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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 10 NOVEMBRE 1998

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. LAURENT FABIUS

1. Questions au Gouvernement (p. 8700).

AIDE AUX PAYS FRAPPÉS PAR L'OURAGAN MITCH (p. 8700)

MM. François Asensi, le président, Dominique StraussKahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

AIDE AUX PAYS FRAPPÉS PAR L'OURAGAN MITCH (p. 8701)

MM. Dominique Paillé, Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

FONDS NATIONAL DE DÉVELOPPEMENT DU SPORT (p. 8701)

MM. Edouard Landrain, Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget.

AIDE AUX PAYS FRAPPÉS PAR L'OURAGAN MITCH (p. 8702)

MM. Damien Alary, Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères.

URBANISME COMMERCIAL (p. 8702)

M. Roland Garrigues, Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce et à l'artisanat.

NOUVELLE-CALÉDONIE (p. 8703)

Mme Catherine Tasca, M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.

ÉGLISE DE SCIENTOLOGIE (p. 8704)

Mmes Yvette Roudy, Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

RETRAITES AGRICOLES (p. 8705)

MM. Michel Suchod, Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche.

MINES ANTIPERSONNEL (p. 8706)

MM. Noël Mamère, Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères.

COUR CRIMINELLE INTERNATIONALE (p. 8706)

MM. Alain Madelin, Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères.

PROJET DE LOI SUR L'AUDIOVISUEL (p. 8707)

M. Michel Péricard, Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication.

VIADUC DE MILLAU (p. 8708)

MM. Alain Marleix, Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

REMBOURSEMENT DES SOINS (p. 8709)

M. Eric Doligé, Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

2. Déclaration de M. le président (p. 8710).

M. le président.

Suspension et reprise de la séance (p. 8710)

PRÉSIDENCE DE M. FRANÇOIS D'AUBERT

3. Animaux dangereux. - Communication relative à la désignation d'une commission mixte paritaire (p. 8710).

4. Loi de finances pour 1999 (deuxième partie). Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 8710).

TRAVAIL ET EMPLOI (suite) Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité ; M. Jean-Pierre Delalande.

Réponses de Mme la ministre et de Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat à la formation professionnelle, aux questions de : MM. Germain Gengenwin, Patrick Delnatte, Michel Hunault, Jean Ueberschlag, Mmes Odette Trupin, Odile Saugues, M. Jean-Marie Bockel, Mme MarieFrançoise Clergeau, M. Gérard Voisin, Mmes Paulette Guinchard-Kunstler, Conchita Lacuey, Martine LignièresCassou, MM. Philippe Vuilque, Francis Hammel.

EMPLOI ET SOLIDARITÉ I. - Emploi

Etat B

Titres III et IV. - Adoption (p. 8727)

Etat C

Titres V et VI. - Adoption (p. 8727)

Article 80 (p. 8727)

Amendements de suppression nos 32 de M. Pignant, 50 de M. Weber et 72 de M. Gengenwin : MM. Serge Poignant, Germain Gengenwin, Jacques Barrot, rapporteur spécial de la commission des finances, pour la formation professionnelle ; Mme la secrétaire d'Etat, M. Maxime Gremetz.

Suspension et reprise de la séance (p. 8729)

MM. Denis Jacquat, Gérard Lindeperg, Jacques Barrot, rapporteur spécial. - Rejet des amendements de suppression.

A mendement no 40 de la commission des finances : M. Jacques Barrot, rapporteur spécial ; Mme la secrétaire d'Etat. - Rejet.

Amendement no 20 de M. Gengenwin : M. Germain Gengenwin. - Retrait.

Adoption de l'article 80.

Article 81 (p. 8730)

Amendements de suppression nos 71 de M. Gengenwin et 75 de M. Michel Bouvard : MM. Germain Gengenwin, Gérard Bapt, rapporteur spécial de la commission des finances, pour le travail et l'emploi ; Mme la ministre. Rejet.


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Amendement no 36 de la commission : M. Gérard Bapt, rapporteur spécial ; Mme la ministre, M. Jean Proriol. Adoption.

Les amendements nos 21 de M. Proriol, 67 et 68 de M. de Courson n'ont plus d'objet.

Amendement no 57 de M. Bapt : M. Gérard Bapt, rapporteur spécial ; Mme la ministre. - Retrait.

Amendement no 37 de la commission. - Adoption.

Amendement no 38 rectifié de la commission. - Adoption.

Amendements identiques nos 58 de M. Bapt et 69 de M. de Courson et amendement no 23 de M. Deprez : M. Gérard Bapt, rapporteur spécial. - Retrait de l'amendement no

58. MM. Germain Gengenwin, Gérard Bapt, rapporteur spécial. - Retrait de l'amendement no

69. MM. Germain Gengenwin, Gérard Bapt, rapporteur spécial ; Mme la ministre. - Rejet de l'amendement no

23. Adoption de l'article 81 modifié.

Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.

5. Dépôt d'un projet de loi (p. 8732).

6. Dépôt d'un rapport (p. 8732).

7. Dépôt d'un projet de loi adopté par le Sénat (p. 8732).

8. Dépôt d'un projet de loi modifié par le Sénat (p. 8733).

9. Ordre du jour des prochaines séances (p. 8733).


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COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. LAURENT FABIUS

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

M. le président.

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Nous commençons par le groupe communiste.

AIDES AUX PAYS FRAPPÉS PAR L'OURAGAN MITCH

M. le président.

La parole est à M. François Asensi.

M. François Asensi.

Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

L'ouragan Mitch a déclenché un déferlement de catastrophes naturelles au Salvador, au Nicaragua, au Honduras et au Guatemala. Les conséquences humaines sont trag iques : 3 millions de sans-abri, 30 000 morts ou disparus, des centaines de milliers d'hectares de cultures et de nombreuses infrastructures détruits.

Ce drame anéantit tous les efforts entrepris par ces pays pour se relever de leurs guerres civiles, au prix d'un effort exigé par le FMI, avec des réductions drastiques des dépenses sociales, de santé publique et d'éducation.

La situation de ces pays justifiait déjà des mesures de soutien au développement.

Au Nicaragua, la moitié des revenus des exportations servait à rembourser la dette.

La France s'était engagée à soutenir les démarches des autorités de Managua pour une adhésion au programme d'allégement de la dette des pays pauvres très endettés.

Aujourd'hui, tous les critères que continuent d'exiger le FMI et la Banque mondiale sont totalement caducs, sauf à se rendre coupable de non-assistance à citoyens du monde en danger.

A catastrophe exceptionnelle, mesures exceptionnelles.

Le Gouvernement a déjà pris des mesures de secours d'urgence.

Comment comptez-vous coordonner et suivre, avec vos partenaires européens, un vaste programme international d'aide à la reconstruction, au développement et à la solidarité ? Plus généralement, M. le premier ministre vient d'affirmer sa volonté d'un nouveau partenariat avec les pays les plus pauvres. La France préside actuellement le Club de Paris. Quelle initiative compte-t-elle prendre pour effacer la dette de ces pays d'Amérique centrale ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Je suis sûr de représenter l'ensemble de l'Assemblée en associant tous nos collègues aux actions qui seront menées pour venir en aide aux populations si durement touchées. Nous sommes véritablement à leurs côtés. (Applaudissements sur tous les bancs.)

La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Monsieur le député, l'Amérique centrale a, en effet, été touchée par une catastrophe naturelle de très grande ampleur : des dizaines de milliers de morts, des millions de sans-abri, des familles entières disparues et, sur un autre plan, l'agriculture dévastée, des sites industriels détruits, une économie à reconstruire pratiquement à partir de zéro.

La France est aux côtés de ces pays dans l'épreuve. Elle l'est par les mesures techniques et sanitaires de première urgence que vous avez évoquées, qui sont nécessaires et qu'il fallait mettre en oeuvre tout de suite.

Bien entendu cela ne suffit pas, il faut aller au-delà. Et vous avez particulièrement mis l'accent sur les conditions financières dans lesquelles sont ces pays, en particulier sur leur dette.

S'agissant de la dette, la France a une responsabilité particulière, car elle préside le Club de Paris, qui est le club des créanciers de ces pays. J'ai donc écrit à tous les ministres des finances du Club de Paris, mes collègues, pour leur annoncer que nous devions mettre en oeuvre un programme qui, à tout le moins, reporterait à plus tard les échéances de dettes due par ces pays en 1999, en 2000 et en 2001.

Mais il faut aller plus loin, et vous avez évoqué les actions internationales. Ces pays, en effet, ont des dettes vis-à-vis du FMI ou de la Banque mondiale, qui ne peuvent pas être directement annulées. Que pouvonsnous faire ? Ce matin, avec le chancelier de l'Echiquier britannique, Gordon Brown, j'ai prévu de constituer un fonds, que nous alimenterons, pour nous substituer aux remboursements de ces pays vis-à-vis du Fonds monétaire international.

Mais il faut aller plus loin encore, car c'est la grandeur de la France d'être aux côtés de ces pays, devant les autres et avant les autres. Et c'est pourquoi, à la demande du Premier ministre, Lionel Jospin, j'annule aujourd'hui unilatéralement l'ensemble des dettes que la France détient sur ces pays, en particulier le Nicaragua et le Honduras.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Au-delà, nous travaillerons avec leurs gouvernements à leur développement et à leur reconstruction. Mais l'urgence, maintenant, était de redonner l'espoir. C'est ce que, à notre échelle, nous essayons de faire.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques


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bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Nous passons au groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.

AIDE AUX PAYS FRAPPÉS PAR L'OURAGAN MITCH

M. le président.

La parole est à M. Dominique Paillé.

M. Dominique Paillé.

L'événement que M. Asensi vient d'évoquer a, bien évidemment, causé l'émoi et la consternation sur l'ensemble des bancs de cette assemblée, et la réponse que vient de lui donner M. le ministre de l'économie nous éclaire et nous rassure quelque peu. Le sujet ne souffrant aucune polémique, je m'abstiendrai de tout commentaire. Il nous semble cependant que les Français ont besoin d'en savoir plus et d'être rassurés sur la pérennité de cette aide qui devrait se traduire par un plan de coopération inscrit dans la durée. Nous devrions également agir en concertation étroite avec nos partenaires de l'Union européenne, car les pays touchés ont avec nous une proximité de culture et une histoire qui en font presque des peuples frères.

Par conséquent, monsieur le Premier ministre, ma question sera simple. Le Président de la République ira, la semaine prochaine, témoigner sur place de la solidarité de la France à l'égard de ces peuples. Le Gouvernement compte-t-il agir en concertation avec ses partenaires de l'Union européenne d'une manière efficace et durable et, si oui, comment ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et sur quelques bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Monsieur le député, je ne reviens pas sur ce que je viens d'expliquer à propos de la dette.

A la fin de mon propos, j'évoquais, en une phrase seulement, pour être bref, la nécessité d'une coopération pour le développement. Votre question va me permettre de m'étendre sur ce point.

Il est bon de répondre autant que faire se peut aux demandes immédiates et urgentes. Il est nécessaire de prévoir l'avenir en remettant une dette importante. Mais cela ne suffit pas. On ne saurait laisser ces pays s'occuper seuls de leur reconstruction, quand bien même ils n'auraient plus de dette vis-à-vis de l'extérieur. Celle-ci nécessitera l'aide internationale et il est souhaitable qu'elle ne soit pas dispersée. Faisons au moins en sorte que l'Europe s'affirme en tant que telle et qu'elle participe à un programme de développement qu'elle aura défini elle-même et qu'elle conduira.

T outefois, notre proposition de coopération doit s'étendre à d'autres pays que ceux que l'Europe peut rassembler. En tout état de cause, c'est en discutant avec les gouvernements des pays sinistrés que ces programmes de coopération et de redéveloppement doivent être mis en place. Ils sont, d'ores et déjà, à l'étude et il est clair que les actions doivent être coordonnées. On en a trop vu dans le passé d'inefficaces parce que trop dispersées.

Aujourd'hui, c'est toute la communauté internationale qui doit se mobiliser. Ici, c'est l'Assemblée tout entière qui se retrouve aux côtés du Gouvernement et même le pousse à aller dans ce sens. Des programmes de coopération sont à l'étude. Ils seront mis en oeuvre. Nous aurons, là, l'occasion de montrer que la solidarité internationale n'est pas un vain mot. Et que ces pays ne bénéficient pas de la nôtre simplement parce que nous avons avec eux des relations historiques et culturelles importantes.

On a trop dit que l'économie était globalisée sur la planète et que tout y était devenu interdépendant pour qu'on ne voie pas cette internationalisation à l'oeuvre face à de telles épreuves : la solidarité aussi doit devenir internationale ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste, du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

FONDS NATIONAL DE DÉVELOPPEMENT DU SPORT

M. le président.

La parole est à M. Edouard Landrain.

M. Edouard Landrain.

Ma question s'adresse à Mme la ministre de la jeunesse et des sports ou, à défaut, à M. le secrétaire d'Etat au budget.

Le FNDS, le Fonds national de développement du sport, toujours insuffisant aux yeux du monde sportif, serait, dit-on, plus riche qu'on ne pourrait le supposer.

Année après année, il aurait accumulé des excédents et disposerait, au 31 décembre 1997, d'une trésorerie de 364 millions de francs. Une explication officielle figure dans les rapports de gestion du FNDS, mais elle n'est pas suffisamment convaincante pour expliquer pourquoi ce solde augmente d'année en année.

Ma question est simple : si cagnotte il y a, quel en est le montant ? Que comptez-vous en faire ? L'attente du mouvement sportif est grande, ses besoins sont immenses. Ces fonds inespérés seraient immédiatement utilisés, c'est sûr. Les petits clubs dont les moyens sont insuffisants et qui sont confrontés à des difficultés financières quotidiennes attendent avec intérêt votre réponse. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat au budget.

M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget.

Monsieur le député, je répondrai effectivement à la place de ma collègue Mme Buffet, en déplacement à Bruxelles.

V ous m'interrogez sur l'existence supposée d'une cagnotte du Fonds national de développement du sport.

Je vous le dis d'emblée : cette cagnotte n'existe pas. (« Ah bon ? » sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.) L'idée même qu'un fonds cogéré par le mouvement sportif et l'Etat aurait une cagnotte signifierait que le mouvement sportif aurait des pratiques de gestion douteuses, ce que vous ne pensez pas, sans doute. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. Bernard Roman.

Très bien !

M. le secrétaire d'Etat au budget.

Des informations erronées ont été publiées sur ce sujet dans la presse spécialisée. Je vais vous répondre clairement.

S'il y a effectivement, à la fin de l'année 1997, ce que l'on appelle en termes techniques un excédent de trésorerie de 364 millions de francs, c'est pour deux raisons.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 10 NOVEMBRE 1998

D'abord, les prélèvements effectués sur les jeux des mois de novembre et de décembre ne sont d'habitude pas consommés immédiatement et sont reportés sur l'année suivante. La seconde raison est de bonne gestion, c'est que, lorsqu'on engage des investissements, on met de côté, les spécialistes le savent, les crédits de paiement correspondants.

Vous me donnez l'occasion d'apporter une précision importante. Lorsque Mme Buffet a pris ses fonctions, elle a découvert que le Fonds national de développement du sport avait souscrit des engagements qui excédaient de loin ses propres moyens financiers. Elle s'est donc engagée à « résorber » ces promesses sans provision sur une période de trois ans. Elle a quelque mérite à le faire, parce qu'il a fallu financer aussi les stades et les équipements pour la Coupe du monde.

Mme Michèle Alliot-Marie.

Ç'avait été fait avant !

M. le secrétaire d'Etat au budget.

Il a fallu aussi poursuivre le soutien au sport de haut niveau et développer des équipements de proximité qui avaient été quelque peu négligés dans le passé.

Mme Michèle Alliot-Marie.

Ce n'est pas vrai !

M. le secrétaire d'Etat au budget.

Enfin, Marie-George Buffet a lancé une politique ambitieuse de soutien au sport populaire qui était attendue depuis très longtemps.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Je le répète, monsieur le député, il n'y a pas de cagnotte et ma collègue est en train de solder les engagements un peu irresponsables qui avaient été pris antérieurement.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Nous en venons au groupe socialiste.

AIDE AUX PAYS FRAPPÉS PAR L'OURAGAN MITCH

M. le président.

La parole est à M. Damien Alary.

M. Damien Alary.

Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères.

François Asensi a évoqué le lourd bilan du cyclone Mitch, ainsi que la question de la dette. J'aborderai, pour ma part, celle des secours d'urgence.

Coulées de boue, glissements de terrain, inondations, tremblements de terre, éruptions volcaniques : en Amérique centrale, les éléments ne cessent de se déchaîner, empêchant les sinistrés d'enterrer leurs morts. Dans de nombreuses régions, les récoltes sont entièrement ravagées, le bétail est perdu, les routes sont coupées. Trois millions de sinistrés, dont beaucoup ont tout perdu, sont maintenant confrontés aux risques d'épidémie - choléra, malaria -, et de famine.

En outre, des milliers de mines ont refait surface, menaçant les survivants.

Monsieur le ministre, nous savons que la France a commencé à apporter son aide aux pays les plus touchés.

A quelques jours du voyage que vous allez effectuer aux côtés du Président de la République, pouvez-vous nous détailler les moyens logistiques et humains qui ont été mis à la disposition de ces pays dans le cadre de l'aide d'urgence ? Comment la France envisage-t-elle der épondre à la proposition espagnole d'aide à la reconstruction des pays affectés par le cyclone, présentée dans le cadre de l'Union européenne ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.

M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères.

M. le ministre de l'économie et des finances a déjà indiqué à quel point la France s'est mobilisée, dès le début, pour apporter la plus grande contribution possible à l'aide aux populations des quatre pays d'Amérique centrale touchés par l'un des trois ou quatre cyclones les plus violents du siècle. Nous avons maintenant confirmation que le bilan s'élève à plus de 11 000 morts et plus de 13 000 disparus.

Nous avons envoyé soit depuis les Antilles, soit depuis la métropole, des spécialistes des catastrophes naturelles, en particulier du déblayage, du matériel de déblayage, des produits pour aider déjà à la reconstruction, des produits médicaux pour les soins, des tentes et des équipements sanitaires. Voilà pour l'aide d'urgence qu'il fallait envoyer dans l'immédiat soit par bateau, soit par avion. Nous sommes encore dans cette phase, même s'il n'est pas trop tôt pour penser à la reconstruction qui suivra.

Le Président de la République sera dans cette région au début de la semaine prochaine, à l'issue d'un voyage au Mexique.

L'aide de la France se monte d'ores et déjà à 24 millions de francs, à quoi s'ajoute l'action menée dans le cadre de l'Union européenne, qui est aujourd'hui de l'ordre de 7 millions d'euros. A la suite d'une réunion qui s'est tenue à Bruxelles hier, la Commission pourrait l'augmenter de 10 millions d'euros supplémentaires.

L a très grave question des mines s'ajoute à la catastrophe, puisqu'on recense dans la région touchée par le cyclone 75 000 mines antipersonnel, qui ont été emportées depuis dans des lieux inconnus. Ce peut être au milieu d'habitations, voire de camps de réfugiés. Là aussi, nos spécialistes sont à l'oeuvre. Et cela ne fait que renforcer notre détermination à faire ratifier et appliquer la convention promulguée le 8 juillet dernier à propos des mines antipersonnel. Vous savez que la France avait apportée son plein appui à cette démarche d'initiative canadienne.

Soyez assuré que tous les efforts nationaux, européens et internationaux, dans le cadre d'un centre de coordination de l'ONU, sont entrepris pour aider ces populations à sortir le plus vite possible de la détresse aiguë dans laquelle elles sont encore plongées. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

URBANISME COMMERCIAL

M. le président.

La parole est à M. Roland Garrigues.

M. Roland Garrigues.

Ma question s'adresse à Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce et à l'artisanat.

Madame la secrétaire d'Etat, la loi de juillet 1996, relative au développement et à la promotion du commerce et de l'artisanat, a réformé la loi dite loi Royer. L'objectif était et reste de rééquilibrer le commerce en faveur des petites et moyennes entreprises, donc de le favoriser en


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 10 NOVEMBRE 1998

centre-ville. Cette loi, dans un souci de transparence et de consensus territorial, a permis d'abaisser à 300 mètres carrés le seuil d'autorisation des surfaces de vente.

Madame la secrétaire d'Etat, quelle est votre position à l'égard de la réglementation des implantations nouvelles de grandes surfaces commerciales sur le territoire ? Entendez-vous réformer la législation à ce sujet ? Que comptezvous faire pour continuer à aider le développement de ce qu'il est convenu d'appeler le petit commerce ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce et à l'artisanat.

Monsieur le député, on m'interroge régulièrement, lors de mes déplacements, sur l'augmentation du nombre d'autorisations par rapport aux deux années précédentes.

Si vous le permettez, je vous répondrai d'abord de manière globale. Nous avons effectivement dépassé les autorisations pour un million de mètres carrés. Sur ces autorisations, plus de 47 % concernent le jardinage et le bricolage et, si l'on y ajoute l'équipement personnel, on dépasse 58 %.

E n abaissant le seuil de 1 000 mètres carrés à 300 mètres carrés, la loi a provoqué arithmétiquement une augmentation de 20 % des mètres carrés soumis à une demande d'autorisation en CDEC et parfois en CNEC.

Je reste persuadée que nous devons maintenir une position d'équilibre entre les différentes formes de commerce.

Pour cela, nous devons veiller à ce que les commissions départementales, qui sont les plus proches du terrain, prennent les meilleures décisions possible.

Au sein de ces commissions, quatre voix sont nécessaires pour que l'autorisation soit donnée.

Dès lors qu'une autorisation obtient ces quatre voix, le Gouvernement n'a pas à demander au préfet d'attaquer cette décision. Le respect de la volonté des élus locaux et des élus consulaires doit primer.

M. Jacques Floch.

Très bien ! Mme la secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce et à l'artisanat.

Afin de leur permettre de prendre des décisions en toute connaissance de cause, nous devons donner aux commissions départementales le maximum d'éléments d'information.

C'est pourquoi nous avons mis en place, sur autant de territoires qu'il était possible de le faire, des schémas d'équipements commerciaux afin d'aider les acteurs économiques et les élus à se mettre d'accord sur le diagnostic de la situation et d'éclairer leurs décisions.

Par ailleurs, le Premier ministre a annoncé la création d'un observatoire national du commerce. Un décret paraîtra prochainement à cet effet.

Je vous rappelle en outre que sous la pression d'un grand nombre de parlementaires, mais avec la bénédiction de l'ensemble du Gouvernement, le FISAC a obtenu 100 millions de francs supplémentaires, passant ainsi de 300 millions à 400 millions de francs. Ces crédits sont destinés à aider aussi directement que possible les projets d'implantation commerciale en centre-ville, dans les quartiers et en milieu rural.

C'est un travail de longue haleine, mais aussi un travail passionnant, que de maintenir l'équilibre entre les formes de commerce, équilibre indispensable aux consommateurs, aux commerçants et aux producteurs. Il faut en effet éviter des situations d'oligopole face aux producteurs.

Cette politique d'équilibre devrait aider les petits commerces, les commerces de proximité, les franchisés, les coopératives à mieux passer le « bug » du commerce électronique, ce dont, malheureusement, ne se préoccupent jusqu'à maintenant que les plus grands distributeurs.

Par son rôle de régulateur, l'Etat doit entraîner dans ce mouvement l'ensemble de petites entreprises commerciales qui peuvent vraiment jouer la carte de la qualité dans cette nouvelle donne commerciale. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

NOUVELLE-CALÉDONIE

M. le président.

La parole est à Mme Catherine Tasca.

Mme Catherine Tasca.

Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'Etat à l'outre-mer.

Une fois retombés l'émotion et le grand élan de confiance suscités par les accords de Nouméa, on a vu réapparaître, là-bas et ici, certaines interrogations, voire certaines inquiétudes, sur la voie choisie en mai dernier.

Le résultat du référendum du 8 novembre apporte une confirmation éclatante de l'adhésion de la très grande majorité des Néo-Calédoniens à ces accords. Nous pouvons à cette occasion leur adresser d'ici un salut amical.

Si ce choix a été possible en mai dernier et renouvelé cette fois encore, c'est d'abord grâce à l'accord des volontés et à l'intelligence de l'avenir d'hommes remarquables, tels que Jean-Marie Tjibaou, Jacques Lafleur et de tous ceux qui les entouraient ; mais c'est aussi beaucoup grâce à la République qui ne les a pas laissés seuls dans un face-à-face difficile. Deux chefs de gouvernement, Michel Rocard et Lionel Jospin, ont su, en prenant toutes leurs responsabilités, les écouter, comprendre la situation et garantir leurs engagements réciproques.

