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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. YVES COCHET

1. Pacte civil de solidarité. - Suite de la discussion d'une proposition de loi (p. 8524).

DISCUSSION DES ARTICLES (suite) (p. 8524)

Article 1er (suite) (p. 8524)

ARTICLE 515-1 DU CODE CIVIL (suite) (p. 8524)

A mendements nos 79 corrigé de M. Dord, 690 de M. de Courson et 621 de M. Dutreil : MM. Dominique Dord, Rudy Salles, Jean-Pierre Michel, rapporteur de la commission des lois ; Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice. - Rejets.

Amendement no 80 corrigé de Mme Boutin : Mme Christine Boutin, M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux. Rejet.

Amendement no 424 de M. Accoyer : MM. Bernard A ccoyer, le rapporteur, Mme la garde des sceaux,

M. Thierry Mariani. - Rejet.

Amendement no 81 corrigé de Mme Boutin : Mme Christine Boutin, M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux. Rejet.

Amendements nos 492 de M. Baguet, 675 de M. Birraux, 420 de M. Accoyer, 534 de M. Mattei, 553 de M. Goasguen et 421 de M. Accoyer : MM. Léonce Deprez, JeanP ierre Foucher, Patrick Delnatte, François Goulard, Claude Goasguen, Bernard Accoyer. - Retrait de l'amendement no 421.

M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux, MM. Pierre L ellouche, Charles de Courson, Claude Goasguen, Mme Véronique Neiertz. - Rejet, par scrutins, des amendements nos 492 et 675 ; rejet des amendements nos 420 et 534 ; rejet, par scrutin, de l'amendement no 553.

Rappel au règlement (p. 8533)

MM. Jean-Louis Debré, le rapporteur.

Reprise de la discussion (p. 8533)

Amendement no 708 de M. Accoyer : MM. Bernard Accoyer, le rapporteur, Mme la garde des sceaux, M. Guy Hascoët. - Rejet.

Amendements nos 18 de M. Besselat et 278 de M. Mariani : MM. Bernard Accoyer, Thierry Mariani, le rapporteur,

Mme la garde des sceaux, M. François Goulard. - Rejets.

A mendement no 287 de M. Mariani : MM. Thierry Mariani, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 493 de M. Baguet : MM. Léonce Deprez, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 82 de Mme Boutin : Mme Christine Boutin, M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendements nos 447, 448, 449 et 446 de M. MasdeuArus : MM. Jacques Masdeu-Arus, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejets.

A mendement no 290 de M. Mariani : MM. Thierry Mariani, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 83 de Mme Boutin : MM. Léonce Deprez, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

APRÈS L'ARTICLE 515-1 DU CODE CIVIL (p. 8541)

Amendement no 806 de M. Goasguen : MM. Claude Goasguen, Edouard Landrain, le rapporteur, Mme la garde des sceaux ; Amendement no 844 de M. Plagnol ; amendement no 555 de M. Goasguen ; amendement no 556 de M. Goasguen.

- Rejets.

Amendement no 846 de M. Plagnol : MM. Henri Plagnol, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

ARTICLE 515-2 DU CODE CIVIL (p. 8543)

Amendement no 291 de M. Mariani et amendements identiques nos 450 de M. Masdeu-Arus et 558 de M. Goasguen : MM. Thierry Mariani, Jacques Masdeu-Arus, Claude Goasguen, Mmes Catherine Tasca, présidente de la commission des lois, la garde des sceaux. - Rejets.

Amendement no 560 de M. Goasguen. - Rejet.

Rappel au règlement (p. 8545)

MM. Jean-Louis Debré, le président.

Reprise de la discussion (p. 8545)

Amendement no 85 de Mme Boutin : Mme Christine Boutin, M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendements nos 292 de M. Mariani, 451 de M. MasdeuArus et amendements identiques nos 559 de M. Goasguen et 847 de M. Plagnol : MM. Thierry Mariani, Jacques Masdeu-Arus, Claude Goasguen, Léonce Deprez, le rapporteur, Mme la garde des sceaux, M. François Goulard.

- Rejets.

Amendements nos 452 et 453 de M. Masdeu-Arus, 206 de

M. Estrosi, 454 et 455 de M. Masdeu-Arus : MM. Jacques Masdeu-Arus, Thierry Mariani, le rapporteur, Daniel Vaillant, ministre des relations avec le Parlement. - Rejets.

Amendements nos 431 de M. Accoyer et 729 de M. MartinLalande : MM. Bernard Accoyer, Yves Fromion, le rapporteur, Mme la garde des sceaux, M. François Goulard.

- Rejets.

Amendement no 430 de M. Accoyer : MM. Bernard Accoyer, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

MM. Dominique Dord, le président.

Suspension et reprise de la séance (p. 8552)

PRÉSIDENCE DE M. RAYMOND FORNI

Amendements identiques nos 87 de Mme Boutin et 294 de M. Mariani et amendements nos 827 de M. Doligé et 659 de M. de Courson : M. le rapporteur. - Ces amendements n'ont plus d'objet.

A mendements nos 293 de M. Mariani et 433 de M. Accoyer : MM. Thierry Mariani, le rapporteur. - Ces amendements n'ont plus d'objet.

Amendements nos 296 de M. Mariani, 612 de M. Dutreil, 295 de M. Mariani et 88 de Mme Boutin : M. Thierry Mariani, Mme Christine Boutin, M. le rapporteur,

Mme la garde des sceaux. - Rejets.

Amendement no 90 de Mme Boutin : Mme Christine Bout in, M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux, MM. Daniel Marcovitch, François Goulard. - Rejet.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

Amendements nos 301 de M. Mariani, 434 de M. Accoyer et amendements identiques nos 202 de M. Estrosi et 300 de M. Mariani : MM. Thierry Mariani, Bernard Accoyer, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejets.

Amendement no 86 de Mme Boutin : MM. Dominique Dord, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendements nos 797 de M. Perrut et 863 de M. Accoyer : MM. Dominique Dord, Bernard Accoyer, le rapporteur,

Mme la garde des sceaux. - Rejets.

Amendement no 89 de M. Dord : MM. François Goulard, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

M. le président.

MM. Patrick Devedjian, le président.

Suspension et reprise de la séance (p. 8558)

Amendement no 297 de M. Mariani : M. Thierry Mariani.

Amendements nos 298 et 299 de M. Mariani : MM. Thierry Mariani, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet des amendements nos 297, 298 et 299.

Amendements nos 435 de M. Accoyer et 828 de M. Doligé : MM. Bernard Accoyer, Thierry Mariani, le rapporteur,

Mme la garde des sceaux. - Rejets.

Amendement no 660 de M. de Courson : M. le rapporteur,

Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 661 de M. de Courson. - Rejet.

APRÈS L'ARTICLE 515-2 DU CODE CIVIL (p. 8560)

Amendement no 785 de M. Fromion : MM. Yves Fromion, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 91 de Mme Boutin : Mme Christine Boutin, M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 93 de Mme Boutin : Mme Christine Boutin, M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 92 de M. Dord : MM. Dominique Dord, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 94 de Mme Boutin : Mme Christine Boutin. - Retrait.

Amendement no 95 de M. Myard : Mme Christine Boutin,

M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 96 de Mme Boutin : MM. Dominique Dord, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendement no 948 de M. Plagnol : M. Henri Plagnol.

Amendements nos 949, 950, 853, 947, 854 et 886 de M. Plagnol : MM. Henri Plagnol, le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Rejet des amendements nos 948, 949, 950, 853, 947, 854 et 886.

Amendement no 851 de M. Plagnol : M. Henri Plagnol. Rejet.

Amendement no 852 de M. Plagnol. - Rejet.

Amendement no 951 de M. Plagnol. - Rejet.

ARTICLE 515-3 DU CODE CIVIL (p. 8564)

Amendements identiques nos 97 de Mme Boutin, 302 de M. Mariani, 456 de M. Masdeu-Arus, 562 de M. Goasguen et 746 de M. Plagnol : MM. Dominique Dord, Thierry Mariani, Claude Goasguen, Jacques MasdeuArus, Renaud Donnedieu de Vabres, le rapporteur,

Mme la garde des sceaux. - Rejet.

Amendements nos 98 de Mme Boutin, 952 de M. Plagnol, 563 de M. Goasguen et 176 de M. Hascoët : Mme Christine Boutin, MM. Henri Plagnol, Claude Goasguen, Guy H ascoët, le rapporteur, Mme la garde des sceaux,

M. Pierre Lellouche. - Rejets.

Amendement no 1032 de M. Tourret : MM. Alain Tourret, Thierry Mariani, Henri Plagnol, le rapporteur, Mme la garde des sceaux, MM. François Goulard, Bernard Birsinger, Renaud Donnedieu de Vabres, Jacques Floch. - Les sous-amendements à l'amendement no 1032 ont été retirés ; adoption de l'amendement no 1032.

L'ensemble des amendements déposés sur l'article L. 513-3 du code civil n'ont plus d'objet, à l'exception des amendements nos 107 de Mme Boutin, 662 de M. de Courson, 108 de Mme Boutin, 835 de M. Doligé, 457 de M. Masdeu-Arus, 109 de Mme Boutin, 458 de M. Masdeu-Arus, 833 et 837 de M. Doligé et 313 de M. Mariani.

Renvoi de la suite de la discussion à une séance ultérieure.

2. Ordre du jour des prochaines séances (p. 8570).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

(1) Le texte de cet article figure dans le compte rendu de la première séance du dimanche 8 novembre 1998.

COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. YVES COCHET,

vice-président

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures.)

1 PACTE CIVIL DE SOLIDARITÉ Suite de la discussion d'une proposition de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de loi relative au pacte civil de solidarité (no 1138).

Discussion des articles (suite) Article 1er (suite)

M. le président.

Cet après-midi, l'Assemblée a poursuivi l'examen de l'article 1er (1) et s'est arrêtée à l'amendement no 79 corrigé.

ARTICLE 515-1 DU CODE CIVIL (suite)

M. le président.

Je suis saisi de trois amendements, nos 79 corrigé, 690 et 621, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 79 corrigé, présenté par M. Dord et Mme Boutin, est ainsi rédigé :

« A la fin du texte proposé pour l'article 515-1 du code civil, supprimer les mots : ", pour organiser leur vie commune". »

L'amendement no 690, présenté par M. de Courson, est ainsi rédigé :

« A la fin du texte proposé pour l'article 515-1 du code civil, substituer aux mots : "pour organiser leur vie commune" les mots : "qui s'obligent mutuellement à une communauté de vie". »

L'amendement no 621, présenté par M. Dutreil et M. Dord, est ainsi rédigé :

« A la fin du texte proposé pour l'article 515-1 du code civil, substituer aux mots : "organiser leur vie c ommune" les mots : "formaliser la mise en commun de leurs ressources". »

La parole est à M. Dominique Dord, pour soutenir l'amendement no 79 corrigé.

M. Dominique Dord.

Si vous le permettez, monsieur le président, je défendrai également dès à présent l'amendement no 621, qui est un peu le dérivé de l'amendement no 79 corrigé.

Nous sommes partis du constat que la notion de « vie c ommune » est particulièrement incertaine et floue.

Essayant de comprendre ce que recouvrent ces deux mots, nous avons parcouru le texte et nous nous sommes aperçus qu'il contient principalement des dispositions matérielles, fiscales ou patrimoniales et fait davantage référence à l'union de ressources ou à l'union de biens qu'à la vie commune. On n'y trouve pas, par exemple, d'obligations ou de dispositions de nature plus subjective telles que la référence à la fidélité, comme dans le mariage. Même les notions de secours et d'assistance n'y figurent pas.

Se pose par ailleurs la question, qui nous paraît essentielle, de la communauté de vie ou la communauté de toit. On nous dit qu'il s'agit d'organiser la vie commune, mais la notion est si imprécise qu'on ne sait pas s'il doit y avoir ou non communauté de vie, communauté de toit ou cohabitation. En outre, si c'est bien là le sens qu'il faut donner à la formule, quelle est l'autorité qui serait chargée de vérifier ou de contrôler la communauté de toit ? Il est essentiellement question dans le texte de l'aide matérielle ; on parle d'acquisition de biens, de mise en commun de revenus. L'expression « vie commune » étant relativement imprécise, et celle-ci ne pouvant se réduire à l'aspect matériel, nous proposons de supprimer purement et simplement la référence à la vie commune, ou bien, et c'est l'objet de l'amendement no 621, de la remplacer par une notion qui nous paraît plus simple : la mise en commun des ressources.

M. le président.

L'amendement no 690 est-il défendu ?

M. Rudy Salles.

Oui, monsieur le président.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, pour donner l'avis de la commission sur les trois amendements.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

La commission a repoussé ces amendements, car le PACS n'est pas seulement la mise en commun de biens ou de ressources. Il comporte aussi des devoirs, qui sont précisés à l'article 515-4. En ce qui concerne la vie commune, nous y reviendrons tout à l'heure, puisque des amendements portent sur cet aspect.

Je vous demande, mes chers collègues, de rejeter ces trois amendements.

M. le président.

La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, pour donner l'avis du Gouvernement sur les trois amendements.

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

Le Gouvernement rejette ces amendements.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 79 corrigé.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 690.

(L'amendement n'est pas adopté.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 621.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Mme Boutin et M. Dord ont présenté un amendement, no 80 corrigé, ainsi rédigé :

« A la fin du texte proposé pour l'article 515-1 du code civil, substituer aux mots : "vie commune", le mot : "cohabitation". »

La parole est à Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin.

Cet amendement précise que les cocontractants doivent vivre sous le même toit, ce qui n'implique pas la notion de vie commune. Il prend en considération la situation des deux personnes quelle que soit la nature de leurs relations. Au surplus, le mot cohabitation conviendrait mieux, reprenant la notion juridique de cohabitant utilisée dans les organismes de sécurité sociale pour accorder des droits sociaux.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission est contre cet amendement. Bien sûr, les pacsés devront avoir une résidence commune au sens fiscal puisqu'ils feront une déclaration fiscale conjointe. Et les termes que nous employons dans le texte sont suffisants pour introduire cette disposition. Mes chers collègues, je vous demande donc, au nom de la commission des lois, de voter contre cet amendement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 80 corrigé.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

MM. Accoyer, Quentin et Schneider ont présenté un amendement, no 424, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil par les mots : "dans le but de bénéficier d'avantages fiscaux et sociaux au détriment des couples mariés, des veuves et veufs, des célibataires et des concubins de sexe différent". »

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Cet amendement propose de préciser le but du PACS, qui est de bénéficier d'un certain nombre de dispositions avantageuses dans les domaines fiscal et social, et la façon dont ces avantages sont financés.

Les avantages que procurera le PACS sur le plan fiscal notamment, pour l'IRPP et l'ISF, mais aussi en ce qui concerne la fiscalité des successions, auront un coût considérable, que Bercy évalue entre 6 et 8 milliards.

Faut-il rappeler que, dans le même temps, le Gouvernement a décidé, cette année, d'abaisser d'un tiers le quotient familial ? Où est donc la logique de votre politique en faveur des familles ? Existe-t-il même une politique nationale visant à sa pérennité ? J'étayerai mes arguments sur des données de l'INSEE, qui nous apprend qu'un couple n'a besoin que d'une fois et demie le revenu d'un célibataire pour atteindre le même niveau de vie, et qu'à niveau de vie égal, un couple dépense seulement 1,3 fois ce que dépense une personne seule pour l'occupation et le chauffage de son appartement.

Par ailleurs, ce qui sera accordé aux pacsés sera bien financé par les familles, les célibataires, les veufs et les personnes seules.

Les pacsés bénéficieront aussi de droits, ce qui diminuera ceux des autres catégories, tant dans les entreprises que dans la fonction publique. En effet, dans les entreprises, le PACS conférera des priorités pour les vacances et, dans la fonction publique, pour le rapprochement.

Nous qui sommes, en tant que parlementaires, si souvent saisis du cas de fonctionnaires déchirés par des problèmes de rapprochement, nous devons faire en sorte qu'ils soient bien informés de cette modification profonde sur laquelle nous n'avons pas assez insisté.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission des lois s'est prononcée contre. C'est un amendement qui fait preuve d'un certain mauvais esprit : si le PACS ouvre des droits aux couples « pacsés », ce n'est pas au détriment des veuves, des veufs, des célibataires ou des gens mariés.

(« Si ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Il s'agit de droits nouveaux.

M. Patrick Ollier.

Comment est financé le PACS ?

M. Patrice Martin-Lalande.

Où trouve-t-on les 8 milliards ?

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Même avis que le rapporteur.

M. le président.

La parole est à M. Thierry Mariani.

Brièvement, s'il vous plaît, mon cher collègue.

M. Thierry Mariani.

Vous pouvez compter sur ma brièveté, comme d'habitude.

(Sourires.)

Même avec brièveté, on peut souligner combien certain amendements sont perspicaces. C'est le cas de celui de M. Accoyer, qui a mis le doigt sur un point important.

En deux ans, avec votre majorité socialo-communisteverte, madame la ministre, vous avez supprimé plus de 15 milliards de francs consacrés à la politique de la famille. Et dans le même temps, vous vous apprêtez à donner 7 à 8 milliards d'avantages aux couples hétérosexuels ou homosexuels qui souscriront un PACS.

L'amendement de mes collègues Accoyer, Quentin et Schneider est en fait de pure logique : il eût été beaucoup plus clair de préciser dans le texte que ces avantages étaient accordés aux signataires d'un PACS au détriment des couples mariés, des veuves et des veufs, des célibataires et des concubins de sexes différents.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 424.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Mme Boutin, MM. Dord, Myard et Kossowski ont présenté un amendement, no 81 corrigé, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil par l'alinéa suivant :

« Les personnes concluant un pacte ne peuvent déroger aux lois qui intéressent l'ordre public et les bonnes moeurs. »

La parole est à Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin.

Cet amendement est très important car il implique tout le cortège des conséquences de l'illicite, notamment la prohibition des pactes sur successions futures.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

Déjà, le PACS facilite le dépouillement d'un partenaire par l'autre. C'est le pouvoir du plus fort sur le plus faible.

La prohibition des pactes sur succession future est une des sentinelles de la justice de la République. Le rappel de l'article 6 du code civil est nécessaire au vu d'une certaine jurisprudence relative aux relations hors mariage.

Cet amendement permettrait donc de montrer que le PACS ne déroge pas a priori à l'article 6 du code civil, et d'en fixer également les limites.

M. le président.

Merci de votre brièveté.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a déjà repoussé un amendement semblable de M. Albertini.

J'ai déjà indiqué à la commission que l'article 6 du code civil s'appliquait aux dispositions du PACS. Je pense donc que Mme Boutin devrait plutôt retirer son amendement. Si elle ne le faisait pas, je proposerais à l'Assemblée de voter contre.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Même avis que le rapporteur.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 81 corrigé.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de six amendements, nos 492, 675, 420, 534, 553 et 421, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 492, présenté par M. Baguet, est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil par l'alinéa suivant :

« Il ne permet pas d'avoir recours à l'adoption, ni à la procréation médicalement assistée. ».

L'amendement no 675, présenté par M. Birraux, est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil par l'alinéa suivant :

« Il ne permet pas le recours à l'adoption ni à la procréation médicalement assistée. »

L'amendement no 420, présenté par MM. Accoyer, Jacob, Muselier, Delnatte, Demange, Quentin, Ferrand et Schneider, est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil par la phrase suivante : "Les signataires de ce pacte d'un même sexe renoncent par là même à recourir à l'adoption". »

L'amendement no 534, présenté par M. Mattei, est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil par l'alinéa suivant :

« Lorsqu'il est conclu par deux personnes du même sexe, le pacte civil de solidarité exclut le droit à l'adoption prévu aux articles 343 et 343-1 du code civil. »

L'amendemant no 553, présenté par M. Goasguen, est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil par l'alinéa suivant :

« Lorsqu'il est conclu par deux personnes du même sexe, la pacte civil de solidarité exclut tout droit à l'adoption prévu aux articles 343 et 343-1 du code civil. »

L'amendement no 421, présenté par MM. Accoyer, Jacob, Muselier, Delnatte, Demange, Quentin, Ferrand et Schneider, est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil par la phrase suivante :

« Les signataires de ce pacte d'un même sexe renoncent par là même à recourir à la procréation médicalement assistée. »

La parole est à M. Léonce Deprez, pour soutenir l'amendement no 492.

M. Léonce Deprez.

Nous avons entendu rappeler à plusieurs reprises qu'il n'était pas question d'ouvrir par cette proposition de loi la porte à l'adoption. Il n'est pas pensable pour le bien de l'enfant que deux personnes de même sexe puissent élever un enfant ensemble. Le pacte civil pouvant être conclu entre deux personnes de même sexe, il paraît donc nécessaire de préciser qu'il ne permet pas d'avoir recours à l'adoption, ni à la procréation médicalement assistée.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Foucher, pour soutenir l'amendement no 675.

M. Jean-Pierre Foucher.

Le problème de la procréation médicalement assistée est un vrai problème et je voudrais, à ce sujet reprendre ce qu'a répondu notre rapporteur, le 9 octobre 1998, à M. Mattei : « J'ai voté contre les dispositions relatives à la PMA pour les couples hétérosexuels lors de la discussion de la loi "bio-éthique" - je suis même intervenu à la tribune sur ce point. Donc je ne peux pas être suspect de la vouloir pour les couples homosexuels, a fortiori. Je considère que le droit essentiel de la personne humaine, c'est de connaître ses origines. »

« Très bien ! » a alors dit M. Roman. Le rapporteur poursuivait ainsi : « De la même manière que je suis hostile à toute mise au monde d'enfant à qui on refusera de connaître ses deux origines... ».

Il est effectivement important pour un enfant de connaître ses deux origines. Il faut absolument être clair à ce sujet et interdire aux couples homosexuels d'avoir recours à la procréation médicalement assistée.

Si on leur en donnait l'autorisation, on créerait une inégalité entre les couples de femmes qui pourraient avoir recours à la procréation médicalement assistée et les couples d'hommes, qui ne le pourraient pas. Ce serait inacceptable !

M. le président.

La parole est à M. Patrick Delnatte, pour soutenir l'amendement no 420.

M. Patrick Delnatte.

On a entendu des avis différents sur les bancs de la majorité à propos de l'adoption d'un enfant par un couple homosexuel. Certes, certaines situations sont extrêmement difficiles et on pourrait imaginer qu'il est parfois préférable pour un enfant d'être accueilli par un couple homosexuel.

Le but de l'adoption, néanmoins, est de donner un père et une mère à un enfant et de lui permettre de retrouver une vie épanouissante, et je pense qu'il faut lui donner les mêmes atouts que s'il avait une filiation parentale naturelle.

Le Gouvernement doit s'engager de façon extrêmement précise et claire. Quoi de mieux que d'exclure explicitement l'adoption pour les signataires d'un PACS du même sexe ?

M. le président.

La parole est à M. François Goulard, pour soutenir l'amendement no 534.

M. François Goulard.

Etant donné sa compétence, que chacun reconnaît, M. Mattei était spécialement fondé à déposer cet amendement. Il ne peut être séparé de ceux


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que nous avons présentés précédemment, qui ont été malheureusement repoussés et qui tendaient à séparer le sort réservé, au regard de ce nouveau contrat ou institution qu'est le PACS, aux couples hétérosexuels et aux couples homosexuels. Si la distinction avait été faite, nous aurions pu naturellement insérer cet amendement prévoyant que, lorsqu'il est conclu par deux personnes du même sexe, le pacte civil de solidarité exclut le droit à l'adoption prévu aux articles 343 et 343-1 du code civil.

Cela nous paraît absolument nécessaire et ceux qui, contrairement à nous, sont des défenseurs acharnés du pacte civil de solidarité, devraient approuver cet amendement. Nous savons, en effet, les uns et les autres, à entendre nos concitoyens et à lire la presse, que c'est la question qui effraie le plus l'opinion aujourd'hui.

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

C'est vous qui l'avez posée en ces termes !

M. François Goulard.

Que des couples homosexuels puissent adopter des enfants est ce qui inquiète le plus.

C'est la raison pour laquelle l'adoption d'un amendement qui exclurait très clairement du droit à l'adoption prévu aux articles 343 et 343-1 du code civil les couples constitués de deux hommes ou de deux femmes liés par un pacte civil de solidarité serait de bon aloi.

Tous les spécialistes de la psychologie des enfants le soulignent, et c'est le bon sens, l'éducation reçue au sein d'un couple constitué par un homme et par une femme permet à un enfant de se développer et d'acquérir sa propre psychologie. Les troubles qui peuvent résulter d'une éducation dans un couple homosexuel sont tels que, quel que soit le respect que l'on porte à ceux qui ont fait ce choix de vie, il faut l'interdire par la loi, car elle est susceptible de créer des troubles préjudiciables à l'enfant.

S'il y a un terrain sur lequel nous pourrions nous rencontrer, c'est bien l'intérêt de l'enfant. Je pense que vous aideriez la cause que vous entendez servir en acceptant cet amendement de clarification. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. Claude Goasgen, pour défendre l'amendement no 553.

M. Claude Goasguen.

Mes chers collègues, l'adoption est une question centrale, et elle a justifié des déclarations politiques importantes allant jusqu'à des engagements du Premier ministre devant l'ensemble de la nation. Celui-ci a certifié que le texte ne permettrait pas l'adoption homosexuelle dans les années à venir. Lorsque le Premier ministre s'engage à la télévision devant la nation, cela mérite tout de même de notre part un minimum d'attention, même si l'heure est tardive.

M. Francis Hammel.

Vous racontez toujours la même chose !

M. Claude Goasguen.

Comme je l'ai souligné dans la discussion générale, c'est une question extrêmement difficile à trancher. Elle se pose en réalité devant les tribunaux, civils et administratifs, notamment devant le Conseil d'Etat, comme récemment, lesquels donnent des réponses contradictoires.

Depuis les lois de 1966 et de 1996, l'adoption est réservée aux personnes mariées et célibataires. Le tribunal, la plupart du temps, est confronté à la question de savoir si le fait qu'un célibataire est homosexuel est une circonstance éloignant de l'adoption ou s'il ne doit pas être pris en considération. Tel est le problème juridique qui se pose. Les juges analysent cas par cas, avec beaucoup de discernement, et selon les circonstances.

Cela étant, quand on lit les attendus de la Cour de cassation ou du Conseil d'Etat, la plupart des juges reconnaissent que le problème est extrêmement grave. Ils souhaiteraient une attitude un peu plus nette du législateur que le silence, notamment de la loi sur l'adoption.

Il existe un précédent dans ce domaine, qu'un grand nombre de parlementaires ici connaissent : la PMA. Un arrêt de la Cour de cassation avait suscité une vive réprobation. La Cour de cassation, en 1994, avait reconnu à un donneur homosexuel le bénéfice de l'exercice de l'autorité parentale sur un enfant né par insémination d'une mère elle-même engagée dans une relation homosexuelle. De toute évidence, il fallait que le législateur intervienne pour éviter des abus que le juge et l'opinion publique considéraient comme étant particulièrement difficiles à supporter, et cela a amené la législation que vous connaissez sur la PMA.

La loi est très claire, elle interdit la PMA aux homosexuels.

M. Guy Hascoët.

Et alors ?

M. Claude Goasguen.

Je vous demande de faire exactement la même chose pour l'adoption en explicitant les déclarations d'intention politiques.

Un certain nombre d'entre vous ont été magistrats.

Lorsque le juge ne sait pas exactement quelle est l'intention du législateur, il se réfère au dernier texte qui a été voté.

Pour ce qui concerne l'adoption, ce sera le texte que nous examinons et qui reconnaît l'égalité du lien hétérosexuel et du lien homosexuel.

M. Jean-Pierre Blazy.

On a compris !

M. Claude Goasguen.

Vous ne pourrez donc pas empêcher le juge d'exciper de la loi que nous avons votée pour considérer que le législateur a marqué l'égalité et qu'il ne peut plus y avoir de mesure discriminatoire.

Vous aurez alors une jurisprudence constante. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

Merci, monsieur Goasguen.

M. Claude Goasguen.

Accordez-moi encore trente secondes, monsieur le président.

(Protestations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Votre temps de parole est écoulé.

M. Claude Goasguen.

Vous serez amenés tôt ou tard à faire ce que font en ce moment les parlementaires suédois, c'est-à-dire ratifier par la législation ce que la jurisprudence reconnaît dans tous les cas de figure.

Si le texte de la loi n'est pas explicite dans le domaine de l'adoption homosexuelle, nous aurons dans quelques années une évolution législative qui viendra ratifier l'évolution jurisprudentielle...

Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République.

Il a raison !

M. Claude Goasguen.

... et permettre l'adoption homosexuelle dans tous les cas de figure. C'est contre une telle évolution que je m'élève.

(Applaudissements sur de


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nombreux bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendante, du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseA lliance et du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer, pour défendre l'amendement no 421.

M. Bernard Accoyer.

Cet amendement traduisant la même optique que l'amendement no 420, je le retire.

M. le président.

L'amendement no 421 est retiré.

Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos 492, 675, 420, 534 et 553 ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a bien entendu repoussé ces amendements, car le texte ne prévoit pas la possibilité d'adopter ou d'avoir recours à la PMA.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Mme la ministre s'est exprimée très clairement sur ce point et peut-être y reviendra-t-elle.

M. Jacques Myard.

Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Pour le reste, et sans faire la moindre provocation,...

M. Alain Juppé et M. Thierry Mariani.

Ça changera !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

... je vous signale que ces amendements ne sont en rien un garde-fou...

M. Jacques Myard.

Plutôt un « garde-folle » !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

... car ce qu'une loi fait aujourd'hui, une autre loi pourrait le défaire. Ils ne serviraient donc strictement à rien.

M. Patrick Ollier.

Le juge applique la loi qui a été votée, monsieur Michel !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Je vous demande donc de repousser ces cinq amendements.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Je vais prendre mon temps pour répondre, car l'adoption est un sujet extrêmement important.

M. Thierry Mariani.

Nous sommes bien d'accord !

Mme la garde des sceaux.

Sur un point aussi fondamental, il faut aller au fond du débat.

Je regrette que M. Devedjian ne soit pas là. Il aurait peut-être été intéressé par ma réponse.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants).

M. Jacques Myard.

Vous auriez pu lui répondre hier !

