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ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES


JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU MERCREDI 25 JUIN 2003

COMPTE RENDU INTÉGRAL
2e séance du mardi 24 juin 2003


SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

1.  Questions au Gouvernement «...».

ARRESTATION DE JOSÉ BOVÉ «...»

MM. Jean-Claude Lefort, Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice.

POLITIQUE AGRICOLE COMMUNE «...»

MM. Jean-Luc Warsmann, Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.

ARRESTATION DE JOSÉ BOVÉ «...»

MM. Patrick Lemasle, Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice.

CENTRES D'HÉBERGEMENT ET DE RÉINSERTION SOCIALE «...»

M. Rodolphe Thomas, Mme Dominique Versini, secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion.

PAIEMENT DES JOURS DE GRÈVE «...»

MM. Marc Le Fur, Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire.

RÉFORME DE BERCY «...»

MM. Eric Woerth, Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

SITUATION ÉCONOMIQUE «...»

MM. Bernard Roman, François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

SALON DU BOURGET «...»

MM. André Berthol, Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.

POLITIQUE HUMANITAIRE DE LA FRANCE «...»

MM. Michel Lejeune, Renaud Muselier, secrétaire d'Etat aux affaires étrangères.
2.  Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire étrangère «...».
3.  Questions au Gouvernement (suite) «...».

MARCHÉS PUBLICS «...»

MM. Arnaud Montebourg, Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

PRÉVENTION DES INONDATIONS «...»

M. Max Roustan, Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable.

INDUSTRIE TEXTILE «...»

MM. François Vannson, François Loos, ministre délégué au commerce extérieur.

Suspension et reprise de la séance «...»

4.  Réforme des retraites. Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, d'un projet de loi «...».

Rappel au règlement «...»

MM. Alain Bocquet, le président.

DISCUSSION DES ARTICLES (suite) «...»
Article 12. - Adoption «...»
Après l'article 12 «...»

Amendement n° 3155 de la commission des affaires culturelles : MM. Denis Jacquat, Bernard Accoyer, rapporteur de la commission des affaires culturelles ; François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité ; Pascal Terrasse. - Adoption.

Avant l'article 13 «...»

Amendements identiques n°s 4851 à 4857 : MM. Frédéric Dutoit, le rapporteur, le ministre, Jacques Desallangre, Maxime Gremetz. - Rejet.
Amendements identiques n°s 4858 à 4864 : MM. Maxime Gremetz, le rapporteur, le ministre, Jacques Desallangre. - Rejet.

Article 13 «...»

MM. Jean Le Garrec, Denis Jacquat, Maxime Gremetz.
Amendements de suppression n°s 3051 de M. Terrasse, 3152 de Mme Billard, 4865 à 4871 : MM. le rapporteur, le ministre, Pascal Terrasse, Jacques Desallangre. - Rejet.
Amendements identiques n°s 4872 à 4878 : MM. Jacques Desallangre, le rapporteur, le ministre, Maxime Gremetz. - Rejet.
Amendements identiques n°s 4879 à 4885 : MM. Alain Bocquet, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
M. Maxime Gremetz.
Adoption, par scrutin, de l'article 13.
M. Maxime Gremetz.

Suspension et reprise de la séance «...»
Après l'article 13 «...»

Amendement n° 11184 de M. Bertrand : MM. Xavier Bertrand, rapporteur pour avis de la commission des finances ; le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Avant l'article 14 «...»

Amendements identiques n°s 10770 à 10776 : MM. Jacques Desallangre, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 10822 de Mme Guinchard-Kunstler : Mme Paulette Guinchard-Kunstler, MM. le rapporteur, le ministre, Pascal Terrasse, Denis Jacquat. - Rejet.

Article 14 «...»

MM. Pascal Terrasse, Denis Jacquat, Jean-Luc Préel.
MM. Alain Bocquet, le président.
Amendements de suppression n°s 4893 à 4899 : MM. Jacques Desallangre, le rapporteur, le ministre, Pascal Terrasse. - Rejet.
Amendements identiques n°s 4949 à 4955 : MM. Jacques Brunhes, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 5092 de M. Préel : MM. Jean-Luc Préel, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendements identiques n°s 4900 à 4906 : MM. Jean-Claude Lefort, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendements n°s 4907 à 4913 : MM. Jacques Desallangre, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendements identiques n°s 4914 à 4920 : MM. Daniel Paul, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendements identiques n°s 4942 à 4948 : MM. Jean-Claude Lefort. - Rejet.
Amendements identiques n°s 4935 à 4941 : M. Jean-Claude Lefort. - Rejet.
Amendements identiques n°s 4928 à 4934 : M. Jacques Desallangre. - Rejet.
Amendements identiques n°s 4921 à 4927 : M. Jean-Claude Lefort. - Rejet.
Adoption de l'article 14.

Article 15 «...»

M. Pascal Terrasse.

PRÉSIDENCE
DE M. MARC-PHILIPPE DAUBRESSE

MM. Denis Jacquat, Daniel Paul, Jacques Desallangre.
Amendements de suppression n°s 2991 à 2999, et 4956 à 4962 : MM. Pascal Terrasse, Daniel Paul, le rapporteur, le ministre, Alain Néri, Mme Paulette Guinchard-Kunstler. - Rejet.
Amendements identiques n°s 4963 à 4969 : MM. le rapporteur, le ministre, Maxime Gremetz. - Rejet par scrutin.
M. Pascal Terrasse.

Suspension et reprise de la séance «...»

Amendements identiques n°s 4970 à 4976 : MM. Maxime Gremetz, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendements identiques n°s 4977 à 4983 : MM. Jacques Desallangre, le rapporteur, le ministre, Maxime Gremetz, le président. - Rejet.
M. Maxime Gremetz.

Suspension et reprise de la séance «...»

Amendement n° 1145 rectifié de la commission des affaires culturelles : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Les amendements identiques n°s 4984 à 4990 ne sont pas soutenus.

Rappel au règlement «...»

MM. Alain Bocquet, le président.

Reprise de la discussion «...»

Amendements identiques n°s 4991 à 4997 : MM. Maxime Gremetz, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendements identiques n°s 4998 à 5004 : MM. Jacques Desallangre, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendements identiques n°s 5005 à 5011 : MM. Maxime Gremetz, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
MM. Maxime Gremetz, Pascal Terrasse.
Adoption, par scrutin, de l'article 15 modifié.

Article 16 «...»

MM. Pascal Terrasse, Denis Jacquat, Georges Colombier, Jean-Luc Préel.
MM. Alain Néri, le président, Alain Bocquet.
MM. Daniel Paul, Alain Néri, Alain Bocquet, le ministre, le président, Pascal Terrasse, Maxime Gremetz.
MM. Maxime Gremetz, le président.
Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.
5.  Nomination d'un député en mission temporaire «...».
6.  Ordre du jour de la prochaine séance «...».

COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

    M. le président. La séance est ouverte.
    (La séance est ouverte à quinze heures.)

1

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

    M. le président. L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.
    Nous commençons par une question du groupe des député-e-s communistes et républicains.

ARRESTATION DE JOSÉ BOVÉ

    M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lefort.
    M. Jean-Claude Lefort. Dimanche, à six heures du matin (Vives exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), en présence d'une armada policière, comme s'il s'agissait d'un terroriste (« Oui ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), José Bové a été brutalement tiré de son lit, arrêté (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) et conduit en prison par hélicoptère sans pouvoir emporter le moindre vêtement de rechange. (« Oh ! » sur les mêmes bancs.) C'est pure honte !
    M. Richard Mallié. C'est un délinquant !
    M. Jean-Claude Lefort. Qu'a donc fait José Bové pour subir pareille infamie ? A-t-il détourné des fonds publics ? (« Non ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.) A-t-il tué un préfet ? (« Non ! » sur les mêmes bancs.) A-t-il triché ? (« Non ! » sur les mêmes bancs. - « Oui ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Evidemment, non ! C'est pourquoi nous accusons le Gouvernement de violence d'Etat injustifiée. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. François Goulard. Et la justice, c'est quoi ?
    M. Jean-Claude Lefort. José Bové est un militant syndicaliste. Il a légitimement attiré l'attention sur les OGM et il devrait en être remercié, car il s'agit de notre sécurité alimentaire à tous. L'Union européenne elle-même a décidé un moratoire contre ces produits. C'est donc bien qu'il y a un risque en la matière.
    En vérité, cette arrestation brutale s'inscrit dans un contexte plus vaste de répression. Nous assistons aujourd'hui à une pénalisation de l'action syndicale. Des milliers de syndicalistes sont atteints : des grévistes sont visés au portefeuille, au moment même où vous menez une politique antisociale tous azimuts. Les deux sont intimement liés.
    M. Bernard Roman. Bien sûr !
    M. Jean-Claude Lefort. Aujourd'hui, nous vous demandons fermement deux choses : la libération de José Bové (« Non ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), qui doit bénéficier de la grâce présidentielle ; et, à l'occasion du 14 Juillet, une loi d'amnistie pour tous les syndicalistes frappés. (Protestations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Avec beaucoup d'autres, nous crions pour vous demander : Liberté ! Liberté au pays des droits de l'homme ! (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur quelques bancs du groupe socialiste. - « Libérez Lefort ! » et protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Richard Mallié. Y compris pour les voyous ?
    M. François Goulard. Bolchevik !
    M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
    M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le député, vous le savez bien, l'action syndicale n'a jamais consisté à faire justice soi-même. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Je voudrais rappeler très solennellement que le premier devoir de l'Etat, c'est d'exécuter les décisions de justice. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Un député du groupe des député-e-s communistes et républicains. Tartufe !
    M. le garde des sceaux. En cinq ans, M. Bové est passé cinq fois devant un tribunal.
    Un député du groupe des député-e-s communistes et républicains. Il est persécuté !
    M. le garde des sceaux. Par deux fois, il a été reconnu coupable et il a été exempté de peine. Il a, ensuite, été condamné à une peine de prison avec sursis. La justice lui avait adressé une mise en garde solennelle, en lui demandant de ne pas recommencer. Il a recommencé.
    Il a de nouveau été condamné. Sa peine a été réduite de quatorze à dix mois. Comme elle était inférieure à un an, il était donc possible de l'aménager avant incarcération. M. Bové a été convoqué par le juge de l'application des peines, mais il a refusé de se rendre à la convocation. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Un député du groupe socialiste. Il n'est pas le seul !
    M. le garde des sceaux. Cela signifie que M. Bové a refusé de collaborer...
    Un député du groupe des député-e-s communistes et républicains. Avec les puissances d'argent !
    M. le garde des sceaux. ... avec la justice : cela veut dire qu'il a défié la justice. Dès lors, il appartenait au garde des sceaux que je suis d'exécuter la décision de justice : c'est ce que j'ai fait. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Jean-Claude Lefort. Lamentable !
    Plusieurs député-e-s communistes et républicains. Hypocrite !

POLITIQUE AGRICOLE COMMUNE

    M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
    M. Jean-Luc Warsmann. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture et concerne un sujet extrêmement important pour l'avenir de l'agriculture française et pour l'ensemble du monde rural.
    Monsieur le ministre, vous participez depuis deux semaines à Luxembourg à des négociations européennes sur la politique agricole commune.
    M. Jean-Claude Lefort. OGM !
    M. Jean-Luc Warsmann. Dans le cadre de ces négociations, vous avez très clairement affirmé quelles étaient les positions de la France par rapport à celles de la Commission européenne : je pense notamment au problème du découplage des aides. Vous avez également affirmé que nous rejetiez les propositions actuelles de la Commission européenne visant à baisser les prix d'intervention sur les céréales et les produits laitiers.
    Il semble toutefois que le commissaire européen Fischler campe sur ses positions, à tel point que, vendredi dernier, lors du sommet européen, en Grèce, le Président de la République a dû réaffirmer que « les propositions de la Commission européenne ne sont pas acceptables et ne seront pas acceptées par la France ».
    Monsieur le ministre, demain, vous repartez pour Luxembourg où les négociations doivent se poursuivre. Comment comptez-vous vous y prendre pour obtenir de la Commission européenne, de la présidence grecque et de l'ensemble des pays européens des résultats conformes aux intérêts de la France ?
    M. Bernard Roman. Comme pour la TVA sur la restauration !
    M. Jean-Luc Warsmann. Je souhaite également vous dire avec force, monsieur le ministre, que, à la veille de cette négociation importante, vous pouvez compter sur le soutien résolu des députés français. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Jean Glavany. Non !
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.
    M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Monsieur le député Jean-Luc Warsmann, la négociation est en effet extrêmement difficile, mais, sur le plan budgétaire, l'anxiété n'est plus de mise, puisque, vous le savez, grâce à l'accord conclu à Bruxelles, le 15 octobre 2002, par le Président Chirac et le Chancelier Schroeder, le budget de la politique agricole commune est stabilisé pour les dix années qui viennent et il n'y aura pas de réduction de crédits pour les paysans européens.
    En juillet dernier, la Commission a mis sur la table des propositions inacceptables. Nous avons tourné en rond depuis et ne sommes entrés dans le coeur de la négociation qu'il y a quinze jours. On nous disait qu'elle ne devait durer que deux ou trois jours, que tout était ficelé. Je constate que, depuis quinze jours, nous tenons fermement la position de la France.
    Quelle est-elle ? Rien ne justifie aujourd'hui une baisse de prix, et il ne doit donc pas y en avoir. Cela implique l'existence de dispositifs de simplification des aides à même de maintenir des régulations de marché et l'activité agricole sur toutes les parties de notre territoire. Il convient, enfin, que nous puissions, dès 2007, mettre en oeuvre les nouveaux dispositifs de manière sereine, en concertation avec les organisations agricoles.
    Ces conditions n'étaient pas réunies dans le compromis de jeudi dernier. C'est la raison pour laquelle nous avons suspendu nos travaux. La balle est dans le camp de la Commission européenne. Nous reprenons les négociations demain, à quinze heures, avec la même résolution et la même volonté d'aboutir, afin de tracer des perspectives durables pour les paysans d'Europe et de France. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

ARRESTATION DE JOSÉ BOVÉ

    M. le président. La parole est à M. Patrick Lemasle, pour le groupe socialiste.
    M. Patrick Lemasle. Monsieur le président, mon collègue Kléber Mesquida s'associe à ma question.
    Monsieur le Premier ministre, vous avez beau déclarer que vous avez la volonté d'apaiser le climat social, vous venez de vous livrer à une véritable provocation. Dimanche matin, à l'aube (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur de nombreux bancs du groupe Union pour la démocratie française), les grands moyens ont été déployés : hélicoptère, escadron de gendarmerie, chiens policiers, portes défoncées. Pour arrêter qui ? Un terroriste ? Un bandit de grand chemin ?
    Plusieurs députés du groupe Union pour un mouvement populaire. Oui !
    M. Richard Mallié. Un délinquant !
    M. Patrick Lemasle. Non. Tout simplement un syndicaliste agricole, connu et reconnu internationalement.
    José Bové est condamné pour des actes commis collectivement dans un cadre syndical et sans violence envers les personnes. Monsieur le Premier ministre, on a vu justice plus clémente pour des actes autrement plus graves perpétrés par d'autres organisations agricoles :...
    M. Jacques Desallangre. Tout à fait !
    M. Noël Mamère. Et la FNSEA ?
    M. Patrick Lemasle. ... destruction de biens publics et même saccage de bureaux ministériels. Rappelez-vous.
    Pour des actes répréhensibles, d'autres peines que la prison existent.
    M. François Goulard. La séparation des pouvoirs, vous connaissez ?
    M. Patrick Lemasle. José Bové et ses amis mènent un combat qui ne menace pas nos concitoyens mais qui pose, fût-ce de façon contestable, les problèmes des expérimentations d'OGM et le rôle de la recherche publique.
    Depuis plusieurs mois, la chancellerie et la présidence de la République sont saisies de demandes de grâce présidentielle. Pourquoi celle-ci n'est-elle pas intervenue ? Cela aurait évité cette pitoyable comédie où vous jouez la force et l'ordre pour complaire à la partie la plus à droite de votre électorat (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), tout en laissant penser aux autres citoyens que la mansuétude du Président de la République pourrait éventuellement s'exercer.
    M. Guy Teissier. Pitoyable !
    M. Patrick Lemasle. Il n'est pas trop tard pour vous ressaisir, monsieur le ministre (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), afin de donner une autre image de notre pays. Laissez vivre la démocratie et faites libérer José Bové ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
    M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le député, permettez-moi une citation : « Les Français ne comprennent pas que des choses interdites puissent se faire sans que personne n'y fasse rien. »
    M. François Hollande. Vous pensez à qui ?
    M. le garde des sceaux. C'est Jean Glavany qui parlait ainsi, le 1er septembre 2001. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Jean Glavany. Je parlais de Chirac !
    M. le garde des sceaux. Monsieur le député, c'est bien de cela qu'il s'agit.
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Chirac !
    M. le garde des sceaux. J'ai répondu à M. Lefort en expliquant clairement que M. José Bové avait récidivé, qu'il avait absolument refusé de collaborer avec la justice...
    M. François Hollande. Comme Chirac !
    M. le garde des sceaux. ... et de se rendre à la convocation du juge de l'application des peines. Il est aujourd'hui en prison : il faut qu'il se demande s'il n'en est pas lui-même responsable. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Les raisons de la condamnation relèvent d'une décision de justice, monsieur le député, indépendante, je me permets de le rappeler, du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Mon rôle est d'exécuter les décisions de justice...
    M. François Hollande. Avec quels moyens ?
    M. le garde des sceaux. ... et je les exécuterai.
    Pour ce qui est du jour et de l'heure auxquels cette arrestation a eu lieu, je vous demanderai, monsieur le député, à quoi nous jouons aujourd'hui. Je vous conseille, à ce propos, la lecture de l'article du Figaro de samedi matin dans lequel M. Bové annonçait lui-même très clairement que ses amis s'opposeraient à son transfert en prison.
    M. François Hollande. C'est en lisant Le Figaro que vous prenez vos décisions ?
    Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Ces poursuites ont été engagées sous la gauche !
    M. le garde des sceaux. Bien sûr, il ne s'attendait pas à ce qu'on vienne l'arrêter vingt-quatre heures plus tôt, mais c'est pourtant ce que nous avons fait. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

CENTRES D'HÉBERGEMENT ET DE RÉINSERTION SOCIALE

    M. le président. La parole est à M. Rodolphe Thomas, pour le groupe UDF.
    M. Rodolphe Thomas. Ma question s'adresse à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
    Monsieur le ministre, mes collègues et moi-même avons appris le gel des crédits destinés aux centres d'hébergement et de réinsertion sociale. (« Scandaleux ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Ces centres, déjà très fragilisés, sont aujourd'hui touchés de plein fouet par ce gel de crédits d'insertion. Pourtant, leur travail d'accompagnement, qui s'adresse à une large part des publics exclus, est exemplaire. Aujourd'hui, ces centres d'hébergement et de réinsertion sociale offrent non seulement des possibilités de logement, mais aussi un véritable parcours de resocialisation et d'emploi. Demain, leurs possibilités d'action risquent de ne plus être les mêmes. En effet, ils craignent de ne plus pouvoir accomplir leurs missions de réinsertion sociale, pourtant définies par l'Etat. Il ne faudrait pas que leurs missions se résument à une simple fonction d'hébergement et de gestion de l'urgence.
    Monsieur le ministre, la France des exclus a besoin d'aide. Nous devons penser à toutes ces personnes démunies qui risquent de trouver porte close quand elles s'adresseront à ces centres. Au nom des intervenants de l'insertion, au nom de tous les élus locaux confrontés aux mêmes difficultés, le groupe de l'UDF vous demande quelles mesures vous comptez prendre afin de soutenir les centres d'hébergement et de réinsertion sociale en difficulté. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur quelques bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion.
    Mme Dominique Versini, secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. Je vous remercie, monsieur le député, de l'intérêt que vous portez à la situation des centres d'hébergement et de réinsertion sociale. Soyez assuré que mon engagement au sein du Gouvernement, tout comme celui de l'ensemble du Gouvernement, rejoint le vôtre.
    M. Jérôme Lambert. On voit le résultat !
    Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. C'est pourquoi je tiens à vous rassurer, en vous informant que le Premier ministre a accepté de lever intégralement le gel des crédits destinés à la lutte contre l'exclusion et à l'insertion par l'activité économique. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. François Hollande. Et pourquoi étaient-ils gelés ?
    Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. Le budget consacré en 2003 à la lutte contre l'exclusion s'élève à 1,1 milliard d'euros.
    M. Bernard Roman. Et avant, c'était combien ?
    Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. Il permet de financer 82 000 places d'hébergement, dont 35 000 places de CHRS.
    M. Christian Paul. Il est temps !
    Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. Vous avez raison, monsieur le député, d'insister sur la situation financière dans laquelle nous avons trouvé les associations de lutte contre l'exclusion. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Dès mon arrivée, j'ai dressé un état des lieux de la situation, et j'ai pu constater combien ces associations, qui, depuis des années, se battent aux côtés de l'Etat pour assurer ces missions, ont été peu respectées. En effet, la cause de la dégradation financière est à trouver tout simplement dans le non-respect des engagements de l'Etat ces dernières années. (Mêmes mouvements.)
    Mme Martine David. Mensonge !
    Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. Figurez-vous que le ministre des affaires sociales avait signé des conventions collectives nationales mais avait omis de tenir compte de leurs conséquences dans la détermination des subventions que son département accordait aux associations. On leur a imposé les 35 heures sans leur donner les moyens de les appliquer ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Aussi vais-je m'attacher en 2004 à obtenir le rééquilibrage des budgets des centres d'hébergement et de réinsertion sociale, afin que les associations se sentent enfin reconnues. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

PAIEMENT DES JOURS DE GRÈVE

    M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
    M. Marc Le Fur. Ma question s'adresse à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire.
    Cette question, monsieur le ministre, nous est en réalité posée par nombre de nos concitoyens, en particulier par celles et ceux qui, ces dernières semaines, ont dû subir de longues journées de grève. Je pense à ces pères et mères de famille qui ont dû réorganiser leur existence, ne serait-ce que pour aller au travail et faire garder leurs enfants. (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Ces personnes ne comprendraient pas que les jours de grève dont elles ont été les victimes soient payés aux grévistes. (« Très bien ! » et applaudissements sur les mêmes bancs.) La grève est un droit, mais c'est aussi une responsabilité que l'on doit assumer.
    Pouvez-vous, monsieur le ministre, rassurer les usagers du service public qui, si d'aventure les jours de grève étaient payés, auraient le sentiment de subir une double peine (« Bravo ! » sur les mêmes bancs) : une première comme usagers et une seconde comme contribuables ? Ils auraient en quelque sorte le sentiment de subventionner la grève dont ils ont été les victimes. (Mêmes mouvements.)
    La France qui travaille et qui n'a cessé de travailler a besoin d'être rassurée : merci de le faire. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire.
    M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Monsieur le député, si votre question est de savoir si les retenues sur salaire pour jours de grève seront réellement appliquées, la réponse est : oui ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Elles le seront conformément à la loi et au règlement : premièrement, les jours de grève se traduisent par le non-paiement du salaire et ne sont pas considérés comme des jours de congé ou de RTT (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) ; deuxièmement, une heure de grève équivaut à une journée de grève, conformément à la définition législative dite du trentième indivisible ; troisièmement, l'assiette des retenues pour fait de grève inclut l'ensemble du salaire et ne se limite pas au traitement principal ; quatrièmement, l'étalement est possible, mais il doit être limité (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains) : enfin, il faut tenir compte de la position du Conseil d'Etat concernant le non-paiement des jours fériés compris entre deux jours de grève. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. Manuel Valls. Voilà !
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. S'agissant de ce dernier point, l'arrêt Omont a établi que les jours fériés ne devaient pas être payés dès lors qu'ils s'intercalaient entre deux jours de grève consécutifs. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Cela signifie, a contrario, que dans le cas où l'agent fait grève le vendredi mais pas le lundi, le samedi et le dimanche sont payés.
    M. Christian Bataille. C'est très clair !
    M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Les règles sont claires. Personne ne conteste la nécessité d'appliquer la loi, mais chacun souhaite qu'elle le soit avec discernement. (« Voilà ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    La Constitution garantit le droit de grève ; la loi, le règlement, la jurisprudence en précisent les modalités d'application. On ne peut à la fois soutenir une légitimité et en contester une autre.
    Je remercie d'ailleurs l'ensemble des groupes parlementaires qui, dans le cadre de rappels au règlement, ont tous tenu à réaffirmer que la loi devait être appliquée. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Plusieurs députés du groupe socialiste. Bravo ! Bravo !
    M. Manuel Valls. La droite n'a rien compris !

RÉFORME DE BERCY

    M. le président. La parole est à M. Eric Woerth, pour le groupe UMP.
    M. Eric Woerth. Monsieur le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, la réforme de l'Etat doit constituer et constitue une priorité forte pour le Gouvernement. Votre ministère, vous le savez, ne laisse pas indifférent. Son autorité, son sens de la régulation et la pression qu'il sait exercer sur les autres rouages de l'Etat sont bien connus. La contrepartie de ce pouvoir est qu'il doit être lui-même exemplaire.
    Or la « forteresse » de Bercy fait souvent l'objet d'attaques, parfois légitimes, sur les thèmes de la bureaucratie, de la rigidité et du gaspillage. Aussi, j'aimerais savoir comment votre ministère et ses 180 000 agents comptent participer à l'effort de réforme que vous prônez vous-même. Nos concitoyens attendent, en effet, avec impatience une action sans ambiguïté sur ce sujet, dans le droit-fil des promesses faites durant les campagnes présidentielle et législative de 2002.
    Quel est, monsieur le ministre, votre sentiment de ministre, mais aussi d'ancien chef d'entreprise sur le sujet ? (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Pourriez-vous nous rappeler ce que vous avez mis en place depuis votre entrée en fonctions et les projets que vous conduirez pour améliorer l'efficacité des services rendus aux Français par votre ministère ? Bref, parviendrez-vous à mettre Bercy en mouvement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. François Hollande. Oui, il peut le faire !
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
    M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur Woerth, non seulement je parviendrai à mettre Bercy en mouvement, mais Bercy est déjà en mouvement et Bercy continuera à avancer.
    C'est effectivement une grande administration, nous le savons tous, avec 180 000 personnes. Elle a beaucoup de responsabilités vis-à-vis de l'ensemble des acteurs économiques, de tous les usagers, des collectivités locales et des entreprises. Dans tous les domaines, Bercy peut et va progresser, pour aider les contribuables, les collectivités locales et les entreprises...
    M. Maxime Gremetz. Si cela pouvait être vrai !
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... à bénéficier d'un service meilleur, plus performant et plus rapide.
    Une telle volonté se traduit par une démarche managériale,...
    M. François Hollande. Managériale : tout est dit !
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... qui caractérise n'importe quelle grande administration de services. Bercy ne sera pas une exception. La démarche est en cours, elle est démultipliée dans toutes les directions et fait l'objet, de ma part, d'une attention particulière, car, de par mon passé professionnel,...
    Plusieurs députés du groupe des député-e-s communistes et républicains. Nous sommes sauvés !
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... j'aime m'occuper de ces sujets. J'aime aider mes directeurs à avancer dans cette voie. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Cette politique se traduira par une amélioration progressive des performances de Bercy,...
    M. Jacques Desallangre. Alors que vous supprimez des emplois !
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... qui se fera non seulement au service des usagers, mais aussi du personnel lui-même et, évidemment, de la collectivité nationale.
    Il est de notre devoir d'améliorer sans cesse les performances de nos administrations. Sachez bien, monsieur le député que, sur ce plan-là, je n'ai de leçons à recevoir de personne ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Dans ce contexte, je peux vous indiquer d'ores et déjà que nous saurons modestement mais sûrement améliorer la productivité de Bercy d'au moins 1 % par an. (« Oh ! là, là ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
    M. Jacques Desallangre. Vous allez moins vite que dans la sidérurgie !
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Bien que modeste, un tel pourcentage nous permettra, année après année, de restituer chaque année à la fonction publique l'équivalent de 2 000 à 2 500 postes de travail pour un redéploiement dans d'autres ministères ou pour réaliser une économie dont nous avons tous besoin.
    Monsieur Woerth, au fur et à mesure que le temps passera, vous pourrez constater que, y compris pour les usagers, Bercy sera en mouvement et que Bercy continuera à avancer. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur divers bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Rires sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

SITUATION ÉCONOMIQUE

    M. le président. La parole est à M. Bernard Roman, pour le groupe socialiste.
    M. Bernard Roman. Monsieur le Premier ministre, l'INSEE a publié cette semaine une étude qui révèle que, pour la première fois depuis dix ans, depuis 1993, le nombre des emplois a diminué dans notre pays.
    M. Christophe Priou. C'est la faute aux grèves !
    M. Yves Nicolin. Et aux 35 heures !
    M. Bernard Roman. Selon la même étude, le chômage continuera à progresser, pour atteindre 9,6 % de la population active d'ici à la fin de l'année.
    M. Lucien Degauchy. Madame Soleil !
    M. Bernard Roman. N'invoquez pas l'héritage, monsieur le Premier ministre. (« Si ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) La dégradation sans précédent de presque tous les indicateurs économiques est le résultat de votre politique (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Protestations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française)...
    M. Richard Mallié. Non, de la vôtre !
    M. Bernard Roman. ... car on ne supprime pas impunément les 35 heures, ni des mesures de la loi de modernisation sociale (Protestations sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), non plus qu'on ne licencie impunément les emplois-jeunes.
    Le 30 juin, dans six jours très exactement, va être mis en oeuvre le plus grand plan social dans notre pays jamais engagé en une fois. Le patron licencieur, c'est l'Etat,...
    M. Jean-Michel Ferrand. C'est vous qui sabotez le travail !
    M. Bernard Roman. ... qui met à la rue 30 000 emplois-jeunes, sur décision du Gouvernement. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Protestations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. François Goulard. Menteur !
    M. Bernard Roman. De tels chiffres traduisent une tendance alarmante qui suscite une double inquiétude.
    La première - et je veux y revenir, car nous n'avons pas obtenu de réponse satisfaisante sur ce point la semaine dernière - résulte des conséquences de l'entrée en vigueur de la nouvelle convention UNEDIC.
    M. Yves Nicolin. Baratin !
    M. Bernard Roman. Si vous ne faites rien, monsieur le Premier ministre, si votre gouvernement reste inerte, ce sont plus de 600 000 personnes qui, dans quelques semaines, en seront réduites à demander l'allocation de solidarité spécifique ou le RMI. Allez-vous, oui ou non, agir pour empêcher que cela arrive ?
    La deuxième inquiétude est que cette tendance contredit toutes les hypothèses sur lesquelles repose la pérennité de votre réforme des retraites. Et depuis trois semaines que le débat sur la réforme des retraites est engagé, nous aurions aimé avoir un certain nombre de réponses sur ce point. (« La question ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Cette réforme repose en effet sur une baisse de moitié du chiffre du chômage ; or, manifestement, on n'en prend pas le chemin ! (Mêmes mouvements sur les mêmes bancs.)
    M. le président. Monsieur Roman, posez votre question !
    M. Bernard Roman. Monsieur le Premier ministre, à quelle logique répond votre politique ? Comment pouvez-vous prétendre sauver les retraites quand le chômage augmente ? Comment pouvez-vous redonner confiance aux Français quand la précarité s'aggrave ? Comment, enfin, espérez-vous apaiser les inquiétudes quand, sur chaque sujet, vous voulez passer en force ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
    M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. L'étude que vous venez d'évoquer, monsieur Roman, prévoit également qu'à partir du dernier trimestre de 2003, la situation du chômage se stabilisera,...
    M. Manuel Valls. Raffarin au chômage !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... puis que notre pays recommencera à créer des emplois. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. François Hollande. Demain, on rase gratis !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Alors, quand on cite une étude, il faut en citer tous les éléments, tant ceux qui concernent la fin de la crise structurelle que connaît l'économie mondiale,...
    Mme Martine David. L'économie mondiale a bon dos !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... que les perspectives optimistes que trace l'INSEE - ainsi d'ailleurs que la plupart de ceux qui suivent l'évolution de l'économie mondiale. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. François Lamy. On en reparlera !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. S'agissant maintenant de la convention de l'UNEDIC (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste), elle a été approuvée par les organisations syndicales. (« Lesquelles ? » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Il n'y a pas des bonnes et des mauvaises organisations syndicales ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Quand on veut donner des leçons de dialogue social, comme vous le faites, il faut être soi-même irréprochable ! Quand on a mis en place une loi sur les 35 heures sans aucune discussion avec les syndicats (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste. - « Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), quand on a mis en oeuvre une loi de modernisation sociale pourtant critiquée par l'ensemble des organisations syndicales, quand on a, à l'été 2000, appliqué la convention sur l'assurance chômage sans aucune négociation avec les organisations syndicales (« C'est faux ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste),...
    M. François Hollande. Sans les organisations syndicales ? C'est faux !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... on n'a aucune leçon à donner en matière de dialogue social ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    La politique économique et la politique de l'emploi que conduit le Gouvernement ont déjà permis d'atténuer les effets de la crise internationale,...
    M. François Hollande. C'est pas vrai !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... et nous faisons aujourd'hui mieux que la plupart des pays européens (« C'est faux ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste), notamment ceux qui ont choisi d'augmenter les impôts et de diminuer brutalement les dépenses.
    Monsieur le député, vous avez une conception des relations sociales qui est passéiste et qui manque d'ambition. En vérité, votre conception des relations sociales est marquée par la nostalgie ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur divers bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

SALON DU BOURGET

    M. le président. La parole est à M. André Berthol, pour le groupe UMP.
    M. André Berthol. Monsieur le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer, on a dit - mais que ne dit-on pas par les temps qui courent ? - que le quarante-cinquième salon aéronautique du Bourget s'était ouvert dans la morosité et la nostalgie : morosité en raison de la crise du secteur aéronautique due aux suites du 11 septembre, à la guerre en Irak et à l'épidémie de pneumopathie en Asie ; nostalgie du fait de l'adieu au Concorde, qui s'est posé définitivement après trente-quatre ans de carrière, ...
    Quelques députés du groupe socialiste. Il s'en sort bien, lui, pour la retraite !
    M. André Berthol. ... marquant ainsi la fin d'une avancée prestigieuse de l'industrie aéronautique française dans le domaine des avions supersoniques.
    Par ailleurs, selon certains, des frustrations ont été ressenties parce que ce salon n'a pas donné lieu à des démonstrations en vol d'avions de combat américains. Pour d'autres, l'absence des Etats-Unis et de la Russie, - chaque pays pour des raisons qui lui sont propres - aurait terni l'éclat de ce salon.
    Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous faire part de votre sentiment et dresser le bilan de cette manifestation qui s'est déroulée tout au long de la semaine passée ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
    M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Monsieur le député, il est vrai que l'on avait annoncé que ce salon serait morose. Eh bien, je puis vous dire, comme les nombreux visiteurs, tels que le Président de la République, le Premier ministre (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains) et de nombreux ministres, que ce salon a été un énorme succès et qu'il s'est terminé dans un véritable climat d'optimisme, pas seulement pour les grandes entreprises, mais aussi pour les PMI-PME, notamment pour les entreprises françaises.
    M. François Hollande. Tout va très bien, madame la marquise !
    M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Je tiens à saluer la valeur ajoutée qu'elles apportent, leur esprit d'innovation et leur très grande agressivité commerciale. D'ailleurs, tous les dirigeants étaient là. Même les Américains ne s'y sont pas trompés, tout le monde était présent !
    Que retenir de ce salon ? Ce fut d'abord un moment d'émotion en raison de l'arrêt du Concorde. Mais nul doute que l'aventure continuera à travers les avancées technologiques qu'il a permises et à travers les avions Airbus.
    Ensuite, ce salon a été l'occasion pour Airbus de faire un véritable festival : ainsi, Emirates a conclu un énorme contrat portant sur vingt et un futurs avions géants et vingt gros-porteurs, Korean Air a signé un contrat pour cinq Airbus, Qatar Airways s'est porté acquéreur de vingt Airbus et a pris des options sur seize appareils supplémentaires.
    Mais il n'y a pas qu'Airbus. Lors de ce salon, Alcatel, la SNECMA, Thales et toutes les petites et moyennes entreprises françaises ont fait l'admiration du monde entier.
    Je note aussi que c'est pendant ce salon que Galileo a été mis sur orbite. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Ce programme dispose maintenant d'un budget, d'un directeur et le premier conseil d'administration s'est réuni. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Enfin, mesdames et messieurs les députés, l'aérien, ce n'est pas seulement de la technologie, c'est aussi des hommes et des femmes qui sont animés de la même passion.
    M. Maxime Gremetz. Et Air Lib ?
    M.  le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. A cet égard, je voudrais rendre hommage au pilote de l'avion de Brit Air qui est décédé dans le grave accident survenu dans la nuit de dimanche à lundi. Et permettez-moi aussi de saluer l'hôtesse de l'air, Mme Valérie Rognant, dont le très grand courage et le très grand sang-froid ont permis de sauver la vie de l'ensemble des passagers de ce vol. (Applaudissements sur tous les bancs.)

POLITIQUE HUMANITAIRE DE LA FRANCE

    M. le président. La parole est à M. Michel Lejeune, pour le groupe UMP.
    M. Michel Lejeune. Monsieur le secrétaire d'Etat aux affaires étrangères (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste),...
    Mme Martine David. La première question depuis un an !
    M. Michel Lejeune. ... l'aide humanitaire que la France apporte aux populations en grande difficulté face à des situations soit de catastrophe naturelle, soit d'après-conflit, est l'un des instruments indispensables et complémentaires de la présence de la France sur la scène internationale. Une telle aide est l'un des modes d'expression de l'attachement que la France porte à la solidarité internationale, à laquelle, d'ailleurs, l'ensemble de nos concitoyens est particulièrement sensible.
    Or, ces dernières années, la scène internationale a connu de nombreuses évolutions, avec notamment l'apparition de nouveaux types de conflits, mais aussi la multiplication des associations et des acteurs humanitaires. Tout cela appelle une réflexion globale sur les modes opératoires et les objectifs de l'action humanitaire, afin qu'elle soit la plus cohérente et aussi la plus efficace possible.
    Nous savons, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous avez engagé cette réflexion. Pouvez-vous nous préciser le cadre et les principaux axes que le Gouvernement a fixés pour adapter au mieux la politique humanitaire d'urgence de la France ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux affaires étrangères. (« Bravo ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Renaud Muselier, secrétaire d'Etat aux affaires étrangères. Monsieur le député, depuis plus d'un an, en effet, nous sommes confrontés des crises humanitaires importantes.
    M. François Hollande. Quel talent !
    M. le secrétaire d'Etat aux affaires étrangères. Que ce soit en Irak, en Afrique, notamment en Afrique australe, nous sommes intervenus dans des situations particulièrement difficiles. Les moyens n'ont jamais manqué mais la coordination n'était pas toujours efficace.
    M. Albert Facon. Il fallait appeler Sarkozy !
    M. le secrétaire d'Etat aux affaires étrangères. Comment fonctionne la politique humanitaire ? L'aide humanitaire passe, soit au niveau international par les organisations des Nations  unies - UNICEF, CICR, HCR -, soit au niveau européen par des systèmes comme ECHO, soit au niveau national par une démarche interministérielle mobilisant des capacités d'intervention des ministères de l'intérieur, de la défense, de l'agriculture ou de la santé, le tout étant piloté par le Quai d'Orsay ou par des ONG dont les compétences sont reconnues au niveau international.
    Toutefois, mon expérience d'ancien médecin du SAMU m'a permis de constater qu'il nous manquait un poste de régulation.
    M. François Hollande. Ça y est, il a trouvé son poste ! (Rires sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le secrétaire d'Etat aux affaires étrangères. C'est la raison pour laquelle nous avons, à la demande du Premier ministre, mis en place au quai d'Orsay avec Dominique de Villepin, une cellule d'intervention capable d'intervenir à tous les niveaux et en moins de vingt-quatre heures. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Ainsi, lors du cataclysme qui a frappé l'Algérie, nous avons, à la demande du gouvernement algérien, pu envoyer sur place en moins de vingt-quatre heures deux unités de la sécurité civile et un hôpital de campagne, et ce en toute dignité, dans la plus grande transparence et la plus grande efficacité. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Cette capacité de régulation nous permet d'intervenir également au niveau international. Au passage, je me permets de rappeler que, depuis 1997, l'aide de la France dans le cadre des grandes organisations internationales avait diminué de moitié. Désormais, nous faisons de nouveau partie, à la demande du Premier ministre, des grands donateurs, notamment au CICR, et nous entendons faire plus.
    M. François Lamy. Où allez-vous trouver l'argent nécessaire ?
    M. le secrétaire d'Etat aux affaires étrangères. Nous avons coordonné l'action des différents ministères pour être plus efficaces, et ceci sans moyens financiers supplémentaires. Nous avons normalisé nos relations avec les ONG...
    M. François Hollande. Quelle était la question ?
    M. le secrétaire d'Etat aux affaires étrangères. ... pour que celles-ci puissent travailler en toute liberté et rapidement. Les dons qui leur seront attribués seront défiscalisés et une norme de qualité sera défendue au niveau international contre le système anglo-saxon.
    Grâce à tout cela, nous intervenons avec souplesse, efficacité et rapidité et pour aider ceux qui souffrent à travers le monde. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

2

SOUHAITS DE BIENVENUE
À UNE DÉLÉGATION PARLEMENTAIRE

    M. le président. Je suis heureux de souhaiter, en votre nom, la bienvenue à une délégation parlementaire, conduite par M. Ryutaro Hashimoto, président du groupe d'amitié Japon-France de la Chambre des représentants du Japon.
    (Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent.)

3

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT
(suite)

    M. le président. Nous revenons aux questions au Gouvernement.

MARCHÉS PUBLICS

    M. le président. La parole est à M. Arnaud Montebourg, pour le groupe socialiste. (Exclamations puis huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Je vous en prie, mes chers collègues !
    M. Arnaud Montebourg. Cette question est destinée à M. Raffarin, Premier ministre. (« Montebourg, voyou ! » sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Monsieur le Premier ministre, votre gouvernement a eu l'idée de faire table rase des règles applicables aux marchés publics passés par toutes les collectivités locales.
    M. François Grosdidier. Caricature !
    M. Arnaud Montebourg. C'est la fin des appels d'offres et de la mise en concurrence des entreprises pour tous les marchés publics inférieurs, tenez-vous bien, à 6,2 millions d'euros, soit 41 millions de francs.
    M. François Goulard. Comme d'habitude, M. Montebourg n'a rien compris et ignore les lois !
    M. Arnaud Montebourg. Voici donc que les présidents de conseils généraux pourront construire des collèges, les maires creuser des piscines, en choisissant les entreprises comme bon leur semble...
    M. Lucien Degauchy. Et alors ?
    M. Arnaud Montebourg. ... selon la tête des entrepreneurs. (« Oh ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - « Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
    Ce projet organise le favoritisme dans les marchés publics sur la plus grande échelle que l'on ait jamais vue.
    M. François Grosdidier. Urba ! Urba !
    M. Arnaud Montebourg. Il autorise, de fait, ce trafic d'influence et la corruption, en rendant quasi impossible la preuve des malversations dans les marchés publics. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. François Goulard. C'est un autoportrait !
    M. Arnaud Montebourg. D'ailleurs, les malversations dans les affaires des lycées d'Ile-de-France (« Urba ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), dans les affaires des lycées de Provence-Alpes-Côte d'Azur (« Urba ! » sur les mêmes bancs) ou dans les affaires de l'OPAC de la ville de Paris (« Urba ! » sur les mêmes bancs) n'ont pu être prouvées que grâce à la législation que vous entendez supprimer. (Vives exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Je vous en prie, mes chers collègues.
    M. Arnaud Montebourg. Après les multiples critiques et attaques dont ce projet a fait l'objet, vous avez indiqué, monsieur le Premier ministre, que la copie de votre décret, qui était d'ailleurs déjà prête, allait être revue.
    M. Bernard Deflesselles. Eh bien alors ?
    M. Arnaud Montebourg. Vous avez reculé mais, malheureusement, pour mieux réaliser votre funeste projet dès l'automne, affirmez-vous.
    Nous vous demandons, dans l'intérêt du pays, d'y renoncer tout à fait. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Lucien Degauchy. Urba !
    M. Arnaud Montebourg. Sinon, l'histoire ne retiendra peut-être de vous que cela : d'avoir été celui qui aura ouvert les vannes de la corruption à tous les étages de la République. (Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Vous risqueriez de devenir une sorte de Berlusconi à la française (Claquements de pupitre sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) dont la politique judiciaire ressemble déjà curieusement à la vôtre : impitoyablement répressive pour le citoyen ordinaire...
    M. le président. Monsieur Montebourg...
    M. Arnaud Montebourg. ... extraordinairement complaisante pour la grande délinquance financière en col blanc (Mêmes mouvements)...
    M. le président. Monsieur Montebourg...
    M. Arnaud Montebourg. ... qui implique un grand nombre de vos amis, parmi lesquels figure, malheureusement pour la France, le Président de la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Huées et claquements de pupitre sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Bernard Accoyer. Scandaleux !
    Plusieurs députés du groupe l'Union pour un mouvement populaire. Voyou !
    M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
    M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur Montebourg, je suis intéressé par la fréquence avec laquelle ce sujet revient régulièrement lors des séances de questions.
    Mme Martine David. Nous y reviendrons encore, parce que nous sommes choqués !
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Cela montre que certains d'entre vous semblent moins convaincus que d'autres de la nécessité de réformer le code des marchés publics, en toute transparence (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), en toute responsabilité, de manière à améliorer - j'ai déjà eu l'occasion de le dire la semaine dernière - la qualité, la rapidité, la réactivité et les tarifs de nos achats. (Mêmes mouvements.)
    M. François Hollande. Pourquoi reculez-vous, alors ?
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Soyons clairs ! Quand le Premier ministre a déclaré vouloir améliorer le système, il l'a fait en totale harmonie avec votre serviteur. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Cette initiative, que nous avons volontairement prise pour améliorer la performance du système d'achats français,...
    M. Jean-Pierre Blazy. Pour améliorer la magouille !
    M. Michel Lefait. Par dogmatisme !
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... doit être assumée par tous, y compris, bien sûr, par les représentants élus, le Premier ministre et moi-même en sommes conscients.
    Au cas où vous ne le sauriez pas, je vous indique que le projet de décret qui a été rédigé a fait l'objet de consultations (« Du MEDEF ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste) auprès de nombreuses personnes directement concernées et d'élus (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), de manière, justement, que tous les problèmes que vous soulevez soient évités.
    Regardez la percée intellectuelle que nous sommes en train de réaliser. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    Mme Martine David. Quelle percée !
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Le Gouvernement, la semaine dernière, à l'initiative du Premier ministre, a déclaré - le président de l'Assemblée nationale en est témoin - qu'il était ouvert à l'idée de réfléchir sur le sujet avec des élus, en petit nombre bien sûr...
    Mme Martine David. Lesquels ?
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... représentant tous les partis qui souhaiteraient s'exprimer sur ce sujet.
    M. François Hollande. C'est ce qu'on fait !
    M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je vous invite donc formellement, monsieur Montebourg, si le groupe socialiste l'accepte, à venir discuter, avec moi et d'autres, de ce sujet. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Bruno Le Roux. Retirez plutôt le texte !

PRÉVENTION DES INONDATIONS

    M. le président. La parole est à M. Max Roustan, pour le groupe UMP.
    M. Max Roustan. Madame la ministre de l'écologie et du développement durable, vous avez présenté, jeudi dernier, à Compiègne, les trente-quatre projets retenus par le Gouvernement dans le cadre du plan de prévention national des crues. Vous tenez ainsi vos promesses en apportant des moyens financiers et des instruments techniques et juridiques nouveaux, notamment pour les collectivités locales.
    Ce plan et votre politique volontariste et innovante sur le thème du développement durable et de la sécurité des habitants dans les zones à risques sont salués par tous.
    En ma qualité d'élu local et de président du groupe d'étude de l'Assemblée nationale sur les inondations, je suis très sensible également aux problèmes de procédures administratives -  -, de suivi des dossiers d'indemnisation et d'exécution des directives données aux préfets.
    Permettez-moi d'ailleurs de profiter de cette tribune pour vous dire, madame la ministre, mes chers collègues, que si dans le Gard, la cellule de crise placée sous l'autorité de M. le préfet a parfaitement fonctionné, il était malheureusement déjà trop tard. Il est toujours préférable d'anticiper la crise pour éviter d'avoir à la gérer ensuite.
    De nombreux cas montrent en effet que, si les procédures administratives, notamment celles de la loi sur l'eau, avaient été plus rapides, nous aurions pu diminuer l'ampleur de la catastrophe.
    Je pense en particulier au bassin de rétention de la Vidourle, qui doit voir le jour à Saint-Geniès-de-Malgoirès, à l'étude depuis près de dix ans - vous connaissez le problème, puisque vous vous êtes rendue sur place - ou encore aux procédures en cours en ce qui concerne le Gardon, dans ma ville d'Alès.
    Pour rendre votre loi plus efficace, il faut simplifier les procédures administratives et surtout réduire leur durée.
    Il faut également, en cas de catastrophe naturelle, donner davantage de pouvoir aux préfets et aux élus locaux, afin que ceux-ci puissent intervenir rapidement pour faire procéder, entre autres, à l'enlèvement des embâcles et des atterrissements.
    Madame la ministre, à quelques semaines du premier anniversaire des orages qui ont dévasté les Cévennes et à l'heure de la simplification administrative, quelles mesures comptez-vous prendre ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable.
    Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement. Monsieur le député, il est tout à fait normal que ce soit vous qui m'interrogiez sur le plan de prévention des inondations du Gouvernement après le martyre subi en septembre 2002 par le département du Gard et la ville d'Alès dont vous êtes maire.
    Voilà quelques jours, a été remis, à Compiègne, le palmarès de l'appel à projets que j'ai lancé dans le cadre de ce plan. Vous étiez présent avec le représentant du conseil général du Gard et le représentant du président du conseil régional du Languedoc-Roussillon. Vous savez donc que le bassin du Vidourle et le bassin des Gardons ont été retenus et que 23 millions d'euros seront prochainement envoyés dans votre département.
    Le plan gouvernemental de prévention des inondations, fondé sur cet appel à projets, prévoit de consacrer 130 millions d'euros sur quatre ans, qui vont générer, au total, 450 millions d'euros de travaux.
    Mais nous nous sommes également engagés, avec M. Gilles de Robien, dans une réforme ambitieuse du service de prévision des crues. Les équipes seront renforcées et un centre hydro-météorologique sera créé pour prévenir les catastrophes de type cévenol.
    En outre, nous achèverons, dans quelques jours, l'examen de la loi sur les risques qui permettra aux collectivités territoriales et, plus largement, aux autorités publiques, de disposer de nouveaux outils juridiques, tels que les servitudes de surinondation, et d'indemniser les propriétaires et les exploitants agricoles. Vous voyez, monsieur Roustan, quand la sécurité des Français est en jeu, le Gouvernement ne transige pas. (Applaudissements sur divers bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

INDUSTRIE TEXTILE

    M. le président. La parole est à François Vannson, pour le groupe UMP.
    M. François Vannson. Monsieur le ministre délégué au commerce extérieur, je souhaite attirer l'attention du Gouvernement sur les effets de la libéralisation complète du secteur textile induite par la fin de l'accord Multifibres en 2005.
    M. Yves Nicolin. C'est important en effet !
    M. François Vannson. Tous les pays membres de l'Organisation mondiale du commerce pourront alors accéder librement au marché textile de l'Union européenne. Je rappelle que le marché européen est déjà le plus libre de la planète. Si l'Union européenne a respecté ses engagements en matière de suppression des freins à l'importation, tel n'est malheureusement pas le cas de nombreux pays pourtant membres de l'OMC. Certains affichent ainsi des droits de douane supérieurs à 50 %. C'est pourquoi je suis de plus en plus inquiet quant à la sauvegarde de nos industries textiles européennes et française.
    M. Jacques Desallangre. Il est bien temps !
    M. François Vannson. Dans ma circonscription, deux entreprises textiles, Tissage de l'Est SARL à Ramonchamp et Tissages Mouline-Thillot dans la commune du Thillot, ont été placées en liquidation judiciaire, alors qu'une troisième entreprise, Victor Perrin à Thiéfosse, est en grande difficulté. Cela porte à plus de 300 le nombre d'emplois menacés.
    Je souhaiterais, d'une part, que vous nous assuriez que les salariés recevront un total soutien du Gouvernement ; d'autre part, que vous nous indiquiez quelle position le gouvernement français défendra dans les futures négociations afin que soient préservés l'industrie textile française et les emplois qui en découlent. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le ministre délégué au commerce extérieur.
    M. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur. Monsieur le député, vous soulevez deux problèmes importants : les négociations internationales et la crise sociale que connaît votre région des Vosges et à laquelle nous ferons face, à vos côtés.
    Les protections douanières telles qu'elles résultent de l'accord textile-vêtement signé en 1995 ne sont pas suffisantes, même si 167 contingents sont encore en oeuvre aujourd'hui. Il faut aussi que les entreprises agissent dans le domaine de l'innovation. Un réseau d'innovation textile a d'ailleurs été mis en place, et mes collègues Fontaine et Haigneré préparent un texte de loi sur l'innovation qui devrait aider les entreprises dans le domaine du textile.
    Il faut également mobiliser le fonds pour l'industrie de Lorraine, dont nous avons assoupli les règles d'utilisation.
    Mais vous avez tout à fait raison, les négociations multilatérales peuvent également jouer un rôle important pour l'avenir de ce secteur. Nous veillerons tout particulièrement, d'une part, à assurer l'ouverture des pays émergents à nos exportations de textile et d'habillement - nous avons besoin d'accords de réciprocité gagnant-gagnant, leurs droits de douane étant à l'heure actuelle très élevés et les nôtres très bas - et, d'autre part, à maintenir la compétitivité de l'ensemble du secteur euro-Méditerranée. Pour ce faire, nous devons convaincre nos amis du Maroc, de la Tunisie et de la Turquie de travailler ensemble et de supprimer entre eux les barrières douanières qui entravent la compétitivité de leurs industries, dont nous dépendons également. (Applaudissements sur divers bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à quinze heures cinquante-cinq, est reprise à seize heures quinze.)
    M. le président. La séance est reprise.

4

RÉFORME DES RETRAITES

Suite de la discussion, après déclaration d'urgence,
d'un projet de loi

    M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi portant réforme des retraites (n°s 885, 898).

Rappel au règlement

    M. Alain Bocquet. Je demande la parole pour un rappel au règlement.
    M. Jean Marsaudon. Ah non ! Encore !
    M. le président. Je vous en prie, c'est moi qui préside.
    La parole est à M. Alain Bocquet, pour un rappel au règlement.
    M. Alain Bocquet. Je viens d'entendre le président du groupe de l'UMP, M. Barrot, déclarer sur une chaîne de télévision, à l'issue des questions au Gouvernement, que l'opposition occultait le débat par des digressions, bavardages et retardements divers,...
    M. Jean Marsaudon. Exact !
    M. Alain Bocquet. ... ce qui pouvait conduire à bloquer l'institution parlementaire, ajoutant qu'il fallait traiter du fond des problèmes. C'est justement ce que souhaite le groupe des député-e-s communistes et républicains : débattre amendement par amendement, article par article, des questions de fond.
    M. Dominique Dord. Cela ne se voit pas !
    M. Alain Bocquet. Comme vous l'avez si bien précisé ce matin lors de la conférence des présidents, monsieur le président, notre attitude n'est pas excessive.
    M. Dominique Dord. Oh non, cela se saurait !
    M. Alain Bocquet. En 1983-1984 pour le projet de loi sur la presse, les débats avaient duré 166 heures, en 1983, sur l'enseignement supérieur, 133 heures, et en 1981, sur les nationalisations, 118 heures alors que nous n'en sommes qu'à 91 heures 33 minutes sur un sujet très important qui engage l'avenir de notre société.
    Le groupe communiste a donc décidé ce matin de poursuivre la discussion, sans faire aucune obstruction à condition que l'on nous laisse le temps de débattre.
    M. le président. Monsieur Bocquet, je sais bien que vous êtes un auditeur attentif de la télévision et la radio. Moi qui y interviens très peu, je suis juste passé, avant le président du groupe de l'UMP, pour préciser que le débat se déroulait normalement, et j'aimerais que vous en preniez acte.

Discussion des articles (suite)

    M. le président. Hier soir l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles et s'est arrêtée avant le vote de l'article 12.

Article 12 (suite)

    M. le président. Je rappelle les termes de l'article 12 :
    « Art. 12. - I. - Le 3° de l'article L. 322-4 du code du travail est abrogé à compter du 1er janvier 2005. Les conventions signées en application de ce 3° antérieurement à cette date continuent à produire leurs effets jusqu'à leur terme.
    « II. - Le 4° et le 5° de l'article L. 322-4 deviennent respectivement le 3° et le 4°.
    « III. - Au premier alinéa de l'article L. 131-2 du code de la sécurité sociale, les mots : "sixième (4°), septième (5°) sont remplacés par les mots : "sixième (4°), septième (5°) sont remplacés par les mots : "cinquième (3°), sixième (4°).
    « IV. - A la fin du dernier alinéa de l'article L. 352-3 du code du travail, il est ajouté la phrase suivante :
    « Lorsque cette indemnisation vise à permettre à certains salariés de bénéficier d'un avantage de préretraite, elle doit, pour ouvrir droit au bénéfice de ces dispositions, être mise en oeuvre dans le respect de conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, liées à l'âge et aux caractéristiques, notamment à la pénibilité, de l'activité des bénéficiaires. »
    « V. - Les dispositions du IV sont applicables à compter de la date d'entrée en vigueur du décret prévu au dernier alinéa de l'article L. 352-3 du code du travail et au plus tard à l'expiration du douzième mois suivant la publication de la loi. »
    M. le président. Je mets aux voix l'article 12, modifié par les amendements adoptés.
    (L'article 12, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 12

    M. le président. M. Accoyer, rapporteur, et M. Jacquat ont présenté un amendement, n° 3155, ainsi rédigé :
    « Après l'article 12, insérer l'article suivant :
    « Dans un délai de trois ans, après la promulgation de la présente loi, le Gouvernement élabore un rapport sur les résultats de la négociation interprofessionnelle engagée entre les organisations professionnelles et syndicales représentatives au niveau national sur la définition et la prise en compte de la pénibilité ainsi que sur les mesures législatives et réglementaires prises au vu de ces résultats ».
    La parole est M. Denis Jacquat.
    M. Denis Jacquat. Monsieur le président, monsieur le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, mes chers collègues, l'allongement nécessaire des durées d'activité doit s'accompagner d'une modification des conditions de travail des salariés expérimentés. Dans ce cadre, et lorsque la pénibilité a un impact irréversible sur l'espérance de vie, des mécanismes éventuels de cessation anticipée d'activité, pris en charge par les entreprises selon des modalités fixées au niveau des branches et des entreprises, peuvent être définis pour tenir compte de la pénibilité des activités.
    Conformément à ses engagements, et à la méthode qui est désormais au coeur de son action, le Gouvernement a choisi de privilégier la voie du dialogue social pour la définition et la prise en compte de la pénibilité. Dans un délai de trois ans, les partenaires sociaux sont invités à ouvrir une négociation interprofessionnelle pour fixer de nouvelles règles en la matière, le Gouvernement pouvant ensuite s'inspirer du résultat de ces négociations pour prendre les mesures législatives et réglementaires appropriées.
    M. le président. La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 3155.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales, et sociales. Avis favorable.
    M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, pour donner l'avis du Gouvernement.
    M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Favorable.
    M. le président. La parole est à M. Pascal Terrasse.
    M. Pascal Terrasse. Cet amendement me paraît contradictoire avec l'explication qu'a bien voulu nous fournir le ministre hier soir s'agissant de la négociation qui allait être entamée avec les partenaires sociaux pour définir la pénibilité dans le cadre des dispositifs de cessation anticipée de certains travailleurs salariés, les CATS. Répondant très clairement à la question que je lui posais, il a déclaré que les partenaires sociaux avaient douze mois à compter de la promulgation de la loi pour mettre en place une négociation qui déboucherait ensuite sur un décret que vous prendrez en Conseil d'Etat. Or, on nous renvoie ici à un délai de trois ans à compter de la promulgation de la loi pour établir le bilan des dispositifs prévus à l'article 12.
    Cela me paraît bien long. S'il y a un bilan à faire, c'est dans l'espace d'un an qu'il doit avoir lieu.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 3155.
    (L'amendement est adopté.)

Avant l'article 13

    M. le président. Je suis saisi de sept amendements identiques n°s 4851 à 4857.
    L'amendement n° 4851 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 4852 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 4853 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 4854 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 4855 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 4856 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 4857 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi libellés :
    « Avant l'article 13, insérer l'article suivant :
    « Il est créé à l'article L. 122-6 du code du travail un 4° ainsi rédigé :
    « 4° Si le salarié est âgé d'au moins 40 ans le délai de congé est porté à 3 mois minimum ;
    « Si le salarié est âgé d'au moins 45 ans le délai de congé est porté à 4 mois minimum ;
    « Si le salarié est âgé d'au moins 50 ans le délai de congé est porté à 5 mois minimum ;
    « Si le salarié est âgé d'au moins 55 ans le délai de congé est porté à 6 mois minimum. »
    La parole est à M. Frédéric Dutoit.
    M. Frédéric Dutoit. Votre projet de loi, monsieur le ministre, tend à allonger la durée de cotisation pour, dites-vous, sauvegarder les retraites par répartition. Désormais, il faudra donc que les salariés travaillent plus longtemps pour pouvoir bénéficier d'une retraite décente. C'est pourquoi, d'ailleurs, vous avez prévu le système de la surcote que nous examinerons lors de la discussion des articles 15 et 17. Pour vous suivre dans cette logique, encore faudrait-il que les salariés appelés élégamment « seniors » ne soient plus les exclus du marché du travail. Une enquête de la DARES effectuée en 2001 révèle qu'un employeur sur quatre pense que la part relative des salariés âgés dans les effectifs a des effets négatifs sur la productivité. Et près d'un sur deux a une image négative du comportement de ces salariés âgés face aux nouvelles technologies. Bref, vous ne l'ignorez pas, les salariés âgés ont mauvaise presse !
    C'est d'ailleurs pourquoi le COR, face à ces comportements des employeurs, dresse le constat que, sans ajustement des politiques de l'emploi, les difficultés des régimes de retraite seront plus importantes. Il nous faut sortir le plus rapidement possible du cercle vicieux qui a abouti, au fil des ans, à l'exclusion des travailleurs âgés du monde du travail. Nous partageons en cela la préconisation du COR sur la nécessité que l'Etat et les partenaires sociaux bâtissent une grande politique nationale. Plusieurs chemins sont à explorer, mais, avant tout, il faut que le regard porté par les entreprises sur les salariés change. Cela ne se fera pas du jour au lendemain. Nous devons donc prévoir dès maintenant des dispositifs en direction des employeurs. C'est ce que nous vous proposons dans cet amendement qui prévoit un dispositif pour dissuader les employeurs de se « débarrasser » des salariés âgés.
    Cet amendement vise à allonger le délai de préavis de licenciement pour les salariés à partir de quarante ans. Il s'agit de le porter à trois mois pour les salariés âgés de moins de quarante ans, à quatre mois minimum pour les salariés âgés d'au moins quarante-cinq ans, à cinq mois pour ceux de cinquante ans et, enfin, à six mois pour ceux d'au moins cinquante-cinq ans. Un tel dispositif est d'autant plus nécessaire que votre réforme prévoit de prolonger de manière significative la durée d'activité des salariés et que le patronat, de son côté, n'est pas prêt à faire un effort. L'opposition du MEDEF à l'article 10, pour des raisons bien différentes des nôtres, en témoigne et les pratiques d'éviction des salariés les plus âgés risquent de demeurer. Pour donner toute cohérence à votre réforme d'ensemble, nous vous demandons donc de voter ces amendements.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. La commission n'a pas accepté ces amendements.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Je suis d'accord avec une partie de l'argumentation de M. Dutoit, notamment s'agissant du regard porté sur les salariés âgés, qui doit changer.
    Par ailleurs, vous nous appellez à la cohérence. Je ferai donc remarquer qu'hier, vous nous avez proposé de voter un amendement visant à supprimer un article repoussant à soixante-cinq ans la possibilité pour les chefs d'entreprise de licencier les salariés, alors que vous nous présentez maintenant un amendement tendant à allonger le préavis de licenciement pour les mêmes salariés.
    M. Maxime Gremetz. Bien évidemment ! Cela n'a rien à voir !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. J'y vois là quelque incohérence !
    M. Maxime Gremetz. Non, ce n'est pas contradictoire !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Je profite de l'occasion, monsieur le président, pour répondre à la question posée par M. Terrasse tout à l'heure. Il s'agit de deux sujets différents. Les partenaires sociaux auront un an pour définir la pénibilité dans le cadre des CATS, tandis que l'amendement de la commission concerne un rapport sur les résultats de la négociation interprofessionnelle destinée à définir les règles en matière de pénibilité, au-delà du mécanisme des CATS.
    M. le président. La parole est à M. Jacques Desallangre.
    M. Jacques Desallangre. Monsieur le ministre, notre position n'est absolument pas contradictoire et vous le savez très bien, même si vous faites semblant de ne pas comprendre - vous êtes trop intelligent pour cela. Le Gouvernement ne peut pas ne pas prendre en compte nos amendements, compte tenu de ses déclarations, de sa position constante. Il doit en effet laisser travailler plus longtemps ceux qui le veulent et qui le peuvent. Or, les employeurs aujourd'hui, dans leur souci de rentabilité immédiate, rejettent les plus âgés, les laissant aux soins de la collectivité nationale. A eux les économies, la baisse du coût du travail, l'amélioration de la productivité ! A la collectivité nationale, l'assistance ! Aux salariés licenciés, la détresse sociale et à leurs familles, la misère et le dénuement !
    M. Alain Bocquet. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le ministre, jusqu'à présent vous avez été obligé de reconnaître que nous étions en pleine cohérence et vous essayez maintenant de démontrer que nous sommes en pleine incohérence.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Oui !
    M. Maxime Gremetz. Eh bien non ! C'est votre fatigue qui vous amène à dire cela. Nous sommes pleinement cohérents, Jacques Desallangre vient de vous le dire. C'est vous qui êtes incohérent. Vous voulez faire travailler les seniors, comme vous les appelez, mais vous dites en même temps à ceux qui utilisent les plans de licenciement : « Comme il n'y a pas d'autres moyens, on va utiliser ces préretraites. » Dans les plans de licenciements collectifs, boursiers, on ne demande pas l'avis des gens qui veulent travailler jusqu'à soixante ans. On les met à la porte ! Je vous ai déjà donné des exemples - Whirpool, Magnetti-Marelli - et il y en a d'autres ! On ne les reclasse pas, ces gens-là. On les met en préretraite. C'est ça la vérité !
    Comment vous en prenez-vous à ces entreprises ? Vous nous dites que vous allez leur demander une petite contribution pour les dissuader d'agir de la sorte, mais elles n'auront plus un devoir de reclassement de ces salariés. Elles n'ont même plus le devoir de réindustrialiser les régions désertées. Vous voyez bien que nous sommes parfaitement cohérents. Nous sommes d'accord pour laisser la liberté à ceux qui le veulent de travailler au-delà de soixante ans, ce que la loi permet déjà - la retraite à soixante ans est un droit, pas une obligation -, mais il faut protéger ceux qui sont licenciés aujourd'hui. Nous sommes en pleine cohérence, monsieur le ministre, et, croyez-moi, nous allons continuer à le démontrer !
    M. Jacques Desallangre. Très bien !
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 4851 à 4857.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. Je suis saisi de sept amendements identiques n°s 4858 à 4864.
    L'amendement n° 4858 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 4859 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 4860 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 4861 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 4862 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 4863 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 4864 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Avant l'article 13, insérer l'article suivant :
    « Compléter l'article L. 122-9 du code du travail par les phrases suivantes :
    « Le taux est majoré de 100 % lorsque le salarié licencié est âgé d'au moins 40 ans ;
    « Le taux est majoré de 125 % lorsque le salarié licencié est âgé d'au moins 45 ans ;
    « Le taux est majoré de 150 % lorsque le salarié licencié est âgé d'au moins 50 ans ;
    « Le taux est majoré de 175 % lorsque le salarié licencié est âgé d'au moins 55 ans. »
    Ces amendements sont-ils défendus, monsieur Gremetz ?
    M. Maxime Gremetz. Oui, monsieur le président.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Rejet.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Même avis que la commission.
    M. le président. La parole est à M. Jacques Desallangre.
    M. Jacques Desallangre. Nous persistons à réclamer la même cohérence intellectuelle au Gouvernement, cohérence qui doit l'amener à prendre les mesures que nous lui proposons, même si cela déplaît au MEDEF - ce que l'on comprendrait fort bien. On ne peut, je le répète, rejeter ceux qui veulent travailler, ceux qui sont détenteurs du savoir-faire, de l'expérience, et peuvent les transmettre aux jeunes en phase d'apprentissage. Il faut donc avoir le courage d'aller contre la politique à court terme de ceux qui, au sein du patronat, sont aveuglés par la recherche immédiate du profit maximum, ceux qui sont aux ordres d'actionnnaires avides. Vous le savez fort bien, en effet, ce ne sont plus les chefs d'entreprise qui commandent aujourd'hui ; ce sont les actionnaires qui font tant de mal à notre économie. Monsieur le ministre, donnez un signal fort en allant contre cette logique !
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 4858 à 4864.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)

Article 13

    M. le président. « Art. 13. - L'article L. 321-13 du code du travail est modifié comme suit :
    « 1° Le 7° est remplacé par les dispositions suivantes :
    « 7° Rupture du contrat de travail d'un salarié qui était lors de son embauche âgé de plus de cinquante ans et inscrit depuis plus de trois mois comme demandeur d'emploi, lorsque l'embauche est intervenue après le 9 juin 1992 et avant le 28 mai 2003. »
    « 2° Après le 7°, il est inséré un 7° bis ainsi rédigé :
    « 7° bis Rupture du contrat de travail d'un salarié qui était lors de son embauche âgé de plus de quarante-cinq ans, lorsque l'embauche est intervenue au plus tôt le 28 mai 2003. »
    Sur cet article, plusieurs orateurs sont inscrits.
    La parole est à M. Jean Le Garrec.
    M. Jean Le Garrec. Je profiterai de cette intervention pour défendre également notre amendement de suppression n° 3051.
    J'avoue, monsieur le ministre, que j'ai quelques questions à vous poser, car je voudrais bien comprendre votre raisonnement. Au moment de sa création, la contribution Delalande avait pour objectif d'éviter la politique consistant à écarter de l'emploi les salariés âgés de plus de cinquante, cinquante-cinq ans. Si j'ai bonne mémoire, cette contribution a d'ailleurs été doublée. En tout cas, elle a permis de mettre un frein à une tentation.
    Bien entendu, une entreprise embauchant un salarié de plus de cinquante ans inscrit en qualité de demandeur d'emploi n'était pas soumise à cette contribution, partant du principe que cette entreprise savait ce qu'elle faisait et que si elle embauchait cette personne c'était pour la conserver. Je ne connais pas d'entreprise qui embauche délibérément un salarié pour ne pas le garder ! Tout cela était logique par rapport à l'effet voulu à l'origine. Mais vous changez maintenant de perspective, puisque vous permettez à une entreprise embauchant un salarié de plus de quarante-cinq ans, qui ne devra d'ailleurs pas forcément être inscrit en tant que demandeur d'emploi, de ne pas tomber sous le coup de la contribution Delalande si ielle est aménée à s'en séparer. Dès lors, pourquoi ne pas fixer l'âge limite à quarante ans, voire à trente-cinq ? La contribution Delalande avait un objectif très précis avec une correction pour les entreprises qui faisaient l'effort d'aller vers des salariés plus jeunes - parce qu'à cinquante ans on est jeune ! Mais là, vous descendez l'escalier à rebours. En définitive, vous tuez la contribution Delalande.
    M. le président. La parole est à M. Denis Jacquat.
    M. Denis Jacquat. Cet article est le dernier du titre Ier. C'est un événement ! (Sourires.) Comme les précédents, il s'inscrit dans le cadre de la politique d'accès à l'emploi et de maintien dans l'emploi des salariés âgés. Il fait partie de l'arsenal des mesures proposées pour améliorer le taux d'emploi de ces salariés. Il est donc important.
    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. L'article 13 de ce projet de loi, d'une importance relativement mineure, n'en est pas moins très révélateur. Encore une fois, sous prétexte que le patronat détourne le droit du travail de ses objectifs, on nous propose de modifier ce droit, de l'assouplir pour mieux manifester la résignation des acteurs publics devant les comportements de tous ces patrons dénués de conscience civique, pour ne pas employer le terme de « voyous », comme le Président de la République. Nous n'acceptons pas cette logique. Quand les patrons détournent l'esprit et la lettre du droit, vous modifiez la loi. Je n'ose pas imaginer ce qu'il adviendrait si cette logique devait être appliquée dans d'autres secteurs de la vie sociale.
    Il est tout aussi paradoxal d'assouplir le droit concernant le licenciement des salariés âgés lorsque l'on prétend non seulement accroître le taux d'activité de ces salariés, mais plus encore faire travailler les Français jusqu'à épuisement, après soixante-cinq ans. Il est vraiment naïf, voire insultant envers les salariés, de penser que plus on assouplit le droit du travail, mieux les objectifs pour lesquels il a été conçu seront atteints. Ainsi la contributionDelalande ne sera-t-elle plus due à partir du moment où le salarié licencié sera âgé d'au moins quarante-cinquante ans lors de son embauche. Cette disposition serait introduite pour prévenir les comportements de patrons qui refusent d'embaucher des salariés entre quarante-cinq et cinquante ans par crainte d'être assujettis à la contribution Delalande. Il s'agit donc d'une nouvelle exception limitant l'application de cette cotisation supplémentaire si bénigne. Ne serait-il pas plutôt souhaitable de réduire les failles de ce dispositif ? Avec cette nouvelle disposition vous semblez bien enterrer une contribution que vous aviez pourtant vous-même créée. Il est vrai que son auteur a disparu de l'Assemblée !
    Cet article est très significatif de la résignation de votre gouvernement devant la situation de l'emploi. Le seul moyen trouvé pour faciliter l'embauche des salariés de plus de quarante-cinq ans est de réduire le coût prévisionnel de leur licenciements, donc de réduire les protections dont ils pourraient bénéficier. Il s'agit simplement d'étendre encore davantage aux salariés âgés l'insécurité devant le travail. Ce qui se cache derrière cet article, c'est la volonté de généraliser la précarité au travail, d'en faire un véritable mode de vie qui ne soit plus réservé aux seuls jeunes entrant dans la vie active. Nous ne pouvons évidemment pas partager ces vues. Cette précarité au travail, si elle devait se généraliser, serait catastrophique pour le sujet qui nous importe aujourd'hui, à savoir le financement de nos retraites. En effet, ce n'est pas avec des petits boulots sous-payés et exonérés de cotisations sociales que l'on financera les retraites.
    Il est plutôt nécessaire de privilégier la stabilité et la sécurité dans l'emploi, donc de protéger ces salariés contre les menaces de licenciement, d'autant que vous avez liquidé la loi de modernisation sociale. Parallèlement, pour prévenir les licenciements, le montant de la contribution Delalande pourrait être augmenté.
    Les dispositions de l'article L. 321-13 du code du travail pourraient être durcies. Pourquoi les entreprises ne sont-elles plus redevables de cette contribution lorsque les salariés qu'elles ont directement licenciés bénéficient des allocations spéciales de préretraite du Fonds national pour l'emploi ? Cette exception ne peut qu'inciter les employeurs à licencier les travailleurs âgés et à les faire « bénéficier » de ces dispositifs de préretraite que vous ne cessez pourtant de dénoncer. Vous voyez où se trouve le manque de cohérence ! C'est la raison pour laquelle les députés communistes rejettent l'article 13 du projet de loi tel qu'il est pour l'instant rédigé.
    M. le président. Je suis saisi de neuf amendements identiques n°s 3051, 3152 et 4865 à 4871.
    L'amendement n° 3051 est présenté par MM. Terrasse, Gorce, Le Garrec et les membres du groupe socialiste ; l'amendement n° 3152 par Mme Billard, M. Yves Cochet et M. Mamère ; l'amendement n° 4865 par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 4866 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 4867 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 4868 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 4869 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 4870 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 4871 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer l'article 13. »
    L'amendement n° 3051 a été défendu.
    L'amendement n° 3152 n'est pas défendu.
    Les amendements n°s 4865 à 4871 viennent d'être défendus par M. Maxime Gremetz.
    Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. La commission a rejeté ces amendements. L'exonération de la contribution Delalande sera réservée aux salariés embauchés au-delà de quarante-cinq ans, ce qui renforce et concrétise notre volonté de maintenir dans l'emploi des salariés dits seniors.
    M. Maxime Gremetz. La dialectique est au pouvoir !
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. La contribution Delalande a été créée en 1987, puis doublée en 1992 et à nouveau en 1998 pour certaines entreprises. C'est dire à quel point c'est un bien commun à l'ensemble des formations politiques qui composent l'Assemblée nationale ! Cela dit, les partenaires sociaux nous ont indiqué que si le système avait des effets positifs pour les plus de cinquante ans, il présentait de véritables inconvénients pour les personnes juste un peu plus jeunes - entre quarante-cinq et cinquante ans -, qui, en cas de licenciement, ont beaucoup de mal à retrouver un travail. L'objectif de cet article est donc d'élargir à l'embauche de salariés ayant entre quarante-cinq et cinquante ans l'exonération de la contribution Delalande pour essayer de réduire les effets négatifs sur cette tranche d'âge.
    M. le président. La parole est à M. Pascal Terrasse, pour répondre au Gouvernement. Et M. Jacques Desallangre interviendra ensuite.
    M. Maxime Gremetz. « Desallangre », monsieur le président, pas « Delalande ».
    M. le président. C'est ce que j'ai dit, monsieur Gremetz. Je suis peut-être vieux...
    M. Maxime Gremetz. Non, monsieur le président, pas encore ! (Sourires.)
    M. le président. ... et fatigué, mais je ne confonds pas encore M. Desallangre et M. Delalande. (Sourires.)
    La parole est à M. Pascal Terrasse.
    M. Pascal Terrasse. Monsieur le président, vous dites que vous êtes vieux, mais compte tenu de l'article que nous propose M. le ministre, je me sens aussi très vieux puisque dans cinq ans je serai considéré comme un travailleur âgé. Vous me tendez en quelque sorte la perche. Mettre en place des dispositifs renforçant l'employabilité des travailleurs âgés dès quarante-cinq ans n'est pas de nature, en effet, à rassurer celles et ceux qui atteignent un tel âge.
    Plus sérieusement, pourquoi nous opposons-nous à l'article 13 ? Certes, la contribution Delalande est un dispositif tout à fait justifié, et qui permet en tout cas de favoriser l'employabilité des plus de cinquante ans. Mais nous considérons qu'il eût été souhaitable que le Gouvernement fasse preuve de plus d'audace et d'imagination pour les travailleurs âgés de plus de quarante-cinq ans.
    Monsieur le ministre, vous auriez pu en effet mettre en place une politique nouvelle, concertée et négociée qui aurait tourné autour de deux grands thèmes, chers aux socialistes. Le premier porte sur la gestion des âges, notamment en deuxième partie de carrière professionnelle. On considère dans notre pays qu'il faut, coûte que coûte, amener un salarié sur son poste de travail jusqu'au terme de son activité professionnelle. Or nous estimons, pour notre part, qu'à l'instar de ce qui se pratique dans divers pays européens, il serait souhaitable qu'un certain nombre de salariés puissent changer de poste, et que l'on tienne compte notamment de la pénibilité des tâches de manière à maintenir dans l'employabilité ces salariés de plus de quarante ans. Comme j'ai eu l'occasion de le dire, on aurait pu imaginer de taxer plus lourdement les trois-huit, le travail pénible ou le travail de nuit des salariés ayant atteint un certain âge. Il y aurait là quelque chose d'original qui permettrait de changer la nature de la deuxième partie de carrière.
    Deuxième grand thème, l'investissement en matière de formation et notamment de validation des acquis professionnels. Ainsi que nous avons eu l'occasion de le rappeler tout au long de ces débats, cet élément est fondamental. Pour s'en sortir, la France aura besoin, en effet, de disposer de travailleurs qualifiés. C'est à travers la valeur ajoutée des entreprises qu'on s'en sortira. Répondant tout à l'heure à une question sur la délocalisation des entreprises textiles qui lui a été posée dans le cadre des questions au Gouvernement, le ministre délégué au commerce extérieur a expliqué qu'il fallait aller vers l'innovation. C'est tout à fait exact. Il faut impérativement s'appuyer sur l'innovation et la recherche. Si nous voulons que les entreprises puissent se développer, il faudra donc adapter les postes de travail, mais aussi les compétences et les connaissances des salariés.
    A cet égard, un investissement fort en matière de formation aurait permis, à notre sens, de mieux répondre au problème de l'employabilité des personnes de plus de quarante ans. C'était mieux que de leur dire que, dorénavant, ils seront considérés comme des travailleurs âgés. Votre position est dommageable en tout cas pour celles et ceux qui, comme moi, auront quarante-cinq ans dans quelques années, monsieur le ministre.
    M. le président. La parole est à M. Jacques Desallangre.
    M. Maxime Gremetz. Nous sommes vieux mais pas fatigués ! (Sourires.)
    M. Jacques Desallangre. Jeunes ou vieux, on peut faire ce constat : le projet de loi du Gouvernement et notamment cet article 13 vont contribuer à évincer du marché du travail les personnes âgées de plus de cinquante ans. Aujourd'hui, avec la libéralisation du marché, le salarié est déjà constamment en situation précaire, même s'il possède un CDI. Pour les travailleurs de plus de cinquante ans, la situation est pire. Il est de plus en plus rare, en effet, d'être actif après cinquante-cinq ans dans les pays industrialisés.
    Ce déclin de l'activité des plus âgés est hélas ! particulièrement important en France. En 1970, près de 70 % des Français âgés de soixante à soixante-quatre ans étaient actifs. En 1983, cette proportion est tombée à 35 %. Elle s'est stabilisée autour de 17 % depuis le milieu des années 90. La proportion d'hommes actifs âgés de cinquante-cinq à cinquante-neuf ans est passée de 83 % à 68 % en trente ans. Ces chiffres sont révélateurs et inquiétants. La montée du chômage observée dans de nombreux pays industrialisés au cours des trente dernières années, bien qu'elle ait touché l'ensemble des travailleurs, a frappé tout particulièrement les salariés âgés.
    En France, la contribution Delalande a permis de limiter les abus en ce qui concerne le licenciement des personnes âgées de plus de cinquante ans, même si, bien sûr, hélas ! certains employeurs peu scrupuleux ont tenté de biaiser le jeu et de détourner la loi. La proposition de loi qui a instauré ce dispositif a été adoptée en 1987, à l'initiative de la droite, je vous le rappelle. Ce système permet de réduire et de réguler les risques de licenciement encourus par les salariés de plus de cinquante ans. Ainsi que je l'ai déjà souligné, il permet aussi de limiter les effets négatifs sur la transmission du savoir-faire et de l'expérience. Il y a donc un véritable bénéfice social et économique à conserver la contribution Delalande.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n° 3051 et n°s 4865 à 4871.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. Je suis saisi de sept amendements identiques n°s 4872 à 4878.
    L'amendement n° 4872 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 4873 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 4874 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 4875 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 4876 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 4877 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 4878 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer le 1° de l'article 13. »
    La parole est à M. Jacques Desallangre.
    M. Jacques Desallangre. Il n'est pas inutile de rappeler - quitte à se répéter s'il le faut - pour bien faire comprendre notre démarche, tout l'intérêt qu'il y a à conserver le bénéfice de la contribution Delalande. Avec l'article 13, sous prétexte de favoriser l'emploi et la mobilité professionnelle des salariés de plus de quarante-cinq ans, le Gouvernement rend moins coûteux pour l'entreprise leur éventuel licenciement. En d'autres termes, et même si mes propos vous déplaissent une fois encore, le Gouvernement garantit au MEDEF un nouveau champ d'extension de la précarité dans le temps même où il prétend contraindre les salariés à allonger leur vie professionnelle. Comprenne qui pourra !
    Monsieur le ministre, la contribution Delalande permet, dans une certaine mesure, une limitation des licenciements de salariés « âgés ». De plus, comme l'a rappelé M. Delalande dans une interview donnée en mai 2001, le licenciement des quinquagénaires constituait un vrai problème de fond avant l'instauration de cette loi. Bien sûr, et je l'ai déjà dit, certains entrepreneurs n'ont pas hésité à licencier juste avant l'âge limite. Mais il s'est avéré que cette mesure était tout de même perçue comme dissuasive et c'est là tout son intérêt. Le départ des actifs expérimentés a des effets pervers. D'abord, les restructurations se révèlent psychologiquement inhumaines. Qui le contestera ? Les troubles de santé, voire les décès, se multiplient et cette politique relève d'une vision à courte vue. Je l'ai déjà dit, je vous épargnerai la redite...
    Il est vrai encore que nous avons besoin que les salariés « âgés » restent sur leur poste de travail - quand ils le veulent et quand ils le peuvent -, pour faire bénéficier l'entreprise et ceux qui vont poursuivre dans l'entreprise, et notamment les plus jeunes en phase d'apprentissage, de leur savoir-faire, de leur expérience. Ils transmettent toujours l'amour de leur métier. Ils témoignent ainsi de leur dévouement à l'entreprise, qui parfois les en récompense bien mal.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Cet amendement de repli aurait pratiquement les mêmes conséquences que les amendements précédents. La commission l'a donc rejeté.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Même avis que la commission.
    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Compte tenu des réponses qui nous sont apportées, il faut bien donner des contre-arguments.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. J'ai expliqué que c'était la même chose que pour l'amendement précédent !
    M. Maxime Gremetz. Vous n'avez rien expliqué du tout ! Vous ne nous avez pas convaincus !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Ça, c'est autre chose !
    M. Maxime Gremetz. Il faut donc recommencer. Vous ne nous avez pas convaincus et vous ne nous convaincrez pas que cet amendement n'est pas justifié. Efforcez-vous tout de même de répondre, sinon il n'y a plus de débat ! Et M. Barrot va encore dire à la télévision : « Il n'y a pas de débat ! » C'est sûr qu'il ne peut pas y avoir de débat si le Gouvernement ne répond pas. On parle tout seul. Et on est bien décidé à continuer à parler tout seul. Mais que M. Barrot ne prétende pas qu'il n'y a pas de débat. Je sais bien, chers collègues de la majorité, que vous êtes très peinés de ne pas être autorisés à parler. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Denis Jacquat. Nous sommes organisés, voilà tout !
    M. Maxime Gremetz. Vous trépignez sur vos sièges. Argumentez donc ! Ayons un débat !
    M. Alain Néri. Ils sont muets !
    M. Maxime Gremetz. Vous ne parlez pas parce que vous avez un sparadrap collé sur la bouche. Mais vous savez que nous avons raison. Vous nous approuvez mais vous ne pouvez pas le dire. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Denis Jacquat. Non, on est bons, c'est notre force !
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le rapporteur, vous n'êtes pas convaincant. Il faut varier vos arguments. Ne répétez pas les mêmes sans cesse. Ecoutez-nous et essayez de nous convaincre.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 4872 à 4878.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. Je suis saisi de sept amendements identiques n°s 4879 à 4885.
    L'amendement n° 4879 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 4880 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 4881 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 4882 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 4883 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 4884 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 4885 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer le 2° de l'article 13. »
    La parole est à M. Alain Bocquet.
    M. Alain Bocquet. Selon l'INSEE, à l'horizon d'un an, un chômeur âgé a moins de chance de retrouver un emploi qu'un jeune chômeur : 15 % contre 40 %. Ce chiffre est révélateur d'une situation difficile. L'exonération de la contribution Delalande constituait à la fin des années 80 une avancée remarquable dans le domaine social. Aujourd'hui, le Gouvernement veut supprimer cette avancée sociale. C'est inacceptable ! Elle a permis d'éviter les licenciements abusifs des salariés de plus de cinquante ans par l'instauration d'une cotisation supplémentaire due par l'employeur pour toute rupture de contrat de travail d'un salarié âgé de plus de cinquante ans.
    On nous dit que notre société ne peut pas supporter plus longtemps le coût social du système actuel. Mais on oublie le coût social que représentent les personnes exclues de l'emploi et les difficultés individuelles qu'elles éprouvent. On oublie aussi que le coût financier qu'engendrera l'augmentation des licenciements des plus de cinquante ans avec la suppression de cette exonération sera sans aucun doute préjudiciable pour l'UNEDIC.
    Un ouvrage de plusieurs auteurs, coordonné par M. Emmanuel Raynaud, intitulé Les Retraites dans l'Union européenne, relativise l'ampleur des difficultés de financement à venir des régimes de retraites. Il met principalement en avant deux arguments : les générations du baby-boom ne devraient guère coûter plus cher à la collectivité lorsqu'elles seront en retraite que lorsqu'elles étaient sur les bancs de l'école ; le financement des inactifs pose en tout état de cause un problème, qu'il s'agisse de verser des pensions aux futurs retraités ou des prestations aux actuels chômeurs. Pour ces auteurs, le remède est d'abord à rechercher dans le taux de croissance de l'économie.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Maxime Gremetz. Nous avons demandé un scrutin public sur cet article qui, s'il n'est pas fondamental, est néanmoins très important dans la mesure où il montre de la part du Gouvernement une incohérence apparente. En effet, d'un côté on veut faire travailler le plus possible les salariés âgés de cinquante-cinq ans et les autres jusqu'à soixante-cinq ans et, de l'autre, on permet des licenciements collectifs boursiers comme on n'en a jamais connu. C'est vraiment une politique de Gribouille. Pour nous, il faut s'attaquer à la racine du mal, c'est-à-dire au chômage qui se développe aujourd'hui, et ne pas laisser notre outil de production se délocaliser, se restructurer au nom du profit, du saint profit devrais-je dire.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. La commission a rejeté cet amendement. Afin d'être agréable à nos collègues du groupe des député-e-s communistes et républicains, je précise qu'il n'y a pas de suppression de la contribution Delalande mais seulement, à partir de la date d'adoption du projet par le conseil des ministres, une exonération prévue pour les salariés embauchés s'ils ont plus de quarante-cinq ans, ce qui constitue une mesure dynamique pour l'emploi des seniors.
    Cet amendement de repli porte justement sur le passage de l'âge de cinquante à quarante-cinq ans : il a donc été rejeté.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces amendements ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Même avis que celui de la commission.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 4879 à 4885.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. Sur l'article 13, je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Notez, monsieur le président, que nous sommes gentils avec vous. Nous vous permettons en effet d'annoncer à l'avance le scrutin. Hier...
    M. le président. Hier, c'était hier, aujourd'hui, c'est aujourd'hui.
    M. Alain Néri. Et demain sera un autre jour ! (Sourires.)
    M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Je mets aux voix l'article 13.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   85
Nombre de suffrages exprimés   85
Majorité absolue   43
Pour l'adoption   58
Contre   27

    L'Assemblée nationale a adopté.
    La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, pouvez-vous nous accorder une courte suspension de séance. Il s'agit non pas de faire de l'obstruction, mais d'organiser notre travail.
    M. le président. Je vous accorde cinq minutes de suspension.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à seize heures cinquante-cinq, est reprise à dix-sept heures cinq.)
    M. le président. La séance est reprise.

Après l'article 13

    M. le président. M. Xavier Bertrand a présenté un amendement, n° 11184, ainsi rédigé :
    « Après l'article 13, insérer l'article suivant :
    « Au début du premier alinéa de l'article L. 122-45 du code du travail, après les mots : "Aucune personne ne peut, sont insérés les mots : ", notamment par le biais d'une offre d'emploi,. »
    La parole est à M. Xavier Bertrand.
    M. Xavier Bertrand, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. L'objectif de ce texte, par différents moyens déjà exposés, est de remonter le taux d'activité des seniors. Cela suppose un profond changement des mentalités.
    On relève aujourd'hui une forme d'exclusion - heureusement partielle - des seniors du marchés du travail qui, dans bien des cas, se traduit au niveau des petites annonces, ce qui est parfaitement anormal. Si l'article L. 122-45 du code du travail sanctionne les discriminations au cours d'une procédure de recrutement, il ne fait pas explicitement référence aux offres d'emploi. L'amendement n° 11184 vise à remédier à cette lacune en précisant formellement qu'aucune discrimination liée à l'âge ni à tout autre critère ne saurait être acceptée, et ce dès la phase des offres d'emploi.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. La commission a accepté cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Le Gouvernement est favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 11184.
    (L'amendement est adopté.)

Avant l'article 14

    M. le président. Je donne lecture de l'intitulé du titre II :
    « Titre II. - Dispositions relatives au régime général et aux régimes alignés. »
    Je suis saisi de sept amendements identiques n°s 10770 à 10776.
    L'amendement n° 10770 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 10771 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 10772 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 10773 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 10774 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 10775 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 10776 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer le titre II. »
    La parole est à M. Jacques Desallangre.
    M. Jacques Desallangre. Avant d'aborder l'article 14 qui vient renforcer le rôle du conseil d'administration de la Caisse nationale d'assurance vieillesse en lui conférant un pouvoir général de proposition en matière de garantie de l'équilibre financier du régime général, nous voulons engager un débat sur la démocratisation des instances de la sécurité sociale - autrement dit, en premier lieu, de la Caisse nationale d'assurance vieillesse.
    Nous ne voyons pas d'inconvénient à accorder davantage de pouvoir aux organismes de la sécurité sociale, bien au contraire. Nous n'en voyons pas davantage à associer plus largement les partenaires sociaux à la gestion de la protection sociale. En revanche, ce qui nous gêne sérieusement, c'est d'accroître les pouvoirs d'un conseil d'administration dont la composition, imposée par le plan Juppé, souffre d'un déficit démocratique évident. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    La réforme de M. Juppé, appelée communément plan Juppé, a considérablement bousculé la démocratisation de la sécurité sociale. Dès lors, un constat s'impose avec évidence : le champ du social souffre d'un grave déficit démocratique. Dans les domaines de l'action sanitaire et sociale, de la protection sociale et de l'emploi, l'évolution a été marquée au cours de la dernière décennie par la remise en cause progressive des conditions, pourtant restreintes, du débat, de l'expression et de l'intervention des salariés, des usagers et des professionnels concernés.
    La sécurité sociale a été tout particulièrement touchée par cette évolution. Les assurés sociaux sont mis à l'écart des orientations et des choix qui déterminent, au niveau local comme au niveau national, leur couverture sociale et la gestion de cette couverture. Le fossé se creuse entre leurs aspirations, leurs besoins, dans des domaines aussi essentiels que l'accès aux soins, la compensation des charges familiales ou les retraites, et un système, une institution, qui mettent en oeuvre dans ces domaines des politiques de rationnement et d'abaissement des droits. Le déficit démocratique apparaît bien comme le corollaire de la régression sociale.
    L'un ne va pas sans l'autre. Le report, plusieurs fois renouvelé, des élections à la sécurité sociale et la succession simultanée des plans gouvernementaux ne sont évidemment pas le fait du hasard. Plus récemment, les mesures Balladur-Veil ont été assorties, en 1994, d'une loi portant réforme de l'organisation administrative et financière de la sécurité sociale, qui renforçait les pouvoirs de l'Etat et rétablissait le paritarisme dans la branche accidents du travail, maladies professionnelles. Plus près de nous encore, le plan Juppé, je le disais, étayait ses dispositifs de maîtrise comptable par de nouvelles mesures d'élagage de la démocratie - suppression des élections, réforme de la composition et du rôle des conseils d'administration, extension des prérogatives de l'Etat et du Parlement.
    L'exigence démocratique n'est pas l'exigence d'un supplément d'âme, le vernis humaniste d'une gestion par définition froide et austère de la sécurité sociale. C'est la condition d'une gestion efficace, proche des aspirations et des besoins de la population.
    C'est pourquoi il me semble difficile de pouvoir accorder des pouvoirs supplémentaires en matière de retraite au conseil d'administration de la Caisse nationale d'assurance vieillesse, compte tenu du manque cruel de légitimité qui le caractérise. On ne peut pas confier de nouvelles missions à un conseil d'administration, - et cela vaut pour n'importe quelle organisation - désigné au mépris des règles démocratiques.
    Aussi cet amendement vise-t-il à rétablir les élections à la Caisse nationale d'assurance vieillesse. Peut-être jugerez-vous sa rédaction imparfaite, mais si vous êtes d'accord sur le principe du rétablissement des élections à la sécurité sociale, il vous suffira de lever l'obstacle rédactionnel et d'apporter le gage d'un engagement en ce sens.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Cet amendement se propose de supprimer le titre II, lequel constitue à l'évidence un dispositif essentiel du présent projet de loi : il introduit en effet des avancées majeures - en particulier le départ à la retraite avant l'âge de soixante ans, les majorations de pension de type surcote, la possibilité de rachat de cotisations, l'assurance veuvage, autant d'avancées considérées comme...
    M. René Couanau. Des avancées sociales !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. ... historiques - il n'est qu'à prendre l'exemple de l'extension du champ de l'assurance vieillesse aux parents restant au foyer pour élever un enfant handicapé. Autrement dit, ce titre II est essentiel et un amendement de suppression aussi large reviendrait à contrarier bien des avancées. Je suis persuadé que nos collègues communistes ne l'ont présenté que dans le but de s'exprimer. Quoi qu'il en soit, la commission a rejeté cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Même avis que la commission.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 10770 à 10776.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. Mme Guinchard-Kunstler a présenté un amendement, n° 10822, ainsi rédigé :
    « Avant l'article 14, insérer l'article suivant :
    « Il est institué, pour les anciens membres de congrégations religieuses, une retraite complémentaire, dont les conditions sont définies par décret. »
    La parole est à Mme Paulette Guinchard-Kunstler.
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Cet amendement traite de la situation très particulière des anciens membres de congrégations religieuses qui, pour des raisons diverses, se retrouvent à toucher des pensions très faibles. Certes, des progrès ont été enregistrés depuis 1998, date à laquelle leur caisse de retraite a été introduite dans le régime général : mais qu'ils aient ou non quitté la vie religieuse, ils n'ont pas accès aux retraites complémentaires et, du coup, leurs pensions sont très basses. Mon amendement est d'une très grande simplicité : il s'agit de faire en sorte que les anciens religieuses et religieux, et plus particulièrement ceux qui ont retrouvé la vie civile, puissent avoir accès à la retraite complémentaire.
    M. le président. Il est vrai qu'il y a des jésuites à Besançon. (Sourires.)
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Monsieur le président, je vous parlerai un jour de l'histoire religieuse très partagée de la Franche-Comté, marquée par les luttes entre protestants et catholiques, mais je crois que c'est une réalité qui prévaut un peu partout. Et j'y suis d'autant plus sensible que la Franche-Comté, au cas où vous l'ignoreriez, connaît depuis très longtemps, et surtout depuis une quarantaine d'années, une situation marquée par la présence sur le terrain de prêtres ouvriers et de religieuses qui, depuis, sont revenus à la vie civile.
    M. le président. Je vous remercie de cettre précision, madame Guinchard-Kunstler.
    Quel est l'avis de la commission ? A votre bon coeur, monsieur Accoyer... (Sourires.)
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. La commission a attentivement étudié cet amendement. Tout en partageant l'objectif - louable - de son auteur, Mme Paulette Guinchard-Kunstler, elle a toutefois pensé que nous avions affaire à des problèmes démographiques particulièrement délicats à gérer,...
    M. Jacques Desallangre. Il est vrai que le taux de fécondité dans cette population est particulièrement bas ! (Sourires.)
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. ... s'il fallait imaginer une retraite complémentaire obligatoire limitée aux congrégations religieuses, compte tenu de l'évolution même des effectifs de ces congrégations. C'est notamment pour cette raison qu'elle a repoussé cet amendement. N'y voyez pas une réponse de jésuite ! (Sourires.)
    Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Vous imaginez bien, mesdames, messieurs les députés, que le conseiller municipal de Solesmes a été évidemment très attentif à cet amendement,...
    M. Jean Le Garrec. Ah !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... qui pose en réalité deux questions différentes.
    Rappelons pour commencer que les ministres du culte et les membres de congrégations qui quittent la vie religieuse sont normalement affiliés au régime de retraite complémentaire correspondant à l'activité professionnelle qu'ils choisissent. Autrement dit, la question se pose essentiellement pour ceux qui vont jusqu'au bout de leurs voeux. Il ne me paraît pas souhaitable, comme vient de le dire le rapporteur, de créer pour ces derniers un régime complémentaire spécifique, lequel serait forcément caractérisé par un rapport démographique par nature très défavorable.
    A la suite de plusieurs contacts entre mon ministère et notamment les représentants du culte protestant réformé, nous sommes convenus de rechercher une formule privilégiant l'affiliation de ces personnes à un régime complémentaire existant. Ainsi cet amendement me paraît-il en l'état prématuré ; je vous invite donc, madame, à le retirer afin que le Gouvernement puisse poursuivre la concertation avec les représentants des congrégations, qui devrait aboutir à l'affiliation des intéressés à un régime complémentaire existant.
    M. Jean-Claude Lenoir. Très bien !
    M. Dominique Dord. C'est la sagesse !
    M. le président. Madame Guinchard-Kunstler, retirez-vous votre amendement, cédant à la pression très forte du ministre ?
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Pour tout vous dire, monsieur le président, j'hésite : j'aimerais un engagement réel, mais j'ai bien entendu ce qu'a dit M. le ministre. Sur le principe - pour ne pas dire sur la forme - je me suis engagée vis-à-vis de l'ensemble de tous ceux que j'ai rencontrés à le maintenir. Je maintiendrai donc cet amendement, mais j'ai bien entendu, monsieur le ministre, votre engagement de trouver une solution.
    M. le président. Monsieur Terrasse, je vous sens une envie d'intervenir sur ce sujet.
    M. Pascal Terrasse. Que voulez-vous, monsieur le président ! Ce matin, en me réveillant, la première chose que j'ai entendue à la radio, c'était...
    M. le président. La messe (Rires.)
    M. Pascal Terrasse. ... une émission sur la crise des vocations religieuses ! Il faut savoir que le mois de juin n'est pas seulement celui des mariages : c'est également celui des ordinations. Et Mme Paulette Guinchard-Kunstler a raison de poser la question d'un métier qui, reconnaissons-le, est aujourd'hui en voie de disparition.
    Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Ce n'est pas un métier !
    M. Pascal Terrasse. Appelons-le vocation ou sacerdoce, si vous voulez.
    Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Heureusement qu'il nous reste Brard !
    M. Pascal Terrasse. La semaine dernière, un amendement déposé par un collègue UDF sur les difficultés des enseignants de l'enseignement confessionnel s'est heurté au refus de l'UMP. Il vous sera difficile de leur faire le coup deux fois. Votre propre électorat aurait du mal à comprendre votre acharnement à l'encontre des religions, en particulier les religions réformée et catholique.
    L'amendement défendu par Paulette Guinchard-Kunstler me paraît aller dans le sens d'une réponse appropriée. Rappelons que leur demande ne date pas d'hier : lorsque, en 1998, nous avions la caisse d'assurance vieillesse d'invalidité et maladie des cultes, autrement dit l'organisme de gestion des caisses de retraites des cultes, les intéressés avaient déjà émis le souhait de voir à terme leur système amélioré. Cette idée de retraite complémentaire serait tout à fait conforme à ce que nous avons mis en place et à ce que vous allez vous-même faire d'ici peu pour d'autres professions.
    M. Denis Jacquat. Monsieur le président, cela fait longtemps que je vous ai demandé la parole !
    M. le président. Inutile de s'énerver !
    La parole est à M. Denis Jacquat.
    M. Denis Jacquat. C'est la troisième fois que cela se produit !
    M. le président. Il suffit de demander !
    M. Denis Jacquat. J'ai demandé !
    M. le président. Dans ce cas, demandez-le poliment. (Sourires.)
    M. Denis Jacquat. Je l'ai demandé poliment !
    M. Pascal Terrasse. Ne nous énervons pas !
    M. le président. Quand même ! Moi aussi, je peux répondre !
    M. Jean Le Garrec. Le Saint-Esprit soit avec nous !
    M. le président. Faisons en sorte que tout se passe calmement.
    M. Denis Jacquat. J'ai demandé calmement, monsieur le président.
    Ainsi que M. Pascal Terrasse et Mme Paulette Guinchard-Kunstler l'ont indiqué, cet amendement traite d'un problème bien réel. J'avais moi-même, en étant rapporteur sur l'assurance vieillesse, eu l'occasion d'appeler l'attention sur ce point. Cela dit, M. le ministre a apporté une réponse à laquelle je me rallie. Mme Paulette Guinchard-Kunstler a promis d'aller jusqu'au bout et je la comprends. Pour notre part, nous rejoignons l'opinion du Gouvernement. Reste que ce problème doit être étudié sérieusement et au fond.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 10822.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. Jacques Desallangre. Dieu reconnaîtra les siens !

Article 14

    M. le président. « Art. 14. - I. - A l'article L. 222-1 du code de la sécurité sociale, il est inséré après le premier alinéa un alinéa rédigé comme suit :
    « La caisse propose toute mesure qui lui paraît nécessaire pour garantir dans la durée l'équilibre de l'assurance vieillesse des travailleurs salariés. »
    « II. - L'article L. 222-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa rédigé comme suit :
    « Les propositions et les avis qu'elle émet sont rendus publics. »
    Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article.
    La parole est à M. Pascal Terrasse.
    M. Pascal Terrasse. L'article 14 a pour objectif d'élargir les compétences du conseil d'administration de la caisse nationale d'assurance vieillesse. En tant que représentant du Parlement - puisque vous m'avez fait l'honneur de me désigner - au conseil de surveillance de l'assurance vieillesse, je ne peux évidemment que souscrire à cette mesure.
    Notons toutefois que cet article se propose de donner des pouvoirs complémentaires à l'assurance vieillesse et de réformer petit à petit la représentativité de cet organisme. Ce renforcement des pouvoirs du conseil d'administration de la Caisse nationale d'assurance vieillesse, qui pourra notamment proposer - me semble-t-il - le taux de cotisation, me paraît plutôt positif. Encore cette mesure ne prendrait-elle tout son sens que si le conseil était élu par les assurés sociaux. D'où la question que je me permets de poser au ministre.
    Depuis de nombreuses années, aucune élection au sein des organisations de protection sociale n'a été organisée. On ne saurait prétendre vouloir dialoguer avec les organisations sociales ni vanter le dialogue social sans chercher dans le même temps à organiser des élections au sein de notre système de protection sociale. La dernière remonte à bien des années. Il me paraît urgent de réintroduire au sein de ces organismes un véritable débat. De nouveaux syndicats ont depuis, vu le jour, une discussion s'est instaurée entre certaines organisations syndicales, sans parler de la place que doivent y tenir les patronales - le MEDEF, on le sait a partiellement quitté bon nombre d'instances dites représentatives. Autant d'éléments qui posent la question de nouvelles élections au sein de la protection sociale. Nous aimerions vous entendre sur ce point, monsieur le ministre. Faut-il, selon vous, dans le cadre de la réforme que nous menons aujourd'hui sur les retraites et que nous mènerons demain ou après-demain sur la réforme de l'assurance maladie, revoir notre propre système de protection sociale ? Doit-il être étatisé ? Doit-il relever de la responsabilité des partenaires sociaux ? Toutes ces questions ont été naturellement posées par les uns et par les autres. Peut-être pourrait-on avoir une réponse.
    Deuxième élément que je voulais évoquer, le renforcement des pouvoirs du conseil d'administration de la CNAVTS. Il me paraît souhaitable que l'on débatte largement des taux de cotisation au sein du conseil d'administration et que, ensuite, le Gouvernement entérine le cas échéant les choix opérés par les organisations représentatives. Il n'en demeure pas moins que, depuis vingt-cinq ans, les cotisations patronales d'assurance vieillesse sont restées identiques alors que les cotisations salariales ont fortement augmenté, et il faut ajouter la contribution sociale généralisée. Il est donc important de poser le problème.
    Enfin, les organisations non syndicales auront-elles une place dans le prochain conseil d'administration de la CNAVTS ? Ces associations représentatives depuis maintenant de nombreuses années souhaitent être largement actrices et partenaires des décisions qui pourraient être prises. Je pense en l'occurence à des fédérations nationales de retraités et de personnes âgées. Y aura-t-il une ouverture sur ce point ?
    M. le président. La parole est à M. Denis Jacquat.
    M. Denis Jacquat. En tant que président du conseil de surveillance de la CNAVTS, en accord avec Pascal Terrasse, et Jean-Luc Préel s'associe très certainement à moi, je me réjouis du renforcement des compétences de son conseil d'administration et de cette reconnaissance de son rôle et de ses missions.
    A ce propos, monsieur le ministre, je voudrais vous transmettre le voeu de son conseil d'administration, que les propositions qu'il est susceptible de formuler s'inscrivent dans le calendrier de la préparation de la loi de financement de sécurité sociale.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Préel.
    M. Jean-Luc Préel. Monsieur le ministre, vous êtes très attaché au dialogue social et à sa relance indispensable dans notre pays. Vous avez eu l'occasion de le redire ces derniers jours. Vous êtes attaché au paritarisme, nous aussi. Dans le projet de loi, vous prévoyez d'accroître le rôle des partenaires sociaux en leur demandant de définir la pénibilité du travail, de mettre en place un plan pour la remontée du taux d'activité des seniors, de cogérer le GIP en charge de l'information des citoyens sur leurs droits à la retraite qui est déjà prévu dans le projet de loi.
    Actuellement, vous le savez, le conseil d'administration n'a quasiment aucun pouvoir, se contentant de gérer les fonds sociaux de la caisse, ce que, je crois, la plupart des Français ignorent. Il ne définit ni les cotisations ni les prestations. Dans l'article 14, vous proposez une avancée assez importante, puisque la caisse proposera les mesures qui lui paraîtront nécessaires pour garantir dans la durée l'équilibre de l'assurance vieillesse des travailleurs salariés.
    Cependant, cette avancée est encore bien modeste. Vous avez déjà eu l'occasion d'expliquer qu'une politique des petits pas permettait de faire accepter une réforme par les partenaires sociaux. L'UDF souhaite cependant donner une pleine responsabilité aux partenaires sociaux dans leurs domaines de compétence.
    Quel est leur domaine de compétence ? Ce qui est lié au travail et ce qui est financé par des cotisations salariales et patronales. Ils sont déjà responsables dans les régimes de retraite complémentaire, AGIRC et ARRCO. Ils ont montré qu'ils pouvaient être responsables dans les problèmes de gestion du chômage avec l'UNEDIC. Nous souhaitons leur donner une autonomie pour les accidents de travail et les maladies professionnelles directement liées au travail. Il nous paraîtrait indispensable que le conseil d'administration de la CNAVTS ait demain, le plus tôt possible, une vraie responsabilité pour gérer effectivement la retraite des salariés.
    Nous avons également proposé la création d'une caisse de retraite des fonctionnaires, car il ne nous paraît pas légitime que la retraite des fonctionnaires ne soit pas gérée paritairement par l'Etat et les syndicats de fonctionnaires.
    Nous souhaiterions donc donner un réel pouvoir au conseil d'administration de la CNAVTS, pour que ses membres puissent, dans un premier temps, définir eux-mêmes les cotisations et les prestations, et, demain, définir la valeur d'achat et de liquidation du point. Nous sommes en effet, très attachés à la mise en place d'une retraite à la carte, une retraite par points.
    M. le président. La parole est à M. Alain Bocquet.
    M. Alain Bocquet. Monsieur le président, on constate, sous votre présidence, une sérénité et une efficacité dans le travail, qui sont appréciables. Les jours se suivent et ne se ressemblent pas.
    M. Dominique Dord. Merci pour lui !
    M. Jean-Luc Préel. Continuons !
    M. le président. Monsieur Bocquet, n'en faites pas trop ! Vous me mettez mal avec mes propres collègues ! (Rires.)
    M. Alain Bocquet. Ce n'était pas mon intention !
    M. le président. Avec vous, je me méfie toujours, mais je vous remercie de vos compliments.
    M. Alain Bocquet. Puis-je souhaiter que vous présidiez toutes les séances sur le dossier des retraites ?
    M. le président. Je savais bien qu'il y avait une contrepartie !
    M. Jean Le Garrec. C'est aimable pour les autres présidents ! (Sourires.)
    M. le président. Je suis très sensible à vos compliments, je suis très sensible au fait que vous souhaitiez que je préside plus souvent. Moi, j'aimerais qu'on avance un peu plus vite.
    M. Alain Néri. Quand vous présidez, on avance plus vite !
    M. Alain Bocquet. Nous avançons !
    L'article 14 du projet de loi est censé renforcer le rôle des partenaires sociaux en octroyant un pouvoir général de proposition au conseil d'administration de la CNAVTS au sujet de la garantie de l'équilibre financier du régime général. Quelle généreuse disposition ! Vous prenez finalement conscience de l'existence des partenaires sociaux et de leur volonté de s'impliquer dans la réforme des régimes de retraites. Plutôt que de voter cet article et de poursuivre les débats, je propose de surseoir à la discussion parlementaire pour permettre à M. Fillon d'ouvrir des négociations avec les organisations syndicales, qui sollicitent l'ouverture de négociations, en particulier celles qui n'ont pas accepté l'accord sur lequel vous vous appuyez !
    Il me paraît des plus paradoxal de donner aux caisses de sécurité sociale un pouvoir - proposer des mesures pour assurer l'équilibre financier des caisses - que l'on refuse aujourd'hui aux syndicats de salariés. C'est sûrement parce que le caisses, en raison de leur structure paritaire, restent sous le contrôle de vos amis du MEDEF. C'est par le renforcement des pouvoirs des organismes paritaires que vous pensez consolider ceux des partenaires sociaux.
    Nous ne partageons pas ce point de vue. Quelle est la légitimité de représentants syndicaux nommés au conseil d'administration des caisses de sécurité sociale ? Quelle est la légitimité d'organismes paritaires où le patronat a autant d'influence que les syndicats dans la gestion de la sécurité sociale des salariés ?
    Nous n'oublions pas que le paritarisme tel que vous l'avez imposé en 1967 et 1995 est un instrument de guerre du patronat contre les syndicats.
    Le système de sécurité sociale mis en place en 1945, sous l'impulsion notamment d'Ambroise Croizat, poursuit la tradition de gestion mutualiste, avec un financement par cotisations sociales et une gestion par les syndicats de salariés. Les caisses de sécurité sociale étaient alors gérées par les administrateurs salariés élus, seule l'élection étant à même de légitimer ces administrateurs. Composée aux trois quarts d'administrateurs élus, on avait alors affaire à une forme de démocratie sociale. La tutelle de l'Etat ne se substituait pas au pouvoir de gestion des caisses. Les salariés géraient eux-mêmes la part socialisée du salaire qu'est la cotisation, car ce salaire n'appartient qu'à eux seuls.
    C'est pour s'approprier la sécurité sociale et contrôler sa gestion que le patronat a imaginé, avec le soutien des gouvernements de droite, ce système paritaire dans les régimes complémentaires et l'UNEDIC d'abord, dans le régime général ensuite. Ce système est résolument anti-démocratique, puisqu'il revient sur le principe électif et fait la part belle aux organisations syndicales les moins représentatives. Le paritarisme consiste à décharger les syndicats de la gestion de la sécurité sociale et à confier cette gestion de fait au patronat.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Mais non !
    M. Alain Bocquet. Nous ne pouvons donc pas soutenir une disposition qui renforce le pouvoir d'instances illégitimes. C'est une simple exigence démocratique de notre part.
    Pour que nous puissions soutenir cet article, deux éléments nous paraissent donc très importants : d'abord, afin de donner aux syndicats la légitimité suffisante, le Parlement devrait décider le rétablissement de l'élection des administrateurs des caisses, parce que, en démocratie, le principe électif nous semble essentiel, et que la légitimité des décisions des caisses de sécurité sociale ne pourrait qu'être renforcée si la représentativité de leurs administrateurs était améliorée ; ensuite, afin de soustraire la gestion de la sécurité sociale et notamment des caisses de retraite des mains du patronat, le Parlement devrait revenir sur le principe du paritarisme et ainsi renforcer les pouvoirs des syndicats au sein des conseils d'administration des caisses.
    Bien sûr, vous allez vous opposer à ces idées, d'abord, par habitude, en vertu de l'article 40 de la Constitution, mais surtout parce que, au fond, vous rejetez cette ambition démocratique. En effet, implicitement, vous contestez la capacité des syndicats à gérer les caisses de sécurité sociale et leur sens des responsabilités. Vous donnez l'impression de n'accepter les règles démocratiques que lorsqu'elles vous assurent, à vous et à vos amis du patronat, la conservation réelle du pouvoir.
    Il est donc logique que vous rejetiez les perspectives progressives de cette démocratie sociale que nous appelons de nos voeux. C'est pourquoi le groupe des député-e-s communistes et républicains rejette aussi l'article 14 de ce projet de loi de démolition de notre système de retraite.
    M. le président. Je suis saisi de sept amendements identiques n°s 4893 à 4899.
    L'amendement n° 4893 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 4894 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 4895 par MM. Dutoit, Asensi et Gérin ; l'amendement n° 4896 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 4897 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 4898 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 4899 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer l'article 14. »
    La parole est à M. Jacques Desallangre.
    M. Jacques Desallangre. Ce débat devrait nous permettre de pointer du doigt l'impérieuse nécessité de démocratiser la sécurité sociale, car le champ du social souffre d'un grave déficit démocratique.
    Dans les domaines de l'action sanitaire et sociale, de la protection sociale, l'évolution a été marquée par la remise en cause progressive des conditions du débat, de l'intervention des salariés, des usagers et des personnels concernés. Les assurés sociaux ont été mis à l'écart des orientations et des choix qui déterminent, au niveau local comme au niveau national, leur couverture sociale et sa gestion. La crise de la sécurité sociale, due à la politique de maîtrise comptable, met en péril la sécurité sociale. L'opposition à cette politique et le débat entre ses partisans et ceux qui la contestent ont pris de l'ampleur.
    Pour créer les conditions d'une véritable réappropriation de la sécurité sociale par les assurés sociaux, il convient de bâtir des propositions pour sa démocratisation. Une réforme visant à la démocratisation de la sécurité sociale est d'autant plus nécessaire que le MEDEF et la CGPME, en quittant les conseils d'administration, n'ont eu d'autre but que d'en fragiliser le fonctionnement. Démocratiser la sécurité sociale est le moyen pour sortir de la crise, pour trouver les conditions d'une gestion efficace, proche des aspirations et des besoins de la population.
    Le lien à créer entre l'assuré social et sa sécurité sociale constitue le fil conducteur de toute réforme de la protection sociale. C'est pourquoi, comme nous l'avons précisé en préalable de l'examen de cet amendement, il nous paraît plus sage de revenir sur ce point pour conforter la légitimité du conseil d'administration de la CNAVTS avant de lui conférer davantage de pouvoirs, aussi justifiés soient-ils.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. La commission a rejeté ces amendements de suppression puisque l'article 14 donne aux partenaires sociaux un rôle plus important à la tête de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés, en leur confiant de nouvelles tâches pour renforcer l'équilibre et l'avenir de nos régimes de vieillesse.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. L'article 14, monsieur Terrasse, vous donne une première indication sur la philosophie du Gouvernement concernant la gestion des régimes sociaux : mieux impliquer, plus impliquer les partenaires sociaux. Le Gouvernement n'entend donc pas étatiser la gestion de la sécurité sociale.
    Pourquoi ne pas aller plus loin aujourd'hui ? Parce que c'est le chantier global de la gouvernance des organismes de sécurité sociale qui doit être ouvert. On ne peut pas l'ouvrir simplement à l'occasion du débat sur les retraites. Nous allons enchaîner les réformes avec un débat sur la gouvernance de la sécurité sociale qui nous conduira à réfléchir avec les partenaires sociaux et l'ensemble des parlementaires à l'évolution de notre système. Le Gouvernement peut dès maintenant indiquer dans quel sens il souhaite aller : c'est vers plus de pouvoir pour les partenaires sociaux.
    M. le président. Pour répondre au Gouvernement, monsieur Terrasse, monsieur Le Garrec ?
    M. Jean Le Garrec. M. Terrasse.
    M. le président. Laissons la place aux jeunes !
    M. Jean Le Garrec. Après M. Bocquet, vous vous y mettez à votre tour ! Je vais finir par demander la parole pour un fait personnel. (Sourires.)
    M. Pascal Terrasse. M. Le Garrec aura encore l'occasion de s'exprimer durant la fin de l'après-midi, voire durant la soirée...
    M. le président. ... et encore durant plusieurs années, j'espère.
    M. Pascal Terrasse. Bien sûr, monsieur le président.
    M. Jacques Desallangre. Avec la sagesse de son expérience.
    M. Pascal Terrasse. Il a l'expérience, en effet. C'est d'ailleurs pourquoi je m'appuie sur ses larges épaules. (Sourires.)
    M. le président et M. Jean Le Garrec. Appuyez-vous. (Sourires.)
    M. Pascal Terrasse. M. le ministre vient d'ouvrir une fenêtre sur les perspectives en matière de gouvernance des organismes sociaux. Il annonce un débat sur un point sur lequel nous ne pouvons qu'être d'accord : la démocratie sociale. Nous y participerons évidemment.
    Pour autant, le débat préalable à la gouvernance et à la démocratie sociale doit également conduire le Gouvernement à se poser la question de la représentativité des organismes qui auront en charge la gestion de notre protection sociale, ...
    M. Jean Le Garrec. Tout à fait.
    M. Pascal Terrasse. ... puisqu'il semble vouloir leur donner plus de pouvoir. Or je ne suis pas certain que le ministre ait répondu sur ce point précis. Cela fait plus de vingt ans qu'il n'y a pas eu d'élections au sein de la sécurité sociale. Le Gouvernement envisage-t-il des élections et peut-il d'ores et déjà nous donner, sinon un calendrier, néanmoins quelques pistes sur le sujet ?
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 4893 à 4899.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. Je suis saisi de sept amendements indentiques n°s 4949 à 4955.
    L'amendement n° 4949 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 4950 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 4951 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 4952 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 4953 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 4954 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 4955 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer le I de l'article 14. »
    La parole est à M. Jacques Brunhes.
    M. Jacques Brunhes. Monsieur le ministre, j'ai entendu votre propos. C'est une raison de plus pour défendre un amendement de suppression. Vous avez évoqué une réflexion à venir sur la gouvernance, de nouveaux textes demain. Supprimons donc l'article 14 et travaillons demain, en profondeur, sur la question de fond qui nous est posée : la démocratie au sein du conseil d'administration de la Caisse nationale vieillesse. Il n'a aujourd'hui aucune légitimité, car il est imposé par les ordonnances Juppé qui méprisent les règles démocratiques, vous le savez. Pourquoi donner un pouvoir nouveau à un conseil d'administration imposé dans de telles conditions ?
    Nous voulons supprimer cet article pour insister sur la nécessité de démocratiser la sécurité sociale.
    Je voudrais rappeler quelques points forts qu'a évoqués M. Bocquet : la nécessité de réunir toutes les conditions permettant aux salariés de se réapproprier la sécurité sociale, les formes à trouver pour insuffler plus de démocratie participative leur permettant de s'exprimer sur les grands choix, et les priorités à retenir en matière de protection sociale ; le retour à l'élection qui leur permettrait de choisir leurs représentants parmi des candidats proposés par les organisations syndicales ; l'attribution des droits et des moyens pour que les administrateurs puissent réellement assurer leur mandat ; la nécessité de revoir la composition des conseils d'administration, la place et la représentativité des organisations représentant les employeurs, les administrateurs salariés devant redevenir majoritaires.
    Le dernier débat sur la non-compensation des exonérations de cotisations accordées aux employeurs dans le cadre de la mise en place de la RTT montre par exemple à quel point il importe d'engager une vraie concertation pour une réforme du financement de la sécurité sociale. Il faudrait élargir l'assiette des cotisations à l'ensemble des éléments constituant la richesse créée par les salariés, et tout particulièrement aux profits financiers. Nos propositions ont été rejetées en bloc. Elles entraîneraient pourtant une dynamique positive pour l'emploi, la reconnaissance des qualifications et l'apport du Fonds de sécurité sociale. C'est pourquoi nous avons déposé ces amendements de suppression.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 4949 à 4955.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. M. Préel, M. de Courson et les membres du groupe Union pour la démocratie française et apparentés ont présenté un amendement, n° 5092, ainsi rédigé :
    « Compléter le dernier alinéa du I de l'article 14 par la phrase suivante :
    « La caisse définit chaque année la valeur d'achat et de liquidation du point ».
    La parole est à M. Jean-Luc Préel.
    M. Jean-Luc Préel. Le groupe UDF considère qu'il s'agit là d'un de ses amendements de principe. Il présente deux avantages. En premier lieu, il responsabilise les partenaires sociaux, qui prennent ainsi leur juste place. Nous souhaitons leur donner enfin un réel pouvoir dans leur domaine de compétence, au sein du conseil d'administration de la Caisse d'assurance vieillesse.
    En second lieu, il permet une réelle retraite à la carte. Les Français souhaitent, me semble-t-il, une plus grande liberté de choix en la matière. Pour cela, un système par points nous paraît la meilleure solution, car il donne une souplesse certaine, permet une bonification des points pour les métiers pénibles, pour les mères de famille, pour les accidentés de la vie. Ce système existe déjà dans les retraites complémentaires AGIRC et ARRCO et vous-mêmes, monsieur le ministre et monsieur le rapporteur, soutenez, dans ce projet de loi, la création d'une retraite complémentaire par points pour les fonctionnaires.
    J'ai cru comprendre, depuis le début de la discussion de ce projet de loi, que vous étiez peut-être favorables à terme à ce projet de retraite par points, mais que vous trouviez que l'UDF anticipait quelque peu. Je vous remercie, monsieur le ministre, de nous le répéter une nouvelle fois, car je suis assez satisfait de savoir que l'UDF est plutôt en avance pour mettre en place un système de retraite plus souple.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. La commission n'a pas accepté cet amendement puisqu'elle a fait sienne l'approche du Gouvernement qui, pour la réforme des régimes obligatoires par répartition, a choisi de s'en tenir à un système contributif fondé sur des annuités.
    Nous avons eu l'occasion de le dire à nos collègues du groupe UDF quand ils étaient dans l'hémicycle, le système par points est différent. Il ne garantit pas les accidents de carrière et leur compensation, ni même la valeur et le pouvoir d'achat des retraites en raison du caractère fluctuant du point. En outre, cette logique aurait pu être porteuse d'inquiétude pour tous les Français.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Je ne vais pas reprendre la démonstration que j'ai faite devant M. Préel et dont le rapporteur vient de rappeler plusieurs arguments. Le régime par points ne correspond pas au consensus national qui s'est dessiné autour de la répartition et d'un système solidaire.
    Quoi qu'il en soit, cet amendement aurait déjà dû tomber. L'Assemblée nationale n'ayant pas adopté le passage au régime par points, je ne vois pas bien comment la CNAV pourrait fixer la valeur du point de retraite.
    M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Préel.
    M. Jean-Luc Préel. Certains de nos amendements sont tombés, vous le savez bien, monsieur le ministre, en application de l'article 40, y compris des amendements qui proposaient la remise de rapports, ce que nous avons trouvé un peu particulier - mais peu importe.
    M. Daniel Paul. Mais non, c'est important !
    M. Jean-Luc Préel. Mais je voudrais surtout répondre au rapporteur sur le fond. Le système par points existe, je le rappelle, pour les régimes complémentaires, et personne ne le remet en question aujourd'hui. Il est même tellement intéressant que vous proposez de l'instituer pour le régime de retraite complémentaire des fonctionnaires, ce qui tendrait à prouver que vous le trouvez satisfaisant. Par ailleurs, vous expliquez qu'un système par points ne permet pas de maintenir le niveau de la pension. Je ne suis pas d'accord avec vous. Votre raisonnement revient à déresponsabiliser les partenaires sociaux qui sont chargés de définir la valeur du point. Si, comme je le crois, ils sont attachés à un haut niveau de pension, ils feront le nécessaire pour que la valeur du point reste élevée, ce que nous souhaitons tous.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 5092.
    (L'amendement n'est pas adopté.)
    M. le président. Je suis saisi de sept amendements identiques n°s 4900 à 4906.
    L'amendement n° 4900 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 4901 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 4902 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 4903 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 4904 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 4905 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 4906 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer le II de l'article 14. »
    La parole est à M. Jean-Claude Lefort.
    M. Jean-Claude Lefort. Défendus.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Même avis.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 4900 à 4906.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. Je suis saisi de sept amendements identiques n°s 4907 à 4913.
    L'amendement n° 4907 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 4908 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 4909 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 4910 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 4911 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 4912 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 4913 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Compléter le dernier alinéa de l'article 14 par les mots : "et transmis au Parlement qui organisera un débat. »
    La parole est à M. Jacques Desallangre.
    M. Jacques Desallangre. Pour éclairer votre lanterne et nous permettre d'appréhender l'ensemble de la question, je rappellerai que le patronat mène une véritable croisade contre notre système de protection sociale. C'est bien dans un contexte de déstabilisation de la sécurité sociale que s'inscrit la décision du MEDEF d'en finir avec le paritarisme institutionnel.
    M. François Goulard. Cela sonne drôlement dans votre bouche !
    M. Jacques Desallangre. Le motif invoqué - l'immixtion de l'Etat dans la gestion des organismes - ne saurait faire illusion, même si le fait est réel. Il y a bien longtemps que, dans ce domaine, les principaux leviers échappent aux conseils d'administration, et plus généralement aux partenaires sociaux, notamment depuis les réformes de 1994 et 1996, dont il faut rappeler qu'elles reçurent le soutien sans réserve du patronat.
    En réalité, le MEDEF entend précipiter et achever le processus d'étatisation, et ouvrir ainsi l'espace de la couverture des risques, notamment maladie et vieillesse, à la privatisation. Son appel à une « nouvelle constitution sociale » ne peut se comprendre que dans le cadre d'une reconfiguration de la protection sociale où, à côté d'une sécurité sociale étatisée, désertée par les partenaires sociaux, ces derniers pourraient négocier au niveau des branches professionnelles, voire des entreprises, les modalités de couvertures de type assurantiel.
    Dans un tel contexte, il importe de rétablir et de consolider dans les faits la place et le rôle prépondérants de la sécurité sociale et de ses régimes obligatoires dans l'ensemble de la protection sociale. Cela implique l'exigence d'une prise en charge au plus haut niveau de l'ensemble des risques et éventualités garantis par chacune des trois branches de la sécurité sociale et son extension à de nouveaux besoins fortement émergents, telle la dépendance. La démocratisation de la sécurité sociale, qui constitue l'alternative au projet patronal, ne peut, en effet, être envisagée indépendamment du contenu de la solidarité qu'elle met en oeuvre, des droits qu'elle confère et de la pérennité de ses engagements. C'est pourquoi il faut redonner toute sa légitimité à la sécurité sociale. Nous proposons donc que les avis et propositions du conseil d'administration de la CNAV donnent lieu à un débat au Parlement.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Dans un précédent amendement, nos collègues du groupe communiste contestaient au conseil d'administration de la CNAV la qualité pour émettre des avis. Dans celui-ci, ils proposent, que ses avis soient transmis au Parlement. Comme ces avis doivent être rendus publics, cet amendement, rejeté par la commission, paraît inutile.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Même avis. J'ajoute que ces avis seront débattus à l'occasion de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 4907 à 4913.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. Je suis saisi de sept amendements identiques n°s 4914 à 4920.
    L'amendement n° 4914 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 4915 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 4916 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 4917 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 4918 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 4919 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 4920 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Compléter le dernier alinéa de l'article 14 par la phrase suivante :
    « Ces propositions et avis qu'elle émet sont transmis aux présidents de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan de l'Assemblée nationale, aux présidents de la commission des affaires sociales et de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation du Sénat, aux présidents des groupes parlementaires de l'Assemblée nationale et du Sénat. »
    La parole est à M. Daniel Paul.
    M. Daniel Paul. Nos amendements de suppression de l'article ont été repoussés...
    M. Alain Néri. Comme d'habitude !
    M. Daniel Paul. ... comme beaucoup depuis le début de la discussion. Mais, comme nous sommes constructifs, nous avons voulu compléter cet article par divers amendements visant à limiter les dégâts, si vous me passez l'expression.
    L'amendement n° 4919 dont je suis signataire propose que ces propositions et avis soient transmis aux présidents des diverses commissions de notre assemblée.
    Vous venez de dire, monsieur le ministre, que ces propositions et avis seraient rendus publics. Mais le respect de notre institution voudrait quand même qu'ils soient, auparavant, communiqués aux diverses commissions et à leurs commissaires, afin qu'ils puissent, à leur tour, se faire un avis dans la transparence la plus totale, compte tenu de l'importance qui s'attache à cette question.
    L'étude d'impact du projet de loi indique que cet article 14 inclut implicitement des missions telles que la formulation de propositions relatives au taux de cotisation permettant d'équilibrer financièrement les comptes de la branche vieillesse et de propositions relatives à la revalorisation des pensions de vieillesse en cohérence avec la procédure d'élaboration de la loi de financement de la sécurité sociale. Il s'agit donc bien, ici, de fixer des taux de cotisation. Souffrez quand même que les présidents des commissions ad hoc de notre assemblée puissent avoir communication de ces propositions et avis.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. La commission a rejeté cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Même avis.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 4914 à 4920.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. Je suis saisi de sept amendements identiques n°s 4942 à 4948.
    L'amendement n° 4942 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 4943 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 4944 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 4945 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 4946 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 4947 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 4948 par MM. Liberti, Golderg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Compléter le dernier alinéa de l'article 14 par la phrase suivante :
    « Ces propositions et avis qu'elle émet sont transmis aux présidents de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan de l'Assemblée nationale, aux présidents de la commission des affaires sociales et de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation du Sénat, aux commissaires des groupes parlementaires de l'Assemblée nationale et du Sénat désignés dans les commissions susmentionnées.
    La parole est à M. Jean-Claude Lefort.
    M. Jean-Claude Lefort. Pourquoi donner un pouvoir nouveau au conseil d'administration de la Caisse nationale vieillesse alors qu'il n'a aucune légitimité ? Il a été imposé, en effet, par les ordonnances Juppé au mépris des règles démocratiques alors en vigueur, c'est-à-dire l'élection des administrateurs.
    En outre, ce pouvoir nouveau donnant lieu à la formulation d'avis ou de propositions doit être, en bonne démocratie, transmis aux parlementaires.
    M. le président. Même avis de la commission et du Gouvernement.
    Même vote, n°s 4942 à 4948.
    (Ces amendements, ne sont pas adoptés.)
    M. le président. Je suis saisi de sept amendements identiques n°s 4935 à 4941.
    L'amendement n° 4935 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 4936 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 4937 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 4938 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 4939 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 4940 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 4941 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Compléter le dernier alinéa de l'article 14 par la phrase suivante :
    « Ces propositions et avis qu'elle émet sont transmis aux commissaires de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan de l'Assemblée nationale, aux commissaires de la commission des affaires sociales et de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation du Sénat. »
    La parole est à M. Jean-Claude Lefort.
    M. Jean-Claude Lefort. Défendus.
    M. le président. Même avis de la commission et du Gouvernement.
    Même vote.
    (Les amendements n°s 4935 à 4941 ne sont pas adoptés.)
    M. le président. Je suis saisi de sept amendements identiques n°s 4928 à 4934.
    L'amendement n° 4928 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 4929 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 4930 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 4931 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 4932 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 4933 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 4934 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Compléter le dernier alinéa de l'article 14 par la phrase suivante :
    « Ces propositions et avis qu'elle émet sont transmis aux présidents de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan de l'Assemblée nationale, aux présidents de la commission des affaires sociales et de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation du Sénat. »
    La parole est à M. Jacques Desallangre.
    M. Jacques Desallangre. Défendus.
    M. le président. Même avis de la commission et du Gouvernement.
    Même vote.
    (Les amendements n°s 4928 à 4934 ne sont pas adoptés.)
    M. le président. Je suis saisi de sept amendements identiques n°s 4921 à 4927.
    L'amendement n° 4921 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 4922 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 4923 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 4924 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 4925 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 4926 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 4927 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Compléter le dernier alinéa de l'article 14 par la phrase suivante :
    « Ces propositions et avis qu'elle émet sont transmis aux présidents des groupes parlementaires de l'Assemblée nationale et du Sénat. »
    La parole est à M. Jean-Claude Lefort.
    M. Jean-Claude Lefort. Défendus.
    M. le président. Même avis de la commission et du Gouvernement.
    Même vote.
    (Les amendements n°s 4921 à 4927 ne sont pas adoptés.)
    M. le président. Je mets aux voix l'article 14.
    (L'article 14 est adopté.)
    M. Pascal Terrasse. Ça va trop vite !

Article 15

    M. le président. « Art. 15. - I. - Au troisième alinéa de l'article L. 351-1 du code de la sécurité sociale, les mots : "une limite déterminée sont remplacés par les mots : "la limite prévue au deuxième alinéa.
    « II. - Les dispositions du I sont applicables aux pensions prenant effet après le 31 décembre 2007.
    « III. - Pour les pensions prenant effet après le 31 décembre 2003 et avant le 1er janvier 2008, la limite mentionnée au troisième alinéa de l'article L. 351-1 du code de la sécurité sociale est égale à :
    « 152 trimestres pour les assurés nés en 1944 ;
    « 154 trimestres pour les assurés nés en 1945 ;
    « 156 trimestres pour les assurés nés en 1946 ;
    « 158 trimestres pour les assurés nés en 1947 ;
    Sur cet article, plusieurs orateurs sont inscrits.
    La parole est à M. Pascal Terrasse.
    M. Pascal Terrasse. Nous en sommes à l'article 16 ?
    M. le président. A l'article 15, mon cher collègue.
    M. Pascal Terrasse. Nous venons de passer deux articles en moins de deux heures, alors que nous avions consacré deux semaines à l'examen des douze premiers. Je ne suis plus.
    M. François Goulard. Eh oui !
    M. Philippe Briand. Une ère nouvelle commence !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. On admire vos capacités de travail, monsieur Terrasse !
    M. Pascal Terrasse. S'agissant de l'article 16...
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. L'article 15 !
    M. le président. Si vous voulez, monsieur Terrasse, je peux directement passer à l'article 16 ! (Sourires.)
    M. Pascal Terrasse. Vous m'avez réveillé, monsieur le président. (Sourires.) L'article 16...
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. L'article 15 !
    M. François Goulard. Il est réveillé physiquement, mais pas intellectuellement !
    M. Pascal Terrasse. L'article 15 porte sur la proratisation des pensions.
    M. Jean Le Garrec. C'est bien ça.
    M. Pascal Terrasse. La réforme Balladur, il faut le rappeler, maintenait le coefficient de proratisation à cent cinquante trimestres. En le relevant à cent soixante trimestres, vous parachevez la réforme Balladur, sans penser aux effets particulièrement défavorables, notamment pour les salariés qui auront effectué des carrières incomplètes - je pense surtout aux femmes.
    Le Conseil d'orientation des retraites soulignait l'intérêt du maintien à cent cinquante trimestres : « la décision de maintenir la proratisation sur 150 trimestres (au lieu d'un allongement à 160 trimestres ou 40 ans) a eu pour objet et pour effet de ne pas pénaliser les femmes qui ont eu des carrières courtes au régime général et qui attendent 65 ans pour liquider leur pension à taux plein, mais ont encore à cet âge une durée de cotisation inférieure à 160 trimestres », écrivait-il.
    Pour mémoire, la proratisation en fonction de la durée d'assurance combine ses effets avec la façon dont est déterminé le taux de pension. La pension, en effet, est calculée en multipliant le salaire annuel moyen - jusqu'à présent, sur les vingt meilleures années, avant que cela ne passe aux vingt-cinq meilleures années - par le taux obtenu en fonction de la durée d'assurance. Le résultat est ensuite divisé par le coefficient de proratisation, calculé en divisant la durée d'assurance réelle par cent cinquante jusqu'à présent, par cent soixante avec la réforme du Gouvernement, ce qui, bien sûr, réduira mécaniquement le niveau des pensions. Ce coefficient n'est neutre - égal à un - que si la durée d'assurance est égale à la durée requise pour atteindre le taux plein. Mais j'imagine que vous connaissez la formule de calcul.
    Non seulement les femmes qui ne parviennent pas à poursuivre leur activité jusqu'à soixante-cinq ans ou qui même, à cet âge, ne peuvent valider cent soixante trimestres, seront toujours pénalisées, mais elles le seront beaucoup plus avec cet article. Il va dans le sens voulu par le Gouvernement : baisse du taux des pensions et appauvrissement du niveau des retraites.
    Après la baisse du taux de remplacement, dont vous avez vous-même reconnu la réalité, monsieur le ministre, au cours de nos débats, voici un nouveau dispositif, dont même Edouard Balladur n'avait pas voulu, lorsqu'il avait réformé les retraites en 1993...
    M. Louis Guédon. C'était un début !
    M. Pascal Terrasse. ... car il considérait qu'il aurait des conséquences lourdes pour les femmes. Vous allez donc plus loin que la réforme Balladur.
    (M. Marc-Philippe Daubresse remplace M. Jean-Louis Debré au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE
DE M. MARC-PHILIPPE DAUBRESSE,
vice-président

    M. le président. La parole est à M. Denis Jacquat.
    M. Denis Jacquat. Il faut toujours voir, dans un article, ce qui représente la plus grande avancée. L'article 15, sur la durée de référence, est extrêmement positif, car il supprime des inégalités entre les monopensionnés et les pluripensionnés.
    Aujourd'hui, ces derniers sont pénalisés par l'application des règles des meilleures années. C'est une situation que j'ai dénoncée chaque année sous la précédente législature en tant que rapporteur de l'assurance vieillesse. Rien n'avait été fait. Une fois de plus, aujourd'hui, le Gouvernement inscrit dans un texte ce qu'il a promis.
    M. Daniel Paul. Hélas !
    M. Denis Jacquat. Cette mesure concerne avant tout les commerçants et les artisans qui ont souvent exercé auparavant une activité salariée. Pour eux, l'amélioration de la pension pourrait se traduire par une hausse de 10 à 20 %.
    M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. L'article 57, monsieur le président ! Il y a déjà eu deux orateurs !
    M. Daniel Paul. Cet article 15 se vêt d'une apparence purement technique. Il traite du mode de calcul de la pension de l'ensemble des régimes - général, agricole et alignés - et plus particulièrement de la durée d'assurance. Celle-ci détermine à la fois le taux de liquidation de la pension à appliquer au salaire de référence et le montant de la pension à la charge de chaque régime. Dans ce dernier cas, la durée d'assurance est établie en fonction d'une durée de référence prédéfinie.
    Or, aujourd'hui, la durée de référence est toujours fixée à 150 trimestres. Cette durée évaluée en trimestres fait écho à la règle de départ en retraite à taux plein après trente-sept années et demie de cotisation.
    Faire passer cette durée de référence de 150 trimestres à 160 trimestres pour le calcul de la durée d'assurance ne fait que prolonger la logique de régression sociale initiée en 1993 par M. Balladur. Loin de répondre à un impératif d'équité, l'article 15 annonce une baisse nouvelle des revenus des retraités.
    Pourtant, les études réalisées par le Conseil d'orientation des retraites et par l'ensemble des organisations syndicales et patronales évaluent très clairement les sacrifices imposés par la réforme Balladur et la vôtre, monsieur le ministre, d'ici à 2020. Elles sont un démenti cinglant à votre affirmation selon laquelle le niveau des pensions serait maintenu.
    Mais ce ne sont pas les seuls mensonges que vous avez proférés... (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Gabriel Biancheri. Mensonges ? Quel vilain mot !
    M. Daniel Paul. ... pour tenter de mieux faire passer dans l'opinion votre projet de réforme des retraites.
    Le Gouvernement répète qu'il sauvera le régime par répartition grâce à « un effort équitablement partagé ». Moyennant une durée de cotisation allongée, les actifs, futurs retraités, seraient assurés du maintien du niveau des pensions. Et de la sorte, la « justice » serait au rendez-vous.
    Une étude portant sur des cas individuels types, dont L'Humanité a publié les résultats dans son édition du 6 mai, a déjà montré qu'en vérité les salariés du privé et les agents de la fonction publique devaient s'attendre à une forte dégradation du niveau de leur pension d'ici à 2020. Vos services, monsieur le ministre, se sont d'ailleurs bien gardés de la contester.
    D'autres travaux encore, réalisés cette fois par le centre confédéral d'études économiques et sociales de la CGT, révèlent l'ampleur des sacrifices qu'imposera votre projet à l'ensemble des assurés sociaux lorsqu'il sera appliqué - et j'utilise ce futur simple à dessein, puisque vous refusez la contradiction.
    Additionnées aux mesures de 1993 de votre prédécesseur, les dispositions envisagées aujourd'hui permettront en effet de réaliser plus de 60 milliards d'euros d'« économies » sur le seul dos des retraités d'ici à 2020. Autrement dit, ces 60 milliards représentent le montant de la baisse programmée du niveau des pensions par rapport à ce qu'il aurait dû être sans ces mesures. C'est un « prélèvement » sur le monde du travail qui n'a sans doute guère de précédent.
    Voilà comment le « casse » de ce début du siècle (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) - si vous me permettez l'expression - sera commis. Voilà comment un article d'apparence purement technique peut cacher une sombre violence faite aux salariés !
    M. le président. La parole est à M. Jacques Desallangre.
    M. Jacques Desallangre. Monsieur le ministre, il y a deux sortes d'ironie : l'ironie plaisante et moqueuse, qui peut égayer un lieu des plus solennels comme le nôtre, même au moment de débats très déterminants pour l'avenir de la nation ; et puis l'ironie cynique, à laquelle, malheureusement, vous semblez avoir cédé avec l'article 15.
    Monsieur le ministre, vous prétendez, au nom de l'égalité entre les monopensionnés et les polypensionnés, porter à 160 trimestres la durée de référence pour le calcul du montant de la pension à charge de chaque régime. Toutefois, vous savez pertinemment qu'en allongeant cette durée, vous aggravez la réduction du niveau des pensions pour l'ensemble des salariés du secteur privé. Plutôt que de revenir sur ces 160 trimestres et l'allongement de la durée de cotisation, vous préférez recourir à une prétendue égalité, qui est en fait l'égalité dans la régression sociale.
    Permettez-moi alors d'insister sur des points que vous semblez toujours négliger lorsque vous parlez des retraites.
    Pour notre part, nous avons estimé ce qu'il en aurait coûté, à partir de l'année 1993 et jusqu'à l'horizon 2020, de maintenir les droits à la retraite tels qu'ils étaient garantis avant 1993, donc sans procéder à la réforme Balladur ni, a fortiori, à la vôtre. Les trois principaux régimes - celui du privé, celui de la fonction publique d'Etat et celui regroupant les agents des collectivités territoriales et les hospitaliers, la CNRACL - auraient dû débourser 90 milliards d'euros supplémentaires pour répondre au surcoût dû, en grande partie, à l'effet démographique de l'accroissement annoncé du nombre des retraités.
    Dès 1993, la droite a cherché les moyens d'« encaisser » cette addition, en répartissant l'effort entre les différents postes envisageables. Le décret Balladur a porté la durée de cotisation pour le secteur privé de 150 trimestres en 1993 à 160 trimestres en 2003 ; vous, vous appliquez la même punition pour le secteur public en allongeant progressivement la durée de cotisation entre 2003 et 2008 pour la porter finalement à 160 trimestres. Toutefois, à la différence de votre prédécesseur, vous prévoyez un nouveau saut à 168 trimestres, soit quarante-deux ans, pour tout le monde d'ici à 2020.
    Une telle mesure peut se traduire par un allongement de la durée d'activité effective, mais aussi par une perte de montant de la pension pour les salariés qui ne pourront ou ne voudront pas adapter leur comportement d'actif en conséquence.
    En nous appuyant sur différentes études portant sur le sujet et en posant l'hypothèse selon laquelle le passage aux quarante puis aux quarante-deux annuités se traduira, pour moitié, par un allongement de la durée réelle d'activité et, pour l'autre moitié, par l'acceptation d'une perte de pension, nous évaluons l'économie réalisée - si l'on peut dire -, grâce aux pertes de pensions, à 12,4 milliards d'euros pour les trois régimes. Où vont passer ces économies ?
    Second type d'actions prévu dans vos réformes : les mesures visant directement à faire baisser le niveau des retraites.
    Il s'agit d'abord de l'allongement de la période de référence pour le calcul de la pension, qui ne correspond plus aux dix, mais aux vingt-cinq meilleures années de salaire. Ce paramètre est redoutable, car il accroît considérablement - sur une carrière de quarante ans et, a fortiori, sur des carrières plus courtes, qui sont le lot d'un nombre croissant de salariés, de femmes en particulier - le risque de voir prises en compte de mauvaises années.
    Il s'agit ensuite de l'indexation de ces salaires de référence sur les prix, et non plus sur les salaires réels. Cette formule est beaucoup moins avantageuse, car les prix évoluent nettement moins vite que les salaires.
    A ces deux dispositions en vigueur depuis 1993, il faut ajouter la création d'une décote pour annuité manquante dans la fonction publique, qui touchera plus d'un agent sur deux. A l'inverse, il faut prendre en considération l'atténuation de la décote pour le privé, prévue dans votre réforme, qui apportera, elle, un avantage - c'est bien le seul - aux salariés concernés.
    Au total, ce deuxième volet de mesures représente 28,3 milliards d'euros d'économies pour les régimes ou plutôt, répétons-le, de prélèvements nets sur les pensions. A quoi, il faut ajouter l'impact de la désindexation des pensions servies qui, depuis 1993, ne sont plus revalorisées en fonction des salaires, mais en fonction des prix, mesure qui occasionne une perte de 20,2 milliards d'euros.
    Récapitulons : à une première ponction de 12,4 milliards due à l'allongement de la durée de cotisation, s'en ajoutent deux autres, respectivement de 28,3 milliards et 20,2 milliards, entraînée par les mesures directes de baisse des pensions. Au total, d'ici à 2020, les retraités actuels et futurs se verront donc voler la bagatelle de 60,9 milliards d'euros, soit une baisse du niveau moyen de leurs pensions de 21 %. Ils vont ainsi supporter les deux tiers de l'effort de financement supplémentaire - 90 milliards d'euros - induit par la donne démographique.
    Pour le reste, l'équilibre serait atteint - mais pour une partie seulement - grâce au produit de l'allongement réel de la durée d'activité, qui accroîtra les rentrées dans les caisses des régimes, et d'un temps plus court de service des pensions, qui diminuera les dépenses : cela devrait permettre de rapporter, selon estimation, 12,6 milliards d'euros. Mais quid des 16,5 milliards d'euros manquants pour boucler le financement ?
    Quoi que vous en disiez, monsieur le ministre, c'est bien un appauvrissement relatif des retraités qui est à l'ordre du jour, après des décennies d'amélioration de leur niveau de vie. Même s'il est difficile de l'estimer, cette évolution aura de toute évidence un impact négatif sur le développement économique.
    M. le président. Il faut conclure, monsieur Desallangre.
    M. Jacques Desallangre. Je termine, monsieur le président.
    Si ces 60,9 milliards d'euros avaient été laissés aux retraités, ils n'auraient pas pris le chemin de la Bourse ou des paradis fiscaux,...
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Oh !
    M. Jacques Desallangre. ... mais ils seraient venus soutenir la consommation, moteur principal de la croissance.
    M. le président. Nous en venons à seize amendements de suppression de l'article.
    M. Alain Néri. Monsieur le président, j'avais demandé la parole !
    M. le président. Monsieur Néri, la discussion sur l'article est close.
    M. Alain Néri. Mais j'étais inscrit !
    M. le président. Monsieur Néri, je n'ai fait qu'appliquer l'article 57, alinéa 1 du règlement. Vous pourrez toutefois vous exprimer dans le cadre de l'examen des amendements de suppression.
    Sur l'article 15, je suis saisi de seize amendements de suppression n°s 2991 à 2999, 3151, 4956 à 4962.
    Les amendements n°s 2991 à 2999 sont présentés par Mmes Adam, Bousquet, Carrillon-Couvreur, Clergeau, Génisson, Launay, Lignières-Cassou, Mignon et M. Roman ; l'amendement n° 3151 par Mme Billard, M. Yves Cochet et M. Mamère ; l'amendement n° 4956 par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 4957 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 4958 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 4959 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 4960 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 4961 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 4962 par MM. Liberti, Golderg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer l'article 15. »
    La parole est à M. Pascal Terrasse, pour soutenir l'amendement n° 2991.
    M. Pascal Terrasse. Loin de correspondre à une avancée sociale, l'article 15 représente au contraire un véritable recul social pour celles et pour ceux dont les carrières sont incomplètes, notamment pour de nombreuses femmes, en raison de situations particulières - familiales, par exemple - ou d'aléas divers.
    Pour celles et ceux qui ne compteront malheureusement pas leurs 160 trimestres de cotisation, le montant de la pension sera fortement diminué, puisque le calcul ne se fera pas sur la base traditionnelle, laquelle avait pourtant été maintenue par M. Edouard Balladur.
    Le ministre nous a d'ailleurs communiqué à ce propos un document fort intéressant, selon lequel cette mesure devrait rapporter 2,4 milliards d'euros à l'horizon 2020. Cette somme n'est pas négligeable et elle sera « gagnée », notamment sur le dos des femmes ; on ne peut que le regretter. Le système de proratisation en cent-soixantièmes sera dramatique pour ces dernières.
    Ce dispositif va se mettre en place d'une manière progressive, pour atteindre son plein effet au 1er janvier 2008. Mais d'ores et déjà, à compter du 1er janvier 2004, un trimestre supplémentaire sera nécessaire. On ne peut que regretter cette orientation
    C'est pourquoi le groupe socialiste demande la suppression pure et simple de l'article 15.
    M. le président. L'amendement n° 3151 n'est pas défendu.
    La parole est à M. Daniel Paul, pour soutenir l'amendement n° 4956.
    M. Daniel Paul. Cet amendement vise à supprimer l'article 15, dans la mesure où il tend à rendre effectif l'allongement de la durée de cotisation et le mode de calcul de la pension à partir d'une durée de cotisation de 160 trimestres.
    En effet, avec cette disposition, nous allons faire vivre aux retraités un scénario semblable à celui du début des années 60, au temps où la vieillesse était largement synonyme de pauvreté. Car tel est bien le fond de l'affaire : en face de mesures de destruction sociale, aucun effort n'est demandé au capital. Le poids de l'ajustement pèse tout entier - Jacques Desallangre vient de la démontrer - sur les retraités et futurs retraités. Rien, aucun geste n'est demandé aux entreprises, ni aux revenus financiers. La logique tout entière de la réforme est contenue dans la règle selon laquelle les salariés du passé, actuels ou à venir se répartissent entre eux le coût des évolutions démographiques : qu'ils se débrouillent, pourvu que cela ne porte pas atteinte au profit !
    Ainsi, il est clair que la réforme proposée, loin de sauver la répartition, comme le prétend hypocritement le texte, en prépare en réalité la destruction !
    La réduction des pensions et les menaces pesant sur leur montant vont inciter ceux qui en ont les moyens à se tourner vers la capitalisation, les diverses propositions du privé réduisant peu à peu la répartition à la portion congrue, celle d'une simple allocation de base pour la grande masse de la population, à l'image de ce qui a déjà cours dans les pays anglo-saxons.
    Pour illustrer mon propos, je vais citer le cas de cette gérante de magasin et de son mari, que j'ai déjà évoqué vendredi dernier, mais vous n'étiez pas là, monsieur le ministre, quand j'en ai parlé.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Si j'étais là !
    M. Daniel Paul. A eux deux, ils touchent chaque mois l'équivalent de 10 000 francs.
    M. Bernard Accoyer. rapporteur. En euros !
    M. Daniel Paul. ... le mari gagnant seulement un peu plus de 3 400 francs pour, selon sa fiche de paie, 169 heures de travail !
    M. Bernard Accoyer. rapporteur. Cela fait combien d'euros ?
    M. Daniel Paul. Comment ce couple pourra-t-il faire appel à d'autres sources de financement pour sa retraite, compte tenu des faibles revenus dont il dispose actuellement ?
    Nous sommes face à un scénario catastrophe. Mais, heureusement, la mobilisation des acteurs sociaux, des salariés et des retraités a montré que nos concitoyens refusent massivement cette entreprise de démolition que vous menez, monsieur le ministre, avec l'ensemble de vos collègues du Gouvernement.
    M. Louis Guédon. Où avez-vous vu cela ?
    M. Daniel Paul. C'est à une telle mobilisation responsable et citoyenne que nous voulons répondre.
    Voilà pourquoi je vous invite, mes chers collègues, à voter en faveur de cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements en discussion ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. La commission a rejeté les amendements de suppression, considérant que l'article 15 supprime une inégalité existant entre les assurés selon qu'ils ont cotisé à un ou à plusieurs régimes, ce qui constitue, contrairement à ce qui a été avancé, un progrès.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Le scénario catastrophe, c'est celui qui résultait de votre inaction, c'est-à-dire de l'absence de réforme des retraites. (Applaudissments sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Et puisque, monsieur Paul, vous avez parlé de mensonge, vous m'autorisez, d'une certaine manière, à parler d'hypocrisie. En effet, ainsi que l'a indiqué M. Terrasse, nous sommes en train d'achever la mise en oeuvre de la réforme de 1993, qui a produit ses effets pendant dix ans ; or vous n'avez jamais réellement trouvé à y redire. Je sais que le groupe communiste va me rétorquer qu'il a demandé à plusieurs reprises l'annulation des décrets de 1993, ...
    M. Daniel Paul. C'est exact !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... mais il m'a semblé que quand le groupe communiste se battait vraiment pour obtenir quelque chose, comme cela a été le cas avec la loi de modernisation sociale, ...
    M. Daniel Mach. Ils criaient tous !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... il finissait par obtenir des résultats. J'en conclus qu'il ne s'est pas battu suffisamment fort pour obtenir l'abrogation des décrets de 1993, que le gouvernement de Lionel Jospin a fort heureusement appliqués et fort sagement maintenus.
    M. Jean-Claude Lefort. Hélas !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Nous avons d'autant moins d'inquiétudes sur le pouvoir d'achat des retraités, monsieur Paul, que nous avons confié, comme c'est écrit dans le texte, au Conseil d'orientation des retraites - auquel vous participerez -, une mission de surveillance, d'expertise, d'analyse sur l'évolution de ce pouvoir d'achat, ce qui permettra de vérifier chaque année que tous les discours catastrophiques que nous avons entendus depuis plusieurs jours n'étaient pas fondés.
    L'article 15 s'imposait pour tirer toutes les conséquences de la réforme de 1993. En effet, il existe aujourd'hui deux durées de cotisation : la durée d'assurance nécessaire pour bénéficier du taux plein, qui a été portée progressivement entre 1993 et 2003 de 150 à 160 trimestres, et la durée de cotisation dans le régime retenu pour le calcul de la pension qui, elle, est plafonnée à 150 trimestres. Cela signifie qu'une personne ayant travaillé 37,5 annuités et liquidé sa pension à soixante-cinq ans, donc en bénéficiant du taux plein touche une pension égale à celle d'une personne ayant travaillé pendant quarante ans ou plus. Il y a là une entorse au régime contributif. La mesure que nous proposons permet donc de simplifier le mécanisme de calcul de la pension.
    M. Pascal Terrasse. Il permet surtout de réaliser des économies !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Désormais, il n'y aura plus qu'une seule durée de cotisation, ce qui, monsieur Terrasse, rendra notre système davantage contributif.
    M. Pascal Terrasse. Voilà !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. C'est la raison pour laquelle je demande le rejet de ces amendements de suppression.
    M. le président. La parole est à M. Alain Néri.
    M. Alain Néri. On a parlé tout à l'heure d'ironie, mais à côté de l'ironie amusante, il y a l'ironie grinçante, et là nous sommes en plein dedans ! En effet, il est très clair que l'objectif de l'article 15 est de diminuer le montant des pensions, c'est mathématique ! Vous pouvez nous faire la démonstration que vous voulez, mais moi, je vais vous en faire une autre. A moins qu'on ait changé les mathématiques.
    M. Louis Guédon. Il faut d'abord les comprendre !
    M. Alain Néri. Toutefois, s'il y a eu changement, il faudra que M. Ferry vienne nous expliquer avec sa verve habituelle la nouvelle façon de faire les opérations simples que l'on enseigne à l'école élémentaire, en particulier la division !
    Votre proposition, monsieur le ministre, s'inscrit parfaitement dans le droit fil des décrets Balladur. Puisque ce sont les vingt-cinq meilleures années qui sont prises en compte, le calcul du montant de la pension est facile à faire : aujourd'hui, celle-ci est obtenue en multipliant le salaire moyen annuel, en fonction des vingt-cinq meilleures années à terme, par le taux obtenu en fonction de la durée d'assurance, le tout étant divisé par le coefficient de proratisation, calculé en divisant la durée d'assurance réelle par 150.
    M. Maxime Gremetz. Voilà !
    M. Alain Néri. Or avec l'article 15, nous ne divisons plus par 150, mais par 160. Aussi, expliquez-moi comment en divisant le même nombre par 160, et non plus par 150, on peut arriver à un résultat supérieur ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Je n'ai jamais dit cela !
    M. Alain Néri. Si tel est le cas, cela rélève de la magie pure et simple. A moins que ce ne soit un sujet du même type que celui de mathématiques qu'ont dû traiter ces jours-ci des candidats au bac, car c'est totalement incompréhensible. Si vous arrivez à me démontrer qu'en divisant le même nombre par 160, on obtient un résultat supérieur à celui qu'on obtiendrait en le divisant par 150, je demande que M. Ferry vienne immédiatement dans l'hémicycle pour nous donner une explication. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à Mme Paulette Guinchard-Kunstler.
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Pour répondre au Gouvernement.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Monsieur le président, il ne peut y avoir qu'une réponse au Gouvernement.
    M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Là, ça en fera deux.
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Monsieur le ministre, vous ne pouvez pas jouer sur deux tableaux à la fois. Vous ne pouvez pas d'un côté affirmer que la réforme des retraites est l'aboutissement d'un long travail auquel le gouvernement de Lionel Jospin a participé en créant le Conseil d'orientation des retraites qui a permis un diagnostic partagé, d'établir ...
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Je n'ai pas dit cela.
    Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Et puis, de l'autre, nous accuser de n'avoir rien fait.
    Je voudrais, à propos de cet article, souligner deux points importants.
    J'ai été frappée par ce qui vient d'être mis en place dans le parlement espagnol : toutes les fois qu'une loi met à mal l'égalité entre les hommes et les femmes, le gouvernement espagnol a obligation de faire des propositions pour éviter que l'écart ne se creuse, ou pour aller plus loin dans la voie de l'égalité professionnelle.
    On peut à cet égard citer le rapport de Mme Greff, au nom de la délégation aux droits des femmes : « En 2000, on estime que les femmes, en moyenne, valident 121 trimestres et que les nouvelles retraitées valident un peu plus de 130 trimestres, alors que pour les hommes la durée valide est de 166 trimestres en moyenne. » Même si je reconnais une amélioration sur certains points, notamment grâce au système de validation d'un certain nombre d'annuités pour les femmes qui travaillent à temps partiel, je considère que cet article touche particulièrement les femmes. Il faudra encore un moment pour parvenir à l'égalité professionnelle, c'est évident.
    Nous sommes très vigilants sur ce point et nous voulons que d'autres propositions soient faites : c'est le sens de notre demande de suppression de l'article.
    Non seulement les inégalités entre les hommes et les femmes en matière de retraite vont être aggravées, mais la suppression d'avantages familiaux fait craindre une double peine pour les femmes : elles vont mettre plus de temps pour atteindre le nombre requis de trimestres validés, et elles se voient supprimer certains avantages familiaux ; en tout cas le dispositif en vigueur sera tellement durci qu'elles n'en profiteront pas, et pourtant ce sont elles qui continueront, majoritairement, à élever les enfants.
    J'ai déjà eu l'occasion de souligner la dangerosité de ce projet, s'agissant de la pénibilité. Je ferai le même commentaire à propos du traitement fait aux femmes, notamment dans cet article. Il faut que nous fassions très attention à ce que l'écart entre les femmes et les hommes, au même titre que l'écart entre les gens les plus pauvres et les gens les plus aisés, ne se creuse pas.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 2991 à 2999 et n°s 4956 à 4962.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. Je suis saisi de sept amendements identiques n°s 4963 à 4969.
    L'amendement n° 4963 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 4964 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 4965 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 4966 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 4967 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 4968 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 4969 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer le I de l'article 15. »
    Ces amendements ont déjà été soutenus.
    M. Maxime Gremetz. Oui, et c'est sur ces amendements que nous demandons un scrutin public.
    M. le président. Sur les amendements identiques n°s 4363 à 4969, je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Même avis.
    M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 4963 à 4969.
    Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   135
Nombre de suffrages exprimés   135
Majorité absolue   68
Pour l'adoption   33
Contre   102

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.
    La parole est à M. Pascal Terrasse.
    M. Pascal Terrasse. Monsieur le président, je demande une suspension de séance de cinq minutes, afin de réunir mon groupe.
    M. Maxime Gremetz. Oh, ils retardent le débat ! (Rires sur divers bancs.)

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à dix-huit heures trente, est reprise à dix-huit heures trente-cinq.)
    M. le président. La séance est reprise.
    Je suis saisi de sept amendements identiques, n°s 4970 à 4976.
    L'amendement n° 4970 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 4971 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 4972 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 4973 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 4974 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 4975 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 4976 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer le II de l'article 15. »
    La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Pour défendre l'amendement de suppression du II de l'article 15 du projet de loi, rien ne me semble plus approprié que de commencer par citer le rapport n° 898 de notre brillant collègue Bernard Accoyer, fait au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, saisie au fond. Voici ce que l'on peut lire à la page 144 : « Le II du présent article prévoit l'entrée en vigueur des dispositions du I après le 31 décembre 2007. En effet, la loi de 1993 dite "Balladur, qui porte la durée d'assurance de 150 à 160 trimestres, atteindra son plein effet au 1er janvier 2008, son application étant progressive. »
    M. Accoyer a au moins un mérite, celui de s'exprimer avec clarté. Qu'il en soit remercié.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. C'est à moi de vous remercier.
    M. Maxime Gremetz. En fait, au-delà de la volonté de supprimer l'inégalité entre assurés unipensionnés et pluripensionnés, volonté à laquelle on ne peut qu'adhérer, il y a quelque chose de beaucoup plus fondamental. Il s'agit, ni plus ni moins, à travers cet article, que d'aggraver les conséquences des réformes dites Balladur de l'été 93.
    M. le ministre pourra toujours me dire que le gouvernement précédent n'y a pas touché. Certes, mais si on nous avait écoutés, ces dispositions auraient été abrogées.
    M. Pierre Hellier. C'est vrai, on ne vous écoute jamais !
    M. Maxime Gremetz. Vous ne pouvez pas dire le contraire. Nous l'avons réclamé chaque année. Seulement vous savez ce qui arrive quand on n'a pas la majorité.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Il faut écouter le Gouvernement.
    M. Maxime Gremetz. Si vous nous écoutiez, ce très mauvais projet serait tout de suite retiré. Mais comme vous avez la majorité, vous pouvez le faire passer en force. Eh bien, nous étions dans la même situation auparavant et nous nous sommes battus tout autant !
    Notons maintenant le sens de l'euphémisme du rapporteur, qui évoque sur un ton particulièrement doucereux la loi dite Balladur, en louant son application comme étant progressive.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. C'est vrai ! Elle est progressive !
    M. Maxime Gremetz. Or, cette loi est la plus funeste de la dernière décennie. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Pourquoi avez-vous seulement abrogé la loi Thomas ?
    M. Maxime Gremetz. Vous avez cassé l'équité qui existait entre le privé et le public pour mieux justifier le nivellement par le bas que vous opérez en imposant à tous une augmentation des annuités : quarante et un, puis quarante et un trois quarts, etc.
    Tout ce dont la réforme Balladur était porteuse nourrit aujourd'hui le discours des thuriféraires de la réforme Raffarin-Fillon.
    Il s'agit, en premier lieu, de la thématique de l'inéquité privé-public. Mais vous omettez de prendre en compte l'histoire qui met clairement en évidence la réalité d'un rattrapage progressif du public par le privé. Où en serait-on aujourd'hui si nos prédécesseurs sur ces bancs, au lieu de faire en sorte d'aligner les régimes du privé sur les régimes présentant le plus de sécurité, à savoir ceux de la fonction publique, avaient fait l'inverse ?
    Il s'agit, en deuxième lieu de la thématique de l'indexation des pensions sur l'évolution des prix à la consommation. Mais hors tabac, évidemment, car il faut pouvoir l'augmenter de 30 %, de 40 % voire de 100 %. Et pour financer quoi ? Les exonérations de cotisations patronales, bien sûr, et non pas la lutte contre le tabagisme. Les hérauts de la réforme ne cessent de présenter cette mesure comme la seule susceptible de garantir le pouvoir d'achat des retraités. Pour reprendre un slogan utilisé par l'UMP, je dirai : « Faux ! Archi-faux ! »
    M. le président. Il faut conclure.
    M. Maxime Gremetz. Oui, mais nous dialoguons, monsieur le président ! (Sourires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Michel Voisin. Mais non, vous monologuez !
    M. le président. Mais le dialogue peut se faire de manière synthétique.
    M. Maxime Gremetz. Mieux vaut faire preuve de pédagogie comme l'a demandé M. Raffarin lui-même.
    M. Pierre Hellier. Et pas de démagogie !
    M. Maxime Gremetz. J'écoute le Premier ministre quand il donne de bons conseils.
    M. Denis Jacquat. Et vous avez raison !
    M. Maxime Gremetz. Chaque année, les retraités voient leur pouvoir d'achat amputé de 1 % par rapport à celui des actifs occupés, tout le monde le sait. Et depuis quelques années que ça dure, la perte atteint 10 %.
    Il s'agit, en dernier lieu, de la thématique de l'inégalité entre pluripensionnés et monopensionnés. Deux questions se posent à ce sujet : premièrement, où cette inégalité prend-elle sa source ? Le rapporteur comme le ministre se montrent peu loquaces à ce sujet ; deuxièmement, la seule solution pour la supprimer consiste-t-elle à harmoniser la durée de cotisation à 160 trimestres ? Pas d'alternative, dites-vous, on connaît la chanson ! Nous, députés du groupe communiste et républicain n'avons eu de cesse de répéter que nous avons un véritable projet alternatif. Et nous allons continuer à le prouver avec les 4 985 amendements qu'il nous reste à défendre.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Monsieur le président, la commission a rejeté l'amendement parce que le II de l'article 15 prévoit précisément une application en 2007 des principales dispositions. De surcroît, le présent projet de loi n'a pas pour objet de revenir sur la réforme de 1993 grâce à laquelle le régime général est à l'équilibre aujourd'hui, et pour quelques années encore.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Avis défavorable, monsieur le président.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 4970 à 4976.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. Je suis saisi de sept amendements identiques n°s 4977 à 4983.
    L'amendement n° 4977 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 4978 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 4979 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 4980 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 4981 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 4982 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 4983 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Supprimer le III de l'article 15. »
    La parole est M. Jacques Desallangre.
    M. Jacques Desallangre. Cet amendement de suppression du paragraphe III de l'article 15 se justifie par le refus constant des députés du groupe communiste et républicain de l'allongement de la durée de l'assurance nécessaire pour obtenir une pension à taux plein, allongement déjà imposé, hélas ! aux salariés du secteur privé au beau milieu du mois de juillet 1993.
    Le paragraphe III de l'article 15 prévoit que la durée de référence est progressivement relevée pour les pensions prenant effet après le 31 décembre 2003, et avant le 1er janvier 2008, à raison de deux trimestres par an : 152 trimestres en 2004, 154 en 2005 et ainsi de suite pour atteindre 160 trimestres au titre des pensions prenant effet après le 31 décembre 2007.
    Il s'agit là sans aucun doute d'une manière de se conformer à un impératif d'égalité de traitement, mal pris en compte, il est vrai, pendant de trop longues années entre unipensionnés et pluripensionnés. Cependant, il est très facile, et même trop facile, à M. le ministre des affaires sociales d'enfiler le costume du justicier dans cette affaire. Pour rétablir une situation d'égalité, il y a toujours deux choix possibles qui peuvent être déclinés avec de nombreuses nuances : aligner tout le monde, soit sur la condition de celui qui paraît se trouver dans la situation la plus avantageuse, soit sur la condition de celui qui, objectivement et comparativement, se trouve à un moment donné dans la situation la plus défavorable. C'est la seconde solution que vous avez choisie.
    Or l'égalité à tout prix est un leurre. Certes, l'égalité entre unipensionnés et pluripensionnés est un objectif consensuel auquel l'ensemble des groupes parlementaires adhèrent sans aucun doute possible. Mais cela ne signifie pas pour autant que tous les moyens sont bons pour l'atteindre. Il ne faut pas être plus machiavélique que Machiavel. L'inégalité dont on nous parle ne résulte que d'une autre inégalité, celle qui a été instituée par la seule application des réformes Balladur de 1993. Au lieu de se conformer à un principe d'égalité trop longtemps bafoué, ce texte ne fait que parachever la mauvaise besogne engagée il y a dix ans. L'article 15 ne présente donc aucune des avancées dont semble se faire l'écho l'exposé des motifs du projet de loi. C'est une inégalité pour corriger une inégalité dont les effets nocifs demeurent.
    En général, moins par moins égale plus. Là, moins par moins donne toujours moins.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Mais vous êtes nuls en mathématiques !
    M. Jacques Desallangre. C'est de l'algèbre un peu bizarre, mais c'est la vérité ici.
    Une chose est sûre, cela aura pour seule et unique conséquence d'accélerer la dégradation du niveau des pensions. La proratisation du mode de calcul de la pension sur 160 trimestres au lieu de 150 sera défavorable pour les retraités, notamment pour les polypensionnés. C'est une certitude qui sera de plus en plus difficile à infirmer à mesure que les effets de la loi dite Balladur se feront pleinement sentir.
    Sous le bénéfice de ces observations et parce qu'on ne corrige pas une injustice en en ajoutant une seconde, nous vous invitons, chers collègues, à adopter cet amendement.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Rejet.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Avis défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix...
    M. Maxime Gremetz. Non, monsieur le président, je veux répondre au Gouvernement.
    M. le président. Vous avez demandé la parole trop tard, monsieur Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Ne vous amusez pas à cela, monsieur le président !
    M. le président. J'ai lancé le vote.
    M. Maxime Gremetz. Faites comme vous voulez, mais je vous préviens que cela aura un coût ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Gremetz, pour répondre au Gouvernement.
    M. Maxime Gremetz. Ce n'est pas parce que le ministre refuse le débat en se taisant qu'on n'a pas le droit de lui répondre !
    M. le président. Allez-y, vous avez la parole.
    M. Maxime Gremetz. Si ça continue, nous demanderons des scrutins publics. Ils seront contents comme cela, nous ne parlerons pas.
    M. Claude Goasguen. C'est vrai qu'on ne vous entend jamais !
    M. Maxime Gremetz. Ce n'est pas possible !
    M. Jean-Pierre Gorges. C'est votre attitude qui n'est pas possible !
    M. Claude Goasguen. Terroriste !
    M. Maxime Gremetz. Qu'est-ce qu'il a dit ?
    Plusieurs député-e-s du groupe communiste et républicain. « Terroriste » !
    M. Claude Goasguen. C'est du terrorisme verbal !
    M. Maxime Gremetz. Vous entendez, monsieur le président, on vient de me traiter de terroriste !
    M. Claude Goasguen. J'ai parlé de « terrorisme verbal » !
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, je vous demande d'interpeller le collègue qui m'a traité de terroriste pour lui demander des excuses publiques.
    M. Pascal Terrasse. C'est scandaleux !
    M. Maxime Gremetz. Il ne faut pas rire avec cela.
    M. le président. Monsieur Gremetz, comme vous le savez, si vous voulez la parole pour un fait personnel, vous ne pouvez la demander qu'en fin de séance. Je ne fais qu'appliquer le règlement.
    M. Maxime Gremetz. Mais je ne demande rien, seulement je viens d'être traité publiquement de terroriste.
    M. Claude Goasguen. Verbal !
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 4977 à 4983.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le président !
    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, nous demandons une suspension de séance pour fait grave et personnel.
    M. le président. Je vous rappelle que, pour les faits personnels, c'est à la fin de la séance qu'il faut intervenir.
    M. Maxime Gremetz. Notre groupe demande une suspension de séance pour examiner les suites que nous allons donner à ce qui s'est passé ici.
    M. le président. Je vais donc suspendre la séance pour deux minutes.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à dix-huit heures cinquante, est reprise à dix-huit heures cinquante-trois.)
    M. le président. M. Accoyer, rapporteur, a présenté un amendement, n° 1145 rectifié, ainsi rédigé :
    « I. - Dans le premier alinéa du III de l'article 15, supprimer les mots : " et avant le 1er janvier 2008 .
    « II. - En conséquence, après le premier alinéa du III de cet article, insérer l'alinéa suivant :
    « 150 trimestres pour les assurés nés avant 1944. »
    La parole est à M. le rapporteur.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Les mesures relatives à la durée d'assurance prise en compte pour la retraite doivent être mises en oeuvre par génération, afin d'assurer une totale équité et d'éviter d'inciter les assurés à anticiper leur départ, ce qui serait contraire à l'objectif de la loi.
    Le présent amendement clarifie la portée de l'article 15 sur ce point.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Favorable.
    M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1145 rectifié.
    (L'amendement est adopté.)
    M. le président. Les amendements identiques n°s 4984 à 4990 de Mme Buffet et des membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ne sont pas soutenus.

Rappel au règlement

    M. Alain Bocquet. Je demande la parole pour un rappel au règlement.
    M. le président. La parole est à M. Alain Bocquet, pour un rappel au règlement.
    M. Alain Bocquet. Monsieur le président, il y a des choses inacceptables.
    On a traité mon collègue M. Maxime Gremetz de terroriste.
    Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Non !
    M. Alain Bocquet. Si ! Je suis attentivement le débat.
    M. Arnaud Lepercq. C'est de « terrorisme » qu'il a été question.
    M. Alain Bocquet. Je le regrette car tout se passait bien depuis l'ouverture de la séance : les débats suivaient un rythme de croisière, deux articles avaient été adoptés et un troisième était en discussion.
    Comme vous l'avez remarqué, nous avons fait preuve de bonne volonté en ne demandant des scrutins publics que sur les articles, ce qui me paraît normal. Il serait souhaitable que chacun essaye de garder son calme pour poursuivre la discussion.
    M. Gilbert Meyer. Là-dessus, tout le monde est d'accord !
    M. Alain Bocquet. En réunion de groupe, ce matin nous avons décidé de tenir compte de ce qui a été dit en conférence des présidents. Il ne faut pas mettre de grains de sable dans ce débat très intéressant.
    J'espère avoir été entendu par nos collègues de la majorité. Je sais qu'ils n'ont pas le droit à la parole, mais, pour autant, ils ne doivent pas insulter mes collègues.
    M. le président. Les propos de M. le président Bocquet reflètent bien la tonalité de la conférence des présidents de ce matin. Il faut effectivement que nous puissions discuter sereinement du projet de loi.

Reprise de la discussion

    M. le président. Je suis saisi de sept amendements identiques n°s 4991 à 4997.
    L'amendement n° 4991 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 4992 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 4993 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 4994 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 4995 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 4996 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 4997 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Au III de l'article 15, supprimer les mots : "154 trimestres pour les assurés nés en 1945. »
    La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Ces amendements tombent !
    M. le président. Non, ils ne portent pas sur la même année que l'amendement n° 1145 rectifié, monsieur le rapporteur.
    Vous avez la parole, monsieur Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Allons, monsieur le rapporteur, vous voulez tout faire tomber, mais vous n'y arriverez pas, même en nous insultant !
    Vous m'avez donc fait remarquer, monsieur le président, que pour les faits personnels - je ne connais pas bien le règlement, car je suis un jeune parlementaire -, il faut intervenir en fin de séance.
    M. le président. C'est cela.
    M. Maxime Gremetz. Il faudra m'y faire penser. (Rires.)
    On ne peut laisser passer certaines choses, mais je vous admire, chers collègues de la majorité ! (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Rester aussi placides avec un sparadrap sur la bouche,...
    Mme Martine David. Sauf certains !
    M. Maxime Gremetz. ... c'est remarquable ! Dans ces conditions, je peux comprendre que, parfois, vous soyez tentés de parler. Mais choisissez un peu vos termes, ne franchissez pas la ligne rouge.
    Les amendements n°s 4991 à 4997 visent donc à supprimer du projet une disposition tendant à allonger la durée de cotisation des salariés nés juste après-guerre, qui doivent liquider leur pension dans les mois ou années à venir. C'est la deuxième question essentielle, avec celle des annuités de cotisation. Car tout au long de votre projet, deux éléments reviennent : l'allongement de la durée des cotisations et la baisse du niveau des pensions. C'est la caractéristique même de votre réforme.
    Pour ceux qui ont des difficultés toujours plus grandes à liquider leur retraite, cela se solde par des désavantages tout à fait certains. Ceux qui en doutent encore devraient se plonger dans la saine lecture du numéro des Echos d'hier.
    M. Bernard Roman. Excellente lecture !
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur Gremetz vous vous étonnez que le Gouvernement ne vous réponde pas.
    M. Maxime Gremetz. Je ne m'étonne de rien !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. C'est le résultat de la tactique que vous avez adoptée, qui consiste à poser plusieurs fois la même question à travers des amendements démontant petit à petit un article. Le Gouvernement vous a répondu au début de ce débat. J'ai été souvent présent ici, notamment ces dernieères années, mais je n'ai pas le souvenir que, dans le passé, les membres du Gouvernement s'attachaient à répondre avec autant de précision aux questions qui leur étaient posées. Je ne veux pas que M. Gremetz en veuille au Gouvernement de ne pas répéter à chaque occasion une réponse qu'il a formulée au début du débat.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements identiques n°s 4991 à 4997.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. Je suis saisi de sept amendements identiques n°s 4998 à 5004.
    L'amendement n° 4998 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 4999 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 5000 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 5001 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 5002 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 5003 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 5004 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Au III de l'article 15, supprimer les mots : "156 trimestres pour les assurés nés en 1946. »
    La parole est à M. Jacques Desallangre.
    M. Jacques Desallangre. Le Gouvernement a toujours la même inspiration. Nous, nous avons toujours le même souci : celui de ne pas allonger la durée de cotisation pour partir dans de moins bonnes conditions ! Monsieur le ministre, je comprends que cela vous irrite,...
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Cela ne m'irrite pas !
    M. Jacques Desallangre. ... mais il nous faut bien rappeler que nous contestons l'essence même de votre projet. Nous sommes fondés à apporter des arguments supplémentaires, ce qui devrait vous conduire à nous répondre.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix, par un seul vote, les amendements n°s 4998 à 5004.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. le président. Je suis saisi de sept amendements identiques n°s 5005 à 5011.
    L'amendement n° 5005 est présenté par Mme Buffet, M. Sandrier et M. Lefort ; l'amendement n° 5006 par MM. Bocquet, Biessy, Desallangre et Braouezec ; l'amendement n° 5007 par MM. Dutoit, Asensi et Gerin ; l'amendement n° 5008 par Mme Fraysse, M. Chassaigne et M. Brunhes ; l'amendement n° 5009 par Mme Jacquaint, M. Vaxès et M. Hage ; l'amendement n° 5010 par M. Gremetz, M. Daniel Paul et Mme Jambu ; l'amendement n° 5011 par MM. Liberti, Goldberg et Brard.
    Ces amendements sont ainsi rédigés :
    « Au III de l'article 15, supprimer les mots : "158 trimestres pour les assurés sociaux nés en 1947. »
    Ces amendements sont-ils défendus, monsieur Gremetz ?
    M. Maxime Gremetz. Non, rien n'est défendu, tout est à défendre !
    M. Jean-Luc Préel. Et vous demandez un scrutin public bien sûr !
    M. Maxime Gremetz. Monsieur Préel, mais prenez donc la parole ! Tout à l'heure vous aviez un malheureux amendement, et vous l'avez retiré !
    M. le président. Monsieur Gremetz, je vous ai donné la parole, prenez-la !
    M. Maxime Gremetz. J'ai bien le droit d'en faire ce que je veux ! (Rires sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste). Ce n'est pas parce que vous me donnez la parole que vous allez me dicter ma conduite !
    M. le président. Je vous ai donné la parole pour défendre un amendement, pas pour interpeller un de vos collègues !
    M. Maxime Gremetz. M. Préel m'interpelle, j'ai la politesse de lui répondre !
    M. Jacques Desallangre. La parole est libre !
    M. Jean-Luc Préel. J'ai simplement constaté que vous alliez demander un scrutin public !
    M. le président. Défendez votre amendement !
    M. Maxime Gremetz. Demandez à M. Préel de ne pas intervenir !
    M. Jacques Desallangre. Si la parole de M. Préel est libre, la nôtre l'est aussi !
    M. Maxime Gremetz. Enfin M. Préel se libère ! La prochaine fois, je sens qu'il va déposer un amendement et qu'il va parler longuement.
    Monsieur le ministre, vous avez de la suite dans les idées, mais nous en avons autant que vous, sinon plus ! Vous, vous avez une cohérence ; elle n'est pas bonne pour les salariés, mais elle est bonne pour le MEDEF. Nous, nous avons une cohérence bonne pour les salariés, mais pas bonne pour le MEDEF. C'est projet contre projet, choix contre choix ! Vous, vous avez une cohérence minoritaire, puisque vous défendez les intérêts d'une minorité. Nous, nous avons une cohérence majoritaire, puisque nous défendons les intérêts de l'immense majorité (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire),...
    M. Arnaud Lepercq. Qui vous en est reconnaissante !
    M. Maxime Gremetz. ... comme l'indique une étude d'opinion du journal La Croix. Vos propositions ne visent qu'à préserver les intérêts de quelques-uns, en particulier ceux des patrons français qui gagnent plus que n'importe qui. Je vous parlerai tout à l'heure de M. Messier - il est très bon ! - et des trente-neuf premiers grands patrons qui gagnent 554 fois le SMIC, ce qui n'est pas mal non plus !
    Au moins, certains députés UMP ont un peu de morale. Je pense à ceux qui veulent taxer les patrons parce qu'ils ont beaucoup de fric, et à deux autres députés qui veulent faire une étude sérieuse, car les patrons français gagnent trop alors qu'ils gèrent mal leurs entreprises. Notre cohérence est donc tout à fait lisible. Elle est bien orientée vers la défense de la majorité de nos concitoyens. C'est une cohérence juste et équitable pour l'ensemble de la population française. C'est pourquoi nous défendons ardemment ces amendements.
    M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Défavorable.
    M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Défavorable.
    M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 5005 à 5011.
    (Ces amendements ne sont pas adoptés.)
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, je demande la parole pour une explication de vote sur l'article.
    M. le président. Vous avez la parole, monsieur Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Je veux rappeler cette cohérence que nous n'avons cessé de défendre, Vous ne voulez rien entendre ! Vous ne voulez rien savoir ! Vous n'êtes pas libres. Il n'y a qu'à vous regarder : vous êtes libres d'être assis et de vous taire ! C'est une certaine conception de la liberté.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Monsieur le président, ce n'est pas une explication de vote !
    M. Maxime Gremetz. M. Préel et les députés de l'UDF en général, je vous croyais pourtant un peu plus libres !
    M. Jean Dionis du Séjour. Les commmunistes et la liberté, c'est quand même une grande histoire ! (Protestations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
    M. Maxime Gremetz. Cher collègue, je suis le successeur d'un député communiste qui a été guillotiné en septembre 1941 pour avoir défendu la liberté et la démocratie. Il s'agit de Jean Catelas. Il a son nom ici. Voyez, sa plaque est ici !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Monsieur le président, ce n'est pas une explication de vote ! Cela n'a rien à voir avec le débat !
    M. le président. Monsieur Gremetz, vous avez la parole pour une explication de vote sur l'article 15 !
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, ce n'est pas à moi qu'il faut vous en prendre !
    M. le président. Vous seul avez la parole, monsieur Gremetz ! Expliquez-vous sur l'article 15 et ne vous écartez pas du sujet !
    M. Maxime Gremetz. Non seulement l'article 15 est très mauvais, mais il en précède un autre qui est encore plus mauvais. C'est pourquoi, monsieur le président, nous demandons un scrutin public.
    M. le président. Sur l'article 15 je suis saisi par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
    La parole est à M. Pascal Terrasse, pour une explication de vote.
    M. Pascal Terrasse. Sans vouloir allonger les débats, je souhaite rappeler que le groupe socialiste votera également contre l'article 15. Nous considérons en effet que cet article aura une incidence très forte sur le montant des pensions des retraités, en particulier celles des femmes. Comme vous le savez, le montant des retraites est actuellement calculé sur la base de 150 trimestres. Or le projet de loi prévoit de porter cette durée de cotisation à 160 trimestres, ce qui aura pour conséquence d'affaiblir les pensions à très court terme, puisque ce dispositif sera en place dès 2008. Vous allez donc appauvrir les retraités de demain, notamment les femmes qui, je le répète, seront les premières à subir les conséquences de cet allongement de la durée d'assurance. Je rappelle que l'incidence financière de ce dispositif s'élève à 2,4 milliards d'euros, pris essentiellement sur les femmes.
    M. le président. Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
    Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
    Je mets aux voix l'article 15, modifié par l'amendement n° 1145 rectifié.
    Le scrutin est ouvert.
    M. le président. Le scrutin est clos.
    Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants   175
Nombre de suffrages exprimés   175
Majorité absolue   88
Pour l'adoption   126
Contre   49

    L'Assemblée nationale a adopté. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. Alain Néri. Il y a du progrès !

Article 16

    M. le président. « Art. 16. - I. - A la section 1 du chapitre Ier du titre V du livre III du code de la sécurité sociale, est inséré l'article L. 351-1-1 rédigé comme suit :
    « Art. L. 351-1-1. - L'âge prévu au premier alinéa de l'article L. 351-1 est abaissé, pour les assurés qui ont commencé leur activité avant un âge et dans des conditions déterminées par décret et ont accompli une durée totale d'assurance et de périodes reconnues équivalentes dans le régime général et, le cas échéant, dans un ou plusieurs autres régimes obligatoires, au moins égale à une limite définie par décret, tout ou partie de cette durée totale ayant donné lieu au versement de cotisations à la charge de l'assuré. Un décret précise les modalités d'application du présent article. »
    « II. - A la section 2 du chapitre IV du titre III du livre VI du code de la sécurité sociale, il est inséré avant l'article L. 634-4 un article L. 634-3-2 rédigé comme suit :
    « Art. L. 634-3-2. - L'âge prévu au premier alinéa de l'article L. 351-1 est abaissé, pour les assurés qui ont commencé leur activité avant un âge et dans des conditions déterminées par décret et ont accompli une durée totale d'assurance dans les régimes d'assurance vieillesse des travailleurs non salariés des professions artisanales, industrielles et commerciales et, le cas échéant, dans un ou plusieurs autres régimes obligatoires et de périodes reconnues équivalentes au moins égales à un seuil défini par décret, tout ou partie de cette durée totale ayant donné lieu au versement de cotisations à la charge de l'assuré. Un décret précise les modalités d'application du présent article. »
    Sur cet article, plusieurs orateurs sont inscrits, auxquels je demande de respecter l'article 57, alinéa 1, du règlement.
    La parole est à M. Pascal Terrasse.
    M. Pascal Terrasse. Monsieur le ministre, je tiens à annoncer d'ores et déjà que sur l'article 16, qui est un article important de votre projet de loi puisque les carrières longues sont l'un des points sur lesquels les discussions ont permis une forme d'avancée, le groupe socialiste s'abstiendra. Il ne votera pas pour cet article, car il suscite des inquiétudes dont je vais vous faire part. Cela dit, nous ne pouvons pas voter contre, monsieur le ministre, car ce serait faire fi de celles et ceux qui vont bénéficier du dispositif. Reste des motifs d'inquiétude, que je vais énumérer ici.
    Je voudrais d'abord rappeler, monsieur le ministre, que vous n'avez cessé, tout au long de nos débats, de prétendre que l'allongement de la durée de cotisation n'aurait pas d'incidence sur l'emploi, alors que nous n'avons cessé de dire l'inverse. D'ailleurs, vous le reconnaissez vous-même avec cet article. En effet, l'étude d'impact de l'emploi de la mesure qui accompagne l'article 16 précise que les personnes qui pourront partir à la retraite de manière anticipée libéreront des postes de travail, ce qui créera de l'emploi. Vous êtes donc là en contradiction avec ce que vous avez dit tout au long de nos débats.
    Autre contradiction que nous avons relevée : vous reconnaissez vous-même que la plupart des salariés susceptibles de bénéficier de ce dispositif sont aujourd'hui inactifs - c'est dans la note d'impact que vous nous avez remise -, puisque vous considérez que ce dispositif profitera essentiellement à des préretraités ou à des personnes au chômage.
    Si le groupe socialiste est inquiet, c'est que cette mesure a été annoncée à grands renforts médiatiques dans le cadre des discussions que vous avez menées avec les organisations syndicales, éveillant ainsi une forte attente chez de nombreux salariés qui ont cotisé plus de quarante ans. Or tous ne bénéficieront pas de ce dispositif. Leur faire croire le contraire est très dangereux, car, à compter du 1er janvier 2004, beaucoup vont déchanter. En effet, on estime aujourd'hui à près de 800 000 le nombre de personnes qui peuvent prétendre à un départ à soixante ans compte tenu de leur durée de cotisation. Or le dispositif, au regard des financements que vous allez mobiliser, ne permettra pas en réalité de toucher plus de 150 000 personnes environ, tout simplement parce que les conditions pour en bénéficier, qui ne sont d'ailleurs pas connues de tous aujourd'hui, puisque vous en renvoyez la définition à un décret en Conseil d'Etat, s'appliquent uniquement à celles et ceux qui auront des durées d'assurance cotisées. Ce sont des personnes qui auront été en activité pendant plus de quarante-deux ans. Cela exclut toute une série de personnes. Je pense tout d'abord à celles qui ont eu des périodes dites « reconnues » ou « en équivalence », notamment les mères de trois enfants, qui bénéficient de bonifications à ce titre. Elles seront exclues du dispositif qui ne tient pas compte de ces périodes. Il en va de même pour toutes celles et ceux qui ont eu des majorations de durée d'assurance, ou dont la carrière professionnelle a été interrompue par des périodes de chômage. Toutes ces personnes n'entreront malheureusement pas dans le cadre du dispositif que vous allez mettre en place, ce qui réduira d'autant la portée de mesures qui auraient pu être, en effet, fort intéressantes.
    Autre élément sur lequel je voudrais insister : ce dispositif n'a de sens - et j'y reviendrai à l'occasion des amendements - que si les partenaires sociaux s'entendent sur le montant de la retraite complémentaire.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Les cinq minutes sont écoulées, monsieur le président !
    M. Pascal Terrasse. Si, malheureusement, la négociation aboutit à un blocage - on peut le penser, notamment en raison des comptes des régimes AGIRC -, cela aura une incidence profonde pour les salariés. En effet, si l'on ne s'appuie que sur une retraite de base, sans retraite complémentaire, une personne ayant cotisé quarante annuités risque de se retrouver avec une pension de retraite de l'ordre de 45 % à 50 % du SMIC, au maximum. Quel intérêt pour la personne ?
    Ce dispositif aurait pu être dynamique. Il aurait pu correspondre à celui que le président Bocquet nous avait présenté il y a un an et demi qu'il a représenté il y a six mois et sur lequel les positions du groupe socialiste étaient très claires - elles n'ont pas changé, ni sous votre gouvernement, il y a trois mois, ni sous le gouvernement précédent. Nous estimions - cela est d'ailleurs indiqué dans le compte rendu des commissions et Mme la ministre l'a dit elle-même à l'époque - que cette mesure avait sa place dans le cadre plus général de la réforme des retraites et qu'il était nécessaire que cette réforme intervienne rapidement.
    M. le président. Veuillez conclure, monsieur Terrasse !
    M. Pascal Terrasse. Malheureusement, le dispositif que vous proposez ne correspond pas à l'attente des salariés. Nous aurons l'occasion, tout au long de la discussion des amendements que nous avons déposés, de vous démontrer qu'en réalité c'est un « faux nez », que cela ne concernera que quelques personnes, et nous ne pouvons que le regretter.
    M. le président. La parole est à M. Denis Jacquat.
    M. Denis Jacquat. Cet article phare du projet de loi concerne les personnes ayant une très longue durée de carrière. A titre exceptionnel, l'UMP s'exprimera par la voix de Georges Colombier,...
    M. Maxime Gremetz. Ah !
    M. Denis Jacquat. ... qui a commencé très tôt sa carrière professionnelle comme salarié de l'industrie. (Applaudissements sur les bancs de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Georges Colombier.
    M. Georges Colombier. Je remercie notre porte-parole, Denis Jacquat, de me laisser son temps de parole.
    L'examen de l'article 16 du projet de loi me permet d'intervenir sur un sujet qui m'est cher et qui constitue l'une des plus importantes avancées introduites par cette réforme. Il s'agit, bien sûr, de la possibilité pour les personnes ayant commencé très tôt leur vie professionnelle, entre quatorze et seize ans, de partir à la retraite après quarante ans de cotisation en fonction de leur durée d'assurance totale et du nombre d'années ayant donné lieu à cotisation.
    Il faut souligner ce point, car il était attendu depuis longtemps par toute une frange de la population et par le mouvement social. Je suis intervenu pour plaider en ce sens le 11 mars dernier, lors de l'examen de la proposition de loi de M. Alain Bocquet visant à permettre aux salariés ayant commencé à travailler tôt de prendre leur retraite au bout de quarante annuités, quel que soit leur âge. Je ne peux aujourd'hui que me réjouir que l'article 16 prévoie partiellement cette possibilité. Bien entendu, j'aurais souhaité, comme chaque membre de notre assemblée, que cette mesure puisse s'appliquer à tous les salariés ayant cotisé quarante annuités, quel que soit l'âge auquel ils ont démarré leur activité.
    Toutefois, si cette mesure paraît séduisante, il faut se rendre compte qu'elle a un coût non négligeable qu'il semble difficile d'assumer au vu de la conjoncture économique actuelle. En effet, d'après les évaluations du Conseil d'orientation des retraites dont nous nous accordons tous à reconnaître le remarquable travail d'expertise et de prospective, si l'on ne s'en tenait qu'aux seuls salariés âgés de cinquante-huit et cinquante-neuf ans, cette mesure aurait un coût extrêmement important. On ne peut donc que saluer le pas décisif fait par le Gouvernement en faveur des salariés ayant commencé très jeunes. La mise en oeuvre de la réforme suppose cependant que les partenaires sociaux, gestionnaires des régimes complémentaires obligatoires, s'y engagent conjointement. A défaut, les abattements définitifs qui seraient applicables aux retraites complémentaires rendraient la mesure sans véritable portée. Une fois encore, on constate l'importance capitale du dialogue social. Je compte sur la bonne volonté des partenaires pour l'animer et pour faire avancer cette réforme.
    Le débat sur le départ avant soixante ans pour certaines catégories de salariés est indissociable de celui sur la pénibilité du travail. En effet, nous sommes tous conscients que, statistiquement, une entrée jeune dans la vie active est souvent synonyme de travail peu qualifié et pénible. Il sera nécessaire, en négociant par branches professionnelles, de définir des critères de pénibilité, en ne prenant pas en compte uniquement le caractère manuel de l'activité. Par ailleurs, dans un souci d'équité, il est absolument indispensable de mesurer la difficulté que peuvent renconter certaines branches professionnelles pour négocier efficacement, de part leur faible taux de syndicalisation, particulièrement dans le secteur privé.
    La pénibilité du travail doit également être prise en compte pour les agents de l'Etat ; elle l'est dans la fonction publique hospitalière où certaines catégories d'agents ont la possibilité de cesser leur activité de manière anticipée, mais ce n'est pas le cas par exemple pour les infirmières libérales qui exercent pourtant le même type d'activité. Les autres agents du service public exerçant des métiers pénibles devraient également pouvoir bénéficier des mesures prévues.
    Le départ anticipé à la retraite et la pénibilité du travail sont, pour l'ancien salarié de l'industrie que je suis, un sujet primordial. Compte tenu de l'écart important d'espérance de vie existant entre les salariés ayant commencé tôt dans des conditions difficiles et les cadres supérieurs ou les professions libérales, il était indispensable d'appliquer le principe d'équité face à une injustice qui touche à la santé et à la longévité des travailleurs.
    Cet article ainsi que plusieurs autres dispositions d'importance ont montré à quel point le Gouvernement a pris à bras le corps cette problématique des retraités les moins aisés. Ce texte est avant tout un texte social et il faudrait non pas s'arrêter uniquement sur l'effort demandé à certaines catégories de salariés, mais davantage observer toutes les avancées qu'il propose.
    Je remercie donc le Gouvernement d'avoir fait le premier pas dans cette direction...
    M. Maxime Gremetz. Un tout petit pas !
    M. Georges Colombier. ... en laissant, et c'est essentiel, la liberté à la personne concernée de continuer à travailler si elle le désire et en responsabilisant les partenaires sociaux en leur donnant la possibilité de négocier sur un sujet aussi important. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Préel.
    M. Jean-Luc Préel. Monsieur le ministre, l'article 16 permet aux assurés qui ont commencé leur carrière très jeunes de partir à la retraite avant soixante ans. Cet article corrige donc partiellement une inégalité majeure...
    M. Pascal Terrasse. Partiellement, en effet !
    M. Jean-Luc Préel. ... et fort mal comprise puisque ceux qui ont cotisé 160 trimestres et qui n'ont pas soixante ans ne peuvent aujourd'hui faire valoir leurs droits à la retraite et continuent à cotiser sans augmenter pour autant ces droits.
    De plus, et comme vient de le dire Georges Colombier, beaucoup parmi ceux-ci ont exercé des métiers pénibles. Monsieur le ministre, permettez-moi cette remarque gentille, une retraite par point aurait permis de résoudre ce problème.
    Par ailleurs, cet article permet un départ à la retraite pour les plus jeunes, tandis qu'un autre propose une surcote. Il s'agit, bien entendu, de deux avancées, mais nous regrettons que tous ceux qui ont cotisé 160 trimestres ne puissent partir à la retraite comme ils le souhaitent. Il est vrai que le coût d'une telle mesure serait effectivement très important.
    Monsieur le ministre, je voudrais ensuite attirer votre attention sur un point particulier, mais qui concerne de nombreux Français : le service national. Comme vous le savez, pour que le service national soit pris en compte dans la retraite, il fallait auparavant avoir travaillé avant de l'accomplir. Depuis le 1er janvier 2002, les périodes de service national sont validées à raison d'un trimestre par période de quatre-vingt-dix jours. Cependant, trimestre validé ne veut pas dire trimestre cotisé. Or le service national n'a pas donné lieu à cotisation, et l'article 16 prévoit que, pour être pris en compte, les trimestres doivent être cotisés et validés.
    Au nom de l'UDF, j'ai donc déposé un amendement tendant à prévoir que les cotisations seront prises en compte à la charge de l'assuré ou du fonds de solidarité vieillesse, qui, par définition, prenait en charge les trimestres non cotisés. Cet amendement, bien entendu, s'est vu opposé l'article 40 de la Constitution et n'a pas été retenu. Toutefois, monsieur le ministre, c'est là un problème que vous devriez prendre en considération. Je crois savoir que le Gouvernement a déposé un amendement en la matière qui ne va cependant pas aussi loin.
    M. Pascal Terrasse. Absolument !
    M. Jean-Luc Préel. Enfin, il me paraîtrait juste que les non-salariés des professions artisanales, industrielles, commerciales, agricoles ou libérales...
    M. Pascal Terrasse. Les fonctionnaires aussi !
    M. Jean-Luc Préel. ... ayant commencé tôt leur activité, entre quatorze et dix-huit ans, ne soient pas exclus du dispositif prévu à l'article 16.
    M. Pascal Terrasse. Les fonctionnaires vont l'être !
    M. Jean-Luc Préel. En particulier, les aides familiaux et les apprentis devraient, me semble-t-il, être concernés par cette avancée, et je pense que de très nombreux députés, notamment à l'UMP, sont d'accord avec moi.
    M. Patrick Lemasle. Ils n'osent pas le dire !
    M. Jean-Luc Préel. Aussi voteront-ils sans aucun doute en ce sens.
    M. Alain Néri. Je demande la parole pour un rappel au règlement.
    M. le président. La parole est à M. Alain Néri, pour un rappel au règlement.
    M. Alain Néri. Monsieur le président, vous venez de nous dire que nous appliquions l'article 57. C'est à ce titre que vous avez limité le nombre d'intervenants dans la discussion générale sur l'article 16, qui est pourtant très important. Or l'article 57 prévoit la clôture de la discussion lorsque deux orateurs d'avis contraire sont intervenus. Dans la mesure où un député UDF et un député UMP se sont prononcés pour, ce qui nous donne deux orateurs de même avis - excusez-moi d'en revenir aux mathématiques élémentaires -, cela signifie que nous ne sommes plus dans le cadre de l'article 57. Dès lors, la discussion sur l'article 16 peut se poursuivre et tous ceux qui sont inscrits peuvent prendre la parole.
    M. le président. Monsieur Néri, excusez-moi de vous le dire, vous avez mal lu le premier alinéa de l'article 57, dont je rappelle les termes : « En dehors des débats organisés conformément à l'article 49, et lorsque au moins deux orateurs d'avis contraire sont intervenus dans la discussion générale, dans la discussion d'un article - ce qui est notre cas - ou dans les explications de vote, la clôture immédiate de cette phase de la discussion peut être décidée par le président... »
    M. Augustin Bonrepaux. Peut être...!
    M. le président. Ainsi que je l'ai indiqué au début de l'examen de cet article, je clorai la discussion lorsque deux orateurs d'avis contraire se seront exprimés. M. Terrasse s'est exprimé. Je vais ensuite donner la parole (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains)...

    M. Pascal Terrasse. Ce n'était pas l'expression d'un avis contraire !
    M. le président. Vous ne m'avez pas laissé finir, monsieur Terrasse ! J'ai bien compris que votre groupe s'abstiendrait.
    M. Augustin Bonrepaux. Ce n'est pas un avis contraire !
    M. le président. Par ailleurs, deux députés, l'un de l'UMP et l'autre de l'UDF ont fait savoir qu'ils voteraient pour. Nous allons entendre à présent deux orateurs du groupe communiste. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    La parole est à M. Alain Bocquet, pour un rappel au règlement.
    M. Alain Bocquet. Monsieur le président, je vous demande, à titre exceptionnel, de ne pas appliquer l'article 57, d'une part, parce que personne n'est contre l'article 16, ce qui pose un problème, et d'autre part, parce que le sujet est très important. Je souhaiterais qu'on puisse ouvrir la discussion sur ce point qui a fait l'objet de deux propositions de loi dont nous avons débattu à deux reprises dans cet hémicycle. Je suppose que M. le ministre sera d'accord.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Il reste 5 500 amendements à examiner !
    M. Alain Bocquet. Il s'agit non pas d'en ajouter, mais de permettre à ceux qui veulent s'exprimer de le faire rapidement.
    M. le président. Afin que le débat se déroule sereinement, je propose de donner la parole à deux orateurs du groupe communiste, puis à un second député du groupe socialiste, M. Terrasse et les deux orateurs de la majorité s'étant d'ores et déjà exprimés. (Assentiment.)
    M. Jacques Barrot. Très bien !
    M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.
    M. Daniel Paul. Monsieur le ministre, nous n'avons pas eu la possibilité d'exposer et de débattre ici de nos propositions alternatives pour ouvrir le droit à la retraite à taux plein pour les salariés ayant cotisé 40 annuités avant d'atteindre l'âge de soixante ans. Il est dommage que, pour établir une justice sociale en faveur de ces hommes et de ces femmes, vous excluiez de fait les deux tiers d'entre eux en leur appliquant immédiatement une durée de cotisation de 42 annuités. Permettez-moi de vous rappeler la teneur de nos propositions et les ressources que nous souhaitions leur affecter.
    Vous le savez, il existe chez les salariés qui ont commencé à travailler très jeunes, dès l'âge de quatorze ou quinze ans, une exigence forte : cesser leur activité et profiter sans attendre d'une retraite plus que méritée. Ces hommes et ces femmes ont connu des conditions de travail pénibles, souvent les plus précaires pour accomplir les tâches les plus ingrates. Peu qualifiées, ces personnes ont, la plupart du temps, touché de petits salaires. Leur carrière s'est effectuée dans l'industrie ou, pour une moindre part, dans les services.
    Dans la métallurgie, la sidérurgie, le textile, l'habillement, l'automobile, l'agriculture et l'agroalimentaire, elles ont été parfois confrontées aux semaines de 48 heures au début des années 60. Les exemples de salariés qui ont dû assumer des horaires plus contraignants encore, subir les effets cumulés du travail posté, de mauvaises conditions de logement et de moyens de transport inadaptés, ne manquent pas. Nous avons d'ailleurs rencontré un grand nombre de ces hommes et de ces femmes à l'occasion de l'examen de ce texte. C'est donc une juste reconnaissance que nous souhaitons leur apporter par l'octroi d'un droit nouveau.
    C'est la raison pour laquelle nous avions élaboré une proposition de loi destinée à permettre aux salariés ayant atteint quarante annuités de cotisation, de bénéficier du droit à la retraite à taux plein sans pour autant attendre l'âge de soixante ans. Toutefois, cette disposition demeure, selon nous, dérogatoire à une ouverture du droit général à la retraite à soixante ans, sur la base d'un retour à 37,5 annuités de cotisations. Une telle mesure permettrait, contrairement à votre projet, l'embauche de centaines de milliers de personnes.
    Nous avons déposé cette proposition par deux fois, sous la précédente législature et en mars dernier.
    Par deux fois, elle a trouvé un écho favorable sur la grande majorité des bancs de notre assemblée, toutes sensibilités confondues. Malheureusement, tout comme nos amendements aujourd'hui, elle est heurtée au sombre article 40 de la Constitution.
    Elle s'inscrit pourtant dans la volonté de maintenir le droit à la retraite dès l'âge de soixante ans et de prendre en compte la pénibilité du travail, en particulier pour ceux qui ont travaillé très jeunes. C'est conforme aux engagements exprimés par M. le Premier ministre le 3 février dernier devant le Conseil économique et social.
    Nos propositions illustrent la volonté des député-e-s communistes et républicains de conjuguer progrès social, lutte contre le chômage et développement de la solidarité entre les générations. Elles s'inscrivent dans le cadre d'une politique de relance de la consommation populaire, nécessaire soutien de la croissance, ne serait-ce qu'en favorisant l'accès à l'emploi à de nouvelles catégories et de nouvelles générations de salariés.
    Après le premier alinéa de l'article L. 351-1 du code de la sécurité sociale, nous proposions d'insérer un alinéa ainsi rédigé :
    « Elle garantit également une pension de retraite à taux plein à l'assuré qui en demande la liquidation lorsqu'il justifie de la durée requise d'assurance ou de périodes équivalentes dans le régime général et un ou plusieurs autres régimes obligatoires, avant l'âge déterminé au précédent alinéa. »
    Pour financer ces mesures, nous avions fait les propositions suivantes :
    « L'ensemble des revenus financiers provenant des titres émis en France sont assujettis à une contribution sociale dont le taux est de 14,6 %.
    « Sont exonérés de cette contribution sociale les livrets d'épargne populaire, les livret A, livrets bleus, livrets et comptes d'épargne logement. Les plans épargne populaire courants, avant promulgation de la présente loi, en sont également exonérés pendant cinq ans. Les revenus des biens immobiliers autres que ceux utilisés pour l'usage personnel du propriétaire et de sa famille directe sont assujettis à la même cotisation que les revenus financiers. Les ressources des assurances maladie, maternité, invalidité, décès et vieillesse sont abondées par le produit de cette contribution. »
    Nous avions ainsi les moyens de financer cette demande forte de centaines de milliers de personnes. Monsieur le ministre, vous proposez aujourd'hui une mesure allant dans ce sens mais sous une forme très atténuée.
    Après les propos que je viens de tenir, vous l'aurez compris, nous ne voterons pas contre l'article 16. Vous comprendrez aussi cependant que nous ne voterons pas pour. Nous nous abstiendrons donc.
    M. le président. La parole est à M. Alain Néri.
    M. Alain Néri. En préambule, je tiens, monsieur le président à vous remercier pour votre compréhension et pour avoir bien voulu déroger à l'article 57 de notre règlement.
    L'article 16 de ce projet de loi aborde, en effet, une question très importante. Il s'agit tout simplement de reconnaître le droit à la retraite dès qu'on a cotisé quarante années et même si l'on n'a pas atteint soixante ans. Par deux fois, une proposition tendant à prévoir une telle mesure est venue en discussion à l'Assemblée nationale, et nous avons été confrontés à un problème difficile. Aujourd'hui, l'article 16 constitue effectivement une avancée, mais cache aussi une tromperie. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Comment pouvez-vous dire une chose pareille !
    M. Alain Néri. Telle n'était peut-être pas votre volonté mais c'est ainsi que l'opinion publique le comprendra.
    Mme Martine David. C'est sûr !
    M. Alain Néri. En effet, le texte prévoit que tous ceux qui auront quarante annuités de cotisation pourront partir même s'ils n'ont pas soixante ans.
    Mme Martine David. On est loin du compte !
    M. Alain Néri. Or, en regardant les choses d'un peu plus près, il apparaît qu'en réalité cette disposition ne permettra de partir à la retraite avant soixante ans que si l'on a cotisé pendant quarante-deux années au moins.
    M. Pascal Terrasse. En effet !
    M. Alain Néri. Un grand nombre de salariés attendent pourtant, fort légitimement, de pouvoir partir à la retraite avant soixante ans s'ils ont quarante annuités. Ce sont ceux qui ont accompli les travaux les plus pénibles, le travail posté ou accompli dans des conditions climatiques difficiles. En outre, ils ont souvent commencé à travailler très jeunes, donc sans formation initiale. De ce fait, ils ont été pénalisés une deuxième fois, car chacun sait bien que ceux qui sont privés de formation initiale bénéficient ensuite très peu de la formation continue. Ces hommes et ces femmes sont usés et, dans certains cas, ne peuvent pas travailler jusqu'à soixante ans. Ils ont donc acquis légitimement le droit à la retraite. Ils sont 800 000 dans ce cas.
    Or, aux termes de l'article 16, 100 000 seulement bénéficieront de ce droit. Ce n'est pas sérieux ! Monsieur le ministre, vous créez une grande illusion, et la déception sera à la hauteur de cette illusion. Mais on n'a pas le droit de décevoir ceux qui ont travaillé le plus dur. Ils subissaient déjà ce que j'oserais appeler une double peine : aujourd'hui, vous inventez la triple peine !
    De plus, nous sommes obligés de constater que vous ne garantissez pas le pouvoir d'achat de ceux qui partiront à la retraite avant quarante annuités, pas plus d'ailleurs que vous ne garantissez le minimum contributif à hauteur de 85 % du SMIC, puisque vous parlez d'un « objectif »... S'agissant de ceux qui ont quarante annuités de cotisations avant soixante ans, vous savez fort bien que, pour qu'ils touchent la retraite complète, ils devront percevoir la retraite complémentaire. Or, cette dernière ne peut être versée que s'il y a un accord des partenaires sociaux. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous garantir qu'avec votre projet les retraites complémentaires seront versées dès que les travailleurs ayant cotisé quarante annuités et ayant moins de soixante ans feront valoir leurs droits à la retraite ? Sinon cela signifie que vous allez laisser à ces salariés une retraite de moins de 3 000 francs par mois - excusez-moi de parler en francs, mais je crois que ce sera beaucoup mieux compris dans nos régions. Est-ce admissible ?
    Nous nous féliciterions de savoir que vous êtes sûr de cet accord. A notre connaissance, cependant, les partenaires sociaux n'ont pas engagé la négociation. On nous répète qu'elle se tiendra au début de l'année prochaine. Mais que se passera-t-il entre-temps ? Nous ne pouvons pas laisser tromper les salariés deux fois,...
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. C'est incroyable !
    M. Alain Néri. ... d'autant plus qu'on sait bien que c'est le MEDEF qui s'oppose au versement des retraites complémentaires.
    M. le président. Monsieur Néri, il faut conclure.
    M. Alain Néri. Je finis, monsieur le président, en donnant un exemple qui éclairera tout le monde.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Oh non !
    M. Alain Néri. Nous avions voté à l'unanimité dans cet hémicycle, lors d'un budget des anciens combattants, un amendement que j'avais proposé au nom du groupe socialiste et qui permettait aux anciens combattants d'Algérie de partir à la retraite avant soixante ans dès lors qu'ils étaient chômeurs et totalisaient quarante annuités de cotisation. Mais le MEDEF s'est opposé à cette mesure, tout comme il a fait capoter l'allocation de remplacement pour l'emploi... N'allez pas semer l'illusion, monsieur le ministre. Si vous n'avez pas de financement assuré pour la retraite complémentaire, n'allez pas faire croire aux salariés qu'ils pourront prétendre à une retraite à taux plein.
    Ma conclusion tient en deux points.
    Premièrement, notre déception de constater que votre proposition ne concernera que 100 000 salariés sur les 800 à 900 000 qui pourraient y prétendre.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Et pourquoi pas 50 000 ou 10 000, pendant que vous y êtes !
    M. Alain Néri. Deuxièmement, pouvez-vous nous garantir que les salariés ayant quarante annuités de cotisation et moins de soixante ans pourront percevoir leur retraite complémentaire sitôt qu'ils auront fait valoir leurs droits.
    M. le président. La parole est à M. Alain Bocquet.
    M. Alain Bocquet. Monsieur le président, vous comprendrez que je sois attaché à cette idée que j'avais défendue avec mes amis du groupe communiste...
    M. François Goulard. Vos camarades, plutôt !
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. En effet, ce serait plus adapté !
    M. le président. Laissez parler M. Bocquet sur le fond !
    M. Alain Bocquet. Surtout que je parle de choses sérieuses !
    Ainsi que vous le savez, j'ai été l'auteur d'une proposition de loi déposée en novembre 2001 et discutée dans le cadre de ce qu'il est convenu d'appeler les niches parlementaires. Tout le monde y avait donné un accord - verbal - mais le fameux article 40 a été brandi par le gouvernement de l'époque...
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Par Mme Guigou !
    M. Alain Bocquet. Bis repetita, j'ai redéposé la même proposition de loi cette année. En toute franchise, monsieur le ministre, si l'idée a progressé, si vous avez pris en compte ce problème dans votre projet, je ne peux qu'apprécier cette avancée et je la mets au compte du combat que nous avons mené, mes amis et moi, avec patience et détermination. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Nous avons été utiles, nous avons apporté notre contribution, c'est tout ! Je pense d'abord à ceux qui sont concernés.
    Soyons clairs : cette proposition de loi avait suscité une grande attente, vous l'intégrez dans votre texte, très bien ; mais je crains la déception qui s'ensuivra parce que vous n'allez pas jusqu'au bout.
    Certes, vous invoquez le coût d'une telle mesure - cela avait déjà été le cas lors des débats sur ma proposition de loi. Cela dit, quand on y regarde de près, tout le monde s'accorde à reconnaître que ces salariés qui ont commencé très jeunes méritent de respirer, méritent une retraite pleine et entière dès qu'ils ont cotisé quarante ans. Certains même en sont déjà à quarante-deux ou quarante-trois annuités alors qu'ils n'ont pas encore atteint l'âge de soixante ans. Un effort financier s'impose.
    Nous vous avons, et nous y reviendrons, proposé plusieurs sources de financement, dont la possibilité de taxer les plus-values financières. Je n'y reviens pas. Reste qu'il faut trouver l'argent pour ne pas en rester à vos 180 000 salariés alors que, dans ma proposition de loi, le nombre de bénéficiaires potentiels était estimé à 800 000. Nous ne pouvons en rester à un petit pas. Il faut un vrai pas - n'oublions pas toutes les retombées qui en découleront en termes d'avantage social, d'avantage économique, de postes qui se libéreront pour des jeunes. C'est loin d'être négligeable pour la société. Je vous demande, monsieur le ministre, de chercher comment aller plus loin.
    Monsieur le ministre, mon groupe et moi aimerions voter pour cet article, (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) mais nous avons besoin de beaucoup plus d'éléments, de beaucoup plus de précisions et, surtout, il faut aller plus loin.
    Faute de quoi, nous provoquerons une déception au bout du compte. Je pense três fort à tous ces gens, tous ces salariés - il y en a beaucoup dans ma région du Nord Pas-de-Calais - qui attendent avec impatience que cette mesure s'applique, mais s'applique pleinement.
    M. Christian Vanneste. C'est vrai !
    M. Alain Bocquet. Cela suppose les accords avec les caisses complémentaires. Je n'y reviens pas. Mais approfondissons la discussion.
    M. Yves Simon. C'est nous qui le faisons en tout cas !
    M. Jean-Pierre Gorges. C'est mieux que les socialistes !
    M. François Goulard. Nous sommes meilleurs que les socialistes !
    M. le président. La parole est à M. le ministre.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Ce débat remonte à des années. Chacun a rappelé le nombre de propositions de loi et de prises de position politiques visant à permettre aux gens ayant commencé à travailler très jeunes et totalisé un grand nombre d'annuités de partir à la retraite avant soixante ans.
    Pourquoi toutes ces propositions, toutes ces déclarations n'ont-elles abouti à des décisions ? Tout simplement parce que l'opération coûte extrêmement cher et pose le problème de l'équilibre du régime général. Le départ à soixante ans, sans autre condition qu'une durée d'assurance de quarante années de cotisation, concerne un peu plus d'un million de personnes. Les précédentes estimations, qui avançaient le chiffre de 850 000 personnes, étaient en réalité sous-évaluées. Le coût total de la mesure, telle qu'elle était notamment proposée dans la proposition de loi de M. Bocquet, représenterait environ 11 milliards d'euros en 2004 - n'oublions pas que ces décisions pèseraient immédiatement sur les comptes du régime général - pour la seule caisse nationale d'assurance vieillesse. Car cette mesure, contrairement à beaucoup de celles que nous avons proposées, a cette caractéristique d'avoir un effet immédiat sur les comptes de l'assurance vieillesse.
    Par ailleurs, contrairement à ce qui est souvent répété, n'allons pas imaginer qu'il y aurait un « stock » à épuiser et que cette disposition n'aurait qu'un coût transitoire. En fait, le travail à l'âge de seize, dix-sept ou dix-huit ans était encore quasiment la norme pour les générations nées dans les années cinquante. Souvenons-nous que l'âge moyen d'entrée sur le marché du travail était encore de dix-huit ans dans les années soixante-dix et jusqu'au début des années quatre-vingt. Même si l'âge moyen d'entrée dans la vie active a eu tendance à s'élever depuis les années cinquante et soixante, les générations concernées, qui sont précisément celles du baby-boom, sont nettement plus nombreuses que celles qui prennent aujourd'hui leur retraite.
    Conscient de ces difficultés, mais désireux d'apporter une réponse à la demande de ceux qui ont commencé à travailler très tôt, le Gouvernement a proposé une mesure, celle dont nous discutons aujourd'hui.
    Je voudrais remercier tous ceux qui ont reconnu, fût-ce pour regretter qu'elle ne soit pas suffisante, l'avancée qu'elle représente. Je suis en revanche stupéfait d'entendre certains la considérer comme une tromperie sans impact réel.
    De quoi s'agit-il ? Nous avions proposé à l'origine aux partenaires sociaux un dispositif réservé à ceux qui ont commencé à travailler à quatorze ans et prévoyant un départ à cinquante-huit ans et à cinquante-neuf ans. La négociation sociale a eu lieu. Nous avons fait évoluer nos positions et finalement proposé de prendre en compte ceux qui ont commencé à quatorze, à quinze et à seize ans, avec les durées cotisées que l'on a rappelées, pour un départ à la retraite entre cinquante-six et cinquante-neuf ans.
    Ce dispositif comporte certes une faiblesse que plusieurs d'entre vous ont relevée, y compris au sein de la majorité - ainsi M. Préel tout à l'heure : la validation des périodes de service national. Le Gouvernement a déposé un amendement qui permettra de répondre à votre attente sur ce sujet. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Combien de personnes seront concernées ? J'ai entendu tous les chiffres. M. Néri est descendu à 100 000.
    M. Pascal Terrasse. Ça va coûter 1,2 milliard !
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Je ne crois pas utile de minimiser l'importance de cette disposition pour des raisons politiques. Avancer un chiffre n'est pas, il est vrai, chose aisée. Mais je vais vous en donner un. Je considère pour ma part qu'au moins 200 000 personnes doivent être concernées. Pourquoi est-ce difficile ? Tout simplement parce que nous ne savons pas avec quelle précision combien de ces gens choisiront, au vu de leur situation propre, de prendre leur retraite.
    M. Maxime Gremetz. Donnez un chiffre potentiel !
    Le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Il n'est pas dit que tous ceux qui ont commencé à travailler à quatorze, quinze et seize ans décideront de profiter de ce dispositif.
    M. Maxime Gremetz. Donc ce sera moins !
    Le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Nous pensons, compte tenu des études qui ont été faites sur ce sujet et des coefficients de correction couramment retenus dans ce domaine, que 200 000 personnes environ sont concernées. Autrement dit, le coût pour la seule caisse nationale d'assurance vieillesse - car nous ne parlons là que du régime général, quand bien même si cette disposition est également ouverte aux autres régimes - devrait s'élever à environ 1,2 ou 1,3 milliard d'euros.
    M. Pascal Terrasse. Cela fait 500 000 personnes ! Voyez vos services !
    Le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Sur les exercices 2004 et 2005, le financement sera réalisé sur les excédents attendus de la CNAV, à savoir 1,6 milliard en 2004 et 1,2 milliard en 2005. A partir de 2006, date à laquelle il n'y aura plus d'excédent de la caisse nationale vieillesse, nous avons prévu une hausse de 0,2 point des cotisations vieillesse. Au-delà, l'équilibre de la CNAV reposera naturellement sur la situation de l'emploi, mais nous ouvrons là un autre débat, celui qui nous a déjà occupés à plusieurs reprises. Enfin, à partir de 2010, le coût de la mesure devrait sensiblement se réduire aux alentours de 300 millions d'euros en 2020.
    Reste une question que plusieurs d'entre vous ont posée - ainsi M. Bocquet à l'instant -, celle de savoir si les régimes complémentaires vont suivre, faute de quoi cette disposition n'aurait naturellement aucun intérêt.
    C'est là que je voudrais faire remarquer à l'opposition que le résultat de la négociation obtenu par le Gouvernement doit être pris en compte, car ceux qui ont apporté leur accord sont précisément les partenaires sociaux qui gèrent les régimes complémentaires. Dès lors que ceux-ci se sont, à nos yeux en tout cas, engagés...
    M. Pascal Terrasse. Il faut demander à FO !
    Le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... par l'accord qu'ils ont signé et qui naturellement comprenait cette mesure importante, force est d'admettre qu'il s'agit d'un réelle avancée sociale. Certes, elle n'est pas aussi étendue que beaucoup d'entre nous l'aurions souhaité, mais elle n'en représente pas moins, du point de vue du Gouvernement et de la majorité, le mieux que nous pouvions en faire compte tenu par ailleurs des contraintes de financement de nos régimes de retraite. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. Christian Vanneste. Très bien !
    M. le président. M. le président Ayrault a demandé que son groupe puisse répondre au Gouvernement. Je vais lui donner satisfaction en autorisant M. Terrasse et M. Gremetz à s'exprimer en application de l'article 56, afin que le débat puisse s'engager. Mais je serai par la suite beaucoup plus rigoureux et je veillerai à ce que les amendements soient examinés plus rapidement, dans la mesure où le débat aura déjà eu lieu.
    M. Maxime Gremetz. Pas de marchandage !
    M. le président. La parole est à M. Pascal Terrasse.
    M. Pascal Terrasse. M. le ministre dit faire confiance aux responsables de l'AGIRC alors que celui qui en assure la présidence n'a pas signé l'accord, me semble-t-il. Il nous le confirmera... Espérons en tout cas que les négociations ne donneront pas lieu à trop de déboires !
    Des chiffres très divers sont lancés, monsieur le ministre. Le plus simple serait de vérifier auprès de vos propres services. Pour ce qui nous concerne, c'est ce que nous avons fait : les 1,2 milliard d'euros que coûte cette mesure dès 2004 représentent environ 150 000 personnes. Et ces chiffres ne sont pas l'effet du hasard : ils sont parfaitement connus et correspondent exactement, du reste, au montant pour lequel vous nous avez répondu.
    Cela dit, monsieur le ministre, la série de réponses que vous venez de nous apporter me satisfait dans la mesure où tout ce que vous venez de nous dire était connu. Mais je crains que les médias et la manière dont a été envoyée la lettre du Premier ministre n'aient laissé croire que tout le monde serait concerné.
    Mme Martine David. Bien sûr !
    M. Pascal Terrasse. Dans mes permanences, j'ai eu l'occasion de faire savoir, en réponse à des courriers qui m'ont été adressés, que certains seront effectivement concernés et d'autres pas. Et bon nombre de gens viendront à coup sûr nous poser la question.
    Mme Martine David. Bien sûr !
    M. Pascal Terrasse. Je me souviens m'être battu comme un fou en faveur du dispositif de l'allocation équivalent retraite, mis en place en attendant justement celui que nous allons adopter dans un instant. Tout comme aujourd'hui vous refaites, quelque part, la même erreur -, on a laissé croire que ce serait le paradis. Ce ne sera malheureusement pas la réalité. Attendez-vous dans vos permanences à voir arriver des gens qui vous diront : « On a bien entendu, on a quarante annuités, on a cotisé, la réforme, on y a droit ! » Pour commencer, ce n'est pas quarante, il faut le dire, mais quarante-deux annuités... Ensuite, certaines périodes seront considérées comme cotisées et d'autres non. Ainsi, une personne qui a aujourd'hui cinquante-huit ans, qui a eu trois enfants et qui totalise 37,5 annuités ne pourra pas, comme elle pourrait le croire, faire valider ses annuités supplémentaires au titre de ses trois enfants. Allez expliquer à une femme de cinquante-huit ans, qui travaille dans le textile, qu'elle ne pourra pas bénéficier du dispositif ! Cela vous sera plutôt difficile, je vous préviens.
    Monsieur le ministre, vous avez eu l'honnêteté de nous répondre. Mais relisez attentivement la lettre que le Premier ministre a envoyée. La manière dont les choses y sont présentées, la manière dont elles se sont dites sans les médias, tout cela jouera comme un ressort qui va vous revenir dans la figure.
    Mme Martine David. Tout à fait !
    M. Pascal Terrasse. Quoi qu'il en soit, je vous remercie de vos informations. Elles auront éclairé la représentation nationale. J'espère que le compte rendu servira à celles et ceux qui pourront faire passer le message car, ne nous voilons pas la face, ce dispositif ne profitera qu'à quelques individus. On ne peut que le regretter même si vos arguments sont parfaitement justifiés : ce dispositif a un coût, vous l'avez vous-même reconnu. Vous considérez que, l'année prochaine, l'excédent de la branche vieillesse atteindra 1,6 milliard d'euros ; je serais plutôt porté à croire qu'il se situera aux alentours de 1,5 milliard d'euros, mais nous aurons l'occasion de le vérifier dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Et cet excédent sera encore plus faible en 2005. Quant aux 0,2 % de cotisation complémentaire, qui ne produiront leurs effets qu'en 2006, année n + 1, je crains qu'ils ne mettent en sérieuse difficulté les comptes de la caisse d'assurance vieillesse. Nous serons alors à quelques mois des élections législatives et présidentielles de 2006 ; j'aurai l'occasion de rappeler, et particulièrement à vous, pour peu que vous soyez encore à ce poste, ce que j'ai dit aujourd'hui : les comptes de l'assurance vieillesse risquent fort de plonger dans le rouge, et sans attendre 2006. Dès 2005, nous pouvons nous attendre à de vraies surprises sur les comptes et sur l'équilibre financier. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste.)
    M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le ministre, je vous remercie des chiffres que vous nous avez donnés, mais j'aimerais bien quelques éclaircissements. Ce n'est pas que je les mette en cause, mais on me permettra de me poser des questions. Nous avons réalisé une étude sérieuse, que je peux vous montrer...
    Monsieur Terrasse, pouvez-vous laisser parler les gens quand ils parlent ? C'est systématique chez vous... C'est drôle, quand même, cette manie. (Rires et exclamations sur divers bancs.)
    M. Jean-Pierre Gorges. M. Terrasse le fait exprès !
    M. Maxime Gremetz. Moi, je vous écoute toujours. Je n'interromps pas. (Rires.)
    M. Pascal Terrasse. Et je vous en remercie.
    M. Maxime Gremetz. C'est une maladie, ça. (Rires.)
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. C'est même une allergie !
    M. Patrick Lemasle. Vous l'avez contaminé, monsieur Gremetz !
    M. Pascal Terrasse. Et comment s'appelle cette maladie ? (Sourires.)
    M. Maxime Gremetz. C'est une maladie de ne pas nous entendre parler. A croire que cela vous donne des boutons. (Rires.)
    M. Yves Nicolin. Ça a duré cinq ans !
    M. Bernard Deflesselles. Et cela continue !
    M. le président. Vous avez la parole, monsieur Gremetz. Poursuivez.
    M. Maxime Gremetz. Cette étude, que disait-elle ? Que 850 000 salariés étaient concernés et que cela représentait 3,9 milliards d'euros.
    M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. C'est totalement faux...
    M. Maxime Gremetz. Pardonnez-moi, mais cette étude chiffrée a été réalisée par la commission des finances de l'Assemblée nationale. Peut-être la commission a-t-elle changé, à moins que ce soient ses fonctionnaires qui aient changé, je n'en sais rien ; reste que ce sont eux qui ont fait cette étude et personne d'autre. A vous entendre, cela coûterait 11 milliards. Avouez qu'il y a une sacrée différence ! J'aimerais qu'on éclaircisse véritablement ces chiffres. Moi, je n'invente rien et vous non plus sans doute. C'est tout simplement que les 850 000 dont nous parlons ne répondent pas aux mêmes conditions que les vôtres. D'abord ils ont quarante annuités de cotisation alors que, pour vous, il en faut quarante-deux, ce qui explique que votre proposition concerne moins de salariés. Il ne faut pas sortir de Saint-Cyr pour comprendre cela !
    M. Pascal Terrasse. De l'ENA ! Ils savent calculer, à Saint-Cyr !
    M. Maxime Gremetz. Autrement dit, nous avons un problème de chiffres et d'études.
    En fait, comme l'a rappelé M. Bocquet, vous allez dans le sens d'une mesure que nous avons proposée mais en en restreignant sérieusement la portée. Et, depuis, il y a forcément moins de salariés concernés. C'est comme pour la retraite des anciens combattants. Chaque année, il y en a moins ! Vous limitez la mesure à trois tranches d'âge. Cela qui devrait concerner environ 180 000 personnes.
    M. le président. Monsieur Gremetz, il faut conclure s'il vous plaît.
    M. Maxime Gremetz. Je pose des questions précises, parce qu'il faut savoir de quoi il retourne.
    Comme M. Bocquet et M. Paul l'ont dit, nous souhaitons que l'on aille au-delà en prenant en compte le coût réel mais aussi l'investissement que cela représente. Cela va libérer des emplois, et nous indemniserons moins de chômeurs. C'est l'ensemble de la situation qu'il faut examiner. Nous allons donc présenter des amendements pour améliorer sérieusement la mesure.
    M. le président. Nous en venons aux amendements.
    M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, il est vingt heures.
    M. le président. La séance reprendra à vingt-deux heures.
    M. Maxime Gremetz. Je propose qu'on arrête là, s'il vous plaît. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Si j'ai bien suivi, personne ne vote contre l'article. Il n'y aura que des votes pour ou des abstentions ?
    M. Maxime Gremetz. Oui.
    M. le président. Y a-t-il lieu dans ces conditions de maintenir les amendements de suppression ?
    M. Maxime Gremetz. Absolument, nous voulons améliorer le texte.
    M. Bernard Accoyer, rapporteur. Si vous voulez améliorer le texte, vous ne pouvez le supprimer.
    M. Maxime Gremetz. Mais si !
    M. le président. La suite de la discussion est donc renvoyée à la prochaine séance.

5

NOMINATION D'UN DÉPUTÉ
EN MISSION TEMPORAIRE

    M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre une lettre m'informant de sa décision de charger M. Christian Philip, député du Rhône, d'une mission temporaire, dans le cadre des dispositions de l'article LO 144 du code électoral auprès de M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer.
    Cette décision a fait l'objet d'un décret publié au Journal officiel du 24 juin 2003.

6

ORDRE DU JOUR
DE LA PROCHAINE SÉANCE

    M. le président. Ce soir, à vingt-deux heures, troisième séance publique :
    Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi, n° 885, portant réforme des retraites :
    M. Bernard Accoyer, rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (rapport n° 898),
    M. François Calvet, rapporteur pour avis au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées (avis n° 895),
    M. Xavier Bertrand, rapporteur pour avis au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (avis n° 899),
    Mme Claude Greff, rapporteure au nom de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes (rapport d'information n° 892).
    La séance est levée.
    (La séance est levée à vingt heures cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT
annexes au procès-verbal
de la 2e séance
du mardi 24 juin 2003
SCRUTIN (n° 226)


sur l'article 13 du projet de loi portant réforme des retraites (accès et maintien dans l'emploi des salariés âgés).

Nombre de votants

85


Nombre de suffrages exprimés

85


Majorité absolue

43


Pour l'adoption

58


Contre

27

    L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe U.M.P. (364) :
    Pour : 56 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Contre : 5. - MM. Michel Buillard, François Calvet, Jean-Pierre Dupont, Sébastien Huyghe et Denis Jacquat.
    Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (149) :
    Pour : 1. - M. Jean-Marie Aubron.
    Contre : 13 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Groupe Union pour la démocratie française (30) :
    Pour : 1 membre du groupe, présent ou ayant délégué son droit de vote.
Groupe communistes et républicains (22) :
    Contre : 9 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (12).

Mises au point au sujet du présent scrutin
(Sous réserve des dispositions de l'article 68, alinéa 4,
du règlement de l'Assemblée nationale)

    MM. Michel Buillard, François Calvet, Jean-Pierre Dupont et Denis Jacquat, qui étaient présents au moment du scrutin ou qui avaient délégué leur droit de vote, ont fait savoir qu'ils avaient voulu voter « pour ».

SCRUTIN (n° 227)


sur l'amendement n° 4968 de M. Gremetz tendant à supprimer l'article 15 du projet de loi portant réforme des retraites (alignement de la durée d'assurance de référence sur 160 trimestres).

Nombre de votants

135


Nombre de suffrages exprimés

135


Majorité absolue

68


Pour l'adoption

33


Contre

102

    L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe U.M.P. (364) :
    Contre : 101 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Non-votants : MM. Marc-Philippe Daubresse (président de séance) et Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (149) :
    Pour : 23 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Groupe Union pour la démocratie française (30) :
    Contre : 1 membre du groupe, présent ou ayant délégué son droit de vote.
Groupe communistes et républicains (22) :
    Pour : 10 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (12).

SCRUTIN (n° 228)


sur l'article 15 du projet de loi portant réforme des retraites (alignement de la durée d'assurance de référence sur 160 trimestres).

Nombre de votants

175


Nombre de suffrages exprimés

175


Majorité absolue

88


Pour l'adoption

126


Contre

49

    L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN

Groupe U.M.P. (364) :
    Pour : 122 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
    Contre : 4. - MM. Michel Buillard, François Calvet, Claude Goasguen et Daniel Mach.
    Non-votants : MM. Marc-Philippe Daubresse (président de séance) et Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (149) :
    Contre : 34 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Groupe Union pour la démocratie française (30) :
    Pour : 4 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Groupe communistes et républicains (22) :
    Contre : 11 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (12).

Mises au point au sujet du présent scrutin
(Sous réserve des dispositions de l'article 68, alinéa 4,
du règlement de l'Assemblée nationale)

    MM. Michel Buillard, François Calvet, Claude Goasguen et Daniel Mach, qui étaient présents au moment du scrutin ou qui avaient délégué leur droit de vote, ont fait savoir qu'ils avaient voulu voter « pour ».