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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1998

SOMMAIRE

PRE

SIDENCE DE M. PATRICK OLLIER

1. Loi de finances pour 1999 (deuxième partie). Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 8765).

AGRICULTURE ET PE

CHE BAPSA Mme Béatrice Marre, rapporteur spécial de la commission des finances, pour l'agriculture.

M. François Patriat, rapporteur pour avis de la commission de la production, pour l'agriculture.

M. Louis Mexandeau, rapporteur spécial de la commission des finances, pour la pêche.

M. Dominique Dupilet, rapporteur pour avis de la commission de la production, pour la pêche.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial de la commission des finances, pour le budget annexe des prestations sociales agricoles.

M. Robert Lamy, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, pour le budget annexe des prestations sociales agricoles.

MM. Félix Leyzour, François Sauvadet, Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche ; Joseph Parrenin, Jacques Rebillard.

Suspension et reprise de la séance (p. 8782)

MM. Aimé Kerguéris, Christian Jacob, François Liberti, René Leroux, Claude Hoarau, Mme Nicole Ameline,

MM. Louis Guédon, Germinal Peiro, Guy Lengagne, Philippe Martin, François Brottes, Jean-Michel Marchand, Jean Gaubert.

M. le ministre.

Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.

2. Saisine pour avis d'une commission (p. 8804).

3. Ordre du jour de la prochaine séance (p. 8804).


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COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. PATRICK OLLIER,

vice-président

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1 LOI DE FINANCES POUR 1999 (DEUXIÈME PARTIE) Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 1999 (nos 1078, 1111).

AGRICULTURE ET PÊCHE BAPSA

M. le président.

Nous abordons l'examen des crédits du ministère de l'agriculture et de la pêche et du budget annexe des prestations sociales agricoles.

La parole est à Mme le rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour l'agriculture.

Mme Béatrice Marre, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour l'agriculture.

Monsieur le ministre de l'agriculture et de la pêche, je suis heureuse de vous saluer et d'être le premier rapporteur du budget de l'agriculture depuis votre nomination ; je dois dire aussi que c'est le premier budget que je présente.

Mes chers collègues, le budget de l'agriculture pour 1999 se caractérise d'abord par une augmentation de 3 % - hors subvention au budget annexe des prestations agricoles - par rapport à celui de 1998, qui constituait déjà lui-même une rupture avec celui de l'année précédente, puisqu'il était en augmentation de 1,2 % par rapport à 1997 après une diminution de 0,7 % en 1997 par rapport à 1996. L'augmentation de 3 % est supérieure à l'augmentation générale du budget de l'Etat, de 2,3 %.

Ainsi se poursuit l'arrêt de la diminution du poids relatif de l'agriculture dans le budget de l'Etat.

Au-delà de cet effort, le budget de l'agriculture pour 1999 se caractérise par une double cohérence. Cohérence avec les priorités dégagées dès le budget de 1998 pour mettre en oeuvre la nouvelle politique voulue par la majorité élue en juin 1997 et le ministre de l'époque, M. Louis Le Pensec, que je remercie pour le travail accompli.

Cohérence, surtout, avec la loi d'orientation agricole, adoptée par l'Assemblée en première lecture le 13 octobre dernier.

Trois priorités importantes dégagées dès 1998 sont maintenues dans le budget pour 1999.

La première est la poursuite de la nécessaire revalorisation des petites retraites, avec l'inscription de 1,2 milliard de francs au BAPSA, dont la subvention d'équilibre figure au budget de l'agriculture. Une première étape de cette revalorisation avait été réalisée en 1998. Elle avait concerné 274 000 retraités, les plus modestes. Cette année, il s'agira de 607 000 retraités agricoles, dont les pensions passeront à 3 000 francs par mois pour les chefs d'exploitation ayant accompli une carrière complète, soit une augmentation de 8 % ; l'augmentation sera de 11 % pour les veuves, de 20 % pour les aides familiaux et de 8,5 % pour les conjoints. Ce budget continue donc de témoigner la solidarité nécessaire avec nos aînés.

La deuxième priorité est l'enseignement agricole, avec plus de 6 milliards de francs inscrits au budget pour 1999, soit une augmentation, très importante, de 6,4 %, des crédits. Cette priorité bénéficie tout particulièrement au secteur public : 180 emplois y sont créés, dont 115 ont d'ailleurs été créés par anticipation dès la rentrée 1998, de même que 60 postes de personnels non enseignants nécessaires pour l'encadrement de la scolarité, en particulier plusieurs emplois d'infirmière nécessaires à la poursuite de la politique de santé scolaire. On note par ailleurs un effort important de résorption de l'emploi précaire, avec la transformation de 128 emplois précaires en postes stables.

Pour la première fois aussi, l'augmentation des moyens a rendu possible la prise en charge partielle, dans un premier temps, des frais de stage des élèves. Ces stages devenaient de plus en plus techniques, les frais étant importants, et un certain nombre de familles ne pouvaient plus les assumer.

Enfin, le fonds social lycéen sera porté de 7 millions à 10 millions de francs, pour les mêmes raisons de solidarité, en faveur des familles les moins aisées de l'enseignement public agricole.

Quant à l'enseignement privé, le rattrapage lié aux engagements de la loi Rocard de 1984 est poursuivi avec une inscription de 2,78 milliards de francs pour 1999, soit une hausse de 8,2 % par rapport à l'an dernier.

Eu égard à certaines revendications que j'ai entendues ici ou là, je rappelle qu'un étudiant de l'enseignement supérieur, dans n'importe quelle discipline, a un coût public de 27 000 francs en moyenne alors qu'un étudiant de l'enseignement privé agricole ouvre droit à une subvention de 31 000 francs. Je dis cela à l'adresse de tous ceux qui pensent que l'enseignement supérieur agricole privé n'est pas suffisamment aidé.

Troisième priorité : la poursuite d'une politique active d'installation des jeunes, engagée l'an dernier.

Cette politique ne peut s'évaluer à la seule lecture des trois lignes de crédits qui lui sont clairement affectées, qu'il s'agisse de la dotation aux jeunes agriculteurs, du fonds d'installation en agriculture et de la préparation à l'installation. Cette politique d'installation est constituée d'un ensemble de dispositifs législatifs, réglementaires et professionnels qui ont tous pour objectif de favoriser


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l'installation - de ce point de vue, la loi d'orientation représente un pas supplémentaire - et, par conséquent, de nombreuses autres lignes budgétaires, outre les trois que j'ai citées, concernent l'installation, même si celle-ci n'y est pas clairement identifiée.

Je ne prendrai que deux exemples. Au moins la moitié des bonifications de prêt, qui représentent la plus grosse dépense publique pour l'installation, plus de 1,5 milliard de francs, sont directement affectées à l'installation des jeunes, notamment par le biais des prêts d'installation et des prêts de modernisation. Deuxième exemple : la DJA bénéficiait en 1997 de 278 millions au titre de la part communautaire, qui venaient s'ajouter à la ligne inscrite au budget de l'Etat.

L'autre raison de ne pas s'en tenir aux inscriptions strictement budgétaires tient au caractère assez formel de certaines d'entre elles. Ainsi en est-il, par exemple, du chapitre 44-41, qui regroupe 3 milliards de francs d'interventions gérées par le CNASEA, chapitre où figure la dotation jeunes agriculteurs. Or le CNASEA a la faculté d'ajuster, d'année en année, les dépenses des différentes lignes d'intervention, en ponctionnant sur telle réserve pour affecter telle ou telle ligne. En termes strictement budgétaires, il faut prendre en compte les 645 millions de francs de la DJA, dont le montant de 1998 est reconduit, et qui seront complétés par 340 millions de francs attendus du FEOGA, les 145 millions de francs du fonds d'installation en agriculture, soit 15 millions de moins qu'en 1998, ceux-ci ayant été transférés sur le nouveau chapitre du fonds de financement du contrat territorial d'exploitation, ainsi que les 86,69 millions de crédits pour les stages de préparation à l'installation, montant légèrement inférieur à celui de 1998, mais qui correspond à un ajustement au nombre de stagiaires attendus. On arrive ainsi à un total de crédits publics en faveur de l'installation de 3 milliards de francs.

J'ajoute que la politique d'installation doit moins se juger au volume des crédits qui lui sont directement affectés qu'à la pertinence des outils mis en place, et à la capacité de les gérer pour favoriser l'installation. A cet égard, l'exemple des PIDIL et du FIDIL est particulièrement probant.

Avec cette politique d'installation, nous étions à la charnière entre les priorités poursuivies dans le budget de 1998 et la mise en oeuvre financière de la loi d'orientation agricole.

Celle-ci avait pour objectif de remettre l'agriculture française sur ses deux jambes, selon la très jolie expression de Pascal Coste. Il fallait conforter la production et affirmer le rôle social, environnemental et d'occupation du territoire de l'agriculture, car cela correspond, de plus, a ux préoccupations de nos concitoyens. Le budget de 1999 traduit, me semble-t-il, cette orientation, avec le financement des contrats territoriaux d'exploitation, un effort sans précédent en faveur de la sécurité et de la qualité des aliments, la consolidation de la politique des filières, la protection de l'environnement, l'occupation de l'espace et la politique de la montagne.

Je développerai rapidement ces points.

Je rappelle tout d'abord que l'innovation centrale de la loi, le contrat territorial d'exploitation, représente une vision nouvelle des relations entre l'Etat et les agriculteurs. Facultatif, ce contrat comporte, en contrepartie des « prestations de l'Etat », des engagements sur « les orientations de la production de l'exploitation, l'emploi, la contribution de l'activité de l'exploitation à la préservation des ressources naturelles, à l'occupation de l'espace ou à la réalisation d'actions d'intérêt général et au dé veloppement de projets collectifs de production agricole ».

Le CTE permet donc de prendre en compte la multifonctionnalité de l'agriculture.

Conformément à l'article 3 de la loi d'orientation, le projet de loi de finances pour 1999 crée donc un chapitre budgétaire nouveau, le chapitre 44-84, intitulé « Fonds de financement des contrats territoriaux d'exploitation agricoles » et doté de 300 millions de francs en 1999. Cette création est opérée par redéploiement : les lignes budgétaires consacrées au fonds de gestion de l'espace rural, cent quarante millions de francs en 1998, et aux OGAF - opérations groupées d'aménagement foncier -, soit quarante-cinq millions de francs en 1998, sont regroupées dans ce chapitre, auquel sont également transférés une partie des crédits du fonds pour l'installation en agriculture, quinze millions de francs, soit 9 % de la dotation d'installation des jeunes agriculteurs de 1998, et de ceux destinés aux offices agricoles, 100 millions de francs, soit 3 % de la dotation pour 1998.

La cohérence de ce redéploiement mérite d'être soulignée elle aussi. Le fonds de gestion de l'espace rural et les OGAF finançaient des opérations entrant très exactement dans l'objet des CTE. J'ai proposé à la commission des finances une observation attirant l'attention du Gouvernement sur la nécessité de préserver les moyens d'entretenir l'espace là où il n'y a plus d'agriculteurs - ou bien peu - susceptibles de signer un contrat territorial d'exploitation. Cette observation a pour objet - et ma remarque s'adresse également à Mme la ministre de l'environnement - d'utiliser des outils spécifiques, peutêtre le fonds de gestion des milieux naturels qui va être créé dans le cadre de la prochaine loi d'orientation et d'aménagement du territoire, mais qui est déjà doté dans le budget de 1999.

Quant au prélèvement sur les offices - modeste, au demeurant, puisqu'il est de 3 % -, ne correspond-il pas à la logique de l'installation de l'agriculture française sur ses

« deux jambes », logique qui consiste peut-être à en alléger une modestement pour permettre à l'autre de se développer.

Je considère donc qu'avec 300 millions de francs, auxquels s'ajouteront environ 150 millions de francs de cofinancement communautaire des mesures agri-environnem entales incluses dans les CTE, ce fonds est suffisamment doté pour 1999 puisque les CTE ne seront véritablement « opérationnels » qu'au quatrième trimestre de 1999.

Reste toutefois une question que vous connaissez bien, monsieur le ministre, et qui sera soulevée au cours des négociations sur la réforme de la PAC : celle du financement des CTE à partir de l'an 2000. Ce financement sur fonds communautaires ne pose pas de problème de volume - les « retours » français sur la PAC le permettent - mais ils poseront le problème de l'acceptation par nos partenaires du principe de subsidiarité appliqué en agriculture, c'est-à-dire de la modulation des aides dans une certaine proportion et selon des critères définis.

Tel est l'enjeu de cette négociation pour la France et pour l'avenir du CTE.

L'autre volet très important de la loi d'orientation agricole, qui trouve sa traduction en termes financiers dans le budget de 1999, est celui de la sécurité et de la qualité alimentaires.


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Les crédits affectés à la qualité et à la sécurité des aliments augmentent globalement de 78 millions de francs, auxquels s'ajoutent 130 créations de postes. Cet effort est sans précédent.

L'année 1999 marquera aussi le démarrage de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments, créée par la l oi du 1er juillet 1998. Celle-ci est dotée de cinquante emplois et de 35 millions de francs pour son fonctionnement, subvention répartie en trois tiers entre les ministères de l'agriculture, pour 11,7 millions de francs, de la santé et de l'économie, la direction de la concurrence étant concernée.

Le Centre national d'études vétérinaires et alimentaires, le CNEVA, désormais coiffé par l'agence, voit de son côté sa subvention de fonctionnement augmenter de 10 millions de francs.

De même, les moyens des services vétérinaires bénéficient d'un effort particulier. Les crédits affectés à ces services passent de 43 à 50 millions de francs, alors que q uarante postes supplémentaires sont créés pour le contrôle du service public de l'équarrissage.

Un effort important est également effectué pour le contrôle des plantes transgéniques, ce qu'il est convenu d'appeler la biovigilance, en application d'un article très important de la loi d'orientation votée le 13 octobre par l'Assemblée. Ainsi, quarante-cinq emplois supplémentaires sont créés dans les services chargés de la biovigilance, alors que les crédits finançant les analyses dans ce domaine passent de 35 à 54 millions de francs.

Troisième volet de la mise en oeuvre de la loi d'orientation : la consolidation des soutiens aux filières de production. Les soutiens aux productions agricoles, chacun le sait, relèvent essentiellement de la politique agricole commune. Toutefois, le budget de l'Etat comporte des dotations représentant la part nationale de certaines interventions communautaires - la prime à la vache allaitante, par exemple -, mais l'action de l'Etat dans ce domaine est aussi déterminante dans le soutien à l'investissement, à travers les prêts bonifiés et l'orientation des productions, confiée aux offices agricoles. Ceux-ci, au-delà de leur fonction de régulation des marchés, jouent aussi un rôle essentiel pour encourager des adaptations plus structurelles. La dotation des offices agricoles a été reconduite, avec 2,9 milliards de francs, 100 millions de francs ayant été affectés au financement des contrats territoriaux d'exploitation. Les crédits de bonification de prêts font l'objet d'une hausse très importante, de 5,1 %, avec 2 332 millions de francs. Je n'insiste pas à nouveau sur le rôle de ces prêts en faveur des jeunes agriculteurs.

M. le président.

Vous êtes arrivée à la fin de votre temps de parole, madame le rapporteur.

Mme Béatrice Marre, rapporteur spécial.

Je termine, monsieur le président. Je ne m'étends pas sur la protection de l'environnement, l'occupation de l'espace et la politique de la montagne, me limitant à une dernière observation.

Malgré son apparente modicité au regard de ce qu'il est convenu d'appeler « les concours publics à l'agriculture », évalués à 173 milliards de francs pour 1999, le budget de l'agriculture pourra donc jouer son rôle traditionnel de levier et d'orientation de la politique agricole, conduite, chacun le sait, dans le cadre de la politique agricole commune, elle-même confrontée aux règles du commerce international.

Nous sommes à la veille de deux échéances importantes, la réforme de la PAC et l'ouverture du nouveau cycle de négociation, à l'OMC.

L'adoption de la loi d'orientation agricole et sa traduction dans le budget pour 1999 donnent une lisibilité à nos partenaires de l'Union européenne, et au-delà, précisent la position de la France sur l'avenir de l'agriculture française, et, nous l'espérons, européenne, si nous arrivons à convaincre nos partenaires.

Merci, monsieur le président, de m'avoir accordé une minute supplémentaire.

M. le président Mes chers collègues, je vous rappelle que la conférence des présidents a fixé le temps de parole des commissions. Nous en avons avec ce budget pour plus de sept heures. Je souhaite que les rapporteurs et les intervenants respectent scrupuleusement leur temps afin que nous puissions finir dans les délais.

La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission de la production et des échanges, pour l'agriculture.

M. François Patriat, rapporteur pour avis de la commission de la production et des échanges, pour l'agriculture.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il y a quelques semaines, un leader agricole de premier plan a déclaré : « La loi d'orientation agricole sera votée à Paris, mais l'avenir de l'agriculture se décidera à Bruxelles. »

M. André Angot.

Eh oui !

M. François Patriat, rapporteur pour avis.

Au milieu de ces deux exercices, dans lesquels, monsieur le ministre, vous entrez de plain-pied - avec quelle fermeté et quel succès ! -,...

M. Christian Jacob.

On en reparlera !

M. François Sauvadet.

Il faut semer avant de récolter !

M. François Patriat, rapporteur pour avis.

... il y a le budget.

Or un budget donne toujours lieu a des débats byzantins, et parfois manichéens. De surcroît, il permet de faire un catalogue à la Prévert de tous les dossiers agricoles, voire para-agricoles, et ils sont nombreux. Pour certains, il est toujours très bon, pour d'autres, toujours très mauvais. En général, quand il est bon, on en parle peu dans les campagnes, mais, quand il est mauvais, on fait le tour des réunions syndicales et coopératives pour souligner toutes ses carences.

Nous allons déjà éviter le débat sur la hausse ou la baisse du budget. Le budget de l'agriculture augmente de près de 3 % hors contribution au BAPSA. Réjouissonsnous ensemble, mes chers collègues, que cette contribution soit moindre, car cela traduit une meilleure santé de l'économie française.

M. Germain Gengenwin.

Tout de même ! On prend un milliard de francs sur la C3S !

M. François Patriat, rapporteur pour avis. Monsieur Gengenwin, le député de Bourgogne aime bien le député d'Alsace, et il ne l'interrompt pas ! Ce budget contient-il des avancées significatives ?

M. François Sauvadet.

Non !

M. François Patriat, rapporteur pour avis.

Oui. Ce budget est-il un budget de reconduction, de transition, est-il un budget porteur d'avenir ?

M. François Sauvadet.

Non !

M. François Patriat, rapporteur pour avis.

Oui. Ce budget contient-il des lacunes ?


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M. François Sauvade.

Oui !

M. François Patriat, rapporteur pour avis.

Sans doute. Il faut être honnête pour discuter et voir ce qu'il y a de bien, ce qui peut être amélioré et ce qui reste encore à développer.

Les mesures significatives ? J'en vois deux.

La première, c'est la création du fonds pour les contrats territoriaux d'exploitation. Pour y voir un peu plus clair, il était en effet nécessaire de regrouper au sein d'un fonds cohérent, qui proposera une nouvelle redistribution des crédits de l'agriculture, des crédits auparavant dispersés sur différentes lignes budgétaires ? Les crédits pourront ainsi être répartis de façon plus équitable pour parvenir, demain à une agriculture qui occupe le territoire, qui soit riche en hommes et qui élabore des produits de qualité. Le fonds de CTE se voit doté de 300 millions de francs dans le budget de l'Etat. Les CTE bénéficieront également d'un cofinancement européen pour 150 millions. Ainsi, ils pourront faire face à l'ensemble des demandes dans les départements en 1999.

La montée en puissance de ces crédits est la seule question majeure que l'on peut se poser dans la mesure où elle est liée à la négociation sur le PAC, j'y reviendrai.

La seconde mesure positive, Mme Béatrice Marre l'a évoquée de façon très précise et avec talent, c'est la reprise d'un engagement du Gouvernement sur la mise à niveau des retraites agricoles à hauteur de 1,2 milliard de francs cette année dans le budget, soit 1,6 milliard en a nnée pleine. Ainsi, sur deux années, nous avons commencé à combler une partie du retard social accumulé au cours des générations.

Ce budget est-il porteur d'avenir ? Je dis oui, pour plusieurs raisons.

D'abord, l'augmentation de 6 % des moyens consacrés à l'enseignement et à la recherche agricoles. La formation est nécessaire, surtout si on veut diversifier, s'adosser à des filières de qualité, développer l'agriculture biologique et les produits transformés.

Ainsi 180 emplois sont créés dans l'enseignement technique agricole, ce qui n'est pas négligeable dans le contexte actuel, et les crédits augmentent de 6 % par rapport à 1998. L'enseignement technique, l'enseignement dans les lycées, l'enseignement supérieur, l'équité entre enseignement public et enseignement privé, y trouvent leur compte.

Ensuite, les crédits de la dotation d'installation aux jeunes agriculteurs sont reconduits. Ils s'élèvent à 645 millions de francs dans le budget, auxquels s'ajoutent 345 millions au titre des fonds structurels européens.

Cela permettra d'honorer les 10 000 installations programmées pour 1999, objectif supérieur à ce qui a été atteint l'année dernière. Mais le rythme des installations est lié aussi aux négociations internationales. Une fois les agriculteurs convaincus et rassurés sur leur avenir à travers les prochaines négociations de la PAC et de l'OMC, le rythme des installations redeviendra normal.

Le fonds pour l'installation agricole en agriculture bénéficie d'une dotation de 145 millions de francs. Dans le cas des transmissions sans successeur familial, ces crédits permettent de distribuer une aide de 30 000 à 70 000 francs, voire 45 000 et 75 000 francs en zone de montagne, je le précise pour vous, monsieur le président, qui défendez ces régions avec ardeur.

Enfin, la sécurité alimentaire constitue un enjeu majeur de l'agriculture. L'année dernière, le ministre de l'agriculture commençait son propos ainsi : qu'attendent les Français de leur agriculture ? Ils attendent de la qualité et de la sécurité. La quantité, nous le savons, est désormais là, et c'est le fruit du monde agricole.

Avec la création de l'Agence française de sécurité alimentaire sanitaire des aliments, avec une augmentation de 10 % des dotations de promotion de contrôle de la qualité, avec la création de 85 emplois, 45 pour les OGM et 40 pour le suivi des matières d'équarrissage, la volonté d'aller vers la qualité est au rendez-vous. On pourra ainsi répondre aux attentes.

Cependant, ce budget présente des lacunes. Vous en êtes conscient, monsieur le ministre. Gouverner, c'est prévoir, gouverner, c'est choisir. Vous le faites.

D'abord en ce qui concerne la forêt. J'espère que la future loi de modernisation forestière permettra de trouver un équilibre durable. Les moyens de l'ONF sont à peine suffisants. Mais la forêt est créatrice d'emplois.

L'excellent rapport de notre collègue Jean-Louis Bianco devrait déboucher sur la création de lignes budgétaires permettant de renverser la tendance.

Ensuite, en ce qui concerne la politique agroalimentaire, les crédits sont insuffisants, même si les offices sont présents. Le fonds national de garantie contre les calamités agricoles soulève de nombreuses interrogations.

Ce fonds, alimenté à la fois par les agriculteurs et par l'Etat, est aujourd'hui largement pourvu. En période de rigueur budgétaire, nous ne pouvions pas échapper à une mesure de régulation, mais celle-ci n'est en aucun cas dangereuse pour l'avenir dans la mesure où l'Etat s'engage à tenir sa parole. Si, par malheur, ce que personne ne souhaite ici, une catastrophe survenait, le budget y pourvoirait.

J'aurai également quelques questions à vous poser, monsieur le ministre.

Premièrement, sur la PAC. Vous avez engagé les négociations à Bruxelles de façon offensive, je crois, et je vous en félicite. La façon dont vous avez su trouver les mots pour décrocher les moyens pour l'exportation et les crédits, y compris interministériels, pour faire face à la crise répétitive du porc, c'est-à-dire les moyens de reconquérir le marché intérieur et limiter la production, augure bien de l'avenir.

Quatre scénarios sont possibles. Il y a ceux qui refusent rigoureusement et obstinément que l'on touche à la PAC.

Ce sont d'ailleurs les mêmes qui disaient non à la PAC en 1992.

M. Christian Jacob.

C'était Louis Mermaz !

M. François Patriat, rapporteur pour avis.

Non, c'étaient les syndicalistes, que vous envoyiez à l'époque devant ma permanence et ma maison et qui criaient :

« Jamais la PAC, jamais les Américains ! » Souvenez-vous.

M. Christian Jacob.

Je vous prie de m'en excuser !

M. François Patriat, rapporteur pour avis.

Il y a ceux qui reconnaissent que cette PAC est faite pour nous.

Après tout, pourquoi pas ? Puis, il y a ceux qui voudraient une PAC a minima . Enfin, il y a le scénario auquel le Gouvernement a réfléchi et qui me paraît être le bon : les négociations de la PAC doivent permettre que les décisions qui intéressent chacun des Etats soient prises à Bruxelles et non, au risque d'une renationalisation de la PAC, dans la subsidiarité. S'il y a couplages, et nous sommes pour, s'il y a plafonnement, et nous sommes pour, il faut que ces mesures soient décidées en accord avec nos partenaires, depuis Bruxelles, de façon que les règles du jeu soient équitables.


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Sans doute M. de Courson interviendra-t-il sur la fiscalité. Je me bornerai à dire qu'elle me paraît aujourd'hui inadaptée.

M. Charles de Courson rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour le budget connexe des prestations sociales agricoles.

Tout à fait !

M. François Patriat, rapporteur pour avis.

Certes, il existe déjà des mesures spécifiques pour les agriculteurs, des dérogations pour les jeunes et des mesures fiscales transitoires, mais si l'on veut définir l'exploitation agricole, l'exploitant, il faut aussi définir les bénéfices. Il faut savoir sur quelles bases ils reposent, en quoi ils interviennent dans les cotisations sociales agricoles, en quoi les transmissions aujourd'hui sont difficiles à assumer. Il faut des mesures pour l'agriculture, comme il y en a eu pour le logement.

Le rapport que nous avons obtenu dans la discussion de la loi d'orientation agricole, à laquelle vous avez participé, nous a permis d'envisager des mesures pour le prochain budget.

Deux questions pour terminer, mon temps de parole étant épuisé.

La mise aux normes suscite des inquiétudes, monsieur le ministre.

M. Germain Gengenwin.

C'est le problème fondamental.

M. Christian Jacob.

Pourquoi ne pas l'avoir inscrite dans la loi ?

M. François Patriat, rapporteur pour avis.

Elle est coûteuse et les agriculteurs pensent qu'elle est parfois trop coercitive. Il faut que la réglementation, c'est-à-dire les ordres que vous enverrez dans les DDA, soit compréhensible et applicable avec les moyens dont disposent aujourd'hui les éleveurs et les agriculteurs.

L'assurance récolte est attendue, elle est dans le projet de loi.

Le but de toute politique demeure l'amélioration des conditions d'existence des hommes. Ce budget amplifie les actions de formation, favorise l'installation des jeunes, consolide les emplois et traduit un effort de solidarité envers les retraités, tout en n'oubliant pas les drames humains de certaines parties du monde.

M. François Sauvadet.

Je ne sais pas où vous avez vu tout cela dans le budget ?

M. François Patriat, rapporteur pour avis.

Les crédits offrent des soutiens dont le rôle est fondamental. Il s'agit de préserver les exploitations défavorisées par la géographie, les produits menacés par la concurrence, les secteurs en difficulté climatique, d'accompagner les projets agro-alimentaires, d'encourager la politique de filières et de veiller à la sécurité alimentaire.

C'est la raison pour laquelle, mes chers collègues, le rapporteur de la commission de la production et des échanges, fidèle en cela aux décisions de la commission, vous invite à voter ces crédits.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. Louis Mexandeau, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du plan, pour la pêche.

M. Louis Mexandeau, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour la pêche.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les crédits de la pêche ne représentent en fait que trois lignes dans le budget que nous étudions aujourd'hui : les deux lignes qui constituent l'agrégat

« Pêche » du fascicule budgétaire auxquelles on peut ajouter la subvention à l'IFREMER. Pourtant, cette donnée immédiate, à laquelle on pourrait se tenir, n'exprime nullement un quelconque désintérêt pour ce secteur.

La mise en oeuvre récente de la loi d'orientation sur la pêche maritime et les cultures marines en est la preuve la plus éclatante. Elle marque une volonté politique de doter l'activité de pêche d'un cadre législatif propre à assurer sa pérennité.

La récente promulgation de la loi tendant à la création d'un office des produits de la mer et de l'aquaculture, l'OFIMER, achève enfin ce dispositif. Cette loi vient d'être publiée au Journal officiel , monsieur le rapporteur Dupilet, du 4 novembre 1998.

Nos récents débats, tout comme ceux de l'an dernier, tant à l'Assemblée qu'au Sénat, ont montré tout l'intérêt que la représentation nationale unanime - le fait mérite d'être souligné - portait à cette activité.

Le projet de loi de finances propose une très légère augmentation des crédits de 0,25 %, ce qui traduit la volonté, d'une part, de poursuivre des actions de fond en faveur de l'ensemble du secteur de la pêche, avec la modernisation de la flottille, l'adaptation de la flotte aux objectifs du programme d'orientation pluriannuel, l'amélioration de l'organisation des marchés, la restructuration du mareyage et l'amélioration de la qualité, et, d'autre part, d'assurer la cohérence des différents aspects des politiques conduites notamment en matière économique.

L'organisation des marchés constitue le premier axe d'intervention budgétaire de la puissance publique puisqu'elle représente plus de 60 % des crédits de la pêche à travers notamment la subvention du Fonds d'intervention et d'organisation des marchés des produits de la pêche maritime et des cultures marines, le FIOM. Ces crédits, sur lesquels je vais m'expliquer, sont amputés de 29,5 millions de francs par rapport au projet de loi de finances de 1998.

Créé en 1975, le FIOM, établissement public à caractère industriel et commercial, s'est vu confier par un décret de 1983 la mission de contribuer à la modernisation, à l'orientation et à la réglementation de la production, de la commercialisation et de la transformation des produits de la pêche maritime et des cultures marines. Il peut également intervenir dans toute action de nature à faciliter la mise en place de régimes d'assurances spécifiques pour les producteurs, notamment contre les intempéries. Il est enfin le correspondant financier des fonds structurels européens et de l'instrument financier d'orientation de la pêche.

La forme actuelle du FIOM n'a pas permis d'atteindre pleinement les objectifs qui lui étaient assignés.

D'une part, la composition du conseil d'administration, où l'aval de la filière est insuffisamment représenté, a conduit paradoxalement à une dépendance croissante des pêcheurs par rapport à la distribution, un dialogue déséquilibré ne leur ayant pas permis de répondre avece fficacité à l'évolution profonde des demandes des acteurs. Ce caractère interprofessionnel est essentiel pour assurer l'efficacité et la cohérence de ses actions.

D'autre part, la gestion du système des prix de retrait avait entraîné des effets pervers, compte tenu d'une insuffisante flexibilité de ces prix et de leur application à des quantités trop importantes d'apports. Même si cette


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situation s'est améliorée aujourd'hui, elle avait par trop conduit à remplacer une politique de soutien par une logique paralysante d'assistanat.

Aussi, la transformation du FIOM en un véritable office de produit de la mer, l'OFIMER, que nous avons déjà évoquée, doit-elle permettre de renforcer le rôle de pilotage économique de la filière.

Ses principaux objectifs en matière d'organisation des marchés, en 1999, porteront sur l'amélioration de la prévision des apports - exercice difficile -, la restructuration du marché et le développement d'une politique de qualité.

L'annonce anticipée des apports a pour but d'améliorer l'écoulement des produits sur le marché en apportant une solution au problème que pose la dispersion des lieux de débarquement. Le programme, qui a été engagé dès 1994, couvre vingt-six ports et a concerné, jusqu'à aujourd'hui, environ 600 bateaux.

La restructuration du marché impose également de coordonner les politiques mises en oeuvre par les organisations de producteurs. Un certain nombre d'imperfections troublent encore la cohérence du système. La loi d'orientation y remédie pour une bonne part, mais il faut également tenir compte de la dimension européenne, particulièrement appuyée, de la politique de la pêche.

Ainsi la France a appelé l'attention de la Commission européenne et du conseil des ministres de la pêche sur les faiblesses de l'organisation commune des marchés qui n'impose pas une conduite identique à l'ensemble des organisations de producteurs.

Le développement d'une politique de qualité est également fondamental pour améliorer et valoriser les produits de la mer. De sa réussite dépend largement l'augmentation de la consommation.

Enfin, le soutien à l'investissement dans les ports de pêche sera poursuivi. Il concernera les opérations d'équipement, qui s'inscrivent principalement dans le cadre des contrats de plan et la modernisation des circuits de commercialisation, qui prendra la suite du programme de m ise aux normes sanitaires des établissements de mareyage.

Les interventions en faveur des entreprises de pêche constituent le second volet de l'action du ministère. Les crédits correspondants sont destinés à la mise en oeuvre d'un plan de sortie de flotte permettant l'ajustement de la flotille française aux objectifs définis par le programme communautaire d'orientation pluriannuel, le POP.

Il faut rappeler que la France devait, avant de pouvoir b énéficier de nouvelles aides communautaires à la construction de navires, rattraper le retard constaté sur l'exécution du troisième POP, ce qui a été fait au début de l'été 1998, grâce au déblocage de 30 millions de francs supplémentaires et une participation accrue de certaines collectivités locales. La France doit désormais mettre en oeuvre le POP-IV en satisfaisant une première étape intermédiaire aux objectifs renégociés à la baisse et qui semblent également en passe d'être atteints.

Le projet de loi de finances pour 1999 prévoit une augmentation de 30 millions de francs des crédits d'intervention en faveur des entreprises de pêche et de cultures marines, augmentation qui est supérieure à la baisse enregistrée sur la subvention à l'organisation des marchés.

La négociation communautaire du quatrième POP, il faut le rappeler, a été très difficile. La commission souhaitait amplifier la politique de réduction des flottes de pêche d'une façon irréaliste et inadaptée à notre pays.

Malgré l'opposition de la France et de la GrandeBretagne, le POP a finalement été adopté, mais avec certains aménagements.

Il faut donc aujourd'hui obtenir les modalités d'application les moins pénalisantes pour la pêche française - à cet égard, monsieur le ministre, je salue les démarches entreprises par votre prédécesseur, Louis Le Pensec.

L'aide à la construction, en attendant, a été gelée et seules demeurent possibles les aides à la modernisation sans augmentation de capacité. Il est cependant primordial et urgent, pour préserver l'avenir de la pêche française, que les programmes de construction neuve puissent reprendre, afin d'assurer l'indispensable renouvellement d'une flottille vieillissante. J'insiste également sur la nécessité de conforter les armements semi-industriels et industriels.

M. le président.

Il faut penser à conclure, monsieur le rapporteur spécial !

M. Louis Mexandeau, rapporteur spécial.

Je mentionnerai enfin - vous voyez, nous y sommes, monsieur le président ! (Sourires) -, le mécanisme d'incitation financière permettant d'aider les jeunes pêcheurs à acquérir un navire, dispositif instauré par la loi d'orientation et dans la réussite duquel nous plaçons beaucoup d'espoirs.

Une politique déterminée et volontaire doit permettre à la pêche maritime française de renforcer de façon durable sa position. Les conditions du rétablissement existent, pourvu qu'elles bénéficient d'un cadre économique et social adapté.

La politique des pêches est, peut-être plus que tout autre secteur d'activité, très dépendante de décisions p rises au niveau communautaire. Cet aspect est incontournable et génère parfois des problèmes, comme le montrent aujourd'hui encore les difficiles négociations sur la mise en oeuvre du plan d'orientation pluriannuel, sur les mesures techniques de préservation de la ressource ous ur les perspectives de réforme de l'organisation commune de marché.

M. le président.

Monsieur Mexandeau, veuillez conclure !

M. Louis Mexandeau, rapporteur spécial.

La difficulté réside dans le fait que les partenaires européens concernés par l'économie de la pêche maritime sont conduits à rechercher en permanence un nécessaire compromis entre les intérêts antagonistes des pays producteurs et des pays transformateurs.

Je termine, monsieur le président, tout en vous félicitant pour votre rigueur.

(Sourires.)

M. le président.

Je tiens à vous féliciter pour votre concision, monsieur le rapporteur spécial !

M. Louis Mexandeau, rapporteur spécial.

La nécessité de mettre en place, sur le plan national, un ensemble cohérent de mesures permettant à la pêche française de développer son activité, et pas seulement de la maintenir, n'en est que plus impérative. La loi d'orientation a été une première étape décisive en organisant les moyens propres à restructurer la filière, à moderniser le statut des entreprises, à adapter les cultures marines et à transformer les relations sociales. Il reste à la mettre en oeuvre efficacement par tous les acteurs de la filière. La création de l'OFIMER prévue par la loi d'orientation, mais qui vient seulement d'être promulguée, parachève ce dispositif. Plus largement, en apportant au monde de la pêche une plus grande confiance en son avenir, elle doit encourager les professionnels à s'engager dans des initiatives ambitieuses.


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M. le président Monsieur le rapporteur spécial, il est temps de conclure. Je vais être conduit à vous interrompre !

M. Louis Mexandeau, rapporteur spécial.

Le projet de budget pour 1999 prévoit des moyens financiers suffisants pour atteindre les objectifs fixés. C'est pourquoi la commission des finances, à l'unanimité, vous invite à adopter les crédits de la pêche. Merci, monsieur le président, pour votre indulgence. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. René Leroux.

L'exercice n'est pas facile ! M. le président Je vous rappelle, mes chers collègues, qu'une minute fait soixante secondes, quel que soit le parlementaire qui intervient ! La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission de la production et des échanges pour la pêche.

M. Dominique Dupilet, rapporteur pour avis de la commission de la production et des échanges pour la pêche.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, après des années de crise extrêmement grave, en 1993 et 1994, et malgré la fragilité de certaines structures, la filière des pêches maritimes et des cultures marines est dans une certaine mesure assainie. La plupart des secteurs reprennent même vigueur.

Objet d'un large consensus à l'Assemblée comme au Sénat, la loi d'orientation sur les pêches maritimes et les cultures marines répond à l'indispensable modernisation de la filière pêche de notre pays. Elle procède de la volonté de tracer un cadre propice à la pérennisation de cette activité fondamentale à l'économie littorale.

En abordant pour la première fois dans une même démarche les différents aspects de la politique des pêches et des cultures marines, la loi d'orientation constitue un événement majeur pour l'avenir de ces secteurs. Le retard de la France dans l'exécution du troisième programme d'orientation pluriannuel de réduction de la flotte de pêche, le POP III, a conduit le Gouvernement, fin 1997, à mettre en place un plan de sortie de flotte d'envergure.

L'objectif de ce plan était tout à la fois d'achever la réalisation du POP III et d'atteindre les objectifs intermédiaires du POP IV à fin 1998, étape préalable à la reprise des investissements dans la flotte de pêche. Pour la réalisation de ce plan, l'Etat a consenti un effort important. En effet, à côté des mesures d'accompagnement social d'usage, la prime d'Etat à la sortie de flotte, ramenée au kilowatt, a été doublée par rapport au plan précédent et une enveloppe de 30 millions de francs a été engagée.

Par ailleurs, plus encore que par le passé, les collectivités territoriales ont été sollicitées afin d'abonder l'aide de l'Etat. Les régions littorales ont décidé de s'associer à ce plan. S'agissant des aides à la modernisation de la flotte, une réserve de 175 millions de francs a été constituée pour la période triennale 1997-1999.

Cette démarche et ces concours complémentaires ont porté leurs fruits. La réussite du plan est confirmée. Le retard de la France sur le POP III est résorbé et l'objectif intermédiaire du POP IV est atteint sur les segments concernés. Le chiffre global de 24 000 kilowatts est même dépassé. Dans cette perspective, monsieur le ministre, vous avez demandé que les COREMODE se réunissent dès la fin du mois d'octobre pour examiner les projets d'investissement et procéder à un classement par ordre de priorité qui servira ensuite de base à la délivrance des permis de mise en exploitation.

L'application de la loi d'orientation sur la pêche maritime va très prochainement, dans le respect des règles communautaires, permettre de réserver l'accès aux licences ou quotas nationaux aux navires de pêche battant pavillon français qui ont un lien économique réel avec le territoire national et qui sont dirigés et contrôlés à partir d'un établissement stable situé en France. L'objectif de ces nouvelles dispositions est de préserver le caractère national des quotas en évitant que des capitaux étrangers n'en profitent sans aucun bénéfice économique ou social pour le littoral français. L'obligation de ce lien réel s'appliquera à compter du 1er janvier 1999, le délai restant devant permettre aux navires actuellement en activité de se conformer aux nouvelles règles. Des sanctions administratives de suspension ou de retrait de licence, ainsi que des mesures pénales ou des amendes sont prévues. Votre rapporteur considère qu'il conviendrait d'établir, à la fin du premier semestre de l'année prochaine, un bilan économique par façade, des conséquences de l'application de cette importante disposition de la loi d'orientation.

Je voudrais dire aussi combien la loi d'orientation sur la pêche fixe un cadre juridique mieux adapté pour l'exploitation des eaux des terres australes et antarctiques françaises. Il conviendra à n'en pas douter de faire respecter l'autorité française dans cette partie du monde avec des moyens dont la limite suppose, à court et moyen terme, une plus grande coopération régionale et internationale.

Lors du conseil du 8 juin dernier, les ministres de la pêche de l'Union européenne ont décidé d'interdire l'utilisation des filets maillants dérivants pour la pêche aux thonidés en Atlantique et en Méditerranée. Constatant que les arguments fondés et rationnels développés par la France n'entraînaient pas l'adhésion des autres Etats membres, tout à été mis en oeuvre pour que les pêcheurs français, particulièrement dépendants de cette pêcherie, disposent des délais nécessaires et des moyens d'adaptation et de reconversion capables d'assurer la pérennité des entreprises de pêche.

Ainsi, la France a finalement obtenu que le délai pendant lequel l'utilisation du filet maillant dérivant resterait autorisée soit porté à quatre ans, c'est-à-dire jusqu'au 1er janvier 2002, soit deux ans de plus que la proposition initiale de la Commission. Il a été également pris acte que d'importantes mesures d'accompagnement seraient définies par le Conseil avant la fin de l'année. Elles devraient concerner le cofinancement par la Commission d'actions de recherche pour l'expérimentation de nouvelles techniques de pêche du thon, les modernisations nécessaires à la reconversion des navires vers d'autres techniques de pêche, des aides adaptées à la sortie de flotte et l'indemnisation pour les conséquences économiques de l'arrêt de l'utilisation du filet maillant dérivant.

Si la décision prise par le Conseil est loin d'être satisfaisante pour la France, elle comporte néanmoins les conditions qui devraient permettre de préserver l'activité des entreprises visées.

Le législateur a aussi décidé que la pêche artisanale devait disposer à court ou moyen terme d'une assurance chômage. Suite au rapport de Mme Simon-Rovetto et au terme d'une analyse des plus complexes, une solution optimale ne se dégage pas d'emblée entre l'affiliation aux ASSEDIC et l'adoption d'un régime professionnel spécifique.

Nous devons rappeler que l'accès au régime d'assurance chômage est d'abord une revendication des marins de la pêche artisanale, exprimée notamment aux moments forts de la crise de 1994. Cette légitime revendication visait


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aussi à restaurer une véritable égalité de traitement entre les marins et les travailleurs terrestres. Force est de constater aujourd'hui l'absence d'un projet élaboré et la difficulté de réunir un consensus professionnel.

Il convient, en effet, de garantir la spécificité de la profession, qu'il s'agisse des conditions d'indemnisation de l'assurance chômage ou de l'organisation de la recherche des emplois. Il ne s'agit pas ici de favoriser la rigidification du secteur, qui concentre les emplois disponibles sur un noyau dur de marins très performants et très qualifiés et de condamner les autres à des emplois précaires. Il devient donc urgent de faire respecter le droit maritime et de contrôler plus efficacement les conditions d'enrôlement, quand elles existent. La protection des travailleurs vaut aussi pour les marins.

Pour répondre à une formation de qualité, garante d'emplois durables pour toute la filière pêche, la réforme de l'enseignement maritime en cours devrait permettre d'établir un nouveau type de gestion des lycées maritimes en les dotant d'un statut public et de dégager de nouvelles perspectives d'avenir pour le personnel enseignant.

Peut-être nous en direz-vous un mot tout à l'heure, monsieur le ministre.

Autre sujet d'actualité, communautaire celui-là : la réforme des fonds structurels européens pour 2000-2006 va modifier les circuits de subvention. Pour la filière

« mer », les aides à la flotte passeront par le FEOGA et l'IFOP restera l'instrument privilégié. Mais la réforme va introduire un changement important puisque cet instrument financier va devenir juridiquement fonds structurel et être régionalisé. Les négociations devraient avoir lieu au cours du premier trimestre 1999. Il y a donc urgence à traiter ce sujet. Il appartient à l'Etat de définir la carte du zonage et tout le travail, sous la tutelle du préfet de région, doit se faire en amont et sur le terrain. De la capacité des professionnels des comités locaux et régionaux à faire des propositions à l'administration dépendra la solution d'un schéma équitable essentiel pour l'avenir de nombreux secteurs d'activités liés à la filière pêche.

Mes chers collègues, en reconduisant globalement les dotations pour l'année 1999 à leur niveau de l'année en cours, dans un contexte de poursuite de la rigueur budgétaire, l'Etat confirme son engagement à poursuivre la mise en oeuvre des priorités définies en faveur de la filière des pêches maritimes et des cultures marines. Il convient de rappeler que la stabilisation des crédits s'effectue à un niveau satisfaisant puisque, dans un contexte d'inflation particulièrement faible, les dotations s'inscrivent à un niveau supérieur de près de 30 % à celui de 1995.

Comme l'a dit Louis Mexandeau, la transformation du FIOM en OFIMER, qui devrait intervenir pour le 1er janvier prochain, s'accompagnera du transfert de la section sociale de l'ancien FIOM, destinée à la participation aux caisses de chômage intempéries et au Comité national des p êches maritimes et des élevages marins. Ainsi, l'OFIMER verra son rôle économique renforcé. Il contribuera enfin à développer des démarches de qualité et un partenariat entre l'amont et l'aval de la filière, pour une meilleure prise en compte des réalités du marché.

S'agissant de l'investissement en faveur de la pêche artisanale, la loi d'orientation a prévu un dispositif fiscal d'incitation lors de la première installation. Toutefois, la récente mise en place du système SOFIPECHE ne permet pas encore d'en dresser le bilan.

Si nous apprécions positivement le niveau des dotations destinées à la modernisation de la flotte, nous estimons cependant, monsieur le ministre, que le retour à une politique de modernisation des navires de pêche industrielle notamment, sur lequel le ministère est silencieux, nécessitera à partir de l'an 2000 des crédits plus conséquents dans la perspective de la nouvelle politique commune des pêches de 2002.

Voilà, mes chers collègues, ce qu'il m'importait de vous dire sur le budget pêche. Compte tenu des éléments d'appréciation que je vous ai soumis et des crédits consacrés à la bonne application de la loi d'orientation, la commission de la production et des échanges vous propose de voter ce budget.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Je vous remercie, monsieur le rapporteur, pour ce strict respect de votre temps de parole.

La parole est à M. le rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour le budget annexe des prestations sociales agricoles.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour le budget annexe des prestations sociales agricoles.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le budget annexe des prestations sociales agricoles qui nous est proposé pour 1999 est stable en francs constants, car les économies de constatation résultant de la diminution des effectifs du régime agricole suffisent en fait à couvrir la mesure de revalorisation des retraites que ce BAPSA comporte.

Le Gouvernement a inscrit, ou plutôt va inscrire par voie d'amendement, une revalorisation significative des petites retraites agricoles. J'approuve naturellement cette mesure...

M. Jérôme Cahuzac.

Quelle démagogie ! (Sourires.)

M. Charles de Courson, rapporteur spécial.

... qui s'inscrit, monsieur le ministre, dans la continuité de celles décidées à l'initiative de vos trois prédécesseurs, MM. Jean Puech, Philippe Vasseur et Louis Le Pensec. Cet effort continu pour les petites retraites agricoles ne doit toutefois pas s'achever en 1999 et j'aurai l'occasion de vous interroger sur ce que vous comptez faire au-delà de cette échéance.

Mais, avant d'en venir à l'importante question des retraites, je voudrais évoquer une à une, sans m'attarder sur toutes, les lignes de recettes et de dépenses du budget annexe. L'analyse de ces lignes est, en effet, à l'origine de mes réticences vis-à-vis du budget que vous nous proposez, compte tenu des multiples problèmes de cohérence qui s'en dégagent.

S'agissant des recettes, j'évoquerai d'abord celles qui proviennent des cotisations des agriculteurs. Celles qui sont inscrites au budget annexe ressortent en augmentation de 4,4 % sur le BAPSA de l'an dernier, ce qui rend compte d'un certain ralentissement de l'évolution des revenus agricoles, mais aussi de la prise en compte dès le BAPSA 1999 des cotisations supplémentaires qui seront prélevées pour financer les retraites proportionnelles des conjoints-collaborateurs, mesure qui figure dans la loi d'orientation agricole.

Vous estimez, en effet, que, dès l'an prochain, les 103 000 conjointes potentiellement concernées choisiront toutes ce statut, ce qui est une hypothèse très optimiste qui me paraît conduire à une surévaluation potentielle des recettes de cotisations.

Je reviendrai maintenant brièvement sur les conditions dans lesquelles s'est effectué, en 1997 et 1998, le basculement des cotisations maladies sur la CSG pour les


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agriculteurs et les retraités agricoles. Globalement, les uns et les autres ont été plutôt gagnants, les exploitants ayant gagné environ 0,65 point de pouvoir d'achat sur leur revenu net et les retraités 1 point. Cependant, ce gain est moindre que celui, de l'ordre de 1,5 point, connu par les salariés. Surtout, il est inégalement réparti et beaucoup ont, en fait, été perdants dans l'opération. Il en est ainsi de tous ceux qui bénéficiaient d'exonérations ou d'abattements sur les cotisations et qui ne les retrouvent pas sur la CSG : les jeunes installés, les pluriactifs, les préretraités, les veuves ou divorcées qui reprennent l'exploitation du conjoint, les retraités polypensionnés et ceux qui bénéficient de majorations pour avoir élevé trois enfants, soit peut-être un million de personnes.

Cette situation illustre la grande difficulté à parvenir à des solutions vraiment équitables en matière de cotisations sociales agricoles tant que l'on n'aura pas mené à bien la réforme de l'assiette sociale, c'est-à-dire tant que l'on n'aura pas éclaté cette assiette entre le revenu du travail et celui du capital. C'est pourquoi j'ai déposé, en le limitant à son volet assiette sociale, un amendement que j'ai déjà eu plusieurs occasions de défendre et qui vise à instituer une réserve spéciale d'autofinancement en sortie de la déduction pour investissement.

M. François Sauvadet.

Très bien !

M. Charles de Courson, rapporteur spécial.

S'agissant des impositions affectées du budget annexe, j'approuve la mesure de simplification que constitue la suppression de la contribution additionnelle à l'impôt foncier non bâti.

En revanche, je m'interroge sur l'évaluation des recettes tirées de la TVA que comporte ce BAPSA. Je les ai en effet comparées aux derniers résultats connus, donc aux réalisations de 1997. Je ne comprends pas comment, à taux de prélèvement constant, les recettes de TVA nette du BAPSA pourraient augmenter de 11,8 % en 1999 par rapport aux réalisations de 1997 alors que l'augmentation, sur la même période, de celles affectées au budget général serait seulement, là aussi à structure constante, de 8,5 %. J'ajouterai un second motif d'interrogation : ces 8,5 % eux-mêmes sont calés sur la prévision de croissance du Gouvernement pour 1999, soit 2,7 % en volume et 1,3 % en valeur. Malheureusement, les instituts de prévision les plus optimistes évaluent aujourd'hui à 2,4 % la croissance en volume. Quant à l'inflation annuelle, elle est tombée à 0,5 %. Inscrire des rentrées de TVA optimistes dans le BAPSA initial permet, certes, de réduire la subvention d'équilibre prévue au budget de l'agriculture, mais après, en gestion, il faut bien couvrir les dépenses.

Or le seul ajustement de la prévision du BAPSA sur la prévision du budget général pour la TVA conduit à réduire de 700 millions de francs votre évaluation pour 1999. Si l'on y ajoute les effets d'une croissance économique en valeur moindre que prévue, on risque d'être proche d'un milliard de francs de moins-values sur la TVA-BAPSA.

Une autre ligne des recettes fiscales du budget annexe me paraît poser un problème encore plus grave : le milliard de francs de produit de contribution sociale de solidarité des sociétés, dite C3S, qui est affecté au BAPSA par la loi de financement de la sécurité sociale en contrepartie de son exclusion définitive du bénéfice de cette ressource à compter de l'an 2000.

Je vous poserai deux questions, monsieur le ministre, sur ce problème que j'ai développé dans mon rapport écrit.

D'abord, est-il raisonnable de financer cette dépense pérenne qu'est la revalorisation des petites retraites par une ressource non reconductible, puisque le budget annexe ne percevra plus de C3S dès l'an 2000 ? Dès cette échéance, monsieur le ministre, vous serez bien obligé d'augmenter à nouveau la subvention d'équilibre pour compenser la disparition de la C3S. Je crains que vous ne soyez contraint de financer partiellement cette augmentation inévitable par une redéploiement des autres crédits de votre ministère.

Seconde question : est-il légitime de priver le régime agricole d'une ressource qui est en partie assise sur les employeurs du secteur agricole, notamment le Crédit agricole et les coopératives agricoles et viticoles, et qui a justement pour objet de compenser, pour les régimes de non-salariés, les effets du développement du salariat ? J'ai d éposé un amendement pour garantir l'attribution pérenne au BAPSA d'une fraction de la C3S égale, au minimum, à celle qui est due par les redevables du monde agricole.

J'évoquerai rapidement les autres ressources du budget annexe. La poursuite de la diminution des versements du fonds de solidarité vieillesse au titre du minimum vieillesse est une conséquence directe et mécanique des mesures successives d'amélioration des petites retraites agricoles. Ce versement aura presque été divisé par deux de 1994 à 1999. Je remarque toutefois que votre estimation pour 1999 ne tient pas compte des effets de la revalorisation des pensions que vous proposez par ailleurs. La contribution du FSV sera donc, selon toute vraisemblance, inférieure à ce qui est inscrit dans le BAPSA, ce qui, là aussi, pose un problème de cohérence. J'ajouterai que le FSV est financé par la CSG que paient toutes les catégories professionnelles, y compris les agriculteurs, les droits sur les alcools et les boissons, qui pèsent sur les prix à la production pour les viticulteurs, ainsi qu'à l'avenir la C3S, au détriment du régime agricole. C'est pourquoi il me semble anormal que la diminution rapide de la participation du FSV au financement du régime agricole soit intégralement compensée par l'augmentation de sa participation à celui des régimes salariés, à travers la validation des annuités de chômage et la création du fonds de réserve des retraites, qui, selon la loi de financement, ne pourra pas bénéficier aux retraités agricoles. Le FSV ou la C3S devraient être mis à contribution pour financer des mesures au profit de ceux-ci.

Quant à la diminution de la subvention d'équilibre de l'Etat, qui passe, mes chers collègues, de 7,8 à 4,9 milliards de francs en 1999, on doit l'apprécier en tenant compte de tous les problèmes évoqués sur les autres lignes de recettes, voire de dépenses, puisque la subvention d'équilibre assure l'ajustement entre ces autres recettes et les charges.

En ce qui concerne les dépenses, il me faut encore évoquer plusieurs problèmes de cohérence. Ainsi, pour ce quie st des charges d'intérêts, vous proposez d'inscrire 173 millions de francs en 1999, ce qui représenterait une augmentation de 5 % par rapport aux prévisions de dépenses révisées pour 1998, soit 165 millions de francs.

Or, dans le même temps, la loi de financement de la sécurité sociale relève de 23 % le plafond du découvert de trésorerie autorisé au régime agricole. Sauf à attendre une forte baisse des taux d'intérêts à court terme, dont le niveau est déjà très bas, il me semble pourtant que les agios prévisionnels devraient plus ou moins suivre le montant du découvert prévisionnel.


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Pour les dépenses de prestations sociales, nous constatons aussi des problèmes de cohérence entre les différents textes législatifs en débat : la loi d'orientation agricole, la loi de financement de la sécurité sociale et le BAPSA. J'ai remarqué ainsi que vous prévoyez une diminution des dépenses d'allocations de remplacement pour les femmes enceintes, alors même que le projet de loi d'orientation prévoit une amélioration de ces allocations qui coûtera au moins 6 millions de francs, ce dont, d'ailleurs, on ne peut que se féliciter.

De même, vous avez construit vos prévisions pour les dépenses de prestations familiales sur la perspective d'une revalorisation égale de la base mensuelle des allocations familiales et des retraites, soit 1,2 %. C'est une erreur révélatrice, car vous n'avez pas anticipé que le Gouvernement déciderait, dans le cadre de la loi de financement, de n'accorder aux familles qu'une revalorisation inférieure, soit 0,7 %.

Vos prévisions de dépenses ne tiennent pas compte non plus des différentes autres mesures inscrites dans la loi de financement en matière de prestations familiales.

S'agissant enfin des dépenses de maladie, compte tenu des d épassements que l'on constate actuellement sur l'ensemble des régimes, je m'interroge sur vos prévisions pour 1999.

Les différents points que j'ai évoqués m'amènent à douter de l'équilibre du budget annexe en gestion. Ils illustrent également la redondance et les incohérences qui s'attachent au débat sur le BAPSA, maintenant que nous avons celui sur la loi de financement de la sécurité sociale, à laquelle s'est ajoutée, circonstance particulière cette année, la loi d'orientation. J'ai rencontré les différents syndicats agricoles et la présidente de la CCMSA et je leur ai demandé de réfléchir à l'opportunité de conserver ce budget annexe, ainsi qu'aux conditions de sa suppression éventuelle. J'espère, monsieur le ministre, que nous pourrons avancer sur ce point.

J'en viens maintenant au sujet principal, la revalorisation des retraites agricoles.

M. Pierre Forgues.

Ah !

M. Charles de Courson, rapporteur spécial.

Le 1,2 milliard de francs que vous nous proposez, monsieur le ministre, dont 400 millions sous forme d'amendements, s'inscrit dans la continuité de ce qui a été fait depuis 1994.

M. Pierre Forgues.

Depuis l'an dernier !

M. Charles de Courson, rapporteur spécial.

En effet, le coût annuel cumulé des mesures prises de 1994 à 1998 représentera 5 milliards de francs en 1999 ; l'effort supplémentaire a bien été en moyenne d'un milliard de francs par an. Je pense que cet effort devra être poursuivi à ce niveau pendant plusieurs années encore.

Je tiens donc à vous interroger, monsieur le ministre, sur vos intentions en la matière. D'abord, quels sont les objectifs visés pour les différentes catégories de retraités agricoles ? Pour ma part, il me semble que la force des engagements politiques qui ont été pris doit nous conduire à atteindre les 75 % du SMIC net pour les anciens chefs d'exploitation.

M. François Sauvadet.

Très bien !

M. Charles de Courson, rapporteur spécial.

Pour les autres catégories, le minimum vieillesse est un objectif légitime.

Ma deuxième question porte sur le calendrier, ce qui m'amène naturellement à évoquer les coûts et le ciblage des mesures. La mesure 1999, comme d'ailleurs les mesures précédentes, devrait apparemment être réservée aux retraités ayant cotisé au régime agricole trente-deux années et demie ou plus. Ce ciblage a pour objectif avoué d'écarter le plus grand nombre de polypensionnés ayant acquis des avantages vieillesse dans d'autres régimes. Mais, d'une part, il écarte les pluriactifs successifs, mais pas les pluriactifs simultanés ; d'autre part, il peut conduire à des situations injustes, notamment vis-à-vis de conjointes ou veuves aujourd'hui octogénaires qui ont cotisé moins de trente-deux ans et demi, tout simplement parce que les cotisations des conjoints n'existaient pas dans leur jeunesse, alors que bien évidemment elles travaillaient à la ferme.

M. le président.

Il faut penser à conclure, monsieur de Courson !

M. Charles de Courson, rapporteur spécial.

Mon idée est donc qu'il serait plus équitable, en contrepartie d'un abaissement de ce plancher de trente-deux années et demie, de n'accorder les majorations de retraite qu'à ceux qui ne disposent pas, par ailleurs, d'un certain niveau d'avantages vieillesse provenant d'autres régimes. Aucun des syndicats agricoles que j'ai rencontrés n'a rejeté le principe d'une telle disposition. Je sais que cela poserait des problèmes techniques. Mais pourriez-vous nous indiquer, monsieur le ministre, si vous êtes prêt, au moins, à lancer des simulations sur cette hypothèse ? Par ailleurs, lors du colloque qui s'est tenu le 12 octobre dernier, à l'Assemblée nationale, l'hypothèse de l'instauration d'un régime complémentaire obligatoire pour les agriculteurs a été envisagée. Quelle est la position du Gouvernement sur ce point ? Pour ma part, je ne vous cacherai pas une certaine réticence liée tout à la fois au niveau déjà très élevé des prélèvements sociaux sur le revenu agricole, qu'il est donc inopportun d'augmenter encore, et au déclin démographique du monde agricole, qui rend pour le moins aléatoire l'équilibre d'un nouveau régime par répartition. Pourquoi ne pas chercher plutôt à conforter le régime de capitalisation facultative qui existe déjà, à l'occasion du débat qui a été annoncé sur l'in stauration d'une forme ou d'une autre de fonds de pension ? Je souhaite enfin aborder deux sujets qui concernent la gestion du régime des non-salariés agricoles.

M. le président.

Faites-le vite, monsieur de Courson, s'il vous plaît !

M. Charles de Courson, rapporteur spécial.

L'un est le regroupement des caisses de mutualité sociale agricole, que je considère comme inévitable. Votre prédécesseur, monsieur le ministre, a fait adopter un amendement sur lequel nous reviendrons et qui, à mon avis, freine cette évolution.

Je voudrais terminer sur un sujet que vous connaissez p our avoir assuré la présidence d'une commission d'enquête sur la Corse, sujet que j'ai particulièrement étudié lors d'un contrôle sur pièces et sur place et dans un récent rapport d'information : la caisse de mutualité sociale agricole de Corse.

Les mesures d'ordre qui s'imposaient ont été prises, puisque le conseil d'administration a été suspendu et l'agrément du directeur retiré. Il faut maintenant penser à l'avenir. Je reste convaincu que le regroupement de la caisse de Corse avec d'autres caisses est une solution qui doit être envisagée, non pas à titre de sanction, mais tout simplement à cause du petit nombre d'agriculteurs corses, petit nombre qui se réduira encore quand l'application de la loi républicaine aura conduit à la cessation des exploitations non viables. Quelles sont les intentions du Gouvernement en la matière ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1998

M. le président.

Venez-en à votre conclusion, monsieur de Courson.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial.

En conclusion, j'ai décidé de m'abstenir lors du vote de ce budget, puisqu'il comporte une mesure intéressante de revalorisation des retraites mais n'en assure pas le financement audelà de 1999.

Je dois ajouter, mes chers collègues, que la commission des finances a adopté le BAPSA. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance et sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour le budget annexe des prestations sociales agricoles.

M. Robert Lamy, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour le budget annexe des prestations sociales agricoles.

Monsieur le président, monsieur le ministre de l'agriculture et de la pêche, mes chers collègues, comme l'avait déjà fait l'an dernier mon prédécesseur, Yves Fromion, je regrette très vivement que le projet de BAPSA qui nous est présenté ne respecte pas le principe de la sincérité budgétaire. La situation de cette année est particulièrement complexe puisque, si l'on veut avoir une vision complète des perspectives financières du régime de protection sociale des non-salariés agricoles, il faut tenir compte non seulement du fascicule budgétaire du BAPSA, mais aussi du projet de loi de financement de la sécurité sociale et du projet de loi d'orientation agricole adoptée en première lecture le 13 octobre dernier.

A l'évidence, il n'y a pas une volonté politique clairement affirmée d'assurer la cohérence des textes en question.

On doit en particulier relever que le projet de BAPSA ne tient pas compte du coût réel de la revalorisation des petites retraites agricoles, puisque cette mesure figure pour 800 millions de francs, alors qu'elle est aujourd'hui estimée à 1 200 millions de francs ; du montant effectif du versement de contribution sociale de solidarité des sociétés dont bénéficiera le BAPSA pour 1999, qui doit être de 1 milliard de francs et non de 600 millions comme prévu dans le fascicule budgétaire ; des mesures d'amélioration de l'allocation de remplacement prévues dans le projet de loi d'orientation agricole, du relèvement de l'âge limite d'ouverture du droit aux allocations familiales au titre des jeunes chômeurs et inactifs, et ce ne sont que quelques exemples.

J'ai eu la curiosité de me reporter à l'avis budgétaire des prestations agricoles pour 1996. Le rapporteur pour avis écrivait : « Le domaine des prestations sociales agricoles peut, du fait de sa très grande complexité, être vu comme un dédale où se perdent bien des regards pourtant avisés. » «

Raison de plus » - continuait-il - « pour mettre le Parlement dans des conditions propres à remplir sa mission de contrôle et, surtout, offrir aux agricultrices et aux agriculteurs de notre pays une grille de lecture simple et claire de leur régime de protection sociale. Or la première ligne de force de l'analyse du BAPSA pour 1996 confirme, hélas, les constatations faites ces dernières années. Le travail d'analyse, de critique et de proposition du législateur est rendu très difficile par un changement permanent de nomenclature et de présentation. » Le rapporteur de la commission des affaires cultu-

relles, familiales et sociales était alors M. Jean Glavany.

(Sourires.)

En votre nouvelle qualité de ministre de l'agriculture, il ne serait pas équitable de vous faire porter la responsabilité de ce projet de BAPSA, à l'élaboration duquel vous n'avez pris aucune part. On peut cependant espérer que, pour le prochain BAPSA, le nouveau ministre tiendra compte de l'appréciation de l'ancien rapporteur pour avis, et aura à coeur de présenter un projet complet et lisible.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Germain Gengenwin.

Certainement !

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche.

Merci, monsieur Lamy !

M. Robert Lamy, rapporteur pour avis.

Au-delà de ce problème de nature formelle, en complément, et souvent en confirmation de l'excellent rapport de mon collègue Charles de Courson, je souhaite faire trois remarques sur le contenu du projet de BAPSA pour 1999.

S'agissant de l'évolution du financement professionnel qui augmente de 2,46 %, je regrette que rien ne soit prévu pour remédier à l'inégalité de traitement dont ont été victimes les non-salariés agricoles dans le cadre de la substitution CSG-cotisations maladie opérée par la précédente loi de finances de sécurité sociale. Je rappelle que la cotisation d'assurance maladie du régime des nonsalariés de l'agriculture a été diminuée de 5,5 points par le décret fixant les cotisations 1998. Or, compte tenu des différences existant entre les assiettes de cotisation et de CSG respectivement applicables aux salariés et aux exploit ants, il aurait fallu que les cotisations techniques d'AMEXA soient diminuées de six points et demi, pour permettre aux non-salariés agricoles en activité de bénéficier du gain de 1,1 point de pouvoir d'achat enregistré par les salariés.

Pour mettre fin à l'inégalité de traitement dont ont été victimes les non-salariés de l'agriculture dans le cadre de la substitution CSG-cotisations d'assurance maladie, opérée par la loi de financement de sécurité sociale de 1998, il aurait été nécessaire de baisser d'un point le taux des cotisations techniques d'AMEXA, qui passerait ainsi de 8,13 % à 7,13 %. Je regrette que cela n'ait pas été prévu.

Ma deuxième remarque vise à souligner le caractère pour le moins opportuniste de la réapparition, dans le projet de BAPSA pour 1999, d'une recette de 1 milliard de francs au titre de la contribution sociale de solidarité des sociétés.

Pour comprendre ce que peut avoir d'étonnant l'existence d'un tel versement de C3S, il convient de rappeler très brièvement l'histoire des relations entre le BAPSA et la C3S.

C ette contribution était, à l'origine, destinée à compenser les pertes de cotisations subies par les régimes des professions non salariées agricoles du fait du développement de ces professions sous forme sociétaire. Après avoir été rendu éligible à la C3S par la loi de finances pour 1992, le BAPSA a perçu plus de 11,5 millions de francs à ce titre sur les deux exercices 1992-1993. Cette ponction massive, qui avait pour finalité réelle de permettre à l'Etat de diminuer sa subvention d'équilibre au budget annexe, a entraîné l'assèchement des réserves antérieurement constituées. En conséquence, le BAPSA n'a plus bénéficié de C3S depuis 1993.

Aujourd'hui, le projet de loi de financement comporte une disposition ayant pour objet de priver le BAPSA de la seconde répartition du produit de la C3S, soit


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1998

2,4 milliards de francs au titre de 1998. En outre, ce régime perd définitivement sa qualité de bénéficiaire de la C3S. Or la modification de l'assiette de cette imposition fait qu'aujourd'hui de nombreux salariés qui relèvent du régime agricole en sont redevables. Il ne serait donc pas illégitime que le BAPSA reçoive de manière pérenne une partie de C3S.

En revanche, il est prévu que 1 milliard de francs de C3S lui sera versé en 1999 en quelque sorte « pour solde de tout compte ». On notera qu'aucune justification de ce versement n'a été donnée par le Gouvernement et que l'exposé de motifs de l'article 2 du projet de loi de financement de la sécurité sociale reste muet sur ce point.

L'objet de ce versement est cependant révélé par la comparaison du fascicule budgétaire du BAPSA et des données actualisées fournies au dernier Conseil supérieur des prestations sociales agricoles. Il est en effet frappant de constater que le « bleu » prévoit un versement de 600 millions de C3S et une mesure de revalorisation des petites retraites agricoles d'un coût de 800 millions de francs, alors que les derniers arbitrages ont fait respectivement passer ces montants de 1 000 millions de francs à 1 200 millions de francs. La corrélation entre le montant de la recette de C3S inscrite au BAPSA et l'ampleur de l'effort de revalorisation qui y est prévu montre clairement que la première a pour but de financer le second.

Il est pour le moins contestable de couvrir le coût d'une dépense durable par une recette non reconductible.

Cette méthode, peu orthodoxe au regard des impératifs d'une bonne gestion budgétaire, a en réalité pour unique objectif de diminuer d'autant la subvention d'équilibre versée par l'Etat au BAPSA. On remarquera en effet que cette subvention diminue cette année de 37 %.

Ma troisième remarque concerne la mesure générale de revalorisation des petites retraites agricoles qui a été annoncée et que le Gouvernement introduira dans le projet de loi de finances par voie d'amendement. Je reconnais bien volontiers qu'il s'agit d'une mesure positive, qui correspond à un effort sensible en faveur des non-salariés de l'agriculture ayant fait liquider leur retraite avant le 1er janvier 1997. Je souhaite cependant rappeler qu'elle s'inscrit dans la continuité d'un effort engagé en 1994.

A titre d'exemple, le coût en 1999 de la mesure de levée de l'interdiction de cumul entre un avantage propre et un avantage de reversion décidée en 1995 en faveur des veuves agricoles sera de 2 milliards de francs.

On peut par ailleurs regretter que le Gouvernement n'ait pas mis à profit un contexte financier asez favorable pour aller un peu plus loin.

La disposition du projet de loi de financement de sécurité sociale qui prive le BAPSA d'une recette de 2,4 milliards en neutralisant la seconde répartition de C 3 S et, surtout, la baisse de près de 3 miliards de francs de la subvention d'équilibre de l'Etat montrent qu'il existait des marges de manoeuvre supplémentaires.

En en utilisant une faible proportion, il aurait été possible de porter le montant minimal de la pension de retraite des chefs d'exploitation ayant fait liquider leur retraite avant le 1er janvier 1997 à un niveau égal à la somme de la retraite forfaitaire et d'une retraite proportionnelle à 1 010 points, alors que la mesure proposée correspond à la retraite forfaitaire complétée par une retraite proportionnelle à 900 points. Un tel coup de pouce aurait permis de traiter de la même manière ces deux catégories de retraités.

En tout état de cause, la revalorisation prévue en 1999 doit être prolongée par d'autres améliorations du niveau des petites retraites agricoles. C'est le sens d'une disposition introduite par voie d'amendement dans le projet de loi d'orientation agricole et ainsi rédigée : « Le Gouvernement déposera avant le 31 décembre 1999 un rapport décrivant, catégorie par catégorie, l'évolution qu'il compte imprimer aux retraites agricoles au cours de la période du 30 juin 1997 au 30 juin 2002. Un développement particulier sera consacré aux mesures envisagées au cours de cette période, avec un effort plus important à son début pour revaloriser les plus faibles pensions. » Il serait sou-

haitable que les navettes à venir permettent de modifier cette disposition dans un sens plus contraignant pour l'exécutif, en y inscrivant l'objectif à atteindre.

Comme l'ensemble des représentants du monde agricole, j'estime que cet objectif ne peut être inférieur à 75 % du SMIC net pour une carrière complète, soit environ 4 000 francs par mois.

M. François Sauvadet.

Très bien !

M. Robert Lamy, rapporteur pour avis.

En conclusion, en tenant compte de la mesure de revalorisation des retraites, mais également de l'absence de rattrapage de la perte de pouvoir d'achat subie par les non-salariés agricoles du fait de la substitution CSG cotisations d'assurance maladie, du caractère peu satisfaisant du mode de financement de la mesure précitée et des insuffisances de son dispositif, la commission, ne suivant pas les conclusions de son rapporteur qui préconise un vote d'abstention, vous propose d'adopter ce projet de budget.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Merci, monsieur le rapporteur, d'avoir respecté votre temps de parole.

Nous abordons la discussion de ce budget.

La parole est à M. Félix Leyzour, premier orateur inscrit.

M. Félix Leyzour.

Monsieur le ministre, le budget que vous nous présentez concerne à la fois l'agriculture et la pêche. C'est mon ami François Liberti qui traitera de la partie pêche.

Les priorités que vous avez affichées sont au nombre de quatre. Premièrement, mettre en place le contrat territorial d'exploitation ; deuxièmement, assurer l'avenir des jeunes ; troisièmement, renforcer la sécurité sanitaire ; quatrièmement, revaloriser les retraites agricoles.

Ces priorités sont appelées à se mettre en oeuvre dans un contexte marqué par la grave crise porcine que nous connaissons et les discussions sur la réforme de la PAC.

Ce contexte se traduit d'ailleurs au niveau budgetaire. En effet, outre les mesures de dégagement du marché obtenues à Bruxelles, vous avez pris un certain nombre de mesures nationales en faveur des producteurs les plus fragiles.

A travers la crise que nous vivons, les problèmes de l'agriculture, au plan européen et au plan mondial, révèlent la nocivité du libéralisme à tout crin et justifien t, si besoin était, la nécessité de rechercher au plan national, avec la loi d'orientation agricole, des solutions pour une agriculture durable et de disposer, au plan européen, d'outils efficaces de régulation du marché, d'une préférence communautaire rénovée. Ainsi, en s'appuyant sur une volonté politique affimée, nous pourrons résister dans les négociations internationales à la forte pression américaine qui s'exerce déjà.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1998

Pour la mise en place de votre première priorité, le contrat territorial d'exploitation, je note que le fonds de financement est doté de 450 millions de francs. Etant donné que les contrats ne seront signés qu'au quatrième trimestre de 1999, que va-t-il se passer durant les trois premiers trimestres ? Comment organiserez-vous la transaction entre les crédits redéployés jusque-là et les nouveaux crédits ? Pour ce qui constitue la deuxième priorité, l'avenir des jeunes, nous enregistrons avec satisfaction que les crédits de l'enseignement agricole augmentent de près de 6 % et permettent la création de 180 emplois nouveaux, dont 115 d'enseignants et 60 de non-enseignants.

Le projet de budget abonde de 31 millions de francs les crédits destinés aux bourses et à la prise en charge des frais de stages et au fonds lycéen. L'enseignement privé se voit doté, quant à lui, de près de 2,7 milliards de francs dans le cadre du respect de la loi de 1984.

A ce propos, puisque les élèves de l'enseignement agricole ont participé au mouvement des lycéens, j'aimerais que vous nous indiquiez, monsieur le ministre, comment vous avez commencé de répondre, ou comment vous entendez répondre, à leurs préoccupations ? Bien que le présent budget de l'enseignement agricole soit le meilleur de la décennie (Murmures sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance), il reste encore beaucoup à faire pour appliquer le principe de 2,5 enseignants par classe ouverte et pour améliorer la situation des ATOS. Peut-on raisonnablement penser que les négociations qui ne manqueront pas d'avoir lieu avec les syndicats, déboucheront sur un plan de rattrapage ? S'agissant toujours de l'avenir des jeunes, les 645 millions de francs de la dotation devraient permettre d'aider 10 000 installations l'an prochain, ce qui constitue un objectif ambitieux qui n'est pas sûr d'être atteint. Il y a là un réel problème qui doit retenir toute notre attention.

La troisième priorité concerne la sécurité alimentaire.

J'aurais voulu m'y attarder quelques instants mais, vu le temps qui m'est imparti, je passerai directement à la quatrième priorité, celle des retraites.

Vous proposez, monsieur le ministre, une revalorisation qui, en année pleine, représente 1,6 milliard de francs, et 1,2 milliard pour les trois trimestres concernés de 1999.

Elle se traduira par le rapprochement du minimum vieillesse de la retraite minimale des chefs d'exploitation qui atteint 3 000 francs par mois. Les veuves toucheront 320 francs de plus par mois et les aides familiaux presque 500 francs de plus. Cette revalorisation concernerait 607 000 retraités. S'y ajoute une mesure de 28 millions de francs de revalorisation des carrières mixtes d'aide familial et de chef d'exploitation.

Dans une lettre que j'avais adressée à votre prédécesseur dès la présentation du budget, j'avais fait observer que, dans la mesure où l'équilibre du BAPSA se faisait en enregistrant des recettes nouvelles - 3,2 milliards provenant de la TVA qui lui est affectée -, conséquence de la reprise économique, et où le BAPSA bénéficiait d'une forte contribution des autres régimes sociaux, cela permettait une baisse de 2,5 milliards de francs de la subvention d'équilibre de l'Etat. On peut s'en féliciter pour le budget de l'Etat, dont je ne méconnais pas l'unicité.

Mais on peut aussi considérer qu'il existe là une marge de manoeuvre pour faire un effort supplémentaire en faveur des retraites.

Je ne formule pas cette demande au nom de je ne sais quelle surenchère. Mais puisqu'on a déjà fait un effort, il faut en faire encore un.

M. le président.

Monsieur Leyzour...

M. Félix Leyzour.

J'approche de ma conclusion, monsieur le président.

M. le président.

Il faudrait y arriver !

M. Félix Leyzour.

C'est pour deux raisons que je présente cette demande. Premièrement, les retraites agricoles sont faibles et les besoins des retraités évoluent. Deuxièmement, dans le cadre de la discussion de la loi d'orientation agricole, nous avons adopté un amendement indiquant que, si le plan de revalorisation portait bien sur la législature, il était nécessaire d'accélérer le rythme les p remières années. Nous sommes dans les premières années et le projet de budget pour 1999 est le premier que la nouvelle majorité maîtrise totalement.

Conjointement, il convient de relever le plafond de l'actif successoral de récupération des arrérages du Fonds de solidarité vieillesse, plafond qui limite l'accès des retraités modestes à ce dispositif. Il n'a pas été relevé depuis 1982 et est toujours fixé à 250 000 francs. Nous demandons qu'il soit actualisé à 400 000 francs.

M. le président.

Et moi je vous demande de conclure !

M. Félix Leyzour.

Je suis déjà engagé dans ma conclusion, monsieur le président.

(Sourires.)

Il y a donc, monsieur le ministre, deux manettes que vous pouvez actionner, ce qui permettrait d'apporter, dès cette année, le complément de réponse attendu à juste titre par des centaines de milliers de retraités.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. François Sauvadet.

M. François Sauvadet.

Monsieur le ministre, nous vous avons écouté avec attention présenter en commission ce budget de l'agriculture, qui a été préparé pour l'essentiel par M. Louis Le Pensec.

C'est un budget auquel vous avez assigné quatre priorités qui s'inscrivent dans la continuité de celles qu'avait définies votre prédécesseur : l'enseignement, la sécurité sanitaire et alimentaire, l'installation et la revalorisation des retraites agricoles.

Mais c'est un budget sans véritable innovation. Vous avez dit vous-même devant la commission qu'il s'agissait d'un budget de transition, hormis la création du contrat territorial d'exploitation, doté de 300 millions de francs.

Nous trouvons là bien des motifs d'interrogation.

D'abord, vous appliquez une loi qui n'est pas encore votée.

M. Germain Gengenwin.

Eh oui !

M. François Sauvadet.

... et qui n'est même pas passée devant le Sénat. Quel paradoxe ! De surcroît, ces 300 millions semblent marquer l'an 1 d'une loi d'orientation agricole qui est loin de traduire l'ambition que vous-même, en tout cas votre prédécesseur, avez affichée. J'observe d'ailleurs que vous n'avez pas dégagé de moyens nouveaux pour les objectifs nouveaux.

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche.

Monsieur Sauvadet, puis-je vous interrompre ?

M. François Sauvadet.

Bien sûr, monsieur le ministre.

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche, avec l'autorisation de l'orateur.

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Monsieur Sauvadet, vous avez raison.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1998

M. François Sauvadet.

Je vous remercie de le noter.

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

J'ai inscrit dans le budget des moyens permettant d'appliquer une loi qui n'est pas encore définitivement adoptée. Figurez-vous que je m'en étais aperçu.

M. François Sauvadet.

C'est heureux pour l'avenir.

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Mais si jamais je n'avais pas prévu les moyens nécessaires, je vous entends déjà me dire : « C'est que vous ne croyez pas à cette loi ! » J'ai donc préféré les inscrire pour crédibiliser la loi.

M. François Sauvadet.

Monsieur le ministre, vous reconnaissez que cette loi n'est pas encore votée. Vous admettrez aussi que ces 300 millions sont un peu juste pour marquer une ambition nouvelle. J'observe, je le répète, que vous n'avez pas dégagé de moyens nouveaux pour une nouvelle ambition. Vous avez simplement procédé par redéploiement, et les conséquences s'en feront sentir.

Je pense d'abord, bien sûr, aux 45 millions prélevés sur les OGAF, les opérations groupées d'aménagement foncier, qui avaient une grande utilité. Comment allez-vous procéder en 1999 pour mener à bien des opérations déjà en cours et qui sont attendues dans le monde rural ? Je pense aussi au programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole. Là encore, vous vous êtes assigné des objectifs que nous partageons en matière de préservation de l'environnement mais, depuis trois ans, les crédits affectés à ces programmes n'ont absolument pas bougé : ils stagnent à 175 millions de francs.

Je relève dans vos priorités l'absence de toute référence économique. Avec ces 300 millions de francs, combien de c ontrats territoriaux d'exploitation allez-vous pouvoir conclure, alors même que l'expérimentation a été engagée dans quatre-vingt-cinq départements ? Comment allezvous sélectionner les heureux gagnants du CTE ?

M. Germain Gengenwin.

Bonne question !

M. François Sauvadet.

Précisons aussi la nature des redéploiements. Ces 300 millions de francs proviennent pour l'essentiel, à hauteur de 140 millions, du Fonds de gestion de l'espace rural. Je vous entends encore, monsieur Glavany, réclamer avec M. Le Vern, en 1996, que les fonds du FGER soient fixés à la hauteur de ce qui était prévu.

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

En effet.

M. François Sauvadet.

Aujourd'hui, vous êtes celui qui signe l'arrêt de mort du FGER, qui n'est plus doté du moindre franc.

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Je le remplace par autre chose.

M. François Patriat, rapporteur pour avis.

Ce sera mieux, on va remplacer la Clio par la Safrane !

M. François Sauvadet.

Vous prélevez également 45 millions sur les crédits des OGAF, je vous ai déjà interrogé à ce sujet.

Quant aux offices d'intervention, je me souviens de ce que disait M. Le Vern sur la nécessité de leur donner des moyens suffisants pour assurer la gestion des marchés.

Vous les privez de 100 millions au profit de contrats dont nous voyons mal les contours et qui, de surcroît, sont par nature individuels.

Enfin, 15 millions de francs sont prélevés sur les dotations destinées au Fonds pour l'installation en agriculture.

Le FIA, que votre prédécesseur présentait l'an dernier, au moment de sa création, comme l'un des outils modernes de l'installation, se voit donc déjà amputé. Il est évident que ce redéploiement aura des incidences sur la poursuite en 1999 de certaines actions engagées, notamment au titre de la politique des filières. Je constate, en le regrettant, que la priorité affichée en faveur de l'installation des jeunes n'a pas de réelle traduction budgétaire.

En fait, la diminution des crédits relatifs à l'installation n'est que la traduction d'un constat décevant : le rythme de croissance des installations aidées s'est fortement ralenti, passant de 11 % en 1996 à 0,9 % en 1997. Audelà des aides classiques, sans doute faudrait-il mettre en oeuvre des mesures plus incitatives en matière fiscale et sociale. Ces mesures, une nouvelle fois, sont les grandes absentes de votre budget. Le rapporteur François Patriat l'a d'ailleurs souligné. Comme nous l'avons fait lors de l'examen de la loi d'orientation, nous vous demandons instamment, monsieur le ministre, une véritable réforme fiscale.

Mais était-il opportun d'amputer le Fonds pour l'installation en l'agriculture, qui passe de 160 à 145 millions, au profit du Fonds de financement des CTE ? Voilà une question toute simple à laquelle nous attendons des réponses.

Les crédits consacrés à la dotation d'installation aux jeunes agriculteurs sont simplement reconduits au niveau des années 1997 et 1998. Ils permettront de financer environ 10 000 installations en 1999.

Surtout, l'enveloppe des stages de préparation à l'installation est en diminution de 13 %, passant de 100 millions en 1998 à 96,9 millions en 1999.

Pour les préretraites agricoles, le système en vigueur n'est pas reconduit. Personnellement, je le regrette. Seule subsiste une aide à la réinsertion professionnelle des agriculteurs en difficulté, à hauteur de 20 millions de francs, ce qui est insuffisant. Cet outil que vous abandonnez permettait des départs et des installations progressifs.

Au total, la politique d'installation que vous affichez n'a donc pas, à nos yeux, de traduction budgétaire. Les jeunes agriculteurs apprécieront.

Un mot, monsieur le ministre, de la gestion de l'espace rural. La protection de l'environnement est une des préoccupations que nous partageons avec vous. Encore faut-il ne pas se contenter d'appeler à cette protection sans donner aux agriculteurs les moyens d'y faire face.

La mise aux normes des bâtiments d'élevage, qui est un des éléments importants de la protection de l'environnement, n'est dotée que de crédits reconduits à hauteur de 175 millions de francs, comme en 1997 et comme en 1998. Si l'on y ajoute le prélèvement opéré sur le FNDAE, le montant total de la contribution de l'Etat sera le même que les deux années précédentes : 325 millions de francs. C'est aussi un aspect sur lequel nous aimerions avoir des éclaircissements.

Les crédits destinés à la montagne régressent d'année en année. L'indemnité compensatrice de handicap naturel accuse un retard important en matière de revalorisation.

Je dois également vous faire part, au nom du groupe UDF, de notre inquiétude face à la suppression de la subvention de l'Etat au Fonds national de garantie contre l es calamités agricoles. Vous le savez, monsieur le ministre, l'agriculture est soumise à de forts aléas climatiques. L'Etat ne doit pas se désengager de l'effort qu'il est appelé à fournir de concert avec la profession agricole.

Nous sommes tous extrêmement attachés au système d'indemnisation en vigueur en France.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1998

Pour la pêche, secteur très important auquel Aimé Kerguéris consacrera son intervention, votre budget est honorable, mais la question du renouvellement de la flotte reste posée par la profession. Nous aimerions avoir des précisions à cet égard.

S'il est un domaine où nous pouvons nous féliciter de l'effort consenti, c'est celui de l'enseignement agricole. Il s'agit, je le souligne, de la poursuite d'une évolution déjà constatée les années précédentes.

M. François Patriat, rapporteur pour avis.

En beaucoup mieux !

M. François Sauvadet.

Je vous rappelle d'ailleurs, monsieur le ministre, qu'en 1996 ce budget avait déjà augmenté de 7 %.

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Non !

M. François Sauvadet.

Cette progression continue est liée au succès de l'enseignement agricole public et privé.

Chacun connaît ses performances, notamment en matière d'insertion professionnelle.

Mais, au-delà des postes d'enseignants et des emploisjeunes que vous avez annoncés, une réflexion s'impose sur la finalité de l'enseignement agricole, et surtout sur la souplesse que nous devons lui donner en matière de formation aux filières nouvelles.

Nous avons pris bonne note des dotations inscrites en faveur de l'Agence française de sécurité des aliments et de la mise en place d'un dispositif de bio-vigilance. Je ne reviendrai pas sur le contexte dans lequel il a été annoncé au moment de la loi d'orientation. C'est une exigence pour l'agriculture française de rester en tête des pays apportant une garantie de sécurité et de qualité alimentaire.

La forêt : à quand la loi de modernisation ? Quand souhaitez-vous la présenter au Parlement, monsieur le ministre ? Question toute simple, qui est une manière de rappeler l'importance du secteur forestier dans l'économie nationale.

Enfin, c'est l'aspect économique qui fait le plus défaut à votre budget. Les crédits d'équipement accordés par l'Etat ne cessent de chuter. Je crains qu'au travers de cette loi de finances, nous ne nous engagions pas suffisamment dans l'appui aux investissements - je pense aux coopératives agricoles, mais aussi à l'ensemble de l'industrie agro-alimentaire - et que nous ne nous privions ainsi de concours européens.

Il faut engager une réflexion sur la modernisation des filières pour leur permettre de s'adapter au contexte concurrentiel international. Cela suppose aussi, monsieur le ministre, que l'on encourage plus fortement que vous ne le faites tout le tissu des petites et moyennes industries, en les aidant à renforcer leur présence sur les marchés à l'exportation.

Nous avons pris bonne note de l'effort consenti pour la SOPEXA. Je vous renvoie à ce qui avait été réalisé l'année précédente et je suis tenté de vous dire : peut mieux faire ! Pour conclure...

M. le président.

Il le faut, monsieur Sauvadet.

M. François Sauvadet.

... je souligne que vous nous présentez ce budget dans un contexte de réforme de la politique agricole commune et des fonds structurels européens, ainsi que de discussions au sein de l'Organisation mondiale du commerce. Je souhaite, au nom de notre groupe, que nous ayons un débat, autour d'une communication du Gouvernement, sur la façon dont il va aborder ces enjeux considérables pour l'avenir du monde rural.

M. Germain Gengenwin.

Très bien !

M. François Sauvadet.

Je souhaite également, monsieur le ministre, que vous exprimiez d'une voix forte et claire la position de la France. Nous serons extrêmement attentifs aux propos que vous tiendrez.

Pour l'essentiel, votre budget n'est pas en mesure, à nos yeux, d'assurer à l'agriculture française l'avenir que vous et nous lui souhaitons. Compte tenu des incertitudes qu'il laisse subsister et de l'absence de moyens nouveaux dont il souffre, nous voterons contre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants).

