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Mme la présidente. La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, portant engagement national pour le logement (nos 2709 rectifié, 2771).
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Piron, premier orateur inscrit dans la discussion générale.
M. Michel Piron. Madame la présidente, mesdames, messieurs, le projet de loi qui nous est soumis se présente comme un complément de la loi d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine et de la loi de cohésion sociale. À vrai dire, ce « complément » a été largement développé par le Sénat, puisqu’il est passé de onze à soixante-trois articles, au risque – et certains s’en sont émus – de perdre en lisibilité politique ce qu’il a incontestablement gagné en précision technique. C’est un vieux débat que celui de la distinction des champs législatif et réglementaire, mais il est plus que jamais d’actualité, et il justifie qu’ici, après avoir rappelé quelques-uns des défis majeurs auxquels nous sommes confrontés, nous nous limitions à évoquer quelques-unes des principales réponses apportées par ce qui doit être notre « engagement national pour le logement ».
Le premier défi est celui du déficit global de logements que nombre d’experts s’accordent à évaluer à près de 400 000 logements fin 2004. Il s’agit donc d’abord – et on n’insistera jamais trop sur ce point – d’une crise de l’offre, qui s’est accentuée notamment entre 1990 et 2003. Son origine est à rechercher, entre autres causes, dans une sous-estimation des besoins nés de l’éclatement des structures familiales, dans un reflux des opérations d’aménagement – alors qu’il y a dix ans environ trois logements sur quatre étaient construits dans le cadre d’une zone d’aménagement concerté, le rapport est tombé à un sur quatre aujourd’hui ; on ne peut pas ne pas faire le lien entre ce reflux et la complexification accrue des procédures –, enfin dans le manque de financements dont souffre le secteur de la construction. C’est d’abord à cet aspect quantitatif de la crise qu’a voulu répondre la loi Robien.
Le second défi est constitué par la structure de ce déficit. C’est dans le secteur du logement à loyers modérés que le manque se fait le plus cruellement sentir : le niveau de la production est tombé à moins de 40 000 logements par an à partir de 1998, quand il en aurait fallu plus de 80 000.
Grâce à la loi du 18 janvier 2005, nous disposons d’outils et de moyens dont l’efficience est désormais attestée : l’année 2005 a vu la construction de 80 000 logements sociaux, soit deux fois plus qu’en 2002, 400 000 mises en chantier, plus de 500 000 permis de construire délivrés. Il faut remonter plus de vingt-cinq ans en arrière pour retrouver des chiffres aussi élevés.
M. Jean-Pierre Brard. C’est de l’archéologie !
M. Michel Piron. Il faudra néanmoins cinq ans de programmation pour résorber les retards considérables accumulés par d’autres – on peut le constater sans qu’il soit besoin, monsieur Brard, de recourir à l’archéologie.
Le troisième défi est celui de la mixité sociale, qui n’est rien de moins qu’un enjeu sociétal. À cet égard, tout ce qui permettra de développer une offre foncière maîtrisée, en incitant les « maires bâtisseurs » à diversifier l’habitat, ne peut qu’être soutenu. C’est précisément le premier problème auquel s’attaque le projet.
Le « paradoxe » de la crise foncière qui frappe notre pays, alors que sa densité est une des plus faibles d’Europe, a été maintes fois évoqué. La libération, selon des tempi variables, de terrains publics mobilisés pour construire quelque 20 000 logements dans les trois ans, constitue déjà un signal fort. Il ne saurait toutefois nous faire oublier la multiplicité des causes qui contribuent à rendre le foncier constructible rare ou indisponible.
Permettez-moi d’insister sur trois d’entre elles : la concentration de la demande dans certaines régions et dans certaines métropoles ; la complexité des textes réglementaires et, ce qui lui est peut-être lié, l’insuffisance des politiques territoriales. Le premier phénomène, commun à la plupart des pays qui nous entourent, justifie incontestablement les mesures spécifiquement dédiées à l’Île-de-France qui devraient peut-être, être étendues aux régions Nord-Pas-de-Calais, Rhône-Alpes et PACA, qui devront, selon de récentes études, connaître les plus grandes tensions à l’horizon 2030. Cela laisse cependant entière la question de l’aménagement du territoire et du rapport étrangement contrasté, voire schizophrénique, de nos sociétés à l’espace.
En ce qui concerne les outils réglementaires, la volonté de faciliter l’adaptation des documents d’urbanisme, de rationaliser l’approche intercommunale des plans locaux de l’habitat, les PLH, de sécuriser les autorisations de construire, constituent un début de réponse au besoin urgent de simplification des procédures à l’intérieur de cadres rénovés. Faut-il rappeler qu’en moins de quinze ans, les délais de réalisation d’opérations concertées sont passés de trois à sept ans, alourdis qu’ils sont par la multiplication constante des contraintes, qui sont, par leur obscurité, autant de gisements de contentieux ?
Ainsi voit-on de plus en plus souvent, par un curieux retournement des principes, nombre d’intérêts particuliers se coaliser pour battre en brèche l’intérêt général exprimé en termes d’utilité publique. Voilà pourquoi nous apprécions particulièrement l’article 3 quater qui, autorisant l’annulation partielle des permis, offre un excellent exemple de ce que permet une hiérarchisation des exigences et des normes. Il m’arrive, mes chers collègues, de me prendre à rêver que d’autres procédures d’urbanisme, telles que les déclarations d’utilité publique, fassent l’objet d’une démarche similaire.
M. Jean-Pierre Brard. Rêvez, rêvez !
M. Michel Piron. Il n’est pas douteux que de telles dispositions favorisent l’implication des acteurs locaux, collectivités et constructeurs divers : de ce point de vue, le chapitre VI du titre Ier mérite une attention toute particulière.
Quant au volet consacré au financement du locatif intermédiaire et à l’accession sociale à la propriété, il prolonge, en le précisant, l’effort déjà considérable consenti par le budget : 6,53 milliards d’euros, soit une progression de 8,35 % à périmètre constant. L’instauration d’un taux réduit de TVA en zones de rénovation urbaine – c’est un immense chantier –, l’élargissement des compétences de l’Agence nationale pour l’amélioration de l’habitat, l’ANAH, la reconfiguration du dispositif « Robien » font partie des nombreuses mesures destinées à mieux orienter l’offre en direction des plus modestes. On me permettra à ce propos de redire l’importance qu’aurait pour de très nombreuses familles le rétablissement du versement de l’APL lorsque son montant mensuel est inférieur à 24 euros.
À cela s’ajoute ce qui relève de l’hébergement d’urgence, à savoir la construction de 5 000 logements et la création de 5 000 places en résidence hôtelière dans les deux ans, ou encore la requalification de l’habitat indigne. Ce sont autant de leviers qui concourront à mettre fin à une situation socialement inacceptable, comme l’a souligné la fondation Abbé Pierre, entre autres, et qui n’est pas économiquement sans danger, ainsi que le relevait le sénateur Marini dans un rapport publié en octobre dernier.
Les résultats d’une telle approche, qui se veut globale, commencent à poindre. Vous me permettrez cependant de rappeler que le succès d’une telle entreprise tient à deux autres conditions.
Premièrement, une politique nationale de l’habitat a besoin de s’appuyer sur des politiques territoriales. Le cadre décentralisé dans lequel elle s’exerce désormais devrait nous amener à repenser le conflit permanent entre la diversité des situations locales et l’unicité des règles, dans une société qui, comme les autres, se complexifie au fur et à mesure de son développement.
Deuxièmement, il faut assumer le temps que nécessite une telle politique. Redisons-le à cette tribune : le temps médiatique de l’annonce peut être le temps de la communication, mais il ne saurait être le temps d’une politique de l’habitat, ni sans doute de quelque politique que ce soit. Tous les élus savent qu’en ce domaine, on doit compter en années. Alors qu’on entrevoit les premiers résultats des mesures prises voilà trois ans, il sera probablement nécessaire de rappeler que ce projet de loi s’inscrit dans la continuité d’une programmation quinquennale que nous avons votée.
M. le ministre Borloo ainsi que le ministre délégué qui était auparavant en charge du logement ont eu le courage de s’engager dans la durée. Cela suffit, me semble-t-il, pour justifier que nous confirmions, avec ce texte, un véritable engagement national pour le logement.
Mme la présidente. Je vous remercie, monsieur Piron, d’avoir respecté votre temps de parole.
La parole est à Mme Annick Lepetit.
Mme Annick Lepetit. Madame la présidente, monsieur le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer, mes chers collègues, le projet de loi que nous examinons aujourd’hui est pour le moins étrange. Annoncé depuis maintenant près de trois ans, il s’est d’abord appelé « Propriété pour tous », puis « Habitat pour tous » et enfin « Engagement national pour le logement ». Ce sont trois ministres du logement successifs qui l’ont annoncé à maintes reprises, changeant son contenu selon les circonstances et promettant toujours plus.
Tout cela aboutit finalement à un texte qui ne répond pas à la crise nationale du logement que subissent beaucoup de nos concitoyens.
Le Gouvernement multiplie les dispositifs fiscaux et les dispositions de soutien à la propriété privée et à l’investissement locatif privé sans aucune contrepartie sociale, alors que la réalité exige en priorité de favoriser le logement social, le seul accessible au plus grand nombre.
Le maintien et la création de dispositifs coûteux et inefficaces, tels le dispositif Robien ou le dispositif Borloo, les atteintes à l’article 55 de la loi SRU, l’affaiblissement de l’État, l’absence de réforme de l’APL, qui trahit le peu de cas que vous faites des locataires, tout cela résume parfaitement l’esprit de ce texte et de la politique, laborieuse et cafouilleuse, menée par votre gouvernement et sa majorité depuis maintenant quatre ans.
M. François Scellier, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan. C’est ce qui s’appelle faire dans la dentelle !
Mme Annick Lepetit. Contrairement à ce que M. Borloo laissait entendre en 2005, vous maintenez le dispositif fiscal « Robien », alors qu’il a favorisé la production de logements privés à loyers souvent très élevés, alors qu’il a contribué à alimenter la flambée des prix et des loyers, alors qu’il génère un véritable effet d’aubaine pour des investisseurs à qui il permet de payer moins d’impôts sans aucune contrepartie sociale. Vous le maintenez alors qu’il coûte très cher à l’État sans répondre aux besoins de nos concitoyens.
M. Jean-Pierre Brard. C’est du masochisme !
Mme Annick Lepetit. En un mot, vous maintenez un dispositif fiscal qui s’est révélé inefficace et dangereux, au lieu de privilégier la réalisation de logements accessibles au plus grand nombre des demandeurs, et de réguler le marché.
Même notre rapporteur Gérard Hamel dénonce les dérives de ce dispositif. Je vous renvoie à la page 152 de son rapport, mes chers collègues : vous y lirez que « dans certaines régions, les constructions réalisées dans le cadre du “ Robien ” se sont avérées inadaptées aux besoins locaux. Certains investisseurs ont raisonné en termes de gain fiscal sans s’intéresser aux caractéristiques du logement. »
Malgré ce constat négatif, vous persistez et signez. Malgré ses dérives et ses effets pervers sur les prix, vous maintenez le « Robien » et vous créez un autre dispositif quasi similaire, également cher et inadapté à la demande : je veux bien sûr parler de l’amortissement « Borloo ». Vous reconnaissez vous-même au passage la piètre qualité du dispositif « Robien », puisque vous déclarez que ce nouveau produit est, lui, social.
M. Jean-Pierre Brard. À ce stade, c’est du masochisme ! Mais il est vrai que M. Borloo commence à être bien amorti !
Mme Annick Lepetit. Mais il semble que la démonstration ne soit pas simple. Aussi, pour le prouver, M. Borloo lui adjoint un adjectif : il devient ainsi le « Borloo populaire ».
M. Jean-Pierre Brard. L’année du soixante-dixième anniversaire du Front populaire !
Mme Annick Lepetit. Mais personne n’est dupe : ce n’est qu’une mascarade pour dissimuler la vérité. Ce dispositif est loin d’être populaire, puisqu’il va permettre de mettre sur le marché des logements dont les loyers de sortie pourront être de 17 % plus chers que les PLI…
M. Gérard Hamel, rapporteur de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire. Vous n’avez pas bien lu le texte !
Mme Annick Lepetit. Je précise qu’il s’agit des prêts locatifs intermédiaires, pour ne pas ajouter encore à la confusion de ce texte.
M. Michel Piron. Il n’y a pas de confusion dans notre esprit !
Mme Annick Lepetit. Vous ne serez pas surpris, mes chers collègues, que nous n’ayons pas la même définition que M. le ministre Borloo de l’adjectif « populaire ».
Cette question sémantique mise à part, le plus grave est que le Gouvernement considère que faire des logements intermédiaires supérieurs, c’est répondre à tous. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Or, vous le savez, les deux tiers des demandeurs de logement entrent dans les plafonds de ressources des prêts locatifs à usage social, les PLUS, et des prêts locatifs aidés d’intégration, les PLAI.
Vous ne vous cantonnez pas à favoriser l’investissement privé sans contrepartie sociale : vous refusez également de faire du logement social sur tout le territoire en remettant en cause l’article 55 de la loi SRU.
M. Rodolphe Thomas. Mais non !
Mme Annick Lepetit. En effet, les députés de la majorité ont à nouveau attaqué l’article 55, par voie d’amendements en commission, en faisant entrer dans le quota de 20 % les logements sociaux ayant fait l’objet d’une opération d’accession à la propriété, c’est-à-dire la vente de HLM.
M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire. Il s’agit d’accession sociale !
Mme Annick Lepetit. Vous faites aussi entrer dans le champ d’application de l’article 55 les logements sociaux qui résultent d’une opération de construction en vue de l’accession sociale à la propriété, c’est-à-dire les constructions neuves comprenant de l’accession sociale à la propriété.
M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. C’est dans la logique de l’article 55 de la loi SRU !
M. Michel Piron. Le mot « accession » n’est pas un gros mot !
Mme Annick Lepetit. Cerise sur le gâteau : vous faites entrer dans le cadre de l’article 55 les aires d’accueil des gens du voyage. À quand les campings ? De qui se moque-t-on ?
Comme vous n’osez pas abaisser légalement le seuil de 20 % de logements sociaux, vous trouvez tous les artifices possibles pour les contourner. La ficelle est énorme ! De surcroît, cela vous permet de justifier ces dispositions en vous faisant passer pour les promoteurs de l’accession sociale à la propriété, dont nous serions les fossoyeurs. Nous sommes favorables à l’accession sociale à la propriété (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire), mais à condition que ce ne soit pas au détriment du logement locatif social.
M. Michel Piron. Dans ce cas, nous sommes d’accord !
Mme Annick Lepetit. Vos amendements prouvent vos intentions : vous voulez surtout que les villes que vous dirigez soient en règle avec la loi sans faire les logements sociaux souhaités et requis. Cette basse manœuvre est tout à fait condamnable.
Il faut avant tout répondre à l’urgence de la situation, mais aussi à ses dérives manifestes. Tout à l’heure, M. Borloo nous a infligé une litanie de chiffres à propos des cinq années du gouvernement Jospin.
M. Michel Piron. C’était un bel exposé, non une « litanie » !
Mme Annick Lepetit. Il faut dire la vérité : depuis 2002 – or en 2002, vous étiez aux affaires –, l’État consacre chaque année moins d’argent à la réalisation de logements sociaux tels que les PLAI et les PLUS.
M. Michel Piron. Ce que vous dites est ahurissant !
Mme Annick Lepetit. Et voilà que des maires se réunissent en un collectif pour refuser d’appliquer la loi !
Les amendements visant à renforcer l’article 55 de la loi SRU que nous avons déposés ont été rejetés en commission. Nous espérons que l’intérêt général l’emportera en séance publique.
M. Jean-Pierre Brard. N’y croyez pas trop : Noël est passé !
Mme Annick Lepetit. Nous demandons aussi la suppression de l’article 9 du projet de loi, qui transfère aux établissements publics de coopération intercommunale, les EPCI, délégataires des aides à la pierre, les modalités d’attribution de logements sociaux aux personnes connaissant des difficultés économiques et sociales. Les règlements départementaux d’attribution de logements sociaux sont ainsi supprimés. Aussi le risque est-il grand que les EPCI ne se tournent vers ceux qui ont le moins besoin d’accompagnement social.
Avec la même logique qui a prévalu à la délégation du contingent préfectoral aux maires ou aux présidents d’EPCI, cet article affaiblit le rôle de l’État, garant de l’intérêt général. C’est pourquoi nous demandons sa suppression, ainsi que celle de l’article 60 de la loi de décentralisation de 2004 qui a délégué le contingent préfectoral aux maires et aux présidents d’EPCI – c’est là une demande constante du groupe socialiste. Dans les deux cas, il s’agit de revenir sur le désengagement de l’État, qui pénalise l’équilibre territorial et la mixité sociale dans les quartiers.
Pour conclure, j’évoquerai la grande absente de ce texte : l’APL, c’est-à-dire les aides au logement. Il est tout de même curieux qu’un projet de loi intitulé « Engagement national pour le logement » ignore totalement ces aides, qui bénéficient pourtant à plus de 6 millions de ménages locataires.
Cela n’a, après tout, rien d’étonnant, puisque depuis 2002 les crédits budgétaires alloués aux aides à la personne diminuent sans cesse. Vous avez d’ailleurs exclu en 2004, par décision gouvernementale, 200 000 bénéficiaires de ces aides. Vous n’avez pas non plus revalorisé les aides et ne les versez plus quand elles sont inférieures à 24 euros par mois, ce qui représente une perte annuelle de 288 euros pour de nombreux ménages – tout cela au moment où les charges et les loyers augmentent rapidement.
Nous avons déposé plusieurs amendements visant à redonner leur vraie valeur aux aides à la personne, c’est-à-dire à rendre les locataires solvables.
Notre amendement visant à supprimer le mois de carence a été voté, il est vrai, en commission. Mais il importe de rappeler, car la presse ne semble pas l’avoir compris, que cet amendement ne devrait pas être examiné en séance, comme celui concernant le versement de l’APL, quel qu’en soit le montant, et cela du fait des règles de recevabilité financière de l’Assemblée. Aussi la décision est-elle entre les mains du Gouvernement, comme l’a d’ailleurs dit M. Borloo le 14 décembre dernier lorsqu’il est venu présenter son projet de loi devant la commission des affaires économiques.
Le Gouvernement va-t-il entériner l’amendement socialiste voté en commission ? Va-t-il annoncer que les aides à la personne seront enfin versées à leurs bénéficiaires quel qu’en soit le montant ? Va-t-il abaisser le seuil de non-versement à 15 euros au lieu de 24 ? C’est, je le rappelle, ce que M. Borloo a annoncé à l’occasion du projet de loi de finances pour 2006, mais il n’était pas présent lors du débat budgétaire sur le logement. La question ne serait pas d’actualité aujourd’hui si le ministre avait fait ce qu’il avait dit. Il est clairement visible que le Gouvernement ne fait rien pour les 6 millions de ménages que leurs revenus obligent à percevoir des aides pour se loger.
Mme la présidente. Madame Lepetit, veuillez conclure, je vous prie.
Mme Annick Lepetit. Avec la politique de la majorité, ces bénéficiaires des aides sont de plus en plus nombreux.
Les socialistes voteront contre votre « engagement national pour le logement », car il ne s’agit pas du tout d’un engagement national pour le logement, loin de là. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Jean-Pierre Brard. C’est à ranger au rayon des farces et attrapes !
M. Yves Simon. Et ce rayon-là, vous le connaissez bien, au parti communiste !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Abelin.
M. Jean-Pierre Abelin. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, les Français vivent une crise profonde du logement. Celle-ci s’est traduite par une explosion du prix du foncier, qui a augmenté de plus de 40 % en cinq ans, et par une augmentation galopante du prix de l’immobilier et des loyers, et a exclu un nombre croissant de nos concitoyens tant du marché de la location que de celui de l’accession.
Cette crise est d’abord et avant tout une crise de l’offre, liée à l’insuffisance de production des dix ou quinze dernières années. Dois-je rappeler à cet égard, n’en déplaise à M. Le Bouillonnec, que le creux historique de production de logements sociaux se situe en 2000-2001 ?
M. Jean-Pierre Brard. Ne soyez pas agressif !
M. Jean-Pierre Abelin. Ce sont des faits, monsieur Brard.
M. Jean-Pierre Brard. Vous savez, les faits sont têtus, et si vous leur faites dire n’importe quoi, ils ne tarderont pas à vous donner tort !
Mme la présidente. Laissez l’orateur s’exprimer tranquillement…
M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Laissez parler M. Abelin !
Mme la présidente. Monsieur Ollier, c’est moi qui fais la police de la séance ! (Sourires.)
M. Jean-Pierre Abelin. Cette crise est due aussi à la pauvreté du stock du foncier disponible, autant qu’aux réticences de certains propriétaires et de certains élus.
Elle tient également aux conditions peu attractives pour la construction offertes aux décideurs locaux et aux difficultés de trouver des professionnels, même si nous ressentons aujourd’hui les premiers effets, sinon d’un retournement du marché, au moins d’une stabilisation dans un certain nombre de villes. Cette stabilisation est liée au niveau excessivement élevé atteint par les prix, à un début de rééquilibrage de l’offre et au record de mise en production des chantiers – 400 000 logements et 80 000 logements sociaux en 2005 – et, enfin, aux incertitudes sur les taux d’intérêt et sur le maintien du taux de TVA à 5,5 %.
Après la loi de 2003 sur la rénovation urbaine, la loi de cohésion sociale et la programmation sur cinq ans du logement, votre projet de loi, monsieur le ministre, qui vise notamment à lever les freins à la construction – et d’abord celui du foncier – et à soutenir les collectivités locales qui bâtissent, est particulièrement attendu.
Pour ce qui concerne le foncier, le groupe UDF approuve totalement les mesures qui permettent aux communes de prévoir dans leurs plans locaux d’urbanisme des zones comportant un minimum de logements sociaux, de même que l’obligation de définir un PLH, un programme local pour l’habitat, par les intercommunalités dans les conditions prévues.
Nous saluons votre volonté de dynamiser les cessions du foncier appartenant l’État, avec l’application d’une décote de 25 % sur le prix de vente dès lors que les terrains seront affectés au logement social.
J’exprimerai toutefois une crainte, celle que l’État, pris entre sa volonté de se désendetter et la priorité donnée au logement social, ne préfère vendre au plus offrant. Il importe que l’État montre l’exemple et qu’en consacrant une part non négligeable de ces cessions au logement social, tout spécialement dans les zones où le marché est le plus tendu, il joue son rôle de régulateur.
M. Borloo ayant été élu du Nord-Pas-de-Calais, je me permettrai aussi d’évoquer, comme cela a été fait en commission, les sites pollués devenus orphelins à la suite de faillites d’entreprises et qui sont aujourd’hui de véritables friches sans avenir. Nous proposons la création d’un fonds spécifique national et une réflexion nouvelle sur ce sujet qui frappe des régions touchées par la restructuration de leur tissu économique.
Nous proposons aussi que, dans les régions, les départements et les agglomérations qui se dotent d’établissements publics fonciers multiples sur le même territoire, le contribuable ou le redevable ne soit pas doublement sollicité alors même qu’une grande partie de ces zones à marchés détendus ne se sentent pas directement concernées.
Votre stratégie de mobilisation dans la durée passe aussi par le soutien aux collectivités qui bâtissent.
Vous avez prévu ou accepté des mesures intéressantes, notamment sur la compensation intégrale, pendant la durée de la loi de programmation, des pertes de recettes liées aux exonérations sur les taxes foncières sur les logements locatifs sociaux réalisés au moyen de PLAI, de PLUS, et de PLUS CD. C’est une avancée importante obtenue lors de la discussion au Sénat. Nous souhaitons que cette compensation puisse être élargie aux logements sociaux construits à l’aide de prêts locatifs sociaux, les PLS, que vous comptabilisez dans les statistiques du logement social. Il y aurait là une vraie cohérence, même si elle a un coût.
Au delà, ne serait-il pas possible, dans le cadre de la réforme de la DGF, de prévoir une majoration de la dotation de chaque commune proportionnellement à la part de logements sociaux nouveaux construits dans les cinq années précédentes ? Ce serait une incitation supplémentaire à construire.
Pour ce qui est de l’accès au logement et à la propriété, la commission a retenu les amendements que nous avons déposés, avec d’autres, sur la suppression du délai de carence d’un mois pour le versement des aides au logement, et sur le versement trimestriel des aides lorsque les sommes mensuelles dues sont inférieures à 24 euros.
En réponse aux propos du ministre Borloo et, surtout, de la commission des finances, je tiens à dire qu’il n’est pas possible de soutenir que ces mesures relèvent du domaine réglementaire alors même que le médiateur de la République considère que le réglementaire a empiété sur la volonté du législateur et sur les droits des familles. L’administration ne peut pas réduire à néant des droits voulus et votés par le législateur.
Monsieur le ministre, je soutiens donc l’appel de notre rapporteur à revenir sur ces deux mesures.
L’UDF propose aussi la révision annuelle du barème de l’APL en fonction du nouvel indice de référence des loyers. Ce serait là aussi une mise en cohérence, alors que de nombreuses familles peinent à payer leurs loyers et, surtout, leurs charges locatives.
En ce qui concerne l’article 55 de la loi SRU et l’obligation pour certaines communes de disposer de 20 % de logements sociaux, nous réaffirmons très clairement que le logement est l’affaire de tous et de toutes les communes et nous demandons une application à la fois juste et ferme de ces dispositions.
Une application juste car nous sommes favorables, dans le décompte des 20 %, à la prise en compte valorisée des PLAI, notamment des logements très sociaux – on sait bien la difficulté que nous rencontrons, au niveau national, pour atteindre des chiffres intéressants de création de PLAI, et nous avons obtenu la multiplication par deux de la prise en compte des PLAI. Nous prenons acte aussi de la prise en compte des aires permanentes destinées aux gens du voyage, ainsi que de celle, encadrée et temporaire, des ventes de logements sociaux.
Nous souhaitons ensuite une application ferme de ces dispositions à travers l’obligation pour toutes les opérations immobilières nouvelles dans les communes concernées de comporter au moins 25 % de logements sociaux, afin de contraindre ces communes à aller au-delà du simple paiement des pénalités prévues.
Nous souhaitons par ailleurs une attitude beaucoup plus dure envers les élus récalcitrants qui, sans raison valable, ne font preuve d’aucune réelle bonne volonté.
M. Jean-Pierre Brard. Très bien ! Qu’ils soient frappés d’inéligibilité !
M. Jean-Pierre Abelin. Enfin, nous souhaitons une évaluation régulière de la politique du logement.
Les deux amendements que j’ai proposés, l’un sur la présentation d’un bilan annuel du résultat et de l’efficacité des cessions de foncier réalisées par l’État au regard des objectifs de réalisations de logements locatifs sociaux, et l’autre relatif à l’évaluation du rapport entre le coût et l’efficacité des aides financières et fiscales publiques au logement – quelle efficacité pour un euro subventionné ? quelle efficacité pour un euro défiscalisé ? – ont été rejetés, le rôle des rapporteurs devant être mis en avant. Néanmoins, je serais heureux que vous puissiez, monsieur le ministre, nous confirmer votre engagement à aller dans le sens d’une très grande transparence sur ces questions.
J’aurais bien d’autres questions à vous poser sur l’avenir des foyers logements qui, du fait de la construction de nombreux EHPAD, rencontrent parfois des difficultés. À ce sujet, un certain nombre d’amendements ont été retenus par la commission, que je souhaite vous voir accepter en vue de leur adoption. J’aimerais par ailleurs vous interroger sur le rapport Pelletier concernant la modernisation des charges récupérables, sur les propositions en faveur du logement en milieu rural, sur l’accession sociale et la négociation d’un vrai contrat d’objectif de ventes de logements par le mouvement HLM, telles qu’on nous les a annoncées.
Un des prédécesseurs de M. Borloo avait eu l’idée d’inscrire dans la loi un objectif annuel – ambitieux d’ailleurs – de ventes par le mouvement HLM. Il ne s’agit peut-être pas de la meilleure solution, mais il faudrait quand même stimuler la vente des logements HLM par l’Union sociale de l’habitat.
M. Jean-Pierre Brard. Et après, où enverra-t-on tous les gens qui attendent un logement ?
M. Jean-Pierre Abelin. Mais l’argent de la vente sert à construire de nouveaux logements sociaux, monsieur Brard !
Mme Muguette Jacquaint. Vraiment ?
M. Jean-Pierre Brard. C’est le sapeur Camember !
M. Jean-Pierre Abelin. Moi-même, je préside un office départemental HLM et je peux vous dire que c’est ainsi que nous procédons !
M. Jean-Pierre Brard. Il n’y a pas de quoi vous vanter !
M. Jean-Pierre Abelin. Nous aurons l’occasion d’évoquer ces sujets au long de la discussion des amendements.
Pour conclure, je dirai que l’UDF aborde ce texte dans un esprit constructif et avec la volonté d’enrichir le projet de loi initial, comme elle l’a fait au Sénat.
Notre groupe se félicite de l’esprit d’ouverture dont le ministre du logement a fait preuve lors de la discussion devant la Haute assemblée. Je salue de la même manière le président et le rapporteur de la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale.
L’UDF souhaite que ce texte, encore amélioré, apporte des solutions concrètes pour le logement et le bien-être de nos concitoyens et pour la cohésion sociale aujourd’hui mise à mal. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.
Mme Muguette Jacquaint. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’examen du texte dont nous allons débattre nous renvoie à la crise du logement évoquée par nous tous ce soir, cette crise nous renvoyant elle-même au printemps et à l’été derniers, marqués par de très graves événements.
Il s’agit des tragiques incendies du Paris-Opéra, hôtel sans confort du 9e arrondissement, loué à un tarif scandaleusement élevé – cette situation n’est pas unique à Paris –, et de celui de l’immeuble du boulevard Vincent-Auriol, dans le 13e arrondissement, où une association caritative avait hébergé, sans pouvoir définir de solutions de logement plus adaptées, des familles de salariés et de travailleurs victimes de l’application sans nuance de la loi du marché.
Ces drames ont alerté l’opinion publique. Les mesures d’expulsion décidées et mises en œuvre avec une certaine brutalité, par la suite, ont choqué, là aussi, nombre de nos concitoyens.
La campagne très médiatisée menée contre les occupants – présentés comme sans droits ni titres –, de certains immeubles parisiens, comme celui de la rue de la Fraternité, dans le 19e arrondissement, a souligné combien le Gouvernement demeurait dans l’incapacité d’apporter une réponse adaptée à de telles situations de détresse sociale et dans l’incapacité de prendre des engagements significatifs en faveur du droit au logement.
Nous regrettons que le Gouvernement ait préféré la logique répressive plutôt que de répondre lucidement aux exigences qu’implique la reconnaissance du droit à vivre dans la dignité.
Nous avons interrogé à diverses reprises le Gouvernement, et bien avant ces drames, notamment lors de la discussion du projet de loi de programmation pour la cohésion sociale ainsi que lors des séances des questions d’actualité. De plus, tout au long de ces derniers mois, nous lui avons demandé quelles mesures il entendait prendre pour remédier à la crise du logement, à la situation des millions de familles aujourd’hui exclues de toute liberté de choix dans leur parcours résidentiel.
Face à cette situation, nous ne pouvons tolérer votre politique ni ne nous en satisfaire. De surcroît, la crise ne cesse de s’aggraver. En effet, l’actualité de l’automne, marquée par les émeutes des jeunes des quartiers populaires, illustre elle aussi la situation du logement. Les familles les plus modestes – entassées –, les jeunes –souvent précarisés et paupérisés –, ne supportent plus la situation qui leur est faite en matière de logement.
La loi du marché se double bien souvent, dans ce cas, de toutes les discriminations frappant de plein fouet des milliers et des milliers de familles, aujourd’hui contraintes à la précarité de leurs conditions de logement.
Plus de 3,5 millions de personnes vivent en situation de surpeuplement, plus de 800 000 sont hébergées chez des tiers – famille ou amis – et 800 000 autres ne doivent de ne pas dormir dehors qu’à des solutions précaires d’hébergement divers. C’est dire l’immensité des problèmes !
Or, à chacune de nos questions ou de nos interpellations, à chacune de nos propositions, vous nous avez affirmé que vous apporteriez des réponses dans le futur projet de loi « Habitat pour tous ». Chacun attendait donc, je dois le dire avec une certaine curiosité, quelle pourrait bien être le contenu de cette loi si prometteuse.
Mais, au vu du texte que nous examinons aujourd’hui, à l’intitulé non moins accrocheur, nos interrogations sont dissipées. Certes, nous ne nous faisions guère d’illusions. D’ailleurs, du propre aveu de M. le ministre, il n’y a dans ce texte, je le cite, « rien de génial ».
M. Jean-Pierre Brard. C’est très lucide !
Mme Muguette Jacquaint. C’est un euphémisme, tant le manque d’ambition de ce projet saute aux yeux. Devons-nous conclure à l’aveu d’un échec ou au simple témoignage du fait que le Gouvernement n’a pas la volonté politique, au-delà des effets d’annonce, de prendre un véritable engagement national en faveur du logement ?
Dois-je rappeler, pour aller vite, que le décret d’annulation du 3 novembre dernier a consacré, entre autres, l’annulation de 55 millions d’euros destinés à la construction et à la réhabilitation du parc locatif social ? Dois-je aussi rappeler que, dans le droit fil de cette démarche, se combinant avec le désengagement de l’État dans le financement de l’accession sociale à la propriété, le budget « Ville et logement » a été diminué de près de 130 millions d’euros – 10 % des crédits de 2005 – sur le poste « Développement et amélioration de l’offre » ?
S’il reprend, dans ses grandes lignes, les thèmes et les termes d’un projet de loi avorté – « Habitat pour tous » –, le texte qui nous est proposé offre-t-il des opportunités nouvelles, s’agissant de répondre aux besoins en logement ?
Prenons les questions dans l’ordre où elles se posent.
Nous savons que la construction de logements se porte plutôt bien dans notre pays. Le nombre de permis de construire délivrés est en constante progression, celui des mises en chantier également.
M. Michel Piron. C’est donc très bon pour l’emploi !
Mme Muguette Jacquaint. Ce rythme soutenu concerne tous les types de biens : maisons individuelles, logements collectifs, résidences étudiantes. Les chiffres devraient inciter à l’optimisme. Mais que constate-t-on dans le même temps ? Non seulement que la demande ne fléchit pas mais, et c’est tout aussi préoccupant, que la construction de logements sociaux n’atteint pas les niveaux escomptés et qu’à peine 40 % de l’habitat produit actuellement est sous plafond de ressources HLM, contre 70 % en 2001.
M. Michel Piron. Peut-être, mais nous construisons deux fois plus qu’il y a cinq ans ! Votre présentation est scandaleuse !
Mme Muguette Jacquaint. Sans compter que, sur les quelque 70 000 HLM produites l’an dernier, très peu sont réservées aux personnes ayant de faibles revenus. Il va quand même bien falloir s’attaquer à cette question ! Combien de gens, aujourd’hui en difficulté, ne peuvent même pas prétendre obtenir un logement social, faute de revenus et de salaires, car ne me dites pas, monsieur le ministre, qu’on peut aujourd’hui avoir un logement quand on a 400 ou 500 euros par mois pour vivre !
Revenons, si vous le voulez bien, l’espace d’un instant, sur le cheminement qui nous a conduits au texte dont nous débattons – cheminement éclairant.
En 2003, le même jour ou peu s’en faut, furent promulguées deux lois, l’une portant orientation et programmation pour la ville et la rénovation urbaine, l’autre portant diverses dispositions relatives à l’urbanisme, à l’habitat et à la construction.
La mesure phare de la première était la création de l’outil d’intervention en matière de rénovation urbaine, l’ANRU, tandis que la seconde était marquée, entre autres, certes par une réforme de la procédure de confection des plans locaux d’urbanisme, mais aussi par l’émergence d’un nouveau produit fiscal d’investissement locatif : le dispositif « de Robien ».
Le moins que l’on puisse dire est que le « de Robien », cela fonctionne, puisque plus de 110 000 des logements construits cette année dans notre pays sont réalisés sous ce régime, dont le coût pour l’État ne fait que croître – il a quadruplé depuis 2003. Comparons maintenant ces données aux 54 000 logements sociaux aujourd’hui construits dans notre pays.
En 2003 toujours, nous avons débattu de la loi de décentralisation. Celle-ci comportait des dispositions relatives à l’utilisation des enveloppes publiques d’aides à la pierre et à la gestion des attributions de logement. On voit ce qu’il est advenu desdits engagements financiers dans les budgets successifs, dont je viens de rappeler qu’ils ne cessent d’être grignotés. Est-ce un hasard si votre texte ne prévoit pas de nouveaux engagements financiers et leur substitue des mesures fiscales, visant pour l’essentiel à alléger les feuilles d’imposition des investisseurs ?
Est-ce ainsi que vous pensez vous montrer à la hauteur des enjeux ? J’ose espérer que non et que vous êtes assez lucide pour ne pas espérer avec de telles mesures un début de réponse aux attentes de nos concitoyens et à l’urgence sociale.
S’agissant des attributions de logements, force est de constater que bien des choses ne vont pas. Le présent texte, en son article 9, prétend corriger certaines dérives en permettant de définir des règlements locaux d’attribution de logement et en prévoyant un retour partiel de l’arbitrage du préfet en dernière instance. Mais les procédures ainsi mises en place ne résoudront pas la question posée et rien ne permettra aux demandeurs de logements de faire valoir dans des délais suffisamment courts leur droit à disposer d’un toit. Devront-ils encore attendre des années avant d’obtenir – et encore, cela reste hypothétique ! – le logement auxquels ils ont pourtant droit ?
En définitive, seul le titre de ce projet de loi est séduisant. Le reste est très largement en deçà des attentes et des inquiétudes qui ne cessent de croître, comme l’a démontré la révolte des habitants des quartiers populaires. Concertation parfois escamotée dans les opérations de rénovation urbaine, objectifs de la loi de programmation non atteints en termes de logements sociaux neufs, persistance de l’intolérable égoïsme des élus refusant de se conformer à la loi sur la solidarité urbaine en construisant des logements sociaux dans leur commune, poursuite des dérives du marché dans le montant des loyers exigés : tout montre qu’il faudrait une loi de plus grande ampleur, et vous le savez bien !
Or ce texte n’est qu’un ensemble de mesures par lesquelles on se contente d’accompagner la mise en œuvre de politiques définies ces dernières années et déjà financées, puisque prévues, entre autres, par la loi de programmation pour la cohésion sociale. Il n’y a aucune mesure nouvelle susceptible de faire vraiment de la réalisation de logements sociaux à loyers accessibles l’une des priorités de la politique de la nation et de l’action des collectivités territoriales. Le Sénat a bien apporté quelques améliorations, mais vous nous permettrez de penser que le titre de votre projet de loi est quelque peu usurpé !
La pénurie reste de mise, nous réservant de nouvelles difficultés pour l’avenir. Selon nous, donc, le texte doit être très largement modifié. Il est urgent d’établir une véritable programmation pour créer un parc réellement social. Aussi formulons-nous dès à présent des propositions bien plus audacieuses que celles de votre projet. Elles se fondent sur le vécu même des demandeurs de logements, des associations de locataires et d’action pour le cadre de vie, des acteurs du droit au logement, qui nous ont tous fait part de leurs observations, de leurs analyses et de leurs propositions.
Elles se fondent également sur notre conviction qu’il est indispensable de mettre en œuvre, comme le soulignait ma collègue Janine Jambu, auteur d’une proposition de loi en ce sens, un véritable service public du logement. Parmi les mesures qui permettraient à un tel service public national de rendre effectif l’exercice du droit au logement, mentionnons, entre autres, la nécessité d’alléger les contraintes de financement des logements sociaux, la mise en œuvre effective des obligations de construction de logements sociaux pour toutes les communes, le renforcement de la qualité et de l’efficacité des aides personnelles au logement, ou encore la mise à disposition gratuite des terrains cédés par l’État pour la réalisation de programmes locatifs sociaux.
Je souligne également que 742 communes de notre pays – et je sais qu’elles ne sont guère heureuses de se trouver ainsi sur la place publique – ne respectent pas la règle des 20 % de logements sociaux. Il faut faire appliquer la loi ! Il est grand temps de pénaliser plus sévèrement les communes qui demeurent opposées à l’application de la loi en augmentant le montant du prélèvement sur leurs recettes et en envisageant l’inéligibilité des élus concernés. Au-delà du discours, il faut prendre des mesures concrètes. Dans le même ordre d’idées, j’ai demandé ici même à plusieurs reprises que l’on verse l’APL aux familles pour lesquelles cette aide est inférieure à 24 euros : pour l’instant, on leur affirme qu’elles ont un droit, mais on ne leur verse rien.
Mme la présidente. Veuillez conclure, s’il vous plaît.
Mme Muguette Jacquaint. À moins que l’on ne fasse enfin droit, dans la suite de la discussion, aux inquiétudes et aux espérances de nos concitoyens, nous ne pourrons voter ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur quelques bancs du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Christine Boutin.
Mme Christine Boutin. Madame la présidente, mesdames, messieurs, on ne peut plus employer aujourd'hui le terme de « logement » sans lui adjoindre celui de « crise », et il faut bien reconnaître que le droit au logement est actuellement en panne.
Selon le rapport de 2005 de la fondation Abbé-Pierre sur « L’état du mal-logement en France », plus de 3 millions de personnes sont confrontées à une grave situation de mal-logement ; 86 500 d’entre elles sont sans domicile fixe et plus de 2 millions vivent dans des logements aux conditions déplorables. Rappelons-nous l’émotion suscitée cet été par les incendies meurtriers d’immeubles insalubres à Paris !
S’il est une chose que nous condamnons de manière unanime, qui fait consensus dans notre pays pourtant si prompt au débat, c’est bien cette situation profondément injuste qui prive la personne de son besoin le plus élémentaire : avoir un abri pour elle et pour les siens. C’est la condition sine qua non de l’insertion sociale, et donc le dernier rempart contre l’exclusion. Nous devrions être tous d’accord dans cet hémicycle pour affirmer que l’État aussi bien que la société sont tenus de procurer à leurs membres les conditions de vie sans lesquelles il leur est impossible de se réaliser en tant que personnes et en tant que familles.
Je salue le précieux travail des nombreuses associations qui œuvrent sans relâche pour que ce droit au logement, affirmé dans la Déclaration des droits de l’homme et repris maintes fois dans la législation française, cesse d’être une abstraction.
Je salue aussi l’important chantier engagé par le ministère de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement et souhaite que ce pacte national pour le logement atteigne ses objectifs en donnant une chance à chacun de s’épanouir personnellement dans notre société.
Cela exige que l’on invente de nouveau leviers pour garantir à toute personne le logement auquel elle a droit, notamment dans les situations d’urgence. À cet égard, après les incendies de cet été, la Ville de Paris et différents ministères ont proposé des actions innovantes, baptisées « les chalets de l’espoir » : il s’agissait d’implanter sur des terrains en attente de construction des chalets offrant des conditions de vie dignes aux personnes qui se trouvent en situation très fragile. Or ces initiatives sont restées sans suite.
J’affirme pourtant que la crise du logement n’est pas une fatalité. La panne de notre droit au logement perdurera tant que nous n’aurons pas installé un bouclier efficace. Le droit au logement doit être protégé par une obligation de résultats, et non plus seulement de moyens. Il est donc grand temps, monsieur le ministre, de mettre en œuvre un droit au logement opposable. Car rendre opposable le droit au logement, c’est lui donner la même force que le droit à l’éducation ou le droit à l’accès aux soins, pour lesquels un recours juridictionnel est possible. Ce qui a largement fait débat à la fin du xixe siècle, nul ne songerait aujourd’hui à en remettre en cause le bien-fondé. Faisons de même pour le droit au logement : mobilisons-nous pour que, d’ici à 2010, avoir un logement approprié à ses besoins ne soit plus un luxe, mais bien un droit effectif !
Ce nouveau droit opposable peut être mis en place par étapes, de façon progressive, pour peu que l’on élabore une stratégie aussi bien nationale que locale : dans une première étape, l’État affirme qu’il est garant de ce droit fondamental ; dans une deuxième étape, l’État est, dans le cadre de la décentralisation, toujours garant mais non gérant de ce droit, qui est désormais du ressort des différents bassins de logements ; dans une troisième étape, les actions sont définies par des contrats d’objectifs passés avec les collectivités territoriales et assortis d’une obligation de résultat ; dans une quatrième étape, c’est seulement au terme d’une échéance donnée qu’il serait possible à toute personne dont le droit au logement ne serait pas respecté de se retourner contre l’État.
Le droit au logement opposable n’est pas une utopie. Il est déjà mis en œuvre dans d’autres pays. Il consiste en l’affirmation que ce droit, en tant que principe fondamental de la Constitution française, relève de la responsabilité de l’État. Il n’est pas la marque de l’ingérence de l’État dans la propriété privée, et pas davantage une potion magique qui éliminerait l’exclusion et les inégalités. Il est en revanche l’expression d’une volonté politique forte, gagée par l’obligation de résultat. Ce que le xixe siècle a su faire pour l’éducation, le xxie siècle doit le faire pour le logement !
Je regrette, monsieur le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement, que dans cet « engagement national pour le logement » vous n’ayez pas pris cette option. C’est un rendez-vous manqué de plus. Depuis vingt ans, j’entends les lamentations, au gré des alternances, sur le manque de logement social. Je constate aussi que l’exclusion et la précarité se développe. Quel signal fort nous aurions pu donner aujourd'hui !
J’avais déposé un amendement tendant à créer ce droit opposable : il a été rejeté en raison de ses implications financières. Il est encore temps, monsieur le ministre, de lever le gage financier, d’autant que ce droit n’aurait d’effets que dans quelques années : quelle espérance nous ferions alors naître chez nos concitoyens !
Mme la présidente. La parole est à Mme Marylise Lebranchu.
Mme Marylise Lebranchu. Monsieur Borloo, comme vous, j’en ai marre !
M. Jean-Louis Borloo, ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Marre d’avoir réduit de moitié la construction de logements sociaux ?
Mme Marylise Lebranchu. Laissez-moi parler ! Je ne vous ai pas interrompu, moi !
Je rappelle que, lorsque nous sommes arrivés aux affaires, le logement social était dans une situation difficile. Voyez les archives : les preuves sont là ! M. Périssol sait fort bien, au demeurant, que nous avons dû ajouter un milliard d’euros pour son plan, ce qui a fortement entravé notre action durant la première année.
M. Gérard Hamel, rapporteur. Ce plan a pourtant été un beau succès !
Mme Marylise Lebranchu. À l’époque, 260 000 ouvertures de chantiers de logements, tous logements confondus, étaient programmées. Grâce à nos efforts, nous sommes passés à 300 000. Cependant, nous avons donné acte que, malgré cette augmentation de 40 000 – sans compter les mises en chantier qui seront dues ultérieurement à l’abaissement de la TVA à 5,5 % – le nombre de logements sociaux restait trop faible. Nous avons eu le courage de pointer ce problème et, cherchant à en établir les causes, nous nous sommes retrouvés face à des constructeurs tétanisés par les difficultés qui pouvaient naître, par exemple, des impayés de loyers ou de la vente éventuelle des logements sociaux. Ainsi, alors que nous étions en mesure de financer 80 000 constructions par an, seules 40 000 ont été réalisées.
Avec sagesse, modestie et humilité, je crois, nous avons reconnu que nous n’y arrivions pas. D’où le plan de relance de janvier-février 2001, avec l’idée des 20 % de logements sociaux par commune. À ceux qui n’acceptent toujours pas ces 20 %, je rappelle que nous ne les avons pas sortis de notre chapeau : ils correspondaient à la moyenne des logements sociaux sur l’ensemble du territoire en 1990, qui était de 23 %. Nous avons ramené ce taux à 20 % pour tenir compte des particularités régionales. En Bretagne notamment, où l’accession à la propriété est fortement ancrée, les collectivités locales auraient pu être gênées pour atteindre 23 %. Louis Besson me disait également qu’aujourd’hui, dans son agglomération de Chambéry, même en appliquant les 20 %, 2 800 personnes resteraient encore sur les listes d’attente, demandes de mutations non comprises. Il faudrait relever le pourcentage à 29 % pour satisfaire toutes les demandes.
Pour répondre à l’obligation posée par la loi SRU, il fallait réinventer le financement du logement social. D’où les PLA et le prêt à cinquante ans pour le rachat de terrains ou d’immeubles anciens. On nous reconnaît généralement peu ce mérite, qui a pourtant permis de construire des logements dans des endroits où la situation devenait intenable. N’oublions pas non plus que le prix du foncier – et c’est une analyse qui a été faite et refaite au cours des années, et sans doute par votre gouvernement – a constitué une barrière très haute pour le logement social. Aujourd’hui, lorsque nous proposons de créer des établissements publics fonciers régionaux, ce n’est pas parce que les régions auraient plaisir à prendre en charge cette nouvelle compétence : c’est parce que nous constatons que, même avec des financements intéressants, certaines collectivités locales ne réussissent plus à acheter de foncier.
Vous dites, monsieur le ministre, que, grâce à l’ANRU, tout sera réglé. J’ai vérifié les précisions que vous m’avez données pour la Bretagne : l’enveloppe de l’ANRU sera de 150 millions d’euros. C’est une belle somme, mais, à enveloppe égale, vous nous avez demandé d’ajouter Vannes et Saint-Malo. Vous avez également demandé à la région d’ajouter une participation, ce que nous n’avions pas fait, les conseils généraux et les collectivités territoriales étant déjà sollicités.
M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. On ne vous a rien demandé d’ajouter !
Mme Marylise Lebranchu. Je vais vous montrer les courriers, monsieur Borloo. Ou alors, ce sont les maires de ces communes qui n’ont rien compris à ce que vous leur avez dit.
M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Ce sont eux qui l’ont souhaité, à juste titre !
M. Bernard Accoyer. Et on dit « monsieur le ministre » !
Mme Marylise Lebranchu. Toujours est-il qu’avec deux communes supplémentaires et une troisième désireuse d’entrer dans le dispositif, l’enveloppe sera constante et la préfète de région a bien précisé qu’il n’y aurait pas moyen de donner davantage de crédits d’État. Arrêtez donc de nous dire que le système de l’ANRU est parfait !
L’idée du guichet unique, M. Dumont le dit souvent, est excellente mais il reste des murs infranchissables. Lorsque le nombre des bénéficiaires du RMI augmente, ainsi que celui des personnes en situation précaire – car le CNE ne facilitera pas l’accès à la propriété, vous le savez aussi bien que moi –,…
Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait !
Mme Marylise Lebranchu. …lorsque le nombre des chômeurs est très important, ce sont les files d’attente qu’il faut regarder. Face à ces files d’attente, le guichet unique de l’ANRU a beau être intéressant, ses financements sont insuffisants, d’autant que les crédits de l’ANAH pour la réhabilitation ont aussi diminué. Les petites communes qui pouvaient en bénéficier pour réaliser quelques logements ne le peuvent plus.
M. François Brottes. C’est exactement le sujet !
Mme Marylise Lebranchu. Pour terminer, je rappelle que le dispositif Besson n’accordait plus d’aide fiscale au parc privé dès lors qu’il dépassait 7 euros le mètre carré de logement, qui variait à l’époque entre 6 euros et 12,50 euros. Nous estimions en effet que l’aide fiscale devait être liée à l’engagement social. Ce qui manque aujourd’hui, c’est un statut, que nous avions défini, du bailleur privé coopérant au logement de ceux qui en ont le plus besoin. Le déplafonnement des avantages fiscaux l’a fait disparaître, ce qui constitue non pas une erreur, mais une faute. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. Rodolphe Thomas.
M. Rodolphe Thomas. Madame la présidente, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous abordons aujourd'hui, dans un contexte difficile, un sujet qui préoccupe l'ensemble des Français : le logement. Nous sommes appelés, pour la troisième fois en trois ans – après la rénovation urbaine et le plan de cohésion sociale – à examiner un projet de loi pour apporter de nouvelles solutions à cette crise. Le texte « Engagement national pour le logement » va fixer les grandes orientations et le cadre législatif de l'action de l'État. Son objectif est triple : libérer le foncier, développer l'offre de logements et en favoriser l’accès, améliorer les conditions d'habitat. Bien entendu, nous soutenons ces objectifs et les mesures qui en découlent.
Depuis les dix dernières années, la construction de logements a pris beaucoup de retard dans notre pays alors même que la demande des ménages ne cesse d'augmenter. Avec l'emploi et l'éducation, le logement est l'un des piliers de notre société. Tant en milieu rural qu’en milieu urbain, les étudiants, les jeunes couples, les familles, mais aussi les retraités qui, avec leur faible retraite, n'arrivent plus à payer leur loyer dans le privé, souhaitent pouvoir bénéficier d’un logement à loyer modéré.
La flambée du prix des terrains à bâtir entraîne spéculation et rétention du foncier, freine la construction de logements sociaux et contribue à fragiliser le pouvoir d'achat des ménages, pris dans une spirale infernale de hausse des prix des loyers.
C’est pourquoi je salue dans ce texte les dispositions qui favorisent l'accession à la propriété. La France est l'un des pays européens où le taux de propriétaires est le plus bas, avec seulement 56 %...
M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Exact !
M. Rodolphe Thomas. …contre 74 % en Grèce, 78 % en Irlande et 83 % en Espagne. Face à ce retard et aux attentes bien légitimes de la population, vous avez su, monsieur le ministre, amorcer un mouvement inverse salutaire, que nous devons impérativement poursuivre.
Nous nous félicitons de l’objectif de réaliser 500 000 logements sociaux sur cinq ans, d’en conventionner 200 000 à loyer maîtrisé et d’en remettre sur le marché 100 000 aujourd’hui vacants. Vous l’avez rappelé, le cap des 400 000 logements mis en chantier a été franchi fin novembre, ce qui contribue à la croissance du bâtiment, en hausse de 3,5 % en 2005, avec la création de 25 000 emplois. Les mesures par ailleurs prises en faveur de l'emploi devraient conforter cette tendance.
Le logement est un facteur majeur de notre cohésion sociale. Combien de nos concitoyens se trouvent encore pris dans ce cercle infernal : pas de logement sans emploi, pas d'emploi sans logement ?
Face à la pénurie de terrains constructibles, le prix des logements disponibles augmente fortement. II est donc impératif d'inverser cette tendance en libérant le foncier disponible des communes et de l'État, et en incitant les propriétaires de terrains non bâtis à les vendre.
Il convient également d'améliorer le financement du logement social et de traiter d'urgence le problème des mal-logés. J'insiste sur la nécessité de lutter plus amplement contre l'insalubrité. Certes, la loi SRU comporte déjà des dispositifs incitant les propriétaires à effectuer les travaux indispensables. Cependant, de nombreux logements sont encore loués à n'importe quel prix et majoritairement à des personnes en situation précaire. C'est pourquoi il faut donner pouvoir aux maires d'autoriser la mise en location de tout immeuble de plus de trente ans, selon qu’il répond ou non aux exigences de décence et de salubrité.
Par ailleurs, il n'est pas acceptable que l'APL ne soit pas versée lorsqu’elle est inférieure à 24 euros par mois. Cela conduit à supprimer arbitrairement toute aide au logement à 200 000 familles modestes et les prive parfois de plus de 300 euros par an, soit l'équivalent d'un loyer. L'allocation devrait être versée au moins à échéance trimestrielle.
Un autre point clé pour les élus que nous sommes est la longueur des délais de jugement en cas de recours contre un permis de construire. Même si la réforme intervenue par ordonnance à la fin de 2005 a permis une avancée significative, ces délais restent trop longs, entravant le déroulement de programmes de construction, y compris d'habitat social.
Il faut également revaloriser l'image du logement social, trop souvent perçu comme réservé aux familles cumulant les difficultés et donc synonyme d'insécurité. Rappelons tout de même que c’est près de 70 % de la population française qui pourrait prétendre à un logement social !
Je suis persuadé que la clé de la réussite en matière de logement repose sur l'engagement et le volontarisme des élus locaux, mais aussi des bailleurs sociaux et privés.
Telles sont les quelques remarques que je voulais formuler. Nous approuvons la plupart des propositions de ce projet de loi, dont nous attendons beaucoup de l’examen, espérant un enrichissement conséquent de son contenu. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Mme la présidente. La parole est à M. Alfred Marie-Jeanne.
M. Alfred Marie-Jeanne. Madame la présidente, messieurs les ministres, chers collègues de l'Assemblée, il serait mensonger de prétendre que la situation du logement en Martinique ne s'est pas globalement améliorée depuis quelques décennies. Grâce à la mobilisation de tous les acteurs, au premier rang desquels les maires qui ont apporté gratuitement le foncier, élément déclencheur de toute opération de construction, les résultats sont là : un parc HLM de 25 000 logements.
Pour autant, et malgré les efforts accomplis, cette question demeure une préoccupation majeure. La situation se dégrade, se complique, se modifie au gré du temps. Il reste tant à faire, dans des conditions plus difficiles et contraignantes, que se loger relève actuellement du parcours du combattant.
L’un des problèmes tient au mille-feuille institutionnel, repris dans le projet de loi. En effet, la délégation de compétence n'est pas expressément définie au départ, ce qui présente un double risque : celui de relations plus tendues entre intercommunalité et conseil général à qui revenait auparavant cette délégation et celui d’un éparpillement préjudiciable à l'efficacité recherchée.
Le foncier se raréfie à cause de l'exiguïté du territoire, du relief accidenté, de l'extension des zones non constructibles due notamment aux aléas sismiques, aux mouvements de terrain, au volcanisme, aux inondations. Pas moins de trente-quatre plans de prévention de risques naturels couvrent nos trente-quatre communes ! Le moment n'est-il pas venu de construire davantage en hauteur et de prendre en compte ces aléas en envisageant une enveloppe spécifique « risques naturels » pour répondre aux nouvelles normes exigées ?
La spéculation sur le foncier a considérablement renchéri son prix. La défiscalisation participe elle aussi à la hausse générale des coûts, qui rend la propriété inaccessible aux plus modestes. Comment stimuler la construction et faciliter l'accession sans moyens conséquents ni mesures d'encadrement idoines ?
Quelle est la réalité aujourd’hui ?
Le retard s’amplifie dans la réalisation des programmes, en raison de la diminution drastique des crédits de la ligne budgétaire unique. Ainsi, 1 500 attributaires ont des dossiers en cours, pour lesquels ils ont versé leur apport personnel et commencé de rembourser leurs prêts, alors que les chantiers ne peuvent pas démarrer. Plus de 10 000 demandes de logement demeurent insatisfaites, et ce nombre reste immuable depuis bien des années. Et ces demandes iront certainement croissant du fait de la décohabitation accélérée des jeunes et du vieillissement constaté de la population.
À cet égard, il faut savoir que plus de 80 % des personnes de soixante ans et plus sont propriétaires de leur logement dans le parc privé qui en compte environ 75 000. Or, ce parc est vétuste, précaire et en partie délaissé. À cet âge, l’accès au crédit est aléatoire à moins d’avoir du répondant, ce qui est loin d’être le cas pour la majorité d’entre elles.
Face à toutes ces difficultés, le marché de la réhabilitation a pris un certain essor. Déjà, 50 % de la LBU est consacrée à cette activité, faisant vivre 400 entreprises artisanales. La masse salariale de leurs 2 100 employés représente déjà 20 % de celle du BTP. Ne faudrait-il pas donner un coup d’accélérateur à la réhabilitation ? Cela permettrait de récupérer au moins 5 500 logements. C’est une piste, une alternative, qu’il ne faudrait pas écarter.
En conclusion, contrairement aux annonces faites, nous constatons que les crédits de la LBU pour le logement social en Martinique sont non seulement insuffisants, mais en baisse continue depuis plusieurs années.
M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. C’est faux !
M. Alfred Marie-Jeanne. Ils sont très en deçà des besoins réels pour ce qui concerne tant les engagements que les crédits de paiement.
En termes clairs, l’État ne prévoit pas les crédits nécessaires pour payer les chantiers qu’il s’est engagé à financer. Les opérateurs du logement social avancent des fonds en début de chaîne pour le compte de l’État mais ne les retrouvent pas dans leur intégralité en fin d’opération.
M. Jean-Louis Dumont. L’État fait sa trésorerie !
M. Alfred Marie-Jeanne. C’est ainsi que l’année 2005 se termine avec 15 millions d’euros d’impayés pour l’ensemble du logement social.
Tel est, monsieur le ministre du logement, rapidement brossé, l’état des lieux aujourd’hui.
Je me permets, enfin, de rappeler les évidences suivantes : à chaque région, sa réalité ! À chaque réalité, son programme adapté ! À chaque programme adapté, son financement approprié !
En chaque lieu, le logement décent participe, en effet, au maintien et au renforcement du lien social, tout en diminuant le taux de « sinistralité ». Ne l’oublions pas ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Le Guen.
M. Jacques Le Guen. Madame la présidente, monsieur le ministre du logement, mes chers collègues, le projet de loi qui nous est présenté prévoit l’élargissement des missions de l’Agence nationale pour l’amélioration de l’habitat, l’ANAH, appelée à devenir Agence nationale de l’habitat.
Comme le précise l’exposé des motifs, l’Agence aura plus largement vocation à promouvoir le développement et la qualité du parc existant de logements privés.
Cette volonté d’améliorer la qualité de l’habitat est à souligner. S’il est impératif de veiller à ce que toute personne dispose d’un logement – et c’est l’un des objectifs majeurs de ce texte – il est également utile et souhaitable de rechercher une qualité accrue.
Je voudrais à ce propos évoquer la situation des riverains des aérodromes militaires qui, chacun peut le comprendre, subissent une gêne sonore indéniable du fait des décollages et atterrissages des aéronefs.
Ces nuisances ne sont pas, à ce jour, suffisamment prises en considération.
En effet – et comment ne pas le déplorer ? – les dispositions du plan national d’actions contre le bruit, qui a conforté et renforcé le dispositif d’aide à l’isolation phonique des logements riverains des grands aéroports civils, ne s’appliquent pas aux riverains des aérodromes militaires. Comme s’il y avait deux types de bruit : un civil, reconnu, et un militaire, qui l’est moins.
Le présent projet de loi n’a pas pour objet de régler cette question, mais j’espère qu’il permettra une intervention accrue de l’Agence en faveur des riverains des aérodromes militaires.
Une fois cette loi votée, il me paraît indispensable que l’Agence, qui bénéficiera d’un champ d’action étendu, se saisisse, dans ses perspectives d’évolution, des questions de nuisances sonores en général – le bruit est considéré comme un des maux de notre époque – et des aménagements à apporter aux logements des riverains des aérodromes militaires, en particulier, ainsi que des aides financières permettant de les réaliser.
J’en ai déjà parlé avec les responsables de l’ANAH. Parmi les pistes envisageables figurent la possibilité d’accorder des dérogations au cas par cas pour le montant des travaux ou encore la création d’un guichet unique pour les aides de l’Agence et pour celles attribuées dans le cadre du plan national d’actions contre le bruit que j’évoquais à l’instant.
Je milite également pour une majoration des subventions pouvant être accordées.
Monsieur le ministre, ce projet de loi tend à développer les missions de l’Agence afin de tendre vers une qualité accrue du parc de logements. Il constitue une première étape que j’approuve et que j’appuie. Il importera ensuite – et je compte sur votre soutien – d’aider les riverains des aérodromes militaires à réaliser des travaux d’isolation phonique de leurs logements. À mon sens, sur un problème aussi particulier, le lieu d’implantation du logement doit être autant pris en compte, sinon plus, que le niveau de revenu pour l’octroi des subventions.
Un mot, pour conclure, sur l’article 55 de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains.
Sans remettre en cause le principe de la mixité sociale, il serait opportun de tenir compte des contraintes foncières auxquelles sont confrontées les communes concernées. Je vous ai saisi, comme votre prédécesseur, de la situation de la commune du Relecq-Kerhuon.
Outre le fait que son territoire est pour le moins exigu – 643 hectares pour 11 500 habitants –, les possibilités d’y construire sont limitées du fait de la proximité du littoral, d’une voie ferrée et de deux voies express ainsi que par la présence d’un bâtiment militaire consacré à la pyrotechnie et de sites naturels boisés. Tout en défendant, je le répète, le principe de mixité sociale, des aménagements doivent être recherchés et trouvés pour de telles communes.
J’espère que la discussion que nous engageons aujourd’hui ainsi que le bilan triennal d’application de la loi SRU y contribueront. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Pemezec.
M. Philippe Pemezec. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, aujourd’hui plus de 80 % de la population vit en milieu urbain ou à sa périphérie alors que, au début du XXe siècle, elle était encore à 90 % rurale. Ces chiffres traduisent la situation à laquelle, nous sommes, en tant qu’élus nationaux ou locaux, confrontés au quotidien.
La plupart de nos concitoyens ont des revenus modestes. Or les prix n’ont cessé d’augmenter. Pourquoi ? Tout simplement parce que l’offre de logements ne répond pas à la demande ? Celle-ci a, en effet, augmenté et restera très forte dans les prochaines années, et ce pour plusieurs raisons. La première est que la population française vieillit. Or, lorsque l’on vit plus longtemps, on est forcément demandeur de logement plus longtemps, on l’occupe plus longtemps et on vit souvent seul, parfois même dans un grand logement. Ensuite, toutes les statistiques montrent que les Français vivent dans des logements de plus en plus grands. Et je ne parle pas des cohabitations nombreuses dues à l’augmentation du nombre des divorces.
Tous ces facteurs expliquent la pénurie actuelle de logements. Il faut donc construire. On n’a jamais autant construit qu’aujourd’hui, comme l’a très justement rappelé Jean-Louis Borloo tout à l’heure. Poursuivons donc l’effort.
Mais je mets en garde ceux qui, sous la pression de la loi SRU, voudraient nous faire croire que le logement social est la solution miracle. Je considère au contraire que c’est le meilleur moyen d’élargir le fossé entre parc privé d’un côté, et parc social de l’autre.
Je rappelle que 47 % des gens modestes vivent dans des logements privés locatifs…
M. Jean-Louis Dumont. C’est du logement social de fait !
M. Philippe Pemezec. Mais nos concitoyens disposant de revenus moyens ne peuvent suivre aucun parcours résidentiel. Ils sont coincés dans une catégorie sociale et ne pourront jamais devenir ni propriétaires ni locataires dans le privé, parce que le delta entre les deux niveaux de loyers est trop important.
M. Michel Piron. C’est un vrai problème !
M. Philippe Pemezec. Il faut donc sortir des sentiers battus. Dans notre combat pour améliorer l’offre de logements privés ou sociaux, nous pouvons agir sur trois leviers – le foncier, la mobilité et l’accession –, sans pour cela opposer parc privé et parc social car la crise du logement est globale. Cette dernière peut cependant être facilement réglée pourvu que l’on s’y attache avec détermination, ce qui est la volonté du Gouvernement.
Il faut d’abord libérer le foncier.
La brusque augmentation du prix des terrains à bâtir a eu, il est vrai, des conséquences préjudiciables. Les personnes modestes, par exemple, ne peuvent plus aujourd’hui devenir propriétaires. Chaque année, 90 000 familles qui arrivaient, dans le passé, à devenir propriétaires mais qui n’y parviennent plus aujourd’hui viennent grossir le nombre des demandeurs de logements sociaux ou se serrent la ceinture pour payer des loyers au-dessus de leurs moyens dans le privé. Qu’on ne s’étonne pas, dès lors, de voir exploser le nombre des cas de surendettement.
La priorité est donc de libérer le foncier, d’y construire et de réguler ainsi le prix du marché de l’immobilier.
Il faut aussi permettre aux maires – et même les y inciter fortement – de redevenir des bâtisseurs.
À ce titre, l’État qui est, directement ou indirectement, le premier propriétaire foncier de France, doit prendre des mesures fortes pour mobiliser ses terrains. Il a encore, me semble-t-il, beaucoup d’efforts à faire.
M. Jean-Louis Dumont. Ça, c’est vrai !
M. Philippe Pemezec. Ce constat, qu’un grand nombre de mes collègues font avec moi, est abordé par votre projet de loi, monsieur le ministre, mais il faut être sans doute plus ambitieux, plus volontaire et replacer le maire au cœur du dispositif de la bataille du logement. Si l’on veut que les maires s’investissent et construisent, il faut, par exemple, leur donner, lorsqu’ils réalisent des logements sociaux, une meilleure maîtrise des attributions. Ce n’est pas le cas aujourd’hui. Il faut également compenser totalement les pertes de taxe foncière en cas de construction de logements sociaux et mieux protéger les procédures d’urbanisme contre les recours injustifiés.
Il faut inciter les maires à construire et également démystifier la densité car l’enjeu se situe aussi sur le plan de l’urbanisme. Si nous voulons construire plus, il va falloir accepter une certaine densification, qui n’est pas un mal : les quartiers de tours et de barres qui se sont enflammés à la fin de l’année dernière et qui ne sont pas des modèles de bien-vivre sont parmi les moins denses. La densité, on la trouve dans le cœur des villes, comme à Paris, où l’on vit le mieux. Il faudra sans doute reconstruire la ville sur la ville.
Il faut réussir ce pari de la densité, mais avec une densité mieux organisée. Il faut revenir à un urbanisme de rue et redonner de l’urbanité à la ville, c’est-à-dire une capacité à vivre ensemble. L’urbanisme froid et glacial, en créant du vide autour des tours et des barres, a aussi généré la désespérance.
Il faut, par ailleurs, encourager la mobilité des ménages lorsqu’ils occupent des logements surdimensionnés ou des logements à faibles loyers alors que leurs revenus ont fortement progressé.
Il faut sans doute également baisser les droits de mutation pour fluidifier le marché, prendre en charge les frais de déménagement, inciter les personnes qui occupent des logements trop grands à retrouver des conditions de vie identiques dans le même quartier, sans payer un loyer plus élevé.
Pour sortir de certaines situations de rente, pourquoi ne pas imaginer des baux à trois, six et neuf ans, à la faveur desquels, au bout de trois ans, on vérifierait l’évolution des revenus ? S’ils n’ont pas évolué, il y aurait maintien dans les lieux ; s’ils ont évolué un peu, il y aurait un surloyer ; s’ils ont évolué fortement, on inciterait la personne à sortir du logement social pour aller vers l’accession.
L’accession à la propriété, en effet – et c’est mon troisième point – est l’élément essentiel. Il faut tout faire pour permettre aux Français, à tous les niveaux, d’accéder à cette propriété dont ils rêvent. Les plus modestes et les classes moyennes se constitueront ainsi une retraite, et le parcours résidentiel en sera facilité.
Mme la présidente. Je vous demande de conclure, monsieur Pemezec.
M. Philippe Pemezec. Libérer le foncier, favoriser la mobilité, développer l’accession à la propriété sont des mesures pragmatiques, justes et durables qui permettront d’améliorer la situation du logement public et privé dans notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Dumont.
M. Jean-Louis Dumont. Madame la présidente, monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, tout d’abord, il conviendrait de se mettre d’accord lorsqu’on cite des chiffres.
M. Michel Piron. Ah !
M. Jean-Louis Dumont. Parle-t-on en termes de production des autorisations de programme contenues dans un budget prévisionnel ? Parle-t-on des autorisations de financement signées par le trésorier-payeur général du département ? Parle-t-on des mises en chantier ? Parle-t-on des produits mis à disposition, c’est-à-dire des fins de chantier ? Parle-t-on des ventes en l’état futur d’achèvement ? Parle-t-on des ventes des produits qui existent, changent de propriétaires et entrent dans un nouveau patrimoine ?
M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Si vous voulez être précis, les VFA ne sont pas des ventes !
M. Jean-Louis Dumont. D’accord ! Mais, à certains moments, on n’y voit pas très clair !
M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Les VFA sont des ventes en l’état futur d’achèvement !
M. Jean-Louis Dumont. Monsieur le ministre, c’est la raison pour laquelle la clarification que vous avez demandée – qui est en cours d’élaboration entre les opérateurs et vous-même – me semble la bienvenue, tout comme le texte que nous examinons ce soir.
Il a été annoncé à grand renfort de trompes, promis par trois ministres qui en ont changé le titre, ajouté ou élagué des éléments. Le texte présenté au Sénat pouvait apparaître – c’est vrai – comme un chantier à disposition du Parlement, puisque l’urgence n’a pas été déclarée et que l’on a laissé libre cours, non pas à l’imagination, mais au travail du Parlement – sénateurs et députés. Nous nous apercevrons, en faisant le bilan en fin de parcours, que pour une fois le Gouvernement a laissé s’effectuer le vrai travail parlementaire.
M. Michel Piron. Ah voilà !
M. Jean-Louis Dumont. C’est une nouveauté, qui mérite d’être soulignée. Depuis quelques années, nous n’y étions pas habitués.
M. Michel Piron. Depuis combien d’années ?
M. Jean-Louis Dumont. On ne peut que s’en réjouir.
Mais, monsieur le ministre, il est vrai que vous prenez quelques risques.
M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Tout à fait !
M. Jean-Louis Dumont. Ils sont cependant limités. Pour construire, il faut du terrain à bâtir, donc du foncier disponible.
M. Éric Raoult. Très bien !
M. Jean-Louis Dumont. En 1996, j’avais présenté au Conseil économique et social un rapport sur le foncier. Dix ans plus tard, monsieur le ministre, les propositions retenues dans ce rapport par l’ensemble des professionnels et des acteurs économiques, sociaux et culturels représentés au CES vont être prises en compte.
Certains collègues estiment que l’État doit mobiliser son foncier. Qu’a fait le patron de RFF, à l’époque où c’était un préfet de la République, pour démontrer qu’il était possible de construire ? Il s’est tout simplement tourné vers des promoteurs privés. Où était le logement social ? Où était le futur logement conventionné ? Où était la réponse aux besoins des populations ?
Monsieur le ministre, accepteriez-vous qu’entre RFF par exemple et les régions Alsace, Lorraine, au hasard, ou Champagne-Ardenne, une négociation s’engage pour vous présenter – pourquoi pas ? – un plan pour les années à venir, dans le cadre du plan de relance de la construction ? Ce serait du bon travail. Prenez-en note ! Je suis prêt à relever ce défi, comme d’autres collègues, avec des membres de RFF.
Mais je vous rappelle que vous avez déjà mis la main sur le pactole dans la loi de finances rectificative. À propos de pactole, un amendement du Gouvernement s’intéresse au crédit immobilier. Nous y reviendrons. Mais quelques questions se posent. Nous pensions naïvement que la négociation était finalisée et le prix du ticket d’entrée ou de sortie fixé.
M. François Brottes. C’est un hold-up !
M. Jean-Louis Dumont. Ce prix passe de 300 à 800 millions d’euros. J’avais parié, à un certain moment, sur un milliard.
M. François Brottes. Trois milliards !
M. Jean-Louis Dumont. Je ne sais pas, monsieur le ministre, qui a eu cette idée. Vous faites état quelque part des « actionnaires de sociétés anonymes de crédit immobilier qui souhaitent céder leur titre ». Qui est le futur actionnaire ? Le connaissez-vous déjà ? On suppute ! On craint !
Jusqu’à présent, monsieur le ministre, vous ou vos prédécesseurs – fussent-ils de gauche – discutaient, négociaient, finalisaient un texte, que l’on retrouvait plus tard dans un projet de loi ou dans une opération. Aujourd’hui, vous discutez, vous négociez, puis, tout d’un coup, vous lancez l’opération.
Beaucoup de réactions, de craintes se sont manifestées. Veut-on faire disparaître un opérateur ? M. Ollier évoquait cet après-midi l’accession sociale à la propriété. Les crédits immobiliers y ont modestement contribué, ainsi qu’à la fluidité du patrimoine.
Permettez-moi de préciser que l’accession à la propriété s’effectue dans la plupart des organismes après avoir défini un plan stratégique de patrimoine, négocié avec le maire, obtenu l’autorisation du préfet de la République, ce qui n’est pas rien – quand il a le temps de donner l’autorisation, mais, généralement, il le trouve !
J’ai pu mesurer, en faisant un tour de France, ce que représentaient la mobilisation des acteurs et l’allégement d’un certain nombre de contraintes. Mais nous voyons également que le gouvernement auquel vous participez, monsieur le ministre, qui préconise de faire des économies et d’alléger vient de créer une nouvelle délégation interministérielle à la production du logement locatif.
Mme la présidente. Monsieur Dumont, il faut conclure !
M. Jean-Louis Dumont. Je pensais naïvement – depuis que je milite pour le logement social, et cela représente un certain nombre d’années – que la DGUHC devait répondre à cela. Si tel était le cas, pourquoi inventer un autre « zinzin » ?
On se plaint beaucoup sur le terrain du manque d’écoute ; des organismes sont mis en cause. Les craintes ne sont pas prises en compte, la mobilisation n’est pas perçue. Ne complexifiez pas encore les choses, monsieur le ministre !
Mme la présidente. Merci, monsieur Dumont…
M. Jean-Louis Dumont. Je m’achemine, madame la présidente, vers ma conclusion. Permettez-moi de souligner que le temps autorisé pour la défense des motions de procédure a été réduit. Il faut donc bien que certaines choses soient dites du haut de cette tribune.
Mme la présidente. Monsieur Dumont, tout le monde s’est plié à la même règle.
M. Jean-Louis Dumont. Ce projet de loi, qui, demain, peut devenir un vrai outil à disposition de l’ensemble des opérateurs, publics ou privés, doit être aussi un signe de confiance envers ceux qui se mobilisent depuis des décennies pour répondre à la demande, plutôt qu’un casus belli pour régler quelques comptes ici ou là !
La subvention de l’État dans une opération représente aujourd’hui entre 1,7 et 3 %. Mais il nous semble plus important que la Délégation à la pierre s’accompagne d’une confiance. Vos services doivent contrôler a posteriori, mais non empêcher. Il faudra expliquer cela à la mission interministérielle d’inspection du logement social.
Mme la présidente. Monsieur Dumont, ne repartez pas sur un autre thème, je vous en prie.
M. Jean-Louis Dumont. Dans certains rapports, la MILOS dit à certains acteurs du logement social que la vente n’est pas leur métier. Pourquoi ne pas l’intégrer dans l’article L. 411 ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-André Périssol.
M. Pierre-André Périssol. Monsieur le ministre, vous présentez un projet de loi sur l’habitat, porteur de dispositions techniques très positives.
Vous le faites après avoir obtenu un rythme de construction sans précédent : plus de 400 000 logements, contre seulement 300 000 dans les années 2000-2002.
Vous le faites après avoir lancé une politique ambitieuse de la ville, novatrice tant dans son contenu que dans les moyens déployés, et nous avons vu récemment combien elle était indispensable.
Vous présentez donc ce projet de loi avec des atouts certains.
Nos concitoyens attendent qu’avant la fin de cette législature, l’accès au logement soit plus facile, qu’ils veuillent accéder à la propriété ou louer, et ce tout particulièrement lorsqu’ils ont besoin de le faire dans des zones qui connaissent de grandes tensions immobilières.
Aussi le bilan du Gouvernement, en matière de logement, sera-t-il lié aux réponses qui seront concrètement apportées à quelques questions, pour que les choses aient réellement changé sur le terrain dans les dix-huit mois qui viennent. J’en évoquerai trois.
Premièrement, satisfaire les besoins là où ils sont le plus pressants. Construire beaucoup de logements, c’est évidemment très bien, et nous vous en félicitons. Mais ce qui va vraiment changer les choses, c’est que la construction de logements tant sociaux que privés se fasse dans les endroits où se situent les vrais besoins. On mesure tout l’enjeu du volet foncier de votre projet de loi.
Deuxièmement, l’accession à la propriété des primo-accédants, donc des jeunes ménages, est quasiment impossible compte tenu du prix du foncier. Ce n’est pas acceptable.
Des dispositifs de portage du foncier doivent être effectivement mis sur pied. Ils doivent être efficaces, encouragés et abondés pour apporter une solution concrète. Sans cela, rien ne changera !
Troisièmement, il faut redéfinir le périmètre de ce qui est véritablement social en matière de logement. Aujourd’hui, les plafonds de revenus des logements PLUS les rendent accessibles à environ deux tiers de la population. Il faut donc définir les catégories de logements qui, en étant aidées, ont une véritable utilité sociale et vocation à bénéficier à ces ménages. Si, demain, monsieur le ministre, les réponses apportées à ces questions sont bonnes, pourra-t-on obtenir des résultats tangibles, c’est-à-dire une offre de logements élargie et adaptée là où il y en a le plus besoin, d’ici à la fin de cette législature ? Je suis convaincu que si on le veut, on le peut. Je citerai trois exemples.
Dans le domaine de l’hébergement d’urgence, vous avez pris l’engagement de réaliser 5 000 logements. Je crois que c’est possible. J’en mesure la difficulté au vu des efforts que nous avons dû faire en 1995 et 1996 pour construire 20 400 logements d’urgence et d’insertion en dix-huit mois.
M. Jean-Louis Dumont. C’est vrai ! On s’en souvient, c’était une vraie mobilisation !
M. Pierre-André Périssol. Ensuite, l’offre en logements locatifs HLM. Je ne veux pas me battre sur les chiffres, mais le succès du prêt à taux zéro, lancé en 1996, a permis de multiplier en 1997 par 2,5 le nombre de places offertes en HLM aux candidats locataires. Et je sais que vous êtes très sensible à la chaîne du logement.
Enfin, la création de 1’amortissement pour l’investissement locatif privé a permis de créer 140 000 logements nouveaux en deux ans, et surtout de créer des logements étudiants ou de grands logements qui manquaient cruellement en certaines localisations.
Pour que les choses changent sur le terrain pour nos concitoyens, il faut une volonté politique forte et un engagement complet. Je sais, monsieur le ministre, que vous avez l’un et l’autre, et je suis donc pleinement confiant dans votre possibilité de nous présenter des résultats concrets, des engagements qui seront tenus – j’en suis convaincu – en fin de législature. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Grand.
M. Jean-Pierre Grand. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, lors de nos rencontres régulières avec nos concitoyens, je crois que chacun d’entre nous peut confirmer que les demandes récurrentes qui s’expriment dans nos mairies, dans nos permanences, vont toutes dans le même sens : « Monsieur le député, monsieur le maire, auriez-vous un logement, auriez-vous un emploi pour mes enfants ou mes petits-enfants… ? »
Le Gouvernement a aujourd’hui pris à bras-le-corps le problème de l’emploi, notamment celui des jeunes. Et c’est son honneur.
À présent, notre majorité agit en faveur du logement pour tous.
Dans mon département, l’Hérault, 1 500 habitants nouveaux s’installent chaque mois. Je peux témoigner des difficultés que rencontrent nos concitoyens dans ma région et mon département en particulier pour trouver un logement en location ou pour accéder à la propriété.
Le marché de l’immobilier étant ce qu’il est, nous avons aujourd’hui le devoir de trouver des solutions à ce problème immense et crucial. Un travail et un toit : n’est-ce pas la première des libertés à garantir à nos concitoyens ?
La progression exponentielle des coûts du foncier à bâtir, dans mon département, nous pose, à nous les maires, un certain nombre de problèmes que cette loi contribue à atténuer.
Je vous rassure, monsieur le ministre, nous sommes très nombreux à souhaiter répondre à l’appel du Président de la République en faveur d’un logement décent pour tous.
Ma commune n’a pas encore atteint le quota décrété par la loi SRU : ce n’est pas une volonté délibérée. Comme bien d’autres maires, j’ai la ferme volonté de satisfaire au plus vite à l’obligation légale des 20 % de logements sociaux. Pourtant, il faut bien savoir que les villes qui ne sont pas dans ce cas ne sont pas forcément des communes privilégiées. Loin de là.
L’exemple de ma ville en témoigne. Les logements privés – immeubles ou « barres », comme l’on dit – regroupent un grand nombre de familles modestes. Nous le constatons évidemment par le biais de l’aide sociale attribuée à de nombreux occupants de ces logements.
Aujourd’hui, ces logements sociaux de fait sont aussi nombreux que les logements officiellement labellisés. C’est le cas de ma commune. Pour autant, même si ces logements sociaux de fait ne sont pas pris en compte par la loi SRU, je vous le dis très solennellement, monsieur le ministre, nous mettrons tout en œuvre pour atteindre le quota fixé par la loi. En tant que maire, je me suis engagé pour que chaque programme immobilier comprenne un quota minimum de 27 % de logements sociaux afin de rattraper le retard. Nous avons formalisé cet engagement dans le plan local de l’habitat – PLH – et nous l’avons inscrit dans le plan local d’urbanisme – PLU – en cours de révision.
Monsieur le ministre, nous sommes obligés de constater que, concomitamment à la demande de logement social locatif, émerge une forte demande d’accession à la propriété. Ces demandes formulées en particulier par de jeunes couples – les primo-accédants – disposant de revenus modestes mais stables sont de plus en plus nombreuses.
Il serait donc, à mon sens, socialement juste de faciliter leur parcours personnel en mettant en place des programmes originaux financés à l’identique des logements sociaux locatifs. Il conviendrait aussi de les comptabiliser au titre de la loi SRU.
Certes, afin de d’éviter toute dérive, cette prise en compte ne pourrait raisonnablement excéder une dizaine d’années et devrait se limiter au quart du parc social.
Cet engagement en faveur de l’accession à la propriété pour les plus modestes comme pour nos plus jeunes concitoyens répond, monsieur le ministre, à la politique du Gouvernement en faveur de l’égalité des chances pour tous. Cette politique est aussi la nôtre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Mme la présidente. La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt-trois heures vingt, est reprise à vingt-trois heures vingt-cinq.)
Mme la présidente. La séance est reprise.
La parole est à Mme Chantal Robin-Rodrigo.
Mme Chantal Robin-Rodrigo. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la crise du logement sans précédent demande une réponse globale et un effort de la nation comparable à celui des années cinquante.
Dans la plupart des agglomérations, le marché est saturé, les loyers ont considérablement augmenté depuis trois ans, au point de devenir inaccessibles pour les ménages modestes, et le prix du foncier s’est envolé. Les files d’attente pour le logement social s’allongent.
Nos concitoyens éprouvent de plus en plus de difficultés à se loger. Certains sont contraints de vivre en camping, dans leur voiture ou de retourner dans leur famille, faute de trouver un toit à portée de leurs moyens.
Les zones rurales ne sont pas épargnées. Malgré la volonté des élus d’attirer de nouveaux ménages dans leurs communes, la disparition des services publics joue en défaveur de la construction de nouveaux logements.
La part consacrée à l’accroissement du parc de logement reste insuffisante malgré l’objectif affiché de 400 000 logements pour 2006 et le texte ne répond pas à la gravité de la situation.
Des mesures fortes doivent être prises d’une part pour répondre à l’érosion continuelle du pouvoir d’achat des locataires, d’autre part, pour faire face à l’exigence de construire des logements sociaux sur l’ensemble du territoire et, enfin, pour développer la mixité sociale.
Depuis 2002, les choix budgétaires effectués par votre majorité n’ont fait qu’aggraver la situation en dérégulant le marché. Tout concourt à un déséquilibre entre l’offre et la demande.
Je citerai la baisse des aides à l’accès au logement qui bénéficient à plus de 6 millions d’allocataires. Vous ne les avez revalorisées que deux fois, ce qui est nettement insuffisant au regard de la hausse des loyers. Vous avez relevé le seuil du non versement de l’allocation logement de 15 à 24 euros, ce qui a privé 120 000 ménages de cette prestation. Et en transférant le FSL aux départements, vous avez signé le désengagement de l’État.
S’agissant de l’offre de logement, vous avez privilégié la montée en charge de logements intermédiaires au détriment des PLUS et des PLAI destinés à loger les personnes à faible revenu.
M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Mais non !
Mme Chantal Robin-Rodrigo. Les PLAI représentaient 12 % de la production en 2000 ; aujourd’hui, ils n’en représentent que 9,5 %.
M. Michel Piron. Donnez-nous des chiffres absolus !
Mme Chantal Robin-Rodrigo. Par contre, pour les logements sociaux intermédiaires, c’est l’inverse : la production a triplé depuis 2000, passant de 9,5 % à 33,7 %.
Enfin, vous avez privilégié les aides fiscales à l’investissement privé. Le dispositif fiscal, dit « Robien », que vous avez institué, n’a fait qu’encourager la spéculation immobilière en accordant, sans contreparties sociales, des avantages fiscaux aux ménages aisés.
En fait, vous avez insufflé une politique du logement qui ne répond pas à la demande sociale actuelle et, malheureusement, ce ne sont pas les propositions faites à ce jour qui vont inverser là situation. Il y a un décalage entre le besoin et l’offre.
L’État, garant de la solidarité et de la cohésion sociale, doit consacrer le budget nécessaire à cette relance du logement. Assez de déclaration de bonnes intentions, les Français attendent des actes !
Vous dites que « l’intérêt majeur du projet de loi consiste à lever les blocages freinant la réalisation de logements ». Pourtant, le texte ne dit rien de l’attitude des élus qui refusent de se conformer à la disposition de la loi SRU qui impose 20 % de logements sociaux. Que vaut donc la cohésion sociale lorsque la solidarité nationale est menacée par ceux qui amalgament logement social, pauvreté, immigration et insécurité ? Comment parler de respect des lois de la République lorsque des élus s’affranchissent de leurs obligations et prétendent, dans le même temps, donner des leçons de citoyenneté et de civisme aux jeunes de nos quartiers ?
Sur ce point, le projet de foi ne dit mot. Rien n’est fait pour contraindre davantage les élus qui ne jouent pas le jeu. Oui, il est du devoir de l’État de faire respecter la volonté du législateur.
Je vois au moins trois leviers sur lesquels il est urgent d’agir.
Premièrement, les dispositifs fiscaux doivent être revus dans le sens d’une plus grande efficacité de la dépense publique. Ils doivent surtout s’accompagner d’un certain nombre d’obligations en matière de plafonnement des loyers afin d’éviter toute spéculation. Il ne saurait y avoir des avantages fiscaux sans réelle contrepartie sociale.
Deuxièmement, l’offre de logements nécessite de relancer la production de logements très sociaux, car c’est dans ce secteur que l’insuffisance est criante. La mixité sociale doit être le moteur de la politique du logement. Elle passe par le développement d’une offre quantitativement suffisante et diversifiée sur l’ensemble du territoire.
Troisièmement, il est nécessaire de garantir le pouvoir solvabilisateur des aides à la personne en revalorisant systématiquement chaque année les prestations au logement, avec pour base les indices fixant le taux d’augmentation des loyers.
Le Gouvernement a déposé un amendement pour obliger les sociétés anonymes de crédit immobilier à céder leurs participations dans des conditions désastreuses, avec captation du produit de la vente au profit de l’Etat : 2, 8 millions d’euros. C’est un véritable hold-up, monsieur le ministre, qui met en péril les emplois des 6 000 collaborateurs de ces sociétés. Voilà une mesure particulièrement scandaleuse, qui va en outre à l’encontre de ce que vous prônez. Le Crédit immobilier de France est l’organisme HLM pour l’accession sociale à la propriété. Il est doté d’un véritable savoir-faire et doit poursuivre sa mission sociale. J’espère que vous reviendrez sur cette décision.
M. Augustin Bonrepaux. N’y comptez pas : ils raclent les fonds de tiroir !
M. Jean-Louis Dumont. Le Parlement souverain saura dire non !
Mme Chantal Robin-Rodrigo. J’attends de ce texte qu’il réponde réellement aux exigences du droit au logement auquel aspirent légitimement nos concitoyens. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. Éric Raoult.
M. François Brottes. Peut-être aurons-nous des excuses !
Plusieurs députés du groupe socialiste. Des excuses !
M. Éric Raoult. Chers collègues, des excuses, certains d’entre vous pourraient en faire pendant des années !
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis plusieurs années, le droit au logement est venu théoriser ou plutôt dissimuler les échecs du devoir de loger. Avec ce nouvel engagement pour le logement, vous avez le mérite, monsieur le ministre, de placer la pratique avant l’idéologie facile de ceux qui, pendant des années, ont manié le slogan plutôt que le ciment.
M. Jean-Claude Lefort. Vous avez pourtant un ministre qui parle beaucoup !
M. Éric Raoult. Monsieur Lefort, lorsque je me rendais dans le Val-de-Marne pour donner des subventions, vous ne teniez pas ce langage !
Le logement est en crise depuis plusieurs années. Les drames de l’été sont venus tous nous interpeller car chaque élu, de quelque ville que ce soit, connaît le dossier des mal-logés. Vous prenez le parti, avec ce projet, d’un nouvel engagement volontariste,…
M. Augustin Bonrepaux. Engagement sur du vent !
M. Éric Raoult. …qui dépasse les partis pris de ceux qui n’ont guère réussi et qui doivent parler fort dans leur porte-voix parce qu’ils ont la truelle modeste.
Votre engagement avait déjà commencé avec la loi de programme pour la rénovation urbaine de 2003, qui a permis de réhabiliter des logements dans les quartiers en difficulté.
Ensuite, avec le plan de cohésion sociale de juin 2004, vous avez fixé des objectifs ambitieux en termes de production de logements.
M. François Brottes. Et avec quels résultats !
M. Éric Raoult. Ces actions viennent enfin s’ajouter au mécanisme d’aide à l’investissement locatif privé « Robien », créé antérieurement, qui a fortement contribué au développement de l’offre nouvelle.
Continuité et bon sens sont donc les deux qualificatifs qui résument le mieux l’objectif du projet de loi dont nous débattons aujourd’hui.
Continuité car le projet de loi portant engagement national pour le logement est un projet attendu depuis les événements tragiques de ces derniers mois, qui s’inscrit, rappelons-le, dans le cadre d’une action entamée depuis 2002. Il témoigne du pragmatisme et de la mobilisation des gouvernements de notre majorité en faveur du logement.
Continuité car ce projet de loi répond également au respect des engagements très clairs du Président de la République, articulés autour de trois axes : un plan ambitieux de démolition-reconstruction ; une volonté d’agir contre les logements et les copropriétés dégradés ; le souci d’assurer la construction de nouveaux logements sociaux.
Dans ce contexte, en 2005, environ 400 000 logements ont été mis en chantier, un niveau de production qui n’a jamais été aussi élevé depuis vingt ans. En 2004, 75 000 logements sociaux locatifs ont été financés contre 42 000 seulement en 2000. L’objectif du plan de cohésion sociale est de produire 500 000 logements en cinq ans, soit un doublement du niveau de 2000. Moins de douze mois après la tenue de son premier conseil d’administration, l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, si critiquée ce soir, a déjà validé pour près de 15 milliards d’euros de travaux. Plus de 230 quartiers, où résident près d’un million et demi d’habitants, sont déjà bénéficiaires d’un dispositif qui engage plus de 57 000 constructions, 110 000 réhabilitations et plus de 110 000 résidentialisations. Au total, le programme représente 35 milliards d’euros de travaux, un niveau jamais atteint.
Mais si l’ampleur de la crise nécessite un accroissement du nombre de nouveaux logements, nous devons également tenir compte de la spécificité urbaine de certaines villes. Dans la région parisienne, l’offre foncière est très restreinte. Car on ne construit pas sur du discours virtuel, mais bien sur des terrains réels.
Mme Chantal Robin-Rodrigo. Il faut faire preuve de volonté !
M. Éric Raoult. Nous en avons de la volonté, madame Robin-Rodrigo !
Les maires sont responsables du présent de leur action, mais pas de l’histoire de leurs prédécesseurs.
Dans ma ville du Raincy, ancien château du duc d’Orléans, …
M. François Brottes. Aïe, aïe, aïe !
M. Éric Raoult. …le prix du mètre carré de terrain est trois fois et demi plus élevé qu’à Bobigny !
M. Jean-Claude Lefort. C’est de votre faute !
M. Éric Raoult. Dans la ville de Livry-Gargan, gérée par le parti socialiste depuis près de trente-cinq ans, le prix du mètre carré de terrain est deux fois et demi plus élevé qu’à Bobigny.
M. Jean-Claude Lefort. C’est déjà moins cher ! (Sourires.)
M. Éric Raoult. Peut-être, mais il n’y a pas encore 20 % de logements sociaux, alors que la mairie est socialiste.
Or les aides de l’État pour le surcoût foncier ne compensent pas cette différence.
L’article 55 de la loi SRU est venu intenter un véritable procès en sorcellerie à certains élus. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. François Brottes. Toujours des gros mots !
M. Éric Raoult. Cette mesure, qui a redonné des vitamines au parti socialiste, n’a souvent même pas laissé aux accusés la possibilité de se défendre. En fait, vous avez, chers collègues, réinventé le pilori urbain. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Mme Chantal Robin-Rodrigo. Nous n’avons de leçons à recevoir de personne ! Balayez devant votre porte !
M. Éric Raoult. Vous ne prenez pas en compte la réalité historique et la situation financière de certaines villes de France.
Au-delà des pénalités, des inéligibilités, des caricatures, des oukases, il faut sortir de l’affrontement et obtenir l’apaisement. Il faut aider les élus à construire sans les stigmatiser.
M. François Brottes. Ah ça, en matière de stigmatisation, vous êtes spécialiste !
Mme la présidente. Monsieur Brottes, vous aurez la parole tout à l’heure, laissez parler l’orateur !
M. Éric Raoult. Il y a quelques années, Roger Quilliot, un de vos illustres prédécesseurs, monsieur le ministre, avait eu cette belle formule : « Un logement social réussi, c’est un logement social invisible. »
À cet égard, monsieur le ministre, je sais que votre projet de loi va dans le bon sens, celui de la concertation, et non pas celui de la menace de sanctions. En effet, vous proposez la mise en place d’un groupe de travail sur les établissements publics fonciers locaux et d’un autre sur le logement social et l’article 55 de la loi SRU.
M. Jean-Claude Lefort. Ça va tout changer !
M. Éric Raoult. Sur ce dernier point, l’objectif d’analyser toutes les difficultés rencontrées par les villes et leur situation particulière va dans le bon sens.
Chers collègues, nous sommes tous élus dans des circonscriptions différentes. Dans la mienne, qui compte six communes, quatre sont concernées par la loi SRU, deux par la politique de la ville. On peut comprendre dès lors que les difficultés de chaque ville relèvent d’une situation spécifique. On n’a pas la chance de se considérer comme privilégié quand on habite Vaujours, Coubron, Le Raincy ou même Livry-Gargan, comme M. Alain Calmat. Je ne parle pas de Clichy et de Montfermeil.
Il faut arrêter de montrer du doigt des maires hors-la-loi, et plutôt donner la main à des collègues, qui ont besoin de l’appui des départements et des régions.
Mme Chantal Robin-Rodrigo. Quand on est législateur, on applique la loi !
M. Éric Raoult. Pour refuser l’indifférence, il faut respecter les différences, qui font la France. C’est pourquoi les décisions du département de la Seine-Maritime et de la région Île-de- France de supprimer les aides financières aux villes concernées par l’article 55 de la loi SRU sont aussi sectaires qu’inadmissibles ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Vous souhaitez également libérer du foncier et aider au financement du logement en baissant de 0,15 % le taux des nouveaux prêts de la Caisse des dépôts et consignations aux bailleurs sociaux et en allongeant la durée des prêts, mais aussi en créant des prêts dédiés à l’acquisition de terrains par la Caisse des dépôts. Cela aussi va dans le bon sens !
Vous encouragez les maires à construire, par exemple, en ajustant les coefficients d’occupation des sols, qui pourront être dépassés pour la construction de logements sociaux dans les zones déficitaires. Voilà encore qui va dans le bon sens !
Je reconnais volontiers la gêne de l’actuelle opposition. Comme elle n’a pas réussi grand-chose, il faut qu’elle parle très fort, et c’est ce que vous faites ce soir, chers collègues. Mais, sur ce dossier du logement, il importe d’avoir des échanges constructifs, dépassionnés et, je l’espère, loin des idéologies.
M. François Brottes. On peut compter sur vous ! (Rires sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Éric Raoult. Monsieur le ministre, ce pragmatisme est votre ligne de conduite depuis de nombreuses années. Après avoir écouté tous les maires, désormais vous agissez.
En tant que député de la majorité, mais aussi comme maire d’une ville dont on a beaucoup parlé, comme du reste la ville voisine, qui est très différente, je suis à vos côtés pour relever le défi de la diversité urbaine, qui est au cœur de votre projet de loi. Nous serons ensemble avec vous car ce texte représente un espoir pour les villes et pour notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
M. François Brottes. Et notez bien qu’un logement invisible n’est pas forcément un logement social réussi ! (Sourires.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Nicolas.