M. Jean-Louis Debré.

Il a attendu tout l'après-midi !

Mme la garde des sceaux.

Je l'ai indiqué dans mon discours de présentation, mardi dernier, et je l'ai répété ce matin, le Gouvernement refuse que l'adoption soit autorisée pour les couples homosexuels.

Le texte du PACS n'autorise pas l'adoption pour les couples homosexuels.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Il ne touche pas, en effet, aux droits de la famille. C'est un choix explicite et volontaire !

M. Pierre Lellouche.

Ce n'est pas vrai !

Mme la garde des sceaux.

Le PACS veut éliminer les discriminations à l'égard des couples homosexuels, c'est une réalité. Il veut permettre que s'organise la vie de tous les couples. Mais il s'arrête là où commence la filiation...

M. Alain Barrau.

Très bien ! Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République.

Ecrivez-le !

Mme la garde des sceaux.

... car là, en effet, la différence des sexes ne peut être niée, et encore moins abolie.

M. Dominique Dord.

Ecrivons-le dans la loi !

Mme la garde des sceaux.

Je vous demande de l'attention, mesdames, messieurs les députés, parce que nous touchons au point cardinal de notre débat.

M. Pierre Lellouche.

Nous sommes bien d'accord !

Mme la garde des sceaux.

Nous ne pouvons pas mélanger non-discrimination et indifférenciation. Ce n'est pas parce qu'on refuse les discriminations, ce que fait le PACS, que l'on nie la différence entre les sexes au regard de la filiation, ce que ne fait pas le PACS, car il s'arrête là où commence la famille.

(Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Yann Galut.

C'est clair !

Mme la garde des sceaux.

C'est un sujet important, et je vous prie de m'écouter.

Je crois, monsieur Goasguen, que vous confondez nondiscrimination et indifférenciation.

Mme Christine Boutin.

Cela ne tient pas debout !

Mme la garde des sceaux.

Vous avez évoqué hier l'article 225-1 du code pénal, qui a été introduit à l'initiative de M. Jean-Pierre Michel, et il faut lui en rendre hommage.

M. Claude Goasguen.

Je l'ai fait, madame !

Mme la garde des sceaux.

C'est vrai ! Cet article institue la non-discrimination, mais pas l'indifférenciation ! En voici le premier alinéa : « Constitue une discrimination toute distinction opérée entre les personnes physiques à raison de leur origine, de leur sexe, de leur situation de famille, de leur état de santé, de leur handicap, de leurs moeurs, de leurs opinions politiques, de leurs activités syndicales, de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée. »

Mme Christine Boutin.

Ah ! Merci.

Mme la garde des sceaux.

Quel bel article de notre code pénal ! Il est heureux qu'en vertu de notre droit, on ne puisse pas faire de discrimination, en matière sociale ou professionnelle notamment, entre des personnes hétérosexuelles et des personnes homosexuelles.

Personne ici, je l'espère, ne peut imaginer que l'on fasse des différences, en raison du sexe, en matière de droit du travail, parce que, à cet égard, hommes et femmes sont placés dans la même situation.

M. Thierry Mariani.

Cela n'a aucun rapport !


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Mme la garde des sceaux.

Si l'on faisait une différence, ce serait une discrimination.

Mais la non-discrimination n'est pas l'abolition de la différence des sexes.

Mme Yvette Roudy.

Ça, c'est vrai !

Mme la garde des sceaux.

Je le précise en particulier à l'intention de M. Goasguen. Les éléments que j'apporte dans le débat vont en effet permettre de clarifier, enfin, les choses, notamment pour la jurisprudence.

M. Alain Barrau.

Et voilà !

Mme la garde des sceaux.

Je l'ai dit avec la plus grande netteté dans mon discours introductif,...

M. Arnaud Lepercq.

Ecrivez-le !

Mme la garde des sceaux.

... il n'y a, pour aucun couple, de droit à l'enfant. Les lois sur la procréation médicalement assistée ont tracé les limites du droit à l'enfant comme source de bonheur individualiste, et la loi ne peut accepter une filiation juridique qui nie la différence des sexes. Un enfant, en effet, a besoin d'un père et d'une mère pour construire son identité et structurer sa personnalité.

M. Pierre Lellouche.

Très bien !

Mme la garde des sceaux.

Mon refus de l'adoption et de la procréation médicalement assistée pour des couples homosexuels est fondé, je le répète, sur l'intérêt de l'enfant, sur ses droits à vivre dans un milieu favorable où il puisse épanouir sa personnalité. C'est ce point de vue que je prends en considération et non celui des adultes ni même des couples quels qu'ils soient.

J'espère, après cette nouvelle mise au point, que vous aurez compris que le PACS est totalement étranger au droit de la filiation et donc sans incidence sur les règles en vigueur (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants),...

M. André Angot.

Ce n'est pas vrai !

Mme la garde des sceaux.

... qu'il s'agisse de l'adoption ou de la procréation médicalement assistée.

La législation en vigueur relative à l'adoption ne permet pas à un couple non marié d'adopter un enfant. Il n'y a donc pas lieu de préciser ce principe qui existe déjà dans notre droit, car ce droit reste inchangé avec le PACS.

M. Richard Cazenave.

Et les célibataires ?

Mme la garde des sceaux.

J'ajoute que l'adoption par les couples hétérosexuels, et par eux seuls, est une question qui sera examinée par le groupe de travail que j'ai constitué sur la famille.

Encore une fois, ne cherchons pas à mêler le débat sur le PACS et le débat sur la famille.

Quant à la procréation médicalement assistée, je rappellerai ici qu'elle est régie très utilement et très précisé ment par les lois sur la bioéthique de 1994...

M. Arnaud Lepercq.

En France, pas à l'étranger !

Mme la garde des sceaux.

... par l'article 311-20 du code civil et les articles L. 152-1 et suivants du code de la santé. Il n'est pas prévu de faire évoluer ces dispositions.

Mme Michèle Alliot-Marie.

Jusqu'à quand ?

M me la garde des sceaux.

Je rappelle que l'article 311-20 du code civil issu de la loi du 29 juillet 1994 pose une série de conditions qui se cumulent avec celles du code de la santé publique.

Pour utiliser la PMA, il faut pouvoir « remédier à l'infertilité dont le caractère pathologique a été médicalement diagnostiqué ». Ce n'est pas un acte banal de commodité.

Les demandeurs doivent être un homme et une femme et non une personne seule ou deux personnes de même sexe.

M. Richard Cazenave.

C'est en effet la loi !

Mme la garde des sceaux.

Les demandeurs doivent être vivants, ce qui interdit la PMA post mortem

M. Richard Cazenave.

Voilà une loi bien faite !

Mme la garde des sceaux.

Les demandeurs doivent être en âge de procréer, mariés ou prouver au moins deux ans de vie commune. Les demandeurs, époux ou concubins, doivent donner leur consentement sous forme expresse.

M. Thierry Mariani.

Bonne loi !

Mme la garde des sceaux.

Celui qui, après avoir consenti à la PMA, ne reconnaît pas l'enfant qui en est issu engage sa responsabilité.

M. Dominique Dord.

Voilà qui est précis !

M me la garde des sceaux.

Deux conclusions s'imposent : la loi de 1994 est en effet bien pensée et elle ne laisse rien au hasard.

M. Thierry Mariani.

Contrairement à celle dont nous discutons !

Mme la garde des sceaux.

Il n'est pas nécessaire de fermer une porte qui n'est pas ouverte. Il suffit d'appliquer la loi existante. Cela vaut et pour la PMA et pour l'adoption.

Mme Yvette Roudy.

Très bien !

Mme la garde des sceaux.

Sans doute faudra-t-il s'interroger sur l'adoption par les couples hétérosexuels non mariés. Cette question fera l'objet d'un examen du groupe de travail que j'ai installé et le Gouvernement prendra position sur cette très importante question.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Yann Galut.

Vous avez la réponse mesdames, messieurs de l'opposition ! (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Richard Cazenave.

La loi sur la PMA est une loi bien faite !

M. le président.

La parole est à M. Pierre Lellouche.

M. Pierre Lellouche.

Madame la ministre, nous sommes bien, comme vous l'avez dit, à un point normatif essentiel du texte.

M. Guy Hascoët.

Mme la ministre a parlé d'un point

« cardinal ».

M. Pierre Lellouche.

C'est en effet un problème de fond qu'il nous faut regarder en face. Votre position, en tout cas oralement, est très claire et je vous en donne acte. Si j'ai bien compris, le Premier ministre est également sur cette ligne. En revanche - et mes collègues l'ont


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entendu comme moi - le rapporteur, dont le rôle est essentiel dans ce texte d'origine parlementaire, a ici même, si l'on se réfère au compte rendu analytique du 9 octobre dernier, mais aussi dans la presse, pris - je rends hommage à son honnêteté - une position...

M. Yann Galut.

Il a dit que c'était à titre personnel !

M. Pierre Lellouche.

Je vous en prie, mon cher collègue, il s'agit d'une affaire importante ...

M. Yann Galut.

Vous nous faites perdre du temps !

M. Pierre Lellouche.

... que nous devrions être capables de régler sans nous jeter des anathèmes, ni nous faire des procès idéologiques.

Je vous demande simplement de m'écouter quelques instants.

Je constate que la ligne du Gouvernement est claire. Je constate également que le rapporteur, auteur de la loi, est l'une des principales personnalités qui, dans ce pays, ont fait évoluer le droit depuis un certain nombre d'années.

Nous avons rendu hommage à son action pour mettre fin aux discrimination envers les homosexuels dans le code pénal.

M. Jean-Pierre Blazy.

Hommage hypocrite !

M. Pierre Lellouche.

M. Michel a dit et écrit, à plusieurs reprises, qu'il n'était pas du même avis que

Mme Guigou,...

Plusieurs députés du groupe socialiste.

C'est son droit !

M. Pierre Lellouche.

... qu'il ne partageait pas son analyse, qui est également la mienne, à savoir qu'un enfant a besoin des deux piliers structurants que sont un père et une mère. D'autres dans ce pays pensent autrement.

Vous venez de nous dire, madame la ministre, la porte n'était pas ouverte, et que, dans ces conditions, il n'était pas utile de la fermer. Autrement dit, il n'y a lieu ni d'en débattre, ni de l'écrire dans la loi.

A cela, je répondrai que, sur le plan du droit, compte tenu de l'équilibre général de votre texte - même si nous n'avons pas réussi à obtenir de vous une clarification sur sa dimension philosophique exacte - statut ou codification d'une relation privée ? -, il n'en demeure pas moins, comme vous venez de le dire, que vous placez les couples sur le même pied, sauf pour ce qui est de la filiation.

Comme Patrick Devedjian l'a dit hier, le problème du droit qui nous est posé est très simple : comment pourrez-vous interdire aux couples homosexuels, que vous reconnaissez dans ce texte, un droit qui existe pour les couples hétérosexuels, et même pour tout individu, aux termes de l'article 343 du code civil ? Voilà la question ! Les exemples étrangers - l'exemple suédois est le plus frappant - nous montrent qu'inévitablement, au nom du principe d'égalité, et sans parler même de la position de M. Michel et de ceux qui pensent comme lui dans ce pays - les tribunaux, quoi que vous nous disiez, vous contraindront peu à peu à normaliser ce droit à l'adoption.

M. Jacques Myard.

Bien sûr !

M. Pierre Lellouche.

Si on pense comme M. Michel, on peut s'en réjouir. Si, à l'inverse, votre position - qui est également la nôtre - est différente, alors je vous demande, madame la ministre, de bien vouloir l'écrire dans la loi.

Plusieurs députés du groupe socialiste.

Mais c'est déjà dans la loi !

Mme Yvette Roudy.

C'est dans la loi sur la bioéthique !

M. Jean-Pierre Blazy.

Exactement !

M. Pierre Lellouche.

Il est absolument nécessaire de l'écrire dans le texte que nous examinons. Sinon nous n'en parlerions pas ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jacques Myard et M. Richard Cazenave.

C'est indispensable !

M. Pierre Lellouche.

Qu'est-ce qui vous gêne, mes chers collègues ?

M. le président.

Monsieur Lellouche, votre temps de parole est épuisé. Veuillez conclure, je vous prie.

M. Pierre Lellouche.

Je terminerai par une simple remarque de bon sens : si, dans cette assemblée, à l'exception de M. Michel, nous sommes tous d'accord sur le fond, alors écrivons ensemble - que la commission des lois ou le Gouvernement présente un amendement ! que ce texte ne s'applique pas à la filiation et exclut, explicitement, l'adoption. Si vous ne l'écrivez pas, vous l'autoriserez.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson.

Mes chers collègues, il y a deux problèmes : la PMA et l'adoption.

En ce qui concerne l'adoption, il faut rappeler que la loi ne l'interdit pas aux célibataires - le rapporteur l'a d'ailleurs rappelé. Mais, lorsque les enquêtes sociales révèlent que la personne qui demande à adopter est homosexuelle, l'adoption n'est pas admise. Il y a donc une exclusion de fait. Le rapporteur a cependant cité des cas où l'enquête sociale n'ayant pas permis de connaître la réalité, il y a eu adoption par des célibataires homosexuels. Ce vide juridique me paraît tout à fait anormal.

Mes chers collègues, je voudrais vous rappeler les propos tenus par le rapporteur le 9 octobre 1998 : « En ce qui concerne l'adoption, nous avons entendu au sein de la commission spéciale dont vous étiez le rapporteur, monsieur Mattei, et dont je faisais également partie, deux pédopsychiatres. J'ai relu le compte rendu de leur audition. La question a été posée de savoir si éventuellement des couples non mariés pouvaient adopter. Mme Neiertz avait déposé un amendement qui tendait à donner cette possibilité aux couples non mariés hétérosexuels » - c'est d'ailleurs déjà la situation - « Moi, j'en avais déposé un autre dont le champ était beaucoup plus large et laissait présager le PACS. Les deux psychiatres nous ont expliqué qu'elles ne pouvaient pas faire de réponse d'ordre général.

En effet, pour certains enfants adoptés par des couples hétérosexuels, c'est la catastrophe, alors que pour d'autres enfants adoptés par des célibataires ou par des couples homosexuels, soit parce que ceux-ci ont caché le fait qu'ils vivent en couple - il s'agit le plus souvent de femmes -, soit parce que le tribunal ou la personne chargée de l'enquête ont fermé les yeux » - c'est regrettable, mais c'est ainsi -, « cela se passe très bien. » Cela peut

aussi se passer très mal.

Le rapporteur n'a jamais caché dans la discussion générale ou en commission qu'il était favorable à l'adoption des « pacsistes » homosexuels. Or, disons-le explicitement, l'immense majorité des membres de cette assemblée, à gauche comme dans l'opposition, est défavorable au droit d'adoption pour les « pacsistes homosexuels ».


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J'ajouterai un argument supplémentaire : le nombre d'enfants adoptables en France est très limité. Ouvrir le droit d'adoption à des « pacsistes » homosexuels, c'est priver des couples hétérosexuels du droit d'adoption.

(Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Eh oui, mes chers collègues !

Mme Frédérique Bredin.

Ce que vous dites est inadmissible !

M. Charles de Courson.

Et comme à peine un tiers des adoptions en France est le fait d'enfants français, cela signifie que la demande est considérable. Je vous rappelle que 5 % des femmes et 5 % des hommes sont stériles ; autrement dit que 10 % des couples ne peuvent pas avoir d'enfant par des moyens naturels.

Il faut donc voter explicitement la règle selon laquelle les « pacsistes » homosexuels sont exclus du droit à l'adoption.

M. le président.

Monsieur de Courson, veuillez conclure.

M. Charles de Courson.

Pour finir, j'évoquerai très rapidement la PMA.

M. le président.

Votre temps de parole est écoulé, monsieur de Courson.

M. Charles de Courson.

Je serai très rapide.

M. le président.

Les mesures électroniques du temps de parole et le chronométrage manuel, comme on faisait dans le temps pour les courses à pied, indiquent que vous avez épuisé votre temps de parole.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Charles de Courson.

Je conclus sur la PMA, monsieur le président.

De la même façon, il faut exclure explicitement les pacsistes homosexuels du bénéfice de la PMA, ce qui ne devrait pas poser de problème puisque la loi sur la bioéthique le fait déjà.

M. Jean-Pierre Blazy.

Alors, que demandez-vous de plus ?

M. Charles de Courson.

Qui peut le plus, peut le moins ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Claude Goasguen.

M. Claude Goasguen.

La déclaration que vient de faire la garde des sceaux prend incontestablement en considération un problème crucial et qui est, de toute évidence, au centre d'un débat de société. Dans l'incertitude actuelle de la jurisprudence, cette déclaration ne sera pas neutre.

M. Yann Galut.

Exactement : elle sera analysée par les juges.

M. Alain Calmat.

Très juste !

M. Claude Goasguen.

A contrario, la déclaration de notre rapporteur atténue le caractère très clair de la déclaration de Mme la garde des sceaux.

M. Jean-Pierre Brard.

Qui est membre du Gouvernement ? Le rapporteur ou la ministre ?

M. Claude Goasguen.

Si nous sommes fondamentalement d'accord sur les limites que nous entendons poser au droit d'adoption par les homosexuels, nous disposons pour le faire de deux méthodes. La vôtre me paraît soumise à une évolution aléatoire. La nôtre, hors de tout esprit polémique, est beaucoup plus sûre. Elle se fonde surt ce qu'a déjà fait le législateur de 1994 à propos de la PMA. Je salue au passage la présence de Philippe Douste-Blazy, auteur de la loi.

La loi sur la PMA a fixé les limites de la procréation médicalement assistée en précisant qu'elle doit avoir pour but de remédier à l'infertilité pathologique d'un couple.

Elle en élimine par nature le recours pour les couples homosexuels. Je vous demande de faire aujourd'hui la même démarche législative, ce qui n'est pas plus difficile.

Je me permettrai simplement de vous lire trois lignes d'un avis d'un commissaire du gouvernement au Conseil d'Etat - les conseillers d'Etat sont suffisamment nombreux ici pour apprécier cette littérature. Avec une clarté absolue, ce qui n'est pas toujours le cas, le commissaire du Gouvernement souligne que « le droit de recourir à l'adoption ou aux techniques de procréation médicalement assistée ne peut donc, en aucune façon, être considéré comme une composante normale de la liberté sexuelle ».

Je ne peux dire mieux, et je vous demande donc de confirmer par la voie législative cette jurisprudence du Conseil d'Etat, qui contient une demande explicite adressée au législateur. Je vous demande d'être clairvoyant quant à l'évolution des tribunaux. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. Yann Galut.

Nous le sommes dans le débat luimême !

M. le président.

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme la garde des sceaux.

Monsieur Goasguen, permettez-moi, sur un sujet aussi important, de vous répondre tout de suite.

D'abord, vous avez bien voulu prendre acte que la déclaration que je viens de faire, qui confirme les propos que j'ai tenus dans mon discours introductif, et à nouveau ce matin, comptera, car les débats parlementaires comptent.

Plusieurs députés du groupe socialiste.

Exactement !

M. Arnaud Lepercq.

C'est ce que nous disons !

Mme la garde des sceaux.

Si les débats parlementaires comptent pour les juges, et c'est heureux, je vous demande de reconnaître aussi que si le rapporteur a pu exprimer en dehors de cette enceinte son opinion personnelle - et il en a le droit : le délit d'opinion n'existe pas dans notre pays -, jamais, en tant que de rapporteur, il n'a pris position pour l'adoption par les couples homosexuels.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Pierre Lellouche.

C'est faux !

Mme la garde des sceaux.

Ici, jamais ! (Protestationss ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Charles de Courson.

Il l'a dit partout !

M. Thierry Mariani.

Oui, monsieur Michel !

M. le président.

S'il vous plaît, chers collègues, je vous demande de laisser parler Mme la ministre.

Mme la garde des sceaux.

Quant à la loi sur la procréation médicalement assistée, qui est en effet une bonne loi, elle n'a jamais posé d'interdictions : elle a dit qui


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

pouvait recourir à la PMA. Elle n'a pas dit que, selon qu'on a les yeux bleus ou noirs, que l'on est noir ou blanc, on peut ou on ne peut pas y recourir.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Thierry Mariani.

Caricature !

Mme la garde des sceaux.

Enfin, la jurisprudence du Conseil d'Etat que vous avez citée n'a pas non plus procédé par interdiction. Elle a procédé par définition positive.

S'agissant d'un sujet aussi important, puisqu'il touche au droit de la famille, je souhaite que nous en traitions dans le cadre de la réforme du droit de la famille.

M. Michel Bouvard.

On aurait dû commencer par là !

Mme la garde des sceaux.

A cette occasion, le Gouvernement s'engage à préciser les conditions de l'adoption.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Sur le vote de l'amendement no 553...

Mme Véronique Neiertz.

J'ai demandé la parole !

M. le président.

Je vais vous la donner, madame Neiertz.

Auparavant, j'informe l'Assemblée que, sur l'amendement no 553, je suis saisi par le groupe Démocratie libérale et Indépendants d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à Mme Véronique Neiertz.

M. Patrick Devedjian.

Et le rapporteur ?

M. Thierry Mariani et M. Michel Bouvard.

On n'a pas entendu l'avis du rapporteur ! Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République.

Donnez la parole au rapporteur !

M. Patrick Devedjian.

Je souhaite répondre à la ministre !

Mme Véronique Neiertz.

Nous venons d'entendre des arguments relatifs à des problèmes cruciaux que pose le texte et qui portent sur la possibilité d'adopter ou d'avoir recours à la procréation médicalement assistée.

Je regrette vivement l'absence de M. Mattei, qui a présidé la commission spéciale relative à la loi sur la bioéthique et celle concernant la loi sur l'adoption, commission dont je faisais partie et où j'étais la porte-parole du groupe socialiste.

M. Richard Cazenave.

Et nous, nous n'avons rien fait peut-être ?

Mme Véronique Neiertz.

Je tiens en effet à souligner deux aspects du texte qui s'inscrivent dans le cadre des lois sur la bioéthique et sur l'adoption, lois que vous avez votées, mes chers collègues de l'opposition.

Je voudrais notamment appeler votre attention sur l'amendement no 534 de M. Mattei, amendement qui règle totalement la question de la procréation médicalement assistée. Dans l'exposé sommaire de son amendement, notre collègue précise que l'interdiction pour les couples homosexuels d'avoir recours à la PMA n'a pas besoin d'être inscrite dans le présent texte...

M. Claude Goasguen.

Je l'ai dit !

Mme Véronique Neiertz.

... dans la mesure où l'article

L. 152-2 du code de la santé publique précise que la PMA est réservée, pour des raisons médicales, à la demande d'un couple constitué d'un homme et d'une femme.

M. Michel Bouvard.

C'est exactement ce qu'a dit M. Goasguen !

M me Véronique Neiertz.

Cette disposition de l'article L.

152-2, sur lequel nous n'avons pas déposé d'amendement, fait partie de la loi bioéthique et fait donc jurisprudence.

M. Pierre Lellouche.

Mais qui êtes-vous pour le dire ?

Mme Véronique Neiertz.

Je suis parlementaire comme vous, mais j'ai étudié la question un peu plus que vous.

(Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

D'ailleurs, le professeur Mattei est de mon avis puisque je suis en train de faire référence à l'un de ses amendements.

M. Jacques Myard.

Prétentieuse !

Mme Véronique Neiertz.

En ce qui concerne l'adoption, je note que si le professeur Mattei demande à ce qu'elle soit interdite à deux personnes du même sexe, il ne réclame pas, en revanche, que soit modifié l'article du code civil qui accorde ce droit aux célibataires. Nous non plus, d'ailleurs, et nous n'avons pas déposé d'amendement tendant à modifier à ce propos la loi sur l'adoption...

M. Yves Fromion.

Evidemment !

Mme Véronique Neiertz.

... que vous avez votée en 1996, et qui fait non seulement force de loi mais aussi jurisprudence.

M. Patrick Devedjian.

N'importe quoi !

Mme Véronique Neiertz.

Nous n'avons donc pas à tenir compte d'une déclaration qui a été faite à titre individuelle ou de déclarations qui ne tiennent pas compte de lois en vigueur, adoptées lorsque vous étiez la majorité et que nous ne proposons pas de modifier. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République ; du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Sur les cinq amendements restant en discussion, trois font l'objet d'une demande de scrutin public. Je viens en effet d'être saisi à l'instant par le groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance d'une demande de scrutin public sur les amendements nos 492 et 675.

Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Les amendements nos 420 et 534, quant à eux, feront l'objet d'un vote à main levée.

Je rappelle que j'ai déjà fait annoncer le scrutin sur l'amendement no 553.

Vous savez que nous devons respecter un délai réglementaire de cinq minutes entre l'annonce d'un scrutin et le scrutin lui-même. Une minute trente s'est déjà écoulée


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

depuis que j'ai fait annoncer les scrutins sur les amendements. Je vous invite donc à patienter encore trois minutes trente.

....................................................................

M. le président.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été cou plés à cet effet.

Je mets aux voix l'amendement no 492.

Le scrutin est ouvert.

....................................................................

M. le président.

Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin : Nombre de votants ...................................

379 Nombre de suffrages exprimés .................

379 Majorité absolue .......................................

190 Pour l'adoption .........................

136 Contre .......................................

243 L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

(« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean-Pierre Brard.

La droite est enfoncée !

M. Jean-Louis Debré.

Monsieur le président...

M. le président.

Plus tard, monsieur Debré ! Je mets maintenant aux voix l'amendement no 675.

Le scrutin est ouvert.

....................................................................

M. le président.

Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin : Nombre de votants ...................................

381 Nombre de suffrages exprimés .................

381 Majorité absolue .......................................

191 Pour l'adoption .........................

136 Contre .......................................

245 (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

Je mets aux voix l'amendement no 420.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 534.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je vais enfin mettre aux voix l'amendement no 553.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

Je vous ai rappelé précédemment les règles relatives à la procédure des scrutins publics. Je ne les répéterai donc pas.

Le scrutin est ouvert.

....................................................................

M. le président.

Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin : Nombre de votants ...................................

378 Nombre de suffrages exprimés .................

378 Majorité absolue .......................................

190 Pour l'adoption .........................

135 Contre .......................................

243 L'Assemblée nationale n'a pas adopté. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) Rappel au règlement

M. Jean-Louis Debré.

Rappel au règlement !

M. le président.

La parole est à M. Jean-Louis Debré, pour un rappel au règlement.

M. Jean-Louis Debré.

Monsieur le président, j'aurais voulu m'exprimer plus tôt, mais vous n'avez pas voulu me donner la parole.

Sur les amendements, nous avons entendu le Gouvernement ; très bien. L'opposition a pu s'exprimer ; très bien. Mais la règle veut que l'on demande à la commission de donner son avis. Or, monsieur le président, je ne vous ai pas entendu lui demander, avant que nous ne procédions aux différents votes, quelle était sa position ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Mme Véronique Neiertz.

Vous n'étiez pas là !

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

M. Debré pourra se référer au compte rendu de nos débats et il verra que le rapporteur de la commission s'est exprimé juste avant le Gouvernement. (« Non ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.) Reprise de la discussion

M. le président.

MM. Accoyer, Jacob et Muselier ont présenté un amendement, no 708, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil par la phrase suivante : "Toutefois, lorsque une personne ayant obtenu la garde d'un enfant à l'issu d'un jugement de divorce conclut un pacte civil de solidarité avec un signataire de même sexe, elle perd automatiquement la garde de cet enfant". »

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Monsieur le président, j'appelle votre attention sur la gravité du sujet dont nous discutons actuellement. A ce propos, je reviendrai dans quelques instants sur l'opinion du rapporteur quant à la question de l'adoption par les couples homosexuels.

M. Michel Bouvard.

C'est ce que veut le rapporteur : l'adoption !

M. Bernard Accoyer.

L'amendement no 708 est un amendement de clarification indispensable, surtout après la déclaration que vient de faire Mme la garde des sceaux.

Cet amendement prévoit que, lorsqu'une personne ayant obtenu la garde d'un enfant à l'issue d'un jugement de divorce contracte un PACS avec une personne de


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même sexe, cette garde puisse lui être retirée. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Patrick Bloche, rapporteur pour avis.

Scandaleux !

M. Michel Bouvard.

Ce sont vos réactions qui sont scandaleuses !

M. Albert Facon.

Et les vôtres donc !

M. Bernard Accoyer.

Le fait qu'un tel amendement puisse être déposé et discuté témoigne de l'impréparation de ce texte. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Permettez-moi de vous rappeler, mes chers collègues, qu'à la tribune le rapporteur de la commission des lois, Jean-Pierre Michel, a confirmé sa position sur l'adoption par les couples homosexuels, position dont il a fait état publiquement à plusieurs reprises. Et s'il ne l'a pas toujours répété, il a annoncé ce qui, selon lui, se passerait inéluctablement.

Je citerai une dépêche de l'AFP du 6 octobre, qui reprend les propos de Jean-Pierre Michel : « A partir du moment où des gens seront engagés dans un PACS, on ne pourra plus - dans combien de temps ? je n'en sais rien - refuser à ces couples-là ce qu'on refuse aujourd'hui par la loi aux simples concubins qui vivent en union libre,...

M. Patrick Ollier.

Eh voilà !

M. Bernard Accoyer.

... c'est-à-dire la possibilité d'adopter. »

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Michel Bouvard.

Voilà ce que pense la majorité !

M. Patrick Ollier.

C'est ce qui se passe en Suède !

M. Bernard Accoyer.

Ce texte, madame la garde des sceaux, aurait dû être l'occasion de mettre un terme à une jurisprudence qui pose un réel problème au regard de l'adoption par les homosexuels célibataires car, que je sache, le pacsé demeure un célibataire. A ce sujet, la jurisprudence est très claire : un arrêt du Conseil d'Etat, en date du 18 février 1994, précise que, si l'adoption d'un enfant par un couple homosexuel est refusée, les candidatures émanant de personnes célibataires homosexuelles ne doivent pas être systématiquement rejetées. (« Et voilà ! »s ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Bien...

M. Bernard Accoyer.

Monsieur le président, nous sommes au coeur du débat, en son point cardinal (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert),...

M. Christian Jacob.

Tout à fait !

M. Bernard Accoyer.

... comme l'a dit Mme la ministre.

