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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 30 OCTOBRE 1998

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. YVES COCHET

1. Loi de financement de la sécurité sociale pour 1999.

Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 7702).

Discussion des articles (suite) (p. 7702)

Article 23 (suite) (p. 7702)

M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé.

Amendements nos 28 de la commission des finances et 65 de la commission des affaires culturelles, avec le sousamendement no 387 de M. Accoyer, et amendement no 174 de M. Barrot : MM. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis de la commission des finances ; Claude Evin, rapporteur de la commission des affaires culturelles, pour l'assurance maladie et les accidents du travail ; Bernard Accoyer. - Retrait du sous-amendement no 387.

MM. le secrétaire d'Etat, Bernard Accoyer, le rapporteur, le rapporteur pour avis. - Retrait des amendements nos 28 et 65 ; adoption de l'amendement no 174.

Amendement no 399 de la commission des affaires culturelles : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Retrait.

Amendement no 66 de la commission des affaires culturelles : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.

Amendement no 172 de M. Barrot : MM. Jacques Barrot, le rapporteur, le secrétaire d'Etat.

Amendements nos 67 et 416 de la commission des affaires culturelles. - Rejet de l'amendement no 172 ; adoption des amendements nos 67 et 416.

Amendement nos 69 de la commission des affaires culturelles et 170 de M. Barrot : MM. le rapporteur, Jacques Barrot. - Retrait de l'amendement no 170.

M. le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement no

69. Amendement no 171 de M. Barrot, avec le sous-amendement no 436 de M. Préel, et amendement no 20 rectifié de la commission des finances, avec le sous-amendement no 466 du Gouvernement : MM. Jacques Barrot, JeanLuc Préel, le rapporteur pour avis, le secrétaire d'Etat. Retrait de l'amendement no 20 rectifié.

MM. Jacques Barrot, le président, le rapporteur.

Suspension et reprise de la séance (p. 7707)

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. - Retrait du sous-amendement no 436 ; adoption du sous-amendement no 446 rectifié du Gouvernement et de l'amendement no 171 modifié.

Adoption de l'article 23 modifié.

Article 24 (p. 7707)

MM. Jacques Barrot, Jean-Luc Préel, Bernard Accoyer,

M me Muguette Jacquaint, MM. François Goulard, Thierry Mariani, Jean-Paul Bacquet, le rapporteur pour avis, Mme la ministre.

Amendement de suppression no 302 de M. Préel : M. JeanLuc Préel, Mme la ministre, M. le rapporteur. - Rejet.

Amendement no 415 du Gouvernement : Mme la ministre,

M. le rapporteur. - Adoption.

Amendements nos 70 de la commission des affaires culturelles, 304 de M. Bur et 178 de M. Barrot : M. le rapporteur. - Retrait de l'amendement no

70. M. Jean-Luc Préel, Mme la ministre. - Retrait des amendements nos 304 et 178.

Amendement no 177 de M. Barrot : MM. Jean-Luc Préel, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.

Amendement no 71 de la commission des affaires culturelles : M. le rapporteur, Mme la ministre. - Adoption.

Amendement no 303 de M. Bur : MM. Jean-Luc Préel, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.

Amendement no 208 de M. Goulard : MM. François Goulard, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.

Amendement no 72 de la commission des affaires culturelles : M. le rapporteur, Mme la ministre. - Adoption.

Amendement no 17 rectifié de la commission des finances : MM. le rapporteur pour avis, le rapporteur, Mme la ministre. - Adoption de l'amendement no 17, deuxième rectification.

Amendement no 18 de la commission des finances : M. le rapporteur pour avis. - Retrait.

Adoption de l'article 24 modifié.

Après l'article 24 (p. 7718)

Amendement no 188 de M. Accoyer : MM. Bernard Accoyer, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.

Article 25 (p. 7718)

MM. Bernard Accoyer, Maxime Gremetz, François Goulard, le rapporteur, le secrétaire d'Etat.

Amendements de suppression nos 209 de M. Goulard et 305 de M. Foucher : MM. François Goulard, Jean-Luc Préel, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet.

Amendements identiques nos 23 de la commission des finances et 73 de la commission des affaires culturelles :

M. le rapporteur, Mme la ministre. - Adoption.

Amendements identiques nos 74 de la commission des affaires culturelles et 19 de la commission des finances : MM. le rapporteur, le rapporteur pour avis, Mme la ministre, MM. Jean-Luc Préel, Jean Le Garrec, président d e la commission des affaires culturelles ; Bernard Accoyer. - Adoption.

Amendements identiques nos 76 de la commission des affaires culturelles et 21 de la commission des finances : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.

Amendement no 75 rectifié de la commission des affaires culturelles : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. Adoption.

Amendement no 189 de M. Accoyer : MM. Bernard Accoyer, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet.

Amendements nos 77 et 78 de la commission des affaires culturelles : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. Adoptions.

Amendement no 79 de la commission des affaires culturelles : M. le rapporteur, Mme la ministre. - Adoption.

Amendements nos 81 de la commission des affaires culturelles et 22 de la commission des finances : M. le rapporteur, Mme la ministre, M. le rapporteur pour avis. Retrait de l'amendement no 22 ; adoption de l'amendement no

81.


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Amendement no 80 de la commission des affaires culturelles : M. le rapporteur, Mme la ministre. - Adoption.

Amendement no 82 de la commission des affaires culturelles : M. le rapporteur, Mme la ministre. - Adoption.

Adoption de l'article 25 modifié.

Article 26 (p. 7727)

Le Gouvernement a retiré cet article.

Après l'article 26 (p. 7727)

Amendement no 85 rectifié de la commission des affaires culturelles : M. le rapporteur, Mme la ministre, M. François Goulard. - Adoption.

Amendement no 88 de la commission des affaires culturelles : M. le rapporteur, Mme la ministre, M. le président de la commission. - Retrait.

Article 27 (p. 7728)

MM. Jean-Luc Préel, Bernard Accoyer, Pascal Terrasse, Yves Bur, Fançois Goulard, Maxime Gremetz, le président de la commission, Mme la ministre.

Amendement de suppression no 125 de Mme Fraysse. Rejet.

Amendement no 24 de la commission des finances : MM. le rapporteur pour avis, le rapporteur, Mme la ministre. Adoption.

Amendement no 90 de la commission des affaires culturelles : M. le rapporteur, Mme la ministre. - Adoption.

Amendement no 89 de la commission des affaires culturelles : M. le rapporteur, Mme la ministre. - Adoption.

Adoption de l'article 27 modifié.

Après l'article 27 (p. 7733)

Amendement no 447 du Gouvernement : Mme la ministre, MM. le rapporteur, Pascal Terrasse, Bernard Accoyer.

Sous-amendement no 449 de M. Accoyer : M. le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet du sous-amendement no 449 ; adoption de l'amendement no 447.

Amendement no 435 du Gouvernement : Mme la ministre, MM. le rapporteur, Jean-Luc Préel. - Adoption.

Article 28. - Adoption (p. 7735)

MM. Jean-Luc Préel, le président.

Suspension et reprise de la séance (p. 7736)

Article 29 (p. 7736)

MM. Maxime Gremetz, Jean-Luc Préel, Bernard Accoyer.

Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.

2. Ordre du jour des prochaines séances (p. 7738).


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COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. YVES COCHET,

vice-président

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures.)

1

LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 1999 Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 (nos 1106, 1148, tomes I à IV).

Discussion des articles (suite)

M. le président.

Hier soir, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles et s'est arrêtée à l'article 23 après avoir entendu les orateurs inscrits sur l'article.

Article 23

M. le président.

Je rappelle les termes de l'article 23 :

« Art. 23. - I. - Il est inséré, après l'article L. 512-2 du code de la santé publique, un article L. 512-3 ainsi rédigé :

« Art. L. 512-3 . - Le pharmacien ne peut délivrer un médicament ou produit autre que celui qui a été prescrit qu'avec l'accord exprès et préalable du prescripteur, sauf en cas d'urgence et dans l'intérêt du patient.

« Toutefois, il peut délivrer par substitution à la spécialité prescrite une spécialité du même groupe générique à condition que le prescripteur n'ait pas exclu cette possibilité, pour des raisons particulières tenant au patient, par une mention expresse portée sur la prescription, et sous réserve, en ce qui concerne les spécialités figurant sur la liste prévue à l'article L. 162-17 du code de la sécurité sociale, que cette substitution s'effectue dans les conditions prévues par l'article L. 162-16 de ce code.

« Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions d'application du présent article. »

« II. Le premier alinéa de l'article L. 601-6 du code de la santé publique est modifié comme suit :

« 1o A la première phrase, après les mots : « d'une autre spécialité », sont insérés les mots : « , appelée spécialité de référence, » et les mots : « l'autre spécialité » sont remplacés par les mots : « la spécialité de référence » ;

« 2o Après la première phrase, il est inséré une phrase ainsi rédigée :

« La spécialité de référence et les spécialités qui en sont génériques constituent un groupe générique. »

« III. L'article L. 716-10 du code de la propriété intellectuelle est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« L'infraction prévue au b de l'alinéa précédent n'est pas constituée en cas d'exercice par un pharmacien de la faculté de substitution prévue à l'article L. 512-3 du code de la santé publique. »

« IV. A la section IV du chapitre II du titre VI du livre 1er du code de la sécurité sociale, les deuxième, troisième et quatrième alinéas de l'article L. 162-16 sont remplacés par les trois alinéas suivants :

« Lorsque le pharmacien d'officine délivre, en application du deuxième alinéa de l'article L. 512-3 du code de la santé publique, une spécialité figurant sur la liste prévue à l'article L. 162-17 autre que celle qui a été prescrite, cette substitution ne doit pas entraîner une dépense supplémentaire pour l'assurance maladie.

« En cas d'inobservation de cette condition, le pharmacien verse à l'organisme de prise en charge, après qu'il a été mis en mesure de présenter ses observations, une somme correspondant à la dépense supplémentaire mentionnée à l'alinéa précédent, qui ne peut toutefois être inférieure à un montant forfaitaire défini par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale, de la santé et du budget.

« Pour son recouvrement, ce versement est assimilé à une cotisation de sécurité sociale. »

La parole est à M. le secrétaire d'Etat à la santé.

M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé.

Je souhaite répondre sommairement à quelques arguments avancés hier dans la discussion sur l'article, et dont je ne sais pas très bien, d'ailleurs, s'ils traduisaient une hostilité au médicament générique et à la substitution, s'ils étaient employés simplement parce qu'il faut bien s'opposer, ou encore s'ils étaient inspirés par le souci louable de sécuriser le système, et surtout le patient.

Ces arguments portaient d'abord sur la responsabilité du pharmacien. La loi protège le pharmacien dès lors qu'il respecte les règles de substitution qui lui permettent, une fois échu le brevet protégeant le médicament princeps, de délivrer un médicament générique, c'est-à-dire une molécule identique et répondant à des normes de bonne fabrication.

Le malade, quant à lui, peut refuser d'acheter le générique qu'on lui propose et exiger la spécialité qui lui a été prescrite en se rendant éventuellement dans une autre pharmacie. Son libre choix, son libre consentement est toujours de règle.

M. Bardet est favorable à un prix dégressif du médicament princeps. Il est évident que certaines spécialités ont vu leur prix volontairement abaissé pour qu'elles ne pâtissent pas de la survenue éventuelle d'un générique, c'est-à-dire le même médicament devenu moins cher. Il est clair en effet que, si le générique est plus cher que le princeps, il n'y a aucune raison de procéder à la substitution.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 30 OCTOBRE 1998

Un sondage récent, publié le 24 octobre par le Moniteur des pharmacies indique que 96 % des pharmaciens sont pour le générique et la manière dont nous le proposons, 3 % contre et 1 % sans opinion. Quant aux médecins, 53 % sont contre, 60 % selon d'autres sondages.

Pour ne pas allonger le débat, je vous épargnerai la lecture d'un ouvrage formidable sur la politique du gouvernement précédent concernant le générique. Mais j'en déduis que lorsque nous sommes en passe de réussir ce que vous avez seulement tenté de faire, vous vous y opposez. Est-ce vraiment nécessaire alors que ce n'est pas 4 milliards de francs que nous pourrons ainsi gagner ; comme 50 % des molécules françaises sont génériquables, ce serait plutôt 11 milliards ?

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Très bien !

M. le président.

Nous passons aux amendements à l'article 23.

Les amendements nos 4 et 5 de M. Georges Sarre ne sont pas soutenus.

Je suis saisi de trois amendements, nos 28, 65 et 174, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 28, présenté par M. Cahuzac, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, est ainsi rédigé :

« Après le troisième alinéa du I de l'article 23, insérer l'alinéa suivant :

« La substitution doit faire l'objet, lors de la délivrance de la spécialité, d'une mention expresse, par le pharmacien, sur l'ordonnance. »

L'amendement no 65, présenté par M. Evin, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, et les commissaires membres du groupe socialiste, est ainsi rédigé :

« Avant le dernier alinéa du I de l'article 23, insérer l'alinéa suivant :

« Le pharmacien mentionne sur l'ordonnance toute substitution à laquelle il procède. »

Sur cet amendement, M. Accoyer a présenté un sousamendement, no 387, ainsi rédigé :

« Au début de l'amendement no 65, insérer les mots : "Après que le patient a accepté la substitution". »

L'amendement no 174, présenté par MM. Barrot, Préel et Bur, est ainsi rédigé :

« Avant le dernier alinéa du I de l'article 23, insérer l'alinéa suivant :

« Lorsque le pharmacien délivre par substitution à la spécialité prescrite une spécialité du même groupe générique, il doit inscrire le nom du générique qu'il a délivré. »

La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour soutenir l'amendement no

28.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

Cet amendement tend à organiser le droit de substitution du pharmacien. Celui-ci doit inscrire sur l'ordonnance le nom du générique qu'il délivre. Imaginons une ordonnance comportant plusieurs lignes. Le patient, qui est le destinataire des produits qu'elle prescrit, doit savoir précisément quel médicament a été substitué à un autre, pour une stricte observance des prescriptions de son médecin.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement no

65.

M. Claude Evin, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

Cet amendement a le même objet que celui présenté par M. Cahuzac au nom de la commission des finances. Il répond également à une préoccupation exprimée hier dans le débat, notamment par M. Bardet. Toutefois, la commission des affaires sociales a préféré sa propre formulation ; elle a donc rejeté l'amendement no 28 et adopté l'amendement no

65.

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir le sous-amendement no 387.

M. Bernard Accoyer.

Il est retiré.

M. le président.

Le sous-amendement no 387 est retiré.

L'amendement no 174 n'est pas soutenu.

Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements nos 28 et 65.

M. le secrétaire d'Etat à la santé.

La rédaction proposée par M. Barrot dans l'amendement no 174 me semble la meilleure. Je demanderai donc à M. Cahuzac et à M. Evin de bien vouloir retirer leur amendement à son profit.

M. le président.

M. Barrot est absent et son amendement n'a pas été soutenu.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Il est repris par le Gouvernement.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur l'amendement no 174 ?

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

La rédaction de M. Barrot semble, en effet, encore plus précise que celle de la commission.

Je retire donc l'amendement no

65.

M. le président.

L'amendement no 65 est retiré.

Retirez-vous également le vôtre, monsieur le rapporteur pour avis ?

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

D'autant plus volontiers que je préfère voter celui de M. Barrot que celui de la commission des affaires sociales, afin de protester contre son impérialisme ! (Sourires.)

M. le président.

L'amendement no 28 est retiré.

Je mets aux voix l'amendement no 174.

Mme Muguette Jacquaint.

Le groupe communiste s'abstient ! (L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Evin, rapporteur, et les commissaires membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, no 399, ainsi rédigé :

« I. - Compléter le dernier alinéa du II de l'article 23 par la phrase suivante :

« Une spécialité ne peut être reconnue comme spécialité de référence que si les titres de propriété industrielle, mentionnés à l'article L. 611-2 du code de la propriété intellectuelle, qui protègent ses indications principales ou complémentaires, sont épuisés, cédés ou concédés. »

« II. - En conséquence, à la fin de l'avant-dernier alinéa (2o ) de cet article, substituer aux mots : "une phrase ainsi rédigée", les mots : "deux phrases ainsi rédigées ».

La parole est à M. le rapporteur.

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

Cet amendement, adopté par la commission des affaires sociales, a surtout pour objet de


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 30 OCTOBRE 1998

susciter un débat sur une question intéressante : que se passe-t-il lorsque les titres de propriété industrielle d'une spécialité médicamenteuse ne sont pas totalement dans le domaine public - par exemple si elle contient deux principes actifs dont un seul est génériquable - et qu'un générique est cependant mis sur le marché. La commission serait très désireuse d'entendre la réponse du Gouvernement.

M. le président.

Quelle est cette réponse, monsieur le secrétaire d'Etat ?

M. le secrétaire d'Etat à la santé.

Aux termes de l'article L. 601-6 du code de la santé publique et des textes réglementaires pris pour son application, les critères qui permettent la reconnaissance de la qualification de générique d'une spécialité donnée - appelée spécial ité de référence - sont des critères de santé publique. Il s'agit, pour l'Agence du médicament, de vérifier l'identité de la composition en principes actifs, l'identité de forme pharmaceutique et la bioéquivalence du médicament géné-r ique par rapport au médicament qu'il revendique comme comparateur.

L'Agence du médicament n'est donc pas tenue, sauf si elle est saisie d'une contestation, de vérifier les titres de propriété industrielle de la spécialité de référence. Il en est de même pour la délivrance de l'autorisation de mise sur le marché qui ne donne pas lieu à vérification a priori de l'existence des droits de propriété industrielle ou d'exploitation du responsable de la mise sur le marché du produit.

Il est logique que l'Agence du médicament n'ait pas à opérer de tels contrôles, qui ne relèvent pas de ses compétences. En outre, elle n'a pas à s'immiscer dans des litiges de droit privé qui peuvent opposer des entreprises concurrentes quant à leurs droits respectifs en matière de propriété industrielle.

Le fait de se référer à une spécialité préexistante pour revendiquer la qualité de générique pour un médicament relève de la responsabilité du génériqueur sous le contrôle des tribunaux. C'est d'ailleurs le même raisonnement qui prévaut au niveau européen en ce qui concerne la protection administrative des données, puisque la directive no 65-CEE précise à l'article 48 que ses dispositions s'appliquent sans préjudice du droit relatif à la protection industrielle et commerciale.

Nous sommes donc défavorables à l'amendement de la commission et nous serions reconnaissants à M. Evin de le retirer.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

Comme je l'ai indiqué, la commission souhaitait surtout obtenir des précisions à ce sujet.

Le Gouvernement lui ayant apporté une réponse utile, je retire l'amendement.

M. le président.

L'amendement no 399 est retiré.

M. Evin, rapporteur, et les commissaires membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, no 66, ainsi rédigé :

« Dans le dernier alinéa du III de l'article 23, substituer au mot : "prévue", les mots : "dans les conditions prévues" ».

La parole est à M. le rapporteur.

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

Amendement rédactionnel.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à la santé.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

66. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

MM. Barrot, Préel et Bur ont présenté un amendement, no 172, ainsi rédigé :

« Substituer aux deuxième et avant-dernier alinéas du IV de l'article 23 les trois alinéas suivants :

« La délivrance par le pharmacien d'officine des pécialités figurant sur la liste prévue par l'article L.

162-17 autres que celles qui ont été prescrites ne peut entraîner de dépenses supplémentaires pour l'assurance maladie.

« Les conditions d'appréciation de cette dépense sont définies par convention à conclure entre l'organisme de prise en charge et les principaux syndicats représentatifs des pharmaciens d'officine.

« En cas d'inobservation de cette condition, le pharmacien verse à l'organisme de prise en charge, après qu'il a été mis en mesure de présenter ses observations, une somme correspondant à la dépense supplémentaire mentionnée aux alinéas précédents. »

La parole est à M. Jacques Barrot.

M. Jacques Barrot.

Le présent amendement prévoit une appréciation globale des coûts éventuellement générés par la substitution au sein d'une officine. Une appréciation produit par produit paraît difficilement applicable.

En outre, il ne faut pas décourager le pharmacien d'user de son droit de substitution. S'il vit dans la crainte de délivrer un générique qui, de manière occasionnelle, peut être un peu plus cher qu'un autre, il faut éviter de le sanctionner.

Il paraît préférable de renvoyer à la négociation conventionnelle les conditions d'appréciation du surcoût.

Celui-ci demeurera évidemment l'exception, puisque la finalité de la politique des génériques est de permettre à l'assurance maladie de réaliser des économies. Mieux vaut donc, me semble-t-il, opter pour un mécanisme élaboré dans le cadre conventionnel qui permettrait de faire le point en fin d'année. Le système proposé à l'article 23 me paraît bien complexe, même si j'en comprends l'économie.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

M. Barrot pose un vrai problème qui n'a pas échappé à la commission puisqu'elle a adopté, pour y répondre, les amendements nos 67 et 416, que je souhaiterais, monsieur le président, soutenir dès à présent.

M. le président.

Certainement, monsieur le rapporteur.

Je suis saisi de deux amendements, nos 67 et 416 ; présentés par M. Evin, rapporteur, et les commissaires membres du groupe socialiste.

L'amendement no 67, est ainsi rédigé :

« Dans l'avant-dernier alinéa du IV de l'article 23, après les mots : "ses observations", insérer les mots : "écrites, et si, après réception de celles-ci, l'organisme maintient la demande". »


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L'amendement no 416, est ainsi rédigé :

« I. - Compléter l'avant-dernier alinéa du IV de l'article 23 par la phrase suivante :

« Toutefois, l'organisme peut décider, si la dépense supplémentaire est inférieure à un montant fixé dans les mêmes conditions, de ne pas procéder au recouvrement. »

« II. - Compléter cet article par le paragraphe suivant :

« Les pertes de recettes sont compensées à due concurrence par une majoration de la contribution visée à l'article L. 136-7 du code de la sécurité sociale. »

Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

Le principe posé par le Gouvernement est que le droit de substitution doit impliquer une dépense moindre. C'est l'un des objectifs du développement des génériques. Mais le dispositif retenu est sans doute trop systématique et le risque est grand de voir le pharmacien durement sanctionné ou au moins automatiquement sanctionné pour des surcoûts de quelques francs.

La commission pense donc qu'il convient d'introduire un peu de souplesse dans le mécanisme en prévoyant que les observations présentées par le pharmacien pour se justifier pourront aboutir à l'exonérer du paiement de l'amende pour surcoût. Si tel n'était pas le cas, on pourrait se demander à quoi sert la possibilité donnée au pharmacien de présenter des observations. C'est l'objet de l'amendement no

67. Quant à l'amendement no 416, il précise que la caisse peut renoncer au recouvrement du surcoût s'il n'excède pas un montant fixé par arrêté ministériel. En effet, monsieur Barrot, il n'est pas possible que le « petit tunnel » dans les limites duquel la caisse pourrait ne pas demander le remboursement au pharmacien soit défini par convention. C'est pourquoi je vous demande de vous rallier aux amendements nos 67 et 416.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement sur les trois amendements ?

M. le secrétaire d'Etat à la santé.

Monsieur Barrot, le Gouvernement a signé avec les pharmaciens d'officine un protocole d'accord général qui prévoit notamment que la profession pourra signer une convention avec l'assurance maladie. Le Gouvernement entend proposer le plus rapidement possible au Parlement les dispositions nécessaires pour concrétiser cette orientation. Il est clair que la contribution du droit de substitution à la maîtrise des dépenses de l'assurance maladie devra faire partie des matières traitées par la convention.

Toutefois, monsieur Barrot, contrairement à ce que vous proposez dans votre amendement, il nous paraît nécessaire d'apprécier, produit par produit, l'économie liée à la substitution. Ce n'est qu'à cette condition que peut s'exercer un réel contrôle de l'application du principe d'économie. On voit mal les caisses rapprocher en fin d'année l'ensemble des prescriptions initiales et les comparer aux spécialités effectivement délivrées.

C'est pourquoi le Gouvernement est favorable aux amendements nos 67 et 416 de M. Evin et défavorable à l'amendement no 172 de M. Barrot.

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Les amendements nos 416 et 172 sont sensiblement différents, pour la bonne raison que celui de la commission laisse l'officine, au moment où elle va connaître une mutation importante avec le développement de la substitution générique, dans une incertitude sérieuse.

Nous avons bien compris que la volonté du Gouvernement était d'essayer de sauvegarder un réseau fragilisé depuis plusieurs années. Dans ces conditions, il nous paraît utile que l'appréciation globale du retentissement de la substitution sur l'équilibre général des officines soit prise en compte avant que ne s'exercent les conséquences prévues par le mécanisme conventionnel. C'est pourquoi l'amendement no 172 nous paraît meilleur.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

Monsieur Accoyer, je crains que nous ne nous soyons pas compris. Les amendements nos 67 et 416 de la commission répondent à la même préoccupation que celui de M. Barrot. Toutefois, il n'est pas possible de procéder par voie de convention, ne serait-ce que parce qu'il n'existe pas, actuellement, de mécanisme conventionnel entre les représentants des officines et les caisses de sécurité sociale. C'est pourquoi il me semble préférable d'adopter les amendements nos 67 et 416 plutôt que l'amendement no 172.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 172.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

67. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 416.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements, nos 69 et 170, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 69, présenté par M. Evin, rapporteur et les commissaires membres du groupe socialiste, est ainsi rédigé :

« Compléter l'article 23 par le paragraphe suivant :

« V. Les dispositions de l'article L.

365-1 du code de la santé publique sont également applicables aux pharmaciens. »

L'amendement no 170, présenté par MM. Barrot, Préel et Bur, est ainsi libellé :

« Compléter l'article 23 par le paragraphe suivant :

« V. - Il est inséré après l'article L. 592 du code de la santé publique un article L. 592-1 ainsi rédigé :

« Art. L.

592-1 Les règles fixées à l'article

L. 365-1 du code de la santé publique pour les membres des professions médicales visées au titre 1er du livre IV du présent code sont applicables aux pharmaciens d'officine. »

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement no

69.

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

Par cet amendement, la commission a souhaité assujettir les pharmaciens d'officine au dispositif prévu par l'article L. 365-1 du code de la santé, communément appelé « dispositif anti-cadeaux », qui s'applique aux médecins prescripteurs. Il semblait souhaitable, compte tenu du développement attendu du générique et


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du fait que les laboratoires pharmaceutiques seront en relation directe avec les pharmaciens, de demander que ces derniers soient régis par les mêmes conditions que les médecins prescripteurs.

M. le président.

La parole est à M. Jacques Barrot, pour soutenir l'amendement no 170.

M. Jacques Barrot.

Si l'on veut, en effet, que le droit de substitution prenne sa place dans le paysage, il faut prévoir des règles qui respectent une certaine éthique. Je remercie la commission d'y avoir veillé et je me rallie à son amendement. Je retire donc le mien.

M. le président.

L'amendement no 170 est retiré.

Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement no 69 ?

M. le secrétaire d'Etat à la santé.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

69. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements, nos 171 et 20 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 171, présenté par M. Barrot et M. Bur, est ainsi rédigé :

« Compléter l'article 23 par les deux paragraphes suivants :

« IV. - 1.

Le premier alinéa de l'article L.138.9 du code de le sécurité sociale est complété par la phrase suivante : "Ce plafond est porté à 10,74 % du prix fabricant hors taxe pour les spécialités génériques définies au premier alinéa de l'article L. 601.6 du code de la santé publique".

«

2. Le deuxièma alinéa de l'article L.

138.9 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :

« Le dépassement de ce plafond est passible d'une amende de 500 000 F et d'un emprisonnement de deux ans.

« V.Les dispositions du titre VI de l'ordonnance no 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et à la concurrence sont applicables aux infractions aux dispositions du paragraphe cidessus. »

Sur cet amendement, M. Préel a présenté un sousamendement, no 436, ainsi rédigé :

« Dans le premier alinéa de l'amendement no 171, substituer aux mots : "spécialités génériques définies", les mots : "groupes génériques définis". »

L'amendement no 20 rectifié, présenté par M. Cahuzac, rapporteur pour avis, est ainsi rédigé :

« Compléter l'article 23 par le paragraphe suivant :

« IV. Le premier alinéa de l'article L.

138-9 du code de la sécurité sociale est complété par les mots : ", ce taux étant porté à 10 % pour les spécialités génériques visées par l'article L.

601-6 du code de la santé publique". »

Sur cet amendement, le Gouvernement a présenté un sous-amendement, no 446, ainsi rédigé :

« Compléter l'amendement no 20 rectifié par les deux alinéas suivants :

« Le deuxième alinéa de l'article L.

138-9 du code de la sécurité sociale est remplacé par les dispositions suivantes :

« Les infractions aux dispositions prévues au présent article sont passibles des sanctions pénales a pplicables aux infractions mentionnées à l'article L.

162-38. Les dispositions du titre VI de l'ordonnance no 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence sont applicables à ces mêmes infractions. »

La parole est à M. Jacques Barrot, pour soutenir l'amendement no 171.

M. Jacques Barrot.

Cet amendement tend à relever le plafond des remises et ristournes qui peuvent être consenties aux pharmaciens d'officine de 2,5 % à 10,74 % du prix des spécialités pour les spécialités génériques.

Ainsi, les fabricants pourront développer leur marché par des ventes directes à l'officine grâce à des ristournes qui garantissent aux pharmaciens une marge proche de celle qu'ils auraient sur les spécialités de référence. Toutefois, cette ristourne est plafonnée à 10,74 % du prixfabricant hors taxe, ce qui équivaut à la marge des grossistes-répartiteurs, afin d'assurer la neutralité des circuits de distribution.

Quant au 2 de l'amendement il vise à garantir que le plafonnement sera effectif.

Cette disposition réaliste, qui autorise une ristourne plus favorable que les 2,5 % prévus sans aller toutefois au-delà d'un certain seuil pour ne pas nuire aux grossistes devrait organiser la distribution du générique dans des conditions convenables et éviter les tentations. Elle peut, en outre, s'appliquer tant à l'industrie pharmaceutique qu'aux officines.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Luc Préel, pour soutenir le sous-amendement no 436.

M. Jean-Luc Préel.

Cet amendement est excellent, mais l'article 23 définissant le « groupe générique » dans le code de la santé publique, il est normal, pour respecter la liberté commerciale, que tous les produits d'un même groupe générique soient soumis aux mêmes règles concurrentielles.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour soutenir l'amendement no 20 rectifié.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

L'objet de cet amendement est le même que celui que M. Barrot vient d'exposer. Il s'agit en effet de maintenir un écart dans les remises possibles et consenties aux pharmaciens entre les produits princeps et les génériques, de sorte que les pharmaciens soient incités, dans des limites raisonnables, et je crois que les taux proposés le sont, à pratiquer la subdivision.

J'aurais tendance à titre personnel à me rallier au taux de 10,74 % proposé par M. Barrot. Il me semble effectivement judicieux d'aligner la remise sur la marge des grossistes répartiteurs, afin de neutraliser ce secteur intermédiaire. Le but est bien clair, il s'agit d'inciter les pharmaciens à procéder aux substitutions.

J'aurais donc tendance à vouloir retirer l'amendement no 20 rectifié au profit de celui de M. Barrot.

M. Jacques Barrot.

Merci, monsieur Cahuzac !

M. le président.

Dans ces conditions, le Gouvernement ne pourra pas présenter son sous-amendement no 446.

M. le secrétaire d'Etat à la santé.

Ce sous-amendement est important !

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Pardonnezmoi pour le désordre ainsi créé dans le déroulement de la séance...


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M. le président.

Je vous en prie.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Les dispositions du sous-amendement no 446 du Gouvernement sont fort judicieuses, en effet. Il s'agit de s'assurer que les taux de remise sont correctement appliqués et ne sont pas dépassés par un certain nombre de laboratoires pharmaceutiques, comme c'est trop souvent le cas actuellement.

Autrement dit, au nom du bon déroulement de la séance, il me paraît difficile de retirer mon amendement comme je le voulais dans un premier mouvement, sauf à empêcher le Gouvernement de sous-amender.

M. Jean-Luc Préel.

A moins que le Gouvernement ne sous-amende l'amendement de M. Barrot au lieu de sousamender le vôtre, monsieur le rapporteur !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

En effet, le Gouvernement peut sous-amender dans les mêmes conditions l'amendement no 171 de M. Barrot.

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'Etat à la santé.

Le sous-amendement du Gouvernement tendait à remplacer le deuxième alinéa de l'article L. 138-9 du code de la sécurité sociale par les dispositions suivantes :

« Les infractions aux dispositions prévues au présent article sont passibles des sanctions pénales applicables aux infractions mentionnées à l'article L. 162-38. Les disposit ions du titre VI de l'ordonnance 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence sont applicables à ces mêmes infractions. »

Si vous en êtes d'accord, monsieur Barrot, nous pourrions ajouter ces dispositions dans l'amendement no 171.

Le sous-amendement du Gouvernement porterait donc sur l'amendement no 171 et non plus sur l'amendement no 20 rectifié.

M. le président.

La parole et à M. Jacques Barrot.

M. Jacques Barrot.

Je suis d'accord avec la proposition de M. le secrétaire d'Etat. Le sous-amendement du Gouvernement me semble pleinement justifié.

Toutefois, la précision apportée par le sous-amendement no 436 de M. Préel me paraissait également très intéressante. Peut-être pourrait-on également la soumettre vote de l'Assemblée ?

M. le président.

Est-ce à dire que les deux derniers alinéas de l'amendement no 171 seraient remplacés par le texte du sous-amendement 446 ? La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Il faut vérifier si nous sommes bien d'accord.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

Monsieur le président, manifestement, il faut remettre de l'ordre dans les différents amendements et sous-amendements. Une courte suspension de séance me semblerait donc opportune.

M. Germain Gengenwin.

Et voilà ! J'en étais sûr, vous demandez une suspension de séance pour ramener des députés sur les bancs socialistes ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La séance est suspendue pour une dizaine de minutes.

Suspension et reprise de la séance

M. le président.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à neuf heures trente, est reprise à neuf heures quarante.)

M. le président.

La séance est reprise.

Reprise de la discussion

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité, pour présenter le sousamendement no 446 rectifié du Gouvernement.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Nouss ouhaitons sous-amender l'amendement no 171 de M. Barrot en remplaçant ses deux derniers alinéas par les deux alinéas suivants :

« Le deuxième alinéa de l'article L. 138-9 du code de la sécurité sociale est remplacé par les dispositions suivantes :

« Les infractions aux dispositions prévues au présent article sont passibles des sanctions pénales applicables aux infractions mentionnées à l'article L. 162-38. Les dispositions du titre VI de l'ordonnance du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et à la concurrence sont applicables à ces mêmes infractions. »

M. Barrot nous a fait part de son accord.

M. le président.

Je mets donc aux voix le sousamendement no 446, tel qu'il vient d'être rectifié.

(Le sous-amendement, ainsi rectifié, est adopté.)

M. le président.

Le sous-amendement no 436 et l'amendement no 20 rectifié ayant été retirés, je mets aux voix l'amendement no 171, modifié par le sous-amendement no 446 rectifié.

(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'article 23, modifié par les amendements adoptés.

Mme Muguette Jacquaint.

Le groupe communiste s'abstient.

(L'article 23, ainsi modifié, est adopté.)

Article 24

M. le président.

« Art. 24. - I. - L'article L. 162-16-1 du code de la sécurité sociale est remplacé par les dispositions suivantes :

« Art. L. 162-16-1. - Le prix de vente au public de chacun des médicaments mentionnés au premier alinéa de l'article L. 162-17 est fixé par convention entre l'entreprise exploitant le médicament et le comité économique du médicament conformément à l'article L. 16217-4 ou, à défaut, par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale, de la santé et de l'économie, après avis du comité. La fixation de ce prix tient compte principalement de l'amélioration du service médical rendu apportée par le médicament, des prix des médicaments comparables, des volumes de vente prévus ou constatés ainsi que des conditions prévisibles et réelles d'utilisation du médicament.

« Ce prix comprend les marges prévues par l'arrêté interministériel mentionné à l'article L. 162-38 ainsi que les taxes en vigueur.


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« Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions d'application du présent article, et notamment les procédures et délais de fixation des prix.

« Sont constatées et poursuivies dans les conditions fixées par le titre VI de l'ordonnance no 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence, les infractions aux conventions et arrêtés mentionnés ci-dessus. »

« II. L'article L. 162-17-4 du code de la sécurité sociale est remplacé par les dispositions suivantes :

« Art. L. 162-17-4 . - En application des orientations qu'il reçoit annuellement des ministres compétents, le comité économique du médicament peut conclure avec des entreprises ou groupes d'entreprises des conventions d'une durée maximum de quatre années relatives à un ou à des médicaments visés au premier alinéa de l'article L. 162-17. Ces conventions déterminent les relations entre le comité et chaque entreprise, et notamment :

« 1o Le prix de ces médicaments et, le cas échéant, l'évolution de ces prix, notamment en fonction des volumes de vente ;

« 2o Le cas échéant, les remises prévues en application de l'article L. 162-18 ;

« 3o Les engagements de l'entreprise visant à la maîtrise de sa politique de promotion permettant d'assurer le bon usage du médicament ainsi que le respect des volumes de vente précités.

« Le comité économique du médicament assure un suivi périodique des dépenses de médicaments en vue de constater l'évolution de ces dépenses par rapport à l'objectif national de dépenses d'assurance maladie mentionné à l'article L.O. 111-3.

« Ce suivi comporte au moins deux constats à l'issue des quatre et huit premiers mois de l'année.

« Lorsque, à l'occasion de ce suivi, le comité constate que l'évolution des dépenses de médicaments n'est pas compatible avec le respect de l'objectif mentionné à l'alinéa précédent, il détermine les mesures de nature à permettre de le respecter. Dans ce cas, le comité économique du médicament peut demander la modification des prix des médicaments fixés par convention ; en cas de refus de l'entreprise concernée de conclure un avenant permettant de rendre la convention compatible avec le respect de l'objectif précité, le comité peut résilier la convention.

« Les modalités d'application du présent article, et notamment les conditions de révision et de résiliation des conventions, sont définies par décret en Conseil d'Etat. »

Plusieurs orateurs sont inscrits sur cet article.

La parole est à M. Jacques Barrot.

M. Jacques Barrot.

Bien qu'il y ait beaucoup à dire sur ce sujet, je me contenterai de rappeler pourquoi je suis très attaché à une politique conventionnelle en matière d'industrie pharmaceutique.

Il se trouve - je dirais presque malheureusement car cela me rappelle des souvenirs déjà anciens - que j'ai été en charge de ce domaine en 1980. A l'époque, nous avions essayé, sous la conduite de M. Raymond Barre, de faire pièce à la tentation, très française, d'administrer purement et simplement l'industrie du médicament.

Certes, l'activité de ce secteur économique a des incidences majeures sur l'assurance maladie : mais il n'en reste pas moins soumis à l'économie de marché. Nous avions alors commencé à jeter les bases d'une politique de conventionnement.

Malheureusement, elle a connu de nombreux avatars et l'on ne peut pas dire que la France a réussi à s'engager dans une véritable politique de conventionnement pluriannuelle. Cela me semble pourtant indispensable si l'on veut stimuler les efforts de l'industrie pharmaceutique en matière d'innovation et de recherche. En effet le désir d'aboutir au prix le plus bas, pour atteindre des objectifs à court terme, ne saurait servir seul de fil directeur. Il est également nécessaire de stimuler la recherche de molécules nouvelles et de thérapeutiques efficaces.

Cet article 24 pose une vraie question : comment peut-on faire du conventionnement en s'enfermant trop dans un objectif annuel ? Par définition, en effet, un conventionnement doit porter sur plusieurs années afin que l'on puisse suivre les évolutions concernant les volumes, les prix, l'intérêt thérapeutique attaché aux produits mis sur le marché...

Madame la ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, êtesvous bien sensibles à ce problème ? Si l'on veut vraiment des conventionnements solides et dignes de ce nom, il ne faut pas qu'ils soient dominés par des perspectives à court terme. Ainsi un laboratoire qui s'engage dans la recherche et l'innovation doit pouvoir évoluer favorablement sans craindre d'être, au premier tournant, si je puis dire, sanctionné pour des raisons de prix conjoncturelles.

Ma deuxième question est suscitée par le lien que l'on doit établir entre cet article et le suivant qui prévoit un mécanisme d'encadrement et de taxation par une régulation économique particulièrement sévère. Ce rapprochement me fait craindre que le conventionnement annoncé dans la loi ne soit qu'un simulacre et que l'on s'achemine vers l'administration pure et simple d'un pan entier de notre économie, répondant au voeu ancien de certains responsables du ministère des finances. Pourtant ce secteur a, lui aussi besoin de se confronter au marché et d'établir des calculs économiques convenables, s'il veut s'engager sur les voies de la recherche et de l'innovation.

Nous sommes donc très attachés à l'idée de conventionnement. M. Evin a écrit que sa mise en oeuvre avait été décevante, mais je serais tenté de lui répondre qu'il faut laisser vivre, perfectionner, évaluer de telles procédures. Or, en la matière, la France n'en est qu'aux balbutiements. Je suis convaincu qu'il ne faut pas renoncer car le conventionnement me semble la meilleure approche de la régulation dans un domaine économique majeur.

Enfin, derrière ce problème apparaît en filigrane l'emploi, dans plusieurs régions. Par exemple, mon ami G ermain Gengenwin en Alsace et moi-même en Auvergne y avons des pôles de recherche pharmaceutique dont certains sont français alors que d'autres appartiennent à des multinationales qui ont choisi d'investir dans notre pays. Ne leur donnons donc pas des signaux contraires avec le sentiment que nous voulons traiter ce problème par des méthodes qui ont fait long feu en mettant en place une sorte d'administration malthusienne et myope de ce grand secteur économique.

Peut-être ai-je été un peu long, monsieur le président, mais je tenais à insister auprès du Gouvernement afin qu'il soit bien conscient de l'ensemble de ces problèmes.

M. Germain Gengenwin.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel.

Nous avons déjà évoqué, hier matin, la situation de l'industrie pharmaceutique, notamment celle des entreprises françaises face à ce que l'on peut appeler, sans exagération « l'impôt recherche » que vous avez voulu leur imposer. Nous avons alors rappelé


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 30 OCTOBRE 1998

que la spécificité française, caractérisée depuis longtemps par une politique de prix bas, empêchait les entreprises de dégager des marges suffisantes. Cela les a donc conduites à accroître les volumes, ce qui n'est pas sain pour la santé de la population. La recherche française a ainsi été ruinée alors que, comme vient de le rappeler Jacques Barrot, ces entreprises emploient de nombreux salariés.

L'architecture actuelle avec l'agence du médicament, le comité économique, la commission de transparence, si elle constitue une organisation assez complexe, est somme toute satisfaisante, à la condition cependant que les règles soient claires et respectées. Reste à savoir comment dans l'espace européen seront réglés les prix. Nous avons d'ailleurs présenté des amendements pour essayer de préciser cet élément majeur à l'époque où nos pays s'ouvrent à la libre circulation de tous les produits ayant reçu des autorisations de mise sur le marché.

En lui-même, le principe du conventionnement est excellent, notamment grâce à la possibilité de passer des accords sur les prix et les volumes. Cependant, lorsqu'il y a contrat, les deux parties doivent le respecter. Or, à plusieurs reprises, l'Etat n'a pas respecté sa parole, ce qui est regrettable, en particulier en imposant des reversements comme cela a été le cas au mois de juillet dernier. Il arrive même à l'Etat d'exercer des pressions sur l'industrie pharmaceutique.

En l'occurrence, pourquoi prévoir une révision des prix après quatre ou huit mois dans le cadre d'une politique conventionnelle ? Cela n'a aucun sens. Lorsque les prix ont été fixés, lorsqu'une entente a été réalisée et co ncrétisée dans une convention, les prix devraient être valables pour la durée de la convention. Il suffirait alors d'appliquer les accords prix-volumes.

Cet article instaure un lien entre les conventions et le respect de l'ONDAM, ce qui est totalement contraire à l'esprit conventionnel et aux accords de 1994 qui impliquent la pluriannualité des conventions. Désormais la convention conclue pour quatre ans pourra être remise en cause deux fois par an.

Par ailleurs, le comité économique du médicaments pourra résilier les conventions de manière unilatérale.

Comment un laboratoire pourra-t-il fonctionner sans la visibilité à long terme nécessaire à la prise de décisions ? La menace du couperet de la résiliation sera un frein permanent à l'innovation.

Outre que la révision au bout de quatre mois - délai trop court, car il n'y a pas assez de recul - est anticonventionnelle, elle aboutira à ce que l'on ne puisse tenir compte du caractère saisonnier de certaines prescriptions. Pourquoi parler de système conventionnel si la clause de sauvegarde en fait un système comparable à celui des lettres clés flottantes à cause de la régulation i nfra-annuelle ? Où est l'approche médicalisée des dépenses de santé ? En fait, il s'agit d'un système purement comptable, a nticonventionnel, incitatif au désinvestissement. Le chiffre d'affaires étant bloqué, qu'adviendra-t-il des médicaments innovants ? On ne voit pas, avec cette politique, comment et pourquoi l'industrie pharmaceutique conclurait des conventions.

Si vous souhaitez vraiment une politique conventionnelle, il faut retirer cet article. En fait, la vraie question est celle de savoir si vous croyez à une politique conventionnelle, ou si vous n'y croyez pas, préférant imposer les prix qui vous conviennent.

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Cet article est le pendant de l'article relatif aux prescripteurs, c'est-à-dire les médecins, dont nous avons débattu hier.

Si nous sommes tous d'accord sur la nécessité de développer des dispositifs conventionnels, encore faut-il que ceux-ci soient équilibrés et permettent à chaque partie d'en tirer un certain avantage. Or tel n'est pas l'esprit qui se dégage de cet article.

On peut d'ailleurs s'inquiéter du devenir des industries de santé dans notre pays. La plupart d'entre elles appartiennent à des groupes étrangers et celles qui sont encore majoritairement détenues par des actionnaires français n'ont plus réellement une taille mondiale face aux géants qui se sont constitués ailleurs. C'est particulièrement triste pour qui se souvient du rayonnement qu'avait l'industrie du médicament de notre pays, en particulier en matière de recherche et de découverte de nouvelles molécules.

Cet article ne va pas dans le bon sens pour deux raisons essentielles.

La première tient au système d'étranglement permanent que constitueront les tarifs flottants, une formule particulièrement dissuasive car toute entreprise, qu'elle soit petite ou grande, a besoin d'un minimum de stabilité pour développer ses activités. En effet, la menace de changement de tarifs en cours d'année rend absolument impossible le développement d'une activité où que ce soit, en l'occurrence sur le territoire national.

Il se dégage de cet article le sentiment que, quelles qu'en soient les conséquences industrielles et sociales, le Gouvernement veut absolument que le médicament soit l'outil principal de l'équilibre du dispositif comptable de l'assurance maladie. Cela n'est pas satisfaisant. Certes, dans beaucoup de pays, les laboratoires sont mis à contribution et les prix sont âprement discutés. Néanmoins cet article va beaucoup trop loin et il conviendrait de l'atténuer en supprimant la possibilité d'ajuster les tarifs en cours d'année et en revenant à un dispositif purement conventionnel.

Dans ce domaine, la ligne directrice doit être la concertation. Nous avons déposé des amendements à ce sujet.

M. le président.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

M me Muguette Jacquaint.

Cet article prévoit la contribution de l'industrie pharmaceutique à la maîtrise des dépenses de santé. Nous y sommes totalement favorables. Je tiens d'ailleurs à souligner que nous souhaiterions un encadrement à la fois plus rigoureux, plus concerté, plus transparent et permanent. On éviterait peut-être ainsi que ne se reproduisent des cas comme celui qui a été récemment relaté dans la presse : il s'agit d'un médicament dont le prix aurait été fixé à 89 francs, conformément à la demande du laboratoire, soit bien audessus des 29 francs que l'administration estimait justifiés.

P ar ailleurs, les laboratoires pharmaceutiques ne doivent pas être seuls à décider du remboursement ou non d'une spécialité pharmaceutique. On le voit avec des médicaments nouveaux tels que le désormais célèbre Viagra. Ce dernier a obtenu une autorisation de mise sur le marché mais il n'est pas remboursé. Cher, il reste donc réservé à ceux qui pourront payer, ce qui est profondément anormal et injuste.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 30 OCTOBRE 1998

I l faut bien entendu favoriser et développer la recherche, mais elle doit absolument bénéficier à tous, conformément aux valeurs de solidarité et de justice qui caractérisent notre système de protection sociale.

Bien entendu, nous voterons l'article 24.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Comme hier soir, avec l'article 21, nous sommes au coeur d'un débat touchant à l'économie de la santé, un débat qui n'est certainement pas facile.

Il faut d'abord bien avoir conscience qu'il s'agit d'une économie tout à fait particulière. En effet, il n'échappe à personne que, quand il s'agit de médicaments, l'acte d'achat est à responsabilité partagée puisque, si la décision appartient au prescripteur, le plus souvent un médecin, le p aiement, inséparable normalement de la décision d'achat, relève de l'assurance maladie. A cause de cette première particularité, l'habituelle économie de marché ne peut pas jouer comme dans les secteurs habituels de consommation.

La deuxième particularité du médicament et de l'industrie pharmaceutique tient au coût de la recherche : formidablement élevé il entre, pour une part très importante, dans le prix de revient du médicament. Il faut donc l'amortir et la durée d'amortissement est déterminante pour l'économie du système.

Nous voyons alors toute la difficulté de l'exercice parce que cette durée d'amortissement implique que les négociations sur le prix des spécialités pharmaceutiques s'inscrivent dans une période de longue durée. Autant les dispositions de l'article 24 ne me paraissent pas critiquables en elles-mêmes, autant l'articulation de l'article 24 et de l'article 25 me fait redouter que la vision de long terme, qui devrait s'imposer aux décideurs en matière de prix du médicament, soit battue en brèche.

Troisième considération, que l'on ne doit pas perdre de vue : l'intensité, l'âpreté de la concurrence internationale. Dans les décisions que nous prenons, nous devons toujours tenir compte du fait que l'industrie pharmaceutique est aujourd'hui internationale.

Sur ce point, l'article 24 n'est pas critiquable mais - j'y reviendrai à propos de l'article 25 - les deux mécanismes, convention, d'une part, ajustements tarifaires, d'autre part -, ne me paraissent pas compatibles.

M. le président.

La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

J'interviens également sur les problèmes rencontrés par l'industrie pharmaceutique puisque ceux-ci sont abordés dans l'article 24 et suivants.

Comme les orateurs qui m'ont précédé l'ont dit, cette industrie fait tout particulièrement les frais de la maîtrise uniquement comptable des dépenses de santé que vous avez décidé de mettre en oeuvre après le plan Juppé.

S'il est légitime que les laboratoires contribuent, au même titre que les assurés sociaux, à l'effort de limitation des dépenses de santé, il ne faut pas pour autant oublier que l'industrie pharmaceutique est avant tout une industrie.

Cette constatation, qui peut sembler triviale au premier abord, mais dont vous ne semblez pas vouloir tenir compte, n'est pas sans importance. En effet, elle implique que l'industrie pharmaceutique puisse bénéficier, comme les autres industries de notre pays, et comme vient justement de le dire mon collègue M. Goulard, d'une lisibilité à long terme et d'une sécurité juridique en ce qui concerne les règles de contribution qui lui seront appliquées d'une année sur l'autre. Or, hélas ! tel n'est pas le cas aujourd'hui, loin s'en faut. En effet, chaque année, avec la discussion du projet de loi sur le financement de la sécurité sociale, les laboratoires attendent de savoir à quelle sauce ils seront mangés.

Le dispositif que vous instaurez dans votre texte, chacun en convient, est non seulement d'une complexité paralysante, mais également d'une efficacité douteuse.

Que proposez-vous au juste ? Vous ne faites peser l'équilibre des comptes de la sécurité sociale que sur l'offre, en occultant complètement les actions que vous pourriez mettre en oeuvre sur la demande. Aucune réforme structurelle n'est proposée.

Vous vous contentez seulement de mettre en place des ristournes en cas de trop perçu.

Aujourd'hui, c'est donc 1,8 milliard de francs que vous exigez des laboratoires pharmaceutiques. Vous avez fait du comité économique du médicament un organisme collecteur de taxes alors qu'il avait été créé justement dans un but opposé qui tendait à privilégier la négociation et le dialogue. Mais il est vrai que nous n'avons pas la même conception de ce que doit être une négociation.

Nous l'avons vu pour les trente-cinq heures, madame la ministre. Nous le voyons maintenant dans la manière dont vous traitez les laboratoires pharmaceutiques.

C'est ainsi que la contrainte financière que vous leur imposez est inadmissible à plus d'un titre.

Tout d'abord, elle est rétroactive. Quand donc votre Gouvernement cessera-t-il de procéder de la sorte ? Quand donc comprendrez vous, madame la ministre, qu'il est impossible de gérer sainement une entreprise quand, en fin d'année, on ne sait pas exactement à quelles taxes on sera soumis ? De plus, l'assiette de cette taxe « volontaire » est fondée sur un certain nombre de classes thérapeutiques telles que le cancer ou le diabète. Si vous pensez qu'on prescrit trop d'anticancéreux ou d'insuline en France, il faut le dire...

De même, il vous faudra assumer d'être le premier ministre des affaires sociales de notre pays à avoir taxé directement ce genre de traitement.

Vous avez même inclus dans l'assiette de la taxe les malheureux laboratoires qui ont osé se lancer dans les génériques et qui ne produisent à ce titre, pour la plupart, que des pertes financières. Quand on veut promouvoir une vraie politique, notamment celle du générique, il me semble qu'on ne commence pas par instituer une nouvelle taxe.

Enfin, votre mesure est injuste. Vous savez bien qu'il y a un espace d'économies potentielles dans le domaine du médicament, qu'il s'agisse de la révision des services votés, de l'instauration d'une vraie politique du générique ou de la mise en oeuvre d'une réforme de la distribution qui concerne environ la moitié du prix public. Sur tous ces sujets, vous avez des marges de manoeuvre et des possibilités d'économies, mais vous n'en faites rien.

En 1999, vous imposez à l'industrie du médicament un taux d'évolution de 2,6 %, conformément au taux d'évolution de l'ONDAM, alors que le taux normal d'évolution, si on tient compte du vieillissement de la population, des progrès techniques et de l'inflation, devrait, vous le savez, être supérieur. C'est ainsi que les laboratoires devront vous ristourner au bout de quelques mois, ce qui dépassera du taux que vous avez fixé arbitrairement.

Cette politique n'a aucun sens car elle n'est en aucun cas conforme à la réalité.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 30 OCTOBRE 1998

Si vous décidiez de promouvoir réellement les génériques en faisant sauter le carcan réglementaire et législatif qui bride leur développement, notamment la taxe sur les ventes directes, si vous établissiez une rémunération correcte pour le pharmacien, vous pourriez économiser quelques milliards de francs sans pour autant léser la santé de nos concitoyens.

Si vous réformiez la distribution, qui représente, je le disais, une part importante du prix public du médicam ent, vous gagneriez, là encore, des marges de manoeuvre.

Si vous procédiez à une véritable évaluation des médicaments utiles et de ceux qui ne le sont pas, ou ne le sont plus, pour établir un meilleur remboursement à des prix européens, ici encore, vous parviendriez à dégager des marges qui pourraient vous éviter d'avoir à prendre des mesures irréalistes.

Mais tout cela, vous ne le faites pas. Quel sera donc le résultat de votre politique ? Il n'y a plus un seul laboratoire français, vous le savez, dans le peloton de tête des grands. Hier encore, la presse économique bruissait des rumeurs d'achat du plus gros laboratoire français qui nous reste, à savoir RhônePoulenc. Les laboratoires étrangers n'ont plus intérêt à venir faire de la recherche en France, ne serait-ce que parce que le prix à l'export est basé sur le prix français.

Des investissements considérables risquent d'être transférés sous des cieux plus accueillants, faisant de notre pays un simple comptoir de vente pour les firmes multinationales. Non, décidément, votre politique ne mènera à rien.

Notre pays doit demeurer une terre d'innovation et de progrès. Vous le condamnez, par de telles mesures, à la stagnation ou, pire, à la régression. De plus en plus de produits essentiels, ayant reçu des ASMR 1, 2 et 3, ne sont pas remboursés. C'est grave ! Vous le savez. Et je ne parle pas du Viagra, du Xénical, ou d'autres produits dont on peut effectivement discuter de la nécessité d'une prise en charge...

En conclusion, madame la ministre, j'ai envie de vous dire : proposez-nous une autre politique, parce que, vraiment, celle prévue pour l'industrie pharmaceutique va dans la mauvaise direction.

M. François Goulard.

Très bien !

M. le président.

Je rappelle à tous nos collègues que nous sommes à l'article 24 et non pas à l'article 25.

M. Thierry Mariani.

Je suis intervenu sur les articles 24, 25, 26. Je n'y reviendrai pas.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Paul Bacquet.

M. Jean-Paul Bacquet.

Il y a des choses que l'on ne peut pas laisser dire dans cet hémicycle ! Hier soir, nous avons eu un débat d'une teneur exceptionnelle sur la maîtrise médicalisée et la maîtrise comptable : je ne puis aujourd'hui entendre sans réagir et pleurer sur le sort des pauvres laboratoires, qui seraient, selon les orateurs qui viennent de s'exprimer, au bord de l'asphyxie. J'ai déjà reçu mon bureau, comme d'autres parlementaires médecins, des représentants de laboratoires venus me faire part des difficultés qu'ils rencontraient pour faire de la recherche et de l'asphyxie financière dont ils souffraient.

Je me suis aperçu que ceux qui se plaignaient tant étaient aussi les laboratoires qui n'avaient fait que du marketing ! Mes chers collègues, un visiteur médical m'a téléphoné l'autre jour pour m'inviter à un enseignement postuniversitaire dont je ne doute pas qu'il soit de haute qualité : il se tenait dans le meilleur restaurant de ma région ! Ce n'était pas de l'argent consacré à la recherche ! Le laboratoire en question inonde les médecins de quatre réseaux de marketing et de visites aux médecins. Est-ce de l'argent destiné à la recherche ? Ne peut-il réaliser des économies plutôt que de venir se plaindre ? Non, mesdames, messieurs, le débat sur la maîtrise comptable et la maîtrise médicalisée était d'une autre teneur hier ! Je me souviens, monsieur Accoyer, lorsque, après la mise en place du plan Juppé, vous avez pris la succession de M. Murat comme responsable de la santé dans votre formation politique : vous avez eu le courage d'affronter les médecins sur le terrain. Vous vous êtes d'ailleurs souvent heurtés à des difficultés et avez dû essuyer des huées. Vous aviez alors une attitude un peu plus responsable ! Je me souviens, monsieur Barrot, lorsque, ministre de la santé, vous avez dû, pour la première fois prendre des mesures non pas de rationnement, mais de rationalisation des soins ! Lors d'une réunion à Vichy - ô combien difficile - à laquelle j'assistais, il vous a fallu un courage exceptionnel pour affronter le corps médical et parler de responsabilisation ! Aujourd'hui, mes chers collègues, il faut aussi responsabiliser les laboratoires, car on ne peut accepter que l'argent soit consacré au marketing plutôt qu'à la recherche.

Je ne peux pas non plus, mesdames, messieurs, laisser dire que des laboratoires vont vendre des génériques à perte ! Les actionnaires de ces laboratoires ne sont pas idiots ! Si le générique était vendu à perte, y aurait-il des réseaux de visites médicales pour promouvoir leur vente ? Non ! Le débat doit redevenir sérieux, comme il l'a été hier soir, et les arguments objectifs ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Bernard Accoyer.

Je demande la parole pour répondre, monsieur le président !

M. le président.

Non, vous avez déjà pris la parole, monsieur Accoyer. En plus, nous sommes sur l'article 24.

M. Daniel Marcovitch.

Vous pourrez demander à intervenir pour un fait personnel à la fin du débat !

M. Jean-Paul Bacquet.

J'ai soutenu la même position, il y a deux ans, monsieur Accoyer !

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Les diverses interventions m'ont semblé davantage avoir trait à l'article suivant qu'à celui que nous nous apprêtons à examiner.

M. Jean-Luc Préel.

Les deux sont liés.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Ils sont bien évidemment liés mais, comme nous allons examiner l'article 25 dans très peu de temps, je me permettais de le faire remarquer.

L'industrie pharmaceutique est le dernier secteur de production où les prix sont administrés. Et je n'ai entendu personne dans cette enceinte aujourd'hui demander la liberté des prix. Il semble donc qu'une certaine unanimité se dégage sur ce sujet qui, vous vous en souvenez probablement, nous avait jusqu'à présent divisés.

Dès lors que les prix sont administrés, il faut une instance au sein de laquelle la concertation puisse se faire entre la puissance publique qui administre et les industriels qui sont administrés.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 30 OCTOBRE 1998

Cette instance, c'est le comité économique du médicament. A cet égard, je veux rendre hommage à Jacques Barrot qui, en 1994, a signé un accord-cadre avec le SNIP, le syndicat national de l'industrie pharmaceutique, dans le but d'établir des conventions pluriannuelles. Il s'agissait là d'une démarche tout à fait satisfaisante.

Pour autant, l'article 24 ne me semble pas mériter les critiques que nous venons d'entendre de la part de l'opposition puisque, dans la logique même de cet accordcadre, les dispositions qu'il contient assoient, d'un point de vue législatif, une pratique que le gouvernement précédent a cherché et souhaité mettre en place par voie simplement conventionnelle. Il s'agit donc d'une sécurisation juridique de pratiques que vous avez vous-mêmes mises en place quand vous étiez aux affaires, messieurs de l'opposition.

Dès lors que cette assise législative est établie, il me semble qu'on ne peut pas souhaiter donner aux laboratoires pharmaceutiques des prix durables et exonérer la puissance publique de la responsabilité du respect de ces accords. Je ne comprends pas l'argument qui consiste à dire que des prix pourraient baisser dès lors qu'une partie du contrat ne serait pas respectée, c'est-à-dire les volumes.

Il va de soi que, si un accord bipartite est signé, il doit être respecté par les deux cosignataires. L'article 24 ne prévoit rien d'autre : au cas où l'un des contractants, en l'espèce l'industrie pharmaceutique, ne respecte pas un accord qu'il a signé, l'autre cosignataire en tire la conclusion, au demeurant dûment prévue par les accords conventionnels. Nous sommes là exactement dans la logique de ce qui avait été tenté en 1994.

Tout le monde se souvient de ce qui s'est passé moins de deux ans plus tard, l'encre de cet accord à peine sèche : dans le cadre du plan Juppé, en dehors de toute procédure conventionnelle et sans aucune négociation préalable, le Premier ministre de l'époque indiquait dans cette enceinte que l'industrie pharmaceutique serait soumise à une contribution exceptionnelle - elles le sont toutes ! - qui n'était en aucune manière prévue dans le cadre de la politique conventionnelle.

Tous les gouvernements ont été confrontés à des difficultés et tous ont réagi peu ou prou de la même manière.

Donc ne vous indignez pas trop quand vous voyez faire ce que vous-même avez fait et que d'autres, au demeurant, avaient pu faire avant vous.

M. Laurent Dominati.

Le problème, c'est que ça ne marche pas !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Pour le reste, il faut savoir ce que l'on veut faire de cet outil qu'est le comité économique du médicament. A quoi peut-il servir ? Deux réponses sont possibles : ou bien il permettra une politique d'acheteur-payeur définie par le Gouvernement ou bien il sera utilisé pour mettre en place une politique industrielle. Mais je ne crois pas que puissent coexister durablement les deux volontés. La politique d'acheteur-payeur consiste à analyser finement et techniquement le service médical rendu par un certain nombre de médicaments et à en tirer les conclusions en matière de prix tant en valeur absolue qu'en valeur relative dès lors qu'un médicament est jugé moins, autant ou plus efficace qu'un autre. Elle a conduit le Gouvernement à quelques déremboursements sur lesquels il ne m'appartient pas de revenir aujourd'hui puisque les experts scientifiques consultés ont pu trancher en leur temps. Mais il va de soi que, si cette politique était décidée, on ne pourrait en rester là. Notre collègue a cité l'exemple du Viagra : il n'est pas remboursé mais on sait qu'il possède une certaine efficacité. Or il existe des thérapeutiques médicales dont l'objet est le même, qu'il s'agisse de médicaments en psychothérapie, de vasodilatateurs ou d'acupuncture dont l'efficacité n'est pas prouvée - car je ne crois pas qu'on puisse affirmer que l'une quelconque d'entre elles ait jamais donné à la France un enfant de plus - mais qui sont néanmoins remboursées.

Dès lors qu'il y a une attitude d'acheteur-payeur, il faut qu'elle soit cohérente et qu'elle s'exprime dans tous les secteurs thérapeutiques.

Si le choix est autre, c'est-à-dire s'il s'agit de faire une politique industrielle, il faut alors un certain volontarisme et modifier le statut du comité économique du médicament. Qui dit politique industrielle, dit en effet intervention de la puissance publique et donc responsabilisation politique. Or, actuellement, le comité économique du médicament n'est pas dépositaire de cette légitimité que seuls les élus et le Gouvernement ont, en tout cas à ce jour et dans notre pays.

Je crois qu'il fut mauvais en son temps de demander au comité économique du médicament, même s'il était présidé par une personne hautement compétente et fortement responsable, de faire à la fois une politique industrielle tout en obtenant une régulation et en espérant avoir une attitude d'acheteur-payeur. Ce rôle qu'on a voulu lui faire jouer a abouti à un échec, à savoir que le taux d'évolution des dépenses de l'industrie pharmaceutique a toujours été entre deux et trois fois celui de l'évolution des dépenses de santé compatible avec la production de la richesse nationale.

Si nous continuons ainsi, l'évolution sera la même et nous aurons, tous les douze à dix-huit mois, des taxes qui, quoique exceptionnelles, n'en seront pas moins répétivives. Si nous ne voulons plus de cela, nous devons mener une politique conventionnelle pluriannuelle, quel que soit le choix du Gouvernement, pour qu'il opte pour la politique d'acheteur-payeur ou la politique industrielle.

Il nous faut par ailleurs un autre outil pour assurer la régulation car c'est du mélange des genres que naissent les taxes exceptionnelles qui présentent le défaut majeur pour l'industrie pharmaceutique de n'avoir aucune lisibilité. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Si vous le permettez, monsieur le président, j'interviendrai également globalement sur les articles 24, 25 et 26, ce qui me permettra, par la suite, d'aller plus vite.

Je le dis comme je le pense : il n'y a pas eu de véritable politique du médicament dans notre pays, c'est-àdire de politique qui prenne en compte à la fois les problèmes de santé publique, les problèmes économiques, et notre souhait de maintenir sur notre territoire des laboratoires performants et innovants. Il n'y a qu'à voir les évolutions de la part des médicaments français sur le marché mondial pour se rendre compte que cette politique n'a pas eu lieu. Or nous devons l'avoir pour de nombreuses raisons.

Tout d'abord, pour des raisons de sécurité sanitaire.

Nous savons très bien, par exemple, quels sont les coûts sanitaires et économiques de l'iatrogénie médicamenteuse : plus d'un million de journées d'hospitalisation. Ce seul chiffre nous impose de mieux connaître les médicaments et d'intervenir.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 30 OCTOBRE 1998

Nous savons aussi que la surconsommation de médicaments peut entraîner des effets pervers. La surconsommation des antibiotiques provoque aujourd'hui la résistance de certains germes. Tout cela doit être pris en compte.

Nous savons également que nous devons préparer l'avenir, c'est-à-dire aider les laboratoires les plus innovants. Etre innovant ne signifie pas forcément produire un nouveau médicament, mais apporter sur le marché un médicament ayant un effet médical supérieur. Nous n'avons pas réussi à le faire jusqu'à présent.

Il nous a donc semblé nécessaire, comme pour la médecine de ville, de mettre en place des outils structurels et une politique structurelle pour les médicaments.

En quoi cela consiste-t-il ? Tout d'abord, il faut le dire simplement, à procéder à l'analyse des surconsommations.

C'est le rôle de la sécurité sanitaire. Nous avons demandé à l'Observatoire national des médicaments de commencer par travailler sur les antibiotiques, les anxiolytiques et les antidépresseurs. Nous nous sommes rendu compte - nous le savions d'ailleurs - que les Français consommaient deux fois à deux fois et demie plus d'antibiotiques que la plupart de leurs voisins et six à sept fois plus d'anxiolytiques et d'antidépresseurs. Et je ne suis pas sûre que nous y gagnions.

Il faut non seulement discuter avec les laboratoires et poser le problème des dépenses de promotion, mais aussi changer les pratiques des assurés sociaux, de nos concitoyens. Les états généraux permettront de faire passer un certain nombre de messages à cet égard.

En cas de grippe à virus, il ne sert à rien de prendre des antibiotiques.

M. Germain Gengenwin.

C'est pourtant ce que les médecins prescrivent !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Justement, il faut le dire et l'expliquer.

M. Bernard Accoyer.

Les choses sont tout de même un peu plus compliquées que cela !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Ensuite, et c'est l'élément majeur, nous avons souhaité analyser les prix et les taux de remboursement au vu de l'effet médical de chaque médicament. Une politique structurelle du médicament ne consiste pas à soutenir artificiellement des prix au motif que tel ou tel laboratoire est bien organisé et réalise un bon lobbying ; car pendant ce temps, on ne suit pas l'évolution, on ne tient pas compte des innovations. Et nous n'avons pas accordé de prix suffisamment élevés à ceux qui peuvent aller se battre avec leurs médicaments sur les marchés internationaux.

Nous devons donc réexaminer tout cela, en procédant classe thérapeutique par classe thérapeutique - nous avons d'ailleurs commencé à le faire - pour rendre homogénéité et cohérence aux prix des médicaments comme aux taux de remboursement en fonction de l'effet médical. Et cette politique me semble comprise par l'industrie pharmaceutique : les laboratoires innovants, ceux qui se battent sur de petits créneaux comme ceux qui se battent sur les grands créneaux, savent qu'ils ont tout intérêt à cette relation entre prix, taux de remboursement et effet médical. C'est la seule démarche de fond capable de répondre tout à la fois à un objectif de santé publique et à des objectifs économiques par l'aide aux plus performants.

Cela exige, c'est vrai, une politique à long terme. Mais une politique à long terme ne signifie pas que l'on ne changera rien pendant trois ou quatre ans. Tout au contraire, cela suppose de discuter en permanence avec les laboratoires : sitôt qu'un dérapage est constaté sur les volumes, on demande ce qui se passe, on vérifie si l'accord signé est respecté ou non, ou bien l'on prend acte de l'arrivée d'un médicament innovant qui impose de modifier certains prix.

La politique conventionnelle, je le répète, ne doit pas être un carcan mais, au contraire, un outil qui nous permette d'intégrer en permanence les mesures structurelles dans nos relations avec les laboratoires. Or, M. Claude Evin l'a souligné, la politique conventionnelle menée ces dernières années ne l'a justement pas permis, et s'est d avantage apparentée à un soutien aux entreprises, comme l'a indiqué la Cour des comptes dans son rapport, assurant à certains industriels une perfusion de survie, voire une rente de situation, qu'à une réelle politique de santé publique. Elle a en fait joué au détriment des laboratoires les plus innovants qui se battent sur les marchés et qui n'ont pu obtenir les prix qu'ils souhaitaient.

La politique conventionnelle que nous souhaitons mettre en place, objet de l'article 24, tend justement à intégrer dans les conventions ces éléments structurels : lutte contre la surconsommation, diminution de la pression promotionnelle, développement des génériques et médicalisation des critères de prise en charge. Voyez le cas des antibiotiques : pour le même effet médical, les prix peuvent varier de un à deux, et les taux de remboursement passer de 35 à 65 % ! Où est la cohérence ? Certes, la tâche n'est pas facile. Il faudra procéder patiemment, sans chercher à imposer d'évolution trop brutale : nous savons bien que derrière, se posent des problèmes d'emploi. Mais c'est bien dans cette direction que nous devons aller.

Tel est l'objectif de l'article 24 : faire entrer cette politique structurelle dans la démarche conventionnelle, la faire évoluer, c'est-à-dire nous renconter suffisamment souvent pour vérifier, comme ce fut le cas cette année que l'on reste bien dans les clous. Nous avons ainsi constaté que des laboratoires n'avaient pas respectés les accords volume-prix, pour 400 millions de francs ; et comme pour la médecine de ville, il n'y a aucune raison de faire payer l'ensemble des laboratoires in fine au motif que quelques-uns n'ont pas respectés leurs engagements.

Je ne comprends pas que vous ne soyez pas d'accord avec ces rendez-vous qui évitent précisément les mauvaises surprises en fin d'année.

Voilà exactement la politique que nous entendons mener, et c'est d'ailleurs ce que nous avons commencé à faire lorsque, au mois de juillet, nous avons tiré les conséquences d'une hausse excessive de la consommation médicamenteuse durant les premiers mois et engagé tout ce travail de vérification. C'est pour cela que nous avons souhaité baisser le prix de certains médicaments aux effets médicaux trop faibles, ou diminuer des taux de remboursement très élevés, voire « dérembourser » certains médicaments ; c'est pour cela que nous avons demandé à plusieurs laboratoires de ristourner à la sécurité sociale les montants correspondant à un non-respect des politiques conventionnelles.

Je suis très heureuse de constater que pratiquement tous les laboratoires, sauf un, sont entrés dans un accord et que 99,8 % de nos propositions ont ainsi été acceptées. Les laboratoires ont ainsi reconnu la justesse de nos observations, qu'il s'agisse des surconsommations ou de la logique d'une relation entre prix, taux de remboursement et effets médicaux.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 30 OCTOBRE 1998

Certes, nous n'aboutirons pas du jour au lendemain, ne serait-ce que pour une raison très simple : l'appréciation de l'effet médical évolue au fur et à mesure des connaissances scientifiques. Nous ne voulons pas non plus imposer de tournants trop brutaux qui gêneraient certains laboratoires et poseraient des problèmes d'emploi.

Mais nous devons avancer avec détermination : si nous voulons sauver les laboratoires français, en particulier les plus innovants, c'est bien grâce à cette politique que nous parviendrons grâce aussi, bien sûr, à l'action que nous menons par ailleurs avec Claude Allègre pour aider la recherche médicale. Rappelons que c'est cette année le premier budget de recherche : il nous aidera à mener et à conforter notre politique structurelle.

L'article 24 intègre ces réformes structurelles dans une p olitique conventielle. Une politique conventionnelle éviddemment à long terme, monsieur Barrot ; mais cela ne peut exclure d'organiser des rendez-vous pour vérifier d'éventuels dérapages ou relever les innovations à prendre en compte et qui nécessiteraient des baisses ou, à l'inverse, des augmentations de prix.

Si malgré tout nous ne parvenons pas à rester dans les clous, interviendra in fine la clause de sauvegarde. Mais j'espère bien que les rendez-vous permanents éviteront d'avoir à la faire jouer.

A cet égard, je vous indique que j'ai décidé de retirer l'article 26 du projet de loi, qui prévoyait une clause de taxation pour la surconsommation de l'année 1998, puisque, conformément à cette politique structurelle, nous avons signé avec tous les laboratoires, sauf un, des accords de ristourne ou de baisse de prix pour cette année. C'est dire notre volonté de privilégier la démarche conventionnelle que je veux considérer comme l'outil capable de faire passer dans les mois et les années à venir notre nouvelle politique vis-à-vis des médicaments, avec les objectifs structurels que je viens de vous indiquer.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

M. Préel et M. Foucher ont présenté un amendement, no 302, ainsi rédigé :

« Supprimer l'article 24. »

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel.

Madame la ministre, nous prenons acte de vos dernières déclarations, heureux d'apprendre que tous les laboratoires sont satisfaits de la politique que vous leur proposez ; mais gardons à l'esprit que, s'ils ont signé, c'est avec un révolver sur la tempe... Ils n'avaient en fait pas d'autre possibilité. Que leur serait-il arrivés inon ? Vous êtes heureuse qu'ils aient signé ; je comprends votre satisfaction. Mais je ne suis pas sûr que l'industrie la partage autant que vous voulez bien le dire.

Nous proposons cependant de supprimer l'article 24, car c'est par lui que le Gouvernement met un terme à la politique conventionnelle du médicament...

M. Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général.

Pas du tout ! Nous l'institutionnalisons !

M. Jean-Luc Préel.

... en donnant une base purement comptable et non plus médicalisée aux dépenses de santé.

La preuve en est d'ailleurs la remise en cause tous les quatre mois et tous les huit mois d'une convention originellement signée pour quatre ans, application immédiate et unilatérale de la clause de sauvegarde au cas où les laboratoires refuseraient les modifications demandées.

Dans ces conditions, à quoi sert-il de signer une convention ? Il est nécessaire d'établir une politique contractuelle bien appliquée, transparente, traitant du bon usage du médicament.

Et ces dispositions seront aggravées par un amendement de M. Claude Evin, que nous examinerons par la suite. Disons-le clairement, nous désapprouvons totalement cet amendement. Nous sommes partisans d'une politique conventionnelle, mais réelle et respectée par les deux parties.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur Préel, il n'est jamais agréable pour un laboratoire de signer des ristournes, j'en suis bien d'accord. Mais beaucoup de laboratoires les ont signées parce qu'elles étaient justifiées, alors que si nous avions appliqué la clause générale, ils auraient moins remboursé. Ils pouvaient soit exiger l'application d'une clause générale à tous les laboratoires, soit accepter cette première tentative d'intégrer des éléments structurels dans nos relations avec eux. Et c'est ce qu'ils ont fait, car nos propositions avaient une justification en termes de politique de santé. Certains laboratoires, notamment les plus gros, auraient très bien pu refuser et préférer une taxe générale qui les aurait fait moins contribuer cette année ; je les remercie d'être entrés dans notre logique. C'est bien qu'ils ont compris le fond des mesures structurelles que nous mettons en place, même s'il n'est jamais agréable de signer des ristournes.

Ensuite, Monsieur Préel, que voulez-vous inscrire dans vos conventions ? Si vous ne voulez pas y mettre de prix ni de volume, à quoi sert finalement votre politique conventionnelle ? Je ne comprends pas très bien. Une convention, c'est bien fait pour fixer des volumes, fixer des prix, prévoir des dépenses promotionnelles, faciliter le recours aux génériques. Si vous ne mettez rien de cela, si votre politique conventionnelle ne constitue pas le train qui permettra de faire avancer les mesures structurelles, à quoi riment vos conventions ? Et si vous ne les faites pas évoluer au rythme des innovations, à quoi servent-elles ? C'est justement parce que nous considérons les conventions comme les supports de notre politique structurelle que nous entendons négocier en permanence avec les laboratoires.

J e voudrais que l'opposition nous réponde : que comptez-vous mettre dans vos conventions, si ce n'est le support d'une politique à mener, comme c'est notre souci, en liaison avec l'industrie pharmaceutique, avec des objectifs de santé et des objectifs économiques ?

M. le président.

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel.

Madame le ministre, mon idée sur les conventions est extrêmement claire : il faut effectivement avoir une politique intelligente du médicament comme avec les médecins. Il faut négocier ensemble, en mettant dans un accord ce que chacun souhaite et accepte. Une fois l'accord conclu, il faut que les deux parties le respectent, sans que régulièrement un des partenaires chercher à imposer des clauses non prévues à l'origine pour sanctionner l'autre. En France, une industrie pharmaceutique se retrouve toujours obligée de passer par la volonté du Gouvernement. Mais dès lors que l'on signe un contrat, le problème est de savoir si les deux signataires se retrouvent sur un pied d'égalité.

Nous sommes, je le répète, pour une vraie politique conventionnelle et pour le respect des signatures des deux partenaires. Je prends acte du fait que vous avez retiré votre article 26, qui illustrait parfaitement la situation : on signait des contrats, on passait des accords et, en cours d'année, on revenait sur des principes établis et on imposait des sanctions. On pouvait discuter du bien-fondé des articles 24 et 25, ne pas être d'accord sur tout, mais au


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moins valaient-ils pour l'avenir. L'article 26, qui, lui, prévoyait une sanction intervenant en cours d'année, était proprement inadmissible.

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur Préel, on ne construit pas une politique avec des conventions où chacun met ce qu'il veut.

M. Jean-Luc Préel.

C'est un accord entre les deux parties !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Vous dites vous-même qu'il faut une politique du médicament avec des axes structurels. Si nous sommes intervenus en juillet, je vous l'ai expliqué, c'est parce que des laboratoires n'avaient pas respecté la convention, à hauteur de 400 millions.

Une politique conventionnelle suppose d'y mettre non pas ce que chacun veut y mettre, mais ce qui relève d'une politique de santé publique et d'une politique économique. Et cela exige une cohérence entre les laboratoires, au vu des médicaments et de leur effet médical. Quand on signe une convention, on doit la respecter ; voilà notre logique.

Des conventions où chacun mettrait ce qu'il souhaite, ce n'est pas une politique. C'est même la négation d'une politique. Vraiment, vous ne savez plus très bien où vous en êtes...

M. le président.

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel.

Madame la ministre, je répète simplement que, pour nous, lorsque deux parties signent un contrat, les deux parties doivent le respecter. Notre divergence porte sur le fait que la clause qui était prévue cette année est collective. Que les laboratoires n'ayant pas respecté leurs engagements soient sanctionnés, j'en suis parfaitement d'accord. Mais il s'agissait là d'une sanction collective sur le chiffre d'affaires des laboratoires. Le troisième paragraphe en particulier était particulièrement nocif, puisqu'il incluait les dépenses de promotion des laboratoires. Or, si les dépenses promotionnelles des laboratoires français sont, en toute logique, effectuées en France, il est anormal de prendre en compte celles des laboratoires dont la maison mère est à l'étranger, et qui, pour une part, sont effectuées à l'étranger.

M. François Goulard.

C'est vrai.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur l'amendement no 302 ?

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

L'article 24 fonde justement la politique conventionnelle à laquelle chacun ici semble se déclarer favorable ; or l'amendement proposé par M. Préel et M. Foucher conduirait justement à supprimer le support, la légitimité de cette politique conventionnelle.

L'article 24 édicte des règles visant à assurer le respect des engagements pris de part et d'autre. Personne ne peut s'opposer à une règle du jeu clairement affirmée dès lors qu'il se dit attaché à la négociation de conventions, donc de contrats passés entre la puissance publique, représentée par le comité économique du médicament, et les laboratoires pharmaceutiques.

Il est donc bien évident que la suppression de cet a rticle conduirait à faire disparaître toute politique conventionnelle. Et l'annonce à l'instant de Mme la ministre montre bien toute l'importance qu'elle attache à la politique conventionnelle et le rôle qu'elle entend lui faire jouer.

Peut-être même un effet d'affichage était-il recherché dans l'article 26, à l'adresse de l'industrie pharmaceutique, pour l'inciter à venir discuter avec le comité économique du médicament pour s'assurer du respect des engagements pris, laboratoire par laboratoire - faute de quoi le mécanisme prévu à l'article 26 aurait joué.

En effet, nous le verrons notamment à l'occasion de l'article 25, nous en avons déjà débattu hier soir à propos des médecins, il est nécessaire de prévoir une clause de reversement pour le cas où tel ou tel secteur de dépenses aurait dépassé les objectifs fixés. Mais, comme nous l'avons dit pour les médecins hier, nous sommes tous désireux de ne pas le voir fonctionner. Et pour ne pas avoir à s'en servir, il faut une bonne politique conventionnelle. C'est pourquoi, mes chers collègues, je vous demande de repousser l'amendement de M. Préel et d'adopter tout à l'heure l'article 24. L'article 25 nous permettra ensuite de mettre en place un mécanisme de reversement en cas de dépassement. Mais cela n'a rien de contradictoire avec une politique conventionnelle : le retrait annoncé par Mme la ministre de l'article 26 en est la preuve.

Quand une politique claire est affirmée par la puissance publique, l'industrie sait où elle va. Cela ne fut pas le cas jusqu'à présent. D'où ma remarque, rappelée par M. Barrot. Les conventions signées jusqu'ici sont parfois apparues comme un leurre, puisqu'elles n'ont pas empêché le gouvernement de M. Juppé de demander, au début de l'année 1996, 2,5 milliards à l'industrie pharmaceutique, sans que celle-ci ait vu venir le coup...

Cette fois-ci, le Gouvernement fixe une orientation, donne les moyens, inscrit les règles dans la loi ; ainsi, chacun sait à quoi s'en tenir. Cette démarche est à l'évidence beaucoup plus claire et sécurisante pour tous les acteurs. Elle est de nature à conforter la politique conventionnelle avec le comité économique du médicament.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 302.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Le Gouvernement a présenté un amendement, no 415, ainsi rédigé :

« Dans la dernière phrase du deuxième alinéa du I de l'article 24, après les mots : "des prix des médicaments", substituer au mot : "comparables" les mots : "à même visée thérapeutique". »

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Amendement de précision. Les mots « à même visée thérapeutique » me semblent mieux convenir à l'objet.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

Favorable, mais j'attire l'attention de mes collègues sur le fait que son adoption ferait tomber les amendements nos 70, 304 et 178.

M. le président.

Monsieur le rapporteur, ils ne portent pas sur le même sujet : celui du Gouvernement concerne la thérapie, les trois autres la comparaison avec les prix européens.

Je mets aux voix l'amendement no 415.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je suis maintenant saisi de trois amendements, nos 70, 304 et 178, pouvant être soumis à une discussion commune.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 30 OCTOBRE 1998

L'amendement no 70, présenté par M. Evin, rapporteur, MM. Bur, Préel, Gengenwin et Foucher, est ainsi rédigé :

« Dans la dernière phrase du deuxième alinéa du I de l'article 24, après les mots : "des prix des médicaments comparables", insérer les mots : "à ceux pratiqués dans les autres Etats de l'Union européenne". »

L'amendement no 304, présenté par MM. Bur, Préel, Gengenwin, Foucher, Blessig et de Courson, est ainsi rédigé :

« Dans la dernière phrase du deuxième alinéa du I de l'article 24, après les mots : "des prix des médicaments comparables", insérer les mots : "des prix pratiqués dans les autres Etats de l'Union européenne,". »

L'amendement no 178, présenté par M. Barrot et M. Préel, est ainsi rédigé :

« Compléter le deuxième alinéa du I de l'article 24 par la phrase suivante :

« Lors de la fixation de ce prix sont également pris en considération les prix pratiqués dans les autres pays de l'Union européenne où le médicament considéré est admis en remboursement par le dispositif national d'assurance maladie. »

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement no

70. Je pense que se pose un problème de formulation, monsieur le rapporteur ?

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

Pas qu'un problème de formulation ! Sur le fond, il y a incompatibilité. L'amendement no 415 ayant été adopté, je ne peux plus défendre le no 70 : il n'est pas possible de considérer les médicaments à même visée thérapeutique et ajouter en même temps une limite géographique. Je retire l'amendement no

70.

M. le président.

L'amendement no 70 est retiré.

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel.

Ces amendements posent un réel problème : celui des prix dans l'Union européenne. Il faudrait qu'au moins on puisse en rediscuter le principe.

Je souhaite que Mme la ministre s'exprime sur ce sujet parce que c'est fondamental compte tenu de l'évolution actuelle de l'Europe et de notre industrie.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Sur le fond, le Gouvernement n'est pas hostile, loin de là, à ce qu'il y ait une référence aux prix européens. Elle devra faire partie de l'accord-cadre que nous aurons avec l'industrie pharmaceutique. Mais nous ne pouvons pas inscrire dans la loi que les prix français doivent être les prix européens. D'ailleurs, cela ne signifie pas grand-chose parce que pour certains médicaments, les prix varient de 1 à 5, voire de 1 à 6.

Nous sommes tout à fait favorables à l'idée de prendre en compte dans nos discussions les prix européens, et même les prix des marchés internationaux pour certains médicaments innovants afin d'aider des laboratoires innovants. Mais en aucun cas ces prix ne peuvent être les prix marqués, d'autant que le marché français est le premier en volume. Or les prix doivent bien entendu prendre également en compte les volumes.

Par conséquent, bien que favorable à l'introduction de cette référence dans la réflexion que nous avons sur la politique structurelle vis-à-vis de l'industrie pharmaceutique, je suis opposée à ces amendements.

M. le président.

Monsieur Préel, retirez-vous les amendements nos 304 et 178 ?

M. Jean-Luc Préel.

Volontiers, monsieur le président.

M. le président.

Les amendements nos 304 et 178 sont retirés.

MM. Barot, Préel et Bur ont présenté un amendement, no 177, ainsi rédigé :

« Après le cinquième alinéa (3o ) du II de l'article 24, insérer l'alinéa suivant :

« Le comité économique du médicament devra transmettre au Parlement les objectifs pluriannuels qu'il aura fixés, ainsi que faire état des constats infra annuels qu'il fera, et des mesures qu'il prendra en conséquence. »

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel.

Le rôle du comité économique du médicament doit être strictement limité. Le dérapage des dépenses de médicaments, dû principalement à des taux de remboursement trop élevés, ne doit pas être imputé à l'industrie pharmaceutique, les taux de remboursement n'étant pas de son fait.

Une trop grande précarité sur les prix ne peut que nuire aux laboratoires pharmaceutiques français. Ceux-ci se verront contraints de prendre des mesures qui auront des conséquences non négligeables en termes économiques, Jacques Barrot l'a dit tout à l'heure, notamment la suppression de postes dans leurs laboratoires de recherche.

Nous demandons, par conséquent, que le comité économique du médicament transmette chaque année les objectifs pluriannuels qu'il aura fixés.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

Avis défavorable.

Je rappelle à M. Préel que ce n'est pas le comité économique du médicament qui fixe les objectifs, mais le Gouvernement. En tout état de cause, s'il était adopté, l'amendement serait inapplicable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Avis défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 177.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Evin, rapporteur, et les commissaires membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, no 71, ainsi rédigé :

« Dans le sixième alinéa du II de l'article 24, après le mot : "médicaments", insérer les mots : "visés au premier alinéa de l'article L.

162-17". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

Il s'agit de préciser que les pouvoirs du comité économique du médicament pour fixer conventionnellement les prix et en analyser la variation ne concernent que les médicaments remboursables.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Avis favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

71. (L'amendement est adopté.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 30 OCTOBRE 1998

M. le président.

MM. Bur, Préel, Gengenwin, Barrot, Foucher, Blessig et de Courson ont présenté un amendement, no 303, ainsi rédigé :

« Supprimer les trois derniers alinéas du II de l'article 24. »

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel.

Défendu.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 303.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Goulard a présenté un amendement, no 208, ainsi rédigé :

« Supprimer l'avant-dernier alinéa du II de l'article 24. »

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Défendu.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 208.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Evin, rapporteur, et les commissaires membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, no 72, ainsi rédigé :

« Dans la première phrase de l'avant-dernier alinéa du II de l'article 24, substituer aux mots : « mentionné à l'alinéa précédent », les mots : « national de dépenses d'assurance maladie ». »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

Amendement rédactionnel.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

72. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Cahuzac, rapporteur pour avis, a présenté un amendement, no 17 rectifié, ainsi rédigé :

« Avant le dernier alinéa du II de l'article 24, insérer les deux alinéas suivants :

« Lorsqu'une mesure d'interdiction de publicité a été prononcée par l'agence du médicament dans les conditions prévues par l'article L.

551-6 du code de la santé publique et les textes pris pour son application, le Comité économique du médicament peut demander, par avenant, la modification des prix des spécialités faisant l'objet de la publicité interdite. Si, pour quelque cause que ce soit, un tel avenant n'a pas été conclu dans le délai d'un mois suivant la publication de l'interdiction au Journal officiel , ces prix sont fixés par arrêté du ministre chargé de la santé et du ministre chargé de l'économie et des finances. La modification des prix ainsi décidée ne peut entraîner une dépense supplémentaire pour l'assurance-maladie ».

« Lorsque la mesure d'interdiction mentionnée à l'alinéa précédant porte sur une spécialité dont le prix n'est pas fixé par une convention passée avec le Comité économique du médicament, le comité propose à l'entreprise qui exploite cette spécialité d'en fixer le prix par une convention spéciale. A défaut de conclusion d'une telle convention dans le mois suivant la publication de l'interdiction au Journal officiel , le prix est fixé par arrêté des ministres visés à l'alinéa précédent. La modification du prix ainsi décidée ne peut entraîner une dépense supplémentaire pour l'assurance maladie. »

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

La publicité pour les médicaments remboursables est soumise à quelques mesures d'encadrement. Une commission, logée à l'Agence du médicament, est chargée d'émettre a posteriori des avis sur la façon dont ces règlements sont respectés. Dès lors qu'elle estime qu'ils ne le sont pas, elle publie un avis au Journal officiel afin de demander aux laboratoires pharmaceutiques concernés de cesser sa publicité.

Le problème est que cet avis survient quelques mois, dans le meilleur des cas, après le début de la campagne et qu'il est, de ce fait, dénué du moindre effet. Ceux qui auraient la patience de consulter ces avis au Journal officiel pourraient constater que certains médicaments font l'objet d'avis rectificatifs, non pas une ou deux fois, mais de huit à dix fois, et l'un d'entre eux quatorze fois de suite ! Ce pourrait être bien plus encore puisque les pouvoirs publics n'en tirent aucune conséquence pratique.

Mon amendement a donc pour objet de redonner un rôle réel et efficace à cette commission composée de professionnels et d'experts, afin que les lois et règlements en vigueur ne soient pas que des voeux pieux, mais bien des recommandations suivies d'effet.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

La commission n'a pas adopté cet amendement, mais, à titre personnel, je considère qu'il soulève un vrai problème. L'Assemblée serait sage d'y prêter attention.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Le Gouvernement est favorable à cet amendement sous réserve qu'on n'y oublie pas le ministre chargé de la sécurité sociale. Il faudrait donc remplacer « du ministre chargé de la santé et du ministre chargé de l'économie et des finances » par « des ministres chargés de la santé, de la sécurité sociale et de l'économie ».

M. Claude E vin, rapporteur pour l'assurance maladie et lesaccidents du travail.

Cela s'impose. Mieux vaudrait même écrire « de la sécurité sociale » avant « de la santé ».

M. le président.

L'amendement sera donc rectifié une seconde fois dans le sens indiqué.

Je mets aux voix l'amendement no 17, deuxième rectification.

(L'amendement est adopté.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 30 OCTOBRE 1998

M. le président.

M. Cahuzac, rapporteur pour avis, a présenté un amendement, no 18, ainsi libellé :

« Compléter l'article 24 par le paragraphe suivant :

« III. 1.

Après l'article L.

550 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 550-1, ainsi rédigé :

« Art. L.

550-1. - Les dispositions de l'article L.

365-1 du présent code, à l'exception de la deuxième phrase de son quatrième alinéa, sont applicables aux membres des professions pharmaceutiques visées au livre V.

« Les compétences conférées par les deuxième et troisième alinéas de l'article L.

365-1 aux conseils départementaux des ordres des professions médicales et paramédicales sont exercées par le conseil régional de l'ordre des pharmaciens.

« Lorsque le champ d'application des conventions visées audit article excède la compétence du conseil régional, elles sont soumises pour avis au conseil national de l'ordre des pharmaciens.

«

2. Dans l'article L.

376-2 du code de la santé publique, les références "L.

365-1 et L.

549" sont remplacées par les références "L.

365-1, L.

549 et

L. 550-1". »

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Il me semble, monsieur le président, que nous avons adopté, à l'article précédent, un amendement de M. Jacques Barrot dont l'objet était le même. Si tel était le cas, je retirerais celui de la commission des finances.

Il s'agissait, en substance, de prévoir pour les pharmaciens, qui joueront désormais un rôle d'ordonnateur des dépenses publiques par leur capacité de substitution, les mêmes dispositions que celles qui s'appliquent aujourd'hui aux médecins prescripteurs et qu'en son temps le Gouvernement avait appelée : loi « anti-cadeau ».

M. le président.

En effet, tel était l'objet de l'amendement no 69 adopté à l'article 23.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Dès lors que des dispositions identiques ont été adoptées à l'article pré cédent, je retire l'amendement no

18.

M. le président.

L'amendement no 18 est retiré.

Je mets aux voix l'article 24, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 24, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 24

M. le président.

M. Accoyer a présenté un amendement, no 188, ainsi rédigé :

« Après l'article 24, insérer l'article suivant :

« I. - L'article L. 245-6-1 du code de la sécurité sociale est supprimé.

« II. - Les pertes de recettes sont compensées à due concurrence par une cotisation additionnelle aux droits sur le tabac au bénéfice des organismes de sécurité sociale. »

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Cet amendement propose de supprimer la taxe sur les ventes directes des laboratoires aux officines car elle gêne le fonctionnement des officines qui constituent un réseau de santé publique puissant et bien réparti sur le territoire. Le réseau pourrait être amélioré et renforcé grâce à cette suppression. Adopter mon amendement donnerait une certaine marge de manoeuvre aux 20 000 officines nationales.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

La commission est défavorable à cet amendement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Le Gouvernement aussi.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 188.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 25

M. le président.

« Art. 25. - I. - Au titre III du livre 1er du code de la sécurité sociale, dans l'intitulé du chapitre VIII, le mot : "Contribution" est remplacé par le mot : "Contributions".

II. - Au même chapitre, il est créé deux sections : 1o La section 1, intitulée : "Contribution à la charge des établissements de vente en gros de spécialités pharmaceutiques et des entreprises assurant l'exploitation d'une ou plusieurs spécialités pharmaceutiques au sens de l'article L. 596 du code de la santé publique", et qui comprend les articles L. 138-1 à L. 138-9 ;

« 2o La section 2, intitulée : "Contribution à la charge des entreprises assurant l'exploitation d'une ou plusieurs spécialités pharmaceutiques au sens de l'article L. 596 du code de la santé publique", et qui comprend les articles L. 138-10 à L. 138-19 ainsi rédigés :

« Art. L. 138-10 . - Lorsque le chiffre d'affaires hors taxes réalisé en France, au cours de l'année civile, au titre des spécialités inscrites sur la liste mentionnée à l'article L. 162-17, par l'ensemble des entreprises assurant l'exploitation d'une ou plusieurs spécialités pharmaceutiques au sens de l'article L. 596 du code de la santé publique et n'ayant pas passé convention avec le Comité économique du médicament, dans les conditions mentionnées au troisième alinéa ci-après s'est accru, par rapport au chiffre d'affaires réalisé l'année précédente, au titre des spéci alités inscrites sur ladite liste, par l'ensemble de ces mêmes entreprises, d'un pourcentage excédant le taux de progression de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie tel qu'il résulte du rapprochement des lois de financement de la sécurité sociale de l'année et de l'année précédente, ces entreprises sont assujetties à une contribution.

« Le montant total de cette contribution est calculé comme suit : Taux d'accroissement du chiffre d'affaires T de l'ensemble des entreprises redevables.

Taux de la contribution globalee xprimé en pourcentage du c hiffre d'affaires déclaré de l'ensemble des entreprises redevables.

T supérieur à K* et/ou égal à K+ 1 point 0,15 % T supérieur à K+1 point et inférieur ou égal à K+2 points 0,65 % T supérieur à K+2 points et inférieur ou égal à K+4 points 1,3 %


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 30 OCTOBRE 1998

Taux d'accroissement du chiffre d'affaires T de l'ensemble des entreprises redevables.

Taux de la contribution globalee xprimé en pourcentage du c hiffre d'affaires déclaré de l'ensemble des entreprises redevables.

T supérieur à K+4 points et inférieur ou égal à K+5,5points 2,3 % T supérieur à K+5,5 points 3,3 % * K = taux de progression de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie arrondi à la décimale la plus proche.

« Ne sont pas redevables de cette contribution les entreprises qui ont conclu une convention avec le Comité économique du médicament en application des articles L. 162-16-1 et suivants du présent code, en cours de validité au 31 décembre de l'année civile au titre de laquelle la contribution est due, à condition que cette convention fixe les prix de l'ensemble des spécialités mentionnées à l'article L. 162-17 exploitées par l'entreprise et comporte des engagements de l'entreprise portant sur l'ensemble du chiffre d'affaires concerné ou sur le chiffre d'affaires de chacun des produits concernés, dont le non-respect entraîne soit un ajustement des prix, soit le versement d'une remise en application de l'article L. 162-18. La liste de ces entreprises est arrêtée par le Comité économique du médicament avant le 31 janvier de l'année suivant l'année civile au titre de laquelle la contribution est due.

« Pour le déclenchement de la contribution, ne sont pris en compte ni le chiffre d'affaires hors taxes réalisé en France au titre des spécialités mentionnées à l'article L. 162-17 par les entreprises qui ne sont pas redevables de cette contribution ni le chiffre d'affaires de ces mêmes entreprises réalisé l'année précédente.

« Art. L. 138-11 . - Le montant global de la contribution tel que calculé en application de l'article L. 138-10 est ainsi réparti :

« a) A concurrence de 30 %, sur le chiffre d'affaires des entreprises redevables tel que défini à l'article L. 13810 ;

« b) A concurrence de 40 %, sur la progression du chiffre d'affaires tel que défini à l'article L. 138-10, réalisé en France par les entreprises redevables au titre des spéc ialités inscrites sur la liste mentionnée à l'article L. 162-17, par rapport au chiffre d'affaires réalisé en France au titre des spécialités inscrites sur ladite liste par les mêmes entreprises, lorsque cette progression est supérieure au taux de progression de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie tel que défini à l'article L. 138-10 ;

« c) A concurrence de 30 %, sur les charges exposées par l'ensemble des entreprises redevables, au titre des dépenses de prospection et d'information visées à l'article L. 245-1.

« Les entreprises créées depuis moins de deux ans ne sont pas redevables de la part de la contribution mentionnée au b du présent article, sauf si la création résulte d'une scission ou d'une fusion d'une entreprise ou d'un groupe.

« Les règles d'exonération prévues par l'article L. 245-4 sont applicables à la part de la contribution prévue au c du présent article.

« Art. L. 138-12 . - La fraction de la part de la contribution prévue au a de l'article L. 138-11, mise à la charge de chaque entreprise redevable, est égale au rapp ort entre son chiffre d'affaires, défini à l'article L. 138-10, et le montant total du chiffre d'affaires, défini à l'article L. 138-10, déclaré par l'ensemble des entreprises redevables, multiplié par le montant total de ladite part.

« La fraction de la part de la contribution visée au b de l'article L. 138-11, mise à la charge de chaque entreprise redevable, est égale au rapport entre la progression de son chiffre d'affaires et la somme des progressions de chiffres d'affaires supérieures au taux de progression de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie, déclarées par l'ensemble des entreprises redevables, multiplié par le montant total de ladite part.

« La fraction de la part de la contribution visée au c de l'article L. 138-11, mise à la charge de chaque entreprise redevable, est égale au rapport entre le montant versé par l'entreprise en application de l'article L. 245-1 et le montant total de la contribution versée par l'ensemble des entreprises redevables en application du même article L. 245-1, à l'échéance du 1er décembre de l'année au titre de laquelle la contribution visée à l'article L. 138-10 est due, multiplié par le montant total de ladite part.

« Un arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale et du ministre chargé du budget fixe les éléments nécessaires au calcul des parts de contribution susmentionnées.

« Le montant de la contribution ne peut excéder, pour chaque entreprise assujettie, 10 % du chiffre d'affaires hors taxes défini à l'article L. 138-10.

« Art. L. 138-13 . - Les parts de la contribution mentionnées au a et au b de l'article L. 138-11 font l'objet d'un versement au plus tard le 30 juin suivant l'année civile au titre de laquelle la contribution est due.

« La part de la contribution mentionnée au c de l'article L. 138-11 fait l'objet d'un versement provisionnel au plus tard le 30 juin de l'année suivant celle au titre de laquelle la contribution est due. Ce versement provisionnel est assis sur les sommes versées par les entreprises redevables, en application de l'article L. 245-1, le 1er décembre de l'année au titre de laquelle la contribution est due. Ce montant est régularisé le 30 juin de l'année suivant l'année au cours de laquelle est effectué le versement provisionnel. Cette régularisation est établie sur la base des sommes versées par les entreprises redevables, en application de l'article L. 245-1, le 1er décembre de l'année suivant celle au titre de laquelle la contribution est due.

« Art. L. 138-14 . - La contribution est recouvrée et contrôlée par l'agence centrale des organismes de sécurité sociale, dans les conditions prévues au 3o de l'article L. 225-1-1. Pour le contrôle, l'agence est assistée, en tant que de besoin, par les unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales.

« Art. L. 138-15 . - Les entreprises redevables sont tenues d'adresser à l'agence centrale des organismes de sécurité sociale les éléments nécessaires pour déterminer leur chiffre d'affaires réalisé au cours de l'année au titre de laquelle la contribution est due, avant le 15 février de l'année suivante.

« Les éléments servant de base à l'établissement de la contribution prévue au c de l'article L. 138-11 sont ceux prévus pour l'établissement de la contribution prévue à l'article L. 245-1 ayant donné lieu aux versements effectués au 1er décembre de l'année au titre de laquelle la contribution prévue à l'article L. 138-10 est due.

« En cas de scission ou de fusion d'une entreprise ou d'un groupe, le champ des éléments pris en compte pour le calcul de la contribution est défini à périmètre constant.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 30 OCTOBRE 1998

« Art. L. 138-16 . - En cas de non-déclaration dans les délais prescrits ou de déclaration manifestement erronée de certaines entreprises redevables, le taux de croissance du chiffre d'affaires de l'ensemble des entreprises redevables est déterminé par le rapport entre la somme des chiffres d'affaires valablement déclarés au titre de l'année civile et la somme des chiffres d'affaires réalisés par les mêmes entreprises au titre de l'année civile précédente.

« Art. L. 138-17 . - Lorsqu'une entreprise redevable n'a pas produit les éléments prévus à l'article L. 138-15 dans les délais prescrits ou a produit une déclaration manifestement erronée, les trois parts de la contribution sont appelées à titre provisionnel :

« 1o Pour l'application de la part de la contribution mentionnée au a de l'article L. 138-11, sur la base du dernier chiffre d'affaires connu, majoré de 20 % ;

« 2o Pour l'application de la part de la contribution mentionnée au b de l'article L. 138-11, sur la base du dernier chiffre d'affaires connu, majoré de 20 % ;

« 3o Pour l'application de la part de la contribution mentionnée au c de l'article L. 138-11, sur la base du dernier versement effectué, majoré de 20 %.

« Lorsque l'entreprise redevable produit ultérieurement la déclaration considérée, le montant de la part de la contribution due au titre de l'année est majoré de 10 %.

Cette majoration peut faire l'objet d'une demande de remise gracieuse.

« Art. L. 138-18 . - Le produit de la contribution est réparti dans les conditions prévues par l'article L. 138-8.

« Art. L. 138-19 . - Lorsqu'une entreprise assurant l'exploitation d'une ou plusieurs spécialités pharmaceutiques appartient à un groupe, la notion d'entreprise mentionnée à l'article L. 138-10 s'entend de ce groupe.

« Le groupe mentionné à l'alinéa précédent est constitué par une entreprise ayant publié des comptes consolidés au titre du dernier exercice clos avant l'année au cours de laquelle est appelée la contribution, en application des dispositions de l'article L. 357-1 du code des sociétés, et les sociétés qu'elle contrôle ou sur lesquelles elle exerce une influence notable au sens du même article.

« Toutefois, la société qui acquitte la contribution adresse à l'agence centrale des organismes de sécurité sociale, d'une part, une déclaration consolidée pour l'ensemble du groupe, et, d'autre part, pour chacune des sociétés du groupe, une déclaration contenant les éléments non consolidés y afférents. »

« III. Les dispositions du présent article s'appliquent à compter de l'exercice 1999. »

Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article.

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

La contribution des laboratoires dépendra de trois facteurs. Je n'évoquerai que la proportionnalité de l'une de ces trois parts aux dépenses de promotion, car elle ne peut que constituer un handicap pour les entreprises qui développent leur activité en France et exclusivement en France, qu'il s'agisse d'ailleurs d'entreprises françaises ou de groupes étrangers ayant développé une activité spécifique sur notre territoire. Celles-ci sont davantage handicapées que les autres par le mécanisme, pour des raisons qui tiennent tout simplement à l'ouverture de nos frontières. On ne peut que déplorer cet acharnement à l'encontre d'entreprises qui ont choisi la France pour se développer, car, indirectement, il n'est pas sans conséquences sur le développement de la recherche et de l'innovation. Le mécanisme choisi ainsi que les différents critères de calcul de la redevance nous paraissent particulièrement négatifs.

Tout cela s'inscrit dans l'évolution générale qui a prévalu ces dernières années, et dont nous avons eu à débattre à plusieurs reprises. Au fur et à mesure des années, on a privilégié l'explosion des volumes, ce qui a conduit, notamment dans le domaine du médicament, les laboratoires à développer davantage leur réseau commercial que leurs activités de recherche et de développement.

Puis, d'un seul coup, un peu à la manière de la grande distribution, la « structure monopolistique », en l'occurrence l'assurance maladie, et d'une certaine façon l'Etat, décide d'étrangler fournisseurs et clients. Si bien que l'avenir de l'industrie pharmaceutique, qui avait déjà beaucoup régressé en France, est compromis.

M. le président.

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz.

L'article 25 prévoit une clause de sauvegarde applicable à la progression du chiffre d'affaires de l'industrie pharmaceutique. Le rapport nous indique qu'il a représenté plus de 130 milliards de francs hors taxe dont plus de la moitié - 55 %, précisément - pour les médicaments remboursables. Il nous semble donc parfaitement légitime qu'une industrie qui tire ses profits du marché de la santé et des remboursements de l'assurance maladie contribue au financement de celle-ci. Cette contribution est si modeste qu'elle ne risque pas de mettre en danger cette industrie ! Depuis des années, les grands groupes pharmaceutiques font ce qu'ils veulent, c'est le moins que l'on puisse dire, et c'est plus souvent la recherche du profit que l'intérêt sanitaire qui les guide. C'est pourquoi je pense qu'il faut les encadrer et leur imposer quelques règles de bonne conduite.

Le prix de certains médicaments, on l'a déjà dit, est extrêmement élevé. On nous explique que c'est à cause de l'activité de recherche. La France, je le souligne, n'occupe pourtant parmi les pays développés qu'un rang médiocre pour la recherche. La réalité, c'est que les grands groupes arrêtent les recherches dès qu'ils estiment ne pas en tirer rapidement des bénéfices suffisants. Cela mérite donc d'y regarder de plus près.

Je relève également, dans le rapport, que les dépenses de publicité et de promotion ne sont guère moins élevées que celles consacrées à la recherche...

Pour toutes ces raisons, nous considérons que cette contribution, limitée - trop, à notre goût ! - est pleinement justifiée. Le groupe communiste la votera.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Quand on entend Mme la ministre nous décrire sa politique idéale du médicament, on ne peut que souscrire à son raisonnement, du moins dans sa première partie, quand elle nous dit qu'il convient de favoriser les molécules les plus utiles, de ne pas soutenir abusivement des laboratoires par des prix sans commune mesure avec l'efficacité thérapeutique des médicaments et de décourager la surconsommation de certaines spécialités dans notre pays par rapport aux autres pays développés. Tout cela est parfaitement exact.

Tout cela peut et doit faire l'objet d'une politique négociée avec l'industrie pharmaceutique.

Je suis de ceux qui pensent que la négociation avec les fournisseurs, quels qu'ils soient, en particulier les industries pharmaceutiques, doit être âpre, car elle doit assurer les meilleures conditions économiques à notre assurance maladie.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 30 OCTOBRE 1998

Mais il y a quelque chose à quoi je ne souscris pas du tout, c'est la méthode de Mme Aubry qui consiste à placer la partie qui négocie avec elle ou avec l'administration concernée, dans une position telle qu'elle n'a d'autre solution que de signer.

Ce qu'elle nous a dit sur l'article 26, que le Gouvernement retire, illustre parfaitement mon propos. Je souhaite la négociation, dit-elle, je souhaite conclure des conventions puisque je retire cette arme coercitive que constitue l'article 26 pour la négociation de cette année. C'est une présentation fort habile des choses, ce dont je la félicite.

La réalité est tout autre et elle est extrêmement simple : dans la mesure où l'article 26 faisait qu'en tout état de cause, quelle que soit l'issue de la négociation, l'industrie pharmaceutique française allait payer la contribution au prix fort, pourquoi voulez-vous que les industries concernées ne signent pas une convention avec l'assurance maladie ? C'est une signature obligatoire. Et la combinaison de l'article 24 et de l'article 25 n'est rien d'autre qu'un outil mis entre les mains du Gouvernement, et de la CNAM accessoirement, qui revient à dire aux industries pharmaceutiques : ou bien vous signez ce que nous voulons, ou bien nous sortons l'artillerie lourde.

C'est une conception très particulière de la négociation qu'a Mme Aubry. Elle tient un raisonnement assez marxiste...

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

Il ne faut pas exagérer !

M. François Goulard.

... en ne voulant négocier qu'en position de force : je ne négocie que si j'ai l'arme absolue, qui oblige la partie contractante à signer le document que j'entends lui faire signer.

Je sais bien que comparaison n'est pas raison. Mais la démarche est la même avec la loi sur la réduction du temps de travail : la loi fixe d'abord la durée légale du travail à 35 heures et l'on dit ensuite aux partenaires sociaux qu'il leur appartient de négocier. L'échec de la négociation collective sur un sujet comme celui-là est d'ailleurs patent.

M. Pierre Hellier.

C'est vrai !

M. François Goulard.

L'article 25 qui nous est soumis met en oeuvre exactement le même mécanisme : on signe, mais avec un revolver sur la tempe !

M. Germain Gengenwin.

Très juste !

M. le président.

La parole est M. le rapporteur.

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

Nous avons déjà eu hier soir un débat de même nature à propos des médecins prescripteurs.

Comment faire en sorte que les objectifs votés par le Parlement soient atteints ? Nous avons tous reconnu qu'il était d'abord nécessaire de laisser jouer les mécanismes conventionnels mais que, dans l'hypothèse où ils ne suffiraient pas, il faudrait prévoir des clauses de reversement.

M. Le Garrec - et M. Goulard l'a d'ailleurs relevé - a mis en évidence la contradiction dans laquelle se trouvait le médecin prescripteur qui doit, d'une part, satisfaire une d emande de santé et, d'autre part, respecter les contraintes économiques. Mais je serais tenté de dire que l'industrie pharmaceutique est, elle aussi, placée devant une contradiction, qui n'est cependant pas tout à fait de la même nature que celle qu'a évoquée hier soir M. Le Garrec. En effet, si l'industrie pharmaceutique est avant tout une industrie, si elle fabrique des produits industriels, si elle doit conduire une politique de développement industriel et une politique de recherche pour proposer de meilleurs produits, elle doit aussi, sur un plan plus général, tenir compte des objectifs de l'assurance maladie puisque les produits en question sont solvabilisés par la société, donc par la sécurité sociale, et qu'ils répondent tant à un objectif de santé publique qu'à un objectif de justice sociale. Cette contradiction est permanente.

Quand nous avons discuté de l'article 24, nous avons reconnu que cette contradiction devait trouver sa solution dans le cadre de la politique conventionnelle, avec le comité économique du médicament. A cela, vous répondez par l'affirmative, mais vous vous empressez d'ajouter qu'il s'agit d'une fausse politique conventionnelle car l'industrie négocie avec le pistolet sur la tempe. Ce n'est pas la vérité ! L'industrie négocie avec la puissance publique parce qu'elle sait que, pour solvabiliser son marché, elle a besoin de la puissance publique. Elle peut très bien, à la limite, ne pas s'adresser à la puissance publique pour demander le remboursement, mais on retombe alors dans les problèmes de santé publique évoqués par ailleurs.

L'industrie a donc besoin de cette négociation pour la fixation de ses prix.

Enfin, monsieur Goulard, vous avez fait allusion au fameux article 26 que le Gouvernement a retiré, et à la clause de sauvegarde. Je vous rappelle que, dans le cas d'une négociation, il y a engagement de part et d'autre.

Je ne jetterai pas la pierre à l'industrie pharmaceutique : si elle n'a pas respecté ses engagements, c'est parce qu'elle était confrontée à la contradiction que j'ai décrite.

On peut considérer que ce n'est pas nécessairement par machiavélisme que les volumes ont été effectivement dépassés. Mais il ne faudrait pas que mon indulgence soit perçue comme une indulgence généralisée car on déplore parfois un machiavélisme de la part de certains industriels. Il est vrai qu'on ne peut pas toujours traverser dans les clous quand une politique de produits est appliquée.

Cela dit, quand des engagements contractuels ont été passés entre un industriel et la puissance publique, il est normal que celle-ci se donne les moyens de faire respecter les engagements pris. J'ajoute qu'il est préférable que la puissance publique fasse respecter ces engagements dans le cadre d'une politique contractuelle acceptée par le comité économique du médicament et l'industrie.

N ous avons d'ailleurs quelque expérience en la matière : la politique des engagements contractuels, qui date de 1994, n'a pas empêché en 1996 le gouvernement d'Alain Juppé d'être obligé de demander tout d'un coup 2,5 milliards à l'industrie pharmaceutique ! L'article 25 prévoit des règles claires. Dans l'hypothèse où l'industrie pharmaceutique serait confrontée à un dépassement pour ses objectifs qui n'aurait pas trouvé sa solution dans le cadre de la politique conventionnelle, elle n'aurait plus la surprise de voir un jour le Gouvernement lui demander un reversement, sans forcément l'avoir justifié et selon une assiette éventuellement contestable, qui obligerait une majorité, comme on l'a vu à la faveur d'un article précédent, à revenir deux ans plus tard sur les décisions prises. L'industrie pharmaceutique saura donc à quoi s'en tenir.

Finalement, cette politique, plus lisible, plus claire, permet à l'ensemble des acteurs de savoir à quoi s'en tenir.

Elle renforce la volonté de contractualisation que nous avons les uns et les autres affirmée. Pour cette raison, il me semble nécessaire d'adopter la clause de reversement.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 30 OCTOBRE 1998

En revanche, il ne nous semble pas possible d'exonérer par avance un laboratoire pharmaceutique de cette clause sous le prétexte qu'il aurait passé une convention. L'affichage clair des objectifs permis par l'article 25 incitera l'industrie pharmaceutique à négocier avec le comité économique du médicament pour éviter tout dérapage en amont.

Mettons en place les mécanismes qui éviteront tout dérapage en amont ! Dans le cas où ces mécanismes n'auront pas été respectés - ce que nous ne souhaitons pas -, l'industrie pharmaceutique, je le répète, saura à quoi s'en tenir. Mais proposer, comme le Gouvernement l'a fait, une exonération éventuelle dans le cas où un accord aurait antérieurement été négocié ne nous a pas paru d'une cohérence pertinente. Pour cette raison, la commission des affaires culturelles et la commission des finances proposeront à l'Assemblée deux amendements tendant notamment à supprimer les deux derniers alinéas de l'article 25.

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'Etat à la santé.

Monsieur le président, je n'ajouterai pas grand-chose à ce que vient de dire excellemment Claude Evin. Il a énoncé toutes les raisons qui nous conduisent, non pas à menacer l'industrie pharmaceutique en lui appliquant un revolver sur la tempe, mais à fixer des règles claires, inexistantes pour l'instant. Dans ce domaine précis, plus les règles paraîtront contraignantes, plus elles seront respectées.

Je vous assure que c'est très clair...

M. François Goulard.

Pour être clair, c'est clair !

M. le secrétaire d'Etat à la santé.

Lorsque M. Juppé a proposé ses ordonnances, aucun cadre, aucune politique conventionnelle n'avaient été prévus avant que la taxe n'intervienne. C'était encore plus brutal que le système que nous proposons. Quant à nous, nous voulons éviter cette brutalité - en tout cas, non tentons de l'éviter.

M. François Goulard.

Vous ne faites pourtant pas dans la dentelle !

M. le secrétaire d'Etat à la santé.

Monsieur Goulard, vous avez vous-même insisté hier sur le caractère particulier du commerce du médicament - ou du commerce de la santé, pour employer une mauvaise expression. Ce caractère exige de la puissance publique, tant pour des raisons de santé publique que pour des raisons économiques, d'encadrer, et même, au préalable, de clarifier.

L'industrie du médicament ne ressemble à aucune autre, notamment pour une raison que vous-même et Claude Evin avez rappelée : ce sont tout de même, par l'intermédiaire d'un dispositif qui, eu égard à ce qui se passe dans le reste du monde, est très particulier, les Français qui paient. Dans cette comptabilité particulière, ils doivent prendre leurs responsabilités. Ne nous reprocheriez-vous pas un éventuel dérapage ? L'enveloppe votée ici doit être respectée. Dès lors que les médecins, l'industrie pharmaceutique ou, d'une certaine manière, les malades, qui exercent une très forte pression, ou les trois ensemble, provoquent un dérapage, nous devons réagir. Nous le faisons en donnant l'alerte en milieu d'année, et non par surprise. Nous essayons d'ailleurs de faire en sorte qu'il y ait le moins de surprises possible.

Je sais bien que le mot « industrie » appelle un cadre qui permette une respiration beaucoup plus facile. Mais si les dérapages dont je parle, dus à notre surconsommation, profitent à l'« industrie » pharmaceutique, ils ne peuvent en l'occurrence être tolérés, ce qui est tout à fait original par rapport au reste du secteur industriel. On pourrait se féliciter de la surconsommation médicamenteuse si l'on n'y prenait garde car, après tout, elle conforte l'industrie elle-même. Or il se trouve que, si nous pouvons accepter de conforter l'industrie en général, nous ne pouvons accepter de conforter cette industrie-là car cela a des conséquences sur la santé publique.

Nous dénoncions tout à l'heure une manière excessive et très singulièrement française de prévoir le marketing plus que la recherche. L'année dernière, nous avons demandé que les efforts de marketing soient réduits au profit de la recherche scientique.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Très bien !

M. le secrétaire d'Etat à la santé.

C'est la même démarche que celle que nous vous proposons aujourd'hui.

Nous nous féliciterons que des profits soient investis dans la recherche de nouvelles molécules, mais, pour l'heure, nous nous plaignons tous que le nombre des brevets de médicaments déposés par la France se réduise de plus en plus. Dès qu'une molécule innovante est trouvée, elle a des chances dans le monde entier, et c'est cela que nous voulons encourager ! Quant à une surconsommation, qui entraînerait des profits et donc une expansion, somme toute naturelle, d'une branche industrielle de l'industrie pharmaceutique, elle ne servirait à rien. Dans ces conditions, pourquoi la société la prendrait-elle en charge ? Une convention va être signée avec l'industrie pharmaceutique. Il ne s'agit pas de lui mettre un revolver sur la tempe, mais au contraire de faire en sorte qu'il y ait une compréhension mutuelle entre la puissance publique et l'industrie, qui sait bien qu'elle doit être « encadrée ». Je dis « encadrée » bien que je n'aime pas l'expression : ce n'est pas qu'elle soit très péjorative, mais elle n'est pas juste.

Nous discutons en permanence avec les représentants de l'industrie pharmaceutique. Les laboratoires relativement performants savent très bien quels sont les médicaments qui servent à la santé publique et ceux qui sont discutés dans le monde entier sauf en France. De ce point de vue aussi, nous devons intervenir.

Je comprends que les parlementaires se préoccupent de l'emploi et des industries qui se sont installées dans leur circonscription. Ce n'est pas votre cas, mais il demeure que nous devons aussi prendre en compte cette préoccupation.

L'industrie pharmaceutique est donc terriblement spécifique. Ce ne sont pas simplement ses développements et ses profits qui nous intéressent : c'est aussi le fait qu'ils soient adaptés aux progrès de santé publique, que l'on ne veuille pas endommager notre industrie française par rapport à l'industrie internationale, et qu'en plus l'enveloppe fixée doive être respectée.

La belle malice ! Qui nous a montré la façon de faire ? Personne n'a innové en ce domaine ! Mais ce qui est embêtant, c'est que, durant des années, nous avons favorisé des produits peu performants en voulant protéger une industrie qui ne se développait pas et qui, malheureusement, était plus majoritairement française qu'internationale. Pendant ce temps, ses concurrents ont pu, avec des prix qui convenaient et des médicaments innovants, développer leur recherche.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Très juste !

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 209 et 305.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 30 OCTOBRE 1998

L'amendement no 209 est présenté par M. Goulard ; l'amendement no 305 est présenté par MM. Foucher, Préel et Barrot.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer l'article 25. »

La parole est à M. François Goulard, pour soutenir l'amendement no 209.

M. François Goulard.

Cet amendement me donne l'occasion de répondre à M. Evin et au secrétaire d'Etat.

Jusqu'à ce point du raisonnement, nous sommes parfaitement d'accord.

M. le secrétaire d'Etat à la santé.

Je le crois aussi !

M. François Goulard.

Nous acceptons tous ici que la puissance publique, qui est le payeur principal de l'industrie pharmaceutique, doive se doter des armes nécessaires pour négocier âprement les prix et pour aborder la négociation conventionnelle dans des conditions qui lui permettent de bien négocier. A ce sujet, il n'y a donc pas la moindre divergence entre nous.

Monsieur le secrétaire d'Etat, certaines des critiques que vous avez émises sur la politique passée sont tout à fait acceptables. Cela dit, quand nous dresserons votre bilan, nous aurons sans doute, à notre tour, de quoi émettre des critiques. Mais dépassons ces querelles, qui sont quelque peu subalternes ! Quel est le fond de l'affaire ? Il importe de savoir si le dispositif que nous allons vraisemblablement adopter est le meilleur de ceux qui nous permettraient de bien négocier la tarification des médicaments avec l'industrie pharmaceutique. Or, autant la convention me semble, pour ce faire un cadre adapté, autant le dispositif de l'article 25 me paraît pécher par les effets qu'il aurait à court terme et par l'incessante remise en cause des accords négociés qu'il induirait.

Nous sommes favorables à une négociation dure, et la puissance publique doit disposer de véritables moyens pour la mener. Mais elle doit le faire pour le long terme : le médicament, la politique du médicament, l'industrie pharmaceutique ont besoin de visibilité qui exige d'intégrer des réflexions à long terme.

Le raisonnement qui sous-tend l'article 25 soumet au contraire la tarification du médicament à des considérations conjoncturelles, donc de court terme. Or ce n'est tout de même pas l'industrie pharmaceutique qui détermine la consommation de médicaments : ce sont les prescripteurs. Certes, il y a le marketing, les visiteurs médicaux, la politique commerciale, et tout cela a un impact.

Mais ce que vous appelez à juste titre la « surconsommation » de certaines spécialités est bien souvent due autant aux patients, aux assurés sociaux et aux médecins prescripteurs qu'à la politique de l'industrie pharmaceutique.

Nous craignons qu'avec l'article 25 vous ne mettiez en cause, pour des objectifs, d'ailleurs parfaitement légitimes, de contrôle de la dépense médicale, toutes les considérations de long terme qui doivent s'attacher à la politique du médicament et de l'industrie pharmaceutique.

Vous mêlez le conjoncturel et le structurel. Telle est notre principale critique.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Luc Préel, pour défendre l'amendement no 305.

M. Jean-Luc Préel.

Avec l'article 25, le Gouvernement met un terme à la politique médicalisée conventionnelle du médicament, en instaurant une logique devenant purement comptable. Or il est nécessaire d'avoir une politique conventionnelle bien appliquée, transparente, et qui traite du bon usage du médicament ; elle ne doit donc pas être fondée sur une logique comptable.

Avec cet article vous risquez, mesdames, messieurs, de tuer l'industrie pharmaceutique française en vous acharnant sur elle au lieu de la protéger. Nous risquons ainsi de n'avoir plus bientôt en France que des distributeurs ! La clause de sauvegarde économique est une sanction collective aveugle, déresponsabilisante, injuste et particulièrement inopportune. En ce qui nous concerne, nous voulons au contraire un système qui responsabilise chacun à son niveau. Sur ce point, nous divergeons totalement.

On l'a vu hier pour les médecins et on le voit de nouveau aujourd'hui pour l'industrie pharmaceutique, nous sommes par principe opposés aux sanctions collectives.

Mais nous sommes favorables à des sanctions individuelles, frappant ceux qui ne respectent pas les accords et les contrats.

Par ailleurs, la troisième part de la contribution que vous prévoyez est particulièrement mal venue. J'en ai d'ailleurs dit quelques mots à propos de l'article 24. Je souhaiterais avoir des précisions à ce sujet car, si les industries françaises affectent bien entendu leurs dépenses promotionnelles à leur siège en France, une entreprise d'origine étrangère peut affecter à son siège à l'étranger ses dépenses promotionnelles. Par conséquent, vous pénaliserez essentiellement les entreprises françaises. Or est-ce le rôle d'un gouvernement français que de pénaliser l'industrie française ? Nous sommes donc tout à fait défavorables au principe. J'aurais bien d'autres arguments à présenter, mais je m'arrêterai là, m'en tenant à l'essentiel.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

La commission est évidemment contre ces amendements.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à la santé.

Contre.

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 209 et 305.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 73 et 23.

L'amendement no 73 est présenté par M. Evin, rapporteur, et les commissaires membres du groupe socialiste ; l'amendement no 23 est présenté par M. Cahuzac, rapporteur pour avis.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Dans le premier alinéa du texte proposé pour l'article L. 138-10 du code de la sécurité sociale, substituer aux mots : "sur la liste mentionnée à l'article L. 162-17" les mots : "sur les listes mentionnées à l'article L. 162-17 du présent code et à l'article L. 618 du code de la santé publique". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

Il s'agit d'élargir l'assiette de la contribution aux médicaments distribués à l'hôpital.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Favorable.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 30 OCTOBRE 1998

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 73 et 23.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements identiques nos 74 et 19.

L'amendement no 74 est présenté par M. Evin, rapporteur, et les commissaires membres du groupe socialiste ; l'amendement no 19 est présenté par M. Cahuzac, rapporteur pour avis.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« I.Dans le premier alinéa du texte proposé pour l'article L. 138-10 du code de la sécurité sociale, supprimer les mots : "et n'ayant pas passé convention avec le comité économique du médicament, dans les conditions mentionnées au troisième alinéa ci-après".

« II.- En conséquence, à la fin de la première ligne de la première et de la deuxième colonne du tableau de cet aricle, supprimer le mot : "redevables".

« III.En conséquence, supprimer l'avant-dernier et le dernier alinéa de cet article. »

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement no

74.

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

Cet amendement tend à supprimer l'exclusion des entreprises conventionnées du champ d'application de la clause de sauvegarde. Le projet prévoit que les entreprises ayant passé une convention avec le comité économique du médicament pourront, a priori, être exonérées d'un reversement, dont nous sommes tous convenus qu'il était absolument nécessaire pour respecter les objectifs de dépenses.

Mais cette clause de sauvegarde économique du début de l'article 25 doit pouvoir jouer une fois que la politique conventionnelle prévue à l'article 24 aura donné tous ses effets. Il ne semble pas possible de mettre en oeuvre l'exonération prévue par le Gouvernement pour les entreprises conventionnées. En effet, le comité économique du médicament pourrait choisir les entreprises avec lesquelles il passerait des conventions, et ces entreprises seraient exonérées du reversement, alors que celles qui n'auraient pu conclure de telles conventions ne le seraient pas. Ce n'est pas possible.

Parce que nous souhaitons que la politique conventionnelle joue pleinement son rôle, il nous semble nécessaire que le mécanisme de l'article 24 soit totalement utilisé. Si tel n'est pas le cas, il faudra alors appliquer la clause de reversement prévue au début de l'article 25 à l'ensemble de l'industrie pharmaceutique. Telles sont les raisons qui ont conduit la commission des affaires culturelles, familiales et sociales à présenter cet amendement.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour soutenir l'amendement no

19.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Nous l'avons bien vu tout à l'heure, l'industrie pharmaceutique a deux spécificités : ses prix sont administrés et les biens qu'elle produit sont solvabilisés par la collectivité nationale.

Parce que ses prix sont administrés, il faut un comité économique du médicament avec un objectif clair, soit d'acheteur-payeur, soit de politique industrielle, qu'il appartient au Gouvernement de déterminer.

Mais, quel que soit cet objectif, on ne peut pas imaginer de politique conventionnelle autre que pluriannuelle.

C'est la raison pour laquelle il faut découpler la régulation économique de la politique conventionnelle. On ne voit pas comment une seule et unique politique conventionnelle pourrait être une politique industrielle ou une politique acheteur-payeur et, dans le même temps, jouer un rôle de régulation économique. C'est ce qui a été tenté toutes ces dernières années et qui a toujours échoué.

La clause de sauvegarde doit donc être découplée de la politique conventionnelle. C'est la seule façon pour la puissance publique d'assurer la croissance des dépenses de santé dans la limite, qui s'impose à nous tous, de la croissance de la richesse nationale.

La commission des finances a adopté cet amendement, car le système qu'il propose est le seul qui permettrait d'avoir une réelle politique, durable, lisible, au sein du comité économique du médicament tout en assurant la collectivité nationale de la croissance des dépenses de biens pharmaceutiques de santé dans la limite de la richesse nationale.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Si le Gouvernement a souhaité introduire cette clause dans l'article, c'est parce qu'il souhaite que les réformes structurelles soient intégrées dans la politique conventionnelle et que ceux qui jouent le jeu de cette politique en tirent tout bénéfice.

J'ai entendu les arguments des rapporteurs. Il est vrai que, vu ce que sont les conventions aujourd'hui, c'est-àdire des conventions globales volume-prix, la rédaction de la clause pose des problèmes techniques et même de comptabilité avec l'ONDAM. Je comprends donc vos réactions, messieurs les rapporteurs. Cela dit, je préférerais que l'amendement ne soit pas adopté tant que nous n'aurons pas trouvé une rédaction permettant de valoriser la politique conventionnelle, afin que les entreprises qui jouent le jeu de cette nouvelle politique en tirent tout le bénéfice. Nous allons continuer à travailler sur une rédaction. Le Gouvernement est défavorable à ces amendements.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel.

Je soutiens Mme la ministre. J'espère qu'elle sera contente, car c'est tout à fait inhabituel.

M. Cahuzac et M. Evin ont l'habitude de travailler ensemble depuis de nombreuses années, nous le savons.

Ils ont une philosophie très particulière, car ils souhaitent sanctionner totalement l'industrie pharmaceutique. Pour nous, le principe - il est important de le répéter - este xtrêmement simple : nous sommes pour de vrais contrats, de vraies conventions et pour que l'on sanctionne ceux qui ne les respectent pas. Mais sanctionner de manière collective les laboratoires, c'est-à-dire même ceux qui auraient respecté leur contrat, c'est une absurdité totale et nous y sommes tout à fait opposés ! Notre position est la même qu'il s'agisse des médecins ou de l'industrie pharmaceutique. Nous divergeons donc totalement de MM. les rapporteurs et je suis très heureux de constater que Mme Martine Aubry, plus raisonnable, est finalement d'accord avec nous.

M. le président.

La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

J'ai bien entendu moi aussi l'argumentation de Mme la ministre et je comprends très bien sa volonté de continuer à réfléchir sur la meilleure manière de lier une vision de politique conventionnelle, que nous souhaitons tous, avec le principe d'une clause que j'appellerai de « serre-file ». Mais


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 30 OCTOBRE 1998

sur ce terrain-là, nous serons très fermes sur nos positions. Je ne reprendrai pas l'argumentation très précise exposée par Claude Evin, au nom de la commission des affaires sociales, et par Jérôme Cahuzac, au nom de la commission des finances. Découpler la politique conventionnelle de la clause serre-file en fixant clairement les enjeux, y compris pour les entreprises, en définissant clairement un contrat stable qui leur permette d'avoir une vision prospective, nous semble tout à fait indispensable.

Nous verrons bien si, dans les semaines ou les mois à venir, une possibilité se dégage, mais en attendant que ce travail aboutisse, avec tout le respect que j'ai pour vous, madame la ministre, nous maintenons notre position.

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Depuis ce matin, l'attitude de Mme la ministre lors de la discussion sur les conventions, son initiative de retirer l'article 26 et maintenant son intervention défavorable à l'amendement no 74, montrent qu'elle prend conscience de la situation qui sera, à l'avenir, celle de nos concitoyens pour l'accès aux médicaments, en particulier aux nouvelles molécules.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Pas grâce à vous en tout cas !

M. Bernard Accoyer.

Il ne faudrait pas que le dispositif de serre-file évoqué par notre sage président de la commission des affaires sociales ne se transformât en un garrot. (Sourires.)

Or, avec les dispositions extrêmement contraignantes, ...

M. Jean-Luc Préel.

Ce serait la guillotine !

M. Bernard Accoyer.

... et à notre avis dangereuses, contenues dans l'amendement no 74, c'est bien ce qui risque de se produire. Aussi, conformément au souhait de Mme Aubry, nous voterons contre cet amendement.

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 74 et 19.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 76 et 21.

L'amendement no 76 est présenté par M. Evin, rapporteur ; l'amendement no 21 est présenté par M. Cahuzac, rapporteur pour avis.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Dans le premier alinéa du texte proposé pour l'article L.

138-10 du code de la sécurité sociale, substituer aux mots : "ladite liste", les mots : "lesdites listes". »

La parole est à M. le rapporteur pour soutenir l'amendement no

76.

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

C'est un amendement rédactionnel.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à la santé.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 76 et 21.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président.

M. Evin, rapporteur, a présenté un amendement, no 75 rectifié, ainsi rédigé :

« Dans le premier alinéa du texte proposé pour l'article L. 138-10 du code de la sécurité sociale, après les mots : "et de l'année précédente", insérer les mots : "compte tenu, le cas échéant, des lois de financement rectificatives". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

C'est un amendement de précision.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à la santé.

D'accord.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 75 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Accoyer a présenté un amendement no 189, ainsi rédigé :

« I. Supprimer le quatrième alinéa (c) du texte proposé pour l'article L. 138-11 du code de la sécurité sociale.

« II. Compléter cet article par le paragraphe suivant : "Les pertes de recettes sont compensées à due concurrence par une cotisation additionnelle aux droits sur le tabac au bénéfice des organismes de sécurité sociale". »

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Je souhaite, une fois encore, souligner le danger qu'il y aurait à inclure les dépenses de promotion dans l'assiette du prélèvement conventionnel.

Comme vient de le rappeler Jean-Luc Préel, ces dépenses sont particulièrement importantes pour les entreprises françaises, proportionnellement à leur chiffre d'affaires.

De la même façon que Mme la ministre a avec juste raison retiré l'article 26, il serait judicieux de supprimer l'incidence des dépenses de promotion sur le calcul de la contribution conventionnelle, ou du moins de la modérer de façon considérable.

J'avais déposé un amendement en ce sens, mais il a été repoussé par la commission des affaires culturelles et déclaré irrecevable. Nous ne pouvons donc en discuter aujourd'hui. Je le regrette, car il illustrait bien le danger qu'il y a à vouloir taxer ainsi de telles dépenses.

L'article 25 prévoit que le montant de la contribution sera plafonné à 10 % du chiffre d'affaires hors taxes. Si, par malheur, une entreprise française atteint ce niveau, cela lui sera fatale. A l'inverse, ce plafond sera sans danger pour un grand groupe multinational. En réalité, au fil des articles - et je m'aperçois avec satisfaction que le Gouvernement en a pris conscience -, avec votre acharnement contre le médicament et les dépenses de médicaments, il est probablement inspiré par un bon sentiment - vous allez assassiner ce qui reste d'entreprises françaises dans le domaine du médicament.

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

Il ne faut pas exagérer !

M. Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général.

Vues de l'esprit !

M. Bernard Accoyer.

Voilà pourquoi il faut adopter mon amendement.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

La commission n'est pas favorable à cet amendement, qui tend à exclure les dépenses de promotion de l'assiette du reversement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à la santé.

Défavorable. Je m'inscris en faux contre l'argument qui consiste à dire que nous assassinons l'industrie française. Et si, en vous


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écoutant, monsieur Accoyer, l'industrie française devait déployer plus d'énergie pour son marketing, pour ses démarches publicitaires, et leur consacrer plus de moyens financiers sous prétexte qu'elle agit en France, il n'y aurait plus de limites.

Le problème est celui de la valeur médicale du produit.

Or, trop souvent, vous le savez très bien, certaines dépenses excessives tournent autour de produits qui n'ont pas beaucoup d'intérêt. De plus, exclure de l'assiette les dépenses promotionnelles reviendrait à mettre la formation médicale continue, sur laquelle nous avons déjà beaucoup travaillé et dont nous avons beaucoup discuté ici, un peu à l'écart de l'industrie pharmaceutique.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 189.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Les deux amendements no s 77 et 78 présentés par M. Evin, rapporteur, sont rédactionnels.

L'amendement no 77 est ainsi rédigé :

« A la fin du quatrième alinéa c du texte proposé pour l'article L.

138-11 du code de la sécurité sociale, substituer à la référence : "L.

245-1", la référence : "L.

245-2". »

L'amendement no 78 est ainsi rédigé :

« Dans le dernier alinéa du texte proposé pour l'article L.

138-11 du code de la sécurité sociale, substituer aux mots : "à la part de", les mots : "au calcul de la part de". »

Vous les défendez ensemble, monsieur le rapporteur ?

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

En effet, ce sont deux amendements rédactionnels.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à la santé.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

77. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

78. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Evin, rapporteur, a présenté un amendement, no 79, ainsi rédigé :

« Dans le troisième alinéa du texte proposé pour l'article L.

138-12 du code de la sécurité sociale, substituer aux mots : "en application du même article L.

245-1", les mots : "au même titre en application de l'article L.

138-10 du code de la sécurité sociale". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

Encore un amendement rédactionnel.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

79. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements nos 81 et 22 pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 81, présenté par M. Evin, rapporteur, et les commissaires membres du groupe socialiste, est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article L. 138-12 du code de la sécurité sociale par l'alinéa suivant :

« Le montant des remises conventionnelles consenties, au cours d'une année donnée, en application de l'article L. 162-18, par une entreprise assuj ettie à la contribution instituée par l'article L. 162-10, vient en déduction, à concurrence de son montant, de la contribution dont cette entreprise est redevable au titre de la même année. »

L'amendement no 22, présenté par M. Cahuzac, rapporteur pour avis, est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article L. 138-12 du code de la sécurité sociale par l'alinéa suivant :

« Le montant des remises conventionnelles consenties, au cours d'une année donnée, en application de l'article L. 162-18, par une entreprise assuj ettie à la contribution instituée par l'article L. 162-10, vient en déduction de la contribution dont cette entreprise est redevable au titre de la même année ».

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement no

81.

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

Il s'agit de mettre à la bonne place la disposition relative aux exonérations. Cet amendement ne devrait pas poser de problème de fond.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Favorable.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour soutenir l'amendement no

22.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

L'amendement no 81 me paraît préférable dans la mesure où il est plus précis. En conséquence, je retire l'amendement no

22.

M. le président.

L'amendement no 22 est donc retiré.

Je mets aux voix l'amendement no

81. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Evin, rapporteur, et les commissaires membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, no 80, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article L. 138-12 du code de la sécurité sociale par l'alinéa suivant :

« Les entreprises exonérées de la contribution versée en application de l'article L. 245-1 sont exonérées de la fraction de la part de contribution visée au c) de l'article L. 138-11 ».

La parole est à M. le rapporteur.

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

C'est un amendement de précision.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

80. (L'amendement est adopté.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 30 OCTOBRE 1998

M. le président.

M. Evin, rapporteur, a présenté un amendement, no 82, ainsi rédigé :

« Dans le deuxième alinéa du texte proposé pour l'article L. 138-19 du code de la sécurité sociale, substituer aux mots : "L. 357-1 du code des sociétés", les mots : "357-1 de la loi no 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

Cet amendement vise à corriger une erreur du Gouvernement. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. François Goulard.

Impossible ! Mme Aubry ne se trompe jamais !

M. Bernard Accoyer.

C'est freudien !

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

Pour l'information du Gouvernement, je précise qu'il n'existe pas de « code des sociétés ».

Le texte visé est la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Heureusement que vous êtes là !

M. le secrétaire d'Etat à la santé.

On apprend des choses formidables ici !

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

C'est à cela que sert le Parlement !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

A corriger les erreurs du Gouvernement !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

82. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'article 25, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 25, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président.

Je rappelle que le Gouvernement a retiré l'article 26.

Après l'article 26

M. le président.

M. Evin, rapporteur, et les commissaires membres du groupe socialiste, ont présenté un amendement, no 85 rectifié, ainsi libellé :

« Après l'article 26, insérer l'article suivant :

« L'article L.712-12-1 du code de la santé publique est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Lorsque la demande d'autorisation porte sur le changement de lieu d'implantation d'un établissement existant, ne donnant pas lieu à un regroupement d'établissements, le demandeur doit joindre à son dossier un document présentant ses engagements relatifs aux dépenses à la charge de l'assurance maladie et au volume d'activité, fixés par référence aux dépenses et à l'activité constatée dans l'établissement.

L'autorité chargée de recevoir le dossier peut, dans un délai de deux mois après la réception du dossier, demander au requérant de modifier ses engagements.

Le dossier n'est alors reconnu complet que si le requérant satisfait à cette demande dans le délai d'un mois.

« En cas de non-respect des engagements mentionnés à l'alinéa précédent, l'autorisation peut être suspendue ou retirée dans les conditions prévues à l'article L.

712-18. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

Cet amendement répond également à un objectif de maîtrise de l'évolution des dépenses que les rédacteurs de l'ordonnance de 1996 avaient bien perçu. En effet, lorsqu'un établissement de santé est autorisé à changer de lieu d'implantation sans sans augmenter sa capacité, il peut être tenté d'augmenter le volume de son activité pour faire face à l'investissement qu'il vient de réaliser, ce qui est d'ailleurs tout à fait légitime.

Néanmoins, une telle attitude n'est pas nécessairement compatible avec les objectifs de maîtrise de l'évolution des dépenses. Les rédacteurs de l'ordonnance de 1996 avaient donc prévu, à l'article L.

712-12-1 du code de la santé publique que, dans ce cas, l'établissement de santé devait s'engager à limiter son volume d'activité et ses dépenses prises en charge par l'assurance maladie. Mais l'ordonnance ne précise pas du tout les conditions dans lesquelles ces engagements doivent être pris. La commission vous propose donc l'amendement no 85 pour permettre l'application de l'article 712-12-1 du code de la santé publique.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Favorable.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Je comprends vos intentions, monsieur le rapporteur, mais je crois que, s'il était adopté, votre amendement freinerait le mouvement de rationalisation économique qui s'opère dans les structures privées.

Cette rationalisation suppose en effet une certaine liberté. Or l'amendement introduirait une rigidité qui rendrait extrêmement difficiles les opérations de fusion et de rapprochement qui sont en cours et doivent se poursuivre.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 85 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Evin, rapporteur, et les commissaires membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, no 88, ainsi libellé :

« Après l'article 26, insérer l'article suivant :

« I. Le premier alinéa de l'article L.

714-32 du code de la santé publique est ainsi rédigé :

« Le praticien exerçant une activité libérale perçoit ses honoraires par l'intermédiaire de l'administration hospitalière. »

« II. Cette disposition prendra effet à compter du 1er avril 1999. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

Monsieur Goulard, la commission et son rapporteur sont tout à fait favorables à la politique de restruturation hospitalière, qui doit permettre les rapprochements entre tous les types d'établissements de santé - que ce soit entre les établissements publics, entre les établissements publics et les établissements privés ou entre les établissements privés.

Je vous renvoie d'ailleurs, mes chers collègues, à mon rapport qui fait notamment état de la misison que le président Jean Le Garrec a conduite dans le Nord avec plusieurs commissaires et qui donne des exemples très précis


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 30 OCTOBRE 1998

de restructuration hospitalière dans cette région : entre d es établissements publics ; entre des établissements publics et des établissements privés - comme l'accord, dont m'a fait part Yves Dauge, passé entre l'hôpital et une clinique privée de Chinon ; ou entre des établissements privés qui fusionneraient ou, du moins, qui décideraient de se rapprocher.

Que les choses soient claires. Cet amendement répond à un double objectif de maîtrise de l'évolution des dépenses - et c'est pour cela qu'il est nécessaire d'en délibérer dans le cadre de cette loi de financement - et de modernisation de l'offre de soins hospitalière, dans la mesure où le regroupement des moyens permet souvent de mieux adapter les investissements aux besoins de la population.

L'amendement que j'ai déposé ne va pas du tout à l'encontre de cet objectif qui doit effectivement pouvoir être atteint dans le cadre de négociations avec les agences régionales d'hospitalisation. Jusqu'à présent, l'absence de règles pouvait conduire certaines cliniques à refuser de coopérer, y compris avec d'autres établissements privés - j'ai des exemples précis en tête.

Cet amendement permettra aux directeurs d'agences régionales d'hospitalisation de mieux négocier avec les établissements privés les conditions de leur rapprochement.

D'autres amendements concernant, cette fois, les établissements publics avaient été adoptés par la commission. Ils n'ont pas été retenus, au motif qu'ils auraient pu constituer des cavaliers budgétaires. Je le regrette, parce que cela prive les directeurs de moyens immédiats dans le cas de regroupements public - public ou public-privé.

Je sais que Mme la ministre des affaires sociales souhaite qu'un DMOS vienne rapidement en discussion, et j'en profite pour dire que nous en avons effectivement besoin pour pouvoir mettre en place des outils de ce type. Car souvent, en cas de regroupement d'établissements, des problèmes statutaires se posent aux praticiens hospitaliers.

Faciliter les regroupements permettrait de répondre aux objectifs de la loi de financement de la sécurité sociale : mieux organiser le système de soins et rationaliser les dépenses en fonction des objectifs de santé publique.

M. le président.

La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Ce que vient de dire M. Evin est très important. Son rapport illustre effectivement ce qui est en train de se faire dans une région et je proposerai à la commission des affaires sociales de se déplacer dans d'autres régions pour voir comment les choses se passent sur le terrain.

Dans la région qui m'est chère, nous avons pu observer le remarquable travail de regroupement mené pour optimiser les moyens en fonction des besoins, entre hôpitaux publics et hôpitaux privés participant au service public, entre cliniques privées, et parfois entre hôpital public et clinique privée. Ce dont nous avions besoin, et c'est l'objet des amendements de M. Evin, c'est de conforter les possibilités accordées aux ARH et aux DARH pour agir dans cette direction.

Ainsi, monsieur Goulard, nous recherchons nous aussi à optimiser les moyens en appréciant le plus précisément possible les besoins. Ce travail est en cours et la vision tout à fait positive que nous avons du rôle des ARH s'en trouve renforcée.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

En répondant à M. Goulard, j'ai fait allusion à l'amendement précédent et aux amendements que la commission avait rédigés sous forme d'articles additionnels et qui répondaient à la même logique.

L'amendement no 88 est un peu différent. Il tend à répondre à la préoccupation manifestée l'année dernière par la Cour des comptes. Il convient d'obliger désormais les praticiens exerçant une activité libérale à l'hôpital public à percevoir leurs honoraires par l'intermédiaire de l'administration hospitalière.

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Le Gouvernement est tout à fait favorable à toute mesure visant à accroître la transparence de l'activité libérale, afin d'en limiter les abus. Je pense toutefois que l'on ne peut pas accepter cette disposition dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale, car je crains qu'il ne constitue un cavalier.

Le Gouvernement est tout à fait prêt à la reprendre dans le projet de la loi portant diverses dispositions d'ordre social qui, vous le savez, sera présenté au Parlement en début d'année 1999. Aussi demanderai-je à

M. Evin de bien vouloir retirer son amendement.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

Je prends acte que le Gouvernement est tout à fait d'accord sur le fond. On peut s'interroger sur le fait de savoir s'il s'agit ou non d'un cavalier.

Je précise tout de même que la Cour des comptes avait bien fait apparaître que les mécanismes actuels de perception des honoraires médicaux - ils ne passent pas par la caisse de l'hôpital - présentaient un caractère anormal au regard du service public et contribuaient à augmenter les dépenses.

Cela étant, je souhaite que le Gouvernement saisisse l'Assemblée le plus rapidement possible d'un texte portant diverses dispositions d'ordre social. Et s'il était possible d'y introduire le mécanisme proposé par l'amendement no 88, la commission des affaires sociales n'y verrait que des avantages.

Pour cette raison, je peux retirer cet amendement, compte tenu de l'engagement pris par le Gouvernement.

M. le secrétaire d'Etat à la santé.

Très bien !

M. le président.

L'amendement no 88 est retiré.

Article 27

M. le président.

« Art. 27. - I. - Il est créé, après l'article 27 de la loi no 75-535 du 30 juin 1975 relative aux institutions sociales et médico-sociales, un article 27-1 ainsi rédigé :

« Art. 27-1 . - Le représentant de l'Etat ne peut modifier les prévisions de recettes et dépenses mentionnées au 5o de l'article 26-1 et imputables à chacune des prestations prises en charge par l'assurance maladie que pour les motifs suivants :

« 1o Les prévisions de recettes ou de dépenses sont insuffisantes ;

« 2o Les prévisions de dépenses ou de recettes ne sont pas compatibles avec les objectifs ou les dotations régionales ou départementales fixés dans les conditions prévues à l'article 27 quinquies ;


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« 3o Les prévisions de dépenses sont manifestement excessives ou injustifiées, compte tenu des conditions de satisfaction des besoins de la population, de l'évolution de l'activité et des coûts des structures fournissant des services analogues ; l'appréciation de ces critères peut être faite par référence aux conventions élaborées dans les conditions prévues, selon le cas, aux articles 2 et 11-2 de la présente loi.

« Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret. »

« II. Il est inséré dans la même loi un article 27 quinquies ainsi rédigé :

« Art. 27 quinquies . - I. - Le financement de celles des p restations des établissements et services sociaux et médico-sociaux publics et privés qui sont à la charge des organismes de sécurité sociale est soumis à un objectif de dépenses.

« Les ministres chargés de la sécurité sociale, de l'action sociale, de l'économie et du budget fixent annuellement cet objectif, en fonction de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie voté par le Parlement, et corrélativement le montant total annuel des dépenses prises en compte pour le calcul des dotations globales, forfaits, prix de journée et tarifs afférents aux prestations correspondantes.

« Ce montant total est fixé par application d'un taux d'évolution aux dépenses de l'année précédente au plus tard dans les quinze jours qui suivent la publication de la loi de financement de la sécurité sociale.

« Ce montant total annuel est constitué en dotations limitatives régionales. Le montant de ces dotations est fixé par les ministres chargés de la sécurité sociale et de l'action sociale en fonction des besoins de la population, d es orientations définies par les schémas prévus à l'article 2-2, des priorités définies au niveau national en matière de politique médico-sociale, en tenant compte de l'activité et des coûts des établissements et services et d'un objectif de réduction progressive des inégalités dans l'allocation des ressources entre régions ; les dotations régionales sont réparties en dotations départementales limitatives par le préfet de région, en liaison avec le directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation et les préfets c oncernés ; ces dotations départementales limitatives peuvent, dans les mêmes conditions, être réparties par le préfet en dotations affectées par catégories de bénéficiaires ou à certaines prestations dans des conditions fixées par décret. »

« II. - Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret. »

« III. - Avant le deuxième alinéa de l'article 11-1 de la même loi, est inséré l'alinéa suivant :

« Il en est de même lorsqu'ils sont susceptibles d'entraîner, pour les budgets des organismes de sécurité sociale, des charges injustifiées ou excessives, compte tenu des objectifs et dotations définis à l'article 27 quinquies de la présente loi. »

« IV. - Le dernier alinéa de l'article L. 174-7 du code de la sécurité sociale ainsi que le dernier alinéa de l'article 27 de la loi du 30 juin 1975 précitée sont abrogés. »

Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article.

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel.

Monsieur le rapporteur, à une époque où l'hôpital manque de praticiens hospitaliers il ne faudrait pas donner l'impression à ces derniers qu'on souhaite les « flinguer ».

L'article 27 étend aux établissements sociaux et médico-sociaux le dispositif de régulation dans le cadre de l'ONDAM. Certes, il est dans la logique de la loi de financement. Mais, malgré cette extension, plusieurs problèmes demeurent, qui ne seront pas réglés par cet article : la fongibilité entre les diverses enveloppes, problème majeur que chacun connaît et sur lequel nous souhaiterions obtenir des explications du Gouvernement ; la réforme de la tarification des établissements ; la mise à niveau des lits médicalisés.

Les deux derniers problèmes sont liés, dans la mesure où les personnes hébergées doivent pouvoir être prises en compte en fonction de leur état et non de l'établissement dans lequel elles se trouvent hébergées. Les moyens doivent également correspondre aux besoins. Nous en sommes, hélas ! très loin. Aujourd'hui, de très nombreux lits, qui ont reçu les autorisations des CROSS, ne sont toujours pas financés ; une circulaire ministérielle envoyée aux préfets au mois de février ou mars faisait état de 19 000 lits de cure médicale autorisés non financés ! Lors de la réforme de la tarification des établissements, il serait indispensable de remettre les compteurs à zéro.

Comme cette réforme se fera très probablement à enveloppe constante, si le Gouvernement n'autorise pas la CNAM à financer tous les lits autorisés non financés actuellement, le déficit restera permanent. Chaque année, on aura un taux directeur de 2 % ou 2,5 %, avec une base non conforme aux besoins réels.

Quelques mots sur un amendement no 447 déposé par le Gouvernement, car il est très important. D'ailleurs de tels amendements devraient nous être remis à l'avance, p our nous laisser le temps d'en discuter et d'en comprendre toutes les implications.

Je ne suis pas opposé au principe général de la prise en charge de l'exercice des professionnels de santé intervenant de manière libérale au sein des établissements, mais je voudrais que l'on me précise si ces rémunérations seront prises sur le budget des établissements ou si elles continueront à être financées par les caisses.

M. Pierre Hellier et M. François Goulard.

C'est le problème du libre choix.

M. Jean-Luc Préel.

En effet. Nous nous orientons vers une forfaitisation. Celle-ci sera-t-elle prise en charge par les budgets des établissements - qui se trouveront dans une situation encore plus difficile - ou par les caisses ? Par ailleurs, je vous rappelle que le ministère du logement, en versant l'APL aux personnes qui se trouvent dans les établissements - foyers, maisons de retraite, par exemple considère qu'elles sont dans leur logement personnel. Dès lors, on ne voit pas pourquoi elles ne pourraient pas choisir leurs praticiens.

M. Pierre Hellier.

Absolument !

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

L'article 27 met sous enveloppe le secteur médico-social. Des associations ont témoigné auprès de nous de leur désarroi. Il est vrai que ce secteur est difficile parce qu'il touche à des questions douloureuses, qui déchirent la vie de nombreuses familles et d'un grand nombre de nos concitoyens.

S on importance en volume est considérable : 22 000 établissements, 1 200 000 lits, 350 000 emplois.

La pression sur la demande est aussi forte ; en particulier du fait de l'augmentation chaque jour plus importante du nombre des personnes âgées qui relèvent d'établissements d'hébergement. Mais le principal, ce sont les services rendus aux handicapés.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 30 OCTOBRE 1998

L'UNIOPSS et le Conseil national consultatif des personnes handicapées l'ont fait savoir. De notre côté, nous voudrions appeler l'attention du Gouvernement sur les différentes priorités.

Il faudrait d'abord, c'est la première des priorités, procéder au toilettage de la grande loi de 1975. Il me semble que le Gouvernement s'y était engagé. Il est en effet des catégories de nos concitoyens envers lesquels on ne saurait manquer à ses engagements. Et c'est précisément le cas dans le domaine médico-social.

Il faudra ensuite, et c'est la deuxième raison qui nécessite de différer cette inévitable mise sous enveloppe du secteur médico-social, procéder à la réforme de la tarification qui a été plusieurs fois remise à plus tard. Nous savons qu'il ne faut pas l'imputer à une défaillance technique ou à un manque de volonté, mais au fait que la tâche est complexe. Cette réforme de la tarification permettrait d'y voir clair et d'opérer la mise sous enveloppe à partir de critères consensuellement acceptés.

C royez-moi, madame la ministre, ceux qui se consacrent à l'accompagnement ou qui supportent, pour des raisons diverses - personnelles, professionnelles ou familiales - des problèmes aussi douloureux attendent de vous un geste de mansuétude : remettez cette décision à plus tard. Procédez d'abord au toilettage de la grande loi de 1975 et à la réforme de la tarification.

M. le président.

La parole est à M. Pascal Terrasse.

M. Pascal Terrasse.

Madame la ministre, vous nous proposez d'étendre aux établissements et services sociaux et médico-sociaux financés par l'assurance maladie le dispositif d'enveloppe opposable. Cette mesure, qui répond à une intention louable, s'inscrit dans le respect de l'ONDAM. Mais elle est de nature à susciter de légitimes inquiétudes. Il convient donc de maintenir le débat contradictoire entre les parties et de tenir compte des besoins financiers dans ce secteur en pleine expansion.

L'enveloppe affectée au secteur social et médico-social sera d'ailleurs en nette progression, puisqu'elle devrait passer de 3,15 % en 1998 à 3,72 % en 1999.

Cette enveloppe, vous nous le confirmerez, permettra de dégager les moyens nécessaires à la création de 7 000 lits en section de cure médicale et de 2 000 places de soins infirmiers à domicile ainsi qu'au financement d'un plan pluriannuel de création de places pour adultes handicapés.

A ce propos, je tiens à vous faire remarquer que certaines régions auxquelles ont été affectés des lits en section de cure médicale rencontrent des difficultés pour en doter les départements. J'en veux pour preuve la région Rhône-Alpes où la commission administrative régionale n'a pas pu affecter les 600 lits en question pour des raisons, semble-t-il, techniques.

M. Jean-Jacques Weber.

C'est intéressant !

M. Jean-Luc Préel.

Vous ne savez pas quoi en faire ? La seule Vendée en a justement besoin de 600 !

M. Jean-Jacques Weber.

Le Haut-Rhin est preneur !

M. Pascal Terrasse.

Alors que nous débattons aujourd'hui de la création de lits complémentaires, je souhaiterais que les régions aboutissent rapidement.

Certains de mes collègues ont évoqué la réforme de la loi du 30 juin 1975. Je souhaiterais connaître le calendrier précis des réformes envisagées. Je crois savoir que des réflexions sont en cours. Cette loi sera-t-elle modifiée dans le courant de l'année 1999 ? Elle est très attendue par les professionnels. Depuis 1975, la décentralisation étant passée par là, la situation a changé et il est devenu nécessaire de redéfinir cette loi portant sur les institutions sociales et médico-sociales.

M. Denis Jacquat, rapporteur pour l'assurance vieillesse.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Yves Bur.

M. Yves Bur.

Cet article a trait à un secteur particulièrement sensible. Vouloir étendre l'enveloppe opposable aux établissements et aux services sociaux et médicosociaux est une approche trop budgétaire. Ce secteur concernant principalement les personnes âgées et les personnes handicapées, on peut comprendre l'émoi que suscite une telle proposition.

Même s'il est normal de disposer d'informations claires sur les dépenses consacrées à ce secteur par l'assurance maladie, il me semble qu'une fois de plus le Gouvernement met la charrue devant les boeufs en abordant les difficultés du médico-social sous un angle purement comptable. Alors qu'une actualisation de la loi de 1975 est en cours de concertation, il me paraîtrait sage d'en attendre les conclusions et de proposer une démarche globale et non pas simplement budgétaire.

Malgré les progrès indéniables qui ont été réalisés, notre pays est encore loin de répondre aux demandes légitimes des familles des personnes handicapées, et surtout lourdement handicapées, qui ont besoin de places en maisons d'accueil spécialisées. Il est urgent, et ce serait à l'honneur de notre société, de proposer un plan pluriannuel ambitieux qui réponde définitivement aux besoins des personnes les plus gravement handicapées.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

C'est fait ! Et depuis plusieurs mois.

M. Yves Bur.

Peut-être, mais nous n'en voyons pas encore l'exécution. Or la situation de ces personnes est humainement inacceptable.

Enfin, je rappellerai au Gouvernement que la loi sur la réduction du temps de travail pose aux établissementss anitaires comme aux établissements médico-sociaux, notamment du secteur privé, des problèmes considérables de mise en oeuvre. Les personnels s'inquiètent des mesures que ces établissements pourraient être conduits à prendre pour absorber les effets de la loi : contrainte au niveau des gains de productivité dans un secteur auquel les restrictions budgétaires passées ont sans doute déjà imposé de grands efforts ; contrainte sur les salaires avec peut-être une obligation de gel, voire de baisse des rémunérations pour absorber les conséquences d'une embauche supplémentaire de 6 % à budget équivalent.

Il appartient au Gouvernement d'indiquer à ce secteur qui emploie plus de 160 000 personnes comment, à travers les enveloppes que l'ONDAM va attribuer aux établissements privés, il compte prendre en charge les difficultés résultant des 35 heures, alors même que les aides qui leur sont attribuées sont dégressives. Le besoin de financement supplémentaire est évalué à 3,28 % au bout de cinq ans et pourrait approcher 5 % si la création d'emplois était portée à 8 % des effectifs, Nous souhaitons obtenir une réponse sur cette question qui concerne aussi bien les établissements que les conseils généraux. Elle les préoccupe d'autant plus qu'ils devront faire face de surcroît aux difficultés de mise en oeuvre de la nouvelle tarification qu'ils attendent.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.


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M. François Goulard.

La présence de l'article 27 dans le texte est assez surprenante et, puisque le Gouvernement a retiré l'article 26, je crois qu'il serait bien inspiré de retirer aussi l'article 27. On s'arrêtera là...

Pourquoi demander le retrait ? Tout simplement parce que le Gouvernement a annoncé une profonde réforme, souhaitée par tous les partenaires, de la très grande loi ou plus exactement des deux très grandes lois de 1975, dont il faut souligner l'importance pour le secteur médicosocial et pour les personnes concernées. Il est absolument incompréhensible qu'on introduise une régulation globale de la dépense par les deux voies d'une approbation préfectorale et de la fixation d'une enveloppe nationale, alors m ême que le Gouvernement annonce une réforme d'ensemble.

Deuxièmement, les problèmes de tarification n'ont pas été résolus et la tendance à la double tarification des établissements est dangereuse, tous les responsables départementaux le savent. Bref, bien des questions restent en suspens et nous espérons que la nouvelle loi permettra de les clarifier. Raison de plus pour attendre.

Enfin, la tutelle préfectorale introduite dans la première partie de l'article pose un problème d'autonomie des collectivités locales, car il ne faut pas oublier la part qu'elles prennent au financement des établissements.

Toutes ces raisons militent en faveur du retrait de l'article 27.

M. le président.

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz.

L'article 27 a pour objet d'appliquer aux établissements et services sociaux et médicosociaux relevant de la loi du 30 juin 1975 le régime des enveloppes opposables. Il s'agit d'enveloppes régionales limitatives destinées à financer les établissements et services tels que les établissements médico-éducatifs qui reçoivent en internat ou en cure ambulatoire des jeunes handicapés ou inadaptés et les établissements qui assurent l'hébergement des personnes âgées ou des adultes handicapés.

Ces enveloppes régionales seraient réparties en dotations départementales par les préfets de région, après consultation des préfets de département et du directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation. Elles deviendraient pour les préfets de département le principal critère de modification du montant global des dépenses de ces établissements et services. Les mécanismes de régulation de ce secteur seraient ainsi modifiés en profondeur, dans la mesure où, jusqu'à présent, l'équilibre des critères - besoins des usagers, activité des structures et moyens financiers disponibles - était préservé en droit.

Je m'interroge sur la pratique qui consiste à définir, pour ces institutions, des enveloppes fermées, sans examiner les besoins dans la concertation et la transparence, dans un domaine où elles sont particulièrement nécessaires. Toutes les parties sont-elles aujourd'hui satisfaites en qualité et en quantité ? Je ne le pense pas. Ces institutions donnent-elles entière satisfaction et répondent-elles à tous les besoins ? Je ne le pense pas non plus.

Nous partageons votre souci de réformer la loi de 1975, madame la ministre, mais faut-il pour autant limiter les dépenses au regard des besoins ? La question est posée.

Lors de l'examen de la loi sur les exclusions, notre assemblée avait déjà procédé à une première modificati on de la loi de 1975, dans l'attente de sa réforme. Aujourd'hui, vous apportez de nouveau une modification. Cela semble pour le moins prématuré, dans la mesure où vous avez engagé, depuis le deuxième trimestre, une nouvelle concertation avec l'ensemble des acteurs concernés en vue d'une refonte globale, concertation dont les conclusions ne sont pas encore connues. Il n'y a plus longtemps à attendre. Alors je suis tenté de dire : attendons encore un peu ! Pour les raisons que je viens d'indiquer, la présence de cet article au sein du projet de loi de financement ne nous semble pas justifiée. Nous avons donc déposé un amendement visant à sa suppression, que j'aurai ainsi défendu par avance, dans l'attente d'un débat de fond sur la réforme de la loi de 1975, après concertation avec tous les acteurs qui font vivre ces institutions et avec ceux qui en bénéficient.

M. Bernard Accoyer et M. Yves Bur.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

La c ommission a longuement débattu de ce sujet en commission, mais elle n'a pas retenu l'amendement de M. Gremetz. Il nous faut en effet affirmer le principe que la quatrième enveloppe, celle du secteur médico-social, doit contribuer à l'objectif national des dépenses d'assurance maladie. Il ne s'agit pas de limiter les dépenses, mais d'encadrer leur progression. C'est ce principe essentiel que pose l'article 27.

Ce secteur est en effet extrêmement sensible. Et nous avons eu en commission un débat tout à fait intéressant portant en particulier sur le problème des handicapés vieillissants et même de ceux qui, grâce aux progrès heureux de la mécecine, prennent leur retraite. C'est un phénomène nouveau.

Tout en maintenant le principe de l'encadrement de la quatrième enveloppe et de sa progression, il nous faut donc prendre en compte la spécificité de ce secteur complexe, sensible et très important socialement. C'est pourquoi, madame la ministre, je vous poserai trois questions.

Premièrement, quelle est l'évolution prévisible, dans le cadre de l'ONDAM, de la quatrième enveloppe ? Cette question est liée à la réflexion sur la tarification.

Deuxièmement, le Gouvernement peut-il nous préciser le calendrier concernant la révision indispensable de la loi du 30 juin 1975 ? Là aussi, le Gouvernement doit prendre position. Nous avons besoin, sur tous les bancs de cette assemblée, d'un calendrier précis qui nous permette de mieux faire comprendre à ceux qui nous interrogent pourquoi l'article 27 est dès maintenant nécessaire, avant de s'engager plus avant dans la réforme.

Enfin, madame la ministre, où en est la concertation sur l'application des 35 heures ? Elle est particulièrement nécessaire dans ce secteur dont il ne faut pas compromettre l'équilibre, car il est relativement fragile, non pas dans sa volonté sociale, mais dans son organisation, caractérisée par un éclatement sur des centaines et même des milliers d'établissements.

Nous n'avons pas retenu l'amendement de M. Gremetz, car nous voulions rester dans un cadre général qui concerne aussi ce secteur, mais nous attendons, madame la ministre, la réponse à ces trois questions précises qui traduisent les inquiétudes qui s'y expriment.

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Toutes les interventions que nous venons d'entendre traduisent le même souci de prendre en charge mieux que par le passé


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les personnes âgées et les personnes handicapées et de t rouver les moyens de cette prise en charge, en l'occurrence médicalisée, puisqu'il s'agit de la sécurité sociale.

Il faudrait éviter tout faux débat sur cet article car, dans les faits, nous opposons bien aujourd'hui les enveloppes aux établissements. Comme vous le savez, des tarifications existent, des budgets leur sont imposés, mais sans que soit prévue dans la loi l'opposabilité générale des enveloppes. C'est d'ailleurs en additionnant les divers budgets accordés aux établissements que nous arrivons à définir l'ONDAM qui est voté depuis trois ans.

Donc, ne croyez pas que nous reculons parce que nous inscrivons dans la loi une opposabilité de droit qui existe aujourd'hui de fait. Nous progressons au contraire, puisque l'opposabilité de fait présente l'inconvénient - c'est le seul - de pouvoir être remise en cause par le juge des années plus tard, faute de fondement juridique.

Mais il n'y a pas lieu, monsieur Gremetz, d'ouvrir un débat juridique.

C'est peut-être sur le plan politique que se situe le principal intérêt de cet article. Le Gouvernement compte mettre des moyens complémentaires à la disposition du médico-social dès 1999, et c'est bien au Parlement qu'il doit y avoir un débat politique sur l'enveloppe qui doit être accordée à ce secteur, sur la priorité qui doit lui être donnée, sur la part de la richesse nationale que nous voulons consacrer à cette forme de la solidarité. Cet article permettra d'engager chaque année un débat de fond sur la place du médico-social dans notre société.

Au demeurant, l'opposabilité n'empêche pas l'enveloppe d'augmenter. Je rappelle à l'opposition que cette enveloppe qu'elle a opposée dans les faits était en augmentation de 2,3 % en 1997. Nous avons fait passer sa progression à 3,15 % en 1998 et nous la portons aujourd'hui à 3,72 % pour 1999. C'est bien la marque de la priorité que le Gouvernement entend donner à sa politique vis-à-vis des handicapés et des personnes âgées.

Comment se traduit-elle dans les faits ? Dans le secteur médico-social, nous allons créer, pour les personnes âgées, 7 000 places de cure médicale et 2 000 places dans les services de soins infirmiers à domicile. Nous allons également lancer la première tranche du plan de création de p laces pour adultes handicapés. Nous allons faire reprendre par l'assurance maladie le financement des centres d'hygiène alimentaire et d'alcoologie en application de la loi contre les exclusions. Ce sont les quatre mesures essentielles.

S'agissant des personnes handicapées, je rappelle que le Premier ministre a annoncé un plan pluriannuel de création de places. L'ensemble des associations s'en est félicité, car ce plan est sans précédent : sur cinq ans, 8 500 places en CAT, 5 500 places en maison d'accueil spécialisée et en foyer à double tarification, et 2 500 places en atelier protégé.

Dans cette loi de financement pour 1999 sont prévus 385 millions de francs de mesures nouvelles : création de 1 100 places en MAS et en FDT, de 2 000 places en CAT et de 500 places en atelier protégé. Nous en trouverons la traduction dans le budget dans quelques jours. S'y ajoutent la poursuite de programmes spécifiques en faveur de l'autisme - 100 millions au total, dont une partie au titre d'un plan pluriannuel -, l'installation dans chaque département d'un centre d'action médico-sociale et le développement des services d'éducation spécialisée et de soins à domicile. Tout cela figure, pour l'année 1999, dans le plan en faveur des handicapés.

A propos de l'aide à domicile, je vous rappelle que nous avons porté hier de 30 à 100 % l'exonération des charges sociales des associations prestataires pour que les personnes âgées et handicapées puissent avoir accès à un service de qualité.

En ce qui concerne les établissements, il fallait clarifier le problème de la tarification. C'est une demande présentée depuis longtemps par les conseils généraux mais aussi par les personnes hébergées, qui souhaitent savoir - parlons simplement - où elles mettent les pieds. Il n'est pas normal que, dans un établissement soi-disant médicalisé, la médicalisation consiste essentiellement en un médecin libéral qui passe une fois par semaine dans un bureau, à qui on fait dicter des ordonnances pour vingt personnes âgées et qui se fait payer vingt consultations, sans les avoir vues.

M. Bernard Accoyer.

C'est le rôle du contrôle médical !

M. Jean-Jacques Weber.

Cela existe beaucoup moins aujourd'hui, madame la ministre.

M. Pascal Terrasse.

Cela existe, et il arrive même que le médecin soit actionnaire de la maison de retraite !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Je suis d'accord, messieur Weber, c'est loin d'être la situation générale, fort heureusement. Mais cela ne doit plus être possible dans notre pays. C'est pourquoi nous proposerons tout à l'heure un amendement élargissant les modes de financement. Ces dérives doivent être contrôlées par la CNAM.

Il n'est pas non plus acceptable qu'on parle de prise en charge de la dépendance quand ce sont des femmes de ménage qui font lever cinq minutes par jour les personnes âgées.

M. Jean-Jacques Weber.

Entièrement d'accord !

M. Pascal Terrasse.

Cela existe aussi !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Il y a de vrais métiers de la dépendance à mettre en place.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Après une ultime réunion prévue la semaine prochaine avec l'Association des présidents de conseils généraux, le texte sur la tarification sera soumis au Conseil d'Etat. Sans préjuger la décision de celui-ci, le texte devrait donc pouvoir être publié dans les deux ou trois prochaines semaines. Il permettra de rendre la tarification transparente.

Mme Hélène Mignon.

Très bien !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Il permettra également de vérifier si les établissements ont bien les moyens de prendre en charge la dépendance et d'assurer la médicalisation. Les tarifs pourront ainsi prendre en compte la qualité du service rendu, notamment avec les GIR, ainsi que le niveau de dépendance de la personne.

Nous sommes donc bien en train d'améliorer la transparence...

M. René Rouquet.

Très bien !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

... tout en souhaitant accroître le nombre de lits médicalisés.

Cette année, 7 000 lits supplémentaires ont déjà été créés mais il faut aller plus loin. A ce propos, la reconversion de certains hôpitaux devrait libérer des lits médicalisés dans les années qui viennent.

M. Jean Le Garrec, président de la commission, et

Mme Hélène Mignon.

Très bien !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Je vous rappelle que 330 établissements sont en cours de reconversion aujourd'hui.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 30 OCTOBRE 1998

M. Jean-Jacques Weber.

C'est un bon début.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

La loi de 1975 complètera le dispositif dans la mesure où elle permet de mieux connaître les besoins et d'organiser les réponses. Sa réforme est en cours d'élaboration, nous finissons les concertations. Elle devrait être adoptée en conseil des ministres au début de l'année prochaine. Aussitôt après, elle sera transmise au Parlement.

Grâce à tous ces éléments, nous serons en mesure de mettre en place une véritable politique médico-sociale dans notre pays. Un débat sera organisé chaque année au Parlement. Ainsi, nous pourrons mieux répondre aux attentes des personnes âgées et des personnes handicapées qui ont bien besoin de la solidarité nationale.

S'agissant des 35 heures, pour répondre à la dernière question du président de la commission, il n'y a pas de scénario unique de réduction de la durée du travail. Nous connaissons la qualité des personnes qui travaillent dans ces établissements et la difficulté de leur tâche. Nous avons donc souhaité - contrairement à la loi Robien, qui par une circulaire, annulée depuis, avait exclu le médicosocial du champ des 35 heures - que la loi leur soit appliquée. Ce ne sera pas facile. Nous travaillons avec ces entreprises pour voir comment nous pouvons traiter la question dans l'enveloppe et dans le cadre de l'article 16 de la loi du 30 juin 1975, avec la volonté d'avancer et de réduire vraiment la durée du travail.

Monsieur le président de la commission, je pense avoir répondu à l'ensemble de vos questions. Je crois que, une fois de plus, nous faisons oeuvre utile. Avec la sortie du texte sur la tarification dans quelques jours, les dispositions annoncées hier sur les établissements à domicile, l'augmentation importante cette année de l'enveloppe consacrée au médico-social - 3,72 % - et les différents programmes pour handicapés et de lits médicalisés, nous avançons vers une plus grande solidarité. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Mme Fraysse, Mme Jacquaint, M. Gremetz et les membres du groupe communiste et apparentés ont présenté un amendement, no 125, ainsi rédigé :

« Supprimer l'article 27. »

Puis-je considérer, monsieur Gremetz, que vous avez déjà soutenu l'amendement no 125 ?

M. Maxime Gremetz.

Oui, monsieur le président.

M. le président.

La commission ainsi que le Gouvernement ont déjà donné leur avis.

Je mets donc aux voix l'amendement no 125.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Cahuzac, rapporteur pour avis, a présenté un amendement, no 24, ainsi rédigé :

« Dans le deuxième alinéa du I de l'article 27, substituer aux mots : "les motifs", les mots : "l'un des motifs". »

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

C'est un amendement purement rédactionnel.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

Favorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

24. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Evin, rapporteur, et les commissaires membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, no 90, ainsi rédigé :

« Après le I de l'article 27, insérer le paragraphe suivant :

« I bis. Les articles 27 bis, 27 ter et 27 quater de l a même loi deviennent respectivement les articles 27-2, 27-3 et 27-4. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

Amendement de cohérence rédactionnelle.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

90. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Evin, rapporteur, et les commissaires membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, no 89, ainsi rédigé :

« I. - Dans le premier alinéa du II de l'artile 27, substituer à la référence : « 27 quinquies » la référence : « 27-5 ».

« II. - En conséquence, procéder à la même substitution au début du deuxième alinéa du II ».

La parole est à M. le rapporteur.

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

Même commentaire que pour l'amendement précédent.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

89. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'article 27, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 27, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 27

M. le président.

Le Gouvernement a présenté un amendement, no 447, ainsi libellé :

« Après l'article 27, insérer l'article suivant :

« Après l'article 27 quater de la loi no 75-535 du 30 juin 1975, il est inséré un article 27 quinquies rédigé comme suit :

« Art. 27 quinquies. - Des conditions particulières d'exercice des professionnels de santé exerçant à titre libéral destinées notamment à assurer l'organisation, la coordination et l'évaluation des soins, l'information et la formation sont mises en oeuvre dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes.

« Ces conditions peuvent porter sur des modes de rémunération particuliers autres que le paiement à l'acte et sur le paiement direct des professionnels par l'établissement.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 30 OCTOBRE 1998

« Un contrat portant sur ces conditions d'exercice est conclu entre le professionnel et l'établissement.

« Un décret en Conseil d'Etat précise les modalités d'application des dispositions qui précèdent ».

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Le Gouvernement a souhaité reprendre un amendement qui, adopté par la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, n'a pas été retenu par la commission des finances. Il s'agit de rendre possible, et non d'imposer je réponds là aux interventions des membres de l'opposition - une prise en charge différente des médecins dans les établissements, notamment au titre de la rémunération.

Nous en revenons à ce que nous disions précédemment. Il est normal d'ouvrir la possibilité de payer, non pas à l'acte, mais sous d'autres formes, par exemple, par une rémunération mensuelle, un médecin associé à l'établissement. Il n'y aura là rien d'obligatoire mais ce sera pris en compte dans le budget de l'établissement dont la dotation globale augmentera dès lors qu'il aura pris en compte la médicalisation. Une telle disposition va dans le bon sens, celui d'un lien plus permanent entre un médecin et un établissement. Elle orientera aussi vers des coûts moindres en évitant les pratiques dont je parlais.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

La commission est naturellement favorable à cet amendement qu'elle avait adopté, mais a uquel la commission des finances avait opposé l'article 40. Je remercie le Gouvernement de l'avoir repris, et je laisse à M. Terrasse, qui était à l'origine de cette disparition, le soin de compléter la présentation.

M. le président.

La parole est à M. Pascal Terrasse.

M. Pascal Terrasse.

Il s'agit de permettre une véritable coordination des interventions des professionnels libéraux en établissement et d'asseoir des relations contractuelles entre les institutions et les professionnels. Mais, comme Mme la ministre l'a souligné, il s'agit d'ouvrir une opportunité, non de créer une obligation.

On le voit bien, dans certains établissements, les médecins et les infirmières n'arrivent pas à travailler ensemble ou passent une partie de la matinée à faire des actes sans véritable coordination. L'amendement tend notamment à améliorer la coordination des interventions. Il devrait aussi permettre d'envisager des modes de rémunération autres que le paiement à l'acte. Je pense en particulier à la coordination des soins, à l'organisation de la permanence des soins, aux admissions, à l'évaluation des soins, à l'information et à la formation d'autres professionnels de soins au sein même des institutions.

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Je propose d'améliorer, par un sous-amendement, l'amendement no 447 du Gouvernement qui va introduire un changement radical dans les établissements d'accueil pour personnes âgées dépendantes.

Comme nous l'avons déjà dit, les personnes âgées sont fragiles psychologiquement. Elles ont une capacité restreinte d'adaptation à des changements de leur environnement, surtout humain. Il nous paraît dangereux de les priver brutalement de leur droit de choisir librement leur praticien. Ces personnes âgées ont leurs habitudes avec des professionnels de santé et des médecins qu'elles sollicitent beaucoup, c'est vrai, tout simplement parce qu'elles ont très souvent besoin de soins auxquels ils peuvent accéder grâce à notre dispositif de protection sociale.

M on sous-amendement tend donc à supprimer

« notamment » dans l'amendement du Gouvernement et le médecin qui prodiguerait les soins. Seul serait concerné par l'amendement le médecin qui s'occuperait d'organiser, de coordonner et d'évaluer les soins, et de mettre en oeuvre l'information et la formation des personnels. Ainsi, nous assisterions dans ces établissements à une mutation progressive. M. Terrasse doit d'ailleurs le savoir de par sa profession, mais certaines maisons de retraite, qui font l'objet d'un forfait de soins, emploient des médecins rétribués autrement qu'à l'acte : ils ont un rôle important à jouer et je suis d'accord pour renforcer encore ce rôle.

J'attire simplement l'attention du Gouvernement sur le danger humain et médical qu'il y aurait à changer brusquement celui qui est en quelque sorte le médecin de famille de ces personnes âgées. Ce lien nous paraît devoir être sauvegardé. C'est pourquoi j'ai déposé ce sousamendement.

M. le président.

Je suis saisi d'un sous-amendement, qui portera le no 449, présenté par M. Accoyer. Il est ainsi rédigé :

« Dans le deuxième alinéa de l'amendement no 447, supprimer le mot : "notamment" ».

Quel est l'avis de la commission ?

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

La commission n'a pas examiné le sous-amendement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Défavorable. Monsieur Accoyer, nous souhaitons que la disposition puisse s'appliquer aussi bien à un médecin coordonnateur de soins qu'à un médecin prestataire de soins.

Cela n'empêchera nullement les personnes âgées de conserver le médecin libéral qu'elles avaient l'habitude de consulter précédemment. Simplement, la prise en charge financière sera faite par l'établissement selon des modes qui pourront être différents du mode actuel. Encore une fois, il n'est pas porté atteinte à la liberté de choix des personnes.

M. le président.

Monsieur Accoyer, maintenez-vous votre sous-amendement ?

M. Bernard Accoyer.

Oui, monsieur le président.

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 449.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 447.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Le Gouvernement a présenté un amendement, no 435, ainsi rédigé :

« Après l'article 27, insérer l'article suivant :

« I. Le dernier alinéa de l'article L. 335-1 du code de la santé publique est complété par les mots : " de ville et d'hospitalisation, et aux dépenses m édico-sociales des centres mentionnés à l'article L. 355-1-1 du présent code".

« II. Le huitième alinéa (7o ) de l'article L. 322-3 du code de la sécurité sociale est complété par les mots : "ou lorsqu'il bénéficie de soins dispensés par un centre mentionné à l'article L. 355-1-1 du code de la santé publique".


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 30 OCTOBRE 1998

« III. Les centres d'hygiène alimentaire et de soins en alcoologie disposent d'un délai de trois mois à compter de la publication de la présente loi, pour déposer une demande d'autorisation selon la procédure visée à l'article 3 de la loi no 75-535 du 30 juin 1975.

« IV Dans l'attente de l'arrêté fixant la dotation globale de financement pour l'année 1999, les caisses d'assurance maladie versent à chaque centre ambulatoire de soins en alcoologie antérieurement financé par l'Etat, dont la demande d'autorisation aura été déposée, des acomptes mensuels sur la dotation globale de financement, égaux au douzième de la participation de l'Etat allouée à chaque centre au titre de ses activités médico-sociales en 1998. Tout refus d'autorisation d'un centre met fin à son financement par l'assurance maladie. »

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

La loi sur la lutte contre les exclusions a défini, à l'article 72, le statut des centres d'hygiène alimentaire et d'alcoologie, les CHAA, qui prennent en compte sur un mode ambulatoire le diagnostic et l'orientation des personnes confrontées à un problème d'alcoolisme, ainsi que la prise en charge médico-sociale de ces personnes. Cet article a également prévu l'intégration des CHAA dans le champ de la loi du 30 juin 1975 sur les établissements sociaux et médico-sociaux.

Jusqu'alors, ces centres ne devaient leur existence qu'à une circulaire de 1983 du ministère de la santé. Par la même occasion, il a transféré le financement des CHAA de l'Etat vers l'assurance maladie, afin d'introduire plus de souplesse dans l'extension du dispositif, et en a profité pour les rebaptiser CASEA, c'est-à-dire centres ambulatoires de soins en alcoologie. Je ne suis pas sûre qu'on y gagne beaucoup, mais cela évite au moins les sourires quand on parle des CHAA. (Sourires.)

Les crédits correspondants à ce transfert, 120 millions de francs, sont bien financés dans le cadre de l'ONDAM.

Le présent amendement prévoit quatre dispositions législatives qui sont nécessaires au transfert financier des CHAA, devenus CASEA : la prise en charge par les régimes d'assurance maladie, non seulement des dépenses médicales, mais aussi des dépenses sociales des CASEA ; l'exonération pour les assurés sociaux de toute participation à leurs frais de soins pour maintenir la gratuité des soins ; un délai de trois mois à compter de la date de publication de la présente loi, s'agissant du dépôt par les CASEA de leur demande d'autorisation selon la procédure visée à l'article 3 de la loi du 30 juin 1975 ; enfin, le financement des CASEA par l'assurance maladie, dès le dépôt de leur demande d'autorisation et pendant la période transitoire d'instruction de ladite demande, afin d'éviter toute rupture de financement.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

La commission est favorable à cet amendement qui répond, en effet, à une préoccupation exprimée lors de l'examen de la loi sur la lutte contre les exclusions et de la loi sur le financement de la sécurité sociale en 1998.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel.

Madame la ministre, si j'ai bien compris, le financement des CASEA sera inclus dans l'ONDAM...

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Oui !

M. Jean-Luc Préel.

...dont le taux a été fixé à 2,6.

Puisque, auparavant, ce financement était assuré par une dotation de l'Etat, cela revient à réduire de 2,6 % cette dotation. L'Etat apportera-t-il un financement complémentaire ?

M. Claude Evin, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

C'est déjà intégré !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

J'ai déjà répondu, mais je suis prête à recommencer, monsieur Préel.

M. le président.

Vous avez la parole, madame la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Le transfert des 120 millions correspondants a été bien réalisé et représente 0,25 % des 3,72 % aujourd'hui affectés au médico-social. Voyez, je suis toujours prête à vous répondre, monsieur Préel ! (Sourires.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 435.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.

Article 28

M. le président.

« Art. 28. - L'article L. 361-1 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :

« Art. L. 361-1 . - Sans préjudice de l'application de l'article L. 313-1, l'assurance décès garantit aux ayants droit de l'assuré le paiement d'un capital égal à un multiple du gain journalier de base tel qu'il est défini à l'article L. 323-4 lorsque l'assuré, moins de trois mois avant son décès, exerçait une activité salariée, percevait l'une des allocations mentionnées au premier alinéa de l'article L. 311-5, était titulaire d'une pension d'invalidité mentionnée à l'article L. 341-1 ou d'une rente allouée en vertu de la législation sur les accidents du travail et maladies professionnelles mentionnée à l'article L. 371-1, ou lorsqu'il bénéficiait, au moment de son décès, du maintien de ses droits à l'assurance décès au titre de l'article L. 161-8. »

L'amendement no 265 a été retiré.

Je mets aux voix l'article 28.

(L'article 28 est adopté.)

M. le président.

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel.

Monsieur le président, je souhaiterais une suspension de séance.

M. le président.

Mais, il est douze heures trente-cinq et nous allons bientôt lever la séance !

M. Jean-Luc Préel.

Oui, mais nous allons aborder un article extrêmement important concernant les personnes âgées - c'est même le seul article sur ce sujet. Je souhaiterais l'étudier avec mon groupe, eu égard à des modifications antérieures. Je demande une suspension de quinze minutes.

M. le président.

Compte tenu de l'heure, je vous propose de la limiter à cinq minutes. Ainsi, nous pourrons entendre les orateurs inscrits sur l'article 29 avant de lever la séance.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 30 OCTOBRE 1998

Suspension et reprise de la séance

M. le président.

La séance est suspendue pour cinq minutes.

(La séance, suspendue à douze heures quarante, est reprise à douze heures quarante-cinq.)

M. le président.

La séance est reprise.

Article 29

M. le président.

Je donne lecture de l'article 29.

Section 3 Branche vieillesse

« Art. 29. - I. - L'article L. 351-11 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :

« Art. L. 351-11 . - Un arrêté interministériel fixe :

« 1o Le coefficient de majoration applicable aux salaires et aux cotisations servant de base au calcul des pensions ou rentes ;

« 2o Le coefficient de revalorisation applicable aux pensions déjà liquidées.

« Ces coefficients sont fixés conformément au taux prévisionnel d'évolution en moyenne annuelle des prix à la consommation de tous les ménages hors les prix du tabac, qui est prévu, pour l'année civile considérée, dans le rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances. »

« II. L'article L. 341-6 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :

« Art. L. 341-6 . - Les salaires servant de base au calcul des pensions et les pensions déjà liquidées sont revalorisés dans les conditions fixées à l'article L. 351-11. »

« III. Les dispositions de l'article L. 357-4-1 et du premier alinéa de l'article L. 357-6 restent inchangées.

« IV. A l'article L. 434-17, les mots : "par les arrêtés pris" sont supprimés.

« V. - Les dispositions du I ci-dessus sont applicables pour l'année 1999. »

Plusieurs orateurs sont inscrits sur cet article.

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz.

« Nous alignerons l'évolution des pensions de retraite sur celle des salaires nets. » Cette pro-

messe figurait dans le programme du parti socialiste lors de la campagne des élections législatives de 1997. Qu'en est-il aujourd'hui ? Près de 100 000 retraités sont descendus dans la rue pour demander que cet engagement soit tenu. Pour eux, en effet, le pouvoir d'achat constitue un réel problème.

Après une vie de travail, quoi de plus normal que d'aspirer à un repos mérité et de pouvoir continuer à être acteur à part entière de notre société. Encore faut-il en avoir les moyens.

Bien que la retraite soit un droit acquis grâce à de nombreuses années de travail, cette possibilité ne leur est plus offerte depuis plusieurs années, d'abord parce que les retraites et les pensions n'évoluent pas en fonction du coût de la vie ou du salaire des actifs ; ensuite parce que la réforme Balladur-Veil de 1994 a conduit à une réduction de 25 % de la retraite de base sur les vingt proc haines années ; enfin parce que l'accord ARRCO-AGIRC de 1996 débouchera sur une diminution de 20 % des retraites complémentaires dans les cinq ans.

En somme les taux de pension vont en s'affaiblissant.

Ce n'est plus possible ! Nous apprécions donc votre coup de pouce concernant la revalorisation des pensions, mais nous souhaiterions vivement qu'il soit plus fort.

Il est temps de mettre un frein aux dispositions qui accentuent la régression sociale. C'est ce que nous avons fait ensemble en abrogeant la loi Thomas...

M. Germain Gengenwin.

Elle n'est pas abrogée !

M. Maxime Gremetz.

... et en instaurant un comité de surveillance au sein du fonds de réserve destiné à consolider le système par répartition et à lui faire tenir ses engagements.

L'un de nos amendements tendait d'ailleurs à indexer les pensions de retraite sur les salaires. Malheureusement, une fois de plus, l'article 40 a tranché. Toutefois, madame la ministre, vous avez toute latitude pour répondre à cette attente des retraités.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel.

La loi de financement de la sécurité sociale permet de débattre de l'ensemble de notre protection sociale, en particulier des problèmes de solidarité entre les générations. A ce propos, l'article 29 est le principal de ceux qui concernent la branche vieillesse. Il est celui où est abordée la question de la solidarité avec nos anciens. Nous la leur devons car nul ne saurait nier que si nous sommes là aujourd'hui c'est grâce à eux.

A cet égard nous estimons que le Gouvernement ne répond pas aux réels besoins de nos anciens et ne prépare pas l'avenir des plus jeunes. Ainsi que nous l'avons déjà exposé dans la discussion générale, nous sommes très attachés à la retraite par répartition. Cependant chacun sait qu'elle est fragile du fait même de la démographie, avec l'arrivée de ce que l'on appelle le papy-boom de 2005. Il se pose donc un réel problème de financement des retraites pour l'avenir.

Le problème est à peu près réglé pour le régime géné ral grâce aux mesures courageuses prises en leur temps par Simone Veil et Edouard Balladur. En revanche rien n'est fait actuellement pour les régimes spéciaux, et nous le regrettons beaucoup. Nous déplorons notamment que le Gouvernement, alors qu'il a toutes les données en main, ait cru bon de se donner un an supplémentaire de réflexion pour ne pas agir. Nous dénonçons à nouveau cet immobilisme regrettable.

Je souligne au passage que l'intervention de M. Gremetz, prétendant que la loi Thomas avait été abrogée, m'a beaucoup étonné. En effet le vote unanime intervenu à ce sujet avant-hier a, au contraire, conforté le principe de l'épargne-retraite.

M. Germain Gengenwin.

Eh oui !

M. Jean-Luc Préel.

En effet, nous nous sommes prononcés à l'unanimité contre un amendement proposant la suppression de la loi Thomas.

M. Bernard Accoyer.

Bien sûr !

M. Pascal Terrasse.

On se reverra !

M. Jean-Luc Préel.

Vous n'allez tout de même pas changer d'avis constamment ! Mercredi, vous avez voté contre la supression de la loi Thomas.

M. Pascal Terrasse.

Nous n'avons pas dit notre dernier mot !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 30 OCTOBRE 1998

M. Jean-Luc Préel.

Par votre vote vous l'avez confortée ! Nous nous en félicitons car nous avions besoin d'un tel vote pour confirmer l'instauration de l'épargne-retraite en France. Certes, cette loi n'est peut-être pas parfaite et il conviendra sans doute de l'améliorer en lui apportant quelques modifications, mais vouloir l'abroger serait aller à contresens de l'histoire.

M. Maxime Gremetz.

Et pourtant, elle va être abrogée !

M. Jean-Luc Préel.

Il est vrai qu'en matière d'épargneretraite on court deux lièvres à la fois. En effet, j'ai cru comprendre que le ministre de l'économie et des finances reconnaissait qu'il était nécessaire d'améliorer les fonds propres des entreprises. Il s'agit d'un problème économique majeur, mais, aujourd'hui, il importe surtout de conforter les retraites de nos anciens et d'assurer celles des futurs retraités.

Je veux enfin revenir sur la médicalisation des établissements d'accueil de personnes âgées, car je n'ai pas encore obtenu de réponse très claire à mes interrogations sur ce sujet.

De nombreux anciens, bien que souhaitant rester à domicile, sont obligés d'aller en établissement d'hébergement soit parce que leur état de santé se détériore, soit parce qu'ils sont isolés. Or le déficit dans la prise en compte de cette dépendance demeure important.

Certes la création de très nombreux lits a été autorisée par les CROS - 19 000 à ma connaissance, au début de l'année - mais aucun financement n'a été prévu. Alors que la réforme de la tarification va être très prochainem ent appliquée, mais, probablement, à enveloppe constante, que vont devenir ces lits autorisés qui n'auront pas été financés ? Vous prévoiriez d'en financer 7 000. Les 12 000 restants seront-ils ou non financés dans le cadre de l'ONDAM l'année prochaine ? Cette question me paraît mériter une réponse appropriée.

Telles sont les observations que je voulais présenter en quelques mots afin de ne pas prolonger le débat, car j'ai cru comprendre que certains souhaitaient que l'on n'aille pas au-delà de samedi soir.

(Sourires.)

M. le président.

J'espère bien que nous n'irons pas audelà de ce soir.

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Cet article 29 concerne la branche vieillesse, dont on ne rappelle pas assez souvent qu'elle est financièrement la plus importante et qu'elle est celle qui a généré depuis longtemps les déficits les plus élevés. Si ces déficits sont moins importants aujourd'hui, on le doit à la réforme du régime général des salariés du secteur privé réalisée par le gouvernement d'Edouard Balladur en 1994.

Cette branche dont l'avenir est totalement incertain est particulièrement fragile. Pour cette raison, elle aurait dû retenir toute votre attention. Or ce projet de loi de financement de la sécurité sociale est le texte des occasions manquées, en particulier pour la réforme des retraites.

Il est vrai que la gauche n'a jamais eu le courage indispensable pour prendre en main l'avenir des retraites de nos concitoyens.

M. Francis Hammel.

Et la droite, qu'a-t-elle fait ?

M. Bernard Accoyer.

En 1991, Michel Rocard, alors Premier ministre, avait demandé un Livre blanc, dans lequel il est officiellement écrit que notre système de retraite par répartition connaîtra, dès 2005, pour des raisons de pyramide des âges, des problèmes particulièrement sérieux qui iront en s'aggravant dans les années suivantes.

Pour autant, qu'a fait la gauche pour les régimes de retraite ? Rien ! Au contraire, en 1994 - certains d'entre nous siégeaient déjà dans cet hémicycle - elle s'est opposée avec véhémence à la réforme courageuse que je viens de rappeler et sans laquelle les déficits que nous devrions combler aujourd'hui seraient bien plus importants.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Deux milliards de francs !

M. Bernard Accoyer.

Non, monsieur Cahuzac, parce qu'il faut additionner les déficits ! En effet, la sécurité sociale n'est ni une photo à un certain instant ni une image médiatique. Elle doit aussi faire des prévisions pour les retraites de nos concitoyens et additionner les déficits, notamment ceux que vous avez constitués avant 1993, qui se sont accumulés dans la CADES et qui endetteront les jeunes générations jusqu'en 2014 ! En 1995, au moment où ce que l'on a appelé la réforme Juppé avait stigmatisé l'impasse dans laquelle se trouvaient les régimes vieillesse, ont été déclenchées de grandes manifestations simplement pour s'opposer à ce que l'on établisse le bilan prévisionnel des régimes de retraite spéciaux. La gauche, unanime, était dans la rue, avec les grévistes qui s'opposaient, en fait, à un simple examen, c'est-à-dire à la transparence.

En 1997, l'Assemblée nationale a adopté la création des fonds de pension et, une nouvelle fois, la gauche s'est dressée, criant au scandale.

M. Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général.

Tout à fait !

M. Bernard Accoyer.

Enfin, nous avons assisté, avanthier, au triste spectacle des négociations de couloir, de l'obstruction et du temps perdu pour aboutir au rejet unanime d'un amendement demandant l'abrogation de la loi Thomas, dans un vote qui a conduit la gauche à se prononcer ainsi pour les fonds de pension ! Cela devient vraiment compliqué ! Aujourd'hui, les chiffres sont là et j'observe avec une certaine satisfaction que la démarche du Gouvernement sur l'aménagement du temps de travail s'apparente à celle qu'il a suivie à propos des fonds de pension. En effet, malgré les effets de manche, les campagnes publicitaires, les affiches quatre par trois et les plaquettes coûteuses, la mise en oeuvre des 35 heures ne correspond plus guère qu'à un assouplissement des conditions de travail ! Non seulement l'objectif de réduction du temps de travail n'est pas atteint, mais, en outre, les salaires sont tirés vers le bas.

(Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Malgré tout, la gauche communique en affirmant qu'il s'agit d'une grande avancée sociale. Comme nous sommes surtout intéressés par l'avenir du pays, nous prenons ce qu'il y a de bon.

Pour les retraites, vous agirez de la même façon. Après avoir jeté aux orties de façon ostentatoire l'épargne de retraite que sont les fonds de pension, vous n'avez de cesse maintenant de nous expliquer qu'elle est finalement inévitable, ce que nous savons tous depuis longtemps.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 30 OCTOBRE 1998

Nous attendons que vous nous présentiez une première proposition. Les nôtres n'ont pas recueilli votre attention.

Mais, comme vous finissez toujours par adopter ce qui semble incontournable - et que vous auriez pu adopter plus tôt pour essayer de sauver l'institution -, peut-être y aura-t-il des jours meilleurs ? M. Gremetz a rappelé quelques-unes des promesses de la gauche en 1997 lors des élections législatives. Je lui répondrai qu'il est des promesses mieux tenues que d'autres et des équilibres curieusement mieux respectés ! Je terminerai par une question : pourquoi avoir revalorisé sur des critères différents et à un niveau différent les allocations familiales et les pensions de retraite ? C'est véritablement, comme pour le reste, la politique du hasard !

M. le président.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

2

ORDRE DU JOUR DES

PROCHAINES SÉANCES

M. le président.

Cet après-midi, à quinze heures, deuxième séance publique : Suite de la discussion du projet de loi, no 1106, de financement de la sécurité sociale pour 1999 : MM. Alfred Recours, Claude Evin, Denis Jacquat et Mme Dominique Gillot, rapporteurs au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (rapport no 1148, tomes I à IV) ; M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan (avis no 1147).

A vingt et une heures, troisième séance publique : Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.

La séance est levée.

(La séance est levée à treize heures cinq.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT