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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. YVES COCHET

1. Diverses mesures relatives à la sécurité routière. - Suite de la discussion d'un projet de loi adopté par le Sénat (p. 10395).

DISCUSSION GÉNÉRALE (suite) (p. 10395)

MM. Jean-Claude Lemoine, Gilbert Biessy, Alain Ferry, Georges Sarre, Daniel Marcovitch, Patrick Delnatte, François Rochebloine, Armand Jung, Bruno Bourg-Broc, Jean-Antoine Leonetti.

Clôture de la discussion générale.

Suspension et reprise de la séance (p. 10407)

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

DISCUSSION DES ARTICLES (p. 10411)

M. le président.

L'amendement no 3 corrigé de la commission des lois avant l'article 1er est réservé jusqu'après l'article 1er

Article 1er (p. 10411)

MM. Jean-Claude Lemoine, François Rochebloine.

Amendement no 82 de la commission : MM. René Dosière, rapporteur de la commission des lois ; le ministre. Retrait.

Amendements identiques nos 1 de la commission et 70 de M. Aschieri : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Amendement no 2 rectifié de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Amendement no 48 de M. Baeumler : MM. Jean-Pierre Baeumler, le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Adoption de l'article 1er modifié.

Avant l'article 1er (Amendement précédemment réservé) (p. 10412)

Amendement no 3 corrigé de la commission : M. le rapporteur. - Retrait.

Avant l'article 2 (p. 10413)

Amendements identiques nos 37 rectifié de M. Delnatte et 71 rectifié de M. Aschieri : MM. Patrick Delnatte, le rapport eur, le ministre, Daniel Marcovitch, Jean-Claude Lemoine, Mme Catherine Génisson, M. François Rochebloine. - Rejet.

Article 2 (p. 10414)

M. Jean-Claude Lemoine.

Amendement no 67 de M. Aschieri : MM. Jean-Pierre Baeumler, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendement no 68 de M. Aschieri : MM. Jean-Pierre Baeumler, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendement no 4 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Amendement no 5 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Amendement no 54 rectifié de M. Marcovitch : MM. Daniel Marcovitch, le rapporteur, le ministre. - Retrait.

Amendement no 53 de M. Marcovitch : MM. Daniel Marcovitch, le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Amendement no 72 de M. Aschieri : MM. Jean-Pierre Baeumler, le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Les amendements nos 58 de M. Marcovitch et 6 de la commission n'ont plus d'objet.

Amendement no 42 de M. Luca : MM. Jean-Claude Lemoine, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendement no 32 de M. Landrain : MM. Pierre Micaux, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendement no 69 de M. Aschieri : MM. Jean-Pierre Baeumler, le rapporteur, le ministre.

Sous-amendement no 87 du Gouvernement : M. le rapporteur. - Adoption du sous-amendement et de l'amendement modifié.

Amendement no 47 rectifié de M. Biessy : MM. Gilbert Biessy, le rapporteur, le ministre. - Retrait.

Amendement no 52 de M. Marcovitch : MM. Daniel Marcovitch, le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Amendement no 7 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Amendement no 8 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Amendement no 43 de M. Luca : MM. Jean-Claude Lemoine, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendement no 9 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Amendement no 10 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Adoption de l'article 2 modifié.

Après l'article 2 (p. 10419)

Amendement no 11 de la commission, avec les sousamendements nos 80 et 81 du Gouvernement : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption des sous-amendements et de l'amendement modifié.

Amendement no 83 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Amendement no 44 de M. Luca : MM. Jean-Claude Lemoine, le rapporteur, le ministre, Jean-Pierre Baeumler, Dominique Bussereau. - Rejet.

Article 3. - Adoption (p. 10421)

Après l'article 3 (p. 10421)

Amendement no 51 de M. Fleury : MM. Jacques Fleury, le rapporteur, le ministre, François Rochebloine. - Retrait.


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Amendement no 51 repris par M. Rochebloine : MM. François Rochebloine, le ministre. - Rejet.

Article 4 (p. 10422)

MM. Jean-Claude Lemoine, Dominique Bussereau.

Amendements de suppression nos 17 de M. Bussereau, 20 de

M. Jean-Claude Lemoine et 33 de M. Landrain : MM. Jean-Antoine Leonetti, le rapporteur, le ministre, Jean-Pierre Baeumler. - Rejet.

Amendement no 12 corrigé de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Amendement no 77 du Gouvernement : MM. le ministre, le rapporteur. - Adoption.

Amendement no 13 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Amendement no 50 de M. Baeumler : MM. Jean-Pierre Baeumler, le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Amendement no 78 du Gouvernement : MM. le ministre, le rapporteur. - Adoption.

Adoption de l'article 4 modifié.

Article 5 (p. 10424)

M

M. Jean-Claude Lemoine, Dominique Bussereau, Mme Catherine Génisson, MM. Jacques Fleury, Pierre Micaux, Jean-Antoine Leonetti, François Rochebloine, Michel Bouvard, Jean-Pierre Baeumler, René Mangin.

Amendements de suppression nos 19 de M. d'Aubert et 21 de M. Jean-Claude Lemoine : MM. le rapporteur, le ministre, François Rochebloine. - Rejet.

Amendement no 22 rectifié de M. Jean-Claude Lemoine : MM. Jean-Claude Lemoine, le rapporteur, le ministre. Rejet.

Amendements nos 64 de M. Micaux, 34 de M. Landrain et 73 de M. Aschieri : MM. Pierre Micaux, Jean-Antoine Leonetti, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendement no 63 de M. Michel Bouvard : MM. Michel Bouvard, le rapporteur, le ministre. - Retrait.

Adoption de l'article 5.

Article 6. - Adoption (p. 10430)

Après l'article 6 (p. 10430)

Amendement no 46 de M. Luca : MM. Jean-Claude Lemoine, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendement no 65 de M. Ferry : MM. Alain Ferry, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Article 7 (p. 10431)

MM. Didier Quentin, Jean-Claude Lemoine, René Mangin.

Amendements nos 40 de M. Accoyer et 18 de M. Bussereau : MM. Patrick Delnatte, Dominique Bussereau, le rapporteur, le ministre. - Rejets.

Amendements nos 38 et 39 de M. Accoyer : MM. Patrick Delnatte, le rapporteur, le ministre, Jean-Pierre Baeumler. - Rejets.

Amendement no 35 de M. Landrain : MM. Jean-Antoine Leonetti, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Adoption de l'article 7.

Avant l'article 8 (p. 10434)

Amendement no 31 de M. Bussereau : MM. Dominique Bussereau, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendements nos 25 de M. Jean-Claude Lemoine et 66 de M. Micaux : MM. Jean-Claude Lemoine, Alain Ferry, le rapporteur, le ministre, François Rochebloine. - Rejets.

Article 8. - Adoption (p. 10436)

Après l'article 8 (p. 10436)

Amendement no 60 de M. Michel Bouvard : MM. Michel Bouvard, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendement no 62 de M. Michel Bouvard : MM. Michel Bouvard, le rapporteur, le ministre, Jean-Antoine Leonetti. - Rejet.

Amendement no 61 de M. Michel Bouvard : MM. Michel Bouvard, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendement no 59 de M. Michel Bouvard : MM. Michel Bouvard, le rapporteur, le ministre, Jean-Pierre Baeumler. - Adoption.

Article 9 (p. 10439)

Amendement no 14 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Amendement no 15 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Adoption de l'article 9 modifié.

Articles 10 et 11. - Adoption (p. 10439)

Après l'article 11 (p. 10439)

Amendement no 79 rectifié du Gouvernement : MM. le ministre, le rapporteur, Jean-Antoine Leonetti, Michel Bouvard, Dominique Bussereau. - Adoption.

Amendement no 26 de M. Jean-Claude Lemoine : M. JeanClaude Lemoine.

A mendement no 24 de M. Jean-Claude Lemoine : MM. Jean-Claude Lemoine, le rapporteur, le ministre, Dominique Bussereau. - Rejet des amendements nos 26 et 24.

Amendement no 49 de M. Fleury : MM. Jacques Fleury, le rapporteur, le ministre, Jean-Antoine Leonetti. - Retrait.

A mendement no 27 de M. Jean-Claude Lemoine : MM. Jean-Claude Lemoine, le rapporteur, le ministre. Rejet.

Amendement no 57 de M. Baeumler : MM. Jean-Pierre Baeumler, le rapporteur, le ministre. - Adoption.

A mendement no 23 de M. Jean-Claude Lemoine : MM. Jean-Claude Lemoine, le rapporteur, le ministre. Rejet.

Amendement no 56 de M. Mangin : MM. René Mangin, le rapporteur, le ministre. - Retrait.

Amendement no 55 de M. Mangin : MM. René Mangin, le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Amendement no 16 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Amendement no 29 de M. Jean-Claude Lemoine : M. JeanClaude Lemoine. - Retrait.

Amendement no 41 de M. Delnatte : MM. Patrick Delnatte, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendement no 86 de M. Gorce : MM. Jean-Pierre Baeumler, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendement no 85 de Mme Gillot : Mme Dominique Gillot, MM. le rapporteur, le ministre, François Rochebloine. - Retrait.

EXPLICATIONS DE VOTE (p. 10446)

MM. Jean-Claude Lemoine, Dominique Bussereau, Jean-Pierre Baeumler.


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VOTE SUR L'ENSEMBLE (p. 10446)

Adoption de l'ensemble du projet de loi.

M. le ministre.

2. Modification de l'ordre du jour (p. 10446).

M. le président, M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

3. Dépôt d'un rapport (p. 10447).

4. Dépôt d'un rapport d'information (p. 10447).

5. Dépôt de propositions de loi adoptées par le Sénat (p. 10447).

6. Ordre du jour des prochaines séances (p. 10447).


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COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. YVES COCHET,

vice-président

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures.)

1

DIVERSES MESURES RELATIVES À LA SÉCURITÉ ROUTIÈRE Suite de la discussion d'un projet de loi adopté par le Sénat

M. le président.

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, portant diverses mesures relatives à la sécurité routière (nos 825, 1153).

Discussion générale (suite)

M. le président.

Cet après-midi, l'Assemblée a commencé d'entendre les orateurs inscrits dans la discussion générale.

La parole est à M. Jean-Claude Lemoine.

M. Jean-Claude Lemoine.

Monsieur le président, monsieur le ministre de l'équipement, des transports et du logement, mesdames, messieurs, comme leurs collègues de l'éducation nationale, les ministres de l'équipement et des transports tiennent à marquer leur passage par une réforme, un projet de loi relatif à la sécurité routière.

A l'image de vos prédécesseurs, monsieur le ministre, vous n'avez pas failli à la règle. Je vous comprends d'aut ant plus que, malheureusement, malgré toutes les mesures prises, et Dieu sait si elles sont nombreuses, malgré tout l'arsenal répressif mis en place, la route en France reste trop meurtrière, beaucoup plus que dans les autres pays où législation et réglementation sont beaucoup plus simples, beaucoup plus lisibles, moins répressives, mieux appliquées...

M. René Dosière, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

Voire !

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Ce n'est pas vrai.

M. Jean-Claude Lemoine.

... et donnent de meilleursr ésultats : les statistiques le prouvent. La méthode employée jusqu'alors chez nous n'a donné que peu de résultats. Elle est donc mauvaise. Nous n'avons utilisé que des mesures répressives ou presque. Certaines sont indispensables, mais il nous faut axer nos efforts sur la prévention, sur la formation, sur l'éducation que nous n'avons que trop négligées et qui ailleurs montrent leur efficacité.

Il faut changer de méthode et vite. Vite, car plus de 8 000 morts par an, auxquels il faut ajouter tous les blessés, tous les handicapés, c'est intolérable.

Je regrette d'ailleurs, moi aussi, que ce texte nous arrive aussi tardivement. Huit mois se sont écoulés depuis son examen au Sénat. Combien de morts et d'accidents auraient pu être évités avec de nouvelles mesures appropriées ! Mais, je le sais, le programme est surchargé : l'étude du PACS, par exemple, a dû paraître plus urgente au Gouvernement qu'un projet de loi destiné à sauver des vies.

Mais revenons, monsieur le ministre, au texte que vous nous soumettez. On y trouve vingt-cinq mesures dont six seulement, vous l'avez rappelé, relèvent du domaine législatif. Je vous remercie vraiment de nous soumettre des mesures réglementaires, car je suis sûr que, puisque vousmême nous en présentez, vous accepterez nos amendements même quand eux aussi sont de nature réglementaire. Car nous allons vous en soumettre un certain nombre : des amendements de suppression certes, des amendements de substitution plus efficaces, tout au moins à nos yeux, des dispositions destinées à l'amélioration des infrastructures routières responsables de 40 % des accidents, selon les statistiques mêmes de votre ministère, et dont on ne dit mot dans le texte, ce qui nous inquiète d'autant plus que le budget consacré aux routes n'est pas facteur d'optimisme.

On ne trouve rien ou peu de choses sur l'aptitude physique des conducteurs ni sur certaines améliorations des v éhicules. Nous proposerons dans ce domaine des mesures que nous considérons appropriées, qui sortent des sentiers battus et qui méritent d'être adoptées.

En revanche, nous relevons avec plaisir dans votre loi des dispositions très intéressantes et novatrices, telle celle destinée à parfaire la formation des conducteurs novices.

Le volet prévu par votre prédécesseur pour les auto-écoles mérite d'être retenu, et les conditions requises pour l'enseignement à titre onéreux d'être étendues aux autres organismes assurant cette formation sans but lucratif.

L'apprentissage de la conduite est une chose trop sérieuse pour que l'on ne soit pas très vigilant et même très exigeant : il ne peut y avoir deux poids deux mesures.

Je crois également que l'éducation et la prise de conscience de l'insécurité méritent beaucoup d'attention.

On parle de la sécurité routière dans les collèges, mais de façon insuffisante. Cela doit faire partie de l'éducation civique, avec des heures obligatoires, et se voir sanctionné par un diplôme ou un certificat de connaissances.

M. Alain Ferry.

Très bien !

M. Jean-Claude Lemoine.

Il faut bien apprendre aux jeunes toutes les risques et conséquences liés à l'inconscience, à la prise d'alcool ou de toute drogue, à tout ce qui modifie le comportement, la vigilance.


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Venons-en aux grandes novations de votre texte, au nombre de trois : la responsabilité pécuniaire des propriétaires des véhicules, le délit de récidive du dépassement de plus de 50 km/h la vitesse autorisée et le dépistage des stupéfiants, grande novation qui mérite d'être saluée et amplifiée et qui reprend en partie le rapport de 1996 de notre collègue Dell' Agnola.

L'article 4 prévoit la responsabilité pécuniaire du propriétaire du véhicule en cas de contravention pour le stationnement, de dépassement des vitesses autorisées et le non-respect d'un stop ou d'un feu rouge. Cette extension de la responsabilité, pas alors établie par la loi du 3 janvier 1972 aux seules règles de stationnement, déroge au principe d'individualité des délits et des peines rappelés dans l'article L.

121-1 du code pénal qui dispose que

« nul n'est responsable pénalement qu'en raison de son propre fait ».

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Mais là, il ne s'agit pas d'un délit !

M. Jean-Claude Lemoine.

Cette règle est rappelée par une jurisprudence constante de la Cour de cassation. Et même si la responsabilité pénale n'est pas engagée, le fait de payer une amende constitue bien une sanction.

L'amendement introduit par la commission des lois du Sénat, avec votre accord monsieur le ministre, prévoit que le propriétaire n'est pas pénalement responsable et que l'application de l'article 4 ne donnera pas lieu à inscription au casier judiciaire ni à retrait de points. Cette disposition ne sera pas non plus prise en compte pour l'application des règles sur les récidives. Cet amendement améliore le texte, mais ne supprime pas l'atteinte aux principes du droit pénal. C'est pourquoi je présenterai un amendement proposant la suppression pure et simple de cette mesure, d'autant plus qu'elle n'améliore en rien la sécurité. Elle permettra seulement de récupérer des sommes jusqu'alors perdues. Je ne sais d'ailleurs ce qu'en pensera le Conseil constitutionnel.

Venons-en à l'article 5 : le délit en cas de récidive pour dépassement de 50 km/h de la vitesse autorisée.

Nous le savons, 48 % des accidents sont dus à un excès de vitesse et il faut absolument y remédier. La vitesse est la cause la plus fréquente des accidents : il faut la combattre par tous les moyens adaptés et de toutes nos forces. Il faut que les chauffeurs...

M. Jean-Pierre Baeumler.

Les chauffards !

M. Jean-Claude Lemoine.

... apprennent à respecter la réglementation ; mais ils ne l'appliqueront que si elle est juste.

Or la mesure que vous nous proposez est mauvaise dans sa forme.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Le Sénat l'a pourtant adoptée !

M. Jean-Claude Lemoine.

Elle est doublement injuste, car elle s'inscrit dans le cadre d'une pensée unique qui sanctionne, au nom de la lisibilité, de façon uniforme, tout excès, aussi condamnable soit-il, sans tenir compte des circonstances.

Cette disposition devrait être modifiée et je proposerai au travers d'un amendement de retenir la formule : « en cas de dépassement de 50 % de la vitesse autorisée » au lieu des 50 km/h en toute circonstance. Cette modification est plus sévère et restrictive ; elle permet d'adapter la vitesse très sanctionnable aux circonstances. Car les vitesses inadaptées sont autrement plus dangereuses que les grandes vitesses.

Sur autoroute, par exemple, il peut survenir des catastrophes épouvantables ; mais toutes ou presque ont lieu par temps de brouillard ou par temps de pluie. Rouler à 80 km/h sous un brouillard épais, à plus forte raison au volant d'un car, est inadmissible et meurtrier. Or votre texte n'apporte aucune réponse dans ce cas précis ; et la modification que je souhaite vise justement ces circonstances-là.

Circuler en ville lors d'une sortie d'école, par exemple, à 80 km/h est intolérable et scandaleux : dans ce cas précis non plus, votre texte ne propose rien de nouveau. La modification que nous préconisons apporte, elle, une réponse. En fait, rouler à 100 km/h en ville est rarissime, ou alors, c'est de nuit, dans des villages très peu peuplés où les risques sont minimes au regard des deux exemples que je viens de citer.

Ces deux exemples, à mes yeux, sont beaucoup plus condamnables et méritent des sanctions plus lourdes que celles qui frapperont un automobiliste au volant d'une Safrane roulant à 180 km/h sur une autoroute déserte et par temps sec.

M. René Dosière, rapporteur.

C'est toujours le même discours !

M. Jean-Claude Lemoine.

Je trouve profondément injuste de moins sanctionner un automobiliste à 80 km/h par temps de brouillard sur autoroute ou en pleine ville que celui qui circule à 181 km/h sur une autoroute déserte et sous un ciel clément, car les risques sont différents. La disposition que je défends me paraît mieux adaptée et plus efficace.

Enfin, pour lutter contre la récidive, je propose d'assortir la contravention du retrait de la carte grise ou de la mise en fourrière du véhicule pendant trois mois, en lieu et place de la prison. Car il me paraît également injuste de condamner à la même peine, et de rassembler dans une même cellule où la contagion est de règle, un malfrat qui aurait braqué une grand-mère ou une bijouterie et un contrevenant dont le seul crime serait d'avoir roulé, dans les conditions déjà évoquées, à 181 km/h sur une autoroute.

Le retrait de la carte grise ou la mise en fourrière du véhicule seraient d'autant plus dissuasifs que personne, famille ou amis ne pourrait pendant cette période utiliser le véhicule. L'on sait par ailleurs que les adeptes de la vitesse considèrent leur voiture comme le signe de leur personnalité à défaut d'employer d'autres termes. Ils y sont en tout cas très attachés.

J'en viens maintenant aux dispositions concernant le dépistage des stupéfiants. Les drogues, qu'elles soient douces ou dures, modifient toutes le comportement des chauffeurs et les rendent inaptes à la conduite, surtout si elles s'ajoutent à une prise d'alcool, aussi minime soitelle. Le projet de loi prévoit de soumettre à ce dépistage les conducteurs impliqués dans un accident mortel. Je ne peux qu'approuver cette mesure novatrice et attendue depuis longtemps.

Certes, je sais qu'aujourd'hui on ne peut l'étendre à tout accident avant de pouvoir faire des dépistages systématiques, comme c'est le cas pour l'alcool. Mais je ne souhaite pas attendre dix ans avant de voir cette disposition étendue et à même de donner des résultats, comme ce fut le cas pour l'alcool au volant.

Certains avancent, s'appuyant sur les données de pays étrangers, plus avancés que nous en ce domaine, que 15 % des accidents mortels concernent des conducteurs usagers de drogue ; ce chiffre augmenterait de 25 à 35 %


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la nuit et le week-end. C'est énorme. On sait en outre que les drogues dites douces ou intermédiaires ont des teneurs de plus en plus fortes en THC, hautement déstabilisant et dangereux. La prise de drogue illicite est un facteur très sous-estimé dans les accidents de la route.

L'académie de médecine a affirmé par ailleurs, en avril dernier, que la recherche de substances illicites chez les automobilistes est tout à la fois fiable et relativement peu coûteuse. Des prélèvements de sueur ou d'urine assurent la même fiabilité que les éthylotests.

Voilà deux appareils, en usage dans de nombreux pays.

Ils coûtent 30 francs environ et peuvent être utilisés par tout le monde, très facilement et en toutes circonstances.

De surcroît, leur coût ira en diminuant au fur et à mesure qu'ils se répandront.

Compte tenu de ces données, comment améliorer et accélérer le dépistage des drogues chez les conducteurs ? Il faut d'abord définir précisément les modalités réglementaires de ces contrôles et leur allouer un budget annuel suffisant, au demeurant minime, on l'a vu. Cela n'entraînerait pratiquement pour l'Etat aucune dépense supplémentaire.

Sur le plan légal, la législation pénale existante ne peut viser que les drogues illicites en reprenant la notion de délit de conduite en état d'ivresse. On a tendance à lui préférer celle d'état alcoolique, oubliant que l'ivresse peut être d'origine autre qu'alcoolique.

Il faut redonner aux forces de l'ordre la possibilité de demander des contrôles lorsque le comportement du conducteur apparaît perturbé alors que le dépistage d'alcoolémie est négatif ou minime. L'article R 129 du code de la route offre cette possibilité.

Ainsi, lorsque des agents intercepteront un individu au comportement anormal, ils rempliront la fiche A, bien connue des forces de l'ordre et de tous les médecins qui ont travaillé dans ces circonstances, et effectueront, comme pour l'actuel dépistage de l'alcool, un test WIPE.

Si le test est positif, si l'individu reconnaît avoir pris de la drogue, ils l'enverront, après l'avoir mis à pied, devant la commission médicale primaire du permis de conduire, qui jugera de l'aptitude ou de l'inaptitude à la conduite.

Si l'individu nie toute prise illicite, l'agent pourra réquisitionner un médecin avec la fiche B, qui existe déjà, pour pratiquer un prélèvement sanguin. En cas de confirmation de présence de drogue, le contrevenant se retrouvera devant la commission. Pourquoi d'ailleurs ne pas généraliser de tels contrôles dans certains lieux à certaines heures bien connus ? En outre, les commissions médicales devraient être équipés de tels tests. Leurs coûts, je l'ai dit, est modeste - 30 francs - et leur taux de fiabilité équivalent à celui des éthylotests, entre 80 % et 90 %. En cas de suspicion clinique, les médecins pourraient pratiquer ces dépistages, complétés par un examen sanguin en cas de contestation.

Ils pourraient juger ensuite en toute connaissance de cause de l'aptitude à la conduite, puisque seule la preuve biologique est reconnue en France.

Une autre piste mérite d'être suivie. Lorsqu'un médecin sait qu'un de ses patients automobilistes utilise des drogues, il pourrait être contraint, soit directement, soit par l'intermédiaire du conseil de l'ordre, de le déclarer au préfet, lequel convoquerait ce contrevenant dangereux devant la commission pour statuer sur son cas.

Mais quid du secret médical, me direz-vous ? Je répondrai que tout récemment, à l'occasion de la loi sur le dopage, le législateur n'a pas hésité à le lever. Et pourtant, le sportif dopé n'est dans la plupart des cas dangereux que pour lui-même ; l'automobiliste, en revanche, est dangereux pour les autres.

Pourquoi accepter de lever le secret médical dans un cas et pas dans l'autre ? Voilà comment nous voudrions aujourd'hui compléter l'article concernant le dépistage des drogues illicites.

Enfin, monsieur le ministre, nous proposerons quelques mesures simples dans les dispositions diverses : mieux identifier les voiturettes sur la route, améliorer les rails de sécurité, prendre soin d'un bon dégagement de visibilité dans les carrefours dangereux, améliorer l'aptitude physique à la conduite, éviter au maximum tout ce qui peut modifier le comportement des chauffeurs, apprendre aux conducteurs les gestes qui sauvent. A ce propos, notre collègue Delnatte, qui avait élaboré une proposition de loi dans ce sens, non encore étudiée, déposera un amendement proposant d'apprendre ces gestes dans le cadre de la formation au permis de conduire.

Il s'agit certes de mesures réglementaires, mais nous voudrions qu'elles soient adoptées parce que nous croyons à leur efficacité.

Nos propositions sont le fruit d'expériences, elles ne découlent pas simplement de la réflexion de personnes qui décident au vu de statistiques et qui roulent peu.

Ce texte permet de nombreuses avancées qui nous réjouissent. Si certains de nos amendements étaient acceptés, nous pourrions le voter.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Gilbert Biessy.

M. Gilbert Biessy.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, s'il est un domaine où les idées reçues sont tenaces, c'est bien celui de la sécurité routière.

Certains, hors de notre assemblée, évidemment, sans refuser le principe des actions engagées, tendent à considérer que tout cela n'est guère efficace. D'autres ne veulent voir dans la sécurité routière en général, et dans ce projet de loi en particulier, qu'un arsenal répressif et liberticide.

Ces idées reçues font plusieurs milliers de morts chaque année. C'est l'honneur de notre Parlement que de ne pas leur prêter une oreille par trop complaisante.

Le Sénat, en première lecture, a su, pour l'essentiel, éviter ce domaine majeur, dans une polémique politicienne. Je suis, pour ma part, persuadé, avec le groupe communiste et apparentés, que l'Assemblée nationale dans sa diversité, adoptera la même attitude, après le débat sur les amendements.

En premier lieu, il est utile de rappeler l'efficacité des initiatives de sécurité routière.

Le travail sur la vitesse, l'alcool, les points noirs, la ceinture de sécurité, etc., a permis de diviser le nombre de morts par deux en vingt-cinq ans. Chaque mesure supplémentaire, même la plus impopulaire, comme le permis à points, est suivie d'une baisse des accidents et des décès. Il est utile de rappeler quelques chiffres : 17 000 morts en 1972, 13 500 en 1975, 12 000 en 1978, 10 000 en 1987, 9 500 en 1992, 8 000 en 1996 et, malheureusement, plus de 8 000 en 1998.


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Malheureusement, ces acquis sont en permanence remis en question, nécessitant un renouvellement de la réflexion et la recherche de nouvelles initiatives portant sur le long terme.

En second lieu, rappelons que les mesures de sécurité routière ne se réduisent pas à une logique liberticide et répressive.

La première des libertés à protéger n'est pas celle du prédateur, c'est celle de sa victime. En l'occurrence, ce n'est donc pas la liberté de mettre les autres en danger qui constitue notre souci, c'est celle de circuler sans risquer sa vie, comme le rappelle fort opportunément le projet de loi.

La répression est donc légitime, n'ayons pas peur de le dire. Elle n'est cependant pas suffisante, et le projet de loi ne s'y réduit pas. Il jette notamment les bases d'une éducation à la conduite que j'appellerai « citoyenne ».

Conduire n'est pas seulement un geste technique, c'est aussi et d'abord un acte social qui témoigne de la relation à autrui. Notre conduite automobile semble cristalliser l'intolérance et l'agressivité qui s'emparent plus largement de notre société. Il y a là un terrain privilégié d'éduca tion sociale.

Le Gouvernement propose de développer ce travail d'éducation, à travers ce projet de loi mais aussi par un certain nombre de mesures réglementaires ainsi que l'a rappelé tout à l'heure le ministre : avec l'action interministérielle dans le milieu scolaire, dès le plus jeune âge ; avec le développement de l'apprentissage anticipé ; avec le travail spécifique sur le secteur des auto-écoles, en concertation avec les représentants de la profession, pour que la formation des conducteurs ne soit pas un bachotage mais une véritable formation à la conduite automobile.

Toutes ces mesures ne sont pas répressives ou, alors, je ne m'y entends pas ! Il reste cependant deux points de ce projet qui ont

« fait couler de l'encre » et qui doivent être abordés franchement et sereinement : le principe de responsabilité pécuniaire du propriétaire et l'instauration d'un délit de récidive de grande vitesse.

Le principe de la responsabilité pécuniaire d'abord.

Dire que rien ne doit changer dans ce domaine, ce serait renoncer à améliorer la sécurité sur la route, mais aussi ne pas se soucier de l'application de la loi.

N'étant pas pénale, la responsabilité pécuniaire du propriétaire n'est pas une innovation terrifiante dans le droit français. Elle existe depuis plus de vingt-cinq ans pour le stationnement. En fait, elle ne fait qu'appliquer le principe général selon lequel on est présumé responsable de ce qui nous appartient : si mon chien mord le voisin, si une tuile tombe de mon toit sur un passant...

Que la responsabilité, civile ou financière, ne soit pas de même nature ne change rien au principe.

Evidemment, on peut toujours se gausser de la clause d'exonération de responsabilité qui passe par la fourniture d'éléments permettant l'identification du contrevenant.

Mais chacun comprend bien que l'exonération de responsabilité du propriétaire qui n'aboutirait pas à la responsabilité de quelqu'un d'autre serait vide de sens.

Reste le délit de récidive de grande vitesse.

Peut-être, selon les circonstances, des génies de la conduite dotés de véhicules performants peuvent-ils rouler en sécurité à 180 km/h sur autoroute ou à 100 km/h en ville. En tout cas, un certain nombre de gens le pensent, et nombreux sont ceux qui en meurent.

Dans notre préoccupation de sécurité routière, nous nous attachons, les uns et les autres, au fil des majorités, à promouvoir des règles simples, de portée générale mais surtout de grande lisibilité. On ne fera pas une règle pour chaque conducteur ou chaque type de véhicule. Les arguments de ceux qui, d'une manière simpliste, prennent l'exemple de l'Allemagne pour expliquer que l'absence de limitation de vitesse ne crée pas plus d'accidents ne sont guère recevables. Que les Français témoignent du faible taux d'agressivité des Allemands sur la route et on pourrait alors adopter la réglementation allemande.

La question n'est pas, à mon sens, de savoir qui peut rouler à 180 km/h, il faut mettre en cause la légitimité même de la vitesse dans la conduite sur le domaine public.

Si la limitation de vitesse a un sens - ce que pour notre part, nous croyons - alors elle doit être respectée.

On peut considérer que quelqu'un qui dépasse la limitation de vitesse de plus de 50 km/h ne peut le faire par hasard.

M. François Rochebloine.

Oh !

M. Gilbert Biessy.

Si, en outre, il est contrôlé à cette vitesse deux fois dans la même année, c'est que les sanctions de contravention n'ont pas d'effet sur lui.

M. François Rochebloine.

Cela ne vous est jamais arrivé, mon cher collègue ?

M. Gilbert Biessy.

Dès lors, nous ne trouvons pas scandaleux que l'on considère cette récidive comme un délit, si ce mot a un sens, ne serait-ce que par la mise en danger d'autrui qu'elle constitue.

Si j'ajoute aux différents points que je viens d'évoquer l'audit des aménagements routiers, les mesures d'ordre réglementaire, les concertations sur l'éducation à la conduite, mais aussi les mesures concrète de partenariat avec les collectivités locales, qui sont sans aucun doute la clé du succès, si j'ajoute enfin les améliorations importantes proposées par la commission des lois à ce sujet, j'ai le sentiment que nous sommes en présence d'une démarche responsable et ambitieuse, une démarche de long terme. C'est pourquoi le groupe communiste et apparentés votera ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le ministre de l'aménagement, des transports et du logement.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Alain Ferry.

M. Alain Ferry.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi soumis à notre examen s'attaque à un fléau qui touche chacun de nos concitoyens : l'insécurité routière.

L'importance du nombre d'accidents mortels dans notre pays est un sujet d'inquiétude pour tous les parlementaires : 8 000 personnes sont tuées chaque année, plus de 20 par jour, et 450 hommes et femmes sont blessés quotidiennement ! Il faut faire vivre ces statistiques : songeons aux drames humains qu'elles recouvrent.

M. François Rochebloine.

C'est vrai !

M. Alain Ferry.

Le groupe UDF partage entièrement la volonté du Gouvernement de lutter contre l'insécurité routière. Cependant, monsieur le ministre, votre méthode est-elle la bonne ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

Nous ne contestons en rien, cela va de soi, l'objectif que vous poursuivez, celui d'épargner des vies humaines.

Le problème que nous soulevons est celui de l'opportunité de certaine mesures que vous préconisez. Nos commentaires se veulent équilibrés et constructifs.

Le projet de loi comporte six sections. Nous allons les examiner successivement.

La première section traite de la formation des conducteurs novices auteurs d'infractions.

Il est proposé d'instaurer un stage de sensibilisation obligatoire pour ces personnes lorsque les infractions commises entraînent, à elles seules, la perte de quatre points. Cette mesure de responsabilisation, que le Sénat souhaitait plus contraignante encore, nous paraît tout à fait justifiée.

L es dispositions relatives à l'enseignement de la conduite et de la sécurité routière appellent davantage de commentaires.

Le cadre juridique et les obligations des auto-écoles ne sont pas suffisamment précis. Ce projet de loi s'attache à combler cette lacune. Nous nous en félicitons.

Toutefois, un point important demeure en suspens : le préjudice financier que subissent les élèves d'une autoécole fermant brusquement ses portes sans avoir dispensé l'enseignement pour lequel un forfait a été souscrit. Mes collègues Edouard Landrain, Pierre Micaux et moi-même avons déposé un amendement visant à exiger des autoécoles une garantie financière suffisante.

M. François Rochebloine.

Très bien !

M. Alain Ferry.

La responsabilité pécuniaire des propriétaires de véhicules fait l'objet de la troisième section du projet de loi.

Cette disposition nous paraît discutable. La mesure proposée étend la responsabilité pécuniaire du propriétaire de véhicule à de nouveaux cas d'infraction graves. Le rapporteur de la commission estime que le principe de la responsabilité pénale personnelle n'est en rien menacée par cette innovation. Nous n'en sommes pas convaincus.

Qui plus est, le dispositif de l'article 4 porte, à nos yeux, atteinte au principe de la responsabilité pénale personnelle. En effet, la personne pénalement responsable doit supporter seule la sanction.

Les aménagements que connaît ce principe ne constituent pas un argument que vous pouvez nous opposer, monsieur le ministre. Le seul cas comparable est la possibilité pour les tribunaux de contraindre un employeur à payer l'amende à laquelle son salarié a été condamné. Or ce précédent n'en est pas un : il ne reconnaît à la justice qu'une faculté alors que vous prévoyez un transfert de sanction automatique et aveugle.

Essayons d'envisager concrètement les effets de cette mesure. Sauf cas de force majeure, le propriétaire du véhicule se trouvera devant l'alternative, soit d'être tenu comme responsable de l'infraction, soit d'indiquer l'identité du conducteur. Cette situation peut correspondre à une délation.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Mais non !

M. Alain Ferry.

Pour toutes ces raisons, mes collègues Landrain, Leonetti et Micaux ont déposé un amendement de suppression de l'article.

Nous abordons maintenant, mes chers collègues, le point le plus discutable de ce projet de loi, celui du délit de grande vitesse en cas de récidive de dépassement de la vitesse autorisée égal ou supérieur à 50 km/h.

Ce délit de grande vitesse suscite plusieurs objections.

Tout d'abord, il existe un risque de double emploi avec le délit de mise en danger d'autrui, institué précisément pour sanctionner le même comportement. Selon la commission, les tribunaux interprètent cette notion de façon restrictive, et les chauffards notoires ne sont jamais sanctionnés sur son fondement. Dans ce cas, pourquoi n'avoir pas précisé le sens de cette incrimination à l'occasion de ce projet de loi ? C'était pourtant l'occasion rêvée.

En outre, l'arsenal répressif en vigueur est déjà considérable. Mieux vaudrait à nos yeux faire appliquer les règles déjà en vigueur. A quoi bon multiplier les règles si elles ne sont pas appliquées faute de moyens ? A quoi bon une loi déclarative ? M. François Rochebloine. Très bien ! M. Alain Ferry. Appliquons le droit en vigueur, voilà l'objectif. Cessons l'empilement illusoire et bureaucratique de mesures sans valeur.

M. François Rochebloine. Eh oui ! M. Alain Ferry. De surcroît, ne s'agit-il pas d'un souhait obstiné de votre administration, plutôt que le résultat d'une réelle réflexion ? M. François Rochebloine. Tout à fait ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement. Le Sénat est d'accord !

M. Alain Ferry.

Enfin, comment ce nouveau délit serat-il perçu par nos concitoyens ? L'automobiliste en infraction sera considéré comme un délinquant sérieux. Finalement, il vaut presque mieux voler une voiture que de dépasser la vitesse autorisée ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Daniel Marcovitch. Ridicule ! M. François Rochebloine. Ce n'est pas ridicule, c'est la réalité ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement. Zéro pointé ! M. Georges Sarre. Monstrueux ! M. François Rochebloine. Mais non ! M. Alain Ferry. Cessons de réglementer ! Cessons d'introduire le juge là où il faudrait un effort de responsabilisation et d'éducation de chacun ! Par ailleurs, si vous persistez à maintenir ce délit, il nous paraît essentiel de moduler la notion de délit de grande vitesse selon qu'il est constaté ou non en agglomération.

M. François Rochebloine. C'est le minimum !

M. Jean-Pierre Baeumler. Chauffard Rochebloine ! C'est connu.

M. Alain Ferry. Dans ce cas de figure, il faut bien sûr se montrer plus strict. Il est plus dangereux de rouler à 100 km/h en ville ou dans un village que d'atteindre 180 km/h sur une autoroute.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement. Qu'en savez-vous ? M. Jean-Pierre Baeumler. Il circule en Porsche ! M. Alain Ferry. J'ai déposé avec mes collègues un amendement allant dans ce sens.

Enfin, les diverses dispositions contenues dans la dernière section du projet de loi pourraient être complétées par un amendement de Pierre Micaux et moi-même, qui instaure un contrôle médical officiel périodique et gratuit pour les personnes âgées de soixante-quinze ans et plus.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

M. François Rochebloine. Même pour les personnes âgées de soixante-dix ans !

M. Alain Ferry.

Ce n'est pas leur faire injure que de c onstater combien les facultés auditives et visuelles peuvent être affectées par l'âge.

M. Jean-Antoine Leonetti.

Il faut le dire au Sénat ! (Sourires.)

M. François Rochebloine.

Excellent amendement.

M. Alain Ferry.

Quant au dépistage systématique des stupéfiants pour les conducteurs impliqués dans un accident mortel - objet de la cinquième section du projet de loi - nous en approuvons le principe.

Cependant, il est anormal que l'alcool et les drogues fassent l'objet d'un traitement différent alors que leurs effets, seuls, sont différents. Or, curieusement, le dispositif retenu par le Gouvernement ne prévoit aucune sanction spécifique réprimant la conduite sous l'emprise de stupéfiants. Visiblement, dans notre pays, pardonnez-moi l'expression, il vaut mieux rouler « schooté » que

« bourré » !

M. Dominique Bussereau.

Demandez à Kouchner !

M. Alain Ferry.

J'ai bien conscience que le principe d'égalité de traitement est difficile à mettre en oeuvre. La consommation d'alcool n'est répréhensible qu'à partir d'un certain taux d'alcool dans le sang, alors que l'absorption de drogues est illégale, quelle que soit son importance. Mais est-ce une raison suffisante pour laisser la situation en l'état ? Je ne le pense pas. Je souhaite que nous adoptions l'amendement que j'ai déposé et qui comble cette lacune.

En définitive, nous ne pouvons accepter que 8 000 personnes meurent chaque année d'accidents de la route ; cette situation doit cesser.

V otre délit de grande vitesse, n'est qu'un effet d'annonce et vous négligez nombre de points décisifs pour l'avenir.

M. François Rochebloine.

Tout à fait !

M. Alain Ferry.

Il nous paraît plus essentiel d'aménager les « points noirs » qui causent de nombreux accidents et sont connus de tous, de brider les voitures en fonction de leurs cylindrées...

M. Jean-Pierre Baeumler.

Il faut laisser cela à Peugeot et à Renault !

M. Alain Ferry.

... car il est incohérent d'instituer un délit de grande vitesse tout en laissant les petites voitures rouler de plus en plus vite,...

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

C'est la nuit du 4 août !

M. Jean-Pierre Baeumler.

Ça vous fait rire, monsieur Ferry : vous roulez en Porsche !

M. Alain Ferry.

... d'assurer la formation et l'éducation des futurs conducteurs dès le plus jeune âge, enfin d'harmoniser les politiques de sécurité routière au niveau européen.

Monsieur le ministre, en raison de toutes ces lacunes, le groupe UDF votera contre votre projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. Dominique Bussereau.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Georges Sarre.

M. Georges Sarre.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le présent projet de loi nous convie à prendre les mesures législatives prévues à l'occasion du comité interministériel de sécurité routière du 26 novembre 1997.

A cette date, monsieur le ministre, on pouvait encoree ntretenir quelque illusion sur la politique menée entre 1994 - mais surtout 1995 - et 1997 par vos prédécesseurs. Mais depuis, les statistiques sont tombées : elles sont mauvaises. L'année 1997 a été celle du ralentissement dans la baisse des indicateurs globaux d'insécurité routière. En 1998, les résultats sont à nouveau mauvais : le nombre des tués et accidentés augmente en raison de l'aggravation des chocs subis.

Monsieur le ministre, je crois savoir que nous sommes d'accord : rien ne serait pire que de croire que nous avons atteint un pallier incompressible de tués et accidentés de la route. Comme nous y invite l'Observatoire national i nterministériel de sécurité routière dans son bilan pour 1997, il nous appartient de donner une nouvelle impulsion pour éviter que l'on se satisfasse de la situation acquise. Oui, une nouvelle impulsion est plus que nécessaire : elle est urgente. Car pendant quelques années, de 1995 à 1997 notamment, l'effort s'est relâché...

M. Dominique Bussereau.

Bien sûr que non ! Les crédits étaient plus importants !

M. Georges Sarre.

... et, sous prétexte de mettre l'accent sur la prévention, le volet répression a été peu à peu abandonné.

Comment imaginer, mes chers collègues, qu'une politique de sécurité routière puisse être efficace sans la peur du gendarme ? Et pourtant, j'ai encore en tête les propos de ceux qui soutenaient l'idée saugrenue défendue par M. Bernard Pons qui voulait rendre visibles les contrôles radar ! Et, monsieur le ministre, pourquoi ne pas prévenir les « infractionnistes » du jour, de l'heure et du lieu où s'effectueraient les contrôles ?

M. Dominique Bussereau et M. François Rochebloine.

Cela n'a rien à voir !

M. Georges Sarre.

Si, et je vais vous expliquer pourquoi.

Les mauvais résultats que nous enregistrons ont une cause simple : la diminution du nombre de contrôles.

N'est pas en cause une quelconque lacune réglementaire ou législative, mais le manque de volonté - pas de moyens, monsieur Ferry - pour appliquer la loi avec la rigueur nécessaire.

M. François Rochebloine.

Manque de volonté de qui ?

M. Georges Sarre.

Que vaut un texte s'il n'est pas appliqué, s'il n'est pas respecté ? Je reviens sur l'évolution inquiétante des dernières statistiques. L'augmentation de la gravité des chocs s'explique par trois causes : la vitesse, le non-port de la ceinture, l'alcool.

Chacune de ces causes pourrait être efficacement combattue. Aucune ne l'est vraiment. Les contrôles en zone de police, comme de gendarmerie, sont insuffisants.

M. Dominique Bussereau, M. Alain Ferry et M. François Rochebloine.

C'est vrai !

M. Georges Sarre.

L'effet dissuasif et préventif du permis à points s'essouffle faute d'être entretenu. Les commissions administratives de retrait du permis à points sont toujours moins nombreuses, et sont même en chute libre.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

M. Alain Ferry.

Tout à fait !

M. Dominique Bussereau.

Il n'y a pas de volonté du Gouvernement !

M. Georges Sarre.

Leur disparition programmée par le c omité interministériel de sécurité routière de novembre 1997 risque ainsi de casser toute la dynamique pédagogique du permis à points.

M. Dominique Bussereau.

Vivement Chevènement !

M. Georges Sarre.

Je souhaite maintenant revenir sur le délit de grand excès de vitesse. Je voudrais dire très cordialement à M. Ferry, car nos rapports sont cordiaux...

M. Alain Ferry.

C'est vrai !

M. Georges Sarre.

... que dans son intervention il n'a manqué aucun des poncifs qu'on entend à propos de tout ce qui conduit aux infractions routières, aux accidents, au nombre de tués et de blessés. Vous m'entendez, mon cher collègue, vous n'en avez pas manqué un seul !

M. François Rochebloine.

C'est une agression !

M. Georges Sarre.

Tout ce que vous avez dit est contraire à toute politique responsable de sécurité routière. Je ne peux développer faute de temps, mais je dois dire qu'on ne peut pas être à ce point « à côté de la plaque » et dire ensuite que l'on est d'accord avec le Gouvernement pour que le nombre des tués et des blessés diminue ! Evidemment, vous ne pouvez pas dire que vous êtes pour qu'il augmente. Qui pourrait soutenir une telle ligne ? Mais, enfin, comment peut-on tenir des propos qui encouragent en fin de compte les infractions ? Oui, une « infractionniste » qui dépasse de 50 km/h la vitesse autorisée est un dangereux criminel !

M. Dominique Bussereau.

Oh !

M. Georges Sarre.

Parfaitement ! Les accidents de la circulation sont là pour le prouver !

M. Jean-Antoine Leonetti.

Rétablissez la peine de mort !

M. Georges Sarre.

J'ai voté pour l'abolition de la peine de mort et vous avez peut-être voté contre !

M. Daniel Marcovitch.

Elle s'applique toute seule la plupart du temps !

M. Georges Sarre.

Le problème est simple : il faut réprimer - vous connaissez mon franc-parler, monsieur le ministre - le grand excès de vitesse qui me paraît résumer l'équivoque sur laquelle repose la sanction prévue. Rendre délictuel un grand excès de vitesse en cas de récidive seulement c'est se bercer d'illusions quant à l'efficacité des mesures envisagées. Cela rappelle la merveilleuse expression marseillaise : « Retenez-moi ou je fais un malheur ! » (Sourires.)

Traversez la France entière, du nord au sud, de l'est à l'ouest. Si vous êtes contrôlé, arrêtez-vous, faites une photo et envoyez-la moi !

M. François Rochebloine.

Vous avez beaucoup de chance, monsieur Sarre !

M. Jean-Antoine Leonetti.

Il a une cocarde ! (Sourires.)

M. Georges Sarre.

Comme il n'y a pas de contrôle monsieur le ministre, dites-vous bien qu'il n'y aura jamais de récidiviste ! Certains parlementaires grimpent aux rideaux et disent : « Mais c'est épouvantable ! Vous rendez-vous compte de ce qui va se passer ? » Mais il ne se passera rien...

M. Dominique Bussereau.

C'est bien ce qu'on dit !

M. Georges Sarre.

... pour la simple raison qu'il n'y a pas assez de contrôles.

M. Alain Ferry.

Eh bien alors, il faut en faire !

M. Georges Sarre.

La mesure deviendra efficace si l'on augmente le nombre de contrôles, mais cela ne dépend pas particulièrement de M. Gayssot. Il faut une volonté d'ensemble.

M. François Rochebloine.

Mais il y a des contrôles !

M. Georges Sarre.

En conclusion, je dirai que la prévention est nécessaire.

S'agissant des auto-écoles, monsieur le ministre, il faut là aussi faire en sorte que la profession, qui compte d'excellents professionnels - j'en connais de nombreux -, soit moralisée. Il n'est que de circuler en banlieue parisienne ou dans d'autres régions de France pour savoir ce que cela signifie concrètement.

Bref, monsieur le ministre, vous n'avez jamais été inquiet, et vous avez eu raison, car je voterai votre projet de loi. D'ailleurs, si je devais résumer mon intervention, je dirais que qui peut le plus peut le moins.

M. Jean-Pierre Baeumler, M. Gilbert Biessy et

M. Daniel Marcovitch.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Daniel Marcovitch.

M. Daniel Marcovitch.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la sécurité est l'affaire de tous. Cette phrase, jusqu'à présent réservée à la sécurit é publique, se devait d'être étendue à la sécurité routière

En effet, le nombre de victimes, morts ou blessés lors d'accidents de la circulation, nous rappelle que, dans ce domaine, la France, comparée aux autres pays européens, obtient de médiocres résultats.

L es mesures réglementaires prises dès les années soixante-dix avaient déjà permis, tant bien que mal, de faire baisser de façon sensible les pertes en vies humaines ou les dégâts matériels, même si leur niveau était resté élevé.

Il était donc plus que temps de prendre des décisions effectives. Le projet de loi qui nous est présenté aujourd'hui, en reprenant les propositions formulées par le comité interministériel de sécurité routière et par le rapport Verré, représente la partie législative d'une politique globale qui inclut, outre une réforme de l'enseignement de la conduite, des sanctions pour les contrevenants et des dispositions concernant les infrastructures.

En tant que membre de la commission de la production et des échanges, je me suis particulièrement intéressé au premier point.

Le constat de l'état du secteur de l'enseignement de la conduite, largement partagé par les professionnels et les pouvoirs publics, est loin d'être satisfaisant.

En effet, il s'agit d'un secteur qui se caractérise par une concurrence très vive du fait de la multiplication du nombre d'établissements, alors que le nombre de candidats diminue. Le rapport établi par la commission des lois - j'allais dire l'excellent rapport -...

M. René Dosière, rapporteur.

Je vous remercie.

M. Daniel Marcovitch.

... est particulièrement éclairant sur ce point.

Entre 1989 et 1994, le nombre d'auto-écoles est passé de 10 000 à presque 14 000 tandis que le nombre de candidats baissait de près de 100 000.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

Cette concurrence acharnée entraîne la multiplication des établissements éphémères, des enseignements bradés, d es pratiques répréhensibles en matière de gestion d'entreprise et parfois même vis-à-vis des clients.

Je rappelle que l'enseignement de la conduite par les auto-écoles peut être considéré comme un véritable service public. Une formation de qualité est le gage de conducteurs responsables tant pour leur propre vie - nous en parlions tout à l'heure - que pour la vie d'autrui. A ce titre, mais également en vertu de la protection du consommateur dont l'Etat est garant, il était du devoir des pouvoirs publics de mettre fin aux dérives constatées.

Les syndicats professionnels, attachés à leur métier et conscients de leurs responsabilités, l'ont bien compris et soutiennent le dispositif proposé.

L'article 2 inscrit enfin dans la loi les conditions nécessaires pour exercer la profession d'enseignant et celle d'exploitant d'établissement d'enseignement de la conduite à titre onéreux.

Rappelons que, jusqu'à présent, l'ensemble de ces dispositions ne faisaient l'objet que de mesures réglementaires inscrites dans le code de la route. Cette particularité m'a d'ailleurs amené à déposer un amendement afin d'interdire la gestion ou l'exploitation d'une autoécole aux personnes sous le coup d'une interdiction d'exercer une activité commerciale ou artisanale prononcée par un tribunal de commerce. Ce qui apparaît comme une évidence ne l'était pas jusqu'à présent.

Si de telles anomalies n'étaient pas courantes, elles existaient néanmoins. L'aggravation des sanctions à l'encontre des contrevenants, et notamment la possibilité d'une suspension administrative de l'autorisation d'enseigner ou d'exploiter un tel établissement, mais également l'obligation d'un contrat écrit entre le candidat et l'auto-école participent concrètement à la moralisation de cette profession et à la protection du consommateur.

Je tiens tout de même à rappeler que la réglementation en vigueur, sans y inciter totalement, favorise néanmoins certaines pratiques très discutables. Ainsi en est-il - et c'est l'exemple le plus frappant - du nombre de places accordé à chaque auto-école à l'examen du permis de conduire qui est calculé en fonction du nombre d'élèves inscrits, quelle qu'ait été la formation du candidat. Les auto-écoles ont donc tout intérêt à attirer par tous les moyens le plus grand nombre d'élèves.

La méthode de répartition des places d'examen n'est donc ni équitable ni réaliste, comme vous me le précisiez, monsieur le ministre, en réponse à l'une de mes questions écrites le 10 août dernier. Une réforme de ce dispositif d oit être mise en oeuvre. La mission d'inspection conjointe du ministère de l'intérieur et de votre ministère a conclu qu'elle passerait par une réorganisation des services administratifs impliqués dans les examens du permis de conduire, dans le respect des règles de la fonction publique, et par une amélioration des conditions d'examen.

Par le biais de plusieurs amendements, le groupe socialiste vous fera des propositions allant dans ce sens. Nous souhaitons qu'elles soient entendues, car l'enjeu est d'importance.

La possession d'un permis de conduire est aujourd'hui indispensable dans la plupart de nos activités, notamment pour trouver un emploi. Nous devons donc être particulièrement exigeants sur la qualité et les conditions de l'enseignement de la conduite. Ce projet de loi et les amendements que nous défendrons en sont les garants.

Le groupe socialiste soutient cette démarche. Il votera donc ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. René Dosière, rapporteur.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Patrick Delnatte.

M. Patrick Delnatte.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour bien mesurer tous les enjeux du texte qui nous est soumis, il nous faut partir d'un constat déplorable : en matière de sécurité routière, et en dépit d'une amélioration ces dernières années, la France est parmi les pays les plus mal placés en Europe.

Avons-nous tout entrepris pour améliorer la sécurité routière ? Non, sans doute, et l'examen de ce texte doit être pour nous l'occasion de dresser le bilan de ce qui a été accompli et, surtout, de nous demander ce que nous devons faire. Prenons en exemple nos voisins européens et posons nous la question : sommes-nous novateurs et efficaces en la matière ? Lors du comité interministériel de sécurité routière du 26 novembre 1997, le Gouvernement s'est fixé pour objectif de diminuer par deux en cinq ans le nombre de tués sur les routes. Nous le souhaitons tous, mais, pour atteindre un tel objectif, il semble impératif de prendre dès à présent des mesures fortes et novatrices. Votre texte sera jugé en fonction de cela. Que proposez-vous pour y parvenir ? En matière de sécurité routière, le débat est déjà anc ien entre les partisans du répressif et ceux du préventif. Force est de constater que, avec certaines dispositions que vous avez voulues spectaculaires, votre texte entend satisfaire davantage les premiers que les seconds.

Pour ma part, je crois que, dans un domaine aussi sensible, il ne faut rien négliger et que, plus que jamais, un juste équilibre doit être trouvé entre répression et prévention.

M. François Rochebloine.

Très bien !

M. Patrick Delnatte.

Je ne contesterai pas, bien au contraire, la nécessité de combattre efficacement la vitesse excessive ou l'alcool au volant, mais si ces comportements doivent effectivement être sanctionnés certaines dispositions que vous préconisez posent problème.

Je pense notamment à votre souhait d'étendre la responsabilité pécuniaire du titulaire de la carte grise. Ne pensez-vous pas qu'une telle mesure ignore les droits élémentaires de la défense du propriétaire de bonne foi et que, à ce titre, elle encourt la censure du Conseil constitutionnel ? Comment condamner le propriétaire d'un véhicule sans établir sa culpabilité ? De même, cette disposition ne favorise-t-elle pas l'impunité du véritable auteur de l'infraction ? Sans doute serait-il souhaitable que votre volontarisme se manifeste dans des domaines où notre retard est vraiment important.

En matière de répression, tout d'abord, ne croyez-vous pas qu'il est temps de sanctionner la conduite sous l'emprise de produits stupéfiants, de la même façon qu'est sanctionnée la conduite en état alcoolique ?

M. Dominique Bussereau.

Très bien !

M. Patrick Delnatte.

Vous proposez de faire procéder à des dépistages de consommation de drogue sur tout conducteur impliqué dans un accident mortel. Fort bien ! Mais pourquoi attendre qu'il y ait accident mortel ? Ne doit-on pas agir dès qu'il y a accident corporel et même dès qu'il y a conduite dangereuse ou troubles du comportement ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

Ce problème n'a rien de marginal. Dans ma circonscription limitrophe de la Belgique, de plus en plus de jeunes reviennent de boîtes de nuit en conduisant sous l'emprise de stupéfiants.

M. François Rochebloine.

Tout à fait !

M. Patrick Delnatte.

Rien de vraiment sérieux n'a été fait à ce jour pour les sensibiliser aux dangers qu'ils encourent et font courir aux autres.

M. Jean-Claude Lemoine.

C'est vrai !

M. Patrick Delnatte.

Je vous rappellerai simplement qu'il est tout à fait reconnu que la consommation de stupéfiants est une cause de plus en plus importante d'accidents graves chez les dix-huit trente-cinq ans.

Sans doute est-il temps également de rattraper un retard important en matière de prévention. On peut, sans nul doute, faire beaucoup avec des mesures simples.

Je prendrai pour exemple l'équipement de ceintures de sécurité dans les bus de transport scolaire. Je sais que des directives européennes nous imposent l'installation d'un tel équipement selon un échéancier qui s'étale jusqu'à l'an 2001. Pour autant, ne serait-il pas possible d'accélérer cette mise en place ? J'aborderai pour terminer un sujet qui tient à coeur à beaucoup de parlementaires et qui touche à la nécessaire modernisation du permis de conduire. Il participe d'une démarche visant à combattre toutes les causes de la mortalité routière et donc à atteindre l'objectif que vous vous êtes fixé, monsieur le ministre.

En l'occurrence, il s'agit d'introduire dans la formation de tous les candidats au permis de conduire l'apprentissage des notions élémentaires de premiers secours, dites des « cinq gestes qui sauvent ».

Cette mesure s'inscrit dans le combat que mène depuis plus de trente ans l'association « Conseil d'action pour la prévention des accidents et les secours d'urgence » et repose sur le constat que 1 000 à 1 500 personnes pourraient être sauvées chaque année si, sur les lieux d'un accident, au moins un des témoins possédait la connaissance de ces cinq gestes.

Il s'agirait d'un enseignement bref, pratique, limité à l'urgence vitale et assimilable par tous, qu'un comité interministériel de la sécurité routière avait d'ailleurs dé jà approuvé en 1974.

Une telle mesure a déjà prouvé toute son efficacité en Suisse. Il a été clairement démontré qu'elle ne peut trouver sa pleine dimension que dans le cadre de l'apprentissage de la conduite et qu'elle est tout à fait réalisable, tant sur un plan pratique qu'en termes de coût. Son adoption permettrait à la France d'être, pour une fois, à l'avant-garde au sein des pays de l'Union européenne. Je crois d'ailleurs savoir que cette mesure fait l'objet d'un large consensus dans cet hémicycle ; ce large accord repose sur une considération humanitaire et sur l'idée qu'il est indispensable de développer la responsabilité.

Je ne prétends pas, bien sûr, être exhaustif s'agissant des mesures susceptibles de concourir à l'amélioration quotidienne de la sécurité de nos concitoyens sur les routes et qui pourraient être retenues dans le présent projet de loi, mais je suis convaincu que le Gouvernement et notre assemblée s'énorgueilliraient à examiner sans esprit partisan les propositions qui leur sont faites en ce sens.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. François Rochebloine.

M. François Rochebloine.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi portant diverses mesures relatives à la sécurité routière que nous sommes appelés à examiner aujourd'hui a notamment pour objectif de diviser par deux le nombre des tués sur les routes d'ici à l'année 2002 et fait suite aux décisions du comité interministériel de sécurité routière de novembre 1997.

Ce texte reprend ou s'inspire d'un certain nombre de dispositions figurant dans deux projets de loi préparés sous la précédente législature. En cela, votre texte comporte peu d'innovations, monsieur le ministre.

Diviser par deux le nombre de tués, comment ne pourrait-on pas souscrire à un tel objectif ? La France, il faut bien le reconnaître, fait figure de lanterne rouge en matière de sécurité routière. Nous ne pouvons donc qu'encourager une démarche volontariste des pouvoirs publics. Toutefois, nous constatons que le seul moyen proposé pour atteindre un tel objectif consiste à appliquer la notion de délit aux grands excès de vitesse.

Bien sûr, il est exact que la vitesse est à l'origine d'accidents mortels ou d'accidents susceptibles de provoquer de graves séquelles. Toutefois, je crains que le vrai problème ne se situe pas seulement là : plus largement, c'est le comportement inadapté et dangereux d'un trop grand nombre de conducteurs qui est en cause.

Il faudrait différencier les excès de vitesse selon la configuration des lieux de circulation, le type d'infrastructure routière et les conditions de circulation du moment : un excès de vitesse en agglomération ou sur autoroute, ce n'est pas la même chose, vous en conviendrez. En effet, on peut être très dangereux à 70 ou à 80 km/h en agglomération et l'être beaucoup moins à des vitesses qui peuvent paraître excessives sur autoroute. Dans le même ordre d'idée, on peut être plus dangereux à 90 km/h sur une route départementale mal profilée qu'en excès de vitesse sur une autoroute peu fréquentée.

En outre, le positionnement de panneaux d'entrée et de sortie d'agglomération, lesquels sont parfois très éloignés des centres-villes, ne facilite pas la lisibilité de la signalisation routière. Trop d'interdictions, trop de restrictions dans certaines lignes droites nuisent incontestablement à la qualité du message.

En revanche, il me semblerait urgent de traiter avec sévérité non seulement les conducteurs en état d'ébriété mais aussi ceux sous l'influence de stupéfiants. Des sanctions spécifiques pourraient être envisagées à l'encontre de ces derniers.

De même, pourquoi ne pas développer davantage la prévention, en particulier auprès des jeunes ? Les accidents mortels, véritable hécatombe dont est victime notre jeunesse, sont malheureusement bien concentrés dans le temps : ils ont lieu à la sortie des discothèques les vendredis, les samedis et les dimanches soirs. Ne pourrait-on pas pratiquer davantage de contrôles inopinés, et, dans le cas de résultats positifs, confisquer les clés des véhicules, appeler un taxi afin de permettre aux conducteurs et aux personnes qui les accompagnent, de regagner à leurs frais leur domicile en toute sécurité, et inviter les conducteurs à venir le lendemain récupérer leurs papiers et leur véhicule au prix d'un avertissement ? Dans les cas de récidive, des sanctions pourraient alors être appliquées.

M. Alain Ferry.

Très bien !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

M. François Rochebloine.

Il me semble que les jeunes concernés retiendraient la leçon pour l'avenir. Je crois la prévention plus utile que la répression.

M. Alain Ferry.

Très bien !

M. François Rochebloine.

Il me paraît également important d'évoquer le problème posé par les véhicules sans permis. Les conducteurs de ce type de véhicule, y compris ceux qui conduisent des véhicules dont la cylindrée est inférieure à 50 centimètres cubes, devraient au moins être obligés de satisfaire aux tests du code de la route.

Enfin, pourquoi ne pas soumettre, périodiquement, comme c'est le cas en Angleterre, les automobilistes âgés de plus de soixante-dix ans à une visite médicale ? Ce contrôle permettrait de vérifier leur acuité visuelle et auditive ainsi que leurs réflexes.

Par ailleurs, monsieur le ministre, où en sommes-nous de l'élimination des points noirs de notre réseau routier ?

M. Jean-Claude Lemoine.

Bonne question !

M. François Rochebloine.

Certes, cela fait partie des priorités affichées par tous les gouvernements, mais, dans la réalité, les crédits de l'équipement ne suivent malheureusement pas.

Il faut toujours attendre qu'un certain nombre d'accidents mortels se soient produits pour qu'enfin les demandes soient prises en compte : j'en parle en connaissance de cause car c'est le cas dans mon département, la Loire. Sans doute est-ce aussi l'un des effets d'une déconcentration insuffisante du ministère de l'équipement et de choix budgétaires contestables.

Le projet que vous nous présentez aujourd'hui, monsieur le minsitre, me semble incomplet car il se contente de créer un délit d'excès de vitesse.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

De grand excès de vitesse !

M. François Rochebloine.

Je crains que ce ne soit qu'une fausse bonne solution destinée à nous donner bonne conscience. Certains auront la chance de passer au travers des contrôles. D'autres, moins chanceux, et dont le véhicule est l'outil de travail, pourront, après deux excès de vitesse au cours de la même année,...

M. le ministre de l'enseignement, des transports et du logement.

Deux grands excès de vitesse !

M. François Rochebloine.

... se retrouver en prison sans parler du montant de l'amende qu'ils devront acquitter.

Appliquons les mesures existantes, soyons sévères avec ceux qui conduisent sous l'empire de l'alcool ou de stupéfiants, responsabilisons les citoyens et en particulier les jeunes, améliorons nos infrastructures, supprimons les trop nombreux points noirs de notre réseau routier, et je suis persuadé que le nombre de morts sera divisé par deux, voire plus.

Mais dans l'état actuel du projet, et malgré les améliorations apportées par le Sénat, je ne peux, pour ma part, accepter que le fait de commettre deux excès de vitesse au cours de la même année soit désormais considéré comme un délit ! Qui d'entre nous dans cet hémicycle ne les a pas commis ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Armand Jung.

M. Armand Jung.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il existe dans notre pays un puissant lobby de la vitesse, de la voiture, de la voiture de sport, de la moto et de la moto de grosse cylindrée. Malheureusement, tel n'est pas le cas pour le vélo ou pour le piéton. Il est vrai que les enjeux industriels et financiers ne sont pas les mêmes.

Les chiffres des accidents de la route ont été donnés tout à l'heure dans toute leur brutalité. Mais savez-vous que le nombre des cyclistes tués par des voitures n'a cessé d'augmenter, notamment ces deux dernières années ? En 1997, 329 cyclistes ont trouvé la mort dans des accidents de la route ; quant au nombre des piétons tués la même année, il s'est élevé à 929.

Le projet de loi que vous défendez aujourd'hui devant nous, monsieur le ministre, est courageux, et nous le soutiendrons, notamment pour combattre ce qu'il faut bien appeler la « délinquance routière ».

M. René Dosière, rapporteur.

Très juste !

M. Armand Jung.

Néanmoins, je doute que ce texte puisse inverser de manière durable la courbe des accidents mortels de la route.

M. Alain Ferry.

Très juste !

M. Armand Jung.

De plus, il n'aura guère d'incidences pour les plus vulnérables des usagers de la route, à savoir les cyclistes et les piétons.

J'aurais, pour ma part, souhaité une modulation du délit de grande vitesse en fonction des infrastructures routières empruntées. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. François Rochebloine.

C'est évident !

M. Armand Jung.

J'aimerais ouvrir une parenthèse à ce sujet. Certains d'entre nous ont fait la même proposition de modulation mais pour autoriser une augmentation généralisée de la vitesse.

M. François Rochebloine.

Pas du tout !

M. Alain Ferry.

Vous n'avez pas écouté !

M. Armand Jung.

Ma démarche est exactement inverse, elle vise à faire baisser la vitesse.

M. Jean-Pierre Baeumler.

Il faut en effet faire baisser la vitesse !

M. Armand Jung.

J'en reviens à mon propos. L'excès de vitesse ne peut pas être traité de manière identique en ville et sur autoroute ; le degré de dangerosité n'y est pas le même, notamment pour les cyclistes et les piétons.

M. François Rochebloine.

Peu menacés sur autoroute...

M. Armand Jung.

Un seuil fixe de délit de grande vitesse n'affectera donc pas la vitesse de circulation en ville, première cause de mortalité des piétons.

Dans le même ordre de préoccupations, j'aurais souhaité un renforcement des peines infligées lors des accidents graves impliquant au moins un cycliste ou un piéton. La sanction doit en effet être proportionnée au danger réel que fait courir le mode de transport utilisé : le nombre des piétons tués par des cyclistes peut se compter sur les doigts d'une main,...

M. François Rochebloine.

Et celui des piétons tués par des piétons ?

M. Armand Jung.

... il n'en est malheureusement pas de même du nombre des piétons tués par des automobilistes.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

Par ailleurs, le simple bon sens voudrait que certaines sanctions soient modulées en fonction du risque potentiel créé. En effet, à l'heure actuelle, le juge peut infliger une amende de 2 000 francs et la suspension du permis à un cycliste comme à un automobiliste en cas de non-respect d'un feu rouge. Pourtant, dans le cas précis, les risques causés à autrui sont totalement disproportionnés. Par ailleurs, aux termes du code de la route, un automobiliste peut tuer un cycliste sans encourir de peine supérieure à quelques mois de prison avec sursis. Il y a là quelque chose d'aberrant. Peut-être pourrez-vous, monsieur le ministre, rectifier par voie réglementaire certaines incohérences et certaines injustices.

Pour avoir, dans cette enceinte et dans ma circonscription, salué et défendu votre politique dans le domaine des transports, je me sens d'autant plus à l'aise pour exprimer aujourd'hui mon inquiétude face à la stagnation de la politique nationale en faveur du vélo. Je n'ignore pas que le comité de suivi de la politique nationale du vélo travaille, mais ses réunions sont espacées et ses moyens financiers dérisoires.

Un certain nombre de mesures simples et peu coûteuses favorisant l'usage du vélo sont prêtes et n'attendent que le feu vert des ministères concernés pour entrer en application. Je pense à la pratique du marquage des vélos, à la mise en place d'un fichier informatisé des vélos volés, à l'ajout d'une simple case supplémentaire pour compléter le bulletin de recensement de 1999 afin de mieux connaître le nombre des usagers du vélo. Pourtant toutes ces propositions sans incidence budgétaire, restent lettres mortes. Je signale à ce sujet que René Mangin présentera tout à l'heure un amendement sur le marquage des vélos auquel je m'associe très volontiers.

Pour préparer le débat que nous avons aujourd'hui, j'ai rencontré plusieurs associations de défense du vélo, regroupées au sein de la FUBICY, la Fédération française des usagers de la bicyclette. Ces associations mettent b eaucoup d'espoir en votre politique, monsieur le ministre. Elles souhaitent également depuis plusieurs mois vous rencontrer personnellement, mais cela a été sans résultat jusqu'à ce jour. Je souhaite que le débat d'aujourd'hui soit l'occasion de renouer le dialogue indispensable avec ces associations de défense du vélo et de renforcer celui-ci. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. Bruno Bourg-Broc.

M. Bruno Bourg-Broc.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi que nous examinons aujourd'hui est un texte important. Nous le savons tous, chaque année il y a trop de morts sur les routes françaises, trop de blessés graves qui se retrouvent sur une chaise roulante. C'est vrai, la vitesse, l'alcool, mais aussi les stupéfiants sont trop souvent à l'origine de ces accidents mortels ou de ces vies brisées par un handicap.

Le texte que nous discutons répond en partie aux problèmes posés. Je ne reviendrai pas sur l'ensemble des dispositifs proposés, Jean-Claude Lemoine l'a fait au nom du groupe du RPR, mais je me permettrai d'insister sur un point et de vous faire part de l'expérience de la ville de Châlons-en-Champagne.

Monsieur le ministre, une fois n'est pas coutume, vous faire la part belle au tout répressif. Le texte se limite pour l'essentiel à la répression, et n'évoque qu'au détour de l'article 2 - et ce n'est qu'un petit détour - le volet éducatif et préventif de la lutte contre les accidents de la route. Je n'en conclus pas forcément que le Gouvernement ne se soucie guère de la formation des conducteurs et de l'amélioration des dispositifs existants,...

M. René Dosière, rapporteur.

Pas avec ce texte tout de même !

M. Bruno Bourg-Broc.

... mais tout de même ! Il y a pourtant fort à faire en la matière. En effet, si la répression peut être un moyen de lutter contre les accidents de la route, il est tout aussi efficace et essentiel de renforcer les dispositifs de formation et de prévention. Jean-Claude Lemoine a insisté sur ce point.

Bien sûr, il faut contrôler la vitesse, car chacun sait que cette mesure est dissuasive. A ce sujet, je partage l'analyse et les propositions de notre collègue Bussereau. Les moyens de la police nationale sont souvent inexistants ou insuffisants et la sécurité y gagnerait sans doute si la police municipale pouvait elle aussi procéder à de tels types de contrôles.

Je partage la philosophie générale de votre projet de loi, monsieur le ministre, mais celui-ci serait bien meilleur si notre assemblée acceptait les amendements déposés par Lionel Luca et qui seront défendus par Patrick Delnatte.

Ces amendements proposent d'améliorer les dispositifs de formation. Ainsi, l'amendement no 44 prévoit d'initier obligatoirement les plus jeunes aux règles de circulation.

L'amendement no 46, tend, quant à lui, à rendre obligatoire le stage de sensibilisation, dès lors qu'une infraction grave a été commise. Enfin, l'amendement no 42 vise à exiger un minimum d'expérience pour les enseignants. Je crois important, dans l'esprit constructif qui nous anime tous, que ces amendements soient adoptés par notre assemblée.

Pour étayer cette démonstration, permettez-moi de prendre l'exemple de la ville dont j'ai l'honneur d'être maire.

Dans le domaine de la circulation routière, Châlonsen-Champagne est l'une des villes les plus sûres de France. Avec un taux de 0,4 accident corporel pour mille habitants, la préfecture champenoise enregistre en effet quinze fois moins d'accidents corporels que la capitale régionale la moins bien classée. Ces résultats sont le fruit d'une volonté continue depuis plusieurs années, de réduire le nombre des accidents et d'un partenariat actif avec l'ensemble des acteurs de la vie locale dans ce domaine : la préfecture, la direction départementale de l'équipement, la police urbaine, mais aussi la prévention routière.

La prévention routière joue en effet un rôle essentiel que vous semblez sous-estimer dans votre texte. C'est pourtant, avec des signalétiques adaptées et des travaux de voirie conçus pour limiter la vitesse et garantir une vraie sécurité, un axe prioritaire de notre politique municipale de sécurité routière.

Les résultats sont là. Si Châlons-en-Champagne est la capitale régionale la plus sûre de France, c'est en partie grâce à cet effort important de prévention et d'éducation, notamment des plus jeunes.

C'est pourquoi il est plus que regrettable, au regard de cette réalité concrète, que le texte que nous examinons ce jour privilégie la répression et ne parle ni d'éducation ni de prévention.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Vous ne l'avez pas bien lu !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

M. Bruno Bourg-Broc.

J'ajouterai à l'adresse du Gouvernement, dont vous êtes le représentant, monsieur le ministre, que c'est mon expérience de maire qui conduit le législateur que je suis à vous présenter ces remarques.

C'est dire que le cumul député-maire présente bien des avantages pour améliorer la qualité des textes législatifs !

M. François Rochebloine.

Très bien !

M. Jean-Antoine Leonetti.

C'est bien de l'avoir dit !

M. René Dosière, rapporteur.

Cumulard et fier de l'être !

M. Bruno Bourg-Broc.

Mais tel n'est pas l'objet du débat de ce soir.

Nous avons la volonté commune, je le pense, de frein er l'hécatombe ; prenons-en ensemble les moyens.

(Applaudissements sur les bancs groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Jean-Antoine Leonetti, dernier orateur inscrit.

M. Jean-Antoine Leonetti.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne reviendrai pas, à ce stade du débat, sur le nombre des tués sur les routes de France et sur le lourd tribut financier et humain que paye la France en étant la lanterne rouge de l'Europe en ce domaine. Je me bornerai à vous rappeler un chiffre : en France, les jeunes meurent vingt fois plus d'accidents de la route que du sida. Si nous développions autant d'actions médiatiques et de prévention dans le domaine de la route que dans celui du sida, nous obtiendrions certainement aussi des résultats dans le premier domaine. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Il faut donc que nous oeuvrions ensemble - et ce sans esprit polémique puisque vous avez rappelé que des ministres appartenant à des gouvernements précédents ont porté des projets de loi qui allaient dans le même sens - pour trouver de bonnes solutions. Le sujet est trop grave pour se prêter à des querelles politiciennes ! Vous annoncez trois grandes mesures pour lutter contre l'insécurité routière : la mise en cause de la responsabilité du propriétaire du véhicule dans certains types d'infractions, la recherche de toxiques autres que l'alcool chez les conducteurs auteurs d'accidents mortels ; la répression du délit de grande vitesse.

Le problème est de savoir quel est le bien-fondé, quelle est l'efficacité de ces mesures ? Considérer que le propriétaire d'un véhicule est a priori l'auteur de l'infraction ou du délit commis par le conducteur de ce véhicule étend indiscutablement la présomption de culpabilité qu'a introduite le droit routier avec les infractions au stationnement.

Ne devra-t-on plus jamais prêter sa voiture ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Mais si !

M. Jean-Antoine Leonetti.

Cela confirmerait que cet objet, déjà tant sacralisé en cette fin de siècle, fait complètement partie de nous-mêmes, à tel point qu'il peut, comme si nous étions dédoublés, commettre des délits à notre place ? Bien entendu, il ne faut pas prendre des substances toxiques à un dosage tel qu'elles puissent modifier le comportement, mais j'appelle l'attention de tous mes collègues sur le fait que presque un tiers de nos concitoyens utilisent des anxiolytiques et que certains médicaments, comme les anti-allergiques, les médicaments cardio-vasculaires, pulmonaires et digestifs altèrent, d'une façon ou d'une autre, la vigilance.

M. Alain Ferry.

Tout à fait !

M. Jean-Antoine Leonetti.

Enfin, l'âge ou le handicap sont des éléments qui peuvent également modifier le comportement. Il faut cependant savoir jusqu'où ne pas aller trop loin. Sinon, plus personne ne conduira un véhicule. Et il faut reconnaître que les personnes âgées ne sont pas les plus en cause.

Quant au délit de grande vitesse, il peut susciter trois questions. La récidive au bout d'un an est-elle plus grave q u'au bout de dix-huit mois ? Le montant de 25 000 francs est-il aussi dissuasif pour ceux qui gagnent 25 000 francs par mois que pour ceux qui gagnent 6 000 francs ? Enfin, un récidiviste qui n'a pas eu l'intention de porter atteinte aux personnes ou aux biens doit-il être frappé de la même sanction que celui qui a commis un vol avec violences, c'est-à-dire d'une peine de prison ? Je ne le crois pas.

On ne peut pas ne pas se poser ces questions à la lecture de ce projet de loi. Si nous étions vraiment assurés que ces mesures avaient une efficacité certaine, nous les voterions avec enthousiasme, car les petites entorses à la liberté ou à l'esprit du droit sont d'un faible prix, eu égard au risque de pertes en vies humaines.

Ce qui nous gêne le plus, dans ce projet, c'est qu'il n'arrive pas à distinguer le réglementaire du législatif ; et des mesures réglementaires suffiraient pour lutter contre le 1 % de chauffards qui récidivent dans l'année en roulant à une vitesse supérieure de cinquante kilomètres à la vitesse autorisée.

Une série de mesures nous apparaissent efficaces, et j'ai noté avec satisfaction qu'elles recoupent certaines de vos propositions.

D'abord, il faut donner aux polices municipales les moyens de contrôler et de sanctionner les excès de vitesse dans les communes.

Ensuite, il faut immatriculer les véhicules à deux roues.

Les accidents de deux roues entraînent en effet des dégâts corporels gravissimes qui déciment notre jeunesse. Ces engins sont également utilisés pour pratiquer la petite délinquance. C'est dire qu'on pourrait faire d'une pierre deux coups et lutter doublement contre l'insécurité.

Il faut introduire à l'école, dans le cadre de l'éducation civique, une information sur la sécurité routière et les règles du code de la route, développer régulièrement des campagnes d'information télévisée, à l'instar de ce qu'on a fait contre le sida, et interdire la publicité pour les marques de voitures qui privilégient la notion de vitesse, de manière directe ou indirecte.

Enfin, il faut installer dans chaque véhicule, ce qui est techniquement possible, une alarme sonore et visuelle inviolable, déclenchée lors du dépassement de la vitesse maximale autorisée.

Voilà quelques mesures simples. Je note que vous avez répondu positivement en ce qui concerne certaines d'entre elles, que le Gouvernement pourrait décider de prendre sans délai. Avec une présence renforcée des policiers et des gendarmes sur le terrain, car la peur du gen-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

darme est tout de même le commencement de la sagesse, elles constitueraient des mesures plus efficaces que la législation que vous nous proposez aujourd'hui.

Je dirai très clairement, monsieur le ministre, que je ne voterai pas contre cette loi.

M. René Dosière, rapporteur.

Très bien !

M. Jean-Antoine Leonetti.

Elle comporte en effet des mesures positives. Mais Montesquieu savait qu'il vaut mieux appliquer les lois avant de les changer...

M. François Rochebloine.

Eh oui !

M. Alain Ferry.

Absolument !

M. Jean-Antoine Leonetti.

... et il affirmait que « les moeurs font toujours de meilleurs citoyens que les lois ».

Je propose que nous nous inspirions de ce grand philosophe français dans de nombreux domaines, en particulier dans celui de la sécurité routière. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Suspension et reprise de la séance

M. le président.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-deux heures vingt-cinq, est reprise à vingt-deux heures cinquante.)

M. le président.

La séance est reprise.

La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, avant que nous n'engagions la discussion des articles et des amendements proposés par les uns et par les autres, je souhaite vous faire part de mon sentiment après la discussion générale qui vient de s'achever.

Je commencerai par rappeler à l'attention de ceux d'entre vous dont les interventions m'ont conduit à penser qu'ils l'avaient oublié que le projet de loi fait partie d'un ensemble de mesures qui ont été décidées à la suite du comité interministériel sur la sécurité routière qui s'es t tenue en novembre 1997. Ces mesures, au nombre de vingt-cinq, tendent essentiellement à faire porter l'effort sur le changement des comportements, c'est-à-dire sur l'éducation, la formation et la prévention. J'encourage ceux qui ne l'ont pas encore fait à en prendre connaissance. Mais j'aurai l'occasion d'y revenir à la faveur de l'examen des amendements.

Selon certains, la démarche du Gouvernement procéderait essentiellement d'une vision répressive. Certes, il y a des éléments de sanction dans le texte. Mais il n'y a pas que cela, tant s'en faut ! Nous sommes, j'en suis persuadé, au coeur d'un débat de société qui concerne tout le monde, au-delà des différences de sensibilité politique et des clivages.

M. François Rochebloine.

La sécurité n'est ni de droite ni de gauche ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Vous avez tout à fait raison, monsieur le député. J'ai d'ailleurs souligné la qualité du débat au Sénat. Après le rapport favorable de M. Lanier, que certains connaissent bien, notamment parce qu'il a été préfet pendant une dizaine d'années, qu'il est juriste et qu'il possède en outre l'expérience du terrain, le consensus qui s'est dégagé n'était pas de surface, mais l'expression d'une volonté, celle de faire en sorte qu'un signe fort soit donné par la représentation nationale pour combattre l'idée de fatalité, qui risque malheureusement de gagner du terrain.

M. Dominique Bussereau.

Vous voulez parler du débat du mois d'avril, monsieur le ministre ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

J'ajouterai une information qui vient de me parvenir et qui ne date donc pas du mois d'avril :

« M. Bernard Bosson » - vous voyez sans doute de qui je veux parler - « et Mme Anne-Marie Idrac, anciens ministres des transports, apportent leur soutien en tant qu'anciens responsables de la sécurité routière au projet de loi présenté par Jean-Claude Gayssot à l'Assemblée nationale. »

Je viens de citer un communiqué datant du 9 décembre 1998 ! (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur les bancs du groupe socialiste.) Soyez attentifs à la gravité de la situation de la sécurité routière ! Je ne peux croire que ces deux anciens ministres, qui ont agi et qui ont travaillé pour la sécurité routière, aient publié ce communiqué dans un souci politicien.

M. François Rochebloine.

Je n'ai jamais dit cela ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Ce communiqué traduit au contraire le souci de sortir de la dimension politicienne que j'ai cru déceler ici ou là - pas partout, je le reconnais.

Je suis convaincu qu'il est possible de trouver un terrain d'entente. Mais je pense aussi qu'il ne suffira pas d'une loi, quelle que soit sa dimension, pour régler le problème.

M. Alain Ferry.

Très juste ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Il faut un ensemble de mesures, une volonté et des actes concrets : c'est l'addition de multiples facteurs qui permettra d'y parvenir.

Monsieur Dosière, nous examinerons bientôt le texte article par article, et notamment les amendements proposés par la commission dont vous êtes le rapporteur.

Celle-ci a fait un travail que je tiens à saluer.

J'ai relevé l'accent que vous avez mis sur la formation permanente. Nous avons déjà pris des mesures à cet égard, mais nous continuerons à y travailler car je considère aussi qu'il s'agit d'un sujet essentiel.

Monsieur Bussereau et monsieur Leonetti, vous dites que l'essentiel de mon projet de loi est de nature réglementaire.

M. Dominique Bussereau.

La totalité ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Vous voulez supprimer ce qui est de nature législative...

M. Dominique Bussereau.

Il fallait présenter un texte plus tôt ! Cela fait deux ans que vous auriez dû le faire ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

C'est la preuve que, soit vous ne voulez pas du texte, soit vous jouez un peu avec la vérité.

En réalité, la seule partie qui soit de nature réglementaire...

M. Dominique Bussereau.

Tout est réglementaire !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Non, monsieur Bussereau ! Et je vous prie de ne pas insister car vous savez que c'est faux !

M. Dominique Bussereau.

Au Conseil constitutionnel, M. Mazeaud étudiera la question ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Il est toujours ennuyeux de persister sur un aspect des choses qui ne correspond pas à la réalité...

M. Dominique Bussereau.

J'ai été rapporteur de la loi

« transports, sécurité et modernisation » ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

... mais c'est bien entendu votre droit ! La seule partie du texte qui pourrait être de nature réglementaire est celle qui concerne les auto-écoles. Les dispositions qui y figurent auraient pu se prendre par décret. Mais j'ai en l'occurrence suivi mon prédécesseur, M. Pons, qui avait estimé que l'importance du sujet méritait qu'il soit porté au niveau de la loi. Cela dit, vous n'êtes pas obligé de suivre M. Pons. (Sourires.)

M. Dominique Bussereau.

En ce qui vous concerne, vous l'avez suivi deux ans plus tard ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Monsieur Bussereau, vous ne vous en sortirez pas avec des arguments tels que ceux que vous avez avancés.

Si vous aviez dit que le budget de la sécurité routière n'était pas suffisant,...

M. Dominique Bussereau.

J'ai dit qu'il n'était pas à la hauteur !

M. François Rochebloine.

Ce qui est vrai ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

... nous pourrions, à la limite, en débattre.

Mais vous avez affirmé qu'il était en recul. Vous me permettrez d'utiliser, à cette heure avancée de la soirée, des mots un peu durs : ce n'est pas vrai !

M. Daniel Marcovitch.

En bon français : c'est un mensonge ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

En réalité, le budget de la sécurité routière est en augmentation de 4 %.

M. Dominique Bussereau.

Et les campagnes télévisées ? Elles ont disparu ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Je reviendrai sur les campagnes, monsieur Bussereau.

Vous avez affirmé que le budget de la sécurité routière accusait un recul.

M. Dominique Bussereau.

Oui ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Or c'est faux ! Vous n'êtes pas obligé de vous souvenir de tout ce qui s'est passé au moment de la discussion du projet de loi de finances, mais c'est faux.

Votre affirmation ne correspond donc pas à la vérité.

M. Dominique Bussereau.

Je la maintiens!

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Mais il n'y a pas que cette augmentation de 4 %. Si vous aviez suivi de près la discussion du projet de loi de finances pour 1999, vous vous seriez aperçu que mon secteur d'activité - l'équipement et les routes - se trouve doté, pour l'entretien et l'exploitation des routes, de crédits qui augmentent de plus de 6 %. La raison en est que j'ai voulu intégrer la dimension de la sécurité, notamment pour les infrastructures routières.

Par ailleurs, j'ai mis en place un fonds de 50 millions de francs afin que nous puissions avancer dans la résorption des passages à niveau les plus dangereux.

Vous avez dit que l'article relatif à la responsabilité du propriétaire du véhicule était liberticide.

M. Dominique Bussereau.

Absolument !

M. René Dosière, rapporteur.

C'est excessif ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Vous avez été vraiment excessif.

Je garderai quant à moi la mesure pour vous répondre.

Votre accusation est grave. En étant aussi excessif, en passant les bornes, vous vous privez d'arguments qui pourraient, d'un certain point de vue, être entendus.

Le projet du Gouvernement soutenu par la commission et par le Sénat dans toutes ses composantes puisque tous les groupes ont voté pour...

M. François Rochebloine.

Ce n'est pas une référence ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Monsieur Bussereau, vous venez de faire un signe de la main voulant signifier que ce que je dis n'est peut-être pas vrai. Il demeure qu'au Sénat tous les groupes ont voté le projet de loi.

M. Dominique Bussereau.

On verra comment cela se passera en commission mixte paritaire!

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Ce projet de loi, monsieur Bussereau, permet justement d'avancer vers la liberté de circuler en toute sécurité et il organise l'égalité des contrevenants devant la loi. Il n'est donc pas liberticide. Cet après-midi, il y avait de nombreux représentants de la ligue contre la violence routière dans les tribunes. C'est peut-être d'ailleurs pour cela que vous avez hésité à dire que vous voteriez contre ce projet de loi, préférant dire : je ne voterai pas pour votre projet de loi. Ce qui pouvait laisser entendre que vous vous abstiendriez peut-être.

M. Dominique Bussereau.

Non ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Les gens qui étaient dans les tribunes m'ont dit, notamment, en faisant référence aux droits de l'homme, que le droit de circuler en toute liberté et en sécurité relevait de la défense des libertés individuelles des citoyens.

Les remarques de certains revenaient à dire que, finalement, le Gouvernement perdait du temps et ne faisait pas grand-chose. Je ne vais pas développer les actions menées, car ce serait trop long.

Je vous signale cependant qu'en novembre 1997 s'est tenu le comité interministériel sur la sécurité routière.

Depuis 1993, il ne s'était pas réuni, ce qui n'était pas bien, je le reconnais.

M. Dominique Bussereau.

Il faut prendre des décrets ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Nous l'avons réuni et nous le réunirons chaque année pratiquement.

Le 7 avril 1998, ce texte est passé au Sénat.

Le brevet de sécurité routière est aujourd'hui complet et obligatoire. Plusieurs ministres sont intervenus. Je me suis rendu avec Mme Ségolène Royal pour assister à une


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

épreuve théorique dans un collège dont l'enseignement en matière de sécurité routière peut être considéré comme exemplaire.

Mme Isabelle Massin a été nommée déléguée interministérielle à la sécurité routière, une femme se voyant ainsi investie de responsabilités en ce domaine.

M. Dominique Bussereau.

Et on a « viré » M. Bodon ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Je citerai encore l'initiative prise, avant le départ en vacances, dans les Landes, sur la RN 10, justement au moment que vous évoquiez ; l'initiative prise le 1er novembre par Mme Isabelle Massin et avec l'Association des paralysés de France et les traumatisés crâniens.

Il y a eu les campagnes radio...

M. Dominique Bussereau.

Pas télé ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Mais quand vous êtes devant la télé, vous n'êtes pas dans votre voiture. (Sourires.)

M. Dominique Bussereau.

Bravo ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

La radio permet de s'adresser directement à l'automobiliste au moment où il conduit.

M. Jean-Pierre Baeumler.

Exactement !

M. Jacques Brunhes.

La radio est plus efficace !

M. Dominique Bussereau.

Oui, mais vous distrayez l'automobiliste !

M. François Rochebloine.

C'est dangereux ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Ce qui ne signifie pas, j'en conviens, qu'il ne faut rien faire à la télévision, bien entendu.

M. Dominique Bussereau.

Alors, faites-le ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Mais ne dites pas que rien n'a été fait. Je pourrais d'ailleurs continuer mon énumération, car la liste est longue.

Je suis en revanche tout à fait d'accord avec vous, mesdames et messieurs les députés : il faut développer toutes les initiatives, toutes les actions propres à modifier les comportements, y compris le comportement des jeunes face à l'alcool ; il faut étudier les cycles de la vigilance, du sommeil, etc.

Voilà maintenant près de dix-huit mois que j'ai suggéré l'idée que le Gouvernement soutienne des centaines, voire des milliers d'initiatives locales sur le thème : « Sur cette route, dans la traversée de cette ville ou de ce village, dans ce département, nous faisons le choix de zéro mort. »

M. François Rochebloine et M. Dominique Bussereau.

Très bien ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Et il faut se battre jusqu'à ce que nous obtenions la réduction de moitié du nombre de tués et d'accidentés sur les routes.

M. François Rochebloine.

Avec quels crédits ?

M. Dominique Bussereau.

C'est de votre responsabilité, monsieur le ministre ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Monsieur Baeumler, vous avez présenté un panorama très juste et très complet de la politique de sécurité routière. Vos préoccupations rejoignent très largement celles du Gouvernement.

Je partage votre idée, que vous êtes peut-être le seul à avoir exprimée avec tant de force qu'il faut travailler à l'harmonisation des règles de sécurité routière au niveau européen. Car il convient d'avancer également sur ce terrain.

Certaines dispositions impliquant la responsabilité du propriétaire du véhicule sont en effet déjà en vigueur dans plusieurs pays européens : l'Autriche, l'Espagne - dont les gouvernements n'ont pas vraiment une sensibilité de gauche.

M. Dominique Bussereau.

L'Autriche, c'est à vous ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

J'allais dire aussi que l'Espagne, c'est à vous...

Mais je ne permettrai pas ce genre d'affirmation.

L'Italie, le Royaume-Uni, les Pays-Bas retiennent, eux aussi, sous des formes diverses, la responsabilité du propriétaire du véhicule.

M onsieur Lemoine, monsieur Delnatte, monsieur Bruno Bourg-Broc, je ne suis pas partisan du « tout répressif ». Comme je l'ai déjà dit, un ensemble de mesures a été pris. Nombre d'entre elles sont préventives, d'autres répressives, je le reconnais, car elles sont nécessaires pour alerter, atténuer les comportements dangereux et réduire la gravité des accidents.

Les dispositions impliquant la responsabilité du propriétaire ont aussi pour objectif de faire comprendre à chacun qu'il peut être amené à encourir une sanction, ne serait-ce que pécuniaire. On me dit que cela porte atteinte aux libertés. Mais je suppose que vous ne pensez pas que celui qui a commis une infraction doit échapper à la sanction. J'espère que dans cette assemblée vous êtes tous comme moi et que vous trouvez injuste que 30 à 40 % des gens puissent y échapper.

M. Dominique Bussereau.

On n'a pas de chauffeur ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Comme je l'ai dit tout à l'heure, en aparté, la nuit du 4 août est passée par là !

M. Dominique Bussereau.

On n'a pas de chauffeur ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Il s'agit d'une lutte contre les inégalités.

J'observe que c'est déjà ce qui se passe en matière de stationnement. Il ne vous est pas venu à l'idée que c'était liberticide. D'ailleurs, vous ne l'avez pas dit !

M. Dominique Bussereau.

Pas encore ! (Sourires.)

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Vous voyez jusqu'où il vous faudrait aller pour étayer votre argument, tellement il est irrationnel !

M. René Dosière, rapporteur.

M. Bussereau est un provocateur ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Nous avons élargi ce qui se fait déjà pour le stationnement. Si le conducteur d'une voiture prêtée n'est pas identifié par interception ou par photographie, c'est le propriétaire qui va payer l'amende sans qu'il y ait retrait des points ou délit pénal. Voilà ce qui va se passer. Et vous trouvez que c'est liberticide ?

M. Dominique Bussereau.

Tout à fait ! Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République.

C'est injuste ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Ce genre de dispositions encouragera celui ou celle à qui vous prêtez votre voiture à se comporter mieux la fois suivante.


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Il contribuera à la responsabilisation. Car vous direz à votre ami...

M. François Rochebloine.

... Ami ou amie ? (Sourires.)

M. René Dosière, rapporteur.

Pas de différence entre les sexes ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

... de veiller au respect des règles.

Quoi qu'il en soit, quand vous prêterez votre voiture à un ami ou à un membre de votre famille, vous aurez tendance à lui dire : fais attention, ne brûle pas un stop ou un feu rouge, parce que c'est dangereux. Non seulement tu vas m'obliger à payer ton amende mais, en plus, tu vas faire courir des risques aux autres pays. Une telle mesure vise donc à favoriser les changements de comportements.

J'ai écouté avec attention ce que vous avez dit sur le dépistage des drogues. Nous en reparlerons lors du débat sur les amendements. Vous savez que les avis des spécialistes et des médecins divergent. Nous franchissons néanmoins une étape, c'est indiscutable, comme certains d'entre vous l'ont reconnu. Nous faisons preuve de mesure et de sagesse en proposant un dépistage en cas d'implication dans un accident mortel. Cela permettra d'approfondir nos connaissances sur la question. Je rappelle par ailleurs que l'usage de la drogue est illicite et que les comportements qui sont liés à la drogue sont sanctionnés.

M. Jean-Claude Lemoine.

Encore faut-il le détecter !

M. Dominique Bussereau.

Il faut le dire à M. Bernard Kouchner ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

En cas d'accident mortel, si le dépistage révèle qu'il y a eu utilisation de drogue, le juge pourra en tenir compte dans la sanction. Et il ne faudra pas attendre dix ans, après notre approfondissement des connaissances, pour aller plus loin si c'est nécessaire.

Je vous remercie, M. Biessy, d'avoir souligné que la politique du Gouvernement repose justement sur cet équilibre entre la formation, l'éducation, la sanction et l'indispensable effort sur les infrastructures. Je partage votre appel à la responsabilité et l'idée qu'il faut savoir prendre des mesures qui ne sont pas toujours populaires à première vue. Mais est-ce bien notre rôle que de vouloir fair plaisir à telle ou telle catégorie ? Certains ont parlé de lobbying . Notre souci ne doit-il pas être d'abord de faire en sorte que les lois votées contribuent à l'intérêt géné ral ? De toute manière, je vais donner des raisons supplémentaires à ceux qui soutiennent ce texte en leur faisant part du résultat d'un sondage de l'IFOP...

M. François Rochebloine.

Il faut se méfier des sondages !

M. Jean-Antoine Leonetti.

Vous influencez le vote ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

La mesure sur l'excès de grande vitesse à partir de 50 kilomètre/heure au-delà de la vitesse autorisée recueille l'assentiment de 76 % des sondés, dont 25 % ne la jugent pas assez sévère.

Mais comme vous ne craignez pas l'impopularité, vous pouvez défendre le 1 % des conducteurs qui pratiquent ces vitesses.

M. Lemoine propose qu'il n'y aurait excès non plus 50 km à l'heure au-dessus de la vitesse prescrite, mais à 50 %. C'est-à-dire qu'il n'y aurait excès de grande vitesse qu'à partir de 195 km/h.

M. Jean-Claude Lemoine.

Pas en ville ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Réfléchissez tout de même. Proposer, alors que la vitesse est limitée à 130 km/h sur les autoroutes, qu'on considère qu'il n'y a grand excès de grande vitesse qu'à partir de 195 km/h, inciterait à dépasser partout les vitesses prescrites !

M. Dominique Bussereau.

Il y a les radars, les gendarmes !

M. Jean-Claude Lemoine.

Vous déformez ce qui a été dit, monsieur le ministre ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Et je ne dis pas cela pour les quelques individus, une infime minorité, qui bénéficient d'une super voiture de riche permettant de rouler sans chauffeur à 200 km/h sur les routes.

M. Dominique Bussereau.

Ne fermez pas les gendarmeries ! les commissariats de polices ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Certains se sont demandé pourquoi on n'avait pas modulé la vitesse selon qu'on circule en ville, dans un village, sur les routes nationales ou sur les autoroutes.

Figurez-vous que j'y avais pensé.

M. Jean-Claude Lemoine.

Ah !

M. François Rochebloine.

Merveilleux ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

La question se pose naturellement.

M. Dominique Bussereau.

C'est le bon sens ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Comme vous pouvez le constater, je ne suis pas systématiquement opposé à vos remarques. Mais je me suis rallié finalement à cette idée : la mesure doit être lisible si l'on veut qu'elle ait un certain impact, que tout le monde admette qu'il faut combattre les excès de vitesse, et participe ainsi à une conduite plus apaisée. Evitons d'avoir à emporter une petite calculette pour savoir si on dépasse de 50 % les vitesses autorisées !

M. Alain Ferry.

Qu'est-ce que ça va être avec l'euro ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

M. Sarre a déploré que le volet de la répression ait été un peu abandonné. Je viens de dire que notre projet était équilibré. Mais je suis d'accord avec lui et je ne suis pas naïf. Je sais que la présence des forces de l'ordre sur les routes est une nécessité. Je serai attentif, avec mes collègues de l'intérieur et de la défense, et je veillerai à ce qu'un niveau de contrôle suffisant soit maintenu et, si besoin est, augmenté sur tous les types de réseaux - sans pour autant tendre des pièges aux automobilistes. M. Queyranne et M. Richard en sont parfaitement d'accord.

La formulation de M. Sarre pouvait prêter à interrogation. Je précise que le nombre de points retirés est toujours en augmentation - 2,8 millions en 1997.

M. Sarre a également critiqué certaines orientations de mes prédécesseurs. Sachez que nous sommes résolus à appliquer fermement notre politique, dans toutes ses composantes, y compris celle de la sanction.

L'important volet consacré aux auto-écoles - les amendements permettront d'y revenir - témoigne du souci de la qualité, de la formation des conducteurs, souci exprimé par MM. Marcovitch, Fleury et Biessy.

Monsieur Marcovitch, vous avez raison de mettre l'accent sur la nécessité de réformer les règles de détermination du nombre de places à l'examen du permis, et de


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

mieux organiser les services administratifs concernés.

Nous y travaillons et nous progresserons sur ces sujets dans les prochains mois.

Monsieur Roblechoine j'espère, que, contrairement à ce que vous avez dit, personne dans cet hémicycle ne trouve normal de se rendre coupable de deux grands excès de vitesse dans l'année.

M. François Rochebloine.

Je n'ai pas dit cela, monsieur le ministre ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Je suis de ceux qui considèrent que la délinquance routière est aussi grave que les autres formes de délinquance. Elle met en cause la vie. Je vous rappelle que, selon un récent sondage, 76 % des personnes interrogées estiment que la sanction pour excès de grande vitesse est juste.

Monsieur Jung, je partage votre souci concernant les vélos. J'ai été particulièrement attentif aux questions que vous avez soulevées en ce domaine.

Le 14 septembre dernier, un décret a donné un vrai statut aux cyclistes. Un second train de mesures est en cours de préparation. Je souhaite qu'elles soient prises très rapidement.

En outre, les services du Premier ministre ont été saisis d'une demande d'inscription, au prochain contrat de plan E tat-région, des projets de « véloroutes », que vous connaissez bien.

Nous travaillons avec les agglomérations concernées à l'élaboration de plans de déplacement urbain en cherchant à mieux intégrer l'usage du vélo : pistes cyclables, parcs adaptés, etc.

Je vous informe que la Fédération française des usagers de la bicyclette a été reçue tout récemment à mon ministère.

Monsieur Bourg-Broc, vous avez souligné le succès de la politique menée à Châlons-en-Champagne. Je suis d'accord avec vous pour développer le partenariat local et les actions de prévention à l'intention des jeunes. Ma politique va tout à fait dans ce sens. Je ne peux qu'approuver votre attitude de maire et j'espère que nous trouverons d'autres points d'accord.

Enfin, monsieur Leonetti, vous avez raison de souligner que le débat sur la sécurité routière est trop grave pour qu'on puisse se livrer à des petits jeux politiciens. Je souhaite, moi aussi, que l'examen des amendements aboutisse à un projet de loi qui aidera à faire reculer l'insécurité routière dans notre pays.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

Discussion des articles

M. le président.

Nous allons aborder l'examen des articles et des amendements. Je vous recommande, mes chers collègues, d'être un peu plus rapides, car nous sommes au bord de l'excès de grande lenteur. (Sourires.)

Comme nous avons plus de quatre-vingts amendements, si nous ne voulons pas terminer à quatre heures du matin il faudra maintenir un certain rythme.

M. Jean-Pierre Baeumler.

Nous y veillerons.

Avant l'article 1er

M. le président.

A la demande de la commission, l'amendement no 3 corrigé, avant l'article 1er , est réservé jusqu'après l'article 1er

Article 1er

M. le président.

« Art. 1er . - Le deuxième alinéa de l'article L. 11-6 du code de la route est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Lorsqu'il est titulaire du permis de conduire depuis moins de deux ans, l'auteur d'une ou plusieurs infractions ayant donné lieu à une perte de points au total égale ou supérieure au tiers du nombre de points initial doit se soumettre à cette formation spécifique. »

La parole est à M. Jean-Claude Lemoine, inscrit sur l'article.

M. Jean-Claude Lemoine.

L'exposé des motifs de ce projet de loi précise que « le risque d'être tué sur la route est trois fois plus élevé pour les conducteurs pendant les trois premières années qui suivent l'obtention du permis de conduire ». C'est la raison pour laquelle l'article 1er ne vise que les conducteurs novices, titulaires du permis de conduire depuis moins de deux ans et auteurs d'infractions graves. Bien sûr, on peut considérer que ces infractions sont dues à l'inexpérience, mais beaucoup d'autres facteurs sont en cause. C'est pourquoi je souhaite que l'enseignement dispensé dans les stages obligatoires mette l'accent sur les effets de l'alcool, ceux de la drogue et ceux de la drogue plus l'alcool.

Les notions techniques, les jeunes conducteurs les connaissent bien : ils sortent de l'auto-école. Malheureusement, ils ne connaissent pas suffisamment les méfaits des produits qui peuvent modifier le comportement du conducteur et réduire sa vigilance. Un enseignement à ce sujet est donc absolument indispensable.

La commission des lois a adopté un amendement permettant de substituer l'obligation de stage à l'amende.

C'est une bonne chose, car les jeunes auraient beaucoup de difficultés à la payer. Je me demande même s'il ne serait pas judicieux d'étendre la substitution à tous les conducteurs, même ceux qui ont passé leur permis depuis longtemps, car un stage technique ne leur serait certainement pas inutile.

M. le président.

La parole est à M. François Rochebloine.

M. François Rochebloine.

Monsieur le ministre, vous m'avez prêté des propos que je n'ai pas tenus au sujet des grands excès de vitesse. Je me suis simplement permis de poser à mes collègues la question suivante : qui dans cet hémicycle, n'a pas commis, au moins une fois dans sa vie, deux grands excès de vitesse la même année ? Je n'ai rien dit de plus.

Plusieurs députés du groupe socialiste.

Cinquante kilomètres de plus, non !

M. François Rochebloine.

Bien sûr, quand on a un chauffeur, c'est plus facile ! Sur le fond, monsieur le ministre, je vous ai fait une proposition qui permettrait aux jeunes sortant des discothèques de rentrer chez eux dans des conditions de meilleure sécurité. Vous ne m'avez pas répondu et j'aimerais que vous le fassiez, car cette proposition me semble utile et intéressante.

M. le président.

M. Dosière, rapporteur, a présenté un amendement no 82, ainsi rédigé :

« Dans le dernier alinéa de l'article 1er , après les mots : "moins de deux ans", insérer les mots : "ou depuis plus de trente ans". »

La parole est à M. le rapporteur.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

M. René Dosière, rapporteur.

Cet amendement étend aux conducteurs expérimentés, titulaires du permis depuis plus de trente ans, la mesure initialement prévue pour les conducteurs ayant leur permis depuis moins de deux ans.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Retrait, sinon avis défavorable. Il paraît préférable de développer l'offre de stages de perfectionnement plutôt que d'étendre aux personnes plus âgées l'obligation faite aux conducteurs novices.

M. le président.

Maintenez-vous l'amendement, monsieur le rapporteur ?

M. René Dosière, rapporteur.

Je le retire.

M. le président.

L'amendement no 82 est retiré.

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 1 et 70.

L'amendement no 1 est présenté par M. Dosière, r apporteur ; l'amendement no 70 est présenté par MM. Aschieri, Hascoët, Mamère, Marchand, Cochet et

Mme Aubert.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Dans le dernier alinéa de l'article, substituer aux mots : "d'une ou plusieurs infractions ayant donné lieu à une perte de points au total", les mots : "d'une infraction ayant donné lieu à une perte de points". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. René Dosière, rapporteur.

Ces deux amendements rétablissent le texte initial du Gouvernement. Il semble que l'obligation de suivre le stage doive être réservée aux auteurs d'une seule infraction grave ayant donné lieu à une perte d'un tiers au moins du nombre de points initial et ne pas s'appliquer également aux conducteurs ayant commis plusieurs infractions totalisant la même perte de points, comme le propose le Sénat.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 1 et 70.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président.

M. Dosière, rapporteur, a présenté un amendement, no 2 rectifié, ainsi rédigé :

« Compléter le dernier alinéa de l'article 1er par les mots : "qui se substitue à l'amende sanctionnant l'infraction". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. René Dosière, rapporteur.

Cet amendement tend à substituer l'obligation de stage à l'amende qui sanctionne l'infraction. Comme l'a souligné M. Lemoine, les jeunes ne disposant que de peu d'argent, il est souhaitable de privilégier la sanction qui permet ensuite d'améliorer la prévention.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Je comprends tellement le souci de la commission que je vais expliquer précisément ma position. Le Gouvernement n'a pas ignoré que l'instauration d'une formation obligatoire entraînerait une charge financière pour les conducteurs novices, notamment les jeunes.

Cependant on ne peut pas les exonérer d'amende pour les fautes graves alors qu'ils ne le seront pas pour des fautes plus légères. Par ailleurs, nous encourageons tous les conducteurs novices à suivre des stages.

M. le président.

Maintenez-vous votre amendement, monsieur le rapporteur ?

M. René Dosière, rapporteur.

Oui.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 2 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Baeumler et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, no 48, ainsi rédigé :

« Compléter l'article 1er par le paragraphe suivant :

« Un rapport d'évaluation sur les stages de formation et de sensibilisation institués par l'article L. 11-6 du code de la route sera présenté devant le Parlement dans un délai d'un an après la promulgation de la loi no du »

La parole est à M. Jean-Pierre Baeumler.

M. Jean-Pierre Baeumler.

Nous allons rendre obligatoires, pour les conducteurs novices auteurs d'infractions graves, les stages de sensibilisation aux conséquences des accidents. Ces stages existent depuis quelques années dans le cadre du permis à points. Nous avons maintenant le recul suffisant pour dresser un bilan et vérifier si le dispositif est suffisamment pertinent, s'il prend en compte, par exemple, les problèmes de l'alcool et des stupéfiants. Je propose donc que le Gouvernement présente, dans l'année suivant suit l'adoption de ce texte, un rapport d'évaluation.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

Favorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

48. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je constate que le vote a été acquis à l'unanimité.

Je mets aux voix l'article 1er , modifié par les amendements adoptés.

(L'article 1er , ainsi modifié, est adopté.)

Avant l'article 1er (amendement précédemment réservé)

M. le président.

Je donne lecture de l'intitulé de la section 1 : Section 1. Disposition relative à la formation des conducteurs novices auteurs d'infractions. »

M. Dosière, rapporteur, a présenté un amendement, no 3 corrigé, ainsi rédigé :

« Avant l'article 1er , dans l'intitulé de la section 1, substituer aux mots : "conducteurs novices auteurs d'infractions", les mots : "conducteurs auteurs d'infractions graves". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. René Dosière, rapporteur.

Cette modification d'intitulé était la conséquence de l'amendement concernant les conducteurs titulaires du permis de conduire depuis plus de trente ans. Dès lors qu'il a été retiré, il faut revenir au titre initial.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

Je retire donc également l'amendement no 3 corrigé.

M. le président.

L'amendement no 3 corrigé est retiré.

Avant l'article 2

M. le président.

Je donne lecture de l'intitulé de la section 2 : Section 2. Dispositions relatives à l'enseignement de la conduite et de la sécurité routière. »

Je suis saisi de trois amendements, nos 36 rectifié, 37 rectifié et 71 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 36 rectifié n'est pas soutenu.

Les amendements nos 37 rectifié et 71 rectifié sont identiques.

L'amendement no 37 rectifié est présenté par MM. Delnatte, Accoyer, Albertini, André, Angot, Jacques Barrot, B audis, Bernard, Birraux, Blum, Mme Boutin,

M

M. Michel Bouvard, Caillaud, Cazenave, Chossy, Colombier, Cova, Cousin, Coussain, Cuq, Demange, Dubernard, Ferrand, Godfrain, Guillet, Hamel, Herriaud,

Mmes Idrac, Isaac-Sibille, MM. Jacob, Robert Lamy, Lepercq, Maurice Leroy, Luca, Marleix, Martin-Lalande, Myard, Péricard, Perrut, Santini, Turinay, Ueberschlag, Michel Voisin, Baguet, Lenoir, Daubresse, Wiltzer, Audinot, Abrioux, Ehrmann et Raimond ; l'amendement no 71 rectifié est présenté par MM. Aschieri, Hascoët, Mamère, Marchand, Cochet et Mme Aubert.

Ces amendements sont ainsi libellés :

« Avant l'article 2, insérer l'article suivant :

« Il est inséré, après l'article L. 11-6 du code de la route, un article L. 11-6-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 11-6-1. - Les candidats au permis de conduire acquièrent, dans le cadre de leur formation, la connaissance pratique des notions élémentaires de premiers secours dites des cinq gestes qui sauvent. Cet apprentissage est assuré par les associations de secourisme agréées.

« Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités de mise en oeuvre de ces dispositions. »

La parole est à M. Patrick Delnatte, pour soutenir l'amendement no 37 rectifié.

M. Patrick Delnatte.

Monsieur le ministre, cet article additionnel vise à introduire dans la formation au permis de conduire l'apprentissage des cinq gestes qui sauvent.

J'ai déjà évoqué le sujet dans la discussion générale, ma is vous ne l'avez pas repris dans votre réponse.

Lorsque survient un accident de la route, il s'écoule un délai incompressible de quelques minutes, voire de plusieurs dizaines de minutes, jusqu'à l'arrivée des secours.

Or les spécialistes sont unanimes pour reconnaître que, dans certains cas, tout se joue parfois, la vie ou la mort, dans les premiers instants qui suivent l'accident. Ainsi, les premiers témoins sont, souvent sans le savoir, les seuls à pouvoir intervenir de manière décisive.

C'est ce qui a justifié en 1967 l'élaboration du programme des cinq gestes qui sauvent. Cet enseignement a trouvé un écho très favorable auprès des médecins des premiers secours, des SAMU, des sapeurs-pompiers et des enseignants du secourisme. J'ajoute que, sur tous les bancs de cette assemblée, de nombreux parlementaires ont donné un écho très favorable à notre proposition.

M. Jean-Antoine Leonetti.

Elle est excellente !

M. Patrick Delnatte.

Je rappelle que l'on pourrait sauver entre 1 000 et 1 500 personnes chaque année, si au moins l'un des témoins de chaque accident pouvait connaître ces cinq gestes.

Cet apprentissage, dont le but est humanitaire et qui p ermettrait en même temps de responsabiliser les témoins, est quelque chose d'assez simple, qui demande très peu de temps : nous l'avons constaté dans le Nord, à l'occasion d'une opération organisée dans les collèges en collaboration avec la Croix-Rouge. Le rendre obligatoire dans la formation au permis de conduire permettrait une avancée significative dans le domaine de la prévention.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur ces amendements identiques ?

M. René Dosière, rapporteur.

La commission a été très sensible aux intentions de M. Delnatte et de M. Aschieri.

Cela dit, elle a repoussé leurs amendements, non pas avec enthousiasme, mais avec une sorte de résignation.

M. Michel Bouvard.

C'est pire !

M. René Dosière, rapporteur.

En effet, des expériences l'ont montré, un tel enseignement, rendu obligatoire, n'entraîne pas une adhésion complète de la part de ceux qui le subissent. De ce fait, sa généralisation, au lieu d'aboutir au résultat escompté par M. Delnatte, serait au contraire susceptible d'aggraver la situation des blessés.

En outre, des heures supplémentaires d'enseignement seraient nécessaires.

M. Michel Bouvard.

L'enseignement de la chimie n'entraîne pas non plus forcément l'adhésion !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

J'avais annoncé, monsieur Delnatte, que je reviendrais sur certains points évoqués dans la discussion générale. C'est le cas en l'occurrence.

Bien évidemment, je suis dans le même état d'esprit que M. le rapporteur. L'idée de départ est louable et légitime. Toutefois, après vérification, notamment auprès d'experts de la commission nationale du secourisme, il est apparu que cette mesure serait susceptible d'entraîner des effets pervers et même qu'il pourrait être dangereux d'accorder crédit à une formation aux premiers secours trop limitée et trop courte.

C'est pourquoi, dans la situation actuelle, je préfère ne pas retenir cet amendement. Il nous faut cependant travailler sur la question. J'ai indiqué qu'une réunion du comité interministériel serait organisée chaque année et que nous devrions y examiner de plus près la possibilité d'organiser une formation dans les collèges. En cinquième et en troisième, des éléments de formation sont déjà dispensés à cet effet. Pourquoi ne pas y ajouter des éléments de base sur les comportements à adopter en cas d'accident ?

M. le président.

La parole est à M. Daniel Marcovitch.

M. Daniel Marcovitch.

Il est difficile, en effet, de se prononcer contre l'amendement, mais il faut dire les choses telles qu'elles sont.

D'abord, nous n'avons aucune garantie sur la qualité de l'enseignement qui pourrait être dispensé.

Ensuite, il s'agit des cinq gestes qui sauvent et non pas des comportements à adopter pour éviter l'aggravation d'un accident.

M. François Rochebloine.

Tout à fait !

M. Daniel Marcovitch.

Or nos collègues médecins savent très bien que, quand on n'exerce pas pendant des années, les gestes se perdent. Par chance, les conducteurs qui auront appris ces cinq gestes qui sauvent n'auront pas


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

l'occasion de les utiliser tous les jours. Mais, au bout de cinq ans ou dix ans, que leur restera-t-il de ces gestes qu'ils auront peut-être simplement vu pratiquer pendant quelques minutes par des bénévoles de la Croix-Rouge ? A mon sens, plutôt que les gestes qui sauvent, c'est le comportement non dangereux en cas d'accident qu'il faudrait enseigner.

M. François Rochebloine.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Patrick Delnatte.

M. Patrick Delnatte.

Il s'agit quand même d'un sujet important. Nous entrons dans un processus de formation générale puisque, en milieu scolaire, on commence à initier les élèves à la sécurité routière, y compris par des gestes pratiques. Ce nouvel apprentissage d'une certaine forme du secourisme va devenir tout à fait banal, et l'enseignement des gestes qui sauvent dans le cadre de la formation au permis serait dispensé par des organismes agréés, et non par n'importe qui.

Cette mesure nous permettrait de franchir une étape décisive. S'il faut l'aménager, je suis tout à fait d'accord, mais il est temps de faire un acte politique fort. Notre amendement le permettrait. Il permettrait également de prévoir les adaptations nécessaires puisque les modalités d'application seraient définies par décret en Conseil d'Etat.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Claude Lemoine.

M. Jean-Claude Lemoine.

J'ai été pendant plusieurs années médecin de pompiers et je puis affirmer que, dans beaucoup de circonstances, la rapidité est primordiale. Il y a quatre ou cinq gestes qu'il est indispensable de connaître et qui sont très faciles à retenir. Savoir comprimer une carotide ou une fémorale, ce n'est pas difficile et cela peut sauver une personne.

Je regrette que ces gestes ne soient pas appris en même temps que la conduite. Je suis sûr que cela pourrait sauver des vies.

M. le président.

La parole est à Mme Catherine Génisson.

Mme Catherine Génisson.

Je trouve cet amendement très intéressant. La seule réserve que je formulerai, c'est qu'il faut être très à cheval sur la qualité de l'enseignement prodigué.

M. Patrick Delnatte.

L'amendement prévoit des organismes agréés.

M. le président.

La parole est à M. François Rochebloine.

Ensuite, nous passerons au vote.

M. François Rochebloine.

Qui paiera la formation ? Dans cet hémicycle, on accepte les amendements sans jamais se soucier de savoir quel est leur coût et qui le supporte ! De plus, je partage l'avis de Mme Génisson et de M. Marcovitch. Je crains que la formation ne soit pas suffisante et qu'elle soit progressivement oubliée.

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements no 37 rectifié et 71 rectifié.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

Article 2

M. le président. - « Art. 2. - Le titre VII du code de la route (partie Législative) est remplacé par les dispositions suivantes :

«

TITRE

VII

«

ENSEIGNEMENT DE LA CONDUITE

DES VÉHICULES TERRESTRES A

MOTEUR ET DE LA SÉCURITÉ ROUTIÈRE

« C HAPITRE 1er

« Enseignement à titre onéreux

« Art. L. 29. - L'enseignement, à titre onéreux, de la conduite des véhicules terrestres à moteur d'une catégorie donnée et de la sécurité routière est subordonné à la dé livrance d'une autorisation administrative.

« Art. L. 29-1. - Nul ne peut être autorisé à enseigner, à titre onéreux, la conduite des véhicules terrestres à moteur d'une catégorie donnée et la sécurité routière, s'il ne satisfait aux conditions suivantes :

« 1o Ne pas avoir fait l'objet d'une condamnation :

« soit à une peine criminelle,

« soit à une peine correctionnelle prononcée pour une infraction figurant sur une liste fixée par décret en Conseil d'Etat ;

« 2o Etre titulaire du permis de conduire, en cours de validité, valable pour la ou les catégories de véhicules considérés ;

« 3o Etre titulaire de l'un des titres ou diplômes dont la liste est fixée par décret en Conseil d'Etat ;

« 4o Remplir les conditions d'âge, d'ancienneté du permis de conduire et d'aptitude physique fixées par décret en Conseil d'Etat.

« Art. L. 29-2. - Dans l'hypothèse où les conditions prévues à l'article L. 29-1 cessent d'être remplies, il est mis fin à l'autorisation prévue à l'article L. 29. En cas d'urgence justifiée par des faits contraires à la probité, aux bonnes moeurs ou à la sécurité des personnes ou méconnaissant les dispositions législatives du présent code, l'autorité administrative peut, après avoir mis l'intéressé en mesure de présenter ses observations, suspendre, pour une durée maximale de six mois, une autorisation délivrée en application de l'article L. 29.

« Lorsque sont établis des procès-verbaux d'infractions correspondant à des faits mentionnés à l'alinéa précédent commises par des bénéficiaires d'autorisations délivrées en application de l'article L. 29, copie en est transmise par le procureur de la République à l'autorité administrative.

« La mesure de suspension provisoire cesse de plein droit dès que l'autorité judiciaire s'est prononcée.

« Art. L. 29-3. - Le fait d'enseigner, à titre onéreux, la conduite des véhicules terrestres à moteur d'une catégorie donnée et la sécurité routière sans être titulaire de l'auto risation prévue à l'article L.

29 ou en violation d'une mesure de suspension provisoire de celle-ci est puni d'une peine d'un an d'emprisonnement et de 100 000 francs d'amende.

« Les personnes physiques coupables de l'infraction prévue à l'alinéa précédent encourent également les peines complémentaires suivantes :

« 1o L'interdiction d'exercer l'activité professionnelle dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise, suivant les modalités prévues par l'article 131-27 du code pénal ;

« 2o L'affichage ou la diffusion de la décision prononcée, dans les conditions prévues par l'article 131-35 du code pénal ;


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

« 3o La confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction ou de la chose qui en est le produit.

« Art. L. 29-4. - Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions d'application du présent chapitre.

« C HAPITRE II

« Etablissements d'enseignement à titre onéreux

« Art. L. 29-5. - L'enseignement à titre onéreux de la conduite des véhicules terrestres à moteur d'une catégorie donnée et de la sécurité routière ne peut être dispensé que dans le cadre d'un établissement d'enseignement dont l'exploitation est subordonnée à un agrément délivré par l'autorité administrative, après avis d'une commission.

« Pour les organismes sans but lucratif régis par la loi de 1901, qui exercent leur activité dans le champ de l'insertion ou de la réinsertion sociale et professionnelle, l'agrément est délivré par l'autorité administrative sous réserve que les conditions prévues au 1o de l'article L. 29-7 et à l'article L. 29-8 soient remplies.

« Un décret détermine les caractéristiques de ces associations.

« La formation, à titre onéreux, des candidats à l'un des titres ou diplômes exigés pour l'exercice de la profession d'enseignant de la conduite des véhicules terrestres à moteur d'une catégorie donnée et de la sécurité routière ne peut être dispensée que dans le cadre d'un établissement dont l'exploitation est subordonnée à un agrément délivré par l'autorité administrative, après avis d'une commission.

« Art. L. 29-6. - Les conditions et les modalités de l'enseignement, à titre onéreux, de la conduite des véhicules terrestres à moteur d'une catégorie donnée et de la sécurité routière font l'objet d'un contrat écrit entre le candidat et l'établissement.

« Les conditions et les modalités de la formation à titre onéreux des candidats à l'un des titres ou diplômes exigés pour l'exercice de la profession d'enseignant de la conduite des véhicules terrestres à moteur et de la sécurité routière font l'objet d'un contrat écrit entre le candidat et l'établissement.

« Art. L. 29-7. - Nul ne peut exploiter, à titre individuel, ou être dirigeant ou gérant de droit ou de fait d'un des établissements mentionnés à l'article L. 29-5, s'il ne satisfait pas aux conditions suivantes :

« 1o Ne pas avoir fait l'objet d'une condamnation :

« soit à une peine criminelle,

« soit à une peine correctionnelle prononcée pour une infraction figurant sur une liste fixée par décret en Conseil d'Etat ;

« 2o Justifier de son aptitude professionnelle ainsi que de la capacité de gérer et de l'expérience de l'enseignement de la conduite.

« Art. L. 29-8. - L'enseignement dispensé dans les établissements mentionnés à l'article L. 29-5 doit être conforme au programme de formation défini par l'autorité administrative qui en contrôle l'application.

« Art. L. 29-9. - Dans l'hypothèse où les conditions prévues aux articles L. 29-7 et L. 29-8 cessent d'être remplies ou en cas de cessation définitive d'activité de l'établissement, il est mis fin aux agréments prévus à l'article L. 29-5.

« En cas d'urgence justifiée pour des faits contraires à la probité ou aux bonnes moeurs ou méconnaissant les dispositions législatives du présent code, ou mettant en cause la sécurité des personnes, l'autorité administrative, après avoir mis l'intéressé en mesure de présenter ses observations et recueilli l'avis de la commission mentionnée à l'article L. 29-5, peut suspendre, pour une durée maximale de six mois, l'agrément délivré en application de l'article L. 29-5.

« Lorsque sont établis des procès-verbaux d'infractions correspondant à des frais mentionnés à l'alinéa précédent commises par des bénéficiaires d'autorisations délivrées en application de l'article L. 29-5, copie en est transmise par le procureur de la République à l'autorité administrative.

« Après que l'intéressé a été mis en mesure de présenter ses observations, une mesure de suspension provisoire pour une durée n'excédant pas six mois peut également être prononcée par l'autorité administrative, en cas de refus de se soumettre au contrôle prévu à l'article L. 29-8, de non-respect du programme de formation défini par l'autorité administrative ou pour méconnaissance des dispositions de l'article L.

29-6.

« La mesure de suspension provisoire cesse de plein droit dès que l'autorité judiciaire s'est prononcée.

« Art. L.

29-10. I. Le fait d'exploiter un établissement d'enseignement de la conduite des véhicules terrestres à moteur d'une catégorie donnée et de la sécuritér outière sans avoir obtenu l'agrément prévu à l'article L.

29-5 ou en violation d'une mesure de suspension provisoire de celui-ci est puni d'un an d'emprisonnement et de 100 000 F d'amende.

« Est puni des mêmes peines le fait d'employer un enseignant qui n'est pas titulaire de l'autorisation prévue à l'article L.

29.

« II. Les personnes physiques coupables de l'une des infractions prévues au I du présent article encourent également les peines complémentaires suivantes :

« 1o La fermeture définitive ou pour une durée de cinq ans au plus de l'un, de plusieurs ou de l'ensemble des établissements de l'entreprise appartenant à la personne condamnée ;

« 2o L'interdiction d'exercer l'activité professionnelle ou sociale dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise, suivant les modalités prévues par l'article 131-27 du code pénal ;

« 3o L'affichage ou la diffusion de la décision prononcée, dans les conditions prévues par l'article 131-35 du code pénal ;

« 4o La confiscation de la chose qui a servi où qui était destinée à commettre l'infraction ou de la chose qui en est le produit.

« III. Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues à l'article 121-2 du code pénal, des infractions prévues au I du présent article.

« Les peines encourues par les personnes morales sont :

« 1o L'amende, selon les modalités prévues par l'article 131-38 du code pénal ;

« 2o La fermeture définitive ou pour une durée de cinq ans au plus de l'un, de plusieurs ou de l'ensemble des établissements de l'entreprise appartenant à la personne condamnée ;

« 3o L'interdiction d'exercer l'activité professionnelle ou sociale dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise, suivant les modalités prévues par l'article 131-39 du code pénal ;

« 4o L'affichage ou la diffusion de la décision prononcée, dans les conditions prévues par l'article 131-35 du code pénal ;


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

« 5o La confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction ou de la chose qui en est le produit.

« Art. L.

29-11. Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent chapitre. »

La parole est à M. Jean-Claude Lemoine, inscrit sur l'article.

M. Jean-Claude Lemoine.

Les dispositions de l'article 2 avaient été préconisées par votre prédécesseur, monsieur le ministre. Elles sont bonnes et nécessaires. La mention de la « capacité à gérer » est nécessaire. L'expérience de l'enseignement de la conduite est indispensable et doit être exigée pour tout organisme ou association qui se destine à cette formation. On n'a pas le droit de lésiner sur l'apprentissage de la conduite. Tous les établissements d'enseignement de la conduite doivent absolument être soumis aux mêmes contraintes.

La notion de probité et de bonnes moeurs doit également figurer dans le texte. On connaît trop de cas où les candidats au permis de conduire ont été grugés. Il est donc nécessaire que cette notion soit affirmée.

M. le président.

MM. Aschieri, Hascoët, Mamère, Marchand, Cochet et Mme Aubert ont présenté un amendement, no 67, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article L.

29 du code de la route par les mots : "renouvelable périodiquement". »

Cet amendement est-il défendu ?

M. Jean-Pierre Baeumler.

Il est défendu, monsieur le président.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

La commission a repoussé cet amendement parce que la disposition qu'il prévoit pourrait éventuellement figurer dans le décret en Conseil d'Etat prévu à l'article L.

29-11.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Même avis que la commission.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

67. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

MM. Aschieri, Hascoët, Mamère, Marchand ; Cochet et Mme Aubert ont présenté un amendement, no 68, ainsi rédigé :

« Dans le dernier alinéa (4o ) du texte proposé pour l'article L.

29-1 du code de la route, après les mots : "permis de conduire", insérer les mots : "d'exp érience professionnelle, de réactualisation des connaissances". »

Cet amendement est-il défendu ?

M. Jean-Pierre Baeumler.

Il est défendu.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

La commission l'a repoussé.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

68. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Dosière, rapporteur, a présenté un amendement no 4, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le début de la dernière phrase du premier alina du texte proposé pour l'article L.

29-2 du code de la route : "En cas d'urgence justifiée par des faits passibles d'une des condamnations visées à l'article L.

29-1, l'autorité administrative... (Le reste sans changement)". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. René Dosière, rapporteur.

Il s'agit d'un amendement rédactionnel, monsieur le président.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

4. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Dosière, rapporteur, a présenté un amendement, no 5, ainsi rédigé :

« Supprimer les deuxième et troisième alinéas du texte proposé pour l'article L.

29-5 du code de la route. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. René Dosière, rapporteur.

L'amendement no 5 permet de déplacer dans une autre partie du texte une disposition qui n'a pas sa place dans l'article 2.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

5. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

MM. Marcovitch, Baeumler et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, no 54 rectifié, ainsi rédigé :

« Compléter le premier alinéa du texte proposé pour l'article L.

29-6 du code de la route par la phrase suivante : "Une garantie d'exécution de ce contrat jusqu'à son terme est déterminée par décret en Conseil d'Etat". »

La parole est à M. Daniel Marcovitch.

M. Daniel Marcovitch.

Le projet de loi prévoit la signature d'un contrat entre l'auto-école et le candidat, en particulier dans le cadre d'un forfait. Néanmoins, ce contrat ne garantit absolument pas, en cas de cessation d'activités de l'entreprise, que le candidat pourra être remboursé ou continuer sa formation jusqu'au bout.

Je propose donc qu'une garantie d'exécution de ce contrat soit déterminée par décret en Conseil d'Etat. Le décret précisera si, comme dans un certain nombre de professions, il reviendra à une caisse de garantir les investissements des candidats ou bien si les auto-écoles souscriront une assurance à cet effet. En tout état de cause, il faut que soit proposée une réelle garantie financière d'exécution du contrat aux candidats.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

Favorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Tout en comprenant la proposition, je suis plutôt partisan d'une voie médiane, permettant l'affichage dans le contrat de formation de la souscription ou de la non-souscription à un mécanisme de garantie. Nous


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pourrions d'ici à la deuxième lecture, explorer une telle possibilité. C'est pourquoi je préférerais que M. Marcovitch retire son amendement.

M. le président.

La parole est à M. Marcovitch.

M. Daniel Marcovitch.

Je prends acte de la proposition du ministre. Les établissements d'enseignement de la conduite pourraient effectivement, comme cela se fait dans un certain nombre d'autres structures, comme les agences immobilières et les agences de voyages, afficher qu'ils ont souscrit à un mécanisme de garantie. Cela donnerait une liberté de choix aux candidats. Nous pourrons étudier cette possibilité d'ici à la deuxième lecture.

M. le président.

L'amendement no 54 rectifié est donc retiré.

MM. Marcovitch, Baeumler et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, no 53, ainsi rédigé :

« Avant le dernier alinéa du texte proposé pour l'article L.

29-7 du code de la route, insérer l'alinéa suivant :

« soit à une peine prévue par les articles 186 et 192 de la loi no 85-98 du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation judiciaire des entreprises, pendant la durée de cette peine. »

La parole est à M. Daniel Marcovitch.

M. Daniel Marcovitch.

Dans la liste des cas qui interdisent l'exercice de la gestion d'une auto-école, ne figure pas celui d'une personne qui se serait vu interdire la gestion d'un commerce par un arrêté du tribunal de commerce. Je demande, par cet amendement, que les gens qui ont été, pour des motifs de fraude, déclarés incapables de gérer un commerce ou une structure artisanale ne puissent pas non plus gérer une auto-école.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

Favorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

53. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

MM. Aschieri, Hascoët, Mamère, Marchand, Cochet et Mme Aubert ont présenté un amendement, no 72, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le dernier alinéa (2o ) du texte proposé pour l'article L.

29-7 du code de la route :

« 2o Justifier de la capacité à la gestion d'un établissement d'enseignement de conduite. »

Cet amendement est-il défendu ?

M. Jean-Pierre Baeumler.

Il est défendu.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

La commission a accepté cet amendement qui permet de clarifier la rédaction de l'alinéa relatif à l'aptitude professionnelle des enseignants de la conduite et à leur capacité de gérer un établissement dispensant cet enseignement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvenement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

72. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

En conséquence, les amendements nos 58 et 6 tombent.

M. Luca a présenté un amendement, no 42, ainsi rédigé :

« Compléter le dernier alinéa (2o ) du texte proposé pour l'article L. 29-7 du code de la route par les mots : "par une expérience de deux ans minimum". »

La parole est à M. Jean-Claude Lemoine, pour défendre cet amendement.

M. Jean-Claude Lemoine.

L'amendement no 42 s'inscrit dans la logique de ce que j'ai dit sur l'article 2. Il a p our but d'exiger « une expérience de deux ans minimum » pour pouvoir exploiter un établissement d'enseignement de la conduite. En effet, dans les autoécoles comme dans certaines associations, l'enseignement de la conduite est parfois confié à des gens qui n'ont aucune expérience dans ce domaine. Par l'introduction de cette condition supplémentaire, on garantirait une meilleure formation à la conduite.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

La commission a repoussé cet amendement, non pas parce qu'elle est défavorable à la disposition qu'il prévoit, qui est tout à fait intéressante, mais parce que celle-ci pourrait figurer - mais nous verrons ce qu'en dira le Gouvernement - dans le décret en Conseil d'Etat prévu à l'article L. 29-11.

M. Dominique Bussereau.

Comme toutes les dispositions du texte !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

L'avis du Gouvernement est le même que celui de la commission.

M. le président.

Monsieur Lemoine, maintenez-vous votre amendement ?

M. Jean-Claude Lemoine.

Oui.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

42. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

MM. Landrain, Micaux et Ferry ont présenté un amendement, no 32, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article L. 29-7 du code de la route par l'alinéa suivant :

« 3o Justifier à l'égard des clients d'une garantie financière suffisante spécialement affectée aux remboursements des fonds reçus aux titres des prestations stipulées dans le contrat mentionné à l'article L. 29-6 ».

La parole est à M. Pierre Micaux.

M. Pierre Micaux.

Monsieur le président, j'ai tendance à penser qu'il existe une similitude entre un marché public soumis à la procédure d'appel d'offres et l'enseignement de la conduite. Pour préserver les intérêts de ceux qui veulent apprendre à conduire, qu'ils soient jeunes ou âgés, il serait bon que les enseignants de la conduite puissent justifier d'un certificat aussi bien des services fiscaux que de l'administration générale de la sécurité sociale ou de la banque, et - pourquoi pas ? - de la Banque de France.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

La commission avait repoussé cet amendement parce qu'elle avait auparavant a dopté celui de M. Marcovitch. L'amendement de


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

M. Landrain n'avait de ce fait plus d'objet. M. Marcovitch a tout à l'heure retiré son amendement, à la demande du ministre. Je suppose que M. le ministre va vous demander également de retirer le vôtre monsieur Micaux, compte tenu de la proposition qu'il a faite de revoir la question d'ici à la deuxième lecture.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Je demande le retrait de cet amendement, afin de permettre une évolution du texte en deuxième lecture dans le sens qui a été indiqué tout à l'heure.

M. le président.

Maintenez-vous votre amendement, monsieur Micaux ?

M. Pierre Micaux.

Malgré nos bons rapports, monsieur le rapporteur, je maintiens mon amendement.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

32. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

MM. Aschieri, Hascoët, Mamère, Marchand, Cochet et Mme Aubert ont présenté un amendement no 69, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article L. 29-7 du code de la route par l'alinéa suivant :

« 3o Remplir les conditions d'âge, d'ancienneté du permis de conduire, d'expérience professionnelle, de réactualisation des connaissances et d'aptitude physique fixées par décret en conseil d'Etat. »

Cet amendement est-il défendu ?

M. Jean-Pierre Baeumler.

Il est défendu.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière.

La commission a accepté cet amendement, qui complète, d'une certaine manière, l'amendement no 72 que nous avons adopté précédemment.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Sous réserve de l'adoption d'un sous-amendement tendant à supprimer les mots : « et d'aptitude physique », le Gouvernement ne voit aucune objection à cet amendement.

M. le président.

Je suis effectivement saisi par le Gouv ernement d'un sous-amendement, qui portera le numéro 87, ainsi conçu : « Dans l'amendement no 69, supprimer les mots : « et d'aptitude physique ».

Quel est l'avis de la commission sur ce sous-amendement ?

M. René Dosière, rapporteur.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no

87. (Le sous-amendement est adopté.)

M. le président.

Il conviendra donc d'écrire, dans l'amendement no 69 : « L'ancienneté du permis de conduire, l'expérience professionnelle et de réactualisation des connaissances. »

Je mets aux voix l'amendement no 69 modifié par le sous-amendement no

87. (L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président.

M. Biessy et les membres du groupe communiste ont présenté un amendement, no 47 rectifié, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le texte proposé pour l'article L. 29-8 du code de la route :

« L'enseignement dispensé dans les établissements mentionnés à l'article L. 29-5 doit être conforme au programme défini par l'autorité administrative.

« Le préfet contrôle les conditions d'exploitation des établissements d'enseignement de la conduite.

« L'application du programme de formation défini par l'autorité administrative fait l'objet d'un contrôle par une commission composée de représentants de l'administration et de représentants qualifiés de la profession désignés dans des conditions fixées par décret. »

La parole est à M. Gilbert Biessy.

M. Gilbert Biessy.

L'amendement no 47 rectifié tend à séparer les contrôles administratifs - conditions d'exploitation, respect des réglementations, etc. - des contrôles pédagogiques qui seraient assurés par une commission composée à la fois de représentants de l'administration et de représentants qualifiés de la profession.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

La commission n'a pas eu à examiner cet amendement, mais elle a accepté l'amendement suivant. Je trouve l'amendement de M. Biessy sympathique, mais j'avoue que je m'interroge sur le rôle que pourrait jouer une commission et sur la complication éventuelle que cela pourrait entraîner, alors que ce contrôle est actuellement effectué par une personne.

Je reconnais cependant que ce contrôle n'est pas satisfaisant. C'est la raison pour laquelle la commission a adopté l'amendement no 52 qui en améliore les conditions.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée.

M. le président.

Monsieur Biessy, maintenez-vous votre amendement ?

M. Gilbert Biessy.

Je le retire.

M. le président.

L'amendement no 47 rectifié est retiré.

MM. Marcovitch, Baeumler et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement no 52, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article L.

29-8 du code de la route par l'alinéa suivant :

« Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions de ce contrôle et fixe les catégories d'agents publics habilités à exercer ce contrôle. »

La parole est à M. Daniel Marcovitch.

M. Daniel Marcovitch.

Comme l'a dit M. le rapporteur, les contrôles pédagogiques sont effectués dans des conditions qui ne sont pas toujours satisfaisantes par des fonctionnaires qui sont en même temps des inspecteurs du permis de conduire et qui ne sont pas toujours de classe A. Il serait bon qu'un corps d'agents publics soit affecté, par décret, uniquement à cette tâche. C'était l'esprit de l'amendement de notre collègue Biessy. Il aura donc satisfaction par l'adoption de mon amendement.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

Favorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Favorable.


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M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

52. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Dosière, rapporteur, a présenté un amendement, no 7, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le début du deuxième alinéa du texte proposé pour l'article L.

29-9 du code de la route :

« En cas d'urgence justifiée par des faits passibles d'une des condamnations visées à l'article L.

29-7, l'autorité administrative... (Le reste sans changement.) » La parole est à M. le rapporteur.

M. René Dosière, rapporteur.

Il s'agit d'un amendement de coordination.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

7. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Dosière, rapporteur, a présenté un amendement, no 8, ainsi rédigé :

« I. Après le troisième alinéa du texte proposé pour l'article L.

29-9 du code de la route, insérer l'alinéa suivant :

« La mesure de suspension provisoire cesse de plein droit dès que l'autorité judiciaire s'est prononcée.

« II. En conséquence, supprimer le dernier alinéa de cet article. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. René Dosière, rapporteur.

Amendement de précision.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

8. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Luca a présenté un amendement, no 43, ainsi rédigé :

« Compléter le texte proposé pour l'article L.

29-9 du code de la route par l'alinéa suivant :

« Le suivi pédagogique devra être permanent et inopiné. Un contrôle sera effectué par un inspecteur du service de formation du conducteur. »

La parole est à M. Jean-Claude Lemoine, pour défendre cet amendement.

M. Jean-Claude Lemoine.

Toujours dans le même esprit, nous proposons qu'un suivi permanent permette de vérifier, d'une façon administrative et pédagogique, l'enseignement qui sera donné dans les différentes structures.

M. le président.

Un suivi permanent et inopiné ?

M. Jean-Claude Lemoine.

Tout à fait.

M. le président.

Comme les contrôles radar de M. Sarre !

M. Jean-Claude Lemoine.

Là, il ne s'agit pas de radars.

Cela me semble une bonne façon de connaître véritablement la qualité de l'enseignement qui est dispensé dans un établissement d'enseignement de la conduite.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

La commission a repoussé cet amendement, non pas parce qu'elle était hostile à son contenu mais tout simplement parce qu'après l'adoption de l'amendement no 52, il devenait sans objet.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Même avis que la commission.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

43. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Dosière, rapporteur, a présenté un amendement, no 9, ainsi rédigé :

« Dans le premier alinéa du I du texte proposé pour l'article L.

29-10 du code de la route, après les mots : "de la sécurité routière", insérer les mots : "ou de formation des candidats pour l'exercice de la profession d'enseignant.

". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. René Dosière, rapporteur.

Il s'agit d'une précision qui corrige en fait une erreur matérielle.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

9. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Dosière, rapporteur, a présenté un amendement, no 10, ainsi rédigé :

« Dans le quatrième alinéa (2o ) du III du texte proposé pour l'article L.

29-10 du code de la route, a près le mot : "personne", insérer le mot : "morale". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. René Dosière, rapporteur.

Il s'agit d'une harmonisation rédactionnelle.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

10. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'article 2 du projet de loi, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 2, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 2

M. le président.

M. Dosière, rapporteur, a présenté un amendement, no 11, ainsi rédigé :

« Après l'article 2, insérer l'article suivant :

« L'enseignement de la conduite des véhicules terrestres à moteur d'une catégorie donnée et de la sécurité routière par les associations régies par la loi de 1901 qui exercent leur activité dans le champ de l'insertion ou de la réinsertion sociale et professionnelle est subordonné à la délivrance d'un agrément par l'autorité administrative qui vérifie que les conditions prévues au 1o de l'article L. 29-7 et à l'article L. 29-8 du code de la route sont remplies.

« Un décret en Conseil d'Etat détermine les caractéristiques de ces associations. »


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Sur cet amendement, je suis saisi de deux sousamendements nos 80 et 81 présentés par le Gouvernement.

Le sous-amendement no 80 est ainsi rédigé :

« Dans le premier alinéa de l'amendement no 11, après les mots : "qui vérifie que les conditions prévues", insérer les mots : "à l'article L. 29-1,". »

Le sous-amendement no 81 est ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le dernier alinéa de l'amendement no 11 : "Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent article". »

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement no

11.

M. René Dosière, rapporteur.

L'amendement reprend les dispositions qui figuraient initialement à l'article 2 dans le texte proposé pour l'article L. 29-5 du code de la route.

M. le président.

La parole est à M. le ministre, pour défendre ses sous-amendements nos 80 et 81 et donner son avis sur l'amendement no

11. M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Il paraît nécessaire que les associations d'insertion pratiquant l'enseignement de la conduite soient soumises aux mêmes conditions que les auto-écoles pour ce qui concerne la qualification de leurs moniteurs. C'est pourquoi le Gouvernement propose, dans le sous-amendement no 80, de rectifier l'amendement de la commission pour y viser l'article L. 29-1.

Par ailleurs, il paraît plus approprié de prévoir que le décret en Conseil d'Etat, évoqué au deuxième alinéa du nouvel article additionnel, fixera « les modalités d'application dudit article » plutôt que « déterminera les caractéristiques de ces associations. » C'est l'objet du sous-amende-

ment no

81. Sous réserve de l'adoption de ces sous-amendements, le Gouvernement est favorable à l'amendement no

11.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur ces deux sous-amendements ?

M. René Dosière, rapporteur.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no

80. (Le sous-amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no

81. (Le sous-amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 11, modifié par les sous-amendements adoptés.

(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président.

M. Dosière, rapporteur, a présenté un amendement, no 83, ainsi rédigé :

« Après l'article 2, insérer l'article suivant :

« Les articles L. 29 à L. 29-11 du code de la route seront applicables aux enseignants et aux établissements d'enseignement à titre onéreux de la conduite des véhicules terrestres à moteur d'une catégorie donnée ainsi qu'aux établissements de formation des candidats pour l'exercice de la profession d'enseignant déjà existants, à l'issue d'un délai et selon des modalités fixés par le décret en Conseil d'Etat prévu par l'article L. 29-11 du code de la route. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. René Dosière, rapporteur.

L'amendement précise que les dispositions que nous venons de voter concernant les auto-écoles s'appliqueront à celles qui sont déjà installées dans des conditions et selon des modalités que nous demandons au Gouvernement de préciser par décret après concertation avec la profession.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

83. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Luca a présenté un amendement, no 44, ainsi rédigé :

« Après l'article 2, insérer l'article suivant :

« L'enseignement des règles de circulation doit être obligatoirement intégré dans le cursus scolaire, dès les classes de secondaire et contrôlé par un test à l'issue de la classe de quatrième. »

La parole est à M. Jean-Claude Lemoine, pour défendre cet amendement.

M. Jean-Claude Lemoine.

L'amendement no 44 rejoint les préoccupations exprimées tout à l'heure par M. le ministre. Il tend en effet à préciser que les règles de la circulation seront enseignées de façon très précise tout au long de la vie et particulièrement lors des cours d'instruction civique dispensés dans les différents établissements scolaires.

Ce serait une avancée importante qui permettrait à chaque individu, tout au long de sa vie, de prendre conscience des risques de la route. Cela ne pourrait être que bénéfique sur le plan de la sécurité.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

La commission a considéré que cette disposition relevait du domaine réglementaire. Par ailleurs, comme l'a souligné M. le ministre, des dispositions ont été prises et des efforts ont déjà été faits en ce sens. Elle n'a donc pas jugé utile de retenir la position un peu systématique proposée par M. Luca.

C'est pourquoi elle a repoussé son amendement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Je partage les préoccupations de M. Luca, mais la disposition qu'il propose ne relève pas du domaine législatif. Donc, avis défavorable.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Baeumler.

M. Jean-Pierre Baeumler.

La disposition proposée est en effet d'ordre réglementaire, mais je crois qu'il est utile d'appeler l'attention de tous les pédagogues et de tous les éducateurs sur l'intérêt que présente la formation sur les questions touchant à la sécurité routière, notamment à l'école. Cette éducation a trouvé place tant à l'école maternelle qu'au collège et au lycée. Cela dit, il est vrai que les circulaires existent. Il suffit de les appliquer. Nous ne voterons pas l'amendement, mais nous tenions à souligner l'intérêt que présente la disposition qui est proposée.

M. le président.

La parole est à M. Dominique Bussereau.

M. Dominique Bussereau.

Quelques mots, monsieur le président, pour répondre au Gouvernement.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

La proposition de notre collègue Luca est, c'est vrai, de nature réglementaire, mais tout est réglementaire dans le texte que vous nous proposez, monsieur le ministre. Elle a néanmoins une valeur forte sur le plan pédagogique et, si le Gouvernement veut véritablement un effet d'affichage et un moyen d'incitation, il ne peut qu'y être favorable. Je ne comprends pas que les propositions émanant de l'opposition soient systématiquement déclarées de nature réglementaire et celles de la majorité de nature législative.

M. François Rochebloine.

Tout à fait.

M. René Dosière, rapporteur.

Ce n'est pas aussi systématique que cela !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

44. (L'amendement n'est pas adopté.)

Article 3

M. le président.

« Art. 3. - Le cinquième alinéa de l'article L.

211-1 du code des assurances est ainsi rédigé :

« Les membres de la famille du conducteur ou de l'assuré, ainsi que les élèves d'un établissement d'enseignement de la conduite des véhicules terrestres à moteur agréé, en cours de formation ou d'examen, sont considérés comme des tiers au sens du premier alinéa du présent article. »

Je mets aux voix l'article 3.

(L'article 3 est adopté.)

Après l'article 3

M. le président.

M. Fleury et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, no 51, ainsi rédigé :

« Après l'article 3, insérer l'article suivant :

« Le nombre de places d'examen de permis de conduire est attribué à chaque établissement d'enseignement de la conduite en fonction du nombre d'heures d'enseignement qu'il a effectuées. »

La parole est à M. Jacques Fleury.

M. Jacques Fleury.

Le système actuel, dit méthode Mayet, attribue à chaque auto-école pour l'examen du permis de conduire un nombre de places proportionnel au nombre d'élèves inscrits. Ce système encourage les auto-écoles à recruter des candidats en pratiquant des tarifs à la baisse, sans avoir nécessairement les moyens d'assurer un enseignement de qualité ni surtout le succès à l'examen. Les candidats se découragent, sont parfois obligés d'attendre longuement leur tour, la formation n'est pas toujours du niveau souhaité et des pratiques assez obscures d'échange de places entre établissements d'enseignement ont déjà été constatées et quelquefois réprimées.

Mon amendement consiste à fixer le nombre de places d'examen du permis de conduire en fonction du nombre d'heures d'enseignement effectuées. Il aurait le mérite d'assainir et de moraliser cette activité.

Cette proposition est soutenue par la profession et reprend une demande qui date déjà de plusieurs mois, voire plusieurs années.

Je crois savoir que des discussions sont en cours depuis longtemps et qu'elles auraient donné lieu à un accord.

Or, pour des raisons qui m'échappent, elles n'ont pas encore débouché sur une solution pourtant attendue avec impatience par la profession.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

La commission a été très sensible à l'intérêt de l'amendement déposé par M. Fleury, comme elle l'était d'ailleurs au texte de l'amendement précédent de M. Luca. Mais considérant, là encore, que le dispositif préconisé relevait plutôt d'une circulaire ministérielle, c'est-à-dire du domaine réglementaire, elle a émis un avis négatif. Vous constatez ainsi, monsieur Bussereau, que notre position n'est pas systématique en fonction de l'étiquette des auteurs des amendements.

M. Dominique Bussereau.

C'est l'exception qui confirme la règle !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Une modernisation de la gestion des places d'examen me paraît à moi aussi nécessaire et j'ai demandé à mes services d'entreprendre une réflexion approfondie sur cette question. Le but est tout à la fois de mieux garantir les droits des candidats, de traiter équitablement les auto-écoles et de favoriser la qualité de l'enseignement.

Après concertation approfondie et expérimentation, la réforme en cours d'étude devrait permettre d'atteindre les objectifs qui inspirent l'amendement de M. Fleury. Cette question est bien du domaine réglementaire. Je suis donc conduit à demander à M. Fleury de retirer son amendement.

M. le président.

La parole est à M. François Rochebloine.

M. François Rochebloine.

L'amendement déposé par notre collègue Fleury est plein de bon sens et je le sout iens pleinement. On parle beaucoup de réflexion, d'études, monsieur le ministre, encore et toujours. Là, il nous est proposé un dispositif tout prêt. Pourquoi ne pas l'appliquer ? Puisque l'on parle des auto-écoles, je voudrais rappeler que nous manquons cruellement d'inspecteurs pour faire passer les examens. Les auto-écoles réclament depuis déjà un certain temps qu'il y en ait davantage.

M. le président.

La parole est à M. Jacques Fleury.

M. Jacques Fleury.

Je suis évidemment sensible à l'argument selon lequel ma proposition relève du règlement et non de la loi. Vous nous annoncez, monsieur le ministre, qu'une réflexion est conduite sur ce sujet. Mais, que je sache, elle était déjà entamée avant que vous ne preniez vos responsabilités...

M. François Rochebloine et M. Alain Ferry.

Tout à fait !

M. Jacques Fleury.

... et semblait avoir débouché sur un accord. Or, pour des raisons que je n'arrive pas à comprendre, peut-être le manque d'examinateurs, je n'en sais rien, rien ne s'est passé, pas même un relevé de conclusions.

Monsieur le ministre, je veux bien retirer mon amendement, mais à condition d'avoir des engagements précis et des informations très positives d'ici à la deuxième lecture, afin de répondre aux attentes de la profession.

M. le président.

L'amendement no 51 est retiré.

La parole est à M. François Rochebloine.

M. François Rochebloine.

Je n'ai pas l'habitude de changer d'avis. Nous reprenons donc l'excellent amendement de notre collègue Fleury.

M. Alain Ferry.

Tout à fait !


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M. le président.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Je veux confirmer la volonté d'aboutir du G ouvernement, mais également rappeler, monsieur Rochebloine, que votre groupe a systématiquement voté pour une réduction des dépenses de fonctionnement lors de la loi des finances. Or voilà que vous proposez une augmentation des dépenses en créant des postes d'inspecteur. Cela dit, pour une fois, je suis de votre avis : il faut suffisamment de personnels dans la fonction publique.

M. François Rochebloine.

Trop facile !

M. Jean-Claude Lemoine.

Un peu simple !

M. Dominique Bussereau.

Excellent amendement que M. Fleury devrait voter !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 51 qui a été repris par M. Rochebloine.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 4

M. le président.

Je donne lecture de l'article 4 : Section 3 Dispositions relatives à la responsabilité des propriétaires de véhicules

« Art. 4. - I. - Au premier alinéa de l'article L. 21-1 du code de la route, les mots : "est responsable pécuniairement des infractions à la réglementation sur le stationnement des véhicules pour lesquelles seule une peine d'amende est encourue," sont remplacés par les mots : "est responsable pécuniairement des contraventions à la réglementation sur le stationnement des véhicules, sur les vitesses maximales autorisées et sur les signalisations imposant l'arrêt des véhicules,".

« II. - Le même article est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La personne déclarée responsable en application des dispositions du présent article n'est pas responsable pénalement de l'infraction. L'application du présent article ne donne lieu à aucune inscription au casier judiciaire et ne peut être prise en compte pour l'application des règles sur la récidive. Elle n'entraîne pas retrait des points affectés au permis de conduire. »

La parole est à M. Jean-Claude Lemoine, premier orateur inscrit sur l'article.

M. Jean-Claude Lemoine.

Comme je l'ai indiqué lors de la discussion générale, je demande la suppression de cet article qui contrevient aux dispositions du code civil :

« Nul n'est responsable pénalement qu'en raison de son propre fait ». Cet article est effectivement anticonstitutionnel.

De surcroît, il n'apporte rien à la sécurité ; il permet seulement à l'Etat de récupérer des fonds. En outre, il ne peut qu'inciter à la délation. Il sera, enfin, très difficilement applicable aux véhicules d'entreprises ou de l'administration et aux loueurs. Et, surtout, il me paraît terriblement injuste, puisqu'il organise, en fait, l'impunité du véritable auteur de l'infraction.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Mais non !

M. Jean-Claude Lemoine.

M. le ministre l'a dit tout à l'heure, on ne prononcera pas de suspension de permis à l'encontre de l'auteur de l'infraction ; aucun point ne lui sera retiré et il ne risquera pas d'être poursuivi pour délit de grande vitesse. Certains automobilistes, ceux-là même que M. le ministre a décrits tout à l'heure, ceux qui possèdent des voitures excessivement rapides, qui conduisent sans chauffeur ni gyrophare, se soucient peu de l'amende.

Sans suspension ni retrait de points, ils ne seront pas véritablement punis.

Autant de raisons qui me conduisent à demander la suppression de cet article 4, défendant du même coup mon amendement no

20.

M. le président.

La parole est à M. Dominique Bussereau.

M. Dominique Bussereau.

Je defends par la même occasion mon amendement no 17 afin de gagner du temps.

Les arguments de M. Lemoine sont tout à fait exacts.

J'ajoute d'ailleurs que, si cet article est voté, nous le soumettrons au Conseil constitutionnel afin de savoir ce qu'il en pense au regard des libertés.

Le vrai problème, je l'ai dit tout à l'heure et M. le ministre m'a répliqué assez vertement, est déjà d'appliquer la loi existante. Or il n'y a pas assez de cinémomètres, pas assez de contrôles, pas assez d'effectifs de gendarmerie et de police nationale, et que nous annonce le Gouvernement ? Des suppressions de commissariats de police et de brigades de gendarmeries. Je connais ainsi un axe routier très important dans ma circonscription sur lequel on supprime les deux brigades entre l'échangeur de l'autoroute et la zone touristique de Royan ; il y aura donc encore moins de chances d'y voir pratiquer des contrôles.

Ajoutons, sur un plan plus juridique, que ces contrôles consistent à « flasher » les véhicules, ce qui est tout à fait normal, mais sans les intercepter. Je comprends que ce soit très difficile, parfois même très dangereux pour les forces de l'ordre : nous avons déjà vu des policiers ou des gendarmes morts dans l'exercice de leur mission en essayant d'intercepter un poids lourd sur le périphérique parisien ou une voiture sur une autoroute par forte circulation. Mais il n'en reste pas moins que quelqu'un commet un acte délicteux et très dangereux pour la vie d'autrui et qu'on le « flashe » sans l'arrêter. On finira un jour par voir une partie civile au tribunal se retourner contre l'Etat pour mise en danger d'autrui, et l'Etat condamné pour ne pas avoir rempli sa mission régalienne, puisqu'il se sera borné à constater l'infraction, sans y avoir mis fin. Votre article n'apporte rien. Appliquons la loi ; ce serait déjà formidable.

M. le président.

Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 17, 20 et 33.

L'amendement no 17 est présenté par MM. Bussereau, R ossi, Goasguen, Clément et Houillon ; l'amendement no 20 est présenté par M. Jean-Claude Lemoine ; l'amendement no 33 est présenté par MM. Landrain, Leonetti et Micaux.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer l'article 4. »

Les amendements nos 17 et 20 ont déjà été défendus.

L a parole est à M. Jean-Antoine Leonetti pour défendre l'amendement no

33.

M. Jean-Antoine Leonetti.

Je serai très bref puisque je développerai les mêmes arguments que mes collègues. Du reste, en commission des lois, il n'y a pas que dans l'opposition que votre article a suscité des interrogations.

M. Gouzes lui-même, je m'en souviens fort bien, a sou-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

levé nombre de problèmes sur sa légalité. Mais le plus grave reste cette impunité : il suffirait de payer pour ne pas être poursuivi sur des infractions graves ! C'est là un message redoutable que vous adressez à vos concitoyens : on est « flashé », on paie, on ne perd pas de points et on ne peut pas être poursuivi ! C'est une véritable incitation à échapper à la loi.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Mais non !

M. Dominique Bussereau.

C'est l'injustice institutionnalisée, les gros contre les petits !

M. Jean-Antoine Leonetti.

J'ai bien compris que l'on n'était pas coupable, mais j'ai bien compris aussi, grâce à l'amendement de M. Gouzes, que, lorsqu'on se fait « flasher » en infraction, on n'est ni responsable ni coupable, mais seulement financièrement redevable !

M. François Rochebloine.

Très bien !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

Vous ne serez pas surpris que la commission se soit opposée à ces amendements de suppression. Pour ne pas allonger les débats sur la constitutionnalité des dispositions citées, je vous renvoie à mon rapport écrit, soulignant d'ailleurs qu'une jurisprudence ancienne estime que la spécificité du droit routier peut justifier des dérogations au principe de la personnalité des peines.

Ajoutons que plusieurs amendements adoptés par la commission réduisent à néant l'argument selon lequel nous encouragerions la délation. J'y reviendrai tout à l'heure lorsque nous les examinerons : ils tendent à améliorer la rédaction des dispositions adoptées par le Sénat en précisant bien qu'il ne s'agit que d'une responsabilité pécuniaire.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Pour commencer, avant de vous présenter ce projet de loi, nous avons sollicité, vous vous en doutez bien, le Conseil d'Etat afin de nous assurer de la fiabilité de ses dispositions sur le plan juridique. D'un côté, vous reprochez à ce texte d'être trop répressif, mais, de l'autre, si j'ai bien compris votre argument, vous le trouvez trop laxiste !

M. Jean-Antoine Leonetti.

Il est mauvais ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Il n'est ni l'un ni l'autre. Je crains que la fougue de vos arguments ne l'emporte sur la lucidité de votre examen. Si quelqu'un est reconnu comme l'auteur d'une infraction, que ce soit par flash ou par interception, non seulement il paiera l'amende, mais il perdra des points. Ce n'est qu'en l'absence d'identification que le propriétaire de la voiture, comme c'est déjà le cas aujourd'hui, sera pécuniairement responsable, à moins qu'il ne fasse la preuve que son véhicule lui a été volé.

Ne faites pas dire à cet article autre chose que ce qu'il dit ! Il n'y a là ni laxisme, ni répression supplémentaire.

Cet article concourra à mieux assurer l'égalité devant la menace de la sanction pécuniaire, mais il incitera également ceux qui prêteront leur véhicule à veiller à ce que le conducteur ne fasse pas n'importe quoi, notamment en matière de feux rouges, de stops et d'excès de vitesse.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Baeumler.

M. Jean-Pierre Baeumler.

On a déjà répondu aux arguments de nos collègues portant sur la délation.

L'amendement adopté tout à l'heure permet d'éviter toute incitation à la délation ; il incitera au contraire les forces de l'ordre à rechercher les véritables auteurs de l'infraction.

Il s'agit uniquement, on l'a dit, de responsabilité pécuniaire, non de responsabilité pénale, car nul n'est responsable que de son propre fait. Il n'y aura ni perte de point ni inscription sur le casier judiciaire. Il était bon de le rappeler.

M. Jean-Claude Lemoine.

Mais c'est injuste !

M. Jean-Pierre Baeumler.

M. le ministre vient de développer un argument important : celui de l'égalité. On parle beaucoup de liberté, mais le principe d'égalité devait être rappelé.

M. Jean-Antoine Leonetti.

C'est purement financier, c'est tout !

M. Jean-Pierre Baeumler.

On sait qu'un tiers des infractions constatées ne sont pas poursuivies, simplement parce qu'on n'a pu identifier le conducteur du véhicule, en particulier lorsqu'il s'agit d'une moto.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Absolument !

M. Jean-Pierre Baeumler.

C'est aussi un problème de responsabilité. Le propriétaire doit en quelque sorte se sentir responsable de ce qui se passera dès lors qu'il a prêté sa voiture à son fils, à sa fille, à un de ses amis. Jer eprends la comparaison du rapporteur au Sénat, M. Lanier : l'automobiliste doit être responsable de son véhicule comme le cavalier l'est de son cheval. Le cavalier est responsable de son cheval qui s'emballe ; le conducteur l'est des chevaux-vapeur dont il est propriétaire.

(Sourires.)

M. Jean-Antoine Leonetti.

Un peu cavalier, comme argument !

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 17, 20 et 33.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

M. Dosière, rapporteur et M. Gouzes ont présenté un amendement, no 12 corrigé, ainsi rédigé :

« I. - Dans le I de l'article 4, après les mots : remplacés par les mots : "est", substituer au mot : "responsable", le mot : "redevable".

« II. - En conséquence, au début de la première phrase du deuxième alinéa du II de cet article, après le mot : "déclarée", substituer au mot : "responsable", le mot : "redevable". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. René Dosière, rapporteur.

Il s'agit d'un amendement rédactionnel.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 12 corrigé.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Le Gourvernement a présenté un amendement, no 77, ainsi rédigé :

« Dans le I de l'article 4, apès le mot : "pécuniairement", insérer les mots : "de l'amende prononcée pour". »

La parole est à M. le ministre.


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M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

C'est un amendement rédactionnel.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

77. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Dosière, rapporteur, a présenté un amendement, no 13, ainsi rédigé :

« Compléter le I de l'article 4 par les mots : "et les mots" "qu'il ne fournisse des renseignements permettant d'identifier l'auteur véritable de l'infraction " sont remplacés par les mots : "que l'auteur véritable l'infraction ne puisse être identifié". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. René Dosière, rapporteur.

La formulation proposée : « que l'auteur véritable de l'infraction ne puisse être identifié » ne peut prêter à équivoque. Ainsi, on ne pourra pas nous reprocher d'encourager à la délation. De ce fait, l'argument de M. Lemoine n'est plus justifié.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

13. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Baeumler et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, no 50, ainsi rédigé :

« Compléter le I de l'article 4 par l'alinéa suivant :

« Dans le même alinéa, après les mots : "événements de force majeure", sont insérés les mots : "ou d'un vol". »

La parole est à M. Jean-Pierre Baeumler.

M. Jean-Pierre Baeumler.

Le vol fait, à mon sens, partie des événements de force majeure susceptible d'être invoqué ; cela va sans dire, mais encore mieux en le disant.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

Comme l'a fait observer M. Baeumler, le vol fait partie des événements de force majeure. (Sourires.)

C'est d'ailleurs la raison pour laquelle la commission a repoussé cet amendement, considérant qu'il était inutile. Cela dit, M. Baeumler préfère que ce soit écrit. Nous verrons ce qu'en dit l'Assemblée.

M. Michel Bouvard.

Tous les membres du groupe socialiste ont signé.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

50. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.

Le Gouvernement a présenté un amendement, no 78, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi les deux dernières phrases du II de l'article 4 :

« Lorsque le tribunal de police, y compris par ordonnance pénale, fait appplication des dispositions du présent article, sa décision ne donne pas lieu à inscription au casier judiciaire, ne peut être prise en compte pour la récidive et n'entraîne pas retrait des points affectés au permis de conduire. Les règles sur la contrainte par corps ne sont pas applicables au paiement de l'amende. »

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

L'amendement no 78 reprend les dispositions adoptées par le Sénat en précisant que l'application de l'article L.

21-1 du code de la route ne donne pas lieu à inscription au casier judiciaire, ne compte pas pour la récidive et n'entraîne pas de retrait de points.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

78. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'article 4, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 4, ainsi modifié, est adopté.)

Article 5

M. le président.

Je donne lecture de l'article 5 : Section 4 Dispositions relatives à la création d'un délit en cas de récidive de dépassement de la vitesse maximale autorisée, égal ou supérieur à 50 km/h

« Art. 5. - Il est ajouté au titre Ier du code de la route (partie législative) un article L.

4-1 ainsi rédigé :

« Art. L.

4-1. - Est puni de trois mois d'emprisonnement et de 25 000 francs d'amende tout conducteur d'un véhicule à moteur qui, déjà condamné définitivement pour un dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 50 km/h, commet la même infraction dans le délai d'un an à compter de la date à laquelle cette condamnation est devenue définitive. »

Plusieurs orateurs sont inscrits sur cet article.

La parole est à M. Jean-Claude Lemoine.

M. Jean-Claude Lemoine.

Je profite de la discussion sur l'article 5 pour répondre à M. le ministre qui m'a, semble-t-il, mal entendu car je ne veux pas imaginer qu'il ait volontairement tronqué mes propos.

Quand j'ai proposé de substituer aux 50 km/h en toutes circonstances une augmentation de 50 % de la vitesse autorisée, vous m'avez rétorqué, monsieur le ministre, que cela revenait à permettre de rouler à 195 km/h sur les autoroutes. Or, vous le savez comme moi, les accidents ont lieu surtout dans les agglomérations, ensuite sur les routes communales ou départementales, enfin sur les routes nationales et, dans une moindre mesure, sur les autoroutes.

M. François Rochebloine.

Tout à fait !

M. Jean-Claude Lemoine.

En fait, je suis beaucoup plus sévère que le Gouvernement. En ville, je propose 75 km/h, vous proposez 100 km/h ; sur les routes départ ementales, je propose 135 km/h, vous proposez 140 km/h ; par temps de brouillard - c'est alors que se produisent les accidents sur les autoroutes -, je propose


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75 km/h tandis que vous proposez 100 km/h. Ma proposition n'est donc pas du tout laxiste, elle n'a pas du tout pour but de permettre à des gens de rouler à 200 km/h sur l'autoroute.

Certes, sur autoroute, vous arrivez à 180 km/h et moi à 195 km/h. Mais, je l'ai déjà dit, la marge est faible et les conséquences peu importantes. En revanche, avec ma proposition, on obtient des améliorations très importantes dans les endroits « accidentogènes », c'est-à-dire dans les agglomérations, sur les routes départementales et en cas de conditions climatiques défavorables comme le brouillard. Je pense donc que cette mesure est bonne. En outre, 50 % en plus partout, c'est aussi lisible que 50 km/h partout. Il n'y aurait pas de difficulté d'application.

Je tenais à revenir sur ce point, parce que je ne voudrais pas qu'on me présente comme un défenseur de la vitesse. En fait, dans quatre circonstances sur cinq, je suis même beaucoup plus rigoureux que ne l'est le Gouvernement.

Parce qu'il est doublement injuste, en étant uniforme en toutes ciconstances et en condamnant à la même peine de prison, peut-être à l'intérieur d'une même cellule, un contrevenant et un malfrat, je demande la suppression de l'article 5. En tout état de cause, je souhaite, s'il devait être conservé, qu'il soit amélioré dans les conditions que j'ai décrites tout à l'heure.

M. François Rochebloine.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Dominique Bussereau

M. Dominique Bussereau.

Mêmes arguments.

M. le président.

La parole est à Mme Catherine Génisson.

Mme Catherine Génisson.

L'article 5 passionne, il expose les sanctions en cas de récidive, dans le délai, d'un an, d'un dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 50 km/h.

J'adhère totalement à toute mesure, préventive ou répressive, qui permet de réduire les effets néfastes de l'excès de vitesse. L'exercice de mon métier, médecinanesthésiste depuis vingt-cinq ans, responsable d'un service d'urgences depuis dix ans, a certainement eu en la matière une vertu pédagogique permanente.

Je soutiens l'article 5, tout en indiquant clairement que la prévention est capitale et qu'à côté du projet de loi que nous examinons, des mesures doivent être prises : la formation des conducteurs dès l'enfance, en particulier en milieu scolaire ; l'instauration d'un véritable apprentissage de la conduite ; l'amélioration de la formation des adultes.

N'oublions pas que l'excès de vitesse est à l'origine de 50 % des accidents mortels de notre pays. C'est une réalité incontournable. A contrario, quand il existe une limitation de la vitesse et qu'elle est respectée, les accidents de la route et surtout leur gravité diminuent. C'est le cas de l'Allemagne, qui applique et respecte les limitations de vitesse sur les routes et quelques tronçons d'autoroute. Il f aut d'ailleurs signaler que les Allemands ne nous communiquent pas leurs statistiques différenciées d'accidents sur routes et autoroutes.

C'est bien sûr surtout le cas de l'Angleterre, championne de la sécurité routière, après la Suède. Elle a considérablement diminué le nombre des morts en associant strictes limitations de vitesse et système de sanctions efficaces.

Le palmarès de la France est moins glorieux. Nous aurons le triste privilège de constater cette année une augmentation sensible du nombre de morts par rapport à 1997 : ils dépasseront largement le nombre de 8 000.

Les chiffres sur le nombre des accidents sur les routes nationales et les autoroutes ont été donnés, je n'y reviens pas. Je souligne néanmoins que l'aggravation des statistiques tant des accidents que des tués concerne les autoroutes.

Je rappelle également que l'augmentation du nombre de tués touche surtout les jeunes de quinze à vingtquatre ans. Chaque jour, vingt-deux personnes sont tuées sur les routes et près de 460 sont blessées.

Mais, derrière la froideur et l'anonymat de ces chiffres, il y a des êtres humains : C'est le jeune motard décédé dont le père venait de payer les réparations de la moto pour l'obtention du bac ; C'est le bébé de dix mois, seul rescapé, qui a vu sa mère, ses deux soeurs décéder sur le coup, son père décé der quelques heures après son arrivée à l'hôpital ; C'est le jeune de vingt ans dont le seul espoir est la survie dans un fauteuil roulant ; C'est le père de famille, brillant directeur commercial, qui assiste impuissant, parce que gravement handicapé, à la destructuration de sa famille.

Il n'est pas question bien sûr de tomber dans une sensiblerie de mauvais aloi, mais on ne peut oublier que, à chaque fois, il s'agit d'un drame personnel, familial, social et économique, vécu au quotidien.

Alors oui ! le plaisir éphémère de l'excès de vitesse devient bien dérisoire.

Quand la prévention n'est pas ou n'est plus suffisante, la sanction est nécessaire.

La sanction proposée dans l'article 5 est sévère. Mais elle ne concerne que la récidive, quand le conducteur a commis un nouveau dépassement de la vitesse maximale autorisée de 50 km/h ou plus, dans un délai d'un an. En fait, 10 % des grands excès de vitesse sont suivis de récidives. Trois mois de prison, 25 000 francs d'amende constituent les limites dans lesquelles le juge module la sanction en fonction des circonstances.

Je souhaite pour ma part que le Gouvernement examine les mesures qui permettent la mise en place de solutions alternatives à la peine de prison : le travail d'intérêt général.

Le service d'urgence, dont j'étais responsable, accueille depuis dix ans des personnes effectuant un travail d'intérêt général à la suite d'infractions routières.

M. Michel Bouvard.

Très bien !

Mme Catherine Génisson.

L'âge, l'origine socio-profes-s ionnelle sont extrêmement diverses. Ces personnes, assistent, dans le respect du secret médical, au brancardage des polytraumatisés, au transport des morts à la morgue, et souvent au désarroi des familles. Je peux vous garantir que la sanction devient alors pédagogique et qu'elle devient prévention pour l'avenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur les bancs du groupe communiste.)

M. Michel Bouvard. Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Jacques Fleury.

M. Jacques Fleury.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne vais pas remettre en cause la philosophie de ce projet. L'idée est communé-


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ment admise que la vitesse excessive est dangereuse. Je viens d'entendre encore une excellente plaidoirie. La création d'un délit pour récidive d'excès de vitesse semble donc se justifier.

Je me permettrai quand même un trait d'humour : monsieur le ministre, lorsque nous aurons adopté cet article, vous serez assez aimable, du moins je l'espère, pour m'amener quelques oranges. (Sourires.)

Non que je conduise très vite. Avec l'âge, je me suis assagi, et même, par prudence, je me suis acheté ce que l'on appelle communément un « veau », c'est-à-dire une voiture qui ne roule pas très vite - je dois même me mettre debout les deux pieds sur l'accélérateur pour atteindre les 160 km/h (Rires.)

Et pourtant, j'en suis à peu près convaincu, cet article, que je vais voter, va m'amener quelques ennuis. Pourquoi ? Parce que certains panneaux sont mis en place à des endroits où la logique du conducteur ne s'attend pas à les trouver.

M. François Rochebloine.

Tout à fait !

M. Michel Bouvard.

C'est vrai !

M. Jacques Fleury.

Je fais 80 000 kilomètres de route par an. Je reconnais ne pas être peut-être toujours attentif à tous les panneaux, qui se succèdent environ tous les 500 mètres. Je regarde sans doute plus la route, les camions, les voitures que je double ou qui me croisent.

Ainsi, lorsque je reviens sur Paris, vers deux heures du matin, en utilisant une autoroute qui, à cette heure-là, est généralement libre - mais ce n'est pas une raison pour commettre un excès de vitesse, je le reconnais volontiers -, je croise, à dix ou vingt kilomètres de Paris, un panneau qui limite la vitesse à 80 km/h. Ce panneau a son utilité en pleine journée et je ne le remets pas en cause.

Mais à deux heures du matin, les embouteillages sont en général peu fréquents. Pourtant, j'ai souvent constaté la présence des radars. Pourquoi les faire fonctionner à deux heures du matin ? Pourquoi ne pas les installer à une heure où le contrôle est vraiment utile ?

M. François Rochebloine.

Eh oui !

M. Jacques Fleury.

J'avoue m'être fait piéger avec une belle régularité, parce qu'il faut passer de 130 km/heure à 80 km/h.

Autrement dit, s'il n'est pas modifié, l'article que je vais voter, avec enthousiasme, vous l'aurez compris, va me causer quelques problèmes. Je voulais émettre ces réserves.

M. le président.

La parole est à M. Pierre Micaux.

M. Pierre Micaux.

Je ne suis pas intervenu dans la discussion générale pour faire gagner du temps à l'Assemblée. Néanmoins, je voudrais dire quelques mots qui me tiennent particulièrement à coeur à l'occasion de cet article 5.

Comme tout le monde ici, je n'oublie pas les morts, les handicapés, les innocents, victimes de la folie. Les causes de ces événements pitoyables sont, nous le savons tous aussi, la vitesse, l'alcool, la fatigue, la drogue.

Je souhaite, à l'occasion de la discussion de l'article 5, qui est l'un des articles essentiels du projet de loi, que les p eines soient aggravées, notamment pour les délits commis en ville. Si le dépassement de la limitation de vitesse est fixé à 50 km/h, le délit sera constaté à partir de 100 km/h. Mon département de l'Aube - ce n'est malheureusement qu'un exemple - va battre, cette année encore, un record du nombre des morts, environ 90 morts pour 300 000 habitants. C'est catastrophique. Or une grande partie des accidents ne sont pas dus à des points noirs, ils ont très souvent lieu en ligne droite. On appuie sur l'accélérateur le soir en sortant de la discothèque. On s'en donne à coeur joie et tant pis pour ceux qui sont en face ! Mettre la barre à 100 km/h, en ville, c'est beaucoup trop.

M. Jean-Antoine Leonetti.

Il a raison !

M. Pierre Micaux.

Nous devons également prendre en compte le temps de réaction avant l'événement - à 80 km/h il est de l'ordre de quinze mètres - et le temps de freinage, à 50 km/h il faut 80 mètres pour s'arrêter.

Mais, surtout, à 80 km/h le choc entre deux voitures est mortel. Alors, à partir de 100 km/h, je vous laisse imaginer...

Quels peuvent être les dégâts causés par un poids lourd, en charge de surcroît, de 35, 40 tonnes, roulant en ville à 100 km/h ? Je considère donc la vitesse de 100 km/h, à partir de laquelle le délit est établi, comme excessive. Nous devons durcir le texte, tout particulièrement pour la circulation en ville, encore que je pense que les effets de la grande vitesse sur les routes de campagne sont également très dangereux.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Antoine Leonetti.

M. Jean-Antoine Leonetti.

L'article 5, qui est très médiatisé, pose problème.

Le premier, c'est qu'il place la barre tellement haut, on vient de le souligner, qu'il pourrait laisser penser à nos concitoyens que, finalement, entre la limite autorisée et 50 km/h au-dessus de la limite autorisée, ce n'est pas très grave. Il vaudrait mieux, très certainement, effectuer des contrôles plus fréquents pour sanctionner toutes les infractions au code de la route liées à la vitesse et proportionner l'importance de la peine aux circonstances et au véhicule utilisé.

Un poids lourd qui roule à 100 km/h dans une ville est quand même un peu plus dangereux qu'une voiture sur une autoroute, qui dépasse de 50 km/h la vitesse autorisée.

Le deuxième problème, c'est que la prison n'arrangera strictement rien.

On peut se tuer à 130 km/h, mais mettre les gens en prison parce qu'ils ont dépassé une vitesse, cela ne sert à rien, ni pour lui ni pour les personnes qui pourraient être les victimes.

En outre, on l'a dit, des collègues pourraient se retrouver en prison : il existe bien une disproportion entre la lourdeur de la peine et son manque d'intérêt par rapport à l'infraction commise.

Enfin, je vous ai dit que les délits concernés représentaient 1 % des infractions, et les récidives, 50 % de ce 1 %. Légiférer uniquement pour 0,5 % des infractions médiatiser cet aspect, risque d'occulter toutes les autres mesures que vous avez fort bien décrites et qui sont, elles, efficaces parce que réglementaires.

Par parenthèse, je précise que je n'ai pas dit que votre texte, monsieur le ministre, était réglementaire ; j'ai dit que des mesures vraiment efficaces pour la sécurité routière étaient plutôt réglementaires que législatives, et nos propos le prouvent.

M. le président.

La parole est à M. François Rochebloine.


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M. François Rochebloine.

Je partage tout à fait les propos de Mme Génisson. En effet, je crois que ce n'est pas la prison qui peut solutionner les problèmes.

Je suis également préoccupé, comme M. Fleury, par les contrôles. Le positionnement des panneaux pose problème. Je me suis moi-même retrouvé en infraction pour avoir roulé à 88 km/h en agglomération parce que, en réalité, le panneau indiquant la fin de l'agglomération était très éloigné de l'agglomération elle-même. Il faut en tenir compte, monsieur le ministre.

Autre exemple, il existe entre Saint-Chamond et SaintEtienne une magnifique route à deux fois trois voies.

Cette route est toujours limitée à 110 km/h, puisqu'elle est considérée comme voie expresse. A côté, se trouve une autoroute qui permet de rouler à 130 km/h. Je considère pourtant cette autoroute à deux fois deux voies plus dangereuse que la route à deux fois trois voies.

Tous ces paramètres doivent être pris en considération.

On ne peut pas considérer que le dépassement de 50 km/h a les mêmes conséquences partout, sur une autoroute ou dans une agglomération. Les conséquences dans les agglomérations sont les plus graves. Il est urgent de s'en apercevoir.

M. le président.

La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard.

Je suis, à titre personnel, favorable au délit de grand excès de vitesse. Il s'agit d'une mesure indispensable. Le problème est, comme l'a indiqué tout à l'heure Mme Génisson, la peine de prison. Une peine de substitution me paraîtrait plus adaptée et plus pédagogique pour le contrevenant.

M. François Rochebloine.

Tout à fait !

M. Michel Bouvard.

Monsieur le ministre, je sais que vous n'avez pas de position dogmatique en la matière puisque lors des réunions de concertation préalables à la discussion de ce texte qui ont eu lieu à votre ministère on a hésité entre un dépassement unique de 50 km/h et une différenciation. Depuis ces discussions, j'ai réfléchi sur ce sujet en observant ce que je voyais autour de moi.

Nombre de mes collègues l'ont dit, un dépassement de 50 km/h de la vitesse maximale autorisée en ville, c'est effectivement beaucoup trop. Quand une voiture passe à 80 km/h sur un passage piétons, à la sortie d'une école maternelle, c'est répréhensible. Là, le délit de grand excès de vitesse devrait s'appliquer. En revanche, nous connaissons tous des cas où le panneau d'entrée d'agglomération se situe un, deux, voire trois kilomètres avant la première habitation, donc le premier risque de voir une voiture déboucher d'une cour privée ou un enfant récupérer un ballon. Je connais une agglomération en Savoie où la route longe un hippodrome entièrement clos et où il n'y a absolument aucune possibilité de sortie sur la route. Si vous roulez à 80 ou 90 km/h à deux heures du matin alors qu'il n'y a aucun riverain, vous êtes effectivement en grand excès de vitesse, mais vous ne provoquez pas le même risque que si vous roulez à 75 ou 80 km/h, c'est-àdire en dessous de la vitesse où la sanction tombe, à la sortie d'une école.

Il serait peut-être nécessaire d'y réfléchir d'ici à la deuxième lecture de ce texte.

M. Alain Ferry.

Très bien !

M. Michel Bouvard.

Si nous voulons donner un signal fort, il importe de ne pas donner le sentiment à l'extérieur de cette assemblée que certains députés votent le texte parce qu'ils appartiennent à la majorité, cependant que d'autres, parce qu'ils sont dans l'opposition, s'opposeraient un peu bêtement.

Je crois qu'on peut aboutir à un consensus si l'on veut se donner la peine de réfléchir à une peine de substitution à la prison et à la différenciation.

Par ailleurs, il conviendrait peut-être que le juge puisse avoir la faculté d'apprécier le niveau de dangerosité du lieu de l'infraction et s'intéresse à l'emplacement des panneaux de signalisation.

M. Jean-Claude Lemoine et M. Jean-Antoine Leonetti.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Baeumler.

M. Jean-Pierre Baeumler.

Le débat est extrêmement intéressant. Derrière toutes ces interventions, on sent bien la volonté de tous de prendre en considération la vitesse qui tue, en particulier la grande vitesse, puisque les uns et les autres ont rappelé que plus de la moitié des accidents et plus de la moitié des tués sont d'abord dus à la vitesse.

La mort c'est souvent la ligne droite, la route sèche, le conducteur seul dans sa voiture. Ce sont 40 % environ des accidents qui se produisent dans ces conditions.

Alors que l'insécurité routière augmente, il est bon de d'envoyer un signal fort en direction d'un tout petit nombre de conducteurs qui n'ont pas encore tout à fait compris que la vitesse est dangereuse pour la vie de leurs concitoyens.

Et quand je pense qu'on a pu entendre dire qu'une vitesse dépassant de 50 km/h la vitesse autorisée sur autoroute, ce n'était peut-être pas si grave que cela ! Quand même ! Rouler à 180 km/h sur une autoroute ! Je rappelle que, quand on est à 180 km/h, il faut au moins 250 à 300 mètres, sur route sèche, pour s'arrêter.

Il me semble donc que vouloir, comme cela a été évoqué encore à l'instant, essayer de moduler ce dispositif, c'est faire fausse route. Il faut un dispositif simple, qui parle, je le répète, à un tout petit nombre de conducteurs, et qui, par là même, rappelle aussi au plus grand nombre que la vitesse tue et qu'elle est à l'origine de drames, comme ceux que Mme Génisson a rappelés excellemment.

Je suis pour ma part, comme les collègues de mon groupe, ouvert à toute discussion concernant de possibles aménagements, mais je répète que ce dispositif garde un caractère pédagogique. Car c'est bien la récidive au cours d'une même année qui est sanctionnée. C'est-à-dire que quelqu'un qui aura été sanctionné, au mois de mars ou d'avril - et je rappelle d'ailleurs que tout dépassement de vitesse de 50 km/h peut être sanctionné aujourd'hui à travers une contravention de cinquième classe, ce qui porte l'amende, je crois, à 10 000 francs - sera, au moins dans l'année qui suit, plus attentif.

M. le président.

La parole est à M. René Mangin.

M. René Mangin.

Je veux évoquer le caractère incongru d'une situation que Jacques Fleury a évoquée tout à l'heure. Il faudra bien qu'on se pose un jour, non au niveau français mais au niveau européen, la question de la capacité qu'ont certains véhicules mis sur le marché d'atteindre des vitesses de 280 à 300 km/h.

M. François Rochebloine.

Très bien !

M. René Mangin.

Mon ami Jacques Fleury qui a pris un peu d'âge a acheté un veau (Sourires), mais ce n'est pas le cas de toutes les voitures. Moi, je n'ai rien contre, étant un ancien pilote automobile.

M. Jean-Pierre Baeumler.

Ah !

M. René Mangin.

Il y en a d'autres ici !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

Je n'ai rien contre quand pour se faire plaisir, pour aller vite, on roule sur des circuits automobiles. Mais il faudra quand même, monsieur le ministre, que la question soit posée au niveau européen, comme d'autres d'ailleurs - je pense par exemple aux kits. Il faudrait peut-être envisager de fixer une limite à la puissance et la vitesse pour éviter que des bolides foncent comme des Formule 1 sur des routes nationales.

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 19 et 21.

L'amendement no 19 est présenté par M. d'Aubert ; l'amendement no 21 est présenté par M. Jean-Claude Lemoine.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer l'article 5. »

Ces amendements ont déjà été défendus.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

Bien entendu, la commission les a repoussés.

Monsieur le président, si vous le permettez, je dirai deux mots maintenant, ce qui m'évitera d'avoir à développer par la suite, l'argumentation de la commission sur les divers amendements proposés à l'article 5.

Dans les positions qu'elle a été amenée à prendre, la commission a eu le souci, en premier lieu, de coller, si je puis dire, au texte du Sénat.

Au Sénat, une discussion importante a abouti au texte, que nous n'avons d'ailleurs pas modifié, concernant en tout cas cet article. Si nous voulons accélérer le processus législatif, nous devons être parfois d'accord avec l'autre assemblée.

M. Jean-Antoine Leonetti.

C'est bien !

M. René Dosière, rapporteur.

C'est l'une de nos préoccupations.

Pour une fois que cela arrive, vous n'allez tout de même pas me reprocher de vouloir être en accord avec le Sénat ! C'est suffisamment rare pour pouvoir le souligner.

M. Jean-Antoine Leonetti.

Il faut que cela se renouvelle ! M. François Rochebloine et M. Alain Ferry.

Cela vous arrange !

M. René Dosière, rapporteur.

En second lieu, la commission a été sensible au caractère de simplicité de l'affichage d'une règle unique de vitesse qui a sans doute aussi une valeur pédagogique. De même, le fait d'annoncer qu'une peine de prison peut être requise peut en inciter certains à la prudence.

M. Jean-Antoine Leonetti.

La peine de mort n'était même pas dissuasive ! Alors les peines de prison...

M. René Dosière, rapporteur.

Je reconnais qu'on peut avoir un autre point de vue. Pour ma part, je vous expose les motifs qui ont abouti aux positions que j'exprimerai ultérieurement.

Cela dit, mes chers collègues, votre rapporteur a entendu vos remarques. Effectivement, il y a des différences selon le lieu, le type de route - nationale, autoroute -, le temps, etc. J'essaierai de proposer, pour une lecture ultérieure, un dispositif prenant en considération au moins ces différences, mais je ne sais pas encore sous quelle forme. Il faudra faire preuve d'imagination.

Monsieur Fleury, effectivement il existe un véritable problème de sécurité en ce qui concerne la signalisation.

Chaque maire fait poser les panneaux qui concernent sa commune. Il y a, de ce point de vue, une certaine anarchie en matière de signalisation, comme d'ailleurs dans la réalisation des infrastructures. C'est pourquoi j'ai déposé un amendement en commission, qui l'a accepté, qui pose le principe de la fixation de normes en matière d'infrastructures, dont les modalités devront bien sûr être définies.

Vos arguments, mes chers collègues, sont donc des arguments de bon sens. Le ton des interventions montre bien d'ailleurs qu'on est au coeur du débat. En deuxième lecture, nous devrions sans doute avancer dans la rédaction des amendements sur cet article.

M. Jean-Antoine Leonetti.

Très bien !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Je précise qu'il s'agit d'une sanction qui s'ajoute à l'existant. Ne laissons pas croire que la sanction n'interviendrait qu'au cas où l'excès de vitesse serait de plus de 50 km/h au-dessus de la vitesse autorisée. Nous proposons, en cas de récidive d'un grand excès de grande vitesse, que l'infraction devienne un délit.

L'objectif de l'article 5 est de dissuader celui qui a commis un grand excès de vitesse de recommencer, mais aussi de faire réfléchir les automobilistes sur le problème de la vitesse, y compris les 99 % d'entre eux qui ne font pas de grand excès de vitesse, mais qui peuvent être amenés à dépasser, peut-être moins largement, les vitesses autorisées.

Il ne faut pas s'imaginer que les sanctions ne concerneront que ceux qui auront dépassé de plus de 50 km/h la vitesse autorisée.

M. Jean-Antoine Leonetti.

Les médias le pensent déjà ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

La représentation nationale devra le faire savoir.

M. le rapporteur ainsi que d'autres députés ont insisté sur le problème de la modulation. C'est une vraie question. Le Gouvernement, en élaborant son projet, que le Sénat a approuvé, a recherché la lisibilité. Or si les chiffres sont différents selon les types d'infrastructures, on risque de gâcher cette lisibilité. C'est pourquoi le Gouvernement a proposé un dispositif qui soit aussi simple que possible.

P ar ailleurs, pour améliorer la signalisation, j'ai demandé à mes services de fournir un effort particulier en vue de la rendre compréhensible pour tous.

M. Michel Bouvard.

Cohérente ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Car, monsieur Fleury, mon but n'est pas de faire rentrer de l'argent, mais qu'il n'y ait pas d'argent qui rentre. Mon but, n'est pas que des gens soient menacés d'une sanction qui peut être grave, y compris aller jusqu'à une peine de prison lorsqu'il y a récidive, mais que tout le monde lève le pied et conduise plus calmement afin de réduire le nombre de tués sur les routes de France, comme c'est le cas dans d'autre pays. Il n'est pas question de chercher à piéger pour piéger. Si des panneaux de signalisation sont mal placés, le Gouvernement devra veiller à y remédier.

Enfin, monsieur Micaux, il faut sanctionner, c'est vrai, un poids lourd qui déboule à une vitesse excessive dans une agglomération. Je signale, puisque la question de la réglementation européenne a été évoquée, que la vitesse des poids lourds de plus de douze tonnes est bloquée à


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

90 km/h et que quiconque ferait sauter le limiteur de vitesse ou les appareils qui permettent le contrôle, est passible de très lourdes sanctions, y compris l'immobilisation du véhicule.

M. le président.

La parole est à M. François Rochebloine.

M. François Rochebloine.

Je souhaite revenir sur la question du classement des voies express en autoroute. La route à deux fois trois voies qui relie Saint-Chamon à Saint-Etienne, par exemple, est limitée à 110 km/h. Un automobiliste sera donc passible d'un grand excès de vitesse à 160 km/h. Je voudrais que l'on m'explique.

M. le président.

Vous l'avez déjà dit, monsieur Rochebloine ! Je mets aux voix, par un seul vote, les amendements nos 19 et 21.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

L'amendement no 76 de M. Aschieri n'est pas défendu.

M. Jean-Claude Lemoine a présenté un amendement, no 22 rectifié, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le texte proposé pour l'article L. 4-1 du code de la route :

« Art. L. 4-1. - Lorsqu'un conducteur d'un véhicule à moteur déjà condamné définitivement pour un dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 50 %, commet la même infraction dans le délai de un an à compter de la date à laquelle cette condamnation est devenue définitive, le tribunal peut prononcer, outre une amende de 25 000 F, soit la rétention du certificat d'immatriculation, soit la rétention du véhicule pour une durée de trois mois. »

La parole est à M. Jean-Claude Lemoine.

M. Jean-Claude Lemoine.

Cet amendement reprend un certain nombre des arguments qui ont déjà été exposés. Nous sommes tous d'accord pour que ce texte soit lisible, mais pour ma part je considère que le dépassement de plus de 50 km/h de la vitesse maximale autorisée n'est pas suffisamment sévère dans de très nombreuses circonstances : par temps de brouillard, en ville, etc.

C'est pourquoi, je propose de sanctionner un conducteur lorsqu'il dépasse de 50 % la vitesse autorisée.

Par ailleurs, je suis totalement d'accord avec ma consoeur, Mme Génisson, qui connaît bien les problèmes d'accidents, puisqu'elle est médecin dans un SAMU, pour remplacer l'emprisonnement par une peine de substitution. Je pense que la rétention du certificat d'immatriculation ou la rétention du véhicule sont des mesures dissuasives, surtout pour les fanatiques de la vitesse. Et je suis comme elle favorable à une condamnation à des tâches d'intérêt général dont on a bien besoin et qui p ourraient sensibiliser davantage les personnes qui commettent des infractions très condamnables. Elles apprendraient beaucoup plus qu'en prison.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

La commission n'a pas examiné cet amendement, mais compte tenu de ce que j'ai dit tout à l'heure elle aurait émis un avis défavorable.

Cela dit, je donne volontiers acte à M. Lemoine que son amendement n'est pas laxiste, encore que le dispositif qu'il propose serait beaucoup plus sévère en agglomération mais moins sévère sur autoroute. Cela montre bien la difficulté de trouver une solution et la nécessité de réfléchir sur ce thème.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 22 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de trois amendements, nos 64, 34 et 73, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 64, présenté par M. Micaux, est ainsi rédigé :

« Dans le texte proposé pour l'article L.

4-1 du code de la route, substituer aux mots : "50 km/h", les mots : "30 km/h dans la traversée des agglomérations et à 50 km/h en dehors des agglomérations". »

L'amendement no 34, présenté par MM. Landrain, Leonetti, Micaux et Ferry est ainsi rédigé :

« Dans le texte proposé pour l'article L.

4-1 du code de la route, substituer aux mots : "50 km/h", les mots : "40 km/h dans la traversée des agglomérations et à 50 km/h en dehors des agglomérations". »

L'amendement no 73, présenté par MM. Aschieri, Hascoët, Mamère, Marchand, Cochet et Mme Aubert, est ainsi rédigé :

« Dans le texte proposé pour l'article L.

4-1 du code de la route, substituer aux mots : "50 km/h", les mots : "40 km/h en agglomération et à 50 km/h sur route et autoroute". »

La parole est à M. Pierre Micaux, pour soutenir l'amendement no

64.

M. Pierre Micaux.

J'ai déjà défendu cet amendement lors de mon intervention sur l'article 5.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Antoine Leonetti, pour soutenir l'amendement no

34.

M. Jean-Antoine Leonetti.

La lisibilité de la vitesse n'est pas forcément la vitesse que l'on ajoute à la vitesse autorisée. Cela suppose que les chauffards connaissent exactement la vitesse autorisée.

Ainsi, on pourrait en même temps obtenir une meilleure lisibilité et moduler la vitesse excessive.

M. le président.

L'amendement no 73, c'est pareil. Je considère qu'il a été défendu.

Quel est l'avis de la commission sur ces trois amendements ?

M. René Dosière, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

64. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

34. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

73. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Les amendements nos 75 et 74 de M. Aschieri ne sont pas défendus.

M. Michel Bouvard a présenté un amendement, no 63, ainsi rédigé :

« A la fin du texte proposé pour l'article L. 4-1 du code de la route, substituer aux mots : "condamnation est devenue définitive", les mots : "notification a été faite, au contrevenant, de la condamnation devenue définitive". »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard.

Cet amendement se justifie par son texte même. Il prévoit que seule la date de notification du relevé d'informations rend celle-ci opposable au justiciable et peut faire courir le délai de récidive légale.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

La commission a émis un avis défavorable car cet amendement compliquerait un peu le système et risquerait de favoriser la fraude : les intéressés peuvent prétendre qu'ils n'ont pas reçu la notification. De plus, une telle mesure surchargerait les tribunaux.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ) M. le ministre de l'équipement, des transports et du glogement.

Défavorable.

M. Michel Bouvard.

Convaincu par les explications de M. le rapporteur, je retire mon amendement.

M. le président.

L'amendement no 63 est retiré.

Je mets aux voix l'article 5.

(L'article 5 est adopté.)

Article 6

M. le président.

« Art. 6. - Le a de l'article L.

11-1 du code de la route est ainsi rédigé :

« a) Infractions prévues par les articles L.

1er à L.

4-1,

L. 7, L.

9 et L.

19 du présent code ; » Je mets aux voix l'article 6.

(L'article 6 est adopté.)

Après l'article 6

M. le président.

M. Luca a présenté un amendement, no 46, ainsi rédigé :

« Après l'article 6, insérer l'article suivant :

« Tout conducteur ayant commis une infraction grave (ayant au moins occasionné la perte de 5 points) devra, en plus des sanctions prévues par la loi, effectuer un stage de sensibilisation. »

La parole est à M. Jean-Claude Lemoine, pour soutenir cet amendement.

M. Jean-Claude Lemoine.

La sanction financière ou pénale est nécessaire, mais, au-delà, c'est d'une formation dont a besoin le conducteur, afin qu'il prenne conscience du danger que peut représenter son infraction. Cet amendement prévoit donc qu'au stage de sensibilisation pourra être imposé à tout conducteur ayant commis une infraction grave, afin de l'éduquer, de le former à de nouveaux comportements préventifs et de l'aider à respecter les valeurs civiques. Un tel dispositif devrait être bénéfique pour la sécurité routière.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

La commission a repoussé cet amendement, tout en considérant que l'idée était intéressante. Elle croit savoir que le Gouvernement réfléchit actuellement à une possibilité de ce type. La commission attend donc les explications du Gouvernement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Le Gouvernement souhaite évaluer l'effet de la mesure avant d'envisager une éventuelle extension à d'autres catégories de conducteurs. Je rappelle que, dès lors qu'il a perdu six points au moins, tout conducteur a intérêt à suivre un stage pour en récupérer quatre, et ne pas risquer de se voir retirer son permis. Le Gouvernement formule donc un avis défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

46. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Ferry a présenté un amendement, no 65, ainsi libellé :

« Après l'article 6, insérer les dispositions suivantes :

« Section 4 bis :

« Dispositions relatives à l'instauration d'un dépistage de stupéfiants chez les conducteurs. »

« Il est ajouté au titre Ier du code de la route un article L. 1er -1-A ainsi rédigé :

« Art. L.

1er -1-A. - Toute personne qui aura conduit un véhicule après avoir fait usage, de manière illicite, de substances ou plantes classées comme stupéfiants, sera punie d'un emprisonnement de deux ans et de 30 000 francs ou de l'une de ces deux peines seulement.

« Les officiers de police judiciaire, soit sur instruction du procureur de la République, soit à leur initiative, et, sur l'ordre et sous la responsabilité des officiers de police judiciaire, les agents de police judiciaire peuvent, même en l'absence d'infraction préalable ou d'accident, soumettre toute personne qui conduit un véhicule "ou qui accompagne un élève conducteur" à des épreuves de dépistage de l'imprégnation de substances ou plantes classées comme stupéfiants.

« Un décret en Conseil d'Etat déterminera les conditions dans lesquelles seront effectuées les opérations de dépistage. »

La parole est à M. Alain Ferry.

M. Alain Ferry.

Cet amendement a pour objet de créer un délit et une sanction à l'encontre de ceux qui conduisent sous l'emprise de stupéfiants, comme c'est le cas avec l'alcool.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

La commission a repoussé cet amendement, car le dispositif de l'article 7 est expérimental. Il semble nécessaire de rassembler des données sur le lien qui peut exister entre la prise de stupéfiants et les accidents avant d'adopter des mesures de généralisation allant éventuellement dans le sens que vous indiquez.

Il nous a paru préférable d'en rester au stade expérimental.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

65. (L'amendement n'est pas adopté.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

Article 7

M. le président.

Je donne lecture de l'article 7 : Section 5 Dispositions relatives à l'instauration d'un dépistage systématique des stupéfiants pour les conducteurs impliqués dans un accident mortel

« Art. 7. Il est ajouté au titre Ier du code de la route (partie législative) un article L. 3-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 3-1. Les officiers ou agents de police judiciaire font procéder sur tout conducteur d'un véhicule impliqué dans un accident mortel de la circulation à des épreuves de dépistage et, lorsqu'elles se révèlent positives ou sont impossibles, ou lorsque le conducteur refuse de les subir, à des analyses et examens médicaux, cliniques et biologiques, en vue d'établir s'il conduisait sous l'influence de substances ou plantes classées comme stupéfiants.

« Les résultats de ces analyses sont transmis au procureur de la République du lieu de l'accident.

« Toute personne qui aura refusé de se soumettre aux analyses et examens médicaux, cliniques et biologiques prévus par le présent article sera punie des peines prévues au premier alinéa du paragraphe I de l'article L. 1er

« Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions d'application du présent article. »

Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article.

La parole est à M. Didier Quentin.

M. Didier Quentin.

Je regrette que l'article 7 n'institue pas un dispositif aussi complet pour les stupéfiants que celui prévu pour l'alcool. Pourtant, cela aurait été souhaitable. En effet, les accidents ayant pour cause l'usage des drogues sont de plus en plus nombreux, notamment chez les jeunes.

Il n'existe aucune statistique officielle en France, mais, selon les études internationales et les études françaises officieuses, les estimations sont comparables : entre 3 et 5 % des conducteurs sont usagers occasionnels ou réguliers de drogues ; entre 10 et 15 % des accidents de la route graves ou mortels concernent des conducteurs usagers de drogues ; et la nuit ou le week-end, comme pour l'alcool, on atteint des pourcentages de 25 à 35 % dans les agglomérations.

Une étude officielle du ministère des transports britannique montre même, en 1997, un taux d'accidents liés aux drogues supérieur à celui des accidents liés à l'acool.

M. Jean-Antoine Leonetti.

Eh oui !

M. Didier Quentin.

Durant de nombreuses années, un dogme a prévalu en France, selon lequel l'usage d'une substance psychotrope était exclusif chez un sujet donné.

Or on constate de plus en plus fréquemment aujourd'hui que l'usage combiné alcool-cannabis-ecstasy se développe, avec des effets très dangereux au volant ou sur deux roues.

C'est pourquoi ce projet de loi me semble une occasion manquée de traiter véritablement le problème de la toxicomanie au volant et en particulier pour les jeunes.

M. François Rochebloine.

Très juste !

M. Didier Quentin.

En effet, il ne concerne que les conducteurs impliqués dans un accident mortel. Or le dépistage serait également justifié pour tout accident corporel, notamment pour ceux ayant des conséquences létales à terme ou provocant un handicap, comme l'a relevé l'excellent rapporteur du projet de loi. Il y a eu, en 1997, quatre fois plus de blessés graves que de morts sur la route, et plus de 125 000 accidents corporels. Aussi aurait-il été souhaitable d'étendre le champ d'application de l'article 7 à tous les accidents corporels.

De plus, monsieur le ministre, lors de la discussion de ce texte en première lecture au Sénat, vous avez expliqué que le problème de la drogue au volant ne devait pas, à votre sens, relever d'emblée d'un délit pénal, mais devait plutôt être abordé, dans un premier temps, par le dépistage systématique des drogues illicites chez les conducteurs impliqués dans un accident mortel, en utilisant l'arsenal législatif et réglementaire actuellement existant et, en particulier, en utilisant le contrôle de l'aptitude à la conduite effectué par les commissions médicales préfectorales des permis de conduire.

Or ces commissions chargées, sous l'autorité des préfets, de vérifier l'aptitude physique des conducteurs ne disposent pas des moyens techniques, réglementaires et financiers leur permettant de procéder valablement au dépistage de drogue chez les conducteurs qu'elles doivent examiner.

Aussi, il conviendrait, me semble-t-il, comme l'a excellemment démontré au début de cette séance M. Lemoine, d'améliorer les possibilités de dépistage de drogues par ces commissions. Pour cela, il faut définir précisément les modalités réglementaires de tels contrôles - je pense par exemple à la détermination des catégories de conducteurs concernées. Il convient également d'allouer à ces commissions un budget annuel pour permettre la réalisation de dépistages dans les urines, la salive ou la sueur.

Par ailleurs, je rappelle que l'article R.

128 du code de la route implique déjà de soumettre à un examen médical, devant les commissions préfectorales, tout conducteur pour lequel une présomption de toxicomanie apparaît.

Je rappelle également que la circulaire no 86-375 du 23 décembre 1986 de Robert Pandraud, lequel était alors chargé de la sécurité routière, circulaire qui était relative aux mesures de police concernant la lutte contre la toxicomanie, demandait aux préfets de soumettre à un exam en médical, par les commissions des permis de conduire, toute personne présentant une suspicion de toxicomanie.

Il apparaît souhaitable de réactiver cette procédure, d'autant que cette démarche va dans le sens de l'esprit du projet de loi gouvernemental, orienté davantage vers l'utilisation des procédures réglementaires et vers l'aspect préventif que vers l'aspect purement pénal.

J'aborderai maintenant rapidement le problème dus ecret médical. L'Assemblée nationale a récemment adopté un projet de loi sur la lutte contre le dopage qui inclut notamment une disposition visant à obliger les médecins à signaler les suspicions de cas de dopage constatées chez leurs patients sportifs. Or le dopage, pour nuisible qu'il soit à l'éthique sportive et à la santé des athlètes, ne met généralement en jeu que la santé du sportif concerné.

M. Jean-Antoine Leonetti.

Très juste !

M. Didier Quentin.

Actuellement, les médecins sont tenus au secret médical vis-à-vis des cas de toxicomanie qu'ils constatent chez des patients pourtant conducteurs, parfois même à titre professionnel. Sans nuire à l'éthique médicale, il conviendrait de créer un dispositif qui permette aux médecins de signaler les cas manifestement dangereux à une autorité assurant le lien avec les commissions médicales, afin de prévenir des risques d'accidents pouvant impliquer des tiers.

Ce rôle pourrait être joué par le médecin inspecteur départemental de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales ou par une structure placée sous


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

l'autorité du conseil de l'ordre des médecins. Elle pourrait évaluer le risque sur dossier et aviser, le cas échéant, le préfet.

Pour conclure, je dirai que l'article 7 fait un petit pas, quoique tardif, dans la bonne direction en amorçant un dépistage des stupéfiants pour les conducteurs, mesure qui, je le rappelle, avait été préconisée dès 1996 dans la proposition de loi déposée par M. Richard Dell'Agnola.

Cependant, il ne répond pas globalement à la gravité de la situation, car son champ d'application est trop restreint. De plus, cet article ne portera, dans les faits, que sur une partie des drogues et non sur leur ensemble. En outre, la très importante question de la toxicomanie par consommation de produits licites n'est pas abordée, ni celle de la consommation de médicaments. Enfin, le Gouvernement - j'y insiste - devra préciser les moyens financiers, techniques, humains et organisationnels nécessaires à la mise en oeuvre d'un dépistage systématique des stupéfiants pour les conducteurs afin que ce texte puisse être appliqué de façon cohérente. Nous attendons des réponses sur ces points pour nous prononcer.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Claude Lemoine.

M. Jean-Claude Lemoine.

Après les propos très complets de mon collègue Quentin et ce qui a déjà été dit dans la discussion générale, j'ai peu de chose à ajouter.

Nous savons dépister l'usage de la drogue de façon aussi sûre que l'absorption d'alcool, et dans des conditions financières très abordables. Il faut donc le faire, en rendant aux forces de l'ordre, comme le proposait M. Quentin, la possibilité de réaliser des contrôles en équipant les commissions médicales - les crédits dont elles disposent sont amplement suffisants pour cela - et en demandant au corps médical de coopérer. Une telle évolution permettrait d'accomplir une avancée très importante en matière de sécurité.

Selon les statistiques étrangères, la drogue cause entre 10 et 15 % des accidents mortels, et ces pourcentages montent jusqu'à 30 à 35 % le week-end ou la nuit. Ne p erdons pas cette occasion d'agir et complétons l'article 7.

M. le président.

La parole est à M. René Mangin.

M. René Mangin.

L'alcool au volant fait l'objet d'année en année d'une répression sans cesse renforcée. Cette sévérité est tout à fait justifiée lorsque l'on connaît s a responsabilité dans une partie significative des accidents de la route. Pour être efficace, cette répression a dû s'appuyer sur un dépistage systématique effectué sur les conducteurs impliqués dans un accident. Or force est de constater que l'usage de drogues ne fait pas l'objet de la même détection. Il est pourtant soumis au même type d'interdiction et aboutit aux mêmes drames de la route.

(« Très juste ! » sur divers bancs.)

Il y a une semaine à peine, des parents m'écrivaient pour témoigner du cas de leur fils, Maxime, âgé de vingt et un ans. En août dernier, alors qu'il venait de reconduire chez elle son amie, le jeune homme a été heurté de plein fouet par une voiture roulant en sens inverse. Le conducteur de ce véhicule, déjà condamné p our détention de stupéfiants, avait consommé de l'héroïne et absorbé du Tranxène. Maxime est décédé dans la nuit qui a suivi cette collision.

Il y a trois temps dans la lutte contre la toxicomanie.

Le mal doit bien sûr être traité à la racine. Gardons-nous d'oublier que c'est le malaise des jeunes qui alimente leur recours aux stupéfiants. Combattre les inégalités, le chômage et l'exclusion est à ce titre la première des préventions. Un deuxième temps, celui de la guérison, implique un suivi, un traitement médicalisé des malades de la d rogue ; Bernard Kouchner et son ministère s'y emploient.

Mais quand l'usage de la drogue par nos jeunes met en péril leur propre vie et celle d'autres jeunes, la répression aussi est légitime. Reprenant les paroles mêmes de cette famille, je dirai simplement que « la mort de nos enfants dans de telles conditions doit être intolérable pour la conscience collective et que nous devons agir ensemble pour la répression accrue de la toxicomanie au volant ».

C'est ce que souhaite faire le gouvernement de Lionel Jospin en adaptant la législation à la recrudescence des accidents dus à la drogue. Les forces de l'ordre procéderont à un dépistage systématique des stupéfiants sur les conducteurs impliqués dans un accident mortel de la route. Les résultats des analyses seront transmis au procureur de la République du lieu de l'accident. Aucun conducteur mis en cause ne doit échapper à ce contrôle et les personnes qui auront refusé de s'y soumettre seront punies de peines prévues par la loi.

L'article 7 de ce projet de loi modifie le code de la route dans un sens positif. En conséquence, j'appelle tous mes collègues de la majorité comme de l'opposition à le voter, même si je partage partiellement les arguments de ceux qui considèrent qu'il faut mettre en oeuvre davantage de moyens techniques afin que les contrôles d'usage de la drogue soient plus fréquents et ne soient pas pratiqués uniquement en cas d'accident mortel.

M. Jean-Antoine Leonetti.

Alors, il faut voter nos amendements !

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements, nos 40 et 18, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 40, présenté par M. Accoyer et M. Delnatte, est ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le début du texte proposé pour l'article L.

3-1 du code de la route :

« Art. L.

3-1. - Toute personne qui aura conduit après avoir consommé des produits stupéfiants sera p assible de 2 ans d'emprisonnement et de 30 000 francs d'amende. Lorsqu'il y aura lieu à l'application des articles 221-6 et 222-19 du code pénal à l'encontre de l'auteur de la présente infraction, les peines prévues seront portées au double.

« Les officiers... (Le reste sans changement.) »

L'amendement no 18, présenté par MM. Bussereau, Rossi, Goasguen et Clément, est ainsi rédigé :

« Après le deuxième alinéa du texte proposé pour l'article L.

3-1 du code de la route, insérer les deux alinéas suivants :

« Toute personne qui aura conduit après avoir fait usage, de manière illicite, de substances ou plantes classées comme stupéfiants sera punie de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 francs d'amende.

« Lorsqu'il y aura lieu à l'application des articles 221-6 et 222-19 du code pénal à l'encontre de l'auteur de l'infraction définie à l'alinéa précédent, les peines prévues par ces articles seront portées au double. »

La parole et à M. Patrick Delnatte, pour soutenir l'amendement no

40.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

M. Patrick Delnatte.

Cet amendement a pour but de combler une lacune du projet de loi en créant un nouveau délit : la conduite sous l'emprise de stupéfiants.

Vous me répondrez sans doute, monsieur le ministre, que l'arsenal juridique existant suffit. Je pense au contraire que la création de ce nouveau délit pénal est indispensable. Ce serait un premier signe important.

M. le président.

La parole est à M. Dominique Bussereau, pour défendre l'amendement, no

18.

M. Dominique Bussereau.

Compte tenu des déclaration de M. Didier Quentin et de M. René Mangin, je ne comprendrais pas le Gouvernement refuse de créer le délit de conduite sous l'emprise de stupéfiants proposé par mon amendement, no 18. Sinon, il faudra nous expliquer pourquoi. En effet, l'affaire est trop grave pour qu'on puisse se contenter de nous répondre qu'on expérimente. Rien ne justifie que l'on attende davantage ; ou alors, c'est qu'il y a des choses qui nous échappent, mais, à ce moment-là, il faut nous le dire.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements.

M. René Dosière, rapporteur.

La commission est défavorable à ces deux amendements.

Pour préparer ce texte, nous avons auditionné le professeur Lagier, auteur du rapport « Sécurité routière, drogues licites ou illicites et les médicaments ». Sans chercher à m'abriter derrière son autorité, je signale tout de même que le professeur Lagier a approuvé le dispositif de l'article 7 en soulignant que notre connaissance des effets de la consommation de stupéfiants sur la conduite automobile n'était pas suffisante pour permettre d'avoir un dispositif généralisé. C'est la raison pour laquelle nous avons bien conscience que le dispositif proposé constitue un premier pas. Et c'est d'ailleurs ce qu'a dit Didier Quentin, qui a développé une argumentation passionnante et fouillée.

Toutefois, c'est volontairement qu'il s'agit d'une procédure expérimentale, et il est souhaitable qu'elle ne dure pas trop longtemps.

Je note au demeurant qu'aucune date limite n'est fixée pour qu'on prenne des dispositions incluant vraisemblablement la création d'un nouveau délit. Peut-être conviendrait-il, monsieur le ministre, de préciser en deuxième lecture combien de temps durera cette analyse statistique de l'influence des stupéfiants sur la conduite automobile. Celle-ci ne portera que sur les accidents mortels, pour une raison de simplicité, et permettra de tirer des enseignements, mais il faudrait effectivement que cette expérimentation ne dure pas trop longtemps, afin de ne pas repousser l'élaboration d'un dispositif plus complet à échéance trop lointaine.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement Bien entendu, l'intention du Gouvernement n'est pas de repousser aux calendes grecques le moment où les leçons de cette expérience seront tirées. Je rappelle simplement que le rapporteur du Sénat, M. Lanier, avait jugé cet article très équilibré eu égard à la situation actuelle.

Avis défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

40. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

18. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements, nos 38 et 39, qui pourraient faire l'objet d'une présentation commune.

L'amendement no 38, présenté par M. Accoyer et M. Delnatte, est ainsi rédigé :

« Dans le premier alinéa du texte proposé pour l'article L. 3-1 du code de la route, substituer aux mots : "impliqué dans un accident mortel de la circulation", les mots : "dont la conduite est dangereuse ou fait preuve de troubles du comportement". »

L'amendement no 39, présenté par M. Accoyer et M. Delnatte, est ainsi rédigé :

« Dans le premier alinéa du texte proposé pour l'article L. 3-1 du code de la route, substituer aux mots : "mortel", les mots : "ayant causé des dommages corporels". »

La parole est à M. Patrick Delnatte, pour soutenir ces deux amendements.

M. Patrick Delnatte.

Le projet de loi n'instaure un dépistage systématique que dans le seul cas d'« accident mortel », mais cette notion n'est pas suffisante. Le décès peut intervenir après l'accident et, s'il n'y a pas eu de dépistage, on risque d'être confronté à des problèmes.

Nous proposons par conséquent que ce dépistage puisse intervenir en cas de conduite dangereuse ou de troubles manifestes du comportement, de même qu'en cas d'accident ayant causé des dommages corporels. Il a été fait référence à une autorité mais je me permets de rappeler que l'académie de médecine a, le 28 avril dern ier, recommandé que le dépistage soit étendu à l'ensemble des accidents corporels consécutifs à des conduites manifestement dangereuses.

Comme notre collègue Quentin l'a rappelé, un certain nombre d'études, d'enquêtes et de recommandations militent en faveur d'un vaste dépistage, à l'instar de ce qui est fait pour mesurer l'alcoolémie. Des enquêtes ont été réalisées au niveau européen. Dans mon département du Nord, les gendarmes et les policiers nous disent que souvent, à la sortie des discothèques, ils notent des signes d'ivresse manifeste chez des jeunes qui sont pourtant négatifs à l'alcootest ; ils sont donc relativement désarmés devant certaines situations.

Les médecins du travail des entreprises dont l'activité comporte des risques demandent aux pouvoirs publics d'intervenir et signalent le danger qu'il y a, pour les conducteurs de cars et de poids lourds, à conduire après avoir fumé un joint, et on a évoqué les accidents qui se produisent la nuit et le week-end. La commission Henrion sur les stupéfiants, pourtant divisée sur la quasitotalité des sujets étudiés, a été unanime pour souligner la nécessité de contrôles routiers et de dépistages assortis de sanctions, pour réprimer l'ivresse cannabique au volant.

En outre, une directive européenne de juillet 1991 relative au permis de conduire subordonne la délivrance à la condition que le candidat ne soit pas dépendant d'une substance psychotrope ou, sans être dépendant, n'en consomme pas des quantités susceptibles d'exercer une influence néfaste sur la conduite. C'est donc un ensemble de raisons qui militent en faveur du dépistage.

Vous dites qu'il faut procéder à une expérimentation.

Mais il y a déjà des exemples à l'étranger et, certains pays appliquent le dépistage à grande échelle : le Danemark, la Suède, les Pays-Bas, la Finlande, l'Allemagne, la Belgique, l'Espagne et la Grande-Bretagne. Les expériences existent donc.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

Vous répondez également que les modalités de dépistage ne sont pas encore satisfaisantes. Mais notre collègue Lemoine a évoqué les différents outils de dépistage. Des procédés simples existent, il suffit de les adapter et de les commercialiser, et si un contrôle positif ne suffit pas, on peut recourir à l'examen de sang, qui est parfaitement fiable.

Toutes les conditions sont donc réunies pour que ce dépistage massif et généralisé soit appliqué au même titre que dans la lutte contre l'alcoolisme, et je ne vois pas ce qui peut nous empêcher d'aller dans ce sens. Je le répète : les recommandations nationales, les pratiques étrangères et les outils techniques, scientifiques et médicaux militent tous dans le même sens, et il faut prendre la décision.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

Défavorable, pour les motifs que j'ai esposés précédemment.

M. Patrick Delnatte.

Ce n'est pas une réponse !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Défavorable également.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Baeumler.

M. Jean-Pierre Baeumler.

Je ne suis pas intervenu tout à l'heure car mon collègue Mangin a développé d'excellents arguments. Le problème est réel, l'Assemblée a exprimé une volonté et, surtout, il y a urgence.

Certes, des incertitudes demeurent sur la causalité entre l'usage de drogue et la modification du comportement, ou encore sur les modalités que pourrait prendre le dépistage, surtout s'il est systématique, ainsi que sur les outils utilisés. Mais il faudrait que le Gouvernement s'engage à nous proposer, d'ici à la deuxième lecture, un calendrier et un canevas pour définir un système adapté de répression de la conduite sous l'influence de stupéfiants.

M. François Rochebloine.

Absolument !

M. Jean-Pierre Baeumler.

On ne peut s'entendre répondre éternellement que la connaissance des problèmes posés est insuffisante. Il faut nous proposer un système répressif de nature à mettre fin à la conduite sous l'influence de stupéfiants.

M. Jean-Antoine Leonetti.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Patrick Delnatte.

M. Patrick Delnatte.

Monsieur le ministre, vous avez davantage esquivé que vous n'avez répondu. Nous n'allons tout de même pas examiner des textes sur la sécurité routière tous les six mois ! Nous ne pouvons pas légiférer aussi souvent.

Il faudrait définir les objectifs aujourd'hui, et vous avez les outils pour les atteindre. Si on lance à nouveau des études, il faudra peut-être attendre la prochaine législature pour arriver à quelque chose. On perdra donc beaucoup de temps, et peut-être aussi, malheureusement, des vies.

M. François Rochebloine.

Eh oui !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

38. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

39. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

MM. Landrain, Leonetti et Micaux ont présenté un amendement, no 35, ainsi rédigé :

« Dans le premier alinéa du texte proposé pour l'article L. 3-1 du code de la route, après les mots : "accident mortel de la circulation", insérer les mots : "ou dans un accident de la circulation nécessitant l'hospitalisation d'une personne". »

La parole est à M. Jean-Antoine Leonetti.

M. Jean-Antoine Leonetti.

La mort n'est pas obligatoirement instantanée lors d'un accident de la route.

Puisqu'on ne veut pas procéder à un dépistage systématique afin d'éviter que les toxicomanes ne conduisent, la moindre des choses serait d'étendre ce dépistage à tous les accidents ayant entraîné une hospitalisation car, dans une proportion non négligeable de cas, la mort survient dans les dix jours qui suivent l'accident.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Défavorable également.

M. François Rochebloine.

Pour quel motif ?

M. Patrick Delnatte.

Cette absence de réponses est scandaleuse !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

35. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'article 7.

(L'article 7 est adopté.)

Avant l'article 8

M. le président.

M. Bussereau a présenté un amendement, no 31, ainsi rédigé :

« Avant l'article 8, insérer l'article suivant :

« 1o Un permis de conduire "spécial véhicule électrique" est créé. Ce permis est délivré aux candidats ayant satisfait aux épreuves théorique et pratique d ans les mêmes conditions que le permis de conduire de la catégorie B.

« 2o L'âge minimal requis pour se présenter à l'épreuve pratique d'admission permettant d'apprécier le comportement du candidat, son aptitude à conduire et à manoeuvrer le véhicule électrique est fixé à dix-sept ans.

« 3o Les candidats au permis de conduire "spécial v éhicule électrique" suivent une formation et subissent l'épreuve pratique sur un véhicule électrique.

« 4o La mention "valable pour la conduite des véhicules de la catégorie B" est apposée sur le permis de conduire "spécial véhicule électrique" par les services de la préfecture :

« dès lors que le conducteur titulaire du permis de conduire "spécial véhicule électrique" a satisfait à un examen pratique dispensé sur un véhicule thermique par un inspecteur du permis de conduire et de la sécurité routière ;

« l'âge minimal requis pour se présenter à cet examen est fixé à dix-huit ans. »

La parole est à M. Dominique Bussereau.

M. Dominique Bussereau.

Le Gouvernement ne prête aucune attention aux amendements de l'opposition, tout en souhaitant un vote consensuel sur ce texte, ce qui est tout de même assez paradoxal.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

M. Jean-Antoine Leonetti.

Et sans donner d'explications !

M. Dominique Bussereau.

C'est donc sans grand espoir que je présenterai cet amendement.

Il existe un type de véhicule particulièrement sécurisant, le véhicule électrique. Il ne va pas vite et implique une conduite très douce et très modérée si l'on veut qu'il roule assez longtemps. De plus, il est non polluant, même si des divergences existent sur ce point, et je vous remercie, monsieur le président, de votre geste d'approbation. Enfin, l'industrie française est, dans ce domaine, bien placée par rapport à ses principaux concurrents.

Il faut favoriser l'utilisation du véhicule électrique par les jeunes, en particulier comme véhicule urbain pour aller à l'université ou au travail. Je propose donc que nous fassions en faveur du véhicule électrique un geste qui ne coûtera rien à l'Etat ; il consiste à abaisser l'âge du permis de conduire pour les jeunes qui conduisent un tel véhicule, les modalités étant expliquées dans le corps de l'amendement. Celui-ci reprend la rédaction d'une proposition de loi déposée au Sénat.

Comme il s'agit d'un texte portant diverses mesures de sécurité routière, nous sommes sans toutefois tomber dans le fourre-tout, faire preuve d'une certaine imagination pour aller dans la bonne direction.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

Défavorable.

La commission a considéré qu'il y avait d'autres moyens pour favoriser le véhicule électrique, en particulier la fiscalisté. En outre, la disposition proposée compliquerait les choses, car certains jeunes auraient leur permis à dix-sept ans et d'autre ne l'auraient qu'à dixhuit ans. Par ailleurs, la conduite en agglomération d'un véhicule électrique n'est pas à ce point différente qu'elle justifie une différence d'âge pour l'obtention du permis de conduire.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Il est vrai que la voiture électrique présente de nombreux avantages et que nous souhaitons encourager son développement. Mais cet amendement ne paraît pas justifié. En effet, les candidats au permis de conduire de la catégorie B peuvent déjà, s'ils le souhaitent, suivre une formation à la conduite sur un véhicule à boîte de vitesses automatique et passer l'épreuve pratique du permis sur un tel véhicule. C'est bien le cas des véhicules électriques, pour autant qu'ils puissent atteindre la vitesse prévue par la réglementation relative aux véhicules d'examen, à savoir 100 kilomètres à l'heure.

Après la réussite de cette épreuve, les personnes sont limitées à ne conduire que des véhicules à boîte automatique.

Pour ce qui concerne l'âge d'accès à un tel permis B plus restrictif, il ne semble pas justifié de traiter les conducteurs de ces véhicules différemment des autres puisque les véhicules électriques peuvent atteindre des vitesses qui dépassent largement les vitesses autorisées en agglomération. Les dispositions proposées relèvent en outre du domaine réglementaire. Je demande donc le retrait de cet amendement et, à défaut, son rejet.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

31. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements, nos 25 et 66, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 25, présenté par M. Jean-Claude Lemoine, est ainsi rédigé :

« Avant l'article 8, insérer l'article suivant :

« Tout conducteur âgé de plus de soixante-dix ans devra se soumettre à un examen médical effectué par un médecin agréé.

« Ce contrôle médical, qui devra être renouvelé tous les cinq ans, donne lieu à la délivrance d'un certificat attestant les capacités de l'intéressé à conduire. »

L'amendement no 66, présenté par MM. Micaux et Ferry, est ainsi rédigé :

« Avant l'article 8, insérer l'article suivant :

« A partir de l'âge de soixante-quinze ans, les conducteurs titulaires de permis de conduire A et B doivent subir, au moins tous les cinq ans, un contrôle médical de leur aptitude physique, donnant lieu à la délivrance d'un certificat médical transmis au préfet du département en vue du renouvellement de leur permis de conduire.

« Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions d'application du présent article. »

La parole est à M. Jean-Claude Lemoine, pour soutenir l'amendement no

25.

M. Jean-Claude Lemoine.

Cet amendement, qui s'inscrit dans le cadre des mesures préventives à mettre en oeuvre en matière de sécurité routière, vise à rendre obli gatoire une visite médicale pour les conducteurs âgés de plus de soixante-dix ans. Cet examen, qui serait ensuite renouvelé tous les cinq ans, comme pour les chauffeurs routiers, permettrait de contrôler sur le plan médical les aptitudes du conducteur.

Cet examen pourra être effectué par un médecin agréé ou, peut-être, par le médecin traitant, sans qu'il soit nécessaire d'aller devant une commission médicale. Beaucoup de personnes arrivent à l'âge de soixante-dix ans sans se rendre compte de leurs difficultés visuelles ou autres, et je pense qu'une telle visite pourrait améliorer sensiblement la sécurité routière. Ceux d'entre nous qui ont siégé longtemps dans les commissions médicales se sont aperçus que les personnes d'un âge certain qui étaient obligées de venir devant elles parce qu'elles avaient brûlé un stop ou commis une infraction souffraient souvent d'une déficience visuelle ou autre dont elles ne s'étaient pas rendu compte. Instituer une visite obligatoire leur rendrait donc service et améliorerait la sécurité de tous les usagers.

M. le président.

La parole est à M. Ferry, pour soutenir l'amendement no

66.

M. Alain Ferry.

Cet amendement prévoit que la visite médicale sera obligatoire pour toutes les personnes ayant dépassé l'âge de soixante-quinze ans.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

La commission a considéré ces amendements avec beaucoup de sympathie mais leur caractère systématique, et donc contestable, l'a conduite à les repousser.

J'ajoute que je ne suis pas sûr que ces amendements, à condition que l'Assemblée les adopte, passeraient le cap du Sénat.

(Rires.)

Je précise par ailleurs que, en cas d'accident, le préfet peut déjà prescrire un examen médical dans le cadre de l'article R.

128 du code de la route si les informations portées à sa connaissance lui permettent de penser que l'auteur de l'accident est marqué par une déficience physique.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Défavorable également.

Il est difficile de fixer un seuil adéquat et les âges proposés par ces amendements sont d'ailleurs différents. Plutôt que de prendre des mesures spécifiques ciblées sur telle ou telle tranche d'âge, nous préférons mettre l'accent sur la formation et le suivi. Je souligne à cet égard que des problèmes, en particulier de vue, peuvent se poser à tout âge, même avant soixante-dix ans ou soixante-quinze ans.

Ce que nous voulons, en fait, c'est promouvoir une formation post permis, tous les dix ans, basée sur le volontariat. Des rendez-vous de perfectionnement seront organisés à titre expérimental dès 1999 dans plusieurs départements. De toute manière, je tiens à vous rassurer : comme des comités interministériels se réuniront chaque année, nous verrons, après évaluation, ce qu'il est possible de faire dans chaque domaine.

M. le président.

La parole est à M. François Rochebloine.

M. François Rochebloine.

Le rapporteur nous a répondu que, si un accident survenait, le préfet pourrait intervenir. Mais je crois qu'il ne faut pas attendre les accidents ! Il y a suffisamment d'exemples où des personnes d'un certain âge ont causé des accidents du fait de déficiences. Les chauffeurs de taxis, d'ambulances et de véhicules assurant le transport d'enfants, ainsi que les moniteurs d'auto-école passent bien ces visites médicales.

Pourquoi pas une personne âgée de soixante-dix ans ? Ce serait tout simplement lui rendre service. Il ne s'agit pas de lui retirer son permis mais de contrôler si elle est en état de conduire normalement et de ne pas mettre la vie des autres en danger.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Claude Lemoine.

M. Jean-Claude Lemoine.

M. Rochebloine a tout à fait raison : mieux vaut prévenir que guérir. Le rapporteur a dit que la visite serait obligatoire en cas d'accident, mais il ne faut pas attendre l'accident ! Par ailleurs, M. le ministre a souligné qu'il était difficile de fixer un âge : soixante-cinq ans, soixante-dix ans, soixante-quinze ans. Mais les chauffeurs routiers et les chauffeurs de taxis doivent passer une visite à partir de soixante-cinq ans, et cet âge n'a jamais été remis en question. Si je vous ai bien compris, monsieur le ministre, vous seriez favorable à ce que tout détenteur d'un permis de conduire passe une visite médicale tous les cinq ans ; ainsi, il n'y aurait plus de seuil.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

25. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

66. (L'amendement n'est pas adopté.)

Article 8

M. le président.

Je donne lecture de l'article 8.

Section 6 Dispositions diverses

« Art. 8. - L'article L. 14 du code de la route est ainsi modifié :

« I. - Dans le premier alinéa, les mots : « à l'occasion de la conduite d'un véhicule » sont supprimés.

« II. - Le 1o est ainsi rédigé :

« 1o Infractions prévues par les articles L. 1er à L. 4-1, L. 7, L. 9, L. 9-1 et L. 19 ; ».

Je mets aux voix l'article 8.

(L'article 8 est adopté.)

Après l'article 8

M. le président.

M. Michel Bouvard a présenté un amendement, no 60, ainsi libellé :

« Après l'article 8, insérer l'article suivant :

« Après l'article L. 18-1 du code de la route, il est inséré un article L. 18-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 18-2. I. Dans le cas où une infraction pour inobservation d'un signal lumineux ou d'un panneau de signalisation imposant l'arrêt absolu du véhicule est relevée à l'encontre d'un conducteur, quel que soit le véhicule utilisé, celle-ci doit être constatée par deux fonctionnaires habilités appartenant au même corps.

« II. Les fonctionnaires habilités à constater l'une des infractions visées au paragraphe précédent doivent établir, sur le procès-verbal de constatation de l'infraction, qu'ils se trouvaient matériellement en position de constater ladite infraction. »

La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard.

Cet amendement a pour but d'éviter tout arbitraire en cas d'inobservation d'un feu rouge ou d'un stop. Un fonctionnaire de police peut être gêné par le soleil ou par une autre raison, et estimer qu'un véhicule n'a pas marqué l'arrêt. Si deux fonctionnaires doivent constater l'infraction, cela représentera une plus grande sécurité pour l'usager.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

En tout cas, cela créera des emplois !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière.

rapporteur, La commission a repoussé cet amendement. Compte tenu de l'heure, je dirai à M. Bouvard qu'il est sympathique, réglementaire, coûteux et inapplicable. (Sourires.)

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Puisque M. Bouvard ne retire pas cet amendement, j'émets un avis défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

60. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Michel Bouvard a présenté un amendement, no 62, ainsi libellé :

« Après l'article 8, insérer l'article suivant :

« Il est inséré, après l'article L.

28 du code de la route, un article L.

28-1 ainsi rédigé :

« Art. L.

28-1. - I. - La mention, dans le cadre de campagnes du publicité, de toute indication, par les constructeurs ou vendeurs de véhicules à deux ou quatre roues, permettant de connaître la vitesse maximale que ledit véhicule peut atteindre, dès lors que celle-ci est supérieure à celle légalement autorisée sur autoroute, est prohibée quel que soit le support utilisé.

« II. - La non-observation de l'interdiction édictée au paragraphe précédent constitue une contravention de quatrième classe prévue à l'article L.

131-13 du code pénal. »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard.

L'amendement no 62 s'inscrit pleinement dans la logique du projet de loi.

Ici même, à l'occasion de l'examen d'un autre texte relatif à la sécurité routière, lors de la précédente lé gislature, je m'étais étonné que des fabricants de pneumatiques destinés à équiper des véhicules en période hivernale indiquent sur les documents les accompagnant, sous forme d'autocollants, que l'on ne pouvait pas rouler avec ces équipements à plus de 160 km/h, alors que la réglementation fixe la vitesse maximale sur autoroute à 130 km/h.

L'amendement no 62 tient compte de ce que l'on voit sur certains documents publicitaires : puisque l'on ne souhaite pas encourager la vitesse, il s'agit seulement d'empêcher que, lors des campagnes de publicité de certaines marques, on indique que les véhicules peuvent rouler à des vitesses supérieures aux vitesses maximales fixées dans notre pays.

M. Jean-Antoine Leonetti.

Très bien !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Cette proposition mérite attention. Je défends d'ailleurs la même idée lors des mes rencontres avec les constructeurs, et je ne désespère pas de pouvoir en reparler rapidement avec eux.

Cela dit, outre que son application compliquerait les choses, je ne suis pas sûr que la contravention de quatrième classe qui est prévue ait un caractère dissuasif.

Je vous remercie, monsieur le député, d'avoir appelé notre attention sur ce problème, mais je suis défavorable à votre amendement.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Antoine Leonetti.

M. Jean-Antoine Leonetti.

L'opposition s'étonne qu'un certain nombre de nos amendements fassent l'objet, soit de la part du rapporteur, soit de la part du ministre, d'un écho favorable et que l'on renvoie nos propositions à la deuxième lecture. Cela fait un peu désordre.

Pourtant, nos propositions, qu'il s'agisse de la drogue, des accidents corporels ou de la limitation des publicités concernant les véhicules, sont intéressantes et, si elles sont bonnes, on peut les voter aujourd'hui.

Aucun des amendements de l'opposition n'est retenu alors qu'ils sont considérés comme bienvenus. Il arrive un moment où l'on s'interroge.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

62. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Michel Bouvard a présenté un amendement, no 61, ainsi rédigé :

« Après l'article 8, insérer l'article suivant :

« I. - Tous les véhicules à moteur, quel que soit leur tonnage, transportant des matières inflammables, explosives, corrosives ou toxiques, amenés à emprunter des routes ou autoroutes équipées de tunnels de plus de trois mille mètres, doivent remplir les conditions de sécurité prescrites par les textes réglementaires et être contrôlés annuellement par les services administratifs habilités.

« II. - Les services administratifs concernés par les contrôles prévus à l'alinéa précédent ne peuvent ni accorder de dérogation, ni sous-traiter à des entreprises étrangères au service public les obligations qui leur sont faites.

« III. - L'impossibilité de produire l'attestation en cours de validité du contrôle prévue à l'alinéa premier constitue une contravention de quatrième classe prévue à l'article L.

131-13 du code pénal. »

La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard.

J'espère donner une chance au Gouvernement avec mon amendement no 61. (Sourires.)

Il devrait attirer l'attention du ministre, sinon d'une partie de la majorité.

Cet amendement concerne les véhicules transportant des matières dangereuses. Dans notre pays, de nombreux itinéraires sont très fréquentés par les poids lourds.

En 1997, dans le sens France-Italie, nous avons compté 377 000 poids lourds et, dans le sens contraire, 388 000.

Environ 10 % du trafic qui va de France en Italie porte sur des matières dangereuses. Celui-ci doit faire l'objet de contrôles, notamment quand les véhicules doivent passer dans des tunnels de plus de trois kilomètres. Il est évident que, si un accident survenait dans un tunnel, cela mettrait en grand danger la population et nuirait donc à la sécurité routière.

Les contrôles sont actuellement effectués avec une grande efficacité par les services des douanes, qui relèvent régulièrement des infractions en ce qui concerne soit la sécurité des véhicules eux-mêmes, soit le contenu des chargements.

Ici ou là, on envisage ou bien d'accorder des dérogations, autorisant que les contrôles ne soient plus effectués systématiquement à l'entrée des tunnels de plus de trois kilomètres, ou bien de permettre qu'ils soient effectués par des sociétés privées choisies par les concessionnaires d'autoroutes.

Je voudrais appeler l'attention du Gouvernement sur le cas de l'Italie. L'Etat italien, qui faisait effectuer les contrôles par des services officiels, comme c'est le cas en France, a délégué certaines de ces missions à des sociétés privées. Et, très curieusement, le trafic de matières dangereuses constaté entre Turin et la frontière a diminué de 30 %. Quelle en est la raison ? Un véhicule qui transporte des matières dangereuses doit porter une plaque orange. Mais celle-ci est très facile à démonter. Si la plaque orange est apposée, le contrôle pourra être effectué par une société qui sera missionnée pour cela. Mais si la plaque orange est démontée et que le camion contrôlé n'est pas réputé contenir des matières dangereuses, une société privée sous-traitante, choisie par une société concessionnaire d'autoroutes pour effectuer ce travail, ne pourra pas intervenir. Les risques pour la population seront donc accrus. Et je ne parle pas de ce que l'on découvre à l'occasion de ces contrôles, dont je me permets de rappeler qu'ils sont particulièrement rentables pour l'Etat.

C'est la raison pour laquelle, s'agissant du transport de matières dangereuses par des véhicules empruntant des tunnels importants, je souhaite que le service public continue d'effectuer ses missions, sans délégation.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

La commission a trouvé l'amendement un peu compliqué et difficilement applicable...

M. François Rochebloine.

Mais il est intéressant !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

M. Jean-Antoine Leonetti.

Nous en rediscuterons sans doute en deuxième lecture ! (Sourires.)

M. René Dosière, rapporteur.

Il s'applique aux seuls véhicules empruntant des routes et des autoroutes équipées de tunnels de plus de 3 000 mètres.

M. Michel Bouvard.

Tout à fait !

M. René Dosière, rapporteur.

Mais qu'en serait-il de ceux qui empruntent des routes et des autoroutes équipées de tunnels de moins de 3 000 mètres ?

M. Bouvard a pensé à des cas très particuliers.

La commission n'a pas eu en tête la liste de toutes les routes et autoroutes comportant des tunnels de plus de 3 000 mètres, pas plus, d'ailleurs, que la liste de celles comportant des tunnels de moindre longueur.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Monsieur Bouvard, le transport de matières dangereuses fait déjà l'objet d'une réglementation abondante, avec laquelle votre amendement viendrait en contradiction. Parfois même, elle serait en retrait par rapport à cette réglementation, notamment en ce qui concerne les sanctions, conformes à une réglementation internationale qui a été adoptée par trente-quatre pays et à laquelle la France doit se conformer. Cette réglementation s'applique à tous les transports de matières dangereuses, et pas seulement à ceux qui empruntent des tunnels.

Peut-être y a-t-il des lacunes concernant les tunnels routiers gérés par les collectivités locales, ou dans le texte applicable aux ouvrages de l'Etat et pour lesquels la responsabilité des maires ou des présidents de conseils généraux n'est pas, sur le plan de la sécurité, engagée. C'est sûrement à ces cas que vous pensiez.

Quoi qu'il en soit, une concertation avec les collectivités locales serait nécessaire, d'autant plus que l'amendement ne résout pas la problématique actuelle.

Le Gouvernement émet un avis défavorable.

M. le président.

La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard.

Je rappelle au rapporteur que la distinction entre les tunnels de moins de 3 000 mètres et ceux de plus de 3 000 mètres n'est pas née dans l'esprit de l'auteur de l'amendement.

Je comprends bien, monsieur le ministre, qu'une concertation soit nécessaire pour des tunnels sur des routes qui sont la propriété de collectivités territoriales.

Mais il faut aussi penser aux concessions autoroutières de l'Etat.

Je souhaite être assuré que, sur des ouvrages importants équipés de tunnels de ce type, les services des douanes françaises continueront d'effectuer leurs contrôles, qu'il ne sera pas accordé de dérogation dispensant les concessionnaires de ces contrôles, nécessaires pour la sécurité des usagers des autoroutes, et qu'il n'y aura pas de soustraitance à des sociétés privées faute d'effectifs suffisants des services des douanes, car alors la mesure perdrait de facto une grande partie de son efficacité, comme on l'a constaté chez nos voisins italiens.

Si vous m'assurez, monsieur le ministre, que, demain, les contrôles continueront d'être effectués par les services des douanes françaises et que des dérogations ne seront pas accordées, je retirerai volontiers mon amendement.

Mais j'ai besoin d'un engagement de votre part.

M. le président.

Je mets aux voix...

M. Michel Bouvard.

Le ministre pourrait me répondre !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

61. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Michel Bouvard a présenté un amendement, no 59, ainsi rédigé :

« Après l'article 8, insérer l'article suivant :

« Les motoneiges sont désormais soumises à une immatriculation. »

La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard.

Il s'agit d'une affaire très sérieuse.

M. le président.

Vous êtes un élu de la montagne !

M. Michel Bouvard.

Je me doute bien qu'en Bretagne les motoneiges sont moins utilisées.

(Sourires.)

Mais cela n'enlève rien à ma grande amitié pour les élus bretons.

Les motoneiges sont utilisées dans un certain nombre de stations de sports d'hiver. Il arrive qu'elles circulent sur des routes qui ne soient pas déneigées. En effet, en période hivernale, toutes les voiries des zones de montagne ne font pas, à partir d'une certaine altitude, l'objet d'une opération de déneigement. Je rappelle d'ailleurs qu'il est écologique d'éviter de saler abondamment les routes ou de les recouvrir systématiquement de gravillon.

Dans ces conditions, les motoneiges peuvent être en circulation avec d'autres véhicules, commettre des infractions ou être impliquées dans des accidents. Le problème de l'identification des propriétaires se pose régulièrement en cas d'accident, qu'il s'agisse d'un simple accrochage ou d'un piéton renversé.

En conséquence, je propose que les motoneiges soient obligatoirement immatriculées.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

La commission a rejeté l'amendement. Cependant, à titre personnel et en souvenir de mon séjour, déjà lointain, au Québec, j'y suis favorable.

S i l'amendement était adopté, cela montrerait à M. Bouvard que nous prenons en considération, même s'il s'agit d'un élément qui n'est pas fondamental, les arguments de l'opposition.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

J'avais un doute quant au lien des motoneiges avec la sécurité routière. Mais j'ai entendu les arguments de M. Bouvard. Je m'en remettrai donc à la sagesse de l'Assemblée.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Baeumler.

M. Jean-Pierre Baeumler.

M. le rapporteur pense au Québec. Moi, je pense à un texte dont j'avais été le rapporteur, il y a quelques années, et qui portait sur la circulation des véhicules à moteur dans les espaces naturels.

On avait alors beaucoup parlé des motoneiges.

Nous avons déposé un amendement tendant à rendre obligatoire l'immatriculation de tous les véhicules à moteur. Les motoneiges entrant dans cette catégorie, je propose à l'Assemblée de rejoindre M. Bouvard,...

M. Jean-Antoine Leonetti.

Très bien !

M. Jean-Pierre Baeumler.

... excellent élu de la montagne ! (Sourires.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

59. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

Article 9

M. le président.

« Art. 9. - Les trois premiers alinéas de l'article 36 de la loi no 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs sont ainsi modifiés :

« a) Au premier alinéa, après les mots : "de transport routier public", sont insérés les mots : "de personnes ou" ;

« b) Au deuxième alinéa, après les mots : "dans les conditions prévues par", sont insérés les mots : "règlement (CEE) no 684/92 du Conseil, du 16 mars 1992, pour le transport de personnes ou" ;

« c) Au troisième alinéa, après les mots : "inscrit au registre mentionné", sont insérés les mots : "à l'article 7 de la présente loi pour le transport de personnes ou", et, après les mots : "de toute entreprise de transport routier public", sont insérés les mots : "de personnes ou". »

M. Dosière, rapporteur, a présenté un amendement, no 14, ainsi rédigé :

« A la fin du troisième alinéa (b ) de l'article 9, supprimer les mots : "pour le transport de personnes". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. René Dosière, rapporteur.

Il s'agit d'un amendement rédactionnel, monsieur le président.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

14. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Dosière, rapporteur, a présenté un amendement, no 15, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le début du dernier alinéa (c) de l'article 9 :

« Au troisième alinéa, les mots : "à l'article 8", sont remplacés par les mots : "aux articles 7 et 8" et après les mots "de toute entreprise..." (Le reste sans changement.) »

La parole est à M. le rapporteur.

M. René Dosière, rapporteur.

Amendement rédactionnel !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

15. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'article 9, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 9, ainsi modifié, est adopté.)

Articles 10 et 11

M. le président.

« Art. 10. - L'article 3 de l'ordonnance no 58-1310 du 23 décembre 1958 concernant les conditions du travail dans les transports routiers publics et privés en vue d'assurer la sécurité de la circulation routière est ainsi modifié :

« I. - Dans le premier alinéa, après les mots : "La falsification des documents,", sont ajoutés les mots : "la fourniture de faux renseignements, l'absence d'installation,".

« II. - Dans le deuxième alinéa, après les mots : "jusqu'à ce qu'il ait été", sont ajoutés les mots : "mis en conformité ou". »

Je mets aux voix l'article 10.

(L'article 10 est adopté.)

« Art. 11. L'article L. 9-1 du code de la route est ainsi modifié :

« I. Dans le premier alinéa, après les mots : "soumis à une obligation de vitesse par construction," sont ajoutés les mots : "de ne pas respecter cette obligation,".

« II. Dans le deuxième alinéa, après les mots : "jusqu'à ce qu'il ait été", sont ajoutés les mots : "mis en conformité ou". » -

(Adopté.)

Après l'article 11

M. le président.

Le Gouvernement a présenté un amendement, no 79 rectifié, ainsi rédigé :

« Après l'article 11, insérer l'article suivant :

« I. 1o Dans le cinquième alinéa (4o ) de l'article 221-4 du code pénal, après les mots : "de l'administration pénitentiaire", sont insérés les mots : "un agent d'un exploitant de réseau de transport public de voyageurs".

« 2o En conséquence, il est procédé à la même insertion dans les articles 222-3, 222-8, 222-10, 222-12 et 222-13 du même code.

« II. L'article 26 de la loi du 15 juillet 1845 sur la police des chemins de fer est rétabli dans la rédaction suivante :

« Art. 26. L'outrage adressé à un agent d'un exploitant de réseau de transport public de voyageurs est puni de six mois d'emprisonnement et 50 000 francs d'amende.

« Lorsqu'il est commis en réunion, l'outrage est puni d'un an d'emprisonnement et de 100 000 francs d'amende. »

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

L'amendement no 79 rectifié est la concrétisation législative de l'engagement, connu de chacun d'entre vous, qu'a pris le Gouvernement d'améliorer les conditions de sécurité dans les transports collectifs.

Au début de l'année, vingt et une mesures avaient été décidées à l'issue d'une table ronde à laquelle avait participé les différentes parties intéressées - directions, repré sentants syndicaux, élus. Parmi ces propositions, il y avait la possibilité d'aggraver les peines pour les agressions contre les agents du secteur public des transports.

L'amendement tend à accroître la répression des infractions commises contre les agents des entreprises de transports publics de voyageurs, tels que les conducteurs de la RATP et les contrôleurs de la SNCF, qui sont très exposés aux risques d'agression, comme l'actualité nous l'a rappelé ces dernières semaines.

Le Gouvernement vous propose, d'une part, d'augmenter les peines encourues en cas de violences physiques commises contre ces agents, étant précisé dans la loi que ceux-ci sont chargés d'une mission de service public.

Il vous propose, d'autre part, de mieux réprimer l'incivilité et les violences verbales dont ces agents seraient les victimes, en instituant un délit d'outrage spécifique dans la loi de 1845 sur la police des chemins de fer.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

Cet amendement répond à une nécessité. La discussion du projet de loi relatif à la sécurité routière est l'occasion de faire progresser un dispositif que tout le monde attend.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

Malgré l'absence de lien avec le texte en discussion, la commission a accepté l'amendement. Son point de vue me semble conforté par les explications de M. le ministre.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Antoine Leonetti.

M. Jean-Antoine Leonetti. Il faut chercher loin pour trouver un rapport entre l'amendement et le projet de loi.

Cet amendement est conjoncturel et catégoriel.

Si l'on doit instaurer une peine supplémentaire pour les agressions commises contre les agents du service public, il faut que cela concerne tous les agents, ou aucun.

La disposition proposée créerait une rupture d'égalité, en liaison avec un événement précis. Cela ne me semble pas très républicain.

M. le président.

La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard.

Le groupe RPR votera cet amendement du Gouvernement. Il est évident qu'il aurait eu davantage sa place dans un autre texte. Mais nous connaissons tous les contraintes du calendrier parlementaire et nous savons qu'il faut parfois saisir l'occasion de raccrocher certaines dispositions à un texte comme celui-ci, « portant diverses mesures ».

Mais ce n'est pas une bonne raison.

On constate en effet une situation d'urgence sur de nombreux itinéraires de banlieue et sur de nombreux réseaux. Certains agents sont plus exposés, parce qu'ils représentent en quelque sorte le dernier symbole de l'administration républicaine ou de l'administration d'Etat. C'est d'ailleurs dommageable car cela signifie que des services de sécurité ne sont peut-être plus assez présents. Il n'en est pas moins nécessaire de donner un signal et d'indiquer, à propos de ces agents, que des poursuites peuvent être engagées en cas de violence ou d'outrage.

C'est pourquoi, de façon très pragmatique, tout en reconnaissant que le texte de rattachement n'est pas forcément le bon et compte tenu de la situation d'urgence, nous voterons cet amendement.

M. le président.

La parole est à M. Dominique Bussereau.

M. Dominique Bussereau.

Le groupe Démocratie libérale votera également cet amendement pour les raisons qui ont été excellemment exposées par M. Bouvard, d'autant qu'il reprend au mot près une proposition de loi déposée au Sénat par M. Christian Bonnet et les membres du groupe des Républicains et Indépendants.

Cela dit, le rattachement de cet amendement à ce texte, sous forme de cavalier, montre à quel point notre travail parlementaire est mal organisé durant cette session.

Nous en sommes réduits à raccrocher ce texte important, attendu depuis très longtemps par les agents du service public des transports, de la RATP ou de la SNCF, à un projet de loi sur la sécurité routière. C'est malheureusement du mauvais travail parlementaire. Toutefois nous le voterons parce qu'il y a une urgence, un besoin et une nécessité.

M. le président.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Monsieur Bussereau, je voudrais d'abord vous dire que je suis informé que le Sénat a adopté un texte analogue, d'initiative parlementaire, cet après-midi. Mon souci est que la mesure soit appliquée au plus vite. Nous verrons, dans la suite de la procédure parlementaire, quelle sera la voie la plus efficace. Je n'ai aucune exclusive vis-à-vis de l'initiative du Sénat.

Je voudrais également préciser à M. Leonetti, pour dissiper toute confusion, que, si j'ai cité la RATP et la SNCF, ce sont tous les services publics de transport qui sont concernés, y compris en province...

M. Michel Bouvard.

Et y compris les remontées mécaniques ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Ce ne sont pas seulement les entreprises publiques, mais le service public de transport de voyageurs.

J'ajoute que les textes prévoient déjà des circonstances aggravantes, en cas d'agression de magistrat ou de policier. Il y a même une formule, dans la loi, qui vise, je crois, les agents assurant une mission de service public.

Ici sont mentionnés de manière explicite, pour les raisons excellemment énumérées par MM. Bouvard et Bussereau, les agents des services publics de transport de voyageurs sur toute la France.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 79 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.

M. Jean-Claude Lemoine a présenté un amendement, no 26, ainsi rédigé :

« Après l'article 11, insérer l'article suivant :

« A compter du 1er janvier 2000, tous les véhicules neufs à moteur dotés d'un moteur d'une cyclindrée de 50 cm 3 et plus devront être équipés à leur sortie d'usine d'un dispositif "éthylotest anti-démarrage".

« Les propriétaires des véhicules de la catégorie visée à l'alinéa 1er et immatriculés avant le 1er janvier 2000 disposeront d'un délai de deux ans à partir de cette date pour équiper leurs véhicules de ce dispositif. »

La parole est à M. Jean-Claude Lemoine.

M. Jean-Claude Lemoine.

Nous avons parlé de nombreux sujets, de drogue, de vitesse excessive, mais pour ainsi dire pas de l'alcool. Pourtant, les drames causés par la conduite sous l'emprise de l'état alcoolique ne sont plus à rappeler. Plutôt que de recourir à de nouvelles mesures répressives, mon amendement vise à équiper les véhicules d'un dispositif éthylotest anti-démarrage.

M. le président.

Pourriez-vous présentez en même temps votre amendement no 24 ?

M. Jean-Claude Lemoine.

Volontiers.

M. le président.

M. Jean-Claude Lemoine a présenté un amendement, no 24, ainsi rédigé :

« Après l'article 11, insérer l'article suivant :

« A compter du 1er janvier 2000, le conducteur d'un véhicule qui fait l'objet de poursuites pour conduite sous l'emprise d'un état alcoolique, lorsque


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

le taux d'alcoolémie est supérieur à 0,8 g par litre de sang, ou 0,4 mg par litre d'air expiré, pourra se voir imposer par la juridiction de jugement l'installation sur son véhicule d'un éthylotest anti-démarrage pour une durée comprise entre six mois et trois ans.

« Cette mesure figurera en annexe du permis de conduire et devra être présentée à toute réquisition des forces de l'ordre. »

Vous avez la parole, monsieur Lemoine.

M. Jean-Claude Lemoine.

Le système anti-démarrage existe aux Etats-Unis depuis 1985. Une étude, conduite par l'université de Maryland, en avril 1997, conclut que ce dispositif a réduit la récidive de 65 %. Au nom de la sécurité routière et sachant qu'il y a encore beaucoup de drames dus à l'alcoolémie, je souhaite que l'amendement no 26 soit adopté.

L'amendement no 24, quant à lui, est un amendement de repli.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

La commission a émis un avis défavorable - comme sur d'autres amendements, on le verra tout à l'heure - parce que le problème relève de la réglementation européenne.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Défavorable !

M. le président.

La parole est à M. Dominique Bussereau.

M. Dominique Bussereau.

Je voudrais faire une suggestion à M. le ministre de l'équipement et des transports.

Je considère que ces amendements sont un peu complexes. Mais on trouve dans n'importe quelle stationservice ou bureau de tabac de petits éthylotests pour quelques dizaines de francs.

Les équipementiers français sont parmi les premiers du monde. Pourquoi ne pas rendre obligatoire l'installation de ces équipements dans tous les véhicules ? Chaque automobiliste pourrait se tester lui-même après avoir consommé de l'alcool. Ensuite, libre à lui de prendre ses responsabilités vis-à-vis de lui-même, de la loi et des autres. Je remarque que nos voitures sont aujourd'hui dotées d'équipements bien plus coûteux, comme des radars ou des GPS.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

26. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

24. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Fleury, M. Baeumler et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, no 49, ainsi rédigé :

« Après l'article 11, insérer l'article suivant :

« Les véhicules particuliers neufs qui seront immatriculés à partir du 1er janvier 2002 devront être équipés d'un système de limitation de vitesse. »

La parole est à M. Jacques Fleury.

M. Jacques Fleury.

Ce genre de proposition suscite de nombreux débats et des interventions multiples de la part de certains constructeurs automobiles que vous identifierez sans difficulté.

On nous objecte que le limiteur de vitesse n'est pas une solution exempte d'effets pervers, et l'on fait remarquer qu'il faut garder une certaine réserve de vitesse pour pouvoir doubler ; c'est d'ailleurs pourquoi j'envisageais, a priori, qu'on puisse brider la voiture un petit peu audessus de la vitesse limite, par exemple 150 ou 140 km/h, pour laisser à l'automobiliste la possibilité de dépasser dans les cas un peu délicats.

On nous objecte aussi qu'en ville, où la vitesse maximale est fixée à 50 km/h, limiter mécaniquement la vitesse des automobiles à 150, 140 ou 130 km/h n'aurait pas d'utilité. Mais, en ville, on ne peut pas dépasser très largement la vitesse autorisée sans en être conscient. Sur l'autoroute, en revanche, on peut être victime d'un moment de distraction et rouler un peu trop vite.

On nous objecte encore, et cet argument me semble plus valable, le droit communautaire européen. Mais je constate que celui-ci s'applique déjà aux transporteurs routiers. Nous avions, en France, appliqué la limitation automatique de vitesse au transport routier avant qu'il existe une législation européenne. Nous pourrions donc très bien nous lancer de la même façon dans cette expérience en France et travailler pour que l'Europe le fasse également.

On nous objecte enfin que la vitesse n'est plus considérée comme un argument de vente par les constructeurs automobiles. J'ai lu dans la presse qu'aujourd'hui on achèterait une grosse automobile - je ne citerai pas de marque - uniquement pour faire voir qu'on en a eu les moyens. Mais il est encore plus tentant de l'utiliser pour faire voir qu'on a de la réserve sous le capot.

Tous ces arguments ne me paraissent pas incourtournables.

J'ai déposé cet amendement car je considère qu'il faut mettre fin à l'hypocrisie qui consiste à laisser sur le marché de l'automobile des véhicules dont la vitesse peut dépasser largement les vitesses autorisées. C'est comme si on donnait la possibilité à chacun de nos concitoyens d'acheter une mitrailleuse lourde avec l'interdiction de l'utiliser contre ses voisins. C'est exactement ce que l'on continue à faire en matière automobile. Par conséquent, je crois qu'il serait logique que l'on adopte une législation plus sévère dans ce domaine.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

Cet amendement est très cohérent car, parmi les mesures concernant la sécurité routière, il doit y en avoir qui portent sur les véhicules je l'ai d'ailleurs souligné dans mon intervention,

M. François Rochebloine.

Eh oui !

M. René Dosière, rapporteur.

Cela dit, comme l'a rappelé Jacques Fleury qui connaît bien la question, une telle disposition doit être négociée au niveau européen. C'est la raison pour laquelle la commission l'a repoussé.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Même avis que la commission.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Antoine Leonetti.

M. Jean-Antoine Leonetti.

Il est à l'heure actuelle techniquement possible d'installer un avertisseur sonore et lumineux qui indique au conducteur qu'il est en train de dépasser la vitesse autorisée. Ce dispositif permettrait de répondre aux excès de vitesse en cas d'atténuation de la vigilance. Par ailleurs, le son est suffisamment désagréable pour être dissuasif.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

Un système analogue a été installé pour inciter à mettre sa ceinture de sécurité : non seulement la voiture ne démarre pas tant que la ceinture n'est pas mise, mais en même temps se déclenche un avertisseur sonore.

M. le président.

La parole est à M. Jacques Fleury.

M. Jacques Fleury.

Monsieur le président, je retire mon amendement.

M. le président.

L'amendement no 49 est retiré.

M. Jean-Pierre Baeumler.

Sinon, il faisait la une des journaux demain matin !

M. le président.

M. Jean-Claude Lemoine a présenté un amendement, no 27, ainsi rédigé :

« Après l'article 11, insérer l'article suivant :

« A compter du 1er juillet 1999, les véhicules à moteur devront de jour et de nuit et par tous temps faire fonctionner leurs feux de croisement. »

La parole est à M. Jean-Claude Lemoine.

M. Jean-Claude Lemoine.

Depuis quelques années, obligation est faite aux motocyclettes de faire fonctionner leurs feux de croisement de jour et par tout temps. De l'avis de tous, elle a contribué à renforcer la sécurité pour l'ensemble des usagers de la route.

Je propose de l'étendre à l'ensemble des véhicules. Il y a toujours une période, en fin de journée ou en début de matinée, où l'on ne sait pas s'il faut allumer ou non ses phares. S'ils étaient allumés en toute circonstance, le problème ne se poserait plus et la sécurité serait accrue. Cela répond au vieux principe : « voir et être vu ».

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

La commission a repoussé cet amendement parce que cette mesure n'améliorerait pas du tout la sécurité des motards. La multiplication de l'utilisation de ces feux banaliserait leur situation.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Les motards sont effectivement très défavorables à ce type de proposition. J'ajoute que les experts divergent sur l'impact de la mesure. De toute manière, s'il devait y avoir une évolution en ce sens, elle relèverait du domaine réglementaire. Avis défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

27. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Baeumler et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, no 57, ainsi rédigé :

« Après l'article 11, insérer l'article suivant :

« La conduite d'un quadricycle léger à moteur au sens de l'article R.

188-1 du code de la route est subordonnée à une formation au code de la route. »

La parole est à M. Jean-Pierre Baeumler.

M. Jean-Pierre Baeumler.

Mon amendement rejoint l'une des propositions de notre collègue Lemoine sur ce qu'on appelle communément les voiturettes - c'est-à-dire l es quadricycles légers à moteur au sens de l'article R.

188-1 du code de la route, dont la puissance du moteur n'excède pas 4 kilowatts.

Ces véhicules posent quelques problèmes, et d'ailleurs on peste souvent quand on les trouve sur notre route.

Certes, ils ne sont pas très nombreux : quelques milliers en France, et leur nombre n'augmente pas. Ils ne provoquent que très peu d'accidents puisqu'ils ne sont impliqués que dans 15 à 20 accidents mortels par an.

Malgré tout, j'aimerais faire deux remarques.

La première, c'est que leurs conducteurs commettent de nombreuses fautes de conduite et de non-respect du code de la route, notamment aux intersections. Certains automobilistes, privés temporairement de leur permis de conduire acquièrent ou louent ce type de véhicule. On a tous vu l'un ou l'autre de nos concitoyens à qui le permis a été retiré, parfois pour avoir conduit en état d'ébriét é, se « rabattre » sur ces voiturettes pour aller au bistrot du village. (Sourires.)

Ma seconde remarque concerne les loueurs de voiturettes. Je tiens d'ailleurs à vous montrer cette publicité, qui m'a amené à réagir. On peut y lire : « Voiture sans permis et sans code ». Or, même si on conduit un véhicule dont la vitesse est limitée, même s'il n'y a pas besoin de permis, il faut au minimum avoir une bonne connaissance du code de la route. Tel est l'objet de mon amendement. (Applaudissements sur divers bancs.)

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

Malgré toute la sympathie qu'éprouve le rapporteur pour l'auteur de cet amendement, la commission n'a pu accepter cette disposition, car elle est d'ordre réglementaire. Et en cela, monsieur Bussereau, elle ne fait pas de différence entre la majorité et l'opposition.

M. Jean-Antoine Leonetti.

Un peu quand même !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Je suis d'accord pour étudier une mesure du type de celle qui est proposé par l'amendement no

57. Mais, comme vient de le dire M. le rapporteur, elle relève du domaine réglementaire ; je demande donc le retrait de l'amendement no

57.

M. le président.

Monsieur Baeumler, maintenez-vous votre amendement ?

M. René Mangin.

Il hésite !

M. Jean-Pierre Baeumler.

J'ai envie de le maintenir !

M. le président.

Dans ce cas, nous allons tester sa popularité.

Je mets aux voix l'amendement no

57. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Jean-Claude Lemoine a présenté un amendement, no 23, ainsi rédigé : Après l'article 11, insérer l'article suivant :

« La conduite des petits véhicules à plus de 2 roues et équipés de moteur d'une cylindrée comprise entre 50 et 125 cm 3 ou équipés d'un autre moteur d'une puissance équivalente, nécessite l'installation et la mise en fonctionnement d'un dispositif de signalisation dont les caractéristiques sont définies par décret. »

La parole est à M. Jean-Claude Lemoine.

M. Jean-Claude Lemoine.

Cet amendement concerne ce même type de véhicules, qui circulent dans des régions comme la mienne.

On a beaucoup de mal à différencier sur la route ces voiturettes qui avancent excessivement lentement, d'autres petits véhicules - comme les Clio - qui roulent à une allure normale.

Je souhaiterais donc que, pour des raisons de sécurité, les voiturettes soient équipées d'une signalisation qui permettent de les reconnaître de loin.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

23. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Mangin, Mme Laurence Dumont, M. Baeumler et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, no 56, ainsi rédigé :

« Après l'article 11, insérer l'article suivant :

« Tout propriétaire d'un véhicule à deux roues équipé d'un moteur est tenu de faire procéder à son immatriculation. Les modalités d'application de cet article sont fixées par décret en Conseil d'Etat. »

La parole est à M. René Mangin.

M. René Mangin.

Monsieur le président, en France, toute une gamme de deux-roues motorisés n'est pas immatriculée. Cette absence d'immatriculation d'une partie des véhicules terrestres à moteur pose une série de problèmes de sécurité publique et est à l'origine de nuisances.

Les services de police, de la gendarmerie et les élus locaux sont unanimes pour dénoncer les effets catastrophiques d'une pareille situation. L'absence d'immatriculation dessert la sécurité des conducteurs, souvent jeunes. Pour un cyclomotoriste, le risque d'être tué est cinq fois plus élevé que pour un automobiliste. En 1996, 216 jeunes de quatorze à dix-neuf ans se sont tués en cyclomoteur.

La maniabilité et les performances de certains véhicules, l'anonymat favorisé par le port du casque intégral et l'ajout de kits, interdits mais toujours proposés à la vente, font aussi en sorte que des actes dangereux sont commis sans que leur auteurs puissent être identifiés.

Nous voyons ainsi, dans nos villes et nos villages, en plus des quelques nuisances dues aux bruits, se multiplier de graves entorses au code de la route.

Enfin, plusieurs dizaines de milliers de deux-roues sont volés chaque année et ceux qui sont retrouvés ne peuvent être rendus à leur propriétaire faute d'immatriculation.

Tous les partenaires, constructeurs et associations sont en accord avec le principe de l'immatriculation de l'ensemble des deux-roues motorisés. Le coût d'une telle mesure, environ 75 francs par véhicule, serait d'ailleurs modique pour la personne concernée.

C'est la raison pour laquelle, avec ma collègue Laurence Dumont et notre collègue Baeumler, nous vous demandons de voter cet amendement.

M. Jean-Antoine Leonetti.

Très très bien !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

Favorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Le comité interministériel de la sécurité routière du 26 novembre 1997 a décidé de rendre obligatoire l'immatriculation des cyclomoteurs, seule catégorie de véhicules à moteur actuellement non immatriculée.

Le dispositif réglementaire est en cours de préparation, notamment avec le ministère de l'intérieur et le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie. Il entrera en vigueur au plus tard en 2000.

Vous avez donc satisfaction, et je vous demande donc, monsieur Mangin, de retirer votre amendement, au demeurant d'ordre réglementaire.

M. le président.

Monsieur Mangin, retirez-vous votre amendement ?

M. René Mangin.

Oui, monsieur le président.

M. le président.

L'amendement no 56 est retiré.

M. Mangin, Mme Laurence Dumont, M. Baeumler et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, no 55, ainsi rédigé :

« Après l'article 11, insérer l'article suivant :

« A partir du 1er janvier 2000, les véhicules à deux roues non motorisés font l'objet d'un marquage dont les modalités sont définies par décret en Conseil d'Etat. »

La parole est à M. René Mangin.

M. René Mangin.

J'associe M. Jung à cet amendement.

Un marquage des bicyclettes en identifiant le propriétaire serait très utile, tant pour la lutte contre le vol que pour la sécurité personnelle des utilisateurs et de leur environnement proche.

Les vols de bicyclettes sont très fréquents malgré les nombreux systèmes antivol existants. Les deux-roues font a ujourd'hui l'objet d'un trafic organisé de grande ampleur. La présence d'un marquage permettrait aux enquêteurs de connaître les caractéristiques des bicyclettes volées.

Le port de certains documents est obligatoire pour la conduite des deux-roues motorisés de plus de 125 cm 3

En l'absence de pièces similaires pour l'utilisation d'une bicyclette, l'auteur d'un accident ou d'une infraction ne peut être identifié. Des enfants, parfois très jeunes, utilisent des vélos sur la voie publique, souvent sans aucun contrôle. L'importance de la circulation sur certaines voies peut leur faire courir un grave danger. Comme ils n'ont généralement pas leurs papiers d'identité sur eux, le marquage permettrait alors de pallier la difficulté de les identifier.

Le comité interministériel de sécurité routière du 26 novembre 1997 a tenu à réaffirmer, dans un des points qu'il a retenus, l'objectif du Gouvernement d'améliorer la sécurité des cyclistes. Cette mesure de marquage, distincte d'une immatriculation qui ferait entrer de jeunes enfants dans le domaine pénal, devrait contribuer à des avancées en ce domaine.

C'est pourquoi nous proposons, mes collègues Laurence Dumont, Jean-Pierre Bauemler, Armand Jung et moi-même, de rendre obligatoire le marquage des véhicules à deux roues non motorisés.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

Favorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Sagesse.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

55. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

M. le président.

M. Dosière, rapporteur, a présenté un amendement, no 16, ainsi rédigé :

« Après l'article 11, insérer l'article suivant :

« La sécurité des infrastructures routières fait l'objet d'un contrôle dont les conditions sont définies par décret en Conseil d'Etat. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. René Dosière, rapporteur.

Contrairement aux véhicules, qui font l'objet de contrôles périodiques, les infrastructures ne donnent lieu à aucune surveillance systématique. C'est ainsi que les carrefours présentant des caractéristiques similaires sont équipés, selon les cas, de giratoires, d'îlots directionnels, de feux, de simples marquages au sol, voire ne font l'objet d'aucun équipement particulier.

Il est clair que le nombre de victimes sur les routes pourrait être sensiblement réduit si un contrôle des infrastructures était institué, à l'image de ce qui existe pour les établissements recevant du public. Au cours de cette soirée, de nombreux collègues ont présenté des observations qui démontrent la nécessité d'intervenir dans ce domaine, en demandant par exemple la pose de panneaux de signalisation. Nous allons examiner des amendements en ce sens.

C'est pourquoi l'amendement no 16 pose le principe d'un contrôle des infrastructures routières. Les modalités d'application, et notamment les délais nécessaires, demandant une concertation avec les élus locaux et les maîtres d'oeuvre, il est proposé qu'elles soient définies par décret en Conseil d'Etat.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

C'est une question importante. D'après certaines enquêtes, le comportement du conducteur, notamment la vitesse excessive, est le premier facteur d'accidents et se trouve à l'origine de 95 % des accidents mortels.

Mais il est vrai que la configuration des infrastructures est parfois un facteur aggravant.

Des études sont en cours pour améliorer le contrôle de sécurité sur les projets routiers de l'Etat. Les visites de sécurité avant mise en service, qui sont déjà pratiquées, seront systématisées.

Les méthodes de contrôle relatives aux étapes antérieures du projet - études préliminaires, avant-projets sommaires, avant-projets détaillés - proposées par un groupe de travail des ponts et chaussées seront appliquées sur des projets afin de les tester. Leur application sera généralisée, après évaluation, à tous les projets relevan t de l'Etat.

Toute extension de ces méthodes concernant les infrastructures neuves aux projets des communes et des départements suppose évidemment une concertation. Celle-ci n'a pas encore eu lieu, comme vous le soulignez, monsieur le rapporteur.

En ce qui concerne les infrastructures existantes, la question est plus difficile, car les méthodes ne sont pas au point. De plus, de nombreux problèmes juridiques relatifs aux responsabilités des uns et des autres se posent.

Par conséquent, il me paraît prématuré de légiférer aujourd'hui. Nous devons, au préalable, engager une concertation approfondie avec toutes les parties intéressées, notamment avec les représentants des maires et des présidents de conseils généraux. C'est pourquoi, monsieur le rapporteur, je souhaite le retrait de l'amendement de la commission.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur.

M. René Dosière, rapporteur.

Monsieur le ministre, j'ai bien entendu votre réponse et je reconnais la nécessité d'une concertation avec les élus. Mais l'adoption de cet amendement ne l'empêche pas, au contraire, puisque les modalités d'application seront définies par le Gouvernement dans le décret.

Jusqu'à présent, en matière de sécurité routière, aucune action forte n'a été décidée. Il est souhaitable de prendre date et d'engager la procédure. C'est la raison pour laquelle, malgré toute l'amitié que je vous porte, je maintiens mon amendement.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

16. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Jean-Claude Lemoine a présenté un amendement, no 29, ainsi rédigé :

« Après l'article 11, insérer l'article suivant :

« Les panneaux de circulation prescrivant aux conducteurs soit de marquer un temps d'arrêt, soit de céder le passage, devront être implantés de façon à permettre une parfaite visibilité aux conducteurs auxquels ils s'appliquent. Les conditions d'application du présent article seront fixées par voie réglementaire. »

La parole est à M. Jean-Claude Lemoine.

M. Jean-Claude Lemoine.

Je retire cet amendement qui, comme les autres, n'a aucune chance d'être adopté.

M. le président.

L'amendement no 29 est retiré.

M. Delnatte a présenté un amendement no 41, ainsi rédigé :

« Après l'article 11, insérer l'article suivant :

« La sécurité des passagers des bus de transport scolaire donnera lieu à un contrôle, dont les conditions sont définies par décret en Conseil d'Etat. »

La parole est à M. Patrick Delnatte.

M. Patrick Delnatte.

Cet amendement vise à poser le problème de l'équipement des bus de transport scolaire en ceintures de sécurité.

Nous avons tous de terribles accidents en mémoire, et il s'agit là d'une obligation de bon sens. Le code de la route exige déjà l'utilisation d'un système de retenue adapté aux enfants dans les voitures. Une directive européenne, transposée par un arrêté publié au Journal officiel du 5 décembre 1996, impose la même obligation pour les bus de transport scolaire, mais sa mise en oeuvre est très étalée dans le temps puisqu'elle s'échelonne jusqu'en 2001.

L'objet de mon amendement est de demander au Gouvernement d'accélérer le processus.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

Avis défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Même avis. Les directives européennes prévoyant l'équipement des autocars en ceintures de sécurité ont été transposées dans la réglementation française et leur application sera contrôlée par les services des mines.

L'équipement n'étant possible que sur des véhicules munis de points d'ancrage, elles ne concernent que les véhicules neufs. Cette mesure est d'ores et déjà en application. Tous les autocars neufs construits en France sont désormais équipés de ceintures.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

Pour ce qui concerne le transport scolaire, la règle autorisant à faire asseoir trois enfants sur une banquette de deux places ne permet pas l'utilisation de la ceinture.

De plus, celle-ci est de faible efficacité pour les jeunes enfants en raison de leur taille.

Par ailleurs, je rappelle que des mesures spécifiques de contrôle existent pour les véhicules servant au transport scolaire.

L'amendement de M. Delnatte appelle justement l'attention sur un problème réel, mais il ne permet pas d'améliorer le dispositif existant. De plus, il relève du domaine réglementaire. L'avis du Gouvernement est donc défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

41. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Gorce et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, no 86, ainsi rédigé :

« Après l'article 11, insérer l'article suivant :

« Un rapport annuel est rendu par le préfet au président du conseil général concernant la sécurité dans les transports scolaires. Il fera notamment mention de la qualité des véhicules utilisés, de l'aménagement des circuits empruntés, des aires d'arrêt et de la formation des conducteurs ainsi que de leur adéquation aux nécessités de garantie de sécurité des enfants faisant l'objet d'un transport scolaire. Ce rapport est rendu public ! » La parole est à M. Jean-Pierre Baeumler.

M. Jean-Pierre Baeumler.

Défendu !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

La commission n'a pas examiné cet amendement. J'y suis défavorable. Les transports scolaires relevant, depuis les lois de décentralisation, de la compétence du président du conseil général, pourquoi faire intervenir à nouveau le préfet ?

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

86. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Mme Gillot et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, no 85, ainsi rédigé :

« Après l'article 11, insérer l'article suivant :

« Un bouton d'appel d'urgence et un signal lumineux de réception d'appel sont incorporés aux bornes téléphoniques d'appel d'urgence sur autoroute, de manière à ce que la gendarmerie puisse localiser l'automobiliste sourd en panne et lui indiquer que son appel de détresse a bien été reçu. »

Est-ce que vous retirez votre amendement, madame Gillot ?

Mme Dominique Gillot.

Non ! Je sais bien que vous êtes tous fatigués, mais je vais vous demander de consacrer encore deux minutes de votre attention à une partie de la population qui souffre bien souvent de discriminations. Les sourds et les déficients auditifs, généralement appelés « malentendants », sont très mal considérés dans notre société. Ils sont confrontés à de grandes difficultés de communication et d'identification de leurs besoins dans la vie quotidienne.

Ainsi, ils sont particulièrement démunis lorsqu'ils sont confrontés à des récepteurs-émetteurs vocaux, même lorsqu'ils sont démutisés, oralisés, bons lecteurs labiaux ou appareillés pour obtenir une certaine récupération auditive. Sur les autoroutes, en cas d'accident ou simplement d'incident, ils ne peuvent communiquer par les bornes d'appel d'urgence qui garantissent la sécurité des autres automobilistes. Rien ne leur indique que leur appel est reçu. Rien ne permet aux services d'intervention de les localiser.

Mon amendement vise donc, monsieur le ministre, à alerter les pouvoirs publics pour qu'ils aménagent de façon adéquate les bornes téléphoniques d'appel d'urgence afin que la sécurité de nos concitoyens sourds soit mieux assurée sur les autoroutes.

Cette proposition ne concerne pas une population minoritaire ou marginale. Notre pays compte plus de q uatre millions de sourds ou malentendants, dont 200 000 sourds profonds qui ne sont pas interdits de conduite dès lors qu'ils ont satisfait aux épreuves du permis de conduire.

De plus, nous le savons, des maladies évolutives, des accidents, ou tout simplement le vieillissement, peuvent altérer l'ouïe. Nous sommes donc tous guettés par ce handicap.

M. François Lamy.

Excellent amendement !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. René Dosière, rapporteur.

La commission n'a pas été en mesure d'examiner cet amendement. A titre personnel, je considère que son caractère réglementaire est vraiment très marqué.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Je comprends votre souci, madame Gillot. Il faut déjà voir ce qu'il est possible de faire sur toutes les nouvelles bornes pour lutter contre cette forme de discrimination.

Mme Muguette Jacquaint.

Et même d'exclusion ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Mais je partage l'avis de M. le rapporteur : cette mesure est d'ordre réglementaire. C'est pourquoi je vous demande de retirer votre amendement. Néanmoins, il est clair qu'il faudra s'inspirer de vos réflexions pour étudier les moyens d'avancer en ce domaine.

M. le président.

La parole est à M. François Rochebloine.

M. François Rochebloine.

Je suis, pour ma part, favorable à cet amendement. Mais, puisque nous parlons de bornes d'autoroutes, je voudrais vous raconter une petite histoire qui remonte à quelques années. Celles qui étaient installées sur 25 kilomètres entre Saint-Etienne et Givors étaient vides ! Heureusement, M. Sarre, alors ministre, a réglé le problème. Mais il faut vraiment s'assurer que ce matériel fonctionne. Cela fait partie de la sécurité routière.

M. le président.

Retirez-vous votre amendement, madame Gillot ?

Mme Dominique Gillot.

Monsieur le ministre, si vous m'assurez que, dans le cadre réglementaire, vous allez étudier les moyens d'équiper les bornes pour que les personnes handicapées auditives puissent être entendues et repérées par les services de sécurité, je veux bien retirer mon amendement. Mais je serai vigilante et je reviendrai à la charge aussi souvent que nécessaire, car cette population est victime de discriminations.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

M. le président.

L'amendement no 85 est retiré.

Nous avons terminé la discussion des articles.

Explications de vote

M. le président.

Dans les explications de vote, la parole est à M. Jean-Claude Lemoine.

M. Jean-Claude Lemoine.

Dans la discussion générale, j'avais dit que nous pourrions, que nous espérions voter ce texte, car la sécurité routière nous préoccupe. Mais je suis triste de la façon dont le débat s'est déroulé. Sauf celui sur les motoneiges, aucun de nos amendements n'a été retenu. On a invoqué tous les prétextes et nos positions ont même parfois été caricaturées. Notamment à propos de l'article 5 sur le délit de grande vitesse, alors que nous étions favorables à des mesures plus lisibles et plus sévères.

Surtout, à l'article 7, nous espérions obtenir un meilleur dépistage de la conduite sous l'emprise de la drogue.

De multiples possibilités nous étaient ouvertes : donner les pouvoirs nécessaires aux commissions médicales du permis de conduire et, comme le code de la route nous le permettait, autoriser les agents de la circulation et les forces de l'ordre à procéder à des contrôles. Or nous n'avons obtenu aucune avancée. Nous savons parfaitement que la drogue est la cause de nombreux accidents mortels. Mais il est possible que l'on n'ait pas voulu gêner certains membres de la majorité plurielle. Nous le regrettons.

Si, dans ce domaine auquel nous tenons particulièrement, de nouvelles propositions nous sont faites en deuxième lecture, peut-être pourrons-nous adhérer à ce texte. Aujourd'hui, nous avons le regret de devoir voter contre.

M. le président.

La parole est à M. Dominique Bussereau.

M. Dominique Bussereau.

J'ai indiqué, dès le début de la discussion générale, que, pour des raisons de forme et de fond, mon groupe, avec regret lui aussi, voterait contre ce texte. Le déroulement de la discussion, aussi courtoise et intéressante qu'elle ait été, n'a fait que conforter notre position.

On nous a sans cesse renvoyés à une deuxième lecture bien lointaine. Il a déjà fallu plus de neuf mois pour la première navette entre le Sénat et l'Assemblée nationale.

Connaissant le calendrier parlementaire du Gouvernement et de sa majorité plurielle, combien en faudra-t-il pour que le texte nous revienne ? De plus, à part le fameux amendement sur les motoneiges, aucune des propositions de l'opposition n'a été acceptée, ni en commission des lois, où les débats ont d'ailleurs été aussi rapides que maigres, compte tenu du nombre des commissaires qui y ont participé, ni même dans l'hémicycle, où nos positions ont été parfois caricaturées, d'ailleurs plutôt par vous-même, monsieur le ministre, - c'est le jeu de la vie publique - que par nos collègues de la majorité plurielle, dont l'attitude est plus ouverte que celle du Gouvernement.

Pour ces raisons, notre groupe votera contre le projet de loi, mais non sans tristesse, car ce sujet aurait mérité un consensus.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Baeumler.

M. Jean-Pierre Baeumler.

Je voudrais tout d'abord souligner la qualité des débats. Même si nous nous sommes parfois séparés sur les votes, nous souhaitons tous, de bonne foi, répondre au drame de l'insécurité routière. Nous avons aussi abordé des questions qui allaient au-delà de l'objet strict du projet de loi : les infrastructures, la formation, l'harmonisation européenne des politiques de sécurité routière. Nous avons enrichi le texte en adoptant de nombreux amendements, parfois contre l'avis du Gouvernement, ce qui permettra de poursuivre la réflexion avec le ministère.

Il est vrai que nous nous séparons de l'opposition sur les principaux articles, notamment les articles 4 et 5.

M. Jean-Claude Lemoine.

Et l'article 7.

M. Jean-Pierre Baeumler.

Il n'est pas très populaire, en effet, de dire certaines vérités. Or la vérité, c'est que la vitesse tue et est la principale responsable de l'insécurité routière. Ces deux articles ont aussi un caractère pédagogique ; ils visent à responsabiliser les conducteurs.

Ce dispositif s'intègre dans la politique engagée par le Gouvernement pour faire reculer l'insécurité routière.

Nous avons noté que le Gouvernement voulait faire diligence pour mettre en oeuvre les dispositions arrêtées lors du comité interministériel de novembre 1997. Nous veillerons à ce que ces orientations se traduisent rapidement dans les textes d'application.

Avec la volonté d'apporter sa pierre à l'édifice qui a été construit, année après année, au fil des législatures, le groupe socialiste votera ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Vote sur l'ensemble

M. le président.

Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(L'ensemble du projet de loi est adopté.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Je remercie l'Assemblée nationale pour l'adoption de ce projet de loi. Il a été amélioré au cours de notre discussion, même si certaines retouches peuvent encore être apportées en deuxième lecture, comme on l'a vu. 2

MODIFICATION DE L'ORDRE DU JOUR

M. le président.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement souhaite prendre la parole pour une communication du Gouvernement.

Vous avez la parole, monsieur le ministre.

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

En application de l'article 48 de la Constitution, le Gouvernement informe l'Assemblée nationale que la dernière lecture du projet de loi, relatif aux modes d'élection des conseillers régionaux et des conseillers de l'Assemblée de Corse et au fonctionnement des conseils régionaux, initialement prévue le mardi 15 décembre 1998, est reportée au mardi 22 décembre après-midi.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 10 DÉCEMBRE 1998

Plusieurs députés du groupe socialiste.

Très bien !

M. Michel Bouvard.

Après l'élection du nouveau président du conseil général Rhône-Alpes ! (Sourires.)

3 DÉPÔT D'UN RAPPORT

M. le président.

J'ai reçu, le 10 décembre 1998, de M. Didier Migaud, rapporteur général, un rapport, no 1256, fait au nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances pour 1999.

4 DÉPO T D'UN RAPPORT D'INFORMATION

M. le président.

J'ai reçu, le 10 décembre 1998, de M. François Loncle, un rapport d'information, no 1257, déposé par la délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne sur l'intégration de l'acquis de Schengen dans l'Union européenne.

5 DÉPÔT DE PROPOSITIONS DE LOI ADOPTÉES PAR LE SÉNAT

M. le président.

J'ai reçu, le 10 décembre 1998, transmise par M. le président du Sénat, une proposition de loi, adoptée par le Sénat, tendant à sanctionner de peines aggravées certaines infractions commises sur les agents d'un exploitant d'un réseau de transport public de voyageurs.

Cette proposition de loi, no 1258, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 10 décembre 1998, transmise par M. le président du Sénat, une proposition de loi, adoptée par le Sénat, portant modification de la loi no 96-370 du 3 mai 1996 relative au développement du volontariat dans les corps de sapeurs-pompiers.

Cette proposition de loi, no 1259, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

6

ORDRE DU JOUR

DES PROCHAINES SÉANCES

M. le président.

Mardi 15 décembre 1998, à dix heures trente, première séance publique : Questions orales sans débat ; Fixation de l'ordre du jour.

A quinze heures, deuxième séance publique : Questions au Gouvernement ; Discussion du projet de loi constitutionnelle, no 985, relatif à l'égalité entre les femmes et les hommes : Mme Catherine Tasca, rapporteur, au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport no 1240).

A vingt et une heures, troisième séance publique : Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.

La séance est levée.

(La séance est levée le vendredi 11 décembre 1998, à deux heures quarante.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT

CONVOCATION DE LA CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS La conférence, constituée conformément à l'article 48 du règlement, est convoquée pour le mardi 15 décembre 1998, à 10 heures, au 4e bureau.