D ans la nouvelle phase qu'ouvre le vote du 8 novembre, le rôle de l'Etat, n'en doutons pas, restera essentiel, et il ne sera pas facile. Outre veiller à la fidélité aux accords de Nouméa, l'Etat devra aussi accompagner les solutions constructives qui seront à inventer à chaque étape, puisque la situation est sans précédent.

Monsieur le secrétaire d'Etat, pouvez-vous nous dire comment se préparent les étapes prochaines, notamment la loi organique que notre assemblée devra examiner très prochainement, loi qui fixera les nouvelles institutions du territoire et qui sera décisive pour l'avenir du processus ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.

M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.

Madame la présidente de la commission des lois, le référendum qui s'est déroulé dimanche en Nouvelle-Calédonie portait sur l'approbation des accords de Nouméa, signés le 5 mai dernier par le Premier ministre et les représentants des deux principales forces politiques, le RPCR et le FLNKS.

Sur les résultats, je tiens d'abord à souligner que la participation électorale a atteint plus de 74 %. Il y a dix ans elle n'avait été que de 63 %. Le « oui » l'a emporté à 72 % contre 57 % pour les accords de Matignon - il était à l'époque minoritaire dans la province sud et à Nouméa.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 10 NOVEMBRE 1998

Les trente-trois communes de la Nouvelle-Calédonieo nt voté « oui », et ce sont 55 000 électeurs sur 106 000 inscrits qui se sont prononcés en faveur du

« oui », soit plus de 52 % du corps électoral.

Ce résultat traduit une adhésion forte des Calédoniens à la démarche initiée par les accords de Matignon, visant à la paix, à la réconciliation, au développement économique dans dans le cadre d'une relation renouvelée avec la République française.

Le Gouvernement, les forces politiques locales, mais aussi métropolitaines puisque 95 % des parlementaires ont approuvé la révision constitutionnelle en juillet dernier, ont contribué à ce résultat. Le Président de la République a également soutenu cette démarche. Je pense que les Calédoniens ont apprécié que l'ensemble de notre pays se prononce en faveur d'une évolution progressive, pacifique, des relations sur le territoire.

Qu'aviendra-t-il maintenant ? Nous avons élaboré un avant-projet de loi organique pour les institutions qui sera examiné par le congrès de la Nouvelle-Calédonie d'ici à la fin de la semaine. Il devrait être présenté en conseil des ministres à la fin du mois et, je l'espère, discuté à l'Assemblée avant la fin de cette année. Compte tenu des navettes parlementaires, la loi pourrait être votée définitivement à la fin de cet hiver, et les institutions nouvelles pourraient se mettre en place à partir du mois de juin. Les Néo-Calédoniens continueront ainsi de construire leur pays pendant les vingt prochaines années, dans un esprit de dialogue et de travail en commun.

Je m'associe aux remerciements que vous avez adressés aux hommes politiques qui ont su faire preuve de clairvoyance dans cette démarche : M. Lafleur, qui était déjà l'un des signataires en 1988, et qui l'est encore aujourd'hui, et M. Roch Wamytan pour le FLNKS. Et nous n'oublierons pas la figure de Jean-Marie Tjibaou, assasiné pour avoir voulu la paix et la réconciliation entre les communautés.

Pour l'ensemble de la représentation nationale, pour notre pays tout entier, ces accords sont la preuve que la France sait concevoir une évolution de ses relations avec le territoire, en accord avec les populations, dans une relation qui est enrichie et renouvelée. Je pense que cela est très positif.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur divers autres bancs.)

ÉGLISE DE SCIENTOLOGIE

M. le président.

La parole est à Mme Yvette Roudy.

Mme Yvette Roudy.

Ma question s'adresse à Mme la garde des sceaux et concerne l'instruction en cours à l'encontre de l'Eglise de scientologie. Il semble que d'incompréhensibles anomalies, risquant d'annuler quinze années de procédure, aient été constatées. Ainsi, des dossiers disparaîtraient du palais de justice de Paris, des liquidations prononcées resteraient sans effet.

Notre assemblée répertorie cette organisation en tant que secte. Plusieurs parlementaires ou anciens parlementaires, en particulier MM. Vivien, Guyard, Brard, ont souligné le danger, la perversité mais, aussi, l'extrême habileté de ces organisations. Elles seraient capables d'infiltrer l'appareil d'Etat, l'appareil administratif, judiciaire et financier et, donc, de déstabiliser notre société.

Nous savons aussi comment elles peuvent s'emparer des esprits, des biens et parfois même des vies. Tout le monde se souvient des suicidés du Temple du peuple et, plus récemment, de ceux du Temple solaire. Nous connaissons l'ampleur des dégâts qu'elles peuvent provoquer à l'intérieur des familles par certaines pratiques ainsi que leur emprise insidieuse sur des jeunes particulièrement faibles.

Les sectes portent donc atteinte à l'ordre privé mais, aussi, à l'ordre public.

Compte tenu de la gravité de ces faits, comment comptez-vous, madame la garde des sceaux, exercer votre v igilance à l'encontre de ce type d'organisations ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur divers autres bancs.)

M. le président.

La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

Madame la députée le 13 octobre dernier, la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris a constaté que le dossier pénal concernant l'Eglise de scientologie n'était pas complet. Il manquait un tome, le 9e , et des pièces du 8e tome.

Dès le lendemain, j'ai saisi les chefs de la cour d'appel de Paris d'une enquête administrative.

Cette enquête, qui a été menée avec beaucoup de détermination et de précision, n'a cependant pas permis de déterminer l'origine de la disparition de ces éléments du dossier.

M. Christian Bataille.

C'est incroyable !

M me la garde des sceaux.

C'est pourquoi, j'ai ordonné vendredi dernier, 6 novembre, une inspection confiée à l'inspection des services judiciaires. La disparition d'un dossier pénal constitue un fait particulièrement grave. La confiance dans la justice passe par la certitude pour les justiciables de voir leurs dossiers soumis aux juridictions.

De son côté, la chambre d'accusation, qui s'est réunie hier s'est donnée jusqu'au 14 décembre pour décider ce qu'il y a lieu de faire pour que ce dossier soit effectivement jugé.

Je voudrais en profiter pour rappeler les mesures qui ont été prises par le Gouvernement pour lutter contre le phénomène sectaire. D'abord au sein du ministère de la justice, une cellule spécialisée a été créée au sein de l a direction des affaires criminelles et des grâces pour sensibiliser les magistrats et les fonctionnaires à la lutte contre le phénomène sectaire. Une session de formation a été organisée cette année par l'Ecole nationale de la magistrature, elle le sera à nouveau l'année prochaine.

Surtout, le Premier ministre a décidé la création d'une mission interministérielle de lutte contre les sectes par un décret du 7 octobre 1998, mission qui se substitue à l'observatoire qui existait précédemment et dont le secrétariat général est confié à un magistrat. Cette mission est chargée de diffuser les informations et de mieux coordonner les actions de l'administration contre les sectes.

Quant à l'action de la justice sur le terrain, il y a eu au 1er mai 1998, 153 procédures pénales établies, qui ont fait l'objet de 73 enquêtes préliminaires et 80 informations judiciaires, dont 17 sont achevées à ce jour.

Ces quelques chiffres témoignent à eux seuls de la prise de conscience par le monde judiciaire de la gravité du phénomène sectaire.

Cela étant, force est de constater que les poursuites se heurtent à plusieurs difficultés, liées notamment à une insuffisance de signalements des faits.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 10 NOVEMBRE 1998

C'est la raison pour laquelle je prépare, à l'intention des parquets, une circulaire qui prévoira qu'un magistrat spécialisé par cour d'appel aura pour tâche de coordonner la lutte contre les sectes (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et sur divers bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) et que les associations de défense des victimes des sectes seront plus étroitement associées et consultées par les tribunaux.

Enfin j'ai décidé d'accorder aux associations de lutte contre les sectes la possibilité de se porter partie civile.

(Applaudissements sur les mêmes bancs.)

Les modalités de cette innovation dans le code de procédure pénale sont actuellement mises au point par mon ministère, en relation avec Mme Catherine Picard qui préside dans notre assemblée le groupe de travail de lutte contre les sectes. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Nous en venons au groupe Radical, Citoyen et Vert.

RETRAITES AGRICOLES

M. le président.

La parole est à M. Michel Suchod.

M. Michel Suchod.

Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture.

Monsieur le ministre, en vous rendant à Vienne, à Bruxelles et demain à Bonn vous prenez actuellement la mesure extérieure de vos responsabilités ministérielles. A l'avant-veille de la discussion de notre budget, je vous interrogerai sur les retraites agricoles, qui concernent 2 millions de nos concitoyens, et représentent donc un véritable enjeu de société.

Nous reconnaissons que des avancées substantielles ont eu lieu depuis dix-huit mois. Ainsi dès l'an dernier dans un budget réputé, ô combien, difficile certains avantages ont été acquis.

Début septembre, une augmentation de 1,6 milliard en année pleine a été annoncée pour 600 000 bénéficiaires.

En dépit de cette légère augmentation le niveau des retraites reste faible ; je rappelle que sur les 900 000 bénéficiaires du fonds social vieillesse, 600 000 sont des agriculteurs. Enfin, dernière avancée, nous avons fait adopter à l'article 1er de la loi d'orientation agricole le principe de la revalorisation des retraites.

Cependant deux problèmes demeurent.

Le premier concerne le million, au moins, d'agriculteurs, qui n'ont pas trente-deux ans et demi de cotisations et qui sont donc écartés du programme de revalorisation des retraites. Pour eux nous avions donc proposé une revalorisation du fonds national vieillesse. C'est du reste ce que nous avions dit avec François Hollande et Germinal Peiro aux agriculteurs que nous avions reçus lors de la manifestation de Tulle.

Nous souhaiterions qu'au cours de cette législature, le minimum vieillesse pour une personne seule soit porté à 4 050 francs, ce qui représenterait une augmentation, qui me semble possible, de 500 francs par mois sur les trois prochains budgets.

Le second problème est lié au budget qui vient en discussion. Vous savez que grâce à des économies et à des recettes nouvelles, le BAPSA dispose de 2,5 milliards de francs supplémentaires. Deux milliards ont été attribués, à juste titre, au nouveau fonds de réserve sur les retraites.

Mais il reste 500 millions.

Tout ou partie de cette somme ne pourrait-elle pas être reportée dès cette année sur les retraites agricoles afin qu'elles atteignent un jour 75 % du SMIC ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche.

Monsieur le député, comme vous l'avez dit vous-même, ce gouvernement a déjà beaucoup fait pour les retraites agricoles. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Dans la loi de finances pour 1998, une augmentation d'un milliard de francs leur a été accordée et, dans le projet de loi de finances pour 1999, c'est 1,2 milliard de francs qui se transformera, en 1,6 milliard en année pleine, compte tenu du décalage bien connu du premier trimestre.

C'est un rythme deux fois plus rapide, que celui qu'a connu la revalorisation des retraites agricoles entre 1993 et 1997. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) J'ajoute que ces revalorisations sont ciblés sur les plus petites retraites, ce qui n'était pas le cas auparavant.

Il faut poursuivre cet effort ; le Gouvernement en a pris l'engagement, dans le cadre d'un amendement à l'article 1er ter de la loi d'orientation agricole.

Le Gouvernement s'est engagé à procéder à une revalorisation des retraites sur cinq ans, c'est-à-dire d'ici à 2002. Il tiendra cet engagement. D'ores et déjà, des réflexions sur ce sujet sont engagées dans le cadre de la préparation de la loi de finances pour l'an 2000.

Plusieurs pistes de réflexion sont aujourd'hui explorées, en dehors de celle concernant la revalorisation des petites retraites agricoles elles-mêmes.

La première piste concerne la revalorisation du seuil d'exonération sur l'actif successoral, qui est actuellement de 250 000 francs. Ce seuil pourrait être porté à 300 000 francs comme c'est le cas pour la prestation spécifique dépendance.

M. Gérard Gouzes.

Très bien !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Le deuxième porte sur l'harmonisation avec le FSV. C'est un problème qui se pose de plus en plus compte tenu des effets de rattrapage.

E nfin, nous avons engagé des négociations avec l'ensemble des organisations professionnelles et les associations représentatives de retraités. Ces négociations sont appelées à se développer dans les prochaines années.

Dans ces réflexions, le Parlement joue tout son rôle puisqu'un groupe de travail animé par M. Germinal Peiro, qui, de ce point de vue, fait preuve d'une compétence à toute épreuve, alimente le Gouvernement en propositions, qui les reçoit avec beaucoup de bienveillance et les examine avec une grande attention.

(« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Qu'entendez-vous, monsieur le ministre, quand vous dites « de ce point de vue » ? (Sourires.) M. Peiro est compétent à tous les points de vue !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 10 NOVEMBRE 1998

MINES ANTIPERSONNEL

M. le président.

La parole est à M. Noël Mamère, pour une question courte, qui devra appeler une réponse courte.

M. Noël Mamère.

Ma question s'adressait à M. le ministre délégué à la coopération, mais, en son absence, je la poserai à M. le ministre des affaires étrangères.

Elle concerne les mines antipersonnel, qui font une victime toutes les vingt minutes et qui, en vingt ans, ont tué plus d'un million de personnes.

La question des mines antipersonnel et en particulier du déminage redevient d'actualité avec ce qui s'est passé en Amérique centrale, en particulier au Nicaragua, où, selon les autorités, plus de 75 000 mines antipersonnel sont aujourd'hui dispersées dans la nature.

Le traité d'Ottawa de décembre 1997, signé par 133 nations mais auquel seulement quarante-neuf Etats ont adhéré dont la France, ne permet pas de résoudre tous les problèmes auxquels sont confrontés les Etats en matière de déminage.

Un problème de coordination et un problème de moyens se posent. Et si ma question s'adressait à M. le ministre délégué à la coopération, c'est parce que le gén éral Jean-Pierre Kelche a déclaré en mai dernier devant la commission de la défense que le déminage humanitaire était de la responsabilité des autorités civiles et non de celle des autorités militaires.

Je poserai trois questions.

La Norvège, le Canada et l'Allemagne viennent d'annoncer qu'ils vont consentir des moyens financiers importants en faveur du déminage. A quelle hauteur la France compte-t-elle contribuer à cette action internationale ? Le ministère de la coopération est-il prêt à mettre en place une structure interministérielle pour que la question du déminage s'inscrive dans le cadre de la politique de coopération et de développement ? Enfin, des décisions de ce type sont-elles inscrites à l'ordre du jour de la prochaine séance du comité interministériel pour la coopération internationale et le dével oppement ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre des affaires étrangères, pour une réponse qui, maheureusement, devra être courte.

M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères.

Monsieur le député, la catastrophe qui vient de se produire en Amérique centrale, notamment au Nicaragua, ce pays martyr déjà ravagé dans le passé par une guerre civile, a remis à l'ordre du jour la question des mines antipersonnel. On estime à 75 000 le nombre des mines antipersonnel qui ont été dispersées par le cyclone au Nicaragua.

Vous savez à quel point la France s'est engagée pour interdire les mines antipersonnel et le rôle qu'elle a joué auprès des Canadiens pour que la convention d'Ottawa sur l'interdiction des mines antipersonnel puisse être signée. La France a d'ailleurs été, parmi les membres permanents du Conseil de sécurité, le premier pays à ratifier cette convention, qui entrera en vigueur le 1er mars prochain.

La question du déminage se pose surtout dans les pays qui, comme le Nicaragua, ont été, dans le passé, frappés par des guerres. Je pense à l'Afghanistan, où il est presque impossible de travailler, au Cambodge, à l'Angola, au Mozambique et, malheureusement, à de nombreux autres pays d'Afrique. Ces types de mines sont malheureusement très faciles à fabriquer et à répandre.

La coopération pour le déminage est une action dans laquelle la France s'est déjà spécialisée depuis des années.

Tant l'armée française que les structures civiles spécialisées ou les services de la coopération française, laquelle est maintenant un volet du ministère des affaires étrangères, sont reconnus dans l'ensemble de ces pays comme apportant une contribution exceptionnelle. Nous allons continuer.

L'ordre du jour exact du CICID auquel vous faisiez allusion et que présidera le Premier ministre, sans doute au mois de janvier prochain, n'est pas encore arrêté, mais cette question pourrait y être inscrite.

Mais sans attendre, dans tous les pays qui comptent sur nous et dans lesquels il est possible de travailler, c'està-dire là où la guerre est terminée, on observe une présence française active. Celle-ci ne cesse de se renforcer et est reconnue partout.

(Applaudissements sur divers bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Nous en venons au groupe Démocratie libérale et Indépendants.

COUR CRIMINELLE INTERNATIONALE

M. le président.

La parole est à M. Alain Madelin.

M. Alain Madelin.

Monsieur le ministre des affaires étrangères, le 17 juillet dernier, 120 pays dont la France, qui a joué un rôle important, ont décidé de créer une cour criminelle internationale qui aura, une fois mise en place, à juger les crimes de guerre, les actes de génocide et les crimes contre l'humanité.

Quelles que soient les imperfections de cette cour, que ce soit sur le plan de ses compétences ou sur celui de ses modalités de fonctionnement, il s'agit là incontestablement d'une formidable avancée des droits de l'homme et de l'idée que nous pouvons nous faire de la justice.

M. Hervé de Charette.

Très juste !

M. Alain Madelin.

Cela signifie que les atrocités, où qu'elles soient commises, n'échapperont pas au châtiment, que la loi du plus fort ne pourra plus les effacer, ni la raison d'Etat les couvrir, ni l'impunité en estomper le souvenir.

M. Hervé de Charette.

Il a raison !

M. Alain Madelin.

Mais pour cela, encore faut-il que soixante pays aient déposé les instruments de ratification au siège de l'ONU.

Ma question est donc simple : la France ne peut-elle pas, devant les autres et avant les autres, donner l'exemple et entraîner, par une action diplomatique, soixante pays à ratifier au plus tôt cette convention internationale ? Ne pourrions-nous pas nous fixer un objectif, un bel objectif : faire de l'an 2000 la date de la création effective de la cour criminelle internationnale afin que nous puissions entrer dans ce

XXIe siècle si proche en étant dotés des moyens efficaces pour punir les criminels, pour que plus jamais les barbaries qui ont ensanglanté le XXe siècle, d'Auschwitz au Goulag, de Santiago du Chili à la place Tiananmen, des charniers de Pol Pot à la Bosnie ou au Kosovo ne puissent être perpétrées en toute impunité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 10 NOVEMBRE 1998

M. le président.

La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.

M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères.

Monsieur le député, vos suggestions rejoignent nos préoccupations, notre travail et l'action dans laquelle le Gouvernement français est engagé depuis l'été dernier, à Rome.

Durant la négociation qui a conduit à l'adoption du texte prévoyant la création de cette cour, la France a joué un rôle non seulement très actif mais aussi particulièrement utile qui a permis d'aboutir à des conclusions. Sans l'action de la France - laquelle a su adopter une position dynamique et constructive dans cette négociation afin qu'un accord puisse se dégager entre les pays qui voulaient tout et ceux qui ne voulaient rien -, la conférence de Rome n'aurait pas pu déboucher sur l'établissement d'un texte crédible et compatible avec les exigences, indispensables dans le monde actuel, du Conseil de sécurité, s'agissant notamment de ses prérogatives dans le cadre du maintien de la paix et de la mise en oeuvre du chapitre VII, dans certains cas.

Aujourd'hui, aucun pays n'a encore ratifié cet accord.

Mais ce n'est pas par manque de volonté politique ; c'est seulement dû au fait que le travail nécessaire pour mettre au point la version définitive du texte dans les différentes langues n'est pas encore achevé à New York.

Par ailleurs, les pays qui ont signé ce texte sont au nombre de trente-deux. C'est important, mais ce n'est pas encore suffisant. Nous avons l'intention de continuer d'être à la tête de ce mouvement.

En tout cas, je ne me hasarderai pas à fixer une date pour la création effective de cette cour, car nous réussirons peut-être à aller plus vite que prévu. Je peux seulement vous dire que sur ce sujet, qui recueille un très large assentiment,...

M. Pierre Lellouche.

Pas celui des Etats-Unis !

M. le ministre des affaires étrangères.

... nous avons l'intention d'aller le plus vite possible et d'entraîner avec nous le plus grand nombre possible de pays. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur divers autres bancs.)

M. le président.

Nous en venons au groupe du Rassemblement pour la République.

PROJET DE LOI SUR L'AUDIOVISUEL

M. le président.

La parole est à M. Michel Péricard.

M. Michel Péricard.

A qui dois-je poser ma question ? Logiquement à vous, madame la ministre de la culture et de la communication, mais chacun sait que c'est vous, monsieur le Premier ministre, qui avez personnellement surveillé et corrigé la rédaction du projet de loi sur l'audiovisuel, manifestant ainsi un intérêt inattendu pour un texte de cette nature.

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Ce projet de loi a été remanié après que le Conseil d'Etat l'eut grandement critiqué : trente voix sur quarante se sont prononcées contre. Ce qui montre au passage l'intérêt de l'examen des textes par cette institution, qui a volontairement été écarté pour un autre texte en cours de discussion.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Philippe Briand.

C'est l'Etat-PS !

M. Michel Péricard.

Ce projet de loi a été habillé d'oripeaux alléchants pour dissimuler sa véritable nature. On réduit la publicité, on n'augmente pas la redevance, mais on met à contribution le budget de l'Etat, ce qui, chacun le sait, monsieur Strauss-Kahn, ne coûte rien ! Merci, mesdames et messieurs les contribuables ! (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

Et tant que nous y sommes, pourquoi ne pas ajouter les 3 milliards supplémentaires réclamés ce matin par M. Lang ? Tout cela soulève nombre de questions dont nous aurons l'occasion de discuter de nouveau. Mais le véritable motif de l'élaboration de ce projet de réforme, à savoir la volonté de remettre en cause le système de nomination des responsables de la télévision, vous n'en parlez guère. Vous nourrissez l'arrière-pensée - un peu naïve, d'ailleurs - de vouloir verrouiller les chaînes publiques (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et sur divers bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert) dans la perspective d'une élection présidentielle qui devient votre obsession.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste et sur divers bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Un peu de calme !

M. Michel Péricard.

Le Conseil d'Etat vous a, sur ce point, admonestés. Tiendrez-vous compte de ses avis ? Le CSA continuera-t-il à jouer un rôle ou le Gouvernement reprendra-t-il le droit de nommer qui lui plaît là où cela lui plaît,...

M. Albert Facon.

Nostalgique !

M. Michel Péricard.

... procédé que vous avez si violemment critiqué en d'autres temps ? (Applaudissementss ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Philippe Briand.

C'est l'Etat-PS !

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de la culture et de la communication, pour une réponse courte.

Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication.

Je pensais que M. Péricard remonterait à ses souvenirs de 1974,...

M. Pierre Lellouche.

Qui allez-vous nommer, madame la ministre ?

Mme la ministre de la culture et de la communication.

... époque où il était contre le démantèlement de l'ORTF. Non, il ne les a pas évoqués ! Je pensais que M. Péricard allait rappeler qu'il avait voté la privatisation de TF 1, qui a considérablement fragilisé l'audiovisuel public français.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Non, il ne l'a pas évoqué.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - « Répondez à la question ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Je pensais également que M. Péricard allait rappeler qu'il y a quelques années, du temps de M. Carignon, il était contre la publicité (« Répondez à la question ! » sur les


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 10 NOVEMBRE 1998

bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants)...

M. le président.

Un peu de silence, s'il vous plaît !

Mme la ministre de la culture et de la communication.

... et qu'il voulait la diminuer sur les chaînes publiques.

Non, il n'a dit mot de ce choix de fond qui permet de garantir l'identité des chaînes publiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Je pensais également que M. Péricard allait saluer ce que plusieurs gouvernements de gauche ont fait.

M. Pierre Lellouche.

Qui allez-vous nommer ?

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Car ce sont des gouvernements de gauche qui ont contribué à garantir l'indépendance de l'information en créant la Haute autorité. Ce n'est pas vous, à droite ! (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Pierre Lellouche.

Qui allez-vous nommer, madame Trautmann ?

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Ce sont aussi des gouvernements de gauche qui ont libéré les fréquences et qui ont renforcé le service public de l'audiovisuel français.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) Je vous demande simplement, monsieur Péricard, de vous reporter à ce qui a été décidé dans la loi de finances de 1997. C'est la droite de l'Assemblée - et vous en faisiez partie - qui a voté une diminution des crédits de 250 millions de francs pour France 2 et de 300 millions de francs pour France 3, soit un total de 550 millions ! (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

C'est ainsi que vous avez abandonné la responsabilité qui est celle d'une majorité et d'un gouvernement et qui consiste à assurer les moyens de fonctionnement d'un service public.