M. le président.

La parole est à M. Joseph Parrenin.

M. Joseph Parrenin.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'analyse de M. Sauvadet sur ce budget m'étonne. Il le juge bon parce qu'il s'inscrit dans l'action entreprise par un gouvernement qu'il soutenait. Et quelques instants plus tard, il le trouve mauvais.

C'est un peu bizarre.

M. Christian Jacob.

Il faut suivre !

M. Joseph Parrenin.

Après avoir débattu de la loi d'orientation agricole, nous abordons aujourd'hui la discussion du budget de l'agriculture et de la pêche pour 1999, un budget en parfaite cohérence avec le projet de loi d'orientation, un budget qui réaffirme la volonté du Gouvernement d'accompagner l'agriculture française dans les mutations et les restructurations nécessaires à son avenir.

Les crédits de l'agriculture, hors subvention d'équilibre au BAPSA, enregistrent une augmentation de 3 %. Au total, ils s'établissent à 34 milliards. C'est un budget très favorablement accueilli dans le monde agricole. Le Gouvernement et la majorité parlementaire prennent en compte pleinement la fonction économique, la fonction sociale et la fonction environnementale des agriculteurs dans notre société. C'est dans un souci constant d'équilibre et d'égalité sur le territoire que ce budget est construit.

Des agriculteurs sur l'ensemble du territoire ; des agriculteurs et des industries de transformation orientés vers des produits de qualité ; une agriculture qui préserve nos paysages et nos ressources naturelles : tout cela traduit une ambition très forte et pleine d'espoir pour les agriculteurs. C'est plus de valeur ajoutée et donc plus d'agriculteurs et plus d'emplois en général ; c'est également une réponse à l'attente de la société.

Ce budget traduit des progrès réellement significatifs, comme la création du Fonds de financement des contrats territoriaux d'exploitation, doté de 300 millions de francs, auxquels s'ajouteront des cofinancements européens. Les premiers CTE seront mis en place dès le deuxième semestre de 1999.

J'ai lu une quinzaine de propositions d'amendements sur les CTE. Leur auteur, qui a dû les rédiger sur un coin de bureau, a sans doute éprouvé des remords, car il part de la suppression totale des 300 millions de crédits pour en arriver à demander une réduction de 1 million seulement. Dommage qu'il ait oublié le dernier amendement, celui qui maintiendrait intégralement l'enveloppe des CTE : les agriculteurs lui en auraient été très reconnaissants.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1998

M. Christian Jacob.

Hum !

M. Jean Auclair.

On en reparlera !

M. Joseph Parrenin.

Ce budget présente également des progrès significatifs avec l'augmentation de 6 % des moyens accordés à l'enseignement agricole. Les choix sont clairs. Nous montrons ainsi notre ambition très forte pour les jeunes. Il est vrai que les débouchés de l'enseignement agricole sont excellents. Du reste, faute de place, un grand nombre de jeunes ne sont pas acceptés dans les lycées agricoles. Que pouvons-nous faire pour remédier à cette situation, monsieur le ministre ? Progrès significatifs encore avec l'accroissement de plus de 10 % des crédits en faveur de la sécurité et de la qualité. Les producteurs et les consommateurs seront ainsi réconciliés.

Enfin, ce budget enregistre des progrès significatifs avec la revalorisation des retraites qui montre le respect des engagements pris. Je ne m'étendrai pas sur ce sujet, Germinal Peiro en parlera mieux que moi.

M. Germinal Peiro.

Absolument ! (Sourires.)

M. Joseph Parrenin.

Mais je veux redire ici que jamais - même si des améliorations avaient été apportées les années passées - un tel effort n'avait été consenti en faveur des plus petites retraites.

M. Jean Auclair.

Et la CSG ?

M. René Leroux.

C'est vous qui l'avez augmentée !

M. le président.

Messieurs, s'il vous plaît, pas d'interpellation !

M. Joseph Parrenin.

Les dotations en faveur de l'élevage et le soutien aux zones défavorisées, ainsi que l'aménagement de l'espace et les crédits en faveur de la forêt, marquent une certaine continuité de cette politique, indispensable dans notre pays.

Je souhaite insister ici sur l'attente certaine de revalorisations de l'indemnité spéciale montagne et des indemnités compensatrices de handicap naturel, ainsi que sur les besoins de versement compensateur à l'Office national des forêts. Là encore, il y a une attente très forte des élus, notamment des élus de communes forestières, qui sont quelque peu inquiets. Mais je suis sûr que, sur tous ces p oints, vous allez nous apporter des réponses satisfaisantes.

Je ne peux terminer sans parler de la politique agricole commune et des fonds structurels. Cette réforme est importante et la négociation risque d'être très difficile. La représentation nationale aura à se prononcer au cours des prochaines semaines sur une proposition de résolution.

La majorité parlementaire souhaite que les intérêts de l'agriculture française soient pris en compte. Cette réforme ne doit pas conduire à une remise en cause de la politique agricole commune. Elle doit se faire avec de réels choix de rééquilibrage des aides entre les différentes régions et les différentes productions. Elle doit prendre en compte de manière significative les emplois en agriculture et surtout mettre un frein aux disparitions d'exploitations agricoles, selon nous, beaucoup trop nombreuses depuis la dernière réforme de la PAC. Ce sont les objectifs de la loi d'orientation agricole, que nous venons d'examiner, et ce doit être demain ceux de la politique agricole commune.

Le Gouvernement et vous-même, monsieur le ministre, pouvez compter sur notre soutien dans cette mission difficile. La majorité sera vigilante et constructive. Elle vous apportera ses réflexions et sa contribution dans ce qu'il est convenu d'appeler le « marathon des négociations ».

Nous avons confiance dans l'avenir de notre agriculture comme une majorité d'agriculteurs ont confiance dans la politique du Gouvernement et de notre assemblée.

M. Jean Auclair.

C'est vite dit !

M. Joseph Parrenin.

C'est la raison pour laquelle nous voterons ce projet de budget.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Jacques Rebillard.

M. Jacques Rebillard.

Monsieur le ministre, je profiterai du temps de parole assez long accordé au groupe RCV pour non seulement commenter votre budget, mais aussi aborder les aspects de votre politique agricole qui conditionnent tout autant l'avenir de l'agriculture française.

Voici donc le second budget de l'agriculture présenté par notre majorité, mais dans un contexte nouveau : celui de la loi d'orientation agricole. Dès cette année, de nouvelles inflexions apparaissent dans l'utilisation des lignes budgétaires. Nous le voyons pour le fonds de gestion de l'espace rural, le fonds d'installation en agriculture, les offices ou encore les OGAF-aménagement. L'objectif est d'avoir une approche non plus segmentée de l'agriculture mais une approche globale reposant avant tout sur un revenu décent pour tous les agriculteurs, une approche qui encourage l'installation des jeunes, qui favorise l'aménagement de l'espace ou l'entretien du territoire, parce que l'agriculteur sera rémunéré pour ces tâches. Enfin, il faut une approche globale pour encourager la qualité et contribuer ainsi à la maîtrise de la production.

La présentation de ce budget doit être scindée en deux parties : budget hors BAPSA et BAPSA. L'amalgame des deux permet à l'opposition de déplorer que le budget de l'agriculture baisse. Ainsi, dans le même temps, elle réclame une baisse globale du budget de la nation mais elle exige sur chaque budget pris séparément une augmentation des moyens. Voilà bien une preuve supplémentaire de ses contradictions.

M. François Patriat, rapporteur pour avis.

Très bien !

M. Jacques Rebillard.

Les économies ont été possibles sur le BAPSA grâce à la bonne tenue de notre économie, aux rentrées de TVA supplémentaires. Nous aurions tort de nous en priver. Je rappelle que ces économies ont été réalisées grâce à la contribution de la C 3 S, cette contribution ayant été étendue aux coopératives agricoles en 1996 par l'ancienne majorité. A ce propos, je tiens à souligner que la C 3 S a beaucoup pénalisé les coopératives en réduisant fortement leur capacité d'investissement. Depuis cette date, près de 180 millions de francs sont ainsi soustraits chaque année à l'investissement.

Avant de proposer de nouvelles mesures de nature fiscale, il serait donc préférable d'analyser la fiscalité existante afin qu'elle ne pénalise pas davantage l'investissement.

Ce budget augmente donc de 3 % hors BAPSA.

Comme il n'est pas possible d'analyser tous les postes, je n'en retiendrai que trois : celui de CTE, celui des SAFER et celui de l'enseignement agricole.

Une première enveloppe de 300 millions de francs est réservée aux CTE. Je constate que, dans beaucoup de départements, dans le cadre de la préfiguration, et à l'initiative plus particulièrement des jeunes agriculteurs, des groupes de réflexion se sont mis au travail pour proposer un contenu au CTE. Cette réflexion, fort à propos, va de pair avec celle engagée dans le cadre des prochains contrats de plan et de l'utilisation des fonds structurels


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européens. Je suis heureux que la profession se saisisse de ces opportunités pour définir elle-même son avenir.

Contrairement à ce que l'opposition proclame, le CTE va marcher ; il mobilise déjà ! Si l'année 1999 voit la mise en place de ce dispositif à un coût budgétaire limité, il faudra veiller à ce que, dès l'année 2000, les moyens financiers soient suffisants pour répondre à toutes les demandes sans délai d'attente. Nous comptons sur vous, monsieur le ministre, pour mobiliser, dans le cadre de la réforme de la PAC, les fonds nécessaires à la généralisation des CTE. Ces sommes pourraient être prises dans les fonds de flexibilité prévus dans les dernières propositions du paquet Santer, ou encore prélevés dans le cadre du plafonnement des aides par exploitation.

Imaginons, par exemple, que nous limitions ces aides à 180 000 francs par UTH ; plus de 3 milliards de francs pourraient être ainsi économisés et affectés aux CTE. Ce plafonnement, qui répond à une revendication de bon sens, obéirait à un objectif de justice et d'aménagement du territoire en faveur des régions les plus défavorisées.

Elle limiterait la course aux hectares ou aux UGB et encouragerait, soit dit en passant, la réduction du temps de travail chez les agriculteurs qui auraient bien besoin de prendre un peu plus de temps de loisirs.

Venons-en, à présent, aux conséquences de la loi de finances pour 1999 qui a prévu la réduction des droits de mutation sur les transactions immobilières. Cette réduction, qui va dans le bon sens, ne va pas sans poser quelques problèmes aux SAFER dont une grande partie des ressources étaient liées à la fiscalité sur ces transactions.

L'article 49 de la loi d'orientation agricole a redéfini les missions des SAFER, mais il faut leur donner les moyens de leurs nouvelles missions : portage du foncier pour faciliter l'installation des jeunes agriculteurs ou acquisitions foncières pour des projets d'aménagement de l'espace. Ce budget ne dégage pas de nouveaux moyens ; il nous faudra y réfléchir sérieusement si nous voulons que les SAFER restent un outil d'aménagement du territoire et d'équilibre entre les exploitations.

T roisième point, l'enseignement agricole, dont le budget va croissant, passant de 6,4 milliards à 6,8 milliards, et nous ne pouvons que nous en féliciter. Les effectifs des élèves sont en constante augmentation. Une telle évolution est un succès pour ce type d'enseignement, dont le contenu est basé sur le concret, et qui permet souvent à des jeunes en situation d'échec dans les filières de l'enseignement général de retrouver un intérêt pour la formation et de réussir leur parcours scolaire.

La seconde raison de ce succès tient à l'attirance toujours plus grande des jeunes vers les métiers de la nature.

Nous ne devons pas les décevoir ; il faut donc créer de véritables débouchés. N'oublions pas non plus que cet enseignement s'adresse prioritairement à de futurs agriculteurs. Et si nous voulons que ces jeunes s'adaptent au nouveau contexte que nous mettons en place par la loi d'orientation agricole, nous devons adapter le contenu de l'enseignement. Très imprégné d'une culture productiviste, il devra prendre en compte les contraintes environnementales et la manière de limiter les conséquences négatives du recours de plus en plus grand aux engrais et autres produits phytosanitaires. Il devra aussi sensibiliser les élèves aux aspects liés à la commercialisation des produits, source de plus-values directes. Une réforme des proprammes s'impose, de même qu'un effort vers la form ation continue, celle des enseignants et des professionnels.

J'en viens à la seconde partie du budget, le BAPSA.

Sur le relèvement des retraites les plus basses, un effort de clarification s'impose. Chacun reconnaît les efforts engagés par le Gouvernement - 1,2 milliard de francs sur le budget pour 1999 - en faveur des retaites les plus basses, et nous ne doutons pas, monsieur le ministre, de votre volonté de poursuivre dans cette direction. Mais une clarification s'impose dans l'articulation entre le montant de ces retraites et celui du fonds de solidarité vieillesse, le FSV. Nous ne comprenons pas que l'on ne puisse pas aboutir plus rapidement à l'équivalence entre le niveau des retraites agricoles les plus basses et le FSV. Je ne suis pas sûr que cette mesure se traduise par un coût global pour l'Etat très supérieur. Nous aimerions, monsieur le ministre, que vous puissiez nous éclairer sur ce dossier très important.

Toujours à propos du BAPSA, on sait que, à la suite de l'épidémie d'encéphalite spongiforme bovine, les éleveurs de viande bovine, très touchés économiquement par les conséquences de cette affaire, avaient bénéficié d'un report sans intérêt de deux années de leurs cotisations sociales agricoles. L'échéance arrivera donc au cours de l'année 1999. Or, nous le savons, ces éleveurs, et en particulier ceux du bassin allaitant, sont ceux dont les revenus sont les plus faibles, ceux qui ont le moins bénéficié de la dernière réforme de la PAC et ceux qui ont le plus à redouter de la prochaine. C'est pourquoi je souhaiterais, monsieur le ministre, que, profitant d'un budget plus facile, vous étudiiez toutes les mesures d'allégement possibles, de l'effacement de cette dette à son étalement sur quelques années supplémentaires.

Voilà pour les cinq points de ce budget que nous souhaitions donc évoquer : le CTE, l'avenir des SAFER, l'évolution du contenu de l'enseignement agricole, la progression des retraites agricoles, et un aménagement du remboursement de l'avance de cotisations sociales des éleveurs de viande bovine.

Mais ce budget doit être mis en perspective, il sera le dernier avant la prochaine réforme de la PAC. Dans un an, nous serons dans un contexte tout à fait nouveau. Je suis persuadé que le Gouvernement a eu raison de mettre en oeuvre une nouvelle loi d'orientation agricole qui est un signe fort en direction de la Commission européenne dont chacun se plaît à souligner les contradictions. Comment vouloir à la fois répondre aux impératifs du marché mondial et maintenir une population agricole nombreuse qui, par obligation, produit à des coûts supérieurs à celui du marché mondial ? En politique, il faut prendre des risques et savoir anticiper, c'est le cas avec cette loi. La France, premier producteur agricole de la CEE, se devait de montrer l'exemple. Si l'objectif de la Commission reste, dans un contexte très libéral, de limiter les manques à gagner d'une diminution des prix, cette réduction, à elle seule, ne saurait résoudre tous les problèmes du marché, notamment celui de l'adaptation de la production à l'offre ou encore la maîtrise de la production.

En l'absence de jachère, ou de prime à l'abattage des jeunes veaux, si l'on ne veut pas, à l'instar de la production porcine, saturer les marchés, des mécanismes de régulation devront être mis en place. Le contrat territorial d'exploitation pourrait apporter une partie de la réponse dans la mesure où il encouragera des modes de production moins intensifs, mais cela ne sera pas suffisant.

Méfions-nous aussi des primes à l'extensification qui ne doivent pas conduire à la désertification des territoires.

J'aimerais, monsieur le ministre, avoir votre sentiment sur


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la maîtrise de production. Elle doit être une adaptation aux besoins du marché, et sera un sujet de préoccupation permanent pour les prochaines années.

Toujours en matière de réforme de la PAC, la version Santer devrait être l'occasion de simplifier les démarches administratives. Si, en matière de versement de primes, elles sont tolérables pour les cultures, elles sont, en revanche, insupportables en matière d'élevage : indemnité compensatrice de handicap naturel, prime à l'herbe, complément extensif, prime à la vache allaitante et prime au bovin mâle. Pour cette dernière, un double prix de marché s'est même instauré, le prix de ces animaux étant différent selon qu'ils sont encore primables ou non ! Il faut simplifier et cette réforme doit en être l'occasion.

Une véritable prime variable à l'UGB, selon le taux de chargement, aurait le mérite de la simplicité. La Commission européenne engendre des anti-Européens à force de complexifier les règlements. A six mois des élections européennes, il faut consentir un effort pour réconcilier les paysans avec les eurocrates. Monsieur le ministre, quelles sont vos intentions dans ce domaine ? Le dernier point de mon intervention porte sur la mise en place d'une taxation écologique, dite « taxe générale sur les activités polluantes », qui concernera l'agriculture.

Les organisations professionnelles sont déjà très mobilisées sur ce sujet. Je souhaite que des discussions soient engagées très rapidement afin que ces mesures se fassent à pression fiscale constante et que, en cas de pratiques

« peu polluantes », elles se traduisent même par une diminution de la pression fiscale.

M. François Sauvadet.

Les agences de bassin aussi sont intéressées !

M. Jacques Rebillard.

Le CTE, que nous souhaitons encourager, devrait en profiter. Ce serait un encouragement supplémentaire pour lui. Où en sommes-nous des discussions sur ce sujet avec le ministère de l'environnement et celui des finances ? Merci, monsieur le ministre, d'avoir été attentif et de bien vouloir répondre aux quelques questions que je vous ai posées sur le budget, mais aussi sur les outils de la maîtrise de la production, les simplifications administratives et la mise en place de la TGAP. En tout état de cause, le groupe RCV votera votre budget.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste.)

Suspension et reprise de la séance M. le président La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures, est reprise à dixsept heures dix.) M. le président La parole est à M. Aimé Kerguéris.

M. Aimé Kerguéris.

Le projet de budget Agriculture, pêche, BAPSA, que vous nous soumettez aujourd'hui, monsieur le ministre, est un budget très important. Pourtant, force est de constater qu'il n'est pas à la hauteur de ses ambitions.

Malgré les 33,55 milliards de crédits affichés, le budget de l'agriculture est en diminution de 6 % par rapport à 1998, les crédits de la pêche stagnent et le financement de la revalorisation des retraites n'est assuré, cette année, que par une mesure non reconductible.

En ce qui concerne l'agriculture, la lecture attentive de vos crédits montre une augmentation de 5 % du titre III des moyens et des services en personnel et en fonctionnement et une baisse de plus de 10 % des dépenses d'intervention en actions économiques, sociales, éducatives et culturelles.

A l'heure où la France doit se préparer aux grands rendez-vous internationaux, tels que la réforme de la politique agricole commune et les négociations de l'Organisation mondiale du commerce, je ne suis pas sûr que ce choix politique soit judicieux.

Qu'attendons-nous, en effet, de votre budget sinon qu'il prépare notre agriculture à relever les grands défis de demain ? Or je n'y vois rien qui permette à nos agriculteurs de mieux répondre à la « mondialisation des activités et des échanges agricoles », pour reprendre l'expression du rapporteur.

Votre budget pour 1999 affiche trois priorités mais peu de moyens.

D'abord, il donne des moyens d'existence aux contrats territoriaux d'exploitation, CTE, mesure phare de la loi d'orientation agricole adoptée récemment à l'Assemblée nationale, par la création d'un fonds de financement doté de 300 millions de francs.

Si l'on peut comprendre qu'une ligne budgétaire spécifique ait été inscrite pour financer les CTE, on ne peut que déplorer que ce soit fait par le redéploiement de crédits totaux ou partiels et au détriment d'autres fonds, tout aussi importants. On voit ainsi disparaître le fonds de gestion de l'espace rural qui répondait à de réels besoins, ainsi que les opérations groupées d'aménagement foncier qui avaient aussi leur utilité.

Quant au fonds pour l'installation en agriculture, présenté en 1998 comme un outil financier prometteur, et aux offices d'intervention, qui répondent efficacement à des problèmes conjoncturels parfois très lourds et très urgents, ils se trouvent amputés respectivement de 15 millions et de 100 millions de francs.

Ce constat m'amène à vous poser trois questions : Comment expliquez-vous ces mesures d'amputation ? Le fonds pour l'installation en agriculture, qui est chargé notamment de faciliter les installations de personnes étrangères au milieu agricole, avait été présenté l'année dernière comme une mesure très porteuse. Quel bilan peut-on en tirer après une année de fonctionnement ? Enfin, selon votre montage financier, les aides nationales pourraient être complétées par des aides communautaires après la réforme de la PAC. Le projet de réforme de la PAC constituera de ce fait un enjeu décisif pour le financement de ces contrats. Quelles assurances pouvez-vous nous donner sur cette dernière partie du financement des CTE qui, aujourd'hui, demeure, par définition, très aléatoire ? Les crédits affectés à l'enseignement, à la formation et à la recherche s'élèvent à 6,8 milliards de francs, ce qui représente une augmentation de 6 % sur le budget de 1998. La priorité donnée à l'enseignement se traduit par une augmentation sensible des moyens consacrés à l'enseignement technique agricole.

Deux problèmes restent néanmoins pendants : Les crédits de l'enseignement agricole privé, dont on ne peut contester le rôle et qui doit bénéficier des mêmes dispositions que l'enseignement agricole public, ne sont même pas réévalués à hauteur de l'inflation. Quant à ceux de la formation professionnelle continue, notamment ceux des stages préparatoires à l'installation, dont on ne peut pas non plus contester l'utilité, ils sont en régression.


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La troisième priorité était l'installation des jeunes agric ulteurs. L'objectif fixé par votre ministère est de 10 000 installations aidées en 1999, objectif louable, mais votre budget ne paraît pas là non plus à la hauteur de ses ambitions. En effet, cette année, les crédits consacrés à la DJA n'augmentent pas et sont reconduits à hauteur de 645 millions de francs. Et les crédits alloués au fonds d'installation en agriculture sont en nette diminution.

Comme vous le savez, le Gouvernement a remplacé après deux années d'existence le FIDIL par le FIA. On ne peut, dès lors, que déplorer que ce nouveau fonds, qui répond à la nécessité d'installer de nouveaux candidats sur les exploitations libérées par les agriculteurs sans successeurs, perde 15 millions de francs au profit du financement des CTE.

En amputant de près de 10 % les crédits affectés à l'installation des jeunes, qui passent de 165 millions à 145 millions de francs, je ne suis pas certain que vous puissiez réaliser l'objectif que vous vous êtes fixé. Je ne suis même pas certain que vous soyez convaincu vousmême de le pouvoir.

En tout état de cause, vous ne pouvez nier notre clairvoyance lorsque, au cours de la discussion sur la loi d'orientation agricole, nous attirions l'attention de votre prédécesseur et celle des agriculteurs sur les conditions de financement des CTE et sur les ponctions qui ne manqueraient pas d'être faites sur les financements, particulièrement ceux destinés aux jeunes qui souhaitent s'installer.

Au-delà des priorités affichées, votre budget comporte, monsieur le ministre, sinon de graves lacunes, du moins de grandes insuffisances.

C'est le cas pour l'action en faveur des Offices. Le budget agricole que vous nous présentez aujourd'hui prévoit au chapitre 44-53 une diminution de 100 millions de francs des crédits afin d'alimenter le fonds de financement des CTE, ce qui ramène la dotation réservée aux Offices à 2,9 milliards de francs. Or, réduire la dotation des Offices, c'est diminuer leur capacité à remplir efficacement leur rôle de régulateur et c'est remettre en question les actions en faveur de la promotion des produits.

En tant que rapporteur, en première lecture à l'Assemblée nationale, du projet de loi d'orientation sur la pêche maritime et les cultures marines, je ne peux que m'inquiéter de cette diminution des crédits, notamment en faveur de l'OFIMER, dont la création est très attendue par tous les professionnels de la filière pêche.

M. François Goulard.

Diminution très inquiétante !

M. Aimé Kerguéris.

A l'heure où la dimension « territoriale » de la politique agricole semble prendre la plus grande importance, ne serait-il pas judicieux, voire indispensable, de soutenir la promotion de nos produits locaux et régionaux ainsi que la vocation exportatrice de notre agriculture et de nos industries agroalimentaires ?

Mme Michèle Alliot-Marie.

C'est évident ! Et ce n'est pas fait !

M. Aimé Kerguéris.

Les crédits destinés au secteur de la pêche ne connaissent aucune augmentation et restent stables.

Dans le cadre des crédits d'intervention, la subvention à l'Office interprofessionnel de la mer, qui remplacera le fonds d'intervention et d'organisation des marchés des produits de la pêche maritime et des cultures marines, est amputée de 29,5 millions de francs du fait du transfert de la section sociale du FIOM, ce qui représente une baisse de 23 %.

On ne peut, en effet, concevoir que la France qui, par sa façade et sa vocation maritimes, dispose d'atouts non négligeables, laisse échapper des marchés ou déraper des cours à cause d'une insuffisance d'organisation ou de moyens.

Réduire ainsi les crédits d'intervention, c'est enlever de sa portée à la loi d'orientation des pêches maritimes et des cultures marines dont le volet organisation de la profession n'était pas le moins important.

Pouvez-vous nous donner des assurances sur votre détermination à aller jusqu'au bout des volontés exprimées par vos prédécesseurs, selon le principe, souvent malmené mais intangible, de la continuité de l'Etat.

Si l'on voulait renforcer la filière pêche, il aurait été, m e semble-t-il, plus crédible de ne pas seulement reconduire les crédits à périmètre constant car, dans ces conditions, l'OFIMER risque de n'être qu'une simple modification de sigle et non pas le signe fort de la volonté publique de relancer la filière pêche.

Dans le cadre des crédits d'investissement, 22 millions de francs sont consacrés à l'ajustement de la flotte de pêche à l'état de la ressource et 19 millions de francs seulement sont consacrés à la modernisation des navires de pêche et à l'aquaculture.

Cette répartition des crédits appelle deux remarques.

D'abord, quel choix politique traduisent ces chiffres ? P ensez-vous sincèrement que ces sommes ridicules peuvent faire repartir à nouveau la pêche française ? Pouvez-vous, par ailleurs, dès aujourd'hui, nous indiquer les effets que vous escomptez de la mise en oeuvre des dispositions de la loi d'orientation visant à mettre fin aux captations de quotas, en termes de retours de navires et de quotas dans nos ports. Pourquoi ne met-on pas en place des aides à la création de sociétés mixtes, alors que les Espagnols en bénéficient déjà, ce qui entraîne une distorsion de concurrence défavorable à nos pêcheurs ?

Mme Michèle Alliot-Marie.

C'est dramatique !

M. Aimé Kerguéris.

Quelles solutions peut-on envisager ? Lorsqu'on connaît les difficultés d'exécution du dernier plan de sortie de flotte en 1998, on est amené à se demander si d'autres solutions ne pourraient pas être envisagées, telle qu'une véritable gestion de l'effort de pêche. Plus qu'une destruction des navires, ne faudrait-il pas réfléchir à une réduction temporaire de l'activité des navires, ce qui, contrairement aux POP capacitaires, aurait l'avantage d'être une mesure réversible et préserverait l'intégralité des possibilités de capture ? Ce mode de gestion des POP pourrait être réalisé par la création d'un fonds d'encadrement de l'activité de toutes les flotilles chalutières.

Je soumets ce point à votre réflexion, monsieur le ministre.

Les navires non chalutiers de moins de douze mètres sont exempts de POP IV. Pour quelle raison ces navires ont-ils bénéficié de la possibilité de s'inscrire à ce plan de sortie de flotte ? Des enveloppes de kilowatts ont été annoncées ces dernières semaines pour la construction de n avires neufs. La construction neuve de chalutiers sera-t-elle autorisée pour 1999 et pour combien de kilowatts ? Sur quels critères seront attribués ces kilowatts dans les différentes COREMODE ? De nombreuses interrogations restent en suspens : quels types de navires-chalutiers, fileyeurs ? Y aura-t-il ou non priorité pour les jeunes ? Les équilibres portuaires et régionaux seront-ils maintenus ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1998

M. le président.

Il faut penser à conclure monsieur Kerguéris.

M. Aimé Kergueris.

En conclusion, s'il est un sujet sur lequel nous sommes tous d'accord, c'est la vocation de l'agriculture française et la place qu'elle doit tenir sur la scène internationale. Là où nos avis divergent, c'est sur les moyens à employer pour y parvenir.

A l'heure où nous devons être plus forts que jamais p our aborder la réforme de la politique agricole commune et les négociations au sein de l'Organisation mondiale du commerce, je ne trouve pas dans votre budget l'élan, l'impulsion que l'on était en droit d'attendre.

C'est pourquoi le groupe Démocratie libérale et Indépendants votera contre votre budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. Christian Jacob.

M. Christian Jacob.

En lisant ce budget, je me suis demandé, monsieur le ministre, si vous lui aviez apporté votre touche personnelle. J'ai tendance à croire que non.

Mais si c'était le cas, ce serait encore plus grave ! Car c'est un budget hors du commun, un budget exceptionnel ! Il faut remonter très loin en arrière pour retrouver un budget de l'agriculture en baisse de 6 % ! Mme Marre nous a dit qu'il ne fallait pas s'arrêter aux chiffres. Heureusement ! Car si on le faisait, ce serait encore plus alarmant ! La note que nous a envoyée le ministre de l'économie et des fiannces, révèle que deux budgets subissent une baisse importante : celui de l'agriculture, 6 %, et celui des anciens combattants, 2,1 %. Ce sont les deux grands budgets sacrifiés ! Plus de 2 milliards de francs sont retirés du budget de l'agriculture qui ne figure pas dans les budgets prioritaires.

Mme Michèle Alliot-Marie.

Le Gouvernement ne s'intéresse qu'à la ville.

M. Christian Jacob.

C'est la moindre des évidences, me direz-vous, puisque les crédits de ce budget diminuent de 6 %.

M. Patriat, Mme Marre et différents intervenants ont expliqué que ce budget était formidable, qu'il s'agisse de l'installation, de l'aménagement du territoire ou des crédits qualité, bref dans tous les domaines.

M. François Patriat, rapporteur pour avis.

J'ai dit qu'il y avait des lacunes !

M. Christian Jacob.

J'ai donc regardé à nouveau ces différentes lignes budgétaires les unes après les autres.

Le programme agri-environnemental est l'un des sect eurs de notre agriculture qui est en plein essor.

M. Le Pensec et encore plus M. Vasseur avaient augmenté les crédits de l'agriculture biologique. Or les crédits du programme agri-environnemental diminuent de 16 millions de francs, monsieur le ministre ! On nous a parlé de l'installation. Grande priorité, en effet, puisque les crédits du FIA diminuent de 15 millions de francs et ceux des OGAF de 45 millions alors que, dans bien des cas, ils sont attribués directement aux jeunes candidats à l'installation ! Les crédits consacrés à la POA, tout ce qui concerne la restructuration des entreprises, les crédits déconcentrés à l'environnement également, diminuent de 18 millions.

Les crédits consacrés aux offices sur les crédits qualité, que personne ne songe à remettre en cause, diminuent de 100 millions de francs.

S'agissant des calamités, ce budget est une vraie calamité ! (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

Les crédits diminuent de 225 millions de francs. Vous m'avez répondu l'autre jour en commission que tout cela devait s'apprécier globalement et non par année. Je vous renvoie au 3o de l'article L.

361-5 du code rural. On nous explique que les crédits apportés par le ministère doivent être au moins équivalents à ceux apportés par les cotisations professionnelles. C'est donc un désengagement sans précédent !

M. Jacques Bascou.

Et les années d'avant ?

M. Christian Jacob.

Je sais que vous n'aimez pas les chiffres, Mme Marre nous l'a dit, mais j'ai repris ceux des différentes lignes.

Il y a bien d'autres points.

Vous savez que la formation agricole d'une manière générale a le meilleur taux de placement. Ce sont les jeunes qui sortent d'une telle formation qui trouvent un travail le plus rapidement. Aucun autre secteur de formation n'arrive au même résultat. Et, dans le cadre de cette formation, l'une de celles qui obtient les meilleurs résultats, c'est l'apprentissage. Là encore, les crédits qui lui sont consacrés baissent.

M. François Goulard.

Le Gouvernement n'aime pas l'apprentissage.

M. Christian Jacob.

La préparation à l'installation, tout ce qui concerne notamment les études prévisionnelles, ce qui permet au jeune de faire son étude budgétaire et de se préparer à son projet : 13 millions en moins ! Je pourrais continuer, monsieur le ministre. La liste est longue de priorités comme celles-là pour lesquelles vous avez systématiquement baissé sur les crédits.

J'évoquais l'installation parce que l'action du gouvernement socialo-communiste auquel vous appartenez est fabuleuse.

(Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

Il n'y a pas de communistes dans votre gouvernement ?

M. Joseph Parrenin.

Si, et nous en sommes fiers ! Ne soyez pas sectaire !

M. Félix Leyzour.

En effet, ce n'est pas une honte.

M. Christian Jacob.

C'est donc bien un gouvernement socialo-communiste.

En dix-sept mois, l'action du Gouvernement a été fantastique ! J'ai même pris le soin d'établir une courbe, monsieur le ministre ! Le nombre des installations a augmenté de 25 % entre 1995 et 1997, soit de 12,5 % par an, et il a chuté de 10 % de 1997 à 1998. C'est une chute vertigineuse depuis que vous êtes au pouvoir ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean Auclair.

Ce gouvernement n'aime pas les agriculteurs !

M. Christian Jacob.

Ce sont les chiffres de la CNASEA, premier versement de DJA. Je pense que vous ne les mettrez pas en cause.

Tout ça tient en fait à une différence d'approche. La vôtre, on l'a vu à propos de la loi d'orientation, est par essence même collectiviste.

(Sourires sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Vous considérez en fait l'économie agricole, et l'économie d'une manière générale, comme un gâteau à distribuer. Plus il y a de gens autour de la table, plus on fait de parts et plus il y a de gens heureux.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1998

M. François Goulard.

C'est comme pour le temps de travail !

M. Christian Jacob.

Cependant, les règles de l'économie s'adaptent mal à l'utopie, même à l'utopie socialiste.

Aujourd'hui, il ne s'agit pas d'instaurer des contrôles en tous genres et de renforcer la pseudo-fonctionnarisation.

C'était fabuleux, dans la loi d'orientation, de vous voir imaginer la notion d'installation provisoire ! Comme je l'avais alors indiqué, même Edith Cresson, en 1981, aux pires moments de la gauche, n'y avait pas pensé.

(Sourires.) Un agriculteur s'installe provisoirement pendant deux ans et, pendant les deux ans, on va regarder si on ne peut pas lui « piquer » un morceau de terrain et aller le distribuer à droite ou à gauche !

M. Joseph Parrenin.

A gauche ! (Sourires.)

M. Christian Jacob.

En plus, vous êtes partial et sectaire, monsieur Parrenin.

(Sourires.)

Il faut au contraire faire preuve de modernisme et instaurer des mesures incitatives, c'est-à-dire favoriser les agriculteurs en place qui privilégient un jeune et qui privilégient l'installation. Les amendements que nous aurons l'occasion d'étudier plus tard vont tous dans le même sens : le renforcement de la politique de l'installation et des mesures incitatives en faveur des jeunes agriculteurs.

Pour ce qui est de la baisse des charges des exploitations agricoles, j'entendais tout à l'heure M. Patriat expliquer qu'un rapport était prévu. Alors ça, c'est fantastique !

M. Jean Auclair.

C'est socialiste !

M. Christian Jacob.

Le ministre précédent et vousmême, monsieur le rapporteur, avez refusé que ce soit inscrit comme priorité, et, aujourd'hui, vous nous annoncez un grand rapport. Soyons sérieux ! C'est un domaine que vous connaissez très bien et les propositions, nous les connaissons tous. Il faut simplement continuer l'action engagée par Philippe Vasseur sur la dotation provision aux investissements, la baisse des charges, l'assiette des cotisations sociales ou la fiscalité. Mais rien là-dessus ! Il ne faut surtout pas redonner un point de compétitivité et chercher à gagner des parts de marché, il faut se recroqueviller sur nous-mêmes ! Compte tenu de tous les points que je viens d'énumérer, et je pourrais en évoquer d'autres si j'avais plus de temps, il est évident, monsieur le ministre, que le groupe RPR, dans son ensemble, votera contre ce budget qui nous ramènera quarante ans en arrière en matière de développement de l'agriculture.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Pourquoi pas cinquante ans ? Qui dit mieux ? (Sourires.)

M. le président.

La parole est à M. François Liberti.

M. François Liberti.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la loi d'orientation sur la pêche votée, en 1997, a affiché une volonté politique forte avec son volet social, le soutien à l'investissement, l'aide à l'installation des jeunes, la formation maritime, la revalorisation des OP et le renforcement de la filière, mais, pour une large part, ces objectifs restent à concrétiser et la pêche demeure aujourd'hui dans une situation d'extrême fragilité.

Le budget pour 1999 est en légère progression, de 0,25 %, et c'est une bonne chose. Néanmoins, il annonce une diminution des crédits d'intervention sur l'organisation des marchés et une augmentation des enveloppes pour la mise en sortie de flotte. En clair, on a encore de la difficulté aujourd'hui à se dégager des politiques antérieures totalement intégrées à la politique européenne.

Il est urgent de rompre avec la stratégie des POP réduisant la flotte au nom d'une maîtrise de la ressource relevant plus du principe que du vécu réel.

Sur directive de l'ICCAT, et selon des évaluations sur la ressource made in USA dont le peu de fiabilité vient d'être démontré par l'IFREMER, les pêcheries des senneurs méditerranéens se voient imposer tout à la fois la réduction des prises, la réduction des périodes de pêche, l'extension unilatérale du contrôle des eaux espagnoles à cinquante milles. Pis, Mme Emma Bonino, pour la Commission européenne, invite les fileyeurs de l'île d'Yeu et les pêcheurs de thonailles en Méditerranée, assimilés injustement aux filets maillants, à utiliser « des engins de capture plus efficaces, et pourquoi pas la senne ? ».

D'un côté, on impose des réductions draconiennes aux senneurs et, de l'autre, on dit aux fileyeurs dont l'activité vient d'être remise en cause de se restructurer et la senne, le tout au nom de la protection de la ressource ! C'est à peu près n'importe quoi ! En matière de protection de la ressource et de la gestion des stocks, il est grand temps que la France, avec l'IFREMER, présente un véritable projet alternatif.

Je rappelle, pour mémoire, que nos capacités de pêche diminuent, que le nombre de marins embarqués et de navires immatriculés s'effondre tandis que la productivité des produits de la mer augmente.

Nous produisons environ 870 000 tonnes alors que la demande dépasse aujourd'hui 1,5 million de tonnes.

Conséquence : nous importons. Le déficit de la balance commerciale des produits de la mer est le plus élevé du commerce extérieur de la France.

Ce que l'on ne pêche plus pour cause de réduction de flotte, ce sont d'autres pays qui le font à notre place, et ce dans les eaux européennes. C'est la raison pour laquelle le nouveau plan de retrait de flotte doit obligatoirement s'accompagner d'une relance effective et immédiate de la construction et de la modernisation des navires.

Je rappelle également que les POP sont imposés par Bruxelles, que la Grèce les refuse catégoriquement, que l'Espagne ne les applique pas et qu'aucun document fiable n'existe pour vérifier leur application dans les autres pays.

La demande supplémentaire de retrait de 29 000 kilowatts pour la France, dont 11 000 pour la Bretagne, est injuste et inadaptée.

Quant à l'évolution de la flotte chalutière méditerranéenne, il est aujourd'hui établi que les engagements pris pour redéployer l'effort de pêche ont été tenus. Il faut donc à présent que l'Etat français et la CEE assurent les moyens du renouveau de la flotte.

En Méditerranée comme en Atlantique, les régions se sont engagées sur le principe d'une participation au plan gouvernemental dès lors qu'on garantit la mise en exploitation de nouveaux navires. Quelles garanties pouvez-vous nous apporter en la matière ? Enfin, pour conclure mon propos, je me dois d'évoquer la situation extrêmement grave vécue aujourd'hui par les pêcheurs et les conchyliculteurs du bassin de Thau, premier centre conchylicole méditerranéen - 15 % de la production nationale - et premier quartier maritime du littoral français par le nombre de marins embarqués.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1998

L a lettre que je vous ai adressée, en date du 9 novembre, résume la situation. La présence d'un phytoplancton potentiellement toxique ayant été détecté pour la première fois à forte concentration dans l'étang de Thau, la pêche, le ramassage et la commercialisation de tous les coquillages sont interdits, par arrêté préfectoral, depuis le 6 novembre jusqu'à nouvel ordre.

Après la « malaïgue » qui, en 1997, a détruit un tiers de la production et laissé sans revenu plus de 500 exploitants, ce nouvel arrêt, à quelques semaines des fêtes de fin d'année pendant lesquelles se commercialise 50 % de la production, est d'ores et déjà un véritable sinistre social qui frappe plus de 3 000 familles vivant de la pêche et de la conchyliculture.

La colère est d'autant plus forte que ces dernières années ont été marquées par un immense effort technique et financier pour préserver le milieu et la qualité exceptionnelle d'un bassin classé en catégorie A pour lequel un second contrat de baie, signé il y a dix jours à peine, va permettre de poursuivre l'investissement, les travaux et le contrôle de la qualité des eaux.

Aujourd'hui, face à l'arrêt provoqué par la présence de cette algue qui interdit toute activité à une période où tout se joue en quelques jours - pêche, collecte, commercialisation, marchés -, des mesures d'une ampleur exceptionnelle s'imposent pour aider tout un territoire à surmonter cette épreuve.

La cellule de crise, animée par le directeur régional des pêches, a retenu quatre volets de mesures : mesures de survie, avec la prise en charge des cotisations sociales et l'attribution d'une indemnité journalière pour tous, marins et agriculteurs, durant la période d'arrêt ; mesures de pérennisation des entreprises, avec le gel de toutes les échéances ; mesures de protection, avec l'interdiction absolue d'utiliser le bassin de Thau comme lieu de retrempage de produits d'importation et la mise en place d'un observatoire permanent ; enfin, mesures de relance, avec le lancement d'une campagne promotionnelle spécifique dès la levée des interdictions.

Je vous demande de prendre toute la mesure de la gravité de la situation et de répondre favorablement à ce plan d'urgence. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. René Leroux.

M. René Leroux.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voici un an après la promulgation de la loi d'orientation pour la pêche et les cultures marines. Même s'il est encore trop tôt pour tirer un bilan des dispositions votées l'année dernière, tous les décrets n'étant pas encore parus, ce texte a inconstestablement oxygéné un secteur qui s'asphyxiait après les crises qu'il a vécues au début des années 90 et notamment en 1994.

Ce texte, qui était très attendu, touche directement, rappelons-le, 17 000 marins-pêcheurs et 10 000 conchyliculteurs. Déjà, des améliorations se font sentir. Les revenus des pêcheurs ont connu une légère augmentation et semblent être revenus au niveau d'avant la crise. La situation des conchyliculteurs est un peu moins bonne car ce secteur a subi des pertes importantes. Le taux de chômage y est par ailleurs supérieur à la moyenne nationale.

Le récent rapport sur le chômage dans la pêche artisanale de Mme Simon Rovetto montre que, si l'on peut constater de manière générale l'existence d'un sousemploi, une pénurie de main-d'oeuvre qualifiée est par ailleurs à déplorer dans certains métiers. Je souhaite que la question de l'indemnisation des chômeurs soit au coeur des préoccupations du Gouvernement, et j'en suis persuadé.

La loi d'orientation aura permis notamment la création de l'OFIMER, la reconnaissance du statut du conjoint exploitant et l'aide à l'installation des jeunes par le biais de dispositions fiscales d'aide à la première installation, avec le dispositif SOFIPECHE. Leurs effets sont très attendus et il sera important de veiller à l'application des décrets.

Cependant, le paradoxe demeure : l'offre est bien inférieure à la demande, ce qui nous conduit, à l'instar de nos partenaires européens, à importer massivement près de la moitié de la consommation intérieure.

Par ailleurs, si les dispositions communautaires doivent permettre le renouvellement des espèces, il n'en demeure pas moins que les ressources diminuent. Le risque est donc de voir disparaître une tradition et une activité ancestrale, source de revenus pour de nombreuses familles et porteuse de vie dans de nombreuses communes.

Ce budget pour 1999, dans la mesure où il reconduit les dotations de l'année précédente, est positif. Comme notre rapporteur l'a souligné, il a connu une augmentation de près de 30 % par rapport à 1995. Il s'agit là d'une preuve formelle de l'engagement du Gouvernement à poursuivre une véritable politique de la pêche, fondée notamment sur des réformes structurelles afin de moderniser la filière.

L'une de ces réformes essentielles est la transformation du fonds d'intervention et d'orientation des marchés en office des produits de la mer et de l'aquaculture, l'OFIMER. La mise en place de l'OFIMER, au mois de j anvier prochain, devrait permettre de réorganiser l'ensemble de la filière, de renforcer la compétitivité des entreprises face à l'accroissement de la concurrence et à la diminution des ressources.

Si le FIOM a, depuis sa création en 1975, joué un rôle déterminant dans la régulation de la production et l'organisation des producteurs, sa transformation en l'OFIMER devrait entraîner des effets positifs pour la filière. Son rôle économique est d'ailleurs clairement confirmé dans votre budget pour 1999. En effet, 57 % des crédits de votre ministère attribués aux pêches et cultures marines lui sont destinés.

Ces crédits devraient lui permettre de se consacrer pleinement à ses missions : animation de la filière pour renforcer les liens des différents opérateurs, du producteur au consommateur ; incitation à la qualité, répondant ainsi aux demandes des consommateurs ; encouragement à l'innovation ; promotion des produits, notamment pour certaines espèces dans des périodes précises.

Ce budget est donc prometteur sur bien des points.

Cependant, je ne peux terminer, monsieur le ministre, sans vous inviter à faire un effort particulier pour la construction neuve de bateaux afin d'assurer le renouvellement d'une flottille vieillissante.

M. Dominique Dupilet, rapporteur pour avis.

Très bien !

M. René Leroux.

Cela redonnerait vitalité et dynamisme à nos ports.

Aussi, comme bon nombre de mes collègues, j'aimerais connaître le nombre de kilowatts qui seront libérés à cet effet dans la limite des autorisations accordées par les instances européennes.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. Claude Hoarau.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1998

M. Claude Hoarau.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'exécution du budget dont nous discutons sera marquée par l'ouverture de négociations importantes pour le devenir de l'agriculture réunionnaise. Je veux parler des négociations relatives à l'organisation commune du marché du sucre, lesquelles doivent débuter en 1999.

C'est avec une inquiétude manifeste et qui n'a sans doute jamais été aussi forte en pareille circonstance, que le monde agricole aborde cette étape.

A vrai dire, les raisons de s'inquiéter ne manquent pas.

Il y a, en premier lieu, un contexte mondial incertain, contraignant et de plus en plus concurrentiel. A cela s'ajoutent la chute des cours mondiaux du sucre et les apports des betteraviers des pays de l'Europe de l'Est. Il y a enfin le précédent des attaques répétées de l'Organisation mondiale du commerce contre la production de bananes des départements antillais.

Ces éléments convergent pour que la plus grande vigilance soit de mise à l'approche des nouvelles négociations concernant l'OCM sucre. La mobilisation des acteurs de la filière canne-sucre est totale à la Réunion. Nous comptons tous sur le soutien du Gouvernement.

Le maintien de cette filière nécessite, au moins, de sauvegarder les acquis obtenus vis-à-vis de l'Union européenne, c'est-à-dire le système qui permet à l'ensemble des producteurs européens, et donc à ceux d'outre-mer, de bénéficier d'aides nationales, de quotas de production et de prix garantis.

Dans ce contexte tourmenté, l'annonce d'un projet de production sucrière en Guyane a suscité chez les acteurs réunionnais des interprétations et des hypothèses multiples, le plus souvent teintées d'inquiétude.

C'est en fait le maintien du quota actuel qui est au centre des interrogations. Si le projet guyanais n'est en aucun cas contesté en tant que tel, l'idée d'un redéploiement des quotas dans lequel le projet guyanais se traduirait, dans le cadre de l'OCM sucre, par un prélèvement sur le quota réunionnais est, par contre, totalement combattue. La concrétisation d'une telle hypothèse remettrait en cause les efforts entrepris depuis tant d'années pour la consolidation de la filière canne-sucre à la Réunion. Elle déstabiliserait une filière qui représente plusieurs milliers d'emplois et elle irait à l'encontre des efforts déployés pour parvenir à un aménagement équilibré du territoire.

Le maintien du quota de 300 000 tonnes de sucre affecté à la Réunion est déterminant pour l'avenir de la filière. Ces dernières années, des efforts importants ont été réalisés, pour améliorer tant la productivité que la richesse en sucre. De très lourds investissements ont été consentis, notamment avec le soutien de l'Union européenne, pour augmenter d'environ 6 000 hectares les surf aces plantées. La production, qui s'élève déjà à 250 000 tonnes, peut à présent augmenter bien au-delà de son volume actuel, pour atteindre l'objectif des 300 000 tonnes.

Une première solution serait que l'Union européenne attribue un quota supplémentaire à la Guyane. Si une telle solution n'est pas envisageable, il devient alors évident à nos yeux que c'est dans le cadre global de la production française de sucre que la question du quota guyanais doit être réglée.

J'ai voulu, monsieur le ministre, volontairement limiter mon intervention à ce volet de l'agriculture réunionnaise, tant il est vrai que les interrogations et les inquiétudes n'ont cessé de grandir depuis plusieurs semaines. Il devient en effet urgent que le Gouvernement apporte, aussi rapidement que possible, une réponse précise et claire à cette question afin d'apaiser les inquiétudes très vives qui se sont cristallisées autour d'elle. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à Mme Nicole Ameline.

Mme Nicole Ameline.

Monsieur le ministre, pas plus que nous n'avions pu trouver dans le projet de loi d'orientation agricole de quoi nous satisfaire, nous ne pouvons trouver dans ce projet de budget pour 1999 le souffle et l'ambition nécessaires pour assurer le devenir de l'agriculture française et, au-delà, européenne.

D'autres orientations, d'autres ambitions nous semblent indispensables pour construire une agriculture moderne, pour maintenir le métier d'agriculteur et pour préserver la contribution essentielle de ce secteur économique à l'aménagement du territoire.

Les lacunes et les insuffisances de ce projet sont nombreuses et elles ont été largement soulignées.

Pour ma part, j'évoquerai d'abord le fait que, compte tenu des chiffres qui sont les siens, le budget de l'agriculture ne finance la politique agricole que d'une façon minoritaire. En fait, la politique agricole française est financée à 66 % par des crédits d'origine européenne, ceux de la PAC. C'est dire à tel point la discussion du projet de budget de l'agriculture est non seulement liée mais aussi indissociable des orientations et de la stratégie que va adopter le Gouvernement dans le cadre de la double négociation en cours sur la réforme de la PAC et celle de son financement par l'Union européenne pour la période 2000-2006.

M. Germain Gengenwin.

Très juste !

Mme Nicole Ameline.

Du reste, cette stratégie nous inquiète. Une chose est sûre : si les orientations actuelles de la Commission, notamment en matière de financement de la PAC, étaient acceptées telles quelles, elles ne manqueraient pas d'avoir des conséquences extrêmement graves sur le budget de l'agriculture, conséquences qui devraient alors se traduire par une forte augmentation, à la mesure des risques de renationalisation des financements des aides directes aux agriculteurs, financements assurés par la politique agricole commune.

De ce fait, ce budget se caractérise donc par une première difficulté liée à sa fragilité, tandis que simultané ment, il fait appel à des ressources de la politique agricole commune pour financer des mesures très importantes prévues dans la loi d'orientation agricole.

En effet, et c'est la seconde faiblesse de ce budget, il ne traduit pas dans ses arbitrages financiers la mesure phare de la loi d'orientation agricole : les contrats territoriaux d'exploitation dont le ministre a voulu faire le coeur du dispositif. La dotation de 450 millions de francs prévue à cet effet est en fait financée pour 300 millions par un redéploiement des crédits existants - ce qui aura, comme nous le verrons, des conséquences néfastes, notamment en matière d'aide à l'installation des jeunes agriculteurs - et pour 150 millions par un appel aux financements européens.

Or, et c'est la troisième faiblesse de ce budget, le redép loiement opéré pour financer les CTE risque de c ompromettre directement l'installation des jeunes, laquelle constitue, comme vous l'avez rappelé, monsieur le ministre, une priorité de votre action. Ainsi, le fonds d'installation en agriculture, créé en 1998 pour l'aide à l'installation des jeunes, perd déjà 10 % de sa dotation, soit 15 millions de francs.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1998

Quatrième faiblesse, et ce n'est pas la moindre, ce budget n'apporte aucune solution pérenne à la question du financement des retraites agricoles. La revalorisation des retraites est en fait financée par une mesure non reconductible : un prélèvement de 1 milliard de francs sur le produit de la cotisation sociale de la solidarité des sociétés.

Manque de cohérence entre les objectifs prioritaires affichés dans le projet de loi d'orientation, absence de choix précis quant à la mise en oeuvre d'une stratégie offensive sur la réforme de la PAC et de son financement, solution de court terme pour les retraites, telles sont les caractéristiques de ce budget.

Je reviens sur la question essentielle, celle de la stratégie à conduire face aux propositions de la Commission sur la PAC.

Nous avons tous en mémoire le mauvais souvenir de Blair House et les difficultés extrêmes qu'il y eut, à l'époque, pour reprendre cette négociation et la faire aboutir à des conclusions beaucoup plus favorables aux intérêts français. Or, aujourd'hui, de quoi s'agit-il ? Depuis la création de la Communauté européenne, la PAC a été l'une des pierres angulaires de cette construction. Elle est née de l'accord franco-allemand, qui l'a rendue possible. La PAC a été et reste très favorable aux intérêts français. Quoi de plus normal, quoi de plus logique, puisque la France est et reste la nation agricole la plus importante de tous les Etats membres. Quoi de plus normal que la PAC demeure donc une politique servant les intérêts de notre agriculture ? Quoi de plus logique que le Gouvernement ait à coeur de prendre soin de ces intérêts ! En outre, au-delà de ses effets bénéfiques qui ont permis à la France de devenir la deuxième puissance agroalimentaire mondiale, la PAC a joué un rôle considérable dans la création de l'Europe en donnant notamment à cette dernière la possibilité de se faire respecter au même titre qu'une grande puissance, d'appliquer à l'intérieur de ses frontières le principe d'une juste préférence communautaire et de confirmer à l'extérieur la place qu'elle occupe et qu'elle doit occuper de plus en plus sur le marché mondial.

Même si j'ai conscience que ce n'est pas le sujet du jour, je voudrais, monsieur le ministre, vous faire part de nos inquiétudes sur le silence de la Commission, notamment sur ces questions fondamentales de préférence communautaire, ou sur la façon dont elle envisage de demander au Conseil un mandat de négociation pour conclure un traité de libre-échange avec les pays sudaméricains du MERCOSUR dont les productions agricoles, chacun le sait, sont directement concurrentielles des productions européennes.

Comment ne pas exprimer aussi notre inquiétude lorsque nous entendons le ministre des affaires européennes déclarer que le paquet Santer marquera la fin d'une singularité française, legs des années 60 où personne ne trouvait anormal que la Communauté finance la modernisation de l'agriculture française ? Paradoxalement, le Gouvernement semblerait donc prêt à admettre que l'Europe ne veuille plus financer la modernisation de l'agriculture française, tout en n'hésitant pas, dans son projet de budget, à compter sur les fonds européens pour financer les contrats territoriaux d'exploitation. Nous ne pouvons imaginer un instant que le Gouvernement puisse donner l'impression qu'il va accepter les propositions de la Commission.

Faut-il d'ailleurs relever que ces propositions sont en contradiction avec les récentes orientations politiques prises par le Conseil des ministres réuni les 19 et 20 octobre derniers, lequel a indiqué très clairement que la réforme de la PAC ne devait pas entraîner une renationalisation ni un transfert de charges budgétaires de la PAC vers les Etats membres ? Je souhaite que cette prise de position vous aide à combattre les propositions actuelles de la Commission.

Plus généralement, nous refusons la notion de contribution nette qui est trop largement invoquée. L'Europe n'est pas une notion comptable, elle est d'abord la traduction d'une volonté politique.

M. Germain Gengenwin.

Très bien !

Mme Nicole Ameline.

L'Allemagne est aujourd'hui contributrice nette de l'Europe à hauteur de 0,4 % de son PNB, mais n'a-t-elle pas tiré d'autres avantages, d'autres dividendes beaucoup plus importants de sa participation à la construction européenne ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Sûrement ! C'est plus difficilement chiffrable, mais vous avez raison !

Mme Nicole Ameline.

L'Europe de demain ne se renforcera pas en généralisant à la quasi-totalité des Etats membres la pratique parfaitement contestable du chèque britannique de fin d'année. Cette généralisation serait même la négation de l'esprit européen.

Nous avons toujours été animés sur nos bancs par une volonté de faire progresser l'Europe, et nous en avons encore apporté la preuve récemment. Pour autant, il faut témoigner d'une volonté tout aussi ferme de préserver les intérêts de la France. Nous aurons le temps de revenir sur cette question, mais je tenais à le préciser dans le cadre d'examen de ce budget.

Un tel budget ne saurait se concevoir sans la réaffirmation de certains principes forts qui doivent nous guider dans la vision que nous avons du développement durable de l'agriculture française. Je rappellerai simplement que l'agriculteur est d'abord un producteur qui doit pouvoir vivre de son métier. Même si l'agriculture française est très diverse, même si les revenus sont très contrastés, l'agriculteur est d'abord un producteur avant d'être un aménageur du territoire.

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Très juste !

Mme Nicole Ameline.

Le principe selon lequel il doit pouvoir tirer l'essentiel de son revenu de la vente de ses productions doit être réaffirmé. C'est dire combien l'organisation des producteurs et la maîtrise des filières de production et de commercialisation doivent être au coeur de notre projet.

L'agriculture a une vocation naturellement exportatrice : en quarante ans, les échanges mondiaux de produits agricoles et agroalimentaires sont passés de 80 à 2 500 milliards de francs, et la part de l'Europe a progressé, tandis que celle des Etats-Unis reculait, si bien que nous sommes aujourd'hui à égalité. Nous devons pouvoir défendre et promouvoir la vocation exportatrice des produits alimentaires, la demande mondiale devant continuer à croître ces prochaines années. Toutefois, la loi d'orientation relève d'une autre logique comme en témoigne cette phrase tirée de l'exposé des motifs : « L'Europe a été amenée à jouer un rôle sur les marchés mondiaux de façon fortuite, pour gérer les excédents... ».


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1998

Il faut modifier cette approche et considérer que notre atout est précisément de pouvoir vendre de tout, comme le font d'ailleurs nos principaux concurrents, sans pour autant sous-estimer le souci que nous partageons tous de promouvoir une agriculture de qualité.

Il ne faut donc pas se satisfaire de la gestion fortuite d'excédents, mais, au contraire, affirmer sans cesse une vocation réelle pour l'économie et pour l'emploi.

Une place indispensable doit être aménagée au développement rural à côté du développement agricole. Ce sera un autre temps fort de notre réflexion, monsieur le ministre, qui s'inscrira notamment dans le cadre de la réforme des fonds structurels. Il est essentiel que les zones rurales fragiles soient très convenablement traitées dans cette refonte. Nous n'avons aucune certitude à cet égard, pas plus dans la loi sur l'aménagement du territoire que dans la réforme européenne actuellement en cours.

Je voudrais également insister sur la nécessité de faire, s'agissant des labels, un effort tout particulier pour la qualité et la diversification des productions agricoles. Je représente une région qui compte onze appellations d'origine contrôlée, et je peux vous dire, monsieur le ministre, qu'il faudra absolument soutenir les actions de valorisation et de promotion des produits auprès des consommateurs européens et sur le marché mondial.

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Alors, votez la loi d'orientation agricole !

Mme Nicole Ameline.

Il faut également, comme l'avez fait dans ce budget, je le reconnais, soutenir l'agriculture biologique.

J'ai tout juste le temps d'ajouter que ce budget aurait pu comporter, comme mes collègues l'ont rappelé avec force, des dispositions fiscales incitant les agriculteurs à investir notamment dans la transformation et la commercialisation des produits.

Mme Béatrice Marre, rapporteur spécial.

La loi d'orientation agricole, c'était il y a quinze jours !

Mme Nicole Ameline.

C'était un complément nécessaire, et je regrette infiniment qu'aucune mesure de ce type ne figure dans ce budget. Il aurait fallu répondre à cette revendication absolument essentielle.

Monsieur le ministre, ce n'est pas tant le contenu de ce budget que son manque de vision d'avenir qui nous laisse un peu sur notre faim. C'est pourquoi le groupe Démocratie libérale et Indépendants ne le votera pas (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. Louis Guédon.

M. Louis Guédon.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, Didier Quentin s'associe à mon intervention.

L'an dernier, l'adoption de la loi d'orientation sur la pêche et les cultures marines avait fait naître beaucoup d'espoirs dans les milieux maritimes. L'examen du projet de budget pour 1999 est l'occasion de nous poser cette question : que sont-ils devenus ? Les professionnels constatent que certains de leurs problèmes ne sont toujours pas résolus.

Certes, le Fonds d'intervention en faveur des entreprises de pêche et de cultures marines connaît une augmentation de 30 millions, mais, dans le même temps, l'Office professionnel des produits de la mer voit son budget diminuer de la même somme.

Il apparaît aussi que les crédits consacrés à l'ajustement de la flottille à la ressource s'élèvent à 22 millions de francs. Nous ne pouvons vous suivre sur ce plan-là, monsieur le ministre. Nous ne pouvons plus détruire nos navires, qui sont performants. La fin du POP III - plan d'orientation pluriannuelle - pose trop de difficultés pour que nous puissions envisager le POP IV.

Permettez-moi de citer quelques chiffres concernant mon département, la Vendée : l'âge moyen des navires y est de vingt-sept ans ; le nombre des pêcheurs actifs y a diminué de 19 % au cours des cinq dernières années.

Pour pallier ces difficultés, adaptons la pêche à la ressource au travers de quotas, qui constituent un moyen souple pour la pêche artisanale de respecter les espèces menacées. Ces quotas doivent d'ailleurs évoluer avec les efforts de chacun : le quota de la sole pour le port de Noirmoutier, jadis fixé pour des caseyeurs, est maintenant inadapté pour les fileyeurs qui les ont remplacés. Il est urgent de sortir de l'immobilisme actuel.

En ce qui concerne la ressource, la France a adopté une attitude défensive, comme en témoigne son attitude sur le dossier du filet maillant dérivant : elle n'est pas parvenue à faire admettre sa position au niveau communautaire.

Une vraie politique de la pêche réclame une attitude ferme quant à la préservation et à la reconstitution des stocks. Il faut interdire la pêche minotière. Pourquoi condamner le filet maillant dérivant, peu dangereux, et laisser les bateaux danois pêcher des juvéniles afin d'en faire de la farine de poisson ? La fermeté s'impose également pour proposer, en concertation avec les professionnels, une politique de

« repos biologique », et pour élaborer une réglementation équitable : pourquoi autoriser les filets maillants dérivants de fond, extrêmement destructeurs, alors que les autres filets maillants dérivants sont, eux, interdits ? S'agissant de la flottille, la politique incohérente menéee ntre les années 1986-1990 a été catastrophique.

L'Europe a encouragé, avec des subventions représentant 60 % du financement, une construction débridée. En 1988, plus de 120 navires de près de vingt-quatre mètres ont été construits, alors que quarante auraient suffi aux besoins. Puis, cette politique a été stoppée brutalement et la casse des navires est maintenant engagée.

Quand recommencerons-nous à construire et selon quel programme ? Une véritable politique devrait intégrer cette programmation à partir de la pyramide des âges des navires, par catégorie, par port et par région.

L'heureux dispositif des quirats-jeunes attend toujours que les décrets d'application soient pris. Monsieur le ministre, il faudra me répondre sur ce point.

Quelle réponse comptez-vous apporter aux demandes de prêts bonifiés modulés qui permettent de rembourser plus vite dans les bonnes périodes et plus lentement dans les périodes de crise ? Pour ce qui est de la valorisation des produits, il est injuste de voir les revenus des pêcheurs se dégrader du fait des dévaluations des pays concurrents, des hausses brutales des prix du carburant ou du dumping pratiqué sur les prix des poissons venus de l'Est. La France doit exiger des autorités communautaires une concurrence loyale.

Ainsi, les contrôles sanitaires doivent-ils répondre aux mêmes conditions d'exigence pour les poissons d'importation que pour nos propres produits, soumis aux normes de Bruxelles.


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Quant aux crédits destinés au futur OFIMER, ils doivent être attribués, en priorité en liaison avec les organisations de producteurs.

En ce qui concerne l'aquaculture, certaines préoccupations du monde maritime sont restées sans réponse.

Je n'ai pas trouvé dans votre budget le soutien qu'attendaient les entreprises de mareyage, lequel est pourtant indispensable à la commercialisation de leurs activités. Ainsi, ces entreprises réclament un allégement significatif de leurs charges. Certes, vous me répondrez qu'avec plus de cinq employés, elles bénéficieront d'une baisse de la taxe professionnelle. Mais vous savez bien que les charges qui pèsent sur elles portent sur les salaires mais sont aussi dues à une fiscalité autre que celle des collectivités locales.

Je ne trouve pas non plus les aides nécessaires au règlement des problèmes sociaux et humains. Les écoles de formation maritime de statut privé, soutenues uniquement par les milieux professionnels et les collectivités locales, ne reçoivent pas les aides indispensables à leur équilibre. Leur rôle est pourtant irremplaçable si l'on veut inciter nos jeunes à s'engager dans une discipline qui engendre des emplois et échappe au chômage. Pourquoi les jeunes qui s'engagent dans cette carrière n'ont-ils pas accès aux bourses, à parité de droits avec leurs camarades de CEP, de CAP et de BEP ? Enfin, le projet de loi de financement de la sécurité sociale tend à transférer aux services fiscaux le recouvrement de la CSG et de la CRDS, actuellement assuré par l'URSSAF. Des cotisations basées sur les résultats de l'entreprise et non plus sur les salaires auraient des conséquences telles que, avec la crise dont nous sortons à peine, la majorité des entreprises de pêche artisanale n'auraient jamais pu les honorer. Cela représente au total une charge moyenne de 30 000 francs par armement, selon le centre de gestion pêche. S'y ajoute, en vertu de la loi d'orientation sur la pêche et les cultures marines, l'indemnisation du chômage par les ASSEDIC, soit une diminution de 20 à 25 % du résultat des entreprises de pêche.

M. le président.

Veuillez conclure, monsieur Guédon.

M. Louis Guédon.

Je termine, monsieur le président.

Le budget de la pêche marque une résignation, il manque d'ambition, l'ambition que nous souhaitons pour que la France poursuive cette activité, justifiée par son littoral maritime. Il ne répond pas à la politique de l'aménagement du territoire et à la politique d'installation attendue par nos jeunes. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Germinal Peiro.

M. Germinal Peiro.

A ce moment de la discussion du budget de l'agriculture pour 1999 et du budget annexe des prestations sociales agricoles, je souhaite centrer mon propos sur le problème des retraites agricoles, qui concerne plus de 2 millions de nos concitoyens. Les retraites agricoles sont les plus basses de notre système de protection sociale. Bon nombre de nos aînés vivent avec des pensions inférieures au minimum vieillesse, malgré l'intervention de la solidarité nationale qui, au travers du fonds de compensation démographique financé par les autres régimes et de la subvention de l'Etat, assure 85 % des retraites agricoles. Les causes de cette situation sont multiples et connues de tous. La première tient sans aucun doute à l'érosion démographique de la profession, qui ne compte aujourd'hui qu'un actif pour trois retraités. De ce point de vue, les retraités agricoles sont les victimes directes d'une politique qu'ils ont subie et qui a vidé les campagnes de notre pays au cours des dernières décennies.

M. André Angot.

Avec vous, ça va dégager plus vite !

M. Germinal Peiro.

La deuxième cause tient à la faiblesse des contributions versées au titre de l'assurance vieillesse. Le régime d'assurance vieillesse agricole n'a été rendu obligatoire qu'en 1952 et a été mis en place très progressivement. Les contributions, calculées sur le revenu cadastral, étaient très faibles pour les petites exploitations familiales. De plus, il n'existait pas - et il n'existe toujours pas - de régime complémentaire obligatoire.

La responsabilité de cette situation n'incombe pas aux retraités agricoles. Replaçons-nous un instant dans le contexte de l'après-guerre : en Bretagne, en Alsace, dans le Périgord et dans toute la moitié sud de la France, les petites exploitations étaient gérées en famille, sur une surface ne dépassant guère une dizaine d'hectares, et vivaient quasiment en autarcie. Dans la formidable mutation qui a suivi, la société tout entière avait intérêt au maintien de prix agricoles aussi bas que possible, ce qui excluait d'accroître les charges des agriculteurs. Personne n'a alors pensé au confort de leurs vieux jours, et la profession elle-même était largement hostile au versement de cotisations. Il appartient aujourd'hui aux jeunes générations de se montrer solidaires, sachant que la plupart des retraités vivent seuls et ne peuvent plus faire face aux dépenses de la vie courante, sachant aussi que la plupart d'entre eux ont vu la valeur foncière et locative de leurs biens chuter et ne peuvent plus compter sur des revenus annexes pour compléter leur modeste pension.

Depuis juin 1997, le gouvernement conduit par Lionel Jospin s'est résolument préoccupé de ce dossier en s'attachant à la revalorisation des retraites les plus faibles. C'est ainsi qu'en 1998 les retraites des aides familiaux et des conjoints d'exploitation totalisant 150 trimestres, soit trente-sept années et demie de cotisations, ont été revalorisées de 500 francs par mois. Cette mesure, qui est d égressive jusqu'à trente-deux années et demie, a concerné 274 000 retraités, pour un coût d'un milliard de francs. De plus, le Gouvernement a tenu à ce que que le principe de la revalorisation des retraites agricoles soit inscrit dans l'article 1er de la loi d'orientation agricole votée en octobre dernier, et s'est engagé, dans un article additionnel, à déposer avant le 31 mars 1999 un rapport décrivant, catégorie par catégorie, l'évolution qu'il compte imprimer aux retraites agricoles du 30 juin 1997 au 30 juin 2002, c'est-à-dire pendant la durée de la législature.

La loi de finances pour 1999 prévoit une nouvelle augmentation, d'un coût de 1,6 milliard en année pleine, qui permettra de porter à 3 000 francs les retraites des chefs d'exploitation, à 2 800 francs celles des veuves, à 2 500 francs celles des aides familiaux et à 2 200 francs celles des conjoints, pour trente-sept années et demie de carrière. Cette mesure, qui sera dégressive jusqu'à trentedeux années et demie, concernera 627 000 retraités agricoles. Au nom du groupe de travail parlementaire que je préside, je veux saluer cet effort, mais nous devons constater que le niveau reste faible, et surtout que ces augmentations ne profitent pas à tous.

Parmi les difficultés que pose la revalorisation des retraites agricoles, l'une apparaît au grand jour : sur les 2 115 000 retraités agricoles que comptait notre pays en 1997, 622 000 seulement avaient validé 150 trimestres, soit trente-sept ans et demi de cotisations, et 265 000


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avaient validé de 130 à 149 trimestres, soit entre trentedeux ans et demi et trente-sept ans et demi de cotisations. En clair, moins d'un retraité agricole sur deux a accompli une carrière longue, soit au moins trente-deux ans et demi en tant qu'agriculteur non salarié. Certains sont polypensionnés, car ils ont cotisé dans d'autres régimes régime salarié ou régime des artisans, le plus souvent -, mais beaucoup ne relèvent que du régime agricole et ne perçoivent qu'une très faible pension, proportionnelle à leur carrière, et incomplète eu égard au nombre de trimestres de cotisations.

M. le président.

Il faut conclure.

M. Germinal Peiro.

Je finis, monsieur le président. Je considère donc, monsieur le ministre, que parallèlement à l'augmentation progressive des retraites selon un plan pluriannuel, comme s'y est engagé le Gouvernement, il est urgent de s'attacher à la revalorisation du minimum vieillesse, qui s'élève à ce jour à 3 470 francs pour une personne seule et 6 230 francs pour un couple. Au total, 900 000 personnes font appel au fonds social vieillesse, et les deux tiers sont des retraités agricoles.

Le relèvement dans les plus brefs délais du minimum vieillesse des personnes seules à 75 % du SMIC, soit 4 050 francs par mois, permettrait de répondre à un véritable besoin social. En effet, ceux de nos concitoyens qui perçoivent l'aide du fonds social vieillesse n'ont pas d'autres revenus, et il leur est impossible de vivre décemment avec moins de 3 500 francs par mois.

M. le président.

Monsieur Peiro, il faut conclure.

M. Germinal Peiro.

Je vous promets que je termine, monsieur le président. Cela permettrait de répondre au plus tôt à la demande des retraités agricoles, qui connaissent les plus grandes difficultés, mais également à celle des petits commerçants et artisans ou épouses de salariés qui, eux aussi, doivent faire face aux dépenses de la vie courante avec de très faibles moyens.

Monsieur le ministre, ce dossier est un dossier difficile qui demande des moyens financiers très importants et une volonté politique très ferme. Nous sommes assurés que vous saurez poursuivre l'action engagée par votre prédécesseur Louis Le Pensec pour apporter des réponses concrètes aux vieux travailleurs de la terre et aux personnes âgées les plus démunies de notre pays.

M. le président.

Bien...

M. Germinal Peiro.

Dans ce combat, vous pouvez compter sur le soutien sans faille du groupe de travail que j'anime et, j'en suis convaincu, sur celui de l'ensemble de la majorité plurielle.

Nous ne devons pas oublier - je finis, monsieur le président - que, parmi les personnes les plus pauvres de notre société, une sur trois est une personne âgée. Notre devoir est de leur rendre leur dignité, notre devoir est d'avancer sur le chemin de la justice sociale.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. Guy Lengagne.

M. Guy Lengagne.

Monsieur le ministre, par une sorte de paradoxe que j'ai déjà souligné devant vos prédécesseurs, vous êtes à la fois le ministre qui a la charge d'un domaine très excédentaire, l'agriculture, et un domaine très déficitaire, car nous importons pour 10 milliards de francs chaque année de produits de la mer.

J'ajoute que, si l'agriculture mondiale est globalement excédentaire, nous avons quelques raisons d'être inquiets quant à l'avenir des pêches mondiales. La production totale a atteint le chiffre de 113 millions de tonnes mais l'on sait que désormais, année après année, la production va diminuer, eu égard à la surexploitation. Votre situation est donc un peu spéciale.

Si le déficit de la balance commerciale est aussi important pour les produits de la mer, c'est parce que les Français sont sages. Comme vous, j'aime le confit, mais les Français devraient savoir que lorsqu'on mange du poisson une fois au moins par semaine - plus, c'est encore mieux - on diminue de 50 % les risques d'avoir un infarctus. (Murmures sur divers bancs.)

Ces études très sérieuses nous viennent de l'Institut Pasteur ; les Français sont donc très sages en consommant du poisson.

(« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

M. Germain Gengenwin.

Avec du riesling ! (Sourires.)

M. Guy Lengagne Je dirai quelques mots de la commercialisation. Vous avez peut-être noté, monsieur le ministre, que nos deux rapporteurs sont originaires du même département que moi, et vous jugerez vous-même si c'est un hasard.

Or ce département a la chance d'avoir le premier port de pêche de France, et surtout le premier centre européen de traitement des produits de la mer. Si la production de Boulogne est de 65 000 tonnes par an, ce port transforme chaque année 300 000 tonnes de poisson, qu'on doit comparer aux 360 000 tonnes de la production de poisson de la pêche française. C'est dire l'importance de la transformation et de la commercialisation du poisson dans ma région.

On a évoqué le rôle de l'OFIMER. Il est fondamental de moraliser - même si le mot est un peu dur - les circuits de commercialisation. Il faudrait aussi éviter au maximum la concurrence entre les produits d'importation et le poisson pêché par nos bateaux. Ce problème ne date pas d'aujourd'hui mais il n'est pas facile à régler.

Je suis par ailleurs un peu en désaccord avec mes amis rapporteurs en ce qui concerne le problème de l'apparition des grandes surfaces dans les circuits de la pêche.

Vous savez comme moi les ravages qu'ont causés les grandes surfaces à l'agriculture et à l'industrie française.

M. Félix Leyzour.

Ce sont elles qui pilotent, maintenant !

M. Guy Lengagne.

Je vois avec quelque inquiétude apparaître une grande surface dans le milieu de la production. Certes, cela a évité de recourir aux « quotashopping », mais il faudra être très prudent si on ne veut pas désorganiser totalement les circuits de commercialisation des produits de la mer en France.

J'insiste enfin sur la nécessité de promouvoir les produits français, comme l'a fait le FIOM. Monsieur le ministre, je vous invite dans ma ville, mais faites l'expérience que je vous propose lors des lunchs. Lorsque des rollmops sont disposés sur la table, suggérez aux gens d'y goûter. Vous vous apercevrez, une demi-heure après, qu'ils ont tous disparu. Pourquoi ? Parce que c'est un produit d'excellente qualité et que le hareng est un produit merveilleux dès lors qu'on sait le préparer et faire sa promotion. La France produit du hareng grâce au combat qu'ont mené les ministres successifs, en particulier votre prédécesseur.

M. Germain Gengenwin.

On ne fait pas assez de publicité !

M. Guy Lengagne.

Votre domaine, monsieur le ministre, est celui qui dépend le plus de l'Europe. Nos collègues de l'opposition ont - c'est leur rôle, sans doute émis quelques critiques.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1998

M. François Sauvadet.

Justifiées !

M. Guy Lengagne.

Mes chers collègues, vous savez que le plupart des dispositions touchant à la pêche dépendent essentiellement de Bruxelles.

M. Germain Gengenwin.

Vous bottez en touche !

M. Guy Lengagne.

Si vous voulez permettre à un armement de pêcher quelques kilos de crevettes en Guyane, ce n'est pas vous, monsieur le ministre, qui donnerez l'autorisation, mais la Commission de Bruxelles.

M. Louis Guédon.

C'est le Conseil des ministres !

M. Robert Lamy.

Et la Commission par défaut !

M. Guy Lengagne.

Il faut reconnaître que le Gouvernement, en ce qui concerne le TAC, s'est très bien défendu.

M. le président.

Monsieur Lengagne, il faut conclure.

M. Guy Lengagne.

Je termine, monsieur le président.

Pour le TAC, nous travaillons sur une répartition qui date de 1983, et il n'est pas facile à un ministre d'obtenir satisfaction pour tout le monde. Je dis bravo au Gouvernement français, qui a fait tout ce qu'il était possible de faire de ce point de vue.

M. Robert Lamy.

Mais il ne peut rien faire !

M. Guy Lengagne.

J'en viens à mon dernier point, la modernisation. Nos pêcheurs vont très souvent pêcher loin de leur base. En gros, 30 % de la pêche française...

M. le président.

Vous avez dépassé votre temps !

M. Guy Lengagne.

... proviennent des eaux françaises et 60 % des eaux européennes non françaises. Nos bateaux doivent donc aller loin ; il est par conséquent indispensable qu'ils soient modernisés. Je sais que vous vous battez à cet effet, mais c'est l'Europe qui prend la décision.

Monsieur le ministre, votre circulaire du 29 octobre 1998 a suscité des espoirs au sein de la pêche artisanale. J'insiste, comme l'an dernier, sur l'impérieuse nécessité qu'il y a à renouveler la pêche industrielle, c'est-à-dire les grands chalutiers, qui ont maintenant trente ans d'âge.

Soyez très attentif à la situation dans ce secteur.

Pour le reste, je pense, je le répète, que le Gouvernement a fait le maximum et que le budget correspond à nos souhaits ; je le voterai donc sans états d'âme.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Philippe Martin.

M. Philippe Martin.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec 33,5 milliards de francs inscrits dans ce projet de budget pour 1999, les crédits accusent un repli de 6 % par rapport à l'année précédente. Cette baisse s'explique par la forte diminution de la subvention d'équilibre au BAPSA, malgré la revalorisation de 1,2 milliard de francs des retraites.

V ous constaterez avec moi que les marges de manoeuvre dégagées par cette substantielle économie n'ont été que très partiellement utilisées.

De plus, ce budget remet en cause la politique d'installation des jeunes agriculteurs, dont le nombre était déjà en diminution : la situation de la fin août 1998 par rapport à celle de la fin août 1997 montre une diminution de 10 % du nombre de premiers versements de la dotation jeunes agriculteurs.

Cette situation ne pourra aller qu'en empirant car vous prévoyez, monsieur le ministre, le transfert d'une partie des crédits du FIA au fonds de financement du CTE, et les crédits DJA sont figés pour l'année prochaine.

Vous portez donc une grave responsabilité quant à l'avenir de notre agriculture, car seule une relance durable de la politique d'installation peut permettre d'atteindre un équilibre entre les départs et les installations, et donc une stabilisation du nombre des agriculteurs en France.

Votre projet de budget mérite donc d'être amélioré sur un certain nombre de points.

Les crédits de la politique agro-industrielle doivent être préservés à leur niveau de l'année dernière, ce qui néces site un supplément de 20 millions de francs. Les moyens du ministère ont été divisés par près de quatre en dix ans, alors qu'existe un cofinancement communautaire. Le maintien des politiques sectorielles est donc nécessaire, en raison des caractéristiques du tissu des PME dans l'agroalimentaire.

Les crédits alloués à l'identification permanente généralisée, bien que revalorisés, devraient à mon sens être complétés en raison du surcoût de l'application du droit communautaire.

La mise en oeuvre du plan de relance pour l'agriculture biologique a mobilisé, l'année dernière, pour la reconversion, 30 millions de francs sur le budget national, a uxquels s'ajoute le cofinancement communautaire. Toutefois, compte tenu des besoins de financement constatés en 1998 et estimés à 85 millions de francs, 10 millions de francs seraient nécessaires pour 1999.

Les crédits alloués à l'enseignement supérieur privé ne permettent pas de répondre aux engagements pris. Il est indispensable que l'accès des jeunes à cet enseignement réponde au souci d'équité.

Votre budget prévoit la suppression de la dotation au fonds des calamités agricoles. Cela remet en cause les principes régissant ce fonds. Qu'en sera-t-il de la mise en place d'une assurance récolte s'il n'y a pas de participation de l'Etat ? En ce qui concerne la revalorisation des petites retraites agricoles, vous opérez par ajustement au sein de votre ministère, à travers la subvention d'équilibre au BAPSA.

Je pense que ce n'est pas la bonne solution, car ce problème de revalorisation relève de la solidarité nationale.

Vous vous êtres engagé à poursuivre l'effort engagé dans ce domaine au cours des dernières années. Celui-ci aura un coût important, qui ne pourra être assuré par un redéploiement au sein de votre ministère.

J'aimerais à présent dire quelques mots au sujet du BAPSA, et tout d'abord des dépenses liées aux prestations familiales. Celles-ci sont en diminution à cause de nouvelles règles d'appréciation de la condition de ressources, qui défavorisent de manière inexplicable et injustifiée les personnes non salariées dont les revenus annuels sont inférieurs à 32 659 francs. Dans ce cas, les ressources sont évaluées forfaitairement en vertu de l'article R.

531-14 du code de la sécurité sociale modifié par un décret du 30 janvier 1997.

Ainsi, monsieur le ministre, avec 33 000 francs de ressources, on peut bénéficier de l'allocation logement ou de l'allocation de rentrée scolaire, mais avec 32 000 francs de ressources, ou même aucune ressource, on en est injustement privé. Ne trouvez-vous pas cela pour le moins aberrant ? Il est nécessaire de réformer les modalités d'évaluation des ressources des exploitants pour l'ouverture du droit à certaines prestations familiales ; les règles édictées par le décret de janvier 1997 sont particulièrement injustes.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1998

Concernant les ressources du BAPSA, les taux techniques et complémentaires des cotisations sociales agricoles ne changent pas en 1999. Aucun nouveau transfert sur la CSG n'est prévu.

Pourtant, il me semblerait opportun de diminuer d'un point supplémentaire la cotisation AMEXA afin de rendre aux agriculteurs le gain de pouvoir d'achat dont ils ont été privés en 1998 à l'occasion du transfert d'une partie des cotisations sur la CSG.

Votre projet de budget, on le constate à la lecture, monsieur le ministre, est largement conditionné par la politique agricole commune.

Je tiens à rappeler, pour conclure, mon opposition au projet de réforme de la PAC tel qu'il est actuellement envisagé dans le cadre de l'Agenda 2000, car il ne constitue qu'une plate-forme de négociations dans la perspective de l'OMC, sans réel projet pour l'agriculture française et européenne.

L'équilibre des marchés agricoles doit rester un objectif politique agricole. Il ne peut être assuré exclusivement par l'ajustement des prix intérieurs sur le marché mondial.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Merci d'avoir respecté votre temps de parole, monsieur Martin.

La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes.

Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, le Gouvernement n'a pas perdu de temps pour affirmer son intérêt pour la forêt, qui, rappelons-le, couvre plus du quart du territoire national, ainsi que pour la filière bois qui occupe près de 500 000 emplois.

M. François Sauvadet.

Ah, la forêt !...

M. François Brottes.

En effet, dès le mois de décembre 1997, le Premier ministre a demandé à notre collègue Jean-Louis Bianco de proposer les orientations pour un projet de loi de modernisation forestière permettant aux acteurs de toute la filière bois de relever un défi à la fois économique, écologique et social.

Je tiens ici à remercier Jean-Louis Bianco pour la qualité, la densité de son rapport, qui fait désormais autorité dans tous les milieux professionnels concernés et qui a déclenché une réelle ferveur, on peut l'affirmer.

M. François Sauvadet.

Il ne faut pas exagérer !

M. François Brottes.

Je le remercie aussi d'avoir associé notre assemblée à sa réflexion par l'intermédiaire du groupe d'études sur la forêt et le bois que j'ai l'honneur de présider.

Monsieur le ministre, il faut rapidement profiter de cet appel de la forêt (Sourires) et de toute la filière pour affronter le double enjeu d'une meilleure compétitivité et d'une gestion durable.

La protection contre les risques naturels, notamment en montagne, la qualité des paysages et des espaces de loisirs, la « maintenance » plutôt que le maintien de la biodiversité, ou encore la lutte contre l'effet de serre sont autant de raisons majeures qui imposent à l'Etat de continuer à assumer pleinement sa responsabilité, qui est peutêtre plus forte ici que dans d'autres secteurs.

Mais cette mission d'intérêt général confiée à la forê t ne peut être remplie avec efficacité que si tous les acteurs de la filière trouvent un intérêt économique à exploiter la forêt et à transformer le bois.

Sur ce plan, le rapport Bianco constitue à lui seul un vrai « projet d'entreprise » pour la filière bois.

Monsieur le ministre, c'est la cohérence d'ensemble des propositions de son rapport qui donne du sens et de la puissance à la stratégie proposée : la forêt française peut produire plus et doit produire plus, la filière peut vendre mieux et doit vendre mieux.

Autant dire tout de suite que cette approche offensive n'est pas incompatible avec les préoccupations écologiques.

J'en veux pour preuve la toute récente déclaration de votre collègue ministre de l'environnement qui indiquait

« que la Fance inclut sa forêt dans son programme de lutte contre l'effet de serre mais - ajoute Mme Voynet pour qu'elle absorbe du gaz carbonique il faut que ce soit une forêt jeune, coupée et renouvelable ».

Oui, monsieur le ministre, la forêt bien exploitée, bien valorisée, est une richesse renouvelable, et le savoir-faire de nos professionnels, dans la forêt publique comme dans la forêt privée, aurait tort de rester timoré, car ce talent ne demande, parfois, qu'à être débridé.

Connaissant vos capacités à faire aboutir les projets, je ne doute pas qu'une « loi Glavany » pour une nouvelle stratégie de la filière bois et forêt dans notre pays saura dans un proche avenir redonner confiance à des centaines de milliers de professionnels.

M. François Sauvadet.

Ç'est un acte de foi !

M. François Brottes.

La France, c'est 1 600 milliards de mètres cubes de bois sur pied. Leur accroissement annuel est évalué à près de 60 millions de mètres cubes, et à peu près 40 millions de mètres cubes sont exploités et commercialisés chaque année.

Jean-Louis Bianco propose de mobiliser 6 millions de mètres cubes en plus d'ici cinq ans, ce qui pourrait créer 100 000 emplois supplémentaires.

Avouons ensemble que le sujet mérite attention. Notre pays investit quatre à dix fois moins d'argent public que nos voisins européens et cette attitude n'est pas nouvelle, chers collègues.

Les chiffres, dans la logique du rapport Bianco, ne peuvent que nous convaincre, je vous demande une seconde d'attention. Pour 100 000 francs d'argent public investi, c'est plus de 3 millions de francs de chiffre d'affaires généré, c'est de l'ordre de 900 000 francs der etours fiscaux ou para-fiscaux, c'est entre 10 et 15 emplois créés, et pour 1 milliard investi, c'est 100 000 emplois créés.

Je ne dirais pas comme le poète « qu'est-ce qu'on attend pour être heureux », mais cette perspective nous interpelle fortement.

L'ONF, au titre du versement compensateur, les CRPF, le fonds forestier national doivent rapidement a ccroître leurs ressources dans des proportions importantes.

M. François Sauvadet.

Nous le demandons !

M. François Brottes.

C'est vrai, monsieur le ministre, le budget de la forêt est dérisoire par rapport au budget de l'agriculture puisqu'il est de l'ordre de 1,5 milliard de francs. Je note tout de même avec satisfaction que ce qui nous est proposé aujourd'hui, c'est un budget de transition, qui marque une volonté certaine de corriger la dérive contre-productive d'un budget à la baisse.

Mais le versement compensateur, malgré une progression de 28 millions de francs, nettement supérieure à l'inflation, n'est pas encore à la hauteur des défis que doit


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1998

relever l'ONF pour le compte de l'Etat et aux côtés des communes forestières. De ce point de vue, je vous remercierais, monsieur le ministre, de bien vouloir nous faire part de vos intentions concernant le tout prochain contrat entre l'ONF et l'Etat.

Le fonds forestier national qui a subi, quant à lui, il y a quelques années, une refonte finalement assez dommageable, n'a plus les moyens d'être réellement incitateur alors qu'il demeure un outil déterminant.

Alors, marquons le pas pour réinventer une nouvelle dynamique, et la formule de Jean-Louis Bianco - un territoire, un projet, un contrat - doit pouvoir nous y aider.

Par ailleurs, la multifonctionnalité reconnue dans la loi d'orientation agricole ouvre la voie pour la forêt.

Nous devons aussi prendre l'offensive au niveau international. La forêt européenne inscrira demain ses massifs forestiers dans des labels d'écocertification qui seront les garants de la qualité de leur production et d'une gestion durable dans le respect de la biodiversité.

Mais, attention, ne nous laissons pas imposer par je ne sais quel groupe de pression « une certification de pacotille » au service du marketing de telle ou telle puissance financière. Il ne faut tout de même pas être frileux face à cette nécessaire certification, car la richesse et la diversité de nos forêts y pourront trouver un réel avantage concurrentiel. Il faut simplement s'organiser en liaison avec les professionnels et les usagers au niveau des Etats et selon une règle transparente et admise par tous.

En conclusion, monsieur le ministre, vous le savez, la f orêt française, publique ou privée, est une forêt

« plurielle » (Rires)...

M. François Sauvadet.

Une forêt de gauche, en somme !

M. François Brottes.

... qui aujourd'hui rassemble ses acteurs dans une aspiration unanime à franchir une nouvelle étape du développement durable.

Monsieur le ministre, votre méthode et votre calendrier feront notre affaire, d'autant que vous êtes un homme qui sait ne pas abuser de la langue de bois. (Sourires et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Voilà une conclusion singulière, monsieur Brottes.

La parole est à M. Jean-Michel Marchand.

M. Jean-Michel Marchand.

Le budget de l'agriculture et de la pêche, avec 28,2 milliards de francs hors BAPSA, est en augmentation de 3 % par rapport à 1998. C'est une première satisfaction, monsieur le ministre.

Ce budget s'inscrit de fait dans le prolongement de la loi d'orientation agricole que nous voterons au cours de cette session parlementaire et prend en compte la mise en place des contrats territoriaux d'exploitation. Dotés à hauteur de 300 millions de francs, il s'agit d'une dotation de démarrage, mais cette dotation est alimentée par redép loiement des mesures agri-environnementales et des OGAF.

Les CTE doivent être l'affirmation de la multifonctionnalité de notre agriculture, de la prise en compte de notre environnement et de nos paysages, de la volonté d'installer des jeunes et de créer des emplois, en un mot, ils doivent permettre un développement durable.

Ils doivent constituer le premier pas vers une réorientation des aides publiques pour traduire la nouvelle politique agricole que nous mettons en avant et nous placer en position de force vis-à-vis de nos partenaires européens lors des rénégociations de la PAC.

Monsieur le ministre, je voudrais insister plus particulièrement sur deux lignes budgétaires qui ne voient pas leurs crédits progresser : la reconversion à l'agriculture biologique et la prime à l'herbe.

Concernant l'agriculture bio, plus de 2 000 reconversions auront été aidées en 1998 pour une enveloppe totale de 83 millions de francs, dont 23 millions de francs de reliquat, et la liste d'attente des candidats s'allonge.

Il ne sera donc pas possible de répondre à la forte demande et d'accompagner l'élan qui se poursuivra en 1999, avec seulement 30 millions de francs au budget et 30 millions de francs de l'Europe.

Quant à la prime à l'herbe, l'augmenter aurait été un signe fort de votre volonté pour une autre agriculture, plus économe d'eau et d'énergie, plus respectueuse des sols et de l'environnement, d'une agriculture plus extensive et moins polluante. C'est encore possible, monsieur le ministre, soit en reventilant les mesures agri-environnementales, qui sont à la hauteur de 819 millions de francs, soit en prélèvant sur les prime irrigation.

Concernant l'enseignement, je souligne la progression de 6,4 %, portant à 3,8 milliards de francs les crédits de l'enseignement agricole. Il est bon qu'éducation et formation restent une priorité et constituent une obligation nationale au service de l'emploi et de l'installation des jeunes.

Je note également la création d'emplois nouveaux, 115 emplois d'enseignants et 60 emplois non enseignants et, tout aussi importantes, la prise en charge d'une partie des frais de stage, l'augmentation du fonds social lycée, ainsi que la revalorisation des bourses.

Il convient également de relever les différentes mesures qui accompagnent l'installation des jeunes pour de meilleures conditions de réussite, en particulier pour ceux qui ne sont pas issus du monde agricole.

S'agissant des personnels, on ne peut pas passer sous silence la diversification et l'augmentation des tâches des agents de votre ministère et de ses services décentralisés face à un effectif en personnel qui, lui, ne progresse pas, bien au contraire. Quelle réponse comptez-vous apporter à la précarité de l'emploi pour les personnels non titulaires de votre ministère et pour les 3 000 contrats emploi-solidarité qui sont affectés à l'enseignement agricole ? Autre volet, la sécurité alimentaire. Vous avez raison d'affirmer, monsieur le ministre, que celle-ci est désormais une préoccupation majeure des Français et qu'elle soulève de véritables débats de société.

Si nous jugeons positifs les moyens financiers supplémentaires accordés pour renforcer la sécurité sanitaire ainsi que les créations de postes engagées dans les différents secteurs de l'Agence française de sécurité sanitaire et du Centre national d'études vétérinaires et alimentaires, nous sommes plus circonspects sur la mise en oeuvre de la biovigilance et du principe de précaution.

Nous ne partageons pas votre sérénité quant aux OGM. Certes, le principe de traçabilité ainsi que le règlement européen sur l'étiquetage constituent des avancées mais ce n'est pas là l'application du principe de précaution. Le débat a été abordé en première lecture de la loi d'orientation agricole, nous souhaitons le poursuivre. Il ne faudrait pas que la seconde lecture fasse l'objet d'un vote bloqué.

M. Christian Jacob.

Il faut voter contre !


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M. Jean-Michel Marchand.

Enfin, les députés Vert avaient demandé, lors de la discussion de la loi sur la sécurité sanitaire, la présence de Mme la ministre de l'environnement comme ministre de tutelle de cette Agence française de sécurité sanitaire des aliments. Nous insistons encore sur la nécessité de créer une Agence de sécurité environnementale.

M. Christian Jacob.

Sinon, vous voteriez contre ?

M. Jean-Michel Marchand.

J'évoquerai quelques points plus rapidement, même si les sujets sont d'importance.

Les SAFER, avec la baisse généralisée à tous des droits de mutation sur les transactions immobilières, ce qui est une bonne chose, vont être fragilisées dans leur fonctionnement et risquent de voir hypothéquée leur fonction de service public. Comment pourront-elles alors continuer à assurer leur mission d'intérêt public, constituer des exploitations de surface utile viables, favoriser l'installation des jeunes et être un véritable outil d'aménagement du territoire ? La crise porcine - et, par extension, toutes les crises de surproduction - fait une fois encore la démonstration de la nécessité que s'organisent les filières et les professionnels, tant au niveau français qu'européen, aussi bien les filières de production que les filières de commercialisation. A cette occasion, il faut que soient traités au fond tous les problèmes liés aux élevages hors sol : installation des structures de production, sécurité sanitaire, qualité des produits, maîtrise des pollutions des sols et des nappes phréatiques.

J'en arrive aux retraites agricoles. Il y a 2 115 000 retraités agricoles, avec, pour un nombre trop important d'entre eux, des retraites inférieures au minimum vieillesse.

Un premier pas a été fait en 1998 avec la revalorisation des retraites les plus modestes. Le processus se poursuit en 1999 avec la revalorisation des petites retraites agricoles, à hauteur de 1,2 milliard de francs, soit 1,6 milliard de francs en année pleine.

Nous comprenons bien que le Gouvernement s'est engagé dans un plan pluriannuel de revalorisation. Mais nous réaffirmons, avec les retraités agricoles et leurs organisations représentatives, l'objectif de 75 % du SMIC pour les cotisants ayant une carrière complète de chef d'exploitation. Or, dans cette perspective, le plan pluriannuel prend du retard et ne permettra pas d'atteindre cet objectif en fin de législature.

Le coût est certes important, mais, renforcer le pouvoir d'achat de ceux qui en ont le moins, c'est participer à la relance de la consommation, donc au soutien de l'économie. Augmenter les retraites, c'est diminuer d'autant la participation du fonds de solidarité vieillesse.

Pour conclure, monsieur le ministre, nous n'oublions pas la part que tiennent nos productions agricoles dans notre balance commerciale.

M. François Sauvadet.

Tiens !

M. Jean-Michel Marchand.

Nous remarquons la revalorisation des crédits de l'aide alimentaire...

M. François Sauvadet.

Significative ?

M. Christian Jacob.

Il faut regarder au microscope !

M. Jean-Michel Marchand.

... même si nous réaffirmons notre attachement à une politique de coopération qui ait pour but l'autonomie alimentaire des pays les plus défavorisés.

Nous notons les efforts et les engagements des professionnels de l'agriculture pour des produits de qualité et pour une information des consommateurs.

Nous voulons croire à une réorientation des aides agricoles par l'intermédiaire des CTE même si nous savons combien l'agriculture française est dépendante de la politique agricole commune.

Votre budget participe de tout cela. Nous le voterons mais nous attendons des réponses à nos interrogations.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste.)

M. François Sauvadet.

Il ne faut pas voter sans savoir !

M. le président.

La parole est M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, intervenir à la fin de cette discussion présente au moins un avantage pour moi, c'est que beaucoup de choses ont été dites, que je partage, s'agissant en tout cas de ce qui a été exposé par mes collègues de la majorité.

Le budget que vous présentez, monsieur le ministre, est un bon budget. Non seulement il assure les missions principales qui vous sont confiées mais il prépare l'avenir puisqu'il prend en compte la loi d'orientation agricole que nous avons votée en première lecture dernièrement.

Puisque le temps m'est compté, je m'attacherai à évoquer deux problèmes : l'un immédiat, mais qui risque de durer pendant quelque temps, le crise du porc, l'autre qui est devant nous, les négociations tant européennes que mondiales.

La crise du porc a déjà été évoquée par les uns et par les autres, mais chacun comprendra que l'agriculteur breton que je suis ne puisse pas éviter d'en parler.

Cette crise est d'abord une crise européenne compte tenu des excédents de production d'environ 10 %. Elle était prévisible. Si les Hollandais et les Allemands n'avaient pas connu la peste porcine il y a deux ans, elle aurait même dû arriver beaucoup plus tôt. Elle est d'autant plus grave. En effet, de nombreux pays ont considéré qu'ils pouvaient continuer de développer cette production, nous précipitant ainsi dans la situation que nous connaissons aujourd'hui.

On ne va pas discuter pour savoir ceux à qui revient la palme de la surproduction, ou la responsabilité première, l'important est que cette crise remette fondamentalement en cause les affirmations libérales de la majorité des responsables de la production porcine.

M. André Angot.

Et la crise asiatique, elle ne compte pas ? C'est une perte de marché !

M. Jean Gaubert.

On sent bien d'ailleurs, à la lecture des déclarations des uns et des autres, qu'ils commencent à s'en rendre compte. Nous espérons que cette prise de conscience n'est pas simplement conjoncturelle mais qu'elle ira beaucoup plus loin. On ne peut pas être libéral quand tout va bien et demander le soutien de l'Etat quand plus rien ne va.

M. François Patriat, rapporteur pour avis.

Très bien ! Voilà ce qu'il faut répéter !

M. Jean Gaubert.

M. Le Pensec avait pris des mesures, vous avez continué, qu'il s'agisse de la réactivation de Stabiporc ou de l'activation de la procédure « agriculteurs en difficulté ». Mais, je l'ai dit, ce n'est pas seulement une crise nationale, c'est une crise européenne, et c'est à ce niveau-là qu'il nous faut intervenir.


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Vous avez obtenu, il y a quelques jours, que des mesures d'exportation en matière d'aide alimentaire soient prises vers la Russie. Mais chacun sait que ces mesures sont limitées ; compte tenu de l'importance de l'excédent, elles ne concernent que deux mois d'excédent de la production européenne.

Il faudra donc aller plus loin, décider, à moyen terme, une réduction de la production, une réduction du cheptel. Il faut le dire, car ce n'est pas encore admis par tout le monde. Ces mesures doivent faire l'objet d'une décision européenne, mais il faudra que chaque pays les adopte.

Il faudra également assurer un meilleur contrôle de la production, d'abord pour l'environnement. On a évoqué à plusieurs reprises les difficultés dans ce domaine. La Bretagne les connaît mieux que d'autres. Pour autant, les autres régions auraient tort de se sentir exonérées. Nous avons eu en Bretagne « la chance » d'avoir des rivières à faible débit : elles ont été, avant les autres, un révélateur de la teneur en nitrates.

Mais à en juger par l'écart de pollution des nappes phréatiques, nous ne sommes pas les seuls concernés. Les mesures proposées par M. Le Pensec et Mme Voynet pour les trente-six cantons les plus concernés en Bretagne doivent donc, à mon sens, être étendues à l'ensemble du territoire national, sinon les autres producteurs risquent de connaître demain la situation malheureuse qui est aujourd'hui la nôtre.

La production porcine est un bon cas d'école s'agissant des négociations que vous allez être amené à conduire.

Les questions qui se posent sont les suivantes. Veut-on garder un maximum de paysans ? Nous l'avons affirmé dans la loi d'orientation agricole, faut-il l'affirmer également au niveau européen, au niveau mondial ? Veut-on p roduire différemment et produire « propre », donc mettre en place des réglementations adaptées et opérer des contrôles ? Veut-on assurer la protection des consommateurs, donc vérifier que les produits qui entrent sur notre marché respectent les règles que nous appliquons à notre propre production ? La législation que nous nous sommes donnée, en particulier la loi sur la sécurité sanitaire et la loi d'orientation agricole, vous sera bien utile pour convaincre nos partenaires européens, puis nos concurrents américains. C'est là que vous êtes attendu !

M. François Sauvadet.

Ça, c'est vrai ! Il est attendu !

M. Jean Gaubert.

Vous avez, monsieur le ministre, notre confiance et notre soutien.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche.

Monsieur le président, madame, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les députés, c'est le premier projet de budget du ministère de l'agriculture et de la pêche et le premier projet de budget annexe des prestations sociales agricoles que j'ai l'honneur de vous présenter et j'ai beaucoup de plaisir à partager ce noviciat avec Mme Marre, qui est rapporteur spécial pour la première fois elle aussi.

En raison du calendrier budgétaire, comme l'a très pertinemment remarqué M. Jacob, ce budget a été préparé par mon prédécesseur et ami, Louis Le Pensec, mais j'ai d'autant plus de facilité à le défendre qu'à la solidarité gouvernementale s'ajoute mon appréciation personnelle : objectivement, je trouve que c'est un bon budget.

J'ai écouté les rapporteurs avec beaucoup d'intérêt et je tiens à rendre hommage au sérieux du travail effectué en commission. J'ai aussi entendu vos interventions, mesdames, messieurs les députés, et vos interrogations. Je vais tenter d'y répondre, en vous priant de m'excuser par avance si j'en oublie quelques-uns. Si c'était le cas,...

M. Christian Jacob.

Nous vous le rappellerions !

M. François Liberti.

Nous vous le dirions !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

... je réparerais cet oubli par écrit tout de suite après la fin de notre débat. Dans l'immédiat, je vous indiquerai les priorités de ce projet de budget et les enjeux qui sous-tendent les choix opérés.

Ces enjeux, vous les connaissez. Ils sont d'abord européens, plusieurs d'entre vous l'ont dit. L'agriculture française est le premier producteur de l'Union - 21 % de la production communautaire - et le premier exportateur, avec un solde positif de nos échanges agro-alimentaires qui a atteint 66 milliards de francs en 1997. Cette puissance, cette vitalité de notre agriculture, doit beaucoup à la politique agricole commune.

La réforme de 1992 qui avait, en son temps, suscité émotion, inquiétude et même polémique, s'est traduite par une progression sensible de la moyenne des revenus agricoles - plus 8 % en moyenne annuelle - même si, je le reconnais, elle n'est pas parvenue à enrayer la baisse t endancielle de la population agricole, que certains d'entre vous avaient dénoncée. Aujourd'hui, une nouvelle réforme est devant nous. Elle est nécessaire pour diverses raisons.

D'abord, la perspective de l'élargissement de l'Europe.

Nous ne pouvons pas agir comme s'il s'agissait d'une échéance lointaine, située dans un avenir indéterminé. Les pays d'Europe centrale ont besoin de l'ancrage européen pour leur stabilité économique et politique, et ils nous font part de leur impatience à nous rejoindre. Je l'ai constaté il y a quelques jours en rencontrant mon homologue polonais. Quant à nous, à l'ouest de l'Europe, nous avons besoin de leur stabilité et nous avons beaucoup à gagner à la consolidation de leur économie. Dans des négociations qui seront longues et, sur certains points, difficiles, il est nécessaire que les Quinze soient capables de présenter avec précision l'acquis communautaire qu'ils demandent aux pays candidats d'adopter. Pour ce faire, il nous faut disposer d'un outil modernisé de politique agricole.

La deuxième raison qui justifie la réforme tient à une autre échéance : celle de la reprise des négociations à l'Organisation mondiale du commerce au début de l'an 2000. Il est arrivé, en d'autres temps, que l'Europe ne fasse pas preuve d'une totale cohésion et adopte une position trop défensive. Il s'agit de tirer les leçons du passé et de faire en sorte que l'Union européenne soit en ordre de bataille, et non en ordre dispersé, avant les négociations à l'OMC, avec un esprit offensif.

Troisième raison : nous connaissons tous l'importance de la question budgétaire dans les négociations communautaires actuelles. Le pacte de stabilité et de croissance s'impose à tous et comporte d'utiles disciplines budgétaires. A ce choix de rigueur, s'ajoutent les difficultés budgétaires invoquées par nos partenaires allemands. A cet égard, je veux rappeler la position du gouvernement français, qui est aussi celle du Président de la République.

Nous avons dit non au cofinancement qui porte en g erme le démantèlement de la politique agricole commune. Nous disons non aussi à l'écrêtement des


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1998

soldes nets, qui ferait supporter le poids et le prix de l'élargissement d'une manière très inégalitaire par les différents partenaires de l'Union. Mais nous disons oui à la maîtrise et à la stabilisation des dépenses ; c'est une piste que nous avons déjà mise sur la table des négociations.

Enfin, dernière raison de la nécessité de cette réforme : il faut vite sortir l'agriculture européenne et les agriculteurs de l'indécision dans laquelle ils vivent quant aux règles du jeu qui régiront leur activité dans les années qui viennent. Je pense en particulier, puisque beaucoup d'entre vous y ont fait allusion, aux jeunes agriculteurs qui, ces temps-ci, comme à chaque période de réforme de la PAC, gèlent leur décision d'installation dans l'attente d'un éclaircissement. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. François Sauvadet.

Il n'y a pas que cela !

M. Jean Auclair.

La ficelle est grosse !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

La ficelle est peut-être grosse, mais l'histoire de l'installation des jeunes agriculteurs montre ces paliers, ces tassements à chaque négociation de la PAC, quoi que vous en disiez ! Cette réforme est nécessaire ; je l'aborde avec ouverture d'esprit et détermination.

Ouverture d'esprit, parce que non seulement je crois nécessaire une réforme de la PAC, mais aussi je souhaite que nous aboutissions prochainement. De ce point de vue, nous devons tous nous féliciter de la position affichée par le gouvernement allemand, qui exercera d'ailleurs la présidence au premier semestre 1999. Il a en effet affirmé sa détermination à respecter le calendrier arrêté à Cardiff, qui devrait permettre d'aboutir au cours de ce premier semestre. L'outil agricole européen doit être adapté à la nouvelle étape qui s'ouvre devant nous. Il doit notamment prendre en compte les exigences autour desquelles une nouvelle dynamique européenne peut s'organiser. Je pense, en particulier, à l'emploi. C'est une Europe de la croissance, pour l'emploi, contre le chômage que nous entendons construire. Les concordances des choix exprimés par les électeurs depuis dix-huit mois dans la plupart des Etats membres démontrent la force du consensus autour de cet objectif.

M. François Sauvadet.

C'est une incantation !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

L'agriculture et le monde rural, monsieur Sauvadet, peuvent et doivent y participer pleinement, concrètement, au-delà des incantations.

J'aborde aussi ces négociations avec détermination. La PAC a été la première grande politique européenne commune. D'une certaine manière elle le reste. Elle a montré la voie. A l'heure où la plupart des Etats européens jugent nécessaire un renforcement de la coordination des politiques économiques nationales, il serait paradoxal d'affaiblir un instrument qui a été à l'avant-garde de l'intégration européenne. Notre agriculture a besoin non pas de moins d'Europe, mais de plus et mieux d'Europe, comme en témoigne, s'il faut un exemple pour le démontrer, la crise porcine actuelle pour laquelle les solutions ne peuvent être qu'européennes. Ainsi, l'Europe dispose aujourd'hui d'une pluralité d'instruments de politique agricole - la préférence communautaire, l'intervention sur les marché, les outils de régulation quantitative, les aides directes, par exemple - qu'il faut conserver tout en procédant aux adaptations nécessaires.

Les négociations autour de la PAC constituent donc un enjeu essentiel, mais l'adaptation de notre agriculture à de nouvelles réalités et de nouvelles attentes est tout aussi décisive. Le budget que je vous présente est inséparable des grands objectifs fixés par la loi d'orientation agricole. Personne ne pourra nous accuser d'incohérence.

J'ai, en effet, le sentiment profond, comme l'avait eu mon prédécesseur Louis Le Pensec, et comme l'ont eu tous les membres de la majorité parlementaire, que notre politique agricole a besoin d'être refondée, de retrouver une légitimité, d'être mieux comprise par la nation. Nous connaissons tous les critiques exprimées par certains de nos concitoyens : surproductions mal anticipées et mal régulées débouchant sur des crises coûteuses - qui peut le nier ? -, détérioration de l'environnement, insuffisante modulation des aides en fonction du revenu. Dans un contexte où chacun est appelé à consentir des efforts, la solidarité, notion que les Français ne remettent pas en cause et à laquelle ils sont, au contraire, très attachés, doit s'exercer dans un cadre transparent d'engagements réciproques.

C'est tout le sens de la loi d'orientaiton agricole. Le temps est venu de redéfinir la place de l'agriculture dans notre société et de reformuler les objectifs de la politique agricole, en prenant en compte à la fois ses fonctions économiques et ses fonctions environnementales, territoriales et sociales.

Personne ne peut oublier la fonction économique de l'agriculture et personne ne peut la sous-estimer.

M. François Sauvadet.

On est content !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Monsieur Sauvadet, vos inquiétudes sont feintes ou manoeuvrières !

M. François Sauvadet.

Non, elles sont fondées !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Les agriculteurs sont aujourd'hui et seront demain des producteurs de denrées alimentaires et de matières premières.

Sans cette fonction économique, sans cette production, nos industries agro-alimentaires ne seraient pas le fleuron industriel mondial qu'elles sont aujourd'hui. Elles doivent le rester.

M. François Sauvadet.

Très bien ! Il faut s'en donner les moyens !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Toutefois, les exploitations agricoles ne pourront produire durablement que si elles prennent en compte les exigences de protection des ressources naturelles. De même, les jeunes ne s'installeront que s'ils trouvent un milieu rural vivant, doté de services collectifs adaptés à leurs attentes.

Enfin, si notre agriculture doit préserver sa place dans les exportations mondiales, c'est aussi en s'orientant vers la qualité, l'innovation, la différenciation des produits.

Nous avons déjà débattu de ces questions lors de l'adoption, en première lecture, du projet de loi d'orientation agricole. Je tenais néanmoins à vous dire dans ce débat budgétaire que je faisais miennes ces orientations dont j'espère qu'elles pourront aussi faire l'objet d'un consensus avec nos partenaires européens. Elles sont, en tout cas, à la base des choix budgétaires que je vais maintenant vous exposer.

Je veux d'abord insister sur le fait que les deux budgets que je présente sont en augmentation. Le budget du ministère de l'agriculture et de la pêche augmente de 3 % par rapport à celui de 1997. Le budget du BAPSA, de son côté, progresse de 1,1 %.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1998

M. Christian Jacob.

Le tout diminue de 6 % ! Vous êtes vraiment fâché avec les chiffres !

M. Jean Auclair.

C'est la magie socialiste !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Est-il nécessaire de revenir sur cette polémique partisane et politicienne de ceux qui, comme M. Jacob, font preuve d'une obstination et d'un aveuglement admirable, expliquant que le budget de mon ministère diminuerait de 6 % au motif que la subvention d'équilibre de l'Etat au BAPSA a dimuné ?

M. Christian Jacob.

Cela figure dans les documents du ministère de l'économie et des finances que je vous ai donnés !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Monsieur Jacob, n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas voir !

M. François Sauvadet.

C'est pourtant vrai !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Le BAPSA enregistre d'importantes recettes nouvelles ; de l'ordre de 3,2 milliards, pour l'essentiel imputables aux recettes de TVA qui lui sont affectées. Il bénéficie aussi d'une plus forte contribution des autres régimes sociaux dans le cadre de la compensation démographique entre régimes. Aussi, la subvention d'équilibre de l'Etat baisset-elle de 2,5 milliards. Pour ma part, je m'en réjouis.

C'est le signe que la croissance est revenue dans notre pays, grâce notamment à la politique menée par le Gouvernement. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

J'ai dit « notamment » : vous voyez que je ne suis ni exclusif ni sectaire. Et pourtant, la tentation était grande de ne pas le prononcer, ce mot

« notamment ».

M. François Sauvadet.

En fait, c'est depuis que vous êtes là ! (Sourires.)

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

C'est le signe également que nos déficits publics diminuent bel et bien, ce que le FMI salue d'ailleurs de manière spectaculaire dans un rapport sur l'économie française publiée ce jour même.

M. François Patriat, rapporteur pour avis.

Il donne un satisfecit au Gouvernement !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Permettez-moi de vous dire que je suis très étonné des réactions de certains qui, d'une part, reprochent au Gouvernement de présenter un projet de budget global pour 1999 excessif en termes de dépenses publiques - c'est ce que nous avons entendu pendant des semaines - et qui, d'autre part, expliquent à l'occasion de l'examen de chaque budget ministériel que la dépense est insuffisante !

M. François Sauvadet.

Cela s'appelle des priorités !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Cela s'appelle l'incohérence ! Pour en revenir au BAPSA, une subvention d'équilibre qui augmenterait quand les recettes baissent mais resterait stable quand les recettes augmentent n'aurait rien d'une subvention d'équilibre. Ce serait un OBNI, un objet budgétaire non identifié, aux effets ravageurs sur les finances publiques.

M. François Sauvadet.

Vous commencez fort !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Je vous remercie de le saluer, monsieur Sauvadet. J'y suis très sensible !

M. Christian Jacob.

Plus de 2 milliards de baisse et vous arrivez à nous expliquer que c'est une augmentation ! C'est fabuleux !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Ce budget en augmentation est un budget cohérent, comme Mme Béatrice Marre, votre rapporteur, l'a fort bien souligné. Il fixe des priorités et leur affecte les dotations nécessaires, en augmentation par rapport à l'année précédente. Il maintient les instruments traditionnels de politique agricole dès lors qu'ils gardent leur pertinence et sont cohérents avec les priorités définies par la loi d'orientation agricole. Je vous propose de commencer par évoquer ces quatre priorités, qui sont au coeur du nouveau contrat entre les agriculteurs et la nation : la mise en place du contrat territorial d'exploitation, la formation et l'installation des jeunes, le renforcement de la sécurité sanitaire, la revalorisation des retraites agricoles.

Le contrat territorial d'exploitation est l'outil majeur au service d'une nouvelle vision de la politique agricole, dans laquelle est prise en compte la multifonctionnalité de l'agriculture et qui encourage l'innovation et la responsabilité. Les CTE varieront certainement d'une région à l'autre, d'un producteur à l'autre. La souplesse et l'imagination doivent présider à leur mise en place. L'essentiel n'est pas la théorie, mais le pragmatisme : une agriculture plus productrice de valeur ajoutée et de qualité, le développement de l'emploi, la préservation des ressources naturelles,...

M. Jean Auclair.

Ce sera tout le contraire !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

... l'occupation la plus équilibrée possible du territoire, tels sont les objectifs. Surtout, un CTE est un contrat, c'est-à-dire un engagement entre l'agriculture et la collectivité, qui crée une relation de partenariat.

M. André Angot.

Comme le PACS ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Le projet pour 1999 affecte 300 millions de francs à un fonds de financement des CTE. Là non plus, je ne reviendrai pas sur l'argument de M. Sauvadet, selon lequel la loi d'orientation agricole n'est pas encore adoptée. Oui, monsieur Sauvadet, j'avais cru remarquer cette particularité !

M. François Sauvadet.

C'est bien !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Mais, je le repète, si nous n'avions pas prévu les crédits, vous nous auriez dit aussi fort : c'est bien la preuve que vous ne croyez pas à cette loi ! Ces 300 millions de francs, c'est peu disent certains, qui ajoutent que cette dotation a pour contrepartie notamment la non-dotation du fonds de gestion de l'espace rural ou des transferts en provenance des offices agricoles.

M. François Sauvadet.

Tout à fait !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Mais cette enveloppe de 300 millions de francs est une dotation de démarrage, qui tient compte du fait que les premiers CTE ne seront pas conclus avant le deuxième semestre de 1999.

M. Christian Jacob.

Donc, d'autres crédits seront redéployés !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1998

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Nous avons adopté le projet de loi d'orientation agricole en première lecture il y a quelques semaines. Il sera examiné par le Sénat au début de l'année 1999, reviendra ici en deuxième lecture, puis il y aura les navettes entre nos deux assemblées. Nous devrions donc normalement adopter ce texte à la fin du premier trimestre de 1999 ou au début du deuxième.

M. André Angot.

Il ne sera peut-être pas adopté ! (Sourires.)

M. Jean Auclair.

Ce serait une bonne chose !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

On peut toujours prendre ses rêves pour des réalités, monsieur Angot ! Mais moi je suis là pour faire avancer la machine ! J'ai donné des consignes aux services de ce ministère pour que les décrets sortent le plus vite possible, dès l'été.

Les premiers contrats territoriaux d'exploitation pourraient ainsi être signés à la rentrée, pour le dernier trimestre de l'année 1999. Ces 300 millions de francs suffiront donc largement à répondre aux besoins.

M. François Sauvadet.

Il faudra nous expliquer la suite !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Ils seront d'ailleurs complétés, en 1999, par des crédits communautaires de l'ordre de 150 millions de francs. La ressource attendue est donc de 450 millions de francs. Il est clair que, pour le budget de l'an 2000 - nous serons, je l'espère fortement, après la réforme de la PAC -, d'autres montants prélevés sur les 70 milliards de francs dont la France bénéficie chaque année au titre des crédits communautaires devront être mobilisés.

Ensuite, le redéploiement que certains soulignent à partir du FGER ou des offices n'est pas seulement financier, il est fonctionnel. Les CTE ont vocation à reprendre les missions du FGER comme les actions de type structurel mises en place par les offices. Je le répète : je ne me satisfais pas de la dispersion, je recherche la cohérence et l'efficacité.

M. Christian Jacob.

Vous allez avoir du mal !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Eh bien, vous nous aiderez, monsieur Jacob ! Et si ce n'est pas vous, ce seront les membres du CNJA qui, heureusement, ne vous suivent pas sur ce terrain !

M. Jean Auclair.

Oh ! ça change ! (Sourires.)

M. Christian Jacob.

C'est évolutif !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

La deuxième priorité consiste à miser sur les jeunes et à assurer leur avenir. Je vais donc évoquer à la fois l'enseignement agricole et la politique d'encouragement à l'installation.

L'enseignement agricole connaît un succès croissant. Sa qualité est reconnue. Ses résultats dans le domaine de l'insertion professionnelle sont incontestables. Certains d'entre vous l'ont dit avec beaucoup de pertinence.

M. François Sauvadet.

C'est vrai !

M. Christian Jacob.

Tout à fait !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Le projet de budget pour 1999 est doté de moyens de conserver et de préserver cet atout. Avec plus de 6,8 milliards de francs, il augmente de 6 %, ce qui, j'ai déjà eu l'occasion de vous le dire en commission, est la hausse la plus forte depuis vingt-cinq ans.

M. François Sauvadet.

Non, c'était déjà le cas en 1996 !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Personne ne peut remettre en cause cette évidence. Ce sont 180 emplois nouveaux qui sont créés et 128 emplois précaires sont résorbés et transformés en postes stables. Sur ces 308 postes, 99 sont des emplois d'ATOS. En outre, pour l'encadrement des lycées, 1 000 emplois-jeunes seront en place au 1er janvier 1999.

M. Christian Jacob.

Cela ne va pas vite !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Les moyens de fonctionnement augmentent, quant à eux, de 11,3 %. Pour renforcer l'effort de solidarité, le fonds social lycéen est abondé de 10 millions de francs, soit une hausse de 42 %.

S'agissant de l'enseignement supérieur agricole, qui connaît aussi un succès croissant, la loi de finances pour 1999 prévoit la création de cinq emplois d'ingérieurs relevant des corps de formation-recherche, une augmentation des crédits de fonctionnement de 1,78 % et la stabilisation des autorisations de programme, à hauteur de 59,6 millions de francs pour réhabiliter, moderniser ou maintenir les bâtiments.

A ce stade, je répondrai plus particulièrement aux préoccupations de M. Leyzour, qui m'a interrogé à la suite de la récente crise lycéenne dont l'enseignement agricole n'a pas été absent. Monsieur Leyzour, nous disposerons de moyens supplémentaires, à hauteur de 22 millions de francs, dans le prochain collectif budgétaire. Et une mission d'inspection est actuellement en cours qui nous conseillera pour les affecter au mieux.

Assurer l'avenir des jeunes, c'est aussi leur permettre de s'installer en nombre suffisant et, notamment, favoriser l'arrivée dans le monde agricole de jeunes dont les parents n'étaient pas des exploitants. En 1998 a été créé le fonds d'installation en agriculture...

M. François Sauvadet.

Eh oui !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Il sera doté de 145 millions de francs en 1999 et servira en priorité à aider des jeunes à s'installer sur des exploitations libérées sans successeur. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. Christian Jacob.

Pourquoi baissez-vous les crédits ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Vous savez qu'aujourd'hui beaucoup d'agriculteurs partent à la retraite sans qu'un membre de leur famille reprenne l'exploitation, ce qui accroît, selon les cas, soit la désertification, soit une excessive concentration.

Les autres instruments d'aide à l'installation sont évidemment maintenus : enveloppe des prêts aux jeunes agriculteurs 5 milliards de francs ; allégements fiscaux en faveur des installations ; dotation jeunes agriculteurs 645 millions de francs ; financement des stages préparatoires à l'installation 86,7 millions de francs.

M. Christian Jacob.

C'est donc une baisse importante !

Mme Béatrice Marre, rapporteur spécial.

Les crédits ne sont pas consommés, vous le savez bien !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Monsieur Jacob, restez calme et serein. Attendez les explications, au lieu « d'aboyer » sur votre banc.

M. le président.

Monsieur Jacob, seul M. le ministre a la parole !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1998

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Il est prévu ainsi d'aider 10 000 installations nouvelles, ce qui représente un effort volontariste, puisque ce chiffre est supérieur aux installations réelles constatées ces dernières années.

M. François Sauvadet.

Ça alors !

M. Christian Jacob.

Fabuleux !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Je redis ici ce que j'ai déjà dit devant la commission de la production et des échanges : le tassement des installations de jeunes m'inquiète - et un peu plus sérieusement qu'il ne vous inquiète, monsieur Jacob.

Mme Yvette Benayoun-Nakache.

Bravo !

M. Christian Jacob.

Nous, nous avançons des propositions ! Vous, vous n'en faites aucune !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Vous vous empêtrez, monsieur Jacob, dans de veilles rengaines selon lesquelles avec vous, c'était le soleil, et avec nous, la tempête. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. Joseph Parrenin.

Il n'y a qu'à voir les installations en Seine-et-Marne !

M. Christian Jacob.

Mais ce sont les chiffres ! Où sont vos propositions ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Je voulais vous dire, monsieur Jacob, que tout ce qui est excessif est dérisoire, que vous feriez mieux d'écouter de temps en temps ce que disent les électeurs et, surtout, que vous avez une conception un peu simpliste de la météo.

Je m'inquiète, moi, de ce tassement. Je le prends en compte raisonnablement en sachant l'effet notoire qu'il a sur les aides de la PAC.

M. François Sauvadet.

Il n'y a pas que cela !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Vous savez, je ne l'ai pas inventé. Ce sont les organisations agricoles qui nous le disent. Ce sont les professionnels qui me l'ont dit, dans mon département, et au plan national.

M. Christian Jacob.

Lesquels ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

« Comm ent voulez-vous, monsieur Glavany, me disent-ils, qu'un jeune s'installe quand il ne sait pas quelles seront les règles du jeu dans les années qui viennent ? »

M. Jean Auclair.

C'est qu'ils doutent de votre politique !

M. le président.

Monsieur Auclair, s'il vous plaît !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Avec vous, tout était merveilleux, monsieur Auclair !

M. Jean Auclair.

Rappelez-vous 1993 !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Comment voulez-vous qu'un jeune fasse un plan de financement, planifie son endettement s'il ne sait pas quels seront ses revenus, s'il ne sait pas de quelles aides il bénéficiera ? Il sait qu'on est en train de tout renégocier.

Quel que soit votre aveuglement, c'est une réalité objective. Mais cela ne suffit peut-être pas à expliquer le tassement. Un an après la création et la mise en place du FIA, je ferai donc le point. J'en tirerai les leçons avec vous, devant l'Assemblée, le moment venu, c'est-à-dire dans quelques semaines.

Mais revenons d'un mot sur les crédits d'installation, dont vous nous dites qu'ils baissent. L'explication de ce phénomène réside dans la non-consommation des crédits.

M. François Sauvadet.

Il faudrait peut-être s'interroger sur la complexité du système !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

A en croire M. Auclair, il y aurait une autre explication : la présence de la gauche au pouvoir !

M. Christian Jacob.

Voilà !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Puisque vous le dites... Mais soyons sérieux deux minutes. Ce tassement est réel et les crédits prévus dans le budget 1998 ne sont pas consommés à la hauteur prévue. Le tassement des crédits ne fait que traduire cette non-consommation.

M. Christian Jacob.

Ils ne sont pas consommés en raison des critères exigés !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

La troisième priorité est la sécurité alimentaire.

Il n'y a pas besoin de longs discours pour montrer qu'il s'agit d'une préoccupation majeure de mon ministère et, au-delà, de tout le Gouvernement.

Le budget total qui lui est consacré est supérieur à 735 millions de francs, soit une hausse de près de 9 %.

Les crédits consacrés à la santé animale s'élèvent à 285 millions de francs, soit 2,3 % de plus qu'en 1998.

Ceux qui sont destinés à la protection sanitaire des végétaux se montent à 53,4 millions de francs, soit une hausse de 52,7 %.

Les services vétérinaires bénéficient d'un effort particulier : les crédits qui leur permettent de procéder à des analyses passent de 43 à 50 millions de francs ; 40 postes supplémentaires sont créés pour le contrôle du service public de l'équarrissage qui est au coeur du dispositif de lutte contre la maladie de la vache folle.

De même, les moyens destinés à renforcer le contrôle des plantes transgéniques, ce que l'on appelle la biovigilance, sont considérablement renforcés.

Vous le savez, à l'issue de la conférence des citoyens sur les OGM, le Gouvernement a arrêté une position fondée sur le principe de précaution. Il a décidé de mettre en place un dispositif de traçabilité des filières de production pour les plantes transgéniques et, à l'initiative de la France, un règlement européen sur l'étiquetage vient d'être adopté. 45 emplois supplémentaires sont créés dans les services chargés de la biovigilance et les crédits d'analyses passent de 35 à 54 millions de francs.

E nfin, l'année 1999 consacrera le démarrage de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments, créée par la loi du 1er juillet 1998. L'agence permettra de renforcer et de rationaliser notre expertise sur la sécurité dans le domaine de l'alimentation humaine et animale.

Elle sera dotée de 50 emplois et de 35 millions de francs de crédits de fonctionnement répartis en trois tiers sur le budget de mon département ministériel, celui de la santé et celui chargé de la consommation.

La quatrième priorité est la revalorisation des retraites agricoles. Le Gouvernement s'est engagé dans un plan de revalorisation des pensions de retraite agricole les plus modestes dont la deuxième phase trouve sa traduction dans la loi de finances pour 1999.

En 1998, les dispositions prises avaient permis une revalorisation de 6 600 francs par an pour 250 000 personnes. Le budget de 1999 prévoit de majorer les pensions de retraite, par attribution de points gratuits de


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1998

retraite proportionnelle à 600 000 personnes pour un coût de 1,2 milliard de francs, soit à 1,6 milliard en année pleine. Cet effort permet de porter les pensions annuelles de : 33 000 francs à 36 000 francs pour 2 18 000 chefs d'exploitation, de 29 700 francs à 3 3 600 francs pour 174 000 veufs et veuves, de 24 000 francs à 30 000 francs pour les aides familiaux et de 24 000 francs à 26 400 francs pour les conjoints. Le Gouvernement a donc tenu ses promesses et continuera à le faire,...

M. Christian Jacob.

Ça, c'est important !

M. Pierre Forgues.

C'est surtout nouveau !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

... comme il s'y est engagé lors de la discussion de la LOA et comme l'article 1er ter nouveau de celle-ci lui en fait désormais obligation.

Pour éclairer les modalités de cette revalorisation, le Gouvernement déposera un rapport d'ici un an. Ce rapport sera élaboré en très étroite liaison avec les travaux menés au sein du groupe d'études parlementaire, autour de Germinal Peiro, dont les propositions seront étudiées avec l'attention que leur sérieux mérite, notamment celle qui concerne la nécessaire revalorisation du minimum vieillesse à laquelle le Gouvernement est très attentif.

C'est un important effort de solidarité que nous devons aux plus vulnérables.

M. François Sauvadet.

Vous vous attacherez les services de M. de Courson !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Je réponds maintenant à certaines de vos interrogations, et notamment à celles de M. de Courson et de M. Lamy.

Non, monsieur de Courson, nous ne sommes pas dans la continuité de ce qui a été fait entre 1993 et 1997 : 2,6 milliards en deux ans,...

M. Charles de Courson, rapporteur spécial.

Non, 1 milliard !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

... c'est un rythme deux fois supérieur à celui des quatre années précédentes ! De plus, cet effort est ciblé sur les plus petites retraites, ce qui n'était pas le cas auparavant...

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. Mais non...

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Monsieur de Courson, les 75 % du SMIC ne représentent pas une dépense de 1,5 milliard, mais de 8,7 milliards.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial.

Je ne vous ai jamais dit ça !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Vous qui êtes un magistrat et qui revendiquez la rigueur, je vous demande de revoir votre copie.

Cela dit, monsieur de Courson, oui, le Gouvernement est favorable à la mise en place d'un régime de retraite complémentaire obligatoire, idée qui fait son chemin, y compris au sein de la profession agricole.

Oui, monsieur Lamy, pendant quatre ans, j'ai été rapporteur pour avis du BAPSA et je n'ai cessé de plaider pour la revalorisation des petites retraites,...

M. Christian Jacob.

Ah, parce qu'il y a de grosses retraites agricoles ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

... je dis bien les petites, et je mets en cohérence mes actes d'aujourd'hui avec mes propos d'hier.

Oui, monsieur de Courson, je suivrai les dossiers agricoles corses avec la même rigueur que celle dont nous avons fait preuve pendant six mois. Mais permettez-moi de vous dire que je ne le ferai pas forcément comme vous me le proposez, « à l'emporte-pièce ».

M. Germain Gengenwin.

Lisez le rapport ! Il est bien fait !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Le dossier corse est suffisamment difficile et sérieux pour qu'on ne le traite pas par foucades ou à coups d'amendements tardifs dans les nuits agitées de cet hémicycle. Il nécessite que le Gouvernement fasse des propositions sereines et cohérentes sur l'ensemble des dispositifs fiscaux et sociaux en Corse.

Voilà ce que sont, monsieur le président, les quatre priorités de ce budget, en étroite cohérence avec le contenu de la loi d'orientation agricole.

Permettez-moi maintenant d'évoquer, autour de quelques grands objectifs, les instruments plus traditionnels de notre politique agricole.

L'aménagement de l'espace rural, d'abord. Vous aurez compris que l'ambition de la loi d'orientation agricole est de privilégier une occupation équilibrée du territoire. Le contrat territorial d'exploitation en sera l'instrument privilégié et fédérateur. Mais d'autres outils demeurent : d'abord, les crédits de la prime à l'herbe à propos de laquelle M. Marchand m'avait interrogé et dont l'objectif est le maintien des systèmes d'élevage extensif. Ils permettent effectivement de maintenir 5 millions d'hectares en herbe et sont reconduits à hauteur de 680 millions de francs. Il y a ensuite la prime à la vache allaitante, dont je m'entretenais hier soir avec le nouveau ministre allemand de l'agriculture. Cette prime, qui est au coeur de bien des discussions européennes, bénéficie aux grandes régions d'élevage herbagé et est dotée à hauteur de 650 millions de francs. Il y a enfin les indemnités compensatoires de handicap naturel - terme qui recouvre essentiellement l'indemnité spéciale de montagne, l'ISM -, qui bénéficient à 120 000 exploitants et qui sont portées à 1,5 milliard - soit une augmentation, par rapport à 1998, supérieure à l'inflation.

L'aide aux bâtiments d'élevage, qui bénéficie surtout aux éleveurs de montagne, est reconduite à hauteur de 224 millions de francs d'autorisations de programmes et à 126 millions de francs de crédits de paiement pour 1999, auxquels s'ajoutent 150 millions de francs du FNDAE.

Je suis, monsieur le président, comme vous, un élu d'un département de montagne, même si ce qui est encore pour quelques jours ma circonscription est en plaine. Je connais donc les difficultés propres à cette agriculture. Je ferai en sorte que ces mesures, abondées par des crédits européens, renforcées par des prêts bonifiés, contribuent à maintenir une activité dynamique dans des zones menacées par la déprise agricole.

J'en profite pour dire un mot sur le fonds de calamités.

Ce fonds n'est pas supprimé. Certes, sa ligne n'est pas dotée cette année (Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance)...

M. François Sauvadet.

Quelle est la différence entre supprimer une dotation et ne pas doter ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Pourquoi n'est-elle pas dotée, monsieur Sauvadet, qui riez aux éclats ?

M. Germain Gengenwin.

Quelle est la différence ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1998

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Monsieur Gengenwin, je vais vous l'expliquer si vous avez une demi-seconde de patience. Parce que ce fonds dispose aujourd'hui d'une trésorerie de 1,4 milliard de francs en caisse, qui doit nous permettre de faire face aux besoins de 1999. En outre, monsieur Jacob, la règle de parité, sur laquelle vous avez insisté, s'apprécie sur la durée. Nous avons connu des années où l'Etat était en avance.

M. Christian Jacob.

Si on fait la moyenne, l'Etat est en retard !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Il peut être cette année en retard. Mais, sur la durée, la parité sera maintenue. Enfin, je prends l'engagement devant cette Assemblée que l'Etat abondera ce fonds suffisamment, si la nécessité s'en faisait sentir dans le courant de l'année 1999.

M. François Patriat, rapporteur pour avis.

Très bien !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Le renforcement des filières de production est un autre grand objectif de notre politique agricole. L'action de l'Etat, vous le savez, passe par les offices. Leur dotation a été reconduite à hauteur de 3 milliards de francs. Le conseil supérieur d'orientation qui prépare la répartition entre les différentes filières ne s'est pas encore réuni. Avant cette concertation avec les professionnels,...

M. François Sauvadet.

Sur 100 millions...

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

J'y viens, monsieur Sauvadet. Comme vous êtes impatient !

M. François Sauvadet.

C'est simplement pour vous aider, monsieur le ministre. Je fais de l'opposition constructive !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

... vous comprendrez qu'il me soit difficile de vous indiquer les grandes lignes de cette répartition.

Je profite de ce passage concernant les filières de production pour faire une nouvelle fois le point avec vous sur la crise porcine, comme m'y a excellement invité

M. Gaubert.

Mon prédécesseur, M. Le Pensec, avait pris des dispositions au mois de septembre pour la mise en place du dispositif Stabiporc ; des aides spéciales, à hauteur de 100 millions de francs, avaient été décidées. J'ai annoncé que j'avais obtenu une rallonge de 150 millions de francs, il y a quelques jours. Mais nous savons bien, et M. Gaubert a eu raison de le dire, que la crise n'est pas française mais européenne et que c'est au niveau européen que se prendra l'essentiel des dispositions.

M. François Guillaume.

Jamais les prix n'ont été aussi bas !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Monsieur Guillaume, à votre place, je ferais preuve d'un peu plus de raison et de mesure sur ce dossier, comme sur d'autres.

M. Christian Jacob.

Pour quelles raisons ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Nous savons bien que nous devons obtenir de Bruxelles un certain nombre de dispositions.

La première que nous avons d'ores et déjà obtenue, c'est dans le cadre de l'aide alimentaire à la Russie, un dégagement de marché, c'est-à-dire des exportations à hauteur de 100 000 tonnes qui seront mises en place dans les semaines à venir. Cela qui soulagera peut-être assez rapidement les cours, sachant que le stockage privé en France est actuellement très bas et que les stockeurs peuvent se remettre à intervenir, dans l'espoir que les exportations habituelles reprennent.

Evidemment, cela ne suffira pas ! Je voudrais vous faire part des conversations que nous avons eues avec le commissaire Fischler, qui proposera au Conseil des ministres agricoles, les 23 et 24 novembre prochains, un certain nombre d'autres scénarios. La Commission ne semble pas vouloir privilégier la réduction du poids des carcasses. Elle considère que c'est un outil assez incontrôlable et peut-être pas si efficace. Elle s'oriente plutôt vers une réduction du cheptel et pense que la réduction du nombre de truies est préférable à celui des porcelets. On en débattra lors de cette réunion.

Mais cela ne suffira pas non plus. La Commission en est d'accord et M. Gaubert a eu raison de le dire. Il faut aussi penser à l'avenir à moyen et long terme. Il faut sortir de cette crise avec un dispositif préventif et s'engager vers une maîtrise de la production au plan européen.

Cela fait d'ores et déjà l'objet des négociations au sein de l'Europe.

Je voudrais réaffirmer ici la détermination du gouvernement français à aller dans ce sens. Il ne faut pas laisser passer cette crise sans en tirer les leçons pour l'avenir et sans engager des mécanismes de maîtrise de la production aussi rigoureux que possible. Il en va de notre responsabilité. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Hoarau m'a interrogé sur la filière sucrière.

L'OCM « sucre » restera en vigueur sous sa forme actuelle jusqu'au terme de la campagne 2000-2001. Il est donc prématuré et difficile d'appréhender quelles évolutions la Commission proposera au Conseil des ministres d'envisager. Celles-ci dépendront notamment de l'état du marché mondial et communautaire, ainsi que des négociations multilatérales qui doivent s'engager bientôt. En tout état de cause, je puis vous assurer que je veillerai à ce que les productions de sucres de canne des DOM soient traitées avec toute l'attention que requiert leur importance particulière dans l'économie de ces départements.

Par ailleurs, il est exact qu'un projet de création d'un complexe sucrier en Guyane est actuellement développé par un groupe constitué à cet effet. Mon prédécesseur, saisi de ce projet, ainsi que mon collègue secrétaire d'Etat aux DOM, a décidé qu'il était nécessaire que le Gouvernement dispose, avant de se prononcer, de différentes expertises sur les principales données et les conséquences de celui-ci, tant sur le plan de l'environnement que de l'agriculture ou de l'économie.

M. François Guillaume.

Il en a pour dix ans !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Ces expertises sont actuellement dans leur phase de lancement ; elles devraient être disponibles pour le premier semestre de 1999. Je puis vous assurer qu'au moment de prendre une décision sur ce projet, le Gouvernement tiendra le plus grand compte des conséquences d'un tel projet sur l'ensemble de la filière canne-sucre-rhum dans les autres DOM, notamment en ce qui concerne l'utilisation des quotas sucriers.

J'en viens à la compétitivité de la filière agro-alimentaire, qui mérite toute notre attention. Non que je sois inquiet à ce sujet, les résultats sont plus que rassurants.

Je pense qu'il faut consacrer de larges dotations budgétaires à un secteur qui n'a pas besoin de l'Etat pour prospérer. Il reste que la SOPEXA, qui regroupe les


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1998

efforts des pouvoirs publics et des professionnels pour assurer la promotion de nos produits sur les marchés étrangers, joue un rôle utile. Cet organisme va signer avec l'Etat une convention d'objectifs. Sa subvention, portée à 1 38 millions de francs, augmente de 10 millions de francs.

De même, les PME innovantes qui souhaitent se moderniser pour être plus compétitives à l'exportation bénéficieront d'une dotation maintenue à 150 millions de francs.

La préservation de l'environnement sera un élément structurant des contrats territoriaux d'exploitation. Est néanmoins maintenue une enveloppe de 140 millions de francs pour des opérations agri-environnementales. Je rappelle que ce montant s'ajoute aux dotations CTE mais aussi à des mesures comme la prime à l'herbe dont la vocation environnementale est évidente.

Je veux, en outre, rappeler que le Gouvernement fera preuve d'une détermination sans faille pour lutter contre les pollutions d'origine agricole et ce n'est pas la récente crise du porc qui me fera changer d'avis. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

Bien au contraire, il s'agit d'un des moyens les plus efficaces pour maîtriser la production.

M. Pierre Forgues.

Bravo !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

C'est d'ailleurs dans l'intérêt des agriculteurs eux-mêmes. Outre le fait que, comme nous tous, ils doivent préférer boire une eau potable et vivre dans des paysages sauvegardés, ils n'ont aucun avantage à voir se développer un différend avec leurs concitoyens sur cette question.

M. François Sauvadet.

Il faut les y aider !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Nous avons pris les moyens de les aider à s'adapter en inscrivant, au budget 1999, 325 millions de francs pour le programme de maîtrise des pollutions en élevage.

M. François Sauvadet.

Absolument pas ! Il n'y a pas un franc de plus que l'an dernier !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Permettez-moi maintenant, monsieur le président, d'évoquer deux secteurs particulièrement importants de l'action de mon ministère : la forêt et la pêche.

La forêt tout d'abord. Notre territoire est riche de nos forêts et l'attachement des Français à leur préservation est particulièrement fort, François Brottes a eu raison de le souligner. Le Gouvernement a confié à M. Jean-Louis Bianco une mission de réflexion et de proposition en vue d'une future loi de modernisation forestière.

Dans son rapport remis le 25 août dernier au Premier ministre et intitulé « La forêt, une chance pour la France », M. Bianco met l'accent sur les modalités de la gestion durable et estime que le potentiel de production et de transformation de la forêt française est particulièrement riche en emplois. Le Gouvernement considère que ce rapport est une bonne base de travail et mes services ont commencé des consultations avec l'ensemble des partenaires concernés. Je ferai très prochainement une communication en conseil des ministres pour fixer les orientations des travaux préparatoires à l'élaboration d'un projet de loi de modernisation forestière, que j'espère soumettre l'année prochaine au Parlement. Nous débattrons ensemble des meilleures modalités d'organisation de ce débat. D'ores et déjà, le budget de l'Office national des forêts, porté en 1999 à 875 millions de francs, est en hausse de 28 millions de francs, ce qui n'est pas dérisoire, monsieur Brottes.

La pêche est une autre richesse de ce pays que j'ai en charge de préserver, un an après le vote de la loi d'orientation pour la pêche maritime et les cultures marines. Un an après, je vous le concède, monsieur Leroux, il n'est pas normal que tous les décrets d'application ne soient pas publiés : cinq seulement sur vingt-huit.

M. André Angot.

A qui la faute ?

M. Christian Jacob.

Que fait le Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Je prends l'engagement qu'ils le seront dans les meilleurs délais...

M. François Sauvadet.

La formule est prometteuse !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

... même si cela dépend aussi un peu de mon collègue ministre de l'équipement.

Le principal dispositif de la loi d'orientation est la transformation du FIOM en un véritable office d'intervention, l'OFIMER. Le contretemps fâcheux que cette création a connu sur le plan juridique est désormais réparé, puisque la loi - je rassure M. Kerguéris - a été promulguée la semaine dernière. Les textes d'application sont soit déjà pris, soit en cours d'adoption. L'OFIMER sera en place au 1er janvier 1999. Il représentera une véritable structure interprofessionnelle capable d'impulser une politique de filière.

M. Kerguéris s'est inquiété du transfert au Comité national des pêches de la section sociale de l'office, ce qui explique une baisse de crédits de 29 millions de francs de ce dernier. Cela correspond tout simplement - je le rassure à nouveau - à une décision prise dans le cadre de la loi d'orientation. J'applique donc les décisions du Parlement.

Mon action vise également à poursuivre la modernisation de la flotte de pêche, déjà bien entamée, et celle des équipements à terre : équipements portuaires, halles à marée.

S'agissant de la flotte de pêche, la France a mis en place, en 1997, un plan de sortie de flotte en partenariat avec les régions ou les départements. Ce plan est en train de réussir.

Nous venons d'obtenir de la Commission européenne le rétablissement des autorisations de construction de navires, ainsi que les aides correspondantes, qui avaient été suspendues en 1997.

J'ai effectivement signé, le 29 octobre dernier, la circulaire fixant les conditions de cette reprise. Plusieurs d'entre vous, dont M. Dupilet, m'ont interrogé sur le nombre de kilowatts concernés. J'indique d'abord très clairement que cette reprise sera modérée ; elle n'ouvrira pas la porte à tous les vents. Pour répondre à la question plus précisément, nous devons attendre le recensement des demandes exprimées dans les COREMODE. Nous ferons alors le point.

Je comprends parfaitement, monsieur Liberti, que l'on se préoccupe du revenu des pêcheurs. Mais il dépend peut-être moins de ce que le pêcheur pêche que de la façon dont il le vend. On ne peut pas décréter l'augmentation de la ressource au fond des océans. Mais on doit sûrement mieux valoriser les produits de la pêche française. C'est d'ailleurs l'esprit de la loi d'orientation.

Vous m'avez également interrogé sur l'étang de Thau.

La commercialisation des coquillages y est provisoirement interdite par décision préfectorale, du fait de la présence de micro-algues toxiques. Cette mesure a fait suite aux résultats des analyses effectuées régulièrement par


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1998

l'IFREMER. Elle montre d'ailleurs qu'une surveillance constante des produits d'élevage est assurée pour la protection des consommateurs, ce dont tout le monde doit se réjouir. Dès que les résultats des analyses le permettront, la réouverture de la commercialisation sera décidée.

Une commission, installée auprès du préfet, est chargée du suivi des événements. Les responsables professionnels y participent. Cette gestion responsable de la crise est de nature à rassurer les consommateurs, sans compromettre la mise en marché ultérieure de la production.

Au total, les crédits alloués à la pêche s'élèvent à 200 millions de francs dans le projet de loi de finances pour 1999.

Je ne saurais être complet sans évoquer l'aide alimentaire, qui ne relève pas exactement de la politique agricole mais dont les crédits sont inscrits au budget de mon ministère. Sous les précédents gouvernements, notre pays avait accumulé un retard dans ses engagements i nternationaux, portant sur la fourniture de 200 000 tonnes d'équivalent céréales par an. Ce retard était d'autant plus dommageable que la France, dans les enceintes internationales, défend l'importance de l'aide publique au développement et appelle notamment à un renforcement de l'aide alimentaire. Pour 1999, le budget de l'aide alimentaire s'élève à 274 millions de francs, en hausse de 70 millions.

Monsieur le président, j'ai respecté aussi scrupuleusement que possible l'impératif horaire que vous m'aviez fixé.

Voilà donc, mesdames et messieurs les députés, ce que je souhaitais vous dire et que je peux résumer ainsi : un budget en augmentation, cohérent, qui dote les instruments nouveaux et qui préserve les instruments traditionnels dès lors qu'ils gardent leur pertinence.

M. Christian Jacob.

Les meilleurs compliments viennent de soi-même !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

C'est un budget qui vise à préparer l'adaptation de notre agriculture aux évolutions de la politique agricole européenne, à maintenir sa place et son image au niveau international, et qui répond, je le crois profondément, aux attentes de tous nos concitoyens.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Je vous remercie, monsieur le ministre, d'avoir respecté votre temps de parole.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

2 SAISINE POUR AVIS D'UNE COMMISSION

M. le président.

J'informe l'Assemblée que la commission des finances, de l'économie générale et du Plan a décidé de se saisir pour avis du projet de loi portant modification du titre III de la loi no 86-1067 du 30 septembre 1986, relatif au secteur public de la communication audiovisuelle et transposant diverses dispositions de la directive no 89/552/CEE du 3 octobre 1989 modifiée par la directive no 97/36/CE du 30 juin 1997 (no 1187).

3

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

M. le président.

Ce soir, à vingt et une heures, troisième séance publique : Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 1999, no 1078 : M. Didier Migaud, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport no 1111) ; Agriculture et pêche ; budget annexe des prestationss ociales agricoles : article 49 et paragraphe II de l'article 50 (suite) ; Agriculture : Mme Béatrice Marre, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe no 4 au rapport no 1111) ; M. François Patriat, rapporteur pour avis au nom de la commission de la production et des échanges (avis no 1116, tome I) ; Pêche : M. Louis Mexandeau, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe no 5 au rapport 1111) ; M. Dominique Dupilet, rapporteur pour avis au nom de la commission de la production et des échanges (avis no 1116, tome II) ; Budget annexe des prestations sociales agricoles : M. Charles de Courson, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe no 42 au rapport no 1111) ; M. Robert Lamy, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (avis no 1112, tome XIV).

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures vingt-cinq.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT