ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
TREIZIÈME LÉGISLATURE
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R A P P O R T D’ I N F O R M A T I O N
Présenté à la suite de la mission effectuée en Serbie
du 8 au 12 décembre 2008
par une délégation du
GROUPE D’AMITIÉ FRANCE- SERBIE (1)
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(1) Cette délégation était composée de M. Jean-Pierre Dufau, Président, MM. Jean-Michel Ferrand, Jean Gaubert, Robert Lecou, François Loncle, et Philippe Meunier
SOMMAIRE
I. L’EVOLUTION DE LA SITUATION POLITIQUE ET ECONOMIQUE DE LA SERBIE 9
A. DE NOUVEAUX EQUILIBRES POLITIQUES 9
B. UNE SITUATION ECONOMIQUE ENCORE FAVORABLE MALGRE LA CRISE FINANCIERE INTERNATIONALE 10
C. UNE SITUATION PARTICULIERE EN VOÏVODINE 12
D. UN FORT CONSENSUS DES SERBES SUR LA QUESTION DU KOSOVO 15
1. UNE REACTION FERME A LA DECLARATION D’INDEPENDANCE UNILATERALE DU KOSOVO 15
II. LES POTENTIALITES DE LA COOPERATION BILATERALE ENTRE LA FRANCE ET LA SERBIE 23
A. LA COOPERATION ECONOMIQUE 23
B. LA COOPERATION CULTURELLE 26
1. LA COOPERATION UNIVERSITAIRE ET INSTITUTIONNELLE 26
2. LA COOPERATION SCIENTIFIQUE 27
C. LA COOPERATION DECENTRALISEE 31
III. LA SERBIE ET L’UNION EUROPEENNE 33
A. LES EFFORTS SERBES POUR DEBLOQUER LA SITUATION 33
B. L’AVANCEE QUE VA CONSTITUER LA MISE EN ŒUVRE DE L’ACCORD DE STABILISATION ET D’ASSOCIATION 34
C. LA NECESSAIRE REPRISE DES NEGOCIATIONS DE PRE-ADHESION 37
D. VERS LA LIBERALISATION DU SYSTEME DES VISAS 40
ANNEXE 1 : Liste des personnalités rencontrées 44
Une délégation du groupe d’amitié France-Serbie de l’Assemblée nationale s’est rendue en Serbie du 8 au 12 décembre 2008.
Présidée par M Jean-Pierre Dufau, député socialiste des Landes, elle comprenait MM. Jean-Michel Ferrand, député UMP du Vaucluse, Jean Gaubert, député socialiste des Côtes d’Armor, Robert Lecou, député UMP de l’Hérault, François Loncle, député socialiste de l’Eure et Philippe Meunier, député UMP du Rhône.
Elle a rencontré à Belgrade les plus hautes autorités de État : le Président de la République, le Premier Ministre, la Présidente de l’Assemblée nationale, le Vice-président du gouvernement en charge de l’intégration européenne et Ministre de la science et du développement technologique, le Ministre de la défense, le Ministre des finances, le Ministre de l’environnement et de l’aménagement du territoire. Elle a longuement discuté avec les membres du groupe d’amitié Serbie-France de l’Assemblée nationale serbe, et avec les présidents des commissions parlementaires des affaires étrangères et de l’intégration européenne. Elle s’est entretenue avec les représentants des milieux économiques serbes ainsi qu’avec plusieurs hommes d’affaires français. En Voïvodine, à Novi Sad, elle a été reçue par les présidents des pouvoirs exécutif et législatif de la région.
Ces rendez-vous ont été grandement facilités par l’Ambassade de France en Serbie, et M. Jean-François Terral, Ambassadeur de France, que la délégation tient à remercier ainsi que ses collaborateurs.
Les entretiens des députés français ont porté sur les sujets les plus importants : la recherche de Ratko Mladic, la situation dans les Balkans, les répercussions de la déclaration d’indépendance unilatérale du Kosovo, les perspectives d’adhésion de la Serbie à l’Union européenne, les répercussions de la crise financière internationale, sans oublier les dossiers bilatéraux franco-serbes.
Le présent rapport en retrace le contenu autour de trois thèmes principaux : la situation en Serbie a changé depuis un an ; la coopération entre la France et la Serbie n’a pas le niveau qu’elle devrait avoir ; la Serbie manifeste une ferme volonté de s’intégrer à l’Union européenne.
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Depuis les dernières élections, la Serbie a changé.
Les résultats sortis des urnes sont clairs : les électeurs ont confirmé lors des élections législatives anticipées du 11 mai 2008 le choix européen qu’ils avaient fait le 3 février 2008, en élisant M. Boris Tadic Président de la République. La coalition « Pour une Serbie européenne » dispose d’une majorité avec l’appoint des socialistes du SPS, ancien parti de M. Milosevic. La majorité parlementaire est en phase avec le Président de la République, et le gouvernement peut mener la politique qu’il souhaite de rapprochement avec l’Union européenne.
Le peuple a de fait tranché entre deux options : la tentation nationaliste et l’intégration européenne, dans un contexte qui était rendu plus difficile par la déclaration unilatérale d’indépendance du Kosovo, le 17 février 2008.
Ce choix s’est concrétisé par l’apparition d’une équipe gouvernementale rajeunie, pro-européenne, ouverte, intégrant de nombreuses femmes, et dont plusieurs membres ont été formés dans un des pays de l’Union européenne.
Depuis les élections, cette nouvelle équipe a multiplié les gestes forts : arrestation rapide de Karadjic, préparation de la mise en œuvre de l’accord d’association et de stabilisation avec l’Union européenne, élaboration de plus de cinquante textes de lois pour se rapprocher du droit communautaire.
Un véritable élan s’est produit. Il importe aujourd’hui de ne pas le casser, en retardant l’évolution de la Serbie vers l’Union européenne, comme c’est le cas actuellement du fait de l’attitude des Pays Bas. Ce pays refuse en effet de ratifier l’Accord de Stabilisation et d’Association, au moment où sont ratifiés de nombreux accords de ce type avec la plupart des États des Balkans.
Selon des sources gouvernementales serbes, la Serbie a connu au premier semestre 2008 une croissance réelle de son PIB de 7,3 %. En 2007, le taux de chômage y était de 18,1%, l’inflation de 10,1 % (contre 40,7 % en 2001), tandis que les investissements directs effectués par les étrangers s’élevaient à 2,6 milliards d’euros et que la dette publique atteignait 29,4 % du PIB. Les réserves de sa banque centrale s’élevaient à 14,2 milliards de dollars.
Ces chiffres marquent une rupture par rapport à la période antérieure à 2001, ce que traduit le taux moyen de croissance des exportations qui s’est élevé à 21,7 % sur la période 2000 – 2007.
Dans un contexte où le PIB par habitant est de 6000 dollars, la Serbie doit poursuivre sa modernisation pour que son appareil industriel soit conforme aux normes européennes, relancer les partenariats public-privé et développer ses infrastructures afin de faciliter les transports de voyageurs et de marchandises. Elle entend continuer sa politique de privatisation qui a déjà concerné en partie le secteur bancaire, celui des assurances, les hydrocarbures et les produits pharmaceutiques.
Les services ont représenté 60 % du PIB en 2007, l’industrie 20 % et le secteur agricole 20 %.
Pour Mme Diana Dragutinovic, Ministre des finances, la crise économique actuelle a obligé le gouvernement à modifier ses perspectives budgétaires : ses prévisions pour 2009 reposaient jusqu’à l’automne sur une croissance de 7 % et la venue de nombreux investissements étrangers. Il est maintenant prévu une croissance de 3 à 3,5 % et des recettes fiscales moins importantes ne permettant pas de mener une véritable politique contracyclique. Le déficit budgétaire sera cependant limité à 1,5 % du PNB, grâce à une politique stricte des recettes et une forte diminution des subventions. Les revenus augmenteront au même rythme que l’inflation, les retraites resteront à leur niveau actuel.
Dans ce contexte, où le gouvernement ne souhaite pas renoncer aux dépenses d’investissements, les grands projets feront l’objet de strictes priorités. Craignant des problèmes de liquidité, il attend des crédits de la Banque Mondiale pour financer sa priorité la plus importante (le corridor X) et pour compenser la baisse des flux de capitaux privés. Il espère de nouvelles aides pour les PME.
Pour la Ministre, la Serbie traverse la situation la plus difficile qu’elle ait connue depuis l’an 2000. Alors qu’elle a l’impression que l’Europe s’est beaucoup plus éloignée d’elle que pendant les huit dernières années, elle exprime une demande de soutien à la France et à l’Union européenne pour surmonter cette crise.
M. Mirko Cvetkovic, Premier Ministre, a quant à lui insisté sur la situation actuelle des banques, la faiblesse de la demande extérieure et ses conséquences pour les exportations, l’importance du corridor X, la restructuration des entreprises et la satisfaction des besoins énergétiques.
Pour le premier Ministre, les banques serbes sont dans une situation relativement favorable : elles n’avaient pas acheté de subprimes ; elles étaient dans l’obligation d’avoir des réserves importantes ; elles ont bénéficié d’une politique monétaire rigoureuse ; leurs dépôts sont maintenant garantis jusqu’à 50 000 euros par compte.
Les entreprises exportatrices souffrent par contre de la baisse de la demande extérieure. Il est plus difficile d’exporter des produits serbes, tandis que les producteurs étrangers sont plus agressifs lorsqu’ils exportent en Serbie. C’est pourquoi le gouvernement a pris des mesures pour augmenter l’attractivité du marché serbe, et engagé des pourparlers avec le FMI.
Si la mise en œuvre des projets d’infrastructures a été revue à la baisse, l’achèvement du corridor X reste prioritaire, tant pour sa partie routière que pour sa partie ferroviaire. Il faut terminer 300 kilomètres d’autoroutes, dont 100 kilomètres au Nord, en zone plate, ce qui facilitera les travaux. Mais il faudra pour atteindre ces objectifs trouver de nouveaux financements, car le concessionnaire n’est pas actuellement en mesure d’assurer la construction.
Les nouvelles voies ferrées sont celles qui vont de Hongrie vers la Macédoine et la Grèce, l’une allant de Belgrade à Zagreb, l’autre de Nic à la frontière avec la Macédoine.
Pour accélérer la vitesse des trains, il va néanmoins falloir restructurer les entreprises de ce secteur qui sont actuellement déficitaires et qui ont besoin de subventions de l’État.
Il faudra également augmenter les approvisionnements en électricité et bâtir de nouvelles capacités. De manière plus générale, dans le domaine énergétique, la Serbie cherche à rationaliser ses importations de gaz, en menant des négociations avec la Russie pour bénéficier du gazoduc South Stream. Elle recherche par ailleurs des investisseurs étrangers qui interviendraient pour améliorer l’écologie. Mais, si elle a beaucoup de projets et de grandes ambitions, elle a peu de moyens.
L’organisation territoriale de la République serbe est particulière. Il n’existe qu’une seule région, la Voïvodine, qui possède un statut d’autonomie particulier. Les autres collectivités locales ne jouissent pas d’un tel statut. Ce sont en fait essentiellement des municipalités, au nombre de 150, ce qui rend du reste difficile l’organisation de jumelages avec des départements ou des régions de notre pays. La création de régions administratives qui pourraient coopérer avec leurs homologues des États membres de l’Union européenne et bénéficier à terme des fonds régionaux n’est actuellement qu’à l’état de projet.
La Voïvodine est certes un cas particulier en Serbie : Les minorités nationales y sont particulièrement fortes : les Hongrois y représentent 14 % de la population, les Slovaques 3 %, les Croates 3%, à côté des Monténégrins, des Roumains, des Tchèques, des Roms et des Ruthènes, si bien que plus d’un tiers des citoyens appartient à une minorité nationale. La communauté hongroise s’y est du reste constituée en force politique. Les personnes appartenant aux minorités nationales disposent de droits linguistiques, d’un droit à l’expression, à l’information et à l’instruction dans leurs langues. Six langues y sont officielles : le serbe, le hongrois, le slovaque, le croate, le roumain et le ruthène.
Son statut découle de la Constitution yougoslave de 1974, qui prévoyait deux provinces autonomes : la Voïvodine et le Kosovo. Cette autonomie fut cependant réduite sous l’ère Milosevic, entre 1990 et 2000.
La province autonome de Voïvodine est compétente en matière économique, dans les domaines de l’industrie, de l’agriculture et des infrastructures qui la concernent. Elle perçoit au minimum 7% du budget national. Elle jouit d’une autonomie fiscale.
Le Parlement de Serbie doit prochainement examiner un projet de nouveau statut pour la Voïvodine. Ce projet, en son état actuel, prévoit d’élargir les compétences du Parlement de la province, de permettre à la Voïvodine d’être représentée à l’étranger, et notamment auprès de l’Union européenne. De manière symbolique, le Conseil exécutif de la province serait appelé gouvernement de Voïvodine.
Les rencontres de la délégation à Novi Sad ont permis de préciser cette situation particulière, de son ampleur et de la complexité de la réforme envisagée.
Pour M. Sandor Egeresi, Président de l’Assemblée de la province autonome, ce nouveau statut respecte le cadre constitutionnel de la République de Serbie et est l’aboutissement de véritables discussions. Il devrait être adopté par le Parlement serbe avant la fin du premier trimestre, même si certains opposants accusent la Voïvodine de volonté de séparatisme et de sécessionnisme.
Ce projet correspond au souhait d’avoir une autonomie interne en matière de développement économique, dans le respect de la constitution serbe, sur la base de l’égalité entre toutes les communautés nationales et de la sauvegarde de leur identité nationale, qui serait garantie par la mise en place d’un Conseil des Communautés nationales de 30 membres.
Les compétences de la Voïvodine concerneront principalement l’agriculture, l’aménagement du territoire, la forêt, les eaux, mais aussi la science, la culture, l’éducation et la santé. La province disposera de ressources propres, lui permettant de financer son budget qui dépassera les 7 % du budget de État qui lui sont consacrés.
Pour Mme Maja Sedlarevic, Vice-Présidente de l’Assemblée de la province autonome, cette évolution intervient après de nombreuses promesses faites depuis 2000, qui n’ont pas abouti : ainsi, le gouvernement de la province avait fait des propositions fiscales qui n’ont pas été suivies. Le projet actuel, élaboré après le vote négatif de la Voïvodine lors du référendum sur la nouvelle Constitution, prévoit une autonomie partielle au plan économique. Le montant des dépenses garanties – 7 % – est très inférieur à la hauteur des ressources générées en Voïvodine
– entre 25 et 30 % du budget national.
Dans ce contexte, la coopération avec les régions européennes est une chance pour la Voïvodine, déjà membre du comité des régions, et qui souhaite jouer un rôle actif au niveau européen. Tel est le sens de la proposition faite par Mme Sedlarevic au Parlement européen d’organiser une rencontre de tous les présidents des parlements des Balkans occidentaux afin de débattre de la réconciliation de tous les peuples des Balkans. Les parlements régionaux pourraient y participer.
Au niveau franco-serbe, la Voïvodine voudrait développer ses actions de coopération avec l’Alsace, souhait que le groupe d’amitié relaiera auprès du conseil régional d’Alsace
M. Bojan Pajtic, Président du Conseil exécutif de la province autonome, souligne quant à lui qu’il dirige une coalition qui a réuni toutes les forces pro-européennes de la région et qui a fait élire 90 députés. Le choix européen est essentiel tant pour la Serbie que pour la Voïvodine.
Le statut particulier de la Voïvodine tient certes à l’histoire, et notamment à la structure de l’empire austro-hongrois. Il tient aussi à son influence réelle et à sa taille : la Voïvodine représente 30 % du territoire et de la population de la Serbie, mais les deux tiers des investissements étrangers effectués en Serbie y sont concentrés.
La région doit maintenant mettre en œuvre la nouvelle Constitution serbe de 2006 qui prévoit qu’elle pourra bénéficier de nouvelles compétences et mettre en place de nouvelles institutions. Le nouveau statut de la région et ses nouvelles compétences devront être harmonisés avec les lois nationales serbes.
Au plan économique, la région s’interroge sur la manière d’organiser l’agriculture afin de l’adapter au contexte européen, en redéfinissant le statut de la propriété, et en cherchant à mettre en places des structures plus modernes et plus diversifiées dans un contexte de concentration des exploitations.
D. UN FORT CONSENSUS DES SERBES SUR LA QUESTION DU KOSOVO
1. UNE REACTION FERME A LA DECLARATION D’INDEPENDANCE UNILATERALE DU KOSOVO
Tous les interlocuteurs serbes de la délégation ont tenu le même langage : le Kosovo n’a pas vocation à être indépendant. Sa déclaration d’indépendance est unilatérale, et n’a pas de valeur en tant que telle. La Serbie en a du reste saisi les Nations Unies et la Cour Internationale de Justice.
La délégation n’a pas entendu de la part des responsables qu’elle a rencontrés de discours agressifs. Ses interlocuteurs déclarent attendre la décision de la Cour, ce qui ne préjuge pas de leurs réactions futures s’ils n’obtenaient pas satisfaction.
La Serbie regrette amèrement que la France ait été le deuxième pays dans le monde à avoir reconnu l’indépendance autoproclamée du Kosovo.
Elle a eu cette même réaction vis-à-vis de tous les autres États ayant pris la même décision. Elle a en conséquence rappelé pendant quelques mois ses ambassadeurs dans les États ayant reconnu cette indépendance.
Elle a manifesté particulièrement sa déception vis-à-vis de la Macédoine et du Monténégro, avec qui elle entend avoir les meilleures relations au plan régional. Elle a déclaré persona non grata les ambassadeurs de ces deux pays en Serbie, car la Macédoine comme le Monténégro ont reconnu l’indépendance du Kosovo un jour après que l’Assemblée Générale des Nations Unies a sollicité l’avis de la Cour Internationale de Justice. A titre de comparaison, le Portugal l’avait fait un jour avant. « Ce fut pour nous une gifle », souligne M. Borislav Stefanovic, Directeur de cabinet du ministre des affaires étrangères qui remarque par ailleurs que la Bosnie-Herzégovine n’a pas eu la même attitude.
M. Bozidar Djelic, Vice-président du gouvernement en charge de l’intégration européenne et ministre de la science et du développement technologique, remarque quant à lui que cette reconnaissance de l’indépendance du Kosovo, « une catastrophe », n’a pas donné lieu à des actes de xénophobie. La violence lors de manifestations n’a duré que quelques heures. Il va falloir maintenant trouver une solution de compromis, car la situation actuelle n’est pas satisfaisante.
Mme Natasa Vuckovic, Présidente du groupe d’amitié Serbie-France de l’Assemblée nationale, souligne que si la Serbie n’a pas accepté la déclaration d’indépendance du Kosovo, il importe qu’elle réagisse de manière retenue et constructive.
2. LA RECHERCHE D’UNE SOLUTION JURIDIQUE
La situation aurait pu déraper, mais la modération l’a emporté tant à Belgrade que sur le terrain.
M. Dragan Sutanovac, Ministre de la défense, a tenu à rappeler les craintes et les préoccupations de beaucoup d’observateurs et de diplomates, il y a moins d’un an, devant les conséquences éventuelles d’une déclaration unilatérale d’indépendance par le Kosovo.
Il y a en effet trois brigades de l’armée serbe sur le territoire du Kosovo, qui comprennent plusieurs milliers d’officiers, de sous-officiers et de soldats, accompagnés de leurs familles.
La retenue l’a emporté sur de possibles provocations, et l’armée serbe a accepté la primauté du politique et des hommes politiques.
La situation au Kosovo reste néanmoins une source majeure de préoccupation car, pour le ministre de la défense, les principales menaces pour la sécurité de la Serbie proviennent du Kosovo et de la Macédoine. L’existence d’un réseau criminel très organisé au Kosovo est l’un des principaux défis pour la sécurité de toute la région.
Remarquant que la déclaration unilatérale d’indépendance est contraire à la résolution 1244 du Conseil de Sécurité de l’ONU, la Serbie a décidé de saisir la Cour Internationale de Justice de cette situation.
Cela permet de traiter le problème différemment, comme le remarque M. Borislav Stefanovic, Directeur de cabinet du ministre des affaires étrangères. C’est important pour la stabilité du Kosovo et de toute la région. La Serbie voudrait pour sa part éviter toute violence au Kosovo, et fera tout par voie juridique et diplomatique pour défendre sa souveraineté.
Pour M. Bozidar Djelic, Vice-président du gouvernement en charge de l’intégration européenne et ministre de la science et du développement technologique, il faut maintenant attendre la décision de la Cour internationale de Justice. Il faudra un compromis, car la situation actuelle n’est pas viable, ce qui explique que de nombreux pays, dont l’Espagne, la Russie, l’Indonésie et le Brésil n’ont pas reconnu la déclaration unilatérale d’indépendance du Kosovo.
La Serbie est prête pour sa part à trouver de nouvelles solutions, si le Kosovo accepte de ne pas avoir de siège aux Nations Unies, et de n’avoir ni armée ni ambassades. De même, elle accepterait un chapitre particulier pour le Kosovo dans les négociations avec l’Union européenne. Elle admettrait de même que le Kosovo soit membre des institutions financières internationales et des institutions spécialisées.
« Tout vaut mieux que l’instabilité et la guerre», ce qui vaut également pour la Bosnie Herzégovine, dont la Serbie ne veut pas le dépècement. De même, la Serbie ne veut pas de « Grande Serbie », car c’est une mauvaise idée. « Ceux qui veulent toucher aux accords de Dayton prennent de grands risques. »
Ce compromis devra permettre de vivre ensemble, d’éviter l’humiliation de la Serbie et le développement des nationalismes de part et d’autre. Il faut substituer une logique européenne d’intégration, digne du XXIe siècle à la logique de balkanisation du XIXe siècle, et y arriver sans violence.
a) Les modalités de son déploiement
Ce déploiement a reçu l’aval du Conseil de Sécurité le 26 novembre 2008. Le Conseil de Sécurité ne s’est toutefois pas prononcé au fond sur l’intégralité du rapport qui lui avait été présenté par le Secrétaire général de l’ONU. Il se contente d’en approuver la teneur générale.
C’est dans ce rapport que sont précisées les missions d’EULEX, qui doit rester neutre à l’égard du statut du Kosovo. EULEX devra « prendre des responsabilités dans le maintien de l’ordre, de la justice et des douanes, sous l’autorité générale de l’ONU et dans le cadre d’une initiative unique des Nations Unies , conduite par le Représentant spécial, et conformément à la résolution 1244 » de 1999. Cette mission de l’Union européenne permettra de faire progresser le débat sur le six points définis en juin dernier : la police, les tribunaux, les douanes, le transport et les infrastructures, les frontières et le patrimoine serbe.
Lors du débat, le représentant de la France, M. Jean-Maurice Ripert, s’exprimant au nom de l’Union européenne, a salué « l’attitude constructive désormais adoptée par les autorités serbes » face la reconfiguration et au déploiement d’EULEX. Il a souligné que l’Union européenne déployait EULEX dans l’esprit d’un dépassement des visions héritées du passé et de l’élaboration d’un avenir commun des nations des Balkans dans le cadre de l’unification européenne. Dans cet esprit, EULEX opérera dans le cadre de la résolution 1244, sous l’autorité globale de l’ONU, et en pleine transparence.
Cette décision du Conseil de Sécurité a permis d’assouplir la position des Serbes du Kosovo, qui, dans un premier temps, avaient été réticents au déploiement d’EULEX dans les zones où ils résident.
Quelques jours après, le 9 décembre, EULEX, Mission européenne de police et de justice au Kosovo, s’est déployée au Kosovo, y compris dans le Nord, forte de 1400 agents internationaux (sur 1 900 d’ici le printemps) et de 500 agents locaux (sur les 1 100 prévus). Une centaine de ses membres séjourneront dans le Nord du Kosovo. Quelques policiers seront présents dans les postes-frontières avec la Serbie.
b) Les appréciations des responsables politiques serbes sur ce déploiement
Pour M. Oliver Dulic, Ministre de l’environnement et de l’aménagement du territoire, la Serbie a joué un rôle très constructif lors du déploiement et de la reconfiguration de la mission d’EULEX.
Pour M. Borislav Stefanovic, Directeur de cabinet du ministre des affaires étrangères, la reconfiguration de la mission d’EULEX a été accompagnée de déclarations qui gênent beaucoup la Serbie, « ce qui est notamment le cas des propos du ministre français des affaires étrangères selon lesquelles EULEX devait mettre en œuvre les lois du Kosovo indépendant ». Ce point devra être éclairci, car EULEX ne pourra pas agir sans une coopération efficace avec la Serbie. Il importe qu’EULEX opère de manière impartiale, et que le caractère neutre de sa mission soit confirmé par le Conseil de Sécurité, car il n’a pas été facile de convaincre l’opinion publique en Serbie qui, dans un premier temps considérait cette mission européenne comme une force d’occupation. La Serbie considère EULEX comme son partenaire, et cela doit être visible sur place, sur le terrain, où la neutralité est nécessaire pour réussir.
Pour M. Dragan Sutanovac, Ministre de la Défense, EULEX devra se soucier du développement des réseaux criminels au Kosovo.
EULEX va compléter l’action de la KFOR. La présence de cette force est le facteur le plus important de stabilité au Kosovo, car « si elle n’existait pas, on reviendrait immédiatement aux années 1990 ». C’est pourquoi il considère qu’elle est la bienvenue au Kosovo, « même s’il faut être courageux pour le dire en Serbie ».
Cette position politique est importante pour le ministre, car un tel discours, couplé avec le rôle de stabilisation que la Serbie peut jouer dans la région, aura des conséquences positives pour son pays qui pourra poser la question du maintien de l’accord de Koumanovo qui « est absurde ».
Selon cet accord, conclu à la veille de l’adoption 1244 du Conseil de Sécurité en 1999, les avions serbes sont interdits de vol sur certaines zones, et les militaires serbes ne peuvent pas être présents sur une partie du territoire serbe qui jouxte le Kosovo.
Or « pourquoi la partie de la Serbie en dehors du Kosovo serait-elle encore sous le contrôle de la KFOR ? Pourquoi les hélicoptères serbes devraient-ils avoir l’autorisation de la KFOR si nous sommes partenaires ? »
Pour Mme Natasa Vuckovic, Présidente du groupe d’amitié Serbie-France de l’Assemblée nationale, les négociations sur EULEX avec le Secrétaire Général de l’ONU et l’Union européenne ont montré la promptitude de la Serbie à coopérer au plus haut niveau.
Il en est de même pour la présence de troupes serbes dans la zone de sécurité de cinq kilomètres. L’armée serbe est maintenant autorisée à y pénétrer, ce qui permet de garantir la sécurité de cette zone et de s’opposer à l’action du grand groupe criminel qui s’y est créé. Mais cette présence dépend encore de décisions prises par le commandement de la KFOR.
La Serbie a aujourd’hui « besoin de gestes, d’actes de l’Union européenne » afin que ses citoyens comprennent ce que l’Union peut lui apporter.
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Comme avec beaucoup de pays, la coopération économique et commerciale n’a pas la dimension qu’elle devrait avoir, même si les investissements directs commencent à être significatifs, dans un contexte où il faut espérer que la crise financière ne portera pas atteinte aux projets importants auxquels pourraient répondre les entreprises françaises.
La France est le sixième fournisseur de la Serbie et son dixième client.
Les exportations françaises se sont élevées en 2008 à 314 millions d’euros (chiffre établi sur 12 mois glissants), ce qui ne représente que 0,08 % des exportations françaises.
Une analyse sectorielle révèle le faible niveau des exportations agro-alimentaires françaises (la Serbie étant largement autosuffisante), mais un rôle important joué par le secteur automobile (28 % de nos ventes), et une évolution positive des exportations de biens intermédiaires (33 %), de biens d’équipement (23 %), et des biens de consommation (9 %).
Les PME prennent peu part à ces échanges.
Les importations françaises en provenance de Serbie se répartissent quant à elles concentrées entre biens intermédiaires (58 %), agroalimentaire (16%), biens d’équipement (12%) et biens de consommation (10%). Elles résultent en partie de l’arrivée à maturité des investissements étrangers réalisés en Serbie.
Le solde des échanges est nettement excédentaire en faveur de la France, avec un taux de couverture proche de 200 %.
Plusieurs grandes entreprises françaises sont implantées en Serbie. Il s’agit notamment de Michelin, Lafarge, Air Liquide, Bongrain, Soufflet, mais aussi de Lohr, Cogifer, Streit, Tarkett, Le Belier dans le domaine de la production ; d’Intermarché, de Gide, d’Air France, de la Société Générale, du Crédit Agricole, de la BNP, de la Coface, pour le commerce et les services, de Vinci, Veolia, Alcatel, Schneider électrique, et BDEOM pour les grands travaux, auxquels s’ajoute une cinquantaine de bureaux de représentation ouverts notamment par Alstom, Areva, Renault, Legrand, Saint Gobain, Sanofi, Biomérieux, Danone et l’Oréal.
Il en résulte 400 millions d’euros d’investissements productifs, ce qui met la France au 7° rang des investisseurs étrangers en Serbie.
A titre d’exemple, Alcatel a déjà installé plus d’un million de lignes téléphoniques, tandis qu’Alstom a construit avec Siemens la centrale électrique de Nikola Testa.
Ces projets concernent essentiellement la construction de ponts, de routes et d’autoroutes, l’extension de centrales électriques, l’environnement et les transports.
L’éligibilité de la Serbie aux procédures FASEP (permettant le financement d’études) et RPE (Réserve Pays Emergents, permettant l’attribution de crédits d’aide, comportant au moins 35 % de dons à des projets non rentables financièrement) devraient faciliter le financement de ces projets. Il apparaît néanmoins que la Serbie y recourt peu, comme elle utilise peu les crédits privés garantis, par souci de ne pas accroître sa dette publique extérieure.
La Serbie a déterminé ses priorités. Elle les a par ailleurs hiérarchisées, afin de s’adapter à la crise financière actuelle.
Sont ainsi considérés comme prioritaires, dans le domaine routier et ferroviaire, d’ici fin 2015 :
- le corridor routier X (financé par le budget serbe et les organismes financiers internationaux),
- le corridor ferroviaire X (financé par le budget serbe, les organismes financiers internationaux et l’Union européenne),
- l’autoroute Belgrade - Adriatique du Sud (financée par le budget serbe et les organismes financiers internationaux),
- le réseau routier régional (construction et amélioration), avec pour seule source de financement, le budget serbe.
Ces projets, dont les étapes de financement et de réalisation ont déjà été prévues, année par année, sont inscrites dans le « plan national relatif à la réalisation d’infrastructures routières et ferroviaires dans la République de Serbie pour la période 2008-2012 ».
Les financements envisagés entre 2008 et 2012 atteignent 2,9 milliards d’euros, dont environ 1,4 milliard d’euros de prêts. La Serbie n’étant que modérément endettée (sa dette publique, de 8,6 milliards d’euros représente 25 % du PIB), ces prévisions sont tout à fait cohérentes avec le souci du gouvernement de ne pas accroître outre mesure le déficit public de État.
Au-delà du secteur routier et ferroviaire, la Serbie considère comme stratégiques le secteur du gaz, la construction de centrales électriques et d’usines hydrauliques, la mesure et le contrôle de la consommation d’énergie, ainsi que les télécommunications.
Elle entend poursuivre un programme important de privatisations dans le secteur bancaire, l’industrie du bâtiment, les transports et l’exploitation minière.
Du fait de la crise financière actuelle, certains projets pourraient être réalisés sur une période plus longue. Ils dépendent notamment des fonds internationaux disponibles.
Pour M. Bozidar Djelic, Vice-président du gouvernement en charge de l’intégration européenne et ministre de la science et du développement technologique, les échanges entre la France et la Serbie pourraient être beaucoup plus dynamiques. Elle aurait intérêt à financer des études de faisabilité, dans des domaines tels que les infrastructures, nationales ou locales, les télécommunications, l’agro-alimentaire. Il faudrait de même qu’elle augmente son aide bilatérale et qu’elle accroisse le nombre de ses bourses. Il va en effet y avoir une nouvelle loi sur les concessions et de nouveaux appels d’offres.
Il serait important que le Président de la République française vienne en Serbie prochainement avec une délégation d’entrepreneurs français, a rajouté le Ministre, et que les projets évoqués récemment à Evian se concrétisent.
Afin de débattre de ces projets et d’améliorer la présence des PME françaises en Serbie, le groupe d’amitié organisera, l’automne prochain, une table ronde à l’Assemblée nationale sur les perspectives des échanges économiques entre la France et la Serbie.
La coopération culturelle est vivante. Elle repose sur des échanges universitaires, des programmes scientifiques et l’activité des deux centres culturels français.
La France a accordé, pour l’année universitaire 2008/2009, 19 bourses de mastère (soit 7 de plus que l’année précédente), 5 bourses de doctorat en cotutelle (3 de plus), en privilégiant les filières économiques, scientifiques et techniques, et notamment les sciences de l’ingénieur et les sciences fondamentales.
Elle met en œuvre une politique de diplômes français délocalisés, à l’Université de Belgrade, en liaison avec Paris 1 (mastère de conservation du patrimoine) et Lyon 2 (3° cycle régional de politiques et management culturels).
Elle soutient les jeunes Serbes dans la recherche de crédits européens, dans le cadre des programmes Tempus, Taiex et Erasmus Mondus. Elle concourt à la création d’une école doctorale à Belgrade mettant en réseau les jeunes chercheurs, avec l’appui scientifique et méthodologique du CERI de l’Institut d’Etudes Politiques de Paris et du CEFRES de Prague.
Sa coopération institutionnelle permet d’apporter un appui à la réforme de la justice, ainsi qu’à la lutte contre le terrorisme et l’immigration clandestine. Elle soutient également plusieurs opérations multilatérales en faveur du Secrétariat général du Gouvernement, de l’Agence serbe du médicament, et des institutions en relation avec le processus d’intégration européenne.
Cette coopération, ancienne, est facilitée par la qualité des chercheurs serbes qui sont impliqués dans des programmes tant bilatéraux que multilatéraux.
Au plan bilatéral, le programme d’actions intégrées « Pavle Savic » présente l’avantage de porter sur plusieurs années et de reposer sur des co-financements. Ses 40 000 euros de dotation annuelle lui permettent de financer, chaque année, pour une durée de deux ans, une quinzaine de projets de recherche. Ces crédits facilitent la mobilité des chercheurs, le développement des échanges scientifiques et technologiques d’excellence entre les laboratoires français et serbes, ainsi que l’intégration des chercheurs serbes dans les réseaux européens de recherche. Son utilité est d’autant plus grande que les visas de ses participants sont obtenus plus facilement.
Ce programme est complété par un accord entre le ministère serbe de la recherche et le CNRS, révisable tous les deux ans. Une attention particulière devra y être accordée, afin d’éviter que d’éventuelles difficultés financières ne portent atteinte aux projets envisagés dans ce cadre.
Par ailleurs, la France soutient financièrement des universités d’été régionales consacrées à l’environnement, tandis que les Académies des sciences de nos deux pays se sont engagées dans un partenariat original visant à renouveler l’enseignement des sciences à l’école. Appelé « La main à la pâte », il résulte d’une initiative du Professeur Georges Charpak.
Au plan multilatéral, la Serbie est impliquée dans des programmes régionaux de recherche soutenus par la France.
Il en est ainsi du programme « ECONET » qui vise notamment à favoriser l’ouverture de l’espace européen de la recherche aux Balkans occidentaux (la Serbie participe dans ce cadre à une dizaine de projets concernant la physique, la chimie, l’agronomie et la génétique moléculaire).
C’est également le cas du programme SEE-ERA NET (South Eastern Europe-Europe Research Area), lancé dans le cadre du 6° programme de recherche et de développement technologique de l’Union européenne et qui permet d’échanger des informations sur les programmes de coopération, d’analyser les capacités de recherche des États des Balkans et de soutenir des projets.
La Serbie participe enfin à une plateforme de dialogue entre l’Union européenne et les pays des Balkans de l’Ouest.
Un intérêt particulier doit être accordé au suivi de ces partenariats multilatéraux, qui augmentent nos capacités de financement, et ce d’autant plus que de nouvelles opportunités peuvent se présenter : c’est ainsi que la Serbie manifeste le désir d’être éligible aux programmes de coopération scientifique mis en œuvre dans le cadre de l’Union pour la Méditerranée.
La délégation a particulièrement apprécié les informations qui lui ont été données lors de sa visite des deux centres culturels français de Belgrade et de Novi Sad.
Celles concernant celui de Belgrade permettent de se rendre compte de l’impact de la présence culturelle française dans la capitale : le Centre dispose de locaux de 600 mètres carrés, ainsi que d’une salle de conférence et d’un atelier pour enfants de 140 mètres carrés. Il est fréquenté par plus de 5000 adhérents, dont 12 % sont des enfants et des lycéens, 35 % des étudiants, 48 % des actifs et 5% des retraités. La très large majorité des personnes qui y viennent régulièrement sont serbes (plus de 80 %).
En 2008, le Centre a prêté plus de 36 000 documents. Sa médiathèque a été fréquentée par plus de 62 000 personnes.
Son fonds est relativement important. Il comporte près de 14 000 livres, plus de 1800 documents sonores, 132 CD-Rom, 968 DVD et 631 cassettes vidéo. Il reçoit de France 57 périodiques.
Le Centre organise par ailleurs de nombreuses activités :
- les mercredis de l’Europe (343 personnes),
- des rencontres entre étudiants et entreprises (837 participants),
- une présentation de livres (920 personnes),
- l’accueil de cyclistes français (137 personnes),
- la Nuit des Musées (7145 personnes),
- diverses conférences (560 participants),
- des rencontres bandes dessinées (218 personnes),
- des vernissages (2750 personnes).
Le Centre offre en outre divers services au public, aux professionnels des bibliothèques et aux professionnels d’autres domaines.
Il s’agit notamment :
- d’informations sur la France contemporaine,
- d’informations sur l’apprentissage du français et les études supérieures,
- d’ateliers pour enfants,
- de visites scolaires et guidées,
- de possibilités de consulter Internet et d’écouter sur place des CD,
- d’un programme satellite avec chaînes françaises,
- de visionnage de films sur demande,
- de tables de présentation thématiques et d’expositions,
- de consultation des catalogues d’éditeurs français,
- de prêts de divers supports aux médias.
Le Centre participe par ailleurs au salon du Livre de Belgrade et à la Foire des Centres culturels étrangers à la Faculté de Philologie.
Ses ateliers pour enfants sont particulièrement intéressants. Ils proposent, trois fois par semaine, pendant 1 h 15, des lectures de contes et d’histoires, du dessin, des travaux manuels, des jeux de mots, des chansons, des récitations, des comptines, une dramatisation de contes, ainsi que le visionnage de films, de dessins animés et de contes français.
En 2008, il a également été proposé aux enfants de se rendre au Théâtre dramatique de Belgrade, lors du mois de la francophonie, au Festival du théâtre lycéen, à des spectacles de marionnettes, à l’exposition « Afrique à l’école », et au conte musical « Pierre et le Loup ».
Ces activités sont cependant menacées par l’évolution des crédits à la disposition des centres culturels français, comme dans beaucoup d’autres pays. Cette situation est préoccupante. Il convient de veiller à conserver une masse critique suffisante pour que la présence culturelle française soit visible et ait du sens.
4. LES PERSPECTIVES OUVERTES PAR LA FRANCOPHONIE
La Serbie est devenue en septembre 2006 membre observateur de l’Organisation internationale de la francophonie. Il va en résulter de nombreux contacts où prendront du reste part des parlementaires.
Ils seront facilités par la création prochaine d’un lycée franco-serbe à Belgrade, qui doit accueillir 700 élèves, tandis que l’Ambassade de France a aidé à la mise en place d’un programme d’enseignement bilingue au sein de deux établissements d’enseignement primaire et secondaire de Belgrade.
La francophonie bénéficiera par ailleurs des programmes que diffuse, depuis 2006, Radio France International, en partenariat avec l’agence de presse serbe Beta. Ces programmes d’information continue ont une vocation principalement économique et européenne. Ils sont en français, la nuit, pendant douze heures et en serbe, le jour, pendant 12 heures également.
Les partenariats mis en œuvre concernent l’appui institutionnel, le développement social, la formation professionnelle, la gestion de l’environnement, la réhabilitation de lieux culturels, la promotion culturelle et la valorisation de la francophonie. Ils permettent aussi des actions concrètes en matière de tourisme culturel, de petite enfance, et de prise en charge gérontologique.
Ils résultent des initiatives prises par plusieurs collectivités locales françaises qui sont jumelées avec des collectivités locales serbes.
Il s’agit notamment :
- du territoire de Belfort et de Novi Sad,
- de Nevers et de Sremska Mitrovica,
- de Suresnes et de Kragujevac,
- du Creusot et de Bor/Madjampek,
- de Bricquebec et de Sremski Karlovci,
- de Boulogne Billancourt et de Pancevo,
- de Sainte-Foy-les-Lyon et de Kraljevo,
- d’Arles et de Mediana,
- de Clermont-Ferrand et de Nis/Pirot,
- de Laon et de Cukarica,
- d’Angoulême et de Belgrade,
- de Puteaux et de Zemun,
- de la Vendée et de Kladovo.
Certains d’entre eux datent des années soixante. D’autres sont plus récents, et ont fait suite au renouveau de la coopération franco-serbe, après les années troublées de la décennie 1990-2000. Ils se sont alors inscrits dans le cadre d’un programme coordonné par « Cités Unies France » et la Conférence permanente des villes et municipalités de Serbie (structure qui apporte une aide technique à ses 167 membres et est en relation avec le Congrès des pouvoirs locaux du Conseil de l’Europe).
Ce programme, pluriannuel, a été particulièrement intéressant, de par son financement (200 000 euros sur cinq ans) et ses objectifs, consistant à inciter les collectivités françaises à s’engager dans des coopérations durables et ciblées, ainsi qu’à donner à la Conférence permanente les outils nécessaires pour conforter son rôle d’expertise, de conseil et de formation. Il a depuis été poursuivi grâce aux contrats de plan État-régions.
Il est envisagé en 2009 et 2010 de poursuivre le programme d’appui institutionnel mis en place par le Conseil de l’Europe afin de former les élus et les cadres territoriaux serbes et de les sensibiliser à l’évaluation des politiques publiques, à la qualité du service aux usagers et à la gestion des ressources humaines. Par ailleurs, seront prochainement organisées les deuxièmes assises régionales de la coopération décentralisée dans les Balkans, ainsi qu’une Université d’été sur la gestion des déchets.
Les contacts de la délégation avec les organes représentatifs des collectivités locales ont montré un profond désir de mettre en œuvre de nouvelles coopérations que le groupe d’amitié va s’efforcer de développer, en intervenant notamment auprès de l’association des maires de France et des fédérations de villes jumelées.
Selon M. Laszlo Varga, Président de la Commission de l’intégration européenne de l’Assemblée nationale serbe, la Serbie s’est fixé trois priorités pour 2009 : le déblocage de l’accord commercial intérimaire et de l'ASA (ratifié par l’Assemblée début septembre 2008) ; l’obtention du statut de candidat ; l’inclusion sur la liste blanche de Schengen.
Sa volonté d’adhérer à l’Europe est forte, profonde et sincère. Son gouvernement est enthousiaste. Il faudrait que l’Union européenne lui renvoie des signaux positifs, afin d’éviter l’incompréhension et le mécontentement d’une partie des citoyens qui pourraient penser que la Serbie n’a pas une bonne image en Europe. Ce qui a été fait jusqu’à présent n’a pas été assez visible.
M. Bozidar Djelic, Vice-président du gouvernement en charge de l’intégration européenne et ministre de la science et du développement technologique, a quant à lui présenté les démarches permettant d’atteindre ces objectifs :
– 600 fonctionnaires ont été amenés à réfléchir à l’acquis communautaire. Un document de 800 pages a été élaboré puis adopté en octobre 2008 afin que la Serbie soit en phase avec l’acquis communautaire fin 2012 ;
– 51 lois devraient être votées prochainement. Le gouvernement en a déjà préparé plusieurs, et le parlement en a déjà adopté 9. 18 sont en cours d’examen parlementaire, début décembre, et le reste devrait passer dans les trois à six prochains mois ;
– ce travail sera poursuivi courant 2009 avec 159 textes supplémentaires, ce qui suppose d’accélérer le rythme du travail parlementaire.
L’analyse de cet accord, signé en avril 2008, permet d’en comprendre l’importance.
Comme tous les accords de ce type conclus avec d’autres États de la région, « l’Accord de Stabilisation et d’association entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et la République de Serbie, d’autre part », définit des principes généraux, met en place un dialogue politique, prévoit une coopération régionale et établit progressivement une zone de libre échange. Il met en place une coopération dans de nombreux domaines.
Au plan politique, l’ASA est fondé sur le respect des principes de la démocratie, des droits de l’homme, du droit international (y compris une coopération totale avec le TPIY), de l’État de droit et de l’économie de marché. Il met l’accent sur l’importance de la paix et de la stabilité internationale et régionale, sur le développement de relations de bon voisinage, sur la lutte contre le terrorisme et contre la prolifération des armes de destruction massive.
Pour faciliter la mise en place d’une véritable coopération régionale, la Serbie s’engage à conclure des conventions dans les deux ans avec les pays ayant déjà signé un tel accord et avant six ans, avec la Turquie, afin d’établir des zones de libre échange. Ces accords permettront de compléter le dispositif déjà en place pour recréer un espace commun de stabilité et de prospérité dans la région des Balkans occidentaux.
Parallèlement, une zone de libre échange sera progressivement mise en place entre la Communauté européenne et la Serbie dans les six ans suivant son entrée en vigueur. La Serbie bénéficiant déjà de mesures commerciales autonomes, l’effort d’ouverture reposera essentiellement sur elle.
De nombreuses dispositions de l’accord ont trait à la libre circulation des travailleurs, à la liberté d’établissement, à la fourniture de services, aux paiements courants, à la circulation des capitaux.
L’ASA traite de même de la circulation des personnes, de la lutte contre le blanchiment des capitaux et les drogues illicites, ainsi que de la lutte contre le terrorisme et la criminalité.
L’Accord prévoit par ailleurs un régime commercial privilégié, un partenariat européen et une assistance financière substantielle de l’Union européenne (771,1 millions d’euros sur la période 2007-2010).
La Serbie s’engage enfin à rapprocher sa législation de l’acquis communautaire, en se concentrant d’abord sur le marché intérieur.
L’association sera mise en œuvre progressivement et sera entièrement réalisée à l’issue d’une période de transition d’une durée maximale de six ans. Dans l’attente de sa ratification, le Conseil pourra conclure un accord intérimaire pour mettre en œuvre rapidement ses dispositions commerciales.
Un Conseil de stabilisation et d’association sera chargé d’en superviser la mise en œuvre. Les parlementaires serbes et européens y seront associés dans le cadre d’une commission parlementaire.
2. LES DECLARATIONS DES RESPONSABLES SERBES
Pour la Serbie, la signature de l’ASA par l’Union européenne est une étape essentielle sur la voie de son adhésion. Cette étape facilitera en effet l’admission de la Serbie sur la liste blanche de Schengen et l’obtention du statut de candidat. Mais pour atteindre ces trois objectifs, la Serbie a besoin du soutien de la France, comme le souhaite M. Oliver Dulic, Ministre de l’environnement et de l’aménagement du territoire : « La Serbie n’ayant pas actuellement de partenaire fort en Europe, la France pourrait jouer ce rôle, au moment des décisions importantes ».
Dans un premier temps, il faudrait que l’Union européenne dégèle l’application de l’accord intérimaire, remarque Mme Natasa Vuckovic, Présidente du groupe d’amitié Serbie-France de l’Assemblée nationale. Cela permettra de faire un pas important vers l’Union européenne et d’éviter le mécontentement des citoyens qui ne comprennent pas le ralentissement du processus qu’on leur avait présenté. Ce serait surtout le pendant de la décision de la Serbie de l’appliquer unilatéralement à partir du 1er janvier 2009.
Ce choix européen de la Serbie est important. Comme le souligne M. Dragan Sutanovac, Ministre de la défense, il faut le replacer dans le contexte des relations de la Serbie avec l’ensemble de ses partenaires, et plus particulièrement avec la Russie. S’il estime qu’il n’y a pas pour la Serbie d’alternative au choix européen, il remarque néanmoins que les nationalistes serbes qui considèrent que la Russie en est une, risqueraient d’avoir beaucoup de poids dans l’électorat si l’Union européenne n’ouvrait pas sa porte à la Serbie.
M. Dragoljub Micunovic, Président de la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale craint de même que la situation n’empire en Serbie si le blocage de la candidature serbe à L’Union européenne n’était pas levé. Les citoyens auraient en effet l’impression de se trouver face à une situation bloquée. Or ils ont déjà perdu beaucoup de temps et ont le droit à une vie digne.
M. Serge Brammertz, Procureur général du TPIY, considère que la Serbie ne coopère pas encore pleinement avec le Tribunal pénal international pour l’ancienne Yougoslavie (TPIY).
Or c’est la condition posée par l’Union européenne – et plus particulièrement par les Pays Bas et la Belgique – pour s’engager dans la ratification de l’Accord de Stabilisation et d’Association.
La position du Procureur général tient à l’absence d’arrestation de Ratko Mladic, ancien chef militaire des Serbes de Bosnie, et de l’ancien chef des insurgés serbes de Croatie, Goran Hadzic, même s’il reconnaît que les agences de sécurité ont intensifié leurs efforts pour les localiser et les arrêter.
Rappelons que Ratko Mladic est accusé de génocide, et notamment du massacre de 8 000 civils bosniaques, musulmans, à Srebrenica. Goran Hadzic doit répondre à 14 accusations de crimes de guerre contre des civils croates entre 1991 et 1993.
Malgré ces réserves qui bloquent la Serbie sur la voie de sa candidature à l’Union européenne, M. Brammertz tient à féliciter ce pays pour les arrestations de Stojan Zupljanin (en juin 2008) et de Radovan Karadzic (en juillet 2008). Il souligne dans un rapport au Conseil de Sécurité des Nations Unies que ces arrestations, « menées par les autorités serbes, sont le fruit d’un gouvernement plus efficace et d’une meilleure coordination entre les autorités politiques et judiciaires, sans oublier les services de sécurité ».
Le Procureur général relève néanmoins que la Serbie n’a pas assez aidé le Tribunal dans le procès de Momcilo Perisic, ancien chef de l’armée yougoslave accusé de crimes contre l’humanité pendant la guerre de 1992-1995 en Bosnie Herzégovine. Il relève que la Serbie ne répond pas toujours de manière adéquate et complète, et s’inquiète de la protection des témoins. Il remarque néanmoins que le bureau du Procureur a maintenant un accès bien meilleur aux archives des agences de sécurité de l’État.
Malgré les efforts de la Serbie, les négociations de pré-adhésion sont actuellement bloquées du fait des Pays Bas qui conditionnent leur organisation à l’arrestation de Mladic.
Les dirigeants serbes ne comprennent pas cette position.
M. Tadic, Président de la République, a tenu sur cette question un discours à la fois ferme et clair.
Après avoir présenté à la délégation une vision globale des relations entre la Serbie et l’Europe, il a longuement insisté sur les difficultés actuelles qu’il fallait surmonter.
Pour le Président, tout dépendra de la manière dont l’Union européenne va concevoir ses relations avec les États-unis et la Russie, et comment elle va gérer les questions de sécurité. Quant à la Serbie, l’adhésion à l’Europe est pour elle un choix stratégique.
L’avenir de ces relations suppose que l’Europe soit prête à recevoir la Serbie, et que celle-ci soit prête à adhérer à l’Union européenne.
Or les évènements récents inclinent au pessimisme : « La Serbie est un pays puni ». On ne l’a pas récompensée pour ce qu’elle a fait pour s’intégrer à l’Europe, alors même qu’elle a fait preuve du plus haut degré de réactivité, et qu’elle a décidé d’appliquer l’ASA unilatéralement, malgré le coût de cette décision. Elle a de même coopéré avec le TPIY en arrêtant Karadjic, quel qu’en ait été le risque en termes de sécurité intérieure.
Vis-à-vis d’EULEX, elle s’est bien comportée, et la mission européenne a pu être reconfigurée. Mais l’Union européenne a augmenté son niveau d’exigence et de sévérité pour l’application de l’ASA. Elle demandait jusqu’à présent une coopération entière avec le TPIY. Elle exige maintenant l’arrestation de Mladic. Mais que va-t-on faire si Mladic n’est pas en Serbie, ou s’il est mort et enterré ? Dans ce cas, la Serbie n’entrera pas dans l’Union européenne et tout le pays sera alors bloqué. La Serbie est ainsi face à une situation impossible, malgré ses efforts reconnus pour rechercher Mladic.
La Serbie doit avoir le même traitement que les autres pays. Les critères de décision ne doivent pas être plus sévères.
L’enquête pour retrouver Mladic est menée très sérieusement. Jamais dans l’histoire de la Serbie, on n’a fait une enquête « aussi large, aussi importante ». Toutes les semaines, des actions très dangereuses sont engagées pour retrouver Mladic. « Je pense qu’il est en Serbie, mais je n’en ai pas la preuve. L’absurde est de devoir expliquer à nos amis européens que nous avons la volonté de l’arrêter. Or ma sécurité personnelle est menacée si Mladic est en liberté », a souligné le Président.
Aujourd’hui, la Serbie paye le prix pour le régime de Milosévic. Même à l’époque de Tito, les citoyens serbes avaient plus de possibilité pour voyager librement en Europe. Or le régime de Tito était une dictature, et la Serbie est maintenant une démocratie qui de surcroît s’est convertie à l’Europe.
Dans ce contexte, la Serbie compte sur le soutien de la France. Mais ce soutien s’est évaporé, a regretté le Président Tadic, alors que les relations entre la France et la Serbie sont d’une importance essentielle, du fait de notre amitié traditionnelle et de la nécessité de trouver de bonnes réponses aux grands défis auxquels nous sommes confrontés.
La Serbie ne sent parfois pas assez de compréhension de la France. Cela a notamment été le cas lors du déploiement d’EULEX. La déclaration du ministre français des affaires étrangères selon laquelle EULEX doit contrôler l’application des lois du Kosovo est « très dangereuse et inacceptable » pour la Serbie qui s’en tient aux six points de l’accord qui prévoyait que la mission européenne devait être neutre.
Ces propos traduisent un sentiment souvent exprimé par d’autres interlocuteurs de la délégation de l’Assemblée nationale.
M. Borislav Stefanovic, Directeur de cabinet du ministre des affaires étrangères, regrette ainsi que la coopération de la Serbie avec le TPIY soit aujourd’hui considérée comme un résultat, alors qu’il s’agit d’un processus.
La Serbie attend maintenant un meilleur avis du TPIY, comme le remarque Mme Natasa Vuckovic, Présidente du groupe d’amitié Serbie-France de l’Assemblée nationale.
La délégation a exprimé son soutien à la Serbie. Il lui semble irrationnel de bloquer des négociations alors que l’arrestation de Mladic ne relève pas de la seule responsabilité des autorités serbes. C’est pourquoi elle a l’intention d’entrer en relation avec le parlement néerlandais pour lui faire part de son étonnement et pour débattre des conséquences d’une telle position.
Il est en effet nécessaire d’envoyer un message clair à la Serbie, au moment où elle fait le choix de l’intégration européenne. Il serait paradoxal de clore les négociations avec la Croatie, et de les poursuivre avec d’autres États des Balkans sans offrir de perspectives à la Serbie. La stabilité de la région exige une progression parallèle des négociations. La coopération régionale, si nécessaire à la réussite du processus d’adhésion, n’aurait enfin aucun sens sans la participation de la Serbie.
C’est pour beaucoup des interlocuteurs de la délégation ce qu’il y a de plus important. C’est en effet le geste le plus concret pour la population.
Comme le souligne M. Borislav Stefanovic, Directeur de cabinet du ministre des affaires étrangères, cela rapprocherait considérablement les citoyens serbes de l’Union européenne. Circuler normalement leur donnerait le sentiment de vivre et d’être comme les autres Européens. Il faut en effet avoir conscience du sentiment d’isolement qu’ils peuvent avoir, et qui est l’un des héritages du système Milosevic. Il faut éviter les discours très faciles sur le thème « l’Europe nous hait ».
Les règles de l’espace Schengen doivent bien entendu être respectées. Mais des progrès pourraient être faits pour que la Serbie figure sur la liste blanche de Schengen.
Il convient d’aller au-delà des mesures qui sont prises par certains États, dont la France, pour faciliter la venue des Serbes dans les États membres de l’espace Schengen.
M. Bozidar Djelic, Vice-président du gouvernement en charge de l’intégration européenne et ministre de la science et du développement technologique, attend quant à lui beaucoup de la France, mais aussi de l’Allemagne, pour faire avancer ce dossier.
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A l’issue de cette mission, il est apparu clairement que la Serbie avait profondément changé depuis les dernières élections présidentielles et législatives. Son engagement européen est certain. Ses efforts pour rechercher activement Mladic, responsable du massacre de Srebrenica, sont réels.
L’arrestation de Mladic changera les relations entre la Serbie et l’Union européenne, actuellement affectées par le refus des Pays Bas de s’engager sur la voie de la pré-adhésion. Nul ne sait bien sûr quand cette arrestation surviendra. En tout état de cause, un signal fort doit être adressé à la Serbie pour lui confirmer ses perspectives européennes.
La préparation de l’adhésion sera, comme pour tous les pays qui ont été candidats par le passé, un processus long, complexe, nécessitant de nombreuses réformes internes. Mais le gouvernement serbe est prêt. Il faudra également que les Serbes, comme les pays voisins qui sont ou seront candidats, s’engagent de manière résolue sur la voie de la coopération régionale. Ce ne sera pas forcément facile, dans une région où la haine continue de subsister et où les guerres récentes ont laissé des traces encore marquées. Mais c’est indispensable pour que l’Union européenne, de son côté, accepte ce nouvel élargissement.
La question du Kosovo devra être réglée. Elle est provisoirement mise en sommeil, à la suite de la saisine de la Cour internationale de Justice. Mais ce sommeil, nécessairement fragile, pourrait se révéler factice en l’absence d’une réflexion plus approfondie de la communauté internationale.
Une réponse coordonnée des États membres de l’Union européenne à la crise financière actuelle pourrait être le levier de nouvelles relations entre tous les acteurs concernés dans les Balkans, tant sont grands les besoins d’équipements collectifs pour créer une dynamique du redressement économique. Beaucoup de projets existent, et ne sont pas réalisés actuellement faute de financements, mais aussi par manque de volonté politique et de préparation technique suffisante. C’est le cas pour la construction de routes, d’autoroutes, de lignes électriques régionales. C’est aussi le cas pour la réalisation d’équipements régionaux dans le domaine de la santé ou dans celui de la navigation fluviale sur le Danube.
La France, comme l’Union européenne, apparaissent comme des partenaires fiables qui permettront à la Serbie de se développer durablement. Mais le développement durable suppose la stabilité et la paix. Il faudra le répéter sans cesse et tout mettre en œuvre pour y arriver.
La construction européenne a permis de structurer la réconciliation franco-allemande. Souhaitons qu’elle soit demain le ciment de la réconciliation des peuples des Balkans occidentaux.
Une mission permet de faire passer des messages. Ce message de dialogue, de coopération, de recherche de la paix a été inlassablement répété pendant cinq jours. Puisse-t-il avoir été entendu ?
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ANNEXE 1 : Liste des personnalités rencontrées
M. Boris Tadic, Président de la République de Serbie,
M. Mirko Cvetkovic, Président du Gouvernement,
Mme Slavica Djukic-Dejanovic, Présidente de l’Assemblée nationale,
M. Bozidar Djelic, Vice-président du gouvernement en charge de l’intégration européenne et ministre de la science et du développement technologique,
M. Dragan Sutanovac, Ministre de la défense,
Mme Diana Dragutinovic, Ministre des finances,
M. Oliver Dulic, Ministre de l’environnement et de l’aménagement du territoire,
M. Borislav Stefanovic, Directeur de cabinet du ministre des affaires étrangères,
M. Dragoljub Micunovic, Président de la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale,
M. Laszlo Varga, Président de la commission de l’intégration européenne de l’Assemblée nationale,
Mme Natasa Vuckovic, Présidente du groupe d’amitié Serbie-France de l’Assemblée nationale,
M. Milos Bugarin, Président de la Chambre de commerce de Serbie,
M. Nenad Milenkovic, Président de la municipalité du Nouveau Belgrade, et Président de la Conférence permanente des villes et des municipalités,
M. Milos Bugarin, Président de la Chambre de Commerce de Serbie,
M. Jean-François Terral, Ambassadeur de France, et ses collaborateurs.
M. Bojan Pajtic, Président du Conseil exécutif de la province autonome de Voïvodine,
M. Sandor Egeresi, Président de l’Assemblée de la province autonome de Voïvodine,
Mme Maja Sedlarevic, Vice-Présidente de l’Assemblée de la province autonome de Voïvodine.
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