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Assemblée nationale
COMPTE
RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL
Session ordinaire de 2004-2005 - 73ème jour de séance, 180ème séance 2ème SÉANCE DU JEUDI 17 MARS 2005 PRÉSIDENCE de M. Éric RAOULT vice-président Sommaire ORGANISATION DU TEMPS DE TRAVAIL APRÈS L'ARTICLE PREMIER A (suite) 2 RAPPEL AU RÈGLEMENT 3 ORGANISATION DU TEMPS DE TRAVAIL APRÈS L'ARTICLE PREMIER A (suite) 3 ARTICLE PREMIER 13 APRÈS L'ARTICLE PREMIER 21 ART. 3 22 ORDRE DU JOUR DU MARDI 22 MARS 2005 26 La séance est ouverte à quinze heures.
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, en deuxième lecture, de la proposition de loi portant réforme de l'organisation du temps de travail dans l'entreprise. APRÈS L'ARTICLE PREMIER A (suite) M. le Président - Conformément à l'article 61, alinéa 3, du Règlement, le vote sur l'amendement 13 rectifié a été reporté à cette séance. L'amendement 13 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Gérard Larcher, ministre délégué aux relations du travail - Le Gouvernement doit à l'Assemblée des éclaircissements sur l'incident de ce matin. Je souhaiterais, Monsieur le président, dès qu'un membre du groupe communiste et républicain sera présent, prendre la parole. M. le Président - Entendu. Je constate que l'amendement 11 rectifié n'est pas défendu. M. Alain Vidalies - L'amendement 88 est défendu. M. Pierre Morange, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales - Avis défavorable à cet amendement contraire à la lettre et à la philosophie de cette proposition de loi. M. le Ministre délégué - Le système des heures choisies n'est plus le sujet de notre débat. Avis défavorable. L'amendement 88, mis aux voix, n'est pas adopté. M. le Président - L'amendement 31 n'est pas défendu. M. Alain Vidalies - Si. M. le Président - Monsieur Vidalies, vous ne pouvez défendre cet amendement. En effet, selon la jurisprudence établie en première lecture de ce texte, il n'est pas possible de défendre les amendements d'un autre groupe. L'amendement 12 rectifié n'est pas défendu non plus. M. Alain Vidalies - Par l'amendement 76, nous voulons revenir à la fixation du contingent d'heures supplémentaires à 130 heures, décidée en 2002. Depuis, ce contingent a été progressivement augmenté pour atteindre 220 heures par le décret du 21 décembre 2004. En portant le contingent à 220 heures et en prévoyant, au-delà, le recours aux heures choisies, votre souci est de favoriser l'utilisation des heures supplémentaires, et non de permettre aux trois millions de chômeurs de trouver tout simplement un emploi, avant de travailler plus pour gagner plus. M. le Rapporteur - Depuis l'ordonnance de 1982, le contingent des heures supplémentaires est fixé par voie réglementaire. Le gouvernement précédent n'avait pas utilisé une autre voie pour fixer le contingent à 130 heures. En outre, l'augmentation du contingent à 220 heures en décembre dernier répond aux besoins des entreprises et des salariés. Avis défavorable. M. le Ministre délégué - Même avis. La fixation de ce contingent doit être fonction des particularités de chaque secteur et négociée avec les partenaires sociaux. M. Hervé Novelli - Evidemment ! M. le Ministre délégué - 73% des salariés sont couverts par des accords collectifs qui, pour certains, ont choisi de porter le contingent au-delà de 220 heures en profitant des assouplissements offerts par la loi Fillon de janvier 2003. L'amendement 76, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Maxime Gremetz - Je voudrais rendre hommage à notre Président, M. Jean-Louis Debré. Ce matin, il a fait respecter avec autorité cette digne Assemblée en renvoyant à plus tard l'examen de la proposition de résolution du groupe communiste et républicain, en l'absence d'un membre du Gouvernement pour participer au débat. M. le Ministre délégué - Même si le Règlement de l'Assemblée ne lui en fait pas obligation, le Gouvernement aurait dû être présent, d'autant que l'ouverture des services publics à la concurrence est un sujet très important. En son nom, je vous présente ses excuses, que j'adresse aussi à M. Ollier, président de la commission des affaires économiques, présent ce matin dans l'hémicycle. Le ministre en charge des relations avec le Parlement consultera le président du groupe communiste et républicain ainsi que le Président de l'Assemblée. Une date sera fixée en Conférence des présidents afin que vous puissiez discuter de ce sujet en présence du Gouvernement (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). M. Maxime Gremetz - Merci, Monsieur le ministre.
APRÈS L'ARTICLE PREMIER A (suite) M. Michel Liebgott - Cet amendement 77 rectifié reprend la proposition initialement défendue par la commission des affaires sociales du Sénat selon laquelle la durée maximale quotidienne de 10 heures de travail doit être rappelée dans la loi. Cette durée maximale a été fixée en 1848, au moins pour les travailleurs de Paris. Il serait raisonnable de ne pas revenir dessus un siècle et demi plus tard. Dans la plupart des branches, les négociations ont déjà abouti mais rien n'exclut que des apports individuels, dans le cadre des heures choisies, ne viennent violer cette règle. De surcroît, se pose la question de la majoration salariale de ces heures. Les explications que le ministre a données au Sénat sont insuffisantes pour que nous renoncions à cet amendement.. M. le Rapporteur - Avis défavorable. M. Hervé Novelli - Très bien ! M. le Rapporteur - La commission des affaires sociales du Sénat a retiré cet amendement car le ministre a confirmé que cette règle de droit commun restait applicable. M. le Ministre délégué - Je souhaite le retrait de cet amendement. La création du dispositif des heures choisies n'ouvre pas une dérogation à la règle de durée maximale quotidienne de 10 heures, je le redis solennellement devant vous. Soucieux de clarté, nous ne souhaitons pas surcharger notre droit d'une disposition superfétatoire. M. Alain Vidalies - Il n'y a en effet pas d'ambiguïté sur le fait que cette disposition soit applicable, mais ne mérite-t-elle pas de figurer dans le code du travail ? Le rapporteur et le ministre soutiennent qu'une telle précision serait superflue, mais je considère pour ma part qu'il n'est pas inutile d'inscrire dans la loi les principes sur lesquels nous sommes tous d'accord. Il faut « sécuriser » le principe selon lequel la durée journalière de travail ne peut excéder dix heures. M. Hervé Morin - La demande de nos collègues socialistes est déjà satisfaite, puisque l'article L. 212-1 du code du travail dispose que « la durée quotidienne du travail effectif par salarié ne peut excéder dix heures ». M. le Ministre délégué - M. Morin parle d'or : je n'ai plus rien à ajouter ! L'amendement 77 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme Danièle Hoffman-Rispal - Notre amendement 85 vise à affirmer que le refus du salarié - et je pense en particulier aux femmes ayant des enfants ou des parents âgés à charge - d'effectuer des « heures choisies » au-delà du contingent légal d'heures supplémentaires ne constitue en aucun cas une faute ou un motif de licenciement. On ne peut raisonnablement exiger du salarié qu'il fasse des semaines très supérieures à quarante heures, et il faut l'inscrire dans la loi, car l'on sait qu'en pratique, la pression des employeurs pourra être très forte. M. le Rapporteur - Avis défavorable. Par définition, les heures choisies ne pourront être effectuées que par des salariés volontaires, ce qui exclut l'hypothèse d'un refus. L'obligation de faire valider le dispositif par un accord collectif offre en outre une garantie supplémentaire. (Murmures sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains) M. le Ministre délégué - Même avis. Ces heures ne pourront être imposées au salarié, et il doit être bien clair que le fait de ne pas se porter volontaire pour les effectuer ne peut constituer une faute. M. Alain Vidalies - Il faut tenir compte de la réalité des situations vécues en entreprise. Le nouveau dispositif des heures choisies doit être mieux encadré, afin de prévenir les incitations trop pressantes des employeurs. La volonté du législateur doit être plus explicitement énoncée. M. Jean Le Garrec - En effet, ne soyons pas naïfs ! Compte tenu du taux de chômage actuel, il faut relativiser la notion de volontariat. Les relations entre salariés et employeurs s'inscrivent, qu'on le veuille ou non, dans un rapport de forces inégalitaire et il est de notre devoir de fixer des limites. Prenons garde aussi à ce que certains oulémas... M. le Ministre délégué - Pensez-vous aux juges de la Cour de Cassation ? (Sourires) M. Jean Le Garrec - ...ne fassent pas une lecture « salafiste » de ces dispositions, au risque de constituer une jurisprudence par trop « protectrice »... L'amendement 85,mis aux voix, n'est pas adopté. M. le Président - L'amendement 42 est cosigné par des parlementaires des groupes UMP et UDF... (M. Gremetz s'exclame) M. Hervé Morin - Cet amendement, dont le premier signataire est Yvan Lachaud, tend simplement à éviter que la journée de solidarité créée par la loi du 30 juin 2004 soit systématiquement fixée le lundi de Pentecôte, pour tenir compte notamment des manifestations traditionnelles organisées ce jour-là - telles que la Féria de Nîmes - et de leurs retombées pour l'économie touristique, locale et nationale. Hier, nous avons adapté le code du travail à certaines particularités alsaciennes et mosellanes : persévérons dans la voie de la souplesse et du pragmatisme. M. le Rapporteur - Avis défavorable. Le dispositif de la journée de solidarité en faveur des personnes âgées dépendantes a été créé il y a moins d'un an et il fait actuellement l'objet d'une expérimentation. Attendons les résultats de cette évaluation avant d'y revenir. Pour cette année, un arrêté la fixe au lundi de Pentecôte. Nous verrons ultérieurement s'il y a lieu de prévoir de nouveaux aménagements. M. le Ministre délégué - Même avis. J'invite au retrait de cet amendement car l'économie générale du dispositif de la journée de solidarité a déjà fait l'objet d'une longue concertation et nous sommes parvenus à une solution équilibrée, fondée sur le recours aux accords collectifs. M. Maxime Gremetz - Vous devriez avoir honte de faire de telles propositions : autant demander au condamné à mort s'il préfère la corde ou la guillotine... (Exclamations sur les bancs du groupe bancs du groupe UMP et du groupe UDF) J'ai sous la main les chiffres des profits réalisés cette année par les principales entreprises : Arcelor, plus 800% ; l'Oréal, plus 143%, Alcatel, plus 114%... M. Hervé Novelli - C'est parce qu'elles sont bien gérées ! M. Maxime Gremetz - Renault, plus 43% ; Total, plus 37%... Et vous vous proposez de leur accorder encore un peu plus d'exonérations de cotisations patronales, cependant que le pouvoir d'achat des salariés continue de régresser. Certes, vous avancez l'idée d'une petite prime d'intéressement, en feignant d'ignorer que cela existe depuis cinquante ans avec les résultats que l'on sait : au moment