M. Jean-Pierre Nicolas. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, oui le logement vaut bien un engagement national. Avec l’emploi, la sécurité et la santé, il constitue une priorité de nos concitoyens. Le droit au logement pour tous est, du reste, consacré à l’article XXV de la Déclaration universelle des droits de l’homme.
Dès lors que l’emploi devient aléatoire ou temporaire, le logement tend à se substituer à lui pour exercer des fonctions d’insertion dans la société. C’est par le logement que peut se faire la reconnaissance sociale de l’individu et que passe la réinsertion dans le monde du travail.
Si chacun reconnaît toutes ces vertus accordées au logement, force est de constater que, jusqu’à ce projet de loi, la farouche détermination nécessaire pour équilibrer l’offre et la demande a fait défaut. Les déclamations sur le droit au logement de celles et ceux qui voudraient que leur soit décerné le monopole du cœur n’ont jamais fait l’objet d’une politique volontariste permettant précisément d’engager le vaste chantier rompant avec le déséquilibre d’une population qui augmente chaque année davantage que le nombre de logements construits.
En vingt ans, la population française s’est accrue de 6 millions d’habitants, soit 300 000 concitoyens environ par an, tandis que le nombre moyen de logements construits annuellement ne dépassait pas 270 000 logements, avec une année d’étiage à 52 000 logements. Dans ces conditions, il n’est pas surprenant de constater que la proportion de logements vacants est aujourd’hui la plus faible depuis trente ans. Nous sommes revenus à un taux inférieur à 7 %, soit au niveau des années soixante. À l’évidence, le marché est tendu. Il était indispensable de casser cette dérive à la hausse qu’il engendre.
Monsieur le ministre, votre détermination et votre pragmatisme ont heureusement déjà porté leurs fruits puisque plus de 400 000 logements ont été construits en 2005, dont 80 000 logements sociaux, soit le double des résultats obtenus lors de la dernière année du gouvernement Jospin, et plus de 500 000 permis de construire ont été déposés. En d’autres termes, on n’avait pas construit autant de logements depuis vingt-cinq ans et autant de logements sociaux depuis dix ans.
M. Jean-Claude Lefort. N’importe quoi !
M. Michel Piron. Mais non, c’est la réalité !
M. Pierre Cohen. La crise du logement est aussi sans précédent !
M. Jean-Pierre Nicolas. Le logement n’est pas une question de droite ou de gauche, mais tout simplement une question républicaine. Je me réjouis donc, monsieur le ministre, que votre projet de loi ne permette pas de laisser libre cours à une société duale ni de creuser un écart entre ceux qui peuvent satisfaire leurs besoins en logement sur le marché et ceux qui n’y arrivent pas. Le logement est un amortisseur social, et vous l’avez compris.
M. Jean-Claude Lefort. Non, c’est un besoin !
M. Jean-Pierre Nicolas. Bien que technique, votre projet de loi est empreint de pragmatisme et de bon sens. En effet, pour construire il est nécessaire de disposer de terrains et donc de rompre avec la spirale à la hausse que nous connaissons. C’est le pilier de votre projet de loi, l’État montrant l’exemple et incitant les collectivités locales à faire de même par le biais des PLU ou des POS.
Au-delà de la mise à disposition de terrains, je suggère que l’on donne réellement la possibilité aux organismes HLM de se porter acquéreurs d’un immeuble vendu en état futur d’achèvement par un maître d’ouvrage privé. Ce dispositif permettra l’adaptation des dispositions de l’article 55 de la loi SRU aux réalités du terrain…
M. Pierre Cohen. Ah !
M. Jean-Pierre Nicolas. …sans toutefois, bien entendu, en renier la philosophie.
Le logement social locatif à vie n’est pas le but des Français. Ils souhaitent être propriétaires de leur habitation. Aussi, je me réjouis de la mesure de taux réduit de TVA. Cet engagement national pour le logement constituera un levier économique important, puisque 22 % de notre PIB provient du secteur du logement, soit près du quart de la production de la richesse nationale.
En conclusion, le marché du logement accuse et amplifie les différences entre catégories sociales, il ségrègue, il oppose et peut même humilier. Votre projet de loi, monsieur le ministre, est un correcteur de ce marché, un réducteur d’inégalités sociales. C’est votre combat, c’est notre combat ; gagnons-le ensemble ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Lignières-Cassou.
Mme Martine Lignières-Cassou. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, à cette heure du débat, beaucoup de choses ont déjà été dites. Aussi, dans le temps qui m’est imparti, je concentrerai mon propos sur deux points. Le premier concerne la pertinence des seuils qui déclenchent l’obligation de logements sociaux et le second a trait au problème que va poser, à mon sens, le conventionnement de logements sans travaux prévu dans votre projet de loi.
Premièrement, il me semble qu’on ne peut pas prétendre à un engagement national pour le logement si 90 % des communes échappent à l’obligation de posséder des logements sociaux. L’effort pour le logement doit être partagé. Les seuils, tels qu’ils ont été définis il y a quelques années, sont-ils encore pertinents ? Pour quelles raisons la loi SRU ne s’applique-t-elle pas dans les communes de moins de 3 500 habitants ? En effet, le problème de l’accessibilité au logement ne se limite pas aux grandes communes, il se pose aussi dans les petites villes. Une étude, publiée dans Le Monde d’hier, montre que les zones rurales se sont développées ces dernières années, notamment à la périphérie des villes, et nous savons combien la pression foncière y augmente et combien il devient difficile de s’y loger.
Ce n’est pas la taille des communes qui peut être un obstacle à la mise en œuvre de la construction de logements sociaux puisque nombre de communes sont regroupées aujourd’hui dans des EPCI ou dans des communautés de communes qui peuvent être l’outil technique de la mise en œuvre de cette obligation. Que signifie donc un engagement national pour le logement qui élude une part importante du territoire et de la population ?
Dans le même ordre d’idées, les programmes locaux de l’habitat ne devraient-ils pas être réalisés dans les communautés de communes, quelle que soit leur taille ? Il en va de même pour les schémas de cohérence territoriale. À mon sens, ils devraient exister dans tous les bassins de vie, quelle que soit leur taille, qu’une commune de 15 000 habitants structure ou non une aire urbaine.
J’ajoute que, pour tenir compte des évolutions de la population, il me semble dommage de ne se référer qu’au seul recensement général qui a lieu tous les neuf ans. La prise en compte des recensements intermédiaires permettrait de lisser l’effort de construction et de conventionnement de logements.
J’en viens maintenant à mon second point, la possibilité pour les propriétaires de conventionner des logements sans y effectuer de travaux.
Cette procédure relèvera de l’Agence nationale pour l’amélioration de l’habitat, rebaptisée pour l’occasion Agence nationale de l’habitat. Cet organisme pourra désormais passer des conventions avec des propriétaires qui pourront bénéficier d’une réduction de 30 % de leurs revenus fonciers, sans qu’ils soient tenus de réaliser des travaux d’amélioration.
Selon vous, ce nouveau dispositif contribuera à élargir l’offre de logements à loyer maîtrisé. Mais une telle mesure a de quoi inquiéter parce que l’ANAH n’a pas les moyens d’exercer des contrôles, pas plus d’ailleurs que les caisses d’allocations familiales.
Nous allons donc vraisemblablement au-devant de graves problèmes puisque les propriétaires pourront louer des logements, qu’ils soient insalubres ou décents, tout en bénéficiant de déductions fiscales.
Certes, il faut davantage de logements sociaux et de logements intermédiaires, mais pas à n’importe quel prix. On ne peut accepter que l’élargissement de l’offre se fasse au détriment de la qualité des logements. Les récents drames liés à l’insalubrité des logements devraient faire réfléchir.
Je viens d’évoquer deux failles de ce projet de loi. Mais il en comporte beaucoup d’autres. C’est ce que le groupe socialiste démontrera tout au long de la discussion de ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Debré.
M. Bernard Debré. Monsieur le ministre, je me contenterai d’aborder deux questions, essentielles à mes yeux, le logement des classes moyennes et l’accession à la propriété.
Je comprends que la priorité soit donnée aux mal logés, aux sans domicile fixe et aux ménages à revenus modestes. Pour autant, il ne faut pas oublier les classes moyennes, qui sont vitales pour l’équilibre de notre société et de nos quartiers et qui sont, dans les agglomérations d’une certaine taille, les principales victimes de la pénurie de logements locatifs et les exclus de fait du parc social. En la matière, Paris est malheureusement exemplaire.
En effet, si les classes moyennes remplissent les conditions de ressources pour postuler au logement social réglementé, elles bénéficient rarement des attributions qui vont tout normalement aux demandeurs prioritaires, du fait de l’insuffisance de logements. Elles se retournent donc vers le secteur libre, dont les loyers sont élevés et qui est par ailleurs en voie d’atrophie, notamment dans le cœur des grandes villes.
Le phénomène le plus remarquable, sans précédent depuis 150 ans, est le désengagement pur et simple des investisseurs institutionnels du logement locatif, sans doute en raison d’une rentabilité insuffisante et de l’accroissement des contraintes pesant sur des bailleurs pour la protection des locataires.
La vente par lots du patrimoine des institutionnels réduit comme peau de chagrin le parc destiné aux classes moyennes qui n’ont d’autre choix que de quitter les centres-villes pour louer un logement loin de leur lieu de travail. Les infirmières de l’AP-HP habitent souvent très loin de leur lieu de travail, alors que l’AP-HP dispose de milliers d’appartements. Ne pourrait-on pas trouver les moyens de les y loger, moyennant un loyer adapté durant quelques années ?
Aujourd’hui, le marché du logement locatif non social est uniquement l’affaire des investisseurs, qui représentent 94 % du parc concerné et tendent vers les 100 %. II est quand même stupéfiant de ne plus trouver en France d’investisseurs dans le secteur locatif libre sans aide fiscale massive. II me paraît indispensable que le Gouvernement élabore un cadre de travail dans lequel les investisseurs institutionnels pourraient naturellement trouver intérêt à réinvestir dans un secteur locatif privé à loyers libres et intermédiaires et qu’il fasse des propositions en ce sens à la représentation nationale. En attendant, il serait utile de favoriser le développement de l’offre de logements intermédiaires dans les grandes agglomérations.
À cet égard, il est inconcevable que l’article 55 de la loi SRU n’incite pas les communes à favoriser, au-delà des logements sociaux, la production de logements à loyers intermédiaires et maîtrisés, tout autant nécessaires.
Il est indispensable d’élargir le périmètre des 20 % à ce type de logements, en incluant pour le moins les logements financés avec des prêts PLI, dont la distribution s’est malheureusement effondrée.
Je demande donc au Gouvernement de bien vouloir prendre en compte ces catégories de logements intermédiaires dans le quota de l’article 55 de la loi SRU, quitte à les sous-pondérer, par exemple, au coefficient de 0,50 % par logement intermédiaire décompté.
Ma seconde préoccupation concerne l’accession à la propriété des locataires du parc social HLM.
Nombre de ménages à faibles ressources n’ont pas les moyens de devenir propriétaires, et la forte hausse des prix, tant dans le neuf que dans l’ancien, rend encore plus illusoire cette espérance. Il n’en reste pas moins qu’aider ceux qui souhaitent passer du statut de locataire à celui de propriétaire est une grande cause nationale.
Tout ce qui facilite la constitution d’un patrimoine immobilier par les ménages est une bonne chose, tant pour leur sécurité matérielle et leur retraite qu’au regard de la responsabilisation et de la stabilité des populations qui font ce choix. Je ne peux donc qu’approuver l’ensemble des mesures existantes et proposées pour faciliter le parcours vers la propriété.
C’est dans le parc social existant que l’accession peut connaître son essor le plus rapide et le plus décisif au profit des occupants locataires, pour la simple raison que le prix de vente des logements dans des immeubles sociaux en grande partie amortis est beaucoup moins élevé que le prix du neuf, a fortiori de la promotion privée. En ce sens, l’amendement de la commission autorisant l’organisme propriétaire à pratiquer une décote ou une surcote de 35 % par rapport au prix des Domaines est une excellente mesure d’ajustement aux capacités financières des candidats acquéreurs.
Une politique d’accession sociale d’envergure, si nécessaire soit-elle, s’est heurtée jusqu’à présent à la réticence et parfois à l’hostilité farouche des organismes propriétaires.
La mise en œuvre des multiples textes de lois sur la vente des logements HLM pris depuis des décennies est restée lettre morte.
M. Jean-Louis Dumont. Ne dites pas n’importe quoi !
M. Bernard Debré. Aujourd’hui, sur un parc de plus de 4 millions de logements sociaux, seuls quelques milliers sont acquis chaque année par les occupants, soit un pourcentage minuscule qui ne correspond même pas à la respiration normale d’une gestion économique d’un parc de logement.
Sans incitation plus contraignante, je crains que nos souhaits ne trouvent guère d’écho auprès des bailleurs sociaux. C’est pourquoi il faut reconnaître aux locataires sociaux un véritable droit à l’accession de leur logement ou d’un logement équivalent dans le parc social, s’ils en ont la volonté et la capacité financière.
M. Jean-Louis Dumont. Cela est déjà inscrit dans la loi !
M. Bernard Debré. Je demande enfin que les recettes provenant de ces ventes soient obligatoirement réinvesties dans la construction de logements sociaux et la réhabilitation d’immeubles dégradés, ce qui garantirait que l’accession sociale ne se fait pas au détriment du locatif social, mais qu’elle lui est structurellement complémentaire.
Le devenir du parc HLM et le statut des occupants est de la responsabilité de la nation, et non des organismes qui sont simplement les outils légitimes et efficaces de production et de gestion. C’est à la représentation nationale et aux élus qu’il revient en définitive de déterminer les règles d’emploi du parc social financé par l’argent public. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Mme la présidente. La parole est à M. Étienne Pinte.
M. Étienne Pinte. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, plusieurs millions d’hommes, de femmes, d’enfants, d’étudiants, de personnes âgées, d’étrangers, de sans domicile fixe sont exclus du droit à un logement décent. Pourtant, la France proclame le droit au logement depuis plus de vingt ans, comme le rappelle très justement le onzième rapport du Haut comité pour le logement des personnes défavorisées qui est sorti en décembre.
Avant de revenir sur cette notion, je mettrai l’accent sur les erreurs à ne pas commettre car elles risqueraient d’entraver les efforts que vous faites, monsieur le ministre, que nous faisons tous ensemble pour redresser une situation que nous avions pourtant bien analysée il y a dix ans en dénonçant la fracture sociale. Dix ans déjà ! Dix ans de perdus et qu’il faut rattraper.
Première erreur à éviter : changer constamment la règle du jeu. En 1990, lors du vote de la loi d’orientation sur la ville, ma ville possédait plus de 20 % de logements sociaux ; en 1996, la définition du logement social a été modifiée et nous sommes tombés à 18,5 % ; en 2000, nouvelle modification de la définition et nous descendons à moins de 15 %. Ces pratiques sont insupportables dans un domaine où nous avons besoin de lisibilité sur le moyen et long terme.
Deuxième erreur : croire que l’annonce d’une décision positive sera rapidement suivie d’effet. Vous savez combien la mobilisation du foncier, surtout en région parisienne, est difficile. Il y a quelques mois, la décision de Gilles de Robien, quand il était encore ministre de l’équipement, de céder des terrains appartenant à l’État a été accueillie très favorablement par les responsables des communes concernées. Qu’en est-il aujourd’hui ? La cession d’une partie des terrains de la direction départementale de l’équipement est remise aux calendes grecques au prétexte que les responsabilités entre l’État et les départements ne sont pas réparties.
M. Jean-Louis Dumont. Et voilà !
M. Étienne Pinte. Il s’agit des parcs et ateliers, dont on ne sait de surcroît ce que deviendront les personnels aux statuts différents. Autre exemple : la cession d’un terrain de soixante hectares situé dans le quartier de Satory, propriété du ministère de la défense, qui nous était promis de longue date. Le problème n’est toujours pas réglé car personne ne sait aujourd’hui qui va financer le coût de la dépollution et l’incertitude dure depuis des années.
M. François Brottes. C’est pareil pour AZF !
M. Étienne Pinte. Troisième exemple : il m’a fallu plus de dix ans pour mettre d’accord la SNCF et Réseau Ferré de France sur la propriété d’un terrain qu’ils étaient prêts à nous céder pour réaliser un complexe économique et social.
M. Jean-Louis Dumont. C’est bien la réalité du terrain !
M. Étienne Pinte. En effet !
Troisième erreur : prendre une bonne mesure sans offrir aux décideurs les incitations nécessaires pour qu’ils y adhèrent pleinement, je veux parler de l’accession sociale à la propriété. Comment voulez-vous, monsieur le ministre, même si je suis très favorable au logement social, que j’accepte que les bailleurs sociaux de ma ville cèdent une partie de leur patrimoine en sachant qu’il sortira du quota du logement social ? Comment voulez-vous que nous nous lancions dans la construction de maisons à 100 000 euros si elles n’entrent pas dans le fameux quota de 20 % ? Déjà, nous n’atteignons pas ce plancher, malgré nos efforts pour créer 100 logements sociaux chaque année.
Quatrième erreur : ne prendre en compte que le coût du foncier dans le calcul de l’aide de l’État. Ce n’est pas possible car chaque ville a sa spécificité et ses contraintes – environnementales, architecturales, urbanistiques, culturelles – qui grèvent la réalisation de logements sociaux. Une centaine de villes en France abritent des secteurs sauvegardés très importants où le coût de la construction est de 30 % à 40 % plus élevé qu’ailleurs. Il faut prendre en compte ces surcoûts.
Cinquième et dernière erreur à éviter : mettre en place, au nom de la mixité sociale, des procédures qui risqueraient de réduire la quantité de logements sociaux à mettre en chantier. L’arrivée de nouvelles populations dans un quartier du centre ville, comme de la périphérie, ne doit pas faire fuir celles qui y vivent déjà.
En conclusion, je reviens à la notion de droit au logement opposable que vous avez écarté, monsieur le ministre, du moins pour le moment. Le droit au logement doit être protégé non seulement par une obligation de moyens, mais aussi par une obligation de résultat.
Les élus locaux ont le souci de ne pas « surdensifier » la ville et de ne pas l’étendre inconsidérément.
Mme la présidente. Votre temps de parole est écoulé.
M. Étienne Pinte. Ces préoccupations doivent être conciliées avec la nécessité de permettre le logement de tous.
L’article 55 de la loi SRU relève de l’obligation de moyens, mais elle ne saurait suffire pour respecter le droit au logement. Les pouvoirs publics doivent être en mesure de faire prévaloir l’intérêt collectif. Une obligation de résultat s’impose. C’est la raison pour laquelle le Haut comité propose le droit au logement opposable à la mode britannique – méthode douce et ciblée sur certaines populations – avant de passer un jour à la méthode écossaise, plus contraignante, selon laquelle l’engagement s’étale dans le temps et dont les résultats doivent être définitivement actés en 2012. Je souhaite donc, monsieur le ministre, que vous preniez en compte plusieurs propositions – et pourquoi pas toutes ? – du Haut comité pour le logement des personnes défavorisées. Ce serait le gage de la réussite dans le domaine du logement de votre plan de cohésion sociale. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Cohen.
M. Pierre Cohen. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le logement connaît aujourd’hui une crise profonde, équivalente à celle de l’après-guerre, alors que nous n’avons pas subi une destruction massive du patrimoine immobilier.
Nous ne sommes pas non plus dans une phase d’explosion démographique, mais il existe un décalage entre les politiques publiques et les comportements des ménages, dont les besoins évoluent. La recomposition des familles, la mobilité des trajectoires, le vieillissement de la population, le prolongement des études contribuent aux mutations structurelles du secteur : l’offre aujourd’hui n’est plus adaptée à la complexité du cycle de vie. Il faut faire face à la pénurie de logement compte tenu de l’évolution des besoins, autrement dit du parcours résidentiel. Pourtant, on continue à produire du logement comme si les ménages avaient un comportement linéaire tout au long de leur vie.
Le logement, avec l’emploi, constitue l’un des principaux déterminants du statut social. Il est un facteur discriminant des inégalités et, partant, il participe à la crise sociale. Certains considèrent en effet le logement comme un investissement rentable, surtout en période de crise, où se déchaîne comme jamais la spéculation foncière et patrimoniale. Mais, pour les autres, il représente une charge qui pèse de plus en plus lourd sur leur budget – je pense en particulier aux plus bas salaires –, dont le pouvoir d’achat baisse. Il peut aussi stigmatiser les habitants d’un quartier ou d’une rue, comme l’ont montré les événements du mois de novembre dernier, voire marginaliser quand on n’a plus de toit. Quand il est inadapté, le logement produit échec scolaire, violences familiales, mal de vivre. Il doit donc être traité comme un élément structurant de la dignité de l’homme.
Ce projet de loi, annoncé comme l’un des chantiers phares du Gouvernement, répond-il à tous les problèmes ? Le sujet doit être abordé avec une grande honnêteté intellectuelle. Or, monsieur le ministre, vous répétez à l’envi que le gouvernement Jospin a failli et que vous allez apporter les solutions à la crise. Cependant, vous êtes au pouvoir depuis quatre ans et la crise s’est encore aggravée ! Il y a lieu de s’interroger, tout de même.
Vous aviez pourtant promis que la création de l’ANRU lèverait tous les obstacles que nous n’avions pas pu ou su surmonter.
M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Les villes socialistes demandent bien des subventions à l’ANRU !
M. Pierre Cohen. Force est de constater que les besoins sont nombreux et que les constructions de logements sociaux n’évoluent guère, même si elles ont légèrement augmenté. Les destructions/reconstructions stagnent parce que l’offre manque d’ambition. Reconnaissez que si les choses ont évolué ces dernières années, c’est grâce à la gauche et aux effets de la loi SRU ! Certes, l’objectif de 20 % de logements sociaux est encore loin, mais l’idée fait son chemin dans l’esprit des habitants.
Vous faites l’erreur majeure de croire que l’accession, fût-elle sociale, constitue la réponse à la crise.
M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. On a bien compris que vous n’en vouliez pas !
M. Pierre Cohen. Elle ne peut y répondre que très partiellement, et ce sont bien toutes les formes de logement social qu’il faut favoriser. Or, contrairement à vos déclarations, les financements de l’État se portent essentiellement sur les logements de type « Robien », sans contrepartie sociale. Selon la revue Habitat et Société, l’État a versé en 2005 1 170 millions d’euros pour 53 000 logements PLUS et 5 000 logements PLAI, c’est-à-dire 58 000 logements véritablement sociaux, contre 1 350 millions d’euros pour les logements « Robien » neufs au nombre de 60 000.
Mme Chantal Robin-Rodrigo. Toujours pour les mêmes !
M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Mais vous avez réduit de moitié le logement social !
Mme la présidente. Monsieur le ministre, laissez parler l’orateur.
M. Pierre Cohen. Ces statistiques reflètent une réalité très inquiétante, d’autant que, dans certaines petites villes, les logements « Robien » restent vacants ! On ne peut pas se fier aux chiffres, monsieur le ministre !
Cette loi apporte-t-elle le souffle nécessaire ? Rien n’est moins sûr. Elle produit la même logique en renforçant les dispositifs d’accession sociale, avec des annonces illusoires de maisons à 100 000 euros. Mais vous ne pourrez relever ce défi qui si les collectivités locales paient le terrain et le viabilisent, pour ne rien dire des équipements.
M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Et le taux réduit de TVA ?
M. Pierre Cohen. En se déchargeant une fois de plus sur le secteur privé et sur le marché, le service public du logement, pourtant de plus en plus nécessaire, est réduit à la portion congrue. Les nouvelles missions conférées à l’ANAH, qui l’autorisent à conventionner des logements privés, en sont une démonstration !
Enfin, vous ne levez pas les obstacles à la construction. Vous demandez des propositions, en voici ! Cela passe par une forte augmentation de la taxation des communes qui ne se donnent pas les moyens d’atteindre l’objectif de 20 % de logements sociaux ; par le transfert d’une grande partie des aides destinées aux logements de type « Robien » vers les PLUS et les PLAI ; par l’obligation pour tout nouveau programme de plus de vingt logements, dans les communes en deçà des 20 % de garantir au moins 30 % de logements sociaux ; par l’interdiction pour l’État de faire des profits sur les opérations foncières réalisées au titre du logement social.
Nous attendions, monsieur le ministre, eu égard à l’urgence de la situation et à l’intérêt du pays, un projet de loi ambitieux qui réponde le plus vite possible au défi qu’est le droit au logement de chacun. Malheureusement, les moyens ne sont pas au rendez-vous. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. François Brottes. Ça a fait très mal !
Mme la présidente. La parole est à M. Claude Goasguen.
M. Claude Goasguen. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma foi, nous soutiendrons ce texte parce qu’il s’inscrit dans une démarche « globalement positive ». (Rires sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Chacun comprend ce que cette expression signifie, n’est-ce pas, chers collègues ?
M. Jean-Claude Lefort. Et les droits d’auteur ? (Sourires.)
M. Claude Goasguen. Nous passerons outre les quelques aspérités du projet, en particulier les dispositions qui ont trait à l’article 55 de la loi SRU et qui ne satisfont pas beaucoup d’entre nous.
Des avancées ont eu lieu en commission – je ne l’ignore pas. Je souhaite qu'elles soient confirmées en séance publique, notamment en ce qui concerne l'accession à la propriété.
M. Pierre Cohen. Cela signifie-t-il qu'il y aura une offensive ?
M. Claude Goasguen. J'aurais également souhaité – des collègues ont évoqué la question – que les classes moyennes, victimes dans les grandes agglomérations de l'augmentation du foncier et du locatif, soient elles aussi susceptibles d’intéresser l’État sur le plan social.
M. Michel Piron. C’est le cas.
M. Claude Goasguen. Nous y reviendrons au cours du débat.
Ce texte est globalement positif parce qu'il tend à relancer la construction en résorbant la crise du logement et à corriger les effets pervers des mesures prises sous les gouvernements précédents.
Je limiterai ici mon propos à la situation en Île-de-France – qui n’est pas la moindre partie du territoire. Le système mis en place fonctionne à peu près correctement dans presque toutes les régions. Il est vrai, la région PACA souffre quelque peu, mais c’est l’Île-de-France qui souffre le plus, monsieur le ministre. En 2005, en France, plus de 400 000 logements ont été mis en chantier et plus de 500 000 demandes de permis de construire ont été déposées, ce qui laisse présager une accélération du nombre de constructions pour l’année 2006. Mais cette embellie ne concerne pas l'Île-de-France, et encore moins Paris qui souffre depuis cinq ans d'une politique municipale malthusienne, préjudiciable à la place de la capitale dans la compétition avec les autres grandes métropoles européennes.
Quand j'entends mes collègues Verts – d'ailleurs absents ce soir – réclamer ici la construction de logements sociaux et soutenir au Conseil de Paris qu’il ne faut surtout pas construire,…
M. Pierre Cohen. Des noms !
M. Claude Goasguen. …je me demande ce qui leur arrive durant leur trajet entre l’Hôtel de Ville et l’Assemblée.
Quand j’entends certains de mes collègues socialistes…
M. Pierre Cohen. Des noms !
M. Claude Goasguen. …vanter ici les mérites du logement social et que je vois les résultats de la politique menée en ce domaine à Paris en 2005, je m’interroge également. Savez-vous, mes chers collègues, combien de logements neufs ont été construits à Paris en 2005 ? On en a construit mille, dont 700 au titre du logement aidé et 300 au titre du secteur privé. Je rappellerai qu’en 2000 la Ville de Paris avait construit 5 500 logements neufs sans l’aide de la région ni de l’État. La seule explication possible d’une telle chute, c’est qu’elle est le résultat d’une politique déterminée, strictement contraire aux objectifs affichés ici par les députés Verts et les députés socialistes.
Un autre signe ne trompe pas : sur l’ensemble de l’Île-de-France, 750 ZAC sont actuellement actives, mais alors que jusqu'en 2000, on en créait quelque cinquante par an, ce nombre est tombé à dix depuis l'adoption de la loi SRU. La situation est encore plus préoccupante à Paris, où aucune ZAC n'a été créée depuis 2001, à l'exception de celle des Batignolles, voulue par l'État et liée à la candidature de Paris aux Jeux olympiques de 2012.
M. Gérard Hamel, rapporteur, et M. Michel Piron. C’est vrai !
M. Claude Goasguen. À part cela, rien !
Une telle attitude est à mettre en regard de la politique ambitieuse menée par les maires précédents, pour qui les ZAC constituaient un outil d'urbanisme indispensable.
M. Michel Piron. Tout à fait !
M. Claude Goasguen. Cette chute, qui est le résultat de la politique délibérément menée par la municipalité socialiste de Paris, et en premier lieu par son maire, qui la conduit, devrait inspirer au Gouvernement des mesures, dont je me permets de soumettre certaines à votre sagacité, monsieur le ministre.
Il faudrait tout d’abord simplifier les procédures du code de l'urbanisme, notamment celles prévues au livre III pour les ZAC, qui sont trop lourdes à gérer et auxquelles devrait se substituer la délivrance d'un permis de construire valant division.
Il serait également profitable aux communes d’Île-de-France et, du reste, de l’ensemble du territoire, que le Gouvernement publie à l'intention des maires un guide d'application de la loi SRU.
M. Pierre Ducout. Cela a été fait en son temps.
M. Claude Goasguen. Non, le guide SRU n’a pas été adapté : il conviendrait de procéder à une nouvelle distribution.
Enfin, monsieur le maire (Sourires)…
Un député du groupe socialiste. Monsieur le ministre !
M. Claude Goasguen. …monsieur le ministre, en effet – mon lapsus provient du fait que j’en appelle à M. le ministre pour se substituer à l’autorité défaillante du maire –, je souhaite vraiment qu’à côté des trois opérations d'intérêt national que vous avez annoncées cet après-midi pour l'Île-de-France et qui constituent une très bonne initiative pour les cas d’urgences, une autre puisse concerner Paris, où existent encore d'importantes emprises foncières que le maire refuse de libérer, notamment dans les arrondissements du Nord-Est.
M. Jean-Louis Dumont. Et les Batignolles ?
M. Claude Goasguen. Je vous demande instamment de mettre à l'étude le lancement d'une opération d'intérêt national à cheval sur les XVIIIe et XIXe arrondissements, où cent hectares au moins sont urbanisables sur 200. Paris ne peut pas persister dans cet assèchement du logement social et cette anémie de la construction en demeurant l'endroit où l'on construit le moins de logements de toute la France ! Il y a va de l’avenir de la capitale. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
M. Michel Piron. Il fallait que cela soit dit.
M. le président. La parole est à M. Philippe-Armand Martin.
M. Philippe-Armand Martin. Monsieur le ministre, le projet de loi portant engagement national pour le logement qui est aujourd'hui soumis à l'examen de l'Assemblée est, je crois, l'expression d'une volonté forte que nous reconnaissons à travers votre action.
Le logement constitue, au même titre que l'emploi, l'une des principales préoccupations de nos concitoyens, parce que disposer d'un toit est un vecteur non seulement d'intégration sociale, mais aussi et surtout d'accomplissement familial, et qu’être en mesure de se loger permet, en partie, d'être inséré au sein de notre société.
Pour autant, et malgré toute l'importance attachée à la possession ou à la location d'un logement, les carences en la matière sont nombreuses, portant principalement sur la rareté et la cherté du foncier, ainsi que sur le manque de logements sociaux. C’est pourquoi je tiens à saluer, monsieur le ministre, votre volonté politique de remédier à une telle situation. Le besoin d'une offre plus importante de logements n’a jamais été aussi pressant parce que la question du droit au logement ne s’est jamais posée en des termes plus cruciaux.
Les chiffres de la construction de logements sont à ce titre éloquents. En 1980, on dénombrait 400 000 mises en chantier de logements, et en 2001, 303 000.
Je rappellerai également que 80 000 logements sociaux étaient financés en 2004, contre seulement 38 000 en 2000. Ainsi, contrairement aux affirmations de nos opposants socialistes, ces chiffres révèlent bien que d'importants retards ont été accumulés sous la précédente législature.
Devant un tel constat, la loi portant engagement national pour le logement définit trois objectifs : libérer le foncier, développer l'offre de logement ainsi que l'accès au logement et améliorer les conditions de logement de nos concitoyens.
Ce dispositif permettra également de renforcer les objectifs que nous nous sommes assignés dans le cadre de la loi de cohésion sociale : les dispositions qui sont actuellement soumises à notre examen amplifieront les efforts engagés, en permettant notamment de libérer le plus de foncier possible, puisque c’est sa rareté qui constitue un obstacle majeur à la réalisation de logements, et plus encore de logements sociaux.
La crise du logement ne se limite évidemment pas aux seuls logements sociaux : elle est tout aussi prégnante en ce qui concerne les autres catégories de logements, notamment les catégories intermédiaires. L’ensemble du dispositif prévu par le présent texte permettra – je le sais, monsieur le ministre – de diversifier et de renforcer les offres de logements, à quelque catégorie qu’ils appartiennent.
À cet égard, une disposition du projet me paraît particulièrement importante : l'application d'un taux de TVA réduit à 5,5 % aux opérations d'accession sociale à la propriété d'un logement neuf dans les quartiers faisant l'objet d'une convention de rénovation urbaine signée par l'Agence nationale pour la rénovation urbaine.
J'attache une importance toute particulière à ce dispositif, car, lors de sa venue dans ma circonscription, Mme Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité, m'a fait part de sa mise en œuvre, évidemment s’il est adopté, pour l'opération de renouvellement urbain qui sera conduite dans le quartier de Bernon à Épernay. Cette large opération permettra de redéployer celui-ci au sein de la ville, d’offrir à ses habitants des logements de meilleure qualité et de susciter une nouvelle vie de quartier. Je suis en effet convaincu que les personnes qui deviendront propriétaires de leur logement grâce au dispositif de TVA à taux réduit seront bien plus respectueuses de leur cadre de vie. Un tel respect, par chacun, de son cadre de vie et de son logement, ainsi que l'arrivée de nouveaux habitants contribueront à renforcer la mixité sociale dans nos villes, et donc leur quiétude.
Mes chers collègues, ne nous trompons pas d'enjeu : ce projet de loi n'a pas pour vocation de s'appliquer dans dix ou quinze ans mais de répondre à la crise actuelle du logement en y apportant des solutions efficaces. Au travers de l'exemple que je viens de vous citer, vous aurez compris que ce texte a vocation à s'appliquer au lendemain de son adoption.
En votant ce dispositif, nous afficherons notre volonté de mettre en œuvre une politique du logement, sociale et privée, ambitieuse, et qui soit, surtout, au service de toutes les Françaises et de tous les Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à M. Pierre Ducout.
M. Pierre Ducout. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, aujourd'hui, le logement constitue, souvent au même titre que l'emploi, le premier problème pour le très grand nombre de nos concitoyens qui, très mal logés, vivent dans des conditions d’inconfort, de surpeuplement, voire d’insalubrité, difficilement supportables. Cette situation concerne beaucoup de jeunes, qui, en raison du nombre insuffisant de logements locatifs sociaux, doivent cohabiter avec leurs parents, alors même qu'ils ont déjà des enfants. Elle concerne également ceux qui, devant l'envolée des loyers, doivent consacrer une part croissante de leur budget aux dépenses de logement, ou même qui ne peuvent plus y faire face : nul n’ignore que les procédures d’expulsions sont en constante augmentation. Elle se traduit enfin par l’absence de toute mixité sociale, les quartiers sensibles de nos grandes villes concentrant les populations en difficulté.
Votre gouvernement, monsieur le ministre, loin d’avoir fait preuve d’une réelle volonté de régler ces problèmes, a pris des mesures et donné des signaux qui ont accentué les difficultés. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Comme l'a fort bien souligné le rapport du sénateur Repentin, approuvé sur tous les bancs du Sénat, relatif aux facteurs fonciers et immobiliers de la crise du logement…
M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Il s’agit du rapport Braye et Repentin !
M. Pierre Ducout. … – vous avez tout à fait raison, monsieur le ministre –, le dispositif de Robien de dégrèvement fiscal a constitué un effet d'aubaine puisqu'il accorde un avantage fiscal sans aucune contrepartie sociale et sans préoccupation des besoins spécifiques des bassins d’habitat, tout en contribuant à la flambée des prix du foncier.
M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Le rapport ne dit pas cela !
M. Pierre Ducout. Si, monsieur le ministre ! Ce dispositif a conduit à une surenchère sur le foncier relativement rare.
M. Jean-Louis Dumont. Notre collègue a raison !
M. Pierre Ducout. Par ailleurs, jusqu'en 2005, votre gouvernement a laissé accroire que les dispositions prévues par la loi SRU, adoptée par la gauche, en matière de logement social, en vue d’assurer une plus grande mixité sociale par la réalisation de 20 % de logements locatifs sociaux, ne seraient pas appliquées, si bien que des communes ont pu se targuer ouvertement de braver la loi. Ce sont seulement les très graves incidents de novembre dans les quartiers sensibles qui ont poussé le Président de la République à dire que cette loi devait être appliquée...
M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Quel amalgame !
M. Pierre Ducout. …et le président de notre commission à convenir que les maires qui ne font aucun effort devaient être sanctionnés.
M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Pourquoi avez-vous divisé par deux la construction de logements sociaux ?
M. Pierre Ducout. Certains amendements déposés par la droite nous font douter de la volonté réelle de maintenir les contraintes indispensables pour appliquer l'article 55 de la loi SRU visant à favoriser la mixité sociale.
Je souhaite souligner deux points du projet de loi. En premier lieu, s'agissant de l'urbanisme, qui est pour une large part du ressort du maire, il est possible de se retrouver sur un certain nombre de sujets.
M. Michel Piron. Alors, que demande le peuple ?
M. Pierre Ducout. Il en est ainsi de la mobilisation de la ressource foncière et de la sécurisation des zones d’urbanisme, de l’accélération et de la simplification notamment des procédures d’obtention des permis. Nous sommes également d'accord sur l'échéancier des zones à urbaniser et la prolongation de la date limite pour la révision simplifiée des plans d’occupation des sols jusqu'au 1er janvier 2010, notamment pour proposer des terrains pour les logements locatifs sociaux, cette mesure intéressant un grand nombre de communes petites et moyennes.
Dans le même esprit, j’ai présenté un amendement concernant les schémas de cohérence territoriaux, qui sont un bon outil d’aménagement, tant pour les aires urbaines que pour les pays ruraux.
Il s’agit aussi d’encourager les maires bâtisseurs. De ce point de vue, j’ai participé au groupe que vous avez mis en place, monsieur le ministre, autour de M. Beysson, délégué interministériel pour le développement de l’offre de logement. Oui à la compensation de l’État pour le foncier bâti, à la possibilité de majorer les COS pour réaliser du logement locatif social jusqu’à 50 %, à l’obligation de tenir compte des logements locatifs sociaux bâtis dans la dotation de solidarité communautaire, à l’application du droit de préemption urbain pour les parts de SCI. Ce dernier point est extrêmement important parce que celles-ci sont un montage qui devient courant aujourd’hui pour s’exonérer de ce droit de préemption qui est un outil prioritaire pour les maires afin de réaliser des logements locatifs sociaux. Oui enfin au partage des plus-values liées au classement en terrain constructible, mais le taux aujourd’hui retenu n’est pas sérieux – 6 % –, Bercy freine. Beaucoup de maires, en discutant avec les propriétaires, obtiennent dans le concret beaucoup plus par affectation de terrain. 30 %, par exemple, serait plus à l’échelle, avec engagement de réalisation de logements sociaux.
Ensuite, s’agissant de l’obligation d’aller vers plus de mixité sociale par l’application de l’article 55 de la loi SRU, après avoir sanctionné en particulier la ville du ministre de l’intérieur suite à un constat de carence, il faudrait aller jusqu’à la deuxième étape prévue par la loi : que le représentant de l’État prenne la place du maire pour réaliser ces logements locatifs sociaux nécessaires.
M. Gérard Hamel, rapporteur. Et avec quelle légitimité ?
M. François Scellier, rapporteur pour avis. Je ne vois d’ailleurs pas comment il ferait.
M. Pierre Ducout. Ayant accepté de participer, en tant que député et président du groupe urbanisme de l’AMF, à un groupe de travail animé par l’ANRU et mis en place à votre demande, monsieur le ministre, sur l’efficacité du pouvoir des préfets au regard de la construction de logements sociaux, je serai très vigilant sur ce sujet.
Vous l’avez compris : il y a vos paroles,…
M. Gérard Hamel, rapporteur. Et les actes aussi !
M. Pierre Ducout. …mais nous verrons le texte qui sortira du Parlement et les actes qui suivront, en usant de nos possibilités pour infléchir réellement la politique du logement…
M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Voulez-vous qu’on la divise par deux ?
M. Pierre Ducout. …en direction de ceux qui en ont le plus besoin dans notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Gilbert Meyer.
M. Gilbert Meyer. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans sa politique de logement, le Gouvernement a décidé d’amplifier les efforts déjà entrepris par le plan de cohésion sociale, et cela avec un grand succès.
II faudra cependant veiller au maintien des moyens pour la réhabilitation du parc existant. Nous devons donc promouvoir encore davantage la réhabilitation, et réussir ainsi à cumuler l’ambition de développement avec la gestion cohérente de l’existant.
Si l’effort de l’État doit être maintenu et accentué, il faut également ne pas se limiter aux possibilités offertes par le seul parc public en donnant des moyens aux particuliers pour qu’ils participent au développement de l’habitat. Ainsi, le partenariat entre les offices publics d’aménagement et de construction et le secteur privé devrait se traduire par un élargissement aux SCI familiales des dispositions de l’article L. 442-2 du code de la construction et de l’habitation, issu de la loi Meyer du 19 février 1998. Dans le même esprit, la réduction de la durée préalable de vacance de deux à un an favoriserait également les opportunités de relogement, en particulier dans les centres-villes. Cette harmonisation, en plus des dispositions déjà appliquées, permettrait de renforcer la mixité sociale et d’émettre un signe fort de la volonté d’agir en tous lieux du territoire. J’ai d’ailleurs déposé un amendement en ce sens.
En outre, l’inapplication des premières priorités du rapport Pelletier de juin 2003, comme dans le cas des charges locatives, contraint certains organismes à des gestions très difficiles. Par exemple, mon OPAC de Colmar, qui gère environ 6 500 logements, a ramassé 5 700 mètres cubes d’encombrants en 2005, laissés par des locataires indélicats sur les balcons, dans les caves, les cages d’escalier ou sur les pelouses, pour un coût de 142 000 euros. En l’état actuel de notre droit, cette somme ne peut être récupérée que par le loyer. C’est une charge énorme qui représente une majoration de 0,84 % du coût de tous les loyers, provoquée par des locataires indélicats. Il faudrait donc trouver une solution pour que ces charges puissent être répercutées directement sur les auteurs de ces dépôts sauvages. Ces mesures permettraient aux organismes de proposer une augmentation annuelle des loyers moins importante, avec la participation active et civique des locataires. Sur ce point aussi, j’ai déposé un amendement.
Par ailleurs, une stabilité législative et réglementaire apparaît aujourd’hui souhaitable pour permettre une action efficace et pérenne. La surenchère des textes, facteur d’illisibilité, ne peut que freiner l’efficacité des mesures préconisées.
Pour terminer, monsieur le ministre, je dirai que vos résultats de 2005 seront très certainement le meilleur détonateur pour une performance encore meilleure en 2006. Personnellement je suis très confiant, et je vous félicite pour votre action très dynamique. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Beaudouin.
M. Patrick Beaudouin. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi portant engagement national pour le logement qui nous est présenté a été adopté par le Sénat au terme d’un débat à la fois constructif et mouvementé.
Constructif, car le Sénat a ajouté cinquante-deux articles additionnels au projet initial qui n’en comptait que onze. Je souhaite que l’Assemblée puisse, elle aussi, enrichir ce texte. Le projet de loi que nous allons étudier est la traduction législative d’un plan global ambitieux puisqu’il actionne de nombreux leviers tels que les questions d’urbanisme, la mobilisation du foncier, la relance de l’offre de logement, l’accession à la propriété et la prise en compte des plus défavorisés. C’est un projet de loi qui est sur tous les fronts du logement et qui ne se cantonne pas à quelques problématiques symboliques.
Mouvementé, car les sénateurs ont souhaité signifier au Gouvernement leur désappointement face au maintien en l’état d’une procédure dont les principes relèvent de l’idéologie plus que d’une logique de concertation. Beaucoup font du taux de 20 % la ligne entre le bien et le mal en matière d’urbanisme, et d’aucuns ostracisent les maires qui ne l’ont pas franchie. Mais l’anathème, monsieur le ministre, n’a jamais construit un mètre carré de logement. Les maires sont confrontés à une réalité qui semble avoir échappé aux législateurs de l’époque. Il faut prendre conscience qu’il existe en effet trois catégories de communes : celles qui sont au-delà des 20 %, celles qui peuvent atteindre les 20 % mais qui ne le veulent pas, celles qui veulent atteindre les 20 % mais qui ne le peuvent pas.
Saint-Mandé, dont je suis maire, Vincennes, dont je suis le député, appartiennent à cette dernière catégorie. Ils veulent bien, et ils le font, et j’en témoigne ici. Saint-Mandé, avec seulement quatre-vingt-douze hectares, même pas un kilomètre carré, soit près de 21 000 habitants au kilomètre carré, Vincennes, avec 45 000 habitants vivant sur deux kilomètres carrés, sont des villes arrivées à maturité urbanistique, ne disposant plus de réserves foncières. La présence de plusieurs établissements publics, qui occupent près de 35 % du territoire, réduit considérablement l’espace foncier disponible : en réalité, ce sont à Saint-Mandé près de 21 000 habitants qui vivent sur soixante-huit hectares, soit une densité de 29 000 au kilomètre carré. Dès lors, l’objectif des 20 %, interprété de manière stricte et rigide, ne peut y être atteint.
À Saint-Mandé, cependant, j’ai l’intime conviction de promouvoir la mixité sociale, avec l’accord de la population, lorsque nous signons un premier plan local de l’habitat, que nous le réalisons, et que nous en engageons un second ; lorsque avec un prix du foncier nu à près de 2 000 euros au mètre carré, nous arrivons à convaincre de construire, sur les rares terrains qui se libèrent, du logement social aux côtés de programmes d’accession à la propriété, réalisant là un vrai brassage résidentiel ; lorsque nous reversons entièrement la taxe PLD, en plus de la surcharge foncière, pour provoquer de telles opérations de mixité sociale, et le directeur général de l’OPAC du Val-de-Marne nous a rendu hommage en déclarant récemment qu’il s’agissait là d’un mode de financement exemplaire car le prix du foncier à Saint-Mandé ou à Vincennes rend difficile le montage d’opérations de logements sociaux ; lorsque Saint-Mandé rachète les droits d’attribution de ces opérations pour loger des Saint-Mandéens défavorisés ; lorsque Saint-Mandé établit des partenariats avec les villes voisines pour participer à des opérations de logement ; lorsque Saint-Mandé réussit à racheter, malgré un coût foncier conséquent du fait de la rareté et de la grande qualité du bâti, des immeubles à rénover ; lorsque nous construisons des logements pour personnes âgées, pour étudiants ou pour jeunes travailleurs débutants ; lorsque nous proposons des logements d’insertion et ouvrons des logements adaptés aux personnes handicapées – plus de trente la semaine dernière – pour répondre aux besoins de la loi sur le handicap, grand chantier du Président de la République ; lorsque nous réalisons une opération programmée de l’amélioration de l’habitat.
Vous voyez, monsieur le ministre, en respectant l’histoire, la culture, l’équilibre de la ville, en mobilisant tous les acteurs, élus, institutionnels, investisseurs, bâilleurs, en assurant une vraie concertation, on peut construire une vraie politique du logement adaptée à chaque commune. Ainsi avons-nous, en huit ans, avec un très rare foncier, au coût élevé, réalisé 504 logements, dont 143 logements sociaux aux critères loi Gayssot, soit une proportion de près de 30 %, et sans y inclure les autres que je viens de mentionner.
Mais la loi SRU présente des incohérences.
Tout d’abord, il y a une incohérence urbanistique :…
M. Jean-Claude Lefort. Ah, vous êtes contre la loi SRU !
M. Patrick Beaudouin. …quand bien même la totalité des faibles disponibilités foncières d’une commune comme la mienne serait affectée à de nouveaux logements, où trouverait-on la place pour construire les équipements publics indispensables à la qualité de vie des nouveaux arrivants ?
M. Jean-Claude Lefort. C’est faux !
M. Patrick Beaudouin. On aboutirait à un type d’espace, malheureusement trop répandu, à mille lieux des équipements dignes d’une cité qui prend soin de ses habitants. Vous avez d’ailleurs créé l’ANRU pour y remédier.
De plus, la loi SRU a une logique bien peu compréhensible. Comment expliquer que des logements accueillant des fonctionnaires de police entrent dans l’assiette de la loi SRU, alors que les mêmes logements pour la justice, 200 mètres plus loin, n’y entrent pas ? De même, si je prends l’environnement propre à l’hôpital Bégin, je constate que celui qui y travaille, s’il est logé dans son foncier intérieur, n’est pas comptabilisé dans l’assiette, alors que le même personnel, avec la même feuille de paye, logé à l’extérieur, dans la cité Pasteur – en cours de réhabilitation –, lui, rentre dans l’assiette. Et il s’agit là de 610 logements ! Or ces logements ont tous été financés avec l’argent public, c’est-à-dire par l’impôt.
En troisième lieu, la loi SRU présente une incohérence comptable : malgré tous les efforts que je viens d’évoquer, ma ville s’est vue sanctionnée. C’est la loi. Mais incohérence des incohérences, le montant de la surcharge foncière versée par la commune pour la construction de logements sociaux éponge cette sanction ! Dans le même temps, et je le dénonce ici, une société d’HLM, dont je tairai le nom, investit 13,5 millions d’euros pour racheter un immeuble de soixante-deux appartements avec un prix de location au mètre carré qui tourne autour de 30 euros, alors qu’en prêt locatif social, il est autour de huit euros. Est-ce là une réponse acceptable, saine et équilibrée à nos problèmes ? Non, c’est de la démagogie et de la gabegie !
J’ajouterai qu’il y a une quatrième incohérence, qui consiste à confondre le moyen – le logement social – avec la fin – une mixité urbaine et sociale assumée et acceptée par chacun, sans imposition arbitraire. Il me semble qu’un changement de philosophie est nécessaire : qui mieux que le préfet et la DDE sont à même de comprendre, d’analyser et de pondérer des situations en vue d’établir un constat partagé ? Il nous faut retrouver l’esprit de la loi d’orientation sur la ville, votée sous M. Rocard,…
M. Jean-Claude Lefort. Ah !
M. Patrick Beaudouin. …basée sur la contractualisation et le respect des contraintes locales. Je pense qu’il est temps de raisonner en flux, et non plus en stock, avec un contrat d’objectifs et de moyens. Le non-respect de ce contrat serait alors la naturelle condition de sanctions financières.
Il est nécessaire également de reconsidérer la question du logement intermédiaire, trop souvent délaissée. Cela, en complétant l’offre de logement, favoriserait une indispensable rotation des locataires.
Enfin, il faut absolument favoriser la liberté, l’accès à la propriété. Le nombre de propriétaires est, hélas, bien inférieur à celui de nombre de nos voisins européens.
« Le bon sens est la chose la mieux partagée », disait Descartes. Je souhaite que nous puissions constater que cette maxime est vraie et que nous puissions prochainement, par une meilleure information partagée, par une concertation accrue, travailler au retour de la saine et efficace logique de la contractualisation.
Je vous fais confiance, monsieur le ministre. Les premiers résultats que vous venez de nous annoncer témoignent du réalisme, du pragmatisme, de l’efficacité de votre politique, qui permet de résorber peu à peu la crise, d’assurer, sans diviser les Français, la cohésion sociale et de rattraper l’inertie des gouvernements de gauche dans ce domaine. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Mme la présidente. La parole est à M. Augustin Bonrepaux, qui sera le dernier orateur à intervenir ce soir.
M. François Scellier, rapporteur pour avis. C’est le bouquet final ! (Sourires.)
M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le ministre, vous paraissez oublier qu’il y a des zones rurales, car votre politique ne répond nullement à leurs problèmes de logements sociaux. Pourtant, il faut de plus en plus de moyens, puisque, comme le révèle l’INSEE, il y a de plus en plus de population. Depuis la création de l’ANRU, vous les avez privées de crédits PALULOS. Je vous fais d’ailleurs remarquer que les crédits PALULOS ont globalement diminué.
M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Mais c’est faux !
M. Augustin Bonrepaux. Ce n’est pas faux, ce sont les chiffres ! Ça vous dérange bien sûr quand je dis l’inverse de ce que vous clamez ! Il y en avait 150 000 en 1998, et seulement 47 000 en 2005. Et pour les zones rurales, il n’y en a pas du tout ! Aucun pour la rénovation des logements de l’OPAC, aucun non plus pour les communes alors qu’elles pouvaient réaliser…
M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Je vous répondrai sur ce point !
M. Augustin Bonrepaux. Mais, monsieur le ministre, c’est la réalité ! Depuis que vous êtes là, nous n’avons plus de crédits PALULOS ! Vous avez dit tout à l’heure qu’il fallait aller voir à la DDE. Je suis allé voir à la DDE, du moins ce qu’il en reste :…
M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. C’est une mise en cause, je répondrai !
M. Augustin Bonrepaux. …il n’y a pas de crédits ! Vous ne pouvez tout de même pas nier la réalité.
De même, pour financer l’ANRU, vous faites appel à l’OPAC.
M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Ce que vous dites est inacceptable !
M. Augustin Bonrepaux. En 2005, vous avez prélevé 50 000 euros sur l’OPAC et 2,5 millions d’euros sur le CIL dans mon département, alors que celui-ci ne bénéficie pas des crédits de l’ANRU ! Voilà la réalité, même si elle vous gêne !
M. Jean-Louis Dumont. Ce sont les pauvres qui paient !
M. Augustin Bonrepaux. Vous paraissez mal connaître, monsieur le ministre, le problème du logement dans les zones de montagne et dans les zones rurales.
M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Heureusement, voilà un grand expert !
M. Augustin Bonrepaux. Savez-vous que pour construire des logements sociaux dans l’Ariège, la commune doit apporter le terrain et l’OPAC participer sur ses fonds propres à hauteur de 12 000 euros ?
M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. C’est sa tâche, non ?
M. Augustin Bonrepaux. Il faut aussi que le département, qui n’en a pas la compétence – c’est l’une des rares qu’on ne lui a pas transférées – consacre 4 000 euros par logement, soit 500 000 euros par an,…
M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Ce n’est vraiment pas beaucoup ! Je comprends les problèmes du logement en Ariège !
M. Augustin Bonrepaux. …et ce alors qu’il doit déjà assumer d’autres transferts de compétences ! Depuis que votre gouvernement a transféré le RMI, savez-vous, monsieur le ministre, que l’État doit 2,5 millions d’euros au département de l’Ariège et un milliard à l’ensemble des départements français ?
M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Parlez-moi de logement !
M. Augustin Bonrepaux. Comment voulez-vous, quand votre gouvernement plafonne aussi les recettes, que les collectivités locales fassent davantage en faveur du logement ?
Quand on augmente les impôts, ce sont les ménages qui paient – 60 % de plus pour mon département ! Nous voulons bien y consentir, s’il s’agit de faire du logement. Mais, d’un côté, vous transférez les charges vers les collectivités locales et, de l’autre, vous leur enlevez les recettes !
M. Gérard Hamel, rapporteur. Vous ne l’avez pas fait, vous ?
M. Augustin Bonrepaux. Telle est, chers collègues de la majorité, la réalité de votre politique ! Il faudrait que vous l’assumiez !
Dans ces conditions, comment voulez-vous, monsieur le ministre, que nous fassions du logement social ?
Au reste, il ne suffit pas de construire des logements neufs. Il faut aussi s’occuper de rénovation. Quand il s’agit de l’OPAC, les crédits PALULOS sont indispensables. Allez-vous les rétablir au niveau de 2001 ?
M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Il ne s’agit pas de crédits PALULOS mais de l’ANAH ! Apprenez donc comment fonctionne le logement !
M. Augustin Bonrepaux. Nous y travaillons dans mon département, monsieur le ministre. Pour rénover les logements sociaux, jusqu’à preuve du contraire, il faut des crédits PALULOS ! Grâce à ces derniers, jusqu’en 2003, nous avons pu faire du logement et de la rénovation, car nous bénéficiions des crédits du gouvernement précédent. Depuis, vous avez supprimé ces crédits. Vous ne pouvez pas nier cette réalité ! Rétablissez donc les crédits PALULOS : en Ariège, ils seront bien utilisés !
Il faut aussi rénover le logement privé. Mais comment le faire sans donner davantage de moyens à l’ANAH ? En 2000, je vous le rappelle, les crédits de l’ANAH s’élevaient à 90 000 euros, contre 43 000 aujourd’hui, soit une réduction de moitié ! Vous voulez faire plus avec moins de crédits !
M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Vous avez fait moins avec plus de crédits !
M. Augustin Bonrepaux. Pour mettre en œuvre une véritable politique du logement, il serait bon que vous écoutiez les conseils du groupe socialiste. (Rires sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Deux mesures sont indispensables à la construction de logements neufs, ainsi qu’à la rénovation de logements anciens. Dans le privé en particulier, des moyens supplémentaires sont nécessaires, ainsi que des mesures réglementaires destinées à contrôler les logements indécents. Il convient d’augmenter les crédits de l’ANAH, pour inciter les propriétaires à rénover leur logement. Sans cela, on n’y parviendra pas !
Par ailleurs, il faut davantage de réglementation, notamment en appliquant la loi SRU pour responsabiliser les propriétaires.
Mme la présidente. Veuillez conclure.
M. Augustin Bonrepaux. Vous présentez, monsieur le ministre, un projet sans lui donner de moyens !
M. Michel Piron. C’est totalement faux !
(M. le ministre de l’emploi montre un graphique présentant une courbe de l’évolution des logements sociaux.)
M. Jean-Louis Dumont. Les moyens affichés ne sont pas les moyens consommés, monsieur le ministre !
Mme la présidente. Veuillez laisser M. Bonrepaux terminer son intervention.
M. Augustin Bonrepaux. Certes, vous avez fait du logement, monsieur le ministre, mais pour qui ? À qui donc s’adresse la loi de Robien ? Aux plus nécessiteux ? J’en doute !
Les moyens faisant défaut à votre projet, vous avez eu une idée lumineuse : accaparer les fonds propres des sociétés de crédit immobilier. Mais il s’agit d’un véritable hold-up ! Vous raclez les fonds de tiroir, et dans tous les domaines ! Bientôt, ces fonds de tiroir seront épuisés ! Au reste, vous utilisez les cagnottes que vous ont laissées vos prédécesseurs ! Et à présent, vous vous apprêtez à confisquer les fonds propres des crédits immobiliers. Savez-vous que ces derniers ont pourtant un rôle important pour l’accès au logement des plus démunis et pour l’aide à l’amélioration de l’habitat insalubre dans les départements ?
M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Dans l’Ariège !
M. Augustin Bonrepaux. Dans l’Ariège aussi, en effet !
Mme la présidente. Veuillez conclure calmement, monsieur Bonrepaux.
M. Augustin Bonrepaux. Si vous êtes tant soit peu sérieux, monsieur le ministre, écoutez donc ce que je dis !
M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Ne parlez pas de sérieux ! Quand on voit vos courbes en matière de logement… (M. le ministre de l’emploi brandit le même graphique.)
M. Augustin Bonrepaux. Ce hold-up sur les fonds propres réduirait encore les moyens du logement dans mon département comme dans les départements ruraux. Osez donc prétendre après cela que vous voulez mettre en œuvre une grande loi pour le logement ! En dépit de vos déclarations d’intention, ce projet de traduira encore par la pénurie. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Mme la présidente. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
Mme la présidente. Aujourd’hui, jeudi 9 janvier, à neuf heures trente, première séance publique :
Suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, n° 2709 rectifié, portant engagement national pour le logement :
Rapport, n° 2771, de M. Gérard Hamel, au nom de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire ;
Avis, n° 2765, de M. François Scellier, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan.
À quinze heures, deuxième séance publique :
Suite de l’ordre du jour de la première séance.
À vingt et une heures trente, troisième séance publique :
Suite de l’ordre du jour de la première séance.
La séance est levée.
(La séance est levée, le jeudi 19 janvier 2006, à zéro heure cinquante-cinq.)
Le Directeur du service du compte rendu intégral
de l’Assemblée nationale,
jean pinchot