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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 9 DÉCEMBRE 1998

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. LAURENT FABIUS

1. Questions au Gouvernement (p. 10232).

AMÉNAGEMENT DE LA RN 19 EN HAUTE-SAÔNE (p. 10232)

MM. Jean-Pierre Michel, Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

MANIFESTATIONS DE CHÔMEURS (p. 10232)

M. Guy Hermier, Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

POSTES D'INFIRMIÈRES DANS LES ÉCOLES (p. 10233)

M. Bernard Birsinger, Mme Ségolène Royal, ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

2. Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire étrangère (p. 10234).

3. Questions au Gouvernement (suite) (p. 10234)

PARTICIPATION DES FEMMES À LA VIE PUBLIQUE (p. 10234)

MM. José Rossi, Lionel Jospin, Premier ministre.

AVENIR DE L'AÉRONAUTIQUE FRANÇAISE (p. 10235)

M

M. Dominique Baudis, Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

PROGRAMME TRIENNAL DE STABILITÉ (p. 10236)

MM. Philippe Auberger, Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

DÉFINITION DES ZONES D'ÉDUCATION PRIORITAIRE (p. 10237)

M. Georges Tron, Mme Ségolène Royal, ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

ENFOUISSEMENT DES DÉCHETS RADIOACTIFS (p. 10238)

MM. Arnaud Lepercq, Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

INSTITUTION D'UNE COUR PÉNALE INTERNATIONALE (p. 10239)

MM. Yves Dauge, Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères.

LUTTE CONTRE LES DÉRIVES SECTAIRES (p. 10239)

Mmes Yvette Benayoun-Nakache, Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

PRÉSENCE DE MAGISTRATS FRANÇAIS DANS DES OPÉRATIONS ÉLECTORALES AU GABON (p. 10240)

Mmes Monique Collange, Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

APPLICATION DE LA LOI CONTRE L'EXCLUSION (p. 10241)

M. Jean Le Garrec, Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

4. Pacte civil de solidarité. - Explications de vote et vote sur l'ensemble d'une proposition de loi (p. 10241).

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission des lois.

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

EXPLICATIONS DE VOTE (p. 10241)

MM. Bernard Bissinger, Henri Plagnol, Alain Tourret, Claude Goasguen, Patrick Bloche, Patrick Devedjian.

VOTE SUR L'ENSEMBLE (p. 10249)

Adoption, par scrutin, de l'ensemble de la proposition de loi.

Suspension et reprise de la séance (p. 10250)

PRÉSIDENCE DE M. PATRICK OLLIER

5. R equête en contestation d'opérations électorales (p. 10250).

6. Loi de finances pour 1999. Communication relative à la désignation d'une commission mixte paritaire (p. 10250).

7. Accès au droit. - Discussion, en deuxième lecture, selon la p rocédure d'examen simplifiée, d'un projet de loi (p. 10250).

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

M. Jacques Brunhes, rapporteur de la commission des lois.

DISCUSSION GÉNÉRALE (p. 10254)

MM. Jean-Antoine Leonetti, Georges Hage, Thierry Mariani, André Vallini, Claude Goasguen, Alain Tourret.

Mme la garde des sceaux.

Clôture de la discussion générale.

Articles 1er , 3, 7 bis, 8 à 11 et 14 (p. 10259)

Article 15 bis (p. 10261)

Le Sénat a supprimé cet article.

Articles 16, 16 bis, 16 ter, 17 A et 17 à 19 (p. 10261)

Ces articles ne font l'objet d'aucun amendement.

VOTE SUR L'ENSEMBLE (p. 10262)

Adoption de l'ensemble du projet de loi.

8. Convention fiscale entre la France et la Fédération de Russie. Discussion, selon la procédure d'examen simplifiée, d'un projet de loi adopté par le Sénat (p. 10262).

Article unique. - Adoption (p. 10262)

9. Accord entre la France et la République tunisienne sur les investissements. Discussion, selon la procédure d'examen simplifiée, d'un projet de loi adopté par le Sénat (p. 10263).

Article unique. - Adoption (p. 10263)


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10. Accord de coopération entre la France et la République de Namibie. Discussion, selon la procédure d'examen simplifiée, d'un projet de loi adopté par le Sénat (p. 10263).

Article unique. - Adoption (p. 10263)

11. Convention fiscale entre la France et la République de Namibie. Discussion, selon la procédure d'examen simplifiée, d'un projet de loi adopté par le Sénat (p. 10263).

Article unique. - Adoption (p. 10263)

12. Validation législative d'actes du ministère des affaires étrangères. Discussion, selon la procédure d'examen simplifiée, d'une proposition de loi (p. 10263).

M. François Loncle, rapporteur de la commission des affaires étrangères.

M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères.

DISCUSSION GÉNÉRALE (p. 10265)

MM. Georges Hage, Pierre Lequiller, François Loncle, Thierry Mariani.

Clôture de la discussion générale.

Article unique (p. 10267)

Cet article ne fait l'objet d'aucun amendement.

Adoption de l'article unique.

13. Ordre du jour de la prochaine séance (p. 10267).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 9 DÉCEMBRE 1998

COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. LAURENT FABIUS

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

M. le président.

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Mes chers collègues, je vous indique dès à présent, pour en finir avec un suspense difficilement soutenable (Sourires), que la séance ne sera pas suspendue à la fin des questions au Gouvernement.

Nous passerons immédiatement aux explications de vote et au vote, par scrutin public, sur l'ensemble de la proposition de loi relative au pacte civil de solidarité.

Nous commençons par les questions du groupe Radical, Citoyen et Vert.

AMÉNAGEMENT DE LA RN 19 EN HAUTE-SAÔNE

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Michel.

M. Jean-Pierre Michel.

Monsieur le ministre de l'équipement, des transports et du logement, ma question concerne la modernisation de la RN 19 qui traverse, notamment, le département de la Haute-Saône. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Mes chers collègues, laissez M. JeanPierre Michel poser cette question d'intérêt... national ! (Sourires.)

M. Jean-Pierre Michel.

Sans revenir sur les promesses du gouvernement précédent (Protestations sur les mêmes bancs),...

M. Didier Boulaud.

Ce serait une trop longue litanie !

M. Jean-Pierre Michel.

... je voudrais rappeler les fondements de ce projet : d'abord, achever de mettre en voie express l'axe Nantes-Mulhouse ; ensuite, désenclaver le département de la Haute-Saône et compenser la suppression des régiments de Lure et de Montbéliard ; enfin et surtout, améliorer la sécurité des usagers et des riverains sur une route nationale où l'on ne compte plus les accidents mortels.

Le Gouvernement a fait procéder à des études, dont il doit maintenant disposer des conclusions. Vous êtes donc en mesure, monsieur le ministre, d'apprécier les coûts comparés d'une autoroute et d'une mise à deux fois deux voies entre Langres et Belfort. Cette dernière solution a l'appui de certains élus de la région, mais il semble acquis que le prochain contrat de plan entre l'Etat et la région Franche-Comté ne permettra pas de réunir les financements nécessaires pour transformer cette route nationale sur quelque 150 kilomètres. Dès lors, ma question est très simple : le Gouvernement est-il en mesure de prendre un engagement budgétaire exceptionnel,...

M. Philippe Auberger.

Non !

M. Charles Cova.

Peut-être : avec l'argent du PACS !

M. Jean-Pierre Michel.

... qui répondrait à un besoin collectif fortement exprimé dans le nord de la FrancheComté ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Monsieur le député, M. le président a souligné l'intérêt national de votre question mais, vous le savez, la liaison entre Langres et Belfort n'est pas inscrite au schéma directeur routier national de 1992.

La solution consistant à réaliser cette liaison sous forme d'une autoroute concédée, qui a été annoncée un peu hâtivement par la majorité précédente, faire d'ores et déjà apparaître, dans le nouveau contexte européen, une subvention d'équilibre très élevée à la charge des collectivités territoriales et de l'Etat.

Des études approfondies ont été engagées sur différentes solutions, notamment celles que vous avez citées - solution concédée ou aménagement sur place de la RN 19 et de la route départementale 438. Ces études seront achevées à la fin de l'année. Il semblerait qu'un aménagement de l'itinéraire existant soit la solution la mieux adaptée au désenclavement du nord de la FrancheComté qui s'inscrit lui-même dans le désenclavement de la Haute-Saône.

Le premier semestre de 1999, au cours duquel seront discutés les schémas de service, permettra de trancher cette question et d'arrêter définitivement le type d'aménagement. Selon le même calendrier se déroulera, comme vous le suggérez également, la négociation des contrats de plan. Cela permettra d'avoir une vue globale de la programmation des opérations routières en Franche-Comté - la Haute-Saône est concernée, mais le territoire de Belfort aussi - et, à partir de là, de définir le mode de financement pour cette liaison tout à fait indispensable.

(Applaudissements sur quelques bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste.)

M. le président.

Nous en venons aux questions du groupe communiste.

MANIFESTATIONS DE CHÔMEURS

M. le président.

La parole est à M. Guy Hermier.

M. Guy Hermier.

Madame la ministre de l'emploi et de solidarité, les chômeurs se font de nouveau entendre. La


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semaine dernière, ils étaient plus de 20 000 dans les rues de Marseille. Demain, ils manifesteront nombreux à Paris à l'appel des associations de chômeurs.

Nous le savons tous, ce qu'ils veulent avant tout, c'est du travail. C'est pourquoi nous avons soutenu les mesures du Gouvernement qui ont permis un premier reflux du chômage, comme la loi contre les exclusions qui doit être maintenant intégralement appliquée. Force est cependant de constater qu'aujourd'hui des centaines de milliers de chômeurs, de RMIstes, de sans-droits continuent de vivre dans des conditions insupportables. Nombre d'entre eux et leurs organisations ont choisi de refuser l'intolérable plutôt que de s'y résigner. Nous partageons ce choix, qui reçoit un large soutien dans l'opinion.

Madame la ministre, que le Gouvernement ne joue pas la montre contre un mouvement porteur d'une si forte exigence sociale et de dignité ! Surtout, qu'il n'espère pas étouffer le cri des chômeurs par un recours à la force et d'inadmissibles violences policières, comme celles de lundi dernier à Marseille, dont a été notamment victime mon ami Joël Dutto, vice-président du conseil général ! Ce serait une faute politique grave ! Les chômeurs ne comprennent pas pourquoi les allocations exceptionnelles, la prime de Noël, qui ont été possibles l'an dernier, ne le sont pas à nouveau cette année.

Nous vous demandons avec force de prendre sans attendre les mesures d'urgence qui s'imposent pour répondre à cette légitime attente, comme nous continuons à vous demander un relèvement significatif des minima sociaux qui permette à tous de vivre dignement.

Madame la ministre, quand les « sans », les sans-emploi, sans-logement, sans-papiers, sans-droits, frappent à la porte de notre société, c'est un devoir pour la gauche de savoir les entendre et de répondre à leur appel ! (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Croyez bien, monsieur le député, que le Gouvernement entend et comprend les chômeurs, même lorsqu'ils s'expriment difficilement et parfois rudement parce que leur situation, souvent intolérable, les a amenés à la marge de l'exclusion et qu'ils ont le sentiment d'avoir perdu leur dignité, cumulant les difficultés financières, de santé, familiales et autres. C'est bien parce que le Gouvernement entend les chômeurs qu'il a fait de la lutte contre le chômage sa priorité numéro un. Aujourd'hui, la relance de la croissance, les emplois-jeunes et la réduction de la durée du travail commencent à porter leurs fruits (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance), mais ceux qui sont aujourd'hui sur le bord de la route ressentent encore plus durement leur situation à un moment où le chômage baisse.

Depuis le vote de la loi contre les exclusions tout a été mis en place pour que la voix des chômeurs soit entendue. Nous recevons les organisations syndicales et les associations de chômeurs. Elles sont actuellement représentées dans les comités de liaison de l'ANPE. De plus, et je tiens à le redire au groupe auquel vous appartenez, nous avons fait paraître la quasi-totalité des textes d'application de la loi contre les exclusions. Déjà 10 000 jeunes sont aujourd'hui dans le programme TRACE, 60 000 chômeurs de longue durée ont été reçus pour un nouveau départ vers l'emploi et la qualification...

M. Jean-Michel Ferrand.

Baratin !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

... et ils seront 800 000 l'année prochaine. Nous travaillons actuellement sur trois dossiers majeurs.

S'agissant, d'abord, de la précarité, je négocie cette semaine avec les organisations patronales et syndicales pour augmenter l'indemnisation des chômeurs. C'est un point important.

S'agissant ensuite des mesures d'urgence, je veux répéter ici devant l'Assemblée nationale que la quasi-totalité des commissions d'action sociale d'urgence sont en place et qu'il y a partout de l'argent pour répondre à l'urgence, dans les Bouches-du-Rhône comme ailleurs.

Enfin, nous travaillons actuellement avec le Premier ministre sur la revalorisation des minima sociaux, qui doit avoir lieu à la fin de l'année.

Le Gouvernement a le souci permanent de faire de l'emploi la priorité numéro un, car c'est la bonne réponse au chômage, et de faire appliquer la loi contre les exclusions. Mais s'il a pris ses responsabilités en sortant la quasi-totalité des textes dans les domaines de l'endettement, du logement, de l'emploi, de la santé, il convient maintenant que l'ensemble des collectivités locales - je pense aux élus des conseils régionaux, généraux et municipaux - à côté des associations, nous aident à faire de cette loi une vraie avancée contre l'exclusion et contre le chômage. C'est aussi cela que nous disent les chômeurs, à Marseille et ailleurs.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

POSTES D'INFIRMIÈRES DANS LES ÉCOLES

M. le président.

La parole est à M. Bernard Birsinger.

M. Bernard Birsinger.

Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

En faisant de l'enfant un individu à part entière, la Convention internationale des droits de l'enfant est venue c ompléter la Déclaration universelle des droits de l'homme dont nous célébrons le cinquantenaire. Promouvoir les droits de l'enfant, c'est assurer leur protection, mais c'est aussi développer leur droit de participation à la vie publique.

En créant le Parlement des enfants, nous avons donné un signe fort pour que les enfants exercent leur citoyenneté. Je connais l'attachement de notre majorité aux droits de l'enfant. Le 19 novembre dernier, nous avons discuté de deux propositions de loi, l'une relative à l'instauration d'un médiateur des enfants, l'autre visant à interdire l'achat de matériels scolaires fabriqués par des enfants. Cette dernière avait été choisie par le Parlement des enfants de cette année. L'adoption de ces textes prouve que la représentation nationale, dans toutes ses composantes, prend au sérieux la parole des enfants.

Mais, car il y a un « mais », nous n'avons pas encore discuté de la proposition de loi retenue par le Parlement des enfants en 1997 tendant à prévoir une infirmière par groupe scolaire. Les députés de la commission d'enquête parlementaire sur l'état des droits de l'enfant en France ont pourtant souligné, tous groupes politiques confondus, l'état sinistré de la santé à l'école. Mme Ségolène Ro yal a dit, dans cet hémicycle, que le nombre de postes d'infirmière créés dans l'éducation nationale était encore insuffi-


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sant. En effet, les 185 postes prévus au projet de budget pour 1999 sont loin de répondre aux attentes et aux besoins exprimés par les enfants et leur famille. Des milliers de parents et d'enfants dans tout le pays ont signé une pétition qui reprend tout simplement la proposition des enfants. Il faut répondre à cette demande de santé à l'école pour les enfants. C'est une mesure sociale concrète très attendue.

Je ne doute pas, monsieur le Premier ministre, que le Gouvernement aura à coeur d'inscrire à l'ordre du jour de notre assemblée la proposition de loi retenue par le Parlement des enfants en 1997. Quand cette proposition serat-elle examinée ? Comptez-vous profiter de l'examen en deuxième lecture du projet de loi de finances pour inscrire dès cette année une progression significative du nombre de postes d'infirmière dans les écoles ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

Mme Ségolène Royal, ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

Monsieur le député, le rôle des infirmières dans les établissements scolaires est en effet essentiel et ce n'est pas un hasard si le Parlement des enfants a émis l'idée de la présence d'une infirmière par é tablissement scolaire. Le Gouvernement est bien conscient de cette nécessité. C'est la raison pour laquelle il a entamé un effort de rattrapage : 600 postes médicosociaux ont ainsi été créés dans le budget de 1998 et 400 autres le sont dans le projet de budget pour 1999.

En deux ans, ce sont ainsi 1 000 emplois supplémentaires d'infirmière, d'assistante sociale et de médecin scolaire qui arriveront dans les écoles, c'est-à-dire autant que pendant les cinq années précédentes.

Cet effort s'inscrit dans un effort global pour la santé scolaire : renforcement de l'éducation à la santé, mise en place des comités d'éducation à la santé et à la citoyenneté, création d'un fonds social pour les cantines et augmentation des fonds sociaux collégiens et lycéens. En effet, le Gouvernement vous rejoint sur ce point, monsieur le député : le droit à la santé est un droit fondamental des enfants et des adolescents et, surtout, c'est la condition première de la réussite scolaire dans les établissements. Le Gouvernement veillera donc, en liaison avec les groupes parlementaires et la présidence de l'Assemblée nationale, à ce que les propositions du Parlement des enfants soient inscrites à l'ordre du jour de l 'Assemblée.

(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

2

SOUHAITS DE BIENVENUE À UNE DÉLÉGATION PARLEMENTAIRE ÉTRANGÈRE

M. le président.

Je suis heureux de souhaiter, en votre nom, la bienvenue à une délégation parlementaire de l'Assemblée nationale de la République socialiste du Vietnam, conduite par M. Do Quoc Sam. (Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent.) 3 QUESTIONS AU GOUVERNEMENT (suite)

M. le président.

Nous reprenons les questions au Gouvernement.

Nous en venons aux questions du groupe Démocratie libérale et Indépendants.

PARTICIPATION DES FEMMES À LA VIE PUBLIQUE

M. le président.

La parole est à M. José Rossi.

M. José Rossi.

Monsieur le Premier ministre, la semaine prochaine, l'Assemblée nationale sera appelée à examiner un projet de loi constitutionnelle relatif à l'égalité entre les femmes et les hommes.

La femme... la France, veux-je dire (Rires et applaudissements), connaît, en effet, un grave retard en ce qui concerne la participation des femmes à la vie politique et, de façon plus générale, à la vie publique. Cette situation n'est acceptable ni pour vous ni pour nous. Elle nuit à l'image et à la qualité de notre démocratie. Le groupe Démocratie libérale et Indépendants ne peut que souscrire à la volonté de favoriser un égal accès des femmes et des hommes...

M. Didier Boulaud.

Donnez l'exemple !

M. José Rossi.

... aux mandats et fonctions politiques et d'assurer en même temps une juste représentation des femmes...

M. Didier Boulaud.

Les Juppettes ?

M. José Rossi.

... dans tous les domaines de la vie civique et sociale.

M. Didier Boulaud.

Donnez l'exemple !

M. José Rossi.

Nous accompagnerons évidemment ce mouvement, bien que nous ayons des réserves juridiques à formuler sur la voie que vous avez choisie. Ces réserves sont d'ailleurs partagées, en dehors de notre assemblée, notamment par les juristes les plus éminents. Je pense en particulier au dernier point de vue récemment exprimé dans la presse par le doyen Vedel.

Toutefois, avant de prendre position sur votre projet de loi, nous souhaiterions au préalable, monsieur le Premier ministre, que vous leviez toute incertitude sur vos objectifs réels. En effet, des rumeurs insistantes font état d'une volonté de votre gouvernement de changer, ou plutôt de poursuivre les changements de mode de scrutin notamment pour les élections législatives. Après l'adoption éventuelle du projet de loi constitutionnelle sur la parité, la nouvelle exigence constitutionnelle, facile à mettre en oeuvre dans le cadre d'un scrutin de liste, semblera évidemment plus difficilement compatible avec le scrutin majoritaire.

Suivant le Président de la République, qui a récemment estimé qu'un mode de scrutin devait exclure « toute manoeuvre ou arrière-pensée politicienne », nous souhaitons que le Gouvernement ne fasse pas de ce projet de loi constitutionnelle l'antichambre d'un mode de scrutin qui serait destiné à ne favoriser qu'une partie de cette assemblée.

M. Bernard Accoyer.

Escroquerie !

M. José Rossi.

Nous vous avons déjà interrogé sur ce point, monsieur le Premier ministre, vous ou les membres de votre gouvernement et singulièrement le ministre de


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 9 DÉCEMBRE 1998

l'intérieur. Le Gouvernement a, pour l'instant, choisi de ne pas nous répondre. Une nouvelle fois, nous vous demandons donc solennellement de nous éclairer dès à présent sur les conséquences concrètes que le Gouvernement entend tirer de ce nouveau principe d'égal accès des femmes et des hommes aux fonctions et aux mandats électifs. Nous avons une position ouverte et favorable en la matière, mais nous souhaitons avoir des informations plus précises pour pouvoir délibérer les yeux ouverts.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. le Premier ministre.

M. Lionel Jospin, Premier ministre.

Monsieur le pré-s ident Rossi, le lapsus que vous avez commis en commençant votre propos me paraît être un bon signe pour l'ouverture de ce débat.

(Sourires.)

Identifier la France aux femmes n'est pas exactement le point jusqu'où le Gouvernement veut aller (Sourires) et il se contenterait de savoir que les femmes ont, dans ce pays, et notamment dans la vie publique, leur juste place.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Dans cette affaire, le Gouvernement a une pensée, un objectif, pas d'arrière-pensée. Ma réponse sera donc claire.

Au coeur de la démarche de modernisation de la vie publique que nous avons engagée, il y a effectivement la volonté d'avancer vers l'objectif de la parité. Bien sûr, la volonté des partis politiques peut y conduire et la formation politique à laquelle j'appartiens, à l'occasion des élections législatives, a réservé 30 % des circonscriptions à des femmes. Et l'on peut constater dans cette assemblée que si le nombre des femmes, encore insuffisant, s'y est fortement accru, c'est beaucoup grâce aux formations politiques de la majorité.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Néanmoins, si cette volonté des formations politiques est défaillante, nous n'avancerons pas assez vite, surtout si le cadre institutionnel, et je dirai même le texte constitutionnel, semblent y faire obstacle.

C'est pourquoi, dès ma déclaration de politique générale, au nom du Gouvernement, j'ai annoncé que nous nous fixions comme objectif une révision de la Constitution afin d'y inscrire l'objectif de la parité entre les femmes et les hommes. Cet engagement a été confirmé par moi-même lors de la journée internationale des femmes, le 8 mars 1998. Il a été accepté par le Président de la République, même si ce dernier a préféré le mot

« égalité » entre les femmes et les hommes à la formule que je proposais, qui me semble plus nette, plus claire et plus novatrice.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Mais on peut introduire le mot

« parité » s'il vous convient mieux. Ce n'est pas un problème...

(Sourires.)

Nous nous sommes donc entendus sur un texte, et un projet de loi constitutionnelle a été adopté par le conseil des ministres le 17 juin. Ce texte, dans la rédaction aujourd'hui retenue par votre commission des lois, tend à réformer la Constitution par cette affirmation, introduite à l'article 3 de notre texte fondamental : « La loi détermine les conditions dans lesquelles est organisé l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats et fonctions. »

Il s'agit d'une réforme essentielle de notre vie démocratique, cinquante ans après l'obtention du droit de vote par les femmes.

M. Jacques Myard.

Grâce à De Gaulle !

M. le Premier ministre.

De Gaulle, oui, et les formations de gauche réunies (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République) dans l'esprit du Conseil national de la Résistance, ne l'oublions pas ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République.

De Gaulle ! De Gaulle !

M. le Premier ministre.

Bien sûr, et le parti communiste, et le parti socialiste, et le MRP, issu des combats de la Résistance. C'est la réalité historique, nous la partageons, ne nous disputons pas.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste. - Protestations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Alors que les femmes représentent 53 % de la population, pouvons-nous accepter qu'elles ne constituent, par différence avec les autres grandes démocraties européennes, qu'à peine 11 % des députés, 6 % des sénateurs, qu'il y ait moins de dix femmes maires de villes de plus de 50 000 habitants, qu'une seule femme soit présidente de conseil régional et qu'aucune ne soit présidente de conseil général ! (Exclamations sur les bancs du RPR.)

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendante.

Si, il y en a une !

M. le Premier ministre.

C'est possible, très bien ! La mise en oeuvre de la parité dans la vie politique doit d'ailleurs s'accompagner d'une action résolue tendant à une plus grande égalité des hommes et des femmes dans tous les aspects de la vie publique, de la vie professionnelle et de la vie sociale. Notre secrétaire d'Etat, Mme Nicole Péry, aura à y travailler et à vous faire des propositions dans les semaines et dans les mois à venir.

Pour répondre complètement à votre propos, monsieur le président Rossi, je tiens à préciser que cette démarche, qui a sa justification en elle-même, n'obéit à aucun autre motif. Il est vrai que les modes de scrutin de liste permettent aisément de réaliser la parité. Nous avons déjà, nous, socialistes, pris des engagements en ce sens et je crois savoir que les formations de la majorité ont proposé un amendement tendant à poser le principe de la parité dans la réforme du mode de scrutin régional. Mais cette révision constitutionnelle n'est, aux yeux du Gouvernement et à mes yeux, en aucune façon conçue comme un moyen ou comme un prétexte à une modification des modes de scrutin, et tout particulièrement du mode de scrutin législatif.

Discutons donc de la parité et de l'égalité sans arrièrepensée. Si nous devions avoir un débat sur les modes de scrutin, il serait d'une autre nature. Le Gouvernement, à cet égard, n'a pas de projet. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Nous en venons aux questions du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.

AVENIR DE L'AÉRONAUTIQUE FRANÇAISE

M. le président.

La parole est à M. Dominique Baudis.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 9 DÉCEMBRE 1998

M. Dominique Baudis.

Monsieur le Premier ministre, l'année prochaine devrait voir la naissance de la société européenne Airbus. C'est une bonne chose parce que Airbus a besoin de passer du stade de GIE au stade de véritable société pour pouvoir lutter à armes égales avec le concurrent américain Boeing.

Néanmoins, vous le savez, cette année 1999 pourrait aussi être l'année de tous les dangers pour l'industrie aéronautique française et pour Aérospatiale.

Dans le processus de création de la société Airbus, nous assistons en effet à un rapprochement accéléré qui pourrait conduire à une fusion entre l'avionneur allemand DASA et l'avionneur britannique British Aerospace. Si cette fusion se faisait sans Aérospatiale, l'industrie aéronautique française pourrait se retrouver dans une situation d'isolement et presque de marginalisation. Ce serait particulièrement préjudiciable au moment où va se décider le partage des charges de travail entre les différents sites pour la construction du très gros porteur l'AXX, qui sera le concurrent du Jumbo, le 747 de Boeing.

Face à ce péril, étant donné que l'Etat est l'actionnaire majoritaire d'Aérospatiale, je voudrais savoir, monsieur le Premier ministre, comment le Gouvernement compte conjurer ce péril. Avez-vous une stratégie ? Selon quel calendrier entendez-vous agir ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Monsieur le député, comme nous le savons tous ici, la France est forte dans le secteur aéronautique qu'il s'agisse de l'aéronautique civile ou militaire, à la fois grâce à la commande publique et à la façon dont l'Etat a su, dans le passé, organiser avec d'autres partenaires le financement de la création d'un GIE comme Airbus.

C'est un secteur où l'effet de taille devient dominant.

C'est très clair aux Etats-Unis, où de gigantesques fusions ont eu lieu. La même réalité s'impose aussi à l'Europe et le fait de regrouper toutes nos forces en matière aéronautique dans un seul ensemble est souhaitable. Le Gouvernement y est favorable.

Toutefois, il ne nous a pas semblé inutile de commencer par regrouper les forces françaises, et cela dans deux directions : d'abord dans le domaine militaire, en apportant à l'Aérospatiale les parts que l'Etat détient dans Dassault Aviation, vieux projet caressé par d'autres gouvernements mais jamais conduit à son terme, et qui sera achevé à la fin de ce mois puisque le pacte d'actionnaires entre Dassault et l'Etat est maintenant terminé.

Ensuite, un second rapprochement entre Aérospatiale et Matra a déjà été annoncé. Il est en cours de discussion et prendra encore un certain temps avant d'être finalisé car l'affaire est complexe, vous le savez. Il avance malgré tout et ce matin même - peut-être est-ce la raison de votre question ? - un accord a été signé entre le premier ensemble constitué par le Gouvernement, ThomsonA lcatel d'une part et l'ensemble Aérospatiale-Matra d'autre part dans le domaine des missiles et des satellites.

Le paysage est donc dégagé.

Alors, dans ce contexte, les deux partenaires principaux, allemand et anglais, que nous avons dans Airbus ont annoncé et travaillent depuis plusieurs mois à un rapprochement, mais car cela ne va pas aussi vite que vous le dites.

Par ailleurs, ce n'est pas dans l'esprit de la déclaration faite entre les trois chefs de gouvernement il y a juste un an, le 9 décembre 1997 - peut-être est-ce la seconde raison de votre question ? Le président de la République française et le Premier ministre de notre côté, le Premier ministre britannique et le Chancelier allemand avaient alors souhaité que le regroupement se fasse simultanément entre les trois entreprises.

Il s'agit, dans le cas de BAE et de DASA, d'entreprises privées. Si elles ont souhaité de leur côté accélérer le processus, ce n'est ni un avantage ni un inconvénient. Je ne partage pas votre point de vue, monsieur Baudis. Vous qui êtes toulousain ne pouvez d'ailleurs trop répandre que l'aéronautique française pourrait, d'une quelconque m anière, être marginalisée. Nous sommes, dans l'ensemble européen, des partenaires incontournables.

Cet accord entre les Anglais et les Allemands n'est pas encore signé. Mais, s'il se réalise, au lieu de discuter à trois, nous discuterons à deux et les deux ensembles ainsi constitués - anglo-allemand d'un côté et français de l'autre, avec Aérospatiale et Matra - seront de poids égaux et présentent donc un rapport de forces égal.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Vous avez évoqué l'A3XX : c'est un grand projet et nous devons en effet peser pour que la plus grande partie de cet avion - en tout cas ce qui est vital - soit fabriquée en France, et si possible à Toulouse. Telle est la position du Gouvernement, qu'il fait valoir en tant qu'actionnaire de l'Aérospatiale, dans les discussions avec nos partenaires. Soyons sûrs d'une chose : le GIE Airbus a été constitué selon un principe d'égalité entre les trois principaux partenaires.

M. Pierre Lellouche.

Mais non ! M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Si cette société doit évoluer d'une quelconque manière, s'il n'y a plus que deux partenaires, le partenaire français et le partenaire anglo-allemand travailleront selon un principe d'égalité. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. André Santini.

On nous l'a déjà dit, mais ce n'est pas convaincant !

M. le président.

Nous en venons aux questions du groupe du Rassemblement pour la République.

PROGRAMME TRIENNAL DE STABILITÉ

M. le président.

La parole est à M. Philippe Auberger.

M. Philippe Auberger.

Dans le cadre de la mise en place de l'euro, le Gouvernement devrait adresser, dans les prochains jours, et au plus tard le 31 décembre, un programme triennal de stabilité, traçant des perspectives précises dans le domaine des finances publiques.

Un projet de rapport aurait été transmis à l'hôtel Matignon par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Qu'attendez-vous donc, monsieur le Premier ministre, pour adresser vos propositions à la Commission de Bruxelles, alors que d'autres pays, cinq je crois, l'ont fait sans attendre la date limite ? Ne pensez-vous pas que ce sujet important mériterait un débat préalable au Parlement, alors que nous allons discuter à nouveau, dans quelques jours, de la loi de


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 9 DÉCEMBRE 1998

finances pour 1999 ? Enfin, seriez-vous gêné de devoir afficher vos objectifs vis-à-vis de vos partenaires de la majorité plurielle, anticipant ainsi les débats qui ne manqueront pas de surgir d'ici à la prochaine élection présidentielle ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. Didier Boulaud.

C'est une question !

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Je ne comprends pas bien, monsieur le député, le sens de votre question.

M. Didier Boulaud.

C'est qu'il n'y a pas de question ! M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Nous devons déposer, comme nous nous y sommes engagés et comme tous nos partenaires, avant le 31 décembre, une projection triennale de nos finances publiques et nous le ferons. Mais nous voulons le faire en concertation avec nos partenaires allemands, qui sont, avec nous, les deux pays les plus importants de la zone euro. Ceux-ci, cela ne vous a pas échappé, sortant d'élections et ayant besoin d'un peu de temps, nous déposerons probablement ces projections vers la fin de la période plutôt qu'au début. D'ailleurs, comme vous l'avez dit, nous sommes déjà le 9 décembre et seuls 5 pays sur 15, qui pourtant n'avaient pas d'élections ont déposé leur projet.

Y aura-t-il discussion au Parlement ? Si c'est ce que vous me demandez, je vous réponds : bien sûr. Il a été prévu que les commissions des finances de l'Assemblée et du Sénat soient informées de ce document, qui est un document gouvernemental, mais dont il est bien naturel d'informer le Parlement.

Votre souci est-il de savoir si, pour ce faire, nous nous entendons bien avec la majorité plurielle ? Je vous renvoie au vote de la loi de finances que nous sommes en train de discuter, dans lequel le partage entre la gauche et la droite a été parfaitement clair. Le budget qui a été présenté est un budget de gauche, voté par la gauche, contré par la droite. Je ne doute pas qu'il en sera de même pour les projections triennales.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

DE

FINITION DES ZONES D'E

DUCATION PRIORITAIRE

M. le président.

La parole est à M. Georges Tron.

M. Georges Tron.

J'aimerais interroger M. le Premier ministre sur la nouvelle définition des zones d'éducation prioritaire. C'est un sujet important parce qu'il touche à la politique de la ville et à la politique de l'éducation.

Nous avons le sentiment qu'il y a, pour le moins, quelques zones d'ombre dans l'approche de ce dossier.

Dans sa circulaire d'octobre 1997, Mme la ministre déléguée avait précisé qu'il devait faire l'objet d'une large concertation avec l'ensemble des élus locaux.

Moi qui suis député d'une circonscription où il y a des ZEP, je parle en connaissance de cause. Or c'est par la presse que nous avons appris l'ampleur des mesures qui étaient envisagées en Ile-de-France. Et c'est par nos intermédiaires locaux, et en particulier par les syndicats, que nous avons été informés des établissements qui étaient susceptibles de sortir des ZEP. D'un côté, on nous annonce une concertation avec les élus locaux, de l'autre, c'est par nos sources d'informations personnelles que nous sommes informés. C'est pour le moins paradoxal ! Ensuite, il semble que certains critères ont été définis par le Gouvernement pour exclure certains établissements des zones d'éducation prioritaire. On aurait pu penser, t out logiquement, que le Gouvernement souhaitait qu'une aide particulière soit apportée aux établissements le plus en difficulté.

Permettez-moi de vous donner un seul exemple : dans le département de l'Essonne, dont je suis l'élu, il n'y a qu'une commune dans laquelle tous les établissements écoles, collèges et lycées - sont en zone d'éducation prioritaire. Le potentiel fiscal de cette commune, qui s'appelle Epinay-sous-Sénart, est inférieur de 10 % à la moyenne départementale. La population défavorisée dans la population totale et le nombre d'élèves qui sont en situation de difficulté par rapport aux diplômes obtenus est supérieur de 10 % à la moyenne départementale. Eh bien, que croyez-vous qu'il arrive, monsieur le Premier ministre ? L'ensemble des établissements devraient être, puisque nous n'avons des informations que par l'intermédiaire de nos propres relais, exclus des ZEP.

Il est pour le moins surprenant de voir un gouvernement comme le vôtre qui a favorisé, l'année dernière, les lois permettant aux étrangers d'entrer sur notre territoire,...

Plusieurs députés socialistes.

Camelot !

M. Georges Tron.

... mette au rang des éléments de difficulté la population étrangère par rapport à la population locale.

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Il est pour le moins paradoxal, d'une part, de dire aux étrangers, par le biais des lois sur l'immigration, qu'ils peuvent rentrer plus facilement et, d'autre part, d'établir un critère discriminant négatif pour juger des difficultés de la commune.

(Vives exclamations sur les mêmes bancs.)

Enfin, monsieur le Premier ministre, on crée aujourd'hui des réseaux d'éducation prioritaire. Cela signifie, très concrètement, que l'ensemble des personnels qui officient dans les quartiers les plus difficiles risquent d'être les seuls personnels de la fonction publique à être pénalisés dans leur progression de carrière et dans leur salaire.

(Exclamations sur les mêmes bancs.)

Plusieurs députés socialistes.

Camelot !

M. Georges Tron.

Fort de ces trois éléments, monsieur le Premier ministre, je voudrais vous poser la question suivante.

(Exclamations sur les mêmes bancs.)

Mais oui, mesdames, messieurs de la majorité, la semaine dernière, vous étiez à nos côtés pour manifester contre ce texte ! Alors je vous demande aujourd'hui d'écouter ma question.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.) Monsieur le Premier ministre, comme cela se passe pour l'académie de Versailles, ne pensez-vous pas qu'il serait opportun de suspendre votre décision et de renouer une concertation qui nous permette de comprendre exactement quelles sont vos intentions en ce domaine ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

Mme Ségolène Royal, ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

Monsieur le député, la politique des zones d'éducation prioritaire créée par Alain Savary, relancée par Lionel Jospin lorsqu'il était ministre de l'éducation nationale (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de


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l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) a permis, dans ces secteurs où le métier d'enseignant est plus difficile qu'ailleurs, dans ces secteurs qui cumulent tous les handicaps : économique, social, culturel, de donner plus à ceux qui ont le moins.

M. Michel Bouvard.

Quand on a supprimé les ZEP rurales, personne n'a rien dit ! Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

Le Gouvernement a décidé en effet - et c'est l'une de ses priorités - de relancer la politique d'éducation prioritaire. Il le fait avec des moyens nouveaux et selon des procédures nouvelles.

Des moyens nouveaux : au total, plus de 600 collèges et écoles supplémentaires seront intégrés en réseaux d'éducation prioritaire et en zone d'éducation prioritaire, ce qui signifie que plus de 15 000 personnes, enseignants et non enseignants, vont bénéficier d'une indemnité par l aquelle la difficulté spécifique de leur travail sera reconnue.

Pour cela, en effet, j'ai engagé une procédure transparente de concertation.

(« C'est faux ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Laissez-moi m'exprimer ! S'il y a des réactions, c'est bien parce que les discussions ont été ouvertes par les recteurs. Elles portent sur le classement des établissements et sur les critères. Certes, les tableaux et les critères ont toujours un caractère limité mais, sans critères, c'est l'arbitraire. En revanche, avec des critères, on peut discuter.

Vous pouvez d'ailleurs légitimement en discuter le choix.

Mais c'est précisément parce que la réalité du vécu dans certains établissements scolaires n'apparaît ni dans des tableaux, ni dans des chiffres, ni dans des critères, que ce processus de transparence, de consultation des organisations syndicales a été engagé. Cette concertation a déjà permis de mettre en évidence plusieurs éléments.

D'abord, il doit effectivement y avoir des sorties de ZEP. Si l'on donne plus là où on en a le plus besoin, c'est pour que la réussite scolaire, la réussite des élèves soit au rendez-vous. Les ZEP ont été faites pour cela et lorsqu'un établissement en sort, cela signifie que la situation s'y est améliorée.

En revanche, chaque fois qu'une sortie de ZEP est ressentie par les équipes pédagogiques soit comme une remise en cause de leur travail, soit comme une pénalisation par rapport à des résultats qui ont été obtenus, la sortie n'aura pas lieu.

Ainsi, dans l'académie que vous évoquez, celle de Versailles, où les députés de la majorité sont d'ailleurs intervenus depuis plusieurs semaines pour souligner les difficultés mises en lumière par cette concertation, il n'y aura, vous le savez, aucune sortie de ZEP, ni de collège, ni d'école, ni de lycée ; il y aura au contraire des entrées supplémentaires de collèges parce que la réalité sociale est là.

J'en terminerai...

M. le président.

Il faut conclure, en effet.

Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.

... en précisant que les entrées en réseau d'éducation prioritaire doivent s'accompagner de contrats de réussite, c'est-à-dire d'une ambition pédagogique pour les élèves et pour les enseignants.

Enfin, je me réjouis, monsieur le député, de vous voir soutenir avec véhémence la politique d'éducation de ce gouvernement, vous qui souteniez un gouvernement qui avait laissé à l'abandon, pendant quatre ans, la politique d'éducation prioritaire.

(Vives protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Franck Dhersin.

Et les prud'hommes ?

ENFOUISSEMENT

DES DÉCHETS RADIOACTIFS

M. le président.

La parole est à M. Arnaud Lepercq.

M. Arnaud Lepercq.

Monsieur le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, ma question a trait à l'application de la loi du 30 décembre 1991, dont vous avez été l'artisan et qui concerne les recherches sur la gestion des déchets radioactifs. Cette loi, je le rappelle, a été votée à une large majorité, dépassant les clivages politiques, et n'a jamais été remise en cause.

A ce propos, je tiens à rendre ici un hommage sincère à notre collègue Christian Bataille (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe du Rassemblement pour la République, puis sur les bancs du groupe socialiste.)

pour le travail remarquable qu'il a réalisé en sa qualité de rapporteur de cette loi et pour la grande probité intellectuelle dont il a fait preuve dans ce dossier.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Ce premier texte législatif sur les déchets nucléaires a été particulièrement suivi par l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques. Aujourd'hui, le Gouvernement dispose de tous les éléments pour prendre une décision concernant l'implantation de laboratoires souterrains, comme le prévoit la loi.

Dans la circonscription de la Vienne dont je suis l'élu, le site granitique de La Chapelle-Bâton, après les études préliminaires et la demande d'autorisation d'implantation et d'exploitation du laboratoire, a fait l'objet d'un avis favorable lors de l'instruction technique confiée au groupe permanent placé auprès de la direction de la sûreté des installations nucléaires, ce site permettant le mieux d'explorer la voie de la recherche sur la réversibilité. D'autre part, lors de l'enquête publique, le conseil général de la Vienne, à la quasi-unanimité - une abstention -, et dixneuf communes sur vingt-deux ont également donné un avis favorable à la réalisation de cet équipement de recherche.

Aujourd'hui, certaines informations relevées dans la presse laissent penser qu'un seul site serait retenu, ce qui mettrait en cause l'architecture de cette loi de recherche, mais également la confiance accordée aux représentants de la population qui, depuis 1994, sur ce site comme sur les autres, ont accompagné cette démarche au sein des commissions locales d'information.

Compte tenu de ces éléments, pouvez-vous, monsieur le ministre, nous préciser les orientations prises par le Gouvernement, plus particulièrement sur le site granitique de la Vienne, qui avait été préconisé par l'Office parlementaire en raison de sa diversité géologique face à l'argile des deux autres sites, et compte tenu des comparaisons internationales, puisque la majorité des laboratoires souterrains des autres pays se trouvent en milieu granitique ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 9 DÉCEMBRE 1998

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, pour une réponse que je souhaite courte.

M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Monsieur le député, avant de vous répondre en quelques mots, je voudrais d'abord m'associer à l'hommage que vous avez rendu à Christian Bataille.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) La question que vous posez touche à l'aval du cycle nucléaire : que doit-on faire des déchets ? Ce problème est très important, puisque ceux qui sont hostiles au nucléaire cherchent justement, en rendant impossible l'évacuation des déchets, à le faire dépérir par une sorte d'« occlusion intestinale ».

Ce que nous voulons faire avec la loi votée en 1991, c'est étudier des voies de recherche. Trois voies principales sont à explorer : la séparation des actinides, c'est-àdire les éléments à vie longue présents dans les déchets ; le stockage, réversible ou irréversible, en couche profonde ; l'entreposage en surface. Votre question concerne la deuxième voie.

Comme vous le savez, un rapport sur les travaux effectués depuis 1991 doit être remis en 2006. Le Gouvernement présentera alors des propositions précises à la représentation nationale. Pour cela, compte tenu des délais nécessaires, il faut que des laboratoires de recherche soient créés dès maintenant dans les différents domaines que j'ai évoqués.

En ce qui concerne les tests de stockage en couche profonde, rien ne sera stocké sur les sites, puisqu'il s'agit de recherches, mais il faut les creuser. La décision du Gouvernement doit intervenir très rapidement. Sur quoi sera-t-elle fondée ? Elle sera fondée, comme la loi le veut, sur des critères techniques et sur la consultation des populations.

Vous me demandez si le site de la Vienne qui vous intéresse sera retenu. Je ne peux pas vous répondre car la décision n'est pas encore prise, mais elle le sera très rapidement. Ainsi, conformément à la loi de 1991, nous pourrons avancer, nous disposerons en 2006 du résultat de ces recherches, et nous pourrons alors décider ce que la nation veut faire des déchets du nucléaire, qui constitue aujourd'hui la source principale de son énergie électrique.

(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Nous en venons aux questions du groupe socialiste.

INSTITUTION D'UNE COUR PÉNALE INTERNATIONALE

M. le président.

La parole est à M. Yves Dauge.

M. Yves Dauge.

Monsieur le ministre des affaires étrangères, de nombreux parlementaires ont parrainé des défenseurs des droits de l'homme. Ceux-ci, vous le savez, tiennent actuellement leurs états généraux au Palais de Chaillot.

Deux questions, dont je veux me faire l'écho auprès de vous, y ont été posées au sujet de la Cour pénale internationale.

Comment la France peut-elle faire en sorte que le traité l'instituant soit ratifié ? La France peut-elle jouer un rôle pour que les crimes de guerre soient retenus dans son champ de compétence ? Pour l'instant, seuls les crimes contre l'humanité et les génocides sont concernés. Or la plupart des atteintes aux droits de l'homme sont liées à des crimes de guerre.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.

M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères.

Monsieur le député, je peux vous rassurer : on ne constate aucun blocage dans la préparation de la ratification du traité, qui consacrera l'adoption définitive de la Cour pénale internationale. Le principe de son institution a été adopté à Rome par cent vingt pays. Aujourd'hui, le texte a été signé par soixante pays. Il n'a encore été ratif ié par aucun, car la procédure prévue par la Convention de Vienne pour mettre au point les textes exacts faisant foi, par exemple en chinois, en espagnol ou en français, n'est pas achevée. C'est seulement lorsqu'elle le sera que pourront commencer les procédures de ratification proprement dites.

A partir du moment où nous disposerons des textes définitifs, il faudra, en effet, entamer dans certains pays, d ont le nôtre, une révision de la Constitution.

(« Encore ! » sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Hier, ou avant-hier, le Premier ministre a annoncé devant l'UNESCO qu'il saisirait pour avis, conjointement avec le Président de la République, le Conseil constitutionnel.

En réponse à une autre question d'un parlementaire, j'avais déjà indiqué, le 10 novembre, que les autorités françaises feraient tout ce qui est en leur pouvoir pour hâter le processus de ratification et donc d'adoption définitive. Cela reste notre ligne et c'est ce à quoi nous allons nous employer.

(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

LUTTES CONTRE LES DÉRIVES SECTAIRES

M. le président.

La parole est à Mme Yvette Benayoun-Nakache.

Mme Yvette Benayoun-Nakache.

Madame la garde des sceaux, vous avez déjà répondu, il y a trois semaines, à notre attente d'un engagement du Gouvernement dans la lutte contre les dérives des sectes, en annonçant notamment la nomination d'Alain Vivien à la tête de la mission interministérielle. Je vous en félicite.

Nous venons de célébrer la semaine des droits de l'enfant. A l'initiative de M. Laurent Fabius, président de l'Assemblée nationale (Rires et applaudissements sur divers bancs), nous avons voté le 19 novembre pour l'institution d'un médiateur des enfants, qui pourra intervenir dans les relations entre les mineurs et l'administration, et être saisi directement par les enfants. C'est là une démarche sur laquelle la mission interministérielle devrait s'appuyer pour lutter contre les dérives sectaires qui portent atteinte de manière flagrante aux droits des enfants.

Ces droits sont aujourd'hui largement bafoués par les activités des sectes, qui sont à l'origine de phénomènes de déscolarisation, d'atteintes à la santé physique et mentale, d'éloignements forcés de la famille. Aujourd'hui, 6 000 enfants âgés de six à seize ans échappent au contrôle de l'éducation nationale. Ils sont inscrits dans des écoles hors contrat, instruits dans leur famille ou au sein d'une communauté sectaire. Comme de nombreuses autres institutions de la République, l'éducation est exposée au danger des dérives sectaires.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 9 DÉCEMBRE 1998

Le Gouvernement a affirmé sa volonté de travailler en collaboration avec les associations de défense des victimes d es sectes. Vous-même, madame la ministre, avez annoncé il y a un mois que la chancellerie avait engagé une réflexion sur l'habilitation de certaines associations à exercer l'action civile pour les infractions commises dans le cadre de dérives sectaires. Cette collaboration paraît indispensable pour lutter efficacement face à l'ampleur du phénomène sectaire et pour faire valoir les droits des enfants.

Pourriez-vous nous indiquer quels moyens de protection le Gouvernement compte mettre en place pour endiguer la pandémie sectaire, qui gangrène nos institutions et menace l'intégrité physique et mentale de milliers d'enfants ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

Madame la députée, votre question me touche particulièrement, d'abord parce qu'il s'agit des sectes, ensuite parce que les dérives sectaires sont particulièrement odieuses s'agissant des enfants.

Le 10 novembre, j'avais rappelé ici même les mesures prises par le ministère de la justice : création d'une cellule spécialisée à la direction des affaires criminelles et des grâces ; désignation d'un magistrat spécialisé par cour d'appel ; travail accru avec les associations.

Mes collègues du Gouvernement se préoccupent également de la lutte contre les sectes. Mme Ségolène Royal (« Ah ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République) défend, en ce moment même, devant le Parlement, un texte sur l'obligation scolaire.

Que faire lorsque des enfants sont victimes de sectes ? Plusieurs cas se présentent.

Quand ce sont les parents qui abandonnent toute responsabilité au profit d'un gourou, les risques sont alors très graves pour les enfants : déscolarisation, absence de vaccinations. Dans tous ces cas, des poursuites pénales peuvent être engagées parce que l'on met en danger la vie des enfants. La justice doit être saisie dès lors que la sécurité, la santé ou la moralité des enfants peut être en cause.

Quand l'un des parents n'est pas d'accord, il peut demander la modification du principe de l'autorité parentale ou de l'hébergement.

Quand les deux parents sont d'accord, mais que des membres de la famille se rendent compte que l'enfant est en danger, des grands-parents, des oncles ou des tantes, il est plus difficile d'agir. Ils doivent, avec l'aide des associations, signaler ces cas au parquet et au juge des enfants.

Bien entendu, il est nécessaire que toutes les personnes qui sont en contact avec les enfants puissent exercer leur vigilance. C'est la raison pour laquelle j'ai adressé aux parquets, le 1er décembre, une circulaire récapitulant les mesures prises par le Gouvernement et dans laquelle je leur ai demandé de travailler en plus étroite liaison avec les associations qui ont pour objet de lutter contre les sectes. Je leur ai également demandé demandé d'organiser des réunions de coordination de tous les services de l'Etat qui peuvent être concernés, non seulement la police et la gendarmerie, mais également les directions régionales du travail, les directions de l'action sanitaire et sociale, les inspections d'académie de l'éducation nationale ou la protection judiciaire de la jeunesse. Enfin, j'ai demandé aux parquets de travailler aussi avec les conseils généraux, car ceux-ci, depuis les lois de décentralisation, exercent une mission particulière de protection de l'enfance.

Si nous arrivons à coordonner, à concentrer et à intensifier l'ensemble des actions de tous les acteurs que je viens de citer, nous serons plus efficaces. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) PRÉSENCE DE MAGISTRATS FRANÇAIS DANS DES OPÉRATIONS ÉLECTORALES AU GABON

M. le président.

La parole est à Mme Monique Collange.

Mme Monique Collange.

Ma question s'adresse également à Mme la garde des sceaux.

Madame la ministre, plusieurs magistrats français, connus pour être des militants assidus d'une association en voie d'autodissolution suite aux agissements scandaleux de l'un de ses membres, se sont rendus au Gabon à l'occasion des élections présidentielles du 6 décembre. Ces magistrats y ont, semble-t-il, été invités pour vérifier les opérations électorales.

Pouvez-vous nous dire quel a été la rôle exact de ces magistrats français ? Ont-ils simplement vérifié ou ont-ils organisé ces opérations électorales ? Ont-ils été rémunérés ou défrayés pour cette tâche ? Si oui, par qui ? Avez-vous été dûment informée par ces magistrats de leur engagement dans ces élections ? Nous écouterons avec intérêt les réponses que vous allez nous apporter sur ces questions afférentes à la dignité de la fonction de magistrat.

(Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

Madame la députée, je vais d'abord vous dire les faits tels que je les connais à l'heure qu'il est.

Six magistrats français sont allés au Gabon au nom de l'AID, l'Association internationale pour la démocratie.

M. Michel Bouvard.

Et pas Mme Deviers-Joncour ?

Mme la garde des sceaux.

Ils ont été invités officiellement par le Premier ministre du Gabon. Cette association, dont les statuts ont été déposés récemment, le 6 octobre 1998, est présidée par le président de l'Association professionnelle des magistrats.

(Exclamations sur les mêmes bancs.)

Elle comprend, parmi ses membres fondateurs, plusieurs autres magistrats qui faisaient partie de la mission gabonaise. Il s'agissait d'une mission de cinq jours pour l'observation de la régularité des élections présidentielles, sous contrôle, ce qui est en effet un peu curieux, de la commission nationale électorale gabonaise.

(Rires sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

Aucun des six magistrats n'a demandé, et n'a donc obtenu, un ordre de mission à la chancellerie. Deux d'entre eux ont informé leur hiérarchie de leur absence pour convenance personnelle, sans donner de détails sur la nature de la mission. Les quatre autres n'ont pas informé leur chef de juridiction.

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 9 DÉCEMBRE 1998

La prise en charge financière des voyages, de l'hébergement, des transports sur place et de la rémunération 1 500 francs d'après nos premières informations - a été assurée par l'Etat gabonais.