de faire les comptes, on trouve toujours des bénéfices pour les actionnaires et jamais pour les salariés ! Vous persistez néanmoins à demander aux salariés de travailler une journée pour rien, prétendument au profit des personnes âgées. On nous refait le coup de la vignette auto et j'ai démontré, sans être valablement contredit, qu'un tiers seulement du produit irait aux personnes âgées, deux tiers à l'entreprise, qui va encore accroître ses profits... Et vous osez faire une telle proposition ! Comprenez-vous pourquoi il y a tant de gens dans la rue, et pourquoi il y en aura encore plus ? Vos chiffres, qui sont ceux du Medef, sont faux. Mais vous mettez en cause quiconque n'est pas d'accord avec vous. Ainsi vous avez mis en cause hier les « oulémas » de la Cour de Cassation, ce qui est très grave ! Vous les avez taxés d'intégrisme : pourquoi pas de terrorisme ? Cela mériterait que je saisisse le Président de la République. On ne doit pas jouer avec les principes républicains. Aujourd'hui, c'est l'INSEE que vous mettez en cause. Supprimons donc l'INSEE ! Où va-t-on ? Moi je mets en cause vos chiffres, qui sont mensongers (Murmures sur les bancs du groupe UMP) comme l'étude du Medef - institution dont l'impartialité est bien connue... Je me demandais comment l'UDF et l'UMP avaient pu se rapprocher sur ce sujet, mais j'ai compris : il s'agit de faire payer les salariés et non ceux qui font les profits. M. Hervé Morin - Sur la journée de solidarité, Monsieur le rapporteur, je rappelle que lorsque nous avions eu ce débat, le Gouvernement n'avait pas parlé d'une journée qui serait la même sur tout le territoire. Dans son arrêté de décembre, il n'a pas tenu les engagements qu'il avait pris envers le groupe UDF et le groupe UMP. Je rappelle d'autre part à M. Gremetz que nous n'avons pas voté cette journée de solidarité, précisément parce que nous souhaitions une vraie réforme des 35 heures, que nous pensions qu'il fallait donner à la France les moyens de produire plus de richesse, et que c'est là la condition de toute politique de cohésion sociale. Quant à la répartition de la valeur ajoutée, il est exact qu'aujourd'hui en France la rémunération du capital excède de 7 à 8 points celle du travail. Mais savez-vous de quand cela date ? De 1982 ! M. Maxime Gremetz - Non, de 1990. M. Hervé Morin - C'est dans tous les livres d'économie. Pour ce qui est enfin du choix entre la corde et la guillotine, je constate qu'en Allemagne, sous un gouvernement socialiste, la durée du travail a été relevée ; dans la fonction publique elle est repassée à 40 heures, 42 dans certains Länder. En Espagne elle est de 38 heures, de 37,5 en Angleterre - gouvernée par les travaillistes -, et je n'ai pas le sentiment que les salariés de ces pays se disent particulièrement exploités. Le travail n'est pas forcément un mal ! M. Maxime Gremetz - Arrêtez ! Il y a trois millions de personnes qui attendent de pouvoir travailler ! L'amendement 42, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Maxime Gremetz - L'amendement 9 rectifié tend à renforcer les prérogatives du comité d'entreprise sur les décisions essentielles concernant le développement de l'entreprise, l'organisation du travail et les rythmes de production. Le comité d'entreprise serait également compétent pour intervenir, en accord avec le chef d'entreprise, sur les projets en matière d'organisation économique et juridique de l'entreprise, de choix de production, d'investissements, de sous-traitance, d'externalisation ou de délocalisation des activités et productions de l'entreprise ou de l'établissement. Le comité d'entreprise, ou à défaut les délégués du personnel, pourrait dans ces domaines soumettre au personnel et au chef d'entreprise des propositions pouvant aller jusqu'au référendum décisionnel des salariés de l'entreprise ou de l'établissement, pour assurer la transparence des choix et l'implication des salariés. Nous souffrons, dans notre pays, d'un manque de connaissance et d'expérience, parce que nous ne donnons pas aux salariés assez de droits d'initiative et de proposition. Pourtant, pour ce qui est de la productivité, les ouvriers français sont bien placés, mieux que ceux des Etats-Unis que vous citez toujours comme un modèle. En revanche la France est devenue un pays de bas salaires. M. Jean-Michel Fourgous - A cause des RTT ! M. Maxime Gremetz - Tiens, M. Fourgous se réveille ! M. Patrick Ollier - Cessez d'attaquer vos collègues. M. Maxime Gremetz - Je ne vous parle pas, Monsieur Ollier. Vous avez déjà pris une baffe ce matin : n'en prenez pas une autre cet après-midi, à moins que vous les aimiez. Heureusement, malgré vous, le Président de l'Assemblée nationale a dit que le Gouvernement devait respecter le Parlement ! M. le Président - Revenons au sujet. M. Maxime Gremetz - Dites alors à M. Fourgous de ne pas m'interrompre. M. Jean-Michel Fourgous - Je m'en vais. Vous êtes une atteinte à l'intelligence française. (M. Jean-Michel Fourgous quitte l'hémicycle) M. Maxime Gremetz - M. Fourgous est très intelligent. Ce départ en est la preuve. Nous manquons, disais-je, de droits pour les salariés, les cadres les techniciens, mais nous sommes quand même parmi les plus productifs du monde, tout en étant devenus un pays de bas salaires. Les études le montrent. Il y a 3 millions de gens au SMIC, mais aussi quelques millions de travailleurs pauvres, des gens qui avec le fruit de leur travail ne parviennent pas à subvenir à leurs besoins. Le nombre des bénéficiaires du RMI a progressé de 9%. Ne pensez-vous pas qu'il faut faire quelque chose pour que ces chômeurs puissent retrouver du travail ? Pour produire efficacement, il faut des salariés bien payés, reconnus, respectés, bien formés, et dotés de droits qui leur permettent de ne pas se sentir comme des pions dans l'entreprise. C'est pourquoi notre amendement 9 rectifié tend à donner aux salariés des moyens d'intervention et de proposition. M. le Rapporteur - Défavorable : cet amendement prévoyant de nouveaux pouvoirs de cogestion n'est pas compatible avec l'esprit de la proposition de loi. M. le Ministre délégué - Même avis. L'amendement 9 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Maxime Gremetz - L'amendement 10 vise à prévoir du temps pour la formation économique et sociale ou la formation syndicale des salariés, afin qu'ils puissent jouer tout leur rôle dans un dialogue social rénové. Le code du travail devient de plus en plus complexe. Il est donc légitime que les délégués du personnel, qui ont une mission dans l'entreprise, et même un rôle de proposition, puissent suivre une formation adaptée en ce domaine. Il faut leur donner les moyens de jouer leur rôle. Vous ne cessez d'appeler de vos vœux des syndicats puissants : encore faut-il que leurs représentants soient formés. Ce qu'on attend aujourd'hui des délégués du personnel n'a rien à voir avec ce qu'on en attendait il y a trente ans. Si l'on veut un dialogue social véritable, il faut s'attacher à leur assurer une véritable formation - non seulement syndicale, mais aussi économique, sociale et juridique. M. le Rapporteur - Avis défavorable. La loi du 4 mai 2004 a déjà augmenté significativement les taux de participation des employeurs au financement de la formation professionnelle, conformément à l'accord national interprofessionnel du 20 septembre 2003, signé par l'ensemble des partenaires sociaux. Dans le cadre de cette formation, la définition et les conditions de mise en œuvre, à titre facultatif, d'actions de formation économique en vue de mieux comprendre la gestion et les objectifs de l'entreprise sont prévues. M. le Ministre délégué - Le Gouvernement ne souhaite pas modifier dans le cadre de ce texte le droit relatif au congé de formation économique, sociale et syndicale. Selon le code du travail, il appartient aux partenaires sociaux, le cas échéant, de définir d'autres régimes. L'effort de codification vise aussi à rendre plus intelligible le droit du travail. Avis défavorable. L'amendement 10, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Maxime Gremetz - L'amendement 7 avait été repoussé en première lecture. Mais les événements survenus depuis devraient inciter la commission et le Gouvernement à reconsidérer leur position. Cet amendement a en effet un double objectif. Il vise d'abord, comme le recommande la Cour des Comptes, qui s'est intéressée à l'utilisation des fonds publics alloués à l'emploi - aides à l'emploi et exonérations de cotisations patronales - à lier ces aides à des créations d'emplois. C'est ce que nous avions fait dans la première loi sur les 35 heures, et les créations d'emplois ont été significatives. Mais aujourd'hui, les exonérations de cotisations patronales sur les bas salaires ne sont pas créatrices d'emplois et bloquent l'augmentation des salaires : plus on a de salariés à 1,3 SMIC, plus on bénéficie d'exonérations. On crée une trappe à bas salaires. Qu'elles proviennent de l'Etat, de la région ou du département, ces aides ne font d'autre part l'objet d'aucun contrôle sur les contreparties en termes de création d'emplois durables. La Cour des Comptes a fait des recommandations précises. Il faut rétablir immédiatement la commission de contrôle de l'utilisation des fonds publics - que vous avez supprimée - et fixer dans des conventions le nombre d'emplois à créer, comme cela existe déjà dans certaines régions. Si les objectifs ne sont pas atteints, les aides publiques perçues doivent être remboursées. La meilleure manière de contrôler l'utilisation de ces fonds serait de rétablir aussi les comités de suivi dans les entreprises, que vous avez supprimés. Sans ce contrôle, vous pourrez toujours donner de l'argent pour l'emploi : les emplois resteront invisibles et les difficultés de l'UNEDIC et de la sécurité sociale ne feront que s'accroître. Voilà pourquoi nous attachons tant d'importance à cet amendement. Les Français vous jugeront aux actes, et vous êtes en train de prendre le boomerang dans la figure. Je ne m'en réjouis d'ailleurs pas : je préférerais que vous soyez à l'écoute de nos concitoyens. M. le Rapporteur - Avis défavorable, pour les mêmes raisons qu'en première lecture. Cet amendement vise à revenir au dispositif Aubry I, supprimé par le dispositif Aubry II. La proposition de loi s'inscrit d'autre part dans une logique d'assouplissement, de liberté et de responsabilité. Si la commission de contrôle de l'utilisation des fonds publics a été supprimée, c'est d'abord en raison de la faiblesse de ses moyens et de ses résultats. La Cour des Comptes assure d'ailleurs ce contrôle. M. le Ministre délégué - Avis défavorable. Il existe déjà des instances - Parlement, Cour des Comptes - pour assurer ce contrôle. M. Maxime Gremetz - C'est la meilleure ! Que ne faut-il pas entendre ! Voulez-vous que l'on se contente de constater tous les cinq ans ou tous les trois ans que les milliards votés en faveur de l'emploi ont été gâchés, ou voulez-vous vraiment qu'ils aillent à l'emploi ? Vous dites que les juges sont là pour assurer ce contrôle. Mais dès qu'ils ne vont pas dans votre sens, vous les tenez pour des intégristes. Faites-vous encore confiance au Conseil d'Etat ? Avez-vous pris connaissance de son avis sur le projet de directive Bolkestein ? Accepter le principe du pays d'origine, dit-il, c'est accepter le démantèlement de notre législation et de notre code du travail. « Si le principe de l'application territoriale de la loi pénale était remis en cause, il conviendrait de prendre la pleine mesure des difficultés qui en résulteraient. » J'espère que vous en tirerez les conclusions. Dans la République française, la législation sociale doit valoir pour tous, indépendamment de la nationalité et des activités exercées. L'amendement 7, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Maxime Gremetz - Régulièrement, on fait état dans les journaux d'une mauvaise utilisation des fonds publics par les entreprises. Cela contribue au malaise de la société : les gens en ont assez qu'on ne contrôle pas l'utilisation de l'argent provenant de leurs impôts. C'est pourquoi notre amendement 8 vise à rétablir les commissions de contrôle de l'utilisation des fonds publics telles qu'elles avaient été instituées par la loi du 4 janvier 2001, au niveau national comme au niveau régional. Refuser cela, c'est prouver que l'on veut continuer à faire des cadeaux aux entreprises, sans contrepartie en termes d'emplois et de développement économique. M. le Rapporteur - Avis défavorable, pour les raisons que j'ai déjà indiquées. M. le Ministre délégué - Défavorable. M. Maxime Gremetz - Pourquoi ? M. le Ministre délégué - Nous vous l'avons déjà expliqué ! M. Maxime Gremetz - Mais non ! Depuis la première lecture, il s'est passé des choses ! Que faites-vous du rapport de la Cour des Comptes ? L'avez-vous au moins lu ? Je dirai cela à M. Séguin ! L'amendement 8, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Maxime Gremetz - Monsieur le Président, je demande une suspension de séance. M. le Président - Je pense que ce n'est pas pour réunir votre groupe... M. Maxime Gremetz - Si (Rires sur les bancs du groupe UMP). Oh, ne riez pas, ce matin, il y avait trois députés sur vos bancs, alors que nous débattions des services publics ! Vous, évidemment, vous restez là sans ouvrir la bouche ! La séance, suspendue à 16 heures 7, est reprise à 16 heures 13. M. le Président - Monsieur Gremetz, vous avez la parole pour défendre votre amendement 5 rectifié. M. Maxime Gremetz - Laissez-moi le temps d'arriver ! M. le Président - Défendez-vous votre amendement, ou dois-je considérer qu'il est défendu ? M. Maxime Gremetz - Lequel, disiez-vous ? M. Patrick Ollier - Si vous suiviez dans votre dossier, vous le sauriez ! M. Maxime Gremetz - J'ai mon dossier sous les yeux et je suis parfaitement. Vous, vous n'avez pas besoin de suivre, puisque l'on vous a demandé de rester bouche cousue ! L'amendement 5 rectifié vise à supprimer l'autorisation du travail de nuit des femmes introduite dans une loi relative à l'égalité professionnelle hommes-femmes. On va encore nous dire qu'il nous fallait absolument transposer cette directive européenne et que la France s'était fait rappeler à l'ordre pour ne l'avoir pas fait. Eh bien, nous, nous n'accepterons jamais une régression sociale qui consiste, plus de cent ans après l'interdiction du travail de nuit des femmes, laquelle fut décidée en 1892, à l'autoriser de nouveau dans l'industrie - je ne parle bien sûr pas des services où ce travail est indispensable dans certains métiers. Le travail de nuit, je suis bien placé pour le savoir, est néfaste à la santé, des hommes comme des femmes. M. Jean Leonetti - En ce cas, je devrais être mort, comme beaucoup de médecins ! M. Maxime Gremetz - Je ne parle pas de secteurs comme la santé, mais de l'industrie. Flodor et ses patrons voyous ont fait travailler de nuit des femmes pour mettre en conserve des petits pois. Cela ne pouvait-il donc pas se faire de jour ? Le travail de nuit, néfaste pour tous, pose encore davantage de problèmes aux mères de familles. S'il fallait harmoniser au nom de l'égalité professionnelle hommes-femmes, il fallait le faire par le haut en interdisant le travail de nuit pour tous dans l'industrie. Si vous êtes prêt à faire un seul effort, Monsieur le ministre, c'est sur ce point qu'il faut le faire, au nom même de la cause des femmes. M. le Rapporteur - Avis défavorable. Ce sujet avait fait l'objet d'un vif débat en première lecture, alors même que la disposition en question figure dans une loi adoptée sous le gouvernement précédent, en application d'une directive communautaire relative à l'égalité professionnelle. Même si celle-ci ne réjouissait personne sur aucun des bancs de cette assemblée, elle devait être transposée. J'ajoute que de très nombreuses femmes travaillaient depuis longtemps de nuit, y compris dans des secteurs qui n'étaient pas couverts par les dérogations prévues dans notre droit national. M. le Ministre délégué - Cet amendement vise à supprimer un article important de la loi du 9 mai 2001 relative à l'égalité professionnelle hommes-femmes. Cette loi dispose que le Gouvernement doit avant la fin de l'année remettre au Parlement un rapport d'évaluation. Je présenterai ce rapport où seront analysées en détail les conséquences du travail de nuit sur la santé, la vie familiale... Nous verrons alors si, dans le respect du principe d'égalité professionnelle, certaines spécificités doivent être prises en compte. Dans cette attente, je vous invite à retirer ce amendement. M. Maxime Gremetz - Je ne le retirerai pas. Je vous remercie de ce rapport, mais pour côtoyer quotidiennement des personnes qui travaillent de nuit, je sais d'avance quelles en seront les conclusions. Il y a déjà eu quantité d'études aux résultats édifiants... L'amendement 5 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Maxime Gremetz - L'amendement 14 rectifié vise à abroger l'article 3 de la loi du 17 janvier 2003 dite « d'assouplissement des 35 heures ». Celle-ci a en effet remis en cause la définition équilibrée de l'astreinte donnée par la Cour de Cassation dans son arrêt du 10 juillet 2002. La Cour y indiquait en substance que les périodes d'astreinte, si elles ne constituent pas un temps de travail effectif, ne peuvent pour autant pas être considérées comme un temps de repos et en concluait « qu'un salarié ne bénéficie pas de son repos hebdomadaire s'il est d'astreinte. » L'article 3 de la loi Fillon de janvier 2003 dispose au contraire, qu'à l'exception des durées d'intervention, les périodes d'astreinte sont prises en compte pour le calcul des périodes minimales de repos quotidien et hebdomadaire. Une astreinte n'ayant pas donné lieu à intervention peut ainsi dorénavant être décomptée du temps de repos. L'objectif est clair : il s'agit de ne pas rémunérer les astreintes. Or, chacun sait qu'un salarié d'astreinte, c'est-à-dire mobilisable à tout moment et en alerte, est au travail. M. le Rapporteur - Avis défavorable. La loi Fillon, qui revient sur la jurisprudence de la Cour de Cassation, précise que l'astreinte est assimilable à du temps de repos pour le respect des règles légales issues de la directive de novembre 1993. Le principe en a été admis par la Cour européenne de justice. J'ajoute que les astreintes donnent toujours lieu à une compensation, financière ou sous forme de repos. M. le Ministre délégué - Cet amendement remettrait en question l'objectif même de la loi du 17 janvier 2003 qui complétait celle du 19 janvier 2000 au sujet des astreintes. Celles-ci, comme l'a dit le rapporteur, font toujours l'objet d'une compensation. Pour ce qui est de la directive de 1993, plusieurs de ses points sont actuellement rediscutés au sein du Conseil européen des ministres de l'emploi. Le Parlement européen prépare également un avis à son sujet. Je ne doute pas que la délégation à l'Union européenne examinera avec attention tout projet de réforme de cette directive. Pour toutes ces raisons, avis défavorable. L'amendement 14 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Maxime Gremetz - Les accords d'entreprise doivent être votés par la majorité des salariés. L'amendement 6 rectifié propose donc de les subordonner au principe de l'accord majoritaire, de manière à éviter que des syndicats qui ne représentent que 20% des salariés puissent être signataires d'accords qui s'appliqueront à l'ensemble des salariés. Les députés de la majorité accepteraient-ils de remettre en cause leurs prérogatives ? L'amendement n'a donc rien de révolutionnaire, à moins de défendre une conception bien particulière de la démocratie ! Cette notion d'accord majoritaire, rappelons-le, a été introduite pour la première fois dans la loi sur la réduction du temps de travail. Il s'agissait de n'octroyer les aides qu'aux seules entreprises ayant conclu un accord majoritaire, signé par des syndicats représentant la majorité des salariés, et de créer des comités de suivi, chargés de vérifier la bonne application de la loi. Vous n'avez pas voulu nous entendre, préférant mettre en place une usine à gaz, faite d'accords dérogatoires. Drôle de conception du dialogue social ! M. le Rapporteur - Défavorable. La loi du 4 mai 2004 repose sur la négociation collective et le principe d'un équilibre entre les différentes positions syndicales. En outre, on ne peut accepter une disposition dérogatoire au code du travail. M. le Ministre délégué - Défavorable. Nous préférons les dispositions de la loi du 4 mai 2004 sur la majorité d'engagement et le droit d'opposition. M. Maxime Gremetz - Le ministre du travail que vous êtes, chargé du dialogue social, devrait être favorable à cet amendement. Les organisations syndicales doivent disposer d'un droit de construction et de proposition, qui leur permette de nourrir un vrai dialogue social. Chacun a intérêt qu'une entreprise se développe et crée des emplois. Mais vous préférez visiblement cantonner les syndicats dans un rôle d'opposition... L'amendement 6 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Alain Vidalies - L'amendement 75 vise à supprimer l'amendement sauvage relatif au temps de trajet, introduit par M. Fourgous dans la loi de programmation pour la cohésion sociale. Singulière proposition, qui frise le ridicule, puisque c'est sans doute le seul cas où le code du travail dispose qu'une indemnité versée à un salarié peut être déterminée par convention, accord collectif ou décision unilatérale de l'employeur. Aucun barème n'étant prévu, une indemnité d'un centime d'euro est donc conforme au droit ! Voilà comment on rédige la loi ! Et certains considèrent qu'il s'agit là d'une avancée... Cette affaire sera à coup sûr source de contentieux. L'amendement de M. Fourgous, en contradiction avec la réglementation de la Cour européenne de justice, a été clairement rédigé pour remettre en cause la jurisprudence de la Cour de cassation sur le temps de déplacement. Mais vous lui avez donné une interprétation suffisamment ambiguë pour « vendre » la disposition au Conseil constitutionnel. J'invite d'ailleurs les professionnels du droit à rependre le mémoire que vous lui avez présenté. Pour vous éviter les foudres des oulémas, il serait plus sage d'abroger l'amendement Fourgous. Malheureusement, quand le Parlement fait mal son travail de législateur, les juges doivent s'y substituer. M. le Rapporteur - Avis défavorable. Nous avons déjà débattu de ce point. Plusieurs députés socialistes - Pas de la question de l'indemnité ! M. le Rapporteur - En première lecture, le ministre a donné toutes les explications nécessaires sur l'indemnisation du temps de déplacement professionnel. M. Jean Le Garrec - Au départ, cela se limitait à l'indemnisation d'un trajet Paris-Tokyo ! M. le Ministre délégué - Avis défavorable. L'interprétation de ce point ne fait aucun doute dans le mémoire donné par le Gouvernement au Conseil constitutionnel : ce dispositif ne s'applique pas dans le cadre des déplacements habituels. Par ailleurs, concernant l'indemnité, cette disposition n'est pas nouvelle dans le code : elle existe déjà pour l'astreinte. Il existe une jurisprudence issue de sages, de magistrats (Exclamations sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains et du groupe socialiste). Pratiquons le parallélisme des formes sur ce sujet ! L'amendement 75, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Maxime Gremetz - J'ai abordé tout à l'heure la question du travail de nuit des femmes dans l'industrie au nom de l'égalité professionnelle. Plus largement, par cet amendement 4 rectifié, il s'agit d'aborder la question de la pénibilité du travail, dont ce texte ne dit mot, et de limiter la durée de travail des salariés effectuant des travaux pénibles. Les résultats de l'étude publiée en décembre par la direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques sur « l'exposition aux risques et à la pénibilité du travail de 1994 à 2003 » sont clairs. 12,7% des salariés travaillent entre minuit et cinq heures du matin, même de manière occasionnelle, contre 11,7% hier. Ce mouvement touche tous les secteurs, et plus particulièrement l'industrie où le nombre des salariés travaillant la nuit est passé de 15,7% à 18,8%, suite à l'adoption de la directive européenne sur le temps de travail permettant le travail de nuit des femmes. Le travail de nuit touche aujourd'hui près d'un salarié sur 5 et les ouvriers qualifiés sont les plus touchés. Ces salariés désirent-ils travailler plus ou travailler mieux ? Le recours aux horaires décalés « à titre exceptionnel » est devenu la règle. Parce que le travail de nuit est mauvais pour la santé, les salariés qui y sont contraints doivent bénéficier d'un allégement global de leur charge horaire et d'un suivi médical. En outre, de nouvelles formes de pénibilité apparaissent. Aujourd'hui, un tiers contre un quart hier des salariés est exposé à un bruit supérieur à 85 décibels. De même, un salarié sur cinq travaille devant un écran contre un sur dix auparavant. Le travail debout a également augmenté. Bref, les exemples du développement de cette pénibilité du travail, anciennement connue, sont légion et l'on doit également prendre en compte la progression des accidents de travail et des maladies professionnelles. M. le Rapporteur - Avis défavorable. Je rappelle qu'il existe un seuil d'encadrement du travail au plan communautaire. En outre, l'article 12 de la loi de 2003 portant réforme des retraites a prévu qu'une négociation interprofessionnelle aurait lieu sur la pénibilité du travail. Elle devra rendre ses conclusions en 2006. M. le Ministre délégué - Avis défavorable. Cette négociation interprofessionnelle est engagée. Au vu de ses conclusions, le Gouvernement décidera ou non de se saisir de cette question dont nous aurons l'occasion de reparler. L'amendement 4 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme Danièle Hoffman-Rispal - Aucun amendement de notre groupe n'a été accepté depuis le début de ce débat. Il serait logique que vous adoptiez cet amendement 73 car il est tout à fait en cohérence avec les propos tenus par la majorité et le Gouvernement. Selon vous, nous aurions craint les négociations avec les partenaires sociaux lors du débat sur les lois Aubry organisant la réduction du temps de travail. Pourtant, dans le même temps, vous reconnaissez que nombre d'accords ont été signés à cette période... M. Hervé Novelli - Sous la contrainte ! Mme Danièle Hoffman-Rispal - Lors du conseil des ministres du 19 novembre 2003, le Gouvernement s'est engagé solennellement à ce que toute disposition touchant au droit du travail fasse l'objet de négociations. Pourtant, vous avez utilisé la formule de la proposition de loi pour faire passer cette réforme et éviter la consultation des partenaires sociaux. Depuis la première lecture de cette proposition de loi, des milliers de manifestants, y compris des salariés du privé, ont exprimé leur inquiétude devant la dégradation de leurs conditions de travail et de leur pouvoir d'achat. Demain, 18 mars, pendant la réunion de la commission nationale sur la négociation collective, prenez donc l'engagement de mener de véritables négociations sur le compte épargne-temps, le pouvoir d'achat et la pénibilité du travail. Comme l'a réclamé M. Liebgott, nous réclamons la tenue d'un « nouveau Grenelle ». M. Hervé Novelli - Ce ne serait plus des négociations mais des injonctions ! M. le Rapporteur - Avis défavorable. Nous en avons débattu en première lecture. M. le Ministre délégué - Avis défavorable. Cette proposition de loi, dont la négociation collective est la clé de voûte, vise à établir la primauté du droit conventionnel sur le droit réglementaire dans une perspective de démocratie sociale. Les questions des salaires minimaux et de l'état des négociations, entre autres, seront abordées avec les partenaires sociaux demain lors de la sous-commission des salaires et durant la réunion de la commission nationale de la négociation collective au mois de juin. M. Alain Vidalies - Compte tenu du fait que les entreprises n'utilisent en moyenne qu'un contingent de 56 heures supplémentaires, nous nous interrogions sur la nécessité de le porter à 220 heures et, plus globalement, sur la portée du présent texte, dont l'applicabilité semblait douteuse. Les déclarations de M. Sarkozy à la convention sociale de l'UMP viennent tout éclairer, puisqu'il propose d'exonérer les heures supplémentaires de cotisations sociales patronales... M. Hervé Novelli - Il n'est pas question d'exonération mais de forfaitisation. M. Alain Vidalies - Nous ne sommes donc plus dans une logique de réduction des cotisations sociales ciblée sur les bas salaires. Autre logique donc, encourager le recours aux heures supplémentaires, ce qui revient à faire travailler plus ceux qui ont déjà un emploi, au détriment de tous les autres ! Il ne s'agit plus d'assouplir le recours aux heures supplémentaires mais bel et bien de l'encourager, et cela change tout. La semaine dernière, lors de l'examen de la loi de sauvegarde des entreprises rapportée par M. de Roux, nous sommes parvenus à faire retirer les dispositions assouplissant le régime du licenciement économique... M. Hervé Novelli - C'est bien dommage ! M. Alain Vidalies - Et nous voyons désormais clair dans votre jeu, qui consiste à ne dévoiler vos véritables intentions qu'en cours de route. La vérité éclate au grand jour : cette proposition de loi vise bien à démembrer l'ensemble de notre droit du travail (Murmures sur les bancs du groupe UMP). Qu'en pense le Gouvernement ? S'il était disposé à dire nettement qu'il rejette la proposition de M. Sarkozy, cela permettrait aux négociations qui débutent demain de s'engager dans un climat plus serein. L'amendement 73, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Jean Le Garrec - Je défends mon amendement 74, mais sans doute serai-je amené à le retirer car il est un peu en retard sur le cours des événements. Le ministre va donc présider demain la sous-commission sur les salaires et nous prenons acte de ce geste politique. Compte tenu du présent texte, il semble cependant indispensable de faire suivre cette première réunion de rencontres de même nature sur l'organisation du temps de travail et sur la politique de l'emploi. M. Sarkozy a déclaré que notre pays ne souffrait pas d'un déficit d'emplois mais d'un déficit de travail... (« Tout à fait ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP) Cela éclaire le présent texte d'un jour nouveau, même s'il restera bien difficile de justifier que l'on détruise autant d'emplois avec une croissance à 2,5% ! Quoi qu'il en soit, il est urgent de confronter les logiques qui s'affrontent au sujet de la politique de l'emploi et de la durée du travail, en présence des partenaires sociaux, et tel est l'objet de notre amendement. M. le Rapporteur - Avis défavorable. M. le Ministre délégué - Même avis. Aux termes de l'article L. 136-2 du code du travail, la commission nationale de la négociation collective traite déjà des thèmes que vous souhaitez voir aborder. Elle se réunit au moins une fois par an et publie ses travaux. Votre demande est donc satisfaite. M. Jean Le Garrec - J'entends bien, et je retire d'ailleurs mon amendement. Je m'autorise cependant à vous recommander de provoquer rapidement une réunion sur l'organisation du temps de travail et sur la politique de l'emploi, compte tenu des changements qui ont affecté ces deux domaines dans la période récente. L'amendement 74 est retiré. M. Michel Liebgott - Notre groupe souhaite se réunir brièvement avant l'examen de l'article premier. La séance, suspendue à 17 heures 10, est reprise à 17 heures 20. M. Maxime Gremetz - Cet article premier travestit profondément les principes du compte épargne-temps. L'objet originel de celui-ci est l'accumulation de temps pour des projets personnels ou familiaux ; c'est aussi est un mode d'indemnisation des congés, et non une voie nouvelle pour constituer une épargne ni un moyen aléatoire de compléter sa rémunération. Or c'est là l'orientation que vous donnez au compte épargne-temps. Avec cette proposition son principe est renversé puisqu'il est prévu de transformer le repos en argent : le compte pourra être alimenté par des jours de congés annuels, des heures et jours de repos, des RTT, des heures supplémentaires, et par des augmentations ou compléments de salaires. Les droits affectés sur le compte seront utilisés soit pour compléter la rémunération du salarié, soit pour alimenter un plan d'épargne retraite, soit pour indemniser un congé non rémunéré. Nous refusons cette monétisation du compte épargne-temps, car elle participe de votre volonté d'encourager la capitalisation et la financiarisation de l'économie. L'article introduit une deuxième dérive: le compte épargne-temps, propriété exclusive du salarié, devient un droit partagé avec l'employeur qui pourra décider unilatéralement de son utilisation. Désormais l'employeur pourra intervenir de manière unilatérale dans l'affectation du compte et se dispenser de payer en temps les heures de travail effectuées en supplément. De même, il pourra affecter des augmentations ou des compléments du salaire de base sur le compte épargne-temps du salarié. En outre, les conditions d'utilisation des droits affectés au CET, selon qu'ils le sont à l'initiative du salarié ou de l'employeur, pourront être différentes : les premières relèveront de l'accord collectif, les autres seront à la discrétion de l'employeur. Dernier aspect, et non des moindres, les modifications que vous apportez au compte épargne-temps visent manifestement à créer des passerelles entre ces comptes et des comptes épargne-retraite. Vous êtes décidément très attachés aux fonds de pension ! Car c'est bien de cela qu'il s'agit. Permettre au compte épargne-temps d'alimenter un plan d'épargne-retraite contribuera au démantèlement du financement des retraites par la solidarité nationale, ce que nous ne pouvons accepter. La principale modification apportée par le Sénat à cet article en est la parfaite illustration. Pour ces raisons, et bien d'autres sur lesquelles nous reviendrons, nous demandons par l'amendement 15 la suppression de cet article. Mme Martine Billard - L'amendement 33 a le même objet. La conception du compte épargne-temps qui inspire cet article n'a rien à voir avec les raisons initiales de sa création. Il avait pour but de permettre au salarié d'accumuler du temps qu'il pourrait, à un moment donné, utiliser pour une formation professionnelle, un congé parental, une préretraite, etc. Les modifications que vous introduisez aboutissent à une complète monétarisation du CET. Ce qui est cohérent avec l'idéologie que vous développez, et qui transparaît dans les déclarations de M. Sarkozy, aujourd'hui massivement approuvées sur les bancs de l'UMP. Quand on affirme en effet qu'il ne s'agit pas d'un déficit d'emploi, mais d'un déficit de travail, et qu'on propose donc d'augmenter la durée du travail de ceux qui sont aujourd'hui salariés, cela veut dire qu'on ne cherche pas à créer des emplois et à réduire le taux de chômage. Par cette proposition, comme par les propos de M. Sarkozy, vous montrez que le but du Gouvernement n'est pas de créer de l'emploi pour ceux qui n'en ont pas, mais de conduire ceux qui en ont à travailler plus. (Protestations sur les bancs du groupe UMP) Ce qu'on propose, c'est de ne pas réduire le chômage. En revanche, vous nous proposez de réduire, voire de supprimer les cotisations sociales patronales, au risque d'augmenter le déficit de l'UNEDIC et de l'assurance maladie. Et vous viendrez ensuite pleurer sur leur situation ! Votre politique ne vise finalement qu'à maintenir un volant de chômage suffisant pour peser sur les salaires. Voilà le sens de votre texte et de la monétisation du CET. Il ne s'agit pas de réduire le chômage, mais de faire pression sur les salaires. Or aucun pays d'Europe ne peut soutenir la comparaison avec les salaires qui sont payés en Chine ou au Vietnam. M. Xavier de Roux - Vous citez des régimes communistes... Mme Martine Billard - Je pourrais citer l'Inde... Nous n'avons aucune chance de concurrencer ces pays sur les salaires : la concurrence doit jouer sur d'autres terrains. Vous persistez pourtant à utiliser la menace des délocalisations et la peur du chômage pour faire diminuer les salaires et contraindre les salariés à travailler plus. M. Michel Liebgott - Notre amendement 44 vise également à supprimer cet article. Deux France s'opposent en réalité, celle des entreprises, qui seraient selon vous capables de rendre la vie meilleure aux Français, et la nôtre, où les entreprises sont au service des salariés et de la France. Votre proposition est finalement cohérente avec les textes adoptés ces six derniers mois. La loi de cohésion sociale a rendu plus difficile la recherche d'un emploi : elle a filialisé l'ANPE et exclu du système d'indemnisation un certain nombre de personnes, qui rejoignent ainsi la cohorte des érémistes. Bref, elle aggrave le chômage. Quant à ce texte, son objectif est clair. Le compte épargne-temps n'est plus destiné à permettre la récupération des heures de travail ou le repos des salariés, mais à dégager des sommes qui puissent être investies dans le système de retraites. L'article premier est destiné, à terme, à financer des systèmes de retraite complémentaire. La loi de cohésion sociale encourage de même la suspicion à l'égard des salariés en arrêt de travail. Tout est fait pour culpabiliser le salarié - il a la chance d'avoir du travail, et s'il veut le garder, il faut travailler plus - et exclure définitivement un certain nombre de demandeurs d'emploi, qui vont irrémédiablement glisser vers la précarité. Cette monétisation symbolisée par l'article premier est au cœur de votre projet politique. On est loin de l'esprit initial du dispositif, qui était de pouvoir travailler à temps partiel pour s'occuper de ses enfants ou tout simplement vivre mieux. L'entreprise pourra désormais tout exiger des salariés, et ceux-ci devront lui faire crédit : c'est le monde à l'envers ! On fait en sorte que les entreprises se portent mieux, pour mieux rémunérer les actionnaires. Les salariés n'en retireront aucun bénéfice, et ce ne sont pas les promesses faites aujourd'hui qui nous convaincront du contraire. M. le Rapporteur - Avis défavorable. L'objet de cet amendement est de supprimer la souplesse et la diversité qui sont les « marques de fabrique » du compte épargne-temps et qui répondent aux attentes de nos concitoyens et des entreprises. M. le Ministre délégué - L'article premier est un article essentiel... M. Maxime Gremetz - Pour qui ? M. le Ministre délégué - ...issu des réflexions conduites par Pierre Morange sur le compte épargne-temps. Nous ne pouvons donc être favorables à cet amendement. Vous avez évoqué les retraites, Monsieur Liebgott. Les retraites et les seniors ont justement fait partie des sujets abordés la semaine dernière à Londres par le G8 Emploi. Grâce à la réforme courageuse engagée par le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin, la France est l'un des rares pays du G8 à avoir sauvé son système de retraites par répartition. Nous souhaitons désormais renforcer le taux d'activité des seniors. Mais contrairement à ce qui se passe dans d'autres pays, où les seniors se voient contraints de compenser la modestie de leur retraite, ce ne sera pas un taux d'activité subi. M. Maxime Gremetz - Je ne peux pas vous laisser affirmer que le système de retraites par répartition est sauvé ! La réforme permet peut-être de partir à la retraite à soixante ans, mais avec quel montant de pension ? Avec une décote de 20% si l'on n'a pas cotisé assez ! Il faudra donc travailler plus pour avoir une retraite à taux plein, alors que des millions de chômeurs attendent du travail ! Alors que son chiffre d'affaires a augmenté de 8% pour atteindre 96 milliards de dollars, IBM France prévoit de supprimer 1 000 de ses 11 000 emplois et de mettre 500 salariés en préretraite. Allez-vous l'accepter, vous qui nous dites que les seniors ne travaillent pas assez ? Le système de retraites par répartition est loin d'être sauvé : les compagnies d'assurances le savent bien ! Les amendements 15, 33 et 44, mis aux voix, ne sont pas adoptés. M. Alain Vidalies - Dans la première version de la proposition de loi, il était question, au premier alinéa, d'accord collectif de branche « étendu ». Notre amendement 45 vise à rétablir cet adjectif car sa suppression est porteuse de dangers pour les salariés. Nous n'avions pas eu d'explications sur ce point ; peut-être le rapporteur et le ministre vont-ils maintenant pouvoir nous en fournir. M. le Rapporteur - Avis défavorable. Les arguments ont déjà été développés en première lecture ; je vous renvoie à la loi du 4 mai 2004. M. le Ministre délégué - Même avis. L'équilibre du dispositif repose non pas sur le contrôle qu'exerce l'administration lors de l'extension - qui peut toujours être demandée par les partenaires sociaux -, mais sur le fait que l'accord conclu est fondé sur un principe majoritaire, dans les conditions définies par la loi du 4 mai 2004. M. Alain Vidalies - Même M. Novelli sourit... L'amendement 45, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme Martine Billard - Mon amendement 34 est défendu. L'amendement 34, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Maxime Gremetz - Puisque vous avez refusé de supprimer cet article, il nous faut tenter de limiter les dégâts pour les salariés... Notre amendement 16 vise donc à subordonner la création du CET à un accord majoritaire, c'est-à-dire signé par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés, respectivement dans la branche, le groupe, l'entreprise ou l'établissement concerné, aux élections de représentativité organisées dans la branche dans des conditions fixées en Conseil d'Etat. Nous avons de la suite dans les idées, et la démocratie au cœur ! M. Alain Vidalies - Notre amendement 46 a le même objet : une véritable démocratie sociale repose sur le principe de l'accord majoritaire à tous les niveaux, lequel suppose des élections de représentativité. Le Gouvernement prétend qu'un grand pas a été fait avec la loi de mai 2004, mais je parlerais plutôt de tout petit pas, et surtout d'usine à gaz car il est extrêmement difficile de s'y retrouver ! En outre, le Gouvernement viole à la première occasion les principes de cette loi, puisque l'article 3 de ce projet pose déjà une dérogation ! M. le Rapporteur - Avis défavorable. Il n'y a pas lieu de remettre en cause les dispositions de la loi de 2004. De plus, on ne voit pas pourquoi la modification proposée ne concernerait que le compte épargne-temps. M. le Ministre délégué - L'article 132-2 du code ouvre déjà la possibilité de conditionner la validité d'un accord de branche ou d'entreprise à sa signature par des syndicats majoritaires soit en nombre, soit en voix. Avis défavorable, donc. Les amendements 16 et 46, mis aux voix, ne sont pas adoptés. M. Michel Liebgott - Non seulement ce texte dénature le compte épargne-temps, mais il ne fait plus référence au désir manifesté par le salarié d'en ouvrir un. Notre amendement 47 vise donc à recueillir l'accord écrit du salarié. M. le Rapporteur - Avis défavorable. La notion de volontariat est réaffirmée ; en outre la protection du salarié peut être assurée par l'accord collectif. M. le Ministre délégué - Défavorable. Ce texte ne remet nullement en cause le principe du volontariat du salarié, auquel d'ailleurs il existe déjà une exception, introduite par la loi Aubry 2 - l'utilisation collective du compte épargne-temps lorsque les caractéristiques des variations de l'activité l'exigent. M. Alain Vidalies - Vous ne répondez pas à la question soulevée par cet amendement : comment les éventuels conflits sur l'existence d'un accord de la part du salarié vont-ils se résoudre ? Un écrit est un moyen de preuve. M. Jean Le Garrec - La question soulevée par M. Vidalies est extrêmement importante. En effet, il y aura nécessairement des litiges, par exemple en cas de défaillance de l'entreprise ou de décès du chef d'entreprise... M. Hervé Novelli - Vous êtes catastrophistes ! Mme Martine Billard - Non, réalistes. M. Jean Le Garrec - Faites au moins référence au code civil, de façon que les litiges puissent être résolus. M. le Ministre délégué - La réponse que vous souhaitez figure dans le texte actuel du code du travail. Relisez-le. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) M. Alain Vidalies - Ce n'est pas une réponse. Enfin, cela fera du travail pour les avocats ! L'amendement 47, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme Martine Billard - L'amendement 35 limite à cinq ans le délai au cours duquel les droits à congé accumulés sur un compte épargne-temps peuvent être utilisés. J'en profite pour rappeler l'attachement des Verts à la conception initiale de ce compte, lequel ne saurait donc être monétisé. Je voudrais revenir aussi un instant sur l'analyse que fait de votre texte l'UIMM, qui le juge d'ailleurs - on peut s'en étonner -, imparfait... M. Hervé Novelli - Ce n'est pas elle qui l'a écrit ! Mme Martine Billard - Il ne répond pas, dit-elle, à l'impératif de redonner toute sa place au travail dans notre société et dénote une « vision passéiste du travail à l'heure », alors qu'il conviendrait, poursuit-elle, de « valoriser les capacités du salarié par le travail à la mission ». Encore heureux qu'elle ne propose pas de revenir au paiement à la pièce ou au boni ! Les patrons des bureaux d'études, suivis par beaucoup d'autres, bataillent depuis longtemps pour supprimer la notion même d'horaire et ont, hélas, obtenu satisfaction avec l'introduction du forfait à la journée -que nous avions dénoncée en son temps. Les salariés ont l'audace de demander que leurs heures ou leur journées supplémentaires de travail soient payées ! Voilà qui est insupportable pour les patrons de l'UIMM qui, magnanimes, acceptent de verser tout au plus « un complément de rémunération » pour les journées travaillées en plus ! Il est erroné, nous disent-ils, d'assimiler heures et journées supplémentaires - comme si une journée n'était pas composée d'heures ! -, et vont encore plus loin, expliquant « qu'il ne convient pas de ratiociner sur leur forfait en jours pour les non-cadres » ! Cette proposition de loi n'est qu'un premier pas. Si on vous laisse faire, vous risquez, durant les quelques années qui vous restent avant la prochaine grande échéance électorale, de supprimer le calcul horaire du temps de travail au profit du forfait à la journée, joliment dénommé « travail à la mission ». M. le Rapporteur - Avis défavorable. Cet amendement va à l'encontre de l'esprit même du texte qui privilégie la souplesse. M. le Ministre délégué - Avis défavorable. L'amendement 35, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Maxime Gremetz - Nous refusons que le compte épargne-temps soit dévoyé de sa mission première et puisse être converti en argent. D'où notre amendement 17. Vous ne manquez décidément pas d'imagination en matière de régression sociale pour suggérer aux salariés de revendre leur temps, s'ils trouvent leurs salaires trop bas ! La régression ne s'arrêtera d'ailleurs pas là si est adoptée la fameuse directive Bolkestein. A cet égard, vous seriez bien inspirés d'écouter le Conseil d'Etat qui, comme le rapporte Les Echos, estime que cette directive soulève d'importants problèmes juridiques, remettant en cause, outre le principe de souveraineté nationale, entre autres, le principe constitutionnel d'égalité devant la loi. Si vous demeurez sourds, plusieurs millions de Français, pour ne pas dire d'emblée la majorité - mais on s'en approche - vous diront prochainement ce qu'ils en pensent ! Mme Danièle Hoffman-Rispal - Notre amendement 49 est identique, visant à redonner son sens originel au compte épargne-temps. Vous auriez d'ailleurs dû en changer le nom puisque celui-ci devient un compte fourre-tout où l'on pourra accumuler n'importe quoi. Les salariés qui voudraient éventuellement travailler plus veulent gagner plus maintenant, pas dans cinq ou dix ans. Avec ce que vous proposez, ils travailleront plus pour gagner moins ! M. le Rapporteur - Avis défavorable. Cet amendement interdirait la monétarisation du compte épargne-temps, qui répond à la demande des salariés d'augmenter leur pouvoir d'achat. M. le Ministre délégué - Avis défavorable. Le Sénat a sanctuarisé la cinquième semaine de congés payés en interdisant qu'elle puisse être convertie en argent. Pour en revenir à votre intervention, Monsieur Gremetz, j'ai fait ce matin en Conseil des ministres une communication sur le travail illégal suite à la réunion le 18 juin dernier - la première depuis sept ans -, de la commission nationale de lutte contre le travail illégal. Nous avons engagé dans plusieurs secteurs, dont quatre prioritaires, 70 000 contrôles qui ont donné lieu à 6 000 procès-verbaux. L'une de nos préoccupations est de lutter contre les fraudes transnationales, au premier rang desquelles l'oubli de déclaration aux autorités du pays d'accueil lors de détachements, qui empêche tout contrôle ultérieur. La Pologne étant souvent montrée du doigt, j'ai diligenté fin janvier une mission de la DILTI à Varsovie de façon à instaurer des procédures de contrôle et à généraliser les téléprocédures, afin que l'obstacle de la langue ne puisse plus servir d'excuse. Vous le voyez, le Gouvernement partage vos préoccupations car il y va de l'intérêt bien compris des salariés bien sûr, mais aussi des entreprises, confrontées au dumping social. Certains salariés de ces pays, on le sait, ne touchent pas le salaire qui leur est dû. J'ai donc diligenté une enquête internationale sur ce sujet. La France n'entend pas céder à quelque forme de dumping social que ce soit : le Président de la République l'a rappelé solennellement hier, tant au président Juncker qu'au président de la Commission européenne. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) M. Maxime Gremetz - La majorité se réveille ! Mme Martine Billard - On ne peut que se féliciter de cette déclaration. Cela dit, vous savez que les salariés dont l'employeur multiplie les CDD - pratique contraire à la loi et qui introduit une forme de dumping social entre les entreprises - peuvent saisir les prud'hommes et demander la requalification de leur contrat de travail en CDI. Que pensez-vous alors de la proposition contenue dans le projet de loi de M. Jacob sur les PME qui tend à limiter cette possibilité à l'année suivant le premier contrat, ce qui est absurde, la durée des CDD successifs autorisés par la loi étant de dix-huit mois ? Les amendements 17 et 49, mis aux voix, ne sont pas adoptés. M. Maxime Gremetz - L'amendement 18, qui concerne le compte épargne-temps, tend à répondre à une question simple : que va récupérer le salarié qui aura placé du temps monétarisé ou de l'argent, sur l'initiative de son employeur ? Le Gouvernement dit se préoccuper du pouvoir d'achat des Français. Pourtant, depuis 2002, il stagne, celui du privé enregistrant même une baisse de 0,3%. Pour le garantir et éviter la spoliation des salariés, il semble donc indispensable d'indexer la rémunération différée des salariés sur les prix. M. Jean Le Garrec - Notre amendement 50 est identique. Tous ces amendements identiques des groupes socialiste et communiste prouvent à quel point le débat en première lecture a été utile. Le problème de la garantie du compte épargne-temps est essentiel. Pouvez-vous nous assurer que la décision unilatérale du patronat de ramener sa contribution à l'AGS de 0,45 à 0,35% ne constitue pas une pression sur le Gouvernement pour l'inciter à remettre en cause la clause de sauvegarde et faciliter les licenciements ? M. le Rapporteur - Défavorable. Le sujet relève de la négociation collective. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des députés communistes et républicains) De surcroît, les dispositifs proposés sont trop complexes. M. le Ministre délégué - Défavorable. S'agissant de l'AGS, les cotisations ont augmenté de 26%, pour atteindre l'équilibre. Quant aux plafonds, ils sont fixés par décret, et le Gouvernement n'entend pas les modifier. M. Maxime Gremetz - Et les pressions du Medef ? M. le Ministre délégué - Des pressions, des pressions... C'est comme l'atmosphère, il faut vivre avec. (Sourires) Les amendements 18 et 50, mis aux voix, ne sont pas adoptés. M. Michel Liebgott - L'évolution du compte épargne-temps ne manque pas d'inquiéter, et même Arcelor, basée dans ma région. Ce n'est pas qu'une question d'atmosphère, mais d'argent sonnant et trébuchant... Il convient donc de fixer des limites au dispositif, d'autant qu'il s'agit de crédit fait à l'entreprise par les salariés. C'est l'objet de l'amendement 51. M. le Rapporteur - Défavorable. M. le Ministre délégué - Même avis. L'amendement 51, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Maxime Gremetz - Une seule main s'est levée sur les bancs de l'UMP ! M. Alain Vidalies - Les amendements 53 et 55 sont défendus. Les amendements 53 et 55, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés. M. Maxime Gremetz - L'amendement 19 vise à supprimer le droit pour l'employeur de décider de l'utilisation du CET. Mme Martine Billard - L'amendement 36 est identique. Cela dit, je souhaite une réponse du ministre délégué sur la réforme prévue par le projet de loi de M. Jacob. Les salariés pourront-ils toujours s'adresser aux prud'hommes pour requalifier leurs CDD à répétition en contrat de travail à durée indéterminée ? M. Alain Vidalies - C'est une vraie question, qui appelle une réponse. Cela dit, votre texte impose à l'employeur de contracter une assurance pour garantir les droits du salarié. Qui vérifiera que l'employeur paye bien ses primes quand ce contrat d'assurance est privé ? En cas de dépôt de bilan de l'entreprise, comment le salarié pourra-t-il faire valoir ses droits, au-delà de la prise en charge par l'AGS, si l'employeur n'a pas souscrit de contrat d'assurance ? Votre texte ne résout pas cette difficulté. D'où notre amendement 56 identique aux deux précédents. Si, selon vous, le salarié doit être volontaire, qu'il le soit au moins en connaissance de cause en ayant mesuré tous les risques ! M. le Rapporteur - Avis défavorable. Ce point a été largement débattu en première lecture et les éléments relatifs au déclenchement de l'assurance suite à l'AGS sont précisés à l'article premier. M. Jean Le Garrec - Mais si l'employeur n'a pas souscrit de contrat d'assurance, que se passe-t-il ? M. le Ministre délégué - Le Gouvernement s'efforce de répondre à l'ensemble des interrogations. Au-delà de l'AGS, un décret permet le contrôle de l'Etat et la convention collective celui du corps social. M. Jean Le Garrec - C'est très beau ! M. le Ministre délégué - S'agissant de la question de Mme Billard, le Gouvernement a pour tradition de ne pas s'exprimer sur un texte qui n'a pas franchi la barrière du conseil d'Etat. La modification ne porterait que sur le délai dans lequel l'action de requalification peut être engagée. Vous aurez bientôt à en débattre. M. Alain Vidalies - M. Larcher, ne vous laissez pas faire ! Vous êtes le défenseur du code du travail. Les amendements 19, 36 et 56, identiques, mis aux voix, ne sont pas adoptés. M. Alain Vidalies - L'amendement 58 est défendu. L'amendement 58, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Maxime Gremetz - L'amendement 20 rectifié vise à contenir les dérives ouvertes par cette proposition de loi concernant l'utilisation du compte épargne-temps par l'employeur. Les droits accumulés sur ce compte ne doivent en aucun cas se substituer à un autre élément de rémunération. M. Alain Vidalies - L'amendement 59 identique est défendu. Les amendements 20 rectifié et 59, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés. M. Alain Vidalies - L'objectif affiché de ce texte, permettre au salarié de travailler plus pour gagner plus, est totalement contradictoire avec le dispositif qui permet à l'employeur de différer le paiement des heures supplémentaires dans certaines circonstances en les plaçant sur le compte épargne-temps. Pour retrouver un peu de cohérence, la majorité doit adopter cet amendement 60. L'amendement 60, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Alain Vidalies - Les amendements 63, 64 et 65 sont défendus. Les amendements 63, 64 et 65, repoussés par la commission et par le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés. M. Maxime Gremetz - En permettant l'utilisation à toutes fins du compte épargne-temps, vous le faites dériver vers un système assurantiel soutenu par un mécanisme d'incitation fiscale et sociale en faveur du plan d'épargne retraite collectif. En réalité, les salariés qui effectueront des heures supplémentaires au-delà du contingent légal feront crédit de leur rémunération à leur patron qui pourra la redistribuer aux actionnaires, dont il fait le plus souvent partie, et bénéficiera en plus d'exonérations de charges patronales et de dégrèvements fiscaux. En outre, le plan d'épargne retraite collectif étant le plus souvent géré à l'extérieur de l'entreprise, l'employeur pourra contourner ses obligations en matière de provisionnement. Ce compte épargne-temps n'est plus qu'un instrument de siphonnage des salaires. Il inspire, à juste titre, la méfiance des salariés. C'est ce qui justifie notre amendement 21. M. Jean Le Garrec - La majorité tient un double discours : il faudrait soutenir la consommation pour relancer le développement économique et ouvrir les négociations salariales mais le compte épargne-temps peut être alimenté sans limitation et être versé sur le plan de retraite collectif. Ce dispositif convient à M. Novelli car il sait que les conditions de travail sont telles que peu de salariés pourront cotiser 42 ans pour obtenir une retraite à taux plein. Ce texte propose un glissement dangereux d'une partie de la rémunération au compte épargne-temps et au plan de retraite collectif. Cet amendement 90 rectifié, identique au 21, vise donc à supprimer le mécanisme d'incitation fiscal et social introduit par amendement sénatorial. M. le Rapporteur - Avis défavorable. Les auteurs de ces amendements font un mauvais procès à l'initiative sénatoriale qui vise à conforter la diversité de fonction de ce compte épargne-temps et à permettre une meilleure solidarité entre les générations en sécurisant le régime de retraite par répartition (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste). M. le Ministre délégué - Je partage l'avis rapporteur. Le dispositif incitatif prévu est équilibré : l'exonération ne porte que sur l'abondement et non sur le principal (Interruptions sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains). M. Jean Le Garrec - Nous savons que cette proposition de loi sera adoptée conforme. Mais nous ne pouvons pas accepter que le rapporteur évoque la défense des salariés pour la faire passer. Ce texte prévoit une obligation d'épargne pour le salarié sur le compte épargne-temps ou le plan d'épargne retraite collectif ! Ces dernières années, l'endettement des entreprises a diminué de 3%, et comme le montre l'exemple de Total que j'ai développé tout à l'heure, les entreprises n'en ont pas profité pour faire des investissements ou augmenter les salaires mais pour mieux rémunérer les actionnaires. Dans ces conditions, comment demander aux salariés d'épargner pour l'avenir ? Voilà une contradiction de plus de votre proposition de loi. Les amendements 21 et 90 rectifié, mis aux voix, ne sont pas adoptés. M. Jean Le Garrec - L'amendement 67 est défendu. L'amendement 67, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme Martine Billard - L'amendement 41 est défendu. L'amendement 41, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. Les amendements 69 et 68 sont retirés. M. Jean Le Garrec - L'amendement 70 rectifié est défendu. L'amendement 70 rectifié, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Jean Le Garrec - Aujourd'hui, les entreprises et leurs salariés bougent beaucoup, disparaissent, se restructurent, se transfèrent... et la gestion du CET risque de devenir une véritable usine à gaz. Notre amendement 71 vise à prévoir - ou à tenter de le faire, car l'on sait bien que la tâche est immense - tous les cas de figure susceptibles d'affecter la réalisation des droits acquis au titre d'un CET. Il pose aussi le problème de la garantie de l'AGS et de l'assurance. M. le Rapporteur - Avis défavorable. Le souci de sécurisation des droits acquis est présent dans l'ensemble du texte, et votre préoccupation est donc satisfaite. M. le Ministre délégué - Même avis, d'autant que le texte apporte finalement plus de sécurité et de garanties que le CET n'en disposait auparavant. Nous progressons donc dans la défense des intérêts des salariés. L'amendement 71, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Maxime Gremetz - Par notre amendement 22, nous voulons que le plafond de garantie de l'AGS ne puisse pas être opposé au salarié pour la réalisation de ses droits acquis. En première lecture, il avait été dit que l'employeur devrait souscrire une assurance pour couvrir les montants dépassant le plafond, mais les chiffres évoqués nous semblent considérables pour les plus petites entreprises. Qu'en sera-t-il finalement ? Jusqu'où ira la garantie de l'AGS pour cette forme de salaire différé ? L'assurance sera-t-elle souscrite par l'employeur et sera-t-elle obligatoire ? Un fonds sera-t-il créé pour faire face aux conséquences d'éventuels sinistres et les partenaires sociaux seront-ils associés à sa gestion ? Le nombre de questions en suspens montre bien que les garanties élémentaires dues aux salariés constituent le volet de ce texte qui a le moins préoccupé ses auteurs. Nous veillons, par notre amendement, à éviter qu'ils ne soient une nouvelle fois pénalisés. M. Michel Liebgott - Notre amendement 78 est identique. Le système de garantie par l'AGS a été mis en place à une autre époque, en 1973, et dans son rapport écrit, notre rapporteur avait lui-même reconnu qu'il faudrait se poser la question de la garantie effective des droits acquis et de l'opposition éventuelle d'un plafond de garantie. A la vérité, votre projet n'est pas plus rassurant que vos réforme des retraites ou de la sécurité sociale : vous prétendez que les principes fondamentaux sont respectés, mais, au final, c'est toujours le salarié - ou l'assuré - qui paie ! L'AGS - gérée par le Medef - sera-t-elle en mesure d'assumer la charge que vous lui confiez ou envisagez-vous de la transférer à l'UNEDIC ? Le statut associatif de l'AGS - qui peut par conséquent se dissoudre à tout moment - ne constitue-t-il pas une menace ? M. le Rapporteur - La commission a repoussé ces amendements. Les dispositions de l'article premier témoignent de notre souci de protéger l'ensemble des droits acquis au titre du CET. Ainsi, en l'absence de garantie conventionnelle, c'est l'entreprise qui interviendra directement pour les garantir. M. le Ministre délégué - Nous avons déjà beaucoup échangé à ce sujet, et je m'engage à ce que les interrogations de M. Gremetz soient prises en compte dans le cadre de la préparation du décret, à laquelle les partenaires sociaux seront associés,... M. Jean Le Garrec - Très bien. M. le Ministre délégué - ...ce qui n'est que justice dans la mesure où les droits acquis appartiennent aux salariés. Les amendements 22 et 78, repoussés par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés. M. Michel Liebgott - L'amendement 72 est défendu. L'amendement 72, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. le Président - L'amendement 37 de Mme Billard tombe, du fait du rejet de l'amendement 67. L'article premier, mis aux voix, est adopté. M. Yves Simon - L'amendement 81 de M. Raison est défendu. L'amendement 81, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Maxime Gremetz - Notre amendement 23 vise à supprimer cet article, lequel tend à proroger jusqu'au 31 décembre 2008 la majoration de seulement 10% applicable à la rémunération des quatre premières heures supplémentaires. De prorogation en prorogation d'un dispositif qui n'avait vocation qu'à permettre aux entreprises de passer aux 35 heures dans de bonnes conditions, on fait un sort doublement défavorable aux salariés concernés : d'abord parce qu'ils ne bénéficient pas de la RTT - et le moins que l'on puisse dire est que le climat actuel n'incite pas les employeurs à l'appliquer ! -, ensuite parce que leur travail au-delà de la durée légale n'est pas rémunéré à sa juste valeur. Ces dispositions posent problème. Tout d'abord vous maintenez l'inégalité de rémunération des heures supplémentaires selon la taille de l'entreprise. J'en conviens, vous ne l'avez pas inventée ; mais faut-il pour autant continuer ? Cela fragilise votre thèse du « travailler plus pour gagner plus ». D'autre part, vous prorogez une disposition qui devait permettre aux entreprises de préparer leur adaptation aux 35 heures ; mais ce passage peut être détourné, non respecté. Pourquoi donc maintenir ce régime dérogatoire ? Nous proposons donc par l'amendement 23 de supprimer l'article 3. M. le Rapporteur - Défavorable. Je rappelle le caractère dérogatoire de ce dispositif, destiné à adapter le cadre de la réduction du temps de travail à la petite taille des entreprises concernées. M. le Ministre délégué - Même avis. Dans ce régime des très petites entreprises, ce sont environ 27% de leurs salariés qui ne sont pas couverts par un accord collectif, portant notamment sur ces sujets. Nous souhaitons qu'il y ait plus d'accords collectifs. La date du 31 décembre 2008 est une date butoir, avant laquelle nous voulons encourager la signature de tels accords. Car la clé de voûte, comme l'ont dit M. Novelli et le président Ollier, c'est la négociation collective. En outre, le rachat n'est possible que si l'employeur et le salarié s'entendent. Ce dispositif existera tant que l'entreprise n'aura pas mis en place un accord de compte épargne-temps, dont nous pensons qu'il doit être recherché. Voilà pourquoi nous ne pouvons approuver la suppression de l'article. M. Maxime Gremetz - 2008, n'est-ce pas après 2007 ? M. le Ministre délégué - Sur le plan calendaire, il me semble que oui (Sourires ) ; mais, malgré tout l'apport de la théologie, je ne suis pas en mesure de modifier le calendrier grégorien... L'amendement 23, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Michel Liebgott - Cet article est essentiel, car il concerne des entreprises dont on ne cesse de dire que ce sont celles qui créent le plus d'emplois. Je suis d'ailleurs un peu surpris que nous ne soyons plus très nombreux pour en traiter. Je suis étonné aussi que le groupe UDF, qui sur ce point semblait nous rejoindre et regretter qu'on maintienne cette discrimination entre grandes et petites entreprises, soit absent. Aujourd'hui, 10 millions de Français bénéficient des 35 heures : il y a eu des accords dans 330 000 entreprises, des emplois ont été créés, et quand la croissance repartira les 35 heures, si elles étaient encore en vigueur, permettraient d'en créer d'autres. Moins il y a d'heures travaillées, plus il peut y avoir partage du temps de travail, c'est évident. Pour notre part, nous préférons faire payer une prestation à quelqu'un qui travaille, plutôt que de l'indemniser sur des crédits sociaux. On peut souhaiter que le nombre des érémistes augmente ; nous préférons plus de salariés au travail, même si c'est pour 35 heures plutôt que 39, voire bientôt 40 ou 48... Nous n'avons manifestement pas la même conception du travail, de la société, ni du social. Pour ce dernier, il est vrai, ce sont les départements qui paient, et leur fiscalité s'impose à tout le monde, ce qui n'est pas le cas sur le plan national. On va donc faire payer les plus démunis pour les plus démunis, en essayant de préserver quelques castes et quelques entreprises. Ces dernières vivent d'ailleurs très bien les 35 heures. Arcelor, loin de s'en plaindre, avait même anticipé et ses bénéfices ont progressé de 800%. Les 35 heures vous traumatisent aujourd'hui beaucoup plus que les grandes entreprises, qui ne veulent pas revenir sur ce dispositif. M. Hervé Novelli - C'est de la provocation. Vous êtes le défenseur des grands trusts ! M. Michel Liebgott - Si vous défendez les petites entreprises, vous devriez faire en sorte qu'elles puissent bénéficier des mêmes dispositions que les grandes. Faute de quoi les salariés auront tendance à quitter les premières pour les secondes. Celles-ci voudront, pour préserver leurs profits, externaliser et sous-traiter. On verra se multiplier de petites entreprises chargées des tâches secondaires, avec des salariés mal payés, souvent à temps partiel et sur CDD, cependant que se dressera à côté une sorte d'aristocratie des entreprises. Voilà à quoi vous allez aboutir en prolongeant indéfiniment un système dérogatoire qui aurait dû prendre fin maintenant. Pour ces raisons nous proposons par l'amendement 79 de supprimer le I et le III de cet article. L'amendement 79, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme Martine Billard - Le sujet est d'importance, car nombre de nos concitoyens travaillent dans ces petites entreprises. Or leurs salariés subissent déjà beaucoup d'inégalités par rapport à ceux des grandes entreprises. Les salaires y sont souvent plus bas ; ils ont peu d'avantages sociaux, pas de restaurant d'entreprise par exemple, ce qui pèse sur leur revenu. Maintenir aussi longtemps l'inégalité dans le paiement des heures supplémentaires renforce encore cet état de fait. En outre, face à la clameur qui exige une augmentation des salaires, le nouveau ministre des finances annonce un développement de l'intéressement ; mais précisément celui-ci n'est généralement pas offert par les petites entreprises. Une nouvelle inégalité va donc s'ajouter à toutes les précédentes ! Être salarié d'une petite entreprise aujourd'hui, c'est être vraiment défavorisé. On peut y rester quand même si l'on n'a pas le choix, ou si l'on est vraiment passionné par son travail. Mais on constate une fuite vers les plus grandes entreprises ; les petites ont donc du mal à conserver un salariat compétent et expérimenté. Maintenir la différence de rémunération des heures supplémentaires est donc finalement un mauvais service à leur rendre. Nous proposons, par l'amendement 38, de remonter le taux de majoration des quatre premières heures de 10 à 25%. M. le Rapporteur - Défavorable, pour les mêmes raisons que Mme Aubry, du fait de la petite taille de ces entreprises. M. le Ministre délégué - Je rappelle que l'adaptation des petites entreprises à la loi Aubry n'a pas été simple. Au point qu'en octobre 2001 M. Jospin a pris un décret, pour tenir compte des difficultés rencontrées. Nous faisons œuvre de pragmatisme ; mais en même temps nous avons le souci de rendre plus attrayante pour les salariés l'entrée dans les PME. C'est pourquoi nous avons souhaité que la période de transition se prolonge. C'est pourquoi aussi, dans le cadre du contrat de reclassement personnalisé, nous avons essayé de réduire l'inégalité entre les salariés des petites et des grandes entreprises en cas de licenciement économique. Nous ne nous soucions pas des seuls salariés des grandes entreprises, mais de tous les salariés, notamment de ceux victimes des inégalités nées de l'application tant de la loi de modernisation sociale que des lois Aubry. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Mme Martine Billard - L'argumentation de M. le ministre pourrait être recevable pour les petites entreprises qui sont passées aux 35 heures ; mais ce n'est pas le cas de la majorité. Or votre proposition concerne toutes les entreprises. Il y a donc une faille dans le raisonnement. Mme Danièle Hoffman-Rispal - Je partage avec Mme Billard l'expérience du travail en petite entreprise. Quand j'ai quitté la mienne, elle n'était pas encore passée aux 35 heures, puisque la date butoir avait été fixée à 2002. La loi du 17 janvier 2003 l'a reportée au 31 décembre 2005, et vous la reportez maintenant au 31 décembre 2008. Cela fera donc huit ans de retard pour les salariés des petites entreprises, qui bénéficient déjà de moins d'avantages que ceux des grandes entreprises et dont les rémunérations sont inférieures. Cela risque de créer des difficultés de recrutement pour les petites entreprises. L'amendement 38, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme Martine Billard - Nous refusons que la renonciation à la réduction du temps de travail puisse être négociée directement entre l'employeur et le salarié sans attendre un accord collectif. Si le Sénat a préféré exclure les femmes enceintes de cette disposition, c'est bien parce que l'on connaît les risques que l'augmentation du temps de travail peut présenter pour la santé. Il faut revenir à des accord négociés qui permettent de prendre en considération les situations spécifiques comme celle des femmes enceintes ou des travailleurs handicapés. C'est ce à quoi tend l'amendement 39. M. Michel Liebgott - L'amendement 80 a le même objet. Nous n'avons décidément pas la même conception de l'entreprise. Passionné de cyclisme, je fréquente régulièrement les magasins de cycles. Là où le mécanicien est correctement payé, l'entreprise se développe ; là où le patron veut payer le moins possible, l'employé finit par s'en aller. Je pense aussi aux entreprises de peinture, qui ont beaucoup de mal à recruter du personnel qualifié. Reste que pour être patron, il ne suffit pas de maîtriser la technique : il faut aussi savoir gérer les relations humaines. La négociation ne peut pas être individuelle : il y faut un cadre, même dans les petites entreprises. M. le Rapporteur - Avis défavorable. Il faut s'adapter à la spécificité des très petites entreprises. Les amendements 39 et 80, repoussés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés. M. Maxime Gremetz - L'amendement 24 rectifié vise à instituer une protection pour le salarié qui, notamment dans une petite entreprise dépourvue de représentant du personnel, serait prié de renoncer de plein gré à des jours de RTT et refuserait cette offre. En effet, le texte ne prévoit aucune formalité pour finaliser l'accord entre le salarié et l'employeur. Il ne prévoit pas non plus la durée de cet accord, ni les conditions dans lesquelles le salarié peut y mettre un terme. Notre amendement ne fait qu'appliquer le parallélisme des formes avec la mesure proposée pour les heures supplémentaires. S'agissant du travail à temps partiel, l'article L. 212-4-3 du code du travail dispose en effet que « les heures complémentaires ne peuvent avoir pour effet de porter la durée du travail effectuée par un salarié au niveau de la durée légale du travail ou à la durée fixée conventionnellement. Le refus d'effectuer les heures complémentaires proposées par l'employeur au-delà des limites fixées par le contrat ne constitue pas une faute ou un motif de licenciement. Il en est de même, à l'intérieur de ces limites, lorsque le salarié est informé moins de trois jours avant la date à laquelle les heures complémentaires sont prévues. » Le refus d'une modification substantielle de son contrat de travail par un salarié à temps partiel ne constitue donc pas une faute ou un motif de licenciement. C'est pour accorder le même type de garanties au salarié qui refuserait de ne pas bénéficier de journées ou de demi-journées de repos qu'il faut expressément prévoir que ce refus ne peut constituer ni une faute ni un motif de licenciement. M. le Rapporteur - Avis défavorable. Cet amendement est superflu, puisqu'il vise un dispositif qui suppose le volontariat du salarié. (M. Gremetz proteste) M. le Ministre délégué - Si les heures supplémentaires sont à l'initiative de l'employeur, les heures choisies nécessitent l'accord du salarié. Avis défavorable. L'amendement 24 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme Martine Billard - L'amendement 40 est défendu. L'amendement 40, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme Danièle Hoffman-Rispal - L'amendement 89 est défendu. L'amendement 89, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. L'article 3, mis aux voix, est adopté. M. le Président - Je vous rappelle que la conférence des Présidents a décidé que les explications de vote et le vote par scrutin public sur l'ensemble de la proposition de loi auraient lieu le mardi 22 mars, après les questions au Gouvernement. M. Maxime Gremetz - Je me suis livré à un petit calcul du taux de présence des membres des différents groupes : UDF, 0% ; UMP, 2,5% ; PS, 2,5%, et PCF, 5% ! (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Mme Martine Billard - Et Verts, 33% ! (Sourires) Prochaine séance, mardi 22 mars, à 9 heures 30. La séance est levée à 19 heures 25. Le Directeur du service ORDRE DU JOUR NEUF heures TRENTE : 1re SÉANCE PUBLIQUE 1. Questions orales sans débat. 2. Fixation de l'ordre du jour. QUINZE HEURES : 2e SÉANCE PUBLIQUE 1. Questions au Gouvernement. 2. Explications de vote et vote, par scrutin public, sur l'ensemble de la proposition de loi portant réforme de l'organisation du temps de travail dans l'entreprise, en deuxième lecture. 3. Discussion de la proposition de loi, adoptée par le Sénat (n° 1287), relative à la création du registre international français. Rapport (n° 2039) de M. Jean-Yves BESSELAT, au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. Avis (n° 2035) de M. René COUANAU, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. VINGT ET UNE HEURES TRENTE : 3e SÉANCE PUBLIQUE Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance. |
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