(Mêmes mouvements sur les mêmes bancs.)

M. le président.

Un peu de silence, s'il vous plaît !

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Que fait le Gouvernement conduit par Lionel Jospin ? (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Il redonne au service public les moyens nécessaires. Il lui rend ses missions et il les confirme - et le Conseil d'Etat s'en est félicité -, et il crée une organisation qui permettra, à partir d'un groupe, d'avoir la puissance nécessaire pour pouvoir répondre aux attentes des téléspectateurs et pour pouvoir exister sur le plan international (« La question ! » sur les mêmes bancs.)

Q uant au président du groupe France télévision (« Ah ! » sur les mêmes bancs), monsieur Péricard, il sera nommé par le CSA.

M. Philippe Briand.

Tout cela ne sert donc à rien !

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Il s'agira d'une présidence commune, comme cela a été institué par la loi de 1989, quand Mme Tasca avait la charge de ce secteur.

Pour ce qui est des directeurs généraux des différentes chaînes filiales, ils seront nommés...

M. François Fillon.

Par le ministre !

Mme la ministre de la culture et de la communication.

... par un conseil d'administration, comme c'est déjà le cas aujourd'hui ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

VIADUC DE MILLAU

M. le président.

La parole est à M. Alain Marleix.

M. Alain Marleix.

Monsieur le président, mes chers collègues, je veux d'abord relever que la réponse de M. Sautter à Edouard Landrain à propos de la « cagnotte » du FNDS est en contradiction totale avec une information qui émane directement du ministère de la jeunesse et des sports. Bien entendu, je tiens ce document à la disposition du secrétaire d'Etat au budget.

(Applaudissements sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Ma question s'adresse à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement, et je la pose également au nom de Jacques Godfrain, député de l'Aveyron et maire de Millau.

Vous savez, monsieur Gayssot, combien est vital pour le Massif central, mais aussi pour les régions Auvergne, Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon, l'achèvement du d ésenclavement Nord-Sud. Ce désenclavement porte d'ailleurs un nom : l'autoroute d'aménagement du territoire A 75, qui relie Clermont-Ferrand à l'Espagne, via Millau et Béziers, autoroute qui, rappelons-le, est le fruit des différents plans « Massif central » lancés depuis plus de vingt-cinq ans.

Or un maillon essentiel de ce réseau fait toujours défaut : le contournement de Millau. Cette absence provoque chaque été les plus grands embouteillages de France, mais surtout pénalise gravement le développement économique du sud du Massif central, région déjà lourdement handicapée.

M. Jean-Paul Bacquet.

Il a raison !

M. le président.

Pouvez-vous poser votre question, monsieur Marleix ?

M. Alain Marleix.

Il est vrai que ce projet de contournement de Millau représente une prouesse technique, puisqu'il s'agit de construire, selon les ingénieurs, un viaduc d'une longueur et d'une hauteur exceptionnelles.

C'est donc un vrai défi technologique, qui fait honneur à nos ingénieurs et à l'administration de l'équipement.

Il est vrai aussi que ce projet est financièrement très coûteux, puisque vos services, monsieur le ministre, l'estiment à environ 2 milliards de francs.

I l est néanmoins impératif, pour l'économie des régions concernées, que l'Etat respecte ses engagements et que la France dispose en son centre du grand axe NordSud, Paris-Barcelone, indispensable à un bon aménagement du territoire.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 10 NOVEMBRE 1998

Ma question est très précise : quel est le calendrier prévu par le Gouvernement et quelles sont les modalités financières retenues ? Autrement dit, quand et comment ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Monsieur le député, le désenclavement passe aussi par la revitalisation de la ligne S NCF Béziers-Neussargues-Paris (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste)...

M. Philippe Briand.

Sauf quand la SNCF est en grève ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

... dont je sais que vous êtes un ardent défenseur.

En ce qui concerne la A 75, j'ai pu, comme beaucoup d'entre vous, vérifier cet été qu'il y avait encore des embouteillages monstres à Millau.

M. Pierre Lellouche.

Quand vous visitiez des barrages de routiers ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Il faut donc agir vite pour réaliser le chaînon manquant de cette autoroute, lequel se situe entre Clermont-Ferrand et Béziers.

Pour aller vite, je considère, comme j'ai déjà eu l'occasion de l'indiquer, qu'il faut concéder le viaduc de Millau sur cette autoroute,...

M. Pierre Lellouche.

Vous privatisez quand ça vous arrange ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

... par ailleurs gratuite entre Clermont-Ferrand et Béziers. La concession permettra de réaliser la totalité de cet itinéraire en 2003, c'est-à-dire quatre ans plus tôt (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. Pierre Lellouche.

C'est bien, l'aménagement du territoire ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Toutefois, le contournement de Millau n'a pas donné lieu à une consultation publique depuis 1993. Le dossier qui sera présenté à l'enquête comportera des éléments généraux sur le choix retenu pour le viaduc de Millau, conformément au concours qui a réuni bureaux d'études et architectes entre 1994 et 1996. Naturellement, le projet n'est pas défini dans le détail, puisqu'il sera réalisé sous la maîtrise d'ouvrage du concessionnaire.

Monsieur le député, voici la réponse que vous attendiez à votre question : aujourd'hui, le dossier concernant l'enquête publique est prêt et celle-ci pourra être lancée du 16 décembre 1998 au 26 janvier 1999. Je rappelle que cette enquête ne portera que sur les conséquences de la mise en concession. Cette décision lève toutes les incertitudes.

(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

REMBOURSEMENT DES SOINS

M. le président.

La parole est à M. Eric Doligé.

M. Eric Doligé.

Monsieur le Premier ministre, régulièrement, le Gouvernement annonce par des relais les mesures qu'il entend prendre à brève échéance. Ainsi Jean-Louis Guigou, directeur général de la DATAR, a-t-il annoncé, au détour d'un colloque, l'arrêt du projet SuperLURE ou Soleil, le 27 octobre dernier. Claude Allègre, interrogé il y a huit jours par un de nos collègues, n'a pu que confirmer.

Dans un autre domaine, qui fait l'objet de ma question, M. Gilles Johannet, directeur de la Caisse nationale d'assurance maladie, a récemment déclaré qu'il était favorable à une baisse des remboursements à l'encontre des malades qui ne souhaiteraient pas s'affilier auprès d'un médecin généraliste, dit médecin référent.

Le Gouvernement entend-il imposer un système de remboursement différent pour les malades qui ne souhaitent pas se rendre systématiquement chez le même généraliste ? Celui qui changerait, pour des raisons qui lui sont propres, de généraliste serait alors pénalisé. Un tel système ne vous paraît-il pas remettre en cause la liberté de choisir son médecin ? Enfin, je vous ai toujours entendu très critique sur le système anglais. Mais n'êtes-vous pas en train de vous en rapprocher insensiblement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur le député, j'ai, moi aussi, entendu ces propos de Gilles Johanet. Jusqu'à preuve du contraire, ils n'engagent que lui. Le Gouvernement n'a pas l'intention de limiter les remboursements, ou de faire payer différemment les malades selon le médecin qu'ils choisissent.

(Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République.) Pour une fois que je partage votre point de vue, vous devriez être contents ! Nous sommes tous d'accord sur un point : lorsqu'un malade accepte d'entrer dans un réseau, dans une filière, d'être suivi par un médecin référent, qui connaîtra son passé et son environnement, il est normal qu'il bénéficie d'avantages particuliers, tel le tiers payant ; cela me paraît une très bonne chose.

D'abord, cette sécurité psychologique est importante pour le malade. Ensuite, celui-ci n'aura pas à faire l'avance des frais. Cela ne l'empêchera pas d'aller consulter un autre médecin, s'il le souhaite, dans le cadre de la liberté de choix du médecin, à laquelle nous sommes, tout comme vous, attachés.

Nous allons vers un travail en filière, en réseau, qui tiendra compte du malade et de sa pathologie. Nous n'allons en aucun cas vers une diminution des remboursements ou vers des modes de paiement plus avantageux pour ceux qui choisiraient un médecin plutôt qu'un autre.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Nous avons terminé les questions au Gouvernement.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 10 NOVEMBRE 1998

2 DÉCLARATION DE M. LE PRÉSIDENT

M. le président.

Avant de suspendre la séance, je tiens à dire quelques mots.

Les incidents qui se sont produits mardi dernier, 3 novembre, ont été évoqués lors de la réunion de notre bureau, ce matin. Je soulignerai trois éléments.

Premièrement, il est impossible d'accepter la violence ou les débordements dans notre assemblée. (Applaudissements sur tous les bancs.) Que ce soit la violence des gestes ou le débordement des mots, c'est le contraire de ce à quoi nous croyons : la démocratie et la République. Il faut songer à l'image que nous donnons de nos travaux.

Il ne faut donc pas que ce qui s'est produit mardi 3 novembre puisse se reproduire.

(Applaudissements sur tous les bancs.)

D euxièmement, M. le vice-président Paecht sait l'estime que nous lui portons en vertu de ce qu'il est et de ce qu'il a vécu, mais aussi en fonction de ce que nous tous, élus par les citoyens au suffrage universel pour les représenter, devons incarner.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants et sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

M. Patrick Devedjian.

Applaudissez, messieurs de la majorité !

M. le président.

Pour les incidents qui se sont produits et la façon dont ils ont été reçus, des regrets ont été exprimés. Ils étaient nécessaires.

M. Pierre Lellouche.

Exprimés par qui ?

M. le président.

Troisièmement, la présidence, qui est garante du fonctionnement de cette maison, doit être neutre. La présidence de séance n'est pas facile à exercer et, évidemment, elle n'est pas infaillible. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

Mais elle ne doit pas et elle ne peut pas être prise à partie. Dans le respect du règlement, elle protège, écoute et fait observer à la fois les orientations de la majorité et les droits de l'opposition. Si on ne respecte pas cette règle commune, on ne se respecte pas soi-même.

(« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Telle est la tradition de notre Assemblée nationale. Il est essentiel qu'elle soit respectée et préservée.

(Applaudissements sur tous les bancs.) Suspension et reprise de la séance

M. le président.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures quinze sous la présidence de M. François d'Aubert.)

PRÉSIDENCE DE M. FRANÇOIS D'AUBERT,

vice-président

M. le président.

La séance est reprise.

3 ANIMAUX DANGEREUX Communication relative à la désignation d'une commission mixte paritaire

M. le président.

M. le président de l'Assemblée nationale a reçu de M. le Premier ministre la lettre suivante :

« Paris, le 10 novembre 1998,

« Monsieur le président,

« Conformément à l'article 45, alinéa 2, de la Constitution, j'ai l'honneur de vous faire connaître que j'ai décidé de provoquer la réunion d'une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif aux animaux dangereux et errants et à la protection des animaux.

« Je vous serais obligé de bien vouloir, en conséquence, inviter l'Assemblée nationale à désigner ses représentants à cette commission.

« J'adresse ce jour à M. le président du Sénat une demande tendant aux mêmes fins.

« Veuillez agréer, monsieur le président, l'assurance de ma haute considération. »

Cette communication a été notifiée à M. le président de la commission de la production et des échanges.

4 LOI DE FINANCES POUR 1999 (DEUXIÈME PARTIE) Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 1999 (nos 1078, 1111).

TRAVAIL ET EMPLOI (suite)

M. le président.

Nous poursuivons l'examen des crédits du ministère de l'emploi et de la solidarité, concernant le travail et l'emploi.

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les députés, Nicole Péry a présenté ce matin la partie formation professionnelle de notre budget, un budget qui a comme priorité, vous le savez, l'emploi. Le budget est le moment de fixer des priorités.

C'est ce que nous avons fait, en prenant en compte, bien évidemment, un certain nombre de contraintes : celles héritées des choix passés, nos choix et ceux des autres, mais aussi des contraintes que nous nous sommes données, tel l'impératif de maîtrise des dépenses publiques.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 10 NOVEMBRE 1998

Faire un budget, c'est surtout faire des choix, essayer de dégager des marges de manoeuvre pour les financer, et donner aux services les moyens d'assumer ces choix. C'est ce que nous avons essayé de faire dans le budget de 1999.

M. Bapt a dit qu'il s'agissait d'un tournant. En effet, certains des textes importants annoncés l'année dernière ont commencé à s'appliquer, et nous avons une approche offensive et active du problème de l'emploi.

Nous savons tous que la croissance, même si elle s'est sensiblement améliorée, entraînant un recul du chômage, et surtout une création nette d'emplois, ne suffit pas, notamment parce qu'elle induit un processus inégalitaire, et qu'un certain nombre de nos concitoyens restent sur le bord de la route.

C'est la raison pour laquelle, parallèlement à la politique économique, une politique active de l'emploi est nécessaire. Elle doit néanmoins être accompagnée de mesures structurelles, afin d'enrichir le contenu de la croissance en emplois.

Cette politique de l'emploi vise donc deux objectifs que vous retrouvez tout au long de ce projet de budget : le développement de l'emploi et l'insertion de ceux qui ont le plus de difficultés pour accéder à l'emploi. C'est la logique du budget de 1999, qui augmente de 4 %, mais qui a donné lieu à un certain nombre d'arbitrages internes, puisque 17 milliards de francs de mesures nouvelles sont prévus, pour un budget qui s'accroît de 6 milliards de francs, cela signifie que nous avons essayé de faire les choix dont j'ai parlé.

Ce projet de budget a trois objectifs majeurs.

Le premier est de respecter nos engagements concernant les politiques visant à enrichir la croissance en emplois, je pense notamment aux emplois-jeunes et à la réduction de la durée du travail.

Le deuxième est de s'intéresser à ceux qui sont les plus éloignés de l'emploi, les jeunes, les chômeurs de longue durée, les RMIstes, à la fois par l'application de la loi contre les exclusions et de son volet emploi, et par le recentrage d'un certain nombre de dispositifs.

Le troisième objectif majeur de ce projet de budget, c'est de donner à ce ministère, qui n'est pas parmi les plus privilégiés et qui a été beaucoup sollicité ces derniers mois, les moyens de remplir l'ensemble de ses missions.

Premier axe, il convient de prévoir les crédits nécessaires pour mettre en oeuvre les politiques que nous avons lancées, à commencer par la réduction de la durée du travail. Comme en 1998, une provision a été inscrite. La politique de négociation a été lancée mais il est difficile de faire des prévisions sur le nombre d'accords qui seront signés pendant une période déterminée.

Pour revenir au titre d'un quotidien auquel JeanClaude Boulard a fait référence ce matin - « Trente-cinq heures, la marmite bouillonne » - je crois que la sauce est bonne. A ceux qui pensent que ces accords ne créent pas d'emplois, j'indique que, à la fin du mois d'octobre, les accords signés, au nombre de 550 environ, ont permis la création de plus de 8 % d'emplois par rapport aux effectifs de l'entreprise, ce qui est supérieur aux 6 % prévus par la loi.

Plus que ces résultats, quelques mois à peine après le vote de la loi, alors que chacun sait que la négociation n'est pas chose facile, nous l'avons toujours dit, puisqu'elle impose de réfléchir à l'organisation du travail des salariés de l'entreprise, à l'articulation entre la vie familiale et la vie professionnelle, à la façon de mieux créer des emplois, c'est la dynamique de la négociation qui est remarquable : 20 % des entreprises seraient en train de négocier et 20 % annoncent qu'elles entameront une négociation prochainement.

Je voudrais dire très gentiment à Mme Bachelot-Narquin, puisqu'elle est de bonne foi, qu'elle devrait l'être autant que le Wall Street Journal qui, il y a quelques jours, sous le titre : « Et si les trente-cinq heures créaient vraiment des emplois ? » publiait un article assez élogieux sur les accords actuellement signés.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin.

Vous citez le Wall Street Journal maintenant ? Où va-t-on ? (Sourires.)

M. Jean-Pierre Delalande.

Le titre avait un point d'interrogation.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Je prends les références qui doivent normalement vous toucher...

La durée du travail, nous le savons, se discute d'abord au sein de l'entreprise, notamment dans les entreprises moyennes et grandes. C'est là que l'on peut trouver les conditions pour mieux utiliser les équipements, répondre aux demandes des clients, organiser le temps de travail en fonction des besoins, donner toutes leurs chances aux salariés de faire un travail de qualité et pour chercher ensemble les potentialités de création d'emplois.

Les accords de branches sont, pour l'essentiel, des accords d'incitation, pour montrer la voie, ouvrir des pistes, je pense notamment aux accords dans l'artisanat qui sont très intéressants car ils peuvent aider des petites entreprises à se situer dans une logique de réduction de la durée du travail en offrant diverses possibilités. C'est ce qu'a fait la Confédération des artisans du bâtiment, la CAPEB.

Pour apprécier la différence entre les deux accords que M. Goulard et Mme Bachelot ont cités, il suffit de les lire. Contrairement à ce que M. Goulard a affirmé, je n'ai pas porté une appréciation sur chacun des accords qui ont été signés. J'ai porté une appréciation sur un seul accord, qui ne respectait ni l'esprit ni la lettre de la loi.

Comment un député peut-il s'étonner qu'un ministre veuille faire respecter une loi qui a été votée par le Parlement ? Quand l'accord de l'Union des industries métallurgiques et minières, pour ne pas le citer, maintient ou augmente la durée du travail alors que la loi en question est une loi de réduction de la durée du travail, quand il fait sortir non seulement les cadres mais également les agents de maîtrise de l'application de la réglementation sur la durée du travail, contrairement au texte de la loi, q uand il prévoit une augmentation du contingent d'heures supplémentaires, comment des parlementaires peuvent-ils s'étonner que je rappelle qu'il existe une loi et qu'elle doit être appliquée ? Quand un tel accord prévoit de ne s'appliquer qu'au 1er janvier 2000, et encore, à l'automne, si les partenaires considèrent que la loi leur permet de l'appliquer, comment peut-on s'étonner que je parle d'accord virtuel ? Je ne me réfère qu'aux termes mêmes de la loi.

L'accord textile, lui, est d'une tout autre nature, il suffit de le lire pour s'en rendre compte. Qu'il s'agisse des heures supplémentaires, de la gestion des cadres, ou encore de la non-prise en compte des jours fériés, contrairement à l'accord de l'UIMM, qu'il s'agisse de l'objectif affiché en matière d'emploi, nous ne sommes pas dans la même logique. Les organisations ne s'y sont d'ailleurs pas trompées.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 10 NOVEMBRE 1998

Ainsi, loin de moi l'idée de porter appréciation sur tel ou tel accord, je tiens simplement à rappeler, en tant que ministre de la République, que la loi est la loi et que, jusqu'à preuve du contraire, personne ne doit s'y soustraire.

Je le ferai chaque fois que ce sera nécessaire.

Sur la réduction de la durée du travail, les accords s'engagent les uns derrière les autres. Nous avons inscrit une provision au budget d'un montant de 3,5 milliards de francs, qui sera complétée par les reports de crédits de la provision 1998 et, si nécessaire, par le collectif de juin 1999.

S'agissant de l'emploi de ces fonds, j'indique à MM. Bapt, Cochet et Gengenwin que nous sommes capables à tout moment de vérifier les cotisations qui sont rentrées à la sécurité sociale et à l'UNEDIC au regard de l'objectif emploi d'un accord signé. L'entreprise, en effet, se doit de déclarer le nombre d'emplois qu'elle va créer et le ministère du travail se doit de les contrôler. Il est donc possible de vérifier a posteriori les cotisations ainsi encaissées. Ce n'est pas une mesure générale comme dans le cas de la ristourne dégressive pour laquelle il est très difficile de mesurer au cas par cas les effets en matière d'emploi.

Aussi avons-nous décidé avec les partenaires sociaux de faire un bilan en milieu d'année pour étudier, au vu de ce bilan, quel recyclage pourrait être mis en place. La France est engagée dans un vaste mouvement de négociation, peut-être un des plus complets que notre pays ait jamais connu puisqu'il doit à la fois prendre en compte les besoins des entreprises, écouter les salariés sur leur volonté de mieux travailler et de mieux vivre et surtout apporter un espoir à ceux qui attendent à la porte. Je ne peux que penser que ce mouvement va s'accélérer dans les semaines et les mois qui viennent.

Deuxième axe de la politique de développement de l'emploi, le programme « emplois-jeunes ». Il est en train d'atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés.

La création des nouveaux services se développe à un rythme soutenu : fin octobre, 143 500 emplois ont été créés dans le cadre de ce programme, dont 75 000 dans les associations, les collectivités locales, les établissements publics - 101 000 sont déjà en place dont 54 000 dans les collectivités locales et les associations. Ce rythme de montée en charge nous permettra de respecter les objectifs de 150 000 emplois créés dès la fin de l'année et, je l'espère, de 250 000 en fin d'année prochaine.

M. Hoarau nous a parlé ce matin du succès des emplois-jeunes à la Réunion : 1 250 emplois ont déjà été créés, permettant de répondre à de nouveaux besoins, notamment dans les domaines du tourisme et de l'environnement. Je m'en réjouis. Nous continuerons à suivre l'évolution dans ce département et à lui donner les moyens de développement nécessaires.

Certains, notamment M. Perrut, ont pu craindre que les recrutements privilégient les jeunes surqualifiés. Qu'on ait pu le craindre au départ, je le comprends, mais qu'on le dise encore aujourd'hui, alors que les chiffres indiquent le contraire, c'est plus surprenant.

M. Michel Hunault.

C'est pourtant le cas !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Non, 30 % des jeunes embauchés n'ont aucune qualification, les deux tiers ont un niveau de diplôme inférieur ou égal au bac. Ces chiffres, que je tiens à votre disposition, sont fournis par le Centre national pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles, qui paie les jeunes et connaît leurs caractéristiques.

En revanche, un effort est encore nécessaire - je m'adresse surtout aux élus - pour que les jeunes des quartiers en difficulté et les jeunes des zones rurales défavorisées soient prioritaires dans ce programme.

M. Maxime Gremetz.

Très bien !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Ainsi, à Lille, 81 % des 250 jeunes embauchés viennent des quartiers en difficulté. Il faut une véritable volonté politique. Mais, au moment où la croissance revient, et alors que ces quartiers, comme les zones rurales défavorisées, risquent de rester à l'écart, nous nous devons de faire un effort particulier dans leur direction.

Le coût total pour le budget de l'emploi devrait être de 17 milliards de francs, ramenés, grâce aux reports de crédits, à 14 milliards cette année, dont 380 millions transférés au FEDOM pour les départements d'outre-mer.

Mme Bachelot a peut-être rencontré des jeunes qui lui ont fait part de l'ennui qu'ils éprouvaient dans ces emplois,...

Mme Roselyne Bachelot-Narquin.

Certains !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

... sans doute n'avons-nous pas dû rencontrer les mêmes. Je passe beaucoup de temps sur le terrain. Ces jeunes me disent combien ils sont fiers d'être enfin utiles et de trouver des nouveaux besoins.

Mme Muguette Jacquaint.

Bien sûr !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Une enquête réalisée par un grand institut de sondage montre que, à 91 ou 92 %, ces jeunes se disent très satisfaits ou satisfaits par les emplois qu'ils détiennent.

M. Patrick Malavieille, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour la formation professionnelle.

C'est vrai !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Avoir l'opportunité de mobiliser toutes ses capacités pour améliorer la qualité de la vie de ses concitoyens est une chance pour un jeune.

C ette année, le secteur privé aura embauché 750 000 jeunes, et non 350 000 comme certains l'ont affirmé, et 400 000 jeunes auront été pris en formation en alternance.

M. Michel Hunault.

Ce n'est pas grâce au Gouvernement.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

En partie. Les entreprises ont pu réembaucher parce que la croissance est revenue.

Mais tout cela est très difficile à mesurer. Doit-on prévoir un dispositif particulier alors que la croissance est là et que l'embauche des jeunes a lieu ? Personnellement, je n'ai jamais parlé de dispositif particulier. Nous avions souhaité, nous en avions parlé avec le patronat, plus d'embauches de jeunes - relisez les débats du 10 octobre sur la formation en alternance. Je constate, aujourd'hui, que c'est ce qui se passe. Plus de jeunes sont embauchés et la formation en alternance se développe, Nicole Péry l'a dit ce matin.

Troisième axe, l'allégement des charges patronales sur les bas salaires. Vous avez été nombreux, Gérard Bapt, le p résident de la commission des affaires culturelles, Maxime Gremetz, à revenir sur la réforme des cotisations sociales patronales. Je l'ai déjà dit lors du débat sur le projet de loi de financement sur la sécurité sociale, le


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 10 NOVEMBRE 1998

G ouvernement souhaite proposer une réforme qui apporte à la fois plus de justice dans le financement de la sécurité sociale et des solutions plus favorables à l'emploi.

