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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1999

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE

DE Mme

NICOLE CATALA

1. Loi de finances pour 2000 (deuxième partie). - Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 8799).

ÉQUIPEMENT ET TRANSPORTS (p. 8799)

M. Jean-Louis Idiart, rapporteur spécial de la commission des finances, pour les transports terrestres.

M. Jean-Jacques Filleul, rapporteur pour avis de la commission de la production, pour l'équipement et les transports terrestres.

M. Gilbert Gantier, rapporteur spécial de la commission des finances, pour les transports aériens et la météorologie.

M. François Asensi, rapporteur pour avis de la commission de la production, pour les transports aériens.

M. Guy Lengagne, rapporteur spécial de la commission des finances, pour la mer.

M. André Capet, rapporteur pour avis de la commission de la production, pour les transports maritimes et fluviaux.

MM. Gilbert Biessy, Marc-Philippe Daubresse, Jacques Fleury, Roger-Gérard Schwartzenberg, Francis Delattre, Michel Bouvard, Daniel Paul, Jean-Pierre Blazy.

Mme la présidente.

Suspension et reprise de la séance (p. 8823)

MM. Yves Cochet, Dominique Bussereau, Mme Odile Saugues,

MM. Philippe Vuilque, Jean-Pierre Baeumler, Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont,

M.

Jean Launay.

Mme la présidente.

Suspension et reprise de la séance (p. 8831)

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

PRÉSIDENCE

DE

M.

YVES

COCHET

M. le ministre.

Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.

2. Ordre du jour de la prochaine séance (p. 8841).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1999

COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE Mme NICOLE CATALA,

vice-présidente

Mme la présidente.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1 LOI DE FINANCES POUR 2000

DEUXIÈME PARTIE Suite de la discussion d'un projet de loi

Mme la présidente.

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2000 (nos 1805, 1861).

ÉQUIPEMENT ET TRANSPORTS

Mme la présidente.

Nous abordons l'examen des crédits du ministère de l'équipement, des transports et du logement concernant l'équipement et les transports ainsi que du budget annexe de l'aviation civile.

La parole est à M. Jean-Louis Idiart, le rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du plan, pour les transports terrestres.

M. Jean-Louis Idiart, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour les transports terrestres.

La politique étant affaire de priorités, vous présentez, monsieur le ministre de l'équipement, des transports et du logement, un bon budget, qui met l'accent sur le transport ferroviaire, l'entretien des routes, la sécurité routière et, dans une moindre mesure, les transports collectifs urbains.

Cela dit, il aurait pu connaître quelques inflexions vers des choix à venir, mais il est difficile d'agir à niveau constant de crédits.

Quelques chiffres pour cadrer notre débat.

Les crédits des transports terrestres, des routes et de la sécurité routière s'élèvent pour 2000 à 7,34 milliards de francs en autorisations de programme et 52,17 milliards de francs en crédits de paiement, soit une augmentation de 23 % pour les premières et une diminution de 0,9 % pour les seconds. Nous travaillons donc sur les mêmes bases que les années précédentes. La diminution des crédits de paiement est en partie compensée par les dotations du FITTVN, qui, sur la base d'une prévision de recettes de 4,33 milliards de francs, affectera les crédits suivants : 1,52 milliard de francs pour le réseau routier national, 500 millions de francs pour les voies navigables et 2,3 milliards de francs aux transports ferroviaires et au transport combiné.

Avec le FITTVN, Bercy nous joue le coup des vases communicants car, même en tenant compte de ce fonds, les crédits de paiement diminuent de 0,2 %, avec un total de 56,5 milliards de francs. Cette quasi-stabilisation permet certes de respecter les engagements de l'Etat mais elle d émontre surtout que la montée en puissance du FITTVN s'accompagne d'un affaiblissement du budget des transports.

Lors de l'examen en séance publique de la première partie du projet de loi de finances pour 2000, le Gouvernement a pris l'engagement de réexaminer l'utilité de ce fonds, dont la commission des finances a souhaité la suppression par amendement. J'ai du mal, monsieur le ministre, à saisir votre attachement à une mesure d'origine balladurienne,...

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Pasqualienne !

M. Francis Delattre.

Il a raison, c'est Pasqua qui a mis en place ce fonds !

M. Jean-Louis Idiart, rapporteur spécial.

... car ce que l'on vous donne d'un côté avec le fonds, on vous le reprend de l'autre sur le budget.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Mais non !

M. Jean-Louis Idiart, rapporteur spécial.

Je ne peux cautionner des modes de gestion illusionnistes, et vous aurez remarqué que le rapporteur pour avis de la commission de la production et des échanges adopte une position à peu près équivalente.

Bref, monsieur le ministre, présentez-nous un budget pour 2001 sans le FITTVN, car la volonté du Parlement doit être respectée. Nous ne travaillons pas ici pour le service des archives ni pour la lecture discrète de nos rapports par le Gouvernement.

M. Francis Delattre.

C'est ça, on va ratisser les crédits !

M. Jean-Louis Idiart, rapporteur spécial.

A l'instar de la mission d'évaluation et de contrôle, j'appelle le Gouvernement à déterminer avec plus de rigueur les choix budgétaires en établissant le schéma directeur des transports, qui déterminera les projets d'infrastructure que la nation souhaite retenir. Sans ce schéma, le vote du Parlement s'apparente, année après année, à une simple reconduction des crédits.

Après cette remarque liminaire, j'en viens à vos crédits.

Je relève la stabilisation des dépenses de personnel, ce qui montre une certaine sagesse dans la gestion des crédits. J'observe également avec satisfaction la budgétisation des rémunérations annexes des personnels techniques de l'équipement, au chapitre 31-94 du fascicule des services communs.

En revanche - et ce sera ma première observation - les crédits des transports collectifs urbains sont marqués par une telle continuité qu'ils me paraissent occulter les défis qui se posent à nous. L'engorgement des villes, accompagné par l'accentuation de la pollution atmosphérique, conduit à remettre en cause les modes de déplacement


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fondés sur l'automobile. Pourquoi alors appliquer aux transports collectifs la TIPP et plus particulièrement les augmentations récentes sur le gazole ? Les transports collectifs sont une voie d'avenir, à condition de les intégrer dans une réflexion d'ensemble sur l'aménagement urbain. Il ne suffit pas d'investir dans des matériels roulants plus rapides et moins polluants, il faut également définir les aires consacrées à la circulation, au transit et au stationnement, et leur tarification. Dans l'avenir, nos concitoyens utiliseront plusieurs modes de transport pour le même trajet.

Certes, l'Etat maintient son effort en province. Les crédits inscrits au chapitre 63-41 - « Transport terrestre.

Subventions d'investissement » - ont régulièrement augmenté ces dernières années, marquant la priorité donnée par le Gouvernement aux transports collectifs.

Ainsi, les autorisations de programme sont passées de 524 millions de francs en 1997 à 581 millions de francs en 1998 et 649 millions de francs en 1999 et les crédits de paiement de 457,3 millions de francs en 1997 à 498,3 millions de francs en 1998 et à 566,8 millions de francs en 1999 - soit une augmentation de 13,7 %.

Le projet de budget pour 2000 confirme cette tendance et la dotation budgétaire est allouée aux infrastructures de transports en site propre : métro, tramways.

La somme de 693 millions de francs prévue pour 2000 servira à la poursuite des opérations en cours - ligne 2 du VAL à Lille, tramway à Strasbourg, bus à Saint-Denis de La Réunion, tramway à Nancy - et au lancement de nouvelles opérations - sur Rouen, Maubeuge, Bordeaux, Caen -, qui feront l'objet d'engagements avant la fin de l'exercice 1999 ou en 2000.

Votre budget, monsieur le ministre, rencontre l'approbation de la majorité. Que lui manque-t-il pourtant ? Sans doute de porter l'effort sur le renouvellement des matériels roulants et surtout de promouvoir la coordination des modes de transport individuels et collectifs. Cela relève certes de l'aménagement urbain - donc de la compétence des maires - mais il m'apparaît que nos concitoyens apprécieraient de disposer de couloirs de bus, de vélos et - pourquoi pas même aujourd'hui ? - de rollers, tous modes de transports économiques et non polluants. Une incitation financière de l'Etat permettrait sans doute un progrès décisif.

Pour ce qui concerne le transport collectif en Ile-deFrance, l'année 1999 est marquée par le renouveau du trafic ferroviaire, après plusieurs années de désaffection.

Avec l'opération « Transîlien », la SNCF veut conquérir une nouvelle clientèle vers les transports collectifs. L'ouverture de lignes de banlieue à banlieue, un matériel roulant plus moderne et une évolution modérée de la tarification ont convaincu les habitants d'Ile-de-France de revenir vers ce mode de transport.

M. Francis Delattre.

Il reste encore beaucoup à faire !

M. Jean-Louis Idiart, rapporteur spécial.

S'il reste encore beaucoup à faire, monsieur le député, c'est qu'il restait encore beaucoup à faire en 1997 ! C'est un effort collectif que nous avons à fournir.

M. Francis Delattre.

Vous n'êtes pas arrivés hier au gouvernement !

M. Philippe Vasseur.

Les besoins augmentent tous les jours. Soyons sérieux !

M. Jean-Louis Idiart, rapporteur spécial.

En matière de transport, les retards sont dus, la plupart du temps, - pour parler comme M. de La Palice - à ce qui n'a pas encore été fait. Vous portez donc une partie de la responsabilité de ces retards.

M. Francis Delattre.

Une partie seulement !

M. Jean-Louis Idiart, rapporteur spécial.

L'Etat et les collectivités locales doivent poursuivre cet effort, surtout pour renforcer la sécurité des agents et des usagers. La violence qui règne sur certaines lignes est cause de désaffection des transports en commun. Tout se conjugue pour que la puissance publique résolve ce problème, qu'il s'agisse de la liberté fondamentale d'aller et venir, de la sûreté et de l'utilisation rationnelle du réseau.

Les concours de l'Etat diminuent de 4,2 % par rapport à ceux de 1999. Le chapitre 46-41 - Contribution de l'Etat aux transports collectifs parisiens - passe de 5,62 milliards de francs à 5,389 milliards de francs pour 2000. L'indemnité compensatrice versée à la RATP diminue, en effet, de 475 millions de francs en raison de l'amélioration des comptes de l'entreprise. Il faut, là encore, signaler l'effort déterminant consenti par la RATP.

Les autres postes - indemnité compensatrice SNCF, réduction de tarif RATP - sont en légère augmentation.

En d'autres termes, votre budget traduit une heureuse inflexion des crédits vers la province. Un tel choix est sage car la réforme du transport en Ile-de-France n'est toujours pas intervenue.

J'en viens au transport ferroviaire, érigé une nouvelle fois en priorité. L'engagement de l'Etat se traduit par le soutien au désendettement de la SNCF, par le biais de Réseau ferré de France.

Pour assurer la viabilité économique de RFF, le Gouvernement a d'abord accordé à l'établissement une dotation en capital de 10 milliards de francs en 1998, soit 2 milliards de francs de plus que ce qui avait été accordé en 1997.

Par ailleurs, dans le cadre de la grande réforme de RFF, le Gouvernement a décidé de consolider la situation financière de l'établissement public en s'engageant à lui apporter 37 milliards de francs au cours des années 1999, 2000 et 2001.

Pour ce qui concerne la SNCF - et je tiens à saluer le travail positif effectué par sa direction et ses personnels pour une nouvelle phase d'expansion - on ne peut qu'enregistrer avec satisfaction la réforme de sa comptabilité, gage d'une meilleure prise en compte de ses coûts. Lesr ésultats financiers s'améliorent également, même si l'entreprise demeure en déficit d'exploitation. L'Etat stabilisant ses concours à 44,2 milliards de francs, qu'il s'agisse des subventions d'investissement ou des compen-s ations tarifaires, mes interrogations portent sur deux domaines.

Le premier concerne le ferroutage.

La catastrophe du Mont-Blanc a montré que des zones sensibles, comme la vallée de Chamonix, ne supportaient plus la fréquentation intense de poids lourds. Mais le cas des Alpes est transposable, à terme, au sillon rhodanien ou aux Pyrénées. Or le transport combiné n'est pas une priorité.

M. Marc-Philippe Daubresse.

Eh non !

M. Jean-Louis Idiart, rapporteur spécial.

Ma deuxième question porte sur le régime de retraite des cheminots.


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Les compensations reçues par ce régime atteignent 18 milliards de francs, dont 13 milliards au titre de l'Etat, le solde étant constitué par la compensation entre régimes spéciaux.

Vous avez estimé, monsieur le ministre, que la mission de la SNCF nécessitait une gestion des risques tout à fait spécifique, dont la prise en compte était indispensable à la mise en oeuvre efficace de sa mission de service public.

C'est en effet d'une volonté conjointe des parties, salariés et employeurs, qu'est né, à l'origine, ce régime d'entreprise. Les salariés, leurs fédérations représentatives et l'entreprise y sont extrêmement attachés. Mais, en même temps, le montant des compensations rend l'indépendance de ce régime fragile. Comment comptez-vous le préserver ? Avez-vous des pistes de réflexion ?

M. Marc-Philippe Daubresse.

La réforme des retraites !

M. Jean-Louis Idiart, rapporteur spécial.

Enfin, monsieur le ministre, pourquoi ne pas exonérer la SNCF de TGAP sur les transports d'ordures ménagères. Nous sommes un certain nombre de parlementaires à le souhaiter mais nous ne sommes pas entendus par Bercy ?

M. Marc-Philippe Daubresse et M. Francis Delattre.

Il faut changer de locataire à Bercy.

M. Jean-Louis Idiart, rapporteur spécial.

Autre point de votre politique, monsieur le ministre : le budget des routes.

Il est marqué par la continuité. Il permet en effet de maintenir le patrimoine routier. En revanche, on ne constate pas d'inflexion de la politique autoroutière - qui ne relève pas stricto sensu du budget de l'Etat -, malgré les travaux de la mission d'évaluation et de contrôle.

Les crédits s'élèvent à 7,3 milliards de francs en autorisations de programme, enregistrant une augmentation de 27,2 %, et à 7,8 milliards en crédits de paiement, subissant une diminution de 8,6 %. Si l'on ajoute les dotations du fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables, au sein duquel 1,527 milliard de francs est prévu pour les routes, tant en autorisations de programme qu'en crédits de paiement, soit 63 millions de francs de moins qu'en 1999, les crédits de paiement diminuent de 8,6 %.

M. Marc-Philippe Daubresse.

Eh oui !

M. Jean-Louis Idiart, rapporteur spécial.

On notera en outre que les travaux financés par le FITTVN ne constituent pas en totalité de nouveaux programmes, contrairement à la vocation initiale du fonds. Ainsi, le plan routier du massif Central est-il maintenant entièrement financé par le fonds. Le FITTVN a donc opéré une débudgétisation, préjudiciable à une lecture claire des crédits.

On relève néanmoins une vigoureuse politique en faveur des ouvrages d'art et de l'entretien routier, dont on ne peut que vous féliciter. Par ailleurs, le changement de nomenclature budgétaire permet de mieux individualiser les dépenses entre l'Ile-de-France, la province et l'outremer.

Reste la politique autoroutière. Ce sujet a été largement débattu lors des travaux de la mission d'évaluation et de contrôle ainsi qu'à l'occasion de la remise du rapport de la Cour des comptes. Vous aviez, à cette occasion, annoncé la mise en place du « nouvel objet autoroutier ». Or je ne vois, ni dans le budget, ni dans les décisions du comité des investissements à caractère économique et social, la moindre trace de cette idée. Où en est, en la matière, votre réflexion ? En verrons-nous la traduction concrète ? Avant de conclure, je ne peux que féliciter le Gouvernement d'accentuer ses efforts en faveur de la sécurité routière, avec l'objectif ambitieux de diviser par deux le nombre de personnes tuées au cours des cinq prochaines années.

Votre budget, monsieur le ministre, poursuit les actions entamées au début de la législature. Dans un secteur où les investissements sont lourds et s'étalent sur plusieurs années, c'est logique. N'oubliez cependant pas que certaines nécessités nous obligeront, à terme rapproché, à infléchir notre politique. Mais c'est sans réserves, ou presque que la commission des finances, sur ma proposition, a adopté les crédits des transports terrestres et demande à l'Assemblée de faire de même. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe communiste.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Jean-Jacques Filleul, rapporteur pour avis de la commission de la production et des échanges, pour l'équipement et les transports terrestres.

M. Jean-Jacques Filleul, rapporteur pour avis de la commission de la production et des échanges, pour l'équipement et les transports terrestres.

Monsieur le ministre, il aura fallu deux événements tragiques au cours des derniers mois, l'incendie du tunnel du Mont-Blanc et la catastrophe ferroviaire près de la gare londonienne de Paddington pour qu'il soit enfin clairement admis par le plus grand nombre qu'en matière de transports, peut-être plus que dans d'autres domaines - car il y va de la sécurité de tous -, le laisser-aller ne peut pas tenir lieu de politique.

L'opinion publique, de plus en plus désorientée et remontée, exige du Gouvernement, des décideurs politique et économiques, que la politique des transports soit réorientée vers des modes moins polluants et plus sécuritaires.

Les citoyens pèsent sur les décisions. Tant mieux, car ils donnent à votre politique plus de légitimité encore pour approfondir avec nos partenaires européens la régulation, la coopération, le travail en commun, afin de donner du temps à la raison.

Les femmes, les hommes de ce pays nous aident ainsi à mettre fin, définitivement, je l'espère, aux entreprises de ceux qui voulaient imposer la libéralisation totale du mode ferroviaire par une concurrence forcément contrôlée par la seule motivation de la rentabilité financière. Les tenants de cette politique oublient qu'il ne peut y avoir de politique globale des transports sans intervention de l'Etat en termes de soutien, d'organisation et de financement.

Cette politique volontaire des transports exige une grande cohérence sur tout le territoire, une implication totale de l'Europe, car, aujourd'hui, il ne peut y avoir de politique globale des transports sans prolongements européens, sans partenariats comme ceux que noue la France, avec quelque succès d'ailleurs. Si tel n'était pas le cas, on assisterait à l'engorgement quasi total des infrastructures et des réseaux, nuisible au plan économique et insupportable au plan social et environnemental.

L'extension dans les entreprises du système de production en flux tendus, qui limite, voire supprime l'existence de stocks, a entraîné la multiplication des transports routiers, qu'il s'agisse des poids lourds ou des messageries.

En outre, depuis vingt ans, la part du transport ferroviaire n'a cessé de régresser, en dépit de la légère et frag ile amélioration constatée récemment. La mondialisation de


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l'économie, qui est encore accélérée par l'approfondissement du marché unique européen et l'intégration dans l'économie européenne des pays d'Europe centrale et orientale, génère également un surcroît de trafic essentiellement routier.

Ainsi, sur la période 1989-1998, le transport de marchandises en transit routier a doublé et, désormais, un poids lourd sur trois circulant sur le réseau national est étranger. Le parcours moyen en partie française est de l'ordre de 856 kilomètres et le nombre de tonneskilomètre réalisées en transit en France s'est élevé l'an dernier à 40 milliards. Actuellement, 80 % des marchandises transportées le sont par la route, le rail en chargeant environ 17 %. Ne nous étonnons pas si le fret ferroviaire est en fort déclin. Il est de l'intérêt général qu'il soit reconstitué

Sur le plan environnemental, tous les modes de transport ne présentent pas les mêmes performances dans l'utilisation de l'énergie, et le chemin de fer dispose à cet égard d'un avantage manifeste.

Avec l'énergie représentée par 1 kilo d'équivalent pétrole, le train complet permet d'acheminer une tonne de marchandises sur 128 kilomètres, le transport combiné une tonne sur 100 kilomètres et le poids lourd une tonne sur 57 kilomètres. Le transport ferroviaire a donc une efficacité énergétique deux à trois fois supérieure à cel le du transport routier, pour le fret comme pour les voyageurs.

La complémentarité des transports, transport combiné, multimodalité, est bien au coeur de nos réflexions et de l'intérêt général.

S'agissant des transports de personnes, la concentration de la population dans les zones urbaines et périurbaines, qui dépasse aujourd'hui 80 %, associée à l'augmentation de la demande de transport née de nouveaux comportements économiques et sociaux, a entraîné une forte augmentation du nombre des embouteillages et « points noirs », l'offre de transports collectifs n'ayant pas accompagné suffisamment cette croissance.

C'est le mérite de ce gouvernement que d'avoir décidé de repenser la politique des transports dans sa globalité.

Mettant fin à un système fondé sur l'offre par mode, qui ne prend pas correctement en compte la complémentarité des différents types de transport, la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire votée le 25 juin prévoit deux schémas multimodaux de services collectifs de transport, l'un concernant les transports de personnes, l'autre les transports de marchandises.

Cette mise en perspective nouvelle permet de mieux appréhender les besoins à partir de la demande de transport. Elle vise aussi à mieux utiliser et valoriser les infrastructures existantes en coordonnant les moyens, tout en mettant l'accent sur la nécessité de mettre en place des infrastructures nouvelles pour fluidifier la circulation routière et permettre au mode ferroviaire et aux transports collectifs urbains de regagner des parts significatives de marché.

D es succès importants ont déjà été obtenus et démontrent ainsi qu'il n'est pas trop tard pour éviter la thrombose des déplacements et ses conséquences économiques et environnementales. Le lancement, dans sept régions expérimentales, d'une expérience de transfert des compétences d'autorité organisatrice de transport ferroviaire aux régions, qui a débuté en janvier 1997, est un succès unanimement reconnu.

Mettant fin à un recul regrettable du transport régional de passagers par train, cette politique a redynamisé un secteur qui fait preuve d'un fort potentiel de croissance, satisfaisant les usagers et désengorgeant le réseau routier.

La généralisation de ce transfert de compétences est désormais annoncée.

La récente création du Conseil supérieur du service public ferroviaire a également pour but, en respectant l'engagement pris en juin 1997 de « réformer la réforme » qui a conduit à la création de Réseau ferré de France, de garantir notamment l'unicité et la cohésion du système ferroviaire national, et donc du service public qu'il assure, dans l'intérêt général.

Votre budget 2000, monsieur le ministre, conforte ces grandes orientations, car c'est le souci de la majorité de conduire ce projet ambitieux dans le respect des droits sociaux des personnels des services de transport.

La compétitivité entre modes de transport, le développement de l'intermodalité, passent par une modernisation des infrastructures et des méthodes, mais aussi par la fin du dumping social exercé dans le transport routier qui, obligeant de fait les conducteurs à ne pas respecter les règlements en matière de durée de conduite, de vitesse limite, de temps de repos et de limite de chargement, met en péril les entreprises soucieuses de la loi et nuit gravement à la sécurité de l'ensemble des usagers de la route. A cet égard, une harmonisation européenne par le haut est indispensable.

Avec 99 milliards de francs, le budget de l'équipement et des transports connaît cette année une progression de 2,6 %. Je regrette cependant qu'il ne soit pas inscrit au rang des budgets prioritaires, ce qu'il mériterait d'être vu l'ampleur des implications des transports dans l'économie nationale et la vie quotidienne de nos concitoyens.

Pourtant, ce budget permet de tenir les forts engagements du Gouvernement pris depuis 1997.

Les priorités y sont clairement affichées : Poursuivre le rééquilibrage en faveur du rail.

Relancer l'investissement ferroviaire par le maintien des capacités d'investissement de Réseau ferré de France et stabiliser la dette.

Garantir des moyens financiers à la SNCF par des concours supplémentaires pour lui permettre de faire face aux augmentations de péages sans compromettre le retour à l'équilibre des comptes. Notre vigilance doit s'exercer pour permettre à la SNCF d'investir dans les matériels, tout en mettant en place les 35 heures, et de remplir ses missions de service public. Pour être clair, j'aurais souhaité que 1,5 milliard de francs soit accordé à notre grand opérateur ferroviaire pour l'aider à réaliser, dans des conditions ne fragilisant pas ses comptes, cette grande mesure sociale qui contribue à inverser la tendance s'agissant des effectifs. Tel n'est pas le cas, semble-t-il, dans ce budget. Je rappelle que, sur l'année 1999, le solde positif s'élève à 1 200 emplois supplémentaires, auxquels il faut ajouter 900 emplois-jeunes et 1 000 apprentis.

Accentuer le rôle de redistribution intermodale du FITTVN. Entre 1997 et 2000, la part du ferroviaire est passée de 39,5 à 53 %. Malgré tout, le FITTVN ne joue pas suffisamment son rôle d'activateur de projets nouveaux, ce qui, à terme, pourrait éventuellement le condamner. Tel n'est évidemment pas notre souhait.

Prôner les transports collectifs urbains, tant en région parisienne qu'en province, avec une progression notable de l'aide de l'Etat, de 37 % en trois ans.


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Améliorer le réseau routier, avec des crédits en augmentation de 6 %, ce qui permettra à l'Etat de respecter ses engagements sur les contrats de plan.

J'aborderai deux points supplémentaires, que nous avions déjà évoqués lors des débats précédents.

Lors du débat sur la loi de financement de la sécurité sociale 2000, j'ai déposé avec M. Idiart un amendement exonérant de la TGAP le transport par fer et voie d'eau des déchets ménagers et assimilés. Le secrétaire d'Etat au budget a refusé nettement et nous comptons sur votre appui en deuxième lecture où nous redéposerons cet amendement.

Par ailleurs, nous souhaitions que les transporteurs collectifs faisant des efforts pour rendre leur matériel peu polluant bénéficient d'un reversement de 7 centimes au même titre que les utilisateurs de gazole.

Ce budget, monsieur le ministre, vous permettra de poursuivre la politique généreuse engagée depuis 1997. Je vous souhaite beaucoup de courage et de persévérance dans les négociations européennes à venir, qui sont décisives. Je sais que vous n'en manquez pas, mais l'appui du Parlement, et en particulier de l'Assemblée nationale, avant les dernières négociations de Bruxelles, a été très important.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Tout à fait !

