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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 2 NOVEMBRE 1998

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. FRANÇOIS D'AUBERT

1. Loi de finances pour 1999 (deuxième partie). - Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 7859).

COOPÉRATION (suite) M. Pierre Brana, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères.

MM. Michel Voisin, Elie Hoarau, Jacques Godfrain, Pierre Goldberg, Yves Dauge, Pierre Lequiller, François Loncle.

M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Rappel au règlement (p. 7877)

MM. Jean-Claude Lefort, le président.

Reprise de la discussion (p. 7878)

Réponse de M. le ministre à la question de M. Pierre Lequiller.

AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET COOPÉRATION

Etat B

Titres III et IV. - Adoption (p. 7878)

Etat C

Titres V et VI. - Adoption (p. 7878)

Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.

2. Ordre du jour des prochaines séances (p. 7879).


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COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. FRANÇOIS D'AUBERT,

vice-président

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures.)

1 LOI DE FINANCES POUR 1999 (DEUXIÈME PARTIE) Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 1999 (nos 1078, 1111).

COOPÉRATION (suite)

M. le président.

Nous poursuivons l'examen des crédits du ministère des affaires étrangères concernant la coopération.

La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères.

M. Pierre Brana, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères.

Monsieur le président, monsieur le ministre délégué à la coopération et à la francophonie, mes chers collègues, ce projet de budget est particulier, puisqu'il est celui de la réforme du ministère de la coopération et de la fusion de ses services avec ceux du ministère des affaires étrangères.

Ce rattachement de la coopération au Quai d'Orsay est, on le sait, un serpent de mer. Il a été régulièrement évoqué depuis le début de la Ve République. Moi-même, je l'ai appelé de mes voeux à plusieurs reprises. Il est et se veut une réponse aux différentes critiques qui, des années durant, ont été adressées à l'ancien dispositif.

Le premier était le manque de cohérence de notre politique d'aide, avec notamment l'éclatement de l'aide publique au développement - l'APD -, entre de nombreux ministères. Le deuxième était l'absence de lisibilité de notre politique de coopération. Le troisième portait sur les difficultés du dispositif de s'adapter aux mutations actuelles que connaissent les pays du Sud, qu'elles soient politiques, économiques ou sociales.

Cohérence, clarté, efficacité. Tels doivent être les maîtres mots d'une politique de coopération.

La première réponse à ce triple défi est donc une réponse administrative. La réforme répond, en effet, à un souci d'efficacité, de rationalisation et de modernisation.

L a nouvelle direction générale de la coopération internationale et du développement regroupe les services concernés des deux ministères et s'organise autour de q uatre directions sectorielles représentant les grands domaines d'action de la coopération internationale : la coopération technique, la coopération culturelle et le f rançais, la coopération scientifique et universitaire, l'audiovisuel et les techniques de communication.

Rappelons d'abord, ce qui n'est pas second, que cette réforme a été menée avec un constant souci de consultation et de négociation avec le personnel. La nouvelle structure devrait se mettre en place le 1er janvier 1999, mais, d'ores et déjà, les deux directions administratives ont fusionné.

Au-delà des questions administratives, cette volonté de regrouper l'ensemble des services va dans le sens de la cohérence et de l'efficacité, tandis que le maintien d'un secrétariat d'Etat, transformé en ministère, souligne que ce souci se double d'une volonté maintenue d'avoir un regard particulier sur la coopération avec les pays francophones et notamment avec l'Afrique.

Pour notre part, nous ne pouvons que nous réjouir de la promotion du secrétaire d'Etat au rang de ministre, d'abord pour lui (Sourires) , ensuite parce qu'ainsi est clairement affirmée la volonté du Gouvernement de continuer à mener de manière forte une politique de coopération.

Avec 0,45 % de son PNB consacré à l'aide publique en 1997, la France se place au premier rang des pays du G 8. En termes de volume, elle est au deuxième rang mondial, derrière le Japon, loin devant l'Allemagne ou les

Etats-Unis. Saluons cet effort, même si nous regrettons une certaine diminution des crédits de la coopération technique.

M. Michel Voisin.

Eh oui !

M. Pierre Brana, rapporteur pour avis.

Certes, cette diminution s'explique par la volonté de remplacer nos coopérants par des personnels des pays concernés. Mais j'ai trop souvent constaté combien les techniciens ou les ouvriers qualifiés faisaient défaut à un certain nombre de pays africains, ne serait-ce que pour assurer l'indispensable maintenance, pour ne pas demander une grande attention en la matière et souhaiter qu'il n'y ait pas désengagement de la part de la France. Peut-être faudrait-il, au contraire, une plus grande adéquation à des besoins réels.

Je tiens aussi à saluer la hausse du montant des contributions volontaires aux dépenses internationales - plus 50 millions sur le chapitre 42-32 -, domaine dans lequel la France a un lourd retard à rattraper. Il était donc important d'augmenter de façon significative nos contributions à des organismes comme l'UNICEF, le Programme alimentaire mondial ou le Haut commissariat aux réfugiés.

Deux autres priorités de ce budget me paraissent également positives. Je veux parler de l'augmentation de crédits destinés à la coopération culturelle et scientifique, qui permettra d'augmenter le nombre de bourses offertes à des étudiants étrangers, et de répondre à l'actuelle concurrence des Anglo-Saxons dans ce domaine, et de la


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volonté de mieux associer la société civile à l'aide au développement, avec une augmentation des crédits consacrés à la coopération décentralisée, et notamment aux ONG.

Le souci de cohérence, de clarté et d'efficacité passait aussi par une réflexion approfondie sur l'APD. Si l'éclatement de cette aide entre différents ministères est difficilement corrigible, il était nécessaire de coordonner davantage ces dispositifs. C'est le but du CICID - le comité interministériel de la coopération internationale et du développement - dont le secrétariat est partagé entre les affaires étrangères et les finances. Il a un rôle très important, puisqu'il doit à la fois déterminer la zone de solidarité prioritaire, établir chaque année la programmation et évaluer la conformité de notre aide aux objectifs fixés.

J'insiste sur cette double nécessité d'une réflexion sur l'aide et d'une évaluation de cette aide.

L'aide au développement doit être ciblée sur des projets précis, son utilisation doit être d'une grande clarté et sa durée conditionnée à un certain nombre de principes, notamment le respect effectif des droits de l'homme dans ces pays. Bien entendu, je pense à l'Afrique subsaharienne, à cet ancien pré-carré, qui, quelles que soient les aides apportées depuis des décennies, est à la fois une des régions les plus pauvres du monde et l'une de celles où les atteintes aux droits de l'homme sont parmi les plus nombreuses.

M. Michel Voisin.

Doit-on en déduire que vous allez voter contre ce budget ?

M. Pierre Brana, rapporteur pour avis.

Bien entendu, la situation n'est pas simple. Les conflits inter et intraétatiques continuent à sévir. Conflits entre le Cameroun et le Nigeria, entre l'Ethiopie et l'Erythrée, révoltes et guerres civiles en Casamance, en Guinée-Bissau, guerre civile encore dans l'ex-Zaïre, en Somalie, raids rebelles en Ouganda, au Rwanda, au Burundi, renaissance d'un affrontement en Angola, tentatives de sécession aux Comores. La liste est longue et n'est malheureusement pas exhaustive.

La politique clairement affirmée par le Gouvernement de non-ingérence et de non-indifférence s'accompagne, et je m'en réjouis, de soutien à des actions internationales, notamment à celles menées par les Africains eux-mêmes.

Le projet RECAMP - renforcement des capacités africaines du maintien de la paix - vise ainsi à permettre de mettre sur pied des unités capables d'être engagées dans des opérations internationales. Mais il y a aussi le centre de prévention des conflits de l'OUA.

T rop longtemps misère, atteintes aux droits de l'homme, non-respect de la vie humaine ont été considérés comme consubstantiels à l'Afrique, terre sinistrée entre les guerres tribales et le sida.

Au travers de la réforme du ministère de la coopération, mais aussi derrière les grands traits du budget qui nous est présenté, on peut lire une volonté affirmée de rompre avec des grilles de lecture trop schématiques, et des pratiques anciennes de type post-colonial, qui ne doivent plus avoir cours.

M. Michel Voisin.

Quel libéralisme !

M. Pierre Brana, rapporteur pour avis.

Derrière les priorités budgétaires et la nécessaire réforme administrative, c'est aussi un regard résolument neuf sur le développement et la coopération que nous devons avoir.

Mes chers collègues, au bénéfice de ces considérations, je vous invite, avec la commission des affaires étrangères, à adopter ces crédits.

M. le président.

La parole est à M. Michel Voisin, premier orateur inscrit.

M. Michel Voisin.

Le projet de budget de la coopération que vous nous présentez, monsieur le ministre, est la traduction de la réforme administrative décidée le 4 février dernier, sans faire grand cas de la représentation nationale. Il regroupe, en effet, sans que l'on puisse trop y reconnaître les siens, deux parties qui s'enchevêtrent, s'interpénètrent et s'imbriquent : celle du ministère des affaires étrangères à proprement parler, et celle du ministère de la coopération.

Faut-il voir dans cette réforme administrative une simple volonté de regrouper dans une stricte logique comptable l'ensemble des crédits concourant à l'action extérieure de la France ou plutôt une volonté d'hégémonie du ministère des affaires étrangères ? Je pense, pour ma part, qu'il s'agit plutôt de la traduction comptable d'un choix politique : placer l'action extérieure de notre pays, en dehors bien sûr du commerce extérieur et de la défense - l'OPA eût été plus malaisé e -, sous la tutelle et l'autorité du ministre des affaires étrangères. Force est de reconnaître, mes chers collègues, que la réunion des compétences du Quai d'Orsay et de la R ue Monsieur n'apparaît aujourd'hui qu'à l'état d'ébauche. Tout me porte à craindre une perte de compétence de l'outil que le général de Gaulle avait forgé pour venir en aide aux pays en voie de développement, et que ses successeurs, y compris François Mitterrand, avaient eu à coeur de préserver, voire d'améliorer.

Je ne puis aujourd'hui que m'interroger sur les véritables raisons, conscientes ou inconscientes, qui ont conduit le Gouvernement à rompre ainsi avec le passé de la Ve République.

Notre bon docteur Sigmund Freud trouverait vraisemblement une explication dans l'expression de la volonté de rupture avec le père, à un moment où il paraît difficile d'assumer un héritage que l'on ne peut cependant pas refuser, mais qu'il est apparemment difficile d'assumer.

N'étant pas psychanalyste, je n'oserai me risquer sur une telle voie. Il nous serait agréable, monsieur le ministre, que vous nous éclairiez sur les véritables raisons qui ont conduit le Gouvernement à vous retirer une partie non pas de vos attributions - enfin, pas encore - mais de vos moyens d'action.

Je ne vous cacherai pas que le groupe UDF s'interroge sur la capacité du Gouvernement à mener à bien une réforme, au demeurant plus complexe qu'il n'y paraît, en disposant d'un budget aussi étriqué.

Les crédits de la coopération sont, en effet, en recul de 7,7 % par rapport à ceux de 1998. Et les changements de nomenclature budgétaire ne sauraient à eux seuls expliquer une baisse aussi importante. Pas plus d'ailleurs que les gains de productivité que vous pourriez envisager de faire sur le dos d'un personnel qui ne peut que s'interroger sur son avenir - la presse s'en fait l'écho aujourd'hui et le sens de son action passée. Convenez-en, monsieur le ministre, et nos partenaires traditionnels apprécieront, vous avez procédé à une diminution des crédits consacrés à l'aide au développement, et de ceux affectés aux écoles françaises, sans parler de l'immolation de notre coopération militaire traditionnelle.

Je m'attarderai sur ce dernier point. Il m'apparaît, comme à bien d'autres ici, indispensable de repenser les modalités de notre coopération de défense. Toutefois, je ne suis pas persuadé que la seule réponse à apporter à ses nécessaires développements en Europe ou au sein de l'OTAN - organisation dans laquelle la France est entrée


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de fait, sans que le Parlement ait d'ailleurs eu à se prononcer - doive résider dans un redéploiement des postes d'assistants militaires techniques présents jusqu'à ce jour dans les pays africains du champ.

Je me permettrai simplement de rappeler qu'à cette tribune même, il y a quelques années, Jean-François Deniau, dont les compétences en la matière ne sauraient être mises en doute par personne, déplorait l'utilisation que le Quai d'Orsay faisait des moyens budgétaires et humains qui lui étaient octroyés pour remplir ses missions de coopération militaire. Il vous faudra, monsieur le ministre, vous expliquer sur la façon dont vous utiliserez effectivement les crédits de coopération de défense.

Alors que l'Afrique est secouée par les soubresauts que chacun de nous connaît, il vous apparaît urgent de retirer les quelques coopérants militaires dans les régions où règne, grâce à leur présence dissuasive, un calme relatif.

Certes, l'ayant appelé de mes voeux lorsque, il y a quelques années, j'étais rapporteur de ces crédits je ne puis que souscrire au concept qui soustend le projet RECAMP visant à aider la formation d'une force interafricaine de maintien de la paix. Je ne puis cependant croire que la contribution future de la France à la sûreté et à la sécurité sur le continent africain se limitera à ce seul moyen. En effet, aucun développement ne me semble possible sans sécurité.

Monsieur le ministre, le groupe UDF déplore que le Gouvernement n'ait pas fait de l'action extérieure de la France l'une de ses priorités, surtout après le budget de pénurie de l'an dernier. Nous pouvons être légitimement inquiets d'une orientation budgétaire qui se satisfait d'une prétendue meilleure santé des économies, en particulier africaines, et diminue les concours de la France aux pays les plus pauvres. La réduction de l'aide aux balances des paiements de ces pays, en baisse de 305 millions de francs, procède d'une vision à court terme qui paraît oublier les données prévisibles pour 1999, notamment la poursuite de la chute des prix des matières premières. Il faut déplorer le recul de 53 % des concours financiers en ce domaine.

Le Gouvernement se désengage, car il situe ses priorités ailleurs. La solidarité, même minime, ne lui apparaît plus comme une action fondamentale. Ce n'est certes pas notre sentiment, de notre côté de l'hémicycle. Fait-il pour autant un geste significatif, en encourageant celles et ceux qui, eux, font preuve de constance dans leur engagement en faveur de l'aide au développement : organisations non gouvernementales, collectivités locales et Agence française de développement ? En effet, il ne faut pas oublier le rôle central de cet opérateur principal du dispositif français d'aide au développement qui contribue, par ses financements, à la réalisation de projets publics, mais aussi privés, créateurs d'emplois.

Votre gouvernement souhaite-t-il, au fond, aligner les modalités de sa coopération en faveur des pays les plus pauvres sur le modèle de ses partenaires occidentaux, notamment américain ? Mieux encore, veut-il diluer son aide bilatérale dans le magma incontrôlable que constituent les aides apportées par les institutions de Bretton Woods, abandonnant ainsi les partenaires privilégiés que sont les pays africains ? La France peut-elle renier son passé et oublier les besoins en aide immédiate et à court terme ? Nous regrettons, par ailleurs, que les reports de crédits de 1998 concernant les fonds d'ajustement structurels n'aient pas été utilisés au bénéfice de l'aide technique.

Pouvons-nous envisager de diminuer de manière aussi marquée le nombre de nos coopérants, alors que les besoins sont toujours aussi criants, voire plus, du fait de la nécessité de remplacer les coopérants qui servaient au titre du service national ? Nous ne pouvons que nous inquiéter du retard dans l'élaboration d'un projet de loi sur ce sujet. Cela conduit à douter de la volonté réelle du Gouvernement à légiférer sur le volontariat. En tout état de cause, si un tel projet de loi devait un jour être vraiment élaboré, son application ne pourrait être raisonnablement envisagée avant deux ou trois ans.

