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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 2 NOVEMBRE 1999

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. LAURENT FABIUS

1. Questions au Gouvernement (p. 8668).

M. le président.

REMPLACEMENT DU PREMIER SUBSTITUT AU PARQUET DE PARIS (p. 8668)

M. Henri Plagnol, Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

MNEF (p. 8669)

MM. Charles de Courson, Lionel Jospin, Premier ministre.

SERVICES DÉPARTEMENTAUX D'INCENDIE ET DE SECOURS (p. 8669)

Mme Chantal Robin-Rodrigo, M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur.

INDÉPENDANCE DE LA JUSTICE (p. 8670)

M. Bernard Accoyer, Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

AVENIR DES SALARIÉS D'AE ROSPATIALE-MATRA (p. 8671)

MM. Yves Fromion, Alain Richard, ministre de la défense.

DÉCALAGES DANS LES REMBOURSEMENTS DE TVA (p. 8672)

MM. Gilbert Meyer, Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget.

SCHÉMAS RÉGIONAUX D'ORGANISATION SANITAIRE (p. 8673)

M. Bernard Outin, Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

RÉDUCTION DU TEMPS DE TRAVAIL DANS LA FONCTION PUBLIQUE (p. 8674)

MM. Jean Vila, Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.

PERSPECTIVES DE PLEIN EMPLOI (p. 8674)

M. Jean-Pierre Pernot, Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

DÉPARTEMENTS D'OUTRE-MER (p. 8675)

MM. Jérôme Lambert, Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer.

PRODUCTEURS DE VOLAILLES (p. 8676)

M. Yvon Abiven, Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce et à l'artisanat.

ACCUEIL D'URGENCE (p. 8676)

MM. Francis Hammel, Claude Bartolone, ministre délégué à la ville.

DÉMISSION DU MINISTRE DE L'ÉCONOMIE ET DES FINANCES (p. 8677)

M. François Goulard, Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

M. le président.

PRÉSIDENCE DE M. PATRICK OLLIER

2. Loi de financement de la sécurité sociale pour l'an 2000. Explications de vote et vote sur l'ensemble d'un projet de loi (p. 8678).

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

M. Alfred Recours, rapporteur de la commission des affaires culturelles, pour les recettes et l'équilibre général.

EXPLICATIONS DE VOTE (p. 8680)

MM. Jean-Luc Préel, Georges Sarre, François Goulard, Gérard Terrier, Jean Bardet, Mme Jacqueline Fraysse.

VOTE SUR L'ENSEMBLE (p. 8685)

Adoption, par scrutin, de l'ensemble du projet de loi.

Suspension et reprise de la séance (p. 8686)

3. Loi de finances pour 2000 (deuxième partie). Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 8686).

ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR, RECHERCHE ET TECHNOLOGIE (suite) (p. 8686)

MM. Bruno Bourg-Broc, Claude Goasguen, Georges Sarre, Pierre Cohen, Jean-Pierre Foucher, Patrick Leroy, Pierre Lasbordes, Mme Cécile Helle,

MM. Jean-Yves Le Déaut, Jacques Guyard.

PRÉSIDENCE DE M. PIERRE-ANDRÉ WILTZER

M. Pierre Ducout.

M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Réponses de M. le ministre aux questions de : MM. Bruno B ourg-Broc, Pierre Lasbordes, Mmes Marie-Hélène Aubert, Huguette Bello, M. Jean-Pierre Foucher.

ÉDUCATION NATIONALE, RECHERCHE ET TECHNOLOGIE

II. Enseignement supérieur

Etat B

Titre III (p. 8709)

Amendement no 68 du Gouvernement : MM. le ministre, Alain Claeys, rapporteur spécial de la commission des finances, pour l'enseignement supérieur. Adoption.

Adoption du titre III modifié.


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Titre IV. Adoption (p. 8709)

Etat C

Titres V et VI. Adoption (p. 8709)

III. Recherche et technologie

Etat B

Titres III et IV. Adoption (p. 8710)

Etat C

Titres V et VI. Adoption (p. 8710)

Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.

4. Ordre du jour des prochaines séances (p. 8710).


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COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. LAURENT FABIUS

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

M. le président.

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Mes chers collègues, je vous indique dès à présent que je ne suspendrai pas la séance à la fin des questions au G ouvernement. Nous passerons immédiatement aux explications de vote et au vote par scrutin public sur l'ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000.

Nous commençons par les questions du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.

REMPLACEMENT DU PREMIER SUBSTITUT AU PARQUET DE PARIS

M. le président.

La parole est à M. Henri Plagnol.

M. Henri Plagnol.

Ma question, qui appelle une réponse claire, je l'espère, s'adresse à Mme la garde des sceaux.

Les développements de l'enquête sur la MNEF ont conduit ce matin à la démission, à la suite d'un choix personnel, du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. S'agissant d'une enquête aussi sensible, vous avez, madame la garde des sceaux, la mission de veiller scrupuleusement à l'indépendance totale des magistrats du parquet qui en ont charge.

Or, par une coïncidence troublante, nous avons appris au cours du week-end que Mme Fulgeras, qui était à la tête de la section des affaires financières du parquet de Paris, allait être remplacée brutalement. Et parmi les dossiers dont elle avait la charge, figurait notamment celui de la MNEF.

Cette coïncidence est d'autant plus fâcheuse que son remplacement a été provoqué très brutalement, sans respecter les usages et la tradition en vigueur s'agissant de magistrats titulaires de postes sensibles. En effet, son départ n'a été précédé d'aucun appel à candidature et ne se rattache pas à un mouvement général des parquetiers.

Quelle raison explique un départ aussi soudain, s'agissant d'un magistrat confirmé, en charge de ce poste depuis huit ans ? Est-ce un départ volontaire ? Si oui, Mme Fulgeras craignait-elle un conflit avec sa hiérarchie ? A-t-elle fait jouer la clause de conscience ? En résumé, comment expliquez-vous ce jeu de chaises musicales, pour le moins maladroit, au parquet de Paris, au lendemain même du réquisitoire supplétif visant le ministre de l'économie et des finances ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie franç aise-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la j ustice.

Monsieur le député, vous m'interrogez sur Mme Fulgeras qui, en effet, occupait les fonctions de premier substitut au parquet de Paris. Elle était l'un des deux chefs de section à l'intérieur du parquet financier. A ce titre, elle était sous l'autorité hiérarchique du procureur de Paris, M. Dintilhac (Murmures sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) , et du chef de la section financière du parquet de Paris, M. Marin.

Mme Fulgeras était depuis neuf ans à ce poste, et M. Dintilhac, le procureur de Paris, lui a proposé une mobilité. (Exclamations sur les mêmes bancs.)

M. Patrick Ollier.

Comme par hasard !

Mme la garde des sceaux.

Nous en avons parlé souvent dans cette assemblée, la mobilité est, je le crois, une bonne chose dans la fonction publique, pour les magistrats en particulier. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Vous avez fait remarquer que cette mobilité n'avait pas fait l'objet d'un examen par le Conseil supérieur de la magistrature. Mais elle n'avait pas à faire l'objet d'un examen par le Conseil supérieur de la magistrature, ni d'ailleurs par la chancellerie, puisqu'il s'agit d'une mobilité interne à des juridictions, comme il s'en produit des dizaines chaque jour, sous l'autorité et à l'initiative des chefs hiérarchiques de ces juridictions évidemment. C'est donc le type de mouvement qui ne relève ni du Conseil supérieur de la magistrature ni des propositions du garde des sceaux et qui a été pris par les responsables compétents, c'est-à-dire par le procureur de Paris, M. Dintilhac (Vives exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants),...

M. Lucien Degauchy.

Vous avez son numéro de poste ?

Mme la garde des sceaux.

... et par le chef de la section financière du parquet de Paris, M. Marin. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Je fais confiance à M. Dintilhac et à M. Marin (Rires et exclamations sur les mêmes bancs) pour continuer à faire fonctionner le parquet de Paris.

J'ajoute que c'est ce gouvernement qui a donné enfin à la section financière du parquet de Paris les moyens dont il avait besoin pour mener à bien ses investigations finan-


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cières en créant un pôle économique et financier, le premier dans notre pays (Protestations sur les mêmes bancs), en l'installant dans de nouveaux locaux, rue des Italiens et en fournissant à chaque magistrat un bureau et un ordinateur, ainsi que des crédits et des assistants spécialisés (« Ouh ! Ouh ! Ouh ! » sur les mêmes bancs) venant du ministère des finances et de la Banque de France.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Huées sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Voilà ce que je peux dire, monsieur le député, en réponse à votre question. Le parquet de Paris continuera à fonctionner dans la sérénité et, enfin, avec les moyens dont il a besoin pour démêler ces dossiers complexes de délinquance économique et financière. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

MNEF

M. le président.

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson.

Monsieur le Premier ministre, ma question concerne le dossier de la MNEF, dossier dont la gravité vient d'être soulignée par la démission du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Vous qui avez été le premier secrétaire du parti socialiste, de 1981 à 1987 et, de nouveau, de 1995 à 1997, estimez-vous normal que la MNEF, mutuelle qui, avec d'autres mutuelles, gère le régime de sécurité sociale des étudiants grâce aux cotisations sociales des Français, ait pu être mise au service de votre parti politique (Protestations sur les bancs du groupe socialiste. - « Ouh ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), voire ait servi de pouponnière de votre parti comme l'ont déclaré d'anciens responsables de la MNEF ? (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme Martine David.

C'est de la diffamation, ça !

M. le président.

La parole est à M. le Premier ministre.

M. Lionel Jospin, Premier ministre.

Monsieur le député, le ministre Dominique Strauss-Kahn...

M. Lucien Degauchy.

L'ex-ministre !

M. le Premier ministre.

... vient de démissionner. Mis en cause dans une procédure judiciaire par sa mention dans un réquisitoire supplétif, il a estimé que cette situation n'était pas compatible...

M. Lucien Degauchy.

Avec la morale ?

M. le Premier ministre.

... avec l'exercice de sa fonction de ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Yves Nicolin.

Ce n'est pas la question !

M. le Premier ministre.

Nous avons, naturellement, parlé ensemble de cette question depuis deux jours.

Je voudrais vous dire clairement quelle était mon approche. Elle reposait sur trois préoccupations : laisser la justice agir librement ; m'inspirer du principe du respect de la présomption d'innocence ; ne pas tirer de conséquences automatiques d'une situation incertaine en fonction d'une pratique antérieure qui a vu des personnalités contraintes à démissionner n'être pas ensuite condamnées.

Dominique Strauss-Kahn a choisi de prendre la décision que vous connaissez. Je salue son acte qui témoigne d'une haute conception de ses devoirs d'Etat. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. -

« Debout ! Debout ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Yves Nicolin.

Ce n'est pas un héros !

M. le Premier ministre.

Je rends hommage à l'exceptionnelle qualité du travail qu'il a accompli depuis deux ans et demi pour...

(« Pour la MNEF ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le Premier ministre.

... notre pays. Il a conduit avec intelligence une politique économique et industrielle bien conçue et efficace.

M. Patrick Ollier.

A la MNEF !

M. le Premier ministre.

Il est respecté, estimé et écouté par ses pairs sur la scène internationale. Je lui exprime devant vous ma sympathie et mon amitié fidèle.

M. Jean-Antoine Leonetti.

Ce n'est pas la question !

M. le Premier ministre.

J'espère qu'il reviendra vite parmi nous. (Applaudissements prolongés sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Jean Bardet.

Pas nous !

M. le Premier ministre.

J'ai demandé au Président de la République, qui l'a accepté, de bien vouloir nommer M. Christian Sautter ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Le reste relève de spéculations ou de polémiques politiques auxquelles je ne participe pas ! (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Le reste est de la responsabilité de la justice. Je m'interdis de parler des affaires judiciaires et je respecte totalement sa liberté.

(Applaudissements prolongés sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Nous en venons à une question du groupe Radical, Citoyen et Vert.

SERVICES DÉPARTEMENTAUX D'INCENDIE ET DE SECOURS

M. le président.

La parole est à Mme Chantal RobinRodrigo.

Mme Chantal Robin-Rodrigo.

Monsieur le ministre de l'intérieur, ma question porte sur les difficultés financières que rencontrent...


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 2 NOVEMBRE 1999

M. Jean-Louis Debré.

La MNEF !

Mme Chantal Robin-Rodrigo.

... les services départementaux d'incendie et de secours.

La loi du 3 mai 1996 a posé en principe l'organisation départementale du système de distribution des secours tant au niveau des effectifs que des équipements. Cette réforme a abouti à la création, dans chaque département, d'un établissement public doté de ses propres institutions et chargé de définir la politique de couverture des risques et d'acquisition des équipements. Elle permet, en outre, de mutualiser les ressources et les moyens.

Cependant, cette réforme ne s'est pas accompagnée d'un transfert financier en direction des collectivités locales. Son coût a été sous-estimé. Le mode actuel de financement n'est pas adapté aux besoins en ressources nouvelles résultant de l'application du nouveau régime i ndemnitaire des sapeurs-pompiers professionnels, de l'allocation de vétéran de sapeurs-pompiers volontaires, de la réforme des transmissions ou de l'harmonisation des différents régimes de travail.

Pour illustrer ces difficultés, je prendrai l'exemple des Hautes-Pyrénées. L'effort qui sera consenti par les collectivités dans le cadre du budget 2000 du DSIS 65 sera de 8 millions de francs, soit en augmentation de 13 % par rapport à l'année 1999. Malgré cet engagement important, deux dossiers majeurs ne pourront pas être financés faute de moyens : il s'agit du plan de recrutement de personnels opérationnels et de la construction et rénovation des casernements, que la loi de 1996 transfère aux SDIS.

Monsieur le ministre, quelles mesures comptez-vous prendre pour répondre à l'inquiétude légitime exprimée par de nombreux élus locaux ? De même, que pensezvous de l'intéressante proposition de loi de mon collègue André Lajoinie visant à instaurer une contribution des compagnies d'assurance au financement des services d'incendie et de secours ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'intérieur, pour une réponse courte.

M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur.

Madame la députée, il est exact que l'application de la loi du 3 mai 1996 entraîne une croissance notable du coût des services d'incendie et de secours désormais départementalisés. Le coût est estimé à environ 15 milliards de francs. La hausse peut atteindre le chiffre que vous avez indiqué, pour diverses raisons : régime indemnitaire ; remise à niveau des services, des équipements et des casernements ; mesures prises pour améliorer la situation des sapeurs-pompiers.

Je rappelle également que le financement des SDIS relève traditionnellement de la seule compétence des collectivités locales, l'Etat prenant à sa charge les unités d'intervention civile, la flotte aérienne des bombardiers d'eau et d'hélicoptères du ministère de l'intérieur, ainsi que les renforts nationaux.

J'ai exploré plusieurs pistes dont celle que vous avez évoquée. Une concertation s'est engagée avec les établissements hospitaliers. La contribution des entreprises et des assurances est également analysée avec le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie. Toutefois, il s'agit d'un secteur en situation concurrentielle en Europe.

S'agissant de l'Etat, je m'oriente vers l'attribution d'une dotation globale d'équipement spécifique, au moins pour la période de remise à niveau, dotation qui pourrait atteindre plusieurs centaines de millions dès lors que les départements et les communes seraient d'accord pour y contribuer, au moins en partie, ce qui implique une concertation au sein du comité des finances locales.

Par ailleurs, j'ai rencontré le président de la Caisse des dépôts et consignations pour, en accord avec le ministère de l'économie et des finances, étudier la possibilité d'un financement à long terme à bas taux d'intérêt pour les investissements immobiliers.

Ces mesures doivent être concertées avec les présidents de SDIS. J'installerai prochainement, avec l'accord du Premier ministre, une commission de suivi et d'évaluation. Elle aura pour mission d'analyser les conditions de mise en oeuvre de la loi de 1996, dont je vous ferai observer qu'elle n'a fait à l'époque l'objet d'aucune étude de faisabilité financière.

M. Jean-Louis Debré.

Ce n'est pas vrai !

M. le ministre de l'intérieur.

Mais nous y pourvoyons.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. Jean-Louis Debré.

Ce n'est pas vrai ! Vous n'avez pas le droit de dire cela !

M. le président.

Nous en venons aux questions du groupe du Rassemblement pour la République.

INDÉPENDANCE DE LA JUSTICE

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le Premier ministre. Je ne doute pas qu'il aura à coeur d'y apporter une réponse précise, puisqu'elle touche à l'indépendance de la justice.

Monsieur le Premier ministre, en février 1998, Gabriel Bestard, procureur de la République à Paris, a été évincé de son poste,...

M. Lucien Degauchy.

Il n'était pas socialiste !

M. Bernard Accoyer.

... battant ainsi le record de brièveté dans cette fonction. Son remplaçant est Jean-Pierre Dintilhac. Il est, pour donner quelques précisions à Mme la garde des sceaux, ex-directeur de cabinet d'Henri Nallet, un ancien ministre socialiste de la justice. Est-ce une coïncidence ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Lucien Degauchy.

Quel est son numéro de carte au PS ?

M. Bernard Accoyer.

En novembre 1998, Laurent Le Mesle, sous-directeur des affaires criminelles et des grâces, est à son tour évincé de son poste. Il avait publié un livre à vocation pédagogique, dans la série des

« Que sais-je ? ». Or le garde des sceaux avait déclaré être en désaccord avec les opinions de l'auteur de ce livre.

Est-ce une coïncidence ? (Protestations sur les bancs du groupe socialiste. - « Très bien ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. Jean-Louis Debré.

Pensez donc ! C'est le hasard !

M. Bernard Accoyer.

La semaine dernière, comme l'a rappelé Henri Plagnol, Anne-José Fulgeras, chef de la section financière du parquet, est soudainement, elle aussi, écartée de son poste. Elle avait assumé la veille un réquisitoire supplétif concernant un membre éminent du Gouvernement pour faux et usage de faux dans le cadre de l'instruction du dossier de la MNEF. Est-ce une coïncidence ? (« Non ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 2 NOVEMBRE 1999

M. Bernard Accoyer.

Monsieur le Premier ministre, alors que la plupart des responsables de l'administration centrale de la chancellerie ont été remplacés par votre garde des sceaux, comment expliquez-vous ces coïncidences et pensez-vous que la série soit terminée ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme la garde des sceaux.

Monsieur le député, je vais vous donner des indications sur la façon dont ce gouvernement conçoit l'indépendance de la justice et des procureurs. (Vives exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Yves Nicolin.

Vous n'êtes plus crédible !

Mme la garde des sceaux.

S'agissant d'abord de M. Gabriel Bestard, il a été nommé par ce gouvernement, en conseil des ministres, procureur général d'une des plus importantes cours d'appel de France, celle d'Aix, c'est-à-dire qu'il a bénéficié d'une promotion importante.

(« Ah ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Il a été nommé à un des postes les plus importants, puisque, aujourd'hui, la cour d'appel d'Aix est en effet l'une des plus encombrées et qu'elle a besoin que l'on s'occupe du bon fonctionnement de ses juridictions.

Il n'y a eu dans ces nominations aucune espèce de favoritisme ou de passe-droit puisque M. Bestard, on s'en souvient, avait été nommé au poste de procureur de Paris par le précédent gouvernement.

Ensuite, ce gouvernement a pris l'engagement,...

Un député du groupe du Rassemblement pour la République.

Ce n'était qu'un engagement !

Mme la garde des sceaux.

... par la voix du Premier ministre, ici même, dans son discours de politique générale en juin 1997 (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), que plus aucune nomination de procureur ne serait faite sans l'avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature. Nous avons tenu parole et, chaque fois que le Conseil supérieur de la magistrature a émis un avis négatif sur des propositions que je lui avais faites, la personne en question n'a pas été nommée. Ce gouvernement a manifesté un respect absolu des avis du Conseil supérieur de la magistrature, ce qui n'a pas été le cas lorsque vous étiez aux responsabilités.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) En outre, j'ai proposé à votre assemblée et au Sénat un projet de loi constitutionnelle pour réformer la Constitution et permettre justement au Conseil supérieur de la magistrature d'être plus indépendant et d'exercer des responsabilités plus importantes. Cette réforme n'attend plus qu'un vote conforme du Congrès. Monsieur le député, votez pour la réforme du Conseil supérieur de la magistrature le 24 janvier prochain ! (« Non ! » sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Peut-être serez-vous alors un peu plus crédible dans les leçons que vous essayez maladroitement, très maladroitement, de nous donner en mettant en avant des pratiques que vous n'avez jamais respectées.

M. Yves Nicolin.

Cela vous fait mal !

M. Charles Cova.

Vous nous en donnez assez comme ça, des leçons !

Mme la garde des sceaux.

Enfin, je rappelle que c'est ce gouvernement qui a supprimé les instructions individuelles dans les dossiers judiciaires (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) et qu'il n'y a plus, depuis que nous sommes aux responsabilités, la moindre intervention dans les dossiers individuels...

M. Yves Nicolin.

Tu parles !

Mme la garde des sceaux.

Il n'y a eu et il n'y aura aucune exception à cette règle. Là encore, monsieur le député, vous êtes loin de pouvoir en dire autant. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

AVENIR DES SALARIÉS D'AE ROSPATIALE-MATRA

M. le président.

La parole est à M. Yves Fromion.

M. Yves Fromion.

Il me semble que la tournure prise par les affaires de Corse devrait amener Mme la garde des sceaux à avoir un peu moins d'assurance. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie et des finances. (« Il n'y en a plus ! » « Lequel ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.) Il y a quelques jours a été annoncée la création de la société aéronautique et spatiale EADS, née de la fusion des groupes DASA et Aérospatiale-Matra. Ces regroupements, rendus inévitables par l'évolution mondiale dans ce secteur, confortent la position européenne.

Néanmoins, les salariés du groupe Aérospatiale-Matra expriment de fortes inquiétudes quant à leur avenir. En effet, personne ne doute que la constitution de la société EADS ne conduise, à terme plus ou moins rapproché, à des recompositions ou à des restructurations au niveau de la production et des bureaux d'études. Il est logique de penser que les décisions stratégiques en la matière prendront en compte les réalités fiscales et sociales prévalant dans chacun des pays européens. Or la France est devenue une sorte de laboratoire social de la réduction obligatoire du temps de travail à 35 heures applicable à tous les salariés. Les mesures de ce genre entraîneront, on le sait maintenant, des contraintes très fortes qui pourraient conduire à des décisions défavorables à la pérennité ou a u développement des sites français.

L'inquiétude des salariés d'Aérospatiale-Matra doit être d'autant moins prise à la légère que votre gouvernement a accepté que la nouvelle société EADS soit une société de droit néerlandais, afin de bénéficier de la fiscalité propre aux Pays-Bas, tout simplement pour échapper à la no tre.


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M. Arnaud Lepercq.

Eh oui, voilà !

M. Yves Fromion.

Quelle opinion vont avoir les cadres et les ouvriers de notre pays en constatant que, pour fuir les dispositions de notre propre fiscalité, on décide de la délocalisation du siège de la plus prestigieuse de nos industries ? Sachant que l'Etat ne détiendra guère plus de 15 % de EADS, le Gouvernement a-t-il pris des dispositions ou reçu des assurances permettant de garantir que les contraintes qui vont peser sur le travail en France, ajoutées au poids de notre fiscalité, ne feront pas obstacle au maintien des sites industriels dans notre pays, notamment à l'implantation des chaînes du futur A3XX ou de l'avion militaire ATF ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de la défense.

M. Alain Richard, ministre de la défense.

Monsieur le député, vous avez tout à fait raison de chercher à mieux comprendre quelles sont les chances des sites situés en France dans la nouvelle organisation de EADS.

Je vous rappelle d'abord que la structure du capital de cette société donne en réalité aux actionnaires français - l'Etat, d'une part, le groupe Lagardère et un groupe d'investisseurs financiers, d'autre part - un droit conjoint à approuver l'ensemble des décisions stratégiques. Il ne faut donc pas raisonner uniquement en termes de pourcentage d'actionnariat puisque l'actionnaire public français partage le droit de décision.

Ensuite, vous avez passé sous silence le gain de compétitivité et le gain potentiel de parts de marché dont va bénéficier l'ensemble d'Aérospatiale. Les synergies et les rapprochements d'établissements entre les deux pays aboutiront sans doute à un solde positif d'emplois grâce aux progrès que nous sommes en train de réaliser sur de multiples marchés, les marchés civils, avec la nouvelle situation d'Airbus, comme les marchés militaires, compte tenu notamment des consolidations en matière de satellites et de missiles.

Enfin, si vous raisonnez en termes de coût relatif du travail, vous constaterez que ce n'est pas avec l'Allemagne que la comparaison se trouve être la plus défavorable pour nous, loin s'en faut. Surtout, il faut tenir compte des capacités technologiques et de la productivité des salariés dans les deux pays. De ce point de vue, vous pouvez être assuré, monsieur le député, que les composantes françaises de EADS sont certainement bien placées pour l'avenir.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Yves Fromion.

Il faudra le dire aux salariés !

M. Arnaud Lepercq.

Et Amsterdam, monsieur le ministre ? DÉCALAGES DANS LES REMBOURSEMENTS DE TVA

M. le président.

La parole est à M. Gilbert Meyer.

M. Gilbert Meyer.

Ma question s'adressait à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

(Sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République :

« Il n'y en a plus ! »)

M. Gilbert Meyer.

Il vient d'être remplacé.

M. Arnaud Lepercq.

Il y en a deux ! (Sourires.)

M. Gilbert Meyer.

La réduction du taux de la TVA à 5,5 % pour les travaux de réhabilitation de l'habitat a suscité un formidable espoir au sein des petites entreprises.

M. Alain Barrau.

Vous faites bien de le dire !

M. Gilbert Meyer.

Pourtant, aujourd'hui, l'euphorie cède la place à l'angoisse.

(Exclamations sur quelques bancs du groupe socialiste.)

Cela est particulièrement vrai chez les artisans et les entrepreneurs soumis au régime de TVA dit du forfait simplifié. Leur crainte trouve son origine dans le mécanisme de récupération de la TVA. En effet, les entreprises achètent leurs fournitures au taux normal de TVA, soit 20,6 %, mais elles ne refacturent les clients qu'à hauteur de 5,5 %. Elles financent donc temporairement la différence. Or le délai de récupération est terriblement long. Les déclarations se font trimestriellement, voire annuellement, et le remboursement intervient deux mois après la déclaration. Ces entreprises devront ainsi financer jusqu'à quatorze mois le différentiel de TVA, qui peut représenter plus de 15 % du montant des achats de matériels.

Je ne vois aucune entreprise capable d'assumer ce rôle de banquier pour des sommes aussi importantes et pour des périodes aussi longues.

M. Patrick Ollier.

Excellente question !

M. Gilbert Meyer.

Dans l'immédiat, la baisse de la TVA aura de graves conséquences sur la vie des entreprises. A moins qu'une solution permettant une régularisation plus rapide ne soit trouvée, de nombreuses entreprises se trouveront devant des difficultés insurmontables.

Je vous demande, monsieur le ministre, de préciser quelles sont les modalités envisagées pour réduire au maximum ces décalages dans le remboursement de la TVA. A l'avance, je vous en remercie.

(Applaudissementss ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat au budget.

M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget.

Monsieur le député, vous avez eu raison de dire que la diminution du taux de la TVA sur les travaux d'entretien du logement de 20,6 % à 5,5 % était un espoir pour les petites et moyennes entreprises du bâtiment.

Cette décision qui, votée par l'Assemblée nationale, s'applique à partir du 15 septembre, représente un formidable espoir d'activité pour un secteur très longtemps négligé.

M. Gilbert Meyer.

La question n'est pas là !

M. le secrétaire d'Etat au budget.

Nous en attendons, d'apprès les estimations des artisans eux-mêmes, environ 30 000 emplois. (« Où ? » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. Jean-Louis Debré.

Ce n'est pas la question !

M. le secrétaire d'Etat au budget.

Mais je vais y répondre, monsieur Debré ! Les artisans achètent effectivement les matériels à 20,6 % et les facturent à 5,5 %.

Ils bénéficient donc d'un crédit d'impôt de TVA qui vient en déduction de la TVA qu'ils paieraient normalement. Certains artisans paieront moins de TVA qu'avant, d'autres peut-être - dans des cas peu fréquents - disposeront d'un véritable crédit d'impôt qui leur sera remboursé dès leurs déclarations. En la matière, je crois qu'il n'y a, monsieur le député, aucun motif d'inquiétude.

M. Gilbert Meyer.

Si !

M. le secrétaire d'Etat au budget.

En tout cas, l'ensemble du secteur du bâtiment a considéré que la mesure était porteuse d'un immense message d'espoir et


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de dynamisme pour l'artisanat du bâtiment et pour l'emploi. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

Nous en venons aux questions du groupe communiste.

SCHÉMAS RÉGIONAUX D'ORGANISATION SANITAIRE

M. le président.

La parole est à M. Bernard Outin.

M. Bernard Outin.

Madame la ministre de l'emploi et de la solidarité, dans quelques jours, vont paraître les premiers bilans des schémas régionaux d'organisation sanitaire, qui sont censés adapter l'offre hospitalière aux besoins de la population. Nous souscrivons à cette démarche mais force est de constater que, par le passé, elle s'est résumée par des fermetures de services, en particulier de services de proximité et par une rationalisation de l'offre de soins, afin de réaliser des économies. Ainsi, en sept ans, 60 000 lits ont été supprimés, ce qui ne saurait être l'aboutissement des SROS.

Aujourd'hui, nos hôpitaux sont de plus en plus sollicités, notamment les urgences dont l'activité connaît une augmentation moyenne de 6 %. En plus, ils doivent faire face à des missions nouvelles, liées en particulier à la couverture maladie universelle ou à la loi de lutte contre les exclusions. Maillons essentiels de l'aménagement du territoire, ils devraient, à ce titre, être dotés de moyens suffisants pour répondre aux préoccupations de la population.

M adame la ministre, quelles mesures comptez-vous prendre pour que notre système hospitalier soit à la hauteur des exigences et des besoins qui s'expriment ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur le député, dès septembre 1997, nous avons engagé la révision des schémas régionaux d'organisation de la santé inspirés par une double logique : régionaliser au mieux la santé, au plus près des besoins de la population, et établir, par bassins de vie mais aussi par région, des pôles d'excellence dans les domaines où les Français ont le plus besoin de l'hôpital - je pense, par exemple, à la cancérologie, à la périnatalité, mais aussi, vous l'avez souligné, aux urgences.

Les schémas régionaux d'organisation de la santé visent trois objectifs. D'abord, l'amélioration de la qualité et de la sécurité : c'est une évidence, mais il y a encore des progrès à faire. Ensuite, la réduction des inégalités dans l'accès aux soins. Enfin, l'adaptation de l'offre de soins aux besoins de la population et aux évolutions technologiques.

Nous disposons, aujourd'hui, des résultats de presque tous les schémas régionaux d'organisation de la santé, ils vont, d'ailleurs, être rendus publics dans quelques heures.

Seuls manquent les résultats de la Picardie et de la Guadeloupe, dont nous disposerons d'ici à quelques semaines.

Nous pouvons dire que les SROS améliorent effectivement la qualité et la sécurité des soins. Sur les trois secteurs prioritaires, cancérologie, périnatalité et urgences, des améliorations tout à fait essentielles sont prévues, grâce, notamment, à des investissements nouveaux. Chacun, quels que soient son lieu de vie et sa catégorie sociale, pourra ainsi avoir accès aux meilleurs services en fonction de la gravité et du stade de sa maladie. Vingtcinq régions ont considéré que les urgences figuraient parmi les priorités des priorités, tant il est clair que beaucoup de nos concitoyens y vont alors qu'ils n'ont parfois jamais eu recours à la médecine. Il en est de même pour la périnatalité.

En ce qui concerne la réduction des inégalités dans l'accès aux soins, dix schémas régionaux d'organisation de la santé ont intégré un volet spécifique pour l'accueil des plus démunis. Dans les contrats fixés cette année entre l'Etat et les hôpitaux, l'accès aux soins des plus démunis, le fait que l'hôpital sorte de ses murs pour aller vers les plus défavorisés seront autant de dimensions prises en compte dans le budget des établissements.

Dans le domaine de la cancérologie, nous renforçons les pôles existants par des investissements très élevés dans vingt-quatre régions.

L'effort portera également sur les activités nouvelles ou insuffisamment développées. Le traitement de l'insuffisance rénale chronique va être ainsi encouragé dans onze régions par des investissements importants. Il en ira de même pour les soins palliatifs dans neuf régions et pour le traitement de la douleur.

J'ajoute que la plupart des schémas régionaux d'organisation de la santé ont prévu des priorités locales - l'alcool, le tabac, la réanimation, la prévention du suicide, la diabétologie - qui vont aussi donner lieu à des investissements.

En outre, vous le savez, un taux de progression des dépenses hospitalières de 2,5 % a été retenu cette année par le Gouvernement afin de poursuivre la réduction des inégalités entre régions. Trois régions seront amenées à rattraper leur retard dans les cinq ans. Et les directeurs d'agence régionale d'hospitalisation vont s'efforcer, comme nous le leur avons demandé, de réduire les inégalités à l'intérieur même des régions, je pense en particulier à la région Ile-de-France.

J'en viens aux suppressions de lits, monsieur le député.

Si elles ont été décidées, c'est par volonté de s'adapter - cela a déjà été le cas dans le passé - aux nouveaux besoins : - la cataracte, par exemple, ne nécessite plus qu'une demi-journée d'hospitalisation contre huit jours il y a encore quatre ou cinq ans...

M. Jean-Michel Dubernard.

Non, non !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

... sans parler de l'obstétrique. C'est aussi par volonté de rechercher la qualité. Dans la quasi-totalité des cas, il s'agit de reconvertir des services, notamment vers l'aide aux personnes âgées et aux personnes handicapées, domaines ou les besoins sont importants, nous le savons. Dans quelques minutes, nous voterons, je l'espère, les aides pour la reconversion du personnel et les investissements, nécessaires pour faire évoluer nos hôpitaux.

Pour le Gouvernement, l'hôpital public est une priorité, il est au coeur de notre politique de santé. C'est la raison pour laquelle les moyens que nous lui consacrons et l'énergie que nous mettons à poursuivre son évolution sont aussi grands. Nous avons là un pôle d'excellence reconnu par tous. Des hommes et des femmes se battent pour améliorer le système de santé dans notre pays : beaucoup en sont encore exclus mais la situation sera améliorée grâce à la CMU. Nous accompagnerons ces évolutions pour les Français, mais aussi pour le personnel à qui l'on doit bien ce soutien. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe Radical, Citoyen et Vert et quelques bancs du groupe communiste. - Exclama-


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tions sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) RÉDUCTION DU TEMPS DE TRAVAIL DANS LA FONCTION PUBLIQUE

M. le président.

La parole est à M. Jean Vila.

M. Jean Vila.

Ma question s'adresse à M. le ministre de la fonction publique. Parce que les syndicats de fonctionnaires lient eux aussi la réduction du temps de travail à l'emploi, ils sont très attentifs à l'application des 35 heures par l'Etat-patron dans les trois fonctions p ubliques - fonction publique de l'Etat, fonction publique territoriale et fonction publique hospitalière sans oublier un million quatre cent mille agents non titulaires.

Dès la remise des conclusions du rapport Roché, vous avez engagé une consultation avec les organisations syndicales et les associations d'élus. Vous avez défini une méthode et un calendrier d'application sans envisager l'emploi comme un élément central du dispositif, alors que 43 % des fonctionnaires partiront à la retraite d'ici à l'an 2010. A cet égard, le quasi-gel des emplois prévu pour 2000 est un signe particulièrement mal venu.

Parce que les services publics peuvent jouer un rôle essentiel et dynamique dans la lutte contre le chômage, en particulier celui des jeunes, je vous demande de donner connaissance à la représentation nationale des moyens que le Gouvernement entend débloquer pour satisfaire cette urgente revendication. Les collectivités territoriales risquent, si des dispositions particulières ne sont pas prises, d'être placées devant des choix fatidiques qui consisteraient à réduire les services rendus à la population par une stagnation des effectifs ou bien encore à augmenter la pression fiscale sur les ménages.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation, pour une réponse très brève.

M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.

Monsieur le député, j'ai terminé, le 7 octobre dernier, une première phase de concertation avec les partenaires sociaux, les syndicats et les associations d'élus locaux au sujet de l'aménagement de la réduction du temps de travail dans la fonction publique.

Cette concertation a fait ressortir un certain nombre de convergences intéressantes, par exemple sur les objectifs.

Ainsi, nous sommes d'accord pour dire que le premier objectif est de faire bénéficier les fonctionnaires, comme les autres salariés, de l'avancée sociale qu'est la réduction du temps de travail à 35 heures. Nous avons aussi convenu qu'il fallait en profiter pour améliorer les services publics. Les partenaires se sont accordés en outre sur la nécessité de rechercher un accord-cadre inter-fonctions publiques : il devrait aboutir au plus tard en janvier 2000.

Cet accord devra être assez souple pour que puissent s'y inscrire les discussions ultérieures au niveau des ministères, des collectivités et des hôpitaux.

Les syndicats ont posé la question de l'emploi. Elle n'est pas taboue, mais je leur ai bien indiqué que, pour la fonction publique, la finalité première de la RTT, c'était l'avancée sociale et non la création d'emplois.

M. Jean-Michel Ferrand.

C'est un aveu !

M. Arnaud Lepercq.

Mauvais exemple ! M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.

Celle-ci ne pourra qu'être que la conséquence des discussions qui auront lieu ensuite au niveau des ministères, des hôpitaux ou des collectivités. S'agissant des collectivités locales, auxquelles vous avez fait référence, nombreuses sont celles qui sont déjà passées aux 35 heures et, que je sache, ce ne sont pas les plus pauvres. Pour autant, la question de l'emploi sera examinée.

La transformation d'heures supplémentaires en emplois et la poursuite de la résorption de la précarité étaient des réponses partielles...

M. Francis Delattre.

Très partielles ! M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.

... aux ajustements qui s'avéraient nécessaires. On peut raisonnablement penser que l'ensemble du processus sera achevé à la fin de l'an 2001, voire en 2002 pour l'Etat notamment. Voilà pourquoi vous ne pouvez percevoir aucune incidence notable sur le projet de budget pour l'an 2000.

Je le répète, ce gouvernement a la volonté de travailler dans la concertation et la transparence avec les fonctionnaires et leurs représentants. Quant au Parlement, il sera régulièrement informé. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe communiste.)

M. le président.

Nous en venons aux questions du groupe socialiste.

PERSPECTIVES DE PLEIN EMPLOI

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Pernot.

M. Jean-Pierre Pernot.

Monsieur le président, ma question s'adresse à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

M. Christian Jacob.

Et des avancées sociales !

M. Jean-Pierre Pernot.

Les derniers chiffres du chômage, concernant le mois de septembre, font apparaître une baisse record (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) : près de 84 000 chômeurs de moins, soit le taux de chômage le plus bas depuis le début de la décennie. Ce chiffre s'inscrit dans la continuité des résultats précédents et marque une accélération spectaculaire sur tous les fronts des secteurs de l'emploi et pour toutes les classes d'âge. Je m'en réjouis et je suis persuadé que c'est aussi le cas de tous les parlementaires ici présents. Les Français eux-mêmes sont optimistes et mesurent, dans leur vie quotidienne, les effets d'une politique économique dynamique.

M. François Loos.

Alors, pas de question ?

M. Jean-Pierre Pernot.

Je ne crois pas que ce soit le fruit du hasard. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Je le perçois davantage comme le résultat de la politique volontariste en direction de l'emploi que vous avez menée, madame la ministre, avec l'ensemble de vos collègues du Gouvernement, en y associant pleinement la majorité parlementaire qui vous soutient.

M. Serge Janquin.

La droite n'a pas le même bilan !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 2 NOVEMBRE 1999

M. Jean-Pierre Pernot.

Les faits, madame la ministre, vous donnent aujourd'hui raison. (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.) Ils sont liés à la politique réaliste et ambitieuse menée contre vents et marées par le Gouvernement depuis juin 1997.

(Mêmes mouvements.)

Ma question, question d'espoir, est la suivante : pouvons-nous espérer un retour prochain au plein emploi ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Lucien Degauchy.

Merci pour la question !

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur le député, j'espère, comme vous, que tout le monde se réjouit...

(« Oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance) ici que le chiffre du chômage ait connu une baisse record au mois de septembre avec 83 600 chômeurs en moins. Ce résultat, obtenu après une période quasi ininterrompue de baisse du chômage sans précédent dans notre pays quant à l'importance des chiffres, est dû, c'est vrai, à la politique menée par le Gouvernement sous l'autorité du Premier ministre qui, dès son arrivée, a fait de l'emploi sa priorité numéro un.

Nous avons d'abord souhaité relancer la croissance en relançant la consommation et Dominique Strauss-Kahn, avec le talent qui est le sien (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert), a mené cette politique économique qui, aujourd'hui, aux dires des organismes internationaux, nous place en tête en termes de croissance, non seulement pour cette année, mais pour les suivantes. Il faudra s'en souvenir dans les mois qui viennent.

Nous avons oeuvré pour une économie à la fois plus performante et plus solidaire. Aider les minima sociaux, revaloriser l'allocation de logement, l'allocation de rentrée scolaire, faire en sorte que la consommation soit plus forte, préparer les emplois de demain, les nouvelles technologies, les emplois-jeunes, réduire la durée du travail nous commençons à en percevoir les résultats ces derniers mois -, enfin, réduire les charges sociales : cet éventail de mesures doit permettre de continuer à faire baisser le chômage dans les mois qui viennent, même si cette baisse peut connaître quelques à-coups.

Si nous nous réjouissons, c'est aussi parce que, depuis maintenant deux ans, 23 % des jeunes qui étaient au chômage ne le sont plus. Un jeune chômeur sur quatre a retrouvé du travail, cela n'était jamais arrivé ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Plus encore, depuis dix mois, grâce à l'application de la loi contre les exclusions et au travail exemplaire du service public de l'emploi, notamment de l'Agence nationale pour l'emploi, le nombre de chômeurs de longue durée, que l'on disait « enkystés », a diminué de 130 000.

Tout cela montre bien que le Premier ministre a fait le bon choix en se fixant l'emploi comme priorité non seulement dans ses discours, mais dans ses actes. Voilà pourquoi aujourd'hui, pour la première fois depuis la crise du pétrole de 1975, les Français ont à nouveau confiance dans l'avenir et dans la baisse du chômage. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) DÉPARTEMENTS D'OUTRE-MER

M. le président.

La parole est à M. Jérôme Lambert.

M. Jérôme Lambert.

Monsieur le secrétaire d'Etat à l'outre-mer, vous venez d'effectuer, dans les départements de Martinique et de Guadeloupe, une importante visite de travail conduite par M. le Premier ministre, accompagné de plusieurs ministres, afin de préparer la prochaine loi d'orientation pour nos départements d'outre-mer. Les responsables politiques, économiques et sociaux, ainsi que les représentants culturels de ces départements souhaitaient cette rencontre, tout comme la population qui a réservé à M. le Premier ministre un accueil enthousiaste.

M. Lucien Degauchy.

Pas toujours !

M. Jérôme Lambert.

Tous ont pu vous faire part des projets et des souhaits dont ils étaient porteurs dans une situation dont la singularité, pour ne pas dire les difficultés particulières, ne nous a pas échappé. Compte tenu de la richesse des contacts et du dialogue instauré, quel bilan pouvez-vous tirer, monsieur le secrétaire d'Etat, de cette visite de travail ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat à l'outre-mer.

M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer.

Monsieur le député, effectivement M. le Premier ministre est allé quatre jours aux Antilles avec cinq ministres : MM. Bartolone, Glavany, Josselin, Mme Lebranchu et moi-même. Ce voyage a été l'occasion de nombreuses rencontres avec les élus locaux, les responsables économiques et sociaux et les représentants de la société civile.

Ces réunions de travail directes, caractérisées par un dialogue franc, nous permettront d'avancer sur les problèmes principaux que rencontrent les départements d'outre-mer, et plus particulièrement les Antilles. Je veux remercier la population de l'accueil chaleureux et sympathique (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) qu'elle a réservé au Premier ministre.

Cette visite nous a d'abord permis de répondre à des questions urgentes. Je pense non seulement aux difficultés que rencontre le secteur de la banane et à l'annonce de mesures en faveur des producteurs, aux problèmes de sécurité qui se posent dans les grandes agglomérations et au renforcement des effectifs, mais aussi, plus généralement, à la nécessité de prendre en compte les attentes de la société sur le plan institutionnel comme sur le plan du développement.

Le projet de loi d'orientation est en préparation. Il sera discuté au Parlement lors du premier semestre 2000. Les élus et les responsables locaux en recevront, d'ici au 15 novembre, les grandes lignes. Ils feront part de leurs réactions, de leurs propositions. Un avant-projet leur sera formellement adressé en début d'année. Voilà, comment, dans un dialogue constructif, nous souhaitons préparer cette loi d'orientation. Celle-ci prendra en compte la demande d'un accroissement des responsabilités sur le plan local et d'un renforcement des moyens en matière de développement économique pour prendre en compte la singularité des Antilles.

E n confirmant l'appartenance des départements d'outre-mer à la République dans le pacte républicain, notre volonté est de les amener à franchir une nouvelle étape. Après celle de la liberté en 1848, avec l'abolition de l'esclavage ; après celle de l'égalité en 1946, avec le sta-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 2 NOVEMBRE 1999

tut de département d'outre-mer ; ce sera, en 2000, celle de la responsabilité et du développement à laquelle le Parlement sera associé. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe communiste.)

PRODUCTEURS DE VOLAILLES

M. le président.

La parole est à M. Yvon Abiven.

M. Yvon Abiven.

Monsieur le ministre de l'agriculture et de la pêche, je voudrais vous interroger sur la filière volailles dont la situation s'est tellement dégradée depuis plusieurs mois qu'elle connaît aujourd'hui une crise grave.

Les raisons en sont multiples et bien identifiées, comme le souligne le rapport Perrin : concurrence féroce avec principalement le Brésil et les Etats-Unis, baisse de la part française dans les exportations mondiales - moins 45 % entre 1993 et 1998, alors que celle des Etats-Unis augmentait de 130 % - insuffisance du montant des restitutions. Les producteurs doivent aujourd'hui supporter en première ligne les conséquences de cette crise. Selon le centre d'économie rurale du Finistère, le revenu moyen a nnuel des exploitations avicoles est passé de 145 000 francs, en 1998, à 99 000 francs en 1999, exercice clos au 30 juin. Par ailleurs, la durée moyenne des vides sanitaires est actuellement supérieure à la durée d'élevage des poulets.

C'est toute la filière qui risque de disparaître si le recul de la France sur les marchés mondiaux se poursuit. En Bretagne, où se concentrent 60 % de la filière, plus de 4 000 emplois sont en jeu. Il est donc capital que, dans les négociations de l'OMC, soit acquis le maintien des restitutions au niveau de la dernière année GATT, soit juillet 2001, dans le cadre d'une clause dite « de paix ».

Qu'entendez-vous faire dans l'immédiat pour soutenir les éleveurs les plus en difficulté ? (« Mais rien ! » sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Quelle politique entendez-vous défendre à moyen terme pour que notre filière volailles puisse conserver sa vocation exportatrice face à la concurrence internationale, notamment à la concurrence américaine ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce et à l'artisanat.

Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce et à l'artisanat.

Monsieur le député, Jean Glavany, qui a dû partir avec Dominique Gillot pour ouvrir des négociations sur un autre problème concernant l'agriculture, m'a demandé de vous faire la réponse suivante.

Il est vrai que la filière volaille est actuellement très touchée par une baisse des exportations. Elle est donc fortement dépendante des restitutions. Très conscient de cette situation, le ministre de l'agriculture a demandé à M. Daniel Perrin un rapport, qui lui a été remis en juillet. Depuis, il a tenu à organiser une concertation approfondie avec les professionnels.

Plusieurs axes d'orientation ont été d'ores et déjà retenus et en tout premier lieu - vous avez raison - un fort soutien de la part du ministre de l'agriculture au niveau européen pour que les restitutions soient bien défendues et que nos agriculteurs obtiennent gain de cause.

En deuxième lieu, M. Glavany juge important, en attendant des reconversions de la filière, de soutenir financièrement les exploitants. Pour cela, 40 millions de francs ont été dégagés, comme l'a annoncé le Premier ministre lors de la table ronde du 21 octobre, dont les modalités sont en cours de discussion avec les professionnels. Pour les prochaines semaines, 10 millions de francs seront affectés exploitation par exploitation, pour soutenir les agriculteurs en difficulté parce qu'ils doivent aujourd'hui baisser la production de leurs élevages et augmenter les temps de repos.

Le ministre est donc parfaitement conscient de la situation. Il reste persuadé que la Bretagne, qui représente 80 % de la production française, doit avoir des soutiens particuliers et s'engage à faire en sorte que les crédits déconcentrés soient utilisés de façon à éviter des failli tes préjudiciables aux agriculteurs et aux agricultrices de cette région. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

ACCUEIL D'URGENCE

M. le président.

La parole est à M. Francis Hammel.

M. Francis Hammel.

Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'Etat au logement. Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2000, le Gouvernement a inscrit des mesures nouvelles au budget de l'emploi et de la solidarité pour favoriser l'accueil en résidence sociale : 60 millions de francs supplémentaires sont ainsi prévus pour améliorer l'urgence sociale. Dans la même perspective, la dotation des centres d'hébergement et de réinsertion sociale a été augmentée de 2,95 % par rapport à 1999, pour atteindre plus de 2,5 milliards de francs. Le financement de la poursuite du programme de création de places nouvelles, conformément aux objectifs annoncés, est ainsi assuré. Une mesure nouvelle de 42 millions de francs permettra de créer 500 places de CHRS, comme ce fut le cas en 1998 et 1999. A cela il faut ajouter 31 millions de francs (« La question ! » sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants) pour couvrir l'évolution de la masse salariale et 100 millions de francs d'investissement pour améliorer les bâtiments.

M. Philippe Vasseur.

La question !

M. Francis Hammel.

Dans une déclaration commune du jeudi 28 octobre dernier, M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement, et Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale,...

M. Philippe Vasseur.

La question !

M. Francis Hammel.

... ont annoncé la mise en place, à Paris et en Ile-de-France,...

M. Philippe Vasseur.

La question !

M. Francis Hammel.

... d'un plan de construction et de réhabilitation de résidences sociales.

M. Philippe Vasseur.

La question !

M. Francis Hammel.

Chaque année, malgré les efforts importants consentis pour faire face à la détresse...

M. Philippe Vasseur.

La question !

M. le président.

Monsieur Vasseur, ça suffit !

M. Philippe Vasseur.

La question ! C'est l'heure !

M. le président.

Monsieur Vasseur, ça suffit ! L'heure, c'est moi qui en suis juge. La télévision est là jusqu'à seize heures cinq. Vous n'avez rien à dire, vous n'avez qu'à vous taire, monsieur Vasseur ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 2 NOVEMBRE 1999

Poursuivez, monsieur Hamel.

M. Francis Hammel.

Chaque année, malgré les efforts importants consentis pour faire face à la détresse de ceux qui se trouvent à la rue, on doit hélas déplorer la souffrance, voire la mort, de personnes sans abri.

M. Philippe Vasseur.

La question !

M. Francis Hammel.

La volonté affichée par le Gouvernement de remédier durablement à cette situation insupportable que connaissent les SDF se traduit par cet ensemble de mesures décidées à leur égard.

Monsieur le secrétaire d'Etat, pourriez-vous...

M. Philippe Vasseur.

Ah, enfin !

M. Francis Hammel.

... détailler le plan défini la semaine dernière pour venir en aide rapidement à ceux qui espèrent passer l'hiver sous un toit ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre délégué à la ville.

M. Claude Bartolone, ministre délégué à la ville.

Monsieur le député, l'Etat fera son devoir. Il fera donc face aux besoins, comme il l'a toujours fait par le passé. Les capacités de l'hiver dernier ont été reconstituées. Pour l'Ile-de-France, près de 5 500 places sont d'ores et déjà ouvertes, ou prêtes à ouvrir, et 500 places peuvent être mobilisées du jour au lendemain si nécessaire, en cas de grand froid.

Néanmoins, comme Louis Besson a eu l'occasion de le dire la semaine dernière aux préfets, il reste encore trop de structures précaires. La situation immobilière à Paris nous empêche d'aller aussi vite que nous le souhaiterions pour ouvrir plus de places et pérenniser et humaniser celles qui existent. Il en résulte que les crédits mis à disposition par l'Etat en ce domaine ne sont pas intégralement consommés.

Ces dernières années, vous l'avez rappelé, monsieur le député, nous n'avons cessé de renforcer le dispositif d'accueil et d'hébergement d'urgence. Pour le seul hébergement d'urgence, les crédits sont passés de 126 millions de francs en 1995 à 210 millions de francs en 1999. Il y a désormais 3 200 places dans le dispositif parisien, dont 2 200 ouvertes toute l'année. Une douzaine d'espaces solidarité-insertion, qui assurent un accueil et offrent des services dans la journée, sont ouverts sur Paris et trois autres le seront prochainement. Le nombre des équipes de rue, qui travaillent jour et nuit pour aller au devant de ceux qui naturellement ne vont pas vers les structures d'urgence, a été considérablement augmenté.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Nous en venons à une question du groupe Démocratie libérale et Indépendants.

DÉMISSION DU MINISTRE DE L'ÉCONOMIE ET DES FINANCES

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

(« La question ! La question ! » et rires sur les bancs du groupe socialiste.)

M. François Goulard.

Monsieur le Premier ministre, nous avons entendu votre brève réponse à propos de la d émission de votre ministre de l'économie et des finances. Vous prétendez laisser la justice agir librement mais, au même moment, nous apprenons le déplacement pour le moins suspect d'un magistrat.

(Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Vous invoquez la présomption d'innocence. Chacun d'entre nous la respecte : mais, vous en conviendrez, c'est une réponse un peu courte, face à une affaire qui met gravement en cause non seulement un des principaux ministres de votre gouvernement mais aussi plusieurs élus et responsables de votre parti.

(« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Monsieur le Premier ministre, vous ne pourrez pas longtemps vous abriter derrière la présomption d'innocence pour nier que la démission de votre ministre de l'économie et des finances pose un problème politique à votre gouvernement et à votre majorité.

Plusieurs députés du groupe socialiste.

Tiberi !

M. François Goulard.

Monsieur le Premier ministre, êtes-vous solidaire des agissements de vos amis politiques dont certains, dans cette affaire, sont très proches de vous ? C'est une question que tous les Français peuvent légitimement se poser.

Ce matin, nous apprenions que l'un des groupes parlementaires de la majorité, le groupe communiste, avait soudainement, très soudainement, décidé de voter contre le budget social de la nation. Il a annoncé depuis qu'il allait sans doute s'abstenir. C'est un acte d'hostilité qui, dans d'autres démocraties, aurait fait tomber le gouvernement ! (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

Monsieur le Premier ministre, vous ne pouvez le nier, vous êtes face à une crise gouvernementale. Nous vous demandons de réserver à la représentation nationale l'annonce des initiatives que vous entendez prendre pour faire face à une telle crise. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

Monsieur le député, puisque vous insistez, je vais vous donner quelques indications plus précises sur la pratique de vos amis concernant les nominations de magistrats.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

En 1995, le procureur de Nanterre a été nommé contre l'avis du Conseil supérieur de la magistrature.

(« Ouh ! » sur de nombreux bancs du groupe socialiste. Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) En 1997, à la veille des élections législatives, un décret a évincé de ses fonctions l'inspecteur général des services judiciaires et un autre décret a nommé comme numéro deux, contre l'avis du Conseil supérieur de la magistrature, un ancien fonctionnaire de la mairie de Paris.

(Mêmes mouvements sur les mêmes bancs.)

Par ailleurs, il y a eu, le 24 juillet 1996, en un seul jour, une rafale de trois nominations de personnalités qui étaient en poste dans les cabinets des gardes des sceaux


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ou dans des postes de haute responsabilité à la chancellerie. Ces personnes sont d'ailleurs toujours en poste. Pour cette raison, je ne prononcerai pas leur nom.

M. Pierre-André Wiltzer.

Ce n'est pas la question !

Mme la garde des sceaux.

S'agissant de la remarque que vous avez faite, pour commencer, sur la démission de Dominique Strauss-Kahn,...

M. Franck Dhersin.

Sors ton mouchoir !

Mme la garde des sceaux.

... je voudrais dire ici qu'il a eu le courage de démissionner pour se défendre. Cette décision, qui l'honore, montre à quel point il a, comme l'a dit le Premier ministre, un sens élevé de l'Etat et de ses responsabilités.

M. Jean-Michel Ferrand.

La question ne portait pas sur ce point !

Mme la garde des sceaux.

Je voudrais dire aussi à la représentation nationale à quel point nous, ses amis, sommes tristes de ce départ et combien nous apprécions le talent et la compétence de Dominique Strauss-Kahn.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

(M. Patrick Ollier remplace M. Laurent Fabius au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. PATRICK OLLIER,

vice-président

2

LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L'AN 2000 Explications de vote et vote sur l'ensemble d'un projet de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle les explications de vote et le vote par scrutin public de l'ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 (nos 1835, 1876).

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, nous voici au terme de la discussion sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour l'an 2000.

Je voudrais tout d'abord remercier le président de la commission des affaires sociales mais aussi les rapporteurs, Mme Clergeau, MM. Evin, Recours et Jacquat, pour leur travail et pour leur implication personnelle, à l'occasion de la première lecture de ce projet.

C'est la troisième fois que ce gouvernement présente devant le Parlement un projet de loi de financement de la sécurité sociale. Nous avons été amenés à dire combien ce débat, même s'il ne prenait en compte que les éléments chiffrés, financiers, de la sécurité sociale, nous paraissait important.

Le Gouvernement souhaite que lors du vote de la loi sur la santé publique et les droits des malades - au printemps, je l'espère - nous puissions définir d'autres moyens pour débattre des problèmes de fond qui sont derrière ces chiffres et, peut-être, si vous le décidez, pour que chaque année, avant l'été, un grand débat sur la santé publique vienne éclairer la préparation de la loi de financement de la sécurité sociale.

L'importance de ce troisième projet tient au fait que las écurité sociale devrait être, l'année prochaine, en excédent - certes, faible, de l'ordre de 2 milliards de francs. - Nous y sommes parvenus, en l'espace de trois ans, à partir d'un déficit de 54 milliards de francs.

Nous voulons, bien sûr, poursuivre les réformes structurelles engagées dans le domaine de la santé. Grâce à elles, les honoraires des médecins, généralistes ou spécialistes, sont restés cette année dans le cadre des objectifs fixés par le Parlement. Il en va de même des hôpitaux et cliniques. Même si elle reste encore trop importante dans notre pays, la consommation pharmaceutique a augmenté dans des proportions moindres par rapport aux années précédentes. Elle se situe aujourd'hui à un niveau acceptable. Nous devons néanmoins poursuivre nos efforts.

Beaucoup reste encore à faire dans les réformes structurelles. Nous avons engagé une grande réforme du médicament tendant à développer le médicament générique et une politique fondée sur le service médical rendu. Nous devons maintenant l'étendre aux matériels médicaux dont l'évolution reste négative en termes financiers et même en termes de transparence. De la même manière, nous avons encore à réaliser des progrès dans certains domaines très spécifiques de la santé.

Cette loi de financement de la sécurité sociale est très importante car elle clarifie, au-delà de la poursuite de nos politiques structurelles, les rôles de l'Etat et de la CNAM.

Une telle clarification avait été demandée par le conseil d'administration de la CNAM dans son plan stratégique.

Elle avait été demandée aussi par plusieurs députés, conduits par Claude Evin, au sein de la commission des affaires sociales. Ils considèrent, avec juste raison, que nous devons clarifier les rôles, la médecine de ville étant dorénavant régulée à l'intérieur d'une enveloppe unique par la CNAM qui reçoit tous les moyens lui permettant de mener une politique conventionnelle, une politique incitative et, si nécessaire, de prendre des décisions pour rester dans l'objectif défini. Il en sera de même de l'hôpital et des cliniques, avec une politique d'accréditation et une tarification à la pathologie. Cela ne signifie pas, d'ailleurs, que l'hôpital sera moins bien traité. Les statistiques dont nous disposons aujourd'hui montrent que rien ne permet de dire que l'hôpital est plus coûteux que la clinique dans la mesure où l'on prend en compte les obligations de service public qui lui incombent. Contrairement aux cliniques privées, l'hôpital ne trie pas les maladies traitées et remplit des fonctions de recherche et d'éducation.

Seule la poursuite des politiques structurelles dans le domaine de la santé assurera un équilibre pérenne qui devrait permettre, par ailleurs, de continuer à améliorer l'accès à certains soins, accès encore insuffisant.

J'ai entendu que nous devions progresser - nous en avons longuement parlé et je crois que c'est l'avis de la majorité - s'agissant de la prise en charge de la dentiste-r ie, de l'optique, des prothèses diverses et variées,


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domaines où notre sécurité sociale protège encore insuffisamment nombre de nos concitoyens. Maintenant que nous avons rétabli l'équilibre et que nous pouvons compter sur des ressources complémentaires, nous entendons, après la couverture maladie universelle, poursuivre le remboursement de ces pathologies. De même que je m'étais engagée l'année dernière à réformer le financement de la sécurité sociale je m'engage à améliorer le financement de ces pathologies, dès que nous en aurons les moyens - dès l'année prochaine, je l'espère.

En faveur de la famille, nous poursuivons la politique ambitieuse qui a été menée avec l'ensemble des associations familiales, des organisations patronales et syndicales.

Aujourd'hui, leur priorité va vers la prise en compte des jeunes enfants - problèmes de modes de garde - et celle des enfants adultes qui restent dans la famille. C'est l'objectif de cette année.

Les familles ont également exprimé leur volonté que soit inscrite une clause pour que les recettes de la branche famille continuent à évoluer en fonction de la richesse nationale. Le Premier ministre s'y est engagé. Cet engagement figure dans le projet de loi que, je l'espère, vous allez voter dans quelques instants.

S'agissant des accidents du travail et des maladies professionnelles, nous avons beaucoup fait pour reprendre l'ensemble des dispositifs sur les maladies professionnelles, pour rouvrir les dossiers, pour faire que les réponses soient plus rapides, pour compléter les tableaux de maladies professionnelles, pour mieux aider ceux qui en sont victimes. Mais surtout, nous étendons cette année la préretraite, comme nous nous y étions engagés, non seulement aux travailleurs fabriquant de l'amiante mais aussi à ceux qui ont été amenés à travailler sur l'amiante tout au long de leur vie active.

En ce qui concerne les retraites, le Premier ministre annoncera un certain nombre de mesures en début d'année. Nous avons, d'ores et déjà, prévu dans ce projet de loi de revaloriser de 1 % du minimum vieillesse et de l'allocation veuvage et de continuer à alimenter le fonds retraites. Si ce projet est voté, à la fin de l'année, 20 milliards environ seront acquis pour ce fonds.

Je tiens à le dire très clairement, car j'ai parfois eu l'impression que nous ne nous comprenions pas vraiment.

Pour la première fois dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, le financement s'ouvre vers les cotisations patronales, au-delà des seuls salaires. C'était attendu et demandé par beaucoup. Il n'y a effectivement pas de raison aujourd'hui que les salaires seuls financent la sécurité sociale dans notre pays.

(« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

Certains disent que c'est insuffisant. Je l'entends, j'allais même dire que je le comprends. Mais c'est un premier pas, qui va permettre de faire contribuer par leurs bénéfices les entreprises capitalistiques qui ont substitué le capital au travail, au profit des entreprises qui créent de l'emploi.

A ceux qui ont exprimé leurs doutes, je répondrai que ce projet, n'est que la conséquence de ce qui a été voté à l'unanimité dans la loi sur la durée du travail et qui traduit notre volonté de baisser les charges sociales dans les entreprises au profit de l'emploi mais de le faire, contrairement à ce qu'a fait la droite, de manière contrôlée au niveau de l'entreprise, de la branche et au niveau national.

Je rappelle à tous que le Gouvernement s'est engagé, à la demande du groupe communiste, à présenter chaque année un bilan de cette baisse des charges en termes de création d'emplois devant la Commission nationale de la négociation collective, devant le conseil de surveillance du fonds des baisses de charges sociales, et bien évidemment au Parlement. Nous aurons l'occasion, à ce moment-là, d'en parler. C'est une demande démocratique de bonne utilisation des fonds publics. C'est une demande légitime : elle a été inscrite dans la loi sur la durée du travail, elle a ses conséquences aujourd'hui dans la loi de financement de la sécurité sociale.

J'ai entendu ceux qui souhaitaient des revalorisations plus importantes dans un domaine ou dans l'autre. Nous nous sommes d'abord adressés aux plus fragiles : je pense aux mesures concernant la CMU, le minimum vieillesse et les familles les plus modestes.

Je n'ai pas la prétention de penser que ce projet est parfait. Simplement, c'est un projet qui nous ramène vers l'excédent et qui nous assure des marges de manoeuvre. A partir de là, nous déciderons ensemble, dans les années qui viennent, quelles seront les priorités pour mieux répondre aux besoins de la population.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, nous pouvons être heureux de constater que grâce à des réformes structurelles, accompagnées par la croissance, la sécurité sociale voit aujourd'hui l'avenir plus en rose et qu'il sera possible d'améliorer encore la situation des Françaises et des Français.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur divers bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. Alfred Recours, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour les recettes et l'équilibre général.

M. Alfred Recours, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour les recettes et l'équilibre général.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, 1998, 1999, 2000... nous en sommes, depuis le début de la législature, à la troisième loi de financement et nous voyons, en perspective et a posteriori, se dessiner certains progrès et certaines évolutions.

Dans cette loi pour l'an 2000, vous nous avez proposé, madame la ministre, un objectif national des dépenses d'assurance maladie de plus 2,5 %. Mais ce taux est calculé sur les dépenses et recettes constatées l'année dernière ; dans la réalité, il s'agit d'environ 4 % d'augmentation par rapport aux critères antérieurs. C'est loin d'être une restriction des dépenses de santé, comme on a pu l'entendre ici ou là. Au contraire, l'occasion nous est donnée, avec cet objectif des dépenses d'assurance maladie, d'améliorer encore les dispositifs de santé pour les Français.

Le projet prévoit la mise en place d'un dispositif conventionnel pour les centres de santé, avec la généralisation du tiers payant, la délégation complète - vous l'avez dit, madame la ministre - aux caisses d'assurance maladie de la régulation des dépenses de médecine de ville. Ce projet, c'est encore la mise en place de mécanismes conventionnels avec les cliniques privées. Nous progressons, année après année, sur ce terrain qui vous est cher et qui nous est cher aussi.

Cette loi pour l'an 2000 se caractérise aussi, dans le domaine de la famille, par le relèvement à vingt et un ans de l'âge des enfants pris en compte pour l'allocation logement et le complément familial. L'an dernier, nous avions porté cette disposition à vingt ans et, l'année précédente, à dix-neuf ans. Là encore, nous faisions preuve de continuité : dix-neuf ans, vingt ans et maintenant vingt et un ans.


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Je retiens aussi l'augmentation du budget de l'action sociale de la Caisse nationale des allocations familiales et, mesure également très importante, la pérennisation de l'allocation de rentrée scolaire. Ainsi la politique familiale enregistre-t-elle, dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale, des progrès marquants.

S'agissant de la branche accidents du travail, il faut souligner, même si je regrette qu'on n'en fasse pas plus, que cette loi de financement prévoit l'indemnisation des victimes de l'amiante ainsi que - enfin ! - celle des victimes d'accidents du travail répétés.

Pour ce qui est de la branche vieillesse, il faut noter le relèvement du minimum vieillesse et de l'allocation veuvage, et les 20 milliards de francs destinés au fonds de réserve des retraites. L'an dernier, lorsque ce fonds avait été créé et doté de 2 milliards, beaucoup avaient glosé s ur la faiblesse du montant. Je leur fais observer qu'il va bénéficier de 20 milliards en 2000. Ainsi, et même sans compter sur une croissance exponentielle l'année prochaine, nous nous donnons, grâce aux différentes mesures prises en matière d'équilibre de la protection sociale, les moyens d'alimenter le fonds de réserve des retraites, quelles que soient les décisions qui seront prises par ailleurs, à la suite des dispositions que pourrait annoncer le Premier ministre en janvier prochain.

S'agissant des cotisations, il convient de souligner particulièrement la réduction des cotisations pour les jeunes agriculteurs et la réforme des cotisations patronales, que nous avions appelée de nos voeux les années précédentes.

L'an dernier, vous nous aviez permis, avec le basculement des cotisations d'assurance maladie vers la CSG, d'engager en matière de ressources une réforme fondamentale qui a produit ses effets.

Cette année, le fonds d'allégement des charges sociales mis en place dans le cadre du présent texte et qu'alimenteront la contribution sur les bénéfices et la taxe générale sur les activités polluantes apportera, si j'ose dire, un peu d'air et permettra de pérenniser une protection sociale dont on pouvait penser, il y a seulement trois ou quatre ans, qu'elle était décidément bien malade et que jamais on n'arriverait à trouver des remèdes pour la remettre sur pied. En trois ans, le déficit est passé de plus de 50 milliards à 4 milliards. L'an prochain, il y aura même des excédents. Tant mieux. Le fonds de réserve des retraites sera aussi davantage alimenté.

Les dispositions tendant à améliorer les conditions de création d'emplois dans notre pays vont également dans le bon sens.

Au terme de ce débat, où les jours et les nuits ont été longs, je crois que nous avons bien travaillé, madame la ministre, notamment au sein de la commission. Année après année, nous sommes là, fidèles au poste, pour vous soutenir dans vos projets. Nous le faisons pour le bien de la nation.

A titre personnel, je veux aussi vous remercier d'avoir inclus dans ce texte un certain nombre de dispositions que j'avais préconisées concernant le tabac. Il est en particulier mis fin à cette situation schizophrénique dans laquelle l'Etat, qui doit mener une politique de santé, bénéficiait de ce qu'il était censé combattre. Les propositions que vous avez retenues vont dans le bon sens.

Au moment de passer au vote de cette loi de financement de la sécurité sociale pour l'an 2000, je me réjouis que l'horizon soit enfin dégagé, que les Français aient pour perspectives d'être mieux soignés, que le financement des retraites commence d'être assuré et que la jeunesse ait confiance dans son avenir, c'est-à-dire celui de notre pays.

Merci, madame la ministre, du travail accompli et je v ous demande de transmettre ces remerciements à l'ensemble du Gouvernement et au Premier ministre.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur plusieurs bancs du groupe communiste.)

Explications de vote

M. le président.

Dans les explications de vote, la parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel.

Nous venons de débattre, pendant près d'une semaine, de la loi de financement de la sécurité sociale. Si le débat constitue un progrès démocratique indéniable - merci à Alain Juppé et à Jacques Barrot - force est de reconnaître que nos possibilités d'amend ement sont extrêmement limitées et que le Gouvernement impose sa volonté.

L'UDF rejette globalement ce projet. En effet, il ne prépare pas l'avenir du pays : rien pour les familles, rien pour les retraites. Il est dangereux aussi pour la branche santé, qui évolue vers l'étatisation. Surtout, le Gouvernement a profité de ce projet pour présenter un financement des 35 heures bricolé, et a tenté un hold-up sur la protection sociale.

Le financement des 35 heures, d'abord. Après l'improvisation et la reculade, voici le bricolage. La loi de 1994 était juste. Elle prévoyait que, pour ne pas pénaliser la protection sociale, l'Etat compensait intégralement les exonérations qu'il décidait. Madame la ministre, vous reniez ce principe ; c'est un retour en arrière condamnable.

Vous faites appel à la taxe sur les tabacs en prélevant 39,5 milliards qui devraient servir à soigner les victimes du tabagisme et à financer la prévention.

Vous créez un nouvel impôt sur les entreprises récoltant ainsi 4,3 milliards, après avoir pris 7 milliards dans la poche des salariés qui ne seront pas rémunérés pour les heures supplémentaires effectuées.

Vous affectez la taxe sur les activités polluantes - 3,2 milliards - au financement des 35 heures, alors qu'elle devrait servir à améliorer l'environnement, la qualité de l'air et de l'eau.

Vous avez tenté un hold-up sur les organismes de protection sociale, faisant fi de la gestion paritaire. Après avoir voulu passer en force, devant le front uni des organismes syndicales, vous avez officiellement reculé. Vous nous présentez un montage très complexe comportant le basculement de la taxe sur les alcools du fonds de solidarité vieillesse aux 35 heures.

Les syndicats se disent satisfaits. Mais des négociations sont en cours avec l'UNEDIC portant sur des dizaines de milliards, et je parie que, à terme, vous leur ferez payer leur résistance.

S'agissant de la protection sociale - mais personne ne semble l'avoir remarqué -, vous maintenez le prélèvement prévu de 5,6 milliards répartis sur les trois branches et l'affectez au FSV.

Ensuite, le projet de loi ne prépare pas l'avenir du pays. En effet, vous ne profitez pas de la croissance pour entreprendre les réformes nécessaires.

Ainsi, contrairement à d'autres pays, vous n'avez pas de politique familiale ; celle-ci est pourtant indispensable pour l'avenir de la France. Sans revenir sur vos errements


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 2 NOVEMBRE 1999

récents - mise sous condition de ressources, abaissement du quotient familial -, notons simplement que vous abrogez la loi de 1994 qui prévoyait l'extension des prestations au-delà de vingt ans, âge auquel les enfants coûtent le plus aux familles.

Vous n'entreprenez aucune simplification des vingttrois prestations et des 15 000 références existantes, totalement ingérables et inexplicables aux bénéficiaires.

Vous accordez une augmentation limitée à 0,5 % alors que l'inflation prévue est de 0,9 % et que le prix implicite du PIB doit augmenter de 1,2 %. Donc, bien loin d'un coup de pouce, vous programmez une perte de pouvoir d'achat pour les familles.

En ce qui concerne la retraite, les données démographiques sont connues de tous, le rapport Charpin les a confirmées. Or vous ne décidez rien.

Vous nous demandez d'attendre encore. Est-ce raisonnable ? Rien, non plus pour les régimes spéciaux et notamment la CNRACL. Le fonds de réserve, créé en 1998, est demeuré virtuel pendant un an.

Alors que la branche est excédentaire, que les retraités ont vu leur pouvoir d'achat diminuer ces dernières années, surtout avec l'application de la CSG, vous ne proposez qu'une augmentation de 0,5 %, inférieure à l'inflation de 0,9 % et au prix implicite du PIB de 1,2 %, programmant ainsi, pour les retraités, une baisse du pouvoir d'achat.

L'UDF souhaite conforter la retraite par répartition en accroissant l'autonomie de la branche. Notre groupe demande, dans un esprit de transparence, la création d'une caisse de retraite des fonctionnaires, gérée paritairement, et l'harmonisation progressive des règles appliquées aux divers régimes. Notre groupe réclame aussi la mise en place effective d'un troisième étage consacré à l'épargne retraite. En cela nous avons repris une proposition du président de notre assemblée, Laurent Fabius, demandant que l'épargne salariale soit investie à 50 % en actions françaises. Vous l'avez rejetée. Votre immobilisme constitue une faute grave.

Enfin, la branche santé. En la matière, votre gestion est essentiellement comptable. Vous ne prenez pas pour base les besoins de la population mais les dépenses de l'année précédente. Vous n'améliorez en rien la prévention et l'éducation à la santé, alors que nous sommes dramatiquement en retard.

Mais les deux reproches essentiels que nous vous adressons concernent l'évolution inéluctable vers l'étatisation et les lettres-clés flottantes.

L'étatisation, tout d'abord. Certes, vous confiez en apparence la gestion de l'ambulatoire à la CNAM, mais vous l'encadrez strictement et gardez la main en dernier ressort. Dans le même temps, vous conservez les hôpitaux, le médicament et récupérez les cliniques. Vous renforcez donc l'étatisation du système. Pis, à une époque où chacun réclame la fongibilité des enveloppes, vous renforcez les barrières et les rigidités. Ce n'est pas un progrès.

Les lettres clés flottantes, ensuite. Après avoir été sanctionnés l'année dernière par le Conseil constitutionnel, vous nous proposez la plus perverse des sanctions collectives. Nous allons donc déférer à nouveau cette loi au Conseil constitutionnel.

L'UDF réclame un « Grenelle de la santé » pour que chacun puisse participer à la sauvegarde et à l'amélioration de notre système. Nous pensons que la solution réside dans la responsabilisation de chacun des acteurs, et surtout dans la régionalisation permettant une politique de santé de proximité et l'adéquation de l'offre aux besoins avec un développement de la prévention.

Vous l'aurez donc constaté, l'UDF rejette ce projet.

Nous désapprouvons le volet recettes et le financement ubuesque des 35 heures. Nous déplorons que vous ne prépariez pas l'avenir du pays : absence de politique familiale, absence de l'indispensable réforme des retraites.

Enfin, nous refusons l'évolution prévisible de la branche santé vers l'étatisation.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Georges Sarre.

M. Georges Sarre.

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'équilibre des comptes sociaux est désormais acquis, bien que l'assurance maladie accuse encore un léger déficit. Il était un préalable à une véritable réforme de notre système de protection sociale. La correction des inégalités, l'augmentation des prestations familiales et des pensions, l'amélioration des conditions de vie et de travail sont des mesures préventives importantes.

La situation des maladies professionnelles a été améliorée, les dossiers des victimes de l'amiante légitimement rouverts. Mais il importe aussi que chaque citoyen, quels que soient ses revenus, ait accès aux soins, des soins d'une qualité aussi bonne que le permettent les progrès de la science et les moyens financiers dont dispose la collectivité.

En un mot, nul ne peut nier aujourd'hui qu'il faille persévérer dans la poursuite de la politique sanitaire et sociale et qu'il faille, en particulier, maîtriser l'évolution des dépenses. Mais cette maîtrise n'est concevable que si l'on donne au système de soins lui-même des objectifs capables de mobiliser les structures et les professionnels, ainsi que des souplesses permettant à chacun de s'adapter et d'évoluer.

Une politique de la santé digne de la France doit s'intégrer dans un projet social plus vaste, fixé démocratiquement. L'égalité doit être son principe majeur.

Ce souci d'égalité conduit à une approche nouvelle débordant le cadre du système de distribution des soins pour appréhender l'ensemble des facteurs déterminant la santé de la population. C'est au Parlement qu'il appartient de déterminer une telle politique et d'opérer les choix qu'elle suppose.

A cet égard, je persiste à croire à la nécessité du vote, tous les cinq ans, d'une loi d'orientation sanitaire qui suppose des choix de politique économique et sociale, des choix en matière d'éducation ou d'environnement, et des choix propres au « secteur de la santé » avec le refus des pratiques actuelles du « fait accompli ». Le vote de la loi de financement de la sécurité sociale deviendrait alors l'occasion de la mise en cohérence des décisions financières annuelles avec les orientations sanitaires quinquennales.

Madame la ministre, pour surmonter les forces d'inertie internes au secteur de la santé, il est nécessaire d'introduire en son sein un mode de régulation qui ne soit pas un simple contrôle budgétaire, rigide et répressif. Il n'y aura pas de vraie régulation si on ne laisse pas aux praticiens et aux professionnels de santé l'entière liberté du choix des soins et du contrôle de leur qualité, l'Etat et les caisses se réservant le contrôle des financements et des objectifs de la politique sanitaire.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 2 NOVEMBRE 1999

Les états généraux de la santé, qui ont remporté un grand succès, ont montré combien les attentes des citoyens étaient fortes. Nos récents débats dans cette enceinte ont montré nos impatiences, qui sont grandes.

Par notre vote, nous soutenons aujourd'hui l'action du Gouvernement, comptant sur la poursuite des trois objectifs qu'il s'est fixés : promotion de la qualité des soins, réduction des inégalités et adaptation de l'offre de soins aux besoins qu'il veut atteindre avec plus de concertation et de démocratie sanitaire. C'est au nom du groupe RCV, dans toutes ses composantes, que je me suis exprimé.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Monsieur le président, madame le ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous avons passé de longues heures à examiner ce projet de loi. Mais elles n'ont pas été de trop pour permettre à l'opposition d'exprimer ses critiques les plus sévères à l'égard de ce texte.

D'abord, nous avons relevé le caractère profondément anormal du financement des 35 heures par le biais de cette loi de financement de la sécurité sociale.

M. Jean-Luc Reitzer.

Tout à fait !

M. François Goulard.

Quoi que vous en disiez, madame la ministre, c'est au bout du compte la sécurités ociale qui financera, au moins partiellement, les 35 heures. Or cela, qui n'est pas acceptable, ne sera pas accepté par les partenaires sociaux.

M. Jean-Luc Reitzer.

Absolument !

M. François Goulard.

Vous avez récusé le terme hold-up. Mais ce n'est pas parce que, pour vous attaquer à l'argent de la sécurité sociale, vous êtes passée discrè tement par la porte de derrière, qu'il ne s'agit pas d'un hold-up ! Nous contestons également la fausse présentation qui vous fait parler de baisse des charges sociales. La réalité, et tous les chefs d'entreprise la connaissent bien, c'est que, face à la très forte augmentation du coût horaire des salaires imputable aux 35 heures, vous ne faites que compenser partiellement la hausse de charges pour certaines entreprises, et pas du tout pour les autres. Ce n'est pas acceptable non plus.

M. Jean-Luc Reitzer.

Tout à fait !

M. François Goulard.

S'agissant des impôts nouveaux que vous prévoyez - et ils sont nombreux - nous dénonçons le caractère inopérant de la taxe générale sur les acti vités polluantes. Vous instaurez une taxe sur un certain nombre d'activités sans inciter les industries concernées à réduire la part des activités polluantes ! Il n'y a là rien de positif. En particulier, nous ne pouvons pas accepter que vous imposiez encore aux agriculteurs une taxe sur les produits phytosanitaires. Nous l'avons dénoncée, et nous avons tenté en vain de vous faire revenir sur votre position. Les agriculteurs français apprécieront.

A propos des retraites, une fois de plus, vous tentez de repousser les échéances. Or, chacun le sait, l'urgence est dépassée. Comment, pour des raisons purement idéologiques, pouvez-vous écarter la création de fonds de capitalisation qui, au-delà des régimes par répartition enfin consolidés - ce que vous ne vous employez pas à faire -, viendraient ajouter un étage à la retraite des Francais ? Le fonds de réserve dont vous vous gargarisez est doté d'un montant ridicule qui n'est pas à la hauteur des besoins, nul ne l'ignore.

Pour l'assurance maladie, vous instaurez, par une fausse délégation à la caisse nationale d'assurance maladie, un mécanisme de sanctions collectives. Les lettres flottantes ne sont rien d'autre qu'un mécanisme de sanctions collectives en cas de dépassement des enveloppes globales. Or, frapper ainsi les professionnels de santé qui n'y sont individuellement pour rien n'est pas acceptable moralement.

Nous contestons encore que vous placiez les établissements privés sous la tutelle de l'Etat. Selon nous, ce sont les caisses d'assurance maladie qui devraient être les interlocuteurs des hôpitaux, y compris des hôpitaux publics.

Au total, nous considérons que l'avenir de l'assurance maladie est à la décentralisation, à l'expérimentation et à la responsabilisation des acteurs, loin de cette approche purement bureaucratique qui est constamment la vôtre.

S'agissant de la famille, aux termes des projets précédents, vous aviez supprimé un certain nombre d'avantages substantiels jusque-là accordés aux familles. Force est de constater que vous ne faites rien pour améliorer le sort de ces familles, qu'elles soient modestes ou qu'elles appartiennent aux classes moyennes. C'est ainsi qu'aujourd'hui, les familles se voient consacrer moins d'argent qu'en 1997. Vous ne semblez pas avoir conscience de l'ampleur des problèmes à venir en matière de politique familiale.

Pour toutes ces raisons, madame la ministre, nous voterons évidemment contre cette loi de court terme qui n'est pas à la hauteur du défi que représente l'avenir de notre protection sociale, avenir qui inquiète l'ensemble des Françaises et des Français.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. Jean-Luc Reitzer.

Excellente intervention !

M. le président.

La parole est à M. Gérard Terrier.

M. Gérard Terrier.

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour l'année 2000 aura été l'objet d'une longue discussion dans notre Assemblée.

M. Jean-Luc Reitzer.

Très juste !

M. Gérard Terrier.

Pour y avoir assisté intégralement ainsi qu'à celle sur la réduction du temps de travail,...

M. Jean-Luc Reitzer.

Bravo ! Exemple à suivre !

M. Gérard Terrier.

... j'ai été une fois de plus frappé par le discours de l'opposition.

(« Ah ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean-Luc Reitzer.

Provocation ?

M. Gérard Terrier.

Pendant tout le débat sur les 35 heures, l'opposition ne nous parlait que de financement ; pendant tout le débat sur le financement, elle n'a eu de cesse de clamer « les 35 heures ! »... On a beau penser que tout est dans tout,...

M. Arthur Dehaine.

Mais l'inverse, c'est bien connu, est également vrai ! (Sourires.)

M. Gérard Terrier.

... chaque projet a sa spécificité, de laquelle il faut bien débattre.

Un faux débat s'est engagé sur la contribution de l'UNEDIC, comme si celle-ci était le coeur du projet.

M. Jean Bardet.

C'est pourtant bien le cas !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 2 NOVEMBRE 1999

M. Gérard Terrier.

Laissez-moi vous rappeler que cette dotation ne représentait que 7,5 milliards, à comparer avec les 1 800 milliards et plus du budget de la sécurité sociale, soit moins de 0,42 %.

M. Jean-Paul Bacquet.

Exactement !

M. Gérard Terrier.

Voilà les faits, et nous pouvons nous réjouir de la sagesse du Gouvernement : plutôt que d'imposer, il a tout au contraire tenu à engager, dans la plus grande sérénité, le nécessaire dialogue avec les partenaires sociaux, afin de clarifier et de préciser leurs relations avec l'Etat.

M. Jean-Luc Reitzer.

Démagogique !

M. Gérard Terrier.

Ce projet de loi est entièrement financé, oui : convenons ensemble que cela n'a pas toujours été le cas dans un passé encore récent.

Oui, ce projet est un grand projet, car il poursuit l'indispensable chantier de la réforme des cotisations patronales, amorcé par le transfert des cotisations sociales vers la CSG ; cette année, des abaissements de charges sociales y sont inscrites.

Moins d'un tiers des aides de l'Etat sont destinées à financer la réduction du temps de travail. Et plutôt que d'accorder sans condition une contribution publique aux entreprises, les contributions seront réservées à celles qui feront preuve de volontarisme dans la lutte pour l'emploi.

Peut-on être en désaccord avec une telle mesure ?

M. Eric Doligé.

Oh oui !

M. Gérard Terrier.

Ce projet fait preuve également de plus de justice en appliquant la baisse des charges sociales pour les salaires atteignant 1,8 fois le SMIC. On évite ainsi l'effet « trappe à bas-salaires » induit par le projet Juppé Que ceux qui ne seraient pas convaincus du bien-fondé d'une telle réforme me permettent ce raccourci : mieux vaut que la sécurité sociale finance le retour à l'emploi des chômeurs que le maintien de l'inactivité.

Mais nous savons tous fort bien que ce projet est bien plus ambitieux et plus structurant. Il permet, entre autres, de retrouver l'équilibre des comptes, puisqu'il fait apparaître un excédent, pour la première fois depuis des décennies. N'est-ce pas ce que chacun souhaitait ? Pourquoi alors faire la fine bouche, sachant que nous y parvenons sans réduire les dépenses de santé, sans augmenter les cotisations ? L'ONDAM augmentera de 2,5 %. Fait nouveau, cette augmentation sera fondée sur les dépenses constatées, comme l'opposition l'avait souhaité l'an dernier.

M. Jean-Luc Reitzer.

L'opposition, une fois de plus, avait raison !

M. Gérard Terrier.

Du reste, le FMI, dans son rapport

« élogieux », à en croire une dépêche de l'AFP, sur la politique économique française, prône un maintien des dépenses sociales et encourage vivement le Gouvernement français à tout faire pour mieux maîtriser les dépenses médicales. Il reconnaît que notre programme de baisse des charges engendre de l'emploi.

Le projet de loi répond à cette attente en garantissant le rôle de l'Etat et en plaçant devant leurs responsabilités les acteurs médicaux - CNAM, praticiens, hôpitaux -, après, bien entendu, les indispensables concertations préalables à chaque convention.

L'amélioration de la politique de la famille est poursuivie, la politique en matière de santé est améliorée. Ce projet marque une étape supplémentaire vers l'amélioration de la qualité des soins et l'abondement du fonds de réserve des retraites.

Bien du chemin reste à faire, mais les socialistes ont cette farouche volonté d'aller de l'avant, dans l'intérêt de nos concitoyens. C'est la raison pour laquelle ils voteront cet excellent projet de loi, encore amélioré, nous en avons pris l'habitude, par notre assemblée. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean-Luc Reitzer.

Quelle surprise !

M. le président.

La parole est à M. Jean Bardet, pour le groupe RPR.

M. Jean Bardet.

Madame la ministre, pour la troisième année consécutive vous nous présentez votre projet de loi de financement de la sécurité sociale. Or jamais projet n'aura été aussi mauvais pour les Français : aucun des problèmes qui se posent à l'entrée du troisième millénaire, qu'il s'agisse des retraites, de la santé ou de la politique familiale, n'y aura été résolu. De surcroît, il aura témoigné à l'égard du Parlement d'un mépris contre lequel je tiens à m'élever avec tous les députés de l'opposition...

M. Jean-Luc Reitzer.

Très bien ! Excellent !

M. Jean Bardet.

... puisque jamais nous n'avons pu en connaître en temps et heure le contenu exact. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Mme Véronique Neiertz.

Vous n'aviez qu'à être là !

M. Jean Bardet.

Jusqu'au dernier moment, l'article 2 a été discuté dans sa forme initiale, alors que tout le monde savait qu'il allait connaître de profondes modifications.

C'est finalement par la presse que nous en avons appris la teneur ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Mme Véronique Neiertz.

Vous n'aviez qu'à venir en séance !

M. Jean Bardet.

L'amendement gouvernemental n'est arrivé que très tardivement en séance publique, alors que nous avions entamé la discussion de l'article 2 originel et même l'examen des amendements de suppression ! Le cinquième paragraphe de l'article 100 du règlement de l'Assemblée prévoit pourtant bien que les amendements du Gouvernement sont discutés en premier ! Sur le fond enfin, cet article 2 n'avait pas à figurer dans un projet de loi de financement de la sécurité sociale. C'est uniquement parce que les 35 heures ne sont pas financées que vous avez été obligée de l'y placer.

M. Jean-Luc Reitzer.

Très juste !

M. Jean Bardet.

Je persiste à dire qu'il s'agit d'un hold-up...

M. Jean-Luc Reitzer.

Absolument !

M. Jean Bardet.

... d'un détournement de fonds, même si ces termes ont le don de vous exaspérer, car telle est bien la vérité ! Certes, le nouveau dispositif que vous uti-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 2 NOVEMBRE 1999

lisez est plus subtil que le précédent, mais il revient au même. Plutôt que de piocher directement dans la poche des organismes sociaux, vous le faites en amont, indirectement, en changeant d'affectation une partie de la taxe sur la consommation des alcools qui devait abonder le fonds de solidarité vieillesse. Où est la différence ? C'est tout à la fois une reculade et un tour de passe-passe.

M. Jean-Luc Reitzer.

Très juste !

M. Jean Bardet.

Vous prenez aussi dans la poche des travailleurs en taxant les heures supplémentaires...

M. Jean-Luc Reitzer.

Exact ! C'est honteux !

M. Jean Bardet.

... pour financer les 35 heures, puisant à une source à la pérennité d'autant moins assurée que les heures supplémentaires devraient à terme disparaître.

De la même façon, comment ne peut-on pas parler de détournement de fonds, ou pour le moins de détournement d'objectif de la taxe sur les tabacs et de la taxe générale sur les activités polluantes, puisque le principe pollueur-payeur n'est plus respecté ? En ce qui concerne la protection sociale, qui aurait dû constituer l'unique objet de ce projet de loi, aucun objectif autre que comptable n'est défini en matière de santé.

Si les prestations vieillesse ont eu droit à une aumône sous la forme d'une augmentation de 0,5 %, l'urgent problème des retraites a été reporté aux calendes grecques.

Vous vous félicitez que les dépenses de santé aient moins augmenté cette année que les précédentes, madame la ministre. Mais vous êtes-vous posé la question de savoir si l'état sanitaire des Français s'était amélioré ? (« Oui ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

Vous vous félicitez du fait que l'hôpital soit resté « dans les clous », mais vous êtes-vous interrogée sur la gronde des infirmières, l'état de vétusté des locaux, l'obsolescence du matériel ? En matière de santé, ce projet de loi ne témoigne d'aucune vision d'ensemble des problèmes qui se poseront aux Français. L'annexe, discutée en fin de débat, se résume à un catalogue de bonnes intentions sans traduction en matière de coûts. Au demeurant, chacun sait que ce document n'engage personne et surtout pas le Gouvernement.

(Brouhaha.)

M. le président.

Mes chers collègues, je comprends que les explications de vote justifient votre retour en masse dans l'hémicycle, mais ayez la courtoisie d'écouter tous les orateurs, et dans le cas présent M. Bardet.

M. Jean Bardet.

Si ce plan ne s'intéresse pas à la santé des Français, il avance en revanche à grands pas vers un système de santé étatisé en donnant tout pouvoir à l'Etat en matière d'hospitalisation publique et privée et tout pouvoir à la CNAM en matière de médecine de ville, faisant disparaître au passage l'esprit conventionnel : en cas d'échec des négociations, c'est la CNAM qui imposera sa règle du jeu. C'est un match où l'arbitre joue dans un des deux camps ! Plusieurs médecins et membres des professions paramédicales siégeant sur des bancs très divers, à droite comme à gauche, vous ont dit, ainsi qu'au rapporteur, en commission comme en séance publique, combien vos articles 18 et 19 étaient mauvais. Est-ce par entêtement ou par sectarisme que vous les avez maintenus ? Je m'interroge sans parvenir à comprendre.

A ce propos, et je ne suis pas le seul à me poser la question, le pas de clerc du parti communiste conduit à s'interroger sur les garanties que vous lui avez données.

Que lui avez-vous donc promis pour qu'il s'abstienne cet après-midi, après avoir déclaré voter contre ce matin ?

M. François Goulard.

Ah ça !

M. Jean Bardet.

Ce projet de loi est dangereux pour la santé, pour la famille et pour les retraites. Ce projet de loi est empreint de sectarisme et d'idéologie,...

M. Jean-Louis Debré.

Oui !

M. Jean Bardet.

... ce projet de loi n'a aucune vision d'avenir. C'est pourquoi le groupe du Rassemblement pour la République votera contre.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

Avant de donner la parole au dernier orateur inscrit dans les explications de vote, je vais, d'ores et déjà, faire annoncer le scrutin de manière à permettre à nos collègues de regagner l'hémicycle.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

M me Jacqueline Fraysse.

Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, comme chacun le sait, les réserves du groupe communiste portent chaque année sur le mode de financement de la sécurité sociale. Nous souhaitons réformer les cotisations pour les élargir à l'ensemble des revenus, y compris les revenus financiers, afin de rééquilibrer les revenus du capital et du travail. C'est ce qu'avait déclaré le Premier ministre en juin 1997, et que vous avez confirmé vousmême, madame la ministre, quelques mois plus tard.

Vous avez effectivement augmenté le taux de la CSG sur les revenus des placements financiers des ménages.

Cette année, vous proposez de créer une cotisation sociale de 3,3 % sur les bénéfices des sociétés. Cette mesure va certes dans le bon sens, mais elle ne rapportera guère que 4,3 milliards de francs. C'est dire combien sa portée reste modeste en regard des 65 milliards d'exonérations de cotisations sociales patronales sur les salaires.

M. Bernard Accoyer.

Dans ce cas, votez contre !

Mme Jacqueline Fraysse.

Modeste tant sur le plan du rééquilibrage promis que sur celui de l'efficacité face aux besoins. Peut-on parler de rééquilibrage lorsque l'on voit, d'un côté, des allégements estimés à terme à 105 milliards de francs, une réforme de la taxe professionnelle qui fait économiser deux milliards aux entreprises et la suppression de la taxe sur les bénéfices pour un montant de 12,5 milliards, et, de l'autre, des taxes sur les heures supplémentaires, les alcools et les tabacs, une fois de plus d irectement ou indirectement supportées par les ménages,...

M. Bernard Accoyer.

Ça, c'est vrai !

Mme Jacqueline Fraysse.

... pour des montants bien supérieurs à ce que rapportera la contribution sociale sur le bénéfice des sociétés ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean-Luc Reitzer.

Excellent !

M. Bernard Accoyer.

Bravo !

M. le président.

Chers collègues, écoutez Mme Fraysse, s'il vous plaît.

M. Jean-Luc Reitzer.

Mais c'est précisément ce que nous faisons ! Parce qu'elle dit la vérité !

Mme Jacqueline Fraysse.

C'est la raison pour laquelle nous avons voté contre ce texte en commission le 21 octobre dernier...

(Applaudissements sur les mêmes bancs.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 2 NOVEMBRE 1999

M. Jean-Luc Reitzer.

Excellent !

Mme Jacqueline Fraysse.

... puis contre l'article 2 la semaine dernière, au cours des débats.

M. Maurice Leroy.

Touché, coulé !

Mme Jacqueline Fraysse.

Autant dire que l'amalgame auquel certains ont cru pouvoir se livrer avec les récents événements concernant le ministre de l'économie et des finances, comme nous l'avons entendu à l'instant, ne grandit pas les instigateurs de cette manoeuvre.

Faute de mesures ambitieuses en matière de financement, vous ne pouvez concrétiser, madame la ministre, des orientations pourtants inscrites à juste titre dès l'article 1er , par exemple l'amélioration des remboursements - vous y avez fait référence - pour les prothèses dentaires et auditives ou les lunettes notamment.

M. Jean-Pierre Delalande.

Très juste !

Mme Jacqueline Fraysse.

Vous nous proposez même une baisse du pouvoir d'achat, pour l'année 2000, des pensions de retraite et des prestations familiales, en n'acceptant qu'une revalorisation de 0,5 %, inférieure à l'inflation prévue de 0,9 %.

M. Jean-Luc Reitzer.

C'est la vérité !

M. Bernard Accoyer.

Exactement !

Mme Jacqueline Fraysse.

Des millions de personnes seront touchées par cette mesure à nos yeux inacceptable.

M. Bernard Accoyer.

C'est vrai ! Et en regard, ils ont quand même réussi à trouver 8 milliards pour le PACS !

M. le président.

Ecoutez Mme Fraysse, s'il vous plaît !

Mme Jacqueline Fraysse.

Certes, nous ne négligeons pas les points positifs de ce texte : la reconnaissance des centres de santé, la garantie dans la loi de la pratique du tiers payant, l'extension du dispositif « amiante » à de nouvelles professions assorti d'un report du délai de forclusion pour la réouverture des dossiers, le calcul de la progression de l'objectif national des dépenses d'assurance maladie, désormais établi par rapport aux dépenses réalisées l'année précédente et non plus rapport à l'objectif fixé, ce qui revient à reconnaître implicitement les besoins.

Face au chantage du MEDEF qui menace de quitter la gestion des organismes sociaux, et face à la droite, qui nous a montré tout au long des débats son profond attachement au plan Juppé,...

M. Alain Juppé.

Avec raison !

Mme Jacqueline Fraysse.

... la meilleure réponse nous semble être de rendre la parole aux assurés sociaux et d'asseoir la légitimité de leurs représentants en organisant des élections des administrateurs des caisses. Nous regrettons vivement que cette proposition ait été rejetée sans débat.

M. Jean-Louis Debré.

Dans ce cas, votez contre le texte !

M. Bernard Accoyer.

Pour les élections, ils sont forts !

Mme Jacqueline Fraysse.

Puis-je terminer mon propos ? (« Oui ! » sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Ne vous laissez pas interrompre, madame Fraysse. Veuillez poursuivre.

Mme Jacqueline Fraysse.

Je vous remercie, monsieur le président.

Dans le contexte, aujourd'hui, certains rêvent de voir chuter le Gouvernement.

(« Oui, oui ! » sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Nous regrettons profondément que le débat ait été placé à ce niveau et ramené à cette seule question. Ainsi, et pour cette raison, le groupe communiste s'abstiendra.

(Huées et protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Madame Fraysse, veuillez conclure, je vous prie.

Mme Jacqueline Fraysse.

J'ai été interrompue, monsieur le président.

(Sur de nombreux bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants : « Allez, à la soupe ! »)

M. le président.

Chers collègues, je vous prie de laisser Mme Fraysse conclure ! Madame Fraysse, je vous invite à terminer votre intervention sitôt que chacun aura retrouvé son calme.

Mme Jacqueline Fraysse.

Nous ne pouvons accepter que le pouvoir d'achat des prestations sociales baisse, que les fermetures de certains hôpitaux se poursuivent tandis que d'autres se débattent dans des budgets insuffisants, alors que les profits des entreprises sont en hausse et atteignent 2 132 milliards de francs, à en croire les comptes de la nation, dont seulement 4,3 milliards iront à la sécurité sociale.

Tout le monde sait ici que la sécurité sociale est au coeur des préoccupations des citoyens. C'est une conquête fondamentale du mouvement social, qui a toujours su réagir aux attaques portées contre lui. Le débat n'est pas terminé.

M. le président.

Madame Fraysse, je vous demande de conclure.

Mme Jacqueline Fraysse.

Nous voulons avancer. Soyez assurés que les parlementaires communistes reviendront sur ces questions lors des prochaines lectures.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste.)

M. Bernard Accoyer.

Mais oui, mais oui !

M. Jean-Louis Debré.

Alors, ils votent contre ou ils votent pour ? Vote sur l'ensemble

M. le président.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

Je vais maintenant mettre aux voix l'ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000.

Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été cou plés à cet effet.

Le scrutin est ouvert.

....................................................................

M. le président.

Le scrutin est clos.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 2 NOVEMBRE 1999

Voici le résultat du scrutin sur l'ensemble du projet de loi : Nombre de votants ...................................

557 Nombre de suffrages exprimés .................

526 Majorité absolue .......................................

264 Pour l'adoption .........................

280 Contre .......................................

246 L'Assemblée nationale a adopté.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Suspension et reprise de la séance

M. le président.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures, est reprise à dixsept heures dix.)

M. le président.

La séance est reprise.

3 LOI DE FINANCES POUR 2000

DEUXIÈME PARTIE Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2000 (nos 1805, 1861).

La séance est reprise.

ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR, RECHERCHE ET TECHNOLOGIE (suite)

M. le président.

Nous poursuivons l'examen des crédits du ministère de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie concernant l'enseignement supérieur, la recherche et la technologie, que nous avons commencé ce matin.

La parole est à M. Bruno Bourg-Broc, premier orateur inscrit dans la discussion.

M. Bruno Bourg-Broc.

Monsieur le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie, vous êtes probablement un homme heureux. Heureux, en effet, de nous présenter un budget affichant une progression supérieure à celle de l'inflation et à la progression générale des crédits budgétaires pour l'an 2000. Il est vrai que si l'on s'arrête à la lecture des chiffres que votre département ministériel nous a transmis, on ne peut que partager votre bonheur.

Ce projet de budget s'élève, en effet, à 52 463 millions de francs, c'est-à-dire une progression de 2,63 % par rapport à 1999, bien supérieure au 0,9 % d'augmentation générale. Il s'articule autour de trois priorités : l'amélioration des moyens des établissements, notamment en emplois, la mise en oeuvre du plan U3M et la poursuite des efforts en faveur du plan social étudiant, ou plutôt de l'amélioration des bourses, puisque votre plan social se limite à cet aspect des choses.

Si l'on devait se satisfaire de ces premiers éléments, le groupe RPR que je représente voterait, comme un seul homme et avec un enthousiasme qui ferait pâlir dans les travées de la gauche, les crédits budgétaires de l'enseignement supérieur pour l'an 2000. Mais ce ne sera pas le cas : car si certaines des mesures présentées ne sont pas mauvaises, l'absence de véritables perspectives guidant votre action rend pour le moins inopérantes toutes les augmentations budgétaires. Si nous souhaitons que la maîtrise des dépenses publiques soit une réalité mieux affirmée et que les impôts diminuent, nous n'en voudrions pas moins que certains budgets soient considérés comme prioritaires et fassent l'objet d'une augmentation toute particulière, comme celui du ministère de l'enseignement supérieur, qui reste largement inférieur à ce qu'il est dans les grands pays occidentaux.

La nécessité, en plus, de préparer la France à affronter les défis du prochain millénaire et notamment la « bataille de l'intelligence » doit nous conduire à réaffirmer l'éducation, la recherche et l'innovation comme les priorités budgétaires si nous souhaitons que notre pays conserve toute sa place dans le village planétaire. C'est d'ailleurs pour cette même raison que je ne partage pas vos analyses budgétaires et que je ne voterai pas votre budget. Loin d'être contradictoire, cette position trouve son fondement dans l'immobilisme qui est le vôtre depuis trop de mois.

Une augmentation des crédits budgétaires peut et doit se justifier dès lors que la nation s'engage dans un processus de réforme structurelle de grande ampleur. Il ne s'agit en rien de programmer un je ne sais quel « grand soir » de l'enseignement supérieur français mais de ne pas limiter son approche de la réforme à une simple approche budgétaire.

Certes, en guise de réponse, vous allez sans doute égrener vos actions pour tenter de démontrer que vous n'êtes pas immobile. Permettez-moi de vous répondre, par avance, que, l'application d'une partie du désormais célèbre « 3-5-8 », mise à part vous n'avez pas fait grandchose. Je citerai, pour étayer mes propos, trois axes de travail qui m'apparaissent indispensables si nous souhaitons engager dans la bataille de l'intelligence nos formations supérieures sur lesquelles vous n'avez pas avancé ou avancé insuffisamment.

Penchons-nous d'abord sur la dimension internationale de l'enseignement supérieur. Ce problème se présente en fait sur deux aspects : l'accueil des étudiants étrangers et la compétitivité de notre système d'enseignement supérieur.

Pour le premier aspect, vous avez, à juste titre, créé l'agence Edufrance dont d'ailleurs vous abondez les crédits cette année. C'est à mettre à votre crédit. Nous attendrons donc les premiers résultats de son travail pour nous prononcer.

Le second aspect, plus essentiel encore, est loin d'être traité. De quoi s'agit-il ? Vous le savez mieux que quiconque, l'image de marque internationale de nos formations supérieures est mauvaise. Si l'on excepte la Sorbonne, mondialement connue, nos universités n'ont pas la réputation d'excellence qui s'attache à celles d'autres pays. Notre système est trop complexe, nos pôles universitaires n'ont pas la dimension requise pour être valorisés sur la scène internationale. Ils sont trop souvent spécialisés dans tel ou tel domaine universitaire.

Hormis le « 3-5-8 », harmonisation intéressante mais à la marge des problèmes réels, les autres problèmes ne sont pas traités dans votre projet.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 2 NOVEMBRE 1999

Examinons maintenant la situation des premiers cycles.

Sans revenir sur la litanie habituelle de l'échec en premier cycle, ni surtout sur l'inégalité des chances qui le caractérise, je poserai simplement le problème de leur réforme.

Qu'il s'agisse de la semestrialisation engagée par votre prédécesseur - mais en panne depuis - qu'il s'agisse de la nécessité de privilégier le travail en travaux dirigés et le tutorat, mais surtout de réorganiser la première année universitaire en limitant l'ultraspécialisation actuelle, sur tous ces sujets, vous n'avez pas avancé.

Je reviendrai sur le problème des premières années de l'enseignement supérieur tout à l'heure en vous interrogeant sur les flux d'étudiants entre les filières courtes professionnalisantes, les universités et les classes préparatoires aux grandes écoles.

Enfin, en ce qui concerne l'autonomie et l'évaluation, vous n'avez rien engagé non plus pour renforcer l'autonomie des universités, pourtant reconnue par tous comme une nécessité dès lors que l'on conserve le caractère national des diplômes. Vous n'avez pas avancé non plus sur le corollaire de l'autonomie, à savoir la mise en place d'un véritable système d'évaluation permettant de publier chaque année un référentiel d'évaluation des formations et des universités.

Ces chantiers sont essentiels et ma liste n'est pas exhaustive, monsieur le ministre. Ils sont en panne et vous pourrez bénéficier de toutes les augmentations budgétaires possibles, vous ne préparerez pas la bataille de l'intelligence si vous ne les poursuivez pas.

Pour ces raisons notamment - autant qu'on puisse les expliquer en cinq courtes minutes -, le groupe RPR ne votera pas votre budget.

(Applaudissements sur les bancs du du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Claude Goasguen.

M. Claude Goasguen.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, si l'on examine les budgets successifs de l'enseignement supérieur - on le fera bien un jour -, un constat s'impose d'évidence : les années passent et se ressemblent ! De ce point de vue, monsieur le ministre, votre budget est dans la continuité des précédents, c'est-à-dire qu'il n'apporte pas grande novation. Certes, il est en augmentation. Mais suffit-il d'augmenter un peu quelques crédits pour convaincre ? Nous ne le pensons pas. La loi de finances n'est pas, en effet, un simple exercice de gestion ; c'est d'abord un acte politique, l'acte politique de la nation. Politiquement donc, votre budget nous semble assez terne.

Vous nous aviez donné l'habitude de discours tournés vers l'avenir. Visiblement, l'enseignement supérieur ne vous inspire pas autant que l'enseignement scolaire. Certains se féliciteront sans doute que, pour une fois, vous ne fassiez pas de vagues ! Mais permettez-moi, sans manier le paradoxe, de regretter cet attentisme, qui s'inscrit dans une continuité immobiliste de la politique universitaire dans notre pays, comme si le monde politique se trouvait en permanence tétanisé par le risque d'un mai 68 permanent, jetant les étudiants désorientés dans la rue. Nous manquons tous, à droite comme à gauche, d'un peu de courage devant le risque de réactions vives dans ce secteur traditionnellement tourmenté et difficile.

Pourtant, la modernisation est nécessaire. Vous vous targuez de préparer le troisième millénaire. Il est vrai qu'à quelques jours de l'an 2000...

M. Georges Sarre.

Soixante jours !

M. Claude Goasguen.

Cinquante-neuf très exactement ! A cinquante-neuf jours donc de l'an 2000, vous auriez tort de vous priver de la formule. Seulement, derrière les mots, il y a les chiffres, et derrière les chiffres, les faits.

Que nous enseignent-ils ? En vérité, ce budget, qui se voudrait prospectif et moderne, ne fait que tenter de rattraper le retard accumulé en matière de logement étudiant, de patrimoine universitaire ou d'encadrement en personnels enseignants.

Vous continuez, par ailleurs, de raisonner selon une logique comptable, en complète déconnexion avec les aspirations réelles, je crois, et les attentes d'un univers qui ne demande qu'à évoluer. En tout cas, cette logique comptable et austère ne permettra pas à l'université de retrouver le rayonnement qui était le sien. Attentisme et déception, voilà ce qui caractérise depuis de longues années - vous n'en êtes pas seul responsable - le monde universitaire en France.

Certes, le budget augmente de 2,6 %, mais cette augmentation est inférieure à celle du budget de 1999 et elle est assez faible par rapport au taux de croissance que nous connaissons actuellement.

Par ailleurs, quatre points précis me paraissent mériter une explication.

Premier point, la baisse des effectifs dans les disciplines scientifiques est préoccupante. Pourquoi cette désaffection soudaine...

M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Non, progressive !

M. Claude Goasguen.

Progressive, c'est vrai ! Pourquoi donc cette désaffection pour des filières qui ne devraient pas poser de problèmes ? Quelle explication en donnezvous ? Deuxième point, le plan social étudiant. Vous en faites une de vos priorités et je ne peux, comme M. Bourg-Broc, que me féliciter de l'effort significatif réalisé en matière de bourses, mais à quel prix ? Si l'augmentation du nombre des bourses permet de remédier aux situations les plus urgentes, cela ne doit pas se faire au prix d'une dégradation des conditions générales de vie dans les campus ou dans les villes universitaires. Or que deviennent la restauration universitaire, le logement étudiant, la médecine universitaire ? Troisième point, le fameux plan U3M. Cette appellation ésotérique renouvelle l'effet d'annonce que vous aviez déjà utilisé pour le plan Université 2000. C'est un peu la même hypocrisie que celle qui prévalait pour le plan précédent. Non seulement vous faites des promesses qui ne pourront pas être tenues vu les moyens alloués, mais, plus grave, bien que cela devienne maintenant fréquent, vous exercez un véritable chantage politique sur les collectivités régionales, auxquelles vous ne donnez ni les moyens financiers, ni les compétences pour relever les défis que vous leur imposez, car il s'agit bien de défis. Quelle hypocrisie de la part de l'Etat, qui se défausse une fois de plus et qui s'en vante ! Si les objectifs du plan U3M paraissent posés, et quelquefois bien posés, vous caricaturez, vous en conviendrez, l'esprit de la décentralisation de la loi socialiste de 1982 et, sous l'illusion de l'association, vous confortez par l'argent des collectivités locales les insuffisances financières et politiques de vos choix gouvernementaux.

C'est d'ailleurs suivant la même logique que le plan U3M, au lieu de préparer l'avenir en permettant la construction de nouveaux bâtiments, ne fera que ravaler


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les façades. A titre d'exemple, la seule opération de désamiantage du campus de Jussieu, qui n'en finit pas de ne pas aboutir, représente plus de 20 % des crédits immobiliers. Le plan Université 2000 construisait. Désormais, vous entretenez.

Enfin, les bibliothèques universitaires sont dans un état de délabrement qui nécessite un effort bien supérieur à celui que vous nous promettez. A cet égard, le rapport de la commission des finances est très clair, je ne le reprends pas. En substance, il estime que, pour atteindre le ratio d'un volume par étudiant et par an, il faudrait doubler le nombre d'abonnements et développer massivement les accès aux ressources électroniques. Il serait nécessaire de consacrer 1 000 francs par étudiant et par an, soit 1 500 millions de francs, contre seulement 890 millions aujourd'hui, quasiment le double de ce que vous nous présentez.

Nous sommes, en effet, dans une ère de mondialisation universitaire. L'université n'est plus simplement un lieu de culture, elle est un lieu d'emploi, de recherche, de dynamique économique, et la concurrence qui s'ouvre entre les universités n'est pas seulement culturelle, elle traduit des enjeux économiques, notamment en ce qui concerne la formation des cadres futurs de l'économie mondiale, dont la France ne peut se permettre d'être absente.

Pour réformer, vous avez besoin, comme vos prédécesseurs, d'un vrai consensus. Il est souhaitable, il est nécessaire que vous engagiez une vaste réflexion en concertat ion avec l'opposition, qui souhaite y participer pleinement, avec la volonté d'aboutir à un consensus constructif. Plusieurs directions doivent être envisagées.

Elles ne sont ni de droite, ni de gauche. Elles s'imposent, car la modernité est une nécessité pour nos universités.

Il faudra, bien sûr, parler de l'autonomie des établissements universitaires. Plus encore que les établissements scolaires - sur lesquels nous reviendrons dans quelques semaines -, les universités ont besoin d'autonomie financière, et nous aurons peut-être des suggestions à vous faire, notamment à propos de la création de fondations universitaires qui permettraient d'avoir un patrimoine universitaire.

M. Christian Cuvilliez.

Oh là là !

M. Claude Goasguen.

Non pas pour que l'Etat le prenne à son compte, certes il dort, c'est un fait, mais peut-être serait-il temps de le rendre actif. Moi, je serais très favorable à une discussion avec vous et votre majorité sur ce sujet.

Autre direction, l'indispensable insertion professionnelle de nos étudiants. Je tiens à souligner - je l'ai fait l'an dernier en pure perte, mais je le répéterai inlassablement - à quel point le service public des universités de la fin du XXe siècle ne se limite pas à délivrer des diplômes.

Je trouve particulièrement regrettable que les difficultés commencent à partir du moment où le diplôme est acquis. Nous laissons nos étudiants, lorsqu'ils atteignent un niveau bac plus quatre, une maîtrise, voire un DEA, totalement démunis pour affronter une insertion professionnelle.

Le service public du

XXIe siècle, c'est de permettre aux universités d'avoir le personnel compétent pour accompagner les étudiants dans la recherche d'un emploi ou de stages rémunérés, pour mettre en connexion les filières sans exception. Cela se fait dans d'autres pays. Pourquoi la France serait-elle en retard dans ce domaine ? Nous avons un devoir à l'égard de nos étudiants.

Cela permettrait aussi, et vous le savez bien, de diminuer l'allongement des études, qui est parfois providentiel pour les étudiants dans la mesure où il leur permet de rester dans une sécurité relative et de ne pas tenter l'approche du marché du travail. (« Oh ! » sur plusieurs bancs du groupe communiste.)

Mais si, mes chers collègues ! Allez dans les universités et vous verrez. Je vois ici quelques spécialistes, qui savent ce dont je parle. Demandez aux étudiants diplômés s'il est facile de trouver un emploi.

M. Christian Cuvilliez.

Le problème ce n'est pas de sortir, mais d'entrer !

M. Claude Goasguen.

A la fin de l'été ils préfèrent s'inscrire en troisième cycle et attendre une année de plus pour voir si la situation se débloque.

Que l'insertion professionnelle soit favorisée par les universités, c'est probablement l'un des moyens de trouver la filière de l'emploi, mais c'est probablement aussi un moyen de désengorger un certain nombre de filières où les gens restent parce qu'ils ne savent pas trouver un emploi, même quand il y a un marché.

Je vous demande donc avec force d'ouvrir cette réflexion, qui nécessaire à l'avenir de nos universités, ne doit pas se limiter à quelques concertations internes à votre majorité, quelles que soient ses qualités intrinsèques.

Il serait convenable de l'ouvrir au-delà, car le milieu universitaire a besoin d'un consensus de la droite et de la gauche pour se moderniser.

C'est parce que, au-delà d'une gestion comptable qui est tout à fait dans votre ligne et dans celle de vos prédécesseurs, nous n'avons pas senti cette volonté de faire progresser l'université et de la moderniser que, sans ambiguïté, nous sommes contraints de voter contre votre budget, en espérant des jours meilleurs.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. Georges Sarre.

M. Georges Sarre.

Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, le budget civil de la recherche et du développement technologique, tel qu'il nous est soumis, préoccupe les députés du Mouvement des Citoyens.

L'un des axes principaux de votre budget, monsieur le ministre, consiste à en réorganiser la structure interne.

Vous avez plusieurs fois déploré la trop grande part des très grands équipements dans le budget de la recherche.

C'est ce constat qui justifie, selon vous, l'abandon du projet de synchrotron SOLEIL dont l'origine, d'après mes sources, remonte à 1989. La France, à vos dires, n'aurait pas besoin d'un nouveau synchrotron. De plus, notre pays n'aurait pas les moyens de le financer seul. Vous avez donc annoncé au début du mois d'août dernier la participation de la France à la construction sur le sol britannique d'un synchrotron de troisième génération.

Notre conviction est que la recherche française a besoin d'une telle machine sur notre sol. Par conséquent, ce sont tous les éléments de votre argumentation que je vais m'employer à réfuter l'un après l'autre.

Premier point, vous incriminez la part excessive prise par les grands instruments au détriment du fonctionnement au jour le jour des laboratoires.

Tout d'abord, il faut rejeter l'amalgame entre des équipements qui n'ont rien à voir entre eux. Il n'est pas possible de ranger dans la même catégorie les vols spatiaux


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ou un détecteur d'ondes gravitationnelles comme VIRGO et d'autres équipements aux applications directes comme le synchrotron.

Ensuite, si le but est de redéployer des crédits en direction des laboratoires, il y a dans votre pratique une contradiction manifeste. Avec le fonds de la recherche technologique et le fonds national de la science, vous avez constitué des cagnottes pour centraliser la distribution des crédits et les distribuer de manière sélective, d'aucuns diraient discrétionnaire.

Enfin, vous semblez oublier que les utilisateurs du synchrotron viennent des laboratoires. Il est parfaitement vain d'opposer les deux catégories d'équipements.

Deuxième point clé, la question des besoins en lignes de lumière pour les expériences.

Vous affirmez que rien ne prouve que nous manquerons de temps de synchrotron pour réaliser des expériences. Tout indique le contraire. Les besoins estimés à vingt ans pour les équipes françaises correspondent à une croissance de 120 % par rapport à ce que fournit aujourd'hui le LURE à Orsay. Concernant les machines dites de troisième génération, les plus récentes, les stations expérimentales sur sections droites sont les plus convoitées. Pour certaines catégories de rayons X, la pénurie menace.

Vous avez déclaré que, avec deux synchrotrons sur le sol français, nous pourrions faire face aux besoins. Vous savez pourtant que le LURE d'Orsay est un vieil équipement, de deuxième génération, dont certains éléments menacent de tomber en panne. Au lieu de le remplacer, vous proposez de le prolonger. Quant au plus bel équipement du monde, pour reprendre vos termes, le synchrotron ESRF situé à Grenoble, c'est un instrument cofinancé par plusieurs pays. La part de la France y est saturée. La jouissance d'un tiers du potentiel de la machine DIAMOND, que vous avancez comme une solution de rechange, ne suffira pas à maintenir la capacité d'expérience des équipes françaises. Celle-ci passe par un nouvel équipement d'au moins vingt-quatre lignes.

Notre pays court le risque de voir la compétitivité de sa recherche se dégrader.

Troisième point, vous affirmez que le coût moyen du projet SOLEIL serait prohibitif par rapport aux autres priorités du ministère. La solution de rechange francobritannique DIAMOND libérerait des capacités de financement.

D'une part, le projet DIAMOND, avec rénovation du

LURE, crée quatorze lignes alors que le projet SOLEIL en crée vingt-quatre. Si l'on tient compte du retour vers le Trésor public et les régimes sociaux du fait des emplois créés en France, le coût d'une heure par instrument est deux fois moins élevé pour SOLEIL. En plus, il faudra louer des lignes complémentaires sur d'autres machines en Europe.

D'autre part, en ce qui concerne l'équilibre interne du budget, il faut comparer ce qui est comparable. Votre méthode de calcul consiste à comparer le coût consolidé de SOLEIL, évalué à 2 milliards, avec d'autres données c omme l'ensemble des dépenses d'université et de recherche, à des fins d'affichage, je crois. Opposer le plan social étudiant au synchrotron, c'est mélanger deux lignes budgétaires radicalement différentes.

Quatrième point, SOLEIL serait un équipement insuffisamment européen. Mais une ouverture de SOLEIL à des participations étrangères, vers l'Espagne ou la Belgique par exemple, ou vers d'autres pays, est parfaitement envisageable. Une optimisation en fonction des besoins et en liaison avec les autres machines européennes est en mesure de remplir les objectifs scientifiques désirés, ce qui est naturellement le principal. Cet instrument est un facteur de rayonnement pour la France, pas de repli.

Le seul point qui ne soit pas vraiment en discussion, c'est l'utilité du rayonnement synchrotron en lui-même.

Chimie, biologie, physique, technologie de l'infiniment petit, tous ces domaines font aujourd'hui l'objet d'une c ompétition mondiale. C'est pourquoi, logiquement, depuis dix ans, tous les rapports commandés sont favorables à ce projet. Le seul rapport négatif, réalisé par un certain M. Clavin, est resté secret. Il est vrai qu'il valait p eut-être mieux ne pas le rendre public puisque

M. Petroff, actuel directeur du synchrotron européen, ESRF, l'a jugé bâclé, imprécis, et en grande partie faux.

Vous connaissez bien d'ailleurs le scepticisme de la communauté scientifique française quant à cette façon de prendre des décisions. Le prix Nobel de physique - Claude Cohen-Tannoudji - ne vient-il pas d'annoncer récemment sa décision de démissionner du Conseil national de la science après avoir constaté qu'il était impossible de faire entendre une voix divergente concernant le synchrotron - lecture de la presse vendredi.

M. Patrick Leroy.

Eh oui !

M. le ministre de l'éducation nationale, de lar echerche et de la technologie.

Une personne sur vingt-six !

M. Georges Sarre.

Vous souhaitez qu'ils partent tous ?

M. le président.

Monsieur Sarre, votre temps de parole est quasiment épuisé.

M. Georges Sarre.

Le caractère indispensable de ce projet, son coût relatif, l'avenir de la recherche française, amènent les députés du Mouvement des citoyens à demander fermement et clairement la réalisation de SOLEIL. J'attends vos réponses, monsieur le ministre.

Si, comme je le crains, elles n'étaient pas à la hauteur de nos espérances, les députés du Mouvement des citoyens ne voteraient pas les crédits du budget de la recherche.

M. Jean-Pierre Michel.

Très bien !

M. Christian Cuvilliez.

Nous sommes d'accord sur bien des points !

M. le président.

La parole est à M. Pierre Cohen.

M. Pierre Cohen.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans une période où l'on évoque la mondialisation dans tous les débats, où l'on ne parle plus que de restructurations industrielles avec la constitution de grands regroupements dans les secteurs de pointe, où il est fait référence en permanence aux logiques de marché, aux flux financiers, y a-t-il encore une place pour la recherche publique ? Une nation comme la France, qui veut s'imposer comme l'un des principaux acteurs de la constitution de l'Europe, se doit d'être au premier rang de la production du savoir.

Pourrait-on être absent de la connaissance de nos origines, de l'explication des phénomènes naturels, des évolutions aussi bien dans le domaine de la santé que dans celui de l'agroalimentaire ou de toutes les technologies avancées ? Non, et ce n'est pas le cas parce que la recherche a souvent été considérée comme une priorité.

L'est-elle encore aujourd'hui ? Je suis convaincu, et nous l'avons consigné avec Jean-Yves Le Déaut dans le rapport sur l'organisation de la recherche que nous a


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confié le Premier ministre, que, si la recherche ne se porte pas si mal que cela, nous sommes à la croisée des chemins.

Nous signalons en effet un risque pour l'avenir de la recherche : le contexte idéologique favorise fortement les recherches finalisées au détriment de la recherche fondamentale ; le contexte économique de relance et de croissance détourne les jeunes de la recherche publique au profit de l'entreprise, et le secteur de l'informatique montre que ce phénomène est déjà d'actualité ; en raison de la pyramide des âges, des secteurs entiers de nos pôles d'excellence sont menacés d'être considérablement affaiblis si nous n'anticipons pas la gestion prévisionnelle du personnel ; des mutations sociétales rapides nécessitent de nouveaux champs de connaissance.

Pour faire face à cette situation, nous nous devons de mettre la recherche au rang des priorités, de mobiliser l'ensemble de la communauté universitaire et des organismes pour qu'ils oeuvrent à un grand dessein national, voire européen : mettre les nouvelles connaissances au service de l'économie et informer les citoyens pour qu'ils sachent appréhender les nouveaux enjeux.

Nous n'en sommes pas encore là, mais nous pouvons toutefois constater que le budget est en progression pour la troisième année consécutive, contrairement à ce qui s'est produit pour les années 1993 à 1997, et que les priorités sont clairement affichées.

Les deux fonds d'intervention, Fonds national de la science et Fonds de la recherche technologique, sont fortement abondés, avec une augmentation de 36 %. L'objectif premier est de donner au politique les moyens d'orienter rapidement la recherche vers des études considérées comme prioritaires, tant sur le plan scientifique que pour le développement technologique. Cela permet ainsi de mettre l'accent sur les biotechnologies et sur les technologies de l'information. On ne peut que soutenir ces choix.

Il importe cependant que ce financement ne se fasse pas au détriment des organismes, et, en même temps, de clarifier les procédures, de rendre les choix transparents, de susciter ces nouvelles dynamiques dans une même cohérence d'évaluation et de suivi des actions. La réussite est à ce prix.

En ce qui concerne l'aide aux laboratoires, je tiens às outenir l'initiative du Gouvernement, annoncée en commission de la production et des échanges, et qui consiste à aider les laboratoires grâce à une enveloppe supplémentaire de 100 millions de francs.

Cette aide, qui va générer une progression de 3,5 % pour les laboratoires, doit être amplifiée, car nous nous trouvons face à un risque de dispersion des multiples financements extérieurs en provenance du monde socioéconomique, de l'Europe ou des régions.

Le Gouvernement réitère son soutien aux jeunes scientifiques, en maintenant les allocations de recherche et de contrats CIFRE. On doit se féliciter de la demande qui consiste à faire suivre les doctorants par des écoles doctorales, afin de mieux les préparer à une carrière scientifique ou de les diriger vers des emplois dans les entreprises.

De même, la création de jeunes équipes nouvelles est une mesure adaptée, à condition que les nouveaux dispositifs restent cohérents et que les moyens soient fournis.

Je tiens à saluer la décision d'alléger les services d'enseignement des jeunes maîtres de conférences les deux ou trois premières années, ce qui favorisera la recherche universitaire.

Le Gouvernement complète le dispositif d'aide aux technologies et à l'innovation. C'est sûrement dans ce secteur que sa politique est la plus marquée, d'autant que la loi sur la recherche et l'innovation va permettre de transférer plus efficacement les connaissances de pointe vers le monde économique et social. Ainsi, note-t-on la création d'incubateurs et fonds d'amorçage dans chaque région, la constitution de fonds de capital-risque et de fonds communs de placements dans l'innovation, le développement de centres de ressources technologiques et de réseaux de diffusion.

L'objectif du Gouvernement était d'orienter le transfert vers les PME-PMI plutôt qu'au bénéfice des grands groupes : nous pouvons, je pense, atteindre cet objectif.

Un rapport détaillé permettrait d'évaluer le chemin parcouru.

Enfin, monsieur le ministre, vous soutenez la culture scientifique et technique en proposant à l'Office d'évaluation des choix scientifiques et techniques de jouer un rôle actif. Sans remettre en cause toutes les initiatives nationales et encore moins lorsqu'elles sont d'origine parlementaire, je suis conscient que nous nous devons d'impulser, à travers les contrats de plan Etat-régions, un gigantesque plan de développement de la culture scientifique et technique de proximité afin que le citoyen de base soit réellement concerné.

Il reste cependant quelques points d'ombre. Je l'ai déjà souligné, votre budget est en croissance de 1,1 % à périmètre constant, ce qui le situe juste au-dessus de l'inflation, mais largement en dessous du taux de croissance, ce qui, à mon sens, décroche encore la part de la recherche par rapport au PIB. C'est d'autant plus préoccupant que, cette année, seuls sont prévus les remplacements des départs à la retraite pour les chercheurs et 18 postes d'ITA pour tous les organismes. Je sais, monsieur le ministre, que vous désapprouvez notre proposition, mais je voudrais, une fois de plus, vous signaler ce danger : nous entrons dans la phase où la pyramide des âges va, en quelques années, obliger le remplacement de près de la moitié des effectifs. D'aucuns s'accordent à penser que seul un échelonnement, sur une dizaine d'années et dès maintenant, permettra de préserver à la fois la qualité et la potentialité de ce secteur.

Ne pas faire de programmation ou, à défaut, une loi de programmation de l'emploi scientifique, c'est afficher une stratégie qui, à terme, modifiera très sensiblement les équilibres de nos structures de recherche. Cet enjeu nécessite une position claire, car nous ne pourrons cautionner une telle évolution. Nous avons un an pour en débattre.

Pour conclure, j'évoquerai la baisse du budget espace.

Pierre Ducout, président du groupe parlementaire sur l'espace, y reviendra plus en détail. Moins que la baisse de 160 millions de francs, c'est l'avenir de ce secteur qui me préoccupe. En effet, la France y joue un rôle déterminant et peut afficher, grâce à son développement, une stratégie de compétence scientifique, d'indépendance et de capacité technologique concurrentielle face aux EtatsUnis. Les choix de la France vont dans le bon sens, aussi bien dans le domaine des lanceurs, avec Ariane 5 Plus, que dans la localisation, avec Galileo, et dans l'observation de la Terre, qui nécessitent encore, pour quelques années, le soutien de la puissance publique.

Le politique doit jouer un rôle de mise en perspective.

Aussi, j'espère que la période où la France va préparer sa présidence de l'Union européenne constituera le moment opportun pour prendre nos marques dans les secteurs de l'espace et de la recherche.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 2 NOVEMBRE 1999

En attendant, sans passion, mais avec espoir, je confirme que le groupe socialiste votera le budget de la recherche. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Foucher.

M. Jean-Pierre Foucher.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec une hausse deux fois moindre que celle de l'an dernier, le budget de l'enseignement supérieur, qui atteint seulement 52,463 milliards de francs, manque évidemment d'ambition. Il correspond à un simple budget de gestion des actions déjà entreprises et n'innove en rien, puisque les grandes réformes que M. le ministre annonce régulièrement sont, dans le meilleur des cas, repoussées à l'année prochaine. Je crains que la France, déjà en position limite, ne prenne un retard irréparable.

Quels sont, parmi les axes affichés par le Gouvernement, ceux que l'on peut retenir ? Les dépenses ordinaires progressent de 3,5 %, tandis que les dépenses en capital, qui, l'an dernier, avaient fait l'objet d'un effort de rattrapage significatif, sont en baisse de 4,5 % en crédits de paiement. On peut considérer que ce budget permet de poursuivre la mise en oeuvre du plan social étudiant engagé en 1998 et de poser les jalons du plan université du troisième millénaire qui, pour l'essentiel, sera financé par les contrats de plan Etat-régions. Cependant, il ne donne pas les moyens de mettre en oeuvre les réformes attendues par l'enseignement supérieur. Il s'inscrit dans la droite ligne du budget de l'an dernier, crédits en moins, et ne contient pas de nouvelles mesures - ou en contient peu.

Le plan social étudiant devrait avoir pour objectif d'élaborer un statut social de l'étudiant, qu'il aiderait à être plus indépendant, évitant les exclusions par la mise en place d'un dispositif d'aides directes. On peut noter un effort louable sur les crédits de l'action sociale, qui progressent de 8 % par rapport au budget initial pour 1999. Ces crédits devraient permettre d'améliorer sensiblement les bourses qui représentent 80 % des dépenses d'action sociale. Les montants sont revalorisés et le champ d'application élargi, notamment grâce au relèvement des plafonds de ressources ouvrant droit aux aides, à l'instauration d'une bourse zéro et à la création d'une bourse de premier cycle. Avec 223 millions de francs de majoration de crédits-bourses et 12 millions de francs d'exonération de droit d'inscription, 36 000 nouveaux boursiers devraient bénéficier de ces aides.

C'est bien, mais cela reste du seul domaine des aides, sans réforme du système, sans création d'un statut de l'étudiant qui est toujours attendu et sans réponse au problème du logement étudiant. Cette dernière question n'est d'ailleurs traitée que dans le cadre du plan U3M, à hauteur d'un quart de l'enveloppe. Pourtant, il y a nécessité de procéder à des rénovations et à de nombreuses constructions nouvelles de chambres de résidence universitaire. D'ailleurs, considérant que le budget de l'enseignement supérieur ne reflétait qu'une opération de saupoudrage des aides, sans les mesures novatrices annoncées depuis deux ans, le mercredi 27 octobre le conseil d'administration du CNOUS a rejeté son projet de budget 2000.

En ce qui concerne les personnels de l'enseignement supérieur, le ministère annonce des possibilités de recrutement de 400 enseignants chercheurs, ce qui facilite le recrutement de jeunes docteurs tout en améliorant le taux d'encadrement des étudiants. En fait, cette mesure correspond à un transfert de la prise en charge de 400 attachés temporaires d'enseignement et de recherche. Comme l'année dernière, la ligne de rémunération ainsi créée a pour conséquence de libérer les emplois occupés par ces ATER.

Par ailleurs, sont créés 796 emplois budgétaires de personnels enseignants : 65 % sont des postes de maîtres de conférences ; les autres sont des postes de professeurs ; cela contribue à améliorer le taux d'encadrement, et nous nous en réjouissons. Cependant, il faut remarquer que ces créations sont en partie financées par la suppression de 40 % d'heures complémentaires. Or, vous le savez, monsieur le ministre, les heures complémentaires sont très utiles dans les formations à caractère professionnel, puisqu'elles permettent de recruter des chargés d'enseignement vacataires parmi les cadres supérieurs, favorisant ainsi les contacts noués entre les étudiants et les entreprises. Cette suppression ne sera donc pas sans effet sur l'insertion professionnelle des étudiants concernés.

Quant aux moyens de fonctionnement des universités, abondés de 120 millions de francs, il sont principalement destinés à permettre le développement des nouvelles technologies.

La recherche universitaire bénéficie d'une subvention de fonctionnement d'un peu plus de 28 millions de francs, qui devrait autoriser l'accueil de 220 post-doctorants étrangers.

Les crédits de fonctionnement des bibliothèques universitaires ne bénéficient que de 10 millions de francs de mesures nouvelles, puisque les 5 millions restants ne proviennent que de transferts de crédits, soit au sein du ministère de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie, soit avec le ministère de la culture.

L'effort consenti pour créer 80 emplois supplémentaires de personnels de bibliothèque est une avancée, mais de nombreux efforts supplémentaires sont attendus : beaucoup de bibliothèques sont dans un état déplorable et la France connaît un retard considérable en la matière. Les heures d'ouverture sont notoirement insuffisantes, comme le soulignent très souvent les étudiants, qui regardent avec envie les bibliothèques universitaires américaines, ouvertes en continu.

Enfin, le plan Université du troisième millénaire, dont l'objectif est de succéder au plan Université 2000, voit ses crédits inscrits dans le projet de loi de finances pour 2000 s'élever à 3,899 milliards de francs d'autorisations de programme ; ils sont donc en progression de 28 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1999. Y sont intégrés les crédits de maintenance, pour un montant de 600 millions de francs, hors recherche. Parmi ces dotations, il faut noter que 600 millions de francs sont destinés au désamiantage de l'université de Jussieu, ce qui grèvera, à hauteur de 20 %, les crédits d'investissement destinés aux opérations de construction et de restructuration et les crédits consacrés au lancement de nouveaux projets, comme la rénovation du Muséum d'histoire naturelle ou du musée du quai Branly.

Sur le fond, il est à craindre que ce plan n'implique trop les collectivités locales, mises à contribution financière, alors que ce n'est pas leur rôle.

En outre, la hausse des crédits de fonctionnement de l'enseignement supérieur ne saurait masquer la baisse de 4,5 % des crédits de paiement et la disparition de 1 600 postes, compensée seulement par la création de 1 260 postes.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 2 NOVEMBRE 1999

Je ferai quatre remarques principales. Il est tout d'abord nécessaire d'ouvrir l'enseignement supérieur au monde, notamment par une meilleure harmonisation des études. Europe de l'emploi et Europe de l'éducation vont de pair. C'est un thème que le groupe UDF développe depuis longtemps, et qui a d'ailleurs été relayé, dans les rangs de la majorité, par Jacques Attali, en mai 1998, dans un rapport sur le modèle européen de l'enseignement supérieur. La récente conférence de Bologne, qui s'est tenue le 19 juin dernier, a permis de définir les grandes lignes d'une telle politique : mise en place d'un système de diplômes lisibles et comparables, organisation des études autour de deux cycles principaux, crédits suffisants et promotion pour faciliter la mobilité des enseignants et des chercheurs, incitation à la mobilité des étud iants et, enfin, développement de la dimension européenne dans les programmes. Certes, le Gouvernement a annoncé la mise en place d'une trame commune avec une composante recherche avant et après licence.

Cette deuxième voie devrait ouvrir sur des mastères courts ou longs, ceux-ci menant au doctorat. Un décret de mai 1999 crée le nouveau grade de mastère bac plus 5. Mais, au-delà des ambitions affichées, le présent budget ne propose aucune mesure permettant de mettre ces réformes en oeuvre.

Ma deuxième remarque porte sur les classes préparatoires, dont les enseignants connaissent une baisse importante et démotivante de leur rémunération, en raison de la diminution de 17 % du taux des heures supplémentaires. Cette mesure atteint tout spécialement les enseignants de ces classes, car leur nombre d'heures de base est plus faible que celui de leurs collègues des lycées et collèges. En réponse à mon collègue Pierre Méhaignerie, M. le ministre a précisé qu'une étude était en cours pour arrêter les modalités d'une nouvelle indemnité compensatrice. Nous aimerions être éclairés sur ce sujet.

Ma troisième remarque est celle que je formule chaque année : il me semble indispensable de créer des liens solides entre les entreprises et l'enseignement supérieur.

Les grandes écoles ont su gérer ce problème depuis longtemps, ce qui n'est pas le cas de l'université. Certes, vous promettez une licence professionnelle pour 2000, composée d'une année à visée professionnelle en complément du bac plus 2. Malheureusement, il s'agit d'un projet que vous ne développez pas. Or l'étudiant français est relativement peu « onéreux ». En redéployant la dépense sociale globale d'éducation, il est pensable d'envisager un financement correct d'une formation professionnalisée, d'autant que les entreprises peuvent être intéressées par une participation au financement.

Enfin - quatrième remarque -, des réflexions sont actuellement menées sur la réforme des études médicales, pharmaceutiques et odontologiques au sein de votre ministère. J'y reviendrai, par le biais d'une question spécifique dans le cadre de ce débat, car vous savez, monsieur le ministre, que cette réforme suscite une grande émotion dans le milieu universitaire et estudiantin.

Je souhaite par ailleurs souligner un phénomène dangereux à terme, la diminution continue des effectifs de l'enseignement supérieur dans les sections scientifiques, alors que, au contraire, le développement des technologies innovantes commande l'arrivée sur le marché d'ingénieurs et de chercheurs plus nombreux. De 1994 à 1998, les effectifs d'étudiants en DEUG de science de la matière ont fondu de 10 %, en mécanique et chimie de 25 % et en génie des procédés de 40 %. Il semble que l'accent mis sur les filières courtes, les difficultés rencontrées par les jeunes thésards et le peu d'attrait de l'université découragent les bacheliers de rejoindre ces filières, au moment où la pyramide des âges recommande un renouvellement urgent du vivier. Par contre, certaines filières à la mode, comme la psychologie ou les « sciences et techniques des activités physiques et sportives », ouvrent finalement peu de débouchés, le marché étant saturé. Il y a donc un effort très important à faire pour l'information des étudiants au moment du choix des filières.

Le budget de la recherche pour 2000 est, quant à lui, stable en volume par rapport aux crédits de la loi de finances initiale pour 1999, avec des crédits de paiement ne progressant que de 1,1 % pour un PNB à 2,5 %. Il connaît donc, cette année encore, un tassement très net.

Lui non plus n'est pas prioritaire, alors que la recherche, comme je l'avais souligné l'année dernière, lorsque j'étais rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, est un élément de base du développement et du rayonnement d'un pays. Est-ce parce que la recherche ne dispose plus, hélas, d'un ministère particulier ? Est-ce parce que les ambitions affichées du Gouvernement ne trouvent pas d'écho chez les chercheurs ? Toujours est-il que ce budget, qui ne contient que deux axes majeurs, ne répond ni aux attentes nées des Assises de l'innovation en 1998, ni aux souhaits des chercheurs, ni aux déclarations précédentes du ministre de la recherche.

C elui-ci souhaite s'attacher presque exclusivement, d'une part, au renforcement des moyens des laboratoires publics de recherche, et, d'autre part, au développement de l'innovation et au renforcement des liens entre recherche publique et entreprise. Dans ce dessein, il accroît les moyens alloués au Fonds national de la science - FNS - tant en autorisations de programmes qu'en crédits de paiement qui passent de 188 à 435 millions de francs, que le ministère gère directement. Cela devrait permettre de mener une politique de recherche cohérente sous la forme d'actions concertées et incitatives dans les secteurs des sciences du vivant, des sciences humaines et sociales et des sciences de la planète et de l'environnement.

Les crédits du Fonds pour la recherche et la technologie - FRT - et de la diffusion des technologies du secteur spatial progressent eux aussi sensiblement, puisqu'ils passent de 670 millions de francs d'autorisations de paiement à 905 millions cette année, soit une augmentation de 35 %. Les nouvelles technologies de l'information et de la communication et la création d'entreprises technologiques devraient notamment en bénéficier.

Tous ces chiffres démontrent bien un souci majeur : centraliser la gestion. Quant à la restauration des moyens des laboratoires des organismes de recherche, la priorité est donnée, au sein des établissements publics scientifiques et technologiques - EPST - au soutien des unités de recherche, qui augmente de 3,5 %. Les personnels, quant à eux, connaissent surtout des transformations d'emplois - 1 000 sont prévues -, requalifiantes, puisque seulement 18 postes d'ITA sont créés et que, à l'INRA, trente emplois d'ITA sont transformés en emplois de chercheurs. Aucune création n'est annoncée pour les personnels chercheurs des EPST. Les moyens en personnel sont d'autant plus insuffisants que le renouvellement du vivier nécessite un taux de 5 % alors que, actuellement, il n'atteint que 3 %. Je souligne tout de même une mesure significative et intéressante : l'augmentation à hauteur de 8,3 millions de francs de la subvention pour les fondations de recherche des instituts Pasteur et Curie. Par ailleurs, quelques dispositions favorisent la recherche universitaire, qui en a grand besoin, comme l'accélération du plan d'accueil des post-docto-


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rants étrangers - 160 bénéficiaires supplémentaires -, 25 millions de francs de crédits pour la recherche dans l'enseignement supérieur, le renforcement des moyens des écoles françaises à l'étranger et la création de 10 emplois de chercheurs à l'Ecole française d'Extrême-Orient.

Mais, il est bien regrettable que, hors FRT, les crédits de la recherche industrielle gérés par le ministère de l'industrie et les crédits de l'ANVAR soient globalement maintenus. Il aurait fallu des mesures concrètes et conséquentes.

La lecture du budget de la recherche inspire une considération, qu'a résumée récemment un grand quotidien : c'est une enveloppe serrée dont la distribution très centralisée laisse les organismes de recherche au pain sec. Tous les grands organismes de recherche voient leurs crédits à peine progresser, quand ils ne régressent pas, comme c'est le cas des crédits civils du CNES.

J'aborderai tout spécialement, comme exemple d'abandon des grands organismes, le cas du CEA, qui fait l'objet d'un habillage en trompe-l'oeil. Au titre IV, les crédits semblent abondés de 79 millions de francs ; or le budget total de cet organisme est inférieur au budget initial de l'année dernière, puisqu'il est basé sur le budget 1999 effectivement alloué, c'est-à-dire qu'il est calculé sur une base diminuée de 100 millions de crédits qui, en réalité, n'ont jamais été versés en 1999.

Par ailleurs, je remarque que le budget du CEA comprend un montant de 236 millions de francs calculé de manière étrange : 50 millions de francs provenant du FRT et du FNS, 165 millions de francs devant provenir des industries - ils sont donc incertains - et 21 millions de francs provenant du différentiel sur les ventes forcées de certaines filiales, et donc du capital. On peut se demander si ces 236 millions seront ou non effectivement crédités au CEA, d'autant que vous ne tenez pas non plus vos promesses de revalorisation au titre VI, puisque le renouvellement des installations n'est pas assuré.

M. le président.

Il faut conclure, monsieur Foucher.

M. Jean-Pierre Foucher.

Je conclus, monsieur le président, dans quelques instants. Enfin, même si ces 236 millions de francs étaient réellement acquis, la situation financière supposerait un gel des salaires et l'absence de prise en compte des effets de l'application des 35 heures, à quoi s'ajoute la contrainte supplémentaire de l'augmentation de la taxe INB - installation nucléaire de base - prévue par l'article 24 de la loi de finances pour 2000.

Pour terminer, je dirai que les choix en matière de grands équipements sont contestables, et j'en prendrai pour meilleure preuve, comme d'autres collègues l'on fait, celui de l'abandon du projet SOLEIL,...

M. Patrick Leroy.

C'est comme une éclipse totale !

M. Jean-Pierre Foucher.

... décision prise pendant l'été, contre l'avis de tous les experts et sans aucune concertation.

M. le président.

Votre temps de parole est expiré, monsieur Foucher. Je vous prie de conclure.

M. Jean-Pierre Foucher.

Je termine, monsieur le président. Mes collègues ayant déjà évoqué l'abandon du projet SOLEIL, je dirai, puisqu'il faut conclure, qu'à l'occasion de ce budget recherche, il serait bienvenu, monsieur le ministre, que vous puissiez nous éclairer sur votre vision globale de la recherche française et sur les choix que vous exercez.

Compte tenu du décalage qui existe entre les objectifs affichés et les moyens alloués, le groupe UDF ne peut adhérer à ce budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Patrick Leroy.

M. Patrick Leroy.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en examinant le budget de l'enseignement supérieur pour l'an 2000, une question s'est immédiatement posée : pourquoi y a-t-il aujourd'hui une réduction des inscriptions universitaires, fait inédit depuis quatre décennies, et ce alors même que l'on constate une augmentation démographique de cette classe d'âge ? La réponse à cette interrogation m'a semblé essentielle pour juger des moyens budgétaires mis à disposition et de leur emploi en matière de priorités.

Il ressort de nombreuses rencontres que j'ai eues avec les syndicats et les associations d'étudiants que cette « évaporation étudiante » est due à plusieurs facteurs, que je voudrais passer succintement en revue.

Premièrement, il existe une incertitude sur les débouchés des études supérieures.

Deuxièmement, des syndicats d'enseignants nous ont signalé que l'accueil et la qualité de la formation sonto bsolètes, les méthodes employées remontant aux années 60-70. Cette situation est imputable, selon eux, à la complexité des inscriptions, à leur coût, au manque d'orientation et d'encadrement - faute de création d'emplois qualifiés -, aux carences très graves en matière de bibliothèques, lesquelles manquent de moyens, et aux insuffisances sur le plan de l'action sociale. Il convient également de rappeler l'importance d'un bon fonctionnement des instituts universitaires de formations des maîtres, les IUFM. J'aurais pu aborder aussi les conditions encore plus difficiles faites, dans notre pays, aux étudiants étrangers.

Troisièmement, un autre facteur de la désaffection étudiante est dû à l'échec important au niveau du premier cycle. Je rappelle que l'encadrement est bien meilleur pour les diplômes d'études approfondies - les DEA - et l es diplômes d'études supérieures et spécialisées - les DESS - que pour le premier cycle, où, fait aggravant, les travaux dirigés sont souvent tenus par des vacataires et non par des titulaires.

Faut-il souligner que toutes ces questions touchent en premier lieu les étudiants issus de familles modestes ? Que propose donc ce projet de budget pour répondre à ces problèmes ? Alors que le budget général de l'Etat ne prévoit qu'une augmentation des dépenses de 0,9 % pour l'an 2000, le budget de l'enseignement supérieur progresse de 2,63 % pour un montant de 52 400 millions de francs. Toutefois, son taux de croissance - 5,5 % - est inférieur à celui du budget de 1999 et à celui du budget global de l'éducation nationale qui est en progression de 3,3 %. Cette hausse privilégie les dépenses ordinaires, qui croissent de 3,5 %, au détriment des dépenses en capital, les crédits de paiement diminuant de 4,7 %. En ce qui concerne les emplois, ce budget a un solde négatif. On compte 1 674 suppressions de postes de contractuels contre 1 668 créations de postes. Parmi les 1 196 postes d'enseignants créés, 400 sont des postes d'attachés temporaires d'enseignement et de recherche, donc des emplois précaires.


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Sur les 472 emplois administratifs, techniques et de bibliothèques, seuls vingt postes concernent des emplois d'infirmières et quatre-vingts des emplois de personnels de bibliothèques. Ces derniers correspondent à une progression d'à peine 2 % des effectifs des personnels des b ibliothèques pour les quatre-vingt-quatre universités françaises, alors que le budget de 1999 avait créé 150 postes ! Les crédits de fonctionnement des établissements progressent, mais en contrepartie d'une économie de 40 millions de francs sur les heures complémentaires. Les bibliothèques sont dotées d'à peine 10 millions de francs de mesures nouvelles alors qu'elles sont dans un état déplorable.

En ce qui concerne le plan social étudiant, la dotation globale qui y est consacrée est nettement insuffisante par rapport aux objectifs poursuivis et aux besoins ressentis en matière de santé, d'hébergement, de restauration et d'aides sociales.

Ce projet de budget consacre au financement du plan de l'université du troisième millénaire pour les dépenses liées aux contrats de plan Etat-régions, pour les opérations de mise en sécurité de Jussieu ou pour les constructions telle celle du quai Branly, 3 300 millions en autorisations de programme et seulement 2 850 millions en crédits de paiement. Ainsi, 600 millions de francs d'autorisations de programme sont consacrés au désamiantage de Jussieu.

Une fraction des crédits du plan U3M est consacrée à la rénovation du Muséum national de l'histoire dont l'état de délabrement préoccupant, faute de crédits, a fait l'objet d'une de mes récentes questions écrites.

Le plan U3M est également intégré aux contrats de plan Etat-régions 2000-2006 pour un montant estimé entre 50 et 60 milliards de francs pour lequel l'Etat ne c ontribuerait qu'à hauteur de 15 milliards, laissant l'essentiel des dépenses à la charge des collectivités territoriales, soit 35 milliards de francs. C'est donc un désengagement de l'Etat dans un domaine où il a une compétence institutionnelle exclusive ! Même si je me félicite des efforts consentis en faveur du plan social étudiants, encore qu'ils soient largement insuffisants pour les dépenses d'équipement - malgré leur évolution erratique - et pour les travaux de mise en sécurité de Jussieu, je ne crois pas, monsieur le ministre, que le montant des crédits alloués à l'enseignement supérieur réponde aux aspirations des personnels et des étudiants. C'est pourquoi le groupe communiste s'abstiendra sur ce projet de budget.

Mais que dire du projet de budget de la recherche et de la technologie pour 2000, sinon qu'il est insuffisant ? Il passe d'un peu plus de 40 milliards de francs en 1999 à 39 860 millions de francs en 2000, soit une régression de 0,4 %. Pour le budget civil de recherche et développement, la progression est d'à peine 1,3 %, les crédits s'élèvent à 54 477 millions de francs.

Ce budget privilégie avant tout les dotations pour le fonds national pour la science et le fonds de la recherche et de la technologie, lesquels bénéficient de crédits en progression importante. Ces derniers passent respectivement de 318 à 565 millions de francs et de 376 à 670 millions de francs en crédits de paiement. Ces montants sont curieusement très proches des crédits de soutien de base aux unités de recherche universitaire.

La dotation des établissements publics de recherche, socle et fierté de la recherche publique française, augmente seulement en moyenne de 1,4 % en dépenses ordinaires et en crédits de paiement.

Parmi les établissements publics à caractère scientifique et technologique, si les crédits de l'INRIA progressent de 4 %, et je m'en félicite, ceux de l'INSERM, de l'INRA, et surtout du CNRS ne progressent respectivement que de 1,8 %, de 1,7 % et de 1,1 %. De manière générale, les montants de leurs autorisations de programme et de crédits de paiement pour l'an 2000 sont inférieurs à ceux de 1993.

Les établissements de recherche à caractère industriel et commercial - EPIC - sont soumis à d'importantes restrictions, à l'exception du CEA et du centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement.

Ainsi, les crédits de paiement du CNES sont en régression de 10,4 % par rapport à 1999, passant de 7 320 millions à 6 650 millions de francs.

Quant aux crédits de paiement de l'IFREMER, ils p assent de 435,01 millions de francs en 1999 à 411,47 millions de francs pour 2000, soit une diminution de 5,4 %. Les 50 millions de francs d'autorisations de programme pour le renouvellement de la flotte, qui avaient déjà été supprimés dans le budget 1999, n'ont pas été reconduits dans le projet de budget pour 2000. Or le remplacement du Nadir , navire vétuste âgé de vingtcinq ans, et la construction d'un nouveau navire support d'engins sont à réaliser d'urgence.

En ce qui concerne les très grands équipement - TGE -, sans lesquels certaines disciplines parmi les plus pointues ne peuvent progresser, on observe l'abandon pur et simple du projet SOLEIL, projet français de synchrotron.

Cette décision ministérielle unilatérale, sans consultation de la communauté scientifique ou des élus, prise en pleine période estivale ne peut que susciter notre ferme désapprobation tant sur la forme que sur le fond. Cette décision risque en effet de faire perdre à la France sa position dans un domaine où elle était pionnière et d'affaiblir le potentiel de recherche français, sans compter d'énormes pertes économiques pour notre pays. C'est à cela que l'on aboutirait, monsieur le ministre, en optant p our une participation minoritaire d'un tiers à la construction du synchrotron britannique DIAMOND sur le sol anglais.

Cela me conduit à vous poser deux questions.

Premièrement, l'exploitation des TGE étant affaire de long terme et requérant des critères de choix sérieux et transparents, pourquoi le conseil des très grands équipements, dont le rôle était de tenir le tableau de bord des TGE existants et de proposer une stratégie cohérente, a t-il été supprimé ? Deuxièmement, pourquoi le rapport Paul Clavin sur le projet SOLEIL est-il tenu secret ? A ce sujet, quand allezvous répondre, monsieur le ministre, au courrier que je vous ai personnellement adressé le 15 septembre dernier et demandant la publication de ce rapport ? Mon groupe ayant réclamé, à maintes reprises, qu'un débat très ouvert et transparent ait lieu sur cette question tant avec le milieu scientifique que devant le Parlement, j'ai du mal à comprendre vos déclarations estivales et vos décisions précipitées. Je ne suis pas le seul, dans ce cas, puisque d'éminents scientifiques ont fait part ces derniers jours de leur total désaccord.


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En ce qui concerne l'emploi scientifique, je regrette vivement que le projet de budget ne prévoie aucune création d'emploi de chercheur dans les EPST et seulement dix-huit créations de postes d'ingénieurs, de techniciens et d'administratifs - ITA.

Vous regrettez, monsieur le ministre, le vieillissement de la pyramide des âges des chercheurs et des ITA. Moi aussi. Mais que proposez-vous ? Vous vous contentez d'un taux annuel de renouvellement de 3 % alors qu'il faudrait un taux de 5 % pour compenser les simples départs à la retraite. En outre, les conditions de départ à la retraite actuelles ne sont pas incitatives.

L'emploi précaire pour les jeunes et les moins jeunes se banalise depuis des décennies dans les établissements publics et universitaires. Actuellement, au CNRS, au moins 4 500 personnes, soit 18 % du personnel, sont en situation précaire ! Que faites-vous ? S'agissant de l'emploi, le rapport Le Déaut-Cohen...

M. Jacques Guyard.

Excellent rapport !

M. Patrick Leroy.

... propose des pistes de réflexion intéressantes, qu'il s'agisse d'une loi de programmation de la recherche pour l'emploi scientifique ou du recrutement précoce des jeunes docteurs. Qu'en pensez-vous ? Pour terminer, quelques mots sur le crédit impôtrecherche, cette mesure fiscale qui devait inciter les entreprises à augmenter leur recherche-développement. A l'instar d'Henri Guillaume dans son rapport, nous dénonçons depuis des années l'opacité et l'inefficacité de ce dispositif qui coûte annuellement 3 milliards de francs de l'Etat.

Le groupe communiste a demandé, par le biais d'un amendement déposé lors de l'examen de la première partie de la loi de finances, de substituer au CIR un impôt recherche libératoire. Notre amendement n'ayant pas été adopté, il serait au moins souhaitable qu'une expertise annuelle plus poussée soit effectuée et figure dans le rapport sur l'état de la recherche et du développement technologique annexé au projet de loi de finances. Une telle analyse permettrait d'apprécier la réalité des sommes mobilisées, ainsi que leur destination, leur utilisation et leur répercussion sur la recherche, le développement et les créations d'emplois.

Mon propos n'a rien à voir avec celui, démagogique, de l'opposition. Il exprime simplement, monsieur le ministre, la crainte du milieu scientifique, que je fais mienne, de voir certaines de vos orientations et décisions provoquer des conséquences néfastes incalculables pour l'avenir de notre pays dans un domaine aussi crucial que la recherche scientifique.

Mon souhait est qu'un gouvernement de gauche puisse s'enorgueillir d'avoir été le bâtisseur d'un système rehaussant notre modèle de recherche au plus haut niveau international.

Monsieur le ministre, nous attendons, avant la dernière lecture, des mesures significatives en faveur de l'emploi scientifique et des grands organismes, faute de quoi nous ne pourrions que confirmer notre vote négatif. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. Pierre Lasbordes.

M. Pierre Lasbordes.

Monsieur le ministre, pour compléter les propos de Bruno Bourg-Broc, je ferai porter mon intervention sur la partie recherche.

Si nous ne pouvons qu'être satisfaits des deux axes que vous nous avez présentés dans une note du 20 septembre dernier sur votre conception politique de la recherche, à savoir redonner à la recherche française une place de premier plan dans tous les domaines et faire de celle-ci un moteur de l'essor de l'économie et de lutte contre le chômage, il n'en demeure pas moins que les moyens mis en oeuvre ne sont pas à la hauteur de vos ambitions.

Le projet de budget présenté progresse de 1,1 %, soit à peine plus que le projet de loi de finances pour 2000. Ce n'est donc pas une priorité pour votre gouvernement. Le résultat est que ce projet de budget n'augmente pas plus vite que l'inflation et voit sa part dans le PIB baisser compte tenu du taux de croissance prévu de 3 %.

Pour ce qui est des EPST, nous constatons des écarts importants entre eux tant en autorisations de programme qu'en crédits de fonctionnement.

Ainsi, le CNRS, qui représente plus de 63 % du potentiel des EPST, paraît être sanctionné de son indocilité, puisque ses crédits ne croissent que de 1,1 % alors que les autres EPST bénéficient d'une augmentation plus importante.

Monsieur le ministre, ce n'est pas une politique, cela ressemble plutôt à l'effet de réactions d'humeur !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Oh non !

M. Pierre Lasbordes.

Comme vous le faisiez remarquer à juste titre mercredi dernier dans cet hémicycle, depuis que vous êtes ministre « il y a sans arrêt des problèmes ».

(Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

C'est un peu facile !

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

Quel mauvais esprit !

M. Pierre Lasbordes.

Modifiez votre politique et les problèmes seront moindres.

S'agissant du budget de la recherche universitaire, nous ne pouvons que saluer sa progression de 3,1 %, avec un accent particulier pour l'accélération du plan d'accueil des doctorants étrangers.

Pour ce qui est de la formation doctorale, les crédits sont strictement maintenus à 1 750 millions de francs, à l'exception des conventions industrielles de formation et d es bourses CIFRE. C'est pourquoi nous vous recommandons une réévaluation de ces bourses restées depuis de nombreuses années au même taux.

S i les crédits des établissements sont sévèrement contingentés, ceux qui sont à la discrétion de la distribution directe du ministère croissent dans les proportions très élevées. Les autorisations de programme du fonds de la recherche et de la technologie croissent de plus de 34 %, la diffusion des technologies du secteur progresse de 50 % et le fonds national de la science de 40 %, ce qui correspond à la manifestation d'un pilotage croissant de la recherche par vous-même.

Aussi, nous interrogeons-nous sur la cohérence de vos positions : en tant que ministre de l'éducation nationale, vous défendez la décentralisation,...

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Oui !

M. Pierre Lasbordes.

... en tant que ministre de la recherche, vous soutenez la recentralisation.

En outre, ce projet de budget fait état d'un taux de renouvellement des personnels chercheurs des EPST de 3 %. Ce taux étant, semble-t-il, inférieur à celui des départs à la retraite, n'est-ce pas le signe annonciateur d'une politique de déclin des organismes de recherche ? Je ne voudrais pas terminer mon intervention sans dire un mot de votre politique des très grands équipements.

Nous sommes favorables, comme vous, à la modernisa-


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tion des équipements de laboratoires. Mais il n'est pas opportun, nous semble-t-il, d'opposer les laboratoires et les très grands équipements. Contrairement aux apparences, ces derniers ne coûtent pas plus chers que les laboratoires, car leurs équipements sont souvent utilisés avec beaucoup plus d'efficacité, sans oublier que, depuis plusieurs années, selon le rapport de M. Migaud, le coût des très grands équipements a baissé.

Dans ces conditions, monsieur le ministre, pourquoi ne pas faire profiter votre ministère de la croissance du

PIB ? Vous avez là une opportunité de satisfaire les demandes et de crédibiliser vos choix, en particulier en favorisant l'équipement des laboratoires.

S'il est nécessaire dans le domaine des très grands équipements de développer la coopération européenne, de grâce, n'utilisez pas, comme vous l'avez fait pour le projet SOLEIL, de faux arguments techniques et financiers qui, de l'avis de spécialistes, sont insoutenables. A cet égard, je vous renvoie à l'excellente démonstration de mon collègue Georges Sarre.

Par ailleurs, pourquoi avez-vous commandé plusieurs rapports auprès d'experts que vous accusez aujourd'hui de participer à des comités partisans, pour remettre en cause la décision prise par le gouvernement d'Alain Juppé, certes, à la veille de la dissolution, alors que vous saviez que vous transféreriez ce projet à l'étranger ? Ces faits me confortent dans l'idée qu'il est nécessaire d'ouvrir, dans cet hémicycle, un débat - auquel l'opposition pourrait participer - sur l'avenir de la recherche en France, comme je vous l'avais suggéré l'an passé à cette même période.

Je souhaite que vous partagiez avec nous l'ambition de donner à la France une recherche publique performante.

Toutefois, je ne peux que constater que ce projet de budget, même s'il comporte des volets très positifs, ne reflète pas un tel état d'esprit. Aussi, le groupe du RPR, en refusant de voter ce projet de budget, manifestera-t-il fermement son désaccord sur votre politique de recherche.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Je vous remercie, monsieur Lasbordes, pour votre concision.

La parole est à Mme Cécile Helle.

Mme Cécile Helle.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de budget de l'enseignement supérieur s'élève à plus de 52 milliards de francs, ce qui représente, comme l'ont souligné les orateurs ce matin, une progression de 2,63 % par rapport à 1999. Cette hausse globale apparaît d'autant plus remarquable qu'elle s'inscrit dans un contexte général de maîtrise des dépenses publiques - le budget de l'Etat ne s'accroissant, quant à lui, que de 0,9 % - et dans un contexte de baisse des effectifs étudiants - 1,836 million d'étudiants étaient attendus dans les universités à la rentrée 1999, soit une diminution de 0,5 % par rapport à l'année précédente.

Cette augmentation confirme la volonté affichée depuis deux ans par ce gouvernement de construire une enseignement supérieur de qualité, ancré dans la modernité et accessible au plus grand nombre.

Deux caractéristiques essentielles marquent à mes yeux ce budget : d'une part, la continuité dans laquelle il s'inscrit par rapport aux deux exercices budgétaires précédents ; d'autre part, sa cohérence par la priorité donnée à la création d'emplois et à la reconnaissance des activités de recherche menées à l'université.

La continuité qu'il manifeste permet à la fois la poursuite de la mise en place du plan social étudiant, la montée en puissance du plan U3M, relais direct du plan Univ ersité 2000, et la progression des moyens des établissements.

Annoncé en juin 1998, le plan social étudiant vise à créer les conditions d'une meilleure reconnaissance de la place des étudiants dans la société, à leur apporter les bases d'une plus grande indépendance matérielle et morale tout en leur permettant d'être mieux responsabilisés dans la conduite des politiques et des institutions de la vie étudiante. L'objectif de ce plan, comme l'ont rappelé ce matin les deux rapporteurs, est, sur une période de quatre ans, de revaloriser les taux des bourses de 15 % et de parvenir à une proportion de 30 % d'étudiants aidés. Pour le budget 2000, cet objectif se traduit par l'inscription au chapitre des bourses de 677 millions de francs supplémentaires. Ils permettent d'augmenter le taux des différentes aides de 4,2 % en moyenne et d'aider 36 000 étudiants de plus, entre autres, grâce au relèvement des plafonds, à la mise en place des commissions d'allocations aux études, visant à aider les étudiants dont la situation au regard du droit à bourse vient à changer brutalement, mais aussi grâce à des bourses à taux zéro et à la création de 200 bourses de mérite supplémentaires.

Il importe à mes yeux d'insister ici, mes chers collègues, sur cet effort continu inscrit prioritairement dans le budget 2000. Le plan social étudiant témoigne d'une logique de programmation budgétaire marquée par la montée en puissance de ce dispositif qui exclut de fait toute logique de pause.

Autre priorité budgétaire : la montée en puissance d'U3M. Alors que le plan Université 2000 visait à répondre à la croissance démographique de l'enseignement supérieur, U3M concerne principalement les conditions d'accueil des étudiants et la recherche. Si un certain nombre des opérations qui y sont liées ont vocation à être intégrées dans les contrats de plan Etat-région 20002006, d'autres relèvent des crédits d'investissement de l'enseignement supérieur. Avec près de 4 milliards de francs en autorisations de programme, les crédits immobiliers permettront de couvrir des opérations de mise en sécurité et de réhabilitation, de construction et de restructuration ainsi que des opérations spécifiques comme Jussieu. Au total, les crédits destinés aux investissements immobiliers progressent de plus de 25 % par rapport à 1999, ce qui marque bien la montée en puissance de U3M. Enfin, du point de vue de la cohérence d'ensemble de la politique en faveur de l'enseignement supérieur, il me semble également important de rappeler que plus du quart des opérations prévues dans le cadre de U3M porteront sur l'amélioration de la vie étudiante, complétant ainsi de manière significative les aides directes prévues dans le cadre du plan social étudiant.

Dernier signe de continuité : la progression des moyens des établissements. Outre les moyens nouveaux dégagés en emplois, sur lesquels je reviendrai dans quelques instants, le budget 2000 se caractérise par la progression du budget de fonctionnement. Cela permettra le rattrapage des crédits de fonctionnement des établissements, le respect des engagements contractuels, la poursuite de l'effort engagé pour les nouvelles technologies, notamment dans les IUFM, la progression des crédits consacrés aux bibliothèques et, enfin, le fonctionnement de l'établissement public de Jussieu. Cette progression, notable depuis trois


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ans, s'accompagne d'un redéploiement au sein des établissements d'enseignement supérieur : d'une part, en faveur des IUT, pour tenir compte de l'augmentation de leurs effectifs depuis trois ans ; d'autre part, en faveur des universités sous-dotées - petites universités ou unités nouvellement créées.

Mais la progression des moyens des établissements est surtout marquée par de nouveaux recrutements de personnels, enseignants et non enseignants. J'en viens à la seconde caractéristique de ce budget 2000 : une priorité réaffirmée donnée à l'emploi et à la recherche universitaire.

Près de 800 postes d'enseignants chercheurs et près de 500 postes de personnels non enseignants sont créés : l'effort budgétaire se traduit d'abord par l'amélioration qualitative de l'enseignement supérieur en France. Ces recrutements conduisent en effet à un renforcement du taux d'encadrement des étudiants qui devrait passer de plus de 22,5 étudiants par enseignant en 1993 à moins de 19 à la rentrée 2000. Plusieurs orateurs ont insisté particulièrement sur ce point. Pour nous, monsieur le ministre, l'encadrement est le garant essentiel d'une meilleure réussite des étudiants, notamment en premier cycle.

Cet effort prioritaire pour l'emploi se caractérise ensuite par une contribution à la modernisation des établissements. Les recrutements des personnels ATOS se distinguent cette année par leur qualité - 38 % en catégorie A et 29 % en catégorie B. Cela conduit à une meilleure prise en compte de l'évolution des métiers de l'enseignement supérieur.

Il se traduit enfin par la progression du flux de recrutement des jeunes docteurs qui permet de renforcer le dispositif de prérecrutement à l'oeuvre depuis 1989 avec les allocataires, les moniteurs et les ATER.

Il me semble également important de souligner que la priorité donnée à l'emploi scientifique s'inscrit à plusieurs titres dans une cohérence d'ensemble. Le plan de limitation des heures complémentaires est poursuivi. La prime pédagogique est réformée pour une meilleure prise en compte de l'investissement de l'enseignant dans la dynam ique pédagogique de son département. Enfin, la recherche universitaire est mieux reconnue grâce à une augmentation de 3,1 % de ses crédits et à la création de 1 250 nouvelles primes d'encadrement doctoral, grâce aussi et surtout à un aménagement du statut des jeunes maîtres de conférence permettant de mieux concilier activité d'enseignement et activité de recherche.

Restent les retards pris depuis de nombreuses années, notamment en matière de recrutement. Ils ne peuvent, bien sûr, être comblés en deux ou trois ans, mais ils ne freinent pas moins la mise en place de certaines de vos réformes, monsieur le ministre. Je pense plus particulièrement aux problèmes de dotation relatifs aux personnels I ATOS que nombre d'établissements d'enseignement supérieurs ont rencontrés. En dépit de la priorité affichée depuis trois ans par votre ministère dans ce domaine, la montée en puissance du volet citoyenneté du plan social étudiant visant à ouvrir les universités sur la ville et sur la vie fait apparaître avec d'autant plus d'acuité les besoins.

Bien sûr, un effort peut être demandé aux établissements pour une meilleure organisation interne : c'est la logique de restructuration. Bien sûr, un effort peut être demandé à ces mêmes établissements pour une meilleure répartition des besoins entre eux : c'est la logique du redéploiement. Mais c'est par un effort toujours réaffirmé en moyens humains que l'on pourra réellement accroître les plages d'ouverture des bibliothèques, améliorer le suivi social des étudiants ou bien encore soutenir efficacement les initiatives culturelles et sportives.

Dans ce domaine, comme dans bien d'autres, parce qu'il s'agit avant tout d'améliorer la qualité de l'enseignement supérieur, vous pourrez toujours, monsieur le ministre, compter sur le soutien des députés socialistes, comme aujourd'hui d'ailleurs, puisque ces derniers voteront les crédits budgétaires de votre ministère pour l'année 2000.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur divers bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. Jean-Yves Le Déaut.

M. Jean-Yves Le Déaut.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la recherche française est aujourd'hui à un tournant car la génération des universitaires et des chercheurs de l'après-guerre s'apprête à partir à la retraite. La moitié des effectifs a un âge supé rieur à quarante-huit ans. D'ici à dix ans, la moitié des chercheurs sera partie. Il convient donc d'anticiper ces départs massifs en élaborant une programmation de l'emploi scientifique sur dix ans qui intégrerait les départs à la retraite, les sorties prévisibles du système de recherche, les créations d'emplois, les postes réservés pour favoriser la mobilité et les redéploiements disciplinaires envisagés.

Dans le même temps, l'université s'est démocratisée. Il a fallu répondre à la demande de formation de haut niveau de deux millions d'étudiants.

Enfin, et, certains de nos collègues l'ont souligné, la recherche est devenue le socle des changements économiques au XXe siècle.

Nous sommes toutefois inquiets du déclin de l'intérêt des jeunes pour les disciplines scientifiques, qui fait craindre une pénurie de diplômés dans ce domaine.

Contrairement à ce qui a été dit, votre budget prépare l'avenir, et ce, au-delà des signes encourageants d'une progression de 22 % des autorisations de programme qui annonce, comme vous vous y étiez engagé, le retour, pour les années prochaines, d'une priorité à la recherche.

Vous avez donné une priorité financière à l'aide aux équipes et aux laboratoires - les pouvoirs publics continuent et continueront de soutenir la recherche fondamentale. Vous avez soutenu les technologies de l'information et de la communication, les sciences du vivant, les sciences humaines et sociales. Enfin, vous avez souhaité mener un effort accru d'aide à l'innovation et aux transferts de technologies innovantes.

Comme nous l'avons souligné avec Pierre Cohen dans un récent rapport remis au Premier ministre, notre recherche est de bon niveau. Paradoxalement, nous avons lancé un cri d'alarme : il est indispensable que la France renforce son potentiel scientifique. Au XXIe siècle, les créations d'emplois se feront sur les gisements de matière grise. Notre pays doit réussir ce rendez-vous avec le futur.

Nous souhaiterions donc, monsieur le ministre, que vous précisiez comment vous comptez agir pour améliorer les domaines les plus fragiles de la recherche française.

L'insertion des jeunes chercheurs est difficile. Sur 11 000 thèses soutenues, dont 2 000 sont préparées par des étrangers - et nous nous en félicitons -, un peu plus de 3 000 docteurs seulement entrent dans l'enseignement supérieur et dans les organismes de recherche. Ils ne sont que 500 à rejoindre les entreprises ou le secteur tertiaire.

Pour certains, c'est donc le chômage ou l'exil forcé. Exil


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forcé et non fuite des cerveaux, comme le prétendent certains, car beaucoup de ceux qui sont partis espèrent revenir en France.

Avec Pierre Cohen, nous nous sommes exprimés à ce sujet. Nous ne sommes pas opposés au post-doctorat qui permet assurément l'ouverture scientifique, la confrontation avec d'autres thématiques de recherche, l'approfondissement de la formation par la recherche. Toutefois nous souhaitons que cesse la dérive actuellement observée dans les recrutements, de plus en plus tardifs.

Le nombre de docteurs sans emploi continue à augmenter tant en France qu'à l'étranger. Beaucoup s'expatrient avec l'espoir de revenir en France, mais une fois partis, les liens avec leur laboratoire d'origine se distendent et ils ont ensuite le plus grand mal à se réinsérer dans un circuit de recrutement trop hexagonal. Les réorientations de carrière sont dès lors difficiles car les entreprises françaises sont réticentes à accueillir des docteurs de plus de 30 ans pour un premier poste dans le secteur privé. Nous souhaitons donc que les docteurs partis à l'étranger puissent avoir accès dans de meilleures conditions aux futurs concours de recrutement ; il convient d'en alléger les procédures et de les rendre plus transparentes. Le rôle des écoles doctorales doit être renforcé dans le souci de l'insertion professionnelle. Nous émettons le voeu que les doctorants puissent, soit enseigner en plus grand nombre dans le premier cycle, soit acquérir une première expérience en entreprise. Un accès prioritaire à l'enseignement secondaire doit être offert aux docteurs d'Etat en recherche d'emploi pour les postes de contractuels actuellement recrutés dans l'enseignement secondaire ou dans les IUFM. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous préciser vos intentions à ce sujet ? Quelles sont, d'autre part, vos propositions pour soutenir la création de nouvelles jeunes équipes, notamment celles portant sur des projets pluridisciplinaires, et pour accorder plus d'indépendance aux jeunes chercheurs ? Le deuxième volet de notre réflexion concerne l'articulation entre les missions et les métiers de la recherche et de l'enseignement supérieur. Ces missions et ces métiers sont totalement imbriqués : formation initiale et formation continue, développement des connaissances, transfert et application des recherches, diffusion de l'information et de la culture scientifique et technique. Chercheurs à plein temps, enseignants-chercheurs, ingénieurs, techniciens, administratifs, ouvriers de service sont autant d'acteurs de la recherche.

Nous proposons une meilleure synergie entre les diverses missions de la recherche, mais surtout une meill eure complémentarité entre ses différents métiers :r echerche fondamentale, valorisation, enseignement, conseil et expertise, administration et gestion de la recherche, coopération internationale, médiation, diffusion de la culture scientifique et technique. Les universités et les établissements publics de recherche doivent travailler en étroite symbiose. Vous avez raison d'en faire une priorité.

La mobilité, malheureusement, reste introuvable en France : dans notre pays, en dehors de la recherche, point de déroulement de carrière. Les autres tâches ne sont pas réellement prises en compte dans la gestion des carrières.

Personne n'a donc intérêt à exercer plusieurs de ces missions au cours de sa carrière professionnelle et les chercheurs restent chercheurs toute leur vie. Ils ne veulent pas être détachés temporairement dans une entreprise, cette expérience constituerait un handicap pour le déroulement de leur carrière.

Les enseignants-chercheurs essaient de consacrer une part de leur activité aux travaux de recherche sur la base desquels ils sont jugés par leurs pairs. Mais 192 heures de TD, c'est lourd quand on travaille en contact étroit avec les étudiants sur des cours renouvelés au rythme de l'avancée des connaissances.

Nous avons donc fait des propositions pour améliorer la mobilité, pour diversifier la carrière des enseignants et des chercheurs, pour donner des avantages incitatifs à ceux qui acceptent d'être mobiles, pour assouplir les contraintes administratives et pour effectuer une meilleure évaluation et mieux lier cette évaluation à la gestion des personnels. Il faut redynamiser le système de recherche et sortir des sentiers battus. Nous avons notamment proposé d'alléger les charges d'enseignement des maîtres de conférence en début de carrière et de leur allouer un crédittemps.

Pouvez-vous préciser ce que vous nous avez déclaré en commission, monsieur le ministre, reprenant - et nous nous en félicitons - cette proposition, et nous indiquer dans quelles conditions les maîtres de conférence nouvellement recrutés pourront bénéficier d'un crédit-temps leur permettant de concilier la préparation d'enseignements nouveaux, au service des étudiants, et le démarrage de travaux de recherche ? Comment allez-vous encourager l'accès des chercheurs et des enseignants-chercheurs aux différents métiers de la recherche durant leur parcours professionnel ? Nous avons également souhaité que des postes d'accueil pour enseignants-chercheurs soient réservés dans les EPST. Comment comptez-vous mener cette politique et pouvez-vous nous assurer que ces postes seront inscrits budgétairement dans la durée ? Combien de postes d'accueil seront réservés dans les EPST ? Comptez-vous favoriser l'ouverture internationale de notre dispositif de recherche en dégageant des postes supplémentaires pour l'accueil de scientifiques universitaires extérieurs dans les différents organismes ? Enfin, comment comptez-vous rendre aux ingénieurs, techniciens et administratifs leur place au coeur du système de recherche ? D'autre part, nous pensons que le soutien à l'INRIA n'est pas suffisant dans le cadre de l'actuel budget. Pour permettre de développer des recherches pluridisciplinaires, nous souhaitons que l'INRIA puisse bénéficier d'un effort particulier en matière de recrutement, cette année et dans les prochaines années. C'est à cette seule condition que nous pourrons atteindre la masse critique en intelligence logicielle, en sûreté des logiciels, en bioinformatique - discipline dont plusieurs rapporteurs ont parlé ce matin -, en télémédecine ou en calcul à haute performance.

M. Jean-Michel Dubernard.

Très juste !

M. Jean-Yves Le Déaut.

Enfin, je constate avec déception la place faite à la recherche en direction des pays en voie de développement. Les grands enjeux du futur concernent les pays du Sud. Or - et ce n'est pas du fait du ministère de la recherche - les errements de la politique française de coopération, son manque de perspective, les rapporteurs l'ont souligné, nécessitent le redémarrage de programmes de corecherche entre les pays du Nord et les pays du Sud. L'IRD et le CIRAD, mais aussi l es universités, doivent travailler plus étroitement ensemble. Ils doivent être le socle d'une nouvelle politique de coopération qui devrait faire partie des programmes prioritaires de la présidence française européenne dans un an.


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Quelles décisions comptez-vous prendre pour établir une véritable mobilité entre chercheurs du Nord et du Sud : bourses liées aux projets validés, accueil d'universitaires associés et envoi de jeunes chercheurs français sur le terrain ? Nous devons mieux associer universités et grands organismes de recherche, tirer le meilleur parti des compétences des doctorants, des enseignants-chercheurs et des chercheurs confirmés, soutenir l'émergence de nouvelles thématiques et valoriser les technologies innovantes pour u ne meilleure dynamique. Ce budget apporte des réponses encourageantes. Mais il est primordial pour nous d'amplifier cette dynamique pour que la France et l'Europe abordent en position de force les défis du futur.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Jacques Guyard.

M. Jacques Guyard.

Monsieur le président, monsieur l e ministre, mes chers collègues, j'aborderai deux thèmes : la professionnalisation de l'université et les choix en matière de recherche.

La professionnalisation de l'université est inséparable de sa démocratisation. Et je me trouve en opposition complète avec notre collègue Goasguen, qui vous reprochait de ne pas assez professionnaliser l'université. Vous l'avez, au contraire, clairement engagé dans cette voie. Le développement des IUT, celui, plus récent et sous votre impulsion, des instituts universitaires professionnalisés, la mise en place des mastères et la multiplication des DESS vont dans ce sens. Il faut continuer.

Je donnerai simplement une piste de travail concernant le statut et la place des professeurs associés. Il est actuellement quasiment impossible pour un professeur associé de diriger une formation de recherche. Or, dans un certain nombre de domaines, ils sont les seuls capables de le faire dans certaines universités. Il faut reconnaître leur place.

Le fait d'être issu de l'entreprise et de lui rester lié n'est pas un péché dans le monde universitaire.

Il faut également renforcer l'approvisionnement en étudiants scientifiques de l'enseignement supérieur mais ce problème concerne plus le second degré que l'enseignement supérieur. Nous y reviendrons à propos des enseignements scolaires.

La meilleure preuve que votre politique va dans le bon sens, monsieur le ministre, c'est que les universités nouvelles ont toutes des taux d'étudiants en formation en alternance ou en formation professionnalisée plus élevés que la moyenne des autres universités. C'est là que votre impulsion a été la plus efficace. C'est dans les banlieues et les régions les plus en difficulté que l'efficacité sociale de l'université est la plus grande.

Second thème : le choix des priorités dans le domaine de la recherche. Pour ne pas avoir d'ennuis, il faut continuer ce qui se faisait avant. Vous avez eu le courage de fixer des priorités claires dans le domaine de la recherche.

Certes, cela soulève des questions, mais dynamise la recherche. J'approuve tout à fait votre choix de faire des sciences du vivant une priorité. C'est en effet sur elles que repose, pour les dix ou vingt années qui viennent, une révolution scientifique et économique de même niveau que celle que nous connaissons actuellement avec les nouvelles technologies de l'information et de la communication. Il y a vingt ans, nous avons raté le train des nouvelles technologies de l'information et de la c ommunication au plan scientifique. Nous sommes aujourd'hui sur le point de réussir le passage en ce qui concerne les sciences du vivant. Les choix ont été faits ; les moyens ont été affectés. Le génopole d'Evry en est un bon exemple avec le réseau français et européen qui se crée autour de lui.

La recherche doit se prolonger dans l'université. Cela suppose que le glissement des chercheurs, des postes soit organisé, que la transversalité de la recherche et de l'enseignement se traduise dans les structures universitaires, ce qui n'est pas encore assez le cas. La recherche doit se prolonger dans l'industrie. Si vous avez fait un gros effort en la matière, il reste encore beaucoup à faire, en liaison d'ailleurs avec le ministère de l'économie et des finances, car le démarrage des entreprises créées par des chercheurs reste encore difficile. Les difficultés tiennent au fait que, malgré les moyens mis en place, les procédures de financement ne sont toujours pas suffisantes.

J'ajoute que la recherche scientifique et technique est aujourd'hui gênée par les mécanismes d'appel d'offres imposés aux chercheurs. Il est presque impossible aujourd'hui à un laboratoire de s'acheter un matériel expérimental ou un prototype. Les procédures d'appel d'offres constituent, dans ce domaine, un véritable blocage à l'innovation.

Je terminerai par un sujet dont on a beaucoup parlé, l'avenir de la recherche dans le secteur d'Orsay et de Saclay, principal secteur de recherches français, qui souffre incontestablement d'un vieillissement de sa population de chercheurs et d'un manque de perspectives. Je comprends tout à fait que les très grands équipements de recherche n'aient pas tous vocation à être implantés en France car ils sont financés au niveau européen. Mais ce secteur a besoin d'une perspective, monsieur le ministre.

Vous avez récemment nommé Jean-Jacques Duby pour faire émerger un projet fédérateur. Il y a d'autres grands domaines de recherche dans le secteur d'Orsay - je pense en particulier à l'optique et à l'optronique. Il est en tout cas nécessaire de donner une perspective à ce secteur, de remobiliser fortement un monde de chercheurs et d'universitaires autour d'un projet d'avenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

(M. Pierre-André Wiltzer remplace M. Patrick Ollier au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. PIERRE-ANDRÉ WILTZER,

vice-président

M. le président.

La parole est à M. Pierre Ducout.

M. Pierre Ducout.

Monsieur le ministre, je veux dire, en introduction, combien les membres du groupe parlementaire sur l'espace ont apprécié votre souci d'engager, avec la représentation nationale, un dialogue franc et direct, en préalable des discussions publiques. Nous avons été sensibles à ce geste et je souhaite, en leur nom, que ce dialogue de qualité puisse se pérenniser.

Certes, la discussion publique du projet de loi de finances relatif aux crédits de la recherche et de la technologie est un moment solennel, mais, au fur et à mesure des échanges, elle permet une meilleure compréhension des acteurs et des politiques engagées.

C'est le troisième projet de budget que vous présentez, monsieur le ministre, au cours de cette législature et je crois pouvoir, avec certains de mes collègues, de mieux en mieux apprécier et mettre en perspective les lignes de force de la politique que vous menez en matière spatiale


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et que nous partageons pour l'essentiel. Cette évolution nous offre l'occasion d'un débat plus en profondeur, ce dont nous pouvons tous nous satisfaire.

La représentation nationale est sensible à votre volonté de mettre en exergue « tout ce qui ne va pas » et de lutter contre. Mais, comme cela ressort de la plupart des interventions précédentes, nous pensons qu'au-delà de vos critiques justifiées, il manque à votre message une orientation plus positive qui permettrait à ceux qui vous écoutent de mieux comprendre le cap que vous vous fixez.

Depuis 1997, vous n'avez cessé de souligner la nécessité de réformer les grands établissements français dont vous avez la responsabilité, face aux évolutions des secteurs dans lesquels ils évoluent. Le CNES n'a pas fait exception. Nous prenons acte de la volonté de réforme qui appartient pleinement au ministre.

Nous prenons acte également de la méthode « forte » de pression financière que vous avez choisie pour ce faire, puisque les crédits du CNES connaissent cette année une nouvelle baisse de 160 millions de francs. Vous qualifiez cette baisse de « symbolique », mais elle n'en est pas moins réelle. Cette méthode est problement justifiée au regard d'une histoire tumultueuse avec la tutelle, même si beaucoup d'entre nous auraient préféré une autre voie sous le signe du dialogue.

Désormais, le message est clair. A vos différents intercoluteurs de le comprendre. Reste que la volonté de réforme ne se suffit pas à elle-même. Elle appelle l'expression de principes fondamentaux pour conduire ces évolutions, engager les changements et orienter les hommes.

Vous n'avez pas manqué de proposer ce cadre essentiel par un contrat d'objectifs sur trois ans qui doit s'accompagner, de notre point de vue, d'un engagement financier clair et pérenne de l'Etat.

Une première liste de dix objectifs a été élaborée. Cette liste est trop récente pour que nous puissions donner un avis précis, mais un sentiment émerge à nouveau selon lequel les orientations proposées sont encore trop vagues pour être efficacement mises en oeuvre. Fondamentalement, je crois utile de vous livrer, non pas en contraste mais en complémentarité, notre conception de ce qui doit conduire les réflexions de la direction du CNES.

Premier principe : recentrer le CNES autour des activités de recherche et d'innovation qui ne peuvent être déléguées à aucun autre acteur.

Deuxième principe : maintenir ses compétences de maître d'ouvrage pour les projets complexes innovants.

Troisième principe : favoriser le transfert vers l'industrie des programmes récurrents conduits jusqu'à présent par le CNES. On peut en effet s'interroger sur la pertinence de voir maintenir les programmes Spot ou Jason sous l'autorité de l'établissement, même si personne ne néglige leur apport scientifique. Peut-être cette démarche doit-elle être initiée par une plus grande liberté accordée aux filiales de l'établissement. Certaines pourraient même se voir pleinement confier leur propre avenir.

Quatrième principe : inviter le CNES à chercher des partenariats publics au-delà du seul secteur spatial. L'association du ministère des transports au programme Galileo est l'exception qui confirme la règle. Il nous semble impératif de rendre cette démarche plus systématique.

L'espace, chacun ici en convient, n'est pas qu'affaire de technologie, c'est aussi un enjeu de société auquel chaque ministère doit prendre sa part.

Cinquième principe : poursuivre et clairement renforcer l'action du CNES en matière de communication afin de valoriser le savoir-faire, en particulier auprès des petites et moyennes entreprises, et de sensibiliser le grand public aux enjeux du spatial. L'effort en la matière nous paraît encore insuffisant, malgré ceux fournis par le CNES et dont nous sommes pleinement conscients.

Monsieur le ministre, vous souhaitez que le CNES fasse des choix. Peut-être ces quelques principes lui permettront-ils, avec votre accord, de trouver une voie pour ce faire.

Enfin, ces évolutions ne peuvent se faire en dehors du contexte international et du cadre européen. Les coopérations internationales, comme celles conduites avec la NASA pour le programme marsien, doivent être maintenues et développées.

Le cadre européen est le niveau pertinent des enjeux économiques, de souveraineté et de culture, car en matière d'accès à l'espace, de télécommunications, de navigation ou de localisation, la concurrence avec les

Etats-Unis est forte et il y a une obligation de compétitivité. Mais il faut aussi que l'engagement public soit fort.

Par ailleurs, le CNES est aujourd'hui au coeur du projet de réseau des centres européens. Les discussions se font désormais de plus en plus fréquentes entre les organismes. Mais il nous paraît important de rappeler que s'il existe aujourd'hui une distinction quant à la géographie européenne en matière spatiale, l'évolution, à terme, s'inscrira dans le cadre communautaire.

Certes, l'Union doit être éprouvée pour pouvoir accueillir cette activité si particulière, mais nous souhaitons attirer votre attention sur les dangers de laisser la Commission avancer seule sur ce plan. Dès que l'Europe de la défense sera en oeuvre, l'espace suivra sans délai. Il faut préparer dès maintenant ces basculements.

La France présidera l'Union européenne au cours du second semestre 2000. Nous sommes convaincus de votre volonté de conduire, à cette occasion, une initiative d'envergure en matière spatiale. Soyez assuré de notre total soutien.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Christian Cuvilliez.

Un soutien méritoire !

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, c'est la troisième année que je présente devant vous ce projet de budget. Trois budgets, cela, qui dessine déjà un parcours, traduit aussi une cohérence. Pourtant, j'ai le sentiment d'un manque de dialogue : nous n'avons pas eu l'occasion de parler de la question en commission, tous ensemble.

M. Jean-Michel Dubernard.

Il fallait venir en commission des affaires sociales, monsieur le ministre !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Il fallait m'inviter, monsieur le député.

M. Jean-Michel Dubernard.

Vous l'avez été !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Je n'ai jamais refusé de venir devant une commission.

Beaucoup de choses dites par les rapporteurs et les intervenants auraient probablement gagné à être débattues, car il n'y a pas de désaccord de fond, simplement


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une méconnaissance de la politique de la recherche qui est menée. J'en suis sans doute responsable. Néanmoins, j'assume mes choix sans aucune ambiguïté.

D'abord, je crois que le regroupement dans un même ministère permet de mener des actions qui ne pouvaient l'être auparavant. Je pense notamment non seulement aux nouvelles technologies à l'école, quasiment inexistantes lorsque nous sommes arrivés, et dont le développement est maintenant assuré, avec compétence, par la direction de la technologie, mais aussi aux rapports entre technologie et médecine, entre autres.

M. Goasguen a parlé de « consensus », et je rebondirai sur cette idée sans polémique. Si nous sommes tous de bonne foi, ce que je suppose, on ne peut critiquer les créd its du budget de la recherche comme l'a fait M. Lasbordes. En effet, nous les avons augmentés de plus de 2 %, alors que les gouvernements successifs de M. Juppé les ont réduits de plus de 2 % !

M. Jean-Yves Le Déaut.

C'est vrai !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Ceux qui ont adopté des budgets ainsi réduits ne peuvent refuser de voter celui-ci sous prétexte que l'augmentation ne serait pas suffisante ! On ne peut avoir un consensus là-dessus.

M. Jean-Michel Dubernard.

La croissance n'était pas la même !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Quelques remarques pour commencer.

L'OCDE vient de publier un classement intégré « Education-Recherche-Nouvelles technologies ». Sur le plan budgétaire, la France occupe la première place avec la Suède, loin devant le Japon et les Etats-Unis. Je m'en réjouis, car c'est grâce à la volonté du gouvernement de Lionel Jospin que nous avons pu retrouver un tel niveau, mais ce n'est qu'un aspect quantitatif. Or, nous connaissons un problème qualitatif et, à ce propos, je citerai quatre faits significatifs.

Premièrement, cela fait trente-deux ans que nous n'avons pas obtenu de prix Nobel de biologie et de médecine et nous ne sommes pourtant pas un petit pays ! Deuxièmement, pour la création de médicaments nous sommes passés de la deuxième place, il y a vingt ans, à la huitième place.

Troisièmement, s'agissant de la création d'entreprises innovantes nous sommes le pays industrialisé le plus en retard.

Quatrièmement, le budget du CNRS, qui est pour tous l'établissement de recherche par excellence, est composé pour 85 % de salaires et pour 15 % de crédits de fonctionnement ou d'équipement. Si l'on extrapole, on constate qu'il n'y aura plus du tout de crédits d'équipement et de fonctionnement en 2015 ou 2016. On a laissé dériver ce budget. De plus, ce même CNRS répartit 85 % de ses crédits sur onze sites en France. Cela veut dire que le reste n'existe pas. Enfin, le secteur des nouvelles technologies de l'information et des communications n'est pas représenté au CNRS, alors que c'est celui qui crée le plus de richesses dans le monde. Cet organisme, qui est le plus gros, s'autoreproduit donc régionalement et thématiquement. Le problème est là ! Ce n'est pas une question de budget. Certains le trouvent insuffisant, mais il a été approuvé par le CSRT - conseil supérieur de la recherche et de la technologie -, qui représente tout le monde, par dix-huit voix, une abstention et un vote contre.

Premier défi à relever : il faut faire en sorte que la richesse de la science française alimente notre économie et qu'elle contribue à la croissance et à la création d'emplois. Ce gouvernement s'est attaqué à ce problème comme aucun autre ne l'avait fait jusqu'à maintenant, et je vais vous le prouver. Comme l'a montré le rapport Guillaume, les fonds publics étaient essentiellement dirigés vers les grandes entreprises : 85 % d'entre eux étaient répartis entre huit groupes industriels. La mobilité des chercheurs vers le monde économique était résiduelle. Les relations entre laboratoires et entreprises étaient encore empreintes de méfiance, se traduisant par une attitude qui nous est extrêmement préjudiciable. Qu'avons-nous fait ? D'abord, la somme versée par le FRT aux grands groupes est passée de plus de 200 millions de francs en 1996 à 90 millions en 1998, et elle continuera à diminuer. Ce chiffre ne correspond pas à une intention, c'est un bilan. Au lieu de donner de l'argent aux grandes entreprises, on en donne aux laboratoires et aux PMEPMI.

Ensuite, nous avons reconstitué un outil efficace d'intervention, le Fonds de la recherche technologique, dont le budget a été porté, en deux ans, de 412 à 900 millions de francs. Pour cela nous avons utilisé une méthode efficace de Jean-Pierre Chevènement, celle des fonds prioritaires. Des réseaux associant laboratoires et PME sont d ésormais financés par les grands groupes, qui ne reçoivent plus d'argent, et développent des produits et des procédés garants de la compétitivité de nos petites entreprises dans les secteurs de la génomique, des matériaux, des sciences et des technologies de l'information et de la communication.

Enfin, nous avons travaillé méthodiquement, avec D ominique Strauss-Kahn, pour qu'apparaissent dans notre pays des entreprises technologiques compétitives. La question du financement a été traitée : 600 millions de francs ont été dégagés pour favoriser le capital-risque et 200 millions ont été consacrés à la création de fonds d'amorçage et d'incubateurs. La loi sur l'innovation et la recherche, que la représentation nationale a votée presque à l'unanimité, ce dont je la remercie, a fait tomber tous les obstacles. Nous avons organisé un concours sur la c réation d'entreprises innovantes pour les jeunes : 2 000 demandes et 240 lauréats, à comparer avec les 320 créations d'entreprises innovantes en dix ans à partir de la recherche publique ! Eh bien oui, cet argent nous l'avons pris ailleurs pour le mettre là ! C'est cela une orientation budgétaire, c'est cela une politique ! Voilà ce que nous avons fait.

Deuxième défi à relever : rendre accessible la connaissance au plus grand nombre. Au début des années 90, nous avons relevé le défi du nombre grâce au plan Université 2000, monsieur Goasguen. Quand j'ai lancé ce plan, tout le monde riait. Je me souviens d'un président d'université qui me disait : « On n'a pas vu un sac de ciment sur un campus universitaire depuis dix ans, ce n'est pas maintenant que ça va commencer ». Eh bien, l'Etat et les collectivités territoriales ont dépensé 42 milliards pour rénover les universités de province. Malheureusement, Paris n'a pas participé à cet effort et vous savez pourquoi. Ce n'est pas l'Etat qui est à blâmer dans cette affaire ! Maintenant, notre enseignement supérieur est-il à niveau ? Non, l'effort est encore insuffisant. Il faut donc l'accentuer cet effort, mais on ne peut pas le faire en une seule fois.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 2 NOVEMBRE 1999

Quand nous sommes arrivés, vous le savez, le rythme des recrutements était de 1 200 par an. Nous avons procédé l'année dernière - et je le dis pour répondre à M. Leroy, qui se soucie autant que moi de l'emploi des jeunes - à 4 500 recrutements. Or 4 500 recrutements, c'est la moitié de la production des docteurs dans ce pays ! Nous poursuivrons cet effort, mais nous ne pouvons pas aller au-delà d'un certain nombre de recrutements. Dans certaines disciplines, en effet, les postes ne seraient pas pourvus parce que le vivier est insuffisant.

Nous avons mis en place le plan social étudiant. Vous en avez beaucoup parlé, et les chiffres sont assez éloquents. Je m'étendrai sur deux points.

Le premier, ce sont les bourses au mérite en faveur des enfants de famille modeste. Pour ceux qui ont obtenu une mention « bien » ou « très bien » au baccalauréat, nous avons inscrit au budget de cette année 400 bourses.

Nous allons maintenant cibler ces bourses sur les quartiers en difficulté, pour aider les enfants de famille modeste à réussir. L'élitisme républicain, c'est cela, et j'y suis attaché autant que d'autres.

Deuxièmement, quelqu'un a dit que le budget du CNOUS n'avait pas été voté. Mais ce n'est pas du tout contre le plan social étudiant ! Il n'a pas été voté tout simplement parce que les ressources du CNOUS étaient insuffisantes et que trois administrateurs de l'Etat étaient absents. Il s'en est fallu d'une voix.

Nous avons ouvert plusieurs chantiers.

Développement de la formation continue diplômante : vingt-trois universités sont ouvertes toute l'année, avec engagement de délivrer tous les diplômes en formation initiale et en formation continue. Nous allons poursuivre cet effort.

Expérimentations, dans le premier cycle, du travail en petits groupes : il s'agit d'améliorer le succès en premier cycle. Cela se fait dans treize universités et l'effort, là aussi, sera poursuivi.

On a parlé d'ouverture internationale. Mais oui, c'est nous qui avons été à l'origine de l'harmonisation européenne qui est en marche avec le slogan 3-5-8. Il faut savoir que les universités françaises décernent quatorze diplômes différents ! Quand nous essayons de faire venir un étudiant de Hong-kong ou d'Amérique du Sud, il ne comprend rien au système. Entre les DEUG, les DEUST, les DESS, les DUT, il ne s'y retrouve pas. Une simplification s'impose.

Nous ne perdons pas pour autant de vue la situation française. Nous avons rapproché grandes écoles et universités. Cette année, pour la première année, les grandes écoles décerneront le mastère. Et puis, c'est une première, un concours à l'Ecole polytechnique sera ouvert aux étudiants de faculté, sur dossier et sur entretien... et bien sûr au mérite, car on n'entre pas à l'Ecole polytechnique sans mérite.

C'est vous, messieurs de l'opposition, qui avez parlé de l'autonomie universitaire. Mais quand la droite était au pouvoir, elle a réduit l'autonomie universitaire en supprimant la politique contractuelle ! (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jacques Guyard.

Bien entendu !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Qui a supprimé la politique contractuelle ? Et qui a fait la recentralisation ? N ous avons donc rétabli la politique contractuelle, c omme nous avons rétabli l'autonomie dans la République et l'égalité républicaine.

Vous souhaitez l'ouverture de notre enseignement supérieur sur le monde ? Moi aussi. Maintenant, nous disposons du plan Université du troisième millénaire, qui permet justement de rétablir l'égalité républicaine en respectant l'excellence là où elle se trouve - parce que l'excellence ne se décrète pas.

Nous mettrons à peu près à égalité Etat et régions.

Mais, cette fois, il ne faudra pas oublier Paris. Les universités parisiennes sont dans un état lamentable.

M. Claude Goasguen.

En effet !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Vous le savez très bien, monsieur Goasguen, aussi bien que moi et peut-être mieux que moi, pour certains.

Il faut également veiller à corriger les inégalités territoriales. Des départements entiers, des académies entières sont désavantagés. On peut mesurer la qualité des universités françaises sur leurs publications et sur leur impact international. Or celles du Nord, de Normandie ou de Bretagne, qui ne sont pas moins bonnes que d'autres, sont désavantagées dans les moyens qui leur sont donnés.

Il faut rétablir cette égalité car rien ne justifie cette situation. U3M est fait pour ça.

U3M, c'est aussi un treillis de plates-formes technologiques dans les villes moyennes pour assurer le développement et l'irrigation complète du tissu économique grâce à la recherche et aux structures d'enseignement technologique, que ce soient les lycées professionnels, les IUT ou les BTS.

Enfin, les centres nationaux de recherche technologique associeront, dans un certain nombre de grandes villes, recherche publique et recherche privée, pour travailler ensemble.

Troisième défi : garantir la qualité de la science française. Nous avons une longue tradition de recherche scientifique de qualité. Cette position est-elle définitivement acquise ? Je vous répondrai sans démagogie : sûrement pas ! Quels sont les enjeux ? Notre appareil de recherche a vieilli. Mais plus encore, les jeunes ont du mal à s'y faire de la place. L'âge auquel on acquiert la « séniorité » n'a fait que croître dans notre système de recherche.

M. Jean-Yves Le Déaut.

Absolument !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Et cela dépasse de beaucoup les recrutements. Pourquoi certains jeunes Français restent à l'étranger ? Parce qu'ils peuvent y faire une proposition de recherche, constituer une équipe, créer quelque chose.

Notre appareil de recherche, organisé autour des grands organismes, a du mal à se redéployer vers les champs nouveaux du savoir. Je vous ai cité les nouvelles technologies de l'information mais je pourrais vous citer d'autres domaines : la cryptologie, la bio-informatique, la génomique, entre autres. Notre système est autoreproductif et notre recherche est encore trop éloignée de l'enseignement.

Comment y remédier ? En retrouvant ce que fut l'inspiration des deux moments où un grand effort a été consenti pour la recherche, à savoir le premier gouvernement du général de Gaulle et le premier gouvernement du président Mitterrand.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 2 NOVEMBRE 1999

Nous avons repris les mêmes outils, c'est-à-dire des fonds d'investissement qui permettent des actions prioritaires que les organismes ne peuvent pas engager. Vous critiquez la non-augmentation des crédits des organismes ; mais si c'était pour qu'ils fassent de l'autoreproduction, ce n'était pas la peine d'augmenter encore leur budget ! En revanche, les laboratoires vont recevoir des financements prioritaires. Les budgets des laboratoires en biologie et en nouvelles technologies de l'information vont augmenter de 15 à 20 % grâce au fonds national de la science ou au fonds de la recherche technologique.

Les ouvertures thématiques, c'est la génomique, la phy-s iologie, les nouvelles technologies de l'information, l'environnement. L'ouverture régionale, c'est le réseau des génopoles dans toute la France, et pas seulement à Paris, ce sont les centres nationaux de recherche technologique.

On me dit que ces fonds sont la manifestation de l'autoritarisme du ministre. Franchement, je trouve cela risible. Ce n'est pas moi qui gère ce fonds. Comme partout, 36 comités scientifiques répartissent les crédits et le ministre se contente de voir passer les crédits, comme cela a toujours été le cas auparavant.

En revanche, et je l'assume pleinement, il y a des priorités scientifiques. La biologie est prioritaire. Pour la première fois dans ce pays, elle n'est pas prioritaire dans les discours, elle est prioritaire dans les budgets...

Mme Geneviève Perrin-Gaillard et M. Jacques Guyard.

Très bien !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Oui, les nouvelles technologies de l'information sont prioritaires. Oui, l'étude de la planète et de l'environnement sont prioritaires. Pourquoi n'y a-il pas d'écologie quantitative au CNRS ? Il a fallu une action concertée pour l'obtenir.

Eh bien oui, telle est notre priorité par rapport à la priorité traditionnelle qui était la physique lourde. C'est vrai, et il est incontestable que nous avons fait des choix.

Vous avez abordé une question absolument légitime pour la représentation nationale. Ces fonds d'intervention doivent être transparents. C'est pourquoi je m'engage devant vous à fournir pour le 1er janvier une note d'information au Parlement sur leur utilisation complète, qu'il s'agisse du FNRT ou, du FNS - composition des commissions, distribution des crédits.

M. Christian Cuvilliez.

Très bien !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Vous pourrez alors vous faire une idée, critiquer...

M. Christian Cuvilliez.

Avoir un débat !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

... et avoir un débat. Je vous ferai tout à l'heure quelques suggestions à ce propos.

Car j'étudie moi aussi le fonctionnement de ce système compliqué.

Nous favorisons le rapprochement entre universités et organismes : mobilité des chercheurs, instauration du contrat unique, accords d'association. Le rapport CohenLe Déaut,...

M. Pierre Ducout.

Excellent !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

... qui est très intéressant, a dressé un bon bilan de la recherche et formulé un certain nombre de propositions. Tout à l'heure, je proposerai un amendement au nom du Gouvernement pour instituer une provision de 20 millions de francs afin d'alléger les jeunes maîtres de conférence de leur charge d'enseignement et leur permettre de faire des équipes de recherche.

Nous avons augmenté les moyens alloués aux équipes de recherche : 3,5 % de plus cette année sur le budget des organismes, auxquels viennent s'ajouter tous les fonds qui proviennent des contrats du fonds national de la science ou du fonds de la recherche technologique.

Nous consacrons par ailleurs aux laboratoires un budget destiné à combler leur retard en équipement milourd. Mais nous veillerons à faire en sorte que cet équipement ne soit pas la propriété d'un seul laboratoire, afin que tout le monde puisse s'en servir au niveau régional.

Comme M. Le Déaut l'a mentionné, nous avons mis en place un concours pour la création d'équipes de recherche. Là aussi, c'est intéressant : certains nous disaient que les jeunes étaient satisfaits. Mais un appel d'offre a été lancé pour savoir qui voulait créer une équipe autonome. Et il y a eu 2 000 demandes ! Malheureusement, on n'a pu en satisfaire que 100, avec le budget que nous avions. L'an prochain, nous l'augmenterons donc.

J'en viens aux très gros équipements. Depuis dix ans, alors que les moyens des équipes ont augmenté de 30 %, ceux consacrés aux gros équipements ont augmenté de 70 %. Aujourd'hui, ils représentent 4,6 milliards de francs et ils augmenteront automatiquement de 200 millions de francs. Vouliez-vous que je laisse mourir les équipes, les équipements des laboratoires et que je continue la politique aveugle menée depuis plusieurs années au profit des grands équipements, sous prétexte que c'est spectaculaire ? Eh bien non ! Mon choix va aux jeunes, aux équipes, à la biologie, par exemple.

Faut-il pour autant priver tel ou tel aspect de la recherche française d'un grand équipement ? Non ! Quelle est donc la solution ? C'est l'Europe ! Vous m'avez demandé pourquoi j'avais supprimé le comité des grands équipements. C'est qu'il était d'une efficacité redoutable : c'était le lobby des grands équipements qui s'autoreproduisait ! J'ai donc transporté ce très redoutable lobby au niveau européen. Nous créons un comité des gros équipements européens de manière à faire payer l'Europe et à libérer un peu plus d'argent pour nos chercheurs.

Oui, il y a une politique de la recherche ! Oui, il y a une ambition pour la recherche. Vous avez cité des exemples. Vous avez fait état de telles ou telles critiques.

Je vous fais tout de même remarquer que cette politique de la recherche est approuvée par Pierre-Gilles de Gennes, prix Nobel de physique, par Georges Charpak, prix Nobel de physique, par François Jacob, prix Nobel de biologie, par Jean Dausset, prix Nobel de biologie, par Jean-Marie Lehn, prix Nobel de chimie, par Maurice Allais, prix Nobel d'économie, par Guy Ourisson, président de l'Académie des sciences, et par François Gros, secrétaire perpétuel de l'Académie des sciences. Ce soutien en vaut beaucoup d'autres ! Je répondrai maintenant à plusieurs questions que vous avez posées, et ce, sans vouloir abuser de votre temps.

Comment rajeunir les effectifs ? Vous avez cité le Commissariat à l'énergie atomique. Il est vrai que, sur de nombreux points, le CEA est un exemple. Il a fixé la retraite à soixante ans. Faut-il le généraliser dans tous les


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 2 NOVEMBRE 1999

organismes de recherche ? Je pose la question, mais je n'ai pas la réponse. Voilà un bon sujet de débat à l'Assemblée nationale.

Cette année des réformes de structure seront apportées.

E lles porteront sur l'évaluation européenne de la recherche et sur la place qui revient aux jeunes. On ne doit pas être obligé de modifier la loi pour créer de nouvelles disciplines. Il faut enfin que les recrutements permettent la pluridisciplinarité. C'est un vrai problème.

J'informerai l'Assemblée nationale de ces réformes.

M. Jean-Michel Dubernard.

Merci, monsieur le ministre !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Sur les bibliothèques scientifiques et les bibliothèques universitaires, vous avez raison de vous faire du souci. Quand Lionel Jospin était ministre de l'éducation nationale, il avait confié une mission à un professeur du Collège de France, qui est un ami héraultais, André Miquel. En 1987, les bibliothèques universitaires ouvraient 40 heures par semaine ; en 1997, 50 heures ; en 1998, 52 heures. On en est à 54 heures ! 600 emplois y ont été créés, depuis notre arrivée. C'est peut-être encore insuffisant.

M. Claude Goasguen.

C'est vrai !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

L'effort n'en est pas moins considérable.

Nous avons créé une mission de la culture scientifique et technique, qui, nous l'espérons, permettra la diffusion, de cette culture, en liaison avec d'autres organismes, que ce soit l'Académie des sciences ou l'office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques. Il s'agit là d'un grand chantier. Il faut informer sinon, nous risquons de nous trouver dans des situations très difficiles lorsque nous devrons prendre des décisions sur des questions comme les OGM ou le nucléaire.

M. le Déaut se préoccupe de l'avenir des doctorants, moi aussi. Nous mettons progressivement en place uns chéma cohérent. En tout état de cause, près de 4 500 doctorants seront recrutés dans le secteur public.

En outre, le recrutement vers le privé va être amélioré.

Enfin, il ne faut pas oublier qu'un doctorat c'est aussi une formation pour faire autre chose. Ce fut l'un des thèmes des assises Chevènement : une formation pour la recherche mais aussi une formation par la recherche.

Nous envisageons donc, comme vous l'avez suggéré, la possibilité de permettre à des docteurs d'enseigner des disciplines qui sont, en général, déficitaires, je pense aux sciences naturelles et à la physique. Après avoir passé un concours, puisque les fonctionnaires ne sont recrutés que sur concours, et bénéficier d'une formation, ils pourraient devenir professeurs de l'enseignement secondaire. Une telle mesure nous permettrait de résoudre deux problèmes.

D'autres voies s'ouvrent également dans l'industrie M. Beffa est un exemple. On recrute des docteurs pour faire autre chose que de la recherche et cela se passe très bien.

Pour en finir sur ce sujet, il faut souligner que la F rance produit un nombre exceptionnel de doctorants : 11 000 par an, contre 10 000 au Japon. Je ne m'en plains pas. Mais il doit être clair que, dans ces conditions, l'avenir des doctorants n'est pas forcément de faire de la recherche, ils peuvent aussi irriguer d'autres secteurs.

S'agissant des professeurs associés, il y a des abus dans certains secteurs, et une structure trop rigide dans d'autres. Il faut donc engager une réflexion. Une mission sera vraisemblablement confiée à un parlementaire pour réfléchir à ce vrai problème. Le système des professeurs associés est un enrichissement mais il faut savoir en limiter les conditions.

Le CNES : oui, telle est bien la volonté du Gouvernement, la France doit garder une très grande ambition spatiale car la France est le moteur spatial de l'Europe - je m'en suis expliqué devant le groupe d'études sur l'industrie spatiale. Cela ne va pas sans un certain nombre de difficultés. Nous devons ainsi consentir un effort industriel considérable pour baisser nos prix. Il nous faut aussi redéfinir un certain nombre de nos projets. S'agissant d'Ariane, élément fondamental de notre politique, nous avons par exemple, été amenés à augmenter la puissance de son dernier étage. Sans doute avions-nous mal évalué les choses.

Mais nous voulons aussi que l'espace soit utile pour les Français et pour les Européens, ce qui n'a pas toujours été le cas, utile pour les télécommunications, pour l'enseignement - nous avons lancé un programme de téléenseignement - pour la médecine. A cet égard, n'est-il pas étrange que nous vendions de la télé-médecine aux Indiens sans la pratiquer chez nous ? Et je pourrais citer d'autres exemples. Voilà pourquoi ces rencontres, intitulées Société et espace et auxquelles les parlementaires sont conviés, sont très importantes pour la politique spatiale future.

J'en arrive enfin au synchrotron.

M. Christian Cuvilliez.

Vous avez gardé le meilleur pour la fin ! (Sourires.)

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Je suis attentif à ce que disent les députés, monsieur Cuvilliez.

Dans le passé, la politique menée a toujours consisté à pousser les très grands équipements sans faire de choix.

C'est le conseil des grands équipements qui décidait. Le résultat, c'est que la France arrivait au dernier rang des grands pays au niveau des investissements en biologie ou en médecine - il suffit de comparer nos chiffres avec ceux du budget américain pour comprendre. Il est évident qu'on ne peut pas décider d'un investissement sans le comparer. Telle est d'ailleurs la tâche des députés au cours du débat budgétaire.

S'agissant des très grands investissements, et donc du synchrotron, je tiens à préciser certains points. Je vous indique d'abord que, contrairement à ce que l'un d'entre vous a prétendu, je n'ai jamais participé à un comité qui aurait décidé quoi que ce soit dans ce domaine.

Quant aux crédits d'investissements prévus dans le plan, ils devraient être fixés pour la part de l'Etat à environ 4 milliards. Admettons que les régions mettent la même somme, nous disposerions de 8 milliards. Dans l'état actuel, compte tenu du fait que nous voulons réduire la part des très grands équipements, qui est déjà trop élevée - la moitié du budget -, nous avons estimé, après les gouvernements de M. Balladur et de M. Juppé, que nous devions renoncer à cet équipement.

Pour autant, nous n'avons pas arrêté un autre choix, même si un partenariat a été envisagé avec les Anglais. Je rappelle que la proposition dite SOLEIL ne comportait ni participation industrielle ni participation européenne.

Nous avons donc décidé de mettre en place un comité européen afin de faire le bilan de toutes les possibilités.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 2 NOVEMBRE 1999

Parallèlement, un rapport a été confié à M. Clavin. Il s'agissait de savoir si les besoins en rayonnement synchrotron pouvaient être satisfaits à l'échelon européen. N'oublions pas les chercheurs français à Berkeley, mais aussi à DESI en Allemagne. Il n'y a pas de nationalisme en ce domaine. M. Clavin est arrivé à la conclusion que nous n'étions pas dans un état d'urgence.

M. Patrick Leroy.

Le mieux serait de nous communiquer ce rapport !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Du reste, les Espagnols ont fait la même analyse. Ils ont renoncé à prévoir un synchrotron à Barcelone après avoir fait procéder à une étude des capacités. Quant à la Hollande, qui compte le plus grand nombre de prix Nobel par tête d'habitant, elle a également considéré qu'un tel investissement n'était pas nécessaire pour l'instant. Par conséquent, nous ne pouvions pas espérer une participation européenne.

M. Georges Sarre.

Et la Suisse ?

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Nos prédécesseurs avaient malheureusement refusé de faire un synchrotron avec la Suisse. Les Suisses l'ont donc fait tout seul, à leur grand regret.

M. Georges Sarre.

Oui, mais ils l'ont fait !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Certes, mais c'est un petit synchrotron, monsieur Sarre. C'est ce qui explique d'ailleurs leurs regrets.

Nous avons donc décidé de geler le projet SOLEIL par manque de moyens. C'est un problème budgétaire. Mais ce n'est pas une catastrophe. Le comité européen, dont je vous ai parlé, va évaluer et prévoir les équipements européens. Il se réunit d'ailleurs cette semaine à Paris. En outre, LURE va continuer à fonctionner pendant deux ou trois ans. Si au terme de cette période, il s'avérait - vous avez mentionné les besoins en biologie, mais je vous rappelle sans vouloir polémiquer que le projet SOLEIL initial ne prévoyait rien en la matière - que les synchrotrons accessibles aux chercheurs français sont saturés et qu'on est alors en mesure de mobiliser des énergies européennes - Espagne, Hollande, Belgique, pays Scandinaves - on rouvrira le dossier SOLEIL. Je vous en donne ma parole.

Bien sûr, je ne suis pas opposé à ce qu'on installe des appareils européens en France. J'espère en attirer le plus possible. N'oubliez pas toutefois que l'ESRF est déjà à Grenoble. Tout comme la pile à haut flux. Le Centre de l'ESA est à Paris. Certes, le CERN est à Genève, mais 42 % de Français y travaillent et les trois quarts de l'anneau sont en France. Il faudra bien que les autres pays européens bénéficient aussi de ces installations.

Sinon ce sera franco-européen. (Sourires.)

Je vais vous montrer, avec deux exemples à l'appui, qu'en la matière je suis cohérent.

Premier exemple, la pile à neutrons européenne. Elle a été installée à Grenoble. Mais, comme les Parisiens n'étaient pas contents, on en a construit une autre à Paris, ORPHÉE. Or, cette pile n'est pas utilisée à plein.

On m'a donc proposé de fermer la moitié de l'installation. Eh bien, dans un souci de cohérence et de respect de l'argent public, je me suis rendu en Espagne et au Portugal pour essayer d'européaniser cette pile et d'éviter ainsi la fermeture. Fermer une pile quatre ans après l'avoir construite, relève d'une drôle de méthode, à mon sens ! Deuxième exemple, l'accélérateur d'ions lourds installé à Caen. Là encore, plutôt que de fermer GANIL, nous essayons de l'européaniser.

C'est donc une politique cohérente. Il s'agit de mutualiser les grands équipements au niveau européen et d'utiliser l'argent national pour aider les jeunes, les laboratoires, les disciplines nouvelles.

Je terminerai par une proposition. Il me semble, en effet, utile de tenir, avec les députés et les sénateurs qui s'intéressent aux problèmes de recherche, des rencontres informelles afin de les informer pleinement de ce qui se fait en matière de politique de recherche et d'enseignement supérieur. Vous pourriez ainsi, mesdames, messieurs, me faire part de vos critiques ou de vos suggestions en dehors des seuls débats budgétaires ou des questions au Gouvernement. J'y suis prêt. D'ailleurs, personne ne peut m'accuser de ne pas avoir accepté une confrontation ou une discussion sur la politique de recherche.

Telle est donc mesdames, messieurs, la politique ambitieuse de recherche et de réorientation budgétaire que nous menons. Je ne doute pas que nous en verrons l'effet concret dans quelques années. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Mes chers collègues, monsieur le ministre, si vous êtes d'accord, nous pourrions terminer l'examen de ce budget cet après-midi.

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. D'accord.

M. Georges Sarre. Très bien !

M. le président.

Nous en arrivons aux questions.

Je vous rappelle que les questions doivent être posées en deux minutes, le Gouvernement disposant de trois minutes pour répondre.

Pour le groupe du Rassemblement pour la République, la parole est à M. Bruno Bourg-Broc.

M. Bruno Bourg-Broc. Monsieur le ministre, ma question porte sur les problèmes concernant les flux d'étudiants dans les premiers cycles. L'enseignement supérieur français compte principalement trois filières : les DEUG, les classes préparatoires aux grandes écoles et les BTS et IUT. Et ces trois filières ont des spécificités bien précises.

Les DEUG ont pour finalité première la poursuite d'études, les classes préparatoires, comme leur nom l'indique, celle de préparer aux grandes écoles, et les IUTBTS, filière courte par excellence, préparent théoriquement à l'entrée dans la vie active.

Or, depuis plusieurs années, on assiste fréquemment à une inversion des flux d'étudiants. Pour schématiser, les meilleurs vont en « classe prépa », ceux qui n'ont pu y entrer vont en IUT, voire en BTS, quant aux autres, ils s'inscrivent en DEUG. En outre, la plupart des élèves qui entrent en IUT ou BTS reviennent ensuite dans les filières universitaires traditionnelles pour poursuivre des études.

Peu à peu, les IUT se transforment donc en premier cycle et ne sont plus perçues comme des filières courtes directement professionnalisantes. De plus, désormais, ce sont des bacheliers généraux qui entrent le plus souvent en BTS ou en IUT, trustant la plupart des places au détriment des bacs technologiques et professionnels qui se retrouvent ainsi en DEUG, filière pourtant totalement inadaptée à leur profil. Il est à craindre que la création prochaine d'une licence professionnelle, qui est, en soi, une bonne chose, ne modifiera pas cet état de choses.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 2 NOVEMBRE 1999

Si chacun convient qu'il serait pour le moins anormal d'empêcher les étudiants d'IUT et de BTS de poursuivre des études, il n'en demeure pas moins qu'il y a là un réel problème. Que comptez-vous faire, monsieur le ministre ? Avez-vous prévu des mesures concrètes pour remédier à cet état de fait dans le présent budget ?

M. le président.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Monsieur le député, vous avez soulevé un vrai problème. Je n'ai pas grand-chose à ajouter à votre analyse, elle est parfaitement exacte. Et je n'ai pas de solution magique.

Simplement, nous allons éviter, dans le plan U3M, de favoriser les IUT implantés dans les universités car cette proximité tend à induire la poursuite des études alors que les universités délocalisées sont davantage tournées vers l'emploi. Nous commençons également à instituer des conditions de quota dans les IUT pour les bacheliers venant du secteur technologique. Mais c'est difficile.

Nous tentons enfin, par le biais de la réforme des prog rammes scientifiques du secondaire, d'endiguer la décroissance des étudiants scientifiques, qui est catastrophique.

Il va de soi qu'il s'agit là d'une action à long terme.

Par ailleurs, la possibilité ouverte aux élèves d'université d'intégrer les grandes écoles sur examen après la licence, et la création de licence professionnalisée, qui favorisera l'entrée sur le marché de l'emploi, pourront jouer un rôle complémentaire.

Voici pour terminer une indication quantitative plutôt réconfortante : la durée des études semble diminuer depuis un an, du fait d'une tendance des étudiants à rentrer plus tôt dans le monde professionnel. Je ne peux pas vous en dire plus, monsieur le député. Quand j'ai des réponses, je vous les donne, quand je n'en ai pas, je vous le dis aussi.

M. le président.

La parole est à M. Pierre Lasbordes.

M. Pierre Lasbordes.

Monsieur le ministre, vous nous avez, à plusieurs reprises, fait part de vos interrogations sur la pertinence d'un flux annuel atteignant 11 000 docteurs d'université, comme c'est actuellement le cas.

P ourriez-vous nous indiquer votre objectif en la matière et les mesures que vous entendez prendre pour l'atteindre, afin que tous ces jeunes docteurs réussissent leur insertion professionnelle ?

M. le président.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Monsieur le député, je vous ai dit tout à l'heure que je me proposais de débattre avec vous de ce sujet en commission dans le courant de l'année. Ce débat, je vous le promets ; nous mettrons au point des scénarios et nous essaierons de voir ensemble ce qu'il est possible de faire.

Je suis, je vous l'avoue, déchiré entre deux exigences.

D'un côté, je considère que c'est une chance pour un pays que d'avoir beaucoup de docteurs ; en réduire le nombre n'est donc pas souhaitable. De l'autre, nous ne devons pas en faire des chômeurs. Il faut donc ouvrir de nouvelles possibilités.

L'ouverture, on peut la trouver dans certains secteurs de l'enseignement secondaire. Prenons un exemple que je connais un peu : la biologie. Bon nombre d'étudiants qui se sont lancés dans une thèse de biologie découvrent par la suite qu'ils n'ont pas véritablement de vocation pour la recherche. Or nous connaissons un déficit considérable de professeurs de biologie dans le secondaire. Nous pourrions essayer de trouver une solution de ce côté-là. Le secteur tertiaire peut également offrir des possibilités d'emplois. Tout cela, je vous propose de l'étudier et d'en discuter ensemble ; c'est un vaste problème et qui intéresse tout le monde.

M. le président.

La parole est à M. Bruno Bourg-Broc, pour une seconde question.

M. Bruno Bourg-Broc.

Monsieur le ministre, le recteur d'académie de Bordeaux vient de présenter ses propositions sur l'évaluation dans le système éducatif. Chacun reconnaît que notre système d'enseignement supérieur et plus particulièrement nos universités manquent cruellement d'une évaluation digne de ce nom.

L'absence d'une réelle évaluation, régulièrement actualisée, n'est pas sans poser de sérieux problèmes, qu'il s'agisse de notre compétitivité internationale ou pour notre capacité à rendre une plus grande autonomie aux universités. Or votre budget ne semble rien prévoir en la matière. Pourquoi ? Quand allez-vous réformer le CNE ? Quand allez-vous véritablement créer une agence indépendante dotée des moyens budgétaires permettant de procéder aux évaluations nécessaires ?

M. le président.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Monsieur le député, sans doute pensez-vous que ce secteur est caractérisé par une inaction du ministre...

M. Bruno Bourg-Broc.

Je n'ai pas dit cela.

M. le ministre de l'éducation nationale, de lar echerche et de la technologie.

Pardonnez-moi de prendre les choses telles qu'elles sont. Certaines critiques ne sont pas justifiées, mais je veux bien admettre qu'elles aient une apparence de justification. Aussi vais-je vous expliquer exactement notre position.

Des comités d'évaluation, on en a créé des tas au fil des ans, sous des ministres de droite comme de gauche.

En fait, personne ne voulait d'une vraie évaluation. Parce que la vraie évaluation est comparative, y compris sur le plan international, et si elle gratifie certains, elle fait mal à d'autres. Et comme personne ne veut faire de mal à personne, on se contente de comités qui font des rapports

« tout le monde est beau, tout le monde est gentil ». Je vous le dis tout net : je n'ai pas envie de refaire ça et de créer un comité de plus.

C'est donc que je ne fais rien, me direz-vous ? Non.

J'ai fait quelques petites choses, mais assez discrètes.

Tout d'abord, j'ai demandé au CNE de mener une évaluation comparative pour la pharmacie. Il a classé les unités de pharmacie en A, B, C, D. C'était la première fois ; les résultats ont été très encourageants. Je m'attendais à recevoir des lettres de protestations des universités classées en D ; pas du tout. Elles ont trouvé que si elles avaient été classées ainsi, c'est qu'elles n'étaient pas très bonnes et qu'il leur fallait réagir.

Après cette première expérience positive, nous allons voir maintenant ce qu'elle donne en médecine. Si cela est bien accepté, nous poursuivrons les évaluations comparatives par le CNE.

Deuxièmement, nous avons mené une étude sur les

« citations index », c'est-à-dire les auteurs cités dans les disciplines scientifiques - cela ne marche pas pour les disciplines littéraires. Cette enquête n'est pas complètement terminée ; dès qu'elle le sera, nous la rendrons publique, discipline par discipline.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 2 NOVEMBRE 1999

J'en ai toutefois une première synthèse et je puis d'ores et déjà vous indiquer que la France est remarquablement placée dans certaines disciplines. Aussi, je vous en donne la primeur, dans les mathématiques, l'auteur le plus cité dans le monde depuis dix-sept ans est un Français. C'est proprement extraordinaire. Mais ce n'est le cas dans toutes les disciplines... Quoi qu'il en soit, cette enquête permettra à chaque université de se situer par rapport aux autres.

Troisièmement, j'ai demandé à M. Papon, ancien directeur général du CNRS et ancien président de l'IFREMER, actuel membre d'un des offices d'évaluations de me présenter une proposition sur la création d'une éventuelle agence. Je n'ai encore pris aucune décision en la matière : l'évaluation, je le répète, est d'abord une affaire de volonté.

Quatrièmement enfin, j'ai obligé chaque organisme à se doter de ce qu'on appelle excusez-moi du franglais un visiting committee , c'est-à-dire d'un comité composé de personnalités extérieures et étrangères et qui fait un rapport. Un rapport a ainsi été rédigé sur le CNRS et remis à sa direction. Un autre est actuellement en cours sur l'INSERM. Tous les organismes seront évalués de la sorte.

Nous nous acheminons ainsi vers un standard international de l'évaluation. Mais, vous le savez bien, si tout le monde parle d'évaluation, il est plus difficile de la faire entrer dans les faits.

M. le président.

La parole est à M. Pierre Lasbordes, pour une seconde question.

M. Pierre Lasbordes.

Monsieur le ministre, vous nous avez indiqué à plusieurs reprises le poids inacceptable des rémunérations salariales dans les EPST en particulier au CNRS. Vous êtes même allé jusqu'à dire qu'en 2015 il n'y aurait plus de crédits disponibles pour l'équipement.

Comment pensez-vous éviter cette étreinte fatale ? Une réforme profonde du CNRS peut-elle apporter la solution ? Si oui, pouvez-vous nous en donner rapidement les grandes lignes ?

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Monsieur le député, vous comprendrez que je ne puisse vous parler des grands principes de réforme du CNRS à cette heure tardive.

Mais vous aurez compris pourquoi, par exemple, nous ne créerons pas davantage de postes nouveaux cette année.

En effet, tant que je n'aurai pas trouvé une solution à ce déséquilibre, je le dis gentiment à Jean-Yves Le Déaut et à Pierre Cohen, il ne serait pas raisonnable de continuer à multiplier les créations de postes. Il nous faut d'abord résoudre cette quadrature du cercle.

Le CEA, qui était dans cette même situation, a rétabli l'équilibre en jouant cinquante-cinquante, en appliquant la retraite à soixante ans et en fabriquant des mises à retraite. Mais, je vous le dis en toute franchise, je ne suis pas vraiment décidé à reprendre cette solution. Nous allons essayer de l'étudier, mais c'est, à mes yeux, une perspective tragique. Lorsque je vous dis que notre budget de la recherche est parti petit à petit dans de telles dérives, c'est malheureusement la réalité. Et ce n'est pas 0,5 % ou 1 % d'augmentation qui y changerait quoi que ce soit. Il nous faut nous attaquer à ce problème et ce n'est évidemment pas facile.

M. le président.

Pour le groupe Radical, Citoyen et Vert, la parole est à Mme Marie-Hélène Aubert.

Mme Marie-Hélène Aubert.

Monsieur le ministre, je voudrais attirer votre attention sur une question chère aux écologistes : l'étude de la mer et des océans. Il s'agit des moyens de l'IFREMER et notamment de la flotte océanographique hauturière.

Monsieur le ministre, notre recherche océanographique est réputée. La flotte de l'IFREMER sert au secteur universitaire, à l'ORSTOM, au CNRS.

A titre d'exemple, le navire Thalassa sert à étudier les stocks de pêche qui permettent de déterminer les quotas, les campagnes sur la recherche fondamentale océanographique s'intéressent aux grands fonds qui constituent les deux tiers de l'océan. Ces recherches servent à l'écologie des grands fonds. La compétence de la France est reconnue dans ce domaine.

L'IFREMER gère pour l'ensemble de la communauté scientifique française la flotte océanographique hauturière, soit à ce jour quatre navires.

Un navire ayant une durée de vie de vingt-cinq ans en moyenne, l'IFREMER avait en toute logique préparé un plan de renouvellement de la flotte. Rédigé en 1994, alors qu'il lui restait encore cinq navires hauturiers - on en comptait huit en 1998 -, ce plan prévoyait la vente d'un navire - ce qui a été fait -, la modernisation du Suroît , qui se termine, mais surtout il prévoyait le remplacement en 2000 du Nadir , navire support des engins d'intervention sous-marine, les engins habités Nautile et Cyana et le robot de grande profondeur Victor. Le Nadir a atteint les vingt-cinq ans et est devenu totalement obsolète.

Nous sommes le seul pays européen a posséder de tels engins d'intervention sous-marine, parmi les plus performants au monde.

Pour réaliser son plan de renouvellement de la flotte, une ligne budgétaire spécifique était abondée d'environ 50 millions de francs chaque année, en accord avec les ministères de la recherche et du budget. En 1999, ce budget a été retiré à l'IFREMER et le budget 2000 montre qu'il n'y aura toujours pas de financement du plan de renouvellement de la flotte. Le budget de l'IFREMER a chuté d'environ 5 % en AP en 1999 et il baisse encore d'environ 5 % en CP en 2000.

Il faut savoir que les océanographes français n'ont pas attendu les incitations ministérielles pour travailler avec l eurs homologues européens, voire mondiaux. L'IFREMER a déjà passé un accord avec les Anglais et les Allemands pour l'échange de ce que l'on appelle les

« temps bateaux ».

Il y a urgence a construire un navire support d'engins, car aujourd'hui, l'IFREMER se retrouve dans l'incapacité de mettre en oeuvre à la fois le Nautile et le robot Victor.

Le Nautile va être stoppé à partir de mi-2000 jusqu'à fin 2001. Par ailleurs, ni l' Atalante ni le Thalassa ne sont capables de mettre en oeuvre le Victor de manière optimale. De ce fait, des campagnes importantes ne pourront être menées à bien.

Monsieur le ministre, comment comptez-vous assurer le développement des recherches de l'IFREMER, extrêmement utiles et réputées dans le monde entier ?

M. Christian Cuvilliez.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Madame la députée, vous évoquez un problème sérieux et difficile, mais je voudrais le replacer dans un contexte plus général.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 2 NOVEMBRE 1999

Il faut d'abord savoir que les bateaux océanographiques coûtent cher à la fabrication - environ 400 millions de francs -, mais également très cher en fonctionnement, de l'ordre de 100 000 à 200 000 francs par jour. Ce qui explique que les bateaux océanographiques du monde entier, et particulièrement en Europe, restent plus de trois ou quatre mois par an à quai, par manque de crédits de fonctionnement. Il est donc indispensable de procéder là aussi à une rationalisation à l'échelle européenne, et pas seulement par le biais d'échanges de missions. Il y en a déjà un peu, mais pas suffisamment. C'est pourquoi une réunion est prévue à la fin du mois pour examiner la situation, car nos partenaires anglais, allemands et italiens sont en butte à un problème exactement identique.

Un deuxième problème se pose pour nous, Français : nous avons un autre bateau, mais celui-ci appartient aux Terres australes et antarctiques françaises, c'est-à-dire à un autre ministère. Il est utilisable, mais utilisé seulement six mois par an. Il faut déjà examiner la situation de ce navire.

Troisièmement, le même problème se pose pour le service hydrographique de la marine, qui lui aussi a besoin de changer de bateau.

Nous sommes en train d'examiner toutes ces questions avec soin et je vous tiendrai au courant des solutions qui seront retenues. Dans ce domaine également, nous ne pouvons multiplier les investissements sans chercher à les optimiser ; le rôle d'un gouvernement est de gérer l'argent public au mieux. Croyez bien que ce secteur m'est très cher ; j'y ai beaucoup travaillé. Mais je n'entends pas traiter ce domaine-là différemment d'un autre.

Nous avons l'intention de mener une politique océanographique très vigoureuse. On ne s'en était guère préoccupé jusqu'à présent. Vous dites que les équipes françaisess ont réputées ; je peux à l'inverse relever certains domaines où nous souffrons d'un déficit considérable, faute d'y avoir consacré des moyens budgétaires depuis des années. Dans certaines disciplines, on ne compte plus que deux ou trois thèses ; elles sont tombées dans la déshérence la plus totale. L'océanographie a besoin d'une relance générale. Vous y êtes attentive ; moi aussi. J'aurai probablement l'occasion de m'exprimer sur ce domaine dans un futur qui ne devrait pas être trop lointain.

M. le président.

La parole est à Mme Huguette Bello.

Mme Huguette Bello.

Monsieur le ministre, vous avez annoncé, en juin dernier, le lancement de RENATER 2, c'est-à-dire de la nouvelle génération du réseau pour la technologie, l'enseignement et la recherche.

RENATER 2 va offrir aux enseignants, aux chercheurs et, plus généralement aux acteurs publics et privés du développement technologique des formes de travail nouvelles et des applications particulièrement innovantes, rendues possibles par le transport en temps réel d'importants volumes de données, la voix et l'image animée notamment.

Les régions métropolitaines desservies par ce nouveau réseau disposeront de moyens de communication performants et à haut débit qui placeront RENATER 2 parmi les réseaux les plus rapides du monde.

Pour des raisons d'ordre essentiellement budgétaire, les départements d'outre-mer ne bénéficeront pas de ces avancées technologiques. En raison de la distance, qui accroît le coût du raccordement, ils seront dotés de capacités beaucoup moins importantes. Le résultat est que, à dotation financière équivalente, ils seront forcément bien moins équipés. La Réunion, dont les équipements, dans la configuration actuelle, enregistrent un débit vingt fois moins élevé que ceux des régions métropolitaines, ne pourra, avec RENATER 2, que voir se creuser davantage encore son retard en matière de diffusion des nouvelles technologies dans le domaine esentiel de l'éducation et de la recherche.

S ans doute, comme vous l'affirmez, monsieur le ministre, l'excellence ne se décrète-t-elle pas. Vous m'accorderez pourtant qu'elle doit être organisée et favorisée.

A la Réunion, elle risque bel et bien d'être contrariée.

Nous savons désormais quel rôle les nouvelles technologies de l'information et de la communication jouent dans le développement. Nous devons donc nous montrer attentifs au très grave handicap dont pourrait souffrir notre région si un raisonnement essentiellement fondé sur des données financières reléguait au second plan les notions de service public, d'aménagement du territoire et d'innovation.

Nous souhaitons donc que les chercheurs et les enseignants de la Réunion soient équipés d'infrastructures aussi performantes que celles dont bénéficieront leurs homologues métropolitains.

M. le président.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Vous avez parfaitement raison, madame la députée. Je vous réponds sans gêne aucune que la Réunion sera bien reliée à RENATER, comme tous les autres départements d'outre-mer, et de la même manière que les départements de métropole. Nous devons toutefois opérer par étape. En octobre 1998, vous le savez, nous avons déjà mis fin à la situation de saturation que rencontraient les utilisateurs de la Réunion.

Grâce à une liaison satellite mise en place par France Télécom, nous avons porté le débit de liaison à 512 kilobits par seconde, aux frais du GIP RENATER. C'était une solution d'urgence. Nous allons relier petit à petit la Réunion à RENATER ; il nous faudra un certain temps pour y parvenir. Pour les Antilles, c'est plus facile du fait de la proximité du réseau américain, mais je n'ai pas du tout l'intention de laisser la Réunion de côté.

J'ajoute que l'université de la Réunion est une université de qualité, comme je l'ai récemment dit à mon collègue le ministre sud-africain, qui doit m'accompagner à la Réunion pour essayer d'établir des liens directs entre l'université de la Réunion et les universités sud-africaines.

Croyez bien, madame la députée, que je n'ai aucun état d'âme sur ce problème.

M. le président.

Pour le groupe UDF, la parole est à

M. Jean-Pierre Foucher.

M. Jean-Pierre Foucher.

Monsieur le ministre, vous envisagez de réformer les études médicales, odontologiques et pharmaceutiques afin de régler, comme vousmême l'avez déclaré, le problème du gâchis humain provoqué par le concours de fin de première année de médecine et de pharmacie. Un projet présenté par vos services propose la création d'une licence santé à laquelle pourrait prétendre tout étudiant titulaire d'un DEUG, quel qu'il soit, pourvu que ce DEUG ait été obtenu en deux ans et avec mention. A la fin de cette licence, un concours classant conditionnerait le passage dans les filières médecine, chirurgie dentaire et pharmacie officinale. Ainsi, après trois années d'études, de nombreux étudiants se retrouveraient laissés de côté. Le gâchis humain serait le même, à ceci près que les étudiants auraient perdu trois ans au lieu de deux... Le concours classant ne permettra pas un vrai choix de carrière de la part de l'étudiant pour sa car-


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rière. Pour la pharmacie, le maintien du diplôme semble compromis. En fait, pour l'ensemble des étudiants, le cursus ne commencerait véritablement qu'à bac +

3. Aux dernières nouvelles, il semblerait, monsieur le ministre, que vous ayez pris en compte les remarques qu'ont suscitées vos propositions quant à la professionnalisation des études et au souhait de voir les étudiants intégrer le plus vite possible l'une des trois filières.

Monsieur le ministre, quelles sont vos intentions exactes ? Entendez-vous mener cette réforme dans la concertation ?

M. le président.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Monsieur le député, vous vous emballez un peu ! Nous n'en sommes pas là ! Nous allons effectivement créer une commission de réforme des études médicales. C'est vrai, nous avons la volonté de mettre fin au gâchis qui consiste à recevoir un étudiant sur dix et à laisser les neuf autres sur le carreau.

En outre, nous souhaitons que la formation médicale comporte des périodes communes où l'on apprenne des disciplines comme l'économie de la santé, l'éthique, la technologie appliquée à toutes les professions de santé, un peu de droit de la santé, par exemple.

Enfin, nous défendons l'idée selon laquelle, comme cela se fait dans beaucoup d'autres pays, un très bon étudiant puisse s'orienter vers des études médicales après avoir fait un premier cycle sans enseignement de biologie, à condition qu'il soit très bon. Il s'agit d'abord d'attirer vers la médecine le plus possible de bons élèves, mais également de promouvoir des secteurs entiers où la France est en train de prendre un retard considérable, comme le droit médical ou l'économie de la santé, à savoir des disciplines intermédiaires.

Ce que vous évoquez est trop précis. Nous sommes pour l'instant très en amont. Du reste, dans le même temps où cette commission de médecine va se mettre en place, est constituée aussi une commission sur la réforme des études de droit, mais personne n'en a parlé parce que cela se déroulera normalement. Aucune décision n'est prise, aucun projet n'est élaboré.

M. Jean-Pierre Foucher.

Mais si !

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Pas du tout ! Il faut bien tester des idées. C'est ce qui est fait, comme Bernard Kouchner l'a fait il y a quelques mois. Mais un projet est quelque chose qui est rédigé et qui a une logique. Il n'y a rien de tel.

Par conséquent, je le répète, votre question est importante mais elle est prématurée. Les choses se feront comme d'habitude en consultant les différentes personnes et les différents secteurs concernés.

M. le président.

Nous en avons terminé avec les questions.

ÉDUCATION NATIONALE,

RECHERCHE ET TECHNOLOGIE

II. Enseignement supérieur

M. le président.

J'appelle les crédits inscrits à la ligne

« Education nationale, recherche et technologie » :

« II. Enseignement supérieur » ÉTAT B Répartition des crédits applicables aux dépenses ordinaires des services civils (mesures nouvelles)

« Titre III : 516 104 326 francs ;

« Titre IV : 45 704 374 francs. »

ÉTAT C Répartition des autorisations de programme et des crédits de paiement applicables aux dépenses en capital des services civils (mesures nouvelles) TITRE V. INVESTISSEMENTS EXÉCUTÉS PAR L'ÉTAT

« Autorisations de programme : 700 000 000 francs ;

« Crédits de paiement : 210 000 000 francs. »

TITRE VI. SUBVENTIONS D'INVESTISSEMENT ACCORDÉES PAR L'ÉTAT

« Autorisations de programme : 5 201 060 000 francs ;

« Crédits de paiement : 3 141 260 000 francs. »

Le Gouvernement a présenté un amendement, no 68, ainsi rédigé :

« Sur le titre III de l'état B concernant l'éducation nationale, la recherche et la technologie :

« II. - Enseignement supérieur :

« Réduire les crédits de dépenses ordinaires de 15 000 000 francs ;

« Majorer les crédits de dépenses ordinaires de 15 000 000 francs. »

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, les auteurs du rapport

« Priorité à la recherche », M. Pierre Cohen et M. JeanYves Le Déaut, députés, estiment qu'il est nécessaire de donner, dans certains cas, plus de souplesse à la répartition des charges entre enseignement et recherche au début de la carrière des jeunes maîtres de conférence. Il c onvient d'examiner soigneusement les conséquences d'une telle mesure et d'en définir précisément les modalités.

Le rapport dit Cohen-Le Déaut fait une proposition intéressante, qui sera examinée dans un cadre global, intégrant le cas échéant d'autres mesures statutaires concernant la mobilité des chercheurs. L'objectif d'une mise en oeuvre du dispositif à la rentrée 2000 est poursuivi. A cet effet, il est proposé d'inscrire une provision de 15 millions de francs afin d'engager la mise en oeuvre de cette mesure, selon les modalités qui font actuellement l'objet d'une concertation. C'est pourquoi il est demandé l'ouverture d'un crédit de 15 millions de francs sur le chapitre 31-96, par diminution de 15 millions de francs des crédits du chapitre 31-11.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Alain Claeys, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan pour l'enseignement supérieur.

La commission donne son accord. Nous veillerons à l'application du dispositif.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 2 NOVEMBRE 1999

M. Alain Cacheux.

Très bien !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

68. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix le titre III, modifié par l'amendement no

68.

M. Christian Cuvilliez.

Abstention du groupe communiste sur l'ensemble des votes pour les crédits de l'enseignement supérieur.

(Le titre III, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix le titre IV.

(Le titre IV est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre V.

(Les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre V sont adoptés.)

M. le président.

Je mets aux voix les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre VI.

(Les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre VI sont adoptés.)

III. Recherche et technologie

M. le président.

J'appelle maintenant les crédits inscrits à la ligne « Education nationale, recherche et technologie ».

ÉTAT B Répartition des crédits applicables aux dépenses ordinaires des services civils (mesures nouvelles)

Titre III : 234 455 000 francs.

Titre IV : 577 374 000 francs.

ÉTAT C Répartition des autorisations de programme et des crédits de paiement applicables aux dépenses en capital des services civils (mesures nouvelles)

TITRE V. - INVESTISSEMENTS EXÉCUTÉS PAR L'ÉTAT Autorisations de programme : 7 000 000 francs.

Crédits de paiement : 3 500 000 francs.

TITRE VI. - SUBVENTIONS D'INVESTISSEMENT ACCORDÉES PAR L'ÉTAT

« Autorisations de programme : 13 458 250 000 francs.

« Crédits de paiement : 11 555 951 000 francs. »

Personne ne demande la parole ?...

Je mets aux voix le titre III.

M. Georges Sarre.

Abstention critique du groupe Radical, Citoyen et Vert.

M. Christian Cuvilliez.

Le groupe communiste vote contre les crédits de la recherche.

(Le titre III est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix le titre IV.

(Le titre IV est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre V.

(Les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre V sont adoptés.)

M. le président.

Je mets aux voix les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre VI.

(Les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre VI sont adoptés.)

M. le président.

Nous avons terminé l'examen des crédits du ministère de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie, concernant l'enseignement supérieur, la recherche et la technologie.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

4

ORDRE DU JOUR

DES PROCHAINES SÉANCES

M. le président.

Mercredi 3 novembre 1999, à quinze heures, première séance publique : Questions au Gouvernement ; Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2000, no 1805 : M. Didier Migaud, rapporteur général au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport no 1861).

Fonction publique, réforme de l'Etat et décentralisation : M. Jean Vila, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe no 31 au rapport no 1861) ; M. Alain Tourret, rapporteur pour avis au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et d e l'administration générale de la République (avis no 1865, tome I).

Anciens combattants ; articles 65 et 66 : M. Jean-Pierre Kucheida, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe no 8 au rapport no 1861) ; M. Maxime Gremetz, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (avis no 1862, tome II).

A vingt et une heures, deuxième séance publique : Suite de l'ordre du jour de la première séance.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 2 NOVEMBRE 1999

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures cinq.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT

MODIFICATIONS À LA COMPOSITION DES GROUPES (Journal officiel, Lois et Décrets, du 3 novembre 1999)

GROUPE DÉMOCRATIE LIBÉRALE ET INDÉPENDANTS (Apparentés aux termes de l'article 19 du règlement) (2 membres au lieu de 1) Ajouter le nom de M. Jean-Pierre Soisson.

LISTE DES DÉPUTÉS N'APPARTENANT À AUCUN GROUPE (6 au lieu de 7) Supprimer le nom de M. Jean-Pierre Soisson.

TEXTES SOUMIS EN APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION Transmissions M. le Premier ministre a transmis, en application de l'article 88-4 de la Constitution, à M. le président de l'Assemblée nationale les textes suivants : Communication du 29 octobre 1999 No E 1321. - Demande du Royaume-Uni de participer à certaines dispositions de l'acquis de Schengen : note de la présidence au groupe « Acquis de Schengen » - 11177/99 Schengen 74.

No E 1322. - Demande d'autorisation présentée par le Gouvernement italien, en vertu de l'article 8, paragraphe 4, de la directive 92/81/CEE du Conseil, relative à l'introduction d'une mesure dérogeant à la directive précitée et visant l'application d'un taux réduit de droits d'accises sur le gazole utilisé comme carburant dans les véhicules utilitaires : communication de la Commission au Conseil (COM [99] 459 final).

No E 1323. - Proposition de décision du Conseil autorisant la France à appliquer ou à continuer d'appliquer des réductions ou des exonérations de droits d'accises sur certaines huiles minérales utilisées à des fins spécifiques, conformément à la procédure prévue par l'article 8, paragraphe 4, de la directive 92/81/CEE (COM [99] 461 final).

No E 1324. - Proposition de décision du Conseil autorisant l'Allemagne à appliquer ou à continuer d'appliquer des réductions ou des exonérations de droits d'accises sur certaines huiles minérales utilisées à des fins spécifiques, conformément à la procédure prévue par l'article 8, paragraphe 4, de la directive 92/81/CEE (COM [99] 469 final).

No E 1325. - Proposition de décision du Conseil autorisant l'Italie à appliquer ou à continuer d'appliquer des réductions ou des exonérations de droits d'accises sur certaines huiles minérales utilisées à des fins spécifiques, conformément à la procédure prévue par l'article 8, paragraphe 4, de la directive 92/81/CEE (COM [99] 471 final).

No E 1326. - Proposition de règlement du Conseil relatif à la conclusion des accords sous forme d'échange de lettres modifiant les accords sous forme d'échange de lettres entre la Communauté européenne, d'une part, et, d'autre part, la République de Bulgarie, la République de Hongrie et la Roumanie relatifs à l'établissement réciproque de contingents tarifaires pour certains vins et modifiant le règlement (CE) no 933/95 portant ouverture et mode de gestion de contingents tarifaires communautaires pour certains vins (COM [99] 489 final).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 2 NOVEMBRE 1999

ANNEXE AU PROCÈS-VERBAL de la 2e séance du mardi 2 novembre 1999 SCRUTIN (no 212) sur l'ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000.

Nombre de votants .....................................

557 Nombre de suffrages exprimés ....................

526 Majorité absolue ..........................................

264 Pour l'adoption ...................

280 Contre ..................................

246 L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN Groupe socialiste (251) : Pour : 247. - MM. Yvon Abiven , Maurice Adevah-Poeuf , Stéphane Alaize , Damien Alary , Mme Sylvie Andrieux ,

M M. Léo Andy , Jean-Marie Aubron , Jean-Marc Ayrault , Jean-Paul Bacquet , Dominique Baert , JeanPierre Baeumler , Jean-Pierre Balduyck , Jean-Pierre Balligand , Gérard Bapt , Alain Barrau , Jacques Bascou , Christian Bataille , Jean-Claude Bateux , Jean-Claude B eauchaud , Mme Yvette Benayoun-Nakache , MM. Henri Bertholet , Eric Besson , Jean-Louis Bianco , A ndré Billardon , Jean-Pierre Blazy , Serge Blisko , Patrick Bloche , Jean-Marie Bockel , Jean-Claude Bois , Daniel Boisserie , Maxime Bono , Augustin Bonrepaux , André Borel , Jean-Michel Boucheron , Jean-Claude Boulard , Didier Boulaud , Pierre Bourguignon , Christian Bourquin , Mmes Danielle Bousquet , Frédérique Bredin , M. Jean-Paul Bret , Mme Nicole Bricq , MM. François Brottes , Vincent Burroni , Marcel Cabiddu , Alain Cacheux , Jérôme Cahuzac , Alain Calmat , Jean-Christophe Cambadelis , André Capet , Thierry Carcenac , C hristophe Caresche , Mme Odette Casanova , MM. Laurent Cathala , Jean-Yves Caullet , Bernard Cazeneuve , Jean-Paul Chanteguet , Guy-Michel Chauveau , Jean-Claude Chazal , Daniel Chevallier , Didier Chouat , Alain Claeys , Mme Marie-Françoise Clergeau , MM. Jean C odognès , Pierre Cohen , François Colcombet , Mme Monique Collange , MM. François Cuillandre , Jean-Claude Daniel , Jacky Darne , Camille Darsières , Michel Dasseux , Yves Dauge , Mme Martine David , MM. Bernard Davoine , Philippe Decaudin , Marcel Dehoux , Jean Delobel , François Deluga , Jean-Jacques Denis , Mme Monique Denise , MM. Bernard Derosier , Claude Desbons , Paul Dhaille , Marc Dolez , François Dosé , René Dosière , Mme Brigitte Douay , MM. Raymond Douyère , Julien Dray , Tony Dreyfus , Pierre Ducout , Jean-Pierre Dufau , Mme Laurence Dumont , MM. Jean-Louis Dumont , Dominique Dupilet , JeanPaul Dupré , Yves Durand , Jean-Paul Durieux , Philippe Duron , Jean Espilondo , Claude Evin , Laurent Fabius , Alain Fabre-Pujol , Albert Facon , Mme Nicole Feidt ,

M M. Jean-Jacques Filleul , Jacques Fleury , Jacques Floch , Pierre Forgues , Raymond Forni , Jean-Louis Fousseret , Michel Françaix , Christian Franqueville , Georges Frêche , Gérard Fuchs , Robert Gaïa , Roland G arrigues , Jean-Yves Gateaud , Jean Gaubert , Mme Catherine Génisson , MM. André Godin , Gaëtan Gorce , Alain Gouriou , Gérard Gouzes , Joël Goyheneix , B ernard Grasset , Michel Grégoire , Mmes Odette G rzegrzulka , Paulette Guinchard-Kunstler , MM. Jacques Guyard , Francis Hammel , Mme Cécile Helle , MM. Edmond Hervé , Jacques Heuclin , François Hollande , Jean-Louis Idiart , Mme Françoise Imbert , MM. Claude Jacquot , Serge Janquin , Jacky Jaulneau , Armand Jung , Jean-Noël Kerdraon , Bertrand Kern , Jean-Pierre Kucheida , André Labarrère , Mme Conchita Lacuey , MM. Jérôme Lambert , François Lamy , PierreClaude Lanfranca , Jack Lang , Jean Launay , Mmes Jacqueline Lazard , Christine Lazerges , MM. Gilbert Le Bris , Jean-Yves Le Déaut , Mme Claudine Ledoux , MM. Jean-Yves Le Drian , Michel Lefait , Jean Le Garrec , Jean-Marie Le Guen , Patrick Lemasle , Georges Lemoine , Bruno Le Roux , René Leroux , Mme Raymonde Le Texier , MM. Alain Le Vern , Michel Liebgott , Mme Martine Lignières-Cassou , MM. Gérard Lindeperg , François Loncle , Bernard Madrelle , René Mangin , Jean-Pierre Marché , Daniel Marcovitch , JeanPaul Mariot , Mme Béatrice Marre , MM. Daniel Marsin , Marius Masse , Didier Mathus , Gilbert Maurer , Guy Menut , Louis Mermaz , Roland Metzinger , Louis Mexandeau , Jean Michel , Didier Migaud , Mme Hélène Mignon , MM. Gilbert Mitterrand , Yvon Montané , Gabriel Montcharmont , Arnaud Montebourg , Philippe Nauche , Bernard Nayral , Henri Nayrou , Mme Véronique Neiertz , MM. Alain Néri , Michel Pajon , Joseph Parrenin , François Patriat , Christian Paul , Vincent Peillon , Germinal Peiro , Jean-Claude Perez , Jean-Pierre Pernot , Mmes Marie-Françoise Pérol-Dumont , Geneviève Perrin-Gaillard , Annette Peulvast-Bergeal , Catherine Picard , MM. Paul Quilès , Alfred Recours , Gérard Revol , Mme Marie-Line Reynaud , M. Patrick Rimbert , Mme Michèle Rivasi , MM. Alain Rodet , Marcel Rogemont , Bernard Roman , Yves Rome , Gilbert Roseau , Mme Yvette Roudy , MM. Jean Rouger , René Rouquet , Michel Sainte-Marie , Mme Odile Saugues , MM. Bernard Seux , Patrick Sève , Henri Sicre , Michel Tamaya , Mmes Catherine Tasca , Christiane Taubira-Delannon , MM. Yves Tavernier , Pascal Terrasse , Gérard Terrier , Mmes Marisol Touraine , Odette Trupin , MM. Joseph Tyrode , Daniel Vachez , André Vallini , André Vauchez , Michel Vauzelle , Michel Vergnier , Alain Veyret , Alain Vidalies , Jean-Claude Viollet , Philippe Vuilque et Kofi Yamgnane.

Groupe R.P.R. (136) : C ontre : 130. - MM. Jean-Claude Abrioux , Bernard Accoyer , Mme Michèle Alliot-Marie , MM. René André , André Angot , Philippe Auberger , Pierre Aubry , Jean Auclair , Gautier Audinot , Mmes Martine Aurillac , Roselyne Bachelot-Narquin , MM. Jean Bardet , François Baroin , Jacques Baumel , Christian Bergelin , André Berthol , Léon Bertrand , Jean-Yves Besselat , Jean Besson , Franck Borotra , Bruno Bourg-Broc , Michel Bouvard , Victor Brial , Philippe Briand , Michel Buillard , Christ ian Cabal , Gilles Carrez , Mme Nicole Catala , MM. Richard Cazenave , Henry Chabert , Jean-Paul Charié , Jean Charroppin , Philippe Chaulet , Jean-Marc


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 2 NOVEMBRE 1999

Chavanne , Olivier de Chazeaux , François CornutGentille , Alain Cousin , Jean-Michel Couve , Charles Cova , Henri Cuq , Jean-Louis Debré , Lucien Degauchy , Arthur Dehaine , Jean-Pierre Delalande , Patrick Deln atte , Jean-Marie Demange , Xavier Deniau , Yves Deniaud , Patrick Devedjian , Eric Doligé , Guy Drut , Jean-Michel Dubernard , Jean-Pierre Dupont , Nicolas Dupont-Aignan , Christian Estrosi , Jean Falala , JeanMichel Ferrand , François Fillon , Roland Francisci , Pierre Frogier , Yves Fromion , Robert Galley , René Galy-Dejean , Henri de Gastines , Jean de Gaulle , Hervé Gaymard , Jean-Pierre Giran , Michel Giraud , Jacques Godfrain , Louis Guédon , Jean-Claude Guibal , Lucien Guichon , François Guillaume , Gérard Hamel , Michel Hunault , Michel Inchauspé , Christian Jacob , Didier Julia , Alain Juppé , Jacques Kossowski , Jacques Lafleur , Robert Lamy , Pierre Lasbordes , Thierry Lazaro , JeanClaude Lemoine , Jacques Limouzy , Thierry Mariani , Alain Marleix , Franck Marlin , Jean Marsaudon , Philippe Martin , Patrice Martin-Lalande , Jacques MasdeuArus , Mme Jacqueline Mathieu-Obadia , MM. Gilbert Meyer , Jean-Claude Mignon , Charles Miossec , Pierre Morange , Renaud Muselier , Jacques Myard , Jean-Marc Nudant , Mme Françoise de Panafieu , MM. Robert Pandraud , Jacques Pélissard , Dominique Perben , Pierre Petit , Etienne Pinte , Serge Poignant , Bernard Pons , Robert Poujade , Didier Quentin , Jean-Bernard Raim ond , Jean-Luc Reitzer , Nicolas Sarkozy , André Schneider , Bernard Schreiner , Philippe Séguin , Frantz Taittinger , Michel Terrot , Jean-Claude Thomas , Jean Tiberi , Georges Tron , Anicet Turinay , Jean Ueberschlag , Léon Vachet , Jean Valleix , François Vannson , R oland Vuillaume , Jean-Luc Warsmann et Mme Marie-Jo Zimmermann.

Non-votant : M. Patrick Ollier (président de séance).

Groupe U.D.F. (70) : Contre : 67. - MM. Jean-Pierre Abelin , Pierre Albertini , Raymond Barre , Jacques Barrot , Dominique Baudis , François Bayrou , Jean-Louis Bernard , Claude Birraux , Emile Blessig , Mme Marie-Thérèse Boisseau , M. Bernard Bosson , Mme Christine Boutin , MM. Loïc Bouvard , Jean Briane , Yves Bur , Dominique Caillaud , Hervé de Charette , Jean-François Chossy , René Couanau , Charles de Courson , Yves Coussain , Marc-Philippe D aubresse , Jean-Claude Decagny , Léonce Deprez , Renaud Donnedieu de Vabres , Philippe Douste-Blazy , R enaud Dutreil , Alain Ferry , Jean-Pierre Foucher , Claude Gaillard , Germain Gengenwin , Valéry Giscard d'Estaing , Gérard Grignon , Hubert Grimault , Pierre Hériaud , Patrick Herr , Mmes Anne-Marie Idrac , Bernadette Isaac-Sibille , MM. Henry Jean-Baptiste , JeanJ acques Jégou , Christian Kert , Edouard Landrain , Jacques Le Nay , Jean-Antoine Leonetti , François Léotard , Maurice Leroy , Roger Lestas , Maurice Ligot , François Loos , Christian Martin , Pierre Méhaignerie , Pierre Micaux , Mme Louise Moreau , MM. Hervé Morin , Jean-Marie Morisset , Arthur Paecht , Dominique Paillé , Henri Plagnol , Jean-Luc Préel , Marc Reymann , Gilles de Robien , François Rochebloine , André Santini , François Sauvadet , Michel Voisin , Jean-Jacques Weber et Pierre-André Wiltzer

Groupe Démocratie libérale et Indépendants (44) : Contre : 42. - Mme Nicole Ameline , MM. François d' Aubert , Jacques Blanc , Roland Blum , Dominique Bussereau , Pierre Cardo , Antoine Carré , Pascal Clément , G eorges Colombier , Bernard Deflesselles , Francis Delattre , Franck Dhersin , Laurent Dominati , Dominique Dord , Charles Ehrmann , Nicolas Forissier , Gilbert Gantier , Claude Gatignol , Claude Goasguen , François Goulard , Pierre Hellier , Michel Herbillon , Philippe Houillon , Denis Jacquat , Aimé Kerguéris , Marc Laffineur , Pierre Lequiller , Alain Madelin , Jean-François Mattei , Michel Meylan , Alain Moyne-Bressand , Yves Nicolin , Paul Patriarche , Bernard Perrut , Jean Proriol , Jean Rigaud , Jean Roatta , José Rossi , Joël Sarlot , Guy Teissier , Philippe Vasseur et Gérard Voisin.

Groupe communiste (35) : Contre : 3. - MM. Patrice Carvalho , Georges Hage et Mme Janine Jambu Abstentions : 31. - MM. François Asensi , Gilbert Biessy , C laude Billard , Bernard Birsinger , Alain Bocquet , Patrick Braouezec , Jean-Pierre Brard , Jacques Brunhes , Alain Clary , Christian Cuvilliez , René Dutin , Daniel Feurtet , Mme Jacqueline Fraysse , MM. André Gerin , P ierre Goldberg , Guy Hermier , Robert Hue , Mme Muguette Jacquaint , MM. André Lajoinie , JeanClaude Lefort , Patrick Leroy , Félix Leyzour , François Liberti , Patrick Malavieille , Roger Meï , Ernest Moutoussamy , Bernard Outin , Daniel Paul , Jean-Claude Sandrier , Michel Vaxès et Jean Vila

Groupe Radical, Citoyen et Vert (33) : Pour : 33. - M. André Aschieri , Mmes Marie-Hélène Aubert , Huguette Bello , MM. Pierre Carassus , Roland C arraz , Gérard Charasse , Bernard Charles , Yves Cochet , Jean-Pierre Defontaine , Jacques Desallangre , Roger Franzoni , Guy Hascoët , Claude Hoarau , Elie Hoarau , Robert Honde , Guy Lengagne , Noël Mamère , Jean-Michel Marchand , Alfred Marie-Jeanne , Mme Gilberte Marin-Moskovitz , MM. Jean-Pierre Michel , JeanPaul Nunzi , Jean Pontier , Jacques Rebillard , Jean Rigal , Mme Chantal Robin-Rodrigo , MM. Georges Sarre , Gérard Saumade , Roger-Gérard Schwartzenberg , Michel Suchod , Alain Tourret , Emile Vernaudon et Aloyse Warhouver.

Non-inscrits (7).

Contre : 4. - MM. Jean-Jacques Guillet , Charles Millon , Jean-Pierre Soisson et Philippe de Villiers

Mises au point au sujet du présent scrutin (Sous réserve des dispositions de l'article 68, alinéa 4, du règlement de l'Assemblée nationale) M. Michel Destot, qui était présent au moment du scrutin ou qui avait délégué son droit de vote, a fait savoir qu'il avait voulu voter « pour » MM. Edouard Balladur, Patrick Ollier, qui étaient présents au moment du scrutin ou qui avaient délégué leur droit de vote, ont fait savoir qu'ils avaient voulu voter « contre ».