M. Jean-Jacques Filleul, rapporteur pour avis.

J'espère que, dans les mois à venir, l'Assemblée nationale ne manquera pas de faire de même, car les combats seront rudes.

En conclusion, la commission de la production et des échanges a donné, à ma demande, un avis favorable à votre projet de budget pour 2000.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur de nombreux bancs du groupe communiste.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Gilbert Gantier, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour les transports aériens et la météorologie.

M. Gilbert Gantier, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour les transports aériens et la météorologie.

Madame le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les crédits de l'aviation civile pour 2000 sont à peu près identiques à ceux qui avaient été votés en 1999, et, déjà, en 1998. En d'autres termes, on cherche en vain la marque d'une volonté politique.

Pourtant, le secteur du transport aérien est en pleine mutation. Pour m'en tenir à l'un des faits les plus importants de ces dernières semaines, nous avons vu au mois d'octobre l'émergence d'un véritable pôle européen de l'aéronautique civile et militaire, avec la fusion d'Aérospatiale-Matra et de Dasa. Cette fusion est dans la ligne du soutien que les pouvoirs publics n'ont cessé de maintenir en faveur de la construction aéronautique depuis de nombreuses années. Elle constitue également un gage d'avenir, à la condition que notre pays sache négocier les modalités de mise en place de la future société européenne, et il faut créditer le Gouvernement d'avoir enfin opté dans ce secteur pour une philosophie libérale, mais il convient aussi de poursuivre la restructuration de nos industries de défense, afin que la participation des sociétés françaises à cette fusion ne mette pas en jeu nos intérêts vitaux.

En revanche, les a priori idéologiques du Gouvernement sur le secteur public ont failli isoler Air France de la plupart des grands systèmes d'alliance, non en raison du statut de la compagnie, mais surtout parce que l'Etat actionnaire ne semble toujours pas en mesure d'apporter les capitaux nécessaires à son développement. Air France n'a conservé son attractivité aux yeux de la compagnie américaine Delta Airlines que par son implantation à Roissy, seul aéroport européen à pouvoir envisager un doublement de sa capacité.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Grâce à qui ?

M. Gilbert Gantier, rapporteur spécial.

Pourtant, rien ne justifie le maintien dans la sphère étatique d'une entreprise qui ne remplit assurément pas une véritable mission de service public, et qui doit se développer dans un secteur ô combien concurrentiel puisque qu'il n'y a pas seulement la concurrence nationale mais aussi toute la concurrence internationale.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Cela marche bien !

M. Gilbert Gantier, rapporteur spécial.

La privatisation de la compagnie lui procurerait les ressources qui lui manquent pour renouveler et accroître sa flotte.

M. Jean-Pierre Blazy.

Ça, c'est de l'idéologie !

M. Gilbert Gantier, rapporteur spécial.

Une conception similaire conduit également le Gouvernement à ne pas envisager la privatisation, ou à tout le moins l'ouverture du capital d'Aéroports de Paris. Or la rentabilité de cette entreprise faiblit, et l'alourdissement de la fiscalité, tant au titre de la taxe sur les bureaux et les entrepôts en Ilede-France que par la suppression du régime des ventes hors taxes, a coïncidé avec une aggravation sensible de la concurrence des services en escale.

La croissance économique apporte certes des raisons d'espérer à la plupart des industries du transport aérien, mais le Gouvernement, en se fondant sur une conception désuète de ce secteur, ne prépare pas les grands enjeux de l'avenir. L'internationalisation des activités l'obligera pourtant sans doute, à terme, à opter pour des solutions libérales. Espérons que certaines opportunités n'auront pas été perdues d'ici là.

J'aborderai maintenant l'examen des crédits de l'aviation civile pour 2000 et je m'étonne de ne pas trouver dans les documents officiels la moindre évocation du fait, malheureusement quasi certain, que le Gouvernement devra rembourser des sommes importantes - on parle de 4 milliards de francs - indûment perçues sur les compagnies aériennes. Il s'agit là de la suite, et peut-être, on peut le souhaiter, de l'épilogue, de multiples contentieux...

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Depuis quand ?

M. Gilbert Gantier, rapporteur spécial.

... à la suite desquels le Conseil d'Etat avait constaté que, pour le calcul des redevances aériennes, étaient pris en compte les coûts afférents au balisage lumineux des pistes, aux services de sécurité d'incendie et de sauvetage et à diverses installations affectées à la gendarmerie, ainsi que 57 % des coûts de fonctionnement de l'Ecole nationale de l'aviation civile, soit des dépenses qui n'auraient pas dû être financées par la redevance.

Le Gouvernement avait bien essayé de contraindre le droit à s'accorder au fait, en tentant une validation législative de ces errements, par une loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, mais, pour des raisons de procédure, cette tentative a été jugée non


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conforme à la Constitution par une décision du 25 juin 1998 du Conseil constitutionnel. Il a ensuite obtenu, par la loi du 23 décembre 1998 portant diverses dispositions en matière de transports aériens, la validation législative des titres de perception des redevances.

Or, par une lettre du 26 mai dernier, le Conseil d'Etat a indiqué à M. le ministre chargé des transports que, conformément à l'article 55 de la Constitution, les traités et accords internationaux régulièrement ratifiés ont, en droit français, une valeur supérieure à celle des lois. Les lois de validation doivent donc, en l'occurrence, être compatibles avec l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme.

En conséquence, le Conseil d'Etat a estimé que le Gouvernement ne pourrait pas, sur cette base, refuser aux intéressés qui le solliciteraient le remboursement des sommes indûment mises à la charge des compagnies aériennes, considérant que l'administration n'avait pas rempli ses obligations. J'espère, monsieur le ministre, que, tout à l'heure, vous nous apporterez des éclaircissements sur ce point essentiel.

Autre problème que j'évoquerai : le détournement de la vocation de l'ancien fonds de péréquation du transport aérien, devenu fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien. Initialement, ce fonds avait été conçu pour subventionner les lignes aériennes déficitaires, dans une optique d'aménagement du territoire. Mais devant la nécessité, apparemment pressante, de trouver de nouvelles ressources, le Gouvernement a modifié fondamentalement la nature du fonds, puisque l'article 32 du projet de loi de finances pour 2000 affecte 77 % du produit de la taxe de l'aviation civile au budget annexe, l'aménagement du territoire n'en recueillant plus que 23 %. L'aménagement du territoire, objectif initial unique du fonds lors de sa création, est ainsi devenu tout à fait secondaire.

En outre, le dispositif introduit une péréquation du financement des aéroports. Je me suis trouvé bien en peine d'en justifier la rationalité économique. Il semble que l'Etat, par la création d'une taxe et l'extension du fonds, se substitue aux gestionnaires d'aéroports que sont notamment les chambres de commerce. Le risque est grand, de ce fait, d'assister au désengagement des collectivités locales, ce qui contraindra le Gouvernement à majorer une fois encore, à terme, les taxes perçues sur les passagers.

Or on rappellera qu'une série de dispositions, allant des nouvelles normes environnementales à la disparition des ventes hors taxes, a accru les dépenses des aéroports.

Le fonds devra donc financer de manière croissante les aéroports, au détriment de la péréquation des lignes aériennes, voulue initialement.

J'en viens maintenant aux crédits du budget annexe de l'aviation civile. Ils s'établissent à 8,7 milliards de francs pour 2000, soit une quasi-stabilisation, comme je l'ai dit tout à l'heure. Du côté des recettes, le produit de la redevance de route est évalué à 4,9 milliards de francs, soit une diminution de 1,6 % par rapport à 1999. Celui des redevances pour services terminaux - en métropole et outre-mer - est établi à 1,166 milliard de francs, ce qui constitue une augmentation de 3,3 % par rapport à l'ancienne redevance.

Plus de 80 % des recettes sont consacrés aux dépenses de fonctionnement. Les charges de personnels s'élèveront à 4,36 milliards de francs, soit une nouvelle augmentation de 3,8 %, notablement supérieure à l'inflation.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Ce sont des personnels qualifiés !

M. Gilbert Gantier, rapporteur spécial.

Les dépenses d'investissement concernent surtout les investissements en faveur de la navigation aérienne, avec 1 220 millions pour 2000. La sécurité des aéroports bénéficiera pour sa part de 120 millions de francs, dont la moitié pour le contrôle de bagages de soute.

Au-delà de ces chiffres, qui paraissent a priori rassurants, ce qui me préoccupe, monsieur le ministre, c'est l'état déplorable des relations entre la direction générale de l'aviation civile et les professionnels du secteur. Le dialogue semble bloqué et le Gouvernement, en l'occurrence, ne joue pas le rôle d'arbitre qui devrait être le sien.

Différents dossiers souffrent de retards préoccupants.

Ainsi en est-il de la formation des contrôleurs de la navigation aérienne. Le départ à la retraite et l'accroissement du trafic génèrent en effet des besoins en nouveaux contrôleurs.

En moyenne, 130 nouveaux arrivants intègrent les effectifs opérationnels chaque année. Cette formation des contrôleurs de la navigation aérienne représente un effort coûteux, mais dont les effets bénéfiques tardent à se faire sentir car elle est l'objet d'une particularité bien française.

A l'origine, les méthodes de travail des contrôleurs aériens français ont trouvé leurs fondements dans celles appliquées par les militaires. Par la suite, on a poursuivi dans la même voie. Puis des considérations sociologiques sont venues compliquer la gestion du corps.

C'est ainsi que le statut d'ingénieur attribué aux contrôleurs - autre particularité française -, bien que non reconnu au plan des titres officiels, a conduit à une prolongation généralisée des études et à une forte progression des rémunérations et, par conséquent, des coûts. On en est arrivé à mettre en place des ingénieurs de formation bac + 7, alors que les aviations civiles européennes, en Grande-Bretagne notamment, se contentaient de techniciens bac + 4 ou même bac + 2. En France, un contrôleur reçoit ainsi une formation au pilotage.

On note, en conséquence, année après année, la proportion fortement croissante de la part des frais de personnels dans le budget annexe, part qui s'établit actuellement à 54 % des dépenses d'exploitation, lesquelles ont elles-mêmes augmenté de 15 % en moins de trois ans.

Cela ne correspond pas à un accroissement des effectifs mais essentiellement à une augmentation des rémunérat ions. Au demeurant, aucune information n'a été communiquée à votre rapporteur sur l'évolution des coûts salariaux unitaires par contrôleur.

Autre problème, sans solution depuis quinze ans : l'accroissement du nombre des mouvements d'avions et le doublement des retards qui en est la conséquence. Ce phénomène n'est certes pas propre à la France, mais il faut reconnaître qu'il est particulièrement sensible chez nous, puisque, en juin 1999, l'augmentation des retards a été de 68 % supérieure à celle de juin 1998, et qu'un vol européen sur trois a connu un retard moyen de vingtneuf minutes à l'arrivée ou au départ. De même, le ciel européen a connu depuis le début de l'année des désordres accrus puisque le trafic a augmenté de 6 % et les retards de 74 %.

Or je constate, dans le même temps, que les crédits d'investissement de la navigation aérienne demeurent à un niveau constant d'environ 1,3 milliard de francs depuis plusieurs années.

Des évolutions techniques sont intervenues en 1999, mais leurs résultats ont été très décevants. D'autres mesures plus efficaces, comme le contrôle franco-suisse de la zone de Genève, ont avorté pour des motifs qui sont


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apparus aux observateurs avertis comme étant, au premier chef, des réactions corporatistes de la CGT. Au surplus, il existe un problème d'affectation de l'espace aérien français au profit de l'activité militaire, qui utilise 50 % de l'espace pour moins de 10 % du trafic.

Il apparaît évident que les problèmes de coordination de la navigation aérienne en France n'ont donc pas été estimés jusqu'à présent à leur juste mesure.

Par ailleurs, les services de la navigation aérienne sont très discrets sur leurs investissements. Ainsi n'ai-je appris que le 28 octobre dernier, lors d'une réunion des responsables de l'aviation civile, que le programme ELECTRA des simulateurs de la navigation aérienne coûterait trois fois plus cher que le montant initialement prévu. Il s'agit d'ailleurs d'un marché de gré à gré, passé sans aucune consultation des compagnies aériennes, pourtant expertes en matière de simulateurs.

J'en viens à ma dernière interrogation, monsieur le ministre. Alors qu'il n'existe aucun rapport entre le pilotage d'un 747 ou d'un A 340 et celui d'un avion de loisir, les personnels techniques et administratifs de la direction générale de l'aviation civile s'entraînent au pilotage d'avions de loisir sur l'aérodrome de Melun-Villaroche, au prétexte que leurs fonctions nécessitent la connaissance des manoeuvres d'approche des aéronefs. Le tout est, bien entendu, financé par le budget annexe. Bien plus, cette formation, gratuite pour les intéressés, déborde le cadre de la DGAC, puisque tout ingénieur de l'Ecole nationale de l'aviation civile semble pouvoir y avoir accès.

Le budget annexe, monsieur le ministre, a pour vocation, non de financer des dépenses ludiques, mais des dépenses liées à la sécurité. Dans la mesure où il s'agit d'une pratique de longue date dont vous n'êtes pas responsable, je me suis abstenu de déposer un amendement de réduction des crédits, qui aurait présenté un caractère vexatoire. Mais peut-être conviendrait-il que vous y mettiez bon ordre.

Compte tenu des incertitudes constantes qui pèsent sur le budget annexe, j'ai proposé à la commission des finances de rejeter les crédits. Celle-ci ne m'a pas suivi et vous demande d'adopter les crédits de l'aviation civile et du transport aérien pour 2000. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

Mme la présidente.

La parole est à M. François Asensi, rapporteur pour avis de la commission de la production et des échanges, pour les transports aériens.

M. François Asensi, rapporteur pour avis de la commission de la production et des échanges, pour les transports aériens.

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'analyse du budget annexe de l'aviation civile pour 2000 est rendue plus difficile en raison des réformes engagées en matière de fiscalité aérienne. Avec 8,7 milliards de francs, ce budget s'inscrit en très légère hausse. Une part croissante des recettes provient des taxes et redevances acquittées par les compagnies aériennes, pour lesquelles vous escomptez, monsieur le ministre, une augmentation du trafic.

Si les crédits affectés à la construction aéronautique sont en très légère baisse en raison de l'achèvement de certains programmes de recherche, ceux dédiés aux avances remboursables pour le lancement du très gros porteur A3XX sont, en revanche, en forte augmentation.

La présentation du budget de l'aviation civile est aussi l'occasion de faire le point sur les restructurations en cours qui affectent actuellement toute la filière aéronautique.

Cette année fut en effet marquée par la passation d'alliances à l'échelle mondiale dans le transport aérien et par un double phénomène de fusions et de privatisations rampantes dans le domaine de la construction aéronautique. Le transport aérien mondial risque de se retrouver, une nouvelle fois, dans une situation de surcapacité.

Obsédées par la maîtrise des coûts d'exploitation, les compagnies aériennes européennes continuent à mettre en place des plans d'économies dans le cadre d'une libéralisation du transport aérien pourtant achevée, je le rappelle, depuis le 1er avril 1997.

Les pressions sur les conditions de travail et les droits des salariés se sont multipliées en l'absence d'un véritable volet social européen et plus globalement d'une politique commune du transport aérien en Europe qui auraient permis de contrer les effets pernicieux du libéralisme.

La définition d'un espace commun des transports aériens comprenant les Etats membres de l'Union et les

Etats-Unis a été approuvée par le Conseil des ministres des transports de juin 1996 et réaffirmée à plusieurs reprises jusqu'à ce jour. Même si cet espace constitue une solution de rechange à la politique de « ciel ouvert » qui a tant divisé les Européens ces dernières années, il ne doit pas englober les droits de trafic. Si c'était le cas, cela permettrait de réaliser le rêve des autorités américaines d'un grand marché libéralisé dans lequel les Etats membres de l'Union n'auraient plus aucune marge de manoeuvre.

C'est dans ce contexte fluctuant que les ailes françaises poursuivent leur redressement. Nul ne peut contester qu'Air France a franchi un cap décisif dans son développement. L'exercice en cours marque le début de la mise en application du projet d'entreprise et la fixation d'objectifs ambitieux parmi lesquels la restauration de la ponctualité, l'augmentation de l'offre de sièges par le renouvellement de la flotte et l'amélioration d'un dialogue social d'ailleurs en plein renouveau.

L'ouverture du capital et les efforts déployés par l'Etat et par les personnels permettent aujourd'hui à Air France d'engager une nouvelle phase de son développement. Son maintien dans le secteur public, même dans l'univers ultra-concurrentiel qu'est devenu le transport aérien, démontre le réalisme du choix fait l'année dernière, sous votre impulsion, monsieur le ministre, par le Gouvernement lorsqu'il a maintenu un actionnaire majoritaire : l'Etat. A preuve, de grandes compagnies privées sont intéressées par une coopération avec Air France alors même qu'elle n'a pas été privatisée.

La croissance du trafic aérien prévue dans les proc haines années et le redressement des compagnies aériennes produisent des effets sur toute la filière aéronautique.

En aval de cette filière, l'augmentation du nombre de passagers nécessite des adaptations de la politique aéroportuaire. Il revient à l'Etat de jouer un rôle essentiel pour mettre en oeuvre une politique aéroportuaire volontariste qui prenne en compte les contraintes environnementales et un aménagement équilibré du territoire.

Ces derniers mois, l'Etat et les différents acteurs du transport aérien ont multiplié les efforts en faveur de la maîtrise des nuisances sonores, notamment avec la création d'une Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires, qui est dotée de 5 millions de francs de crédits d e fonctionnement. Espérons que cette autorité


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indépendante jouera pleinement son rôle et que vos engagements seront tenus, monsieur le ministre, notamment à propos de l'aéroport Charles-de-Gaulle.

Sur ce site, à la condition que le niveau de bruit ne dépasse pas celui atteint en 1997, le seuil des 55 millions de passagers ne doit en aucun cas être dépassé, au risque d'assister à la dégradation du cadre de vie et de l'environnement.

M. Jean-Pierre Blazy.

Très juste !

M. François Asensi, rapporteur pour avis.

Le renouveau de la politique aéroportuaire passe également par le développement d'Aéroports de Paris sur le plan national et international, dans un cadre rénové et dans le plein respect de l'environnement, comme vous l'avez rappelé, au nom du Gouvernement dans une lettre de mission adressée au nouveau président d'Aéroports de Paris. Bien entendu, ce redéploiement ne peut conduire à une privatisation de fait des Aéroports de Paris.

De nouvelles priorités s'imposent auxquelles je souscris pleinement : amélioration de la qualité des services offerts ; optimisation des capacités ; inscription de l'activité aéroportuaire dans une perspective de développement durable ; développement du dialogue avec les collectivités locales ; amélioration des dessertes terrestres ; renforcement des activités d'Aéroports de Paris à l'international ; rénovation des relations sociales.

L'année 1999 a été marquée par des annonces de regroupements et de fusions. Des opérations de privatisation rampante se sont multipliées comme en témoignent le rapprochement d'Aerospatiale avec Matra hautes technologies puis la fusion surprise d'Aerospatiale Matra avec l'allemand DASA.

Avec les pays partenaires d'Airbus, la France s'est clairement prononcée en faveur de la constitution d'un grand pôle européen. Ce cadrage n'a pas empêché les principaux industriels d'Airbus de se livrer à une véritable

« partie de poker ». Des difficultés sont apparues sur l'estimation des actifs, sur la répartition des activités et sur le partage du pouvoir au sein d'Airbus.

Profitant de cette situation, le Gouvernement a décidé de privatiser par fusion Aerospatiale et Matra. Même si l'Etat reste le premier actionnaire majoritaire d'Aerospatiale-Matra et dispose d'une action spécifique, il est permis d'émettre des doutes, voire des réserves sur les conditions de la fusion. D'après de nombreux experts, une estimation ne devait donner à M. Lagardère pas plus de 20 % et non 33 % du capital.

M. Francis Delattre.

Encore un cadeau fait au grand capital !

M. François Asensi, rapporteur pour avis.

La récente annonce de la fusion entre Aerospatiale et l'allemand DASA amplifie le processus de désengagement de la puissance publique, puisqu'elle ne dispose plus dans le nouveau groupe que de 15 % du capital.

Malgré les pressions exercées outre-Rhin, je compte sur votre plus grande fermeté pour que l'Etat reste dans le capital de la nouvelle entité qui détient, avec l'espagnol CASA, 80 % du capital d'Airbus. Monsieur le ministre, pouvez-vous garantir que l'Etat gardera ses prérogatives de puissance publique dans ce nouveau montage ? Sans doute, la constitution d'une nouvelle entité industrielle et militaire européenne s'impose face au géant américain Boeing. Reste que le rôle de la puissance publique doit prévaloir dans les grands équilibres du capital. A défaut, les marchés financiers réduiront à néant les politiques publiques et l'idée d'une défense européenne indépendante.

Enfin, la question du statut d'Airbus est à nouveau posée. Reconnaissons que l'actuelle structure - un GIE - a réussi l'impossible : faire travailler ensemble des nations concurrentes, préserver l'indépendance tout en imbriquant les intérêts, créer une marque européenne unique et reconnue dans le monde entier. Actuellement, Airbus vend deux fois plus d'avions qu'il ne peut en produire et son carnet de commandes frôle les 600 milliards de francs. Airbus doit profiter de cette conjoncture, d'autant que la flotte mondiale devrait plus que doubler dans les vingt années à venir.

Si une réorganisation d'Airbus semble aujourd'hui inéluctable, elle ne devrait pas peser sur la politique sociale et l'emploi de la future grande entreprise.

Dans le domaine de la construction aéronautique, je me félicite du soutien de l'Etat dans ce budget en faveur des avances remboursables pour le très gros porteur A3XX.

uvrons pour que la réalisation et surtout l'assemblage du futur avion se réalisent à Toulouse, qui est le site historique d'Airbus, mais aussi une région fortement dotée d'une culture industrielle aéronautique.

Comme vous le savez, le soutien à notre construction aéronautique s'inscrit dans le cadre des limitations imposées par l'accord franco-américain de 1992. La Commission européenne estime que les Etats-Unis ne respectent pas les termes de l'accord. Le secteur de l'industrie aéronautique continue de bénéficier de financements en provenance de la NASA ainsi que d'avantages fiscaux.

La France présidera le conseil des ministres des transports de l'Union européenne pendant le second semestre de l'an 2000. A cette occasion, je souhaite que vous preniez, monsieur le ministre, des initiatives fortes avec vos partenaires européens pour renforcer la coordination du contrôle aérien européen, coordonner les études et les recherches pour la conception d'une nouvelle génération d'avions supersoniques, lutter contre les nuisances sonores sur tout le territoire de l'Union, proposer une nouvelle structure juridique pour Airbus aussi performante que le GIE, et définir un volet social qui protège les droits des salariés. Le secteur de la filière aéronautique ne doit pas se laisser aller à un moins-disant social qui pénaliserait les salariés sous prétexte d'une concurrence accrue.

A l'heure du marché tout-puissant et de la mondialisation tentaculaire des économies, les pouvoirs publics doivent faire preuve de vigilance pour défendre le savoirfaire aéronautique et préserver les droits sociaux des salariés.

Aujourd'hui, une nouvelle société se profile, celle des fonds de pension et des stock-options, une société profondément marquée par le libéralisme où les valeurs dominantes ne sont plus la solidarité mais la recherche effrénée de la rentabilité. Nous risquons d'en subir le contrecoup si l'Etat ne réaffirme pas à temps sa présence et ne conforte pas son rôle régulateur.

Telles sont les observations d'ordre général que je tenais à vous présenter, monsieur le ministre, avant de rappeler que la commission de la production et des échanges a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de l'aviation civile.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Guy Lengagne, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour la mer.


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M. Guy Lengagne, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour la mer.

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, en 1997 et en 1998, je rappelais à cette même tribune combien la France, deuxième puissance maritime du monde par la surface des mers sous sa juridiction, pourrait être un grand pays maritime. Les dix minutes consacrées à ce rapport, au lieu de quinze pour les autres rapports de la commission des finances, montrent que, désespérément, notre pays reste les pieds englués dans la glaise...

J'en viens tout de suite à l'essentiel. Le budget pour 2000 de la mer, avec 6,321 milliards de francs, traduit une légère augmentation par rapport à l'an dernier, mais il faut rappeler que les dépenses publiques consacrées à la mer atteignent en réalité 10,5 milliards de francs.

La subvention à l'Etablissement national des invalides de la marine constitue, comme chaque année, le poste principal, mais il faut souligner que, pour la première fois, sa part dans le budget est en baisse, passant de 75 % à 71 %. Je tiens à souligner que, hors ENIM, les dotations sont en forte hausse ; plus 15,66 % par rapport à 1999.

Transformation d'emplois, amélioration des carrières, création d'emplois : les dépenses de personnel augmentent de 3,54 %. Deux priorités apparaissent clairement dans ce budget : l'amélioration de la formation et le renforcement de la sécurité.

Les subventions de fonctionnement et d'investissement aux écoles nationales de la marine marchande sont en hausse : 10 % en crédits de paiement.

On a prévu 315 postes budgétaires dans la loi de finances pour intégrer le personnel de l'association pour la gérance des écoles maritimes et aquacoles, l'AGEMA, dans la fonction publique. Mais, pour rendre cette intégration effective, une modification législative est nécessaire et, à cette fin, je proposerai à l'Assemblée un article additionnel après l'article 70.

M. Gilbert Le Bris.

Très bien !

M. Guy Lengagne, rapporteur spécial.

La dotation

« signalisation et surveillance maritime » augmente de 13,77 % et les moyens en crédits de personnel sont significativement renforcés.

De plus, un effort est fait pour restaurer ou remplacer le matériel de signalisation maritime, matériel qui est, il faut le souligner, dans un état de décrépitude avancé, et vous n'y êtes pour rien, monsieur le ministre.

(Sourires.)

On ne peut que rendre hommage au personnel qui, avec les moyens du bord, a fait des prouesses pour permettre au matériel de fonctionner.

Mais pourquoi cet effort notable en faveur de la sécurité est-il gâché par la diminution incompréhensible cela représente une « économie » de 1 million de francs de la subvention d'équipement que l'Etat accorde à la Société nationale de sauvetage en mer, alors même que le plan de modernisation engagé par la SNSM avait reçu l'accord de votre ministère ? Faut-il rappeler que les sauveteurs en mer, souvent appelés les « pompiers de la mer », sont très estimés dans notre pays ? Je me réjouissais l'an dernier, à cette même tribune, en constatant qu'on avait renoncé à la détestable habitude de compléter la subvention à la SNSM en « pompant » dans la réserve parlementaire. Aurais-je parlé trop vite ? Je dirai maintenant quelques mots sur les courtiers maritimes.

La législation européenne va entraîner la disparition de leur activité. Aujourd'hui, il leur est interdit d'exercer une activité commerciale. La loi actuellement en préparation va supprimer cette profession. Certes, les courtiers pourront ensuite exercer des activités commerciales mais ils ne disposeront d'aucun laps de temps entre la disparition de leur métier traditionnel et leur reconversion. Il faudra donc prévoir une période durant laquelle ils pourront cumuler les deux activités.

J'en viens à la politique portuaire.

L'activité de nos ports a été bonne en 1998 et le premier trimestre 1999 est encourageant.

Mais ne nous réjouissons pas trop vite : la part dans notre commerce extérieur du trafic transitant par nos ports est en baisse, notamment à l'exportation. On entend souvent incriminer les coûts de passage portuaire, mais je ne crois pas que ce soit la vraie raison.

Ainsi, pour les conteneurs, Le Havre est moins cher qu'Anvers ou que Rotterdam.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Tout à fait ! On ne le dit pas assez !

M. Guy Lengagne, rapporteur spécial.

Il y a dans le rapport écrit un tableau précis à ce sujet.

En réalité, outre la qualité et la diversité des services offerts, la desserte des ports joue un rôle clef. Ils doivent être reliés aux grands réseaux de voies navigables et il est important que les liaisons ferroviaires soient de bonne qualité. Sait-on qu'en France la vitesse moyenne des trains de marchandises est de 14 kilomètres à l'heure ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Nous progressons !

M. Guy Lengagne, rapporteur spécial.

On ne peut dès lors que souscrire à la volonté du Gouvernement de développer le concept de « corridor de fret ». Ces considérations ne doivent pas nous faire oublier qu'avant toute chose nos ports doivent être modernes et en bon état. Les coûts d'entretien et les investissements y sont certes très lourds mais on ne peut pour autant admettre la stagnation des crédits d'entretien - depuis cinq ans pour les ports autonomes et trois ans pour les ports d'intérêt national - et la forte baisse des crédits d'investissement, tant en autorisation de programme qu'en crédits de paiement.

Le recours de plus en plus fréquent aux collectivités territoriales ne saurait être la panacée.

Pourquoi ne pas permettre aux ports de faire dese mprunts à très long terme - cinquante ans par exemple -, dès lors que la durée de vie des installations construites est de cet ordre ? Je profite de ce rapport pour aborder de nouveau la question du statut de nos ports nationaux. Ils sont 30, 7 autonomes et 23 dits d'intérêt national, dont le directeur est, je le rappelle, un haut fonctionnaire de l'Etat. Le traitement réservé à nos ports est inégalitaire, les ports autonomes étant mieux dotées par l'Etat. N'est-il pas temps de revoir le statut élaboré en 1983 ? Nos 30 ports ont-ils vraiment tous une dimension nationale ? Pourquoi ne pas confier certains d'entre eux aux régions, qui ont compétence économique ? Dix-sept de nos ports d'intérêt national sur vingt-trois sont en effet concédés à des chambres de commerce et d'industrie. Ce qui m'a amené à consulter le rapport élaboré en mai 1999 par l'inspection générale des finances sur les chambres de commerce.

Sa lecture est consternante : non-respect du code des marchés publics, salaires des cadres très élevés, dépenses inconsidérées, investissements irréalistes... Je ne résiste pas


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à l'envie de vous lire une phrase de ce rapport : « De m émoire de l'inspection générale des finances, peu d'enquêtes ont donné lieu à autant de dénonciations (y compris auprès des procureurs de la République) que l'audit des CCI. » Il ne s'agit pas de faire ici le procès des

chambres de commerce, car beaucoup d'entre elles fonctionnent correctement, mais, dès lors que l'Etat leur confie des équipements d'importance vitale pour notre pays, il est normal d'être vigilant.

La disparité des situations des CCI est un obstacle au développement harmonieux de notre façade maritime. Je cite dans mon rapport l'exemple de deux ports d'intérêt national voisins, ayant à leur tête le même directeur, haut fonctionnaire de l'équipement, l'un concédé à la CCI la plus riche de France, l'autre à la plus pauvre ! Comment, dans ces conditions, mener une politique maritime cohérente ? Il ne s'agit pas, dans mon esprit, d'écarter les chambres de commerce, mais il faut que la rigueur que l'on impose de plus en plus aux collectivités territoriales soit aussi de mise pour ces organismes dès lors qu'ils gèrent des équipements publics.

La protection et l'aménagement du littoral sont dotés de crédits en nette augmentation ; on ne peut que vouse n féliciter, monsieur le ministre. Notre flotte de commerce est stabilisée à 217 navires sous pavillon français. Le budget 2000 prévoit un dispositif de remboursement par l'Etat des contributions sociales patronales, pour u n montant de 133 millions de francs, auxquels s'ajoutent 70 millions de francs pour les lignes desservant la Corse, mais il faut rappeler que les armements se plaignent des longs délais de paiement. Le remboursement de la part maritime de la taxe professionnelle fait l'objet d'une inscription en loi de finances initiale.

Je voudrais attirer votre attention sur un point qui me paraît extrêmement important : l'ouverture à la concurrence internationale de la desserte vers les îles risque de mettre en grande difficulté la SNCM, qui dessert la Corse. Par ailleurs, la suppression des boutiques en duty free depuis le 1er juillet a entraîné pour les deux armements français Sea-France et BAI d'importantes pertes de recettes. Rappelons que Sea-France tirait 50 % de ses recettes des ventes hors-taxes. Si un effort important n'est pas fait au profit de ces deux compagnies, le risque est grand de voir nos voisins britanniques régner seuls sur la Manche ! Il est encore trop tôt pour mesurer la perte réelle de trafic, mais les régions de Calais, Boulogne et Dunkerque l'ont déjà fortement ressentie, car, dans ces villes, de nombreux commerces vivent grâce à la clientèle britannique, qui fait la traversée attirée par les duty free et par le faible coût du passage par navire dû précisément au système des duty free

Pour terminer, signalons que le système de GIE fiscal qui s'est substitué aux quirats - dont nous avons longuement parlé - se met lentement en place : 15 dossiers sont en instance et 6 ont été acceptés.

En résumé, le secteur maritime est, plus que tout autre, soumis à la pression de la mondialisation. L'Etat, plus qu'ailleurs, doit donc être très attentif à ses difficultés.

Malgré les quelques insuffisances signalées, ce budget comporte de nombreux points positifs ; aussi, au nom de la commission des finances, unanime, je vous demande de l'adopter.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Mme la présidente.

La parole est à M. André Capet, rapporteur pour avis de la commission de la production et des échanges, pour les transports maritimes et fluviaux.

M. André Capet, rapporteur pour avis de la commission de la production et des échanges, pour les transports maritimes et fluviaux.

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, s'il existe un certain rituel dans les interventions des rapporteurs budgétaires, on a aussi coutume de dire et d'entendre que le secteur de la mer n'intéresse qu'insuffisamment les parlementaires.

Territoire bordé de milliers de kilomètres de côtes maritimes, la France ne répond pas, à la différence de certains autres Etats européens, à l'appel de la mer. Je ne faillirai pas, bien entendu, à la tradition car il est vrai que, particulièrement dans ce domaine, on pourrait décerner à la France la mention : « peut mieux faire ».

Permettez-moi cependant cette année - une fois n'est pas coutume - de dire que le bilan global de notre activité maritime et portuaire, et même du trafic sur nos voies navigables, est plutôt honorable, et qu'il a connu une progression, de 1997 à 1998, qui soutient la comparaison avec celle de nos voisins les plus dynamiques.

Globalement, le trafic de fret des ports autonomes a progressé, en 1998, de 6,4 % par rapport à l'année précédente. Cette croissance reflète, certes, des situations contrastées, Nantes, Saint-Nazaire et Le Havre se distinguant avec des évolutions particulièrement importantes - respectivement de 21 % et 11 % -, tandis que le trafic stagne à Marseille.

Ces chiffres reflètent la bonne santé de notre économie. Ils n'en sont pas moins le témoignage du dynamisme de l'activité portuaire de notre pays, qui a su moderniser profondément, en quelques années, le secteur de la manutention.

Plus encore, les trafics les plus intégrés de la filière du transport, mais aussi les plus rémunérateurs - je veux parler du transport conteneurisé - ont progressé fortement en 1998, leur taux de croissance frôlant les 7 % en un an. Désormais, Le Havre, où l'Etat, soutenu par les collectivités, lance le projet d'extension « Port 2000 », traite 1,3 million équivalents 20 pieds, et Marseille a dépassé les 600 000 conteneurs. Malheureusement, ces résultats n'empêchent pas un certain tassement des marges des établissements portuaires, qui ont reculé d'un tiers en 1998 par rapport à l'année précédente, malgré l'augmentation des trafics.

Il nous faut poursuivre de façon volontariste une politique d'investissement dans la filière portuaire, qui constitue un élément essentiel d'un aménagement durable de notre territoire. La France bénéficie d'atouts indéniables pour profiter largement de la croissance retrouvée en gagnant des parts de marché dans la concurrence européenne entre ports. C'est en enjeu important en termes d'emplois, d'activité industrielle et de services. C'est également un élément essentiel d'une politique d'indépendance et de garantie de nos approvisionnements, ainsi que l'a reconnu la Commission européenne en vue de la préparation de la future directive sur les ports et les infrastructures maritimes.

L'adoption de la loi no 99-533 du 25 juin 1999 d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire, en définissant une approche résolument multimodale de la filière des transports, a placé les ports maritimes au coeur de nos axes de circulation.

Dans le cadre d'un transport le plus souvent de bout en bout, les ports maritimes réalisent le transfert des marchandises entre le transport maritime et les différents


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moyens de transport terrestre, cette dernière expression devant être prise dans son sens le plus large et désignant aussi bien les voies navigables que le rail et la route.

Les ports constituent ainsi le maillon essentiel d'une chaîne de transport multimodale vers lequel doivent converger les divers modes de transports terrestres.

Parmi les facteurs de la compétitivité des ports, la qualité de la desserte terrestre est devenue déterminante.

C'est en effet sur le transport terrestre que peuvent être aujourd'hui réalisés d'importants gains de productivité en termes de temps et de respect des délais, mais aussi de coût du transport.

Ainsi, le coût de l'acheminement terrestre d'un conteneur peut, sur des distances de 500 kilomètres, représenter cinq à six fois celui de son passage portuaire. Pour certains types de trafic, en particulier pour les trafics intercontinentaux de conteneurs, le grandes lignes maritimes sont désormais amenées à faire escale dans un n ombre limité de ports. La réduction du nombre d'escales et leur massification impliquent une extension des régions européennes desservies à partir du port, avec son hinterland, extension favorisée par l'intégration progressive de l'économie européenne. Elles impliquent également un recours accentué au mode de transport privilégié pour les grandes quantités et les grandes distances qu'est le cabotage maritime. Les transports fluviaux et ferroviaires sont également concernés par cette nouvelle orientation.

Or l'essentiel des pré- et post-acheminements des ports français se fait aujourd'hui, à 85 %, par la route. En effet, la desserte ferroviaire des ports français reste insuffisamment développée par rapport aux pays où il existe une réelle synergie entre modes de transport. Or, dans la concurrence exacerbée qu'ils se livrent entre eux, tous les ports européens consacrent un effort considérable à l'extension de leur hinterland ferroviaire.

Leur stratégie repose sur trois axes : L'amélioration de l'interface portuaire, afin de transformer les terminaux portuaires en véritables terminaux multimodaux, dotés de connexions ferroviaires performantes ; Le développement des infrastructures ferroviaires et la qualité du service offert au passage du fret sur le réseau ferroviaire ; Enfin, la multiplication de services directs et réguliers reliant les ports aux principales destinations européennes.

La question de la stratégie et des actions concrètes de la SNCF et de RFF, à court et moyen termes, est vitale pour l'avenir des ports français.

En effet, si les pré-et post-acheminements ferroviaires des ports français représentent un bon tiers du fret ferroviaire international sur notre territoire, ils offrent un potentiel de croissance de plusieurs milliards de tonneskilomètres.

C'est pourquoi il importe que la SNCF et RFF soient des acteurs à part entière du développement du transit de marchandises dans les ports français.

De même, les efforts pour promouvoir les platesformes portuaires, en tant que plates-formes de transport c ombiné par excellence, doivent être intensifiés. Il convient que ces dernières puissent bénéficier des mêmes conditions favorables que le transport combiné rail-route.

Monsieur le ministre, vous ne serez par ailleurs pas étonné que l'élu du Pas-de-Calais vous entretienne ici, s'agissant du trafic maritime de passagers, de la nécessité d'une intervention urgente et forte de l'Etat pour préserver et développer l'armement français sur la liaison transmanche-France, c'est-à-dire l'entreprise Sea.

En effet, si le trafic passagers se porte bien en Méditerranée, où, en 1998, les résultats ont connu une progression de plus de 14 %, il n'en va pas de même sur la liaison Calais-Douvres, qui, concentrant désormais l'essentiel du trafic vers la Grande-Bretagne, a vu son trafic hors camions chuter de manière spectaculaire depuis juillet dernier.

Cette situation a une cause, contre laquelle nous n'avons cessé de mettre en garde les autorités communautaires : la suppression des ventes hors taxes à bord à partir du 1er juillet.

Le gouvernement français n'a pas manqué de mettre en garde ses partenaires européens contre les risques de l'application de cette disposition, qui, je tiens à le rappeler, avait été décidée initialement pour accompagner l'harmonisation des niveaux d'accise et des taux de TVA en Europe. Or celle-ci est encore loin d'être concrétisée.

Le Premier ministre, Lionel Jospin, le ministre de l'économie et des finances Dominique Strauss-Kahn et vous-même, monsieur le ministre, avez tout fait pour éviter l'application brutale de cette disposition, dont les effets mécaniques étaient déjà connus et analysés. Au cours du trimestre qui a suivi l'interdiction du duty free, le trafic a reculé globalement de 14 % pour les passagers et de 16 % pour les véhicules, du fait de l'augmentation des tarifs de passage rendue nécessaire pour compenser le manque à gagner des ventes à bord.

Au mois d'août 1999, le nombre de voya geurs à pied, clientèle souvent populaire qui vient passer la journée ou deux jours sur le continent, par exemple à Boulogne, dans le Calaisis ou à Calais, a chuté de près de 40 % par rapport au mois d'août 1998. Ce recul constitue une perte considérable pour l'ensemble de la zone côtière et du Calaisis, en particulier pour Calais et Boulogne-surMer, dont une partie du dynamisme économique est liée à la consommation de la clientèle anglaise.

Ce recul du marché n'a pas affecté le transport de fret par camion, par nature peu sensible aux attraits de la vente hors taxes. Au cours de la même période du mois d'août, ce segment du marché a progressé de 17,4 % par rapport à 1998.

Mais, paradoxalement, cette bonne tenue du fret, ajoutée à la stabilité des parts de trafic entre le mode maritime et la liaison par le tunnel, défavorise l'armement Sea-France aussi gravement que le recul du trafic privé lié à la fin du duty free.

La fusion des deux compagnies P & O et Stena, après l'éclatement de Sealink, a laissé la filiale de la SNCF seule, dans une situation marquée par une forte inégalité.

Aujourd'hui, quand P & O et Stena alignent 7 ferries de 26 000 tonnes chacun, leur permettant d'assurer quotidiennement 35 traversées dans les deux sens, que pèsent les 4 navires de 8 000 tonnes de Sea-France, qui effectuent au mieux 15 passages par jour ? Le marché n'est plus équilibré et l'allongement des délais d'attente, qui peuvent atteindre cinq ou six heures pour les camions les jours de pointe, chez Sea-France, constitue un contre-argument de vente redoutable, là où la compagnie concurrente assure qu'avec elle le camion et son chargement ne seront pas retenus à quai plus d'une heure dans tous les cas. Il y a là une concurrence déloyale entre les deux compagnies.


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A situation grave, mesures d'urgence. Une recapitalisation de Sea-France, en nature, par cession des quatre bâtiments qu'elle loue aujourd'hui, devra probablement être abondée par un soutien financier, pour permettre à l'entreprise de faire face à un déficit annuel estimé, dans les conditions actuelles de son armement et du marché, à plus de 200 millions de francs par an.

Mais nous pensons que Sea-France a un avenir, dans un marché du fret en expansion. Cela nécessite de prendre très rapidement la décision de commander un nouveau navire pour permettre à la compagnie d'affronter la concurrence, sinon à armes égales, du moins efficacement.

Dans l'attente de sa livraison, qui ne peut guère intervenir avant deux ans, il faut rapidement décider d'utiliser un navire de location, afin d'empêcher une perte plus grande des parts de trafic.

Il y va de l'avenir économique d'une région déjà lourdement frappée par le chômage, qui entrevoit dans le développement du marché unique un espoir de reconversion et de relance. C'est également là un moyen d'éviter la constitution d'un monopole de la liaison transmanche de surface, car le risque est grand, en cas d'atermoiements, d'une absorption de l'armement national.

Permettez-moi, pour conclure, monsieur le ministre, d'aborder brièvement deux points concernant les crédits destinés aux transports maritimes et fluviaux.

Je me réjouis de la forte progression des crédits hors ENIM, qui augmentent de 15,6 % par rapport à la loi de finances initiale de 1999. En outre, les autorisations de programme progressent sensiblement, atteignant 520 millions de francs en 2000, contre 213 seulement cette année. Ces dotations permettront de renforcer la politique de sécurité, de signalisation et de surveillance maritime, ainsi que de soutenir activement notre pavillon, l'emploi maritime et notre flotte de commerce. Ces décisions étaient attendues.

Mme la présidente.

Veuillez conclure, monsieur le rapporteur pour avis.

M. André Capet, rapporteur pour avis.

S'agissant des voies navigables, les crédits sont en progression de 9 % par rapport à l'année qui s'achève. Ils confirment l'engagement du Gouvernement en faveur de ce secteur, qui se concrétisera bientôt, je l'espère, par le lancement effectif des travaux sur la liaison Seine-Nord et la liaison SeineEst. Cependant, force est de constater que l'essentiel de ces crédits provient de la FITTVN : loin de représenter un moyen de renforcer l'action en faveur du transport multimodal et du désenclavement, cela constitue une débudgétisation regrettable, comme nous l'avions d'ailleurs craint lors de la création du fonds, en 1994, alors que nous étions dans l'opposition.

Sous ces réserves, monsieur le ministre, il s'agit d'un bon budget, et je suis heureux de vous indiquer que, sur ma proposition, la commission de la production et des échanges a émis un avis favorable à l'adoption de ces crédits.

(Applaudissements et « Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Gilbert Biessy, premier orateur inscrit.

M. Gilbert Biessy.

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le budget de l'équipement et des transports progresse de 2,5 % en moyens d'engagement, ce qui est plutôt mieux que la moyenne générale du budget, dont la hausse reste inférieure à 1 %. Les orientations de ce budget sont claires : améliorer la démocratie dans les choix publics, favoriser les investissements, donner la priorité au ferroviaire, relancer la politique de sécurité routière. Ces choix, nous les faisons nôtres, monsieur le ministre, même si ce budget a aussi des faiblesses.

Examinons-le en détail.

En premier lieu, nous exprimons notre satisfaction quant aux progrès de la concertation. Le choix d'infrastructures, dans notre pays, doit associer les partenaires territoriaux non seulement au financement, mais aussi au contenu même des décisions. C'est l'orientation que vous entendez développer, monsieur le ministre, dans le cadre des grands choix d'investissements nationaux et européens, y compris hors contrats de plan. Cela nous a conduit aussi à la mise en place de structures de concertation, comme le Conseil supérieur du service public ferroviaire, qui constitue une avancée intéressante.

En second lieu, nous approuvons les priorités retenues en matière d'investissements. Les 15,3 milliards de francs d'autorisations de programme pour le transport et l'équipement représentent une augmentation de plus de 8 %, ce qui est important.

Que l'on me permette de souligner ici le rôle fondamental que doit jouer le FITTVN dans cette orientation.

Je sais bien qu'une partie de notre assemblée se méfie des ressources affectées. Moi-même, je n'en fais pas une religion. Mais soyons clairs : en cette période de batailles autour du déficit, de restrictions budgétaires, d'obsession des coûts, il est bon que certains investissements majeurs soient protégés de tentations prédatrices, même si le fonds augmente de 400 millions de francs, comme cette année.

C'est le transport ferroviaire qui bénéficie prioritairement de cette augmentation. Un chiffre simple symbolise cette priorité nouvelle : entre 1997 et 2000, la part du ferroviaire dans le FITTVN sera passée de 39,5 % à plus de 53 %, inversant ainsi la tendance historique à l'hégémonie de la route. Cela crédibilise les engagements forts que vous avez pris, monsieur le ministre, comme votre objectif de doubler le fret ferroviaire d'ici à 2010, notamment grâce au transport combiné. Mais nous ne devons pas nous cacher que si les mentalités ne changent pas profondément, nous n'atteindrons pas cet objectif. Tant que la vitesse commerciale des trains de marchandises ne dépassera pas 14 kilomètres/heure, il ne faut pas espérer d'augmentation massive des parts de marché du transport ferroviaire.

M. Jean-Claude Lefort.

Autant aller à vélo ! (Sourires.)

M. Gilbert Biessy.

Nous devons donc révolutionner les mentalités en la matière, y compris à la SNCF, afin que toute la mesure de l'enjeu soit prise.

Autre exemple : depuis la fermeture du tunnel du Mont-Blanc, toute une population redécouvre ce qu'est une vallée de montagne sans milliers de camions et demande massivement que le tunnel ne soit pas rouvert.

Certes, cette revendication paraît bien difficile à satisfaire.

Mais elle montre bien à quels choix nous sommes confrontés et combien il est urgent de mettre en place des alternatives au fret routier. Et nous savons quel soutien nous pouvons attendre de la population, toutes opinions politiques confondues, pour de telles solutions. Ce n'est sans doute pas notre collègue Bouvard qui me contredira.

Autre priorité clairement exprimée dans ce budget : les transports publics urbains. Nous nous en félicitons. Pour la province, l'enveloppe va augmenter de 8 % par rapport à 1999, soit 37 % en trois ans. Là aussi, nous touchons à


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une question cruciale : le développement des réseaux contribue à lutter contre l'isolement de certains quartiers ; à ce titre, il constitue une véritable arme contre l'exclusion.

Si nous notons avec intérêt l'engagement sur les investissements, il nous faut regretter, monsieur le ministre, qu'une fois de plus, l'Etat n'apporte pas son concours au fonctionnement des transports collectifs urbains, hormis en région parisienne. En ce domaine, il faut malheureusement encore raisonner en termes de parts de marché par rapport à la voiture : une grande partie du changement de mentalité de l'usager urbain passe par une baisse du prix du billet de bus ou de tramway.

Cela implique forcément une aide de l'Etat au fonctionnement des transports collectifs urbains, qui ne saurait être envisagée sans un prélèvement significatif sur les ressources procurées par la TIPP. Les organismes gestionnaires ont besoin que la solidarité de l'Etat s'exprime dans leur gestion quotidienne. Le Gouvernement doit les entendre.

Dans un premier temps, monsieur le ministre, en gage de bonne volonté, je vous demande de faire étudier trèss érieusement la possibilité d'exonérer les transports publics urbains des écotaxes et d'une partie de la TIPP sur le gazole, au même titre que les transporteurs routiers.

M. Jean-Louis Idiart, rapporteur spécial.

Très bien !

M. Gilbert Biessy.

La présence de transports collectifs urbains dans une ville est fondamentalement écologique, car elle évite la présence de milliers d'automobiles personnelles. Il serait juste de leur reconnaître cette qualité.

Il faudra bien qu'on y vienne un jour ou l'autre, et j'aimerais que cela soit avant que les villes ne deviennent invivables.

M. Jean-Claude Lefort.

Très bien !

M. Gilbert Biessy.

Donner la priorité au transport ferroviaire et au transport collectif n'est pas une lubie. Il s'agit clairement d'un enjeu de santé publique, de mode de vie, de sécurité, d'équité sociale, bref, d'un enjeu de civilisation.

Pour autant, une telle priorité ne signifie pas abandonner la route, comme on l'entend dire parfois. Les moyens d'engagement destinés aux routes augmentent de près de 6 % par rapport à 1999, et nous nous en réjouissons. En tenant compte de la contractualisation, cette augmentation est portée à 15 %. Toutefois, l'enveloppe du contrat de plan est très nettement insuffisante au regard des besoins criants qui se font jour. Une deuxième enveloppe devrait, semble-t-il apporter une dizaine de milliards de francs supplémentaires.

M. Jean-Claude Lefort.

Ce n'est pas assez !