Le Gouvernement a d'ailleurs accepté un amendement de votre assemblée exprimant le voeu qu'un projet de loi soit déposé avant la fin du premier semestre 1999. Je suis convaincue, puisque les objectifs sont partagés par la plupart de nos interlocuteurs, que nous arriverons à nous mettre d'accord sur les modalités pour que cette réforme complète, c'est nécessaire, les autres réformes structurelles d'ores et déjà engagées.

Le deuxième objectif majeur de ce budget a consisté à concentrer les dispositifs sur les publics les plus éloignés de l'emploi. C'est tout l'enjeu de la lutte contre les exclusions. C'est l'engagement que nous avons pris au sommet de Luxembourg dans le plan national pour l'emploi, comme certains pays voisins et amis.

Pour nous, la première façon de lutter contre le chômage de longue durée et le RMI a été de faire en sorte que la loi contre les exclusions entre le plus rapidement possible en application. Cette loi a été promulguée le 29 juillet. Tous les textes d'application seront sortis avant la fin novembre, à l'exclusion de celui sur l'insertion par l'économique qui, de toute façon, n'entre en application qu'au 1er janvier 1999.

Les parcours prévus aussi bien pour les jeunes, je parle du parcours TRACE, que pour les chômeurs de longue durée, les RMIstes, dans le cadre du programme « nouveau départ » à l'ANPE, sont déjà en place. Ce mois-ci, 25 000 chômeurs de longue durée et RMIstes ont été reçus pour être accompagnés sur un parcours de longue durée par l'ANPE, alors même que les jeunes entrent aujourd'hui dans le programme TRACE.

Tous les autres décrets, notamment sur les CES et sur les CEC, sont actuellement soumis à l'examen du Conseil d'Etat. Ils devraient sortir avant la fin novembre, ainsi que je l'ai annoncé tout à l'heure. L'ensemble de ces outils nous permettra de proposer, dès le mois de décembre, des contrats emplois consolidés à 80 % pendant cinq ans à des publics véritablement défavorisés, qui n'ont aucune chance d'entrer dans le secteur marchand.

C'est en tout cas ce que je souhaite.

Quant aux crédits annoncés en mars, et dont certains avaient douté qu'ils y trouveraient leur place, ils sont intégralement pris en compte dans le budget pour 1999 : 3,2 milliards de mesures nouvelles seront consacrés aux dispositifs nouveaux de lutte contre l'exclusion dans le domaine de l'emploi.

Le premier de ces dispositifs, je viens d'en parler, c'est le contrat emploi consolidé. Le nombre de CEC ouverts en 1999 double par rapport à celui de 1998 : il atteint 60 000. Le taux d'aide, je viens de le dire, est porté à 80 % sur les cinq ans du contrats. L'enveloppe correspondante est importante, 5,250 milliards de francs, mais elle est nécessaire si nous souhaitons sortir un certain nombre de nos concitoyens de l'assistance lorsqu'aucune autre solution ne s'offre à eux, je pense notamment aux plus âgés ou à ceux qui connaissent des situations familiales ou personnelles difficiles.

Le deuxième dispositif est l'élargissement du contrat de qualification aux adultes sans qualification. Prévu à titre expérimental, il va commencer à s'appliquer. Nicole Péry l'a dit ce matin, certaines branches comme le bâtiment ont déjà signé un accord.

Quant au programme TRACE, troisième dispositif, il permettra d'accueillir 40 000 jeunes en 1999. Les premiers jeunes sont entrés dans ce dispositif début octobre.

Ce programme propose un suivi pendant dix-huit mois, qui verra se succéder un certain nombre d'actions, des actions de remobilisation, des bilans de compétence, un passage dans l'insertion par l'économique, des formations de courte durée ou en alternance. Il s'agit de trouver pour les jeunes les plus éloignés de l'emploi la bonne articulation entre les différents dispositifs dans un suivi permanent, pendant dix-huit mois, pour les mener vers la qualification ou vers l'emploi.

Je l'ai souvent souligné, il faut mieux coordonner les actions entre les régions et l'Etat, vers les publics les plus fragiles et accompagner financièrement les régions qui souhaitent s'engager dans cette activité.

M. Perrut a reproché une grande bureaucratisation du programme TRACE. Je serais heureuse qu'il me donne sa référence car justement, s'il est un dispositif simple, c'est bien celui du programme TRACE. D'ailleurs comment aurions-nous pu, dès le 1er octobre, faire bénéficier les jeunes d'une loi qui a été publiée au Journal officiel le 29 juillet si nous n'avions pas justement prévu une très grande facilité de mise en place de ce programme.

Quatrième outil majeur, le domaine de l'insertion par l'économique. Nous en avons parlé devant un certain nombre de parlementaires hier au Conseil national de l'insertion par l'activité économique, les années passées ont été difficiles, la situation de l'emploi n'était pas bonne, la croissance n'était pas là, beaucoup de ces entreprises avaient peu de commandes et les crédits budgétaires avaient été réduits. Entre 1995 et 1997, le nombre d'entreprises d'insertion et d'associations intermédiaires a baissé. Nous avons travaillé avec ce secteur. Il fallait que la loi clarifie, reconnaisse, le rôle important de l'insertion par l'économique.

Il convenait également de lever les ambiguïtés qui pesaient sur son développement, de créer de nouveaux outils, d'améliorer ce qui existait et de renforcer les moyens financiers. C'est ce que nous avons fait puisque, vous le savez, plus de 3 milliards de francs seront consacrés à l'insertion par l'économique sur la période de 19992000. De tels moyens, qui n'ont jamais été atteints, visent à la fois le doublement des postes d'insertion, mais aussi une extension des PLIE. Ceux-ci sont extrêmement importants parce qu'ils permettent aux élus de coordonner et de mettre en réseau l'ensemble des moyens nécessaires au suivi des personnes les plus en difficulté.

Par ailleurs, les aides ont été harmonisées, renforcées, simplifiées : exonération totale des cotisations patronales de sécurité sociale dans le secteur marchand, aides aux postes d'insertion unifiées - 50 000 francs sont donnés par le ministère du travail au lieu des deux subventions parallèles actuelles, par le ministère du travail et par le ministre des affaires sociales ; création de fonds départementaux d'insertion par l'économique dotés de 75 millions de francs qui devront aider les initiatives locales, ingénierie des projets, aide au démarrage, consolidation des structures.

Les élus participant hier au Conseil national de l'insertion par l'économique ont insisté sur l'importance qu'il y a à ce que les contrats de plan Etat-régions puissent intégrer cette donnée de l'insertion par l'économique. J'y suis évidemment très favorable.

Au-delà de ces nouveaux outils pris en application de la loi contre les exclusions, nous avons fait en sorte de recentrer les outils traditionnels vers ceux qui en ont le plus besoin, en prenant en compte l'existence, du fait de la croissance, d'effets d'aubaine et de substitution dans les mécanismes en place. Nous savons bien que pour un


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grand nombre de nos concitoyens, qui se trouvent dans une situation d'assistance, seuls ces contrats aidés peuvent constituer une réponse.

Aussi notre objectif est-il d'augmenter de manière importante le nombre de contrats pour les personnes qui n'ont pas accès à l'emploi ; ils augmenteront effectivement de 120 000 cette année, je crois que c'est important.

Pour cela, nous avons continué à recentrer les contrats emploi solidarité vers les publics les plus fragiles. En 1998, déjà, sur les 450 000 CES mis en place, nous avons porté de 56 à 67 % la proportion des chômeurs et des RMIstes de longue durée. Le nombre de ceux d'entre eux qui ont bénéficié d'un CES a ainsi augmenté de manière importante. Nous entendons, au cours de l'année 1999, porter ce chiffre des deux tiers aux trois quarts afin de nous concentrer sur ces publics prioritaires. La même démarche vaut pour les contrats initiative emploi.

Enfin, nous avons reciblé notre effort de formation vers ceux qui n'en avaient pas encore bénéficié. Je pense notamment aux SIFE et aux stages d'accès à l'entreprise.

Nous prévoyons donc cette année 120 000 contrats en plus : 70 000 pour les CES et les CEC, 40 000 contrats de qualification pour les jeunes les moins qualifiés, 10 000 contrats de qualification pour adultes et un recentrage des autres dispositifs vers ces publics.

Troisième élément de cette stratégie de lutte contre l'exclusion, destinée à ramener au coeur de notre société ceux qui en sont aujourd'hui les plus éloignés : la transition des minima sociaux vers l'emploi. Je ne reprendrai pas ici l'ensemble des mesures qui ont été prises en la matière. Vous les connaissez, nous en avons parlé lors du débat sur le financement de la sécurité sociale. Je rappellerai simplement qu'un dispositif était prévu par la loi contre les exclusions pour permettre un meilleur intéressement à la reprise d'une activité ; de nombreuses personnes qui ont un revenu de solidarité hésitent en effet à reprendre un emploi d'abord parce que les frais complémentaires sont importants, ensuite parce qu'ils craignent l'échec et ont peur de ne pas retrouver, après coup, leur revenu de solidarité.

Nous avons travaillé sur une grande diversité de situations et sur des modes de gestion différents ; qu'il s'agisse du RMI, de l'allocation spécifique de solidarité, ou de l'allocation de parent isolé, ce ne sont ni les mêmes règles, ni les mêmes périodicités, ni les mêmes organismes de gestion.

Nous avons néanmoins trouvé un dispositif commun.

Le décret est actuellement au Conseil d'Etat. Ce dispositif doit permettre de renforcer les mécanismes d'intéressement pour le RMI et l'ASS et de mettre l'API au même niveau - trois mois de cumul intégral entre l'allocation de solidarité et le salaire, puis 50 % pour les neuf mois suivants.

Le budget prévoit également le financement des préretraites et des revenus de remplacement. Je souhaiterais dire quelques mots en la matière.

Maxime Gremetz et Gaëtan Gorce ont parlé du licenciement. Encore une fois, ce n'est pas à la collectivité de se substituer aux entreprises en assumant leurs responsabilités, surtout lorsque celles-ci ont les moyens de gérer des modifications d'emplois.

Personnellement, je partage très bien la philosophie sur le licenciement développée par Gaëtan Gorce ce matin.

Nous devons encourager la gestion prévisionnelle des emplois et pénaliser le recours à la flexibilité externe, lorsqu'elle n'est pas rendue nécessaire par la situation de l'entreprise. C'est la raison pour laquelle j'ai été conduite, dès cette année, à freiner considérablement le nombre de préretraites octroyées à des entreprises qui réalisaient, par ailleurs, des bénéfices et n'avaient donc aucune raison de faire payer ces préretraites par la collectivité. De la même manière, je leur ai demandé une contribution financière accrue, ce qui explique d'ailleurs en très grande partie la baisse de 4,5 milliards de la dotation.

Mais je tiens à rassurer M. Gremetz. Il n'est pas question pour nous d'abandonner les préretraites. Celles-ci doivent être réservées à des salariés, évidemment d'un ce rtain âge, dans des secteurs et des entreprises en difficulté, dans des zones d'activités précaires où il est difficile de retrouver un emploi. C'est dans cet esprit que nous avons travaillé.

Si les fonds prévus dans ce budget pour les préretraites baissent de 4,5 milliards, c'est sous l'effet conjugué de plusieurs éléments.

Premièrement, de nombreux salariés licenciés en 1992, 1993 et 1994 atteignent aujourd'hui l'âge de la retraite et sortent en masse du système de préretraite. Souvenez-vous de ces grandes années de crise, lorsque nous avons atteint des records de licenciements et de préretraites... Cette sortie en masse provoque une baisse de ces crédits quasi automatique.

Deuxièmement, le nombre des entrées a diminué à cause de la baisse du nombre de licenciements due à la croissance.

Troisièmement, il faut prendre en compte l'effet cumulé des décisions dont je vous ai parlé : ne pas financer les préretraites lorsque les entreprises peuvent les financer elles-mêmes et, dans les autres cas, les faire contribuer davantage à ces financements.

Dans mon esprit, il ne s'agit bien évidemment pas, par cette réduction des crédits de préretraite, de pénaliser les salariés. Il s'agit de recentrer les préretraites qui sont aujourd'hui moins nombreuses qu'hier. C'est ainsi que nous avons travaillé depuis un an maintenant, ce qui nous a permis de mieux utiliser l'argent public.

Nous en arrivons maintenant au second sujet - qui me vaudra sans doute d'être interpellée par M. Delalande -, à savoir la contribution dite Delalande que doivent verser les entreprises aux ASSEDIC lorsqu'elles incluent dans un licenciement des salariés de plus de cinquante ans.

Il faut savoir qu'une préretraite accessible à partir de cinquante-sept ans - voire de cinquante-six ans avec dérogation -, est aujourd'hui deux fois plus coûteuse qu'un départ avant cinquante-six ans. Ainsi nombre d'entreprises accélèrent les licenciements intégrant des salariés entre cinquante et cinquante-six ans.

Ce phénomène a été aggravé en 1997 par la mise en place de l'ACA. Celle-ci améliore l'indemnisation chômage des personnes ayant plus de quarante ans de contribution au régime de l'assurance vieillesse, ce dont nous ne pouvons que nous féliciter. Seulement, elle a incité certaines entreprises à faire partir des salariés en leur disant qu'elles les paieraient jusqu'au moment où ils pourraient bénéficier de l'ACA et que la collectivité, en l'occurrence les chefs d'entreprise et les salariés, les paierait jusqu'à ce qu'ils atteignent l'âge de la retraite.

En conséquence et bien que j'aie relevé le coût de la contribution Delalande et fait baisser à 40 000 le nombre d'entrées en chômage de salariés de plus de cinquante ans ou de cinquante-cinq ans, celles-ci ont à nouveau augmenté jusqu'à 71 000 malgré la mise en place de l'ARPE, qui en a pourtant ponctionné une partie. Aussi devons-


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nous retrouver un équilibre entre le coût de la préretraite pour l'entreprise et le coût du licenciement d'un salarié âgé de cinquante à cinquante-cinq ans.

Je propose que cette contribution, qui est de un mois à cinquante ans et qui va jusqu'à six mois à cinquante-six ans et au-delà, soit doublée en conservant son rythme d'évolution, pour éviter des effets « couperet » ; les entreprises de moins de vingt salariés en seraient exonérées, comme c'est le cas jusqu'à présent ; les entreprises de vingt à cinquante salariés conserveraient le régime actuel.

Il s'agit de toucher essentiellement des entreprises qui ont pris l'habitude de licencier les salariés de cinquante à cinquante-six ans.

Je voudrais dire à ceux qui s'inquiètent d'éventuels effets pervers conduisant à freiner les embauches à partir de l'âge de cinquante ans, que la contribution Delalande ne s'applique pas aux embauches réalisées après l'âge de cinquante ans et que de tels effets ne sauraient donc exister.

Je pense aussi qu'il faut appliquer cette contribution aux salariés de plus de cinquante ans entrés en convention de conversion, puisqu'ils sont passés de 1994 à 1997 de 10 à 17,5 %, avec une multiplication par quatre de ceux de plus de cinquante-cinq ans.

On voit bien là comment les entreprises jouent sur des dispositifs qui sont parallèles. Après tout, leur rôle est peut-être de trouver les modalités les moins coûteuses.

Mais le nôtre est de faire en sorte que l'argent public, qu'il vienne de l'UNEDIC ou qu'il vienne du budget de l'Etat, soit utilisé pour les personnes qui en ont vraiment besoin, et pas pour se « débarrasser » à moindre coût de celles dont on sait qu'elles auront énormément de difficultés à retrouver un emploi.

M. Jean-Pierre Delalande.

Madame la ministre, puis-je vous interrompre ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Je vous en prie.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Delalande, avec l'autorisation de Mme la ministre.

M. Jean-Pierre Delalande.

Je vous remercie de me permettre d'intervenir sur ce point. J'ai appris par la presse, comme tout le monde, votre décision et je voulais vous dire mon sentiment, à la fois sur la forme et sur le fond.

S ur la forme, je suis un peu surpris. J'ai cru comprendre que vous proposiez aux partenaires sociaux de négocier, étant entendu que vous avez déjà fixé le terme de la négociation. Cela me paraît curieux.

Plus sérieusement, sur le fond, il me semble qu'il serait intéressant de s'interroger sur les raisons qui conduisent les entreprises à agir ainsi. Vous en avez cité un certain nombre. Je partage assez largement le diagnostic que vous avez fait. Mais je ne suis pas d'accord sur la réponse que vous apportez. Je trouve bizarre que, depuis onze ans que le dispositif a été mis en place, vous n'ayez pas affiné la réflexion. Je vous suggérerai donc quatre pistes de réflexion.

Les choses ont changé, mais un certain nombre d'entreprises, confrontées à des besoins de mutation, cherchent d'abord à licencier économiquement les salariés les plus âgés, parce que ce sont ceux qui leur coûtent le plus cher, indépendamment des effets de substitution ou du fait qu'elles peuvent essayer de faire payer ces licenciements par la collectivité publique, comme vous l'avez indiqué. Mais un certain nombre d'entreprises se disent aussi que leurs salariés n'arrivent plus à suivre les évolutions technologiques et en sont malheureux. Il me semble que c'est à cette articulation que nous devons réfléchir.

Depuis de très longues années, je milite pour une gestion des âges en matière de ressources humaines dans les entreprises. Nous sommes d'accord pour considérer que les licenciements économiques ont un coût considérable, à la fois pour la nation - capital humain et expérience inutilisée - et pour l'entreprise - défaut de transmission de la culture de l'entreprise. Celles qui se sont lancées, il y a une dizaine d'années, dans ces procédures un peu sévères s'en sont quelquefois mordu les doigts, dans la mesure où elles se sont heurtées à une grande difficulté de gestion de leur pyramide des âges ; les jeunes qu'elles a vaient embauchés en substitution des salariés âgés qu'elles avaient licenciés ont maintenant quarante ans ; elles ne sont plus à même de leur proposer des sorties intéressantes et ont engendré chez eux des frustrations importantes. Au-delà des frustrations financières qui sont payées par la sécurité sociale, il y a chez les intéressés u ne frustration psychologique à prendre en considération.

J'en viens à mes quatre pistes de réflexion.

Premièrement, pourquoi ne subordonneriez-vous pas le paiement de la contribution de 1987, instituée par l'article 321-13 du code du travail, à une convention directe avec une autre entreprise pour le reclassement ? On sait bien qu'il y a une tendance, chez certains salariés fatigués, à dire : « J'en ai assez, je préfère toucher ma prime et ne pas accepter un autre emploi dont le salaire, ou la localisation, ne me conviendrait pas. » Mon idée est

de chercher à répondre à ce phénomène. Une entreprise qui considère qu'un de ses salariés ne répond plus exactement à l'emploi qui lui est proposé rechercherait une autre entreprise susceptible de le reclasser directement. Se créeraient ainsi des réseaux d'entreprises...

M. Michel Destot.

C'est un véritable discours, monsieur le président !

M. le président.

Monsieur Delalande, il faut réduire votre propos et énoncer maintenant vos propositions !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Vous auriez pu vous inscrire dans la discussion.

M. Jean-Pierre Delalande.

Monsieur le président, c'est important. Et c'est par la presse...

M. le président.

Ce dialogue est sympathique, mais je ne crois pas qu'il puisse se prolonger très au-delà. Je vous demande de conclure, monsieur Delalande.

M. Jean-Pierre Delalande.

Deuxièmement, vous pourriez subordonner le paiement de la contribution de 1987 à une formation quand il y a eu un plan de formation et de reconversion dans les deux années qui ont précédé le licenciement.

Troisièmement, vous pourriez mettre en place des conventions avec l'éducation nationale, c'est-à-dire élargir l'article 66 de la loi quinquennale qui reprend lui-même l'article 73 de la loi du 27 janvier 1993.

Enfin, vous pourriez réfléchir à une mise en place d'un départ « en sifflet » avec convention d'aide passée avec des associations sportives, culturelles, sociales ou caritatives.

Au besoin, madame la ministre, puisque nous ne pouvons pas, à la demande du président, et je le comprends bien, poursuivre cet échange publiquement, je vous propose de vous rencontrer pour développer ces points avec vous.

M. Maxime Gremetz.

Voilà une bonne proposition !


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M. le président.

Très bien ! Je ne doute pas une seconde que vous pourrez vous rencontrer.

Poursuivez, madame la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Je vais d'abord répondre au discours de M. Delalande. Je ne sais pas quelle presse il a lu, mais il n'y a jamais été question de lancer une négociation en la matière...

M. Jean-Pierre Delalande.

La Tribune du 6 novembre !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Il n'en a jamais été question. Cela fait partie des prérogatives de l'Etat. En revanche, comme je le fais toujours, nous avons consulté les organisations patronales et syndicales, sur cette question comme sur d'autres.

Peut-être avez-vous donc été surpris, mais je peux vous assurer que ni les organisations patronales, ni les organisations syndicales ne l'ont été, puisque je les ai consultées sur cette question.

Par ailleurs, vous dites que certains salariés veulent partir parce qu'ils ne sont pas préparés à l'évolution technologique. Mais c'est bien tout le travail que nous faisons, avec Mme Péry notamment, pour réformer la formation professionnelle.

Mme Muguette Jacquaint.

Tout à fait !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Comme le faisait remarquer M. Gaëtan Gorce, nous ne pourrons pas éviter les licenciements si nous attendons d'être dos au mur, avec des salariés de cinquante ans qu'on n'a pas préparés aux évolutions technologiques. Il nous faut donc les y préparer.

Compte tenu de l'évolution des techniques, de la qualité du travail dans l'entreprise et de l'espérance de vie, on ne saurait se réjouir quand on sort du marché du travail des personnes de cinquante ans - dont l'espérance de vie est de quatre-vingts ans.

Il faut donc faire en sorte que les entreprises gèrent la carrière de leurs salariés de manière qu'ils soient en permanence adaptés, et ce sera sans doute plus facile avec des générations qui ont, dès l'abord, une meilleure qualification. C'est donc bien par le biais de la préparation des salariés aux évolutions technologiques que l'on pourra traiter ce problème.

Monsieur Delalande, il ne me semble pas sain, comme je l'ai souvent entendu de votre côté, de dire qu'il faut repousser l'âge de la retraite de soixante à soixante-cinq ans. De la même manière, il ne me semble pas admissible de faire partir des salariés de cinquante ans, qui ont mis toutes leurs capacités dans l'entreprise et auxquels on dit du jour au lendemain qu'ils ne peuvent plus servir et qu'ils coûtent trop cher. Il faut que les entreprises soient capables d'anticiper la pyramide des âges. Après tout, un bon chef d'entreprise doit savoir investir, mais aussi gérer le « capital humain ».

M. Patrick Malavieille, rapporteur pour avis.

Très bien !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Ce n'est pas le cas de ceux qui licencient tous les salariés de plus de cinquante ans.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) Je constate que l'ARPE a été étendue, dans la voie tracée lors de la conférence du 10 octobre 1997, et je me réjouis que les partenaires sociaux aient décidé d'en discuter. J'espère que cette négociation aboutira. L'Etat s'est proposé à financer une partie de cette extension de l'ARPE, notamment pour ceux qui ont commencé à travailler très jeunes.

Enfin, je voudrais dire quelques mots sur les moyens humains et opérationnels du ministère de l'emploi ; j'en profite pour saluer l'effort de mobilisation que l'administration centrale comme les services déconcentrés ont déployé depuis un an et demi.

Pour suivre les chômeurs de longue durée, les RMIstes, les jeunes éloignés de l'emploi, l'ANPE a besoin d'un personnel qualifié capable de les recevoir - comme elle a commencé de le faire - et de les accompagner dans la durée. C'est ce qui explique que ses effectifs aient été renforcés par 1 000 agents - 500 recrutés par anticipation en 1998, 500 en 1999.

Les contrats de progrès de l'ANPE et de l'AFPA sont étroitement articulés. J'ai été amenée, déjà, à le préciser.

Il est excessivement important que les deux activités soient liées. L'AFPA pourra ainsi se consacrer, en priorité, à la formation des demandeurs d'emploi.

J'en viens au réseau des missions locales et des PAIO.

Michel Destot, qui a accepté d'assurer la présidence du Conseil national des missions locales, connaît toute leur importance, non seulement pour l'accueil, mais aussi pour l'accompagnement des jeunes. En effet, si elles les accompagnent vers l'emploi, elles sont également capables de les aider à régler tous leurs autres problèmes. Je me réjouis que, grâce à un conseil national renouvelé, nous ayons l'appui des missions locales et des PAIO pour travailler en liaison avec l'ANPE et faire en sorte que le programme TRACE redonne véritablement une chance à des jeunes très éloignés de l'emploi. L'Etat est prêt à cofinancer, comme c'est la règle, 450 emplois d'agents avec les collectivités locales qui accepteront d'accompagner cet effort.

Enfin, j'ai souhaité, dans ce budget, renforcer les moyens de mes services autour de trois objectifs.

J'y ai d'abord inscrit - et cela a été salué par Maxime Gremetz - la création de 140 emplois de contrôleur du travail et de 10 emplois d'inspecteur du travail, qui doivent à la fois assurer des missions de contrôle - je pense en particulier aux durées maximales du travail, à l'hygiène et à la sécurité - et des missions d'accompagnement des négociations.

Ensuite, j'ai souhaité que la résorption de l'emploi précaire, déjà engagée par mon prédécesseur, soit achevée l'an prochain, de telle sorte que, fin 1999, il n'y ait plus aucun emploi précaire dans mes services.

Enfin, j'ai décidé d'améliorer de manière très significative la situation des agents de catégorie C. Nous savons que dans ce ministère, les agents de catégorie C accomplissent souvent des tâches revenant à la catégorie B, de même que les attachés considèrent qu'on leur confie souvent des travaux incombant aux administrateurs civils.

Je continuerai à faire en sorte que ce ministère dispose des moyens quantitatifs et qualitatifs que nécessitent les missions et les priorités que s'est fixées le Gouvernement.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Nous en arrivons aux questions.

Pour le groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, la parole est à M. Germain Gengenwin.

M. Germain Gengenwin.

Madame la secrétaire d'Etat à l a formation professionnelle, ma première question concerne l'utilisation des ressources de l'AGEFAL, qui ont été amputées à plusieurs reprises ces dernières année s. A chaque fois, on nous assure que les sommes ponctionnées sur les fonds destinés aux formations des jeunes sont affectées au financement d'autres dispositifs. Dans les faits


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il n'en est rien, et nous aimerions savoir où passe cet a rgent. Je souhaiterais donc que le Gouvernement informe l'Assemblée de l'affectation précise des sommes successivement prélevées sur l'AGEFAL.

On nous dit aussi que les ponctions ainsi opérées sur les prétendus excédents de l'AGEFAL n'affectent pas le financement des contrats-jeunes. Ce n'est pas tout à fait exact. En effet, il faut savoir que la collecte du 0,4 % en faveur de l'alternance obéit à un calendrier particulier, puisqu'elle est réalisée avant le 1er mars, tandis que les contrats peuvent s'étendre sur plus ou moins d'une année. L'AGEFAL raisonne sur deux exercices afin de couvrir les engagements pris au titre de l'année n + 1. De ce fait, les ponctions opérées au profit du budget de l'Etat affectent non pas la trésorerie de l'AGEFAL, mais ses possibilités en n +

1. Selon des informations qui m'ont été transmises à l'occasion du rapport sur la formation des jeunes que j'ai présenté il y a quinze jours devant le comité de coordination, il apparaît qu'un effet de ciseaux, occasionné par l'augmentation du nombre de contrats concomitante d'une stagnation de la collecte et aggravé par les ponctions successives, serait à craindre. Qui va assurer le financement des contrats de qualification, si cette crainte devait se confirmer ?

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat à la formation professionnelle.

Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat à la formation professionnelle.

Monsieur Gengenwin, je découvre votre question concernant la formation des jeunes, l'alternance et le financement de l'AGEFAL. Je n'ai pas évoqué cet aspect dans mon propos de ce matin parce qu'il n'avait fait l'objet d'aucun commentaire de la part des rapporteurs, mais je suis en mesure de vous fournir quelques éléments de réponse.

Ce qui m'a le plus frappé dans le débat autour de l'AGEFAL, c'est d'abord l'interrogation sur la dynamique de l'utilisation de ces fonds destinés au financement des formations en alternance, et particulièrement des contrats de qualification. J'ai d'ailleurs noté que les rapports établis par votre assemblée, notamment celui de la commission d'enquête créée il y a quatre ans,...

M. Jean Ueberschlag.

Très bonne commission ! Mme la secrétaire d'Etat à la formation professionnelle.

... se montraient assez sévères à ce sujet. J'ai donc décidé d'y regarder de plus près et j'en ai conclu qu'il s'agit plus d'une question de trésorerie que d'excédent.

Ayant fait ce constat, j'ai rencontré les partenaires sociaux et je leur ai dit ce que je pensais : quand on a une trésorerie de 1,3 milliard qui semble disponible, il est difficile de se prémunir contre certaines actions que l'on peut, les uns et les autres, critiquer. Je souhaite que, lors des discussions qui prépareront la réforme, les partenaires sociaux recherchent les moyens d'une gestion plus dynamique permettant de réduire trésorerie, par une utilisation des fonds beaucoup plus rapide et efficace.

La deuxième interrogation relative à ce dossier porte sur l'équilibre entre le financement des contrats de qualification et celui de l'apprentissage. A diverses reprises, des sommes ont été prélevées sur les fonds de l'alternance, notamment des contrats de qualification, pour abonder les fonds de l'apprentissage, le plus souvent d'ailleurs avec l'accord des partenaires sociaux puisque ce sont eux qui effectuent les versements. D'après les derniers chiffres en ma possession, on peut penser que sur les 6 milliards collectés au profit de l'alternance, un milliard a basculé vers le financement de l'apprentissage, et plus particulièrement des centres de formation d'apprentis.

A cela s'ajoute le problème du fonds de péréquation qui, depuis l'année dernière, permet de corriger les inégalités entre les régions et, à l'intérieur d'une même régi on, entre les CFA.

La conclusion que je tire de ces diverses interrogations, c'est que nous devrons réfléchir ensemble à un financement commun aux deux formes de l'alternance, même si chacune, à l'évidence, le contrat de qualification comme le contrat d'apprentissage, doit conserver le rôle qui est le sien.

Je souhaiterais également que nous mettions au point des dispositifs de financement plus transparents et surtout moins inégalitaires d'une région à l'autre, sans jamais perdre de vue - c'est chez moi un souci constant que m'inspire une expérience politique avant tout régionale l'efficacité du partenariat de proximité.

J'ai conscience de la difficulté de la tâche, mais ce sont là les deux objectifs que je m'assigne. Nous avons, les uns et les autres, tout à gagner à réfléchir sur ces orientations.

M. le président.

La parole est à M. Germain Gengenwin, pour une seconde question.

M. Germain Gengenwin.

Il est vrai, madame la secrétaire d'Etat, que si tout le monde fait preuve de bonne volonté, on aboutira certainement à un bon accord.

Ma seconde question porte sur trois points.

Premièrement, quels sont les critères de répartition du fonds de péréquation de la taxe d'apprentissage ? Les avez-vous déjà définis ? Deuxièmement, les ateliers pédagogiques personnalisés bénéficient d'une enveloppe de 110 millions de francs.

Comment sera-t-elle répartie entre les régions ? Troisièmement, mais je ne vous en voudrais pas si vous n'étiez pas en mesure de me répondre aujourd'hui, l'ANACT, l'Agence nationale pour l'aide aux centres de travail, est assez mal perçue sur le terrain. Elle coûte néanmoins 69,5 millions de francs à l'Etat et son budget est en légère progression. Quel est son bilan ? Quelles missions lui assignez-vous aujourd'hui ?

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.

Mme la secrétaire d'Etat à la formation professionnelle.

Monsieur Gengenwin, je découvre avec un égal plaisir votre seconde question et j'essaierai d'y répondre aussi rigoureusement que possible.

La taxe de péréquation est récente puisqu'elle a été instituée par la loi du 16 octobre 1997. Elle répond aux objectifs que je viens d'exposer par anticipation. Son produit, en 1997, s'est élevé à 631,5 millions de francs qui ont été répartis en 1998, entre les régions en fonction de leurs besoins et, dans chaque région, entre les CFA.

Il est évident que cette opération doit être renouvelée.

On m'indique, pour 1998, une collecte de 650 millions de francs environ, à répartir l'an prochain. Je n'ignore pas que le décret en vigueur n'est valable que pour un an. Il faudra donc, avant même la fin de 1998, qu'un nouveau décret soit pris afin de fixer les critères pérennes de répartition de ces ressources.

C'est pourquoi il me semble urgent qu'une réunion de concertation ait lieu. La présidente du comité de coordination, Mme Jarnac, que j'ai saisie de cette question, m'a indiqué qu'elle réunirait, le 25 novembre, un groupe de travail associant les trois collèges du comité : régions, partenaires sociaux, Etat.


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Nous attendrons, bien sûr, l'avis du comité de coordination pour arrêter notre position, mais il me semble que, parmi les critères de répartition à retenir, devraient figurer le nombre d'apprentis et le niveau des ressources d'apprentissage de chaque région. Faut-il y ajouter d'autres éléments ? Personnellement, j'aimerais que l'effort réalisé en matière d'apprentissage par chaque région soit également retenu et qu'un effort particulier soit consenti en faveur des jeunes souffrant d'un déficit de qualification.

M. le président.

Nous en venons aux questions du groupe du Rassemblement pour la République.

La parole est à M. Patrick Delnatte.

M. Patrick Delnatte.

Vous le savez, madame la ministre, les associations intermédiaires mènent depuis plus de dix ans une action déterminée en faveur de l'insertion professionnelle et sociale des chômeurs les plus défavorisés. Elles ont prouvé que, pour peu qu'on leur en donne les moyens, elles savent prendre une part prépondérante dans l'accompagnement des chômeurs de longue durée et leur repositionnement dans le monde du travail.

Pour peu qu'on leur en donne les moyens, disais-je, et c'est bien là que le bât blesse, car la loi d'orientation pour la lutte contre les exclusions est venue accroître les contraintes qui pèsent sur elles, notamment pour la durée de mise à disposition en entreprise, contraintes qui constituent d'importantes limitations de leur champ d'intervention économique et risquent de réduire leur rôle et leur efficacité.

Cette situation fait aujourd'hui peser des menaces sur la gestion et l'équilibre financier des associations intermédiaires. Cependant, celles-ci se disent à même d'assumer ces nouvelles contraintes si on veut bien leur accorder un réel accès au marché et leur reconnaître un rôle de partenaire à part entière, complémentaire du service public de l'emploi et des autres opérateurs de terrain.

Or des incertitudes persistent. Les associations interm édiaires redoutent des blocages administratifs et craignent donc que les moyens qui leur sont nécessaires pour faire face à toute l'étendue de leur mission ne soient pas au rendez-vous. Compte tenu des nouvelles règles plus restrictives qui régissent leur fonctionnement, elles s'inquiètent de savoir si les crédits seront suffisants en 1999. Elles attendent de vous, madame la ministre, des réponses budgétaires à leurs attentes.

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur le député, vous vous étiez déjà fait le porte-parole des associations intermédiaires lors de l'examen de la loi contre les exclusions. A plusieurs reprises, d'ailleurs, j'avais trouvé un certain écart entre ce qu'elles me disaient et ce qu'elles vous disaient.

Il se trouve que s'est réuni hier le Conseil national de l'insertion par l'activité économique, où était représentée la présidente du CORAS, qui regroupe l'ensemble des associations intermédiaires. Comme l'ensemble des présidents des structures d'insertion, elle s'est dite très heureuse de la loi contre les exclusions et de ses modalités d'application. Elle a salué la reconnaissance du rôle de l'insertion par l'économique, en tant qu'outil pour l'emploi. Elle a également apprécié les moyens complémentaires que nous mettons en place : j'ai dit ce qu'ils étaient et ils sont importants. A la suite d'un propos que j'avais tenu, elle a reconnu qu'après une discussion âpre entre elle et moi sur les problèmes des mises à disposition en entreprise, nous avions trouvé une solution qui évitait les excès, pour ne pas dire plus, et nous permettait de revenir à ce que les associations intermédiaires continuent d'être pour leur grande majorité, mais que certaines avaient oublié, c'est-à-dire un outil au service des personnes les plus en difficulté.

Je rappelle que les associations intermédiaires bénéficient d'une aide comprise entre 50 000 et 100 000 francs par emploi, selon l'étendue du territoire concerné, l'importance de la population et les objectifs en termes de v olume d'emplois, ainsi que d'une exonération des charges patronales pour l'assurance maladie et les allocations familiales dans la limite de 750 heures par emploi sur une période continue de douze mois.

Nous avons défini les conditions de mise à disposition en entreprise. Les associations devront demander un accord au-delà de seize heures. La mise à disposition ne pourra pas excéder un mois renouvelable une fois dans une même entreprise, ni 240 heures par an alors qu'actuellement la durée moyenne est de 171 heures.

Par ailleurs - je tiens à vous rassurer sur ce point - les associations intermédiaires pourront toujours recourir à l'appui social individualisé que l'ANPE assure pour accompagner les chômeurs en grande difficulté. Les crédits de l'appui social, qui étaient de 30 millions en 1998, passeront à 100 millions en 1999 et à 200 millions en 2000.

Vous voyez que les associations intermédiaires qui vous sont chères me le sont aussi, le budget le démontre amplement.

M. le président.

La parole est à M. Michel Hunault.

M. Michel Hunault.

Ma question concerne le chômage des jeunes.

En annonçant les chiffres des emplois-jeunes, madame la ministre, vous vous êtes demandé s'il fallait mettre en place un dispositif particulier pour le secteur privé. Or je rappelle que nous avons cette regrettable spécificité d'être le pays d'Europe où le nombre de chômeurs de moins de vingt-cinq ans est le plus élevé : près de 600 000. Le constat est connu, les solutions le sont pour une bonne part : développer l'apprentissage et la formation en alternance, favoriser le temps partiel et le tutorat pour intégrer progressivement les jeunes dans l'entreprise.

C'est pourquoi je vous demande avec insistance ce que le Gouvernement a l'intention de faire pour étendre au secteur privé le dispositif des emplois-jeunes. Il y a là, en effet, un gisement d'emplois à exploiter : je pense aux professions libérales, aux travailleurs indépendants, aux petites et moyennes entreprises, qui veulent participer à l'effort d'insertion des jeunes. Nous avons, à cet égard, des responsabilités partagées.

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur le député, si le chômage des jeunes reste très important dans notre pays, il n'en a pas moins diminué de 12 % en un an. C'est loin d'être négligeable, surtout si l'on fait la comparaison avec les années passées.

Certains s'interrogent sur le point de savoir si, à côté des emplois-jeunes du secteur public, qui seront quelque 150 000 à la fin de l'année, il ne convient pas de mettre en place un dispositif spécifique au secteur privé. J'ai rappelé que le secteur privé avait déjà à sa disposition plusieurs mécanismes, le premier d'entre eux étant la formation en alternance. Vous y avez fait référence et Mme Péry en a parlé abondamment. Nous sommes tous convaincus aujourd'hui que, pour les jeunes qui n'ont pas eu de formation dans le système traditionnel, la meilleure réponse


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est la formation en alternance, que ce soit l'apprentissage ou les contrats de qualification, contrats qui sont aujourd'hui en développement.

Par ailleurs, pour les jeunes en chômage de longue durée et très éloignés de l'emploi, nous avons mis en place le programme TRACE, qui permet de les accompagner, sur une durée pouvant atteindre dix-huit mois, vers la qualification et vers l'emploi.

S'ils sont un peu moins en difficulté, ils bénéficieront néanmoins du programme « Nouveau départ » mis en place par l'Agence nationale pour l'emploi qui doit leur permettre de retrouver effectivement le chemin de la qualification et de l'emploi.

J'ajoute que d'autres dispositifs existent : les préretraites c ontre embauche pour lesquelles l'ARPE a permis 35 000 entrées sur le marché du travail chaque année depuis qu'elle existe ; les avances remboursables et les aides au conseil pour la création d'entreprise, l'EDEN - l'encouragement au développement d'entreprises nouvelles - que nous avons mis en place en même temps que la loi sur les emplois-jeunes, les CIE-jeunes, qui permettent l'embauche directe de jeunes.

Depuis un an je réfléchis sur le point de savoir si nous devons accorder une aide particulière aux entreprises qui embauchent des jeunes. Je pense que la conjoncture est telle que ce type d'aide ne pourrait avoir qu'un effet d'aubaine. Nous souhaitons continuer à travailler, comme le fait Mme Péry, sur l'aide à l'insertion et à la formation dans les entreprises pour les jeunes, mais prévoir aujourd'hui un mécanisme spécifique alors que 775 000 embauches se font spontanément, ne produirait qu'un effet d'aubaine, je le répète.

En revanche, nous poursuivons notre réflexion avec le secteur privé, pour voir si certains besoins nouveaux ne seraient pas solvables. Je pense à des services autour des entreprises, autour des personnes, qui pourraient être organisés de manière plus développée qu'aujourd'hui, car je suis convaincue que les jeunes pourraient bénéficier de ces emplois.

M. le président.

La parole est à M. Jean Ueberschlag.

M. Jean Ueberschlag.

Madame la secrétaire d'Etat, nous avons pu lire que les dépenses de la formation professionnelle sont en hausse. Cela ressort d'une étude de la DARES, qui date de mai 1998, laquelle a également souligné que cette hausse était essentiellement due à la part que les régions prennent dans les actions de formation, alors que, toujours selon la DARES, la participation de l'Etat est en forte baisse.

Il s'agit d'une tendance regrettable que vous vous apprêtez à accentuer avec l'article 80 du projet de loi de finances pour 1999.

En effet, alors que tout le monde s'accorde à dire qu'en matière d'insertion, la racine du mal c'est l'absence de qualification, donc de formation ; alors que les contrats de formation en alternance connaissent un succès remarquable - avec un accroissement de 23 % en cinq ans - et que l'apprentissage est en flèche, vous décidez, sans concertation, de supprimer la prime à l'embauche de 6 000 francs pour tous les contrats d'apprentissage concernant des jeunes ayant des qualifications supérieures au niveau V. Cette décision intervient quelques jours à peine après un autre décret qui supprime la prime à l'embauche pour les jeunes entrant en contrat de qualification avec des niveaux supérieurs au CAP.

M. Michel Hunault.

C'est contradictoire avec ce que l'on a entendu.

M. Jean Ueberschlag.

Madame le secrétaire d'Etat, ce n'est pas ainsi que vous revaloriserez la filière de l'apprentissage. Ce n'est pas ainsi que vous rendrez service à tous les jeunes à la recherche d'un emploi durable.

Vous avez souligné que les filières en alternance étaient en développement et je l'ai rappelé aussi. Mais ce n'est pas parce qu'elles se développent qu'il faut leur retirer l'échelle de sous les pieds.

De plus ces décisions prises, sans concertation aucune, je le répète, laissent mal augurer de la nouvelle loi sur la f ormation professionnelle annoncée depuis quelques temps.

Je sais que les dispositifs qui ont été mis en place, que ce soient les emplois-jeunes ou les 35 heures, exigent des moyens. Mais pourquoi les financez-vous sur le dos de l'alternance ? C'est un mauvais coup que vous risquez de porter à nos jeunes et à tous ceux, entrepreneurs et formateurs, qui ont cru en la parole de l'Etat.

Ne pensez-vous pas, madame la secrétaire d'Etat, qu'il serait sage d'y renoncer ? Dites-nous franchement quelles sont vos intentions.

M. Michel Hunault.

Très bien !

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.

Mme la secrétaire d'Etat à la formation professionnelle.

Monsieur le député, j'ai longuement abordé ce sujet ce matin, mais je tiens à vous répondre d'une façon très concrète, même si mon propos sera plus ramassé.

Vous avez d'abord mis en doute l'importance du financement de l'Etat. Pourtant j'ai souligné ce matin que le noyau dur de 26,4 milliards de francs avait été atteint grâce à une augmentation de 5,3 %. S'il ne saurait être question de nier l'effort des régions, je vous rappelle les chiffres que j'ai cités aussi ce matin quant aux sommes consacrées à la formation professionnelle : 56 milliards pour l'Etat, 55 milliards pour les entreprises, 13 milliards pour les régions, 14 milliards pour d'autres organismes, principalement l'UNEDIC.

Ensuite je veux répondre directement à votre interrogation sur l'article 80.

Il est exact que le Gouvernement a choisi le recentrage des primes à la signature du contrat d'apprentissage. A cet égard, n'oubliez pas, monsieur le député, que les a utres primes en matière d'aide à la formation 10 000 francs ou 12 000 francs selon l'âge de l'apprenti - ainsi que les exonérations de charges sociales qui constituent l'apport quantitatif le plus important, sont maintenues, quel que soit le niveau du jeune embauché. Cela vous montre que le Gouvernement continue à soutenir fortement l'apprentissage.

Je vous ai d'ailleurs fait part de ma volonté de ne pas considérer cette formation comme étant passéiste ou liée à des métiers peu qualifiés. Au contraire, je comprends ceux qui veulent en faire une véritable filière, car elle répond à des besoins réels, à des formes d'intelligence, à des formes d'intérêt et, certainement aussi, à certains secteurs de la société.

Vous le verrez, au fur et à mesure que nous avancerons dans nos travaux, je continuerai à avoir cette volonté de promouvoir l'alternance au travers de ces deux formes : les contrats de qualification et l'apprentissage.

M. le président.

Nous en venons à une première série de questions du groupe socialiste.

La parole est à Mme Odette Trupin.


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Mme Odette Trupin.

Dans une économie en perpétuelle mutation et dans un contexte concurrentiel mondial, chacun sait que la formation continue devient un enjeu majeur tant pour l'entreprise que pour le salarié.

Elle représente une vraie valeur économique. S'il n'est, dès lors, pas souhaitable que les entreprises se désintéressent de la formation et de la compétence de leurs salariés, il est aussi important que les salariés investissent dans leur avenir professionnel.

La compétence et l'employabilité sont aujourd'hui la meilleure protection sociale. Pourtant la formation, surtout dans une optique d'employabilité, n'est pas facile à promouvoir auprès des entreprises de proximité dont la priorité est la réalisation d'objectifs à court terme. Même si l'obligation de financement a fait entrer la formation dans leurs moeurs, les entreprises s'impliquent surtout dans la formation d'insertion destinée aux jeunes actifs ou dans la formation d'adaptation qui vise l'amélioration à court terme de la productivité et dont le retour sur investissement est rapide.

Le salarié, de son côté, reste trop souvent passif par rapport à sa propre formation. Il se contente de bénéficier de l'offre, lorsqu'elle existe, alors qu'il devrait être demandeur en la matière.

Compte tenu de votre volonté fortement affirmée de développer cette dimension de la formation professionnelle continue qui se traduit par une augmentation de 5,3 % de son budget par rapport à 1998, il me paraît important de réorienter l'action de l'Etat qui, en symbiose avec les régions, pourrait être un partenaire attentif du développement indispensable des salariés, notamment dans les PME-PMI.

En clair, quels moyens l'Etat compte-t-il mettre en oeuvre pour inciter les employeurs et les salariés en responsabilité partagée à prendre davantage en compte le volet formation, à co-investir dans une dynamique d'avenir et de progrès ?

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.

Mme la secrétaire d'Etat à la formation professionnelle.

Madame la députée, vous revenez sur un débat de fond qui a fait l'objet d'un échange que nous avons eu ce matin, très directement lié tant au présent qu'à l'avenir.

Ce matin, même si je l'ai fait à grands traits, j'ai relevé des constats sur lesquels je veux revenir un instant.

Le premier est celui de l'état de la population active, caractérisé par le fait que 40 % d'entre elle a un niveau de formation initiale au-dessous du CAP. J'ai déjà insisté sur ce point car il me semble un élément très important à intégrer dans notre réflexion.

J'ai également insisté sur les inégalités qui marquent l'accès à la formation professionnelle. J'ai relevé celles dont sont victimes les femmes, quels que soient les niveaux auxquels nous pouvons nous référer, ainsi que celles qui frappent les salariés des petites et moyennes entreprises, dont 91 % n'accèdent jamais à la formation.

Cette inégalité aussi doit être absolument pourfendue. J'ai aussi cité d'autres inégalités, mais je ne veux pas trop m'étendre sur le sujet.

Ce matin j'ai enfin évoqué le développement de la mobilité en donnant certains chiffres majeurs que nous devons intégrer. Ainsi un salarié sur quatre a changé d'entreprise au cours des cinq dernières années et un actif sur quatre a changé de catégorie professionnelle, voire de métier, durant la même période. Cela démontre qu'il convient de construire des droits nouveaux afin de prendre en compte ces parcours professionnels de plus en plus discontinus, et encore lorsqu'il n'y a pas, entre plusieurs parcours professionnels, ces moments de rupture que sont les périodes de chômage.

Nous devons mener une réflexion d'ensemble permettant de prendre en compte l'ensemble de ces constats, ce qui exigera concertations et négociations. Il est notamment souhaitable de construire un droit individuel, transférable d'une situation à l'autre. C'est la seule manière de pouvoir lutter efficacement contre les inégalités, et de faire en sorte que chaque salarié puisse s'adapter à toutes les mutations auxquelles il sera confronté.

Ce droit individuel devra être conforté par un effort de mutualisation, faute de quoi nous laisserons trop de personnes au bord du chemin, pour reprendre cette image simple.

C'est dans ce sens que nous réfléchirons ensemble.

M. le président.

La parole est à Mme Odile Saugues.

Mme Odile Saugues.

Madame la ministre de l'emploi et de la solidarité, le 17 avril 1998, notre assemblée a adopté la loi ouvrant droit à une allocation spécifique d'attente aux chômeurs âgés de moins de soixante ans ayant quarante annuités de cotisation vieillesse. Son article unique est particulièrement clair : le total de ressources des bénéficiaires de l'allocation spécifique d'attente ne pourra être inférieur à un montant fixé par décret.

L'article 1er du décret du 12 juin 1998 complète et parfait le dispositif. Conformément à nos engagements, il prévoit que le montant total des ressources des bénéficiaires de l'allocation spécifique d'attente visée au premier alinéa de l'article L.

351-10-1 du code du travail ne peut être inférieur à 5 000 francs.

Cette loi répond à une attente très forte et se traduit par un important effort budgétaire, nous le savons tous.

Pourtant, sur le terrain, nous constatons que l'application de ce décret par les guichets des ASSEDIC ne correspond ni à la loi, ni au décret, ni à la circulaire. En effet, seuls les bénéficiaires de l'ASS majorée parviennent à ce seuil de 5 000 francs de revenus, mais ce n'est pas le cas pour ceux ne percevant que l'ASS simple qui devraient bénéficier de la majoration de l'ASS dès qu'ils justifient de 160 trimestres de cotisations d'assurance vieillesse.

Madame la ministre, vous avez déjà été alertée sur ce problème qui nous est soumis jusque dans nos permanences où nous recevons des personnes qui s'interrogent et qui nous interrogent.

Ce débat budgétaire nous donne l'occasion d'appeler de nouveau votre attention sur la question de l'application de nos lois et non, je le répète, sur un problème der édaction. Pouvez-vous nous indiquer, madame la ministre, les instructions que vous comptez donner pour que les ASSEDIC appliquent enfin pleinement la loi dans sa lettre et dans son esprit ?

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Madame la députée, je puis vous confirmer, vous l'avez d'ailleurs indiqué, que les textes d'application de l'ASA sont en conformité avec l'intention du législateur et avec les engagements qu'a pris le Gouvernement : le total des ressources des bénéficiaires de l'ASA est effectivement supérieur à 5 000 francs.

Cela ressort clairement du décret du 12 juin 1998, qui prévoit que les bénéficiaires de l'ASS au taux simple passent automatiquement au taux majoré dès lors qu'ils


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ont 160 trimestres de cotisations à l'assurance vieillesse, auxquels s'ajoutent les 1 750 francs versés au titre de l'ASA. De la même manière, le RMIste isolé, qui perçoit une allocation insuffisante pour atteindre ces 5 000 francs, touche un montant d'ASA de 2 570,58 francs afin de pouvoir aussi bénéficier d'un total qui dépasse ce plancher de 5 000 francs.

Il est vrai que nous avons été saisis de quelques cas, dont un que vous connaissez puisqu'il est intervenu à Clermont-Ferrand et quelques autres à Rouen. En fait ces problèmes ont simplement été provoqués par des anomalies informatiques. En effet, un logiciel qui devait faire passer des personnes de l'ASS au taux simple à l'ASS au taux majoré n'a pas fonctionné. Je pense que la situation est redevenue normale aujourd'hui. De toute façon nous avons saisi la direction générale de l'UNEDIC pour que des instructions fermes soient données dans tous les cas.

Les personnes, sans doute peu nombreuses, qui ont été victimes de cette erreur, bénéficieront évidemment d'un rappel des sommes dues.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Marie Bockel.

M. Jean-Marie Bockel.

Madame la ministre, la ville de Mulhouse s'est engagée sans délai et fortement, vous le savez, dans le dispositif « Nouveaux métiers, nouveaux services ». Notre objectif était ainsi de contribuer à la création de 500 emplois-jeunes : 100 dans nos services et 400 en externe. Comme il est déjà pratiquement atteint, nous allons essayer d'arriver au total de 700 emploisjeunes.

Nous n'en sommes pas moins restés attachés à une éthique afin d'éviter les dérives, et nous avons respecté leso bligations suivantes : pas de surqualification dans l'emploi puisqu'un tiers des postes est occupé par des jeunes de niveau V bis ou VI ; mise en place d'une formation et d'un projet professionnels ; pérennisation au bout de cinq ans de l'emploi du jeune grâce à notre réseau d'entreprises, au plan local d'insertion par l'économique et à la mission locale. Des actions sont d'ailleurs menées avec les entreprises qui permettent déjà d'anticiper sur les futurs emplois-jeunes dans le secteur privé.

Pour nous permettre de réaliser, sur les plans qualitatif et quantitatif, la création d'emplois-jeunes, nous souhaitions pouvoir cofinancer par le PLIE l'accompagnement des jeunes en difficulté embauchés en emplois-jeunes.

Dans l'état actuel, vos services ne nous ont pas autorisé ce cofinancement. Or le document unique de programmation 1994-1999 de l'objectif 3 précise pour la mesure 13 : « Le PLIE permet de mobiliser sur des objectifs qualitatifs et quantitatifs l'ensemble des actions intervenant sur le plan local en faveur de l'insertion. »

L e programme « Nouveaux services, nouveaux emplois » constitue bien, à mon sens, une action en faveur de l'insertion des jeunes en difficulté visés par l'instruction DGEFP no 98-07.

Pourrez-vous nous aider à surmonter cette difficulté ?

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur le député, permettez-moi d'abord de saluer l'engagement de la ville de Mulhouse en faveur des emploisjeunes puisque vous êtes le maire de l'une des villes qui a mis en place le plus rapidement et le plus complètement un nombre élevé de ces emplois en respectant totalement l'esprit de la mesure, aussi bien pour le type d'emplois créés que pour les jeunes concernés.

Je ne pense pas que nous soyons en désaccord sur le fond, mais je tiens à souligner que, pour être de vrais emplois, les emplois-jeunes doivent bénéficier à des jeunes qui sont aptes au travail, et non pas à ceux qui peuvent bénéficier, par exemple, d'actions d'insertion parce qu'ils ont des difficultés d'insertion dans le travail ou dans la société. Or je ne confonds pas ces jeunes en difficulté avec des jeunes non qualifiés. En effet, on peut être non qualifié et ne pas être en difficulté, ou avoir des difficultés à trouver un emploi mais ne pas être en difficulté sociale, psychologique ou d'insertion.

Je me réjouis donc qu'un grand nombre de jeunes sans qualification aient pu trouver dans votre ville des emplois faiblement qualifiés dans le domaine de la sécurité ou de l'environnement, par exemple, qui leur permettent de commencer à travailler et, je l'espère, de rentrer dans un parcours de formation.

J'ai donc bien compris votre question sur l'accompagnement de ces jeunes, mais je ne suis pas sûre que les plans locaux d'insertion par l'économique soient le meilleur outil pour ceux qui ont également des difficultés en matière de logement ou d'accès à la santé, par exemple.

Ce rôle relève plus d'une mission locale que d'un PLIE, formule réservée à des jeunes et à des adultes en grande difficulté d'insertion auxquels tous ces outils de l'insertion par l'économique doivent être consacrés.

Cela dit, il nous faut examiner la question. Si, pour pouvoir bénéficier d'un emploi-jeune, des jeunes sont obligés de s'expatrier loin de leur lieu de résidence, ils doivent pouvoir trouver des moyens d'accompagnement leur permettant de faire face aux frais occasionnés. Encore une fois, la mission locale me semble mieux à même de répondre à ce problème, mais nous la regarderons néanmoins avec attention.

M. le président.

La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau.

Mme Marie-Françoise Clergeau.

Madame la ministre, je souhaite connaître vos projets concernant le corps des inspecteurs du travail. La loi d'orientation et d'incitation à la réduction du temps de travail du 13 juin 1998 engendre en effet trois grandes questions.

La première tient à la définition de la durée du travail effectif. Celle-ci, plus cohérente avec la jurisprudence et les directives européennes, est non seulement une garantie pour les salariés mais aussi une source de plus de clarté pour les employeurs. Elle induit toutefois la nécessité d'un contrôle de l'acceptation de ce nouveau concept de durée du travail sur le terrain et dans les entreprises.

La deuxième est relative à la place centrale réservée à la négociation dans le processus de réduction du temps de travail. Compte tenu de l'insuffisance de ces négociations, un dispositif de soutien et de conseil semble nécessaire dans les entreprises.

La troisième a trait à la nécessité de la bonne application de la loi quand elle s'imposera à tous, c'est-à-dire en 2000 pour les entreprises de plus de vingt salariés et à partir de 2002 pour les autres.

Afin de s'en assurer, il convient de mettre en oeuvre dès maintenant le recrutement des personnels qui, à l'issue de la période de formation, pourront veiller au respect de la loi. L'importance du rôle que sont amenés à remplir les services d'inspection du travail avec la mise en oeuvre des 35 heures impose un renforcement en conséquence des effectifs de contrôle et d'inspection, non seulement dans les directions départementales du travail et de l'emploi, mais également dans les sections d'inspection du travail, de plus en plus sollicitées.

Un premier effort est engagé avec la création de quinze emplois d'inspecteur du travail en 1998, auxquels vient s'ajouter, dans le cadre du budget pour 1999, la création


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de dix emplois d'inspecteur du travail et de cent quarante emplois de contrôleur dont cinquante en transformation d'emploi. Il me semble important de prolonger cet effort en créant de nouveaux postes statutaires et de nouvelles sections d'inspection pour pallier le retard pris ces dernières années dans ce domaine.

La poursuite de l'effort est indispensable pour le renforcement des moyens des services d'inspection du travail.

Je crains en effet que ceux-ci ne restent insuffisants au regard de l'importance de la tâche. Quelles sont, madame la ministre, les perspectives en ce domaine ?

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Madame la députée, je partage bien évidemment votre point de vue. Il ne sert à rien de voter des lois si nous ne sommes pas capables de les faire appliquer.

Comme je l'ai dit dans mon intervention à la tribune, j'ai demandé aux directeurs départementaux du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle que soit inscrit cette année, dans les priorités de l'inspection du travail, le contrôle de la durée du travail, de l'hygiène et de la sécurité. Le non-respect de la durée maximale du travail, qu'elle soit journalière ou hebdomadaire, et le recours abusif aux heures supplémentaires ne sont en effet pas acceptables au moment où nous négocions le passage aux 35 heures.

Comme je l'ai également dit, j'ai demandé que les moyens des services soient confortés. Ainsi, dix postes d'inspecteur du travail complémentaires viendront s'ajouter aux quinze postes créés en 1998 - il s'agit bien d'emplois supplémentaires -, et 140 postes de contrôleur seront créés, dont 135 sur le terrain. Il est très important qu'ils travaillent au sein d'une section, au contact des réalités. C'est là qu'ils peuvent véritablement effectuer leur travail de contrôle et d'incitation auprès des entreprises.

L'effort est de taille. Je l'avais entamé en 1992 et en 1993, et je regrette qu'aucun moyen complémentaire n'ait été donné à l'inspection du travail entre 1994 et 1997.

De la même manière, il faudra accroître le nombre des sections. Entre 1991 et 1998, vingt-trois sections complémentaires ont été créées. Nous examinons actuellement la possibilité d'en implanter de nouvelles dans des bassins d'emploi qui ont évolué. Nous devrons continuer soit à créer des sections complémentaires, soit à implanter des sections géographiquement détachées de la direction départementale. C'est le cas dans quatre-vingts lieux.

C'est un moyen d'assurer la réalité du contrôle de l'inspection du travail.

Je partage donc votre point de vue, madame la députée, et ce budget est une première illustration de l'effort du Gouvernement en ce sens.

M. le président.

Nous passons au groupe Démocratie libérale et Indépendants.

La parole est à M. Gérard Voisin.

M. Gérard Voisin.

Les emplois-jeunes font recette. J'y reviens après M. Hunault et M. Bockel, car tout le monde n'a pas la chance d'avoir une ville comme Mulhouse.

Plus d'un an après la mise en oeuvre du plan emploisjeunes, nous devrions rapidement disposer d'un premier bilan, comme le prévoit l'article 12 de la loi du 16 octobre 1997. Il devra analyser les effets de la loi sur l'emploi et sa contribution à la satisfaction des besoins à couvrir.

Il devra également estimer le poids des initiatives locales.

Les élus locaux que nous sommes n'ont en effet pas ménagé leurs efforts pour concrétiser une loi dont, pourtant, nous ne partageons pas totalement la philosophie.

Notre inquiétude principale reste la pérennisation de ces emplois. Nous savons qu'à l'expiration des contrats emplois-jeunes, qui ont une durée maximale de cinq ans, nous ne pourrons pas maintenir tous les emplois créés car nos finances locales ne le supporteront pas. Je crains que nous n'ayons alors le sentiment d'un grand gâchis.

Je n'oublie pas les promesses du candidat Jospin : il promettait la création non pas de 350 000 emplois mais de 700 000 emplois pour les jeunes. L'effort accompli dans le secteur public devait en effet être doublé par un volet en faveur du secteur marchand, lequel, semble-t-il, a été depuis oublié.

Je le regrette car je suis persuadé qu'une incitation significative en faveur de l'emploi des jeunes en direction des entreprises du secteur privé et, en particulier, des petites, à hauteur de l'effort accompli dans le secteur public, aurait, à long terme, été beaucoup plus favorable à l'emploi. Les activités ainsi encouragées, étant créatrices de richesse, auraient en effet trouvé tout naturellement et rapidement leur utilité économique et, par conséquent, les conditions de leur pérennisation.

Madame la ministre, comptez-vous aujourd'hui agir en faveur de l'emploi des jeunes dans le secteur marchand, comme l'avait promis M. Jospin quand il était candidat ? Vous venez de botter en touche. Votre intervention à la tribune et vos réponses à M. Hunault et à M. Bockel ne sont pas satisfaisantes car vous êtes loin des promesses alléchantes qui furent des vecteurs de votre victoire électorale.

M

Maxime Gremetz.

Monsieur le président, les deux minutes dont dispose chaque orateur sont dépassées !

M.

Gérard Voisin.

Le sujet est enterré. Exhumez-le afin de tenir vos engagements. Donnez aux jeunes et aux entreprises les moyens que vous leur aviez promis. Il ne doit pas y avoir plus d'effets d'aubaine que dans le public.

M.

le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur le député, je comprends assez mal votre intervention. Ou bien les besoins nouveaux sont solvables, et j'ose espérer que le marché les organise et c'est pourquoi beaucoup dans vos rangs disent que l'aide de l'Etat doit continuer à diminuer parce qu'il ne sert à rien d'aider à la création d'emplois, ou bien ils ne sont pas encore solvables et le marché ne les aide pas et c'est pourquoi nous avons institué les emplois-jeunes dans le secteur public.

Cela dit, je suis ravie d'entendre que, malgré un scepticisme très important au moment de la discussion de la loi sur les emplois-jeunes, vous avez contribué à la création des 143 000 emplois-jeunes dont nous disposons d'ores et déjà et à l'emploi des 101 000 jeunes qui en bénéficient déjà.

Je pense que le scepticisme dont vous faisiez état il y a un an a disparu.

M. Gérard Voisin.

Je n'ai pas voté la loi.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

J'espère que vous ne serez plus du tout sceptique dans deux ou trois ans, quand nous aurons trouvé, avec les jeunes et leurs employeurs, les moyens de pérenniser ces emplois.


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S'il y avait une recette miracle en matière d'emploi, cela se saurait. Vous me proposez de donner une aide à toute embauche de jeune ! Mais comment financer l'embauche des 750 000 jeunes qui va avoir lieu spontanément dans notre économie ?

M.

Gérard Voisin.

Cela faisait partie de vos promesses électorales ! Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Si vous pensez qu'il faut développer un type de formation particulier, proposez-le. Mais vous ne pouvez pas sans arrêt nous dire : « Réduisez les charges, réduisez votre budget, réduisez les impôts ! », et nous demander d'aider à la création d'emplois qui a lieu spontanément - ce dont je me réjouis - grâce à la croissance que nous avons aidé à mettre en place en favorisant la relance de la consommation, et notamment en aidant les catégories les plus fragiles.

M. Patrick Malavieille, rapporteur pour avis.

Très bien ! Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur le député, les emplois-jeunes sont aujourd'hui en p lace dans le secteur public. Un certain nombre d'emplois sont créés dans le secteur privé, et je m'enr éjouis : 750 000, alors que nous avions parlé de 350 000. Vous voyez que nous sommes bien au-delà.

Si vous pensez qu'il manque dans notre dispositif des incitations en direction du secteur privé, je suis pour ma part tout à fait prête à examiner ce point. Mais je n'ai rien entendu de tel dans votre question, qui était plus polémique que pratique, et je le regrette.

M.

Robert Lamy.

Il a simplement rappelé l'une de vos promesses électorales.

M. Gérard Voisin.

J'ai simplement rappelé ce que M. Jospin avait promis quand il était candidat !

M.

le président.

Nous en revenons au groupe du Rassemblement pour la République.

La parole est à M. Patrick Delnatte.

M.

Patrick Delnatte.

Madame la ministre, ma question concerne l'aide aux chômeurs créateurs d'entreprise.

L'année dernière, lors du vote de la loi emplois-jeunes, notre assemblée a adopté le principe d'une avance remboursable permettant d'aider les jeunes créateurs d'entreprise dans le financement de leur projet. Or, à ce jour, les textes d'application n'ont pas été publiés. Qu'en est-il exactement ? Plus généralement, le Gouvernement serait-il favorable à la mise en place d'un tel système d'avance pour tous les créateurs d'entreprises, quel que soit leur âge ? Enfin, quelles mesures de collaboration et de soutien pouvez-vous proposer aux associations qui effectuent un travail remarquable dans ce domaine ? J'associe à ma question mon collègue Jean-Luc Warsmann, qui est très engagé dans l'association « Ardennes Initiative ». Il y a, madame la ministre, sur le terrain, un réseau très dense de soutien à la création d'entreprises qui ne demande qu'à réussir. Ce réseau est indispensable pour remonter la pente en ce domaine.

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Comme vous l'avez indiqué, le dispositif EDEN, visant à aider les jeunes à créer des entreprises, est maintenant en place. Ce dispositif est assez novateur : une avance remboursable est accordée aux jeunes créateurs d'entreprise - 40 000 francs pour un créateur et 60 000 lorsqu'ils sont deux - et un suivi et un accompagnement sont prévus sur plusieurs années. Cette méthode apparaît aujourd'hui la plus appropriée aux yeux des spécialistes. Nous avons tous, les uns comme les autres, modifié l'ACRE, l'aide à la création d'entreprise. Je ne suis d'ailleurs pas absolument sûre que nous ayons eu raison. En tout cas, ceux qui s'occupent et qui accompagnent les créateurs d'entreprise le pensent.

La gestion est, aujourd'hui, déléguée à des organismes spécialisés. L'Etat, lui, assure le pilotage et le contrôle. Le dispositif sera commun pour les jeunes, pour les bénéficiaires des minima sociaux et pour les salariés d'entreprises en faillite ayant fait l'objet d'une reprise, comme nous l'avons prévu dans la loi contre les exclusions.

Voilà où en est, aujourd'hui, le dispositif EDEN. J'ai la conviction, tout comme vous, qu'il faut aider les associations qui, sur le terrain, travaillent en faveur de la création d'emplois. Je vous rappelle, d'ailleurs, que nous disposons de crédits d'ingénierie pour les nouveaux besoins emplois-jeunes. Ils ne sont pas très utilisés aujourd'hui. Si les jeunes créateurs d'entreprise se plaçaient sur de nouveaux créneaux, ces fonds pourraient être utilisés pour les accompagner dans leur réflexion et leur permettre de procéder à des investigations sur la faisabilité de leurs projets et l'existence de marchés.

M. le président.

Nous revenons au groupe socialiste.

La parole est à Mme Odette Trupin.

Mme Odette Trupin.

Ma question est redondante avec celle de M. Gengenwin sur le financement de l'apprentissage et, notamment, le fonds national de péréquation de la taxe et les critères de répartition entre les fonds régionaux à compter de 1998. Je me permets d'y insister, car les régions, conformément aux dispositions de la loi du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat, contribuent pour une part importante au financement des centres de formation d'apprentis. Le développem ent qualitatif et quantitatif de ces établissements entraîne, pour les conseils régionaux, un effort budgétaire de plus en plus lourd, que la répartition du fonds de péréquation de la taxe d'apprentissage est destinée à compenser partiellement.

Madame la secrétaire d'Etat, vous avez déjà répondu sur ce sujet mais je souhaiterais savoir quelles mesures peuvent être envisagées pour permettre le versement de ce financement aux fonds régionaux d'apprentissage et de formation professionnelle continue.

Cette question se pose avec acuité dans certaines régions et notamment dans la région Aquitaine.

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.

Mme la secrétaire d'Etat à la formation professionnelle.

Madame la députée, c'est bien volontiers que je réponds à nouveau à une question portant sur la péréquation. En premier lieu, permettez-moi de dire tout l'intérêt que nous portons à cette péréquation. Elle permet de réduire un peu les inégalités de ressources qui existent entre les régions et, au sein d'une région, entre les CFA.

Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, la somme transférée en 1997 a été de 631 millions de francs. Pour 1998, nous savons que nous pouvons compter sur une collecte de 650 millions de francs. Le 25 novembre prochain, un groupe de travail regroupant les trois collèges du comité de coordination - régions, partenaires sociaux et Etat - se réunira pour définir les critères pérennes de répartition des ressources.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 10 NOVEMBRE 1998

Sachez, madame la députée, qu'aux critères déjà retenus en 1997, à savoir le nombre d'apprentis et les ressources de formation de chaque région, je trouverais normal - mais j'attends, bien sûr, de connaître l'avis du comité de coordination - que l'on puisse ajouter l'effort fait par chaque région pour l'apprentissage, ainsi que l'effort fait envers les publics en manque de qualification et de professionnalisation.

M. le président.

La parole est à Mme Paulette Guinchard-Kunstler.

M me Paulette Guinchard-Kunstler.

Madame la ministre, madame la secrétaire d'Etat, l'article 5 de la loi d'orientation relative à la réduction du temps de travail dispose que la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles. Dans le secteur social et médico-social, les personnels sont régulièrement amenés à effectuer des heures de nuit en chambre de veille au sein des différents établissements associatifs. La plupart des conventions collectives qui ont, sur ce point, reçu un agrément ministériel prévoient qu'une nuit passée en chambre de veille équivaut à trois heures de travail effectif.

Les responsables d'associations craignent de se trouver dans une situation difficile à la fois sur le plan financier, et dans les négociations.

Est-il prévu, madame la ministre, que votre ministère prenne en compte les particularités liées à ce type d'activité ? Est-il dans vos intentions de donner une suite favorable à la demande d'élaboration d'un décret validant le principe actuel d'équivalence ?

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Madame la députée, vous avez soulevé un problème majeur pour la réduction du temps de travail dans le secteur sanitaire et social : celui du service de nuit passé en chambre de veille. Des réponses conventionnelles ont déjà été mises en place et c'est au regard de ces réponses que nous devons envisager les choses. Comme vous le savez, l'UNIFED est en train de négocier avec les organisations syndicales et ce sujet est sur la table. Va-t-on maintenir une équivalence du type de celle qui existe aujourd'hui ou en créer une autre ? Je n'en sais rien encore. En tout cas, c'est un vrai problème et il faudra tirer toutes les conséquences de l'accord qui interviendra sur le plan réglementaire, pour que la réduction de la durée du travail se fasse sans difficulté, notamment sur le plan du financement, pour les organismes concernés. Soyez sûre que je m'en préoccupe.

M. le président.

La parole est à Mme Conchita Lacuey.

Mme Conchita Lacuey.

Madame la ministre, madame la secrétaire d'Etat, mesdames, messieurs les députés, je souhaite attirer votre attention sur la situation des jeunes mères de famille au regard de leur activité professionnelle et particulièrement de celles qui bénéficient de l'allocation parentale d'éducation, l'APE.

On note, depuis 1994, une diminution significative du taux d'activité des mères de deux enfants âgées de 25 à 34 ans.

Quand on sait que les femmes sont plus touchées par le chômage et la précarité de l'emploi, notamment le temps partiel et qu'au 31 décembre 1997, 530 000 mères de famille avaient demandé l'APE, dont 80 % avaient cessé toute activité, on peut légitimement s'inquiéter des conséquences de ce phénomène sur l'activité des femmes en général.

Pour les femmes, le danger est évident. La reprise d'un travail n'est pas automatique, surtout pour celles qui ont un niveau d'études relativement faible au départ, ou qui ont occupé des emplois sans qualification et précaires.

Pour que cette interruption ne soit pas pénalisante, ne faudrait-il pas donner à ces jeunes mères ainsi qu'à celles qui sont bénéficiaires de l'allocation parent isolé, et particulièrement à celles qui sont en difficulté, la possibilité de continuer leur évolution professionnelle avec un accès aux formations qualifiantes par étapes successives et adaptées aux contraintes familiales ? Le travail des femmes est devenu un fait de société qui a contribué largement à leur émancipation. Madame la ministre, madame la secrétaire d'Etat, je sais que vous êtes très sensibles à cette question et que, comme nous, vous ne souhaitez pas que soit remise en cause la légitimité du travail féminin. C'est la raison pour laquelle je vous demande ce que vous envisagez de faire pour que ces jeunes mères puissent mettre à profit une réorientation professionnelle de façon à échapper à des conditions de vie trop précaires.

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Madame la députée, malheureusement, nous disposons d'assez peu d'informations sur les femmes qui ont choisi d'utiliser l'allocation parentale d'éducation, notamment sur celles ayant trois enfants. Ce que nous savons, en revanche, c'est que l'élargissement de l'aide, en 1994, aux femmes ayant deux enfants dont un de moins de trois ans, a entraîné le retrait du marché du travail d'environ 100 000 femmes. Trois ans après la mise en place de cette APE de rang deux, c'est-à-dire à partir du second semestre 1997, on se rend compte qu'un certain nombre de ses bénéficiaires sont revenues sur le marché du travail.

D'ailleurs, depuis le début de l'année les sommes dépensées au titre de l'APE se réduisent. C'est dire que, la croissance revenant, ces femmes - et nous ne pouvons que nous en réjouir, vous comme moi - reviennent sur le marché du travail.

Néanmoins, je crois qu'il y a un véritable problème d'accès à la formation et de retour au travail pour un grand nombre d'entre elles. Aussi ai-je demandé au service d'études du ministère du travail d'effectuer une enquête sur un échantillon de douze caisses d'allocations familiales pour examiner quels sont leurs problèmes de réinsertion. Nous devrions disposer, au tout début de 1999, d'éléments sur la situation des allocataires et sur la trajectoire professionnelle qu'elles ont eue ou qu'elles aimeraient avoir.

Nous ne devons pas nous contenter des résultats de ce début d'année. En effet, ce sont certainement celles qui avaient les qualifications les plus élevées qui ont pu retrouver un travail. Nous devons donc réfléchir à des mécanismes de formation qui puissent permettre aux autres d'entrer à nouveau progressivement dans la vie professionnelle. A cet égard, je crois pouvoir vous dire que le contrat de qualification adulte peut y contribuer.

Vous le savez, il faut avoir été inscrit un an au chômage pour en bénéficier. Mais nous avons fait une exception pour les femmes percevant l'APE afin qu'elles puissent profiter de cette formation en alternance, de nature à les aider à rentrer doucement sur le marché du travail. Peutêtre faudra-t-il compléter ce dispositif à la lumière des études que nous menons actuellement.


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M. le président.

La parole est à Mme Martine Lignières-Cassou.

Mme Martine Lignières-Cassou.

Madame la ministre, au-delà de la priorité que vous avez donnée aux emplois jeunes et à la réduction du temps de travail, un de vos objectifs est de recentrer l'action du Gouvernement sur les dispositifs de retour à l'emploi et d'insertion pour les publics défavorisés et les plus fragiles.

Je pense plus particulièrement aux contrats intiative emploi, régis par la loi du 4 août 1995.

En effet, afin de faciliter une insertion professionnelle durable, l'Etat peut conclure avec des employeurs des conventions ouvrant droit au bénéfice de contrats de travail dénommés CIE, dont les bénéficiaires, d'après la loi du 4 août 1995, se répartissent en quatre grandes catégories : les demandeurs d'emploi de longue durée et les bénéficiaires du RMI ; les bénéficiaires de l'allocation spécifique de solidarité ; les femmes isolées assumant ou ayant assumé des charges de famille, et les personnes âgées de plus de cinquante ans privées d'emploi.

Or il apparaît, madame la ministre, que certaines modifications des conditions générales figurant dans les imprimés distribués par l'ANPE posent problème. La phrase : « les personnes de plus de 50 ans inscrites comme demandeurs d'emploi pendant douze mois », a été remplacée par : « une durée de douze mois consécutifs au moment de l'embauche », ce qui exclut une catégorie de demandeurs d'emploi particulièrement sensible.

C es modifications portent également atteinte aux femmes isolées assumant ou ayant assumé des charges de famille puisque les CIE semblent désormais réservés aux personnes au chômage depuis plus de deux ans ou bénéficiaires du RMI.

Cette situation est préoccupante à deux titres. D'une part, ces nouvelles modification ne sont inscrites nulle part, ni dans la loi ni dans les décrets, et semblent le fait de la seule volonté de l'ANPE. D'autre part, ces modifications excluent du dispositif les publics les plus en difficulté - les plus de 50 ans et les femmes isolées - et vont à l'encontre de la volonté gouvernementale de prévenir les exclusions et de lutter contre elles.

Enfin, et bien que le budget de l'emploi soit en augmentation de 6,6 milliards de francs, les charges financières supplémentaires inscrites au budget pour 1999 ont nécessité des économies et des redéploiements.

Existe-t-il, madame la ministre, une corrélation entre la réduction du nombre de CIE - 20 000 cette année - et la baisse de 50 % de la dotation des primes inscrites au budget 1999 ? Cela ne va-t-il pas fragiliser le dispositif et pénaliser les bénéficiaires et les personnes les plus en difficulté ?

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Madame la députée, la réduction des crédits inscrits en 1999 pour les CIE a une double origine.

Elle résulte d'abord de la réduction du nombre des entrées, 180 000 au lieu de 200 000, liée à notre souhait d'éviter les effets d'aubaine et de faire bénéficier du CIE les personnes qui n'auraient eu que bien peu de chances d'être intégrées dans ce dispositif auparavant. Nous avons déjà obtenu des résultats, certes modestes, à ce recentrage, puisque la part des chômeurs de longue durée de plus de deux ans est passée de 30 à 33 % à la fin du premier semestre de 1998. Si l'on y ajoute les autres publics prioritaires, RMIstes et travailleurs handicapés, ce taux atteint 70 % à la fin juin 1998, alors qu'il suffit d'être inscrit au chômage depuis un an pour pouvoir bénéficier d'un CIE.

Mais il nous apparaît extrêmement important - c'est pourquoi les primes sont différenciées - d'aider davantage les entreprises qui embauchent des chômeurs de deux à trois ans voire de plus de trois ans.

La deuxième raison, c'est que le taux de ruptures en cours de contrat est en forte augmentation, puisqu'il est passé de 20 à 30 %, ce qui entraîne une réduction quasi automatique des crédits concernés. Cela s'explique par l'amélioration de la situation de l'emploi. Un certain nombre de ces personnes ont souvent trouvé un emploi plus qualifié, mieux rémunéré ou, en tout cas, qui leur convient mieux, et ont donc décidé de quitter l'emploi pour lequel elles bénéficiaient du CIE.

Pour le reste, nous avons gardé la règle selon laquelle il faut être inscrit depuis douze mois consécutifs, parce que c'est une mesure qui s'applique aux chômeurs de longue durée. On ne peut donc considérer que des personnes qui auraient eu des contrats à durée déterminée pendant les douze derniers mois pourraient en bénéficier. Sinon on prendrait le risque de favoriser l'effet d'aubaine, notamment pour les jeunes qui ont souvent quelques contrats à durée déterminée.

Par conséquent, il vaut mieux maintenir la règle actuelle et continuer à concentrer la mesure sur ceux qui en ont le plus besoin.

M. le président.

La parole est à M. Philippe Vuilque.

M. Philippe Vuilque.

Madame la ministre, la loi sur les emplois-jeunes remporte un indiscutable succès. Près de 140 000 jeunes en bénéficieront d'ici à la fin de l'année.

Cependant, lors de sa mise en oeuvre, est apparue une difficulté dont les conséquences peuvent être, dans cert ains cas, préjudiciables pour l'emploi. Certaines communes hésitent encore à signer des contrats emploisjeunes. Comme elles ne sont pas adhérentes au régime d'assurance chômage pour l'ensemble de leur personnel non titulaire, elles sont contraintes d'assurer elles-mêmes la couverture du risque chômage de ces jeunes, ce qui peut représenter une lourde charge financière. En effet, seuls les contrats de travail emploi-solidarité et les contrats d'apprentissage ouvrent droit à des régimes d'indemnisation particuliers.

Les partenaires sociaux ont été saisis de ce problème mais ne sont, pour l'heure, pas parvenus à dégager un accord.

Dans ces conditions, ne serait-il pas judicieux d'envisag er la création d'un régime dérogatoire permettant notamment aux collectivités territoriales en assurance propre, d'adhérer à l'UNEDIC pour leurs seuls emploisjeunes, sachant que nombreuses sont les communes dans ce cas qui souhaiteraient pouvoir embaucher des jeunes ?

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur le député, le Gouvernement avait souhaité, comme vous, que l'UNEDIC accepte l'adhésion des emploisjeunes, même lorsque la commune n'a pas fait adhérer l'ensemble de ses personnels non titulaires au régime d'assurance chômage. Le problème ne se pose pas pour les emplois-jeunes embauchés par les associations, car elles relèvent du droit privé.

S'agissant des emplois-jeunes des collectivités locales, j'avais saisi, en septembre 1997, les partenaires sociaux, certaines organisations syndicales m'ayant donné leur accord. Pour l'instant, l'UNEDIC n'a pas souhaitér épondre positivement à cette question. Mais nous


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 10 NOVEMBRE 1998

recommençons des discussions avec l'UNEDIC, notamment sur les problèmes des CES, des CEC et de l'apprentissage dans le secteur public. J'espère donc que nous pourrons trouver une solution, dans les semaines qui viennent, au moment où les négociations de l'UNEDIC vont à nouveau s'ouvrir. Ça n'aurait pas de sens que les emplois-jeunes, qui sont de vrais emplois, destinés peu à peu à se solvabiliser, ne puissent pas donner droit à une indemnisation de l'UNEDIC, comme les autres emplois.

Trouver une solution de cette manière serait la meilleure des choses car je répugne toujours à imposer des règles aux partenaires sociaux qui, comme vous le savez, sont gestionnaires de l'UNEDIC. En revanche, je tiens beaucoup, comme vous, à résoudre ce problème.

M. le président.

La parole est à M. Francis Hammel.

M. Francis Hammel.

Les lois de décentralisation ont accordé aux régions de multiples compétences, notamment en matière de formation professionnelle, et plus particulièrement en matière de qualification des demandeurs d'emploi. Ces régions se sont donc dotées de services spécifiques et votent, par conséquent, des crédits permettant d'assurer l'insertion des personnes au chômage.

L'Etat conserve néanmoins une part importante de responsabilités et de moyens financiers pour compléter les dispositifs régionaux.

Si une intervention du couple Etat-région dans le cadre de la formation professionnelle donne la possibilité d'établir un parcours de formation cofinancé, cela ne va pas sans poser de problèmes dans le montage de ces parcours.

Il faut également noter que cette situation tend à s'aggraver lorsqu'un troisième ou un quatrième partenaire, tel que les ASSEDIC, vient s'y associer. Les difficultés que rencontrent certains stagiaires dans l'élaboration de leur projet révèle les lacunes et les dysfonctionnements qui existent dans les relations entre les différents partenaires de la formation professionnelle : mauvaises communication et coordination entre eux, superposition des responsabilités, au lieu d'une répartition mieux adaptée, décalage dans les attributions de financement. Ces incohérences conduisent parfois les candidats à un projet à subir un véritable parcours du combattant pour parvenir au but qu'ils se sont fixés. Elles provoquent souvent des découragements, voire des réactions de rejet et la décision d'abandonner de la part des stagiaires, qui sont déjà fragilisés par le chômage.

Pour faciliter l'insertion, quelles dispositions entendezvous prendre afin d'inciter à la mise en synergie des compétences et des actions de l'Etat et des autres partenaires de la formation dans l'accueil, l'orientation, le financement et le suivi des demandeurs d'emploi stagiaires de la formation professionnelle ?

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.

Mme la secrétaire d'Etat à la formation professionnelle.

Monsieur le député, les régions, du fait de leur compétence dans le domaine de la formation professionnelle, sont des partenaires essentiels du service public de l'emploi dans le domaine de l'orientation des demandeurs d'emploi. Cela conduira, notamment dans le cadre des futurs contrats de plan, à proposer aux régions de s'associer à la définition et à la mise en oeuvre de ce service intégré d'appui aux projets professionnels. Le but poursuivi est de chercher dans chaque région une cohérence globale du dispositif d'accueil et de suivi des demandeurs d'emploi pour lesquels le projet d'accès à l'emploi révèle un besoin de formation.

Par ailleurs, les deux projets de contrat de progrès entre l'Etat, l'ANPE et l'AFPA, pour la période de 19992003, prévoient que les deux établissements devront établir, à l'échelon local, des relations facilitant l'accueil et le suivi des demandeurs d'emploi pour lesquels le projet d'accès à l'emploi révèle un besoin de formation. Il s'agit d'une mise en cohérence de l'action de l'Etat dans le domaine de l'appui à l'élaboration des parcours de format ion des demandeurs d'emploi. J'ajoute que, pour atteindre cet objectif, l'ANPE et l'AFPA mettront en place un service intégré d'appui aux projets professionnels qui aidera les demandeurs d'emploi à construire leur projet de formation à finalité professionnalisante.

Enfin, les conditions de mobilisation des compétences nécessaires pour mettre en oeuvre cette coopération seront définies au niveau local.

M. le président.

La parole est à M. Francis Hammel, pour une seconde question.

M. Francis Hammel.

Lors de votre intervention devant le Comité national consultatif des personnes handicapées, vous avez rappelé, madame la ministre, votre volonté de donner une formation professionnelle initiale aux personnes handicapées, formation conçue dans une meilleure concertation avec les acteurs locaux de l'emploi et de la formation, et d'encourager les IMPRO dans leur action de préparation à la vie professionnelle, en milieu ordinaire comme en milieu protégé, et dans leur démarche de construction de parcours individualisé.

La mise en application de ces affirmations est d'une urgente nécessité. En effet, malgré les efforts consentis, notamment grâce aux apports de la loi de juillet 1987, et malgré l'intérêt porté à la formation professionnelle et à l'insertion des personnes handicapées par les gouvernements successifs, l'actuel, en particulier, la situation reste préoccupante. Le niveau de qualification des travailleurs handicapés reste très peu élevé : 53 % des handicapés en recherche d'emploi, tous handicaps confondus, contre 39 % des valides, sont dépourvus de qualification.

Seuls 7 à 8 % des jeunes, en moyenne nationale, parviennent à la sortie de l'IMPRO à trouver un emploi en milieu ordinaire, les autres intégrant, pour l'essentiel, les CAT, les foyers et dans une faible mesure les ateliers protégés.

L'AFPA n'offre qu'une quantité limitée de places aux stagiaires handicapés. La formation par alternance proposée aux jeunes handicapés reste très insuffisante. La formation spécialisée en centres de rééducation professionnelle souffre de la multiplicité des tutelles, de la rigidité des règles de fonctionnement, de financement, et de rémunération des stagiaires.

E n conséquence, quelles mesures entendez-vous prendre, madame la ministre, pour que vos aspirations se réalisent de façon concrète et durable ?

M. Germain Gengenwin.

Bonne question !

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Vous soulevez un problème majeur, celui de l'emploi des handicapés, et donc, en amont, de leur formation.

La France est un des rares pays où les entreprises préfèrent payer la cotisation à l'AGEFIPH plutôt que de faire un effort, comme dans les pays nordiques ou anglosaxons, pour intégrer des travailleurs handicapés.

C'est la raison pour laquelle nous avons décidé, avec l'ensemble des associations représentatives des handicapés, de prendre le taureau par les cornes et de traiter le pro-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 10 NOVEMBRE 1998

blème dès le plus jeune âge. Ainsi Mme Ségolène Royal viendra devant le Conseil supérieur d'orientation des handicapés, dans quelques jours, pour présenter des mesures d'accompagnement dans le milieu ordinaire d'éducation.

Un certain nombre d'emplois-jeunes aident, d'ailleurs, les jeunes handicapés dans l'éducation nationale, mais aussi dans la formation professionnelle.

Nous avons engagé des actions de plusieurs ordres.

Il s'agit, d'abord, de développer l'apprentissage à la sortie des IMPRO et des autres établissements d'éducation spécialisée qui, aujourd'hui, est pratiquement inexistant.

Ensuite, il convient d'utiliser le cadre de l'expérimentation des contrats de qualification adulte. Il faut que les personnes handicapées puissent accéder à ces formations en alternance qui, parfois, leur conviennent mieux.

En troisième lieu il faut accroître la complémentarité des formations de droit commun et des formations spécialisées ; dans ce domaine, un certain nombre d'expériences très intéressantes sont en cours.

Enfin, on déclinera l'offre de formation auprès des COTOREP, dont le fonctionnement fait actuellement l'objet d'une enquête de l'IGAS, enquête qui porte, bien évidemment, sur leur travail de reconnaissance de l'inaptitude, mais aussi sur leur capacité à proposer une orientation et une information sur les formations aux personnes handicapées.

Il sera, en outre, indispensable de renforcer les centres de rééducation professionnelle.

La réalisation de ces objectifs reposent principalement sur deux outils.

Tout d'abord, la mise en oeuvre - au-delà de l'action du service public de l'emploi, que j'ai mobilisé sur les personnes handicapées - d'une convention d'objectife ntre l'Etat et l'AGEFIPH, qui portera sur les années 1999 à 2003. Elle sera signée dans quelques jours et mobilisera 1,5 milliard de francs pour l'appui à ces objectifs d'orientation et de formation des handicapés. Ce sera d'ailleurs un programme sans précédent en la matière.

Elle repose, ensuite, sur la prise en compte, dans le cadre de contrats de progrès avec l'AFPA que je viens de signer, comme de la commande publique des besoins d'appuis techniques et spécialisés auprès des centres de formation accueillant les publics handicapés. L'AFPA a d'ailleurs accueilli en 1997, 3 745 stagiaires handicapés contre 2 000 quelques années auparavant - ça s'améliore lentement - et ses prestations d'orientation se sont élevées à près de 42 000 en 1997. Là au contraire l'augmentation m'apparaît tout à fait importante.

L'ensemble de ces mesures, après consultation du Conseil supérieur de reclassement professionnel et social des travailleurs handicapés va faire l'objet d'une mise en oeuvre concertée au plan départemental, afin de ne laisser personne de côté au moment où la croissance est de retour. Ces moyens en hommes et ces moyens financiers devraient pouvoir y contribuer.

M. le président.

Nous en avons terminé avec les questions.

EMPLOI ET SOLIDARITÉ

I. Emploi

M. le président.

J'appelle les crédits inscrits à la ligne :

« Emploi et solidarité :

« I. Emploi. »

ÉTAT B Répartition des crédits applicables aux dépenses ordinaires des services civils (mesures nouvelles)

« Titre III : 720 092 915 francs ;

« Titre IV : 48 535 169 714 francs. »

ÉTAT C Répartition des autorisations de programme et des crédits de paiement applicables aux dépenses en capital des services civils (mesures nouvelles) TITRE V. INVESTISSEMENTS EXÉCUTÉS PAR L'ÉTAT

« Autorisations de programme : 75 000 000 francs ; Crédits de paiement : 34 600 000 francs. »

TITRE VI. SUBVENTIONS D'INVESTISSEMENTS ACCORDÉES PAR L'ÉTAT

« Autorisations de programme : 446 330 000 francs ;

« Crédits de paiement : 227 700 000 francs. »

Personne ne demande la parole ?...

Je mets aux voix le titre III.

(Le titre III est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix le titre IV.

(Le titre IV est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre V.

(Les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre V sont adoptés.)

M. le président.

Je mets aux voix les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre VI.

(Les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre VI sont adoptés.)

Article 80

M. le président.

J'appelle l'article 80 rattaché à ce budget.

« Art. 80. - I. - La deuxième phrase du premier alinéa de l'article L.

118-7 du code du travail est ainsi rédigée :

« Cette indemnité se compose :

« 1o D'une aide à l'embauche lorsque l'apprenti dispose d'un niveau de formation inférieur à un minimum défini par décret.

« 2o D'une indemnité de soutien à l'effort de formation réalisé par l'employeur. »

« II. Les dispositions du présent article entrent en vigueur pour les contrats conclus à compter du 1er janvier 1999. »

Je suis saisi de trois amendements identiques nos 32, 50 et 72.

L'amendement no 32 est présenté par M. Poignant et

M. Doligé ; l'amendement no 50 est présenté par

M. Weber ; l'amendement no 72 est présenté par MM. Gengenwin, Bur, Mme Boisseau et M. Préel.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer l'article 80. »

La parole est à M. Serge Poignant, pour soutenir l'amendement no

32.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 10 NOVEMBRE 1998

M. Serge Poignant.

L'amendement no 32 vise à supprimer l'article 80. Même si vous avez besoin d'argent pour les emplois-jeunes, ce serait une erreur, madame la secrétaire d'Etat, de supprimer cette prime à l'embauche audelà du niveau V, d'autant plus qu'il existe dans certains secteurs d'activités, en particulier le bâtiment, pénurie de main-d'oeuvre qualifiée. Nous avons en outre besoin de bac « pro ».

Vous avez annoncé des primes à l'apprentissage pour l'ensemble des niveaux, mais ce qu'il faut, c'est inciter les entreprises à former des jeunes.

M. le président.

La parole est à M. Germain Gengenwin, pour défendre l'amendement no

72.

M. Germain Gengenwin.

Je défends également l'amendement no 50 de M. Weber.

Madame la secrétaire d'Etat, nous avons déjà longuement insisté sur l'importance de la prime d'apprentissage de niveau V. La limiter serait nuire à l'image de marque que nous avons réussi à donner ces dernières années à l'apprentissage.

Certes vous avez maintenu les primes de 10 000 francs par an ainsi que l'exonération de charges, mais pour que les entreprises, notamment les entreprises artisanales, puissent former des jeunes qui seront capables un jour de les reprendre il faut conserver le maximum d'incitations.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission des finances sur ces trois amendements de suppression ?

M. Jacques Barrot, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour la formation professionnelle.

Cette suppression de la prime à l'embauche pour des apprentis au-dessus d'un certain niveau me paraît tout d'abord incompréhensible.

Si cette disposition traduit une volonté de recentrage, c réez plutôt des incitations qui conduiront des employeurs à prendre des apprentis moins bien formés. Je crains que cette mesure, sous le prétexte de recentrage, couvre tout simplement la recherche d'une économie budgétaire.

Ayant quelques raisons de me méfier du ministère du budget, que j'ai quelquefois dû combattre à propos de certaines mesures à court terme, je mets en garde l'Assemblée contre cette mesure.

A l'interprétation - que je ne fais pas mienne - qui consiste à dire que pour éviter aux lycées de perdre des effectifs, il faut pénaliser l'apprentissage supérieur, je réponds que la meilleur méthode est de faire ce que non sans mal - j'ai réussi dans ma propre ville : la création d'une section d'apprentissage pour la préparation au BTS en lycée. Cela marche très bien.

Outre qu'elle est incompréhensible, cette suppression est également dangereuse. Nous avons tout fait pour revaloriser l'image de la filière apprentissage, afin d'aider ceux qui sont sans doute les moins bien formés par l'école de la République, mais aussi ceux qui, après des études convenables, ont du mal à s'insérer.

M. Poignant vient de rappeler qu'il y avait pénurie de main-d'oeuvre qualifiée dans certains secteurs. J'ajoute que sur le terrain, nous voyons des apprentis enchaîner leurs a pprentissages, partant du CAP ou du BEP pour atteindre le BTS.

Madame la secrétaire d'Etat, j'ai essayé de toutes mes forces d'élargir l'apprentissage à l'industrie et aux services.

Bien sûr, vous y êtes très attachée, vous l'avez rappelé tout à l'heure, pour le secteur des métiers. Mais l'apprentissage doit aujourd'hui être développé dans les secteurs d'avenir, les services et l'industrie.

Vous avez dit que les entreprises ne réclamaient pas cette prime. C'est vrai pour les grandes entreprises. Mais ce n'est pas là que vous trouverez beaucoup d'apprentis de ce niveau.

J'ai été très frappé lorsque j'ai visité Peugeot à Rennes , du nombre ridicule d'apprentis. Le vrai gisement, ce sont les petites et moyennes entreprises. Ce sont elles qui peuvent accueillir des jeunes. Mais, il est exact comme les chefs d'entreprise le font remarquer d'emblée, qu'ils prendront des jeunes ayant certaines qualités et que, s'ils veulent vraiment les suivre, cela mobilisera une partie du temps d'un cadre et représentera une charge pour l'entreprise.

Supprimer cette prime aujourd'hui, serait donc une erreur. D'autant plus que vous nous avez très justement conseillé d'attendre la publication du Livre blanc avant toute décision. Alors, je serais tenté de dire : « Différons ! » La commission des finances a bien voulu adopter un amendement no 40 dont je suis l'auteur, qui maintient pour une année ces primes, en les gageant par un prélèvement très modique de 60 millions sur l'AGEFAL.

Cette proposition me semble raisonnable et c'est pourquoi j'ai plaidé en faveur de cet amendement avec fermeté, convaincu qu'il corrige une erreur.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler.

Et l'avis de la commission des affaires culturelles ?

M. Patrick Malavieille, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour la formation professionnelle.

Elle n'a pas examiné ces amendements, qui ont été simplement évoqués par un de nos collègues.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la secrétaire d'Etat à la formation professionnelle.

Je m'adresserai directement à M. Barrot et je ferai u ne réponse unique sur les cinq amendements à l'article 80.

Monsieur Barrot, je ne doute pas un instant de votre conviction sur ce sujet. J'ai évoqué longuement ce matin un certain nombre de critères. Cet après-midi, j'ai repris quelques explications. Comment vous convaincre de retirer votre amendement que je ne pourrai pas soutenir.

Peut-être vais-je rappeler l'objectif de cette disposition de recentrage des primes ? Il s'agit d'accentuer notre effort pour les jeunes du niveau CAP ou BEP ou pour ceux qui ont échoué au baccalauréat.

Cet objectif du Gouvernement s'inscrit dans la logique de la loi contre les exclusions, il répond à notre désir de soutenir davantage les jeunes qui souffrent d'un réel manque de qualification.

Nous tenons, par ce recentrage des primes, à traiter de la même façon les deux formations en alternance, d'une part, les contrats de qualification et, d'autre part, les contrats d'apprentissage.

En 1990, les contrats de qualification étaient signés à 67 % par des jeunes de niveau V, ou inférieur, en tout cas par des publics que nous jugions prioritaires alors qu'en 1997 ceux-ci ne représentaient plus que 43 % des contrats. C'est contre cette dérive et pour donner un signal politique que le Gouvernement propose le recentrage des primes.

J'ai ajouté cet après-midi que l'impact, en termes budgétaires et même en termes de nombre de jeunes concernés, est certainement plus fort pour les contrats de qualification que pour les contrats d'apprentissage du fait de la


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 10 NOVEMBRE 1998

nature de l'apprentissage. En 1997, 84 % des contrats signés s'adressaient bien aux jeunes que nous souhaitons plus particulièrement aider.

J'ai également précisé, monsieur Barrot, qu'il n'y avait aucune volonté de ma part de réserver l'apprentissage à des métiers peu qualifiés. J'ai au contraire rappelé mon attachement au secteur des métiers en général, mais je comprends très bien votre volonté d'améliorer l'image de l'apprentissage et d'en faire une filière à part entière concernant aussi les niveaux II, III ou IV. D'ailleurs, les primes fortes de soutien à la formation et les exonérations de charges sociales sont maintenues pour l'ensemble du dispositif, quel que soit le niveau des jeunes.

Je terminerai en vous rappelant l'effort financier que consentira la communauté nationale pour l'alternance, en augmentant le volume des contrats de qualification comme des contrats d'apprentissage et en affectant en 1999, 2,95 milliards de francs aux contrats de qualification et 9,25 milliards de francs aux contrats d'apprentissage.

Un mot peut-être encore sur le financement que vous proposez pour l'AGEFAL. Nous discutons actuellement avec les partenaires sociaux d'une aide de l'AGEFAL portant sur la formation professionnelle et l'alternance afin de mettre en place un fonds de concours de 500 millions de francs. Nous comptons donc bien nous adresser à cette association pour aller le plus loin possible dans les contrats de formation en alternance.

Quoi qu'il en soit, je souhaiterais que les amendements à l'article 80 soient retirés.

M. le président.

La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz.

Je ferai une remarque et une proposition.

D'abord, la remarque. Il est vraiment dommage qu'aucun de ces amendements n'ait été examiné par la commission des affaires sociales. On se demande à quoi nous servons ! Ensuite, une proposition. Monsieur le président, je demande une suspension de séance pour examiner un problème.

M. Germain Gengenwin.

Ah non ! Demain, c'est le 11 novembre, monsieur Gremetz !

M. le président.

Pour réunir votre groupe, monsieur Gremetz ?

M. Maxime Gremetz.

Oui, cinq minutes suffiront.

M. le président.

Bien ! La séance est suspendue.

Suspension et reprise de la séance

M. le président.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures trente-cinq, est reprise à dix-huit heures quarante.)

M. le président.

La séance est reprise.

La parole est à M. Denis Jacquat.

M. Denis Jacquat.

Pourquoi modifier un système qui fonctionne ? Depuis des années - et Germain Gengenwin se bat dans ce sens en commission - nous essayons d'améliorer le niveau de qualification à l'entrée de l'apprentissage. En outre, nous faisons des efforts, avec succès, pour augmenter le nombre d'apprentis, quel que soit leur niveau.

Modifier le système reviendrait à anéantir ces efforts, qui ont permis d'obtenir des résultats positifs. D'ailleurs, les chambres consulaires et les syndicats professionnels nous ont alertés en soulignant que ce serait une erreur.

Madame la ministre, madame la secrétaire d'Etat, ne la faisons pas.

M. le président.

La parole est à M. Gérard Lindeperg.

M. Gérard Lindeperg.

On ne peut pas dissocier le contrat de qualification du contrat d'apprentissage, car si on leur applique un régime différent, il y a un risque de cannibalisation d'un dispositif par l'autre. A partir du moment où a été arrêtée une position visant à réorient er le contrat de qualification, qui avait singulièrement d érivé, on en arrive à une situation relativement cohérente.

S'agissant de l'AGEFAL, il ne me paraît pas très orthodoxe d'inscrire dans la loi de finances des crédits gérés par les partenaires sociaux. En tout cas, les représentants des salariés que j'ai pu rencontrer ne sont pas opposés à ce principe, dès lors qu'il sera possible de vérifier au bout d'un an si le dispositif est conforme à ce que nous souhaitons ou s'il dérive.

Si, au bout d'un an, il apparaît que certains des objectifs fixés n'ont pas été atteints, je demanderai au Gouvernement de revoir la situation.

Le groupe socialiste votera contre les amendements.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur spécial pour la formation professionnelle.

M. Jacques Barrot, rapporteur spécial pour la formation professionnelle.

Il est possible de raisonner différemment pour le contrat de qualification et pour le contrat d'apprentissage, car ce dernier est beaucoup plus lourd dans le domaine de la formation. Quand une entreprise prend un jeune en apprentissage, il devient salarié de l'entreprise et fait partie des ses effectifs. Le contrat de qualification n'offre pas les mêmes garanties en matière de formation.

Nous avons voulu revaloriser l'artisanat. Dans ce domaine, il ne faut pas trop changer les dispositifs. Je ne prétends pas qu'ils doivent rester immuables, mais à trop souvent les changer, on risque de déstabiliser les acteurs, qu'il est déjà très difficile de motiver.

Les employeurs français doivent prendre plus de jeunes en formation. Ne leur donnez pas des motifs pour ne pas le faire.

J'ai critiqué la politique des emplois-jeunes, mais je reconnais que, dans certains cas, elle a permis d'ouvrir les portes des administrations à des jeunes de niveau bac + 2.

Or, s'agissant de celles des entreprises, on a l'impression que vous les leur fermez un peu. C'est dommage ! J'ai terminé mon plaidoyer personnel.

Tenu par le vote de la commission, je ne peux pas retirer l'amendement.

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 32, 50 et 72.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

M. Migaud, rapporteur général, et M. Barrot ont présenté un amendement, no 40, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi l'article 80 :

« Il est institué pour 1999 une contribution exceptionnelle au budget de l'Etat sur les excédents financiers des organismes paritaires collecteurs agréés pour recevoir les contributions des employeurs prévus à l'article 30 de la loi de finances pour 1985 (no 84-1208 du 19 décembre 1984).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 10 NOVEMBRE 1998

« A cet effet, le compte unique prévu par le I de l'article 45 de la loi de finances rectificative pour 1986 (no 86-1318 du 30 décembre 1986) apporte au budget de l'Etat une contribution exceptionnelle d'un montant de 60 millions de francs.

« La contribution est versée au comptable du Trésor du lieu du siège de l'organisme gestionnaire du compte unique avant le 1er septembre 1998. Le contrôle, le recouvrement, le contentieux, les garanties et sanctions relatifs à cette contribution sont régis par les règles applicables en matière de taxe sur les salaires. »

La parole est à M. Jacques Barrot.

M. Jacques Barrot, rapporteur spécial pour la formation professionnelle.

J'ai déjà exposé le sens de cet amendement qui a été adopté par la commission des finances. Je crois que l'Assemblée est suffisamment éclairée pour se prononcer.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la secrétaire d'Etat à la formation professionnelle.

L'avis que j'ai donné précédemment est global. Il vaut pour les cinq amendements déposés sur l'article 80, puisqu'ils ont tous le même objectif. Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

40. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Gengenwin a présenté un amendement, no 20, ainsi rédigé :

« Dans l'avant-dernier alinéa (1o ) du I de l'article 80, supprimer les mots : "lorsque l'apprenti dispose d'un niveau de formation inférieur à un minimum défini par décret". »

La parole est à M. Germain Gengenwin.

M. Germain Gengenwin.

Je le retire.

M. le président.

L'amendement no 20 est retiré.

Je mets aux voix l'article 80.

(L'article 80 est adopté.)

Article 81

M. le président.

J'appelle l'article 81 rattaché à ce budget.

« Art. 81. I. A l'avant-dernier alinéa de l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale, sont supprimés les mots "par les articles L. 241-6-1 et L. 241-6-2 du présent code, par l'article 7 de la loi quinquennale no 931313 du 20 décembre 1993 relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle et".

« II. A l'article 1062-1 du code rural, les mots "des articles L. 241-6-2 et" sont remplacés par les mots "de l'article".

« III. Au II de l'article 39 et à l'avant-dernier alinéa de l'article 39-1 de la loi quinquennale no 93-1313 du 20 décembre 1993 relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle, sont supprimés les mots "par les articles L. 241-6-1 et L. 241-6-2 du code de la sécurité sociale et par l'article 7 de la présente loi".

« IV. Sont abrogés :

« 1o Les articles L. 241-6-2 et L. 241-6-4 du code de la sécurité sociale ;

« 2o Les articles 1062-2 et 1062-3 du code rural ;

« 3o L'article 7 de la loi quinquennale no 93-1313 du 20 décembre 1993 relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle.

« V. Les dispositions du présent article sont applicables aux gains et rémunérations versés à compter du 1er janvier 1999. »

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 71 et

75. L'amendement no 71 est présenté par MM. Gengenwin, Coussain et Weber ; l'amendement no 75 est présenté par

M. Michel Bouvard et M. Charié.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer l'article 81. »

La parole est à M. Germain Gengenwin, pour soutenir l'amendement no

71.

M. Germain Gengenwin.

Je défendrai également l'amendement no 75 de M. Michel Bouvard.

L'article 81 remet en cause, à compter du 1er janvier prochain, l'exonération de cotisations d'allocations familiales dont bénéficient les entreprises situées en zones de revitalisation rurale, les entreprises nouvelles exonérées d'impôts, les régimes spéciaux qui n'appliquent pas la réduction générale des charges sur les bas salaires, les salariés occasionnels et non occasionnels des exploitants agricoles.

Nous proposons, par les amendements nos 71 et 75, de supprimer cet article, car nous estimons qu'il s'agit véritablement d'une erreur, d'une entrave à l'emploi pour une certaine catégorie de personnes, en particulier celles qui occupent des emplois saisonniers.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission des finances ?

M. Gérard Bapt.

rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour le travail et l'emploi.

La commission n'a pas examiné cet amendement, mais elle ne l'aurait certainement pas adopté, puisqu'elle a déposé elle-même un amendement tendant à ne supprimer que partiellement l'article 81.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Avis négatif sur cette suppression totale. J'y reviendrai à propos de l'amendement de la commission.

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 71 et 75.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

M. Migaud, rapporteur général,

M. Bapt et M. Bonrepaux ont présenté un amendement, no 36, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le I de l'article 81 :

« I. A l'avant dernier alinéa de l'article L.

241-13 du code de la sécurité sociale, les mots : "par les articles L.

241-6-1 et L.

241-6-2 du présent code, par l'article 7 de la loi quinquennale no 93-1313 du 20 décembre 1993 relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle et" sont remplacés par l es mots "par l'article L.

241-6-2 du présent code,". »

La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt, rapporteur spécial pour le travail et l'emploi.

Monsieur le président, si vous en étiez d'accord, nous pourrions examiner à la fois les amendements nos 36, 37 et 38 rectifié, puisque les amendements nos 36 et 37 sont des amendements de forme qui sont cohérents avec l'amendement no 38 rectifié.

M. le président.

Bien volontiers, monsieur Bapt.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 10 NOVEMBRE 1998

M. Gérard Bapt, rapporteur spécial pour le travail et l'emploi.

L'objet de ces amendements est de maintenir le bénéfice de l'abattement de cotisations d'allocations familiales pour les salariés des entreprises ou établissements situés dans les zones de revitalisation rurale et pour ceux de certaines entreprises publiques.

La commission des finances a estimé que la suppression prévue par l'article 81 présenterait plusieurs inconvénients.

D'abord, une telle suppression est en contradiction avec l'article 115 de la loi de finances pour 1998, lequel a maintenu ces exonérations. Il nous a paru donc inopportun de remettre en cause ce choix tant que la réforme d'ensemble des cotisations sociales patronales ne sera pas intervenue.

Ensuite, une suppression immédiate de cet avantage reviendrait à nier la spécificité des zones de revitalisation rurale. Même si l'exonération de certaines cotisations d'allocations familiales ne devait avoir dès l'origine qu'un caractère temporaire, la commission des finances a considéré qu'une suppression immédiate ne permettrait pas de procéder dans des conditions satisfaisantes à l'évaluation nécessaire des aides aux territoires ruraux défavorisés, puisque cette aide n'existerait plus au moment où l'on procédera à cet examen.

Enfin, puisqu'il s'agit d'une exonération de « stocks », la commission a considéré que la mesure risquerait de détériorer la situation des entreprises bénéficiaires, et donc la situation économique des zones de revitalisation rurale, ce qui, à l'évidence, irait à l'encontre du principe même de leur existence.

En ce qui concerne les entreprises publiques, il est apparu préférable de ne pas remettre en cause cet avantage l'année même où les efforts consentis par l'Etat permettent notamment à la SNCF - qui serait l'entreprise publique la plus pénalisée - de poursuivre sa stratégie d'adaptation sur la base d'une situation financière redressée.

Telles sont les raisons pour lesquelles je propose à l'Assemblée d'adopter ces amendements.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement no 36 ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Si vous me le permettez, monsieur le président, je donnerai mon avis sur les trois amendements, puisque M. le rapporteur les a présentés ensemble.

M. le président.

Soit !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Le Gouvernement est sensible aux arguments développés par Gérard Bapt. Sans doute vaut-il mieux, en effet, réexaminer cette mesure de simplification dans le cadre de la réforme des cotisations patronales que le Gouvernement souhaite engager et qui doit donner lieu, comme l'Assemblée l'a décidé il y a quelques jours, au dépôt d'un projet de loi avant la fin du premier semestre 1999.

Donc, le Gouvernement serait favorable à ces trois amendements, qui visent à maintenir l'abattement sur les allocations familiales dans les zones de revitalisation rurale et pour certaines entreprises publiques, mais à condition, bien évidemment - et nous devrons le vérifier d'ici à la deuxième lecture -, que leur rédaction ne permette pas le cumul de cet abattement et de la ristroune dégressive, puisqu'elles n'étaient pas cumulables auparavant.

En tous cas, le Gouvernement est d'accord pour maintenir cet abattement de cotisations d'allocations familiales.

M. Patrick Malavieille, rapporteur pour avis pour la formation professionnelle.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Jean Proriol.

M. Jean Proriol.

Je voudrais soutenir la position défendue par M. Bapt.

Ayant moi-même déposé un amendement qui risque de tomber si l'amendement no 36 est adopté, je tiens donc à indiquer qu'il visait, lui aussi à contrecarrer la très discrète suppression de la mesure qui, selon la DATAR, est la plus efficace du dispositif des zones de revitalisation rurale, à savoir les exonérations fiscales et les allégements de charges sociales propres à ces zones.

Une telle suppression aurait pratiquement vidé de la majeure partie de sa substance le dispositif des ZRR, alors même que le projet de loi d'orientation pour l'aménagement durable du territoire, approuvé en conseil des ministres le 29 juillet dernier, stipule, au dernier alinéa de son article 27 : « l'Etat met en place les moyens nécessaires pour que ces zones - les ZRR - puissent bénéficier des politiques contractuelles prévues à l'article 22 ». Cet article va dans le bon sens.

Je note avec satisfaction l'acceptation de principe de Mme la ministre, sous réserve, bien entendu, que les ajustements soient réalisés d'ici à la seconde lecture.

Nous sommes là dans une logique d'aménagement du territoire qui se situe dans le droit fil de la lutte contre l'exclusion et pour la création d'emplois dans ces zones.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

36. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

En conséquence, les amendements nos 21 de M. Proriol, 68 et 67 de M. de Courson tombent.

M. Bapt a présenté un amendement, no 57, ainsi rédigé :

« Supprimer le II de l'article 81. »

La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt, rapporteur spécial pour le travail et l'emploi.

Je présente cet amendement, qui n'a pas été déposé en commission des finances, uniquement pour que le Gouvernement confirme en séance publique ce que j'ai écrit dans mon rapport, à savoir qu'il s'engage à m aintenir l'abattement de cotisations familiales aux exploitations agricoles pour leurs salariés, occasionnels ou non occasionnels.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Je confirme l'engagement du Gouvernement. Dès lors, je demande à M. Bapt de bien vouloir retirer son amendement.

M. le président.

Le retirez-vous, monsieur Bapt ?

M. Gérard Bapt, rapporteur spécial pour le travail et l'emploi.

Après avoir obtenu la confirmation du maintien de la mesure en question, je retire mon amendement, qui est devenu superfétatoire.

M. le président.

L'amendement no 57 est retiré.

M. Migaud, rapporteur général, M. Bapt et M. Bonrepaux ont présenté un amendement, no 37, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le III de l'article 81 :

« III. - Au II de l'article 39 et à l'avant-dernier alinéa de l'article 39-1 de la loi quinquennale no 93-1313 du 2 décembre 1993 relative au travail,


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 10 NOVEMBRE 1998

à l'emploi et à la formation professionnelle, les mots : "par les articles L.

241-6-1 et L.

241-6-2 du code de la sécurité sociale et par l'article 7 de la pré-s ente loi" sont remplacés par les mots : "par l'article L.

241-6-2 du code de la sécurité sociale". »

Cet amendement a été défendu et le Gouvernement s'est prononcé.

Je le mets aux voix.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Migaud, rapporteur général,

M. Bapt et M. Bonrepaux ont présenté un amendement, no 38 rectifié, ainsi rédigé :

« Supprimer le 1o du IV de l'article 81. »

Cet amendement a également été défendu et le Gouvernement s'est déjà prononcé.

Je le mets aux voix.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de trois amendements, nos 58, 69 et 23, pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements nos 58 et 69 sont identiques.

L'amendement no 58 est présenté par M. Bapt ; l'amendement no 69 est présenté par MM. de Courson, Jégou, Méhaignerie et Kert.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer l'avant-dernier alinéa (2o ) du IV de l'article 81. »

L'amendement no 23, présenté par M. Deprez, est ainsi rédigé :

« I. Supprimer le 2o du IV de l'article 81.

« II. Compléter cet article par le paragraphe suivant :

« La perte de recettes est compensée par une majoration à due concurrence des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. Gérard Bapt, pour soutenir l'amendement no

58.

M. Gérard Bapt.

Je le retire.

M. le président.

L'amendement no 58 est retiré.

La parole est à M. Germain Gengenwin, pour soutenir l'amendement no

69.

M. Germain Gengenwin.

Il est défendu.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur spécial pour le travail et l'emploi.

Cet amendement est satisfait. Je suggère donc à

M. Gengenwin de le retirer.

M. Germain Gengenwin.

Je le retire.

M. le président.

L'amendement no 69 est retiré.

La parole est à M. Germain Gengenwin, pour soutenir l'amendement no

23.

M. Germain Gengenwin.

Cet amendement, déposé par notre collègue Léon Deprez, a pour objet d'exclure le secteur agricole des mesures de suppression de l'exonération de cotisations d'allocations familiales.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur spécial pour le travail et l'emploi.

La commission n'a pas examiné cet amendement, mais il est satisfait.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

23. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'article 81, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 81, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président.

Nous avons terminé l'examen des crédits du ministère de l'emploi et de la solidarité concernant le travail et l'emploi.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

5 DÉPÔT D'UN PROJET DE LOI

M. le président.

J'ai reçu, le 10 novembre 1998, de M. le Premier ministre, un projet de loi portant modification du titre III de la loi no 86-1067 du 30 septembre 1986 relatif au secteur public de la communication audiovisuelle et transposant diverses dispositions de la directive 89/552/CEE du 3 octobre 1989 modifiée par la directive 97/36/CE du 30 juin 1997.

Ce projet de loi, no 1187, est renvoyé à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, en application de l'article 83 du règlement.

6 DÉPÔT D'UN RAPPORT

M. le président.

J'ai reçu, le 10 novembre 1998, de M. Alain Néri, un rapport, no 1188, fait au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales sur le projet de loi relatif à la protection de la santé des sportifs et à la lutte contre le dopage (no 941).

7 DÉPÔT D'UN PROJET DE LOI ADOPTÉ PAR LE SÉNAT

M. le président.

J'ai reçu, le 10 novembre 1998, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par le Sénat, relatif à l'organisation de certains services au transport aérien.

Ce projet de loi, no 1186, est renvoyé à la commission de la production et des échanges, en application de l'article 83 du règlement.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 10 NOVEMBRE 1998

8 DÉPÔT D'UN PROJET DE LOI

MODIFIÉ PAR LE SÉNAT

M. le président.

J'ai reçu, le 10 novembre 1998, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, modifié par le Sénat en deuxième lecture, relatif aux animaux dangereux et errants et à la protection des animaux.

Ce projet de loi, no 1185, est renvoyé à la commission de la production et des échanges, en application de l'article 83 du règlement.

9

ORDRE DU JOUR

DES PROCHAINES SÉANCES

M. le président.

Jeudi 12 novembre 1998, à neuf heures trente, première séance publique : Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 1999, no 1078 : M. Didier Migaud, rapporteur général au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport no 1111).

Jeunesse et sports : M. Alain Barrau, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe no 34 au rapport no 1111) ; M. Alain Néri, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (avis no 1112, tome XIII).

A quinze heures, deuxième séance publique : Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 1999, no 1078 : M. Didier Migaud, rapporteur général au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport no 1111).

Agriculture et pêche, budget annexe des prestationss ociales agricoles : articles 49 et paragraphe II de l'article 50.

Agriculture : Mme Béatrice Marre, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe no 4 au rapport no 1111) ; M. François Patriat, rapporteur pour avis au nom de la commission de la production et des échanges (avis no 1116, tome I).

Pêche : M. Louis Mexandeau, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe no 5 au rapport no 1111) ; M. Dominique Dupilet, rapporteur pour avis au nom de la commission de la production et des échanges (avis no 1116, tome II).

Budget annexe des prestations sociales agricoles : M. Charles de Courson, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe no 42 au rapport no 1111), M. Robert Lamy, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (avis no 1112, tome XIV).

A vingt et une heures, troisième séance publique : Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-huit heures cinquante-cinq.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT