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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU JEUDI 13 MARS 2003

COMPTE RENDU INTÉGRAL
2e séance du mercredi 12 mars 2003


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. MARC-PHILIPPE DAUBRESSE

1.  Allocation personnalisée d'autonomie. - Discussion d'une proposition de loi adoptée par le Sénat «...».

Rappels au règlement «...»

M. Jean-Marie Le Guen, Mme Muguette Jacquaint, M. Denis Jacquat, vice-président de la commission des affaires culturelles.

Ouverture de la discussion «...»

M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat aux personnes âgées.
M. Georges Colombier, rapporteur de la commission des affaires culturelles.

EXCEPTION D'IRRECEVABILITÉ «...»

Exception d'irrecevabilité de M. Jean-Marc Ayrault : MM. Jean-Marie Le Guen, Denis Jacquat, Mmes Hélène Mignon, Muguette Jacquaint, M. Yvan Lachaud. - Rejet.
M. le secrétaire d'Etat.

QUESTION PRÉALABLE «...»

Question préalable de M. Jean-Marc Ayrault : Mme Danièle Hoffman-Rispal, MM. le secrétaire d'Etat, Yves Bur, Mme Catherine Génisson, M. Yvan Lachaud, Mme Muguette Jacquaint. - Rejet.
M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles.

DISCUSSION GÉNÉRALE «...»

Mme
Marie-Françoise Pérol-Dumont,
MM.
Yvan Lachaud,
Michel Vaxès,
Denis Jacquat,
Michel Vergnier,
Bernard Derosier.
Renvoi de la suite de la discussion à une prochaine séance.
2.  Dépôt d'une proposition de loi organique «...».
3.  Dépôt d'une proposition de résolution «...».
4.  Dépôt de rapports «...».
5.  Dépôt de rapports sur des propositions de résolution «...».
6.  Ordre du jour des prochaines séances «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE
DE M. MARC-PHILIPPE DAUBRESSE,
vice-président

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

1

ALLOCATION PERSONNALISÉE D'AUTONOMIE

Discussion d'une proposition de loi adoptée par le Sénat

    M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, portant modification de la loi n° 2001-647 du 20 juillet 2001 relative à la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et à l'allocation personnalisée d'autonomie (n°s 642, 685).

Rappels au règlement

    M. Jean-Marie Le Guen. Je demande la parole pour un rappel au règlement.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour un rappel au règlement.
    M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le président, je souhaite protester d'une façon très solennelle contre l'organisation de nos travaux. La discussion de cette proposition de loi ne devait commencer que demain et, d'une façon impromptue - s'agissant de ce texte, cela ne nous surprend qu'à moitié -, l'ordre du jour a été bouleversé, nous conduisant à débattre ce soir.
    De ce fait, certains de nos collègues ne peuvent pas être présents, notamment Mme la vice-présidente, Paulette Guinchard-Kunstler, qui devait être notre principale oratrice sur ce texte. Je tiens à dire ici que ce ne sont pas des façons de travailler convenables pour notre assemblée.
    M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.
    Mme Muguette Jacquaint. Je m'associe aux protestations de M. Le Guen s'agissant de nos conditions de travail.
    9805La semaine dernière, il n'était prévu d'examiner le présent texte qu'à partir de demain, jeudi 12 mars. Nous avons tous - que nous soyons présents ce soir ou non - des engagements à respecter : nous avions pris des rendez-vous et nous avons aussi du travail dans nos circonscriptions. Il faut le dire : bousculer ainsi l'ordre du jour de l'Assemblée, c'est manquer de respect à l'égard des parlementaires !
    M. le président. La parole est à M. le vice-président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.
    M. Denis Jacquat, vice-président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Nous aussi, nous nous sommes inquiétés de ce changement de notre ordre du jour. Mais le président de la commission, M. Dubernard, nous a précisé, il y a quelques instants, en commission, que c'était à la demande de l'ensemble des présidents des groupes, dont les vôtres, madame, monsieur, que la discussion de cette proposition avait été avancée de vingt-quatre heures. Pour l'opposition comme pour la majorité, cela entraîne des bouleversements. Mais la décision a été prise à l'unanimité.
    M. Jean-Marie Le Guen. A la demande des présidents de groupes, ou avec leur accord ?
    M. le président. Il est pris acte de vos protestations. Tous les mardis, une conférence des présidents réunit le président, les vice-présidents et les présidents de groupe. La modification de l'ordre du jour prioritaire - ce qui arrive de temps en temps - a fait l'objet d'une communication du président Debré et n'a pas suscité de protestations de la part de vos présidents de groupe. En conséquence, l'ordre du jour a été ainsi modifié, comme le veut l'application normale de notre règlement.

Ouverture de la discussion

    M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées.
    M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je voudrais tout d'abord saluer l'excellent travail de votre rapporteur, Georges Colombier, et je tiens à remercier le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, Jean-Michel Dubernard, ainsi que celui de la commission des finances, Pierre Méhaignerie, pour leur implication active dans ce dossier.
    La proposition de loi qui nous réunit aujourd'hui est un texte d'ajustement, un texte d'urgence, destiné tout simplement à sauvegarder, je dirai même à sauver l'APA, en se donnant les moyens d'assurer, en 2003, son équilibre financier.
    M. Michel Vergnier. En 2003 ? Bravo !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Il s'agit d'une première étape. Elle sera suivie d'une seconde étape, à la fin de l'année 2003 - comme d'ailleurs la loi le prévoit - visant, sur la base des enseignements tirés des évaluations en cours, à assurer l'avenir de la prestation.
    Permettez-moi, avant d'entrer dans le vif du sujet, de saisir l'opportunité que j'ai de m'adresser à vous pour vous présenter succinctement les grands axes de notre politique pour les personnes âgées.
    Douze millions de personnes ont aujourd'hui plus de soixante ans dans notre pays. Elles représentent plus de 20 % de la population. Elles seront dix-sept millions en 2020. Dès 2010, les Français de plus de soixante ans seront plus nombreux que ceux de moins de vingt ans.     Notre société est confrontée à un phénomène nouveau, et d'une très grande ampleur, celui de l'allongement de la vie. Il va modifier en profondeur les besoins économiques et sociaux. Faute d'anticipation, un décalage inquiétant est apparu entre les réponses mises en oeuvre par les pouvoirs publics et les besoins et les attentes croissantes des populations concernées.
    Une prise de conscience générale des enjeux s'impose aujourd'hui. Nous devons mettre la politique de notre pays davantage en phase avec sa démographie. Nous devons apporter une réponse globale à l'ensemble des défis auxquels nous avons à faire face.
    Nous avons fixé quatre grandes orientations, destinées à couvrir toute la diversité des situations des seniors et des personnes âgées.
    La première de ces orientations vise à promouvoir une société pour tous les âges. Une société pour tous les âges, c'est une société où chacun, quel que soit son âge, peut s'investir et participer à la vie politique, économique et sociale. Nous voulons permettre aux seniors de conserver une part active dans la société, grâce, notamment, au bénévolat et au volontariat, que nous entendons développer. Une société pour tous les âges, c'est aussi une société où les générations conservent des liens étroits entre elles. Nous devons promouvoir le rapprochement, l'échange et la solidarité entre les générations.
    Notre deuxième axe d'action a pour but de permettre à chacun de réussir son vieillissement. Pour bien vieillir, il faut savoir anticiper son avancée en âge. C'est l'objectif du programme « bien vieillir » que nous avons lancé, avec le Premier ministre et le ministre des sports, et auquel une quinzaine de villes sont associées cette année.
    Développer les droits des personnes âgées constitue notre troisième grande orientation. Il s'agit de préserver leur liberté de choix, d'améliorer l'appréciation de leurs besoins et de mieux les orienter.
    Lutter contre la maltraitance des personnes âgées qui touche près de 15 % des plus de soixante-quinze ans, est l'une de nos principales priorités. Nous avons installé, le 19 novembre dernier, un comité national de vigilance, fer de lance de notre plan de lutte dans ce domaine. La dignité de nos anciens doit être absolument respectée.
    Une société doit protéger les plus faibles : ses enfants, bien sûr, mais aussi les personnes âgées.
    M. Michel Vergnier. Ce n'est pas ce que vous allez faire !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Pardon, ce n'est pas ce que vous avez fait, mais c'est ce que nous allons accomplir !
    Mon quatrième axe d'action vise à améliorer l'offre de prise en charge des personnes âgées en perte d'autonomie. Nous allons renforcer la proximité des politiques en faveur des personnes âgées, faciliter le maintien à domicile, encourager l'essor et l'adaptation d'une offre d'accueil diversifiée et poursuivre l'amélioration de la qualité des établissements.
    Depuis notre arrivée au Gouvernement, nous avons accéléré le rythme des signatures des conventions.
    M. Michel Vergnier. Ne dites pas cela !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Ainsi, alors que 330 conventions ont été signées en 2000-2001, 1 100 l'ont été en 2002, de juin 2002 lorsque nous sommes arrivés à décembre 2002 nous en avons signé près de 700. Vous, vous en avez signé 330 en deux ans et vous nous donnez des leçons !
    M. Michel Vergnier. Combien de temps faut-il pour les préparer ?
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. J'ajoute que 1 800 conventions seront négociées et signées dès cette année.
    Une autre de nos priorités vise à améliorer l'accompagnement des personnes âgées atteintes de la maladie d'Alzheimer : 750 places de séjour temporaire et 1 750 places d'accueil de jour seront créées en 2003. Nous avons également mis en place une « instance prospective Alzheimer », composée de gens du terrain, chargée de mieux définir les besoins des malades et de leurs familles et de faire émerger des formules innovantes de service et d'hébergement.
    Enfin, et c'est la raison pour laquelle nous sommes réunis ce soir, nous allons sauvegarder l'allocation personnalisée d'autonomie. Il nous faut sauver l'APA ! Cette sauvegarde est difficile, mais elle est indispensable. Le nombre de personnes très âgées augmente fortement. D'ici à 2040, le nombre des plus de 85 ans doublera de 1,2 million à 2,4 millions. Or le grand âge est facteur de dépendance. Celle-ci concerne une personne de plus de 80 ans sur dix, une personne de plus de 85 ans sur quatre, et une personne de plus de 90 ans sur trois. Malgré les gains d'espérance de vie sans incapacité, tous les scénarios montrent que le nombre de personnes âgées dépendantes augmentera de manière importante dans les années à venir : de 25 % environ d'ici à 2020 et de 55 % d'ici à 2040.
    Les enjeux auxquels nous sommes confrontés sont donc particulièrement importants.
    L'enjeu est tout d'abord humain. On ne peut rester insensible à l'isolement, à la détresse, au sentiment de dignité perdue qui frappent plus d'un million de personnes fragilisées par l'âge et la maladie, et confrontées à la perte progressive de leur autonomie. Nous devons les entourer de soins, de présence, d'affection, les accompagner et les soutenir.
    L'enjeu est social ensuite, car la personne âgée n'est pas seule concernée : sa famille l'est également. Or, l'on sait la place éminente qu'occupent les familles dans la prise en charge des personnes âgées dépendantes. A cela s'ajoute une multiplicité d'intervenants, d'établissements, d'associations et de services qui viennent en aide à ces personnes.
    C'est dire si l'enjeu est économique aussi, et chacun sait l'impact de cette politique sur l'emploi.
    L'enjeu est financier, bien sûr, et j'y reviendrai dans un instant.
    Enfin l'enjeu est politique, et je dirais même philosophique, car notre humanité se mesure à la qualité de la prise en charge de nos aînés les plus fragiles.
    Mme Hélène Mignon. Dans ce cas, vous n'avez rien compris !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. L'importance de ces enjeux rend d'autant plus préoccupante la montée en charge très rapide de l'APA, bien plus rapide que prévu,...
    M. Michel Vergnier. Parce que c'était une très bonne loi !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. ... et largement sous-estimée par nos prédécesseurs.
    M. Michel Vergnier. Vous manipulez les chiffres !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. On comptait 642 000 bénéficiaires d'une prestation dépendance à la fin de l'année 2002 ; on en prévoit 850 000 en 2003,...
    M. Augustin Bonrepaux. Les prévisions étaient justes !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. ... alors que nos prédécesseurs calaient leurs perspectives financières sur le chiffre de 500 000 à 550 000 bénéficiaires en 2002-2003, et 800 000 à l'horizon 2005-2006.
    M. Augustin Bonrepaux. C'est bien la preuve que c'est un succès ! Soyez honnête !
    M. Michel Vergnier. Vous voyez bien que les prévisions étaient justes !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. C'est vrai, à 300 000 personnes près !
    M. Michel Vergnier. C'est faux ! Vous venez de le dire !
    M. Augustin Bonrepaux. C'est la rançon du succès !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Cette rapide progression du nombre de bénéficiaires traduit bien sûr un réel besoin.
    Mme Hélène Mignon. Voilà !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Mais il est aussi la conséquence de conditions d'ouverture des droits insuffisamment maîtrisées.
    Quelques chiffres, issus du plus récent bilan de l'APA pour 2002, rendent clairement compte de cette montée en charge très rapide : 1,43 million de demandes ont été déposées sur les bureaux de nos départements à la fin de l'année dernière, 782 000 décisions ont été rendues : le taux moyen de rejet est de 18 %, 23 % à domicile et 8 % en établissement.
    M. Augustin Bonrepaux. Vous mettez en cause les médecins ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. La part du GIR 4 progresse régulièrement : 31 % fin mars, 35 % fin juin, 38 % fin septembre et 41 % fin décembre. Le plan d'aide moyen s'élève à 516 euros à domicile, avec une participation moyenne du bénéficiaire de 5 %. En établissement, le tarif dépendance moyen s'élève à 416 euros, pris en charge à hauteur de 30 % en moyenne pour l'usager.
    En 2002, les dépenses pour l'APA se sont élevées au niveau national à près de 1,850 milliard d'euros.
    M. Bernard Derosier. Quelle est la part de l'Etat ?
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Nous allons y venir.
    Certes, ce montant est globalement inférieur au plan de financement prévisionnel de 2,5 milliards d'euros. Il est d'ailleurs sans doute minoré en raison de l'incidence des demandes en instance dans certains départements.
    Pour 2003, les dépenses feront un bond en avant, avec une prévision de 3,7 milliards d'euros, qui dépasse de 1,2 milliard d'euros, soit d'un tiers, le montant initialement prévu.
    Mme Hélène Mignon. Eh oui !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Il fallait, mes chers collègues...
    M. Michel Vergnier. Nous ne sommes pas ministres !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. ... mes chers amis, réagir sans attendre et faire face, dans une situation budgétaire particulièrement tendue, la plus mauvaise croissance des vingt dernières années. Vous avez eu le vent dans le dos, nous l'avons de face. (Rires sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Augustin Bonrepaux. La pente est dure ! (Sourires.)
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Vous avez eu le vent dans le dos, vous n'en avez pas profité ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains). Vous avez dilapidé la croissance, comme déjà par le passé.
    M. Jean-Marie Le Guen. C'est votre faute ! Dès que vous arrivez, la croissance s'enfuit ! Rien qu'à vous voir, ça va mal !
    M. Augustin Bonrepaux. C'est pour cela que vous taxez les petits pour faire des cadeaux aux riches ?
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Une concertation a été engagée dès cet été avec l'assemblée des départements de France. A la demande du Premier ministre, des réunions ont été organisées au cours des mois de novembre et décembre derniers pour trouver une solution au dérapage financier occasionné par nos prédécesseurs.
    M. Michel Vergnier. Arrêtez donc de dire des bêtises !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. A l'issue de cette concertation, le principe d'un effort partagé pour couvrir le besoin de financement de 1,2 milliard d'euros a été retenu.
    M. Jean-Louis Idiart. Ce sont des girouettes !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. L'Etat apportera ainsi une contribution complémentaire de 400 millions d'euros.
    M. Augustin Bonrepaux. Grâce à l'emprunt ! On racle les fonds de tiroir !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Les départements seront sollicités pour un montant équivalent. Des aménagements seront mis en oeuvre, qui seront sources d'économies...
    M. Jean-Marie Le Guen. Et ce sont les générations futures qui paieront l'APA !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. ... sans dénaturer la mesure et en lui conservant son caractère universel.
    M. Michel Vergnier. Supprimez l'universalité !
    M. Jacques Le Guen. Quelle mauvaise foi, ces socialistes !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Ces aménagements nous permettront d'instaurer un lien plus marqué entre le versement de la prestation et l'effectivité de l'aide, et d'ajuster le barème de participation. Le réajustement du barème fera l'objet d'un projet de décret en cours d'adoption. Il est guidé par deux préoccupations.
    M. Jean-Marie Le Guen. D'abord régression sociale !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Tout d'abord, il convient d'établir un meilleur équilibre entre l'APA versée à domicile et l'APA versée en établissement. A domicile, la participation moyenne est aujourd'hui de 5 %. En établissement, elle est proche de 30 %. Le nouveau barème portera la participation moyenne à domicile à 12 %.
    Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont. Nivellement par le bas !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Si vous pensez que faire du social, c'est faire de la publicité démagogique...
    M. Jean-Marc Roubaud. Ils sont spécialistes !
    Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont. Ce sont les départements qui l'ont fait !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. ... six mois avant les élections, pour mettre en avant cette bonne mesure sociale, vous vous trompez. Le social, ce n'est pas cela.
    M. Jean-Marie Le Guen. Vous avez raison : soyons discrets sur les bonnes mesures sociales !
    Mme Muguette Jacquaint. Vous ne faites pas de publicité pour les plans sociaux !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Ensuite, il faut contribuer à maintenir l'équilibre indispensable du plan de financement que nos prédécesseurs avaient largement sous-évalué. L'effort demandé préserve les revenus les plus faibles.
    Près de 40 % des bénéficiaires dont le revenu mensuel déclaré est inférieur à 623 euros ne verseront demain, comme aujourd'hui, aucune participation.
    M. Patrick Beaudouin. En effet, il faut le dire !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Près de 30 % des bénéficiaires dont le revenu mensuel se situe entre 624 euros et 900 euros verseront une participation variant de 0 à 9 % environ du plan d'aide. La participation des personnes disposant des revenus les plus élevés - vous ne serez pas contre - passera de 80 à 90 %.
    La base de ressources prise en compte pour le calcul de la participation exclut certains revenus, tels que le minimum vieillesse, les revenus de l'épargne, le livret A, le CODEVI, le PEP, l'allocation logement, les retraites d'anciens combattants ou de veuves de guerre.
    M. Jean-Marie Le Guen. Assumez cette répartition sociale ! Diffusez des tracts ! Communiquez !
    M. le président. Monsieur Le Guen, vous aurez largement le temps de vous exprimer. Laissez parler M. le secrétaire d'Etat.
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Oh, mais ces interruptions ne me gênent pas, monsieur le président. (Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Je suis habitué à ce type de vociférations. Je pratique ces messieurs depuis tant d'années dans mon département : moi, dans la majorité et eux dans l'opposition.
    Je rappelle, enfin, que la participation résultant de ce nouveau barème restera dans la plupart des cas inférieure à celle qui est appliquée de longue date en matière d'aide ménagère, et que toutes ces mesures ne sont pas rétroactives.
    Les autres mesures de l'accord sont mises en oeuvre par la proposition de loi que nous allons discuter ce soir. Le Gouvernement souscrit aux objectifs de ce texte. Le premier vise à renforcer le caractère de prestation en nature et affecté de l'APA, tout en préservant le libre choix de la personne âgée. L'APA étant une prestation en nature, elle doit être intégralement utilisée pour couvrir les dépenses prédéfinies dans le plan d'aide. Le versement en espèces n'est là que pour garantir à la personne âgée le libre choix, selon qu'elle souhaite procéder de gré à gré ou recourir à un service mandataire ou prestataire. Le texte renforce les moyens dont les départements disposent pour garantir l'effectivité de la prestation.
    Le deuxième objectif du texte auquel le Gouvernement souscrit vise à organiser une prise en charge partagée du besoin de financement complémentaire pour 2003 évalué à 1,2 milliard d'euros. L'Etat a, pour sa part, fait le choix de l'emprunt et s'engage à le rembourser.
    Enfin, le troisième objectif de la proposition de loi consiste à apporter une aide spécifique aux départements les plus en difficulté du fait du poids de leur population âgée et de la faiblesse de leur potentiel fiscal.
    Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont. Mais c'est par un emprunt ! Ce n'est que pour un an !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Un emprunt que nous allons rembourser, madame ! (Sourires.)
    Il s'agit donc bien, avec le projet de décret sur le barème, de sauvegarder l'APA, en garantissant le financement pour 2003 sans attendre le débat ultérieur sur le bilan global de la loi ; en conciliant la double exigence de maîtrise de la dépense et de la fiscalité pour les départements, et de réponse aux besoins réels. Nous aurons ainsi sauvegardé l'APA.
    M. Jean-Marc Roubaud. Bravo !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Il faut également parler des engagements du Gouvernement. Ce texte n'a pas la prétention de tout régler, ni celle de garantir définitivement le financement de la prestation. C'est un texte d'urgence, destiné à venir en aide aux collectivités départementales qui assurent aujourd'hui, en moyenne, 57 % du financement de la prestation. C'est un texte d'autant plus urgent que l'efficacité des mesures qu'il prend dépend, pour 2003, de la rapidité de leur mise en oeuvre.
    Nous savons tous que les départements auront voté leur budget le 31 mars. Il était donc urgent de leur donner des informations précises. Les réponses que nous allons leur apporter sont largement supérieures à celles qu'ils avaient reçues jusqu'à présent.
    Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont. Vous êtes le seul à le penser !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Dans la répartition que nous leur avons adressée, 80 % d'entre eux voient leur participation passer à 50 %, l'Etat finançant les 50 % restants, alors que la loi que vous avez mise en place taxait les départements aux deux tiers, le tiers restant étant l'apport d'Etat.
    Réunis pour faire face à une situation d'urgence, les participants à la concertation de l'automne dernier ont souhaité privilégier une démarche à deux temps. Le premier temps correspond à la recherche d'un financement complémentaire et d'aménagements générateurs d'économies. Grâce aux dispositions de cette proposition de loi et du projet de décret qui ajuste le barème - à cet égard, le Gouvernement s'engage, dans le cadre du groupe de travail entre l'Etat et l'assemblée des départements de France, à réaliser un bilan des économies qui résulteront du dispositif dont nous discutons et du projet de décret en cours d'adoption - ; à arrêter de nouvelles économies si ce dispositif ne permettait pas d'assurer celles prévues par l'accord, soit 400 millions d'euros en année pleine ; à tirer les conséquences des travaux du groupe de travail sur le GIR 4, dont les conclusions doivent être remises prochainement ; à examiner les modalités de facturation de l'APA en établissement, ainsi que les relations avec l'assurance maladie.
    Dans un second temps, nous nous livrerons à un examen plus approfondi de la loi, conformément au calendrier prévu par celle-ci. Cet examen ne peut, en effet être efficace que s'il s'appuie sur une durée d'application suffisamment longue de la loi. Il nous faut du recul pour pouvoir bien apprécier les correctifs indispensables.
    M. Michel Vergnier. Vous ne pouvez pas faire ça aujourd'hui ?
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. L'inspection général des affaires sociales, l'inspection générale de l'administration et l'inspection générale des finances effectuent actuellement une évaluation d'ensemble du dispositif. Un comité scientifique procède, dans le même temps, à une expertise de la grille AGGIR.
    Le Gouvernement pense qu'il est nécessaire d'attendre que l'ensemble de ces évaluations lui soit remis avant d'engager un débat plus approfondi sur le dispositif de l'APA.
    M. Michel Vergnier. C'est ce que nous pensons aussi !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Nous pourrons alors engager, au second semestre de cette année, une réflexion sur les modalités d'un financement assuré et pérenne de l'APA. C'est la raison pour laquelle nous nous félicitons que la proposition de loi ne bouleverse pas les équilibres actuels.
    Pour conclure, et avant d'écouter vos interventions, je tiens à rappeler les progrès de l'effort consenti par la nation en direction des personnes âgées dépendantes. Il se traduit par une progression des dépenses publiques en faveur de l'autonomie, qui étaient de 1 milliard d'euros en 2001, qui sont passées à 1,9 milliard d'euros en 2002 et seront de 3 milliards d'euros en 2003, mais aussi par la promotion d'une offre de service de qualité à domicile grâce au récent agrément de l'accord salarial de la branche aide à domicile. Cet agrément va permettre à plus de 80 000 personnes d'obtenir en quatre ans une amélioration très significative de leur situation salariale - plus de 23 %. L'emploi dans ce secteur sera développé, avec une progression de 40 000 salariés environ, grâce à de meilleures formations et de réelles perspectives de carrière. C'est toute une profession, ô combien méritante, qui se voit ainsi reconnue ; c'est aussi notre manière à nous de faire du social.
    Notre ambition est donc de répondre aux besoins réels, tout en veillant à une meilleure maîtrise de la dépense et en réaffirmant le principe d'une gestion décentralisée et de proximité pour ajuster au mieux les réponses aux besoins des personnes.
    Notre objectif est clair : poursuivre la construction d'une réelle politique en faveur des personnes âgées. Les chiffres que je viens de citer l'attestent. Mais il nous faut construire cette politique sur des bases solides, notamment celles de la responsabilité : nous ne pouvons accepter les dérives financières qui nous ont été léguées, pas plus qu'un alourdissement excessif de la fiscalité locale qui s'effectue, notamment, au détriment des personnes âgées.
    C'est pourquoi le Gouvernement soutient la proposition de loi aujourd'hui en discussion.
    Tels sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, les commentaires dont je souhaitais vous faire part en préambule de notre discussion. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.
    M. Georges Colombier, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, au moment où fut votée la loi qui l'instituait, le principe d'une allocation personnalisée d'autonomie fut bien accueilli par la représentation nationale. Loin de jouer les Cassandre, l'opposition de l'époque, dont je faisais partie, avait cependant critiqué le mode de financement indigent proposé par le précédent gouvernement. Force est de constater que le temps nous a donné raison et qu'il nous faut à présent remédier d'urgence à cette carence.
    Alors que la loi du 20 juillet 2001 relative à la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et à l'allocation personnalisée d'autonomie n'a pas deux ans, cette nouvelle allocation - qui a succédé à la prestation spécifique de dépendance - est déjà victime de son succès. Depuis plusieurs mois, on entend parler de la nécessaire réforme du financement de cette aide. Aujourd'hui, nous voilà contraints d'en assurer la viabilité financière pour l'année 2003, dans l'attente d'une solution plus pérenne que nous serons amenés à discuter dès l'automne prochain.
    Si besoin était, la mise en place de cette allocation a prouvé l'existence d'une réelle attente de plusieurs centaines de milliers de personnes. Cependant, la création de l'APA s'est accompagnée de sérieuses incertitudes portant notamment sur le nombre potentiel des allocataires et sur son financement. L'histoire a malheureusement confirmé ces craintes, puisque le nombre de dossiers déposés et de plans d'aide financés est aujourd'hui très supérieur à celui prévu par le gouvernement au moment de l'examen de la loi avec, pour principale conséquence, une déstabilisation des finances des départements et un important besoin de financement.
    La situation est telle que l'adoption de mesures d'urgence, propres à assurer le financement de l'APA en 2003, s'avère indispensable. C'est l'objet du présent texte qui ne peut qu'être considéré comme une disposition transitoire. En effet, une réflexion plus large doit être conduite, notamment à la lumière du rapport du Gouvernement prévu par l'article 15 de la loi portant création de l'APA et du rapport du fonds de financement de l'APA.
    La création de la prestation personnalisée d'autonomie a constitué une avancée qu'il faut saluer, et je ne m'en étais pas privé à l'époque. Cette mesure avait su éviter deux écueils qui en auraient bridé l'efficacité : le recours sur succession et l'exclusion des personnes âgées dépendantes en GIR 4.
    N'en faisons pas mystère, chacun sait parfaitement que tout mécanisme de recours sur succession est fortement dissuasif et laisse dans l'ombre de nombreuses personnes âgées qui préfèrent ne pas se faire connaître, car le sacrifice posthume est trop lourd à assumer. Bien que les fondements théoriques du recours sur succession puissent se défendre, ses conséquences sur le terrain sont trop lourdes. Les personnes dépendantes qui ne demandaient pas la PSD parce qu'elles avaient peur du recours sur succession étaient-elles moins dépendantes que celles qui acceptent aujourd'hui l'APA ?
    Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont. C'est vrai !
    M. Georges Colombier, rapporteur. Non, bien entendu. On ne peut pas en vouloir aux personnes âgées de refuser un système qui va ensuite pénaliser leur famille, laquelle, souvent, se mobilise et se sacrifie déjà beaucoup pour ses aïeux.
    La question du GIR 4 est plus complexe, mais ma détermination à ne pas exclure cette population est aussi grande. Il est toutefois difficile de ne pas parler des limites de la grille AGGIR qui classe les personnes âgées perdant la vue en GIR 5 et dont le changement d'une variable peut, dans certains cas, faire passer une personne de GIR 6 à GIR 2. Toutefois, si l'on s'en tient à la plupart des cas de personnes âgées dépendantes classées en GIR 4, on se rend compte que le besoin d'aide est réel. Rappelons que la classification en GIR 4 comprend les personnes qui n'assument pas seules leur transfert, mais qui, une fois levées, peuvent se déplacer à l'intérieur du logement. Elles doivent être aidées pour la toilette et l'habillage. Comment peut-on imaginer qu'il faille laisser ces personnes livrées à elles mêmes ?
    La représentation nationale doit montrer dès aujourd'hui que son intention n'est pas de démanteler l'APA, mais de la financer.
    Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont. C'est bien ce que nous attendons !
    M. Georges Colombier, rapporteur. Il ne serait pas acceptable d'en faire une PSD bis.
    M. Jean-Marie Le Guen. Il serait utile de le préciser !
    M. Georges Colombier, rapporteur. N'oublions pas que la dépendance peut tous nous toucher, et mettons-nous à la place des personnes âgées se trouvant dans cette situation. Je ne pense pas que nous pouvons accepter de revenir sur ces deux points, et il n'en n'est pas question, car nous trahirions ainsi la confiance que les personnes âgées dépendantes et leurs familles ont placée en nous.
    Enfin, je me permettrai une dernière remarque avant de passer à l'étude des tenants et aboutissants de cette proposition de loi. Je pense que la véritable solution au problème de la dépendance passe par la création d'un risque spécifique au sein de la sécurité sociale. En effet, je suis persuadé depuis longtemps que, si la sécurité sociale était créée aujourd'hui, elle prévoirait un risque dépendance. A l'époque de sa fondation, l'espérance de vie était bien plus faible qu'aujourd'hui et la dépendance n'était pas un problème. Certes, la conjoncture économique ne permet pas de lancer cette mesure dans l'immédiat, mais je souhaiterais que le Parlement s'intéresse sérieusement à cette question lorsque le ciel de la croissance s'éclaicira.
    Abordons à présent l'analyse du texte proprement dit, portant modification de la loi relative à la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et à l'allocation personnalisée d'autonomie.
    Cette proposition de loi, examinée en séance publique par le Sénat le 27 février dernier, permet d'assurer le financement pour la présente année et corrige déjà quelques injustices ayant pu résulter de l'application de la loi. Ainsi, l'APA peut être sauvée, et elle le sera.
    Les chiffres sont éloquents. Le gouvernement de l'époque avait sous-estimé, d'une part, le nombre des bénéficiaires potentiels alors que le nombre des personnes classées en GIR 4, désormais intégrées dans le dispositif, ne pouvait être sérieusement connu et, d'autre part, la rapidité de la montée en charge du système. Ainsi, il évaluait le nombre des personnes en perte d'autonomie à 800 000 et prévoyait une lente montée en charge du dispositif : en 2002 et 2003, premières années d'application de la mesure, le coût initial était estimé, respectivement, à 2,29 milliards d'euros et 2,59 milliards d'euros pour 500 000 et 550 000 bénéficiaires.
    Chacun sait aujourd'hui que l'APA a été victime de son succès. L'Observatoire national de l'action sociale décentralisée, l'ODAS, et la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques, la DREES, ont proposé des estimations du coût de l'APA sur lesquelles le Gouvernement et les conseils généraux se sont fondés pour l'élaboration de cette proposition de loi. Ces chiffres ont été tempérés ce matin par le directeur du fonds de financement de l'APA, au cours de son audition par la commission, sur laquelle je reviendrai.
    L'allocation personnalisée d'autonomie est financée par les départements, qui en assument la gestion et le service, ce qui était déjà le cas pour la PSD.
    L'APA bénéficiant à une population plus large et plus nombreuse que la PSD et les autres formes d'aide servies par le département aux personnes âgées dépendantes - allocation compensatrice pour tierce personne, prestation expérimentale dépendance, aide ménagère à domicile -, les coûts supportés par les conseils généraux entrant dans le cadre de l'APA se révèlent nettement supérieurs à ceux qu'ils supportaient auparavant au titre de la dépendance. C'est la raison pour laquelle la loi a prévu une contribution financière nationale spécifique au bénéfice des départements, en complément de la fiscalité locale, afin de partager le financement de ces coûts supplémentaires. Cette contribution est assise sur une augmentation de 0,1 % de la CSG.
    Avant de passer à la discussion générale sur le texte dont il nous est proposé de débattre aujourd'hui, il faut rappeler que la proposition de loi déposée le 11 février 2003 sur le bureau du Sénat par M. Louis de Broissia et plusieurs de ses collègues représente le second volet d'un accord conclu entre l'Etat et les départements, le premier volet étant constitué par un décret en cours de rédaction.
    Présenté au comité des finances sociales le 4 février dernier, ce projet modifierait l'article 7 du décret n° 2001-1084 du 20 novembre 2001 relatif aux modalités d'attribution de la prestation et au fonds de financement prévus par la loi du 20 juillet 2001 relative à la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et à l'allocation personnalisée d'autonomie. Cet article porte sur les conditions de fixation du montant de l'aide ainsi que sur la participation du bénéficiaire.
    L'article 1er du nouveau décret proposerait deux mesures : d'une part, le plafond de ressources en dessous duquel les bénéficiaires sont exonérés de participation financière passerait de 949 euros à 623 euros mensuels et le plafond au-delà duquel le montant maximal de participation est acquitté passerait de 3 162 euros à 2 483 euros ; d'autre part, le montant maximal de la participation passerait de 80 % à 90 % du montant du plan d'aide. Par ailleurs, 40 % des bénéficiaires seraient exemptés de participation financière. Ces adaptations auraient pour effet de porter le taux moyen de participation des personnes vivant à leur domicile de 5 % à 12 %. Elles ne mettraient cependant pas un terme à l'inégalité existant entre les personnes vivant à domicile et celles hébergées en établissement, puisque ces dernières participent en moyenne à hauteur de 30 %.
    Enfin, la modification n'aurait pas de caractère rétroactif : seuls les nouveaux bénéficiaires en feraient l'objet ainsi que les bénéficiaires actuels au moment de la révision de leurs droits.
    Quels sont les principaux apports de la proposition de loi sénatoriale ? Ils consistent en trois points clefs.
    Premièrement, la date d'ouverture des droits à l'APA est fixée, non plus à la date de dépôt du dossier complet, mais à la date de notification de la décision du président du conseil général. La plupart des personnes attendent en effet la notification de l'aide pour recourir à un service. En conséquence, les deux premiers mois étaient souvent versés sans être dépensés. Cette pratique, qui rappelle les dérives constatées du temps de l'allocation compensatrice pour tierce personne, doit être corrigée.
    Deuxièmement, il convient d'assurer le contrôle de l'effectivité de l'aide par divers moyens.
    Troisièmement, la présente proposition de loi vise à permettre au fonds de financement de l'APA d'emprunter 400 millions d'euros afin, entre autres, d'aider les départements à faire face à la montée en charge de l'allocation personnalisée d'autonomie.
    Concernant ce troisième point, il est à noter que la commission des affaires culturelles, familiales et sociales a eu l'occasion d'auditionner ce matin M. Lenain, directeur du fonds de financement de l'APA. Malgré le temps réduit dont nous avons disposé pour étudier ce texte, ce que je regrette, nous avons pu obtenir deux chiffres importants. D'après M. Lenain, le coût de l'APA s'est élevé à 1 850 milliard d'euros en 2002 et les prévisions pour 2003 font apparaître un doublement de cette somme, qui s'élèverait à 3,7 millards d'euros.
    M. Jean-Marie Le Guen. Voilà !
    M. Georges Colombier, rapporteur. Si le financement pour l'année 2002 était assuré, ce que je reconnais, c'est loin d'être le cas pour 2003,...
    M. Bernard Derosier. Eh oui ! Le secrétaire d'Etat nous a dit le contraire !
    M. Jean Roatta. A qui la faute ?
    M. Georges Colombier, rapporteur. ... où l'on devra, en plus, faire face à un reliquat des années précédentes, ce qui explique l'abstention de l'opposition de l'époque sur ce texte.
    Toujours à propos du FFAPA, je ferai mienne la remarque judicieuse de M. Denis Jacquat, porte-parole du groupe UMP sur ce texte : notre collègue estime souhaitable que soit revu, à terme, le statut juridique de ce fonds, qui ne figure ni dans la loi de financement de la sécurité sociale, ni dans la loi de finances, ce qui empêche en partie le contrôle de sa gestion par le Parlement.
    M. Jean-Marie Le Guen. Oui, très bon amendement ! Excellent !
    M. Georges Colombier, rapporteur. Notons également que la proposition de loi originelle a été enrichie au Sénat d'un article 6, dont la finalité est la prise en charge par le fonds de modernisation de l'aide à domicile des charges supplémentaires pouvant résulter de la réforme de la tarification. Nous ne pouvons que nous réjouir de cet article, et mes collègues conseillers généraux ne me contrediront pas,...
    M. Bernard Accoyer. Certainement pas, en effet !
    M. Georges Colombier, rapporteur. ... car il permet de mettre fin à une injustice, puisque certaines personnes dépendantes en établissement voyaient les tarifs augmenter avec la mise en place de l'APA.
    M. Bernard Accoyer. Eh oui !
    M. Georges Colombier, rapporteur. Cette disposition me permet toutefois de vous interroger très officiellement, monsieur le secrétaire d'Etat, sur des préoccupations soulevées en commission portant sur l'avenir de la filière professionnelle de l'aide à domicile. Chacun d'entre nous a souvent l'occasion de rencontrer les acteurs de terrain de l'aide à domicile et leurs associations. Leurs demandes de formation et de reconnaissance officielle sont légitimes et le travail qu'ils font au service de nos anciens est tout simplement remarquable.
    M. Bernard Accoyer. Tout à fait !
    M. Georges Colombier, rapporteur. Dans le même état d'esprit, il faut souligner l'importance que représente la mise en place des guichets uniques en direction des personnes âgée, sous la forme des centres locaux d'information et de coordination gérontologique, ainsi que les services rendus par ces structures au plan local. Il serait souhaitable, au vu de l'attente et de l'engouement suscités par les CLIC, que la représentation nationale soit assurée de la poursuite de ces expériences réussies.
    Avant de conclure, je souhaiterais donc, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous nous rassuriez sur ces deux points en particulier, et sur les nécessaires améliorations à apporter aux conditions de travail et à la formation des personnels travaillant au contact des personnes âgées dépendantes en général.
    Pour en terminer, j'estime que, loin de démanteler l'APA, comme cela a pu être dit à plusieurs reprises, le texte aujourd'hui proposé à la représentation nationale vise à sauver cette aide des négligences que nous avions dénoncées en matière de financement. Les fondements de l'APA sont donc préservés. Cette allocation restera universelle et sera financée pour l'année en cours, ce qui est modeste mais pour le moins indispensable.
    Sur ma proposition, la commission des affaires culturelles, familiales et sociales s'est prononcée pour l'adoption conforme de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Exception d'irrecevabilité

    M. le président. J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste une exception d'irrecevabilité, déposée en application de l'article 91, alinéa 4, du règlement.
    La parole est à M. Jean-Marie Le Guen.
    M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, cette motion de procédure a trois objets.
    Nous voulons protester, d'abord, contre votre méthode de gouvernement, qu'illustrent parfaitement le caractère expéditif de ce débat, l'urgence dans laquelle vous soumettez ce texte à notre assemblée et votre volonté de tout faire pour obtenir un vote conforme des deux assemblées, et ce enfin de hâter encore un peu plus la discussion. En fait, vous voulez agir en évitant autant que possible la concertation et le débat. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Ce n'est pas une bonne méthode. Voilà donc déjà une bonne raison de s'opposer à votre texte.
    En deuxième lieu, nous refusons un texte porteur d'injustices, qui toucheront les plus âgées d'entre les personnes âgées et qui pèseront lourdement sur les plus défavorisées d'entre elles.
    M. Jean-Marc Roubaud. Pitié !
    M. Bernard Accoyer. Ce texte vise à sauver l'APA, au contraire !
    M. Jean-Marie Le Guen. Enfin, nous ne pouvons pas accepter un texte qui s'inscrit complètement dans la politique de régression sociale actuellement engagée par votre gouvernement... (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), politique qui tourne définitivement le dos aux défis réels de notre société.
    M. Jean-Louis Idiart. Très bien !
    M. Jean-Marie Le Guen. Alors que l'APA fut l'une des réformes les plus importantes de la précédente législature -...
    M. Bernard Accoyer. Non financée !
    M. Roland Chassain. Oui, avec l'argent des autres, c'est facile !
    M. Jean-Marie Le Guen. ... à laquelle nombre d'entre vous étaient d'ailleurs contents, il y a quelques mois, d'apporter leur soutien -, parce qu'elle représentait un espoir considérable pour notre société, vous procédez aujourd'hui à sa réforme, ou plus exactement à son amputation, et ce sans avoir établi un véritable bilan, sans procéder à aucune concertation.
    Ce texte est un coup de force qui n'a d'autre ambition que de dissimuler les mauvais coups portés à la solidarité que nous devons aux plus âgés et aux plus fragiles d'entre nous. Nous sommes saisis d'une proposition de loi...
    M. Jean Roatta. Une bonne proposition de loi !
    M. Jean-Marie Le Guen. ... présentée avec la complaisance de vos amis du Sénat, votée dans la discrétion, dont vous faites tout, aujourd'hui, pour accélérer l'adoption - quitte à bousculer, je le rappelais tout à l'heure, l'ordre du jour de l'Assemblée - et pour limiter les possibilités d'amendement, y compris par votre propre majorité - à cet égard, M. le rapporteur a rappelé à l'instant l'excellente suggestion de notre collègue Jacquat -,...
    M. Jean-Marc Roubaud. Mais il faut payer !
    M. Jean-Marie Le Guen. ... et ce dans le but d'obtenir un vote conforme.
    Ce débat est biaisé car, profitant d'une préparation insuffisante et refusant toute véritable concertation, vous essayez de justifier ce texte avec des arguments tellement faux que je n'hésite pas à les qualifier de mensongers (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), comme je le montrerai dans un instant.
    Seule l'absence de véritable débat contradictoire et d'étude préalable...
    M. Jean-Marc Roubaud. Amnésique !
    M. Jean-Marie Le Guen. ... vous permet d'affirmer des contrevérités au service d'une mauvaise politique.
    M. Christian Ménard. Votre discours, c'est l'apologie de l'irresponsabilité !
    M. Jean-Marie Le Guen. Le Parlement, enfin, est contourné car votre politique s'applique d'abord en dehors du débat parlementaire, notamment par la mise en oeuvre de ces fameux décrets qui, à eux seuls, ont une importance beaucoup plus grande que les articles de cette proposition de loi.
    Ainsi, monsieur le ministre, vous témoignez des véritables méthodes et des objectifs de la politique sociale de votre gouvernement. On est bien loin de la prétendue « transparence » affichée lors du débat sur les retraites. On est aussi très loin des valeurs de solidarité proclamées en matière de protection sociale.
    Mme Geneviève Levy. Il n'a rien compris !
    M. Jean-Marie Le Guen. Lorsque votre gouvernement décide, on voit bien dans quel sens il va...
    M. Jean-Marc Roubaud. Dans le bon sens !
    M. Jean-Marie Le Guen. ... ou plutôt dans quel sens il recule ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Il se trouve que c'est d'abord dans votre domaine de compétence, monsieur le secrétaire d'Etat, que le Gouvernement a décidé de jeter le masque. Après les beaux discours et les vertueuses déclarations, même si vous les répétez encore aujourd'hui, vous mettez en oeuvre très concrètement le recul de la solidarité. Vous procédez en fait à des déremboursements en agissant d'abord au détriment des plus défavorisées d'entre les personnes âgées. Vous ne vous élevez pas au niveau des défis posés par le choc générationnel que va connaître notre société.
    Certes, ce ne seront pas les personnes âgées dépendantes qui viendront aujourd'hui manifester leur révolte. Et ce ne seront sans doute même pas leurs familles qui, de façon collective, pourront s'exprimer, car notre société hésite encore à considérer ces questions comme relevant de l'organisation sociale. Il suffit d'ailleurs de voir le retard que nous avons pris dans un domaine proche, celui de la lutte contre le handicap. Trop souvent, les familles concernées sont accaparées par les soucis de la gestion du quotidien, hésitantes, et parfois culpabilisées de faire appel à la solidarité nationale. En fait, cet état d'esprit est en train de changer. Des milliers de familles sont concernées par les reculs inhérents à votre politique sociale.
    M. Jacques Le Guen. N'importe quoi !
    M. Jean Roatta. Si ce n'était pas si grave, on en rirait !
    M. Christian Ménard. Vous faites de la démagogie.
    M. Jean-Marie Le Guen. Elles seront parfois confrontées à des situations très douloureuses. Nous devons avoir conscience que la question de la dépendance deviendra l'une des premières questions sociales de notre pays.
    Il n'est, dès lors, pas acceptable de traiter ainsi cette question de société. Quelles que soient les difficultés rencontrées pour mettre en oeuvre une politique sociale moderne et généreuse, ce n'est pas en restreignant les droits que nous avancerons.
    Mais au-delà de cette proposition de loi, il faut considérer votre politique dans sa globalité, et rappeler comment s'est organisé dans notre pays, depuis un certain nombre d'années, le débat autour de la prise en charge de la dépendance, où nous en sommes aujourd'hui dans la réalité, et quelles seront les conséquences de la politique que vous voulez mettre en oeuvre.
    M. Jean-Marc Roubaud. Merci pour les conseils !
    M. Jean-Marie Le Guen. Avant d'en venir au texte lui-même, faisons donc un peu d'histoire. Car la question sociale de la dépendance va devoir ouvrir - quelle que soit la volonté des uns et des autres -, un nouveau chapitre de notre protection sociale. Elle doit donc être examinée dans sa dynamique.
    En 1991, le rapport parlementaire de notre ancien collègue Jean-Claude Boulard prônait, avec une vision prospective tout à fait remarquable, le financement d'une allocation d'autonomie et de dépendance. Il aura fallu attendre dix ans, durant lesquels se sont succédé de nombreux textes, avant d'y parvenir. Je les rappelle pour mémoire, et le fait de les citer retrace déjà tout l'historique de ce combat : le projet de loi de Pierre Bérégovoy en 1992, bloqué - déjà - au Sénat ; la proposition de loi Teulade et Cathala, fin 1992 ; le projet de loi de Mme Codaccioni en 1995, abandonné, j'allais dire dissout, par la présentation du plan Juppé sur la sécurité sociale. Cette absence de décision confirme le retard de prise de conscience de cette grande question sociale. Elle témoigne aussi de la peur de l'effort financier à effectuer.
    M. Jean-Marc Roubaud. Amnésique !
    M. Jean-Marie Le Guen. Comme c'est le cas à chaque avancée sociale réalisée dans ce pays, les mêmes arguments se retrouvent, et nous les retrouverons tout au long de cette discussion : refus de l'effort social à consentir ; tentation d'essayer de culpabiliser les gens qui y ont recours ; mesquinerie dans les procédures bureaucratiques à mettre en oeuvre. Nous retrouverons cela tout au long de la transformation que vous opérez dans la politique de prise en charge de la dépendance. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Jean-Louis Idiart. Que c'est vrai, tout cela !
    M. Jean-Marie Le Guen Les étapes que j'ai rappelées permirent d'aboutir en 1997 à la proposition sénatoriale créant, au niveau des conseils généraux, la fameuse PSD, dont nous savions déjà qu'elle serait en fait un recul.
    M. Jacques Le Guen. C'était une avancée, au contraire !
    M. Jean-Marie Le Guen. Ce système, qui était bien plus économe - on trouvait déjà ce souci qui vous importe tant (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) -,...
    Un député du groupe socialiste. Econome et inégalitaire !
    M. Jean-Marie Le Guen. ... notamment pour les départements, mettait fin à l'allocation compensatrice pour tierce personne. Il insistuait également le recours sur succession, qui est si populaire dans vos rangs. Présentée comme une avancée par les sénateurs, la PSD fut au contraire un véritable raté social, car mis à part la logique d'individualisation de la demande qu'elle introduisait, c'était déjà un recul concret, si l'on considère la réduction drastique des budgets engagés induite par les dispositions de ce texte.
    M. Jacques Le Guen. Mais non !
    M. Jean-Marie Le Guen. Il fallut donc attendre 2001 pour aboutir à la reconnaissance de la dépendance et la prise de décision concrète.
    Quand on observe la manière donc cette question a été traitée au cours de ces dernières années, on ne peut que constater combien le Sénat - et si j'ose dire, il y a là un paradoxe - a considérablement retardé la reconnaissance des droits des personnes âgées - dépendantes -...
    M. Jacques Le Guen. Ce n'est pas gentil, ça !
    M. Roland Chassain. Les sénateurs ne font pas de l'électoralisme, eux !
    M. Bernard Schreiner. Ce ne sont pas des gaspilleurs !
    M. Roland Chassain. Non, des gestionnaires !
    M. Jean-Marie Le Guen. ... et bloqué systématiquement les mesures susceptibles d'étendre ces droits et de répondre à un véritable besoin de société.
    Venons-en à présent au coeur du sujet : nous vous avons entendu dire, et encore ce soir, monsieur le secrétaire d'Etat, que la loi instituant l'APA était certes une bonne loi, mais que le financement de cette allocation n'a pas été prévu. (« C'est vrai ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) C'est la thèse centrale qui sous-tend votre politique de recul. C'est là une allégation que je trouve purement manipulatoire, et je vais tenter de le démontrer. Elle est d'autant plus grave qu'elle est complètement dénuée de fondement, ce qui ne l'empêche pas d'être relayée par toutes les instances gouvernementales.
    Certes, il est de bon ton, et bien commode, dans ces périodes d'alternance politique, surtout lorsque surgissent les premières difficultés, d'invoquer l'incurie et l'irresponsabilité du gouvernement précédent.
    M. Jacques Le Guen. Mais c'est une réalité, en l'occurrence !
    M. Jean-Marie Le Guen. Chacun peut observer que le gouvernement de M. Raffarin a recours à ce procédé d'une façon très abondante, j'allais dire systématique.
    M. Bernard Schreiner. Et vous, que faisiez-vous ?
    M. Jean-Marie Le Guen. Mais c'est moins la critique politicienne du gouvernement Jospin qui vous importe, dans cet argument, que la justification de vos propres reculs.
    L'allocation personnalisée d'autonomie n'échappe évidemment pas à cette critique en règle, même si, au passage, on fait l'amalgame entre de pseudo-révélations et de véritables informations.
    En effet, je confirme ici, et je veux y insister, que contrairement à ce que vous dites, les chiffres réels des dépenses de l'APA sont ceux à partir desquels nous avions travaillé, tout particulièrement notre assemblée, pour la mise en place de cette nouvelle prestation. Et je citerai tout à l'heure les rapports de nos collègues à ce sujet.
    Or, si certains font semblant de découvrir que l'APA, comme toute politique sociale ambitieuse, a un coût - et c'est peut-être cela qui vous surprend -, c'est qu'en général ils rechignent à l'effort financier inhérent à toute politique sociale.
    M. Michel Vergnier. Eh oui ! Pour nous, c'est un investissement, pour eux, c'est une dépense !
    M. Jean-Louis Idiart. Pour eux, quand on ne produit plus, on est bon à tuer !
    M. Jean-Marie Le Guen. Oui, mes chers collègues de la majorité, les politiques sociales ont un coût. Il faut savoir le reconnaître et l'assumer. Rappelons-nous donc ce qu'avait avancé le gouvernement de Lionel Jospin, ainsi que notre rapporteur, Pascal Terrasse. Tout d'abord, la loi instituant l'APA prévoyait une mise en oeuvre en deux temps. Une première phase correspondait à la montée en charge, et il devait y avoir une enquête HID - handicaps - incapacités - dépendance - qui devait intervenir lors des deux premières années.
    M. Michel Vergnier. Très juste !
    M. Jean-Marie Le Guen. Une seconde phase prévoyait la réalisation d'un bilan permettant d'asseoir définitivement le financement de cette mesure dans le temps.
    En 2001, le gouvernement a précisé que les chiffres valaient pour les deux premières années. Il était alors tout à fait conscient que les estimations sur lesquelles il s'était fondé méritaient d'être affinées en fonction du nombre de personnes qui auraient effectivement accès à l'allocation d'autonomie. C'est pourquoi la loi prévoyait un bilan à la fin du mois de juin 2003.
    La majorité d'alors a eu l'honnêteté de reconnaître qu'elle se situait dans une fourchette. Dans leurs interventions, Pascal Terrasse, Elisabeth Guigou ou Paulette Guinchard-Kunstler ont donné toutes ces informations au Parlement dans la plus grande transparence. Ainsi dans son rapport, notre collègue Pascal Terrasse indiquait : « En régime de croisière, en 2003, le coût estimatif de l'allocation personnalisée d'autonomie serait de 23 milliards de francs. L'article 13 du présent projet de loi prévoit qu'un bilan d'application financier sera alors réalisé, afin d'examiner la cohérence du mode de financement ainsi mis en place avec la montée en charge de l'allocation. En tout état de cause, et en vertu du principe d'annualité qui s'applique aux finances sociales - et singulièrement au projet de loi de financement de la sécurité sociale, - ajouterai-je - il n'est pas possible de prévoir dès aujourd'hui le financement à long terme de l'allocation personnalisée d'autonomie. »
    Après avoir rappelé la réalité des chiffres et les propos avancés par ceux qui ont mis en oeuvre la réforme de l'APA, j'examinerai maintenant les arguments que vous employez pour légitimer votre politique.
    Pour l'essentiel, vous vous appuyez sur un rapport de l'Observatoire national de l'action sociale décentralisée pour avancer des chiffres qui visent à dramatiser la situation. Or l'ODAS, même s'il est présidé par l'un de nos éminents collègues de la commission des finances, est une association sans aucun mandat public. Par ailleurs, les études menées sont loin d'être exhaustives puisqu'elles ne portent que sur quelques départements et donnent lieu à des prises de position fort diverses.
    En juillet 2002, dans un rapport distribué lors de son assemblée générale et largement commenté dans une conférence de presse, avec, là aussi, une tonalité fort alarmiste, l'ODAS écrit : « 2002 est une année de forte perturbation sur ce secteur de l'aide sociale des personnes âgées. La mise en oeuvre de l'APA va, malgré une compensation d'une partie du surcoût financier par l'Etat, provoquer une forte évolution des dépenses. » Les prévisions de l'ODAS, reprises et amplifiées par l'ADF, s'établissent alors à un coût de 2,2 milliards d'euros pour 2002 : 0,87 milliard d'euros pour l'APA en établissement et 1,33 milliard d'euros pour l'APA à domicile pour être précis.
    Six mois plus tard, en janvier 2003, dans un rapport intitulé, APA : enjeux et perspectives, l'ODAS notait : « En 2002, l'APA a un impact modéré sur les dépenses nettes d'aide sociale en direction des personnes âgées. La dépense d'APA est compensée, d'une part, par la diminution des autres prestations qu'elle remplace - ACTP, PSD et une partie de l'aide ménagère - et, d'autre part, par l'apport de l'Etat via le fonds de financement de l'APA. » Cette fois-ci, le coût de la mesure est estimé à 1,5 milliard au lieu des 2,2 milliards d'euros avancés plus tôt. S'agissant de l'incidence budgétaire, le besoin de financement passe à 0,65 milliard d'euros.
    Voilà qui montre bien que, s'il existe encore une certaine incertitude sur les chiffres, l'estimation de vos amis a été volontairement alarmiste afin de justifier la décision que vous prenez.
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Nous sommes au-dessous de la réalité !
    M. Jean-Marie Le Guen. Voilà pour l'ODAS, si j'ose dire.
    Mais ce n'est pas tout. Vous jouez également de l'ambiguïté sur le nombre de demandeurs de l'APA - proche de 800 000 selon vous - et le nombre des allocations effectivement servies - en fait, 469 000 à la fin de 2002.
    M. Michel Vergnier. Fini, les raffarinades !
    M. Jean-Marie Le Guen. Or, les flux de demandes se sont, bien entendu, fortement réduits. Ont été évoquées, tout à l'heure les campagnes très intenses qui ont eu lieu, parfois récupérées par certains départements, pour ne pas dire par un certain nombre de vos amis, qui ont bien insisté sur le fait qu'il s'agissait d'une allocation départementale. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jacques Le Guen. Ce sont quand même les départements qui payent.
    M. Jean-Marie Le Guen. Je parle pour ceux de la minorité d'hier, comme pour ceux de la majorité d'hier, et je ne veux faire de reproche politique à personne, même si, en tant que député de la nation, je suis un peu surpris d'une récupération locale pour les uns ou les autres. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Mais, en tout état de cause, il me semble qu'après avoir à ce point utilisé le bénéfice de l'APA, un certain nombre d'entre vous, qui cumulent ces fonctions de député de la nation et de responsable de départements et qui se sont vantés auprès de leurs électeurs de la mise en place de l'APA devraient faire preuve d'un minimum de retenue dans leurs critiques de la politique qui a été mise en oeuvre. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Michel Vergnier. On a les preuves !
    M. Yves Bur. Provocateur !
    M. Jacques Le Guen. Or l'évolution du flux des demandes, j'y reviens, n'a pas empêché la même ODAS - qui, décidément, n'en manque pas ! (Sourires) - d'extrapoler la tendance de la fin de 2002, pour estimer à 950 000 le nombre de bénéficiaires potentiels en 2003. Vous agitez un épouvantail et, quelques mois plus tard, vous êtes obligés de revenir à des chiffres beaucoup plus réalistes.
    Alors, monsieur le secrétaire d'Etat, avez-vous des chiffres provenant aujourd'hui de l'ensemble des départements ou de la DRES à nous fournir ?
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Je vais vous en donner. Vous ne serez pas déçus.
    M. Jean-Marie Le Guen. Merci, monsieur le secrétaire d'Etat, j'espère qu'ils seront étayés et vérifiés par votre administration.
    Par ailleurs, vous nous avez annoncé qu'il manque 1,2 milliard d'euros pour financer l'APA. Mais, comment expliquer cela, sinon par la nature même du projet de loi de financement de la sécurité sociale que vous avez fait voter. Dans ce PLFSS, vous n'avez pourtant pas hésité à inscrire des augmentations de dépenses parfois surprenantes. Et je n'ai pas besoin ici de rappeler les chiffres de l'ONDAM, pour tel ou tel domaine de l'assurance maladie. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Pourquoi n'avoir pas alors prévu les financements nécessaires pour 2003 ? Aujourd'hui, vous êtes bien mal venus de faire payer aux personnes âgées les insuffisances de votre politique. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Yves Bur. C'est spécieux !
    Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont. Non ! C'est mathématique !
    M. Jean-Marie Le Guen. Il nous faut autre chose que des déclarations qui n'emportent que les mots d'un jour. Nous devons obtenir de votre gouvernement et de l'Etat les rapports objectifs qui doivent être faits sur ce sujet. Malheureusement, ils ne seront disponibles qu'après que votre politique de recul aura été mise en oeuvre.
    Il était effectivement prévu dans la loi qu'un rapport financier devait être remis au Parlement avant le 30 juin 2003. Pourquoi cette date ? Tout simplement parce que les comptes administratifs des départements ne sont publiés qu'en avril. Avant cette date, vous ne disposez donc pas d'éléments sérieux qui vous permettraient d'affirmer que les dépenses ont dérapé.
    La réalité, monsieur le secrétaire d'Etat, c'est celle que nous a révélée ce matin le directeur du FFAPA, après que notre collègue Paulette Guinchard-Kunstler a demandé son audition, puisque étonnamment, ni la commission du Sénat ni celle de l'Assemblée n'avaient jugé utile d'entendre cette personne, pourtant concernée au premier chef par notre débat.
    Cette audition, à ce point tardive qu'elle ne figure pas dans le rapport - et que le rapporteur, dont je salue l'honnêteté, a citée tout à l'heure - a montré que les chiffres que nous avions prévus pour le financement de l'APA étaient les bons. Vous avez donc injustement, je le crois, dramatisé la situation. Cela signifie en outre, et c'est grave, que le texte que vous voulez adopter dans la précipitation repose sur des estimations financières erronées. Le Gouvernement dénonce depuis le mois de juillet dernier le coût exorbitant de l'APA en s'appuyant sur des chiffres pour l'essentiel imaginaires. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Le directeur du FFAPA nous a annoncé les chiffres suivants, je parle sous le contrôle des membres de la commission qui étaient présents. Pour 2002, le financement de l'APA représente 1,58 milliard d'euros, soit 12,14 milliards de francs, alors que les prévisions de notre rapporteur Pascal Terrasse comme celles du gouvernement faisaient mention de 16,5 milliards de francs. Nos estimations étaient donc supérieures à la réalité, et non inférieures comme le Gouvernement se plaît à le répéter.
    M. Michel Vergnier. Irréfutable !
    M. Jean-Marie Le Guen. Pour 2003, ce financement représente 3,7 milliards d'euros, soit exactement ce que prévoyait le rapport Terrasse. Pour 2002, le FFAPA présente un excédent de 75 millions d'euros, dû à la différence entre les droits constatés et les encaissements, excédent intégré dans l'enveloppe de fonds pour 2003. En fait, le fameux 1,2 milliard non financé dont vous parlez n'est que la traduction - je le disais tout à l'heure, je n'y reviens donc pas - des insuffisances de votre propre projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003. (« Oh ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Michel Vergnier. C'est imparable! (Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jean-Marie Le Guen. On le voit, on est bien loin de vos chiffres et de vos affirmations. Vous avez mené constamment une politique d'annonces alarmistes pour mieux justifier vos renoncements alors que le Président de la République lui-même avait promis que l'Etat tiendrait ses engagements en ce qui concerne le financement de l'APA.
    M. Jacques Le Guen. Il les tient !
    M. Jean-Marie Le Guen. Après l'argument financier, je voudrais aborder les autres thèmes de la polémique que vous avez engagée de façon plus ou moins officielle contre la loi.
    J'en viens donc à l'argument concernant le poids de l'APA sur les finances départementales. Je commencerai par citer - nouvelle révérence - les déclarations du Premier ministre dans son intervention à l'Assemblée nationale lors du débat sur le projet de loi relatif à la décentralisation : « Troisième principe : l'autonomie financière. Certes le sujet est difficile, mais il est très important, et nous devons y travailler ensemble. Elle doit permettre aux autorités locales de déterminer elles-mêmes leur politique : quand on organise la tutelle de l'argent, on organise la tutelle des responsabilités. J'entends parfois dire que cette réforme ne changerait pas grand-chose. Or voyez l'exemple de l'APA, mesure importante mais qui n'a pas été financée. Dans le cadre de la réforme nous aurions la possibilité d'organiser ce financement. Je ne souhaite pas une décentralisation "mistigri qui transfère seulement les difficultés et les problèmes. Je souhaite une décentralisation équilibrée qui protège les collectivités territoriales de la tentation pour l'Etat de leur transférer plus de charges que de responsabilités ».
    On voit dans ce discours le début de la manoeuvre. Premièrement, le Gouvernement laisse croire que cette loi avait prévu un transfert de compétences de l'Etat vers les départements.
    M. Michel Vergnier. Tiens donc !
    M. Jean-Marie Le Guen. Or ce sont les départements qui ont depuis toujours eu cette responsabilité, d'abord avec l'allocation compensatrice de tierce personne, puis avec la PSD, et donc logiquement avec l'APA. Ce n'est donc pas, et cela n'a jamais été, un transfert de compétences de l'Etat vers les conseils généraux, mais bien une action de l'Etat avec les conseils génraux.
    Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Tout le monde le sait !
    M. Jean-Marie Le Guen. Apparemment M. Raffarin, lui, ne le sait pas ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) En réalité, cette omission n'est pas gratuite, comme je vais le démontrer.
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. La démonstration, vous l'avez déjà faite : vous vous êtes trompé de 300 000 dossiers.
    M. Jean-Marie Le Guen. Deuxièmement, vous laissez croire qu'il n'y a pas eu d'expérimentation. Là encore, cette affirmation est purement et simplement fausse : la prestation dépendance a été l'objet d'un véritable temps d'expérimentation dans dix départements...
    M. Denis Jacquat. Douze !
    M. Jean-Marie Le Guen. ... et c'est votre majorité qui, à l'époque, n'en a pas tenu compte.
    Troisièmement, puisqu'il n'y a pas eu de transfert de compétences, il n'y avait pas lieu d'effectuer un transfert financier. C'est la logique même. Néanmoins, tout rapprochement avec la politique de décentralisation qu'entend mener M. Raffarin serait, en l'occurrence, déplacée.
    Par contre, la loi a bien prévu un mécanisme de financement pour accompagner l'effort des conseils généraux. Les départements assuraient seuls la charge de la PSD et de l'allocation compensatrice tierce personne, alors qu'aujourd'hui ils sont aidés par le biais du FFAPA. De plus, le législateur pouvait décider, à l'occasion du bilan prévu par la loi, de changer les clés de répartition entre financement départemental et national. Et vous auriez pu le faire dès aujourd'hui si seulement vous aviez eu l'intention de travailler à améliorer le fonctionnement de l'APA. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Mais tel n'est pas le choix de votre gouvernement, de votre majorité, qui préfèrent diminuer le montant de l'allocation des personnes âgées.
    M. Bernard Accoyer. Pourquoi être aussi agressif ? On peut se parler poliment !
    M. Michel Vergnier. Il a raison ! On n'est pas à l'UMP ici !
    M. Jean-Marie Le Guen. Avant l'APA, les départements étaient les seuls financeurs de l'aide en direction des personnes âgées. Avec l'APA, on a fait le choix, tout en leur confiant la responsabilité de gérer cette aide, de les accompagner financièrement.
    Je rappelle d'ailleurs que l'APA a été pour les départements, à un moment où la région a le vent en poupe, une occasion de faire la preuve de leur capacité à gérer les politiques sociales de proximité.
    En revanche, et c'est un acquis dont nous pouvons donner acte, alors même que nous n'avons pas encore les chiffres qui nous permettent de connaître précisément les besoins financiers réels, il semble bien qu'il faille revenir sur la péréquation entre les différents départements. Il est vraisemblable qu'une quinzaine de départements connaissaient de réelles difficultés. C'est pour cela, d'ailleurs, que nous avons déposé un amendement en ce sens, que nous examinerons dans la discussion si, par extraordinaire, la motion d'irrecevabilité que je défends aujourd'hui n'était pas adoptée.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Amendement Seine-Saint-Denis !
    M. Jean-Marie Le Guen. Face à ces problèmes d'ajustement, vous aviez parfaitement le loisir, dans le PLFSS pour 2003, de vous donner les marges nécessaires en affectant les déciles de CSG au financement de l'APA. De même, vous pouvez le faire pour le PLFSS pour 2004 mais vous avez fait dès aujourd'hui un autre choix, celui de diminuer les prestations et, qui plus est, de les répartir de façon injuste.
    Ainsi, en ce qui concerne précisément le présent projet de loi, nous ne pouvons accepter la modification de la date d'ouverture des droits de l'APA que prévoit l'article 1er car la justification que vous en donnez est absurde et scandaleusement injuste.
    En effet, si l'on se réfère à cet article, l'ouverture des droits sera effective non plus à la date du dépôt de dossier complet mais à la date de notification de la décision du président du conseil général. Cela consiste tout bonnement à gagner deux mois sur le dos des personnes âgées dépendantes. Cette disposition, d'une grande mesquinerie, est d'autant moins admissible que pour les personnes âgées placées en établissement, la prise en charge de la dépendance est sans délai, compte tenu du fait que le personnel et les structures sont déjà en place. Dès lors, comment contester la réalité et l'effectivité de l'aide, y compris dans les deux premiers mois de prise en charge ? Là encore, ce sera à la famille d'assumer l'intégralité des frais durant ces deux premiers mois, charge souvent très lourde pour les plus défavorisées.
    A tous les niveaux de ce texte, on constate la volonté de faire porter une certaine suspicion sur les bénéficiaires de l'APA, comme si pour faire des économies - et j'ai encore entendu ce beau mot, tout à l'heure - il fallait coûte que coûte chercher à en diminuer le nombre sans prendre en compte une réalité sociale flagrante afin d'apporter les réponses qu'attendent nos concitoyens en termes de moyens et de mesures.
    Les articles 2 et 3 traduisent clairement votre volonté de rogner l'APA en alourdissant inutilement les mesures de contrôle, alors que la loi prévoyait déjà des dispositifs efficaces en la matière, chaque département pouvant par ailleurs organiser ses modalités de contrôle en fonction des situations spécifiques. Exiger des personnes âgées elles-mêmes une batterie de justificatifs de leur participation financière sera vécu comme une nouvelle suspicion à leur encontre. Et c'est bien légitime.
    Il est vrai, mes chers collègues, qu'en matière sociale, vous ne reculez pas devant la bureaucratie ! (Exclamations et rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Celle-ci vous effraie dès qu'il s'agit de libérer l'économie et d'accroître les privilèges. Mais en matière sociale, il n'y a jamais trop d'alourdissement.
    En l'occurrence, vous vous comportez bien en bureaucrates. (Nouvelles exclamations sur les mêmes bancs.) Par l'article 4, vous voulez faire passer la part du fonds versée aux départements de 80 à 90 %. Cette disposition ne tient aucun compte de l'amélioration de la péréquation entre les départements, même s'il est prévu, pour 2003, un concours spécifique pour aider les départements en difficulté - ce dont nous nous félicitons.
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Très bien !
    M. Jean-Marie Le Guen. Ce fonds se voit également attribuer 400 millions d'euros...
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Vous voyez, tout arrive !
    M. Jean-Marie Le Guen. ... sous la forme d'un emprunt. Oh, la belle politique !
    M. Jacques Le Guen. Vous savez faire : 200 milliards de francs par an sur cinq ans !
    M. Jean-Marie Le Guen. Son remboursement sera à charge de l'APA, ce qui signifie que le Gouvernement, une fois de plus, ne prendra pas ses responsabilités. Il y a peu de politique, en matière sociale, où vous ne commenciez par annoncer que vous allez avoir recours au déficit. C'est même devenu l'antienne de votre politique économique, au point que certains, au sein de votre majorité, y voient quelques sujets de préoccupation. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Bernard Accoyer. Le gaspillage, à qui le doit-on ?
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Et les 35 heures ?
    M. Jean-Marie Le Guen. Enfin, de quoi parlons-nous ? De la protection sociale, dont on sait que les derniers exercices, sous la gauche, étaient parfaitement équilibrés ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Vous pouvez le contester, mes chers collègues. Tout comme vous pouvez contester ces chiffres.
    M. Yves Bur. Mais qu'avez-vous fait pendant cinq ans ?
    M. Jean-Marie Le Guen. On n'a rien fait pendant cinq ans, si ce n'est d'équilibrer les chiffres de la sécurité sociale, ce que vous êtes bien incapables de faire ! A peine revenez-vous que les chiffres s'amoncellent et que les trous béent...
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Cet équilibre n'était que dissimulation !
    M. Jean-Marie Le Guen. Et ce n'est qu'un premier texte. Vous commencez à dérembourser ici, mais vous dérembourserez là, tout au long de l'année 2003. Ce sera l'année des déremboursements en matière de protection sociale ! Nous nous retrouverons plus d'une fois à cette tribune, mes chers collègues, pour en parler !
    M. Yves Bur. Vous n'avez jamais eu ce courage !
    M. Jean-Marie Le Guen. Alors, ne parlez pas et assumez votre politique !
    Les premières victimes en seront les personnes âgées : lorsqu'on reparlera de l'assurance maladie,...
    M. Michel Vergnier. En effet !
    M. Jean-Marie Le Guen. ... lorsque vous serez en recul sur les retraites.
    Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont. Eh oui !
    M. Jean-Marie Le Guen. Vous avez raison de commencer à crier. Car c'est ce que vous ferez pendant toute l'année 2003 pour essayer de faire oublier que vous allez pratiquer des déremboursements. En fin de compte, une fois que vous aurez mis en oeuvre vos politiques dans le domaine économique et social, les règles de la solidarité dans notre pays se trouveront bouleversées. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Pourtant, le FAPA - eh oui, c'était du temps de la gauche ! - avait un excédent de 75 millions d'euros, comme je l'ai rappelé précédemment. Vous avez intégré « vite fait » cet excédent dans le fonds pour 2003, tout en réduisant le fonds de modernisation de l'aide à domicile de 36 millions d'euros. Ainsi, le Gouvernement préfère réduire le fonds de modernisation de l'aide à domicile plutôt que de se servir de l'excédent du fonds de financement de l'APA.
    Venons-en à ce fameux décret, le plus inique le plus « massif », de votre politique. Celui-ci relève la participation des familles de 5 à 12 % en moyenne,...
    Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont. C'est un scandale !
    M. Jean-Marie Le Guen. ... et notamment celle des plus pauvres puisque, dans le même temps, vous abaissez le seuil déclenchant de la participation de 949 à 623 euros. Contestez-vous ces chiffres ? Sans doute pas : tout à l'heure, vous avez considéré qu'ils étaient justes.
    M. Christian Ménard. Ce ne sont pas les chiffres, c'est la manière que nous contestons !
    M. Jean-Marie Le Guen. Non seulement ils étaient justes parce que c'était la vérité, mais ils étaient justes au sens où il vous paraissait juste que les personnes que je viens de citer soient plus nombreuses à payer et paient davantage. De ce point de vue, il faudrait assumer votre politique !
    Cette mesure, donc, devrait vous faire économiser 73 millions d'euros. On ne peut s'empêcher de faire le rapprochement avec votre choix...
    M. Bernard Accoyer. Et la MNEF ?
    M. Jean-Marie Le Guen. Je sens que là, je touche des fibres sensibles, monsieur Accoyer.
    M. Jean-Claude Perez. Eh oui, ça leur fait mal !
    M. Jean-Marie Le Guen. On ne peut s'empêcher de faire le rapprochement avec votre choix d'élever le plafond de la réduction d'impôt pour l'emploi d'un salarié à domicile, mesure qui coûte 74 millions d'euros. Il y aura donc, d'un côté, 73 millions à payer en plus par les plus défavorisés, du fait de l'augmentation du ticket modérateur, notamment par ceux qui gagnent entre 623 et 949 euros de retraite - vous voyez les sommes dont on parle...
    M. Jean-Claude Perez. C'est bien la droite !
    M. Jean-Marie Le Guen. ... et, de l'autre, 74 millions de recettes fiscales à toucher en moins, au profit de ceux qui paient des impôts.
    M. Michel Vergnier. Et les 500 millions de l'ISF ?
    M. Jean-Marie Le Guen. J'y viendrai, cher collègue... En effet, seules les personnes imposables sont en mesure de profiter de cette mesure de baisse d'impôts.
    Mme Catherine Génisson. L'APA, c'est l'AGED pour les personnes âgées !
    M. Jean-Marie Le Guen. Et voilà ! S'agissant des déficits publics, vos approches sont bien sélectives : vous vous adressez exclusivement aux personnes très aisées.
    J'aimerais vous montrer comment l'effet de vos décisions combinées renforcera encore davantage et de façon flagrante votre choix de vous tourner vers nos concitoyens très aisés. Je vais donc vous citer des cas très concrets, que je tiens de l'expérience vécue au sein d'un conseil général et qui m'ont été rapportés par l'une de mes collègues.
    M. M.G., 84 ans, évalué en GIR 3, vit avec 995 euros par mois. Il bénéficie d'un plan d'aide composé d'une assistante de vie durant huit heures par semaine, sa famille assurant les week-ends. Actuellement, le montant de sa participation, après déduction fiscale, est de 8 euros. Après application de votre décret, ce sera près de 88 euros qu'il devra débourser, soit 80 de plus !
    M. R.V., 81 ans, évalué en GIR 3, vit avec 1 261 euros par mois. Il bénéficie d'un plan d'aide composé d'une assistante de vie durant deux heures par jour, d'une infirmière une fois par semaine, la famille assurant là aussi le week-end. Il utilise par ailleurs une télé-alarme. Actuellement, le montant de sa participation, après déduction fiscale, est de 40 euros. Après application de votre décret, sa participation se montera à 163 euros, c'est-à-dire à 123 euros de plus.
    M. Jean-Claude Perez. Et voilà !
    M. Jean-Marie Le Guen. Mme B.R., 83 ans, évaluée en GIR 3, vit avec 3 500 euros par mois. Le plan d'aide se compose d'une assistante de vie quatre heures par jour, plus une heure le samedi et le dimanche, une infirmière cinq fois par semaine, la famille assurant les week-ends. Actuellement, le montant de sa participation, après déduction fiscale, est de 304 euros. Après votre décret, elle sera de 336 euros, soit seulement de 30 euros supplémentaires.
    M. Michel Vergnier. Et voilà !
    M. Jean-Marie Le Guen. On le voit bien, à travers ces exemples : c'est la personne dont les revenus sont les plus élevés qui bénéficie de l'augmentation la plus faible de sa contribution.
    M. Jean-Claude Perez. C'est toujours pareil !
    M. Bernard Accoyer. Mais non, ce n'est pas vrai !
    M. Jean-Marie Le Guen. Ces exemples seront publiés au Journal officiel, vous pourrez me porter la contradiction...
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Vous avez l'habitude de vous tromper sur les chiffres !
    M. Jean-Marie Le Guen. Cette politique n'a que peu d'effet global sur les dépenses publiques : baisse de recettes d'un côté, moins de dépenses de l'autre. Mais, entre-temps, ce ne sont pas les mêmes qui paient et qui profitent !
    M. Jean-Claude Perez. Et voilà !
    M. Jean-Marie Le Guen. Regardons la réalité des chiffres. Une fois de plus, les plus modestes qui paieront ! Le choix de votre politique est clair : privilégier les plus aisés, et non venir en aide aux personnes âgées.
    J'entends certains d'entre vous parler du cinquième risque et je suis persuadé, les connaissant, de leur sincérité et de leurs engagements. Mais, mes chers collègues, pouvez-vous parler aujourd'hui de cinquième risque alors que vous reculez, à propos d'une politique pourtant modeste, en la considérant déjà comme trop lourde ?
    Mme Catherine Génisson. C'est vrai !
    M. Jean-Marie Le Guen. Comment pouvez-vous croire que nous arriverons au cinquième risque ? Comment pourrions-nous en assumer les dépenses ? Considérez les discussions qui sont actuellement menées, à l'intérieur de la majorité, à ce propos.
    Je ne veux faire de procès d'intention à personne, je respecte les convictions et les engagements de chacun. Mais comment les rapporteurs peuvent-ils nous dire qu'ils sont pour le cinquième risque, tout en validant la politique menée à l'heure actuelle ? Essayez de défendre l'APA telle qu'elle est, avant même de penser à la généraliser dans un système de protection sociale. Mes chers collègues, défendons d'abord l'existant. Nous en serons tous plus crédibles.
    M. Michel Vergnier. Très bien !
    M. Jean-Marie Le Guen. Après avoir parlé des résultats de votre politique sociale et de votre politique fiscale, je ne peux m'empêcher de dire un mot de l'ISF. (« Enfin ! » et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Le Gouvernement fait un cadeau de 500 millions d'euros aux plus aisés de nos concitoyens ! En contrepartie, on demande aux personnes âgées dépendantes une participation de 400 millions d'euros. 500 millions d'un côté, 400 millions de l'autre. N'avez-vous pas l'impression, une fois de plus, de faire payer aux personnes âgées et, particulièrement, aux plus fragiles d'entre elles ce que vous consentez aux plus favorisées ?
    Mme Muriel Marland-Militello. Autrement, les personnes les plus favorisées partiraient...
    M. Jean-Marie Le Guen. Vous allez me dire - et nous y serons tous sensibles - que les 500 millions de l'ISF créent des emplois. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Et les 400 millions de l'APA ? Vous croyez qu'ils n'en créent pas ?
    M. Michel Vergnier. Evidemment que si !
    M. Jean-Marie Le Guen. Et où ? En région ! Des emplois de quelle nature ? Des emplois non qualifiés et peu qualifiés, qui concernent très directement les publics qui en ont besoin. Et où ? Dans vos circonscriptions...
    M. Frédéric Soulier. Ils sont où, les 400 millions ?
    M. Jean-Marie Le Guen. Je répète : vous supprimez 400 millions d'intervention sociale sur l'APA et vous supprimez 500 millions d'impôts. Je vous propose, mon cher collègue, de renoncer aux 500 millions de l'ISF, de laisser les 400 millions sur l'APA. Car ces derniers représentent, c'est sûr, des emplois dans vos circonscriptions, qui seront directement utilisés pour accroître la solidarité dans notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    Mme Catherine Génisson. Et cela soutiendra la croissance !
    M. Jean-Marie Le Guen. Si on fait le bilan de ces quelques décisions politiques qui sont les vôtres, on voit bien que nous sommes très loin des discours sur l'économie qu'on a tenus et des contraintes financières qui pèseraient sur la politique sociale. En fait, vos choix ne sont pas dictés par des contraintes financières. Ce sont des choix politiques, qui s'affirment clairement à travers cette réforme de l'APA.
    M. Michel Vergnier. Comme les réductions d'impôts !
    M. Jean-Marie Le Guen. J'en viens maintenant à un autre point qui a été souvent évoqué sur les bancs de la majorité, à savoir l'adage selon lequel : « les familles n'ont qu'à payer, comment faisions-nous avant ? » ou le traditionnel : « les familles doivent prendre en charge leurs aînés ». Cette antienne mérite d'être discutée.
    Je me dois de répondre à ces propos, tenus par des personnes qui ont la chance de ne pas avoir à s'occuper de personnes dépendantes.
    La montée en charge très rapide de l'allocation personnalisée d'autonomie a permis de libérer la véritable demande des personnes âgées. Cela nous a permis de découvrir - sur tous les bancs de cette assemblée - combien les familles étaient isolées, souvent épuisées. Le mérite de l'APA a été de rendre enfin publique, et c'est une des raisons de son succès et de sa montée en puissance, la réalité d'un besoin d'accompagnement par la prise en charge de la dépendance des personnes âgées.
    Il est très difficile pour une personne, pour chacun d'entre nous peut-être, de voir ses parents sombrer dans la dépendance. Les rôles sont renversés. Il faut s'occuper d'eux, prendre les décisions, les accompagner. Ceux qui veulent rétablir le recours sur succession disent vouloir « responsabiliser les familles ». Croyez-vous que cela ne soit pas souvent le cas déjà ? Dans la très grande majorité, lorsque les familles ont des parents dépendants, elles ne ménagent ni leur temps ni leur argent. L'expérience de terrain qui est sûrement la vôtre vous a sûrement permis de le vérifier : l'APA a donné à ces familles une bouffée d'oxygène, mais ce n'est pas pour autant qu'elles vont se désengager.
    Tout à l'heure, j'ai cité des exemples concrets et précis. A chaque fois, la famille intervenait, le week-end par exemple. Peut-on demander plus encore à des familles qui sont parfois éloignées de leurs parents ? Il faut savoir raison garder en la matière et se garder des attitudes démagogiques du « y'a qu'à » ou encore de la nostalgie des temps passés.
    Quant à l'affirmation selon laquelle les personnes âgées empocheraient l'aide allouée pour remplir leur bas de laine, elle n'a pas de réalité quand on connaît la pratique d'indemnisation, régie par un principe d'individualisation. Toute allocation est basée sur un plan d'aide décidé conjointement avec la personne âgée, la famille et l'équipe médico-sociale. C'est seulement quand un département ne s'investit pas suffisamment dans la mise en place des équipes médico-sociales qu'il peut y avoir ici ou là - comme partout - des risques de dérapage.
    Ce n'est pas le seul exemple : votre gouvernement a systématiquement tendance à confondre responsabilité et pénalisation des bénéficiaires des politiques sociales.
    A travers ces discours, on voit surgir les mêmes arguments qu'en 1996 - du style de ceux qui sont avancés chaque fois qu'une innovation sociale est introduite dans notre pays. La PSD, disait-on à l'époque allait alimenter les bas de laine et il eût été plus logique de laisser à la famille le soin de payer et de s'occuper de ses parents âgés...
    Vision à la fois peu réaliste, peu humaine, incapable de prendre la mesure des défis nouveaux posés par la dépendance ! Tendance permanente et spontanée de trop de conservateurs d'exercer leur méfiance vis-à-vis des bénéficiaires des politiques sociales et de s'en servir comme argument pour freiner les réformes et le progrès ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Mais au-delà de l'injustice de votre politique, ce qui frappe, c'est votre incompréhension de la dynamique économique et sociale mise en oeuvre par la réforme de l'APA. Comment ne pas voir en effet que l'APA, au-delà de son coût, est aussi une formidable occasion en matière d'aménagement du territoire et une chance de créer des emplois locaux, sur la base d'une vraie reconnaissance des professionnels, en particulier en matière d'aide à domicile ?
    Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont. Très bien !
    M. Jean-Marie Le Guen. Comment ne pas voir aussi que l'APA permet la professionnalisation du secteur qui intervient aux côtés des personnes âgées, alors que ce n'est pas le cas avec l'augmentation des réductions d'impôts que vous consentez ? Ce n'est pas la même politique, elle n'aura pas les mêmes effets sociaux. A moyen terme, étant donné les besoins à venir, nous devons dès aujourd'hui créer des réseaux de solidarité de professionnels compétents. Ce n'est pas en recourant à la déduction fiscale, par le biais des emplois familiaux, que vous doterez notre pays de cet outil de politique sociale, moderne et adapté aux défis de demain.
    La différence entre ces deux optiques n'est pas mince. Votre politique tourne le dos à la dynamique des politiques sociales de demain, celle de la mise en oeuvre des réseaux. Nous aurons l'occasion d'y revenir : il faut s'attacher au nécessaire rapprochement des dispositifs sanitaires et des dispositifs médico-sociaux.
    L'APA est un levier essentiel au service de l'emploi de service, aussi important qu'il soit aujourd'hui. En diminuant son financement, vous diminuez mécaniquement les créations d'emploi dans ce secteur. Ces emplois se trouvent là où sont les personnes âgées, c'est-à-dire le plus souvent en milieu rural - et c'est un député urbain qui en parle. Notre collègue Vergnier, président du conseil général de la Creuse, a ainsi su se saisir de la chance que représente cette allocation.
    M. Michel Vergnier. Merci !
    M. Jean-Marie Le Guen. On estime à près de 1 000 les emplois qui peuvent être créés dans le département de la Creuse grâce à l'APA. Paulette Guinchard-Kunstler me disait que 270 emplois avaient déjà été créés en Franche-Comté.
    Ainsi, après la suppression des emplois-jeunes, autre mesure « sociale », s'il en fut, après l'abrogation de la loi sur la réduction du temps de travail, après la suspension du volet antilicenciement économique de la loi de modernisation sociale, le Gouvernement met à mal un secteur créateur d'emplois. Car cette allocation, tout en aidant à la prise en charge des personnes âgées dépendantes, encourage à recourir à des personnels à domicile.
    En réduisant l'aide aux personnes âgées, vous faites en même temps reculer l'emploi, vous réduisez le financement de la formation de ces aides et vous renvoyez ces professions dans la non-reconnaissance d'où le gouvernement précédent avait commencé de les sortir.
    Pourtant, nous pouvons tous mesurer l'aide dont l'APA fait bénéficier les familles et les attentes qu'elle suscite. Elle est un moyen unique de créer du lien social entre des personnes en situation d'isolement familial et social, tout en consolidant le tissu associatif dans un partenariat renouvelé.
    Cela nous concerne tous. C'est notre devoir envers nos aînés, mais aussi envers les familles qui, tous les jours, accompagnent leurs parents et envers les aides-soignants, les aides à domicile, les infirmières, qui sont confrontés, à domicile comme en établissement, aux besoins d'écoute, de parole, de communication, de dignité des personnes âgées.
    Vous nous proposez de réduire le coût de l'APA en augmentant la participation financière des personnes âgées les plus pauvres, mais la meilleure façon de réduire les coûts financiers de la dépendance, vous le savez tous, c'est de tout faire pour réduire la dépendance elle-même. Cela passe, par exemple, par le lancement d'un grand programme de recherche sur la maladie d'Alzheimer et par la mise en oeuvre d'un plan de prévention contre les maladies chroniques et les causes de l'entrée dans la dépendance. De ce point de vue, notre pays a encore beaucoup de retard. Là aussi, les réseaux et l'argent disponible - ces fameux 400 millions d'euros - pourraient être mobilisés. Et lorsque nous aurons à débattre, au mois de juillet, semble-t-il, de la loi de santé publique, j'espère bien apprendre quels moyens le Gouvernement se donnera pour mettre en oeuvre une politique de prévention. Les beaux discours ne suffisent plus, il faudra y mettre des moyens qui font encore défaut.
    Qu'il faille s'attacher aujourd'hui à définir les besoins, c'est une évidence. La grille AGGIR, le rapporteur l'a souligné, retrace mal les besoins évolutifs. Les frontières entre les groupes sont ténues. En 2001, le législateur a fait preuve d'intelligence en entreprenant de réviser la grille. Mais il faut poursuivre. Le comité scientifique d'adaptation des outils d'évaluation de l'autonomie devait rendre son rapport le 31 janvier 2003. Nous l'attendons toujours et nous espérons, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous nous en donnerez des nouvelles...
    Il semble que, puisque le GIR 4 coûte cher, vous voudriez le scinder en deux, si bien qu'une moitié de ceux qui en relèvent aujourd'hui n'aurait plus droit à l'APA. Je pense au cas dramatique des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer, qui pourraient être directement concernées. Les familles sont très inquiètes du peu de cas que vous faites des démences séniles. Les malades d'Alzheimer sont majoritairement classés en GIR 4. Ils ont besoin d'aide et d'accompagnement et ils ont peur de ne plus pouvoir bénéficier de l'APA.
    Au travers de l'exemple de cette maladie, dont l'impact est déjà si fort et dont la progression doit être très rapide dans les années qui viennent étant donné le vieillissement de la population, nous mesurons le chemin à parcourir pour adapter nos politiques sanitaires et nos politiques sociales au bouleversement démographique que nous allons connaître et à toutes ses conséquences.
    Les réticences, les craintes et les réflexes de régression que vous manifestez à propos de l'APA, vous y serez également confrontés lorsque vous aborderez la réforme des retraites et celle de l'assurance-maladie. Certes, le choc démographique nécessite d'être géré et les réformes sont nécessaires. Certes, les moyens dont nous disposons pour nos politiques sociales sont forcément limités, même si la droite et la gauche ne mettent pas la même limite à l'effort social de la nation. Mais puisque nous sommes confrontés à ces limites et à ces défis, je ne crois pas, contrairement à ce que vous dites, que la restriction de la couverture sociale, surtout au détriment des moins favorisés, soit la seule politique possible.
    Oui, nous devons avoir l'imagination et le courage de réformer nos politiques sociales. Ne faut-il pas, par exemple, explorer le rapprochement significatif, dont les premiers bénéficiaires seraient les personnes âgées, de la prise en charge des soins et de la prise en charge médico-sociale ? Pour faire face à la vague démographique, nous devons trouver, entre le sanitaire et le social, des convergences de bonne gestion qui nous procureront des gains de productivité considérables.
    De la même façon, au moment où vous abordez la réforme des retraites, avez-vous bien réfléchi à la place que vous entendez donner à la prise en charge nécessairement collective des politiques sanitaires et sociales concernant les personnes âgées ? Pourrez-vous sérieusement traiter des retraites et de leur pouvoir d'achat si, dans le même temps, vous ne mettez pas sur la table l'avenir de l'assurance maladie...
    M. Yves Bur. Vous n'avez jamais voulu la réformer !
    M. Jean-Marie Le Guen. ... et les politiques de déremboursement ou de transfert sur les assurances complémentaires de prestations qui relevaient, jusqu'à présent, de l'assurance obligatoire ; si, dans le même temps, vous n'êtes pas capables de dire à l'ensemble des retraités et des personnes qui approchent de la retraite, comment, dans les années qui viennent, vont être pris en charge les problèmes de la dépendance ? C'est une question essentielle.
    M. Yves Bur. Que de regrets à constater tout ce que vous n'avez pas fait !
    M. Christian Ménard. La réforme des retraites, par exemple !
    M. Jean-Marie Le Guen. Ecoutez, mes chers collègues, en créant l'APA, nous avons certainement fait beaucoup plus pour les personnes âgées que vous ne ferez vous-mêmes avec votre réforme des retraites ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Jean-Louis Idiart et M. Michel Vergnier. C'est clair !
    M. Yves Bur. Quel culot !
    M. Jean-Marie Le Guen. A l'évidence, ce n'est pas dans le sens d'un renforcement de la solidarité que vous comptez agir. C'est pourquoi nous trouvons votre politique irrecevable : parce qu'elle tourne le dos à la justice et à l'avenir. Votre action, monsieur le secrétaire d'Etat, traduit un abandon flagrant de la politique en faveur des personnes âgées dépendantes, dont vous n'avez pas su défendre les intérêts au sein du Gouvernement.
    Aujourd'hui, l'opinion politique est très inquiète. Des milliers de personnes, partout en France, ont signé des pétitions pour vous demander de ne pas toucher à l'APA. C'est la première fois dans notre pays que l'on observe une mobilisation aussi forte en faveur des personnes âgées et de leurs droits, probablement parce que nos concitoyens ont enfin compris qu'en se mobilisant pour l'APA, ils défendaient en fait leurs propres intérêts. C'est le début d'une politique sociale d'avenir ; l'APA doit rester un droit universel. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Christian Ménard. La gauche, c'est l'abandon !
    M. le président. Dans les explications de vote, la parole est à M. Denis Jacquat, pour le groupe UMP.
    M. Denis Jacquat. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je pensais que notre pays ne voulait plus de politique politicienne, mais souhaitait une politique sociale réaliste, efficace et attentive aux désirs des Français. C'est en ce sens que, pour ma part, j'interviendrai.
    Les Français souhaitent que l'APA continue à exister car, dans le fond, il s'agit d'une bonne loi. Cependant, ce soir, il faut sauver l'APA. Et c'est urgent ! Hubert Falco l'a dit en parlant de texte d'urgence. Georges Colombier l'a redit en évoquant des mesures d'urgence indispensables. Les conseils généraux, de droite comme de gauche, demandent d'urgence, avant le 31 mars, afin d'établir leur budget, un texte précis et clair concernant le financement de l'APA, en particulier au niveau national.
    Pour dresser le constat, ce n'est pas la peine de se battre avec les chiffres. Il faut seulement rappeler quelques chiffres simples, évoqués ici même l'année dernière et cette année. Le gouvernement précédent avait indiqué que, pour 2003, la dépense serait de 2,5 milliards d'euros. Ce matin, le directeur du FFAPA a précisé devant la commission des affaires sociales qu'il fallait prévoir en réalité une somme de 3,7 milliards. La différence est de 1,2 milliard.
    Quand j'étais lycéen à Metz, Jean Laurain, ancien ministre socialiste, qui était mon professeur de philo en sciences-ex, m'avait appris à toujours lire et relire les textes. Or notre éminente collègue Paulette Guinchard-Kunstler indiquait elle-même en commission, dans un propos relaté à la page 13 du rapport : « Au total, le surcoût de l'APA est ainsi évalué à 1,5 milliard d'euros. » Nous sommes donc d'accord sur les chiffres : il manque au moins 1,2 milliard d'euros pour financer l'APA en 2003.
    M. Michel Vergnier. Non ! Ce n'est pas ce qui manque, c'est ce que vous n'avez pas financé !
    M. Denis Jacquat. A propos de l'APA, j'ai entendu dire que nous étions contre et que nous faisions tout contre les personnes d'un certain âge. Or, je tiens à rappeler, car j'étais l'un de nos porte-parole, que nous avons toujours dit, l'année dernière et les années précédentes, dans le cadre de l'opposition constructive que nous pratiquions en nous interdisant toute politique politicienne, qu'il fallait répondre oui à l'APA, mais que nous avions des doutes sur son financement. Ces propos, je les ai confirmés lors de l'examen de chaque projet de loi de financement de la sécurité sociale. Et lors de la création de l'APA, nous nous sommes abstenus. Refusant de voter contre, nous avons opté - c'était une nouveauté peut-être - pour une abstention constructive, en précisant que nous avions peur pour les deux années à venir, 2002 et surtout 2003, et plus encore pour les années suivantes, car rien n'était prévu au-delà.
    Puisque Jean-Marie Le Guen a parlé du site Internet de l'Assemblée nationale, je vous invite à le consulter : vous y verrez que Yves Bur, Georges Colombier ou moi-même avons toujours dit oui à l'APA, mais en émettant des doutes quant à son financement.
    Encore une fois, je ne suis pas là pour faire de la politique politicienne. Alors je tiens à dire, au nom de l'UMP, que nous ne voulons pas le démantèlement de l'APA, mais que nous voulons au contraire la sauver. Les Françaises et les Français ne veulent pas des paroles, ils veulent des actes et des résultats.
    M. Jean-Marie Le Guen et M. Michel Vergnier. Pour ça, ils vont être servis !
    M. Denis Jacquat. Dans cet esprit, l'UMP votera contre l'exception d'irrecevabilité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à Mme Hélène Mignon, pour le groupe socialiste.
    Mme Hélène Mignon. Monsieur le ministre, les personnes âgées, vous l'avez dit, méritent que l'on préserve leur liberté de choix. Ce sont en effet des citoyens, - et surtout des citoyennes - à part entière, et à 80 % elles veulent finir leur vie chez elles.
    Vous avez aussi évoqué les liens étroits qui doivent être entretenus entre les jeunes générations et les anciens : c'est la solidarité entre générations dans la société et au sein même de la famille.
    Préserver les liens étroits entre les parents, les grands-parents et les enfants, c'est éviter de donner à la personne âgée la sensation qu'elle est une charge pour les siens - pas seulement sur le plan financier, même si cela est très important, mais à cause du besoin d'être aidée pour accomplir certains actes de la vie courante.
    L'aide à domicile permet de retarder l'entrée en établissement. C'est aussi une mesure de prévention.
    Répondre aux besoins des personnes âgées sans leur présenter le spectre du recours sur succession, voilà qui a effectivement permis une montée en puissance rapide de l'APA. Quoi que vous en disiez, mes chers collègues et monsieur le secrétaire d'Etat, les estimations se sont révélées exactes pour 2002, comme l'a montré M. Le Guen, et le financement était non seulement assuré, mais excédentaire. Il reste vrai aussi qu'en 2003 nous atteindrons les chiffres prévus pour 2004.
    M. Yves Bur. Eh oui !
    Mme Hélène Mignon. Il y a donc un décalage d'un an dans les prévisions. Mais pourquoi manipuler les chiffres de 2002 ? Je n'en vois pas l'intérêt.
    Souvenons-nous que les conseils généraux ont réclamé la responsabilité de l'APA, ce qui correspond à leurs compétences. Mais nous sommes tous d'accord pour dire que l'APA, comme toute mesure sociale, a un coût. Tout geste de solidarité doit être financé, et je verrais un penchant dangereux, que je refuserais pour ma part de cautionner, à reculer devant l'effort en déclarant : solidarité oui, mais marche arrière à cause du coût !
    Vous dites vouloir sauvegarder l'APA, mais en manipulant les chiffres. Nous voulons, nous, sauvegarder l'APA en sauvegardant la dignité des personnes âgées et de leur famille.
    M. Denis Jacquat et M. Yves Bur. Nous aussi !
    Mme Hélène Mignon. Nous ne voulons pas revenir sur une mesure qui répond à un vrai besoin et permet aussi des créations d'emplois. Nous voulons permettre aux personnes âgées dépendantes de vivre selon leur choix. Pour ces raisons, le groupe socialiste votera l'exception d'irrecevabilité. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.
    Mme Muguette Jacquaint. S'il fallait choisir un terme pour qualifier la majorité actuelle, je la comparerais volontiers à un service d'urgences : urgence à diminuer l'APA, urgence à supprimer les emplois-jeunes, urgence à supprimer les aides-éducateurs, urgence à remettre en cause les retraites ; mais aussi urgence à satisfaire le MEDEF en réduisant l'impôt sur les grandes fortunes de 500 millions d'euros.
    M. Jean Auclair. Le MEDEF : il y avait longtemps !
    M. Denis Jacquat. C'est obsessionnel !
    M. Yves Bur. Mme Jacquaint en rêve !
    Mme Muguette Jacquaint. Cela fait beaucoup d'urgences...
    M. Bernard Accoyer. Normal, c'est la série ! (Sourires.)
    Mme Muguette Jacquaint. ... pour aller dans le sens contraire de ce qu'attendent la grande majorité des gens.
    M. Alain Joyandet. Vous, il vous faudrait plutôt un service de réanimation ! (Rires.)
    Mme Muguette Jacquaint. Je vous entends, les uns et les autres, dire que c'est un sauvetage. Vous donnez le sentiment que vous allez tout sauver. Mais quand les Français, au bout de quelques mois, vont se rendre compte des conséquences de votre politique, je ne suis pas sûre qu'ils vous considéreront comme des sauveteurs !
    M. Jean-Claude Mignon. Mais si !
    M. Jean Auclair. Allez faire un tour en Creuse, vous verrez !
    Mme Muguette Jacquaint. Je doute même qu'ils vous délivrent un brevet de sauvetage. En tout cas, s'il faut vous en délivrer un, ne comptez pas sur nous !
    M. Yves Bur. Ce qui est sûr, c'est que les Français ne comptent pas sur vous !
    Mme Muguette Jacquaint. Ne comptez pas non plus sur les personnes âgées, car en voyant la diminution de l'APA, elles jugeront comment vous les traitez !
    M. Yves Bur. Les Français ont déjà jugé !
    M. le président. La parole est à M. Yvan Lachaud, pour le groupe UDF.
    M. Yvan Lachaud. Mes chers collègues, je ne reprendrai pas les propos de mon collègue de l'UMP. Mais, me réfèrant à ceux que nous venons d'entendre, je dirai simplement que, pour nous, il est urgent de sauver l'APA.
    Mme Muguette Jacquaint. Encore un sauveteur !
    M. Yvan Lachaud. Voilà pourquoi nous ne voterons pas l'exception d'irrecevabilité présentée par le groupe socialiste.(Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Je mets aux voix l'exception d'irrecevabilité.
    (L'exception d'irrecevabilité n'est pas adoptée.)
    M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées.
    Mme Muguette Jacquaint. Et voici maintenant le maître nageur en eaux troubles !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Mesdames et messieurs les députés, je voudrais simplement donner quelques précisions concernant les chiffres, parce qu'ils ont été mis en doute.
    Vous vous référez, monsieur Le Guen et madame Mignon, à l'année 2002. Or, vous le savez fort bien, les dossiers ont commencé à être déposés en janvier. L'année 2002 n'est donc pas, pour les financements, une année pleine.
    Quant au bilan que vous souhaitez, monsieur Le Guen, je vous renvoie à celui de la DREES, que vous n'allez pas, je pense, remettre en cause. Il y avait, au 31 décembre 2002, 1 043 000 demandes déposées, 837 000 dossiers étaient déclarés complets et l'hypothèse minimale pour fin 2003 est de 870 000 dossiers. Par conséquent, lorsque je parle de 800 000 dossiers fin 2003, je suis encore en dessous de la réalité.
    M. Jean-Marie Le Guen. Vous ne parlez que des dossiers !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Les financements suivent, monsieur Le Guen. C'est évident !
    Mme Muguette Jacquaint. Alors, quels sont les chiffres pour 2003 ?
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Vous aviez prévu 2,5 milliards ; il faut 3,7 milliards. Il manque donc 1,2 milliard. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Question préalable