M. Gilbert Biessy.

Mais compte tenu des besoins que nous avons recensés, c'est au moins 20 milliards qu'il faudrait, monsieur le ministre !

M. Jean-Claude Lefort.

Il a raison !

M. Gilbert Biessy.

Sur cette question d'importance, le Gouvernement pourrait donner de la crédibilité à son engagement en matière de démocratie et de transparence dans les choix d'investissements.

En outre, la route porte un enjeu majeur dont nous nous devons de prendre toute la mesure : c'est celui de la sécurité routière. En prenant pour objectif de diviser par deux le nombre de tués dans les cinq prochaines années, le Gouvernement a fait de la sécurité routière l'une de ses priorités. Cela s'est notamment traduit par la loi du 18 juin 1999. Nous ne pouvons évidemment pas encore évaluer les conséquences de ce texte. Mais nous partons de loin : si le nombre d'accidents de la route et celui des blessés sont en baisse constante, celui des tués est remonté de 7 989 à 8437 en 1998. Nous sommes donc condamnés à innover dans ce domaine. Et le budget de l'Etat doit y contribuer. D'ailleurs, l'enveloppe consacrée à la sécurité routière augmente de 17,7 % cette année.

Reste un enjeu majeur du budget, présenté comme la priorité permanente du Gouvernement et de la majorité : l'emploi.

L'effet direct des investissements se mesure en termes d'emploi : un milliard de francs de commandes représente environ 3 000 emplois créés ou maintenus. Cependant, cette logique de développement de l'emploi et des investissements s'avère peu compatible avec le maintien de suppressions d'emplois au sein des services de l'équipement. Certes, le projet de budget 2000 en a réduit le nombre. Après les 1 000 suppressions d'emplois par an sous le gouvernement précédent, la nouvelle majorité a d'abord divisé ce chiffre par deux, puis l'a réduit de plus de 20 %, en proposant cette année 385 suppressions d'emplois. Pour autant, disons-le tout net : nous ne pouvons nous en satisfaire. Nous avons là un effet pervers de l'objectif de stabilisation globale des effectifs de la fonction publique évoqué par M. le Premier ministre, il y a quelques mois. Ce credo est extrêmement dangereux : dès que l'on crée des postes dans un ministère, des emplois sont supprimés dans un autre.

M. Jean-Claude Lefort.

Tout à fait !

M. Gilbert Biessy.

Personne ne conteste l'utilité de créer des postes au ministère de la justice, de l'environnement ou des affaires sociales, mais nous ne pouvons admettre que cela se traduise par près de 400 suppressions d'emplois au ministère de l'équipement. De telles questions, je le sais, font l'objet d'arbitrages très difficiles entre les différents ministères. D'ailleurs, le chiffre auquel nous parvenons est sans doute bien inférieur aux propositions de départ, établies dans le cadre d'une solidarité gouvernementale qui ne m'échappe pas. Je n'oublie pas non plus les autres emplois créés dans votre administration. Mais j'invite le Gouvernement à mesurer les conséquences des suppressions d'emploi sur le terrain, dans les subdivisions de la direction de l'équipement, notamment.

Il est en particulier indispensable de maintenir le niveau des effectifs dans les départements de montagne confrontés à des conditions très difficiles en matière d'entretien et de viabilité hivernale. Là aussi, c'est une question de sécurité. Sur ce point, je souhaiterais obtenir votre engagement solennel, monsieur le ministre.

En conclusion, le projet de budget des transports engage notre pays dans une logique alternative, qui n'est certes pas au niveau que l'on souhaiterait, face aux enjeux ; mais depuis quinze ans, elle n'a jamais été aussi réelle, aussi concrète.

C'est pourquoi le groupe communiste exprime l'intention de voter ce budget mais ne désespère pas d'obtenir des engagements forts du Gouvernement sur plusieurs questions qui ont été posées. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Jean-Claude Lefort.

Très bien !

Mme la présidente.

La parole est à M. Marc-Philippe Daubresse.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1999

M. Marc-Philippe Daubresse.

Monsieur le ministre, la discussion du budget de l'équipement et des transports va nous permettre de mettre en lumière deux longues années d'atermoiements débouchant sur une absence de politique à long terme.

La représentation nationale a pu comprendre, dans les débats de cet après-midi, que des sommes considérables étaient consacrées chaque année à l'équipement et aux infrastructures de notre pays, mais, pour nous, la seule question qui vaille est de savoir si la France, demain, figurera ou non à la première place de l'Europe des échanges. Nous attendions donc de votre budget - symbolique, pour l'an 2000 - qu'il réoriente cette politique vers une stratégie de long terme. Et notre déception est à la hauteur des défis qui n'ont pas été relevés.

Avant d'entrer dans l'examen des crédits que vous soumettez à notre arbitrage, je voudrais, au préalable, faire un peu d'histoire récente sur le problème de l'intermodalité et du transport combiné, dont beaucoup d'orateurs ont parlé.

Pour le budget 98, il y a deux ans, le groupe UDF avait choisi la modération à votre endroit, monsieur le ministre, : vous nous annonciez un rééquilibrage des modes de transport et un fort développement de l'intermodalité. Nous attendions que vos premiers discours, somme toute prometteurs, se trouvent vérifiés dans l'action de votre ministère. Mais nous avons très vite compris qu'on vous avait confié ce ministère essentiel, non pas pour piloter une stratégie ambitieuse au profit des infrastructures de notre pays mais pour vos qualités évidentes de communicateur et de modérateur politique, qui vous ont permis de calmer les syndicats et vos amis communistes, en protégeant le statu quo global qui les arrange, par un conservatisme calculé. (Sourires.)

Ainsi, depuis deux ans, le transport routier, qui n'en demandait pas tant, a connu un développement soutenu, dû à la croissance et à la logique du marché, pendant que l e transport ferroviaire, et notamment le transport c ombiné, s'effondrait, malgré l'argent injecté sans contrôle dans la seule SNCF et ses sociétés satellites.

Nous en sommes arrivés, monsieur le ministre, grâce à cette lenteur chronique qui caractérise l'action du Gouvernement depuis deux exercices budgétaires, à la situation dramatique à laquelle nous confronte la catastrophe du tunnel du Mont-Blanc. Il va falloir, en effet, attendre 2015 pour que des marchandises puissent de nouveau passer en masse sous les Alpes par la liaison ferroviaire Lyon-Turin ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Ce n'est tout de même pas ma faute !

M. Marc-Philippe Daubresse.

Et il n'y a pas de véritable alternative à cette situation en cul-de-sac, car il est évident que les riverains de la vallée de Chamonix n'accepteront plus demain - ils viennent de vous le dire haut et fort dimanche dernier - qu'un million de camions v iennent encombrer chaque année leurs routes etr épandre une pollution mortelle qu'on retrouve à 4 000 mètres d'altitude, sur les glaciers.

Vous n'avez pas d'autre solution que de développer le ferroutage et le transport combiné. Vous allez nous annoncer des études, mais quand se fera la réalisation effective de ce tunnel ? En fait, en laissant RFF et la SNCF, pour le transport combiné, seuls face à des responsabilités techniques et sociales qu'ils étaient dans l'incapacité d'assumer, vous avez définitivement désespéré les entreprises de transport routier qui croyaient dans le transport combiné rail-route, et qui avaient investi, dans des conteneurs ou des caisses ferroviaires, des sommes considérables pour relever le défi qu'on leur avait proposé. Depuis deux ans, on a laissé se dégrader de manière inacceptable la qualité du service, la régularité et les coûts compétitifs que le rail national éta it censé leur garantir en contrepartie de cette confiance.

Comme le dit si bien Marcel Pagnol par la bouche de Raimu dans sa trilogie marseillaise : « L'honneur, c'est comme des allumettes, ça ne sert qu'une fois ! » Eh bien, monsieur le ministre, la crédibilité en matière économique, c'est la même chose, ça ne marche qu'une fois. Il est dommage que ce soit toute une profession, celle des transporteurs routiers du transport combiné, qui en ait fait la cruelle expérience. C'est pourquoi, quand vous annoncez que l'objectif de votre politique est de doubler en dix ans le volume des marchandises transportées par le fer, en augmentant sensiblement les subventions aux opérateurs, nous restons stupéfaits. En deux ans, vous avez réussi à faire plonger le transport combiné rail-route, assuré par ces mêmes opérateurs, de + 16 % avant 1997 à 10 % ces deux dernières années ! Non, ce n'est pas en augmentant sensiblement les subventions de fonctionnement aux opérateurs qu'on développera le transport combiné, c'est en renforçant très sensiblement l'investissement sur les lignes et les plates-formes de fret, seul moyen de garantir la qualité du service assuré.

Monsieur le ministre, ce préalable sur le transport combiné met en lumière la responsabilité du Gouvernement dans la situation inquiétante que connaît aujourd'hui en France l'économie des transports et de la logistique. Et pendant ce temps, nos voisins européens ramassent la mise.

Vous avez eu beau jeu d'annoncer en commission un budget de 160 milliards de francs, en augmentation arithmétique de 2,5 % pour l'an 2000. Je rappelle pour mémoire, et pour la vérité des comptes, que ces 160 milliards, hors FARIF, tiennent déjà compte des 12 milliards destinés à RFF pour l'exercice 2000. Vous avez certes promis 37 milliards à RFF sur trois ans, mais cette nouvelle structure se trouve déjà en grave déficit chronique.

Elle est donc incapable de financer la moindre infrastructure ferroviaire nouvelle, puisque les besoins sont énormes et urgents. Le président de RFF a annoncé lui-même - M. Filleul l'a rappelé dans son excellent rapport - qu'il souhaitait a minima 20 milliards par an pour le long terme avec une prime supplémentaire de 7 milliards. Je vous laisse comparer cette somme aux 12 milliards de la dotation de RFF pour cette année.

Le groupe UDF n'est pas dupe et dénonce cette manoeuvre qui vous permet de prétendre à des résultats que vous savez parfaitement ne pas pouvoir tenir.

Pour l'ensemble de votre budget, je vous renvoie à la réaction de vos propres amis politiques en commission, et notamment aux interrogations fort pertinentes du rapporteur pour avis pour l'équipement et les transports terrestres, Jean-Jacques Filleul.

Comment allez-vous faire, monsieur le ministre, pour maintenir à un niveau tolérable les péages d'infrastructures que doit payer la SNCF sans appauvrir un peu plus encore Réseau ferré de France et sans précipiter à nouveau la SNCF dans la spirale du déficit dont l'ont sortie, avant votre entrée en scène, des gouvernements courageux et responsables, si vous alourdissez la barque de 4 milliards de francs supplémentaires ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1999

L'opposition d'aujoud'hui est curieuse de connaître la recette que vous allez appliquer pour ne pas devoir ajouter, aux milliards annuels que coûte aux Français le statut de certains personnels de la SNCF, des subventions nouvelles qui dégradent du même coup les comptes que son président s'échine à rétablir avant l'an 2000, avec succès je dois dire.

Comment allez-vous faire pour financer le milliard et demi que coûtera, à la SNCF, la réduction du temps de travail que vous avez imposée dogmatiquement et dans l'urgence, alors qu'aucune des fonctions publiques d'Etat n'y arrivera avant 2002 ? A ce propos, comment allezvous aborder la réduction du temps de travail à 35 heures dans le transport routier si vous persistez à camper sur une position idéologique, alors que la plupart de nos partenaires européens réclament de la flexibilité ? Autre interrogation sur votre gestion, monsieur le ministre. Vous claironnez à qui veut l'entendre que les crédits du FITTVN n'ont jamais été aussi élevés et que 53 % d'entre eux iront, en 2000, au transport ferroviaire.

Mais ces 2,3 milliards que vous allez orienter vers le ferroviaire, pouvez-vous nous en donner l'exacte ventilation ? Et ces fameux 500 millions de francs qui, pour l'instant, ne sont pas mentionnés dans les documents budgétaires et que vous promettez en commission au transport combiné pour 2000, pouvez-vous affirmer ici qu'ils seront orientés en intégralité vers ce nouveau mode de transport, sans le moindre glissement d'une partie de ces sommes vers le financement de la réduction du temps de travail ? S'agissant des crédits destinés au transport fluvial, je me pose une question angoissante dont le rapport de M. Capet ne fait pas état : où est passé le canal SeineNord ? Où est passée cette infrastructure stratégique pour la France en Europe et pour toute une région déjà mise à mal par vos alliés politiques dans la négociation des contrats de plan Etat-régions ? Quand annoncerez-vous effectivement le démarrage des travaux de cette infrastructure ? Que d'atermoiements ! Où en sont les études pour Seine-Est ? J'avais dénoncé ici même le projet de Canal RhinRhône du temps de l'ancien gouvernement. J'approuve donc tout à fait l'orientation visant à supprimer ce projet, aussi coûteux qu'inutile, mais où en est l'alternative par la Saône ? Tous les experts interrogés ces dernières années sont unanimes pour dire que votre budget fluvial permettra tout juste d'entretenir les infrastructures existantes mais que, sans moyens supplémentaires, il n'y aura pas de grand projet français pour le

XXIe siècle.

Je n'insisterai pas sur le transport maritime après ce qu'a dit M. Lengagne. J'évoquerai simplement le port du Havre, dont chacun ici voudrait qu'il soit un grand port international...

M. Daniel Paul.

Il l'est déjà !

M. Marc-Philippe Daubresse.

... à même de concurrencer Rotterdam et Anvers. Mais pensez-vous qu'il y parviendra si vous ne consacrez au projet « Port 2000 », au Havre, que 200 millions de francs, c'est-à-dire bien moins que toutes les prévisions les plus pessimistes ? Espérons en tout cas, et j'espère que vous nous donnerez des assurances sur ce point, que la desserte ferroviaire sans laquelle ce port n'a aucun avenir sera financée ! Je passerai rapidement sur les crédits affectés à la sécurité routière. Ils augmentent de 18 %, ce qui est bien.

Faut-il les affecter plutôt à la communication ou plutôt au financement des moyens de contrôle ? C'est une question dont j'aimerais que l'on parle ici cet après-midi.

Pour ce qui est des crédits routiers, on ne peut pas dire que vous ayez lésiné sur le couperet, puisque les moyens de paiement s'effondrent de près de 15 % par rapport au budget précédent. Certes, ces crédits demeurent le premier poste d'investissements du ministère, mais il nous faut bien constater que les études d'autoroutes concédées et non concédées baissent de 9,5 % et que - M. Biessy le disait juste avant moi - compte tenu de la négociation des contrats de plan Etat-régions, les perspectives sont extrêmement pessimistes, puisque, pour ce qui concerne les périphériques de nos grandes agglomérations, on note une baisse de 22 %. Je prendrai pour exemple la région Nord Pas-deCalais. Alors que les crédits routiers du précédent contrat de plan se montaient à 1,5 milliard, on nous annonce calmement qu'ils dégringolent à 700 millions seulement dans la nouvelle mouture actuellement négociée. Il en faudrait plus du double pour relier la future autoroute A 24 au réseau belge. J'aimerais obtenir une réponse sur ce point, monsieur le ministre. Où en est l'autoroute A 24 ? Que prévoyez-vous de faire pour la relier au réseau belge ? Quid du contournement Est de l'agglomération lilloise pour relier l'A 1 au même réseau belge ? On ne peut plus aujourd'hui aller de Paris vers les pays du Nord sans rencontrer une file ininterrompue de camions, voire deux files lorsque l'on prend l'autoroute A

1. J'en viens à ma conclusion, monsieur le ministre, puisque des orateurs éminents ont abordé ou aborderont les autres chapitres de votre budget, et je citerai le philosophe André Comte-Sponville selon lequel : « L'optimisme est d'intelligence, le pessimisme, de raison. »

En 1998, nous étions résolument optimistes sur les chances que pourrait avoir notre pays en matière de développement en devenant la plate-forme logistique de l'Europe de par sa géographie, sa culture et ses entrepreneurs. Mais nous sommes devenus, de raison, résolument pessimistes depuis deux ans que nous vous écoutons annoncer des mesures qui ne sont pas concrétisées dans les budgets. Voilà pourquoi nous allons aujourd'hui censurer votre budget alors que nous ne l'avions pas fait en 1998. Les faits ont en effet démenti un système de gouvernement qui tient davantage de l'incantation que de la volonté politique. Le groupe UDF votera donc contre ce budget en trompe-l'oeil, qui ne fait que consolider le f onctionnement au détriment de l'investissement.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Jacques Fleury.

M. Jacques Fleury.

Monsieur le ministre, ce n'est pas bien ! En deux ans, vous n'avez pas prévu l'accident sous le tunnel du Mont-Blanc. Cela doit être difficile d'être à votre place lorsque l'on n'a pas de baguette magique ! Sans être exceptionnel, le budget des transports, qui c onnaît cette année une progression de 2,6 % de l'ensemble de ses moyens d'engagement, marque une continuité quant à l'effort consenti et traduit, dans les faits, les orientations que vous aviez marquées dès votre arrivée au ministère et pour lesquelles le groupe socialiste vous apporte son soutien : rééquilibrage en faveur du rail


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par la relance de l'investissement ferroviaire, meilleure répartition des crédits du FITTVN en faveur du chemin de fer et encouragement des transports combinés.

Dans le même ordre d'idées, pour éviter une politique exclusivement routière, les crédits en faveur des voies navigables sont une nouvelle fois en progression de 9 %. Cet effort permettra de poursuivre la restauration du réseau existant si longtemps négligé et je profiterai de l'occasion pour vous demander l'état actuel du dossier du canal Seine-Nord, qui intéresse toute la partie Nord de notre pays.

Au demeurant, dans le secteur routier, l'effort reste soutenu puisque les crédits d'investissement augmentent de 6 % et que les crédits du FITTVN affectés à ce secteur permettront la poursuite de grosses opérations, notamment dans le Massif central. S'agissant des autoroutes concédées, la mise en service de 218 kilomètres en l'an 2000 montre une progression de l'effort. Pour autant, bien des collègues qui approuvent le rééquilibrage de votre politique en faveur du fer et de la voie fluviale, souhaitent que soient complétés plus rapidement le maillage routier et le désenclavement de régions défavorisées.

De mon côté, m'associant à M. Daubresse, je souhaiterais connaître l'état d'avancement du dossier de l'A 24, dont la nécessité se fait de plus en plus sentir en raison de la saturation de l'autoroute A

1. Il faut également souligner l'effort de promotion des transports collectifs urbains puisque l'Etat investira, en 2000, 470 millions en Ile-de-France, soit une hausse de 36 %, et 748 millions pour les transports urbains de province, soit une haussse de 37 % depuis 1997. Mais malgré ces efforts, notre inquiétude demeure quant à l'avenir du fer. Il est vrai que les capacités d'investissement de RFF sont sauvegardées grâce à la nouvelle dotation en capital de 12 milliards de francs et à l'augmentation des péages payés par la SNCF. Justement, l'équilibre de la SNCF ne risque-t-il pas, à terme, d'être menacé par l'augmentation de ces péages, malgré le mécanisme de compensation que vous avez heureusement prévu, d'autant que la SNCF doit appliquer la loi sur les 35 heures ? Monsieur le ministre, je profiterai de ce débat pour vous interroger sur divers aspects de la politique des transports, et en particulier sur ce qui concerne les transporteurs routiers. Votre budget s'efforce de donner un nouveau souffle à la sécurité routière. Dans cet esprit, nous avons adopté, le 6 février 1998, un texte visant à réduire les risques qu'encourent les chauffeurs routiers, et qu'ils font courir aux usagers de la route lorsqu'ils sont soumis à des cadences et à des conditions de travail insupportables. Je note avec satisfaction que vous poursuivez cette année l'effort déjà constaté l'an dernier en créant 37 postes de contrôleur des transports terrestres.

Mais je m'inquiète car, à ma connaissance, le décret d'application des dispositions législatives sur l'immobilisation des véhicules en infraction n'est pas encore paru. Dans quel délai pouvons-nous l'espérer ? La durée du travail des chauffeurs routiers est l'une des questions essentielles que pose ce secteur d'activité. Nous savons bien que c'est un facteur crucial dans le cadre de la concurrence acharnée que se livrent les transporteurs routiers à l'intérieur de l'Europe. D'un côté, il est indispensable que la durée du travail des chauffeurs soit réduite. D'un autre côté, il est indiscutable que l'applicaton brutale des 35 heures mettrait en péril nos entreprises si une harmonisation à l'échelle européenne n'était pas obtenue et si le dumping au niveau des salaires par l'utilisation, par exemple, de main-d'oeuvre polonaise ou hongroise à des niveaux scandaleusement bas n'était pas contrôlé. Je souhaite donc connaître les dispositions que vous comptez prendre au niveau national et obtenir au niveau européen pour faire coïncider notre volonté d'améliorer les conditions de travail des chauffeurs routiers et la nécessité de sauvegarder la compétitivité de nos entreprises. Mais je ne crois pas, monsieur Daubresse, que la flexibilité soit acceptable dans ce domaine.

Dans ce projet de budget, l'aide d'accompagnement à la généralisation de l'obligation de formation professionnelle des chauffeurs diminue de 4 millions. J'en suis d'autant plus surpris que la demande de routiers formés est actuellement très forte et que les employeurs ne touvent plus, sur le marché du travail, les personnels nécessaires. On me dit qu'il manque 15 000 chauffeurs routiers.

M. René Mangin.

Exact !

M. Jacques Fleury.

Il existe, dans ce secteur, un gisement d'emplois important qui n'est pas exploité pour le moment parce que les centres de formation sont saturés.

Je vous remercie de m'indiquer les solutions que vous envisagez.

Enfin, dans un tout autre domaine, je voudrais vous interroger sur le devenir de la SNCM, qui assure les liaisons maritimes entre le continent et la Corse. Cette compagnie devra, dans des délais maintenant assez courts, se soumettre à la concurrence. Y est-elle prête ? Sinon, quelles mesures comptez-vous mettre en oeuvre pour l'y préparer, sachant que des milliers d'emplois sont en jeu ? Pour conclure, compte tenu des ambitions que nous devons avoir dans le domaine des transports, ce budget peut paraître modeste. Faute de moyens suffisants, il laisse planer des inquiétudes sur l'avenir de la SNCF et reste timide dans la réorientation vers l'intermodalité.

Pour autant, monsieur le ministre, il assure la continuité de la politique que vous nous avez annoncée. C'est pourquoi le groupe socialiste vous apportera son soutien.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg.

M. Roger-Gérard Schwartzenberg.

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite intervenir sur ce budget en illustrant mon propos par deux exemples concrets relatifs aux difficultés que rencontrent les habitants de ma circonscription du Valde-Marne.

L e premier concerne les transports aériens. Les communes voisines de l'aéroport d'Orly - VilleneuveS aint-Georges, Villeneuve-le-Roi, Ablon, Valenton, Limeil, Boissy, Villecresnes et les communes du Plateau Briard - subissent tout le poids des nuisances sonores de l'aéroport d'Orly, d'une manière qui met en cause leur tranquillité, leur environnement et leur cadre de vie. La première nécessité, c'est donc de lutter contre le bruit à la source par quatre mesures principales.

Il faut le faire par le maintien et la stricte application du couvre-feu, qui interdit l'utilisation nocturne des pistes d'Orly de vingt-trois heures trente à six heures du matin, pour respecter le droit au sommeil des riverains.

Ce couvre-feu doit être strictement respecté et les dérogations accordées par la DGAC doivent devenir encore plus exceptionnelles qu'elles ne le sont aujourd'hui.

Il faut le faire aussi par le maintien du plafonnement du nombre de mouvements sur Orly, fixé par l'arrêté du 6 octobre 1994 qui limite à 250 000 le nombre des créneaux horaires attribuables chaque année aux compagnies aériennes.


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Il importe aussi d'assurer la mise en oeuvre de procédures de moindre bruit, au décollage et à l'atterrissage, ainsi que le respect rigoureux des trajectoires et couloirs aériens, sous peine d'amendes pour les pilotes et les compagnies.

Enfin, comme cela a été fait à Roissy, il convient d'établir et de mettre en oeuvre un code de bonne conduite engageant tous les professionnels du transport aérien, ainsi qu'une charte de qualité de l'environnement sonore aéroportuaire liant l'Etat, Aéroports de Paris, les compagnies aériennes, les élus locaux et les associations de riverains, comme vous l'aviez évoqué à la première table ronde sur Orly tenue au ministère le 14 décembre 1998.

Ces quatre mesures sont indispensables pour mieux protéger les riverains d'Orly contre le bruit. Je vous demande donc de bien vouloir renouveler, par rapport à ces mesures, les engagements que vous aviez déjà pris devant l'Assemblée le 12 mai 1999, lors du débat sur l'autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaire.

- l'ACNUSA.

L'autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires, instituée par la loi du 12 juillet 1999, marque un progrès important. Pour que ce progrès entre vraiment dans les faits, il importe que les textes réglementaires relatifs à l'ACNUSA soient publiés le plus rapidement possible,...

M. Jean-Pierre Blazy Absolument !

M. Roger-Gérard Schwartzenberg.

... en tout cas avant le 31 décembre de cette année.

De même, je souhaite qu'un nouvel indice de mesure du bruit, plus fiable, soit défini par l'ACNUSA à l'issue de l'enquête de gêne sonore actuellement en cours à Roissy.

Enfin, les communes voisines de l'aéroport d'Orly, victimes du bruit et soumises aux très fortes contraintes d'urbanisme liées au plan d'exposition au bruit qui entravent leur développement démographique et économique - Villeneuve-le-Roi a ainsi perdu 2 000 habitants au cours de la dernière décennie - doivent recevoir des compensations financières, comme je l'ai fréquemment réclamé à l'Assemblée nationale, notamment dans une question du 4 octobre 1996, comme je l'ai réclamé aussi à votre prédécesseur, Bernard Pons, par lettre des 3 mars 1997, puis à vous-même par différents courriers d u 24 septembre 1997, 25 mai 1998 et 8 septembre 1999.

Du fait des règles actuelles, les communes riveraines de l'aéroport d'Orly victimes du bruit ne bénéficient que très peu des recettes fiscales - taxe professionnelle, taxe foncière - de l'activité aéroportuaire. Celles-ci reviennent pour l'essentiel à des communes qui ne subissent pas les n uisances, mais qui sont le siège des compagnies aériennes ou des établissements aéroportuaires, comme Paris siège d'Aéroports de Paris. Il faut en finir avec cette injustice et établir enfin un vrai système de péréquation.

Il est indispensable de partager équitablement les retombées fiscales de l'aéroport d'Orly entre toutes les c ommunes riveraines. A cet égard, il conviendrait d'étendre à Orly les propositions de la mission qui avait été confiée au sénateur Lachenaud sur la répartition des recettes engendrées par l'aéroport de Roissy.

Le 12 mai 1999, à l'Assemblée nationale au cours du débat sur l'ACNUSA, vous avez déclaré, monsieur le ministre, en répondant à mon intervention en ce sens :

« Des propositions ont été faites pour une meilleure répartition des retombées fiscales des aéroports. Je vous confirme le travail interministériel sur ce sujet. Avec les ministres des finances et de l'intérieur, je vous proposerai un nouveau dispositif lors de la présentation du projet de loi de finances pour l'an 2000. »

Enfin, le 21 mai 1999, à la deuxième table ronde sur Orly organisée au ministère, vous avez de même déclaré :

« Le Gouvernment a indiqué qu'il était favorable au principe d'un fonds de péréquation des recettes fiscales engendrées par la plate-forme aéroportuaire. Un travail interministériel a lieu actuellement en vue du projet de loi de finances 2000. » Or, le projet de budget que vous

nous soumettez ne comporte pas de mesures en ce sens, ce que je regrette vivement.

J'ai donc déposé un amendement à votre projet de budget. Je demande ainsi que le Gouvernement dépose, avant le 30 juin 2000, devant le Parlement, un rapport concernant l'institution d'un fonds de péréquation des recettes fiscales engendrées par la plate-forme aéroportuaire d'Orly. Ce fonds aurait notamment pour objet d'accorder des compensations financières aux communes voisines de l'aéroport d'Orly pour compenser les nuisances sonores et les contraintes d'urbanisme subies par celles-ci. Il s'agit donc d'établir un système durable et pérenne.

Cet amendement vise aussi à fairer en sorte que soit également examinée dans ce rapport la possibilité de mettre en place dès l'année 2000 un crédit spécial destiné à accorder des compensations financières immédiates aux communes voisines de l'aéroport d'Orly victimes des nuisances sonores générées par l'activité aéroportuaire. Il s'agit, par cette seconde disposition, de créer dès l'année 2000 un crédit d'urgence pour réparations immédiates des préjudices subis.

Le second point que je voudrais aborder concerne, lui, l'équipement routier. Villeneuve-Saint-Georges est traversée en plein centre-ville par la RN 6, qui supporte une circulation de 60 000 véhicules par jour, dont de nombreux poids lourds. Cette situation provoque de nombreux encombrements qui entravent la fluidité de la circulation pour tous les usagers de cet axe. Il en résulte une très forte pollution atmosphérique pour les riverains villeneuvois et valentonnais de la RN 6 et de très fortes nuisances sonores. Enfin, cette traversée de la ville par un axe routier de cette importance entraîne de très fréquents accidents, dont plusieurs sont mortels, alors que le Gouvernement a fait de la sécurité routière une grande cause nationale pour l'année 2000.

Pour mettre fin à cette situation gravement préjudiciable, le schéma directeur de la région d'Ile-de-France a fait expressément référence à « la réalisation prioritaire de la déviation de Villeneuve-Saint-Georges » et l'actuel contrat de plan Etat-région comporte des crédits d'études et d'acquisitions foncières pour cette déviation. Si ces crédits peuvent être utilement complétés au XIIe contrat de plan 2000-2006, il importe à l'évidence d'aller au-delà et d'y inscrire aussi des crédits de travaux permettant la réalisation effective de cette déviation sans se borner à un démarrage des premiers travaux de libération des emprises à la fin de ce XIIe plan.

Dans les « 20 mesures pour le développement de l'aéroport d'Orly » que vous avez présentées à la table ronde du 21 mai 1999, la dixième mesure s'intitulait :

« Début des travaux de la déviation de la RN 6 à Villeneuve-Saint-Georges avant la fin du prochain plan ». En effet, cette déviation permettra aussi d'améliorer les accès terrestres à la plate-forme d'Orly en supprimant les difficultés de circulation. Je vous demande donc instamment d'inscrire au XIIe contrat de plan les crédits nécessaires à


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la réalisation de cette déviation, conformément aux engagements pris au schéma directeur et à la table ronde d'Orly le 21 mai dernier. Il y va de la fluidité de la circulation dans ce secteur de l'Ile-de-France. Il y va de la sécurité, de la santé, de la tranquillité et du respect du cadre de vie des habitants de Villeneuve-Saint-Georges et des communes voisines.

Pour conclure, je voterai votre projet de budget avec d'autant plus de plaisir, monsieur le ministre, qu'il intègrera mon amendement. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Francis Delattre.

M. Francis Delattre.

C'est un budget important que le vôtre, monsieur le ministre : celui des équipements lourds, des équipements collectifs qui devront assurer, dans les années qui viennent, une grande part de la qualité de vie de nos concitoyens.

Malgré la bienveillance relative, au moins au départ, avec laquelle nous avons examiné vos propositions, nous avons été frappés non seulement par une absence de continuité, mais par une véritable rupture avec les priorités que vous énoncez depuis deux ans.

J'en ai relevé six exemples. Et toujours avec bienveillance, sinon il y en aurait beaucoup plus ! Première insuffisance : les investissements routiers et autoroutiers sont les laissés-pour-compte de votre budget.

Si nous considérons, nous aussi, qu'un rééquilibrage entre la route et les transports en commun est indispensable, en particulier dans une région que nous connaissons bien tous les deux, la région parisienne, nous ne pensons pas que le sacrifice des routes permettra forcément d'améliorer la situation des autres modes de transport. De plus, quand on analyse les résultats du dernier recensement, on s'aperçoit que la route et l'autoroute sont, qu'on le veuille ou non, des facteurs puissants de désenclavement de certaines régions.

M. Jean-Jacques Filleul, rapporteur pour avis.

Cela ne suffit pas !

M. Francis Delattre.

Les régions ou départements où la population diminue sont les plus dépourvus de routes ou d'autoroutes suffisamment opérationnelles.

M. Jean-Louis Idiart, rapporteur spécial.

En région parisienne, ce n'est pas le cas !

M. Francis Delattre.

Non, mais je ne suis pas là pour parler uniquement de la région parisienne.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Vous êtes universaliste ! (Sourires.)

M. Francis Delattre.

Cela n'enlève rien à la complémentarité des autres modes de transport, notamment du rail ou des transports en commun dans les agglomérations, mais on le constate : 75 % des déplacements de voyageurs et 85 % des transports de marchandises se font par la route et l'autoroute. Il est donc inquiétant monsieur le ministre, que les deux dossiers les plus difficiles aujourd'hui soient le financement des autoroutes et le rétrécissement des crédits accordés aux routes importantes, notamment celles que l'on appelait auparavant les nationales.

Quand la mission d'évaluation et de contrôle vous a auditionné, nous nous attendions à certaines mesures, en réponse aux observations qu'elle avait présentée. Certes, l'endettement des sociétés d'autouroute, comme celui de la SNCF, n'est pas de votre faute. L'endettement est toujours le produit de l'histoire d'une entreprise, d'une collectivité, et je reconnais que la situation que vous avez trouvée à votre arrivée au ministère n'était pas extraordinaire. Mais on ne peut pas dire qu'elle va considérablement s'améliorer avec les mesures que vous nous annoncez, puisque la dette des sociétés d'autoroute, qui s'élève aujourd'hui à 130 milliards de francs, atteindra 160 milliards en 2005.

C'est là que nous souhaiterions un ministre des transports un peu plus percutant : nous ne cessons de répéter que les prélèvements sur les sociétés d'autoroute sont de plus en plus élevés et qu'ils contribuent à leur déficit, et pourtant rien n'a changé. Il en est de même pour les tarifs, de même pour l'inadéquation de la durée des concessions au regard des délais d'amortissement. Que dire enfin de l'absence, relevée sur tous les bancs, d'une dotation de fonds propres pour ces sociétés, notamment les SEM, hormis COFIROUTE ? Rien n'est prévu dans votre budget pour essayer d'y remédier.

Au total, si l'on considère l'ensemble des crédits mis à votre disposition pour les autoroutes, on s'aperçoit que vous ne sauvez la face que grâce au FITTVN. Tout le monde considère que ces crédits sortent de la norme budgétaire, ce qui est à peu près vrai. Mais il faut rappeler que ce dispositif de prélèvement sur les autoroutes avait été mis en place, au départ, dans l'idée de financer des investissements pour l'aménagement du territoire.

M. Jean-Louis Idiart, rapporteur spécial.

Vous êtes bien le seul à y avoir cru !

M. Francis Delattre.

Aujourd'hui, le FITTVN est devenu un moyen de financement ordinaire. Je ne suis pas d'accord avec mes collègues socialistes qui voudraient le resituer dans la norme budgétaire. Pourquoi ? Parce que c'est le moyen pour vous, monsieur le ministre, de sauver une ressource, et vous avez bien raison de vouloir le conserver. Alors, monsieur le rapporteur, ne critiquons pas ce fonds plus qu'il ne doit l'être. Il vous a quand même permis de sauver la face.

Pour les crédits routiers, le poste le plus important est celui des investissements réalisés dans le cadre des contrats de plan. Là encore, les perspectives ne sont guère rassurantes, puisque vous prévoyez, en gros 21 millards de francs pour la période 2000-2006, contre 27 milliards pour les précédents contrats de plan. Quant aux crédits de paiement affectés, à l'entretien des routes, ils diminuent de 9,6 %. Globalement, le budget de l'Etat consacre de moins en moins de crédits à l'investissement et de plus en plus au fonctionnement. Votre ministère est l'une des principales victimes de cette dérive.

Deuxième insuffisance : la sécurité routière. Le Gouvernement, comme tous ceux qui l'ont précédé ces dernières années, proclame qu'il veut en faire une priorité. Il multiplie donc les campagnes d'information et les ronds-points aux carrefours... mais aussi les points noirs. Certains équipements routiers, notamment en région parisienne, ne semblent pas correspondre à une véritable politique de sécurité routière. Par exemple, comment peut-on continuer à construire des autoroutes sans utiliser les bitumes autodrainants ? Quand on passe d'un revêtement classique à un tronçon recouvert de ce fameux bitume, les conditions de sécurité changent du tout au tout. C'est très important, les campagnes d'information, mais le Gouvernement devrait aussi se demander pourquoi on persiste à construire des équipements moins sûrs qu'ils ne


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pourraient l'être s'il y avait une véritable volonté politique d'utiliser les progrès de la technologie au service de nos concitoyens.

Troisième insuffisance : la dérive du financement des transports urbains en Ile-de-France. Malgré vos belles déclarations, je suis obligé de constater que non seulement les crédits, mais également les parts de marché des transports en commun continuent de diminuer en région parisienne. Cela tient bien sûr à l'insuffisance des moyens. Cela tient aussi à une dérive inquiétante : le manque croissant de fiabilité constaté par les usagers.

Dans ma commune, je viens de recevoir une pétition de jeunes parents qui me demandent d'ouvrir les garderies au-delà de dix-neuf heures, car les trains prévus à cette heure-là arrivent une fois sur deux autour de dixneuf heures trente. Ce sont les témoignages de ce type, très réalistes, qui nous conduisent à dire que les transports en commun de la région parisienne sont défaillants à un double titre : la fiabilité, mais aussi la sécurité - à partir de vingt heures, sur certaines lignes, l'insécurité est généralisée.

Quatrième insuffisance : le problème de la dette ferroviaire et les grandes orientations que nous voyons poindre aprés le Conseil européen de juin dernier.

Nous ne comprenons pas l'opposition du gouvernement de la France à une expérience qui consisterait à introduire un peu de concurrence dans les transports ferroviaires, notamment pour le fret. Je ne suis pas de ceux qui disent que la privatisation à tout crin de la SNCF est le moyen de régler tous les problèmes.

M. Jean-Louis Idiart, rapporteur spécial.

Quand même !

M. Francis Delattre.

Mais j'estime que des mesures facilitant la concurrence seraient de bon aloi. D'ailleurs, le groupe Démocratie libérale et Indépendants soutient la résolution prise à l'époque par la présidence allemande, avec laquelle vous sembliez en conflit. Au-delà du problème du statut de la SNCF, cette résolution invite les

Etats membres à ouvrir rapidement une période de transition de quatre ans pendant laquelle le fret ferroviaire serait soumis à un régime faisant coexister deux systèmes : l'un de concurrence, l'autre d'entente avec les compagnies existantes. Une telle expérience permettrait, selon nous, d'étudier les moyens d'améliorer la productivité des uns et des autres et d'alléger quelque peu la charge du contribuable. Car les sommes aujourd'hui versées par le budget de l'Etat à la SNCF sont considérables, de l'ordre de 65 milliards.

Cinquième insuffisance : l'absence totale d'intérêt pour le transport fluvial. L'Etat consacre à ce mode de transport 1,1 % du budget d'investissement, ce qui est très largement insuffisant pour assurer l'entretien et a fortiori la rénovation du réseau.

Sixième insuffisance, soulignée par plusieurs orateurs : l'inertie face aux conséquences de l'explosion du trafic aérien.

Toutes les communes concernées par un aéroport international, et bien entendu leurs habitants, craignent une aggravation des nuisances.

La mise en place d'une autorité indépendante chargée de vérifier le respect des normes et des couloirs par les compagnies aériennes est une bonne chose, mais est-ce suffisant pour faire face à une explosion du trafic de l'ordre de 8 % ? Un collègue vient d'évoquer l'aéroport d'Orly, je parlerai de Roissy, qui accueille aujourd'hui l'essentiel du développement, d'ailleurs souhaitable, du trafic aérien.

Il y a une décision politique courageuse que vous devez prendre très rapidement, si vous voulez respecter l'engagement que vous-même avez pris lors de la discussion sur l'ouverture des deux nouvelles pistes, c'est-à-dire le plafonnement du trafic de Roissy à 55 millions de passagers.

Sur la base du développement actuel, les plafonds initialement prévus pour 2020 seront en effet atteints dès 2010.

Or la conception et la réalisation d'un aéroport international demandent bien dix à quinze ans. J'ai vécu d'assez près l'implantation de Roissy pour le savoir.

Cette troisième plate-forme ne doit pas forcément se situer en région parisienne, des possibilités existent dans les régions avoisinantes. Ce que nous demandons, c'est que la décision arrêtée prenne en considération la saturation prochaine de Roissy. Les conditions de vie de toute la zone urbaine et notamment des riverains sont telles q u'une réponse rapide de votre part, monsieur le ministre, est nécessaire. Ce dossier devient inquiétant.

Monsieur le ministre, compte tenu aussi bien du niveau décevant des moyens proposés que de l'absence d'un réel dessein, de véritables priorités pour l'équipement de notre pays, le groupe Démocratie libérale et Indépendants, vous l'avez compris, ne pourra pas voter votre budget.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard.

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vous prie de bien vouloir excuser mon arrivée tardive dans l'hémicycle, due à la présentation du budget du tourisme en commission.

Monsieur le ministre, vous êtes en charge de l'un des principaux budgets du pays, tant en volume que par son impact sur l'activité économique.

Avec une enveloppe de 147 milliards de francs de crédits pour l'an 2000, le ministère de l'équipement, des transports et du logement est le premier en termes d'investissements civils.

Vous disposez, grâce à cette force d'investissement, de tous les leviers nécessaires pour favoriser un effet vertueux d'entraînement économique dans l'ensemble du pays et dans tous les secteurs d'activité. Nous regrettons d'autant plus que le ministre que vous êtes n'ait pas aujourd'hui les moyens de cette politique.

Une fois de plus, les crédits du FITTVN sont intégrés à votre budget afin de masquer une partie des baisses et d'améliorer artificiellement l'enveloppe en valeur absolue.

Même le rapporteur spécial de la commission des finances, mon successeur dans cette fonction, Jean-Louis Idiart, s'en est ému au point de proposer un amendement de suppression du FITTVN, solution sur laquelle je ne le suis d'ailleurs pas.

M. Jean-Louis Idiart, rapporteur spécial.

La cohérence n'est pas votre fort !

M. Francis Delattre.

C'est une solution extrême !

M. Michel Bouvard.

Nous considérons en effet que les principes qui ont motivé la création du fonds restent valables, même s'il est devenu, au fil des années, un outil de débudgétisation. Le FITTVN a permis, depuis sa création, un rééquilibrage des financements publics vers le transport ferroviaire comme vers le transport fluvial dont les investissements étaient insuffisants ; il a aussi permis de subventionner le transport combiné.


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Comme toujours, je regrette une certaine absence de lisibilité de ce budget. Il est difficile d'établir des comparaisons car les présentations ne sont pas identiques d'une année sur l'autre.

Si l'on exclut les crédits du FITTVN, qui proviennent des taxes perçues sur les ouvrages hydrauliques et les péages autoroutiers, taxes que vous alourdissez par ailleurs, et si on se limite à la comparaison des crédits d'Etat, il s'avère que le budget global des transports pour 2000 reste stable, voire subit une légère baisse par rapport à 1999. Hors FITTVN, j'y insiste, cette baisse se chiffre à près de 1 % : 0,9 % exactement.

Au-delà de l'agrégat de la sécurité routière que vous avez un peu « soigné », plus 17,8 %, et je m'en réjouis, car c'est ce que le groupe RPR avait réclamé, avant l'été, lors de l'examen du projet de loi portant diverses mesures relatives à la sécurité routière, plusieurs chiffres traduisent les faiblesses récurrentes de ce budget :...

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Mais non !

M. Michel Bouvard.

... moins 10,6 % pour les routes, plus 0,1 % seulement pour le transport aérien, plus 0,7 % pour le transport maritime, plus 0,4 % pour le transport terrestre, soit au total, je l'ai dit, une baisse de 0,9 %.

M. Jean-Jacques Filleul.

rapporteur pour avis.

Pour les routes, c'est une augmentation de 6 % !

M. Michel Bouvard.

Les routes sont, cette année encore, les grandes perdantes de ce budget, avec une baisse de 10,6 % des crédits de paiement, ramenés à 7,719 milliards. L'érosion se poursuit, je dirai même qu'elle s'aggrave ! Le secteur des transports enregistre une baisse de 0,6 % de ses moyens de paiement : 57,443 milliards.

En termes de moyens de paiement, au-delà d'une progression fort modeste de 1 % qui en porte le montant à 48 milliards, vous affichez ostensiblement une priorité aux capacités d'investissement pour le ferroviaire. Vous nous dites même qu'il s'agit de la dominante de ce budget.

Certes, Réseau ferré de France est renforcé de 12 milliards pour consolider sa situation financière.

M. Jean-Jacques Filleul, rapporteur pour avis.

C'est bien !

M. Michel Bouvard.

Nous approuvons cette mesure et l'on peut se réjouir, monsieur Filleul, que chacun apprécie aujourd'hui la réforme de Bernard Pons, qui a assuré la clarification des compétences et l'assainissement financier de la SNCF.

M. Jean-Jacques Filleul, rapporteur pour avis.

Heureusement qu'on y a mis un peu d'argent !

M. Michel Bouvard.

La « réforme de la réforme » a abouti à la seule création d'une structure de coordination entre RFF et la SNCF, qui avait d'ailleurs été envisagée à l'époque sans être retenue. Nous en sommes d'autant plus satisfaits que le parti socialiste avait vigoureusement combattu la proposition de Bernard Pons.

M. Jean-Louis Idiart, rapporteur spécial.

Tout à fait !

M. Jean-Jacques Filleul, rapporteur pour avis.

Il fallait des moyens !

M. Michel Bouvard.

Vous nous dites, monsieur le ministre, que le rail progresse. Personnellement, je ne le crois pas, car, au-delà de cette dotation à RFF, on peut déplorer que les investissements s'avèrent très éloignés de vos propres prévisions. Sans doute en espériez-vous davantage, et on vous comprend. Le montant des crédits alloués aux futurs contrats de plan augmente certes de 1,2 à 4,3 milliards de francs. Néanmoins, ces engagements sont très en deçà des besoins.

Vous-même, le 8 février dernier, aviez présenté à la presse « les perspectives d'investissements ferroviaires à l'horizon des dix prochaines années ».

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

12 milliards par an !

M. Michel Bouvard.

Ces besoins de crédits étaient ventilés en trois parties : 45 à 55 milliards pour la construction de nouvelles lignes à grande vitesse ; 30 à 35 milliards pour la modernisation du réseau classique ; 40 à 45 milliards pour l'entretien du réseau actuel.

Même si la période évoquée lors de votre conférence de presse excède de trois ans celle des contrats de plan, ces chiffres soulignent le fossé entre votre discours, vos désirs et la dure réalité budgétaire. C'est le fossé qui se creuse toujours entre le caractère honorable des intentions et le caractère plus cruel des faits.

Tout en restant prudent et en reconnaissant bien v olontiers que les investissements ferroviaires ne dépendent pas uniquement des contrats de plan, on note cependant que 4,3 milliards de francs sont attribués au rail pour la période de sept ans couverte par les contrats, alors que vous-même évaluez les besoins entre 30 et 35 milliards pour les dix prochaines années. Où allezvous trouver la différence ? Même en retranchant trois années, l'écart colossal entre ces deux chiffres doit tempérer l'optimisme de ceux qui se réjouissaient d'un renversement politique en faveur du rail.

L'Institut fer-route études transports, l'Ifret, qui est très au fait de la question, est beaucoup plus pessimiste que vous, puisque, selon lui, « il faut s'attendre à ce qu'une grande partie des projets actuels, TGV ou autres, soient, faute de crédits, encore dans les cartons en 2010 ».

L'enjeu est pourtant de taille. Il est, en effet, urgent de remettre à niveau le réseau existant, car, vous le savez, dans dix ans il absorbera 90 % du trafic.

La France a aussi besoin de lignes nouvelles de fret pour écouler le trafic de transit et gérer mieux de nouvelles contraintes, comme la circulation des trains de fret la journée.

Des engagements internationaux nous lient également, comme celui, par exemple, du TGV Madrid-BarceloneFrance, sans parler de l'urgence des problèmes de transports dans les Alpes et les Pyrénées.

J'avais, monsieur le ministre, évoqué ici même, l'an dernier encore, la situation que connaissent ces deux massifs montagneux, notamment le massif alpin, du fait de l'inadaptation des infrastructures de transports à la croissance du trafic des marchandises.

C'était après la publication du rapport Brossier, unanimement condamné par l'ensemble des élus du massif alpin, rapport qui proposait de ne rien faire en s'en remettant aux travaux engagés par nos voisins helvétiques dans le cadre du programme des nouvelles liaisons ferroviaires alpines. Depuis, malheureusement, nous le regrettons tous, est intervenue la catastrophe du Mont-Blanc, qui a agi comme le révélateur d'une situation que les élus de la montagne, toutes tendances confondues, soulignent depuis près de vingt ans.

Nous souhaitons que, dans le prolongement du sommet franco-italien de Nîmes, les gouvernements français et italien arrêtent une décision d'engagement des travaux


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du nouveau tunnel sous les Alpes à l'automne 2000. Cela suppose des moyens financiers qui n'existent pas dans votre budget. Et nous ne pouvons pas vous le reprocher nous le comprenons.

Il est urgent d'aboutir à l'élaboration du protocole transports de la convention alpine, qui, par un système de prélèvements financiers sur l'ensemble des passages alpins, doit dégager les ressources nouvelles nécessaires.

Mais cela suppose aussi que nous puissions à nouveau disposer, pour les investissements dans les transports, de prêts à long terme et à taux réduit.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Absolument !

M. Jean-Jacques Filleul, rapporteur pour avis.

Bien sûr !

M. Michel Bouvard.

A ce sujet, monsieur le ministre, comme l'an dernier, je demande que des discussions soient engagées avec la Caisse des dépôts et consignations, dont les réserves financières et l'accès à une ressource privilégiée lui permettraient de mettre en oeuvre ces financements à long terme. Nous sommes nombreux à être d'accord sur ce point.

M. Jean-Jacques Filleul, rapporteur pour avis.

Tout à fait !

M. Michel Bouvard.

Alors que la planification lancée par le général de Gaulle a permis à la France de se doter au cours des quarante dernières années des moyens nécessaires à son développement et à son aménagement, les prochains contrats de plan sur la période 2000-2006 marquent, hélas, un certain désengagement de l'Etat, dont la part annuelle passe de 17,6 à 15 milliards de francs. La plupart des choix opérés par le Gouvernement traduisent une volonté de freiner la réalisation des grands é quipements structurants dont la France a besoin.

Mme Voynet, en tant que ministre de l'aménagement du territoire, en a d'ailleurs contesté l'utilité.

Vous êtes donc obligé de renoncer à des centaines de kilomètres de routes, de rails, de voies navigables et peutêtre - j'espère que non - de liaisons transfrontalières, pourtant indispensables pour désenclaver des territoires fragiles et assurer la place de la France dans les échanges économiques européens.

La dotation « pour les contrats de plan routes » baisse de 27 à 20 milliards, ce qui est inacceptable. Et, nous venons de le voir, aucun effort majeur n'est consenti en faveur du train ou du ferroutage. On nous parle beaucoup de la fameuse « deuxième enveloppe », dont le montant de 10 milliards pour l'ensemble des contrats de plan est sans rapport avec les promesses faites par chaque ministre sur son utilisation. Nous en avons eu encore quelques exemples la semaine dernière, lors d'un congrès où un certain nombre d'entre vous étaient présents.