Les crédits alloués aux écoles françaises reculent, eux aussi, de façon importante : 5,8 %. Sans doute est-ce l'une de vos manières de contribuer au rayonnement international de la France ! S'agit-il, selon vous, d'une façon d'assurer la formation des techniciens locaux dont le développement a tant besoin ? Ce ne peut être en tout cas une façon de soutenir notre rayonnement culturel et technique.

Nous ne pouvons donc que déplorer cette entaille pratiquée aveuglément dans les crédits d'action éducative, tout comme nous regrettons la suppression de postes d'enseignants coopérants. A cet égard, peut-être avez-vous succombé à l'amicale pression de votre collègue de l'éducation nationale qui recherche désespérement des postes à redéployer pour dégraisser son mammouth ? Si mes souvenirs sont exacts, il me semble, monsieur le ministre, que vous avez également en charge la francophonie, à moins que M. Védrine n'en soit directement le patron.

M. Jean-Claude Lefort.

C'est perfide !

M. Michel Voisin.

Je vous en prie, monsieur Lefort, vous venez d'arriver et vous n'avez pas entendu le début de mon intervention.

M. Jean-Claude Lefort.

Je l'ai suivi sur le circuit de télévision intérieure ! M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Je répondrai à tout cela.

M. Michel Voisin.

Je l'espère bien, monsieur le ministre.

M. Pierre Brana, rapporteur pour avis.

Ce sera facile ! M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Je m'étonne qu'un expert-comptable sache aussi mal lire un budget !

M. Michel Voisin.

Laissez-moi conclure, monsieur le ministre, car vous verrez que je veux vous aider.

M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Il serait temps !

M. Michel Voisin.

Le FAC a été l'instrument qui a permis à la France de garantir des revenus réguliers destinés à faciliter les investissements des pays les moins avancés.

Pourquoi diminuer les crédits de paiement qui lui sont affectés, sous prétexte d'un étalement de l'exécution des p rogrammes ? Nous attendons de vous, monsieur le ministre, que vous nous apportiez les justifications de cette réorientation de notre politique de coopération.

N'a-t-on pas une nouvelle fois pris seulement en considération, ce que je déplore, certainement comme beaucoup ici, les arguments comptables avancés par Bercy auxquels il ne vous a pas été possible de vous opposer ? L'augmentation des contributions volontaires de la France au programme de développement des Nations Unies ne saurait à elle seule incarner une quelconque


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compensation à la cure d'austérité que vous faites subir au budget de la coopération. Force est de reconnaître que les 50 millions de francs d'augmentation des contributions françaises sont bien faibles dans la balance de l'aide au développement et bien peu de choses au regard des engagements passés de la France.

Le FAC prétend s'organiser désormais sur un partenariat avec les collectivités locales. Le souci de proximité développé depuis plusieurs années est, a priori, louable.

Toutefois, il convient de s'interroger sur l'évolution à long terme de cette politique. Ne s'agit-il pas, monsieur le ministre, en fait, d'un nouveau désengagement de l'Etat et d'une tentative masquée de transférer aux collectivités locales une charge que le Gouvernement n'entend plus assumer ? Monsieur le ministre, la réforme administrative que vous conduisez, au détriment de la coopération, en bradant l'héritage généreux laissé par le général de Gaulle et par vos prédécesseurs montre combien vous acceptez de sacrifier l'idéal qui l'animait - et qui vous a un temps animé, vous et votre majorité - sur l'autel de la rigueur b udgétaire. M. Brana l'a également souligné et je reprends son appréciation.

Le projet de budget de la coopération que vous nous présentez n'est certainement pas conforme à l'idée que nous nous faisons du rayonnement de la France à l'égard de pays qui nous sont proches par l'histoire. Il manque d'ambition pour la France et son rôle dans la communauté internationale. Nous ne pouvons vous suivre dans votre volonté de réduire progressivement à néant les efforts accomplis et l'action passée de vos prédécesseurs de droite comme de gauche.

Monsieur le ministre, je ne suis pas un nostalgique dans l'âme. Je souhaite même de tout coeur que votre réforme réussisse et vous permette de poursuivre l'action que nous avons menée.

Pour toutes ces interrogations, sur lesquelles j'attends des réponses, le groupe UDF ne votera pas en faveur de ce projet de budget.

M. le président.

La parole est à M. Elie Hoarau.

M. Elie Hoarau.

Monsieur le ministre, l'île de la Réunion fait de la France un Etat riverain de l'océan Indien, de même que l'existence des départements d'outre-mer fait de l'Union européenne la seule puissance continentale présente dans toutes les parties du monde.

Cette situation constitue indéniablement un atout pour l'Union européenne, pour les départements d'outre-mer en général et pour la Réunion en particulier, à condition que soit pris en compte le rôle de trait d'union que la Réunion peut jouer entre la France et l'Union européenne, d'une part, et les pays d'Afrique australe et du bassin indiaocéanique, d'autre part. Or, actuellement, les

Etats riverains de l'océan Indien essaient de bâtir des organisations internationales en vue de constituer des blocs économiques, sans que la Réunion ne soit associée à ces tentatives. Tel est le cas, par exemple, de la SADC, la conférence pour le développement du sud de l'Afrique, qui est en train de réaliser une zone de libre échange qui comptera plus d'un demi-milliard d'habitants dans moins de vingt-cinq ans.

De plus, chacun a présent à l'esprit le fait qu'en ce moment même des négociations ont lieu entre l'Union européenne et les Etats ACP. Ces nouveaux accords s'acheminent vers une régionalisation plus prononcée.

Dans notre région, cela se traduira par un partenariat renforcé entre l'Union européenne et la SADC, comme l'atteste d'ailleurs le sommet qui aura lieu demain à Vienne. Il est à déplorer que la Réunion n'ait pas été associée à ces discussions, comme elle a été exclue de la négociation pour la mise en place d'une zone de libre échange entre l'Union européenne et l'Afrique du Sud.

Si les intérêts de la Réunion ne sont pas pris en compte dans de tels accords, ceux-ci constitueront une menace réelle pour ses productions qui seront dangereusement concurrencées sur le marché européen.

Une logique similaire est en oeuvre pour ce qui est de l'Indian Ocean Rim.

Une demande a été formulée pour une adhésion de la France au titre de la Réunion, mais il faudrait revoir la procédure ou la stratégie de la démarche si l'on veut éviter un rejet au sommet de Maputo prévu pour mars prochain.

Pourtant, la Réunion a un ardent désir de prendre toute sa place dans la coopération régionale : elle dispose, pour ce faire, d'atouts indéniables qui pourraient être autant de pôles d'excellence pour cette coopération. On peut citer : la santé, la protection de l'environnement, la culture, les échanges économiques et commerciaux, mais également la formation supérieure et la recherche. A cet égard, le plan pour l'université du troisième millénaire doit tenir compte de cette orientation.

Le renforcement du concept, plus précisément de la doctrine, de région ultrapériphérique, les fameuses RUP, et un traitement spécial de ces dernières par l'Union européenne constituent un axe essentiel pour le développement de la Réunion et pour son insertion dans son environnement naturel. Je demande donc au Gouvernement français d'apporter tout son soutien au rapport d'initiative que le Parlement européen est en train de préparer. Ce rapport devrait être adopté en février ou mars 1999. Il vise à définir les rapports entre les régions ultrapériphériques et les pays ACP de leurs régions.

De même façon que le POSEIDOM a défini les nouveaux rapports entre les départements d'outre-mer et l'Union européenne - ce qui a abouti à l'article 299-2 du traité d'Amsterdam - le rapport d'initiative que prépare le Parlement européen devra réglementer les relations entre les départements d'outre-mer et les pays ACP voisins.

Ainsi, notre double appartenance à l'Union européenne et à notre zone géographique n'apparaîtra plus comme un point fragile chargé de contradictions mais deviendra, au contraire, un atout majeur qui sera valorisé au profit de notre développement, mais aussi de celui de nos voisins.

En son temps, la participation de la Réunion aux côtés des Etats membres de la commission de l'océan Indien a constitué une avancée significative. Depuis, des formules plus pertinentes et plus simples ont été trouvées. Elles ont permis notamment aux Antilles et à la Guyane d'être pleinement parties prenantes - même si elles souhaitent l'être plus encore - à l'association des Etats de la Caraïbe ou à d'autres collectivités d'outre-mer de siéger au sein d'organisations régionales. Le Gouvernement doit faire en sorte, monsieur le ministre, que la Réunion puisse bénéficier de ces avancées, qui lui permettront d'être un partenaire actif des développements majeurs en cours dans le bassin indiaocéanique et en Afrique australe.

La région pourrait jouer un rôle décisif dans ce domaine. Tel est, en tout cas, l'objet de la réforme administrative que nous souhaitons et dont nous avons fait état ici même lors du débat du 23 octobre dernier sur l'outre-mer. Elle consisterait à créer un deuxième département à la Réunion et à donner à la région des compétences accrues en matière de coopération régionale et dans ses relations avec l'Union européenne.


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Telles sont, monsieur le ministre, les remarques que je voulais faire à l'occasion du débat sur le budget de votre ministère.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M.

le président.

La parole est à M. Jacques Godfrain.

M.

Jacques Godfrain.

Monsieur le ministre, permettez-moi d'abord de souligner combien je me rejouis que vous ayez désormais rang de ministre délégué, ce qui vous p ermet de participer régulièrement au conseil des ministres. Une telle place revient au responsable de la coopération en raison de l'action qu'il conduit. En effet, si elle a peu d'importance aux yeux des observateurs de la politique en France, elle n'échappe pas à ceux des autres pays, notamment ACP, qui regardent bien souvent vers notre pays pour savoir quels sont les meilleurs chemins et les expertises les plus fiables en matière de développement.

Dans son rapport, M. Adevah-Poeuf a formulé des remarques très pertinentes, traduisant l'opinion qu'inspire généralement ce budget de la coopération. N'eût été sa conclusion appelant à un vote positif, nous aurions pu l'approuver totalement.

Ce budget pour 1999 marque un moment presque historique, puisqu'il est le premier intégré à celui du ministère des affaires étrangères. Cela signifie clairement que, dorénavant, les crédits alloués à la coopération et au développement seront des outils de la politique étrangère de la France. Les actions que vous menez devront désormais être interprétées à cette aune. Ainsi que l'a souligné un orateur cet après-midi, cette évolution est lourde de sens. Ainsi lorsqu'un pays ayant moins de population qu'un autre recevra davantage de crédits que lui, cela constituera un signe fort de politique étrangère. Votre ministère courra donc maintenant le risque de voir chacune de ses actions n'être jugée qu'en fonction d'une interprétation politique, plus du tout sur le plan humanitaire ou social.

On peut même se demander si votre ministère ne mènera plus qu'une action politique au service exclusif de la diplomatie ! Cela voudrait dire que les actions humanitaires, culturelles ou sanitaires passeraient au second plan, ce que nul ne souhaite. La priorité doit en effet rester à ces actions qui marquent depuis longtemps les interventions de la France.

En matière d'aide publique au développement nous avons une spécificité très ancienne que Michel Voisin vient de rappeler. Elle a caractérisé l'action de tous les septennats de la Ve République, faisant d'ailleurs suite à celle conduite sous la IVe République, notamment à partir de la loi Defferre : dans les instances internationales où nous siégeons - je pense en particulier au G 7 et au G 8 - si la voix du gouvernement français ou du chef de l'Etat français, quel qu'il soit d'ailleurs, ne s'élevait pour demander que le niveau d'aide publique au développement dans le monde atteigne un certain niveau, qui défendrait cette aide publique au développement ? Au sommet de Lyon où le Président de la République français avait invité le FMI et la Banque mondiale, nos partenaires des pays développés, notamment américains, avaient été en quelque sorte obligés par la décision de la France de parler de ce sujet.

C'est là où je crois déceler une contradiction entre cet affichage, qui est le fruit d'un consensus général - et ce n'est pas M. le ministre des affaires étrangères qui me contredira -, cet appel que nous faisons régulièrement aux grandes puissances des pays développés et la diminution constante des crédits que nous consacrons à la coopération.

Certes nous sommes rassurés. Nous connaissons les chiffres pour chaque pays. Nous savons que nous sommes classés deuxième derrière les Japonais, que les Allemands arrivent en troisième position, et les Américains en quatrième position. Nous savons très bien que nous n'avons pas à rougir de notre action en chiffres relatifs comme en chiffres absolus. Mais n'y aura-t-il personne pour se dresser dans l'arène internationale et nous dire : « Arrêtez vos discours aux Nations unies, aux réunions du G 7 et du G 8 ! Avec un budget d'une telle modestie, vous ne pouvez plus donner des leçons aux autres ! » Rien ne serait plus grave pour la crédibilité internationale de notre pays que ce point fort de notre politique étrangère qu'est l'aide publique au développement soit désavoué par le budget qui nous est présenté.

Mais l'aide au développement ne se borne pas à l'aide publique au développement. Elle comprend également une action d'accompagnement et de soutien à tous les investisseurs privés, que ce soit au travers de l'action menée par l'Agence française de développement - nouvelle formule - ou de l'appui apporté aux entreprises qui investissent ou qui échangent avec les pays en question.

Cette aide à l'investissement privé doit avoir un prolongement parce que, si l'entreprise privée subit des pertes - c'est un risque - celles-ci ne doivent pas être sans compensation.

Les entreprises qui avaient beaucoup investi dans des pays comme le Congo ou la République centrafricaine n'ont plus, aujourd'hui, d'interlocuteur alors qu'elles ont tout perdu. Si l'on veut relancer l'investissement sur des bases privées dans ces pays, il faut une compensation plus que symbolique de ces pertes.

Rien ne serait plus grave qu'au moment où l'Afrique oscille entre la démocratie, ce qui est notre souhait, et l'intégrisme totalitaire, la faiblesse de notre effort soit involontairement complice de ce dernier.

Rien ne serait plus grave également que des peuples entiers, dont la notion d'espérance est d'abord liée à celle d'espérance de vie et qui nous font confiance, n'aient plus comme possibilité de survie que la longue marche migratoire vers nos rivages ou nos banlieues. C'est un sujet qu'il faut aborder courageusement. L'aide au développement consiste aussi à donner à des populations la possibilité de trouver leur bonheur en restant chez elles.

L'action conduite par le Gouvernement en matière de migration est étroitement liée à celle qu'il mène en matière de développement local. J'apprécie d'ailleurs que les aides à la coopération décentralisée, destinées à fac iliter la vie de populations qui, sinon, se retrouveraient chez nous dans des conditions indigentes, soient en augmentation.

Rien ne serait plus grave que, si la justice reculait et l'arbitraire progressait, ce soit parce que la France n'assumait plus ses fonctions internationales.

Dans quelques semaines, aura lieu la ratification par la France du traité d'Amsterdam. Les débats qu'elle suscitera seront, n'en doutons pas, examinés de près par de nombreux peuples du monde.

La coopération entre l'Union européenne et l'Afrique ne revêt peut-être pas une importance extrême chez nous, mais elle est une préoccupation majeure des peuples africains.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 2 NOVEMBRE 1998

Ce que la France et l'Europe peuvent bâtir ensemble est une chance exceptionnelle pour tous les peuples du monde, à condition que nous soyons logiques avec nousmêmes et que nous ayons une position ferme et solide.

P ourquoi ? Parce que, dans quelques mois, nous commencerons à étudier de très près les suites des accords de Lomé. Je souhaite vivement que votre ministère puisse jouer un rôle d'expertise dans ce domaine. Les techniciens qui vous conseillent, les fonctionnaires du ministère de la coopération sont tout à fait compétents sur ce sujet et doivent être partie prenante dans cette négociation. Nous avons vu, pour les règlements sur la banane, lors de la négociation sur l'OMC, à quel point il était important d'examiner de près ces accords internationaux.

Monsieur le ministre, vous avez de la chance d'avoir des fonctionnaires de la qualité des vôtres.

