ASSEMBLÉE NATIONALE
DÉBATS PARLEMENTAIRES
JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DU JEUDI 18 DÉCEMBRE 2003
COMPTE RENDU INTÉGRAL
1re séance du mercredi 17 décembre 2003
SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ
1. Questions au Gouvernement «...».
BAISSE DU TAUX DE LA TVA DANS LA RESTAURATION «...»
MM. Jérôme Lambert, Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
TAXE SUR LA POLLUTION DE L'EAU «...»
M. Olivier Jardé, Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable.
CONSTRUCTION EUROPÉENNE «...»
M. Maxime Gremetz, Mme Noëlle Lenoir, ministre déléguée aux affaires européennes.
IDENTIFICATION DE PERSONNES
DANS L'UNION EUROPÉENNE «...»
MM. Alain Suguenot, Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
NOUVELLE GOUVERNANCE À L'HÔPITAL «...»
MM. Jacques Domergue, Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.
EUROPE DE LA DÉFENSE «...»
M. Pierre Morel-A-L'Huissier, Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense.
RETRAITE DES FEMMES FONCTIONNAIRES «...»
Mme Danièle Hoffman-Rispal, M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire.
PRÉVENTION DES INONDATIONS «...»
M. Max Roustan, Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable.
OGM «...»
M. Daniel Garrigue, Mme Claudie Haigneré, ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies.
AIDES AU LOGEMENT «...»
MM. Jean-Yves Le Bouillonnec, Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
CONTRÔLES SUR LES IMPORTATIONS
DE PRODUITS ALIMENTAIRES AUX ÉTATS-UNIS «...»
MM. Daniel Mach, François Loos, ministre délégué au commerce extérieur.
CIRCULATION ROUTIÈRE
PAR TEMPS HIVERNAL «...»
MM. Alain Moyne-Bressand, Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
Suspension et reprise de la séance «...»
PRÉSIDENCE DE Mme HÉLÈNE MIGNON
2. Formation professionnelle et dialogue social. - Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, d'un projet de loi «...».
DISCUSSION DES ARTICLES(suite) «...»
Réserve de l'article 38, de l'amendement n° 354 de la commission des affaires culturelles portant article additionnel après l'article 38 et de l'article 39.
Article 40 «...»
Amendement n° 355 de la commission des affaires culturelles : M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur de la commission des affaires culturelles ; Mme Dominique Versini, secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. - Adoption.
L'amendement n° 192 de M. Depierre n'a plus d'objet.
Amendements n°s 356 corrigé de la commission et 118 de M. Gremetz : M. le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement n° 356 corrigé ; l'amendement n° 118 n'a plus d'objet.
Amendement n° 119 de M. Gremetz : MM. Frédéric Dutoit, le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat. - Rejet.
Adoption de l'article 40 modifié.
Article 41 «...»
Amendement n° 120 de M. Gremetz : Mme Muguette Jacquaint, M. le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat. - Rejet.
Amendements identiques n°s 121 de M. Gremetz, 236 de M. Vidalies et 291 de Mme Billard : MM. Frédéric Dutoit, Alain Vidalies, Mme Martine Billard, M. le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat. - Rejet.
Amendement n° 194 de M. Depierre : MM. Jean-Marie Geveaux, le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat, MM. Gaëtan Gorce, Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles ; Jean Le Garrec. - Retrait.
Amendement n° 290 de Mme Billard : Mme Martine Billard, M. le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat, M. Francis Vercamer. - Rejet.
Amendement n° 195 de M. Depierre : MM. Jean-Marie Geveaux, le rapporteur, Mme la sécrétaire d'Eta, MM. Frédéric Dutoit, Alain Vidalies, le président de la commission. - Adoption.
Amendement n° 237 de M. Vidalies : MM. Alain Vidalies, le rapporteur, Mme la sécrétaire d'Etat. - Rejet.
Amendement n° 58 de la commission, avec le sous-amendement n° 390 de Mme Billard : M. le rapporteur, Mmes la secrétaire d'Etat, Martine Billard. - Rejet du sous-amendement n° 390 ; adoption de l'amendement n° 58.
Amendement n° 386 de la commission : M. le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat. - Adoption.
Amendement n° 238 de M. Vidalies : MM. Alain Vidalies, le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat. - Rejet.
Amendement n° 239 de M. Vidalies : MM. Alain Vidalies, le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat. - Rejet.
Adoption de l'article 41 modifié.
Article 42 «...»
Amendement de suppression n° 240 de M. Vidalies : MM. Alain Vidalies, le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat. - Rejet.
Amendement n° 289 de Mme Billard : Mme Martine Billard, M. le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat, M. Jean Le Garrec. - Rejet.
Amendements n°s 287 de Mme Billard et 122 de M. Gremetz : Mme Martine Billard, MM. Daniel Paul, le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat, MM. le président de la commission, Jean Le Garrec. - Rejets.
Amendement n° 288 de Mme Billard : Mme Martine Billard, M. le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat. - Rejet.
Amendement n° 387 de la commission : M. le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat, M. Alain Vidalies. - Adoption.
Adoption de l'article 42 modifié.
Article 43 «...»
Amendement n° 123 de M. Gremetz : Mme Muguette Jacquaint, MM. le rapporteur, François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. - Rejet.
Amendements identiques n°s 59 de la commission et 197 de M. Depierre : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendements n°s 124 de M. Gremetz, 241 de M. Vidalies et 196 de M. Depierre : MM. Frédéric Dutoit, Alain Vidalies, Jean-Marie Geveaux, le rapporteur, le ministre, Mme Chantal Brunel, MM. Maxime Gremetz, Francis Vercamer. - Rejets.
Amendement n° 177 de Mme Billard : Mme Martine Billard, MM. le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 60 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 61 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 62 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article 43 modifié.
Article 38 (précédemment réservé) «...»
MM. Maxime Gremetz, le ministre.
M. Frédéric Dutoit.
Amendements de suppression n°s 115 de M. Gremetz, 143 de M. Vercamer, 232 de M. Vidalies et 293 de Mme Billard : MM. Maxime Gremetz, Francis Vercamer. - Retrait de l'amendement n° 143.
MM. Alain Vidalies, Jean-Marc Ayrault, Mme Martine Billard, MM. le rapporteur, le ministre. - Rejet, par scrutin, des amendements n°s 115, 232 et 293.
Amendement n° 381 du Gouvernement, avec le sous-amendement n° 391 de M. Vidalies : MM. le ministre, le rapporteur, Alain Vidalies. - Rejet du sous-amendement n° 391 ; adoption de l'amendement n° 381.
L'article 38 est ainsi rédigé.
Les amendements n°s 117 et 116 de M. Gremetz et 233 de M. Vidalies n'ont plus d'objet.
Après l'article 38
(amendement précédemment réservé) «...»
Amendement n° 354 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Article 39 (précédemment réservé) «...»
M. Maxime Gremetz.
Amendements n°s 234 de M. Vidalies et 292 de Mme Billard : M. Alain Vidalies, Mme Martine Billard, MM. le rapporteur, le ministre, Francis Vercamer. - Rejets.
Amendement n° 235 de M. Vidalies : M. Alain Vidalies. - Retrait.
Adoption de l'article 39.
Mme la présidente.
Après l'article 43 «...»
Amendements n°s 180 de M. Novelli et 190, deuxième correction, de M. Depierre : MM. Jean-Pierre Gorges, le rapporteur, Claude Gaillard, le ministre, Alain Vidalies, Frédéric Dutoit, Mme Martine Billard. - Retrait de l'amendement n° 180 ; adoption de l'amendement n° 190, deuxième correction.
Article 44 «...»
Amendement n° 357 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article 44 modifié.
Article 45 «...»
Amendements n°s 125 de M. Gremetz, 242 de M. Vidalies et 286 de Mme Billard : Mme Muguette Jacquaint, M. Alain Vidalies, Mme Martine Billard, MM. le rapporteur, le ministre. - Rejets.
Adoption de l'article 45.
Article 46 «...»
Amendement n° 198 de M. Depierre : MM. Jean-Marie Geveaux, le rapporteur, le ministre. - Retrait.
Adoption de l'article 46.
Article 47 «...»
Amendement de suppression n° 126 de M. Gremetz : MM. Daniel Paul, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 63 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 64 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article 47 modifié.
Article 48. - Adoption «...»
Après l'article 48 «...»
Amendement n° 65 de la commission, avec le sous-amendement n° 128 de M. Gremetz : MM. le rapporteur, le ministre, Alain Vidalies, Frédéric Dutoit, Claude Gaillard. - Retrait de l'amendement n° 65.
Article 49 «...»
Amendement n° 66 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre, Frédéric Dutoit. - Adoption.
Amendement n° 67 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article 49 modifié.
Avant l'article 50 «...»
Amendement n° 358 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Article 50 «...»
Amendements de suppression n°s 127 de M. Gremetz et 178 de Mme Billard : Mmes Muguette Jacquaint, Martine Billard, MM. le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Adoption de l'article 50.
Après l'article 50 «...»
Amendement n° 149 de Mme Jacquaint : Mme Muguette Jacquaint, MM. le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 360 corrigé de M. Daniel Paul : MM. Daniel Paul, le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement n° 360 corrigé modifié.
M. Daniel Paul.
Amendement n° 189 de Mme Brunel : MM. Jean-Pierre Gorges, le rapporteur, le ministre. - Retrait.
Avant l'article 51 «...»
Amendement n° 359 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Les articles 51 et 52 ont été retirés.
SECONDE DÉLIBÉRATION «...»
Article 34 «...»
Amendement n° 1 du Gouvernement : M. le ministre, Mme Martine Billard. - Adoption.
Adoption de l'article 34 modifié.
Les explications de vote et le vote sur l'ensemble du projet de loi sont reportés à une séance ultérieure.
3. Saisine pour avis d'une commission «...».
4. Ordre du jour de la prochaine séance «...».
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ
M. le président. La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
QUESTIONS AU GOUVERNEMENT
M. le président. L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.
Nous commençons par une question du groupe socialiste.
BAISSE DU TAUX DE LA TVA DANS LA RESTAURATION
M. le président. La parole est à M. Jérôme Lambert.
M. Jérôme Lambert. Monsieur le Premier ministre, l'échec du sommet européen, le week-end dernier, n'est pas seulement celui d'une étape essentielle, préparée de longue date, de la construction politique de l'Europe, faute pour les gouvernements d'avoir su dialoguer entre eux dans un climat de confiance. C'est aussi l'échec répété d'une promesse électorale de Jacques Chirac et de Jean-Pierre Raffarin d'obtenir rapidement la baisse du taux de TVA dans le secteur de la restauration. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Pierre Lellouche. Et Jospin, qu'a-t-il fait sur la TVA ?
M. Jérôme Lambert. Il y a plusieurs mois, j'avais déjà interrogé le Gouvernement sur sa volonté réelle de baisser le taux de TVA, en m'inquiétant, à juste titre, du risque que faisait peser la dérive budgétaire du Gouvernement sur nos relations avec les autres nations européennes.
M. Richard Cazenave. Indécent !
M. Jérôme Lambert. Sachant que cette baisse de TVA dépend de la volonté unanime de nos partenaires européens, l'état de nos relations politiques avec l'ensemble des gouvernements de l'Union est un facteur essentiel de réussite en la matière. Or, qu'avez-vous fait en matière financière...
M. Bernard Deflesselles. Et vous ?
M. Jérôme Lambert. ... pour obtenir l'accord de nos partenaires européens ? Le bras de fer que vous avez engagé pour vous affranchir unilatéralement de nos engagements européens en matière budgétaire ne vous a pas permis d'obtenir l'unanimité requise, certains se sentant floués par votre comportement arrogant. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Assurément, aucune des conditions nécessaires à l'obtention de la baisse de la TVA promise n'a vraiment été recherchée. En l'absence de cette baisse, vous aurez moins de mal à tenir vos engagements financiers, fût-ce au prix d'une promesse non tenue.
D'ailleurs, comment continuer à croire en vos promesses qui n'engagent que ceux qui ont le malheur d'y croire ? Car la vérité est dans la réalité vécue par nos concitoyens qui, pour la plupart, compte tenu de la dure situation économique et sociale résultant des échecs de votre politique (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.), passeront des fêtes de fin d'année dans l'inquiétude. Nous le regrettons, mais vous en portez clairement la responsabilité. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Patrick Roy. Lui, au moins, il passera de bonnes fêtes !
M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur Lambert, nos concitoyens auraient tort de passer leurs fêtes de Noël dans la morosité, car la conjoncture est en train de s'améliorer (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) : non seulement elle s'améliore partout, mais nous avons pris, depuis un an et demi, des mesures qui commencent à payer. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Mme Chantal Robin-Rodrigo. Pour qui ?
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Vous verrez la manière dont la situation évoluera.
Par ailleurs, contrairement à ce que vous dites, nous avons fait ce que nous pouvions,...
M. François Hollande. Vous pouvez peu alors !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... et ce que nous devions pour mettre en oeuvre l'opération de réduction de la TVA sur la restauration.
M. Augustin Bonrepaux. Avec quel résultats ?
M. François Hollande. Alors, pourquoi cela ne marche-t-il pas ?
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. C'est une opération intelligente, qui crée des emplois, et nous sommes tous en faveur de la création d'emplois, n'est-ce pas, monsieur Lambert ? Cependant, elle dépend, vous l'avez rappelé, d'une décision européenne prise à l'unanimité.
M. Michel Lefait. Vous n'avez pas tenu vos promesses. Vous avez trompé les gens !
M. Albert Facon. Pour le bâtiment, ça marche !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Le contexte n'est pas celui que vous indiquez. Il est faux de dire qu'en engageant un bras de fer, nous avons mis en danger la solidarité entre les acteurs européens dans le cadre du pacte de stabilité. Vous savez très bien que cette décision a été prise en respectant scrupuleusement les modalités de décision communautaires.
M. François Hollande. Cela vous arrange !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. En ce qui concerne la baisse de la TVA sur la restauration, comme le Premier ministre l'avait annoncé, j'ai eu la possibilité, vendredi dernier, lors d'un conseil ECOFIN informel, c'est-à-dire autour d'une table de restauration (Exclamations et rires sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains),...
M. Albert Facon. Avec une TVA à 19,5 % ?
M. Michel Lefait. Provocation !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... d'évoquer ce sujet. Il a été décidé qu'il serait inscrit, ainsi que d'autres modifications de TVA, à l'ordre du jour de notre prochaine réunion et des prochaines réunions du conseil ECOFIN.
M. François Hollande. Quand ?
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Nous avons bon espoir de parvenir à convaincre nos collègues, comme sur d'autres sujets, que cette opération doit être autorisée au niveau communautaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
TAXE SUR LA POLLUTION DE L'EAU
M. le président. La parole est à M. Olivier Jardé, pour le groupe UDF.
M. Olivier Jardé. Madame la ministre de l'écologie et du développement durable, nous avons la chance d'avoir une agriculture particulièrement performante. Elle participe activement, non seulement à la richesse nationale, grâce à ses exportations, mais également à l'aménagement et à la valorisation du territoire national. Pourtant, cette agriculture est en crise : les revenus agricoles baissent et l'on demande à nos agriculteurs d'améliorer la qualité de leur production.
Dès lors, est-il judicieux, madame la ministre, d'augmenter la taxation et l'imposition agricoles en créant une nouvelle taxe : la taxe sur la pollution de l'eau ? Pourriez-vous éclairer la représentation nationale sur vos réelles intentions à ce sujet ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le député Olivier Jardé, tout au long de l'année 2003, nous avons mené un intense travail de concertation pour bâtir une nouvelle politique de l'eau. Les agriculteurs ont émis le souhait d'intégrer le système des agences de l'eau afin de toucher des aides supplémentaires pour la mise aux normes des exploitations. Ils ont admis que les redevances qu'ils versent pourraient, en échange, faire l'objet d'un rééquilibrage, puisque, actuellement, le rapport entre les aides touchées par les agriculteurs et les redevances versées est de sept à un.
Nous avons lancé, dans ce débat de synthèse, un certain nombre de pistes. Ainsi, la redevance à l'élevage pourrait être remplacée par une redevance simplifiée sur l'azote entré dans les exploitations. Nous avons imaginé également, ensemble, que des mesures d'incitation aux bonnes pratiques environnementales pourraient être mises à l'étude en concertation avec les agriculteurs, sur la base du travail effectué par les députés Jean-Claude Flory, Marcelle Ramonet et Antoine Herth.
Ce sont, je le répète, des pistes de réflexion sur lesquelles nous travaillons avec les agriculteurs. Nous connaissons les charges qui pèsent sur eux. Il ne s'agit pas de les augmenter.
Aussi le rééquilibrage demandé par la profession agricole sera-t-il compensé, bien entendu, par des aides supplémentaires. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
CONSTRUCTION EUROPÉENNE
M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.
M. Maxime Gremetz. Monsieur le Premier ministre, la construction européenne des marchés financiers, qui repose aujourd'hui sur des critères d'austérité, vit une crise majeure.
L'échec du sommet de Bruxelles est un révélateur de la désunion d'une Europe qui avance à reculons, avec comme perspective un projet de Constitution faisant le choix de l'ultralibéralisme (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) et de la régression sociale, au profit des multinationales et contre les peuples.
Ce projet est dans l'impasse, ce qui ne nous étonne pas. Voyez dans quelles conditions, mes chers collègues, nous accueillons les nouveaux arrivants. Quelle triste image !
M. Yves Bur. Ils sont plus heureux que du temps de l'Union soviétique !
M. Maxime Gremetz. Il y a quelques semaines, nous vous alertions sur ces blocages prévisibles et vous demandions, comme le dit excellemment M. Balladur, avec raison (Rires sur de nombreux bancs et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire qui redoublent alors que M. Balladur entre dans l'hémicycle), de suspendre tout élargissement dans l'attente d'institutions efficaces, car cette crise est bien celle d'un mode de construction européenne que nous ne cessons de dénoncer.
Plutôt que de conduire vingt-cinq pays dans une aire de libre-échange, de concurrence sauvage, avec leurs corollaires que sont les délocalisations, le chômage massif et la précarité, il est plus que jamais nécessaire que la France oeuvre pour une tout autre construction européenne : une Europe de nations souveraines, de l'amitié et de la solidarité entre les peuples, une Europe qui porte au plus haut les droits sociaux, le principe de solidarité et d'égalité des territoires, une Europe du progrès social en faveur de l'épanouissement des populations qui la composent.
Après cet échec cuisant et dans cette ambiance de chaos, quelle va être l'action de la France ? Allez-vous en temps voulu, monsieur le Premier ministre,...
M. le président. Monsieur Gremetz, veuillez conclure.
M. Maxime Gremetz. ... consulter enfin le peuple français par voie de référendum sur le projet de construction européenne que vous serez amené à nous proposer ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée aux affaires européennes.
Mme Noëlle Lenoir, ministre déléguée aux affaires européennes. Monsieur Gremetz, vous ne découragerez pas notre engagement en faveur de l'approfondissement de la construction européenne pour les citoyens, qui demeure total.
Cet engagement s'est traduit par des propositions qui ont été retenues par le Conseil européen de Bruxelles dans les conclusions qu'il a adoptées pour une Europe plus compétitive et génératrice d'emplois. A notre demande et à celle de l'Allemagne, nous avons fait acter un renforcement des politiques de recherche et d'innovation. Par ailleurs, nous avons demandé qu'en tête des priorités du prochain Conseil européen de mars figure le thème de l'emploi et de l'Europe sociale.
Quant à la Constitution, monsieur Gremetz, elle est bien évidemment faite pour les citoyens. L'Europe est une union de nations, elle est aussi une union de peuples. C'est la raison pour laquelle nous avons une vision ambitieuse de la construction européenne. Nous souhaitons une Europe politique qui puisse décider pour elle-même et être présente dans le monde pour défendre nos intérêts. Nous souhaitons une Europe de la compétitivité, laquelle n'a jamais fait de mal aux citoyens, bien au contraire.
Nous voulons également une croissance durable et génératrice d'emplois. J'ajoute que nous avons obtenu, dans le cadre du projet de Constitution, des acquis sociaux très importants. Outre la reconnaissance d'une base juridique aux services publics économiques et une extension des compétences de l'Union en matière de santé, qui a été défendue par mon collègue M. Mattei, nous avons obtenu - et la nouveauté est de taille - l'intégration de la Charte des droits fondamentaux, qui comprend, vous le savez, monsieur Gremetz, les droits sociaux du citoyen européen, lequel pourra s'en prévaloir directement devant les institutions européennes.
La Constitution n'est pas dans une impasse. Il aurait été très dommageable, vous l'avouerez, que l'Europe conclue un accord bancal qui n'aurait finalement satisfait personne et aurait été critiqué partout.
Nous restons engagés en faveur d'un modèle socio-économique de l'Europe, qui permette aux citoyens de cette Europe de vivre pour longtemps dans la prospérité à laquelle chacun a droit et dans un espace de solidarité, qui est la finalité même de l'Europe.
C'est pourquoi nous soutiendrons la présidence irlandaise, qui devra renouer le dialogue constitutionnel. Soyez rassurés, monsieur Gremetz, nous ne sommes pas en divorce avec les objectifs sociaux qui sont les vôtres. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
IDENTIFICATION DE PERSONNES
DANS L'UNION EUROPÉENNE
M. le président. La parole est à M. Alain Suguenot, pour le groupe UMP.
M. Alain Suguenot. Monsieur le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, l'identification des personnes est bien sûr un élément essentiel de toute politique de sécurité publique.
Il y a une quinzaine de jours, vous avez tenu, avec vos homologues européens, une réunion qui avait pour objet d'accélérer le processus d'intégration des données physiques dans les titres de séjour et les visas des ressortissants des pays tiers. Vous avez trouvé un accord sur l'harmonisation souhaitée par les chefs de gouvernement réunis à Salonique, en juin dernier.
A votre initiative, et comme vous le souhaitiez depuis février 2003, deux procédés ont été retenus : l'image faciale, qui doit être numérisée et stockée pour être intégrée dans les visas et les titres de séjour, et l'empreinte digitale, qui est une mesure plus simple, pour les contrôles de base. Ces mesures seront obligatoires dès 2005, notamment dans le cadre des visas Schengen, et elles devraient également s'appliquer au futur passeport européen, selon le souhait du Conseil de l'Union.
Monsieur le ministre, que pensez-vous de l'efficacité de ces mesures, dans le cadre de la lutte contre l'immigration clandestine, la délinquance et, évidemment, le terrorisme ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à M. ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le député, la biométrie est une technique indispensable si nous voulons être efficaces. Il existait un désaccord au plan européen : les Allemands voulaient mettre en place la reconnaissance par l'iris, alors que nous préférions la reconnaissance par l'empreinte digitale. Or à quoi servirait une reconnaissance biométrique qui ne serait pas la même d'un pays à l'autre ? Nous avons pu trouver un accord sur l'empreinte digitale et sur la reconnaissance faciale, parce que - chacun l'a reconnu - la technique en était maîtrisée et plus rapide.
Nous ne voulons pas attendre 2005, car nos compatriotes ne veulent pas attendre cette date pour que leur sécurité soit mieux garantie. Nous avons donc décidé, le ministre des affaires étrangères et moi-même, de choisir, dès 2004, trois ou quatre consulats français pour mettre en place l'utilisation de ces données biométriques. On doit savoir que le consulat de Bamako, au Mali, reçoit 150 demandes de visas par jour et que celui de Dakar, au Sénégal, en reçoit 100 par jour.
Quel est, monsieur Suguenot, le principal moyen d'entrer dans notre pays ? Ce sont les visas de tourisme : on entre régulièrement en France et l'on s'y maintient irrégulièrement. Une personne qui dispose d'un visa de tourisme de trois mois le perd une fois entrée en France et - coup du sort - oublie d'où elle vient ! Grâce à la prise d'empreinte digitale, que vous avez votée et qui sera concrètement mise en place dès 2004, nous pourrons savoir d'où vient cette personne - nous lui rafraîchirons la mémoire - et, plus important, puisque nous aurons une preuve, nous pourrons exiger du pays source qu'il délivre un visa consulaire de retour.
Ainsi, grâce à la biométrie, nous pourrons être efficaces dans la maîtrise de l'immigration et dans la lutte contre l'immigration clandestine. C'est ce que vous attendiez tous. Dès 2004, nous obtiendrons les premiers résultats. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
NOUVELLE GOUVERNANCE À L'HÔPITAL
M. le président. La parole est à M. Jacques Domergue, pour le groupe UMP.
M. Jacques Domergue. Monsieur le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, à l'issue de plusieurs rapports récents, dont celui que vous m'avez confié sur la crise de la chirurgie en France (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), vous avez élaboré un projet sur la nouvelle gouvernance à l'hôpital dans le cadre du plan Hôpital 2007. Les questions posées hier par l'opposition, volontairement polémiques,...
M. Pierre Lellouche. Comme d'habitude !
M. Jacques Domergue. ... ne font qu'ajouter à la confusion. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Mme Chantal Robin-Rodrigo. Et la confusion de la politique du Gouvernement ?
M. Jacques Domergue. La grève d'hier, lancée par la confédération des hôpitaux généraux, fait référence au troisième volet du plan Hôpital 2007. Elle traduit les inquiétudes des professionnels - je cite l'un des tracts distribués - quant à « la réduction de la place du médecin à l'hôpital et la subordination du médical au gestionnaire ».
Ne tenant pas compte du malaise ressenti au sein des hôpitaux, la confédération prône l'immobilisme. Cela montre à quel point le message de la nouvelle gouvernance est mal perçu.
Votre projet, monsieur le ministre, met au contraire l'accent sur l'indispensable coopération entre médecins, soignants et administratifs, dans un souci d'efficacité et de qualité des soins. L'organisation de l'hôpital autour des pôles d'activité apparaît comme l'élément fondateur de votre réforme.
Ma question est la suivante, monsieur le ministre. Afin de préciser votre projet, pouvez-vous dire devant la représentation nationale comment et en quoi la nouvelle gouvernance va pouvoir remotiver l'ensemble des personnels hospitaliers ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.
M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Monsieur le député, la gouvernance hospitalière, qui est la nouvelle organisation interne de l'hôpital, est le quatrième volet du plan Hôpital 2007. Ses principes sont simples. Il s'agit, pour les hospitaliers, de choisir plutôt que de subir (« Ah ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste),...
M. François Hollande. Ils seront surtout libres de choisir la porte !
M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. ... de bâtir et d'agir tous ensemble. La gouvernance hospitalière consiste, dans le cadre de la mission du service public au service des malades, qui sont notre seule préoccupation (« Comme pendant la canicule ? » sur plusieurs bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains), à donner aux hospitaliers plus de souplesse, plus de flexibilité, plus de liberté et plus de responsabilité.
Il faut bien reconnaître, monsieur le député - et le rapport Couanau l'a montré -, que nos modes de fonctionnement à l'hôpital sont périmés : ils datent des années 1960, et les textes de 1970 et 1991 n'y ont pas changé grand-chose. Notre organisation est figée et cloisonnée entre les directeurs, d'un côté, et les médecins, de l'autre. La gouvernance hospitalière veut les associer dans un pilotage commun de l'établissement dans lequel ils travaillent, dans une organisation librement consentie, autour de pôles d'activité regroupant les moyens, les plateaux techniques, les équipements, et rassemblant les services médicaux autour des activités médicales.
M. François Loncle. Galimatias !
M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. C'est une démarche de reconnaissance, de confiance vis-à-vis des hospitaliers, et dans le climat actuel, d'espérance. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
EUROPE DE LA DÉFENSE
M. le président. La parole est à M. Pierre Morel-A-L'Huissier, pour le groupe UMP.
M. Pierre Morel-A-L'Huissier. Madame la ministre de la défense, en marge de leurs discussions à Bruxelles sur le projet de constitution, les chefs d'Etat et de gouvernement de l'Union européenne ont abordé, le week-end dernier, la question de la défense. L'accord conclu il y a deux semaines par la France, l'Allemagne et le Royaume-Uni pour renforcer la défense européenne en la dotant d'une capacité à mener des opérations de maintien de la paix, leur a été soumis. Cet accord prévoit, en complément de l'OTAN, la mise en place d'un quartier général européen pour planifier les opérations de maintien de la paix.
Par ailleurs, les dirigeants européens ont eu à se prononcer sur une stratégie européenne de sécurité préparée par le haut représentant pour la politique étrangère et de sécurité commune, qui fait référence à la possibilité d'actions militaires préventives.
Pouvez-vous, madame la ministre, nous faire part des décisions prises à Bruxelles sur ces deux points, et nous préciser sur quels fondements et sous quelle forme pourraient se présenter ces stratégies européennes de sécurité ? (Applaudissements sur divers bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la défense.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense. Monsieur le député, malgré l'absence d'accord global sur le projet de constitution, le bilan du sommet de Bruxelles a été très positif dans le domaine de la défense. Certaines avancées obtenues peuvent être traduites dans les faits à très brèves échéances ; d'autres sont des acquis pour l'avenir.
Vous avez plus particulièrement relevé deux de ces avancées d'ores et déjà acquises.
La première est la création d'un état-major de planification et de conduite d'opérations de l'Union européenne. Cela devrait permettre de répondre aux différentes hypothèses d'engagement des forces européennes, qu'il s'agisse d'opérations autonomes ou d'opérations engagées avec des moyens de l'OTAN.
Le deuxième acquis est la stratégie européenne de sécurité adoptée par le Conseil. Il s'agit d'une étape essentielle puisque, pour la première fois, les pays européens expriment leur commune vision du monde dans un document commun. Ce dernier prépare la réponse européenne aux défis du monde contemporain, c'est-à-dire au terrorisme, à la prolifération, aux crises régionales, en envisageant les anticipations de crises pour éviter qu'elles se produisent.
A la fin du printemps dernier, les grands programmes d'armement - ceux de l'avion A 400 M, du missile Meteor, des hélicoptères Tigre et NH 90, de Galileo -, avaient représenté des avancées significatives de l'Europe de la défense. Aujourd'hui, avec l'agence européenne de l'armement, avec l'objectif capacitaire 2010, avec le collège européen de défense, avec le corps européen de gendarmerie, ce sont de nouvelles étapes d'une affirmation concrète de l'Europe de la défense qui ont été dessinées à Bruxelles. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
RETRAITE DES FEMMES FONCTIONNAIRES
M. le président. La parole est à Mme Danièle Hoffman-Rispal, pour le groupe socialiste.
Mme Danièle Hoffman-Rispal. Monsieur le ministre de la fonction publique, vous n'avez pas réglé le problème des retraites, les Françaises et les Français s'en rendent compte aujourd'hui. La réforme votée cet été a refusé de tenir compte des critiques et des propositions formulées par l'opposition. Elle crée plus de problèmes qu'elle n'en résout. Elle aboutira à une impasse financière car la moitié du coût lié à l'augmentation du nombre des retraités dans les années à venir n'est pas financée.
Par ailleurs les femmes fonctionnaires qui ont eu des enfants, ont cru en vous écoutant, que la bonification d'un an par enfant dont elles bénéficiaient était sauvegardée. Or il n'en est rien !
M. Bernard Derosier. C'est honteux !
Mme Danièle Hoffman-Rispal. Nous avons dénoncé cela durant les débats, car vous remettez en cause ce droit pour de nombreuses femmes, notamment pour celles qui auront eu leur enfant avant leur entrée dans la fonction publique, celles qui découvrent maintenant la réalité avec inquiétude.
Pour les fonctionnaires qui ont commencé leur carrière très tôt, vous aviez promis aux partenaires sociaux une avancée en échange de l'allongement de la durée de cotisation imposée à tous de manière rigide. Une grande organisation syndicale se dit aujourd'hui trahie sur cette question et dénonce le véritable blocage que vous pratiquez en la matière.
La loi sur les retraites apparaît désormais pour ce qu'elle est : une réforme de régression sociale qui pénalise les plus modestes. (« La question ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Allez-vous, monsieur le Premier ministre, accepter de revenir sur ces dispositions les plus choquantes en proposant de rétablir la bonification d'un an par enfant pour toutes les femmes fonctionnaires ? Allez-vous lancer une vraie concertation sur les carrières longues dans la fonction publique ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur de nombreux bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Permettez-moi de répondre à Mme Hoffman-Rispal et faites en sorte qu'elle puisse m'entendre !
Madame la députée, vous avez raison : ainsi que le rappelle souvent Mme Ameline, le Gouvernement veut aider les femmes à concilier vie de famille et activité professionnelle. Il tient également à assurer une meilleure égalité avec les hommes dans le déroulement des carrières.
M. Léonce Deprez. Très bien !
M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Je vous remercie aussi d'avoir complimenté celles et ceux qui ont tenu à résoudre l'équation très simple, comprise par la totalité de l'opinion française, dans laquelle nous avons de plus en plus de retraités, et de moins en moins d'actifs, ce qui déséquilibre forcément le système. Il fallait en effet faire preuve de courage politique pour intervenir afin de sauvegarder les retraites ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Je vous remercie enfin de me permettre d'apporter une précision sur la situation des femmes fonctionnaires.
Dans le souci de concilier activité professionnelle et vie familiale pour les parents, hommes et femmes, d'enfants nés après le 1er janvier 2004, nous avons décidé que la durée de la période durant laquelle ils auront assez de travailler pour s'occuper de leurs enfants sera désormais prise en compte pour les retraites. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Jean Le Garrec. Ce n'est pas de cela qu'il est question !
M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. En ce qui concerne les enfants nés avant le 1er janvier 2004 (Protestations sur les bancs du groupe socialiste),...
M. Albert Facon. Hors sujet !
M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. ... les fonctionnaires concernés bénéficieront d'une bonification d'un an par enfant. Même une maman qui ne sera pas titulaire dans la fonction publique et qui aura fait valider cette période, aura droit à une bonification d'un an.
M. Jean Le Garrec. La fera-t-elle valider ?
M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Qui plus est, si elle a eu ses enfants alors qu'elle relevait du régime général, elle bénéficiera d'une majoration de retraite de deux ans qui viendra diminuer sa décote et augmenter le montant de sa retraite, ce qui n'était pas possible avant la loi. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Maxime Gremetz. La décote, voilà le problème !
M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Ainsi aurons-nous réglé la quasi-totalité des situations. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Il reste certes quelques cas, mais nous sommes en train de les étudier avec François Fillon. Nous avons ainsi répondu à un souci de justice, fondement même de l'action du Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
PRÉVENTION DES INONDATIONS
M. le président. La parole est à M. Max Roustan, pour le groupe UMP.
M. Max Roustan. Madame la ministre de l'écologie et du développement durable, vous avez fait de la prévention des inondations l'une de vos grandes priorités. Chacun sait que vous avez réformé le dispositif national de prévisions des crues et que vous avez dégagé des moyens pour financer des initiatives innovantes en matière de prévention des inondations. La loi relative à la prévention des risques majeurs que vous aviez préparée et que nous avons adoptée en juillet dernier a déjà été mise en oeuvre dans une trentaine de bassins. Celui des Gardons, dans le Gard, qui irrigue la circonscription dont je suis élu, fait partie de ces bassins pilotes et je vous en remercie.
La semaine dernière, les médias nationaux et locaux ont évoqué un rapport traitant de la prévention des inondations et des crues du Rhône, qui aurait été remis à vos services à la fin de 2002 et qui n'aurait donné lieu à aucune réaction de votre part. Pourriez-vous nous expliquer votre point de vue sur cette affaire ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le député, votre question va me permettre de rétablir quelques vérités.
En 1994, l'un de mes prédécesseurs, Michel Barnier, a commandé une étude sur le bassin du Rhône à l'entente interdépartementale Rhône-Saône. Son coût, estimé à pas moins de 3 millions d'euros, devait être financé à 40 % par l'Etat et à 40 % par un établissement public de l'Etat, en l'occurrence, l'agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse. Or, quand j'ai pris la responsabilité du ministère de l'écologie et du développement durable, c'est-à-dire huit ans après, j'ai constaté que cette étude n'avait toujours pas été remise. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) J'ai donc demandé au préfet coordonnateur de bassin, celui de la région Rhône-Alpes, d'activer la structure qui, entre-temps, est devenue Territoire Rhône, afin que tel soit le cas. Il aura cependant fallu attendre encore six mois avant que cette étude soit remise aux services locaux de l'Etat. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. François Hollande. Qu'a fait le Gouvernement ?
Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. En mars, nous avons reçu à ce sujet au ministère le président de Territoire Rhône. Nous avons alors constaté que s'il s'agissait d'une bonne étude diagnostique, elle ne constituait en aucune façon une stratégie opérationnelle. J'ai donc demandé, huit jours après, au préfet coordonnateur de bâtir cette stratégie opérationnelle avec tous les acteurs concernés et, en juin 2003, j'ai retenu trois bassins pilotes : ceux de l'Isère, de la Saône et, comme vous l'avez dit, monsieur le député, celui des Gardons.
Cette action a été concrétisée par une série de réunions, et je n'ose penser que le président de Territoire Rhône a oublié qu'il avait participé à une réunion de coordination à la préfecture de bassin, au début du mois de décembre.
M. Jean-Pierre Brard. C'est Alzheimer !
Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le député, il y a ceux qui se complaisent dans la lucidité a posteriori et ceux qui s'y refusent. Il y a ceux qui polémiquent et ceux qui agissent. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Jean Glavany. Et vous, que faites-vous ?
OGM
M. le président. La parole est à M. Daniel Garrigue, pour le groupe UMP.
M. Daniel Garrigue. Madame la ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies, les experts européens se sont prononcés, la semaine dernière, sur une demande d'importation de maïs transgénique, et la décision qu'ils ont prise a pour conséquence de prolonger le moratoire sur les organismes génétiquement modifiés, ce que l'on appelle les OGM, jusqu'au printemps prochain.
On comprend bien que, dans un domaine qui porte sur le vivant, il est indispensable de prendre les plus grandes précautions avant de décider. Néanmoins, on prend aussi le risque de voir l'Europe et la France s'isoler, au moment où les Etats-Unis, la Chine, l'Argentine, le Brésil et beaucoup d'autres encore développent très activement ces technologies. La seule façon, dans l'immédiat, de surmonter cette difficulté consiste à développer notre effort de recherche.
Je voudrais donc savoir où nous en sommes dans ce domaine, de quelles marges de liberté disposent nos chercheurs pour mener les études nécessaires et si l'importance de notre effort nous permet de rester au niveau de nos principaux concurrents. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies.
Mme Claudie Haigneré, ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies. Monsieur le député, le moratoire sur les autorisations de commercialisation des OGM ne vise pas directement les activités de recherche. Vous avez néanmoins eu raison de souligner qu'il traduisait un climat de défiance. De plus, des destructions illégales d'essais ont été opérées durant ces derniers mois. Tout cela a considérablement réduit les activités de recherche, tant dans le secteur public que dans le secteur privé, ce qui est évidemment pénalisant et préoccupant pour la situation de la recherche française.
Le choix individuel des consommateurs doit être garanti en toutes circonstances et vous savez que le Gouvernement s'y emploies en particulier au niveau européen, en mettant en avant les maîtres mots d'information transparente, de libre choix et de sécurité. D'ailleurs, l'évolution de l'avenir commercial des plantes et des aliments à base d'OGM sera déterminé par les consommateur, par les commerçants, par les agriculteurs et non par nous-mêmes. Il n'empêche que nous devons absolument continuer à poursuivre cette activité de recherche et conserver, ce socle de compétence, pour deux raisons essentielles.
D'abord, maintenir les compétences, en particulier par la recherche publique, c'est conserver une capacité autonome d'expertise, de veille, de décision. Il ne saurait en effet y avoir expertise fiable que s'il y a compétence scientifique. Et seule l'existence d'une recherche indépendante permet de lever les incertitudes, d'avoir une analyse critique, argumentée, au regard des préoccupations qui subsistent dans le domaine de l'environnement et de la santé.
Ensuite, le maintien de ces compétences est indispensdable si l'on veut préserver l'indépendance technologique et économique de l'agriculture européenne. Ainsi, j'ai visité, tout récemment, la société Meristem Thérapeutique, en Auvergne, qui essaie de produire à partir du maïs une lipase gastrique pour soigner la mucoviscidose. Il s'agit d'un superbe succès scientifique dans un domaine où la France est pionnière en Europe et dans le monde.
Dans un contexte favorable, cela peut devenir un magnifique succès économique, au bénéfice des malades.
Voilà pourquoi il faut maintenir ce socle de compétences, aussi bien dans nos organismes publics, le CIRAD, l'INRA, le CNRS, que dans le cadre de nos partenariats avec le secteur privé. Je peux citer, à cet égard, le programme Géno-plante que nous essayons de raviver afin de conserver, en la matière, cette compétence compétitive. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
AIDES AU LOGEMENT
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour le groupe socialiste.
M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le ministre chargé du logement.
En 2002, 6 169 000 foyers ont bénéficié d'une aide moyenne de 183 euros chaque mois pour payer leur loyer. Prenant en compte les revenus, les charges familiales et le coût des loyers, ces aides permettent à nos concitoyens, et pas seulement aux plus modestes, d'accéder à un logement décent et de s'y maintenir. Le barème de ces aides aurait dû être revalorisé avec effet au 1er juillet 2003, mais il ne l'a pas été, alors même que la réunion, hier, du Conseil national de l'habitat vous en donnait une nouvelle opportunité. A nos yeux comme à ceux de tous les acteurs du secteur du logement, le pire est à venir et nos concitoyens doivent le savoir.
Monsieur le ministre, vous vous étiez engagé, dans cet hémicycle, à procéder à cette revalorisation. Au mois de novembre, vous vous étiez même aventuré à donner certains pourcentages. Nous savons pourtant que vos choix budgétaires vous l'interdisent. Votre gouvernement a en effet décidé de réduire de 193 millions d'euros les crédits que l'Etat consacrera en 2004 au financement de ces aides. Comment accepter une telle politique, alors que ces aides sont et seront rendues de plus en plus nécessaires par la paupérisation des populations les plus défavorisées ?
Comment ceux que vous plongez aujourd'hui dans la précarité par le chômage, ceux qui subissent les diminutions des prestations sociales, paieront-ils leurs loyers ?
M. Jean Glavany. Très bien !
M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Ce sont les populations les plus modestes que votre gouvernement va encore ponctionner. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Bernard Accoyer. Pas du tout !
M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Monsieur le ministre, vous avez prétendu que vous alliez faire plus en dépensant moins.
M. Bernard Accoyer. Et vous, vous n'avez rien fait !
M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Tout le monde sait, même dans votre majorité, que cela est impossible. Dans ces conditions, allez-vous sacrifier la revalorisation des barèmes avec effet rétroactif au 1er juillet 2003 ? (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Nicolas Forissier. Démago !
M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Ou bien allez-vous sacrifier la prise en charge de tous nos concitoyens qui, par les effets de votre politique désastreuse, ont connu une dégradation de leur situation et voient leur capacité à se loger gravement compromise ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Monsieur le député, j'ai déjà eu le plaisir de vous confirmer que le barème des aides personnelles au logement serait revalorisé au 1er juillet 2003, ce qui aurait dû être de nature à vous donner satisfaction.
Par ailleurs, je vous rappelle que les plafonds de loyers seront revalorisés, comme l'année dernière, de 1,2 %, et nous donnerons même un coup de pouce supplémentaire à Paris et dans la petite couronne, en les relevant de 2,5 %.
Enfin, je vous indique que ces suppléments d'aides au logement vont atteindre 150 millions d'euros en 2003,...
M. Jean-Pierre Brard. C'est papa Noël !
M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. ... alors que, en 2000 et en 2001, ils ne représentaient que 90 millions d'euros : c'était de votre temps. (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Georges Tron. Et alors, monsieur Le Bouillonnec ?
M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Cela dit, monsieur le député, il faut aussi sortir de cette spirale infernale qui fait que l'on augmente sans arrêt les aides à la personne...
M. Augustin Bonrepaux. Prestidigitateur !
M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. ... au détriment de l'offre de logement. Il est vrai que nous recherchons des économies.
M. Augustin Bonrepaux. On en verra le résultat !
M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Nous allons saisir le Conseil national de l'habitat des nouvelles mesures que nous préparons.
M. Michel Vergnier. Quelles mesures ?
M. Augustin Bonrepaux. Avec quels moyens ?
M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Il sera interrogé dans les semaines qui viennent.
On ne sortira de la tension sur les loyers, surtout dans le domaine social, qu'en faisant de l'offre supplémentaire.
M. Michel Lefait. Mais les caisses sont vides !
M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. J'ai le plaisir de vous informer que, au 31 décembre 2003, nous aurons réalisé 57 000 logements sociaux pour l'année, contre 40 000 à 45 000 lorsque vous étiez au pouvoir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), et que, en 2004, nous avons programmé 80 000 logements sociaux, c'est-à-dire 40 % de plus que vous n'en avez réalisé.
Un député du groupe socialiste. Menteur !
M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Alors, monsieur le député, vous voulez donner des leçons en matière sociale et des leçons de morale devant les micros ; vous auriez été bien inspiré de les appliquer ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
CONTRÔLES SUR LES IMPORTATIONS
DE PRODUITS ALIMENTAIRES AUX ÉTATS-UNIS
M. le président. La parole est à M. Daniel Mach, pour le groupe UMP.
M. Daniel Mach. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, ma question s'adresse à M. le ministre délégué au commerce extérieur.
Monsieur le ministre, dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, les Etats-Unis ont mis en place tout un arsenal juridique de contrôle, de prévention et de sécurité. Dans ce cadre, la semaine dernière, une loi portant sur le bio-terrorisme est entrée en vigueur. Cette loi vise à renforcer les contrôles sur tous les produits alimentaires importés. Elle soulève quelques inquiétudes chez les exportateurs français, car elle les oblige notamment à enregistrer sur internet, auprès des administrations spécialisées, tous leurs produits entrant sur le sol américain et à recourir au service d'un agent local. Cela pose des problèmes à de nombreux viticulteurs, notamment, qui sont peu équipés en informatique et qui sont soumis à des délais et des contraintes tels qu'ils peuvent difficilement anticiper, longtemps à l'avance, leurs exportations.
Monsieur le ministre, comment le Gouvernement entend-il informer les exportateurs concernés et comment envisage-t-il de les aider ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué au commerce extérieur.
M. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur. Monsieur le député, après la catastrophe du 11 septembre, les Etats-Unis ont pris un certain nombre de mesures contre le terrorisme ; c'était leur droit et c'était nécessaire. Une de ces mesures est la loi sur le bio-terrorisme que le président Bush a signée au mois de juin de l'année dernière. Assez compliquée, elle a nécessité un certain nombre de textes d'application, qui ont été pris au premier semestre 2003.
Nous même avons décidé, face à ce texte, plusieurs mesures : une première tendant à faciliter la déclaration que les entreprises productrices de produits agroalimentaires vendus aux Etats-Unis doivent faire. Un logiciel a été mis en place par le groupe France Agricole qui est maintenant disponible par exemple à partir du site internet www.planetexport.fr. Ce dispositif est très simple et permet aux entreprises de remplir plus facilement cette obligation.
Deuxièmement, nous avons organisé des séances d'information dans la plupart des régions françaises. Sur les 25 000 entreprises françaises qui exportent aux Etats-Unis, 5 300 sont concernées par le problème. Plus de la moitié de ces dernières ont assisté à l'une des douze réunions d'information qui ont eu lieu tout particulièrement dans les régions viticoles et qui avaient été organisées de concert avec la fédération professionnelle des exportateurs de vins et spiritueux.
Enfin, nous avons décidé de doubler le nombre de salons français aux Etats-Unis l'année prochaine : il passera de douze à vingt-cinq. Ainsi plus d'efforts de promotion de nos exportateurs pourront être soutenus par notre pays, et ils trouveront un environnement qui leur permettra de bien connaître toutes les réglementations américaines auxquelles ils doivent obéir, comme d'ailleurs toutes les entreprises américaines et toutes les entreprises exportant vers les Etats-Unis. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
CIRCULATION ROUTIÈRE PAR TEMPS HIVERNAL
M. le président. La parole est à M. Alain Moyne-Bressand, pour le groupe UMP.
M. Alain Moyne-Bressand. Monsieur le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer, les vacances arrivant, nous devons prendre en compte, en cette période de fêtes de fin d'année, que, souvent, les fortes chutes de neige ou le verglas entraînent, malheureusement, de graves problèmes de circulation et de sécurité sur grand nombre d'axes routiers et autoroutiers de notre territoire. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Nous avons tous à l'esprit ces images de bouchons interminables, de camions et d'automobiles immobilisés sur les routes à cause du temps, avec tous les problèmes humains que génère l'attente des services de déblaiement, lesquels doivent être félicités pour leur sens du devoir.
Il est donc impératif d'anticiper cette situation et de se donner les moyens nécessaires pour y parer, avec le plus d'efficacité et le maximum de résultats.
Cette nuit, monsieur le ministre, vous avez assisté...
M. Jean-Pierre Brard. Dans la froidure !
M. Alain Moyne-Bressand. ... à un exercice inédit de simulation d'intervention en cas de neige abondante ou de grand verglas.
M. Maxime Gremetz. Par un froid sibérien !
M. Alain Moyne-Bressand. Monsieur le ministre, quels enseignements tirez-vous de cette opération ? Comment ce dispositif permettra-t-il d'anticiper et de gérer les situations d'intempéries ?
Par ailleurs, pouvez-vous nous dire si ce plan neige et verglas est prévu pour les principaux axes massivement empruntés par nos concitoyens pendant cette période hivernale ?
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Monsieur Moyne-Bressand, effectivement, l'exercice qui a eu lieu cette nuit sur l'autoroute A 4 était destiné à vérifier si le dispositif que nous avons mis en place à la suite de l'expérience malheureuse que nous avons vécue en janvier 2003 - on se souvient des milliers de voitures bloquées sur l'autoroute - était opérationnel.
Cet exercice a mobilisé un grand nombre de personnels des préfectures, des gendarmeries, de la police et de l'équipement. Le monde des entreprises de transport, que je tiens à saluer, s'y est associé.
Les progrès passent d'abord par une amélioration de l'alerte, car ce qui avait manqué, l'année dernière, c'était l'anticipation et la coordination. Aujourd'hui, avec le renforcement de la cellule opérationnelle et du rôle de coordination du préfet de zone, nous estimons être mieux organisés que l'année dernière.
La priorité doit être aussi la fluidité du trafic. Nous avons donc procédé à des exercices visant à stocker les camions sur des parkings et nous avons testé des déviations destinées à permettre aux véhicules de s'échapper des nasses que peuvent constituer, en ces circonstances, les autoroutes. Le dispositif a bien fonctionné, sans neige et sans verglas, il est vrai.
J'insisterai aussi sur un autre progrès très important, l'amélioration de l'information en direction des usagers. Il n'y a rien de pire, en effet, que d'être bloqué sur une route ou une autoroute et de ne rien savoir. Désormais, le poste de commandement aura le 107.7 FM à sa disposition en quelques secondes.
Ces mesures s'appliquent bien entendu dans les sept zones de défense, avec une bonne coordination entre les zones elles-mêmes.
Monsieur le député, malgré tout cela, la météo réserve des surprises. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) On n'est jamais à l'abri de conditions climatiques exceptionnelles ! On peut toujours appeler les usagers à la prudence. Sachez en tout cas que les services de l'Etat et des sociétés d'autoroutes, ainsi que les services de secours sont désormais mieux organisés, plus disponibles et toujours généreux, pour rendre service aux usagers. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. Nous en avons terminé avec les dernières questions au Gouvernement de l'année...
Suspension et reprise de la séance
M. le président. La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à quinze heures cinquante, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de Mme Hélène Mignon.)
PRÉSIDENCE DE Mme HÉLÈNE MIGNON,
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
FORMATION PROFESSIONNELLE
ET DIALOGUE SOCIAL
Suite de la discussion, après déclaration d'urgence,
d'un projet de loi
Mme la présidente. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social (n°s 1233, 1273).
Discussion des articles (suite)
Mme la présidente. Hier soir, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles, s'arrêtant à l'article 38.
A la demande du Gouvernement, l'article 38, l'amendement n° 354 de la commission portant article additionnel après l'article 38 et l'article 39 sont réservés.
Article 40
Mme la présidente. « Art. 40. - I. - A la fin de l'article L. 132-18 sont ajoutés les mots : "et dans le groupe.
« II. - Après l'article L. 132-19 du code du travail, il est inséré un article L. 132-19-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 132-19-1. - La convention ou l'accord de groupe, négocié et conclu dans le cadre du groupe défini à l'article L. 439-1 entre l'employeur de l'entreprise dominante et les organisations syndicales de salariés représentatives dans le groupe au sens de l'article L. 132-2, emporte les mêmes effets que la convention ou l'accord d'entreprise.
« Les conditions de validité des conventions ou accords d'entreprise ou d'établissement prévues au IV de l'article L. 132-2-2 sont applicables aux conventions ou accords de groupe.
« Les conventions ou les accords de groupe ne peuvent comporter des dispositions dérogatoires à celles qui sont applicables en vertu des conventions ou d'accords de branche dont relèvent les entreprises ou établissements appartenant à ce groupe, sauf disposition expresse de ces conventions ou accords de branche. »
M. Anciaux, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, a présenté un amendement, n° 355, ainsi libellé :
« Rédiger ainsi le début du premier alinéa du texte proposé pour l'article L. 132-19-1 du code du travail :
« Art. L. 132-19-1. - La convention ou l'accord de groupe fixe son champ d'application constitué de tout ou partie des entreprises constitutives du groupe. La convention ou l'accord de groupe négocié et conclu avec les organisations syndicales (le reste sans changement). »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Il est préférable de développer la négociation de groupe sur le fondement du droit commun de la négociation collective selon lequel les accords fixent eux-mêmes leur champ d'application.
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion, pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 355.
Mme Dominique Versini, secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. Favorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 355.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° 192 de M. Depierre n'a plus d'objet.
Je suis saisie de deux amendements, n°s 356 corrigé et 118, pouvant être soumis à une discussion commune.
L'amendement n° 356 corrigé, présenté par M. Anciaux, rapporteur, est ainsi rédigé :
« Dans le deuxième alinéa du texte proposé pour l'article L. 132-19-1 du code du travail, substituer à la référence : "IV la référence : "III. »
L'amendement n° 118, présenté par M. Gremetz, M. Dutoit, Mme Jacquaint et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains, est ainsi rédigé :
« Dans le deuxième alinéa du texte proposé pour l'article L. 132-19-1 du code du travail, substituer aux mots : "au IV les mots : "au 1° du III. »
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 356 corrigé.
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. C'est la rectification d'une erreur de référence.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. Favorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 356.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, l'amendement n° 118 tombe.
L'amendement n° 193 n'est pas défendu.
M. Gremetz, M. Dutoit, Mme Jacquaint et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 119, ainsi rédigé :
« A la fin du dernier alinéa du texte proposé pour l'article L. 132-19-1 du code du travail, supprimer les mots : ", sauf disposition expresse de ces conventions ou accords de branche. »
La parole est à M. Frédéric Dutoit.
M. Frédéric Dutoit. Cet amendement vise à soulever un fait révélateur et à protéger le principe de faveur.
Comme certains de nos collègues l'ont souligné en commission, la lecture de l'exposé des motifs de l'article 40 du projet de loi pourrait prêter à sourire si l'enjeu n'était pas si grave pour notre législation sociale. Selon l'exposé des motifs, « Le dernier alinéa... » - de l'article 40 - « ... prévoit cependant une différence avec l'accord d'entreprise, l'accord de groupe ne pouvant déroger aux dispositions des accords de branche dont relèvent les entreprises appartenant au groupe. En effet, permettre une possibilité de dérogation aurait eu pour conséquence une instabilité pour la couverture conventionnelle des salariés et une fragilisation des relations sociales au sein de cette entité. »
Vous reconnaissez donc que la dérogation nuit aux relations sociales, qu'elle instaure « une instabilité pour la couverture conventionnelle des salariés ». Pourquoi ce que vous reconnaissez pour le groupe ne serait-il pas vrai aux autres niveaux de la négociation ?
Vous admettez tout de même les limites d'une telle conception de notre législation, à moins que cette rédaction révélatrice ne vous ait échappé.
Ce texte est en totale contradiction avec tout le discours que nous tient le Gouvernement depuis le début de ce débat. Il parle toujours d'adaptation et du souci d'être au plus près des préoccupations de l'entreprise - raison pour laquelle il faudrait permettre de déroger. Toutefois, dans le même temps, il écrit que la dérogation constitue un danger entraînant « instabilité et fragilité » !
Cette contradiction a un deuxième effet : outre qu'elle montre l'incohérence de votre discours dicté par le MEDEF, elle nous donne raison. Depuis le début, nous manifestons notre méfiance à l'égard de la généralisation de la dérogation - ce qui a même fait dire à la majorité que nous étions caricaturaux et que nous avions une vision archaïque du monde du travail.
Toutefois, par ce membre de phrase, vous prouvez le contraire, et nous vous en remercions. Vous montrez que nous avons raison d'exprimer notre plus grande inquiétude à l'égard des dispositions de ce texte, qui constituent une menace grave pour les garanties et droits des salariés dans notre pays.
C'est pourquoi nous avons déposé cet amendement, qui vise à supprimer une disposition qui remet en cause la hiérarchie des normes.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. Pour des motifs exposés lors de la discussion sur l'article 37, la commission a rejeté l'amendement n° 119.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. Etant donné la spécificité de la situation du groupe, il paraît nécessaire d'éviter un régime trop complexe en laissant ce dernier cumuler l'ensemble des dérogations possibles prévues par les différentes branches où s'exerce son activité. C'est en conséquence aux accords de branche de définir explicitement les conditions dans lesquelles les accords de groupe peuvent comporter des stipulations dérogatoires. Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 119.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 40, modifié par les amendements adoptés.
(L'article 40, ainsi modifié, est adopté.)
Article 41
Mme la présidente. « Art. 41. - L'article 132-26 est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. L. 132-26. - I. - Lorsqu'une telle faculté est prévue par un accord de branche, les entreprises dépourvues de délégué syndical peuvent déroger aux articles L. 132-2, L. 132-7, L. 132-2-2, L. 132-19 et L. 132-20 du code du travail dans les conditions fixées ci-après.
« II. - Les accords de branche mentionnés au I peuvent prévoir qu'en l'absence de délégués syndicaux dans l'entreprise ou l'établissement, ou de délégués du personnel faisant fonction de délégué syndical dans les entreprises de moins de cinquante salariés, les représentants élus du personnel au comité d'entreprise, ou, à défaut, les délégués du personnel, peuvent négocier et conclure des accords collectifs de travail.
« Les accords d'entreprise ou d'établissement ainsi négociés n'acquièrent la qualité d'accords collectifs de travail qu'après leur approbation par une commission paritaire nationale de branche, dont les modalités de fonctionnement sont prévues par l'accord de branche. Faute d'approbation, l'accord est réputé non écrit.
« Ces accords d'entreprise ou d'établissement ne peuvent entrer en application qu'après leur dépôt auprès de l'autorité administrative dans les conditions prévues à l'article L. 132-10 du code du travail, accompagnés de l'extrait de procès-verbal de validation de la commission paritaire nationale de branche compétente. Cette commission peut également se voir confier le suivi de leur application.
« III. - Les accords de branche mentionnés au I peuvent également prévoir que, dans les entreprises dépourvues de délégué syndical et lorsqu'un procès-verbal de carence a établi l'absence de représentants élus du personnel, des accords d'entreprise ou d'établissement sont conclus par un ou plusieurs salariés expressément mandatés pour une négociation déterminée, par une ou plusieurs organisations syndicales reconnues représentatives sur le plan national. A cet effet, une même organisation syndicale ne peut mandater qu'un seul salarié.
« L'accord signé par un salarié mandaté doit avoir été approuvé par les salariés à la majorité des suffrages exprimés, dans les conditions fixées par décret.
« L'accord d'entreprise signé par le salarié mandaté ne peut entrer en application qu'après avoir été déposé auprès de l'autorité administrative dans les conditions prévues à l'article L. 132-10 du code du travail.
« Le salarié mandaté au titre du présent article bénéficie de la protection prévue par les dispositions de l'article L. 412-18 du code du travail dès que l'employeur a connaissance de l'imminence de sa désignation. La procédure d'autorisation administrative est applicable au licenciement des anciens salariés mandatés pendant une période de douze mois à compter de la date à laquelle leur mandat a pris fin.
« En l'absence d'accord, le délai de protection court à la date de la fin de la négociation matérialisée par un procès-verbal de désaccord.
« IV. - Les accords d'entreprise conclus selon les modalités définies aux II et III ci-dessus peuvent être renouvelés, révisés ou dénoncés selon les modalités mentionnées à ces paragraphes respectivement par l'employeur signataire, par les représentants élus du personnel ou par un salarié mandaté à cet effet. »
M. Gremetz, M. Dutoit, Mme Jacquaint et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 120, ainsi libellé :
« Rédiger ainsi le texte proposé pour l'article L. 132-26 du code du travail :
« Art. L. 132-26. - I. - Les entreprises dépourvues de délégué syndical peuvent déroger aux articles L. 132-2, L. 132-7, L. 132-2-2, L. 132-19 et L. 132-20 du code du travail dans les conditions fixées ci-après.
« II. - Dans les entreprises ou les établissements de moins de cinquante salariés dépourvus de délégués syndicaux, les accords sont conclus par un ou plusieurs salariés expressément mandatés pour une négociation déterminée, par une ou plusieurs organisations syndicales reconnues représentatives sur le plan national. A cet effet, une même organisation syndicale ne peut mandater qu'un seul salarié.
« L'accord signé par un salarié mandaté doit avoir été approuvé par les salariés à la majorité des suffrages exprimés, dans les conditions fixées par décret.
« L'accord d'entreprise signé par le salarié mandaté ne peut entrer en application qu'après avoir été déposé auprès de l'autorité administrative dans les conditions prévues à l'article L. 132-10 du code du travail.
« Le salarié mandaté au titre du présent article bénéficie de la protection prévue par les dispositions de l'article L. 412-18 du code du travail dès que l'employeur a connaissance de l'imminence de sa désignation. La procédure d'autorisation administrative est applicable au licenciement des anciens salariés mandatés pendant une période de douze mois à compter de la date à laquelle leur mandat a pris fin.
« En l'absence d'accord, le délai de protection court à la date de la fin de la négociation matérialisée par un procès verbal de désaccord.
« III. - Les accords d'entreprise conclus selon les modalités définies aux II ci-dessus peuvent être renouvelés, révisés ou dénoncés selon les modalités mentionnées à ces paragraphes respectivement par l'employeur signataire, par les représentants élus du personnel ou par un salarié mandaté à cet effet. »
La parole est à Mme Muguette Jacquaint.
Mme Muguette Jacquaint. Cet amendement vise à assurer une autonomie de négociation à tous les niveaux. C'est pourquoi il propose de supprimer les dispositions qui font dépendre les négociations dans les petites entreprises des clauses de l'accord de branche. Il affirme également la primauté de la représentation syndicale pour la négociation.
En effet, le paragraphe II du texte proposé pour l'article L. 132-26 du code du travail ouvre droit à la négociation d'accords par des représentants non syndiqués. Ainsi, on ouvre la porte à la non-syndicalisation, alors que nous entendons répéter à longueur de journée que les syndicats n'ont plus de représentativité, tout en faisant en sorte, parallèlement, qu'il n'y ait pas d'élections de représentants du personnel pour faciliter les négociations « maison » dans les petites structures. Il résulte de ce paragraphe que des salariés mandatés par l'entreprise pourront négocier des accords dérogatoires à tout l'ordonnancement juridique.
Par ailleurs, il remet en cause le rôle des syndicats dans le dialogue social dans la mesure où il reconnaît, dans certains cas, un pouvoir de négociation au comité d'entreprise ou aux délégués du personnel.
Le débat sur les rôles respectifs des syndicats et des organes représentatifs du personnel en matière de négociation sociale est fort ancien. Toutefois, il avait jusqu'à présent été tranché en faveur des syndicats, notamment par la création du mandatement. Le projet de loi fait aujourd'hui un choix radicalement inverse, qui risque de conduire à l'éclatement de la démocratie sociale dans notre pays.
Si l'on peut contester le mandatement dans son principe, il n'en contient pas moins un garde-fou, une garantie de base : les salariés mandatés sont désignés par les organisations syndicales représentatives et ne peuvent pas négocier hors du cadre de leur mandat. Or le II du texte proposé pour l'article L. 132-26 fait disparaître ce garde-fou.
La seule vraie solution consiste donc, comme le préconise M. Bernard Thibault, de rendre obligatoires les élections professionnelles dans toutes les entreprises, quelle que soit leur taille. C'est pourquoi nous proposons que toute négociation se fasse en présence soit d'un délégué syndical soit d'un salarié mandaté par un syndicat.
Pour cela, nous prévoyons que, dans les entreprises ou les établissements de moins de cinquante salariés dépourvus de délégués syndicaux, les accords soient conclus par un ou plusieurs salariés expressément mandatés pour une négociation, déterminée par une ou plusieurs organisations syndicales reconnues représentatives sur le plan national. Et surtout, nous prévoyons que l'accord signé par un salarié mandaté doit avoir été approuvé par les salariés à la majorité des suffrages exprimés. Ainsi, la responsabilité des organisations syndicales et la démocratie seront respectées.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. La commission a rejeté cet amendement, ainsi que les trois suivants qui ont le même objet.
Je suis étonné par le contenu de ces amendements. En effet, refuser de donner la possibilité aux représentants du personnel élus, donc légitimes aux yeux des salariés, de négocier des accords me semble contradictoire avec la volonté affichée par l'opposition de favoriser la démocratie sociale. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Mme Muguette Jacquaint. Ce n'est pas ce que prévoit le projet !
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. Une telle possibilité est-elle contradictoire avec le rôle des organisations syndicales ? A mes yeux, absolument pas !
Je rappelle que le Conseil constitutionnel, dans une décision de 1996, a souligné que les organisations syndicales ont une vocation naturelle à négocier, mais qu'elles n'ont pas le monopole des négociations.
Par ailleurs, j'observe que cette possibilité de négociation par les élus du personnel n'est utilisable que s'il n'y a pas de délégué syndical dans l'entreprise ou de délégué du personnel faisant fonction de délégué syndical.
J'ajoute que les élus du personnel ont souvent été présentés par des organisations syndicales, puisque celles-ci disposent d'un monopole de présentation des candidatures au premier tour des élections du personnel.
Je précise également que les accords conclus par les élus du personnel ne sont valides qu'après approbation par une commission paritaire nationale de branche, qui comprend naturellement les représentants des organisations syndicales.
Enfin, je ne peux qu'être étonné par la défiance de l'opposition vis-à-vis des élus du personnel,...
Mme Muguette Jacquaint. Vous n'avez pas à être surpris de notre défiance !
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. ... alors que le paragraphe VII de l'article 19 de la loi Aubry II avait prévu la même possibilité.
En conséquence, la commission a rejeté cet amendement.
M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Aubry-Jacquaint : même combat !
M. Gaëtan Gorce. Cette argumentation est un peu simpliste, monsieur le rapporteur !
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. Non, objective !
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement sur cet amendement ?
Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. Le Gouvernement est très attaché au développement du dialogue social dans les entreprises de moins de cinquante salariés. C'est d'ailleurs la position que les partenaires sociaux ont préconisée dans leur texte du 16 juillet 2001.
La rédaction proposée dans le titre II du projet de loi répond à l'ensemble des situations pouvant exister et vise à favoriser le dialogue social dans l'entreprise.
C'est d'abord à la branche qu'il revient d'organiser elle-même la négociation d'entreprise, selon des formes dérogatoires au droit commun : salarié mandaté, comité d'entreprise ou, à défaut, délégué du personnel.
Le Gouvernement est, pour ces motifs, défavorable à l'amendement.
Mme Muguette Jacquaint. Une dérogation de plus !
Mme la présidente. Souhaitez-vous intervenir, madame Jacquaint ?
Mme Muguette Jacquaint. Je ne suis pas convaincue !
M. Jean-Marie Geveaux. Ce n'est pas une surprise !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 120.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques, n°s 121, 236 et 291.
L'amendement n° 121 est présenté par M. Gremetz, M. Dutoit, Mme Jacquaint et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ; l'amendement n° 236 est présenté par MM. Vidalies, Gorce, Christian Paul et les membres du groupe socialiste ; l'amendement n° 291 est présenté par Mme Billard, M. Yves Cochet et M. Mamère.
Ces amendements sont ainsi rédigés :
« Supprimer le II du texte proposé pour l'article L. 132-26 du code du travail. »
La parole est à M. Frédéric Dutoit, pour soutenir l'amendement n° 121.
M. Frédéric Dutoit. Monsieur le rapporteur, s'agissant de cet amendement, vous n'apporterez sans doute pas la même réponse que sur le précédent. Je tiens à vous rappeler que le groupe communiste a proposé à plusieurs reprises - il a même déposé une proposition de loi en ce sens - que toutes les nouvelles organisations syndicales qui ont émergé depuis quelques années soient enfin officiellement reconnues et puissent participer à la négociation sociale. Votre argument qui consiste à prétendre que l'opposition - et pas seulement le groupe communiste - ne voudrait pas reconnaître la liberté de chaque salarié à être représenté par qui il veut tombe dans la mesure où même le Gouvernement refuse notre proposition.
Cet amendement vise, comme le précédent, défendu par Mme Jacquaint, à préciser que seule l'autorité syndicale est habilitée à négocier. En effet, la possibilité de conclure des accords normatifs avec des représentants élus non syndiqués fait disparaître toute obligation pour l'employeur d'avoir des interlocuteurs syndicaux, directs ou par mandatement interposé, pour pouvoir négocier un accord. Jusqu'à aujourd'hui, seuls les syndicats étaient habilités à négocier.
Le II du texte proposé pour l'article L. 132-26 du code du travail fait primer la non-syndicalisation. Or il convient d'affirmer plus fortement le rôle des syndicats plutôt que d'attribuer le pouvoir de négociation aux comités d'enteprise ou aux délégués du personnel non syndiqués, qui risquent de se retrouver coincés entre le marteau et l'enclume et obligés d'être à la « solde » des employeurs négociateurs.
Nous restons convaincus que la procédure du mandatement doit être privilégiée pour assurer la réussite du dialogue social, et ce même en l'absence de délégués syndicaux.
J'ajoute, monsieur le rapporteur, que nous avons proposé hier soir que tous les salariés puissent voter le même jour pour désigner leurs représentants au niveau de la branche ou au niveau interprofessionnel.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Vidalies, pour soutenir l'amendement n° 236.
M. Alain Vidalies. L'oeuvre est achevée. En d'autres termes, la coupe est pleine.
Avec ce texte, les accords de branche et les accords d'entreprise sont mis sur le même plan, mais, de plus, le champ dérogatoire, jusqu'à aujourd'hui réservé aux accords de branche, est ouvert aux accords d'entreprise. De plus, cet article prévoit que des accords d'entreprise peuvent être signés par des représentants élus non syndiqués. Cela commence à faire beaucoup. On en arrive à remettre en cause les principes fondamentaux du droit du travail, ce qui va bouleverser l'organisation des relations sociales dans notre pays.
Il est légitime de se demander ce qui se passe en l'absence de représentants syndicaux. Dans ce cas, deux réponses sont possibles : le recours aux délégués non syndiqués ou le mandatement, cette seconde possibilité présentant l'intérêt majeur de reconnaître la légitimité des organisations syndicales.
M. Frédéric Dutoit et Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait !
M. Alain Vidalies. Cette solution, que nous avions retenue dans la loi sur les 35 heures, a le mérite de consacrer le rôle des organisations syndicales.
On ne peut pas en permanence parler de dialogue social, et lorsqu'il s'agit de représenter les salariés dans le dialogue social, inventer le concept des délégués non syndiqués, ou, lorsqu'il s'agit de représenter les salariés dans les conseils d'administration, confier cette représentation aux seuls salariés actionnaires. Si quelqu'un doit représenter les salariés, c'est uniquement les organisations syndicales, dans leur diversité, bien entendu.
Le choix que vous faites sera très lourd de conséquences. Aussi, nous préférons supprimer la possibilité que vous ouvrez à des élus non syndiqués de représenter l'ensemble des salariés. Du reste, ce rôle ne leur est pas reconnu dans le code du travail. Dans le même temps, vous transformez le rôle des délégués du personnel ou des représentants au comité d'entreprise. C'est socialement une mauvaise action.
Bien entendu, vous me rétorquerez qu'il y aura, parallèlement à la solution proposée, celle du mandatement, mais si on utilise la grille de lecture de l'ensemble du projet de loi, on voit bien à quelle remise en cause des règles du dialogue social va aboutir l'application de ce texte.
Pour notre part, nous proposons que la solution de substitution retenue soit celle du mandatement, qui reconnaît la légitimité des organisations syndicales.
Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard, pour soutenir l'amendement n° 291.
Mme Martine Billard. D'abord, 97 % des entreprises n'ont pas de délégués syndicaux, tout simplement parce que la majorité des entreprises sont de petite taille. Certes, certaines d'entre elles n'ont qu'un seul salarié, mais beaucoup d'autres, employant plus de cinquante salariés, n'ont pas de délégués syndicaux.
Ensuite, le monopole syndical est tout de même très limité dans les PME puisque, souvent, lors du premier tour des élections des délégués du personnel ou des délégués au comité d'entreprise - tour où seules les listes syndiquées peuvent participer -, il n'y a pas d'élu. En revanche, les listes non syndiquées peuvent se présenter au second tour. De fait, aujourd'hui, 23 % des délégués du personnel sont non syndiqués.
Par conséquent, ouvrir la possibilité de faire signer des accords d'entreprise par des délégués du personnel ou des délégués au comité d'entreprise non syndiqués, au lieu de renforcer le syndicalisme - ce qui semble être le souhait de M. Fillon puisqu'il nous a expliqué vouloir un syndicalisme responsable -, risque d'avoir l'effet exactement inverse. Si l'on veut renforcer le syndicalisme, il faut que les délégués chargés de négocier des accords d'entreprise puissent s'adosser sur des syndicats - et c'est d'ailleurs l'objet d'un des amendements que j'ai déposés.
Actuellement, il doit y avoir un délégué du personnel dans les PME comptant entre onze et vingt-cinq salariés. Lors des négociations, le chef d'entreprise peut se faire accompagner de représentants de son choix, tandis que le délégué ne peut se faire accompagner, lui, que de son suppléant. Or un amendement de la majorité tend, au nom de la rentabilité des entreprises, à supprimer la possibilité pour le suppléant de siéger lors des réunions. Nous verrons quand cet amendement viendra en discussion quelles seront la position de la commission et celle du Gouvernement. En tout cas, actuellement, dans le meilleur des cas, lors des négociations, il y a deux salariés présents face au chef d'entreprise et aux personnes choisies par celui-ci.
Des salariés ont pu être élus pour défendre les intérêts de leurs collègues sur des propositions précises, pas pour renégocier des accords d'entreprise. Autoriser le recours à un délégué du personnel ou à un délégué du comité d'entreprise sans introduire l'obligation que ce recours soit validé d'une façon ou d'une autre par les confédérations syndicales risque d'entraîner un maximum d'accords d'entreprise de complaisance. Dans les PME, il n'y a pas de plans sociaux et vous pouvez être licencié assez facilement, c'est le moins qu'on puisse dire. Il est à craindre que beaucoup d'accords d'entreprise soient signés dans des situations totalement défavorables pour les salariés, parce que le salarié élu aura eu le couteau sous la gorge. Il devra signer l'accord ou se résigner à perdre son emploi.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. Rien n'empêche les organisations syndicales telles que SUD ou l'UNSA de prouver leur représentativité dans l'entreprise. Nous aussi, nous préférons que ce soient les syndicats qui négocient. Mais cet article répond à une réalité, que vous avez rappelée : dans les deux tiers des entreprises de plus de dix salariés, il n'y a pas de délégués syndicaux. La loi Aubry II, elle-même, dans son article 19, paragraphe VII, prévoyant également cette possibilité puisqu'elle stipulait que : « Dans les entreprises de moins de cinquante salariés dépourvues de délégués syndicaux, [...] les délégués du personnel peuvent négocier un accord collectif d'entreprise. »
Mme Martine Billard. Ce n'est pas mieux !
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. La formule proposée dans l'article 41 n'est possible que si un accord de branche l'a prévue. La validation des accords négociés ne peut ensuite se faire qu'après l'approbation des accords par une commission paritaire nationale de branche. L'accord ne peut entrer en application qu'après son dépôt auprès de l'autorité administrative, accompagné de l'extrait du procès-verbal de validation de la commission paritaire nationale de branche. Ces garanties ont été considérées comme conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 96-383 du 6 novembre 1996.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable aux amendements.
Mme la présidente. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 121, 236 et 291.
(Ces amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. M. Depierre et M. Barrot ont présenté un amendement, n° 194, ainsi rédigé :
« A la fin du premier alinéa du II du texte proposé pour l'article L. 132-26 du code du travail, substituer aux mots : "peuvent négocier et conclure des accords collectifs de travail les mots : "ou de l'institution unique résultant de l'article L. 461-1-1 peuvent négocier et conclure des accords collectifs. »
Cet amendement est-il défendu ?
M. Bernard Depierre. Il est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. Je comprends tout à fait l'esprit de cet amendement. Toutefois, j'observe qu'il n'existe pas, pour le moment du moins, d'institution unique de représentation du personnel résultant de l'article L. 461-1-1 du code du travail. La commission a donc logiquement rejeté cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. Le Gouvernement est favorable. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Gaëtan Gorce.
M. Gaëtan Gorce. Madame la présidente, c'est la deuxième fois - et je pense que ce n'est pas la dernière - que nous avons affaire à des amendements de cette nature. Surgissant au dernier moment, on n'a même pas pu obtenir une explication claire, ni de la part de ses auteurs, ni de la part du rapporteur, qui s'est prononcé défavorablement, ni enfin de la part du Gouvernement, qui s'est contenté d'émettre un avis favorable. Pourtant, ces amendements sont signés du président du groupe majoritaire de cette assemblée, le groupe UMP. Surtout, alors que ces amendements touchent aux institutions représentatives du personnel dans l'entreprise, ils n'ont jamais été discutés avec les partenaires sociaux, contrairement aux engagements pris dans ce texte.
Bref, on voit surgir une sorte d'OVNI juridique ou politique dans le paysage parlementaire dans des conditions, permettez-moi de le dire, assez ahurissantes puisque, je le répète, aucune explication ne nous est donnée sur le fond. La volonté de passer en force est claire.
Cette situation est d'autant plus inadmissible que nous allons devoir examiner tout à l'heure un amendement du même président du groupe UMP - qui n'est quand même pas n'importe quel député ni n'importe quel responsable politique - qui remet en cause certaines dispositions de la loi sur la réduction du temps de travail, en particulier en matière de calcul de la rémunération des heures supplémentaires. Je voudrais alerter cette assemblée sur la manière dont nous travaillons sur ces sujets. Que le groupe majoritaire, qui, depuis le début de ce débat, passe son temps à donner des leçons aux uns et aux autres sur le dialogue social, se permette ce genre de procédé est tout bonnement inacceptable ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Protestez ! C'est bien la preuve que je touche à un endroit qui vous fait mal !
Mme Muguette Jacquaint. Vous pourriez au moins le défendre, cet amendement, pour qu'on sache ce qu'il veut dire !
M. Gaëtan Gorce. L'opposition tient à dénoncer cette méthode, qui est non seulement contestable dans la forme mais également inacceptable sur le fond.
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.
M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. La contradiction apparente est due, je crois, à une erreur de numérotation. En effet, l'amendement fait référence à l'article L. 461-1-1 du code du travail qui n'existe pas. Il s'agit en fait de l'article L. 431-1-1. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Il semble que M. Depierre, qui est pourtant un redoutable spécialiste du droit du travail, se soit trompé, épuisé peut-être par les incessants allers et retours en commission.
M. Gaëtan Gorce. Je vous rappelle qu'on fait la loi, monsieur le président de la commission.
M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Il n'en reste pas moins que le code du travail comporte cette notion d'institution unique. Donc, soit l'amendement est adopté et il est redondant, soit il est retiré et les choses sont alors plus simples. C'est de toute façon purement technique.
Mme Martine Billard. Il est impossible de travailler ainsi !
Mme Muguette Jacquaint. On n'a même pas entendu ceux qui l'ont déposé !
Mme Martine Billard. Et le Gouvernement dit qu'il y est favorable !
M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Je viens de vous expliquer qu'il y avait eu une erreur de numérotation.
Mme Muguette Jacquaint. On a compris !
M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Je viens de m'en apercevoir à l'instant en cherchant à comprendre pourquoi les deux positions de la commission et du Gouvernement étaient différentes.
Ceux qui étaient à la commission, et vous n'y étiez pas, madame,...
Mme Martine Billard. Dans les réunions organisées au titre de l'article 88 du règlement, on voit dix amendement à la seconde !
M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. ... ont repoussé cet amendement pour les raisons simples qu'a données le rapporteur. S'il y a une contradiction, elle est due à une erreur de numérotation. C'est aussi simple que cela.
Mme la présidente. Madame la secrétaire d'Etat, le Gouvernement avait-il corrigé l'erreur pour donner un avis favorable ? Autrement dit, avait-il vu que l'amendement faisait référence à l'article L. 431-1-1 du code du travail au lieu de l'article L. 461-1-1.
Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. Tout à fait. Ma réponse intégrait l'article L. 431-1-1.
Mme Muguette Jacquaint. Cela méritait d'être précisé.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean Le Garrec.
M. Jean Le Garrec. Madame la présidente, je n'abuse jamais de ce genre de chose, mais je crois que nous aurions besoin d'une suspension de séance de cinq minutes pour clarifier la discussion. L'amendement qui nous est proposé n'est pas anodin.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Depierre.
M. Bernard Depierre. Compte tenu des différents éléments, nous retirons notre amendement. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Jean Le Garrec. Dans ces conditions, je retire ma demande de suspension de séance, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 194 est retiré.
Mme Billard, M. Yves Cochet et M. Mamère ont présenté un amendement, n° 290, ainsi rédigé :
« Compléter le premier alinéa du II du texte proposé pour l'article L. 132-26 du code de travail par la phrase suivante : "Ces représentants élus du personnel au comité d'entreprise et ces délégués du personnel doivent être expressément mandatés pour une négociation déterminée par une ou plusieurs organisations syndicales reconnues représentatives. »
La parole est à Mme Martine Billard.
Mme Martine Billard. Cet amendement vise à corriger l'inégalité introduite par ce texte, avec d'un côté, des salariés mandatés par des syndicats qui négocient en pouvant s'appuyer sur l'expertise syndicale et, de l'autre côté, des délégués élus qui peuvent n'avoir jamais eu aucune relation avec quelque syndicat que ce soit, qui n'ont pas été spécifiquement mandatés sur des sujets précis. Pour avoir travaillé dans une PME, je sais très bien que des délégués du personnel élus peuvent pratiquement ne rien connaître au code du travail. Ce n'est pas leur faute. Quand on n'est pas syndiqué, il peut être difficile de suivre une formation, ne serait-ce que faute de temps.
Alors que nous sommes en train de mettre en place dans des entreprises des accords dérogatoires aux accords de branche, il me semble important que les délégués soient mandatés par des organisations syndicales de façon qu'ils aient l'expertise de ces organisations syndicales. C'est ce qui avait été prévu pour mettre en place les accords de réduction du temps de travail, et le fait, monsieur le rapporteur, que la loi Aubry ait autorisé des délégués du personnel non mandatés par les organisations syndicales me paraît être une erreur. Fort heureusement, d'ailleurs, dans la majorité des cas, ce sont des salariés mandatés par les organisations syndicales qui ont négocié.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. Madame Billard, je respecte vos propos qui me paraissent tout à fait cohérents. Mais le dispositif proposé serait, lui, totalement incohérent.
Soit une organisation syndicale parvient à mandater un salarié, auquel cas c'est le dispositif de mandatement qui s'applique, soit il est fait recours aux élus du personnel et le mandat est, dans ce cas, inutile.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. La position du Gouvernement est défavorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard.
Mme Martine Billard. Monsieur le rapporteur, il n'y a pas de contradiction. Dans le cas d'entreprises dépourvues de délégué syndical et lorsqu'un procès-verbal de carence a établi l'absence de représentants élus du personnel, un salarié peut être mandaté par un syndicat. Dans l'autre cas, c'est-à-dire quand il existe soit un délégué CE, soit un délégué du personnel, celui-ci peut négocier des accords sans aucune assise syndicale.
Mon amendement prévoyait que, dans les deux cas, le délégué du personnel ou le simple salarié soit mandaté par une instance syndicale.
M. Frédéric Dutoit. Je suis pour.
Mme la présidente. La parole est à M. Francis Vercamer.
M. Francis Vercamer. L'argument de Mme Billard me paraît intéressant, l'idée étant de donner plus de représentativité, plus de légitimité aux organisations syndicales.
M. Jean Le Garrec. En effet.
M. Francis Vercamer. Mais si l'amendement me semble assez séduisant, comme d'ailleurs l'un de ceux de M. Gremetz hier, sur le même sujet, je pense qu'il n'est quand même pas très réaliste. Hier, M. Gremetz disait qu'il valait mieux avoir un salarié délégué, élu par les autres salariés, plutôt qu'un salarié mandaté, car, dans ce cas, on n'est pas sûr qu'il soit représentatif de l'ensemble des salariés dans l'entreprise. A présent, on essaie de faire un mixte entre les deux statuts, mais cela me paraît un peu difficile. En effet, le délégué du personnel n'a pas forcément envie d'être mandaté par une organisation syndicale, ce qui ne veut pas dire qu'il ne doit pas pouvoir contractualiser, ou négocier un accord avec l'employeur.
Mme Muguette Jacquaint. Il a été élu pour cela, quand même !
M. Francis Vercamer. Donc, il me semble préférable que le délégué du personnel soit mandaté pour avoir une structure derrière lui pour l'aider, je ne pense pas que cela doive être obligatoire. C'est pourquoi je ne voterai pas cet amendement, bien qu'il me paraisse séduisant.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 290.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. M. Depierre et M. Barrot ont présenté un amendement, n° 195, ainsi rédigé :
« Dans la première phrase du deuxième alinéa du II du texte proposé pour l'article L. 132-26 du code du travail, après les mots : "accords collectifs de travail, insérer les mots : "au sens du présent titre. »
Cet amendement est-il défendu ?
M. Jean-Marie Geveaux. L'amendement est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. La commission a rejeté l'amendement.
M. Gaëtan Gorce. Peut-on savoir ce dont il s'agit, monsieur le rapporteur ?
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. L'avis du Gouvernement est favorable.
L'amendement n° 195 a le mérite d'apporter une clarification juridique au texte présenté. Il précise que l'accord d'entreprise négocié et conclu avec les représentants élus du personnel, et donc selon un mode dérogatoire à la négociation collective, n'acquiert sa qualité d'accord collectif de travail qu'au sens du présent titre.
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. Madame la présidente, je me range à l'avis du Gouvernement, avec les derniers arguments qui viennent de m'être donnés.
M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. A titre personnel !
Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Dutoit.
M. Frédéric Dutoit. L'amendement n° 195 est tout à fait cohérent avec l'amendement n° 194. Mais alors que M. Depierre a retiré son amendement tout à l'heure parce qu'il semblait poser problème, on accepte celui-ci sans la moindre difficulté.
M. Jean Le Garrec. Ce n'est pas possible !
M. Frédéric Dutoit. Je crois qu'il y a vraiment un problème entre la commission, le Gouvernement et les auteurs des amendements, dont j'observe qu'ils ne sont même pas présents.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Vidalies.
M. Alain Vidalies. Premièrement, il y a un problème de cohérence.
Mme Muguette Jacquaint. Bien sûr !
M. Alain Vidalies. A partir du moment où l'amendement précédent a été retiré, je ne vois pas comment celui-ci pourrait subsister.
Deuxièmement, cet article n'est pas destiné à être codifié - je ne sais pas d'ailleurs, c'est bien là toute l'ambiguïté, comment on pourrait codifier les mots « au sens du présent titre », ce serait monstrueux. Si c'est également votre avis, madame la secrétaire d'Etat, je pense que votre explication, qui figurera au Journal officiel, suffira à ceux qui voudront faire l'exégèse du texte.
Ces amendements n'ont donc aucun intérêt ; ils ne font que créer la confusion, à moins que vous ne nous expliquiez quelles seraient les conséquences de la modification. J'estime par conséquent que, en l'état, il vaut peut-être mieux rester cohérent et retirer cet amendement, comme a été retiré l'amendement n° 194.
M. Jean Le Garrec. Tout à fait.
Mme Muguette Jacquaint. Bien sûr !
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Je ne sais pas si ces amendements méritent des débats aussi longs.
M. Alain Vidalies. La déclaration de Mme la secrétaire d'Etat suffit !
M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. En réalité, l'amendement sera codifié à l'article L. 132-26 du code du travail. Mais je crois que c'est davantage un amendement rédactionnel qu'autre chose.
M. Jean-Marie Geveaux. Un amendement de précision !
M. Frédéric Dutoit. Raison de plus !
M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Si l'avis du Gouvernement est favorable...
M. Gaëtan Gorce. Mais le précédent a été retiré !
Mme la présidente. J'observe que l'exposé des motifs des deux amendements est identique.
Mme Martine Billard. C'est cela qui est bizarre !
Mme la présidente. Monsieur Geveaux, retirez-vous l'amendement n° 195 ?
M. Jean-Marie Geveaux. Non !
Mme Muguette Jacquaint. Il aurait tort de le retirer, puisque le Gouvernement y est favorable !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 195.
(L'amendement est adopté.)
M. Jean Le Garrec. Quel bazar !
Mme la présidente. MM. Vidalies, Gorce, Christian Paul et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 237, ainsi libellé :
« Rédiger ainsi le début de la première phrase du premier alinéa du III du texte proposé pour l'article L. 132-26 du code du travail :
« Les accords de branche mentionnés au I peuvent prévoir que dans les entreprises dépourvues de délégué syndical des accords d'entreprise ou d'établissement sont conclus... (Le reste sans changement.) »
La parole est à M. Alain Vidalies.
M. Alain Vidalies. L'argumentation est la même que celle que j'ai développée tout à l'heure sur la nécessité de maintenir les syndicats comme des acteurs exclusifs du dialogue social et de ne pas inventer d'autres systèmes.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. Le débat a déjà eu lieu et la commission a rejeté cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. La position du Gouvernement est défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 237.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. M. Anciaux, rapporteur, a présenté un amendement, n° 58, ainsi rédigé :
« Après le premier alinéa du III du texte proposé pour l'article L. 132-26 du code du travail, insérer les deux alinéas suivants :
« Les organisations syndicales définies ci-dessus doivent être informées au plan départemental ou local par l'employeur de sa décision d'engager des négociations.
« Ne peuvent être mandatés les salariés qui, en raison des pouvoirs qu'ils détiennent, peuvent être assimilés au chef d'entreprise, ainsi que les salariés apparentés au chef d'entreprise mentionnés au premier alinéa des articles L. 423-8 et L. 433-5 du code du travail. »
Sur cet amendement, Mme Billard, M. Yves Cochet et M. Mamère ont présenté un sous-amendement, n° 390, ainsi rédigé :
« Dans le premier alinéa de l'amendement n° 58, après les mots : "départemental ou local, insérer les mots : "un mois avant par lettre recommandée. »
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 58.
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. L'amendement n° 58 apporte deux précisions importantes sur la mise en oeuvre du mandatement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. La position du Gouvernement est favorable.
Cet amendement vise d'abord à clarifier la transparence dans l'ouverture de négociations selon une forme dérogatoire au droit commun qu'est le mandatement des salariés. Cette information permettra aux organisations syndicales locales d'être informées par l'employeur de sa décision d'engager les négociations et de pouvoir ainsi mandater chacune un salarié.
Cet amendement vise ensuite à préciser les incompatibilités de désignation des salariés mandatés afin d'assurer l'indépendance de la négociation compte tenu du lien de parenté pouvant exister avec l'employeur ou des pouvoirs détenus pouvant conduire à une assimilation avec lui.
Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard, pour soutenir le sous-amendement n° 390.
Mme Martine Billard. L'amendement n° 58 me convient, mais je le trouve un peu vague. Je crois utile de préciser dans quelles conditions les organisations syndicales doivent être informées. Si elles devaient l'être par un coup de fil quarante-huit heures avant, il n'y aurait pas de réaction, c'est évident. Je suggère que l'information soit transmise, par lettre recommandée, à l'ensemble des organisations syndicales de la zone un mois avant le début des négociations, de façon qu'elles aient les moyens de réagir.
Certains me diront que le délai d'un mois est un peu long. Je sais par expérience qu'il faut laisser aux syndicats, compte tenu des faibles moyens dont ils disposent dans certaines branches, d'une marge pour réagir.
Je ne pense pas que ma proposition soulève de problème idéologique. En revanche, je crois qu'elle permet de régler une difficulté : on risque en effet de créer des contentieux sur le fait de savoir si l'employeur a réellement averti ou non les organisations syndicales.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. Ce sous-amendement n'a pas été examiné par la commission. A titre personnel, j'y suis défavorable car il est trop contraignant.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. Défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 390.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 58.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. M. Anciaux, rapporteur, a présenté un amendement, n° 386, ainsi rédigé :
« Compléter le deuxième alinéa du III du texte proposé pour l'article L. 132-26 du code du travail par la phrase suivante : "Faute d'approbation, l'accord est réputé non écrit. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. Cet amendement vise à préciser les conséquences de la non-approbation par les salariés d'un accord conclu par un salarié mandaté.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. Favorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 386.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. MM. Vidalies, Gorce, Christian Paul et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 238, ainsi rédigé :
« Dans le IV du texte proposé pour l'article L. 132-26 du code du travail, substituer aux mots : "aux II et le mot : "au. »
La parole est à M. Alain Vidalies.
M. Alain Vidalies. Cet amendement est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. Défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. Défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 238.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. MM. Vidalies, Gorce, Christian Paul et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 239, ainsi rédigé :
« Dans le IV du texte proposé pour l'article L. 132-26 du code du travail, supprimer les mots : ", par les représentants élus du personnel. »
La parole est à M. Alain Vidalies.
M. Alain Vidalies. Cet amendement est également défendu.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. L'amendement a été rejeté par la commission.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. Défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 239.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 41, modifié par les amendements adoptés.
(L'article 41, ainsi modifié, est adopté.)
Article 42
Mme la présidente. « Art. 42. - I. - L'intitulé de la section IV du chapitre II du titre III du livre Ier du code du travail est remplacé par l'intitulé suivant : "Commissions paritaires.
« II. - L'article L. 132-30 du code du travail est remplacé par les disposition suivantes :
« Art. L. 132-30. - Des commissions paritaires professionnelles ou interprofessionnelles peuvent être instituées au plan local, départemental ou régional, par accord conclu dans les conditions prévues à l'article L. 132-2.
« Ces commissions paritaires :
« 1° Concourent à l'élaboration et à l'application de conventions et accords collectifs de travail, négocient et concluent des accords d'intérêt local, notamment en matière d'emploi et de formation continue ;
« 2° Examinent les réclamations individuelles et collectives ;
« 3° Examinent toute autre question relative aux conditions d'emploi et de travail des salariés intéressés. »
MM. Vidalies, Gorce, Christian Paul et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 240, ainsi rédigé :
« Supprimer l'article 42. »
La parole est à M. Alain Vidalies.
M. Alain Vidalies. Je ne comprends pas très bien la nouvelle rédaction de l'article L. 132-30 du code du travail. La rédaction actuelle prévoit des protections particulières attachées au statut des salariés qui siègent dans les commissions paritaires locales, mais la nouvelle rédaction les supprime.
Je le concède, cet article n'est peut-être pas le mieux rédigé du code, mais on ne peut en tout cas supprimer les garanties dont bénéficient les salariés siégeant dans les commissions paritaires.
Notre amendement vise en fait à maintenir la rédaction actuelle.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. La commission a rejeté cet amendement.
L'article 42 tend, au contraire, à favoriser le dialogue social territorial et l'amendement n° 387 de la commission répond au souci de M. Vidalies.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. L'amendement vise à supprimer l'article 42 sous le prétexte que la nouvelle rédaction proposée pour l'article L. 132-30 du code du travail remettrait en cause les garanties individuelles et collectives des salariés siégeant dans les commissions paritaires locales. Tout au contraire, la nouvelle rédaction de cet article ne tend qu'à organiser le dialogue social territorial en prenant en compte les principes dégagés par la position commune.
Il s'agit d'une réécriture et d'une clarification de cet article, qui fixe le cadre des commissions paritaires locales. Les garanties individuelles et collectives des salariés qui siègent et qui siégeront dans les commissions locales s'en trouveront confortées. Tel est le sens de l'amendement n° 387 de la commission, que nous examinerons dans quelques instants.
Le Gouvernement est donc défavorable à l'amendement n° 240.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Vidalies.
M. Alain Vidalies. Aujourd'hui, une disposition figurant dans le code du travail prévoit la protection des salariés qui participent à la négociation. Je m'inquiète de la disparition de cette disposition.
Pour répondre en partie à mon argumentation, le rapporteur m'assure que l'amendement n° 387 ne rend pas nécessaire le maintien de la rédaction actuelle. Or, selon cet amendement, « les accords visés au premier alinéa fixent les modalités d'exercice du droit de s'absenter, de la compensation des pertes de salaires ou du maintien de ceux-ci, ainsi que de l'indemnisation des frais de déplacement de salariés appelés à participer aux négociations, de même qu'aux réunions des commissions paritaires ».
Il faut bien avouer qu'avec un tel amendement on passe d'une protection de droit commun à une protection conventionnelle, ce qui représente une vraie régression. Demain, les protections dont bénéficient ceux qui négocieront, quant à leur rémunération ou à leurs engagements, ils ne dépendront plus que de l'éventuel contenu de l'accord de branche, alors qu'actuellement ces protections s'exercent de droit.
Imaginez la situation dans laquelle se trouveront les négociateurs ! Jusqu'à présent, le code leur assurait un statut qui permettait de maintenir l'équilibre de la négociation, mais vous inventez un système dans lequel les négociateurs salariés devront négocier avec la partie patronale sur le contenu de leur propre protection.
On fait ainsi disparaître une protection statutaire résultant du code et on invente une protection dite conventionnelle. Quel beau concept on veut introduire dans notre droit du travail !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 240.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Mme Billard, M. Yves Cochet et M. Mamère ont présenté un amendement, n° 289, ainsi rédigé :
« Supprimer le I de l'article 42. »
La parole est à Mme Martine Billard.
Mme Martine Billard. L'article 42 peut sembler anecdotique. Il vise notamment à remplacer l'intitulé de la section IV du chapitre II du titre III du livre Ier du code du travail - « Dispositions particulières aux entreprises de moins de cinquante salariés » - par l'intitulé suivant : « Commissions paritaires ». De fait, les dispositions qui suivent s'appliqueront à l'ensemble des entreprises.
Dans sa rédaction actuelle, l'article L. 132-30 dispose que « des accords [...] peuvent regrouper au plan local ou départemental, professionnel ou interprofessionnel, les entreprises occupant moins de cinquante salariés. Ces accords instituent des commissions professionnelles ou interprofessionnelles, qui concourent à l'élaboration et à l'application de conventions . »
Cet article, qui permettait jusqu'à présent d'apporter un certain nombre de garanties aux salariés des PME, est tout d'un coup étendu à l'ensemble des salariés. Cela nous conduit à nous interroger. Si vous introduisez cette possibilité, c'est bien parce que vous partez de l'idée que, dorénavant, il pourrait y avoir des accords d'entreprise et d'établissement tellement différents des accords de branche qu'il conviendrait de recourir à des commissions paritaires, quelle que soit la taille des entreprises. On peut craindre que, dans certaines zones, le droit ne soit totalement différent de celui appliqué dans d'autres, et que l'on n'aille vers une uniformisation par le bas dans l'ensemble des entreprises du secteur pour ce qui concerne les garanties du droit social jusqu'à présent prévues.
C'est pourquoi je propose qu'on en reste à la rédaction actuelle du code du travail.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. Cet amendement a été rejeté par la commission.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. Défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean Le Garrec.
M. Jean Le Garrec. Ce qu'a dit Mme Billard est d'une grande importance.
L'accord de branche était protecteur. En passant à une vision paritaire, dont on ne sait pas très bien comment elle pourra fonctionner, on en vient à l'idée de dérogation, c'est-à-dire à une absence de protection des salariés. J'appelle l'attention du Gouvernement et de la majorité sur ce point. On veut créer, comme vient de le dire Mme Billard, une ouverture par le bas dont on n'est pas capable de mesurer les conséquences.
Je suis persuadé, mesdames, messieurs, que, lorsque, dans vos circonscriptions, vous expliquerez cela aux organisations syndicales et que vous exposerez les raisons pour lesquelles vous aurez voté l'article 42, vous vous trouverez dans une situation très difficile.
Prenez bien la mesure de ce qui se produira avec des accords paritaires dans des entreprises où, très souvent, la présence syndicale est très faible, voire inexistante !
A mon avis, l'article 42 est extrêmement dangereux. C'est le genre d'article qui aurait dû être soumis à une critique, à une négociation, et qui aurait dû faire l'objet d'une interpellation des organisations syndicales.
Vous verrez les dégâts que, dans vos circonscriptions, cet article provoquera !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 289.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, n°s 287 et 122, pouvant être soumis à une discussion commune.
L'amendement n° 287, présenté par Mme Billard, M. Yves Cochet et M. Mamère, est ainsi rédigé :
« Compléter le premier alinéa du texte proposé pour l'article L. 132-30 du code du travail par les mots et la phrase suivants : "afin de regrouper les entreprises occupant moins de cinquante salariés. Dans le cas de regroupement d'employeurs constitués dans les formes prévues à l'article L. 127-1, ce seuil d'effectif ne s'applique pas. »
L'amendement n° 122, présenté par M. Gremetz, M. Dutoit, Mme Jacquaint et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains, est ainsi rédigé :
« Compléter le premier alinéa du texte proposé pour l'article L. 132-30 du code du travail par les mots : "pour pouvoir regrouper les entreprises occupant moins de cinquante salariés. »
La parole est à Mme Martine Billard, pour soutenir l'amendement n° 287.
Mme Martine Billard. Cet amendement est défendu.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Paul, pour défendre l'amendement n° 122.
M. Daniel Paul. L'article 42 vise à organiser le dialogue social territorial en prenant en compte les principes dégagés par la position commune. Mais il va bien plus loin que la position commune.
M. Jean Le Garrec. Evidemment !
M. Daniel Paul. En effet, celle-ci ne prévoit que la possibilité d'assurer le cas échéant un dialogue social au niveau territorial. Or vous proposez d'étendre cette possibilité à la faveur d'une réécriture de l'article L. 132-30 du code du travail.
Le nouvel article L. 132-30 fixe le cadre des commissions paritaires locales en leur reconnaissant quatre grandes missions, dont une nouvelle. Mais la difficulté réside surtout dans le fait que vous dénaturez le sens de ces commissions, à l'origine instituées pour permettre aux petites structures dépourvues de délégués syndicaux de se regrouper pour mener une négociation collective, car vous faites sauter tous les niveaux de seuil. Il conviendrait plutôt d'inciter à l'organisation d'élections de représentation dans chaque entreprise.
L'amendement n° 122 tend donc à réintroduire les dispositions existantes pour les entreprises de moins de cinquante salariés. La rédaction actuelle ouvre la porte à la « désincitation » à la représentation syndicale dans l'entreprise. La non-fixation de seuils fait craindre que la disposition proposée puisse à terme se substituer aux règles normales de représentation du personnel, telles qu'elles sont prévues par le code du travail.
Si des organisations paritaires locales peuvent se constituer, elles doivent rester circonscrites aux très petites entreprises.
C'est un véritable cataclysme que vous risquez de provoquer dans le monde syndical et le monde de l'entreprise. Ce sera un jour noir pour le code du travail, que vous êtes en train de détricoter !
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur les deux amendements en discussion ?
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. La commission a rejeté ces deux amendements, estimant que l'ouverture du dialogue social territorial aux entreprises de plus de cinquante salariés est au contraire de nature à favoriser le développement de la négociation collective.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. Défavorable.
M. Daniel Paul. C'est fou !
M. Jean Le Garrec. Il n'y a ni débat ni explication !
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Paul.
M. Daniel Paul. Je suis surpris.
Nous sommes confrontés à un problème de fond. Or nous n'avons droit qu'à un avis lapidaire de la commission et à un avis tout aussi lapidaire du Gouvernement. Quant aux députés de la majorité présents dans l'hémicycle, ils n'ont aucune réaction, se contentant de lever la main pour voter.
Or l'article 42 est loin d'être anodin, monsieur le président de la commission ! S'il s'agissait d'une disposition anodine, je comprendrais que la discussion aille très vite, mais pas sur un article comme celui-là !
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Je rappelle à nos collègues que nous avons eu un long débat, qu'un rapport a été présenté, que trois motions de procédure ont été défendues et que chacun a eu l'occasion de s'exprimer largement.
Je rappelle également que le Gouvernement a demandé la réserve de deux articles, qui méritent, me semble-t-il, un débat plus approfondi que celui que nous avons en ce moment.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean Le Garrec.
M. Jean Le Garrec. Monsieur le président de la commission, je ne peux pas admettre ce genre d'argumentation. Ayant moi-même présidé la commission des affaires culturelles, je puis vous affirmer, à la suite de M. Daniel Paul, que l'article 42 n'est pas anodin. En conscience, j'estime qu'il mérite un débat de fond.
Quant à nos interrogations, elles ne traduisent nullement une attitude d'obstruction, qui n'est pas notre genre.
J'ai dit très clairement que nous avions des craintes concernant l'application de cet article sur le terrain. On ne peut donc expédier ainsi nos objections : il faut opposer à nos arguments d'autres arguments. Il est extrêmement dommageable que personne ne réponde à nos inquiétudes, qui sont réelles.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. Madame la présidente, l'ancien article L. 132-30 prévoyait déjà que les commissions paritaires pouvaient inclure des accords collectifs. Je ne vois pas où est le cataclysme !
Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard.
Mme Martine Billard. Mais cet article s'appliquait aux entreprises de moins de cinquante salariés.
M. Jean Le Garrec et M. Daniel Paul. Exactement !
Mme Martine Billard. Vous voulez introduire dans le code du travail la possibilité d'accords d'entreprise locaux concernant l'ensemble des entreprises et qui pourront être dérogatoires aux accords de branche. Il ne s'agit pas d'un petit cataclysme puisque vous prévoyez que les commissions « concourent à l'élaboration et à l'application de conventions et accords collectifs de travail », et qu'elles « négocient et concluent des accords d'intérêt local, notamment en matière d'emploi et de formation continue ».
De plus, une disposition concernant des accords sur la formation professionnelle a été votée au titre Ier.
Je remarquerai au passage que vous n'auriez pas dû faire référence à la « formation continue », expression qui a disparu du code...
M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Madame Billard, je vous en supplie ! Ne tombez pas dans la facilité !
Mme Martine Billard. C'est un petit détail, que je vous signale au passage.
Ce n'est pas n'importe quel article que vous voulez nous faire voter !
Il pourra donc y avoir des accords locaux entre les entreprises d'un territoire, qui ne seront alors plus sous la protection des accords de branche. Ce n'est pas un petit changement dans notre droit social !
Mme Chantal Brunel. Moi, cela ne me choque pas tellement !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 287.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 122.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Mme Billard, M. Yves Cochet et M. Mamère ont présenté un amendement, n° 288, ainsi rédigé :
« Après le premier alinéa du texte proposé pour l'article L. 132-30 du code du travail, insérer les deux alinéas suivants :
« Ces accords prévoient des modalités particulières de représentation du personnel des entreprises visées. Ils déterminent si les représentants du personnel sont désignés par les organisations syndicales représentatives ou élus par les salariés desdites entreprises dans des conditions prévues à l'article L. 423-14. Ces représentants exercent au moins les missions définies au premier alinéa de l'article L. 422-1. Ces accords doivent comporter les dispositions relatives aux crédits d'heures des représentants du personnel ainsi que celles relatives aux modalités d'exercice du droit de s'absenter, à la compensation des pertes de salaires ou au maintien de ceux-ci ainsi qu'à l'indemnisation des frais de déplacement des salariés représentants du personnel ou membres des commissions paritaires.
« En cas de licenciement, la procédure prévue aux articles L. 425-1 à L. 425-3 sera applicable aux salariés membres des commissions paritaires. »
La parole est à Mme Martine Billard.
Mme Martine Billard. Cet amendement concerne les garanties des salariés qui seront amenés à participer aux commissions paritaires. Il reprend strictement celles qui figurent dans le texte actuel de l'article L. 132-30, lequel protégeait jusqu'à présent les salariés, dans le cadre des commissions paritaires des entreprises de moins de cinquante salariés.
L'amendement n° 387 de la commission opère de ce point de vue un net recul.
On veut étendre la possibilité d'accords à l'ensemble des entreprises et on veut réduire dans le même temps les protections des salariés qui seront amenés à signer ces accords. Cela commence à faire beaucoup !
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement, qui est satisfait par l'amendement n° 387 de la commission,...
Mme Martine Billard. Non !
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. ... dont les dispositions s'ajouteront aux dispositions actuelles.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. Défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 288.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. M. Anciaux, rapporteur, a présenté un amendement, n° 387, ainsi rédigé :
« Compléter le texte proposé pour l'article L. 132-30 du code du travail par l'alinéa suivant :
« Les accords visés au premier alinéa fixent les modalités d'exercice du droit de s'absenter, de la compensation des pertes de salaires ou du maintien de ceux-ci, ainsi que de l'indemnisation des frais de déplacement de salariés appelés à participer aux négociations, de même qu'aux réunions des commissions paritaires. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. C'est un amendement de précision.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. Favorable.
M. Alain Vidalies. M. le rapporteur a dit que c'était un amendement important. Maintenant, il dit que c'est un amendement de précision !
Mme Martine Billard. Il faudrait savoir !
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Vidalies.
M. Alain Vidalies. Toute une série d'amendements déposés par l'opposition sur cet article 42 ont été repoussés au motif que M. le rapporteur avait proposé lui-même un amendement qui répondait à toutes nos préoccupations - et Dieu sait si elles sont graves ! Cet amendement supposait des explications. Ne voilà-t-il pas qu'il nous est présenté comme un amendement de précision !
Il est normal que l'on pose des questions. L'interprétation qui est donnée du texte, avant de servir aux praticiens du droit, sert au débat parlementaire. Sur un certain nombre de points, déjà, les questions posées par l'opposition ont fait évoluer le texte.
En l'occurrence, monsieur le rapporteur, nous vous demandons pourquoi vous avez retenu cette rédaction. Il est temps d'éclairer l'Assemblée sur votre initiative, d'autant qu'il ne s'agit pas que de nous : des dizaines de milliers d'entreprises sont concernées ! Et l'on ne manquera pas de se reporter à nos travaux pour connaître l'importance de votre amendement. J'imagine la tête d'un juge, en cas de débat d'interprétation, si un avocat lui répond : « Vous savez, cela n'avait guère d'importance, ce n'était qu'un amendement de précision. »
En conséquence, monsieur le rapporteur, si vous voulez donner à votre amendement l'importance qu'il avait jusqu'à cet instant, il vous faut l'expliciter.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. Je répète que cet amendement a été inspiré par l'article L. 132-17 du code du travail. Nous avons eu l'occasion d'en débattre. Il vise à préciser que l'accord instituant les commissions paritaires comporte des clauses relatives aux modalités d'exercice de leurs fonctions par les salariés y participant, en sus de celles figurant déjà dans le code du travail ou dans une convention de branche étendue.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 387.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 42, modifié par l'amendement n° 387.
(L'article 42, ainsi modifié, est adopté.)
Article 43
Mme la présidente. « Art. 43. - L'article L. 135-7 du code du travail est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. L. 135-7. - I. - Les conditions d'information des salariés et des représentants du personnel sur le droit conventionnel applicable dans l'entreprise et l'établissement sont définies par accord de branche. En l'absence d'accord de branche étendu, les modalités définies au II s'appliquent.
« II. - Au moment de l'embauche, le salarié reçoit de l'employeur une notice d'information relative aux textes conventionnels applicables dans l'entreprise ou l'établissement.
« L'employeur lié par une convention ou un accord collectif de travail doit fournir un exemplaire de ce texte au comité d'entreprise et, le cas échéant, aux comités d'établissement, aux délégués du personnel et aux délégués syndicaux.
« En outre, l'employeur tient un exemplaire de cette convention ou accord collectif à la disposition du personnel sur le lieu de travail. Un avis est affiché à ce sujet. »
M. Maxime Gremetz, M. Frédéric Dutoit, Mme Muguette Jacquaint et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 123, ainsi rédigé :
« Compléter la première phrase du I du texte proposé sous l'article L. 135-7 du code du travail par les mots : "et ne peuvent apporter moins d'informations que celles prévues au II de cet article. »
La parole est à Mme Muguette Jacquaint.
Mme Muguette Jacquaint. Nous avons un a priori positif sur les attendus de cet article. En effet, il nous paraît important que les salariés soient informés des conventions auxquelles ils sont soumis.
Mme Chantal Brunel. Ils le sont !
Mme Muguette Jacquaint. Vous reprenez là une disposition inspirée par la position commune, mais quelque peu différente, des premiers textes soumis pour avis aux organisations syndicales. Nous y reviendrons grâce à notre prochain amendement, mais je ne voudrais pas anticiper sur les débats à venir.
L'objet de cet amendement est d'assurer au salarié une correcte information sur le droit conventionnel applicable dans son entreprise. Le premier paragraphe de l'article 43 dispose que ces conditions d'information sont définies par accords de branche. Mais, à défaut d'accord sur ce point, vous prévoyez le minimum applicable en matière d'information.
Sur une question aussi importante, il convient de s'assurer que le principe de faveur est respecté, c'est-à-dire que l'accord de branche apporte des informations supplémentaires au minimum prévu au paragraphe II. En tout état de cause, cet accord de branche ne peut apporter moins d'informations que le minimum.
Un tel amendement, monsieur le ministre, ne peut souffrir aucune contestation.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. La commission a rejeté cet amendement, mais je tiens toutefois à remercier Mme Jacquaint de nous fournir, grâce à cet amendement, l'occasion de prouver que le principe de faveur n'est pas supprimé, contrairement à ce qui est dit parfois ici et là, sur ces bancs.
Cet amendement est inutile puisque la convention prévue au paragraphe I ne peut en aucun cas, en vertu de l'article L. 132-13 du code du travail, comporter des dispositions moins favorables que les garanties légales mentionnées au II de l'article 43 du projet de loi.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 123.
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Je remercie également Mme Jacquaint, tout en regrettant de ne pas pouvoir donner un avis favorable à son amendement. La rédaction de l'article 43 vise en effet à donner aux partenaires sociaux le moyen de définir eux-mêmes les conditions de l'information des salariés, puisqu'ils sont dans la plupart des cas eux-mêmes les auteurs des textes dont l'information doit être assurée. L'accord de branche, dont la validité est subordonnée désormais au principe majoritaire, est la meilleure garantie d'une bonne information que nous souhaitons tous.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 123.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, n°s 59 et 197.
L'amendement n° 59 est présenté par M. Anciaux, rapporteur ; l'amendement n° 197 est présenté par M. Depierre et M. Barrot.
Ces amendements sont ainsi rédigés :
« Dans la dernière phrase du I du texte proposé pour l'article L. 135-7 du code du travail, supprimer le mot : "étendu. »
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 59.
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. C'est un amendement de cohérence.
Mme la présidente. L'amendement n° 197 est-il défendu ?
M. Jean-Marie Geveaux. Oui, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Favorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 59 et 197.
(Ces amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements, n°s 124, 241 et 196, pouvant être soumis à une discussion commune.
L'amendement n° 124, présenté par M. Gremetz, M. Dutoit, Mme Jacquaint et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains, est ainsi rédigé :
« Dans le premier alinéa du II du texte proposé pour l'article L. 135-7 du code du travail, après le mot : "employeur, insérer les mots : "un exemplaire de la convention et. »
L'amendement n° 241, présenté par MM. Vidalies, Gorce, Christian Paul et les membres du groupe socialiste, est ainsi rédigé :
« Dans le premier alinéa du II du texte proposé pour l'article L. 135-7 du code du travail, substituer aux mots : "une notice d'information relative aux les mots : "un exemplaire des. »
L'amendement n° 196, présenté par M. Depierre et M. Barrot, est ainsi rédigé :
« Dans le premier alinéa du II du texte proposé pour l'article L. 135-7 du code du travail, substituer aux mots : "relative aux les mots : "sur l'existence des. »
La parole est à M. Frédéric Dutoit, pour soutenir l'amendement n° 124.
M. Frédéric Dutoit. Madame la présidente, compte tenu de la discussion qui a eu lieu à propos de l'amendement défendu par Mme Jacquaint, je ne doute pas que la commission et surtout le Gouvernement accepteront celui-là. En effet, le paragraphe II définit les conditions d'information du personnel en cas d'absence d'accord de branche étendu. Le premier alinéa prévoit que le salarié reçoit, au moment de l'embauche, une notice d'information sur le droit conventionnel applicable dans l'entreprise ou l'établissement. En raison de la fréquente lourdeur des documents conventionnels, une simple notice d'information semble constituer à la fois une obligation raisonnable et une information plus accessible pour le salarié que les documents eux-mêmes, selon notre rapporteur.
Je ne suis pas de cet avis, pour deux raisons. Tout d'abord, il convient de renforcer l'information des salariés sur le droit conventionnel en prévoyant que l'employeur fournit à celui-ci un exemplaire de la convention au moment de l'embauche. Cela ne fait obstacle, ni à la consultation sur place, qui reste un droit pour le salarié, ni à la mise en oeuvre d'une consultaton disponible sur intranet, ni même au bénéfice d'une notice explicative complémentaire. Ensuite, il s'agit de respecter les engagements envers les partenaires sociaux. Au moment des consultations, la rédaction du texte prévoyait un exemplaire de la convention, ce qui semblait satisfaire les partenaires sociaux, si l'on tient compte de ce qu'ils nous en ont dit au moment de nos différentes rencontres.
Pourquoi revenir sur cette solution ? Nous proposons d'en rester aux écrits initiaux, qui semblaient convenir aux partenaires sociaux. Je ne doute pas que cet amendement sera accepté par le Gouvernement.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Vidalies, pour soutenir l'amendement n° 241.
M. Alain Vidalies. Cet amendement est défendu.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Geveaux, pour soutenir l'amendement n° 196.
M. Jean-Marie Geveaux. Cet amendement précise l'article 43. Informer individuellement chaque salarié des textes conventionnels applicables dans l'entreprise concourt à l'efficacité du droit social et doit être approuvé. Cela étant, une simple indication de la liste des accords et de l'endroit où le salarié peut les consulter suffit. En prévoyant une « notice d'information relative à ces textes », le projet de loi laisse entendre que l'employeur doit établir une note résumant leur contenu. Or la pratique des notices relatives aux accords de retraite et de prévoyance démontre qu'elles sont génératrices de contentieux. Il nous semble que substituer les mots : « sur l'existence des » aux mots « relative aux » aboutit à une rédaction plus précise, qui permettrait d'éviter ces problèmes.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. Défavorable aux amendements n°s 124 et 241 et favorable à l'amendement n° 196.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Le Gouvernement n'est pas favorable à l'amendement n° 124 car il vise à donner aux salariés des exemplaires de la convention collective dont chacun sait que ce ne sont pas des documents d'une lisibilité parfaite. Le souhait du Gouvernement, qui est de donner une notice explicative, me semble aller dans le sens d'une meilleure information.
Sur l'amendement n° 241, avis défavorable.
Sur l'amendement n° 196, je voudrais expliquer la position du Gouvernement, également défavorable. Cet amendement vise à transformer la notice explicative proposée dans le projet de loi en une liste de documents. Or une telle liste ne saurait être considérée comme une information complète et claire pour le salarié. Autant remettre la convention intégrale n'est sans doute pas rendre un bon service en matière d'information du salarié, autant lui remettre la liste des textes qui s'appliquent à sa situation paraît beaucoup trop restreint par rapport à ce que nous avons voulu faire. Nous souhaitons fournir aux salariés un document explicatif, à caractère pédagogique, afin qu'ils puissent prendre la mesure des droits dont ils bénéficient. Adopter l'amendement n° 196, ce serait reculer par rapport à ce que le texte propose.
Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait !
Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Dutoit.
M. Frédéric Dutoit. Monsieur le ministre, très sincèrement, pensez-vous que les salariés sont incultes et incapables de comprendre les documents qui leur sont remis ? Je ne le crois pas. L'argumentation que vous avez développée pour rejeter notre amendement est complètement fallacieuse. Cette assemblée compte de nombreux salariés et je peux vous garantir qu'ils sont largement en mesure de comprendre les textes qu'ils lisent.
Mme la présidente. La parole est à Mme Chantal Brunel.
Mme Chantal Brunel. L'amendement n° 196 a l'avantage de la simplicité. La question est de savoir qui va rédiger cette notice explicative. S'il n'y a pas de notice de branche, ce sera à l'entreprise elle-même de le faire et, si la notice est mal rédigée, cela va entraîner des complications réglementaires.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Loin de moi l'idée de penser que les salariés ne sont pas capables de comprendre les conventions. J'ai simplement dit qu'elles ne sont pas toujours écrites dans un langage clair.
Je remarque que le salarié peut à tout moment obtenir la convention collective. Proposer de la distribuer à l'ensemble des salariés est très théorique. Cela n'aura pas de véritable impact sur la qualité de son information. En revanche, lui fournir une notice explicative correctement rédigée sur ses droits constituerait un progrès en matière d'information. C'est la raison pour laquelle j'insiste à nouveau auprès de la majorité sur la nécessité d'une telle disposition.
Mme Chantal Brunel. Mais qui doit la rédiger ?
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. La meilleure solution serait que la branche rédige la notice. Sinon, ce sera naturellement à l'entreprise de le faire.
Mme Chantal Brunel. C'est lourd !
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. C'est peut être lourd, mais c'est toujours mieux - en tout cas pour le salarié - qu'une liste de références qui n'a pas la valeur informative que nous avons voulu essayer de donner. C'est un élément important des équilibres que nous recherchons.
Mme la présidente. La parole est à M. Maxime Gremetz.
M. Maxime Gremetz. Nous avons déjà eu ce débat en commission. A entendre certains, aujourd'hui, à l'heure d'Internet, on n'aurait plus besoin d'écrit. C'est une idée que je combats. Car même s'il faut savoir utiliser toutes les technologies nouvelles, l'écrit est une composante du progrès et de l'intelligence. Sinon, autant supprimer tous les livres. Si j'en parle, c'est parce que cela me semble important. Et je trouve que la tendance générale qui est de se reporter systématiquement, par exemple, aux CD-Rom, c'est se moquer du monde !
Par ailleurs, il arrive fréquemment que dans les entreprises, les salariés ne savent même pas de quelle branche d'activité ils relèvent.
Mme Chantal Brunel. Il a raison !
Mme Muguette Jacquaint. C'est tellement complexe !
M. Maxime Gremetz. Ils sont nombreux, même parmi les syndicalistes, à ne pas savoir comment accéder à l'accord de branche ou à la convention collective. C'est l'abc. Mais pourtant, c'est la réalité.
Mme Chantal Brunel. En effet !
M. Maxime Gremetz. On a donc un effort à faire. Notre idée était simple : comme ce n'est pas tous les jours qu'une convention est signée, il est normal, si quelques modifications interviennent, qu'il en soit fait état.
Vous estimez que c'est exagéré. Peut-être.
Vous dites qu'on pourrait imaginer que ce soit la branche ou l'entreprise qui rédige une notice. Cela me plaît assez. Mais dès que les patrons doivent payer, vous vous insurgez un petit peu, à droite ! (Murmures sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Remarquez, dans les branches, ils sont forts ! Ils ont plein de fric. Leurs publications sont extraordinaires. Elles ne sont pas à petit budget, croyez-moi !
Mme Martine Billard. On les reçoit, en effet.
M. Maxime Gremetz. Moi qui ne suis plus employé dans la métallurgie, je les reçois toujours.
Cela dit, monsieur le ministre, je m'interroge et je demande que vous y réfléchissiez : qui peut traduire de façon lisible les choses essentielles pour les salariés dans les entreprises ? Qui sera le maître d'ouvrage de cette traduction ? Car qui dit traduction dit...
Mme Chantal Brunel et Mme Muguette Jacquaint. Interprétation !
M. Maxime Gremetz. Qui tiendra la plume ? Il faudra faire en sorte que ce ne soit pas seulement la branche professionnelle. Les deux parties devront se mettre d'accord sur un texte qui reflète parfaitement l'essentiel du contenu de l'accord de branche.
Mme la présidente. La parole est à M. Francis Vercamer.
M. Francis Vercamer. Je suis satisfait que le débat démarre enfin et amusé que ce soit sur un article plutôt consensuel puisqu'il traite de l'information du salarié.
Article consensuel, mais néanmoins important. L'Assemblée a voté le principe de dérogation, avec la question corollaire : le principe de faveur est-il battu en brèche ou non ? Chacun appréciera. Maintenant, il faut bien que le salarié sache comment il va être « géré », au sens social du terme.
On voit bien la difficulté et je pense, monsieur le ministre, que l'idée d'une notice est assez intéressante, parce qu'elle présente l'avantage de donner un caractère synthétique à l'information. Le problème, c'est qu'on ne s'adresse pas seulement aux grandes entreprises, mais aussi aux petites, qui n'ont pas forcément de service de communication ni même de service comptable. Comment vont-elles informer leurs salariés ? D'une manière qui risque de ne pas être tout à fait complète, voire erronée. J'imagine bien les litiges qui seront portés devant les prud'hommes ou l'inspecteur du travail à propos d'une notice que chaque partie interprétera à sa manière et qui ne correspondra ni à l'accord de branche, ni à l'accord interprofessionnel, ni même quelquefois à l'accord d'entreprise parce que, entre-temps, le délégué du personnel signataire de l'accord aura changé.
Une notice de synthèse remise à l'embauche permettra d'informer rapidement et synthétiquement le salarié, car si on lui donne dix bouquins il ne les lira pas ! Néanmoins, si l'on veut éviter qu'elle ne devienne source de litiges, il faut prévoir des garanties. Faut-il que les délégués du personnel ou même les deux parties signent la notice pour la valider ? Ou bien faut-il attendre un accord de branche qui décide du contenu ? Je n'en sais rien, mais le groupe UDF reste très prudent.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Geveaux.
M. Jean-Marie Geveaux. Monsieur le ministre, vous avez indiqué que la notice pourrait être rédigée au niveau de la branche ou, à défaut, par l'entreprise.
Or, dans les PMI et PME, il n'y a pas toujours de syndicats organisés sur lesquels l'employeur pourrait s'appuyer pour rédiger un document en commun. Nombre d'entre elles ne disposent pas non plus de services juridiques aptes à rédiger une notice claire et informative à l'intention des salariés.
Mme Chantal Brunel. Exactement !
M. Jean-Marie Geveaux. Voilà pourquoi notre amendement, qui a d'ailleurs été accepté par la commission, me paraît apporter une précision utile.
Mme Chantal Brunel. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Je crois que quelques précisions sont nécessaires.
D'abord, le projet vise à donner de nouveaux pouvoirs de négociation aux entreprises, et on ne peut pas considérer qu'elles n'ont pas les moyens de rédiger des notices, mais qu'elles ont les moyens de négocier des accords. Le corollaire de la plus grande liberté conventionnelle que nous voulons leur accorder est évidemment l'obligation d'assumer une meilleure information des salariés. Car plus il y aura de conventions conclues au niveau des entreprises et des branches, plus l'information du salarié devra être précise. Aujourd'hui, le nombre de textes est nécessairement moindre, puisqu'ils sont pris pour l'essentiel à un niveau supérieur.
C'est donc à une information plus large et plus précise des salariés que vise cet article. Mais peut-être y a-t-il, dans la manière dont nous évoquons ce sujet, quelques imprécisions. L'article 43 ne demande pas aux branches ou aux entreprises de résumer les conventions collectives, ce qui serait un exercice extrêmement difficile et douteux sur le plan juridique, mais de fournir aux salariés un document comprenant, outre le récapitulatif de l'ensemble des conventions et des accords collectifs que l'employeur applique dans son entreprise ou son établissement, l'indication du lieu et des modalités de consultation de ces textes dans les locaux de travail, éventuellement par intranet. Cette notice doit comporter des informations de base utiles à la compréhension des textes, mais ne saurait en aucun cas être un substitut à leur connaissance concrète et complète. Entre la liste pure et simple des textes, qui résulterait de l'adoption de l'amendement n° 196, et la proposition du Gouvernement, la différence réside au fond dans les informations permettant au salarié d'accéder facilement aux textes dont il a besoin.
Mais j'insiste encore une fois sur le fait qu'il est indispensable, si on veut donner à l'entreprise la liberté de négocier, de renforcer parallèlement l'information des salariés. Le Gouvernement avait sollicité une mission de l'IGAS à ce sujet en septembre dernier. C'est elle qui, après s'être notamment penchée sur les systèmes existant dans les autres pays européens, nous a amenés à faire cette proposition.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 124.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 241.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 196.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Mme Billard, M. Yves Cochet et M. Mamère ont présenté un amendement, n° 177, ainsi rédigé :
« Compléter le premier alinéa du II du texte proposé pour l'article L. 135-7 du code du travail par la phrase suivante : "La notice d'information contient également des éléments d'information sur les dispositifs juridiques contre les discriminations en milieu professionnel énoncés à l'article L. 122-45. »
La parole est à Mme Martine Billard.
Mme Martine Billard. Je pense, moi aussi, que cette notice d'information est bienvenue, parce qu'il n'est pas si facile de retrouver le texte d'une convention collective. En outre, c'est souvent un document volumineux et assez long à imprimer, que bien des salariés renonceraient à se procurer.
Je propose de compléter cette notice par des éléments d'information sur les dispositifs juridiques destinés à lutter contre les discriminations en milieu professionnel. Je sais bien que nul n'est censé ignorer la loi, mais je ne pense pas que tous les salariés vont consulter l'article L. 122-45 du code du travail pour savoir quelles sont les discriminations inacceptables. Or la seule obligation qu'ont les entreprises à cet égard est de rappeler dans leur règlement intérieur qu'il ne peut y avoir d'abus d'autorité en matière sexuelle ni de harcèlement moral, ce qui ne couvre pas l'ensemble du champ des discriminations.
On parle beaucoup, en ce moment, des discriminations à l'embauche dont sont victimes de nombreux jeunes en raison de leurs origines. Il serait donc utile que la notice comporte, non pas, bien entendu, l'ensemble des textes applicables en la matière, mais des éléments d'information sur les recours ouverts aux salariés pour faire valoir leurs droits et, à terme, sur l'autorité qui sera mise en place pour lutter contre les discriminations.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement. Faut-il, au moment de l'embauche, informer les salariés sur les dispositions en vigueur relatives à la lutte contre les discriminations ?
Mme Chantal Brunel. Oui ! Mme Billard a raison !
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. Le sujet est évidemment important. Mais pourquoi, madame Billard, s'en tenir aux discriminations visées à l'article L. 122-45 ? Pourquoi ne pas se référer également à l'article L. 123-1 ou encore à l'article relatif au harcèlement ? Toutes ces dispositions figurent clairement dans le code du travail et sont en outre reprises, en vertu de l'article L. 122-34, dans le règlement intérieur de l'entreprise.
Mme Martine Billard. Pas toutes !
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 177.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. M. Anciaux, rapporteur, a présenté un amendement, n° 60, ainsi rédigé :
« Dans le deuxième alinéa du II du texte proposé pour l'article L. 135-7 du code du travail, après les mots : "comités d'établissement,, insérer les mots : "ainsi qu' . »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. Amendement de clarification rédactionnelle.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Favorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 60.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. M. Anciaux, rapporteur, a présenté un amendement, n° 61, ainsi rédigé :
« Dans la première phrase du dernier alinéa du II du texte proposé pour l'article L. 135-7 du code du travail, après le mot : "exemplaire, insérer les mots : "à jour. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. Cet amendement vise à rappeler que l'obligation d'information des salariés n'est pas formelle et que les documents conventionnels en consultation dans l'entreprise doivent être actualisés.
M. Alain Vidalies. Très bien !
M. Maxime Gremetz. Nous sommes pour !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 61.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.
L'amendement n° 324 n'est pas défendu.
M. Anciaux, rapporteur, a présenté un amendement, n° 62, ainsi rédigé :
« Compléter le texte proposé pour l'article L. 135-7 du code du travail par l'alinéa suivant :
« Dans les entreprises dotées d'un intranet, l'employeur met sur celui-ci à disposition des salariés un exemplaire à jour de la convention ou de l'accord collectif de travail par lequel il est lié. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. Cet amendement prévoit la mise à disposition par l'employeur, sur l'intranet de l'entreprise, des documents conventionnels. Une telle modalité de consultation permettra un accès plus facile et plus discret des salariés à tous ces documents.
M. Frédéric Dutoit. Très bien !
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Favorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 62.
(L'amendement est adopté.)
M. Maxime Gremetz. Quand la mesure est bonne, nous la votons. Vous voyez que nous ne sommes pas sectaires !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 43, modifié par les amendements adoptés.
(L'article 43, ainsi modifié, est adopté.)
Mme la présidente. Nous en revenons aux articles et amendements précédemment réservés.
Article 38
(précédemment réservé)
Mme la présidente. « Art. 38. - Dans le code du travail, lorsqu'une disposition législative mentionne pour sa mise en oeuvre une convention ou un accord de branche, qu'il soit étendu ou non, après les mots : "accord ou convention collective de branche, sont ajoutés les mots : "ou accord d'entreprise ou d'établissement, à l'exception du dernier alinéa de l'article L. 212-4 et de l'article L. 213-2. »
Avant que je ne donne la parole à M. Frédéric Dutoit, inscrit sur l'article, souhaitez-vous intervenir, monsieur Gremetz ?
M. Maxime Gremetz. Oui, madame la présidente, sinon pour un rappel au règlement, du moins pour informer l'Assemblée à propos d'un sujet qui me tient à coeur.
Si je suis arrivé un peu en retard cet après-midi, c'est parce que j'ai rencontré des chômeurs qui ne toucheront plus aucune indemnité après le 31 décembre. Vous me direz que ce n'est pas à l'ordre du jour, mais M. le ministre nous a affirmé que des dispositions avaient été prises. Je veux simplement lui lire une lettre que m'a remise une femme qui est dans cette situation :
« J'ai trente-trois ans et je vis seule. Je suis à la recherche d'un emploi depuis un an, sans résultat malgré de nombreux envois de CV et de lettres de motivation. J'étais indemnisée 900 euros en moyenne et mes droits allaient jusqu'à fin février. A cause de la convention UNEDIC, mes droits s'arrêtent le 31 décembre. Je n'ai pas le droit à l'ASS et je vais aller m'inscrire au RMI. Je vais recevoir à peu près 360 euros, soit le montant de mon loyer ! Si je ne retrouve pas d'emploi, je vais devoir quitter mon logement. Pour faire quoi ? Aller habiter où ? Je ne sais pas, mais je ne pense pas être en mesure de retrouver un emploi dans ces conditions-là. »
Et ce n'est pas un cas isolé. Je pourrais vous parler d'une autre personne qui doit abandonner son logement ou encore de cette femme de trente-sept ans, avec deux enfants, qui voulait créer une entreprise et avait tout pour le faire, mais qui se retrouvera sans rien au 31 décembre.
Je vous demande, monsieur le ministre, de nous confirmer qu'il y a bien une solution pour ces gens qui sont dans le désespoir le plus total, et on comprend pourquoi. Cela les réconforterait à la veille de Noël.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur Gremetz, j'ai déjà indiqué que la plupart de ceux qui verront, du fait de la nouvelle convention UNEDIC, réduire leur période d'indemnisation, auront droit à l'ASS. A l'époque, cela a fait sourire l'Assemblée. Si la personne que vous venez d'évoquer n'a pas droit à l'ASS, cela veut sans doute dire qu'elle n'a pas travaillé au moins cinq ans durant sa vie professionnelle, puisque c'est cette durée qui ouvre droit à l'ASS.
Mme Martine Billard et M. Maxime Gremetz. Durant les dix dernières années !
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. C'est vrai. Il reste que la première solution est naturellement l'ASS.
Deuxièmement, j'ai donné à l'ANPE des instructions très précises pour que les personnes qui vont sortir du dispositif UNEDIC soient prioritaires dans l'accompagnement vers le retour à l'emploi et pour l'utilisation de tous les dispositifs existants.
Enfin - ce n'est que le dernier recours - il y a le filet de sécurité du revenu minimum.
Mme Martine Billard. Pas pour tous !
Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Dutoit, inscrit sur l'article 38.
M. Frédéric Dutoit. Cet article a fait couler beaucoup d'encre, au même titre que les articles 36 et 37. Il vient porter le coup de grâce de la remise en cause de la hiérarchie des normes.
Dans la dernière version de son projet, le Gouvernement a introduit cet article balai prévoyant que, dans tous les cas où la loi renvoie son application à un accord de branche, il conviendra désormais d'ajouter « ou accord d'entreprise ou d'établissement ».
Les raisons d'un tel ajout sont les suivantes. Dans une première version, monsieur le ministre, vous n'aviez prévu la possibilité de conclure des accords dérogatoires dans un sens défavorable au salarié que si la loi renvoyait pour son application à un accord de branche ou à un accord d'entreprise. Cette réserve limitait le champ de l'accord dérogatoire. Dans certains domaines, en effet, la loi renvoie seulement à l'accord de branche pour sa mise en oeuvre. Si, d'aventure, le Gouvernement était contraint de revenir sur sa première copie, il a entendu, dans cette éventualité, se prémunir pour pouvoir donner satisfaction au MEDEF sur la question essentielle du champ de l'accord dérogatoire, que le patronat souhaite le plus large possible.
Avec cet article, vous remettez en cause l'articulation de notre législation sociale en matière de droit du travail. Il permet - c'est gravissime et synonyme d'une régression sociale inacceptable - que l'application d'un texte législatif soit directement renvoyée au niveau d'une négociation d'entreprise et ne soit plus, comme c'était le cas jusqu'ici, négociée obligatoirement, au préalable, au niveau de la branche.
Mais l'important est la faculté désormais offerte aux entreprises de déroger aux accords de niveau supérieur - accords de branche et interprofessionnels -, qui équivaut à la mort de l'ordre public social. Est ainsi satisfaite la vieille revendication du CNPF, devenu MEDEF, de donner la priorité, dans la quasi-totalité des domaines, à la négociation d'entreprise, à un niveau où les syndicats sont plus faibles ou carrément absents, comme vous l'avez vous-même reconnu cet après-midi. A ce niveau, il est possible d'exercer sur eux, quand ils existent, et sur les salariés, même consultés par référendum, le chantage à la fermeture ou à la délocalisation vers des contrées plus accueillantes, où la notion même de droit du travail relève de la science-fiction.
La concurrence ainsi rendue possible pour obtenir le plus grand recul sur la seule variable d'ajustement reconnue - la valeur travail - est saluée par l'actionnaire. Le devenir des relations sociales, tel que vous le dessinez, imposera demain encore plus fortement qu'aujourd'hui l'exigence d'une démocratisation de la négociation collective, contre ces accords au rabais signés par des personnes sans légitimité véritable et pour une négociation majoritaire, en d'autres termes pour des accords qui ne seraient applicables qu'à la condition d'être représentatifs des aspirations de la majorité des salariés concernés.
Avec votre texte, le prétendu avènement de la négociation majoritaire est entouré de tellement de conditions qu'il en devient chimérique, ce qui renforce encore plus nos craintes.
Mme la présidente. Je suis saisie de cinq amendements identiques, n°s 115, 143, 232, 293 et 304.
L'amendement n° 115 est présenté par M. Gremetz, M. Dutoit, Mme Jacquaint, et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ; l'amendement n° 143 est présenté par M. Vercamer ; l'amendement n° 232 est présenté par M. Vidalies, M. Gorce, M. Christian Paul et les membres du groupe socialiste ; l'amendement n° 293 est présenté par Mme Billard, M. Yves Cochet et M. Mamère ; l'amendement n° 304 est présenté par M. Meslot.
Ces amendements sont ainsi rédigés :
« Supprimer l'article 38. »
La parole est à M. Maxime Gremetz, pour soutenir l'amendement n° 115.
M. Maxime Gremetz. Nous revenons à la question de fond, que nous n'avons d'ailleurs pas quittée. Mais il était sage de réserver ces articles de principe pour pouvoir les examiner avec vous, monsieur le ministre, car ce n'est pas sous-estimer Mme Versini de dire que le code du travail et les règles du dialogue social ne relèvent pas directement de sa compétence. La réserve nous aura donc permis non seulement de gagner du temps, mais surtout d'aborder avec vous une question que je n'hésite pas à dire fondamentale.
Comme vient de l'expliquer mon ami Frédéric Dutoit, nous sommes au coeur du problème, et le texte que vous proposez fait contre lui l'unanimité des organisations syndicales. Là, plus de déclaration commune ! Même ceux qui l'avaient signée condamnent la mise en cause d'un principe qui fonde notre droit du travail et notre législation sociale, ce fameux principe de faveur selon lequel tout accord doit améliorer la situation dans l'entreprise ou la branche par rapport à la loi. Tout accord, bien sûr, déroge à la loi, mais il ne le peut qu'en mieux. Seules sont autorisées les dérogations positives. Mais voici que vous nous proposez des dérogations négatives, avec des accords dérogatoires qui pourront remettre en cause toute une série d'acquis de la législation sociale. On pourra négocier des avantages à la baisse, ce qui ne s'est jamais vu dans une société comme la nôtre, où l'on a toujours amélioré la législation sociale et le code du travail.
Les progrès ont rarement été le résultat du bon vouloir des uns et des autres. Après le Front populaire, en 1936, c'est bien le général de Gaulle qui, à la Libération, avec les communistes, a fait progresser la législation sociale. Faut-il le rappeler, non pas au gaulliste historique, car vous êtes trop jeune, monsieur le ministre, mais au gaulliste de lignée historique que vous êtes,...
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. Très bien !
M. Maxime Gremetz. ... tout comme le rapporteur, d'ailleurs ? Vinrent ensuite les grands mouvements de mai et juin 1968, puis la victoire de la gauche, en 1981, suivie de réformes structurelles qui ont apporté des améliorations significatives.
Or, aujourd'hui, on nous propose de faire tourner la roue de l'histoire à l'envers et de revenir sur ces acquis. Certes, l'histoire nous apprend qu'il n'y a pas de fatalité du progrès : la Chine ou les pays arabes ont développé une grande culture civilisatrice puis régressé, avant de progresser à nouveau. Mais le droit du travail est fait par les hommes et pour les hommes. On ne peut donc pas accepter qu'il soit remis en cause. Monsieur le ministre, vous dites que la réforme des retraites a été acceptée, mais je vous promets des rebondissements, et plus importants que vous ne le pensez. Cela commence déjà, même dans cette période choisie, juste avant les fêtes de fin d'année. Et nous connaîtrons des jours un peu plus chauds. Le ministre de l'équipement nous promettait beaucoup de neige : elle pourrait fondre à la rentrée.
Méfiez-vous, là aussi, monsieur le ministre, de la réaction des organisations syndicales, en désaccord profond avec vous, et de celle des salariés quand ils se rendront compte de l'ampleur de ce que vous remettez en cause. Que se passera-t-il quand certains entrepreneurs s'engouffreront dans la brèche que vous ouvrez pour remettre en cause les 35 heures ?
Mme Martine Billard. Grâce à la dérogation !
M. Maxime Gremetz. Dans la métallurgie, que vont-ils nous pondre ? Et M. Seillière ? Et M. Sarkozy, dans le textile ?
Mme la présidente. Monsieur Gremetz, veuillez conclure.
M. Maxime Gremetz. Bref, nous insistons particulièrement sur le fait que nous voulons supprimer l'article 38 qui remet en cause le principe de faveur. Ce principe n'est pas un privilège : c'est un droit, une conquête sociale. Il fait partie du bloc de notre législation sociale. Nous ne pouvons pas le laisser remettre en cause.
Mme la présidente. Vous avez eu le privilège de dépasser votre temps de parole, monsieur Gremetz.
M. Maxime Gremetz. Excusez-moi d'avoir abusé de ce privilège...
Mme Martine Billard. C'était une dérogation. (Sourires.)
M. Maxime Gremetz. ... mais c'était pour la bonne cause.
Mme la présidente. La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l'amendement n° 143.
M. Francis Vercamer. Le groupe UDF a contesté l'article 36, qui pose le principe selon lequel la dérogation est possible, sauf si elle est interdite par l'accord de branche. Nous avons combattu cette disposition et nous avons proposé - malheureusement, nous n'avons pas été écoutés - d'accepter la dérogation, à condition qu'elle soit autorisée, c'est-à-dire qu'elle devienne l'exception. Comme cet amendement à l'article 36 n'a pas été accepté, à mon grand regret, je retire l'amendement n° 143, qui en était la conséquence.
Mme la présidente. L'amendement n° 143 est retiré.
La parole est à M. Alain Vidalies, pour soutenir l'amendement n° 232.
M. Alain Vidalies. L'article 38 est le plus préoccupant au plan social et le plus curieux au plan juridique, y compris dans la rédaction qui est proposée aujourd'hui par le Gouvernement.
Cet article a pour objectif d'élargir systématiquement le champ des dérogations de l'accord de branche à l'accord d'entreprise. Actuellement, le code du travail prévoit déjà un certain nombre de dérogations au niveau de la branche ou de l'entreprise, dans certains cas particuliers. A chaque fois, c'est le législateur qui a décidé et contrôlé la mise en oeuvre de ces dérogations. Aujourd'hui, le Gouvernement propose, dans un seul article de portée générale, que toutes les dérogations prévues par le législateur au niveau de la branche soient élargies aux accords d'entreprise.
En outre, comme on remet en cause, dans d'autres articles, la hiérarchie des normes - l'accord d'entreprise pouvant s'appliquer sans être contraint par l'accord de branche -, la possibilité de déroger à des dispositions importantes du code du travail par un simple accord d'entreprise se retrouve dans l'article 38.
Ces dispositions sont consignées dans un tableau qui figure aux pages 174 à 177 du rapport. Elles sont souvent d'une importance considérable pour la vie des entreprises et la situation des salariés. On trouve ainsi des dispositions relatives à la conclusion du contrat à durée déterminée, d'autres qui concernent le travail temporaire, ou encore le contingent d'heures supplémentaires - mettons de côté la durée maximale hebdomadaire du travail -, la dérogation à la durée du travail quotidienne et hebdomadaire, la dérogation au repos quotidien de onze heures, les équipes de suppléance...
Est-ce faire montre d'un esprit pernicieux que de se demander si, à partir du moment où vous autorisez une dérogation au niveau de l'entreprise sur les dispositions qui touchent toutes, peu ou prou, aux modalités de calcul de la durée du travail dans l'entreprise, vous ne vous dispensez pas d'attaquer explicitement, frontalement, les 35 heures, tout en obtenant un résultat strictement identique, monsieur le ministre ? Il me semble, en tout cas, que c'est la lecture que le Premier ministre a faite dans la déclaration que nous évoquions hier.
Cet article, même dans sa rédaction actuelle, pose évidemment un problème de constitutionnalité, puisqu'il s'agit là de l'application des dispositions de l'article 34 de la Constitution. Jusqu'à présent, chaque dérogation visait une disposition particulière du code du travail, c'est-à-dire qu'elle correspondait à une délégation expresse, au sens où l'entendent le Conseil constitutionnel et l'ensemble des commentateurs. Pouvons-nous passer d'une dérogation résultant d'une délibération expresse de l'Assemblée nationale à une délibération générale, alors que sont en jeu un principe général du droit - le principe de faveur - mais aussi des principes constitutionnels concernant la santé ou la sécurité des travailleurs, ou le principe d'égalité ? Pouvons-nous faire ce choix ? A la lecture des décisions du Conseil constitutionnel, je ne crois pas que l'on puisse accepter ce texte, car, s'il était validé - je ne veux pas présager de ce que sera la décision du Conseil constitutionnel -, il marquerait définitivement l'absence de tout contrôle et le renoncement à beaucoup de principes.
Il est vrai que cet article a déjà acquis une certaine notoriété, puisque le rapporteur lui-même nous a fait part - et je l'en remercie - de ses états d'âme, en tout cas des problèmes que soulève cette disposition. Ainsi, il écrit, pages 177 et 178 de son rapport, sous le tableau qui vise l'ensemble des dérogations : « Cet inventaire des dispositions concernées ne semble malheureusement pas suffisant pour adopter l'article en l'état, qui ne permet quasiment aucune des insertions projetées, même au prix d'une interprétation souple de l'article. » Et surtout : « Il convient donc de procéder à une réécriture de l'article prévoyant la modification pertinente de chacune des dispositions concernées dans ces différents codes. »
Monsieur le rapporteur, il vous appartient de nous dire de quelle manière vous entendez prendre en compte ces principes, qui étaient marqués du sceau du bon sens, pour nous faire des propositions. Pour l'instant, vous n'avez déposé aucun amendement ou sous-amendement en ce sens. Or, on ne peut pas porter un jugement aussi sévère sur la disposition quasi essentielle, en tout cas la plus importante, de ce texte, au regard de ses conséquences sur la vie des gens, sans nous faire des propositions. A moins que vous ne nous demandiez de rejeter l'article, mais vous ne le proposez pas.
Cet article est d'une importance considérable, puisque, je le répète, il prévoit que ces dérogations importantes peuvent s'appliquer au niveau de l'entreprise. C'est le choix que vous avez fait. Mais ce choix n'est pas combattu que sur ces bancs et par toutes les organisations syndicales de salariés, qui considèrent cette sorte de vision unique concentrée sur l'entreprise comme très dangereuse. Votre majorité ou le Gouvernement font souvent référence à leur attachement au développement et à la vie des petites entreprises et au dialogue social. Aussi auriez-vous été bien inspirés de prendre en considération le seul accord sur le dialogue social qui soit intervenu et mis en oeuvre : celui du 12 décembre 2001, qui a été conclu dans le secteur de l'artisanat et qui concerne 800 000 entreprises et 2 millions de salariés.
Cet accord a été signé par toutes les organisations syndicales, l'UPA, la CAPEB, et par plus de quinze branches professionnelles de l'artisanat. Or, la pétition de principe de cet accord est la suivante : « Toutefois, la complexité croissante du droit du travail et de la formation professionnelle, ainsi que la nécessité d'adapter les modes d'organisation du travail aux évolutions de l'emploi, des technologies, des besoins de la clientèle, des règles de la concurrence font de la branche professionnelle le niveau le plus approprié pour l'élaboration des dispositions les mieux adaptées aux besoins des entreprises artisanales et de leurs salariés. »
C'est exactement ce que nous disons. Or, là, ce sont à la fois des salariés et des entreprises qui vous le disent. Cela méritait d'être rappelé, au moment où nous abordons un article dont les conséquences seront d'une exceptionnelle gravité.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault.
M. Jean-Marc Ayrault. Dans le prolongement de ce que vient de dire mon collègue Alain Vidalies, je souhaite m'adresser au ministre des affaires sociales qui, comme moi, assistait il y a quelques instants au discours du Président de la République. J'ai entendu beaucoup de choses qui m'ont convenu, puisque le Président de la République a rappelé quelle était l'identité républicaine de la France. Parmi les valeurs qui fondent notre pacte républicain, il a insisté en particulier sur l'égalité entre tous les Français, quels que soient leur origine sociale ou nationale, la couleur de leur peau, ou leur sexe. Mais si je souscris au discours, je ne peux pas accepter la politique menée, qui contredit complètement l'affirmation de ces principes, car, avec ce projet de loi, vous êtes en train de renforcer l'inégalité entre les Français.
Monsieur le ministre, pour être élu d'une région où de grandes entreprises industrielles travaillent avec des entreprises sous-traitantes, vous savez bien qu'il existe déjà entre ces grandes entreprises de construction navale ou de construction aéronautique et les petites entreprises des différences de salaires très importantes qui posent de graves problèmes et sont douloureusement vécues par les salariés. Or, le projet de loi que vous faites voter à l'Assemblée nationale, sans accepter aucun amendement d'où qu'il vienne, accentuera et inscrira dans le marbre de la loi ces inégalités, alors que l'objectif devrait être, au contraire, de les faire reculer.
Certes, me direz-vous, la branche peut récuser les accords d'entreprise. Mais, vous savez bien que la diversité syndicale et votre refus sincère d'inscrire dans la loi les accords majoritaires permettront des accords dérogatoires au principe d'égalité, défavorables aux conquêtes sociales qui sont intervenues depuis des années dans notre pays.
Déjà, le Gouvernement a fait inscrire dans la loi le temps de travail à deux vitesses. Dans notre pays, il y a deux types de salariés : ceux qui sont à 35 heures et ceux qui ne le seront jamais. Vous savez bien que, autant les petites et moyennes entreprises et leurs salariés disposent d'un véritable savoir-faire, autant le dialogue social n'y est pas facile, car la représentation syndicale y est faible et les salariés n'osent pas forcément revendiquer, s'opposer à la proposition patronale. Je suis pour le dialogue social, la négociation et la recherche de compromis. Mais je ne peux accepter que la loi mette les salariés dans une telle situation de faiblesse, alors qu'elle devrait, au contraire, tout en favorisant le dialogue social, la négociation et la recherche du compromis, les protéger et mettre en place des filets de sécurité. Ce qui, actuellement, fait souffrir beaucoup de Français et ce qui les fait se décourager ou désespérer du pacte social républicain c'est l'insécurité sociale qui s'installe effectivement dans notre pays.
Vous savez bien qu'une telle insécurité nourrit les extrêmes. Vous devriez - vous êtes un républicain, monsieur le ministre, je le dis sans aucune réserve - vous interroger sur ces lois que, au fur et à mesure, vous faites voter par l'Assemblée nationale, une assemblée où l'UMP est ultra majoritaire et peut se permettre de faire ce qu'elle veut. C'est particulièrement grave. Vous êtes loin des inspirations du gaullisme social, vous qui faites entrer dans la loi de notre pays et dans la réalité sociale les inspirations d'un libéralisme pur et dur, qui aggrave la fracture civique dont souffre déjà notre pays.
M. Alain Vidalies. Très bien !
M. Jean-Pierre Gorges. C'est excessif !
Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard, pour soutenir l'amendement n° 293.
Mme Martine Billard. L'amendement n° 293 propose la suppression de l'article 38 dans son ancienne version. Mais je le maintiens à la lecture de la nouvelle version. Celle-ci prévoit un nouveau cas auquel il ne peut pas être dérogé, la durée hebdomadaire maximale de travail, mais il en reste, hélas ! encore un grand nombre. Je me contenterai de citer deux exemples.
Il est assez fantastique que vous ayez maintenu les dérogations possibles au repos quotidien de onze heures par accord d'entreprise, alors que se développent chaque jour davantage les forfaits-jour pour les cadres. Ainsi, tous les ingénieurs de la branche Syntec sont au forfait-jour. Celui-ci ne peut excéder 217 jours, selon le code du travail. Mais à ce forfait-jour pourra s'ajouter la dérogation au repos quotidien de onze heures : nous ne serons plus dans le cadre de la durée maximale hebdomadaire du travail. Dès lors, combien d'heures par semaine les ingénieurs des bureaux d'études et de la branche informatique vont-ils travailler ? On ne prend même plus en compte la capacité de reproduction de la force productive alors que onze heures de repos quotidien cela laisse tout de même treize heures de travail. Si l'on permet aux entreprises de déroger à la règle des onze heures de repos, jusqu'où va-t-on aller ?
Le deuxième exemple de ces dérogations possibles porte sur le temps partiel.
En la matière, l'une des avancées récentes qui prenait en compte les évolutions du monde du travail était la fixation d'une période minimale de travail continu, et la limitation du nombre d'interruptions d'activité supérieures à deux heures. Or il sera possible dorénavant de déroger à cette possibilité, entreprise par entreprise.
Aujourd'hui, dans la grande distribution, on sait que les contrats de travail sont majoritairement à temps partiel et qu'ils concernent essentiellement des femmes. Pour protéger celles qui ont opté pour le temps partiel des dispositions avaient été introduites dans l'article L. 212-4 du code de travail, afin d'éviter qu'elles puissent être obligées de travailler en plusieurs périodes, ce qui risquait de les contraindre à être présentes toute la journée dans l'entreprise ou dans ses parages.
En autorisant des dérogations à cet article, vous allez permettre aux entreprises de la grande distribution de proposer des contrats de travail à temps partiel obligeant ces femmes à travailler, par exemple, une heure en début de matinée, une ou deux heures le midi, au moment où les autres salariés sortent de leurs entreprises et viennent faire leurs courses, deux heures en fin d'après-midi, et ainsi de suite. De la même façon, les personnes embauchées en RMA pourront être obligées d'accepter des horaires totalement éclatés, puisqu'une personne employée dans ce cadre est bien évidemment soumise à l'accord d'entreprise.
Par conséquent, dans certains secteurs, quatre heures de travail pourront être étalées sur l'ensemble de la journée. Ainsi, un progrès social introduit récemment aura vécu puisqu'il pourra être battu en brèche par cette réforme que vous nous proposez, monsieur le ministre. Cela signifie que des femmes qui ont déjà beaucoup de mal à faire face aux besoins de leurs familles, qui sont souvent épuisées par les allers-retours, notamment dans les grandes agglomérations, car elles ont rarement les moyens d'habiter près de leur lieu de travail, auront des conditions de travail encore plus difficiles. On s'étonnera, après, qu'il y ait des problèmes avec les enfants de ces salariés qui ne pourront pas leur consacrer suffisamment de temps. Monsieur le ministre, en tant que femme, j'ai vraiment du mal à comprendre comment vous pouvez accepter une telle possibilité.
M. Jean-Marc Ayrault. Très bien !
Mme la présidente. L'amendement n° 304 n'est pas soutenu.
Sur le vote des amendements identiques n°s 115, 232 et 293, je suis saisie par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements de suppression ?
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. La commission a rejeté ces amendements.
La possibilité ouverte par l'article 37 de déroger, par accord d'entreprise, aux accords de branche n'a de sens que si l'on permet à la négociation d'entreprise d'intervenir dans les domaines de négociation traditionnellement ouverts au seul niveau de la branche.
Oui, monsieur Vidalies, en ma qualité de rapporteur, j'ai émis certaines critiques. Je me félicite d'ailleurs d'avoir été entendu par le Gouvernement puisque la nouvelle rédaction qu'il propose prend en compte les remarques que j'avais formulées avant et pendant son audition par la commission.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Madame la présidente, mesdames, messieurs les députés, il est un point sur lequel nous sommes tous d'accord : l'article 38 est essentiel. Il constitue en effet l'une des pièces maîtresses du dispositif que le Gouvernement vous propose et qui s'inspire très largement de la position commune.
Cet article consacre l'ouverture souhaitée du champ de la négociation collective au niveau de l'entreprise, laquelle, je le répète, est l'un des éléments clefs de l'équilibre trouvé par les partenaires sociaux dans la position commune qu'ils ont signée, après de longues négociations, seul document qui vaille à mes yeux.
Néanmoins, cette ouverture demeurera totalement encadrée par la loi, laquelle, madame Billard, constitue un solide filet de sécurité. Je le répète donc une nouvelle fois, parce que cela est utile : les accords ne pourront pas déroger à la loi. La dérogation ne sera possible qu'au regard des normes conventionnelles et seulement si des syndicats majoritaires, en nombre de salariés ou en nombre d'organisations, le décident.
Monsieur Vidalies, je reconnais qu'il y avait plusieurs principes de rédaction, mais nous avons retenu celui par lequel on affirme que, partout où le législateur a donné mandat aux partenaires sociaux pour mettre en oeuvre la loi, la négociation pourra se décliner dans les entreprises comme dans les branches. On aurait effectivement pu retenir un système qui aurait consisté à énumérer les articles du code ainsi modifiés. Je considère que les deux procédés sont équivalents.
Le rapporteur a d'ailleurs explicité la portée de l'article et nous avons pris en compte une partie de ses remarques dans un amendement du Gouvernement qui sera examiné dans quelques instants.
Sur le fond, chacun voit bien que l'équilibre du texte repose sur l'extension du champ de la négociation d'entreprise, d'une part, et sur l'extension sans réserve du champ de l'accord majoritaire, d'autre part.
L'argument d'inconstitutionnalité, auquel j'ai déjà répondu, aurait un sens s'il y avait un renvoi général et non encadré pour l'avenir. Or la mesure en cause ne vaut que pour le passé. Les dispositions visées par l'article 38 sont clairement délimitées ; elles ont d'ailleurs fait l'objet de tableaux précis.
A M. Ayrault je rappelle que l'insécurité sociale, les inégalités entre les Français selon les entreprises dans lesquelles ils travaillent ne sont pas des nouveautés. Elles correspondent à une réalité qui ne date pas d'aujourd'hui. A ce sujet, on peut s'interroger sur le point de savoir pourquoi un système aussi centralisé que le nôtre, qui a donné toute sa force et toute sa primauté à la loi, a abouti à autant d'inégalités entre les uns et les autres. C'est d'ailleurs un peu le même raisonnement qui, si je ne m'abuse, avait conduit les socialistes à soutenir, il y a quelques années, le principe de la décentralisation, alors même que nous avions été nombreux à penser, pendant longtemps, que c'était le système centralisé d'un Etat fort agissant dans le sens de l'intérêt général qui permettait d'assurer l'égalité des droits sur le territoire. Tout le monde reconnaît aujourd'hui que la décentralisation n'a pas accru les inégalités entre les territoires ; elle a même parfois permis de les réduire.
Les dernières inégalités entre les Français en matière de temps de travail, monsieur Ayrault, ont été créées par la loi de 1998. Elle a, d'ailleurs de manière définitive, séparé les Français en deux catégories : ceux qui avaient le droit de bénéficier des 35 heures et ceux qui n'y passeraient jamais car, malgré les textes de 1998 et de 2000, beaucoup de Français sont restés exclus du passage aux 35 heures. Il est donc injuste de reprocher à ce texte de créer des disparités en matière de temps de travail. Telle était - ô combien ! - déjà la réalité dans les lois de Mme Aubry.
De la même façon, le principe de l'accord dérogatoire - je l'ai indiqué à plusieurs reprises au cours de ce débat - n'est pas une innovation de ce texte. Certes, il l'amplifie et en augmente la portée, mais il a été introduit pour la première fois, monsieur Ayrault, dans les lois de M. Auroux en 1982, puis il a été confirmé dans les réformes mises en oeuvre en 1990.
En réalité, je pense que ce texte permettra une avancée sociale considérable que vous ne voulez pas voir ou que vous n'avez pas vue : l'introduction, pour la première fois, du principe de l'accord majoritaire, même si j'entends bien vos critiques sur le fait que nous n'allons pas assez loin. Peut-être n'allons-nous pas assez loin, mais vous, vous n'avez rien fait en la matière. Vous n'avez jamais mis en oeuvre de réforme permettant d'amorcer un mouvement vers l'accord majoritaire.
En revanche, nous avons enclenché ce mouvement, et ma conviction est qu'il se transformera en une vague qui emportera ce texte parce que les salariés, les organisations syndicales aspireront, une fois que la règle majoritaire aura commencé à être utilisée, à aller plus loin. Alors les réticences que j'ai pu rencontrer dans la préparation de ce projet auprès des partenaires sociaux eux-mêmes pour aller jusqu'au bout de la logique, c'est-à-dire à l'accord majoritaire pur et simple, finiront par disparaître. Ce sera la meilleure garantie et la meilleure réponse aux craintes que vous avez exprimées.
Mme la présidente. Nous allons maintenant procéder au scrutin, qui a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Je vais donc mettre aux voix les amendements n°s 115, 232 et 293 de suppression de l'article 38.
Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.
Je vais vous laisser quelques instants pour regagner vos places.
Mme la présidente. Le scrutin est ouvert.
Mme la présidente. Le scrutin est clos.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 32
Nombre de suffrages exprimés 30
Majorité absolue 16
Pour l'adoption 8
Contre 22
L'Assemblée nationale n'a pas adopté.
Le Gouvernement a présenté un amendement, n° 381, ainsi libellé :
« Rédiger ainsi l'article 38 :
« A compter de l'entrée en vigueur de la présente loi, lorsqu'une disposition législative du code du travail mentionne pour sa mise en oeuvre une convention ou un accord de branche qu'il soit étendu ou non, cette mise en oeuvre peut également faire l'objet d'un accord d'entreprise, à l'exception des cas visés à l'article L. 212-4, au deuxième alinéa de l'article L. 212-7 et à l'article L. 213-2. »
Sur cet amendement, MM. Vidalies, Gorce, Christian Paul et les membres du groupe socialiste ont présenté un sous-amendement, n° 391, ainsi rédigé :
« Compléter l'amendement n° 381 par les mots : "ainsi qu'aux articles L. 981-2, L. 981-3, L. 981-4, L. 981-5, L. 982-1, L. 982-2, L. 983-1, L. 983-4 du code du travail. »
La parole est à M. le ministre, pour soutenir l'amendement n° 381.
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Il s'agit de l'amendement que je viens d'évoquer.
L'article 38 généralise le renvoi à l'accord d'entreprise à chaque fois que le renvoi à l'accord de branche est déjà prévu. Cet amendement propose une rédaction qui tient compte des remarques formulées par le rapporteur et par plusieurs d'entre vous et tend à éviter de lier le champ d'application de la disposition à une terminologie qui, de fait, peut varier d'un article à l'autre dans le code du travail.
Il ajoute à ce renvoi un cas d'exception correspondant à la durée maximale hebdomadaire du travail.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. Elle a accepté cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Vidalies, pour soutenir le sous-amendement n° 391.
M. Alain Vidalies. Je relève d'abord que l'opposition peut parfois être utile.
M. Jean-Marie Geveaux. Pas toujours !
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Si, elle est même nécessaire !
M. Alain Vidalies. En effet, vous proposez d'ajouter l'article L. 212-7 dans la liste des dispositions qui ne pourront pas faire l'objet d'accords d'entreprise. Or j'avais évoqué ce moyen non pas au regard de considérations politiques, mais pour une simple question de bon sens. En effet, il s'agit du seul cas où, jusqu'à présent, il fallait un accord de branche, plus un décret, ce qui était assez ahurissant. Il était donc pratiquement impossible à vos services de mettre en oeuvre cette disposition. La solution est donc bien, fort heureusement, pour ceux qui en bénéficieront, de ne pas permettre de dérogations à ce sujet dans les accords d'entreprise.
Par ailleurs, monsieur le ministre, vous affirmez que cette nouvelle rédaction ne change rien à l'objectif affiché dans la première. Cela signifie que la discussion, y compris constitutionnelle, qui nous oppose sera arbitrée sur les mêmes bases. Pourtant, je m'étais interrogé, à la lecture de cette nouvelle rédaction de l'article 38, sur la portée de l'expression : « cette mise en oeuvre peut également faire l'objet d'un accord d'entreprise ». En effet, cela aurait pu laisser penser qu'un accord d'entreprise ne pouvait intervenir que s'il existait un accord de branche. Telle n'est pas l'interprétation que vous avez donnée. Cette dernière correspond d'ailleurs à la portée de l'utilisation du terme « également », dont la définition dans le Littré est bien « de même valeur ». Nous n'aurons donc pas de débat sur la portée de cette nouvelle rédaction, qui ne change rien au débat de fond que nous avons eu et qui sera arbitré par le juge constitutionnel.
Quant à notre sous-amendement, il tend à concourir à la cohérence de l'action gouvernementale. En effet, monsieur le ministre, vous nous présentez un texte en deux parties : l'une sur la formation professionnelle, l'autre sur le dialogue social. Vous précisez que vos propositions tiennent compte de la décision des partenaires sociaux. Je pense donc qu'il serait utile d'exclure d'ores et déjà des dérogations possibles les dispositions que nous avons inscrites dans la première partie sur la formation professionnelle, sauf à ne rien comprendre à ce que sont véritablement vos objectifs.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement ?
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. Ce sous-amendement n'a pas été examiné par la commission. A titre personnel, j'y suis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 391.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 381.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, l'article 38 est ainsi rédigé.
Les amendements n°s 117 et 116 de M. Gremetz et 233 de M. Vidalies n'ont plus d'objet.
Après l'article 38
(amendement précédemment réservé)
Mme la présidente. M. Anciaux, rapporteur, a présenté un amendement, n° 354, ainsi libellé :
« Après l'article 38, insérer l'article suivant :
« Après l'article L. 132-17 du code du travail, il est inséré un article L. 132-17-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 132-17-1. - Les accords de branche instituent des observatoires paritaires de la négociation collective. Ils fixent les modalités suivant lesquelles, en l'absence d'accord de branche portant sur le même objet, ces observatoires sont destinataires des accords d'entreprise conclus pour la mise en oeuvre d'une disposition légale. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. Il s'agit de la création de l'observatoire paritaire de branche.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Favorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 354.
(L'amendement est adopté.)
Article 39
(précédemment réservé)
Mme la présidente. « Art. 39. - La valeur hiérarchique accordée par leurs signataires aux conventions et accords conclus avant l'entrée en vigueur de la présente loi demeure opposable aux accords de niveaux inférieurs. »
La parole est à M. Maxime Gremetz, inscrit sur l'article.
M. Maxime Gremetz. Dans la version modifiée de son projet, le Gouvernement a isolé cet article selon lequel « la valeur hiérarchique accordée par leurs signataires aux conventions et accords conclus avant l'entrée en vigueur de la présente loi demeure opposable aux accords de niveaux inférieurs ».
Les syndicats considèrent que cet article est un garde-fou dans le sens où les accords déjà signés demeurent valides et conservent leur caractère hiérarchique. Ils expliquent, par exemple, que les accords sur les 35 heures déjà conclus ne pourront pas être remis en cause. Cependant, des interprétations différentes se font jour, l'article 39 venant percuter les articles 36 et 37.
Par conséquent, si, dans une entreprise, un accord pourra comporter des dispositions déjà négociées, donc encadrées par le « caractère impératif », de nouvelles dispositions pourront y déroger. Comment, dès lors, valider l'accord ? Si la « valeur hiérarchique » est « accordée par les signataires », ceux-ci ne pourront-ils pas décider qu'il sera possible de déroger à une clause ? Jusqu'à présent, les conventions collectives - je vous le rappelle, monsieur le ministre - n'apportaient pas ces précisions, car cela n'était pas utile. Pourra-t-on vraiment, en application de l'article 39, empêcher ce que l'article 36 autorise ?
Vous avez parlé de garde-fou et les syndicats ont employé la même expression. Il y aurait donc un risque à vouloir les prévoir ?
Le premier garde-fou que vous défendez, monsieur le ministre, est celui selon lequel la dérogation par accord d'entreprise ne serait possible que si l'accord de branche ou l'accord interprofessionnel ne s'y opposait pas. Toutefois, ceux qui sont actuellement en vigueur ont été conclus sous le régime actuel. Ils n'ont donc jamais eu à prévoir, et pour cause, puisque la question ne se posait pas, une telle interdiction.
Le deuxième garde-fou serait que la valeur hiérarchique des accords déjà signés ne pourrait être remise en cause.
Cela étant, un accord déjà signé peut toujours être dénoncé. Nombre de salariés dont la convention collective a été dénoncée au cours de ces dernières années sont payés pour le savoir.
Voilà donc les « garde-fou » !
En réalité, il s'agit d'une protection en trompe-l'oeil, car aucun signataire d'un accord n'a « accordé » une quelconque valeur hiérarchique aux clauses des accords signés, pour la simple et bonne raison que cette valeur hiérarchique ne pouvait pas faire l'objet de la négociation et qu'elle était déterminée par la loi.
Dans ces conditions, il est facile d'imaginer quelle interprétation sera faite, demain, de cette disposition. Ainsi, dès lors que les signataires des clauses d'un accord de branche fixant le montant des indemnités de licenciement n'auront rien dit de la valeur de ces clauses, un accord d'entreprise pourra fixer des montants moins favorables.
La rédaction retenue pour cet article est plus qu'hasardeuse et mériterait, sinon une réécriture, au moins des engagements fermes de votre part, monsieur le ministre.
Quelle réponse apportez-vous d'ailleurs à cette interrogation : l'article 39 protège-t-il, dans tous les cas, c'est-à-dire quel que soit le type de rédaction adopté par les signataires, le principe de faveur pour les conventions et accords collectifs existants ?
Par exemple, l'accord du bâtiment prévoit un contingent d'heures supplémentaires de 145 heures par an et par salarié. Un accord d'entreprise conclu dans une entreprise de ce secteur pourra-il fixer un contingent supplémentaire plus élevé, éventuellement jusqu'à 423 heures - quarante-sept semaines multipliées par neuf heures hebdomadaires - ou, au contraire, votre projet de loi interdit-il à un tel accord de fixer un contingent supérieur à celui prévu par l'accord de branche existant ?
Dans la seconde hypothèse, il faut alors dissiper les incertitudes. En effet, les signataires précisaient rarement, pour ne pas dire presque jamais, la valeur hiérarchique qu'ils accordaient à une convention, puisque cela était inutile en raison, justement, de l'existence du principe de faveur ou de l'impossibilité de déroger à certains textes par simple accord d'entreprise.
Voilà autant de questions, monsieur le ministre, autant de contradictions, qui existent, me semble-t-il, dans votre texte et qui méritent au moins que vous fassiez toute la clarté sur ces points précis. Vous verrez que, à moins de faire de la haute voltige, vous n'arriverez pas à surmonter ces contradictions, parce qu'elles sont insurmontables !
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, n°s 234 et 292, pouvant être soumis à une discussion commune.
L'amendement n° 234, présenté par M. Vidalies, M. Gorce, M. Christian Paul et les membres du groupe socialiste, est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi l'article 39 :
« Une convention ou un accord collectif ne peut comporter des clauses moins favorables que celles des conventions et accords d'un niveau supérieur conclu avant la publication de la présente loi. »
L'amendement n° 292, présenté par Mme Billard, M. Yves Cochet et M. Mamère, est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi l'article 39 :
« Une convention ou un accord ne peut comporter des clauses moins favorables aux salariés que les clauses des conventions et accords couvrant un champ territorial ou professionnel plus large, signés avant la date d'entrée en vigueur de la présente loi. »
La parole est à M. Alain Vidalies, pour soutenir l'amendement n° 234.
M. Alain Vidalies. Monsieur le ministre, quand vous vous exprimez sur cet article qui est dit de « sécurisation » - qui, normalement, doit donc interdire toute remise en cause des accords existants -, vos propos semblent correspondre à l'attente des organisations syndicales. En tous les cas, vous vous exprimez d'une façon dépourvue d'ambiguïté. Les choses sont claires.
La difficulté vient de la rédaction que vous avez choisie pour l'article 39, qui ne prêterait à nulle discussion n'était l'expression « accordée par ». Elle n'ajoute rien au texte et, si on la supprime, comme le propose mon amendement, et qu'on la remplace par « reconnue par », la rédaction est simple et claire, et il n'y a plus aucune difficulté d'interprétation.
Il me semble que vous pourriez accepter mon amendement puisqu'il correspond aux propos que vous avez tenus jusqu'à présent. Mais si vous le refusez, et que vous maintenez cette expression qui n'apporte rien au texte, dont personne ne peut démontrer qu'elle serait plutôt favorable aux salariés et qui est source d'incertitude juridique pour tout le monde, nous ne pouvons qu'être inquiets.
Je crois comprendre pourquoi elle a été choisie, car on en retrouve une similaire dans quelques arrêts de la Cour de cassation, mais ce n'est pas une motivation suffisante pour la mettre en l'état dans la loi.
M. Gremetz l'a déjà dit, dès lors que, s'agissant des rapports entre les conventions de branche et les conventions d'entreprise, votre texte est rédigé de telle sorte que tout ce qui n'est pas interdit est autorisé, alors que vous nous demandez d'accepter l'inverse et de permettre expressément des dérogations au niveau de l'entreprise, nous ne pouvons que nous interroger, surtout si l'on compare ce choix à celui que vous avez fait pour la rédaction des articles précédents. Vous pourriez apaiser nos inquiétudes, d'autant que vous vous êtes exprimé sans nuance à propos de la « sécurisation », nous sommes prêts à vous en donner acte.
Les commentaires d'observateurs de plus en plus nombreux, tant au Parlement, dans au moins trois groupes, que chez les experts du droit du travail, visent de plus en plus cette expression. Nous sommes donc au pied du mur : si vous la maintenez, il vous faut préciser sa portée et ce qu'elle apporte à une rédaction qui est limpide.
Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard, pour soutenir l'amendement n° 292.
Mme Martine Billard. En général, ce qui est clair s'énonce clairement ! Or là, nous sommes contraints à l'exégèse : c'est dire qu'il y a un petit problème ! C'est d'autant plus étonnant que nous sommes en période de simplification administrative, une simplification bienvenue, d'ailleurs, si l'on en croit les exemples cités hier dans différents médias. Nos textes de loi ont grand besoin de clarification !
Comme l'a dit Alain Vidalies, il est surprenant, alors que tous les autres articles sont rédigés clairement, que, dans celui-ci, vous donniez l'impression de tourner en rond et de ne pas dire clairement que les accords et les conventions signés jusqu'ici ne peuvent pas comporter de clauses moins favorables. Si c'est réellement ce que vous voulez, pourquoi ne pas l'écrire ? Du reste, cela ne concernera que les conventions encore en vigueur. Celles qui ont été dénoncées, comme la convention du commerce de centre-ville, ne protégeront plus rien, et il pourra y avoir très rapidement des accords d'entreprise dans ce secteur.
Mais pour les autres, s'il n'est pas dit clairement qu'il ne peut pas y avoir d'accord dérogatoire tant qu'il n'y a pas renégociation des conventions de branche, vous ouvrez pour demain la porte à d'innombrables contentieux dans toutes les branches. Il s'agira de savoir si, à l'époque où il n'était pas besoin de préciser la valeur hiérarchique, cette valeur était implicite ou ne l'était pas. On ira ainsi de tribunal en Cour de cassation et, pendant ce temps, les salariés se retrouveront, une fois de plus, dans une situation inconfortable, sans savoir ce qui est autorisé et ce qui ne l'est pas !
Monsieur le ministre, si aucune des deux rédactions que nous vous proposons, Alain Vidalies et moi-même, ne vous convient, proposez au moins une rédaction plus claire pour l'article 39.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. M. Vidalies me paraît plutôt avoir défendu l'amendement suivant, n° 235.
Quant aux amendements n°s 234 et 292, qui sont présentés comme des amendements de clarification, la commission, ne partageant pas ce point de vue, les a repoussés.
L'article 39 vise à sécuriser les conventions et accords conclus avant l'entrée en vigueur de la loi. Ces amendements auraient pour effet de rendre illégaux l'ensemble des accords dérogatoires conclus, par exemple en matière de durée du travail, avant l'adoption de la loi. Il s'agit donc là d'une source d'insécurité juridique majeure, d'une atteinte à l'économie des contrats légalement conclus et à la liberté contractuelle, que ne manquerait pas de relever le Conseil constitutionnel.
En outre, on peut penser que les partenaires sociaux y seraient extrêmement défavorables, dès lors que l'article 39 reprend strictement, quant à lui, les termes de la position commune.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. L'article 39 pose le principe que les nouvelles règles du projet relatif à la hiérarchie des normes conventionnelles ne s'appliqueront qu'aux conventions et accords conclus postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi. Toutefois, la volonté des partenaires sociaux sera respectée dans les cas où ceux-ci, avant même cette entrée en vigueur, avaient souhaité prévoir, notamment dans les accords de branche, des renvois à des accords de niveau inférieur permettant des adaptations ou prévoyant des options à la discrétion des accords.
S'agissant de la rédaction, je confirme à M. Vidalies l'interprétation que j'ai donnée tout au long de ce débat de la valeur de cet article. Il s'agit bien de faire en sorte qu'il n'y ait pas de remise en cause des conventions passées. Et les termes que nous avons choisis - et c'est pourquoi je ne peux pas accéder à sa demande de modifier la rédaction - reprennent mot pour mot ceux de la position commune. Or il est inutile de vous dire que cet article de la position commune a tout particulièrement fait l'objet de longs débats entre les partenaires sociaux.
Je vous le lis : « Cette disposition ne remet pas en cause la valeur hiérarchique accordée par leurs signataires aux accords conclus avant son entrée en vigueur. » Nous avons repris intégralement la rédaction de la position commune, à la satisfaction des partenaires sociaux, du moins de ceux qui ne souhaitaient pas que soient remis en cause les accords conclus avant l'entrée en vigueur de cette loi.
Mme la présidente. La parole est à M. Francis Vercamer.
M. Francis Vercamer. Cet article suscite quand même des interrogations. J'aurais pu, il est vrai, les évoquer en début d'article, mais j'ai préféré le faire à l'occasion d'un amendement qui permet, éventuellement, de discuter.
Je poserai deux questions à propos de cet article.
La première concerne les accords de branche ou interprofessionnels qui seraient rendus caducs par une disposition législative. En effet, une partie d'un accord pourrait être rendue caduque. Je prendrai un exemple simple, celui des jours fériés, et vous comprendrez aisément ce choix, puisqu'un projet de loi relatif à un jour férié est actuellement évoqué.
M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Kippour ?
M. Francis Vercamer. Non, le lundi de Pentecôte ! Un tel texte pourrait remettre en cause les accords relatifs à la réduction du temps de travail. Ce ne serait pas le fait des partenaires sociaux, mais de la loi. Cela signifierait-il que, dès lors, toutes les entreprises pourraient déroger à cet accord rendu caduc ? Faudrait-il considérer qu'il n'existe plus, et que cet article ne s'applique donc pas, ou au contraire continue-t-il à s'appliquer ? En d'autres termes, peut-on déroger ?
La seconde question est du même ordre, et concerne les dérogations qui interviendraient avant qu'un accord de branche les interdise. Je prendrai le même exemple : la loi modifie les dispositions relatives aux accords interentreprises - du moins, les accords de branche sur la RTT. Puis, après le temps de la négociation, sont conclus un certain nombre d'accords d'entreprise qui dérogent à l'accord de branche. Cet accord de branche, qui l'interdit, s'applique-t-il aux accords conclus antérieurement, ou non ?
Il s'agit de problèmes assez importants, car des litiges pourraient apparaître. Ces accords d'entreprise sont-ils valables, ou non ?
Voilà donc, monsieur le ministre, les deux questions que je me posais, et sur lesquelles je souhaiterais que vous nous précisiez la position du Gouvernement.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Vidalies.
M. Alain Vidalies. J'entends les explications de M. le ministre. La rédaction que nous souhaitions pour l'article 39 serait beaucoup plus claire, mais je souhaite que nous puissions parvenir à un résultat qui évite autant que possible les ambiguïtés sur cet article.
Je prends donc acte de ce que vient de nous dire M. le ministre : si cette rédaction a été choisie, c'est d'abord parce qu'elle correspondait à celle de la déclaration commune - ce qui ne me semble pas suffisant pour le législateur -, mais surtout - et c'est important - pour couvrir les cas de dérogations déjà décidées précédemment dans des accords de branche.
Dans tous les cas, cela ne pourra jamais se lire en sens inverse, à savoir que, faute de valeur hiérarchique explicitement reconnue dans l'accord, on pourrait le remettre en cause. Par conséquent, c'est uniquement le cas où tout est figé, y compris les dérogations qui existaient précédemment.
Une telle interprétation aura au moins le mérite lorsqu'apparaîtront les contentieux - inévitables - d'interdire à quelque esprit mal intentionné de remettre en cause la volonté de sécurisation juridique.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur Vercamer, la loi pourra, évidemment, pour un motif d'intérêt général suffisant, modifier une convention collective, mais cela n'en changera ni la date ni sa valeur hiérarchique. S'agissant du jour férié, pour reprendre votre exemple, il est donc inutile de s'inquiéter.
Par ailleurs, si l'accord de branche postérieur n'a pas prévu que ces dispositions seraient impératives, la mise en conformité des accords d'entreprise ne sera pas légalement obligatoire.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 234.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 292.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. MM. Vidalies, Gorce, Christian Paul et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, n° 235, ainsi rédigé :
« Dans l'article 39, substituer aux mots : "accordée par leurs signataires le mot : "reconnue. »
La parole est à M. Alain Vidalies.
M. Alain Vidalies. Je le retire.
Mme la présidente. L'amendement n° 235 est retiré.
Je mets aux voix l'article 39.
(L'article 39 est adopté.)
Mme la présidente. Nous en revenons maintenant aux amendements portant article additionnel après l'article 43.
Après l'article 43
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, n°s 180 et 190 deuxième correction, pouvant être soumis à une discussion commune.
L'amendement n° 180, présenté par M. Novelli et M. Gorges, est ainsi rédigé :
« Après l'article 43, insérer l'article suivant :
« L'avant-dernière phrase du VIII de l'article 5 de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail est complétée par les mots : "et en 2004 et en 2005. »
L'amendement n° 190 deuxième correction, présenté par MM. Depierre, Barrot, Gaillard, Poulou et Mme Vautrin, est ainsi rédigé :
« Après l'article 43, insérer l'article suivant :
« L'avant-dernière phrase du VIII de l'article 5 de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail est complétée par les mots : "2004, 2005. »
La parole est à M. Jean-Pierre Gorges, pour soutenir l'amendement n° 180.
M. Jean-Pierre Gorges. Cet amendement est défendu.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. La commission a repoussé l'amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Claude Gaillard, pour soutenir l'amendement n° 190 deuxième correction.
M. Claude Gaillard. Cet amendement concerne les entreprises de moins de vingt salariés. Je rappelle que, dans la loi Aubry, qui a pu être qualifiée de brutale, une souplesse avait néanmoins été prévue dans le décompte des heures supplémentaires : celles-ci ne s'imputent sur le contingent qu'à partir de la trente-septième heure en 2002, et de la trente-sixième en 2003.
En outre, la loi relative aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi a prolongé l'application de la majoration de 10 % des heures supplémentaires jusqu'au 31 décembre 2005.
A la fois pour fournir aux petites entreprises la souplesse dont elles ont besoin et par souci de cohérence, notre amendement propose de proroger aussi jusqu'au 31 décembre 2005 l'imputation sur le contingent d'heures supplémentaires.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. La commission a accepté cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. L'amendement n° 190 deuxième correction revient à se substituer aux négociations qui n'ont pas eu lieu dans les branches. De ce point de vue, je ne peux pas considérer qu'il est conforme à l'esprit du projet.
J'ajoute qu'un régime juridique différent selon la taille de l'entreprise se justifie sur ce sujet précis pendant une période transitoire. Cela a été le cas pour les entreprises de moins de vingt salariés de 2000 à 2003. Je ne suis pas certain, compte tenu de la liberté conventionnelle qui leur a été reconnue par la loi de janvier 2003, qu'il n'y ait pas ici un risque en droit.
Cela étant, je m'en remets sur ce sujet à la sagesse de l'Assemblée.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Gorges.
M. Jean-Pierre Gorges. Monsieur le rapporteur, je ne comprends pas pourquoi l'amendement n° 190 deuxième correction a été accepté par la commission alors que le n° 180, qui est strictement le même, a été repoussé.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. Il fallait simplement choisir entre les deux rédactions !
M. Jean-Pierre Gorges. Soit !
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Vidalies.
M. Alain Vidalies. Quand allez-vous donc vous arrêter ? Le texte que vous nous avez présenté est déjà lourd et, un mercredi soir, en fin de session, sans que personne n'ait jamais abordé la question, un amendement remet en cause la loi sur les 35 heures, ou prolonge les mesures d'adaptation. Ce n'est pas rien. Il s'agit du calcul du contingent d'heures supplémentaires. Cela concerne la vie des gens.
On fait une loi sur le dialogue social. Cette question a-t-elle été discutée, débattue avec les organisations syndicales d'employeurs et d'employés ? Les entreprises se sont-elles exprimées ? Ce débat de société, important, a-t-il eu lieu ? Non, et, en cinq minutes, au détour d'un amendement, il faudrait subitement voter un tel amendement
Que nos arguments de caractère social ne vous intéressent pas, on l'a compris depuis longtemps, mais il y a aussi un argument économique sur lequel j'appelle votre attention : même si la croissance revient, en dépit de votre politique, vous n'aurez pas de créations d'emplois, vous aurez des heures supplémentaires. Cet amendement est donc absurde sur le plan économique.
Je ne comprends pas que le Gouvernement puisse s'en remettre à la sagesse de l'Assemblée sur une telle question ! Si cet amendement est adopté, les organisations syndicales vont se demander ce qui se passe, comme les partis politiques, car personne n'est au courant de cette affaire.
Parfois, naturellement, sur telle ou telle question particulière, un amendement peut être présenté en séance. Mais, là, cela concerne la vie de millions de gens, et cela pourrait devenir définitif sans qu'il y ait jamais eu la moindre négociation. Même si l'on suit votre raisonnement, ce n'est pas possible d'agir ainsi alors que l'on débat d'un texte comme celui-ci.
Mme Muguette Jacquaint. Laissez faire la négociation !
M. Alain Vidalies. M. le ministre a dit qu'il fallait laisser faire la négociation. Nous n'étions pas d'accord, mais soyez au moins en cohérence avec vos propres propositions. En tout cas, nous n'acceptons pas l'idée que ce pourrait être une adaptation mineure. Vous prenez une initiative grave, et ce qui est encore plus grave, c'est que le débat aura lieu dans le pays, après le vote du Parlement, puisqu'il n'aura pas eu lieu avant. Le comble, c'est que nous examinons une loi sur le dialogue social !
Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Dutoit.
M. Frédéric Dutoit. Depuis le début de cette discussion, nous ne cessons de dire que le principe de dérogation peut permettre n'importe quoi dans les entreprises et nous avions expliqué que les entrepreneurs ou les branches pourraient même ainsi remettre en cause les 35 heures. C'était l'argument que nous avions donné pour montrer que le texte était très nocif pour l'ensemble du monde du travail. Et M. Novelli insiste pour que les employeurs se rendent compte que c'est réellement possible. Si j'ai bien entendu ce que vous avez dit depuis le début, monsieur le ministre, vous ne pouvez pas accepter un tel amendement.
Mme Muguette Jacquaint. Ce n'est plus de la négociation !
Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard.
Mme Martine Billard. J'ai écouté avec attention votre intervention, monsieur le ministre, et j'ai été un petit peu étonnée par la conclusion car, dans l'exposé de motifs de votre projet, à propos du titre II, « Du dialogue social », il est écrit : « A cet égard, le Gouvernement prend l'engagement solennel de renvoyer à la négociation nationale interprofessionnelle toute réforme de nature législative relative au droit du travail. »
Vous avez dit au début de votre intervention qu'il serait tout de même mieux de laisser les partenaires sociaux parvenir à un accord sur cette question, et finalement, vous vous en remettez à la sagesse de l'Assemblée. J'ai l'impression d'entendre un double langage. Etes-vous si pressé de faire un cadeau de Noël au patronat des petites entreprises ? La négociation risquait d'aboutir à la même chose mais il faut absolument que vous le fassiez avant le 31 décembre ! Faut-il que cela entre en vigueur le plus vite possible ? On ne peut pas attendre quelques mois de négociations pour voir à quel accord on parviendrait ? Non, il faut agir tout de suite ! Il y a eu une demande d'une partie du MEDEF, et hop ! on dépose un amendement...
M. Mansour Kamardine. Et voilà ! C'est reparti ! Y a-t-il une contre-indication à voter une loi avant Noël ?
Mme Martine Billard. ... et hop ! Comme vous vous en remettez à la sagesse de l'Assemblée, va être voté un amendement du MEDEF.
Moi, je ne comprends plus ! Je sais bien qu'un engagement solennel du Gouvernement n'est finalement qu'une déclaration sans valeur. Mais, si on ne peut plus croire les engagements solennels, que va-t-on croire ?
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Gorges.
M. Jean-Pierre Gorges. Bien que je ne voie pas la nuance, la commission considère que l'amendement n° 190 deuxième correction est mieux rédigé que l'amendement n° 180. Comme ils ont la même signification, il serait tout de même aberrant d'en adopter un et de refuser l'autre. Je retire donc l'amendement n° 180 et je demande qu'on ajoute M. Hervé Novelli et M. Jean-Pierre Gorges à la liste des signataires de l'amendement n° 190 deuxième correction.
Mme la présidente. L'amendement n° 180 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 190 deuxième correction, dont sont désormais cosignataires MM. Novelli et Gorges.
(L'amendement est adopté.)
Article 44
Mme la présidente. « Art. 44. - Après l'article L. 132-5 du code du travail, il est inséré un article L. 132-5-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 132-5-1. - La convention de branche ou l'accord professionnel prévoit les modalités de prise en compte dans la branche ou l'entreprise des demandes relatives aux thèmes de négociation émanant d'une ou des organisations syndicales de salariés représentatives, sans préjudice des obligations formulées aux articles L. 132-12 et L. 132-27. »
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur, a présenté un amendement, n° 357, ainsi rédigé :
« Dans les premier et deuxième alinéas de l'article 44, substituer à la référence : "L. 132-5-1 la référence : "L. 132-5-2. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. C'est un amendement rédactionnel.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Favorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 357.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 44, modifié par l'amendement n° 357.
(L'article 44, ainsi modifié, est adopté.)
Article 45
Mme la présidente. « Art. 45. - L'article L. 412-8 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Un accord d'entreprise peut autoriser la mise à disposition des publications et tracts de nature syndicale, soit sur un site syndical mis en place sur l'intranet de l'entreprise, soit par diffusion sur la messagerie électronique de l'entreprise. Dans ce dernier cas, cette diffusion doit être compatible avec les exigences de bon fonctionnement du réseau informatique de l'entreprise et ne pas entraver l'accomplissement du travail. L'accord d'entreprise définit les modalités de cette mise à disposition ou de ce mode de diffusion, en précisant notamment les conditions d'accès des organisations syndicales et les règles techniques visant à préserver la liberté de choix des salariés d'accepter ou de refuser un messsage. »
Je suis saisie de trois amendements, n°s 125, 242 et 286, pouvant être soumis à une discussion commune.
L'amendement n° 125, présenté par M. Gremetz, M. Dutoit, Mme Jacquaint et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains, est ainsi rédigé :
« Dans la première phrase du dernier alinéa de l'article 45, substituer aux mots : "peut autoriser les mots "doit prévoir. »
L'amendement n° 242, présenté par MM. Vidalies, Gorce, Christian Paul et les membres du groupe socialiste, est ainsi rédigé :
« Dans la première phrase du dernier alinéa de l'article 45, substituer aux mots : "peut autoriser les mots "prévoit les modalités de. »
L'amendement n° 286, présenté par Mme Billard, M. Yves Cochet et M. Mamère, est ainsi rédigé :
« Dans la première phrase du dernier alinéa de l'article 45, substituer aux mots : "peut autoriser le mot "prévoit. »
La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour soutenir l'amendement n° 125.
Mme Muguette Jacquaint. L'article 45 complète l'actuel article L. 412-8 du code du travail relatif à la diffusion des informations syndicales dans l'entreprise afin d'encadrer l'usage syndical des nouvelles technologies de l'information et de la communication. Il prévoit la possibilité pour les syndicats d'utiliser les supports informatiques et, notamment, intranet pour véhiculer les informations, dans le respect de certaines garanties. C'est une avancée.
Toutefois, à la différence de la position commune qui souhaitait que ce point fasse l'objet d'une négociation au niveau de la branche, le présent article confie la mise en oeuvre de cette forme de communication syndicale à l'accord d'entreprise.
La position commune sur cette question portait au niveau des branches la nécessité de négociation autour de l'accès aux NTIC. En effet, le texte des partenaires sociaux proposait que les branches s'emploient à définir des orientations pour un code de bonne conduite relatif aux modalités d'accès et d'utilisation des nouvelles techniques par les organisations syndicales de salariés dans les entreprises, à partir d'un seuil d'effectifs fixé par la branche.
Ce relevé de décision fait apparaître une volonté plus qu'une possibilité. Nous souhaitons revenir à ce que souhaitent les organisations syndicales des salariés, afin que la négociation sur ce point soit plus incitative.
Nous proposons donc qu'un accord d'entreprise doive prévoir la mise à disposition des nouveaux moyens de communication de l'entreprise aux syndicats, et non qu'il puisse l'autoriser.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Vidalies, pour soutenir l'amendement n° 242.
M. Alain Vidalies. Il est défendu.
Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard, pour soutenir l'amendement n° 286.
Mme Martine Billard. C'est un amendement similaire. Soit on pense que toutes les possibilités, qu'il s'agisse de l'écrit ou d'internet, doivent être utilisées pour la diffusion des informations, ce qui a été prévu dans un autre cas, et les accords d'entreprise préciseront ensuite dans quelles conditions, soit on introduit une différence entre l'écrit et internet, ce qui semble difficile à justifier et le sera encore plus dans les années à venir.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur ces amendements ?
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. La commission a rejeté ces trois amendements. Il n'y a pas de raison de contraindre les partenaires sociaux à négocier sur la question. Il convient simplement de leur ouvrir la faculté de le faire.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Même avis.
M. Alain Vidalies. Ils auraient pu également discuter sur les heures supplémentaires.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 125.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 242.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 286.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 45.
(L'article 45 est adopté.)
Article 46
Mme la présidente. « Art. 46. - L'article L. 133-5 du code du travail est ainsi modifié :
« I. - A la fin du 1° sont ajoutés les mots : ", le déroulement de carrière des salariés exerçant des responsabilités syndicales et l'exercice de leurs fonctions ; ».
« II. - Il est inséré après le 2° un 2° bis ainsi rédigé :
« 2° bis Les conditions d'exercice des mandats de négociation et de représentation au niveau de la branche ; ». »
M. Depierre et M. Barrot ont présenté un amendement, n° 198, ainsi libellé :
« Rédiger ainsi l'article 46 :
« Le premier alinéa de l'article L. 132-17 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée : "Les conventions de branche doivent plus généralement définir les conditions d'exercice des mandats de négociation et de représentation au niveau de la branche ainsi que les règles de déroulement de carrière des salariés exerçant des responsabilités syndicales. »
L'amendement est-il défendu ?
M. Jean-Marie Geveaux. Il est défendu.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement. Le code du travail permet déjà aux conventions de branche de comporter de telles clauses. Sauf pour les conventions étendues, il n'y a pas de raison de les rendre obligatoires.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Même avis.
M. Jean-Marie Geveaux. L'amendement est retiré, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 198 est retiré.
Je mets aux voix l'article 46.
(L'article 46 est adopté.)
Article 47
Mme la présidente. « Art. 47. - I. - Le code du travail est ainsi modifié :
« 1° Au premier alinéa de l'article L. 123-4, les mots : "conformément aux dispositions des articles L. 132-18 à L. 132-26 du présent code sont remplacés par les mots : "conformément aux dispositions des articles L. 132-18 à L. 132-25 du présent code ;
« 2° Au premier alinéa de l'article L. 212-4-6, les mots : "n'ayant pas fait l'objet de l'opposition prévue à l'article L. 132-26 sont supprimés ;
« 3° A l'article L. 212-4-12, les mots : "n'ayant pas fait l'objet de l'opposition prévue à l'article L. 132-26 sont supprimés ;
« 4° Le premier alinéa de l'article L. 212-10 est supprimé ;
« 5° Au II de l'article L. 212-15-3, les mots : "et sous réserve que cette convention ou cet accord n'ait pas fait l'objet d'une opposition en application de l'article L. 132-26 sont supprimés.
« Au premier alinéa du III du même article, les phrases : "La convention ou l'accord collectif prévoyant la conclusion de conventions de forfait en jours ne doit pas avoir fait l'objet d'une opposition en application de l'article L. 132-26. Cette convention ou cet accord doit fixer le nombre de jours travaillés sont remplacées par : "La convention ou l'accord collectif prévoyant la conclusion de conventions de forfait en jours doit fixer le nombre de jours travaillés ;
« 6° Au troisième alinéa de l'article L. 213-1 la phrase : "Compte tenu du caractère dérogatoire du travail de nuit, l'accord collectif ne doit pas avoir fait l'objet d'une opposition en application de l'article L. 132-26 est supprimée ;
« 7° Au premier alinéa de l'article L. 227-1, les mots : "n'ayant pas fait l'objet de l'opposition prévue à l'article L. 132-26 sont supprimés ;
« 8° Au II-2° de l'article 2-1 de l'ordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 portant création des chèques-vacances, les mots : "dans les conditions prévues aux deux premiers alinéas de l'article L. 132-30 du code du travail sont remplacés par les mots : "dans les conditions prévues à l'article L. 132-30 du code du travail. »
« II. - Le premier alinéa de l'article L. 713-18 du code rural est supprimé. »
M. Gremetz, M. Dutoit, Mme Jacquaint et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 126, ainsi rédigé :
« Supprimer l'article 47. »
La parole est à M. Daniel Paul.
M. Daniel Paul. Il s'agit d'un amendement de coordination en pleine cohérence avec le schéma de démocratie sociale que nous avons défendu tout au long de ces débats. Avec l'article 47, monsieur le ministre, vous procédez à un toilettage des différents articles du code du travail, qui vont souffrir des implications de votre réforme. C'est un article de coordination législative qui prend en compte la suppression du droit d'opposition aux accords d'entreprise dérogatoires, dans différents domaines : l'égalité professionnelle, la modulation, le travail intermittent, la mise en oeuvre du travail de nuit, etc.
Nous avons manifesté très clairement notre hostilité à la réforme proposée en ce qui concerne le dialogue social et mis en perspective un projet alternatif dont l'article 47 ne fait pas partie. C'est la raison pour laquelle nous en demandons la suppression.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. Rejeté.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 126.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. M. Anciaux, rapporteur, a présenté un amendement, n° 63, ainsi rédigé :
« Après le 1° du I de l'article 47, insérer l'alinéa suivant :
« 1° bis Le troisième alinéa de l'article L. 132-10 est supprimé ; ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. C'est un amendement de coordination. L'article 132-10 avait été oublié dans la liste des dispositions du présent article tirant les conséquences de la suppression du droit d'opposition actuellement prévu à l'article L. 132-26 du code du travail.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Favorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 63.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. M. Anciaux, rapporteur, a présenté un amendement, n° 64, ainsi rédigé :
« Substituer au 8° du I de l'article 47, le paragraphe suivant :
« I bis. - Dans le 2° du II de l'article 2-1 de l'ordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 portant création des chèques-vacances, les mots : "aux deux premiers alinéas de sont remplacés par le mot : "à. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. C'est un amendement rédactionnel.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Favorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 64.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 47, modifié par les amendements adoptés.
(L'article 47, ainsi modifié, est adopté.)
Article 48
Mme la présidente. « Art. 48. - Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à modifier, par ordonnance, le code du travail de Mayotte (partie législative) pour y faire figurer, en les adaptant, les dispositions du titre II de la présente loi.
« Cette ordonnance sera prise, au plus tard, dix-huit mois après la publication de la présente loi. Un projet de loi de ratification sera déposé devant le Parlement au plus tard six mois à compter de la publication de l'ordonnance. »
Je mets aux voix l'article 48.
(L'article 48 est adopté.)
Après l'article 48
Mme la présidente. M. Anciaux, rapporteur, a présenté un amendement, n° 65, ainsi libellé :
« Après l'article 48, insérer l'article suivant :
« Le code du travail est ainsi modifié :
« A. - Après le quatrième alinéa de l'article L. 136-1, est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« - des députés et des sénateurs représentant les groupes constitués dans chaque assemblée ; ».
« B. - L'article L. 136-2 est ainsi modifié :
« I. - Dans le 2°, après le mot : "avis, est inséré le mot : "motivé.
« II. - Après le 2°, est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 2° bis De donner un avis motivé au ministre chargé du travail sur les propositions d'actes communautaires relatives à la négociation collective et de fournir des propositions quant aux modalités de leur éventuelle transposition dans le droit national ; ».
« III. - Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les propositions, les avis et le bilan visés respectivement aux 1°, 2°, 2° bis, 7° et 8° sont transmis sans délai aux commissions compétentes des assemblées parlementaires. »
Sur cet amendement, M. Gremetz, M. Dutoit, Mme Jacquaint, et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un sous-amendement, n° 128, ainsi libellé :
« Rédiger ainsi le dernier alinéa du A de l'amendement n° 65 :
« - un représentant de chaque groupe parlementaire représenté à l'Assemblée nationale et un représentant de chaque groupe parlementaire représenté au Sénat. »
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 65.
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. Cet amendement vise à améliorer le dialogue entre les différentes sources normatives en matière de droit du travail. Nous proposons d'associer le Parlement le plus en amont possible aux évolutions du droit du travail et de renforcer le poids de l'expertise de la Commission nationale de la négociation collective, tant dans l'élaboration du droit national que dans l'articulation avec les droits communautaires.
M. Alain Vidalies. C'est de l'humour, je suppose ?
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Cet amendement, qui vise à intégrer à la CNNC des membres du Parlement, correspond à une interrogation que j'ai moi-même évoquée au cours du débat : nous aurons sans doute de plus en plus de résultats de la négociation collective à intégrer dans notre législation, ce qui pose le problème de la participation en amont du Parlement aux discussions avec les partenaires sociaux.
Le Gouvernement approuve les orientations de l'amendement, mais une représentation de tous les groupes de chacune des deux assemblées risque de bouleverser l'équilibre de la CNNC au détriment des partenaires sociaux. Il ne me paraît donc pas possible d'accepter l'amendement en l'état. Si vous le sous-amendiez pour retenir le principe d'une représentation du Parlement à raison de deux députés et deux sénateurs, je n'y verrais que des avantages, mais la solution que vous proposez se traduirait par une entrée tellement massive du Parlement à la CNNC que les partenaires sociaux s'y retrouveraient quasiment en minorité.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Vidalies.
M. Alain Vidalies. Deux députés et deux sénateurs, nous connaissons cette formule. Ce n'est d'ailleurs pas une pratique propre à cette majorité, la précédente faisait la même chose. Dans un certain nombre d'institutions, il y a deux députés, et ils sont tous les deux de la majorité, à la CNIL par exemple. Ce n'est pas l'objectif de la commission. Nous voulons permettre à l'ensemble de la représentation nationale d'être informée et de rencontrer les partenaires sociaux dans la Commission de la négociation collective.
On peut trouver d'autres critères, mais un représentant par groupe, cela a l'avantage de la neutralité et cela me paraît être plutôt une bonne idée si on veut éviter que cela devienne un enjeu politique entre nous. C'est un choix qui correspond assez bien à la spécificité de cette institution.
Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Dutoit.
M. Frédéric Dutoit. En commission, où il a beaucoup été discuté de cette question, nous étions tous tombés d'accord pour que le Parlement soit représenté au sein de la Commission nationale de la négociation collective. Par notre sous-amendement, nous proposons simplement qu'un représentant de chaque groupe parlementaire représenté à l'Assemblée nationale et un représentant de chaque groupe parlementaire représenté au Sénat siège au sein de cette commission, c'est-à-dire que nous proposons une représentation parlementaire identique à celle existant au conseil d'orientation des retraites.
Mme Muguette Jacquaint. Le Premier ministre s'y est engagé !
M. Frédéric Dutoit. Monsieur le ministre, vous seriez bien inspiré d'accepter ce sous-amendement puisque, effectivement, le Premier ministre lui-même s'est déclaré favorable à une représentation du Parlement dans chaque nouvel organisme créé où cette présence est sollicitée. Je le cite : « Je ne manquerai pas à l'avenir, lors de la création d'un organisme, où la présence de représentants du Parlement est sollicitée, de prévoir cette disposition. »
Pour être en conformité avec ce qu'a déclaré le premier des ministres, il conviendrait que ce sous-amendement soit adopté.
Mme la présidente. La parole est à M. Claude Gaillard.
M. Claude Gaillard. Comme cela a été dit, ce débat a déjà eu lieu en commission et s'est conclu sur l'idée selon laquelle il n'était pas possible d'envisager un représentant par groupe. La commission a donc proposé que siègent au CNNC des députés et des sénateurs représentant les groupes constitués dans chaque assemblée, ce qui permettra une certaine modulation. En effet, dans le cas où nous aurions prévu un représentant par groupe, si les Verts avaient connu un succès plus grand aux élections législatives et avaient pu constituer un groupe - bien sûr, c'est une hypothèse d'école -, l'opposition aurait eu trois représentants, tandis que la majorité n'en aurait eu que deux !
Mme Martine Billard. C'est le droit de l'opposition ! (Sourires.)
M. Claude Gaillard. Même si l'on n'est pas dans une optique partisane, c'est quelque chose à prendre en compte.
J'ai bien entendu ce que nous a dit le ministre : s'il y avait un représentant par groupe, les parlementaires siégeant au sein de ladite commission seraient trop nombreux par rapport aux partenaires sociaux. Et si le nombre des représentants du Parlement est un problème, peut-être pourrait-on prévoir uniquement une représentation de la majorité et de l'opposition. Mais, encore une fois, l'idée d'un représentant par groupe n'est pas celle qu'a retenue la commission.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement ?
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. Je rappelle que je rapporte au nom de la commission et que je le fais fidèlement. Comme l'a souligné Claude Gaillard, la commission a, après de longues discussions, retenu une formulation en ce qui concerne la représentation du Parlement au sein de la CNNC, laquelle tenait compte de la composition de cette dernière : c'est celle que je vous ai présentée en défendant l'amendement n° 65.
Quant au sous-amendement n° 128, la commission y est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement sur le sous-amendement ?
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Ce débat est très intéressant, mais on voit bien qu'il n'est pas totalement mûr. En effet, l'argument que je viens d'avancer selon lequel l'arrivée des représentants des groupes du Sénat et de l'Assemblée nationale pourrait complètement modifier les équilibres au sein de la CNNC n'est pas de ceux que vous ne pouvez pas ne pas recevoir.
Il y a de nombreux groupes au Sénat, un peu moins à l'Assemblée, mais cela peut changer. Dans l'hypothèse d'un représentant par groupe, ce serait neuf, dix ou onze parlementaires qui entreraient dans une structure qui ne comprend actuellement que des partenaires sociaux. Cela mérite au moins une discussion avec eux sur le sujet.
D'une manière plus générale, si nous entrons dans un processus d'élaboration des normes en matière sociale un peu différent de celui qui prévaut actuellement, la question de l'association du Parlement se posera en des termes si complexes qu'elle ne peut pas être résolue au détour d'un amendement. C'est pourquoi je suggère à l'Assemblée de repousser l'amendement de la commission, tout en m'engageant à ce qu'il y ait une discussion entre les partenaires sociaux et les représentants des assemblées pour examiner comment il sera possible, à l'avenir, de mettre en place un système d'information mutuelle et de travail mutuel en amont pour répondre à une situation qui se posera de plus en plus fréquemment.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. Compte tenu des explications et de l'engagement de M. le ministre, je retire l'amendement n° 65.
M. Claude Gaillard. Le ministre est convaincant !
Mme la présidente. L'amendement n° 65 est retiré.
Article 49
Mme la présidente. « Art. 49. - Avant le 31 décembre 2007, le Gouvernement présente au Parlement, après avis de la Commission nationale de la négociation collective, un rapport sur l'application de la présente loi. »
M. Anciaux, rapporteur, a présenté un amendement, n° 66, ainsi rédigé :
« Dans l'article 49, après le mot : "avis, insérer le mot : "motivé. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. Cet amendement vise à faire de l'avis de la Commission nationale de la négociation collective sur le rapport d'application de la loi un avis motivé. Un tel avis éclairerait l'information du Parlement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Favorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Dutoit.
M. Frédéric Dutoit. J'indique que nous sommes favorables à cet amendement.
J'en profite pour dire à M. le ministre que j'ai pris acte de son engagement sur la mise en place d'un système d'information mutuelle et de travail mutuel entre la représentation nationale et les partenaires sociaux. Cela dit, il s'agit d'une question qui ne manquera pas de se poser à l'avenir, notamment avec le futur texte relatif à la décentralisation. Nous devrons certainement réfléchir tous ensemble à la place que doivent occuper non seulement l'Etat mais aussi le Parlement français dans le cadre de la république décentralisée et au rôle qu'ils doivent y jouer, même s'il s'agit d'un concept que je ne partage pas puisque le groupe auquel j'appartiens s'est opposé à la modification de la Constitution faisant de la France une république décentralisée.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 66.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. M. Anciaux, rapporteur, a présenté un amendement, n° 67, ainsi rédigé :
« A la fin de l'article 49, substituer aux mots : "de la présente loi les mots : "du présent titre. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. Cet amendement est d'ordre rédactionnel.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Favorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 67.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 49, modifié par les amendements adoptés.
(L'article 49, ainsi modifié, est adopté.)
Avant l'article 50
Mme la présidente. Je donne lecture de l'intitulé du titre III du projet de loi et du chapitre Ier de ce titre :
« TITRE III
« DISPOSITIONS DIVERSES
« Chapitre Ier
« Garanties de certaines créances salariales »
M. Anciaux, rapporteur, a présenté un amendement, n° 358, ainsi rédigé :
« Supprimer la division et l'intitulé suivants :
« Chapitre Ier
« Garantie de certaines créances salariales. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. Cet amendement est également d'ordre rédactionnel.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Favorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 358.
(L'amendement est adopté.)
Article 50
Mme la présidente. « Art. 50. - L'article L. 143-11-3 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L'assurance prévue à l'article L. 143-11-1 couvre les sommes dues aux salariés en cas de rupture du contrat de travail dans le cadre d'un licenciement pour motif économique, en application d'un accord d'entreprise, lorsque l'accord a été conclu et déposé au moins dix-huit mois avant la date du jugement d'ouverture de la procédure de redressement ou de liquidation judiciaires. »
Je suis saisie de deux amendements identiques, n°s 127 et 178.
L'amendement n° 127 est présenté par M. Gremetz, M. Dutoit, Mme Jacquaint et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ; l'amendement n° 178 est présenté par Mme Billard, M. Yves Cochet et M. Mamère.
Ces amendements sont ainsi rédigés :
« Supprimer l'article 50. »
La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour soutenir l'amendement n° 127.
Mme Muguette Jacquaint. Cet amendement a déjà été défendu.
Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard, pour soutenir l'amendement n° 178.
Mme Martine Billard. Je comprends que des accords de dernière minute puissent accroître d'autant les charges de l'Association pour la garantie des salaires. Il n'en demeure pas moins que certaines entreprises, en particulier des petites entreprises - et ce sera encore plus le cas avec les accords d'entreprise -, pourront revenir sur le montant des indemnités de licenciement. Dans les bassins d'emploi sinistrés, où le taux de chômage est élevé, les salariés dont l'entreprise ferme ont peu de perspectives de reclassement, en raison de leur âge et parfois d'un manque de qualification.
Ces derniers dix-huit mois, des négociations avaient permis d'augmenter les indemnités de licenciement, ce qui deviendra impossible. Désormais, on verra des salariés de cinquante ans licenciés avec des indemnités de licenciement très faibles.
Je ne suis pas convaincue que, dans les zones sinistrées, cet article ne suscite pas des réactions assez violentes, du type de celles qui se sont produites chez Selatex ou Metaleurop, en raison du désespoir des salariés privés d'avenir, alors qu'ils sont encore assez loin de la retraite et sans véritables possibilités de reclassement.
Cet article mériterait d'être revu, ou au moins d'être limité à certains cas.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. La commission a rejeté ces deux amendements. Il convient de mettre fin aux abus résultant de la conclusion dans certaines entreprises d'accords collectifs dont chacun sait que leur financement sera assuré non par l'entreprise, mais par l'AGS.
Cette pratique, qui contribue à dégrader les comptes de l'AGS, déjà dans une situation difficile, pèse de ce fait sur toutes les autres entreprises, et donc à terme sur l'emploi.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Même avis que celui de la commission : défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix par un seul vote les amendements n°s 127 et 178.
(Ces amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 50.
(L'article 50 est adopté.)
Après l'article 50
Mme la présidente. Mme Jacquaint et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 149, ainsi libellé :
« Après l'article 50, insérer l'article suivant :
« Le deuxième alinéa du 4 de l'article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales est complété par une phrase ainsi rédigée : "Cet arrêté ne peut en aucun cas restreindre l'exercice normal du droit de grève. »
La parole est à Mme Muguette Jacquaint.
Mme Muguette Jacquaint. Peut-être considérez-vous, monsieur le ministre, que cet amendement est un cavalier, mais il me permettra de porter à la connaissance du Gouvernement la façon dont on peut remettre en cause à la fois la négociation, le rôle des syndicats et le droit de grève. Cet amendement vise à vous alerter sur un fait récent qui concerne aussi bien le ministre de l'intérieur que vous, monsieur le ministre du travail. Le premier est concerné parce qu'il s'agit de faits qui sont la conséquence de l'interprétation qui a été faite de la loi sur la sécurité intérieure, et vous, vous l'êtes en raison d'une interprétation de ce texte qui a entravé l'exercice du droit de grève.
Le Conseil d'Etat a suspendu un arrêté de réquisition pris à la mi-novembre par le préfet d'Indre-et-Loire contre des sages-femmes grévistes de la clinique du Parc, dans la banlieue de Tours. La haute juridiction administrative a également annulé la décision du tribunal administratif d'Orléans, qui avait rejeté, fin novembre, une requête en référé des grévistes contre les réquisitions. Le Conseil d'Etat a considéré que la décision du préfet porte « une atteinte grave à la liberté fondamentale que constitue le droit de grève ».
Le différend commence début novembre, lorsque les douze sages-femmes qui assurent le fonctionnement du bloc des accouchements de cette clinique privée à but lucratif se mettent en grève. Elles réclament l'égalité de salaire avec les sages-femmes du public, qui a été promise à tout le personnel de l'établissement en 2001.
M. Jean-Marie Geveaux. Qui a fait cette promesse ?
Mme Muguette Jacquaint. Je vois un membre de la majorité sourire, mais il s'agit bien de la remise en cause du résultat de négociations.
M. Jean-Pierre Gorges. C'est l'expression « privé à but lucratif » qui me fait sourire.
Mme Muguette Jacquaint. Les sages-femmes de la clinique du Parc, qui assurent 40 % des naissances du département, touchent en effet, à la fin de leur carrière, 400 euros de moins que leurs consoeurs du public. Leur mobilisation pour être mieux rémunérée commence donc le 5 novembre.
La clinique demande à la justice de droit d'imposer un service minimum, avant d'être déboutée. L'agence régionale de l'hospitalisation, l'ARH, suspend immédiatement, pour des raisons de sécurité, l'activité du seul bloc accouchements, et les futures mères sont accueillies au CHU.
Une semaine plus tard, les négociations sont dans l'impasse, et le préfet prend un arrêté qui réquisitionne l'ensemble des sages-femmes.
C'est cet arrêté et deux suivants - le préfet prononcera trois réquisitions successives - que le Conseil d'Etat a jugés « d'une illégalité manifeste ». Le préfet s'est appuyé, pour prendre ses décisions, sur l'article 3 de la loi du 18 mars 2003 sur la sécurité intérieure, qui prévoit la réquisition de « tout bien et service » et « des personnes nécessaires » à leur fonctionnement. Toutefois, cet article précise que cette réquisition peut seulement avoir lieu « en cas d'urgence, lorsque l'atteinte au bon ordre, à la salubrité, à la tranquillité et à la sécurité publiques l'exige ». Le Conseil d'Etat est donc venu mettre un bémol à l'interprétation abusive qui était faite de cet article en décidant que le préfet ne pouvait « prendre que les mesures imposées par l'urgence et proportionnées aux nécessités de l'ordre public ».
Le Conseil d'Etat a considéré qu'en requérant l'ensemble des sages-femmes en vue de permettre la poursuite d'une activité complète d'accouchements du service obstétrique de la clinique du Parc dans les conditions existant avant le déclenchement du mouvement de grève et en les obligeant à reprendre leur activité professionnelle normale, le préfet les a empêchées d'exercer leur droit de grève, qui est une liberté fondamentale. C'est une atteinte, monsieur le ministre, disproportionnée à un droit constitutionnel.
Pour le Conseil d'Etat, le préfet aurait dû « envisager le redéploiement d'activités vers d'autres établissements de santé ou le fonctionnement réduit du service, et [...] rechercher si les besoins essentiels de la population ne pouvaient être autrement satisfaits compte tenu des capacités sanitaires du département ».
Voilà les faits que je voulais porter à votre connaissance. Ils montrent que, par une certaine interprétation des textes, on peut faire obstacle, d'une part, à la négociation sociale et, d'autre part, à l'exercice du droit de grève et à celui du droit syndical.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement. Il ne semble pas nécessaire de préciser qu'un arrêté ne peut pas restreindre l'exercice normal du droit de grève dans la mesure où ce droit s'exerce dans le cadre de dispositions de nature constitutionnelle et des lois qui le régissent.
Mme Muguette Jacquaint. On peut le contourner : la preuve !
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement qui, d'ailleurs, Mme Jacquaint le reconnaîtra elle-même, n'est pas en rapport avec le texte. Je tiens toutefois à apporter quelques éléments de réponse à son intervention.
Le droit de grève est un droit constitutionnel, et rien ne peut être déduit de l'arrêt cité sur le service minimum. La continuité du service public est tout autant une exigence constitutionnelle. La conciliation de ces deux principes doit être organisée par la loi, mais cette conciliation doit être envisagée comme un dernier recours. La priorité doit être donnée à la prévention des conflits et à la négociation.
Mme Muguette Jacquaint. Mais la conciliation n'avait pas eu lieu, monsieur le ministre !
Mme la présidente. Madame Jacquaint, souhaitez-vous intervenir ?
Mme Muguette Jacquaint. Non, madame la présidente.
M. Jean-Pierre Gorges. Mme Jacquaint a dit qu'elle ne voulait pas.
M. Mansour Kamardine. Elle s'est déjà largement exprimée sur le sujet !
Mme la présidente. Mme Jacquaint a le droit de reprendre la parole si elle le désire.
Je mets aux voix l'amendement n° 149.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. M. Daniel Paul et les membres du groupe des député-e-s communistes et républicains ont présenté un amendement, n° 360 corrigé, ainsi rédigé :
« Après l'article 50, insérer l'article suivant :
« I. - Le cinquième alinéa du I de l'article L. 129-1 du code du travail est complété par les mots : "ou d'une aide à la mobilité dans l'environnement de proximité favorisant leur maintien à domicile.
« II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par un relèvement des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
« III. - La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle sur les droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Daniel Paul.
M. Daniel Paul. Cet amendement, qui a l'apparence d'un cavalier, concerne en fait un problème important touchant au code du travail, et donc aux relations sociales.
La population française vit au quotidien une révolution démographique qui bouleverse toutes nos représentations culturelles de la personne âgée. Grâce aux progrès de la santé et à l'amélioration des conditions d'existence, l'espérance de vie a progressé pratiquement de dix ans depuis 1950. De 1962 à 1990, le nombre de personnes de plus de soixante-quinze ans est passé de 2 à 4 millions.
Parallèlement, un autre phénomène s'est développé, celui de la solitude. Ainsi, dans notre pays, près de 20 % des sexagénaires, 30 % des septuagénaires et plus de 40 % des octogénaires vivent seuls. Ces proportions sont plus élevées chez les femmes que chez les hommes, compte tenu des différences dans l'espérance de vie.
Or, comme l'a démontré le drame de l'été dernier, le développement de la solitude, s'ajoutant à celui de la dépendance, constitue un risque social majeur. Notre devoir de solidarité nationale, face à cette situation, ne nous oblige-t-il pas à reconsidérer la question de la place de la personne âgée dans notre société, non pas seulement comme une assistance due à une population marginale et fragilisée, mais comme un rapport social nouveau ? Quoi qu'il en soit, en aucun cas, la dépendance ne doit signifier la perte de tout droit à l'autonomie et à la dignité.
Cela signifie qu'il convient de développer, mais aussi de faire évoluer les services d'aide à domicile vers des services intégrant l'idée « d'accompagnement dans l'environnement immédiat », la notion de domicile ne devant pas « enfermer » la personne concernée, sauf à transformer le contenu du « maintien à domicile ».
Il faut rompre l'isolement en assurant la continuité du lien social, en mettant à la disposition de toutes ces personnes les services de solidarité propres à leur permettre de choisir, dans la dignité et le respect de l'identité de chacun, la vie sociale de leur choix.
Le maintien à domicile signifie donc le maintien des relations familiales et sociales avec l'environnement de proximité habituel. S'agissant de personnes parfois malades ou dépendantes, les activités sociales nécessitent une prise en charge adaptée, notamment par une aide à la mobilité et un déplacement sécurisé.
La loi n° 96-63 du 29 janvier 1996 encadre très précisément la nature des activités pouvant être exercées par les organismes de services aux particuliers. Ces dispositions se retrouvent notamment dans l'article L. 129-1 du code du travail. Toutefois, ces textes limitent les agréments à des interventions destinées aux personnes « qui ont besoin d'une aide personnelle à leur domicile ».
Une telle limitation empêche les directions départementales du travail et de l'emploi, ainsi que les DDASS, de délivrer les agréments nécessaires aux associations qui proposent cette aide à la mobilité dans l'environnement de proximité participant du maintien à domicile.
L'objet de cet amendement est donc de répondre à cette préoccupation, en complétant l'article L. 129-1 du code du travail. Je ne doute pas, chers collègues, que vous accueillerez favorablement cette proposition de bon sens.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. La commission a rejeté l'amendement, qu'elle a estimé satisfait par le droit en vigueur. Cependant, je partage le souci exprimé à l'instant par M. Paul et me déclare, à titre personnel, favorable à cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. L'amendement vise à étendre les prestations assurées aujourd'hui à domicile par les associations dans le cadre de l'agrément prévu par l'article L. 129-1 du code du travail. Le Gouvernement partage ce souci d'étendre les services d'aide à domicile à des prestations d'accompagnement dans l'environnement immédiat de la personne dépendante, pour mieux faire face aux situations d'isolement. Il est important de permettre aux associations et aux entreprises concernées d'assurer ce service à proximité du domicile, à partir du moment où il permet le maintien à domicile.
Le Gouvernement est donc favorable à cet amendement et lève le gage.
Mme Muguette Jacquaint. C'est parfait !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 360 corrigé, compte tenu de la suppression du gage.
(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)
Mme la présidente. Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.
M. Daniel Paul. Je tiens à remercier M. le ministre et le rapporteur.
M. Mansour Kamardine. Et vos collègues, qui ont voté pour.
Mme la présidente. Je crois que nous pouvons tous les remercier.
M. Daniel Paul. C'est un vote de bon sens.
Mme la présidente. Mme Brunel et M. Novelli ont présenté un amendement, n° 189, ainsi libellé :
« Après l'article 50, insérer l'article suivant :
« La première phrase du troisième alinéa de l'article L. 424-4 du code du travail est ainsi rédigée :
« Lorsqu'un délégué du personnel titulaire ne peut se rendre à une réunion avec les employeurs, il peut se faire remplacer par un délégué suppléant. »
La parole est à M. Jean-Pierre Gorges, pour soutenir cet amendement.
M. Jean-Pierre Gorges. Le texte actuel du code du travail prévoit : « Dans tous les cas, les délégués suppléants peuvent assister avec les délégués titulaires aux réunions avec les employeurs. »
La présence de deux délégués lors des réunions avec les employeurs est une charge qui pèse lourdement sur les entreprises, à l'heure où beaucoup d'entre elles souffrent des conséquences de la réduction du temps de travail.
Il convient de donner au délégué suppléant un vrai rôle de suppléant, c'est-à-dire un rôle de remplaçant du délégué titulaire.
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. La présence à toutes les réunions des délégués du personnel, titulaires mais également suppléants, est de nature à assurer une représentation des salariés de qualité. Il ne semble donc pas opportun de modifier le droit actuellement en vigueur. La commission, après une longue discussion, a repoussé cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur Gorges, le Gouvernement partage l'avis de la commission. L'objectif de ce texte, auquel vous avez souscrit, est de favoriser la négociation d'entreprise. Nous avons bien vu que, pour ce faire, il conviendra de mettre en place, là où ils n'existent pas, des représentants syndicaux et des délégués du personnel qui soient en mesure de mettre en oeuvre cette négociation. Dès lors, tout ce qui pourrait être interprété comme une restriction à la possibilité des délégués du personnel et des représentants syndicaux de participer au débat risquerait d'être mal interprété par les partenaires sociaux. Il serait donc raisonnable de ne pas adopter cet amendement.
M. Jean-Pierre Gorges. Je retire l'amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 189 est retiré.
Avant l'article 51
Mme la présidente. Je donne lecture de l'intitulé du chapitre II :
« Chapitre II
« Contrat d'insertion dans la vie sociale »
M. Anciaux, rapporteur, a présenté un amendement, n° 359, ainsi rédigé :
« Supprimer la division et l'intitulé suivants :
« Chapitre II
« Contrat d'insertion dans la vie sociale. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Le Gouvernement est favorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 359.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. Les articles 51 et 52 ont été retirés.
Seconde délibération
Mme la présidente. En application de l'article 101 du règlement, le Gouvernement demande qu'il soit procédé à une seconde délibération de l'article 34 du projet de loi.
La seconde délibération est de droit.
La commission interviendra dans les conditions prévues à l'alinéa 3 de l'article 101 du règlement.
Je rappelle que le rejet des amendements vaut confirmation de la décision prise en première délibération.
Article 34
Mme la présidente. L'Assemblée a adopté en première délibération l'article 34 suivant :
TITRE II
DU DIALOGUE SOCIAL
« Art. 34. - Il est inséré, après l'article L.132-2-1 du code du travail, un article L. 132-2-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 132-2-2. - I. - La validité d'un accord interprofessionnel est subordonnée à l'absence d'opposition de la majorité des organisations syndicales de salariés représentatives dans le champ d'application de l'accord. L'opposition est exprimée dans un délai de quinze jours à compter de la date de notification de cet accord.
« II. - Lorsqu'une convention de branche ou un accord collectif professionnel étendu, conclu conformément aux dispositions du I, le prévoit, la validité des conventions ou accords conclus dans le même champ d'application professionnel est subordonnée à leur signature par une ou des organisations syndicales représentant une majorité de salariés de la branche.
« La convention ou l'accord, mentionné à l'alinéa précédent et conclu conformément aux dispositions du I, définit la règle selon laquelle cette majorité est appréciée en retenant les résultats :
« a) Soit d'une consultation des salariés concernés, organisée périodiquement, en vue de mesurer la représentativité des organisations syndicales de la branche ;
« b) Soit des dernières élections aux comités d'entreprise, ou à défaut des délégués du personnel.
« La consultation prévue au a, à laquelle participent les salariés satisfaisant aux conditions fixées par les articles L. 433-4 ou L. 423-7, doit respecter les principes généraux du droit électoral. Ses modalités et sa périodicité sont fixées par la convention ou l'accord de branche étendu mentionné au premier alinéa ci-dessus. Les contestations relatives à cette consultation relèvent de la compétence du tribunal de grande instance.
« Dans le cas prévu au b, la convention ou l'accord de branche étendu fixe le mode de décompte des résultats des élections professionnelles.
« A défaut de la conclusion de la convention ou de l'accord étendu prévu au premier alinéa, la validité d'une convention de branche ou d'un accord professionnel est soumise aux conditions prévues au I.
« III. - Une convention de branche ou un accord collectif professionnel conclu conformément aux dispositions du II, détermine les conditions de validité des conventions ou accords d'entreprise ou d'établissement, en retenant l'une ou l'autre des modalités énumérées au 1° et 2° ci-après :
« 1° Soit la convention ou l'accord d'entreprise ou d'établissement signé par une ou des organisations syndicales représentatives ayant recueilli au moins la moitié des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections au comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel ; si les organisations syndicales signataires ne satisfont pas à la condition de majorité, le texte peut être soumis, dans des conditions fixées par décret, à l'approbation, à la majorité des suffrages exprimés, des salariés de l'entreprise ou de l'établissement, à l'initiative des organisations syndicales de salariés signataires, à laquelle des organisations syndicales non signataires peuvent s'associer ;
« 2° Soit la convention ou l'accord d'entreprise ou d'établissement ne donne pas lieu à l'opposition d'une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli au moins la moitié des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections au comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel. L'opposition est exprimée dans un délai de huit jours à compter de la notification de cet accord.
« Lorsque la convention ou l'accord n'intéresse qu'une catégorie professionnelle déterminée relevant d'un collège électoral défini à l'article L. 433-2, sa validité est subordonnée à la signature ou à l'absence d'opposition d'organisations syndicales représentatives ayant obtenu les voix d'au moins la moitié des suffrages exprimés dans ce collège.
« En l'absence de convention ou d'accord étendu tel que prévu au premier alinéa du présent III, la validité de la convention ou de l'accord d'entreprise ou d'établissement est subordonnée à sa conclusion selon les modalités définies au 2° du présent III.
« IV. - La partie la plus diligente des organisations signataires d'une convention ou d'un accord collectif en notifie le texte à l'ensemble des organisations représentatives à l'issue de la procédure de signature.
« V. - L'opposition est exprimée par écrit et motivée. Elle précise les points de désaccord. Elle est notifiée aux signataires.
« Les textes frappés d'opposition majoritaire et les textes n'ayant pas obtenu l'approbation de la majorité des salariés sont réputés non écrits. Les accords mentionnés au I, les conventions et accords étendus mentionnés au premier alinéa du II, les conventions et accords mentionnés au dernier alinéa du II et aux troisième et quatrième alinéas du III ne peuvent être déposés en application de l'article L. 132-10 qu'à l'expiration du délai d'opposition. »
Le Gouvernement a présenté un amendement, n° 1, ainsi rédigé :
« I. - Après le troisième alinéa (2°) du III du texte proposé pour l'article L. 132-2-2 du code du travail, insérer l'alinéa suivant :
« En cas de carence d'élections professionnelles, lorsqu'un délégué syndical a été désigné dans l'entreprise ou dans l'établissement, la validité d'une convention ou d'un accord d'entreprise ou d'établissement signé par ce délégué est subordonnée à l'approbation de la majorité des salariés dans les conditions du 1°. »
« II. - En conséquence, dans la dernière phrase du dernier alinéa du V, substituer au mot : "quatrième le mot : "cinquième. »
La parole est à M. le ministre.
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Il s'agit de répondre à une interrogation soulevée par M. Gorce au cours du débat sur l'article 34, s'agissant de la prise en compte de l'existence d'une situation de carence d'élections professionnelles. Sensible aux arguments qui ont été présentés, je propose un amendement qui subordonne la validité de l'accord à l'approbation par la majorité des salariés.
Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Billard.
Mme Martine Billard. Je suis favorable à cette disposition, mais je regrette que l'on ne fasse pas la même chose pour les délégués du personnel et les délégués des comités d'entreprise, c'est-à-dire que la validité des accords signés par ces délégués ne soit pas subordonnée à l'approbation de la majorité des salariés.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.
Je mets aux voix l'article 34, modifié par l'amendement n° 1.
(L'article 34, ainsi modifié, est adopté.)
Mme la présidente. Les explications de vote et le vote, par scrutin public, sur l'ensemble du projet de loi auront lieu le mardi 6 janvier, après les questions au Gouvernement.
SAISINE POUR AVIS D'UNE COMMISSION
Mme la présidente. J'informe l'Assemblée que la commission de la défense nationale et des forces armées a décidé de se saisir pour avis du projet de loi autorisant la ratification des protocoles au Traité de l'Atlantique Nord sur l'accession de la République de Bulgarie, de la République d'Estonie, de la République de Lettonie, de la République de Lituanie, de la Roumanie, de la République slovaque et de la République de Slovénie (n° 1107).
ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE
Mme la présidente. Ce soir, à vingt et une heures trente, deuxième séance publique :
Discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances pour 2004 :
M. Gilles Carrez, rapporteur (rapport n° 1285).
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures quarante-cinq.)
Le Directeur du service du compte rendu intégralde l'Assemblée nationale,
JEAN PINCHOT
annexe au procès-verbal
de la 1re séance
du mercredi 17 décembre 2003
SCRUTIN (n° 419)
sur les amendements n° 115 de M. Gremetz, n° 232 de M. Vidalies et n° 293 de Mme Billard tendant à supprimer l'article 38 du projet de loi relatif à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social (extension du domaine des accords d'entreprise ou d'établissement à celui des conventions ou accords de branche).
Nombre de votants
32
Nombre de suffrages exprimés
30
Majorité absolue
16
Pour l'adoption
8
Contre
22
L'Assemblée nationale n'a pas adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
Groupe U.M.P. (364) :
Pour : 2. - MM. Louis Guédon et Christophe Guilloteau.
Contre : 22 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-votant : M. Jean-Louis Debré (président de l'Assemblée nationale).
Groupe socialiste (149) :
Pour : 2 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-votant : Mme Hélène Mignon (présidente de séance).
Groupe Union pour la démocratie française (30) :
Abstentions : 2 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Groupe communistes et républicains (22) :
Pour : 3 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.
Non-inscrits (12) :
Pour : 1. - Mme Martine Billard.
Mises au point au sujet du présent scrutin
(sous réserve des dispositions de l'article 68, alinéa 4,
du règlement de l'Assemblée nationale)
MM. Louis Guédon et Christophe Guilloteau, qui étaient présents au moment du scrutin ou qui avaient délégué leur droit de vote, ont fait savoir qu'ils avaient voulu voter « contre ».
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