Document mis en distribution le 21 juin 2004 N° 1674 -- ASSEMBLÉE NATIONALE CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958 DOUZIÈME LÉGISLATURE Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 16 juin 2004. RAPPORT FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L'ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LE PROJET DE LOI ORGANIQUE, MODIFIÉ PAR LE SÉNAT (N° 1638), pris en application de l'article 72-2 de la Constitution relatif à l'autonomie financière des collectivités territoriales, PAR M. Guy GEOFFROY, Député. -- Voir les numéros : Assemblée nationale : 1re lecture : 1155, 1541, 1546 et T.A. 300. 2e lecture : 1638. Sénat : 1re lecture : 314, 324 et T.A. 89 (2003-2004). MESDAMES, MESSIEURS, L'Assemblée nationale est saisie, en deuxième lecture, du projet de loi organique relatif à l'autonomie financière des collectivités territoriales, troisième pilier du dispositif organique souhaité par le pouvoir constituant au printemps 2003. En première lecture, votre rapporteur avait en effet insisté sur la continuité des réformes intervenues depuis la révision constitutionnelle du 28 mars 2003, visant à doter notre pays d'une véritable organisation décentralisée. Après l'adoption de la loi organique relative au référendum local, celle sur l'expérimentation par les collectivités territoriales et avant d'achever le projet de loi relatif aux libertés et responsabilités locales, qui permet le transfert de compétences entre l'échelon national et les échelons locaux, le Parlement doit aujourd'hui préciser le sens du troisième alinéa de l'article 72-2 de la Constitution qui dispose que « les recettes fiscales et les autres ressources propres des collectivités territoriales représentent, pour chaque catégorie de collectivités, une part déterminante de leurs ressources ». La question n'est pas mince et a fait l'objet d'un débat très nourri tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat. Pour bien en mesurer la portée, il convient de revenir sur la manière dont chacune des chambres a interprété les dispositions constitutionnelles. I. - L'ANALYSE DU PROJET DE LOI ORGANIQUE À L'ASSEMBLÉE NATIONALE 1. Les catégories de collectivités territoriales Décliné en quatre articles, le projet de loi organique qui a été présenté en avril à l'Assemblée nationale s'attache en premier lieu à définir la notion de catégories de collectivités. L'article 1er fait un choix pragmatique, puisqu'il ne retient que trois grandes catégories de collectivités, communes, départements, régions, auxquelles sont agrégées, selon la nature et les compétences exercées, les collectivités territoriales à statut particulier, qu'elles soient d'outre-mer ou de métropole. Ne figure pas dans la répartition ainsi élaborée la Nouvelle-Calédonie, qui n'est présente dans l'énumération qu'au titre de ses provinces et, de façon implicite, de ses communes : régie désormais par le titre XIII de la Constitution, la Nouvelle-Calédonie ne bénéficie pas en tant que telle des articles 72-1 et 72-2 introduits dans le titre XII de la Constitution par la révision du 28 mars 2003. N'apparaît pas non plus, dans l'énumération de l'article 1er, de référence aux établissements publics de coopération intercommunale, puisque ces établissements ne sont pas, par définition, reconnus comme des collectivités territoriales et demeurent, du moins juridiquement, de simples émanations des communes membres. Pour autant, l'intercommunalité n'est pas absente du projet de loi organique, dans la mesure où les articles suivants précisent les circuits techniques permettant de prendre en compte, pour le calcul du ratio d'autonomie financière des communes, les flux financiers entre celles-ci et les établissements publics de coopération intercommunale dont elles sont membres. Dès lors, la prise en compte des ressources propres des groupements conjointement à celles des communes revient à faire bénéficier ces groupements, de façon certes indirecte, de la nouvelle garantie apportée par la loi organique en termes d'autonomie financière. 2. Définition des ressources propres L'article 2 est indubitablement au cœur de ce nouveau dispositif, puisqu'il a pour objet, en particulier, d'énumérer les catégories de ressources composant les ressources propres. Dans sa rédaction initiale, il était précisé que « les ressources propres des collectivités territoriales, autres que le produit des impositions de toutes natures, sont constituées des redevances pour services rendus, des produits du domaine, des participations d'urbanisme, des produits financiers et des dons et legs. » C'est précisément sur la définition des impositions de toutes natures qu'a porté le débat, à la fois à l'Assemblée nationale et au Sénat. Le rapporteur, partageant d'ailleurs l'analyse du Rapporteur général de la Commission des Finances, auteur d'un avis sur le projet (1), avait tiré de la lecture combinée du deuxième et du troisième alinéas de l'article 72-2 (2) de la Constitution une conclusion très claire : la première phrase du deuxième alinéa de l'article fixe un principe général qui permet aux collectivités locales de recevoir tout ou partie des impositions de toutes natures. La seconde phrase précise que la loi peut autoriser les collectivités à en fixer le taux et l'assiette : ainsi, les impositions sont bien des ressources fiscales dont, en principe, l'assiette et le taux sont fixés par la loi. La Constitution ouvre la possibilité - et il ne s'agit que d'une simple faculté - de déléguer aux collectivités le pouvoir de fixer le taux et l'assiette. Mais ce n'est ici qu'une exception au principe, exception que le législateur peut plus ou moins étendre. Ainsi, la définition d'un taux ou d'une assiette par l'échelon local n'apparaît alors que comme une modalité de perception d'un impôt local, et non comme un critère pour distinguer les ressources fiscales locales de celles qui ne le seraient pas. En outre, en indiquant, au troisième alinéa de l'article 72-2 de la Constitution que « les recettes fiscales et les autres ressources propres des collectivités territoriales représentent, pour chaque catégorie de collectivités, une part déterminante de l'ensemble de leurs ressources », le Constituant invite à interpréter comme étant des ressources propres des collectivités toutes les recettes fiscales, sans exclusive. Si tel n'avait pas été le cas, la Constitution aurait comporté une réserve explicite sur ce point. Dès lors, c'est sans aucun état d'âme, ni aucune « crainte », contrairement à ce que certains de nos collègues sénateurs ont affirmé, que votre rapporteur a assumé une interprétation des dispositions constitutionnelles raisonnable et conforme à la lettre et l'esprit du texte permettant d'inclure, parmi les ressources propres des collectivités territoriales, les ressources provenant du produit d'impositions partagées sans que les collectivités territoriales aient une maîtrise du taux de ces impositions. Au centre du débat se tenait bien évidemment la question du classement, parmi les ressources propres, des ressources provenant, pour les départements, du transfert d'une fraction des tarifs de la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP), destiné à compenser la mise en œuvre de la loi portant décentralisation du revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité. L'analyse qui vient d'être défendue et qui s'inscrit dans le strict cadre constitutionnel, trouvait une illustration dans l'amendement proposé par le rapporteur et adopté par l'Assemblée nationale visant à lier, dans la rédaction de l'article, la définition du champ des impositions de toutes natures prises en compte de manière automatique dans l'ensemble des ressources propres des collectivités territoriales à la norme constitutionnelle elle-même de façon à mieux identifier la « filiation » constitutionnelle de la norme organique. Aussi était-il précisé que c'est bien au titre du deuxième alinéa de l'article 72-2 que les collectivités locales reçoivent des impositions de toutes natures. C'est au nom de cette lecture fidèle de la Constitution que le rapporteur, comme le Gouvernement, se sont opposés en séance à des amendements visant à ne voir dans les impositions de toutes natures que celles pour lesquelles les collectivités voteraient le taux ou détermineraient le tarif. Au-delà même des divergences sur l'interprétation à donner au texte constitutionnel, la rédaction de l'article 2 défendait ainsi une vision moderne et réaliste des finances locales qui permettrait, par l'instauration d'une fiscalité innovante assise sur des bases dynamiques, de sortir du diptyque désormais obsolète : produits des « quatre vieilles »/ dotations de l'État. C'est cette question qui a suscité au Sénat le plus de discussions. Nous aurons l'occasion d'y revenir. 3. Définition du ratio d'autonomie financière et de la part déterminante L'article 3 a pour objet de définir à la fois le dénominateur du ratio d'autonomie financière, à savoir l'ensemble des ressources, et de préciser le seuil de ce ratio en deçà duquel la part des ressources propres ne pourra plus être considérée comme déterminante. Il n'est pas donné dans le projet de loi une énumération exhaustive de l'ensemble des ressources devant être intégrées dans le dénominateur du ratio d'autonomie financière ; de façon très pragmatique, la rédaction du projet s'en tient à une définition « en creux » en rapportant le montant des ressources propres à celui de la totalité des ressources, et cela, pour chaque catégorie de collectivités territoriales. Sont toutefois exclus explicitement de ce calcul les emprunts, qui ne constituent qu'une ressource provisoire, ainsi que les ressources correspondant au financement par l'État de compétences transférées à titre expérimental ou mises en œuvre par délégation de l'État, le motif de cette exclusion étant là encore de ne pas faire dépendre les ratios d'autonomie financière de flux financiers dont l'existence peut ne pas être pérenne. Le projet de loi exclut également, afin d'éviter tout double compte, le montant des transferts financiers entre collectivités d'une même catégorie et prévoit des règles particulières pour le décompte des flux financiers entre établissements publics de coopération intercommunale et communes membres. S'agissant de la définition du seuil d'autonomie financière en deçà duquel la part des ressources propres des collectivités territoriales n'est plus considéré comme déterminante, l'article 3 propose deux critères alternatifs ; le premier permet de considérer, pour chaque catégorie de collectivités, que « la part des ressources propres est déterminante, au sens de l'article 72-2 de la Constitution, lorsqu'elle garantit la libre administration des collectivités territoriales relevant de cette catégorie, compte tenu des compétences qui leur sont confiées ». Il introduit ainsi un principe de proportionnalité entre les compétences transférées et le seuil d'autonomie financière, un État fortement décentralisé devant accepter le corollaire d'une responsabilité fiscale accrue des élus locaux. Le second critère est moins sujet à interprétation, puisqu'il définit comme valeur plancher le taux d'autonomie financière constaté pour chaque catégorie de collectivité en 2003, ce seuil correspondant à l'achèvement de la réforme de la taxe professionnelle initiée en 1999. 4. Information du Parlement et correction des déséquilibres L'article 4 a pour objet de préciser les modalités de l'information du Parlement relative à la mesure de l'autonomie financière des collectivités locales et de prévoir les mécanismes de garantie du ratio. Il prévoit à cet effet la transmission d'un rapport au Parlement, pour une année donnée, avant le 1er septembre de la deuxième année qui suit ; ce rapport doit faire apparaître, pour chaque catégorie de collectivités, la part des ressources propres. Lorsqu'il est constaté sur la base de ce rapport que la part des ressources propres ne répond pas aux prescriptions de l'article 3, le Gouvernement a l'obligation de proposer des dispositions nécessaires au rétablissement du ratio au plus tard dans la loi de finances initiale de la troisième année celle où le constat a été fait. Tout en concevant que la compilation des données exigeait un temps relativement long, le rapporteur, suivi par l'Assemblée nationale, a proposé de réduire le délai dans lequel le Gouvernement se devait de proposer un rétablissement du ratio, en le fixant à deux ans au lieu de trois. II. - LES DÉBATS AU SÉNAT À l'initiative de son rapporteur de la Commission des Lois, M. Daniel Hoeffel, et de celui de la Commission des Finances saisie pour avis, M. Michel Mercier, le Sénat a choisi de s'abstraire de cette lecture de l'article 72-2 de la Constitution, en procédant, en particulier, à une tentative de définition des ressources propres des collectivités locales. Dans cet objectif, outre l'introduction d'un article additionnel visant à replacer dans le code général des collectivités territoriales l'ensemble du projet de loi organique et d'un amendement de précision à l'article 1er, le Sénat a réécrit dans une très large partie l'article 2 du projet, afin de préciser ce qu'il entendait par « ressources propres ». 1. La définition des ressources propres au Sénat La rédaction finalement adoptée résulte d'un compromis quelque peu laborieux entre un amendement de M. Daniel Hoeffel et un sous-amendement de M. Yves Fréville. Elle consiste désormais à ne retenir comme ressources propres que « celles constituées du produit des impositions de toutes natures dont la loi les autorise à fixer l'assiette, le taux ou le tarif, ou dont elle détermine, par collectivité, la localisation de l'assiette ou du taux ». Le premier membre de phrase est issu de la proposition du rapporteur de la Commission des lois, le second de M. Fréville. Le rapporteur du Sénat avait défendu en commission des Lois, comme en séance, une interprétation selon laquelle seules peuvent être considérées comme des ressources propres, celles pour lesquelles les collectivités ont le pouvoir de déterminer les taux ou l'assiette. Il étayait sa définition par une simple considération pratique : « que sont des ressources propres sinon des recettes dont les collectivités locales ont la maîtrise ? ». Le sous-amendement de M. Fréville permet d'ajouter à cette définition très restrictive - et sans doute trop - au regard des prescriptions constitutionnelles de l'article 72-2, des impositions qui ne répondent pas à ces critères mais qui entrent à l'évidence dans la catégorie des ressources propres des collectivités locales, parce qu'elles conservent un lien fort avec la collectivité concernée et ses spécificités. L'auteur de l'amendement a cité, pour illustrer son propos, les impôts à taux fixe dont l'assiette est localisée, en particulier les droits de mutation à titre onéreux, ou ceux dont le taux est décliné par département, tels que le versement transport pour la région Ile-de-France. Le ministre délégué à l'Intérieur, M. Jean-François Copé, a ajouté à cette liste l'imposition forfaitaire sur les pylônes ou la redevance des mines, dont les taux sont fixés forfaitairement par la loi mais dont l'assiette est localisable. Il apparaît ainsi que le sous-amendement proposé par M. Fréville détermine tout à la fois une règle de fond et une règle de procédure pour qualifier les ressources propres, autres que celles dont les collectivités ont la maîtrise de l'assiette, du taux ou du tarif : - la règle de fond consiste dans l'obligation de maintenir, par la loi, un lien entre la collectivité et les ressources en question. Les ressources propres ne sauraient dès lors être déterminées in abstracto : c'est ainsi que M. Fréville présenta son sous-amendement en indiquant qu'« il est certain qu'une ressource affectée globalement à l'ensemble des collectivités locales, même si elle provient d'une imposition de toutes natures, ne peut pas être considérée comme une imposition propre à chaque collectivité locale, voire à chaque catégorie de collectivité locale ». Le terme « ressources propres » s'entend dès lors ici davantage comme « ressources distinctes », ou « ressources propres à chaque collectivité » que dans l'acception qu'on lui donne plus généralement de « ressources décidées par elle seule » ; - la règle de procédure est une règle démocratique essentielle qui confie au législateur, et non au pouvoir réglementaire, le soin de fixer, pour chacun des bénéficiaires, un tarif ou une partie d'assiette. Comme l'a indiqué M. Michel Mercier en séance, « on ne peut pas continuer à avoir des partages d'impôts d'Etat résultant de calculs effectués au sein des ministères, calculs que nous avons parfois de la peine à comprendre. C'est le législateur, comme le prévoit l'article 34 de la Constitution, qui fixera, pour chacun des bénéficiaires de cet impôt partagé, un tarif ou une partie d'assiette. [...] Le sous-amendement de M. Fréville me semble augurer d'un vrai partage et d'un vrai pouvoir du Parlement, dans la mesure où il lui appartiendra de fixer les modalités du partage auxquelles seront forcément associées les collectivités locales ». La rédaction proposée par M. Fréville permet donc tout à la fois d'imposer une dimension locale à la définition des ressources propres en tenant compte des caractéristiques de chacune d'elles, tout en confiant au Parlement le soin d'en déterminer les modalités et de procéder aux arbitrages nécessaires. En vertu de cette rédaction, le choix serait donné au législateur de déterminer localement soit l'assiette, soit le taux par collectivité. Dans la majorité des cas, ce choix se portera sur l'assiette, qui est facilement localisable : le cas de l'imposition forfaitaire sur les pylônes électriques, régie par l'article 1519 A du code général des impôts, constitue un bon exemple puisque il est prévu, pour chaque pylône installé sur le territoire de la commune, un tarif. Il s'agit donc bien d'une assiette locale, et même très « visualisable ». En revanche, lorsqu'il ne sera pas possible de déterminer une assiette localisable, le législateur devra alors en passer par la détermination d'un taux par collectivité, là encore, dans le souci de préserver une certaine proximité entre le produit de l'imposition et la collectivité. Le cas le plus éclairant est précisément celui de la part de tipp affectée aux départements : en effet, si l'assiette de cet impôt est nationale, puisque déterminée en fonction des quantités de carburants vendues sur l'ensemble du territoire, la détermination de son taux peut parfaitement être localisée dans la loi, soit par un tableau fixant pour chaque département un taux, soit par une formule de calcul permettant de parvenir à un taux identifié pour chacun en considération de critères locaux spécifiques. La compatibilité de la rédaction proposée par M. Yves Fréville avec la classification parmi les ressources propres du produit de la part de tipp affectée aux départements a ainsi fait l'objet d'un long débat au Sénat et c'est à cette seule condition de compatibilité que le Ministre délégué y a donné un avis favorable. 3. Clarification du ratio À l'article 3, le Sénat a clarifié la rédaction du projet en excluant du dénominateur du ratio d'autonomie financière les flux financiers entre collectivités ou entre communes et établissements publics de coopération intercommunale au titre d'un transfert expérimental ou d'une délégation de compétences. De même que pour les financements de l'État au titre d'un transfert expérimental ou d'une délégation de compétences, ces flux ont un caractère provisoire et il importe donc de ne pas fausser le calcul du ratio d'autonomie en prenant en compte des ressources qui ne seraient pas pertinentes. 4. Information du Parlement Enfin, à l'article 4, le Sénat, à l'initiative de son rapporteur, a souhaité améliorer l'information du Parlement en adoptant deux amendements ayant pour objet : - de prévoir que le rapport du Gouvernement au Parlement devra présenter non seulement le taux d'autonomie financière des différentes catégories de collectivités territoriales, mais également ses modalités de calcul et son évolution ; - d'avancer au 1er juin de la deuxième année suivant l'année de référence le délai de remise de ce rapport. III. - LES PROPOSITIONS DE LA COMMISSION DES LOIS Tout en approuvant les clarifications apportées par le Sénat sur le projet de loi organique, le rapporteur s'interroge cependant sur la rédaction de l'article 2 finalement adoptée par le Sénat. Certes, une telle rédaction permet d'inclure, conformément à l'article 72-2 de la Constitution, le produit d'impositions partagées comme celui de la TIPP pour les départements parmi les ressources propres des collectivités, mais cette interprétation ne saurait être une fin en soi. La loi organique se doit d'aspirer à une certaine pérennité ; en donnant une solution à un problème conjoncturel, on perd de vue l'objectif initial du projet de loi qui est de transcrire le plus fidèlement possible les prescriptions constitutionnelles de l'article 72-2. C'est ce souci qui est celui du rapporteur. Il apparaît, dès lors, que le compromis politique auquel est parvenu le Sénat doit être remanié afin que, juridiquement, la définition retenue des ressources propres ne soit pas en décalage par rapport à ce que prévoit le texte de la Constitution. Dans cet objectif, le rapporteur a proposé un amendement visant à élargir le champ des ressources propres à celles dont le taux ou la part locale d'assiette serait fixée dans la loi par catégorie de collectivités, et non plus collectivité par collectivité. Il s'agit ainsi de classer parmi les ressources propres le produit d'impositions dont le taux serait fixé par la loi en fonction de la catégorie de collectivités, et non plus collectivité par collectivité, entendu au sens unitaire. Le lien de proximité voulu par les sénateurs entre l'imposition et la collectivité se trouve certes quelque peu distendu, mais cette rédaction permet de rester dans l'épure constitutionnelle qui, rappelons-le, ne prévoit aucune exclusive en matière de ressources propres. En outre, un tel amendement résout la question de l'application du dispositif aux communes, une déclinaison dans la loi d'un taux pour 36 000 communes paraissant de fait irréaliste. La rédaction proposée représente en conséquence une voie médiane entre le souhait de rester le plus fidèle possible à l'article 72-2 de la Constitution, et celui exprimé par les sénateurs de pouvoir tenir compte, dans la loi fiscale, des spécificités locales. L'amendement propose en outre une rédaction plus précise des dispositions relatives à la localisation de l'assiette et du taux en faisant référence à la part locale d'assiette, qui est juridiquement plus fondée, et en supprimant la notion inutile de localisation du taux, puisque celui-ci devra être déterminé par collectivité ou catégorie de collectivité. Cet amendement a été adopté par la Commission à la suite du débat retracé ci-après. Après avoir rendu hommage à la clarté des propos du rapporteur, le président Pascal Clément a salué la présence de membres de la Commission des finances et souhaité que le débat se concentre sur l'objet même du projet de loi organique en jugeant inutile de revenir sur la rédaction des dispositions de l'article 72-2 de la Constitution relatives aux ressources propres et qui s'imposent au législateur. M. Bernard Derosier a regretté que le Sénat ne soit pas allé au terme de sa logique de défense de l'autonomie des collectivités locales, qui aurait dû le conduire à donner toute sa portée à la notion de ressources propres. Il a donc invité la Commission à adopter les amendements du groupe socialiste, qui ont précisément cet objet. M. Augustin Bonrepaux a déploré que la majorité soutienne des amendements tendant à définir de façon restrictive la notion de ressources propres et lui a reproché d'avoir rendu possible, lors de la révision constitutionnelle, une telle restriction. Il a dénoncé les effets des dispositions du projet de loi organique qui ne tiennent pas compte des mécanismes de péréquation des ressources entre les collectivités locales. Évoquant la rédaction de l'article 2 du texte, issue des travaux du Sénat, il s'est demandé en quoi la localisation par la loi de l'assiette ou du taux d'un impôt pouvait favoriser l'autonomie financière des collectivités territoriales. Ayant rappelé que le précédent gouvernement avait supprimé la part salariale dans l'assiette de la taxe professionnelle ainsi que la part régionale de la taxe d'habitation, le président Pascal Clément a souligné que le choix de privilégier les ressources propres des collectivités locales, dont elles pourraient fixer librement l'assiette et les taux, aurait conduit inévitablement à une grande rigidité du dispositif, susceptible d'interrompre le processus de décentralisation. C'est pourquoi il a approuvé la démarche du Gouvernement, qui permet la poursuite des transferts de compétences et soutenu les modifications proposées par le rapporteur, qui permettent de tenir compte des spécificités locales dans la détermination de l'assiette et du taux des impositions transférées. Il a souligné que, même dans un État fédéral comme l'Allemagne, l'essentiel des ressources propres des Länder étaient constituées par des impositions partagées. Le rapporteur a relevé l'oscillation permanente de l'opposition entre la demande d'une autonomie financière complète pour les collectivités territoriales et celle de l'étatisation de leurs ressources, justifiée par le souci de permettre aux collectivités d'exercer les compétences qui leur sont confiées. À titre d'illustration, il a cité un propos récent de M. Augustin Bonrepaux, déclarant préférer une bonne dotation à un mauvais impôt. Il a insisté sur la portée de la révision constitutionnelle de mars 2003, qui oblige l'État à prendre ses responsabilités, quelle que soit la notion de ressources propres des collectivités territoriales finalement retenue, si ces collectivités n'étaient pas en mesure d'exercer leurs missions. S'agissant de la notion de ressources propres, il a évoqué, pour justifier le lien établi entre ressources propres et assiette ou taux localisable dans la loi, l'exemple des droits de mutation, qui sont à l'évidence perçus par les élus locaux comme des ressources propres alors que leur taux est fixé par la loi. Le président Pascal Clément a souligné les inconvénients, sur le plan de l'équité, d'un trop large recours à la notion de ressources propres localisables, qui aurait pour effet de creuser les inégalités entre collectivités territoriales. M. Charles de Courson a nié, pour sa part, que la Constitution empêche le législateur de donner son plein effet à la notion de ressources propres, l'article 72-2 prévoyant simplement, en son deuxième alinéa, que les collectivités territoriales peuvent recevoir tout ou partie du produit des impositions de toutes natures et, en son troisième alinéa, que les recettes fiscales sont au nombre de leurs ressources propres. Il a rappelé que, lors des débats parlementaires sur la révision constitutionnelle, le Gouvernement avait déclaré que la définition des ressources propres serait opérée dans la présente loi organique. Abordant la définition des impositions localisables, il a fait valoir que, pour être retenu parmi celles-ci, un impôt devait être à la fois compatible avec les normes européennes, suffisamment démocratique et doté d'une assiette relativement stable. Il s'est alors demandé quels grands impôts respectaient ces trois critères. Après avoir exclu la tva, il a fait part de ses doutes quant à la taxe intérieure sur les produits pétroliers, dans la mesure où la « transférabilité » de cette taxe est conditionnée par des décisions relevant de la compétence du Conseil de l'Union européenne statuant à l'unanimité et où, pour pouvoir être considérée comme localisable, la taxe, qui est payée sur le lieu de raffinage, devra faire l'objet d'une définition statistique de son assiette, laquelle se heurte à des difficultés techniques. Pour lui, l'impôt sur le revenu, quoique localisable, n'est pas suffisamment démocratique, puisqu'il n'est acquitté que par la moitié des citoyens environ et que son taux est fortement progressif. Il a estimé en revanche que la contribution sociale généralisée correspondait aux exigences requises et qu'il serait aisé d'en abaisser le taux national, qui est de 7,5 % et d'ouvrir aux collectivités territoriales la faculté de voter un taux additionnel, moyennant un dispositif de péréquation compensant les inégalités de ressources. Ayant souligné que cette contribution présentait toutes les caractéristiques d'un bon impôt, il a fait valoir que son taux avait déjà été réduit de 0,15 point, la recette correspondante étant, par le biais d'un mécanisme complexe, indirectement affectée aux départements. Il a ajouté que d'autres hypothèses étaient imaginables, telles que la majoration par la loi de finances du taux de la taxe sur l'électricité, ou la création d'une taxe sur le gaz. Évoquant l'examen du texte par le Sénat, il a rappelé qu'un premier amendement, élaboré notamment par lui-même et le sénateur Michel Mercier en concertation avec l'association des maires de France et notamment son président, M. Daniel Hoeffel, s'était heurté à l'opposition du Gouvernement, puis qu'un sous-amendement, présenté par M. Yves Fréville, avait été rectifié pour permettre à la taxe intérieure sur les produits pétroliers, dont le taux est fixé par le Parlement, d'être artificiellement classée dans les ressources propres des collectivités locales dès lors que l'on disposerait d'une assiette statistique. Contestant enfin l'argument tiré du système allemand, il rappelé que la Loi fondamentale fixait le partage par moitié entre les recettes fédérales et celles dévolues aux Länder, de sorte que, lorsqu'une loi fédérale a prévu un abattement, par exemple au titre des charges de famille, elle doit corrélativement prévoir un dispositif de compensation. Il a conclu en indiquant que la tâche à laquelle le Parlement devait s'atteler était de désigner les impôts inclus dans les ressources propres et de définir les modalités de modulation de leur assiette. M. Xavier de Roux a considéré que le texte de la Constitution n'exigeait ni que les collectivités territoriales puissent fixer l'assiette ou le taux des impôts, puisque cette possibilité est laissée à la discrétion du législateur, ni que les recettes fiscales de ces collectivités soient localisables. Il a conclu que le débat sur la définition des ressources propres était un débat de caractère politique, le législateur n'étant pas tenu de privilégier l'une des options possibles. M. Michel Piron a rappelé que le Parlement avait débattu longuement de ce qui constituait l'autonomie des collectivités territoriales. Pour lui, les collectivités françaises disposant déjà de moyens financiers très significatifs par rapport à la situation des autres pays européens, il conviendrait de mettre l'accent sur l'aspect réglementaire de l'autonomie plutôt que sur son aspect financier. Le rapporteur a réaffirmé son interprétation du texte constitutionnel, qui met l'accent sur la capacité des collectivités locales à disposer librement de leurs ressources plutôt que sur la composition de ces ressources, et donne à la loi le pouvoir de déterminer les conditions dans lesquelles les collectivités disposent de leurs ressources, de les autoriser à fixer l'assiette ou le taux de recettes fiscales, et de fixer les limites de cette capacité. Il a également relevé que la Constitution mentionnait parmi les ressources propres des collectivités locales les « recettes fiscales », sans distinguer entre la fiscalité locale et les autres impositions. Il a réitéré son intention que puisse être également considéré comme ressource propre un impôt affecté aux collectivités territoriales et pour lequel la loi fixe une assiette locale et un taux particulier pour chaque catégorie de collectivités ; il a démontré que cette rédaction était conforme à la Constitution, qu'elle permettait de prendre en compte des mécanisme de péréquation tout en garantissant l'autonomie financière des collectivités territoriales. Après avoir rejeté l'exception d'irrecevabilité n° 1 et la question préalable n° 1 présentées par M. Alain Bocquet, la Commission a examiné les articles du projet de loi organique. Article 1er : Définition de la notion de catégorie de collectivités territoriales : La Commission a été saisie d'un amendement de M. Bernard Derosier tendant à distinguer, parmi les catégories de collectivités territoriales mentionnées, les communes de moins de 10 000 habitants et celles de plus de 10 000 habitants. Après que l'auteur de l'amendement eut souligné qu'il serait peu significatif de regrouper les communes dans une seule catégorie, le rapporteur a rappelé qu'un amendement identique avait été rejeté en première lecture et contesté la pertinence de cette distinction qui n'apparaît d'ailleurs pas dans le texte constitutionnel. La Commission a donc rejeté cet amendement. La Commission a rejeté un autre amendement du même auteur tendant à considérer comme catégorie de collectivités territoriales les établissements publics de coopération intercommunale (epci). Le rapporteur a rappelé que la Constitution n'avait pas érigé les epci en collectivités territoriales, tout en soulignant qu'elle avait reconnu leur importance dans le droit à l'expérimentation ou la notion de chef de file. Il a ajouté que le projet de loi organique mentionnait parmi les ressources propres des communes celles qui bénéficient aux epci, permettant ainsi à ces établissements de bénéficier, de façon certes indirecte, de la garantie d'autonomie financière. La Commission a ensuite été saisie de trois amendements de M. Bernard Derosier supprimant l'assimilation de Mayotte, Saint-Pierre-et-Miquelon, des collectivités à statut particulier, des collectivités d'outre-mer et des provinces de la Nouvelle-Calédonie aux départements et régions, et prévoyant une catégorie propre à ces collectivités d'outre-mer. M. Bernard Derosier ayant souligné qu'il s'agissait ainsi de mieux prendre en considération la spécificité fiscale de ces collectivités, le rapporteur a jugé peu opportun de prévoir des catégories comportant trop peu de collectivités et s'est interrogé sur le souhait des populations d'outre mer de faire l'objet d'une telle différenciation. La Commission a donc rejeté ces trois amendements. La Commission a adopté l'article 1er sans modification. Avant l'article 2 : La Commission a rejeté un amendement de M. Bernard Derosier, tendant à préciser que la péréquation est un élément constitutif de l'autonomie financière des collectivités territoriales, le rapporteur, sans minimiser l'importance des dispositifs de péréquation, ayant rappelé qu'ils relevaient de la loi, conformément à l'article 72-2 de la Constitution, et non de la loi organique. Article 2 : Définition de la notion de ressources propres : La Commission a été saisie d'un amendement de M. Bernard Derosier précisant que les ressources propres sont constituées du produit des impositions de toutes natures dont les collectivités votent le taux ou déterminent le tarif, des redevances pour services rendus, des produits du domaine, des participations d'urbanisme, des produits financiers et des dons et legs. Évoquant les conditions dans lesquelles a été compensé le financement par les départements des dépenses liées à l'allocation personnalisée d'autonomie, l'auteur a jugé que le Gouvernement ne respectait pas les engagements pris par le précédent gouvernement lors de l'examen de la loi du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité. Constatant que se reproduisait le même scénario pour le transfert du rmi-rma, il s'est demandé, de façon plus générale, comment faire en sorte que l'État respecte ses engagements financiers sans que les départements aient à faire l'avance des dépenses. Il a dès lors jugé indispensable que les collectivités puissent avoir la maîtrise des taux afin de pouvoir compenser les manquements de l'État. Le président Pascal Clément ayant constaté que cette situation n'était pas inédite, aucun gouvernement ne pouvant calculer avec exactitude la dépense susceptible d'être engagée par les collectivités, le rapporteur a proposé le rejet de cet amendement, conformément à la position qui avait déjà été celle de l'Assemblée nationale en première lecture, avant de rappeler que l'article 4 du projet de loi organique avait précisément pour objet de régler les cas dans lesquels le ratio d'autonomie financière passerait en dessous du seuil, une loi de finances qui ne prendrait pas les dispositions nécessaires s'exposant à être censurée par le Conseil constitutionnel. Après avoir souligné que les difficultés financières de l'État le conduisaient à octroyer des libertés à défaut de pouvoir verser de l'argent, M. Charles de Courson a estimé que la lecture que le rapporteur fait de la Constitution n'est pas exacte, sinon le troisième alinéa de l'article 72-2 ferait mention, non pas des recettes fiscales, mais des impositions de toutes natures. La Commission a rejeté cet amendement, ainsi que, pour les mêmes raisons, un amendement de M. Bernard Derosier précisant que les ressources propres des collectivités territoriales sont celles dont les collectivités et leurs groupements fixent librement le montant. La Commission a ensuite été saisie de quatre amendements sur lesquels elle a engagé une discussion commune : deux amendements identiques, l'un de Mme Anne-Marie Comparini, l'autre de M. Bernard Derosier, tendant à supprimer les mots : « ou dont elle détermine, par collectivité, la localisation de l'assiette ou du taux » ; un autre de M. Bernard Derosier, supprimant les mots : « par collectivité » ; le dernier, du rapporteur, substituant aux mots : « la localisation de l'assiette ou du taux » les mots : « ou par catégorie de collectivités, le taux ou une part locale de l'assiette ». Mme Anne-Marie Comparini a insisté sur le fait que l'autonomie financière des collectivités territoriales supposait la possibilité pour un exécutif d'agir sur les recettes et rappelé que, dans certaines collectivités, il ne reste aucune imposition qui permette de faire jouer l'« effet levier » que permet la fixation du taux. Présentant ses amendements, M. Bernard Derosier a rappelé qu'ils manifestaient l'attachement de son groupe au pouvoir des collectivités de déterminer l'assiette et le taux de leurs ressources, estimant que l'adoption de cet amendement permettrait de résoudre le problème lancinant des finances locales. Jugeant incompréhensible la rédaction retenue par le Sénat, M. Charles de Courson a contesté la possibilité de confier à la loi le soin de déterminer le taux d'une imposition, jugeant que cela conduirait à considérer l'impôt comme une recette fiscale entrant dans le numérateur du ratio d'autonomie financière alors que l'assiette ne serait pas localisable. De même, il s'est interrogé sur le sens de la formule : « localisation de l'assiette », se demandant si le lieu qui sera retenu, à cette fin, sera celui de la perception ; prenant l'exemple la tipp départementale et rappelant que son lieu de paiement est la raffinerie, et non le lieu de consommation, il s'est demandé s'il était concevable que la localisation d'une imposition puisse varier selon qu'elle est entendue dans le sens de la loi organique ou qu'elle entre dans la définition de l'impôt national. Évoquant ensuite la taxe sur les conventions d'assurance dans son volet « véhicules automobiles » dont le Gouvernement a promis le transfert et qui représente près de 3 milliards sur les 4,2 milliards que produit cette taxe, il a estimé que la localisation était possible mais qu'elle supposait simultanément la création d'un dispositif de péréquation. Soulignant la difficulté de la question soulevée à travers ces amendements, M. Xavier de Roux a observé qu'il fallait choisir entre une « territorialisation » de tous les impôts, qui soulève des difficultés compte tenu de la diversité des ressources des collectivités, et l'attribution par l'État aux collectivités d'une part du produit de telle ou telle taxe. Jugeant nécessaire de maintenir une forme de péréquation dans un souci de justice, il a pris l'exemple de la taxe sur les contrats d'assurance et souligné que, si la loi ne fixait pas l'assiette et le taux, des délocalisations en résulteraient. Après avoir rappelé que, selon les propos du précédent ministre de l'Intérieur, les collectivités auraient la maîtrise du taux de la taxe sur les conventions d'assurances, le rapporteur a jugé que le classement parmi les ressources propres du produit de cette taxe ne faisait pas de difficulté. Il a ensuite rappelé que, de l'aveu même de nombreux sénateurs, la rédaction retenue par ces derniers était confuse, complexe et incertaine, et jugé que son amendement répondait aux préoccupations exprimées dans les autres amendements. Explicitant la rédaction adoptée par le Sénat, il a distingué deux hypothèses, selon qu'il est, ou non, possible de déterminer une assiette locale : lorsqu'il est matériellement impossible de déterminer la part locale de l'assiette d'un impôt national transféré, par exemple dans le cas de la tipp transférée aux départements, cette rédaction permettra de garder un lien de proximité avec la collectivité en fixant un taux appliqué à chaque département. Il a ajouté qu'un tel mécanisme permettra en outre d'inclure des éléments de péréquation. En revanche, lorsque l'assiette locale sera « visualisable », comme c'est par exemple le cas en matière de droits de mutation, il a précisé que le taux serait fixé par l'État. Présentant son amendement, il a considéré qu'il permettait une lecture plus générale de la loi organique, en sortant du caractère très conjoncturel de la rédaction adoptée au Sénat, destinée à régler le seul problème de la tipp affectée aux départements. M. Augustin Bonrepaux s'est interrogé sur la différence entre une dotation et un produit, lequel résulte de l'application d'un taux à une base. Il a jugé qu'une dotation évoluant en fonction de l'inflation et du pib était préférable, pour les collectivités locales, à un impôt qui n'évolue pas, la Constitution garantissant seulement qu'il ne baissera pas. Admettant qu'il puisse être difficile de localiser une assiette, il a estimé que le Gouvernement adaptait peu à peu la loi aux transferts de compétences envisagées ; considérant ensuite que des solutions différentes existaient, il a jugé que le projet de loi limitait excessivement l'autonomie financière des collectivités. Évoquant la réforme de la taxe professionnelle, il a jugé qu'il ne resterait rien de l'autonomie des collectivités si on lui substituait une part de tipp localisée dont le taux serait fixé par le Parlement. Il a donc considéré que seul l'amendement de M. Bernard Derosier était conforme au souci d'assurer une véritable autonomie financière des collectivités locales. S'interrogeant sur la portée de l'amendement du rapporteur, M. Charles de Courson s'est demandé si « le » taux fixé par la loi serait unique, auquel cas il a jugé qu'il s'agirait davantage d'une dotation que d'une ressource propre ; en outre, il a considéré que la rédaction permettrait de considérer comme une ressource propre un impôt national dépourvu d'assiette locale à condition que le taux soit déterminé dans la loi ; enfin, il s'est interrogé sur la notion de « part locale d'assiette » figurant dans l'amendement. M. Christian Decocq a déclaré approuver l'amendement du rapporteur jugeant qu'il permettra à l'État d'être juste. A l'issue de ce débat, la Commission a rejeté les amendements de Mme Anne-Marie Comparini et de M. Bernard Derosier et adopté l'amendement du rapporteur (amendement n° 1). La Commission a rejeté deux amendements de Mme Anne-Marie Comparini devenus sans objet, ainsi que deux amendements de M. Bernard Derosier relatifs aux dégrèvements, le rapporteur ayant souligné que les dégrèvements, étant neutres pour la collectivité, pouvaient être considérés comme des ressources propres. Elle a adopté l'article 2 ainsi modifié. Article 3 : Définition des notions d' « ensemble des ressources » et de « part déterminante » : La Commission a rejeté deux amendements de M. Bernard Derosier, mentionnant les transferts financiers réalisés au titre de la péréquation ainsi que six autres amendements du même auteur précisant que la part de ressources propres des collectivités ne pouvait être inférieure, respectivement, aux taux de 60 %, 55 %, 50 %, 45 %, 40 % et 33 % de l'ensemble de leurs ressources. Le rapporteur a estimé que le taux de 33 % serait inférieur au taux effectif constaté pour les départements et les communes pour l'année 2003 et rappelé que le taux d'autonomie financière des régions qui était de 62 % en 1997, s'était trouvé ramené à 35 % en 2003. M. Charles de Courson s'est demandé sur quel fondement constitutionnel pouvait reposer une différence de taux d'autonomie financière selon les collectivités locales et rappelé que les taux de ressources fiscales propres des collectivités pour 2003 étaient de 54 % pour les communes, 51 % pour les départements et 35 % pour les régions. La Commission a adopté l'article 3 sans modification. Article 4 : Mécanisme de mise en œuvre de la garantie : La Commission a rejeté six amendements présentés par M. Bernard Derosier, le premier imposant de prendre en compte le déséquilibre entre le taux d'autonomie financière constaté en 2003 et le taux effectif le 1er juin de l'année qui suit et non pas deux ans après, le deuxième et le troisième prévoyant respectivement l'obligation ou la possibilité d'organiser un débat au Parlement sur le rapport relatif à l'autonomie financière, le quatrième obligeant à corriger le déséquilibre dans la plus prochaine loi de finances suivant celle où le constat a été fait, le cinquième et le sixième précisant que le rapport fera également apparaître le taux médian de ressources propres constaté par rapport à l'ensemble des ressources, son évolution dans le temps et les mesures prises pour assurer son relèvement, ainsi que les écarts par rapport à la moyenne du niveau de ressources et les mesures correctrices. La Commission a adopté l'article 4 sans modification. Après l'article 4 : Après que le rapporteur eut indiqué que la question de la péréquation devait être traitée dans une loi ordinaire, la Commission a rejeté un amendement présenté par M. Bernard Derosier définissant la péréquation. Elle a rejeté trois autres amendements du même auteur : le premier prévoit que toute création, extension ou transfert de compétences au profit des collectivités territoriales doit s'accompagner de la mise en place de mécanismes de péréquation permettant d'assurer l'exercice dans des conditions égales de ces compétences sur l'ensemble du territoire ; le deuxième dispose que toute création, diminution ou modification des recettes d'origine fiscale d'une catégorie de collectivités ayant pour conséquence de modifier la structure de ces recettes ou de diminuer leur autonomie financière ne peut intervenir qu'après concertation avec les collectivités concernées ; le troisième propose qu'à compter de 2006, les collectivités locales et leurs établissements dotés d'une fiscalité propre puissent augmenter leur taux de taxe professionnelle par rapport à l'année précédente et par rapport aux taux et tarifs des autres impositions perçues au profit des collectivités. * * * La Commission a ensuite adopté l'ensemble du projet de loi organique ainsi modifié. * * * En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République vous demande d'adopter le projet de loi organique, modifié par le Sénat (n° 1638), pris en application de l'article 72-2 de la Constitution relatif à l'autonomie financière des collectivités territoriales, modifié par l'amendement figurant au tableau comparatif ci-après. TABLEAU COMPARATIF ___
AMENDEMENTS NON ADOPTÉS PAR LA COMMISSION Article premier Amendements présentés par M. René Dosière et les commissaires membres du groupe socialiste : · Dans le troisième alinéa (1°) de cet article, après les mots : « les communes », insérer les mots : « en distinguant les communes de moins de 10 000 habitants et celles de plus de 10 000 habitants. · Après le 1° de cet article, insérer l'alinéa suivant : « 1° bis Les établissement publics de coopération intercommunale ; ». · Dans l'avant-dernier alinéa de cet article (2°), supprimer les mots : « auxquels sont assimilées la collectivité départementale de Mayotte, la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon et les collectivités à statut particulier issues de la fusion d'une ou plusieurs communes et d'un département. » · Dans le dernier alinéa de cet article (3°), supprimer les mots : « auxquels sont assimilées les collectivités d'outre-mer régies par l'article 74 de la Constitution autres que celles mentionnées au 2°, les provinces de la Nouvelle-Calédonie, les collectivités à statut particulier issues de la fusion de départements et de régions et les collectivités mentionnées au dernier alinéa de l'article 73 ». · Compléter cet article par l'alinéa suivant : « 4° Les collectivités d'outre-mer ». Avant l'article 2 Amendement présenté par M. René Dosière et les commissaires membres du groupe socialiste : Insérer l'article suivant : « Au sens du dernier alinéa de l'article 72-2 de la Constitution, la péréquation est un élément constitutif de l'autonomie financière des collectivités territoriales ». Article 2 Amendements présentés par M. René Dosière et les commissaires membres du groupe socialiste : · Rédiger ainsi le deuxième alinéa de cet article : « Au sens de l'article 72-2 de la Constitution, les ressources propres des collectivités territoriales sont constituées du produit des impositions de toutes natures dont les collectivités votent le taux ou déterminent le tarif, des redevances pour services rendus, des produits du domaine, des participations d'urbanisme, des produits financiers et des dons et legs. » · Rédiger ainsi le deuxième alinéa de cet article : « Au sens de l'article 72-2 de la Constitution, les ressources propres des collectivités territoriales sont celles dont les collectivités et leurs groupements fixent librement le montant. Elles sont constituées du produit des impositions de toutes natures, des redevances pour les services rendus, des produits du domaine, des participations d'urbanisme, des produits financiers et des dons et legs. » Amendement présenté par Mme Anne-Marie Comparini et amendement identique présenté par M. René Dosière et les commissaires membres du groupe socialiste : · Dans le deuxième alinéa de cet article, supprimer les mots : « ou dont elle détermine, par collectivité, la localisation de l'assiette ou du taux ». Amendements présentés par M. René Dosière et les commissaires membres du groupe socialiste : · Dans le deuxième alinéa de cet article, supprimer les mots : « , par collectivité, ». · Compléter le deuxième alinéa de cet article par la phrase suivante : « Les dégrèvements ou dotations accordés par l'État ne peuvent en aucun cas être considérés comme des ressources propres au sens de cet article ». · Compléter le deuxième alinéa de cet article par la phrase suivante : « Les dégrèvements pris en charge par l'État ne constituent pas des ressources propres. » Amendements présentés par Mme Anne-Marie Comparini : · Dans le deuxième alinéa de cet article, supprimer les mots : « ou du taux ». · Dans le deuxième alinéa de cet article, substituer aux mots : « ou du taux », les mots : « et du taux ». Article 3 Amendements présentés par M. René Dosière et les commissaires membres du groupe socialiste : · À la fin du deuxième alinéa de cet article, substituer aux mots : « et des transferts financiers entre collectivités d'une même catégorie », les mots : « et des transferts financiers réalisés au titre de la péréquation entre collectivités d'une même catégorie ou entre l'État et les collectivités territoriales ». · À la fin du deuxième alinéa de cet article, substituer aux mots : « et des transferts financiers entre collectivités d'une même catégorie », les mots : « et des transferts financiers réalisés au titre de la péréquation ». · Après le mot : « confiées », rédiger ainsi la fin du dernier alinéa de cet article : « . Elle ne peut être inférieure à 60 % de l'ensemble des ressources. » · Après le mot : « confiées », rédiger ainsi la fin du dernier alinéa de cet article : « . Elle ne peut être inférieure à 55 % de l'ensemble des ressources. » · Après le mot : « confiées », rédiger ainsi la fin du dernier alinéa de cet article : « . Elle ne peut être inférieure à 50 % de l'ensemble des ressources. » · Après le mot : « confiées », rédiger ainsi la fin du dernier alinéa de cet article : « . Elle ne peut être inférieure à 45 % de l'ensemble des ressources. » · Après le mot : « confiées », rédiger ainsi la fin du dernier alinéa de cet article : « . Elle ne peut être inférieure à 40 % de l'ensemble des ressources. » · Après le mot : « confiées », rédiger ainsi la fin du dernier alinéa de cet article : « . Elle ne peut être inférieure à 33 % de l'ensemble des ressources. » · Dans le dernier alinéa de cet article, substituer à la date : « 2003 », la date : « 2002 ». Article 4 Amendements présentés par M. René Dosière et les commissaires membres du groupe socialiste : · Dans le deuxième alinéa de cet article, substituer aux mots : « le 1er juin de la deuxième année qui suit », les mots : « le 1er juin de l'année qui suit ». · Compléter le deuxième alinéa de cet article par la phrase suivante : « La remise de ce rapport fait l'objet d'un débat au Parlement. » · Compléter le deuxième alinéa de cet article par la phrase suivante : « Ce rapport peut faire l'objet d'un débat. » · Dans le dernier alinéa de cet article, substituer aux mots : « par une loi de finances pour la deuxième année suivant celle où le constat a été fait », les mots : « par la plus prochaine loi de finances suivant celle où le constat a été fait ». · Compléter cet article par l'alinéa suivant : « Ce rapport fera également apparaître, pour chaque catégorie de collectivités, le taux médian de ressources propres constaté par rapport à l'ensemble des ressources, son évolution dans le temps, ainsi que les mesures prises pour assurer son relèvement ». · Compléter cet article par l'alinéa suivant : « Ce rapport fera également apparaître, au sein de chaque catégorie de collectivités, les écarts à la moyenne du niveau de ressources propres existants, ainsi que les mesures envisagées pour permettre le resserrement de ces écarts ». Après l'article 4 Amendements présentés par M. René Dosière et les commissaires membres du groupe socialiste : · Insérer l'article suivant : « La péréquation entre les collectivités territoriales doit permettre la correction des différences de ressources et de charges pour assurer un niveau comparable de services publics, entre collectivités appartenant à une même catégorie au sens de l'article 1. « Elle prend la forme à la fois de dotations de l'État visant à une action de solidarité au bénéfice des collectivités les moins favorisées, et de mécanismes de solidarité entre collectivités d'une même catégorie. » · Insérer l'article suivant : « Toute création, extension ou transfert de compétences au profit des collectivités territoriales doit s'accompagner de la mise en place de mécanismes de péréquation permettant d'assurer l'exercice dans des conditions égales de ces compétences sur l'ensemble du territoire. » · Insérer l'article suivant : « Toute création, diminution ou modification des recettes d'origine fiscale d'une catégorie de collectivités ayant pour conséquence de modifier la structure de ces recettes ou de diminuer leur autonomie financière ne peut intervenir qu'après concertation avec les collectivités concernées et doit s'accompagner des mesures adaptées au maintien de leur degré préalable d'autonomie financière. » · Insérer l'article suivant : « À compter de 2005, les communes, les départements, les régions et les organismes de coopération intercommunale dotés d'une fiscalité propre peuvent augmenter librement leur taux de taxe professionnelle par rapport à l'année précédente et par rapport aux taux et tarifs des autres impositions perçues au profit des collectivités. » --------------------- N° 1674 - Rapport sur le projet de loi organique, pris en application de l'article 72-2 de la Constitution relatif à l'autonomie financière des collectivités territoriales (2ème lecture) (M. Guy Geoffroy) 1 () Avis n° 1546 de M. Gilles Carrez au nom de la Commission des finances, avril 2004. 2 () Article 72-2, alinéas 2 et 3 : « [les collectivités] peuvent recevoir tout ou partie du produit des impositions de toutes natures. La loi peut les autoriser à en fixer l'assiette et le taux dans les limites qu'elle détermine. » « Les recettes fiscales et les autres ressources propres des collectivités territoriales représentent pour chaque catégorie de collectivités, une part déterminante de l'ensemble de leurs ressources. La loi organique fixe les conditions dans lesquelles cette règle est mise en œuvre ». © Assemblée nationale |