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Deuxième séance du mercredi 7 avril 2004 189e séance de la session ordinaire 2003-2004 vice-président M. le président. La séance est ouverte. (La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)
Suite de la discussion, en deuxième lecture, d'un projet de loi M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi relatif à la politique de santé publique (n°s 1364, 1473). M. le président. J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste une exception d'irrecevabilité, déposée en application de l'article 91, alinéa 4, du règlement. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen. M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le ministre de la santé et de la protection sociale, c'est à mon tour de vous accueillir et, surtout, de vous féliciter pour votre nomination, car en matière de facilités ou d'honneurs, le poste qui est dorénavant le vôtre n'est indiscutablement pas le plus enviable de la République. M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, rapporteur. Ça commence très bien ! (Sourires.) M. Jean-Marie Le Guen. Vous vous êtes donc porté volontaire pour l'occuper. Cela mérite le respect compte tenu non seulement des tâches générales du ministère de la santé, mais aussi des tâches particulières qui lui incombent actuellement. Car si nous allons débattre ce soir du projet de loi relatif à la politique de santé publique, nous avons aussi une vision globale du contexte dans lequel il s'inscrit. Vous avez insisté sur le terme « courage », l'employant à plusieurs reprises - et vous en aurez effectivement besoin. Au cours de la discussion, nous pourrons d'ailleurs vérifier la réalité de votre courage politique et de votre engagement pour les valeurs de la santé qui nous rassemblent tous et que vous avez fort bien évoquées dans votre discours introductif. A vous entendre tout à l'heure énoncer les principes d'une politique de santé, nous nous retrouvions tous ; mais cela nous rappelait aussi les propos - dans des termes un peu différents mais forcément convergents avec les vôtres - que tenait Jean-François Mattei il y a quelques mois. C'est pour moi l'occasion de saluer tant l'homme que l'ancien député, même si j'ai été de ceux qui ont critiqué sa politique. Cette évocation nous rappelle singulièrement, compte tenu du contexte actuel, qu'il y a, aujourd'hui comme sous votre prédécesseur, un vrai décalage entre les principes et la réalité. Ce décalage a contribué aux événements de ces dernières semaines. Certains ont parlé de l'échec, non pas d'un homme - je ne crois pas que Jean-François Mattei doive le prendre ainsi -, mais d'une politique et de l'équipe gouvernementale qui l'a portée. En effet, la politique menée par le Gouvernement depuis deux ans en matière de santé publique a échoué, tant sur le plan général que sur des questions particulières. A tel point que nous doutons tous, même la majorité, de la capacité de celle-ci à faire face aux difficultés auxquelles elle est confrontée dans les domaines de la santé et de l'assurance maladie. Monsieur le ministre, vous nous avez dit que vous feriez preuve de volonté. Sachez que l'opposition en fera tout autant en défendant ses convictions avec le plus de rigueur possible, mais aussi avec humilité - je n'ai d'ailleurs pas hésité à reconnaître la difficulté de la tâche qui nous attend tous. J'en viens maintenant plus précisément au texte en discussion. Monsieur le ministre, j'ai déjà affirmé en d'autres occasions que l'examen de ce texte n'était pas opportun. Si certains vous ont dit que la clarification avait été faite en première lecture, peut-être avez-vous eu le sentiment que, finalement, le débat porterait sur un sujet consensuel. Mais, malheureusement, je dois vous dire qu'on vous aurait mal conseillé, car la réalité est tout autre. De consensus, il n'y en a point ! Non seulement l'opposition a critiqué ce texte, mais même vos amis de l'UDF ont voté contre. Les partenaires sociaux au sens large, à savoir l'ensemble des organisations syndicales de salariés, la plupart des organisations des professionnels de santé, les institutions, telles la Caisse nationale d'assurance maladie et la Mutualité française, des partenaires avec qui vous affirmez sans cesse vouloir discuter, se sont tous prononcés contre ce projet de loi. Alors que vous faites appel à l'union nationale, nous entamons aujourd'hui l'examen, en seconde lecture, d'un texte qui a rassemblé le front le plus large possible contre lui. Ce projet n'est aujourd'hui soutenu que par l'UMP, qui agit en l'occurrence autant comme force politique que comme force sociale. S'agissant de la clarification, je me félicite que ce texte ait été très largement amendé - pour ne pas dire restructuré - grâce au travail mené en première lecture par l'Assemblée nationale et par le Sénat, bien que ce soit encore insuffisant. Dès lors, de par la volonté du Gouvernement et l'intervention légitime du législateur, il a perdu son inspiration première : il a cessé d'être un texte de santé publique pour devenir, par bien des aspects, une sorte de DMOS, un texte relatif à diverses mesures d'ordre social centré sur les professions médicales. Ce constat serait à lui seul suffisant pour justifier l'exception d'irrecevabilité car vous savez bien que le Conseil constitutionnel préconise un lien direct entre le contenu d'un texte et son intitulé. Ces deux points sont presque secondaires par rapport au fond du débat - que vous avez commencé à aborder dans votre intervention. En effet, un des principaux reproches qu'encourt votre texte, c'est d'anticiper très largement sur le débat concernant la gouvernance de notre système de santé, puisqu'il participe à son étatisation, même si vous avez essayé - de façon insuffisante, selon moi - de repousser un tel choix. Ce reproche majeur n'est pas uniquement le fait de l'opposition, mais aussi de l'ensemble des partenaires sociaux, qui dénoncent la méthode consistant à ne pas tenir compte du dialogue social et, sur le fond, la proposition d'un texte d'étatisation. La confusion est d'autant plus forte que ce texte nous en rappelle d'autres. Vous n'étiez pas encore au Gouvernement mais il y a quelques semaines à peine, lors de l'examen du projet de loi relatif aux responsabilités locales, nous débattions des compétences respectives, dans le cadre de la régionalisation, des organismes de l'Etat - fussent-ils déconcentrés ou décentralisés - et des partenaires sociaux en matière de pilotage des organismes sanitaires et sociaux. Certes, les députés qui s'investissent le plus dans les questions de santé ou d'assurance maladie ne participaient pas à ce débat, mais nos collègues de la majorité et le Gouvernement lui-même, en la personne de M. Devedjian, avançaient tranquillement dans leur raisonnement, nous expliquant qu'il n'y avait pas plus légitimes que les organismes déconcentrés et décentralisés de l'Etat pour piloter le système de santé. Une telle conception se défend, monsieur le ministre, sauf que vous prétendez la refuser matin, midi et soir, alors qu'elle est mise en application matin, midi et soir, par exemple dans le texte dont nous débattons ce soir comme dans celui sur la décentralisation. Vous envisagez de faire de même dans le projet de loi sur l'autonomie des personnes âgées et des personnes dépendantes. Vous essayez ainsi, une fois de plus, d'anticiper sur le débat relatif à la mise en œuvre du fameux cinquième risque de dépendance et de perte d'autonomie - débat que vous appelez pourtant de vos vœux et que vous estimez légitime -, alors qu'un tel sujet devrait faire l'objet d'une concertation avec les partenaires sociaux et l'opposition. C'est un choix politique. Un choix politique respectable, d'ailleurs. Mais ce n'est pas le nôtre, ni celui des partenaires sociaux, ni celui des gestionnaires de l'assurance maladie, ni celui de la plupart des intervenants du secteur. Avec ce texte, monsieur le ministre, votre gouvernement anticipe une fois de plus sur la discussion qui doit porter sur la gouvernance. C'est dire que le contexte n'est absolument pas clarifié. Encore une fois, alors que le Gouvernement, en ce qui concerne le problème majeur de la réforme de l'assurance maladie, affiche sans cesse son intention de mettre en avant la nécessité d'une gestion autonome par les partenaires sociaux, il renie cette orientation texte après texte. Dans quel contexte ce projet de loi est-il discuté ? On peut dire que lors de la première lecture, nous avons tous fait preuve de beaucoup de retenue - mais il faut dire que l'opposition avait plus de mérite à le faire -, puisque nous sortions d'un événement dramatique,... Mme Muguette Jacquaint. Dramatique, oui ! M. Jean-Marie Le Guen. ...un échec de santé publique majeur, je veux parler de celui que nous avons connu à l'occasion de la canicule. Aujourd'hui, en deuxième lecture, nous débattons de ce projet de loi dans un contexte marqué par une autre crise très grave, celle de l'assurance maladie. On ne peut pas réfléchir sur ce projet sans tenir compte de ces deux crises. S'agissant de la canicule, et puisque je veux essentiellement me tourner vers l'avenir, j'attire votre attention, monsieur le ministre, la vôtre comme celle de tous mes collègues, sur le fait que les éléments de prévention d'une situation analogue à celle que nous avons connue l'été dernier ne sont absolument pas mis en œuvre. Indépendamment des circulaires, indépendamment des procédures, indépendamment des dispositions fort utiles que nous avons adoptées en première lecture, tendant à faire remonter l'épidémiologie post mortem en direction de l'INVS. Tout cela est utile, mais avouez que ce n'est pas très opérationnel par rapport à un drame majeur dont nous espérons tous qu'il n'arrivera pas cet été. Je vous interpelle donc très directement, monsieur le ministre : où en est-on de la mobilisation de l'ONDAM médico-social, pour parler en termes très techniques, afin qu'un minimum de moyens soient débloqués dans l'ensemble de nos maisons de retraite leur permettant d'être dotées de cette fameuse salle bénéficiant d'un minimum de protection thermique ? Cela devrait être fait, mais les crédits, à l'heure qu'il est, ne sont pas mobilisés. Nous savons tous que dans nos circonscriptions, les incantations ministérielles ne se sont toujours pas traduites dans la réalité. Quant à la crise de l'assurance maladie, je l'ai déjà évoquée mais j'y reviens. Avant de se parer de toutes les vertus d'un texte de santé publique, on ne peut pas ignorer que l'assurance maladie participe aussi - c'est un minimum - à la santé publique. Pour des raisons financières, pour des raisons démographiques, pour des raisons tenant, d'une façon générale, au désordre de l'organisation du système de soins, nous assistons à une dégradation de la qualité de ce système, même si je reconnais qu'elle n'est pas uniquement liée à l'action de votre gouvernement. J'en viens maintenant au texte lui-même. J'ai rappelé tout à l'heure qu'on pouvait y voir trois parties. La première concerne l'organisation du système de santé. La deuxième concerne les politiques de santé publique. Et à cet égard, ce texte est profondément lacunaire et ne manifeste aucun courage pour prendre les orientations nécessaires pour surmonter les lobbies qui s'affirment contre la santé publique. J'espère que notre débat permettra de l'améliorer sur ce point. La troisième constitue une sorte de DMOS où s'accumulent des maladresses ainsi que les dispositions tendant à prendre en compte tout un catalogue d'intérêts corporatistes. Les différentes interventions que je ferai ce soir me permettront de traiter chacune de ces questions. Je voudrais dès maintenant revenir sur la question fondamentale de l'organisation du système de santé publique telle qu'elle est envisagée dans votre texte. Je l'ai déjà dit, je pense que sur ce point, il est tout à fait incongru par rapport au reste de la discussion que nous avons. Ce texte est profondément étatiste, même s'il a acquis un caractère baroque grâce au travail des parlementaires. M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Merci pour eux ! M. Jean-Marie Le Guen. Je fais partie de ces artistes. Nous avons essayé d'introduire dans ce texte des éléments positifs, mais soyons honnêtes : ils ne suffisent pas à contrebalancer une orientation qui dès le départ était mauvaise. Le texte qui nous est soumis serait parfaitement inapplicable s'il était adopté tel quel. M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Mais non ! M. Jean-Marie Le Guen. Il serait même deux fois inapplicable. D'abord, parce qu'il est en soi pratiquement inapplicable. Ensuite, parce qu'il sera à nouveau remis en cause dans le cadre du débat que nous aurons sur la gouvernance. L'Etat, l'Etat, l'Etat, tel est votre crédo. La philosophie de ce texte est une exaltation de l'Etat. Je ne vous en fais pas le reproche, monsieur le ministre, puisque vous n'êtes que l'héritier de cette orientation. Oui, l'Etat est exalté dans son centralisme. M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Ce texte fait de l'Etat le garant de la santé publique ! M. Jean-Marie Le Guen. Il est exalté dans une conception pyramidale. On descend du haut vers le bas, du savant vers ceux qui sont chargés d'appliquer la politique de santé publique. Il est vrai que vous avez quelque savoir universitaire et pouvez vous prévaloir de quelque activité universitaire. Mais il n'y a rien de communautaire dans ce texte, contrairement à ce que vous avez dit. Il s'inscrit dans une vision essentiellement épidémiologique. Il est d'abord orienté vers les pathologies. C'est là sa philosophie première, qui s'accompagne d'une négation tout à fait exagérée, poussée jusqu'à la caricature, des approches populationnelles et communautaires en matière de santé publique. C'est cette vision qui explique que vous vous opposiez à une autre conception de la politique de l'Etat, celle qui veut que celui-ci définisse des orientations politiques justes, qu'il ait un rôle non pas de décideur mais d'animateur, que les pratiques soient décentralisées et non pas pyramidales, et où l'intervention se fait non pas dans l'exaltation de l'autorité de l'Etat mais dans celui de la démocratisation des pratiques sociales. Il y a donc deux logiques très différentes. Et je suis évidemment un peu surpris de devoir constater que je défends une approche qui, paradoxalement, est presque plus libérale que la vôtre, du moins en ce qui concerne notre système de santé. Ce texte est incapable de dégager des priorités. Cent priorités ! Ne faudrait-il pas plutôt écrire : « sans priorité » ? Vous parlez de cinq priorités plus prioritaires que les autres, mais aucune d'entre elles, mis à part le cancer, ne trouve de traduction concrète dans ce projet. La santé environnementale, elle n'est pas là. La santé du travail, elle n'est pas là. Les maladies rares, elles ne sont pas là. Et d'ailleurs, devraient-elles l'être ? On voit bien qu'il y a un décalage. On a dégagé cinq items, peut-être parce que c'étaient ceux qui revenaient le plus souvent dans les enquêtes d'opinion, et on a défini cent objectifs pour essayer de satisfaire tout le monde, ce qui n'est évidemment pas possible. Pourtant, il existe des travaux très académiques, notamment ceux de l'académie de médecine, qui ont été faits sur la méthodologie des choix en santé publique. Or il n'y a rien dans ce texte qui corresponde à une démarche cohérente de définition des priorités. Mais puisqu'on exalte l'Etat, parlons-en ! Puisqu'on exalte la centralité, parlons-en ! Car votre texte n'en parle pas. Je n'évoquerai pas, parce que je ne veux pas en rajouter, le fait que cette loi devait être une loi de programmation, c'est-à-dire définissant des moyens. Or il n'y en a aucun. Mais elle n'est même plus une loi d'orientation. Pourtant, monsieur le ministre, nous vous défendrons. Mon collègue Gérard Bapt, qui est rapporteur spécial de votre budget, défendra la nécessité de dégager des moyens. Actuellement, vous ne les avez pas, ces moyens matériels et humains. C'est vrai au niveau central, pour les différentes directions de votre ministère, ce qui entraîne un tel appauvrissement matériel et humain que cela met en cause la qualité du pilotage de notre santé publique. C'est aussi vrai dans les régions. Sans entrer dans la polémique, tout le monde sait que les DRIRE n'ont pas suffisamment de moyens. L'affaire de la légionellose nous montre bien que les moyens déconcentrés manquaient. Parlons de ce qui est l'outil principal de l'Etat en matière de santé : les agences, la DGS, et les relations entre les deux. Quelle est aujourd'hui la politique de l'Etat vis-à-vis de ces agences ? Je pense à celles qui sont directement sous la tutelle du ministère de la santé comme à celles qui pourraient l'être demain. Nous avons eu un débat il y a quelques semaines sur les effets de l'utilisation d'un certain nombre de pesticides, notamment le Gaucho. Or le rôle le plus important est celui que jouent les directions du ministère de l'agriculture chargées de travailler avec les agences, en l'occurrence avec l'AFSSA. Alors qu'un certain nombre de décisions graves, et souvent injustes, ont été prises en matière de gestion des agences, votre prédécesseur nous a dit qu'il avait un plan pour rassembler les agences, pour les restructurer. Ce texte, qui prétend être visionnaire, en dit-il un mot ? Non. Aurons-nous ce débat ? Peut-être l'aurons-nous un jour, oui, mais pas à l'occasion de l'examen de ce texte, qui prétend être une loi d'orientation. Bizarrement, en première lecture, et pour ainsi dire à chaud, on a tout d'un coup chargé l'INVS de tout le suivi de la politique de veille sanitaire, non seulement au plan épidémiologique, non seulement au niveau du recueil de l'information, mais aussi au niveau opérationnel. Personnellement, je trouvais étonnant qu'une institution ayant plutôt un caractère de recherche appliquée, dont le rôle est plutôt la sensibilisation et le dépistage, soit tout d'un coup chargée d'une responsabilité opérationnelle. D'un autre côté, à juste titre mais plus tard, on a appris que la DGS avait décidé de se doter d'une cellule de veille et d'action opérationnelle, de façon permanente. Au passage, j'espère que les moyens suivront. Mais à quoi sert le débat que nous avons eu en première lecture, où nous avons chargé l'Institut de veille sanitaire de ces travaux si c'est pour que vous concentriez à nouveau ces tâches au niveau de la DGS ? En région, l'assurance maladie sera le banquier requis, monsieur le ministre. Les professions de santé - elles vous le disent - seront fonctionnarisées. Nous notons une régression dans la mise en place des politiques de santé publique. Il y a des acquis dans les régions, même s'il faut déplorer des inégalités. Sans doute aurait-il fallu essayer d'aligner les standards les plus bas sur les plus hauts. En Poitou-Charentes et dans le Nord-Pas-de-Calais ont été mis en place, en matière d'organisation de politique de santé publique, des réseaux collectifs qui fonctionnent parfaitement. Chacun y travaille en réseau, à égalité de responsabilités. Personne ne dénie à l'Etat son rôle d'impulsion majeure, mais une certaine entente et une certaine collaboration existent. Aujourd'hui, on est en train de caporaliser l'ensemble du système. Tous les acteurs, des CPAM en passant par les URCAM, les URML et autres organisations syndicales de médecins, se sentent caporalisés. Les partenaires sociaux, on l'a souligné, sont ignorés. Il a fallu l'intervention des parlementaires pour que soient maintenues ces fameuses conférences régionales de santé, qui sont des embryons, encore faibles et insuffisants, reconnaissons-le, de démocratie sanitaire au centre de toute politique de santé en général et de politique de santé publique. Parallèlement, on prononce la dissolution de toutes ces structures associatives, source de la prise de conscience des problèmes de santé en région, en annonçant que tout sortira de la casquette de préfet. M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Ce n'est pas vrai ! M. Jean-Marie Le Guen. Monsieur le ministre, vous comprenez bien que ce projet est loin d'un texte qui rassemble et puisse nous convaincre de notre capacité à conduire une politique de santé publique dans ce pays, ce qui éclairerait d'une façon générale notre action. J'aurai l'occasion de revenir prochainement à la tribune pour parler du contenu des politiques de santé ou plus exactement, de l'absence d'éléments significatifs dans ces politiques de santé, absence qui nous semble particulièrement préoccupante. Le chaos juridique et politique qui préside à l'ensemble des textes déjà votés ou qui le seront prochainement, l'absence de concertation sur ce projet relatif à la santé publique - qui, plus que tout autre, devrait nous rassembler - sont deux raisons qui fondent cette exception d'irrecevabilité. Je vous le disais en vous accueillant, monsieur le ministre, j'ai entendu M. Mattei tenir un discours de rassemblement et de dialogue. Mais comment, aujourd'hui, éviter le décalage entre vos intentions et la réalité ? Les propos tenus en la matière ne doivent pas miner tout sentiment d'efficacité et de responsabilité. C'est, en effet, une des questions auxquelles nous nous trouvons confrontés. Allons-nous continuer à laisser dériver la réalité face aux intentions du Gouvernement ? Vos intentions sont très bonnes, tirez-en les conclusions pour ce texte. Il serait bon que, le texte sur la gouvernance de l'assurance maladie devant être voté avant l'été,... M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale. A l'été ! M. Jean-Marie Le Guen. ...les trois premiers articles du projet que nous examinons ce soir soient réservés pour plus tard. Pourquoi, en effet, nous précipiter ? Ne serait-il pas préférable d'attendre la discussion que vous engagerez avec les partenaires sociaux et éventuellement avec l'opposition disposée à mener ce débat très en amont ? Si vous voulez donner du crédit à votre appel au dialogue, au rassemblement et à votre volonté de ne pas étatiser notre sécurité sociale, rattachez ces trois premiers articles au projet sur la gouvernance que vous présenterez d'ici à quelques semaines. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) Mme Muguette Jacquaint. Très bien ! M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé et de la protection sociale. M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale. Je suis d'accord sur un point avec M. Le Guen, qui connaît bien ce sujet : on ne peut pas aborder la gouvernance de l'assurance maladie sans évoquer les problèmes de santé publique. On ne pourra, demain, dessiner les contours d'une nouvelle gestion de l'assurance maladie, que j'appelle de mes vœux, sans qu'il n'y ait, au plus haut niveau de l'Etat, une définition des objectifs de santé publique. J'aurai l'occasion de préciser ma position sur ce point dans les prochaines mois. Je suis persuadé que nous nous retrouverons, au moins sur les objectifs. En revanche, monsieur Le Guen, je suis très étonné de ce que vous avez dit au sujet de l'Etat. Nous débattons à contre-emploi. Je ne vous savais pas si libéral ! Dans notre pays, nous avons besoin de l'Etat pour des missions régaliennes. Que les Aéroports de Paris appartiennent à l'Etat, je trouve cela assez étonnant, mais que l'Etat ne s'intéresse pas à la santé publique, je trouve cela choquant. Il y a une culture de la santé publique à mettre en place. Alors que je m'adresse à vous, je pense à quelqu'un que nous sommes plusieurs à avoir connu ici - il est décédé aujourd'hui - je veux parler du professeur Pous. A l'époque, comme M. Monier, il prêchait dans le désert concernant la santé publique. Il n'y a pas de culture de santé publique dans ce pays. Il faut la mettre en place. Pas un seul maire de grande ville n'a dans son équipe un médecin de santé publique. Ils sont, en revanche, entourés de financiers, d'architectes, de spécialistes de l'urbanisme, mais jamais d'un spécialiste de la santé publique. C'est comme si la santé publique n'existait pas. Or se posent des problèmes de santé dus à l'environnement. D'où vient la bronchiolite du nourrisson ? De la pollution des grandes villes ! Mais ni le maire de Paris, ni celui de Toulouse ou de Bordeaux n'ont dans leur équipe un spécialiste de la santé publique. La culture de santé publique n'existe pas. La santé publique doit être une mission régalienne de l'Etat. Certes, il existe des services d'hygiène et de santé, mais ce n'est pas ma conception de la santé publique. Vous dites que l'opposition fera preuve de volonté et de courage. Tant mieux. De la volonté, je sais que vous en avez. Nous verrons si vous aurez du courage, monsieur Le Guen. J'attends vos propositions et ce que vous direz de celles que nous ferons. M. Jean-Marie Le Guen. Pas celles que vous faites, puisque, pour l'instant, vous n'en avez pas ! M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Avec la majorité et le Gouvernement, je ferai des propositions puisqu'il s'agit de l'intérêt général. Je reprendrai quelques-unes de vos observations. Vous dites que les partenaires sociaux sont opposés à ce texte. La FNATH - Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés - sera heureuse de l'apprendre, elle qui s'est clairement déclarée favorable à ce projet de loi. Vous avez également parlé d'étatisation. Je demeure persuadé qu'entre les partenaires sociaux et l'Etat, il y a une complémentarité : aux partenaires sociaux de gérer la sécurité sociale, à l'Etat de fixer les objectifs de santé publique. Vous m'interrogez sur la prévention de la « future canicule ». J'espère que cela ne se produira pas. Quel argent faudra-t-il débloquer pour lutter contre les hyperthermies et les déshydratations ? Je ferai très prochainement un point précis, région par région, sur ce problème majeur. Vous parlez de l'Etat exalté. L'Etat n'est pas exalté. Il doit être présent et fort s'agissant de ses missions régaliennes dont la santé publique fait partie. Je pense que le professeur Dubernard sera d'accord avec moi. M. Bapt nous parlera des moyens. Je sais qu'ils sont trop faibles. Mais vous étiez au pouvoir, monsieur le Guen, il y a deux ans. Donc, ce n'est pas nouveau. Ce qui est vrai aujourd'hui, l'était hier. Vous ne parviendrez pas à faire croire que notre gouvernement est responsable de cette situation. M. Pierre Morange. Excellente remarque ! M. le ministre de la santé et de la protection sociale. J'ajouterai un mot concernant les régions. Vous dites que le Nord-Pas-de-Calais et le Poitou-Charentes disposent de réseaux. C'est vrai et c'est très bien. Mais quel est le véritable problème ? En France, nous sommes très bons en matière curative. M. Jean-Marie Le Guen. Nous en reparlerons ! M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Certes. Mais vous ne ferez croire à personne que quelqu'un qui souffrirait, ce soir, d'un infarctus du myocarde sera mal soigné en France. Il le sera aussi bien que chez nos voisins européens. En revanche, nous sommes mauvais, en matière de prévention. C'est ainsi. Cela dépend, en particulier, des catégories socioprofessionnelles. Les femmes d'ouvriers ou les ouvrières sont moins protégées du cancer du sein que celles d'une catégorie socioprofessionnelle supérieure. Ce n'est pas normal. Enfin, il existe des disparités régionales. Entre la région Midi-Pyrénées et le Nord-Pas-de-Calais, l'écart d'espérance de vie est de deux ans et demi pour les femmes et de quatre ans pour les hommes. Sans doute est-ce dû à la composition des catégories socioprofessionnelles et à l'âge, mais si j'apparie l'âge et la catégorie socioprofessionnelle, j'aboutis encore à une espérance de vie supérieure en Midi-Pyrénées. Cet écart n'est pas dû aux bienfaits des graisses insaturées du canard et de l'oie ! M. Jean-Marie Le Guen. Non, mais il est dû aux conséquences de l'alcoolisme ! M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Cet écart résulte de facteurs de risques, lesquels dépendent de l'éducation à la santé. Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait ! M. le ministre de la santé et de la protection sociale. J'estime que l'Etat, les préfets ont des responsabilités à cet égard. Les partenaires dont vous avez parlé font du bon travail, mais ils sont trop dispersés dans les régions. L'éducation à la santé doit relever de la responsabilité de l'Etat. Ce n'est pas parce que l'Etat n'a jamais agi dans ce domaine qu'il faut renoncer à demander aux préfets de jouer un rôle en matière d'éducation à la santé. Enfin, ce projet de loi relatif à la politique de santé publique est positif parce qu'il est le premier à traiter de santé publique. Je sais que vous l'avez énormément amélioré sur tous ces bancs et je vous en remercie. Nous aurons l'occasion de reparler de santé publique quand nous examinerons le texte sur la gouvernance de l'assurance maladie, donc les nouvelles structures de santé publique. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. le président. Dans les explications de vote, La parole est à M. Pierre Morange, pour le groupe UMP. M. Pierre Morange. Je ne répéterai pas les propos remarquables tenus par le président de la commission et rapporteur sur ce projet de loi essentiel. Ce texte est essentiel non pas simplement pour des raisons historiques - le précédent projet de loi d'ensemble sur la santé publique datait de 1902 - mais aussi dans la mesure où il comble une carence : finalement, nous avions un système de soins mais pas de politique de santé. Les quatre grands axes de ce projet de loi fondateur, sa philosophie, sont connus. Comme l'ont rappelé M. le ministre et M. le rapporteur, la responsabilité régalienne de l'Etat en matière de santé publique y est affirmée, au travers d'une organisation et d'une coordination efficientes des différents acteurs impliqués, avec la volonté de clarifier les rôles et de donner la priorité à la prévention, ce parent pauvre de notre système sanitaire, lequel est essentiellement axé sur l'aspect curatif. Le deuxième grand axe consiste à définir des objectifs sanitaires, et l'on ne peut que s'étonner des critiques de l'opposition, qui considère le propos trop éclaté en de multiples objectifs. Il s'agit justement de définir avec précision le périmètre d'action sanitaire, avec la volonté que l'Etat intervienne pour ne pas laisser l'initiative aux seules régions. Les exemples qui ont été cités ne font que retraduire l'originalité des dynamiques locales et témoignent du manque d'équité sanitaire entre les régions de France et de Navarre. Les différences d'espérance de vie entre le nord et le sud de la France et entre catégories socioprofessionnelles ou culturelles, rappelées par M. le ministre, sont autant d'indices de cette « inéquité » sanitaire. Il est du devoir de l'Etat d'assurer l'équité dans le domaine de la santé, qui est au cœur du pacte républicain. Troisième grand axe, la proposition d'une organisation à l'échelon régional est pertinente. L'efficacité appelle en effet une certaine proximité, mais il faut aussi se tenir à une distance suffisante pour avoir une vision synthétique. Cette organisation se fera sous la responsabilité et l'autorité du représentant de l'Etat afin de coordonner l'action des différents acteurs. Le quatrième grand axe consiste à assurer cette coordination, la multiplicité des acteurs pouvant amener une certaine complexité et nuire à l'efficience, il est essentiel de le rappeler. Enfin, n'oublions pas que cette motion de procédure était une exception d'irrecevabilité. M. Yves Bur. Ah bon ? M. Pierre Morange. Or, le moins que l'on puisse dire, c'est que l'argumentation sur l'inconstitutionnalité du texte est restée un petit peu ténue. Mais je ne voudrais pas faire de procès d'intention à l'orateur de l'opposition. M. Serge Blisko. M. Le Guen est docteur, mais pas en droit constitutionnel ! M. Pierre Morange. J'affirme que nous sommes dans notre rôle en discutant d'un projet de loi de programmation pluriannuelle, car il était nécessaire de mettre en place une politique en matière de santé publique. Ce texte, de surcroît, s'inscrit dans un calendrier parfaitement pertinent - avec une transmission de témoin entre le ministre de la santé précédant, Jean-François Mattei, et le nouveau, Philippe Douste-Blazy -, puisque nous devrions aussi légiférer, l'été prochain, sur la gouvernance de l'assurance maladie. Je rappelle également que nous ajoutons d'autres outils à la boîte à outils de l'assurance maladie. S'agissant du secteur ambulatoire, les accords de bon usage de soins et les divers protocoles, comme celui relatif à la prise en charge des affections de longue durée, ont permis d'améliorer l'efficience du système. En ce qui concerne le médicament, alors que certains décrets signés en 1999 n'avaient pas été appliqués dans les faits par le gouvernement précédent, là encore, le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin a fait œuvre utile, qu'il s'agisse du service médical rendu par les molécules ou encore de l'explosion des génériques, obtenue sous l'action du ministère de la santé. M. Jean-Marie Le Guen. Il n'y a pas que cela qui a explosé ! M. Pierre Morange. Enfin, dans le domaine hospitalier, la tarification de l'activité a été mise en place dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale. L'opération, extrêmement bien coordonnée, s'articule donc autour d'une philosophie sanitaire, sa colonne vertébrale, sous l'égide de l'Etat, au titre de ses prérogatives régaliennes, afin que la santé soit garantie de façon équitable sur l'ensemble du territoire. Nous voterons donc contre l'exception d'irrecevabilité. M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Préel, pour le groupe UDF. M. Jean-Luc Préel. Monsieur le président, comme cela vient d'être dit, notre collègue Jean-Marie Le Guen, dans son exception d'irrecevabilité, n'a en rien démontré l'inconstitutionnalité du texte, mais cela ne trompe personne car le but de ces motions de procédure est généralement d'obtenir du temps de parole. (Sourires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Ce soir, M. Le Guen s'en est octroyé pas mal puisque, si j'ai bien compris, il défendra trois motions à lui tout seul. En une heure et demie, il aura l'occasion de nous expliquer quelle est la position du parti socialiste... M. Gérard Bapt. Non ! Une demi-heure ! M. Jean-Luc Préel. Trois fois une demi-heure, cela fait une heure et demie. M. Yves Bur. Notre collègue Le Guen est si bavard ! M. Jean-Luc Préel. Il aura l'occasion, disais-je, de nous expliquer les réformes qu'il propose en matière de santé, de politique de santé publique, de gouvernance de l'assurance maladie. A la fin de la soirée, nous devrions donc être parfaitement informés : grâce à Jean-Marie Le Guen, tous les problèmes seront réglés. M. François Vannson. Quel sens de l'ironie ! M. Jean-Luc Préel. M. le ministre Douste-Blazy vient de nous expliquer que, dans notre pays, nous sommes plutôt bons dans le domaine curatif, mais que, en matière de prévention et d'éducation à la santé, nous sommes encore assez médiocres. C'est vrai, et voilà pourquoi il est si important de légiférer. Le texte, dans sa rédaction initiale, n'était pas satisfaisant, et nous avons tenté, en première lecture, de l'améliorer, sans grand succès, ce qui nous a d'ailleurs conduits à voter contre. Mais ensuite, au Sénat, quelques améliorations ont pu lui être apportées, et j'espère que, dans un esprit de dialogue retrouvé, nous parviendrons encore à l'amender, notamment au cours des débats d'aujourd'hui et de demain. Plusieurs problèmes ont été évoqués. En matière de santé publique, l'Etat joue un rôle essentiel pour définir les grands principes et intervenir, par le biais de ses services et des agences. Je considère cependant que conférer la présidence des groupements régionaux aux préfets de région constitue une erreur, car cela revient en réalité à la confier aux DRASS, tandis que les responsables des ARH, également nommés en conseil des ministres et représentant donc l'Etat au niveau régional, siégeront, si j'ai bien compris, au conseil d'administration de ces groupements. Quand on connaît le fonctionnement de l'Etat et les problèmes - je n'ose pas dire les rivalités - entre les uns et les autres, je vois mal comment les DRASS pourront imposer aux ARH des propositions auxquelles celles-ci n'adhéreront pas ou même qu'elles n'auront pas proposées elles-même. M. Serge Blisko. Très juste ! M. Jean-Luc Préel. Dans le cadre de la nouvelle gouvernance, il serait logique de procéder à une vraie régionalisation, c'est-à-dire de confier à des agences régionales de santé les missions de prévention, d'éducation, de soins, et pourquoi pas de formation. Le deuxième problème important porte sur les fameux cent objectifs. Cent objectifs, c'est sans doute beaucoup, il y a un côté affichage,... Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait ! M. Jean-Luc Préel. ...et je peux le comprendre, mais cela occulte un peu les priorités. Le Sénat en a ajouté quelques-unes car des pans entiers avaient été oubliés, notamment la question de l'audition. Le président de la commission et rapporteur souhaite revenir à cent. Il serait dommage, je crois, d'éliminer certains objectifs, oubliés par notre assemblée en première lecture mais proposés par le Sénat. Le troisième problème concerne les comités de base départementaux et régionaux, en particulier les CODES et les CRES, qui regroupent les associations de terrain. Votre texte a tendance à descendre de l'INPES, avec des délégués régionaux. Ne pas s'appuyer davantage sur les hommes et les femmes de terrain qui s'occupent de prévention et d'éducation à la santé serait une erreur. Sur tous ces sujets, nous proposerons des amendements. Je ne doute pas, monsieur le ministre - en tout cas, je l'espère - que, dans un esprit d'écoute et de concertation, vous en accepterez quelques-uns. Cela nous amènera à considérer que le texte aura été amélioré en seconde lecture et donc, demain, à ne pas voter contre. M. Yves Bur. Allons, vous ne feriez pas cela, tout de même ! M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt, pour le groupe socialiste. M. Gérard Bapt. Monsieur le président, mes chers collègues, il est bien clair que M. Le Guen ne cherchait pas à démontrer l'inconstitutionnalité du projet de loi. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. Pierre-Louis Fagniez. Ah bon ? M. Pierre Morange. Et le respect de la procédure parlementaire ? M. Gérard Bapt. Son argumentation tendait à montrer que ce texte, après le changement important intervenu dans la composition du Gouvernement, aurait mérité d'être remis en chantier et de donner lieu à un complément de concertation, à l'instar de ce que vous avez annoncé, monsieur le ministre, à propos de la réforme de l'assurance maladie. Les éléments du texte relatifs à la gouvernance vont venir « télescoper » l'implication de l'ensemble des partenaires - y compris de l'opposition, avez-vous dit - dans la réforme de la gouvernance. Je vois aussi, monsieur le ministre, une contradiction dans vos propos sur la continuité avec le texte de M. Mattei. Vous savez, lorsque votre prédécesseur avait annoncé une grande loi de santé publique, un grand espoir était né, tant il était important de mettre ce sujet au premier plan des préoccupations, de s'éloigner un peu du strict aspect comptable, ou même de l'aspect réforme offre de soins, en abordant la dimension prévention, qui, vous l'avez dit, manque encore cruellement dans notre culture médicale. Mais, à cet égard, il faudrait davantage de temps, c'est évident. Beaucoup se sont demandés pourquoi la canicule et ses conséquences sanitaires n'ont jamais été abordées lors les multiples concertations menées par M. Mattei préalablement à l'examen du projet de loi - qui n'est plus de programmation mais d'orientation, puisque les problèmes budgétaires empêchent de s'engager sur des financements. Dans le cadre de la commission d'enquête, j'ai interrogé à ce propos le professeur San Marco, qui, depuis l'expérience vécue en 1983, lance des messages d'alerte chaque fois qu'il va faire un petit plus chaud que d'habitude à Marseille : il m'a répondu, à ma grande surprise, n'avoir jamais été sollicité au sujet de cette loi de santé publique. Il y aurait donc intérêt, je crois, à remettre en chantier la concertation, d'autant que les conséquences tirées à la va-vite de la catastrophe sanitaire de cet été nous ont semblé à la fois prématurées et limitées. Plusieurs de nos amendements tendent du reste à mieux tenir compte des propositions de la commission d'enquête de notre assemblée. Il faudra aussi certainement revenir sur certaines orientations propres à votre prédécesseur. Vous avez insisté, tout à l'heure, sur les aspects positifs de la loi Kouchner en matière de démocratie sanitaire, mais il faut bien dire, à cet égard, que votre prédécesseur manifestait la plus grande méfiance vis-à-vis de toutes ces organisations d'usagers, sans lesquelles il ne saurait pourtant y avoir de progrès en matière de prévention et de santé publique. C'est également à notre initiative qu'a été restitué à l'INPES, l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé, son rôle d'impulsion et de coordination de l'éducation sanitaire, auquel vous avez affirmé attacher la plus grande importance. Dès lors, monsieur le ministre, si vous voulez que cette loi d'orientation de santé publique fasse la transition entre les deux gouvernements et devienne la « loi Douste-Blazy », il faut absolument, à mon sens, que vous vous donniez du champ, que vous ouvriez de nouvelles pistes de concertation et que vous retiriez immédiatement du texte tout ce qui concerne la gouvernance et la démocratie sanitaire. M. Préel a prétendu qu'il n'y avait aucun motif à défendre une exception d'irrecevabilité, mais il s'est contredit lui-même puisqu'il en a appelé à des ARS, des agences régionales de santé, alors que le texte donne la prééminence aux préfets tout en maintenant les ARH. Hormis l'aspect constitutionnel, cette argumentation montre bien que le nouveau ministre aurait tout intérêt à se donner du temps et à reprendre la concertation pour préparer les réformes en cours. J'ai entendu M. Morange nous parler des accords de bon usage des soins, qui n'ont rien à voir avec le projet de loi relatif à la politique de santé publique mais entrent effectivement dans le champ de ces réformes. M. le président. Veuillez conclure, monsieur Bapt. M. Gérard Bapt. Même si le projet de loi n'est pas inconstitutionnel, ce serait rendre service au nouveau ministre que de prendre notre temps avant de progresser dans son examen. M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour le groupe communiste. Mme Muguette Jacquaint. Monsieur le ministre, comme votre prédécesseur, vous nous avez affirmé que l'Etat avait attaché une très grande importance aux questions de santé publique, allant jusqu'à nous parler de « cent objectifs à atteindre ». Mais il y en a tant à atteindre, en vérité, qu'on ne voit plus les priorités ! Encore faudrait-il qu'elles soient bien définies dans le texte, ce qui n'est pas le cas. Une culture de la santé publique est nécessaire, je vous l'accorde. Mais la prévention reste le parent pauvre, vous le reconnaissez vous-même, de la santé publique, et ce depuis des années. Nous le rappelions à votre prédécesseur. Où en sommes-nous en ce qui concerne la santé scolaire, la santé au travail et les campagnes de sensibilisation, que ce soit sur le cancer du sein, l'alcoolisme ou encore l'obésité ? Quelles mesures concrètes ont été prises en ce domaine, et lesquelles votre gouvernement prendra-t-il pour aller dans le sens où vous prétendez vouloir aller pour améliorer la santé publique ? Nous ne pouvons qu'être inquiets sachant les coupes claires que vous allez opérer - on nous l'annonce - lorsque nous examinerons la réforme de la sécurité sociale. Pour montrer que nous ne sommes pas d'accord avec ce texte sur la politique de santé publique, tel que nous le présente le Gouvernement, nous voterons l'exception d'irrecevabilité. J'ajoute que nous avions réussi à faire passer un amendement au Sénat relatif précisément à la prévention, qui visait à ce qu'il y ait une visite médicale par an dans les écoles. Même cet amendement-là a été rejeté ! Alors, quand on vous entend affirmer que l'Etat prend en considération cette question et en fera la priorité des priorités, nous ne pouvons qu'être sceptiques et nous ne pouvons qu'être opposés à ce projet de loi qui ne répond aucunement aux priorités en matière de santé publique. M. le président. Je mets aux voix l'exception d'irrecevabilité. (L'exception d'irrecevabilité n'est pas adoptée.) M. le président. J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault une question préalable, déposée en application de l'article 91, alinéa 4, du règlement. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen. (« Encore ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. Jean-Marie Le Guen. Les honorables parlementaires qui, par leur présence, démontrent tout l'intérêt qu'ils portent à la santé publique - et qui ne sont pas là, j'imagine, seulement parce qu'ils sont réquisitionnés (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) pour vérifier que les choses se passent bien - ne devraient pas être trop gênés d'entendre encore parler de santé publique, et d'autant moins qu'ils pourraient être intéressés de savoir ce qui a changé entre la première et la deuxième lecture et ce qui s'est passé entre les deux. Nous avons tous entendu le discours du Président de la République : oui, bien sûr, il faut plus de social, plus de dialogue, a-t-il convenu. Et ce qui était hier stupide et irresponsable est reconnu désormais ! Ainsi en est-il pour les chercheurs, ce qui n'est pas sans intérêt quand on parle de santé publique, parce que ce qui se passe à l'INSERM, par exemple, n'est pas indifférent à cet égard, que ce soit dans les sciences dures ou dans les sciences humaines. Je voudrais être certain que l'autosatisfaction qui régnait avant le 28 mars ne persiste pas mais je ne le peux pas sachant que le texte que nous examinons est complètement isolé dans notre société. Il n'est guère approuvé que par une association - peut-être n'aimerait-elle pas d'ailleurs être citée dans ce cadre. Mais aucune autre institution, aucun acteur de santé, en dépit de vos incantations, ne continue à en soutenir la démarche. A l'évidence, notre conception de l'Etat et de la société n'est pas la même. Pour notre part, nous, socialistes, nous ne pensons pas qu'il y a, d'un côté, un Etat régalien qui existe d'autant plus qu'il donne des coups de menton, et de l'autre, le marché. Nous pensons que, entre les deux, il existe des formes de régulation sociale. C'est d'ailleurs le cœur, pensons-nous, du modèle social européen et, plus encore, le cœur de notre modèle de santé publique. L'existence d'une société civile articulée avec la volonté politique, effectivement animée souvent par l'Etat : voilà ce que nous considérons utile et même nécessaire pour notre société, surtout dans ces domaines. Peut-être n'avez-vous pas encore bien assimilé tous les éléments de ce texte, monsieur le ministre. Par exemple, le préfet doit, bien sûr, impulser quelque chose, y compris sur les DRASS car il a une capacité et une connaissance supérieures. Mais le DRASS est un fonctionnaire d'Etat. Il dépend même de votre ministère, à la différence du préfet. Oui, donc, il faut que l'Etat ait un rôle d'impulsion. Mais par qui ? Par M. de Villepin ? Est-ce lui qui va désormais impulser la politique de santé publique, ou est-ce le ministre de la santé ? Voilà une des questions concrètes qui vont se poser. Et le préfet de région se réunira-t-il, comme le prévoit le projet, seulement avec des fonctionnaires ou également avec des partenaires sociaux et des responsables d'institutions, pour étudier les orientations à donner à la région ? La politique de la région n'est-elle que la simple déclinaison de ce qui se passe au plan national ou l'adaptation au plan régional des grandes impulsions données au plan national ? Enfin, vous affirmez que l'Etat ne sera que le garant et donnera délégation au gérant. Mais ce n'est pas du tout ce que l'on trouve dans le texte, lequel crée un GIP, justement, autour de l'Etat. Et c'est ce GIP qui va mener la politique de santé publique, pour l'essentiel. C'est bien dire qu'il est le gérant et c'est bien cela qui pose problème : non pas tant que l'Etat soit à l'origine de l'impulsion politique, cela ne me choque pas, mais qu'il soit aussi le gestionnaire, par l'intermédiaire dudit GIP régional. La démonstration est faite d'une étatisation, d'une monopolisation de l'action de santé publique (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), et cela s'oppose à ma vision d'une économie sociale nécessaire à l'ensemble de notre système de santé. Au-delà, ce n'est pas un texte de loi, pas plus que des incantations sur le rôle régalien de l'Etat qui peuvent se substituer au contenu des politiques. Venons-en précisément à ce contenu. Les politiques de santé publique ne sont pas des concepts abstraits. Nous connaissons tous les variations de mortalité selon les régions, les classes d'âge, les couches sociales, l'expérience professionnelle ou l'environnement. Mais voyons plutôt ce que contient le texte de loi. S'agissant du tabac, le Gouvernement et l'actuelle majorité ont réalisé une avancée par l'augmentation des prix. Nous les avons soutenus, même lorsqu'ils reculaient. Malheureusement, le présent projet arrive à un moment où la volonté du Gouvernement commence à faiblir. Nous voudrions la ranimer. Dites-nous donc, monsieur le ministre, ce que vous allez faire sur le prix du tabac ! Allez-vous dire, comme le Premier ministre, il y a quelques semaines, qu'il ne serait plus question d'augmentation du prix du tabac mais au contraire de politiques en direction des buralistes ? Ou bien que la santé publique est votre objectif et que vous allez continuer ce qu'avait initialement prévu M. Mattei en la matière ? Telle est la question, celle de la volonté et du rôle de l'Etat. En ce qui concerne l'alcool, il n'y a rien ! Pourtant l'alcoolisme est un problème de santé publique spécifique à notre pays, fort ancien, je le reconnais. Pour lutter contre ce fléau, la majorité précédente avait adopté la loi Evin, ce qui n'était pas si mal. M. François Rochebloine. On peut en parler ! M. Jean-Marie Le Guen. Sans doute vous en souvenez-vous, monsieur le ministre, ainsi d'ailleurs que des reculs auxquels elle a donné lieu par la suite. Depuis, rien ! Et en particulier dans ce texte ! J'ai entendu ce que vous avez dit tout à l'heure, sur un aspect symbolique, certes - mais j'aime les symboles -, à propos des bouilleurs de crû. Manque de chance, sur ce point, nous avons été battus en commission ! En tout cas, vous pourrez compter sur l'opposition pour vous soutenir ! Parmi les amendements qui nous sont proposés, il y en a un ou deux qui me semblent vraiment significatifs d'une volonté politique. Je pense à la proposition de notre collègue Bur sur les prémix, ainsi qu'à l'amendement que je présente visant à interdire certaines actions dans les débits de boissons après vingt-trois heures, notamment en direction des jeunes. Nous savons, vous savez que, plus ou moins dans l'illégalité, dans les boîtes de nuit, dans les bars, dans les discothèques, fréquentés par les jeunes, sont organisées des promotions d'alcools, souvent d'alcools forts, d'ailleurs. M. François Rochebloine. Il y a aussi des actions en sens inverse ! M. Jean-Marie Le Guen. Ce ne serait pas suffisant, bien sûr, mais nous n'avons pas la prétention de résoudre, par ce texte, tous les problèmes. Nous vous proposons, monsieur le ministre, de vous prononcer en faveur d'états généraux de la lutte contre l'alcoolisme, que vous organiseriez. Il n'y a pas de solution miracle. La mesure symbolique sur les bouilleurs de cru, mesure que je soutiens, est destinée à frapper les esprits. Ne devrions-nous pas, par exemple, reprendre la proposition d'une de nos collègues de la majorité au Sénat, à savoir apposer sur les bouteilles une mise en garde destinée aux femmes enceintes ? Car nous le savons tous, et moi particulièrement qui suis originaire, comme mon nom l'indique, d'une région où l'alcoolisme est un grave problème, l'alcool qui n'est pas en soi dangereux, le devient pour une femme enceinte et en tout cas pour le fœtus. Or cette vérité n'est pas du tout admise dans l'opinion. A propos de l'alcoolisme, je le répète, il n'y a rien dans votre texte. Il faut avancer. L'Etat est volontaire, il décide en matière de santé publique, dites-vous. Alors, allons-y ! M. François Rochebloine. Trop facile ! M. Jean-Marie Le Guen. J'ai évoqué M. de Villepin. Or, sur la lutte contre la toxicomanie, c'est bien le ministre de l'intérieur qui est chargé de nous présenter un texte. Hormis les initiatives parlementaires, il n'y a rien dans le présent projet sur un problème pourtant bien réel et qui agite les préaux. En matière d'environnement, différentes sociétés savantes multiplient les rapports sur les risques environnementaux, mais votre projet est muet sur ce sujet. Rien non plus sur la médecine du travail et la médecine scolaire qui ont un rôle à jouer dans la santé publique. Je ne parle pas seulement du manque de moyens, mais de la redéfinition des problématiques. Et que dire de l'obésité ? Je suis un de ceux qui ont attiré l'attention des pouvoirs publics sur la nécessité de passer à la vitesse supérieure sur cette question. Bernard Kouchner avait mis en œuvre une politique à travers le PNNS - programme national nutrition-santé - excellente méthodologie de lutte contre l'obésité et traitant plus globalement de la nutrition. Les principes de santé publique qui animent le PNNS, sa mise en œuvre et les moyens dont il est doté sont de ce point de vue un rattrapage intéressant face à une absence totale de politique de nutrition dans notre pays depuis des années. Aujourd'hui, tout le monde a conscience du drame sanitaire qui nous menace. L'Académie de médecine - je cite notamment le professeur Tubiana - nous annonce en effet que, si nous ne faisons rien, d'ici à quinze ans, 25 % des jeunes de ce pays seront obèses et que 70 à 80 % d'entre eux le resteront toute leur vie, s'installant du même coup dans le diabète. Un cinquième de la population ! Ce fléau est même capable de faire reculer l'espérance de vie moyenne, du jamais vu depuis des centaines d'années, ce qui serait la marque d'un incroyable recul social. Oui, mes chers collègues, du fait de l'obésité, les dix ou quinze années à venir nous offrent la perspective d'une diminution de l'espérance de vie moyenne dans notre pays. M. Yves Bur. Nous sommes bien d'accord ! M. Serge Blisko. C'est consensuel ! M. Jean-Marie Le Guen. Je sais que vous êtes d'accord. Alors, passons aux actes ! Le Sénat a retenu un des quatre amendements que j'avais proposés sur ce sujet. M. Mattei, qui s'y était opposé à l'Assemblée, y ayant réfléchi entre-temps, l'a accepté au Sénat. Or que nous propose-t-on aujourd'hui ? Un amendement gouvernemental résultant d'arbitrages antérieurs aux 21 et 28 mars, contraire au point de vue du ministère de la santé et tendant à revenir en arrière. Heureusement, notre commission des affaires culturelles, familiales et sociales l'a repoussé. Je vous le demande, monsieur le ministre, revenons au texte du Sénat. Retirez l'amendement gouvernemental et refusez un arbitrage qui s'est fait hors de votre présence et qui est contraire aux intérêts de la santé publique. Prenez cette décision, elle vous appartient. Montrez votre courage politique ! Mes chers collègues, nous le savons, à chaque fois que nous parlons de santé publique, nous nous heurtons - car l'Etat n'est pas tout-puissant - aux lobbies. M. Serge Blisko. Eh oui ! M. Jean-Marie Le Guen. Moi qui ai été rapporteur de la loi Evin sur l'alcool et sur le tabac, je rappelle que certains prétendaient alors qu'elle allait nuire à l'économie. Mais enfin, quelle honte pour nous si nous ne l'avions pas votée à l'époque ! En l'adoptant, nous nous sommes montrés des pionniers et nous avons été capables ensuite de faire partager notre point de vue, alors minoritaire, à nos partenaires européens. M. Serge Blisko. Oui, mais ce n'est plus le cas aujourd'hui ! M. Jean-Marie Le Guen. La France, cependant, a toujours un trop fort taux de consommation de tabac, et nous savons que des dizaines de milliers de nos concitoyens en mourront. M. Serge Blisko. En particulier des femmes ! M. Jean-Marie Le Guen. Nous avons naguère été capables d'infléchir une tendance, non seulement par des politiques de prévention, mais aussi par des actes forts, symboliques, qui ont entraîné les médias à se « désintoxiquer », eux aussi, du tabac. En réalité, s'ils ne parlaient guère des méfaits du tabac pendant des années, c'est qu'ils tenaient aux recettes publicitaires que le tabac leur apportait. Mais qu'en est-il du problème de l'alcool ? et de l'obésité ? M. François Rochebloine. Et de la drogue ? M. Jean-Marie Le Guen. Toutes ces questions se posent aujourd'hui. Pourquoi les principaux médias de notre pays ne soutiennent-ils pas une politique de santé publique sur ces questions, comme ils devraient le faire ? Tout simplement parce que leurs annonceurs font la loi ! Mais la volonté politique de l'Etat, aujourd'hui, ne consiste-t-elle pas à déléguer aux préfets plutôt qu'à des associations la mise en œuvre d'une politique de santé publique ? C'est à nous de prendre les décisions qui s'imposent. Ce sont celles que prône l'OMS et que des pays comme le Québec et la Grande-Bretagne, qui n'ont pourtant pas nos traditions, ont déjà su prendre. Ce projet de loi nous offre aujourd'hui l'occasion d'affirmer une volonté politique, de démontrer l'efficacité de l'action publique. Saisissons-la pour faire vivre cette loi sur la politique de santé publique (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.). M. Yves Bur. Nous menons une vraie politique de santé. Nous avons su agir contre le tabac, contre la vitesse. M. Jean-Marie Le Guen. J'ai soutenu ces mesures. M. le président. La parole est à M. le ministre. M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Il est impossible aujourd'hui de ne pas étatiser la santé publique, car c'est une mission régalienne de l'Etat. Quand vous me dites que M. de Villepin dirige les préfets, c'est vrai, mais un préfet représente l'Etat tout entier et applique la politique de santé publique décidée par le ministre de la santé et de la protection sociale autant que la politique de sécurité décidée par le ministère de l'intérieur. Vous avez tenu par ailleurs un discours courageux sur certains sujets, monsieur Le Guen. En effet, nous devons être au rendez-vous de la santé publique. Et pour ma part, je pense que l'éducation à la santé est bien plus importante que la répression. M. François Rochebloine. Absolument ! M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Vous avez évoqué le prix du tabac. Reconnaissez, monsieur Le Guen, que le Gouvernement est allé « fort » sur cette question ! M. Jean-Marie Le Guen. Je l'ai souligné. M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Et je vous en remercie. Cela nous a sans doute coûté très cher lors des dernières élections... M. Yves Bur. Il faut avoir du courage pour sauver les gens ! M. le ministre de la santé et de la protection sociale. ...comme naguère la loi Evin vous avait coûté cher. Mais là n'est pas la question. L'important est l'éducation à la santé, afin de dissuader les jeunes d'adopter des conduites addictives. Et c'est ce à quoi nous allons travailler ensemble. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. le président. Je mets aux voix la question préalable. (La question préalable n'est pas adoptée.) M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. Bertho Audifax. M. Bertho Audifax. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à l'occasion de l'examen, en deuxième lecture, du projet de loi relatif à la politique de santé publique, nous allons débattre de 102 articles restant en discussion sur lesquels plus de 250 amendements ont été déposés. Au cours de cet exercice, nous ferons œuvre utile si nous respectons l'ambition initiale de ce texte : donner à l'Etat les moyens de tenir son rôle de garant de la protection de la santé publique. Cette ambition correspond en effet à une attente forte de nos concitoyens. J'ai entendu tout à l'heure l'orateur du groupe socialiste nous expliquer que ce n'était pas à l'Etat de caporaliser la santé publique. M. Yves Bur. M. Le Guen est excessif ! M. Bertho Audifax. Cependant, lorsque nos concitoyens ont un problème, ils veulent que soit assuré, pour tous, le droit à la protection de leur santé. Autrement dit, ils demandent aux pouvoirs publics, c'est-à-dire à l'Etat, de s'acquitter du devoir de protéger collectivement la population contre les risques susceptibles de menacer sa santé. Désormais, chaque fois que leur santé ou celle de leurs proches est menacée, c'est vers l'Etat et ses agents que les Français et les Françaises se tournent pour exiger une protection efficace. L'actualité le confirme régulièrement, que ce soit à l'occasion de l'apparition et de la propagation d'épidémies du type SRAS, méningite, sida ou hépatite B ou d'autres menaces plus diverses de type bioterrorisme ou catastrophe écologique. Alors que l'histoire contemporaine est marquée par le rôle sans cesse réduit de l'Etat, force est de constater que la santé publique va constituer l'une des rares extensions du domaine régalien. Or, aujourd'hui, notre système de santé n'est pas en mesure de donner pleinement satisfaction à cette demande de la société française. La preuve majeure de cette incapacité réside, par exemple, dans la mortalité prématurée, celle qui survient avant l'âge de soixante-cinq ans. Elle reste en France à un niveau anormalement élevé, alors que les causes en sont connues et que l'on sait qu'elle peut être évitée. D'autres pays développés, comme l'Allemagne ou l'Italie, connaissent une mortalité aux âges adultes inférieure à la nôtre. C'est dans la perspective de ne plus admettre de telles contre-performances que ce projet de loi a été déposé en mai 2003 et qu'il a été très sensiblement amélioré par notre assemblée en première lecture en octobre 2003, puis par le Sénat en janvier 2004. Je voudrais rendre ici hommage, moi aussi, à M. Jean-François Mattei d'avoir eu le courage de proposer une grande loi de santé publique. D'un point de vue technique, ce projet de loi s'articule autour de cinq titres. Le titre Ier définit le périmètre de la politique de santé publique, clarifie les responsabilités et simplifie les instances impliquées. Tout à l'heure, certains d'entre vous ont affirmé que le système fonctionnait bien et que nous voulions le caporaliser. On a parlé d'approche populationnelle. N'était-ce pas plutôt une approche en forme de millefeuilles où l'on faisait faire dix fois les mêmes choses par dix intervenants différents ? M. François Vannson. Tout à fait ! M. Bertho Audifax. Il s'agit donc pour nous de définir le périmètre de la politique de santé publique, de clarifier les responsabilités et de simplifier les instances impliquées. Quant au titre II, il porte sur les outils d'intervention de l'Etat. Ces deux titres me semblent être les plus importants, car ils sont structurants. Ils modifient l'architecture du système actuel qui n'a jamais consacré la santé publique en tant que telle comme une responsabilité de l'Etat, ni comme un domaine prioritaire d'action des pouvoirs publics. Ils retouchent profondément une organisation qui, en l'absence de politique d'ensemble, est le résultat de réformes successives, s'imbriquant les unes dans les autres sans vision globale et dont la prévention était le parent pauvre. Très rapidement, on peut retenir qu'à l'échelon national, le paysage institutionnel est réorganisé en trois niveaux. D'abord, un niveau de concertation, d'expertise et de coordination, avec la Conférence nationale de santé, instance permanente de débat entre les associations, les professionnels, les sociétés savantes, et le Haut conseil de la santé publique qui reprend les missions du Conseil supérieur d'hygiène publique de France et celles du Haut comité de la santé publique. Puis, vient le Comité national de la santé publique, instance de coordination interministérielle et de gestion politique. Au niveau politique, tous les cinq ans, le Gouvernement soumet à l'approbation du Parlement, sur la base des travaux de ces instances, un projet de loi fixant les priorités de la politique de santé publique, et le ministre de la santé arrête les plans nationaux de santé publique. Enfin, un troisième niveau de mise en œuvre est constitué par les agences sanitaires, les organismes de recherche, les associations et l'assurance maladie. Un schéma similaire est déployé à l'échelon régional, où les objectifs nationaux doivent être déclinés en tenant compte des spécificités locales, et dans lequel tous les acteurs de la santé publique doivent travailler ensemble. Il est vrai que certaines régions menaient déjà des politiques de santé publique efficaces. Mais celle à laquelle j'appartiens, la Réunion, n'en a même jamais mis en place. Nous sommes pourtant confrontés à des maux tels que l'alcoolisme ou à la drogue - le cannabis, notamment - et à d'autres problèmes spécifiques à la collectivité. Il existe donc une inégalité entre les régions, et c'est pourquoi j'espère que cette loi sera l'occasion de mettre en place dans chacune d'elle une vraie politique régionale de santé publique. Signalons qu'un nouveau titre II bis résulte de l'adoption de nombreux amendements au texte initial destinés à tirer un certain nombre de conclusions de la canicule de l'été 2003. En ces temps où l'actualité est incertaine, et parfois menaçante, nous devons nous accorder sur ces dispositions fort opportunes : l'obligation de signalement de menaces imminentes pour la santé de la population ; l'extension des pouvoirs de l'administration en matière de police sanitaire en cas de menace sanitaire grave ; la sécurisation juridique du « plan blanc », dispositif de crise qui permet aux établissements de mobiliser les moyens de toute nature dont ils disposent en cas d'afflux de patients ou victimes ou pour faire face à une situation sanitaire exceptionnelle ; ou encore les dispositions s'inscrivant dans les suites du plan « Biotox », qui tend à prévenir et à organiser la lutte contre les attaques biologiques et bactériologiques. Le titre III traite des cinq plans de santé publique nationaux, qui sont autant de priorités que le Gouvernement assigne à son action : la lutte contre le cancer, la santé environnementale - incluant la santé au travail -, la violence et les comportements à risque, les maladies rares et la qualité de vie des personnes atteintes de maladies chroniques. De ce fait, la politique de santé publique est mise sous objectifs. Cet effort est louable car, jusqu'à présent, lorsque l'on parlait d'objectifs dans le secteur sanitaire, on faisait référence à un outil comptable, l'ONDAM, voté par le Parlement à l'occasion des lois de financement de la sécurité sociale. Malgré les efforts du Gouvernement pour médicaliser l'ONDAM, cet objectif ne permet pas aux responsables publics que nous sommes de savoir si les ressources consacrées au système de santé ont le meilleur impact possible sur l'état de santé de la population. C'est pourquoi la mise sous objectifs de la politique de santé publique qui nous est proposée est salutaire, d'autant qu'elle est renforcée par le fait que ce texte comporte, sous forme d'un rapport annexé, un « tableau de bord » destiné à améliorer le pilotage de notre système de santé et évaluer sa performance. Les dispositions du titre IV concernent la recherche et à la formation médicale continue. Elles créent, en premier lieu, l'Ecole des hautes études en santé publique, pour hisser notre système de formation au meilleur niveau. En second lieu, le projet de loi actualise le dispositif d'encadrement des recherches biomédicales issu de la loi dite Huriet-Sérusclat de 1998. Mon éminent collègue Pierre-Louis Fagniez interviendra sur ces dispositions au cours de la discussion des articles. En permettant à l'Etat d'affirmer son rôle en matière de santé publique, de mieux coordonner ses actions et celles des différents acteurs et d'évaluer sa politique, ce projet de loi servira le volontarisme manifesté par le Gouvernement dans ce domaine, si important pour nos concitoyens, ce qui ne pourra que se traduire par des résultats encore plus encourageants que ceux obtenus jusqu'à présent, et donc se mesurer par des vies sauvées. Je pense en particulier au formidable acquis résultant de la politique menée en matière de lutte contre le tabagisme, principale cause de cancer et de mortalité évitable. Grâce aux mesures courageuses adoptées à l'occasion de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003, notamment l'augmentation de la fiscalité sur le tabac, et grâce à la loi de juillet 2003 visant à restreindre la consommation de tabac chez les jeunes, le tabagisme diminue très sensiblement. Une étude de l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé, réalisée en octobre 2003, atteste de la baisse sensible de la proportion de fumeurs dans la population totale, surtout chez les femmes. De même, en matière de lutte contre le cancer, d'importants efforts ont été réalisés en faveur du dépistage des cancers du sein chez la femme, avec la généralisation à tout le territoire de la mammographie réalisée tous les deux ans chez les femmes âgées de cinquante à soixante-quatorze ans. Nous espérons que grâce à ce texte les efforts de ce type seront plus systématiques à l'avenir. Une vraie politique de santé publique se traduira en effet dans notre pays par de nouvelles vies sauvées. C'est la raison pour laquelle le groupe UMP souhaite que ce texte soit adopté par notre assemblée. Bien sûr, il n'est pas parfait. Bien sûr, il conviendra de le faire vivre. C'est d'ailleurs ce qu'il faut demander à nos concitoyens présents dans les associations ou groupements de santé : faire vivre le texte, tant à l'échelon national que régional. C'est à ce dernier niveau que l'effort le plus important devra être fourni, afin que la loi porte tous ses fruits. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Préel. M. Jean-Luc Préel. Monsieur le ministre, vous prenez en charge un secteur extrêmement important, et ce dans une période cruciale. Je vous souhaite donc bonne chance et j'espère que vous réussirez cette mission difficile. Les Français sont en effet très attachés à la santé ; ils la placent même au premier rang de leurs préoccupations. Or notre système de soins connaît une crise extrêmement grave touchant tous les secteurs : une crise morale, organisationnelle et financière. Votre responsabilité est donc immense. Nous espérons que vous réussirez à sauvegarder notre système de soins en permettant l'égal accès de tous à des soins de qualité. L'UDF sera à vos côtés si vous souhaitez l'écouter et l'associer en amont aux décisions. Elle souhaite en effet être un partenaire de la majorité. C'est pourquoi j'espère que votre volonté de dialogue et d'écoute sera effective. Notre système de soins est, à juste titre, reconnu comme bon pour le curatif, mais il est particulièrement médiocre dans les domaines de la prévention et de l'éducation à la santé. Cette situation est sans doute liée à un problème de culture et de formation, mais aussi à l'absence d'une volonté clairement affichée et à la prolifération des intervenants : différents ministères, caisses, mutuelles, nombreuses associations, chacun défendant son propre projet en y consacrant un tout petit budget. La situation est aggravée par le manque de coordination et la confusion des responsabilités. C'est pourquoi ce projet de loi était très attendu. Mais il nous a fortement déçus, à tel point qu'en première lecture l'UDF avait fini par voter contre ce projet, pour quatre raisons. Premièrement, le texte introduit ou conforte une distinction entre le soin et la prévention. Non seulement celle-ci nous paraît irréaliste, mais ce choix conduit à confier la responsabilité de la prévention et de l'éducation au préfet - et donc à la DRASS. L'ARH, dont le directeur est pourtant nommé en conseil des ministres, n'est qu'un simple membre du conseil d'administration du groupement régional. Il est clair qu'une telle organisation ne fonctionnera pas. L'UDF plaide au contraire pour la désignation d'un responsable régional unique de la santé, chargé à la fois du soin, de la prévention, de l'éducation et de la formation. Vous le savez, monsieur le ministre, vous qui étiez cardiologue : lorsqu'un médecin reçoit une personne hypertendue ou diabétique, il la soigne, mais en lui donnant des conseils il fait aussi de l'éducation, et en cas de problème génétique il pratique même de la prévention. Le soin, l'éducation et la prévention sont donc liés ; les dissocier constitue selon nous une grave erreur. Deuxième raison qui nous a conduits à critiquer ce texte : vous prévoyez que l'INPES puisse disposer de correspondants régionaux, mais pour l'UDF, au contraire, il faut s'appuyer sur les hommes et les femmes de terrain, sur les membres des associations intervenant au niveau des collèges, des lycées ou des communes. Ce sont eux les « effecteurs », et il n'est pas raisonnable de s'en passer et même de ne pas s'appuyer sur eux. L'UDF souhaite donc un renforcement du rôle des CODES et des CRES, chargés de réunir au niveau départemental et au niveau régional les hommes, les femmes et les associations, le Gouvernement devant quant à lui s'appuyer sur une fédération nationale dynamique de ces associations. La troisième raison est la présentation de cent objectifs quantifiés avec la volonté affichée d'améliorer dans les cinq ans les problèmes de santé recensés. Ce nombre donne aux objectifs de santé un aspect de catalogue et trahit une volonté artificielle de communication tout à fait regrettable. Ainsi, plusieurs problèmes de santé sont-ils marginalisés, voire ignorés : il serait par exemple dommageable de ne pas prendre en compte l'alcool, les problèmes de l'audition ou de la santé mentale. L'orientation est donc très épidémiologique ; le volet populationnel, pourtant important, a été occulté et négligé. Le fait de quantifier les objectifs en sachant par avance que la plupart d'entre eux ne seront pas atteints dans cinq ans expose à une critique prévisible. L'UDF aurait souhaité que soient clairement identifiées, en se basant sur la mortalité prématurée évitable, trois à quatre priorités, telles que le cancer du sein, les cancers du colon et du rectum, les maladies cardiovasculaires, l'alcool et le tabac, sur lesquelles on « mettrait le paquet » dans le cadre d'un programme pluriannuel afin d'obtenir des résultats. La quatrième raison est l'absence des moyens humains et financiers permettant de mettre en œuvre la politique de santé publique affichée dans le projet de loi. Or, sans moyens, nous n'avancerons guère. Le rejet de tous nos amendements, le plus souvent sans la moindre argumentation de la part du rapporteur ou du ministre, avait également motivé notre opposition au texte. Mais à en juger par l'attention manifestée par le rapporteur, je suis sûr que nous ne rencontrerons pas ce problème en deuxième lecture. (Sourires.) Certaines mesures proposées par nos amendements auraient pourtant pu recevoir l'appui de tous nos collègues. Il en est ainsi, par exemple, de la nécessité de prévoir, pour tous les professionnels de santé, une formation continue obligatoire, financée et évaluée. La formation continue est en effet source de qualité. Le Sénat a amélioré le texte sur plusieurs points. J'ai d'ailleurs noté avec amusement que des amendements que j'avais proposés au nom de l'UDF en première lecture, et qui avaient été rejetés, ont été repris au Sénat avec l'accord du ministre. C'est donc avec un grand espoir que nous entamons la discussion de la deuxième lecture. Les temps ont en effet changé, avec un nouveau Gouvernement et une nouvelle démarche, plus à l'écoute de la population et des composantes de la majorité. Je pense, monsieur le ministre, que vous serez attentif à nos propositions qui n'ont pour but que d'essayer d'améliorer le texte. Celui-ci vient en effet à un moment crucial : nous sommes tous en attente de la réforme de la gouvernance. Elle est urgente et nécessaire, car le déficit cumulé sur trois ans est de 33 milliards d'euros. Il s'élèvera probablement à 14 milliards d'euros en 2004. Le diagnostic posé par le Haut conseil est partagé par tous, ou presque, mais l'étiologie l'est moins. Quant au traitement, il sera certainement douloureux pour tous et donc délicat à mettre en œuvre. Il convient d'abord de financer le déficit sans le reporter sur nos enfants. Il n'est donc, par principe, pas acceptable de prolonger de quelques années l'existence de la CADES. Une fois le déficit financé, il conviendra de mettre en place une maîtrise médicalisée, que vous aviez, monsieur le ministre, ébauchée en 1993. Toutefois, pour que celle-ci soit efficace, tous les acteurs devront être associés en amont aux décisions et en aval à la gestion. C'est pourquoi l'UDF propose, après la création de caisses autonomes gérées paritairement pour les maladies professionnelles et les accidents du travail, une réelle régionalisation de la santé fondée sur des conseils régionaux de santé élus par collèges. Si j'évoque ce problème majeur de la gouvernance, c'est qu'actuellement, nous manquons de lisibilité sur la volonté du Gouvernement. Or plusieurs lois, y compris celle de santé publique, apportent leur pierre au nouvel édifice sans que le schéma ou le but soient clairement identifiés. Il en est ainsi des ordonnances du 4 septembre 2003 -assouplissement de la planification sanitaire, contractualisation des autorisations, nouvelles modalités pour l'investissement -, des ordonnances adoptées en conseil des ministres le 17 mars - relations Etat-caisses, simplification de l'organisation des établissements -, de la loi sur les territoires ruraux - maisons médicales, aides à l'installation -, de la loi sur la décentralisation -participation de conseillers régionaux à la commission exécutive de l'ARH, investissements hospitaliers aidés par les collectivités -, du plan Hôpital 2007 - gouvernance, tarification à l'activité, investissements - et, bien entendu, de cette loi de santé publique, qui confie au préfet la responsabilité de la santé publique au niveau régional. Une mise en perspective paraît absolument indispensable. Souhaitez-vous un responsable régional unique pour la santé ou souhaitez-vous plusieurs responsables de secteurs aux limites floues, comme le propose ce texte ? Allez-vous demain proposer des ARS contrôlées démocratiquement, chargées du soin - aussi bien à l'hôpital qu'en ambulatoire -, de la prévention, de l'éducation à la santé et de la formation ? Une réponse claire sur ce point permettrait d'avoir une première idée sur vos orientations. Je n'ai pas abordé tous les volets de ce texte, fort variés, ce qui lui donne plus l'aspect d'un DMOS que d'un vrai texte de santé publique, mais nous aurons au cours des débats, que j'aborde avec confiance et espoir, tout loisir de parler de la psychothérapie, de l'Institut national du cancer, de l'école de santé publique ou du saturnisme, entre autres. Merci, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, pour votre écoute et pour l'attention que vous porterez aux amendements de l'UDF. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.) M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse. Mme Jacqueline Fraysse. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, lorsque, en première lecture, nous avons abordé ce projet relatif à la politique de santé publique, nous sortions d'une tragédie sanitaire où 15 000 personnes avaient trouvé la mort. Les différents rapports émis depuis sur le sujet ont souligné certes les défaillances de notre système d'information sanitaire, mais surtout la faiblesse de notre système de santé publique ainsi que la gravité des effets d'une politique de restriction de l'offre de soins. C'est dans ce contexte que la discussion sur ce projet de loi s'était engagée. Arguant à juste titre de la nécessité de définir des objectifs clairs de santé publique affirmés au plan national par l'Etat et encourageant la régionalisation de la conduite de cette politique, le Gouvernement a proposé de créer une nouvelle institution, le groupement régional de santé publique, et a fait un certain nombre de propositions pour valoriser le préventif face au curatif, le préventif étant le parent pauvre de la politique publique de santé. Je ne m'étendrai pas sur notre position quant aux principes qui structurent cette stratégie et auxquels nous sommes favorables. Nous pensons en effet que les objectifs de santé publique doivent être définis clairement par l'Etat et que la région est l'échelon pertinent de cette mise en œuvre. Nous avions cependant soulevé plusieurs questions et formulé des doutes sur lesquels je voudrais revenir. Quel crédit accorder aux intentions du Gouvernement de s'engager dans une véritable politique de santé publique face à l'absence de financements ? Comment interpréter et mettre en œuvre cette centaine d'objectifs non hiérarchisés dont certains définissent des buts sanitaires quantitatifs, parfois qualitatifs, et d'autres des indicateurs d'évaluation sanitaire, voire des outils pour construire ces indicateurs d'évaluation ? Ces interrogations étaient rendues légitimes par la faiblesse du texte sur au moins deux axes essentiels : la prévention et les risques implicites induits par la création d'un groupement régional de santé publique, le GRSP. La santé au travail ne faisait l'objet que d'un unique article, très limité et sans véritable portée pratique. La santé scolaire était tout simplement évacuée du texte, alors que la période de scolarité est justement le moment privilégié pour toucher l'ensemble de la population jeune et y déceler ceux qui ont des difficultés particulières. Quant aux objectifs de ce GRSP, ils semblaient douteux, notamment en raison de la composition de son exécutif, dont les membres sont essentiellement des financeurs - Etat, CNAMTS, ARH, et financeurs privés -, et d'où sont exclus les usagers du système de santé et les élus, autrement dit celles et ceux qui traitent de l'intérêt général et des besoins. M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Non, les élus en font partie, et les autres sont dans la conférence régionale de santé ! Mme Jacqueline Fraysse. Oui mais les usagers devraient également faire partie du GRSP pour parler des besoins. Il est vrai que nous ne disposions pas alors de données financières ou stratégiques précises lorsque nous avons travaillé sur ce texte. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 et la loi de finances pour 2004 n'étaient pas encore discutées. La loi de décentralisation n'avait pas encore révélé son contenu, et le plan Hôpital 2007 n'avait pas dévoilé son vrai visage. C'est aujourd'hui chose faite, et, malheureusement, toutes nos craintes se voient confirmées. Ce texte, contre toutes les apparences dont il est paré, ne vise pas à mettre en œuvre une véritable politique nationale et régionale de santé publique. II poursuit et aggrave la politique globale de réduction de la prise en charge sanitaire collective. Ainsi, les discussions, tant à l'Assemblée qu'au Sénat, concernant les enjeux d'une prévention de la santé au travail n'ont pas permis de repousser les limites du texte. En dépit des exemples récents de légionellose, en dépit des rapports alarmants sur l'évolution des cancers professionnels, des troubles musculo-squelettiques, des maladies chroniques, des pathologies psychiques résultant des conditions de travail, en dépit de l'alerte permanente des médecins du travail, vous vous êtes opposés à toute modification substantielle de cette disposition. Vous avez refusé d'élargir les pouvoirs des médecins du travail, de revenir sur la constitution d'une fiche d'aptitude du salarié à son poste de travail, disposition totalement contraire au code du travail. Vous avez refusé d'élargir le rôle des représentants des salariés dans le contrôle sanitaire de l'entreprise, d'améliorer la reconnaissance des maladies professionnelles et des accidents du travail, pourtant largement sous-déclarés, tout le monde le sait. En dépit de l'ampleur des besoins de santé au travail, vous vous êtes cantonnés à installer un système de veille épidémiologique dans l'entreprise. Concernant la santé scolaire, permettez-moi, monsieur le ministre, de vous dire ma surprise, même si, je sais, ce n'est pas vous qui étiez alors ministre. En première lecture, notre assemblée a adopté un amendement déposé par le groupe communiste et républicain, accepté par la commission, visant à instituer une visite médicale régulière pour les enfants durant leur scolarité. Ce n'était tout de même pas un geste très révolutionnaire, c'était une mesure évidente de prévention. Au Sénat, votre prédécesseur a proposé et fait adopter par sa majorité un amendement pour supprimer cette disposition. C'est une attitude vraiment indigne à mes yeux, tant sur le fond que sur la forme, d'autant que les besoins sont immenses, personne ne peut les ignorer, vous l'avez d'ailleurs dit. J'avais interpellé votre prédécesseur à cette occasion sur la situation de la médecine scolaire dans mon département des Hauts-de-Seine, où la visite médicale avant l'entrée en sixième n'est plus assurée systématiquement pour tous les enfants, faute de médecins scolaires. Notre amendement visait à renforcer la législation pour la santé des enfants, je regrette beaucoup que le Gouvernement s'y soit opposé. Quant à l'acte II de la loi de décentralisation, qui devait permettre de donner les moyens de financement nécessaires à ces interventions régionalisées en matière de santé publique, chacun aura pu constater qu'il n'a consisté qu'en un vaste délestage financier de l'Etat au détriment des collectivités locales. Evidemment, tout cela éclaire le rôle et la fonction du fameux GRSP. I1 s'agit au bout du compte d'organiser le financement des actions de santé publique sans que cela coûte un sou au budget de l'Etat, Bruxelles oblige, sans doute ! De même, le plan Hôpital 2007, qui devait être l'occasion d'une reconfiguration régionale de l'offre de soins dans le cadre d'une nouvelle et meilleure relation ville-hôpital, afin d'accentuer la logique de prévention sanitaire, est en réalité l'outil d'une privatisation progressive de l'hôpital public et le vecteur d'une marchandisation de la santé en France, ... M. Yves Bur. Intox ! Mme Jacqueline Fraysse. ...la région n'étant encore là que pour subvenir aux besoins financiers d'investissement pour le bâti hospitalier, auparavant assumés par le budget de l'Etat. Enfin, vous affirmiez la nécessité de travailler au rééquilibrage de la part du préventif et de celle du curatif -souci que nous partageons - de contribuer à un effort financier particulier en faveur de la prévention et donc de la santé publique, mais tant la loi de finances que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 confirment l'absence de nouveaux moyens d'intervention en santé publique et sécurité sanitaire. Seule la création d'une ligne budgétaire « plan cancer » permet de donner l'illusion d'un investissement supplémentaire, sans doute parce qu'il s'agit là d'un chantier présidentiel. Cette nouvelle répartition interne des crédits d'Etat destinés à la santé publique a donc des conséquences concrètes importantes. Tout d'abord, les régions et les collectivités locales devront compenser les désengagements et manquements de l'Etat central pour mener à bien leur politique de santé publique. Le risque est alors grand de voir se creuser les disparités régionales et les inégalités déjà marquées devant la santé et la mort, dont vous avez d'ailleurs parlé vous-même, monsieur le ministre. Cela illustre de surcroît la volonté arbitraire d'un recentrage des dotations d'Etat sur certains dispositifs sanitaires, au détriment d'autres parfaitement établis et efficaces. Ainsi, alors que la lutte contre le cancer est proclamée priorité nationale par le Gouvernement, l'Institut Gustave Roussy, plus grand centre anticancéreux d'Europe, qui avait réussi à engager un programme d'investissement et de recherche ambitieux, se voit confronté à un plan d'économies de 10 millions d'euros, soit l'équivalent de 250 emplois ! M. le président. Veuillez conclure, madame Fraysse ! Mme Jacqueline Fraysse. Je vais conclure, monsieur le président. Tel est donc l'esprit général de ce projet de loi de santé publique qui nous est soumis en deuxième lecture, un texte dont le contenu s'inscrit entièrement dans une stratégie de réduction des dépenses publiques, que la pléthore d'articles ajoutés par le Sénat ne peut masquer. Monsieur le ministre, mes chers collègues, lors des dernières élections, les électrices et électeurs ont confirmé leur refus de votre politique libérale, qui s'ingénie depuis deux ans à mettre à sac toutes les constructions sociales solidaires et collectives pour y substituer une logique marchande et individualiste. M. le président. Madame Fraysse, je vous prie de bien vouloir conclure. Mme Jacqueline Fraysse. Je termine, monsieur le président ! M. le président. Votre temps de parole est terminé. Mme Jacqueline Fraysse. Systématiquement et par tous les moyens, vous désossez notre système de sécurité sociale pour le jeter en pâtures aux appétits sans bornes des marchés financiers. (Exclamations sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. Bernard Accoyer. Vous exagérez ! M. Yves Bur. Intox ! Mme Jacqueline Fraysse. Cette politique, mes chers collègues, la majorité du pays n'en veut pas et vous l'a fait savoir. Je vous invite très sérieusement, monsieur le ministre, à en tenir compte et à cesser cette espèce de fanatisme libéral (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) qui fait dire au Premier ministre qu'en tout état de cause, rien n'arrêtera le Gouvernement. C'est une curieuse conception de la démocratie ! M. le président. Madame Fraysse, merci de terminer ! Mme Jacqueline Fraysse. Je termine. Des réformes, sans aucun doute, sont à faire, mais quelles réformes, avec quel contenu et au service de qui ? Il est urgent d'y travailler avec l'ensemble de nos concitoyens, professionnels et usagers, avec les élus, afin que l'intérêt général prévale. M. le président. C'est terminé ! Mme Jacqueline Fraysse. Je veux croire que la parole démocratique qui vient de s'exprimer... M. le président. Vous n'avez plus la parole ! Mme Jacqueline Fraysse. ...permettra que cette seconde lecture soit l'occasion d'un changement d'attitude... M. le président. Madame Fraysse, c'est fini ! Mme Muguette Jacquaint. C'est scandaleux de fermer le micro ! M. le président. Chacun est tenu de respecter son temps de parole. J'ai été très patient, mais je ne puis accepter qu'on le dépasse d'un tiers. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) La parole est à M. Yves Bur. M. Yves Bur. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, une politique de santé publique, beaucoup en parlait, certains en rêvaient, mais c'est l'honneur de Jean-François Mattei de l'avoir enfin concrétisée et c'est à vous, monsieur le ministre, de la mener à bon port. En plaçant pour la première fois la santé publique au cœur de la problématique santé, en définissant des priorités et des objectifs pour améliorer l'état sanitaire de notre population sur la base d'indicateurs de santé, nous engageons notre pays à s'approprier enfin une culture de santé publique. Nous nous dotons enfin de repères réels et mesurables qui donneront sens au débat sur la réforme de notre système de soins et d'assurance maladie. Ce texte constitue une première étape dans la clarification des responsabilités. A ce titre, la politique de santé publique doit servir d'assise à la réforme de notre système de santé pour permettre à tous d'avoir accès à des soins de qualité. M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Très bien ! M. Yves Bur. Dans ce cadre, il revient à la représentation nationale de définir les priorités et les objectifs de santé publique, mais aussi d'allouer les moyens financiers nécessaires pour les concrétiser. Le pilotage de la mission de santé publique relève bien évidemment de la responsabilité première de l'Etat qui doit en être le garant et veiller à la mise en œuvre des priorités. Il devra prendre en compte dans cette démarche les risques induits par l'environnement et par les conditions de travail, sans négliger la nécessaire réduction des inégalités en matière de santé. Parce que je reste un partisan convaincu de la décentralisation, j'estime que le rôle de l'Etat ne peut se justifier qu'à la condition d'une redéfinition de sa mission, d'une évolution profonde de son mode de fonctionnement et de son organisation. Nous prenons acte de la place redonnée aux conférences régionales de santé qui doivent être transformées en structures permanentes de concertation et de débat au sein desquelles l'ensemble des acteurs de la santé apprendront à mieux se connaître, à appréhender en commun les besoins et les objectifs, à s'entendre sur les moyens à mettre en œuvre pour promouvoir un système de prévention et de soins plus efficace. Un tel lieu de débat est indispensable pour accompagner et réussir les réformes structurelles que nous allons proposer aux Français dans les prochains mois. Parallèlement, je voudrais réaffirmer certaines priorités, qui ne peuvent dépendre des aléas électoraux, car il y va de la santé et de la vie de nos concitoyens. Oui, une politique de prévention ambitieuse peut heurter certains de nos compatriotes, car corriger les habitudes de vie n'est jamais chose aisée, même si au fond d'eux-mêmes les Français en mesurent l'intérêt réel. Oui, malgré le mécontentement des fumeurs, piégés par une vraie dépendance, nous devons amplifier les campagnes de prévention pour épargner à notre jeunesse de tomber dans le piège mortel que leur tendent avec cynisme les fabricants de mort en différé. Nous devons mieux accompagner tous ceux qui souhaitent s'arrêter de fumer par des soins appropriés. Oui, l'alcoolisme reste un fléau, même si notre pays fait encore trop souvent profil bas pour renforcer la prévention. Aujourd'hui, ce sont les jeunes et mêmes les très jeunes, à partir de quatorze ans, qui sont la cible des fabricants. Avec le même cynisme que les fabricants de cigarettes, ils leur vendent de nouvelles boissons très « tendance », des mélanges à base de vodka ou de gin, qui dissimulent la présence d'alcool derrière un taux de sucre très élevé. Ces boissons contournent la taxation des prémix que nous avions imposée dès 1997. La consommation de ces mixtures explose dans tous les pays européens et je vous proposerai une nouvelle définition, plus globale, fondée sur le taux de sucre. Nous ne sommes pas isolés dans ce combat. Déjà la Suisse et l'Allemagne ont engagé cette lutte afin de casser la progression de ces produits et rappeler aux industriels que leurs profits ne justifient pas toutes les démarches marketing au détriment de la santé de nos jeunes. Notre objectif, à travers ce projet de loi, n'est pas de nous limiter à une refonte organisationnelle, mais bien d'affirmer notre volonté d'améliorer l'état de santé et de bien-être de nos concitoyens. Cette démarche est cohérente avec la volonté qui nous anime de rendre plus efficace notre système de soins. Les objectifs de santé publique, en amplifiant les efforts de l'éducation et en développant la culture de la prévention, permettront de concentrer les moyens collectifs sur le traitement des pathologies les plus graves et d'optimiser ainsi les chances de guérison. En engageant notre pays, les acteurs de santé et l'ensemble de la population, dans la voie de la santé publique, nous leur proposons une démarche gagnant-gagnant : gagnant en termes de santé, gagnant en termes économiques, gagnant en termes de qualité de vie. C'est la raison pour laquelle, monsieur le ministre, nous soutenons votre projet de loi, ainsi que les efforts de modernisation de notre système de santé que vous allez engager. Ce qui est en jeu, c'est la solidarité face à la maladie. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt. M. Gérard Bapt. Je souhaite vous saluer, monsieur le ministre, dans vos nouvelles fonctions. M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Merci ! M. Jean-Michel Dubernard , président de la commission, rapporteur. Voilà qui nous change de ton ! M. Gérard Bapt. Le groupe socialiste, attaché à la question de la santé et de la santé publique en particulier, tâchera de vous aider par une opposition constructive et positive et qui s'élargira peut-être même à des terres qui nous sont communes. (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) Mon groupe avait salué en première lecture l'annonce d'une loi de santé publique, qui avait suscité beaucoup d'espoirs. Nous avions d'ailleurs participé de manière positive à la discussion du texte proposé par ce prédécesseur, profitant des qualités d'écoute et d'ouverture du rapporteur. Nous avions obtenu des avancées sur certaines de nos propositions, notamment la réduction des inégalités en matière de santé. J'ai noté, monsieur le ministre, que vous insistiez sur ces inégalités. Je souhaite que vous vous saisissiez également de la question de l'aide médicale d'Etat, ce qu'avait refusé de faire votre prédécesseur. Pourtant, cela concerne la santé publique ; je pense par exemple aux maladies infectieuses qui peuvent se développer chez certaines populations défavorisées d'origine étrangère. Nous avions aussi obtenu le rétablissement de l'Institut national de prévention et d'éducation à la santé dans ses missions initiales, notamment assurer le développement de l'éducation par la santé ; j'ai noté aussi l'accent que vous avez mis sur cette dimension. Le texte initial de M. Mattei « déconstruisait » la loi du 4 mars 2002, dite « loi Kouchner », notamment dans son volet relatif à la démocratie sanitaire, dont j'ai noté que vous la jugiez positive. Comment, en effet, une politique de santé publique pourrait-elle se passer des associations, notamment en matière d'éducation sanitaire ? En première lecture, le groupe socialiste, avec le concours de la commission, avait travaillé au retour à l'esprit de la loi Kouchner. Ainsi, la réintégration de la conférence nationale et des conférences régionales de santé évitera à l'Etat de s'enfermer dans un splendide isolement, même si, comme vous l'avez indiqué, il doit conserver son rôle de décision et d'impulsion en matière de santé publique. Néanmoins, l'examen de ce projet de loi a été troublé par deux événements. Le premier, dramatique, fut la catastrophe sanitaire liée à la canicule. Ce texte n'a pu intégrer, en dépit des amendements présentés en urgence par votre prédécesseur, les propositions formulées de manière unanime par la commission d'enquête présidée par M. Evin et rapportée par M. d'Aubert, sur les conséquences sanitaires de la canicule. Monsieur le ministre, comment ces propositions pourront-elles être intégrées en deuxième lecture ? L'autre événement était de nature politique et je veux parler de l'amendement Accoyer (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) qui a marqué une volonté sous-jacente de la majorité, ou du moins de certains de ses membres, d'encadrer de manière autoritaire l'exercice de la psychothérapie... M. Bernard Accoyer. Seulement lorsqu'elle est exercée par des charlatans ! M. Gérard Bapt. ...ce qui lui est antinomique. Enfin, les incertitudes subsistent sur vos grands plans d'action. Je souhaite, à cette heure, n'intervenir que sur l'un d'entre eux : le plan de lutte contre le cancer. Il s'agit d'une priorité légitime, que nous soutenons et qui s'inscrit dans la continuité du plan quadriennal de M. Kouchner. Toutefois, cette lutte contre le cancer passe aussi par la lutte contre les inégalités sociales. L'étude du développement des cancers dans la population française montre en effet l'importance des modes de vie, des risques professionnels ou de l'accès à la prévention et aux soins. A cet égard, j'avais écrit, en ma qualité de rapporteur du budget de la santé, à l'ensemble des directeurs des agences régionales d'hospitalisation, qui m'ont tous répondu, pour leur demander l'état d'avancement des actions du plan cancer. Je souhaite citer deux de ces réponses. Dans la région Nord-Pas-de-Calais, le cancer dispute la première place, dans les causes de mortalité, aux maladies cardio-vasculaires et la région bat des records mondiaux, notamment pour les cancers des voies aérodigestives supérieures ou le cancer du sein. Des efforts importants sont donc à réaliser, mais l'ARH m'écrit que les réseaux en cancérologie sont dans l'impasse : les protocoles ont été revus trois fois et sont diffusés, mais les dossiers communs ne sont pas remplis, leur utilité est remise en cause, les audits sont prévus mais non financés, alors même que des moyens importants ont été engagés. Ce plan oublie donc d'évaluer les dispositifs déjà à l'œuvre. Il ne pose donc plus le problème du financement et il est frappant de constater que nous ne disposons pas d'une comptabilité précise des dépenses engagées par l'Etat et par la sécurité sociale dans la lutte contre le cancer. De manière générale, il faudrait subordonner le financement d'une nouvelle mesure à une évaluation préalable, laquelle devrait être publiée et élargie à la qualité du suivi et à l'orientation des malades. On sait, par exemple, que le financement de certains dépistages a été confié à des structures trop peu professionnelles. De la même façon, la chirurgie, en matière de cancer, ne devrait être effectuée que dans des structures ayant obtenu un agrément préalable. J'ai regretté que l'amendement que j'avais déposé en première lecture ait été repoussé. Mais je voudrais aller un peu plus loin et évoquer une situation qui vous touche, monsieur le ministre, celle de la région Midi-Pyrénées. Le réseau ONCOMIP a été créé par l'ARH en 1999. Le rapport d'étape d'août 2003 fait état d'un bilan décevant. En dépit du bien-fondé évident de la démarche, le développement des réseaux est entravé par les résistances de certains acteurs, par les revendications quant aux moyens, par la fragilité du statut de médecin coordonnateur. A Toulouse, deux médecins ont successivement démissionné et n'ont toujours pas été remplacés. A ces difficultés s'ajoute la complexité des financements. La dimension d'évaluation est donc primordiale et l'on ne peut faire litière de ce qui existe déjà en termes d'actions de santé publique. Monsieur le ministre, vous êtes attaché à la lutte contre le cancer, par la construction de « cancéropôles », notamment à Toulouse, comme vous l'avez récemment évoqué au cours d'une conférence de presse. Mais il ne peut y avoir d'avancées significatives sans une évaluation qui associe tous les acteurs, y compris les associations de malades. C'est à cette aune que nous jugerons, au cours de la discussion, de votre volonté d'ouverture et de rupture avec la démarche entamée, dans un objectif louable, par votre prédécesseur. Si vous avez succédé à M. Mattei, c'est bien qu'il avait failli en quelque chose ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Comme le Premier ministre n'a pu le tenir pour responsable du trou de la sécurité sociale, dès lors qu'il s'agit d'une politique de financement de l'assurance maladie... (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. Bernard Accoyer. Les leçons de votre part sont déplacées ! M. Gérard Bapt. ...il s'agit donc d'une rupture dans la gestion de la santé publique. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) M. Pierre-Louis Fagniez. Monsieur Bapt, un peu d'élégance ! M. le président. La parole est à M. Paul-Henri Cugnenc. M. Jean-Marie Le Guen. Enfin quelqu'un qui va parler de l'alcool ! (Sourires.) M. Paul-Henri Cugnenc. Monsieur le ministre, monsieur le président, mes chers collègues, nous revenons, dans le cadre de cette deuxième lecture, sur un texte particulièrement important, et vous me permettrez d'insister dès maintenant sur quelques points. Vous avez rappelé à juste titre que nous voulons faire mieux dans un certain nombre de domaines, comme ceux de la politique de prévention ou de l'acquisition d'une culture de santé publique que nous ne possédons peut-être pas tous. Mais vous avez également souligné que, dans le domaine curatif, le niveau de performance de notre système de santé était unanimement reconnu. Pour autant, cet acquis, s'il est aujourd'hui une réalité, n'est pas inaltérable. M. Bernard Accoyer. C'est vrai ! M. Paul-Henri Cugnenc. Nous devons cette efficacité à tous ceux dont le métier est de s'occuper des malades, à tous les soignants - aux infirmières, aux médecins et à tous ceux qui participent aux soins -, qui subissent la crise démographique que nous savons et continuent de subir le choc dramatique des trente-cinq heures. (« Tout à fait ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Nous savons que nos structures d'hospitalisation publiques et privées ne peuvent pas retrouver leur équilibre de fonctionnement depuis cette décision qui a déstabilisé tout notre système. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. Jean-Marie Le Guen. Abrogez-la ! M. Paul-Henri Cugnenc. Or, une partie de ce personnel soignant se sent démobilisée par la situation vacillante de l'hôpital. Il faut, monsieur le ministre, préserver ce qui est aujourd'hui le plus performant. La lutte contre le cancer, dont le Président de la République a fait l'une des priorités de ce quinquennat, est l'un des axes majeurs de votre politique, avec, notamment, la création de l'Institut national du cancer. Ce choix, auquel vous n'êtes pas tout à fait étranger, est salué comme il se doit par notre majorité et par l'ensemble des Françaises et des Français. M. Jean-Marie Le Guen. Il n'en pense pas un mot ! M. Paul-Henri Cugnenc. Vous avez affiché la priorité que vous accordez à ce dossier en proposant la création d'un groupe d'étude parlementaire sur le cancer et la santé publique. Ce groupe s'enorgueillit aujourd'hui de voir son président chargé de la santé au sein du Gouvernement. L'expérience que vous avez réussi à mettre en œuvre en Midi-Pyrénées dans le domaine de la recherche, avec le Cancéropôle de Toulouse, est exemplaire. Ce projet, qui associe sur un même site des chercheurs du public et du privé permet une collaboration originale et une complémentarité certainement très productive. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Pour ce qui est de la prévention, j'aborderai, d'une manière originale peut-être, mais du moins honnête et scientifique, le dossier de la lutte contre l'alcoolisme. M. Jean-Marie Le Guen. Non ! Pas ça ! (Rires.) M. Paul-Henri Cugnenc. Il faut enfin cesser d'amalgamer la modération, que nous défendons tous, avec le dogmatisme de l'alcoolémie zéro, ou le vin avec toutes les autres boissons alcoolisées, dont les alcools durs. Le vin ne fait pas seulement partie de notre patrimoine - ce n'est pas là une donnée scientifique - : c'est aussi la seule boisson alcoolisée dont la consommation modérée ait un effet bénéfique reconnu. (Rires sur divers bancs.) La prévention, vous l'avez dit, monsieur le ministre, c'est d'abord l'éducation. Or, l'éducation, c'est la modération, et non pas l'interdit. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Sourires sur divers bancs) Mme Martine Billard. Comme pour le cannabis ? M. Paul-Henri Cugnenc. De même, messieurs qui souriez, la prévention routière ne consiste pas à interdire la circulation des véhicules (Rires sur divers bancs.) Enfin, la prévention des taux élevés d'alcoolémie suppose de savoir quel est l'alcool responsable. (« Exactement ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Aucune démarche n'est scientifiquement défendable si elle ne prend pas en compte cette donnée étiologique. Or, nous n'avons jamais encore reçu de réponse à cette question. (Rires sur plusieurs bancs.) Monsieur le ministre, compte tenu de l'importance de ce texte, vous pouvez compter sur le soutien de nos collègues de l'UMP dans la discussion et le vote. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. Jean-Marie Le Guen. Il est des nô-ô-tres ! (Rires.) M. le président. La parole est à M. Serge Blisko. M. Serge Blisko. Monsieur le ministre, mes chers collègues, j'insisterai sur un point particulier du projet de loi relatif à la politique de la santé publique, qui a fait couler beaucoup d'encre et a suscité autant de débats que l'ensemble du texte : l'article 18 quater, qui traite des psychothérapies. Monsieur le ministre, vous avez le bonheur d'être innocent - nouveau-né, si je puis dire - dans cette affaire. N'ayant été associé à la première lecture du texte ni à l'Assemblée ni au Sénat, vous aurez, nous l'espérons, un regard neuf sur les dispositions introduites initialement par l'amendement de notre collègue Accoyer. Ce dernier, d'ailleurs, après avoir mis le feu aux poudres bien plus, me semble-t-il, que ce qu'il souhaitait, ne le défend plus aujourd'hui. Sans doute a-t-il été lui-même surpris de soulever autant de vagues alors qu'il ne voulait, je n'en doute pas, que donner des garanties aux patients, aux citoyens qui ont recours à un psychothérapeute. Initialement, cet amendement reposait sur le rapport Cléry-Melin et avait pour but de réserver l'exercice de la psychothérapie aux psychiatres et aux psychologues, à l'exclusion de tous les autres professionnels qui exercent cette activité. Mais de qui est-il exactement question dans ce débat parfois très confus ? De professionnels dont les fonctions sont différentes. D'un côté, des psychiatres, à qui leur titre et leur diplôme confèrent - et à eux seuls - le droit de soigner les troubles mentaux et de prescrire des médicaments, y compris, pour les psychiatres hospitaliers, des substances qui ne peuvent être prescrites en ville. De l'autre côté, un ensemble de professionnels que je désignerai du nom de psychothérapeutes. La plupart d'entre eux sont formés par des écoles et des instituts privés souvent coûteux, et jamais à l'université - ce qui ne signifie pas qu'ils n'aient pas de titres universitaires. Ils réalisent un travail considérable de soutien, d'accompagnement, d'aide et de soin. Il est, d'ailleurs, étonnant que l'Université ne soit pas associée à ces formations. Les psychothérapeutes méritent certainement de voir leur compétence reconnue ou, à tout le moins, évaluée. A cette occasion, un titre pourrait leur être délivré dans les mêmes conditions qu'à tous les professionnels qui s'efforcent d'exercer dans leur pratique une action psychothérapique, comme les éducateurs spécialisés, les orthophonistes ou les psychomotriciens. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. Bernard Accoyer. Ce n'est pas la même chose ! M. Serge Blisko. Gardons-nous d'être simplistes : il n'y a pas, d'un côté, un champ qui serait clair, qui s'appellerait la psychiatrie, soumise au contrôle classique et habituel de l'exercice médical, et de l'autre côté le flou, l'absence de contrôle, les difficultés et les dérives sectaires ou mercantiles ! Il peut, certes, y avoir - et il y a - des dérives mercantiles. Il convient, toutefois, de relativiser le danger sectaire, qui existe partout. Ni le diplôme, ni l'inscription au Conseil de l'Ordre des médecins ne protègent de la dérive sectaire l'individu souffrant qui consulte un psy-quelque-chose ! Nous savons que des médecins, voire des psychiatres inscrits à l'Ordre ou des psychologues titulaires d'un diplôme peuvent être affiliés à une secte. Une loi a été votée par cette assemblée, qui permet de poursuivre les responsables de ces dérives. Les mesures existantes peuvent être, au besoin, renforcées, et je sais que le Conseil de l'Ordre des médecins est prêt à cette vigilance. On a voulu légiférer sous le coup d'une émotion réelle, mais peut-être n'y avait-il pas urgence à le faire. La vivacité des réactions le confirme. Beaucoup de professionnels, psychologues ou psychiatres, observent à juste titre que le débat a été beaucoup trop rapide et trop marqué, du côté du Gouvernement, par des changements de pied successifs. Au cours des débats parlementaires, l'amendement Accoyer, trop restrictif comme nous l'avons tous reconnu, a été suivi par l'amendement de synthèse proposé par M. Gouteyron, qui n'était pas sans intérêt, mais qui ressemblait à une véritable usine à gaz, en prévoyant d'instaurer notamment un Conseil et quatre collèges, et posait plus de questions qu'il n'en résolvait. Après cet amendement, qui n'est plus d'actualité, est venu celui de M. Mattei, censé tout résoudre, mais qui, comme je vais le montrer, n'apporte en réalité aucune solution. Il en va de même, d'ailleurs, de l'amendement que M. Dubernard a déposé au nom de la commission, qui reprend, en le formalisant et en lui donnant une valeur plus juridique, l'amendement Mattei. La création d'un registre national de psychothérapeutes tenu par les DDASS, sur lequel toute personne professant la psychothérapie serait tenue de s'inscrire, pose plus de questions qu'elle n'apporte de réponses. On ne sait pas, en effet, comment serait établie cette liste. En outre, un grand nombre de personnes seraient exemptées d'inscription. C'est d'abord le cas des médecins, quelle que soit leur spécialité. C'est là une première aberration : un gastro-entérologue ou un oto-rhino-laryngologiste pourraient donc pratiquer des psychothérapies sans avoir bénéficié d'une formation spécifique. Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Vous n'avez pas lu le texte ! M. Serge Blisko. C'est aussi le cas des psychologues titulaires d'un diplôme d'Etat. Je l'ai bien lu, et c'est bien la preuve que ceux qui ont rédigé ce texte n'avaient pas lu le code de la santé publique ! En effet, il n'existe pas de diplôme d'Etat de psychologue, mais seulement des diplômes, certificats ou titres sanctionnant une formation universitaire. Notons également que, depuis la loi du 4 mars 2002, les psychologues doivent se faire inscrire sur une liste dans leur département d'exercice. Nous avions donc à la fois un amendement prévoyant que les psychologues n'avaient pas besoin de se faire inscrire et une loi rendant nécessaire leur inscription. Comprenne qui pourra ! A légiférer dans un climat d'urgence, on arrive à de telles aberrations. Deuxièmement - et les psychologues en conviennent, leurs syndicats, leurs associations, les universitaires, la pratique des psychothérapies n'est pas enseignée dans le cycle d'études d'un psychologue, y compris clinicien, ce qui pose des problèmes. J'en arrive à ce qui a alimenté la chronique, à savoir les psychanalystes. Vous reprenez, monsieur Dubernard, la même formulation : les « psychanalystes régulièrement enregistrés dans les annuaires de leurs associations ». Par qui et comment seront définies les associations reconnues comme pouvant « régulièrement » enregistrer les psychanalystes ? Quelles garanties seront demandées à ces associations ? Quelles mesures législatives ou réglementaires permettront de garantir que telle association faisant référence à Freud dans ses statuts est effectivement une association sérieuse, de qualité, composée de personnes validées et contrôlées ? En outre, de nombreux psychanalystes ne sont pas membres d'une association, même s'ils travaillent dans un cadre associatif. Certains psychanalystes seraient donc exemptés de la procédure d'inscription sur un registre tandis que d'autres, qui ne seraient ni médecins, ni psychologues, qui n'auraient pas ces fameux diplômes seraient contraints de suivre cette procédure pour pouvoir exercer. On a été beaucoup trop vite ! Une réflexion plus approfondie s'impose sur cette question de l'avenir de l'annuaire qui prendrait force légale et deviendrait un moyen de contrôle administratif et réglementaire contraire à la tradition de la psychanalyse française qui, depuis un siècle, fait de la reconnaissance par les pairs, le fondement du travail collectif des psychanalystes. M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Lisez mieux l'amendement ! M. le président. Je vous demande de conclure, monsieur Blisko ! M. Serge Blisko. En d'autres termes, il ne peut être donné une quelconque autorisation d'exercer la psychanalyse sur le seul fondement d'un annuaire. La psychanalyse a été persécutée en Europe. Je ne veux pas faire de comparaisons qui seraient tout à fait inconvenantes. M. le président. Veuillez conclure ! M. Serge Blisko. Mais, la dernière fois que nous avons vu cela, c'était dans l'Allemagne des années trente où, après avoir contraint la plupart des psychanalystes allemands et autrichiens à l'exil, on recréa une association psychanalytique. M. le président. Monsieur Blisko, concluez ! M. Serge Blisko. La psychanalyse ne se développe que dans les pays démocratiques et dans un climat de liberté. Elle n'est réapparue dans les pays de l'Est que dans les années quatre-vingt-dix. Dans ces pays de l'Est, la psychiatrie avait été mise au service de la police politique pour « traiter », « redresser », « corriger » les dissidents. On cite, comme indice de santé démocratique, l'existence d'élections libres et d'un Parlement régulièrement élu. Je proposerai d'ajouter un autre indice, plus modeste, plus souterrain : la liberté d'exercer la psychanalyse. On s'est beaucoup moqué des guerres picrocholines entre diverses associations de psychanalystes. Elles démontrent leur vitalité et prouvent que tout le monde se connaît. M. le président. Monsieur Blisko ! C'est terminé ! M. Serge Blisko. Je vous demande donc, monsieur le ministre, de retirer, au moins provisoirement, cet article. Il me semble en effet nécessaire que soit mise en place une mission d'information parlementaire sur un problème qui ne saurait être traité à la légère, au détour d'un amendement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) M. le président. La parole est à Mme Christiane Taubira. Mme Christiane Taubira. Monsieur le ministre, vous avez dans votre discours introductif gratifié l'outre-mer d'une demi phrase. J'y ai décelé de la compassion dont je ne suis donc pas sûre de devoir vous remercier, d'autant que nous avons pris acte, lundi, du silence absolu observé par le Premier ministre sur l'outre-mer lors de sa déclaration de politique générale. M. Gérard Bapt. C'est vrai ! Mme Christiane Taubira. Il est impossible de croire que le Premier ministre ignore les particularismes de l'outre-mer. Et je ne veux pas parler de ce que l'on a coutume d'appeler ses handicaps. Je pense plutôt à ses atouts, et d'abord à la qualité des hommes et des femmes qui y vivent, à ses ressources naturelles souvent considérables et à des situations géostratégiques souvent enviables. Il est impossible aussi de croire que le seul principe de l'identité législative ait servi de trompe-l'œil au chef d'un gouvernement qui, en 2003 - même si c'est sous la poussée d'une forte demande - a inscrit dans la Constitution, la nécessité d'aménagement, voire d'habilitation, au regard de ces particularismes. Les rapports Berland et Descours sur la démographie des professions de santé sont également muets sur l'outre-mer. Quelles que soient les raisons de ce silence, de cette ignorance ou de cette indifférence, il me paraît utile et urgent de rappeler ce qui est significativement différent dans nos pays et appelle des dispositions spécifiques. C'est d'autant plus utile et urgent que ce projet de loi est aux dires mêmes du rapporteur un texte fondamental sur lequel reposera la politique de santé publique pendant les cinq ans à venir. Le temps manque pour exposer de façon exhaustive l'offre de soins en Guyane, pour en souligner les graves insuffisances, mais également les nuances. Une demi-heure n'y suffirait pas. Je me propose simplement de fournir quelques données et d'énoncer quelques principes. La Guyane s'étend sur 91 000 kilomètres carrés, et 85 % de sa population se trouve regroupée sur le littoral, le reste étant dispersé dans l'hinterland. C'est également sur le littoral que se trouvent les trois établissements qui participent du service public, auxquels s'ajoutent trois cliniques privées et des centres de santé dans les communes isolées et éloignées. Les pathologies recouvrent en fait des maladies qui sont liées au mode de vie des sociétés de consommation, telles que les maladies cardiovasculaires ou le diabète, mais également les maladies d'environnement tropical comme le paludisme, la dingue, la tuberculose ou la fièvre jaune, et les maladies liées aux activités industrielles - c'est le cas de la pollution par le mercure, avec les risques neurotoxiques que cela entraîne - ainsi que certains cancers. Quelques chiffres sont révélateurs. La mortalité infantile trois fois supérieure à la moyenne nationale, la mortalité maternelle huit fois supérieure à la moyenne nationale, la couverture vaccinale probablement la plus mauvaise de tous les départements français : 21 % pour la coqueluche, 46 % pour la rougeole, 45 % pour le BCG. L'espérance de vie pour les deux sexes est inférieure de quatre ans à l'espérance de vie nationale. On observe une surmortalité des personnes âgées, avec un taux supérieur de 40 %. A cela s'ajoutent les décès précoces liés aux accidents de la circulation, aux maladies parasitaires et infectieuses, aux accidents cardiovasculaires et aux tumeurs. Au total, ces décès précoces représentent potentiellement 42 000 années de vie perdues. Outre le sida, deux sujets nécessitent une très grande attention : l'alcoolisme et la toxicomanie. L'accès à l'eau potable n'est pas satisfaisant. En effet, 15 % des ménages n'y sont pas encore raccordés, situation propice aux maladies telles que la typhoïde et, d'une manière générale, les maladies entériques. La lutte antivectorielle mérite une mention particulière. Sur ce territoire impaludé, l'Etat a signé avec le conseil général une convention qui le décharge de cette compétence, laquelle lui est pourtant assignée par la loi. Il ne rembourse au conseil général que 10 % des dépenses réellement engagées pour le service de démoustication. L'offre de santé publique, l'offre de soins est notoirement insuffisante. Cinquante postes hospitaliers sont vacants. Pour la médecine de ville, la densité est trois fois inférieure à la densité nationale. Certaines spécialités sont totalement absentes. C'est le cas de la cancérologie, de la chirurgie pédiatrique, de la chirurgie cardiaque, de la neurochirurgie, alors que les traumatismes crâniens et les AVC sont très nombreux. D'autres sont faiblement pourvus. C'est le cas de la psychiatrie, de l'infectiologie, ou de la diabétologie. D'autres enfin accusent des défauts d'organisation. Il en est ainsi de la périnatalité et le pôle « femme - enfant » qui est urgent et indispensable n'en est encore qu'aux études, dix ans après sa conception. M. le président. Je vous prie de conclure, madame Taubira. Mme Christiane Taubira. J'attends encore la réponse du Gouvernement à une question écrite que j'ai posée voici plus de cinq mois. Monsieur le ministre, vous savez que l'hôpital de Cayenne est en cessation de paiement, que les fournisseurs refusent de livrer, y compris des gaz médicaux, et que les évacuations médicales externes sont faites exclusivement sur réquisition du préfet. La question de principe est de savoir si le système de santé publique est bien la condition d'égalité d'accès aux soins. Si oui des réponses structurelles et pérennes seront-elles apportées au déficit de l'hôpital de Cayenne, qui est lié à la structure sociologique - nombreux sont les allocataires de la CMU et de l'AME -, mais aussi à l'enclavement d'un territoire, qui oblige à des évacuations en hélicoptère, au sous-équipement et à l'absence de spécialités, ce qui impose des évacuations externes, même pour des examens, et nécessite que soient apportées des synergies aux services et aux équipes médicales. J'espère, monsieur le ministre, que vous serez attentif à ces besoins, car sur place, évidemment, nous serons nombreux à ne pas laisser faire. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) M. le président. La parole est à Mme Martine Billard. Mme Martine Billard. Monsieur le ministre, force est de constater que ce projet de loi reste au milieu du gué, y compris après la première navette parlementaire, par peur de heurter les lobbies économiques, et ce en dépit de l'énumération en annexe de pieux objectifs qui, au demeurant, comme l'a rappelé le rapporteur, n'ont pas valeur législative. Le professeur Belpomme, cancérologue, chargé de mission pour la mise en œuvre du plan cancer, nous dit, dans le livre qu'il a récemment publié que « le cancer est une maladie que notre société fabrique de toutes pièces et qu'il est en grande partie induit par la pollution de notre environnement ». Il précise : « On soigne les malades atteints du cancer et non l'environnement qui est lui-même malade. » Or 80 à 90 % des cancers sont causés aujourd'hui par la dégradation de l'environnement. Mais quelle politique de lutte contre les cancers, ou contre les troubles musculo-squelettiques, pouvons-nous avoir si la politique de santé s'arrête aux portes des entreprises et si vous refusez de renforcer les dispositifs du code du travail qui déplaisent tant au patronat ? Quelle leçon avons-nous retenue du drame des victimes de l'amiante si nous n'améliorons pas les dispositifs de la santé au travail, en renforçant son indépendance vis-à-vis des employeurs, en accroissant le rôle des comités d'hygiène et de sécurité, le rôle des délégués du personnel et syndicaux, en faisant participer aux services de santé au travail les associations des victimes des maladies professionnelles ? Mais non ! Votre majorité s'obstine à refuser de toucher au code du travail sur cette question, alors que, dans le même temps, les licenciements de délégués syndicaux se multiplient dans les entreprises, et ce avec l'aval du précédent ministre de l'emploi. En 1998, une enquête du ministère de l'emploi avait montré que 8,5 % de l'ensemble des salariés étaient exposés sur leur lieu de travail à des produits reconnus cancérogènes, comme le plomb, les éthers de glycol, le chrome et d'une manière générale les solvants. A cet égard il importe de mettre en œuvre des mesures visant à protéger de façon plus efficace les salariés et à interdire l'utilisation de toutes ces substances dangereuses en vertu du principe de précaution. De même, les pesticides représentent un problème majeur de santé publique, non seulement parce qu'ils sont à l'origine de cancers, mais aussi parce qu'ils entraînent des malformations et des risques de stérilité. Cela exige un meilleur contrôle, voire l'interdiction de certaines molécules actuellement autorisées. Mais votre projet de loi ne comporte aucune proposition concrète de prévention et, lors de la première lecture, tous les amendements allant dans ce sens ont été rejetés. Quelle politique de prévention de l'obésité pouvons-nous proposer si notre assemblée refuse toute mesure concrète en direction des jeunes scolarisés, afin de limiter les incitations à consommer des boissons sucrées et à grignoter des friandises ? Ces comportements sont pourtant reconnus comme un des facteurs de développement de l'obésité chez les jeunes. Les dispositifs adoptés par le Sénat visant à limiter les messages publicitaires incitant les jeunes à grignoter seront-ils maintenus par notre assemblée en deuxième lecture ? Malheureusement, des amendements déposés par le Gouvernement et par certains députés de la majorité tendent à les remettre en question. Quelle politique de prévention de l'hypertension artérielle et des risques cardio-vasculaires pouvons-nous proposer si nous ne nous attaquons pas aux surconsommations de sel imposées par les industries agroalimentaires, notamment dans les plats précuisinés, le pain et la charcuterie ? Et pourtant, le traitement contre l'hypertension est le premier poste de dépenses de la sécurité sociale en ce qui concerne le secteur des médicaments. M. Paul-Henri Cugnenc. Qu'est-ce que c'est que cette cuisine ? Mme Martine Billard. Cette cuisine c'est l'AFFSSA, entre autres, qui en parle. C'est précisément la cuisine au sel. Quelle politique de santé publique, enfin, si nous cédons au lobby de l'alcool ? J'ai entendu la brillante intervention d'un de nos collègues visant à démontrer qu'il y avait une différence fondamentale entre le vin et l'alcool, mais, que je sache, le vin contient bien de l'alcool, sinon, c'est du jus de raisin ! (Sourires.) M. Paul-Henri Cugnenc. Bonne remarque ! (Sourires.) M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Elle a raison ! Mme Martine Billard. Dans ces conditions, je crains que les conséquences de cette deuxième lecture ne soient guère plus brillantes que celles de la première, et que la lutte contre l'alcoolisme se réduise à peu de choses ! Les rapports d'expertise sanitaire se multiplient pour prôner le développement des actions de prévention, de santé environnementale et de santé au travail : Agence sanitaire sur les aliments, sur l'environnement, les médicaments, rapport de l'IGAS, de l'Académie de médecine, du Conseil économique et social. A quoi servent tous ces rapports, qui font pourtant souvent des propositions très intéressantes, à quoi sert-il d'en réclamer d'autres si les pouvoirs publics reculent face à tel ou tel lobby économique ? J'ai bien écouté votre discours d'introduction, monsieur le ministre. Je vous ai entendu fixer un certain nombre d'objectifs qui ne pouvaient, disiez-vous, être absents d'une loi de santé publique. J'espère donc que, lors de la discussion des amendements, vos intentions se traduiront dans les faits. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) M. le président. La parole est à M. Pierre-Louis Fagniez. M. Pierre-Louis Fagniez. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je centrerai mon propos sur le titre IV de ce projet de loi, consacré à la recherche biomédicale. Une fois que nous aurons adopté les modifications auxquelles nous avons travaillé, nous devrions pouvoir le voter à l'unanimité. J'aborderai donc trois points qui ont été étudiés lors de la première lecture à l'Assemblée du projet de loi et qui ont fait l'objet d'un travail important en commission sous la présidence de notre cher président Dubernard. Ces trois points essentiels concernent le fonctionnement des comités de protection des personnes, l'autorisation de recherche biomédicale chez les personnes majeures hors d'état d'exprimer leur consentement et la recherche sur l'évaluation des soins courants. S'agissant du fonctionnement des comités de protection des personnes, la mise en œuvre du régime d'autorisation des recherches biomédicales met un terme au caractère consultatif des anciens comités. Désormais, les comités de protection des personnes ont un rôle renforcé puisqu'une recherche ne peut être envisagée, donc commencée, sans un avis favorable de leur part. Ils sont une étape incontournable, même pour l'autorité compétente, à savoir le ministre, qui, in fine, donne l'autorisation. Considérant l'effet couperet de l'avis des comités de protection des personnes, il est apparu qu'il n'était pas concevable, comme cela était le cas avec les anciens comités consultatifs, les CCPPRB, que leur avis ne puisse faire l'objet d'un appel. C'est pourquoi nous avons, avec Jean-Michel Dubernard, proposé un amendement, accepté par la commission, visant à permettre aux intéressés, en cas d'avis défavorable du comité de protection des personnes, de demander au ministre de la santé de soumettre le projet de recherche à l'avis d'un comité compétent pour une autre région. Bref, il fallait une structure d'appel, tous les chercheurs nous l'on dit : nous vous la proposons. S'agissant de l'autorisation de recherche biomédicale chez les personnes majeures, hors d'état d'exprimer leur consentement et ne faisant pas l'objet d'une mesure de protection légale, la question a été longuement débattue lors de la première lecture car le projet initial distinguait deux situations. La première où l'autorisation pouvait être donnée par la personne de confiance ou la famille, voire par un proche de l'intéressé entretenant avec celui-ci des liens étroits et stables ; la seconde où l'avis du juge des tutelles devait être nécessairement recueilli lorsque la recherche était susceptible de porter atteinte au respect de la vie privée ou à l'intégrité du corps humain. Considérant que toute recherche peut, par nature, comporter un risque d'atteinte à l'intégrité du corps humain et que le juge des tutelles n'a pas à prendre de décision pour une personne dont il n'a pas prononcé la mesure de protection, nous avions souhaité supprimer cette clause. De nombreux chercheurs cliniciens avaient attiré notre attention sur cette responsabilité inhabituelle du juge des tutelles. Son rôle consiste essentiellement à décider de la protection des personnes pour des actes retentissant sur le patrimoine ou la vie sociale. Mais, d'après la pratique des juges des tutelles, ils n'interviennent pas actuellement pour des actes visant à la santé. Ce serait donc une nouveauté en France, et une exception dans le monde. J'ai vérifié dans la législation européenne et américaine : nulle part, on a recours à un juge et encore moins à un juge des tutelles. De plus, cette clause serait considérée par les médecins comme une remise en cause inacceptable du processus de décision collégiale famille-médecin, éprouvé depuis longtemps dans les unités de réanimation et de gérontologie, sans aucun préjudice de la protection des patients. Pour preuve, il est rapporté un taux de 50 % seulement d'acceptation de participation à ces recherches, ce qui montre bien le souci constant des médecins du respect de l'avis des proches, sinon, il y aurait 100 % d'acceptation. Finalement, un compromis a été trouvé en première lecture, limitant le recours au juge des tutelles lorsque « la recherche comporte, par l'importance des contraintes ou par la spécificité des interventions auxquelles elle conduit, un risque sérieux d'atteinte à la vie privée ou à l'intégrité du corps humain ». Mais les mots « risque sérieux », dont nous avons beaucoup discuté avec Claude Evin, difficiles à définir, méritaient d'être précisés en deuxième lecture. Aussi proposons-nous avec Jean-Michel Dubernard un amendement confiant au comité de protection des personnes l'appréciation du risque à partir d'une description précise du protocole de recherche. S'agissant de la recherche sur l'évaluation des soins courants, rappelons que les dispositions de la loi du 20 décembre 1988, dite loi Huriet-Sérusclat, s'appliquent à l'ensemble des recherches biomédicales. Mais il convient de préciser qu'elles ont été provoquées par la recherche médicamenteuse, singulièrement les essais thérapeutiques de phase I sur les volontaires sains. Elles ont été ensuite étendues à toutes les recherches, incluant notamment les procédures de réanimation, de chirurgie et l'implantation des dispositifs médicaux. Tout à fait adaptées aux recherches médicamenteuses, elles permettent facilement la transposition des dispositifs prévus par la directive européenne du 4 avril 2001 relative aux essais cliniques de médicaments. En revanche, elles paraissent injustifiées pour les recherches sur l'évaluation des soins courants. Et, en première lecture, l'accent a été mis sur l'importance de ces recherches en termes de santé publique, ce qui montre à quel point ce titre devait figurer dans ce projet de loi. Il a été proposé de recourir à une procédure simplifiée assurant un maximum de protection aux malades, en prévoyant explicitement que l'investigateur pouvait être le promoteur. Cette mesure était un pas dans la reconnaissance de la spécificité de la recherche portant sur l'évaluation des soins courants. Mais avec Jean-Michel Dubernard, nous pensons, après avoir beaucoup consulté sur ce sujet, qu'il est préférable de ne pas créer de régime simplifié ou allégé qui pourrait être interprété comme un système à deux vitesses moins lisible. Aussi, proposons-nous que les dispositions prévues pour les recherches biomédicales ne s'appliquent pas aux recherches sur l'évaluation des soins courants dès lors que tous les actes sont pratiqués de manière habituelle, sans aucune procédure supplémentaire ou inhabituelle de diagnostic, et qu'un protocole, obligatoirement soumis à l'avis consultatif du comité de protection des personnes, définit les modalités particulières d'information et de surveillance des personnes. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. le président. La discussion générale est close. La parole est à M. le président de la commission. M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. J'aimerais expliquer à M. Blisko, qui a évoqué l'article 18 quater, ce qui nous a conduits à évoluer et à déposer un amendement que je vous inviterai à adopter. Tout d'abord, je souhaite que personne ne dénature la démarche de Bernard Accoyer, qui a toujours été guidée par un seul objectif : protéger les personnes, souvent parmi les plus fragiles, qui veulent suivre une psychothérapie. M. Serge Blisko. Je lui en donne acte ! M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Son amendement, tout le monde le sait, a provoqué des passions. Le Sénat a fourni un travail remarquable et a procédé à de nombreuses auditions qui l'ont amené à abandonner l'idée d'une réglementation des psychothérapies pour se pencher plutôt sur l'usage du titre de psychothérapeute. Cela me semble être le bon angle d'approche. Mais mon homologue au Sénat, M. About, et le ministre ont reconnu que la rédaction retenue était perfectible. J'ai donc proposé à la commission une nouvelle rédaction, qu'elle a acceptée. Il nous fallait agir sans attendre, c'est notre responsabilité. D'autres pays qui ne sont pas des dictatures absolues ont réglementé la psychothérapie sans provoquer les levées de boucliers auxquelles nous avons assisté. Dans ces conditions, pourquoi une réglementation, a minima, de l'usage du titre devrait-elle à nouveau susciter de telles réactions ? En effet, un grand nombre de professions, dans tous les secteurs de la vie publique, sont plus ou moins réglementées. Notre mission est d'essayer de protéger les personnes souhaitant entreprendre une psychothérapie, car de nombreuses dérives existent, même s'il est difficile de les évaluer précisément. Nous devions donc garantir aux personnes qui se tournent vers les psychothérapeutes que ceux-ci disposent de la formation théorique et pratique requise. J'en profite pour dire que dans l'amendement qui sera présenté, la formation à la psychanalyse est reconnue. Que celle-ci soit freudienne, lacanienne ou autre, cette formation est sérieuse, solide, longue et comporte de nombreux contrôles puisque chaque psychanalyste se soumet au contrôle d'un autre psychanalyste. Nous aurons l'occasion d'y revenir au cours du débat. Mais en tout état de cause, monsieur Blisko, je crois que ce serait une erreur de supprimer l'article 18 quater. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. le président. La parole est à M. le ministre. M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Je voudrais dire à M. Audifax que je partage sa vision et le remercier pour son brillant exposé. Nous devons, c'est vrai, donner un signe politique fort dans le domaine de la santé publique. Nous n'avons en effet que trop attendu. Des progrès ont été accomplis depuis une vingtaine d'années dans un certain nombre de domaines, mais la culture de santé publique reste encore trop faible. Il fallait donc un texte. Certes, celui-ci n'est pas parfait. Mais il fallait que l'Etat fixe un certain nombre d'objectifs - on a parlé d'une centaine, ce qui est peut-être excessif - et que l'on voie tous les cinq ans s'ils sont atteints, car il est important de disposer d'indicateurs. M. Préel a raison de dire que nous ne pourrons pas continuer à parler de nouvelle gouvernance de l'assurance maladie si nous ne discutons pas avec les médecins d'une régulation médicalisée. Dès lors que l'on évoque la régulation médicalisée, on voit surgir les ayatollahs du budget de l'assurance maladie qui prétendent que ce n'est pas sérieux. Or je vous l'assure, mesdames et messieurs les députés : c'est très sérieux ! L'expérience des références médicales opposables de 1993 a montré qu'il y a eu, en 1995 - c'était la première fois depuis dix ou quinze ans - un arrêt dans la progression des dépenses d'assurance maladie parce qu'on avait vraiment agi sur ces références médicales. Vous avez raison, c'était un début ; il faut continuer. Aujourd'hui, les conférences de consensus permettent, dans 80 % des monopathologies, de dire quels sont les comportements, les conduites à tenir pour les médecins. Et ils ne demandent pas mieux car ce sont des gens responsables. Arrêtons de prendre les médecins libéraux pour des irresponsables ! (« Tout à fait ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Il faut jouer le jeu avec eux et qu'ils le jouent avec nous. Ils en sont d'accord. Je souhaite que, dans les prochains mois, nous édictions des références sérieuses. Concernant les ARS, l'ARH, c'est vrai, est un début. On crève, trop souvent, dans notre système de santé, de séparer toujours l'hôpital public, qui représente la moitié des dépenses d'assurance maladie, du reste, c'est-à-dire des médecins libéraux de la médecine ambulatoire. Il serait bon qu'au niveau régional - et vous êtes depuis longtemps un grand partisan de la régionalisation de la santé et de l'assurance maladie - on aille vers une deuxième étape, en regroupant autour des ARH l'hôpital et la médecine ambulatoire. Vous voudriez y ajouter l'éducation pour la santé et la prévention. C'est une idée à creuser. Cette loi est une étape. Je le disais dans mon propos introductif, il y a aujourd'hui trop d'acteurs de santé dans une région. Votre idée me semble bonne même si elle n'est pas traduite dans ce texte. S'agissant de la gouvernance, comme je l'ai déjà dit ce texte a le mérite d'exister. Nous ne pourrons pas développer la gouvernance nouvelle de l'assurance maladie sans propositions en termes d'organisation de santé publique, et notamment d'épidémiologie et de connaissance des indicateurs de santé. Mme Fraysse m'a interrogé sur la visite médicale de prévention des enfants. Le projet de loi prévoit précisément un dispositif général de consultation périodique de prévention. Celui-ci concerne aussi les enfants. Cependant, une visite annuelle pose deux types de problèmes. Premièrement, pourquoi tout le monde devrait avoir une consultation annuelle, alors que seule une minorité d'enfants sont privés de médecins ? Deuxièmement, pourquoi cette consultation devrait-elle être annuelle ? Je connais des enfants qui ont besoin de deux consultations par an, tandis que d'autres pourraient n'en avoir une que tous les trois ans. Cela dépend du contexte socioprofessionnel et des antécédents familiaux. Monsieur Bur, bravo pour votre courageux discours sur la prévention ! Vous n'avez pas eu peur de le dire et vous avez raison, il faut une politique de santé publique digne en termes de prévention. Monsieur Bapt, j'aimerais, comme vous, disposer de plus de moyens financiers pour développer le plan cancer. Vous avez parlé de M. Kouchner ; je ne pense pas qu'il disposait de plus d'argent que nous. Faisons en sorte que nous développions, ensemble, une grande politique de prévention et de soins dans le domaine du cancer et des réseaux. S'agissant de la canicule, le texte qui vous est soumis comporte des dispositions législatives permettant d'organiser la lutte contre les canicules. Un amendement prévoit que l'INPES puisse intervenir en situation d'urgence. D'autres mesures sont opérationnelles. Elles commencent à être définies au ministère de la santé et de la protection sociale. Elles font actuellement l'objet de concertations avec les autres administrations et les autres professionnels. Le plan canicule sera annoncé dans quelques semaines. J'aimerais d'ailleurs pouvoir en discuter au préalable avec les parlementaires, afin qu'ils sachent quel plan canicule nous allons présenter aux Français, d'abord sur les structures - hôpital, maisons de retraite, maisons de retraite médicalisées - mais aussi sur les réseaux gériatriques, et en particulier leur rapport avec les collectivités locales. Monsieur Cugnenc, nous avons travaillé ensemble, en effet, au sein du groupe d'études sur le cancer et la santé publique. Vous étiez, à l'époque, mon vice-président. Je vous remercie du travail que vous avez fait ainsi que d'avoir reconnu, comme M. Bapt, l'intérêt de ce grand projet midi-pyrénéen toulousain de Cancéropôle qui devrait regrouper 2 000 à 2 200 chercheurs, secteurs public et privé confondus, sur le terrain de l'ancienne usine AZF. Il me paraît aujourd'hui très important de pouvoir développer dans un même site la recherche fondamentale, la recherche appliquée et la recherche au lit du malade. C'est ce qui nous manque un peu en France, et c'est bien de l'avoir remarqué. Vous m'expliquerez la différence exacte entre le vin et l'alcool (Sourires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) car je n'ai pas tout compris. Monsieur Blisko, le président de la commission vous a répondu et j'ai parfaitement compris votre message, à savoir qu'il faudra considérer tout ce que vous avez dit lorsqu'on prendra les décrets. Madame Taubira, je vous prie de m'excuser de ne pas avoir suffisamment parlé de l'outre-mer. En réalité, les chiffres que vous avez cités, et que j'ignorais, sont très préoccupants. Vous avez dit que la mortalité maternelle était huit fois plus élevée que la moyenne nationale. Il y a sans doute des composantes infectieuses, comme vous l'avez dit. Une étude très approfondie sera nécessaire et je reconnais que je n'avais pas perçu l'étendue du problème. Madame Billard, on verra bien ce qui ressortira du débat parlementaire au fil des amendements. Monsieur Fagniez, merci de permettre un consensus sur le titre IV. J'espère que la démonstration que vous avez faite permettra de voter tous ces articles. Même si le texte est encore imparfait, le travail de l'Assemblée nationale, sur tous ses bancs, a permis de l'améliorer et nous disposons aujourd'hui d'un beau texte sur la santé publique pour notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Motion de renvoi en commission M. le président. J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste une motion de renvoi en commission, déposée en application de l'article 91, alinéa 7, du règlement. La parole est à M. Jean-Marie Le Guen. M. Maurice Giro. Le Guen III ! M. Jean-Marie Le Guen. Rassurez-vous, mes chers collègues, je serai bref ! J'invite tous ceux qui sont intéressés par les problèmes de la gouvernance de l'assurance maladie à relever les propos du ministre sur les agences régionales de santé et je ne doute pas qu'il nous donnera, demain, lors de la discussion des articles, des précisions sur la compatibilité avec la délégation aux partenaires sociaux tant réclamée par le Gouvernement. J'invite donc les partenaires sociaux à examiner de plus près la déclaration du ministre pour être plus éclairés sur les orientations du Gouvernement. Pour le reste, je ne reviendrai pas sur les lacunes que j'ai déjà dénoncées. Je souhaite que la commission puisse se réunir à nouveau pour les combler. J'espère que la discussion des amendements nous permettra de vous convaincre, et que le ministre et les députés de la majorité auront à cœur de nourrir ce texte et de l'améliorer sur un certain nombre de sujets. Il y a encore une marge de progression. Si vous ne votez pas le renvoi en commission, nous continuerons demain dans cette direction. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) M. le président. La parole est à M. le ministre. M. le ministre de la santé et de la protection sociale. Monsieur Le Guen, je ne peux laisser dire qu'il y a un message quelconque me concernant et concernant la gouvernance de l'assurance maladie avec des ARH et l'ARS. Je ne formulerai qu'un vœu, que nous retrouvions l'esprit de 1945 qui présida à la création de la sécurité sociale. C'est cet esprit qu'il faut rechercher avec les partenaires sociaux et c'est celui qui me guide aujourd'hui. M. le président. La parole est à M. le président de la commission. M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. Monsieur Le Guen, je rappelle que le texte qui nous est soumis a déjà fait l'objet d'un large débat à l'Assemblée en première lecture. J'en veux pour preuve quelques éléments statistiques. Il y a eu vingt-sept heures de débat en séance publique, ce qui est beaucoup, deux motions de procédure ont été défendues et 575 amendements ont été examinés, dont 225 ont été adoptés. M. Bernard Accoyer. Quel travail ! M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission, rapporteur. La discussion se poursuit en deuxième lecture avec la même intensité. La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a consacré près de deux heures et demie à l'étude des 116 amendements déposés lors de l'examen du rapport. Par ailleurs, la commission a examiné en début d'après-midi près de 200 amendements au titre de l'article 88 du règlement, dont la moitié avait déjà été examinée en première lecture. Le travail en commission a donc bien eu lieu. Chacun a pu s'exprimer à loisir et défendre ses amendements. Le temps de la discussion n'est pas clos pour autant, et nous sommes tous d'accord pour qu'il soit poursuivi en séance publique. Pour toutes ces raisons, je vous demande de rejeter la motion de renvoi en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. le président. Je mets aux voix la motion de renvoi en commission. (La motion de renvoi en commission n'est pas adoptée.)
ORDRE DU JOUR DES PROCHAINES SÉANCES M. le président. Aujourd'hui, à neuf heures trente, première séance publique : Projet de loi, n° 1015, autorisant la ratification du protocole relatif à l'adhésion de la Communauté européenne à la convention internationale de coopération pour la sécurité de la navigation aérienne « Eurocontrol » du 13 décembre 1960, telle qu'amendée à plusieurs reprises et coordonnée par le protocole du 27 juin 1997, fait à Bruxelles le 8 octobre 2002, M. Paul Quilès, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères (rapport n° 1425) ; (Procédure d'examen simplifiée ; art. 107 du règlement) Projet de loi, n° 1197, autorisant l'approbation de la convention d'entraide judiciaire en matière pénale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de l'Inde (ensemble un avenant sous forme d'échange de lettres), M. Jacques Remiller, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères (rapport n° 1426) ; (Procédure d'examen simplifiée ; art. 107 du règlement) Projet de loi, n° 1198, autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de l'Inde en matière d'extradition, M. Jacques Remiller, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères (rapport n° 1426) ; (Procédure d'examen simplifiée ; art. 107 du règlement) Projet de loi, n° 1207, autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de Nouvelle-Zélande relative à l'emploi des personnes à charge des membres des missions officielles d'un Etat dans l'autre (ensemble un échange de lettres), M. René Rouquet, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères (rapport n° 1427) ; (Procédure d'examen simplifiée ; art. 107 du règlement) Projet de loi, n° 1208, autorisant l'approbation de l'avenant à la convention du 29 janvier 1951 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République italienne relative aux gares internationales de Modane et de Vintimille et aux sections de chemins de fer comprises entre ces gares et les frontières d'Italie et de France, M. Jean-Claude Guibal, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères (rapport n° 1428) ; (Procédure d'examen simplifiée ; art. 107 du règlement) Projet de loi adopté par le Sénat, n° 1329, autorisant la ratification de l'accord entre la République française, la Communauté européenne de l'énergie atomique et l'Agence internationale de l'énergie atomique relatif à l'application de garanties dans le cadre du traité visant l'interdiction des armes nucléaires en Amérique latine et dans les Caraïbes (ensemble deux protocoles), M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères (rapport n° 1472) ; (Procédure d'examen simplifiée ; art. 107 du règlement) Projet de loi, n° 1328, autorisant l'approbation de l'accord sous forme d'échange de lettres, signées le 26 novembre et le 30 décembre 2002, complétant le traité du 7 juillet 1998 entre la République française et le Royaume d'Espagne relatif à la coopération transfrontalière en matière policière et douanière, M. Jacques Remiller, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères (rapport n° 1471) ; (Procédure d'examen simplifiée ; art. 107 du règlement) Projet de loi, n° 1334, autorisant l'approbation de la convention concernant l'assistance administrative mutuelle en matière fiscale, Mme Danielle Bousquet, rapporteure au nom de la commission des affaires étrangères (rapport n° 1470) ; (Procédure d'examen simplifiée ; art. 107 du règlement) Projet de loi, n° 1280, autorisant l'approbation de l'avenant à l'entente fiscale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Québec en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu, Mme Martine Aurillac, rapporteure au nom de la commission des affaires étrangères (rapport n° 1468) ; (Procédure d'examen simplifiée ; art. 107 du règlement) Projet de loi, n° 1327, autorisant l'approbation d'une convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République tchèque en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscale en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole), M. François Loncle, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères (rapport n° 1467) ; (Procédure d'examen simplifiée ; art. 107 du règlement) Projet de loi, adopté par le Sénat, n° 1330, autorisant l'approbation de l'avenant à la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République argentine en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, M. François Loncle, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères (rapport n° 1469) ; (Procédure d'examen simplifiée ; art 107 du règlement) Suite de la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi, n° 1364, relatif à la politique de santé publique, M. Jean-Michel Dubernard, rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (rapport n° 1473). A quinze heures, deuxième séance publique : Suite l'ordre du jour de la première séance. A vingt et une heures trente, troisième séance publique : Suite de l'ordre du jour de la première séance. La séance est levée. (La séance est levée, le jeudi 8 avril 2004, à zéro heure quarante-cinq.) Le Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale, jean pinchot |