(« Cadeau ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

Ce déplacement de magistrats soulève, on le voit, plusieurs questions, et notamment celle de savoir si les conditions dans lesquelles a été effectuée une telle mission ne portent pas atteinte à la dignité des magistrats concernés...

Mme Odette Grzegrzulka.

Si !

Mme la garde des sceaux.

... telle qu'elle est mentionnée dans les articles 8 et 43 du statut de la magistrature.

Dès avant-hier, lundi 7 décembre, j'ai demandé des rapports écrits aux chefs de cour dont relèvent les six magistrats concernés, ainsi qu'aux intéressés eux-mêmes.

M. Francis Delattre.

Et leur indépendance ?

Mme la garde des sceaux.

Sans attendre les résultats de ces investigations, j'ai demandé au directeur des services judiciaires de rappeler sans délai aux chefs de cour les conditions dans lesquelles les magistrats peuvent être appelés à exercer des missions à l'étranger.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Gérard Bapt et M. Georges Frêche.

C'est la section spéciale ! APPLICATION DE LA LOI CONTRE L'EXCLUSION

M. le président.

La parole est à M. Jean Le Garrec.

M. Jean Le Garrec.

Très symboliquement, le groupe socialiste a choisi de poser une dernière question d'actualité à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité, après la question de nos camarades du groupe communiste.

(Exclamations et rires sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Elle porte, en effet, sur le mouvement des chômeurs. Et je ne vois pas, mesdames, messieurs, en quoi cela prête à rire ! Il s'agit bien d'une question d'actualité.

Madame la ministre, le 9 juillet dernier, nous avons adopté 159 articles d'une grande loi visant à répondre à tous les problèmes de l'exclusion, de l'emploi à la santé, du logement au surendettement. Nous avons élaboré ce texte avec l'appui très fort des deux rapporteurs spéciaux, M. Alain Cacheux et Mme Véronique Neiertz. Cinq mois après, nous entrons dans la phase d'application. Le travail est suivi de très près par les commissaires socialistes et par la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, notamment Mme Hélène Mignon.

Aujourd'hui, les chômeurs nous font part de leurs légitimes inquiétudes et de leur souci de recevoir rapidement des réponses. En fait, et cela mérite non pas l'interpellation mais l'écoute, ils nous disent leur mal à vivre. Leur discours est fort et nous l'entendons.

Madame la ministre, à travers la mise en place des premiers dispositifs, à travers les commissions sociales d'urgence, les guichets polyvalents et la réflexion engagée par l e Gouvernement sur la revalorisation des minima sociaux, pouvons-nous dire tous ensemble que non seulement nous comprenons, mais que nous engageons les réponses ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur le député, comme je l'ai déjà dit en répondant à M. Hermier, la quasi-totalité des dispositions de la loi contre les exclusions sont aujourd'hui en place.

Je préciserai brièvement quelques points de nouveau.

Pour les jeunes les plus éloignés de l'emploi, 5 000 sont déjà dans le programme TRACE, 10 000 le seront avant la fin de l'année.

(« Il était temps ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Oui, car vous aviez supprimé le programme PAC que nous avions mis en place en 1993 pour ces jeunes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

S'agissant des chômeurs de longue durée et des RMIstes, 60 000 ont déjà été reçus et seront accompagnés jusqu'à l'emploi ou à la qualification par l'ANPE ; ils seront 850 000 l'année prochaine.

Quant aux contrats de qualification pour adultes, qui ont donné lieu à tant de critiques, du côté de l'opposition, ils sont déjà en place. Mme Péry en a négocié les modalités, notamment avec la Fédération du bâtiment.

Les trois premiers adultes à en bénéficier - et c'est symbolique - sont une femme RMIste avec trois enfants, un chômeur de longue durée et une femme isolée.

Voilà pour ce qui est de la mise en place des mesures sur l'emploi.

Sur le logement - l'aide à la médiation locative, le nouvel encadrement des surloyers, l'amélioration des règles de l'APL -, M. Louis Besson a déjà fait paraître la plupart des décrets. Il en est de même des décrets portant sur l'endettement et sur la santé qui sont soit déjà sortis, soit à la signature.

Monsieur le député, je le redis, les commissions d'urgence sont aujourd'hui partout en place sauf dans deux départements dont les présidents du conseil général n'ont pas voulu s'y associer. Il existe désormais des fonds d'urgence dans tous les départements pour répondre à ceux qui sont en grande difficulté, notamment en fin d'année, alors que les dépenses sont souvent plus importantes.

Nous travaillons donc sur la précarité et sur les minima sociaux. Mais je compte largement sur tous ceux qui se m obilisent aujourd'hui - associations, présidents de conseils régionaux et de conseils généraux, maires élus pour que la loi de lutte contre les exclusions entre pleinement en application dès les premiers mois de l'année prochaine. C'est ce qu'attendent les chômeurs et les exclus.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

4 PACTE CIVIL DE SOLIDARITÉ Explications de vote et vote sur l'ensemble d'une proposition de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle les explications de vote et le vote sur l'ensemble de la proposition de loi relative au pacte civil de solidarité.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 9 DÉCEMBRE 1998

Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que le vote aurait lieu par scrutin public en application de l'article 65-1 du règlement.

La parole est à Mme la présidente de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, la proposition de loi relative au pacte civil de solidarité franchit aujourd'hui une étape décisive. Je tiens en premier lieu à remercier le président du groupe socialiste d'avoir permis à cette discussion de s'engager dans le cadre d'une séance réservée.

Je remercie aussi le Gouvernement, tout spécialement le Premier ministre, la garde des sceaux, le ministre des relations avec le Parlement, d'avoir su encourager l'initiative parlementaire en lui ménageant le temps nécessaire dans notre ordre du jour et en l'accompagnant de toute sa compétence pour compléter notre réflexion.

Je veux également rendre hommage au travail de la commission des lois et de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, en particulier de leurs rapporteurs, Jean-Pierre Michel et Patrick Bloche. Ce travail a été parfois injustement décrié. Pourtant, il a été fort sérieux, approfondi et à l'écoute de tous. Il a notamment permis que les groupes communiste, Radical, Citoyen et Vert et socialiste se réunissent sur une même volonté et un même projet.

Aujourd'hui, je pense aussi au réel travail accompli depuis des années par les associations militantes, notamment homosexuelles, qui ont revendiqué un juste droit et n'ont pas voulu que les couples homosexuels soient enfermés dans une solution communautariste. C'est en grande partie grâce à elles que va s'offrir enfin, par la loi, une solution juridique à tous les couples qui ne veulent ou ne peuvent entrer dans l'institution du mariage.

Mme Christine Boutin.

Il était temps de les saluer !

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

L'élaboration a été particulièrement longue à partir des divers textes déposés depuis plus de six ans. Au cours de cette nouvelle législature, il a fallu un an de travaux préparatoires pour parvenir à un texte très sensiblement enrichi par rapport aux propositions initiales. Il a fallu aussi soixante-dix heures de débats à l'Assemblée nationale.

Tout ce temps a pu paraître très long, trop long. Pourtant, tout ce temps aura finalement été utile puisqu'il a permis à chacun d'élucider les enjeux, de formuler les objectifs et de fortifier les positions pour ou contre, éclairant ainsi les choix politiques. Sans doute a-t-il aussi levé certaines interrogations, voire certaines peurs.

Ce débat a eu un large prolongement dans le pays hors de notre hémicycle. D'abord, parce que ses initiateurs ont mené d'innombrables rencontres publiques et aussi parce que les médias ont donné, chacun à sa manière, un large écho à ce sujet.

S'il a fallu tant de persévérance, c'est que nous sommes un vieux pays, légitimement fier de son histoire mais que, de ce fait, nous avons beaucoup de mal à sortir de nos catégories de pensées et de nos modèles historiquement installés. Mais ce qu'une société moderne attend de ses législateurs, c'est qu'ils sachent prendre en compte ses besoins nouveaux. Le texte que nous allons voter n'est pas une révolution. Il est une juste évolution du droit pour résoudre d'injustes situations. Nul n'y perdra. Beaucoup y gagneront en dignité et en sécurité. Notre société tout entière y gagnera en solidarité.

Cette première lecture a clarifié et renforcé la proposition de loi et je tiens à remercier tous les parlementaires qui y ont contribué. Le texte va continuer son chemin dans la procédure parlementaire. Je souhaite que les prochaines étapes permettent, dans un délai raisonnable, l'adoption définitive d'une bonne loi qui, j'en suis convaincue, est très attendue par un grand nombre de nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Patrick Devedjian.

On verra...

M. le président.

La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, au terme de ce long débat, je voudrais d'abord remercier chaleureusement les deux rapporteurs de la proposition de loi, Patrick Bloche et Jean-Pierre Michel. Les convictions qui les animaient étaient totalement sincères et constituaient l'aboutissement d'une longue démarche.

La commission des lois, présidée par Mme Catherine Tasca, a enrichi la réflexion par les consultations et les auditions auxquelles elle a procédé et qui ont perfectionné le texte sur lequel vous allez vous prononcer dans un instant. Sans eux, ce texte n'aurait pas vu le jour.

C'est grâce à leur persévérance et au courage qu'ils ont manifesté depuis plusieurs années qu'un travail mûrement pesé et réfléchi a pu être présenté à votre Assemblé e. Dès l'origine, le Gouvernement a soutenu cette initiative parlementaire et manifesté très clairement son soutien à ce qui constitue, en effet, un projet moderne de société.

Pour ma part, j'ai fait état, dès le début, de mon engagement constant auprès de ceux qui voulaient voir aboutir le texte. Le résultat est là. Je voudrais remercier aussi tous les députés qui nous ont aidés à faire en sorte que ce texte puisse être enrichi et amélioré.

Le débat a été long. Bien entendu, il y a eu des hésitations, parfois des différences d'appréciation et quelquefois des oppositions assez nettes, voire violentes. Mais n'est-il pas normal que, sur un tel sujet, chacun s'exprime et fasse valoir ses opinions avant que l'on tranche ? Ce débat était nécessaire. Il a porté sur un certain nombre d'enjeux fondamentaux pour notre société. Malgré les vicissitudes, les exagérations, les excès même, les points importants ont été débattus. J'ai écouté attentivement tous les arguments qui méritaient de l'être et j'ai répondu aux interrogations légitimes des uns et des autres.

Ces soixante-dix heures de débat auront permis de faire avancer quelques questions majeures, sur lesquelles, je l'espère, nous avons pu éclairer nos concitoyens. J'en dirai brièvement quelques mots.

Nous voulions donner des droits à des personnes qui vivent une relation stable et durable, mais qui ne veulent pas ou ne peuvent pas se marier. Par conséquent, nous avions le choix entre constater cette relation ou bien la faire reconnaître par un contrat. C'est cette deuxième voie que nous avons choisie et le débat a montré qu'un véritable engagement était mieux à même de définir les droits et les obligations des personnes sans discrimination, mais sans négation non plus de la différence des sexes.

Je dirai aussi que le débat a permis de bien cerner la différence entre le pacte civil de solidarité entre deux personnes et l'institution du mariage.

(« Non ! » sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 9 DÉCEMBRE 1998

du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Il a permis également de bien distinguer les liens de solidarité qui unissent un couple et la famille. Dès lors, il a fait apparaître que le pacte civil de solidarité n'avait rien à voir avec des questions aussi essentielles que la filiation, l'autorité parentale, la procréation médicalement assistée ou l'adoption. A cet égard, je le répète, le texte ne change rien à l'état du droit dans ces matières.

Certes, ces questions se posent, et avec gravité, mais elles devront être abordées lors du débat sur la famille que le Gouvernement entend engager après que le groupe

« famille », que j'ai mis en place à la chancellerie, aura rendu ses conclusions, à la fin du premier semestre de l'année prochaine.

Je dirai aussi que ce débat n'a nullement éludé la question particulièrement sensible du respect dû à la vie privée des personnes qui entendent voir reconnaître les liens qui les unissent. Hier soir, nous avons apporté des précisions sur les conditions de publicité du pacte, ainsi que sur l'intervention de la Commission nationale informatique et libertés. De même, le débat sur les fratries a été utile pour mûrir la réflexion. J'ai souligné les enjeux et les difficultés de cette question. Vous vous êtes déterminés, au cours de cette première lecture, en faveur de l'extension du PACS aux fratries. Mais je suis certaine que, d'ici à la deuxième lecture, nous trouverons la bonne solution.

Enfin, je dirai que ce débat a permis de faire comprendre que nos textes les plus vénérables, au premier rang desquels le code civil, étaient et devaient être vivants. Nous avons pris nos responsabilités en faisant évoluer le code civil, comme d'autres avant nous, depuis trois ou quatre décennies, ont su le faire, par exemple sur le divorce - je pense aux grandes lois de 1975 - ou sur l'autorité parentale. On peut évidemment contester les choix que nous avons faits, mais pas la pertinence de la démarche qui consiste à faire évoluer le code civil avec la société.

Enfin, je voudrais rappeler que le pacte civil de solidarité comble un vide juridique ressenti par quelques millions de personnes qui vivent ensemble sans être mariées.

Le pacte civil de solidarité est là pour apporter des réponses à des problèmes quotidiens, de logement, de couverture sociale, des problèmes fiscaux et de rapprochement professionnel entre des personnes qui ont des liens forts et durables et qui veulent voir reconnue cette communauté de vie. Parce qu'il encourage la stabilité, parce qu'il crée de nouvelles solidarités, parce qu'il répond à l'attente de millions de gens, ce texte est utile et juste. En ce sens, il constitue une réforme résolument moderne.

N'est-ce pas la meilleure fonction du droit, et sans doute la mieux comprise par nos concitoyens, que d'encadrer les faits sociaux qui surgissent pour y apporter desr éponses et instituer des repères ? Le droit doit reconnaître les faits sociaux, et notamment que cinq millions de personnes vivent ensemble sans être mariées. A cet égard, je suis certaine que le texte sur le pacte civil de solidarité fera progresser l'harmonie entre les pratiques sociales, d'une part, et le droit, d'autre part. C'est là aussi reconnaître la fonction symbolique du droit.

Voilà pourquoi, mesdames, messieurs les députés, je vous demande avec joie (Rires et exclamations sur les mêmes bancs.), cet après-midi, de consacrer l'existence de ce texte par votre vote.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Mes chers collègues, nous en venons aux explications de vote des groupes politiques. Chaque orateur ne dispose, je le rappelle, que de cinq minutes au plus.

Pour le groupe communiste, la parole est à M. Bernard Birsinger.

M. Bernard Birsinger.

Madame la ministre, mes chers collègues, à l'issue d'un vaste débat dans cet hémicycle et dans le pays, les députés communistes voteront pour le pacte civil de solidarité.

M. Didier Boulaud.

Très bien !

M. Bernard Birsinger.

Ce texte ouvre des droits nouveaux à des millions d'individus. Je pense particulièrement à l'imposition commune, aux dispositions prises en matière de succession, à l'ouverture de la qualité d'ayant droit d'assuré social pour le partenaire lié par un PACS et qui ne peut pas y prétendre à un autre titre, aux dispositions nouvelles inscrites dans le code du travail et dans les statuts des fonctions publiques, au droit à reprendre le bail du partenaire décédé.

Au-delà de l'octroi de ces droits nouveaux, le pacte civil de solidarité constitue un cadre juridique et une reconnaissance sociale des couples qui ne souhaitent pas ou ne peuvent pas se marier. Il est une prise en compte de l'évolution de la société et des moeurs, des façons de concevoir sa vie de couple et de famille.

Ce que l'histoire retiendra, ce ne sont pas les heures d'obstruction de la droite, tentant désespérément de ramer à contre-courant du progrès (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance) mais bien l'engagement de la gauche plurielle pour une avancée de société (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Pierre Lequiller.

Belle avancée !

M. Bernard Birsinger.

C'est bien à cet engagement que les communistes auront participé.

Depuis le début, notre position est restée tout aussi volontaire ; elle n'a pas varié au fil des jours. Notre attitude a été délibérément constructive pour tenter d'obtenir des améliorations au texte en discussion.

Ainsi, nous avons proposé que le PACS soit signé en mairie, lieu qui nous semble le plus approprié pour cela.

Nous avons aussi tenté d'effacer tous les délais de nature à retarder l'accès aux nouveaux droits et proposé que le pacte civil de solidarité aille plus loin en faveur des étrangers, en leur ouvrant très clairement le droit au séjour.

Or le texte que nous allons adopter laisse encore une large place à l'appréciation des préfets, donc à des différences de traitement.

Enfin, nous pensons qu'il aurait été bon d'améliorer les modes d'attribution et de calcul de diverses prestations sociales, comme le droit à la pension de réversion pour le partenaire survivant. Il conviendra donc de poursuivre la mise à jour de nos dispositions fiscales et sociales.

Cette attitude constructive des députés communistes a permis d'enrichir le texte initial.

Ainsi, nous nous félicitons que certaines de nos propositions aient été reprises. Je pense notamment à l'amendement qui précise que le PACS est ouvert à deux personnes de « sexe différent ou de sexe identique ». Cette précision est une reconnaissance explicite, inédite du couple homosexuel par le législateur.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 9 DÉCEMBRE 1998

Parmi les autres améliorations du texte initial, je veux souligner l'ouverture de la qualité d'ayant droit d'assuré social au partenaire pacsé qui ne peut y prétendre à un autre titre, disposition déclarée irrecevable dans un premier temps. Nous notons également le relèvement de l'abattement sur les droits de succession, même si nous aurions souhaité aller plus loin vers l'égalité de traitement avec les couples mariés. Enfin, nous sommes heureux que le délai d'un an de PACS prévu avant de pouvoir bénéficier de la reprise de bail ait été effacé.

Permettez-moi tout de même de regretter que notre demande tendant à la suppression de l'ouverture de certaines dispositions du PACS aux fratries n'ait pas été retenue. Le problème que rencontrent certains frères et soeurs est réel, mais il est préférable de le régler ultérieurement comme Mme la ministre en a fait la proposition hier soir.

Le PACS a pour objet le couple, et y ajouter la question des fratries contribue à en altérer la nature. Sur ce point, nous espérons être entendus lors de la seconde lecture.

Les députés communistes voteront donc le pacte civil de solidarité. Nous le voterons pour sa portée symbolique et historique. Nous le voterons parce qu'il reconnaît l'évolution de la structure familiale.

Nous voterons le PACS parce que ce texte est un pas supplémentaire vers le droit à l'égalité, vers l'égalité des droits entre les couples. Comme nous le disions lors du débat, en ouvrant des droits nouveaux et en apportant des améliorations concrètes dans la vie de tous les jours, le PACS est une contribution vivante au cinquantième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme. Il ouvre en quelque sorte un nouvel espace de liberté.

Nous voterons le pacte civil de solidarité parce qu'il s'inscrit dans la logique de la proposition de loi que nous avions déposée sous la précédente législature. Nous le voterons parce qu'il constitue une reconnaissance sociale du couple homosexuel. Nous le voterons parce qu'il est le résultat des luttes des homosexuels et de leurs associations dont nous nous sommes faits les relais dans cet hémicycle tout au long des débats. Ces citoyens, ces militants ont su exprimer, structurer et faire grandir leurs exigences, qui, à l'arrivée, vont bénéficier à l'ensemble de la société. Je sais que demain ils resteront mobilisés pour veiller à la bonne application du PACS.

Ces deux derniers mois, le débat a été rude. Il a même été combat et parfois chahut. L'opposition a montré sa détermination à user de tous les moyens pour s'opposer...

M. Charles Cova.

L'opposition est là pour ça !

M. Bernard Birsinger.

... à la volonté transformatrice de la majorité plurielle et à l'attente de millions de nos concitoyens. Nous ne nous faisons pas d'illusions : les manoeuvres d'obstruction ne cesseront pas avec le vote d'aujourd'hui. Pourtant les citoyens ne veulent pas et ne peuvent pas attendre. Ils veulent pouvoir bénéficier au plus vite des nouveaux droits ouverts. Aussi demandonsnous au Gouvernement d'examiner la possibilité de déclarer l'urgence, comme l'y autorise le deuxième alinéa de l'article 45 de notre Constitution, afin que le PACS soit adopté et mis en oeuvre dans les meilleurs délais.

Avec le vote du PACS, notre pays fait un grand pas en avant dans le combat contre toutes les formes de discrimination, notamment celles liées à la sexualité des individus. Vous pouvez continuer à compter sur les députés communistes pour relever le défi et poursuivre le double objectif de l'égalité des droits et du droit à la différence.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Pour le groupe UDF, la parole est à

M. Henri Plagnol.

M. Henri Plagnol.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je n'ai pas été surpris d'entendre le groupe communiste demander que l'urgence soit déclarée sur ce texte pour, une fois de plus, essayer d'escamoter un débat qui, depuis deux mois, dérange tellement dans les rangs de la majorité.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) En effet, soyons honnêtes...

M. Jean-Pierre Brard.

Cela va vous être difficile !

M. Henri Plagnol.

... qui, sur ces bancs, aurait imaginé, lorsque nous avons commencé l'examen de ce texte, que le PACS donnerait lieu à un débat de société qui, rétrospectivement, apparaît comme un véritable tournant dans la législature, avec ses discussions longues, difficiles, passionnées et passionnantes. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Nul n'avait envisagé cette hypothèse, surtout pas le Premier ministre qui, la veille du rejet historique de ce texte pour inconstitutionnalit (Protestations sur les mêmes bancs), avait tout fait pour minimiser sa responsabilité dans sa présentation, s'abritant derrière l'initiative parlementaire et prétendant, comme il l'a d'ailleurs fait une nouvelle fois dans la confusion il n'y a pas très longtemps, que seule une poignée de « marginaux » extrémistes...

M. Jean-Pierre Brard.

Outranciers ! Archaïques !

M. Henri Plagnol.

... auxquels je revendique l'honneur d'appartenir (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste)...

M. Georges Frêche.

Pas besoin de le préciser !

M. Henri Plagnol.

... allait ferrailler contre un texte présenté comme une modernisation inéluctable de notre droit.

En réalité, si notre débat a pris une telle ampleur, c'est d'abord parce que vous avez montré votre peu d'enthousiasme à le voter.

(Protestations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert), ensuite parce qu'il repose sur une double imposture.

Il existe en effet un décalage total entre les motifs invoqués - que Mme la garde des sceaux vient d'ailleurs de reprendre - et la réalité du texte. Vous avez ainsi mis en avant le fait qu'il s'agissait de réformes modestes, pragmatiques, tendant à apporter des réponses concrètes à des revendications légitimes exprimées par des couples vivant hors mariage, homosexuels ou hétérosexuels, lesquels souhaitent bénéficier de droits sociaux qui leur sont refusés actuellement par la jurisprudence : possibilité de continuer d'occuper le logement du partenaire en cas de décès, couverture sociale, éventuellement avantages fiscaux.

Cependant, aucune de ces réformes ne justifiait le PACS, et vous le savez bien.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Quelques modestes amendements au code civil ou au code des impôts auraient suffi. Ils auraient d'ailleurs été votés dans la sérénité par une très large majorité de cette assemblé e, bien au-delà des clivages gauche-droite.

(Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 9 DÉCEMBRE 1998

En fait, le PACS a un tout autre objet : créer un statut sans précédent dans notre droit et qui n'existera qu'en France - car aucun pays démocratique n'a adopté cette formule -, un statut juridique et fiscal qui donnera à tous les couples, quelle que soit la réalité de leurs liens ou de leur engagement, les mêmes droits juridiques, fiscaux et sociaux. Cela constitue un véritable bouleversement de notre code civil. Il s'agit d'une alternative systématique au mariage, très loin des motifs que vous invoquez.

Cette distorsion entre le discours tenu pour justifier le texte et la réalité de son contenu explique que nous ayons eu un débat aussi long et aussi passionné.

M. Jean-Pierre Blazy.

Mais non !

M. Henri Plagnol.

Ce débat est tout à l'honneur de notre assemblée, car notre rôle est de permettre aux Français qui nous regardent et qui nous écoutent de mesurer la réalité des textes que nous votons. Or, au fil des heures, les Français ont commencé à douter, puis sont devenus, dans leur grande majorité, franchement hostiles, non pas à la nécessité de tenir compte de l'évolution de la famille et de la société, mais à l'idée que, sous ce prétexte, on bouleverse le code civil et les fondements même de la famille dans notre pays.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) En tout cas, madame la garde des sceaux, quand on prétend vouloir réformer et moderniser le droit de la famille, puisque vous nous avez indiqué que ce serait la grande oeuvre de votre action au ministère de la justice, on ne peut pas le faire en prétendant passer en force sans engager la moindre concertation avec les différentes familles spirituelles, politiques, associatives de ce pays (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), sans avoir une seule fois organisé des audit ions contradictoires en commission des lois pour entendre les plus grands sociologues, philosophes ou analystes de notre société.

Cette absence radicale de concertation est une première dans l'histoire sociale et familiale de la Ve République et elle explique bien des déboires que vous avez eus au cours de ce débat.

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) J'en viens au fond du texte. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Il faut accélérer.

M. Henri Plagnol.

La raison pour laquelle le groupe UDF s'y est opposé de toutes ses forces tient en trois phrases : le PACS est le contrat du bon plaisir entre les adultes (Protestations sur les mêmes bancs) ; c'est la loi du plus fort ; c'est l'oubli de l'enfant.

Le PACS est donc le contrat du bon plaisir par opposition à ce beau mot de solidarité dont vous nous rebattez les oreilles et qui n'a rien à voir avec ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Il donne, en effet, la possibilité à deux adultes qui décident contractuellement de vivre ensemble, sans souscrire la moindre contrainte, de bénéficier des mêmes droits fiscaux et sociaux que les gens mariés.

Première question : est-ce la justice ? Nous, à l'UDF, nous défendons les principes de responsabilité et d'équité.

Or le PACS les bafoue.

Deuxième question : au lieu de conforter le lien social comme vous prétendez le faire, n'allez-vous pas aggraver encore la précarisation des couples et la décomposition de la famille dont nous voyons tous les conséquences dans les permanences de nos circonscriptions ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Pouvez-vous conclure, monsieur Plagnol.

M. Henri Plagnol.

J'ai presque fini, monsieur le président.

Ensuite, le PACS est la loi du plus fort. En effet, on pourra y mettre fin par une simple lettre avec un préavis de trois mois. Il n'y a pas la moindre garantie pour le plus faible. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Alors que la législation du mariage met tout en oeuvre pour protéger le plus faible et assurer une parfaite réciprocité des droits et des devoirs, vous vous comportez, ce qui est étonnant de la part de la majorité plurielle, en ultralibéraux en introduisant une sorte de supermarché de la famille ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Enfin et c'est le plus grave, le PACS ne dit pas un mot sur l'enfant. Au nom de raisons idéologiques et abstraites, vous nous avez répété que l'on pouvait légiférer sur le couple, sans légiférer sur la famille. Mais qui peut croire sérieusement qu'un tel système est tenable à partir du moment où, dans leur immense majorité, les couples pacsés auront des enfants ? Cela relève de l'imposture ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Vous avez donc pris le risque de diviser durablement les Français sur l'idée qu'ils se font de la famille alors que cette question nous rassemblait sur tous les bancs de cet hémicycle depuis la Libération. (Rires et exclamations sur les mêmes bancs.) Vous avez ainsi hypothéqué, dès le départ, votre ambition de réformer et de moderniser le droit de la famille.