Si un parent qui a la charge d'un ou plusieurs enfants décide de contracer un PACS avec une personne de même sexe, le texte permettra, madame la garde des sceaux, de créer la famille d'un type nouveau, que vous n'avez cessé de condamner - sur ce point, nous sommes d'accord avec vous - c'est-à-dire la famille, si on peut la qualifier ainsi, composée d'un papa et une maman de même sexe. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Et ce type de famille, personne n'en veut.

Nous ne pouvons pas adopter un texte qui ne serait pas clair sur ce point.

Entendons-nous bien. Avec cet amendement, la garde par un parent resterait la règle. Mais, dans ce cas, la conclusion d'un PACS serait interdite.

Mme Raymonde Le Texier.

Quelle horreur !

M. Bernard Accoyer.

Les psychologues, les pédiatres, les scientifiques, les médecins, notamment les pédopsychiatres, insistent sur la nécessité pour l'enfant d'avoir un cadre familial avec un père et une mère de sexe différent, car l'enfant s'identifie à ses parents et tout son équilibre en dépend. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Enfin, madame la garde des sceaux, l'indivision, qui régit dans le cadre du PACS les droits successoraux, ne manquera pas de porter un préjudice majeur aux enfants.

En effet, le nouveau partenaire pacsé avec un parent pourra faire irruption dans l'indivision parentale, et c'est inacceptable. C'est la raison pour laquelle il faut adopter notre amendement. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Je ferai un petit retour en arrière en précisant que, tout à l'heure - le compte rendu en fera foi -, j'ai donné l'avis du rapporteur de la commission. Par ailleurs, je remercie de ses propos Mme la ministre.

Cela dit, sur le texte qui nous occupe aujourd'hui dans cette enceinte, je ne me suis jamais départi du rôle de rapporteur de la commission des lois, et je n'ai rien dit qui soit contraire ni à la position de la majorité ni à la position du Gouvernement sur la question de l'adoption et de la PMA.

M. Alain Barrau.

Très bien !

M. Robert Lamy.

Et ailleurs ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

En revanche, j'ai, comme vous, le droit de m'exprimer à titre personnel, et ce même si mes opinions diffèrent des vôtres.

(Assentiment sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste.)

J'en viens à l'amendement de M. Accoyer, amendement que je trouve scandaleux.

M. Alain Barrau.

Très juste !

M. Michel Bouvard.

Ce sont vos positions qui sont scandaleuses !

M. Patrick Bloche, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

C'est un amendement honteux !

M. Alain Tourret.

Ecoeurant même !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Cet amendement est scandaleux parce qu'il limite arbitrairement et automatiquement les pouvoirs du juge. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Michel Bouvard.

La loi se fait ici, pas dans les palais de justice !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La perte de la garde d'un enfant est automatique uniquement lorsque le juge a décidé de lever les pouvoirs d'autorité parentale. Dans tous les autres cas, notamment dans celui que vous avez cité, si, lorsqu'un parent ayant la garde d'un enfant conclut un PACS avec une personne de même sexe, l'autre parent saisit le juge pour modification de garde, ce dernier aura toujours la possibilité d'attribuer la garde au parent demandeur, celle-ci n'étant jamais définitivement attribuée à un parent. Personnellement, je trouverais que ce serait un peu scandaleux. Mais ce serait possible.

Dire que cela sera automatique revient à faire obstacle de façon scandaleuse aux pouvoirs du juge. Or je pense que, en toute matière, il faut laisser au juge un large pouvoir d'appréciation. C'est la raison pour laquelle je demande à l'Assemblée de repousser votre amendement.

M. Patrick Bloche, rapporteur pour avis.

Bravo !

M. Michel Bouvard.

A quoi servons-nous ? Le rapporteur confond les pouvoirs des juges et ceux des parlementaires !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Cet amendement révèle une méconnaissance absolue de l'évolution de la législation sur l'autorité parentale. Le seul critère à prendre en considération est l'intérêt de l'enfant, qu'il appartient en effet au juge, comme vient de le dire Jean-Pierre Michel, d'apprécier selon les circonstances. Toute autre solution constituerait un retour en arrière par rapport à la jurisprudence civile de ces dernières années, qui ne retire pas l'autorité parentale qui a eu un enfant dans le cadre d'un couple hétérosexuel mais fait ensuite un autre choix de vie et vit avec un partenaire homosexuel.

J'ai dit dans mon discours introductif de la façon la plus nette que, lorsqu'on a eu un enfant, lorsqu'on est père ou mère, il faut le rester pour cet enfant pour le reste de son existence.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) En outre, une telle attitude nous ramène à l'époque où la garde de l'enfant était liée au comportement supposé fautif de l'un des parents par rapport à l'autre.

Monsieur Accoyer, signer un PACS n'est pas un péché au regard de nos lois laïques.

M. Bernard Roman.

Très bien !

Mme la garde des sceaux.

Un tel amendement est à mes yeux non seulement inconstitutionnel, mais proprement honteux et scandaleux ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la Démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Yves Fromion.

Vous êtes dans une impasse juridique !

M. Bernard Birsinger.

C'est un amendement inhumain !

M. le président.

La parole est à M. Guy Hascoët, contre l'amendement.

M. Guy Hascoët.

En lisant cet amendement, je me suis demandé quelle intention il traduisait.

Il révèle en effet en profondeur quelque chose que je ne pensais pas voir apparaître dans ce débat. Vous visez des situations réelles, et je ne reviens pas sur les explications juridiquement justes de M. Goasguen, mais l'amendement aboutirait en fait à retirer à des personnes qui sont dans la situation que Mme Guigou a décrite la garde de l'enfant que le juge, appréciant la situation, leur a confiée.

Cela signifie qu'au nom d'une morale vous prétendez utiliser un pouvoir politique pour punir et faire souffrir des gens, sans aucun fondement autre que l'objectif de l'expiation.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Michel Bouvard.

Vous vous moquez des enfants ! Pour vous, ils ne servent qu'à taxer !

M. Bernard Birsinger.

Un amendement comme ça on n'en discute pas, on le combat !

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Je m'attendais à ce que cet amendement suscite un débat. Je vois que celui-ci est particulièrement enflammé ; il démontre l'impréparation de ce texte, qui a un certain nombre de conséquences.

Ce qui doit nous réunir, c'est avant tout l'intérêt de l'enfant.

(« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

Il n'est pas question de revenir sur le droit actuel,...

M. Bernard Roman.

Si !

M. Bernard Accoyer.

... mais de mesurer l'incidence de l'introduction du PACS dans notre code civil sur le maintien de la cellule familiale et des encouragements que la nation lui décerne par des avantages financiers, fiscaux et sociaux, afin que cette cellule familiale reste, comme l'a dit Mme la ministre, essentiellement constituée par un père et une mère de sexe différent.

M. Michel Bouvard.

Très bien !

M. Patrick Bloche, rapporteur pour avis.

Vous vous enfoncez !

M. Bernard Accoyer.

Il ne faut pas déformer les propos que j'ai tenus, ni le sens de cet amendement. Il existe aussi des dispositions pour protéger les enfants qui n'ont, hélas, qu'un père ou une mère. Les dispositions du code de la famille ont prévu des prestations sociales spécifiques et des avantages, qui sont certes insuffisants, mais qui ont le mérite d'exister.

Il ne faut donc pas donner à cet amendement un sens qu'il n'a pas. Il vise en réalité à montrer que votre texte ne défend pas l'intérêt de l'enfant.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement no 708.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements, nos 18 et 278, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 18, présenté par M. Besselat, est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil par l'alinéa suivant :

« L'enfant conçu pendant un PACS a pour père le partenaire masculin. Les dispositions du chapitre 2 du présent code lui sont applicables. »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

L'amendement no 278, présenté par M. Mariani, est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil par l'alinéa suivant :

« L'enfant conçu après la conclusion d'un pacte civil de solidarité a pour père le partenaire masculin. »

L'amendement no 18 est-il défendu ?

M. Bernard Accoyer.

Oui, monsieur le président.

M. le président.

La parole est à M. Thierry Mariani, pour soutenir l'amendement no 278.

Mme Yvette Roudy.

Cet amendement est scandaleux !

M. Thierry Mariani.

Quels que soient les cris sur les bancs de la majorité plurielle, qu'il s'agisse du PACS I, du PACS II, du CUCS ou du PIC, il y a un seul absent, les droits de l'enfant.

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Bernard Roman.

Certains de vos amis se disent choqués par vos amendements !

M. le président.

Poursuivez, monsieur Mariani ! Votre temps de parole s'écoule.

M. Thierry Mariani.

M. Roman m'interrompt sans cesse. Qu'il souffre que je puisse m'exprimer !

M. le président.

Vous avez les nerfs assez solides pour ne pas répondre aux provocations : continuez !

M. Jean-Pierre Brard.

Un vrai disque, Mariani !

M. Jean-Pierre Blazy.

Toujours la même chose !

M. Thierry Mariani.

Cet amendement, comme les amendements précédents défendus par l'opposition, tend à faire en sorte que l'enfant trouve son compte dans le texte concernant le PACS.

Je vous propose de compléter le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil par l'alinéa suivant :

« L'enfant conçu après la conclusion d'un pacte civil de solidarité a pour père le partenaire masculin. » Cette

rédaction vous fait peut-être sourire mais Mme la garde des sceaux a dit tout à l'heure que le PACS s'arrêtait là où commençait la famille. Et j'aimerais savoir, en l'occurrence, s'il s'arrête juste avant ou juste après.

Cet amendement est essentiel. Il vise une fois de plus à protéger le plus faible, c'est-à-dire l'enfant. Des droits et des avantages sont conférés aux personnes qui ont conclu un PACS. Dans la mesure où ces avantages sont très proches de ceux que procure le mariage, il n'y a aucune j ustification pour que certaines obligations liées au mariage ne soient pas reprises dans le PACS.

La présomption de paternité, et ce n'est pas un détail, est un des facteurs les plus protecteurs de l'enfant en cas de mariage. Dans la mesure où le PACS s'adresse aussi aux couples hétérosexuels, qui auront des réductions d'impôts en application de ce texte, la moindre des choses, madame la ministre, monsieur le rapporteur, est de leur demander qu'ils reconnaissent au moins les enfants qui naîtront de cette union. Cela ne me semble ni farfelu, ni provocateur : c'est à mon sens indispensable pour les enfants qui naîtront dans le cadre des PACS.

Ce qui nous différencie, c'est que vous n'avez à l'esprit qu'une chose : donner des droits nouveaux fondés sur le seul amour que se portent les gens, tandis que nous, nous voulons que ces droits soient subordonnés à l'accomplissement de certaines obligations bénéfiques à la société tout entière.

Visiblement, le sort des enfants dans le cadre du PACS n'est pas l'une de vos principales préoccupations (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), comme en témoigne l'absence de l'enfant de ce texte. Mais trouvezvous normal que, si deux personnes de sexe différent ont signé un PACS, il n'y ait pas obligatoirement une reconnaissance de la présomption de paternité ? Par ailleurs, la mère pacsée pourra-t-telle continuer à percevoir l'allocation de parent isolé ?

M. le président.

Nous allons le savoir, monsieur Mariani...

M. Thierry Mariani.

Nous ne sommes pas encore entrés dans le débat sur les prestations sociales, mais il serait p aradoxal qu'on puisse signer un PACS, bénéficier d'avantages fiscaux et de certains avantages sociaux sans être obligé de reconnaître l'enfant.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur les deux amendements ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Mes chers collègues, je crois que l'intérêt de l'enfant, auquel nous sommes tous également attachés, du moins je le suppose, devrait nous inciter à tenir des propos plus mesurés que ceux qu'ont tenus MM. Accoyer et Mariani.

La commission des lois a repoussé ces amendements.

Vous voulez en effet nous faire dire à tout prix que le PACS serait un sous-mariage ou un mariage bis.

(« Oui ! »s ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Ce n'est pas le cas ! Il n'y a pas donc lieu de prévoir une présomption de parternité.

M. Pierre Lellouche.

Il n'y a qu'à les stériliser !

M. Jean-Pierre Brard.

Ce que vous dites est odieux !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

D'ailleurs, chers collègues de l'opposition, c'est grâce à vos prédécesseurs, lorsqu'ils étaient la majorité, et notamment grâce à notre ancien collègue Pierre Mazeaud - qui était le rapporteur de ce texte et qui s'est opposé au garde des sceaux de l'époque, Jean Foyer, qui était beaucoup moins libéral que lui en la matière - que, du fait de la loi du 31 janvier 1972, tous les enfants, dans ce pays, quels que soient les conditions de leur naissance et le statut de leurs parents au moment où ils naissent, ont les mêmes droits.

(« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

Heureusement !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Les enfants qui naîtront dans des couples ayant passé un PACS seront protégés par la loi sur la filiation.

M. Pierre Lellouche.

Quelle loi ?

M. Bernard Roman.

La loi de 1972 !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Ils porteront le nom de l'homme, s'il est le premier à les reconnaître, et ils porteront le nom de leur mère, si elle est seule à les reconnaître, parce que celui avec qui elle aura pacsé ne sera peut-être pas le père de l'enfant - après tout, cela arrive, et même dans les couples mariés.

Du point de vue de l'intérêt de l'enfant, le PACS est donc totalement neutre. Mais relisez les débats de l'époque : vous verrez que les joutes oratoires entre Pierre Mazeaud et Jean Foyer étaient « gratinées ».


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

Grâce à la loi de 1972, tous les enfants, dans ce pays, sont sur un pied d'égalité, mis à part une petite réserve concernant les droits de succession des enfants adultérins.

La commission est donc opposée à l'adoption de ces amendements. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement sur les deux amendements ?

Mme la garde des sceaux.

Identique à celui du rapporteur.

Je répète, car je l'ai déjà dit ce matin, que, le PACS n'étant pas le mariage, il n'est pas question de lui transposer la présomption de paternité du mari de la mère d'un enfant légitime.

M. Thierry Mariani.

Et l'enfant ? Qui aura-t-il comme père ?

M. Patrick Bloche, rapporteur pour avis.

Celui qui l'aura reconnu !

Mme Véronique Neiertz.

Celui qui aura pris ses responsabilités !

M. Thierry Mariani.

C'est une vraie question !

M. Bernard Roman.

Et vous avez eu une vraie réponse !

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Tous les amendements que nous venons d'examiner successivement tournent autour de la question des enfants : adoption, garde, paternité. Et M. le rapporteur comme Mme la ministre ont développé des arguments dont certains ne laissent pas de nous étonner.

M. le rapporteur a ainsi estimé il y a quelques instants qu'un amendement de notre collègue Accoyer était inacceptable car il limitait le pouvoir du juge.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Il a été repoussé !

M. François Goulard.

Est-ce que la loi se verrait interdire de limiter le pouvoir d'un juge ? A mon avis - mais ma conception est peut-être exagérément classique -, le juge tient son pouvoir de la loi. Mais il est loisible à tout instant au législateur d'encadrer le pouvoir du juge, qui n'est là que pour appliquer la loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

De temps à autre, il convient de rappeler des vérités élémentaires.

Mme la ministre nous a dit que nous avions raison en ce qui concerne l'adoption et que son point de vue rejoignait le nôtre, mais qu'il était inutile de mentionner cette précision dans la loi. Et certains de nos collègues ont cru devoir nous rappeler, mais nous le savons tous, que les discussions en séance publique servent à éclairer l'interprétation de la loi de manière subsidiaire. Nous ne comprenons toujours pas pourquoi il n'est pas opportun d'écrire noir sur blanc ce sur quoi, à l'exception d'ailleurs remarquée de M. le rapporteur, nous sommes tous d'accord.

M. Jacques Fleury.

Il ne s'agit plus des amendements !

M. Patrick Bloche, rapporteur pour avis.

Cette remarque est juste, monsieur le président !

M. François Goulard.

Mme la ministre nous a annoncé que toutes ces questions seraient traitées dans une loi à venir, ce qui exclut que nous en traitions dans celle-ci.

M. Jacques Fleury.

Tout cela a déjà été dit !

M. François Goulard.

Nous voyons bien que, sur chacun de ces sujets, la même question est posée. Vous pouvez estimer qu'elle est réglée ; nous, nous pensons qu'elle ne l'est pas.

Mais ce qui ressort finalement de nos débats - et c'est le trait dominant depuis quelques jours -, c'est que ce texte a été mal préparé. Il a été mal rédigé à l'origine. Je n'hésite pas à le dire : il a été bâclé ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. Jacques Fleury.

Hors sujet !

M. le président.

M. Goulard va conclure.

M. François Goulard.

Le Gouvernement a fait le choix de ne pas présenter un projet de loi. Il a fait le choix de faire venir devant notre assemblée, de manière subreptice, une proposition de loi qui avait son aval. Mais, ce faisant, il a écarté la possibilité de préparer de manière sérieuse un texte de loi qui aurait suivi la procédure normale, et qui aurait en particulier été soumis à l'avis préalable du Conseil d'Etat, c'est-à-dire qu'il aurait été examiné par des juristes compétents.

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

C'est un texte d'origine parlementaire ! Vous êtes contre l'initiative parlementaire ?

M. François Goulard.

Au lieu de cela, nous avons un texte qui pose infiniment plus de problèmes qu'il n'entend en résoudre, et je pense que, jusqu'à la fin du débat, nous rencontrerons ce type de difficulté. Il faut que tous les Français sachent que nous faisons aujourd'hui de la très mauvaise législation. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

18. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 278.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

MM. Mariani, Masdeu-Arus et Doligé ont présenté un amendement, no 287, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil par l'alinéa suivant :

« Une même personne ne peut conclure un nouveau pacte qu'après 300 jours révolus depuis la dissolution du pacte précédent. »

La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Cet amendement est lui aussi gratiné !

M. Thierry Mariani.

Si j'ai bien compris, du fait du rejet de mon amendement précédent, les parents, et cela me semble grave, pourront signer un PACS, bénéficier d'avantages fiscaux, d'avantages sociaux, d'un rapprochement s'ils sont fonctionnaires, d'avantages en matière de succession, et l'enfant qui naîtra du PACS pourra être de père inconnu.

M. Pierre Lellouche.

Eh oui !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

C'est déjà le cas dans les couples mariés !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

M. Thierry Mariani.

Il fallait revenir sur ce point car nous avons entendu pendant des semaines la gauche nous asséner l'argument que le PACS allait permettre de protéger le plus faible, de protéger l'enfant.

Mais l'enfant, on l'a dit et redit, est totalement absent de ce texte. Et quand l'opposition vous propose de l'y faire figurer, vous refusez. Nous voyons bien que ce n'est pas votre préoccupation.

Par l'amendement no 287, je vais essayer, sans trop y croire, de vous permettre, madame la ministre, monsieur le rapporteur, de donner à cette stabilité tant évoquée dans la presse un début de réalisation. Peut-être paraîtrat-il un peu provocateur à certains sur vos bancs, mais il propose tout simplement qu'une même personne ne puisse conclure un nouveau pacte qu'après 300 jours révolus après la dissolution du pacte précédent.

Si l'on tient compte du délai de trois mois qui suivra la répudiation par lettre recommandée, on s'aperçoit q u'une personne peut théoriquement souscrire trois PACS dans l'année.

Monsieur le rapporteur, madame la présidente de la commission, peut-être ai-je mal compris le texte, et je ne demande qu'à être démenti, mais je vois mal comment vous pourriez vous opposer à ce qu'une personne signe trois PACS dans l'année.

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

C'est du délire !

M. Thierry Mariani.

L'amendement no 287 est un amendement de bon sens.

En effet, pour les couples hétérosexuels, on voit très bien l'intérêt d'une telle disposition en ce qui concerne les enfants et leur éventuelle reconnaissance, si celle-ci vous préoccupe. Il convient de protéger ces derniers, et cet amendement y contribue.

Pour les couples homosexuels, l'intérêt est ailleurs. Cet amendement vise à éviter la conclusion de PACS successifs, au gré des rencontres, et privilégie les relations suivies et durables, ce qui répond à l'une de leurs revendications.

Pour tous les couples, cet amendement vise à se prémunir contre les PACS blancs qui vont très certainement se développer et remplacer les mariages blancs.

Voilà pourquoi j'estime que vous ne pouvez pas traiter cet amendement par le mépris.

Est-il choquant, monsieur le rapporteur, après vous avoir entendu invoquer l'argument de la stabilité en faveur du PACS, de demander qu'on ne puisse pas conclure plus d'un PACS par an ou, à tout le moins, au cas où cet amendement serait repoussé, qu'on ne puisse pas conclure trois PACS dans l'année ?

M. Jean-Pierre Brard.

M. Mariani, député de Las Vegas !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a rejeté cet amendement pour les mêmes raisons que le précédent. Nous ne sommes pas dans le cadre du mariage, ni de la présomption de paternité. Il n'y a donc aucune raison d'imposer un délai de viduité.

M. Michel Bouvard.

Il y a un régime fiscal, tout de même !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Au surplus, monsieur Mariani, en ce qui concerne l'intérêt de l'enfant, il faut vraiment que vous révisiez la loi de 1972 et le code civil. Aujourd'hui, dans le cadre du mariage, il peut exister des enfants qui n'ont pas de père. Si le mari intente une action en désaveu de paternité et gagne le procès, l'enfant n'a pas de père.

M. Thierry Mariani.

C'est l'exception ! Vous ne prenez que des cas marginaux.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Vous regarderez le nombre de cas jurisprudentiels, monsieur Mariani.

Je vous propose donc, mes chers collègues, de repousser cet amendement.

M. Thierry Mariani.

Vous allez permettre trois PACS par an !

M. Bernard Roman.

Il peut y avoir dix concubinages par an !

M. le président.

Monsieur Mariani, vous n'avez plus la parole ! Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

J'ai dit ce matin que je m'opposerais à tout amendement qui opérerait une confusion entre le PACS et le mariage. C'est le cas de celui-ci. Par conséquent, j'y suis défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 287.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Baguet a présenté un amendement, no 493, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil par l'alinéa suivant :

« Les signataires d'un pacte civil conservent leur nom de famille. »

La parole est M. Léonce Deprez, pour soutenir cet amendement.

M. Léonce Deprez.

M. Baguet estime que les signataires d'un pacte civil doivent conserver leur nom de famille. C'est un amendement de bon sens, visant à éviter les confusions.

Mme la ministre a dit à plusieurs reprises, et nous l'avons noté avec intérêt, que le PACS s'arrête là où commence la famille. Mais il est évident qu'il y aura des enfants nés de couples hétérosexuels pacsés. Or, comme il a été décidé que les déclarations de PACS ne se feraient plus à la mairie ni à la préfecture, mais au greffe du tribunal, les tribunaux d'instance risquent d'être surchargés - ils le sont déjà - et ils pourront difficilement faire face aux problèmes d'état civil posés par ces enfants.

De plus, pour éviter toute confusion avec les mariages, il faut que les signataires d'un pacte civil conservent leur nom de famille.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a bien entendu repoussé cet amendement.

D'abord, « nom de famille », cela ne veut strictement rien dire en droit. Vous auriez dû écrire « nom patronymique ».

Ensuite, tout le monde conserve son nom patronymique, y compris les femmes mariées. Simplement, l'usage est qu'elles portent le nom de leur mari.

Quant à la transmission du nom, elle se fait uniquement selon les règles de la filiation. En l'occurrence, celles-ci s'appliqueront. Par conséquent, celui qui aura reconnu l'enfant le premier - on peut espérer que ce sera le père -...


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

M. François Vannson.

« On peut espérer » : ça ne coûte pas cher !

M. Pierre Lellouche.

Oui, curieuse conception du droit !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

... transmettra son nom à l'enfant. Aujourd'hui, dans le cadre du concubinage, quand la reconnaissance de la mère est antérieure à celle du père, les parents peuvent ensuite se mettre d'accord pour modifier l'état civil de l'enfant.

Donc, cet amendement n'a strictement aucun intérêt, et j'en propose le rejet.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Comme chacun le sait, depuis la loi du 6 fructidor an II disposant qu'« aucun citoyen ne pourra porter de nom ni de prénom autres que ceux exprimés dans son acte de naissance », le nom ne se perd pas.

M. Jean-Pierre Brard.

Rappelle-toi fructidor, Léonce ! (Sourires.)

Mme la garde des sceaux.

Il se change éventuellement, selon la loi du 11 germinal an XII, et, depuis 1993, selon l'article G 1 du code civil, pour intérêt légitime.

Il s'emprunte : c'est le nom d'usage selon l'article 264 du code civil.

Il s'ajoute, selon l'article 43 de la loi du 23 décembre 1985 relative à l'égalité des époux et des parents dans les régimes patrimoniaux : c'est l'usage du double nom.

Mais de perte, il n'est pas question, et il est donc inutile de vouloir rassurer les signataires d'un pacte civil, qui, é videmment, conservent pleinement leur état civil.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 493.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Mme Boutin et M. Dord ont présenté un amendement, no 82, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil par l'alinéa suivant :

« L'aptitude à conclure un pacte civil de solidarité relève de la loi personnelle de chaque individu ».

La parole est à Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin.

Mes chers collègues, nous avons parfois des discussions houleuses, mais elles ont au moins le mérite de clarifier les choses et de démasquer la majorité plurielle.

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Après le rejet de ces différents amendements, nous pouvons affirmer de façon claire et ferme que tout est organisé pour que, demain, les enfants puissent être adoptés par des couples homosexuels.

(Protestations sur de nombreux bancs du groupe socialiste.)

M. François Vannson.

La maman sera un papa ! Encore une prouesse socialiste !

Mme Christine Boutin.

Le PACS a pour objet la communauté de vie entre deux personnes et relève donc du statut personnel. Il n'est pas inutile d'engager la discussion sur la situation de deux contractants ressortissants d'un Etat qui ne connaît pas le mariage, car il s'agit d'une difficulté très réelle. Ce problème ne se pose pas avec le mariage, qui est connu dans le monde entier.

Mais le PACS, comme cela a été dit, est un « objet juridique non identifié ». De même, que se passera-t-il pour les personnes étrangères qui voudraient conclure un PACS avec un Français ?

M. Jean-Pierre Brard.

Dieu ne fait pas la différence !

Mme Christine Boutin.

J'aimerais savoir si le droit international privé dominera ou si le PACS pourra être conclu avec un national d'un pays qui ne connaît pas le PACS. Il s'agit d'une question juridiquement délicate.

M. Jean-Pierre Blazy.

Nous allons étendre le PACS à tous les pays.

M. Noël Mamère.

Ce sera la mondialisation du PACS !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a repoussé cet amendement totalement inutile. Je laisse le soin à Mme la ministre, qui est plus calée que moi en droit international privé, d'en exposer les raisons.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Madame Boutin, cet amendement est en effet inutile. Le pacte civil de solidarité est un contrat, et les conditions de capacité applicables à ce type d'acte relèvent en droit international privé de la loi personnelle de chaque contractant, c'est-à-dire de la loi du pays dont il est le ressortissant. En effet, les lois sur l'état et la capacité sont attachées aux personnes. Non seulement elles les régissent dans le pays de leur nationalité, mais encore elles les suivent en dehors de ce pays.

C'est une jurisprudence constante.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

82. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Nous en venons à quatre amendements, nos 447, 448, 449 et 446, présentés par M. Jacques Masdeu-Arus. Ils peuvent faire l'objet d'une présentation commune.

Pouvez-vous les défendre ensemble, mon cher collègue ?

M. Jacques Masdeu-Arus.

Volontiers, monsieur le président.

M. le président.

L'amendement no 447 est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil par l'alinéa suivant :

« Pour conclure un pacte civil de solidarité, les deux parties doivent justifier d'une adresse commune de résidence principale depuis au moins dix ans. »

L'amendement no 448 est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil par l'alinéa suivant :

« Pour conclure un pacte civil de solidarité, les deux parties doivent justifier d'une adresse commune de résidence principale depuis au moins cinq ans. »

L'amendement no 449 est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil par l'alinéa suivant :

« Pour conclure un pacte civil de solidarité, les deux parties doivent justifier d'une adresse commune de résidence principale depuis au moins deux ans. »

L'amendement no 446 est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil par l'alinéa suivant :

« Pour conclure un pacte civil de solidarité, les deux parties doivent justifier d'une adresse commune de résidence principale. »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

Vous avez la parole, monsieur Masdeu-Arus.

M. Jacques Masdeu-Arus.

Comme on a pu le constater depuis le début de la discussion, le PACS, c'est réellement flou et c'est même opaque. Plus personne n'y retrouvera ses petits ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Francis Hammel.

Elle est bien bonne !

M. Jacques Masdeu-Arus.

Les quatre amendements que j'ai déposés sont similaires. Ils visent à préciser la notion particulièrement floue de vie commune. Afin d'éviter les abus, il importe de réserver le PACS aux seules personnes vivant réellement ensemble.

M. Jean-Pierre Brard.

M. Masdeu-Arus tient la bougie !

M. Jacques Masdeu-Arus.

Et pour être sûr qu'elles vivent ensemble, il serait bon, puisque des avantages fiscaux importants vont être consentis, de s'assurer qu'elles vivent sous le même toit.

Dans mes quatre amendements dégressifs, je propose d'exiger dix ans, cinq ans, deux ans de résidence commune, ou même simplement que les contractants vivent déjà sous le même toit au moment où ils concluent le PACS.

M. Jean-Pierre Blazy.

Pourquoi pas vingt ans ?

M. Albert Facon.

On ne pourra pacser que post mortem !

M. Jacques Masdeu-Arus.

Sans cette condition, il serait facile de contourner la loi pour bénéficier des avantages fiscaux. Des contraintes sont nécessaires, on l'a bien vu dans ce débat.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur les quatre amendements ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a rejeté ces amendements. En effet, je m'en suis déjà expliqué, le PACS ne prend pas en compte l'antériorité de la vie commune éventuelle entre les deux personnes. Il a comme point de départ le dépôt et la conclusion de la convention. C'est si vrai d'ailleurs que, dans notre texte, les droits ouverts ne le sont quelquefois qu'après un certain délai, notamment les droits de déclaration fiscale, justement parce que l'on ne prend pas en compte, et c'est volontaire, l'antériorité de la vie commune.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Même avis que le rapporteur.

M. Pierre Lellouche.

Je demande la parole pour répondre au Gouvernement...

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 447.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 448.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 449.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 446.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. Patrice Martin-Lalande.

Monsieur le président,

M. Lellouche avait demandé la parole...

M. le président.

MM. Mariani, Masdeu-Arus et Doligé ont présenté un amendement, no 290, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil par l'alinéa suivant :

« Toutefois, il est nul de plein droit quand un des partenaires au moins est un étranger en situation irrégulière. »

La parole est à M. Thierry Mariani. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Thierry Mariani.

Vous pouvez faire « ah ! », car je vais mettre une fois de plus en évidence vos propres contradictions.

M. Jean-Pierre Brard.

Quel dialecticien !

M. Thierry Mariani.

Cet amendement vise à conférer une nullité de plein droit au PACS conclu entre deux personnes dont l'une au moins est un étranger en situation irrégulière.

M. Jean-Pierre Blazy.

On vous reconnaît bien là !

M. Albert Facon.

Les deux fantasmes en même temps !

M. Thierry Mariani.

Lors de la discussion du projet de loi RESEDA, relatif à l'entrée et au séjour des étrangers en France ainsi qu'au droit d'asile, le ministre de l'intérieur nous avait déclaré que le PACS n'aurait aucune conséquence en matière d'immigration. L'extrait du Journal officiel que je vais vous lire dans quelques secondes en t émoigne. Or, quelques mois après, vous faites le contraire. Ainsi, monsieur Michel, lorsque vous nous dites - et c'est souvent - qu'il est inutile de préciser tel ou tel point dans la loi, il apparaît que c'est au contraire très utile pour vous empêcher de proposer ultérieurement le contraire.

Il est certain que le PACS ouvrira un véritable boulevard à l'immigration irrégulière sur notre territoire grâce à votre article 6. Je persiste à dire qu'en matière de régularisation des sans-papiers, le PACS servira de voiture-balai.

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jacques Masdeu-Arus.

C'est fait pour !

M. François Vannson.

C'est un accord avec Le Pen ! Il avait besoin de quelques vitamines !

M. Thierry Mariani.

L'article 6 de la proposition de loi dispose que la conclusion d'un PACS constitue un des éléments d'appréciation des liens personnels en France.

Qui peut sérieusement penser que ce motif ne sera pas, dans tous les cas, considéré comme suffisant, à partir du moment où la loi y fait expressément référence ? Le PACS permettra donc en fait l'obtention de plein droit d'un titre de séjour.

Voilà que la majorité rose-verte-rouge, empêtrée dans l'affaire des sans-papiers, vient de trouver, en partie, une solution miracle à ses problèmes. Il suffira aux étrangers, même en situation irrégulière, de contracter un PACS pour obtenir un titre de séjour. Ce pacte civil de solidarité est en effet aussi facile à contracter qu'il est aisé à défaire. Une simple lettre suffit dans les deux cas, et j'ai prouvé tout à l'heure qu'on pourrait conclure trois PACS par an.

M. le président.

Merci, monsieur Mariani...

M. Thierry Mariani.

Monsieur le président, je n'ai pas dépassé mon temps de parole.

M. le président.

Si, de quelques secondes.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

M. Thierry Mariani.

Nous entrons bel et bien dans une nouvelle ère. Le mariage blanc, à l'instar du mariage sincère, est devenu ringard et dépassé. Nous allons connaître le PACS blanc, plus moderne, plus simple d'utilisation, plus facile à détourner. Certains parlent à raison de mariage bis quand ils analysent le PACS. En matière d'immigration, il s'agit en tout cas d'un véritable itinéraire bis qui est aujourd'hui proposé aux candidats à l'immigration clandestine. Cela, nous ne pouvons l'accepter.

M. Maxime Gremetz.

Vous êtes lassant !

Mme Nicole Bricq.

Dites donc, au RPR, vous n'avez pas mieux que ça ?

M. Georges Tron.

Il est excellent ! Ecoutez-le et vous verrez !

M. Thierry Mariani.

En deux phrases, pour finir, je rappelle, dans le texte du Journal officiel, les propos tenus par le ministre de l'intérieur le 26 février 1998.

Mon collègue Jean-Luc Warsmann s'adressait à lui en ces termes : « Ce débat me donne l'occasion d'interroger M. le ministre au sujet du "pacte d'intérêt commun", ou "pacte civil de solidarité". Quels droits, selon lui, les personnes qui souscriraient ce pacte auraient-elles en matière de nationalité et de carte de séjour ? Bénéficieraient-elles des mêmes droits que ceux conférés par le mariage ? Quelle est sa position ? » Le ministre a rétorqué : « Monsieur le président, je ne suis pas tenu de répondre aux provocations de M. Warsmann ! » Neuf mois après, on s'aperçoit que ce que vous appeliez des provocations n'était en réalité, hélas ! qu'une intuition.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission des lois a repoussé cet amendement, car il est en contradiction avec les dispositions, très restrictives, de l'article 6, que nous examinerons plus tard. Au surplus, je vous fais remarquer, monsieur Mariani, qu'aujourd'hui un étranger en situation irrégulière peut se marier valablement. Simplement, le mariage n'ouvre pas le droit au séjour.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Votre amendement, monsieur Mariani, tend à rendre nul un pacte civil de solidarité dans le cas où l'un des deux partenaires est un étranger en situation irrégulière.

Je rappelle que l'objectif du pacte civil de solidarité est de permettre aux personnes concernées d'organiser leur vie commune. Il s'agit d'un mécanisme qui a trait à la vie privée des individus, indépendamment de leur situation administrative. En intégrant la création du pacte civil de solidarité dans le livre premier du code civil relatif aux personnes, la séparation entre les procédures civiles et les procédures administratives, qui sont totalement indépendantes les unes des autres, est clairement affichée.

Les conditions propres à la réglementation sur l'entrée et le séjour des étrangers n'ont pas à être transposées dans les dispositions relatives au pacte civil de solidarité et la situation irrégulière au regard du séjour sur le territoire ne peut en soi faire obstacle à la conclusion d'un pacte civil de solidarité ou rendre celui-ci nul.

Cela étant, et pour répondre aux objections, je rappelle que la conclusion d'un pacte civil de solidarité ne permettra pas la délivrance automatique d'un titre de séjour aux étrangers éventuellement en situation irrégulière, puisque, aux termes de la proposition de loi, et nous y viendrons plus tard, le PACS ne sera qu'un élément parmi d'autres dans l'examen de la situation de l'étranger par l'administration.

M. Thierry Mariani.

Un élément suffisant !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 290.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Mme Boutin et M. Dord ont présenté un amendement, no 83, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil par l'alinéa suivant :

« Il n'y a pas de PACS lorsqu'il n'y a pas de consentement. »

La parole est à M. Léonce Deprez.

M. Léonce Deprez.

La volonté de ne pas réaliser, à travers le PACS, un mariage bis a été clairement exprimée.

De ce fait, les conditions de forme du PACS sont, c'est le moins qu'on puisse dire, très légères : une déclaration é crite conjointe des partenaires organisant leur vie commune, adressée non plus à la préfecture mais au greffe. C'est une simple formalité.

Derrière la bonne intention qui inspire le PACS donner des droits à des personnes déclarant mener une vie commune - n'y a-t-il pas des risques de dérives de la part de contractants uniquement désireux de profiter de ces droits ? Il serait bon, par conséquent, de spécifier que le PACS doit reposer sur un consentement. Une simple déclaration écrite au greffe, est-ce une formalité suffisante pour ouvrir droit aux avantages du PACS ?

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission demande le rejet car, bien entendu, il ne peut y avoir de PACS s'il n'y a pas de consentement entre les deux partenaires.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Cela va de soi, en effet.

Il n'y a pas de PACS quand il n'y a pas deux personnes.

Il n'y a pas de PACS lorsqu'il n'y a pas de déclaration écrite conjointe.

Il n'y a plus de PACS quand les deux partenaires décident d'y mettre fin, etc.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

83. (L'amendement n'est pas adopté.)

APRÈS L'ARTICLE 515-1 DU CODE CIVIL

M. le président.

Nous en venons aux amendements après l'article 515-1 du code civil. Nous commençons par l'amendement no 806...

Mme Véronique Neiertz.

Il tombe, compte tenu des votes antérieurs.

M. le président.

Non !

M. Pierre Lellouche.

Ça n'a pas marché !

M. Bernard Accoyer.

Heureusement, madame Neiertz, que ce n'est pas vous qui avez été choisie comme vice-

présidente

!


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

M. le président.

MM. Goasguen, Goulard et Perrut ont présenté un amendement, no 806, ainsi rédigé :

« Après le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil, insérer l'article suivant :

« Art. 515-1-1. - Les mineurs ne peuvent contracter de pacte civil de solidarité sans le consentement de leurs père et mère, à défaut de leurs aïeuls et aïeules. »

La parole est à M. Claude Goasguen.

M. Claude Goasguen.

Monsieur le président, je vais défendre simultanément les amendements nos 806, 555 et 556, pour aller plus vite.

M. le président.

Très bien !

M. Claude Goasguen.

Ils portent tous trois sur la capacité des personnes. La vraie question est en effet la suivante : quelle capacité est nécessaire pour contracter un pacte civil de solidarité ? Est-ce la capacité de contracter de droit commun ? Nous l'avons entendu. Dans l'affirmative, le mineur émancipé peut donc se lier seul par un PACS.

Les mineurs non émancipés et les majeurs protégés peuvent-ils contracter un tel pacte ? Faut-il appliquer le droit commun des incapacités ? Faut-il s'inspirer des mesures particulières prévues pour le mariage ? Ainsi, l'article 506 du code civil précise que le mariage d'un majeur en tutelle n'est permis qu'avec le consentement d'un conseil spécialement convoqué pour en délibérer, sauf si les père et mère ont donné l'un et l'autre leur consentement. De même, pour le mariage du majeur en curatelle, le consentement du curateur est requis ou, à défaut, celui du juge des tutelles, conformément à l'article 514 du code civil.

Des solutions particulières existent également pour le mariage des mineurs. Elles figurent dans les articles 148 et suivants et au second alinéa de l'article 481 du code civil.

L'importance du PACS, que vous présumez et que nous présumons avec vous, mes chers collègues, justifierait qu'y soient étendues des solutions applicables au mariage des mineurs et des majeurs protégés. Cela nécessiterait que soit complété en ce sens le texte qui nous est proposé, à moins que, comme peut le laisser croire un amendement de M. Albertini, le pacte civil de solidarité soit réservé aux majeurs. En l'état actuel des choses, c'est la seule disposition de droit positif.

La question que je vous pose est la suivante : entendezvous réserver le PACS aux seuls majeurs, ce qui serait le cas si le texte était adopté en l'état, ou bien allez-vous l'ouvrir aux mineurs en faisant jouer certaines dispositions courantes et assez fréquemment appliquées de la législation du mariage ? En fait, il s'agit d'un problème juridique relatif à la capacité de contracter. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. Edouard Landrain.

M. Edouard Landrain.

Je voudrais dès à présent défendre l'amendement no 844 de M. Plagnol, car il se situe dans le droit-fil des propos que vient de tenir Claude Goasguen.

Le pacte civil de solidarité ne prévoit aucune protection pour les incapables majeurs. Il y a donc lieu d'intégrer dans le texte les dispositions prévues à cet effet.

Les mêmes motifs avaient conduit à déposer un amendement que vous avez accepté, sur la condition d'âge minimum. Il n'a pourtant pas semblé convenable de priver de la jouissance de ses droits une personne dont l'âge ou la maladie ont altéré les facultés mentales ou physiques.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission des lois a rejeté ces amendements. En effet, et je m'en suis déjà expliqué très longuement, dès l'instant où les dispo sitions du PACS sont incluses dans le livre premier du code civil, les articles concernant la protection des majeurs incapables s'appliquent. Tout ce qui est ainsi demandé sera automatiquement applicable au pacte civil de solidarité.

Nous avons d'ailleurs adopté un amendement de M. Albertini limitant la conclusion du PACS aux majeurs, nonobstant les règles sur les mineurs émancipés, puisque l'article 481 du code civil dispose très clairement que le mineur émancipé a les mêmes droits que les majeurs, sauf en ce qui concerne les possibilités de se faire adopter et de se marier, pour lesquelles le consentement des parents est obligatoire.

M. Pierre Lellouche.

Autrement dit, c'est comme pour le mariage !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Il faut donc repousser les quatre amendements.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Même avis que le rapporteur.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 806.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

L'amendement no 844, présenté par M. Plagnol et les membres du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil par la phrase suivante : "Le majeur en tutelle ou en curatelle ne peut contracter de pacte civil de solidarité sans autorisation ; les dispositions des articles 506 et 514 du code civil sont applicables au présent titre". »

Les amendements nos 555 et 556 sont présentés par

M. Goasguen.

L'amendement no 555 est ainsi rédigé :

« Après le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil, insérer l'article suivant :

« Art. 515-1-1. - Les majeurs en tutelle ne p euvent contracter de pacte civil de solidarité qu'avec le consentement d'un conseil de famille spécialement convoqué pour en délibérer. »

L'amendement no 556, est ainsi rédigé :

« Après le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil, insérer l'article suivant :

« Art. 515-1-1. - Les majeurs en curatelle ne p euvent contracter de pacte civil de solidarité qu'avec le consentement du curateur et, à défaut, celui du juge des tutelles. »

Ces amendements ont été défendus et la commission comme le Gouvernement se sont exprimés.

Je vais mettre successivement aux voix les amendements nos 844, 555 et 556.

(Ces amendements, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

M. le président.

M. Plagnol et les membres du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance ont présenté un amendement, no 846, ainsi rédigé :

« Après le texte proposé pour l'article 515-1 du code civil, insérer l'article 515-1-1 suivant :

«

« Art. 515-1-1. - L'obligation sans cause ou sur une fausse cause ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet. La cause est illicite, quand elle est prohibée par la loi, quand elle est contraire aux bonnes moeurs ou à l'ordre public. »

La parole est à M. Henri Plagnol.

M. Henri Plagnol.

Cet amendement tend à inciter la majorité à approfondir la notion de contrat.

Puisque, d'une part, vous répétez inlassablement que le PACS est un contrat, supposant en conséquence un échange de volontés, alors que, d'autre part, vous précisez qu'il s'agit d'un contrat d'une nature particulière qui n écessitera certaines interventions de la puissance publique afin d'éviter toute forme d'abus, il me semble indispensable d'introduire dans le texte des dispositions protectrices des contractants. Il faut en effet s'assurer que leur consentement sera éclairé et que l'échange des volontés ne risque pas d'aboutir à des situations préjudiciables à l'ordre public.

Tel est le sens de cet amendement qui énumère les causes qui rendraient le contrat illicite.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission des lois a repoussé cet amendement sur l'objet duquel je me suis déjà expliqué plusieurs fois. Comme quoi plusieurs amendements sont répétitifs et tendent à nous faire perdre du temps. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Thierry Mariani.

Ce n'est pas vrai ! Voilà que ça recommence !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Monsieur Mariani, jeune député, vous n'apprendrez pas aux autres ce qu'est l'obstruction. Nous l'avons souvent vu mise en oeuvre sur ces bancs et depuis longtemps.

M. Thierry Mariani.

Vous êtes un expert !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

L'article 6 du code civil concernant l'ordre public et les bonnes moeurs s'app liquera évidemment au PACS. Ceux qui seront contraires à l'ordre public et aux bonnes moeurs seront nuls de plein droit. L'amendement est donc inutile et j'en demande le rejet. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Même avis.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 846.

(L'amendement n'est pas adopté.)

ARTICLE 515-2 DU CODE CIVIL

M. le président.

Je suis saisi de trois amendements nos 291, 450 et 558, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 291, présenté par M. Mariani est ainsi rédigé :

« I. - Supprimer le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil.

« II. - Compléter cet article par le paragraphe suivant :

«

1. Les pertes éventuelles de recettes pour l'Etat sont compensées à due concurrence par une majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

«

2. Les pertes éventuelles de recettes pour la sécurité sociale sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 885 U et 575 A du code général des impôts affectée aux organismes de sécurité sociale. »

Les amendements nos 450 et 558 sont identiques.

L'amendement no 450 est présenté par M. MasdeuArus ; l'amendement no 558 est présenté par MM. Goasguen, Herbillon et Teissier.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil. »

La parole est à M. Thierry Mariani, pour soutenir l'amendement no 291.

M. Thierry Mariani.

Je ne veux pas tomber dans le panneau et répondre à une nouvelle provocation du rapporteur, mais je tiens à rappeler à l'autre côté de l'hémicycle quelques précédents pour montrer à nos collègues qu'en matière d'obstruction ils n'ont absolument pas de leçon à nous donner.

L'opposition d'alors avait, en effet, déposé 5 488 amendements sur le plan Juppé au cours de l'hiver de 1995 (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), 4 700 amendements sur le changement de statut de la régie Renault en avril 1990 et 3 838 amendements sur l'abrogation de la loi Falloux. Ces chiffres figurent dans un article de Libération . (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Je vous en prie, mes chers collègues.

M. Thierry Mariani.

Souffrez au moins, messieurs de la gauche plurielle, que l'opposition, sur un texte aussi important que celui dont nous débattons, ne présente qu'un quart du nombre des amendements que vous avez déposés sur la régie Renault. Cessez donc de nous donner des leçons en matière d'obstruction et de conduite des débats ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Monsieur Mariani, veuillez défendre votre amendement.

M. Thierry Mariani.

Je suis sans cesse interrompu, monsieur le président.

Je constate que la seule loi citée pour souligner qu'elle était très complète, est celle sur la bioéthique. Mais, que je sache, elle a été élaborée par notre majorité.

Le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil peut sembler curieux au lecteur attentif. En effet, il énumère de façon exhaustive les cas dans lesquels il ne peut y avoir de pacte civil de solidarité. Il en est ainsi entre ascendant et descendant, entre collatéraux, entre alliés en ligne directe, entre deux personnes dont l'une au moins est mariée, entre deux personnes dont l'une au moins est déjà liée par un pacte.

On peut cependant se demander pourquoi vous édictez de tels interdits. En effet, si j'en crois le rapport sur la première version du PACS - la nouvelle version est si


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

proche que le commentaire vaut aussi bien pour les deux -, le pacte civil de solidarité est ouvert à deux personnes désireuses de mener leur vie ensemble sans que leur projet commun de vie soit nécessairement fondé sur une relation sexuelle.

Je ne vois donc pas les motifs qui vous poussent à prévoir, comme en matière de mariage, de tels empêchements dans la mesure où votre texte ne contient aucune obligation de type conjugal. Cela a d'ailleurs été rappelé il y a quelques minutes.

Une nouvelle fois, vous confondez les genres et introduisez dans votre texte une confusion supplémentaire qu'il convient de lever.

Nous en revenons à la remarque que nous avons formulée plusieurs fois : vous ne pouvez pas tout mélanger dans votre proposition de loi. Vous ne pouvez pas prétendre que celle-ci n'a aucun rapport avec le sexe tout en édictant des empêchements relatifs à cette question.

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Pierre Lellouche.

Très juste !

M. Thierry Mariani.

Elu d'une circonscription semirurale je connais nombre de frères et soeurs, d'oncles et de neveux, de parents isolés et d'enfants qui vivent ensemble, pas forcément à deux, qui partagent les dépenses courantes liées à leur communauté de vie, mais qui ne pourront pas bénéficier de votre dispositif pour la simple raison qu'ils ont un lien de parenté trop proche.

Cela est difficilement compréhensible quand on essaie de suivre votre logique, puisque personne ne demande qu'il y ait de relations sexuelles entre les prétendants à la conclusion d'un PACS.

La disposition dont je demande la suppression est au mieux inutile. Au pire, elle va ajouter à la confusion dans un texte qui est déjà loin d'être clair. De sérieuses explications s'imposent à ce sujet, mais nous attendons toujours des réponses.

Telles sont les motivations de mon amendement des uppression. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean-Pierre Blazy.

Ils commencent à fatiguer !

M. le président.

La parole est à M. Jacques MasdeuArus, pour défendre l'amendement no 450.

M. Jacques Masdeu-Arus.

Les arguments que vient de développer M. Mariani sont tout à fait justifiés si, comme le soutient le Gouvernement, le PACS est un pacte de solidarité. En ce cas, il serait tout à fait opportun d'empêcher les membres d'une même famille de signer un PACS.

En revanche, si la solidarité n'était pas réellement le fondement du PACS, cela signifierait qu'il s'agit bien d'un mariage bis , d'une union réservée aux homosexuels et n'ayant rien à voir avec la défense de la famille.

(« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Claude Goasguen, pour soutenir l'amendement no 558.

M. Claude Goasguen.

Je défendrai en même temps l'amendement no 560, qui est très proche.

M. Jean-Pierre Brard.

C'est un stakhanoviste ! (Sourires.)

M. Claude Goasguen.

Je veux souligner, par cet amendement de suppression, une autre imperfection juridique du texte dont nous allons d'ailleurs constater les effets quelques articles plus loin.

Il s'agit des problèmes posés par la question de la nullité du PACS. Vous savez fort bien, monsieur le rapporteur, qu'elle constitue une sanction civile. Elle est donc très difficile à manier dans la mesure où son étendue a des effets destructeurs.

Par exemple, que se passera-t-il pour les biens indivis entre deux personnes ayant passé un PACS et vécu conformément à ce contrat si ce dernier est annulé ? De t els cas sont fréquents, notamment en matière de mariage. Mais, dans ce domaine, après plusieurs siècles de réflexion, les juristes ont inventé ce qu'on appelle la théorie du mariage putatif.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Cela n'a rien à voir !

M. Claude Goasguen.

De telles questions se poseront, monsieur le rapporteur ! Ne haussez pas les épaules. Vous les aurez sur le dos dans quelques mois ou dans quelques années.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Et le concubinage putatif, vous connaissez ?

M. Claude Goasguen.

Le mariage putatif permet de régler les problèmes patrimoniaux provoqués par l'annulation d'un mariage au mieux des intérêts de chacun dans des situations pourtant difficiles sur le plan contentieux.

Mme Nicole Bricq.

Je m'étonne que la loi salique n'ait pas encore été évoquée !

M. Claude Goasguen.

Or, monsieur le rapporteur, vous n'avez rien prévu de semblable en cas d'annulation d'un PACS. Nous sommes donc complètement démunis pour affronter de telles situations, ce qui laisse dubitatif à l'égard de la manière dont a été préparé le texte. Vous avez présumé que la nullité relative allait régler tous vos problèmes, mais tel ne sera pas le cas. Cela créera au contraire des difficultés supplémentaires.

En l'occurrence, les juges, qui travaillent aussi, se référeront à ce qui se passe en cas d'annulation d'un mariage.

Une fois de plus, monsieur le rapporteur, quel que soit l'intérêt que vous portez à votre création juridique, elle ne sera, sur le plan du droit, que le décalque du mariage.

Pour tout problème juridique, il faudra faire référence à la jurisprudence sur le mariage. Ce n'était donc pas la peine d'inventer un tel contrat.

M. le président.

La parole est à Mme la présidente de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

Nous avons écouté avec beaucoup d'intérêt ce cours sur les nullités et les problèmes à venir. Malheureusement, l'amendement no 291 propose de supprimer l'article qui interdit la conclusion d'un PACS entre certaines personnes.

M. Claude Goasguen.

J'ai compris ! Je l'ai lu, madame !

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

Or nous ne pouvons en aucun cas envisager de supprimer les interdits tels qu'ils sont énoncés. Nous sommes en parfaite cohérence avec ce qui a été dit tant par notre rapporteur que par Mme la garde des sceaux : le PACS s'arrête là où commence la famille et la filiation.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

M. Alain Barrau.

Très bien !

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

Cet article énumère en effet les personnes ne pouvant devenir parties à un PACS et nous y tenons. C'est pourquoi la commission n'a pas retenu cet amendement.

Monsieur Masdeu-Arus, il est bien d'évoquer une solidarité ouverte à tout vent, mais cela n'a rien à voir avec l'objet du texte. Celui-ci règle la vie à deux, la vie en couple ou la vie choisie à deux. Il ne concerne nullement tous les problèmes de solidarité que l'on rencontre dans notre société. Pour cela, je vous renvoie aux nombreuses mesures prises par notre gouvernement pour instaurer davantage de solidarité dans notre pays. (« Très bien » sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Je suis défavorable aux amendements nos 291, 450 et 558 parce qu'ils supprimeraient les conditions dans lesquelles un pacte civil ne pourrait être conclu. Ainsi il n'y aurait plus aucune exclusion empêchant deux personnes physiques de conclure un PACS. Serait donc permis le PACS entre parent et enfant, entre frère et soeur et même entre personnes mariées ou déjà liées par un ou plusieurs autres PACS.

On tolérerait, on cautionnerait même, l'inceste, la bigamie et le communautarisme. Vous comprendrez que le Gouvernement ne puisse pas accepter ces amendements.

(Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Thierry Mariani.

Caricature !

Mme la garde des sceaux.

Quant à l'amendement no 560 présenté par M. Goasgen, il est d'une autre nature et concerne la nullité. Néanmoins, l'avis du Gouvernement est défavorable.

En effet, cet amendement tend à supprimer la nullité qui est la sanction du non-respect des conditions posées par la loi pour conclure un pacte civil de solidarité. Or les interdictions faites à certaines personnes de conclure un PACS ne peuvent avoir d'efficacité que si elles sont sanctionnées par la nullité de l'acte. Il est donc indispensable de la prévoir.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Tout à fait !

M. Alain Barrau.

Très bien !

M. Bernard Accoyer.

Je demande la parole pour répondre au Gouvernement.

M. Thierry Mariani.

Moi aussi, monsieur le président !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 291...

(Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Thierry Mariani.

On ne peut jamais répondre ! (L'amendement n'est pas adopté.)

M. Dominique Dord.

Je demande la parole pour un rappel au règlement...

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 450 et 558.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

M. Goasguen a présenté un amendement, no 560, ainsi rédigé :

« Au début du premier alinéa du texte proposé pour l'article 515-2 du code civil, supprimer les mots : "à peine de nullité". »

Cet amendement a déjà été défendu.

La commission et le Gouvernement se sont exprimés.

Je mets aux voix l'amendement no 560.

(Protestationss ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) (L'amendement n'est pas adopté.)

Rappel au règlement

M. Jean-Louis Debré.

Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Louis Debré, pour un rappel au règlement.

M. Jean-Louis Debré.

Monsieur le président, je vous rassure, je ne vais pas demander une suspension de séance car je ne veux pas faire comme l'actuelle majorité lorsqu'elle était dans l'opposition qui, systématiquement, bloquait les débats en demandant des suspensions à répétition.

Je veux simplement vous faire constater que, alors que nous travaillons sérieusement depuis deux heures, vous nous empêchez systématiquement de répondre au Gouvernement.

(Protestations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - « Si ! si ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Je considère que cela n'est pas viable.

M. le président.

Des statistiques ont été établies par la présidence de séance cet après-midi. Elles ont montré que les deux tiers du temps de parole avaient été utilisés par l'opposition et un tiers par la majorité.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Je vous rappelle aussi que, aux termes de l'alinéa 7 de l'article 100 de notre règlement, ne peut être entendu, sur chaque amendement, après que la commission et le Gouvernement ont donné leur avis, qu'un orateur d'opinion contraire. La quasi-totalité des amendements étant présentés par l'opposition, si un membre de l'opposition veut s'exprimer contre l'amendement d'un de ses collègues, cela lui est donc loisible.

M. Pierre Lellouche.

Vous plaisantez, monsieur le président ?

M. le président.

D'autres articles donnent la faculté de répondre au Gouvernement et à la commission. Je les ai d'ailleurs appliqués. M. Goulard a usé de cette faculté. Je les appliquerai à nouveau, comme on va le voir avec l'amendement suivant.

M. Pierre Lellouche.

Vous l'avez fait sur l'adoption, exclusivement ! Reprise de la discussion

M. le président.

Mme Boutin et M. Dord ont présenté un amendement, no 85, ainsi rédigé :

« Dans le premier alinéa du texe proposé pour l'article 515-2 du code civil, après le mot : "nullité", insérer le mot : "absolue". »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

La parole est à Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin.

L'amendement no 85 s'inscrit dans la continuité de l'intervention de M. Goasguen de tout à l'heure.

Pour éviter les contentieux, il me paraît indispensable d'ajouter le mot « absolue » après celui de « nullité ». En effet, l'action en nullité absolue est ouverte à tous ceux qui y ont intérêt, à la différence de l'action en nullité relative, qui est exclusivement rattachée à la personne dont le consentement a été vicié.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a rejeté cet amendement, le jugeant inutile. Il n'y a pas lieu de préciser si c'est à peine de nullité absolue ou relative.

Mme Christine Boutin.

Cela fait pourtant une différence. Les règles élémentaires du droit vous échappent !

M. Jean-Pierre Brard.

C'est la soif d'absolu de Mme Christine Boutin ! C'est l'absolue nullité !

M. Pierre Lellouche.

M. Brard connaît bien la nullité absolue !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Je vais, madame la député, vous répondre un peu longuement sur ce point.

Mme Christine Boutin.

Merci.

M. Jean-Pierre Brard.

C'est un privilège immérité.

Mme la garde des sceaux.

Je voudrais d'abord rappeler quels sont les caractères d'une nullité absolue. Elle sanctionne la violation d'une règle d'intérêt général ou une atteinte aux règles essentielles de notre société. Elle est susceptible d'être invoquée par tout intéressé pendant trente ans et d'être couverte par la cessation du vice qu'elle sanctionne.

A l'inverse, la nullité relative protège les intérêts privés des personnes concernées et d'elles seules. Elle n'est invocable que par ceux qu'elle est destinée à protéger. Elle se prescrit par cinq ans et est susceptible d'être couverte lors de la cessation du vice, si l'acte en cause peut être confirmé.

Je voulais rappeler ces définitions parce que vous préconisez la nullité absolue plutôt que la nullité relative dans le cas du PACS.

M. Pierre Lellouche.

Fort justement !

Mme la garde des sceaux.

Le pacte civil de solidarité étant une convention de droit privée organisant les conditions de vie de deux personnes résidant ensemble, les rapports qu'il engendre incitent à penser que la nullité encourue est relative.

Mme Christine Boutin.

Ça peut dépendre !

Mme la garde des sceaux.

Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de retenir le régime des nullités absolues, car je ne voudrais pas que n'importe quelle personne - un précédent conjoint, un créancier, par exemple - puisse, pendant trente ans, invoquer la nullité.

M. Raymond Douyère.

Très bien !

Mme la garde des sceaux.

Ce qui me paraît essentiel, c'est que des relations incestueuses ne puissent perdurer au travers d'un pacte civil de solidarité, même non enregistré, dont les signataires garderaient le secret. Le problème pourrait se poser.

Mais je rappelle qu'aux termes de l'article 423 du nouveau code de procédure civile, le ministère public peut agir d'office pour la défense de l'ordre public à l'occasion des faits qui portent atteinte à celui-ci. Il ne fait pas de doute que le parquet pourrait, s'il venait à connaître, par exemple, d'un pacte civil de solidarité entre père et fille ou frère et soeur, agir en nullité, et, à mes yeux, cette possibilité d'action est suffisante pour répondre aux préoccupations que vous avez exprimées.

Mon avis est donc défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

85. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de quatre amendements, nos 292, 451, 559 et 847, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 292, présenté par M. Mariani, est ainsi rédigé :

« I. - Supprimer le deuxième alinéa (1o ) du texte proposé pour l'article 515-2 du code civil.

« II. - Compléter cet article par le paragraphe suivant :

« 1o Les pertes éventuelles de recettes pour l'Etat sont compensées à due concurrence par une majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

« 2o Les pertes éventuelles de recettes pour la sécurité sociale sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 885 U et 575 A du code général des impôts affectée aux organismes de sécurité sociale. »

L'amendement no 451, présenté par M. Masdeu-Arus, est ainsi rédigé :

« I. - Supprimer le deuxième alinéa (1o ) du texte proposé pour l'article 515-2 du code civil.

« II. - Compléter cet article par le paragraphe suivant :

«

1. Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées à due concurrence par une majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

«

2. Les pertes de recettes pour la sécurité sociale sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 885 U et 575 A du code général des impôts affectée aux organismes de sécurité sociale. »

Les amendements nos 559 et 847 sont identiques.

L'amendement no 559, est présenté par MM. Goasguen, Mattei et Dominati ; l'amendement no 847 est présenté par M. Plagnol et les membres du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.

Les amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer le deuxième alinéa (1o ) du texte proposé pour l'article 515-2 du code civil. »

La parole est à M. Thierry Mariani, pour soutenir l'amendement no 292.

M. Thierry Mariani.

Je vais être encore plus bref que d'habitude,...

M. le président.

Très bien !

M. Thierry Mariani.

... afin de ne pas allonger les débats. (Sourires.)

L'amendement no 292 reprend essentiellement des dispositions que j'ai déjà défendues à propos de l'amendement no 291.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

M. le président.

C'est exact.

M. Thierry Mariani.

Je le répète, je ne vois pas pourquoi, alors qu'on permet à deux frères ou deux soeurs, ou un frère et une soeur de conclure un PACS, des oncles et des neveux, des parents isolés ou des enfants qui vivent ensemble, mais pas forcément à deux, et partagent les dépenses courantes liées à leur communauté de vie ne pourraient pas bénéficier de votre dispositif au prétexte qu'ils ont un lien de parenté trop proche. Une fois de plus, j'ai beaucoup de mal à voir la cohérence du texte et je pense que les Français éprouvent les mêmes inquiétudes et se posent les mêmes questions.

M. le président.

La parole est à M. Jacques MasdeuArus, pour défendre l'amendement no 451, qui a le même objet.

M. Jacques Masdeu-Arus.

L'amendement s'inspire des mêmes réflexions.

Je pose à nouveau la question : pourquoi ne serait-il pas possible à deux membres d'une même famille de conclure un PACS ?

M. Claude Goasguen.

Mais parce qu'il suppose des relations sexuelles !

M. le président.

La parole est à M. Claude Goasguen, pour défendre l'amendement no 559.

M. Claude Goasguen.

Tous ces amendements résultent du dérapage de votre texte. Si vous en étiez restés à votre intention initiale, à savoir créer un contrat destiné aux homosexuels et aux hétérosexuels, au lieu d'en élargir le champ d'application aux fratries, ce qui, par certains aspects a dénaturé votre texte, ils n'auraient pas lieu d'être.

C'est, dites-vous, une mesure de solidarité à l'égard de deux frères ou de deux soeurs ou d'un frère et d'une soeur qui se trouvent dans une situation précaire. Je ne vois pas pourquoi un ascendant âgé et son fils ou sa fille ne pourraient pas faire l'objet de la même sollicitude.

A partir du moment où vous mettez en place un contrat de solidarité, je ne vois pas pourquoi on ne l'étendrait pas à toutes les situations difficiles qui peuvents e rencontrer à l'intérieur d'une famille, lesquelles méritent tout autant l'attention et la solidarité du législateur.

C'est la raison du dépôt d'un certain nombre de nos amendements, dont, je le répète, vous êtes responsables.

M. le président.

La parole est à M. Léonce Deprez, pour défendre l'amendement no 847.

M. Léonce Deprez.

Il est inspiré par les mêmes préoccupations que vient d'énoncer notre collègue Goasguen.

Nous retenons ce qu'on nous dit. Les frères et soeurs ne pourront pas conclure de PACS. Ils ne pourront bénéficier que de certains droits liés à la conclusion d'un PACS. Dès lors, pourquoi ne pas les ouvrir à un célibataire et à sa mère âgée, par exemple ? Le texte n'est pas cohérent.

Il faudrait préciser les conditions dans lesquelles on pourrait, en famille, bénéficier des mesures liées au PACS.

M. Lucien Degauchy.

Il a tout à fait raison !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur les quatre amendements ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

L'Assemblée vient de se prononcer contre des amendements plus globaux qui supprimaient l'intégralité de l'article 515-2. Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Il est aussi défavorable parce que le PACS, qui s'applique principalement aux couples, peut présupposer des rapports charnels. Il ne peut être question de paraître légitimer des relations incestueuses.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Thierry Mariani.

Qu'est-ce que cela veut dire : « le PACS qui s'applique principalement aux couples » ?

M. François Goulard.

Je demande la parole contre les amendements, monsieur le président.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Monsieur le président, tout à l'heure, vous nous avez refusé la possibilité, pourtant usuelle, de répondre au rapporteur ou au Gouvernement.

Il se trouve, en l'occurrence, que je veuille m'exprimer contre les amendements qui ont été très brièvement présentés. Vous ne pouvez vous y opposer, compte tenu du règlement. Vous m'y autorisez donc et je vous en remercie.

Je veux m'exprimer contre les amendements de mes collègues, parce que je les trouve beaucoup trop limitatifs.

(Rires.)

En effet, ils visent à supprimer les restrictions qui figurent dans le texte, et je suis très sérieux mes chers collègues en disant cela.

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Pierre Blazy.

M. Goulard veut parler pour ne rien dire.

M. François Goulard.

L'article 515-2 du code civil, tel qu'il est rédigé, restreint les possibilités de conclure un PACS à des gens qui vivent en couple et qui ont, on le suppose ou on le présuppose, des relations sexuelles. Et c'est en vous plaçant dans cette logique-là que vous en excluez les ascendants, les descendants, les collatéraux et toutes les personnes qui ont des liens de parenté.

Je trouve, pour ma part, que la suppression de cette restriction est tout à fait insuffisante. Comment justifier en effet qu'on limite le bénéfice du PACS à seulement deux personnes ? Si l'on suit les propositions de mes collègues qui ont présenté ces amendements de suppression, on lève les restrictions du texte mais on continue à limiter le bénéfice du PACS à deux personnes : un oncle et son neveu, une mère et sa fille, par exemple.

M. Jean-Pierre Blazy.

Quelle horreur !

M. François Goulard.

Mais une mère et ses deux filles, un oncle et ses deux neveux restent exclus du bénéfice du PACS. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Le sujet est très sérieux. Quel est, en effet, le fondement des avantages, d'ordre pécuniaire, que vous allez, dans la suite du texte, attribuer aux gens qui ont signé un tel pacte ?

M. Serge Janquin.

Pitreries !

M. François Goulard.

Vous allez leur permettre de faire une déclaration d'impôt unique qui, dans certains cas, peut réduire leur imposition sur le revenu. Vous allez alléger les droits de succession.

M. Serge Janquin.

Arrêtez ! Tout cela manque de dignité !

M. François Goulard.

Bref, vous allez leur accorder un certain nombre d'avantages matériels, qui seront à la charge de la collectivité. Et la contrepartie de ces avan-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

tages réside bien dans la décision qu'auront prise les signataires du PACS d'établir entre eux une certaine forme de solidarité. Nous trouvons là, dans le texte, la trace de la solidarité qui s'exerce entre les signataires du PACS.

Pour ma part, je considère que, à partir du moment où plus de deux personnes prennent l'engagement d'exercer entre elles cette solidarité, il est tout à fait anormal et infondé - et l'argument est d'importance, parce que je pense qu'il peut fonder une inconstitutionnalité du texte de réserver le bénéfice des avantages liés à la conclusion d'un PACS à deux personnes et de ne pas l'ouvrir à trois ou à quatre personnes.

Quand trois ou quatre personnes, ou plus, partagent les mêmes conditions matérielles et prennent les mêmes engagements les unes vis-à-vis des autres, elles doivent pouvoir, pour respecter le principe d'égalité, qui est constitutionnel, bénéficier des mêmes avantages que ceux que vous allez donner aux deux signataires d'un PACS.

Voilà pourquoi, monsieur le président, je m'élève farouchement contre le caractère par trop restrictif des amendements qui ont été défendus par mes collègues.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 292.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 451.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 559 et 847.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

Je suis saisi de cinq amendements nos 452, 453, 206, 454 et 455, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 452, présenté par M. Masdeu-Arus, est ainsi rédigé :

« I. Dans le deuxième alinéa (1o ) du texte proposé pour l'article 515-2 du code civil, supprimer les mots : "entre ascendant et descendant en ligne directe,".

« II. Compléter cet article par le paragraphe suivant :

«

1. Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées à due concurrence par une majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

«

2. Les pertes de recettes pour la sécurité sociale sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 885 U et 575 A du code général des impôts affectée aux organismes de sécurité sociale. »

L'amendement no 453, présenté par M. Masdeu-Arus, est ainsi rédigé :

« I. Dans le deuxième alinéa (1o ) du texte proposé pour l'article 515-2 du code civil, supprimer les mots : ", entre alliés en ligne directe et entre collatéraux jusqu'au troisième degré inclus".

« II. Compléter cet article par le paragraphe suivant :

«

1. Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées à due concurrence par une majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

«

2. Les pertes de recettes pour la sécurité sociale sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 885 U et 575 A du code général des impôts affectée aux organismes de sécurité sociale. »

L'amendement no 206, présenté par M. Estrosi, est ainsi rédigé :

« Dans le deuxième alinéa (1o ) du texte proposé pour l'article 515-2 du code civil, supprimer les mots : ", entre alliés en ligne directe et entre collatéraux jusqu'au troisième degré inclus". »

L'amendement no 454, présenté par M. Masdeu-Arus, est ainsi rédigé :

« I. Dans le deuxième alinéa (1o ) du texte proposé pour l'article 515-2 du code civil, supprimer les mots : ", entre alliés en ligne directe".

« II. Compléter cet article par le paragraphe suivant :

«

1. Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées à due concurrence par une majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

«

2. Les pertes de recettes pour la sécurité sociale sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 885 U et 575 A du code général des impôts affectée aux organismes de sécurité sociale. »

L'amendement no 455, présenté par M. Masdeu-Arus, est ainsi rédigé :

« I. Dans le deuxième alinéa (1o ) du texte proposé pour l'article 515-2 du code civil, supprimer les mots : "et entre collatéraux jusqu'au troisième degré inclus".

« II. Compléter cet article par le paragraphe suivant :

«

1. Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées à due concurrence par une majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

«

2. Les pertes de recettes pour la sécurité sociale sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 885 U et 575 A du code général des impôts affectée aux organismes de sécurité sociale. »

La parole est à M. Jacques Masdeu-Arus, pour soutenir les amendements nos 452 et 453.

M. Jacques Masdeu-Arus.

Si, comme le soutient le Gouvernement, le PACS n'est pas un mariage bis pour les homosexuels, mais un contrat de solidarité, il n'y a aucune raison, comme cela vient d'être dit, d'en exclure les membres d'une même famille, et en l'occurrence les ascendants et descendants en ligne directe.

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

Si ce n'est pas de l'obstruction, qu'est-ce que c'est ?

M. Jacques Masdeu-Arus.

D'ailleurs, si l'article 1er de la proposition de loi interdit la conclusion d'un PACS aux frères et soeurs vivant ensemble, l'article 10 leur ouvre le bénéfice de certains droits liés à la conclusion d'un PACS, mais d'une manière insuffisante. Cela démontre, d'une part, que le PACS est bien une réponse à la demande des homosexuels et, d'autre part, que le texte est incohérent et contradictoire.

Cette partie du texte n'est malheureusement pas le seul exemple.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

Cela prouve également l'incertitude dans laquelle se trouvent ses partisans, incapables d'avouer qu'il s'agit bien d'un mariage entre homosexuels mais pourtant hostiles à ouvrir le bénéfice du PACS aux membres d'une même famille.

L'amendement no 452 tend à donner la possibilité de conclure un PACS aux ascendants et descendants en ligne directe et l'amendement no 453, aux alliés en ligne directe et aux collatéraux jusqu'au troisième degré inclus.

M. le président.

L'amendement no 206 de M. Estrosi est-il défendu ?

M. Thierry Mariani.

Il est défendu.

M. le président.

La parole est à M. Jacques MasdeuArus, pour défendre les amendements nos 454 et 455.

M. Jacques Masdeu-Arus.

Il n'y a aucune raison d'exclure du bénéfice du PACS les membres d'une même famille, en l'occurrence les alliés en ligne directe - c'est l'amendement no 454 - et les collatéraux jusqu'au troisième degré inclus - c'est l'amendement no 455.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur les cinq amendements ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission propose à l'Assemblée de rejeter ces amendements.

Je tiens à souligner, pour que ce soit inscrit au Journal officiel, que nous sommes ici en pleine obstruction parlementaire. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jacques Masdeu-Arus.

Pas du tout !

M. Dominique Dord.

C'est une manie, chez vous !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

En effet, quelle est la technique utilisée ? Le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil est composé de quatre alinéas dans lesquels sont énumérés trois empêchements à la conclusion d'un PACS. L'opposition a d'abord proposé une série d'amendements tendant à supprimer l'article. Ces amendements ont été rejetés. Elle a ensuite proposé des amendements visant à supprimer le premier alinéa de cet article, qui ont été é galement rejetés. L'opposition divise maintenant la phrase du deuxième alinéa et propose des amendements visant à supprimer la première partie, la deuxième partie et la troisième partie de la phrase.

La commission des lois vous propose donc de rejeter l'ensemble de ces amendements et appelle l'opposition à un peu de raison dans le débat parlementaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Mme Michèle Alliot-Marie.

Et vous ayez un peu de dignité et de sens démocratique ! Cela vous changera !

M. le président.

La parole est à M. le ministre des relations avec le Parlement.

M. Daniel Vaillant, ministre des relations avec le Parlement.

Avis défavorable, pour les raisons exposées précédemment.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 452.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 453.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 206.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 454.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 455.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Les amendements nos 848, 849 et 850 ont été retirés.

Je suis saisi de deux amendements, nos 431 et 729, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 431, présenté par MM. Accoyer, Muselier, Demange et Quentin, est ainsi rédigé :

« Dans le dernier alinéa du texte proposé par l'article 515-2 du code civil, après les mots : "est déjà liée", insérer les mots : "ou a déjà été liée depuis moins de cinq ans". »

L'amendement no 729, présenté par M. Martin-Lalande, est ainsi rédigé :

« Dans le dernier alinéa (3o ) du texte proposé p our l'article 515-2 du code civil, après le mot : "liée", insérer les mots : "ou a déjà été liée à trois reprises". »

La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l'amendement no 431.

M. Bernard Accoyer.

Monsieur le président, avant de défendre l'amendement no 431, je voudrais répondre brièvement à M. le rapporteur de la commission des lois. Il accuse l'opposition de pratiquer l'obstruction parlementaire.

M. Jean-Pierre Blazy.

Mais c'est vrai !

M. Michel Vergnier.

Il a raison !

M. Bernard Accoyer.

En réalité, monsieur le rapporteur, comme nous l'avons démontré à plusieurs reprises, la préparation de ce texte a été confidentielle.

Mme Michèle Alliot-Marie.

Pour ne pas dire bâclé !

M. Bernard Accoyer.

Alors qu'il s'agissait d'une réforme profonde du code civil et de notre société tout entière, la procédure choisie n'a absolument pas permis d'examiner les modifications fondamentales que vous nous proposez dans l'esprit qui a toujours été celui de notre assemblée, c'est-à-dire en ouvrant le débat à des commissions extra-parlementaires, en prévoyant des réunions communes de la commission des affaires sociales et de la commission des finances, en procédant à des auditions publiques.

M. Pierre Forgues.

On a entendu ça mille fois !

M. Bernard Accoyer.

Nous avons pu constater tout à l'heure, lorsque nous en avons débattu, que la gravissime question de l'adoption par les célibataires et les pacsés homosexuels n'avait pas été examinée au fond. Le Gouvernement, en séance, nous a concédé, à nous dont le premier devoir est la protection de l'enfant, que, dans quelques mois, selon son bon vouloir, il nous proposerait de légiférer sur cette question ô combien urgente ! Vous nous avez accusés de faire de l'obstruction, monsieur le rapporteur, mais personne n'a oublié que, le 9 octobre, Mme la garde des sceaux a répété deux fois son discours à la tribune et que, par un certain nombre


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

de manoeuvres dilatoires, de la majorité a différé de dix heures quarante-cinq à quinze heures trente le vote d'une motion de procédure, laquelle, finalement, a été adoptée par l'opposition, qui était, « à ce moment-là », comme vous dites, majoritaire.

M. Michel Bouvard.

Très bien !

M. Patrick Ollier.

Ils l'ont oublié !

M. Bernard Accoyer.

Je vous demande donc, monsieur le rapporteur, de ne plus revenir sur cette question.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

En réalité, nous recourons au seul moyen dont nous disposons pour aborder au fond les questions gravissimes que pose votre texte.

M. Lucien Degauchy.

Très juste !

M. Jacques Fleury.

C'est ridicule !

M. Bernard Accoyer.

L'amendement no 431 pose, lui aussi, une question importante, et si le travail préparatoire indispensable dont je parlais à l'instant avait été mené, nous n'aurions pas à l'aborder maintenant.

Vous nous avez dit que le PACS était fondé sur deux éléments : un lien sexuel et une solidarité qui se traduit par des avantages matériels, fiscaux et sociaux. En outre, le PACS peut être conclu de façon itérative, la nouvelle version, préparée tout aussi rapidement que la précédente, prévoyant un préavis de rupture de trois mois, toujours par lettre recommandée - peut-être par fax, pourquoi pas ? Il faudrait le préciser. (Sourires.)

Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République.

Le fax du PACS !

M. Bernard Accoyer.

Dans de telles conditions, mes chers collègues, il convient de s'interroger sur le délai à imposer entre la conclusion de PACS successifs. Cela s'impose d'autant plus que la conclusion d'un PACS nécessite la transmission de documents, puisque vous avez décidé de ficher les « pacsés » dans les préfectures et que les listes devront être communiquées aux préfectures des lieux de résidence successifs. Voyez la complexité du cheminement de ces dossiers, qui, de surcroît, introduira une faiblesse dans la nécessaire confidentialité qui s'attache à des choix personnels.

Je propose donc, par cet amendement, que deux PACS ne puissent être conclus successivement à moins de cinq ans d'intervalle.

M. le président.

La parole est à M. Yves Fromion, pour soutenir l'amendement no 729.

M. Yves Fromion.

Par cet amendement, mon excellent collègue M. Martin-Lalande a tenté, une fois de plus, de montrer les points faibles de cette procédure. En voilà un nouveau, quoique déjà souligné par plusieurs de mes collègues, qui tient au fait que l'on peut très facilement entrer et sortir d'un PACS. Afin de limiter les excès du recours à cette procédure, il vous est proposé de limiter à trois le nombre de PACS pouvant être signés par le même individu.

M. Michel Vergnier.

Tiens ! Voilà autre chose !

M. Yves Fromion.

Le bon sens de cette proposition n'échappera à personne : on sent bien que les avantages du PACS peuvent inciter à des dérives.

M. Michel Vergnier.

Eddie Barclay s'est marié sept fois !

M. Yves Fromion.

On en relève déjà pour les mariages, pourquoi n'y en aurait-il pas pour les PACS ? Il convient d'encadrer la procédure du PACS pour dissuader ceux qui seraient tentés d'en abuser. C'est le sens de l'excellente proposition de notre collègue M. Martin-Lalande.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur les deux amendements ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard, contre les amendements.

M. François Goulard.

Il n'y a rien d'extraordinaire, lorsqu'on appartient à l'opposition, à avoir sur certains points des opinions divergentes...

M. Michel Vergnier.

La droite se divise !

M. Guy Hascoët.

Cela devrait arriver plus souvent !

M. François Goulard.

Cela me paraît parfaitement légitime. La seule chose que l'on peut déplorer, c'est la polarisation excessive des opinions, favorisée par l'attitude de certains. Le sujet devrait appeler l'expression d'opinions infiniment plus nuancées dans chacun des camps.

Pour ma part, je suis contre les deux amendements présentés même si je respecte parfaitement l'opinion de mes collègues. Si le PACS devait être institué...

M. Alfred Recours.

Il le sera !

M. François Goulard.

... ce à quoi je suis, pour ma part, opposé, il me paraîtrait tout à fait abusif, au nom du respect de la liberté des uns et des autres, de prétendre limiter le nombre de PACS qu'une même personne peut signer successivement. L'homme ou la femme ont le droit de changer d'opinion ; cela relève de la décision individuelle. Les restrictions à cette liberté, comme le suggèrent mes deux collègues, me paraît excessive.

Sur l'obstruction parlementaire, monsieur le rapporteur, il y a beaucoup à dire. Peut-être pourrions-nous commencer chacun de notre côté par faire notre examen de conscience, et songer à nous mettre un jour autour d'une table pour parler de l'aménagement des règles qui régissent nos travaux.

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission, et

M. Jacques Fleury.

C'est une très bonne idée.

M. François Goulard.

C'est effectivement une possibilité, mais je ne crois pas que ce soit d'actualité ce soir...

M. le président.

Ce le sera mardi !

M. François Goulard.

... surtout après les incidents qui ont marqué le début de cette discussion.

Un sujet aussi sérieux exige de faire preuve de sérénité et d'être abordé à froid. Or c'est loin d'être le cas après la démonstration de la volonté du Gouvernement et de sa majorité d'empêcher carrément l'opposition de s'exprimer dans certaines circonstances, alors qu'elle en a constitutionnellement le droit.

(Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Alfred Recours.

Dix heures de motions de procédure !

Mme Christine Boutin.

Les motions de procédure font partie des droits de l'opposition !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

M. Alain Néri.

C'était pourtant bien parti...

M. Jean-Pierre Blazy.

C'est l'art de parler pour ne rien dire !

M. Philippe Houillon.

Vos réactions confirment ce que M. Goulard vient de dire !

Mme Michèle Alliot-Marie.

Monsieur le président, nous n'arrivons plus à entendre l'orateur.

M. François Goulard.

Je voudrais ajouter, si vous me permettez de m'exprimer, mais je pense que c'est du ressort du président, non du vôtre, mes chers collègues (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)...

M. le président.

Vous pouvez terminer, monsieur Goulard : vous avez encore droit à trente-cinq secondes !

M. François Goulard.

Enfin, peut-on s'exprimer dans cet hémicycle ? Le rapporteur est fort mal placé pour faire sur ce point la leçon à l'opposition. J'ai là une dépêche de l'AFP rapportant les propos de Mme la garde des sceaux en réponse aux critiques de la droite sur son attitude samedi soir, vers vingt-trois heures, pendant que notre collègue Patrick Devedjian présentait sa motion de renvoi, je n'irai pas jusqu'à prétendre que sa présentation ait fait l'unanimité,...

Plusieurs députés du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.

Elle a fait la minorité !

M. Alain Néri.

Restez modeste !

M. François Goulard.

... mais tout le monde s'est accordé à en reconnaître la qualité et le sérieux. Or Mme la ministre a confié que, pendant ce temps, elle avait lu un très beau livre de Jean Daniel, Avec le temps.

« C'est un très beau livre, a-t-elle ajouté, composé de petits passages qui permettent de s'abstraire de temps en temps quand on entend des horreurs. »

M. Christian Bataille.

Vous continuez à commenter la presse ! On s'en moque !

M. François Goulard.

M. Devedjian a-t-il dit des horreurs ? Je vous mets au défi de le prouver. Est-ce dire des horreurs, est-ce faire une manoeuvre d'obstruction que de présenter pendant deux heures de temps une motion aussi argumentée ? (« Oui ! » sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) Les déclarations de la ministre sont indignes des responsabilités qu'elle exerce. C'est elle qui a souillé ce débat. Ce n'est pas nous qui enfreignons des règles de démocratie. (Exclamations et huées sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. Jacques Fleury.

Hors sujet !

M. Christian Bataille.

Pantin !

Mme Christine Boutin.

Vous êtes mal à l'aise, vous perdez les pédales !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 431.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 729.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

MM. Accoyer, Muselier et Doligé ont présenté un amendement, no 430, ainsi rédigé :

« Compléter le dernier alinéa du texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par les mots : "ou séparée de corps". »

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Cet amendement de précision démontre, une nouvelle fois, combien le texte a été hâtivement élaboré. Il vous est proposé de compléter le dernier alinéa du texte proposé pour l'article 515-2 par les mots : « ou séparée de corps ».

En effet, la séparation de corps ne dissout pas le mariage, elle met seulement fin au devoir de cohabitation. On a relevé le risque de polygamie lorsqu'un PACS est conclu par un individu déjà lié par les obligations du mariage civil. Il est stupéfiant que ce point n'ait pas été pris en considération dans le texte de loi. Celui-ci prévoit que le PACS sera déposé à la préfecture du département dans lequel les deux « pacsés » établiront leur résidence d'un commun accord. Il n'est même pas précisé s'ils doivent avoir une résidence commune, mais simplement qu'ils habitent tous deux dans le département. Nous sommes dans la plus totale improvisation, et c'est justement pour démontrer une fois de plus le caractère improvisé de ce texte, inadmissible s'agissant des droits fondamentaux de la famille, que j'ai déposé cet amendement.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Monsieur le président, s'agit-il vraiment de l'amendement no 430 ? A écouter M. Accoyer, je croyais qu'il parlait d'autre chose...

M. Thierry Mariani.

Vous devriez le lire !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

... car je ne vois pas qu'on y parle de préfecture ni de quoi que ce soit.

La commission a évidemment repoussé l'amendement.

Ce n'est pas un amendement d'obstruction, monsieur Accoyer : c'est un amendement de profonde méconnaissance du droit.

Le texte en discussion, soyez-en certain, a été préparé sérieusement...

M. Thierry Mariani.

Autrement dit, nous sommes de trop !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

... par vos rapporteurs, entourés des administrateurs de la commission des lois, avec les conseils judicieux du Gouvernement et de juristes distingués. Vous comme moi savons qu'il est de bon ton de jouer la comédie en séance...

Mme Michèle Alliot-Marie.

Si quelqu'un joue ici la comédie, c'est vous !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

... et de prendre un ton très sérieux pour dire des choses qui ne le sont pas.

Chacun sait que ceux qui sont séparés de corps sont toujours mariés.

M. Bernard Accoyer.

Eh bien alors ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Et comme le texte précise bien que le PACS n'est pas possible pour les gens mariés, il va de soi qu'il en est de même pour les séparés de corps. Ce n'est pas la peine de le préciser.

M. Bernard Accoyer.

Pourquoi pas !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Monsieur Accoyer, vous avez montré votre profonde méconnaissance du droit civil. C'est regrettable pour le porte-parole du groupe RPR sur ce texte.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

M. Thierry Mariani.

Il n'en est pas le porte-parole !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Exactement le même avis que le rapporteur.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 430.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. Dominique Dord.

Monsieur le président, je demande la parole.

M. le président.

Pour un rappel au règlement ?

M. Dominique Dord.

Oui, monsieur le président, sur l'article 58...

M. le président.

Monsieur Dord, n'invoquez pas l'article 58 qui mentionne simplement l'existence de rappels au règlement : il faut nous dire sur quel article votre rappel se fonde réellement.

M. Jean-Pierre Blazy.

Il va nous parler des services vétérinaires !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

M. Dord ne connaît pas très bien le règlement !

M. Dominique Dord.

Monsieur le président, nous débattons depuis trois heures. Il reste encore beaucoup d'amendements à examiner. Nombre de nos collègues ont sans doute besoin de se reposer.

Je demande une suspension de séance de quinze minutes pour réunir mon groupe. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Didier Migaud.

Plutôt trente secondes !

M. le président.

La suspension de séance à la demande d'un président de groupe ou d'un délégué ayant son pouvoir est de droit.

Je vous accorde cinq minutes, monsieur Dord.

Suspension et reprise de la séance

M. le président.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-trois heures cinquante-cinq, est reprise le 9 novembre 1998, à zéro heure, sous la présidence de M. Raymond Forni.)

PRÉSIDENCE DE M. RAYMOND FORNI,

vice-président

M. le président.

La séance est reprise.

Je suis saisi de quatre amendements nos 87, 294, 827 et 659, pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements nos 87 et 294 sont identiques.

L'amendement no 87 est présenté par Mme Boutin et

M. Dord, l'amendement no 294 est présenté par MM. Mariani et Masdeu-Arus.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa suivant :

« 4o Entre deux personnes dont l'une au moins est mineure. »

L'amendement no 827, présenté par MM. Doligé, Jean-Pierre Dupont et Devedjian, est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa (4o ) suivant :

« 4o Entre deux personnes dont l'une au moins est un mineur. »

L'amendement no 659, présenté par M. de Courson, est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa suivant :

« 4o L'homme avant dix-huit ans révolus et la femme avant quinze ans révolus ne peuvent contracter un pacte civil de solidarité sauf dans les cas prévus aux articles 145 à 160 du code civil. »

Monsieur le rapporteur, je pense que ces amendements tombent ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

En effet, monsieur le président !

M. le président.

Les amendements nos 87, 294, 827 et 659 n'ont plus d'objet.

Je suis saisi de deux amendements, nos 293 et 433, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 293, présenté par M. Mariani et M. Masdeu-Arus, est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa suivant :

« 4o Entre deux personnes dont l'une au moins est un mineur émancipé. »

L'amendement no 433, présenté par MM. Accoyer, Muselier, Demange et Quentin, est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa suivant :

« 4o avec un mineur émancipé. »

La parole est à M. Thierry Mariani, pour soutenir l'amendement no 293.

M. Thierry Mariani. La page 9, où figure le fameux tableau comparatif entre les trois régimes, du rapport nous apprend qu'un mineur émancipé peut conclure un PACS. C'est inadmissible. Beaucoup de mineurs émancipés vivent dans des situations précaires et souvent, hélas, dans des situations fragiles. Ils sont des cibles faciles pour certaines personnes sans scrupules. Compte tenu du caractère du PACS, je pense qu'il n'est pas sain de permettre aux mineurs émancipés d'en conclure.

Voilà l'objet de cet amendement. Il se place dans la ligne claire adoptée par l'opposition depuis le début de ce débat : faire en sorte que les droits des plus faibles soient préservés.

M. le président.

Merci, monsieur Mariani, d'avoir été bref.

L'amendement no 433 a la même teneur.

Quel est l'avis de la commission ? M. Jean-Pierre Michel, rapporteur. Ces amendements tombent, car ils visent les mineurs émancipés, dont nous avons parlé à propos de l'amendement de M. Albertini.

M. le président.

Les amendements nos 293 et 433 n'ont en effet plus d'objet.

Je suis saisi de quatre amendements nos 296, 612, 295 et 88, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 296, présenté par M. Mariani, est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa suivant :

« 4o Entre deux personnes dont l'une au moins est visée à l'article 1124 du présent code. »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

L'amendement no 612, présenté par M. Dutreil et M. Herbillon, est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par les alinéas suivants :

« 4o Les mineurs non émancipés ;

« 5o Les majeurs protégés au sens de l'article 488 du présent code. »

L'amendement no 295, présenté par M. Mariani et M. Masdeu-Arus, est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa suivant :

« 4o Entre deux personnes dont l'une au moins est un majeur protégé au sens de l'article 488 du présent code. »

L'amendement no 88, présenté par Mme Boutin et M. Dord, est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa suivant :

« Le majeur en tutelle ou en curatelle ne peut conclure un PACS sans l'accord de son tuteur ou de son curateur. »

La parole est à M. Thierry Mariani, pour soutenir l'amendement no 296.

M. Thierry Mariani. Mes amendements nos 296 et 295 sont défendus.

M. le président.

La parole est à Mme Boutin, pour défendre l'amendement no

88.

Mme Christine Boutin.

Je regrette que vous ayez été aussi rapide, monsieur le président : je n'ai pas eu le temps de rejoindre ma place dans l'hémicycle pour défendre mon amendement précédent ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Mme Yvette Roudy.

Il fallait courir plus vite !

Mme Christine Boutin.

Je n'ai pas besoin de leçon, madame, car j'ai démontré que j'étais capable d'être un coureur de fond !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Et vous connaissez la solitude du coureur de fond !

Mme Christine Boutin.

On ne peut décidément pas s'exprimer dans cet hémicycle !

Mme Michèle Alliot-Marie.

C'est la conception socialiste de la démocratie !

M. le président.

Mes chers collègues, seule Mme Boutin a la parole.

Mme Christine Boutin.

Cet amendement a pour objectif de combler une des nombreuses lacunes du texte, lequel fait l'impasse sur la question des capacités des cocontractants. Il me semble important d'adopter la précision que je propose, par prudence.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur les quatre amendements ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a déjà indiqué que ces amendements devaient être rejetés puisque les règles générales de capacité des contrats et du consentement s'appliquaient.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Même avis.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 296.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 612.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 295.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

88. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Mme Boutin a présenté un amendement, no 90, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa suivant :

« Seuls les Français peuvent conclure un pacte civil de solidarité. »

La parole est à Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin.

Cet amendement entend clarifier le débat et éviter des jurisprudences ultérieures. Il faut empêcher les fraudes pour l'obtention des cartes de séjour.

Le problème est réel et j'espère que j'obtiendrai une réponse très précise, en particulier du Gouvernement, sur cette affaire, puisque sont en jeu, naturellement, tous les problèmes d'immigration clandestine.

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Vous n'êtes pas favorables à l'immigration clandestine, que je sache !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a repoussé cet amendement.

Je considère quant à moi qu'il est de nature inconstitutionnelle car contraire au préambule de la Constitution et à la Déclaration des droits de l'homme.

Au surplus, je m'étonne, madame Boutin, que vous, vous repreniez les très mauvais arguments sur la préférence nationale dont on sait par qui ils sont défendus dans ce pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pur la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Thierry Mariani.

C'est de la caricature !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Cet amendement vise à réserver la conclusion d'un pacte civil de solidarité à deux ressortissants français. Le Gouvernement y est défavorable, d'abord parce que cet amendement est contraire à la tradition de notre code civil qui ne ferme pas les droits civils aux étrangers au seul motif qu'ils sont étrangers ; ensuite parce qu'en droit international privé il est admis qu'un contrat peut être régi par la loi du pays avec lequel cet acte présente un lien de rattachement suffisant, tel que le lieu où doit s'exécuter la convention ; enfin, parce qu'appliqués au pacte civil de solidarité ces principes conduisent à faire régir la convention par la loi française dès lors que l'un de ses membres possède une attache avec notre pays. Cette attache peut consister dans la nationalité française de l'un des signataires sans que l'autre doive obligatoirement posséder aussi cette nationalité.

Voilà pourquoi je suis défavorable à l'amendement.

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

Très bien !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

M. François Goulard.

Je demande la parole, monsieur le président.

M. le président.

Je vous prie de m'excuser, monsieur Goulard, mais M. Marcovitch m'a également demandé la parole contre l'amendement. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. François Goulard.

Je l'avais demandée avant lui ! Je vais finir par demander une suspension de séance !

M. le président.

Vous aurez la parole dans quelques instants, mais il n'appartient qu'à moi de présider les débats ! La parole est à M. Daniel Marcovitch.

M. Daniel Marcovitch.

Pour toutes les raisons qui viennent d'être évoquées tant par le rapporteur que par

Mme la ministre, nous voterons contre l'amendement.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme Christine Boutin.

Ce n'est pas étonnant !

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Monsieur le président, il n'est pas dans mes intentions de remettre en question votre présidence. Je me bornerai à faire observer que M. Marcovitch n'a levé la main qu'après m'avoir vu le faire ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Monsieur Goulard, mon champ de vision ne me permet pas de regarder à la fois la droite et la gauche. C'est sans doute un défaut quand on préside, mais c'est une qualité quand on fait de la politique. (Sourires.)

M. François Goulard.

Je le reconnais bien volontiers !

M. Patrick Devedjian.

Demandez donc à M. Soisson !

M. Alain Barrau.

Ce n'est pas un exemple !

M. François Goulard.

Je voudrais, avec des termes moins excessifs et moins enflammés que M. le rapporteur et Mme la ministre, et en toute amitié, dire à Mme Boutin que je ne suis pas d'accord avec son amendement, pour deux raisons.

La première est évidente : les ressortissants de l'Union européenne doivent être placés sur un même plan que les Français au regard du droit civil comme au regard d'autres règles. L'autre raison - mais c'est là une opinion personnelle -, c'est qu'un étranger, quelle que soit son origine, doit pouvoir contracter comme un Français sur le plan civil, et donc un pacte civil de solidarité - à supposer naturellement que ce pacte soit adopté par notre assemblée et par le Parlement, ce que je ne souhaite pas.

M. le président.

Il eût été dommage, en effet, monsieur Goulard, de ne pas vous entendre. (Sourires.)

Je mets aux voix l'amendement no

90. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de quatre amendements, nos 301, 434, 202 et 300, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 301, présenté par MM. Mariani, Masdeu-Arus et Doligé, est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa suivant :

« 4o Entre deux personnes dont l'une au moinse st un étranger entré de façon irrégulière en France. »

L'amendement no 434, présenté par MM. Accoyer, Jacob, Muselier, Demange, Fromion, Delnatte, Quentin et Ferrand, est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa suivant :

« 4o Avec des personnes séjournant illégalement sur le territoire national. »

Les amendements nos 202 et 300 sont identiques.

L'amendement no 202 est présenté par M. Estrosi ; l'amendement no 300 est présenté par MM. Mariani, Masdeu-Arus et Doligé.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa suivant :

« 4o Entre deux personnes dont l'une au moins est un étranger dont le séjour en France est irrégulier au regard des lois et conventions relatives au séjour des étrangers en France. »

La parole est à M. Thierry Mariani, pour soutenir l'amendement no 301.

M. Thierry Mariani.

Si l'on en croit les déclarations des membres de la majorité, les effets du PACS sur l'entrée et le séjour des étrangers en France auraient été limités...

M. François Lamy et M. Jean-Claude Lefort.

Et c'est reparti !

M. Thierry Mariani.

... puisque sa conclusion n'entraînerait pas le droit automatique à un titre de séjour.

En fait - et je vais le démontrer - il n'en est rien.

C'est bien un assouplissement de la première version du texte qui a finalement été adopté par la majorité. En effet, dans le texte initial examiné en commission, le PACS I - on finit par s'y perdre puisqu'au premier passage en commission des lois il y a eu deux versions du PACS -, étaient considérés comme ayant des liens personnels en France, et donc comme pouvant obtenir automatiquement un titre de séjour, les étrangers liés à un Français par un PACS depuis au moins un an, et à condition que leur entrée sur le territoire fût régulière.

Voilà ce qui était écrit dans le tout premier texte examiné en commission.

Par conséquent, deux conditions essentielles quoique insuffisantes étaient posées : un délai d'un an et la régularité de l'entrée sur le territoire.

Dans le nouveau texte, ce n'est plus le cas. Même si la conclusion d'un PACS ne constitue plus qu'un des éléments d'appréciation des liens personnels en France - mais qui peut sérieusement penser que ce motif ne sera pas dans tous les cas considéré comme suffisant, à partir du moment où la loi y fait expressément référence ? - il faut noter que toute condition de délai ou d'entrée régulière a disparu.

Si bien que le texte qui nous est présenté pourra servir de base à la régularisation de tous les sans-papiers qui, actuellement, ne remplissent pas les critères, pourtant largement assouplis. Il leur suffira de se lier à un Français par un PACS pour pouvoir prétendre sans délai au bénéfice d'une régularisation.

Je le répète, nous risquons de voir se développer dans les prochains mois, à l'instar des parrainages républicains de l'été dernier, la conclusion de « PACS républicains », à la seule fin de permettre la régularisation des sans-papiers.

En outre, comme vous avez refusé de limiter le nombre successif de PACS, rien n'empêchera certains d'en conclure trois successivement dans l'année !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

M. Lucien Degauchy.

Dérive dangereuse !

M. Thierry Mariani.

Le PACS constitue un risque dangereux en matière d'immigration. Mon amendement a donc pour objet de soumettre sa conclusion à une entrée régulière sur le territoire. C'est tout de même un minimum !

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer, pour défendre l'amendement no 434.

M. Bernard Accoyer.

Mon amendement no 434 est très voisin.

Le PACS est assorti d'avantages fiscaux et sociaux. Je propose de rendre impossible la conclusion d'un PACS aux personnes séjournant illégalement sur le territoire national. Il ne faudrait pas que non seulement le PACS devienne le moyen idéal de régularisation des personnes séjournant illégalement sur le territoire national - quelles que soient les raisons de cette illégalité -, mais permette aussi le dévoiement de notre système de protection sociale, dont nous savons combien il est fragile, et pour la sauvegarde duquel nous avons tous ensemble décidé d'essayer de faire un maximum d'efforts.

Pour toutes ces raisons, l'amendement no 434 mérite d'être adopté.

M. le président.

La parole est à M. Thierry Mariani pour défendre l'amendement no 300.

M. Thierry Mariani.

Mon amendement no 301 visait les étrangers entrés en situation irrégulière. Celui-ci vise ceux qui séjournent irrégulièrement en France. (Rires sur les bancs du groupe socialiste.) Il y a une différence !

M. Michel Bouvard.

Nos collègues socialistes ne sont pas des juristes !

M. Thierry Mariani.

Le coût financier du PACS risque d'être lourd.

M. Michel Bouvard.

On taxera un peu plus les familles !

M. Thierry Mariani.

Il semble particulièrement choquant de faire profiter du PACS des étrangers qui auraient bafoué nos lois, soit en entrant, soit en séjournant illégalement sur notre territoire. On ne saurait méconnaître les lois françaises quand elles gênent et demander à en bénéficier quand elles apportent des avantages !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a déjà tranché cette question puisqu'elle s'est prononcée contre des amendements précédents interdisant à des étrangers en situation irrégulière de conclure un PACS.

Nous reviendrons, monsieur Mariani, sur cette question au moment de la discussion sur l'article 6 - mais vraisemblablement pas ce soir.

Effectivement, une première mouture de l'article 6 était beaucoup plus large que la rédaction actuelle. Elle ouvrait un droit à la régularisation. Avec la présente rédaction, l'administration gardera son entière capacité d'apprécier si le PACS est constitutif de la vie privée. Je vous signale - mais vous le savez mieux que moi, car vous êtes un expert en cette matière, ayant suivi le débat sur la loi RESEDA - qu'actuellement, pour les concubins, l'administration exige cinq ans de vie commune.

Peut-être exigera-t-elle un peu moins pour le PACS - je le souhaite -, parce qu'il y aura un engagement et la conclusion d'un contrat.

M. Michel Bouvard.

Quel aveu !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Cela évitera les PACS successifs tous les trois mois, dont vous dénonciez le risque tout à l'heure.

La commission est contre ces amendements.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 301.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 434.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 202 et 300.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

Mme Boutin, M. Dord et M. Christian Martin ont présenté un amendement, no 86, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa suivant :

« 4o Entre deux personnes n'ayant pas cohabité pendant au moins un an. »

La parole est à M. Dominique Dord.

M. Dominique Dord.

Cet amendement vise à préciser la notion de vie commune, car le texte n'a aucune exigence en la matière, alors même qu'il précise que le PACS est conclu afin que deux partenaires puissent organiser leur vie commune. Il ne fait qu'évoquer, pour définir la vie commune, des conditions matérielles - aides matérielles, acquisitions de biens, revenus -, mais à aucun moment il n'exige la communauté de vie, la cohabitation, la communauté de toit pour les pacsés.

Ce serait pourtant la moindre des choses, compte tenu du nombre d'avantages fiscaux, successoraux, mais aussi sociaux auxquels le PACS va ouvrir droit. A défaut nous prendrions le risque - aucun d'entre nous ici, je pense, ne souhaite le prendre - de voir se multiplier les PACS blancs. Il s'agit donc d'instaurer une manière de mise à l'épreuve des personnes souhaitant conclure un PACS en leur demandant une cohabitation minimum d'un an.

Je pense que cet amendement devrait faire l'unanimité.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a déjà rejeté des amendements semblables. Le PACS n'est pas le constat d'une cohabitation antérieure : c'est un point de départ à partir duquel, après certains délais, des droits sont ouverts. La commission est contre l'amendement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Même avis.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

86. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

L'amendement no 692 n'est pas défendu.

Je suis saisi de deux amendements, nos 797 et 863, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 797, présenté par M. Perrut, est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa suivant :

« 4o Entre deux personnes dont l'une au moins a été autorisée à adopter un enfant. »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

L'amendement no 863, présenté par M. Accoyer et M. Muselier, est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa suivant :

« 4o Entre deux personnes de même sexe dont l'une a été autorisée à adopter un enfant. »

La parole est à M. Dominique Dord, pour défendre l'amendement no 797.

M. Dominique Dord.

On en a déjà évoqué la teneur tout à l'heure...

M. Jean-Jacques Filleul.

Alors...

M. Dominique Dord.

... mais il y a cette fois une précision un peu particulière.

Certaines personnes ayant adopté un enfant dans le cadre d'un mariage précédent voudront conclure un PACS avec une personne de même sexe. J'ai bien entendu les remarques, tout à l'heure, s'agissant d'une personne qui aurait déjà la garde d'un enfant, mais, dans cette hypothèse, nous ferions courir à l'enfant...

M. Patrick Bloche, rapporteur pour avis.

C'est reparti !

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

Après le mariage à l'essai, c'est le mariage obligatoire !

M. Dominique Dord.

... un risque considérable et supplémentaire d'être déstabilisé après une première rupture affective que constitue, selon les cas, l'abandon, ou encore la perte ou l'éloignement de ses parents d'origine.

Nous pourrions donc compléter l'article 515-2 du code civil par un quatrième alinéa qui interdirait à deux personnes du même sexe dont l'une au moins a été autorisée à adopter un enfant à conclure un PACS.

Dans les enquêtes sociales qui précèdent systématiquement les démarches d'adoption (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste)...

M. le président.

Monsieur Dord, voulez-vous conclure, s'il vous plaît ?

M. Thierry Mariani.

Il a cinq minutes !

M. Dominique Dord.

Je n'arrive pas à conclure puisque je suis interrompu. A vrai dire, monsieur le président, j'ai du mal à comprendre qu'on puisse m'interrompre s'agissant d'un sujet d'une telle gravité ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Les enquêtes sociales qui précèdent les démarches d'adoption sont très longues et pointilleuses. Demandez à tous ceux qui sont engagés dans des démarches d'adoption les difficultés que cela représente ! Les autorités de tutelle sont extrêmement vigilantes avant d'accorder à un couple la possibilité d'adopter. Honnêtement, si une personne ayant obtenu une adoption souscrivait ensuite un PACS avec une personne du même sexe, cela modifierait profondément les conditions de l'adoption.

C'est la raison pour laquelle je vous propose cet amendement, en espérant être suivi par la majorité de l'Assemblée.

M. le président.

Monsieur Dord, la mention : « de même sexe » n'apparaît pas dans votre amendement. Si vous y introduisez cette notion, il est presque identique à l'amendement no 863, ce qui dispensera peut-être

M. Accoyer de longues explications.

La parole est à M. Bernard Accoyer, pour défendre l'amendement no 863.

M. Bernard Accoyer.

Vous avez raison, monsieur le président, je me bornerai à compléter les propos de M. Dord sur cette question fondamentale qui, selon

Mme la garde des sceaux, est au coeur du débat.

Cependant, on regrette une nouvelle fois que ce débat n'ait pas pu se dérouler calmement, avec un certain consensus, pendant les mois qui auraient été nécessaires à la préparation d'un texte aussi important.

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

Vous avez refusé de l'étudier !

M. Renaud Donnedieu de Vabres.

C'est faux !

M. Bernard Accoyer.

Etant entendu que l'arrêt du Conseil d'Etat du 18 février 1994 précise qu'il n'y a pas lieu de repousser systématiquement les demandes d'adoption émanant de personnes célibataires homosexuelles, cet amendement est particulièrement important pour protéger l'enfant.

Il faut introduire une telle disposition dans l'article 1er

Ce serait l'occasion pour le Gouvernement de mettre de l'ordre entre ce qu'il prétend possible et ce qui est possible à partir de ce texte...

M. le président.

Merci, monsieur Accoyer.

M. Pierre Lellouche.

Cela ne fait pas cinq minutes !

M. Bernard Accoyer.

Le Gouvernement nous précise que la famille, c'est un père et une mère de sexes différents.

M. Jacques Fleury.

Pour un père et une mère, c'est généralement le cas !

M. Bernard Accoyer.

Nous sommes d'accord avec le Gouvernement, car c'est la seule cellule qui permette le développement harmonieux d'un enfant sur le plan psychique. Or, si cette précision n'est pas mentionnée dans l'article 1er , il y aura immanquablement des familles qui seront encouragées, avec l'aide de la nation, à s'organiser sur un modèle différent, que nous rejetons.

Pour toutes ces raisons, il faut adopter l'amendement no 863.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos 797 et 863 ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a rejeté tout à l'heure des amendements de même nature après un long débat, après les explications de Mme la ministre et après des scrutins publics. Je propose donc que nous rejetions également ces deux amendements.

Mme Christine Boutin.

Pas un seul amendement n'a été retenu !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Je trouve ces deux amendements parfaitement choquants. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Bernard Accoyer.

C'est votre texte qui est choquant !

Mme la garde des sceaux.

Ce serait un comble de pénaliser une personne, quels que soient ses choix sexuels, qui a été légalement et antérieurement autorisée par un juge à adopter un enfant.

M. Bernard Accoyer.

Il faut protéger l'enfant ! C'est notre devoir !

Mme la garde des sceaux.

Le PACS ne peut pas et ne doit pas interrompre une parenté antérieure, qu'elle soit naturelle ou adoptive,...

M. Bernard Accoyer.

Cette personne n'est pas obligée de pacser !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

M. Guy Hascoët.

Cela la regarde !

Mme la garde des sceaux.

... de la même façon que la parenté antérieure ne saurait faire obstacle au PACS.

M. Pierre Lellouche.

Où est l'intérêt de l'enfant, dont vous parliez tout à l'heure ? Vous vous contredisez !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 797.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 863.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Dord, Mme Boutin, MM. Gengenwin, Perrut et Christian Martin ont présenté un amendement, no 89, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa suivant :

« 4o Entre deux personnes de même sexe dont l'une au moins a la garde légale d'un mineur. »

La parole est à M. François Goulard, pour défendre cet amendement.

M. François Goulard.

C'est vrai que nous tournons autour des mêmes sujets avec ces différents amendements.

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Plusieurs députés du groupe socialiste.

C'est vrai !

M. Guy Hascoët.

Pour tourner, on tourne !

M. François Goulard.

Mes chers collègues, c'est un sujet suffisamment sérieux pour que nous en parlions dans le calme.

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

M. Goulard a au moins le mérite de reconnaître que nous sommes sur le même sujet,...

M. François Goulard.

C'est vrai !

M. le président.

... s'agissant d'un amendement qui est pratiquement rédigé de manière identique aux précédents,...

M. François Goulard.

Ils sont très voisins !

M. le président.

... ce qui va lui permettre d'être bref, ...

M. Bernard Roman.

On tourne en rond !

M. le président.

... si vous ne l'interrompez pas, bien entendu.

Poursuivez, monsieur Goulard.

M. François Goulard.

Mme la ministre vient de dire que deux de nos amendements étaient choquants.

Je ne crois pas que nous ayons intérêt à utiliser un tel vocabulaire, parce que c'est celui de la polémique.

Mes collègues qui ont déposé ces amendements pensaient à des situations douloureuses. On peut avoir une opinion ou une autre, mais on ne peut nier qu'il y ait un réel problème. Si quelqu'un ayant la garde légale d'un mineur conclut un PACS avec une personne du même sexe, nous aurons de facto un enfant mineur qui va être élevé par un couple homosexuel.

Plusieurs députés du groupe socialiste.

Et alors ?

M. François Goulard.

C'est une réalité.

Je ne dis pas que de telles situations n'existent pas.

Simplement, Mme la ministre nous a affirmé tout à l'heure que le Gouvernement était formellement opposé à l'adoption d'un enfant par un couple homosexuel, et je pense que l'immense majorité de notre assemblée était de son avis. Or quelle différence y a-t-il en pratique entre l'adoption d'un enfant par un couple homosexuel et le fait qu'une personne ayant la garde d'un mineur conclue un PACS avec une personne du même sexe ? Sur le plan légal, il y a une différence évidente qui n'échappe à personne mais, en pratique, nous nous trouvons dans la même situation : un enfant élevé au sein d'un couple homosexuel.

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Alfred Recours.

Allez planter des choux !

M. François Goulard.

Je vois que Mme la ministre lit encore son roman, qui est certainement passionnant (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert)...

M. le président.

Je vous en prie.

M. François Goulard.

... mais la situation pratique est la même que celle que nous évoquions tout à l'heure.

Qualifier de choquant le dépôt d'un amendement qui pose un problème de cet ordre, quelle que soit, encore une fois, la réponse qu'on y apporte, me paraît donc totalement déplacé. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Défavorable. La commission a déjà répondu deux fois non à une telle disposition, lorsqu'elle a refusé un amendement du même type concernant les gens qui avaient déjà pu adopter, et lorsqu'elle a expliqué que, dans le cas d'un parent ayant la garde légale d'un enfant et décidant de pacser, l'autre parent, s'il existe, pourra toujours saisir le juge, qui pourra décider une modification de la garde.

M. Pierre Lellouche.

Tu parles !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Il y a un garde-fou !

Mme Michèle Alliot-Marie.

Dans ces conditions, il ne faut pas tenir de grands discours sur l'intérêt de l'enfant !

M.

le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. André Angot.

Mme Guigou s'en moque : elle lit son roman !

Mme la garde des sceaux.

Je suis contre cet amendement pour les raisons que j'ai indiquées tout à l'heure. Si j'ai trouvé les deux précédents amendements choquants, monsieur Goulard, je trouve celui-ci scandaleux. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

89. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. Henri Plagnol.

Je demande la parole pour un rappel au règlement, monsieur le président.

M. le président.

Sur quelle disposition du règlement vous appuyez-vous ? Si c'est sur l'article 58, c'est inutile.

(Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

M. Thierry Mariani.

Pourquoi ?

M. Pierre Lellouche.

Vous l'avez supprimé ?

M. Henri Plagnol.

Vous me permettez de m'exprimer, monsieur le président ?

M. le président.

Je vous le répète, monsieur Plagnol, je vous donnerai l'autorisation de vous exprimer lorsque v ous m'aurez dit sur quelle disposition vous vous appuyez. Si tel n'est pas le cas, nous passerons à l'amendement no 297.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Enfin un président qui préside. Très bien !

M. Henri Plagnol.

Je me fonde sur l'article 56. Monsieur le président, vous qui êtes un homme connu pour votre courtoisie...

M. le président.

Monsieur Plagnol, permettez-moi de vous rappeler les termes de l'article 56.

Les ministres, les présidents et les rapporteurs des commissions saisies au fond obtiennent la parole quand ils la demandent. Les commissaires du Gouvernement peuvent également intervenir. Le président peut autoriser un orateur à répondre au Gouvernement ou à la commission. Par conséquent, vous n'avez pas la parole et nous allons passer à l'amendement no 297.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. Vives protestationss ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Georges Tron.

C'est lamentable !

M. Patrick Devedjian.

Rappel au règlement.

M. Georges Tron.

Arrêtez la discussion dans ce cas ! On n'a qu'à partir, ce sera plus simple !

M. le président.

Mes chers collègues, je vous lance un appel à la raison et au sérieux. On ne peut pas faire n'importe quoi dans cet hémicycle.

M. Henri Plagnol.

C'est inadmissible !

M. le président.

J'ai interrogé M. Plagnol,...

M. Henri Plagnol.

Vous ne m'avez pas laissé le temps de répondre !

M. le président.

... et il m'a donné comme référence l'article 56 du règlement qui ne l'autorise absolument pas à intervenir, car, que je sache, ni le Gouvernement ni la commission n'ont demandé la parole.

M. Georges Tron.

Pourquoi avoir exclu l'article 58 ?

M.

le président.

Je fais respecter le règlement !

M. Henri Plagnol.

Monsieur le président...

Plusieurs députés du groupe socialiste.

Vous êtes ridicule !

M. Patrick Devedjian.

Rappel au règlement !

M. le président.

Sur quelle disposition vous fondezvous, monsieur Devedjian ?

M. Patrick Devedjian.

Je demande une suspension de séance pour réunir mon groupe afin d'étudier le règlement, monsieur le président.

(Applaudissement sur plu-s ieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la république, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Mes chers collègues, la suspension demandée par un groupe étant de droit, je suspends la séance cinq minutes en demandant à ceux qui ne se réunissent pas de rester à leur place.

Suspension et reprise de la séance

M. le président.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à zéro heure trente-cinq, est reprise à zéro heure quarante.)

M. le président.

La séance est reprise.

M. Mariani et M. Masdeu-Arus ont présenté un amendement, no 297, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa suivant :

« 4o Entre deux personnes dont le consentement de l'une au moins n'a été donné que par erreur. »

La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

L'amendement no 297 vise à combler une lacune du texte puisqu'il est proposé d'ajouter à la liste des causes de nullité les PACS conclus entre deux personnes dont le consentement de l'une au moins n'a été donné que par erreur.

(Rires sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) Puisque vous riez, je vais vous donner très rapidement la définition de l'erreur que donne un manuel de droit. On distingue ainsi trois catégories d'erreurs : l'erreur obstacle qui détruit le consentement, l'erreur qui le vicie et l'erreur qui est indifférente à la validité du contrat.

M. Bernard Birsinger.

C'est vous l'erreur !

M. le président.

Cher collègue !

M. Thierry Mariani.

Je ne relèverai pas...

M. le président.

Merci !

M. Thierry Mariani.

... les erreurs et les taches de cet hémicycle ! L'erreur obstacle est celle qui porte sur la nature de la convention, sur l'objet ou sur la cause. Les contractants ne se sont pas entendus et ils n'ont pas voulu véritablement contracter. Même si cela vous fait sourire, mes chers collègues, si le chapitre relatif aux contrats prévoit l'erreur, c'est peut-être que cela existe, et il ne me semble pas illogique d'insérer cette notion dans ce texte.

M. le président.

M. Mariani, pouvez-vous, dans une présentation commune, nous parler, après l'erreur, du dol, puis de la violence ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

C'est de la séduction dolosive.

(Sourires.)

M. Thierry Mariani.

Avec plaisir, monsieur le président, en espérant que je n'aurai à subir de nouveau ni ricanements, ni quolibets, ni insultes.

(« Mais non ! » sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Alfred Recours.

Ne soyez pas complexé !

M. le président.

Je suis en effet saisi de deux amendements, nos 298 et 299.

L'amendement no 298, présenté par MM. Mariani, Masdeu-Arus et Doligé, est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa suivant :

« 4o Entre deux personnes dont le consentement de l'une au moins a été surpris par dol. »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

L'amendement no 299, présenté par MM. Mariani, Masdeu-Arus et Doligé, est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa suivant :

« 4o Entre deux personnes dont le consentement de l'une au moins a été extorqué par violence. »

La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

L'amendement no 298 a pour objet de pallier les erreurs, ou au moins les manquements du texte.

