Document mis en distribution le 21 avril 2004 N° 1541 -- ASSEMBLÉE NATIONALE CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958 DOUZIÈME LÉGISLATURE Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 14 avril 2004. RAPPORT FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L'ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LE PROJET DE LOI ORGANIQUE (N° 1155) pris en application de l'article 72-2 de la Constitution relatif à l'autonomie financière des collectivités territoriales. PAR M. Guy GEOFFROY, Député. -- Voir les numéros : 1155 et 1546. INTRODUCTION 5 I. - L'AUTONOMIE FINANCIÈRE DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES : UNE NOTION RELATIVE AU REGARD DES EXPÉRIENCES ÉTRANGÈRES 6 A. LA LENTE CONSTRUCTION DE L'AUTONOMIE FINANCIÈRE 6 B. LA FRANCE, MODÈLE EUROPÉEN ? 7 II. - L'ÉROSION DE L'AUTONOMIE FINANCIÈRE DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES ENTRE 1997 ET 2002 9 A. LE TEMPS DE LA DÉFIANCE 9 B. L'IMPOSSIBLE PROTECTION CONSTITUTIONNELLE 15 III. - DE NOUVELLES PERSPECTIVES POUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES DANS LE CADRE D'UNE ORGANISATION DÉCENTALISÉE DE LA RÉPUBLIQUE 18 A. LE CHANGEMENT DE PERSPECTIVE INDUIT PAR LA RÉVISION CONSTITUTIONELLE DU 28 MARS 2003 18 B. DES RÉFORMES QUI DONNENT UN NOUVEL ESSOR À LA DÉCENTRALISATION 19 IV. - LE PROJET DE LOI ORGANIQUE 20 A. UNE DÉCLINAISON DE L'ARTICLE 72-2 DE LA CONSTITUTION 20 B. LE CONTENU DU PROJET DE LOI 21 DISCUSSION GÉNÉRALE 23 EXAMEN DES ARTICLES 27 Article premier : Définition de la notion de catégorie de collectivités territoriales 27 Article 2 : Définition de la notion de ressources propres 32 Article 3 : Définition des notions d' « ensemble des ressources » et de « part déterminante » 38 Article 4 : Mécanisme de mise en œuvre de la garantie 44 Après l'article 4 45 TABLEAU COMPARATIF 47 AMENDEMENTS NON ADOPTÉS PAR LA COMMISSION 53 ANNEXE : Principales mesures de réduction des ressources des collectivités locales intervenues depuis 1997 55 PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR 57 Troisième - et dernière - des lois organiques venant compléter la révision constitutionnelle du 28 mars 2003, après la loi organique relative au référendum local et celle sur l'expérimentation par les collectivités territoriales, la loi organique relative à l'autonomie financière clôt définitivement le volet institutionnel (1) de la grande réforme de la décentralisation initiée par le Président de la République dès son discours de Rouen en avril 2002. À la suite de son adoption, notre pays disposera d'outils juridiques en adéquation avec la reconnaissance de son organisation décentralisée, fondée sur l'adhésion populaire, avec le référendum local, l'innovation, avec l'expérimentation, et la responsabilité locale, avec l'autonomie financière des collectivités territoriales. De ces trois lois, il est probable que celle sur l'autonomie financière des collectivités locales soit la plus attendue, suscitant à la fois des espoirs, mais également, n'en doutons pas, des appréhensions auprès de nos concitoyens. Il est important, ici, de ne pas se tromper de débat : il ne s'agit pas de militer pour une hausse de la fiscalité locale, mais de miser au contraire sur la responsabilité des élus. Ce pari est à la fois une exigence démocratique, car il n'existe pas de pouvoir politique véritable sans pouvoir fiscal, mais également un impératif économique, car la recherche de la « productivité » des institutions locales est désormais indispensable à la croissance économique. Renvoyé pour examen à la Commission des lois, conformément à l'article 36 de notre Règlement, qui donne compétence à notre commission pour toutes les lois organiques, ainsi que pour les textes relatifs à l'administration générale des collectivités locales, un tel projet ne pouvait cependant se passer de l'expertise économique et financière de la Commission des finances. C'est donc en étroite concertation avec son Rapporteur général, M. Gilles Carrez, que le rapporteur a travaillé, pour aboutir à un même constat : après des années de remise en cause de l'autonomie financière des collectivités locales, il était urgent de restaurer le pouvoir fiscal local en définissant, pour chaque catégorie de collectivités locales, un ratio d'autonomie financière prenant en compte la part des ressources propres sur l'ensemble des ressources des collectivités locales. Il fallait également, conformément à l'article 72-2 de la Constitution, établir un seuil en deçà duquel le caractère déterminant de ces ressources propres n'était plus assuré. Tel est l'objet du présent projet de loi organique, qui, en quatre articles, s'attache à définir les termes du ratio d'autonomie financière, ainsi qu'à fixer un seuil. I. - L'AUTONOMIE FINANCIÈRE DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES : UNE NOTION RELATIVE AU REGARD DES EXPÉRIENCES ÉTRANGÈRES A. LA LENTE CONSTRUCTION DE L'AUTONOMIE FINANCIÈRE La reconnaissance de l'autonomie financière des collectivités locales n'est pas une revendication nouvelle : elle s'inscrit, bien avant les lois de décentralisation de 1982, dans la tradition des grands débats qui fondèrent la République et l'organisation institutionnelle de la France. Ainsi, à la suite de la loi de 1893 relative à la solidarité sociale, qui fait porter sur les collectivités locales de lourdes charges d'assistance obligatoire et gratuite, sans que ces dépenses ne donnent lieu à compensation de la part de l'État, les parlementaires multiplient les interpellations et obtiennent finalement, dans la loi de finances pour 1931, une mesure permettant de corriger la situation par le versement de crédits exceptionnels et la prise en charge de frais de personnel administratif agissant dans le cadre d'établissements publics chargés d'assurer un intérêt national. Entre temps, les parlementaires auront pris l'initiative de rappeler aux ministres des Finances et de l'Intérieur les promesses faites lors des précédents débats en déposant de nombreuses propositions de loi invitant le gouvernement à présenter rapidement des mesures destinées à équilibrer le budget des collectivités locales. Le ministre de l'Intérieur de l'époque, Germain Martin, répond par la négative à ces interpellations en jugeant que « l'on ne pouvait construire solidement si on voulait séparer les finances de l'État des finances des communes et des départements ». Cette dissociation entre ce qui relève des finances publiques de l'État et des collectivités locales ne va donc pas de soi ; elle a fait au contraire l'objet d'un long combat, ponctué d'avancées discrètes et de retentissants retours en arrière. Premier engagement ferme dans la voie de l'autonomie financière, la loi du 31 décembre 1970 allège les modalités de l'exercice de la tutelle préfectorale en supprimant l'approbation préalable du budget des communes. Elle est suivie, sous le gouvernement de M. Raymond Barre, par la loi de finances pour 1979 qui supprime le versement représentatif de la taxe sur les salaires pour le remplacer par la dotation globale de fonctionnement, mise en place peu auparavant dans la loi du 3 janvier 1979. Cette dotation conserve le caractère de prélèvement sur recettes, qui permet ainsi de marquer le caractère fiscal du financement des collectivités. La loi du 10 janvier 1980 portant aménagement de la fiscalité directe locale instaure ensuite le principe du vote des taux par les collectivités locales, celles-ci ne pouvant jusqu'alors voter qu'un produit fiscal dont la charge était répartie entre les différents impôts par les services de l'État. Avec les lois de décentralisation de 1982, le principe d'autonomie financière rejoint celui de libre administration des collectivités territoriales, puisque, au même titre que les actes des collectivités, les budgets locaux sont rendus exécutoires de plein droit. En outre, les régimes de contrôle et d'approbation préalables en matière d'emprunts sont abrogés. Les lois de décentralisation mettent également en place un dispositif de globalisation des subventions d'équipement, à travers notamment la dotation globale d'équipement, supprimant dans le même temps les contrôles techniques exercés par les services de l'État lors de l'attribution des subventions spécifiques. Cette démarche de globalisation permet également la pérennité des versements par le caractère automatique de leur attribution. En matière fiscale, les lois de décentralisation inscrivent dans le code général des collectivités territoriales le principe de compensation des transferts de compétences par des transferts d'impôts d'État ( voir aujourd'hui l'article L. 1614-4 du code général des collectivités territoriales), ces transferts d'impôts devant constituer la moitié au moins des ressources attribuées par l'État à l'ensemble des collectivités locales (article L. 1614-5 du code général des collectivités territoriales). Dans ce cadre sont transférées aux départements les recettes fiscales issues de la vignette automobile et aux régions celles liées à la taxe sur les immatriculations. Parallèlement, la possibilité d'instituer une fiscalité facultative est reconnue aux collectivités territoriales. Les lois de décentralisation de 1982 ont ainsi été à juste titre présentées comme l'aboutissement d'une démarche permettant de reconnaître aux collectivités locales non seulement la liberté de dépenses mais également celle de percevoir des ressources fiscales. À la lumière du critère de l'autonomie financière, elles ont incontestablement permis de placer les collectivités territoriales françaises en tête des systèmes européens. B. LA FRANCE, MODÈLE EUROPÉEN ? L'article 9 de la Charte européenne de l'autonomie locale du 15 octobre 1985, élaborée au sein du Conseil de l'Europe, reconnaît explicitement le principe d'autonomie locale : « Les collectivités locales ont droit, dans le cadre de la politique économique nationale, à des ressources propres suffisantes dont elles peuvent disposer librement dans l'exercice de leurs compétences. Les ressources financières des collectivités locales doivent être proportionnées aux compétences prévues par la Constitution ou la loi. Une partie au moins des ressources financières des collectivités locales doit provenir de redevances et d'impôts locaux dont elles ont le pouvoir de fixer le taux, dans les limites de la loi. Les systèmes financiers sur lesquels reposent les ressources dont disposent les collectivités locales doivent être de nature suffisamment diversifiée et évolutive pour leur permettre de suivre, autant que possible, dans la pratique, l'évolution réelle des coûts de l'exercice de leurs compétences » Bien que figurant parmi les premiers signataires de la Charte, la France ne l'a jamais ratifiée. La Charte dessine pourtant, en quatre alinéas, les contours d'une décentralisation réussie ; ce refus de ratification (2) ne doit pas être analysé trop hâtivement comme l'illustration d'un jacobinisme institutionnel. Au contraire, la comparaison avec les autres systèmes locaux européens permet de situer la France en bonne place dans l'échelle de l'autonomie financière des collectivités locales. Ainsi, un rapport du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l'Europe sur la situation de la démocratie locale et régionale en France, publié en 2000, précise que « la France se situe ainsi largement au-dessus de la moyenne de la fiscalité propre (25,7 %) et largement au-dessous de la moyenne des transferts (49 %) dans les États membres du Conseil de l'Europe » ; ces bons résultats permettent de placer les collectivités territoriales françaises à la 8ème place pour ce qui est de l'autonomie fiscale et à la 10ème pour ce qui est de l'autonomie financière tenant compte des redevances et prix. Au vu de ces chiffres, collectés par un groupe d'experts indépendants, le rapport du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux aboutit aux conclusions suivantes : « Cette performance d'autant plus remarquable qu'elle est réalisée dans un contexte d'émiettement communal, guère favorable au développement d'une fiscalité locale propre, ne fait pas, comme on le dit parfois, de la France une exception au sein de l'Union européenne, mais place effectivement celle-ci au même niveau moyen que les États scandinaves où l'autonomie locale est la plus développée (même si dans ces pays le pourcentage des dépenses locales par rapport au pib est nettement plus élevé qu'en France). » Que l'étude porte sur la part des ressources fiscales dans les ressources totales des collectivités territoriales, sur la part des dotations globalisées par rapport aux subventions spécifiques attribuées pour des projets déterminés ou sur la marge de manœuvre des collectivités dans la fixation des taux d'imposition, les conclusions permettent à chaque fois d'attribuer à la « décentralisation à la française » un rang plus qu'honorable. Pour s'en tenir à la fiscalité locale, la place de celle-ci dans le financement hors emprunt des collectivités locales apparaît nettement plus élevé en France que dans d'autres États pourtant caractérisés par leur très forte autonomie locale, comme l'Espagne (où le taux n'est que de 30 %), l'Italie (25 %) ou l'Allemagne (20 %). En outre, dans ces pays, les taux des impôts perçus à l'échelon local sont souvent fixés par l'État, comme en Allemagne où le produit de la fiscalité reçu par les collectivités provient essentiellement d'impôts partagés. D'où vient alors le paradoxe qui consiste à présenter la France comme un État incorrigiblement jacobin ? Tentons, comme certains auteurs avant nous (3), d'avancer une explication plus sociologique que juridique ou économique : dans des pays comme l'Espagne ou l'Allemagne, le principe de l'autonomie locale est parfaitement intégré dans la culture politico-administrative de ces pays, y compris au niveau des administrations centrales. L'autonomie financière n'apparaît pas dès lors comme une condition essentielle de l'exercice de l'autonomie locale, la faible part des ressources propres dans les budgets des collectivités locales reflétant en quelque sorte un état « apaisé » des relations entre l'échelon local et l'échelon central. À l'inverse, la revendication permanente des élus locaux en France pour faire croître la part des ressources propres sur les dotations est le résultat d'un long combat contre l'État tenté, au moindre aléa économique, de jouer sur les mécanismes d'indexation des dotations. À la différence d'autres pays plus décentralisés, la libre administration des collectivités territoriales, pourtant inscrite dans la Constitution, n'a ainsi jamais été considérée comme un acquis. Illustration de ce rapport de forces, les réformes entreprises entre 1997 et 2002 ont très largement contribué à éroder le mouvement décentralisateur. II. - L'ÉROSION DE L'AUTONOMIE FINANCIÈRE DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES ENTRE 1997 ET 2002 · Le démantèlement de la fiscalité locale La fiscalité locale française est, pour l'essentiel, constituée de quatre taxes directes : trois taxes sur les biens immobiliers (les taxes foncières sur les propriétés bâties et non bâties visant les propriétaires et la taxe d'habitation visant l'occupant) et une taxe professionnelle visant les personnes morales ou physiques exerçant une activité non salariée et dont la base est constituée des immobilisations corporelles et, jusqu'en 2003, des salaires ou recettes. L'architecture de cette fiscalité est souvent décrite comme obsolète et inadaptée, compte tenu de l'amplification du mouvement de décentralisation auquel on a assisté ces vingt dernières années : la taxe professionnelle a notamment été critiquée pour ses effets négatifs sur l'emploi, ainsi que pour l'inégalité de la richesse nationale tirée de son produit, puisque 10 % des entreprises acquittent 80 % de l'ensemble. La taxe d'habitation a fait l'objet également de fréquentes remises en cause : l'obsolescence de ces bases, qui reposent sur les valeurs locatives, ne permet pas d'appréhender les réelles capacités contributives des contribuables puisque les bases ne tiennent pas compte des revenus. La dernière révision mise en œuvre date de 1961 pour le foncier non bâti et de 1970 pour le foncier bâti. Plus généralement, il est fait le reproche à la fiscalité locale son manque de dynamisme dans la mesure où elle est assise sur les stocks et non sur les flux. Le caractère inadapté de la fiscalité locale a été souligné à maintes reprises, notamment par le rapport d'information du Sénat au nom de la mission commune d'information chargée de dresser le bilan de la décentralisation (4) ainsi que par la Commission pour l'avenir de la décentralisation présidée par M. Pierre Mauroy (5). Ce dernier souligne ainsi, dans son rapport remis au Premier ministre, que « ce qui menace l'autonomie fiscale, c'est d'abord et surtout l'archaïsme de nos impôts locaux ». En dépit de ce constat partagé par tous, le Gouvernement précédent a choisi l'immobilisme plutôt que de prendre le chemin plus difficile de la réforme. Il a ainsi reporté la révision des valeurs cadastrales conduite en 1990 - décidée à la suite de l'échec d'une procédure d'actualisation abandonnée en 1987 - en refusant de l'intégrer dans les rôles d'imposition, justifiant son impéritie par la crainte des transferts de charges qu'une telle révision impliquait. Plus grave, il a tenté de pallier les insuffisances de la fiscalité locale par des ajustements successifs qui ont contribué à déséquilibrer gravement le dispositif déjà fragile du financement local. Ces réformes, menées sans vision globale, ont conduit progressivement au démantèlement de la fiscalité locale, au détriment de l'autonomie financière des collectivités territoriales. Cette inertie n'a pas seulement été dénoncée par l'opposition de l'époque ou les élus locaux. Elle a donné lieu à une critique sévère du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l'Europe, dans son rapport précité : « La France ne peut plus se satisfaire du constat de l'impossibilité de réformer la fiscalité locale dont les défauts (archaïsme dans la mesure où elle est basée sur des stocks plutôt que des flux) [...] ne peuvent justifier la suppression, pour autant que l'on considère qu'une certaine autonomie financière est inhérente à une décentralisation authentique ». On trouvera en annexe le détail des principales mesures de ces ajustements qui ont conduit à une réduction des ressources des collectivités locales intervenues depuis 1997. Citons, pour l'essentiel, l'article 29 de la loi de finances pour 1999, qui a supprimé la taxe additionnelle régionale aux droits de mutation à titre onéreux, soit plus de 10 % des recettes fiscales totales des régions ; dans ce même article a été adoptée également la réduction des droits de mutation à titre onéreux des départements. L'article 44 de cette même loi a supprimé la fraction de l'assiette de la taxe professionnelle assise sur les salaires, soit près d'un tiers de l'assiette de cet impôt dont le produit représente près de la moitié du produit des quatre taxes directes locales. L'article 9 de la loi de finances pour 2000 a poursuivi le mouvement en unifiant les taux départementaux des droits de mutation à titre onéreux sur les locaux d'habitation. L'article 11 de la loi de finances rectificative pour 2000 a supprimé la part régionale de la taxe d'habitation, soit près de 15 % des recettes fiscales totales des régions et 22 % du produit des quatre taxes. L'article 6 de la loi de finances pour 2001, ainsi que l'article 24 de la loi de finances pour 2002 ont supprimé la vignette automobile pour les personnes physiques, les associations et les personnes morales pour les trois premiers véhicules. Au total, en tenant compte de l'ensemble des mesures intervenues en matière de fiscalité locale, la part des recettes fiscales propres par rapport aux recettes totales est passée, entre 1997 et 2002, de 58,2 % pour les communes à 54,7 %, de 58,3 % pour les départements à 52,2 % et de 57,8 % pour les régions à 36,5 %. L'évolution de cette part est retracée dans le tableau suivant : Ressources propres prises en compte ici : en milliards d'euros
Pour les collectivités locales, ces réformes se traduisent ainsi très directement par l'affaiblissement de leurs marges de manœuvre, mais également, de façon plus insidieuse, par une perte en termes financiers. En effet, l'État a cherché, dans un contexte de maîtrise des finances publiques, à compenser a minima ces réformes. Il a en premier lieu choisi, à chaque fois que cela lui était possible, la compensation d'exonérations plutôt que le dégrèvement. Alors que la première est une dotation compensatrice d'une perte pour la collectivité locale, calculée en fonction du produit des bases exonérées par le taux figé de l'année de référence, le dégrèvement est une compensation fiscale intégrale, sans amputation des bases, et évolutive avec l'assiette de la base dégrevée et le taux d'imposition en vigueur, de sorte que la contribution de l'État est dépendante à la fois de l'évolution des bases concernées et des décisions des collectivités locales. Dès lors, compte tenu du dynamisme des impôts locaux, l'État a cherché à maîtriser ces dépenses en se dégageant de la logique des dégrèvements : il en a été ainsi du plafonnement de la taxe professionnelle par rapport à la valeur ajoutée, des dégrèvements totaux de taxe d'habitation, de la dotation de compensation de la taxe professionnelle, hors sa partie relative à la réduction pour embauche et investissements, ainsi que la compensation pour suppression de la part « salaires » des bases de taxe professionnelle. Ces compensations aboutissent à des résultats défavorables aux collectivités locales : lorsqu'elles évoluent en fonction des bases réelles et des taux de l'année d'entrée en vigueur de la mesure, les collectivités locales subissent une perte dès lors que les taux de l'année en cours sont supérieurs à ceux de l'année d'entrée en vigueur de la mesure ; lorsque les compensations sont indexées sur la dotation globale de fonctionnement, elles se révèlent défavorables aux collectivités locales dès lors que les bases ou le produit de l'impôt augmentent plus vite que le taux d'évolution de la DGF. La recentralisation des finances locales est également lourde de conséquences pour l'État ; c'est désormais un lieu commun de constater que l'État est devenu le premier contribuable local, ayant été contraint de prendre en charge, par le biais de compensations et de dégrèvements, une part croissante de la fiscalité locale. Il supporterait ainsi à lui seul, selon le rapport publié en juin 2003 par M. Joël Bourdin au nom de l'Observatoire des finances locales, plus de 33 % du produit de la fiscalité locale, soit 22,3 milliards d'euros pour une recette totale de 66,8 milliards. Ces sommes correspondent à une prise en charge de : - 33,2 % du produit de la taxe d'habitation ; - 4,9 % du produit des taxes foncières ; - 48,6 % du produit de la taxe professionnelle. Une étude effectuée en mai 2000 par M. Yves Fréville, sénateur, a ainsi permis de montrer que l'essentiel de la croissance des concours de l'État était imputable aux compensations d'exonérations et de dégrèvements, ceux-ci étant passés de 0,45 % du pib en 1982 à 1,5 % en 1998, alors que dans le même temps, les dotations de l'État dans leur ensemble ont diminué de 1,45 % à 1,35 % du pib. Cette montée en charge des dispositifs de compensation et dégrèvements induit de façon indéniable une plus grande rigidité dans la gestion des concours de l'État aux collectivités locales : les dotations passives devenant peu à peu plus importantes que les dotations actives, les concours financiers perdent leur logique de péréquation pour ne constituer que des substituts de fiscalité locale. L'État prend ainsi le risque de se priver d'un instrument essentiel de correction des déséquilibres territoriaux. · L'absence de visibilité des dotations La maîtrise de leurs ressources par les collectivités locales constitue le cœur du débat sur l'autonomie financière ; elle implique que les collectivités locales puissent prévoir de façon à peu près fiable le montant des sommes dont elles peuvent disposer. Cette maîtrise passe bien évidemment par la fiscalité locale, mais il n'est pas exclu non plus d'imaginer qu'elle concerne les dotations versées par l'État. Les élus locaux sont, en effet, en droit d'attendre en ce domaine une stabilité ou, du moins une certaine prévisibilité des montants attribués. En ce domaine, l'architecture des dotations de l'État entre 1997 et 2002 n'a pas permis de répondre à cet impératif de clarté. L'opacité des concours financiers, régulièrement dénoncée par les élus locaux, a ainsi fait l'objet d'une analyse détaillée de la Cour des comptes dans son rapport sur l'exécution de la loi de finances pour 2000 ; la Cour fustigeait alors « l'inflation des dotations pour des objectifs peu identifiables » en précisant que « se mêlent ainsi des objectifs de stabilisation des budgets des collectivités, de péréquation entre celles-ci, de compensation de moindres recettes fiscales, ou encore d'encouragement à l'investissement qui rendent délicates la mise en place d'indicateurs de résultats et l'appréciation de l'efficacité de tels concours ». Les modalités de calcul de la dgf illustraient parfaitement cette complexité, puisque la répartition de certaines de ces composantes faisait intervenir pas moins de 16 critères différents... Là encore, la pratique du précédent gouvernement n'a pas servi la cause de la décentralisation : théoriquement inclus dans une enveloppe normée dénommée « contrat de croissance et de solidarité », les concours financiers de l'État sont censés évoluer selon des critères d'indexation précisément définis et donc en principe prévisibles(6). Dans la pratique, les contours de l'action de l'État se sont révélés difficiles à cerner, en raison de l'empilement des dotations hors contrat de croissance et des abondements exceptionnels. Ainsi, la dotation de l'État au Fonds national de Péréquation a bénéficié d'un abondement de 22,87 millions d'euros en 2000 et 2001 ; la dotation de solidarité urbaine (dsu) a bénéficié, pour sa part, d'un abondement en 1999 de 76,22 millions d'euros, reconduit en 2000 et 2001 et de 122 millions d'euros en 2002. Ces abondements ont été accordés hors de l'enveloppe du contrat de croissance et de solidarité et n'ont donc pas fait l'objet d'une consolidation pour les années suivantes. La comparaison de la progression des concours de l'État d'une année sur l'autre s'est ainsi révélée très ardue, les collectivités locales apparaissant de plus en plus comme la variable d'ajustement au coup par coup du budget de l'État. Conjuguée au mécanisme très technique du « recalage » de la dotation globale de fonctionnement d'une année sur l'autre et des régularisations a posteriori, qui provoquent des variations erratiques des dotations, l'utilisation des abondements exceptionnels a contribué à altérer définitivement la lisibilité des concours de l'État par rapport aux prévisions initiales. C'est donc sous la menace budgétaire d'une non-reconduction des dotations d'année en année, et avec des marges de financement réduites que les collectivités territoriales ont dû exercer leurs compétences. Ce pari a été d'autant plus difficile à tenir que, dans le même temps, l'État accroissait les charges imparties à l'échelon local. · L'accroissement des charges des collectivités locales En dépit des principes clairs posés par les lois de décentralisation en matière de compensation des transferts de compétences, force est de constater que l'État a souvent cherché, par le biais de la décentralisation, à réduire son déficit en transférant des charges croissantes aux collectivités locales. Un rapport du Conseil économique et social (7) analyse ainsi, compétence par compétence, le poids des transferts à la charge des collectivités territoriales ; il montre, en premier lieu, que les collectivités locales ont dû faire face à des retards d'investissement importants, notamment en matière de lycées et de collèges, sans que les dotations afférentes ne tiennent compte de ces besoins. Les régions et départements ont ainsi dû mobiliser, pour remédier à l'état déplorable des établissements, des montants qui vont bien au-delà des compensations attribuées. À titre d'exemple, pour les régions, les dépenses réelles d'équipement des lycées sont passées de 130 millions d'euros en 1986 à 1 245 millions d'euros en 1993 ; sur cette même période, les compensations par l'État au titre de la dotation régionale d'équipement ont progressé de 57,5 millions à 203 millions d'euros. Les collectivités territoriales ont également été confrontées à un alourdissement de leurs charges, sans que celles-ci ne soient compensées ; l'exemple de l'Allocation personnalisée d'autonomie (apa) est à cet égard emblématique du désengagement de l'État. Le coût de ce dispositif, institué par la loi n° 2001-647 du 20 juillet 2001, était initialement estimé à 2,53 milliards d'euros. Il était prévu au départ que l'État assumerait le financement de cette allocation à hauteur de 930 millions d'euros, par le biais du Fonds de financement de l'apa. La participation des départements, estimée initialement à 1,6 milliard d'euros, devait être alimentée à hauteur de 1,1 milliard d'euros par la réaffectation des sommes consacrées antérieurement à la Prestation spécifique dépendance, que l'apa avait vocation à remplacer. Le surcoût net pour les départements était ainsi estimé à 500 millions d'euros. Les prévisions se sont révélées être bien en dessous de la réalité : en 2002, les dépenses d'aide sociale inscrites aux budgets primitifs ont crû de 10,5 % par rapport en 2001, contraignant ainsi 68 départements à procéder à des hausses, souvent très substantielles, des taux de fiscalité locale. En 2003, les dépenses inscrites aux budgets primitifs au titre de l'apa connaissent un quasi-doublement (+ 90 % en moyenne). Les départements évaluent ainsi la dépense à 3,76 milliards d'euros, soit 8 % de leur budget total et 20 % du budget d'aide sociale. Par conséquent, et comme l'année précédente, la plupart des départements ont relevé significativement leurs taux d'imposition, après plusieurs années d'évolutions très modérées de la fiscalité départementale. Enfin, les collectivités locales ont dû faire face à des charges nouvelles, issues non pas de nouveaux transferts, ou, comme dans le cas de l'apa, d'une extension de compétences, mais induites par des réglementations toujours plus contraignantes. Le respect de normes, notamment techniques, implique des charges toujours plus lourdes ; ainsi que le souligne le rapport du Conseil économique et social précité, « le poids financier considérable de ces contraintes nouvelles ne tient pas seulement aux équipements nouveaux induits ou aux surcoûts pour les autres équipements projetés, mais aussi à la mise aux normes du stock des équipements existants. Il est aggravé par la nécessité de respecter des délais souvent très courts pour cette mise aux normes ». Une étude menée par le cabinet Arthur Andersen pour le compte de la Fédération des villes moyennes et le Crédit local de France a permis de chiffrer l'impact financier pour les communes de la mise aux normes dans les secteurs de l'environnement, de la voirie, des équipements sportifs, des bâtiments publics et de la restauration collective. En extrapolant ces résultats obtenus à partir de l'examen approfondi de 10 villes moyennes, l'étude fait apparaître un coût oscillant pour les communes entre 19 et 22 milliards d'euros sur la période allant de 1999 à 2005, voire 2013 pour les travaux liés à la teneur en plomb de l'eau. Si le précédent gouvernement ne saurait être tenu entièrement responsable de cette inflation normative, tant celle-ci est liée aux réglementations communautaires, il est un domaine pour lequel il porte une pleine et entière responsabilité, qui est celui de la durée hebdomadaire du travail dans la fonction publique : en imposant sans concertation à la fonction publique territoriale la nouvelle durée du temps de travail, le gouvernement de M. Lionel Jospin a pris le risque d'affaiblir durablement les marges de manœuvre financière des collectivités locales. Les effets de cette réforme sur les dépenses de fonctionnement sont difficiles à appréhender ; néanmoins, une étude de la direction générale des collectivités locales et du Centre national de la Fonction publique territoriale estime que seules 10 % des collectivités pratiquaient une durée hebdomadaire du travail inférieure à 39 heures au 31 décembre 1999. Ce chiffre illustre l'ampleur des réaménagements que les collectivités locales ont du fournir pour se mettre en conformité avec la loi. Ainsi, en 2003, les prévisions des départements et des régions font état d'une nouvelle hausse des charges de personnel, de l'ordre de 7,9 %, succédant à celle de 8,9 % en 2002. Démantèlement de la fiscalité locale, non-reconduction des dotations, alourdissement des charges... Tel est le bilan de la législature 1997-2002. Les parlementaires de l'opposition de l'époque avaient cru pouvoir trouver dans la Constitution, et dans son interprétation par le juge constitutionnel, une parade à ces remises en cause de l'autonomie financière. Faute de dispositions suffisamment précises dans la Constitution du 4 octobre 1958, leurs espoirs furent déçus. B. L'IMPOSSIBLE PROTECTION CONSTITUTIONNELLE · Des dispositions constitutionnelles elliptiques Dans son rapport consacré à la loi constitutionnelle relative à l'organisation décentralisée de la République, le président Pascal Clément souligne, à juste titre, la plasticité du cadre constitutionnel hérité de 1958, qui s'est accommodé avec un égal bonheur de la fin de la tutelle sur les collectivités locales, de la création des régions et du développement de l'intercommunalité. Cette plasticité tient pour une très large part au laconisme des dispositions consacrées à la libre administration des collectivités territoriales, qui ont permis toutes les interprétations possibles : dans sa rédaction antérieure à la révision constitutionnelle du 28 mars 2003, le principe de libre administration des collectivités locales n'est, en effet, affirmé dans la loi fondamentale que par deux fois, à l'article 34, qui dispose que la loi détermine les principes fondamentaux de la libre administration des collectivités locales, de leurs compétences et de leurs ressources ; à l'article 72, qui indique, dans son deuxième alinéa, que ces collectivités s'administrent librement par des conseils élus et dans des conditions prévues par la loi. Sur la base de ces seules dispositions, le Conseil constitutionnel a fait œuvre créatrice ; il a tout d'abord considéré, sur le fondement de l'article 34, que seule la loi pouvait fixer les conditions et les garanties de la libre administration locale et jugé en conséquence qu'il revenait au législateur de définir ce qui relève des ressources locales (8) et de déterminer les limites à l'intérieur desquelles les collectivités locales peuvent elles-mêmes fixer les taux d'imposition(9). Il a ensuite cherché à encadrer ce pouvoir législatif, en défendant le principe de libre administration des collectivités locales : il a ainsi considéré que l'article 72 de la Constitution interdit d'instituer par la loi la tutelle d'une collectivité locale sur une autre (10). Il a considéré également que ce principe impliquait de créer des collectivités territoriales disposant d'attributions effectives(11), et s'opposait à ce que soit imposée par le législateur la publicité des séances de la commission permanente de ces collectivités(12). Néanmoins, comparé aux remises en cause répétées par le législateur du principe de libre administration des collectivités locales, le nombre de décisions faisant valoir la nécessaire protection de l'échelon local apparaît relativement faible. Mais, faute de dispositions dans la Constitution suffisamment précises, le juge constitutionnel s'est souvent trouvé démuni : l'autonomie financière des collectivités locales, corollaire indissociable du principe de libre administration, n'a donc pas pu recevoir la consécration constitutionnelle qu'elle méritait. · La fragilité du principe d'autonomie financière Le Conseil constitutionnel a, semble-t-il, toujours subordonné la reconnaissance de l'autonomie financière à celle du principe constitutionnel de libre administration : l'autonomie financière n'étant pas une exigence constitutionnelle en elle-même, elle ne peut être analysée qu'à la lumière du principe plus global de libre administration, tel que reconnu à l'article 72 de la Constitution. Ainsi, les multiples décisions que le Conseil constitutionnel a été amené à prendre dans le domaine de l'autonomie financière peuvent être résumées à un principe simple : la libre administration est respectée aussi longtemps que les collectivités locales possèdent la maîtrise de leur action grâce à la faculté de pouvoir librement se prononcer sur la nature des mesures à prendre. Partant de ce constat, le juge constitutionnel a admis que le législateur puisse instituer une dépense obligatoire à la charge des collectivités territoriales, en précisant simplement que « les obligations ainsi mises à la charge d'une collectivité territoriale doivent être définies avec précision quant à leur objet et à leur portée et ne sauraient méconnaître la compétence propre des collectivités territoriales ni entraver leur libre administration (13)». S'agissant plus précisément des ressources mises à la disposition des collectivités locales, le Conseil constitutionnel s'est attaché à dégager deux principes, qui sont le maintien des ressources globales et les limites à la réduction des ressources fiscales. La jurisprudence relative au maintien des ressources globales ne s'est pas révélée aussi protectrice que ce à quoi les élus locaux étaient en droit d'attendre : le Conseil constitutionnel a ainsi considéré, à propos d'une disposition réduisant, pour certaines catégories de communes, la garantie de progression minimale de dgf, qu'elle ne pouvait être regardée comme constituant une entrave à la libre administration dans la mesure où elle n'était susceptible d'entraîner qu'une diminution minime de la progression des dotations (14). Il a, dans une décision de la même année, admis la suppression d'une recette fiscale sans compensation au motif « qu'eu égard au montant du prélèvement en cause par rapport à l'ensemble des recettes de fonctionnement de la ville de Paris, sa suppression n'est pas contraire au principe de libre administration des collectivités locales » (15). Il semble ainsi, sans qu'un seuil n'ait été clairement déterminé, que la réduction ou la suppression de ressources ait à répondre à un critère de proportionnalité en fonction de l'importance de l'ensemble des recettes. Ce critère est, en outre, apprécié différemment selon les collectivités touchées par la réduction, comme le laisse supposer la décision précitée : « si l'application des dispositions conjuguées des articles 7, 10 et 14 de la loi conduira, dans les limites déterminées par celle-ci, à un accroissement des charges de quelques communes, cette situation ne concernera que des communes dont le potentiel fiscal par habitant est très élevé ; que, dans ces conditions, ni dans l'immédiat, ni à terme, il n'en résultera une entrave à la libre administration de la collectivité communale ». S'agissant de la part des ressources fiscales dans l'ensemble des ressources globales des collectivités territoriales, le Conseil constitutionnel considère en premier lieu que les collectivités territoriales doivent disposer d'une marge de manœuvre dans la fixation du montant de leurs recettes. Comme le précise un commentateur avisé de la jurisprudence du Conseil constitutionnel : « si les recettes fiscales propres d'une collectivité territoriale disparaissaient ou devenaient insuffisantes, elles ne pourraient faire face à des dépenses imprévues, ce qui pourrait compromettre la continuité de services publics locaux ou l'ordre public, portant atteinte à des principes de valeur constitutionnelle. Plus généralement, une dépendance excessive par rapport à l'État viderait de sa substance l'autonomie locale, contrevenant ainsi à l'article 72 de la Constitution (16)». De façon assez audacieuse, le contrôle du Conseil constitutionnel sur les dispositions réduisant les recettes fiscales ne s'est pas limité à une étude au cas par cas, mais s'est inscrit au contraire dans la continuité : ainsi, dans sa décision du 12 juillet 2000, le juge a conclu que si les mesures de suppression et de compensation « réduisent de nouveau la part des recettes fiscales des régions dans l'ensemble de leurs ressources, elles n'ont pour effet ni de restreindre la part de ces recettes, ni de diminuer les ressources globales des régions au point d'entraver leur libre administration ». Six mois plus tard, dans sa décision du 28 décembre 2000, le juge constate la nouvelle diminution des recettes fiscales : « [les dispositions critiquées] réduisent encore la part des recettes fiscales dans l'ensemble de leurs ressources » sans pour autant entraver la libre administration des collectivités locales. Ainsi, à chaque fois, le juge constate qu'un degré supplémentaire est franchi dans la remise en cause de la fiscalité locale. Pour autant, il ne précise pas quel est le seuil au-delà duquel il y a inconstitutionnalité. Cette question de la détermination du seuil en deçà duquel le principe de libre administration n'est pas respecté reste donc marquée par la même incertitude que pour le niveau de ressources globales, car le Conseil constitutionnel fait appel là encore au principe de proportionnalité, suivant lequel la réduction de la part des recettes fiscales dans les ressources globales ne doit pas être telle qu'elle entrave leur libre administration. Contrairement aux attentes des élus locaux, il n'a jamais jusqu'à présent considéré que ce seuil était franchi. Plutôt que de se perdre en conjectures pour savoir à quel moment « la ligne jaune » de l'autonomie financière serait franchie, le Gouvernement a choisi d'en faire une garantie constitutionnelle en l'inscrivant dans un nouvel article 72-2 de la Constitution. Cette reconnaissance marque ainsi l'avènement d'une nouvelle organisation décentralisée de la République. III. - DE NOUVELLES PERSPECTIVES POUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES DANS LE CADRE D'UNE ORGANISATION DÉCENTALISÉE DE LA RÉPUBLIQUE A. LE CHANGEMENT DE PERSPECTIVE INDUIT PAR LA RÉVISION CONSTITUTIONELLE DU 28 MARS 2003 La loi constitutionnelle du 28 mars 2003 est très certainement le résultat de l'exaspération des élus locaux face à des pratiques de l'État jugées déloyales. Mais elle n'est pas que cela : en inscrivant à l'article 1er de la Constitution que l'organisation de la République est décentralisée, le Constituant a tenu à proclamer solennellement que l'État ne saurait à lui seul incarner l'intérêt général. Placé au côté des principes d'indivisibilité de la République et d'égalité, le principe d'organisation décentralisée permet ainsi de reconnaître aux collectivités locales une égale responsabilité dans la conduite des affaires publiques. Cette nouvelle organisation de la République s'appuie désormais sur cinq piliers, décrits par le Premier ministre dans son discours devant le Congrès : - la promotion du principe de subsidiarité et de proximité ; - la création d'un droit à l'expérimentation ; - la création d'outils locaux de participation populaire ; - la fixation d'un nouveau cadre financier pour garantir l'autonomie financière des collectivités territoriales et développer la péréquation entre les territoires ; - la reconnaissance d'un droit à la spécificité par la possibilité d'adapter le statut des collectivités en métropole et outre-mer. Loin de n'être que des principes abstraits, ces nouvelles exigences constitutionnelles ont institué un cadre adéquat pour la mise en œuvre concrète d'un grand nombre de réformes. En un temps record et dans un contexte économique pourtant défavorable, le Gouvernement s'est ainsi employé à décliner le texte constitutionnel en une série de projets qui révolutionnent complètement l'organisation administrative de notre pays. B. DES RÉFORMES QUI DONNENT UN NOUVEL ESSOR À LA DÉCENTRALISATION Avant même la réforme constitutionnelle, la loi de finances pour 2003 annonçait déjà de façon très concrète la confiance du Gouvernement envers l'échelon local en proposant un assouplissement de la règle du lien entre les taux des taxes directes locales. Cet assouplissement, que le précédent Gouvernement a toujours refusé, permet une variation de la taxe professionnelle dans la limite d'une fois et demie la variation du taux de la taxe d'habitation ou, si elle est moins élevée, du taux moyen pondéré de la taxe d'habitation et des taxes foncières. Après la loi constitutionnelle du 28 mars 2003, ce sont deux textes de nature organique, le premier relatif au référendum local, le second relatif à l'expérimentation par les collectivités territoriales, qui permettent de donner aux collectivités locales de nouveaux moyens d'intervention dans le cadre d'un dialogue rénové avec les électeurs. La loi de finances pour 2004 innove à son tour. Elle propose ainsi une refonte complète de l'architecture des dotations de l'État en faisant de la dgf, qui atteint cette année plus de 36 milliards d'euros, soit un doublement, le pivot central des dotations. La dgf intègre désormais un ensemble de dotations et de compensations qui évoluaient auparavant selon des critères propres. La simplification qui en résulte était attendue depuis longtemps. Préconisée dans un rapport ministériel sous le précédent Gouvernement, cette réforme était, comme tant d'autres, restée lettre morte. Pour les élus locaux, elle signifie pourtant une plus grande prévisibilité des montants attribués, et donc, une meilleure anticipation dans la gestion locale. Cette réforme sera suivie, dans la prochaine loi de finances, d'une réforme des critères de répartition des dotations. Enfin, dernier grand projet en cours de discussion, le projet de loi relatif aux libertés et responsabilités locales ouvre véritablement le nouvel acte de la décentralisation. Ce texte est le fruit d'un long travail de concertation, au travers notamment des Assises des collectivités locales, qui ont eu lieu l'année précédente dans tout le pays. Avec cette démarche à l'écoute des élus locaux et des citoyens, le Gouvernement a souhaité rompre avec la méthode empruntée en 1982 qui avait imposé aux responsables de l'échelon local une réforme sans l'expliquer. Le texte prévoit ainsi des transferts de compétence en matière de développement économique, de transports, d'action sociale, de logement, de santé et d'éducation. Le choix a été fait d'opérer par blocs de compétences ; ainsi, à chaque fois que cela a été possible, les mécanismes de co-gestion et de co-responsabilité ont été supprimés. Quand la complexité du sujet ne permettait pas de procéder à un transfert par bloc, il a été décidé de faire appel au principe dégagé dans le cinquième alinéa de l'article 72 de « chef de file », permettant ainsi à une collectivité d'organiser les modalités d'exercice d'une compétence partagée entre plusieurs niveaux. La clarification des compétences qui en résulte va ainsi permettre au citoyen de mieux identifier les responsables. Au total, en incluant le transfert aux départements du rmi, ce sont plus de 11 milliards d'euros qui feront l'objet d'une gestion directe à l'échelon local à la suite de ces transferts. Le financement sera proposé dans la loi de finances pour 2005. D'ores et déjà, les articles 88 et 89 du projet prévoient les modalités de compensation des transferts en donnant une transcription législative aux dispositions de l'article 72-2 de la Constitution, qui dispose que « tout transfert de compétences entre l'État et les collectivités territoriales s'accompagne de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice ». L'article 88 fait par ailleurs le lien avec le troisième alinéa de l'article 72-2 et le projet de loi organique relatif à l'autonomie financière en énonçant que « la compensation financière des transferts de compétences s'opère à titre principal, par l'attribution d'impositions de toute nature, dans les conditions fixées par la loi de finances ». La loi organique qui nous est présentée aujourd'hui vient ainsi compléter ce dispositif de transferts financiers en l'inscrivant dans la problématique plus générale de l'autonomie financière des collectivités locales. IV. - LE PROJET DE LOI ORGANIQUE A. UNE DÉCLINAISON DE L'ARTICLE 72-2 DE LA CONSTITUTION L'article 72-2 de la Constitution a pour objet de définir le nouveau cadre de l'autonomie financière des collectivités locales ; il est d'abord précisé, dans son premier alinéa que « les collectivités territoriales bénéficient de ressources dont elles peuvent disposer librement dans les conditions fixées par la loi ». Les deuxième et troisième alinéas, consacrés aux ressources, précisent que les collectivités locales peuvent recevoir le produit des impositions de toutes natures, dans les conditions prévues par la loi, et que les recettes fiscales ainsi induites, ainsi que les autres ressources propres doivent constituer une part déterminante de l'ensemble de leurs ressources. On se souvient des débats ayant eu lieu au Sénat sur le choix de l'adjectif « déterminant ». Il est apparu au cours de la discussion que le terme « prépondérant », qui avait les faveurs du Sénat, aurait conduit à placer de facto bon nombre de collectivités en situation de contradiction avec les dispositions constitutionnelles. Comme le rappelait le Président Pascal Clément dans son rapport, « la réforme constitutionnelle a vocation à donner une dynamique, elle n'est pas destinée à rejeter hors champ, dès sa publication, une part non négligeable de collectivités. Il s'agit ainsi d'assigner au législateur une direction, un objectif à atteindre. La suppression de ressources propres, ou le remplacement de ressources propres par des dotations, encourra désormais le risque de censure du Conseil constitutionnel ». Le quatrième alinéa de l'article prévoit que tout transfert de compétences entre l'État et les collectivités territoriales s'accompagne de l'attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice ; de même, toute création ou extension de compétences doit être accompagnée de ressources déterminées par la loi. Enfin, le dernier alinéa précise que la loi prévoit des dispositifs de péréquation destinés à compenser les inégalités entre collectivités locales. La loi organique présentée aujourd'hui est prévue par le troisième alinéa de l'article 72-2 ; elle est destinée à préciser les conditions dans lesquelles est mise en œuvre la règle selon laquelle les recettes fiscales et les autres ressources propres des collectivités représentent une part déterminante de l'ensemble de leurs ressources. B. LE CONTENU DU PROJET DE LOI Avec le troisième alinéa de l'article 72-2, le pouvoir constituant a entendu mettre un coup d'arrêt aux évolutions constatées, qui ont conduit à transformer 15 milliards d'euros de recettes fiscales locales en dotations de l'État, réduisant ainsi l'autonomie financière. Le texte constitutionnel se devant d'être concis, il n'a pu procéder à une énumération de ce qui relevait des ressources propres et des recettes globales : le projet de loi organique procède donc à une « explication de texte » en précisant ce qui n'a pu être introduit dans la Constitution. Ainsi, il revient à la loi organique d'expliciter le ratio utilisé pour définir l'autonomie financière des collectivités locales, en définissant : - les ressources propres (article 2 du projet); - l'ensemble des ressources prises en compte (article 3); - la notion de part déterminante, ou, plus exactement le seuil en deçà duquel l'autonomie financière n'est plus assurée (article 3). L'article 72-2 de la Constitution précisant en outre que le principe de l'autonomie financière s'apprécie « pour chaque catégorie de collectivités locales », il a paru également nécessaire de définir, à l'article 1er, ce que l'on inclut dans chaque catégorie afin de parvenir au calcul d'un ratio homogène réunissant des collectivités locales aux caractéristiques semblables. S'agissant du seuil, le projet de loi organique propose, à l'article 3, que le niveau d'autonomie atteint en 2003, c'est-à-dire l'année où la réforme de la taxe professionnelle initiée en 1999 est intégralement achevée, constitue une seuil au dessous duquel ne peut être ramenée la part des recettes fiscales et autres ressources propres. L'article 4 institue un mécanisme de garantie de l'autonomie financière définie au précédent article, en prévoyant la remise d'un rapport par le Gouvernement sur l'évolution des recettes et la mise en œuvre des mesures correctrices nécessaires, s'il apparaît, au vu du rapport, que les règles posées à l'article 3 ne sont pas respectées. Sans ces précisions, le recours à l'article 72-2 de la Constitution reste inopérant : c'est du moins ainsi qu'a jugé le Conseil constitutionnel qui a estimé que l'article 72-2 ne pouvait être utilement invoqué « tant que ne sera pas promulguée la loi organique qui devra définir les ressources propres des collectivités territoriales et déterminer la part des ressources propres que doivent représenter les recettes fiscales et les autres ressources propres dans l'ensemble de leurs ressources (17)». Compte tenu des enjeux de la décentralisation, de l'ampleur des réformes en cours, il apparaît désormais urgent de procéder à une explication claire des intentions du Constituant, afin de rendre opérationnelle dans les meilleurs délais l'exigence constitutionnelle de l'autonomie financière. * * * Après l'exposé du rapporteur, plusieurs commissaires sont intervenus dans la discussion générale. Après avoir remercié le rapporteur pour la clarté de son exposé, le président Pascal Clément a salué une avancée espérée depuis vingt ans grâce à la réforme constitutionnelle de 2003, qui a notamment conforté l'autonomie financière des collectivités territoriales en introduisant la notion de « part déterminante » des ressources propres dans l'ensemble des recettes des collectivités territoriales. Il a considéré que celles-ci seraient désormais à l'abri des mésaventures qui ont marqué la première étape de la décentralisation. M. Jacques Floch s'est réjoui de voir que l'actuelle majorité, après s'être opposée vivement aux « lois Deferre » des années quatre-vingts, s'était finalement ralliée à la décentralisation. Il s'est interrogé sur l'utilité du projet de loi organique, qui lui a paru se réduire à une explication du texte constitutionnel, pourtant suffisamment clair en lui-même. Il a estimé que le projet ne garantissait pas aux collectivités locales une réelle liberté fiscale, que seule pourrait assurer la faculté de déterminer librement l'assiette et le taux d'un impôt qui leur serait propre. Il a par ailleurs regretté que soit absente de ce texte la solidarité républicaine, qui suppose des mécanismes de péréquation destinés à compenser les inégalités d'assiette fiscale entre les collectivités et à éviter les tentations de baisse concurrentielle des taux. Regrettant l'absence de dispositions relatives aux établissements publics de coopération (epci), il s'est déclaré convaincu que la majorité serait conduite à tirer les conséquences des efforts considérables de regroupement consentis par les élus locaux et de la mise en place de grandes entités assumant des investissements lourds. Revenant sur les observations du rapporteur sur les modalités du transfert des collèges et des lycées aux départements et aux régions définies voici vingt ans, il s'est inscrit en faux contre une argumentation purement comptable et d'ailleurs démentie par l'expérience des citoyens, qui ont apprécié l'effort des collectivités dans la construction des établissements scolaires, preuve d'une réforme réussie du point de vue du service rendu. Il s'est enfin interrogé sur le sens de la notion d'autonomie financière, puisque la part respective des ressources des différentes catégories de collectivités territoriales n'est pas définie. Il a considéré dès lors que la présente loi organique serait source de déception pour les collectivités territoriales. Le président Pascal Clément a constaté avec satisfaction que M. Jacques Floch employait un argument qui avait été absent du discours de ses amis lors de la décentralisation des lycées et des collèges : celui de la compensation des charges. Il a rappelé qu'avant la décentralisation, les crédits budgétaires n'autorisaient annuellement que la construction d'un ou deux collèges et d'un ou deux lycées pour toute la France, alors que, depuis lors, chaque département et chaque région mettaient en chantier tous les ans un ou deux établissements relevant de leur compétence. Il a rappelé que, désormais, l'adéquation entre les compétences et les ressources transférées serait soumise au contrôle du juge constitutionnel conformément à l'article 72-2 de la Constitution et souligné que cette disposition prévoyait expressément l'adoption d'une loi organique pour en déterminer les modalités d'application. M. Xavier de Roux s'est déclaré surpris par les arguments de l'opposition, avant de souligner que le texte constitutionnel ne pourrait que faire obstacle au penchant de l'État à transférer des compétences sans les ressources appropriées. Il a cité l'exemple récent des charges relatives à l'allocation personnalisée d'autonomie, dont les départements doivent chaque année financer la charge croissante. En réponse à une remarque de M. Christophe Caresche, il a fait valoir que le revenu minimum d'activité avait, quant à lui, fait l'objet d'un financement, le principe de compensation des charges bénéficiant désormais d'une assise constitutionnelle. M. Christophe Caresche s'est montré étonné de la ferveur avec laquelle la majorité défendait ce projet de loi, alors que, selon des informations parues dans la presse, nombre de ses membres avaient fait état de leurs interrogations, d'aucuns attribuant même aux projets du Gouvernement relatifs à la décentralisation la responsabilité de la défaite électorale subie par la majorité lors des dernières élections régionales. Il a néanmoins reconnu que les interrogations suscitées par ce texte dépassaient les clivages partisans habituels. Après avoir convenu qu'il y avait eu, par le passé, des transferts de compétences sans véritable compensation financière, il a toutefois observé que, par leur ampleur, les transferts prévus par le projet de loi sur les libertés et responsabilités locales étaient sans commune mesure avec ceux opérés par les lois de 1982 et de 1983, qui ont confié la gestion et la construction des établissements scolaires aux collectivités territoriales. Évoquant les dispositions du projet de loi organique, il a regretté qu'elles ne prévoient pas la compensation financière intégrale des nouvelles charges confiées aux collectivités locales, notamment la prise en charge du revenu minimum d'activité ou de l'entretien et de la construction des routes nationales. Réagissant aux propos M. Jacques Floch, M. Michel Piron s'est demandé si les membres du groupe socialiste étaient sincèrement favorables à la décentralisation compte tenu de l'insistance avec laquelle ils soulignaient le risque d'aggravation des inégalités entre les collectivités locales qu'elle serait censée provoquer. Puis, après avoir rappelé qu'aucun impôt local n'avait été affecté à la construction des établissements scolaires, en application du principe constitutionnel de non affectation des recettes fiscales, il a indiqué que le seul élément permettant de comparer l'effort consacré, avant 1982, par l'État avec celui des collectivités territoriales, était d'évaluer le montant des budgets d'investissement dédiés à ces opérations. Il a souligné, de surcroît, que le projet de loi organique n'avait nullement pour objet de déterminer les modalités de la péréquation entre collectivités locales. Après avoir noté que les derniers résultats des élections régionales semblaient avoir réduit l'appétence de la majorité pour la décentralisation et le transfert de compétences aux régions, M. Émile Zuccarelli s'est toutefois réjoui des assauts de prosélytisme en faveur de la décentralisation auxquels ce débat a donné lieu. Il a contesté les arguments attribuant à la réduction du temps de travail la responsabilité de l'augmentation des effectifs des collectivités locales. Après avoir évoqué les déclarations du Président de la République annonçant l'exonération de la taxe professionnelle pour les nouveaux investissements, il a souhaité savoir si cette mesure ferait l'objet d'une compensation financière de la part de l'État. Le rapporteur a apporté les précisions suivantes : - la taxe professionnelle, dont la réforme a été annoncée par le Président de la République, sera évidemment remplacée par un impôt équivalent. - il n'est pas possible de définir les ressources propres des collectivités comme les seules sur lesquelles les collectivités ont un pouvoir de fixation des taux : une telle interprétation méconnaîtrait la deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article 72-2 de la Constitution, qui précise que la loi peut, et non doit, autoriser les collectivités locales à fixer l'assiette et le taux des impositions de toutes natures dans les conditions qu'elle détermine. Article premier Le troisième alinéa de l'article 72-2 de la Constitution dispose que « les recettes fiscales et les autres ressources propres des collectivités territoriales représentent, pour chaque catégorie de collectivités, une part déterminante de l'ensemble de leurs ressources ». L'objet du présent article est donc de définir chacune de ces catégories de collectivités. La référence aux catégories de collectivités territoriales n'existait pas dans la version initiale du projet de loi constitutionnelle déposé en octobre 2002, qui prévoyait au deuxième alinéa de l'article 72-2 que « les recettes fiscales, les autres ressources propres des collectivités et les dotations qu'elles [à savoir, les collectivités territoriales] reçoivent d'autres collectivités territoriales représentent une part déterminante de l'ensemble de leurs ressources ». Issue d'un amendement de rédaction globale de l'article 72-2 présenté par le Gouvernement au Sénat, l'introduction de la notion de catégorie de collectivités territoriales ne parait pas avoir été analysée à l'époque avec toute l'attention qu'elle méritait : elle modifie pourtant la portée de l'article 72-2 puisque elle garantit une autonomie financière non pas à chaque collectivité prise individuellement, mais catégorie par catégorie. Par souci de réalisme, il a ainsi été décidé de raisonner en terme de moyenne et non plus au cas par cas. Cela étant, la notion de catégorie de collectivité territoriale reste à définir, car le terme n'apparaît à aucun moment dans le texte constitutionnel. La lecture du premier alinéa de l'article 72 de la Constitution apporte toutefois une première réponse en disposant que « les collectivités territoriales de la République sont les communes, les départements, les régions, les collectivités à statut particulier et les collectivités d'outre-mer régies par l'article 74. Toute autre collectivité territoriale est créée par la loi, le cas échéant en lieu et place d'une ou plusieurs collectivités mentionnées au présent alinéa ». Il apparaît donc d'emblée trois grandes catégories de collectivités territoriales que sont les communes, les départements et les régions. Reste alors la question des collectivités à statut particulier et des collectivités d'outre-mer. La rédaction du projet de loi organique ne reprend pas, pour ces collectivités d'outre-mer ou à statut particulier, une jurisprudence déjà ancienne du Conseil constitutionnel qui utilise ce terme de « catégories de collectivité » pour reconnaître que le législateur peut créer, sur le fondement des articles 34 et 72 une nouvelle catégorie de collectivité ne comprenant qu'une unité (18) : en conséquence, si, pour le Conseil constitutionnel, la Corse, Paris ou Mayotte représentent trois catégories de collectivités territoriales distinctes, elles ne sauraient néanmoins être traitées de façon indépendante pour l'application de la loi organique sur l'autonomie financière. S'il en était différemment, le calcul du ratio de la part déterminante des ressources propres serait établi à chaque fois pour une unité : il n'existe pourtant aucune raison de donner à ces collectivités territoriales une protection en terme d'autonomie financière plus grande que celle retenue pour les collectivités de droit commun. Dès lors, ainsi que le rappelle l'exposé des motifs du projet de loi, il a été jugé préférable de retenir la définition la plus simple possible, qui est aussi la plus large, afin de ne pas multiplier le nombre de catégories à prendre en compte pour la détermination du degré d'autonomie financière. Dans cet objectif, il n'a été retenu que trois grandes catégories de collectivités, que sont les communes, les régions et les départements, avec le rattachement des collectivités d'outre-mer ou à statut particulier à l'une ou l'autre de ces catégories, selon leur nature et les compétences exercées. Ce critère de compétences exercées permet, comme on le verra, l'intégration, dans un même agrégat, de collectivités territoriales aux structures de financement très diversifiées. Première des catégories citées à l'article 1er, les communes regroupent l'ensemble des communes métropolitaines et ultramarines, y compris, comme on le verra un peu plus loin, les communes de Nouvelle-Calédonie. C'est bien évidemment la catégorie la plus importante, puisque elle compte 36 778 unités, et la plus hétérogène en termes statistiques : elle rassemble en effet à la fois les communes rurales et urbaines, les grandes métropoles comme Paris et les villages. La Commission a rejeté un amendement de M. René Dosière, proposant d'opérer une distinction entre les communes selon leur population, le rapporteur ayant indiqué qu'une telle différenciation n'était pas prévue par l'article 72-2 de la Constitution. Cette catégorie présente néanmoins une grande homogénéité juridique puisqu'elle ne comprend que les communes : n'y est rattachée aucune collectivité d'outre-mer ou à statut particulier ; n'y figurent pas non plus les établissements publics de coopération intercommunale. L'intercommunalité n'est pas pour autant absente du projet de loi organique, dans la mesure où les articles 2 et 3 précisent les dispositions techniques qui permettent de prendre en compte les circuits financiers entre les communes et les établissements publics de coopération intercommunale dont elles sont membres. Il n'est pas possible juridiquement d'aller au-delà de ces précisions techniques en faisant figurer les groupements intercommunaux de façon explicite dans la catégorie des communes : le pouvoir constituant a en effet dénié à ces groupements le statut de collectivité territoriale en considérant que ceux-ci n'étaient que des émanations de leurs communes membres. Il convient néanmoins de relativiser cette question dans la mesure où la garantie de l'autonomie financière des communes induit nécessairement une garantie pour les epci. Ainsi que le rappelait le ministre délégué aux libertés locales, M. Patrick Devedjian, devant le Comité des finances locales : « les intercommunalités n'étant pas des collectivités locales à part entière, elles ne sont pas identifiées en tant que telle au sein d'une catégorie donnée, mais [...] la prise en compte de leurs ressources propres conjointement à celles de leurs communes membres revient à les faire bénéficier de la garantie reconnue à la catégorie de communes à laquelle elles sont rattachées (19)». La Commission a examiné un amendement de M. René Dosière, proposant de prendre en compte, de manière spécifique, les établissements publics de coopération intercommunale (epci) au titre des catégories de collectivités territoriales mentionnées au 3e alinéa de l'article 72-2. Le rapporteur a rappelé qu'une telle extension excédait la portée de la norme constitutionnelle, qui ne mentionne que les collectivités elles-mêmes, tout en soulignant que les epci sont pris en considération, aux articles 2 et 3 du projet, dans le cadre de la consolidation des ressources des communes. La Commission a donc rejeté cet amendement. La deuxième catégorie citée à l'article 1er rassemble les départements, auxquels sont assimilées la collectivité départementale de Mayotte, la collectivité territoriale de Saint-Pierre-Miquelon et les collectivités à statut particulier issues de la fusion d'une ou plusieurs communes ou d'un département. L'agrégation dans une même catégorie des 96 départements métropolitains ne pose aucune difficulté ; encore est-il toutefois nécessaire de préciser que cette agrégation intègre le département de Paris, puisque Paris est à la fois une commune et un département, avec des budgets bien distincts. L'intégration des quatre départements d'outre-mer ne parait pas non plus de nature à susciter de difficulté particulière ; régis par le principe de l'adaptation législative tel que défini à l'article 73 de la Constitution, les départements d'outre-mer exercent les mêmes compétences, à quelques adaptations près, qu'un département métropolitain. Il convient néanmoins de préciser qu'en terme de financement, l'architecture des recettes est très nettement différente de celle des départements de métropole ; les budgets des départements d'outre-mer sont en effet alimentés par des contributions de l'État au régime très particulier et par des ressources fiscales propres à l'outre-mer (20). Cette particularité se retrouve pour les communes des départements d'outre-mer ; s'agissant toutefois de la catégorie des communes, qui regroupe près de 36 000 unités, la question des conséquences de l'intégration des communes de la Martinique, de la Guadeloupe, de la Réunion et de la Guyane se pose avec une acuité moindre. En revanche, s'agissant des départements d'outre-mer, dont la dépendance vis-à-vis des dotations de l'État est plus grande que celle des départements métropolitains, l'intégration des dom dans le ratio général des départements a inévitablement pour conséquence de faire baisser le seuil de l'autonomie financière. Néanmoins, un traitement particulier de ces départements n'apparaît pas souhaitable tant il est difficile de construire un agrégat d'autonomie financière pour quatre unités. Seraient également intégrées dans la catégorie des départements la collectivité départementale de Mayotte et la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon. Là encore, il s'agit d'intégrer des collectivités territoriales comprenant des fortes spécificités par rapport aux départements de métropole. Ainsi, il n'existe pas à Mayotte d'impôt d'État, l'ensemble de la fiscalité, qu'il s'agisse de l'impôt sur le revenu des personnes physiques, de l'impôt sur les sociétés, des droits d'enregistrement et des droits de douane étant versé à la collectivité départementale. Néanmoins, ces spécificités devraient bientôt s'atténuer avec l'application du code général des impôts et du code des douanes prévue dès l'année 2007 par la loi n° 2001-616 du 11 juillet 2001 relative à Mayotte. Conformément au souhait exprimé par la population mahoraise, la collectivité départementale de Mayotte a en effet vocation à se rapprocher du statut départemental. La collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon se trouve en revanche très proche dans son financement des départements de métropole. Ayant jusqu'en 1985 le statut de département, la collectivité territoriale a conservé de ce statut une très forte similitude dans l'exercice des compétences et les modalités de son financement. Enfin, seraient intégrées dans la catégorie des départements les collectivités à statut particulier issues de la fusion d'une ou plusieurs communes et d'un département. Cette précision ne renvoie à aucune collectivité en particulier mais permet d'envisager toutes les hypothèses, sans avoir pour autant besoin de procéder à une modification de la loi organique. Dans le cas d'une fusion d'un département avec une commune, et l'on pense bien évidemment à Paris, il parait logique de comptabiliser la collectivité issue de la fusion parmi les départements. La troisième catégorie citée à l'article 1er est assurément la plus hétérogène puisque elle intègre les régions, la collectivité territoriale de Corse auxquelles sont assimilées les collectivités d'outre-mer régies par l'article 74 de la Constitution autres que celles mentionnées au 2°, les provinces de la Nouvelle-Calédonie, les collectivités à statut particulier issues de la fusion de départements et de régions et les collectivités mentionnées au dernier alinéa de l'article 73. L'intégration dans une même catégorie des régions métropolitaines avec les régions d'outre-mer soulève les mêmes questions que précédemment pour les départements d'outre-mer, puisque l'essentiel des recettes fiscales des régions d'outre-mer est constitué d'impôts spécifiques tels que la taxe additionnelle à l'octroi de mer, la taxe sur les carburants et la taxe sur les rhums, qui représentent à elles seules 85 % de leurs ressources fiscales. Néanmoins, à l'instar de la solution retenue précédemment pour les départements d'outre-mer, il n'apparaît pas souhaitable, compte tenu du fait que les compétences et la nature des régions d'outre-mer sont très proches de celles de métropole, d'établir une catégorie particulière ne comprenant que quatre unités. L'intégration dans la catégorie des régions de la collectivité territoriale de Corse pose moins de difficultés, même si là encore la structure des recettes comprend quelques particularités. Néanmoins, la filiation entre région et collectivité territoriale de Corse ne fait pas de doute, dans la mesure où, aux termes de l'article L. 4421-2 du code général des collectivités territoriales, la collectivité territoriale de Corse a été « substituée à la région de Corse dans tous ses droits et obligations ». La référence aux collectivités d'outre-mer régies par l'article 74 de la Constitution autres que celles mentionnées au 2° permet d'exclure de la catégorie régionale Saint-Pierre-et-Miquelon et Mayotte, dont l'intégration dans la catégorie des départements est prévue à l'alinéa précédent. Reste donc ce qui constitue le « solde » des collectivités régies par l'article 74, à savoir la Polynésie française et les Iles Wallis-et-Futuna. La Nouvelle-Calédonie ne figure qu'au titre de ses provinces ; en effet, l'article 3 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie ne reconnaît comme collectivités territoriales de la République que les provinces et les communes. La Nouvelle-Calédonie elle-même jouit d'un statut difficilement définissable qui est celui « d'un territoire français susceptible de devenir un État souverain (21)». Lors de la révision constitutionnelle, les sénateurs ont souhaité préciser à l'article 72-3 de la Constitution, soit dans le titre XII consacré aux collectivités territoriales, que « le statut de la Nouvelle-Calédonie est régi par le titre XIII » ; les auteurs de cette modification entendaient ainsi conférer à la Nouvelle-Calédonie le caractère de collectivité territoriale de la République qu'aucun texte ne consacre plus actuellement. Pour autant, comme le rappelait Mme Brigitte Girardin, ministre de l'outre-mer, lors des débats, la modification apportée « ne paraît pas revêtir la portée juridique que lui prête le rapporteur ». La question était ainsi de savoir si, par cet ajout au titre XII qui renvoie au titre XIII, l'article 72-3 conférait à la Nouvelle-Calédonie le statut de collectivité territoriale de la République et lui rendait alors applicable l'ensemble des dispositions prévues au titre XII, telles que le droit à l'expérimentation, la participation locale ou l'autonomie financière. La réponse paraît avoir été définitivement tranchée par le Conseil constitutionnel dans sa décision sur la loi organique relatif au référendum local(22), qui exclut la Nouvelle-Calédonie de l'application de la loi. Prenant acte de cette décision, le Gouvernement n'a en conséquence pas inclus la Nouvelle-Calédonie parmi la catégorie des régions pour le calcul du ratio d'autonomie financière. Autre collectivité qui ne figure pas dans la catégorie des régions, ni dans aucune autre, les Terres Australes et Antarctiques françaises paraissent pourtant, au vu des réponses qui ont été faites à votre rapporteur, devoir être assimilées aux régions. S'agissant d'un territoire sous administration directe et ne disposant d'aucune population permanente, cette intégration ne paraît pas avoir d'incidence sur le calcul du ratio. La Commission a rejeté un amendement présenté par M. René Dosière, proposant de distinguer, au sein des collectivités territoriales, les collectivités d'outre-mer, ainsi que deux amendements de conséquence du même auteur. Il est prévu également que la troisième catégorie de collectivités territoriales intègre les collectivités à statut particulier issues de la fusion de départements et de régions, ainsi que les collectivités mentionnées au dernier alinéa de l'article 73 de la Constitution. Là encore, comme pour la catégorie des départements, ces références ne renvoient à aucune collectivité existante, mais permettent d'envisager d'éventuelles évolutions du paysage institutionnel français. La référence au dernier alinéa de l'article 73, qui dispose que « la création par la loi d'une collectivité se substituant à un département et une région d'outre-mer ou l'institution d'une assemblée délibérante unique pour ces deux collectivités ne peut intervenir sans qu'ait été recueilli [...] le consentement des électeurs inscrits dans cette collectivité » permettrait ainsi l'intégration des collectivités uniques créées dans les départements français d'Amérique, bien que, à la suite de l'échec des consultations électorales sur le sujet le 7 décembre 2003, cette question institutionnelle ne semble plus d'actualité. La Commission a adopté l'article premier sans modification. Article 2 Poursuivant sa mission d'explication du texte constitutionnel, le projet de loi organique s'attache à définir, dans l'article 2, la notion de ressources propres. Cette notion est essentielle car c'est elle qui figure au numérateur du ratio calculé pour obtenir le degré d'autonomie financière dont jouit chaque catégorie de collectivités territoriales. Sans définition adéquate, les dispositions de l'article 72-2 de la Constitution restent inopérantes ; c'est du moins ce qu'en a conclu le Conseil constitutionnel saisi sur la base de cet article dans sa décision sur la loi de finances pour 2004 : la méconnaissance de l'article 72-2 « ne peut être utilement invoquée tant que ne sera pas promulguée la loi organique qui devra définir les ressources propres des collectivités territoriales et déterminer la part des ressources propres que doivent représenter les recettes fiscales et les autres ressources propres dans l'ensemble de leurs ressources (23) ». En conséquence, l'article 2 a pour objet, dans un premier alinéa, d'énumérer les catégories de ressources composant les ressources propres ; dans un second alinéa de décrire le mécanisme de consolidation des flux financiers entre communes et établissements publics de coopération intercommunale dont elles sont membres, s'agissant de la prise en compte des ressources propres de ces établissements. I. - L'ÉNUMÉRATION DES CATÉGORIES DE RESSOURCES COMPOSANT LES RESSOURCES PROPRES Aux termes de la première phrase du troisième alinéa de l'article 72-2 de la Constitution, « les recettes fiscales et les autres ressources propres des collectivités territoriales représentent, pour chaque catégorie de collectivités, une part déterminante de l'ensemble de leurs ressources ». Le texte constitutionnel distingue donc, dès le départ, deux catégories de ressources propres que sont les recettes fiscales et les autres ressources propres. L'article 2 du projet de loi organique reprend cette distinction en procédant par une incise : « les ressources propres des collectivités territoriales, autres que le produit des impositions de toutes natures, sont constituées des redevances pour services rendus, des produits du domaine, des participations d'urbanisme, des produits financiers et des dons et legs ». Il précise que cette définition est faite « au sens de l'article 72-2 de la Constitution », ceci afin d'éviter toute confusion avec le terme de recettes propres, qui figure notamment à l'article L. 1612-4 du code général des collectivités territoriales, et dont l'acception est différente (24). Ainsi, la lecture du premier alinéa de l'article 2 laisse à penser que l'intégration du produit des impositions de toute nature va de soi, et que l'enjeu de la définition des ressources propres porte d'avantage sur la deuxième catégorie, à savoir les redevances, produits du domaine, produits financier, participations et dons et legs. La rapidité d'une telle interprétation occulte alors le fait que, derrière cette expression d'impositions de toutes natures se cachent les véritables enjeux juridiques et financiers. A. Les impositions de toutes natures Les impositions de toutes natures représentent à l'heure actuelle l'essentiel des ressources propres des collectivités territoriales. Cette expression, produit des impositions de toutes natures, renvoie à la lecture de l'article 34 de la Constitution, qui dispose que « la loi fixe les règles concernant : [...] l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures », ainsi qu'à celle du deuxième alinéa de l'article 72-2 qui énonce que « [les collectivités territoriales] peuvent recevoir tout ou partie du produit des impositions de toutes natures. La loi peut les autoriser à en fixer l'assiette et le taux dans les limites qu'elle détermine ». Notons au passage, mais le rapporteur aura l'occasion d'y revenir, l'articulation directe entre l'article 34 et l'article 72-2, qui permet aux collectivités territoriales de recevoir tout produit d'imposition dans des conditions que la loi détermine. L'expression « impositions de toutes natures » renvoie ainsi à une définition connue, que la jurisprudence du Conseil constitutionnel (25), mais également la doctrine ont permis de préciser. Sont ainsi classés dans cette définition : - les impôts, quelle que soit leur dénomination, qui sont des prélèvements pécuniaires définitifs, requis par l'autorité publique, des personnes physiques et morales, sans contreparties déterminées ; - certains types de prélèvements obligatoires, recouvrés dans des conditions particulières : redevances d'espaces verts, taxe de défrichement, redevance pour l'archéologie préventive, quant ces prélèvements ne sont pas affectés à un service rendu. A contrario, les taxes rémunérant des services rendus ou tout au moins mis à la disposition du redevable ainsi que les redevances, qui ne sont dues qu'en cas de prestation effectivement utilisée par le redevable, ne sont pas incluses dans la catégorie des impositions de toutes natures. Elles figurent néanmoins bien entendu parmi les ressources propres. Au delà de ce rappel de la jurisprudence, il convient de s'interroger sur ce que contient, très concrètement, la catégorie des impositions de toutes natures, et l'on sait que le débat porte ici essentiellement sur la classification des ressources provenant d'un impôt partagé. Ce débat est en effet apparu au mois d'octobre de l'année dernière au moment de la discussion de l'article 59 da la loi de finances pour 2004 permettant la compensation financière aux départements de la mise en œuvre de la loi portant décentralisation du revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité. En transférant aux départements, pour certains carburants, une fraction des tarifs de la taxe intérieure sur les produits pétroliers, sans possibilité pour ces départements de modifier ces tarifs, le Gouvernement a introduit une nouvelle forme de fiscalité locale, qui, si elle est bien connue dans les autres pays européens et notamment en Allemagne, reste encore à définir en France. On sait que le Conseil constitutionnel a refusé, en dépit de la saisine des requérants, de qualifier juridiquement cette nouvelle ressource en renvoyant sur le législateur organique une telle responsabilité. A l'heure où cette responsabilité nous échoit, il faut bien reconnaître que les arguments juridiques et économiques plaident pour un classement des ressources fiscales sans pouvoir de taux dans la catégorie des ressources propres. Le principal argument juridique est tiré de la lecture du texte constitutionnel : on connaît déjà l'enchaînement juridique qui permet de lier l'article 34 de la Constitution avec le deuxième alinéa de l'article 72-2. La reconnaissance d'un pouvoir fiscal se fait par la loi et dans le cadre de la loi. On tire de cette constatation une règle de procédure, qui interdit au pouvoir réglementaire d'intervenir en matière de fiscalité locale, mais également une règle de fond : le pouvoir fiscal local ne saurait être absolu, il est limité par la loi. Plus convaincant encore est la lecture combinée du deuxième et du troisième alinéa de l'article 72-2 de la Constitution. La première phrase du deuxième alinéa fixe un principe général qui permet aux collectivités locales de recevoir tout ou partie des impositions de toute nature. La seconde phrase précise que la loi peut autoriser les collectivités à en fixer le taux et l'assiette ; il ne s'agit donc que d'une possibilité et non d'une condition déterminante pour classer ces produits d'imposition parmi les ressources fiscales locales. La fixation d'un taux et d'une assiette n'apparaît ainsi que comme une modalité de la perception d'un impôt local. En outre, en indiquant, au troisième alinéa de l'article 72-2 de la Constitution que « les recettes fiscales et les autres ressources propres des collectivités territoriales représentent, pour chaque catégorie de collectivités, une part déterminante de l'ensemble de leurs ressources », le Constituant invite à interpréter comme étant des ressources propres toutes les recettes fiscales, sans exclusive. La définition des impositions de toutes natures ayant été donnée au deuxième alinéa, le projet de loi organique ne pouvait, sauf à encourir le risque d'une censure du Conseil constitutionnel, sortir de ce champ en restreignant la notion de produit des impositions de toute nature comme étant celui sur lequel les collectivités territoriales avaient un pouvoir de fixation des taux. Une telle rédaction serait en effet au delà des prescriptions constitutionnelles. Une telle lecture de la loi constitutionnelle apparaît en outre conforme à la jurisprudence du Conseil constitutionnel puisque celui-ci a refusé de lier le principe de l'impôt local avec la faculté de décider des taux (26) : « Considérant que, comme il a été dit ci-dessus, le principe de libre administration des collectivités territoriales reçoit application "dans les conditions prévues par la loi" ; qu'en vertu de l'article 34 de la Constitution il appartient au législateur de déterminer les principes fondamentaux de la libre administration des collectivités locales, de leurs compétences et de leurs ressources, ainsi que de fixer les règles concernant l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures ; Considérant que dans l'exercice de sa compétence en matière fiscale le législateur n'est pas tenu de laisser à chaque collectivité territoriale la possibilité de déterminer seule le montant de ses impôts locaux ». En termes économiques, le classement parmi les impositions de toutes natures du produit d'un impôt partagé sans pouvoir de taux ne fait pas non plus de doute ; la nature même de ce produit est en effet différent de celui d'une dotation puisque il n'y a pas dans le premier cas de face-à-face entre l'État et l'échelon local. Ainsi, à l'inverse des dotations, l'État ne peut ajuster les modalités d'indexation dans un objectif de réduction des déficits publics. Une fois défini le taux par le législateur, l'impôt partagé évolue selon des critères économiques indépendants. Dès lors s'exerce pour les élus une nouvelle responsabilité, qui est de suivre les évolutions du produit fiscal, voire de l'anticiper en fonction des indicateurs de la croissance économique. On sort ainsi de la tutelle déresponsabilisante des dotations pour promouvoir de nouveaux modes de gestion locale. Néanmoins, en dépit de ces arguments juridiques et économiques, le rapporteur n'ignore pas les déceptions qu'une telle interprétation génère. Les auditions des associations d'élus auxquelles le rapporteur a procédé avec le Rapporteur général de la commission des Finances ont ainsi permis de prendre la mesure des inquiétudes suscitées par cette nouvelle forme de fiscalité locale, dans un contexte de réforme de la taxe professionnelle. La décision du Conseil constitutionnel sur la loi de finances pour 2004 permet toutefois d'apaiser une partie de ces inquiétudes, puisque le juge a considéré que « si les recettes départementales provenant de la taxe intérieure sur les produits pétroliers venaient à diminuer, il appartiendrait à l'État de maintenir un niveau de ressources équivalent à celui qu'il consacrait [au revenu minimum d'insertion et à l'allocation de revenu de solidarité] avant [leur] transfert ». La Commission a examiné un amendement présenté par M. René Dosière, proposant de limiter le périmètre des impositions de toutes natures prises en compte dans la notion de ressources propres au sens de l'article 72-2 de la Constitution, au seul produit de celles dont les collectivités votent le taux ou déterminent le barème. Le rapporteur a indiqué que la rédaction proposée ne lui semblait pas compatible avec celle de l'article 72-2, qui ne faisait de la fixation de l'assiette et du taux qu'une possibilité, et non une obligation. M. Christophe Caresche a contesté le recours systématique du rapporteur à l'argument de la non-conformité des amendements à la Constitution, cette appréciation n'appartenant qu'au Conseil constitutionnel. La Commission a rejeté cet amendement. Elle a en revanche adopté un amendement de précision rédactionnelle du rapporteur, visant à lier, dans la rédaction de l'article 2, la définition du champ des impositions de toutes natures prises en compte de manière automatique dans l'ensemble des ressources propres des collectivités territoriales à la norme constitutionnelle elle-même, de façon à mieux identifier la « filiation » constitutionnelle de la norme organique (amendement n° 1). Après avoir ainsi défini la notion d'imposition de toutes natures, il reste à en préciser les contours juridiques. Se pose alors la question des dégrèvements et compensations qui substituent au contribuable local le contribuable national. La substitution du contribuable national au contribuable local emprunte deux voies distinctes, comme on l'a vu dans l'introduction générale du rapport : le dégrèvement est un mécanisme qui permet de réduire la cotisation fiscale du redevable de l'impôt tout en restant transparent pour la collectivité, dans la mesure où les bases imposables notifiées à la collectivité sur lesquelles s'exerce son pouvoir fiscal comprennent celles qui font l'objet d'un dégrèvement. La compensation est un mécanisme tout à fait différent puisque l'État prend à sa charge la diminution des recettes fiscales supportée par la collectivité. Les mécanismes de compensation font ainsi l'objet d'un calcul et d'une indexation. Compte tenu de la neutralité, pour la collectivité territoriale, du dispositif de dégrèvement, il est logique, sans que cela ne soit explicité à l'article 2, d'intégrer les montants en cause dans les ressources propres, au titre du produit des impositions de toutes natures (27). Il en va en revanche différemment des compensations qui ont un coût pour les collectivités ou qui, du moins, ne peuvent prétendre à la même neutralité. Celles-ci seront donc incluses parmi les ressources globales des collectivités territoriales, telles que définies à l'article 3 du projet de loi organique. La Commission a examiné deux amendements de M. René Dosière, tendant, l'un à exclure des ressources propres des catégories de collectivité, les dégrèvements et les dotations, et, l'autre, uniquement les dégrèvements. Le rapporteur a relevé que, s'agissant des dotations, satisfaction était donnée à l'auteur des amendements, puisque celles-ci étaient exclues par le projet des ressources propres, et intégrées au dénominateur du ratio dans l'ensemble des ressources. En ce qui concerne les dégrèvements, il a souligné qu'ils étaient neutres pour les collectivités territoriales, puisqu'ils consistent en réalité en une simple substitution du contribuable national au contribuable local, sans modification des ressources globales des collectivités. La Commission a en conséquence rejeté ces deux amendements. B. Les autres ressources propres des collectivités territoriales A la différence des impositions de toutes natures, le premier alinéa de l'article procède, pour les autres ressources propres, à une énumération que l'on peut considérer comme exhaustive. Sont cités les redevances pour services rendus, les produits du domaine, les participations d'urbanisme, les produits financiers et les dons et legs. Il s'agit ainsi de ne retenir que des ressources préservant l'autonomie financière des collectivités territoriales, c'est à dire outre les impositions de toutes natures, les catégories de ressources sur lesquelles les collectivités ont une maîtrise parce qu'elles en déterminent le principe et le tarif (redevances pour services rendus) ou plus largement parce que les ressources concernées proviennent d'une initiative (produit du domaine, produits financiers, participations d'urbanisme) ou d'une décision libre de la collectivité (dons et legs). Ainsi, pour ce qui concerne les participations d'urbanisme telles qu prévues à l'article L. 2331-6 du code général des collectivités territoriales, la collectivité est libre d'instituer ou non ces participations. Enfin, aux termes de l'article L. 2242-1 et L. 3213-6 du code général des collectivités territoriales, il revient au conseil municipal et au conseil général de statuer sur l'acceptation des dons et legs. La définition de ces ressources propres se veut exhaustive ; elle permet en effet de dessiner « en creux » ce qui ne relève pas de la catégorie des ressources propres et qui est destiné à figurer au dénominateur du ratio d'autonomie financière. L'interprétation de l'article 3 du projet de loi organique permet en effet de considérer que ce qui ne figure pas à l'article 2 doit être intégré dans l'ensemble des ressources. Poursuivant cet objectif d'exhaustivité, le second alinéa de l'article 2 s'attache à préciser les modalités de consolidation des flux financiers entre communes et établissements publics de coopération intercommunale dont elles sont membres. II. - LES RESSOURCES PROPRES DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE COOPÉRATION INTERCOMMUNALE Le second alinéa de l'article 2 prévoit d'ajouter, pour la seule catégorie des communes, les ressources propres perçues par les établissements publics de coopération intercommunale. Les epci ne constituant pas une catégorie de collectivités territoriales mais étant des émanations de leurs communes membres, il appartient au législateur organique de préciser dans quelles conditions leurs ressources peuvent être intégrées au calcul du ratio d'autonomie financière pour les communes. Il est effectivement impensable de laisser hors du champ d'application de la loi organique un mouvement intercommunal qui concerne désormais près de 90 % de la population, et pour des montants financiers extrêmement importants. Les ressources propres de ces établissements sont identiques à celles des communes ; il s'agit en effet d'établissements qui n'exercent leurs compétences que par transfert de compétences des communes membres. C'est d'ailleurs bien ainsi qu'il faut interpréter la rédaction du second alinéa, qui fait référence « au montant [des ressources propres] qui, mentionnées au premier alinéa, bénéficient aux établissements publics de coopération intercommunale ». Les modalités d'intégration de ces ressources propres dans le numérateur du ratio d'autonomie financière sont simples, puisqu'il s'agit d'une simple addition avec les ressources propres des communes. Le calcul est plus compliqué, on le verra, pour la détermination de l'ensemble des ressources, à l'article 3. Il faut préciser enfin que cette addition intègre tous les établissements publics de coopération intercommunale, y compris les établissements publics sans fiscalité propre, tels que les syndicats de communes. La Commission a adopté l'article 2 ainsi modifié. Article 3 Le présent article a pour objet à la fois de définir le dénominateur du ratio d'autonomie financière, à savoir l'ensemble des ressources, et de préciser seuil de ce ratio en deçà duquel la part des ressources propres ne pourra plus être considérée comme déterminante. I. - LE CALCUL DE L'ENSEMBLE DES RESSOURCES DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES Ainsi qu'il a été vu au précédent article, le projet de loi organique ne procède pas à une énumération exhaustive de l'ensemble des ressources. De façon très pragmatique, il est en effet précisé que la part des ressources propres est calculée en rapportant le montant de ces dernières à celui de la totalité des ressources, et cela pour chaque catégorie de collectivités territoriales. A titre essentiel sont intégrées dans l'ensemble de ces ressources, les subventions et dotations émanant de l'État. En dépit de la simplicité de la formulation, il a paru nécessaire d'exclure de cet agrégat plusieurs éléments qui auraient contribué à perturber le calcul du ratio. Il s'agit : - des emprunts : Il a en effet été considéré que les emprunts, qui constituent par définition des ressources provisoires, puisque donnant lieu à remboursement, ne pouvaient être utilement décomptés dans la totalité des ressources. Dans la mesure où ils ne figurent pas non plus parmi les ressources propres, il faut dès lors considérer que les flux financiers générés par le recours au crédit sont totalement exclus du dispositif de mesure de l'autonomie financière. - des ressources correspondant au financement par l'État des compétences transférées à titre expérimental ou mises en œuvre par délégation de l'État : On sait que la révision constitutionnelle du 28 mars 2003 a consacré le principe de l'expérimentation, que ce soit à l'article 37-1 ou au quatrième alinéa de l'article 72-2 de la Constitution. Ainsi, aux termes de l'article 37-1, « la loi et le règlement peuvent comporter, pour un objet et une durée limités, des dispositions à caractère expérimental » ; de même, l'article 72 dispose que « dans les conditions prévues par la loi organique, et sauf lorsque sont en cause les conditions essentielles d'exercice d'une liberté publique ou d'un droit constitutionnel garanti, les collectivités territoriales ou leurs groupements peuvent, lorsque, selon le cas, la loi ou le règlement l'a prévu, déroger à titre expérimental et pour un objet et une durée limités, aux dispositions législatives et réglementaires qui régissent l'exercice de leurs compétences ». La loi organique n° 2003-704 du 1er août 2003 est venue préciser les modalités de cette expérimentation. Le projet de loi relatif aux responsabilités locales, en cours de discussion au Parlement, prévoit de nombreuses dispositions s'inscrivant dans ce cadre constitutionnel de l'expérimentation, que ce soit l'article 35 relatif à la gestion par les régions des fonds structurels européens, l'article 48 sur les mesures d'assistance éducative prises en charge par les départements ou l'article 54 sur la participation des régions au financement et à la réalisation des équipements sanitaires. Il est prévu à chaque fois pour ces expérimentations, dans le décret arrêtant la liste des collectivités admises à participer, les modalités de financement. Dès lors se pose la question de l'intégration des ressources dont une collectivité pourrait bénéficier dans ce cadre expérimental. S'agissant de ressources qui peuvent ne pas être pérennes, dans le cas où l'expérience est abandonnée car jugée peu concluante, il a paru plus simple de les exclure totalement du calcul du ratio. Leur intégration aurait en effet conduit à des variations erratiques du taux d'autonomie financière sans que cela ne corresponde réellement à une évolution dans la structure du financement des collectivités locales. C'est le même raisonnement qui a été suivi pour les ressources issues de l'exercice de compétences déléguées par l'État. On sait que le projet de loi relatif aux responsabilités locales prévoit, dans son article 49, une délégation des aides à la pierre pour le logement aux départements et établissements publics de coopération intercommunale. Ces délégations se font par conventions entre l'État et la collectivité délégataire, qui fixent notamment les modalités de financement. S'agissant de délégation, l'exercice de la compétence est temporaire ; il peut être renouvelé mais uniquement dans le cadre de la signature d'une nouvelle convention. Dès lors, il a paru préférable de ne pas tenir compte des montants attribués au titre de cette délégation car ils ne sont pas significatifs de l'autonomie financière d'une catégorie de collectivités. Il en va cependant autrement des délégations de compétences pratiquées entre catégorie de collectivités, notamment dans le cadre de l'article 101 du projet de loi relatif aux responsabilités locales, qui permet aux établissements publics de coopération intercommunale de se voir déléguer, à leur demande, des compétences exercées par le département ou la région. En l'absence de disposition explicite à ce sujet, il faut considérer que les montants confiés dans le cadre de ces délégations viendront augmenter le total des ressources de la catégorie de collectivités délégataires et, en l'occurrence, s'agissant de l'article 101 du projet de loi, la catégorie des communes. - des transferts financiers entre collectivités d'une même catégorie : Il s'agit ainsi d'éviter les doubles comptes qui consisteraient à intégrer, dans le cadre d'un transfert financier entre collectivités d'une même catégorie, à la fois les ressources de la collectivité bénéficiaire et celles de la collectivité à l'origine du transfert. A l'inverse des montants financiers reçus dans le cadre d'une expérimentation ou d'une délégation de compétences, ou même issus d'un emprunt, il ne s'agit pas d'exclure totalement du ratio les transferts financiers entre collectivités d'une même catégorie, mais simplement de ne les décompter qu'une seule fois. Les transferts financiers ainsi désignés sont ceux résultant du versement de fonds de concours, de subventions ou de partages de fiscalité entre collectivités, en application de la loi du 10 janvier 1980. B. les règles particulières relatives aux flux financiers entre EPCI et communes membres Le deuxième alinéa de l'article 3 permet de consolider les flux financiers entre les établissements publics de coopération intercommunale et leurs communes membres. Dans la logique du dispositif proposé à l'article 2 pour la consolidation des ressources propres, le projet de loi propose en premier lieu que l'ensemble des ressources pris en compte au dénominateur du ratio de la catégorie des communes soit complété par l'ensemble des ressources des epci. Le projet prévoit néanmoins de retrancher de cette somme les ressources bénéficiant aux epci et qui font l'objet dans les mêmes conditions que pour les collectivités territoriales d'une réfaction, à savoir les ressources provenant des emprunts, et celles correspondant au financement d'une compétence transférée par expérimentation ou par délégation de l'État. L'ensemble des ressources ainsi calculé serait ensuite minoré des transferts financiers entre communes et établissements publics de coopération intercommunale. Il s'agit là encore d'éviter de comptabiliser ces transferts deux fois comme ressources, au titre des communes et au titre des epci. Ils regroupent à la fois les subventions et fonds de concours entre niveau communal et intercommunal, mais également les versements effectués par les groupements à leurs communes membres au titre de l'attribution de compensation et de la dotation de solidarité communautaire(28). II. - LA DÉFINITION DE LA PART DÉTERMINANTE DES RESSOURCES PROPRES DANS L'ENSEMBLE DES RESSOURCES Le dernier alinéa de l'article 3 a pour objet, une fois précisés les termes du numérateur et du dénominateur du ratio, d'établir ce qui doit être considéré comme une part déterminante. Le projet de loi organique propose à cet effet deux critères, l'un dynamique et l'autre statique. Au titre du premier, il est proposé de considérer, pour chaque catégorie de collectivités, que « la part des ressources propres est déterminante, au sens de l'article 72-2 de la Constitution, lorsqu'elle garantit la libre administration des collectivités territoriales relevant de cette catégorie, compte tenu des compétences qui leur sont confiées ». Une telle rédaction permet de ne pas réduire le principe de l'autonomie financière au seul respect d'une valeur plancher. En faisant ainsi référence à la libre administration des collectivités locales, le projet de loi organique s'inscrit dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel, qui a toujours veillé à ce que les mesures réduisant la part des recettes n'aient pas pour effet d'entraver la libre administration des collectivités locales. Le projet de loi organique introduit toutefois, par rapport à cette jurisprudence, une dimension nouvelle puisque les ratios ainsi déterminés doivent être compatibles avec les compétences confiées aux collectivités territoriales. Il s'agit là de répondre à un impératif démocratique : si un pays faiblement décentralisé peut s'accommoder de ratios d'autonomie financière assez bas, il paraît indispensable en revanche d'accroître la responsabilité fiscale des élus à mesure que les compétences locales s'accroissent. Le second critère utilisé, plus statique, pour définir la part déterminante des ressources propres est celui de la valeur plancher, fixée, pour chaque catégorie à celui calculé pour l'année 2003. Avec la fixation de cette valeur plancher, le législateur organique se conforme aux injonctions du Conseil constitutionnel lui faisant obligation « de définir [...] pour chaque catégorie de collectivités territoriales, la part minimale que doivent représenter les recettes fiscales et les autres ressources propres dans l'ensemble de leurs ressources ». Les seuils atteints en 2003 pour chaque catégorie de collectivités territoriales sont retracés dans le tableau suivant. Il s'agit toutefois d'hypothèses « basses » car il n'a pu être pris en compte dans les ressources propres que le produit des impositions de toutes natures et les produits des services et du domaine. Pour le calcul définitif de ces ratios devront s'ajouter les participations d'urbanisme ainsi que les produits financiers et les dons et legs. Il s'agit en outre, pour les départements et les régions, des éléments établis à partir des budgets primitifs. Pour les communes, l'absence de taux pour 2003 tient d'une part à la difficulté de rassembler rapidement les informations portant sur plus de 36 000 unités, et d'autre part à la nécessité de croiser ces montants avec ceux établis pour les établissements publics de coopération intercommunale. Les seuils établis pour 2002 offrent néanmoins une idée du ratio pris en compte pour les communes, dans la mesure où aucune disposition n'est venue depuis lors dégrader les montants des ressources propres. Ressources propres prises en compte ici : recettes fiscales en milliards d'euros
Il a ainsi été fait le choix de ne pas inscrire formellement, dans la loi, de seuils chiffrés, mais de se reporter à des valeurs déterminées pour une année précise. Reconnaissons qu'une telle rédaction ne facilite pas la compréhension immédiate du texte, car il est nécessaire de se reporter à des chiffres qui ne sont pas aisément accessibles et ne figurent même pas en annexe au texte. Il a paru effectivement difficile d'inscrire en annexe des valeurs qui ne sont pas encore définitivement connues. Ce choix de l'année 2003 répond à la fois à des considérations juridiques et économiques. Considérations juridiques d'abord, puisque le Conseil constitutionnel a toujours considéré que la recentralisation des finances locales à laquelle on a assisté ces dernières années n'avait pas conduit à entraver la libre administration des collectivités locales. Il s'agit donc à la fois de respecter cette jurisprudence constitutionnelle et de considérer que l'on est arrivé, sur ce plan, à un étiage en dessous duquel ce principe de libre administration n'est plus respecté. Considérations économiques, ensuite, puisque l'année 2003 correspond à l'achèvement de la réforme de la taxe professionnelle initiée en 1999. C'est donc sur la base de ratios stabilisés que repose la loi organique. Ainsi que le rappelle l'exposé des motifs du projet de loi, la référence au niveau atteint en 2003 n'est qu'un plancher qu'il sera souhaitable de dépasser au cours des prochaines années. Ce dépassement ne pourra se faire que par une modification de la loi organique. Il serait en effet erroné de considérer que le principe d'autonomie financière est soumis à un effet de « cliquet » : les ratios d'autonomie financière pourront en effet toujours être diminués. Il appartiendra toutefois au juge constitutionnel de contrôler sur le fondement de la deuxième phrase du dernier alinéa de l'article 3, que cette baisse n'est pas de nature à faire passer le ratio en dessous du seuil constaté pour 2003, et, sur le fondement de la première phrase, que le ratio ainsi atteint garantit toujours la libre administration, compte tenu des compétences exercées par les collectivités locales. La Commission a rejeté deux amendements de M. René Dosière, tendant, par une modification du calcul du dénominateur de la fraction servant à établir la part des ressources propres, à infléchir les transferts financiers entre collectivités dans le sens d'un enrichissement de la péréquation, soit, pour le premier, à un niveau global, soit, pour le second, entre collectivités d'une même catégorie ou entre l'État et les collectivités. Le rapporteur a relevé que, si l'objectif poursuivi par les amendements méritait réflexion, leur rédaction présenterait l'inconvénient de rigidifier inutilement le texte organique, alors que l'article 72-2 de la Constitution ne prévoyait pas lui-même d'opérer une quelconque différence de traitement entre transferts de ressources résultant de politiques de péréquation ou de politiques de redistribution. La Commission a ensuite examiné un amendement de M. René Dosière, proposant de substituer, au titre de la période de référence prévue par l'article 3, l'année 2002 à l'année 2003. Le rapporteur a observé que cette suggestion constituait une forme d'aveu de ce que la suppression de la part salariale de la taxe d'habitation s'était traduite par une dégradation de l'indépendance financière des collectivités territoriales. M. Jacques Floch a rappelé que l'objectif initial de cette réforme de la fiscalité locale consistait à préserver les emplois, et qu'il convenait donc de s'en féliciter. Le rapporteur a indiqué que son avis défavorable à l'amendement n'était pas lié à cette réforme, mais à la définition du cadre constitutionnel dans lequel s'inscrit l'examen du projet de loi organique. La Commission a rejeté cet amendement avant d'adopter l'article 3 sans modification. Article 4 Le présent article a pour objet de préciser les modalités d'information du Parlement relative à la mesure de l'autonomie financière des collectivités locales et de prévoir les mécanismes de garantie du ratio. Le premier alinéa de l'article prévoit que le Gouvernement transmet au Parlement, pour une année donnée, au plus tard le 1er septembre de la deuxième année qui suit, un rapport faisant apparaître, pour chaque catégorie de collectivités, la part des ressources propres. Un tel délai de deux ans peut apparaître long ; il se justifie pourtant en termes de comptabilité publique, puisque les derniers comptes administratifs relatifs aux budgets locaux d'une année n ne sont adoptés au plus tard que le 30 juin de l'année n+1. La Commission a examiné un amendement de M. René Dosière, visant à élargir le contenu du rapport à la présentation des écarts à la moyenne du niveau des ressources propres entre collectivités, ainsi que des mesures envisagées pour les réduire. Le rapporteur a indiqué que cette proposition était difficilement envisageable pour chacune des quelques 36 000 communes, et que, de surcroît, l'objectif du resserrement des écarts ne comptait pas au rang des prescriptions constitutionnelles. Malgré les propos de M. Jacques Floch, qui a fait valoir que cet amendement reprenait une proposition ancienne de la majorité, formulée lorsque ses membres étaient dans l'opposition, la Commission l'a rejeté. Le second alinéa précise que, si, pour une catégorie de collectivités territoriales, la part des ressources propres ne répond pas aux règles fixées à l'article 3, les dispositions nécessaires au rétablissement du ratio sont arrêtées, au plus tard, par la loi de finances initiale de la troisième année suivant celle où ce constat a été fait. Il s'agit ainsi de préciser les suites à donner au rapport établi en application de l'alinéa précédent. Concrètement, une disposition déséquilibrant gravement l'architecture des ressources des collectivités locales prise en année n devra faire l'objet d'un dispositif de correction en année n+5, compte tenu des délais cumulés des premier et second alinéas. Là encore, ce délai peut apparaître long, mais il convient néanmoins de garder une certaine souplesse dans l'application du dispositif ; en effet, l'absence de mesures correctrices en loi de finances entraîne non pas la censure du dispositif initial qui a détérioré le ratio, mais celle de la loi de finances cinq ans après. Compte tenu de cet enjeu, il importe de laisser au Gouvernement suffisamment de latitude pour décider des mesures à prendre, notamment lorsque le dispositif initial est un héritage d'une précédente majorité. À ce stade de la discussion, le rapporteur n'ignore pas que le rétablissement du ratio peut prendre deux voies distinctes, qui se résument mathématiquement à augmenter le numérateur ou diminuer le dénominateur ; il est en effet imaginable en théorie de penser que le rétablissement du ratio passe par une diminution des dotations. Outre que la déloyauté d'une telle méthode susciterait de sérieuses difficultés politiques, il n'est pas exclu de penser qu'elle encourrait la censure du Conseil constitutionnel sur le fondement du principe de libre administration. S'agissant plus particulièrement des modalités de contrôle du Conseil constitutionnel, et de l'articulation de ce contrôle avec les dispositions des articles 3 et 4, plusieurs précisions s'imposent : L'existence d'un dispositif temporaire permettant au Gouvernement de rétablir un ratio détérioré n'empêche nullement la censure immédiate du Conseil constitutionnel sur le fondement de l'article 61 de la Constitution. Il ne s'agit pas en effet d'imposer, pour le contrôle de la conformité à l'article 72-2 de la Constitution, une nouvelle procédure de contrôle constitutionnel avec un effet différé à cinq ans. Une telle disposition serait d'ailleurs à n'en pas douter contraire à la Constitution. La procédure de l'article 61 de la Constitution et celle de l'article 4 de la loi organique répondent en fait à des situations différentes. Il se peut qu'une disposition soit manifestement inconstitutionnelle parce qu'elle ne respecte pas la part déterminante des ressources propres nécessaires aux collectivités locales pour assurer leur libre administration compte tenu des compétences qui leur sont transférées, ou parce qu'elle fait manifestement passer le ratio d'autonomie financière en deçà du taux constaté en 2003, sans prévoir de dispositif de compensation. Dans ces cas-là, le Conseil constitutionnel sera certainement amené à prononcer une censure immédiate. En revanche, s'agissant du suivi d'une disposition affectant les ressources des collectivités locales, et des modalités de sa compensation, il importe de pouvoir fournir au Conseil constitutionnel les outils adéquats pour procéder à une évaluation sur le moyen terme. C'est là que l'article 4 présente toute son utilité et son caractère novateur. Il ne faut donc pas voir dans cet article une alternative au contrôle classique du Conseil, mais un moyen supplémentaire à sa disposition pour protéger la libre administration des collectivités locales. La Commission a adopté l'article 4 sans modification. La Commission a rejeté deux amendements de M. René Dosière, précisant l'interprétation qui devait être donnée de la contrainte constitutionnelle de péréquation entre les collectivités territoriales, soit en assurant un niveau comparable de services publics par des dotations de l'État ou des mécanismes de solidarité entre collectivités, soit en prévoyant des mécanismes de péréquation accompagnant tout transfert de compétences. Elle a rejeté deux autres amendements du même auteur, l'un imposant une procédure de concertation avec les collectivités préalablement à toute modification de leurs ressources fiscales, l'autre tendant à supprimer tout mécanisme de liaison des taux de taxe professionnelle par rapport à ceux des autres impositions locales. Le rapporteur a rappelé que les mécanismes de liaison de taux n'étaient pas de nature organique mais relevaient des lois ordinaires et des lois de finances, que la déliaison ainsi proposée avait été refusée par la précédente majorité, et que la seule avancée en la matière résultait de la loi de finances pour 2003. Il a donné un avis défavorable à cet amendement, que la Commission a rejeté. La Commission a adopté l'ensemble du projet de loi ainsi modifié. * * * En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République vous demande d'adopter le projet de loi organique pris en application de l'article 72-2 de la Constitution relatif à l'autonomie financière des collectivités territoriales (n° 1155), modifié par l'amendement figurant au tableau comparatif ci-après. ___
AMENDEMENTS NON ADOPTÉS PAR LA COMMISSION Article premier Amendements présentés par M. René Dosière et les commissaires membres du groupe socialiste : · Compléter le 1° de cet article par les mots : « en distinguant les communes de moins de 10.000 habitants et celles de plus de 10.000 habitants. » · Après le 1° de cet article, insérer l'alinéa suivant : « 2° Les établissements publics de coopération intercommunale ; ». · Rédiger ainsi l'avant-dernier alinéa (2°) de cet article : « 2° Les départements ; ». · Après le mot « Corse », supprimer la fin du dernier alinéa (3°) de cet article. · Compléter cet article par l'alinéa suivant : « 4° Les collectivités d'outre-mer. » Amendements présentés par M. René Dosière et les commissaires membres du groupe socialiste : · Rédiger ainsi le premier alinéa de cet article : « Au sens de l'article 72-2 de la Constitution, les ressources propres des collectivités territoriales sont constituées du produit des impositions de toutes natures dont les collectivités votent le taux ou déterminent le tarif, des redevances pour services rendus, des produits du domaine, des participations d'urbanisme, des produits financiers et des dons et legs. » · Compléter le premier alinéa de cet article par la phrase suivante : « Les dégrèvements ou dotations accordés par l'État ne peuvent en aucun cas être considérés comme des ressources propres au sens de cet article. » · Compléter le dernier alinéa de cet article par la phrase suivante : « Les dégrèvements pris en charge par l'État ne constituent pas des ressources propres. » Amendements présentés par M. René Dosière et les commissaires membres du groupe socialiste : · Après le mot : « financiers », rédiger ainsi la fin du premier alinéa de cet article : « réalisés au titre de la péréquation. » · Après le mot : « financiers », rédiger ainsi la fin du premier alinéa de cet article : « réalisés au titre de la péréquation entre collectivités d'une même catégorie ou entre l'État et les collectivités territoriales. » · À la fin du dernier alinéa de cet article, substituer à la date « 2003 », la date « 2002 ». Amendement présenté par M. René Dosière et les commissaires membres du groupe socialiste : Après le premier alinéa de cet article, insérer l'alinéa suivant : « Ce rapport fera également apparaître, au sein de chaque catégorie de collectivités, les écarts à la moyenne du niveau de ressources propres existants, ainsi que les mesures envisagées pour permettre le resserrement de ces écarts. » Amendements présentés par M. René Dosière et les commissaires membres du groupe socialiste : · Insérer l'article suivant : « La péréquation entre les collectivités territoriales doit permettre la correction des différences de ressources et de charges pour assurer un niveau comparable de services publics, entre collectivités appartenant à une même catégorie au sens de l'article 1er. « Elle prend la forme à la fois de dotations de l'État visant à une action de solidarité au bénéfice des collectivités les moins favorisées, et de mécanismes de solidarité entre collectivités d'une même catégorie ». · Insérer l'article suivant : « Toute création, extension ou transfert de compétences au profit des collectivités territoriales doit s'accompagner de la mise en place de mécanismes de péréquation permettant d'assurer l'exercice dans des conditions égales de ces compétences sur l'ensemble du territoire. » · Insérer l'article suivant : « Toute création, diminution ou modification des recettes d'origine fiscale d'une catégorie de collectivités ayant pour conséquence de modifier la structure de ces recettes ou de diminuer leur autonomie financière ne peut intervenir qu'après concertation avec les collectivités concernées et doit s'accompagner des mesures adaptées au maintien de leur degré préalable d'autonomie fiscale. » · Insérer l'article suivant : « À compter de 2005, les communes, les départements, les régions, et les organismes de coopération intercommunale dotés d'une fiscalité propre peuvent augmenter librement leur taux de taxe professionnelle par rapport à l'année précédente et par rapport aux taux et tarifs des autres impositions perçues au profit des collectivités. » PRINCIPALES MESURES DE RÉDUCTION DES RESSOURCES DES COLLECTIVITÉS
Source : DGCL. PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR - Association des maires de France (amf) : · M. Philippe Laurent, maire de Sceaux et vice-président du conseil général des Hauts-de-Seine · M. Alain Roby, directeur du département Finances de l'amf, · M. Alexandre Thouzet, chargé des relations avec le Parlement. - Comité des finances locales : · M. Jean-Pierre Fourcade, président. - Assemblée des départements de France (adf) : · M. Philippe Adnot, sénateur, président du conseil général de l'Aube, · Mme Catherine Marcadier, chef du service des finances. - Assemblée des districts et des communautés de France (adcf) : · M. Marc Censi, président, · M. Dominique Braye, sénateur des Yvelines, · M. Nicolas Portier, délégué de l'adcf, · Mme Francine Myotte, chargée de mission aux affaires juridiques et financières - M. Loïc Philip, professeur émérite à l'université d'Aix-Marseille. - M. Robert Hertzog, professeur à l'iep de Strasbourg. - La Fédération des Maires des Villes Moyennes a remis une contribution écrite. -------------- N° 1541 - Rapport sur le projet de loi organique pris en application de l'article 72-2 de la Constitution relatif à l'autonomie financière des collectivités territoriales (M. Guy Geoffroy) 1 () Pour la métropole du moins, car il est prévu, à l'article 73 de la Constitution, une loi organique précisant les modalités de dérogation à la loi des départements et régions d'outre-mer. 2 () Un avis négatif rendu par le Conseil d'État le 5 décembre 1991 peut être avancé comme motif pour expliquer ce refus ; la révision constitutionnelle du 28 mars 2003 devrait désormais permettre de revoir cette question sous un nouveau jour. 3 () « Quelle autonomie de ressources pour les collectivités territoriales ? » Stéphanie Gandreau, Revue Générale des collectivités territoriales, janvier-février 2003, p. 578-596. 4 () Rapport de la mission commune d'information chargée de dresser le bilan de la décentralisation et de proposer des modifications de nature à faciliter l'exercice des compétences locales, présidée par M. Jean-Paul Delevoye, rapportée par M. Michel Mercier, Sénat n° 447 (1999-2000). 5 () Refonder l'action publique locale, Rapport au nom de la Commission pour l'avenir de la décentralisation, octobre 2000. 6 () L'enveloppe du contrat de croissance et de solidarité est indexée selon l'indice du taux d'inflation majorée de 33 % de la croissance du PIB. 7 () Jean-Pierre Brunel, L'avenir de l'autonomie financière des collectivités locales, rapport présenté au nom du Conseil économique et social, 2001. 8 () Décision n° 64-29 L du 12 mai 1964. 9 () Décision n° 90-277 du 25 juillet 1990. 10 () Décision n° 2001-454 DC du 17 janvier 2002. 11 () Décision n° 85-196 DC du 8 août 1985. 12 () Décision n° 98-407 DC du14 janvier 1999. 13 () Décision n° 90-274 DC du 29 mai 1990. 14 () Décision n°91-291 DC du 6 mai 1991. 15 () Décision n°91-298 DC du 24 juillet 1991. 16 () J.-E. Schoettl, AJDA n° 9, 20 septembre 2000, p. 739 et 740. 17 () Décision n° 2003-489 DC du 29 décembre 2003. 18 () Le Conseil constitutionnel a ainsi considéré « que la disposition de la Constitution aux termes de laquelle "toute autre collectivité territoriale est créée par la loi" n'exclut nullement la création de catégories de collectivités territoriales qui ne comprendraient qu'une unité ; que telle a été l'interprétation retenue par le législateur lorsque, en métropole, il a donné un statut particulier à la ville de Paris et, outre-mer, il a créé la collectivité territoriale de Mayotte ». 19 () Compte rendu de séance du Comité des finances locales du 8 juillet 2003. 20 () Encore faut-il ajouter que les situations des quatre départements d'outre-mer sont elles-mêmes très diverses : l'octroi de mer ne bénéficie qu'au département de la Guyane ; dans les autres départements, son produit est réparti uniquement entre les régions et les communes. Les droits de consommation sur les tabacs sont affectés aux seuls budgets des départements de la Guyane et de la Réunion. 21 () François Luchaire, Le statut constitutionnel de la Nouvelle-Calédonie, Economica, avril 2000, p. 13. 22 () Décision n° 2003-428 DC du 30 juillet 2003. 23 () décision n° 2003-489 DC du 29 décembre 2003. 24 () L'article L. 1612-4 désigne comme recettes propres une partie des recettes budgétaires d'investissement de la collectivité qui, ajoutée à l'autofinancement, vient couvrir le remboursement de la dette. 25 () Cf. notamment décisions n° 82-124 L du 23 juin 1982 et n° 90-285 DC du 28 décembre 1990. 26 () Décision n° 91-291 DC du 6 mai 1991. 27 () Cette précision prend toute son importance dans le cadre de la réforme de la taxe professionnelle, puisqu'il a été précisé par le Ministre délégué aux libertés locales, M. Patrick Devedjian, que la période transitoire d'exonération prendrait la forme de dégrèvements. Cf. JO AN compte rendu de la 3ème séance du 4 mars 2004, p. 2500 . 28 () Article 1609 nonies C du code général des impôts. © Assemblée nationale |