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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 21 OCTOBRE 1998

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE

DE

M.

FRANÇOIS D'AUBERT

1. Loi de finances pour 1999 (deuxième partie). - Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 7139).

ENSEIGNEMENT SCOLAIRE (suite) (p. 7139)

M.

Jean-Paul Bret, Mme Martine David,

M.

Philippe Duron.

M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Mme Ségolène Royal, ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire ; M. le ministre.

Réponses de M. le ministre et de Mme la ministre aux questions de : M. René Couanau, Mmes Françoise de Panafieu, Martine Aurillac, MM. Nicolas DupontA ignan, Bernard Birsinger, Ernest Moutoussamy, Mme Nicole Bricq, MM. Stéphane Alaize, Jean-Louis F ousseret, Bernard Perrut, Pierre Lequiller, André S chneider, Robert Poujade, Mmes Marie-Jo Z immermann, Paulette Guinchard-Kunstler, M. Eric B esson, Mmes Geneviève Perrin-Gaillard, Jacqueline Lazard, M. Julien Dray, Mmes Danièle Bousquet, Odette Trupin.

ÉDUCATION NATIONALE,

RECHERCHE ET

TECHNOLOGIE

I. ENSEIGNEMENT

SCOLAIRE

Etat B

Titres III et IV. - Adoption (p. 7167)

Etat C

Titres V et VI. - Adoption (p. 7167)

Après l'article 79 (p. 7167)

A mendement no 35 de la commission des finances : M. Jacques Guyard, rapporteur spécial de la commission des finances ; Mme la ministre, M. Michel Vergnier. Adoption.

Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.

2. Dépôt d'un rapport d'information (p. 7168).

3. Dépôt d'un projet de loi rejeté par le Sénat (p. 7168).

4. Ordre du jour des prochaines séances (p. 7168).


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COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. FRANÇOIS D'AUBERT,

vice-président

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures.)

1 LOI DE FINANCES POUR 1999 (DEUXIÈME PARTIE) Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 1999 (nos 1078, 1111).

ENSEIGNEMENT SCOLAIRE (suite)

M. le président.

Nous poursuivons l'examen des crédits du ministère de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie concernant l'enseignement scolaire.

La parole est à M. Jean-Paul Bret.

M. Jean-Paul Bret.

Madame la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire, monsieur le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie, j'évoquerai deux questions : la santé scolaire et les exclus du système scolaire.

Le système de santé scolaire connaît une situation extrêmement difficile, et ce sont les mots que vous-même avez utilisés, madame la ministre, lors de votre audition, en février dernier, par la commission d'enquête parlementaire sur l'état des droits de l'enfant en France. Vos propos ont d'ailleurs été repris par les rapporteurs.

C'est la raison pour laquelle vous avez, dès l'an dernier, engagé un important effort budgétaire, qui se poursuivra en 1999 avec la création de trente emplois de médecin, 185 emplois d'infirmière et 185 emplois d'assistante sociale.

Cet effort est-il pour autant à la hauteur des besoins ? Il n'est pas exagéré de dire que la médecine scolaire reste un secteur assez largement sinistré.

Le besoin exprimé par les enfants eux-mêmes, à travers la proposition de loi adoptée en 1997 par le Parlement des enfants - une infirmière au moins par école -, traduit une attente très forte à l'égard du système scolaire en matière de santé ; c'est cette attente qu'il convient de mieux satisfaire. Au-delà du problème des moyens, qui reste essentiel, c'est le fonctionnement même de la médecine scolaire qui fait question.

Le cloisonnement institutionnel entre la protection maternelle et infantile, qui concerne tous les enfants jusqu'à six ans, et le service de protection de la santé, qui concerne les enfants plus âgés, paraît largement obsolète, en tout cas peu efficace. Il reproduit en effet un système de tranches d'âge qui méconnaît la dynamique dont relève la santé. Comme l'avait fait remarquer le Haut Comité de la santé publique dans un rapport datant de 1992, l'enfance et l'adolescence sont des périodes d'acquisition d'un capital santé, lequel se construit progressivement.

A cet égard, l'étanchéité entre les services départementaux de protection maternelle et infantile et les services de promotion de la santé en faveur des élèves est tout à fait regrettable et contrevient à la complémentarité de leurs missions.

L'absence de suivi des dossiers entre ces deux institutions réduit la portée des bilans effectués par la PMI à quatre ans et par les services de santé scolaire à six ans, alors qu'ils participent tous deux d'une logique de détection et de suivi des troubles éventuels. Ce manque de coordination apparaît d'autant moins justifié que l'organisation relationnelle des moyens tient à la volonté des services eux-mêmes. Faire travailler ces services ensemble est donc une véritable nécessité.

Ensuite, il convient de se pencher sur le statut de la médecine scolaire, dont beaucoup soulignent la faiblesse, mais aussi l'inadaptation. La possibilité de donner un pouvoir de prescription aux médecins scolaires pourrait être instaurée, et une politique incitative pourrait contribuer à créer des passerelles entre la médecine scolaire et la médecine de ville. L'instauration de la prescription contribuerait à rehausser l'image souvent dégradée de la médecine scolaire.

La commission d'enquête parlementaire sur l'état des droits de l'enfant en France, dont j'étais le rapporteur, a fait des propositions en ce sens ; je souhaiterais qu'elles puissent être examinées.

M. Jean-Pierre Baeumler.

C'était un excellent rapport !

M. Jean-Paul Bret.

Le deuxième sujet que je souhaite aborder est celui des exclus du système scolaire. Le terme peut recouvrir des réalités différentes. Il s'agit des enfants qui ne sont pas scolarisés dans des établissements publics ou dans des établissements privés sous contrat ; ce problème est encore mal connu et mal évalué, même si cette question a fait à la fin du printemps dernier, je crois, l'objet de deux propositions de loi sénatoriales et d'un rapport devant le Sénat.

M. le président.

Il va falloir conclure.

M. Jean-Paul Bret.

Je termine, monsieur le président.

Ce problème pose la question des modalités de contrôle de l'obligation d'instruction. Faut-il rappeler qu'en France l'instruction est obligatoire, mais que l'enseignement est libre et l'école facultative ?


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L'actualité récente a mis en lumière le problème des enfants éduqués dans les sectes, mais le phénomène concerne également les enfants instruits dans le cadre familial ou les enfants livrés à eux-mêmes en raison de l'exclusion où de l'immigration clandestine.

L'ampleur du phénomène, certes marginale en valeur relative, n'est cependant pas négligeable en valeur absolue.

M. le président.

Je vous ai demandé de conclure.

M. Jean-Paul Bret.

Je termine vraiment, monsieur le président.

Dans l'état actuel du droit, seule l'obligation d'instruction est soumise à un contrôle, lui-même très limité. A chaque rentrée scolaire, les maires sont tenus de dresser la liste de tous les enfants résidant dans leur commune et soumis à l'obligation scolaire. Ce contrôle est a minima , voire inexistant.

Ne faudrait-il pas procéder à une évaluation plus complète de la situation des enfants non scolarisés, de façon à préciser l'ampleur du problème et les modalités de l'action ?

M. le président.

Je vais être obligé de vous interrompre.

M. Jean-Paul Bret.

C'est ma dernière phrase, monsieur le président.

Un dispositif législatif ne serait-il pas nécessaire pour renforcer le contrôle exercé sur les enfants non scolarisés ? Telles sont les questions sur lesquelles je souhaiterais obtenir des réponses et des éclaircissements du Gouvernement.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à Mme Martine David.

Mme Martine David.

Monsieur le ministre, face à la crise qui secoue actuellement le monde des lycées et collèges, je crois que le Gouvernement a adopté une attitude constructive, faite d'écoute, de dialogue et de décisions.

Il le fallait car le malaise est bien réel et les années passées auront notamment été marquées, dans de trop nombreux collèges et lycées, par le problème récurrent du remplacement des professeurs absents. Dans ce domaine, les dysfonctionnements de notre système éducatif sont indéniables et particulièrement préoccupants.

C'est un élément de perturbation pour tous : pour les élèves, pour les associations de parents, pour les équipes pédagogiques et pour les responsables d'établissement.

Je connais bien ces problèmes qui, dans ma circonscription de l'Est lyonnais, déjà marquée par des difficultés économiques et sociales considérables, ont des répercussions plus fâcheuses encore.

En effet, chacun s'accorde à reconnaître le rôle primordial de la scolarité en matière d'insertion sociale et d'égalité des chances. C'est toute la noblesse du service public de l'éducation.

Or cette valeur ne prend que plus d'ampleur et de force dans les quartiers les plus défavorisés. Et il est impératif, je crois, que l'école publique assure à chaque élève les conditions d'un enseignement de qualité, et donc de vraies possibilités de réussite.

Je sais, monsieur le ministre, que vous partagez cet avis, comme je sais que vous ne pouvez être tenu pour responsable de ce triste état de fait. Il n'en demeure pas moins qu'il est difficile d'expliquer aux parents d'élèves qu'en dépit du nombre de jeunes en attente d'un poste, on ne peut prévoir un effectif de remplaçants suffisant, surtout dans des disciplines où les candidats sont nombreux.

Cette incompréhension et l'exaspération qui en découle sont d'ailleurs une des causes principales du mouvement lycéen de ces dernières semaines. Nous nous félicitons donc de votre décision en matière de déconcentration. Il semble en effet impératif de rapprocher les centres de décision des besoins réels.

Encore faudra-t-il mettre en place au niveau des rectorats les moyens nécessaires - dans le domaine de la formation, notamment - pour permettre aux personnels administratifs de mener à bien ces missions nouvelles.

Mais, aujourd'hui encore, il est pratiquement impossible d'obtenir une évaluation chiffrée du volant de titulaires académiques prévu pour chaque matière, et de savoir comment ces chiffres sont estimés et ajustés chaque année.

A ce titre, la mesure de déconcentration des mouvements d'enseignants se traduira sans nul doute par une amélioration sensible.

Cependant, nous le savons, le seul traitement des mouvements annuels ne peut suffire puisque le problème des remplacements suppose à la fois souplesse et rapidité. Il nécessite donc des mesures relatives au nombre de postes de remplacement par académie et par matière, mais aussi une gestion des effectifs au plus près des besoins, confiée aux académies elles-mêmes.

Les dispositions nouvelles que vous avez annoncées aujourd'hui constituent un effort conséquent et concret qui vient s'ajouter aux crédits budgétaires de votre ministère pour 1999. Cet effort doit néanmoins se poursuivre pour mieux répondre aux besoins recensés dans les établissements et exprimés par les lycéens.

Les élèves et leurs parents, mais aussi l'ensemble des acteurs locaux - élus, enseignants et responsables pédagogiques - attendent du Gouvernement des engagements dans ce domaine, et je vous remercie de nous faire part de vos intentions. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

Mme David n'a pas utilisé l'intégralité de son temps de parole, ce qui est tout à fait méritoire.

(Sourires.)

La parole est à M. Philippe Duron.

M. Philippe Duron.

Le budget de 1999 ne règle pas tous les problèmes réels que connaît l'éducation nationale et qu'a soulignés le mouvement lycéen. Mais il n'en reste pas moins que le budget que vous présentez, monsieur le ministre, est un bon budget. D'abord parce qu'il augmente de façon significative, ensuite parce qu'il fait le choix de l'emploi.

Dans cette brève intervention, je consacrerai quelques minutes à un aspect innovant de la politique de l'emploi en faveur des jeunes, je veux parler des aides-éducateurs.

En ce qui concerne la création de ces emplois-jeunes, vous avez anticipé, monsieur le ministre, sur le vote de la loi du 16 octobre 1997. Les événements vous ont donné raison car vous avez ainsi largement contribué au succès du dispositif, en le popularisant auprès des jeunes.

Ceux-ci ont massivement répondu à l'appel de l'éducation nationale, qui a reçu près de 180 000 candidatures.

Dès la fin de l'année 1997, 20 000 aides-éducateurs étaient recrutés par l'éducation nationale ; aujourd'hui, ils sont près de 40 000. La création de postes se poursuit puisque le budget de 1999 prévoit le recrutement de 20 000 aides-éducateurs supplémentaires, auxquels s'ajouteront les 10 000 annoncés cet après-midi pour les lycées, ce qui portera à terme leur nombre à environ 70 000. La consolidation des 40 000 aides-éducateurs déjà recrutés


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est pour l'essentiel autofinancée par votre ministère ; vous anticipez ainsi sur la pérennisation des emplois-jeunes dans votre administration.

Une majorité de postes a été implantée dans les écoles, et une attention particulière a été accordée aux projets des établissements situés en zone sensible et en zone rurale, qui ont été dotés en priorité. Dans les établissements du second degré, les fonctions exercées sont en majorité l'aide à la surveillance et l'aide au travail personnel.

Toutes les académies ont mis sur pied un dispositif de suivi et d'évaluation de ces aides-éducateurs, sous diverses formes.

Quel bilan pouvons-nous tirer de ce dispositif un an après ? Sur le terrain, on a mesuré les effets positifs de l'introduction des aides-éducateurs sur le fonctionnement de l'école.

Tout d'abord, du fait de leur âge, les aides-éducateurs représentent une sorte de passerelle entre les adultes enseignants et les enfants élèves. Ils jouent un rôle de médiateurs. Leur présence a contribué à améliorer le climat régnant dans certains collèges de quartiers défavorisés.

Les aides-éducateurs introduisent ensuite une grande souplesse dans le fonctionnement de l'école. Des progrès notables sont fait vers l'individualisation de la pédagogie et du suivi des élèves. Des dédoublements de classe deviennent possibles, entraînant une démultiplication de l'action enseignante. On se dirige vers une culture de la co-intervention, dans la mesure où les aides-éducateurs sont présent dans les classes et prennent en charge des sous-groupes d'élèves. C'est donc une véritable bouffée d'air qui est apportée au fonctionnement de l'école, ce que reconnaissent les enseignants et les intéressés euxmêmes.

L es aides-éducateurs sont considérés aujourd'hui comme des acteurs de terrain indispensables. L'éducation nationale a donc su relever massivement, rapidement et efficacement le défi de la mise en place de ces emploisjeunes. La poursuite de cette politique de soutien à l'emploi des jeunes constitue une des priorités de votre ministère.

Pour l'avenir, une évacuation exhaustive met en évidence quelques insuffisances et appelle quelques correctifs.

En matière de formation, tout d'abord, beaucoup de candidats à un emploi-jeune se sont dirigés très vite vers l'éducation nationale car celle-ci a été la première à les recruter en grand nombre. Or le souhait de beaucoup d'aides-éducateurs de suivre des formations susceptibles de déboucher plus tard sur des emplois plus stables, reste à l'heure actuelle sans réponse suffisante.

Afin de ne pas laisser se développer un sentiment de frustration, il serait peut-être souhaitable de mettre en place des dispositifs de passerelle permettant aux aideséducateurs de passer, tout en conservant leurs CDD, de l'éducation nationale à d'autres secteurs ou organismes, comme les collectivités territoriales ou les associations.

M. René Couanau.

Ben voyons !

M. Philippe Duron.

Les moyens financiers débloqués par l'éducation nationale afin de permettre aux aideséducateurs de suivre de telles formations restent peut-être encore insuffisants.

Mais ces 40 000, et bientôt 70 000 salariés n'ont pas encore de représentation en termes d'élus du personnel.

C'est un vide qu'il faut combler, ne serait-ce qu'au regard du droit.

En ce qui concerne la clarification des tâches, des difficultés ont pu apparaître quant à la règle de nonsubstitution des emplois existants, en particulier dans les collèges, où la fonction des aides-éducateurs ne se distingue pas toujours clairement de celle exercée par les surveillants. Le risque est que les emplois d'aide-éducateur évoluent dans certains cas vers des emplois subalternes, c'est-à-dire des postes de surveillant améliorés. Une telle évolution serait contraire à l'esprit de la loi du 16 octobre 1997 et à son concept majeur, celui des « nouveaux emplois, nouveaux services ».

Afin d'éviter un tel inconvénient, les tâches des aideséducateurs mériteraient d'être définies et évaluées aprè s la première année. Elles pourraient l'être avantageusement, en comparant ce qui s'est passé à l'extérieur de l'éducation nationale avec les pilotes du dispositif emploisjeunes.

Pour conclure, les aides-éducateurs constituent une innovation majeure pour l'éducation nationale. Ils introduisent de la souplesse et favorisent l'innovation pédagogique dans les écoles et les collèges. Ils sont pour beaucoup dans la réussite du programme emplois-jeunes voulu par le Gouvernement.

Pour cette raison, et pour bien d'autres de ces aspects positifs comme mes collègues du groupe socialiste, je voterai votre budget.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, bien que ce ne soit pas à l'ordre du jour, je tiens avant tout à vous exprimer ma satisfaction, en tant que ministre chargé de l'espace, pour le succès d'Ariane 5, qui est une étape supplémentaire dans l'indépendance spatiale française.

(Applaudissements sur tous les bancs.)

Je partagerai mon temps de parole avec Ségolène Royal, qui a beaucoup de choses importantes à vous dire.

Ce budget augmente de 4,1 %, contre 3,15 % l'an passé, et 2,3 % les années précédentes. Il connaît donc une progression importante. Certains orateurs ont dit que cela tenait à l'augmentation des rémunérations des fonctionnaires. Je leur rétorquerai que cette augmentation va dans la poche des enseignants et qu'elle a, par conséquent, bien sa place dans ce budget. Je ne comprends donc pas ce raisonnement. D'ailleurs, la plupart de ceux qui ont eu d es suppressions d'heures supplémentaires annuelles - HSA - ne les verront pas sur leur bulletin de salaire, car elles seront totalement compensées par l'augmentation des points de fonctionnaires. Je le dis en passant. Leurs revenus ne diminueront pas.

Je ne suis pas un grand champion du quantitatif. Je fais partie de ceux qui pensent que l'éducation nationale est une grande priorité. Elle l'est depuis de nombreuses années, mais ce n'est pas le tonneau des Danaïdes ! La France dépense aujourd'hui près de 500 milliards pour l'éducation nationale, car, aux dépenses de l'Etat, s'ajoutent désormais celles des collectivités territoriales. Le calcul qu'a fait M. Guy Hermier, en fonction du PIB, est d'ailleurs totalement inexact puisqu'il a complètement omis d'ajouter la part prise par les collectivités territo-


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riales. L'augmentation de la part de l'éducation dans le budget français n'a cessé de s'amplifier. Notre budget de l'éducation est l'un des plus importants du monde.

Cela dit, je veux bien batailler au plan quantitatif également ; je suis prêt à la confrontation sur tous les terrains choisis par l'opposition ! Nous créons 3 916 emplois b udgétaires, 4 000 postes non budgétaires, 25 000 emplois-jeunes. Par rapport à ce que faisait le précédent gouvernement de droite, qui supprimait des emplois,...

M. Jean-Pierre Baeumler.

Exactement !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

... c'est un changement radical, quelles que soient les arithmétiques utilisées. Il y avait moins et il y a plus ! On ne transforme pas le moins en plus, si ce n'est en mettant de l'argent. Or c'est ce que fait ce gouvernement de gauche. Les enseignants se plaignent qu'on ne crée pas assez de postes. Mais on en crée considérablement plus qu'au moment où on les supprimait et, à l'époque, ils ne protestaient pas. Etait-ce parce qu'ils étaient particulièrement bien traités par le ministre de l'éducation nationale ?

M. Bernard Birsinger.

Parce qu'ils sont maltraités aujourd'hui ?

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Non ! Ils sont bien traités aujourd'hui, mais de manière républicaine.

M. Bruno Bourg-Broc.

Ils vont être contents de vos déclarations !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

J'en viens à l'aspect qualitatif. Ségolène Royal complétera mon intervention sur ce point. Que faisons-nous ? L'école du XXIe siècle, avec l'adaptation des rythmes scolaires. Et nous n'avons pas besoin du ministère de la jeunesse et des sports pour adapter les rythmes scolaires. Nous le faisons nous-mêmes avec les emplois-jeunes, en intégrant l'ensemble des éducateurs, en introduisant l'aide aux nouvelles technologies, à l'étude, qui permettra à tous les enfants de France de s'initier aux nouvelles technologies, à la musique, aux arts et aux sports. Ce vaste mouvement, que nous comptons étendre à 2 000 écoles, est déjà dépassé puisque nous avons plus de 10 000 candidatures et que la seule ville de Paris veut l'appliquer à plusieurs centaines d'écoles dès la rentrée prochaine. Ce mouvement est donc en place. Cela étant, je souligne que l'ensemble des syndicats d'enseignants du premier degré sont associés à cette aventure, ce qui montre bien que j'ai écouté les conseils que m'a donnés M. Hermier l'année dernière...

M. Bruno Bourg-Broc.

Il ne vous en est pas reconnaissant !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

... et que j'ai poursuivi le dialogue social.

Ensuite, la réforme des lycées. J'en ai parlé cet aprèsmidi à l'Assemblée nationale. Elle se met en place suivant un processus de consultation des enseignants, des élèves.

Une discussion a eu lieu dans les deux assemblées sur les principes et le calendrier. Cette réforme a recueilli un très large assentiment. Elle est en ce moment en train d'être élaborée techniquement et sera annoncée dès que possible. Nous avons décidé de hâter un peu le pas à la suite du mouvement lycéen, qui exprimait une certaine impatience. Je ne reviens donc pas sur ce problème.

Quant à la réforme des collèges, elle se fera. C'est Mme Royal qui la pilotera. C'est donc elle qui vous en dira quelques mots.

Les nouvelles technologies se mettent en place et

M. Bourg-Broc trouve qu'on ne les finance pas assez.

Je lui répondrai qu'en 1997, dans le budget de M. Bayrou,...

M. Jean-Pierre Baeumler.

Qu'il a voté !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

... qu'il a en effet voté et soutenu,...

Mme Martine David.

Toute la droite l'a voté !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

... on dépensait 38 millions de francs pour les nouvelles technologies. En 1998, nous avons augmenté ces dépenses de 184 %, puisqu'elles sont passées à 108 millions de francs. Pour 1999, elles seront de 215 millions de francs, plus 500 millions de prêts à taux zéro pour les collectivités territoriales. D'ailleurs, le résultat ne s'est pas fait attendre ; je vous renvoie aux articles de presse dans ce domaine.