En cas de dol, l'un des contractants non seulement s'est trompé, mais a été trompé ; il me semble nécessaire de le préciser.

Quant à l'amendement no 299, il tend lui aussi à insérer une précision qui n'est pas inutile ; elle permet d'éviter des dérives qui nous inquiètent.

Vous le voyez, lorsque je ne suis ni interrompu, ni insulté, je défends calmement et brièvement mes amendements !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

J'ai déjà indiqué à la commission que les règles générales du consentement s'appliquaient au PACS. Il n'y a donc pas lieu de les reformuler.

Ces amendements sont inutiles, et je propose leur rejet.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Même avis.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 297.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 298.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 299.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements nos 435 et 828, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 435, présenté par MM. Accoyer, Muselier, Quentin et Doligé, est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa suivant :

« Ceux ou celles qui contreviendraient à l'une de ces prohibitions seront passibles d'une peine d'un an d'emprisonnement et 300 000 francs d'amende. »

L'amendement no 828, présenté par MM. Doligé, Jean-Pierre Dupont et Devedjian, est ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa suivant :

« Celui ou celle qui contreviendrait à l'une des prohibitions énoncées au présent article sera puni des peines édictées par l'article 433-20 du code pénal. »

La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l'amendement no 435.

M. Bernard Accoyer.

Si l'article 515-2 énonce des causes de nullité, il ne dit pas, en revanche, que le fait de contracter un PACS dans ces conditions constituerait des délits passibles de certaines sanctions. Ces délits sont la polygamie, l'inceste, les fraudes fiscales et les fraudes à la sécurité sociale. C'est la raison pour laquelle nous vous demandons d'adopter l'amendement no 435.

M. le président.

La parole est à M. Thierry Mariani, pour soutenir l'amendement 828.

M. Thierry Mariani.

L'amendement no 828 est défendu.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a émis un avis défavorable. Elle ne souhaite pas ajouter des pénalités à celles qui existent déjà dans le code pénal, et qui prohibent l'inceste et les autres délits qui viennent d'être énumérés.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Le Gouvernement estime que ces amendement sont inutiles, parce que la nullité, déjà prévue par l'article, paraît constituer une sanction suffisante. En cas de fausse déclaration, la sanction est déjà prévue.

En outre, ces amendements sont incohérents, car les causes de nullité du mariage - et la bigamie n'en est qu'une parmi d'autres - ne sont en principe pas pénalement sanctionnées. Un père n'a pas le droit d'épouser sa fille, mais un tel mariage ne constitue pas une infraction.

Pourquoi voudrait-on dès lors réprimer pénalement un père qui conclurait un pacte civil de solidarité avec sa fille ?

M. Georges Tron et M. Patrick Devedjian.

C'est effrayant !

Mme la garde des sceaux.

Cela reviendrait à mieux protéger le pacte civil de solidarité que le mariage, alors que le pacte civil de solidarité n'est pas un mariage bis et qu'il constituera donc, à l'évidence, une institution de notre droit dont la protection juridique doit être, certes, organisée, d'où la nullité, mais de façon moins pressante, que celle du mariage.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 435.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 828.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. de Courson a présenté un amendement, no 660, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa suivant :

« Il peut être formé opposition au contrat prévu à l'article 515-1 dans les mêmes conditions que celles prévues aux articles 172 à 179 du code civil. »

Cet amendement est soutenu.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Contre.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Contre.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 660.

(L'amendement n'est pas adopté.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

M. le président.

M. de Courson a présenté un amendement, no 661, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil par l'alinéa suivant :

« Les demandes en nullité du contrat prévu à l'article 515-1 s'effectuent selon les articles 180 à 202 du code civil. »

Je mets aux voix l'amendement no 661.

(L'amendement n'est pas adopté.)

APRÈS L'ARTICLE 515-2 DU CODE CIVIL

M. le président.

MM. Fromion, Martin-Lalande, Doligé et Accoyer ont présenté un amendement, no 785, ainsi rédigé :

« Après le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil, insérer l'article suivant :

« Art. 515-2-1 . - Avant de conclure un pacte civil de solidarité avec un partenaire de même sexe, une personne ayant la garde d'un enfant acquise à la suite d'une procédure de divorce doit en informer, trois mois avant la signature, l'autre parent ainsi que le juge ayant octroyé la garde. Le juge s'assure que l'autre parent a bien été informé. Si l'autre parent considère qu'il y a matière à réexaminer le jugement, ce réexamen est de droit.

« L'autorité judiciaire compétente pour la décision de l'octroi de la garde peut, si l'intérêt de l'enfant l'exige, retirer la garde de l'enfant à cette personne au profit d'un autre membre de la famille. Pour rendre son jugement, elle prend en compte les informations obtenues après une enquête sociale et les sentiments exprimés par l'enfant lors de son audition. »

La parole est à M. Yves Fromion.

M. Yves Fromion.

Nous avons déjà évoqué à plusieurs reprises le problème qui se pose lorsque, des deux signataires d'un PACS, l'un a un enfant, soit qu'il soit issu d'une union précédente, soit qu'il ait été adopté. Nous avons tous été d'accord, y compris le Gouvernement, pour reconnaître que le changement de cadre de vie offert à cet enfant pouvait donner lieu à une discussion.

L'article 291 du code civil dispose que, à la suite d'un divorce, le juge peut réexaminer la situation de l'enfant, et il ne vient à l'idée de personne de contester ce dispositif.

En revanche, se pose le problème de la publicité ou de l'opposabilité aux tiers. En cas de mariage, il y a publicité de bans. Les tiers sont informés et peuvent, s'il y a lieu, faire valoir des objections. Mais dans le cas du PACS, aucune publicité n'est prévue. Comment sera informé le juge qui aura eu à trancher sur la garde de l'enfant que la personne a qui il a confié cette garde va changer de statut ? Comment sera informé l'autre conjoint, celui qui a été privé de la garde de l'enfant au bénéfice de l'autre parent, que son ex-conjoint, s'il s'agit d'un divorce, va contracter un PACS ? Il est vrai, comme le rapporteur et le Gouvernement l'ont rappelé, que des procédures existent. Le juge et les services sociaux, qui seront naturellement amenés à donner un avis, font leur travail, mais encore faut-il que tout cela puisse fonctionner.

L'amendement no 785 a pour objet d'obliger une personne qui a la garde d'un enfant et qui va conclure un PACS à rendre publique son intention dans un délai que je propose de fixer à trois mois - mais je suis prêt à écouter tout autre argument et à sous-amender mon amendement.

Ainsi, le juge et l'autre parent, dans le cas d'un divorce, seront informés et ce dernier pourra faire valoir leurs droits.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission a donné un avis défavorable à cet amendement, bien que je le considère comme le meilleur de tous ceux que nous avons repoussé sur le même sujet. Si la commission n'a pas adopté cet amendement, c'est qu'elle en a trouvé la rédaction un peu lourde et sujette à discussion.

M. Yves Fromion.

Je peux le sous-amender, monsieur le rapporteur.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Nous n'allons pas faire ce travail en séance, monsieur Fromion. Je propose donc le rejet. Mais je ne suis pas hostile...

M. Pierre Lellouche.

Ah ! Enfin !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

... à ce que l'on écrive dans la loi, même si un parent peut toujours saisir le juge pour faire modifier une garde devenue suspecte, que le fait, lorsqu'une personne qui va conclure un PACS a la garde légale d'un enfant, elle en informe l'autre parent si ce dernier a simplement un droit de visite.

M. Yves Fromion.

Le juge aussi !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Je vous propose de régler ce point en deuxième lecture, ou à moins que nos collègues sénateurs s'en chargent.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Je suis d'accord avec le rapporteur.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 785.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. Yves Fromion.

C'est décourageant !

M. le président.

Mme Boutin et M. Dord ont présenté un amendement, no 91, ainsi rédigé :

« Après le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil, insérer l'article suivant :

« Art. 515-2-1. Le père, la mère, et à défaut de père et de mère, les aïeuls et aïeules peuvent former opposition à la conclusion du PACS par leurs enfants et descendants. »

La parole est à Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin.

Rien n'est prévu dans la proposition de loi en matière d'opposition à la conclusion d'un PACS. Des membres de la famille des contractants peuvent avoir des raisons légitimes de s'y opposer. C'est l'objet de l'amendement no

91.

M. le président.

Je vous remercie, madame Boutin, pour votre brièveté.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Nous ne sommes pas en matière de mariage ; nous sommes donc contre l'opposition au PACS. La commission a rejeté l'amendement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Même avis.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

91. (L'amendement n'est pas adopté.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

M. le président.

Mme Boutin a présenté un amendement, no 93, ainsi rédigé :

« Après le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil, insérer l'article suivant :

« Art. 515-2-3. - Les enfants aptes à exprimer leur volonté peuvent former opposition à la conclusion d'un PACS par l'un de leurs parents avec un tiers. »

La parole est à Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin.

L'amendement no 93 tient compte des enfants, qui sont les grands oubliés de ce texte.

Dans le cadre de la convention internationale des droits de l'enfant, comme de notre droit interne, nous p ortons une attention croissante à l'expression des enfants, notamment lors de la séparation de leurs parents.

Il peut être intéressant, lors de la conclusion d'un PACS, d'entendre les enfants qui sont aptes à exprimer leur volonté, de façon à tenir compte de leur avis mais aussi de leur propre intérêt.

Cet amendement a pour objet de donner la possibilité aux enfants aptes à exprimer leur volonté de former opposition à la conclusion d'un PACS par l'un de leur parent avec un tiers.

C'est là un des droits élémentaires qui pourrait être reconnu aux enfants des parents pacsés.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Mme Boutin a été souvent mieux inspirée. La commission a rejeté un amendement qui prévoyait que les aïeuls et aïeules puissent former opposition au PACS. Ils ne peuvent pas le faire pour le mariage, je le rappelle.

Il s'agit ici d'enfants aptes à exprimer leur volonté, donc d'enfants mineurs qui pourraient faire opposition à ce que l'un de leurs parents conclue un PACS...

Mme Christine Boutin.

Le juge peut les auditionner !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

... alors qu'ils ne peuvent même pas faire opposition au remariage de leurs parents ! La commission est donc hostile à cet amendement, qui est un peu folklorique !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

93. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Dord et Mme Boutin ont présenté un amendement, no 92, ainsi rédigé :

« Après le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil, insérer l'article suivant :

« Art. 515-2-2. - Les enfants majeurs peuvent former opposition à la conclusion d'un PACS par l'un de leurs parents avec un tiers. »

La parole est à M. Dominique Dord.

M. Dominique Dord.

M. le rapporteur, en vertu des discussions qui ont eu lieu en commission, refuse d'imaginer des formules d'opposition au PACS. Je me permets néanmoins de revenir à la charge sur ce sujet qui rejoint une des préoccupations que nous avons déjà exprimées lors de la discussion du texte proposé pour l'article 515-1.

L'objet du PACS est d'offrir une structure juridique à deux personnes qui veulent organiser leur vie commune.

Toutefois, il est possible que tel ne soit pas leur vrai but et qu'elles utilisent le PACS comme un outil, d'ailleurs commode comme l'ont rappelé plusieurs d'entre nous, pour bénéficier d'avantages ou de droits. Il peut se trouver que les enfants ou un tiers aient connaissance de cette absence de volonté d'organiser la vie commune. Il serait intéressant de prévoir une possibilité d'opposition ou de recours, qui ne figure pas dans le texte, alors même que l'article 1er définit l'objet du PACS, qui est, précisément, d'organiser la vie commune.

Cet amendement no 92 n'a rien de folklorique, monsieur le rapporteur : il pose une vraie question. Il essaie d'y apporter une réponse, et ne mérite pas d'être traité par le mépris, comme vous venez de le faire à l'encontre d'un amendement présenté par Mme Boutin.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

92. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Mme Boutin et M. Dord ont présenté un amendement, no 94, ainsi rédigé :

« Après le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil, insérer l'article suivant :

« Art. 515-2-4. Le conjoint d'un précédent mariage ou le contractant d'un précédent PACS peut former opposition à la conclusion d'un PACS par son précédent conjoint ou contractant. »

La parole est à Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin.

Cet amendement est retiré, monsieur le président.

M. le président.

L'amendement no 94 est retiré.

M. Myard, Mme Boutin, MM. Dord, Kossowski et Doligé ont présenté un amendement, no 95, ainsi libellé :

« Après le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil, insérer l'article suivant :

« Art. 515-2-5. Le ministère public peut former opposition à la conclusion d'un PACS. »

La parole est à Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin.

Nous pensons qu'il serait intéressant de permettre au ministère public, qui peut y avoir intérêt, notamment pour éviter des fraudes, de former opposition à un PACS.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Dévaforable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Cet amendement n'est pas nécessaire. Je rappelle que le mécanisme d'enregistrement du pacte civil de solidarité devra permettre les vérifications nécessaires à l'autorité publique qui l'enregistrera. Il n'est donc pas utile de confier un rôle particulier au ministère public, car cela ferait double emploi.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

95. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Mme Boutin, MM. Dord, Myard et Doligé ont présenté un amendement, no 96, ainsi rédigé :

« Après le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil, insérer l'article suivant :

« Art. 515-2-6. Les créanciers d'un PACS peuvent former opposition à la conclusion d'un PACS de leurs débiteurs. »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

La parole est à M. Dominique Dord.

M. Dominique Dord.

Je vous remercie, madame la ministre, de votre réponse, mais elle nous paraît surprenante et en tout cas très imprécise. Comment et avec quels moyens l'autorité chargée de valider le PACS procédera-t-elle. S'il s'agit des tribunaux d'instance, dont on connaît la surcharge de travail, je ne crois pas qu'on ait l'intention de les doter de moyens supplémentaires pour vérifier la validité des PACS...

M. le président.

Monsieur Dord, me permettez-vous de vous rappeler que l'amendement no 96 ne concerne pas les tribunaux d'instance. Venez-en donc, s'il vous plaît, à l'objet de cet amendement.

M. Dominique Dord.

L'amendement no 96 a en effet pour objet... (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Laissez M. Dord s'exprimer !

M. Dominique Dord.

Il s'agit ici de démarches d'opposition. Vous nous dites que l'amendement no 95 ne serait pas recevable au motif que la même autorité serait chargée d'enregistrer et de vérifier le PACS.

Je pense, mes chers collègues, que nous sommes en droit de nous interroger sur la manière dont elle le fait et en vertu de quelles dispositions. Le texte ne le mentionne pas.

J'en viens maintenant à la question des créanciers, monsieur le président, qui, comme à moi, vous tient à coeur.

Nous savons que le PACS peut être un moyen d'organiser son insolvabilité face aux créanciers.

M. Alain Néri.

Si on a mauvais esprit !

M. Dominique Dord.

Or, il est tout à fait imaginable aujourd'hui, puisque vous avez refusé les amendements qui imposaient un délai entre la conclusion de deux PACS, qu'après avoir contracté des dettes dans le cadre d'un premier PACS, s'engage dans un second, au détriment des droits des créanciers. Les créanciers d'un premier PACS devraient en quelque sorte pouvoir se protéger d'un second qui irait à l'encontre de leurs propres droits sur la première créance.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Avis défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Cet amendement n'est pas cohérent. Si une personne est créancière d'un pacte civil de solidarité ou, plus exactement, des deux membres de celui-ci, c'est que le pacte civil de sécurité est déjà conclu.

Si elle n'est créancière que d'une seule personne qui n'a pas signé de pacte civil de solidarité mais qui s'apprête à le faire, la conclusion du PACS n'aura aucune incidence sur l'existence de la créance et le droit de la recouvrer.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

96. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Plagnol et les membres du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance ont présenté un amendement, no 948, ainsi rédigé :

« Après le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil, insérer l'article suivant :

« Art. 515-2-1. - Le pacte civil de solidarité conclu en fraude de la loi peut être annulé à la suite d'une demande de nullité formée dans les trente ans suivant la date de conclusion du pacte civil de solidarité. »

La parole est à M. Henri Plagnol.

M. Henri Plagnol.

Je vous propose, monsieur le président, de faire une présentation commune de la série d'amendements qui porte sur les clauses de nullité. Il s'agit des amendements nos 948, 949, 950, 853, 947, 854, 886.

M. le président.

Je vous remercie.

L'amendement no 949, présenté par M. Plagnol et les membres du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, est ainsi rédigé :

« Après le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil, insérer l'article suivant :

« Art. 512-2-1. - Le pacte civil de solidarité conclu en fraude de la loi peut être annulé à la suite d'une demande de nullité formée dans les cinq ans suivant la date de conclusion du pacte civil de solidarité. »

L'amendement no 950, présenté par M. Plagnol et les membres du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, est ainsi rédigé :

« Après le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil, insérer l'article suivant :

« Art. 515-2-1 Le pacte civil de solidarité conclu en fraude de la loi peut être annulé à la suite d'une demande de nullité formée dans l'année du pacte civil de solidarité. »

L'amendement no 853, présenté par M. Plagnol et les membres du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, est ainsi rédigé :

« Après le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil, insérer l'article suivant :

« Art. 515-2-1 L'action en nullité du pacte civil de solidarité peut être intentée par toute personne intéressée. »

L'amendement no 947, présenté par M. Plagnol et les membres du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, est ainsi rédigé :

« Après le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil, insérer l'article suivant :

« Art. 515-2-1 L'action en nullité du pacte civil de solidarité peut être intentée par les parents des personnes souhaitant conclure un pacte civil de solidarité. »

L'amendement no 854, présenté par M. Plagnol et les membres du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, est ainsi rédigé :

« Après le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil, insérer l'article suivant :

« Art. 515-2-1 L'action en nullité du pacte civil de solidarité peut être intentée par l'ex-époux de l'une des personnes souhaitant conclure un pacte civil de solidarité. »

L'amendement no 886, présenté par M. Plagnol et les membres du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, est ainsi rédigé :

« Après le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil, insérer l'article suivant :

« Art. 515-2-1 L'action en nullité du pacte civil de solidarité peut être intentée par le ministère public. »

Vous avez la parole, monsieur Plagnol.

M. Henri Plagnol.

Je serai bref puisque Mme la ministre, en réponse à Mme Boutin, s'est exprimée très clairement sur les actions en nullité.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

Ces amendements ont pour objet de faire préciser dans la loi les délais d'action en matière de nullité et la qualité des personnes qui pourront l'opposer, afin que des contentieux ne fragilisent pas à l'infini la construction juridique du PACS, en faisant peser une incertitude sur les droits et les effets positifs générés par ce régime juridique nouveau.

S'agissant d'un contrat, il faut toujours être précis et je crains, madame la ministre, malgré les éclaircissements que vous nous avez apportés tout à l'heure, que faute de précision, les cosignataires d'un PACS ne soient exposés à des recours en nullité qui pourront survenir dans les trente ans suivant la conclusion de ce PACS, dans les cas de nullité absolue, et dans les cinq ans en cas de nullité relative.

Il y aurait donc eu tout intérêt à préciser, au cas par cas, les délais et la qualité des ayants droit pouvant entamer ce type d'action en s'inspirant des dispositions très sages relatives à la législation sur le mariage, dispositions qui visent à protéger les signataires et à les prémunir contre d'éventuels contentieux.

M. le président.

Je regrette vraiment, monsieur Plagnol, de ne pas vous avoir donné la parole tout à l'heure, car vous venez de nous faire une présentation de vos amendements qui va accélérer le cours de notre discussion.

Mme Muguette Jacquaint.

C'était un paquet cadeau !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Elle s'est prononcée défavorablement. Mme la garde des sceaux a expliqué tout à l'heure les raisons pour lesquelles il était utile de les rejeter.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Je vais répéter pourquoi il ne faut pas adopter ces amendements.

L'amendement no 948 fixe à trente ans le délai pour agir en nullité d'un PACS illicite. Mais j'observe qu'un PACS conclu en violation de l'article 515-2 du code civil ne pourra jamais avoir d'effet à l'égard des tiers, quelle que soit la date de sa conclusion, car dès lors que l'un des partenaires voudra l'invoquer, les tiers pourront toujours quant à eux invoquer son caractère illicite.

Ensuite, je note que la notion de fraude à la loi apparaît trop imprécise pour pouvoir être retenue.

Telles sont mes observations sur l'amendement no 948.

Quant aux autres amendements, ils se heurtent au même type d'objections.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 948.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 949.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 950.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 853.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 947.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 854.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 886.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Plagnol et les membres du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance ont présenté un amendement, no 851, ainsi rédigé :

« Après le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil, insérer l'article suivant :

« Art. 515-2-1. Tout acte d'opposition énoncera la qualité qui donne à l'opposant le droit de la former ; elle contiendra élection de domicile à la préfecture où le pacte civil de solidarité devra être enregistré ; il devra également contenir les motifs de l'opposition et reproduire le texte de la loi sur lequel est fondée l'opposition : le tout à peine de nullité et de l'interdiction de l'officier ministériel qui aurait signé l'acte contenant opposition.

« Le tribunal de grande instance se prononcera dans les dix jours sur la demande en mainlevée formée par les futurs partenaires du pacte civil de solidarité.

« S'il y a appel, il y sera statué dans les dix jours et, si le jugement dont est appel a donné mainlevée de l'opposition, la cour devra statuer même d'office.

« Si l'opposition est rejetée, les opposants, autres n éanmoins que les ascendants, pourront être condamnés à des dommages-intérêts.

« Les jugements et arrêts par défaut rejetant les oppositions à l'enregistrement d'un pacte civil de solidarité ne sont pas susceptibles d'opposition. »

La parole est à M. Henri Plagnol.

M. Henri Plagnol.

L'amendement no 851 et les suivants portent sur les oppositions. C'est un point technique en apparence, mais très important pour protéger la force du contrat que souscriraient les cosignataires d'un PACS.

J'ai repris volontairement les dispositions très sages - fruits d'une longue expérience - du code civil relatives à la protection de ceux qui s'engagent dans le mariage.

Ces dispositions prévoient que l'acte d'opposition qui, je le rappelle, fait peser une extrême fragilité sur ceux qui, par hypothèse, voudraient s'engager dans un PACS doit préciser la qualité de l'opposant, le lieu d'élection du domicile, les motifs de l'opposition et reproduire le texte de la loi ; le tout à peine de nullité. Le tribunal devra se prononcer dans les dix jours, ce qui est absolument nécessaire à l'efficacité du régime que vous prétendez mettre en place.

Enfin, pour éviter toute forme d'opposition abusive, des dommages-intérêts sont prévus au cas où les opposants ne rempliraient pas les critères requis pour s'opposer. Il s'agit là de dispositions d'ordre public et relevant de l'intérêt général.

M. le président.

La commission et le Gouvernement s'étant déjà exprimés, je mets aux voix l'amendement no 851.

(L'amendement n'est pas adopté.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

M. le président.

M. Plagnol et les membres du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance ont présenté un amendement, no 852, ainsi rédigé :

« Après le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil, insérer l'article suivant :

« Art. 515-2-2. - L'opposition peut être faite par tous moyens. »

Je mets aux voix l'amendement no 852.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Plagnol et les membres du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, ont présenté un amendement, no 951, ainsi rédigé.

« Après le texte proposé pour l'article 515-2 du code civil, insérer l'article suivant :

« Art. 515-2-1. Une fois que le vice a cessé, le pacte civil de solidarité peut être confirmé. »

Je mets aux voix l'amendement no 951.

(L'amendement n'est pas adopté.)

ARTICLE 515-3 DU CODE CIVIL

M. le président.

Je suis saisi de cinq amendements identiques nos 97, 302, 456, 562 et 746.

L'amendement no 97 est présenté par Mme Boutin, MM. Myard, Dord, Gengenwin, Perrut et Kossowski ; l'amendement no 302 est présenté par M. Mariani ; l'amendement no 456 est présenté par M. Masdeu-Arus ; l'amendement no 562 est présenté par MM. Goasguen, Herbillon et Teissier ; l'amendement no 746 est présenté par M. Plagnol et les membre du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer le texte proposé pour l'article 515-3 du code civil. »

La parole est à M. Dominique Dord, pour soutenir l'amendement no

97.

M. Dominique Dord.

Le texte proposé pour l'article 515-3 concerne les conditions d'enregistrement et la publicité du PACS. C'est un sujet important, sur lequel la position de la commission a souvent varié.

Pour l'heure, le texte prévoit que le PACS sera enregistré aux services de la préfecture et inscrit sur un registre spécial, inscription qui lui confère date certaine. Les partenaires doivent annexer au PACS une copie de leur acte de naissance et un certificat de la préfecture de leur lieu de naissance attestant qu'ils ne sont pas déjà mariés ou liés par un PACS. Le texte proposé prévoit également que, à l'étranger, les formalités se dérouleront au consulat.

Nous estimons que le texte proposé pour l'article 515-3 mérite d'être complètement revu car la notion de « partenaires » à laquelle il est fait allusion n'existe pas en droit civil français, et personne ne sait exactement ce qu'elle recouvre. Le rapporteur pourrait-il nous préciser ce que signifie le terme « partenaires ». Doit-il exister un lien affectif, sentimental, familial ou sexuel ? En fait, ce terme relève du vocabulaire courant.

S'agissant du lieu retenu pour la signature du PACS, il semblerait, en tout cas pour l'instant, que ce soit la préfecture. Nous avons bien compris que la mairie aurait constitué un lieu trop symbolique rappelant le mariage.

Toutefois, la préfecture nous semble un lieu éminemment contestable car il affirme d'une manière encore plus éclatante l'autorité symbolique de l'Etat.

Le tribunal de grande instance, d'abord refusé, semble revenir en vogue. Mais tout cela mériterait un vrai débat.

Troisième élément,...

M. le président.

Rapidement, monsieur Dord.

M. Dominique Dord.

C'est le premier amendement sur cet article très important, monsieur le président.

M. le président.

Oui, mais il y a cinq intervenants, monsieur Dord.

M. Alain Néri.

M. Dord est intarissable !

M. Dominique Dord.

Voilà une remarque qui est vraiment d'un très grand intérêt.

M. le président.

C'est plutôt un compliment !

M. Dominique Dord.

Un registre spécial sera créé...

M. Jean-Pierre Blazy.

Par les services vétérinaires !

M. Dominique Dord.

Cette remarque est encore d'un très grand intérêt ! La création d'un registre spécial qui doublera ceux de l'état civil tenus dans les mairies nous semble appeler des moyens supplémentaires, que ce soit dans les préfectures ou dans les tribunaux d'instance. Or il ne semble pas qu'ils aient été prévus.

M. le président.

Monsieur Dord, vous avez épuisé votre temps de parole.

M. Dominique Dord.

Comme nous avons été assez rapides sur les amendements précédents, nous disposons d'une sorte de petit crédit.

(Sourires.)

M. le président.

Soit ! Mais ne perdons pas le temps que nous avons précédemment gagné.

(Sourires.)

M. Dominique Dord.

Je termine, monsieur le président.

E nfin, le texte proposé pour l'article 515-3 ne comporte aucune précision quant à l'accès des tiers à ces registres. Pourront-ils connaître le contenu du PACS, ou seulement son existence ? Voilà un certain nombre de questions qui nous semblent de nature à justifier le dépôt de l'amendement no

97.

M. le président.

Monsieur Mariani, votre amendement no 302 est-il soutenu ?

M. Thierry Mariani.

Oui, monsieur le président, il l'est.

M. le président.

Votre amendement no 562 également, monsieur Goasguen ?

M. Claude Goasguen.

Je vais le défendre, monsieur le président.

M. le président.

Vous avez la parole.

M. Claude Goasguen.

Le texte proposé pour l'article 515-3 du code civil a déjà fait couler beaucoup d'encre, puisque le PACS s'est retrouvé ballotté entre divers lieux, passant de la mairie à la préfecture, pour peut-être finir au tribunal d'instance si est adopté un amendement que je vois poindre.

Il est bien évident que le pacte civil de solidarité est un acte d'état civil. Et je comprends bien l'embarras des rédacteurs qui, confrontés à la réaction de nombreux maires, ont dû transférer un rôle d'enregistrement à une autre institution dont ce n'était pas la fonction.

Nous sommes donc en présence d'un système qui, nombre d'entre vous le reconnaissent dans les couloirs, est quelque peu alambiqué, puisque l'engagement entre


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

deux personnes sera enregistré à la préfecture, alors qu'il s'agit de liens personnels normalement fondés sur une certaine affectivité. De plus, la préfecture n'est absolument pas dotée des moyens appropriés.

Vous réduisez le pacte civil de solidarité à un simple enregistrement sur lettre circulaire ronéotée, délivrée par un fonctionnaire sans doute débordé. Vous assimilez l'enregistrement du PACS à une procédure qui sert d'habiture pour déclarer les associations ! Tout cela montre à quel point vous vous êtes heurtés à des résistances fortes. Si l'enregistrement du PACS doit se faire dans les préfectures, c'est que les mairies n'en ont pas voulu. Et si les mairies n'en ont pas voulu, c'est qu'il y a dans l'opinion publique de notre pays un problème par rapport à ce texte que vous essayez de faire passer par des moyens plutôt incorrects sur le plan de la procédure parlementaire.

M. Pierre Lellouche.

C'est vrai !

M. Claude Goasguen.

A mon avis, les préfectures ne vont pas tenir longtemps. Il faudrait au minimum prévoir un transfert des actes relatifs au PACS vers l'état civil, puisqu'il y a des incompatibilités.

M. Pierre Lellouche.

Absolument !

M. le président.

La parole est à M. Jacques MasdeuArus, pour défendre l'amendement no 456.

M. Jacques Masdeu-Arus.

Comme nous l'avons souligné dans ce débat, il ne nous paraît toujours pas nécessaire d'inscrire dans la loi un nouveau statut relationnel qui risque de déstructurer davantage le sens du couple et de la famille. Le PACS porte un grave préjudice à l'institution du mariage,...

M. Guy Hascoët.

Ce n'est pas le débat !

M. Jacques Masdeu-Arus.

... et le fait qu'un tel contrat puisse être conclu rapidement, avec un minimum de formalités, aggrave encore sa dangerosité.

En outre, il s'avère que les personnes contractant un PACS ne seront plus recensées à l'état civil mais en préfecture, comme vient de l'indiquer notre collègue Goasguen, ce qui ne manquera pas de poser de graves problèmes. En revanche, la proposition que vient de faire Claude Goasguen d'un transfert vers l'état civil permettrait de protéger le PACS.

Je demande donc la suppression du texte proposé pour l'article 515-3 du code civil.

M. le président.

La parole est à M. Renaud Donnedieu de Vabres, pour soutenir l'amendement no 746.

M. Renaud Donnedieu de Vabres.

Si l'on considère qu'une inscription officielle est nécessaire pour ouvrir des droits, il faut aller jusqu'au bout de la logique et considérer que l'inscription en préfecture ou dans un tribunal n'est pas suffisante. Dans ces conditions, si on veut ouvrir des droits et créer de vraies garanties, il faut que l'inscription de l'acte soit portée sur les registres de l'état civil.

M. Claude Goasguen.

C'est évident !

M. Renaud Donnedieu de Vabres.

Comme vous le voyez, l'attitude de l'opposition n'est pas une attitude d'obstruction. Contrairement à ce que prétend le président du groupe parlementaire socialiste - vous le découvrirez demain matin dans Le Figaro (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) -, nous ne sommes pas à la recherche des voix du Front national : nous faisons notre travail de législateur. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur les cinq amendements ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Le texte proposé pour l'article 515-3 précise comment le PACS doit être conclu, en quel endroit et selon quelle procédure. Bien entendu, la commission a repoussé les amendements de suppression de cette disposition essentielle du texte.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Même avis que la commission.

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 97, 302, 456, 562 et 746.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

Je suis saisi de cinq amendements, nos 98, 952, 563, 176 et 1032, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 98, présenté par Mme Boutin et M. Dord, est ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le texte proposé pour l'article 515-3 du code civil :

« Art. 515-3. - Le PACS fait l'objet d'un acte écrit sous seing privé. »

L'amendement no 952, présenté par M. Plagnol et les membres du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, est ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le texte proposé pour l'article 515-3 du code civil :

« Le pacte civil de solidarité fait l'objet, à peine de nullité, d'une déclaration écrite conjointe des partenaires chez un notaire. Cette déclaration organise leur vie commune et précise le lieu de leur résidence commune.

« Le notaire fait porter mention de l'acte notarié à la préfecture du lieu de naissance de chaque partenaire, ou en cas de naissance à l'étranger au ministère des affaires étrangères.

« La déclaration faite chez le notaire confère date certaine au pacte.

« Les partenaires annexent au pacte une copie de leur acte de naissance et un certificat de la mairie de leur lieu de naissance attestant qu'ils ne sont pas déjà liés par un pacte.

« A l'étranger, la réception, l'inscription et la conservation du pacte, liant deux partenaires dont l'un au moins est de nationalité française, sont assurées par les agents diplomatiques et consulaires français. Le dépôt, l'inscription et la conservation des modifications du pacte sont également assurées par ces agents. »

L'amendement no 563, présenté par MM. Goasguen, Mattei et Teissier, est ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le texte proposé pour l'article 515-3 du code civil :

« Art. 515-3. - L'attestation civile de solidarité est un acte sous seing privé passé devant notaire.

« La publicité de l'attestation civile de solidarité, de ses modifications et de son extinction doit être assurée aux services de l'état civil, par des mentions en marge de l'acte de naissance des partenaires. »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

L'amendement no 176, présenté par M. Hascoët, Mme Aubert, MM. Aschieri, Cochet, Mamère et Marchand, est ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le texte proposé pour l'article 515-3 du code civil :

« Art. 515-3. - Le pacte civil de solidarité fait l'objet, sous peine de nullité, d'une déclaration écrite c onjointe des partenaires organisant leur vie commune et remise par eux à la mairie dans laquelle ils établissent leur résidence d'un commun accord.

« Les services de la mairie l'inscrivent sur le registre d'état civil.

« Ils font porter mention de la déclaration sur le registre d'état civil tenu à la mairie du lieu de naissance de chaque partenaire, ou en cas de naissance à l'étranger, à la préfecture de sa région.

« L'inscription sur le registre du lieu de résidence confère date certaine au pacte.

« Les partenaires annexent au pacte une copie de leur acte de naissance et un certificat de la mairie de leur lieu de naissance attestant qu'ils ne sont pas déjà liés par un pacte.

« Les modifications du pacte font l'objet d'un dépôt, d'une inscription et d'une conservation à la mairie qui a reçu l'acte initial.

« A l'étranger, la réception, l'inscription et la conservation du pacte, liant deux partenaires dont l'un au moins est de nationalité française, sont assurées par les agents diplomatiques et consulaires français. Le dépôt, l'inscription et la conservation des modifications du pacte sont également assurées par ces agents. »

La parole est à Mme Christine Boutin, pour soutenir l'amendement no

98.

Mme Christine Boutin.

L'Etat n'a pas à intervenir dans les relations privées de deux personnes lorsqu'il n'y a pas d'intérêt. Si le mariage fait l'objet d'une reconnaissance de l'Etat, c'est parce qu'il est garant de la continuité et de la stabilité de la société. Or, par définition, le PACS n'assure aucune stabilité. C'est pour cette raison qu'il est préférable que le PACS reste dans la sphère privée et fasse l'objet d'un acte écrit sous seing privé.

M. le président.

L'amendement no 952 est-il soutenu ?

M. Henri Plagnol.

Il est soutenu, monsieur le président.

M. le président.

Et l'amendement no 563 ?

M. Claude Goasguen.

Il est défendu.

M. le président.

La parole est à M. Guy Hascoët pour soutenir l'amendement no 176.

M. Guy Hascoët.

Comme je l'ai déjà dit, on a suscité la peur des maires en leur faisant croire qu'ils allaient, en tant qu'officiers d'état civil, voir arriver devant eux des couples homosexuels, et on leur a demandé de signer une pétition sur le thème : « Pas de ça dans ma mairie ! »

Mme Christine Boutin.

Les élus sont capables d'analyse, vous savez !

M. Guy Hascoët.

C'est grave d'avoir trompé les élus de toutes nos communes. Il est également anormal d'accepter l'idée que des maires, qui sont donc les premiers magistrats de l'état civil, puissent refuser d'appliquer la loi. Un tel acte d'incivilité serait inacceptable de la part d'élus de la République.

M. Thierry Mariani.

Et votre position sur les sanspapiers ?

M. le président.

Mes chers collègues, on m'indique que, sur l'amendement no 1032 présenté par M. Tourret, trente et un sous-amendements viennent d'être déposés ; il n'est pas possible de les classer et de les distribuer immédiatement.

Je suggère par conséquent que nous terminions l'examen des amendements nos 98, 952, 563 et 176, et que nous abordions ensuite celui de l'amendement no 1032.

Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos 98, 952, 563 et 176 ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

La commission s'est prononcée contre ces quatre amendements, qui proposent des solutions différentes de celle retenue par le texte : l'amendement no 98 propose un acte notarié, un acte sous seing privé, comme l'avait suggéré M. Hauser ; M. Plagnol propose également de passer devant un notaire, de même que M. Goasguen ; quant à M. Hascoët, il propose la mairie. En dépit du regret des rapporteurs, la commission s'est prononcée également contre ce dernier amendement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Même avis.

M. le président.

La parole est à M. Pierre Lellouche, contre l'amendement.

M. Pierre Lellouche.

Je vous comprends, monsieur le

président

: il est préoccupant de voir un aussi grand nombre d'amendements déposés à cette heure tardive...

Le problème dont il s'agit maintenant est au moins aussi important que celui de l'adoption, dont nous avons déjà parlé. Le lieu d'enregistrement de cette création juridique n'est pas neutre. Il illustre sa nature même : institution ou contrat ? M. Goasguen a exposé tout à l'heure les raisons pour lesquelles, de reculade en reculade, vous aviez abandonné l'idée d'aller devant le maire pour aller à la préfecture, puis, si j'en crois l'amendement de M. Tourret, devant le tribunal d'instance. Je suis contre l'amendement de M. Hascoët parce que je pense que le PACS et la relation entre deux personnes, notamment du même sexe, est d'abord une affaire privée, qui relève donc du notaire.

Mais le Journal officiel témoignera que je trouve un immense avantage à cet amendement : sa cohérence. Le seul endroit, en effet, où l'on puisse justifier des droits, assurer une coordination par rapport à un précédent PACS et établir l'état civil des personnes, c'est la mairie.

Je comprends par conséquent la logique de M. Hascoët.

Dans la mesure où vous créez un tel système, vous devez aller au bout de votre logique, madame la ministre, monsieur le rapporteur, et il faut aller à la mairie. Et si vous choisissez la route privée, il faut aller devant le notaire. Mais vous ne choisissez ni l'un ni l'autre.

Je note qu'il y a encore tout de même des gens cohérents dans vos rangs, ce qui n'est pas le cas au sein Gouvernement.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

98. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 952.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 563.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 176.

(L'amendement n'est pas adopté.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

M. le président.

Nous en venons donc à l'amendement no 1032. Nous examinerons ensuite, au fur et à mesure, les sous-amendements.

MM. Tourret, Charasse, Charles, Crépeau, Defontaine, Honde, Huwart, Pontier et Rebillard ont présenté un amendement, no 1032, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le texte proposé pour l'article 515-3 du code civil :

« Art. 515-3. - Deux personnes qui décident de conclure un pacte civil de solidarité doivent établir une déclaration écrite conjointe organisant leur vie commune.

« A peine de nullité, elles doivent la remettre au greffe du tribunal d'instance dans le ressort duquel elles fixent leur résidence, en y annexant une copie de leur acte de naissance et un certificat du greffe du tribunal d'instance de leur lieu de naissance ou, en cas de naissance à l'étranger, du greffe du tribunal de grande instance de Paris attestant qu'elles ne sont pas déjà liées par un pacte.

« Le greffier inscrit cette déclaration sur un registre et en assure la conservation.

« Il fait porter mention de la déclaration sur un registre tenu au greffe du tribunal d'instance du lieu de naissance de chaque partenaire ou, en cas de naissance à l'étranger, au greffe du tribunal de grande instance de Paris.

« L'inscription sur le registre du lieu de résidence confère date certaine au pacte.

« Les modifications du pacte font l'objet d'un dépôt, d'une inscription et d'une conservation au greffe du tribunal d'instance qui a reçu l'acte initial.

« A l'étranger, la réception, l'inscription et la conservation du pacte, liant deux partenaires dont l'un au moins est de nationalité française, sont assurées par les agents diplomatiques et consulaires français. Le dépôt, l'inscription et la conservation des modifications du pacte sont également assurés par ces agents. »

La parole est à M. Alain Tourret.

M. Alain Tourret.

Cet amendement retient le tribunal d'instance comme lieu de dépôt du PACS. Il a été longuement étudié par la commission et je rappellerai les arguments qui ont conduit celle-ci à l'adopter.

Premier argument : le tribunal est l'héritier de la justice de paix, et cette notion d'apaisement, alors que notre discussion a été un peu vive, me semble particulièrement bienvenue.

Le deuxième argument a déjà été développé : le PACS est un contrat de droit privé, et seulement un contrat de droit privé. Dès lors, la juridiction de droit privé, à savoir le tribunal d'instance, semble plus appropriée, plus appropriée en tout cas que la préfecture.

Troisième argument : la proximité. Il y a de quatre à six tribunaux d'instance par département, alors qu'il n'y a qu'une préfecture. La notion de proximité, prise en compte dans le choix de la mairie, qui a été exclu, apparaît plus forte avec le tribunal d'instance qu'avec la préfecture.

Quatrième argument : le personnel des tribunaux d'instance a l'habitude de ce que l'on appelle la juridiction gracieuse. En effet, à la différence des tribunaux de grande instance, le tribunal d'instance n'est pas simplement un lieu où l'on juge le contentieux. Il a aussi une activité de juridiction gracieuse, s'occupe des certificats de nationalité mais aussi de la tutelle, de la curatelle et de tout ce qui concerne les conseils de famille. C'est donc une juridiction beaucoup plus adéquate que le tribunal de grande instance.

Enfin d'autres arguments militent en faveur du tribunal d'instance. Si la préfecture avait été retenue, la préfecture de police de Paris aurait pu recevoir les PACS, ce qui aurait été choquant et ne pouvait être accepté. Par ailleurs, le risque de constitution d'un fichier n'aurait pu être exclu, même s'il doit être relativisé.

Cette argumentation, qui a été développée en commission, a convaincu celle-ci et a recueilli l'avis favorable du groupe UDF. Elle devrait donc convaincre l'Assemblée.

La solution proposée permettra un apaisement pour une raison technique absolument évidente.

M. Pierre Lellouche.

C'est de la navigation à vue !

M. le président.

Afin qu'il n'y ait pas d'ambiguïté, jer appelle que les sous-amendements à l'amendement no 1032 n'ont pas encore été distribués, mais je vais néanmoins donner la parole à M. Mariani, qui souhaite en évoquer deux.

M. Thierry Mariani.

Je tiens à dénoncer la manoeuvre qui consiste à déposer un amendement de dernière minute qui fait tomber des dizaines d'amendements de l'opposition ! Cela illustre bien l'impréparation et l'improvisation de ce texte !

Mme Janine Jambu.

Pas du tout !

M. Thierry Mariani.

Pendant des mois, on nous a dit que la mairie était le lieu idéal. Devant les critiques et les réserves d'un grand nombre de maires, on a préféré jusqu'à il y a quelques minutes la préfecture, et la nouvelle rédaction semblait mûrement réfléchie. On nous a expliqué que la commission avait procédé à de nombreuses auditions et consultations, et voilà qu'on change une nouvelle fois d'optique et qu'on se tourne maintenant vers les tribunaux d'instance ! Je note au demeurant que c'est encore le groupe des Verts qui a la charge d'interrompre la discussion des arguments de l'opposition en déposant cet amendement.

La solution que vous avez retenue in fine , et qui consiste à notifier le PACS au tribunal d'instance, ne nous paraît pas satisfaisante. En effet, comment pourrezvous contrôler qu'une même personne n'a pas contracté plusieurs PACS dans différents tribunaux d'instance si la mention du PACS n'est pas portée en marge de l'état civil ? Ce sera impossible, et vous le savez. Ou alors, il faudrait prévoir la création d'un fichier informatisé, ce qui n'est pas envisageable.

Il conviendrait, je le répète, de porter en marge de l'acte de naissance une mention indiquant qu'une personne est liée par un PACS.

A une heure trente du matin, dans la nuit de dimanche à lundi, vous changez complètement d'optique et, après les mairies puis les préfectures, vous vous rabattez sur les tribunaux d'instance. Vraiment, madame la ministre, madame la présidente de la commission des lois, monsieur le rapporteur, cela prouve que vous vous livrez à un véritable bricolage juridique ! Déposer dans de telles conditions un amendement qui fait tomber une partie des arguments de l'opposition montre à nouveau l'impréparation de ce texte et prouve une fois de plus qu'il ne pourra pas être appliqué. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

M. le président.

Si j'ai bien compris, monsieur Mariani, vous retirez vos sous-amendements ?

M. Thierry Mariani.

Oui, monsieur le président.

M. le président.

La parole est à M. Henri Plagnol.

M. Henri Plagnol.

La proposition de M. Tourret représente incontestablement une petite amélioration technique...

M. Yves Fromion.

Tout à fait !

M. Henri Plagnol.

... car rien n'était plus absurde que le recours aux préfectures.

M. Yves Fromion.

Bien sûr !

M. Henri Plagnol.

Mais nous ne croyons pas que le recours au greffe du tribunal d'instance constitue la meilleure solution pour l'enregistrement du PACS.

D'abord, parce que ces greffes sont surchargés, nous le savons tous et Mme la ministre le rappelle souvent. Ils n'ont déjà pas pu faire face au contentieux surabondant engendré par la législation sur le surendettement.

Mais, au-delà de ces objections techniques, il en est une beaucoup plus fondamentale.

De deux choses l'une, en effet : soit la majorité considère que le PACS est une institution qui modifie profondément l'état civil des personnes, et la seule solution logique est la mairie. Si vous ne l'avez pas retenue, ce n'est pas parce que vous ne vouliez pas le faire, mais parce que vous n'avez pas pu, du fait du succès de la pétition des maires.

(Protestations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Vous saviez très bien que beaucoup de maires de ce pays ne l'auraient pas permis ! (Nouvelles protestations sur les mêmes bancs.)

M. le président.

Mes chers collègues, je vous en prie ! Nous arrivons pratiquement au terme de cette soirée : gardez votre calme !

M. Henri Plagnol.

Si, en revanche, vous considérez que le PACS est un contrat, la seule solution logique, étant donné qu'un contrat est de nature privé, consistait à recourir au notaire.

En bref, c'était soit la mairie, soit le notaire. Mais choisir le greffe du tribunal d'instance est une mauvaise solution.

C ela dit, le groupe UDF - et en particulier Mme Christine Boutin - avait préparé de nombreux amendements en vue d'améliorer le texte. Nous étions également prêts à déposer des sous-amendements à l'amendement de M. Tourret. Mais, à ce point du débat, pour bien montrer que nous ne voulons pas faire d'obstruction, et parce que nous ne souhaitons pas prolonger davantage le travail législatif, nous retirons nos sousamendements, en accord avec Mme Christine Boutin.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La présidence vous en remercie, monsieur Plagnol.

Quel est l'avis de la commission sur l'amendement no 1032 ?

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Lors de la réunion qu'elle a tenue en application de l'article 88 du règlement, la commission a été convaincue par les arguments développés par M. Tourret, que celui-ci vient d'exposer à nouveau.

J'ai fait observer qu'il n'était pas d'usage que l'on revienne sur une disposition adoptée lors de la réunion ordinaire de la commission - laquelle avait retenu la préfecture comme lieu d'enregistrement du PACS -, ajoutant que je laissais néanmoins à la commission le soin de se déterminer, ce qu'elle a fait. M. Plagnol était présent, M. Blessig également. La majorité et l'opposition ont voté pour l'amendement de M. Tourret, qui substituait le greffe du tribunal d'instance à la préfecture.

J'avais néanmoins indiqué à M. Tourret que son amendement n'était pas très bien rédigé, car il aurait dû, pour être complet, prévoir d'autres modifications de l'article 515-3 du code civil. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a levé la forclusion et a accepté que M. Tourret présente un nouvel amendement. Celui-ci n'a pas été formellement examiné par la commission, mais la nouvelle rédaction de l'article 515-3 qu'il propose est tout à fait valable. Par conséquent, avis favorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Le Gouvernement est favorable à l'amendement de M. Tourret.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Je serai extrêmement bref, puisque je souscris aux propos de mes collègues de l'opposition.

La préfecture était, à l'évidence, la pire des solutions.

Je ne reviens pas sur les inconvénients extrêmement graves qu'un registre détenu par des services qui ont autorité sur la police pourrait avoir dans certaines circonstances, différentes de celles d'aujourd'hui.

M. Yves Fromion.

Pourquoi une telle suspicion ?

M. François Goulard.

Le choix du tribunal d'instance présente des inconvénients évidents. Ces tribunaux sont, à l'heure actuelle, dans l'incapacité de remplir de nouvelles tâches. Certes, celles-ci ne seront pas très lourdes partout, mais elles entraîneront des difficultés matérielles.

Je signale par ailleurs que la chancellerie prévoit un plan de fermeture de ces tribunaux. Il y a quelque paradoxe à donner de nouvelles compétences à des tribunaux qu'on ferme en grand nombre.

La solution proposée par M. Tourret est un moindre mal, mais elle n'est pas satisfaisante. Le PACS est un acte d'état civil. Or le lieu où sont enregistrés les actes d'état civil, c'est la mairie. Ayez donc le courage de le reconnaître et assumez vos choix.

Par ailleurs, sur un plan strictement pratique, seule la mairie permet d'assurer une transcription sérieuse des mentions sur les registres, car les difficultés matérielles a uxquelles sont confrontés les tribunaux d'instance conduiront fatalement à un défaut de concordance entre leurs registres et ceux des mairies. Les intéressés seront donc confrontés à des difficultés juridiques sérieuses du fait de la solution boiteuse et passablement hypocrite que vous retenez.

M. Pierre Lellouche.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Bernard Birsinger.

M. Bernard Birsinger.

Cet amendement pose un problème au groupe communiste.

M. François Goulard.

Le fax de la place du ColonelFabien n'est pas arrivé ! (Rires sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance. - Protestations sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

M. Bernard Birsinger.

Nous avions d'ailleurs déposé à ce sujet un amendement, no 2. Il nous semble que le lieu le plus approprié est la mairie. A partir du moment où nous voulons ouvrir des droits nouveaux à des millions de gens, le lieu le plus connu, celui qui existe dans toutes les villes, le lieu symbolique, le lieu de proximité, c'est la mairie.

M. Bernard Accoyer.

Même les communistes le disent !

M. Bernard Birsinger.

C'est donc le lieu « naturel » pour contracter dans le cadre du PACS. La mairie est l'endroit où sont dressés la plupart des actes d'état civil aujourd'hui.

Mais puisqu'on parle aussi de reconnaissance sociale, je crois que la mairie est un lieu symbolique très important.

Le choisir permettrait d'affirmer solennellement l'importance du PACS.

Enfin, comme je l'ai déjà dit dans la discussion générale, je vois d'un mauvais oeil un certain nombre de compétences, notamment en matière d'état civil, quitter la mairie. La signature des actes d'état civil en mairie est une réalité depuis 1792 et il est dommage que le PACS soit signé ailleurs.

On nous rétorque parfois que les maires ne sont pas d'accord. Désolé, messieurs de l'opposition, la loi s'applique à tous ! Et, à partir du moment où elle serait votée, nous aurions bien évidemment la possibilité de la faire appliquer par l'ensemble des maires.

Pour résumer, nous n'étions pas d'accord avec le choix de la préfecture mais le choix du tribunal d'instance nous pose un problème. Nous nous abstiendrons donc sur cet amendement et nous réaffirmons avec force notre volonté de voir le PACS signé à la mairie.

M. le président.

La parole est à M. Renaud Donnedieu de Vabres.

M. Renaud Donnedieu de Vabres.

Mes chers collègues, nous voici à un moment très important de ce débat...

M. Bernard Roman.

Essentiel !

M. Renaud Donnedieu de Vabres.

... car il ne s'agit pas simplement de la détermination d'un lieu géographique : nous nous trouvons vraiment au coeur du dispositif de la loi.

Comme l'ont dit certains des orateurs précédents, il devrait s'agit soit de la mairie, lieu classique de création des droits et de transcription sur les registres d'état civil, soit d'un contrat sous seing privé conclu chez le notaire.

Au lieu de cela on nous propose un système bâtard et hypocrite.

Les intentions des uns et des autres doivent être claires.

Si, en commission, les membres du groupe UDF ont considéré que le transfert de la préfecture vers le tribunal d'instance était un progrès, à ce stade de la réflexion publique, ils ne peuvent pas voter cet amendement, parce qu'il propose, je le répète, une solution bâtarde qui n'est ni un contrat sous seing privé ni un acte déposé en mairie. Lorsqu'un contrat sera déposé auprès d'un tribunal, qu'est-ce qui garantit que la notoriété en sera assurée ? Si une personne souscrit ensuite un autre PACS, parmi les pièces qui lui seront demandées devrait figurer un extrait d'état civil assorti d'une mention ; elle n'y sera pas portée. Ce système bâtard ne peut recevoir notre assentiment.

M. le président.

La parole est à M. Jacques Floch.

M. Jacques Floch.

Les orateurs qui m'ont précédé ont tous dit que le choix du lieu où seront enregistrés les contrats et tenus les registres avait une grande force symbolique. La discussion en commission des lois a montré que, malgré la diversité de nos opinions, nous pouvions parfois nous rapprocher pour essayer de trouver la meilleure solution, celle qui donnera assez de force au contrat pour en assurer au moins la reconnaissance par ceux qui le signeront et par ceux qui auront besoin de le connaître.

Nos collègues du groupe communiste l'ont souligné, la mairie, maison de tous, est un lieu symbolique où sont tenus depuis près de deux siècles les registres d'état civil.

Je rappellerai tout de même que le maire, officier d'état civil, agit en tant que représentant de l'Etat, sous le contrôle du procureur de la République. Les livres de l'état civil, qui font foi lorsqu'il y a divergence entre les écritures, sont conservés dans les tribunaux de grande instance. C'est sous l'autorité du procureur de la République qu'en est assurée la conservation.

Il y a eu débat sur le point de savoir si les préfectures ou les sous-préfectures pouvaient être le lieu d'accueil des contrats. Parmi nos collègues de l'opposition, M. Pandraud est celui qui s'y est le plus fortement opposé.

Connaissant bien l'administration préfectorale, il a fait valoir qu'il y aurait d'énormes difficultés et qu'il ne pouvait garantir qu'elles seraient surmontées dans l'ensemble des préfectures.

Restait les tribunaux. Lequel ? Le tribunal de grande instance ? Au niveau du symbole, il apparaît comme celui où se règlent les conflits alors que nous souhaitons que le PACS soit au contraire un moyen d'apaisement. Mais l'on peut aussi considérer que le tribunal d'instance est le successeur du juge de paix, de la justice de paix. C'est pourquoi nous nous sommes ralliés à la proposition d'Alain Tourret, et nous la voterons.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 1032, étant précisé que l'ensemble des sous-amendements ont été retirés.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Mes chers collègues, à la suite de l'adoption de l'amendement no 1032, l'ensemble des a mendements déposés sur le texte proposé pour l'article 515-3 du code civil tombent, à l'exception des amendements nos : 107 de Mme Boutin ; 662 de M. de Courson ; 108 de Mme Boutin ; 835 de M. Doligé ; 457 de M. Masdeu-Arus ; 109 de Mme Boutin ; 458 de M. Masdeu-Arus ; 833 de M. Doligé ; 837 de M. Doligé ; et 313 de M. Mariani.

La suite de la discussion est renvoyée à une séance ultérieure.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

2

ORDRE DU JOUR

DES PROCHAINES SÉANCES

M. le président.

Aujourd'hui, à dix heures, première séance publique : Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 1999 (no 1078) : M. Didier Migaud, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan (rapport no 1111) ; Equipement, transports et logement : Tourisme : M. Michel Bouvard, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan (annexe no 28 au rapport no 1111) ; M. Jean-Pierre Defontaine, rapporteur pour avis au nom de la commission de la production et des échanges (avis no 1116, tome XII).

A quinze heures, deuxième séance publique : Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 1999 (no 1078) : M. Didier Migaud, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan (rapport no 1111) ; Emploi et solidarité ; articles 82 et 83 : Affaires sociales : M. Pierre Forgues, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan (annexe no 20 au rapport no 1111) ; Santé : M. Gilbert Mitterrand, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan (annexe no 23 au rapport no 1111) ; M. Bernard Accoyer, rapporteur pour avis au nom des affaires culturelles, familiales et sociales (avis no 1112, tome X) ; Rapatriés : M. Francis Delattre, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan (annexe no 22 au rapport no 1111) ; Action sociale et lutte contre l'exclusion : M. Serge Janquin, rapporteur pour avis au nom des affaires culturelles, familiales et sociales (avis no 1116, tome VIII).

A vingt et une heures, troisième séance publique : Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.

La séance est levée.

(La séance est levée, le lundi 9 novembre 1998, à une heure quarante-cinq.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

ANNEXES AU PROCÈS-VERBAL de la 3e séance du dimanche 8 novembre 1998 SCRUTIN (no 138) sur l'amendement no 492 de M. Baguet à l'article 1er (art. 515-1 du code civil) de la proposition de loi relative au pacte civil de solidarité (impossibilité pour les signataires d'avoir recours à l'adoption et à la procréation médicalement assistée).

Nombre de votants .....................................

379 Nombre de suffrages exprimés ....................

379 Majorité absolue ..........................................

190 Pour l'adoption ...................

136 Contre ..................................

243 L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN Groupe socialiste (251) : Contre : 193 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Non-votant : M. Jean Glavany (membre du Gouvernement).

Groupe R.P.R. (137) : Pour : 87 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe U.D.F. (68) : Pour : 26 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe Démocratie libérale et Indépendants (44) : Pour : 23 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe communiste (36) : Contre : 27 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe Radical, Citoyen et Vert (33) : Contre : 23 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Non-votant : M. Yves Cochet (président de séance) Non-inscrits (5).

SCRUTIN (no 139) sur l'amendement no 675 de M. Birraux à l'article 1er (art. 515-1 du code civil) de la proposition de loi relative au pacte civil de solidarité (impossibilité pour les signataires d'avoir recours à l'adoption et à la procréation médicalement assistée).

Nombre de votants .....................................

381 Nombre de suffrages exprimés ....................

381 Majorité absolue ..........................................

191 Pour l'adoption ...................

136 Contre ..................................

245 L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN Groupe socialiste (251) : Contre : 195 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Non-votant : M. Jean Glavany (membre du Gouvernement).

Groupe R.P.R. (137) : Pour : 87 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe U.D.F. (68) : Pour : 26 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe Démocratie libérale et Indépendants (44) : Pour : 23 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe communiste (36) : Contre : 27 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe Radical, Citoyen et Vert (33) : Contre : 23 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Non-votant : M. Yves Cochet (président de séance).

Non-inscrits (5).

SCRUTIN (no 140) sur l'amendement no 553 de M. Goasguen à l'article 1er (art. 515-1 du code civil) de la proposition de loi relative au pacte civil de solidarité (impossibilité d'adoption pour les signataires de mê me sexe).

Nombre de votants .....................................

378 Nombre de suffrages exprimés ....................

378 Majorité absolue ..........................................

190 Pour l'adoption ...................

135 Contre ..................................

243 L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN Groupe socialiste (251) : Contre : 193 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Non-votant : M. Jean Glavany (membre du Gouvernement).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1998

Groupe R.P.R. (137) : Pour : 87 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe U.D.F. (68) : Pour : 25 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe Démocratie libérale et Indépendants (44) : Pour : 23 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe communiste (36) : Contre : 27 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe Radical, Citoyen et Vert (33) : Contre : 23 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Non-votant : M. Yves Cochet (président de séance).

Non-inscrits (5).

Mise au point au sujet du présent scrutin (Sous réserve des dispositions de l'article 68, alinéa 4, du règlement de l'Assemblée nationale) MM. François Bayrou, qui était présent au moment du scrutin a fait savoir qu'il avait voulu voter « pour ».

Prix du numéro : 4 F Paris. - Imprimerie des Journaux officiels, 26, rue Desaix.

103980990-001198