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Première séance du mercredi 1er décembre 2004 81e séance de la session ordinaire 2004-2005
M. le président. La séance est ouverte. (La séance est ouverte à quinze heures.)
M. le président. L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement. Comme chaque premier mercredi du mois, les quatre premières questions seront consacrées à des thèmes européens. M. le président. La parole est à M. Jérôme Lambert, pour le groupe socialiste. M. Jérôme Lambert. Monsieur le Premier ministre, depuis plus de dix jours, à la frontière de l'Union européenne, le peuple ukrainien subit une situation qui appelle la mobilisation de tous les démocrates. Un scrutin présidentiel frauduleux au résultat contesté entraîne aujourd'hui la réaction massive d'un peuple qui réclame le respect de la démocratie et de son choix. Ce peuple sera-t-il entendu des dirigeants de l'Ukraine qui tiennent encore le pouvoir institutionnel et des dirigeants russes, en particulier de Vladimir Poutine, qui semble vouloir tenir un rôle de premier plan dans les affaires de l'Ukraine ? Le président Chirac a-t-il pris toutes les initiatives indispensables pour soutenir le respect de la démocratie - en dehors du souhait qu'il a exprimé que ce pays évite une « crispation » ou un « drame » dont il n'a pas besoin ? Monsieur le Premier ministre, la crispation est là depuis dix jours, et le drame n'est peut-être pas loin. La France se targue, à juste raison, de parler, dans bien des situations, de sa propre voix en matière de politique étrangère et ne manque jamais de s'exprimer en son nom et au nom des droits de l'Homme. Jusqu'ici, hormis le souhait d'éviter une « crispation », la voix de la France face à M. Poutine est plutôt faible et peu audible ! Si nous voulons éviter le drame évoqué par le président Chirac, il faut que notre détermination à défendre la démocratie soit sans aucune ambiguïté. Les démocraties européennes et notre propre pays doivent se mobiliser pour peser de tout leur poids afin que la démocratie gagne en Ukraine. Alors que la presse affirme que la diplomatie française est embarrassée et qu'on le constate dans les faits, quelles initiatives le Gouvernement ou le Président de la République vont-ils prendre pour faire entendre la voix de la France et soutenir le respect de la démocratie en Ukraine ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères. M. Michel Barnier, ministre des affaires étrangères. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur le député Lambert, depuis cette élection présidentielle marquée en effet, comme je l'ai dit moi-même hier à cette tribune, par de très nombreuses fraudes, la situation en Ukraine évolue tous les jours. Il y a quarante-huit heures, le président Koutchma a lui-même souhaité de nouvelles élections. Hier, les provinces de l'Est ont demandé leur autonomie et ont même annoncé des référendums. Ce matin, le Parlement ukrainien a voté une motion de défiance contre le Premier ministre. Pendant toutes ces journées, le peuple ukrainien manifeste avec beaucoup de dignité pour que sa voix soit respectée. Devant cette situation, monsieur Lambert, je ne suis pas embarrassé pour vous dire les principes qui fondent l'action de notre pays : le soutien à la démocratie - puisque c'est l'enjeu de cette crise -, le refus de la violence, la recherche d'une solution politique qui préserve l'unité de l'Ukraine et la stabilité régionale, et, enfin, le soutien à tous les efforts des institutions ukrainiennes pour qu'elles trouvent elles-mêmes cette solution politique. Vous demandez ce que fait la France ? Monsieur Lambert, s'il y a la voix de la France, il y a aussi celle de l'Europe. Tel est précisément le sens de la médiation qu'en notre nom M. Solana est en train de conduire en Ukraine, avec notre soutien. C'est là une preuve que cette diplomatie européenne est en marche. Il s'agit d'une diplomatie commune - que ce soit en Ukraine, en Iran pour lutter contre la prolifération nucléaire, au Proche-Orient ou dans les Balkans. Monsieur Lambert, si par hasard vous cherchiez une raison supplémentaire d'approuver la constitution européenne (Sourires), en voilà une. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. le président. La parole est à M. Olivier Jardé, pour le groupe Union pour la démocratie française. M. Olivier Jardé. Monsieur le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer, voilà cinq ans - le 12 décembre 1999 -, la coque du pétrolier Erika se brisait sur la pointe de Penmarch. Cette catastrophe écologique était la plus importante depuis le drame de l'Amoco Cadiz : 400 kilomètres de littoral ont été souillés par le pétrole, de la pointe du Finistère à la Vendée. Nous vivons actuellement une situation comparable avec la pollution causée par le Prestige dans le Golfe de Gascogne. Nous sommes convaincus que le niveau européen est le niveau adéquat pour améliorer la politique de la sécurité de la mer comme pour préserver notre patrimoine maritime. L'UDF a formulé quatre propositions pour lutter contre les marées noires : bannir les pavillons de complaisance, créer des ports refuges, créer une police européenne de la mer afin d'améliorer les contrôles et faire la chasse aux navires-poubelles - car les marées noires sont souvent causées par des bateaux en très mauvais état. Monsieur le secrétaire d'État, allez-vous intervenir au niveau communautaire pour préserver notre littoral de ces catastrophes écologiques ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.) M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État aux transports et à la mer. M. François Goulard, secrétaire d'État aux transports et à la mer. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur le député Jardé, l'Europe est, en effet, le bon niveau d'intervention pour une politique rigoureuse en matière de sécurité maritime, tant il est vrai que les bateaux qui peuvent faire naufrage sur les côtes espagnoles ou françaises ont souvent pour destination des ports d'autres pays européens. Après les catastrophes de l'Erika et du Prestige, l'Europe a réagi avec vigueur, détermination et succès. Elle a édicté des règles et veille à leur respect, avec notamment la création d'une agence de sécurité maritime européenne qui est aujourd'hui en place et contrôle les systèmes d'inspection dans les différents pays de l'Union. La France aussi a réagi vigoureusement, après une période d'attentisme. Si nous avons, en effet, été condamnés pour l'insuffisance des contrôles dans nos ports en 1999 et 2000, nous respectons - et dépassons même - aujourd'hui les normes de contrôle des bateaux dans les ports français. Nous réagissons également en punissant : depuis le début de l'année, nous avons détourné pas moins de seize navires, et engagé des poursuites judiciaires dans les cas de pollutions volontaires ou involontaires. Nous nous sommes donc dotés d'un dispositif pénal draconien. La France milite également au niveau européen, comme elle l'a fait notamment à Malaga, sous l'impulsion du chef de l'État, pour faire adopter la réglementation sur les doubles coques pour les pétroliers. Elle le fait aujourd'hui encore pour que l'Union européenne se dote d'une directive imposant dans tous les pays de l'Union des sanctions pénales pour les pollutions volontaires ou involontaires causées par les navires. C'est dire si nous sommes en phase, dans ce domaine, avec la Commission européenne. Nous voulons demeurer les mieux-disants européens en matière de sécurité maritime. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lefort, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains. M. Jean-Claude Lefort. Monsieur le président, le débat sur le traité de constitution européenne prend son élan. Et voilà que survient un projet de directive particulièrement éclairant, si besoin était, pour souligner le caractère profondément antisocial et ultralibéral de l'actuelle constitution européenne : la directive Bolkestein... M. Maxime Gremetz. Oh ! la la ! M. Jean-Claude Lefort. ...- du nom du commissaire qui était chargé du marché intérieur. Selon cette directive, désormais, en Europe, toute entreprise de services sera soumise non pas aux lois sociales du pays où elle exercera son activité, mais à celles du pays dont elle est originaire. Demain, un prestataire de services installé dans un pays où les garanties sociales sont dérisoires pourra faire travailler chez nous des salariés venus de ce pays, à des conditions qui ne sont pas celles qui s'appliquent en France, mais celles qui s'appliquent dans le pays d'où ils viennent. (« Scandaleux ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Il s'agit, en fait, d'une délocalisation des salariés par une mise en concurrence généralisée des peuples. Il s'agit aussi d'une attaque directe contre les services publics. C'est l'exact contraire d'une harmonisation par le haut et de toute idée de non-recul ou de non-régressivité des droits sociaux. Voilà ce que permet l'Europe actuelle ! Voilà où nous conduirait, sans limite dans le temps, le traité Giscard ! Il y a bien une Europe de droite, que soutient avec enthousiasme le baron Seillière et que l'actuel traité veut renforcer. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. Maxime Gremetz. Oui ! M. Jean-Claude Lefort. Il y a aussi une Europe de gauche, qu'il est possible de construire par la victoire du « non ». (« La question ? » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Il s'agit aujourd'hui de bien plus que de poser une question : c'est une exigence que nous manifestons. Nous disons : « Pas de directive Bolkestein en Europe ! » C'est clair, c'est net et c'est précis ! (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur plusieurs bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée aux affaires européennes. Mme Claudie Haigneré, ministre déléguée aux affaires européennes. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur le député Lefort, je vais m'efforcer de répondre de façon claire et sereine à votre interrogation à propos de la directive relative aux services dans le marché intérieur, dont l'objectif est, en effet, de réaliser un véritable marché intérieur des services. Cette proposition de directive justifie un accueil globalement positif (Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains) au regard des potentialités de créations d'emplois - un rapport récent fait état, je le rappelle, d'un déficit de 200 000 emplois dans le secteur des services - et de la compétitivité de nos entreprises, qui sont très exportatrices de services. Le débat sera long et ardu. Il n'est pas seulement technique, mais aussi politique. M. Jean-Claude Lefort. C'est intenable ! Mme la ministre déléguée aux affaires européennes. Vous avez raison de souligner, monsieur le député, l'ampleur de cette directive, qui est en effet complexe et dont le champ d'application est trop large. Elle aborde de manière trop simple le principe du pays d'origine. (Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.) M. le président. Mes chers collègues, veuillez laisser parler Mme Haigneré ! Mme la ministre déléguée aux affaires européennes. Cette disposition est cause d'incertitudes pour les consommateurs et les prestataires de services. Qu'il s'agisse de Patrick Devedjian ou de moi-même, le Gouvernement aborde ces négociations avec des exigences fermes et incontournables. (Vives exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Pour assurer la confiance des consommateurs face aux délocalisations que vous évoquez dans le domaine social... M. Maxime Gremetz. Et les bas salaires ? M. Jean-Claude Lefort. C'est catastrophique ! Mme la ministre déléguée aux affaires européennes. ...et pour éviter un alignement par le bas des législations nationales (« Oh là là ! » sur les bancs du groupe des députés communistes et républicains),... M. Jean-Claude Lefort. Il faut entendre ça ! Mme la ministre déléguée aux affaires européennes. ...il faut une harmonisation préalable avant toute application du principe du pays d'origine. Deuxièmement, nous exigeons de la Commission européenne - et vous ne l'avez pas dit - des garanties quant à l'application aux services publics, comme elle s'y est engagée. (Protestations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Troisièmement, la Commission doit prendre acte de certaines exclusions sectorielles que nous réclamons pour préserver la diversité culturelle, notre modèle social et les spécificités juridiques de nos professions réglementées. Avec ces fermes exigences, nous sommes donc loin de la dérive ultra-libérale que vous caricaturez ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Nous sommes confortés dans notre fermeté par l'avis que le Conseil d'État a rendu au Premier ministre. Je tiens à rappeler que le Parlement européen travaille également sur cette question. Le rapport de Mme Gebhardt et la motivation des députés européens nous donneront des éléments pour une négociation encore plus ferme. Je voudrais encore saluer ici le fait que votre assemblée se soit saisie de ce dossier et le travail remarquable que réalise Mme Comparini, que j'ai reçue à plusieurs reprises. (Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Vous serez associés à ces négociations, que nous voulons fermes et résolues, mais constructives pour l'Europe. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.) INNOVATION ET RECHERCHE EUROPÉENNES M. le président. La parole est à M. Michel Herbillon, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire. M. Michel Herbillon. Monsieur le Premier ministre, au moment où nos compatriotes s'intéressent aux enjeux concrets de la construction européenne, aux « réalisations concrètes », pour reprendre les mots de Robert Schuman, je souhaiterais, monsieur le Premier ministre, que vous fassiez pour nous le point sur les politiques menées par l'Union européenne pour relancer la stratégie de Lisbonne, visant à faire de l'Europe l'économie de la connaissance la plus compétitive au monde, où l'innovation et la recherche ont un rôle clé à jouer pour la croissance économique, pour la cohésion sociale et pour l'emploi. Alors que le dernier conseil européen a fait de cet objectif sa priorité, quelles sont les mesures concrètes qui vont être prises, tant par l'Union que par la France, pour répondre à cette ambition ? Je souhaiterais également que vous nous disiez à cette occasion où en est la candidature du site de Cadarache pour l'installation du réacteur de fusion nucléaire ITER,... M. Maxime Gremetz. C'est dans la presse ! Vous ne savez pas lire ? M. Michel Herbillon. ...et que vous donniez à la représentation nationale des informations sur l'état d'avancement de la réforme du pacte de stabilité, visant à réserver un traitement spécial aux dépenses de recherche. M. le président. La parole est à M. le Premier ministre. M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Monsieur le député, vous avez raison de replacer la stratégie de Lisbonne au cœur du projet européen. Je note d'ailleurs avec gratitude que cette réflexion se trouve dans le rapport consacré aux universités au xxie siècle, que vous venez de remettre au Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Vous avez raison d'applaudir ce travail fait au nom de la délégation pour l'Union européenne. La stratégie de Lisbonne vise à donner à l'Europe la première place dans la société mondiale de la connaissance et de l'information. Si nous sommes en retard dans la mise en œuvre de cette stratégie, c'est parce que l'Europe ne dispose pas aujourd'hui des institutions capables de porter un projet aussi ambitieux. Le traité constitutionnel nous donnera des institutions européennes suffisamment fortes pour porter des ambitions aussi essentielles que la stratégie de Lisbonne, notamment pour ce qui est de la recherche, de l'innovation, de tout ce qui concerne l'intelligence ajoutée dans le projet économique et social de l'Union européenne. Ce projet est le projet de l'Europe et celui de la France. C'est dans ce but que nous avons créé une agence nationale de la recherche, dans le cadre du budget pour 2005 ; c'est dans ce but que nous lançons une mobilisation nationale en faveur de la recherche, des industries de la connaissance, du développement de l'éducation et de l'accès à l'éducation, grande ambition nationale. Un député du groupe socialiste. C'est nouveau ! M. le Premier ministre. Car il ne vous a pas échappé, mesdames et messieurs les députés, que l'éducation est désormais placée au niveau le plus élevé dans la hiérarchie gouvernementale. Plusieurs députés du groupe socialiste. Poudre aux yeux ! M. le Premier ministre. C'est dans ce contexte que s'inscrit notre forte mobilisation en faveur du projet ITER, grand projet de recherche par lequel la communauté scientifique française et européenne a su s'affirmer au niveau international comme capable d'une grande initiative de l'intelligence, dans l'esprit justement de la stratégie de Lisbonne. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Lors du dernier conseil de compétitivité, qui s'est tenu vendredi, l'Union européenne a réaffirmé son soutien à l'implantation de ce projet à Cadarache. Tant Claudie Haigneré que François d'Aubert se sont fortement investis dans ce dossier. Je peux aujourd'hui vous dire que la légitimité du site de Cadarache pour l'implantation d'ITER est reconnue par nos partenaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Je ne doute pas qu'elle sera, dans les jours prochains, reconnue par l'ensemble des partenaires du projet, y compris les États-Unis et la Corée. Nous aurons prochainement l'occasion de le dire au président coréen, puisqu'il sera en visite dans notre pays la semaine prochaine. Ce qui a été fait à Cadarache est exemplaire, sur le plan scientifique, sur le plan industriel, mais aussi sur le plan de la décentralisation. Comme pour la future antenne du musée du Louvre à Lens, nous voyons une grande décision nationale et européenne soutenue par les collectivités territoriales. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) C'est cela, la décentralisation : c'est la capacité nationale d'affirmer de grands projets qui suscitent la mobilisation des collectivités territoriales et en font les acteurs du rayonnement de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) M. le président. La parole est à M. Yves Nicolin, pour le groupe UMP. M. Yves Nicolin. Monsieur le Premier ministre, vous avez, dès votre prise de fonctions, affirmé votre volonté de faire de l'adoption l'un des piliers de la politique familiale de notre pays. Aujourd'hui, cette volonté a permis de jeter les bases d'une réforme fondamentale, que vous avez vous-même engagée. Au moment où le Conseil supérieur de l'adoption, que j'ai l'honneur de présider, participe intensément à la préparation cette réforme, qui doit notamment déboucher sur la création d'une agence française de l'adoption, les démarches d'adoption entamées au Cambodge par plusieurs de nos compatriotes ont été bloquées par le moratoire décidé par notre pays le 31 juillet 2003. M. Michel Vergnier. Vous voulez parler de Johnny ? M. Yves Nicolin. Or cela fait dix-huit mois que des centaines d'enfants répondant aux critères d'adoptabilité attendent qu'une famille leur soit enfin attribuée ; douze d'entre eux, à qui les autorités cambodgiennes ont attribué des parents, ne peuvent pas rejoindre leur nouvelle famille. Depuis plusieurs semaines, aux côtés des futurs parents, nous travaillons, avec plusieurs de nos collègues, dont Michèle Tabarot, avec les services de l'État au règlement de cette situation dramatique. Je tiens à saluer le travail accompli par Renaud Muselier à cet égard. (« Bravo ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Pouvez-vous, monsieur le Premier ministre, nous confirmer que ces douze enfants pourront enfin rejoindre leur nouvelle famille pour fêter Noël avec leurs parents ? Pouvez-vous nous indiquer s'il est permis d'espérer que la France va reprendre les adoptions dans ce pays et selon quelles modalités ? M. Michel Vergnier. Demandez à Johnny ! M. Yves Nicolin. Nous permettrions ainsi à plus d'un enfant de croire enfin à l'existence d'un bonheur familial tant désiré. M. le président. La parole est à M. le Premier ministre. M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Je tiens d'autant plus à répondre à votre question, monsieur Nicolin, que je connais votre engagement à la tête du Conseil pour l'adoption. Je tiens également à saluer la forte mobilisation de Mme Tabarot sur le plan parlementaire. Chacun le sait, adopter un enfant est un acte d'amour, de générosité, que plusieurs d'entre vous ont déjà vécu. C'est un acte majeur dans la vie d'une famille, qui demande de la préparation, mais surtout beaucoup de générosité. C'est la fraternité vécue à l'état pur. Nous avons été contraints d'encadrer plus strictement l'adoption d'enfants en provenance du Cambodge et d'autres pays en raison de certaines dérives dangereuses qui mettaient en péril la pureté et la générosité de cette démarche : elle est en effet fragilisée par une forme spécifique de délinquance, qui va du détournement de la procédure administrative jusqu'au trafic d'enfants. Nous ne pouvions pas tolérer d'être complices de telles pratiques, affectant un phénomène social d'une telle importance. Mais il est vrai que ces restrictions ont atteint un certain nombre de familles, qui avaient déjà établi un premier contact avec l'enfant et l'avaient déjà accueilli au moment où notre décision est intervenue. Cette décision était nécessaire ; mais je reconnais qu'on ne peut pas accepter la situation que vivent ces familles, et la rupture d'un lien affectif établi avec l'enfant dès la première lettre, dès le premier regard. C'est ce qui s'est passé pour ces douze enfants du Cambodge. C'est pourquoi j'ai décidé de faire en sorte que les douze familles concernées puissent accueillir leurs enfants le plus tôt possible. Je continue ce travail, pour elles ainsi que pour les familles qui ont eu des contacts avec des enfants en Roumanie. Nous considérons en effet que dès qu'un contact est établi, même s'il est d'ordre administratif et public, il s'agit déjà dans les faits d'un lien réel, relevant de la sphère de la vie privée, que nous n'avons pas droit de rompre pour des raisons administratives et politiques. C'est pourquoi nous faisons tout pour rétablir au plus vite les liens qui se sont établis entre les familles d'accueil et ces douze enfants cambodgiens, qui doivent être accueillis, comme ne le faisons pour les enfants roumains. Nous allons bâtir une autre politique de l'adoption internationale, une politique plus généreuse, qui se donnera les moyens d'être indépendante de tout trafic, afin de conserver à cet acte majeur sa pureté originelle. Je voudrais rassurer les familles, qui considèrent déjà ces enfants comme leurs enfants : ces enfants rejoindront bientôt leur famille d'adoption. La France fraternelle, c'est cela aussi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Hugon, pour le groupe UMP. M. Jean-Yves Hugon. Monsieur le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, afin que la France puisse demeurer une véritable terre d'accueil, le Gouvernement a mis en place une nouvelle politique de maîtrise de l'immigration, ouverte et généreuse pour ceux que nous accueillons, intransigeante et ferme face aux clandestins. Les lois que nous avons votées ici ont permis au Gouvernement de donner un sérieux coup de frein à l'immigration clandestine, qui avait pris des proportions inquiétantes. Parallèlement, votre prédécesseur et vous-même avez impulsé des coopérations, tant avec des pays sources qu'avec nos partenaires européens, pour endiguer ce phénomène. Monsieur le ministre, pouvez-vous faire part à la représentation nationale du degré d'efficacité des moyens dont vous disposez, du bilan des négociations menées avec d'autres pays en termes de coopération, enfin des résultats obtenus en 2004 en matière de reconduites à la frontière ? M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. M. Dominique de Villepin, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le député, l'immigration irrégulière est inacceptable dans notre pays, parce qu'elle est dangereuse, vous l'avez souligné, tant sur le plan humain que sur le plan économique et social. Parce qu'il met en péril notre société, la lutte contre ce phénomène suppose une mobilisation particulièrement forte et une politique globale. Celle-ci doit d'abord être, en amont, une politique de coopération avec les pays sources, les pays d'origine de l'immigration irrégulière, mais aussi avec les pays de transit. Je me suis, dans ce but, rendu à plusieurs reprises dans les pays du Maghreb. Cette action doit aussi s'exercer aux frontières. C'est tout le sens des coopérations que nous mettons en place avec les pays voisins. Ainsi, la coopération franco-britannique en matière d'immigration illégale a permis de diviser par vingt le nombre de candidats à l'immigration vers ce pays. Ma visite à Calais m'a confirmé dans la volonté de poursuivre cette coopération. Cette politique globale doit être menée aussi à l'échelon de notre propre territoire, notamment par le biais des reconduites aux frontières. Lors des dix premiers mois de l'année, il y a eu d'ores et déjà 13 000 reconduites, soit une augmentation de 40 % par rapport à l'année 2003, et de 60 % par rapport à 2002 ; et je me suis fixé l'objectif de 20 000 reconduites pour 2005. Une politique de fermeté exige bien évidemment des moyens supplémentaires, notamment juridiques. Comme le souligne très bien Thierry Mariani dans son excellent rapport, nous disposons aujourd'hui de ces moyens juridiques nécessaires que sont les certificats d'hébergement, délivrés sous le contrôle des maires, ou les visas à identifiant biométrique, qui vont permettre de mieux contrôler le séjour des étrangers. Une telle politique suppose également des moyens logistiques. C'est pourquoi le nombre de places dans les centres de rétention administrative passera de 1 100 à 1 600 dans le budget pour 2005, et que l'effort consenti en la matière, qui était d'un million d'euros en 2003, s'élèvera à 33 millions d'euros en 2005, ce qui représente un effort tout à fait significatif. Il faut aussi des moyens administratifs. Ce sera la mise en place d'un pôle d'éloignement dans chaque département, qui concentrera les moyens des forces de sécurité et ceux des différentes administrations. Cette politique donne des résultats, puisqu'elle a fait baisser la pression migratoire dans notre pays. On peut le constater à la zone d'attente de Roissy, qui est la première frontière nationale : il y avait 540 non admis par jour en 2003 ; il y en a aujourd'hui moins de 80. Nous poursuivrons donc cette politique avec la même détermination. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. le président. La parole est à M. François Dosé, pour le groupe socialiste. M. François Dosé. Monsieur le ministre des solidarités, de la santé et de la famille, je souhaite aborder, par le biais de cette question d'actualité, les réalités et les promesses concernant la problématique des personnes âgées désorientées, frappées par la maladie d'Alzheimer ou par des pathologies apparentées. Nous sommes tous, monsieur le ministre, les uns et les autres, dans la diversité de nos responsabilités, de nos territoires, de nos convictions, confrontés aux besoins, constatés et inventoriés, aux attentes légitimes des intéressés parfois, des proches toujours. Aussi, prenant acte des volontés exprimées, notamment par vous, monsieur le ministre, ou des priorités annoncées, en particulier par le Président de la République, ici des établissements publics, là des associations à but non lucratif, ou encore des sociétés privées, déposent des projets afin de relever ce défi, médical et sociétal, du bien-être et du bien-vivre des personnes âgées désorientées. En Lorraine et ailleurs, les comités régionaux d'organisation sociale et médico-sociale ont validé cet automne des dossiers pertinents, soutenus par les conseils généraux, toutes tendances politiques confondues, appuyés par les services territoriaux de l'État, les fameuses DDASS, et relayés par le monde associatif, notamment France-Alzheimer. Mais, faute de crédits, les préfets ne peuvent signer ni les arrêtés autorisant la création d'une unité de soins, ni les conventions tripartites finançant son coût de fonctionnement. Et, in fine, les maîtres d'ouvrage, en attente de cet engagement, reportent les travaux ; les associations, les familles, s'impatientent ; la parole politique, une nouvelle fois, est discréditée. Monsieur le ministre, je ne vous demande pas l'impossible - par exemple, des crédits à la hauteur des besoins. Mais, président d'un établissement porteur d'un tel projet, confronté à cette réalité que je viens de décrire, je vous demande, au nom de tous les autres dirigeants d'établissement, de respecter vos engagements financiers. Comment et quand sortirons-nous de cette situation inadmissible et mal vécue par les uns et les autres ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.) M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État aux personnes âgées. Mme Catherine Vautrin, secrétaire d'État aux personnes âgées. Monsieur Dosé, vous avez abordé les problèmes de financement des places en établissement et vous avez remarqué que les CROSS pouvaient donner des avis favorables qui, après, n'étaient pas immédiatement suivis. Je vous rappelle qu'il s'agit de se référer au texte que vous avez présenté en janvier 2002, et qui prévoyait deux étapes : d'abord, l'acceptation par le CROSS ; ensuite, le financement. Mais cette seconde étape, que vous aviez prévue, c'est le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin qui l'a mise en place (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)... M. Jean-Marc Ayrault. Ce n'est pas vrai ! Mme la secrétaire d'État aux personnes âgées. ...avec le plan vieillissement et solidarité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Ce plan prévoit 10 000 places. Nous les avons eues au budget 2004, nous les aurons de la même manière dans le budget 2005. (« Ce n'est pas vrai ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Et je tiens à vous dire, d'ores et déjà, qu'au titre du budget 2005, l'ONDAM médico-sociale est en augmentation de 11 % : 425 millions d'euros supplémentaires. Et il y aura 3 600 places pour les personnes atteintes de ces nouvelles pathologies, comme la maladie d'Alzheimer. Effectivement, c'est un vrai sujet de préoccupation. Mme Chantal Robin-Rodrigo. Baratin ! Mme la secrétaire d'État aux personnes âgées. Madame, on ne parle de baratin sur un sujet aussi grave ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Il concerne tous les Français, lesquels attendent du Gouvernement qu'il se mobilise et qu'il agisse. C'est ce que nous faisons. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. le président. La parole est à M. Michel Raison, pour le groupe UMP. M. Michel Raison. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale. Le surendettement est, depuis plusieurs années, un véritable désastre social et financier pour de nombreuses familles françaises. Ces foyers se retrouvent dans une telle situation pour avoir cédé à l'illusion des prêts « faciles et pas chers », ou encore « sans engagements », comme les vantent, dans les publicités, des magasins et des organismes de crédit. La grande distribution, d'ailleurs, n'arrange rien. De plus, l'absence de coordination entre organismes de crédit permet à des personnes de cumuler plusieurs crédits dont ils ne peuvent assumer la charge, ce qui aggrave évidemment, dans bien des cas, le risque de surendettement. Face à cette situation qui dure depuis plusieurs années, vous avez mis en place, au cours de l'année 2003, une procédure de redressement personnel, pour donner une seconde chance aux ménages surendettés. Aujourd'hui, la situation en matière de surendettement reste grave. L'arrivée dans notre pays des 35 heures (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste), que je caractériserai de « poison à diffusion lente » (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), a fait croire à nos citoyens qu'ils pouvaient avoir plus de loisirs sans pour autant augmenter leurs revenus (« Oh ! » sur les bancs du groupe socialiste), et n'a fait qu'aggraver la progression des dossiers de surendettement. Aussi, monsieur le ministre, pouvez-vous nous faire connaître votre analyse, compte tenu du nombre de dossiers de ménages surendettés et, surtout, tirer un premier bilan de fonctionnement de l'application de la procédure de redressement personnel ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. le président. La parole est à M. le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale. M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale. Monsieur Raison, le surendettement en France est reconnu, depuis la loi Neiertz, comme un phénomène, un fléau. Celui-ci n'a cessé de s'aggraver. Aujourd'hui, ce sont près de 700 000 familles qui vivent dans cette spirale infernale de frais d'huissier et de procédure. Ce dossier a deux aspects. D'une part, et vous l'avez dit, il y a un problème de prévention, et de multiples crédits à la consommation un peu faciles. La commission Jolivet a fait des propositions. Christian Jacob s'en est saisi, pour trouver un juste équilibre : il faut éviter ce pousse-au-crédit, parfois irresponsable, tout en faisant attention à ne pas couper la route du crédit aux plus modestes. C'est un exercice d'équilibre dans lequel il s'est engagé. D'autre part, vous savez que, devant ce fléau, le Parlement a voté, en août 2003, une loi de la deuxième chance pour les familles surendettées de bonne foi. Après huit mois d'existence, et grâce notamment à l'impulsion d'un comité de pilotage présidé par M. Canivet, ce sont près de 17 000 familles qui ont bénéficié de cette procédure de la deuxième chance. Ainsi, il y a eu un appel d'air. Et c'est tant mieux. Ce mois d'octobre est le premier, depuis de longues années, où le nombre de dossiers a diminué : moins 5 % par rapport à octobre 2003. Mais cette évolution reste extrêmement fragile. Enfin, monsieur Raison, la vraie réponse, on la trouve évidemment dans la mise en route le plus rapidement possible du plan de cohésion sociale (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), avec 14 milliards d'euros qui permettront à beaucoup de ces familles de remonter dans le train de la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. le président. La parole est à Mme Chantal Bourragué, pour le groupe UMP. Mme Chantal Bourragué. Ma question s'adresse à M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille. Monsieur le ministre, le sida, avec, en 2004, plus de trois millions de morts et près de quarante millions de personnes touchées dans le monde, est un fléau toujours plus ravageur. Parmi ses victimes, la proportion de femmes et d'enfants augmente de façon dramatique. En France, les chiffres de l'Institut national de veille sanitaire ont été rendus publics vendredi dernier. Le constat est extrêmement préoccupant : l'épidémie de sida ne recule toujours pas. En 2003, 6 000 nouvelles victimes de ce terrible fléau ont été recensées. Les régions Île-de-France et Aquitaine sont parmi les plus touchées. Un tiers de ces nouveaux cas correspond à des contaminations datant de moins de six mois. La France, aujourd'hui, compte près de 100 000 personnes séropositives, et, dans la plupart des cas, elles ne savent pas qu'elles sont contaminées. Nos actions doivent se concentrer sur la prévention, mais aussi sur l'accompagnement des personnes qui vivent au quotidien avec la maladie. Ce mercredi 1er décembre est la Journée mondiale contre le sida. Je tiens à saluer le travail formidable fourni par les associations et le corps médical. Ils nous rappellent, chaque jour, que lutter contre la maladie, c'est aussi se battre contre sa banalisation et contre les discriminations qu'elle engendre. Le Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, a déclaré la lutte contre le sida, « grande cause nationale pour 2005 ». Monsieur le ministre, vous avez annoncé, dans cette perspective, un nouveau programme de lutte contre le VIH, de 2005 à 2008. Pouvez-vous nous présenter son contenu et ses objectifs ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille. M. Philippe Douste-Blazy, ministre des solidarités, de la santé et de la famille. Madame la députée, l'épidémie du sida a commencé il y a vingt ans. Et jamais l'humanité n'avait été confrontée à une épidémie comme celle-là. Nous savons qu'aujourd'hui il y a quarante millions de personnes séropositives sur la planète, et les chiffres d'ONUSIDA indiquent qu'il y aura soixante-huit millions de morts dans les vingt ans qui viennent. C'est donc un phénomène planétaire qui est unique. Il faut y faire face au niveau français, et au niveau international. En France, on compte 6 000 séropositifs de plus chaque année. Il y a des signes encourageants - et je parle en accord avec M. Lefort, président, à l'Assemblée nationale, du groupe d'études sur le sida - : les chiffres ont chuté chez les héroïnomanes, parce que nous avons tous mené des politiques de réduction des risques. En revanche, il y a des signes inquiétants : pour la première fois depuis cinq ou six ans, il n'y a plus de prévention véritable dans la population homosexuelle, mais une résurgence des comportements à risque. En conséquence, 22 % des nouveaux diagnostics proviennent de la communauté homosexuelle. Autre signe très préoccupant : 50% des femmes séropositives sont originaires d'Afrique sub-saharienne, et on n'arrive pas véritablement à les suivre. Enfin - vous en avez parlé -, il y a les disparités régionales : 50 % des nouveaux cas sont situés à Paris, en Île-de-France, et également en Aquitaine, et 8 % aux Antilles et en Guyane. Ce sont des sujets de préoccupation terriblement importants pour nous parce que nous n'arrivons pas véritablement à endiguer ce phénomène. Maintenant, mesdames, messieurs les députés, il ne servirait à rien d'en parler, lors de la Journée mondiale contre le sida, si on ne rappelait pas que nous avons une obligation : celle de payer au Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme les 150 millions d'euros que le Président de la République a décidé de lui donner. Nous sommes ainsi le premier contributeur mondial par habitant. Et j'espère que les États-Unis, qui versent l'équivalent de 200 millions d'euros, continueront à être un contributeur important. Je termine en soulignant que rien n'est possible s'il n'y a pas, en Afrique, de génériques, ni de gratuité des traitements et de la distribution. Tout cela n'a plus de sens si nous sommes égoïstes au point de ne pas comprendre que, non seulement, il ne faut pas laisser mourir les gens en Afrique ou en Asie, mais aussi que plus il y aura de malades là-bas, plus il y en aura également dans les pays du Nord. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur divers bancs.) M. le président. Le sida nous concerne tous. Et la lutte contre le sida a été reconnue grande cause nationale pour 2005. L'Assemblée nationale tout entière est heureuse de cette décision. (Applaudissements sur tous les bancs.) SUBVENTIONS DE L'ÉTAT M. le président. La parole est à M. Michel Destot, pour le groupe socialiste. M. Michel Destot. Lors de la dernière campagne présidentielle, puis au sommet de la terre de Johannesburg, le Président de la République n'avait pas été avare de déclarations ambitieuses sur le développement durable. Ces discours présidentiels sont pourtant en contradiction flagrante, monsieur le Premier ministre, avec la politique de désengagement de votre gouvernement, notamment en matière de transports publics. Ainsi, comme on le sait, vous avez supprimé les aides de l'État pour les transports collectifs en site propre de province, dans les lois de finances 2004 et 2005 ; une enveloppe de 65 millions d'euros pour solde de tout compte ayant été concédée fin 2003. J'avais souligné, à l'époque, que cette somme, très éloignée des 300 millions d'euros nécessaires, était loin de satisfaire les élus locaux, qui n'ont d'ailleurs pas manqué, sur tous les bancs, de le faire savoir. Face au tollé général, M. Jean-François Copé, alors ministre délégué à l'intérieur et porte-parole du Gouvernement, déclarait, lors de l'assemblée des communautés urbaines, le 22 octobre dernier, à Lille, qu'au-delà de cette ouverture au collectif budgétaire 2003, à hauteur de 65 millions d'euros, l'État continuerait à tenir ses engagements pour tous les chantiers sur lesquels il a engagé sa signature. Mais est-ce réellement, monsieur le Premier ministre, la position de votre gouvernement ? Vous me permettrez d'en douter, tant les annonces intervenues récemment, au mieux, créent de la confusion et, au pire, traduisent une partialité de l'État dans ses choix d'affectation de crédits. Ainsi, entre les deux tours de la législative partielle de Bordeaux, nous apprenions que la communauté urbaine se voyait attribuer une subvention de 20 millions d'euros, ce dont nous nous réjouissons, bien sûr, pour les Bordelais. Mais où sont pris ces crédits ? Et que penser, plus généralement, de la répartition de cette enveloppe de 65 millions d'euros ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Ainsi, sur ma droite, 15 millions d'euros pour Strasbourg, 10 millions pour Saint-Étienne et pour Marseille, 9,5 millions pour Toulon ; mais, d'autre part, 6 millions pour Clermont, 5 millions pour Montpellier, 2 millions pour Lorient, et zéro pour Le Mans et Nantes ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Bref, monsieur le Premier ministre, comment pouvez-vous encore parler d'impartialité de l'État ? Que croire ? Qui croire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) M. le président. La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Monsieur Destot, vous êtes un fin connaisseur des problèmes de transports en commun puisque vous êtes, tout le monde le sait, président du GART, le groupement des autorités responsables de transports. Vous savez donc de quoi vous parlez et vous connaissez l'histoire : c'est notre majorité qui, il y a dix ans, avec les ministres, M. Bosson et Mme Idrac, a mis en place des systèmes incitatifs pour les transports collectifs dans nos villes et nos agglomérations. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Je vous vois opiner du bonnet, je vais donc faire encore appel à votre mémoire. C'est le gouvernement précédent qui a entériné des projets de transport en commun, en laissant impayés 460 millions d'euros, ou plutôt, à l'époque, 3 milliards de francs ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Devant cette situation, le Premier ministre a pris trois types de décisions et, d'abord, celle d'inscrire tout de suite en loi de finances rectificatives 2003, 45 millions d'euros, puis dans le collectif budgétaire 2004, 65 millions d'euros. Par ailleurs, il a confié à Christian Philip, qui a fait preuve d'imagination et d'esprit d'innovation, le soin de trouver de nouvelles solutions pérennes pour financer ces transports en commun et de les consigner dans un rapport. Enfin, nous avons mis en place trois lignes de crédits à des conditions de durée et de taux particulièrement avantageuses,... M. Christian Bataille. Pour servir vos amis ! M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. ...qui équivalent à 100 millions d'euros de subvention. Alors, puisque vous parlez de développement durable, eh bien, oui, monsieur Destot, je suis fier de cette politique ! M. Christian Bataille. Vous ne répondez pas à la question ! M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Lorsque l'on regarde toutes les décisions qui ont été prises depuis deux ans, on s'aperçoit que les trois quarts des infrastructures que nous construisons respectent l'écologie : ferroviaire, canaux, transports maritimes. (« Ce n'est pas vrai ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Deuxième innovation par rapport à vous : lorsque nous annonçons des projets de transports, nous ne laissons pas d'ardoise, nous les finançons ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) LIAISONS AÉRIENNES M. le président. La parole est à M. Bertho Audifax, pour le groupe UMP. M. Bertho Audifax. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. À plusieurs reprises, des compagnies aériennes ont cessé brutalement leurs activités sur les lignes reliant la Réunion à Paris, et inversement : PointAir, Air Outre-mer, Air Lib et aujourd'hui, malheureusement, Air Bourbon. À chaque fois, le scénario est identique : du jour au lendemain, la compagnie cesse son activité et les billets d'avion déjà payés sont perdus pour les clients, sans compensation ni remboursement. Les conséquences sont graves sur le budget des familles ; il en résulte, par ailleurs, des problèmes humains majeurs de voyage et d'hébergement pour les touristes et pour les originaires de la Réunion. Cela nuit, en outre, à la crédibilité de futures compagnies et à celle de la destination touristique de la Réunion. Pour l'avenir, serait-il possible, monsieur le ministre, de créer pour les compagnies aériennes une obligation de compensation pour les passagers nantis de titres de voyage et qui se retrouveraient dans une telle situation ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. le président. La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Merci, monsieur Audifax, de vous préoccuper de ces voyageurs qui restent « en panne », si j'ose dire, au milieu d'un voyage. La situation de ces voyageurs est différente selon la façon dont ils ont acquis leur billet. Ceux qui ont acheté un forfait touristique dans une agence de voyages sont protégés par la loi de juillet 1992, et se verront donc remboursés et transportés, ou bien non remboursés mais transportés. En revanche, sur les mille voyageurs touchés par la disparition d'Air Bourbon, il y en a plusieurs centaines qui sont vraiment en panne, y compris financièrement. L'État va les aider, à hauteur de trois cents euros par billet, somme qui n'en couvre pas le coût total, car ils sont chers. Les collectivités locales se mobilisent également en faveur de ces voyageurs en panne. Dès demain, un vol ramènera 145 voyageurs en métropole ; après-demain, d'autres vols en ramèneront 745. Les quelques-uns qui resteront devront attendre lundi, mardi au plus tard, des vols d'Air France. Vous avez raison, il faut aborder la question au niveau communautaire. Il faut davantage protéger les voyageurs qui sont en cours de transport. Nous allons y travailler et porter ce message au niveau de l'Union européenne. Je pense que la France, forte de ces expériences malheureuses, saura faire entendre sa voix. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. le président. La parole est à M. Marc Bernier, pour le groupe UMP. M. Marc Bernier. Monsieur le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et de la ruralité, la Commission européenne a adopté, le 22 novembre dernier, un compromis sur les règles de transport des animaux d'élevage dans l'Union européenne. Cette initiative mérite d'être saluée dès lors qu'elle répond aussi bien aux demandes des associations protectrices des animaux qu'à celles des professionnels de l'élevage, du négoce et du transport. En revanche, cet accord laisse de côté les questions les plus controversées concernant les séquences de transport et la densité de chargement des véhicules. Elles furent à l'origine de l'échec des débats en avril dernier et ont fait l'objet de vives critiques de la part de votre prédécesseur mais aussi des professionnels. En effet, ces derniers avaient unanimement considéré que l'arrêt de douze heures, imposé par le projet de règlement, après neuf heures de transport, était un non-sens. Il n'aurait fait qu'accroître le stress des animaux transportés puisqu'il était prévu de les laisser à l'intérieur des véhicules. À titre d'exemple, dans mon département de la Mayenne, qui accueille le premier marché aux veaux d'Europe, le transport des animaux, soit 40 % des exportations, serait passé de quinze à vingt-sept heures, pour des destinations telles que l'Espagne ou l'Italie. Les conséquences de telles mesures se seraient traduites, à l'évidence, par une augmentation des temps et des frais de transport, ce qui aurait porté un coup fatal à tous les acteurs de la filière animale, à l'horizon 2005. Les professionnels ont souhaité être entendus. Ce sont les premiers défenseurs du bien-être animal et ils sont désireux de conserver durablement à l'élevage de notre pays la qualité qui fait sa réputation. Monsieur le ministre, la France ayant posé pour condition la révision des règles relatives aux temps de transport et aux densités de chargement, quelles garanties seront désormais accordées aux éleveurs, négociants et transporteurs d'animaux, après l'adoption de ce compromis ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et de la ruralité. M. Dominique Bussereau, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et de la ruralité. Les ministres de l'agriculture des vingt-cinq États membres viennent, effectivement, de conclure, le 22 novembre dernier, un accord qui modifie les principes et les procédures en vigueur sur les conditions de transports des animaux. Un suivi par satellite des véhicules de transport sera mis en place progressivement, les exigences pour les transports de longue durée seront renforcées et une formation harmonisée au plan communautaire sera diffusée. Cette formation sera fondée sur le modèle qui a cours dans notre pays depuis plusieurs années. Se posent, en effet, le problème de la densité de chargement des animaux et du rythme de transport et de repos. Comme le souhaitait la France, les conditions à cet égard restent inchangées. Il s'agit donc d'un bon compromis, qui entrera en application le 1er janvier 2007. Mais il ne fait pas l'unanimité dans l'Union. Il devra donc être réexaminé dans les années à venir ; un rapport sera remis avant la fin de 2010. Plus globalement, monsieur Bernier, sous l'autorité du Premier ministre, le Gouvernement sera très attentif dans les mois à venir - comme l'a été Hervé Gaymard - au point de vue des professionnels de la filière animale en particulier, et de l'ensemble de l'agriculture. Je recevrai, d'ailleurs, dès cet après-midi, le président de la FNSEA, M. Lemétayer, pour une première prise de contact. Comme c'était le cas avec Hervé Gaymard, le Gouvernement continuera à travailler au développement de notre agriculture en concertation avec les agriculteurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) M. le président. La parole est à M. Édouard Leveau. M. Édouard Leveau. Monsieur le ministre des solidarités, de la santé et de la famille, le plan de modernisation des hôpitaux fixe des objectifs ambitieux. Son grand intérêt est de rechercher la complémentarité entre le secteur public et le secteur privé. Pour cela, il faut favoriser, au plan local, la mise en commun des moyens et la répartition des missions au sein de la filière santé, afin d'éviter une surabondance de l'offre de soins dans certaines spécialités ou, à l'inverse, une pénurie dans d'autres. Il en va ainsi des rapprochements sur des sites communs d'hôpitaux et de cliniques privées. Comme le recommande le rapport d'une mission d'appui, l'aide apportée à l'investissement privé et les investissements importants qui sont engagés sur des sites d'hôpitaux publics doivent justifier un dialogue entre les professionnels de la santé, les investisseurs privés et les autorités régionales hospitalières. C'est d'autant plus nécessaire qu'il faut gérer - en commun - un équipement lourd dans le cadre du plan cancer, comme un équipement de radiothérapie, alors que la dispersion des sites semble entraver la régionalisation et la réalisation d'économies, et nuire à la sécurité des patients. Au total, et prenant exemple de ma circonscription, je pense qu'un plan hospitalier unissant public et privé éviterait de très nombreux transports qui sont source, pour le malade, de perte de temps et de fatigue et, pour l'assurance maladie, de dépenses improductives en termes de santé publique. Monsieur le ministre, l'État et les agences régionales d'hospitalisation ont-ils le pouvoir d'influer sur le secteur privé pour que, dans ses investissements, il recherche la complémentarité avec le secteur public, en contrepartie des subventions qu'il reçoit ? M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille. M. Philippe Douste-Blazy, ministre des solidarités, de la santé et de la famille. C'est vrai, monsieur Leveau, il faut moderniser l'hôpital. C'est d'ailleurs le sens du plan Hôpital 2007, qui est d'une ampleur jamais égalée, puisqu'il est de 10 milliards d'euros. D'ici à 2007, si nous voulons moderniser l'hôpital public, il nous faut, d'abord, accepter l'idée qu'il y ait des réseaux hospitaliers, donc qu'il y ait des plateaux techniques de très haut niveau dans certains hôpitaux mais pas dans tous. Il n'en faut pas moins que tous nos territoires disposent d'une offre hospitalière décente et efficace. C'est la raison pour laquelle je suis contre la fermeture des hôpitaux locaux. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Deuxième condition, il faut que la médecine libérale et la médecine hospitalière travaillent ensemble. Elles ont le même financeur, l'assurance maladie. Or, la loi réformant cette dernière oblige, dans chaque région, à la coopération entre l'union régionale des caisses d'assurance maladie et les agences régionales d'hospitalisation. Enfin, troisième condition, il faut que l'hôpital public et l'hôpital privé travaillent eux aussi ensemble. Je déplore que les cliniques des Fougères et Saint Pierre de Dieppe ne travaillent pas avec l'hôpital de cette ville. Pourtant, je peux vous affirmer qu'il existe déjà cent projets de collaboration entre l'hôpital public et l'hôpital privé. Nous savons quelle est la démographie médicale ; nous connaissons l'état des urgences et le prix des équipements. Mais il n'est pas possible qu'une partie de notre territoire demeure sans hôpital ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement. Suspension et reprise de la séance M. le président. La séance est suspendue. (La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de M. François Baroin.) PRÉSIDENCE DE M. FRANÇOIS BAROIN, vice-président M. le président. La séance est reprise. Chers collègues, je vous rappelle que la Conférence des présidents a décidé que la séance de cet après-midi serait levée à dix-sept heures quarante-cinq. Celle de ce soir reprendra à vingt et une heures, et non pas vingt et une heures trente.
SAISINE DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL M. le président. J'ai reçu de M. le président du Conseil constitutionnel une lettre m'informant que, en application de l'article 61, alinéa 2, de la Constitution, plus de soixante sénateurs ont saisi le Conseil constitutionnel de la loi portant diverses dispositions relatives au sport professionnel.
Suite de la discussion d'un projet de loi M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat après déclaration d'urgence, de programmation pour la cohésion sociale (nos 1911, 1930). Discussion des articles (suite) M. le président. Hier soir, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles et s'est arrêtée à l'article 15. M. le président. La parole est à M. Rodolphe Thomas, inscrit sur l'article 15. M. Rodolphe Thomas. Cet article concerne les aides apportées aux entreprises qui forment les apprentis. Monsieur le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale, je ne reviendrai pas sur les mesures du plan de cohésion sociale dont l'un des axes forts est la modernisation de l'apprentissage, l'objectif étant de créer près de 500 000 contrats d'apprentissage. Cet objectif est ambitieux, mais réalisable si nous mobilisons tous les acteurs et particulièrement les entreprises qui sont à même de former nos jeunes. Il nécessite de créer un climat de confiance entre les entreprises et le Gouvernement et de mener une politique incitative et pragmatique d'aide financière. Or, monsieur le ministre, ce qui nous inquiète s'agissant de cette réforme, c'est que le Gouvernement a pris une décision arbitraire sans tenir compte de la position exprimée par le vote des députés UMP et UDF lors du débat sur le projet de loi de finances pour 2005. Le 3 novembre dernier, notre collègue Fourgous, rapporteur spécial de la commission des finances, avait fait voter dans cet hémicycle le rétablissement de l'exonération des cotisations sociales patronales au titre des salaires versées aux apprentis qui ont obtenu leur diplôme. Il s'agissait de l'amendement n° 59, déposé à l'article 75, dans le cadre du volet formation professionnelle, le but étant de maintenir l'exonération pendant toute la durée du contrat d'apprentissage. Cette disposition cohérente avait d'ailleurs fait l'unanimité au sein de la commission des finances. Or, au cours de la séance du 19 novembre, sans s'en tenir au vote initial des députés, le Gouvernement a demandé une deuxième délibération et, à trois heures du matin, a fait rétablir l'article 75 initial. Les organisations professionnelles sont vent debout contre cette décision. Monsieur le ministre, comment pouvons-nous instaurer un climat de confiance en opérant un tel revirement ? Quelle crédibilité pouvons-nous offrir aux yeux des employeurs, alors même qu'on veut les inciter à embaucher des apprentis ? Il faut avoir une ligne de conduite claire et cohérente si l'on veut que cette réforme puisse aboutir et porter ses fruits. J'espère que le Gouvernement reviendra rapidement sur sa décision pour ne pas porter atteinte à cette réforme et que nous obtiendrons gain de cause en commission mixte paritaire. M. le président. Nous en venons aux amendements. Je suis saisi de deux amendements, nos 228 et 583, tendant à supprimer l'article 15. La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour soutenir l'amendement n° 228. Mme Muguette Jacquaint. L'article 15 propose d'introduire le principe de l'intermédiation obligatoire des organismes collecteurs dans le code général des impôts et d'instituer un crédit d'impôt au bénéfice des entreprises qui emploient des apprentis. L'accueil et l'accompagnement d'apprentis dans une entreprise ne s'improvisent pas. Les entreprises embauchant régulièrement des apprentis doivent s'engager dans une démarche mûrie et durable leur permettant d'adapter leur organisation et de former leur personnel pour participer pleinement à la pédagogie de l'alternance. Rappelons à cet égard que les ruptures de contrat résultent trop souvent d'une entrée en apprentissage par défaut ou d'un rejet du maître d'apprentissage, plus fréquent lorsque l'entreprise n'a pas la culture du tutorat. L'abandon précoce de l'apprentissage, qui se solde par une entrée sur le marché du travail sans diplôme et sans qualification, a des conséquences graves. Il génère des difficultés d'insertion majeures, en particulier pour les filles. La qualité de l'intégration dans l'entreprise et de l'investissement du tuteur auprès de l'apprenti peut donc contrebalancer des a priori négatifs sur l'apprentissage lui-même ou sur la spécialité de formation et conduire le jeune à achever son cycle d'apprentissage. Pourtant, la création d'un crédit d'impôt, dont l'intérêt pour l'entreprise dépendra uniquement du nombre de contrats signés, ne répondra aucunement à cette exigence de qualité. Si tel n'était pas le cas, je souhaiterais que vous en fassiez la démonstration. Aussi, en l'absence de toute contrepartie qualitative à la prévention des ruptures de contrats avant terme ou à la lutte contre l'échec à l'examen final, cet article peut même créer des effets d'aubaine au détriment de la qualité du nouveau contrat d'apprentissage. Pour accueillir correctement les jeunes, les entreprises doivent trouver dans l'apprentissage un intérêt autre que financier et ne pas considérer que les apprentis créent des charges indues. Il en va de la réussite de l'apprentissage. Tel est le sens de cet amendement de suppression. M. le président. la parole est à M. Christian Paul, pour soutenir l'amendement n° 583. M. Christian Paul. Monsieur le ministre, vous devrez déployer des trésors d'imagination pour nous convaincre des bonnes raisons qui vous ont conduit à réformer le dispositif d'incitation des entreprises. Même s'il ne m'incombe pas de relayer les réactions de celles-ci, je dois dire qu'elles sont très hostiles au nouveau système que vous proposez aujourd'hui à l'Assemblée nationale, comme l'ont montré les auditions de représentants des entreprises et de syndicats de salariés. Je souscris à la démonstration de Mme Jacquaint sur le risque d'effet d'aubaine. C'est une nouvelle niche fiscale que vous créez ainsi, alors même que la rémunération des apprentis est d'ores et déjà une charge imputable sur les produits d'exploitation de l'entreprise. Nous sommes désireux de comprendre, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, comment vous avez pu aboutir à cette proposition. Je mets à profit l'arrivée de M. Jean-Louis Borloo dans le débat sur l'apprentissage pour évoquer une autre question, celle du financement de cette réforme. Si l'objectif de redonner à l'apprentissage toute sa place dans le système de formation professionnelle est noble, les régions ressentent toutefois une profonde inquiétude, car elles devront désormais assurer le financement de la rémunération des apprentis. Certes, l'État a promis de verser une compensation, mais aucune garantie n'a été donnée hier soir, sauf sur un ou deux points mineurs. Aussi les régions craignent-elles que cette dotation ne devienne progressivement partielle, comme toutes celles qui accompagnent vos mesures de décentralisation. Monsieur Borloo, cette réforme aurait dû faire l'objet d'une grande loi sur l'apprentissage, et non d'un simple volet dans le cadre d'une loi de lutte contre l'exclusion. M. Richard Mallié. Il ne s'agit pas d'exclusion, mais de cohésion sociale ! M. Christian Paul. C'est la formation professionnelle de nos jeunes qui est en cause ! Il ne s'agit pas de faire émerger de l'apprentissage des diplômes sociaux de troisième ou de quatrième ordre. M. Denis Jacquat. Bien sûr que non ! M. Christian Paul. L'apprentissage doit être une voie de réussite scolaire et professionnelle : M. Hénart l'a dit, mais les actes ne suivent pas. Sur le principe, nous sommes donc d'accord,... M. Denis Jacquat. Votez la loi ! M. Christian Paul. ...mais, dans la pratique, vous n'assumez pas l'objectif que vous vous êtes fixé. En outre, inclure de telles propositions dans cette loi nous paraît un très mauvais signal en direction des formateurs, des jeunes et de leurs familles. C'est une faute stratégique. M. Richard Mallié. Ce que vous voulez dire, c'est qu'il faut toujours remettre au lendemain ce que l'on peut faire le jour même ! M. Christian Paul. En ce qui concerne le financement, je le répète, le recours au crédit d'impôt n'est pas justifié, et c'est pourquoi nous proposons de supprimer l'article 15. Quant aux régions, elles doivent prendre toute leur place dans les PRDF, et les mesures de compensation qui leur sont destinées doivent répondre à un souci de solidarité et de péréquation nationale. Or, dans ce domaine comme dans d'autres, cette préoccupation fait cruellement défaut. M. le président. La parole est à Mme Françoise de Panafieu, rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour donner l'avis de la commission sur les amendements en discussion. Mme Françoise de Panafieu, rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. La commission a émis un avis défavorable sur ces amendements. Monsieur le ministre, ne voyez pas dans mon propos une opposition au système proposé, ... M. Christian Paul. Il faudrait oser, pourtant ! Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Sur ce plan-là, monsieur le député, je n'ai pas de leçon à recevoir. M. Christian Paul. C'était un encouragement ! Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. J'appelle votre attention, monsieur le ministre, sur le cas de certaines entreprises, plus fragiles que d'autres et n'ayant, en raison des caractéristiques propres à leur activité, pas nécessairement recours à l'apprentissage. La question m'a souvent été posée lors des auditions en commission : ne souffriront-elles pas de l'absence de crédit d'impôt ? M. Christian Paul. Nous y voilà ! Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Je me contente de poser la question. Mais ne vous inquiétez pas, le Gouvernement va nous répondre. Il est vrai que l'on peut retourner le raisonnement, et objecter que, précisément, le projet a vocation à susciter le développement de l'apprentissage là où il n'existe pas encore. J'ai d'ailleurs demandé aux personnes auditionnées de m'indiquer les secteurs dans lesquels on n'y avait pas recours, et je dois reconnaître que l'on nous a donné peu d'exemples. Il reste que l'inquiétude est réelle. Je le répète, mon propos n'est pas de remettre en cause le dispositif dans son ensemble. Mais il serait souhaitable que le Gouvernement soit attentif à la situation et puisse, si des déséquilibres étaient avérés, apporter, en temps utile, les correctifs nécessaires. Par ailleurs, la commission proposera, après l'article 16 bis, un amendement visant à ce qu'un bilan de la mesure, comportant des indicateurs tant qualitatifs que quantitatifs, soit dressé. M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes, pour donner l'avis du Gouvernement. M. Laurent Hénart, secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes. Monsieur le président, je répondrai d'abord à M. Rodolphe Thomas au sujet de l'article 75 du projet de loi de finances, dont il a évoqué la discussion en première lecture à l'Assemblée nationale. Sur cette question, le Gouvernement est à l'écoute de la commission des finances et de la commission des affaires sociales du Sénat. Avec Jean-Louis Borloo et Gérard Larcher, nous serons à la Haute assemblée jeudi prochain, lors de l'examen des crédits du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle et des articles rattachés. Nous essaierons de déterminer la voie la plus sage. Monsieur Thomas, j'ai bien noté votre reproche, qui rejoint d'ailleurs ce que j'avais déjà entendu en séance publique, lorsque la majorité de l'Assemblée s'est prononcée contre l'avis du Gouvernement : il semble paradoxal de vouloir une réforme ample et généreuse de l'apprentissage tout en préconisant une mesure restrictive concernant quelques semaines de contrat de travail sans exonération. Ce n'est pas tant l'argent qui en cause, je l'ai bien compris, que l'ajout de formalités supplémentaires pour les employeurs d'apprentis. En ce qui concerne le mécanisme de crédit d'impôt, évoqué par Mme Jacquaint et M. Christian Paul, je souhaite dissiper quelques malentendus, apporter quelques éléments objectifs d'information et rappeler la stratégie du Gouvernement dans cette réforme de l'apprentissage. Les malentendus sont de deux ordres. Premièrement, monsieur Paul, vous avez parlé du rôle des régions dans la rémunération des apprentis. Mais nous ne modifions en rien le code du travail : le contrat d'apprentissage reste un contrat de travail ; la rémunération de l'apprenti est versée par l'employeur, et non pas par la région. Quant aux « à-côtés » du salaire, si une institution les prend en charge, c'est bien l'État, puisque c'est lui qui paye les exonérations de charges sociales. La région n'interviendra donc en aucune manière dans la rémunération des apprentis, je m'y engage. Le deuxième malentendu concerne l'augmentation du salaire des apprentis en première année. Aujourd'hui, il équivaut à 25 % du SMIC, ce qui est déraisonnable. Nous souhaitons donc qu'il rejoigne la fourchette de rémunération du contrat de professionnalisation, c'est-à-dire qu'il passe au-dessus des 50 % du SMIC. Qui supportera cet effort ? D'une part, l'employeur, à travers le versement du salaire brut et, d'autre part, l'État, à travers le versement des cotisations patronales. Les régions ne sont donc pas non plus concernées par cette augmentation salariale annoncée pour le premier semestre de 2005. L'effort est partagé entre l'État et les entreprises. C'est d'ailleurs cet effort qui conduit au crédit d'impôt. L'objectif de ce dernier, madame Jacquaint, est double. D'abord, il représente une compensation pour les entreprises, qui vont devoir assumer cette augmentation salariale. Ensuite, il incite les employeurs à prendre des mesures destinées à mieux accueillir l'apprenti. Il peut s'agir, par exemple, de mieux indemniser le maître d'apprentissage, de recourir, aux côtés de ce dernier, aux services d'un tuteur, ou de payer à l'apprenti un salaire supérieur au minimum légal. J'ai même vu des entreprises recourir aux services de cabinets spécialisés dans la formation professionnelle lorsque l'apprenti connaissait des difficultés - handicap ou retard scolaire. Aucune de ces initiatives n'est parfaite, mais toutes ont un coût pour l'employeur, que le crédit d'impôt vient compenser. Il s'agit donc d'aider l'employeur à assumer les charges induites par l'augmentation de la rémunération des jeunes apprentis et par notre exigence accrue en termes de qualité des maîtres d'apprentissage. J'en viens aux contrats qui vont lier l'État, les régions et les CFA, afin de permettre à ces derniers de bénéficier de 200 millions d'euros de crédits supplémentaires de la part du Fonds national de développement et de modernisation de l'apprentissage. Le versement de cet argent est subordonné à la signature d'une charte de qualité, articulée autour de cinq engagements clairs, le premier étant la réduction du taux de rupture. Le mécanisme est simple. Le CFA a la charge de mettre en place, à l'intérieur du centre et dans l'entreprise, un tutorat pour le jeune apprenti. Il doit également rendre compte de la baisse du taux de rupture. S'il a connaissance de maîtres d'apprentissage ou d'employeurs indélicats, il lui incombe de saisir la direction départementale du travail, qui a autorité pour mettre fin à ces mauvaises pratiques. Nous prévoyons donc simplement l'application de la loi, une application rendue plus zélée par l'incitation financière. En ce qui concerne les effets d'aubaine, je remarque que l'entreprise doit accueillir l'apprenti depuis au moins six mois pour se voir ouvrir le droit au crédit d'impôt. Or nous savons que les ruptures interviennent généralement dans les six premiers mois. En tout état de cause, pour être efficace, la mesure doit être simple : multiplier les conditions nuirait à sa lisibilité. Nous souhaitons que tous les employeurs sachent que ce crédit d'impôt de 1 600 euros leur est ouvert. Vous m'avez interrogé, madame la rapporteure, sur le mécanisme de compensation. Vous avez fourni vous-même le premier élément de réponse : l'État prend toutes les précautions pour que les entreprises, à l'échelle microéconomique, puissent trouver une compensation à l'augmentation de la taxe d'apprentissage par le biais de la contribution régionale au développement de l'apprentissage - qui représente 0,06 % de la masse salariale. Premièrement, nous avons prévu une mise en œuvre de la mesure sur trois ans, ce qui permettra de faire monter en puissance l'appareil de formation et d'apporter des réponses aux entreprises dans des branches où l'apprentissage serait insuffisamment développé. Deuxièmement, l'État met de l'argent sur la table, les 200 millions d'euros du Fonds national de développement et de modernisation de l'apprentissage, ce qui revient à cofinancer cette montée en puissance. Enfin, la compensation prévue excède les dépenses des entreprises. En 2005, le système du crédit d'impôt apportera à ces dernières près 150 millions d'euros, compte tenu de la surcharge représentée par la contribution régionale au développement de l'apprentissage, soit un tiers de plus que le montant de cette charge, que nous faisons donc plus que compenser. Je vous en prie, monsieur Paul, pas de confusion : les régions ne paieront jamais un euro du salaire des apprentis, ni avant notre réforme, ni après. De ce point de vue, vous pouvez être tranquille. En ce qui concerne la loyauté financière dont l'État fait preuve à leur endroit, je vous répondrai lorsque nous examinerons l'article 16, qui porte sur les conventions d'objectifs et de moyens. Bien entendu, le Gouvernement est défavorable aux amendements de suppression. M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec. M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Notre demande de suppression de l'article a deux motivations : la contradiction dont fait preuve le Gouvernement et le choix du crédit d'impôt. Mes collègues ont montré ce qu'il y avait de contradictoire à vouloir, par des avantages financiers, inciter les entreprises à développer l'apprentissage, alors que l'objectif affiché du Gouvernement - et que nous ne contestons pas - est de montrer à ces entreprises, en particulier dans les branches où on n'y a pas recours, combien l'apprentissage est utile pour satisfaire, à long terme, les besoins en main-d'œuvre et en qualification. Cette incitation fiscale est critiquable - et elle a été critiquée, notamment au Sénat -, parce que les entreprises ont la capacité de prendre en charge tous les aspects du développement de l'apprentissage. En second lieu, il y a la technique du crédit d'impôt. Cette technique, on la connaît : c'est un instrument dont le Gouvernement use depuis plusieurs années, mais il le fait depuis quelque mois de manière surabondante. Ainsi, le prêt à taux zéro, que nous avons évoqué dans le cadre du projet de loi de finances, se présente sous la même forme. L'intérêt du crédit d'impôt est de reporter au moins un an plus tard l'effort de l'État. Il s'agit d'une technique de régulation budgétaire. On ne peut reprocher au Gouvernement de s'en servir, mais cela n'équivaut pas à participer concrètement au soutien de l'apprentissage. Enfin, chaque centime d'euro sollicité est une charge pour les entreprises et, comme tel, peut être déduit. Les entreprises peuvent donc raisonner uniquement en termes financiers, indépendamment de l'intérêt qu'elles éprouvent à l'égard de l'apprentissage et de la qualité de leur engagement en sa faveur. M. le président. La parole est à M. Denis Jacquat. M. Denis Jacquat. Depuis hier, nous entendons souvent dire avec raison dans cet hémicycle qu'il faut redonner toutes ses lettres de noblesse à l'apprentissage. Mais tel est précisément l'objectif de l'article 15. Il s'agit, comme cela a été souligné, d'instituer un crédit d'impôt pour les entreprises employant des apprentis. Nombre de jeunes voulant un emploi qualifié le plus rapidement possible, l'apprentissage constitue la meilleure des voies pour eux. Comme vient de le préciser Laurent Hénart, il y a quelques instants, pour les employeurs, former un apprenti demande du temps, de la patience et cela a un coût. Aussi, la création de postes d'apprentis exige-t-elle simplification des procédures et incitation fiscale. On le constate très souvent lorsque nous sommes invités par des organismes professionnels, quel que soit le type d'entreprises, le patron sera d'accord pour former un apprenti si la procédure est simple. Édouard Jacque et moi-même, tous deux élus d'une région frontalière, pouvons témoigner que les entreprises allemandes ou luxembourgeoises embauchent nos apprentis, ce qui prouve la qualité de l'apprentissage dans notre pays. Sans doute le constatez-vous aussi, monsieur le ministre, à Valenciennes. J'ai tout à l'heure entendu dire que l'article 15 n'avait pas sa place dans ce texte. Au contraire ! L'emploi des jeunes est partie intégrante de la cohésion sociale. Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Très bien ! M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 228 et 583. (Ces amendements ne sont pas adoptés.) M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, n°s 103 et 634. La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement n° 103. Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Je laisse le soin à M. Thomas de défendre les deux amendements. M. le président. Vous avez la parole, monsieur Rodolphe Thomas. M. Rodolphe Thomas. Ces amendements ont été examinés et adoptés par la commission et j'en remercie Mme la rapporteure. Ils concernent les jeunes qui suivent un parcours d'accompagnement personnalisé. Le taux de chômage des jeunes, notamment des moins qualifiés, s'est accru. Plus difficile que par le passé, leur insertion professionnelle s'effectue au prix d'une précarité croissante. Au travers de ces chiffres, nous ne pouvons que constater régulièrement l'échec des politiques visant à l'intégration professionnelle des jeunes peu ou non qualifiés. Utilisons donc enfin des moyens d'intégration plus efficaces. Je pense ici, bien sûr, à la filière de l'apprentissage, fondement même de l'insertion sociale et professionnelle. Le taux d'insertion dans l'entreprise est supérieur de 80 % à celui de la filière générale. Donc, le projet de cohésion sociale prévoit, dans son article 15, un crédit d'impôt de 2 200 euros pour l'embauche d'un apprenti bénéficiant de l'accompagnement personnalisé. Notre amendement le porte à 3 200 euros pour encourager davantage les entreprises qui font l'effort de s'inscrire dans une démarche citoyenne en embauchant des jeunes de seize à vingt-cinq ans totalement exclus de tout parcours de formation scolaire et qui, dès le départ, sont dépourvus des bases initiales essentielles à toute insertion. Un net effort est donc accompli en direction de tous ces jeunes, confrontés souvent depuis de nombreuses années à un risque d'exclusion professionnelle. Donnons donc les moyens aux entreprises qui les soutiennent. M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes. Le Gouvernement comprend tout à fait le souci qui inspire ces amendements et y souscrit puisqu'il a porté lui-même le crédit d'impôt de 1 600 euros, crédit d'impôt de droit commun, à 2 200 euros pour l'embauche d'un jeune bénéficiant de l'action d'accompagnement personnalisé. Le porter à 3 200 euros pose un problème. En effet, ce crédit d'impôt ne serait plus justifiable, compte tenu de la prime accordée aux employeurs par les régions. L'employeur recevrait, alors, une somme d'argent supérieure au salaire de l'apprenti. Mme Muguette Jacquaint. Exactement ! M. le secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes. Un jeune apprenti, en première année, reçoit un salaire net payé par l'employeur, après exonérations de charges, de l'ordre de 3 600 euros et la prime moyenne octroyée par la région à l'employeur s'élève à 2 000 euros. Y ajouter les 3 200 euros, serait permettre à l'employeur d'encaisser 5 200 euros de fonds publics. Mme Muguette Jacquaint. Eh oui ! M. le secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes. Je vous demande donc de bien vouloir retirer ces amendements, d'autant plus que l'amendement suivant, qui permet de faire bénéficier l'employeur d'un travailleur handicapé du crédit d'impôt majoré, participe de la même démarche et recevra, lui, le plein assentiment du Gouvernement. M. le président. La parole est à Mme la rapporteure. Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Il vaudrait mieux retirer les amendements identiques. M. Rodolphe Thomas. Je suis d'accord, monsieur le président ! M. le président. Les amendements n°s 103 et 634 sont retirés. Je suis saisi de trois amendements, n°s 104 rectifié, 715 et 517, pouvant être soumis à une discussion commune. La parole est à M. Patrick Beaudouin, pour soutenir l'amendement n° 104 rectifié. M. Patrick Beaudouin. M. Hénart vient de le souligner, cet amendement est extrêmement simple. Outre le plan de cohésion sociale dont nous discutons à l'heure actuelle, nous avons tous à l'esprit le grand chantier du handicap à travers le projet de loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, qui sera examiné en deuxième lecture dans quelques jours. Les membres du groupe de travail sur l'apprentissage, tout comme d'autres élus, ont eu, si je puis m'exprimer ainsi, le « réflexe handicap » et souhaitent, en conséquence, que le texte sur la cohésion sociale porte la marque de ce regard neuf sur le handicap. Elle pourra prendre forme, si ce texte comporte, en matière d'apprentissage, une disposition facilitant la formation en alternance des jeunes handicapés et incitant, naturellement, les entreprises à la favoriser. L'amendement n° 104 rectifié de la commission, cosigné par Jean-Paul Anciaux et par moi-même, tend donc à majorer le crédit d'impôt des entreprises employant un apprenti handicapé. Il s'agit là de la traduction d'une culture et d'une attitude nouvelle à l'égard de la personne handicapée qui fait partie intégrante de notre société. C'est dans cet état d'esprit que s'inscrit également le sous-amendement n° 969 du Gouvernement, qui prévoit d'ouvrir les contrats d'objectifs et de moyens aux personnes handicapées. M. le président. La parole est à M. Rodolphe Thomas, pour soutenir l'amendement n° 715. M. Rodolphe Thomas. L'article 15 institue un crédit d'impôt au bénéfice des entreprises qui emploient des apprentis, un crédit majoré lorsque l'apprenti est un jeune sans qualification faisant l'objet de l'accompagnement renforcé prévu par le nouvel article L. 322-4-17-1 du code du travail. L'apprentissage constitue une voie d'insertion professionnelle par excellence, plus encore pour les personnes handicapées. Il faut noter d'ailleurs que les entreprises artisanales - qui ne sont pas assujetties à l'obligation d'emploi - emploient massivement des personnes handicapées, puisque plus de 120 000 personnes handicapées travaillent dans les établissements de moins de vingt salariés et 228 000 dans les entreprises assujetties à l'obligation d'emploi. Considérant l'importance de la voie de l'apprentissage pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées et afin d'inciter les entreprises à recruter comme apprentis de jeunes handicapés, il est proposé de majorer le crédit d'impôt des entreprises employant des apprentis handicapés. M. le président. La parole est à M. Denis Jacquat, pour soutenir l'amendement n° 517. M. Denis Jacquat. Cet amendement est défendu. M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 715 et 517 ? Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. La commission a adopté l'amendement n° 104 rectifié. M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les trois amendements en discussion ? M. le secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes. Le Gouvernement est favorable à l'amendement de la commission. M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec. M. Jean-Yves Le Bouillonnec. L'objectif des amendements n'est pas contestable, mais nous souhaitons un éclaircissement sur la technique utilisée. J'insiste sur le fait que je ne reviens pas sur l'objectif, qui est clair et partagé. Le dispositif viendra-t-il en sus des dispositifs affectés à la qualité de travailleur handicapé, notamment en cas d'accompagnement ? Si oui, dans quelles conditions seront-ils mis en œuvre ? S'ils cohabitent, n'y aura-t-il pas un risque que l'entreprise ait à opérer un choix purement financier ? M. Denis Jacquat. Mais non ! Mme Hélène Mignon. Mais si ! M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je pose une question ! Vous connaissez les COTOREP ! M. Beaudouin sait que nous sommes attentifs à ces problèmes. N'y a-t-il pas ici cohabitation de deux techniques différentes permettant à l'employeur de choisir en fonction de son propre intérêt qui peut ne pas être celui du jeune handicapé ? Je ne porte ici aucun jugement de valeur, je pose simplement une question. A-t-on bien analysé cet aspect ? Mme Muguette Jacquaint. Reconnaissons qu'il s'agit là de vraies questions, même si nous ne sommes pas opposés au principe ! M. le président. La parole est à M. Denis Jacquat. M. Denis Jacquat. J'avoue être extrêmement surpris par ce que je viens d'entendre. J'ai siégé pendant vingt-trois ans dans une COTOREP. La personne qui aura passé autant d'années que moi dans une telle commission sera en mesure, elle aussi de s'exprimer. M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Ce sont des jugements de valeur ! C'est désagréable ! J'ai posé une question ! Pourquoi, monsieur le président, nous renvoie-t-on à des jugements de valeur dès que l'on pose une question ? M. Denis Jacquat. Monsieur Le Bouillonnec, je tiens seulement à préciser à l'Assemblée qu'un texte doit être transversal. Lorsqu'on connaît les difficultés rencontrées en particulier par les jeunes handicapés pour trouver un emploi, quand on sait les problèmes moraux rencontrés par une famille qui a un enfant handicapé et qui souhaite, en vain, que cet enfant travaille, on ne peut que se réjouir que le Gouvernement, par le biais de ces différents articles, porte un autre regard sur les cinq millions de handicapés que compte notre pays et qui rencontrent beaucoup plus de difficultés que les autres dans la recherche d'un emploi. Je suis persuadé que jamais un chef d'entreprise, quel que soit le type de son entreprise, ne choisira d'embaucher une personne handicapée pour obtenir des avantages financiers ! En effet, comme je l'ai précisé tout à l'heure, former un apprenti prend du temps, et plus encore lorsque celui-ci présente un handicap physique, psychique ou physique et psychique. Je me félicite donc de ces amendements. Continuons à porter ce même regard sur les personnes handicapées ! M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint. Mme Muguette Jacquaint. J'ai participé au débat sur le handicap et je vous rejoins tout à fait, monsieur Jacquat, pour dire que nous devons porter un nouveau regard sur les personnes handicapées. Mais je suis choquée que vous mettiez en cause notre humanisme. M. Denis Jacquat. Je n'ai rien fait de tel ! Mme Muguette Jacquaint. Nous avons tout de même le droit de poser quelques questions ! M. Denis Jacquat. Tout à fait ! Mme Muguette Jacquaint. Les personnes handicapées veulent vivre dignement, comme tout le monde, et jouir des mêmes droits à la formation et au travail. Aujourd'hui, des personnes handicapées suivent une formation. Elles sont parfois même très qualifiées. Or les entreprises ne font pas toujours preuve de la citoyenneté et de l'humanisme dont vous parlez, monsieur Jacquat ! M. Denis Jacquat. C'est vrai ! Mme Muguette Jacquaint. Je souscris à ces amendements. Le crédit d'impôt est tout de même important, mais tout n'est pas aussi angélique que vous le prétendez ! Nous avons donc le droit de poser des questions pour obtenir des garanties. M. le président. La parole est à M. Denis Jacquat. M. Denis Jacquat. Je suis entièrement d'accord avec vous, madame Jacquaint. C'est à nous d'inciter à la citoyenneté les entreprises que vous avez dénoncées. M. le président. Si j'ai bien compris, monsieur le secrétaire d'État, le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 104 rectifié de la commission. Levez-vous le gage ? M. le secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes. Bien sûr, monsieur le président. Nous avons étudié la situation, monsieur Le Bouillonnec, et aucun arbitrage délicat ne semble à redouter. C'est un crédit d'impôt qui est prévu alors que, pour l'emploi de travailleurs handicapés, le système se fonde sur des pénalités financières. En ce qui concerne l'accompagnement, le réseau des missions locales est déjà conventionné avec le réseau d'accompagnement des travailleurs handicapés. L'initiative parlementaire dont nous discutons est donc la bienvenue. M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 104 rectifié, compte tenu de la suppression du gage. (L'amendement, ainsi modifié, est adopté.) M. le président. En conséquence, les amendements nos 715 et 517 n'ont plus d'objet. Je suis saisi d'un amendement n° 105. La parole est à Mme la rapporteure, pour le défendre. Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Il s'agit d'un amendement rédactionnel. M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes. Favorable. M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 105. (L'amendement est adopté.) M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 557. La parole est à M. Bertho Audifax, pour le soutenir. M. Bertho Audifax. Je partage l'analyse de M. Jacquat : l'apprentissage est important pour la cohésion sociale. À la Réunion, le taux de chômage des jeunes est très élevé. Il est plus difficile pour une entreprise d'embaucher un jeune de plus de vingt et un ans qu'un jeune de moins de vingt et un ans. Cet amendement propose d'assimiler le public des jeunes de plus de vingt et un ans, dans les régions où le taux de chômage des jeunes dépasse 25 %, à celui qui doit bénéficier de l'accompagnement personnalisé, et de porter le crédit d'impôt pour cette tranche d'âge à 2 200 euros au lieu de 1 600 euros. On sait en effet que, dans ces régions où il y a un très fort chômage des jeunes, le nombre d'entreprises est très faible. Il s'agit donc de compenser ces deux handicaps. M. Denis Jacquat. Très bien ! M. le président. Quel est l'avis de la commission ? Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Il nous paraît préférable de retenir comme critère les publics plutôt que les zones géographiques. Nous sommes décidés, monsieur Audifax, à aider les territoires d'outre-mer en fonction de leurs spécificités, mais la commission, eu égard à la portée globale de la loi, était dans l'obligation de rejeter cet amendement. M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes. Défavorable. M. le président. La parole est à Mme Hélène Mignon. Mme Hélène Mignon. Qu'il y ait le plus possible de jeunes en contrat d'apprentissage, c'est une bonne chose pour les jeunes et pour l'artisanat et le commerce. S'ils ont de grandes difficultés, monsieur le secrétaire d'État, pourra-t-on faire appel au référent de la mission locale ? M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale. Très bonne question ! M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État. M. le secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes. Si l'entreprise bénéficie du crédit d'impôt majoré de 2 200 euros, c'est que le jeune a signé un contrat d'insertion dans la vie sociale, un CIVIS. Il sera donc accompagné par un référent, mission locale ou PAIO. Les deux programmes peuvent bien sûr se superposer. M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 557. (L'amendement est adopté.) M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 633. La parole est à M. Rodolphe Thomas, pour le défendre. M. Rodolphe Thomas. Cet amendement prévoit un dispositif analogue à celui de M. Audifax, mais en faveur des quartiers défavorisés. Dans les zones urbaines sensibles, vous le savez, le taux de chômage des jeunes est passé en quinze ans de 28 à 50 %. Il s'agit ici d'inciter les entreprises à embaucher des jeunes exclus de tout dispositif d'insertion. Comme l'a rappelé M. Borloo l'année dernière dans le cadre du projet de loi sur la ville et la rénovation urbaine, il faut mettre l'accent sur les quartiers défavorisés. Cet amendement doit permettre de donner une priorité à tous ces jeunes qui vivent dans un quartier très difficile ou une zone urbaine sensible. M. le président. Quel est l'avis de la commission ? Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Cet amendement a été rejeté par la commission, pour les mêmes raisons que pour le précédent. M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes. Pour les jeunes des zones urbaines sensibles qui ont des difficultés à trouver un emploi, il est déjà prévu un accompagnement par la mission locale et un crédit d'impôt majoré. Ils sont donc aidés. Si on allait plus loin, on multiplierait les niches fiscales au risque de rendre la loi incohérente, voire injuste. Mme Hélène Mignon. Nous sommes d'accord ! M. le secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes. Je souhaite donc, monsieur Thomas, que vous retiriez votre amendement. M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint. Mme Muguette Jacquaint. Je suis moi aussi l'élue d'une zone où les jeunes ont des difficultés à trouver un emploi. Ce n'est pas seulement parce qu'ils n'ont pas de formation. Pour un grand nombre d'entre eux, il suffit qu'ils disent leur nom ou la ville d'où ils viennent, qui n'a pas très bonne réputation, et c'est le barrage systématique à l'embauche. Il serait tout de même injuste d'accorder un crédit d'impôt à ceux-là mêmes qui refusent de faire l'effort d'embaucher ces jeunes. Vous savez déjà ce que l'on pense du crédit d'impôt. Là, ce serait tout de même pousser le bouchon un peu loin. De plus, dans les ZUS, il y a parfois des zones franches, et les entreprises qui s'y installent ont déjà quelques avantages qui ne sont pas négligeables. Pour toutes ces raisons, je m'oppose à l'amendement. M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 633. (L'amendement n'est pas adopté.) M. le président. Je mets aux voix l'article 15, modifié par les amendements adoptés. (L'article 15, ainsi modifié, est adopté.) M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 229 et 757, tendant à supprimer l'article 16. La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour défendre l'amendement n° 229. Mme Muguette Jacquaint. L'article 16 offre aux acteurs de l'apprentissage la faculté de signer des contrats d'objectifs et de moyens. Il existe pourtant de très nombreuses conventions, plans, programmes ou schémas établissant un partenariat entre les pouvoirs publics et les partenaires sociaux : le contrat de plan, établi pour sept ans entre l'État et la région pour organiser les cofinancements sur les programmes d'intérêt commun ; le contrat d'objectifs de développement coordonné des différentes voies de formation professionnelle initiale et continue ; le plan régional de développement des formations professionnelles ; le programme régional d'apprentissage ; les schémas régionaux, qui portent sur une filière, comme l'apprentissage ; les conventions d'application du plan. Le présent article prévoit d'ajouter une nouvelle convention à cette liste bien longue, avec les mêmes objectifs que ceux qui existent déjà et en associant les mêmes acteurs. Combinée à la régionalisation, la politique contractuelle doit réussir là où les modes de gestion traditionnels ont plus ou moins échoué. Par le dialogue, la transparence qu'elle donne aux procédures et la dynamique qu'elle suscite, elle est conçue comme un véritable instrument de pilotage mis au service d'une exigence accrue de qualité et d'efficience de l'apprentissage. Mais où est l'échec de la politique contractuelle déjà en place ? Il n'y a aucune raison de créer un dispositif supplémentaire et facultatif de contractualisation, de complexifier encore un peu plus le système. Voilà pourquoi nous avons déposé cet amendement de suppression. M. le président. La parole est à M. Christian Paul, pour défendre l'amendement n° 757. M. Christian Paul. Si nous proposons de supprimer l'article 16, c'est d'abord, monsieur le secrétaire d'État, pour ouvrir le débat sur le rôle que vous entendez faire jouer aux régions dans le domaine de la formation professionnelle et notamment de l'apprentissage. Selon l'article 8 de la loi sur les responsabilités locales votée il y a quelques mois, la région définit et met en œuvre la politique régionale d'apprentissage et de formation professionnelle des jeunes et des adultes à la recherche d'un emploi ou d'une nouvelle orientation professionnelle. C'est donc aux régions que vous-même et votre majorité avez souhaité transférer le pilotage de la politique de formation professionnelle mais aussi d'apprentissage. J'aimerais que vous nous disiez ce que vous attendez d'elles. Le programme régional de développement des formations, le PRDF, vous paraît-il totalement inopérant ? Au fond, en inventant un nouveau mode de contractualisation, n'êtes-vous pas en train de confirmer la fin des contrats de plan entre l'État et les régions ? Nous avons aujourd'hui des programmes régionaux qui permettent à la région de jouer un rôle prééminent en matière de formation professionnelle, et des contrats de plan État-région, qui permettent, là où l'État le juge utile et la région le souhaite, de renforcer l'action publique. Nous souhaitons connaître votre position. Les dotations de décentralisation en matière d'apprentissage ne paraissent pas préservées puisqu'elles ne sont nullement indexées sur le nombre d'apprentis. Leur évolution n'est donc pas garantie. Bref, il y a de nombreuses incertitudes et inquiétudes, et l'article 16 est plutôt de nature à en ajouter. M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements de suppression ? Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. La commission a émis un avis défavorable. J'aurai l'occasion de revenir sur cette question lorsque je présenterai l'amendement n° 106 rectifié qui propose une nouvelle rédaction de l'article 16. M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes. Défavorable. M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 229 et 757. (Ces amendements ne sont pas adoptés.) M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 106 rectifié, qui fait l'objet du sous-amendement n° 969. La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement n° 106 rectifié. Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Cet amendement vise à rétablir l'outil que constituent les contrats d'objectifs et de moyens. Le Sénat les avait supprimés au profit des contrats déjà existants. La relance de l'apprentissage exige, pour aller suffisamment vite, un outil spécifique, sinon nous allons traîner. Or il y a urgence. Pour faire droit au souci du Sénat, nous proposons que ces nouveaux contrats puissent prendre la forme d'une annexe aux contrats déjà existants. Par ailleurs, cet amendement assigne un nouvel objectif aux contrats d'objectifs et de moyens : la promotion du soutien à l'initiative pédagogique, objectif qui figurait déjà dans l'exposé des motifs du projet. La commission n'a pu, comme elle le souhaitait initialement, y ajouter l'objectif de développement de l'accès des jeunes handicapés à l'apprentissage, pour des raisons liées aux impératifs de recevabilité financière. Peut-être puis-je déjà dire que je suis, à titre personnel, favorable au sous-amendement que va présenter en ce sens le Gouvernement et qui est conforme aux nombreuses mesures adoptées sur cette même question aux articles précédents. M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 106 rectifié et soutenir le sous-amendement n° 969. M. le secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes. Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 106 rectifié, complété par le sous-amendement n° 969. Ce sous-amendement vise, en cohérence avec les débats que nous avons eus jusqu'à maintenant, à ce que l'accueil des personnes handicapées dans les dispositifs d'apprentissage fasse partie des priorités des conventions d'objectifs et de moyens. M. Denis Jacquat. Parfait ! M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement ? Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Favorable. M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 969. (Le sous-amendement est adopté.) M. le président. La parole est à M. Christian Paul. M. Christian Paul. Je souhaiterais obtenir quelques éclaircissements sur le rôle que la loi entend confier aux régions dans le domaine de l'apprentissage. Quelle est, monsieur le secrétaire d'État, votre doctrine, puisque visiblement l'État entend, après la loi de décentralisation, intervenir à nouveau dans ce domaine ? Par ailleurs - et cette question s'adresse également à Mme la rapporteure - l'amendement de la commission implique-t-il que l'État entende le cas échéant contracter avec des chambres consulaires ou avec des organismes de formation, sans que le conseil régional concerné soit partie prenante ? Le fera-t-il parfois contre l'avis des régions ? M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État. M. le secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes. Monsieur Christian Paul, l'essentiel de l'apprentissage a été confié aux régions par les lois de décentralisation de 1982 et de 1983. Depuis cette date, le système de la compensation globale et forfaitaire s'applique, que ni vous, ni nous n'avons modifié. De la même façon que l'on ne compense pas les charges relatives aux lycées en fonction du nombre de lycéens, on ne compense pas les CFA et la compétence d'apprentissage en fonction du nombre d'apprentis. Pourtant, en 1992, 1993 et 1994, ce nombre a varié de façon très sensible. C'était un rappel et j'essaye de vous répondre de manière non polémique. L'article 20 de la loi de finances pour 2005 améliore la compensation de l'apprentissage - ce sera mon deuxième élément de réponse. Depuis 1982-1983, l'apprentissage était compensé par une dotation inscrite dans le budget de l'État, qui augmentait de 2 % par an en moyenne. À la place, l'État propose de créer une contribution pour le développement de l'apprentissage, additionnelle à la taxe d'apprentissage, le fameux 0,06 % que mentionnait M. Thomas à l'article précédent. Cette contribution, intégralement affectée aux régions, se substituera à la dotation d'État. En cela, nous respectons le principe d'autonomie financière des collectivités locales, en essayant de compenser les compétences centralisées par des recettes fiscales affectées, plutôt que par des subventions d'État. J'attire votre attention sur le fait que la contribution, étant assise sur la masse salariale, augmentera d'environ 5 % par an, contre 2 % dans le budget précédent. Nous compensons les régions par une nouvelle ressource plus dynamique. Troisième élément, le fonds national de modernisation de l'apprentissage et les conventions d'objectifs et de moyens : il s'agit de respecter les lois qui, depuis 1982 et 1983, ont établi une compétence pleine et entière aux régions en matière d'apprentissage. L'État n'a pas vocation à remplacer les régions, et il ne souhaite pas le faire. En revanche, il souhaite que celles qui décident de se mobiliser soient accompagnées et que leurs efforts soient cofinancés. Le fonds national de modernisation de l'apprentissage, qui se montera à 215 millions d'euros en année pleine, abondera les moyens des régions pour les actions allant dans le sens des différents objectifs mentionnés dans l'amendement de la commission. Quant aux conventions, elles sont bien sûr passées avec les régions. Il ne faut pas inverser l'ordre des choses : il ne s'agit pas de faire des conventions avec les organismes consulaires ou les branches professionnelles, mais avant tout de faire des conventions État-régions, spécifiquement dédiées à l'apprentissage, pour la durée du plan de cohésion sociale. Il s'agit de mettre en œuvre ce plan, en partenariat avec les régions. Qui dit convention, dit forcément accord. M. Christian Paul. Pas de convention directe ? M. le secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes. Non, pas de convention directe. En revanche, et l'Association des régions de France ne s'y est pas opposée, bien au contraire, nous souhaitons que les gestionnaires des centres de formation d'apprentis puissent aussi être signataires de ces conventions État-régions. L'État l'est pour les CFA-éducation nationale ; les chambres de métiers, les chambres de commerce et les branches professionnelles le seront pour les CFA qu'elles gèrent. Telle est l'économie générale du dispositif. Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Très bien ! M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec. M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Monsieur le secrétaire d'État, vous avez expliqué au Sénat pourquoi le fonds de modernisation est aujourd'hui présenté par voie d'amendement. Je ne suis pas sûr d'avoir bien compris le rapport avec le Trésor public. M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État. M. le secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes. Le fonds national de modernisation de l'apprentissage est alimenté par une ponction sur la taxe d'apprentissage, correspondant aux exonérations que la loi supprime. Vous avez voté hier soir la suppression de certaines exonérations. S'y ajoute - et c'est là qu'entre en jeu la technique budgétaire - les surplus de taxe d'apprentissage qui, faute d'affectation, iraient au Trésor public. Il ne nous aurait pas paru normal que l'État garde cette part de la taxe d'apprentissage. Elle est donc affectée à un tiers, en l'occurrence les régions. M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je vous remercie. M. Christian Paul. Monsieur le président, je souhaiterais poser une autre question. M. le président. Non, nous sommes en train de voter. J'ai déjà été très libéral. Je vous propose d'en terminer avec cette discussion. Je mets aux voix l'amendement n° 106 rectifié, modifié par le sous-amendement n° 969. (L'amendement, ainsi modifié, est adopté.) M. le président. En conséquence, l'article 16 est ainsi rédigé. Les amendements n°s 558, 716 et 559 n'ont plus d'objet. La parole est à M. Christian Paul. M. Christian Paul. Monsieur le président, je demande, au nom du groupe socialiste, une suspension de séance. Suspension et reprise de la séance M. le président. La séance est suspendue. (La séance, suspendue à dix-sept heures vingt-cinq, est reprise à dix-sept heures trente.) M. le président. La séance est reprise. M. le président. Je suis saisi d'un amendement, n° 271, portant article additionnel après l'article 16. La parole est à M. Denis Jacquat, pour soutenir cet amendement. M. Denis Jacquat. Cet amendement, que Georges Colombier m'a demandé de soutenir, institue un plafond de taxe d'apprentissage par apprenti. La taxe d'apprentissage est la première ressource financière des centres de formation d'apprentis. Or force est de constater qu'il existe aujourd'hui une grande disparité s'agissant de sa répartition : les CFA en relation étroite avec certaines branches professionnelles ou avec certaines chambres consulaires perçoivent des sommes importantes par apprenti tandis que les CFA qui relèvent de l'interprofessionnel, du secteur public ou des associations perçoivent des montants beaucoup plus modestes. Le niveau de ce plafond de taxe d'apprentissage par apprenti serait fixé par un décret. Les sommes reçues en excédent serviraient à alimenter le fonds de modernisation et de développement de l'apprentissage créé par la présente loi. M. le président. Quel est l'avis de la commission ? Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Cet amendement a été repoussé par la commission. L'article L.118-2-3 du code du travail prévoit déjà un système de redistribution. En outre, les ressources annuelles des CFA sont plafonnées en fonction du nombre d'apprentis. Je comprends le souci d'évaluer précisément les coûts, année par année, et d'avoir une bonne lisibilité du système de redistribution. Toutefois, si le dispositif que je viens de mentionner n'a pas encore pu fonctionner, il devrait être opérationnel d'ici à la fin de l'année. En effet, il fallait auparavant mettre en place dans les régions une comptabilité analytique pour évaluer les coûts de formation. Celle-ci est aujourd'hui en place. Au 31 décembre 2004, ces coûts seront connus, ils seront rendus publics et le système de redistribution pourra alors être appliqué, je pense, dès l'année prochaine. M. Christian Paul. Monsieur le président, puis-je avoir la parole ? M. le président. Monsieur Paul, le règlement stipule que, lorsqu'un amendement a été défendu, le président demande l'avis de la commission, puis l'avis du Gouvernement. Ce n'est qu'après qu'un autre orateur peut intervenir. M. Denis Jacquat. Très bien ! M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 271 ? M. le secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes. À la lumière des explications de Mme la rapporteur, le Gouvernement souhaite que cet amendement soit retiré. À défaut, il émettra un avis défavorable. M. le président. La parole est à M. Christian Paul. M. Christian Paul. C'était sur ce sujet de la péréquation - parce que, au fond, c'est la question que pose notre collègue de l'UMP - que je souhaitais interroger le Gouvernement tout à l'heure. M. le président. Cela justifie que je vous aie demandé de faire preuve d'un peu de patience. M. Christian Paul. Le groupe socialiste a profité de la suspension pour procéder à quelques recherches documentaires. Monsieur le ministre, vous avez déclaré au Sénat que le fonds de modernisation comprendrait deux sections, dont l'une, la section de péréquation, existe déjà. Le sujet n'est pas mineur car cela concerne le rôle des régions, avec des disparités interrégionales fortes du fait du mode de perception de la taxe d'apprentissage. Nous aimerions savoir plus précisément comment le Gouvernement entend opérer cette péréquation pour l'avenir ? Il y va de sa crédibilité. M. le président. La parole est à M. Denis Jacquat. M. Denis Jacquat. Mme la rapporteur et M. le secrétaire d'État ont été très clairs dans leurs explications. Au nom de Georges Colombier, je retire l'amendement. M. le président. L'amendement n° 271 est retiré. La parole est à M. le secrétaire d'État. M. le secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes. Je ne peux guère vous en dire plus qu'au Sénat, monsieur Paul. M. Christian Paul. Dommage ! M. le secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes. D'abord, je vous rappelle que l'actuel fonds de péréquation va devenir une section du nouveau fonds de modernisation, en conservant le même montant de 150 millions d'euros. Le Gouvernement a pris sur ce point des engagements clairs avec l'Association des régions de France. Ensuite, nous allons engager avec l'Association des régions de France, à sa demande, une discussion pour revoir les critères de mobilisation de ce fonds de péréquation. Mais, pour que le débat se déroule dans la transparence, nous avons présenté au Sénat, qui l'a adopté à l'unanimité, un amendement qui permettra de retracer, en annexe des comptes administratifs des régions, l'ensemble des fonds mobilisés pour l'apprentissage. Cet amendement a d'ailleurs été sous-amendé par le sénateur Mélenchon. Bref, le cadre est le suivant : nous sanctuarisons les 150 millions d'euros pour la péréquation, nous introduisons de la transparence dans les budgets régionaux pour connaître les mouvements de fonds consacrés à l'apprentissage et, si nous le pouvons, nous améliorerons, en concertation avec l'Association des régions de France, les critères préétablis. M. le président. Sur l'article 16 bis, je suis saisi d'un amendement n° 875. La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir cet amendement. Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Il s'agit d'un amendement rédactionnel. M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes. Favorable. M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 875. (L'amendement est adopté.) M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 876. La parole est à Mme la rapporteure, pour le défendre. Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Il s'agit d'un autre amendement rédactionnel. M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes. Favorable. M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 876. (L'amendement est adopté.) M. le président. Je mets aux voix l'article 16 bis, modifié par les amendements adoptés. (L'article 16 bis, ainsi modifié, est adopté.) M. le président. Je suis saisi d'un amendement, n° 230, portant article additionnel après l'article 16 bis. La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour soutenir cet amendement. Mme Muguette Jacquaint. Madame la rapporteure, si l'on crée des centres de formation d'apprentis pour faire face à la croissance escomptée du nombre des contrats passés, il importe selon nous que ces centres soient gérés, compte tenu de la diversité des sources de financement mobilisées, par un conseil d'administration représentatif tant des salariés apprentis que des financeurs, comme c'est en général le cas dans les conseils d'administration. Si les régions sont parties prenantes du financement des CFA, il nous semble naturel qu'elles soient représentées au sein des conseils d'administration et non pas cantonnées à une fonction de contrôle a posteriori de la situation financière de ces centres. Le contrôle financier par un conseiller régional permettrait d'ailleurs d'éviter certaines dérives - n'oublions pas qu'il s'agit d'argent public. La convention créant les CFA doit comporter des dispositions en ce sens. Tel est l'objet de l'amendement n° 230. M. le président. Quel est l'avis de la commission ? Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Les centres de formations d'apprentis disposent déjà, madame Jacquaint, de conseils de perfectionnement. En outre, dans la convention portant création d'un centre de formation d'apprentis, les modalités d'organisation administrative, financière et pédagogique sont fixées. Enfin, il est déjà précisé par décret que chaque centre de formation d'apprentis doit constituer une unité administrative et pédagogique indépendante, dotée d'un conseil d'administration et d'une instance délibérante. Se fondant sur ces trois points, la commission a estimé que cet amendement était inutile et l'a rejeté. M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes. Défavorable. M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 230. (L'amendement n'est pas adopté.) M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 107 rectifié. La parole est à Mme la rapporteure, pour le soutenir. Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. L'amendement n° 107 rectifié prévoit la remise tous les ans d'un rapport au Parlement. C'est une nécessité si l'on veut apprécier l'application du vaste dispositif de financement de l'apprentissage qui nous est proposé aujourd'hui. Ce rapport devra être particulièrement détaillé et viser chacun des éléments en cause, tant au plan quantitatif qu'au plan qualitatif : les nouveaux contrats, le fonds de modernisation, l'exonération, les crédits d'impôt, notamment. L'ensemble des membres de la commission souhaitent ces éclaircissements. L'amendement a donc été adopté par la commission. M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes. Favorable. M. le président. La parole est à M. Francis Vercamer. M. Francis Vercamer. Je voulais remercier M. le secrétaire d'État et Mme la rapporteure d'avoir changé d'avis sur l'utilité des rapports. Tous nos amendements dans lesquels nous demandions l'établissement de rapports ont été repoussés hier et avant-hier au prétexte que personne ne les lit. Mais la nuit porte conseil. J'espère que la prochaine fois que nous défendrons un amendement de ce genre, le Gouvernement et Mme la rapporteure le considéreront d'un meilleur œil. (Sourires.) M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État. M. le secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes. Je pense que le rapport en question est particulièrement utile. Tous les sujets dont nous avons discuté - conventions, fonds, conditions de vie des apprentis, amélioration de la qualité pédagogique en CFA, accueil de l'apprenti en entreprise - sont essentiels et nécessitent une évaluation annuelle par le Parlement, surtout de manière transversale, au-delà de ce que permettent déjà les différents rapports budgétaires et la LOLF. Le rapport proposé par Mme la rapporteure a d'ailleurs une large assise et intègre de nombreux sujets sur lesquels le groupe UDF avait demandé des rapports. Il synthétise, avec bonheur, l'ensemble des initiatives du groupe UDF. On ne peut que s'en réjouir. M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 107 rectifié. (L'amendement est adopté.) M. le président. Sur l'article 17, je suis saisi d'un amendement n° 877. La parole est à Mme la rapporteure, pour défendre cet amendement. Mme Françoise de Panafieu, rapporteure. Amendement rédactionnel. M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes. Favorable. M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 877. (L'amendement est adopté.) M. le président. Je mets aux voix l'article 17, modifié par l'amendement n° 877. (L'article 17, ainsi modifié, est adopté.) M. le président. Mes chers collègues, il est presque dix-sept heures quarante-cinq. Comme convenu et comme annoncé, nous allons interrompre nos travaux. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE M. le président. Ce soir, à vingt et une heures, deuxième séance publique : Suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat après déclaration d'urgence, n° 1911, de programmation pour la cohésion sociale : Rapport, n° 1930, de Mme Françoise de Panafieu et M. Dominique Dord, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales ; Avis, n° 1920, de M. Alain Joyandet, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan ; Avis, n° 1928, de M. Georges Mothron, au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. La séance est levée. (La séance est levée à dix-sept heures quarante-cinq.) Le Directeur du service du compte rendu intégral jean pinchot |