Il est vrai qu'il reste un problème extrêmement important à résoudre. La formation des enseignants se met en place. Pour les nouveaux enseignants, elle est intégrée dans les programmes d'IUFM ; pour les anciens enseignants, il y a des stages de recyclage. Il nous reste à mettre en place un dispositif de maintenance et de réparation des appareils ; sinon, on risque de se retrouver devant une situation difficile. Nous nous y attaquons.

S'agissant des absences, je voudrais faire une mise au point devant l'Assemblée nationale. Certes, l'objectif, c'est le « zéro défaut », mais je n'ai jamais dit que j'allais l'atteindre tout de suite. Je suis un scientifique et je suis conscient des équilibres de force. Je ne suis pas capable de faire cela. Cela dit, je vais vous donner un résultat. Le seul fait d'avoir édicté la règle selon laquelle un professeur ne laisse pas une classe sans être remplacé a entraîné la diminution de moitié du taux d'absence. Vous parliez de mes discours et de mes actes : voilà un acte !

Mme Nicole Bricq.

Très bien !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

J'en viens, pour terminer, au problème concernant les enseignants. Un ancien ministre de l'éducation nationale, contredisant son propre Premier ministre, a déclaré : « La déconcentration, je l'avais faite, puisqu'une partie des enseignants était affectée par les recteurs. » Je voudrais mettre ici très officielle-

ment les points sur les « i ».

M. Bruno Bourg-Broc.

La déconcentration était commencée !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Avec une telle déconcentration, il y avait deux types d'enseignants : les nobles et les roturiers. Les nobles étaient les enseignants titulaires nommés dans le cadre du mouvement national - la majorité - et les roturiers s'appelaient les maîtres auxiliaires, taillables et corvéables à merci, recrutés par les recteurs en fonction des besoins et licenciés dans les mêmes conditions. Quand je suis arrivé à ce ministère, j'en ai repris 28 000.

Mme Nicole Bricq.

C'est vrai !

M me Geneviève Perrin-Gaillard et M. Jean-Pierre Baeumler.

Très bien ! Bravo !


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M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Désormais, cette maison est une maison républicaine. La totalité des emplois statutaires est pourvue par des titulaires. Les maîtres auxiliaires bénéficient de garanties de réemploi. Ils doivent se présenter à un concours pour être titularisés. Il n'y a pas de titularisation automatique et, en ce sens, il n'y a pas de précarité à l'éducation nationale ! Je suis fier d'avoir fait cette politique ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. Bruno Bourg-Broc.

Et les emplois-jeunes, monsieur le ministre !

M. le ministre de l'éducation nationale, de lar echerche et de la technologie.

Les emplois-jeunes concernent des jeunes qui sont momentanément dans le système. Cela n'a rien à voir avec les maîtres auxiliaires.

Nous avons, pendant des mois, discuté d'un décret qui est passé en Conseil d'Etat et, qui a été publié au Journal officiel . La déconcentration est maintenant faite ; elle est irréversible ; les autres programmes n'existent plus. Je ne vois pas, d'ailleurs, comment j'aurais pu improviser un décret en Conseil d'Etat, en fonction de réponses diverses et variées ! Le Conseil d'Etat, dans sa grande sagesse, et malgré tous les appuis dont je bénéficie au sein de cette maison, compte tenu d'amitiés diverses et variées, n'est pas prêt à délibérer sur un décret en quelques jours.

Mme Véronique Neiertz.

Vous devriez nous en dire plus sur vos appuis !

M. André Schneider.

Des noms !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Des noms ! Eh bien, le directeur de cabinet du Premier ministre,...

Mme Véronique Neiertz.

Encore !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

... le directeur de cabinet de ma collègue, ministre déléguée,...

Mme Véronique Neiertz.

C'est tout ?

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

... et tant d'autres ! Ce gouvernement utilise toutes les compétences les plus éminentes.

Je terminerai donc sur les enseignants. Je vous ai dit que j'allais m'occuper d'une chose qui, à l'exception du syndicat CFDT, n'a jamais beaucoup préoccupé personne, à savoir les conditions de travail des enseignants.

D'abord, grâce à la réforme, les enseignants auront automatiquement moins d'élèves par classe et moins de classes. Ensuite, leurs horaires seront modulés. Ils auront moins de cours magistraux et ils feront de l'aide aux élèves, ce qui profitera aux élèves des familles modestes, car aujourd'hui tous ceux qui obtiennent une mention au bac sont soit des fils d'enseignant, soit des gens qui prennent des leçons particulières. C'est une véritable industrie qui se fabrique. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Bruno Bourg-Broc.

C'est une caricature !

Mme Marie-Jo Zimmermann.

C'est grotesque !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Ce n'est pas grotesque, madame, ce sont les statistiques, je regrette ! (Protestationss ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Il existe maintenant en France une industrie des leçons particulières. Or, je ne suis pas pour le privilège d'une classe aux dépens d'une autre. (Exclamations sur les mêmes bancs.)

Mme Marie-Jo Zimmermann.

C'est grotesque pour ceux qui réussissent ! C'est honteux !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Madame, je me fonde sur des données, non sur des préjugés ! Mais je comprends, vous ne représentez pas les mêmes classes sociales que moi ! (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Mme Marie-Jo Zimmermann.

C'est scandaleux !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Nous nous préoccuperons des conditions d'enseignement, des services d'enseignement et de la manière dont on traite les débutants.

Mme Marie-Jo Zimmermann.

C'est ridicule !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Madame, je comprends que vous vouliez que les privilèges continuent, mais pas moi ! C'est la politique que vous défendez, pas la mienne ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme Marie-Jo Zimmermann.

Pas du tout !

M. Guy Hermier.

Ça marche toujours le populisme !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Je ne veux pas maintenir les privilèges !

Mme Marie-Jo Zimmermann.

Il n'y a pas de privilèges !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Si, il y en a ! L'encadrement à Paris n'est pas le même qu'en province ou en banlieue. Je comprends que vous vouliez maintenir ces privilèges, madame la députée, mais pas moi !

Mme Véronique Neiertz.

Bravo !

M. Nicolas Dupont-Aignan.

Les enseignants ont compris !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

L'insuccès de la grève démontre d'ailleurs que les enseignants ont compris : 8 % de grévistes chez les enseignants !

M. Nicolas Dupont-Aignan.

Vous y êtes très populaire !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Je vois que vous êtes tout à fait apte à manipuler les statistiques ! Les enseignants débutants sont un problème. Ils ne sont pas aidés, pas accueillis, pas logés, et ont peu de moyens de travail au lycée : la plupart n'ont pas de bureaux, pas de moyens informatique et, la plupart du temps, ils n'ont pas accès à Internet.

M. Bruno Bourg-Broc.

Vous connaissez mal la situation dans les lycées ! Les professeurs n'ont pas de bureau dans les lycées !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 21 OCTOBRE 1998

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Nous nous attaquerons à cet aspect qualitatif, ce que personne n'a fait.

M. Bruno Bourg-Broc.

Vous ne pouvez dire cela !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Comme pour le quantitatif, excusez-moi de vous le dire, nous avons marqué dixhuit à zéro par rapport à vous, pour la dimension qualitative il ne sera pas difficile de faire mieux ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe communiste.)

M. Bruno Bourg-Broc.

Lamentable ! Les enseignants ne vont pas être rassurés !

M. André Schneider.

C'est honteux !

M. le président.

La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

Mme Ségolène Royal, ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

Je tiens tout d'abord à remercier Jacques Guyard et Yves Durand, pour leurs excellents rapports, les commissions pour leur travail ainsi que l'ensemble des intervenants dans cette discussion. Les rapports étaient d'ailleurs si complets que cela me permettra de me concentrer sur des sujets limités qui me tiennent particulièrement à coeur. Je vous rendrai compte, au passage, du travail accompli par rapport aux engagements pris l'année dernière devant vous, ainsi que de la façon dont cet actuel projet de loi de finances permettra de les consolider et de les amplifier. Je commencerai par la lutte contre les inégalités et les exclusions, en particulier la relance de l'éducation prioritaire, puis je vous parlerai de la prévention de la violence, enfin, si le temps qui m'est imparti me le permet, j'évoquerai l'ouverture de quelques nouveaux chantiers.

D'abord, la relance des zones d'éducation prioritaires.

A cet égard, je répondrai aux orateurs qui ont été nombreux à intervenir sur ce sujet dans la discusison. L'éducation nationale a su donner, aux cours des années passées, le meilleur d'elle-même dans les zones d'éducation prioritaires. Elle a su briser le dogme faussement rassurant de l'uniformité. Elle a su innover dans le travail en équipe, dans la pédagogie, dans les projets élaborés collectivement. Elle a su résister au scepticisme, parfois aux abandons, et tenir le cap de la réussite scolaire. Elle a su s'atteler au problème difficile du rôle de l'école dans les lieux où se concentrent les difficultés économiques, sociales et culturelles. Elle a su ouvrir et construire un partenariat actif et dynamique et, il faut le reconnaître, les ZEP ont produit, pour l'ensemble du système éducatif, des idées et des savoir-faire qui ont ensuite été génér alisés en dehors d'elles.

M. Didier Migaud, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie général et du Plan.

C'est vrai ! Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

Je pense au travail en équipe, aux projets d'établissement, à l'importance de la préscolarisation en maternelle, trois thèmes qui ont été d'abord soulignés et mis en oeuvre dans les zones d'éducation prioritaires.

Mais ces résultats ont été obtenus au prix d'efforts considérables. Le chemin est pavé de fatigue et de doutes et, plus que partout ailleurs, dans les zones d'éducation prioritaires, tout est toujours à recommencer. La paupérisation de certains quartiers, l'aggravation du chômage, la violence qui règne autour de certains établissements scolaires, rendent la tâche encore plus difficile qu'auparavant.

Il nous faut donc plus que jamais rassembler nos énergies, donner plus à ceux qui ont le moins, relever le défi de la réussite des enfants des milieux défavorisés en faisant preuve à leur égard d'ambition et d'exigence. Ce budget en est la traduction.

Dans une société menacée de l'intérieur par l'ignorance, l'intolérance, la violence, la pauvreté, la solitude, ce sont notamment les enseignants et tous ceux qui travaillent en ZEP qui gardent les nouvelles frontières de la société. Sans eux, tout peut basculer, car tout se joue là, à l'école. Les ZEP ont permis de progresser et de résister.

L'école et le collège sont, dans ces endroits, les gardiens de l'essentiel. Les ZEP sont aujourd'hui à un tournant, car il nous faut accélérer le mouvement et empêcher les ruptures. La souffrance scolaire existe pour certains élèves, comme pour certains enseignants. Les jeunes qui sortent sans qualification et sans diplôme du système scolaire sont au nombre de 90 000. L'illettrisme et la difficulté de maîtrise des langages sont encore trop fréquents. Là se trouve la racine des inégalités, de l'échec scolaire et de l'exclusion sociale. Un adulte qui ne lit pas ne se sent pas citoyen et un enfant qui est en échec dès l'école primaire le sait et le sent. Là se trouve sans doute le premier germe de la violence. Une société qui a soif de justice ne peut pas accepter que tout soit joué avant l'âge de dix ans. Cette bataille fondamentale mobilise plus que jamais nos forces. Avec ce budget nous voulons accomplir une nouvelle étape pour faire progresser l'égalité des chances.

En effet, les ZEP ont quinze années d'expérience. Je m'étais engagée l'année dernière devant vous à relancer cette politique et, à organiser des forums académiques. Ils ont eu lieu et ont rassemblé plus de 10 000 participants.

Des assises nationales se sont tenues à Rouen en présence du Premier ministre. Les ateliers, les formes d'échange, les interventions des organisations syndicales, des fédérations de parents d'élèves, des mouvements pédagogiques et des mouvements d'éducation populaire ont permis cette association de tous à vos efforts.

Ces assises ont montré que nous sommes au coude à coude, dans l'action, pour avancer. La logique de notre action est simple. Certes, elle n'est pas spectaculaire au départ, mais elle sera efficace, à condition de fournir un effort de longue haleine. Et cet effort, mesdames et messieurs les députés, s'inscrit dans la durée de la législature.

Elle consiste, d'une part, à diffuser les modèles qui font leur preuve, ainsi que l'inventivité pédagogique et, d'autre part, à mettre en place une stratégie nouvelle pour tenir compte des résultats de cette inventivité. Alors, les zones d'éducation prioritaires et les réseaux qui les entourent deviendront les lieux du recul des inégalités scolaires, mais préfigureront aussi, telle est mon ambition, les mutations de l'école, que nous devons accompagner à l'aube du siècle prochain.

Ce travail s'appuie sur deux outils : le contrat de réussite et le réseau d'éducation prioritaire, dont j'ai eu l'occasion de définir les contenus à Rouen. Premièrement, il s'agit de réaffirmer les exigences communes pour assurer un égal accès de tous au savoir. C'est pourquoi j'ai écarté, bien évidemment, l'idée qu'il pourrait y avoir des programmes pour les établissements situés en ZEP et d'autres programmes pour les autres établissements : non, les exigences doivent être les mêmes pour tous.

Deuxièmement, le contrat de réussite doit obligatoirement comporter des actions sur la maîtrise de la langue, pour ouvrir à tous les portes de l'autonomie linguistique.

Troisièmement, il faut introduire un enseignement à l'image pour favoriser une meilleure maîtrise de l'information.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 21 OCTOBRE 1998

Quatrièmement, il faut encourager la scolarisation précoce pour ouvrir les voies de la réussite scolaire. Priorité est donnée à la scolarisation des enfants à partir de deux ans.

Cinquièmement, il faut atténuer les ruptures éducatives, qui fragilisent les élèves. Derrière cette action, il y a tout le soin qui doit être apporté à la transition entre l'école primaire et le collège.

Sixièmement, il faut éduquer l'enfant à la citoyenneté pour l'initier aux règles de la vie sociale et civique. Tous les établissements en zone d'éducation prioritaire et en réseau d'éducation prioritaire doivent comporter des chartes des droits et des devoirs de citoyenneté dans l'école.

Septièmement, des actions doivent viser à resserrer les liens de l'école avec les parents.

Huitièmement, il faut ouvrir l'école sur le quartier, pour créer les conditions d'un partenariat plus efficace, et coordonner la politique scolaire avec les politiques de la ville.

Enfin, nous devons accompagner les enseignants et créer les conditions d'un pilotage plus performant.

Telles sont, mesdames et messieurs les députés, les mesures concrètes qui sont actuellement en cours de réalisation dans le cadre des contrats de réussite et de la définition de la nouvelle carte des réseaux d'éducation prioritaires. J'ai entrepris un tour de France des académies pour voir où en sont les contrats de réussite et mesurer la qualité des réseaux d'éducation prioritaires. Et j'observe que le message a été fort bien compris sur le terrain et qu'ici ou là émergent des contrats de réussite de grande qualité, dans lesquels, en particulier, les réseaux d'éducation prioritaires choisissent des pôles d'excellence. Car, et c'est aussi l'une de mes préoccupations, dans les zones d'éducation prioritaires un droit à l'excellence doit aussi exister. C'est pourquoi j'encourage les collèges par des crédits pédagogiques d'accompagnement à faire le choix d'une dominante, que ce soit dans le sport, dans la culture, dans les sciences ou encore dans les langues, ces divers choix n'étant pas exclusifs les uns des autres.

Bref, c'est à soutenir cette action ambitieuse, précise, qui se met en place actuellement sur le terrain, que vise le présent projet de loi de finances. Et j'ai bien entendu l'ensemble de vos interventions.

Après avoir fait une simulation, en liaison avec les recteurs pour examiner quels étaient les besoins puisque la carte des ZEP n'a pas été bougée depuis dix ans, j'ai mesuré la difficulté qu'il y avait à sortir, un peu brutalement, des zones d'éducation prioritaires des établissements qui, même si ce classement n'est pas totalement justifié, ne pourraient pas supporter une sortie de ZEP sans se sentir pénalisés par rapport aux résultats qu'ils ont obtenus. Par conséquent, j'ai la grande satisfaction d'annoncer à la représentation nationale qu'un amendement g ouvernemental vous proposera de compléter les 3 000 primes de zones d'éducation prioritaires actuellement prévues dans le présent projet de budget.

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Très bien ! Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

Ce complément, qui répond aux préoccupations notamment des deux rapporteurs, a été calibré en fonction des demandes et cela nous permettra d'intégrer en zone d'éducation prioritaire plus de 130 collèges supplémentaires.

Parallèlement, des sorties de ZEP seront malgré tout décidées parce qu'une carte des zones d'éducation prioritaires doit être mouvante. Mais ces sorties seront moins nombreuses compte tenu de l'effort gouvernemental pour tenir compte des réalités sociales et, surtout, elles pourront être étalées sur trois ans.

Enfin, les indemnités versées au personnel de direction exerçant en zone d'éducation prioritaire seront également revalorisées, car nous savons bien, les uns et les autres, à quel point le rôle des personnels de direction est majeur à la fois dans l'immédiat pour ce qui concerne la définition des projets et des contrats de réussite et pour ce qui concerne la remise en mouvement de l'éducation prioritaire.

M. Bruno Bourg-Broc.

Bravo ! Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

Je voudrais, toujours au titre de ce premier thème concernant la lutte contre les exclusions, évoquer la poursuite d'une politique sociale ambitieuse. Certains ont bien voulu le souligner : les bourses de collège sont augmentées de façon significative. Leur attribution est confiée aux établissements, ce qui permettra une meilleure prise en compte des besoins des familles. Un troisième taux de bourse pour les collèges est créé et s'élèv e à 1 800 francs. Au total, les moyens consacrés aux bourses de collège passeront progressivement de 800 millions de francs à 1,1 milliard, soit un accroissement de plus de 35 % sur deux ans. Les crédits consacrés aux écoles ouvertes augmentent aussi.

Enfin, le plan pour la santé scolaire - et je réponds là à un certain nombre d'intervenants - constitue un acte majeur de la politique de réduction des inégalités.

D'abord, 400 créations d'emplois de médecins, d'infirmières et d'assistantes sociales sont prévues dans le budget 1999, qui s'ajoutent aux 600 de 1998. Ainsi, en deux ans, nous faisons deux fois plus que ce qui a été fait lors des cinq années précédentes. On pourra toujours dire que c'est insuffisant. Mais l'objectif à atteindre, notamment dans les quartiers difficiles, est la présence d'une infirmière par collège et par réseau d'école, et il faudra bien que notre pays arrive à se fixer et à réaliser cet objectif.

Dans cette attente, il nous revient aussi de redéfinir le rôle des infirmières et des assistantes sociales par rapport à l'évolution du vécu, de la souffrance des élèves et des adolescents. Ce travail est actuellement engagé. En effet, une assemblée générale des infirmières se tiendra pendant l'année scolaire au cours de laquelle nous aurons l'occasion de dialoguer sur l'évolution de leur métier, sur la façon dont elles doivent se situer dans le paysage scolaire, sur l'articulation avec les familles et sur les nouvelles pathologies des élèves.

Je voudrais rappeler que dans le cadre du plan pour la santé scolaire, les comités d'éducation à la santé et à l a citoyenneté se mettent progressivement en place et prennent à bras-le-corps le problème de la prévention des conduites à risque.

Des actions de prévention se développent grâce à l'introduction dans les collèges d'un module de vingt heures consacrées à l'éducation à la santé.

Le fonds social pour les cantines est reconduit à hauteur de 250 millions de francs alors même que les bourses des collèges sont confiées aux établissements et permettront aussi de faire face aux problèmes de l'alimentation dans les restaurants scolaires.

Je ne peux aborder de façon exhaustive l'ensemble des questions relatives à la lutte contre les inégalités, mais, avant de fermer ce chapitre, j'évoquerai toutefois la question de la lutte contre l'illettrisme, qui constitue au cours de cette année l'une de nos priorités.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 21 OCTOBRE 1998

Cette année verra s'accentuer la lutte contre l'illettrisme, avec un effort de prévention qui débutera dès l'école maternelle. Car les évaluations nationales, dont j'ai rétabli la fréquence tous les ans en CE2 et en sixième, ont fait apparaître que les enfants en grande difficulté de lecture et d'expression orale auraient pu être dépistés dès l'école maternelle.

Il faut donc repérer ces élèves le plus tôt possible...

M. René Couanau.

Absolument ! Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

... pour leur offrir des actions individuelles de remédiation et atteindre l'objectif que nous nous sommes fixé : faire en sorte que tous les enfants arrivant en classe de sixième maîtrisent correctement les savoirs de base - écriture, lecture, expression orale, calcul, citoyenneté et soient en mesure de poursuivre leurs progrès de citoyen et d'élève.

Dans le même esprit, les expériences d'écoles ouvertes seront poursuivies et amplifiées : les progrès réalisés par les élèves en difficulté y sont en effet considérables. de tels lieux leur permettent de renouer avec le milieu scolaire des liens de confiance.

Cette année verra l'application d'une mesure à laquelle je tiens particulièrement et qui consiste à développer les internats en collège. Pour un certain nombre d'adolescents, c'est la solution à leur problème d'exclusion, de rupture avec le quartier, d'évolution par rapport à leur milieu familial. De nombreuses familles, notamment issues du quart-monde, demandent des places d'internat pour leurs enfants, et, malheureusement, nous ne pouvons pas répondre à cette demande sociale fondamentale.

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Tout à fait ! Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

Les jeunes filles sont particulièrement intéressées.

Or nous ne sommes pas en mesure de répondre à leur demande qui conditionne pourtant leur réussite scolaire.

M. Bruno Bourg-Broc.

Très bien ! Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

Deux types d'internat seront développés, d'une part, les internats dans les collèges ruraux - j'y reviendrai tout à l'heure en vous parlant du nouveau souffle à apporter à l'école rurale. Ces internats peuvent permettre d'engager des actions de solidarité entre les quartiers et les collèges ruraux en voie de désertification qui peuvent trouver là un nouveau potentiel d'élèves ! Il s'agit d'une nouvelle action de solidarité ville-campagne...

M. Augustin Bonrepaux, président de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

Très bien ! Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

D'autre part, les internats de proximité dont nous devons réinventer la forme : sans doute opter pour des foyers de collégiens ou de logements sociaux restructurés pour accueillir des petits internats de dimension familiale. Ce travail doit être conduit en liaison avec les collectivités locales, les départements, les communes et le ministère de la ville.