Le moment venu, nous proposerons des réformes ambitieuses pour reconstruire la famille, non pas autour du contrat entre deux adultes, mais autour de l'enfant.

Voilà pourquoi l'UDF continuera de se battre contre le PACS. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Pour le groupe RCV, la parole est à

M. Alain Tourret.

M. Alain Tourret.

Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, notre assemblée a donc examiné, pendant deux mois, cette réforme essentielle, attendue depuis plus de dix années sur laquelle nombre d'entre nous avaient beaucoup travaillé. Au cours de ces deux mois, la volonté d'obstruction l'a souvent emporté sur le désir de clarification.

M. Alain Barrau.

C'est vrai !

M. Alain Tourret.

Comment pouvait-il en être autrement ? Les conservateurs, épuisés par leurs contradictions internes, ont saisi cette occasion pour donner des repères à leur électorat.

M. Patrick Malavieille.

Très bien !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 9 DÉCEMBRE 1998

M. Alain Tourret.

Il est cependant regrettable que cette stratégie ait débouché sur le dévoiement du débat parlementaire. Elle a ainsi montré les limites du règlement de notre assemblée. En effet et prenons-y garde !, seul l'antiparlementarisme gagnera à ce jeu dangereux.

Pourtant les débats ont parfois été de qualité. La fureur de l'opposition ne s'appuyait pas que sur du vide.

(« Ah ! » sur les bancs de l'Union pour la démocratie française-Alliance.) Par ailleurs, les amendements retenus suffisent à démontrer que le débat parlementaire a été fructueux. Qu'il nous soit donc permis de souligner la force de conviction des deux rapporteurs, constatée par tous, et de la présidente de la commission des lois à laquelle je rends hommage, ainsi que la pertinence des observations du Gouvernement, notamment en ce qui concerne les fratries. C'est donc un texte de qualité que nous avons enrichi et qui le sera encore tant les débats ont souligné qu'il était possible d'améliorer les articles relatifs à l'indivision et au statut des frères et soeurs.

Nous avons donc répondu par un texte fondamental à une attente souvent désespérée de couples qui n'avaient pas voulu ou pas pu choisir le mariage ; de couples homosexuels, encore victimes d'une homophobie, aussi lâche que scandaleuse, rappelant parfois cette période de honte et de haine que fut le vichysme. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Nous avons donné des droits nouveaux dans des domaines pratiques mais essentiels : le droit au bail, le droit à la sécurité sociale, le droit de se rapprocher du lieu de travail de son partenaire, le droit de lui succéder, le droit de s'intégrer dans la nation française. Tels sont les droits primordiaux que nous avons ouverts aux intéressés et nous en sommes fiers. Nous sommes fiers d'avoir créé ainsi un nouvel espace de liberté, d'avoir démontré que la gauche, toute la gauche, savait se retrouver sur les problèmes de société.

M. Alain Barrau.

Très bien !

M. Alain Tourret.

Demain, d'autres grandes réformes de société nous attendent. La France de l'an 2000 n'est pas celle du

XIXe siècle. Le groupe Radical, Citoyen et Vert, les Radicaux sauront, comme aujourd'hui, permettre des évolutions indispensables, être les humanistes de notre temps. Ils voteront donc ce texte de liberté qui renforce la pacte républicain. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

Pour le groupe Démocratie libérale et Indépendants, la parole est à M. Claude Goasguen.

M. Claude Goasguen.

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, nous voici enfin arrivés à la fin de la discussion de la proposition de loi relative au PACS et à l'épreuve de vote. La majorité va pouvoir exercer ses prérogatives, deux mois exactement après ce vendredi - noir, pour elle ! - où elle était devenue minoritaire. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Le PACS sera aujourd'hui, très provisoirement, et en première lecture, sans doute adopté par notre assemblée : ce devrait être d'autant moins difficile que tous les députés de la majorité ont été priés de taire leurs états d'â me (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.),...

M. Bernard Roman.

Ce n'est pas vrai !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

Ils n'ont pas d'âme, seulement un esprit !

M. Claude Goasguen.

... d'apposer leur signature au bas d'un texte, de venir en force suivre les débats en reniant ce qui fait leur charge de représentants de la nation, c'est-à-dire sans jamais prendre la parole ni présenter un amendement. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

Parce que vous parlez trop !

M. Claude Goasguen.

Après vous avoir forcé à repousser par deux fois ce vote, après avoir largement démontré les incohérences de ce texte, nous allons sans doute devoir - très provisoirement - nous incliner.

L'adoption du PACS n'est pourtant que le début des difficultés pour le Gouvernement. (« C'est vrai ! » sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Mois après mois, l'opinion sera amenée à découvrir le mauvais coup porté au droit des personnes, de la famille, de l'enfant, et donc à l'évolution de la société française.

Le Gouvernement a manqué de courage politique.

L'existence de conditions de vie précaires pour beaucoup de personnes vivant en situation non maritale est un vrai problème de société, qui aurait pu faire l'objet d'un texte de loi consensuel (« Pas avec vous ! » sur les bancs du groupe socialiste), et d'une large concertation des forces politiques et des forces religieuses et sociales de notre pays. Vous avez préféré la combinaison électorale. Votre proposition de loi est le contraire d'un texte de solidarité.

(« C'est faux ! » sur les bancs du groupe socialiste) . Le PACS est en réalité un texte de convenance politicienne.

(Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.) Le Gouvernement et la majorité n'ont cessé de nous le faire croire, Mme la garde des sceaux n'a cessé de nous le répéter sur tous les tons, agacée et quelquefois condescendante : le PACS n'est pas la famille.

M. Alain Barrau.

Voilà !

M. Claude Goasguen.

Le Gouvernement se trompe. Ce n'est pas tant la famille, capable d'évolution, qui rattrapera votre texte en rendant caduque votre construction idéologique, mais c'est surtout l'enfant qui vous demandera des comptes. C'est sur l'avenir de sa situation juridique et sociale que vous avez totalement oublié dans ce débat que vous aurez à vous expliquer. Comme s'il était imaginable de légiférer sur le droit des personnes sans avoir le souci obsessionnel de l'enfant dans une société de précarité que vous confirmez, que vous accentuez encore.

M. François Liberti.

C'est faux !

M. Claude Goasguen.

Vous devrez ainsi rendre des comptes sur les dangers qui pèsent désormais sur le droit de l'autorité parentale et la pratique de l'adoption par les couples homosexuels.

Car vous n'avez pas eu le courage non plus d'aborder la question des personnes homosexuelles. Ce débat était pourtant nécessaire et l'Assemblée tout entière était prête à en discuter. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 9 DÉCEMBRE 1998

Ce faisant, vous avez, sans doute sans le vouloir, contribué à marginaliser un peu plus une communauté homosexuelle dont les difficultés sont réelles...

M. Michel Lefait.

Tartuffe !

M. Claude Goasguen.

... et qui se serait bien passée de votre excès de sollicitude et de ce texte si mal agencé.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. André Gérin.

Démago !

M. Claude Goasguen.

Mais, comme vous ne perdez jamais une occasion de régler vos petites affaires électorales (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.), vous avez aussi profité de ce texte pour faire passer, de façon scandaleuse, un article totalement inacceptable qui peut remettre en cause toute notre législation difficile sur le sujet passionnel de l'immigration. La signature d'un PACS, aux aléas évidents, simplement déclaratif, permettra d'obtenir une carte de séjour au titre des « liens privés et familiaux » prévus par l'article 5 de la loi relative à l'entrée et au séjour des étrangers...

M. Charles Cova.

C'est une grave responsabilité qu'ils ont prise !

M. Claude Goasguen.

... que vous avez votée le 11 mai 1998. Elle permettra ainsi d'obtenir un permis de travail.

M. Lucien Degauchy.

C'est grave !

M. Claude Goasguen.

Cette disposition, dont nous nous sommes efforcés de démontrer toute la nocivité, est une bombe jetée sur un terrain déjà miné. Elle vient souligner, une fois encore, la duplicité de votre discours sur l'immigration.

M. Jean-Michel Ferrand.

Absolument !

M. Claude Goasguen.

D'un côté, vous essayez de faire croire que vous avez choisi la voie de la rigueur. De l'autre, vous ne cessez de jouer par des promesses avec cette partie, qui vous est nécessaire, de votre électorat.

(« Oh ! » sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Votre texte est donc inacceptable et il ne sera pas accepté par les Français.

(« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Vous vous enfoncerez dans le marécage de la bataille parlementaire qui sera longue et difficile pour vous.

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Mes chers collègues, il n'est pas indispensable de crier dans les marécages ! (Sourires.)

M. Claude Goasguen.

Ce sont les crapauds qui coassent !

M. le président.

Veuillez poursuivre, monsieur Goasguen.

M. Claude Goasguen.

Souvenez-vous qu'en 1984, un texte inique avait voulu frapper la liberté de l'école (Exclamations sur les mêmes bancs) et que les Français vous avaient imposé son retrait. Nous sommes nombreux dans cette assemblée, devant votre entêtement, à souhaiter qu'il en soit de même dans les mois qui viennent afin de protéger les libertés de la famille et de l'enfant.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. Patrick Bloche, pour le groupe socialiste.

M. Patrick Bloche.

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, monsieur le ministre, mes chers collègues, deux mois pour faire bouger deux siècles de code civil ! (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Je pense qu'avec le recul nécessaire, le temps que nous aurons consacré à cette première lecture à l'Assemblée nationale aura une valeur toute relative.

Deux mois qui n'auront pas été forcément inutiles si l'on considère que le débat qui a eu lieu dans cet hémicycle a permis de porter une pédagogie du pacte civil de solidarité qui a pénétré notre pays en profondeur.

(Rires et exclamations sur les mêmes bancs.)

M. Lucien Degauchy.

Belle pédagogie !

M. le président.

S'il vous plaît, mes chers collègues !

M. Patrick Bloche.

Je souhaitais en porter témoignage pour l'avoir constaté à Lille comme à Angers, à Bordeaux comme à Saint-Etienne ou encore à Cergy. Le PACS intéresse désormais toute la société et le débat parlementaire y aura contribué, grâce notamment aux apports essentiels de Catherine Tasca, de Jean-Pierre Michel et de Jean-Marc Ayrault.

(Exclamations sur les mêmes bancs.)

Deux mois qui auront permis à la majorité de l'Assemblée nationale d'affirmer avec force sa volonté de prendre en compte les évolutions de nos modes de vie en passant de la tolérance à la reconnaissance. En nous engageant une nouvelle fois, avec détermination, dans ce combat jamais achevé pour l'égalité des droits, nous remplissons le mandat que nous ont donné nos concitoyens au printemps de 1997.

M. Jean-Michel Ferrand.

Pas pour longtemps !

M. Patrick Bloche.

Deux mois qui auront vu l'opposition parlementaire être incapable de faire le choix entre ses pulsions archaïques et ses tentations néo-libérales.

A celles et ceux qui, par le dépôt de centaines d'amendements, ont voulu nous dire qu'entre l'individu et la famille il n'y a rien, je souhaiterais rappeler que cinq millions de nos concitoyens vivent en couple hors mariage.

Ce n'est pas rien ! Aux parlementaires de l'opposition, qui, par des interventions rarement relayées à l'extérieur de cet hémicycle, ont justifié notre volonté de faire disparaître des discriminations intolérables en cette fin de siècle, je me permettrai de relever l'imprudence idéologique du refus de tout formalisme.

Ces soixante-dix heures d'échanges ont montré plus d'une fois qu'un cadre juridique nouveau entre le mariage et l'union libre était indispensable pour ne pas accorder des droits sans contrôle, pour ne pas accorder des droits sans demander en contrepartie des devoirs, pour ne pas accorder des droits sans que soit posé clairement l'accord préalable de deux volontés humaines.

La base contractuelle, qui est aussi celle d'une solidarité active entre deux personnes ayant un projet de vie commune, était d'autant plus nécessaire que le pacte civil


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 9 DÉCEMBRE 1998

de solidarité a une charge symbolique : celle de la reconnaissance juridique tant attendue des couples de même sexe. En attendant ce stade supérieur de civilisation que sera un jour l'indifférence absolue à l'égard de choix de vie qui appartiennent à la sphère privée,...

M. André Schneider.

Qu'est-ce qu'il ne faut pas entendre !

M. Patrick Bloche.

... il était de notre responsabilité de faire reculer l'homophobie par le vote d'une loi globale et non par l'adoption aussi discrète qu'incertaine d'amendements à des textes de portée générale.

Avec l'appui du Gouvernement qu'Elisabeth Guigou a porté ici même de façon si éclatante (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), la majorité de notre assemblée a fait le choix d'une initiative d'origine parlementaire.

Du début à la fin de cette discussion en première lecture, l'opposition n'a eu de cesse, lorsqu'elle était à court d'arguments, de contester l'usage de l'article 39 de notre Constitution. Elle a ainsi, avec beaucoup d'imprudence, relayé au sein même du Parlement, la contestation de la légitimité que nous donne le suffrage universel à faire la loi (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), validant, par là même, l'idée que, pour les sujets dits de société, seul le gouvernement des juges et des experts est habilité à modifier les règles de notre droit.

M. Patrick Ollier.

C'est stupide !

M. Patrick Bloche.

Cette imprudence de l'opposition, nous avons également pu la déceler dans certains propos tenus hier soir, envisageant l'abrogation future du pacte civil de solidarité. Je mets solennellement au défi, aujourd'hui, l'actuelle minorité de l'Assemblée nationale de faire de cette perspective l'un des engagements de ses prochaines campagnes électorales.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Que retiendront les lecteurs à venir des comptes rendus de notre actuel débat sinon qu'une majorité de l'Assemblée nationale a voulu faire pour la première fois du couple, qu'il soit de sexe différent ou de même sexe, un sujet de droit ? Ils constateront également que le pacte civil de solidarité a posé les bases d'un lien social moderne permettant aux plus faibles de nos concitoyens de disposer de moyens juridiques nouveaux pour mieux faire face, à deux, à des situations de précarité nées de la perte d'un emploi ou d'un logement, ou de l'irruption de la maladie.

Le pacte civil de solidarité, c'est aussi cela. Ne l'oublions pas même si cet aspect a été insuffisamment évoqué lors de notre discussion.

Le pacte civil de solidarité a été mis au débat public par les associations homosexuelles il y a maintenant sept ans. La première proposition de loi créant un cadre juridique global et unifiant pour ceux qui ne veulent ou ne peuvent se marier date de 1992. Les opinions les plus diverses, de nature philosophique, spirituelle ou juridique, se sont pleinement exprimées tout au long de ces années.

il est donc urgent de ne plus attendre et d'assumer en responsabilité notre fonction de législateur, contribuant ainsi au renforcement du pacte républicain.

C'est la raison pour laquelle le groupe socialiste votera la proposition de loi relative au pacte civil de solidarité...

M. François Sauvadet et M. Maurice Leroy.

Il est aux ordres !

M. Patrick Bloche.

... avec toute la force de ses convictions et sa foi en l'avenir.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - « Aux ordres ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Avant de donner la parole au dernier orateur inscrit pour les explications de vote, je vais, d'ores et déjà, faire annoncer le scrutin de manière à permettre à nos collègues de regagner l'hémicycle.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Patrick Devedjian, pour le groupe RPR.

M. Patrick Devedjian.

Monsieur Bloche, vous avez raison : deux mois ce n'est pas trop pour débattre du projet de PACS. Il n'y a qu'un malheur, c'est que vous aviez prévu quatre heures. Et ce n'est pas ce qui est arrivé ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Ce débat qui a duré deux mois illustre parfaitement la méthode socialiste qui, selon moi, se résume à quatre principes.

Mme Odette Grzegrzulka.

Hors sujet !

M. Patrick Devedjian.

Le premier principe de la méthode socialiste, c'est de s'emparer d'un vrai problème, auquel l'ensemble de la société est sensible.

Le deuxième, c'est de proclamer à tous vents combien on est vertueux et moderne.

M. Bernard Roman.

Ce que nous sommes !

M. Patrick Devedjian.

Le troisième principe, c'est de proposer une solution dont le contenu idéologique doit être fort et prêter à une appropriation partisane.

Et le quatrième principe c'est de ne pas se préoccuper des aspects techniques et des conséquences sur la vie quotidienne des intéressés.

(Applaudissements sur les mêmes bancs.) Tant il est vrai que le bénéfice politique ou électoral est immédiat et global tandis que les difficultés sont ultérieures et diluées.

Le Premier ministre prêche la politique à la manière des dévots de Molière : l'essentiel, c'est d'avoir l'air. Et vous avez l'air, effectivement ! (Rires et applaudissements sur les mêmes bancs. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Philippe Auberger.

Oui, ils ne manquent pas d'air !

M. Patrick Devedjian.

Pour le PACS, on voit les résultats ! Dressons un petit bilan des dispositions que vous proposez. Les homosexuels qui ne voudront pas se déclarer publiquement continueront à subir les discriminations qui sont pourtant justement dénoncées. Les couples


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 9 DÉCEMBRE 1998

vivant en union libre et qui se refusent à prendre des engagements écrits devront désormais le faire s'ils veulent conserver des droits que les tribunaux leur reconnaissaient déjà. L'Etat va enfin pouvoir entrer dans leur vie privée.

Les quelques malheureux qui auront eu la faiblesse de croire à vos proclamations se trouveront dans une situation pire pour ce qui concerne leurs biens en raison de l'indivision et pour ce qui concerne leur vie de couple par la pratique de la répudiation que vous instituez pour la première fois en droit français.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Pendant ce temps, rien n'est fait pour la famille. Que les parents soient mariés ou non, les crédits ont été réduits.

(« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe Rassemblement pour la République.) La situation du conjoint survivant demeure injuste, profondément injuste. Les droits de succession aussi archaïques sur le plan civil que confiscatoires sur le plan fiscal restent ce qu'ils sont.

M. Bernard Roman.

Ce n'est pas vrai !

M. Patrick Devedjian.

Toutes ces incohérences conduiront très certainement à la censure du Conseil constitutionnel.

Monsieur Bloche, nous n'aurons pas besoin de proclamer dans nos campagnes électorales que nous mettrons fin à vos dispositions, à cette proposition de loi, parce qu'il n'en restera pas grand-chose lorsque le Conseil constitutionnel aura statué.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Et quand nous reviendrons aux responsabilités, (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)...

M.

Didier Boulaud.

Jamais !

M.

Patrick Devedjian.

... et que les Français auront compris ce qu'il y a derrière vos belles paroles, nous rendrons ce qui reste du PACS totalement inutile par la modernisation du droit de la famille.

(Applaudissements sur les mêmes bancs.)

En réalité, monsieur Bloche, c'est votre méthode de légiférer qu'il faut condamner.

Pas d'auditions publiques, alors qu'on sait aujourd'hui combien elles sont utiles quand il s'agit de grandes questions de société.

Aucune audition par la commission, qui a examiné le texte qui nous est soumis en vingt-sept minutes !

Mme Odette Grzegrzulka.

C'est faux !

M. Patrick Devedjian.

Record absolu du débat parlementaire, madame Tasca ! Ce que vous appelez l'obstruction de la droite trouve là sa légitimité la plus totale. Vos insuffisances expliquent que nous ayons voulu faire durer ce débat afin que les Français comprennent de quoi on parle ! (Applaudissements sur les mêmes bancs.) Ce débat, que vous appelez d'obstruction, leur a permis de se faire une véritable opinion sur ce dont nous parlons et leur a permis aussi d'évoluer considérablement car ils ont vu que, derrière les bonnes intentions proclamées, il y avait beaucoup moins de réalité.

Aucune audition d'experts : ceux que le Gouvernement avait nommés ont exprimé ailleurs, dans la presse, qu'ils étaient contre le projet de PACS.

Aucune audition des autorités religieuses qui, s'agissant du droit de la famille, pourraient être légitimement consultées.

(Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Oui, monsieur Michel, elles ont été consultées sur le service militaire. Pourquoi ne le seraient-elles pas sur le droit de la famille ? (Applaudissements sur les bancs du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Aucune audition des associations familiales par la commission des affaires culturelles. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste.) Refus absolu d'engager un dialogue avec l'opposition pour essayer de mettre au point une réforme. (Protestations sur les mêmes bancs.) Mais oui ! Vous avez voulu vous approprier de manière politicienne les dividendes de ce débat. Or, quand on veut légiférer sur les moeurs, quand on veut légiférer sur la société, on doit essayer de légiférer de manière durable parce que c'est important pour tout le monde et que les clivages partisans n'ont aucun sens dans les affaires de société. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendant.)

Le comble de l'incohérence a été atteint hier soir, quand le Gouvernement, tout en dénonçant lui-même le caractère inconstitutionnel de la disposition sur les fratries, a refusé d'en tirer les conséquences et a encouragé le groupe socialiste à voter malgré tout la disposition.

(Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. Jean-Paul Charié.

Aberrant !

M. Patrick Devedjian.

Vous avez adopté cette attitude malgré l'opposition du groupe communiste et des Verts, qui, sur ce point, étaient raisonnables.

P our nous rassurer - nous étions quand même inquiets - il nous était expliqué dans les couloirs de l'Assemblée qu'on ne recherchait qu'un effet d'affichage en deuxième lecture et que l'article disparaîtrait, la presse s'intéresse moins aux lectures ultérieures. On ne peut pas être plus cynique, madame la garde des sceaux. On ne fait pas la loi de cette manière-là. C'est la raison pour laquelle le groupe RPR votera contre la proposition de loi. (Applaudissements du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Vote sur l'ensemble

M. le président.

Je vais mettre aux voix par scrutin public l'ensemble de la proposition de loi.

Le scrutin a été annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même, et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été cou plés à cet effet.

Le scrutin est ouvert.

....................................................................

M. le président.

Le scrutin est clos.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 9 DÉCEMBRE 1998

Voici le résultat du scrutin : Nombre de votants ...................................

568 Nombre de suffrages exprimés .................

565 Majorité absolue .......................................

283 Pour l'adoption .........................

316 Contre .......................................

249 L'Assemblée nationale a adopté. (Applaudissements prolongés sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) Suspension et reprise de la séance

M. le président.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures, est reprise à dixsept heures vingt, sous la présidence de M. Patrick Ollier.)

PRÉSIDENCE DE M. PATRICK OLLIER,

vice-président

M. le président.

La séance est reprise.

5

REQUÊTE EN CONTESTATION D'OPÉRATIONS ÉLECTORALES

M. le président.

En application de l'article L.O.

181 du code électoral, j'ai reçu du Conseil constitutionnel communication d'une requête en contestation d'opérations électorales.

C onformément à l'article 3 du règlement, cette communication est affichée et sera publiée à la suite du compte rendu intégral de la présente séance.

6 LOI DE FINANCES POUR 1999 Communication relative à la désignation d'une commission mixte paritaire

M. le président.

M. le président de l'Assemblée nationale a reçu de M. le Premier ministre la lettre suivante :

« Paris, le 8 décembre 1998

« Monsieur le président,

« Conformément à l'article 45, alinéa 2, de la Constitution, j'ai l'honneur de vous faire connaître que j'ai décidé de provoquer la réunion d'une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances pour 1999.

« Je vous serais obligé de bien vouloir, en conséquence, inviter l'Assemblée nationale à désigner ses représentants à cette commission.

« J'adresse ce jour à M. le président du Sénat une demande tendant aux mêmes fins.

« Veuillez agréer, monsieur le président, l'assurance de ma haute considération. »

Cette communication a été notifiée à M. le président de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

7 ACCÈS AU DROIT Discussion, en deuxième lecture, selon la procédure d'examen simplifiée, d'un projet de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi relatif à l'accès au droit et à la résolution amiable des conflits (nos 1179, 1241).

Je rappelle que ce texte fait l'objet d'une procédure d'examen simplifiée.

La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les députés, j'ai déjà eu l'occasion de dire devant vous à quel point la demande de nos concitoyens à l'égard de la justice est immense. Elle prend les formes les plus diverses. C'est un signe de l'évolution des esprits. Le droit est désormais, je dirai même enfin, reconnu dans nos sociétés comme un instrument essentiel de régulation sociale.

Pourtant, force est de constater que l'accès au droit, notamment pour les plus démunis et encore plus pour les exclus de notre société, ne s'exerce pas dans des conditions satisfaisantes.

C'est pourquoi - dans le cadre de la réforme de la justice que j'ai proposée et engagée au nom du Gouvernement, et qui s'articule, je le rappelle, autour de trois axes : une justice au service des citoyens, une justice au service des libertés et une justice davantage indépendante et impartiale - j'ai fait du projet de loi relatif à l'accès au droit et à la résolution amiable des conflits une première priorité.

Ce texte est la clé de voûte du premier volet de la réforme qui vise à mettre davantage la justice au service des citoyens.

Le droit au droit est un principe essentiel du pacte d émocratique. Il est en particulier, pour les plus modestes, l'une des premières conditions de l'égalité réelle devant la loi. Comme le relève Mme Geneviève de Gaulle-Anthonioz, permettre aux exclus de faire valoir leurs droits, de se défendre, c'est leur rendre leur dignité.

Le présent projet marque ma volonté d'instaurer une véritable politique publique de régulation sociale par le droit. Il poursuit deux grands objectifs.

Le premier objectif est l'ambition de mettre à la disposition des citoyens dans chaque département un lieu où ils puissent disposer d'une information générale sur leurs droits et obligations. Cette mission sera impartie aux conseils départementaux de l'accès au droit dont la création devra être généralisée.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 9 DÉCEMBRE 1998

De même, les maisons de justice et du droit doivent être institutionnalisées, car elles jouent un rôle essentiel dans la justice de proximité. Elles concourent, en effet, en assurant une présence judiciaire proche des citoyens, à la prévention de la délinquance et aux politiques d'aide aux victimes et d'accès au droit.

Le second objectif est d'offrir à chaque citoyen des réponses diversifiées pour le règlement des conflits, sans que ceux-ci aient à s'adresser systématiquement aux tribunaux.

J'ai, en effet, acquis la conviction, en écoutant les femmes et les hommes de terrain - magistrats, auxiliaires de justice, membres du mouvement associatif -, que les solutions négociées peuvent souvent apporter une réponse plus adaptée à de nombreux litiges et qu'elles doivent, dans le cadre de l'institution judiciaire, trouver une place à côté de la réponse plus classique qu'est le jugement.

La négociation doit constituer non seulement une alternative au jugement, mais aussi et surtout une alternative au procès lui-même. Il faut cesser de confondre l'accès au droit et l'accès à la justice. Je rappellerai l'adage célèbre : « une bonne transaction vaut mieux qu'un mauvais procès ».

Les plus modestes ont aussi le droit d'accéder à la transaction. L'égalité impose que toute personne, quelles que soient ses conditions de ressources, puisse faire valoir ses droits, avec le concours d'un avocat, sans obligatoirement assigner son adversaire devant le tribunal.

C'est une grande innovation de ce projet de loi que de permettre le financement par l'aide juridictionnelle du concours de l'avocat et, par conséquent, l'accès des plus démunis à cette forme de règlement des litiges.

De même, le fait que l'avocat puisse apporter son concours, que celui-ci soit financé, dans le cadre de la médiation pénale, constitue évidemment une très grande avancée.

Au terme de la première lecture parlementaire, les deux assemblées ont adhéré à l'économie générale du projet.

Je m'en réjouis. Elles ont, au-delà d'une acceptation de principe, émis, tout en proposant des améliorations du texte, un vote conforme au projet sur l'essentiel des dispositions de la réforme.

Cependant, certaines dispositions relatives aux conseils départementaux de l'accès au droit ont été amendées par le Sénat.

J'évoquerai successivement les points les plus nombreux, essentiels, qui font l'objet d'un vote conforme des deux assemblées, et les points amendés par le Sénat.

S'agissant de l'accès au droit, la loi de 1991, que nous devons à la volonté réformatrice de Henri Nallet, avait franchi un premier pas en permettant à ceux qui étaient dépourvus de moyens financiers de faire valoir leurs droits devant les tribunaux avec l'assistance d'un avocat rémunéré, mais aussi en leur permettant d'accéder aux consultations juridiques.

Cependant, si essentielles que soient l'assistance au cours des procédures non juridictionnelles et la consultation juridique, ces prestations n'englobent pas toutes les missions susceptibles d'être menées au titre de l'accès au droit. L'accès au droit doit notamment répondre aux attentes des femmes et des hommes le plus en difficulté dans leur existence quotidienne. Une assistance et un accompagnement personnalisé doivent leur être assurés dans les démarches administratives les plus élémentaires de la vie courante, de même que l'orientation vers les organismes chargés de la mise en oeuvre de droits dont, bien souvent, ils sont ignorants. Il est de notre responsabilité de leur donner les moyens de briser la spirale de l'exclusion.

Cette émergence de besoins nouveaux doit figurer dans la politique d'accès au droit, tout comme doit y être incluse la diversification des modes de règlement des conflits.

J'en viens maintenant à la transaction. Nous posons tous un même constat : la demande de justice de nos concitoyens ne cesse d'augmenter. Nous devons nous en réjouir. C'est le signe d'une démocratie forte au sein de laquelle la loi du plus fort ne saurait s'imposer au plus faible. Mais prenons garde que ne s'instaure, pour répondre à cette demande, un seul processus, celui du recours au « tout judiciaire ».

C'est pourquoi la réforme entreprise, à laquelle la commission des lois apporte son soutien, je tiens encore une fois à l'en remercier, tend à moderniser le service public de la justice en adaptant ses modes de réponse aux demandes de nos concitoyens.

Le recours au mode négocié du règlement des différends doit constituer, je l'ai déjà dit, non seulement une alternative aux jugements mais aussi et surtout une alternative au procès lui-même.

Je sais que certains ont exprimé la crainte de voir s'instaurer une justice à double vitesse au seul préjudice de nos concitoyens les plus démunis. Cette crainte, à laquelle nous devons porter une grande attention, me paraît cependant vaine. Chacune des parties à un litige aura en effet la possibilité de se faire assister par un avocat. L'aide juridictionnelle sera donc élargie pour que la transaction avant procès soit rétribuée à ce titre.

Le principe de l'égalité des armes dans la conduite de la négociation sera donc instauré. Il s'agit là d'une avancée considérable.

Je soulignerai, une nouvelle fois, la force de l'engagement de l'Etat, qui apportera, et c'est une grande innovation, un concours financier significatif à ces modes de régulation des litiges en dehors de l'enceinte judiciaire.

Je vous rappelle que le projet de loi de finances pour 1999 prévoit une dotation budgétaire de 1 443 millions de francs contre 1 228 millions de francs en 1998, soit une augmentation de 17,5 % en un an. Cette augmentation est destinée en particulier à financer ces nouveaux modes de régulation des conflits.

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

Bravo !

Mme la garde des sceaux.

Je précise enfin que le champ d'application de l'aide juridictionnelle a été étendu aux instances devant les juridictions compétentes en matière de pensions militaires et à l'intervention de l'avocat dans le cadre des mesures prévues par l'article 12-1 de l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante.

Enfin, j'en viens aux dispositions du projet relatives à la médiation pénale et aux maisons de justice et du droit qui ont également été votées par les deux assemblées.

Les médiations pénales sont passées de 11 000 en 1992 à 60 000 à la fin de 1997. Ainsi, dans le seul ressort du tribunal de grande instance de Lyon, les formations correctionnelles jugent dans l'année 8 000 affaires alors que, d ans la même période, et dans le même ressort, 4 000 affaires font l'objet d'une médiation pénale au sein d'une maison de justice et du droit. Il ne s'agit donc plus


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d'un phénomène marginal puisque cela équivaut à la moitié des affaires traitées par les tribunaux correctionnels.

La réforme qui vous est soumise vise à impulser une politique volontariste de la médiation pénale, soucieuse, pour éviter en ce domaine également la critique d'une justice à double vitesse, de garantir les droits des parties.

Pour assurer l'effectivité du concours de l'avocat, au même titre que pour la transaction civile ou commerciale, un régime de financement spécifique sera mis en place.

La médiation pénale a pris son essor au fur et à mesure de l'implantation de nouvelles maisons de justice et du droit qui, par ailleurs, développent de nombreuses initiatives, auxquelles je tiens à rendre hommage, notamment en direction des mineurs et pour favoriser l'accès au droit.

J'ai pu apprécier très concrètement de telles initiatives sur le terrain à l'occasion de ma visite, lundi dernier, de la structure que vous avez mise en place à Gennevilliers, monsieur Brunhes, et dans laquelle vous êtes fortement impliqué en votre qualité de maire de cette commune. Je vous en remercie.

Les maisons de justice et du droit correspondent, à l'évidence, à un besoin. Elles ont rencontré leur public, si je puis m'exprimer ainsi. Le stade de l'expérimentation doit maintenant être dépassé. Leur reconnaissance juridique devrait être de nature à favoriser leur intégration dans le dispositif de la politique judiciaire que j'entends mener au service des citoyens.

Le Sénat a apporté quelques modifications aux dispositions du projet de loi que nous examinons aujourd'hui, notamment celles qui sont relatives au conseil départemental de l'accès au droit.

S'agissant de l'appellation du conseil départemental, je pensais, pour ma part, qu'elle devait être le reflet de la politique que j'ai défendue devant vous, c'est-à-dire à la fois l'accès au droit et la résolution amiable des conflits, d'où le titre que j'avais initialement retenu de « conseil départemental de l'accès au droit et de la résolution amiable des conflits ». Je reconnais que c'était un peu long. Le Sénat a voulu raccourcir cette appellation dans un souci de commodité et de simplicité, comme l'avait d'ailleurs suggéré, en première lecture, votre commission des lois.

S'agissant des missions du conseil départemental de l'accès au droit, j'entends réaffirmer avec force à cette tribune qu'il aura aussi pour mission, en dehors des missions classiques dévolues à l'actuel conseil départemental de l'aide juridique, de conduire des actions de manière à favoriser le règlement amiable des litiges, d'adapter les modalités de l'aide à l'accès au droit aux besoins des personnes en situation de grande précarité et de mener des campagnes de sensibilisation et de formation auprès des personnes qui peuvent être chargées de mettre en oeuvre l'aide à l'accès au droit.

Je voulais rappeler solennellement ces missions dès lors que le Sénat, sans contester la nécessité pour le conseil départemental de conduire de telles actions, a, pour des raisons de stricte orthodoxie juridique, adopté des amendements supprimant la référence expresse à ces missions.

Nos débats doivent en garder la trace ainsi que la trace de la volonté du Gouvernement et du législateur.

La Haute Assemblée a estimé que ces dispositions, dès lors qu'elles ne présentaient pas un caractère normatif, n'avaient pas leur place dans un texte législatif. Votre commission des lois, en proposant un vote conforme à propos de cette question adhère à cette analyse. J'en prends acte.

Je demanderai aux conseils de veiller à conduire ces actions. Elles sont essentielles pour que la politique d'accès au droit que je défends, et qui rejoint vos propres préoccupations, mesdames, messieurs les députés, entre effectivement dans les faits.

Je regrette que, sur un autre point à mes yeux important, le Sénat ait amendé le projet. Je fais référence, vous l'aurez compris, à la composition des conseils départementaux de l'accès au droit.

Mes nombreuses rencontres avec les acteurs de terrains, ceux qui font vivre au quotidien les actuels conseils, m'avaient convaincue de l'utilité, pour faciliter leur création, de resserrer le nombre des membres fondateurs. Le projet avait été élaboré en ce sens.

Je tiens à dissiper toute ambiguïté. Il ne s'agissait évidemment pas d'écarter certains professionnels du droit, mais nous savons, les uns et les autres, qu'ils jouent un rôle majeur dans la politique de l'accès au droit, mais la pratique a révélé que la création d'un conseil départemental était quelquefois freinée par un trop grand nombre d'acteurs. C'est pourquoi le projet prévoyait de réduire à cinq le nombre de membres fondateurs.

Le Sénat a élargi la composition de ce « noyau dur » aux associations départementales des maires, aux notaires, aux huissiers de justice et aux avoués. Votre commission des lois vous propose d'entériner ce nouveau dispositif.

Puisqu'il s'agit d'un vote conforme des deux assemblées, dans la mesure où je ne méconnais pas l'utilité de ce que peuvent apporter ces professionnels ou ces élus aux conseils départementaux d'aide juridique, je veux bien donner une chance à une organisation élargie. Je ferai un bilan dans un an et je verrai s'il faut revenir sur ce dispositif. Au-delà des textes, nous pouvons peut-être, par une politique plus active d'incitation, accélérer la création des conseils départementaux. Il nous appartient, à vous comme à moi, de mobiliser dans les départements l'ensemble des acteurs concernés par la création des conseils.

Aujourd'hui, c'est-à-dire sept ans après l'entrée en vigueur de la loi de 1991, seuls vingt-sept conseils départementaux ont été créés, dont sept cette année, ce qui représente une notable accélération, et quatre sont en cours de constitution dans les départements de HauteGaronne, du Val-de-Marne, de Loire-Atlantique et de la Charente. J'entends, bien entendu, amplifier cette dynamique.

Je dégagerai donc les moyens financiers nécessaires à cette fin. Ainsi, cinq millions de francs de crédits d'intervention et six millions de francs de crédits de fonctionnement supplémentaires sont inscrits dans le projet de budget pour l'année 1999, afin de faciliter la création des conseils départementaux d'accès au droit.

Je fixe pour objectif la création, au cours de l'année 1999, de vingt-sept conseils départementaux, dont dixhuit dans des départements relevant de la carte des sites prioritaires de la politique de la ville.

Mon administration centrale devra également se mobiliser pour apporter son expertise et son concours à la réalisation de cet objectif.

Chacun doit avoir présent à l'esprit l'importance de l'enjeu. Il s'agit de développer une véritable politique d'accès au droit sur l'ensemble du territoire, dans un délai


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rapide, car tout citoyen, je le répète à nouveau, quel que soit le département où il réside a le droit à la connaissance de ses droits.

Je me suis donné, en proposant cette réforme, l'objectif de renforcer la référence au droit, fondement de notre société démocratique, et de restaurer l'image d'une justice au service des citoyens.

Je vous remercie, mesdames, messieurs les députés, monsieur le rapporteur, madame la présidente de la commission des lois, d'avoir, par une collaboration exemplaire, accompagné et soutenu ma démarche. Mes remerciements vont également aux sénateurs. Vos contributions respectives et le soutien que vous avez manifesté à ce projet ont été précieux.

Je saluerai encore la qualité des débats et je relèverai tout particulièrement leur sérénité : nous avons su être à l'écoute des uns et des autres. C'est ma conception de la vie démocratique, et c'est aussi comme cela, je crois, que l'on fabrique de bonnes lois.

Je conclurai en soulignant que, grâce au travail mené en commun, Gouvernement et Parlement, et dont il me plaît de souligner de nouveau le caractère exemplaire, vous allez adopter un texte qui a été examiné en conseil des ministres au mois de mai dernier. Seulement sept mois auront été nécessaires pour conduire à son terme une réforme fondamentale pour la justice au service des citoyens, et de cela aussi, je voulais vous remercier.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

M. Jacques Brunhes, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale le 3 juin dernier, examiné en première lecture le 29 juin par notre assemblée et le 4 novembre par le Sénat, le projet de loi relatif à l'accès au droit et à la résolution amiable des conflits nous revient en seconde lecture.

En apparence, le Sénat a sensiblement modifié le projet : sur vingt-cinq articles, onze ont été modifiés, un a été supprimé et quatre ont été ajoutés. En réalité, la plupart des modifications introduites tiennent soit à des changements rédactionnels, soit à la suppression de dispositions jugées de nature réglementaire, soit au changement de dénomination du conseil départemental chargé de la mise en oeuvre de la politique d'aide à l'accès au droit.

En effet, qu'il s'agisse de l'aide juridictionnelle, de l'aide à l'accès au droit, de l'aide à l'intervention de l'avocat en matière de médiation pénale ou des maisons de justice et du droit, les deux assemblées ont approuvé les orientations et les principes sous-tendant le projet du Gouvernement. Pour le reste, si l'opportunité de certains amendements adoptés par le Sénat pourrait être discutée, votre rapporteur estime leur portée limitée.

Dans le chapitre Ier relatif à l'aide juridictionnelle, cinq articles ne sont plus en navette, du fait de leur adoption conforme par le Sénat. Il s'agit des articles relatifs au rôle d u vice-président du bureau d'aide juridictionnelle - article 2, aux demandes d'honoraires en cas de retour à meilleure fortune par suite du gain du procès - article 4 -, au délai de perception de la contribution de l'Etat en cas de condamnation à des frais irrépétibles - article 5 - et au retrait de l'aide juridictionnelle : articles 6 et 7.

Outre des changements purement rédactionnels, le Sénat a apporté deux modifications qui peuvent être acceptées par notre assemblée.

D'une part, il a réduit d'un an à six mois le délai pendant lequel l'avocat doit justifier de l'importance et du sérieux des diligences accomplies pour bénéficier de la rétribution qui lui est due lorsque l'aide a été accordée en vue de parvenir à une transaction avant l'introduction de l'instance et qu'une transaction n'a pu être conclue : il s'agit de l'article 1er

D'autre part, il a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle, sans condition de ressources, pour les personnes formulant une demande devant les juridictions compétentes en matière de pensions militaires : il s'agit de l'article 7 bis

La plupart des modifications introduites par le Sénat dans le chapitre II du projet, relatif à l'aide à l'accès au droit, sont d'ordre rédactionnel ou tiennent à la dénomination de l'organisme chargé de développer la politique d'aide à l'accès au droit dans le département.

Alors que le projet transformait l'actuel « conseil départemental de l'aide juridique » en « conseil départemental de l'accès au droit et de la résolution amiable des litiges », le Sénat a raccourci cette appellation dans un souci de commodité, comme l'avait d'ailleurs suggéré la commission des lois en première lecture. La commission a donc proposé de se ranger à la dénomination retenue par le Sénat, soit « conseil départemental de l'accès au droit ».

Par ailleurs, le Sénat a supprimé deux alinéas de l'article 8 explicitant les buts poursuivis par la politique d'aide à l'accès au droit, à savoir la conduite d'actions destinées à favoriser le règlement amiable des litiges et l'adaptation des modalités de cette aide aux besoins des personnes en situation de grande précarité. Tout en souscrivant à ces intentions, il a estimé que ces dispositions, n'étant pas de nature législative, n'avaient pas à figurer dans la loi mais dans l'exposé des motifs du projet, ce qui est le cas, ou dans une circulaire d'interprétation de la loi.

A l'article 9, le Sénat a supprimé une disposition, jugée par lui de nature réglementaire qui, malheureusement, avait été introduite par notre assemblée pour préciser que le conseil départemental de l'accès au droit mène des campagnes de sensibilisation et de formation auprès des personnes pouvant être chargées de mettre en oeuvre l'aide à l'accès au droit. Je vous rappelle à cette occasion, madame la ministre, à quel point nous souhaitons, nous aussi, distinguer le domaine réglementaire du domaine législatif.

Enfin, des divergences subsistent quant à la composition du conseil départemental définie par l'article 9 du projet, l'Assemblée souhaitant que les chambres départementales des huissiers et des notaires y siègent en qualité de membre associé et le Sénat qu'elles conservent leur statut de membre de droit. Par ailleurs, les sénateurs ont ajouté, au titre des membres de droit, la chambre de discipline des avoués et l'association départementale des maires, alors même que des communes ou groupements de communes du département peuvent être appelés par le président à siéger avec voix consultative.

Vous avez évoqué cette question, madame la garde des sceaux, et je voudrais à mon tour en dire deux mots. Lors du débat en première lecture, le nombre des membres de droit du conseil départemental de l'accès au droit a été avancé comme étant l'une des causes des difficultés rencontrées dans la constitution du GIP. Toutefois, le Sénat n'a pas suivi le Gouvernement dans sa volonté de réduire


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significativement le nombre des membres de droit et il n'a pas suivi non plus notre assemblée. Je comprend donc, madame la ministre, vos regrets.

Mais je crois profondément que le problème essentiel pour la constitution des conseils départementaux dépend d'abord de la conviction des magistrats eux-mêmes. Aussi, il appartiendra à la chancellerie, le cas échéant par circulaire, de relayer auprès des présidents des tribunaux de grande instance des chefs-lieux des départements la volonté ferme et unanime du Parlement de voir se constituer dans les meilleurs délais l'ensemble des conseils départementaux de l'accès au droit, afin que ceux-ci puissent rapidement mettre en oeuvre une politique d'aide à l'accès au droit.

L'idée d'un bilan annuel, que vous venez d'avancer, madame la ministre, me paraît excellente. Il n'est pas possible d'accepter des disparités entre les départements.

Dans le chapitre consacré à l'aide à l'intervention de l'avocat en matière de médiation pénale, le Sénat a adopté sans modification les articles 12 et 13 étendant le champ de l'aide juridique à cette intervention.

Fort opportunément, il a complété l'article 14 du projet afin d'étendre ce dispositif financier à l'intervention de l'avocat dans le cadre des mesures prévues par l'article 12-1 de l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante : sur la base de cet article, le procureur de la République peut, en effet, proposer au mineur une mesure de réparation ou une activité d'aide à l'égard d'une victime ou dans l'intérêt de la collectivité.

Le Sénat a adopté sans modification l'article 15 procédant à diverses abrogations, a supprimé l'article 15 bis de portée rédactionnelle et a limité à cinq ans les dispositions transitoires relatives aux conseils départementaux de l'aide juridique déjà constitués lors de l'entrée en vigueur de la présente loi.

Par ailleurs, les sénateurs ont adopté deux articles additionnels prolongeant le recrutement complémentaire de magistrats administratifs et validant certaines décisions prises pour la détermination de l'ancienneté des fonctionnaires du Sénat au moment de leur titularisation.

Sous réserve de modifications rédactionnelles mineures aux articles 17A et 17, le Sénat a souscrit à l'institutionnalisation des maisons de justice et du droit, estimant très positives les expériences en cours.

Permettez-moi, madame la ministre, de vous poser une question. En première lecture, l'Assemblée nationale, puis le Sénat, ont voté l'article 17 du projet relatif à l'organisation et aux missions des maisons de justice et du droit, sous réserve d'obtenir des informations précises sur le contenu du décret d'application alors en cours d'élaboration. Je souhaite donc que vous puissiez nous apporter les précisions attendues.

Enfin, le Sénat a procédé à différentes coordinations dans les articles 18 et 19 du projet, qui modifient les deux ordonnances relatives à l'aide juridique dans la collectivité territoriale de Mayotte et dans les territoires d'outre-mer.

En conclusion, je tiens à relever le minutieux travail réalisé par l'Assemblée et sa commission des lois, ainsi que par le Sénat, sa commission des lois et son rapporteur. Cela m'a permis de proposer à notre commission des lois, qui l'a accepté, qu'il soit mis fin à la navette parlementaire.

Ainsi, six mois après son dépôt sur le bureau de l'Assemblée nationale, la promulgation de la première des quatre lois ordinaires comprises dans la réforme de la justice sera possible. Grâce à un vote conforme - et c'est ce à quoi je vous invite, mes chers collègues -, le premier texte de la réforme globale de la justice, que le Gouvernement a présenté par votre voix, madame la garde des sceaux, pourra être ainsi mis en oeuvre dans un délai remarquablement court.

Il n'est pas indifférent que ce soit la loi qui entend ouvrir à tous les portes du droit, celle qui poursuit l'objectif ambitieux d'acclimater en France une culture de compromis, celle qui permettra d'apporter des réponses

« compréhensibles, efficaces, rapides et apaisantes » à tous nos concitoyens, même à ceux qui sont en situation de grande précarité, il n'est pas indifférent, dis-je, que ce soit cette loi-là qui soit la première adoptée par le Parlement.

Je m'en félicite très vivement et je regrette d'autant plus que les médias aient prêté si peu d'attention à un texte qui favorise l'accès de tous aux droits, au rapprochement de la justice avec les citoyens, à l'efficacité de l'action judiciaire.

Avec la commission des lois, je vous invite, mes chers collègues, à adopter définitivement le texte qui nous est proposé.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.) Discussion générale

M. le président.

Dans la discussion générale, la parole est à M. Jean-Antoine Leonetti.

M. Jean-Antoine Leonetti.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le 21 janvier 1997, le Président de la République déclarait : « J'ai demandé au Gouvernement, dont c'est la responsabilité, de mettre en place une justice plus rapide, plus simple, plus efficace et plus proche des justiciables. Pour y parvenir, il conviendra d'améliorer l'organisation actuelle, d'accroître les moyens, d'alléger les procédures, de développer la conciliation et la médiation. » C'est dire que l'opposi-

tion s'inscrit dans l'axe du texte que vous proposez.

C'est dans ce cadre général posé par le Président de la République que se situe le projet de loi relatif à l'accès au droit et à la résolution amiable des conflits. Nous sommes chargés de l'examiner aujourd'hui en seconde lecture, après le Sénat.

Ce texte comporte trois volets : l'aide juridictionnelle, l'aide à l'accès au droit, enfin les maisons de justice et du droit.

L'aide juridictionnelle a vu son budget triplé et le nombre de ses bénéficiaires doublé en huit ans, preuve de son utilité et de son efficacité.

Votre volonté est d'étendre cette aide au règlement amiable des conflits avant la saisine d'un tribunal dans le but de limiter le recours au procès et de désengorger les tribunaux.

Mais, à notre avis, il y a un danger à laisser penser à nos concitoyens que c'est faute de temps ou de moyens que la négociation remplace le jugement et la transaction la sanction, car c'est alors le plus faible, le plus pauvre ou le moins instruit qui en subirait les conséquences.

Vous avez donc souhaité distinguer accès au droit et accès à la justice. Mais pour les usagers, et en particulier pour les plus démunis d'entre eux, ces subtiles distinctions n'auront d'intérêt que si, dans la pratique, ils ont le sentiment que leur droit est défendu et que la justice est rendue et respectée. Dans le cas contraire, nous verrions le procès succéder à la négociation. C'est pourquoi il


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conviendrait de prévoir un rapport d'étape afin d'évaluer l'efficacité de cette mesure. Car, madame la ministre, une bonne transaction vaut mieux qu'un mauvais procès, surtout quand on est riche.

Le Sénat a par ailleurs étendu à juste titre cette mesure aux mineurs délinquants en matière pénale, ce qui permettra sans aucun doute d'aborder avec plus d'efficacité le problème des infractions mineures commises par les jeunes dans notre pays et de les sanctionner à la mesure des délits.

Certains regretteront, non sans arguments d'ailleurs, la suppression de la « justice de paix » qui, il y a quelque temps encore, assurait un travail de conciliation à peu de frais, grâce aux juges de paix suppléants, avocats pour la plupart. Il est souvent difficile dans notre pays, et même dans le monde, de penser aux choses simples.

Le deuxième volet de votre projet concerne l'aide à l'accès au droit. Il est fondé sur le principe républicain d'égalité des citoyens devant la loi, considérant à juste titre que certains sont exclus de la justice comme ils sont exclus de notre société car ils n'ont même pas connaissance de leur droit. Ces dispositions d'amélioration « du droit au droit » ne consistent là aussi, en fait, qu'en une série d'ajustements et d'améliorations de la loi de 1991.

Seulement vingt-sept conseils départementaux avaient été mis en place à ce jour, leur fonctionnement se limitant souvent de toute évidence à un simple rôle d'information. Vous avez pensé à tort que le nombre de per-s onnes qui les composait était une gêne à leur fonctionnement. Fort opportunément, un amendement sénatorial a réintégré dans ces conseils les professionnels du droit et les maires, qui sont les garants de leur efficacité. Il semble, en effet, indispensable que ces derniers siègent au sein de ces conseils au moins au même titre que des associations qui ne sont pas à l'abri de partialité et sont, en tout cas, totalement dénuées de légitimité populaire. Depuis longtemps, ce sont les maires, notamment dans les villages, qui arrivent à résoudre bien des litiges sans avoir recours aux tribunaux, en particulier les litiges portant sur des problèmes de voisinage.

Le dernier volet concerne les maisons de justice et du droit. Celles-ci existent déjà en dehors du cadre législatif et ont rendu d'énormes services, surtout dans les quartiers difficiles. Il était donc légitime qu'elles soient institutionnalisées.

La maison de justice paraît moins solennelle que le palais du même nom, mais les mots suffisent-ils à rendre la justice plus proche, plus humaine ou plus efficace ?

M. le président.

Pensez à conclure, monsieur Leonetti.

M. Jean-Antoine Leonetti.

Je conclus. En première lecture, nous avions exprimé nos inquiétudes quant au fonctionnement de ces maisons de la justice. Le Sénat a également fait part de ses préoccupations de voir se développer une justice au rabais, une justice pour les pauvres.

Nous vous demandons de nous rassurer sur ce point et de préciser vos intentions ultérieures, dès lors que la loi est vague et que le décret n'est pas encore, bien entendu, appliqué.

Nous ne pouvons que regretter que, cette fois encore, il soit fait appel aux collectivités territoriales pour aider à la mise en place de ces maisons.

Ces modifications apportées par le Sénat ont certes considérablement amélioré le texte, mais il ne s'agit que d'une série d'aménagements limités de la loi existante, dont la portée dépendra essentiellement de la volonté du Gouvernement de dégager les moyens budgétaires adéquats. Compte tenu du manque d'ambition du projet et de l'incertitude quant aux moyens budgétaires alloués, le groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance s'abstiendra.

M. Thierry Mariani.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Georges Hage.

M. Georges Hage.

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, ce projet de loi tend à permettre aux plus démunis de faire valoir leurs droits en justice. Il prolonge la loi contre les exclusions, conforte l'exercice de la citoyenneté et complète l'aide juridictionnelle.

Les maisons de justice et du droit et, dans chaque d épartement, les conseils d'aide juridique devraient contribuer à corriger les effets de la précarité, qui frappe notamment les exclus de la société, en particulier dans les litiges qui en sont directement la conséquence : saisies, expulsions, dettes liées au chômage. Les maisons de justice, lieu de médiation, pourront assurer une justice accessible et plus proche.

Le vrai problème réside dans la mise en oeuvre concrète, effective, d'un réseau de maisons de justice. Si quelque chose est à craindre, c'est l'inégalité de l'apparition sur le territoire de ces maisons de justice et, par voie de conséquence, une inégalité des individus dans l'accès au droit. Les collectivités locales ne sauraient assumer en totalité une charge qui relève d'abord du budget de l'Etat,...

M. Thierry Mariani.

Absolument !

M. Georges Hage.

... puisque la justice, comme la sécurité intérieure ou extérieure de l'Etat, sont des attributs directs de la souveraineté.

S'agissant de l'aide juridictionnelle, j'ai déjà eu l'occasion, notamment lors de la discussion du projet de budget, de dire l'inconvénient des plafonds de ressources trop faibles.

Voilà les quelques brèves remarques que je souhaitais exprimer sur ce projet que le groupe communiste, attentif à la réforme en cours et qui s'est plus longuement expliqué en première lecture, votera.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, si nous souscrivons, dans leurs grandes lignes, aux motivations qui fondent ce projet de loi, il convient dès à présent de redire combien il est regrettable que cette discussion intervienne de manière isolée - en dehors d'une réflexion globale sur la réforme de la justice, souhaitée par le Président de la République. Les dysfonctionnements de la justice doivent être régulés dans une vision d'ensemble afin de proposer des solutions cohérentes et lisibles par tous.

Le texte que vous soumettez à notre discussion, madame la garde des sceaux, traite de deux questions essentielles pour les justiciables : d'une part, l'accès au droit, d'autre part, la résolution amiable des conflits. Ce sont là deux questions essentielles, car force est de constater que notre société connaît une évolution comparable à celle des sociétés anglo-saxonnes, qui appréhendent de plus en plus les rapports humains, sociaux et professionnels sous un angle juridique.

Dans ce contexte de réflexe contentieux, d'inflation des affaires, notamment civiles, et face à l'engorgement des tribunaux qui en résulte, nombre de nos concitoyens se


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trouvent démunis. Cette dérive juridique de notre société et la multiplication des procédures complexes qui en découlent posent le problème crucial de l'égalité d'accès de tous les citoyens à la justice. En effet, trop nombreux sont nos concitoyens qui ne parviennent pas à faire valoir leurs droits, tant du fait d'un manque de moyens qu'en raison d'une insuffisance d'informations sur les démarches ou procédures qui s'offrent à eux. Se profile ainsi le danger d'une justice à deux vitesses.

L'enjeu de la réforme est donc d'assurer à chacun un droit accessible à tous, conjugué au développement de modes alternatifs de résolution amiable des conflits, plus rapides et moins onéreux. Malheureusement, au-delà des bonnes intentions manifestes que vous affichez, nous pouvons d'ores et déjà constater que votre texte pèche par des lacunes flagrantes quant aux mesures proposées et aux moyens que vous entendez y affecter.

En ce qui concerne, tout d'abord, l'accès au droit en termes de moyens financiers, votre projet de loi prétend améliorer le dispositif d'attribution de l'aide juridictionnelle résultant de la loi du 10 juillet 1991.

Le coût d'accès à la justice constitue une réelle contrainte à l'accès au droit. Une contrainte que les réponses apportées par ce projet de loi ne sauraient - hélas ! - desserrer tant elles apparaissent insuffisantes et incomplètes. En effet, vos propositions, madame la ministre, portent sur le fonctionnement des bureaux de l'aide juridictionnelle et éludent le problème essentiel, à savoir le plafond de revenus qui conditionne l'attribution de l'aide juridictionnelle. Or, ainsi que le soulignait le rapport établi en première lecture, la faiblesse des plafonds - 4 901 francs pour l'aide juridictionnelle totale et 7 353 francs pour l'aide juridictionnelle partielle -

« écarte du bénéfice de l'aide juridictionnelle un pourcentage important de la population ». Entendons par là, mes chers collègues, la grande majorité de nos concitoyens.

Ces classes moyennes modestes qui, au prix d'innombrables efforts et malgré les ponctions fiscales à outrance dont elles sont les principales victimes, parviennent à vivre correctement mais sans pour autant pouvoir s'offrir une assistance juridique. Le problème de fond, à savoir le coût rédhibitoire de l'accès au droit pour la majeure partie des Français, étant largement occulté par votre texte, la révision du dispositif de l'aide juridictionnelle que vous nous présentez n'aura donc de réforme que le nom.

S'agissant, ensuite, de l'accès au droit en vue d'une meilleure information des citoyens sur les droits qui leur sont ouverts, sur les obligations qui leur incombent et sur les procédures qui peuvent être mises en oeuvre pour telle ou telle affaire, nous touchons aux conditions essentielles du fonctionnement équitable de la justice.

Tout le monde ne dispose pas d'une situation sociale aisée ou du bagage intellectuel nécessaire pour accéder à une information et à une assistance juridiques. Les personnes les plus démunies ou les moins averties en font malheureusement les frais.

Les myriades de textes et le labyrinthe des procédures s'apparentent trop souvent à un parcours du combattant qui décourage ceux qui n'ont pas les atouts nécessaires. Il y a là une injustice flagrante que nous ne pouvons pas, que nous ne devons pas tolérer et à laquelle nous devons remédier sans tarder. Alors, pour que nul ne soit censé ignorer la loi, notre devoir est, d'une part, de porter le droit à la connaissance de tous au nom du principe fondamental d'égalité et, d'autre part, de le rendre plus lisible, plus palpable. Là encore, votre projet de loi, madame la ministre, ne tient pas ses promesses et n'apportera pas les changements attendus.

Vous prétendez donner une nouvelle impulsion à l'aide à l'accès au droit, mais vous vous contentez de colmater quelques lacunes des conseils départementaux de l'aide juridique créés en 1991 et dont le bilan à ce jour s'avère peu satisfaisant. C'est ainsi que vous prévoyez la simplification des modalités de création de ces conseils, la définition de nouveaux partenaires obligatoires ou complémentaires et le développement des modes de règlements à l'amiable des conflits. Aussi louables soient-elles, je doute que ces mesures suffisent à mieux informer nos concitoyens sur leurs droits et obligations. En effet, votre texte manque cruellement de propositions quant aux mesures susceptibles de promouvoir une justice plus proche de nos concitoyens, ainsi que je l'avais suggéré au nom du groupe RPR en première lecture.

Pourtant, il est indispensable d'élargir, d'une part, le champ de diffusion du droit au public au-delà des inst ances juridiques traditionnelles, sans pour autaunt brouiller les cartes entre professionnels et concours juridiques extérieurs, d'autre part, de mener une action d'information en amont, dans une démarche pédagogique d'initiation au droit. L'amélioration de l'accès au droit est d'autant plus souhaitable qu'elle permettrait, grâce à une meilleure information, d'évitr la tentation procédurière et contentieuse qui tend à s'accroître et d'orienter les justiciables vers des modes de règlement amiable des litiges, plus légers et moins onéreux.

J'en viens au deuxième volet du projet de loi : le règlement amiable des conflits. Face à l'inflation des affaires, notamment civiles, qui engorgent les tribunaux dont les moyens et les effectifs ne suivent pas, quant à eux, une courbe ascendante, le développement des modes alternatifs de résolution amiable des conflits s'impose comme une évidence. A ce titre, j'ai noté avec intérêt le débat que vous avez eu au Sénat à propos de l'élargissement de la clause compromissoire en matière civile qui pourrait constituer une avancée certaine en matière de règlement n on contentieux des conflits. Aussi, je vous serais reconnaissant de bien vouloir me préciser votre position sur cette proposition. Nos concitoyens doivent avoir l'assurance du bien-fondé d'une résolution amiable d'un conflit, en sachant qu'ils bénéficient ainsi d'un dispositif approprié à leur situation, préférable à une procédure longue et inadaptée au cas précis qui les intéresse. En aucun cas, il ne doivent ressentir ce mode de règlement des litiges comme une justice au rabais pour ceux qui n'auraient pas les moyens de s'engager dans un procès.

Le développement de la médiation doit par conséquent être accompagné des moyens nécessaires à son efficacité et à sa lisibilité. Il s'agit là du véritable nerf de la guerre.

Or, sur ce point, votre texte ne garantit rien. De plus, il est indispensable de préserver le principe de sécurité juridique, insuffisamment pris en compte par votre texte. En effet, nous devons dès à présent nous interroger sur l'articulation des missions confiées, d'une part, aux conseils départementaux de l'accès au droit, d'autre part, à d'autres organismes comme les maisons de la justice et du droit.

Sans un effort de clarté de votre part, votre texte, madame la ministre, risque d'accroître la confusion des justiciables. Nos concitoyens doivent pouvoir disposer de tous les éléments d'information nécessaires pour déterminer les cas qui relèvent d'un juge professionnel et ceux qui peuvent être soumis à l'appréciation d'autres formes de justice, comme la médiation, sans subir un quelconque préjudice sur le plan de la sécurité juridique. L'incohérence de votre méthode, conjuguée à de multiples


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incertitudes quant aux modalités concrètes d'application et de financement des mesures, font que le groupe du RPR s'abstiendra sur ce texte.

M. le président.

La parole est à M. André Vallini.

M. André Vallini.

Rapprocher la justice des citoyens, tel est l'objectif du projet de loi qui nous revient aujourd'hui et qui vise à faciliter l'accès au droit et à favoriser les modes amiables de résolution des litiges. C'est un texte moderne, puisqu'il prend la mesure de l'évolution de notre société où la régulation sociale se fait aussi, et de plus en plus, par le droit. Son aspect essentiel réside en effet dans l'égalité des justiciables devant l'accès au droit, quelles que soient leurs ressources financières. Ils pourront ainsi faire valoir leurs droits avec le concours d'un avocat, sans obligatoirement passer devant un tribunal.

Cela passe par la réorganisation et le développement des conseils départementaux de l'aide juridique, par le développement de la médiation pénale, qui est une réponse adaptée, moderne et rapide à tous les problèmes de dégradations, de violences légères - ce que l'on appelle aujourd'hui les « incivilités » -, qui se multiplient, mais aussi aux contentieux familiaux ou de voisinage. Enfin, cela passe aussi par le développement des maisons de justice et du droit sur tout le territoire national.

Le texte qui nous revient ce soir a été un peu modifié par le Sénat. Il l'a été dans un sens favorable, selon nous, s'agissant du délai imparti à l'avocat pour justifier de ses diligences et bénéficier d'une rémunération en cas d'échec de la tentative de transaction. Ce délai a été réduit par le Sénat de un an à six mois, ce qui nous paraît encore raisonnable.

En revanche, d'autres modifications apportées par la Haute Assemblée nous paraissent beaucoup moins judidicieuses. La première concerne la finalité de l'accès au droit. Le Sénat a en effet décidé de supprimer des mentions importantes qui éclairaient le but et même l'esprit d'un accès au droit élargi. Il a ainsi supprimé la phrase :

« Les actions d'aide à l'accès au droit sont conduites de manière à favoriser le règlement amiable des litiges » ou encore la phrase : « Les modalités d'aide à l'accès au droit sont adaptées aux besoins des personnes en situation de grande précarité. » Cette suppression est d'autant plus

regrettable que cette disposition faisait écho à la loi contre les exclusions, que nous avons votée il y a quelques semaines.

Enfin, le Sénat a modifié la dénomination du conseil départemental de l'accès au droit et de la résolution amiable des litiges, qui n'est plus que le conseil départemental de l'accès au droit. Là encore, c'est dommage.

Vous avez dit, madame la ministre, qu'il s'agissait peutêtre d'une orthodoxie juridique. Je parlerai plutôt de formalisme un peu désuet, de frilosité, voire d'un conservatisme coutumier à la Haute Assemblée.

Ce qui compte, en tout cas, c'est l'application concrète que nous allons faire de cette loi dans les mois et les années qui viennent, d'abord par les décrets d'application que vous allez prendre, puis par la pratique quotidienne qui sera celle des fameux conseils départementaux de l'accès au droit.

L a dernière modification apportée par le Sénat concerne précisément ces conseils départementaux. Elle est plus importante, puisqu'elle concerne leur composition. Le Sénat a complété la liste de leurs membres de droit par l'association départementale des maires, les chambres départementales des huissiers de justice et des notaires, au risque de les alourdir un peu. Or l'expérience de 1991 nous montre que nous avons raison de craindre une telle lourdeur. En tout cas, il reviendra demain aux huissiers et aux notaires de nous démontrer que nos réticences n'étaient pas fondées. Nous verrons bien dans un an, madame la ministre, lors du bilan que vous établirez, si nous avions raison d'être réticents.

Au total, au-delà des modifications apportées par le Sénat, et que nous regrettons, nous voterons ce texte non seulement parce qu'il est attendu par les Français, mais aussi parce qu'il répond aux trois objectifs que s'était fixés le Gouvernement et qui sont aussi les nôtres : une justice moins complexe et plus simple, en facilitant la connaissance de leurs droits par les citoyens ; une justice plus rapide et plus souple, en facilitant les modes de règlement amiable des litiges ; enfin, une justice moins chère et plus accessible, notamment aux plus modestes, en rationalisant les procédures de l'aide juridictionnelle pour en faciliter l'utilisation par tous les justiciables.

Madame la ministre, vous avez rappelé tout à l'heure que votre réforme de la justice était globale, qu'elle comportait trois volets, trois « piliers », comme on a pris l'habitude de le dire : une justice impartiale - c'est la réforme du CSM en cours et celle à venir des rapports entre la chancellerie et le parquet ; une justice plus respectueuse des libertés - c'est la réforme de la présomption d'innocence, que nous allons bientôt examiner, au début de 1999 ; enfin, une justice accessible à tous et c'est l'objet de cette loi importante, qui est la première que nous allons voter, dans des délais records, comme vous l'avez rappelé, ainsi que le rapporteur, M. Bruhnes.

Cette réforme de la justice est attendue par les Français, voulue par le Gouvernement et soutenue par le groupe socialiste. Elle va faire ce soir un grand pas et nous nous en réjouissons. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. Claude Goasguen.

M. Claude Goasguen.

Madame la garde des sceaux, de tous les projets de loi qui composent votre programme de réforme de la justice, c'est avec ce projet de loi relatif à l'accès au droit et à la résolution amiable des conflits que vous avez pris le moins de risques. En effet, le principe qui guide ce texte - garantir l'accès de tous au droit sans forcément passer par le juge - ne peut être que consensuel.

Nous approuvons sans réserve la démarche d'extension du champ d'application de l'aide juridictionnelle au règlement amiable des conflits avant la saisine d'une juridiction. Ainsi les justiciables les plus démunis ne devront-ils pas systématiquement engager des procédures juridictionnelles longues pour pouvoir bénéficier de l'aide quand leur litige pourra être réglé par une simple transaction amiable. C'est d'ailleurs parce que son objectif est partagé que votre texte a été adopté à l'unanimité par le Sénat, dont les modifications ont à leur tour été maintenues par notre commission des lois.

Ces modifications ne changent pas substantiellement votre projet de loi, mais certaines d'entre elles le complètent très utilement. Ainsi en est-il de l'extension du bénéfice de l'aide juridictionnelle, sans condition de ressources, pour les personnes formulant une demande devant les juridictions compétentes en matière de pensions militaires, ou encore de l'extension de l'aide à l'intervention de l'avocat en matière de médiation pénale à la mise en oeuvre par le parquet de la procédure de réparation spécifique aux mineurs.


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Nous étions par ailleurs favorables, dès la première lecture, au maintien de la qualité de membre de droit des conseils départementaux de l'aide juridique des huissiers et des notaires, ainsi qu'à la simplification de la dénomination de ces conseils.

Face à cet unanimisme, et prenant en compte les améliorations au texte apportées par les sénateurs, je vous annonce dès à présent que le groupe Démocratie libérale et Indépendants, qui n'avait pas voté pour ce projet de loi lors de la première lecture, s'abstiendra en deuxième lecture. Nous ne pouvons en effet répondre favorablement à ce texte dans la mesure où nous le trouvons par certains aspects, encore décevant. En première lecture déjà, nous avions souligné à quel point ce projet de loi, qui ne vise qu'à améliorer des mécanismes et des procédures existants, apparaissait peu ambitieux et insuffisamment novateur.

Le dispositif d'aide à l'accès au droit se limite à la modification de la composition des centres départementaux de l'accès au droit et à la définition d'une mission générale de recensement des dispositifs existants pour en assurer la promotion. Les dispositifs de rémunération des avocats sont loin d'être suffisamment incitatifs. Les maisons de justice et du droit trouvent une reconnais-s ance juridique, certes, mais leur création n'est aucunement obligatoire.

Nous regrettons par-dessus tout l'absence de précisions sur le financement à long terme de l'aide juridique qui posera de très sérieux problèmes. Cette année encore, la dotation budgétaire de l'aide juridique augmente, poursuivant la même progression depuis 1991. Le montant juridique a en effet triplé depuis 1991, passant de 401 millions de francs à 1228,5 millions de francs en 1997. La progression de 17,5 % prévue dans le projet de budget pour 1999 est certes nécessaire, mais elle ne réglera pas le problème de fonds du financement de l'aide juridique. Nous vivons, en effet, dans une société qui judiciarise l'ensemble des rapports sociaux. De plus, la crise économique ravive souvent le besoin de justice de nos concitoyens et il est évident que nous irons, dans les années à venir, vers les croissances budgétaires exponentielles dans ce domaine. L'Etat aura-t-il les moyens d'assurer la prise en charge totale de l'aide juridique ? Un débat est nécessaire sur cette question, qui doit prendre en compte la proposition que nous avons faite il y a quelques années d'instituer un système supplém entaire d'assurance de protection juridique. Nous regrettons que votre projet de loi soit encore une occasion de ne pas tenir ce débat essentiel pour la sécurité à venir de nos concitoyens et la survie de notre justice de demain. C'est la raison pour laquelle le groupe Démocratie libérale et Indépendants s'abstiendra.

M. le président.

La parole est à à M. Alain Tourret.

M. Alain Tourret.

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, pour l'essentiel, ce projet de loi modifie la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Il institutionnalise par ailleurs les maisons de justice et du droit.

Ce projet permettra de renforcer la protection juridique en incluant la présence des conseils lors de la rédaction et de la conclusion des actes juridiques. C'est une excellente chose. Sera ainsi renforcé l'accès au droit et, par là même, la prévention des litiges. Une telle initiative, particulièrement heureuse, est saluée par les professionnels du droit.

N otre société devient chaque jour un peu plus complexe : les ajouts législatifs, la superposition des textes et les incertitudes juridiques rendent indispensable la présence des professionnels du droit. Or tout a un coût et les plus démunis ne pouvaient jusqu'ici avoir recours aux avocats lors de la rédaction des contrats, pas plus que lors des tentatives de médiation. Prévention et médiation seront donc renforcées, et c'est particulièrement heureux.

Le contrôle de l'importance et du sérieux des diligences de l'avocat permettra, nous l'espérons, d'éviter tout dévoiement. Permettez, cependant, quelques observations à ce sujet.

Peut-être faudra-t-il réfléchir aux avocats qui pourront ainsi présenter des demandes dans le cadre de l'aide juridique. Nombreux sont, en effet, madame la ministre, les magistrats et, parmi eux, les plus importants, les chefs de cour, qui souhaitent éviter la multiplicité des incidents devant les cours d'appel, des procédures parfois injustifiées, souvent inutiles, mais permettant d'obtenir des indemnisations au titre de l'aide juridique et aboutissant à compliquer les procès au détriment des droits du justiciable.

La paupérisation de la profession d'avocat est une réalité. L'aide juridictionnelle devient, dès lors, une tente à oxygène et conduit de manière rampante à une dépendance, parfois totale, des avocats vis-à-vis de l'Etat. Le caractère forfaitaire de l'aidene permet pas, au demeurant de contrôler l'opportunité des actions ni les efforts et l'investissement personnel des conseils. Il s'agit là d'un risque important de dévoiement et il faut y prendre garde.

M. Jean-Antoine Leonetti.

Très bien !

M. Alain Tourret.

Il serait donc particulièrement judicieux, madame la garde des sceaux, qu'un rapport nous éclaire sur les incidences de l'aide juridique. Faute de quoi, je le crains, nous n'arriverons pas à résoudre le problème posé par l'allongement des procédures, leur inutilité faisant courir, par là même un certain risque aux justiciables.

Mais ces observations sont bien sûr secondaires par rapport aux excellents objectifs de cette loi, à savoir le renforcement de la médiation et de la résolution amiable des conflits. Madame la garde des sceaux, nous voterons donc sans hésitation votre projet.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme la garde des sceaux.

Mesdames, messieurs les députés, au terme de ce débat, je tiens à remercier les différents orateurs de leur soutien, qui a pris des formes diverses.

Même s'ils se sont exprimés de façon nuancée, je remercie les députés de la majorité qui sont intervenus au nom de leur groupe, pour avoir affirmé un soutien sans réserve à ce projet de loi. Certains ont posé des questions.

J'ai bien noté celles de M. Tourret, et je vais répondre dans un instant à celle posée par M. Brunhes, le rapporteur.

Je remercie aussi les représentants des groupes de l'opposition. Il est en effet important que, à propos d'un texte de ce genre, l'Assemblée nationale manifeste sur tous les bancs le souci de voir progresser la justice au quotidien.


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ERREUR Je remercie spécialement André Vallini qui a remplacé Gérard Gouzes au pied levé. Sa connaissance, évidemment excellente, de nos projets de réforme lui avait permis de le faire brillamment.

M. Brunhes m'a donc interrogée sur le contenu du décret. Le décret fixe les modalités de création et de fonctionnement des maisons de la justice et du droit : la convention constitutive ; le type de partenariat avec les municipalités ; l'organisation d'une structure de permanence, s'il faut un secrétariat ; les modalités d'intervention des différents acteurs, que ce soit les parquets, les associations des maires, les médiateurs civils ou d'autres personnes qui souhaiteraient s'associer. Telles sont les dispositions principales que comprendra ce décret.

Après le vote unanime du Sénat, je me réjouis que vous vous apprêtiez à voter ce texte à une très forte majorité. Je ferai en sorte que les décrets d'application soient pris aussi vite que possible, pour que la loi puisse entrer en application très rapidement.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La discussion générale est close.

Le texte dont nous sommes saisis ne fait l'objet d'aucun amendement.

J'en donne lecture : Article 1er

M. le président.

« Art. 1er I, I bis et II. Non modifiés.

« III. L'article 39 de la même loi est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Lorsque l'aide a été accordée en vue de parvenir à une transaction avant l'introduction de l'instance et qu'une transaction n'a pu être conclue, le versement de la rétribution due à l'avocat, dont le montant est fixé par décret en Conseil d'Etat, est subordonné à la justification, avant l'expiration du délai de six mois qui suit la décision d'admission, de l'importance et du sérieux des diligences accomplies par ce professionnel.

« Lorsqu'une instance est engagée après l'échec de pourparlers transactionnels, la rétribution versée à l'avocat à raison des diligences accomplies durant ces pourparlers s'impute, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, sur celle qui lui est due pour l'instance. »

Article 3

M. le président.

« Art. 3. - L'article 22 de la même loi est ainsi rédigé :

« Art.

22. Le président du bureau ou de la section compétente ou, en cas d'absence ou d'empêchement du président, le vice-président peut statuer seul sur les demandes ne présentant manifestement pas de difficulté sérieuse.

« Le président ou, le cas échéant, le vice-président peut, en outre, procéder aux mesures d'investigation nécessaires et rejeter la demande si le demandeur, sans motif légitime, ne communique pas dans le délai imparti les documents ou les renseignements demandés. »

Article 7 bis

M. le président.

« Art.

7 bis. I. Il est ajouté, au titre V du livre Ier (partie Législative) du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, après l'article L.

104, un article L.

104-1 ainsi rédigé :

« Art.

L. 104-1. Les dispositions de la première partie de la loi no 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique sont applicables de plein droit, sans condition de ressources, aux personnes qui formulent une demande en application du présent code devant le tribunal départemental des pensions, la cour régionale des pensions et le Conseil d'Etat.

« Les modalités de rétribution de l'avocat désigné en application de ladite loi sont fixées par décret en Conseil d'Etat. »

« II. A la fin de l'article 77 de la loi no 91-647 du 10 juillet 1991 précitée, les mots : ", à l'exception de son article 36" sont supprimés. »

Article 8

M. le président.

« Art. 8. - Le titre Ier de la deuxième partie de la même loi est intitulé : "Définition de l'aide à l'accès au droit" et comprend l'article 53 ainsi rédigé :

« Art.

53. L'aide à l'accès au droit comporte :

« 1o L'information générale des personnes sur leurs droits et obligations ainsi que leur orientation vers les organismes chargés de la mise en oeuvre de ces droits ;

« 2o L'aide dans l'accomplissement de toute démarche en vue de l'exercice d'un droit ou de l'exécution d'une obligation de nature juridique et l'assistance au cours des procédures non juridictionnelles ;

« 3o La consultation en matière juridique ;

« 4o L'assistance à la rédaction et à la conclusion des actes juridiques.

« Les conditions dans lesquelles s'exerce l'aide à la consultation en matière juridique sont déterminées par le conseil départemental de l'accès au droit en conformité avec les règles de déontologie des personnes chargées de la consultation et dans le respect des dispositions du titre II de la loi no 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques. »

Article 9

M. le président.

« Art. 9. - Le titre II de la deuxième partie de la même loi est intitulé : "Mise en oeuvre de l'aide à l'accès au droit" et comprend les articles 54 à 60 ainsi rédigés :

« Art.

54. Dans chaque département, il est institué un conseil départemental de l'accès au droit, chargé de recenser les besoins, de définir une politique locale, de dresser et diffuser l'inventaire de l'ensemble des actions menées. Le conseil est saisi, pour information, de tout projet d'action préalablement à sa mise en oeuvre et, pour avis, de toute demande de concours financier de l'Etat préalablement à son attribution. Il procède à l'évaluation de la qualité et de l'efficacité des dispositifs auxquels il apporte son concours.

« Il peut participer au financement des actions poursuivies.

« Il établit chaque année un rapport sur son activité.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 9 DÉCEMBRE 1998

« Art.

55. Le conseil départemental de l'accès au droit est un groupement d'intérêt public auquel sont applicables les dispositions de l'article 21 de la loi no 82610 du 15 juillet 1982 d'orientation et de programmation pour la recherche et le développement technologique de la France.

« Il est constitué :

« 1o De l'Etat ;

« 2o Du département ;

« 3o De l'association départementale des maires ;

« 4o De l'ordre ou, si le département compte plus d'un barreau, de l'un des ordres des avocats établis dans le département choisi par leurs bâtonniers respectifs ;

« 5o De la caisse des règlements pécuniaires de ce barreau ;

« 6o De la chambre départementale des huissiers de justice ;

« 7o De la chambre départementale des notaires ;

« 8o Dans les départements sièges d'une cour d'appel, de la chambre de discipline des avoués près cette cour ;

« 9o A Paris, de l'ordre des avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ;

« 10o D'une association oeuvrant dans le domaine de l'accès au droit, désignée conjointement par le président du tribunal de grande instance du chef-lieu du département et les membres mentionnés aux 2o à 9o , sur la proposition du préfet.

« Le conseil départemental est présidé par le président du tribunal de grande instance du chef-lieu du département, qui a voix prépondérante en cas de partage égal des voix.

« Le procureur de la République près le tribunal de grande instance du chef-lieu du département exerce la fonction de commissaire du Gouvernement.

« La convention constitutive détermine les modalités de participation des membres au financement des activités ou celles de l'association des moyens de toute nature mis par chacun à la disposition du groupement, ainsi que les conditions dans lesquelles ce dernier peut accueillir en son sein d'autres membres que ceux mentionnés au 1o à 10o

« Art.

56. Peuvent être appelés par le président à siéger au conseil départemental de l'accès au droit, avec voix consultative, des représentants :

« 1o Des communes ou groupements de communes du département ;

« 2o et 3o Supprimés.

« 4o Si le département compte plus d'un barreau, des ordres des avocats et de leurs caisses des règlements pécuniaires n'ayant pas la qualité de membres en application de l'article 55.

« Le président peut également appeler à siéger, avec voix consultative, toute personne physique ou morale qualifiée.

« Art.

57. Le conseil départemental de l'accès au droit reçoit et répartit les ressources définies à l'article 68

Il peut conclure des conventions :

« 1o Avec des membres des professions juridiques ou judiciaires réglementées ou leurs organismes professionnelles ou avec des personnes répondant aux exigences du titre II de la loi no 71-1130 du 31 décembre 1971 précitée, en vue de définir les modalités de leur participation aux actions d'aide à l'accès au droit ;

« 2o Avec les centres communaux d'action sociale ou tout autre organisme public ou privé, en vue d'obtenir leur concours pour la mise en oeuvre de l'aide à l'accès au droit.

« Art.

58. Le conseil départemental de l'accès au droit décide du montant des frais de consultation qui peuvent rester à la charge du bénéficiaire selon un barème qu'il établit en fonction des ressources de l'intéressé et de la nature de la consultation.

« Art.

59. Le bénéfice des mesures prises par les conseils départementaux de l'accès au droit ne peut être refusé aux Français établis hors de France en raison de leur résidence à l'étranger.

« Les questions relatives à l'aide à l'accès au droit intéressant les Français établis hors de France relèvent, en l'absence de lien avec un autre département, du conseil départemental de l'accès au droit de Paris.

« Art.

60. Le ministre des affaires étrangères et les chefs des postes diplomatiques ou consulaires exercent leurs attributions en matière d'aide à l'accès au droit pour les Français établis hors de France, concurremment, le cas échéant, avec les autres aides ou mesures d'assistance prévues par les conseils départementaux de l'accès au droit. »

Article 10

M. le président.

« Art. 10. - I. - A la fin de l'article 69 de la même loi, les mots : "le conseil départemental de l'aide juridique" sont remplacés par les mots : "le conseil départemental de l'accès au droit".

« II. - Après l'article 69 de la même loi, il est inséré un article 69-1 ainsi rédigé :

« Art.

69-1. La rétribution des personnes assurant des consultations juridiques organisées dans le cadre de la deuxième partie de la présente loi fait l'objet d'une tarification dans des conditions prévues par décret. »

Article 11

M. le président.

« Art. 11. - I. - Au dernier alinéa de l'article 29 de la même loi, les mots : "conseil départemental de l'aide juridique" sont remplacés par les mots : "conseil départemental de l'accès au droit".

« II. Au premier alinéa de l'article 65 de la même loi, les mots : "conseils départementaux de l'aide juridique" sont remplacés par les mots : "conseils départementaux de l'accès au droit".

« II bis. Dans le dernier alinéa de l'article 68 de la même loi, les mots : "conseil départemental de l'aide juridique" sont remplacés par les mots : "conseil départemental de l'accès au droit".

« III. Au 10o de l'article 70 de la même loi, les mots : "conseils départementaux" sont remplacés par les mots : "conseils départementaux de l'accès au droit". »

Article 14

M. le président.

« Art. 14. - Il est inséré, après l'article 64-1 de la même loi, un article 64-2 ainsi rédigé :

« Art.

64-2. L'avocat assistant, au cours des mesures prévues au septième alinéa de l'article 41 du code de procédure pénale ou à l'article 12-1 de l'ordonnance no 45174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante et


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 9 DÉCEMBRE 1998

ERREUR ordonnées par le procureur de la République, la personne mise en cause ou la victime qui remplissent les conditions pour bénéficier de l'aide juridictionnelle a droit à une rétribution fixée par décret en Conseil d'Etat.

« Un décret en Conseil d'Etat détermine les modalités selon lesquelles l'aide est accordée par le président ou le vice-président du bureau d'aide juridictionnelle. »

Article 15 bis

M. le président.

Le Sénat a supprimé l'article 15 bis.

Article 16

M. le président.

« Art. 16. - Les conseils départementaux de l'aide juridique constitués à la date d'entrée en vigueur de la présente loi peuvent poursuivre leurs activités dans les conditions prévues par la deuxième partie de la loi no 91-647 du 10 juillet 1991 précitée dans sa rédaction antérieure à la présente loi, jusqu'à l'expiration de la durée fixée dans leur convention constitutive et au plus tard jusqu'à l'expiration d'un délai de cinq ans à compter de la promulgation de la présente loi. »

Article 16 bis

M. le président.

« Art. 16 bis. - I. - L'article 7 de la loi no 87-1127 du 31 décembre 1987 portant réforme du contentieux administratif est ainsi modifié :

« 1o Dans la première phrase, les mots : "jusqu'au 31 décembre 1999" sont remplacés par les mots : "jusqu'au 31 décembre 2004" ;

« 2o Au début de la seconde phrase, les mots : "Pour les années 1995, 1996 et 1997" sont remplacés par les mots : "Pour les années 2000, 2001 et 2002". »

« II. A l'article 8 de la loi no 87-1127 du 3 1 décembre 1987 précitée, les mots : "jusqu'au 31 décembre 1999" sont remplacés par les mots : "jusqu'au 31 décembre 2004". »

Article 16 ter

M. le président.

« Art. 16 ter. - Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, sont validées les décisions limitant, pour la détermination de l'ancienneté des fonctionnaires du Sénat au moment de leur titularisation, la prise en compte de leurs services militaires au service national obligatoire ainsi qu'aux services de guerre et assimilés. »

Article 17 A

M. le président.

« Art. 17 A. - Il est inséré dans le livre VII du code de l'organisation judiciaire un titre XI ainsi rédigé :

«

TITRE XI

« ASSISTANCE DU JUGE PAR LE SECRÉTAIRE DE LA JURIDICTION

« Néant » Article 17

M. le président.

« Art. 17. - Il est inséré, dans le livre VII du code de l'organisation judiciaire, un titre XII ainsi rédigé :

«

TITRE

XII

« MAISONS DE JUSTICE ET DU DROIT

« Art.

L. 7-12-1-1. Il peut être institué des maisons de justice et du droit, placées sous l'autorité des chefs du tribunal de grande instance dans le ressort duquel elles sont situées.

« Elles assurent une présence judiciaire de proximité et concourent à la prévention de la délinquance, à l'aide aux victimes et à l'accès au droit.

« Les mesures alternatives de traitement pénal et les actions tendant à la résolution amiable des litiges peuvent y prendre place.

« Art.

L. 7-12-1-2. Non modifié.

« Art.

L. 7-12-1-3. Le présent titre est applicable dans les territoires d'outre-mer et dans la collectivité territoriale de Mayotte.

« Dans les territoires d'outre-mer et dans les collectivités territoriales de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon, les maisons de justice et du droit sont placées sous l'autorité des chefs du tribunal de première instance dans le ressort duquel elles sont situées. »

Article 18

M. le président.

« Art.

18. L'ordonnance no 92-1143 du 12 octobre 1992 relative à l'aide juridictionnelle dans la collectivité territoriale de Mayotte est ainsi modifiée :

« 1o Non modifié ;

« 1o bis Après l'article 17, il est inséré un article 17-1 ainsi rédigé :

« Art.

17-1. Le président du bureau d'aide juridictionnelle peut statuer seul sur les demandes ne présentant manifestement pas de difficulté sérieuse.

« Il peut, en outre, procéder aux mesures d'investigation nécessaires et rejeter la demande si le demandeur, sans motif légitime, ne communique pas dans le délai imparti les documents ou les renseignements demandés. »

« 2o Non modifié ;

« 3o L'article 26 est ainsi rédigé :

« Art.

26. Pour toute affaire terminée par une transaction conclue avec le concours de l'avocat ou de la personne agréée avant ou pendant l'instance, il est alloué à l'auxiliaire de justice une rétribution égale à celle due par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle lorsque l'instance s'éteint par l'effet d'un jugement.

« Lorsque l'aide a été accordée en vue de parvenir à une transaction avant l'introduction de l'instance et qu'une transaction n'a pu être conclue, le versement de la rétribution due à l'avocat ou à la personne agréée, dont le montant est fixé par décret en Conseil d'Etat, est subordonné à la justification, avant l'expiration du délai de six mois qui suit la décision d'admission, de l'importance et du sérieux des diligences accomplies par celui-ci ou celle-ci.

« Lorsqu'une instance est engagée après l'échec de pourparlers transactionnels, la rétribution versée à l'auxiliaire de justice à raison des diligences accomplies durant les pourparlers s'impute, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, sur celle qui lui est due pour l'instance. »

;

« 4o et 5o Non modifiés ;


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 9 DÉCEMBRE 1998

« 6o Il est inséré, après l'article 39, un article 39-1 ainsi rédigé :

« Art.

39-1. Les dispositions des articles 29 et 37 à 39 sont portées à la connaissance du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle lors de la notification de son admission au bénéfice de celle-ci. »

;

« 7o Il est inséré, après l'article 40, un article 40-1 ainsi rédigé :

« Art.

40-1. L'avocat ou la personne agréée en application de l'article 879 du code de procédure pénale qui intervient, après désignation d'office, dans les conditions prévues à l'article 63-4 dudit code a droit à une rétribution.

« L'avocat ou la personne agréée assistant, au cours des mesures prévues au septième alinéa de l'article 41 du code de procédure pénale ou à l'article 12-1 de l'ordonnance no 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance d élinquante et ordonnées par le procureur de la République, la personne mise en cause ou la victime qui remplissent les conditions pour bénéficier de l'aide juridictionnelle a droit à une rétribution. L'aide est accordée par le président du bureau d'aide juridictionnelle. »

;

« 8o Non modifié. »

Article 19

M. le président.

« Art. 19. - L'ordonnance no 92-1147 du 12 octobre 1992 relative à l'aide juridictionnelle en matière pénale dans les territoires d'outre-mer est ainsi modifiée :

« 1o A Après l'article 11, il est inséré un article 11-1 ainsi rédigé :

« Art.

11-1. Dans les territoires de la NouvelleCalédonie et de la Polynésie française, le président du bureau d'aide juridictionnelle peut statuer seul sur les demandes ne présentant manifestement pas de difficulté sérieuse.

« Il peut, en outre, procéder aux mesures d'investigation nécessaires et rejeter la demande si le demandeur, sans motif légitime, ne communique pas dans le délai imparti les documents ou les renseignements demandés. »

« 1o Le deuxième alinéa de l'article 22 est remplacé par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Il peut être retiré, en tout ou partie, par le bureau d'aide juridictionnelle dans les cas suivants :

« 1o S'il survient au bénéficiaire, pendant l'instance ou l'accomplissement des actes pour lesquels il a été accordé, des ressources telles que si elles avaient existé au jour de la demande d'aide juridictionnelle, celle-ci n'aurait pas été accordée ;

« 2o Lorsque la décision passée en force de chose jugée a procuré au bénéficiaire de l'aide juridictionnelle des ressources telles que si elles avaient existé au jour de la demande d'aide juridictionnelle, celle-ci n'aurait pas été accordée ;

« 3o Lorsque la procédure engagée par le demandeur bénéficiant de l'aide juridictionnelle a été jugée abusive ou dilatoire. »

;

« 2o Il est inséré, dans le titre IV, après l'article 23, un article 23-1 ainsi rédigé :

« Art.

23-1. Les dispositions des articles 22 et 23 sont portées à la connaissance du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle lors de la notification de son admission au bénéfice de celle-ci. »

;

« 3o Il est inséré, dans le titre V, avant l'article 24, deux articles 23-2 et 23-3 ainsi rédigés :

« Art.

23-2. Non modifié.

« Art.

23-3. L'avocat et, dans le territoire des îles Wallis et Futuna, la personne agréée qui assistent, au c ours des mesures prévues au septième alinéa de l'article 41 du code de procédure pénale ou à l'article 12-1 de l'ordonnance no 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante et ordonnées par le procureur de la République, la personne mise en cause ou la victime qui remplissent les conditions pour bénéficier de l'aide juridictionnelle ont droit à une rétribution.

« L'aide est accordée par le président du bureau d'aide juridictionnelle dans les territoires de la Nouvelle-Calédonie et de la Polynésie française et par le président du tribunal de première instance dans le territoire de Wallis-etFutuna. »

« 4o Non modifié. »

Vote sur l'ensemble

M. le président.

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(L'ensemble du projet de loi est adopté. - Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) 8

CONVENTION FISCALE ENTRE LA FRANCE ET LA FÉDÉRATION DE RUSSIE Discussion, selon la procédure d'examen simplifiée, d'un projet de loi adopté par le Sénat

M. le président.

L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole) (nos 920, 1219).

Je rappelle que la conférence des présidents a décidé que ce texte serait examiné selon la procédure d'examen simplifiée.

Conformément à l'article 107 du règlement, je mettrai directement aux voix l'article unique du projet de loi.

Article unique

M. le président.

« Article unique. - Est autorisée l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole), signée à Paris le 26 novembre 1996, et dont le texte est annexé à la présente loi. »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 9 DÉCEMBRE 1998

Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

(L'article unique du projet de loi est adopté.)

9 ACCORD ENTRE LA FRANCE ET LA RÉPUBLIQUE TUNISIENNE

SUR LES INVESTISSEMENTS Discussion, selon la procédure d'examen simplifiée, d'un projet de loi adopté par le Sénat

M. le président.

L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approb ation de l'accord entre le Gouvernement de la R épublique française et le Gouvernement de la République tunisienne sur l'encouragement et la protect ion réciproques des investissements (ensemble un échange de lettres) (nos 918, 1220).

Je rappelle que la conférence des présidents a décidé que ce texte serait examiné selon la procédure d'examen simplifiée.

Conformément à l'article 107 du règlement, je mettrai directement aux voix l'article unique du projet de loi.

Article unique

M. le président.

« Article unique. - Est autorisée l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la R épublique française et le Gouvernement de la République tunisienne sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements (ensemble un échange de lettres), signé à Paris le 20 octobre 1997, et dont le texte est annexé à la présente loi. »

Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

(L'article unique du projet de loi est adopté.)

10 ACCORD DE COOPÉRATION

ENTRE LA FRANCE ET LA RÉPUBLIQUE DE NAMIBIE Discussion, selon la procédure d'examen simplifiée, d'un projet de loi adopté par le Sénat

M. le président.

L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approb ation de l'accord entre le Gouvernement de la R épublique française et le Gouvernement de la République de Namibie sur la coopération culturelle, scientifique et technique (nos 785, 1221).

Je rappelle que la conférence des présidents a décidé que ce texte serait examiné selon la procédure d'examen simplifiée.

Conformément à l'article 107 du règlement, je mettrai directement aux voix l'article unique du projet de loi.

Article unique

M. le président.

« Article unique. - Est autorisée l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la R épublique française et le Gouvernement de la République de Namibie sur la coopération culturelle,s cientifique et technique, signé à Windhoek le 22 mars 1995, et dont le texte est annexé à la présente loi. »

Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

(L'article unique du projet de loi est adopté.)

11

CONVENTION FISCALE ENTRE LA FRANCE ET LA RÉPUBLIQUE DE NAMIBIE Discussion, selon la procédure d'examen simplifiée, d'un projet de loi adopté par le Sénat

M. le président.

L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la R épublique française et le Gouvernement de la République de Namibie en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune (nos 921, 1221).

Je rappelle que la conférence des présidents a décidé que ce texte serait examiné selon la procédure d'examen simplifiée.

Conformément à l'article 107 du règlement, je mettrai directement aux voix l'article unique du projet de loi.

Article unique

M. le président.

« Article unique. Est autorisée l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Namibie en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, signée à Windhoek le 29 mai 1996, et dont le texte est annexé à la présente loi. »

Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

(L'article unique du projet de loi est adopté.)

12 VALIDATION LÉGISLATIVE D'ACTES DU MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES Discussion, selon la procédure d'examen simplifiée, d'une proposition de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de M. François Loncle et de plusieurs de ses collègues, relative à la validation législative d'actes pris après avis du comité technique paritaire du ministère des affaires étrangères (nos 1205, 1218).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 9 DÉCEMBRE 1998

Je rappelle que ce texte fait l'objet d'une procédure d'examen simplifiée.

La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires étrangères.

M. François Loncle, rapporteur de la commission des affaires étrangères.

Monsieur le président, monsieur le ministre des affaires étrangères, mes chers collègues, la commission des affaires étrangères propose à l'Assemblée d'adopter une proposition de loi ayant pour objet de valider préventivement des actes d'une importance capitale pour le ministère des affaires étrangères.

En effet, par une décision du 29 juillet 1998, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêté du 14 octobre 1994 qui déterminait les organisations syndicales aptes à désigner les représentants du personnel au comité technique paritaire du ministère des affaires étrangères et fixait la répartition des sièges entre elles. De ce fait, tous les textes pris après avis de ce comité sont entachés d'illégalité. Parmi eux figurent des textes relatifs aux rémunérations, aux prestations familiales, au statut des chiffreurs, à l'organisation de l'administration centrale et, en particulier, le projet de décret réformant l'organisation de la coopération.

Le comité technique paritaire doit être consulté sur toutes les questions et projets de textes intéressant l'ensemble des services du ministère, à l'exception des établissements culturels qui relèvent d'un comité technique paritaire distinct. Le ministre établit la liste des organisations syndicales aptes à désigner des représentants et fixe le nombre de sièges attribués à chacune d'elles en fonction de leur représentativité.

Jusqu'à présent, les ministres successifs ont toujours considéré qu'il suffisait, pour apprécier cette représentativité, de se fonder sur les seules élections aux commissions administratives paritaires.

Mais le Conseil d'Etat a estimé que le ministre des affaires étrangères devait tenir compte de l'audience des organisations syndicales auprès des agents non titulaires comme auprès des agents titulaires. Or la plupart des agents non titulaires ne participent pas à l'élection des commissions administratives. Notamment, les recrutés locaux ne sont pas représentés à ces commissions, alors qu'ils forment près de la moitié des effectifs du ministère.

Dans ces conditions, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêté du 14 octobre 1994 et a considéré que le ministre était tenu de procéder à une consultation de l'ensemble des agents titulaires et non titulaires, notamment des agents recrutés localement de nationalité étrangère.

La présente proposition de loi vise exclusivement à remédier à la situation juridique créée par la décision du Conseil d'Etat.

La validation par la loi est une solution exceptionnelle, acceptée par le Conseil constitutionnel à partir du moment où elle répond à certaines conditions.

En premier lieu, la validation doit respecter l'autorité de la chose jugée. A cette fin, la présente proposition n'a pas pour effet de valider l'arrêté annulé par le Conseil d'Etat, mais seulement les actes pris après avis du comité technique paritaire, et seulement dans la mesure où ils n'ont pas été eux-mêmes annulés pour un autre motif.

En deuxième lieu, la validation est justifiée lorsque l'insécurité juridique a réellement des conséquences contraires à l'intérêt général. Dans le cas qui nous occupe, il suffit pour s'en convaincre d'examiner la liste des 31 textes qui ont été soumis au comité technique paritaire du 20 décembre 1994 au 23 juin 1998. Il ne me paraît pas possible d'attendre la formation d'un nouveau comité technique paritaire pour prendre de nouveaux actes. En effet, le nouveau comité ne pourra être mis en place qu'après une consultation du personnel, ce qui prolongerait jusqu'au mois de mai, au moins, la période pendant laquelle les actes concernés pourraient être attaqués. Cette solution reviendrait notamment à repousser de plusieurs mois la mise en oeuvre de la réforme de la coopération.

En troisième lieu, la validation doit être « ciblée » sur le seul moyen qui a justifié l'annulation. A cet effet, le texte de la proposition précise que les actes précités sont validés « en tant que leur légalité serait contestée par le moyen tiré du défaut de consultation de l'ensemble des agents titulaires et non titulaires... ». En d'autres termes,

ces actes pourront être éventuellement annulés s'ils sont attaqués sur le fondement d'autres moyens.

Enfin, la validation ne vaut que pour les actes publiés avant la promulgation de la loi de validation. Par exemple, le projet de décret réformant la coopération a été soumis au comité technique paritaire du 23 juin 1998 mais n'a pas encore été publié. Il n'entrera dans le champ de la validation que dans la mesure où cette publication interviendrait avant la promulgation de la validation.

Selon les informations transmises à votre rapporteur, le Gouvernement publiera ce décret dans la première quinzaine de décembre. Mais M. le ministre pourrait nous le confirmer.

Pour l'avenir, il est prévu de procéder désormais, en vue d'établir la représentativité des différentes organisations syndicales, à une consultation de l'ensemble des p ersonnels, titulaires et non titulaires, soit environ 14 000 agents, dont 10 500 à l'étranger. Cette consultation concernera en particulier les recrutés locaux de nationalité étrangère, le Conseil d'Etat ayant estimé que cette catégorie devait être intégrée au corps électoral.

On peut comprendre cette exigence, dans la mesure où les recrutés locaux de nationalité étrangère employés par le ministère des affaires étrangères sont particulièrement n ombreux : plus de 5 000 sur un effectif de 13 681 agents.

Cependant, la participation des recrutés locaux de nationalité étrangère pose plusieurs problèmes.

Le principal problème, d'ordre logistique, concerne la communication qui, dans certains cas, devra se faire dans la langue locale.

Des difficultés juridiques pourront également surgir dans la mesure où les droits des recrutés locaux - et par voie de conséquence, leurs droits syndicaux - découlent d'un contrat de travail de droit local. Leur participation à une consultation limitée aux organisations syndicales françaises pourrait être en contravention avec leur affiliation syndicale locale.

A fortiori, cette consultation sera en contradiction avec le droit local si celui-ci ne reconnaît pas le droit syndical ou s'il impose l'affiliation à un syndicat unique. Des difficultés d'ordre diplomatique pourraient alors être soulevées. Le recours exclusif au vote par correspondance à l'étranger devrait permettre de protéger l'exercice de son droit par chaque agent dans les conditions souhaitables de discrétion.

Cette validation est aussi l'occasion de souligner, mes chers collègues, les inconvénients du recours massif au recrutement local qui a marqué la politique du personnel des affaires étrangères depuis 1991.

Le recrutement local présente des avantages certains. Le personnel recruté localement, selon les conditions du droit du travail local, est infiniment moins coûteux que le


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 9 DÉCEMBRE 1998

personnel expatrié. Il est également indispensable pour pourvoir certains postes en contact direct avec le public, spécialement dans les pays non francophones.

Mais il présente aussi des invonvénients. Le statut juridique des recrutés locaux n'est pas satisfaisant. Ce type de recrutement a atteint un plafond au-delà duquel des fonctions qui relèvent de la souveraineté - l'instruction des demandes de visas par exemple - seraient attribuées à des étrangers. Par ailleurs, la situation sociale de certains recrutés locaux est très précaire, en raison de l'absence ou de la quasi-absence de régimes de protection sociale dans certains pays.

La politique de recrutement local est aujourd'hui en cours de redéfinition. A cette fin, vous avez, monsieur le ministre, mis en place une mission de réflexion sur la politique générale de recrutement et de gestion des personnels recrutés localement, afin de proposer des modalités de gestion renouvelées.

Compte tenu de ces observations, la commission des affaires étrangères vous demande, mes chers collègues, d'adopter cette proposition de loi.

M. le président.

La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.

M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères.

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les députés, je n'interviendrai que brièvement pour remercier votre assemblée d'avoir bien voulu débattre, cet après-midi, de la proposition de loi relative à la validation législative d'actes pris après avis du comité technique paritaire du ministère des affaires étrangères.

Je voudrais remercier tout spécialement M. François Loncle, principal auteur de cette proposition, qu'il vient de rapporter devant vous.

Je ne reviendrai pas sur le détail des raisons qui ont conduit M. Loncle et un certain nombre de vos collègues à accepter de déposer ce texte. M. Loncle vient en effet de s'exprimer très clairement à ce sujet. Comme il vous l'a indiqué, le Conseil d'Etat a annulé fin juillet dernier un arrêté ministériel d'octobre 1994 qui fixait la composition du comité technique paritaire des affaires étrangères. Du fait de cette décision, tous les actes pris après avis de cette instance pouvaient être dorénavant contestés par la voie de l'exception d'illégalité. C'est dire que plusieurs réformes importantes, mises en oeuvre au cours de ces quatre dernières années par mes deux prédécesseurs et par moi-même, pourraient en être affectées. D'une façon générale, c'est toute la vie administrative et juridique du ministère des affaires étrangères, depuis 1994, qui se trouve ainsi fragilisée.

Vous conviendrez qu'une telle insécurité juridique, susceptible de remettre en cause des décisions importantes pour le fonctionnement quotidien et pour l'organisation de notre outil diplomatique, ne peut être acceptée. Il fallait donc trouver le moyen de conforter l'ensemble de ces actes au travers d'une procédure de validation législative.

Nous aurions tous, bien entendu, préféré ne pas recourir à une telle procédure, qui doit demeurer tout à fait exceptionnelle et limitée dans sa portée, et qui le demeure, d'ailleurs. Mais la situation elle-même exceptionnelle créée par la décision du Conseil d'Etat et la nécessité de garantir un minimum de sécurité juridique couvrant les quatre années passées imposaient cette solution.

Compte tenu de l'urgence de régler cette situation inédite pour mon administration, étant donné que le décret réformant l'organigramme doit être publié dans les tout prochains jours, l'Assemblée a accepté de prendre l'initiative d'une telle validation, ce dont je lui sais partiellement gré.

Votre commission des affaires étrangères a eu l'amabil ité d'approuver la proposition de loi déposée par M. Loncle. Le Gouvernement ne peut que vous inviter à faire de même.

Discussion générale

M. le président.

Dans la discussion générale, la parole est à M. Georges Hage.

M. Georges Hage.

Monsieur le président, monsieur le ministre des affaires étrangères, mes chers collègues, le comité technique paritaire est parfois la seule solution pour sortir d'un imbroglio juridique. Nous sommes toujours réservés sur ce type de pratique qui revient, quoi qu'on en dise, à faire quelque entorse à l'état de droit.

Aujourd'hui, l'argument de l'urgence est avancé pour justifier cette validation par l'adoption d'une proposition de loi.

Nous mesurons, comme le rapporteur, toutes les conséquences de la décision du Conseil d'Etat du 28 juillet 1998, qui risque effectivement de frapper d'illégalité plusieurs textes juridiques du ministère des affaires étrangères pris depuis l'automne 1994, ainsi que tous ceux pris a près avis du comité technique paritaire depuis juin 1997.

Nous n'en serions pas là si l'administration et le ministre responsable avaient pris alors en considération de manière plus sérieuse les observations des organisations syndicales qui, faute d'être entendues, ont dû recourir au Conseil d'Etat.

Les organisations syndicales, depuis plusieurs semaines, demandent l'annulation des arrêtés illégaux et l'organisation rapide d'élections ; elles se plaignent de la réaction, qu'elles jugent tardive, de l'administration.

Nous souhaitons connaître, monsieur le ministre, les dispositions qui ont été prises dès le rendu de l'avis du Conseil d'Etat afin de réduire justement ces délais.

Si nous pouvons comprendre les arguments avancés pour justifier l'adoption de cette proposition de loi, il faut au moins que l'administration sorte le plus vite possible de la situation d'illégalité dans laquelle elle s'est ellemême placée.

Sans cette proposition de loi, la réforme de la coopération prendrait un retard de plusieurs mois. Or si cette réforme est très attendue, c'est en raison de l'opacité de certaines, actions menées au nom d'une coopération s'inscrivant dans le domaine réservé. Raison de plus pour que la réforme s'établisse dans la plus grande transparence et que l'on prenne le temps de la plus large concertation.

Le défi est réel. Inventer une nouvelle politique de la coopération suppose de rompre avec le passé, de manifester une ambition nouvelle, de choisir une démarche qui consacre une intervention publique moins soumise à la logique libérale et à la montée en puissance des acteurs économiques privés.

La place nouvelle de la coopération dans le ministère des affaires étrangères ne va pas sans comporter le risque - c'est en tout cas la crainte d'un certain nombre de salariés de l'ancien ministère - d'une perte de potentiel et, en définitive, de l'affaiblissement de l'action de la France.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 9 DÉCEMBRE 1998

C'est pour toutes ces raisons que nous avions avancé la proposition de créer un ministère du développement de plein exercice, qui aurait pu disposer pour son action de tous les crédits actuellement dévolus à des actions participant de la coopération entre la France et les pays du Sud.

Si le Parlement a pu déjà débattre de la réforme de la coopération, il faut largement l'associer à sa mise en oeuvre et non seulement l'en informer.

Nous renouvelons notre réserve sur le principe même de ce type de validation législative, en demandant encore à être convaincus que tout a été fait pour éviter un tel recours. En même temps, nous insistons sur la nécessité d'une consultation rapide et dans les formes de tout le personnel du ministère.

Il va de soi que le groupe communiste votera la proposition de loi.

M. le président.

La parole est à M. Pierre Lequiller.

M. Pierre Lequiller.

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, ainsi que je l'avais dit lors de l'examen des crédits pour 1999 des ministères des affaires étrangères et de la coopération, le groupe Démocratie libérale souscrit à la volonté de rationalisation des services de l'action extérieure de la France. Pourtant, la question essentielle de la fusion des moyens humains et financiers de ces deux départements ministériels mérite mieux, nous semble-t-il, qu'un débat inscrit dans l'urgence et dicté par des considérations juridiques liées à l'illégalité de la procédure jusque-là suivie pour réaliser cette opération. Cette remarque, je le rappelle, avait été faite par les députés issus de tous les groupes, y compris de la majorité.

Somme toute, et comme je le rappelais en commission, nous sommes ici pour discuter d'une proposition de loi d'origine gouvernementale (Sourires), destinée à masquer les vices et les incertitudes de cette opération. Et vous avez bien fait, monsieur le ministre, de remercier chaleureusement M. Loncle d'avoir bien voulu se dévouer pour déposer cette proposition de loi qui, si cela n'avait pas été une question de forme, aurait dû être présentée par le Gouvernement lui-même.

Les conséquences de cette réforme auraient justifié que l'on consacre un vrai débat parlementaire à l'avenir de la coopération. La France, on le sait, a toujours accordé une place particulière à ce secteur de son action extérieure. La fusion actuelle aboutit à la suppression sur trois ans de près de mille postes d'agents. Parallèlement, et malgré une augmentation certes relative des crédits des affaires étrangères, on s'aperçoit que les montants de l'aide au développement traditionnellement dévolus à la coopération baissent de 4 %. Par ailleurs, je note que le comité interministériel chargé de redéfinir l'action de la France à l'étranger, qui aurait dû être au centre de la réforme, ne s'est toujours pas réuni.

Si je comprends bien, le Parlement, en adoptant en première lecture la loi de finances pour 1999, a ipso facto voté pour les crédits d'un ministère qui n'existera plus au 1er janvier prochain, les transferts de compétences et de crédits liés à cette fusion étant renvoyés à une agence de développement qui, elle-même, n'est pas encore créée.

Cette réalité m'amène à m'interroger - et c'est une question qui a été posée sur tous les bancs - sur la volonté réelle du Gouvernement de maintenir, malgré la fusion, la politique de coopération et d'aide au développement que la France a toujours conduite dans le passé.

Force est de constater que vous avez fait prévaloir la forme sur le fond. Si nous sommes d'accord, je le répète, sur le principe de la rationalisation de l'action publique, encore faut-il, auparavant, en avoir déterminé clairement les objectifs. Rationaliser oui, mais pour quoi faire ? Cette question me paraissant non résolue à ce jour, le groupe Démocratie libérale s'abstiendra.

M. le président.

Pour le groupe socialiste, la parole est à M. François Loncle.

M. François Loncle, rapporteur.

Mon hésitation sur le choix du micro, monsieur le président, tenait au fait que je ne savais pas si je devais répondre aux intervenants en tant que rapporteur ou m'exprimer au nom du groupe socialiste.

M. le président.

Dans votre intervention, vous faites ce que vous voulez, monsieur Loncle, mais il eût été préférable que vous preniez le micro du groupe socialiste plutôt que celui de la commission. C'est pourquoi je vous avais fait signe.

M. François Loncle, rapporteur.

Les micros ont la m ême valeur, de même que les places que nous occupons.

Cela dit, monsieur le président, personne ne s'étonnera qu'en tant que porte-parole du groupe socialiste, je sois d'accord avec l'auteur de la proposition de loi et l'auteur du rapport.

(Sourires.)

M. Thierry Mariani.

Quelle surprise ! M. François Loncle, rapporteur.

Je le dis en toute modestie, bien entendu.

Après avoir salué M. Hage, je dirai à M. Lequiller, en le remerciant de ses amabilités, que le débat sur la coopération, il le sait bien en tant que membre de la commission des affaires étrangères, a lieu complètement et largem ent au moment de l'examen du budget, et en particulier à l'occasion de la venue devant notre commission et à cette tribune du ministre, Charles Josselin.

M. Pierre Lequiller.

C'était un seul budget, alors...

M. François Loncle, rapporteur.

J'ai le souvenir, monsieur Lequiller, que nous avons longuement débattu, et la discussion se poursuivra car la réforme de la coopération se met en place.

Comme l'ont dit M. Hage et M. le ministre, c'est pour des raisons d'urgence, que vous avez bien voulu vous aussi reconnaître qu'il faut adopter cette proposition de loi.

M. le président.

Au nom du groupe RPR, la parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

Pour une fois, je pense que trois minutes me suffiront.

(Sourires.)

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je serai très bref sur cette question, car elle ne revêt pas de difficulté particulière pour le groupe RPR, qui votera cette proposition de loi.

Comme l'a rappelé M. le rapporteur, le Conseil d'Etat, dans sa décision du 28 juillet 1998, a annulé l'arrêté du 14 octobre 1994, qui déterminait les organisations syndicales aptes à désigner les représentants du personnel au comité technique paritaire du ministère des affaires étrangères et fixait la répartition des sièges entre les organisations. C'est ainsi que tous les textes pris après avis de ce comité sont entachés d'illégalité.

Les fonctionnaires du ministère, notamment en ce qui concerne certains de leurs droits sociaux, de leurs prestations familiales, et de leurs rémunérations, vivent depuis


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cette décision dans une insécurité juridique complète. La proposition de loi qui nous est soumise vise donc à valider les actes pris après avis du comité technique paritaire.

La validation par la loi est une situation exceptionnelle, qui est admise par le Conseil constitutionnel dans la mesure où elle satisfait à certaines conditions : elle doit respecter l'autorité de la chose jugée ; elle doit être justifiée par une situation d'insécurité juridique dont la persistance aurait des conséquences contraires à l'intérêt géné ral ; elle doit être « ciblée » sur le seul moyen qui a justifié l'annulation ; enfin, elle n'est possible de façon préventive que dans la mesure où l'insécurité juridique est réelle.

Je ne reviendrai pas sur les développements contenus dans le rapport, car ils me semblent assez convaincants sur le respect de ces conditions par la proposition de loi.

Je souhaite simplement m'étonner à mon tour que l'initiative d'une telle disposition émane du Parlement. Il m'aurait semblé plus logique que le Gouvernement s'en saisisse par le biais d'un projet de loi.

Mise à part cette réserve, et compte tenu des implications de l'annulation par le Conseil d'Etat de l'arrêté du 14 octobre 1994, le groupe RPR votera cette proposition de loi.

M. le président.

La discussion générale est close.

Le texte dont nous sommes saisis ne fait l'objet d'aucun amendement. Je le mettrai aux voix dans le texte de la commission.

J'en donne lecture : Article unique

M. le président.

« Article unique. - Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, sont validés les actes pris après avis du comité technique paritaire ministériel institué par l'article 2 du décret no 94-726 du 19 août 1994 relatif au comité technique paritaire du ministère des affaires étrangères et dérogeant à certaines dispositions du décret no 82-452 du 28 mai 1982 relatif aux comités techniques paritaires, réuni dans sa composition fixée respectivement au vu des arrêtés du 14 octobre 1994 et du 1er octobre 1997 déterminant les organisations syndicales aptes à désigner les représentants du personnel au comité technique paritaire du ministère des affaires étrangères et fixant la répartition des sièges entre ces organisations, en tant que leur légalité serait contestée par le moyen tiré du défaut de consultation de l'ensemble des agents titulaires et non titulaires relevant de la compétence dudit comité en application du deuxième alinéa de l'article 11 du décret no 82-452 du 28 mai 1982 modifié relatif aux comités techniques paritaires. »

Je mets aux voix l'article unique de la proposition de loi.

(L'article unique de la proposition de loi est adopté.)

13

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

M. le président.

Ce soir, à vingt et une heures, deuxième séance publique : Discussion : de la proposition de résolution, no 770, de M. André Aschieri et plusieurs de ses collègues tendant à créer une commission d'enquête pour faire toute la lumière sur les agissements et objet du groupement de fait dit « département protection sécurité » ; de la proposition de résolution, no 879, de M. Robert Gaïa et plusieurs de ses collègues tendant à créer une commission d'enquête afin de faire le point sur l'organisation, le fonctionnement, les objectifs, les soutiens et les agissements du groupement dit « Département protection sécurité » : M. Raymond Forni, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport no 902) ; Discussion de la proposition de résolution, no 775, de M. André Lajoinie et plusieurs de ses collègues tendant à la création d'une commission d'enquête sur certaines pratiques des groupes industriels, de services et financiers, relatives à l'emploi et l'aménagement du territoire : M. Philippe Duron, rapporteur au nom de la commission de la production et des échanges (rapport no 1034) ; Discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi, no 1185, relatif aux animaux dangereux et errants et à la protection des animaux : M. Georges Sarre, rapporteur au nom de la commission de la production et des échanges (rapport no 1207) ; (Procédure d'examen simplifiée) ; Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, no 1192, relatif à l'emploi des fonds de la participation des employeurs à l'effort de construction : M. Daniel Marcovitch, rapporteur au nom de la commission de la production et des échanges (rapport no 1217) ; M. Jacques Guyard, rapporteur pour avis au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (avis no 1242).

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-huit heures cinquante.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 9 DÉCEMBRE 1998

ANNEXE AU PROCÈS-VERBAL de la 1re séance du mercredi 9 décembre 1998 SCRUTIN (no 155) sur l'ensemble de la proposition de loi relative au pacte civil de solidarité.

Nombre de votants .....................................

568 Nombre de suffrages exprimés ....................

565 Majorité absolue ..........................................

283 Pour l'adoption ...................

316 Contre ..................................

249 L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN Groupe socialiste (250) : Pour : 249. - MM. Yvon Abiven , Maurice Adevah-Poeuf , Stéphane Alaize , Damien Alary , Mme Sylvie Andrieux ,

M M. Léo Andy , Jean-Marie Aubron , Jean-Marc Ayrault , Jean-Paul Bacquet , Dominique Baert , JeanPierre Baeumler , Jean-Pierre Balduyck , Jean-Pierre Balligand , Gérard Bapt , Alain Barrau , Jacques Bascou , Christian Bataille , Jean-Claude Bateux , Jean-Claude B eauchaud , Mme Yvette Benayoun-Nakache , MM. Henri Bertholet , Eric Besson , Jean-Louis Bianco , A ndré Billardon , Jean-Pierre Blazy , Serge Blisko , Patrick Bloche , Jean-Marie Bockel , Jean-Claude Bois , Daniel Boisserie , Augustin Bonrepaux , André Borel , Jean-Michel Boucheron , Jean-Claude Boulard , Didier Boulaud , Pierre Bourguignon , Christian Bourquin , Mme Danielle Bousquet , MM. Jean-Pierre Braine , Pierre Brana , Mme Frédérique Bredin , M. Jean-Paul B ret , Mme Nicole Bricq , MM. François Brottes , Vincent Burroni , Marcel Cabiddu , Alain Cacheux , Jérôme Cahuzac , Alain Calmat , Jean-Christophe Cambadelis , André Capet , Thierry Carcenac , Christophe Caresche , Mmes Véronique Carrion-Bastok , Odette Casanova , MM. Laurent Cathala , Bernard Cazeneuve , Jean-Paul Chanteguet , Guy-Michel Chauveau , JeanClaude Chazal , Daniel Chevallier , Didier Chouat , Alain Claeys , Mme Marie-Françoise Clergeau , MM. Jean C odognès , Pierre Cohen , François Colcombet , Mme Monique Collange , MM. François Cuillandre , Jean-Claude Daniel , Jacky Darne , Camille Darsières , Michel Dasseux , Yves Dauge , Mme Martine David , MM. Bernard Davoine , Philippe Decaudin , Marcel Dehoux , Jean Delobel , François Deluga , Jean-Jacques Denis , Mme Monique Denise , MM. Bernard Derosier , Claude Desbons , Michel Destot , Paul Dhaille , Marc Dolez , François Dosé , René Dosière , Mme Brigitte Douay , MM. Raymond Douyère , Julien Dray , Tony Dreyfus , Pierre Ducout , Jean-Pierre Dufau , Jean-Louis Dumont , Mme Laurence Dumont , MM. Dominique Dupilet , Jean-Paul Dupré , Yves Durand , Jean-Paul Durieux , Philippe Duron , Jean Espilondo , Claude Evin , Alain Fabre-Pujol , Albert Facon , Mme Nicole Feidt , MM. Jean-Jacques Filleul , Jacques Fleury , Jacques Floch , Pierre Forgues , Raymond Forni , Jean-Louis Fousseret , Michel Françaix , Christian Franqueville , Georges Frêche , Gérard Fuchs , Robert Gaïa , Yann Galut , Roland Garrigues , Jean-Yves Gateaud , Jean Gaubert , Mmes Catherine Génisson , Dominique Gillot , MM. André Godin , Gaëtan Gorce , Alain Gouriou , G érard Gouzes , Joël Goyheneix , Bernard Grasset , Michel Grégoire , Mmes Odette Grzegrzulka , Paulette Guinchard-Kunstler , MM. Jacques Guyard , Francis Hammel , Mme Cécile Helle , MM. Edmond Hervé , Jacques Heuclin , François Hollande , Jean-Louis Idiart , Mme Françoise Imbert , MM. Claude Jacquot , Maurice Janetti , Serge Janquin , Armand Jung , Jean-Noël Kerdraon , Bertrand Kern , Jean-Pierre Kucheida , André L abarrère , Mme Conchita Lacuey , MM. Jérôme Lambert , François Lamy , Pierre-Claude Lanfranca , Jack Lang , Jean Launay , Mmes Jacqueline Lazard , Christine Lazerges , MM. Gilbert Le Bris , Jean-Yves Le Déaut , Mme Claudine Ledoux , MM. Jean-Yves Le Drian , Michel Lefait , Jean Le Garrec , Jean-Marie Le Guen , Patrick Lemasle , Georges Lemoine , Bruno Le Roux , René Leroux , Mme Raymonde Le Texier , MM. Alain Le Vern , Michel Liebgott , Mme Martine LignièresCassou , MM. Gérard Lindeperg , François Loncle , Bernard Madrelle , René Mangin , Jean-Pierre Marché , Daniel Marcovitch , Jean-Paul Mariot , Mme Béatrice Marre , MM. Daniel Marsin , Marius Masse , Didier Mathus , Gilbert Maurer , Louis Mermaz , Roland Metzinger , Louis Mexandeau , Jean Michel , Didier Migaud , Mme Hélène Mignon , MM. Gilbert Mitterrand , Yvon

M ontané , Gabriel Montcharmont , Arnaud Montebourg , Henri Nallet , Philippe Nauche , Bernard Nayral , Henri Nayrou , Mme Véronique Neiertz , MM. Alain Néri , Michel Pajon , Joseph Parrenin , François Patriat , Christian Paul , Vincent Peillon , Germinal Peiro , JeanClaude Perez , Mmes Marie-Françoise Pérol-Dumont , Geneviève Perrin-Gaillard , Annette Peulvast-Bergeal , Catherine Picard , MM. Paul Quilès , Alfred Recours , Gérard Revol , Mme Marie-Line Reynaud , M. Patrick Rimbert , Mme Michèle Rivasi , MM. Alain Rodet , Marcel Rogemont , Bernard Roman , Yves Rome , Gilbert Roseau , Mme Yvette Roudy , MM. Jean Rouger , René Rouquet , Michel Sainte-Marie , Mme Odile Saugues , MM. Bernard Seux , Patrick Sève , Henri Sicre , Michel Tamaya , Mmes Catherine Tasca , Christiane TaubiraD elannon , MM. Yves Tavernier , Pascal Terrasse , Gérard Terrier , Mmes Marisol Touraine , Odette Trupin , MM. Joseph Tyrode , Daniel Vachez , André Vallini , André Vauchez , Michel Vauzelle , Michel Vergnier , Alain Veyret , Alain Vidalies , Jean-Claude Viollet , Philippe Vuilque et Kofi Yamgnane

Non-votant : M. Laurent Fabius (président de l'Assemblée nationale).

Groupe R.P.R. (139) : Pour : 3. - M. Bernard Accoyer , Mme Roselyne BachelotNarquin et M. Jean-Marc Chavanne

Contre : 135. - M. Jean-Claude Abrioux , Mme Michèle Alliot-Marie , MM. René André , André Angot , Philippe Auberger , Pierre Aubry , Jean Auclair , Gautier Audinot , Mme Martine Aurillac , MM. Edouard Balladur , Jean


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 9 DÉCEMBRE 1998

Bardet , François Baroin , Jacques Baumel , Christian Bergelin , André Berthol , Léon Bertrand , Jean-Yves Besselat , Jean Besson , Franck Borotra , Bruno Bourg-Broc , Michel Bouvard , Victor Brial , Philippe Briand , Michel Buillard , Christian Cabal , Gilles Carrez , Mme Nicole Catala , MM. Jean-Charles Cavaillé , Richard Cazenave , Henry Chabert , Jean-Paul Charié , Jean Charroppin , Philippe Chaulet , Olivier de Chazeaux , François Cornut-Gentille , Alain Cousin , Jean-Michel Couve , Charles Cova , Henri Cuq , Jean-Louis Debré , Lucien Degauchy , Arthur Dehaine , Jean-Pierre Delalande , Patrick Deln atte , Jean-Marie Demange , Xavier Deniau , Yves Deniaud , Patrick Devedjian , Eric Doligé , Guy Drut , Jean-Michel Dubernard , Marc Dumoulin , Jean-Pierre Dupont , Nicolas Dupont-Aignan , Christian Estrosi , Jean-Claude Etienne , Jean Falala , Jean-Michel Ferrand , François Fillon , Roland Francisci , Pierre Frogier , Yves Fromion , Robert Galley , René Galy-Dejean , Henri de Gastines , Jean de Gaulle , Hervé Gaymard , JeanPierre Giran , Michel Giraud , Jacques Godfrain , Louis Guédon , Jean-Claude Guibal , Lucien Guichon , François Guillaume , Jean-Jacques Guillet , Gérard Hamel , Michel Hunault , Michel Inchauspé , Christian Jacob , Didier Julia , Alain Juppé , Jacques Kossowski , Jacques Lafleur , Robert Lamy , Pierre Lasbordes , Thierry Lazaro , Pierre L ellouche , Jean-Claude Lemoine , Arnaud Lepercq , Jacques Limouzy , Lionnel Luca , Thierry Mariani , Alain Marleix , Franck Marlin , Jean Marsaudon , Philippe Martin , Patrice Martin-Lalande , Jacques Masdeu-Arus , Mme Jacqueline Mathieu-Obadia , MM. Gilbert Meyer , Jean-Claude Mignon , Charles Miossec , Renaud Muselier , Jacques Myard , Jean-Marc Nudant , Patrick Ollier , Robert Pandraud , Jacques Pélissard , Dominique Perben , Michel Péricard , Pierre Petit , Etienne Pinte , Serge Poignant , Bernard Pons , Robert Poujade , Didier Quentin , Jean-Bernard Raimond , Jean-Luc Reitzer , Nicolas Sarkozy , André Schneider , Bernard Schreiner , Philippe Séguin , Frantz Taittinger , Michel Terrot , Jean-Claude Thomas , Jean Tiberi , Georges Tron , Anicet Turinay , Jean Ueberschlag , Léon Vachet , Jean Valleix , François Vannson , Roland Vuillaume , Jean-Luc Warsmann et Mme Marie-Jo Zimmermann

Groupe U.D.F. (69) : Contre : 68. - MM. Jean-Pierre Abelin , Pierre Albertini , Pierre-Christophe Baguet , Raymond Barre , Jacques Barrot , Dominique Baudis , François Bayrou , Jean-Louis Bernard , Claude Birraux , Emile Blessig , Mme MarieThérèse Boisseau , M. Bernard Bosson , Mme Christine Boutin , MM. Loïc Bouvard , Jean Briane , Yves Bur , Dominique Caillaud , Hervé de Charette , Jean-François Chossy , René Couanau , Charles de Courson , Yves Coussain , Marc-Philippe Daubresse , Jean-Claude Decagny , Léonce Deprez , Renaud Donnedieu de Vabres , Philippe Douste-Blazy , Renaud Dutreil , Alain Ferry , Jean-Pierre Foucher , Claude Gaillard , Germain Gengenwin , Valéry Giscard d'Estaing , Gérard Grignon , Hubert Grimault , Pierre Hériaud , Patrick Herr , Mmes AnneMarie Idrac , Bernadette Isaac-Sibille , MM. Henry JeanBaptiste , Jean-Jacques Jégou , Christian Kert , Edouard Landrain , Jacques Le Nay , Jean-Antoine Leonetti , François Léotard , Maurice Leroy , Roger Lestas , Maurice Ligot , François Loos , Christian Martin , Pierre Méhaignerie , Pierre Micaux , Mme Louise Moreau , MM. JeanMarie Morisset , Arthur Paecht , Dominique Paillé , Henri Plagnol , Jean-Luc Préel , Marc Reymann , Gilles de Robien , François Rochebloine , Rudy Salles , André Santini , François Sauvadet , Michel Voisin , Jean-Jacques Weber et Pierre-André Wiltzer

Abstention : 1. - M. Jean-Louis Borloo

Groupe Démocratie libérale et Indépendants (43) : Contre : 41. - Mme Nicole Ameline , M. François d' Aubert , Mme Sylvia Bassot , MM. Jacques Blanc , Roland Blum , Dominique Bussereau , Antoine Carré , Pascal Clément , Georges Colombier , Francis Delattre , Franck Dhersin , Laurent Dominati , Dominique Dord , Charles Ehrmann , Nicolas Forissier , Gilbert Gantier , Claude Gatignol , Claude Goasguen , François Goulard , Pierre Hellier , Michel Herbillon , Philippe Houillon , Denis Jacquat , Aimé Kerguéris , Marc Laffineur , Jean-Claude Lenoir , Pierre Lequiller , Jean-François Mattei , Michel Meylan , Alain Moyne-Bressand , Yves Nicolin , Paul Patriarche , Bernard Perrut , Jean Proriol , Jean Rigaud , Jean Roatta , José Rossi , Joël Sarlot , Guy Teissier , Philippe Vasseur et Gérard Voisin

Abstention : 1. - M. Alain Madelin

Groupe communiste (36) : Pour : 35. - MM. François Asensi , Alain Belviso , Gilbert Biessy , Claude Billard , Bernard Birsinger , Alain Bocquet , Patrick Braouezec , Jean-Pierre Brard , Jacques B runhes , Patrice Carvalho , Alain Clary , Christian Cuvilliez , René Dutin , Daniel Feurtet , Mme Jacqueline Fraysse , MM. André Gerin , Pierre Goldberg , Maxime Gremetz , Georges Hage , Guy Hermier , Robert Hue , Mmes Muguette Jacquaint , Janine Jambu , MM. André Lajoinie , Jean-Claude Lefort , Patrick Leroy , Félix Leyzour , François Liberti , Patrick Malavieille , Roger Meï , Bernard Outin , Daniel Paul , Jean-Claude Sandrier , Michel Vaxès et Jean Vila

Groupe Radical, Citoyen et Vert (34) : Pour : 29. - M. André Aschieri , Mmes Marie-Hélène Aubert , Huguette Bello , MM. Pierre Carassus , Roland C arraz , Gérard Charasse , Bernard Charles , Yves Cochet , Michel Crépeau , Guy Hascoët , Elie Hoarau , Claude Hoarau , Robert Honde , François Huwart , Guy L engagne , Noël Mamère , Jean-Michel Marchand ,

M me Gilberte Marin-Moskovitz , MM. Jean-Pierre Michel , Jean-Paul Nunzi , Jean Pontier , Jean Rigal , Mme Chantal Robin-Rodrigo , MM. Georges Sarre , Gérard Saumade , Roger-Gérard Schwartzenberg , Michel Suchod , Alain Tourret et Aloyse Warhouver

Abstention : 1. - M. Jacques Desallangre

Non-inscrits (6).

Contre : 5. - MM. Charles Millon , Hervé Morin , JeanPierre Soisson , André Thien Ah Koon et Philippe de Villiers

Mises au point au sujet du présent scrutin (Sous réserve des dispositions de l'article 68, alinéa 4, du règlement de l'Assemblée nationale) MM. Bernard Accoyer et Jean-Marc Chavanne, qui étaient présents au moment du scrutin, ont fait savoir qu'ils avaient voulu voter « contre ».