Ils ont très souvent fait passer leurs convictions avant leur carrière, désireux qu'ils étaient de servir la cause du développement. Or, ils se sentent aujourd'hui un peu bousculés par la réforme qui se met en place souvent sans eux - j'allais presque dire contre eux.

Ils ont besoin d'un signe fort, d'une action « sociale », qui leur permette d'envisager l'avenir plus sereinement et de ne pas se sentir dépendants d'une décision qui leur échappe totalement, bref, de supprimer l'incertitude qui plane sur leur destin.

Un plan social est indispensable pour compenser la bourrasque qui passe sur eux. La très forte chute des crédits qui leur sont affectés remet en cause la crédibilité de leur action dans les pays de leur ressort. Leur situation doit être prise en compte avec beaucoup d'attention et de détermination par les services du quai d'Orsay.

Pour terminer, je voudrais lancer quelques idées.

La notion de coopération va peu à peu céder la place à celle de partenariat.

La simple coopération suppose des rapports, certes d'égalité, néanmoins entre un pays qui apporte et un pays qui reçoit. Cette notion sera bientôt dépassée. Le partenariat suppose un rapport beaucoup plus égalitaire. Les réunions, les grandes conférences périodiques devront dorén avant tenir davantage compte de l'avis des pays destinataires de l'aide.

Nous aidons à la formation de nombreux jeunes étudiants. Ils s'engagent dans des filières universitaires qui doivent les conduire à des métiers pour lesquels ils ont envie de donner le meilleur d'eux-mêmes. Mais quel lien existe-t-il entre ces filières d'études et les grands projets de la coopération franco-africaine ? A ce jour, aucun ! Il convient d'associer les jeunes qui étudient en France ou dans les universités africaines que nous soutenons à des projets d'action et de création dans leur pays. Ce lien est essentiel pour assurer la cohérence de leur formation et éviter que leurs études ne trouvent aucun débouché dans leur pays.

Par ailleurs, les centres culturels sont de moins en moins ceux de la France et de plus en plus ceux de la francophonie. Et c'est bien ainsi.

Ils ne sont pas des bouts de lignes de notre action culturelle nationale mais des foyers de culture où artistes et créateurs peuvent trouver qui des scènes, qui des orchestres, qui des salles de projection, qui des salles d'exposition, qui des bibliothèques, pour les oeuvres des Africains. Ainsi parviendrons-nous petit à petit à l'idée de partenariat culturel. Nous pourrions même imaginer que les conseils d'administration puissent être composés à parité de représentants de votre ministère et de représentants des forces vives, intellectuelles ou artistiques des pays africains.

Comprenez-moi bien, monsieur le ministre : ne pas voter votre budget n'est pas un signe de défiance à votre égard, ni à l'égard de l'action personnelle que vous menez et à laquelle je me dois de rendre hommage. Ce faisant, nous voulons interpeller, par delà votre personne et vos services, ceux qui aujourd'hui font le budget de la France et leur faire comprendre que le budget de la coopération, et plus largement celui des affaires étrangères, ne constitue pas une variable d'ajustement national. S'il est certes nécessaire de mener des politiques rigoureuses en matière budgétaire, il n'est pas bon qu'elle se fassent au détriment de notre image ; il n'est pas bon que nous accroissions l'angoisse de peuples du monde qui ont peu de recours dans le monde développé en dehors de celui de la France.

Il ne serait pas bon, monsieur le ministre - et ce sera ma conclusion - qu'au cours de l'année qui vient, comme il est malheureusement de tradition, quelques gels de crédits ou quelques suspensions de paiements viennent diminuer encore les crédits dont vous disposez.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

La parole est à M. Pierre Goldberg.

M. Pierre Goldberg.

Monsieur le président, messieurs les ministres, chers collègues, les crédits de la coopération pour 1999 figurent, pour la première fois, comme cela a déjà été dit, dans le budget des affaires étrangères. Cet te évolution, qui est annoncée depuis plusieurs mois et s'inscrit dans la réforme de la coopération, marque une rupture indéniable et positive avec le passé.

Nul ne saurait oublier que c'est par le biais du ministère de la coopération qu'a été conduite pendant trop longtemps une politique africaine - domaine réservé de l'Elysée - marquée par l'opacité et par des dérives comme celle qui a éclaté au grand jour avec le rôle plus qu'ambigu joué par les dirigeants de notre pays dans le génocide rwandais.

On ne saurait changer d'orientation et de méthodes sans faire évoluer du même pas l'outil indispensable à la concrétisation d'une politique. Car c'est bien une ambition politique qui doit guider la redéfinition de la politique française de coopération, composante majeure de la politique étrangère de notre pays.

Si l'on a pu un temps envisager de confier la gestion de l'ensemble des crédits affectés à la coopération au ministère des finances, nous jugeons infiniment préférable l'option qui a été retenue. La réforme se concrétise en effet par la création d'une nouvelle direction : la direction générale de la coopération internationale et du développement, opérationnelle dès janvier prochain.

La prochaine étape sera marquée par la réunion du comité interministériel de la coopération et du développement ; l'avenir nous dira comment il accomplira le rôle de coordination qui lui est assigné.

Nous continuons, pour notre part, à penser que notre proposition de créer un ministère du développement était une réponse adaptée à l'enjeu que représente la construction de nouveaux rapports entre la France et ses pays partenaires du Sud.

M. Jean-Claude Lefort.

Très bien !

M. Pierre Goldberg.

La recherche d'un vrai codéveloppement, la construction de relations économiques et politiques internationales rompant avec la logique de


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domination et d'exploitation sont en effet les clefs du développement et de l'emploi non seulement dans les pays du Sud mais aussi - ai-je besoin de le dire ? - en France et en Europe.

Le dernier rapport de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement souligne à cet égard la responsabilité particulière des pays développés dans le soutien aujourd'hui nécessaire de la demande : conforter l'activité des pays les moins développés, aider ces pays à faire face aux conséquences de la crise financière en leur permettant notamment - et ce n'est pas rien - de se protéger de la spéculation, sont, pour cet organisme, des objectifs vitaux pour le devenir de la croissance mondiale.

Cela a été dit cet après-midi notamment par JeanClaude Lefort, le monde est malade tant de la croissance financière que de l'insuffisance des dépenses pour les hommes, qu'il s'agisse de salaires, de formations, d'investissements utiles et de créations d'emplois efficaces.

C'est dire l'exigence de la construction d'un nouvel ordre économique et financier, passant par l'élaboration de nouvelles règles du jeu limitant les pouvoirs des marchés financiers et la démocratisation des organismes internationaux.

Nous souhaitons que la France, comme elle a su le faire récemment lors des négociations concernant l'accord mutuel sur les investissements, agisse activement dans cette perspective. Comment, à cet égard, ne pas évoquer l es négociations engagées pour la reconduction des accords de Lomé ? Plusieurs enjeux mériteraient de structurer l'avenir des relations entre l'Union européenne et les pays dits ACP - Afrique, Caraïbes, Pacifique -, les acquis de Lomé comme le partenariat, la prévisibilité de l'aide, la sécurité de ces relations constituant un point d'appui précieux pour aller de l'avant.

Il y a plus que jamais nécessité de promouvoir les ressources humaines des pays ACP en donnant la priorité à la satisfaction des besoins de base dans les domaines vitaux de la santé et de l'éducation, un accent particulier devant être mis sur le besoin en formation.

Il faut libérer le potentiel de production locale dans le domaine agricole, comme au Mali, et favoriser une politique de la ville en lien avec l'urbanisation croissante.

Il convient d'inscrire ces projets dans la recherche d'une coopération et d'une intégration régionales, en particulier dans les domaines stratégiques tels que l'énergie, les transports, l'hydraulique.

Que dire également de l'urgence de promouvoir une nouvelle approche de la conditionnalité de l'aide au développement ? Il faut dépasser les programmes d'ajustement structurels qui sont établis dans des cercles restreints sur des critères strictement financiers - et non de développement et sans consultation ni intervention de la société civile.

En mettant en oeuvre une démarche de contrat prenant en compte les réalités socioculturelles et économiques des pays, c'est une véritable co-élaboration et un suivi paritaire du programme favorisant l'intervention des populations qui devrait être à nos yeux constamment recherchée.

Si un accord global inscrit dans la durée et précisant les principes de la coopération, ses objectifs et les modalités de sa mise en oeuvre est nécessaire, il nous semble souhaitable de le décliner dans des accords prenant en compte la spécificité de chaque grande région ACP.

Dans le domaine de la coopération financière, le principe de la programmation est essentiel pour garantir la prévisibilité de l'aide et la sécurité des relations entre l'Union européenne et les partenaires du Sud. La Banque européenne d'investissement pourrait renforcer son engagement par l'octroi de prêts à long terme et à taux très bas pour financer des projets lourds, répondant aux priorités de développement de l'Union avec ses partenaires.

L'Union européenne a vocation à se faire l'avocat des pays ACP dans les instances internationales, contre les tendances ultralibérales qui déstabilisent le développement des pays les plus fragiles. Elle peut agir pour arracher les meilleurs compromis possibles entre les exigences des marchés financiers et celles des sociétés africaines. Au FMI, s'agissant des dettes et des programmes d'ajustement structurel de l'OMC, elle doit refuser qu'on impose aux pays africains une ouverture des frontières incompatible avec leur développement.

Comment ne pas mesurer le coût de l'absence de développement ou du mauvais développement de toute une partie du monde ? Comment ne pas mesurer également les potentialités considérables que peut receler pour ces sociétés, comme pour nos pays développés, la conduite dynamique de ce que j'appellerai cet immense chantier international.

Pour en venir plus précisément au budget, le fait que la réduction des crédits des affaires étrangères porte principalement sur les crédits gérés antérieurement par la coopération ne saurait être considéré comme satisfaisant.

Un certain nombre d'arguments fondés sont avancés pour justifier cette baisse d'un peu plus de 7 %.

Nous ne pouvons que nous féliciter si jamais, grâce à une amélioration de la situation des économies africaines, le même effort n'est plus nécessaire au titre de l'ajustement structurel lié à la dévaluation du franc CFA. On peut toutefois s'interroger sur la portée de ce constat optimiste et sa capacité à traduire un développement durable du continent africain à un moment, et je ne crois que nul ne peut le contester, où s'assombrit l'avenir pour nombre de pays comme la Guinée, le Zimbawe, le Gabon ou le Cameroun, confrontés à la chute dramatique du prix des matières premières et alors que demeurent, et même se renforcent, des logiques économiques de domination, de pillage, voire de relégation s'agissant des pays les plus pauvres.

Les désordres politiques que connaissent nombre de pays d'Afrique, notamment les Etats qui composent l'Afrique des Grands Lacs, réduisent par la force des choses le montant des crédits consacrés au soutien financier, mais on ne saurait se satisfaire de cette situation.

L'avenir de la coopération technique est objectivement pénalisé par la déflation annuelle des effectifs de coopérants qui ne semble pas, de l'avis même du rapporteur de la commission des finances, répondre à une politique bien définie.

En revanche, nous ne pouvons que nous féliciter de la stabilité des autorisations de programme sur le FAC, confirmant l'effort engagé l'an dernier sur « l'aide-projet », ou de l'augmentation sensible des crédits de la coopération décentralisée.

Si la France, notamment avec ce budget, garde la deuxième place pour le montant net de l'aide publique au développement, 0,45 % du PIB, c'est assurément beaucoup plus que les 0,08 % du PIB américain, mais il est possible et certainement nécessaire de faire plus, mais aussi différemment.


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Le désengagement américain ne saurait laisser indifférent, car il fragilise l'action des organismes internationaux.

Les USA vont ainsi supprimer en 1999 toute contribution au fonds des Nations Unies pour la population, ce qui va se traduire, selon nos comptes, par un manque à gagner de quelque 20 millions de dollars. Cet organisme ayant pour mandat principal d'aider les pays en développement à résoudre leurs problèmes de population, cela ne manquera pas d'entraîner une dégradation de la santé maternelle et infantile dans les pays bénéficiaires.

L'on sait pourtant, l'assemblée parlementaire de la francophonie l'a encore rappelé en juillet dans une recommandation adoptée lors de sa rencontre d'Abidjan, combien il convient de prendre systématiquement en compte, dans tout programme de développement, la dimension de la population, les programmes d'information et d'éducation sur la santé et les droits liés à la procréation, en particulier en direction des jeunes.

M. Jean-Claude Lefort.

Très bien !

M. Pierre Goldberg.

Les relations que la France entretient avec ses partenaires du Sud et son positionnement dans les instances internationales doivent être nourris par un souci de la justice et du codéveloppement, afin d'inventer concrètement un nouvel avenir pour le Nord comme pour le Sud et de favoriser une mondialisation qui ne soit plus fondée sur la domination des marchés financiers.

Le chantier de la réforme de la coopération est ouvert et doit impérativement se poursuivre.

C'est avec cette conviction, en prenant en compte les avancées que traduit ce budget, en dépit de ses limites, que notre groupe apportera un vote positif. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur quelques bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Yves Dauge.

M. Yves Dauge.

Monsieur le ministre, la réforme annoncée est en cours. Comment la mener à bien et, surtout, comment la réussir ? Il y a d'abord, évidemment, les moyens humains, d'autres avant moi l'ont souligné. J'ai souvent eu, pour des questions très précises, des relations personnelles avec vos services, qu'il s'agisse des directions des ministères, de l'Agence française du développement ou de l'Agence pour l'action culturelle. Il y a en France, je le dis avec force, un réseau de compétences exceptionnel.

Au-delà des services de l'administration et des agences, il y a aussi le grand réseau des collectivités locales et des ONG. C'est une richesse dont il faut bien mesurer l'importance, l'ampleur, la dynamique, et, si nous voulons faire une réforme, au-delà des questions d'organigramme, qui occupent évidemment toujours les esprits, il faut mobiliser toute cette population d'acteurs publics, parapublics ou privés et être en contact direct avec eux.

C'est donc un appel que je vous lance, mais vous pratiquez bien l'exercice, je dois le reconnaître. Je vous ai, en effet, souvent entendu intervenir sur le thème de la coopération devant des assemblées de professionnels. Votre discours passe bien, parce que vous êtes vous-même un praticien de l'exercice. Vous connaissez au fond les choses. Aujourd'hui, ce que beaucoup de gens attendent dans les services, c'est un contact direct avec vous et une communication rapide sur l'essentiel : que voulons-nous ? Le contenu de nos actions change de façon radicale.

Ce n'est pas seulement notre volonté, c'est aussi le fait du monde qui change. Il est évident que la coopération ne sera pas demain ce qu'elle a été hier et les personnels attendent qu'on leur tienne un discours fort sur son contenu. C'est maintenant qu'il faut le faire, parce que le temps nécessaire pour mettre en place les structures a été pris. Il y a des interrogations sur les moyens financiers, mais on peut aller au-delà des inquiétudes si on tient un discours politique fort.

Il le faut également vis-à-vis de l'extérieur. Un certain nombre de pays étrangers attendent de savoir quels secteurs géographiques seront prioritaires. Bien sûr, il y a l'Afrique traditionnelle, mais la Méditerranée est tout de même un secteur essentiel. J'étais, l'autre jour, à Bruxelles pour la conférence Euro-Méditerranée. Douze pays de la Méditerranée ont maintenant des relations institutionnelles dans ce forum Europe-Méditerranée, et la France y tient une place prépondérante. Tout le monde se tourne constamment vers elle. On attend l'Europe, mais on attend la France au coeur de l'Europe, j'en ai été témoin.

De toute façon, quand l'Europe met 100 francs, il y a 20 francs qui viennent de la France. Nous sommes donc au coeur d'un dispositif très proche de nous. Cela dit, il y a les Caraïbes, il y a l'Asie du Sud-Est. Nous avons également des contacts avec ces pays qui attendent considérablement de nous.

Bref, il nous faut d'urgence, maintenant, clarifier le contenu de nos actions et annoncer les secteurs géographiques concernés.

Sur le contenu, je suis frappé par ce que la France a fait et peut faire encore concernant la question institutionnelle. Comme le titrait récemment un journal, le développement sera d'autant plus fort que la démocratie sera forte. C'est une question centrale de notre coopération. Oui, nous pouvons peut-être mieux que d'autres apporter à nos partenaires quelque chose d'essentiel en matière institutionnelle, en matière de droit. Nous l'avons vu récemment, de manière spectaculaire, lors d'un récent déplacement. Le Conseil d'Etat thaïlandais, créé pratiquement par la France il y a bien des décennies à la demande des autorités thaïlandaises est une institution remarquable. La Thaïlande n'est pas l'un des pays les plus proches de nous. Pourtant, nous nous sommes trouvés tout d'un coup devant des gens qui vivaient de notre système institutionnel, qui y faisaient constamment référence, qui parlaient notre langue, parce que nous avions ensemble, il y a des décennies, développé une action remarquable dans le domaine des institutions et du droit.

C'est un champ essentiel qu'il nous faut développer.

Bien entendu, nous serons toujours confrontés aux problèmes de la formation et de la culture. Dans certains pays dont la situation est absolument critique, nous ne p ourrons pas développer un certain élitisme. Nous devrons sans doute sélectionner des partenaires locaux pour créer l'encadrement qui manque. Nous allons nous noyer dans une ambition, certes respectable, mais à la limite de l'inefficacité, si nous essayons de former partout et tout le monde, alors que nous devons immédiatement faire face à des problèmes d'encadrement qu'il nous faut identifier, sur lesquels il nous faut mettre l'accent. Le développement des bourses nous permettra peut-être d'y faire face de manière efficace.

Dans tous ces pays en développement, nous sommes confrontés au problème très grave, et très difficile à gé rer, du développement urbain. Nous l'avons souvent évoqué ensemble. Comment aider ces pays à le maîtriser ? Comment faire en sorte que l'urbanisme qui se développe de manière anarchique soit mieux maîtrisé ? La France a des compétences exceptionnelles en ce domaine, et l'agence française peut effectuer un travail remarquable avec un


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grand nombre de professionnels. Comment faire en sorte que le projet de développement d'une ville soit aussi social, éducatif ? Il peut être le pire comme le meilleur.

Nous retrouvons des questions fondamentales sur l'eau, l'assainissement, l'environnement. La France, en ce domaine, doit structurer son intervention de manière beaucoup plus efficace, beaucoup plus forte, et mobiliser encore plus toutes les compétences interministérielles, car, si le ministère des affaires étrangères et de la coopération est en première ligne, le ministère de l'équipement et d'autres ministères sont évidemment concernés.

De toute façon, monsieur le ministre, même si elle est ambitieuse sur le plan du budget et des moyens humains, qu'elle mobilise, et elle doit l'être, la France ne peut plus intervenir seule, de façon bilatérale. Il faut absolument qu'elle apprenne à mieux travailler avec l'Europe. J'ai souvent l'occasion de travailler avec les fonctionnaires de Bruxelles, notamment des Français, qui disent très couramment que les Français sont loin du compte par rapport aux Espagnols, aux Italiens et aux ressortissants d'un grand nombre d'autres pays, qui savent beaucoup mieux consommer les crédits, monter des projets. Nous devons apprendre à nous organiser professionnellement à l'intérieur de nos propres administrations comme avec les professionnels français pour mieux mobiliser le réseau européen et intervenir en partenariat constant avec l'Europe.

Si je parle de l'Europe, je peux parler aussi des organisations internationales. Il n'est pas normal que la France ne soit pas plus engagée dans les opérations menées par les Nations Unies. Moi, j'ai été très engagé dans des actions menées par l'UNESCO. J'étais vraiment fier de pouvoir le faire en tant que Français, avec l'appui des autorités françaises qui menaient un partenariat très actif avec l'UNESCO. Et pourquoi ne pas développer systématiquement nos interventions dans un cadre international ? Nous n'avons qu'à y gagner. De toute façon, être seul sur des sujets de cette ampleur, qui touchent à ce point la culture, l'éducation, c'est une utopie. D'ailleurs, cela rejoint là une réflexion que vous développez souvent sur la conception que nous devons avoir de la francophonie.

La francophonie, ce n'est pas une alternative, c'est un plus. On nous l'a dit dans différents déplacements. Ce plus ne peut se concevoir qu'en relation avec les autres partenaires qui interviennent sur la scène internationale, et pas du tout en concurrence. Sinon, nous serons éliminés et marginalisés.

Finalement, même si ce budget suscite un certain nombre de critiques, nous avons devant nous une politique ambitieuse, une volonté, un grand ministère, puisque la coopération est rehaussée au rang de ministère à part entière, ce qui est un geste politique fort. Je pense que vous allez approfondir la stratégie du développement.

Vous avez tenu des discours sur le contenu de la coopération qui me paraissent aller dans le bons sens. Je souhaite que vous lanciez, en 1999, une réflexion sur le fond avec l'ensemble des acteurs, pour bien montrer l'importance des enjeux et définir des actions de nature stratégique, étant entendu que, souvent, avec peu de moyens, on peut faire beaucoup, si l'on sait jouer sur l'effet de levier. Ce devrait être systématique mais, malheureusement, nous ne savons pas le faire. Nous pouvons dépenser beaucoup d'argent avec des budgets bons en apparence et obtenir des résultats décevants. L'argent est une nécessité, mais l'argent ne suffira pas et moi, je plaide pour l'intelligence et la méthode. La France a encore d'immenses ressources disponibles en ce domaine, qu'elle peut mobiliser pour que nous soyons plus forts, plus présents sur le terrain, plus efficaces, mieux reconnus encore. Nous avons devant nous, je pense, de belles perspectives. En tout cas, moi, j'y crois. Je soutiens pleinement votre action et j'apprécie, comme un grand nombre de mes collègues, sinon tous, y compris ceux de l'opposition, votre engagement personnel.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Pierre Lequiller.

M. Pierre Lequiller.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avant d'examiner plus en détail le projet de budget de la coopération, je voudrais m'attarder un moment sur la réforme du ministère de la coopération.

La réorganisation de la politique de coopération s'effectue par son intégration aux services du ministère des affaires étrangères. Comme je l'ai indiqué cet après-midi, cette réorganisation me paraît positive. Cependant, il faudrait aller beaucoup plus loin avec la création d'une administration unique comprenant l'action économique extérieure.

En ce qui concerne la réorganisation actuelle, je voudrais vous poser une question sur les délais. Le décret de fusion organique des deux ministères n'a toujours pas été publié. J'ai ouï dire qu'un problème purement technique, dû à l'annulation par le Conseil d'Etat d'un arrêté relatif au comité technique paritaire du ministère des affaires étrangères, pourrait retarder de quelques mois sa publication, alors qu'il était prévu que la nouvelle structure se mette en place dès le 1er janvier 1999. Pourriez-vous me donner des éléments à ce sujet ? J'en viens à l'examen du projet de budget pour la coopération. Le budget de la coopération, qui avait déjà subi une réduction de 3,6 % entre 1997 et 1998, se voit encore amputé de 8,16 % en 1999. Ses crédits s'établissent à 5,96 milliards de francs. Permettez-moi donc de m'interroger sur la contradiction qui existe entre la diminution patente des moyens et la dynamique de reconquête que vous aviez affichée lors de votre entrée en fonction.

La politique française de coopération, c'est avant tout l'aide au développement, financée par le fonds d'aide et de coopération. Or ce fonds voit ses moyens diminuer de 11 %, ce qui ne manquera pas d'avoir des conséquences sur l'aide que nous apportons aux Etats les plus pauvres, d'autant que l'aide bilatérale directe doit être concentrée sur une zone de solidarité prioritaire qui, pour l'instant, n'a toujours pas été définie.

L es crédits d'investissement de la coopération, M. Tavernier l'a souligné dans son rapport, sont en baisse de 34,62 %, et ne représenteront plus que 17 millions en 1999. Aucune opération nouvelle majeure ne pourra être entreprise.

La suppression de 170 postes de coopérants dans le domaine de l'assistance technique est également préoccupante. Lors de la présentation de la réforme de la politique de coopération, les expatriés avaient exprimé leur crainte de voir le nombre de coopérants diminuer. Ils n'avaient pas tort. Certes, un grand nombre de ces postes disparaissent car ils étaient occupés par des coopérants du service national. Les crédits n'ont pas été dégagés pour recruter des coopérants car ils ne sont malheureusement pas disponibles pour la coopération.

Avant d'en venir à un sujet qui me tient particulièrement à coeur, le développement de l'enseignement du français à l'étranger, je voudrais dire quelques mots sur la francophonie.

Le français, qui a eu la première place aux

XVIIe et

XVIIIe siècles, a cédé la place à l'anglais. La charte des Nations Unies a été rédigée en anglais, même si le


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français a été reconnu ensuite comme langue de travail.

Paradoxalement, le français a regagné en influence avec le processus de décolonisation : un quart des Etats membres de l'ONU sont des Etats francophones, et le nombre des francophones est estimé à 200 millions de par le monde.

Nous avons entendu ici même, voilà quelques jours, le vibrant plaidoyer du président du Sénégal.

Les crédits prévus dans le projet de budget pour 1999 et consacrés à la francophonie amorcent une décrue relative, avec une baisse de 0,46 %. Il est dommage que, pour utiliser au mieux ces quelque 62 millions destinés à notre politique francophone, la rationalisation des multiples structures en charge de la francophonie n'ait toujours pas été mise en place. D'autant plus que le français recule dans de nombreux Etats : en Espagne, en Algérie, en Roumanie, en Pologne, au Chili où il était largement pratiqué.

La francophonie passe notamment par l'enseignement de notre langue à l'étranger. L'enseignement du français à l'étranger est pris en charge par l'Agence pour l'enseignement du français à l'étranger, l'AEFE, qui regroupe 275 établissements, qui comptent plus de 157 000 élèves, dont 41 % sont français, et plus de 11 000 enseignants.

Je relève cependant deux points positifs : une progression de la dotation consacrée à l'AEFE, encore qu'avec un peu moins de 2 milliards de francs elle demeure encore insuffisante. Je regrette par contre la faiblesse des crédits disponibles pour les dépenses d'investissement, qui interdit le lancement de toute politique ambitieuse d'implantations nouvelles, car le redéploiement est indispensable, et la reprise d'établissements en gestion directe parfois souhaitable.

Je note également que les bourses scolaires des enfants français suivant leur scolarité à l'étranger sont revalorisé es b ien que cette augmentation ne fasse que couvrir l'accroissement des frais de scolarité dû à une baisse des moyens des établissements.

I l serait intéressant, monsieur le ministre, qu'en commission des affaires étrangères nous puissions avoir un échange sur le réseau d'enseignement à l'étranger et sur son redéploiement.

Dans un rapport que j'avais présenté en juillet 1996, en tant que député en mission, j'exposais les avantages indéniables de notre réseau d'enseignement à l'étranger, mais je montrais aussi les améliorations à apporter.

Je proposais de rapprocher l'enseignement du monde de l'entreprise, de vaincre les rigidités nées de la loi et des décrets de 1990, de faciliter le redéploiement de notre réseau en fonction de l'évolution économique et politique mondiale, de recentrer notre effet sur la formation des élites intellectuelles, politiques et économiques locales, d'intégrer la dimension européenne, de faciliter les passerelles entre les élèves de notre enseignement secondaire français et notre enseignement supérieur et d'orienter ce vivier de ressources humaines, souvent bilingues ou plurilingues, vers les filières porteuses de l'économie internationale.

Telle devrait être notre ambition pour utiliser au mieux le réseau français de l'enseignement à l'étranger qui reste le premier du monde.

Les orientations budgétaires de la coopération sont encore plus rigoureuses que celles du ministère des a ffaires étrangères. Les crédits sont en diminution.

Comme nous l'avons souligné tout à l'heure pour les crédits affectés aux affaires étrangères, la dotation revenant à la coopération nous paraît insuffisante pour accomplir les missions qui sont du ressort de la politique française de la coopération.

Pour toutes ces raisons, tout en rendant hommage à votre action personnelle, monsieur le ministre, le groupe Démocratie libérale et indépendants votera contre votre projet de budget.

M. le président.

La parole est à M. François Loncle.

M. François Loncle.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dussé-je en étonner beaucoup, je supplée Mme Yvette Roudy qui, empêchée, m'a demandé de vous faire part de son intervention. J'en donne lecture : La francophonie est l'amour commun d'une même langue d'origine. On dit joliment que la francophonie institutionnelle réunit des Etats et des gouvernements qui ont le français en partage. Plus qu'une force économique elle n'en a pas la structure -, la francophonie est une force culturelle qui regroupe - à défaut parfois de fédérer - 104,6 millions de personnes, réparties sur cinq continents, et entre quarante-neuf Etats.

Du fait de la mondialisation, de la mainmise de l'anglais, la francophonie recule. On ne peut s'y résigner.

L'influence politique, économique, scientifique, intellectuelle, diplomatique de la France est liée à sa présence culturelle, linguistique, historique. Le déclin de l'une entraîne le déclin de l'autre.

Les faiblesses de la francophonie sont sérieuses. J'en citerai trois.

Première faiblesse : 60 % des francophones habitent en Europe occidentale. Les zones les plus dynamiques du point de vue démographique soit ne comptent que peu de francophones - 0,06 % en Amérique du Sud, encore moins en Extrême-Orient -, soit souffrent de phénomènes empêchant la diffusion de la langue française : arabisation des enseignements au Maghreb, impact du sousdéveloppement sur la scolarisation en Afrique subsaharienne.

La deuxième faiblesse est historique. Au fur et à mesure que les systèmes d'enseignement des anciennes colonies européennes se mettent en place, la France envoie de moins en moins d'enseignants former des élèves à la langue française.

A ce phénomène, historiquement compréhensible, s'ajoute malheureusement une déscolarisation que l'on constate en Afrique subsaharienne, notamment. Il me semble anormal que des pays francophones, aidés massivement par la France, ne puissent développer de système satisfaisant d'enseignement obligatoire.

Troisième faiblesse : hormis en France et à Monaco, le français est toujours la langue d'une minorité.

Ces faiblesses conjuguées nous placent dans une position défensive. Au fur et à mesure que l'anglais progresse, le fait est que le français disparaît. Ainsi, si 70 % des textes primaires de la Commission européenne étaient en français en 1986, ce pourcentage est aujourd'hui tombé à 38,5 %. Dans le même temps, les textes primaires rédigés en anglais sont de plus en plus nombreux : 19 % en 1995, 35 % début 1996 et 44,7 % en décembre 1996.

Pourtant, on ne peut réagir par la simple incantation ou le rappel d'un âge d'or disparu. La défense de la francophonie - qui est aussi celle d'une certaine pluralité culturelle et liguistique - passe par des décisions offensives et une certaine éthique de comportement qui doit faire de la francophonie un pôle de référence.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 2 NOVEMBRE 1998

A l'occasion d'un rapport présenté à la commission des affaires étrangères et approuvé par elle, j'avais proposé une relance de la francophonie sous la forme de vingt propositions.

Tout d'abord au regard de l'atomisation des services ayant de près ou de loin à voir avec la francophonie et des sommes en jeu, dont personne n'a été capable à cet instant de me donner le montant exact - on parle de 700 millions de francs environ - chacun sait qu'il faut réagir. Nous sommes nombreux à attendre le jour où un ministre de la francophonie, doté d'un ministère à part entière, pourra regrouper tous ces services éclatés et rationnaliser l'octroi des fonds publics pour les mettre au service d'une volonté.

En outre, il ne serait pas extravagant de s'assurer de l'usage de ces fonds. Sommes-nous dotés de moyens de contrôle convenables ? Je crains que non.

De plus, il serait extrêmement utile d'évaluer les résultats de nos efforts. Personne n'a été en mesure d'expliquer quels sont les résultats de notre action.

F aute de temps, je ne proposerai que quelques mesures. S'agissant des visas, nous le savons, la politique malthusienne des visas menée ces dernières années a mis en péril les intérêts de la francophonie. Celle-ci a longtemps reposé sur la formation, dans les universités françaises, des futurs cadres des pays francophone. Les conditions humiliantes de l'octroi des visas par nombre de services consulaires, les délais d'obtention, le refus parfois opposé à la demande - ou au renouvellement - de visa, y compris lorsque l'étudiant pourrait bénéficier d'une inscription dans un établissement scolaire, voire prétendre à une bourse, ont gravement nui à la francophonie et détourné les étudiants vers les Etats-Unis, la GrandeBretagne et l'Australie. Les agents chargés de la délivrance des visas doivent être encadrés par des agents titulaires français. Ils doivent être également mieux formés et informés du fait qu'un étudiant ou, a fortiori, un enseignant ou un chercheur, n'est pas nécessairement un immigré clandestin en puissance. Cet assouplissement est à mettre en oeuvre d'urgence dans les pays francophones.

La France, longtemps deuxième pays d'accueil derrière les Etats-Unis, s'est vu reléguer cette année à la troisième place par le Royaume-Uni.

De la même façon, la politique des bourses doit tenir compte des besoins de la francophonie. Les bourses d'études de longue durée doivent être préférées aux bourses de stage de trop courte durée et permettre l'immersion culturelle et linguistique du bénéficiaire. Les études en pays étrangers créent entre le pays d'accueil et l'étudiant accueilli un lien fort, dont la rentabilité à long terme est évidente.

En même temps, je proposerai de mieux intégrer les p réoccupations francophones dans l'enseignement du français à l'étranger. Les élèves étrangers représente nt plus de la moitié des élèves de l'agence pour l'enseignement du français à l'étranger. On en compte presque 100 000.

Ils constituent un formidable réservoir. Or la majorité d'entre eux s'échappe après le bac vers les pays anglosaxons. Les bourses d'excellence que vous mettez en place, monsieur le ministre, peuvent représenter un moyen de retenir ces jeunes.

La francophonie souffre à la fois de l'absence de priorités claires et de vieilles habitudes paralysantes.

Il conviendrait de concentrer les actions sur les pays traditionnellement francophones afin d'éviter la dispersion des moyens et le saupoudrage ; il conviendrait également de mettre en place des actions auprès de communautés francophones qui ne disposent pas de relais institutionnels, je pense à la Louisiane ou aux Haïtiens de NewYork estimés à plus de 400 000.

Trop de fonctionnaires français abandonnent trop facilement la défense de leur langue maternelle. Nous devons exiger des fonctionnaires internationaux français qu'ils utilisent le français pour la rédaction des textes primaires dès lors qu'il s'agit de la langue de travail de l'organisation qui les emploie.

Nous devons également mettre en place des filières francophones de préparation aux concours des écoles diplomatiques nationales ou au recrutement des organismes internationaux. Un Suédois qui entrerait à la Commission européenne grâce à une telle préparation ne serait-il pas un bon ambassadeur de la francophonie ? Il conviendrait d'obliger les représentants de la France à l'étranger à employer le français et de demander aux pays membres de la communauté francophone de s'exprimer en français dans les organisations internationales.

Je proposerai enfin l'organisation chaque année, ou avant chaque sommet, d'un débat parlementaire sur la francophonie.

Les propositions, on le voit, peuvent être nombreuses, qui visent à redonner au français et à la communauté francophone une place et un rôle.

Encore conviendrait-il de veiller à ce que la francophonie conserve une identité et une éthique.

Chacun s'accorde à dire que nombre de pays entrés dans la communauté francophone ne respectent pas les valeurs dont nous nous voulons les porteurs : celle de la démocratie, du développement et des droits de la personne humaine. De la même façon les opérations réalisées dans un cadre multilatéral ne font pas toujours l'objet d'un contrôle soutenu et gagneraient sans doute à être davantage rationalisées.

Ce contrôle peut, sans aucun doute, s'exercer de façon plus approfondie dans un cadre bilatéral : je propose que tout projet de coopération francophone fasse l'objet d'un contrat clair avec l'Etat bénéficiaire et poursuive des objectifs quantitatifs : obligation de scolarisation, appréciation du statut de la femme notamment. L'aide doit être fonction du respect de ces engagements afin de favoriser la démocratie, le développement ainsi que des avancées concrètes au profit de la langue française : enseignement dès le primaire, ouverture de filières francophones.

C'est parce qu'elle sera exigeante sur ses valeurs que la francophonie sera recherchée et que l'on évitera une dilution dans un déclin participant d'une mondialisation qui tend à l'uniformité.

Pour bâtir ce socle, il faut une volonté politique forte, car il s'agit là d'un défi essentiel qui mérite, je le répèt e, la création d'un ministère à part entière.

Pour terminer, je voudrais attirer votre attention, monsieur le ministre, sur le décès violent, dans des circonstances douteuses, d'un de nos coopérants à Djibouti survenu dans la nuit du 18 au 19 octobre 1995, voilà plus de trois ans déjà.

Bernard Borrel, magistrat français, était en mission de coopération judiciaire pour le développement à Djibouti d'un Etat de droit. Je l'ai très bien connu, lui et sa famille, quand il était procureur de la République à Lisieux. L'enquête pour rechercher les circonstances de ce qui apparaît comme étant de façon certaine un assassinat, n'a pas abouti à ce jour, la version officielle étant « suicide par immolation par le feu » alors que l'autopsie exigée par sa femme a révélé qu'il était déjà mort quand son corps a brûlé.


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S'il s'avérait que tout n'a pas été fait pour rechercher les auteurs d'un tel crime, la France s'en trouverait déshonorée sur le plan international.

Un pays qui ne serait pas capable d'assurer la protection de ses représentants à l'étranger et la punition de leurs agresseurs serait discrédité non seulement dans le monde, mais aussi à l'égard de ses propres ressortissants.

La famille de Bernard Borrel, la magistrature française et l'association d'aide et de soutien aux victimes d'infractions commises à l'étranger insistent par conséquent pour obtenir du Gouvernement toutes les assurances leur permettant de croire que toutes les initiatives ont été prises, tant sur le plan judiciaire interne que sur celui de l'entraide internationale, pour que les enquêtes nécessaires soient menées et que, quelles que soient les directions q u'elles doivent prendre, la collaboration de la République de Djibouti leur soit réservée sans faille, condition sine qua non d'une fructueuse coopération judiciaire ultérieure.

Ainsi s'achève l'intervention de Mme Roudy.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre délégué à la coopération et la francophonie.

M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Mesdames, messieurs les députés, voici en effet venu le premier rendez-vous budgétaire traduisant dans les faits la réforme de notre dispositif de coopération, à laquelle Hubert Védrine et moi-même avons, au cours de cette année, consacré beaucoup de soin et beaucoup de temps.

Désormais, l'ensemble des crédits consacrés par la France à ses actions de coopération internationale sont inscrits dans un seul budget, celui du ministère des affaires étrangères, et c'est donc aux côtés d'Hubert Védrine que je vais les commenter et répondre aux questions que les rapporteurs et les orateurs ont posées.

Laissez-moi d'abord souligner la qualité du travail accompli par les rapporteurs. Du fait de la réforme, la transition entre les deux exercices budgétaires rendait l'analyse techniquement malaisée. Je crois qu'il faudra d'ailleurs que l'Assemblée réfléchisse à la meilleure façon d'organiser la discussion du budget de ce ministère « nouvelle manière ». Il n'est pas sûr que le découplage, tel qu'on l'a pratiqué aujourd'hui, soit complètement pertinent et il m'est arrivé de me sentir un peu concerné cet après-midi.

Mais nous aurons l'occasion, je pense, d'en reparler.

L'an dernier, dans les mêmes circonstances, faisant référence à la déclaration de politique générale du Premier ministre, j'avais affiché nos ambitions, dit le pourquoi de la réforme et esquissé ses lignes de force. Cet après-midi, le ministre des affaires étrangères les a justement rappelées.

Un an plus tard, je viens vous rendre compte des réalisations, vous demander les moyens de prolonger cette ambition pour l'inscrire définitivement dans la durée.

Mais, auparavant, laissez-moi vous dire un mot de l'ambiance qui a caractérisé l'environnement dans lequel nous avons dû entreprendre cette réforme et construire ce projet de budget. Il nous fallait d'abord dépasser de nombreuses tentatives avortées. Le diagnostic porté sur notre coopération était critique depuis longtemps : opacité, enfermement dans le pré carré francophone, et les propositions envisageaient toutes de réorienter notre coopération pour qu'elle serve mieux la démocratie, l'ouverture au monde de nos partenaires, qu'elle contribue aussi plus efficacement à la lutte contre la pauvreté, en associant davantage les intéressés au choix des moyens.

D epuis longtemps chacun convenait qu'il fallait moderniser notre appareil administratif pour améliorer son efficacité, accroître la lisibilité de notre action, développer les synergies entre les pôles économiques et diplomatiques et déjà réunifier celui-ci.

En 1997, les esprits étaient mûrs pour que la réflexion redémarre. Le changement politique en a porté témoignage. Lionel Jospin nous a assigné l'objectif de reconfigurer le dispositif français de coopération.

Encore fallait-il prêter attention aux sensibilités des personnels concernés. A ceux de la « coop » - pour employer une expression consacrée - comme à ceux de la direction générale. D'un côté, la sensibilité aux thématiques du développement, de l'autre, la sensibilité aux impératifs de la diffusion de notre culture. Tous souhaitaient une meilleure affirmation multiforme de notre présence à l'extérieur. Et globalement, des deux côtés, la crainte que le schéma futur minore l'une des composantes au profit de l'autre.

Si quelques questions restent posées, les efforts que nous avons accomplis pour dissiper les inquiétudes quant au devenir de chacun dans la nouvelle organisation ont porté leurs fruits. Si chacun attend, avec intérêt, le résultat des réflexions engagées sur des questions statutaires importantes - je pense à la fusion des corps - l'essentiel désormais - certains y ont fait allusion - est de mobiliser tous les acteurs, et d'abord les personnels, à la réussite de cette ambition.

Nous sommes au début d'une nouvelle étape qu'Hubert Védrine et moi-même entendons mener dans les mois à venir en poursuivant la concertation étroite avec les intéressés et leurs représentants.

Je déplore que certains d'entre vous aient laissé entendre que cette réforme était conduite sans les intéressés, voire contre eux. Je les appelle à rencontrer plus souvent les personnels, aussi bien ceux de la direction générale, boulevard Saint-Germain, que ceux de la rue Monsieur, et ils verront que, dans leur grande majorité, ceux-ci ont compris le sens de la réforme et en attendent un surcroît d'efficacité et d'intérêt de leur travail.

Le ministre des affaires étrangères l'a dit, plusieurs des rapporteurs l'ont regretté et moi aussi je le déplore, le budget des affaires étrangères progressera peu en 1999.

Nous aurions aimé que le contexte budgétaire nous aide à mieux gérer les mutations qu'implique cette réforme.

Mais c'est un choix gouvernemental qui résulte de priorités nationales fortes. Nous l'assumons. Il nous a conduit à pratiquer des arbitrages.

J'ai cru comprendre que nombreux sont ceux qui sur ces bancs - et cela déborde le cadre strict de l'opposition - souhaitent un effort de maîtrise des finances publiques et le maintien du niveau des prélèvements obligatoires.

Bref, j'ai cru comprendre que tout le monde partage le besoin d'une maîtrise budgétaire globale. Il est évident que si nous devons augmenter certains postes budgétaires pour des raisons tenant à la satisfaction des besoins en matière de formation ou de sécurité, nous devons faire des efforts plus importants sur d'autres postes, dans la mesure du possible. N'en déplaise à ceux qui pensent différemment. Je vais essayer de vous en apporter la démonstration.

Vos rapporteurs ont bien noté que le budget des affaires étrangères est globalement stable, mais qu'à structures constantes, cette stabilité cache une progression relative des crédits des affaires étrangères et une diminution de ceux de la coopération. C'est là que j'en reviens à ma démonstration. Les marges dont nous disposions en


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matière de crédits d'ajustement structurel de d'assistance technique peuvent être considérées comme la contribution des crédits de la coopération au renforcement d'autres budgets, y compris aux nécessaires redéploiements de celui des affaires étrangères.

Toutefois, je vous confirme que la réforme ne se traduit pas par une diminution des capacités de fonctionnement de notre appareil administratif.

J'en viens à nos choix.

C'est l'idée que nous nous faisons de la présence de la France dans le monde, de l'influence qu'elle peut y exercer, de l'aide au développement qu'elle a vocation à apporter, mais c'est aussi le contexte que je viens de brosser, qui nous ont conduit à opter pour un mode d'organisation et à vous proposer certains choix budgétaires.

Ce n'est pas une administration sans ambition ni sans moyens qui vient ainsi enrichir notre ensemble diplomatique. C'est une structure porteuse d'un projet, dotée des moyens humains et financiers nécessaires pour l'assumer.

Elle veut, elle peut apporter une nouvelle dimension au pôle diplomatique français, celle de la coopération au développement.

Je rappelle que cette coopération au développement a vocation à se déployer bien au-delà du seul continent africain. Elle doit concerner presque tous les continents.

Ce qui, monsieur Goldberg, je vous le dis très calmement, invalide l'idée d'un ministère chargé de la coopération, qui serait distinct du ministère des affaires étrangères, voire opposé.

M. Jean-Claude Lefort.

Il n'a pas dit cela ! M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Il a rappelé l'espoir qui avait été le sien de la création d'un grand ministère de la coopération et du développement.

M. Pierre Goldberg.

Du développement ! M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Je veux tenter de vous convaincre que le fait d'inscrire le développement au coeur de la politique étrangère de la France peut être vécu comme une contribution essentielle à la stabilité du monde mais surtout à la lutte contre l'élément qui est probablement le plus porteur de conflits, l'inégalité dans le développement. C'est le choix que nous avons fait. Nous devons le réussir ensemble.

Mon rêve est que chaque diplomate se sente agent de développement. C'est également à cette ambition que nous allons devoir travailler. Et je sais qu'Hubert Védrine y consacre aussi beaucoup de ses efforts.

Cette réforme, c'est d'abord la construction de structures administratives cohérentes. Nous avons précisé le périmètre des compétences respectives de Bercy et des affaires étrangères - Maurice Adevah-Poeuf a d'ailleurs posé des questions sur le point d'équilibre entre le pôle économique et le pôle diplomatique, et j'y reviendrai - et surtout rapproché les procédures de leur mise en oeuvre.

Nous avons confirmé les modalités d'exercice des tutelles sur l'Agence française de développement à qui de nouvelles responsabilités ont été confiées.

Au sein des affaires étrangères, à l'issue d'une vaste procédure de concertation avec les personnels, Hubert Védrine et moi-même avons arrêté un schéma d'organisation qui sera mis en oeuvre dans son intégralité au mois de janvier prochain.

Les services fonctionnels des affaires étrangères et de la c oopération vont fusionner afin de mieux gérer l'ensemble des moyens humains et budgétaires des deux anciennes structures, assistance technique comprise.

La mission militaire de coopération, renforcée de la sous-direction de l'aide militaire, est érigée en direction de la coopération militaire et de défense, placée sous l'autorité du directeur général des affaires politiques. Mais elle conservera, je vous en donne l'assurance, sa sensibilité au développement ; c'est un élément auquel, je le sais, certains sont très attentifs.

Le service des affaires francophones, directement rattaché au secrétariat général du Quai d'Orsay, gagne en autonomie. Il gagnera aussi en efficacité.

Mais c'est le coeur même de la coopération internationale qui est repensé. La direction générale des relations scientifiques, culturelles et techniques du Quai d'Orsay, d'une part, et la direction du développement et le service de la coordination géographique de la coopération, d'autre part, donnent naissance à une direction générale de la coopération internationale et du développement, la DGCID.

Nous avons choisi de construire cette unité en identifiant ses différentes orientations sectorielles, sans retenir le principe d'une organisation géographique. M. Myard regrettait qu'on ait melangé une organisation sectorielle et une organisation géographique dans cette direction générale. Il n'en est rien. Nous avons fait le choix d'une organisation par métier et refusé d'entrée une séparation géographique qui n'aurait pu qu'entretenir la confusion.

Nous avons, disais-je, choisi de construire cette unité en identifiant ses différentes orientations sectorielles : l'aide au développement et la coopération technique, la coopération culturelle et du français, la coopération scientifique, universitaire et de recherche et l'audiovisuel extérieur. Nous dotons cette unité d'une équipe de coordinat ion et de pilotage, à la fois sous l'angle de la coordination géographique et sous celui de la mise en oeuvre des moyens-prévision, programmation, suivi et évaluation.

Le deuxième élément majeur est la restructuration du budget.

En février dernier, le Premier ministre a décidé que le ministre délégué chargé de la coopération et de la francophonie assurerait la présentation des crédits de coopération, identifiés au sein du budget des affaires étrangères.

Il me revient donc de vous présenter les crédits d'intervention du Quai d'Orsay, affectés à l'ensemble des actions de coopération internationale, étant entendu que les moyens de fonctionnement des structures qui les mettent en oeuvre sont comptabilisés par ailleurs.

Pour un budget global de 20,7 milliards de francs, 8,2 milliards de francs sont consacrés aux interventions.

Si j'y ajoute les subventions de fonctionnement aux institutions sous tutelle de la DGCID, inscrites au titre III du budget, notamment l'agence pour l'enseignement français à l'étranger, l'Association française d'action artistique, et divers établissements culturels, de coopération et de recherche situés à l'étranger, ce sont 2,3 milliards supplémentaires qui doivent être comptabilisés au titre de la coopération internationale, portant l'ensemble des moyens ainsi mobilisés à 10,5 milliards de francs.

La nomenclature budgétaire a été révisée pour tenir compte de la nouvelle organisation administrative. D'où les difficultés de lecture et de comparaison avec l'exercice précédent que j'évoquais.

Les chapitres budgétaires nouveaux ne sont pas en continuité avec l'ancien chapitre 42-10 du Quai d'Orsay ou les différents chapitres du budget de la coopération. Je suis convaincu, à l'inverse, que la subdivision en fonction


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de la destination des crédits, qui recoupe largement la nouvelle organisation administrative, offrira une meilleure lisibilité.

C'est ainsi que nous avons distingué, dans des chapitres spécifiques, les crédits de coopération technique et au développement, les crédits de coopération culturelle et scientifique, l'action audiovisuelle extérieure, dotée pour la première fois d'un budget supérieur au milliard de francs, l'appui aux initiatives privées et décentralisées, le

« hors l'Etat » comme on dit parfois, et la coopération militaire et de défense.

De plus, nous avons constitué des sous-ensembles qui correspondent aux différents instruments de coopération mis en oeuvre dans ces grands domaines, notamment l'assistance technique, les bourses, les subventions aux opérateurs de coopération.

Le troisième champ de réflexion est celui des choix budgétaires.

Nous avons choisi de maintenir le montant de notre aide-projet. C'est la priorité reconnue tant par nos missions de coopération que par l'ensemble de nos partenaires. Ainsi, nos autorisations de programme au titre du FAC demeurent au niveau de la loi de finances pour 1998, soit 2,3 milliards de francs, dont 1,3 milliard mis en oeuvre par la DGCID et 1 milliard au titre des donsprojets mis en oeuvre par l'AFD.

Mais, en sens inverse, les arbitrages budgétaires n'ont pas permis de transformer les économies réalisées sur nos concours financiers en d'aide-projet supplémentaires.

Comme les années précédentes, l'amélioration de la situation budgétaire de nos partenaires en développement a entraîné une faible consommation de nos crédits d'ajustement structurel en 1998. Et les perspectives de consommation restent sensiblement les mêmes en 1999, sous réserve de l'évolution très récente de la conjoncture internationale. Je pense à l'effondrement de certains marchés du Sud-Est asiatique, à la baisse du prix du pétrole et d'autres matières premières, comme le bois qui concerne beaucoup de pays africains, au cours du dollar, autant d'éléments qui pourraient contribuer à un ralentissement de la demande mondiale.

Mais compte tenu du montant des crédits de report dont nous disposons et sachant qu'il s'agit là en quelque sorte d'une politique de constatation, si la situation se dégradait par trop dans certains de ces pays, nous serions en mesure dans le courant de l'année de remettre les concours financiers au niveau nécessaire pour faire face à la situation.

Quoi qu'il en soit, et sous réserve de la nécessaire prudence que l'actualité commande, la situation de nos partenaires s'est globalement améliorée, leurs grands équilibres sont largement restaurés et leur endettement tant interne qu'externe s'est réduit. J'ajoute que la naissance de l'euro et la sécurisation financière des échanges qui en résultera offrent une perspective particulièrement favorable à ces pays. L'analyse vaut d'abord pour nos partenaires de la zone franc qui en seront les premiers bénéficiaires, mais aussi, plus généralement, pour l'ensemble des pays ACP.

En 1999 - et j'en viens à l'autre grande ligne budgétaire que beaucoup d'entre vous ont commentée cet après-midi -, nous aurons à gérer une réduction de 170 postes des effectifs de l'assistance technique civile et de 24 postes de ceux de l'assistance militaire. L'an dernier, la réduction portait sur 305 postes. Certes, nous n'avons pas lieu de nous féliciter de cette nouvelle baisse, mais le ralentissement observé peut laisser espérer une stabilisation.

Reste à savoir ce que nos partenaires et nos personnels eux-mêmes pensent du recours à l'expertise locale. Et c'est bien parce que cette logique de la diminution n'emporte pas la conviction de tous, notamment celle des rapporteurs, c'est le moins que l'on puisse dire, que nous avons entrepris un exercice de rédéfinition des missions, des statuts et des conditions d'exercice de l'assistance technique « à la française ».

J'ai confié l'animation de la réflexion sur ce sujet à un haut fonctionnaire, M. Nemo, bon connaisseur de notre dispositif de coopération. Il me rendra ses conclusions après concertation avec les intéressés au début de l'an prochain. Nous disposerons ainsi d'une évaluation précise et actualisée de nos besoins à court et moyen terme, ce qui nous permettra d'afficher un objectif clair et de sortir de la seule logique budgétaire.

D'aucuns ont opposé cette réduction des moyens et l'extension affichée du champ dans lequel cette coopération technique est susceptible de s'exercer. Je ferai simplement observer que, dans le courant de l'année 1999, nous allons surtout préparer de nouveaux projets, nouer des partenariats avec ces nouveaux pays. Quand bien même nous aurions disposé de moyens importants supplémentaires, je ne suis pas sûr que nous aurions été en mesure de les utiliser à bon escient l'an prochain. La question se reposera différemment en l'an 2000, date à laquelle de nouveaux partenariats auront été noués et de nouveaux projets définis.

Dès 1999, nous recyclerons une partie de l'économie générée par la baisse des effectifs sur l'amélioration de la situation indemnitaire des coopérants. Les majorations familiales et le régime des coefficients géographiques seront les points d'affectation des crédits correspondants.

U ne structure administrative plus cohérente, une nomenclature budgétaire spécifique, des choix budgétaires clairs, voilà restaurées les conditions d'une lisibilité longtemps insuffisante. C'était aussi un des objectifs de la réforme. C'est ainsi notre politique extérieure qui s'en trouvera globalement renforcée. Mais ne s'agit là que des moyens.

Reste à donner son assise définitive à cette réforme. Le comité interministériel de la coopération internationale et du développement va prochainement, autour du Premier ministre, exprimer les choix politiques de fond. De même, le Haut Conseil de la coopération internationale permettra bientôt à la société civile de manifester son implication dans l'effort national.

Le premier CICID - et je réponds là à la question posée par M. Adevah-Poeuf - se réunira dans les toutes prochaines semaines, très probablement au début du mois de décembre. Mais c'est une indication qui devra s'apprécier par rapport à l'agenda du Premier ministre, agenda qui, je n'ai pas besoin de le préciser, est particulièrement chargé.

A cette occasion, nous proposerons une définition de la zone de solidarité prioritaire, c'est-à-dire la traduction pratique des principes évoqués en février dernier et le Gouvernement arrêtera sa position. A ce moment-là, le contenu politique de la réforme sera précisé : avec qui nous nous proposons de coopérer, dans quels secteurs prioritaires, avec quelle intensité, avec quels outils, avec quels objectifs en termes de démocratie, de droits de l'homme, mais aussi en fonction de quels intérêts stratégiques nationaux, européens ou francophones ?


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La procédure, inévitablement lourde, de préparation d'un comité interministériel est d'ores et déjà lancée. De même, le décret instituant le Haut conseil est dans la phase finale de sa mise au point. Sa publication est imminente.

J'ai donc une certaine fierté, huit mois après l'annonce d'une grande réforme, à constater que bien des choses ont changé.

Cette réforme, vous avez bien voulu l'enrichir de vos observations. Durant ces derniers mois, nous avons souhaité en augmenter la portée et le sens par une consultation des différents milieux professionnels et des centres de décision : entreprises, collectivités, institutions, qui ne conçoivent plus leur développement sans projection à l'extérieur de nos frontières. Nous sommes heureux de constater que leur approche rejoint largement nos propres priorités.

Le moment est venu en effet d'esquisser en quelques mots notre ambition. Vous l'avez bien perçu : la méthode que nous avons adoptée reflète la conception d'un monde qui se transforme et la volonté d'instruire une réponse appropriée de la France à cette transformation.

Une politique ambitieuse, c'est avant tout des priorités affichées, auxquelles sont consacrés des moyens humains et financiers significatifs. Je synthétiserai ces priorités de coopération internationale autour de quatre idées simples et fortes : développer notre capacité d'influence extérieure ; identifier et fidéliser les élites chez nos partenaires ; confirmer notre position en matière de coopération au développement ; associer la société civile à notre ambition.

Une plus grande influence par une meilleure présence, médiatique, diplomatique et géographique.

Une meilleure présence médiatique, d'abord. Cela nous a conduit à renforcer notre action dans le domaine de l'audiovisuel extérieur. Des hommes nouveaux, un projet actualisé correspondant à l'état des techniques et de la concurrence, voilà pour la relance d'une dynamique dans un secteur éminemment compétitif, capitalistique, porteur d'avnir. Hubert Védrine y a fait allusion.

L'audiovisuel extérieur ne se résume pas à la francophonie mais je rappelle que notre budget fournit l'essentiel de la contribution française à la francophonie. TV5 participe pour 273 millions de francs, et vous savez quelle priorité cela constitue pour nous. Le service des affaires francophones et la future DGCID apporteront quant à eux 286 millions. J'ajoute que ce rôle ne se limite pas à payer toujours plus : à notre initiative, et en accord avec l'ensemble de nos partenaires, l'action des principaux opérateurs de la francophonie va être évaluée, en ce qui concerne tant la qualité de leurs programmes et de leurs projets que leur gestion.

Meilleure présence aussi dans les institutions multilatérales. Nous augmentons sensiblement le volume de nos contributions volontaires aux organisations internationales - 50 millions supplémentaires parallèlement à la mise en oeuvre d'une politique volontariste de présence française dans ces organisations. Cela vaut, bien sûr, pour les institutions de l'ONU et de Bretton Woods, mais cela vaut ainsi pour l'Europe et les divers organismes multilatéraux dédiés au développement.

Cela vaut également largement pour les institutions de la francophonie. A Hanoï, nous avons pris des engagements pour 1998-1999 et nous avons construit de nouvelles institutions. Ainsi, 43 millions de francs de mesures nouvelles ont été adoptés pour financer deux programmes majeurs : la promotion du français dans les organisations internationales et le développement des nouvelles technologies de l'information et de la communication dans l'espace francophone.

Un mot encore sur notre présence dans les instances multilatérales. Pour prendre notre place et orienter notre action, nous devons moderniser notre politique de présence d'experts et de fonctionnaires. Je m'y emploie car je considère que nous ne parvenons pas suffisamment à faire entendre notre voix sur le fond au regard du montant de nos contributions dans certains organismes.

Meilleure présence géographique, enfin. La réorientation progressive d'une partie de nos moyens humains et matériels vers de nouveaux partenaires est un autre volet de cette politique d'influence. Même si elle demeure modeste sur le plan financier, cette évolution est indispensable.

Appuyer le renforcement des composantes de l'Etat de droit aux marches de l'Europe ou dans les républiques de la CEI, c'est conforter de nouveaux Etats, sécuriser une région encore potentiellement instable.

M. Myard a regretté qu'une direction du développement spécifique ne s'occupe pas de l'Afrique, laissant entendre que les actions conduites sur ce continent, les experts qui y travaillent et les techniques qui y ont été éprouvées ne pourraient pas être utilisés ailleurs. Mais je pourrais citer certains pays d'Europe de l'Est où le besoin de construire l'Etat et de mettre en place une justice plus efficace et une fiscalité plus performante est aussi grand que dans certains pays d'Afrique ; je suis donc heureux que notre réforme permette à la coopération technique de s'exercer aussi dans ces pays-là.

Notre action consiste également à ouvrir de nouveaux marchés aux industriels français, pour qui la paix est une condition prélable à l'investissement et au commerce.

Mme Aubert nous a presque reproché, cet après-midi, de défendre parfois les intérêts des grandes entreprises ou des groupes industriels français. Je ne me sens pas obligé de m'excuser d'être parfois porteur de projets industriels intéressant directement nos entreprises lorsque je me déplace dans ces pays. Mais j'insiste sur le fait que les grandes entreprises ne sont pas les seules à mobiliser notre énergie et notre imagination, car nous pensons que le partenariat avec les petites et moyennes entreprises mérite d'être fortement encouragé ; c'est aussi en pensant à elles que nous nous faisons les interprètes des propositions françaises.

M. Jean-Claude Lefort.

Très bien ! M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

En tout état de cause, nous avons l'intention de renforcer ces actions nouvelles de coopération et d'y consacrer des moyens plus importants.

Deuxième idée force : identifier et fidéliser les élites futures chez nos partenaires. Il s'agissait déjà cette année d'une priorité de notre action, comme de celle des affaires étrangères, d'ailleurs, dans des pays différents, avec des optiques ou des moyens différents, dans la mesure, par exemple, où les appuis aux systèmes éducatifs et universitaires nationaux sont eux-mêmes de nature diverse. Demain, ce sera un thème transversal essentiel pour l'ensemble des services. Notre politique de bourses, en particulier de bourses d'études, verra ainsi ses moyens renforcés, et Hubert Védrine y a déjà fait allusion.

La politique des visas participe aussi du meilleur accueil de ces futures élites.

Cela se traduira également par la recherche de partenariats différents, enrichis, entre institutions de formation françaises et étrangères. Nos universités, nos écoles de


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commerce, nos chambres de commerce et d'industrie, nos c hambres de métiers, nos entreprises - auxquelles M. Lequiller a fait allusion - nos écoles militaires sont des opérateurs potentiels de coopération, que nous souhaitons promouvoir à l'extérieur. Elles peuvent devenir des appuis en organisation et des transmetteurs de savoir, au bénéfice d'une école nationale ou régionale dans les pays en développement. Là encore, la coopération militaire nous fournit de bons exemples, telle l'ouverture en 1999 d'un centre régional de formation au maintien de la paix à Abidjan.

J'en viens à notre volonté de confirmer la place de la France dans l'aide publique au développement. Dans la dernière période, la réussite impressionnante des économie asiatiques a pu faire douter de l'utilité de l'aide publique au développement. L'investissement privé suffisait. La crise que ces pays traversent, la fragilité qu'ils ont manifestée dans des domaines qui touchent aussi bien à la formation qu'aux grandes infrastructures donnent à l'aide publique au développement un regain d'actualité et d'intérêt. Même au FMI, même à la Banque mondiale, lors des dernières assemblées annuelles, on a pu observer une évolution significative du discours sur l'aide publique au développement.

Le développement humain, la lutte contre la pauvreté, l'enseignement de base et la formation en général, l'instauration de l'Etat de droit y ont été clairement reconnus comme conditions du développement durable des pays sous ajustement, par-delà l'équilibre des nations, que nous recherchons tous. En bref, la pertinence et l'utilité de l'aide publique au développement sont désormais réaffirmées avec force.

La France a depuis longtemps fait sienne cette analyse et, contrairement à d'autres, elle s'y est tenue.

Je déplore l'érosion observée au cours des dernières années. Mais l'effort que nous consacrons reste important. En 1997, notre aide, qui pouvait être évaluée à 37 milliards de francs - c'est-à-dire 0,45 % de notre PIB -, nous a maintenus au premier rang des pays du G8 en ce qui concerne le taux d'effort, au second rang en ce qui concerne le volume, derrière le Japon, mais devant les Etats-Unis, qui ont vu leur effort régresser jusqu'à 0,08 % de leur PIB.

J'entends bien que nous ne pouvons pas donner des leçons aux autres dès lors que nous réduisons notre propre effort. Je fais simplement observer que d'autres sont beaucoup moins bien placés que nous et que nous nous efforçons, à juste titre je crois, de les mettre face à leurs responsabilités dans ce domaine aussi.

L'année 1999 sera celle de la renégociation des accords de Lomé. Nous avons défendu âprement la préservation de ce lien privilégié entre l'Europe et les pays en développement, notamment africains.

La future convention sera marquée par deux innovations. Désormais, l'OMC existe, l'Europe politique et monétaire aussi.

Déjà, par rapport à l'OMC, nous avons rappelé l'objectif d'intégration des pays en voie de développement dans l'économie mondiale, mais aussi le besoin d'un calendrier et de modalités appropriées selon les régions.

J'ajoute qu'il nous faut promouvoir l'idée que les processus d'intégration régionale servent les objectifs de développement, mais aussi le maintien de la paix.

Le dialogue politique intégrera la prévention des conflits, mais aussi l'approfondissement de la démocratie et la bonne gouvernance.

Quant à l'Europe monétaire, comme je le disais à l'instant, la naissance de l'euro consolidera le lien économique et commercial avec les pays en voie de développement, mais pas seulement avec les pays de la zone franc.

L'année 1999 sera aussi l'occasion pour nous de réfléchir à une meilleure utilisation des canaux de l'aide multilatérale, en recourant de façon plus volontaire au multilatéral, lorsque nous ne disposons pas des moyens humains spécifiquement français nécessaires sur le terrain.

J'attends d'ailleurs beaucoup des conclusions et propositions que votre collègue Yves Tavernier transmettra au Premier ministre sur l'articulation de nos actions bilatérales et multilatérales.

Les nouveaux pays de coopération au développement, ceux que nous souhaitons intégrer dans notre zone de solidarité prioritaire, sont au centre de cette réflexion.

D'une manière générale, la France a besoin de mobiliser mieux ses forces. La mondialisation rend les pays du Sud plus sensibles à la concurrence et à la multiplicité des initiatives ; elle les rend d'autant plus attentifs à toutes les formes de partenariat qui augmenteront leurs chances de réussites. Associer plus activement la société civile à notre politique de coopération internationale devient aussi un impératif.

J'en ai implicitement parlé tout au long de mon exposé. La coopération que l'on qualifie de « hors l'Etat » est au coeur des nouvelles dynamiques. Les moyens que nous lui consacrons sont en augmentation sensible. Ils sont appelés à soutenir des initiatives très diverses.

La coopération décentralisée, portée par les collectivités territoriales, s'affirme chaque jour davantage comme répondant à une attente, à des besoins forts d'organisation de l'espace chez nos partenaires. Nous encourageons l'élargissement de son champ d'action et la diversité de ses intervenants. Au printemps prochain, afin de conclure une série de rencontres organisées pays par pays, dans plusieurs villes et départements français, des rencontres nationales de la coopération décentralisée consolideront les outils de cette présence française qui participe à l'enracinement de la démocratie, chez nous comme chez nos partenaires.

Aux côtés des collectivités publiques, ce sont le tissu associatif, les acteurs de l'économie, les entreprises, y compris les PME, et les organisations professionnelles qui s'engagent. Des contacts avec leurs organisations, des actions conduites et réussies ensemble, comme la journée d e promotion de l'investissement en zone franc, témoignent d'une heureuse synergie entre l'Etat et le secteur privé.

Les organisations de solidarité internationale ont, quant à elles, une tradition établie de coopération dans les secteurs les plus divers. Notre souci est de les voir se renforcer, de les inciter à une cohésion, à une réunion des moyens, à une professionnalisation qui les rendront aussi plus efficaces et plus crédibles par rapport à leurs homologues étrangères.

Au-delà de la dizaine d'ONG les plus importantes et les plus connues en France et dans le monde, le tissu associatif français reste trop émietté, ce qui rend difficile la mise en oeuvre de programmes importants. L'enjeu est de taille, en particulier si l'on considère que les bailleurs de fonds internationaux privilégient souvent le canal des ONG. Nous appuierons les initiatives qui répondront à ce défi.

J'ajouterai un mot sur le recours à de nouveaux acteurs de coopération, comme les fédérations syndicales, de salariés et patronales. J'ai souhaité impulser une nouvelle


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dynamique, dans l'idée que le dialogue social sert le développement et la démocratie. En 1998, vous avez bien voulu appuyer cette initiative et abonder les crédits que j'avais décidé d'y consacrer. Ce terrain de coopération se révèle particulièrement fertile ; avec votre appui, j'y consacrerai de l'énergie et des moyens supplémentaires en 1999.

Laissez-moi vous dire combien l'année de préparation de cette réforme a été passionnante. Nous espérons que l'année de sa mise en oeuvre le sera davantage encore.

Comme le Premier ministre nous en a donné mandat, nous reviendrons devant l'Assemblée pour présenter un bilan de l'aide publique française au développement.

M. Jean-Claude Lefort.

Très bien ! M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Cela nous donnera aussi l'occasion de faire le point sur les questions traitées par le CICID, la zone de solidarité prioritaire, notamment, et d'évoquer le rôle du Haut conseil de la coopération internationale.

Fixons-nous un objectif, celui de proposer à la société française, dans les six prochains mois, un débat de fond, pour qu'à la réforme de la coopération dont vous connaissez l'architecture réponde la mobilisation dont elle porte l'esprit. Dans quelques mois, je proposerai aux instances de concertation que nous avons prévues le document de référence autour duquel le débat pourrait s'engager.

Je ne doute pas que nous saurons alors rencontrer les aspirations de nos concitoyens à une plus grande ouverture sur le monde, et revéler aussi le gisement de générosité que recèle dans ses profondeurs la société française.

Mesdames, messieurs, je répondrai maintenant à certaines des questions qui m'ont été posées. Je ne commenterai pas les rapports qui ont été présentés. Je remercie les orateurs qui ont bien voulu souligner la qualité du travail que nous avons accompli, et ils étaient nombreux.

M. Adevah-Poeuf, qui était de ceux-là, a posé de nombreuses questions auxquelles je crois avoir en partie répondu en ce qui concerne, la zone de solidarité prioritaire. S'agissant de la relation entre le pôle économique et le pôle diplomatique, je rappelle qu'il appartient au Premier ministre de décider des grandes actions extérieures de la France, et que les grands choix sont faits au niveau interministériel.

Quant à la dette, la question la plus importante est de savoir si la part de l'aide publique au développement qui lui est affectée va continuer à croître ou si, le désendettement étant à peu près stabilisé, l'aide publique au développement va d'abord servir à financer de nouveaux projets. Cette question me paraît très importante, et nous pouvons influer sur la réponse.

Je ne suis pas sûr d'avoir totalement saisi la pertinence de la question relative à la fongibilité de l'assistance technique. Il n'y a pas de quota par région ou par pays. On peut donc considérer que l'assistance technique est fongible, qu'il s'agisse de l'assistance civile ou de l'assistance militaire. Et c'est bien en fonction des besoins et des accords de partenariat que nous négocions avec les différents pays, que nous organisons la présence dans l'espace de nos experts.

Quant au volontariat civil, qui tient compte de la réforme du service national, je rappelle que le projet de loi instituant cette formule est en cours d'achèvement, et il pourrait être déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale au début de l'année 1999, afin d'être voté au printemps.

Vous avez également insisté, monsieur Adevah-Poeuf, sur le rôle que l'euro pourrait jouer dans la consolidation des économies africaines ; je ne pense pas utile d'insister davantage sur ce point.

Notre attitude à l'égard de la République démocratique du Congo se résume dans cette formule : ni ingérence ni indifférence. Nous savons trop les responsabilités que l'histoire et la géographie nous assignent. Nous suivons avec beaucoup d'attention l'évolution de la situation.

Nous poursuivons avec ce pays, au travers d'organisations civiles, une coopération qui s'élève à une vingtaine de millions de francs. Nous avons récemment organisé une action humanitaire en faveur des populations de Kinshasa, très touchées par les événements. Nous attendons, avec un peu d'impatience, que des signes positifs se manisfestent, notamment en ce qui concerne la démocratie et les droits de l'homme. Le président Kabila en a encore récemment pris l'engagement. Nous espérons que, sur le terrain, des progrès pourront être rapidement constatés, qui nous permettraient de reprendre un dialogue plus soutenu avec ce pays.

Monsieur Hoarau, vous avez évoqué le rapport d'initiative du Parlement européen. Nous allons l'examiner avec beaucoup d'attention. Nous partageons avec les élus réunionnais, notamment, le souci de mieux participer à la vie régionale. J'ai eu l'occasion, il y a quelques mois, lors de la conférence de l'océan Indien qui s'est tenue à Maurice, de rencontrer le président de votre région. Nous savons bien que c'est aussi par la Réunion que la France est présente dans l'océan Indien.

Vous avez évoqué les instances internationales, et notamment la rencontre entre l'Europe et la Southern Africa Development Coordination Conference , la SADC, à laquelle je dois me rendre demain matin. Mais il faut savoir que les organisations de ce type s'appuient sur des protocoles qui rendent plus difficiles la participation directe d'une région française. S'il s'agit de vous associer plus étroitement, en vous informant mieux des éléments qui concourent à la prise de décision, nous pouvons sans difficulté convenir de nous voir plus souvent et d'échanger davantage. Je suis en effet convaincu que c'est aussi une manière de mieux assurer, grâce à vous, la présence de la France dans l'océan Indien, et j'espère que cela sera également possible dans les Caraïbes grâce aux départements français d'outre-mer.

Monsieur Godfrain, merci de votre plaidoyer en faveur de l'APD, avec lequel nous sommes bien d'accord. Vous avez insisté sur les investissements privés. Nous nous employons à les favoriser en sachant que la sécurité juridique, sinon fiscale constitue un préalable. Et l'appui institutionnel que nous assurons grâce à nos experts, fiscal istes ou magistrats, contribue directement à aider l'investissement privé. L'OHADA, que vous connaissez bien, continue de progresser. J'espère que les instances multilatérales, y compris européennes, sauront accorder d emain encore plus d'importance à cette ambition qu'elles ne le font aujourd'hui.

Vous avez évoqué la relation existant entre l'aide au développement et l'émigration. Je ne m'y arrêterai pas, mais je crois que chacun est attentif au message que vous avez voulu faire passer.

Vous avez beaucoup insisté sur le mal de vivre des fonctionnaires de la coopération. Je vous ai dit tout à l'heure ce que je pensais de leur état d'esprit, parce que nous avons su les associer à la réflexion menée et que nous sommes en train de répondre à ce qui leur posait problème.


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Vous parlez d'un plan social. J'observe qu'il n'y a pas de licenciements. Pas plus les agents de l'administration que les associations relais de l'ancien ministère menacés.

Le libre choix des responsabilités susceptibles d'être confiées aux agents au sein de la future politique sera la règle. Il n'y aura pas d'affectation forcée. Nous prendrons en compte les voeux de chacun.

La rationalisation de la gestion des deux ministères passera probablement par la fusion, dans un même corps, des agents exerçant des responsabilités comparables. Mais nous préserverons les droits acquis des agents, notamment en matière de primes.

Vous comprendrez, dans ces conditions, que j'accepte difficilement la perspective d'un plan social qui, dans notre esprit, renvoie nécessairement à la situation que peuvent connaître des entreprises en difficulté, avec des licenciements bien réels. C'est évidemment sans aucun objet pour ce qui nous concerne.

En revanche, j'approuve les propositions que vous avez faites concernant les centres culturels, propositions qui visaient à une meilleure association des artistes, des créateurs et des intellectuels dans les pays d'accueil. C'est dans cette direction que nous nous orientons pour mieux faire circuler notre influence sur ces pays, en Afrique notamment. Nos directeurs d'instituts ont pour instruction permanente d'assurer cette symbiose par tous les moyens, par exemple en s'associant aux élites locales. Ils le font bien, d'ailleurs, mais il était intéressant de rappeler la nécessité de cet effort.

Monsieur Goldberg, votre espoir d'un grand ministère sera déçu : nous avons fait un autre choix. Je tiens cependant à vous donner l'assurance que le développement est au coeur de la politique extérieure de la France. C'est un message que nous voulons faire passer, non seulement dans les relations bilatérales, mais encore dans les grandes institutions multilatérales que vous avez citées, qu'il s'agisse du Fonds monétaire international ou de la Banque mondiale. Nous essayons de les rendre plus attentives aux réalités économiques, et surtout sociales, des pays qui font l'objet d'ajustements structurels. Je crois que le message est mieux reçu aujourd'hui qu'hier. Il est vrai que certaines crises, auxquelles vous faisiez allusion tout à l'heure, sont là pour inciter les experts à un peu plus de modestie.

Il nous faut poursuivre dans cette direction. La France est à même de transmettre un message susceptible de rassembler nombre de ces pays, qui sont attentifs au rôle très spécifique qu'elle peut jouer. Il conviendrait de consolider ce rôle-ci par ce discours-là.

Sur la régulation publique, vous rejoignez aussi bien les propositions faites encore récemment par Hubert Védrine à la tribune des Nations Unies, que les propos tenus par Dominique Strauss-Kahn à Washington, lors de l'assemblée du Fonds monétaire international.

Vous avez regretté la baisse de la coopération technique. Je n'y insiste pas. J'ai déjà expliqué quelle analyse nous en faisions. Nous vous rendrons compte des conclusions que M. Nemo nous présentera dans quelques mois, ce qui nous permettra de définir nos orientations en ce domaine.

Je suis d'accord avec vous pour ne pas confondre mondialisation et tyrannie des marchés, pour reprendre votre expression.

Monsieur Dauge, en Méditerranée aussi, la France est très attendue. Certains ont beaucoup insisté à ce propos.

Je pense plus particulièrement à M. Myard. Il faut dire que je connais M. Myard depuis longtemps, en fait depuis l'époque où je présidais la délégation pour l'Union européenne et où il était déjà la « vestale de la souveraineté nationale ». (Sourires.) Eh bien, l'importance qu'il reconnaît à la Méditerranée est un argument de plus pour justifier la réforme de la coopération. Car cette réforme devrait nous aider à mobiliser d'autres outils et d'autres moyens dans les régions en question.

Sur la francophonie, monsieur Dauge, nous sommes d'accord : il faut mieux évaluer. C'est à cela aussi que les nouvelles commissions mixtes s'emploient.

Monsieur Lequillier, vous approuvez avec la réforme, mais vous auriez voulu qu'on aille plus loin en intégrant l'action économique extérieure. Ce sera sans doute pour la prochaine fois (Sourires), mais il faudra attendre encore un peu.

S'agissant du décret, celui-ci a été examiné le 20 octobre par le Conseil d'Etat et devrait être publié dans les semaines à venir. En effet, une validation législative des actes juridiques qui ont été pris, à la suite de l'élection, en 1994, des représentants des personnels au CTP ministériel du Quai d'Orsay est nécessaire. Je souhaite qu'elle intervienne rapidement. Dans quelques semaines, cet obstacle administratif devrait être levé. Nous pourrons ainsi respecter le calendrier que nous nous étions fixé, en particulier pour la mise en place, dès janvier 1999, de la DGCID.

Sur la francophonie, vous-même et M. Loncle, qui se faisait le porte-parole de Mme Roudy, avez beaucoup insisté. Je voudrais vous rappeler les efforts importants que nous consentons.

Vous avez regretté qu'on n'ait pas rationalisé les structures de la francophonie. Or la mise en place d'un secrétariat général de la francophonie répondait déjà au besoin qu'il y ait « un pilote dans l'avion ». M. Boutros BoutrosGhali a été désigné à Hanoï. Il s'emploie d'ailleurs à donner une dimension politique à la francophonie, ce que beaucoup souhaitaient. Dans le même temps, l'Agence de la francophonie est en pleine réorganisation. Je pense qu'on répond là au voeu que vous exprimiez : la réforme des outils de la francophonie continue.

Vous souhaitez de nouvelles implantations d'établissements d'enseignement. J'avoue ne pas savoir très bien comment procéder. Améliorer l'existant, consolider les alliances françaises, nous nous y employons ; mais réaliser des implantations nouvelles, c'est plus difficile.

Vous souhaitez par ailleurs un partenariat d'entreprise.

Nous avons déjà largement satisfait ce voeu. Je n'oublie d'ailleurs pas que vous avez rédigé, en 1996, un rapport sur l'avenir de l'agence.

Beaucoup de vos recommandations sont déjà mises en oeuvre : le redéploiement dans les zones prioritaires - il a eu lieu ; l'augmentation du nombre d'enseignants titulaires dans le réseau - on s'y emploie, notamment par l'augmentation des titulaires résidents comme vous l'aviez souhaité ; un effort supplémentaire pour les bourses scolaires, une meilleure insertion des établissements dans leur environnement, une modernisation de la pédagogie, tout cela a été accompli.

M. Loncle et Mme Roudy ont comparé la GrandeBretagne et la France pour le nombre d'enseignants accueillis. Mais il y a une différence sensible. Dans beaucoup d'établissements britanniques, l'enseignement est payant. On y accueille ceux qui payent, pas forcément sur des critères de sélection ou sur examen. En France, le principe est celui de la gratuité. J'en ai parlé avec M. Allègre ; la discussion se poursuit. Mais pour l'instant, n ous considérons qu'il faut préserver cette gratuité


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d'accès. La contrepartie, c'est une plus grande exigence, ceux qui viennent chez nous devant accomplir le même cycle d'enseignement et poursuivre le même objectif, c'est-à-dire le diplôme de fin d'études. Il nous faut donc bien introduire des critères d'accueil.

Sommes-nous trop rigoureux, trop sélectifs ? Je vous invite à poursuivre vous-même le débat. Quelle attitude devons-nous adopter vis-à-vis de ces élites qui ont tendance à aller ailleurs, en payant ? Nos structures ne nous permettent pas d'accueillir un nombre excessif d'enseignants, à cause justement de la gratuité que je rappelais à l'instant. C'est une question dont on pourra reparler. Je n'y insiste donc pas.

Mme Yvette Roudy.

C'est une question de visas ! M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Un mot sur l'affaire Borrel, à laquelle je sais, madame Roudy, que vous êtes très attentive. Nous avons aujourd'hui l'assurance que l'affaire est suivie avec la plus grande attention par des professionnels de très grande qualité - nous avons pu le vérifier. L'instruction devrait être terminée dans les semaines qui viennent. Mme Borrel aura évidemment accès aux pièces de l'instruction, étant elle-même magistrat - c'est important pour elle. Nous souhaitons que la vérité soit établie de façon incontestable afin de décider des modalités d'une reprise de notre coopération dans le domaine de l'appui à la justice. C'est une demande forte de la communauté française sur place ; le projet qu'animait le juge Borrel garde toute son utilité.

J'ai gardé « pour la bonne bouche » l'intervention de M. Voisin parce que j'ai trouvé que son réquisitoire était d'une sévérité extraordinaire.

La condamnation à laquelle vous vous êtes livré, monsieur le député, était vraiment sans appel. Oserai-je dire que vous avez fait preuve d'humanité quand, cessant de lire vos papiers, vous avez improvisé ? D'un coup, votre propos devenait plus mesuré.

Refusons-nous l'héritage du père ? Non. Mais il y a un temps pour tout.

M. Jean-Claude Lefort.

C'est le « droit d'inventaire » ! M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Il y avait un temps pour accompagner la décolonisation. Et il y a un temps pour considérer qu'elle est définitivement terminée. Nous devons entretenir des relations normales, ouvertes, contemporaines, avec les pays en développement, y compris avec les anciennes colonies.

Ce sont en effet des pays dans lesquels les fils n'ont pas l'histoire des pères. Ce sont des pays qui n'ont pas envie d'avoir avec nous la relation qu'ont entretenue leur père - voire leur grand-père, parce que le temps passe...

Mme Nicole Bricq.

Eh oui ! M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Recherchons-nous des gains de productivité des personnels ? Non. Nous souhaitons utiliser le mieux possible nos personnels, certes. Mais c'est une ambition que nous partageons avec l'ensemble de l'administration et de la fonction publiques.

Les crédits de la coopération militaire ne baissent pas, mais sont strictement maintenus à niveau : 700 millions de francs, pour ceux qui étaient inscrits au budget de la coopération et 80 millions pour ceux qui étaient inscrits au budget des affaires étrangères. Le conseil de défense a décidé de ce maintien comme il a décidé de rythmes, somme toute modérés, de redéploiement en direction de certains anciens pays de l'Est. Il est vrai que nous avons pu observer sur place que, parfois, l'importance des missions de coopération militaire ne se justifiait plus.

Vous êtes trop au fait de ces questions, les uns et les autres, pour que j'aie à vous rappeler qu'il faut surtout éviter de confondre maintien de l'ordre et coopération militaire. Pour ce qui est de la préparation à la sécurité, les forces prépositionnées ont un rôle bien spécifique à jouer que je ne confonds pas avec la coopération militaire.

Abandonnons-nous les pays africains ? Non, monsieur Voisin. Les pays africains ne sont pas abandonnés, et ils le savent bien. Nous continuons à leur consacrer beaucoup de temps. Le sommet Afrique-France se réunira à Paris, dans quelques jours, et auquel la plupart des chefs d'Etat africains participeront, viendra confirmer l'importance de la présence de la France dans leur réalité.

Vous avez enfin parlé du recul des crédits accordés aux écoles françaises. J'essaie de comprendre ce que cela signifie, car c'est en contradiction avec les chiffres qu'on m'a communiqués. Le budget de l'AEFE augmente de 5,6 %, les bourses scolaires augmentent, le nombre de résidents augmente, bref je crois que vous avez probablement été mal renseigné.

En conclusion, je voudrais vous dire que, si l'on a fait souvent de « l'afro-pessimisme », on a eu souvent aussi une vision très pessimiste de l'image de la France dans les pays en développement, y compris en Afrique. Or, j'ai souvent observé une grande appétence de France et de français dans ces pays, qui considèrent que nous avons un rôle spécifique à jouer dans leur développement.

Il faut répondre à cette demande. Il faut y mobiliser l'opinion française. Il faut lui faire mieux savoir ce que nous faisons, mieux le faire valoir aussi.

C'est un peu comme si nous nous sentions encore coupables et que nous évitions de faire connaître notre action dans ces pays. Au travers de la représentation nationale, je voudrais inviter les Français, quand il s'agit de coopération et d'aide au développement, à abandonner délibérément la culpabilité et la nostalgie. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Rappel au règlement

M. le président.

La parole est à M. Jean-Claude Lefort, pour un rappel au règlement.

M. Jean-Claude Lefort.

Monsieur le président, le début de l'intervention de M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie m'incite à prendre la parole.

M. le président.

Sur quel article vous fondez-vous, monsieur Lefort ?

M. Jean-Claude Lefort.

L'article 58-1, qui concerne l'organisation de nos débats, monsieur le président.

Nous avons commencé cet après-midi, à quinze heures, les débats sur deux budgets majeurs qui donnent l'occasion à la représentation nationale d'aborder, une fois l'an, de manière globale les questions de politique étrangère et de coopération. Cette année, de surcroît, l'organisation du ministère a subi des modifications.

En tout et pour tout, notre groupe n'a obtenu que quinze minutes de temps de parole sur le budget des affaires étrangères et dix minutes sur celui de la coopération. Encore a-t-il dû pour cela renoncer à poser des questions.


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Quinze minutes, cela équivaut au temps de parole accordé pour la présentation de trois amendements sur un projet de loi ! Sur des budgets d'une telle importance, c'est inadmissible.

Je tiens, monsieur le président, à ce que vous vous fassiez notre interprète auprès de la conférence des présidents pour lui faire part du mécontentement que nous inspire la déplorable organisation de ces débats. Je vous présente cette demande au nom de mon groupe, mais je pense que l'ensemble de nos collègues pourraient s'y associer, car ils éprouvent le même sentiment. Je rejoins ainsi une suggestion de M. le ministre de la coopération qui estime, lui aussi, qu'il faut améliorer les choses.

M. le président.

Restez-en au règlement, monsieur Lefort !

M. Jean-Claude Lefort.

C'est ce que je fais : je m'en tiens à l'organisation des débats.

M. le président.

Alors, venez-en à votre conclusion.

M. Jean-Claude Lefort.

Il est scandaleux que, comme la plupart de nos collègues, nous n'ayons pu poser aucune question sur l'absence, dans le budget de la coopération, de ligne clairement identifiable consacrée aux problèmes de population, ce qui laisse accroire que notre pays n'a pas de politique en la matière, ou encore sur des sujets comme l'immigration ou la taxe Tobin.

M. le président.

Vous n'êtes plus maintenant dans le cadre d'un rappel au règlement et je vais être obligé de vous couper la parole.

M. Jean-Claude Lefort.

Je conclus, monsieur le président.

La manière dont nous travaillons n'est pas acceptable sur des sujets d'une telle ampleur.

M. le président.

Monsieur Lefort, dois-je vous rappeler que, pour la discussion de la deuxième partie de la loi de finances, le temps de parole global fixé en conférence des présidents et attribué aux groupes est de quarante-sept heures, réparties entre eux en fonction de leur effectif ? Le groupe communiste dispose ainsi de cinq heures vingt-cinq minutes. C'est lui qui a choisi de ne consacrer, à l'intérieur de ce quota, que quinze minutes au budget des affaires étrangères et dix minutes à celui de la coopération.

(Protestations sur les bancs du groupe communiste.)

M. Jean-Claude Lefort.

Tous les groupes sont dans la même situation ! Reprise de la discussion

M. le président.

Nous en venons à la question de M. Pierre Lequiller pour le groupe Démocratie libérale.

M. Pierre Lequiller.

Monsieur le ministre, vous avez bien voulu vous référer au rapport que j'ai rédigé. Mais je ne suis pas d'accord avec vous quand vous dites que nous n'avons pas besoin de nouveaux établissements scolaires.

Des redéploiements sont nécessaires, j'y insiste dans mon rapport, pour s'adapter à l'évolution politique et économique du monde. Ils exigent qu'on leur consacre d'importants crédits d'investissement.

Ma question porte sur la coopération européenne. Elle permettrait à la fois d'assurer ce redéploiement, d'affirmer concrètement la solidarité des Etats de l'Union, d'encourager le plurilinguisme et de réduire les coûts de c onstruction des établissements. Ne convient-il pas, monsieur le ministre, d'étendre les expériences telles que celles de Manille ou de Taïwan, en s'appuyant, dans un premier temps, sur la coopération franco-allemande ? Au moment où nous entrons dans l'euro, cette collaboration permettrait de faire avancer concrètement et la diversification nécessaire, et la construction européenne.

M. le président.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Je n'aimerais pas que mes propos soient compris comme le refus de réaliser de nouveaux établissements.

Notre action prouve qu'il n'en est rien : nous venons de poser la première pierre d'un établissement à Luanda et d'en inaugurer un autre à Maputo. Mais les contraintes budgétaires nous empêchent d'aller plus loin, pour le moment, sauf à accepter une dérive des impôts qui serait contraire, monsieur Lequiller, à votre philosophie.

Pouvons-nous nous associer avec d'autres pays europ éens, dans le cadre d'opérations triangulaires par exemple ? Car vous évoquez l'Allemagne, mais tous nos partenaires sont également concernés. Pourquoi pas des écoles franco-germano-portugaises ? Ce peut être un bon moyen de consolider nos établissements, qui rencontrent un succès considérable. C'est bien ce succès qui nous conduit en priorité à donner aux établissements existants les moyens de se développer.

AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET COOPÉRATION

M. le président.

J'appelle les crédits inscrits à la ligne

« Affaires étrangères et coopération ».

ÉTAT B Répartition des crédits applicables aux dépenses ordinaires des services civils (mesures nouvelles)

« Titre III : 596 698 172 francs.

« Titre IV : moins 506 251 868 francs. »

ÉTAT C Répartition des autorisations de programme et des crédits de paiement applicables aux dépenses en capital des services civils (nouvelles mesures)

TITRE V. - INVESTISSEMENTS EXÉCUTÉS PAR L'ÉTAT

« Autorisations de programme : 281 000 000 francs.

« Crédits de paiement : 91 000 000 francs. »

TITRE VI. - SUBVENTIONS D'INVESTISSEMENT ACCORDÉES PAR L'ÉTAT

« Autorisations de programme : 2 316 500 000 francs.

« Crédits de paiement : 410 100 000 francs. »

Personne ne demande la parole ?...

Je mets aux voix le titre III.

(Le titre III est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix la réduction de crédits du titre IV.

(La réduction de crédits est adoptée.)

M. le président.

Je mets aux voix les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre V.

(Les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre V sont adoptés.)


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M. le président.

Je mets aux voix les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre VI.

(Les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre VI sont adoptés.)

M. le président.

Nous avons terminé l'examen des crédits du ministère des affaires étrangères concernant la coopération.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

2

ORDRE DU JOUR

DES PROCHAINES SÉANCES

M. le président.

Mardi 3 novembre 1998, à neuf heures, première séance publique : Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 1999, no 1078 : M. Didier Migaud, rapporteur général au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport no 1111).

Emploi et solidarité : Ville : M. Pierre Bourguignon, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe no 25 au rapport no 1111) ; Ville et intégration : M. Roland Carraz, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (avis no 1112, tome XII) ; M. André Santini, rapporteur pour avis au nom de la commission de la production et des échanges (avis no 1116, tome X) ; Fixation de l'ordre du jour.

A quinze heures, deuxième séance publique : Questions au Gouvernement ; Explications de vote et vote, par scrutin public, sur l'ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 ; Discussion des propositions de loi : de M. Jean-Pierre Michel, de M. Jean-Marc Ayrault et plusieurs de ses collègues, de M. Alain Bocquet et plusieurs de ses collègues, de M. Guy Hascoët, de M. Alain Tourret, relatives au pacte civil de solidarité (nos 1118, 1119, 1120, 1121 et 1122) : M. Jean-Pierre Michel, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport no 1138) ; M. Patrick Bloche, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (avis no 1143).

A vingt et une heures, troisième séance publique : Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt-trois heures quarante-cinq.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT