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Assemblée nationale
COMPTE
RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL
Session ordinaire de 2004-2005 - 32ème jour de séance, 77ème séance SÉANCE DU LUNDI 29 NOVEMBRE 2004 PRÉSIDENCE de M. Éric RAOULT vice-président Sommaire ACCORDS INTERNATIONAUX 2 STATUT DU PERSONNEL MILITAIRE TRAITÉ DE COOPÉRATION FRANCE-MOCACO PROTECTION DES INVENTIONS AVANT LE TITRE PREMIER 20 ART. 5 21 ART. 6 23 ART. 7 24 ART. 8 25 ORDRE DU JOUR DU MARDI 30 NOVEMBRE 2004 27 La séance est ouverte à quinze heures. L'ordre du jour appelle le vote, selon la procédure d'examen simplifiée, sur sept projets de loi dont deux adoptés par le Sénat autorisant l'approbation d'accords internationaux. M. le Président - Conformément à l'article 107 du Règlement, je vais mettre aux voix l'article unique de chacun de ces textes. L'article unique de la convention relative à l'extradition entre les Etats membres de l'Union européenne est adopté. L'article unique de la convention relative à la procédure simplifiée d'extradition entre les Etats membres de l'Union européenne est adopté. L'article unique de la convention relative à l'entraide judiciaire en matière pénale entre les Etats membres de l'Union européenne est adopté. L'article unique du protocole à la convention relative à l'entraide judiciaire en matière pénale entre les Etats membres de l'Union européenne est adopté. L'article unique de l'accord France-Roumanie sur l'emploi salarié des personnes à charge des membres des missions officielles est adopté. L'article unique de l'accord international sur l'Escaut est adopté. L'article unique de l'accord international sur la Meuse est adopté.
L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre les Etats membres de l'Union européenne relatif au statut du personnel militaire et civil. M. Xavier Darcos, ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie - L'Europe de la défense est devenue en 2003 une réalité concrète. Les opérations militaires et de police ont été un succès, ainsi de Concordia en Macédoine et d'Artémis en République démocratique du Congo où la France a été « nation cadre ». En matière de police, l'UE a pris la relève des Nations unies en Bosnie et l'opération de police Proxima s'est substituée à l'opération militaire Concordia en Macédoine. Le projet de traité constitutionnel adopté en juin 2004 prévoit l'extension des missions dites de Petersberg ainsi que la mise en place de coopérations structurées, d'une agence d'armement pour renforcer la recherche et les capacités militaires et, enfin, d'un principe d'assistance mutuelle entre Etats membres. Il prévoit également de renforcer la capacité à planifier et à accomplir des missions autonomes en créant une cellule de l'UE auprès de l'état-major de l'OTAN, une cellule civilo-militaire à l'état-major de l'UE et des arrangements de liaison entre l'état-major de l'OTAN et celui de l'UE. Trois priorités ont été fixées pour les mois à venir : la mise en place de l'agence européenne de défense créée en juillet 2004, la relève de l'opération de l'OTAN en Bosnie par l'UE et, enfin, la mise en place d'un centre d'opération qui pourrait planifier et conduire des opérations autonomes comparables à Artémis. Pour accompagner la montée en puissance de la politique européenne de défense et, en particulier, faciliter la mise en œuvre des opérations, il a été décidé de doter les personnels mis à disposition des Etats membres sur les territoires respectifs d'un statut juridique spécifique. Le « SOFA UE » a été signé le 17 novembre 2003 et s'inspire des dispositions du « SOFA OTAN » de juin 1951. Ce nouvel accord tend à combler les lacunes de la situation du personnel détaché auprès de l'état-major de l'UE en lui octroyant des immunités et des privilèges comparables à ceux des fonctionnaires et agents des communautés européennes. Il s'appliquera également au personnel détaché auprès du Haut représentant pour la PESC, du Comité politique et militaire, du Comité militaire de l'UE, de la cellule civilo-militaire et du centre d'opérations en cours de création. Le « SOFA UE » s'appliquera aussi au personnel mis à disposition des nations-cadres d'une opération et aux exercices. L'accord règle aussi divers aspects techniques comme le port d'uniforme du pays d'origine, la reconnaissance des permis de conduire militaires, l'immunité de juridiction dans le cadre du service, le transit, les bénéfices de soins médicaux, les conditions de détention et de port d'armes, les facilités de communication et de transport ainsi que l'inviolabilité des archives. Le « SOFA UE » s'applique d'office dans le cas où le statut des forces n'est pas couvert par un autre accord ; dans le cas contraire, il s'applique à titre subsidiaire ; il peut être enfin étendu à des Etats tiers participant à des exercices ou à des missions de l'UE. Le champ géographique de l'accord est le territoire métropolitain mais la France notifiera au secrétaire général du Conseil de l'UE qu'il s'appliquera également aux départements et collectivités d'outre-mer ainsi qu'à la Nouvelle-Calédonie et aux terres australes et antarctiques françaises. Tel est l'objet du projet de loi soumis à votre approbation. M. Jacques Remiller, suppléant M. Bernard Schreiner, rapporteur de la commission des affaires étrangères - Utopie il y a dix ans, projet il y a cinq ans, la politique européenne de sécurité et de défense est aujourd'hui une réalité. S'agissant des structures, je ne reviendrai pas sur les modalités de fonctionnement des différentes institutions de la PESD : comité politique et de sécurité, comité militaire, état-major, cellule de planification, centre de situation, agence européenne de défense. Ce sont plus de 200 personnes qui oeuvrent au jour le jour à faire vivre la PESD. La stratégie européenne de sécurité, quant à elle, a été définie en décembre 2003 et constitue une avancée majeure. Enfin, s'agissant des moyens, l'agence européenne de défense, créée le 12 juillet dernier, devrait contribuer à approfondir une démarche capacitaire européenne. Outre les moyens matériels, lors du sommet d'Helsinki de décembre 1999, les chefs d'Etat et de gouvernement ont voulu doter l'Union européenne d'une force d'intervention de l'ordre de cinquante mille à soixante mille hommes, déployable en 60 jours, pour une durée d'au moins un an, afin d'être en mesure d'effectuer les missions de gestion de crises dites de Petersberg. L'objectif d'Helsinki a été déclaré atteint à la fin de l'année 2003. Il manque toutefois un élément essentiel pour que ceux qui participent à la sécurité de l'Europe puissent mener à bien leurs missions en toute sécurité juridique : tel est l'objet de la présente convention, signée le 17 novembre 2003 à Bruxelles, qui fixe le statut des forces chargées de mener à bien les « missions de Petersberg ». La définition d'un tel statut était urgente, alors que l'UE multiplie ses interventions sur les théâtres extérieurs, je pense en particulier aux opérations Concordia et Artémis - c'est d'ailleurs cette dernière opération qui a mis en évidence la nécessité de disposer d'un texte européen afin de régler les questions liées à la présence des personnels détachés par les Etats participant à l'opération auprès du quartier général d'opération, situé à Paris. A ce jour en effet, les personnels militaires et civils détachés auprès de l'état-major de l'UE ne sont régis par aucun accord leur octroyant des immunités et privilèges comparables à ceux des fonctionnaires et agents des Communautés européennes. La seule base juridique en la matière est une décision du Conseil du 16 juin 2003 visant à déterminer les conditions de travail, à définir les droits et obligations auxquels sont soumis les personnels détachés et à préciser le régime applicable aux indemnités et dépenses. Dans la perspective de la relève de l'OTAN par l'Union européenne en Bosnie, dans le cadre de l'opération Althéa, cette lacune juridique n'est pas acceptable : l'existence d'un statut régissant les personnels des Etats membres intervenant dans le cadre de la PESD est une nécessité absolue. Ce statut, quel est-il ? Calqué pour partie sur la convention de 1951 entre les Etats membres de l'OTAN, il est en fait très classique. Il prévoit tout d'abord des éléments matériels, ayant trait aux soins médicaux, au port de l'uniforme et des armes, à la nécessité d'un ordre de mission et au régime fiscal des soldes et traitements perçus. Il définit ensuite, pour les personnels civils et militaires détachés auprès des institutions de la PESD, un régime d'immunité de juridiction pour les paroles, écrits et actes accomplis dans l'exercice de leurs fonctions. S'agissant des personnels mis à disposition des quartiers généraux, les compétences juridictionnelles respectives de l'Etat d'origine et de l'Etat de séjour sont précisément définies. Ainsi, chaque Etat membre jouit d'une juridiction exclusive pour les infractions punies par ses lois qui ne le seraient pas par l'autre Etat membre. En cas de concurrence de juridictions, l'Etat d'origine exerce par priorité celle-ci, pour les infractions portant atteinte uniquement à sa sûreté, à sa propriété ou à l'un de ses personnels, ou bien encore lorsque les infractions sont accomplies dans l'exécution du service. Le règlement des dommages fait l'objet d'une disposition spécifique, prévoyant notamment la renonciation - dans des conditions classiques- des Etats membres à toute demande d'indemnité à l'encontre d'un autre Etat membre. La question de la compatibilité entre ce statut et celui d'autres forces - telles celles de l'OTAN - est également réglée. Le principe est que le statut faisant l'objet de la présente convention ne s'applique que dans les cas où les quartiers généraux et les forces sont mis à disposition de l'UE pour la préparation et l'exécution des missions de Petersberg, et lorsque leur statut n'est pas couvert par un autre accord. Lorsque le statut de ces quartiers généraux et de ces forces est régi par un autre accord, des arrangements spécifiques peuvent être conclus entre l'UE et les Etats ou organisations concernés, afin de décider quel est l'accord applicable à l'opération ou à l'exercice considérés. Enfin, le statut peut être appliqué à des Etats tiers participant à des opérations ou à des exercices militaires réalisés sous l'égide de l'UE. Ce fut du reste le cas au Congo, où se sont joints aux treize Etats membres de l'UR participant à l'opération l'Afrique du Sud, le Brésil, le Canada et Chypre. Tel est le contenu - somme toute classique - de la convention qui nous est soumise. A ce jour, seule l'Autriche l'a ratifiée - le 8 septembre 2004 - et il est important que la France figure parmi les premiers Etats membres à procéder à sa ratification, pour rester fidèle au rôle moteur qu'elle entend jouer dans la construction de la politique européenne de sécurité et de défense. C'est pourquoi, sur notre recommandation, la commission des affaires étrangères a donné un avis unanimement favorable à l'adoption du présent projet de loi. M. François Loncle - Il est assez inhabituel que le Parlement ait à débattre d'un tel projet de ratification, dont les principaux enjeux ont été traités très en amont - lors de la discussion de l'accord lui-même - et dont la portée est somme toute plus administrative et juridique que directement politique. Les occasions d'évoquer les avancées de l'Europe de la défense étant cependant trop rares - hors le cadre assez contraint de l'examen annuel des crédits de la défense -, c'est de très bon cœur que je saisis, au nom du groupe socialiste, l'occasion qui nous est donnée de le faire. Puisqu'il faut respecter un minimum de formalisme, je vous annonce d'emblée que le groupe socialiste votera en faveur du projet de loi. M. le Rapporteur suppléant - Très bien ! M. François Loncle - J'en viens donc à la défense européenne, le concept ne recouvrant pas, chacun l'aura compris, la défense de l'Europe. L'Alliance atlantique, créée en 1949 pour contrer la menace soviétique, a vu sa pertinence opérationnelle mise en cause par l'effondrement de l'URSS. Cependant, les crises des Balkans ont cruellement démontré l'évanescence d'une option militaire strictement européenne. La fin de la bipolarité donne aux Européens l'espoir de ne plus dépendre de puissances extérieures pour la solution de leurs problèmes. Pour agir dans le domaine de la sécurité, les Européens avaient besoin d'institutions et tel est le fond de la mutation qui est intervenue lors de la négociation du traité de Maastricht. Jusqu'en 1992, les Communautés successives sont des organes d'intégration économique. Même si une certaine coopération politique s'est développée depuis les années 1970 en matière de politique étrangère, ces institutions n'ont pas de compétence dans ce domaine. Le traité de Maastricht crée, lui, une Union européenne dotée de pouvoirs monétaires et économiques, d'une diplomatie commune et de compétences en matière de sécurité, tout en ouvrant la perspective d'une défense commune. Depuis la chute du Mur, l'Europe aime à se penser comme un continent réuni. S'il n'est pas aujourd'hui question de mettre sur pied une défense commune avec les anciennes républiques de l'Union soviétique, il apparaît urgent de développer un système continental de dialogue sur la sécurité et de coopération. Tel est le rôle de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, qui réunit les cinquante-quatre Etats intéressés à la sécurité du continent. Si l'on ajoute à l'Alliance atlantique, à l'UE et à l'OSCE, le Conseil de l'Europe et l'ONU, on a une idée de la complexité institutionnelle de l'Europe en matière de sécurité. Au reste, cette complexité fait écho au caractère éminemment incertain et mouvant des situations à traiter. Les grands affrontements entre Etats ou entre Alliances ne sont plus à l'ordre du jour : il s'agit désormais de traiter des crises - telles celles des Balkans - découlant de l'explosion d'un ou plusieurs Etats, et de gérer les interactions d'acteurs divers ayant peu à voir avec les armées régulières de jadis. Le métier militaire évolue et les armées européennes se réforment les unes après les autres. Une seule institution ne pouvant traiter l'ensemble de ces formes de conflits, l'architecture institutionnelle se complique et cette évolution soulève nombre d'interrogations. La première a trait à l'avenir de l'ONU. L'OSCE, elle, reste une lourde machine, souvent impuissante à décider du fait de la règle du consensus, et pratiquement dépourvue de moyens. Contrairement à son programme, établi au début des années 1990 dans la Charte de Paris, elle s'en tient à quelques actions de diplomatie préventive, d'observation des conflits ou de contrôle des élections. L'Alliance atlantique a muté sous l'effet de ses élargissements successifs et de ses interventions au cours de la dernière décennie, notamment en Yougoslavie en 1999. Elle souffre aujourd'hui d'une double incertitude. Sur son rôle : demeure-t-elle la coalition militaire et de défense que décrit le traité fondateur ou est-elle devenue une organisation de sécurité pour tout le continent ? Sur son étendue : ouverte en 1999 à la Pologne, la Hongrie et la République tchèque, a-t-elle vocation à s'étendre encore pour réunir tous les Etats du continent, avec - ou sans - la Russie? La situation actuelle en Ukraine donne à la question une singulière acuité ! Quant à l'Union européenne, la mise en œuvre du traité de Maastricht dans les domaines diplomatique et stratégique a été moins rapide que prévu. Officiellement, l'UE dispose d'une politique étrangère et de sécurité commune, incarnée par un « M. PESC » ; dans les faits, l'Union a pu paraître en retard sur les événements. En outre, elle ne dispose pas non plus de forces adaptées, sous commandement européen, pour intervenir elle-même dans les crises exigeant une interposition, une opération de maintien de la paix ou une action humanitaire. La diplomatie commune a pourtant été relancée par le traité d'Amsterdam en 1997, cependant que la constitution d'une force militaire européenne est en vue. Les Etats membres sont engagés dans la création de mécanismes de décision et dans la constitution de forces d'intervention ayant vocation à permettre à l'Union de s'occuper elle-même de ses propres affaires de sécurité et de stabiliser les zones incertaines du continent. De ce point de vue, la déclaration de Petersberg marque une étape fondatrice dans le processus d'autonomisation politique de la défense européenne. En fixant les missions d'une force européenne, elle a ouvert le champ des possibles, comme le prévoyait l'article 17 du traité de Maastricht. La déclaration franco-britannique du 4 décembre 1998 a aussi représenté une étape marquante, notamment dans son point 2 qui affirme que l'Union doit avoir une capacité autonome d'action, appuyée sur des forces militaires crédibles. En définitive, c'est vers cette autonomie continentale qu'a tendu une grande partie des efforts consentis depuis lors par l'Allemagne, la Belgique, le Luxembourg, la France, la Grande-Bretagne et la Suède. Lors du Conseil européen de Bruxelles du le 12 décembre 2003, les 25 Etats membres ont pour la première fois défini ensemble leur environnement de sécurité et fixé des objectifs stratégiques communs. C'est une véritable vision européenne du rôle de l'Union dans le monde qui a ainsi été arrêtée. La France fait sienne cette stratégie, mise au service d'un multilatéralisme efficace, fondée sur l'engagement préventif et sur la promotion du droit international. L'Europe devient aujourd'hui un acteur planétaire, capable de mobiliser les ressources civiles et militaires de l'action extérieure pour contribuer à la construction d'un monde plus équitable, plus sûr et plus uni. Il est un point, délicat pour certains d'entre nous, que je ne souhaite pas éclipser : les relations entre l'Union et l'OTAN. Dessein européen et solidarité atlantique ne sont pas contradictoires. Chacune des organisations a son rôle à jouer, selon les circonstances. Nous défendons donc l'idée d'une cohérence dans la complémentarité. Parce que l'Europe peut avoir besoin des moyens de l'OTAN, auxquels elle contribue, nous faisons jouer les accords de « Berlin plus » entre l'Union et l'Alliance ; parce que l'Union dispose déjà des ressources nécessaires pour gérer certaines crises, elle peut aussi agir seule, dans des délais souvent très brefs ; enfin, parce que, dans tous les cas, nous souhaitons affirmer la primauté du politique et préserver l'autonomie de décision de chacune des organisations, nous veillons à maintenir le contrôle politique et la direction stratégique des opérations au niveau pertinent. C'est d'ailleurs pourquoi je déplore, et je ne suis pas le seul, la rédaction définitive de l'article I-41 du traité constitutionnel européen. Notre collègue Paul Quilès souligne à juste titre, dans son excellent rapport sur le budget de la défense, que le projet de Constitution, agissant comme un corset, empêchera toute dynamique politique de se déployer. Au-delà du souhait d'exister militairement, l'Union européenne a un devoir d'efficacité. Le succès de ses opérations Concordia en Macédoine et Artémis en République démocratique du Congo lui ont donné une crédibilité opérationnelle incontestable. Bientôt, elle relèvera la SFOR en Bosnie. Cette opération, particulièrement délicate, constituera un nouveau test majeur. Il nous faut continuer de faire progresser la défense européenne. Sur le plan politique, notre ambition est celle d'une Europe forte et pacifique, prête à concourir au rétablissement ou au maintien de la paix, en toute autonomie stratégique. Sur le plan stratégique, elle est de fixer des objectifs réalistes, notamment en matière de capacités militaires. L'Objectif global 2010, qui traduit la volonté de disposer à cette échéance de forces armées européennes capables d'agir ensemble, depuis le niveau stratégique jusqu'au théâtre d'opérations, doit nous y aider. Au-delà, il faut arriver à une Europe capable de planifier et de conduire des opérations, comme de déployer rapidement des forces « inter-opérables ». Y contribuera la création d'une cellule civilo-militaire et d'un noyau de centre d'opérations européen à l'état-major de l'Union. Sur le plan tactique enfin, il faut citer la mise en place de groupements tactiques interarmes, la mise à disposition de 1 500 hommes, la création d'une force européenne de gendarmerie, à l'initiative de la France, l'effort nécessaire pour mieux partager encore le renseignement, afin notamment de lutter contre le terrorisme. L'Agence européenne de défense permettra, quant à elle, de mieux coordonner les objectifs capacitaires, les programmes d'armement en coopération et tous les aspects relatifs à la recherche et à l'industrie. Elle sera l'un des outils-clés de l'autonomie stratégique européenne, objectif majeur à nos yeux. Sur le plan industriel, l'objectif est de disposer d'une industrie de défense structurée au niveau européen, qui nous permette de préserver nos acquis et de conserver une avance en matière d'équipements. Des recompositions et des collaborations industrielles ont donné des résultats spectaculaires dans le domaine aéronautique, spatial et électronique. Il faudrait y tendre également en matière d'équipements navals et terrestres. L'Union européenne doit savoir concentrer ses efforts en matière de recherche-développement, faute de quoi seul un rôle de sous-traitant lui serait laissé. La ratification de cet accord participe de la cohérence du nouveau dispositif mis au service de la politique européenne de sécurité et de défense. C'est pourquoi, avec le groupe socialiste, je la voterai. M. Claude Gatignol - L'accord qui nous est proposé témoigne de l'engagement total de notre pays en faveur de la politique européenne de sécurité et de défense. Il convient de l'approuver sans retard afin que tous les personnels œuvrant pour la sécurité de l'Europe puissent exercer leurs missions dans un cadre juridique sûr. La PESD est aujourd'hui une réalité. Elle dispose de structures, d'un outil de référence politique avec le document « Une Europe plus sûre dans un monde meilleur » pour identifier les priorités stratégiques de l'Union, au-delà de la seule dimension militaire, enfin, de moyens civils et militaires de gestion de crise, opérationnels depuis la fin 2003. Un état-major de l'Union existe désormais, composé de 150 officiers et experts militaires des Etats membres détachés auprès du Secrétariat général du Conseil et dirigé depuis avril dernier par le général de corps d'armée français, Jean-Paul Perruche. Cet accord est également nécessaire parce que les théâtres d'intervention des forces européennes se multiplient - Macédoine, Congo, Bosnie... -, preuves de la capacité de l'Union à gérer une crise de façon globale. L'Union s'apprête ainsi à prendre le relais le 2 décembre prochain de l'OTAN en Bosnie. Il s'agira de la première opération de cette ampleur, avec le déploiement de 7 000 hommes. Avec près de 450 hommes sur le terrain, la France sera le huitième contributeur à cette force. Cet accord est indispensable car aucune disposition n'octroie aujourd'hui d'immunités et de privilèges aux personnels civils et militaires détachés auprès de l'état-major de l'Union, comme il en existe pour les fonctionnaires et agents des Communautés européennes. Un vide juridique va ainsi être comblé. Le groupe UMP votera donc cet accord. L'article unique du projet de loi, mis aux voix, est adopté.
L'ordre du jour appelle la discussion de deux projets de loi autorisant l'un la ratification du traité de coopération entre la France et la principauté de Monaco, l'autre l'approbation de l'avenant à la convention fiscale entre la France et la principauté de Monaco. M. le Président - La Conférence des présidents a décidé que ces deux projets de loi feraient l'objet d'une discussion générale commune. M. Xavier Darcos, ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie - La France et la principauté de Monaco étaient liées jusqu'à présent par le traité du 17 juillet 1918, dont l'esprit et le contenu ne correspondaient plus aux réalités actuelles et n'étaient plus compatibles avec les prérogatives d'un Etat souverain, désormais membre de l'ONU, du Conseil de l'Europe et de nombreuses organisations internationales. Le 24 octobre 2002 a été signé un traité destiné à réaffirmer les relations d'amitié franco-monégasques, dont la spécificité tient autant à la géographie qu'à l'histoire. Le nouveau traité réaffirme la souveraineté et l'indépendance de la Principauté, ainsi que la politique d'étroite concertation entre les deux Etats, notamment dans le domaine des relations internationales. Il prévoit que les actions de la Principauté, conduites en toute souveraineté, respectent les intérêts français dans les domaines politique, économique, de sécurité et de défense. Il prévoit également que les deux Etats concluent des conventions dans des domaines d'intérêts communs et procèdent à des consultations régulières dans le cadre d'une commission mixte de coopération. L'actualisation des relations financières s'est effectuée sur la base du rapport du directeur du Trésor d'octobre 2000 et du relevé de conclusions de MM. Rouvillois et Cailleteau, inspecteurs des finances. Aujourd'hui, la plupart des propositions de ce rapport sont mises en oeuvre, qu'elles concernent la mise en circulation de l'euro à Monaco, ou la convention fiscale. Ainsi, l'avenant fiscal du 26 mai 2003 prévoit que le traitement fiscal des relations économiques entre des sociétés dépendantes établies en France d'une part, à Monaco d'autre part, se rapproche désormais du droit commun français. Le paiement des commissions et des redevances entre sociétés pourra désormais être admis en déduction des bénéfices de la société qui les aura versées. Preuve devra être fournie que cela ne dissimule pas une réalisation ou un transfert de profits. Cet alignement sur le droit français correspond à une demande des entreprises françaises détenant des filiales dans la Principauté. Cet avenant prévoit aussi que les résidents français de Monaco seront désormais soumis à l'impôt de solidarité sur la fortune et qu'ils pourront bénéficier des réductions d'impôts accordées pour l'emploi d'un salarié à domicile et les frais de garde des jeunes enfants. Cet avenant réaffirme enfin le principe de l'unicité du territoire fiscal français et monégasque : les règles de partage de la TVA seront plus proches de la réalité économique et garantiront mieux les intérêts de la France. Le deuxième volet du traité concerne une nouvelle convention d'entraide judiciaire en matière pénale qui doit moderniser la convention du 21 septembre 1949. L'objectif est de parvenir à un instrument conforme à la convention du conseil de l'Europe de 1959, ainsi qu'aux accords et conventions conclus depuis lors au sein de l'Union européenne. Enfin, les négociations ont porté sur une convention de coopération administrative, destinée à se substituer à celle du 28 juillet 1930. Les Monégasques souhaitaient que le principe de libre accès de leurs ressortissants aux emplois publics soit admis, tout en continuant de faire appel, en priorité sur toute autre nationalité, à des ressortissants français, voire à des fonctionnaires français en détachement, pour un ensemble d'emplois que la faiblesse de la population monégasque ne permet pas de pourvoir. La France partageait cette préoccupation conforme aux conventions internationales. La négociation avait pour enjeu de concilier cette préoccupation et la nécessité de garantir que les titulaires des emplois les plus sensibles jouiraient de la confiance des deux Etats. Les monégasques souhaitaient par ailleurs pouvoir accéder plus facilement à la fonction publique française, la convention de 1930 s'étant révélée plutôt dissuasive. A l'instar des Andorrans, les Monégasques accéderont à notre fonction publique dans les mêmes conditions que les ressortissants des pays membres de l'Union européenne. Enfin, l'approfondissement de la coopération administrative entre les deux Etats se fera sous le contrôle de la Commission de coopération franco-monégasque. Le texte de la future convention a été arrêté en juin et, après sa signature, il sera soumis à l'approbation du Parlement, mais il n'entrera en vigueur qu'après la conclusion de l'ensemble des négociations en cours sur les questions financières et l'entraide judiciaire. M. Jean-Claude Guibal, rapporteur de la commission des affaires étrangères - Nous examinons deux projets. Le premier tend à autoriser la ratification du traité du 24 octobre 2002, le second à autoriser l'approbation de l'avenant à la convention fiscale du 18 mai 1963. Ces deux textes s'inscrivent dans un mouvement général de modernisation des relations entre la France et la principauté de Monaco, voulu par les autorités monégasques depuis de nombreuses années. La principauté, en effet, souhaitait voir les attributs de sa souveraineté renforcés, ce que la France a accepté dans la mesure où la révision des relations bilatérales s'élargissait aux matières financières, fiscales et judiciaires. Certaines négociations ont déjà abouti, ce qui explique que nous examinions aussi l'avenant à la convention fiscale de 1963. Le traité de 2002 doit se substituer au traité d'amitié de 1918 qui n'est plus adapté à la situation actuelle et encadre trop la souveraineté monégasque. Si le nouveau traité tend à moderniser nos relations avec la principauté, il ne remet pas en question la spécificité des liens entre les deux pays, qui ne deviennent pas des relations interétatiques de droit commun. Il n'est plus question « d'amitié protectrice », comme en 1918, mais de « communauté de destin », concept fort mais inhabituel dans les relations entre Etats. De même, si disparaît l'exigence d'une « parfaite conformité » de l'exercice de la souveraineté monégasque avec les intérêts politiques, économiques et militaires de la France, le traité de 2002 prévoit néanmoins que les actions de la principauté devront « s'accorder » avec les intérêts fondamentaux de la République française. Sur le plan international, le mécanisme « d'entente préalable » de 1918 est remplacé par une concertation « appropriée et régulière ». La nouvelle rédaction confère une plus grande autorité à la principauté, sans pour autant introduire la symétrie des obligations, la France ne s'engageant qu'à prendre en compte les intérêts fondamentaux de la principauté. Le nouveau traité pourrait avoir pour conséquence le rehaussement du niveau de notre représentation diplomatique. Aujourd'hui, la principauté est représentée en France par un ambassadeur, tandis que la France l'est à Monaco par un consul général. Les Monégasques souhaitent que notre pays installe une ambassade dans la principauté, mais la décision n'a pas été prise du côté français. En cas de modification de l'ordre successoral, l'agrément de la France n'est plus requis, notre pays devant simplement être informé. Cette exigence du traité de 1918 s'explique par le contexte particulier de l'époque, c'est-à-dire par la crainte qu'un prince allemand accède au trône. Au total, le traité de 2002 répond à un souhait légitime de la principauté de Monaco qui considérait le traité de 1918, empreint de paternalisme, comme totalement désuet. Il faut se féliciter que sa modification ait eu lieu dans un climat de confiance. Toutefois, le traité du 24 octobre 2002 ne constitue qu'un cadre général. Son article 6 prévoit que des conventions particulières interviendront dans des domaines d'intérêt commun. C'est ainsi que les négociations ont abouti à la signature d'un avenant à la convention fiscale de 1963. Les Français résidant à Monaco depuis 1989 seront désormais assujettis à l'impôt de solidarité sur la fortune, comme ils le sont à l'impôt sur le revenu en application de la convention de 1963. S'agissant de la TVA, l'avenant fixe une nouvelle règle pour le partage du produit de cet impôt entre les deux pays. On se souvient de la polémique suite à l'augmentation, considérée par certains comme excessive, des reversements de TVA effectués par la France au profit du Trésor monégasque. Ce problème résultait de la formule de calcul, inattaquable dans son principe, mais inadaptée. L'avenant vise à modifier cette formule dans un sens plus favorable à la France. D'autres discussions sont en cours, en particulier dans le domaine de la coopération administrative. Il s'agit de réviser la convention de 1930 selon laquelle les principaux postes de responsabilité sont pourvus par des fonctionnaires français. Le Conseil de l'Europe avait fait de la suppression de cette exigence une condition à l'adhésion de la principauté. La nouvelle convention doit prévoir que les personnes occupant des emplois sensibles devront jouir de la confiance des deux Etats. S'agissant de la coopération judiciaire en matière pénale, les négociations commencées il y a deux ans et demi doivent permettre de rapprocher les règles franco-monégasques avec celles qui prévalent entre Etats de l'Union européenne. Il reste à régler la question de la transmission directe des demandes d'entraide entre juges et celle de l'inclusion des infractions fiscales dans le périmètre de l'entraide judiciaire. Une session de négociation a eu lieu en juillet dans un excellent climat, laissant espérer un accord prochain. Sur la méthode, la commission a estimé logique de ratifier dans un premier temps le traité de 2002, fixant le nouveau cadre des relations bilatérales, puis de ratifier les conventions sectorielles au fur et à mesure de leur signature. C'est ainsi que nous allons nous prononcer sur l'avenant fiscal. A cet égard, la représentation nationale apprécierait d'être informée de l'état d'avancement des autres conventions. Sans méconnaître le sacro-saint principe de l'égalité devant l'impôt, j'observe que son application pure et dure aux Français vivant à Monaco a pour conséquence directe la disparition progressive de la communauté française en principauté. Forte de 15 122 immatriculés en 1984, elle n'en comptait plus que 9 454 en 2002 et ne cesse de diminuer. La communauté française de Monaco s'est réduite de 40% en vingt ans et ne représente plus que 32% de la population monégasque, contre 58% en 1968. L'assujettissement à l'ISF va accentuer cette tendance : compte tenu des prix de l'immobilier en principauté, il suffit d'être propriétaire de son logement pour être imposable. Or l'intérêt de la France est que ses ressortissants soient nombreux, actifs et influents, à plus forte raison quand s'affirme la souveraineté monégasque et même si cela doit nous coûter quelques recettes fiscales. Le moins que la France puisse faire serait de ne pas traiter ses ressortissants moins bien que s'ils étaient domiciliés sur le territoire national et de ne les assujettir à l'ISF qu'à partir de l'entrée en vigueur de l'avenant, c'est-à-dire en 2005, et non depuis 2002 comme on l'entend parfois suggérer au mépris du principe de non-rétroactivité. Je ferai un dernier commentaire sur le champ des conventions qui font l'objet d'une actualisation. Celles qui concernent les régimes sociaux, en particulier les retraites, devraient être revues. Par ailleurs, la France étant devenue une république décentralisée, il conviendrait d'en tirer les conséquences en associant, au moins à titre consultatif, les collectivités locales voisines de la principauté aux travaux de l'actuelle commission mixte et de la future commission de coopération. Il ne serait pas illégitime que, sur l'économie de reversement de TVA, la France accorde une dotation spécifique à celles de ces collectivités dont une grande partie de la population active travaille à Monaco. Une telle solidarité financière existe déjà entre le canton de Genève et Annemasse. La commission vous recommande d'adopter ces deux textes. M. François Loncle - Le groupe socialiste prend part à ce débat. Mais les textes que nous examinons sont-ils suffisamment importants pour être ainsi inscrits à notre ordre du jour ? Ou bien cette discussion nous a-t-elle été imposée par M. Myard, observateur méticuleux mais quelque peu acariâtre du monde global ? Nous connaissions sa critique des « machins » internationaux. Plus récemment, il a usé de son art rhétorique contre certains petits pays, désignés sans ménagements diplomatiques comme des « Etats croupions » en commission. Monaco voudrait donc une messe chantée au Parlement, sous la direction d'un représentant qualifié de la diversité majoritaire. Les députés socialistes sont favorables au respect des souverainetés comme de la parole de la France. C'est François Mitterrand, je le rappelle, qui représenta le gouvernement français au mariage du prince Rainier avec Mlle Grace Kelly. La colonisation, les souverainetés limitées, les traités inégaux appartiennent heureusement au passé. Qui songerait, à l'exception de notre excellent collègue, à retenir l'horloge de l'histoire ou à revenir à des rapports asymétriques entre Etats ? Comment, d'ailleurs, figer dans le droit une relation inégale entre Etats à raison de leur différentiel de taille, de population, de puissance militaire ou hydraulique ? Peut-être le regret impérial manifesté par notre collègue n'est-il qu'un artifice littéraire, associant notre Assemblée à l'hommage qui sera rendu en 2005 à Cervantès. Les moulins à vent d'aujourd'hui sont ceux listés par notre collègue pour justifier son réquisitoire. Pourquoi Monaco n'aurait pas droit à sa souveraineté ? Parce que Monaco n'a pas de maison d'arrêt, parce que Monaco importe toute son eau... M. Jacques Remiller - Il y a une maison d'arrêt à Monaco ! M. François Loncle - J'aurais aimé que vous fussiez là, mon cher collègue : la France n'a plus de bagne, elle achète à l'étranger tout son pétrole. Qui veut tuer son chien l'accuse de la rage. Le loup de la fable reproche à l'agneau qu'il s'apprête à dévorer de troubler son eau, alors qu'il s'abreuve à l'aval du prédateur. La France a reconnu l'indépendance et la souveraineté de Monaco le 2 février 1861 et le 17 juillet 1918. Elle avait du reste admis officiellement les droits souverains de la principauté dès le 14 septembre 1641. Le pays était né en 1297, avec la conquête du Château-Vieux par le premier des Grimaldi - de souche génoise mais du parti guelfe, partisan de la papauté - déguisé en moine franciscain. Dans l'article premier du traité de 1918, la France reconnaît en ces termes la souveraineté monégasque : « le Gouvernement de la République française assure à la principauté de Monaco la défense de son indépendance et de sa souveraineté et garantit l'intégrité de son territoire comme si ce territoire faisait partie de la France ». Depuis 1918, la France a reconnu bien d'autres souverainetés. Si nous appliquions la doctrine de notre collègue, il faudrait revoir notre copie à l'endroit de pays comme les Comores, qui ont accédé à l'indépendance alors qu'ils sont imparfaitement souverains. Il y aurait là matière à fonder une nouvelle approche des rapports internationaux, de nature à susciter bien des perturbations dans la Caraïbe et le Pacifique, zones de prolifération de ces « Etats croupions » dont l'existence scandalise sur les bancs de la diversité majoritaire. Faut-il rayer les Maldives, qui n'ont pas d'eau potable et risquent d'être submergées par la montée des océans, des atlas diplomatiques, ou les aider à surmonter ce drame écologique ? Les relations franco-monégasques sont certes particulières, et le traité d'amitié et de coopération mérite d'être actualisé. Mais il serait inacceptable sur le terrain des principes, comme du droit international, de nier au peuple monégasque - qui existe et vote démocratiquement - comme à Monaco, membre des Nations unies, d'exercer une souveraineté plus effective. Le traité qui nous est proposé est un compromis acceptable. Nos collègues Vincent Peillon et Arnaud Montebourg avaient lancé sous la législature précédente un appel à la vigilance fiscale, concernant Monaco et d'autres Etats, qu'ils soient « d'opérette » - comme le dit notre collègue avec une absence de courtoisie dont il porte seul la responsabilité - ou plus respectables par leur superficie, leur population ou leur capacité à consommer une eau authentiquement nationale... Heureusement, la convention fiscale qui est également soumise à notre approbation a repris certaines de leurs suggestions, en particulier l'assujettissement des résidents français à l'ISF. Le monde est bousculé par de graves événement qui violent les principes universels de paix et de droit. L'Ukraine est en crise ; les Irakiens seraient paraît-il en état de voter le 30 janvier prochain - que l'on me permette d'en douter et de m'étonner du consentement silencieux de la France ; nos armées ont fait feu de tout bois en Côte d'Ivoire dans des conditions conduisant le groupe socialiste à demander la constitution d'une commission d'enquête ; les bruits de sabre s'accumulent aux confins de la République démocratique du Congo ; la paix est toujours en suspens au Proche-Orient ; les autorités soudanaises n'en finissent plus de provoquer des drames comme celui du Darfour ; une guerre civile ignorée des médias déchire le Népal, une autre s'amorce au sud de la Thaïlande. Ailleurs, à l'exception obscène de l'Irak, les pays handicapés par leur dette sont sommés de payer rubis sur l'ongle. Le monde nous interpelle. Evitons donc autant que possible les débats « croupions ». La commission des affaires étrangères a consacré trois réunions aux relations de la France avec Monaco. Le groupe socialiste rappelle au Gouvernement les exigences internationales du moment, et lance à la représentation nationale un appel à la raison et aux priorités du monde. Cela ne l'empêchera pas d'approuver sans réticence ces textes. M. Claude Gatignol - Ces deux projets de loi s'inscrivent dans un mouvement général de modernisation des relations entre la Principauté de Monaco et la France. Le premier autorise la ratification du traité d'amitié et de coopération signé le 24 octobre 2002, qui a vocation à remplacer le traité du 17 juillet 1918. Le second concerne l'avenant à la convention fiscale du 18 mai 1963 : il découle du nouveau traité d'amitié, qui prévoit la signature de conventions particulières dans plusieurs domaines. Le traité d'origine n'étant plus adapté aux réalités d'aujourd'hui, le nouveau traité répond à un souhait maintes fois renouvelé de la Principauté, en lui conférant une plus grande autonomie et en renforçant les éléments de sa souveraineté, dans le respect des intérêts fondamentaux de la République française. Le renforcement de l'autorité de la Principauté passe par la concertation bilatérale dans les domaines essentiels - politique, économique, de la sécurité, de la défense et des relations internationales. La commission de coopération franco-monégasque, qui remplacera la commission mixte franco-monégasque, en sera le lieu privilégié. Elle se réunira une fois par an, alternativement à Paris et à Monaco. La signature du nouveau traité d'amitié et de coopération a été assortie d'une obligation de révision des relations bilatérales, afin de mieux garantir les intérêts fondamentaux de notre pays. C'est pourquoi l'avenant à la convention fiscale du 18 mai 1963 était nécessaire : l'objectif visé est de considérer les 8 000 citoyens français résidant à Monaco comme des contribuables français de droit commun. D'autres domaines feront l'objet de conventions. Un groupe de travail bilatéral chargé de la mise à niveau de la législation financière applicable à Monaco a été constitué en mars 2003. Mais la question du contrôle et des sanctions des pratiques des établissements installés à Monaco n'a pas encore trouvé de solution, ce qui bloque la conclusion de l'accord. Toutes les questions ne sont pas résolues non plus dans le domaine de l'entraide judiciaire pénale, même si des négociations ont eu lieu depuis 2003. La coopération administrative est un autre dossier important : il s'agit de permettre aux Monégasques, à l'instar des Andorrans, d'accéder à la fonction publique française dans les mêmes conditions que les ressortissants des pays membres de l'Union européenne. Les négociations sont en cours et le texte de la convention est arrêté. Je partage avec mon collègue rapporteur l'espoir de voir les relations franco-monégasques évoluer dans d'autres secteurs, comme le domaine social ou celui de la répartition des compétences entre collectivités locales limitrophes. Dans la perspective des conventions à venir, le groupe UMP est donc tout à fait favorable à la modernisation des relations entre Monaco et notre pays. Il votera ces deux projets de loi. M. Yves Coussain - Très bien. La discussion générale est close. L'article unique du projet de loi autorisant la ratification du traité de coopération entre la France et la Principauté de Monaco, mis aux voix, est adopté. L'article unique du projet de loi autorisant l'approbation de l'avenant à la convention fiscale entre la France et la Principauté de Monaco, mis aux voix, est adopté. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi adopté par le Sénat relatif à la protection des inventions biotechnologiques. M. Patrick Devedjian, ministre délégué à l'industrie - Le projet de loi qui vous est soumis aujourd'hui a pour objet de parachever la transposition en droit interne de la directive du 6 juillet 1998 relative à la protection juridique des inventions biotechnologiques. Les questions de brevetabilité du vivant ont déjà fait l'objet de réflexions approfondies ici même, notamment au sein de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et techniques, et bien sûr aussi lors des débats, très riches, sur la loi du 6 août 2004 relative à la bioéthique, qui a transposé dans le code de la propriété intellectuelle les articles 5 et 6 de la directive, concernant le corps humain et ses éléments. En adoptant le présent projet, vous achèverez ce processus de transposition. Il y a urgence, puisque la directive aurait dû être transposée depuis le 30 juillet 2000 et que la France a été condamnée pour défaut de transposition par la Cour de justice des communautés européennes le 1er juillet 2004. Soucieux de ne pas différer plus longtemps cette mise en conformité de notre droit interne avec les règles communautaires, le Gouvernement vous présente le texte qui avait été préparé sous la dernière législature - et salue le travail accompli par la commission des affaires économiques et par son rapporteur, M. Gatignol. Le domaine des biotechnologies représente l'un des principaux champs de découverte et d'innovation qui s'ouvrent au génie humain en ce début du XXIe siècle. Il regroupe l'ensemble des méthodes et des techniques qui permettent aux hommes de découvrir de nouveaux développements des organismes vivants, y compris les microorganismes. Les biotechnologies interviennent dans des domaines très divers. La santé, tout d'abord : de nouvelles thérapies, la thérapie génique, les médicaments mais aussi les diagnostics sont concernés. Il y a là évidemment un enjeu majeur, notamment pour la lutte contre les grandes épidémies et endémies. Les biotechnologies rendent possible la création de produits inédits, inconcevables sans leur intervention, par exemple l'EPO pour le traitement de certaines anémies. L'agriculture peut également en bénéficier, par exemple pour améliorer les rendements ou lutter contre les parasites. Dans l'agroalimentaire, elles permettent d'améliorer la qualité. Autre domaine d'élection : la protection de l'environnement Les enzymes introduites dans les lessives permettent par exemple de laver le linge à basse température, sans ajouter de phosphates, ce qui réduit la consommation d'énergie et la pollution. Les biotechnologies sont également utiles pour résoudre de nombreux problèmes de détection et de traçabilité. Le génie génétique est notamment utilisé dans le cadre de la répression des fraudes, de la recherche de paternité, de la police scientifique ou encore de la lutte contre le terrorisme. Ce secteur aux applications si diverses regroupe en France des grands laboratoires publics, des groupes importants ainsi que des petites entreprises privées. Environ la moitié de ces dernières ont moins de six ans et emploient moins de dix salariés. 61% des entreprises européennes de biotechnologies travaillent en priorité pour la santé, 32% pour l'agriculture, l'agroalimentaire et la santé animale et 7% pour l'environnement. La recherche y joue évidemment un rôle prépondérant. Pourtant, et c'est tout l'enjeu du débat qui nous réunit aujourd'hui, dans ce domaine essentiel, les pays européens ont pris du retard par rapport aux Etats-Unis et au Japon, faute d'une approche juridique harmonisée. La protection juridique assurée par les brevets est essentielle pour le développement de ce secteur. La brevetabilité de la matière vivante n'est d'ailleurs pas une nouveauté : dès 1873, Louis Pasteur obtenait un brevet pour une levure exempte de germes pathogènes destinée à l'industrie de la brasserie. Je crois utile de rappeler que le système des brevets participe à l'innovation de deux manières. D'abord, le brevet assure, pendant une période de temps limitée mais suffisamment longue, la reconnaissance d'un monopole au profit de l'inventeur. Cela permet de rentabiliser les dépenses de recherche-développement réalisées pour parvenir à l'invention brevetée. Mais le brevet assure seulement un droit exclusif d'exploitation d'une invention, et non un droit de propriété sur un produit, qui reste accessible. En récompensant l'inventeur pour son œuvre créatrice, le système de protection par le brevet a essentiellement pour but d'encourager l'innovation technique. Il permet d'attirer l'investissement vers la recherche-développement et l'exploitation industrielle de ses résultats. Le brevet assure ensuite une progression rapide des connaissances. En contrepartie du monopole temporaire qu'il octroie, le dépôt d'un brevet implique en effet obligatoirement la divulgation de l'invention et sa publication par les offices de brevet - en France, l'Institut national de la propriété industrielle, l'INPI. La documentation-brevets est la source d'information technologique internationale la plus complète, la plus systématique et la plus accessible : 80% de l'information scientifique et technique y est contenue. Le système des brevets assure ainsi l'éclosion de nouvelles inventions, elles-mêmes sources d'innovations futures. Contrairement à ce qui est parfois affirmé, le brevet ne fait donc obstacle ni à la diffusion de l'information scientifique et technique, ni aux progrès de la recherche. En transposant les principes issus de la directive, le projet de loi va rendre effective en droit interne cette nécessaire protection juridique des inventions biotechnologiques La directive a défini des règles communes aux Etats membres dans ce secteur d'avenir. Elle est fondée sur le constat que l'extension de la brevetabilité aux inventions impliquant une matière biologique est nécessaire pour protéger la propriété intellectuelle. Dans cette perspective, elle précise les conditions et les limites dans lesquelles la protection par un brevet peut être obtenue pour des inventions portant sur la matière biologique. Je veux rappeler que ce texte a été adopté par le Parlement européen et par le Conseil à l'issue de négociations longues et complexes, après l'échec d'une première proposition de directive sur ce sujet en mars 1995. Il constitue désormais un compromis équilibré entre les considérations économiques, éthiques et de société. La directive comporte plusieurs garanties éthiques, notamment en excluant de la brevetabilité tout ce qui n'est qu'une découverte de l'existant naturel et ne fait donc pas appel à l'inventivité technique. Son article 3-1 précise que « sont brevetables les inventions nouvelles, impliquant une activité inventive et susceptibles d'application industrielle, même lorsqu'elles portent sur un produit composé de matière biologique ou en contenant, ou sur un procédé permettant de produire, de traiter ou d'utiliser de la matière biologique. » Sont exclus de la brevetabilité, outre le corps humain, les variétés végétales et les races animales. Non brevetables en tant que telles, les variétés végétales sont couvertes par le régime communautaire de protection des obtentions végétales. La directive comporte des garanties spécifiques concernant le corps humain : elles ont été largement débattues par l'Assemblée nationale dans le cadre de la loi du 6 août 2004 relative à la bioéthique. Enfin, la directive prévoit des évaluations périodiques. Pour les inventeurs, les déposants, et les entreprises, elle met un terme à l'incertitude juridique résultant des divergences entre les législations et les pratiques nationales mais aussi internationales. Les déposants ne pouvaient en effet pas toujours déterminer avec certitude si leurs inventions étaient ou non susceptibles d'être brevetées. D'autre part, l'absence de règles confirmées pouvait les faire hésiter sur la portée susceptible d'être reconnue au titre délivré. Après la transposition, les scientifiques et les industriels européens bénéficieront d'une sécurité juridique accrue et pourront bâtir une stratégie de propriété industrielle à plus long terme, donc investir dans les technologies innovantes. Le présent projet transpose fidèlement les principes issus de la directive. Il s'insère, tout comme la directive, dans le cadre constitué par le droit des brevets. Il applique notamment au domaine des biotechnologies le principe selon lequel le brevet ne protège que les inventions, c'est-à-dire des solutions techniques à des problèmes techniques, et en aucun cas les simples découvertes. Les conditions d'activité inventive et d'application industrielle garantissent que la matière dans son environnement naturel ne sera pas brevetée. Dans ce cadre clairement établi, le projet de loi poursuit trois objectifs : protéger les inventions portant sur la matière biologique, sous réserve des exclusions liées à l'ordre public, et en déterminer les conditions, la portée et les limites ; assurer le respect des règles protégeant la vie animale et végétale, notamment en conciliant la non brevetabilité des races animales et des variétés végétales avec la brevetabilité d'inventions issues d'une intervention technique de l'homme ; organiser les relations entre les titulaires de brevets et, d'une part, les agriculteurs ou éleveurs acquéreurs de matériel biologique couvert par des brevets, d'autre part, les titulaires de droits sur les obtentions végétales. Je veux brièvement revenir sur les modifications apportées par le Sénat, avec l'accord du Gouvernement. Le Sénat a assuré les coordinations nécessaires entre ce projet de loi et les dispositions de la loi du 6 août 2004 relative à la bioéthique. Il a par ailleurs souhaité modifier certaines rédactions afin d'assurer une transposition plus fidèle de la directive. Sur tous ces points, je remercie M. Gatignol d'avoir fourni dans son rapport des explications très complètes. Le Sénat, enfin, a veillé à concilier le droit des brevets et celui des obtentions végétales, pour répondre aux intérêts de notre filière semencière. En effet les variétés végétales sont actuellement protégées soit par un certificat d'obtention végétale, soit par un brevet lorsqu'elles incorporent un gène servant de support à une invention qui a été brevetée. Une exception à la protection par un COV permet aux agriculteurs d'utiliser sur leur exploitation et pour leurs besoins des semences de ferme : c'est le privilège de l'agriculteur. Une seconde exception limite le droit de l'obtenteur pour les actes accomplis aux fins de création de nouvelles variétés : c'est le privilège du sélectionneur. Or la directive que nous transposons intègre le privilège de l'agriculteur, mais pas celui du sélectionneur, sans non plus le prohiber formellement. De plus, la directive ne porte pas sur l'exemption pour la recherche qui permet d'utiliser une invention brevetée à des fins de recherche, cette exemption n'ayant pas encore donné lieu à une harmonisation communautaire. Aussi le Sénat a-t-il précisé le champ exact de cette exemption en visant les « actes accomplis en vue de créer ou de découvrir et de développer d'autres variétés végétales ». Ainsi, le droit qui s'attache au brevet comme au COV sera préservé s'agissant de la commercialisation, au cas où la variété nouvelle incorpore la caractéristique brevetée. Ainsi précisé, l'ensemble du dispositif établit un équilibre entre les droits des brevetés et ceux du domaine public, ce qui rassurera le citoyen tout en satisfaisant aux besoins de l'industrie et de la recherche . Son adoption mettra définitivement notre pays en accord avec ses obligations communautaires. Il y a urgence (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) . M. Claude Gatignol, rapporteur de la commission des affaires économiques - Les nouvelles technologies ne sont pas seulement celles de l'information. Des progrès tout aussi rapides affectent la biologie moléculaire. Les biotechnologies dont vous avez eu raison, Monsieur le ministre, de souligner l'importance, fonctionnent comme un accélérateur de la nature, et à ce sujet, il serait bien utile de créer un conservatoire des espèces, pour préserver la richesse du capital vivant. Les changements qu'elles apportent s'appliquent tout particulièrement au domaine de la santé, avec la thérapie génique. Les récentes communications issues des laboratoires du Génopole ouvrent ainsi de grands espoirs pour lutter contre la maladie dégénérative de Duchêne. Ces changements concernent également l'environnement. Ainsi, en 1980, l'arrêt « Diamond-Ananda Chakrabarty » de la Cour suprême des Etats-Unis a déclanché le processus de mise à niveau du droit des brevets pour faire place aux biotechnologies. En 1987, une huître a reçu un brevet puis, l'année suivante, une souris transgénique, souche de la fameuse lignée « MYC Mouse ». Le texte que nous examinons modifie le code de la propriété intellectuelle afin d'adapter les conditions de la brevetabilité du vivant. La question n'est pas nouvelle, puisque, en 1873, Pasteur avait obtenu un brevet pour une levure exempte de germes pathogènes destinée à la brasserie. L'enjeu économique était déjà présent. Mais les progrès récents du génie génétique ont repoussé les frontières du débat sur les conditions dans lesquelles un brevet peut porter sur la matière vivante, alors que nous en sommes toujours, en France, depuis la loi de 1978, à la prise en compte des micro-organismes. Il importait donc de lever les incertitudes juridiques pesant sur la protection des inventions biotechnologiques, d'une part au regard de l'éthique, puisque le droit des brevets, depuis toujours, s'arrête à la frontière de ce qui est considéré comme sacré, d'autre part au regard du droit international, puisque tout retard dans le régime de protection juridique pourrait pénaliser nos inventeurs par rapport à des concurrents étrangers mieux protégés. Cette mise à niveau des conditions de brevetabilité du vivant est déjà bien engagée, d'abord par la directive de 1998 qui transpose au niveau communautaire l'accord de l'OMC de 1994 relatif aux aspects des droits de propriété intellectuelle touchant au commerce, ensuite par la loi du 6 août 2004 relative à la bioéthique, qui a tranché les questions relatives à la brevetabilité des inventions génétiques relatives au corps humain, en transposant simultanément les parties de la directive de 1998 portant sur ce sujet. Le présent projet permet de parachever ce travail en réglant les questions de brevetabilité pour les invention génétiques relatives aux animaux et aux végétaux. Parmi toutes ses dispositions, la principale innovation se trouve dans l'institution du privilège du sélectionneur qui, même si elle n'a pas été prévue par la directive, répond à la préoccupation de semenciers français face aux stratégies d'accaparement des ressources végétales menées par les grands groupes américains. Ce faisant, nous procédons au même choix que l'Allemagne. La commission a relevé que le texte élargit le droit de la brevetabilité davantage aux végétaux qu'aux animaux, parce que les premiers bénéficient depuis 1961 du régime juridique international des COV, qui n'a pas d'équivalent pour les seconds. Il est donc logique d'étendre ce régime aux végétaux incorporant des inventions biotechnologiques, sans qu'il y ait lieu de faire de même pour les animaux. Voilà qui permet du reste de concilier au mieux le respect du sacré avec l'exploitation des potentialités des biotechnologies, en utilisant la récente découverte qu'une partie du capital génétique est commun aux trois genres. L'extension de la brevetabilité de la recherche sur les végétaux a permis de produire de l'insuline ou des composants du sang d'origine végétale. Ces outils médicaux nouveaux respectent pleinement la dignité de la personne humaine et écartent les risques de transmission de la maladie. Nous nous sommes également interrogés sur les marges d'appréciation laissées à l'institut national de la propriété intellectuelle et en aval au juge civil dans l'application des dispositions relatives à la brevetabilité du vivant. De fait, le projet, conformément à la directive, ouvre des marges d'appréciation, à l'occasion de formules comme l'« utilité médicale substantielle » pour la brevetabilité des procédés de modification génétique des animaux, ou l'« intérêt économique considérable » pour justifier le recours à la procédure d'octroi par le juge d'une licence « obligatoire ». Il est donc légitime que le législateur encadre correctement les conditions d'application des dispositions qu'il met en place mais il convient aussi de se rendre compte qu'encourager une attitude excessivement fermée risque d'avoir un impact négatif pour les acteurs économiques nationaux dans un contexte où d'autres pays font preuve de plus de souplesse. Ainsi les Etats-Unis confondent-ils « invention » et « découverte » dans l'appréciation de ce qui est brevetable, ce qui favorise les stratégies d'accaparement des ressources biotechnologiques. En la matière, le choix fait par le Sénat de mettre en œuvre toute la directive mais rien que la directive relève non seulement de la conformité au droit européen mais également d'une saine prudence. La troisième question que je souhaite aborder concerne la protection contre la dissémination des plantes génétiquement modifiées. Une mission commune d'information présidée par Jean-Yves Le Déaut est en cours sur les « conséquences environnementales et sanitaires des autorisations d'essais d'OGM ». Il semble désormais acquis que le contenu du projet sur les OGM sera subordonné à ses conclusions. Faisons donc confiance à nos collègues pour trouver la meilleure solution juridique à cette question sans nous précipiter sur des amendements trop hâtifs, d'autant plus que deux directives européennes traitent de ce sujet. Je me félicite du travail de notre collègue sénateur Jean Bizet quant au texte qui nous préoccupe car il a su parfaitement le coordonner avec les acquis législatifs de la loi relative à la bioéthique d'août dernier mais également le rendre plus conforme à la directive sur des points délicats et même en améliorer la qualité rédactionnelle. Mes commentaires, dans le rapport, visent à préciser quelques ultimes points rédactionnels méritant des éclaircissements complémentaires. La complexité du sujet justifie en effet qu'un soin particulier soit apporté à ces commentaires puisqu'ils pourraient orienter la décision d'un juge se trouvant dans la nécessité de se référer aux travaux parlementaires pour l'interprétation de la loi. Je souligne enfin qu'il s'agit d'un dispositif législatif consensuel puisqu'il se fonde sur des analyses du rapport de décembre 2001 écrit au nom de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques sur « la brevetabilité du vivant » de notre collègue Alain Claeys et qu'il s'appuie sur le texte initialement mis au point par le gouvernement précédent. En outre, la condamnation de la France le 1er juillet dernier par la Cour de justice des communautés européennes pour non-transposition de la directive - transposition qui aurait dû intervenir avant le 30 juillet 2000 - ainsi que l'engagement par la Commission européenne, le 5 octobre dernier, d'une procédure d'astreintes financières, militent fortement pour une rapide adoption définitive du texte. Toutes les conditions étant réunies pour répondre à cette situation d'urgence décisionnelle, j'invite l'ensemble de mes collègues à s'accorder sur un vote conforme du texte transmis par le Sénat. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) M. le Président - Nous en venons à la discussion générale. M. Jean-Yves Le Déaut - Je souligne la qualité des rapports de MM. Bizet et Gatignol mais également la qualité du rapport initial de M. Pastor. En juillet 2003, la Commission européenne a décidé de saisir la Cour de justice européenne à l'encontre de huit pays, dont la France, pour ne pas avoir transposé la directive de 1998. Nous avons été condamnés le 1er juillet 2004, ce qui contribue à expliquer sans doute notre discussion. Les biotechnologies constituent un enjeu scientifique et économique. La plupart des médicaments nouveaux en sont aujourd'hui issus - en 2004, 20 molécules sur 34. Leur apport est également considérable dans le domaine agricole avec les biotechnologies végétales et ce sera le cas dans le domaine environnemental afin de dépolluer les sols ou d'améliorer la qualité de l'air et des eaux. Dans son édition d'aujourd'hui, un grand journal du soir affirme que les biotechnologies se « refont une santé » en citant l'indicateur des fonds de capital risque investis. Je ne suis pas aussi optimiste car il existe un fossé technologique important entre la France, les Etats-Unis et le Japon. En cinq ans, le National Institutes of Health a doublé son budget, avec une augmentation, en 2003, de 3,7 milliards de dollars, soit huit fois le budget de l'INSERM. En outre, les fusions qui ont eu lieu dans le domaine de la pharmacie, que ce soit en France avec Aventis ou en Suisse avec Novartis, ont entraîné la disparition de pans entiers de la recherche. Enfin, la fuite des cerveaux vers les Etats-Unis se poursuit, car nous n'avons pas su traiter de façon globale les questions liées aux biotechnologies non plus que celles liées à la propriété intellectuelle. Deux rapports récents montrent que la France et l'Europe ont perdu le contrôle de technologies essentielles. Certes, il n'est pas trop tard pour réagir et je ferai quelques propositions dans le cadre d'un rapport que je présenterai en janvier 2005. Cette situation s'explique sans aucun doute par la faiblesse des crédits publics. Certains considèrent que les deux tiers des crédits de la recherche doivent provenir du secteur privé mais un tel financement sera impossible si la plupart des centres de recherches partent à l'étranger et en particulier aux Etats-Unis. Nous devrons en outre faire face à une concurrence accru de la Chine et d'autres pays émergents. Je salue l'initiative du Président Debré qui nous a demandé de réfléchir sur un texte qui associe majorité et opposition. Je regrette néanmoins que ce projet soit présenté un peu à la sauvette. Des points majeurs doivent encore être discutés de manière approfondie, je pense en particulier à la clarification des notions de découverte et d'invention dans le domaine des biotechnologies. Concernant les brevets, les différences sont considérables entre le Japon, les Etats-Unis et l'Europe : sur plus de 48 000 brevets demandés au Japon entre 1991 et 2000, 15 500 provenaient des Etats-Unis et seulement 9 000 de l'Europe ; les sorties en direction des Etats-Unis étaient sur la même période de 3 600 et de 4 600 vers l'Europe. Sur 42 283 brevets demandés aux Etats-Unis, 3 676 provenaient du Japon et 7 455 de l'Europe. Depuis le début des années 1990, la prédominance des Etats-Unis en matière de brevets n'a cessé de s'affirmer, et leur avance ne cesse de se creuser. De même, il y a tout lieu de regretter que les demandes de brevets émanant des petites sociétés de type start up soient considérablement plus faibles en Europe qu'aux Etats-Unis ou au Japon. Le temps me manque pour rouvrir le débat entre « découverte » et « invention industrielle ». Je me bornerai à dire que si l'intitulé du texte est rassurant, son contenu n'offre pas de garanties supplémentaires. S'agissant de la brevetabilité des gènes, j'appelle l'attention sur le risque qui s'attache à croire qu'à un gène n'est associée qu'une fonction. La génomique nous enseigne que plusieurs fonctions peuvent être associées à un seul gène. Déposer des brevets à la pelle sur une multitudes de gènes peut donc conduire indirectement à breveter des fonctions virtuelles. L'article premier du projet semble poser quelques garde-fous, mais la transposition en droit interne de la directive européenne n'épuise pas le sujet. Je ne me sens pas autorisé à considérer que le débat est clos et je demande au Gouvernement des explications sur la manière dont il envisage l'association entre gène et fonctions dans la démarche de brevetabilité. Il importe surtout qu'on ne croie pas - compte tenu de l'immense complexité de la machinerie cellulaire - qu'à un gène ne correspond qu'une fonction. Il conviendrait aussi de préciser le régime d'exemption de brevet de certaines activités de recherche. Nous avons en mémoire l'exemple de cette firme américaine qui, ayant breveté un gène utilisé dans la détection du cancer du sein, a prétendu interdire à l'institut Curie de travailler sur ce gène, en revendiquant l'exclusivité de son exploration. Il faut éviter que le dépôt d'un brevet en amont ne bloque toute la recherche en aval. Je me félicite de l'introduction - à l'initiative du sénateur Bizet - du privilège du sélectionneur. Sa reconnaissance constitue en effet une avancée majeure. Il sera également indispensable de bien distinguer le droit du brevet et celui du certificat d'obtention végétale, de manière à prévenir les pratiques abusives de certains grands groupes - je pense notamment à certaines grosses sociétés de semences américaines. Il y a tout lieu de se féliciter que le texte envisage la protection de toutes les générations successives et maintienne le privilège de l'agriculteur, même si tous les risques associés ne sont pas pris en compte... M. le Président - Il faut conclure. M. Jean-Yves Le Déaut - Nous souhaitons enfin que le régime des licences obligatoires soit conforté. Monsieur le ministre, ce texte apporte un mieux et nous sommes en accord avec plusieurs de ses dispositions. Puissent cependant les questions que j'ai rapidement évoquées faire l'objet d'une attention particulière, qu'il s'agisse des chevauchements de protection, des freins que les brevets peuvent opposer à l'avancée technologique ou de la capacité d'expertise de nos organismes publics en matière de brevetabilité. Bien que ce projet de transposition n'aille pas au fond des choses, le groupe socialiste le votera, tout en attendant du Gouvernement des réponses claires aux différentes réserves qu'il a émises. Mme Nathalie Kosciusko-Morizet - Nous sommes invités à compléter le dispositif de protection des inventions biotechnologiques. Le texte parachève la transposition de la directive 98-44, déjà partiellement transposée pour ce qui concerne les dispositions relatives au génome humain. Nous discutons donc aujourd'hui de celles relatives aux domaines végétal et animal. Ce travail répond à un impératif juridique communautaire, puisque nous accusons plus de quatre ans de retard dans la transposition de la directive. Nous remplissons aussi un objectif de mise en sécurité juridique et de respect éthique. Le domaine était en effet régi par la seule loi de 1978, devenue très inadaptée en ce qu'elle confiait au juge le soin de fixer les limites, ce qui revenait à les soumettre à d'éventuels revirements de jurisprudence. Nous répondons enfin à un impératif d'ordre économique, dans la mesure où l'on peut considérer que la non-transposition n'est pas pour rien dans le retard européen dans le secteur des biotechnologies. Cette transposition est d'autant plus urgente que la science avance vite dans ces matières. Depuis 2000, nous sommes en effet entrés dans l'ère du post-séquençage, et le génome est exploité en de multiples domaines. Le texte qui nous est proposé respecte parfaitement l'esprit de la directive. Il concilie efficacement respect de l'éthique et exigence de sécurité juridique. Il permet à la fois de protéger les inventions biotechnologiques et de définir des règles de protection de la vie animale et végétale. Il est important, comme l'a souligné tout à l'heure M. Le Déaut, de bien associer le gène à la fonction. L'article 6 répond à cette exigence, surtout après l'amendement adopté par le Sénat précisant que « la fonction que doit exercer le gène dans la matière protégée est celle indiquée dans la demande du brevet ». J'attends toutefois de la part du ministre des éclaircissements sur ce point. S'agissant de la protection de la vie animale et végétale, je tiens à souligner le travail remarquable du Sénat, en particulier de son rapporteur, M. Bizet. Dans sa grande sagesse, la Haute assemblée a en effet étendu aux sélectionneurs le privilège qui existe pour les agriculteurs et les éleveurs, - principe qui participe de l'économie et de la philosophie de toute une filière, et que nous avons toujours défendu dans toutes les instances internationales, en particulier depuis l'adoption en 1994 à l'OMC de l'accord relatif à la propriété intellectuelle. Cela garantit la liberté d'utilisation des variétés végétales protégées à des fins de créations variétales. Enfin, ce texte n'interfère en rien avec les travaux de la mission parlementaire sur les OGM. C'eût été malvenu tant que la mission n'a pas terminé ses travaux. Il n'en est rien. C'est pourquoi le groupe UMP votera ce texte sans arrière-pensée et avec le sentiment de faire œuvre utile. M. Jean-Claude Lefort - Nous voici donc aujourd'hui la dernière phase de la transposition de la directive européenne 98-44 du 6 juillet 1998. Qu'il ait fallu six ans montre combien cette directive, qui touche à des aspects fondamentaux de notre civilisation même, fait l'objet de vives controverses ! En 2001, j'avais déposé un amendement tendant à interdire absolument toute brevetabilité du vivant, quel qu'il soit. Ayant obtenu des garanties concernant le végétal et l'animal, j'acceptais finalement de ne pas y faire référence, ce qui permit à mon amendement d'être adopté à l'unanimité. Hélas, en août 2004, la loi dite Mattei revenait sur ce vote, et partant, sur la distinction parfaitement claire que mon amendement avait contribué à souligner entre découverte et invention. La découverte, par exemple celle de la séquence d'un gène, ne peut par essence être brevetable. Tout ce qui existe naturellement ne peut appartenir à quelques-uns, dans la mesure où cela appartient à tous. Tout ne peut être marchandise. C'est pourtant le choix contraire que fit M. Mattei en 2004, oublieux de ses positions de 2001, où il avait voté mon amendement ! Dès lors, un doigt était mis dans l'engrenage, et voilà que l'on nous propose maintenant d'y mettre le bras tout entier ! Pour notre part, nous restons, comme en 2001, résolument opposés à toute brevetabilité du vivant, quel qu'il soit. Notre opposition est d'autant plus forte qu'avec l'accord de Monsanto, la distinction absolue entre découverte et invention ne semble plus aussi nette. M. Mattéi avait expliqué, pour faire adopter son texte, que seule la technologie, et non la biologie, pouvait être brevetée. Nous avions à l'époque exprimé les plus grandes inquiétudes et nous avions raison, car il apparaît bien aujourd'hui que la technologie brevetable, telle que conçue par M. Mattéi, inclut bien le gène et que, dès lors, l'humain est devenu brevetable. Nous ne pouvons, Monsieur le rapporteur, être d'accord. Il est indispensable de renégocier la directive, et cela est possible. D'ailleurs, seuls neuf Etat membres sur les vingt-cinq et maintenant quinze sur les vingt-cinq l'ont transposée. Le Sénat a proposé des amendements qui ont été repris, mais ils n'ont aucune chance d'être in fine intégrés au texte, puisque, pour avoir une portée juridique, il faudrait qu'ils soient acceptés par tous les Etats membres. Seul mon amendement interdisant toute brevetabilité du vivant, adopté à l'unanimité par notre Assemblée, aurait une portée, sinon juridique, du moins politique. Le Sénat avance comme argument qu'il nous faudrait harmoniser notre législation avec celle des Etats-Unis. Etrange argument ! L'Europe n'a pas à calquer ses décisions sur celles prises outre-Atlantique, et heureusement d'ailleurs qu'elle ne le fait pas en tous domaines ! L'argument selon lequel il faudrait transposer rapidement cette directive ne tient pas davantage. Chacun voit bien les profits considérables à la clé de ces brevets sur le vivant. Mais en quoi la somme de quelques intérêts particuliers constituerait-elle l'expression de l'intérêt général ? Qui osera assumer cette approche purement mercantile ? Puisque la question du génome humain est réglée, nous pouvons avancer sur le reste de manière consensuelle, nous dites-vous, Monsieur le rapporteur. Eh bien, nous ne sommes pas d'accord. Je le redis, nous sommes opposés à toute brevetabilité du vivant, quel qu'il soit. Or, l'article 611-19-2, relatif à la matière biologique animale et végétale, institue bien un brevet global sur le vivant. Si l'on vous suivait, les agriculteurs se trouveraient demain sous le joug des semenciers pour des produits dont l'innocuité n'est d'ailleurs pas établie. Il est surprenant d'ailleurs que nous débattions de ce texte alors que le Président de la République en personne a dit la nécessité d'une loi sur les OGM. Enfin, la transposition de cette directive ouvre plus grand encore la porte au bio-piratage de leur flore, de leur faune, de leurs savoirs ancestraux, quand ce n'est pas de leur propre tissu humain, dont sont victimes nombre de peuples du Sud. Pourquoi s'enorgueillir de suivre les Etats-Unis dans cette voie honteuse ? L'argent pour l'argent anéantit tout, y compris la morale. En vérité, derrière tout cela, s'affrontent deux conceptions : celle de l'argent roi qui triomphe de tout, au mépris de l'intérêt général, et celle de l'homme qui domine cette logique aveugle, pour servir l'intérêt général. Vous avez choisi la première, nous la seconde. C'est pourquoi, souhaitant marquer par là l'exception française, comme il en existe une dans le domaine culturel, je déposerai de nouveau mon amendement de 2001, en l'étendant à l'ensemble du règne animal et végétal. Chacun jugera, d'après nos votes, quelle conception, les uns et les autres, nous avons du monde. Doit-il être marchand ou humain ? Telle est la question qui nous est posée aujourd'hui. La discussion générale est close. M. Jean-Yves Le Déaut - Puisque l'article 2 a été supprimé par le Sénat pour être introduit dans la loi sur la bioéthique, notre collègue Brottes a déposé cet amendement 1 qui vise à insérer la précision suivante : « La présente loi respecte les principes de gratuité, de bénévolat qui peuvent notamment servir au développement des inventions biotechnologiques ». Il s'agit de rappeler que le corps humain et les éléments qui en sont issus ne peuvent faire l'objet d'un quelconque commerce. M. le Rapporteur - La commission a examiné cet amendement dans le cadre de l'article 88. Cette précision n'est pas à sa place dans un texte qui vise les espèces animales et végétales et non le corps humain. En outre, l'article L. 617 du code de la propriété intellectuelle interdit de breveter des inventions qui ne seraient pas conformes à l'ordre public. Je vous renvoie aux articles 16-2, 16-6 et 16-8 du code civil. La loi du 6 août 2004 vous donne satisfaction. Vous pourriez peut-être retirer cet amendement. M. le Ministre - Même avis. Cet amendement est motivé par des préoccupations sérieuses, mais il est déjà satisfait par la loi sur la bioéthique, reprise dans le code civil : la non-patrimonialité est garantie aux articles 16-1 et 16-5, la gratuité du prélèvement à l'article 16-6 et l'anonymat des dons à l'article 16-8. M. Jean-Yves Le Déaut - L'amendement est retiré. L'article premier, mis au voix, est adopté. M. Jean-Yves Le Déaut - Des questions précises ont été posées au ministre. Sans attendre l'article 5, nous souhaitons des précisions sur la différence entre gènes et fonctions ainsi qu'entre découverte et invention. M. le Ministre - S'agissant des dépôts de brevet, il a été fait état de statistiques désespérantes. Je ne conteste pas ces chiffres, mais ils ne font que refléter les forces et les faiblesses des différentes économies et en particulier l'ampleur des efforts de recherche. S'il est vrai que 40% des brevets européens viennent des Etats-Unis, on retrouve cette proportion dans tous les secteurs et non dans les seules biotechnologies. En France, pour la première fois en dix ans, le nombre des dépôts a progressé de 3,5% en 2004, passant de 17 000 à 17 500. Sur la distinction entre gènes et fonctions, l'article 17 de la loi sur la bioéthique est clair. La simple découverte d'un élément du corps humain, y compris la séquence totale ou partielle d'un gène, ne peut constituer une invention brevetable. Seule l'est la fonction, c'est-à-dire l'application. Vous trouvez donc, dans la loi du 6 août 2004, la garantie que vous demandez. M. Jean-Yves Le Déaut - Certes, mais la loi sur la bioéthique ne concerne que le corps humain. Il n'est pas écrit que le gène d'une espèce végétale ou animale ne peut être breveté. En outre, qu'en est-il des brevets déjà déposés ? M. le Ministre - Je vous confirme que l'interdiction s'applique aux autres espèces que l'homme. M. le Président - Le Sénat a supprimé l'article 2. L'article 3, mis aux voix, est adopté, de même que l'article 4. M. Jean-Claude Lefort - Sur des questions de civilisation, on ne doit pas fuir ses responsabilités. Avant de défendre mon amendement, je veux rappeler que le droit européen prime sur le droit national. Toute transcription qui n'est pas fidèlement conforme est donc source de conflit. La Cour de justice des communautés européennes, quand elle sera saisie, donnera raison au droit européen. Je vous donne lecture de l'article 5 de la directive, qu'on nous demande de transcrire : « Un élément isolé du corps humain ou autrement produit par un procédé technique, y compris la séquence ou la séquence partielle d'un gène peut constituer une invention brevetable, même si la structure de cet élément est identique à celle d'un élément naturel. » Selon la directive européenne, le vivant est donc brevetable ! Mon amendement 2 vise à dire clairement qu'il ne peut l'être et j'étends cette interdiction aux espèces végétales et animales. Même le texte du Sénat autorise la brevetabilité du vivant, à partir du moment où il existe plusieurs variétés. Ce n'est pas acceptable. On ne doit pas pouvoir breveter la biologie, mais seulement la technique, qui ne procède que de l'invention. Si la différence fondamentale entre la découverte et l'invention n'est pas maintenue, tout peut devenir marchandise sur la planète. Ce n'est ni le vœu de mes collègues, ni le vôtre, Monsieur le ministre. Il faut donc adopter mon amendement. M. le Ministre délégué - Je suis convaincu de votre bonne foi, Monsieur Lefort. Mais l'article 5 de la directive a déjà été transposé par la loi bioéthique, dont vous ne contestez pas le texte. Vous estimez en revanche que celui-ci contrevient à la directive. Je vous ai lu l'article 17 de la loi, qui dispose clairement : « ne peuvent pas ». Je rappelle en outre que le Conseil constitutionnel a validé la loi bioéthique. Sans doute a-t-il interprété comme moi - brevetable par la fonction, et non pas en tant que tel - l'article 5 de la directive. Si vous aviez raison... M. Jean-Claude Lefort - J'ai raison ! M. le Ministre délégué - Peut-être... L'expérience m'a appris à professer la plus grande humilité à l'égard de la règle de droit. « Il n'est pas de tyran qui n'ait trouvé un juriste », disait Napoléon. Si vous aviez raison, Monsieur Lefort, la loi bioéthique ferait immanquablement l'objet d'un recours de la Commission européenne. Ce n'est pas le cas. M. le Rapporteur - La commission n'a pas été saisie de cet amendement. A titre personnel, j'observe cependant que la directive date de 1998. Or la recherche scientifique a progressé depuis cette date, notamment dans la découverte du génome et la connaissance des fonctions du gène. M. Lefort peut être rassuré : son amendement est satisfait. S'agissant de la brevetabilité du corps humain, j'ai la même interprétation que le ministre de l'article 17 de la loi bioéthique - qui a été validée par le Conseil constitutionnel et n'a fait l'objet d'aucun recours devant la Cour de justice des Communautés. L'article L.611-18 dispose bien que « le corps humain, etc, ne peuvent constituer des inventions brevetables ». L'article L.611-19 va dans le même sens - celui de la protection du génome - s'agissant de la brevetabilité des végétaux et des animaux. J'en arrive au troisième point de votre amendement. L'usage du mot « jamais » me semble dangereux dans un texte qui ouvre le droit à brevet : on risque de bloquer toute évolution de la recherche et d'introduire une confusion préjudiciable entre la mise à disposition de tous du génome et des éléments d'invention qui, eux, peuvent être protégés au titre de la propriété intellectuelle. Je vous suggère donc de retirer votre amendement, Monsieur Lefort. M. Jean-Yves Le Déaut - Le sujet est important. La loi du 6 août 2004 a bien distingué le gène et la fonction. Mais le texte ne dit pas clairement qu'il faut limiter la protection par brevet pour les séquences et les séquences partielles couplées aux applications. On peut considérer qu'une portion d'ADN peut être un médicament - c'est la thérapie génique - mais seulement à condition que personne n'aille breveter la totalité du génome bactérien, végétal, animal ou humain pour en devenir propriétaire. Sur le travail d'une machine qui séquence des gènes, nous sommes d'accord. Mais comment traite-t-on les brevets déjà déposés sur des séquences - j'ai parlé des brevets de Craig Venter - auprès de l'office américain des brevets ? Le gène est un langage, qui peut être décrypté par un code. Ce code donne une protéine, qui peut être un médicament. Imaginons que quelqu'un décrypte le gène et présume d'une fonction d'une protéine qu'il n'a pas découverte lui-même. Que se passe-t-il, sachant que la philosophie des offices américain, japonais et européen des brevets n'est pas la même ? J'estime pour ma part que la position européenne n'est pas suffisamment claire. Lorsqu'un gène et une fonction sont isolés pour en faire un médicament, on peut considérer qu'il y a une propriété intellectuelle. Le texte n'est pas clair. Je pense donc, à l'instar des Allemands, qu'il faut demander une renégociation de la directive de 1998, comme celle-ci le prévoit et à la lumière des procès qui ont déjà eu lieu. Il existe certes une trilatérale des trois grands offices, mais les questions que je pose sont de vraies questions. M. Jean-Claude Lefort - Le rapporteur nous explique que la directive de 1998 est dépassée, du fait des progrès de la recherche. Alors de deux choses l'une : ou bien elle est obsolète, et il faut la renégocier, ou bien elle n'est pas adaptée sur le fond, et il faut aussi la renégocier. Raison de plus si elle porte atteinte à des valeurs fondamentales ! Le contexte est favorable, puisque seuls quinze des vingt-cinq Etats de l'Union ont transposé la directive à ce jour. Je vais maintenant vous lire l'article L.613-2-2 tel qu'il ressort de la transposition : « la protection conférée par un brevet à un produit contenant une information génétique ou consistant en une information génétique s'étend à toute matière dans laquelle le produit est incorporé et dans laquelle l'information génétique est contenue. » On voit bien ici que nous ne respectons pas la césure entre découverte et invention ! Je ne suis évidemment pas contre les brevets, mais je ne veux pas que nous nous alignions sur la conception de cette hyper-puissance économique pour laquelle tout sur cette planète est marchandise. Puisque le rapporteur nous dit que la directive est obsolète... M. le Rapporteur - Je n'ai pas dit cela. M. Jean-Claude Lefort - ...et puisque la brevetabilité s'étend à toute matière... M. le Ministre délégué - Ne nous faites pas un procès à votre façon ! M. Jean-Claude Lefort - Je n'ai fait que lire le code. Laissez donc de côté votre tendance à la polémique ! M. le Ministre délégué - Alors, ne nous faites pas dire ce que nous n'avons pas dit ! M. Jean-Claude Lefort - La directive étant obsolète, conclusion logique des propos du rapporteur... M. le Rapporteur - Non. M. le Ministre délégué - Non. M. Jean-Claude Lefort - ...et le code nous disant jusqu'où va cette brevetabilité, je prétends qu'il ne faut pas transposer. Renégocions maintenant la directive ! Faisons ensemble cet acte politique fort consistant à ne pas s'aligner sur les thèses américaines ! Nous avons réussi à faire valoir l'exception française dans le domaine culturel, affirmons-la aussi dans le domaine des biotechnologies ! L'amendement 2, mis aux voix, n'est pas adopté. L'article 5, mis aux voix, est adopté. M. Jean-Yves Le Déaut - J'aimerais que le Gouvernement nous apporte quelques précisions sur l'article que vient de citer M. Lefort et qui me semble mal rédigé. Supposons que l'on incorpore dans un organisme, par des méthodes non génétiques, certains caractères, par exemple un gène de résistance à la sécheresse, et que l'on brevette le tout en certificats d'obtention végétale. S'il y a un brevet sur cette espèce transformée, on ne pourra plus l'utiliser sans licence, alors même que le gène peut déjà exister dans la même espèce, de manière naturelle. Comment va-t-on prouver que ce gène existait de manière naturelle ? Vous imaginez les contentieux. M. le Ministre délégué - Le gène ne peut pas être breveté. M. Jean-Yves Le Déaut - Si, à partir du moment où il a été incorporé dans une espèce. M. le Ministre délégué - Sa fonction, seulement ! M. Jean-Yves Le Déaut - Oui, mais si des espèces ont de manière naturelle cette même fonction, il y aura procès parce qu'il y aura eu brevet sur ce gène. Je crois donc qu'il aurait fallu mieux préciser les rapports entre droit des certificats d'obtention végétale et droit des brevets. J'aurais aimé aussi des précisions sur l'article L.612-2-3, notamment au regard de ce qui s'est passé au Canada. Comment un agriculteur pourra-t-il prouver qu'un gène est arrivé accidentellement - ce qui est tout à fait possible, on l'a vu - dans les semences qu'il utilise ? On lui fera un procès pour contrefaçon et ce sera le combat de David contre Goliath ! M. Jean-Claude Lefort - Le ministre nous dit que ce n'est pas le gène qui est breveté. Permettez-moi donc de lui lire le deuxième paragraphe de l'article L.611-18 : « seule une invention constituant l'application technique d'une fonction d'un élément du corps humain peut être protégée par brevet. Cette protection ne couvre l'élément du corps humain que dans la mesure nécessaire à la réalisation et à l'exploitation de cette application particulière. » Il est bien dit « l'élément du corps humain » et non pas la fonction. Donc, nous brevetons bien le gène. M. le Rapporteur - Je reviens à l'objet du texte, à savoir les espèces animales et végétales. Ce qu'a dit M. Le Déaut est intéressant, mais nous sommes là dans le débat sur le privilège du sélectionneur, notion introduite par le rapporteur du Sénat et à laquelle il convient de faire pleine référence, tout en sachant que le travail qui consiste à sélectionner naturellement les meilleures semences permet, dans ce domaine où la France détient 25% du marché, d'obtenir une progression de 1 à 2% des performances du végétal, tandis que l'incorporation d'une fonction d'un gène dans une nouvelle semence peut permettre des progrès dix à vingt fois supérieurs - dont les pays du Sud profiteront. Je ne peux pas laisser dire que la directive est obsolète, car si on ne la transposait pas, nous ferions en réalité un saut en arrière, alors que notre volonté est d'aller de l'avant et de ne pas laisser nos chercheurs en position d'infériorité. M. le Ministre délégué - Ce qui est brevetable, Monsieur Lefort, c'est le couple indissociable que forment le gène et la fonction, c'est cette dualité A plus Y. Mais le gène lui-même n'est pas breveté. Si avec le gène A on invente une fonction Z, le nouveau couple A+Z devient brevetable. Ainsi votre souci de ne pas voir breveter le vivant est respecté. Sur ce point, une vraie différence sépare les Européens et les Américains, qui acceptent, eux, de breveter la découverte. C'est pourquoi nous nous dotons des instruments juridiques propres à ne pas tomber sous la domination du droit américain. Que la directive doive être un jour rafraîchie, j'en suis d'accord, mais sa transposition représente un progrès sensible même s'il n'est pas définitif, tant il est vrai que nous ne légiférons pas pour l'éternité. L'article 6 mis aux voix, est adopté. M. Jean-Yves Le Déaut - Le privilège du sélectionneur est bienvenu, à condition qu'il soit effectivement respecté, ce qui n'est plus le cas pour les hybrides depuis déjà longtemps. M. Jean-Claude Lefort - C'est comme pour le Terminator ! M. Jean-Yves Le Déaut - Il s'agissait effectivement de la domination du semencier sur l'agriculteur. L'avancée réalisée au Sénat nous paraît heureuse, tout comme, me semble-t-il, au Gouvernement. En revanche, la référence à l'exemption au titre de la recherche me paraît trop faible. Si, comme on l'a vu à propos du logiciel ou du vivant, le brevet a pour seule fonction de bloquer le développement du savoir, il faut s'insurger contre la démarche d'un certain nombre de grandes sociétés qui ne déposent de brevets que dans ce but. C'est pourquoi la recherche doit être totalement libre, même celle qui se développe à partir de brevets ou d'espèces protégées. Si, à partir d'une tulipe orange, je suis capable de créer une tulipe orange et noire avec des bandes verticales, je suis protégé par un COV si cette nouvelle variété est stable. Il me paraît indispensable que tout chercheur puisse continuer à travailler sur les gènes de cette variété pour inventer à son tour une autre espèce. Or, le dispositif qui nous est présenté est beaucoup trop timide pour protéger le chercheur. J'espère, Monsieur le ministre, que la position du gouvernement français est bien de soutenir le droit à la recherche dans tous les cas. De plus, si la directive devait être révisée comme nous le souhaitons tous, vous veillerez à ce que ce droit à la recherche soit amélioré de telle sorte que le brevet ne puisse pas faire obstacle au savoir. M. le Rapporteur - Nous partageons tous, je crois, les préoccupations de Jean-Yves Le Déaut. Certains des commentaires figurant dans mon rapport sont destinées à servir de fondement aux interprétations juridiques ultérieures. Oui, il faut laisser aux chercheurs la liberté d'évoluer à partir de tous les gènes disponibles. Le privilège du sélectionneur comporte la liberté pleine et entière du chercheur qu'il est, quel que soit le matériel génétique qu'il utilise. Sa liberté s'arrête au stade de la commercialisation. Nous sommes décidés à ne pas laisser nos chercheurs subir des contraintes découlant d'une situation de monopole que certains grands groupes voudraient se créer. M. Jean-Claude Lefort - Monsieur le ministre, lorsque vous mettez A et B ensemble pour obtenir Z, A, qui est la matière vivante, est breveté. Vous ne pouvez plus y toucher pour obtenir X. M. le Ministre délégué - Si ! M. Jean-Claude Lefort - Le code dispose que la protection « ne couvre l'élément du corps humain »... M. le Ministre délégué - ...mais « seulement dans la mesure où »... M. Jean-Claude Lefort - Il s'agit bien de l'élément du corps humain et non pas de la fonction. Si nous sommes d'accord, alors le texte est mal rédigé et il faut le changer. Par ailleurs, des promesses de ministres pour une renégociation, j'en ai trop entendu (Interruptions sur les bancs du groupe UMP) pour ne pas vouloir tenir plutôt que courir. Les ministres passent... L'article 7 mis aux voix, est adopté. M. Jean-Yves Le Déaut - On lit dans cet article : « ...pour autant que la variété constitue un progrès technique important et présente un intérêt économique considérable », cet adjectif ayant été introduit par le Sénat. Quelle est la portée juridique de l'expression « un intérêt économique considérable » ? C'est tout le problème des licences, qu'il est possible de refuser pour éviter la concurrence. C'est ce qu'a fait Microsoft vis-à-vis des logiciels libres. Nous sommes dans un cas analogue : une invention est brevetée mais la licence pour l'exploiter est refusée. M. le Ministre délégué - Cette expression figure dans la directive, qui reprend elle-même le texte de l'OMC. M. Jean-Claude Lefort - Et voilà ! M. le Ministre délégué - Oui, Monsieur Le Déaut, des procès auront lieu, mais la jurisprudence affinera et précisera l'interprétation. M. Jean-Claude Lefort - Parler d'« intérêt économique considérable » suffit à montrer que l'économie prime sur l'homme. Vous parlez de l'OMC, mais qu'est-ce qui doit prévaloir à notre époque : le droit commercial ou les droits économiques et sociaux ? Nous avons déjà vu ce qui arrive lorsque prévaut l'« intérêt économique considérable », notamment en Afrique concernant les traitements contre le Sida. Une transposition française de l'accord de Cancun du 30 août dernier devrait faire en sorte, pour la première fois, que le droit des hommes et la sécurité sanitaire l'emportent sur les intérêts économiques : c'est considérable. Votre projet, selon le point de vue où l'on se place, est mal ficelé, ou, au contraire, trop bien. Les articles 8, 9, 10, 11 et 12, successivement mis aux voix, sont adoptés. M. le Président - Nous en venons aux explications de vote. M. Jean-Yves Le Déaut - Il a fallu plus de six ans pour retranscrire cette directive en droit interne, sans doute en raison d'oppositions diverses, notamment concernant l'article 5, même si la loi sur la bioéthique a contribué à résoudre les questions relatives aux éléments isolés du corps humain. Le texte dont nous débattons présente quelques avancées par rapport au texte initial. Il n'est plus possible de prétendre que la protection de la propriété intellectuelle en matière d'inventions biotechnologiques n'est pas nécessaire. Souvenons-nous à ce propos du contentieux qui opposa les professeurs Montagné et Gallo lors de la découverte du virus du Sida et de la contestation des Etats-Unis. Sur le plan européen, il est donc impératif que nous protégions la propriété intellectuelle : c'est une question morale qui engage également, en l'occurrence, le devenir de la planète. Ce texte va en ce sens, mais des questions demeurent en particulier quant à la recherche : vous avez certes précisé qu'il ne serait pas possible de breveter un gène en tant que tel, mais quid d'un gène qui aurait plusieurs fonctions et du chercheur qui en découvrirait, par exemple, la deuxième ? J'ai le sentiment, sur ce plan-là, d'un travail inachevé, et sans doute parce que les pays européens n'ont pas tous la même interprétation du droit de la protection des inventions biotechnologiques. Le groupe socialiste votera ce projet mais il assortit son vote d'une demande de révision de la directive élaborée il y a six ans. L'ensemble du projet de loi, mis aux voix, est adopté. Prochaine séance, mardi 30 novembre, à 9 heures 30. La séance est levée à 18 heures 35. Le Directeur du service ORDRE DU JOUR A NEUF HEURES TRENTE : 1ère SÉANCE PUBLIQUE 1. Questions orales sans débat 2. Fixation de l'ordre du jour A QUINZE HEURES : 2e SÉANCE PUBLIQUE 1. Questions au Gouvernement. 2. Explications de vote et vote, par scrutin public, sur l'ensemble de la proposition de loi relative aux droits des malades et à la fin de la vie (n° 1882). 3. Suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat après déclaration d'urgence (n° 1911), de programmation pour la cohésion sociale. Rapport (n° 1930) de Mme Françoise de PANAFIEU et M. Dominique DORD, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Avis (n° 1920) de M. JOYANDET, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. Avis (n° 1928) de M. Georges MOTHRON, au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. A VINGT ET UNE HEURES TRENTE - 3e SÉANCE PUBLIQUE Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance. Le Compte rendu analytique Préalablement,
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