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Session extraordinaire de 2001-2002 - 11ème jour de séance, 20ème séance 3ème SÉANCE DU JEUDI 1ER AOÛT 2002 PRÉSIDENCE de M. Jean LE GARREC vice-président Sommaire EMPLOI DES JEUNES EN ENTREPRISE (CMP) 2 JUSTICE (suite) 6 ARTICLE 3 6 ART. 5 9 ART. 6 9 AVANT L'ART. 7 10 ARTICLE 7 11 ART. 7 BIS 17 ART. 8 18 ART. 9 18 APRÈS L'ART. 9 18 ART. 10 18 ART. 11 20 ART. 12 20 APRÈS L'ART. 12 21 ART. 13 21 APRÈS L'ART. 13 21 ART. 14 22 AVANT L'ART. 15 23 ART. 15 23 ORDRE DU JOUR DU La séance est ouverte à vingt et une heures quinze. Monsieur le Président - J'ai reçu de M. le Premier ministre une lettre soumettant à l'approbation de l'Assemblée le texte de la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant création d'un dispositif de soutien à l'emploi des jeunes en entreprise. En conséquence, l'ordre du jour appelle la discussion du texte de la commission mixte paritaire. M. Bernard Perrut, rapporteur de la CMP - Le texte qui nous est présenté ce soir est d'une importance particulière, puisqu'il vise à enrayer le chômage des jeunes. Au cours de nos débats, nous avons constaté que le projet traduisait fermement l'engagement du ministre et, plus largement, du Gouvernement, envers les jeunes et les entreprises, en faveur de l'emploi. La souplesse de ce texte n'est pas la moindre de ses vertus, et elle sera le gage de son efficacité, une efficacité d'autant plus nécessaire que de nombreux jeunes, inquiets de leur avenir, attendent un signe fort du Gouvernement et de notre assemblée. Nos débats ont permis que toutes les sensibilités politiques s'expriment et c'est ainsi que les aspects positifs du projet ont été soulignés, mais aussi ses limites. La grave question du chômage des jeunes doit être abordée avec confiance, mais aussi avec humilité : Marcel Aymé ne disait-il pas que l'humilité était l'antichambre de la perfection ? (Sourires) Je ne doute pas que nous pourrons la trouver... Au cours des auditions, la commission a entendu les représentants des partenaires sociaux, des chambres des métiers et des chambres de commerce ; le sentiment général est que le texte trouvera à s'appliquer aussi bien dans les petites entreprises que dans les grandes. L'accord s'est donc fait, en CMP, sur le texte modifié et complété par l'Assemblée de dispositions juridiques qui le rendent immédiatement applicable. Le projet exprime une volonté réelle d'améliorer au plus vite la situation de jeunes en grande difficulté et qui ne parviennent pas à accéder au monde du travail. Déjà, les missions locales expriment tout le bien qu'elles pensent d'un texte qui permettra à leur patient travail d'insertion d'aboutir. De même, artisans, PME et grandes entreprises ont, dans leur grande majorité, dit leur enthousiasme pour ce dispositif qui permettra non seulement de leur mettre le pied à l'étrier, mais aussi de former les jeunes salariés nouvellement embauchés - car la formation aura lieu, le texte ayant pour autre grand mérite de redonner tout leur rôle aux chefs d'entreprise et aux partenaires sociaux, qu'il responsabilise. Je vous propose donc d'adopter le texte issu de la CMP, en dépit du pessimisme qui prévaut sur certains bancs. Faut-il rappeler le mot d'Alain, « le pessimisme est d'humeur ; l'optimisme est de volonté » ? C'est cette volonté qui s'exprime, dans le texte, au service des jeunes, de l'économie et de la France (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). M. Jean-Paul Anciaux - S'agissant de l'emploi des jeunes, la politique du précédent gouvernement s'est essentiellement traduite par la création des « emplois-jeunes », dispositif réservé au secteur non marchand, financé par les fonds publics, qui n'opposait pas de réelles perspectives personnelles aux jeunes salariés et qui ne prévoyait aucune obligation de formation ou de tutorat. Les jeunes recrutés dans ce cadre sont aujourd'hui nombreux à s'inquiéter pour leur avenir, soit que les postes qu'ils occupent n'aient pas vocation à être pérennisés, soit qu'ils se demandent si les moyens leur seront donnés d'intégrer la fonction publique par voie de concours. Le texte que nous soutenons n'est pas fondé sur les mêmes principes, mais sur l'évidence que ce sont les entreprises qui créent majoritairement les emplois. Aussi le dispositif Fillon recherche l'insertion professionnelle directe des jeunes en grande difficulté. Cette orientation doit être encouragée, car elle offre une alternative réelle à ceux pour qui le parcours scolaire s'est soldé par un échec. Par ailleurs, et contrairement à ce qui avait cours jusqu'à maintenant, le nouveau dispositif n'oppose pas les intérêts des entreprises à ceux des salariés. C'est un système « gagnant-gagnant » qui est instauré. Pour la première fois, un dispositif piloté par l'Etat propose à un jeune un contrat à durée indéterminée, sans contrainte ni exigence. M. Patrick Bloche - Il n'en sera que plus facile de le licencier ! M. Jean-Paul Anciaux - Nous savons la fierté de ceux qui ont la chance de décrocher un emploi ! C'est une nouvelle vie qui s'ouvrira pour de nombreux jeunes : nouvelle vie de salarié, nouvelles responsabilités, découverte de l'entreprise, premiers salaires, premiers projets, premiers achats rendus possibles... Voilà du concret ! Auriez-vous fait le petit effort nécessaire pour comprendre la philosophie de ce texte que vous auriez pu utilement contribuer aux débats, chers collègues de l'opposition. Au lieu de cela, vous avez préféré mener une bataille de procédure, dans le seul but d'imposer de nouvelles obligations, de nouveaux contrôles, de nouvelles pesanteurs administratives... S'agissait-il pour vous de jouer la montre - et dans quel but ? -, ou votre obstruction systématique ne faisait-elle que démontrer, une fois encore, que vous ne parvenez pas à vous affranchir de vos vieux démons dogmatiques ? Décidément, pour vous, l'Etat ne doit faire confiance à personne, le travail demeure une aliénation, et la participation constructive de tous les acteurs de l'entreprise à un projet commun est une impossibilité ! Nous avons de la société une vision beaucoup plus constructive et beaucoup plus moderne, tout en restant modestes. Nous sommes convaincus que la réussite du dispositif découlera de la mobilisation de tous. Une campagne de sensibilisation et d'information est donc impérative tant au niveau national qu'au niveau local. Je suis certain que le Gouvernement s'y attachera à son niveau, cependant qu'il sera de notre responsabilité de parlementaires de mobiliser les acteurs locaux en récusant tout esprit de chapelle ou, pour dire les choses crûment, toute concurrence malsaine entre institutions ou associations. L'information doit enfin être toute en amont, au sein de l'éducation nationale ; l'action des rectorats et des CIO sera donc décisive. Je me réjouis que nous ayons travaillé, nombreux, à favoriser l'insertion professionnelle durable des jeunes en difficulté, et je déplore que nos collègues de l'opposition manquent ce rendez-vous important. Le fossé infranchissable qui nous sépare, c'est que, dans l'intérêt des jeunes, il nous est souvent arrivé de rallier vos propositions ou de nous abstenir pour témoigner au moins d'une part d'approbation. Nous sommes constructifs, vous êtes sectaires ! Les Français vous ont jugés très sévèrement mais vous persistez à ne pas comprendre le message en vous figeant dans des positions résolument négatives. Après le passage en CMP, où sur plusieurs points nos collègues sénateurs ont été rassurés par les explications de notre président et de notre rapporteur, le groupe UMP votera ce projet de loi avec confiance et enthousiasme au profit des jeunes que le gouvernement et la majorité précédents ont laissés au bord du chemin (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF). M. Patrick Bloche - Pour rapide qu'elle ait été, la discussion de la première loi sociale de la législature nous a confirmé le cap foncièrement libéral que votre gouvernement a fixé pour notre pays. Cela n'augure rien de bon pour cette « France d'en bas » dont vous nous parlez si volontiers ! Un député UMP - Au moins, nous, nous la connaissons ! M. Patrick Bloche - À partir d'un bon postulat - créer des emplois pour les jeunes sans qualification dans une période de ralentissement de la croissance -, vous n'aboutissez finalement qu'à faire un cadeau de 650 millions par an aux grandes entreprises en leur procurant à moindre coût un réservoir de main-d'_uvre qualifiée... Plusieurs députés UMP - Vous n'avez décidément rien compris ! M. Patrick Bloche - ...et les PME qui auraient dû être les premières à bénéficier du dispositif devront se contenter des restes. Mais la critique principale que l'on doit vous faire, c'est d'offrir aux entreprises un cadeau sans contreparties en termes de formation ou d'évaluation annuelle des résultats. Vous faites un chèque en blanc au MEDEF ! (« Archaïque ! » sur les bancs du groupe UMP) Au reste, nous attendons toujours des réponses sur plusieurs points essentiels. Que vont devenir les formations en alternance et le programme TRACE ? Après trois jours de discussion, qui peut dire s'ils ne vont pas disparaître (Murmures sur les bancs du groupe UMP). Quelles garanties pouvez-vous nous donner que les emplois proposés aux jeunes dans le cadre de ces contrats seront durables et de qualité ? L'ouverture du dispositif au temps partiel n'augure rien de bon à cet égard. Il s'agit, convenez-en, d'une loi à grande vitesse... M. le Rapporteur de la CMP - Il y a urgence pour les jeunes ! M. Patrick Bloche - ...et vous avez préféré ne pas rappeler que l'écrasante majorité des amendements présentés - y compris par des membres de la majorité - avaient été repoussés. Quant à ceux de l'opposition, ils ont fait l'objet d'un rejet partisan - et souvent sectaire - qui vous a même conduit à refuser toute évaluation du dispositif par le Parlement, alors qu'il est admis de longue date que nous devons suivre l'application des lois que nous votons. Le Gouvernement nous a montré son vrai programme : abandon pur et simple des emplois-jeunes, mise en cause des lois Aubry relatives à la réduction du temps de travail (« Pas du tout ! » sur les bancs du groupe UMP). Cinq années d'avancées sociales sont ainsi balayées ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF) On efface tout et on reprend les affaires là où Juppé les avait laissées. Heureusement, on connaît la suite ! (Mêmes mouvements) Vous mettez fin brutalement aux emplois-jeunes mais qu'allez-vous faire des 250 000 jeunes concernés ? (Protestations sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF) Plusieurs députés UMP - C'était à vous d'y penser ! M. Jean-Marie Le Guen - Laissez l'opposition s'exprimer ! M. Patrick Bloche - Plus personne ne met en cause l'utilité des emplois-jeunes et nombreux sont les élus de votre majorité à se soucier du devenir des jeunes accueillis sous cette forme dans leurs collectivités ou dans les associations. Vous avez évoqué à plusieurs reprises, Monsieur le ministre, le besoin