    M. le président. J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste une question préalable, déposée en application de l'article 91, alinéa 4, du règlement.
    La parole est à Mme Danièle Hoffman-Rispal.
    Mme Danièle Hoffman-Rispal. M. le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'allocation personnalisée d'autonomie, chacun en convient aujourd'hui, constitue une grande avancée sociale pour les personnes âgées dépendantes et pour leur famille. Cette loi historique adoptée par le Parlement en 2001 posait en effet les jalons d'une réflexion et d'une politique globale face au vieillissement.
    Or, à peine plus d'un an après l'entrée en vigueur de l'APA, le Gouvernement et sa majorité veulent déjà revenir, ne serait-ce qu'en partie, sur cet immense acquis social.
    Pour préparer l'opinion à cette régression, ce gouvernement n'a trouvé, depuis plusieurs mois, qu'une chose à dire et à répéter à propos de l'APA : « C'est une bonne mesure, mais elle coûte trop cher ! »
    Oui, cette mesure à un coût - mais c'est justement le signe que l'APA répond à un réel besoin social.
    Après l'avoir tant critiquée, la majorité actuelle se glorifie aujourd'hui d'inscrire au budget les crédits nécessaires à son financement. Mais, en fait, vos intentions sont malheureusement très claires, et cette proposition de loi le prouve : vous voulez mettre en oeuvre, dès à présent, des mesures qui limiteront l'effort global de solidarité envers nos aînés - j'y reviendrai.
    Les personnes âgées dépendantes bénéficiaires de l'allocation, leurs familles et l'ensemble des professionnels du secteur partagent une grande inquiétude. Vous prétendez vouloir préserver l'APA - la « sauver », dites-vous ! Mais, derrière vos discours rassurants, les mesures de restriction qui figurent dans la proposition de loi ne constituent-elles pas, en réalité, monsieur Jacquat, la première étape d'un démantèlement ?
    Par touches successives, vous pourriez dénaturer un droit universel que vous n'avez pas osé supprimer trop brutalement du fait de la sensibilité de l'opinion publique sur cette question.
    M. Denis Jacquat. Mais non !
    Mme Danièle Hoffman-Rispal. L'APA coûte trop cher, dites-vous ?
    M. Denis Jacquat. Je n'ai jamais dit cela !
    Mme Danièle Hoffman-Rispal. Demain, vous nous direz la même chose de la sécurité sociale. De cette appréciation découle la proposition de loi que nous étudions aujourd'hui. Une initiative pour le moins précipitée, et qui ne se situe pas, à mon sens, à la hauteur de l'enjeu que nous devons prendre en compte !
    Notre société voit l'espérance de vie s'allonger chaque année. Cette chance exceptionnelle est à l'origine de mutations profondes. Sachons répondre aux défis nouveaux et grandissants qu'elle entraîne.
    Ne vous y trompez pas : l'enjeu constitué par la solidarité entre les générations est encore devant nous. La France n'est pas en avance dans la prise en charge de ses aînés. D'autres pays européens en ont fait une priorité depuis longtemps déjà.
    Je suis convaincue que nous sommes là devant une question politique majeure : quelle société voulons-nous construire ? Quelle vision avons-nous de la solidarité entre les générations ? Quelle politique entendons-nous mener pour assurer la dignité des personnes âgées, et prendre en charge leur perte d'autonomie ? Il en va des valeurs les plus essentielles de notre société. Ce sont des questions fondamentales, auxquelles ce texte aurait dû répondre.
    A l'évidence, votre approche exclusivement financière du vieillissement n'est pas à la hauteur de l'enjeu. Comment ne pas la relier, du reste, au problème des retraites, dont vous allez nous proposer prochainement une réforme ? La remise en cause de l'APA est la plus mauvaise façon d'engager le débat ; elle augure mal des mesures que vous nous proposerez.
    Si l'on s'en tient à ses articles, le contenu de la proposition de loi que nous examinons ce soir pourrait presque passer pour anodin. Pour autant, personne ne l'ignore, la principale remise en cause de l'APA n'est pas dans ce texte, mais dans le décret que le Gouvernement prépare parallèlement et dont vous avez d'ores et déjà indiqué la teneur. Celui-ci consistera à faire passer la participation moyenne des personnes bénéficiant d'une aide à domicile de 5 à 12 %. De 80 %, le plafond maximum versé pour la participation des bénéficiaires passera à 90 % et touchera un nombre d'allocataires beaucoup plus conséquent. Surtout, les personnes âgées dont les ressources sont comprises entre 623 et 949 euros mensuels - quelles sommes importantes ! - devront désormais mettre la main à la poche pour faire face au coût de l'aide à domicile. A cet égard, j'aurais pu reprendre à mon compte les exemples significatifs que M. Jean-Marie Le Guen évoquait à l'instant.
    Ainsi, vous prétendez vouloir sauver l'APA. Or, la mesure que vous allez prendre consiste à faire payer les personnes âgées qui perçoivent - je vais parler en francs, c'est souvent plus compréhensible pour elles - moins de 6 000 francs par mois. En résumé, ce sont essentiellement les plus modestes que vous aurez mis à contribution.
    L'économie globale que vous en attendez pour cette année est de 73 millions d'euros. Or, vous avez déclaré rechercher 400 millions d'euros d'économie à faire porter sur les bénéficiaires. Est-ce à dire que le pire est encore à venir ?
    Je prendrai un exemple que je connais bien, celui de la ville de Paris, qui est aussi un département et qui verse à ce titre une allocation personnalisée d'autonomie à près de 15 000 bénéficiaires, contre 1 800 PSD auparavant. La majorité des allocataires sont des femmes âgées de plus de 85 ans, souvent veuves ; 83 % d'entre elles ne disposaient auparavant d'aucune aide et près de la moitié ont des revenus inférieurs au seuil de 949 euros. C'est sur elles que vous faites porter l'effort le plus important.
    Ce ne sont pas que des chiffres. Ce sont autant de situations concrètes, souvent très difficiles, voire dramatiques. Songez que des dizaines de milliers de personnes, aux revenus modestes - car moins de 6 000 francs par mois, c'est un revenu modeste - parfois mal logées, ou dont le logement est très mal adapté à leur dépendance, voyaient depuis quelques mois leur aide à domicile presque entièrement prise en charge par la collectivité. Demain, la participation qu'elles devront verser viendra amputer leur budget, à moins qu'elles ne renoncent simplement à l'aide à domicile elle-même. Or, personne n'osera dire que ce soutien est un luxe. Il est la condition d'une vie toujours digne.
    La dépendance due au vieillissement n'atteint pas tous les individus de la même façon. Nous ne sommes pas égaux devant la vieillesse. C'est pourquoi, plutôt que de faire payer davantage les personnes dépendantes, vous auriez dû faire reposer l'effort supplémentaire sur l'Etat, c'est-à-dire faire appel à la solidarité nationale.
    Une telle solution n'est pas dans l'air du temps, visiblement : en témoignent les mesures fiscales que vous prenez dans le même temps. La réduction d'impôt pour l'emploi à domicile, que vous avez accrue, va profiter aux personnes les plus aisées ; la baisse de l'impôt sur le revenu ne concerne que la moitié des contribuables, celle qui l'acquitte effectivement. Quand on constate que vous diminuez parallèlement l'allocation versée aux personnes âgées dépendantes, qui touchent moins de 900 euros de revenus mensuels, on comprend quelles catégories sociales votre Gouvernement entend privilégier.
    Comment alors ne pas comparer, dans l'esprit comme dans les modalités, votre aménagement de l'allocation personnalisée d'autonomie avec l'instauration d'un ticket modérateur pour les bénéficiaires de l'aide médicale d'Etat, ou la mise en place d'un délai - tiens ! encore un délai - avant l'ouverture effective des droits des bénéficiaires de la couverture maladie universelle.
    A en croire ses déclarations d'intention, les projets de la majorité se placeraient sous le signe de la solidarité. Quelle ironie ! Le surcoût que devraient prendre à leur charge les bénéficiaires de l'allocation personnalisée d'autonomie serait, selon vos évaluations, de 400 millions d'euros, soit une somme légèrement inférieure aux recettes fiscales que va perdre l'Etat du fait de la réduction de l'impôt de solidarité sur la fortune. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste.)
    Vous auriez pu choisir d'aborder la question de la dépendance d'une tout autre façon, en partant des besoins réels. La rapide montée en charge de l'APA, le nombre de dossiers déposés, le nombre d'allocations attribuées par les présidents de conseils généraux après l'évaluation effectuée par les équipes médico-sociales le montrent clairement : les besoins sociaux correspondant à la prise en charge de la dépendance sont considérables. L'APA est un succès majeur parce qu'elle répond de manière pertinente à un besoin majeur.
    Vous avez pourtant décidé de prendre, de façon précipitée, des mesures fondées exclusivement sur des considérations financières à courte vue. Vous nous les présentez comme de simples ajustements techniques, mais nous voyons bien qu'elles vont nettement dans le sens d'une remise en cause de la solidarité.
    Il ne s'agit pas pour nous de faire du financement de l'allocation d'autonomie une question annexe. Mais il faut en parler sérieusement et ne pas en faire le préalable de la prise en charge de la dépendance. Financer l'APA n'est pas tout. Il était indispensable d'attendre de disposer de données précises sur son coût réel, avant de modifier tout le dispositif sur la base d'approximations.
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Les budgets sont votés au 30 mai !
    Mme Danièle Hoffman-Rispal. Certains départements ont même déjà voté leur budget.
    Comment en effet pouvez-vous parler avec tant d'assurance de la question du financement sans avoir obtenu les chiffres exhaustifs et incontestables de l'année 2002 ? Ce matin seulement nous avons pu, suite à la demande de notre collègue Paulette Guinchard-Kunstler, recevoir le directeur du fonds de financement de l'APA pour une audition devant la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Est-ce bien sérieux ? L'article 13 de la loi de 2001 prévoyait un bilan financier de l'application de la loi d'ici juin 2003. Vous n'avez pas attendu d'en disposer.
    Je vais sans doute reprendre à mon compte plusieurs éléments de l'intervention de Jean-Marie Le Guen, mais il me semble que la répétition a valeur de pédagogie. N'étant pas encore parlementaire à l'époque, j'ai relu un certain nombre de dossiers concernant l'APA, dont celui de la loi du 20 juillet 2001, disponible sur le site de l'Assemblée. J'ai ainsi pu vérifier que Pascal Terrasse, le rapporteur du projet de loi, n'avait pas sous-évalué dans ses prévisions les implications financières de l'APA, contrairement à ce que nous entendons depuis plusieurs mois. Il estimait en effet son coût à 16,5 milliards de francs pour 2002, soit 2,5 milliards d'euros.
    Or le premier chiffre que nous a indiqué ce matin le directeur du fonds de financement de l'APA, et que M. le ministre a d'ailleurs confirmé, est 1,85 milliard d'euros, soit un montant sensiblement inférieur aux estimations initiales.
    On nous répond ce soir que 2002 ne constitue pas une année pleine.
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. On croit rêver !
    Mme Danièle Hoffman-Rispal. J'ai pourtant le sentiment d'avoir vu, dès la mise en place de l'APA, voire début décembre, des publicités fleurir dans les centres d'action sociale et dans nombre d'autres endroits, quelle que soit leur couleur politique, du conseil général. Ces « allocations départementales personnalisées d'autonomie » ont bénéficié d'une campagne massive, incitant l'opinion publique à se renseigner et à bénéficier de ce qu'on lui offrait. Prétendre que l'année 2002 n'est pas une année pleine alors que la loi était applicable au 1er janvier est donc pour le moins surprenant.
    S'agissant du nombre de bénéficiaires, on nous annonce enfin un chiffre : 642 000. Mais ce matin j'ai entendu 550 000. On nous dit que 1 043 000 dossiers sont déposés...
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. J'ai cité les chiffres de la DREES !
    Mme Danièle Hoffman-Rispal. Le nombre de bénéficiaires n'est donc pas de 800 000. Le chiffre avancé par l'enquête HID concerne une période de trois ans. Vous citez, monsieur le secrétaire d'Etat, le nombre de 642 000. Mais certains départements utilisent encore un système de calcul forfaitaire. Nous ne connaissons pas le nombre de dossiers rejetés, car ils ne sont, pour le moment, que déposés, et - vous l'avez vous-même admis - certaines évaluations n'ont pas encore été faites.
    De même, pour 2003, l'évaluation du rapporteur portait le coût de l'APA à 23 milliards de francs, soit 3,5 milliards d'euros. C'est le chiffre de M. Terrasse, ou de Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Je l'ai trouvé dans les rapports déposés il y a un an et demi, il n'arrive pas par hasard.
    Or le Gouvernement évalue aujourd'hui ce coût à 3,7 milliards d'euros. La différence n'est donc pas, comme on nous le répète à outrance, de 1,2 milliard d'euros.
    Votre indignation est donc bruyante, mais je ne suis pas sûre qu'elle s'appuie sur des chiffres correspondant à la réalité. L'APA a un coût, en effet : celui qui a été prévu. Dès lors, il convient d'effectuer les choix budgétaires qui s'imposent, et qui sont, certes, lourds de signification.
    On peut, comme vous le préconisez, faire largement porter l'effort sur les personnes âgées...
    M. Jacques Le Guen. C'est injuste !
    Mme Danièle Hoffman-Rispal. ... ou bien faire jouer la solidarité nationale en abondant le fonds de financement de l'APA. Nous avons fait des propositions en ce sens, mais vous avez préféré l'emprunt pour financer l'effort que l'Etat est censé réaliser par le biais du fonds national de financement de l'APA. Ainsi, c'est l'ensemble du financement de l'allocation personnalisée d'autonomie qui, au lieu d'être pérennisé et consolidé, ce qui aurait dû être le but de nos discussions de ce soir, va être fragilisé, et par l'Etat lui-même !
    Je tiens à citer le sénateur Michel Mercier, membre de votre majorité, qui, il y a quelques jours au Sénat, vous avertissait en ces termes : « Les dispositions proposées ne resteront pas dans les annales pour leur grande orthodoxie financière. » On ne saurait mieux dire, au vu de votre audace budgétaire : vous financez des dépenses de fonctionnement par l'emprunt.
    M. Michel Vergnier. C'est rare !
    Mme Danièle Hoffman-Rispal. Je suis curieuse de savoir ce qu'en pensera la Commission européenne.
    Venons-en aux réalités de la prise en charge de la dépendance.
    Il est regrettable que la révision de l'allocation personnalisée d'autonomie que vous entreprenez ne vise pas à accroître l'efficacité du dispositif, mais prétende contrôler l'efficacité de son utilisation en jetant la suspicion sur les personnes âgées.
    M. Yves Bur. Oh !
    Mme Danièle-Hoffman-Rispal. Je dis « prétende » car tout est déjà prévu dans la loi initiale !
    M. Yves Bur. Tout, sauf le financement !
    Mme Danièle Hoffman-Rispal. Pourquoi en rajouter sur ce contrôle d'effectivité ? Croyez-vous vraiment que l'allocation versée serve très concrètement, dans la quasi-totalité des cas, à autre chose qu'à financer un plan d'aide à domicile ? En lisant ces articles, on se pose la question.
    Le ministre des affaires sociales, François Fillon, a en outre cru bon d'opposer entre eux les deux modes de prise en charge de la dépendance, en établissement et à domicile. D'après lui, les bénéficiaires de l'allocation personnalisée à domicile seraient privilégiés. Cette opposition artificielle entre les modes de garde n'est pas judicieuse au regard de la notion de libre choix, que M. Falco a longuement évoquée au début de son intervention.
    Lorsque vous estimez que les personnes qui perçoivent l'allocation d'autonomie pour une aide à domicile sont trop largement aidées, vous commettez un contresens lourd de conséquences. En effet, cette aide n'est ni superflue ni trop coûteuse ; elle est même souvent encore insuffisante.
    L'aide à domicile remplit un rôle important de soutien immédiat, mais aussi de prévention. Y renoncer signifie, trop souvent, pour une personne âgée, qu'elle devra ensuite aller vivre plus rapidement dans une maison de retraite.
    Pour qui en connaît le coût bien supérieur de l'accueil en établissement et sait que la très grande majorité des personnes concernées - près de 90 % - souhaitent rester chez elles le plus longtemps possible, cette proposition témoigne d'une méconnaissance manifeste de la réalité des besoins. Les économies d'aujourd'hui préparent des dépenses accrues de demain.
    Quelle action entendez-vous mener à l'égard de l'aide à domicile ? Le secteur est fragile et j'ai le sentiment que vous le fragilisez davantage encore en augmentant la participation des bénéficiaires, au lieu de solvabiliser la demande ; en créant un délai de deux mois entre le dépôt du dossier et l'ouverture des droits à l'allocation, mesure qui créera de graves difficultés de prise en charge, au quotidien, pour une économie, à l'évidence, dérisoire ; enfin et surtout en réduisant comme peau de chagrin le fonds de modernisation de l'aide à domicile.
    Les métiers d'aide à la personne ont pourtant besoin que leur soient donnés une vraie formation et une vraie qualification. A un moment où le chômage augmente à nouveau, ils représentent un formidable gisement d'emplois dans les années qui viennent. Ils rendent un service de proximité devenu indispensable dans les villes comme en zone rurale.
    En prenant 36 millions d'euros - soit les deux tiers de la somme initialement affectée - sur le budget du fonds de modernisation, vous empêchez concrètement l'aide à domicile de se déveloper et de se hisser au niveau de professionnalisation et de reconnaissance qui doit être le sien. Ces 36 millions, vous les destinez aux départements pour lesquels l'APA représente une charge financière particulièrement lourde. Certes, nous sommes conscients de la nécessité de renforcer la péréquation entre les départements et nous avons même proposé des amendements en ce sens. Certains, du fait de leurs ressources fiscales et de leur démographie, connaissent en effet de réelles difficultés liées à la mise en oeuvre de l'APA. Cependant vous déshabillez Pierre pour habiller Paul, au lieu de faire jouer pleinement la solidarité nationale.
    Cette proposition de loi est bien à l'image de votre politique globale à l'égard des personnes âgées. Vous aviez, quoi qu'on nous en dise, déjà gelé la programmation des comités locaux d'information et de coordination gérontologique, les CLIC. Je connais quelques départements, monsieur le secrétaire d'Etat, qui ont subi des gels républicains, l'an dernier, bloquant ces CLIC. Pourtant, véritables lieux d'information et de conseil, ces structures d'accompagnement et de suivi individuel des personnes dépendantes sont indispensables. D'ailleurs, M. Colombier en a lui-même parlé. Elles sont la garantie d'un suivi performant et équitable des personnes, d'un vrai maillage gérontologique de tout le territoire national.
    Coordonner l'aide autour de la personne âgée et de sa famille est, nous le savons, un enjeu prioritaire. Le nombre de CLIC est aujourd'hui encore nettement insuffisant dans notre pays. En interrompant la programmation de la création de mille nouveaux CLIC, vous mettez un terme à de multiples expériences locales visant à répondre au désarroi des personnes âgées en perte d'autonomie, et de leurs familles.
    Qu'en est-il en outre de votre politique d'accueil des personnes âgées en établissement ? Allez-vous, là aussi, bloquer la signature des 1 800 conventions tripartites inscrites dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 ?
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Je viens de vous répondre !
    Mme Danièle Hoffman-Rispal. Très bien, mais que sont devenus les 183 millions d'euros prévus pour moderniser les maisons de retraite ? Je vois, comme vous, l'inquiétude des professionnels du secteur. Il semble donc, excusez-moi, monsieur le secrétaire d'Etat, que vos réponses ne soient pas forcément claires, non seulement pour moi mais aussi pour ces professionnels.
    M. Michel Vergnier Eh oui !
    Mme Danièle Hoffman-Rispal. Il semblerait pour le moins inconséquent de geler ces crédits, alors que vous-même, monsieur le secrétaire d'Etat, avez déclaré - je l'ai lu avec plaisir - que 200 000 lits en établissement étaient indignes de nos aînés, opinion que je partage largement. D'où la nécessité, pour être vraiment dans une démarche de qualité, de continuer l'effort en signant ces conventions tripartites.
    Comme pour l'aide à domicile, comme pour les CLIC, le Gouvernement a mis un coup d'arrêt à une politique qui consistait à améliorer la qualité de la prise en charge de nos aînés. Cette proposition de loi sur l'allocation personnalisée d'autonomie doit être examinée à la lumière de cette remise en cause globale.
    Malgré tout, la majorité s'évertue à faire passer ces initiatives pour des ajustements technico-financiers destinés à préserver l'APA.
    Pour notre part, nous savons qu'elles constituent bel et bien, pour tout le secteur de la prise en charge des personnes âgées dépendantes, un recul manifeste par rapport à la loi de 2001 adoptée sous l'égide du gouvernement de Lionel Jospin.
    Tous les professionnels du secteur, je le répète, toutes les associations familiales et toutes les organisations syndicales sont particulièrement attachés au progrès qu'a représenté la mise en place de l'APA. Aucun ne s'est mépris sur le sens de votre action. Leur inquiétude est légitime. La vigueur de leurs réactions démontre, s'il en était besoin, que la politique de votre Gouvernement constitue bien un retour en arrière.
    M. Michel Vergnier. Le Gouvernement marche en arrière.
    Mme Danièle Hoffman-Rispal. Une question demeure maintenant : jusqu'où irez-vous dans le « détricotage » de la loi de 2001 ?
    M. Yves Bur. Allez-y !
    M. Jean-François Chossy. Dieu seul le sait !
    Mme Danièle Hoffman-Rispal. Le recours sur succession a été rejeté au Sénat, mais cette idée est si ardemment défendue par certains membres de la majorité et même du Gouvernement que nous ne saurions considérer qu'elle est définitivement écartée. Nous y sommes profondément opposés pour une raison simple : elle enlèverait à l'allocation personnalisée d'autonomie son caractère de droit universel. Nous en reviendrions alors à la prestation spécifique dépendance que beaucoup de personnes âgées renonçaient à demander, alors qu'elles y auraient eu droit, à cause de l'existence de ce recours sur succession.
    Cette tentation du retour à la PSD se confirmera-t-elle avec la suppression de l'allocation versée à un grand nombre de bénéficiaires actuels ; je veux parler de ceux qui sont actuellement classés - quel terme ! - en GIR 4, donc considérés comme « moyennement » dépendants. J'ai entendu, y compris dans le groupe d'étude sur les personnes âgées de l'Assemblée, beaucoup de propos par rapport à ces personnes âgées classées en GIR 4.
    Je me permettrai, là aussi, monsieur le ministre, de vous adresser une mise en garde : le recours à l'aide à domicile joue un rôle de prévention très important pour ces personnes qui, en particulier pour celles qui développent un début de maladie d'Alzheimer ou des troubles apparentés. Y renoncer les conduirait rapidement à un niveau de dépendance plus grand. Cette mesure ne serait par conséquent ni juste ni efficace.
    A écouter certains membres de la majorité, la révision de la grille des GIR pourrait vous conduire très prochainement à aller dans ce sens. Ainsi que nous l'avons déjà souligné, nous aurions préféré que la représentation nationale soit saisie de la globalité des intentions du Gouvernement concernant l'APA. Ce n'est pas la méthode que vous avez choisie, car vous peinez, sur un sujet d'une telle importance, à assumer vos choix.
    Ainsi les mesures qui viennent aujourd'hui bouleverser le dispositif de la prise en charge de la dépendance passent par le biais d'un décret et d'une proposition de loi. Que des parlementaires se saisissent directement de cette question, nous pourrions tous nous en réjouir. Mais cela masque en fait votre incapacité à assumer la remise en cause de l'APA devant l'opinion.
    M. Michel Vergnier. N'avoue jamais !
    Mme Danièle Hoffman-Rispal. En effet, autant le dire, cette proposition de loi ne traite pas de la dépendance. Elle s'inscrit dans les coupes budgétairs auxquelles il vous faut procéder pour boucler votre budget et tenter de tenir vos promesses de baisse d'impôts. La preuve en est que, s'il s'agissait d'évaluer sereinement l'APA, de proposer des améliorations à la lumière de l'expérience, vous auriez attendu les quelques mois qui nous séparent du délai fixé par la loi,...
    M. Michel Vergnier. Bien sûr !
    Mme Danièle Hoffman-Rispal. ... pour évaluer dans tous ces aspects le dispositif actuel.
    M. Denis Jacquat. Fin mars !
    M. Michel Vergnier. Oh ! Non !
    Mme Danièle Hoffman-Rispal. C'est pourquoi vous devez faire vite : une seule lecture devant le Parlement ; un avis conforme de la commission des affaires culturelles et sociales de notre assemblée qui n'a adopté aucun amendement.
    M. Denis Jacquat. On se retrouvera d'ici à la fin de l'année.
    Mme Danièle Hoffman-Rispal. Pourtant vous auriez pu en accepter certains.
    Ce débat se déroule en catimini. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Denis Jacquat. Non !
    M. Michel Vergnier. Le ministre ne vous écoute pas !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Bien sûr que si !
    Mme Danièle Hoffman-Rispal. Cela est d'autant plus regrettable que le texte qui nous est présenté s'inscrit, plus globalement, dans le contexte de votre politique sociale. Alors que la loi de 2001, qui instituait l'allocation personnalisée d'autonomie, portait une vision d'avenir, la proposition de loi en discussion témoigne, à l'inverse, d'une vision étroite négligeant les évolutions profondes de notre société. Nous aurions pourtant pu, sur un sujet aussi fondamental que l'autonomie des personnes âgées, prendre la peine de travailler ensemble pour améliorer la loi actuelle. Plutôt que de tuer l'APA, vous auriez pu la faire vivre.
    A l'évidence, la direction que prend le Gouvernement est toute autre. Vous entamez aujourd'hui le démantèlement d'un acquis social (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire),...
    M. Jean-François Chossy. Mais non !
    M. Denis Jacquat. Madame, vous êtes charmante, mais tout de même !
    Mme Danièle Hoffman-Rispal. ... certes récent, mais auquel les Français sont plus attachés que vous ne le pensez. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Michel Vergnier. Calmement et posément elle a tout expliqué.
    M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Madame Hoffman-Rispal, je vous remercie pour le ton de vos propos, même si je n'en partage pas la teneur.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Et qui tranche avec celui de ses prédécesseurs !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Je vais simplement vous apporter quelques précisions.
    Vous avez évoqué l'évaluation du précédent gouvernement en mentionnant fort justement le chiffre de 23 milliards de francs, soit 3,5 milliards d'euros, et en concluant que cela était proche des 3,7 milliards que nous engageons pour 2003. Vous avez simplement oublié de rappeler que ce chiffre de 23 milliards de francs, évoqué par le rapporteur, correspondait au moyen terme, c'est-à-dire à l'horizon 2005-2006. Madame Hoffman-Rispal, comme M. Le Guen, vous avez trois ans de retard. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Mme Danièle Hoffman-Rispal. Mais non !
    M. Augustin Bonrepaux. Trois ans d'avance !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Non, il s'agit bien de trois ans de retard et de quelque 300 000 dossiers de retard ! Voilà tout simplement les raisons du décalage qu'il y a entre ce que vous dites et ce que nous nous affirmons.
    Par ailleurs, je tiens à vous rassurer, en ce qui concerne les CLIC : les crédits inscrits dans mon budget ont été totalement préservés. De ce fait, d'ailleurs, 270 CLIC étaient en place à la fin de l'année 2002.
    Puisque la date du 31 mars a été évoquée à plusieurs reprises, je précise qu'elle m'a été demandée par tous les présidents des conseils généraux que j'ai rencontrés.
    M. Jean Lassalle. C'est exact !
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. En effet, les budgets départementaux doivent être votés avec les taux des impôts locaux, avant cette date. Ils ont donc souhaité des évaluations précises afin de savoir ce que représenteront 50 % du financement puisque, comme nous allons le faire dans la Creuse, monsieur Vergnier, le département n'assurera que la moitié de la dépense alors que la loi que vous avez votée en laissait les deux tiers à sa charge. (Protestations sur les bases du groupe socialiste.)
    M. Bernard Derosier. Ce n'est pas vrai !
    M. Augustin Bonrepaux. Non, 50 % !
    M. Richard Mallié. Il sait de quoi il parle : il était président de conseil général !
    M. Augustin Bonrepaux. Il ne l'est plus !
    M. le président. La parole est à M. Yves Bur.
    M. Yves Bur. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous sommes tous d'accord pour dire que le vieillissement de notre population constitue un événement démographique inédit dont on doit d'abord se réjouir, même s'il porte en lui des défis rédoutables dont la dépendance est certainement le plus difficile à traiter.
    Le choix d'accompagner les personnes âgées dépendantes et, notamment, de les aider à assumer les charges médico-sociales lourdes est partagé par tous. Notre souhait le plus profond, je le répète une fois de plus, est de ne pas remettre en cause l'aide que vous avez instituée et la réforme qui a été engagée, dont les contours sont bons, nous avons été nombreux à le dire : Denis Jacquat, Georges Colombier, moi-même. Mais si, moins de deux ans après avoir voté l'APA, nous sommes obligés de revenir sur le sujet, c'est d'abord parce que, dès 2001, vous aviez prévu de rediscuter les conditions de son financement. D'ailleurs, il faut le répéter aussi, ce fut souvent la règle : vous avez toujours été très évasifs et très flous sur le coût réel de vos promesses.
    Mme Danièle Hoffman-Rispal. Ce n'est pas une raison pour revenir en arrière !
    M. Yves Bur. MM. Jacquat, Colombier et moi-même, nous n'avons eu de cesse d'exiger plus de clarté dans le débat et vous avez toujours éludé la question.
    Je suis convaincu que Mme Guinchard-Kunstler entendait apporter une première réponse au problème de la dépendance croissante de nos aînés mais je reste tout aussi convaincu que si, aujourd'hui, nous sommes contraints de sauver l'APA, c'est parce que la montée en puissance a été beaucoup plus rapide que vous ne l'aviez estimée.
    M. Michel Vergnier. C'est vrai.
    M. Yves Bur. Et vous ne m'enlèverez pas de l'esprit qu'il y avait, derrière cela, des arrière-pensées électorales. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)Comment expliquer autrement une campagne de publicité - unique dans les annales -...
    M. Jean-Marc Nudant. Tout à fait !
    M. Yves Bur. ... pour promouvoir ce progrès social, même s'il a été à crédit ?
    M. Jean-Marie Le Guen. Faites donc une campagne de publicité pour expliquer comment vous allez moins rembourser les personnes âgées ! (Sourires sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Yves Bur. Cette publicité, que vous avez faite de manière agressive, a d'ailleurs pris de court l'ensemble des conseils généraux qui n'ont pas pu prendre des dispositions pour mettre en oeuvre l'APA dans de bonnes conditions.
    Pour le financement, vous avez une fois de plus, eu recours à la création de fonds.
    M. Augustin Bonrepaux. Vous savez de quoi vous parlez, vous ?
    M. Yves Bur. Et, comme d'habitude, ces fonds n'étaient pas financés.
    Le fonds de réserve pour les retraites compte aujourd'hui à peu près 13 milliards d'euros. Au rythme où vous l'avez abondé, nous devrions attendre 2040 pour qu'il atteigne enfin les 152 milliards d'euros, c'est-à-dire les 1 000 milliards de francs, que vous aviez prévus.
    M. Jean-Marie Le Guen. Vous n'avez rien versé en 2002 !
    M. Richard Mallié. Et si on parlait du déficit budgétaire que vous nous avez laissé !
    M. Yves Bur. Nous serons confrontés, monsieur Le Guen, à un surcoût que Mme Guinchard-Kunstler estime, pour l'année prochaine, à 1,5 milliard d'euros.
    M. Jean-Marie Le Guen. C'est le tonneau des Danaïdes ! Avec vous, c'est percé de partout !
    M. Richard Mallié. C'est plutôt, avec vous !
    M. Yves Bur. Nous l'estimons cette année à 1,2 milliard d'euros. C'est la raison pour laquelle, face à l'urgence, nous mobilisons les usagers, les conseils généraux et le FAPA pour traiter de ce financement dont vous ne vous êtes pas occupé au moment de la création de la loi.
    Nous entendons sauver l'APA...
    M. Augustin Bonrepaux. Vous l'enterrez, plutôt !
    M. Yves Bur. Nous ne l'enterrons pas. Nous allons la sauver...
    M. Jean-Marie Le Guen. Docteur Jekyll !
    M. Yves Bur. ... et nous employer à pérenniser son financement pour les années à venir. C'est la raison pour laquelle l'UMP ne votera pas la question préalable. (« Très bien » et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson, pour le groupe socialiste.
    Mme Catherine Génisson. Mes chers collègues, nous aurions pu nous retrouver pour améliorer les conditions d'application de l'APA, dont nous reconnaissons tous le bien-fondé. L'allocation personnalisée d'autonomie est en effet l'expression de notre solidarité envers nos aînés afin qu'ils puissent avoir le plaisir de continuer à vivre avec nous.
    M. Yves Bur. Solidarité à crédit !
    Mme Catherine Génisson. Mais nous devons combattre ce qui est au coeur du dispositif de cette proposition de loi : le manque de soutien budgétaire. Et, finalement, ce que nous avons ce soir, c'est - que la profession me pardonne - un débat de maquignons. Nous n'avons entendu que des arguments financiers...
    M. Yves Bur. Vous, vous les évitez les arguments financiers !
    Mme Catherine Génisson. Mme Danièle Hoffman-Rispal en a fait la brillante démonstration.
    Vous reconnaissez l'acquis social de l'APA, et son humanité, mais vous refusez le coût de la solidarité.
    Allons au coeur du débat ! Quand vous oubliez tous les emplois qui peuvent être créés grâce à l'APA, quand vous préférez réduire l'ISF au lieu de financer cette allocation, nous ne pouvons pas vous suivre. Nous voterons la question préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à monsieur Yvan Lachaud, pour le groupe UDF.
    M. Yvan Lachaud. Notre souci d'équité et d'humanisme doit s'exprimer pleinement aujourd'hui. Il y va de notre système de solidarité nationale. C'est, pour l'Union pour la démocratie française, un élément de fierté que d'assurer aujourd'hui le sauvetage de l'APA en résolvant notamment son financement. Le Gouvernement a le courage de sortir les bouées de sauvetage. (Rires sur les bancs du groupe socialiste.) Il était urgent de le faire. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Même les présidents de conseils généraux de l'opposition nous demandent, en aparté, de prendre de ces mesures.
    M.  le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Tout à fait !
    M. Yvan Lachaud. Nous entendons ce soir un double langage. L'UDF ne votera pas la question préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Michel Vergnier. Le problème, c'est la méthode !
    M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.
    Mme Muguette Jacquaint. Tout comme nous avons voté l'exception d'irrecevabilité, nous voterons la question préalable.
    Ce matin en commission, ce soir en séance publique, il nous est reproché d'avoir fait trop de publicité autour de l'APA ! On croit rêver !
    M. Richard Mallié. C'était électoral !
    Mme Muguette Jacquaint. Pourquoi voter des lois et, qui plus est, de bonnes lois comme l'est, de l'avis de tous, celle pour les personnes âgées, si c'est pour les cacher ? Autant ne pas voter de loi ! Ayez le courage de le dire : l'APA c'était bien, mais il ne fallait pas la voter ; mieux vaut voter de mauvaises lois. D'ailleurs, c'est ce que vous allez faire aujourd'hui...
    Trop de publicité !
    M. Yves Bur. C'était celle de Jospin !
    Mme Muguette Jacquaint. ... que vous empêche d'aller faire la vôtre sur la diminution de l'APA que vous vous apprêtez à décider avec ce texte ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)
    M. le président. Je mets aux voix la question préalable.
    (La question préalable n'est pas adoptée.)
    M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Au moment d'engager la discussion générale, je souhaite recadrer le débat, en me tenant à l'écart des excès de langage qu'on a pu entendre.
    M. Michel Vergnier. C'est vrai qu'à droite, ils ont tenu des propos très excessifs !
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. La réforme de l'AFPA était consensuelle et l'est toujours sur le fond. Sur la forme, c'est un peu différent. M. Le Guen s'est absenté...
    M. Bernard Derosier. Nous ne sommes jamais vraiment absents ; nous sommes toujours virtuellement présents !
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. ... mais je trouve - cela lui sera rapporté ou il le lira - qu'il a un peu forcé le trait...
    M. Jean-Marie Le Guen. Me voilà, monsieur le président, vous vouliez me parler ?
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Je ne me répéterai pas, vous lirez les comptes rendus, monsieur Le Guen.
    Dès l'adoption de cette loi, comme l'a rappelé M. Bur, nous avions douté de la pérennité de son financement car il était en grande partie pris en charge par les départements. Le temps nous a, malheureusement, donné raison, et les procès d'intention me semblent aujourd'hui dépassés.
    M. Bernard Derosier. Dites-le à M. Falco !
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Une évidence s'impose : les prévisions faites à l'époque concernant la montée en charge de l'APA étaient totalement irréalistes.
    M. Michel Vergnier. Pas les prévisions, le calendrier !
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Elle a été nettement plus rapide qu'on ne l'avait annoncé.
    M. le secrétaire d'Etat nous a donné les chiffres exacts : les projections réalisées par le précédent gouvernement estimaient le nombre des bénéficiaires, et Mme Guinchard-Kunstler l'a redit en commission, à 800 000 en régime de croisière à l'horizon 2005-2006. Depuis son entrée en vigueur, 715 000 dossiers ont été déposés et l'estimation actuelle du ministère est de 870 000 dossiers à la fin de 2003.
    En ce qui concerne le coût, vous nous avez aussi donné, monsieur le secrétaire d'Etat, des chiffres qui ont le mérite d'être clairs et de bien cadrer les choses. La prévision était de 2,5 milliards d'euros à la fin 2003 ; le coût est estimé maintenant par le ministère à 3,7 milliards d'euros pour la même date, soit une différence de 1,2 milliard d'euros. Pour Mme Hoffman-Rispal, - et elle a raison - cela signifie une erreur de prévision de 8 milliards de francs.
    Ainsi l'APA, présentée comme la quatrième grande loi sociale du gouvernement socialiste, a été, comme d'autres, financée à crédit. Elle a déséquilibré le fonds vieillesse qui, aujourd'hui, n'a plus de réserve. Son directeur, M. Lenain, l'a confirmé ce matin en commission : aucun prélèvement n'est plus possible et ce fonds est à la limite du déficit.
    M. Georges Colombier, rapporteur. C'est exact !
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Par ailleurs, le trés discret rapport de l'assemblée des départements de France attribuait à l'APA, en juin dernier, une hausse moyenne de 4 % de la fiscalité locale prévue pour 2002, alors que la pression fiscale dans les départements était en baisse depuis 1996. Quinze jours plus tard, Dexia Crédit Local indiquait que, du fait de l'APA, les départements avaient augmenté la fiscalité de 2 % en 2002, et la moyenne cache en réalité d'importantes disparités. La Haute-Garonne ou la Savoie ont ainsi dû augmenter la pression fiscale de 25 % à 30 % ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Mme Hélène Mignon. Quoi ? La Haute-Garonne !
    M. Jean-Louis Idiart. Non, quand même !
    Mme Hélène Mignon. Ne citez pas la Haute-Garonne ! Soyons sérieux !
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Et Mme Muguette Jacquaint nous a donné l'exemple de la Seine-Saint-Denis : alors que la PSD coûtait 10 millions d'euros par an, l'APA en a coûté 33 en 2002...
    M. Jean-Louis Idiart. C'est scandaleux ! Vous racontez des bobards !
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. ... et s'élèvera à 60 en 2003. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Je cite les chiffres de Mme Jacquaint. Elle peut les confirmer...
    Mme Muguette Jacquaint. Je les confirme.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Et elle a raison. C'est un exemple de dérapage lié à un manque de prévision qui n'était peut être pas, comme l'a très bien dit M. Bur tout à l'heure, sans arrière-pensées au moment où la campagne de publicité a été lancée, quelques mois avant l'élection.
    Dès son arrivée, le Gouvernement a engagé une réflexion sur les moyens de financer ce surcoût et d'aider les départements les plus fragilisés, sans remettre en cause l'APA. Je veux à cet égard saluer les efforts d'Hubert Falco qui, dès le début de ses prises de fonction, a pris le problème à bras-le-corps, avec pour souci premier de sauver l'APA et de tout faire pour préserver sa dimension universelle et sociale. Une série de rencontres entre les conseillers généraux et l'Etat a permis d'aboutir à un partage du surcoût entre les départements, l'Etat et les bénéficiaires les plus aisés, dont la participation devrait être augmentée. C'est par la voie du décret que doit se concrétiser pour partie le réaménagement du dispositif. Il prévoit une modification de la participation des usagers et la proposition de loi de M. de Broissia s'articule à celui-ci.
    Les principaux apports du texte sénatorial sont au nombre de trois.
    La première mesure consiste à allonger le délai d'obtention de l'allocation : le versement sera désormais effectué après l'agrément médico-social et l'agrément du conseil général. Il ne sera plus, comme actuellement, automatique dès réception de la demande.
    Deuxièmement, il est prévu de renforcer les moyens d'investigation des conseils généraux, afin de s'assurer que l'APA ne sert pas à financer autre chose qu'un plan d'aide pour une personne âgée dépendante.
    Troisièmement, le texte modifie les conditions dans lesquelles le FAPA aide les départements et autorise ce fonds à emprunter, 400 millions d'euros, à cet effet.
    Par ailleurs, le Gouvernement a souhaité offrir la possibilité aux conseils généraux de verser directement l'APA aux associations prestataires de services auprès des personnes dépendantes. Il a également donné un support législatif au financement par le fonds de modernisation de l'aide à domicile d'une participation forfaitaire destinée à contribuer à la compensation des charges supplémentaires pouvant résulter de la réforme de la tarification.
    A été écartée une solution de sauvetage qui aurait consisté à supprimer l'élargissement du service de la prestation aux personnes en GIR 4. Pour beaucoup, le besoin d'aide est réel, nous le savons tous. A aussi été écarté le rétablissement du recours sur succession - point qui a été longuement discuté dans l'intervention liminaire du ministre et dans les autres interventions.
    La non-récupérabilité sur succession de l'APA a été et demeure l'un des fondements de son succès. Le recours avait eu un effet très dissuasif dans le cadre de la PSD. Il aurait été fort regrettable de revenir sur cette disposition et je fais partie de ceux qui considèrent que nous devons, dans la mesure du possible, renouer avec une certaine mutualisation des risques.
    Ce texte doit être considéré comme une disposition transitoire. La solution de l'emprunt ne pourra pas être reconduite indéfiniment, nous l'avons bien compris. Une réflexion plus large doit être conduite, notamment à la lumière du rapport du Gouvernement prévu par la loi portant création de l'APA et du rapport du fonds de financement de l'APA. D'ici là, nous devons venir en aide aux conseils généraux et désamorcer la bombe à retardement issue du texte initial.
    Il s'agit moins de durcir l'APA que de la sauver d'un naufrage annoncé. Le précédent gouvernement a fait commerce d'illusions. A nous la charge d'agir dans un esprit de responsabilité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Discussion générale

    M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont.
    Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont. Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, une société se juge à l'attention qu'elle accorde à sa jeunesse et à ses aînés. Or, ce sont actuellement les premières victimes des choix budgétaires gouvernementaux : d'un côté, suppression des emplois-jeunes et réduction drastique des efforts antérieurement consentis en faveur de l'éducation nationale de l'autre, démantèlement de l'allocation personnalisée d'autonomie.
    Il est inutile, monsieur le ministre, de tenter d'esquiver la question. Le débat actuel sur l'APA et son financement est largement - pour ne pas dire exclusivement - lié à la décision regrettable du gouvernement de M. Raffarin de réduire l'impôt sur la fortune et l'impôt sur le revenu - deux cadeaux faits aux plus aisés de nos concitoyens qui vous conduisent à amputer cette dépense sociale pourtant indispensable, comme le prouve le nombre de demandes d'APA déjà enregistrées dans nos départements.
    Sans ce manque à gagner budgétaire, la question du financement de cette grande avancée sociale se poserait certes, tant la demande est importante, ce qui est significatif du besoin en la matière - et nous n'avions jamais nié la nécessité de réajustements budgétaires. Mais en tout état de cause, les engagements pris par vos prédécesseurs auraient pu être tenus, et cette mesure de solidarité, plébiscitée par nos concitoyens, aurait été instaurée sans heurts.
    Ainsi, le présent texte a un but unique : faire des économies au détriment des personnes âgées dépendantes et fragiles. Le mot, au demeurant, n'est-il pas revenu de façon récurrente dans votre propos ? A l'évidence, mieux vaut, avec ce gouvernement, être riche et bien portant que pauvre et en situation de dépendance.
    Mme Muriel Marland-Militello. Voilà qui est original !
    Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont. Pour en venir à vos propositions, permettez à l'élue départementale que je suis, et à ce titre particulièrement sensibilisée à la mise en place de l'APA, de dire que ces propositions relèvent de la cavalerie. Sans reprendre les analyses judicieuses de mes collègues Danièle Hoffman-Rispal et Jean-Marie Le Guen, j'insisterai néanmoins sur votre choix de financer cette dépense sociale pérenne par un emprunt, ce qui est la marque d'une curieuse orthodoxie financière, à laquelle pas un élu local n'oserait se risquer ! Le subterfuge vous permettra certes de passer le cap de 2003, mais vous n'échapperez pas ensuite à un financement stable par l'impôt.
    Le Président de la République, alors candidat, n'avait-il pas au demeurant déclaré en avril 2002 que l'Etat ne saurait reporter sur d'autres que lui le financement de sa politique sociale et que l'urgence sera donc d'adosser l'aide aux personnes âgées à des financements stables ? Parallèlement, vous allez contraindre les conseils généraux à augmenter fortement la fiscalité locale, aggravant ainsi les disparités qui peuvent exister selon le potentiel fiscal des départements. Curieuse manière d'engager les nouveaux transferts de compétences proposés par M. le Premier ministre ! C'est de bien mauvais augure pour la décentralisation !
    Certes, vous envisagez une dotation de solidarité spécifique de 20 % dont une vingtaine de départements, les moins favorisés, pourraient être bénéficiaires. Mais cette décision, qui va dans le sens d'une nécessaire péréquation et qu'à ce titre il convient de saluer, est obérée par le fait que ces 20 % seront puisés dans les 400 millions d'emprunt et donc non renouvelables, non pérennes.
    Par ailleurs, monsieur le secrétaire d'Etat - cela a été dit mais il n'est pas inutile de le répéter -, la mise en place de l'APA a d'ores et déjà permis la création de très nombreux emplois, et il n'est pas si fréquent qu'une allocation sociale soit génératrice d'embauches. Permettez-moi, à titre d'exemple, de vous citer mon département de la Haute-Vienne qui, avec 350 000 habitants, a d'ores et déjà créé 750 postes pour mettre en place cette allocation.
    Ainsi, vos propositions, néfastes pour nos aînés, sont de plus antiéconomiques. Cette loi répond à un besoin social fort. Elle engendre de surcroît des emplois. C'est pourquoi le retour en arrière que vous soutenez, monsieur le secrétaire d'Etat, est non seulement une erreur mais aussi une faute !
    Pour autant, nous n'avons jamais dit que notre texte représentait les « tables de la loi ». Il est un aspect qui méritait, à l'évidence, d'évoluer. Il s'agit, bien sûr, de la prise en charge en établissement. Il faut, en effet, reconnaître que les effets bénéfiques de l'APA, incontestables dans le cadre de la prise en charge à domicile, ont, dans le cadre d'un hébergement en établissement, largement été gommés par l'arrivée concomitante de la réforme de la tarification et de la mise en place de la réduction du temps de travail, ce qui a rendu le dispositif opaque pour les usagers. Et, comme l'a dit très justement ma collègue, Catherine Génisson, nous aurions pu, nous aurions dû, nous retrouver pour améliorer ce point. Malheureusement, force est de constater que votre seule proposition en la matière est la suppression des crédits d'assurance maladie en 2003 pour 183 millions d'euros, suppression qui remet en cause la poursuite des conventions tripartites dont l'objet était d'améliorer la prestation de soins par un personnel dûment formé et diplômé.
    Vous avez, monsieur le secrétaire d'Etat, reconnu à plusieurs reprises, et il convient à ce propos de saluer votre honnêteté intellectuelle, que la loi instituant l'APA était une bonne loi qui répondait à une demande sociale forte. Alors, ne soyez pas celui qui, pour tenir les promesses fiscales du Président de la République et du Premier ministre, ira prendre dans les poches des plus fragiles les cadeaux fiscaux faits au plus aisés de nos concitoyens. Revenez sur ce texte de régression que, bien sûr, nous ne voterons pas car la faculté pour tous nos aînés de vivre dans la dignité est le moins que nous leur devons (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. Yvan Lachaud.
    M. Yvan Lachaud. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les progrès de la médecine et le vieillissement de notre population accroissent le nombre de ceux qui, le grand âge venu, souffrent de troubles du comportement ou de handicaps physiques qui ne leur permettent plus d'être autonomes dans leur vie quotidienne.
    Chaque gouvernement est confronté, face à l'évolution des liens familiaux et des modes de vie, à la question de la perte d'autonomie des aînés et de sa prise en charge par la solidarité nationale. Ce sujet sensible pèsera de plus en plus lourd et la question de la dépendance est un enjeu majeur pour les prochaines années.
    En instituant, à juste titre, l'allocation personnalisée d'autonomie par la loi n° 2001-647 du 20 juillet 2001, l'intention du législateur était de venir en aide à ces quelque 800 000 personnes âgées de plus de soixante ans. Il palliait ainsi les limites de l'ancien système de prestations, la PSD, issue de la loi du 24 janvier 1997, dont les critères d'accès étaient par trop restrictifs.
    Lors du vote de l'APA, le groupe UDF avait lui-même encouragé sa mise en oeuvre afin de répondre aux situations douloureuses de nombreuses familles. Nous avions cependant mis en garde le gouvernement de l'époque sur la nécessité d'un plan de financement crédible. La catastrophe financière annoncée est malheureusement en passe de se réaliser.
    En effet, il était prévu que 650 000 et 785 000 personnes bénéficieraient de l'APA respectivement pour 2002 et 2003. Or dès 2002, ce sont, et vous le disiez tout à l'heure, monsieur le secrétaire d'Etat, plus de 770 000 personnes qui ont perçu l'allocation ! Le nombre de bénéficiaires dépasse donc très largement les évaluations initiales.
    Face à ce succès auquel n'ont pas répondu des mesures appropriées, les conseils généraux, qui ont reçu de nombreux dossiers, ont très vite fait part de leurs difficultés de financement.
    Les inquiétudes exprimées lors du vote de l'APA sont donc aujourd'hui largement confirmées. Les dépenses ont purement et simplement explosé. Ni la part de CSG attribuée au financement de l'APA, ni les contributions des régimes de retraite ne permettent de faire face à cette augmentation.
    Les conséquences ne se sont pas fait attendre, notamment pour les conseils généraux qui ont dû assumer la charge financière de cette imprévoyance et mobiliser toutes leurs ressources pour couvrir les charges supplémentaires. En 2002, l'APA a représenté un coût pour les conseils généraux de 1,5 milliard d'euros. En 2003, il pourrait s'élever à 3,7 milliards d'euros.
    C'est pourquoi je salue la proposition de loi que nous examinons ce jour, qui a l'avantage de ne pas remettre en cause le mécanisme de l'APA, mais s'attache à trouver les moyens de la financer en 2003.
    M. Jean Lassalle. Très bien !
    M. Yvan Lachaud. Que ce dispositif ne soit pas remis en cause est à mes yeux capital car, je le souligne au nom du groupe UDF, il est indispensable.
    Ce débat est l'occasion de rappeler notre attachement à cette avancée sociale qui permet à chacun de vivre dans la dignité. Cette mesure souple, qui offre toute liberté quant au mode d'hébergement, permet de faire jouer pleinement, dans un souci d'équité et d'humanisme, notre système de solidarité nationale. C'est un élément de fierté et un gage de responsabilité intergénérationnelle.
    L'autre avantage de cette proposition de loi est de résoudre le problème de financement pour l'année 2003.
    M. Jean Lassalle. Très bien !
    M. Yvon Lachaud. Les mesures proposées constituent en effet une étape décisive dans le financement du 1,2 milliard d'euros manquant.
    La formule retenue, et tout à l'heure critiquée par l'opposition, pour assurer ce financement - un emprunt - n'est cependant pas des plus satisfaisantes, mais il y a urgence et c'est bien évidemment, hors examen de la loi de finances, la seule solution envisageable.
    Je souhaite également apporter mon soutien aux mesures qui donnent aux départements les moyens de contrôler la bonne utilisation de l'argent public. L'amélioration du contrôle de l'effectivité de l'aide, notamment à domicile, va dans le bon sens, sous réserve bien sûr que le bénéficiaire de l'aide soit informé. Il est également souhaitable que les procédures de contrôle mises en place ne soient pas trop lourdes ni trop complexes et qu'elles tiennent compte de l'état de dépendance des bénéficiaires.
    Enfin, il ne faut pas nous voiler la face : la question du financement de l'APA se reposera en 2004 et il faudra trouver un financement pérenne. En effet, le dispositif sur lequel nous sommes amenés à nous prononcer aujourd'hui ne résout pas la question pour les années suivantes.
    Le rapport prévu dans la loi de 2001 sur l'application du texte devra être l'occasion de réfléchir à un nouveau financement ou, au besoin, à une nouvelle réforme de l'allocation.
    L'objectif qui est le nôtre est de préserver l'avenir de l'APA. Nous devons le faire de façon responsable pour maintenir cette avancée sociale.
    C'est pour cette raison que le groupe UDF votera en faveur des modifications proposées. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Michel Vaxès.
    M. Michel Vaxès. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègue, nous examinons une proposition de loi d'origine sénatoriale visant à organiser un montage financier pour financer l'APA. Nous pensons qu'il s'agit d'une nouvelle étape dans le démantèlement des avancées sociales de la dernière législature.
    L'APA serait-elle victime de son succès ? Je crois surtout qu'elle a permis de mettre en lumière des situations cachées et qu'elle a libéré les familles d'un poids redoutable, celui d'une souffrance tue, d'une souffrance liée à l'absence de soutien quand elles devaient affronter la présence d'une personne âgée dépendante dans leur entourage.
    Dès lors, une montée en charge non négligeable s'est produite. Cette grande avancée sociale a ouvert des portes pour beaucoup de personnes, beaucoup de familles désemparées à l'idée de supporter seules la perte d'autonomie d'un proche.
    Elles se voyaient enfin reconnaître un droit, personnalisé, égal et objectif. Le nouveau dispositif prend réellement en compte leur besoin et offre un véritable choix entre placement en hébergement et maintien à domicile. Et surtout, il n'a plus d'effets pervers comme le recours sur succession de la PSD.
    L'écart entre le nombre de bénéficiaires de la PSD et celui de l'APA montre que cette nouvelle prestation d'aide sociale était une véritable bouffée d'oxygène pour les familles confrontées à la perte d'autonomie d'un parent.
    Pour l'année 2002, 878 000 demandes d'APA ont été recensées. Jusqu'au mois de septembre, 542 000 dossiers ont été examinés, un avis favorable a été émis dans 84 % des cas. Ce sont en tout 490 000 personnes qui ont bénéficié de l'APA pour l'année écoulée - ce qui est proche des prévisions du précédent gouvernement - et pour lesquelles le financement a été prévu. Toutefois, pour l'année 2003, nous sommes conduits à estimer à plus de 800 000 le nombre de bénéficiaires potentiels, ce qui correspond à un surcoût estimé à 1,2 milliard d'euros environ.
    Cette situation a obligé certains départements à recourir à une augmentation substantielle de leur fiscalité et a fait supporter, dans les faits, le surcoût de l'APA aux administrés.
    Avec cette proposition de loi, vous tentez de répondre uniquement à cette difficulté financière. Mais vous ne faites que poser une rustine budgétaire et vous vous employez à prendre des dispositions qui priveront l'APA de sa portée originelle. Vous la dénaturez en lui imposant des restrictions drastiques. Les mesures techniques que vous envisagez de prendre par décrets, ajoutées aux effets de cette proposition de loi, contribueront à modifier l'intention et la forme de l'APA. Votre volonté est claire : réduire purement et simplement l'allocation et le nombre de ses bénéficiaires.
    Votre équation est simple : il manquerait 1,2 milliard d'euros ; donc 400 millions seront récupérés sur les familles, 400 seront mis à la charge des département et 400 à la charge de l'Etat. C'est le choix que vous faites. Nous le contestons, car il existe d'autres solutions.
    Ce texte, s'il en était besoin, rappelle que le Gouvernement substitue aux objectifs sociaux des objectifs comptables. La logique de sauvegarde que vous défendez n'est pas recevable. Vous ne pouvez pas justifier la remise en cause de l'APA au seul motif que sa montée en charge a été plus rapide que prévue.
    Quant aux familles, il est proprement scandaleux que vous les mettiez à l'épreuve. En renforçant les contrôles qui existent déjà, en prenant des dispositions restrictives quant à l'attribution de l'APA, vous espérez faire une économie de 400 millions. En réalité, des familles devront se justifier pour des aides qu'on leur apporte pour faire face à des situations d'extrême détresse parfois, alors que, dans le même temps, vous multipliez les aides publiques aux entreprises et les exonérations en tous genres, sans exiger le moindre contrôle quant à leur utilisation ! Il y a vraiment deux poids deux mesures...
    Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait !
    M. Michel Vaxès. ... selon que l'on est puissant ou misérable !
    M. Denis Jacquat. Vous avez de bonnes lectures !
    M. Michel Vaxès. Quand, d'un côté, on accable les personnes âgées en baissant les deux plafonds de l'APA, et que, d'un autre côté, on exonère de plus de 3,5 milliards les personnes les plus fortunées, peut-on expliquer cette logique autrement que par un choix en faveur de privilégiés ?
    Mme Muguette Jacquaint. Absolument !
    M. Michel Vaxès. Vous allez donc plonger à nouveau de nombreuses familles dans un terrible désarroi. Nombre d'entre elles se retrouveront avec l'un des leurs en situation de dépendance et disposeront de moins de moyens pour affronter cette charge.
    En ce qui concerne l'emprunt que vous autorisez pour le FFAPA, vous ne précisez pas dans le détail les modalités de répartition des dotations supplémentaires de ce fond. De plus, vous ignorez totalement les réalités économiques et sociales de chaque département.
    Vous regardez le problème par le petit bout de la lorgnette. D'une part, vous hypothéquez le véritable débat de fond que nous aurions dû avoir à l'occasion de la parution du rapport d'évaluation, prévue au mois de juin prochain par la loi de juillet 2001, et qui aurait permis de poser tous les termes du débat autour de la perte d'autonomie. Mais là encore on travaille dans l'urgence. Pourtant, ce n'est que dans deux mois que ce débat aurait pu avoir lieu.
    D'autre part, vous ignorez la question du vieillissement. Toutes les études montrent que ce phénomène va s'amplifier et devenir un vrai défi pour notre société. Nous le voyons bien avec le débat sur les retraites. Le corollaire de l'allongement de la durée de vie est le risque de perte d'autonomie et le problème de sa prise en charge. C'est inévitable.
    Or vous ne répondez là qu'à une question financière très conjoncturelle, sans assurer l'indispensable pérennité de ce dispositif. Vous nous le reprochez, mais vous reproduisez ce même schéma. Par conséquent, toute leçon en la matière serait malvenue.
    C'est pourquoi les députés du groupe des député-e-s communistes et républicains, comme ils l'avaient fait au moment de l'élaboration de la loi de juillet 2001, comme la nécessité en a été rappelée en commission, continuent de préconiser la prise en charge de la perte d'autonomie par la sécurité sociale.
    Le risque de dépendance ira croissant : il convient ainsi, dès à présent, d'assurer le financement pérenne de la couverture de ce risque et de ne pas se contenter de répondre aujourd'hui à une situation donnée, sans voir que, dans l'état actuel du dispositif, cette difficulté pourrait se reproduire.
    Souvenons-nous que, au moment de l'examen de la loi qui a instauré l'APA, les parlementaires communistes ont été les seuls à défendre et à formaliser l'idée de la couverture universelle du risque de la perte d'autonomie dans le champ de la protection sociale, regrettant la solution « hybride » alors retenue. A l'époque, un certain consensus s'était réalisé autour du caractère provisoire de l'APA, à mi-chemin entre une prestation sociale qui, par essence, relève de l'assistance et du principe de solidarité et une prestation de sécurité sociale universelle relevant de la solidarité nationale.
    Nous continuons de penser qu'il faut viser la couverture universelle de la perte d'autonomie des personnes âgées, qu'il est désormais nécessaire de répondre aux questions posées par la situation des personnes handicapées vieillissantes ou des personnes atteintes avant l'âge de soixante ans de maladies dégénératives.
    Pour les nombreuses associations signataires, en 1999, du Livre blanc pour une prestation d'autonomie, la discrimination entre les personnes, selon leur âge et l'origine de leur déficience, mérite une nouvelle réflexion. Les besoins concrets d'aides diverses dans la vie quotidienne existent, que la personne ait plus ou moins de soixante ans. Cette argumentation, que je fais mienne, a inspiré un amendement proposant de faire de l'APA une véritable prestation de sécurité sociale destinée à compenser les incapacités des personnes dépendantes.
    La question reste ouverte quant au rattachement de ce dispositif, chacun mettant un peu ce qu'il veut sous le générique « cinquième risque ». Faut-il une nouvelle branche autonome, un rattachement à la branche vieillesse ou à la maladie ? Pour l'heure, en accord avec les acteurs qui oeuvrent dans ce domaine, nous avons choisi la dernière option.
    En ce qui concerne le financement, il nous semble opportun qu'il soit assis sur une cotisation sociale. C'est un principe fonsdamental de notre protection sociale. Nous savons pertinemment - puisque la question se pose de manière récurrente, chaque année, lors du vote du projet de loi de financement de la sécurité sociale - que la part salariale et la part patronale dans la richesse produite ne sont plus du tout à parité. C'est pourquoi nous proposons un financement pérenne par une cotisation « perte d'autonomie » reposant sur la valeur travail et capital, cotisation modulée pour chaque entreprise en fonction de la masse salariale dans la valeur ajoutée, et non, comme certains l'envisagent, une augmentation de la CSG, impôt touchant principalement les revenus du travail et dédouanant l'entreprise. C'est une exigence fondamentale. Vous ne pourrez pas l'éluder bien longtemps.
    Toutefois, et compte tenu du revirement de votre position, nous proposerons d'autres modes de financement qui écartent les familles d'une mise à contribution toujours plus forte.
    Nous avons déposé plusieurs amendements qui visent à annuler des décisions budgétaires de votre Gouvernement, et à financer le « trou » de l'APA au nom de la solidarité nationale. Il s'agit de revenir sur la baisse de l'impôt sur le revenu pour les deux tranches supérieures du barème. Cette mesure rapporterait précisément 1,2 milliard d'euros, soit la totalité du manque à gagner. Nous proposons par ailleurs de supprimer l'allègement sur l'ISF : cela rapporterait 500 millions d'euros, soit un peu plus que ce que vous espérez économiser sur le dos des familles. Car, en définitive, vous voulez faire payer aux personnes âgées ce que vous concédez aux plus riches et au MEDEF. Bel exemple de solidarité nationale.
    Vous l'aurez compris, nous dénonçons le caractère injuste de cette proposition de loi tendant à remettre en cause cette avancée sociale qui concerne 800 000 personnes dépendantes et leurs familles. Face à la montée en charge de l'APA, les solutions apportées par le Gouvernement et sa majorité ne sont pas acceptables. Restreindre l'accès au droit des bénéficiaires potentiels, faire des économies en augmentant la détresse des familles qui ont à leur charge une personne âgée dépendante, et qui souvent sont les plus démunies, cela est profondément choquant. Dans le même temps, le Gouvernement, sans sourciller, allège l'ISF et multiplie les cadeaux aux grands groupes, qui, eux, continuent de licencier.
    L'APA n'est ni trop ni pas assez généreuse. Elle est juste et demande même à se développer pour devenir une prestation de sécurité sociale. C'est ce développement que vous freinez. Moins d'APA, c'est moins de prévention de la dépendance, moins d'emplois d'aide à la perte d'autonomie et plus de dépenses de santé à venir, notamment en structure hospitalière.
    Avec cette loi et les décrets qui l'accompagneront, l'allocation personnalisée autonomie sera moins généreuse et socialement moins juste. Elle sera fragilisée, puisque aucun financement pérenne n'assure son avenir.
    Nous entendons donc nous opposer au cynisme des dispositions qui font des personnes âgées et de l'APA leurs nouvelles lignes de mire. Nous continuerons, monsieur le secrétaire d'Etat, de militer pour imposer un nouveau droit de la dépendance. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. Denis Jacquat.
    M. Denis Jacquat. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, lorsque, au printemps 2001, notre Assemblée a été saisie en vue de l'examen du projet de loi relatif à la création de l'allocation personnalisée d'autonomie, nous avons, dans un bel élan collectif, salué avec enthousiasme cette initiative qui est apparue de bon aloi.
    Nous étions, en effet, unanimement convaincus que ce texte donnerait lieu à l'éclosion d'une réforme de grande envergure, qui mettrait un terme aux insatisfactions existantes et répondrait ainsi aux attentes légitimes qui avaient été engendrées par la prestation spécifique dépendance.
    Celle-ci, est-il besoin de le rappeler, avait abouti à un échec retentissant en raison de ses profondes lacunes et des inégalités flagrantes qu'elle avait occasionnées.
    Nous étions, par conséquent, remplis d'espoirs face à ce texte qui s'inscrivait dans la perspective fort louable de permettre que cette page soit tournée afin que les personnes en perte d'autonomie se voient enfin accorder une prestation conforme à leurs souhaits et besoins.
    A cet égard, il est indéniable que la création de l'allocation personnalisée d'autonomie a conduit à des avancées significatives.
    Tel est le cas de la suppression du recours sur succession qui produisait un effet dissuasif à l'égard de certains bénéficiaires potentiels de la prestation spécifique dépendance. Il en est de même pour ce qui concerne l'extension de la prestation aux personnes classées GIR 4.
    A ce propos, nous avions largement approuvé ces dispositions et je tiens à indiquer que nous persistons à penser qu'il convient de les saluer et qu'il serait totalement inopportun de les remettre en cause, Georges Colombier l'a dit.
    Cependant, en dépit de ces avancées, un grand nombre de députés de l'opposition a choisi de s'abstenir au moment du vote de ce texte. Comme je l'ai souligné à cette époque, cette abstention se voulait constructive, car nous pressentions que ces mesures ne pouvaient, à elles seules, assurer le succès de la prestation. Il nous semblait évident que le bien-fondé de ce texte et la pérennité même de l'APA seraient caducs si aucune amélioration n'était apportée au financement, clé de voûte du dispositif, qui avait manifestement été sous-estimé.
    Malheureusement, nos craintes se sont rapidement avérées justifiées car, dès les premiers mois de mise en application de la prestation, les départements ont croulé sous un afflux de demandes nettement plus élevé que prévu, ce qui a entraîné un surcoût de dépenses particulièrement important. Pour mémoire, un certain nombre d'entre eux ont dû procéder à une très forte augmentation de la fiscalité afin de pouvoir atténuer la déstabilisation de leurs finances tout en continuant à faire face aux besoins des personnes en perte d'autonomie.
    A ce propos, j'avais indiqué au cours des discussions relatives à l'APA que cette situation était parfaitement prévisible, car les chiffres disponibles à cette période - je pense en particulier à l'étude menée en 2000 par la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques, la DREES - attestaient de l'ampleur du nombre des personnes susceptibles de bénéficier de cette prestation. J'avais également indiqué que la prise en compte des personnes classées en GIR 4, ainsi que la suppression du recours sur succession, devaient alimenter notre réflexion concernant la montée en puissance de l'APA.
    Aujourd'hui, il nous appartient, comme nous y invite la proposition de loi qui nous est présentée, de prendre de toute urgence les mesures qui s'imposent, afin de remédier au déséquilibre financier auquel l'APA se trouve confrontée.
    Il s'agit certes d'un texte de transition destiné, en partie par l'emprunt, à assurer le financement pour l'année en cours. Cependant, cette transition est indispensable, car, en adoptant ce texte, nous accorderons un répit salutaire à l'APA. En effet, laisser perdurer la situation actuelle équivaudrait à mettre en péril la survie de ce dispositif dont on sait qu'il correspond à une attente réelle de plusieurs centaines de milliers de personnes dans notre pays.
    A plus long terme, à la lumière des résultats du bilan qui nous sera présenté prochainement et dont on peut raisonnablement penser qu'il aboutira à un constat proche de celui qui nous réunit aujourd'hui, il faut absolument s'orienter vers un montage financier stable. Je partage à cet égard l'analyse du rapporteur Georges Colombier, qui a souligné que les départements ne peuvent pas continuer à supporter une telle charge et qu'on ne pourra pas indéfiniment augmenter la pression fiscale locale. Ainsi, il faudra réfléchir à la place que nous entendons conférer à la CSG dans ce dispositif.
    A titre personnel, j'ai toujours milité en faveur de la création d'un cinquième risque au sein de la sécurité sociale et je redis mon attachement à cette solution, car je suis persuadé que c'est le seul gage de pérennisation de l'APA et le seul moyen efficace de faire jouer la solidarité nationale.
    De plus, je tiens à rappeler que les projections relatives au vieillissement démographique de la population révèlent qu'il entraînera inéluctablement une augmentation mécanique du nombre de personnes âgées souffrant d'une perte d'autonomie, sans oublier que le milieu associatif souhaite ardemment que la notion de perte d'autonomie soit étendue à toutes les catégories d'âge.
    Je crois fermement que ces éléments doivent nous inciter à nous inscrire dans une perspective de long terme au cours des discussions que nous aurons à nouveau à ce sujet.
    Il serait également souhaitable que le statut juridique du fonds de financement de l'APA soit revu car, comme notre collègue Yves Bur l'a fort justement rappelé lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003, ce fonds ne figure ni dans la loi de financement de la sécurité sociale ni dans la loi de finances, ce qui compromet fortement les possibilités de contrôle du Parlement sur sa gestion.
    De même, il conviendra de poursuivre la réflexion en vue de remédier aux distorsions existant entre les personnes à domicile et les personnes hébergées en établissement.
    Pour en revenir plus précisément à notre débat de ce jour, il nous est proposé, outre l'adoption de mesures adéquates en vue de financer l'APA en 2003, une modification de la date d'ouverture des droits des bénéficiaires. Nous approuvons cette disposition qui vise à simplifier, et donc à améliorer, la gestion de la prestation.
    Quant au principe d'un concours de solidarité au bénéfice des départements dont le rapport dépenses d'APA sur le potentiel fiscal est le plus fort, il nous semble essentiel qu'un mécanisme de péréquation soit introduit.
    En conclusion, le groupe de l'UMP adhère pleinement à ce texte grâce auquel nous parviendrons à sauver l'allocation personnalisée d'autonomie en attendant une refonte plus globale que nous appelons de nos voeux et qui permettra d'asseoir définitivement ce texte dans notre édifice social. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. Michel Vergnier pour le groupe socialiste.
    M. Michel Vergnier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, y avait-il urgence à réformer l'APA ? On peut se poser la question ce soir. Selon nous, il valait mieux attendre de savoir très clairement où nous en étions. En effet, l'APA n'est en place que depuis quelques mois, et on légifère déjà pour la réformer.
    Au Sénat, un de nos collègues a dit qu'il y avait le feu à la maison. Nous ne le pensons pas. Il y avait simplement à faire des choix budgétaires en faveur des personnes âgées, afin de répondre à un besoin social que personne, ici, n'a osé remettre en cause. Il est temps, puisque aucun orateur ne l'a fait jusqu'à présent, de rendre hommage à ceux qui ont conçu cette loi sous le gouvernement précédent, et de remercier ceux qui l'ont votée sous la précédente législature : je suis assez fier d'avoir été l'un d'eux.
    On peut craindre que notre débat d'aujourd'hui ne soit qu'un prélude et qu'on aille encore plus loin. A cet égard, ce que j'ai entendu tout à l'heure ne me rassure pas : ne dit-on pas que qui veut tuer son chien l'accuse de la rage ? Sans doute s'est-on un peu précipité, alors que l'APA n'en est qu'à ses débuts : cela prouve en tout cas que, en matière de progrès social, nous n'avons pas les mêmes conceptions.
    Le Gouvernement, conscient de défendre une valeur fondamentale de notre société, la solidarité entre les générations - quelle belle expression ! -, nous presse de légiférer. Mais nous restons vigilants. Puisque c'est notre devoir, nous discutons, nous échangeons, nous nous opposons. Quoi de plus naturel pour un parlementaire ? Il est pour nous impensable que le Gouvernement et les sénateurs de droite réduisent de façon drastique cette allocation destinée aux personnes âgées. Comment ne pas être inquiet, sceptique face à cette détermination à revenir sur des acquis sociaux fondamentaux, salués par tous nos concitoyens, et même plébiscités par les Français lorsque le gouvernement précédent les a mis en place ? C'était une réforme courageuse, nécessaire et digne. Une fois de plus, nous constatons que des acquis sociaux sont mis en cause par le Gouvernement : il y a de quoi être révolté.
    Cette loi, saluée par tous, qui touche un public large, était jusqu'à présent égalitaire et universelle, puisque son attribution n'était pas soumise à condition de ressources. Elle est aujourd'hui ébranlée dans ses fondements mêmes. Son esprit est bafoué, et elle commence à perdre de son sens.
    En effet, il y avait d'autres façons de la financer qu'en augmentant la participation des familles. Cela n'a pas été dit encore, mais vous allez faire payer les familles deux fois : une première directement, en augmentant leur participation, et une seconde par le biais de l'imposition locale qui, elle aussi, va augmenter. Monsieur le secrétaire d'Etat, même si je dois saluer l'important effort qui a été consenti en faveur de certains départements, notamment la Creuse, le compte n'y est pas. Dans la Creuse, malgré cet effort, la fiscalité locale va augmenter de manière considérable - de l'ordre de 18 à 19 %. Les familles paieront bel et bien deux fois.
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Et les 35 heures ?
    M. Michel Vergnier. Oh, je connais ce discours, monsieur le secrétaire d'Etat. Chaque fois que nous avons interrogé le Gouvernement sur ce sujet, comme j'ai eu l'occasion de le faire moi-même lors des séances de questions, vous avez répondu en évoquant les responsabilités de l'ancien gouvernement. Quand prendrez-vous enfin les vôtres ? C'est ce que nous attendons.
    Mme Muriel Marland-Militello. C'est ce que nous faisons !
    M. Michel Vergnier. Sauf que vous ne faites pas payer l'Etat !
    M. Denis Jacquat. L'Etat, c'est le peuple, les contribuables !
    M. Michel Vergnier. Nous n'avons jamais dit, monsieur Jacquat, que l'APA ne coûterait rien. Vous avez, comme moi, assisté aux débats, et vous savez, car nous l'avons souligné, quel est l'impact de cette mesure en matière de création d'emplois.
    Je suis donc obligé de poser à nouveau la question, puisque j'étais le porte-parole de mon groupe lors de la discussion du projet de loi relatif à la création économique : puisque l'on diminue de 500 millions de francs l'impôt sur la fortune, soi-disant pour créer des emplois, pourquoi ne fait-on pas la même chose pour l'APA ? Vous savez, ce n'est pas mille emplois, il y a eu une petite erreur de M. Le Guen tout à l'heure pour la Creuse, mais c'est tout de même plus de quatre cents emplois qui ont été créés. C'est une entreprise formidable, pour le département de la Creuse, et qui méritait une autre attention.
    Plus tard, dans le débat, monsieur le secrétaire d'Etat, je vous ferai part de la situation particulière de mon département, et nous proposerons des amendements. Mais très franchement, réformer l'APA en restreignant son champ d'application est un mauvais choix. En revanche, chercher des financements pour maintenir son caractère universel aurait été un bon choix, et nous regrettons que vous ne l'ayez pas fait. Dans un département comme le mien, cela aura une grande répercussion, plus d'ailleurs en termes de principes mêmes que de solutions à apporter, car les solutions que vous préconisez ne résoudront pas le problème financier.
    Ce choix est le vôtre. Permettez-nous, monsieur le secrétaire, de ne pas le partager, et de défendre nos convictions avec vigueur et sincérité. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. Bernard Derosier.
    M. Bernard Derosier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, décidément la droite est indécrottable. Elle n'a de cesse, quand elle revient au pouvoir, de démanteler toute la politique sociale que la gauche a instaurée. Après les emplois-jeunes, après les 35 heures, c'est le tour de l'APA, avant, sans doute, la protection sociale et la couverture maladie universelle.
    Je pensais, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'avec bientôt un an d'action gouvernementale derrière vous, vous auriez, à l'occasion de ce débat, un comportement plus responsable que celui que vous affichez. Pendant des mois, vous avez tergiversé, incapable d'apporter une réponse cohérente aux responsables des départements qui ne vous posaient qu'une seule question : quand l'Etat va-t-il respecter ses engagements ?
    Pendant des mois, vous avez fui vos responsabilités, vous retranchant derrière un argument aussi simpliste que fallacieux, à chaque interpellation dont vous étiez l'objet : le gouvernement Jospin n'aurait pas prévu le financement de l'APA.
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. C'est la vérité !
    M. Bernard Derosier. Il est vrai que les prévisions affichaient alors, au moment de l'examen de la loi, un nombre de demandeurs plus faible que celui que nous avons connu dès la première année. Cela signifiait-il, monsieur le secrétaire d'Etat, que les prévisionnistes d'hier, de gauche, selon vous, seraient moins fiables que ceux d'aujourd'hui, qui seraient de droite, selon votre démonstration ? Vous savez bien qu'en fait, ce sont les mêmes qui vous permettent aujourd'hui d'avancer des chiffres qui ne font que confirmer le succès de cette mesure.
    Car personne ne peut à ce jour contester le succès de cette importante réforme qu'est l'allocation personnalisée d'autonomie, qui permet, bien mieux que la prestation spécifique dépendance, de prendre en compte la situation de nombreuses personnes âgées et de leur offrir les moyens nécessaires à la prise en charge de leur dépendance. Ce succès, reconnu par tous, aurait justifié de la part du Gouvernement un autre traitement que cette proposition de loi relative à la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et à l'APA, qui revient sur des aspects fondamentaux de cette réforme.
    Là encore, le Gouvernement a fui ses responsabilités en s'abritant derrière une initiative parlementaire. En effet, socialement juste, l'APA donne enfin - ou peut-être devrais-je dire « donnait » - aux personnes devenues dépendantes, de manière universelle, les moyens de s'assurer une réelle dignité dans la dépendance.
    La mise en oeuvre de cette allocation a été confiée aux départements. Elle a atteint beaucoup plus rapidement que prévu son objectif, preuve irréfutable de sa nécessité. Elle pose un véritable problème de financement.
    Pourtant, des engagements avaient été pris par le gouvernement précédent afin d'assurer la pérennité de ce dispositif.
    Mme Muriel Marland-Militello. Ah bon ?
    M. Bernard Derosier. A l'occasion du congrès de l'Association des départements de France, en octobre 2001, à Rodez, devant les présidents de conseils généraux, Daniel Vaillant, alors ministre de l'intérieur, avait pris acte, au nom du Gouvernement, des préoccupations des élus départementaux. Il s'était engagé à ce qu'un premier bilan soit établi à la fin de l'année 2002 afin de constater les effets de la montée en charge de l'APA sur son financement.
    Par ailleurs, à l'occasion du débat parlementaire et dans la loi elle-même, un autre engagement consistait en un pacte financier partageant les responsabilités des départements et de l'Etat : la répartition du surcoût de dépenses occasionné par l'APA devait faire l'objet d'un partage égal entre l'Etat et les départements. L'APA trouvait ainsi sa source à la fois dans la solidarité nationale et dans la solidarité départementale.
    Les orateurs de droite n'ont de cesse de dire qu'il faut « sauver l'APA ». Mais il ne s'agit tant de sauver l'APA que d'assurer son financement en respectant et la loi et les engagements de l'Etat. Or aucun de ces engagements n'est respecté. Et après mon collègue Michel Vergnier, je veux dire en effet que, pour 2002, le compte n'y est pas.
    Depuis plusieurs mois, le Gouvernement n'a de cesse d'amplifier l'instabilité financière des départements et a délibérément abandonné le principe de la parité financière. Il décide aujourd'hui de faire payer les bénéficiaires et les départements et remet largement en cause les fondements mêmes de l'APA.
    Monsieur le secrétaire d'Etat, vous déclariez, le 17 août 2002, que l'allocation personnalisée d'autonomie était « une bonne mesure sociale que nous ne remettrons pas en cause, quoi qu'on en dise ici ou là ».
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Nous ne la remettons pas en cause.
    M. Bernard Derosier. Que faites-vous aujourd'hui, à travers cette proposition de loi que vous soutenez, sinon renier votre engagement d'alors ?
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Nous sauvons l'APA, c'est-à-dire que nous faisons ce que vous n'avez pas fait !
    M. Bernard Derosier. Vous ajoutiez : « Il n'est pas pensable que les conseils généraux assurent, en cas de nécessité, le milliard d'euros manquant. »
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Demandez à M. Vergnier !
    M. Bernard Derosier. « Ce serait accroître de 10 % en moyenne leur budget en occasionnant une hausse de trois à six points d'impôt. » Et pourtant, le couperet est tombé. N'est-ce pas scandaleux ?
    Par la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui, la majorité actuelle conforte la position du Gouvernement et continue à mettre à mal un dispositif de la nécessité duquel la preuve n'est plus à faire.
    Ce texte a pour objectif affiché de permettre d'économiser 250, 300, 400 millions d'euros sur le dos des bénéficiaires.
    L'article 1er modifie la date d'ouverture des droits à l'APA pour la personne. Cette date ne serait plus fixée au moment du dépôt du dossier mais à celui de la notification de la décision d'attribution par le président du conseil général. Cette disposition revient à faire perdre deux mois d'allocation aux bénéficiaires et même davantage, perte d'autant plus importante chez les personnes les plus dépendantes, et également pour les personnes en établissement, qui devront régler l'intégralité du tarif dépendance durant cette période. Et puis, la tentation sera forte, par souci d'économie, de laisser courir le délai, un mois, deux mois, trois mois supplémentaires.
    Quant aux articles 2 et 3, ils sont redondants. La loi du 20 juillet 2001 instaure déjà un contrôle de la mise en oeuvre du plan d'aide, chaque département organisant les modalités de ce contrôle. Ces articles font ainsi porter une certaine suspicion sur les bénéficiaires de l'APA. C'est une démonstration supplémentaire du peu de considération de la droite pour les publics en difficulté.
    Enfin, l'article 4 constitue une grande innovation en matière de finances publiques. Il fait passer la part du fonds versé aux départements de 80 % à 90 % et prévoit la souscription d'un emprunt par le fonds de financement de l'APA, à hauteur de 400 million d'euros. Un emprunt pour du fonctionnement ! Un élu local, monsieur le secrétaire d'Etat, maire de Toulon, qui prendrait une telle initiative serait passible des tribunaux.
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Comment ?
    M. Bernard Derosier. De plus, il est prévu que le remboursement de cet emprunt soit à la charge du fonds de financement de l'APA, et donc, indirectement, à la charge des départements.
    Une fois de plus, le Gouvernement fuit ses responsabilités. Les départements vont devoir se substituer à l'Etat et n'auront d'autres solutions que d'augmenter leur fiscalité locale alors que, dans le même temps, le Gouvernement affiche une baisse des impôts ségrégative et refuse de faire jouer la solidarité nationale en faveur de l'APA.
    M. Yvan Lachaud. Allons, allons.
    M. Bernard Derosier. Force est de constater que, pour répondre à des objectifs purement comptables, la majorité et le Gouvernement, par les mesures qu'ils proposent, font fi des objectifs sociaux et remettent gravement en cause la prise en charge de la dépendance. Ils reviennent ainsi progressivement vers une prestation spécifique dépendance qui, comme chacun sait, a fait la preuve de sa totale inefficacité en même temps que de son caractère inégalitaire.
    M. Michel Vergnier. Absolument !
    M. Bernard Derosier. Cette mise à mal n'est pas terminée, puisqu'il semblerait que le Gouvernement ne soit pas disposé à financer les conventions tripartites prévues dans le cadre de la réforme de la tarification des établissements accueillant des personnes âgées dépendantes pour 2003. Cela suscite une très grande émotion parmi les associations de retraités et les organismes gestionnaires d'établissements.
    Si cette mesure était confirmée, c'est la médicalisation des établissements pour personnes âgées qui serait remise en cause, et toute la politique de prise en charge de la dépendance telle que la gauche l'avait instaurée.
    La proposition de loi qui nous est aujourd'hui soumise contribue à remettre en question une réforme sociale fondamentale, qui est à la fois essentielle pour les personnes âgées dépendantes et leurs familles et garante d'un véritable élan de solidarité nationale et locale.
    Ce texte participe au démantèlement de cet important acquis social. Il est lourd de conséquences, injuste et inacceptable. La majorité et le Gouvernement portent une lourde responsabilité. Nous en prenons à témoin les centaines de milliers de personnes bénéficiaires de l'APA et leurs familles, qui avaient enfin trouvé une réponse à un vrai problème de solidarité entre les générations. Ainsi, si elles en doutaient, elles peuvent mesurer à travers ce texte qu'il y a vraiment une différence entre la gauche et la droite. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le secrétaire d'Etat aux personnes âgées. C'est pour cela que les Français ont tranché !
    M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à une prochaine séance.

2

DÉPÔT D'UNE PROPOSITION
DE LOI ORGANIQUE

    M. le président. J'ai reçu, le 12 mars 2003, de Mme Marie-Jo Zimmermann, une proposition de loi organique tendant à favoriser la parité en politique.
    Cette proposition de loi organique, n° 693, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

3

DÉPÔT D'UNE PROPOSITION
DE RÉSOLUTION

    M. le président. J'ai reçu, le 12 mars 2003, de M. Yves Cochet et plusieurs de ses collègues, une proposition de résolution tendant à créer une commission d'enquête relative aux conflits d'intérêt éventuels ayant présidé à la rédaction du rapport de l'Académie des sciences et du communiqué de l'Académie de médecine et de pharmacie établissant l'absence de risque des OGM pour la santé de l'être humain et son environnement.
    Cette proposition de résolution, n° 692, est renvoyée à la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, en application de l'article 83 du règlement.

4

DÉPÔT DE RAPPORTS

    M. le président. J'ai reçu, le 12 mars 2003, de M. Richard Dell'Agnola, un rapport, n° 689, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, sur le projet de loi renforçant la lutte contre la violence routière (n° 638).
    J'ai reçu, le 12 mars 2003, de M. Laurent Hénart, un rapport, n° 690, fait au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, sur le projet de loi relatif au mécénat et aux fondations (n° 678).
    J'ai reçu, le 12 mars 2003, de M. Jean Proriol, un rapport, n° 691, fait au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, sur le projet de loi modifiant l'article 1-1 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications (n° 677).

5

DÉPÔT DE RAPPORTS
SUR DES PROPOSITIONS DE RÉSOLUTION

    M. le président. J'ai reçu, le 12 mars 2003, de M. Christian Ménard, un rapport, n° 687, fait au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées, sur la proposition de résolution de M. Dominique Paillé tendant à la création d'une commission d'enquête concernant les pratiques frauduleuses dans l'attribution des pensions d'invalidité et les dysfonctionnements du service de santé des armées (n° 526).
    J'ai reçu, le 12 mars 2003, de M. Patrick Ollier, un rapport, n° 688, fait au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, sur la proposition de résolution de MM. Patrick Ollier et Jacques Barrot tendant à la création d'une commission d'enquête sur les conditions de gestion d'Air Lib et sur l'utilisation des fonds publics par cette compagnie aérienne (n° 684).

6

ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SÉANCES

    M. le président Aujourd'hui, à neuf heures quinze, première séance publique :
    Discussion de la proposition de loi, n° 623, de M. Michel Vaxès et plusieurs de ses collègues tendant à la suppression du mot « race » de notre législation :
    M. Michel Vaxès, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport n° 670).
    A quinze heures, deuxième séance publique :
    Suite de la discussion de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, n° 642, portant modification de la loi n° 2001-647 du 20 juillet 2001 relative à la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et à l'allocation personnalisée d'autonomie :
    M. Georges Colombier, rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (rapport n° 685) ;
    Discussion de la proposition de résolution, n° 446, de MM. René André et Jacques Floch sur la création d'un procureur européen :
    M. Guy Geoffroy, rapporteur, au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport n° 565).
    A vingt et une heures, troisième séance publique :
    Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.
    La séance est levée.
    (La séance est levée, le jeudi 13 mars 2003, à une heure vingt.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT
MODIFICATIONS À LA COMPOSITION
DES GROUPES
Journal officiel, Lois et Décrets, du 13 mars 2003
GROUPE DE L'UNION POUR UN MOUVEMENT POPULAIRE
(352 membres au lieu de 351) :

    Ajouter le nom de M. Marc Francina.

LISTE DES DÉPUTÉS
N'APPARTENANT À AUCUN GROUPE
(11 au lieu de 12) :

    Supprimer le nom de M. Marc Francina.