J'en viens maintenant à la prévention de la violence et à la généralisation de l'éducation civique. « La République, pour vivre, a besoin de citoyens libres et responsables. La mission de l'école est de former des hommes, c'est-à-dire, en France, disait Jean Jaurès, des citoyens, et d'abord par l'éducation civique ». Vous le voyez, ce n'est pas nouveau. Nous avons renforcé partout, à tous les niveaux du système scolaire, l'éducation à la citoyenneté.

La prévention contre la violence a d'abord comporté la mise en place d'un plan gouvernemental, avec un dispositif ambitieux sur dix sites d'intervention antiviolence : 900 000 élèves sont concernés, des moyens supplémentaires importants ont été attribués à ces différentes zones. Les résultats y sont encourageants puisqu'on constate que la présence d'adultes permet le reflux d'un certain nombre de comportements.

La poursuite du plan antiviolence s'accompagnera, en 1999, d'un renforcement du partenariat avec les autres services ministériels concernés. La priorité dans l'affectation des emplois sera maintenue en 1999. Ainsi, les 400 emplois médico-sociaux seront affectés en priorité dans les académies sensibles.

D'autres mesures seront appliquées. D'abord la coopération entre les différents services ministériels - intérieur, justice, ville, défense - a été renforcée, puisque, pour la première fois, une instruction aux communes a précisé les modalités de coopération en matière de prévention et de lutte contre la violence dans les établissements scolaires.

Les contrats locaux de sécurité mis en place ont été multipliés autour des établissements scolaires sensibles.

Enfin, l'action éducative a été renforcée, et c'est, je crois, essentiel. J'ai évoqué tout à l'heure la généralisati on de l'éducation civique : elle doit se faire avec l'introduction au brevet des collèges d'une épreuve d'éducation civique. Le réseau des classes relais sera porté à 250 classes au cours de l'année 1999. Enfin une aide très opérationnelle a été apportée aux établissements, avec la diffusion récente, à la demande des chefs d'établissement, d'un guide pratique précisant les lignes de conduite à adopter face la violence. Ce guide d'action est, depuis le 15 octobre, dans tous les établissements scolaires.

Des actions spécifiques de lutte contre la maltraitance ont été déployées dans les établissements scolaires : lutte contre les abus sexuels, avec la distribution massive, à l'école primaire, de passeports de prudence ; formation des enseignants, des inspecteurs de l'éducation nationale, pour que la parole de l'enfant puisse être recueillie, et pour que, plus jamais, elle ne soit étouffée quand elle exprime des souffrances intolérables.

Une action de lutte contre le racket a également été mise en place, ainsi que la loi contre le bizutage - vous le savez, puisque vous l'avez votée. Un numéro vert «

SOS Violence » a été mis en place au ministère, et nous recevons actuellement plus de 200 appels par jour. Ils font tous l'objet d'un suivi, sont répercutés dans les académies et donnent lieu à différentes actions qui permettent de régler les problèmes ainsi mis à jour.

Pour l'année qui commence, de nouveaux chantiers vont être ouverts. Je recevais récemment les chefs d'établissement et les personnels de direction, notamment ceux des collèges, et nous avons décidé d'ouvrir trois nouveaux chantiers : lutte contre la toxicomanie ; lutte contre les absences répétées de certains élèves - ce problème s'aggrave dans certains établissements scolaires ; enfin, formation des personnels et des élèves aux procédures de médiation, c'est-à-dire à la résolution pacifique des conflits.

Tels sont, mesdames, messieurs les députés, les deux thèmes importants que je voulais évoquer devant vous. Si M. le président m'y autorise, j'évoquerai rapidement l'ou-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 21 OCTOBRE 1998

verture de nouveaux chantiers, ce qui me permettra de répondre à un certain nombre de questions posées dans le cadre du débat général.

D'abord l'étude - comme l'a dit Claude Allègre à l'instant - d'un projet pour les collèges. Ce travail sur les collèges respecte ce qui a été fait dans le passé. Si nous avons décidé de ne pas ouvrir tout de suite un chantier, c'est parce que notre prédécesseur avait déjà engagé des réformes importantes et que les collèges ne seraient pas forcément en mesure de comprendre que, une nouvelle équipe ministérielle arrivant, on entame un nouveau chantier et qu'une nouvelle réforme des collèges soit mise en place.

Nous avons donc pris le temps d'établir un bilan de la réforme de M. Bayrou. Puis nous avons procédé à un audit sur un certain nombre de collèges. Enfin, nous avons rassemblé l'ensemble des rapports des inspections générales sur les collèges du pays.

Cet été, nous avons fait un tour de table de consultation syndicale. Une forte demande émergeait sur une redéfinition des objectifs du collège à l'approche de l'an 2000.

Quels sont aujourd'hui les objectifs du collège par rapport à l'acheminement des élèves vers la fin de la scolarité obligatoire ? Ce travail est en cours. Nous allons donc définir les objectifs fondamentaux à atteindre à la fin du collège et les différents champs d'action et de réforme qui en découlent, tant en ce qui concerne la direction des collèges, leur pilotage que la formation et l'accompagnement des équipes, que les questions relatives à la vie scolaire, à l'acquisition des savoirs fondamentaux et des langages, le problème de l'aménagement des rythmes, la question des relations avec les parents, tous les problèmes relatifs à l'évolution de l'adolescence et, bien évidemment, les questions des internats que je viens d'évoquer.

Bref, nous sommes en train de faire un inventaire de l'ensemble des problèmes auxquels les collèges sont actuellement confrontés, des points sur lesquels nous pouvons peser pour améliorer l'efficacité des collèges. A partir de ce travail, un débat aura lieu dans les différents collèges du pays, pour faire émerger un certain nombre de consensus et de priorités sur les réformes souhaitées.

Nous aurons donc l'occasion d'en reparler puisque le Parlement y sera associé.

Des questions ont également été posées sur l'aménagement des temps de l'enfant. Je voudrais évoquer devant vous la mise en place et l'articulation avec l'école du

XXIe siècle des contrats éducatifs locaux. Des instructions interministérielles sont arrivées sur le territoire, et des contrats éducatifs locaux sont en train d'émerger.

Permettez-moi de répondre à quelques interrogations.

Non, il ne s'agit pas de transférer vers les collectivités locales la charge financière de l'aménagement des temps scolaires et périscolaires, mais bien au contraire de lancer d'abord un appel à projet sur l'ensemble du territoire et pas sur quelques écoles privilégiées qui ont plus de moyens que d'autres ; ensuite de caler l'intervention des moyens de l'Etat sur les écoles et sur les groupes d'écoles qui en ont le plus besoin ; enfin, de rendre cohérentes les différentes interventions du ministère de l'éducation nationale avec les aides-éducateurs de la culture, de la jeunesse et des sports et de la ville, pour que les équipes du terrain et des interlocuteurs qui parlent le même langage se mettent d'accord sur un contrat éducatif local, arrêté dans l'intérêt des élèves.

Je voulais terminer en évoquant en quelques mots un thème qui, je le sais, tient beaucoup à coeur à certains d'entre vous : le nouveau souffle donné à l'école rurale - nous aurons l'occasion d'y revenir. A la suite du rapport Lebossé, que j'avais demandé en début d'année, un certain nombre de mesures sur la relance de l'école rurale sont en préparation autour de plusieurs idées fortes : l'amélioration de la préscolarisation en milieu rural, la lutte contre l'isolement des maîtres et des élèves, la mise en place de réseaux d'écoles et de collèges ruraux grâce aux nouvelles technologies de communication - ils en bénéficieront prioritairement -, l'amélioration de la liaison entre le collège et l'école, enfin la mise en place des contrats éducatifs ruraux, en partenariat avec les différents acteurs du monde rural.

Voilà donc quelques pistes. Sachez que, là aussi, les moyens budgétaires en cours de discussion permettront de donner un contenu très concret à cette nouvelle ambition de l'enseignement scolaire.

En conclusion, je voudrais rappeler que cette politique éducative s'accompagne de mesures statutaires importantes. Ce faisant, je répondrai aux inquiétudes de Guy Hermier et aux interrogations de Claude Goasguen, qui ont tout à l'heure affirmé qu'il n'y avait rien dans le budget pour les enseignants et les personnels.

Si, mesdames et messieurs les députés, il y a beaucoup de choses dans ce budget et Claude Allègre l'a bien montré. Dans le premier degré, la constitution du corps des professeurs des écoles est accélérée. A la suite de l'accord i ntervenu avec les organisations syndicales, plus de 24 000 instituteurs seront intégrés professeurs des écoles au 1er septembre 1999. Dans le second degré, plusieurs mesures permettent de revaloriser la carrière des enseignants, par exemple les transformations d'emploi de professeur de lycée professionnel ou de PEGC, ou encore l'augmentation de postes hors classe.

S'agissant de personnels non enseignants, plusieurs mesures permettent la mise en oeuvre des conclusions de la table ronde sur les ATOS, comme la revalorisation des indemnités de personnel.

Le total de ces mesures représente un coût de 520 millions de francs en 1999. Nul ne peut donc soutenir que les enseignants et les personnels non enseignants aient été oubliés dans ce budget.

Mesdames, messieurs les députés, dans son Premier mémoire sur l'Instruction publique, Condorcet écrivait :

« L'éducation publique est pour la puissance publique un devoir de justice. »

Telle est également l'ambition de ce gouvernement et celle de ce budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe communiste.)

M. Jean-Pierre Baeumler.

Excellent !

M. le président.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Juste un mot, monsieur le président, car j'ai oublié un point important dans mon intervention.

Il n'a pas échappé aux regards aigus et convergents de Guy Hermier et de Claude Goasguen que nous n'avions pas indiqué comment nous financerions ce que nous avons annoncé cet après-midi. Eh bien, je précise que le Gouvernement déposera, en deuxième lecture, un amendement qui tiendra compte de ces mesures et qui augmentera donc le budget des sommes correspondantes.

M. Guy Hermier.

Y en aura-t-il un sur les hors classe ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 21 OCTOBRE 1998

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Pour l'instant, il y aura celui que j'ai indiqué.

M. le président.

Monsieur Hermier, vous pourrez poser des questions tout à l'heure par l'intermédiaire des orateurs de votre groupe.

Nous en arrivons, en effet, aux questions.

Je rappelle que les questions seront appelées par périodes successives de quinze minutes par groupe, chaque orateur disposant de deux minutes pour poser sa question.

Nous commençons par le groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.

La parole est à M. René Couanau.

M. René Couanau.

Monsieur le ministre, je reviendrai brièvement sur les éléments de votre réponse face aux a ttentes des lycéens. Personnellement, je considère comme une erreur de proclamer que la réforme n'est pas une affaire de moyens financiers. Nous connaissons assez la lourdeur des structures de votre ministère et la pesanteur du système pour savoir que tout mouvement demande un minimum d'aisance par redéploiements ou par moyens nouveaux, voire les deux à la fois.

Donc, au risque de susciter à nouveau votre mauvaise humeur (Sourires),...

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Mais non ! (Sourires.)

M. René Couanau.

... j'oserai quelques questions.

Tout d'abord, pouvez-vous nous préciser les moyens en postes et en crédits qui vous seront nécessaires pour abaisser à la prochaine rentrée tous les effectifs des classes de lycées à 35 élèves, comme vous vous y êtes engagé ?

M. Jean-Pierre Baeumler.

Seulement dans les classes de terminale !

M. René Couanau.

Estimez-vous que l'objectif de 35 élèves par classe, en terminale ou dans les autres classes de lycée, est satisfaisant ? Par ailleurs, tous les élèves, les professeurs, les parents et les spécialistes que nous avons rencontrés ces temps derniers ont souligné que, dans certaines matières, notamment les langues vivantes, et pour l'apprentissage des nouvelles technologies, les petits groupes de travail s'imposaient. On parle donc de dédoublement de classes.

Dans cette perspective, quel est le nombre de postes ou d'heures nécessaires ? Quel est le montant des crédits dont vous auriez besoin ? Avez-vous prévu une programmation ? Vous avez ensuite parlé de déconcentration. Nous n'allons pas cracher dans la soupe. Nous l'avons assez réclamée pour estimer la démarche satisfaisante, si elle est bien accomplie. Les mouvements de professeurs vont donc être déconcentrés à la prochaine rentrée. Si j'ai bien compris, il y en aurait deux : un, national, pour les mutations interacadémiques, et l'autre, académique. Pouvez-vous nous indiquer le calendrier de ces mouvements et comment vont se faire les premières affectations ? A ce sujet, allez-vous déconcentrer des moyens administratifs du ministère sur les rectorats - notamment les moyens administratifs des personnels enseignants, des trois sousdirections, des douze bureaux ? Allez-vous accompagner c e mouvement par une réelle déconcentration des moyens ? Dernier point, enfin, à propos des emplois-jeunes.

Monsieur le ministre, les maires, que nous sommes parfois, se sont engagés dans la création d'emplois-jeunes, quoi qu'ils pensent de la loi, et ils sont très attentifs à ce qui se passe à l'éducation nationale. Que ferez-vous pour assurer, au bout de cinq ans, la pérennisation des emplois-jeunes ? Ne craignez-vous pas de renouveler une sorte de corps de maîtres auxiliaires, au rabais, dont il vous faudra, au dernier moment, assurer la formation et l'intégration dans l'éducation nationale ? Ne voyez là rien de polémique. Le problème est réel et il faudra bien que vous y répondiez.

M. le président.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Monsieur le député, je répondrai dans l'ordre inverse à vos questions et je commencerai donc par les emplois-jeunes.

L'intégration pédagogique des emplois-jeunes est, dans l'ensemble, très bonne dans le primaire et bonne au regard du plan de lutte contre la violence dans les collèges, mais elle pose quelques problèmes dans les zones non concernées par le plan violence.

Le deuxième aspect tout à fait satisfaisant des emploisjeunes réside dans le turn over.

En effet, un peu plus de 22 % d'entre eux quittent annuellement l'éducation nationale pour occuper d'autres emplois. Par conséquent, je pense que le renouvellement normal que nous attendons se produira.

La formation, en revanche, reste à améliorer. Et là, le problème le plus préoccupant est lié aux académies. Dans celle de Lyon, par exemple, la formation est très bonne.

Mais dans d'autres elle l'est moins. Un des paramètres essentiels est le degré d'implication des universités locales dans ce processus : plus elles s'impliquent, meilleure est la formation.

Vous vous en doutez, je suis très sensible aux emploisjeunes. C'est un des chantiers sur lesquels nous nous penchons actuellement, car l'éducation nationale doit être impeccable en ce domaine.

S'agissant de la pérennisation des emplois-jeunes, le Gouvernement est solidaire. Il ne vous aura pas échappé que le ministre de l'éducation nationale plaide régulièrement pour la pérennisation non pas des employés, mais des emplois-jeunes - et il ne parle pas forcément de manière irresponsable. Du reste, on ne comprendrait pas vraiment pourquoi, après le succès des emplois-jeunes dans le primaire, après la mise en place de l'école du

XXIe siècle, ces emplois, qui ne sont pas du tout des emplois au rabais, ne seraient pas pérennisés. Leur vertu principale est d'être occupés par des jeunes. On le voit bien dans les établissements, ils cassent les barrières psychologiques qui peuvent exister entre l'enseignant et l'élève, le premier notant le second. Ils raccourcissent les distances créées par l'âge.

Deuxième question, la déconcentration. Je vous remercie de me poser la question du calendrier. Vous allez voir, il est lumineux ! Je me suis d'ailleurs demandé pourquoi cela n'avait pas été fait il y a vingt ou trente ans.

Aujourd'hui, tout est traité par Paris. Pour aller de Villeurbanne à Vénissieux, par exemple, il faut passer par Paris. Et, si des enseignants de Paris qui n'ont pas de classe veulent prendre un poste en Seine-Saint-Denis, une opération spéciale est nécessaire pour les affecter dans ce département.

Mme Véronique Neiertz.

C'est très rare qu'on veuille aller en Seine-Saint-Denis !

M. Alain Calmat.

Et c'est dommage !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

C'est peut-être très rare.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 21 OCTOBRE 1998

Il n'empêche, madame la députée, qu'un certain nombre d'enseignants à Paris et sans classe actuellement sont tout prêts à aller en Seine-Saint-Denis !

Mme Véronique Neiertz.

Il faut me les envoyer ! (Sourires.

)

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Oui, mais justement, les choses ne se passent pas comme ça ! Figurez-vous que la carrière des enseignants est gérée à partir d'un dossier qui contient un certain nombre de matériaux administratifs et que les recteurs n'ont même pas la possibilité d'accéder à leurs désirs.

J'en reviens au calendrier. Quand je vous en aurai expliqué le principe, vous comprendrez mieux les difficultés actuelles et les problèmes récurrents de l'éducation nationale. Dans l'ancien système, les enseignants faisaient leurs demandes de mutation, quels que soient leurs voeux, entre le mois de décembre et le 6 janvier ; et le résultat des affectations était connu entre la mi-juillet et le 4 septembre. Pour certaines, il fallait même attendre le 4 septembre. Ainsi, le 4 septembre dernier, le recteur de l'académie de Créteil a reçu un paquet-cadeau de choix : il a tout simplement appris par la machine administrative que 200 enseignants ne prendraient pas leur poste ! A cela s'ajoute une complication supplémentaire : les concours de recrutement se déroulent alors que le mouvement n'est pas encore fait. Pour couronner le tout, une clause complètement idiote et appliquée uniquement pour le secondaire prévoit qu'après la réussite au concours le stage de responsabilité de deuxième année doit s'effectuer dans l'académie où l'on a préparé le concours.

Comme pour l'agrégation de philosophie, 80 % des reçus ont préparé le concours à Paris, 80 % des stages de responsabilité se concentrent à Paris.

Un député du groupe socialiste.

A la mairie ? (Rires.)

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

... et l'égalité républicaine n'existe pas ! Ça, c'est pour le système actuel.

Le nouveau système va s'appliquer, quant à lui, dès l'année prochaine. Il doit être clair, en effet, que je ne vous renvoie pas aux calendes grecques. Le décret en Conseil d'Etat est déjà paru, et le logiciel et les formulaires sont en place. Dès l'an prochain donc, les enseignants qui voudront changer d'académie - et je rappelle que les mutations interacadémiques ne représentent qu'un tiers des mouvements - feront leur demande en février.

Pour les mutations à l'intérieur d'une même académie, les demandes devront être effectuées en avril. En tout état de cause, l'ensemble du mouvement sera terminé le 20 juin, ce qui laissera deux mois et demi pour régler les problèmes éventuels.

Mais la déconcentration, ce n'est pas seulement le mouvement, c'est aussi la mise en place d'un service inédit à l'éducation nationale : une direction des ressources humaines. Les rectorats, les inspections d'académie, et les groupements d'établissements en seront également dotés.

Je pense même qu'on pourrait en prévoir une dans les gros lycées, afin, par exemple, de recevoir les enseignants et pour leur permettre de faire leur plan de carrière. Un numéro de téléphone spécial et un site Internet seront également mis en service pour les renseigner sur le nouveau système de mouvement. Je peux vous dire qu'à la place de soixante pages au BO, il y aura, dorénavant, un formulaire que tout le monde pourra comprendre et qui ressemblera à la déclaration d'impôt. (Rires et exclamations sur divers bancs.)

M. André Schneider.

Vous n'avez rien de mieux, monsieur le ministre ? (Sourires.)

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Certes, monsieur le député, la déclaration d'impôt peut présenter des côtés pas forcément sympathiques, voire désagréables - encore que ce soit un acte républicain - mais elle est extrêmement simple, en tout cas pour les salariés.

Le formulaire sera donc lui aussi très simple. Il suffira de répondre par oui ou par non aux questions posées : voulez-vous être muté ? Où ? Avec mouvements ? etc.

Nous serons ainsi débarrassés de tout le fatras actuel.

Vous me demandez, par ailleurs, si les moyens centraux seront déconcentrés. Oui, bien sûr ! On ne va pas les empiler, rue de Grenelle ou rue de Châteaudun ! Je l'ai dit, on déconcentrera au fur et à mesure le personnel correspondant. D'ores et déjà, d'ailleurs, certains personnels vont dans les rectorats pour mettre en place le système et discuter sur place.

Mais ce n'est pas le tout de déconcentrer la rue de Grenelle dans les rectorats, il faudra aussi déconcentrer les rectorats vers le terrain. Pas tout de suite, toutefois, car l'opération est difficile et qu'on ne peut pas tout faire en même temps. En tout cas, on n'y échappera pas. Songez que le rectorat de Lille, avec 1 100 personnes, compte sans doute plus de personnel que le ministère de l'environnement ! On peut donc légitimement imaginer que ce personnel devra aller plus près des acteurs du terrain et des décisions.

Autrement dit, le premier acte de la déconcentration est fait -et il n'a pas été improvisé, bien sûr. C'est un long chemin qui nous a pris toute l'année. Mais il faudra aller plus loin.

En fait, et comme je l'ai déjà dit, il faut revenir à l'esprit de la création de l'école républicaine. Je le répète inlassablement, quand Jules Ferry et Ferdinand Buisson ont fait l'école républicaine, à la fin du siècle dernier, le nombre d'instituteurs était égal au nombre de professeurs agrégés aujourd'hui. On leur suggéra, ici même, d'instituer un concours national d'instituteurs pour assurer l'égalité républicaine. Mais ils eurent l'extraordinaire prescience de prévoir une école normale d'instituteurs par département. Et c'est ainsi, par cette déconcentration d'entrée de jeu, qu'ils ont mis l'école républicaine près des gens et assuré son enracinement.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler.

Eh oui ! M. le ministre de l'éduction nationale, de la recherche et de la technologie.

Pourquoi n'ont-ils pas procédé de même dans le secondaire, me rétorquerez-vous ? Eh bien, parce qu'à l'époque il n'y avait que quelques dizaines de lycées en France - un seul à Bordeaux et à Lyon - et qu'il n'était donc pas possible de déconcentrer. Aujourd'hui, avec 4 500 lycées et 400 000 enseignants, la situation a bien changé et la gestion est devenue tout à fait différente.

S oyez donc persuadés que nous allons vers la déconcentration. Cependant tout le monde doit s'y mettre, parce que, pour réussir, il faut impliquer davantage les élus, qui sont plus près des réalités locales.

M. René Couanau.

Et l'abaissement des effectifs ?

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Je vais vous répondre aussi sur ce sujet, car je ne veux esquiver aucune question.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 21 OCTOBRE 1998

M. le président.

Monsieur le ministre, je me permets de vous rappeler que la règle du jeu veut que l'on ne consacre en principe que cinq minutes à chaque question.

(Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Germinal Peiro.

M. Couanau en a posé quatre !

M. le président.

Poursuivez, monsieur le ministre.

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Monsieur le président, je comprends votre souci et je le partage, mais, dans la mesure où l'on m'a posé quatre questions, n'ai-je pas droit à quatre fois cinq minutes pour répondre ? (Sourires.)

M. le président.

Pas tout à fait, non. Vous aurez l'occasion d'y revenir plus tard.

Mme Conchita Lacuey.

Monsieur le ministre peut tout de même s'expliquer !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Je tiens à répondre aussi complètement que possible à la représentation nationale.

Sur les effectifs, je vais être très franc.

L'école de la République est confrontée à une vraie concurrence, celle de l'école privée. Or, bien que je sois très attaché à l'école de la République, je suis obligé de constater que, dans ce cadre, celle-ci n'est pas sur la vague montante. Ainsi à Paris, cette année, 600 élèves sont passés de l'école de la République à l'école privée.

M. Bernard Birsinger.

Ils reviennent après !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

En matière de gestion, je suis même obligé de m'interroger, étant responsable de l'école de la République. En effet, alors que le l'on dénombre un professeur pour onze élèves dans l'école de la République...

M me Françoise de Panafieu.

C'est l'école

« citoyenne » ?

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

... contre un pour treize dans les écoles privés où le taux d'encadrement est donc inférieur, le nombre moyen d'élèves dans les classes d'enseignement privé est de 24, contre 29,5 dans l'école de la République.

Cela signifie que, avant de parler de créer des milliers et des milliers de postes, nous devons nous interroger sur notre question. La responsabilité d'un ministre de la République est de poser cette question, aussi désagréable soit-elle, y compris pour lui-même. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Nous avons certes l'objectif de faire baisser le nombre des élèves dans les classes où cela est nécessaire, mais nous ne devons pas faire de fétichisme en la matière. En effet, dans certaines disciplines enseignées comme en cours magistraux, ces chers élèves se trouveront l'année suivante dans des amphis rassemblant 500 élèves. Ils risqueraient alors d'avoir un drôle de choc. Or les sondages réalisés sur ce sujet montrent qu'ils estiment que 500 élèves par matière dans un amphi n'est pas un nombre trop élevé.

En revanche, cette réduction est souhaitable pour d'autres disciplines, par exemple les travaux pratiques de physique ou de sciences naturelles, les cours de langues. A cet égard, vous avez pu constater que notre politique visait à accroître le nombre des professeurs de langues et des locuteurs natifs des pays considérés afin de faire parler les élèves avec des étudiants d'origine étrangère. Nous créons 1 000 postes de ce genre et nous continuerons dans cette voie.

Il faudra également diminuer le nombre des élèves par classe dans les cours portant sur les nouvelles technologies.

Nous nous préoccupons donc de ce problème d'encadrement.

Dans le même ordre d'idée il faudrait aussi que certains lycées de grandes villes n'ouvrent pas des options pour trois ou quatre élèves, car cela ne correspond pas à une saine gestion des fonds de la République.

Je précise évidemment que cette remarque ne tend nullement à remettre en cause le principe des options mis en oeuvre par Lionel Jospin quand il était ministre de l'éducation nationale. Il s'agit d'une excellente initiative, mais encore faut-il qu'elle fasse l'objet d'une gestion rigoureuse.

J'en viens à votre dernière question, monsieur Couanau, qui me permettra de répondre aussi à M. Hermier et à M. Goasguen qui m'ont interrogé sur le même sujet.

Mme Nicole Bricq.

M. Goasguen n'est même plus là !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Peut-être, mais il nous entend grâce à l'oreille qu'ont les députés quand ils sont absents ! (Sourires.)

Chacun sait qu'il n'est pas facile de rouvrir les listes complémentaires des concours de recrutement. En particulier, l'accord des jurys est indispensable, mais nous l'avons obtenu pour plusieurs disciplines déficitaires. A l'heure où je vous parle, je ne sais évidemment pas combien nous prendrons de reçus supplémentaires. C'est pourquoi l'amendement gouvernemental sur ce sujet ne peut pas être présenté aujourd'hui. Il sera déposé en deuxième lecture, lorsque nous aurons pu placer les enseignants dans les classes qui en ont besoin. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

Monsieur le ministre, je me permets de rappeler une nouvelle fois que la règle du jeu des questions est qu'il ne faut consacrer à chacune et à sa réponse que cinq minutes. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme Nicole Bricq.

M. Couanau avait posé quatre questions !

M. le président.

Je comprend fort bien que le Gouvernement doive parfois répondre un peu plus longuement lorsqu'une question en comporte plusieurs, mais il faut essayer d'être concis.

Nous en venons aux questions du groupe du Rassemblement pour la République.

La parole est à Mme Françoise de Panafieu.

Mme Françoise de Panafieu.

Monsieur le ministre, avant de poser ma question, je tiens à vous dire que j'ai été choquée par vos propos. Pour moi, en effet, et contrairement à vous, semble-t-il, il n'est qu'un seul service public d'éducation en France. (Murmures sur les bancs du groupe socialiste.)

Il comprend l'école laïque d'une part et l'école privée sous contrat d'association, d'autre part. Toutes ces écoles sont des écoles de la République. (Non Non ! sur les bancs du groupe socialiste.)

Tous les petits Français qui les fréquentent sont des petits républicains. Puis-je vous rappeler, monsieur le ministre, que vous êtes le ministre de toutes ces écoles ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 21 OCTOBRE 1998

pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

J'en viens à ma question.

Agir dans l'intérêt des lycéens est une phrase qui revient régulièrement, depuis quelques jours, dans votre discours. Au nom de cet intérêt, vous exigez un allégement immédiat des programmes enseignés. Or l'enseignement des matières scolaires ne saurait être considéré comme une feuille de papier que l'on découpe à l'envi pour l'ajuster et la faire entrer, coûte que coûte et à la vavite, dans une enveloppe. Pourtant, cette décision a été prise aujourd'hui même. Nous l'avons apprise, je le rappelle, cet après-midi lors des questions d'actualité.

Voilà donc une décision qui intervient en cours d'année scolaire, avec application dès la rentrée des vacances de la Toussaint, c'est-à-dire dans dix jours.

M. Bruno Bourg-Broc.

C'est de l'improvisation !

Mme Françoise de Panafieu.

A cet égard, je veux poser deux questions, l'une de forme, l'autre de fond.

Plusieurs députés du groupe socialiste.

Une seule question !

Mme Françoise de Panafieu.

Sur la forme, comment les enseignants pourront-ils adapter leurs cours alors que l'année scolaire est entamée ? Voilà une raison supplémentaire de les déstabiliser. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Sur le fond, quelle méthode appliquerez-vous pour décider des coupes à effectuer dans les programmes ? D'ailleurs, la réforme dont vous exigez la mise en place immédiate et sans concertation préalable consistera-t-elle en une réduction des heures de cours ou en un allégement des programmes enseignés ? (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme Martine David.

Ce n'est pas une question ! Le ministre n'a jamais dit cela !

Mme Françoise de Panafieu.

Monsieur le ministre, c'est la première fois que la représentation nationale - mais vous êtes peut-être un peu jeune dans cet hémicycle pour le savoir (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) - est tenue à ce point à l'écart des décisions.

Ainsi, les députés sont obligés de vous demander de vous expliquer clairement sur ce qui va se passer de nouveau en matière d'enseignement, dans dix jours seulement, dans nos établissements scolaires. Je vous remercie de bien vouloir nous répondre. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Madame la députée, je pense que beaucoup d'éléments ont échappé à votre attention.

Mme Françoise de Panafieu.

Certainement ! Et à l'attention de beaucoup de monde !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Cela étant, je ne crois pas que vous soyez coupable, car vous n'êtes pas spécialiste de ce sujet. (Rires sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme Françoise de Panafieu.

Trois cent mille personnes ont bien compris combien vous étiez un vrai spécialiste !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

En particulier, certaines pratiques scientifiques vous échappent un peu.

Ainsi que je l'ai répété plusieurs fois depuis de nombreux mois, le conseil national des programmes, qui regroupe des spécialistes appartenant à des sensibilités politiques différentes - car même si l'on n'a pas à les connaître, certains les affichent -, étudie la question. Les associations de spécialistes, comme celles des professeurs de sciences naturelles, des professeurs de physique, des professeurs de mathématiques, des professeurs d'histoire et de géographie, travaillent déjà à l'allégement des programmes.

Il était même prévu de longue date que j'annoncerais le résultat de ces travaux après la Toussaint, mais cela vous a sans doute échappé. Pourtant, la presse s'en est souvent fait l'écho et je l'ai répété à plusieurs reprises dans cette maison, mais vous n'étiez peut-être pas là, ce qui explique que vous ne soyez pas informée de ce que j'ai annoncé. En tout cas, cela n'a rien de précipité.

Sur l'allégement des programmes, vous me posez donc une question à laquelle j'ai déjà répondu.

Il ne s'agit évidemment pas de changer les horaires.

A cet égard, il existe des règles dans l'éducation nationale, madame la députée, mais je crois que vous les ignorez !

Mme Françoise de Panafieu.

Alors, expliquez-nous ce que vous allez faire !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

En effet, on ne peut changer les horaires sans suivre des procédures précises, d ont le déroulement exige un certain temps. Par conséquent, les horaires ne seront pas changés.

Mme Françoise de Panafieu.

Alors, expliquez-nous !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Je crois que vous avez du mal à comprendre ! (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Mme Françoise de Panafieu.

Je ne suis pas la seule !

M. Bernard Outin.

Elle vient de l'école privée !

M. Pierre Lequiller.

Nous sommes nombreux à avoir du mal à comprendre !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Oui, mais ce n'est pas mon problème !

M. le président.

Monsieur le ministre, ne vous laissez pas troubler par d'autres questions. Répondez à celle de Mme de Panafieu.

M. Pierre Lequiller.

Il faudrait aussi qu'il soit correct avec les députés !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Il faut également être correct avec les ministres, monsieur le député, et ne pas les interrompre. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Un ministre peut aussi se défendre. Il ne s'agit pas d'un privilège réservé aux députés. Dites-vous donc bien que, si vous me cherchez, vous me trouverez. (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Nous nous sommes donc expliqués sur ce sujet, qui a même fait l'objet d'un colloque au cours duquel les élèves et les plus grands spécialistes se sont exprimés. Nos pro-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 21 OCTOBRE 1998

grammes scientifiques se sont alourdis au point d'être surchargés. Il faut revenir à l'essentiel et c'est ce qu'ont fait ceux qui ont travaillé dans ce domaine. Je pense que tout cela sera annoncé et commenté.

M. Nicolas Dupont-Aignan.

Dites-le, car c'est dans dix jours !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Cette décision est préparée depuis six mois !

Mme Françoise de Panafieu.

Alors, dites-le-nous !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Je l'ai déjà dit, madame, notamment quatre fois dans quatre interventions en réponse à des questions d'actualité à l'Assemblée nationale.

Mme Françoise de Panafieu.

Il n'y avait aucune réponse !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Il doit être possible de les retrouver. Je pense d'ailleurs que le RPR gagnerait à avoir un service de presse ! (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Bruno Bourg-Broc.

Il n'a toujours pas répondu !

Mme Françoise de Panafieu.

C'est incroyable !

M. le président.

La parole est à Mme Martine Aurillac.

Mme Martine Aurillac.

Monsieur le ministre, la qualité de l'enseignement repose notamment sur un grand principe : la parité entre l'enseignement public et l'enseignement privé. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Bernard Outin.

C'est nouveau !

M me Martine Aurillac.

L'enseignement privé sous contrat est en effet partie prenante de la politique éducative, qu'il s'agisse de réforme des lycées, de zones d'éducation prioritaires ou d'enseignement primaire. Or force est de constater que la contribution de l'Etat au fonct ionnement des établissements privés diminuera de 85,6 millions de francs en 1999.

J'imagine que ce sera Mme Royal qui me répondra puisque M. le ministre vient de sortir.

M. Nicolas Dupont-Aignan.

Il ne s'intéresse pas à l'enseignement privé !

M. Alain Calmat.

Mme Royal est aussi ministre !

Mme Martine Aurillac.

L'un des principaux dossiers en souffrance demeure l'égalisation du statut des enseignants privés et du public, en matière de retraite, d'une part, et de prévoyance, d'autre part. Ce dossier est prioritaire et relève maintenant d'une urgence absolue. Un accord avait été trouvé avec le précédent gouvernement pour un plan de financement échelonné sur plusieurs années.

Depuis la loi Debré de 1959, le statut des enseignants du privé tend à s'aligner sur celui des enseignants du public, mais le problème de l'harmonisation des retraites et celui de la prévoyance reste entier. Mon collègue Bruno Bourg-Broc vous avait d'ailleurs aussi posé une question mais il n'a pas obtenu de réponse.

Il s'agit notamment d'établir les modalités du remboursement par l'Etat des sommes versées par les organismes de gestion et de résoudre la question du mode de financement des retraites et des indemnités de départ, question d'autant plus pressante que le nombre de départs va s'accélérer d'ici à 2005.

Mme Martine David.

Ce ne sont plus des questions, mais des interventions !

Mme Martine Aurillac.

En conséquence, je voudrais connaître les dispositions que vous entendez mettre en oeuvre dans le cadre de la loi de finances pour résoudre ces problèmes et établir enfin une réelle parité entre les enseignants du privé et ceux du public, et savoir quelle traduction budgétaire vous comptez leur donner. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

Mme la députée, la réponse que je vais vous donner est extrêmement simple, puisque je me contenterai de faire référence à la loi du 31 décembre 1959 sur les rapports entre l'Etat et les établissements d'enseignement privés sous contrat.

Les mesures prises dans l'enseignement public sont transposées, selon cette loi, dans l'enseignement privé.

Dans ce cadre, la carrière des maîtres des établissements privés sous contrat est appréciée dans le strict respect de la loi au regard de celle des enseignants de l'enseignement public. En particulier, ils bénéficient des mêmes possibilités de promotion.

Dans ce même esprit, le Gouvernement, contrairement à vos inquiétudes, a veillé à faire en sorte que les mesures prévues en faveur des élèves de l'enseignement public en fonction du niveau de rémunération de leurs parents, c'est-à-dire toutes les mesures sociales que j'ai eu l'occasion d'évoquer, soient également offertes aux élèves de l'enseignement privé sous contrat. Je pense aux bourses des collèges, au fonds social pour les cantines, mais également aux emplois-jeunes, dont peuvent également bénéficier, depuis janvier 1998, les écoles et collèges privés sous contrat.

J'ai également proposé aux responsables de l'enseignement privé sous contrat, dont les écoles répondaient aux critères retenus pour le public, de me faire savoir s'ils souhaitaient entrer dans le dispositif des zones d'éducation prioritaires. Il me semble en effet normal que, à partir du moment où nous avons décidé de lutter contre les inégalités entre élèves, nous traitions, ainsi, conformément à la loi, madame, et dans la plus grande courtoisie, aux dires même des responsables de l'enseignement privé sous contrat, les problèmes qui relèvent du secteur qui vous préoccupe. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Bruno Bourg-Broc.

La question portait sur les retraites des enseignants !

M. le président.

La parole est M. Nicolas DupontAignan.

M. Nicolas Dupont-Aignan.

Madame la ministre, je veux évoquer la question des personnels non enseignants dans l'éducation nationale, en particulier le rôle exact des emplois-jeunes.

En effet, on relève depuis des années, car cela n'est pas dû uniquement à votre gouvernement, un retard important dans les créations de postes, notamment d'ATOS, de médecin, d'assistante sociale, d'infirmière, en fait de tout personnel non enseignant. Or les créations d'emplois annoncées par votre budget sont bien évidemment large-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 21 OCTOBRE 1998

ment insuffisantes pour combler et rattraper ce retard, notamment dans les académies en difficulté où le décalage entre les besoins et les postes est extrêmement important.

Cela m'amène donc à traiter de l'utilisation des emplois-jeunes dans l'enseignement.

Ainsi, dans un collège de Vigneux, dans ma circonscription, la moitié des postes de surveillant ont été supprimés à la rentrée. Après une grève avec occupation des locaux, l'académie a condescendu à remplacer les postes de surveillant par des emplois-jeunes, ces fameux emplois-jeunes qui étaient censés couvrir des besoins nouveaux.

Apparaît alors dans toute sa lumière la manoeuvre, le tour de passe-passe budgétaire, qui consiste à supprimer de la ligne budgétaire les crédits permettant le financement des postes officiels de surveillant même s'ils sont remplacés par des dotations figurant sur une ligne déconcentrée - et le remplacement de ces emplois par des emplois-jeunes. Or, on nous a répété à l'envi, lors de la discussion au Parlement, que les emplois-jeunes ne devaient couvrir que des besoins nouveaux.

Est-il donc opportun de supprimer cette ligne budgétaire et ces emplois ? On peut en effet se poser la question après avoir entendu M. Allègre annoncer à la télévision ce soir qu'il allait créer 3 000 postes de surveillant.

J'avoue ne plus comprendre : d'un côté, de tels postes sont supprimés dans le budget ; de l'autre, on les recrée.

D'abord, monsieur le ministre, s'agit-il de 3 000 postes à mi-temps ou à plein temps ? J'ai cru comprendre qu'il s'agissait de postes à mi-temps, ce qui signifierait que l'on ne crée vraiment que 1 500 postes.

Ensuite, comment le Gouvernement entend-il financer ces 3 000 faux demi-postes, et les 10 000 emplois-jeunes supplémentaires ? Les enseignants doivent-ils s'attendre à une nouvelle diminution de la rémunération des heures supplémentaires ? Plus gravement encore, si je puis dire, tant on est dans le bricolage, le ministre de l'éducation nationale est-il sérieux quand il propose mille appelés du contingent, alors que l'on sait qu'ils sont en voie de disparition ? Bref, je voudrais savoir si le Gouvernement a la volonté d'augmenter le nombre des personnels non enseignants - ATOS, infirmières... - dans des proportions bien supérieures aux chiffres annoncés, - des milliers de créations de postes seraient nécessaires, notamment pour la surveillance -,...

M. Jean-Pierre Baeumler.

Il mélange tout et pose dix questions, ce n'est pas sérieux !

M. Nicolas Dupont-Aignan.

... ou se contentera-t-il d'un bricolage qui ne pourra aboutir à terme qu'à la proposition de notre collègue M. Bourg-Broc : la décentralisation de la gestion des personnels non enseignants vers les régions, qui ne pourraient pas faire plus mal ?

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

Monsieur le député, je vais essayer de mettre un peu de clarté dans les questions fort complexes que vous venez de poser.

M. Nicolas Dupont-Aignan.

Elles ne sont pas complexes.

Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

Ma réponse est très simple. Le nombre de maîtres d'internat surveillants d'externat, dits MI-SE est de 37 287. Le projet de loi de finances pour 1999 prévoit le transfert de 3 300 supports budgétaires de MI-SE au chapitre 31-97, relatif aux rémunérations des autres personnels enseignants non titulaires. Sur le terrain, vous aurez exactement le même nombre de personnes, mais elles ne seront pas payées sur la même ligne budgétaire.

Est-ce que vous me suivez jusque-là ?

M. Nicolas Dupont-Aignan.

Je vous suis.

Mme Martine David.

Il a fait l'ENA ! Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

Par ailleurs, un décret est en préparation. Il tend à définir les nouvelles conditions de recrutement et de service des MI-SE. Il a pour objet de mettre en place une meilleure compatibilité entre l'exercice des fonctions de surveillants et la poursuite effective des études. En effet, de plus en plus de MI-SE sont des étudiants qui ne font plus d'études. Ce sera l'occasion de clarifier le dispositif.

Il est possible qu'il prévoie des obligations de service moins importantes pour permettre la poursuite des études.

Dans le cadre de ce décret, les MI-SE assureraient des tâches d'éducation et participeraient à la surveillance des élèves. Ils pourraient apporter une aide pédagogique et contribuer à l'animation des activités socio-éducatives organisées dans l'établissement.

Par ailleurs, pour les lycées, 3 000 MI-SE supplémentaires seront recrutés afin, notamment, d'animer les lieux de vie des lycéens qui seront créés dans les établissements ou qui existent déjà.

Les aides-éducateurs et les MI-SE, pour répondre à la dernière de vos questions, ne remplissent pas le même rôle dans les établissements. Il n'y aura pas de substitution des premiers aux seconds. La meilleure preuve en est que cette année nous créerons à la fois des postes d'aideséducateurs et de MI-SE. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Nous en venons maintenant au groupe communiste.

La parole est à M. Bernard Birsinger.

M. Bernard Birsinger.

Madame la ministre, ma question porte sur la santé à l'école. Ce domaine a été délai ssé pendant des années et le manque de personnel est aujourd'hui criant.

Vous avez, madame la ministre, souligné à plusieurs reprises l'ampleur du problème. Ainsi, vous avez créé 300 postes d'infirmières en 1998, soit plus qu'entre 1995 et 1997. De même, des mesures ont été prises en faveur de la restauration scolaire. Je m'en félicite, mais le retard pris est tel qu'il faut aller beaucoup plus loin et ne pas se contenter des 185 postes prévus actuellement pour répondre aux attentes et aux besoins.

Le Haut Comité à la santé publique, dans un rapport adressé au Parlement en 1997, a dressé un tableau préoccupant de la santé des enfants, des adolescents et des jeunes adultes. Il faut agir vite parce que l'enfance est la période au cours de laquelle se constitue durablement le capital santé de l'individu. Le mal-être psychologique et les comportements à risque à cet âge-là peuvent avoir des conséquences graves et durables sur la santé du futur adulte.

Notre pays est en tête des pays consommateurs d'anxiolytiques, de somnifères ou d'antidépresseurs, y compris chez les enfants. Et il est malheureusement en tête également des pays de l'Europe de l'Ouest pour le nombre des suicides de mineurs. Quand déciderons-nous de mener une véritable politique sanitaire de prévention ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 21 OCTOBRE 1998

Face à ces besoins, il est nécessaire que notre pays dispose d'un véritable service sanitaire et social de l'éducat ion nationale, composé d'infirmières, d'assistantes sociales, de psychologues et de médecins en nombre suffisant.

Dans ce cadre, je pense qu'il est urgent de créer un nombre beaucoup plus important de postes d'infirmières.

Elles jouent en effet un rôle pivot dans l'école pour soigner, écouter, éduquer à la santé. Je sais que ce dernier point vous tient à coeur.

Les enfants, les adolescents confirment l'analyse du Haut Comité à la santé publique.

En 1997, le quatrième Parlement des enfants a voté une proposition de loi réclamant la présence d'une infirmière dans chaque groupe scolaire. Et celui de cette année, auquel vous étiez présente, madame la ministre, a vu l'adoption d'une autre proposition de loi, visant à améliorer la condition des enfants malades.

Il faut répondre à ces attentes et montrer aux enfants, aux jeunes, que l'exercice de la citoyenneté dont on parle beaucoup, et à juste titre, est efficace, et que leur parole est réellement prise en compte par la représentation nationale.

C'est le sens de la campagne de pétitions dont j'ai pris l'initiative, qui reprend très exactement la proposition de loi du Parlement des enfants de 1997. D'ores et déjà, 100 000 cartes-pétitions circulent sur tout le territoire.

Les parents d'élèves sont très actifs dans cette campagne et je peux vous assurer que la proposition des enfants recueille un formidable écho.

C'est pourquoi, madame la ministre, je demande que soit examinée la proposition de créer 12 287 postes d'infirmières dans le cadre d'un plan pluriannuel pouvant s'étaler sur quatre ans.

Selon notre collègue Jacques Guyard, ce serait impossible. J'explique donc la proposition.

Elle émane du Syndicat national des infirmières et conseillères de santé. Il a fait son calcul sur la base d'une infirmière ou deux par lycée, suivant la grosseur de celui-ci, et de deux infirmières par collège travaillant chacune à mi-temps sur le collège et les écoles primaires rattachées au collège. Elle ne correspond pas à la proposition des enfants qui souhaitaient qu'il y ait une infirmière par groupe scolaire. Mais on voit bien qu'on répond à un besoin très urgent. D'ailleurs, cela a été noté tout à l'heure.

M. le président.

Monsieur Birsinger, veuillez poser votre question.

Mme Martine David.

Les autres intervenant avant lui n'ont pas été rappelés à l'ordre, monsieur le président.

M. Bernard Birsinger.

Je n'ai qu'une question, je l'argumente un petit peu !

M. le président.

Cela fait déjà quatre minutes que vous vous exprimez, monsieur Birsinger.

M. Bernard Birsinger.

Je vais donc conclure, monsieur le président.

Tous les groupes de l'Assemblée nationale ont, lors de la commission d'enquête sur les droits de l'enfant mis en évidence l'importance de la santé à l'école et de la présence d'infirmières au sein des établissements scolaires.

Les postes d'infirmières que je vous propose de créer seraient faciles à pourvoir. Je ne prendrai qu'un exemple : pour 50 postes dans l'académie de Lille, il y a eu 400 candidatures.

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

Monsieur le député, je partage, vous le savez, la totalité des préoccupations que vous venez d'exprimer.

Je connais le rapport du Haut Comité de la santé publique : il souligne la nécessité de renforcer les actions de prévention en matière de santé. Le Gouvernement en a d'ailleurs fait une de ses priorités : 600 postes médicosociaux ont été créés l'année dernière et 400 cette anné e, soit plus que pendant les cinq années précédentes.

C'est encore insuffisant, je le reconnais très sincèrement, mais de nombreuses mesures sont déjà prises dans ce budget, et l'effort en faveur de la santé scolaire doit, comme le conseil des ministres s'y est d'ailleurs engagé, être planifié sur plusieurs années.

La santé est une des conditions de la réussite scolaire.

Un enfant qui est en mauvaise santé, qui a mal aux dents ou qui souffre d'un problème de santé grave, ne peut pas réussir à l'école. C'est pourquoi nous sommes fortement mobilisés sur cette question.

Cette année, je vais m'employer à intégrer la santé scolaire dans une démarche globale. Cela a déjà été le cas avec le rétablissement des bourses des collèges, la création du fonds social pour les cantines, la mise en place des comités d'éducation à la santé dans les établissements scolaires et du module d'éducation à la santé dans les collèges et le lancement d'actions très importantes sur la prévention des conduites à risque.

Je vais également m'atteler à la redéfinition de la mission, du travail, des compétences et de la charge qui incombent aux infirmières et aux assistantes sociales, en veillant à une meilleure articulation entre ces deux métiers qui souvent se superposent et ne travaillent pas suffisamment ensemble. Une réflexion sera également menée sur leur place dans les collèges : doivent-elles ou non, par exemple, dépendre de l'équipe de direction pour être vraiment intégrées à la politique éducative du collè ge ou des écoles ? Ce travail va avoir lieu. Une assemblée générale des infirmières se tiendra à laquelle les parlementaires qui le souhaitent seront invités.

Une fois ce travail de redéfinition terminé, j'espère pouvoir, l'année prochaine, prendre des décisions qui iront dans le sens de ce que nous souhaitons tous deux, monsieur le député. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Ernest Moutoussamy.

M. Ernest Moutoussamy.

Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la ministre, il avait été annoncé que le redéploiement national des ZEP permettrait à la Guadeloupe de rattraper son important retard. Je rappelle quelques chiffres. Pour 428 000 habitants, la Guadeloupe compte 30 établissements en ZEP, accueillant 8,42 % des élèves alors que la Martinique, par exemple, dispose, pour 392 000 habitants, de 97 établissements en ZEP regroupant 23,91 % des élèves. On constate aujourd'hui que la situation réelle du département-archipel de la Guadeloupe n'est pas prise en compte.

S'il faut se féliciter de la mise en place des réseaux d'éducation prioritaire, il convient de souligner qu'ils ne pourront pas permettre à la Guadeloupe de revenir au même niveau que la Martinique, par exemple, et que le retard ne sera pas comblé.

Pour éviter toute discrimination, monsieur le ministre, madame la ministre, vous serait-il possible d'accorder au moins 200 indemnités de sujétion spéciale aux personnels exerçant dans l'académie de la Guadeloupe ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 21 OCTOBRE 1998

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

Monsieur le député, comme vous le savez, la Guadeloupe bénéficie pour la période 1998-2001 d'un plan pluriannuel de développement destiné à améliorer les conditions de fonctionnement et les résultats du service public de l'enseignement local. Dans ce cadre, il a été demandé au recteur de la Guadeloupe de conduire les consultations locales préalables nécessaires pour définir un schéma pluriannuel de développement académique. Dans ce contexte, je vous propose de reposer avec l'ensemble des recteurs la question de la carte des zones d'éducation prioritaire. Il n'est pas sûr que ce soit la meilleure solution, compte tenu des difficultés qui se posent pour identifier les différents établissements scolaires, mais je suis tout à fait ouverte à réexaminer cette carte, en liaison avec les recteurs - dont celui de la Guadeloupe, puisque tous ont été appelés à faire des propositions.

Il est vrai que le département de la Guadeloupe a un taux de scolarisation en ZEP inférieur à celui de la Martinique et de la Guyane. Je ne sais pas encore s'il s'agit d'un problème de remise à niveau ou si d'autres dispositifs, correspondant aux critères de fonctionnement des ZEP, ont été mis en place.

Je puis vous rassurer, monsieur le député : la redéfinition de la carte des ZEP concernera bien évidemment la Guadeloupe.

M. le président.

Nous en venons maintenant au groupe socialiste.

La parole est à Mme Nicole Bricq.

Mme Nicole Bricq.

Monsieur le ministre, je crois honnêtement que le plan que vous avez annoncé aujourd'hui correspond aux attentes des lycéens. J'en veux pour preuve les revendications des élèves du lycée de MitryMory dans ma circonscription de Seine-et-Marne qui se sont très vite retrouvés à la pointe de la contestation.

Leur réclamation essentielle était de disposer de lieux d'expression, de lieux de convivialité au sein de leur lycée.

Je crois que vous avez visé juste.

Après notre rapporteur spécial de la commission des finances, M. Jacques Guyard, je voudrais évoquer le problème, commun à l'ensemble des lycées, du non-renouvellement des CES à la fin de l'année.

Si l'on peut comprendre le recentrage opéré par Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité sur les publics en difficulté, il ne faut pas oublier que le manque de personnels administratifs était souvent compensé - c'était particulièrement vrai dans les lycées d'enseignement professionnel - par des CES.

Je prendrai un seul exemple qui illustre bien mon propos. Le lycée Le Gué à Tresmes, dans ma circonscription, n'a pas fait l'objet d'une réhabilitation, du fait de la carence de l'ancienne majorité au conseil d'Ile-de-France.

Il est maintenant inscrit dans le programme prioritaire de la nouvelle majorité. Or les CES, que vous voulez supprimer, remplissaient des fonctions d'ouvriers d'entretien dans ce lycée, déjà en grande difficulté.

Ma question est la suivante : parmi les mesures que vous avez annoncées, quelles sont celles qui compenseront le non-renouvellement des CES ? Les chefs d'établissement sont très inquiets. Ils ne savent pas s'ils doivent ou non renouveler ces postes et attendent avec impatience votre réponse.

M. le président.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Madame la députée, je vous remercie de m'avoir posé cette question, bien qu'elle soit très difficile.

Je ne botterai pas en touche en vous disant - ce qui est pourtant la vérité - que les CES sont gérés par le ministère de la solidarité... Compte tenu de la situation, ou pourrait demander au ministère de la solidarité la même chose qu'au ministère de la défense, c'est-à-dire d'éviter, tant qu'on n'a pas de système de remplacement, de retirer brutalement les CES. Je vais m'y employer. Je vous remercie donc de votre excellente remarque.

Cela étant dit, essayons de regarder un peu plus loin.

L'opération que nous avons menée en faveur des maîtres auxiliaires - arrêt de la précarité, intégration par des pro cédures normales - n'a pas eu d'équivalent pour les personnels ATOS. De plus, l'éducation nationale fonctionne encore avec trop d'emplois précaires, y compris sur des postes qui sont des emplois normalement réservés à des fonctionnaires.

Nous avons la volonté d'apurer cette situation, après les discussions qui ont eu lieu sur l'ensemble des problèmes des ATOS.

Plus largement, nous devons mener une réflexion sur l'entretien des lycées. Le président Giscard d'Estaing avec qui je m'entretenais cet après-midi, et qui est président de région, me faisait remarquer que le problème de l'entretien était rarement abordé lors de la construction de nouveaux bâtiments, ou de la mise en place de nouvelles technologies. Or les lois de décentralisation n'ont certainement pas réglé les problèmes d'une manière très claire.

Se sujet sera à l'ordre du jour de la rencontre qui aura lieu la semaine prochaine avec les présidents de région. Il est clair que chacun devra mettre la main à la poche, pour assurer l'entretien des lycées et la maintenance du matériel.

Se pose également le problème plus global de l'emploi précaire dans la fonction publique. Le Gouvernement a décidé de s'y attaquer. Le ministère de la fonction publique y travaille actuellement.

Je reviens à votre question initiale. Il y a là, je suis d'accord avec vous, une urgence. Il. faut éviter que soient brutalement supprimés les CES dans les établissements scolaires, sous peine de provoquer des tensions très graves.

Mais il faut veiller également à repérer parmi les vrais CES, tels qu'ils avaient été conçus au départ, ceux qui pourraient être de véritables emplois.

M. Bernard Outin.

Créez des emplois !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Je peux vous donner le nombre de vrais CES dans l'éducation nationale : il est de 60 000.

M. le président.

La parole est à M. Stéphane Alaize.

M. Stéphane Alaize.

On me pardonnera de revenir sur la question de Mme Bricq, mais je l'orienterai différemment. Certains CES correspondent à des fonctions véritables, qui pourraient se traduire par des impôts permanents de la fonction publique. Ne serait-ils pas possible de les transformer en CAE, ce qui permettrait de prolonger le contrat, des intéressés tout en préparant leur intégration dans des conditions financièrement acceptables ? Au-delà de cette question, vous avez évoqué la participation des collectivités régionales au financement. Mais les départements aussi rencontrent des difficultés accrues


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 21 OCTOBRE 1998

avec les collèges, d'autant que l'on scinde désormais les cités mixtes collèges-lycées, en construisant de nouveaux bâtiments beaucoup plus spacieux qu'autrefois. Il faut bien entretenir ces nouveaux mètres carrés au prix des pires difficultés, précisément parce que le nombre d'ouvriers de service ne suit pas. Vous préoccupez-vous de ce sujet ? Ma question concerne également les ATOS. La création des 216 postes supplémentaires permettra-t-elle de rattraper dès cette année les disparités entre académies ? Celle de Grenoble, qui englobe le département de l'Ardèche, fait partie des dernières académies métropolitaines. L'académie de Guyane, créée tout récemment, se trouve dans une situation encore moins favorable.

Enfin, je tiens à décerner un satisfecit à Mme la ministre pour l'attention toute particulière qu'elle porte au milieu rural. Il ne s'agit pas d'opposer l'urbain et le rural ; mais le rural aussi a droit à sa part du progrès. Je vous en félicite, madame la ministre.

M. le président.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Monsieur le député, votre question est très voisine de la précédente. Je serai tout à fait franc : le Gouvernement a décidé de maintenir les emplois publics à un certain niveau.

M. Jean Vila.

Ce n'est pas une bonne idée !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Une discussion sur ce point est possible, mais je tiens à justifier notre position.

La France dépense 51 % de son PIB en dépenses publiques.

M. Jean Vila.

C'est une bonne chose.

M. Pierre Lequiller.

C'est beaucoup trop !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Et la plupart des économistes estiment que c'est beaucoup.

M. Jean Vila.

Non.

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Le budget de l'éducation nationale, qui représente le quart du budget de l'Etat, est pour plus de 90 % consacré à la rémunération des personnels. Je serai certes le dernier à me plaindre de voir la priorité des priorités accordée à l'éducation nationale.

Toutefois, le problème des ATOS se pose avec une telle ampleur au niveau des lycées qu'on ne peut, dans le contexte actuel, espérer combler le déficit du jour au lendemain. Il n'en faudra pas moins créer des postes dans les lycées, et c'est pourquoi j'insiste encore et toujours sur la nécessité du dialogue qui doit se créer entre l'Etat et les collectivités territoriales.

Je vous parle en toute franchise : je suis parfaitement conscient des dépenses et des efforts entrepris par les collectivités territoriales. Pour les écoles, les choses sont parf aitement claires : se sont les communes qui les construisent et en assurent l'entretien. Pour les cantines et l'entretien, elles font appel soit au personnel communal, soit, dans certains cas, à des sociétés privées, sous leur responsabilité.

Malheureusement, la même mécanique n'a pas été reprise s'agissant des collèges et des lycées, par les départements, les régions et les lois de décentralisation successives que je commence à étudier un peu - il faut bien apprendre à être ministre (Sourires) - sont restés sur ce point ambiguës. Je ne pratique pas la langue de bois : le problème est réel, et c'est pourquoi nous devons nous mettre autour d'une table pour en discuter.

En tant que socialiste, je ne suis pas très content de voir mon ministère recourir à des masses d'emplois précaires. Qu'ai-je fait ? Ça ne se voit pas beaucoup, mais cela m'a valu une lettre de remerciement d'une confédération syndicale parmi les plus puissantes et les plus proches d'un des groupes de la majorité. (Rires sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Georges Hage.

Des noms !

M. Bernard Outin.

Encore un indice !

M. Julien Dray.

La confédération française des travailleurs chrétiens ! (Sourires.)

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Vous ne le savez peutêtre pas, mais certains travailleurs dans l'éducation nationale, des ouvriers des CROUS, étaient payés en dessous du SMIC. Nous avons mis fin à cette injustice. Nous nous attaquons donc au point par point à ce problème, dont l'ampleur est considérable. Si nous réalisons les économies de gestion auxquelles nous aspirons - et sur lesquelles je préfère pudiquement ne pas m'étendre - et si la représentation nationale maintient les moyens de l'éducation nationale, nous devrions être en mesure de créer un certain nombre de postes, d'ATOS en particulier.

S'agissant des assistantes sociales et des infirmières, la situation de la France n'est pas unique : le problème se pose un peu partout dans le monde. Mais les pays où cela va le mieux, on ne l'a pas suffisemment souligné, sont ceux où le personnel social ou sanitaire se partagent, en continuité, entre l'école et les collectivités territoriales.

Ainsi, la situation est claire sur le plan médical, mais également psychologique.

C'est dire si l'ensemble de la question doit faire l'objet d'un dialogue beaucoup plus approfondi entre les collectivités territoriales et l'Etat, et les initiatives telles que celles prises par Ségolène Royal avec les contrats locaux d'éducation en sont un exemple typique.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Louis Fousseret.

M. Jean-Louis Fousseret.

Nous nous félicitons de voir inscrite dans le budget pour 1999 une revalorisation des taux de l'indemnité de sujétion des directeurs d'école servie prioritairement à ceux qui exercent en ZEP, pour un montant de 10 millions de francs. Cet effort devait être salué, même s'il mérite d'être conforté.

En effet, tous les partenaires du système éducatif, y compris votre ministère, s'accordent à reconnaître que les responsabilités liées à la direction des écoles ne cessent de s'accroître. Les directeurs jouent un rôle décisif dans le fonctionnement des écoles, dans l'organisation du travail en équipe, dans les relations avec les familles et les communes, dans l'accueil des emplois-jeunes dans les écoles, dans l'élaboration des projets éducatifs, dans l'aménagement des nouveaux rythmes scolaires et dans la mise en oeuvre des contrats éducatifs locaux.

Or, cet afflux de responsabilités provoque actuellement - nous le constatons tous - une certaine désaffection. De plus en plus, ce sont des jeunes qui se portent candidats à ces postes, qui exigent pourtant une certaine expérience. Pour lutter contre cette tendance, il conviendrait d'élargir les décharges de service. Pouvez-vous nous préciser vos propositions à ce sujet ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 21 OCTOBRE 1998

Ma question porte également sur la situation des professeurs hors classe. Dans l'enseignement du premier degré, la catégorie hors classe représentera environ 1 % de l'ensemble du corps des professeurs, bien loin des 15 % statutaires. Pour l'enseignement du second degré, le projet de budget 1999 prévoit la création de 1 287 emplois hors classe. Cela apportera certes une amélioration, mais,e n aucun cas, ne permettra d'atteindre les 15 % statutaires.

Je sais, madame la ministre, que vous héritez d'une situation ancienne et que vos services sont particulièrement sollicités. Mais pouvez-vous nous faire part de vos intentions ? Vous paraît-il possible de mettre en place un plan de rattrapage sur plusieurs années pour atteindre les 15 % prévus ?

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

Monsieur le député, vous me posez en fait trois questions.

Les 55 000 directeurs d'école jouent en effet un rôle crucial. Nous nous sommes employés à revaloriser la fonction, au niveau tant des décharges de service que des indemnités et des bonifications indiciaires. Dans le relevé de conclusions relatif à l'enseignement primaire signé le 10 juillet 1998, que j'ai déjà évoqué à la tribune, plusieurs mesures constituent un nouvel effort en leur direction. Pour commencer, l'accélération du rythme d'intégration par liste d'aptitude, qui tiendra compte de cette fonction, permettra aux instituteurs directeurs d'accéder plus rapidement au corps de professeurs des écoles.

Ensuite, 10 millions de francs seront consacrés à la revalorisation de l'indemnité de sujétion spéciale, en priorité pour les directeurs d'école en ZEP ; enfin, pour les décharges de direction, les mesures prévues pour les écoles de cinq classes seront poursuivies et étendues, et u ne meilleure utilisation des remplaçants permettra d'accorder un quota de jours de décharge pouvant aller jusqu'à trente jours par an, mobilisables sur certaines périodes, en particulier en début et en fin d'année scolaire afin que les directeurs d'école puissent se consacrer aux relations avec les parents, au dialogue avec les familles et à la préparation des projets d'école. Ces diverses mesures sont de nature à répondre à vos préoccupations.

S'agissant de la hors classe des professeurs des écoles, pour les enseignants du premier degré, priorité a été donnée à l'intégration des instituteurs dans le corps des professeurs des écoles. Nous devrions parvenir à un quasidoublement des flux d'intégration par rapport au rythme initialement prévu en 1989. L'unification des corps enseignants du premier degré sera achevée en 2007. Dans les années à venir, nous aurons à examiner la question de la hors classe des professeurs des écoles en tenant compte du nombre d'enseignants qui remplissent effectivement les conditions pour y accéder, et non en nous bornant à raisonner en fonction des seuls pourcentages statutaires.

S'agissant du pyramidage des corps du second degré, le plan de revalorisation de la fonction enseignante a expressément prévu que la hors classe des corps des professeurs certifiés, des professeurs d'éducation physique et sportive, des conseillers principaux d'éducation et du grade de professeur de lycée professionnel devait atteindre 15 % des effectifs de la classe normale de ces corps ou grades au 1er septembre 1993, à l'issue d'une montée en charge de cinq ans. Les plans Jospin et Lang avaient fixé le même objectif pour le corps des professeurs agrégés. Or ce pyramidage s'est dégradé à partir de 1994, du fait notamment des nombreuses transformations d'emplois intervenues, en application du plan Jospin, dans la classe normale des corps en cause et destinées à promouvoir les personnels de corps mis en extinction, comme les adjoints d'enseignement, les chargés d'enseignement d'éducation physique et sportive, les professeurs de lycées professionnels du premier grade, les PEGC et les conseillers d'éducation.

Selon le corps, le pyramidage varie de 9,5 % pour les

PLP 2 à 12,5 % pour les certifiés.

Afin de remédier à cette situation, le Gouvernement a décidé, dès 1997, dans le cadre de la loi de finances pour 1998, d'entamer le rattrapage du pyramidage des corps aux grades intéressés ; à ce titre, près de 400 emplois de classes normales ont été transformés en emplois de hors classe au 1er septembre 1998.

Dans le cadre du projet de loi de finances pour 1999, cet effort est poursuivi et accru par la transformation de 1 287 emplois supplémentaires. En outre, des négociations sont ouvertes avec les organisations syndicales pour étudier les modalités et le terme d'un rattrapage intégral permettant de porter rapidement à 15 % le pyramidage des corps des personnels enseignants du second degré et des conseillers principaux d'éducation.

Je tenais à vous répondre très complètement sur cette question qui intéresse de nombreux salariés du ministère de l'éducation nationale.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Je voudrais tout de même rappeler la règle du jeu : deux minutes par orateur et, en principe, une seule question ! Le but n'est pas de caser vingtcinq questions dans deux minutes. Aussi serai-je conduit à interrompre dorénavant les orateurs au bout de deux minutes, même s'ils n'ont posé qu'une question et demie.

Pour le groupe Démocratie libérale, la parole est à

M. Bernard Perrut.

M. Bernard Perrut.

Dans le domaine de la santé et de l'action sociale, vous ne répondez pas aux besoins et aux attentes des jeunes, que l'on retrouve au fil des différentes étapes du parcours des jeunes : école, collège et lycée.

M ais surtout, sachons éviter deux écueils : accuser vos prédécesseurs de n'avoir rien fait, car on ne peut contester une véritable prise de conscience de la part des deux précédents ministres de l'éducation nationale, et tomber dans l'irréalisme en voulant affecter une infirmière ou un médecin dans chaque établissement. C'est parfaitement impossible : il faudrait quarante ans, à votre rythme, pour y arriver.

Madame la ministre, quels sont, en ce domaine, vos objectifs précis pour les années qui viennent ? Quel est votre échéancier ? Selon quels critères allez-vous affecter les médecins et les infirmières dans le cadre de ce budget 1999, face à l'ampleur de la demande ? Entendezvous mettre en place une collaboration et des conventions avec les services et les professionnels de santé présents sur le terrain ? Ce pourrait justement être une première réponse.

Mais les effectifs ne sont pas la seule réponse. Etesvous favorable, madame la ministre, à renforcer le rôle des médecins et des infirmières scolaires,...

P lusieurs députés du groupe socialiste.

Trois questions !

M. Bernard Perrut.

... Parfaitement qualifiés pour détecter les situations précaires, aider, écouter ? Il faudrait justement, au-delà de l'établissement, pouvoir assurer ou faire assurer le suivi médical et social des jeunes, voire de leur famille.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 21 OCTOBRE 1998

Lors de la discussion sur la loi contre les exclusions, j'avais évoqué ici même la mise en place de bons de consultation gratuits pour les situations de détresse. Quel est l'état de votre réflexion sur ce point ? Enfin, dernière question...

Plusieurs députés du groupe socialiste et du groupe communiste.

Quatre questions !

M. le président.

Dernière question, vraiment !

M. René Mangin.

Même la droite n'écoute pas le président !

M. Bernard Perrut.

Dernier point de ma question, monsieur le président.

(Sourires.)

C'est une question très complète, et vous devriez l'écouter, car elle concerne les handicapés et elle n'a pas été évoquée au cours de cette soirée.

Madame la ministre, envisagez-vous de renforcer, dans l e cadre des emplois-jeunes notamment, les postes d'aides-éducateurs, afin d'aider les enfants handicapés dans les actes de la vie quotidienne et de leur permettre de mieux s'intégrer dans la vie des établissements scolaires ordinaires ?

M. le président.

M. Perrut a réussi à poser deux questions en deux minutes quinze.

(Sourires.)

Plusieurs députés du groupe socialiste.

Quatre !

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

Avec votre permission, monsieur le député, je considérerai que j'ai répondu à votre première question.

M. Jean Vila.

Très bien ! Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

Passons aux deux suivantes, sur lesquelles je n'ai pas encore eu l'occasion de répondre.

Les nouveaux emplois médico-sociaux seront affectés selon le critère du besoin des élèves, donc en priorité mais pas seulement - dans les zones d'éducation prioritaire. Là où sont constatées des carences graves hors zone d'éducation prioritaire, nous veillerons bien évidemment aussi à l'attribution de personnels médico-sociaux.

Par ailleurs, plusieurs expériences sont en cours pour répondre à votre souci de coordination entre la médecine de ville et la médecine scolaire, en particulier en nous inspirant de ce qui se pratique dans les PMI où nous avons tout lieu d'être satisfaits du dispositif, particulièrement sur le plan de la prise de responsabilité des parents.

Très souvent en effet, le fait de renforcer la médecine scolaire entraîne paradoxalement une déresponsabilisation des parents. Nous avons donc une réflexion de fond à conduire sur la prise en charge globale de la santé de l'enfant par rapport à l'ensemble des responsabilités éducatives qui l'entourent.

S'agissant de l'intégration des enfants handicapés à l'école, nous avons bien veillé à ce que les aideséducateurs soient recrutés au vu de leur formation et de leur spécificité, afin de permettre des actions d'intégration des enfants handicapés à l'école primaire. Des résultats tout à fait exceptionnels ont du reste été obtenus dans ce domaine, et je veillerai personnellement à ce que, parmi les 10 000 nouveaux aides-éducateurs bientôt affectés en école primaire, un certain nombre de postes à cet effet soient réservés au sein de chaque académie. J'ajoute que je prépare toute une série de mesures visant à favoriser l'intégration des enfants handicapés à l'école, y compris dans le cadre de la formation des maîtres. Aujourd'hui, lorsqu'une école accueille un enfant handicapé, elle considère que c'est un exploit exceptionnel - et c'en est un.

Je voudrais que l'on puisse renverser cette logique.

L'école, aujourd'hui, fait moins que les entreprises, puisqu'elle intègre moins de 4 % d'enfants handicapés. C'est beaucoup trop peu. La France est à la traîne de l'ensemble des pays européens. Je me suis donc fixé comme premier objectif de doubler ce nombre. Une école qui n'intègre pas un enfant différent devrait considérer qu'elle ne remplit pas sa mission fondamentale. Aujourd'hui, une école qui en intègre un considère que c'est une exception. L'exception, demain, ce sera les écoles qui n'intègrent pas ces enfants différents qui ont droit à la scolarité comme tous les autres.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Pierre Lequiller.

M. Pierre Lequiller.

Monsieur le ministre, je voudrais vous poser une question de méthode. Vous avez dit vouloir « dégraisser le mammouth » et bannir les solutions archaïques.

M. Jean-Pierre Baeumler.

Changez de discours !

M. Pierre Lequiller.

Les Français, parents et jeunes, p ouvaient attendre de ces déclarations une grande réforme d'ensemble du système éducatif. En réalité, qu'avez-vous fait depuis seize mois ? Vous avez décidé de créer des dizaines de milliers d'emplois-jeunes, ce qui est une curieuse façon de « dégraisser le mammouth » et ce qui est, à mon avis, une mauvaise mesure, car ces jeunes sont mal préparés à leur rôle.

(Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

M. Germinal Peiro.

Allez leur dire !

M. Pierre Lequiller.

Vous avez pris, il y a quelques jours, un décret pour déconcentrer le mouvement des enseignants du second degré. C'est positif, cela va dans le bon sens, mais c'est tout de même une déconcentration très limitée. Voilà ce à quoi se limite votre révolution.

Plusieurs députés du groupe socialiste.

Quelle est la question ?

M. Pierre Lequiller.

Pendant ce temps, Tony Blair en Grande-Bretagne, Aznar en Espagne (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), la Nouvelle-Zélande ont engagé des réformes profondes autour de quatre principes : la déconcentration, l'autonomie des établissements, leur responsabilité, et leur évaluation, non pas sur les résultats, mais sur le travail qui y est réalisé. Autour de ces quatre principes, on peut effectivement construire une réforme globale du système éducatif c'est en tout cas une idée à laquelle nous sommes attachés depuis longtemps - tout en garantissant, bien sûr, la qualité des diplômes sur l'ensemble du territoire. C'est le rôle de l'Etat.

Vous parlez de réforme, mais on a du mal à voir votre projet d'ensemble...

M. René Mangin.

On a du mal à voir votre question !

M. le président.

Monsieur Lequiller, si vous en veniez à votre question...

M. Pierre Lequiller.

... tant les annonces non suivies de faits sont nombreuses.

J'en viens donc à ma question (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Etes-vous prêt à venir devant l'Assemblée nationale pour un débat sur la réforme du système scolaire que vous envisagez, comme vos prédécesseurs l'ont fait, et comme cela se passe dans les pays étrangers que j'ai cités ? Depuis votre arrivée, nous n'avons pas eu de débat d'ensemble. En France, on ne parle pas suffisamment d'éducation. On n'en parle qu'au moment des crises. Je crois qu'il serait important que l'on ait un tel débat.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 21 OCTOBRE 1998

M. le président.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Monsieur le député, pour avoir un débat clair, il faut se mettre d'accord sur les questions de vocabulaire. Vous avez employé un qualificatif analogique concernant un animal préhistorique que, par ailleurs, j'aime bien personnellement (Rires), mais il ne s'agissait pas, en l'occurrence, de l'identifier à l'éducation nationale, mais à l'administration centrale de l'éducation nationale.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler.

Très bien !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Il y avait dix-neuf directions.

M. Pierre Lequiller.

Vous en avez fait onze.

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

J'en ai fait onze. Il n'y avait aucune femme directeur, il y en a cinq, qui sont d'ailleurs là-haut. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

C'est cette administration centrale qui se déconcentre elle-même en allant plus près des gens, en s'occupant de questions de plus en plus concrètes, suivant des méthodes de moins en moins bureaucratiques. C'est elle qui a permis à l'éducation nationale d'être l'administration la plus rapide de la République dans la mise en place des emplois-jeunes.

M. Alfred Recours.

Avant la loi !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Tous les records de rapidité ont été battus.

Ces emplois-jeunes ne correspondent pas à votre attente, mais tout le monde, y compris les journaux qui ne sont généralement pas favorables à ce type de mesure et qui ont fait des reportages sur le sujet, y compris des organisations qui y étaient extrêmement défavorables au départ, a reconnu que cela avait changé l'état d'esprit de l'enseignement dans les écoles. L'efficacité de notre action n'est donc pas en cause.

Vous avez fait une comparaison, que vous aimez beaucoup, avec des collègues anglais, mais ils viennent voir en France comment on a fait pour avancer. Les déclarations, certes, ont été fortes, mais la réforme de l'école en Grande-Bretagne est au point zéro ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Pierre Lequiller.

Ce n'est pas vrai !

M. le président.

Nous revenons au groupe RPR.

La parole est à M. André Schneider.

M. André Schneider.

Monsieur le ministre, vous avez parlé à de nombreuses reprises ce soir de dignité. Permettez-moi de vous dire que j'ai été profondément choqué par les propos que vous avez tenus tout à l'heure à la tribune à l'encontre des députés de l'opposition. Pour ce qui est des origines sociales humbles, je relève personnellement le défi avec tout le monde ici ! Enfin, il n'y a pas que de bons enseignants à gauche et des mauvais à droite !

M. Bruno Bourg-Broc.

Très bonne mise au point !

M. Jean-Pierre Baeumler.

C'est un bon principal, c'est vrai !

M. André Schneider.

J'en viens maintenant à ma question.

La colère actuelle des lycéens et le mécontentement des enseignants du second degré démontre, s'il en était encore besoin, combien est difficile la tâche des personnels de direction des lycées et des collèges.

Des centaines de postes ne sont pas occupés alors que, dans un grand nombre d'établissements, il faudrait au contraire augmenter le nombre de personnels de direction.

M. Jean-Pierre Baeumler.

Vous avez raison !

M. André Schneider.

Plus que jamais, en cette période de grande évolution de notre système éducatif, le rôle des équipes de direction est primordial pour construire ce changement.

Lors du débat budgétaire de 1998, j'ai déjà eu l'occasion d'appeler votre attention sur les charges et responsabilités écrasantes qui pèsent sur ces personnels, sans compensation en retour. Quelles mesures urgentes, parce que c'est urgent, entendez-vous prendre en leur faveur ? Votre projet de budget est très silencieux sur ce point.

M. Jean-Pierre Baeumler.

Non, vous n'avez pas bien regardé !

M. le président.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Monsieur le député, je vous fais des excuses si je vous ai blessé. Mettre en cause l'origine sociale de quelqu'un, ce n'est pas bien. Je parlais de manière globale, peut-être un peu polémique, et je vous prie très sincèrement de m'en excuser. Chacun, en effet, par-delà les polémiques politiques générales, a droit au respect et de ses convictions.

Venons-en à la question que vous posez.

Je viens de recevoir les représentants des personnels de direction. Que des crédits soient prévus pour eux dans le budget, ce n'est pas leur principale revendication. Leurs traitements ont été revalorisés cinq fois au cours des dernières années et le problème n'est pas budgétaire.

Cette année, nous n'engagerons pas beaucoup de réformes nouvelles parce qu'il y en a un grand nombre en chantier et qu'il faut les achever, mais nous aborderons le problème des personnels de direction et des p ersonnels d'inspection, sur lesquels nous ne nous sommes pas beaucoup penchés jusqu'à maintenant, ainsi que celui des conditions de travail des enseignants.

Quand les établissements marchent bien, c'est d'abord grâce aux personnels de direction. Quand ils ne marchent pas, c'est parfois à cause d'eux. Mais il faut bien reconnaître qu'ils sont dans une situation difficile.

Ils ont d'abord un problème de responsabilité civile.

On est en train de l'étudier et je serai peut-être amené à présenter un projet de loi au Parlement à ce sujet.

Aujourd'hui, en effet, quand un panneau de basket tombe sur la tête d'un élève parce que le matériel n'est pas bien entretenu, le proviseur risque d'être condamné.

M. Jean-Pierre Baeumler.

Exact !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Cela fragilise le personnel de direction, qui aura tendance à essayer de se protéger en interdisant de jouer au basket si les terrains ne sont pas absolument impeccables, et on ne peut pas lui en vouloir.

Quand M. Jospin a été nommé Premier ministre, il a constitué son équipe. Quand quelqu'un est élu président d'un parti politique, il choisit son équipe. Un proviseur,


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 21 OCTOBRE 1998

lui, n'en a même pas le droit. Or il ne peut animer un établissement s'il n'a pas la possibilité de choisir au moins quelques personnes pour l'aider auprès de lui.

En plus, il est très peu aidé. Il a un adjoint seulement dans les gros lycées. Or la paperasserie augmente d'année en année et l'introduction de l'informatique...

M. Jean-Pierre Baeumler.

A doublé le boulot !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie ... a augmenté encore le boulot. Il naît en effet des logiciels de plus en plus compliqués. Et il faut vite oublier le précédent, car le dernier est encore meilleur. Finalement, nous recevons des lettres qui nous disent : « Vous êtes gentil, monsieur le ministre, mais votre nouveau logiciel, on ne l'utilisera pas. » Evidemment, c'est un peu agaçant, mais on

comprend le problème.

Par ailleurs, les chefs d'établissement sont soumis systématiquement à la critique, et on leur refuse tout leadership pédagogique. Ils l'ont de fait, pas de droit, dans cette organisation de l'éducation nationale où les strates s'empilent, mais sans aucune hiérarchie.

Il va falloir faire en sorte que le travail des chefs d'établissement soit mieux organisé, mieux considéré, et leur donner les moyens d'exercer leur tâche difficile.

J'ajoute que, parfois, l'inspecteur d'académie, avec 300 établissements, est très lointain. C'est pourquoi nous voulons mettre en place des administrations de zone, plus proches des chefs d'établissement, pour éviter qu'ils ne soient isolés dans cette grande jungle qu'est l'éducation nationale.

Soyez assuré que Mme Royal, pour les collèges et les écoles, et moi-même sommes extrêmement conscients de ce problème. Nous avons rencontré les associations de chefs d'établissement.

Elles sont extrêmement représentatives, beaucoup plus que n'importe quelle association d'enseignants, puisque 82 ou 83 % des chefs d'établissement sont syndiqués, ce qui permet une discussion plus simple. Nous aurons probablement à discuter de textes qui modifieront un certain nombre de choses dans ce domaine.

Cela ne veut pas dire - et je constate que la plupart des chefs d'établissement, et les meilleurs n'y sont pas du tout opposés - qu'il ne faut pas encourager l'émergence d'une démocratie lycéenne, qui n'est ni la chienlit ni la démagogie, mais la reconnaissance du fait que les jeunes gens et les jeunes filles à notre époque ne sont pas tout à fait ceux de 1950, lorsque j'étais moi-même sur les bancs des lycées.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Robert Poujade.

M. Robert Poujade.

Madame le ministre, monsieur le ministre, le mercredi 9 septembre dernier, les professeurs des classes préparatoires aux grandes écoles scientifiques, commerciales, littéraires, ont fait grève, ce qui est à peu près sans précédent lors d'une rentrée. Leurs élèves, pou rtant très attachés à la continuité de leurs cours, ont en général non seulement compris mais soutenu ce mouvement.

Au-delà du mécontentement légitime né, vous le savez, de l'application arbitraire et injustifiable à ces maîtres, dont les heures d'interrogation orale font partie intégrante du service, du décret du 30 juillet 1998, ce mouvement exprimait un profond malaise, ressenti par les élèves, mais également par de futurs élèves et par des parents d'élèves.

Ces professeurs ont le sentiment qu'une offensive démagogique, annoncée depuis longtemps par des propos agressifs à l'égard de ces classes préparatoires, est engagée contre elles, alors même que des réformes profondes ont permis en particulier d'adapter aux enseignements et aux universités d'aujourd'hui des classes scientifiques dont les filières ont été profondément réorganisées.

Les classes préparatoires aux grandes écoles n'ont cessé d'être des creusets de la promotion des jeunes, souvent issus de milieux populaires, par l'effort et par le mérite.

M. Jean-Paul Bret.

Il va faire pleurer Margot.

M. Robert Poujade.

Leurs maîtres sont particulièrement justiciables de l'admirable page, que vous connaissez, dans laquelle Péguy parlait de professeurs qui ne font pas des « cours » mais « des classes ». Et quelles classes ! Je voudrais simplement vous demander, monsieur le ministre, si vous entendez mettre un terme à des attaques insidieuses contre des classes qui ont tant apporté et qui apportent tant à l'enseignement et à la République.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Monsieur le ministre, vous ne trouverez jamais dans ma bouche un propos agressif à l'encontre des professeurs de classes préparatoires.

M. Robert Poujade.

Je n'ai pas dit cela.

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Si vous êtes bien informé, vous saurez que je connais personnellement de très près la vie des professeurs de classes préparatoires.

Cela dit, comme l'a écrit fort bien Alain Etchegoyen, l'éducation nationale, dans certains secteurs, est devenue malade du mensonge, et des bruits se propagent, y compris sur l'Internet réservé aux classes préparatoires.

Les propos prêtés au ministre n'ont de près ni de loin aucun rapport avec la réalité. On n'indique d'ailleurs ni où il les a tenus ni à quel sujet.

M. Robert Poujade.

Je n'ai pas regardé Internet.

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Je ne peux malheureusement pas entretenir une escouade de « nettoyeurs d'Internet » (Sourires.)

M. Alfred Recours.

Une dizaine d'emplois-jeunes ! (Sourires.)

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Le problème qui se pose, c'est que ces professeurs qui travaillent beaucoup, qui ont une tâche très lourde, dont les programmes ont beaucoup évolué sous l'impulsion d'un certain ministre de l'éducation nationale qui s'appelait Lionel Jospin et sont donc tout à fait corrects, ont été atteints par la mesure générale de solidarité nationale et de solidarité à l'intérieur de l'éducation nationale que j'ai prise. Les heures HSA étaient calculées sur quarante-deux semaines alors qu'aujourd'hui le salaire est calculé sur la base de trente-six semaines. J'ai fait une opération vérité, ce qui nous a permis de créer 40 000 emplois-jeunes à l'éducation nationale pour des jeunes qui étaient au chômage.

Cette action a été comprise par la grande majorité des enseignants de l'éducation nationale puisque la grève qui a été organisée contre cette mesure n'a pas été suivie par


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 21 OCTOBRE 1998

les enseignants. Et je suis très fier que l'éducation nationale ait donné l'exemple en faisant des économies sur des heures supplémentaires payées dans le cadre d'un processus discutable et permis de faire sortir 40 000 jeunes du chômage.

Les professeurs de « prépas », qui sont de loin les mieux payés de l'éducation nationale, beaucoup plus que les professeurs d'université, n'ont pas voulu, pour certains d'entre eux, s'associer à ce geste de solidarité. J'en ai pris acte, et comme je m'intéresse aux faits, j'en ai déduit un certain nombre de choses. Cela n'a changé ni ma détermination ni mon attitude vis-à-vis de ces enseignants qui font un travail très difficile, qui travaillent beaucoup et qui meurent souvent jeunes - j'en sais malheureusement quelque chose. Il n'en demeure pas moins que les attaques contre les classes préparatoires sont des fantasmes dénués de tout fondement.

La seule question qui se pose est de savoir s'il faut maintenir des classes où il y a quinze élèves et un reçu à l'Ecole polytechnique tous les cinquante ans !

M. le président.

La parole est à Mme Marie-Jo Zimmermann.

Mme Marie-Jo Zimmermann.

Monsieur le ministre, je souhaiterais m'expliquer tout d'abord sur le terme « grotesque » que j'ai employé, et je vous prie de m'excuser s'il vous a choqué. Jusqu'au mois de janvier dernier, j'étais enseignante de terminale dans l'académie de Nancy-Metz et je vous assure qu'il n'y a pas que des élèves issus de milieux privilégiés qui obtiennent des mentions « Bien » et « Très bien ». L'ambition de tout enseignant est de faire réussir ses élèves de quelque milieu qu'ils soient issus.

M. Jean-Paul Bret.

Bien sûr !

Mme Marie-Jo Zimmermann.

Telle a toujours été la mienne pendant près de vingt-cinq ans.

Mais j'en arrive à ma question.

La langue française est menacée par l'hégémonie mondiale de l'anglais. Afin de réagir, les pouvoirs publics devraient diversifier le choix de la première langue apprise par les élèves. La tendance constatée depuis des décennies en France montre, hélas ! que la part de l'anglais comme première langue est écrasante. Il est donc surprenant que, confrontés à cette situation, les pouvoirs publics ne réagissent pas plus vigoureusement.

La première réflexion qui se pose est celle de l'absence de mesures incitatives en faveur d'autres langues. En effet, on ne peut pas traiter chaque langue sur un pied d'égalité car la dynamique de l'anglais étouffe les autres langues. Si l'on veut s'en sortir, des actions concrètes et volontaristes sont nécessaires, telles que le relèvement des subventions pour les échanges linguistiques non anglophones, des effectifs allégés dans les classes concernées, des bonifications de points au baccalauréat pour les candidats ayant une première langue autre que l'anglais.

J'aimerais, monsieur le ministre, que vous nous précisiez tout d'abord si une telle politique de diversification linguistique par des incitations positives recueille votre assentiment, et, si oui, je souhaiterais savoir ce que vous comptez faire.

Je terminerai mon intervention par une remarque. La moindre des choses serait de supprimer radicalement tout ce qui peut avantager anormalement le choix de l'anglais.

Certains BTS, par exemple, comportent obligatoirement une épreuve d'anglais. Que dirait-on si une autre langue, comme l'espagnol, l'allemand ou le russe, était obligatoire dans d'autres BTS ? Alors que la Lorraine et l'Alsace affectent des moyens importants pour promouvoir le bilinguisme franco-allemand, l'Etat agit délibérément en sens inverse. Ainsi, le rectorat a affecté dans les écoles primaires vingt-cinq assistants linguistiques, tous spécialisés en anglais. Cela est tout de même un peu choquant.

M. Jean-Paul Bret.

Quelle question partiale !

Mme Marie-Jo Zimmermann.

Ces exemples caractérisent de véritables discriminations au détriment des autres langues étrangères. Je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous m'indiquiez ce que vous envisagez pour que l'anglais ne soit plus anormalement favorisé par rapport à d'autres langues étrangères. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Madame la députée, je suis attaché à la défense de la langue française. Pas plus tard que ce matin, une discussion sur des problèmes de naturalisation m'a amené à intervenir en conseil des ministres pour souligner que le ministre de l'éducation nationale ne saurait admettre que l'on naturalise des gens qui ne parlent pas français.

M. Pierre Lequiller.

Très bien !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Je continue à penser que notre langue est un des fondements essentiels sur lesquels je continuerai à me battre.

J'en viens ensuite à ma politique dans ce domaine. Elle est quelque peu différente de ce qui se faisait généralement, mais elle commence à donner quelques résultats.

Le Premier ministre avait déclaré dans une intervention que, dans quelques années, nos enfants parleraient tous anglais ou, plus exactement, un sabir dérivé de l'anglais.

Pour ma part, j'ai dit l'année dernière que l'anglais n'était plus une langue étrangère. Ces propos m'ont valu d'être fustigé ici ou là. La seule protestation vraiment justifiée était celle des professeurs d'anglais, qui se sont alarmés par le fait que le ministre de l'éducation nationale se satisfaisait de l'introduction d'un pseudo-anglais comme moyen de communication. La guerre contre l'anglais n'a pas plus de sens aujourd'hui que celle contre le latin au Moyen Age. Si Newton avait écrit en anglais, il n'aurait pas été compris de Leibniz. L'anglais est devenu une langue véhiculaire. C'est ainsi.

Je suis attaché à me battre à la fois pour le français - et notamment le français en Angleterre - et pour les autres langues. Nous allons donc renforcer l'enseignement en France de l'allemand, du russe, de l'italien, de l'arabe et du chinois. La seule langue qui résiste à l'anglais est à l'heure actuelle l'espagnol, provoquant par là même un grave problème de recrutement pour enseigner cette langue.

Je veux donc rééquilibrer les choses en faisant aussi porter l'effort sur la manière d'enseigner ces langues. Par rapport à des pays plus polyglottes que nous, comme les P ays-Bas, nous manquons de locuteurs natifs qui viennent aider les professeurs de langues en faisant des séances de conversation.

C'est pourquoi, dans les mesures d'urgence en faveur des lycées, nous avons décidé de créer mille postes de lecteurs de langues, et non de lecteurs d'anglais. Per-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 21 OCTOBRE 1998

sonnellement, si l'anglais était appris davantage dans le primaire, cela laisserait plus de place dans le secondaire pour l'allemand, l'italien et l'espagnol, par exemple.

Mme Marie-Jo Zimmermann.

Je suis d'accord aussi.

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Cette stratégie me paraît être la bonne.

L'incidence lycéenne m'a conduit à examiner l'état des bourses Erasmus ainsi que le nombre des futurs professeurs de français qui viennent se former en France. Je me suis aperçu de la dégradation formidable du nombre de bourses Erasmus. A quelque chose malheur est bon ! Car il m'a semblé que ces étudiants accepteraient sans doute une bourse complémentaire pour venir travailler dans un établissement scolaire et aider les professeurs de langue.

C'est là-dessus que nous travaillons actuellement, madame.

M. le président.

Nous en revenons aux questions du groupe socialiste.

La parole est à Mme Paulette Guinchard-Kunstler.

M me Paulette Guinchard-Kunstler.

Madame la ministre, le nombre de questions consacrées à la santé scolaire est significatif de la crise, de l'abandon dans lequel a été laissé depuis plusieurs années ce secteur, enjeu important du système éducatif - vous l'avez rappelé tout à l'heure -, en particulier dans le cadre de la lutte contre les inégalités.

La faiblesse des effectifs, que ce soit de médecins, d'infirmières ou d'assistances sociales, vous a conduite à mettre en place en 1998 et pour 1999 des ouvertures de postes importants pour ces trois catégories de personnels et à mobiliser des comités d'éducation à la santé et à la citoyenneté.

Ma question, madame la ministre, porte sur le choix qui, à l'heure actuelle, semble être fait de faire appel à la médecine de ville plutôt qu'à la médecine scolaire. Les médecins scolaires réalisent un travail de prévention en profondeur et ont à ce titre développé un travail spécifique de santé publique.

Ne pourrait-on pas donner toute sa place à la médecine scolaire, aux médecins scolaires dans une logique de santé publique ? Par ailleurs, dans le Doubs, outre les graves problèmes d'effectifs, les centres médico-scolaires, lieux de rencontres entre les équipes de médecins et d'infirmières manquent cruellement de moyens de fonctionnement - qui sont n ormalement placés sous la responsabilité des communes -, à tel point que, dans certains cas, ils ne peuvent affranchir leur courrier.

Ne pourrait-on pas, dans le cadre des contrats locaux d'éducation, inciter les communes à faire davantage en leur faveur ?

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

Madame la députée, j'ai eu l'occasion de répondre à plusieurs reprises à différentes questions sur la santé scolaire. C'est dire combien nous devons faire face à une urgence.

Ma démarche dans ce domaine est globale et s'appuie sur des actions relatives à l'éducation à la santé - je vous rappelle la mise en place dans les collèges d'un module de vingt heures d'éducation à la santé - et sur des actions de prévention des conduites à risques. Plusieurs actions très importantes ont été menées cette année dans le système scolaire : prévention de la maltraitance, actions de formation pour prévenir la maltraitance et les abus sexuels, également une journée nationale sur les droits de l'enfant, qui comportait des actions relatives à la protection de la santé. De nombreuses initiatives citoyennes ont porté sur la santé. Ont été menées également des actions relatives à la prévention des conduites à risques, notamment la généralisation des comités d'éducation à la santé, qui prennent à bras le corps les problèmes de toxicomanie, par exemple. Toutes les actions relatives à la prévention de la violence concernent aussi, selon moi, la santé à l'école.

En ce qui concerne l'accès aux soins, j'ai mis en place un travail d'articulation entre les médecins de la PMI et les enfants de l'école maternelle, car c'est très tôt que doivent se prendre les bonnes habitudes en matière de santé scolaire. J'encourage aussi plusieurs expérimentations d'articulation entre la médecine de ville et la médecine scolaire.

M. Jean-Paul Bret.

C'est très bien ! Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

Cette réflexion doit être poursuivie, même si, comme vous le soulignez à juste titre, le rôle des médecins scolaires est très important.

Nous avons à faire face à un paradoxe : d'un côté, il y a, dans le système libéral, trop de médecins prescripteurs qui ne gagnent pas toujours bien leur vie et ne demanderaient qu'à se mettre au service des enfants du système scolaire et, de l'autre, des médecins scolaires qui n'ont pas le droit de soigner sous prétexte qu'ils feraient concurrence au secteur libéral. Du fait de l'impasse dans laquelle on se trouve, il faut avoir le courage de remettre à plat ce dispositif.

M. Jean-Paul Bret.

Très bien ! Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

C'est la raison pour laquelle j'ai demandé à l'inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et à l'IGAS de travailler pour la première fois conjointement à la remise à plat des problèmes statutaires de rémunérations, de missions, de l'ensemble des médecins, qu'ils soient scolaires ou libéraux, en remettant au coeur du dispositif la protection et la prévention des problèmes de santé des enfants. Je vous ferai bien sûr part des conclusions de ces deux inspections. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Eric Besson.

M. Eric Besson.

S'agissant des effectifs dans les écoles maternelles et élémentaires, je vous demande, madame la ministre, si le Gouvernement a l'intention de renforcer à l'avenir l'accueil des enfants de deux ans. Je sais que le bien-fondé de la scolarisation précoce des enfants fait parfois débat. Je suis pourtant persuadé qu'il s'agit là d'un outil majeur d'éveil, de socialisation et d'intégration, notamment dans les zones sensibles, qui ne se limitent malheureusement pas aux zones d'éducation prioritaires.

Ainsi, dans les ZEP de la Drôme, l'accueil des enfants de deux ans se fait très bien.

Par ailleurs, l'établissement de la carte scolaire se heurte chaque année au problème du critère de référence de la fréquentation maximale par classe. Les inspecteurs d'académie appliquent la règle du ministère et fixent les effectifs maxima à trente élèves par classe. Les syndicats appellent les enseignants à s'en tenir à vingt-cinq. Ne pensez-vous pas qu'il est urgent que la concertation entre votre ministère et les syndicats débouche sur une règle du jeu communément acceptée ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 21 OCTOBRE 1998

Enfin, j'attire votre attention sur les difficultés particulières que représentent dans les écoles situées en zone rurale les classes uniques, où les enseignants doivent gérer des effectifs qui peuvent aller jusqu'à trente élèves et qui sont de niveaux parfois très différents. Ces classes uniques ne devraient-elles pas bénéficier d'un abaissement rapide du seuil maximal des effectifs ?

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

Monsieur le député, la préscolarisation des enfants de moins de trois ans est une préoccupation importante et correspond à une demande sociale de plus en plus forte des familles. Aujourd'hui, 35 % des enfants de moins de trois ans sont scolarisés, et 99 % des enfants de plus de trois ans. En France, la scolarité est obligatoire à partir de l'âge de six ans, comme vous le savez, alors que, pratiquement nous avons réalisé la scolarité quasi obligatoire à partir de trois ans. C'est un progrès considérable et une spécificité française dont on peut légitimement être fier.

Toutefois, il existe de grandes disparités régionales puisque la scolarisation des enfants de moins de trois ans oscille entre 15 % dans certains départements et 70 % dans d'autres. Je veille, au moment de l'établissement de la carte scolaire, à rétablir une certaine égalité entre les départements. En outre, une priorité est accordée bien évidemment à la préscolarisation en zone d'éducation prioritaire, parce que la scolarisation précoce est un élément très important de la lutte contre les inégalités socioculturelles. En ce qui concerne les effectifs, l'objectif de vingt-cinq élèves par classe est optimal. Il est très souvent atteint dans de nombreuses écoles maternelles, surtout si l'on tient compte de la scolarisation partielle des enfants.

Nous entendons aussi améliorer la qualité de l'accueil des enfants de moins de trois ans en répétant que l'école maternelle n'est pas une garderie de substitution. Vouloir scolariser les moins de deux ans ou accepter en cours d'année des enfants qui n'avaient pas deux ans le jour de la rentrée scolaire, n'est pas bon.

Il faut avoir le courage de le dire, car cela peut avoir des effets négatifs sur les processus d'acquisition du langage chez les autres enfants déjà scolarisés. Je m'emploie donc à redéfinir les formes et la qualité de l'accueil des enfants de moins de trois ans, non seulement pour étendre leur scolarisation, parce que c'est un vrai projet de société, par rapport aux acquis scolaires dont ils peuvent bénéficier, mais aussi pour ne pas tomber dans un excès. Je répète qu'une scolarisation trop précoce, ou le fait de laisser les parents considérer que l'école maternelle est une garderie gratuite, risque de porter préjudice aux enfants qui sont en cours d'acquisition du langage et d'un certain nombre de connaissances.

M. le président.

La parole est à Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

Vous avez, madame la ministre, annoncé des mesures en faveur des ZEP lors du colloque de Rouen en juin 1998. Il s'agit, entre autres, d'assurer la scolarisation des enfants jusqu'à deux ans, d'améliorer l'accompagnement des enseignants en zone d'éducation prioritaire, d'effectuer un travail de relations avec les parents, d'améliorer le suivi pédagogique des élèves les plus fragiles.

Or il reste un grand travail à accomplir pour aller dans ce sens lorsqu'on fait le constat des réalités.

De plus, nous devons veiller à ce que les niveaux d'exigence dans les établissements concernés ne soient pas abaissés. Il est indispensable que ceux-ci deviennent non des ghettos mais des lieux d'apprentissage innovants, organisés en réseaux avec des établissements qui ne sont pas situés dans ces zones.

A cette fin, il est nécessaire de disposer d'un personnel stable, formé, et - pourquoi pas ? - volontaire, ce qui est loin d'être le cas pour le moment.

Par ailleurs, il est indispensable, pour qu'il y ait réussite scolaire dans les zones d'éducation prioritaires, que l'éducation nationale tisse des liens avec les familles et qu'elle en prenne l'initiative. En effet, nous savons combien il est difficile, pour des parents en situation de précarité, victimes du chômage, de nouer spontanément des liens avec l'école, alors qu'ils étaient déjà eux-mêmes fort souvent en échec scolaire.

Avec le dispositif en faveur des ZEP, il ne s'agit pas toujours de donner plus, mais bien de donner mieux.

Je souhaite, madame la ministre, que vous nous précisiez très clairement les moyens humains, financiers ou matériels nouveaux que vous comptez développer pour assurer l'objectif que le Gouvernement s'est donné en matière de ZEP et de REP.

Par ailleurs, la priorité est donnée aux ZEP dans les cités et les quartiers urbains. Il conviendrait de ne pas oublier les ZEP rurales. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

Quelles actions comptez-vous développer ? Affecterezvous aux ZEP des moyens plus ciblés et plus spécifiques, à la hauteur des besoins particuliers identifiés ?

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

Madame la députée, la relance de l'éducation prioritaire est en mouvement, on peut le dire puisque je reçois déjà des projets de contrats de réussite et la nouvelle cartographie des réseaux d'éducation prioritaires de nombreuses académies. C'est ce qui m'a conduite à demander au Gouvernement une mesure complémentaire, le nombre des indemnités de sujétion spéciale passant, grâce à un amendement qui sera présenté par le Gouvernement, de 3 000 dans le projet de loi de finances initial, à 13 000. Ainsi, 13 000 personnels enseignants et non enseignants pourront bénéficier de cette mesure ; 130 collèges nouveaux et au total 170 établissements, avec les écoles de rattachement pourront intégrer l'éducation prioritaire.

A cette mesure très importante, il convient d'ajouter la revalorisation de l'indemnité de sujétion spéciale des directeurs d'école. Cette mesure bénéficiera aux directeurs d'école travaillant en ZEP. Les collèges situés en ZEP seront classés dans une catégorie supérieure à celle à laquelle ils peuvent prétendre.

J'ai voulu, par cette mesure, permettre la venue en ZEP de chefs d'établissement chevronnés, expérimentés, qui, jusqu'à présent, s'ils venaient dans des établissements de ZEP comptant moins d'élèves, étaient rétrogradés car les collèges sont classés en fonction de leur importance démographique.

En obtenant, à l'occasion du projet de loi de finances, le reclassement de certains collèges de ZEP, je vais pouvoir y attirer des chefs d'établissement dont la carrière continuera à progresser même si cet établissement plus difficile compte moins d'élèves.

Ces mesures seront complétées par une adaptation du barème visant à améliorer la carrière des personnels en zone d'éducation prioritaire et à faciliter leur mutation.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 21 OCTOBRE 1998

Enfin, vous le savez, pour la première fois, les nominations des chefs d'établissement en zone d'éducation prioritaire et en zone difficile ont été faites sur profil, à la suite d'entretiens personnalisés avec les recteurs, et non plus seulement en fonction de choix géographiques. Cette politique commence à porter ses fruits. Elle tient compte du fait que le rôle des chefs d'établissement dans les quartiers les plus difficiles est absolument crucial.

En outre, les emplois-jeunes sont prioritairement affectés aux ZEP, de même que les emplois médico-sociaux.

Ainsi, l'année dernière, sur les 600 emplois d'infirmière et d'assistante sociale créés, 400 ont bénéficié à des ét ablissements sensibles. En 1999, la même priorité sera observée pour l'affectation de 400 nouveaux emplois de ce type.

Mais cela n'exclut bien évidemment pas d'autres établissements dont les besoins peuvent être importants.

Le dispositif des zones d'éducation prioritaires n'exclut pas a priori le secteur rural. Mais la réalité du travail quotidien en milieu urbain et en milieu rural n'est pas identique, même si le secteur rural présente certaines difficultés. C'est la raison pour laquelle, dans le cadre du plan de relance de l'école rurale, je proposerai la mise en place de réseaux d'écoles rurales, et des mesures spécifiques seront prévues en fonction des difficultés qu'y rencontrent les personnels enseignants : isolement, éloignement, frais de déplacement. Le milieu rural induit toute une série de handicaps socio-culturels des élèves, dont on parle peut-être moins mais qui sont tout aussi douloureux.

Enfin, la mise en place des réseaux d'éducation prioritaires correspond à une politique extrêmement ambitieuse de mise en commun des ressources pédagogiques, des ressources éducatives, des savoir-faire, et elle permet de regrouper des établissements et des écoles qui sont confrontés aux mêmes difficultés, qu'ils soient classés en ZEP ou non.

Je vois même dans les projets qui me sont proposés des expériences tout à fait intéressantes prévoyant l'entrée dans des réseaux d'éducation prioritaires de certaines grandes écoles parrainant des collèges pour y mener, par exemple, des activités scientifiques de haut niveau, contribuant à la constitution de pôles d'excellence auxquels ces établissements n'auraient jamais pensé pouvoir accéder.

J'espère que l'ensemble des parlementaires sauront relayer cette action sur le terrain. En tout cas, vous y serez étroitement associés.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à Mme Jacqueline Lazard.

Mme Jacqueline Lazard.

De la présentation du budget pour l'enseignement scolaire, j'ai retenu particulièrement la volonté du Gouvernement de lutter contre l'exclusion en milieu scolaire. J'ai bien noté une augmentation de près de 30 % des crédits destinés à l'action sociale, pour un montant qui s'élèvera en 1999 à 4,2 milliards de francs.

Cela se traduit notamment dans l'élargissement et la rénovation du dispositif des bourses au bénéfice des familles les plus démunies. C'était une nécessité et vous y avez répondu, madame la ministre. Les fonds sociaux lycéens et collégiens et le fonds social pour les cantines, la restauration et l'hébergement permettent de venir en aide très rapidement aux familles rencontrant des difficultés.

Sur le fond, je vous félicite de ces mesures. Cependant, je formulerai deux observations de forme. En premier lieu, la multiplication des guichets rend peu lisibles les aides diverses. Il conviendrait de rechercher une plus grande homogénéité. En second lieu, si le principe de la bourse annuelle des collèges a été acquis, il est regrettable que la possibilité de mensualisation ne soit pas offerte par tous les établissements.

Je ne doute pas, madame la ministre, que vous serez attentive à ces observations.

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

Madame la députée, comme vous l'avez souligné, un certain nombre de dispositifs ont été mis en place pour renforcer la lutte contre l'exclusion sociale : le renforcement des fonds sociaux lycéens ou collégiens, le fonds social des cantines, les bourses des collèges - le champ d'application a été étendu à des élèves exclus de l'aide à la scolarité -, la création d'un troisième taux, fi xé à 1 800 francs, la création d'un guichet unique. Avec le transfert des bourses des caisses d'allocations familiales vers les collèges, les familles ont désormais un interlocuteur unique.

Le fonds social des cantines est maintenu, et vous avez raison de souligner qu'il y a maintenant une diversité d'aides qui, lorsqu'elle est bien gérée par les établissements scolaires, ne fait l'objet que d'un seul dossier, d'un seul contact avec la famille. Malheureusement, dans certains cas, on demande à la famille de remplir plusieurs dossiers, qui contiennent parfois des informations différentes.

Nous étudions, en liaison avec le syndicat des personnels d'intendance et l'administration, la possibilité de simplifier le dispositif pour la rentrée prochaine, afin d'alléger les tâches administratives qui pèsent sur ces personnels, pour rendre un meilleur service aux familles, leur épargner des tracasseries administratives et, surtout, soulager les personnels d'intendance et d'administration ainsi que les assistantes sociales, qui ne doivent pas passer l'essentiel de leur temps à remplir des dossiers.

Je suis très soucieuse de parvenir à une simplification de l'ensemble de ces dispositifs et je ferai en sorte qu'ils soient opérationnels à la rentrée prochaine.

M. le président.

La parole est à M. Julien Dray.

M. Julien Dray.

Ma question sera double et concerne la vie quotidienne dans les lycées.

Le racket scolaire sort progressivement de la loi du silence où il était plongé et vous avez, madame la ministre, mis en place un numéro vert.

Avez-vous l'intention de pérenniser ce système et de l'étendre, dans la mesure où ses premiers résultats sont positifs ? Des situations qui n'étaient pas connues ont été révélées et les élèves ont pu trouver un interlocuteur, ce qui n'était pas le cas auparavant. Le dispositif pourrait s'adosser à une action des régions et des départements, afin que le problème du racket scolaire soit mieux pris en charge.

La deuxième partie de ma question concerne les cantines scolaires. La conception des emplois du temps, notamment dans les collèges, fait que le temps dont disposent les enfants pour les repas est de plus en plus réduit. Cela oblige un certain nombre d'élèves de sixième à manger en moins de sept minutes car ils passent les derniers, après les grands.

Or le repas devrait être un moment essentiel de la journée et permettre une éducation à l'alimentation. Il est nécessaire de traiter cette question sérieusement.

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 21 OCTOBRE 1998

Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

Monsieur le député, la première partie de votre question porte sur le racket. La distribution dans les collèges de 4 millions de dépliants contre le racket a porté ses fruits : le jour même, le standard de SOS-violence - mis en place contre le bizutage et qui nous a permis de mettre fin à un certain nombre d'abus à cet égard - a reçu non plus une trentaine d'appels par jour, ce qui est déjà énorme, mais de 200 à 250.

Nous sommes donc en train de lever la loi du silence, ce qui permet de commencer à traiter la violence.

Vous m'avez demandé si cette action serait pérennisée.

Le dispositif était initialement prévu pour trois mois, mais votre idée d'un partenariat entre les régions et le ministère de l'éducation nationale me semble tout à fait judicieuse, et je me tiens bien évidemment à votre disposition si la région Ile-de-France souhaite conduire des actions de ce type.

Pour ce qui est des cantines, je partage tout à fait votre souci. D'ailleurs, en mettant en place le fonds social pour les cantines, j'avais donné des instructions concernant la qualité de la nourriture mais aussi insisté sur l'importance p édagogique des temps réservés aux repas. Ceux-ci doivent se dérouler dans le calme et il faut particulièrement lutter contre la violence qui peut se manifester à ce moment-là. En effet, celle-ci se produit souvent pendant les interclasses. Je partage donc votre souci à cet égard. Le moment du repas est essentiel et les élèves doivent être respectés. Votre préoccupation rejoint notre souci de développer l'éducation à la santé.

Je vais donc à nouveau donner des instructions très fermes en ce sens. Je recommanderai notamment aux établissements scolaires de prévoir des créneaux horaires différents selon l'âge des élèves. Des améliorations peuvent être facilement trouvées et je veillerai personnellement à ce que ce soit le cas.

M. Julien Dray.

Excellent !

M. le président.

La parole est à Mme Danièle Bousquet.

Mme Danièle Bousquet.

L'action du Gouvernement et la part du budget affectée à l'éducation nationale vont peu à peu permettre de rétablir des conditions de travail satisfaisantes pour les enseignants et pour les élèves, mais je m'interroge sur la situation particulière des jeunes sortant du système scolaire sans qualification.

Ces dizaines de milliers de jeunes sont les plus menacés par le chômage et la précarité, puisque 50 % d'entre eux sont sans emploi trois ans après leur sortie du système scolaire.

Il est donc indispensable d'agir en leur faveur et de les aider à réintégrer le système scolaire, ou en tout cas la formation, car c'est le seul moyen de les préserver du chômage. A cet effet, ont été mis en place, dès 1981, les missions locales, et, plus récemment, les MIJEN, missions d'insertion pour les jeunes dans l'éducation nationale. Ces structures effectuent un travail extrêmement important et enregistrent une réussite certaine. Les MIJEN relèvent du budget dont nous discutons aujourd'hui. Du fait de l'effort qu'elles traduisent en faveur des jeunes, à qui elles permettent d'obtenir une qualification, de définir un véritable projet professionnel et d'accéder à une formation individualisée, ces structures sont absolument indispensables. Elles sont rebaptisées « missions nouvelle chance ».

Cette nouvelle dénomination traduit-elle une nouvelle orientation, une remise en cause de leur mission, ou s'agit-il d'un simple changement de nom ? Enfin, ces organismes auront-ils, en 1999, les moyens de poursuivre la mission qui a été la leur jusqu'à présent ?

M. le président.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Madame la députée, les 50 000 ou 60 000 élèves qui sortent tous les ans du système éducatif sans aucune qualification représentent un problème très grave qui ne peut pas rester sans réponse, mais le budget comporte un certain nombre de niches financières. Nous avons donc confié à Mme Moisan, inspectrice générale, une mission d'étude sur « les nouvelles chances ». Il faut faire en sorte de repérer ces jeunes suffisamment tôt, lors des premiers échecs, afin d'apporter des solutions très en amont. Il ressort des premières études que les situations sont extraordinairement hétérogènes les réponses ne peuvent donc être uniformes.

Ces enfants, dont certains sont dits « ascolaires », ne sont pas dénués de qualités, parfois remarquables, y compris sur le plan intellectuel. Par conséquent, nous ne voulons absolument pas d'un système qui les aiguillerait systématiquement vers l'enseignement professionnel, alors que leur formation peut être extrêmement variée.

Nous travaillons donc sur cette question, mais je ne veux pas m'exprimer avant qu'une analyse n'ait permis de définir des solutions. Nous ne sommes pas encore en mesure de passer à l'action, mais nous avons décidé de bénéficier de la mécanique européenne « Ecoles de la nouvelle chance ». L'une de ces écoles a été créée à titre expérimental à Marseille ; une autre sera créée en SeineSaint-Denis et une troisième dans une autre zone difficile. Nous verrons à l'usage comment le système fonctionne.

Ce problème concentre quasiment tous les grands défis de la société moderne et de la ville, en particulier celui de l'exclusion, au sens le plus âpre et le plus grave.

Soyez persuadée que nous sommes mobilisés. Je ne verrais d'ailleurs que des avantages à ce que Mme Moisan, lorsqu'elle aura avancé sa mission, assiste à une réunion de vos commissions. Vous pourriez ainsi dialoguer avec elle et apporter vos contributions d'hommes et de femmes de terrain, confrontés à ces problèmes, tout en réfléchissant à la façon de mettre en place un système qui soit efficace en ce domaine.

Il faut savoir que certains de ceux qu'on appelle les

« enfants perdus », sont devenus de grandes vedettes de télévision, de cinéma ou dirigent des entreprises parmi les plus grandes en France. Vous seriez surpris si je dévoilais le nom d'une ou deux grandes personnalités du monde des affaires qui figurait dans cette catégorie.

Autrement dit, pour moi, il n'y a pas d'orientation qui doive être définitive. Je crois profondément que l'acquis est supérieur à l'inné ; je dirai même que c'est la base de mon engagement de socialiste. Je ne pourrais donc pas me satisfaire du travail que nous faisons ensemble si nous n'apportions pas ne serait-ce qu'un début d'élément de réponse à cette question. Je ne m'engage pas à résoudre ce problème, car je sais qu'il est immense, mais je considère que c'est un défi que nous devons relever.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à Mme Odette Trupin.

M me Odette Trupin.

Monsieur le ministre, le 13 novembre 1997, j'avais attiré votre attention sur le problème de la formation des adultes, mission fondamentale du système éducatif selon les termes de la loi d'orientation du 10 juillet 1989.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 21 OCTOBRE 1998

La réponse que vous m'aviez faite manifestait alors un intérêt, un engagement et des interrogations quant à l'organisation la plus appropriée pour mener à bien cette mission, notamment au sein du second degré dans les GRETA. Vous avez vous-même montré votre détermination pour que votre ministère ne soit plus simplement c elui de l'enfance et de l'adolescence, mais qu'il prenne également en compte les caractères permanents et continus de la formation.

A l'heure où la Communauté européenne s'oriente résolument vers l'éducation des citoyens tout au long de la vie, je m'interroge sur la place que l'éducation nationale française va prendre dans cet ambitieux projet. Faudrait-il, à l'heure où l'école, confinée dans son huis-clos pédagogique, manifeste quelques poussées convulsives rémanentes, abandonner au seul secteur privé et associatif la formation permanente des adultes en tant que salariés et en tant que citoyens ? Depuis votre arrivée, vous vous êtes singularisé, monsieur le ministre, par un foisonnement d'idées, d'initiatives, de consultations, de tables rondes, marquant votre volonté forte de rénovation du système éducatif dans le cadre du

XXIe siècle et d'une approche qualitative. Pouvez-vous me rassurer sur vos engagements et la place que compte prendre l'éducation nationale en matière de formation permanente ? Dans l'affirmative, pouvez-vous me dire si cette volonté sera inscrite dans l'exercice du budget de l'éducation nationale pour les années à venir ?

M. le président.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Madame la députée, j'ai déjà répondu à ce genre de questions hier. En effet, la formation continue est au coeur de notre projet universitaire. Je suis à l'origine d'un texte... qui a finalement été soumis au Parlement par Jack Lang, sur la validation diplomante des acquis professionnels. C'est une base qui a beaucoup de mal à être utilisée, en raison de résistances puissantes à cette idée que l'on peut valider des acquis professionnels sous forme de diplôme.

Nous avons organisé cette année un concours entre les universités. Treize d'entre elles ont été primées et sont restées ouvertes tout l'été. Grâce à cela, nous avons pu dispenser une formation continue à des informaticiens, dont la France a besoin, et nous allons continuer. Il était d'ailleurs intéressant de constater que, alors que quasiment toutes les universités françaises avaient soumis des projets pour ce concours, celles qui ont été choisies appartiennent à des types extrêmement divers : universités traditionnelles de grandes villes, nouvelles universités, universités monodisciplinaires ou pluridisciplinaires. Ce projet est donc au coeur de notre démarche. Vous avez aussi souligné que le recteur Jean-Paul de Gaudemar...

M. Jean-Pierre Baeumler.

Excellent recteur !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

... venait de me remettre le premier rapport de la table ronde sur la formation continue. Je vous propose à cet égard de distinguer dans ce mot, qui est devenu indéfini, ou plutôt polymorphe, trois concepts différents.

Le premier, c'est l'éducation continue. Elle consiste, pour un professeur, par exemple, à se tenir au courant des découvertes scientifiques au fur et à mesure qu'elles se font pour rester performant. Nous agissons en la matière dans l'enseignement secondaire ainsi que dans l'enseignement primaire et nous donnerons des éclaircissements le moment venu - des négociations sont en cours.

Le deuxième concept, c'est la formation continue qualifiante - je propose ce vocabulaire à la suite du rapport du recteur de Gaudemar -, c'est-à-dire la formation continue qui permet d'acquérir une nouvelle qualification, mais dans le cadre structurel et institutionnel dans lequel celui qui la suit se trouve déjà. L'exemple type, c'est celui d'une secrétaire de direction, d'un administratif, ou encore d'un professeur qui souhaite se former aux nouvelles technologiques.

Le troisième concept est ce que le recteur de Gaudemar appelle la formation continue validante, c'est-à-dire celle qui est validée par un diplôme ou qui, du moins, donne lieu à une reconnaissance, quelle qu'en soit la forme. Et là, bien sûr, on bute sur un problème très compliqué. Les négociations que nous menons avec le patronat sont très difficiles. Mais nous rencontrons aussi des difficultés, je vous le dis franchement, avec les règles de la fonction publique. En effet, celui qui acquiert une qualification demande, naturellement, à avancer dans la grille indiciaire. C'est pourquoi on nous dit : n'allez pas trop vite ! Voilà donc les trois types de formation continue que l'on peut distinguer. Dans ce domaine, nous avançons.

Mais, si ce dossier constitue, pour ce qui est de l'enseignement supérieur, l'une de mes grandes priorités avec l'internationalisation, je ne vous dis pas pour autant que les choses vont être simples.

Ce sera un combat difficile, je le signale au passage avec un exemple précis sur lequel je vais m'attarder, car il me faut informer certains députés de l'opposition de ce que nous faisons de concret - je vais d'ailleurs lancer un petit formulaire qui leur sera régulièrement adressé à cet effet ! (Sourires.)

L'exemple en question, c'est celui de la mise en place d'une agrégation interne en droit et en économie. Quelle opposition fabuleuse ! L'idée qu'un jury puisse décerner l'agrégation de droit et celle d'économie en prenant en compte la formation continue provoque une allergie absolument extraordinaire. Et pourtant, il faut savoir que le nombre de candidats à l'agrégation dite interne en économie a été deux fois et demie supérieur au nombre de candidats à l'agrégation externe. C'est donc une notion difficile.

Nous étudions, en ce moment, le modèle danois.

Pourquoi le modèle danois ? Parce que le Danemark est le pays d'Europe où le taux de formation continue est le plus élevé. Devant les résistances sociales, politiques, psychologiques qu'ils ont rencontrées, les Danois ont adopté la méthode suivante. Ils ont institué une « trame » de diplômes de formation initiale et une autre de formation continue, avec des appellations différentes. Et ils ont mis en place un système d'équivalences entre les deux trames.

Le fait que les diplômes équivalents ne portent pas tout à fait le même nom facilite les choses. Les Danois estiment que la question de la reconnaissance des équivalences relève des relations sociales, que c'est aux partenaires sociaux d'en discuter. Nous sommes donc en train d'étudier ce modèle pour voir s'il serait transposable en France.

Enfin, dernier problème : celui des GRETA. C'est un outil qui a été efficace, mais qui n'est plus très utilisé, il faut le dire, depuis que la formation professionnelle a été transférée aux régions. Cela dit, les GRETA fonctionnaient sur un mode un peu étrange : une espèce de libéralisme d'Etat. Ils vendaient leurs prestations, y compris à des enseignants, ce que je trouve un peu « limite », géraient du personnel, bénéficiaient de ristournes sous forme de primes et l'Etat, lui, ne profitait de rien. Or


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 21 OCTOBRE 1998

maintenant qu'ils sont en difficulté, ils se tournent vers nous en nous demandant de les aider, de reprendre le personnel, d'assurer le financement ! Je ne dis pas non, mais pas à n'importe quelles conditions. C'est en effet le moment de discuter. Si on leur consacre de l'argent, en particulier si l'on gère les problèmes de personnel, si on les remet sur pied, il faudra que l'Etat soit associé aux bénéfices. Excusez-moi cet esprit un peu comptable, mais cela me paraît normal. Le libéralisme d'Etat, je n'aime pas beaucoup cela.

Donc, voilà le panorama sur ce problème de la formation continue qualifiante et sur la manière de procéder. Si les débats généraux sont impossibles, je vous propose là encore d'avoir une discussion commission sur ce sujet. Il y a un clivage fondamental entre ceux qui croient que l'inné est plus important que l'acquis - c'est une illusion - et ceux qui croient le contraire. Personnellement, je suis socialiste parce que je crois que l'acquis est supérieur à l'inné.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Mme Marie-Jo Zimmermann et M. Robert Poujade.

Mais nous aussi !

M. le président.

Nous en avons terminé avec les questions.

ÉDUCATION NATIONALE,

RECHERCHE ET

TECHNOLOGIE I. - Enseignement scolaire

M. le président.

J'appelle les crédits inscrits à la ligne

« Education nationale, recherche et technologie » : "I. - Enseignement scolaire". »

ÉTAT B Répartition des crédits applicables aux dépenses ordinaires des services civils (mesures nouvelles)

« Titre III : 2 892 090 526 francs ;

« Titre IV : 2 151 257 711 francs. »

ÉTAT C Répartition des autorisations de programme et des crédits de paiement applicables aux dépenses en capital des services civils (mesures nouvelles)

TITRE V. - INVESTISSEMENTS EXÉCUTÉS PAR L'ÉTAT

« Autorisations de programme : 623 000 000 francs ;

« Crédits de paiement : 444 960 000 francs. »

TITRE VI. - SUBVENTIONS D'INVESTISSEMENT ACCORDÉES PAR L'ÉTAT

« Autorisations de programme : 85 000 000 francs ;

« Crédits de paiement : 51 200 000 francs. »

Personne ne demande la parole ?...

Je mets aux voix le titre III.

M. Guy Hermier.

Le groupe communiste s'abstient.

(Le titre III est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix le titre IV.

M. Guy Hermier.

Abstention ! (Le titre IV est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre V.

M. Guy Hermier.

Abstention ! (Les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre V sont adoptés.)

M. le président.

Je mets aux voix les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre VI.

M. Guy Hermier.

Abstention ! (Les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre VI sont adoptés.)

M. le président.

En accord avec la commission des finances, j'appelle maintenant un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 79.

Après l'article 79

M. le président.

M. Migaud, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, et M. Guyard ont présenté un amendement, no 35, ainsi rédigé :

« Après l'article 79, insérer les dispositions suivantes :

« Éducation nationale, recherche et technologie :

« Art. 79 bis. - Les personnels en service au 1er janvier 1997 à l'Ecole nationale des métiers du bâtiment (Felletin, Creuse), intégrée dans l'enseignement public en application de la loi no 59-1557 du 31 décembre 1959, qui justifient au 1er janvier 1998 de services effectifs d'une durée équivalente à un an au moins de services à temps complet, pourront à compter de cette date, sur leur demande et dans la limite des emplois budgétaires créés à cet effet, être nommés, puis titularisés, dans les corps correspondants de la fonction publique.

« Un décret en Conseil d'Etat fixera les conditions d'intégration, de vérification de l'aptitude professionnelle et de classement des personnels intéressés. »

La parole est à M. Jacques Guyard.

M. Jacques Guyard, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

Il s'agit d'un amendement de forme visant à intégrer au service public de l'éducation nationale l'Ecole nationale des métiers du bâtiment installée à Felletin, dans la Creuse, qui est un établissement historique, comme nous l'expliquera notre collègue Vergnier. Il s'agit surtout ici d'intégrer les personnels sur des emplois budgétaires créés à cet effet.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

Favorable.

M. le président.

La parole est à M. Michel Vergnier.

M. Michel Vergnier.

Rassurez-vous, mes chers collègues, il est tard et je n'abuserai pas de votre patience.

Cette affaire est exemplaire s'agissant de la collaboration qui peut exister entre l'Etat et les régions. C'est pour cette raison surtout que je tenais à m'exprimer. Cet amendement vise en effet à permettre à vingt-cinq personnes travaillant actuellement comme contractuels au lycée des métiers du bâtiment de Felletin, dans la Creuse, d'obtenir leur intégration, impatiemment attendue et surtout bien méritée, dans la fonction publique de l'éducation nationale.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 21 OCTOBRE 1998

Depuis que l'établissement de Felletin, ancienne école privée, Ecole nationale des métiers du bâtiment, a été transformée, à la fin de l'année 1997, en établissement public local d'enseignement grâce aux efforts conjoints, je le répète, de l'Etat et de la région, le 1er juin 1997 a été une date très importante. Les personnels administratifs, techniques et ouvriers licenciés de l'ancienne école privée ont en effet été repris à cette date sur des emplois précaires. Ils ont su s'adapter à la nouvelle situation de cet établissement essentiel pour notre département. Avec le personnel enseignant et la direction, ils ont contribué à la réussite de l'intégration de ce lycée dans l'enseignement public. Cet établissement est le leur. Ils veulent qu'il vive bien. Ils y mettent toute leur énergie et leur conscience professionnelle. Ils sont légitimement désireux d'obtenir un statut moins précaire ainsi qu'une reconnaissance professionnelle. Les postes réclamés étant prévus dans le budget, il serait normal qu'ils soient attribués aux personnels contractuels déjà en place. Ils en seront fort satisfaits. Ils vous en remercient par avance. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

35. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.

Nous avons terminé l'examen des crédits du ministère de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie concernant l'enseignement scolaire.

La suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 1999 est renvoyée à la prochaine séance.

2

DEPÔT D'UN RAPPORT D'INFORMATION

M. le président.

J'ai reçu, le 21 octobre 1998, de M. François Loncle, un rapport d'information, no 1141, déposé en application de l'article 145 du règlement par la commission des affaires étrangères, sur la mission effectuée en Algérie par une délégation de la commission.

3

DEPÔT D'UN PROJET DE LOI

REJETÉ PAR LE SÉNAT

M. le président.

J'ai reçu, le 21 octobre 1998, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi relatif au mode d'élection des conseillers régionaux et des conseillers à l'Assemblée de Corse et au fonctionnement des conseils régionaux, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, et qui a fait l'objet d'un vote de rejet par le Sénat au cours de sa séance du 21 octobre 1998.

Ce projet de loi, no 1142, est renvoyé à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

4

ORDRE DU JOUR

DES PROCHAINES SÉANCES

M. le président.

Aujourd'hui, à neuf heures, première séance publique : Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 1999 (no 1078) : M. Didier Migaud, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport no 1111).

Aménagement du territoire et environnement : Environnement : M. Michel Suchod, rapporteur spécial, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe no 7 au rapport no 1111) ; M. Stéphane Alaize, rapporteur pour avis, au nom de l a commission de la production et des échanges (avis no 1116, tome IV).

A quinze heures, deuxième séance publique : Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 1999 (no 1078) : M. Didier Migaud, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport no 1111).

Equipement et transports : Transports terrestres : M. Jean-Louis Idiart, rapporteur spécial, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe no 30 au rapport no 1111). Equipement et transports terrestres : M. Jean-Jacques Filleul, rapporteur pour avis, au nom de la commission de la production et des échanges (avis no 1116, tome XIV). Mer : M. Guy Lengagne, rapporteur spécial, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe no 27 au rapport no 1111). Transports maritimes et fluviaux : M. André Capet, rapporteur pour avis, au nom de la commission de la production et des échanges (avis no 1116, tome XV). Transport aérien et météorologie : M. François d'Aubert, rapporteur spécial, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe no 29 au rapport no 1111). Transports aériens : M. François Asensi, rapporteur pour avis, au nom de la commission de la production et des échanges (avis no 1116, tome XIII).

A vingt et une heures, troisième séance publique : Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.

La séance est levée.

(La séance est levée, le jeudi 22 octobre 1998, à zéro heure quarante.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 21 OCTOBRE 1998

TRANSMISSION DE PROPOSITIONS D'ACTES COMMUNAUTAIRES

M. le Premier ministre a transmis, en application de l'article 88-4 de la Constitution, à M. le président de l'Assemb lée nationale, les propositions d'actes communautaires suivantes : Communication du 20 octobre 1998 No E 1163. Proposition de directive du Conseil modifiant la directive 91/440/CEE relative au développement de chemins de fer communautaires. Proposition de directive du Conseil modifiant la directive 95/18/CE concernant les licences des entreprises ferroviaires. Proposition de directive du Conseil concernant la répartition des capacités d'infrastructure ferroviaire et la certification en matière de sécurité. Document de travail de la Commission : commentaire des différents articles de la proposition de directive concernant la répartition des capacités d'infrastructure ferroviaire, la tarification de l'infrastructure ferroviaire et la certification en matière de sécurité (COM [98] 480 final).

No E 1164. Proposition de règlement (CE) du Conseil relatif à une politique de capacité des flottes communautaires dans la navigation intérieure en vue de promouvoir le transport par voie d'eau (COM [98] 541 final).