de dialogue social mais nous avons bien compris que vous n'acceptiez le dialogue que s'il se mettait au diapason de votre politique ! Il en va ainsi de l'article 3 relatif au régime de cotisations sociales des intermittents du spectacle et de leurs employeurs : vous faites passer - via un cavalier - une réforme à laquelle sont hostiles toutes les organisations professionnelles du secteur culturel et audiovisuel. La petite musique sociale jouée durant la période électorale ne se fera décidément plus entendre ! Vous êtes passés aux choses « sérieuses » qui consistent pour vous à toujours plus déréglementer. À vos yeux, le droit du travail doit systématiquement s'incliner devant la liberté de l'employeur (Murmures sur les bancs du groupe UMP). M. Jean-Marie Le Guen - C'est le renard libre dans le poulailler libre ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste s'oppose à ce dispositif qui est le produit d'une logique infiniment plus libérale que sociale. Et je tiens à vous rassurer : nous ne sommes pas à court d'arguments - et nous risquons d'en disposer de plus solides encore dans quelque temps - pour expliquer à nos concitoyens pourquoi nous voterons contre ce texte (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste). M. Rudy Salles - Le groupe UDF a accueilli avec satisfaction la volonté du Gouvernement de donner une seconde chance aux jeunes en difficulté en leur ouvrant les portes de l'entreprise. Depuis vingt ans, en effet, les politiques de l'emploi se sont succédé mais la précarité n'a pas reculé. Les emplois-jeunes ont fait la preuve de leur efficacité en ne débouchant pas sur des emplois pérennes. Il n'était donc que temps de prendre une mesure simple en faveur des jeunes chômeurs (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UDF et du groupe UMP). Notre groupe vous a posé de manière insistante la question de la formation, et il a pris acte de l'engagement du Gouvernement de mobiliser les partenaires sociaux pour proposer au pays des solutions susceptibles d'aider nos entreprises à combler le déficit en personnel qualifié dont elles souffrent de manière chronique. Tout notre système de formation professionnelle doit être réformé : lançons des programmes de formation ambitieux, revalorisons l'enseignement professionnel, favorisons la formation tout au long de la vie. La lutte contre le chômage exige une mobilisation générale. Nous rejetons de longue date les mesures sectorielles qui dressent les unes contre les autres des catégories entières de la population active. La solution - qui peut en douter ? -, c'est de baisser globalement les charges qui pèsent sur les entreprises de manière à accroître le salaire direct et à créer une vraie différence entre les revenus du travail et ceux de l'assistance. M. Bloche a évoqué le régime d'assurance chômage des intermittents du spectacle. Nous avions demandé un moratoire. Le Gouvernement l'a accordé jusqu'au 1er septembre. C'est un pas décisif par rapport au gouvernement précédent qui n'avait rien réglé mais il faut engager une réflexion plus large sur la notion même d'« intermittence » et sur le statut des artistes dans la société. Formation professionnelle, baisse des charges pour relever les salaires directs, statut des intermittents, devenir des emplois-jeunes : le Gouvernement a devant lui un vaste calendrier de réformes. Le groupe UDF votera ce texte qui tend à redonner à notre jeunesse la place qu'elle mérite dans le monde du travail (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe UMP). La discussion générale est close. M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité - Tout a été dit durant ces deux jours et je me bornerai à rappeler une évidence : la France détient depuis trop longtemps un triste record par rapport à ses partenaires européens, celui du chômage des jeunes. Tous les gouvernements ont tenté de traiter ce mal qui mine notre pacte républicain. Nous proposons aujourd'hui un outil nouveau qui ne tend pas à se substituer à ceux qui existent déjà mais à les compléter utilement. Le contrat sans charges n'a pas été pensé contre l'alternance - que nous soutenons depuis longtemps alors que la gauche qui l'a longtemps combattue lui prête aujourd'hui toutes les vertus - ou contre le contrat de qualification, qui est un excellent outil, du reste plus intéressant financièrement pour les entreprises que le présent dispositif. Ce nouveau dispositif, nous voulons l'ajouter au programme TRACE, mis en place par la majorité précédente mais que nous allons améliorer en le faisant évoluer vers le contrat d'insertion dans la vie sociale. Nous l'ajoutons aussi aux emplois-jeunes puisque nous honorerons les 220 000 contrats passés et que nous inscrivons 3 milliards d'euros pour les financer. Mais il est vrai que nous voulons proprement sortir de cette formule, car elle n'était pas faite pour durer : on ne peut pas créer une fonction publique bis, au rabais, avec un statut précaire et sans véritables perspectives de formation. Le nouveau dispositif est aussi le signe d'un changement de politique. Nous ne sommes pas socialistes (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP). Nous pratiquons une philosophie de la confiance. Nous voulons que les entreprises et les partenaires sociaux soient au c_ur du débat public et nouent avec l'Etat le même type de relations qui existe dans la plupart des grands pays modernes. C'est pourquoi nous avons choisi la simplicité. D'abord celle d'un vrai contrat de travail. La gauche nous dit : finalement, des CDD auraient été préférables car plus difficiles à casser... M. Jean-Marie Le Guen - De toute façon, votre contrat est bien une sorte de CDD : à 22 ans, ces jeunes seront licenciés et cela coûtera moins cher à l'entreprise qu'un CDD ! M. le Ministre - ...Mais que n'aurions-nous pas entendu si nous avions proposé un CDD ? Le jeune aura un vrai contrat de travail et un vrai salaire. Ce dispositif est enfin un signe de confiance que nous adressons à la jeunesse. L'opposition s'y est opposée, c'était son droit et peut-être son devoir - et sans doute la rénovation de la démocratie ne passe-t-elle pas par « moins d'opposition », mais elle passe sûrement par un « mieux d'opposition » (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). C'est pourquoi j'aurais voulu que le débat ne s'égarât pas vers de faux sujets tels que la prétendue remise en cause des emplois-jeunes, soudain pavés de toutes les vertus. L'opposition nous a reproché les allégements de charges aux entreprises, alors que nous devons déjà assumer l'héritage de la majorité précédente, à savoir 15 milliards d'allégements... M. Jean-Marie Le Guen - La moitié venait de la majorité d'avant 1997 ! M. le Ministre - Vous aviez cinq ans pour les supprimer, vous avez préféré ajouter 8 milliards de plus ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Le débat s'est égaré également vers les conditions faites aux grandes entreprises, dénoncées par l'opposition comme responsables de tous les maux de la société alors qu'elles constituent nos principales armes dans la bataille de la mondialisation. Et craindre qu'elles assèchent le vivier des jeunes susceptibles de passer contrat montre en fait que la gauche craint la réussite de notre dispositif. Enfin, l'opposition a feint de trembler pour l'avenir des dispositifs déjà existants, en particulier pour l'alternance, alors que nous sommes très attachés à cet outil de formation, qui peut cependant être amélioré et qui ne saurait convenir à tous les jeunes. M. Bloche nous accuse de vouloir tout reprendre à zéro. Si seulement nous pouvions ! Mais non, il nous faut bien assumer l'héritage et réparer vos dégâts, parfois graves. Je pense en particulier aux lois sur les 35 heures, à leur bilan économique et financier... M. Jean-Pierre Dufau et M. Jean-Marie Le Guen - Abrogez-les ! M. le Ministre - ...mais surtout à leur bilan culturel et social, qui est au c_ur de votre défaite aux élections (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Mais, je suis fier d'avoir présenté à l'Assemblée un texte simple, efficace, humble. Un texte qui s'adresse aux jeunes les plus en difficulté et qui ouvre la voie à une politique d'allégements de charges aux entreprises. Pour conclure, je remercie le rapporteur (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) d'avoir veillé précisément à ce que ce texte reste simple. Je remercie aussi la commission et la majorité pour son soutien. Ce projet constitue la première étape d'une nouvelle politique sociale dont les deux objectifs prioritaires sont la croissance et le renforcement de la cohésion nationale (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF). Plusieurs députés UMP - Bravo ! L'ensemble du projet de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire, mis aux voix, est adopté. La séance, suspendue à 21 heures 50, est reprise à 22 heures 05. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi d'orientation et de programmation pour la justice, adopté par le Sénat après déclaration d'urgence. M. Arnaud Montebourg - Cet article est de nature pragmatique. Mais le pragmatisme peut conduire à franchir les limites constitutionnelles. M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur de la commission des lois - Pour cela, il y avait l'exception d'irrecevabilité ! M. Arnaud Montebourg - Nous observons tout d'abord que la révolution opérée dans la loi Sarkozy au regard du code des marchés publics est reproduite à l'identique dans le présent texte. Nous souhaitons savoir ce que répondraient le rapporteur - avec son esprit rayonnant - et le Gouvernement, et s'ils peuvent nous rassurer. L'exception proposée au code des marchés publics revient en fait à confier à trois groupes le monopole de la construction des 11 000 places de prison. Cette question a fait dans le passé l'objet d'une vigilance particulière du Conseil constitutionnel, dont une décision de 2001 a censuré les dérogations au code des marchés publics. Nous souhaitons savoir comment le rapporteur et le Gouvernement entendent faire tenir tout cela debout. M. Claude Goasguen - Je mets en garde l'Assemblée contre une dérive que semble amorcer M. Montebourg. Tout d'abord il ne lui appartient pas de juger de la constitutionnalité du projet. S'il avait dû soulever des questions de constitutionnalité, c'eût été dans le cadre de l'exception d'irrecevabilité. Nul n'est fondé à exciper de l'inconstitutionnalité dans cet hémicycle : c'est la jurisprudence Mazeaud. Je n'accepte donc pas les arguments du type : surveillez vos expressions, mes chers collègues, car tout ce que vous direz pourra être retenu contre vous, et le Conseil constitutionnel veille au-dessus de vos têtes ! Ce sont des expressions de procureur, et j'en ai assez d'avoir dans cette assemblée un petit procureur (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP), ou plutôt, comme j'ai de façon plus exacte qualifié un jour M. Montebourg, un petit flic de l'Assemblée ! (Mêmes mouvements). Je n'accepte pas la façon dont M. Montebourg a traité la représentation nationale, comme si elle était placée sous la tutelle de son _il impitoyable. Cette manière de traiter les représentants de la nation mériterait que M. Montebourg fasse des excuses à ses collègues (Mêmes mouvements). M. le Rapporteur - Ce débat me surprend beaucoup. L'article 3 comporte des dispositions qui, pour l'essentiel, ont déjà été appliquées en matière pénitentiaire en 1987. En outre l'alinéa qui fait l'objet du débat est, j'imagine, le suivant : « si le marché est alloti, les offres portant simultanément sur plusieurs lots peuvent faire l'objet d'un jugement global ». Mais c'est là un moyen de permettre des économies pour les finances publiques. Enfin, les articles concernés du code des marchés publics sont réglementaires, et c'est bien la moindre des choses qu'une loi puisse y faire dérogation. J'appelle donc mes collègues à adopter l'article 3 (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). M. Arnaud Montebourg - Sans aller jusqu'à faire un rappel au Règlement dans les formes, j'observerai simplement qu'en m'entendant qualifier de « flic » je ne me sens pas injurié car c'est une profession honorable. Mais l'adjectif « petit » est péjoratif dans la bouche de M. Goasguen, et mériterait des excuses au nom de la courtoisie qui doit présider à nos débats. M. le Président - Tout ceci n'est pas la meilleure manière d'engager le débat. Je pense qu'il convient de mettre fin à cet échange. M. Christian Estrosi - Rappel au Règlement. Je souhaite le respect des procédures. M. Montebourg était inscrit sur l'article, Monsieur le Président, et vous lui avez donné la parole. M. Goasguen était inscrit, et vous lui avez donné la parole. Mais il n'y avait aucune raison réglementaire de redonner la parole à M. Montebourg si ce n'est en fin de séance pour un fait personnel. M. le Président - Votre collègue n'a pas fait référence à un fait personnel. Je considère que l'incident est clos. M. le Rapporteur - Je le dis à tous nos collègues, nous avons commencé l'examen du texte cet après-midi dans un climat constructif. J'appelle chacun à rétablir ce climat, nécessaire à un vrai travail de fond. M. le Président - C'est également mon souhait. M. René Dosière - Nous proposons par l'amendement 107 la suppression de l'article 3, pour plusieurs raisons. Il en est que je n'évoquerai pas, car si nous avons en effet des doutes sur la constitutionnalité de cet article, il appartiendra au Conseil constitutionnel de se prononcer. Mais en outre, la procédure proposée ne nous paraît pas satisfaisante. Tout d'abord, elle est plus lourde pour les finances publiques que la procédure normale. Les rapporteurs spéciaux de l'Assemblée et du Sénat ont d'ailleurs montré que la procédure Chalandon avait entraîné un surcoût de 80 % en termes de fonctionnement. Or, sur la durée, le fonctionnement pèse plus que l'investissement : les économies réalisées sur ce dernier sont largement inférieures au surcoût lié au fonctionnement. On comprend bien pourquoi : quand il y a des préfinancements et des intérêts bancaires, les entreprises les intègrent dans leurs coûts. Tous les rapports commandés par le ministère sur les prisons Chalandon attestent l'existence de difficultés : il suffirait de les rendre publics pour que chacun puisse en juger. La procédure proposée privilégie d'autre part les grands groupes et aboutit à limiter la concurrence. Le ministère s'en est aperçu avec le « programme 4000 » : quand il a fait appel à la concurrence pour savoir à qui confier la gestion de ce programme, il n'y a pas eu d'offres et il a dû annuler son appel. Dans le passé, le ministère a connu des difficultés pour réaliser ses programmes d'investissement. On a souvent dit que les taux de réalisation n'étaient pas satisfaisants. Mais c'est pour une part un effet d'optique. En effet, la direction du budget a toujours accepté qu'au titre des investissements du ministère de la justice on inscrive les crédits de paiement en totalité. On sait bien pourtant qu'un programme commence par une phase d'études et que les dépenses ne viennent qu'ensuite, raison pour laquelle les taux de réalisation sont généralement faibles. La Cour des comptes a d'ailleurs critiqué ce système, et il ne faut pas se fier aux apparences. Comme le Garde des Sceaux l'a lui-même reconnu, la Chancellerie a beaucoup progressé dans sa capacité à lancer des équipements, grâce en particulier à l'agence de maîtrise d'ouvrage du ministère, transformée récemment en établissement public et placée à la disposition du nouveau secrétariat d'Etat. Cet établissement compte des personnes très qualifiées. Va-t-il disparaître, ou au contraire monter en charge ? M. Jacques Pélissard, rapporteur pour avis de la commission des finances - S'agissant de la mise en concurrence et de la transparence des marchés, je rappelle que l'article 2 de la loi du 22 juin 1987 apporte déjà de vraies garanties. L'article 2 du présent projet conforte les principes posés par la loi Chalandon, et met ses dispositions en conformité avec le code des marchés publics entré en vigueur le 9 septembre 2001, qui exige en particulier une publicité communautaire au-delà du seuil de 130 000 €. Sur le plan juridique, tout est parfaitement clair et transparent. Sur l'aspect économique, rappelons aussi les conclusions, rendues le 28 juin 2000, par la commission d'enquête présidée par M. Mermaz, M. Floch étant rapporteur. Dans son audition d'alors, la directrice de l'administration pénitentiaire a déclaré au sujet du parc 13 000 : « il s'agit d'établissements conçus avec une grande rationalité, globalement économes en termes de personnels ». Et la Cour des comptes, en 1994, a évalué à 68 000 € le coût de la place dans le parc classique, contre 51 000 € dans le programme 13 000. Ce programme était donc plus économe et plus rapide à réaliser. Enfin, je ne comprends pas bien l'attitude de l'opposition. Les marchés de fonctionnement relatifs au programme 13 000 se sont terminés le 3 mars 2001. Le gouvernement d'alors pouvait passer au système de régie. Or, Mme Lebranchu a arrêté le 19 juillet 2001, la liste des nouveaux titulaires des marchés de fonctionnement, en choisissant de nouveau des filiales de grands groupes. Alors, soyez cohérents : comment critiquer aujourd'hui le système du marché de fonctionnement alors que vous l'avez vous-mêmes utilisé il y a un an ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF) Contre l'amendement 107. M. le Secrétaire d'Etat - En 1988, s'est posée la question de savoir s'il fallait poursuivre le programme Chalandon. M. Arpaillange a répondu positivement. Monsieur Dosière, l'excellente agence créée au début de l'année va monter en puissance, et jouer un rôle moteur dans l'accélération du programme de construction. Avis défavorable à l'amendement. M. Arnaud Montebourg - Notre principale critique porte sur la fusion des marchés de la construction, de l'exploitation et de la maintenance. On connaît l'affaire des lycées d'Ile-de-France, qui ont donné lieu à de graves malversations (Interruptions sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF). On pourrait citer des noms propres. Je ne le ferai pas (Rires). Des détournements considérables ont été opérés au profit des caisses du parti majoritaire (Interruptions sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF). Un député UMP - Et du parti socialiste ! M. Arnaud Montebourg - L'argumentation politique de la majorité a du mal à ébranler notre argumentation juridique. Mon attitude est celle de la vigilance, comme il convient à l'opposition, vous le savez d'expérience, Monsieur Goasguen ! M. Claude Goasguen - Je vais demander une nouvelle fois à M. Montebourg de présenter des excuses ! L'amendement 107, mis aux voix, n'est pas adopté. L'article 3, mis aux voix, est adopté, de même que l'article 4. M. le Rapporteur - L'amendement 149 est de précision. L'amendement 149, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté. L'article 5 modifié, mis aux voix, est adopté. M. Pierre Albertini - Il me paraît souhaitable d'associer le Parlement à l'évaluation des objectifs et des résultats du service public de la justice ; car celle-ci est bien un service public, à la disposition de tous les Français. Il est normal que le Parlement soit maître des grandes orientations que le Gouvernement exécute dans un cadre annuel. Le projet dispose que l'évaluation soit assurée par un service extérieur à la Chancellerie, sans plus de précision. Ce dispositif, quel qu'il soit, ne dispense pas le Parlement de suivre l'évolution, les progrès, les difficultés aussi du service public de la justice. Il y aurait là aussi un moyen de resserrer les liens entre le pouvoir politique et la justice. En effet, autant je suis attaché à l'indépendance personnelle des magistrats du siège, aussi je refuse de rompre le lien entre le pouvoir politique et le parquet. J'avais proposé que cette association du Parlement à l'évaluation prenne la forme d'un office. On me dit que les offices déjà existants ont connu un sort inégal. Ainsi, l'offre parlementaire d'évaluation de la législation n'a produit que deux rapports, - j'ai écrit l'un des deux. C'est que le mode de travail parlementaire est peu compatible avec ce type de réflexion. Reste que le Parlement doit jouer un rôle d'impulsion de l'action publique. Hier, le Garde des Sceaux a proposé d'organiser un débat, ici ou ailleurs. Je le veux bien, à condition que nous procédions à une évaluation régulière, sans nous borner à faire des ronds dans l'eau. Tel est le but de l'amendement 23, que je suis prêt à retirer si le Gouvernement s'engage à associer régulièrement l'Assemblée nationale et le Sénat à l'exercice d'évaluation du service public de la justice. M. Xavier de Roux - Je suis stupéfait de l'intervention de M. Albertini. Le Parlement a un rôle en matière de contrôle budgétaire, mais la séparation des pouvoirs lui interdit de s'immiscer dans le fonctionnement de l'autorité judiciaire. M. Arnaud Montebourg - Vous voulez laisser au Gouvernement le monopole de l'immixtion ! Mme Marylise Lebranchu - Je profite de cette notion d'évaluation pour revenir sur le fait de confier au privé à la fois la construction, l'aménagement, l'entretien... (Protestations sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF) Il me semble que la commission des lois devrait être informée plus précisément des difficultés rencontrées avec les entreprises chargées de la gestion d'un certain nombre d'établissements pénitentiaires, et c'est au moment de l'évaluation qu'on peut s'en rendre compte. Effectivement, certains marchés ont été reconduits, mais dans le même temps, d'autres ne l'ont pas été, puisque les appels d'offres ont été infructueux, et le nombre de sociétés répondant à l'Etat est devenu de plus en plus faible. Il a même fallu enlever les prestations de santé en raison de l'évolution de leur coût. Si vous aviez pu nous accompagner dans cette mission d'évaluation, vous seriez moins disposés aujourd'hui à confier à la fois la construction, la gestion et la maintenance au privé. Vous en avez d'ailleurs fait l'expérience, certains d'entre vous m'ayant déjà écrit pour m'informer de dysfonctionnements majeurs liés à la gestion comme à l'entretien de différents établissements pénitentiaires. Chacun peut se tromper, et l'on peut avoir de très mauvaises surprises. En tout cas, à la lumière de l'expérience, je crois qu'il ne faut pas renouveler l'erreur. M. le Rapporteur - Pourquoi ne nous révéler qu'aujourd'hui les difficultés rencontrées à l'époque où vous étiez ministre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF) Cet article 6 est révolutionnaire : puisque le ministre de la justice accepte de faire évaluer l'ensemble des sommes inscrites dans cette loi de programme par un organisme extérieur. La commission des lois souhaite aller plus loin, et faire porter cette évaluation sur un certain nombre de points dont elle fait la liste dans l'amendement 150, et notamment l'effectivité de la mise à exécution des décisions de justice, et l'amélioration du fonctionnement et de la sécurité des établissements pénitentiaires. Le Sénat a demandé que nous recevions le rapport de l'organisme qui fera le contrôle au moment de la loi de règlement, ce qui nous permettra de travailler en temps réel. Nous progressons donc sensiblement en matière de rigueur, et je vous demande d'adopter l'amendement 150, en repoussant le 23. M. le Garde des Sceaux - Le dispositif proposé paraît tout à fait satisfaisant. Je suis donc défavorable à l'amendement 23, et favorable à l'amendement 150. L'amendement 150, mis aux voix, est adopté. L'amendement 23 est retiré. L'article 6 modifié, mis aux voix, est adopté. M. Michel Vaxès - Je voulais reprendre à mon compte l'amendement de M. Albertini, mais ma voix n'a pas porté jusqu'au perchoir. M. le Président - Je le regrette d'autant plus que M. Albertini aurait été très sensible à cette attention (Sourires). M. Michel Vaxès - Je partage le souci de la majorité de mettre en place une justice de proximité, mais je ne suis pas convaincu que l'instauration d'un « proxi-juge » réponde aux attentes des Français. Il aurait été préférable, dans un souci de proximité, d'instaurer un échevinage et de réviser la carte judiciaire. A défaut, nous ne pouvons vous suivre, et proposons par l'amendement 60 d'annuler l'ensemble des dispositions sur la justice de proximité. L'amendement 60, repoussé par le Gouvernement et la commission, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Pierre Albertini - Nous adhérons à l'idée d'une justice de proximité ; encore faut-il réussir l'exercice et ne pas s'apercevoir trop tard que le seuil de compétence, les modalités d'intervention, la complicité ou la procédure détournent les justiciables de cette institution. L'enjeu est d'autant plus grand que l'expression de « justice de proximité » est à la mode. Le vice-président du Conseil d'Etat s'est d'ailleurs étonné de cette expression, ne connaissant pas de « juge de l'éloignement ». Pour que la justice de proximité apporte une réelle valeur ajoutée au dispositif actuel, il conviendrait peut-être de parler de « juges de paix », et de relever le plafond des affaires de sa compétence au-dessus de 1 500 €, seuil trop modeste pour désencombrer vraiment les tribunaux d'instance. En bref, si l'on souhaite que la mission de ces juges soit couronnée de succès, il faut prendre garde au titre qui leur sera donné, à leur compétence, et aussi au délai de jugement, deux mois me paraissant être un délai raisonnable. J'observe enfin que le texte est ainsi rédigé qu'il permet l'évitement de la « justice de proximité », puisqu'il prévoit d'ores et déjà l'éventualité de son dessaisissement et le renvoi des affaires au tribunal d'instance si la compétence du « juge de proximité » est contestée. Ce faisant, on brouille le message adressé aux Français, ce qui n'est sans doute pas le but visé. Nos amendements porteront sur ces points. M. Claude Goasguen - Bien des arguments de mon collègue Albertini sont pertinents, mais son appréciation du dispositif est exagérément négative. La justice de proximité, que nos concitoyens estiment indispensable est en gestation depuis des années. Néanmoins, la loi organique devra éviter plusieurs travers. Il lui faudra en premier lieu passer outre le conservatisme de l'institution judiciaire, qui pousserait vite à cantonner les nouveaux juges dans le rôle d'adjoints vacataires des tribunaux d'instance. Il lui faudra aussi différencier soigneusement la justice de proximité des tribunaux d'instance pour ce qui est de l'exécution des sentences. On ne le sait que trop : dans les tribunaux d'instance, elle est plus qu'aléatoire ! Il est indispensable que les juges de proximité disposent des moyens de faire exécuter leurs sentences. S'agissant d'autre part de la compétence de ces nouveaux juges, il serait regrettable de se priver de l'expérience professionnelle acquise, par exemple, par les officiers de police judiciaire ou par d'autres catégories professionnelles qui, bien qu'ayant conduit une carrière dans le milieu judiciaire ou parajudiciaire, n'ont pas nécessairement fait de longues études supérieures. Comment trouvera-t-on les 3 000 vacataires nécessaires si la règle demandée par l'institution judiciaire n'est pas assouplie ? Enfin, tout ce qui visera à simplifier la procédure devra être favorisé. Je ne doute pas que si ces conditions sont remplies, la justice de proximité réussira (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). M. Christian Philip - En ma qualité de maire d'un arrondissement de Lyon - maire de proximité, donc ! -, je sais que l'exaspération de nos concitoyens tient autant à la multiplication de ces actes devenus banals que sont les vols de sacs à main, les rackets et les insultes qu'à l'impunité dont jouissent leurs auteurs. Cette impunité, l'opinion publique ne la supporte plus, et le Gouvernement a donc raison de vouloir y mettre un terme. Mais comment imaginer, comme le font certains, que les tribunaux d'instance, déjà surchargés, le pourraient, même s'ils étaient dotés de moyens supplémentaires ? Une autre réponse est nécessaire, et il faut, en effet, instituer un juge plus proche des citoyens, aisément accessible et ayant un pouvoir de sanction. Une justice de proximité qui fonctionne renforcerait la démocratie ; l'instaurer, c'est répondre aux inquiétudes qu'ont manifestées ceux qui se sont égarés dans des votes extrêmes, parce qu'ils n'avaient plus confiance dans la protection de l'Etat. C'est pourquoi je comprends mal les critiques selon lesquelles il s'agirait de juges « au rabais », dont la compétence et l'indépendance ne seraient pas garanties. Pourquoi donc, s'ils ont une solide expérience professionnelle ? Je préfère cette compétence pratique à une compétence théorique... M. René Dosière - Universitaire par exemple ? M. Christian Philip - ...Etre universitaire ne m'empêche pas de reconnaître la valeur de l'expérience professionnelle ! Nos concitoyens veulent que l'Etat fasse preuve d'autorité, et cela va être fait. La loi organique devra permettre que la justice de proximité s'organise dans de bonnes conditions, mais il faut aller vite car les attentes sont grandes. Nous ne pouvons plus nous contenter de médiateurs ou de conciliateurs : il est temps qu'un vrai juge tranche et condamne. M. le Président - Veuillez conclure. M. Christian Philip - J'insiste pour que le juge de proximité soit rattaché à un territoire précis. Ainsi aura-t-il la mémoire des faits survenus dans la zone dont il a la charge, et ainsi les citoyens apprendront-ils à le connaître. On peut, comme l'a fait notre collègue Albertini, s'interroger sur sa compétence, mais on ne peut reprocher au Gouvernement sa prudence. Soyons pragmatiques : si le juge de paix réussit, il sera temps de redéfinir son champ de compétence. M. le Président - Compte tenu du nombre d'orateurs inscrits dans ce débat, je vous invite, mes chers collègues, à respecter strictement votre temps de parole. M. Emile Blessig - On le sait, la demande de justice de nos concitoyens est très grande, et elle est aussi très largement insatisfaite. Telle étant la situation, deux réponses sont possibles : l'autopersuasion consistant à affirmer que l'augmentation des moyens permettra que tout aille mieux, ou la voie de la créativité, c'est-à-dire de la réforme et donc de la justice de proximité pour les litiges modestes et les mille infractions qui empoisonnent la vie quotidienne sans que leurs auteurs soient sanctionnés. Pour celui qui le subit, il n'est pas de « petit » litige ! Aussi, la réussite du dispositif dépendra de sa rapidité et, évidemment, de son efficacité qui ne tiendra pas obligatoirement à la proximité géographique. De son organisation, nous reparlerons à l'automne. Mais il me semble essentiel de préciser dès à présent la place respective du juge de proximité et du juge d'instance. Qu'en sera-t-il du ressort territorial du juge de proximité ? Il est dit qu'il sera créé un juge de proximité dans le ressort de chaque cour d'appel mais s'agira-t-il du même ressort géographique que celui du tribunal d'instance ou d'un autre ? Il faut aller vers une homogénéisation des ressorts territoriaux. De même, le code de l'organisation judiciaire dispose qu'en cas d'empêchement, le juge de proximité puisse être remplacé par le juge d'instance. Une telle disposition ne peut être que transitoire. Je conçois qu'il soit impossible de recruter dans l'immédiat le contingent nécessaire de juges de proximité mais, au nom de leur indépendance, il est exclu de considérer que le juge d'instance puisse de manière permanente se substituer à lui en tant que de besoin. M. Jean-Jack Queyranne - C'est le monde à l'envers ! M. Emile Blessig - En tout état de cause, il conviendra d'y revenir dans la loi organique (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP). M. Michel Vaxès - Nous partageons le souhait d'une justice proche et de qualité mais elle ne peut se développer au détriment du respect des droits des justiciables. A ce titre, l'on se doit de définir précisément la notion même de proximité. Celle-ci recouvre à nos yeux deux enjeux essentiels : assurer au justiciable un accès plus facile à l'institution, mieux associer le citoyen à son fonctionnement. Dès lors, et même si l'objectif central de répondre plus vite à la demande de justice est partagé, le choix du Gouvernement de créer un corps parallèle de juges nous surprend et nous inquiète. Pourquoi ne pas adapter les structures existantes en leur donnant les moyens de mieux fonctionner ? Les juges d'instance sont des professionnels formés, accessibles et indépendants. Ils n'ont besoin que d'un surcroît de moyens pour être plus efficaces et plus rapides. Encore doit-on rappeler que le délai de réponse des tribunaux d'instance - cinq mois en moyenne - est le plus faible. Certes, il n'est pas envisageable de multiplier dans l'immédiat les juges d'instance : il faudrait au moins trente mois pour atteindre l'effectif visé. C'est pourquoi nous proposons d'instituer auprès de chaque juge d'instance un collège d'assesseurs-citoyens chargé de l'assister au quotidien. Son indépendance serait garantie par la présence d'un juge professionnel. Nous déplorons que l'indispensable réforme de la carte judiciaire ne soit plus à l'ordre du jour et que lui soit préféré le bouleversement de l'organisation judiciaire que constitue l'instauration du juge de proximité. Prenons garde à ce que les justiciables n'en pâtissent pas ! Nous proposerons un amendement de suppression de cet article car, manifestement, le juge de proximité tel que vous vous proposez de l'instituer ne correspond pas aux objectifs proclamés. Je tiens également à porter à la connaissance de notre assemblée un amendement déposé par un député de la majorité - et finalement non défendu, ce qui explique sans doute la disparition de son auteur - parce qu'il me semble révélateur de l'esprit qui traverse ses bancs. Cet amendement présenté par Mme Joissains Masini (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP) proposait en effet que le corps des magistrats soit composé pour moitié de membres issus de la magistrature, pour un quart de membres issus des autres professions judiciaires et justifiant de cinq ans d'ancienneté et pour le quart restant de chefs d'entreprise et de hauts fonctionnaires. L'objectif était sans doute d'associer la France d'en bas ! M. le Rapporteur - Cet amendement n'a pas d'existence puisqu'il ne sera pas défendu ! M. Michel Vaxès - Permettez-moi tout de même de le trouver révélateur d'un certain état d'esprit qui ne manque pas de nous inquiéter ! M. Daniel Garrigue - La justice de proximité suscite dans le pays de grands espoirs. L'idée n'est pas nouvelle comme en témoignent les tentatives d'affirmer le rôle des conciliateurs, des délégués du médiateur ou des délégués des procureurs. Las, ces instances n'ont pas acquis une véritable audience... M. Jean-Jack Queyranne - Pas du tout ! M. Daniel Garrigue - Pour garantir le lien avec le terrain, il est indispensable que le juge de proximité ait obligation de tenir des audiences foraines, qu'il n'hésite pas à traiter des problèmes locaux presque en concurrence avec les élus ! M. André Vallini - Alors, ce ne sont pas des juges ! M. Daniel Garrigue - C'est par leur lien privilégié avec la réalité du terrain que les juges de proximité se distingueront des juges d'instance (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP). M. Michel Vaxès - L'amendement 61, de suppression, est défendu. M. Jean-Yves Le Bouillonnec - L'amendement 109 vise également à supprimer l'article et les différentes interventions que nous venons d'entendre me confortent dans l'idée que la démarche tendant à instituer le juge de proximité court à l'échec. Le besoin de proximité se traduit par une demande d'information, de médiation et de conseil qui est prise en compte depuis longtemps. Les maisons de la justice et du droit, les délégués du médiateur et du procureur ont été créés dans ce but. Il reste, certains l'ont dit, à les développer. Mais à côté de la conciliation et de la médiation, il est une mission tout autre qui consiste à juger, c'est-à-dire à rendre une décision en appliquant le droit pour trancher un conflit. La solennité qui s'attache à l'acte de juger et les responsabilités qui en découlent mobilisent une compétence particulière et une connaissance profonde de la vie de nos concitoyens. L'acte de juger emporte un sens de la justice qui intègre la dimension d'équité. Dès lors, votre proposition de créer une nouvelle juridiction en faisant appel à tous les instruments du tribunal d'instance et en reprenant l'ensemble de ses règles de procédure sans ajouter aucun élément facilitant la saisine du justiciable me semble parfaitement infondée. Les modes de réponse et d'assistance seront analogues et les parties auront la faculté de se décharger sur le juge d'instance. M. le Rapporteur - Mais que proposez-vous ? M. Jean-Yves Le Bouillonnec - De confier la mission de proximité au juge d'instance. Comme le souligne Christian Cointat, les tribunaux d'instance présentent des points communs avec les juges de paix et constituent une juridiction de proximité. Il fallait leur reconnaître cette primauté et leur donner plus de moyens, tant humains que matériels. Ensuite seulement aurait-on pu permettre à des citoyens de participer à l'_uvre de justice. Je ne voudrais pas que la représentation nationale donne, par ce projet, le sentiment d'une suspicion envers les magistrats (Protestations sur les bancs du groupe UMP) car jamais nous ne pourrons atteindre l'objectif que nous partageons tous si nous ne commençons pas par réconcilier nos concitoyens avec la justice (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe C. et R.). Mme Martine Billard - On entend beaucoup parler ici de simplicité, de rapidité et de proximité. Je ne suis pas convaincue pour ma part qu'en l'occurrence elles riment avec efficacité et égalité devant la loi. On nous dit que les structures actuelles sont débordées. Soit, mais faut-il, chaque fois qu'une structure est débordée, en créer une nouvelle ? On nous dit encore que cette nouvelle structure ne jugera que des petites affaires, c'est-à-dire celles inférieures à 1 500 €. 1 500 €, ce n'est sans doute pas grand-chose pour nous, parlementaires, mais cela représente tout de même cinq RMI. Quant à l'amende encourue, elle représente dix ans de RMI... Pour un gouvernement qui prétend défendre la France d'en bas, cela commence mal. La justice manque de moyens, c'est vrai, mais vous auriez pu faire le choix de renforcer ceux des tribunaux d'instance. Les différences entre eux et les juges de proximité n'est de toute façon pas évidente. Une différence tout de même : on ne sait pas comment se fera l'appel des décisions des juges de proximité. Le risque, c'est qu'à terme, les moyens des tribunaux d'instance stagnant, il se crée un nouveau niveau de juridiction, ce qui ne serait guère conforme à l'objectif de simplification. L'amendement 244 de suppression de l'article est défendu. M. le Rapporteur - Défavorable. M. le Garde des Sceaux - Je souhaite répondre à certaines interrogations. Oui, nous créons bel et bien une juridiction. C'est ce que nous voulons et ce dont l'opposition ne veut pas. Le ressort du juge de proximité est celui du juge d'instance, c'est-à-dire l'arrondissement. Quant à la substitution du juge d'instance au juge de proximité, elle représente un mécanisme transitoire pour tenir compte du caractère progressif du recrutement et de la mise en place des juges de proximité. Toutes garanties seront données dans la loi organique quant à leur indépendance. Nous débattrons alors du niveau de formation ou de l'expérience requis, le but étant de trouver un point d'équilibre entre la nécessité d'avoir un vivier suffisant de candidatures, avec des gens ayant des expériences diverses et une connaissance de la vie locale, et celle de se conformer à la jurisprudence du Conseil constitutionnel, qui exige un certain niveau de compétence. De fait, il ne s'agira pas d'un travail social, mais bien de dire le droit et de prendre des décisions de justice, ce qui est un acte grave. Plusieurs députés socialistes - Oui, justement. M. Christian Estrosi - La volonté de l'opposition de supprimer l'article 7 est à l'image de toute son attitude depuis le début de la session extraordinaire : empêcher le Gouvernement et la majorité de traiter ce que les Français ressentent comme une priorité majeure : la lute contre l'insécurité. Ne voyez-vous pas pourtant, Messieurs, la détresse de nos concitoyens ? Vous savez bien que certaines plaintes ne sont même plus enregistrées et que, de votre temps, les polices avaient instruction de ne plus poursuivre certains délits. M. Jean-Jack Queyranne - Fantasmes ! M. Christian Estrosi - Avec le texte sur la sécurité intérieure, nous avons doté la France d'une nouvelle architecture institutionnelle et donné davantage de moyens aux policiers et aux gendarmes. Il faut maintenant que le traitement judiciaire suive. Je déplore cette nouvelle tentative de l'opposition pour mettre à mal l'autorité de l'Etat (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF). Les amendements 61, 109 et 244, mis aux voix, ne sont pas adoptés. M. Pierre Albertini - Si l'on veut une justice de proximité efficace, il faut s'en donner les moyens. Or j'ai quelques doutes sur les chances de réussite du dispositif qui nous est présenté. Il faudrait déjà modifier l'appellation du nouveau juge - c'est l'objet de mon amendement 267. L'expression « juge de paix » serait préférable à celle de « juge de proximité », d'abord parce que les juges de paix ont déjà existé, leur création remonte même à 1791. S'ils ont été supprimés, ce n'est pas parce qu'ils ne correspondaient plus à un besoin mais parce que leur ressort était le canton, ce qui était parfait pour une France rurale mais plus pour un milieu urbain devenu majoritaire. Je plaide pour cette expression car elle renvoie bien à la fonction pacificatrice de cette juridiction. Mes amendements suivants se rapportent au délai de jugement - je propose deux mois - et à la procédure, que je voudrais plus simple que celle en vigueur devant les tribunaux d'instance. Pour ce qui est du seuil de compétence - vous avez prévu 1 500 € -, je crois qu'il serait plus sage de vous en remettre au décret car sinon il sera difficile par la suite de modifier ce seuil. De plus, je m'interroge sur le caractère législatif d'une telle disposition. Enfin, j'ai un amendement qui tend à remplacer le mécanisme de dessaisissement du juge de proximité. Mieux vaut en effet renvoyer au tribunal d'instance le soin d'apprécier une question préjudicielle et ne revenir au juge de paix qu'une fois effectuée l'interprétation de la règle. M. le Rapporteur - Par souci de lisibilité, la commission préfère s'en tenir à la « justice de proximité ». Elle a donc repoussé l'amendement 267. M. le Garde des Sceaux - Même avis. L'amendement 267, mis aux voix, n'est pas adopté. M. le Rapporteur - Quant à l'amendement 22, la commission estime que l'introduction d'un délai non assorti d'une sanction serait sans efficacité. Défavorable. M. le Garde des Sceaux - Même avis. L'amendement 22, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme Martine Billard - L'amendement 245 est défendu. L'amendement 245, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. le Rapporteur - La commission est défavorable à l'amendement 19 qui élève le seuil de compétence de 1 500 à 2 500 €. Il est évident que le périmètre de compétence du juge de proximité pourra évoluer ; mais la sagesse est de laisser d'abord l'institution se mettre en place et monter en puissance. Dans quelques années, après évaluation - laquelle est prévue par le projet -, nous pourrons y revenir et éventuellement modifier ce seuil. M. le Garde des Sceaux - Même avis. L'amendement 19, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Xavier de Roux - L'amendement 215 tend à rendre la justice de proximité plus lisible en la distinguant bien du juge d'instance. Or le ressort de ces deux juridictions sera le même ; et leurs procédures de saisine seront également identiques. Comment dès lors le justiciable fera-t-il réellement la différence ? Pour bien distinguer la nouvelle juridiction, il faut en simplifier la procédure. Actuellement, on peut saisir le juge d'instance de deux manières, l'une lourde, par voie de citation, l'autre plus légère, par simple notification au greffe. L'objet de notre amendement est de faire expressément référence, pour le juge de proximité, à cette dernière procédure, c'est-à-dire aux articles 847-1 à 847-3 du nouveau code de procédure civile. Il doit être clair pour le justiciable que, lorsqu'il s'adresse au juge de proximité, il le fait sous forme substantielle. Sinon, quelle différence avec le juge d'instance ? M. le Rapporteur - A une courte majorité, la commission a adopté cet amendement. M. le Garde des Sceaux - Je ne vois pas l'intérêt de restreindre ainsi la liberté du justiciable quant à son mode d'accès au juge de proximité. La voie d'accès que vous proposez est possible dans le projet, mais il laisse ouverte également d'autres entrées : à quoi bon les fermer ? M. Claude Goasguen - C'est la philosophie générale du juge de proximité qui est ici en cause. Croit-on que cette nouvelle institution pourra se développer si on l'assortit de la même lourdeur que le tribunal d'instance ? Il en résultera un appel d'air vers ce dernier. Ce n'est au contraire qu'en simplifiant la saisine du juge de proximité - et là est l'enjeu politique de cet amendement - qu'on pourra le pérenniser. Choisir les mêmes procédures pour lui que pour le tribunal d'instance, c'est créer un appel vers celui-ci, et faire à terme du juge de proximité un simple adjoint, un vacataire qui vient boucher les trous. L'amendement 215 facilitera au contraire sa pérennisation. M. le Rapporteur - Que propose le Gouvernement ? D'offrir, pour saisir le juge de proximité, une totale liberté de choix entre quatre entrées, les mêmes que pour le juge d'instance. Quelles sont-elles ? La première est la tentative préalable de conciliation, qui est formée verbalement ou par lettre simple au greffe : on ne peut pas faire plus simple. La deuxième, plus formelle, consiste à procéder par assignation à toutes fins. La troisième entrée est la requête conjointe et la présentation volontaire des parties, démarche d'une grande simplicité elle aussi. La quatrième est la déclaration au greffe. Que propose l'amendement 215 ? De fermer les trois premières portes pour le juge de proximité, et de ne laisser ouverte que la quatrième. Je partage au contraire l'avis du ministre : laisser ouvertes les quatre portes est une chance supplémentaire de réussite pour l'institution. Personne n'a jamais critiqué cette liberté de choix concernant le tribunal d'instance ! En outre l'identité des modes de saisine évitera les erreurs de procédure qui pourraient survenir si un justiciable se trompe sur le seuil de compétence. L'amendement a été voté à une courte majorité, puissamment aidé par l'opposition. Pour ma part, j'appelle la majorité à soutenir le Gouvernement et à rejeter l'amendement. M. Pascal Clément, président de la commission des lois - Nous avons passé trois quarts d'heure sur ce détail en commission, et voilà que nous repartons avec enthousiasme... Mais comme tout le monde a raison, et dit et fait la même chose, je ne vois pas d'issue possible ! On peut passer la nuit à se demander s'il faut manger ou boire, mais les deux sont inscrits au menu. Il n'y a pas à choisir : il y a tout ! Sur quoi certains disent qu'ils veulent un seul plat dans le menu, et d'en débattre pendant des heures ; c'est étonnant... Je ne referai pas l'excellente synthèse du rapporteur ; je prendrai seulement un exemple. Dans les querelles de voisinage, certains peuvent craindre que leur adversaire ne défère pas à une simple lettre : ils souhaiteront passer par un huissier, pensant qu'ils seront ainsi mieux défendus par la justice. Autrement dit, il y a des justiciables qui préfèrent la solution la plus compliquée, parce qu'elle est plus rassurante. Ne nous mettons pas seulement à la place de l'avocat, mais aussi à celle des justiciables : laissez-les faire compliqué quand ils le veulent ! M. Pierre Albertini - Ce qui nous est proposé est une simple copie de la procédure d'accès au tribunal d'instance. À nos yeux, il faut pour le juge de proximité une porte d'entrée beaucoup plus simple. Nous n'allons pas invoquer la turpitude de nos concitoyens pour introduire nous-mêmes des complexités dans la loi ! Sans cette simplicité, nous privons le juge de paix de la lisibilité indispensable. L'amendement 215, mis aux voix, n'est pas adopté. M. le Rapporteur - Le projet prévoit que le juge de proximité peut concilier les parties. La commission souhaite préciser, par l'amendement 151, qu'il peut le faire directement, mais aussi en en confiant le soin à un conciliateur de justice. L'amendement 151, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté. Mme Martine Billard - L'amendement 247 a pour objet de prévoir que les parties peuvent se faire assister ou représenter par le partenaire d'un pacs. Autant prévoir dès maintenant l'ensemble des possibilités. L'amendement 247, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Pierre Albertini - Les amendements 6, 20 et 268 sont défendus. Les amendements 6, 20 et 268, repoussés par la commission et par le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés. M. le Rapporteur - L'amendement 152 est rédactionnel. M. le Garde des Sceaux - Avis favorable. L'amendement 152, mis aux voix, est adopté. M. Jean-Pierre Dufau - Notre amendement 110 tend à supprimer l'article L. 331-5 du code de l'organisation judiciaire. Sur le juge de proximité, la majorité et l'opposition ont des conceptions profondément différentes. La vraie proximité, pour nous, tient dans l'écoute, la conciliation, la médiation. Mieux vaut éviter les procédures plutôt que de les multiplier, La Fontaine nous l'a appris. Il importe donc de donner aux structures de médiation davantage de moyens d'action. Si, pour finir, l'intervention du juge s'impose, il ne peut être qu'un professionnel. Or, votre juge non professionnel juge seul, ses décisions sont sans appel, sinon devant la Cour de cassation. Si l'affaire est trop difficile pour lui, il peut, et c'est un aveu de la faiblesse de votre dispositif, se dessaisir au profit du juge d'instance. Mais comment réglez-vous la question soulevée par M. Badinter, qui rappelait qu'un juge ne peut pas déléguer sa compétence ? Lorsqu'on sait que l'article L. 331-5 tend à confier à cette nouvelle juridiction les affaires pénales relatives aux mineurs, on prend la mesure des dégâts à venir. C'est, au fond, remettre gravement en cause les fondements de l'ordonnance de 1945, c'est-à-dire la spécialisation de la justice des mineurs. Dans ce changement fondamental, nous ne pouvons pas vous suivre. Il signifie que les mineurs sont désormais banalisés, placés au même niveau que les majeurs. On ne les considère plus comme des êtres en devenir mais comme des êtres accomplis. Où sont alors l'éducation et la prévention ? Vos dispositions sont en contradiction avec la convention internationale des droits de l'enfant, ratifiée par la France. Comment surmonter cette contradiction ? En supprimant l'article. M. le Rapporteur - Je suggère, pour surmonter ces contradictions, une autre solution qui est de redresser vos contrevérités. D'abord, le juge de proximité ne porte en rien atteinte aux compétences du juge des enfants, donc à la spécialisation de la justice des mineurs. Ensuite, le juge de proximité va connaître les contraventions que peuvent commettre les majeurs ou les mineurs, comme le fait aujourd'hui le tribunal de police, et dans les mêmes conditions. De plus, le président du tribunal de grande instance ne cesse pas de déléguer ; ouvrez donc le code de procédure pénale. Au reste, le tribunal ne pourrait pas fonctionner sans cette capacité de délégation. Enfin, les règles d'appel et de cassation sont parfaitement identiques à celles applicables aux juridictions existantes. En matière pénale, à partir des contraventions de troisième classe, il est possible de saisir la cour d'appel. Face à vos contrevérités ainsi redressées, la commission a repoussé votre amendement (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF). M. le Garde des Sceaux - Même avis. L'amendement 110, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme Martine Billard - L'amendement 246 est défendu. L'amendement 246, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. L'article 7 modifié, mis aux voix, est adopté. M. Michel Vaxès - L'amendement 62 est défendu. L'amendement 62, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. le Rapporteur - L'amendement 153 rectifié apporte une clarification rédactionnelle. M. le Garde des Sceaux - Avis favorable. L'amendement 153 rectifié, mis aux voix, est adopté, de même que l'article 7 bis ainsi modifié. M. Michel Vaxès - L'amendement 63 est défendu. L'amendement 63, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Jean-Pierre Dufau - L'amendement 111 est de coordination. L'amendement 111, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. le Président - L'amendement 269 tombe. L'article 8, mis aux voix, est adopté. M. Michel Vaxès - L'amendement 64 est défendu. L'amendement 64, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. Les amendements 112 de M. Vallini et 248 de Mme Billard, repoussés par la commission et par le Gouvernement, ne sont pas adoptés. M. le Président - L'amendement 270 tombe. L'article 9, mis aux voix, est adopté. M. Christian Vanneste - Je rectifie l'amendement 296 en supprimant son paragraphe III. Les deux premiers tendent à faire prévaloir l'idée de l'impunité zéro et à développer la justice de proximité, comme nous l'ont demandé les Français, car l'impunité pour les auteurs d'infraction est ressentie comme une injure faite aux victimes. Nos concitoyens veulent que soit traité le problème de la primo-délinquance. La sanction des infractions doit être systématique, rapide et proportionnelle à la faute commise, ce qui aura pour les plus jeunes une valeur éducative. Nous proposons de favoriser le recours aux mesures alternatives de traitement pénal. Les conseils de réparation pénale, installés dans les maisons et les antennes de justice, seraient chargés de mettre ces mesures en place. Le conseil est présidé par le délégué du procureur, et composé du représentant du maire ou du président de l'établissement public intercommunal. Ces mesures alternatives sont décidées par le délégué du procureur après avis du conseil et s'appliquent à la personne qui s'est reconnu coupable pour la première ou la deuxième fois d'une petite ou moyenne infraction, cette procédure tend à mieux associer les élus locaux à la définition des mesures de prévention comme au suivi de la délinquance. Elle est aussi une alternative efficace au classement sans suite des actes incriminés. M. le Rapporteur - Il s'agit en fait de la reprise d'une proposition de loi. Rejet. M. le Garde des Sceaux - Je comprends la préoccupation exprimée par M. Vanneste. La réparation est un excellent principe. Mais le dispositif proposé est complexe et un peu confus. Autant les élus locaux doivent être informés, et participer aux conseils locaux de sécurité, autant il faut éviter qu'ils interviennent dans la définition de sanctions. Cet amendement pourrait-il être retiré ? M. Christian Vanneste - Je retire l'amendement 296 rectifié. M. le Président - L'amendement 197 avant l'article 10 est retiré. M. Michel Vaxès - Vous vous apprêtez à durcir les dispositions du code pénal pour réduire la délinquance juvénile, mais votre logique m'échappe : ces dispositions répressives n'auront pour effet que de structurer leur quête d'identité dans la violence, de renforcer leur détermination à s'opposer à une société qui les rejette, au lieu de leur faire prendre conscience que s'organiser en marge de la société ne peut les aider à sortir du mal-être. Comprendre leur détresse sans excuser leurs actes implique de pouvoir leur dire la loi et leur en faire saisir le sens. Ils édictent leurs propres règles dans leur propre monde parce que notre société leur refuse le nôtre. L'Etat devrait mobiliser l'ensemble des institutions dans l'accompagnement éducatif des enfants dont certains, bien sûr, ont besoin de contrainte et de sanction. Pour autant, celles-ci doivent être comprises pour être acceptées. Pour cela, il ne faut jamais perdre de vue que la punition, l'éloignement ou l'enfermement ne sont pas des fins en soi, mais les ultimes moyens d'un travail de réinsertion. En ce sens, l'institution judiciaire a besoin de moyens pour accomplir ses missions de réconciliation des justiciables avec la loi commune. Plus que jamais, il faut éviter que l'institution judiciaire se cantonne dans un rôle exclusivement répressif, et l'inciter au contraire à travailler en liaison étroite avec tous les acteurs sociaux. Pour redonner l'espoir, il n'est d'autre solution que de perpétuer l'esprit de l'ordonnance de 1945, qui fait honneur à la France et à sa justice de l'enfance. Votre texte, Monsieur le ministre, croit que tout se réglera en répondant immédiatement à un acte par une sanction, alors que tout professionnel de l'enfance et de l'adolescence sait que le danger, avec un adolescent, est de s'engager dans l'escalade. Pour cette raison, nous proposerons de retirer un certain nombre de dispositions et d'en modifier d'autres. Mme Marylise Lebranchu - L'amendement 198 a pour objet de s'opposer à la modification de l'article 122-8 du code pénal. La nouvelle rédaction met l'accent sur la responsabilité pénale et renvoie au second plan les mesures de protection, d'assistance et d'éducation. Le plus choquant réside cependant dans l'instauration d'une responsabilité pénale dès l'âge de dix ans, alors qu'il est impossible pour un enfant de cet âge de comprendre la notion de risque pénal. Il serait plus sage de reprendre la philosophie de l'ordonnance de 1945 qui permet de juger des mineurs très jeunes, dès lors qu'ils sont capables de discernement. Pour autant, ce texte distingue clairement l'acte de délinquance de la responsabilité pénale qui ne saurait concerner les mineurs de treize ans. Nous insistons sur le retour à des sanctions éducatives, éventuellement très fermes, pour les mineurs de dix à treize ans. Il a même été proposé de créer, dans chaque département, des établissements d'accueil pour ces enfants difficiles, face auxquels les magistrats se trouvent démunis. Un travail efficace en concertation avec des pédopsychiatres, pourrait ainsi éviter à des enfants agresseurs de devenir des enfants délinquants. Faire porter une responsabilité pénale à un enfant de dix ans constitue une erreur d'appréciation et je suis convaincue qu'il faudra revenir, dans un an ou moins, à des dispositions plus sages. M. le Rapporteur - Avis défavorable. M. le Garde des Sceaux - Avis défavorable. M. Christian Estrosi - Il est douloureux de vous entendre caricaturer les engagements forts que nous avons pris à l'égard des Français. Vous essayez de créer l'amalgame entre responsabilité pénale et majorité pénale. Je vois encore tous ces titres : « Ils veulent mettre les enfants de dix ans en prison ». Depuis quand la responsabilité pénale a-t-elle envoyé un mineur dans un centre de détention ? M. André Vallini - Elle n'a jamais dit cela ! M. Christian Estrosi - Il devient aujourd'hui indispensable de mettre, certes progressivement, ces petits caïds de dix ans face à leurs responsabilités. Quand, à dix ans, on insulte impunément une vieille dame, à douze ans on lui arrache son sac, à treize on viole son intégrité physique, et à quatorze on est devenu un parfait caïd ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste) Si au contraire, une sanction appropriée est infligée dès l'âge de dix ans, tel repeindre le préau d'une école, l'enfant réfléchira à deux fois avant de récidiver. Le principe de responsabilité pénale à 10 ans n'est que cela, et je remercie le Gouvernement de tenir ainsi ses engagements (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDF). L'amendement 198, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Michel Vaxès - Notre amendement 65 a pour objet de s'opposer à l'abaissement de l'âge de la majorité pénale. Mme Martine Billard - Si les adultes, moins individualistes, se donnaient la peine de corriger les incivilités des enfants, les leurs comme de ceux du quartier, cela éviterait peut-être d'avoir à conduire des enfants de dix ans devant le juge ! L'amendement 249 de suppression de l'article est défendu. Les amendements 65 et 249, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés. Mme Martine Billard - L'amendement 250 est défendu. L'amendement 250, repoussé par la commission et par le Gouvernement, n'est pas adopté. L'article 10, mis aux voix, est adopté. M. Michel Vaxès - L'amendement 66 de suppression de l'article est défendu. L'amendement 66, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. L'article 11, mis aux voix, est adopté. M. Michel Vaxès - Mon intervention vaudra défense des amendements 67, 38 et 69, qui tendent à requalifier les mesures dites « éducatives » dans votre texte pour ce qu'elles sont, à savoir, pour les trois premières, des peines restrictives de droit. Quant à l'obligation de suivre un stage de formation civique, c'est en effet une mesure éducative intéressante, que plusieurs juridictions ont d'ailleurs déjà instituée. Enfin, j'aimerais que le Garde des Sceaux nous explique pourquoi le Gouvernement a refusé, sans explication, d'améliorer cet article comme le souhaitait le rapporteur du Sénat, dont l'amendement a été retiré de manière énigmatique après une suspension de séance. La représentation nationale doit être pleinement informée. Mme Marylise Lebranchu - Monsieur Estrosi, vous ne devriez pas entretenir la confusion comme vous le faites. Je pense, comme vous, qu'une réprimande ou une sanction est nécessaire lorsqu'un mineur adopte les comportements que vous avez décrits, mais il y a un abîme entre ce que vous nous avez expliqué et le texte que vous nous proposez, ce dont vous refusez de convenir. C'est pourquoi l'amendement 200 tend à supprimer l'article 12, qui illustre la confusion entre sanctions, mesures éducatives et mesures de sûreté, sans tenir aucun compte de la nécessité de mesures de réinsertion. C'est ainsi que l'on peut en arriver à l'aberration de mesures de sûreté incompréhensibles aux mineurs, et à l'enfermement pur et simple. Le contenu de cet article est très différent des commentaires qu'il suscite. L'amendement 200, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. le Rapporteur - L'amendement 154 est de précision. L'amendement 154, accepté par le Gouvernement, est adopté. L'amendement 67, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Georges Fenech - Il me semble que l'on fait beaucoup de sémantique pour qualifier des mesures qui n'ont d'autres visées que prophylactiques. Ne s'agit-il pas, avant tout, de protéger le mineur de la récidive ? Dans ce cadre, l'amendement 80 tend à lui interdire les contacts avec les éventuels coauteurs ou complices de l'infraction. M. le Rapporteur - La commission a adopté cette disposition qui lui a paru pleinement justifiée. Mme Martine Billard - Et s'ils sont dans la même classe ? L'amendement 80, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté. Les amendements 68 et 69, repoussés par la commission et par le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés. L'article 12, mis aux voix, est adopté. M. le Rapporteur - L'amendement 155 est de coordination. L'amendement 155, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté. Mme Marylise Lebranchu - L'amendement 201 est défendu. L'amendement 201, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Thierry Mariani - L'amendement 225 est défendu. L'amendement 225, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. L'article 13, mis aux voix, est adopté. M. Richard Mallié - L'amendement 36 corrigé prévoit d'appliquer aux mineurs les dispositions du code pénal relatives à l'obligation d'accomplir un travail d'intérêt général (TIG), notamment lorsqu'ils se sont livrés à des taggages. M. le Rapporteur - La commission comprend le souci qui anime les auteurs de l'amendement. Toutefois, leur préoccupation est satisfaite par les textes en vigueur, puisque le juge peut imposer une mesure de réparation. Par ailleurs, M. Estrosi a déposé un amendement relatif à la sanction des tags, qui sera examiné ultérieurement. C'est pourquoi la commission a exprimé un avis défavorable. M. Richard Mallié - L'amendement 36 corrigé est retiré. M. Christian Estrosi - La cour d'appel de la chambre criminelle n'a-t-elle pas rendu un arrêt, le 16 mai 2002, par lequel elle indique que l'obligation de TIG n'est pas applicable aux mineurs de 16 ans ? M. le Rapporteur - C'est exact. En revanche, je le répète, le juge peut imposer une mesure de réparation à un mineur. De ce fait, l'amendement est satisfait. M. Richard Mallié - L'amendement 37 tend à abroger l'article 769-2 du code de procédure pénale, en application duquel toutes les fiches relatives aux procédures judiciaires contre un mineur sont retirées de son casier judiciaire lorsqu'il atteint l'âge de la majorité. M. Jean-Jack Queyranne - C'est incroyable ! M. Thierry Mariani - L'amendement 233 corrigé a le même objet. Ce qui est incroyable, c'est que cette disposition résulte des lois d'amnistie de 1981 et de 1988. Les forces de l'ordre sont révoltées de ne pouvoir faire état des antécédents judiciaires des multirécidivistes âgés de dix-huit ans et trois jours. Il faut revenir sur cette mesure scandaleuse, et faire en sorte que le casier judiciaire des mineurs délinquants ne redevienne pas vierge le jour où ils atteignent la majorité légale. Mon amendement 232 est défendu. M. le Rapporteur - L'article 769-2 du code de procédure pénale dispose en effet que les jeunes atteignant l'âge de dix-huit ans bénéficient de l'effacement de leur casier judiciaire des incidents survenus au cours de leur minorité. Assez encadrées, ces dispositions prévoient l'effacement des amendes, des peines éducatives, des sursis simples ou des TIG. Il est du reste un principe commun de notre droit qui veut qu'une fois la peine accomplie, l'intéressé puisse bénéficier d'une nouvelle chance... M. Jacques Myard - Il est transformé ! M. le Rapporteur - On donne au jeune majeur une chance de repartir sur de bonnes bases mais s'il faute à nouveau, il ne bénéficie évidemment plus de l'excuse de minorité et s'expose à toutes les sanctions applicables aux adultes. Pour ces raisons, la commission des lois a émis un avis défavorable à ces trois amendements (Murmures sur les bancs du groupe UMP ; « Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste). M. le Garde des Sceaux - Même avis après mure réflexion. Les explications de votre rapporteur me semblent tout à fait conséquentes. M. Jacques Myard - C'est l'amnésie ! M. le Garde des Sceaux - Il faut graduer la sanction mais une société doit aussi savoir redonner une chance. M. André Vallini et M. Jean-Jack Queyranne - Très bien ! M. Thierry Mariani - Quitte à redonner une chance, donnons aussi aux forces de l'ordre une chance de travailler dans de meilleures conditions ! Si les fautes inscrites sont aussi mineures que l'on veut bien le dire, pourquoi les effacer ? Je précise que cet amendement de bon sens m'a été suggéré par des représentants des forces de l'ordre... M. André Vallini - On n'est pas au commissariat ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) M. Thierry Mariani - Si mon amendement vous irrite à ce point, je le maintiens d'autant plus volontiers. Pensons aux difficultés des forces de l'ordre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) M. Richard Mallié - Soit le jeune qui a fait des bêtises se tient tranquille et personne n'aura l'idée de consulter son casier judiciaire, soit il recommence et il est alors utile de savoir que l'on affaire à un récidiviste : nos amendements sont de bon sens ! (Applaudissements quelques bancs du groupe UMP et du groupe UDF). M. le Rapporteur - Je précise que le principe de la mise à jour régulière du casier judiciaire et d'effacement des contraventions au bout de trois ans, des mises à l'épreuve au terme de la période et des sursis simples au bout de cinq ans vaut aussi pour les majeurs. M. Thierry Mariani - Appliquons-le de la même façon aux nouveaux majeurs ! M. le Rapporteur - Ne perdons pas de vue l'essentiel. La crise de la justice des mineurs tient au défaut de suites données à leurs actes de délinquance, pas aux règles d'effacement du casier. Attention aux fausses bonnes solutions ! M. André Vallini - Je suggère à M. Mariani un amendement tendant à rétablir le marquage au fer rouge ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP) Plusieurs députés UMP - Quelle intolérance ! Les amendements 37 et 233 corrigé, mis aux voix, ne sont pas adoptés, non plus que l'amendement 237. Mme Marylise Lebranchu - L'amendement 202 vise à supprimer l'article. Il est en effet pour le moins paradoxal de prétendre faire de la détention des 10-13 ans un événement exceptionnel tout en prévoyant des dispositions qui tendent à l'étendre très sensiblement. Je vous mets en garde : n'allons pas vers une justice des mineurs plus dure encore que celle des majeurs ! L'amendement 202, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. L'article 14, mis aux voix, est adopté. M. Guy Geoffroy - L'amendement 156 vise à rétablir dans son bon ordre l'intitulé de la section 3. L'amendement 156, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté. Mme Marylise Lebranchu - L'amendement 203 tend à supprimer cet article qui fait peser sur les 13-16 ans un régime de contrôle judiciaire à ce point aggravé qu'il semble plus lourd que celui qui s'exerce sur les majeurs. Au reste, si l'évolution proposée était retenue, le contrôle judiciaire ne se distinguerait plus guère de la détention provisoire. Or la plupart des mineurs que j'ai rencontrés, comme vous sans doute, dans les centres éducatifs renforcés étaient effrayés par la durée de leur séjour. Pour eux, cinq mois d'éloignement, c'est une éternité ! Je crains donc qu'ils ne soient tentés de préférer 15 jours ou un mois de détention provisoire à plusieurs mois dans un centre éducatif, durée indispensable pour ramener le jeune à des règles de vie en commun. Donnons une chance aux jeunes accueillis en CER ; faisons en sorte qu'ils ne préfèrent pas la prison ! M. le Rapporteur - Je démens formellement les propos qui sous-tendent l'argumentation de Mme Lebranchu. Le jeune ne peut être tenté de « préférer la prison » pour se soustraire plus vite à ses obligations puisque le texte prévoit expressément une période de suivi éducatif - ou de liberté surveillée - à l'issue de la période de détention. Dois-je rappeler le problème auquel nous sommes confrontés : il s'agit de trouver des réponses aux situations des jeunes pour lesquels les solutions purement éducatives échouent. Les nouveaux outils que nous proposons n'auront d'efficacité que si les intéressés ont au-dessus de la tête l'épée de Damoclès que constitue la menace de la détention provisoire. Cette possibilité de mettre en détention, nous l'assumons dans la mesure où elle est au service de la deuxième chance que nous devons au mineur délinquant. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP). Il n'y a pas en la matière de solution miracle. Nous devons admettre que la mise en détention risque d'être la seule solution pour un certain nombre de récidivistes. En refusant les centres fermés, Madame Lebranchu, vous acceptez que les jeunes susceptibles d'y être admis se retrouvent à brève échéance devant un juge et écopent de deux ou trois ans de prison ferme ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP) M. le Président de la commission - Je conçois que l'on puisse ne pas être favorable à ce projet mais encore faut-il que l'on parle de la même chose. M. Warsmann l'a rappelé, il n'est pas possible qu'un mineur soit admis dans un centre éducatif fermé s'il n'a pas bénéficié au préalable de mesures éducatives ou d'une mesure de placement. L'esprit du texte, c'est un déroulé en trois phases : placement, possibilité d'admission en CEF et dans l'hypothèse où le jeune s'évade du centre fermé, possibilité - et non obligation- de le mettre en détention pour une période de quinze jours renouvelable - étant entendu que le mineur peut être reconduit au centre éducatif fermé. Au reste, je ne vois guère de différence avec la philosophie des centres institués par M. Toubon et repris par le gouvernement auquel appartenait Mme Lebranchu. La dimension pédagogique reste très présente et le fait que le centre soit fermé ne fait pas obstacle à ce que le jeune y bénéficie d'un suivi permanent. Il y a un suivi permanent puisque le jeune qui retourne en centre fermé retrouve les éducateurs, tandis qu'actuellement, s'il quitte le centré renforcé, il est tout simplement remis aux parents, ce qui représente un échec total. Nous, nous prévoyons certes une sanction mais en même temps nous donnons au jeune une chance d'insertion supplémentaire. M. le Garde des Sceaux - Avis défavorable. L'amendement 203, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme Anne-Marie Comparini - Mes amendements 216 et 217 partent d'une même idée : renforcer l'aspect socio-éducatif du contrôle judiciaire, qui aujourd'hui consiste en un simple pointage laissant peu de chances au mineur de convaincre le juge de la réalité de ses efforts. Je propose donc que le contrôle judiciaire puisse être assorti d'obligations relatives au suivi d'une formation ou d'un traitement médical. M. le Rapporteur - L'amendement 216 est satisfait par le 10° de l'article 138 du code de procédure pénale et le 217 par le 6° du même article. C'est pourquoi la commission ne les a pas retenus. Mme Anne-Marie Comparini - Ils sont retirés. M. le Rapporteur - Le 157 est un amendement de clarification rédactionnelle. L'amendement 157, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté. M. le Rapporteur - L'amendement 158 corrige une erreur matérielle. L'amendement 158, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté. M. Michel Vaxès - En cas de manquement du mineur à ses obligations, le responsable du centre doit faire rapport au juge des enfants et le texte prévoit qu'une copie de ce rapport est adressée au procureur de la République. Notre amendement 70 tend à supprimer cette dernière disposition car c'est au juge des enfants de voir s'il y a lieu de donner suite à l'incident, donc de se rapprocher des services du parquet. D'une façon générale, je m'interroge sur la possibilité pour l'éducateur de mener un vrai travail avec le mineur alors qu'il est obligé de dénoncer tout manquement. Cela ne peut que casser la relation de confiance entre eux. M. le Rapporteur - Si nous soumettons les délinquants multirécidivistes à un contrôle judiciaire, c'est avec l'objectif que ce contrôle soit effectif. Certes, le juge peut révoquer ce contrôle si le mineur n'en respecte pas les obligations mais l'expérience nous enseigne que les juges préfèrent parfois ne pas réagir. Nous voulons donc qu'il y ait une autre voie de révocation possible, ce qui suppose que le procureur soit informé d'un éventuel manquement. M. le Garde des Sceaux - Même avis. L'amendement 70, mis aux voix, n'est pas adopté. M. le Rapporteur - L'amendement 159 est celui de la gradation des peines. Il précise que le centre éducatif fermé constitue un deuxième niveau de sanction, le premier visant tous les jeunes ayant eu affaire, à un titre ou à un autre, avec la justice. S'ils commettent une infraction passible de cinq ans d'emprisonnement, alors ils risquent le centre éducatif fermé. M. le Garde des Sceaux - Favorable. L'amendement 159, mis aux voix, est adopté. M. le Rapporteur - L'amendement 160 rétablit l'obligation de placer les mineurs sous contrôle judiciaire dans les centres éducatifs fermés, seuls à même de leur donner la deuxième chance éducative dont ils ont besoin. M. le Garde des Sceaux - Avis favorable. L'amendement 160, mis aux voix, est adopté. L'article 15, modifié, mis aux voix, est adopté. La suite du débat est renvoyée à la prochaine séance qui aura lieu ce matin, vendredi 2 août, à 9 heures. La séance est levée à 0 heure 55. Le Directeur du service ORDRE DU JOUR A NEUF HEURES : 1ère SÉANCE PUBLIQUE Suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat après déclaration d'urgence (n° 154), d'orientation et de programmation pour la justice. M. Jean-Luc WARSMANN, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. (Rapport n° 157) M. Jacques PÉLISSARD, rapporteur pour avis au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. (Avis n° 158) A QUINZE HEURES : 2ème SÉANCE PUBLIQUE Suite de l'ordre du jour de la première séance. A VINGT ET UNE HEURES : 3ème SÉANCE PUBLIQUE Suite de l'ordre du jour de la première séance. |
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