Vous connaissez, monsieur le ministre, l'extrême vigilance du groupe RPR sur toutes les questions touchant au ferroviaire. Et c'est précisément parce que nous sommes très soucieux de défendre les intérêts du chemin de fer français et attentifs à une politique équilibrée d'aménagement du territoire que nous avons voté au mois de juin dernier la proposition de résolution relative au chemin de fer communautaire qui proposait le rejet des propositions de la Commission. Le groupe RPR réaffirme, par ma voix, son attachement au caractère public de la SNCF et entend voir le Gouvernement défendre la position française face à celle de la Commission, qui avait été initiée en son temps par M. Delors.

Quant au volet de la sécurité, vous le comptez au nombre de vos priorités. Mais si des efforts ont été accomplis, ils méritent d'être accentués. Un seul exemple, qui souligne là aussi l'urgence : la délinquance dans les transports en commun parisiens représente 8 % de la totalité de la délinquance, sans parler de l'inflation des actes de dégradation du matériel et des agressions sur les agents.

Nous souhaitons que les contrats qui ont été passés en Ile-de-France entre le représentant de l'Etat, le préfet de police de Paris, la RATP, la SNCF, le recteur et le procureur de la République puissent faire école.

Autre sujet de préoccupation : le transport collectif.

M. Jean-Jacques Filleul a rappelé que, cette année encore, rien n'était prévu pour les transports collectifs de personnes afin de compenser le surcoût de taxation du gazole, alors même que les transporteurs routiers avaient obtenu dès le début le reversement. Aux sept centimes de 1999 s'ajouteront à partir de janvier prochain sept nouveaux centimes pour les transports collectifs. Cette différence de traitement sera encore accentuée par la TGAP.

Je me réjouis de l'attention portée par M. Filleul à un problème que nous avons nous-mêmes évoqué dès le budget 1999.

Le coût global de ces mesures représentera environ 250 millions de francs par an pour une entreprise comme la RATP. Le rapporteur considère que cette situation est d'autant plus paradoxale que cette entreprise a lancé enfin un ambitieux programme de renouvellement de son parc de bus, qui répondra dans sa totalité, dès 2002, aux normes Euro 3.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

C'est vrai !

M. Michel Bouvard.

Il serait souhaitable qu'une solution soit trouvée dès cette année pour compenser ces surcoûts et mettre les transports collectifs à égalité avec le transport routier de marchandises, quitte à inciter au renouvellement du parc avec des véhicules propres.

Je rappelle enfin que les principales victimes de cette situation sont les réseaux de transport de province, qui n'ont pas accès comme la RATP et la SNCF Ile-deFrance à la dotation d'équilibre de l'Etat. Il n'y a pas de système de guichet pour les réseaux de tranport de province.

M. Gilbert Biessy.

Eh oui !

M. Michel Bouvard.

Le groupe RPR a longuement dénoncé lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale les nombreux effets pervers de l'extension du champ d'application de cette TGAP, dont les recettes vont alimenter le fonds servant à financer la politique de réduction du temps de travail. Avec cette mesure, c'est tout le principe du fameux double dividende qui s'effondre.

M. Yves Cochet.

Mais non !

M. Michel Bouvard.

Je souhaite revenir un instant sur la TIPP, qui, contrairement à l'exonération en vigueur dans neuf pays de l'Union européenne, frappe en France les transports publics, lesquels demeurent pourtant l'un des principaux moyens de lutte contre la pollution. On ne peut, à cet égard, que relayer la préoccupation du GART sur cette nouvelle éco-fiscalité qui pénalise le développement des transports publics.

Un mot des crédits inscrits au budget de la marine marchande, sur lesquels reviendront, avec la compétence qui est la leur, Didier Quentin et Jean-Yves Besselat. Je


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me félicite des mesures prises en faveur du programme

« Port 2000 », même si l'avenir de la marine marchande française reste inquiétant.

Monsieur le ministre, au-delà de l'optimisme affiché, les carences de votre budget n'en demeurent pas moins évidentes. Cette année encore, de nombreuses opérations attendues pour l'amélioration des dessertes routières et des conditions de transport, notamment collectifs et plus particulièrement ferroviaires, ne pourront pas être réalisées dans les délais.

Cela reflète l'ensemble des orientations budgétaires du Gouvernement, comme j'ai eu l'occasion de le dire lors de la discussion générale, puisque la diminution des crédits d'investissement des titres V et VI pénalise principalement le budget des transports.

Un certain nombre d'interrogations subsistent. Qu'en est-il de l'état d'avancement des études pour le TGV Rhin-Rhône ? Pouvez-vous démentir la rumeur d'une concurrence entre le projet Rhin-Rhône et le TGV Est, ce dernier sollicitant d'ailleurs très largement le budget des régions ? Le Sénat, de son côté, a engagé des travaux sur la politique d'aménagement du territoire. Un rapport a été publié en juin 1998 qui fait notamment ressortir l'impérieuse nécessité de réduire les écarts territoriaux, de valoriser la situation centrale de la France en Europe tout en soulignant les exigences d'une politique de nos infrastructures de transport qui tienne compte à la fois des agents économiques et des contraintes de finances publiques.

Des propositions ont notamment été faites pour le domaine autoroutier. Avec Yves Deniaud et Michel Inchauspé, nous avons relayé la proposition de loi déposée au Sénat pour permettre au système autoroutier français de perdurer et d'être mis en valeur au niveau communautaire.

Or nous nous aperçevons que l'une des dispositions du projet de loi de finances, prévoit d'augmenter la taxe prélevée sur les sociétés d'autoroutes de 0,5 %, ce qui, à l'évidence, ne suit ni les recommandations de la Commission, qui trouvait trop élevés les prélèvements sur le système autoroutier ni les recommandations de notre propre mission d'évaluation et de contrôle.

Face aux interrogations et aux inquiétudes que je viens d'évoquer, vous comprendrez, monsieur le ministre, que le groupe RPR ne puisse approuver le budget qui nous est présenté aujourd'hui. Nous souhaitons que les discussions sur les contrats de plan permettent d'améliorer la situation des infrastructures dans notre pays, qui sont un élément essentiel du bien commun et des conditions de vie de nos concitoyens.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul.

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre pays dispose d'atouts maritimes, avec une large ouverture sur les mers qui le bordent, des accès faciles aux ports qu'il a aménagés au fil de son histoire, une position géographique à l'extrémité occidentale du continent qui a toujours constitué le marché le plus important du monde.

Les ports sont toujours des passages obligés des hommes comme des marchandises. Les échanges maritimes ne cessent de se développer, nécessitant la modernisation et l'extension des installations, l'élévation des compétences des personnels appelés à les utiliser.

Mais force est de constater que notre pays n'a pas fourni depuis une trentaine d'années les efforts suffisants pour justifier cette vocation maritime. Les gouvernements successifs ont manqué de volonté politique et bradé un secteur qui vaut aussi en emplois et indépendance nationale.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Vous avez raison.

M. Daniel Paul.

Sans doute encore une politique à courte vue n'a-t-elle pas perçu les enjeux liés à une véritable politique maritime, qu'il s'agisse de la marine marchande - donc du pavillon national et des emplois de marins - ou qu'il s'agisse des industries navales, des emplois et de la valeur ajoutée qu'entraînent le transit et la transformation des marchandises dans nos ports. La vocation maritime se juge à la capacité que l'on se donne de surmonter aujourd'hui ces défis.

C'est un véritable enjeu national. Actuellement, la majorité des trafics maritimes qui intéressent notre pays passent par Anvers ou Rotterdam. Aujourd'hui, notre pays est au vingt-huitième rang pour sa flotte, et de grands armements n'hésitent pas à supprimer le pavillon national et même le registre Kerguelen.

M. Michel Bouvard.

Eh oui !

M. Daniel Paul.

Je souhaite, monsieur le ministre, que notre pays, que notre Gouvernement réaffirme la vocation maritime de la France. Vos budgets 1998 et 1999 avaient déjà rompu avec les tendances précédentes. Celui que vous nous présentez pour 2000 poursuit cette rupture. Nous lui serons donc favorables.

Mais, on le sait, cela ne suffira pas. D'une part, notre pays est dans un environnement européen et international largement dominé par un ultra-libéralisme qui, dans le secteur maritime et portuaire, cherche à faire prévaloir une règle unique : celle des marchés et du profit. L'ignorer conduirait, en se voilant la face, à l'échec. L'imiter serait contraire à ce que sont notre Gouvernement et sa majorité.

C'est donc en usant de nos atouts - et la géographie en est un - que nous pouvons redresser la situation, sans céder au libéralisme, mais en faisant des hommes les objectifs et les outils de cette politique.

Ainsi, la formation des marins est-elle une nécessité : de ce point de vue, la transformation et l'intégration de 315 emplois dans les écoles est un élément très positif.

M ais les besoins recensés font cependant état de 382 postes nécessaires.

Je souhaite que cet objectif soit aussi celui du Gouvernement, comme je souhaite que soit envisagé un diplôme permettant de coupler navigation maritime et navigation fluviale.

L'actualité des derniers mois a fait état de l'existence d'épaves flottantes - nous en avons au Havre -, avec tous les risques qu'elles font courir aux personnels embarqués, mais aussi aux ports qui acceptent de les accueillir.

L'instauration d'une réglementation internationale contraignante, avec, dès à présent, des capacités d'inspection, est une nécessité urgente.

M. Michel Bouvard.

Tout à fait !

M. Daniel Paul.

Ces mêmes impératifs de sécurité justifient, par ailleurs, comme vous l'a écrit mon ami François Liberti, que soient mis au niveau suffisant les crédits permettant à la SNSM d'assurer le plan de construction prévoyant une trentaine d'embarcations de 2000 à 2005, pour un montant de 60 millions de francs.

Par ailleurs, la médecine maritime mérite sans doute u ne attention particulière et une augmentation du nombre de médecins. L'autorisation d'embarquer, qui


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devrait n'être valable qu'un an, vaudrait, dans les faits, à présent pour deux ans, avec tous les risques que cela suppose.

Le transport du fret est un problème crucial. Comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, je souhaite qu'un plan de développement du cabotage soit mis à l'étude rapidement. Outre les avantages en matière de transport, l'emploi comme les activités navales en bénéficieraient.

Les armateurs font état de la nécessité d'aller plus avant non seulement dans le remboursement des cotisations liées à l'ENIM mais dans l'exonération totale des charges sociales. C'est un leitmotiv qui n'est pas spécifique au patronat maritime.

Mais on sait les enjeux actuels. L'emploi doit être au coeur des négociations si l'on ne veut pas voir disparaître progressivement le métier de marin dans notre pays. Cela vaut aussi pour la question du pavillon, pour laquelle une mission est en cours. Cela vaut encore pour les cessations anticipées d'activité, qui doivent aussi viser l'embauche de jeunes et ne pas être seulement des couperets ne correspondant qu'à des réductions du nombre de marins nationaux. Cela vaut enfin pour la RTT, qu'il faut faire aboutir favorablement.

Vous savez les inquiétudes des personnels portuaires et des dockers. Selon certains adeptes de la pensée unique ultralibérale, seule la remise en cause des conditions de travail et des statuts, seule la transformation de quais et de terminaux portuaires en les dédiant à un opérateur, seule la concurrence seraient susceptibles de rendre nos ports compétitifs.

Faut-il rappeler qu'un port comme Le Havre est en mesure d'accueillir un navire, de le charger ou le décharger vingt-quatre heures sur vingt-quatre, 365 jours par an, ce qui signifie une souplesse totale, partie intégrante du travail des personnels concernés ? Certains pèsent pour que la compétitivité des ports ne se juge qu'à l'aune du plus grand profit pour de grands groupes multinationaux, organisant la concurrence aux dépens des personnels et de la sécurité, en ne s'intéressant qu'aux activités les plus rentables. Cela vaudrait pour la manutention comme pour le remorquage. Je vous ai écrit à ce sujet, et je souhaite une clarification rapide.

Nous savons votre combat dans les instances européennes en particulier, mais l'emploi stable, qualifié, comme l'amélioration nécessaire de la compétitivité, doit être l'objectif et un des éléments de nos ports, ainsi que des entreprises concernées.

Cela implique une concertation permettant de régler les problèmes qui peuvent surgir, et nos places portuaires doivent, sur ce plan, devenir exemplaires. Les écrits que vous avez été amené, ces dernières semaines, à adresser sur ces sujets auront sans doute permis, en rappelant ces vérités d'évidence, de dépasser des situations difficiles et de remettre l'homme au coeur des enjeux.

Chez les manutentionnaires comme chez les personnels portuaires, il convient enfin de faire progresser des dossiers significatifs, susceptibles, selon les organisations syndicales, de permettre près de 2 000 embauches.

Il s'agit de la PRP pour les dockers : un accord tripartite a été signé au plan national, mais n'est pas appliqué dans les ports. Une évaluation permet pourtant d'envisager 400 embauches de dockers en cinq ans. De même, la RTT devra aussi intervenir dans ces entreprises. Il s'agit aussi de l'accord de branche intervenu avec l'UPACCIM, concernant la RTT pour les personnels des Ports autonomes. La parution des textes permettrait sans doute d'accélérer le processus.

Il s'agit encore de prendre en compte l'âge moyen élevé des personnels des ports, quarante-trois ans en moyenne, et de mettre en place un dispositif de cessation anticipée d'activités. Sur quatre ans, 1 567 personnels portuaires sont concernés : c'est donc un enjeu social et économique d'importance.

Représentant d'une circonscription du Havre, vous me permettrez enfin, monsieur le ministre, de me féliciter des décisions touchant « Port 2000 », même si subsistent des insuffisances de financement que je vous ai signalées par écrit, et que j'espère voir surmonter dans les prochains mois. Souhaitons que ce projet soit le signe de la volonté politique que je désire voir s'exprimer davantage encore pour notre pays, pour que les hommes demeurent toujours au centre des préoccupations dans ces domaines maritimes comme dans les autres et qu'ils soient partie prenante des décisions qui les concernent. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.

M. Jean-Pierre Blazy.

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je suis toujours étonné de voir nos collègues de l'opposition, apôtres du libéralisme, proposer constamment en première partie de la loi de finances la réduction des dépenses publiques et des impôts...

M. Michel Bouvard.

Non !

M. Jean-Pierre Blazy.

... et en deuxième partie, comme viennent de le faire à l'instant M. Delattre et M. Bouvard, critiquer les dépenses de ce ministère, qu'ils jugent insuffisantes.

M. Michel Bouvard.

Avec les 70 milliards annuels des 35 heures, il y a de quoi faire des investissements !

M. Jean-Pierre Blazy.

Je relève là une contradiction majeure.

Pour ma part, je me félicite, monsieur le ministre, de la qualité de ce budget, qui voit sa progression s'établir à 2,6 % par rapport à 1999.

A la veille de la signature des contrats de plan Etatrégion, je salue la reconstitution des capacités d'investissement du ministère qui devraient permettre la mise en chantier de nombreux projets, en particulier dans le domaine des transports terrestres.

S'agissant de la promotion des transports collectifs urbains, l'effort est conséquent pour l'Ile-de-France.

M. Michel Bouvard.

Eh oui ! Comme toujours !

M. Jean-Pierre Blazy.

Cet effort se justifie par les retards importants accumulés au cours du XIe plan qui a privilégié les opérations dans Paris intra-muros, très coûteuses, avec des surcoûts considérables, au détriment de la périphérie et des banlieues.

M. Michel Bouvard.

Qui a décidé Eole et Meteor ? Le ministre socialiste de l'époque !

M. Jean-Pierre Blazy.

Ecoutez-moi, monsieur Bouvard.

Je ne suis pas certain que le compte y soit encore tout à fait, mais j'espère que la deuxième enveloppe promise y pourvoira.

Enfin, la réforme du cadre institutionnel et financier du syndicat des transports parisiens sera engagée ; je m'en réjouis. Il est en effet important que la région fasse son entrée au conseil d'administration du STP.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1999

M. Michel Bouvard.

La loi lui en donne la présidence !

M. Francis Delattre.

C'est le préfet qui préside !

M. Jean-Pierre Blazy.

Je vais m'attarder sur deux sujets concernant le développement durable des transports que nous devons favoriser.

Le premier est la résorption des points noirs du bruit dans le domaine des transports terrestres, sujet qui me tient à coeur puisque je suis président du conseil national du bruit. En effet, alors que le rapport Lamure remis il y a un an à Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, prévoit un plan de réduction de cette nuisance doté de 10 milliards de francs en dix ans, ce qui devrait correspondre à un milliard de francs par an, le budget pour 2000 ne comporte que 350 millions de francs de crédits à ce titre.

Même si le cofinancement dans le cadre des contrats de plan permettra de mobiliser des sommes plus élevées qui restent à déterminer, il faut avouer, monsieur le ministre, que l'effort engagé - même s'il convient de la saluer - n'est pas à la hauteur des besoins. Je vous rappelle que le rapport Lamure souligne les atteintes à la santé que cause le bruit lié à la proximité de certaines infrastructures et met en évidence le fait que les catégories sociales les plus défavorisées sont les plus exposées.

En second lieu, dans le domaine du transport aérien, plusieurs interrogations nécessitent des réponses.

Pour ce qui est d'abord du contrôle aérien, vous avez répondu à la question que je vous ai posée le 12 octobre dernier sur les retards accumulés et sur la saturation du ciel parisien, que vous procédiez à des recrutements de contrôleurs aériens, car ils étaient rendus nécessaires par l'augmentation très importante du trafic. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous indiquer le nombre de postes qui seront créés au cours de l'exercice 2000 ? Par ailleurs, si je me félicite de l'inscription au budget d'une ligne ACNUSA, je m'interroge sur le montant alloué au regard des missions qui ont été confiées par la loi à la première autorité administrative indépendante en matière environnementale. En outre, pouvez-nous m'assurer que tous les textes réglementaires relatifs à la loi portant création de l'ACNUSA seront prêts d'ici à la midécembre ? Monsieur le ministre, vous le savez, les réclamations et les plaintes des populations riveraines et de leurs élus ont été nombreuses au cours des derniers mois autour de Roissy. Des engagements ont été pris. Si certains sont tenus, d'autres ne le sont pas encore. Il importe notamment que soit engagée une politique volontariste tendant à renforcer la solidarité et à favoriser un développement économique respectueux de la qualité de l'environnement des collectivités territoriales situées autour des zones aéroportuaires.

Lors de l'extension de l'aéroport de Roissy, vous vous étiez engagé à mettre en oeuvre un dispositif inspiré du rapport Lachenaud. Il serait souhaitable que des mesures soient prises dans les plus brefs délais afin que les communes les plus touchées par les nuisances générées par une plate-forme aéroportuaire puissent connaître un d éveloppement plus harmonieux. Pouvez-vous nous confirmer, monsieur le ministre, que, dans la prochaine loi de finances rectificative, des dispositions seront prises qui pourront être mises en oeuvre au 1er janvier 2000 ? J'envisage, pour ma part, de déposer une proposition de loi concernant les neuf plus grands aéroports français.

Désormais, il apparaît que le plafonnement du trafic sur Roissy à 55 millions de passagers, prévu à l'horizon 2015, sera peut-être dépassé dès avant 2010, Monsieur Delattre.

M. Yves Cochet.

Hélas !

M. Jean-Pierre Blazy.

Face à cette situation, il est urgent de repenser la politique aéroportuaire, non seulement au niveau francilien, mais aussi à l'échelle du territoire national.

M. Yves Cochet.

Très bien !

M. Jean-Pierre Blazy.

En ayant le souci de mettre en oeuvre une politique équilibrée d'aménagement du territoire respectueuse de l'environnement, nous devons nous interroger sur l'opportunité d'une meilleure répartition du trafic aérien dans le cadre des futurs schémas de services des transports. Or rien n'apparaît, ni sous une forme ni sous une autre, dans le budget quant à la construction future du troisième aéroport, que je souhaite.

M. Yves Cochet.

Ah non ! Pas moi !

M. Jean-Pierre Blazy.

Laissez-moi poursuivre, monsieur Cochet.

Ainsi, la décision récente de Delta Air Lines, associée à Air France, de créer une ligne quotidienne directe entre Lyon et New York à partir du 14 avril prochain remet en cause, de manière flagrante, la doctrine jusqu'à présent admise de la compagnie nationale, consistant à concentrer le trafic transatlantique sur Paris, en particulier sur Roissy. Cela montre, monsieur le ministre, que le troisième aéroport parisien peut être éloigné d'une heure à deux heures de la capitale, à la condition de faire le pari de l'intermodalité, c'est-à-dire de la complémentarité airrail.

Par ailleurs, lors du dernier conseil des ministres européens des transports, sous la pression américaine, le report de la mise en oeuvre de la directive visant à interdire la circulation des avions « husk-kités », avions anciens et très bruyants mais équipés d'un réducteur de bruit, en mai 2000 pour les flottes européennes et en 2002 de façon générale, a été envisagé. Les Américains sont, e n effet, les seuls producteurs de « husk-kits », et, surtout, ils sont les plus concernés par les avions « husk-kités ». Je vous demande solennellement, monsieur le ministre, de tout faire pour que les dispositions prévues par la directive européenne puissent s'appliquer dans les délais prévus.

M. Yves Cochet.

Très bien !

Mme la présidente.

Il vous faut conclure, monsieur Blazy.

M. Jean-Pierre Blazy.

J'en ai presque terminé ! Toutefois, je constate que vous avez accordé davantage de temps à certains de nos collègues.

Monsieur le ministre, la réduction du temps de travail dans le domaine du transport aérien est de votre compétence. Pouvez-vous nous présenter l'état des discussions engagées, les difficultés éventuelles rencontrées et les moyens supplémentaires que vous pensez pouvoir dégager s'agissant du renforcement nécessaire des moyens de l'inspection du travail, sur les plates-formes parisiennes en particulier ? Enfin, à plusieurs reprises, la presse s'est fait l'écho des difficultés rencontrées par des voyageurs handicapés sur les lignes d'Air France. Hier encore, un quotidien du matin titrait : « Des sourds indésirables sur Air France. »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1999

Pendant l'été, vous avez vous-même réagi ». Monsieur le ministre, Air France étant toujours la compagnie nationale, quelles décisions comptez-vous prendre sur cette question sensible ? Je vous remercie, monsieur le ministre, de l'attention que vous accordez à mes observations et des réponses que vous voudrez bien apporter à mes questions.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Mme la présidente.

Je vais suspendre la séance quelques minutes.

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures quarante-cinq, est reprise à dix-huit heures.)

Mme la présidente.

La séance est reprise.

La parole est à M. Yves Cochet.

M. Yves Cochet.

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis des années, la politique de l'Etat en matière de transport a consisté essentiellement à développer, d'une part, le réseau routier et ses corollaires et, d'autre part, le trafic aérien, dont le rythme de développement est d'environ 7 % par an.

Nous ne pouvons plus supporter le « tout autoroutier » ou le « tout routier ». En termes d'efficacité, la route n'est plus optimale. Elle a atteint ses limites et ne peut plus assurer les exigences de sécurité et de protection de l'environnement réclamées avec de plus en plus de force par nos concitoyens. Souvenez-vous, monsieur le ministre, de la catastrophe du tunnel du Mont-Blanc. Une manifestation a eu lieu encore samedi dernier pour protester contre le fait que, après cette catastrophe, il soit prévu de rouvrir le tunnel du Mont-Blanc aux camions.

Il faut s'engager, non plus dans le transport routier, mais au contraire, et de façon urgente, dans le ferroutage.

Que dirait-on de la SNCF si elle affichait, comme la route, un bilan de 8 000 morts par an ? Cette hécatombe est un scandale permanent.

Quant à l'avion, il consomme sur les trajets de courte distance quatre fois plus d'énergie que le train. Or près de la moitié des voyages en avion s'effectuent sur des distances inférieures à 800 kilomètres.

Comme vous le savez, il est plus facile de réduire les nuisances sonores dues au trafic ferroviaire que celles dues au trafic aérien, et il est même possible de supprimer les premières alors qu'on ne le peut pas pour les secondes.

Or, comme M. Blazy, entre autres, l'a déjà souligné, des centaines de milliers de personnes sont exposées dans le Val-d'Oise aux nuisances sonores des aéroports, et notamment de celui de Roissy.

J'ai plusieurs questions à vous poser, monsieur le ministre, à ce sujet.

Premièrement, pouvez-vous me dire quelles sont les conclusions s'il y en a déjà de l'enquête de gêne sonore menée depuis un an autour de Roissy ? Deuxièmement, où en sont les quatre décrets qui d oivent paraître en application de la loi créant l'ACNUSA ? J'entendais tout à l'heure M. Schwartzenberg demander le maintien du couvre-feu à Orly. M. Schwartzenberg est un homme heureux ! Nous n'avons pas de couvre-feu à Roissy. Pourtant, monsieur le ministre, il existe une solution et vous le savez : l'aéroport de Vatry en Champagne pourrait concentrer le trafic de fret. Il suffirait de l'aménager.

M. Philippe Vuilque.

Très bien !

M. Yves Cochet.

Dernière question sur ce point : elle concerne la légende du troisième aéroport en région parisienne évoquée notamment par M. Blazy. Personnellement, je n'y crois pas, et même je ne veux pas qu'il y ait un troisième aéroport en Ile-de-France. Mais je suis inquiet parce que, selon des rumeurs, le projet de Beauvilliers, en Eure-et-Loir, serait relancé. J'espère qu'il n'en sera rien. Quelle est, monsieur le ministre, votre réflexion sur ce sujet ? J'en viens maintenant au réseau ferroviaire et aux voies d'eau, qui nous intéressent évidemment beaucoup plus, quoique pas dans n'importe quelles conditions.

Un de mes collègues, Guy Hascoët, travaille depuis plusieurs années à la liaison Seine-Nord, qui concerne un peu mon département puisque je suis très attentif au tronçon de l'Oise. Etant donné les enjeux économiques et environnementaux, tout doit être fait dans la transparence et la concertation, comme a déjà commencé à le faire VNF, que je félicite pour ses initiatives. Mais ce patrimoine fluvial mérite une attention et une réflexion particulières.

Comme vous, j'en suis sûr, je suis très attaché à la multimodalité, laquelle doit reposer, d'une part, sur une orientation européenne en vue d'une action plus coord onnée et l'établissement de normes de sécurité communes et, d'autre part, sur une orientation régionale afin de mettre en place un aménagement équilibré et optimal du territoire.

Quant au FITTVN, du point de vue du principe, je ne peux que m'y opposer, parce qu'il ne s'agit pas de crédits budgétaires classiques, mais, du point de vue de l'efficacité, je ne peux que le défendre car l'on a pu, grâce à ce fonds, rééquilibrer les investissements consacrés au transport au profit du rail. L'objectif qui a été fixé pour les transports dans le budget de la région Ile-deFrance à savoir consacrer deux tiers des investissements aux transports en commun, et notamment au rail, et un tiers à la route devrait valoir également non seulement pour le FITTVN, mais aussi pour l'ensemble des crédits des transports d'Etat.

Enfin, monsieur le ministre, j'appelle votre attention sur un projet qui nous tient à coeur, et qui vous tient sans doute également à coeur : la politique des transports en ville.

Je crois savoir que vous préparez un projet de loi, auquel j'ai, à titre personnel, donné le temps de projet UHT, pour Urbanisme-Habitat-Transport. (Sourires.)

On peut l'appeler autrement, le sigle UHT sonnant, il est vrai, un peu bizarrement. Nous y serons particulièrement attentifs. Mieux ! Nous souhaitons être associés à sa préparation car ce qui est en jeu, c'est le développement durable des villes. Il nous faut inventer la vie en ville au

XXIe siècle. Il ne s'agit pas simplement de désengorgement urbain, il s'agit de santé publique. Et, en fait, ce qui est à l'étude, c'est un véritable projet de civilisation, laquelle est urbaine maintenant.

Pour cela, des initiatives parlementaires ou ministé-r ielles ne sauraient, à elles seules, suffire. Pour

« reconstruire les villes sur elles-mêmes », comme l'on dit maintenant, il faut non seulement des initiatives des p ouvoirs publics mais aussi des actions citoyennes,


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associatives et démocratiques. C'est en associant les gens eux-mêmes à la reconstruction de leur ville que l'on pourra parvenir à de bonnes politiques.

J'ai certes formulé quelques critiques. Mais votre budget est bon. C'est pourquoi nous le voterons. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Dominique Bussereau.

M. Dominique Bussereau.

Monsieur le ministre, vous ne vous étonnerez pas que, comme l'a déjà indiqué Francis Delattre, notre groupe ne vote pas votre budget.

Dans le peu de temps qui m'est imparti, j'évoquerai les problèmes successivement, du transport ferroviaire du transport aérien et du transport routier.

En ce qui concerne le transport ferroviaire, je souhaite vous interroger sur le rachat par la SNCF de l'entreprise VIA GTI. L'assemblée générale du GART - le groupement des autorités responsables des transports - se tenait ce matin et je peux vous dire que cette question suscitait beaucoup d'inquiétudes et de questions chez l'ensemble des élus, toutes tendances politiques confondues.

On comprend très bien que M. Gallois veuille faire de la SNCF un grand groupe s'insérant dans l'ensemble de la chaîne de transport : transport ferroviaire, urbain et péri-urbain. Une critique facile d'ailleurs - mais je ne fais que la mentionner - serait de voir en cela une nationalisation, puisqu'une entreprise publique achète une entreprise privée. Mais j'observe, monsieur le ministre, que ce rachat pose un problème de forme car, s'agissant du transport ferroviaire pour lequel l'Etat est un gros pourvoyeur de fonds, le Parlement aurait pu, et aurait dû, être consulté sur l'agrandissement du périmètre de l'entreprise publique. Je suis étonné, comme beaucoup, d'apprendre ce rachat par la presse.

M. Pierre Lequiller.

Eh oui !

M. Dominique Bussereau.

En plus d'un problème de fond, cela pose également, monsieur le ministre, comme l'ont relevé ce matin de nombreux collègues lors de l'assemblée générale du GART, un problème de concurrence : les entreprises qui avaient l'habitude de discuter, d'un côté, avec VIA GTI et, de l'autre, avec la SNCF je pense en particulier aux projets de tram-train ou de train-tram - se retrouvent maintenant face à un seul et même interlocuteur. Il n'y a donc plus de contrepoids.

Les élus en sont fort gênés.

A cela s'ajoute un problème de monopole. La SNCF se trouvera en effet en position monopolistique dans un certain nombre de cas, ce qui représente un abus de centralisation par rapport au pouvoir des élus locaux.

Cela étant dit, on peut aussi se réjouir de cette affaire, car vous n'êtes pas sans savoir, monsieur le ministre, que VIA GTI est un gros opérateur à l'étranger et qu'il exploite en particulier une ligne ferroviaire en Allemagne et plusieurs en Suède. A partir du moment où vous autorisez, comme je le suppose, cette opération en tant qu'autorité de tutelle, cela implique à terme que la SNCF ellemême soit mise en concurrence dans les régions avec d'autres opérateurs car on voit mal comment la SNCF irait porter concurrence à des opérateurs - tels la DB, la Deutsche Bundesbahn, par exemple - dans d'autres pays européens, et se retrouverait dans son propre pays en situation de monopole.

La suite logique, monsieur le ministre, de l'achat de VIA GTI - et j'attends sur ce point votre réponse - est l'ouverture, dans le cadre de la régionalisation, des réseaux ferroviaires régionaux à d'autres opérateurs.

M. Pierre Lequiller.

Il a raison !

M. Dominique Bussereau.

C'est d'ailleurs ce qui est dans l'air du temps et vous le savez bien.

M. Jean-Jacques Filleul, rapporteur pour avis.

Il fait de l'idéologie !

M. Dominique Bussereau.

Les choses se passeront de la sorte dès que vous ne serez plus ministre des transports et peut-être même déjà sous votre ministère, car il en sera ainsi quel que soit le gouvernement.

Deuxième point - non plus d'interrogation, cette fois-ci, mais de désaccord - concernant votre politique en matière ferroviaire : votre opposition à la directive européenne. Je continue à considérer le compromis que vous avez obtenu comme boîteux et incompréhensible.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Mais...

M. Dominique Bussereau.

Je ne suis pas sur ce point d'accord avec M. Bouvard, monsieur le ministre. Cela peut arriver...

M. Michel Bouvard.

L'opposition, elle aussi, est plurielle !

M. Dominique Bussereau.

Je vais vous donner lecture M. Filleul me le pardonnera, il l'a déjà entendue l'autre jour au Sénat - d'une phrase-édifiante - du compromis que vous avez signé, sur laquelle j'aimerais quelques explications de texte. « Les redevances de base » - est-il écrit - « seront fixées au niveau des coûts liés directement au fonctionnement des services ferroviaires avec la possibilité de majorations supplémentaires en fonction d'options transparentes et non discriminatoires, tout en garantissant une compétitivité optimale. » La représentation nationale

souhaiterait, monsieur le ministre, avoir quelques explications, sur le sens de cette phrase.

Les technocrates européens qui ont « pondu » ce texte ne l'ont certainement fait ni pour les cheminots, ni pour les citoyens français.

M. Jean-Claude Lefort.

C'est parce que vous ne voulez pas comprendre ! (Sourires.)

M. Jean-Louis Idiart, rapporteur spécial.

Ça dépend comment on le dit ! (Sourires.)

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Mettez les virgules où il faut, monsieur le député ! (Sourires.)

M. Dominique Bussereau.

Cela rejoint ce que disait

M. le Premier ministre hier sur les fautes de grammaire.

Je crois en effet que ce texte est tout à fait une application de la doctrine Jospin ! Autre point de désaccord avec votre politique ferroviaire, monsieur le ministre : et M. Filleul voudra bien m'en excuser, ce n'est pas lui qui est mis en cause, bien évidemment - l'inutilité de cette usine à gaz que vous avez appelée le conseil supérieur du service public ferroviaire. J'observe que, à la tête d'un organe qui veut redonner le pouvoir au citoyen, vous avez placé onze syndicalistes et dix élus. Est-ce à dire que vous donnez la préférence aux personnels de l'entreprise par rapport aux élus dont c'est le rôle et le pouvoir de donner leur avis sur le service ferroviaire ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1999

M. Jean-Jacques Filleul, rapporteur pour avis.

Vous dites cela parce que vous n'en faites pas partie ! Vous voudriez siéger dans tous les organes qui concernent les transports !

M. Dominique Bussereau.

J'ai d'ailleurs, monsieur le ministre, posé une question écrite le 13 septembre pour avoir des précisions sur le coût et les moyens de cette usine à gaz. A ce jour, je n'ai pas encore eu de réponse.

J'espère en obtenir une dans le Journal officiel avant le 13 novembre, conformément à notre règlement.

Dernier point de différence avec vous, monsieur le ministre, sur la politique ferroviaire : vous ne faites rien pour prévenir les conflits et, en particulier, vous n'envisagez pas d'instaurer l'indispensable service minimum.

Lors de l'examen de la proposition de loi déposée par l'ensemble de l'opposition sur ce sujet en présence de M. Vaillant, j'ai observé dans le discours de M. Le Garrec une ouverture. Celui-ci a en effet reconnu qu'il faudra bien un jour y penser. Il faudra d'autant plus y penser, monsieur le ministre, que, lors de la dernière grève des contrôleurs, plus de 1 000 trains de marchandises étant restés « en carafe » sur l'ensemble du réseau français, un grand nombre d'entreprises, contrairement à ce que vous souhaitez et à ce que souhaitent nos rapporteurs, ont abandonné le transport ferroviaire du fait du nonacheminement des marchandises.

M. Michel Bouvard.

Tout à fait !

M. Dominique Bussereau.

Tant que vous ne garantirez pas en cas de grève - et ce n'est pas la légitimité de la grève qui est en cause - un service minimum pour le transport combiné, jamais vous ne pourrez redonner à ce dernier une place en France car les entreprises arbitreront toujours en faveur de la route, laquelle assurera toujours le transport, quelles que soient les conditions.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

C'est irréaliste !

M. Dominique Bussereau.

Au contraire ! C'est tout à fait réaliste. D'autres pays le font bien.

Il faudra donc en ce domaine mettre vos actes, monsieur le ministre, en conformité avec votre discours.

J'en viens au transport aérien.

Votre refus de sortir Air France de sa situation exceptionnelle d'entreprise étatisée pose à celle-ci un véritable problème. Le redressement de cette entreprise, qui est à mettre à l'actif de M. Spinetta, comme celui de la SNCF est à mettre à l'actif de M. Gallois, est compromis parce qu'elle est isolée et peut difficilement conclure des alliances. Face à Star Alliance, face à Oneworld, face à Air Wings, Air France et Delta Air Lines se retrouvent avec des compagnies, certes respectables mais, malheureusement, de seconde zone : Virgin, TAP, Royal Air Maroc, Tunisair, une ligne aérienne hongroise. Mais, contrairement à toutes les grosses compagnies européennes, elle n'a pas de partenaire asiatique ni aucun grand partenaire européen. Et vous savez bien, monsieur le ministre, que la raison en est le statut étatisé de l'entreprise, qui nuit aux alliances... (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. Jean-Pierre Blazy.

Mais non !

M. Dominique Bussereau.

Tant que vous ne serez pas revenu, comme le souhaite d'ailleurs M. Fabius, sur le statut d'entreprise publique d'Air France,...

M. Jean-Louis Idiart, rapporteur spécial.

Ne faites pas dire n'importe quoi à M. Fabius !

M. Dominique Bussereau.

... cette dernière souffrira.

Et c'est le manque d'alliance qui en sera la cause.

M. Jean-Pierre Blazy.

C'est de l'idéologie !

M. Dominique Bussereau.

Pas du tout. C'est la réalité des choses. M. Fabius l'a dit ! Mettez-vous d'accord, mes chers collègues, entre vous.

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Mme la présidente.

Mes chers collègues, seul M. Bussereau a la parole.

M. Dominique Bussereau.

Merci, madame la présidente.

Toujours en matière de transport aérien, il est un autre problème sur lequel je souhaiterais que le Gouvernement agisse plus et discoure moins, c'est celui de la ponctualité.

La « productivité » du ciel est en train de décliner. L'organisation de l'espace européen ne correspond pas à nos attentes. Il y a un taux de retard trop important sur l'ensemble des vols français et, en particulier, sur les vols intérieurs.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

C'est vrai.

M. Dominique Bussereau.

Parmi les pistes à explorer, citerai-je la privatisation du contrôle aérien ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Jean-Pierre Blazy.

C'est une fausse solution !

M. Félix Leyzour.

Dès qu'il y a un problème, la droite privatise !

Mme Odile Saugues.

N'oubliez pas, mon cher collègue, que les chemins de fer anglais sont privatisés...

M. Dominique Bussereau.

Vous seriez trop contents de me traiter de libéral. Il faut bien que je vous provoque un petit peu.

M. Jean-Louis Idiart, rapporteur spécial.

Vous employez des gros mots : privatisation, libéral !

M. Dominique Bussereau.

Des solutions doivent être trouvées et je voudrais que vous vous y employiez plutôt que de vous livrer à des imprécations dès que je prononce un mot qui vous choque ! J'en viens enfin au transport routier. Vous avez amputé les crédits routiers de 10 %, ce qui, dans l'ensemble des collectivités françaises, pose un problème.

M. Michel Bouvard.

C'est tout bonnement insupportable !

M. Dominique Bussereau.

Je comprends très bien, monsieur le ministre, que vous souhaitiez rétablir un meilleur équilibre entre la route et le fret, encore que, comme je vous l'expliquais tout à l'heure, un bon moyen d'y parvenir serait de régulariser le trafic du combiné.

Mais il ne faut pas déshabiller Pierre pour habiller Paul, et le rapport de M. Filleul montre bien à quel point vous succombez à l'idéologie, pardonnez-moi de le dire, lorsque vous dites qu'il faut lutter contre l'hégémonie routière.

M. Jean-Pierre Blazy.

L'hégémonie de la route est un fait incontestable.

M. Dominique Bussereau.

Il ne faut pas lutter contre l'hégémonie routière, il faut favoriser l'intermodalité...

M. Jean-Louis Idiart, rapporteur spécial.

C'est la traduction que peut en faire un libéral !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1999

M. Dominique Bussereau.

Soyons positifs et non négatifs sur ce point. Augmenter les crédits du ferrovaire est certes une bonne chose mais pourquoi le faire en diminuant ceux de la route ? En réalité, comme l'a très bien dit Marc-Philippe Daubresse, il n'y a plus actuellement de véritable politique de soutien du transport combiné.

Vous augmentez les crédits pour la sécurité routière et c'est une bonne chose, monsieur le ministre, mais que ne l'avez-vous fait plus tôt ?

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont.

Et vous, qu'avez vous fait quand vous étiez au pouvoir ?

M. Dominique Bussereau.

Comme je vous l'ai dit lors de l'examen du projet de loi sur la sécurité routière, il est facile de dire qu'il y a de bons chiffres en année x.

Q uand on n'a fait aucune campagne télévisée en année x-1, on porte une part de la responsabilité de l'hécatombe.

Vous avez raison d'augmenter les crédits de la sécurité routière, mais si vous diminuez en même temps les crédits routiers c'est, permettez-moi de vous le dire, un placebo. Si vous diminuez la sécurité de l'équipement routier en diminuant les crédits routiers, il ne sert à rien d'augmenter les crédits de la sécurité routière. Il faut à fois maintenir les premiers et augmenter, comme vous le faites à juste titre, les seconds.

Enfin, dernier point sur lequel vous êtes très attendu par l'ensemble des entreprises de notre pays : l'application des 35 heures au transport routier. Vous savez que c'est une menace pour les entreprises françaises et que c'est inapplicable dans le transport routier.

M. Jean-Jacques Filleul, rapporteur pour avis.

Un certain nombre d'entreprises appliquent déjà les 35 heures !

M. Dominique Bussereau.

Non, toutes les entreprises attendent. Si vous voulez achever le transport routier - pensez à Willy Bentz et à bien d'autres -, c'est ainsi qu'il faut faire.

Parce que nous n'avons pas la politique ferroviaire que nous souhaitons, que le maintien de l'entreprise Air France dans un statut étatisé crée des difficultés et que la baisse des crédits routiers pose de réels problèmes à l'ensemble des entreprises françaises et des collectivités, et avec regret car nous souhaiterions nous associer à un grand budget avec du souffle et de l'enthousiasme, nous voterons, monsieur le ministre, contre les crédits de votre ministère. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

Mme la présidente.

La parole est à Mme Odile Saugues.

Mme Odile Saugues.

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, consommation d'espace, pollution atmosphérique, bruit, insécurité : la population mesure concrètement l'impact des transports dans le cadre de vie, et nous avons tous en mémoire la mobilisation d'élus et d'habitants de communes particulièrement exposées à ces nuisances, voire de « pays » si l'on pense à certaines vallées alpines nombreux sont les collègues qui y ont fait allusion à cette tribune.

M. Michel Bouvard.

Merci !

Mme Odile Saugues.

Face à un tel enjeu, les pouvoirs publics se doivent de réagir, notamment en introduisant dans les mécanismes de la régulation du secteur des transports des critères environnementaux.

Les exemples concrets ne manquent pas pour illustrer cette volonté politique, et les premiers résultats sont déjà visibles. Ainsi, en matière de pollution atmosphérique, des progrès sensibles ont été réalisés sur les émissions de plomb, de monoxyde de carbone et d'hydrocarbures.

Si l'on veut réellement progresser dans cette voie, qui passe par un rééquilibrage des modes de transport, il nous faudra dépasser le stade des mesures incitatives ou des contraintes fiscales pour atteindre une vérité des coûts des infrastructures et des coûts d'usage directs et indirects.

Une évaluation exhausive, intermodale et faisant l'objet d'un consensus reste à établir. Elle est incontournable.

Cette vérité des coûts nécessitera, par exemple, de réfléchir en profondeur à la situation très préoccupante des sociétés concessionnaires d'autoroutes. Des critiques et des mises en garde réitérées ont été formulées par la Cour de comptes en 1973, 1986, 1990, 1992 et récemment, dans un rapport publié le 24 juin dernier. La transparence de la politique autoroutière française doit être totale, la fuite en avant stoppée.

Pour ma part, j'évoquerai plus particulièrement le cas du transport routier de marchandises. Pour certains trafics, la vérité des coûts et des prix, dans un contexte de concurrence plus conforme à la réglementation sociale et aux réglementations sur la vitesse, pourrait donner une marge de pertinence accrue au transport ferroviaire en général, et au transport combiné fer-route en particulier.

C'était déjà la conclusion du rapport du Conseil national des transports rendu public il y a un an.

Les avantages du transport combiné doivent être rappelés : possibilité d'avoir des horaires de travail plus raisonnables, investissements en matériels relativement limités, notamment. Par ailleurs, les enjeux en termes de sécurité et de traitement de la congestion de certains axes sont bien sûr à prendre en compte dans la vérité des coûts.

Cette priorité de rééquilibrage se retrouve, monsieur le ministre, dans votre budget, où les choix politiques sont clairement affichés.

J e me réjouis tout particulièrement des récentes annonces que vous avez faites à propos de la ligne Clermont-Ferrand -Neussargues -Béziers. Je suis convaincue que chacun prendra la mesure de ce projet et assumera ses responsabilités.

La prise en compte de l'environnement dans la politique des transports pose également la question des déplacements au sein des agglomérations. Le futur projet de loi urbanisme-habitat-déplacement sera une arme décisive pour traiter ce sujet, et je rejoins les préoccupations de M. Cochet, mais cette priorité se dessine déjà dans le cadre de votre budget.

Le développement des transports collectifs urbains doit être encouragé. La nécessité de disposer d'un cadre de vie agréable et d'une circulation fluide se traduira par des choix, sinon des sacrifices. Ces choix peuvent s'exprimer à travers la réalisation de certaines lignes en site propre, la modernisation du réseau ferroviaire régional, et aussi par la réutilisation d'emprises ferroviaires urbaines. Ainsi, votre budget propose une augmentation de 8 % de la dotation pour les investissements en faveur des transports urbains de province.

Face à la nécessité, urgente, d'affirmer une politique des transports conciliable avec les enjeux environnementaux, la puissance publique reste garante de l'intérêt général par la réglementation et le contrôle.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1999

La répartition spatiale, temporelle et modale des trafics doit se faire dans le cadre d'une concurrence loyale, ce qui exige un contrôle de l'application des réglementations, notamment pour ce qui concerne le respect des règles sociales.

Le budget renforce encore les moyens de l'inspection du travail dans le secteur du transport routier de marchandises : le nombre de contrôleurs des transports routiers atteindra l'an prochain 440 agents. C'était une nécessité.

Cet effort devra se poursuivre car les textes sur les infractions, le contrôle, la sous-traitance, la coresponsabilité des chargeurs doivent être appliqués. La loyauté de la concurrence intra et intermodale comme le développement durable en dépendent directement. Cela suppose notamment une coopération étroite entre le ministère des transports et le ministère de la justice.

Ce souci de régulation doit s'exprimer par la réglementation, mais aussi par des choix d'investissements.

Le choix en matière d'investissements dans les infrastructures est une idée neuve. Il nécessite de la détermination, de la cohérence et de la continuité. Il nécessite également des adaptations fondamentales, qui, à l'évidence, ne pourront pas satisfaire tout le monde. On ne pourra pas répondre efficacement aux problèmes impératifs liés à la consommation énergétique, aux pollutions atmosphériques, à la consommation d'espace, au respect des normes sociales et à la sécurité sans réorienter en profondeur notre politique de transports.

Les crédits que nous examinons aujourd'hui constituent une étape dans cette nécessaire définition de choix pertinents. Nous sommes bien sûr tous conscients dese fforts qu'il nous faudra encore entreprendre pour répondre aux défis de demain.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe communiste.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Philippe Vuilque.

M. Philippe Vuilque.

Monsieur le ministre, je me félicite à mon tour de l'augmentation de 2,6 % de votre budget. Dans cette année de négociation des contrats de plan, il était important que les moyens d'investissement, notamment dans les transports, soient à la hauteur des attentes et permettent de reconstituer les capacités d'investissement de l'Etat autour de grands projets de développement d'intérêt national et européen.

S'agissant du budget des routes, si les crédits de paiement pour l'année 2000 diminuent,...

M. Michel Bouvard.

Ah !

M. Philippe Vuilque.

... et on peut le regretter, les crédits d'investissement augmentent de près de 6 %, ce qui devrait permettre à l'Etat de respecter ses engagements sur les contrats de plan et d'engager un partenariat rénové avec les collectivités territoriales.

M. Michel Bouvard.

Cela veut dire que l'on paie plus !

M. Philippe Vuilque.

A ce propos, la somme qui sera réservée à ce que l'on appelle la « deuxième enveloppe » sera, nous l'espérons, conforme aux attentes des élus, car, dans de nombreuses régions, les besoins d'investissement en infrastructures routières sont importants.

M. Michel Bouvard.

Ah ! Ah !

M. Philippe Vuilque.

Nous sommes attachés, comme vous, à l'équilibre entre les grands modes de transport.

Encourager les transports ferroviaires et les transports combinés est une nécessité, mais une nécessité complémentaire à la mise à niveau des infrastructures routières dans certaines régions qui n'ont pas encore l'équipement normal indispensable à leur développement économique et donc à l'emploi. Se pose alors pour l'Etat un problème d'équité et de solidarité territoriale car, malheureusement, ce sont souvent les régions les plus fragiles qui sont les plus pénalisées.

M. Michel Bouvard.

Eh oui !

M. Philippe Vuilque.

Pour illustrer mon propos, je vais prendre un exemple que je connais bien, celui de la région Champagne-Ardenne.

Voilà une région qui a souffert pendant longtemps et qui souffre toujours d'être sous-équipée en infrastructures en raison de l'insuffisance des investissements de l'Etat.

C'est pourtant une région de passage. L'histoire y est peut-être pour quelque-chose, me direz-vous, puisque certains de nos voisins ont eu la fâcheuse habitude de passer par chez nous et plus particulièrement par les Ardennes, que ce soit en 1870, en 1914 ou en mai 1940 ! Ceci explique peut-être cela !

M. Michel Bouvard.

Et Cohn-Bendit, plus récemment !

M. Philippe Vuilque.

Au-delà de l'anecdote, lorsque l'on compare avec l'équipement des autres régions, que constate-t-on ? Depuis vingt ans, la Champagne-Ardenne, qui recouvre près de 5 % du territoire national, compte près de 2,5 % de la population du pays, n'a reçu qu'à peine 2 % des crédits d'investissement de l'Etat. C'est une situation inéquitable, et le prochain contrat de Plan sera loin de combler ce déficit.

M. Marc-Philippe Daubresse.

Eh oui !

M. Philippe Vuilque.

Au-delà de ce dernier, je voudrais attirer de nouveau votre attention sur un projet d'intérêt national, le futur axe Marseille-Rotterdam, appelé encore l'Eurocorridor, qui concerne directement la ChampagneArdenne. Il ne manque sur son territoire, et plus particulièrement dans le département des Ardennes, que 40 malheureux petits kilomètres pour que, en 2005, date à laquelle nos amis belges termineront leurs investissements routiers à la frontière française, cet axe soit achevé.

Ce chaînon manquant nous fait nationalement, régionalement et départementalement cruellement défaut. Son achèvement permettrait la connexion des autoroutes belges et françaises et offrirait une alternative à l'emprunt des axes A 1 et A 31, aujourd'hui saturés, dangereux et donc coûteux. Au passage, ce n'est pas contradictoire avec ce que souhaitent un certain nombre de nos collègues : l'achèvement de l'A

24. Certes, le coût n'est pas négligeable, mais c'est un investissement sans commune mesure avec le coût d'un éventuel doublement complet de l'A 1 ou de l'A 31 et les retombées positives énormes qu'on est en droit d'en attendre pour la région et en particulier pour les Ardennes, qui, soit dit en passant, en ont bien besoin, d'autant plus que, sur ce grand projet d'intérêt national, le conseil régional et le conseil général des Ardennes sont prêts à s'engager financièrement bien au-delà des clefs de financement traditionnelles.

Cet investissement devra faire l'objet d'un engagement spécifique de l'Etat en dehors du contrat de Plan, comme vous l'avez fait, monsieur le ministre, pour d'autres grands axes Nord-Sud d'aménagement du territoire, la construction de l'A 75 à travers le Massif central, ou l'aménagement de la RN 10, pour ne citer que ceux-là.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1999

L'ensemble des élus de Champagne-Ardenne attendent de l'Etat une négociation particulière sur ce projet, permettant une programmation pluriannuelle et des engagements réciproques. Ce n'est pas seulement une revendication régionale mais une nécessité nationale permettant d'améliorer la sécurité et de proposer une nouvelle desserte à l'axe Nord-Sud.

Nous comptons sur vous pour que ce dossier fasse l'objet d'une contractualisation spécifique. Du côté des élus nationaux, régionaux, départementaux et locaux et des responsables économiques et syndicaux, sachez que la détermination est grande à voir enfin cet axe achevé dans un avenir proche. Merci de nous dire comment vous envisagez de faire avancer ce dossier. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Jean-Pierre Baeumler.

M. Jean-Pierre Baeumler.

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon intervention portera exclusivement sur les questions touchant à la sécurité routière.

En 1998, 8 312 personnes ont trouvé la mort sur les routes de France. Autant de vies fauchées, de drames humains, de familles brisées. Cette augmentation inacceptable de 4 % du nombre de tués sur la route par rapport à 1997 rompt avec la tendance à la baisse continue depuis le début des années soixante-dix. Si ce chiffre nous a fait douter, dans un premier temps, il nous a surtout signifié qu'il ne fallait pas baisser la garde. Le budget de la sécurité routière pour l'année 2000, en augmentation de 17 %, montre, monsieur le ministre, que telle n'est pas l'intention du Gouvernement et de votre ministère.

Ces morts sur la route sont, en effet, pour partie évitables. L'hécatombe routière n'est pas une fatalité. Depuis vingt-cinq ans, les gouvernements successifs ayant fait de la sécurité routière une priorité nationale, le nombre de tués sur les routes françaises a été divisé par deux, et ce dans un contexte d'intensification de la circulation. Des mesures comme la limitation des vitesses autorisées, l'obligation du port de la ceinture de sécurité, à l'avant comme à l'arrière, le renforcement de la lutte contre l'alcool au volant, l'amélioration des infrastructures ou encore l'instauration du contrôle technique des véhicules ont fait baisser de manière significative le nombre de morts sur la route.

Oui, je le répète, l'hécatombe routière n'est pas une fatalité. La réduction sensible du nombre de tués sur la route cette année n'est sans doute pas étrangère à la détermination dont fait preuve le Gouvernement. Le Premier ministre, Lionel Jospin, a, en effet, déclaré, lors du comité interministériel de sécurité routière tenu le vendredi 2 avril dernier, la sécurité routière grande cause nationale en l'an 2000. « En cinq ans, le nombre de décès sur les routes doit être réduit de moitié », avez-vous affirmé, monsieur le ministre.

Mieux, au-delà des déclarations, le Gouvernement et son ministre des transports se donnent les moyens de cette ambition. Depuis le comité interministériel de sécurité routière du 26 novembre 1997, le Gouvernement a mis en oeuvre une politique globale, cohérente et volontariste de sécurité routière, en intervenant tout autant dans les domaines de l'aménagement du territoire, de l'environnement, de l'éducation et de la santé.

L'adoption en 1998 d'un nouveau dispositif législatif s'inscrit dans cette démarche. Il est à la fois dissuasif, avec la création du délit de grande vitesse, l'instauration de la responsabilité pécuniaire du propriétaire du véhicule en cas d'infraction grave et la mise en place d'un dépistage systématique des stupéfiants pour les conducteurs impliqués dans un accident mortel, et pédagogique, avec le renforcement de la formation des jeunes à la citoyenneté automobile et l'obligation pour les conducteurs novices auteurs d'une infraction grave de suivre un stage de formation.

Peut-être pouvons-nous dès maintenant commencer à tirer les engagements de ces mesures législatives prises il y a quelques mois. Concourent-elles de manière effective à produire de nouveaux comportements routiers, notamment en ce qui concerne la vitesse et le respect du code de la route ? L'impact de la loi sur la sécurité routière sera indéniablement renforcé par la mise en oeuvre des décisions arrêtées par le comité interministériel de sécurité routi ère du 2 avril 1999. Le budget de la sécurité routière pour l'an 2000 confirme et surtout inscrit dans la durée les objectifs du CISR, à savoir développer une politique de communication plus incisive, améliorer la sécurité des infrastructures, moderniser l'exploitation de la route et rendre les contrôles des forces de l'ordre plus efficaces.

Premier objectif : une politique de communication plus incisive.

Le projet de loi de finances pour l'an 2000 va dégager de nouveaux moyens pour les campagnes de communication de la sécurité routière, tant nationales que locales. Le doublement des fonds attribués à la sensibilisation de nos concitoyens par rapport à 1988 constitue un effort sans précédent. Le budget pour 2000 rompt avec les pratiques d'amputations successives que l'on a connues de 1993 à 1997. Ces moyens seront ainsi augmentés de 15 millions de francs. La participation des compagnies d'assurance au financement de ces campagnes, comme c'est le cas en Australie, et l'affectation d'une partie du produit des amendes de police non redistribué permettraient d'en accroître l'ampleur.

Toute politique de sécurité routière passe par l'explication des mesures décidées. Il nous faut continuer à expliquer, en faisant passer des idées simples comme « la conduite dangereuse, ce n'est pas toujours les autres », afin que les comportements sur la route changent. Les campagnes d'information ont un impact sur la population que seuls égalent les contrôles des forces de l'ordre.

La nouvelle campagne de communication initiée par la sécurité routière et projetée cet été à la télév ision est à saluer. Pour la première fois, des images réelles d'accidents interpellent les conducteurs. Les spots de Raymond Depardon adoptent un ton à la fois plus dur et plus direct. Les images choisies frappent les esprits : véhicules accidentés, secouristes et pompiers en action, corps sans vie, témoins en état de choc. La sécurité routière a choisi de visualiser la réalité brutale de l'accident.

L'opération Label Vie, lancée en 1999 et poursuivie en 2000, permettra de démultiplier localement l'impact des campagnes de communication de niveau national. L'appel à projets auprès des jeunes avec la participation de partenaires locaux et associatifs constitue une priorité du budget et je m'en félicite.

Deuxième objectif : améliorer la sécurité des infrastructures.

L es campagnes de sensibilisation, cependant, ne peuvent à elles seules suffire. Le comité interministériel de sécurité routière du 2 avril 1999 a inscrit parmi ses p riorités le contrôle de sécurité des infrastructures.

Cette décision part d'un constat simple : si 95 % des accidents mortels ont pour origine des problèmes de


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comportement, on s'aperçoit aussi que, dans 40 % des cas, l'infrastructure routière intervient comme facteur accidentogène. Le Gouvernement propose d'intégrer de manière systématique, et dès les phases d'étude, la sécurité dans les projets routiers neufs. Je me félicite de cette nouvelle manière de concevoir les projets routiers.

Comme le soulignait déjà le CISR du 26 novembre 1997, l'amélioration de la sécurité des infrastructures passe par l'instauration d'un audit de sécurité pour les nouveaux projets routiers.

Les investissements routiers constituent un volet fondamental de toute politique cohérente de sécurité routière.

C'est ainsi que les sommes allouées à l'amélioration de la sécurité et au traitement des zones d'accumulation d'accidents sont augmentées de 5 %. Troisième objectif : moderniser l'exploitation de la route.

Le fonctionnement et la maintenance des équipements participent de la même manière à la lutte contre l'insécurité routière. Avec une dotation budgétaire de 318 millions de francs, l'exploitation des routes va gagner en efficacité. Ainsi, la mise en conformité des carrefours à feux avec les normes européennes va sauver de nombreuses vies. Les routes seront plus sûres. L'installation dans le cadre du schéma directeur d'exploitation de la route d'un vaste ensemble de matériel comme des postes d'appel d'urgence, des panneaux à message variable ou des caméras va améliorer de manière significative les conditions de circulation de nos concitoyens.

Quatrième objectif enfin : rendre les contrôles des forces de l'ordre plus efficaces et les sanctions effectives.

La pédagogie ne suffit pas, hélas ! La promotion de nouveaux comportements passe aussi par la peur du gendarme. Les usagers de la route changent de comportement s'ils s'attendent à être contrôlés. L'augmentation de 25 % des crédits consacrés aux équipements de contrôle me paraît une mesure de bon sens.

Je voudrais terminer en insistant sur les trois points suivants : Les jeunes de quinze à vingt-cinq ans ont représenté plus du quart des tués et près du tiers des blessés graves en 1998. Comme nous y invitait le CISR du 2 avril 1999, le monde de l'éducation doit trouver une plus grande place dans la lutte contre l'insécurité routière.

L'éducation routière, de la maternelle au lycée, doit permettre de sensibiliser dès leurs plus jeune âge et de manière continue les futurs conducteurs.

Par ailleurs, l'usage de la route fait partie intégrante des cours d'éducation civique. Tout ce qui concourt à la promotion de nouveaux comportements auprès des plus jeunes comme l'objectif de recruter 500 emplois-jeunes est à saluer.

Enfin, il faut impérativement accélérer l'harmonisation européenne des politiques de sécurité routière.

Pour conclure, au-delà des chiffres, la réussite d'une politique de réduction drastique des accidents sur les routes de France passe par la mobilisation de tous. Si chacun s'implique dans cette grande cause nationale, l'impact des campagnes de la sécurité routière sera démultiplié. « Si chacun fait un peu, c'est la vie qui gagne. ». Le

nouveau slogan de la sécurité routière le résume parfaitement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Mme la présidente.

Mes chers collègues, je fais preuve de compréhension à l'égard des orateurs qui ne disposent que de cinq minutes pour s'exprimer, mais le résultat de cette indulgence est que la séance se prolongera au-delà de l'horaire prévu, ce qui ne manquera pas de gêner certains d'entre vous. C'est pourquoi j'invite les deux derniers orateurs à respecter leur temps de parole.

La parole est à Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont.

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont.

Madame la présidente, j'espère que vos propos ne sont pas le signe que vous allez manifester une plus grande sévérité à mon encontre. (Sourires.)

Monsieur le ministre, les champs d'intervention du budget que vous présentez sont très larges. Aussi limiterai-je mon propos au seul volet des transports terrestres.

A cet égard, et de nombreux collègues viennent de le souligner, vos propositions budgétaires confirment votre volonté d'opérer un rééquilibrage en faveur du ferroviaire.

Les moyens du FITTVN sont en effet clairement orientés en ce sens, puisque, pour la première fois, plus de la moitié de ses dotations seront affectées au chemin de fer.

Tout en souscrivant, bien entendu, à votre souci d'une politique plus équilibrée entre les différents modes de transport, je souhaiterais néanmoins, dans le cadre de ce débat budgétaire, appeler tout particulièrement votre attention sur le dossier routier.

Je me félicite, bien sûr, de la hausse significative des crédits consacrés à l'entretien du réseau existant, pour lequel des retards colossaux étaient à déplorer, et plus largement de l'importance des moyens attribués à la sécurité routière, moyens qui visent à traduire dans les faits les décisions du comité interministériel à la sécurité routiè re du printemps dernier.

Permettez-moi, monsieur le ministre, d'insister sur le rôle déterminant des déviations urbaines, non seulement pour l'environnement, mais aussi pour la sécurité. Il n'est plus tolérable que, à l'aube du

XXIe siècle, certaines villes aient encore à subir en leur coeur même un transit croissant,...

M. Michel Bouvard.

Très juste !

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont.

... tout particulièrement lorsqu'il s'agit d'un trafic international de poids lourds.

M. Michel Bouvard.

Très juste !

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont.

Je pense, bien sûr, au premier chef, au contournement de Bellac, mais bien d'autres villes sont dans la même situation.

M. Michel Bouvard.

C'est le cas de Chambéry !

M. Jean-Pierre Baeumler.

Pensez aussi à la RN 66 !

M me Marie-Françoise Pérol-Dumont.

Aussi me semble-t-il impératif que les aménagements nécessaires pour construire les déviations en question soient également pris en compte comme relevant de la sécurité. Je sais que vous êtes très sensible à ce problème, monsieur le ministre.

Pendant des décennies, entretien et sécurité ont été négligés ou au mieux sous-évalués. On mesure aujourd'hui l'importance du sinistre qui était en préparation, et il est évident que les sommes à mobiliser sont considérables. Vous vous êtes saisi de ce problème, monsieur le ministre, il convient de vous en donner acte.

Pour autant doit-on se limiter à cette seule perspective ? A mon sens, non ! C'est pourquoi je ne peux manquer, de vous faire part de mon inquiétude, partagée je crois, par de nombreux collègues, face à la baisse sensible de l'enveloppe affectée aux routes dans les prochains


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contrats de plan.

(« Très juste ! » sur divers bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

L es investissements routiers ont parfois mauvaise presse, et j'ai bien conscience que d'aucuns considèrent qu'ils coûtent chers et dispensent d'avoir des idées neuves - entendons par-là des idées moins budgétivores. Cependant, il faut avoir l'honnêteté de regarder les choses en face.

M. Michel Bouvard.

Très bien !

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont.

Le recensement de 1999, dont on est en train de nous livrer les résultats, démontre de façon éclatante que des zones pourtant fragiles du territoire national ont pu enrayer leur déclin démographique dès lors qu'elles étaient devenues plus facilement accessibles...

M. Michel Bouvard.

Voilà !

M me Marie-Françoise Pérol-Dumont.

... et que, a contrario, celles qui restaient fortement enclavées s'enfonçaient dans la spirale de la déprise. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Loin de moi, monsieur le ministre, l'idée de dire que les infrastructures créent à elles seules du dynamisme et de l'activité économique, mais force est de constater qu'elles y contribuent grandement !

M. Michel Bouvard.

Il faudra le dire à Voynet !

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont.

Il ne s'agit pas de faire de la voirie autoroutière la panacée comme cela a pu être le cas de façon totalement excessive par le passé, mais bien de corriger des déséquilibres patents et de mettre à niveau certains territoires qui ont depuis trop longtemps l'impression de subir des vexations en cascades et qui, à l'heure de l'Europe, ne peuvent plus accepter de rester coupés des grands courants d'échanges, qu'ils soient routiers ou ferroviaires.

Ainsi, monsieur le ministre, la sélectivité des tracés, les choix d'itinéraires doivent-ils obéir à des critères incontestables sur lesquels pourront s'organiser des arbitrages en faveur du long terme et en parfaite cohérence avec les besoins réels de l'aménagement du territoire.

En ce sens, il convient de donner la priorité aux projets revendiqués de concert par plusieurs régions et assurant la continuité de grands axes de gabarit européen. En outre, il serait vain de préconiser la mise en réseau de villes moyennes comme une solution de rechange à l'hypermétropolisation si ces villes ne sont pas reliées par des infrastructures routières dignes de ce nom ! A l'évidence, monsieur le ministre, le volet routier des contrats de plan ne saura être à la mesure des besoins, et il convient, me semble-t-il, d'ouvrir très rapidement d'autres perspectives.

Le financement d'investissements lourds en matière routière ne pourrait-il faire une plus large place à l'emprunt, tant il est vrai qu'emprunter pour investir n'est pas de mauvaise gestion, mais bien au contraire revient à préparer l'avenir, surtout dans un contexte de taux historiquement bas comme celui que nous connaissons ? De surcroît, l'état de nos finances publiques, magistralement remises en ordre en deux ans et demi (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) et chacun sait pourtant d'où nous sommes partis - doit aujourd'hui nous offrir l'opportunité d'une nouvelle donne en matière routière.

Pour conclure, monsieur le ministre, permettez-moi aussi de souhaiter que les fonds européens, dont chacun déplore à ce jour la sous-consommation ou le mauvais ciblage, fassent davantage de place aux grands travaux d'infrastructures.

M. Michel Bouvard.

Très bonne idée !

M me Marie-Françoise Pérol-Dumont.

Les finances européennes ne s'en porteraient pas plus mal, la consommation des crédits serait plus satisfaisante, les contrôles des juridictions des comptes seraient plus faciles - et plus pertinents. Je suis de surcroît persuadée que l'Europe n'y perdrait pas en crédibilité, et il me semble, qu'elle en a quelque peu besoin. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Mme la présidente.

A quelques secondes près, vous avez prouvé, madame Pérol-Dumont, que l'on pouvait respecter un temps de parole de cinq minutes.

(Sourires.)

La parole est à M. Jean Launay.

M. Jean Launay.

Monsieur le ministre, vous avez, en commission de la production et des échanges, présenté le bilan du dernier conseil des ministres européens des transports. Deux des thèmes qui y ont été évoqués - la réduction du temps de travail dans les transports routiers et l'interdiction de circuler le week-end - sont importants et directement liés à l'avenir du transport ferroviaire.

Mon intervention portera donc sur ces thèmes.

Si l'étape de la libéralisation totale, adossée à la notion de clients autorisés, n'a pas été franchie, vous avez néanmoins reconnu vous-même, le 12 octobre dernier, que

« la partie était loin d'être gagnée ».

La gagner, cela signifierait : obtenir une interopérabilité des réseaux, faire circuler des trains de bout en bout sur un réseau européen dédié au fret, chaque pays devant affréter des voies au transport des marchandises, strictement ou prioritairement par rapport au transport des voyageurs.

Je crois qu'il est souhaitable de réaliser cet objectif.

Mais comment y parvenir puisque le transport ferroviaire part avec le handicap a priori de n'être rentable que sur une longue distance, qu'il nécessite des infrastructdures plus lourdes que le transport routier et qu'il ne permet pas le porte-à-porte ? A mon sens, il ne sera possible d'y parvenir qu'à une double condition : d'une part, régler enfin la question du temps de travail des routiers, car ce point conditionne la faiblesse des coûts internes pour la route ; d'autre part, mettre en place une véritable application du principe

« pollueur - payeur ». En effet, le transport routier n'intègre jamais dans ses coûts la pollution qu'il engendre : on a même, dans la loi de finances de 1999, remboursé aux transporteurs routiers l'augmentation du prix du diesel ! Dans le même temps, la SNCF paye pour le fret ferroviaire un péage d'infrastructure à Réseau Ferré de France, alors que le transport routier, lui, n'a jamais participé au coût de l'infrastructure routière, que, pourtant, il dégrade six fois plus que les voitures particulières !


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Pour illustrer mon propos, je souhaite, monsieur le ministre, vous citer un exemple, un mauvais exemple : celui des conditions de réception et d'expédition des traverses bois par les ateliers SNCF de Bretenoux-Biars, situés dans la circonscription dont je suis l'élu.

Ce seul et dernier chantier de traverses bois est un établissement industriel de la SNCF qui emploie 130 personnes. Jusqu'en 1993, ces ateliers SNCF recevaient et expédiaient les traverses uniquement par wagons. Depuis cette date, prétextant des difficultés d'approvisionnement,...

M. Marc-Philippe Daubresse.

La faute à qui ?

M. Jean Launay.

... dues à la fermeture de nombreuses gares et triages, l'entreprise nationale a commencé à recevoir des traverses par la route.

M. Marc-Philippe Daubresse.

C'est à cause des grèves à répétition !

M. Jean Launay.

En 1998, pour la première fois, le trafic « entrées » par la route a supplanté le trafic

« entrées » par le rail - 35 000 tonnes sur 67 000 tonnes -, ce qui représente plus de 1 300 camions sur une année.

Dans le même temps, de 1994 à 1998, les ateliers magasins expédiaient, par fer uniquement, entre 62 000 et 69 000 tonnes de bois traités.

Aujourd'hui, le processus engagé pour les expéditions ressemble étrangement à celui mis en oeuvre en 1993 pour les réceptions : on vient d'annoncer, il y a une quinzaine de jours, la prétendue nécessité de transporter par la route 2 500 traverses, soit dix camions, à destination de l a plate-forme multimodale de Bordeaux-Hourcade.

Certes, aucune voie ferrée ne permet une livraison directe sur ce chantier, mais, dans le cadre de la complémentarité entre les deux modes de transport, ne peut-on envisager qu'entre Bretenoux-Biars et Bordeaux, la plus longue distance, l'acheminement se fasse par le train ? Vous le voyez, monsieur le ministre, pour ce qui est de son réseau profond et transversal, la SNCF ne montre pas le bon exemple en matière d'aménagement du territoire.

Notre collègue Gilbert Biessy en appelait d'ailleurs tout à l'heure au changement des mentalités, y compris à la SNCF.

J'ajoute que les ateliers magasins payent le tarif fort, comme un client occasionnel, ce qui ne va pas du tout dans le sens d'un rééquilibrage des transports de marchandises au profit du ferroviaire.

Si les arbitrages d'une entreprise normale se font en faveur de la route et si ceux de la SNCF se font dans le même sens, comment peut-on espérer un rééquilibrage en faveur du rail ? L'objectif que vous avez fixé de doubler en dix ans le volume de marchandises transportées par la voie ferrée est-il suffisant ? Où sont les chances du fret ferroviaire si les moyens accordés aux opérateurs ne sont pas suffisants pour entraîner une intermodale ? Relayant les interrogations que notre rapporteur JeanJacques Filleul a formulées lors de votre audition devant la commission de la production et des échanges, monsieur le ministre, je souhaite connaître le montant du FITTVN qui sera consacré au fret ferroviaire, et plus précisément celui de l'aide que l'Etat accorde à la SNCF au titre du développement du transport combiné.

Deux trains desservent chaque jour les ateliers de Biarssur-Cère, mais le nombre de leurs wagons diminue ! Au-delà de cet exemple symbolique des traverses, c'est non seulement la question de l'avenir de la gare ellemême et de la ligne Brive-Aurillac qui est posée, mais aussi celle d'un véritable rééquilibrage entre les modes de transports. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

A la demande du Gouvernement, je vais suspendre la séance une dizaine de minutes. Elle reprendra aux environs de dix-neuf heures.

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures cinquante, est reprise à dix-neuf heures dix.)

Mme la présidente.

La séance est reprise.

La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Madame la présidente, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les députés, c'est la troisième fois qu'a lieu ce rendez-vous de présentation et de discussion du budget de mon ministère. Une fois de plus, je constate la qualité et la richesse des rapports présentés. Je veux en remercier sincèrement les auteurs, JeanLouis Idiart, Jean-Jacques Filleul, Gilbert Gantier, François Asensi, Guy Lengagne et André Capet, même si, sur certains points, l'opinion du Gouvernement peut être différente de la leur.

Cette présentation me donne l'occasion de faire un bilan et de tracer des perspectives.

J'essaierai de répondre à l'ensemble des orateurs qui se sont exprimés sur des sujets d'ordre général. S'agissant des problèmes plus particuliers, je n'y répondrai pas maintenant, afin de ne pas allonger mon intervention, mais dans la soirée.

L'ensemble des crédits disponibles pour mon département ministériel, toutes catégories et toutes sources confondues, s'élève à plus de 147 milliards de francs.

L'augmentation est de 2,5 % par rapport à 1999, soit près de trois fois le taux de progression moyen des dépenses de l'Etat, qui est de 0,9 %.

Si l'on rattache à ces 147 milliards de francs la dotation de 12 milliards de francs à Réseau ferré de France et les crédits du FARIF, qui ont été budgétisés pour 2000, on arrive à un volume de crédits disponibles de l'ordre de 162 milliards de francs.

Enfin, si j'ajoute les crédits supplémentaires que le Gouvernement propose par amendement pour compenser l'assujettissement à la TVA de la dotation à RFF et tenir compte de la modification du régime de surcompensation de la CNRACL, ce sont environ 165 milliards de francs qui sont disponibles. Je me demande, monsieur Bouvard, comment vous faites pour considérer que ce budget est en diminution.

Je ne dirai rien des budgets du logement et du tourisme puisque les secrétaires d'Etat chargés de ces questions, Michelle Demessine et Louis Besson, vous en feront prochainement une présentation spécifique, ce dernier dans le cadre de la procédure simplifiée mise en oeuvre cette année en commission des finances.

J'évoquais devant vous, il y a un an, la crise des grands ensembles urbains, marquée notamment par la ségrégation sociale et spatiale, et ma volonté, comme celle du Gouvernement, de faire progresser dans les villes la mixité, l'échange, le partage et - pourquoi pas ? -


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1999

l'urbanité, partie intégrante de notre idéal républicain de fraternité. A cet effet, j'ai entrepris avec Louis Besson, au printemps dernier, un débat dans six villes différentes, auprès des élus et de leurs habitants, sur la façon dont ils vivent la ville, dont ils la perçoivent, et sur les améliorations qu'ils voudraient voir se réaliser.

A la demande de M. le Premier ministre, et dans l'esprit de l'intervention de M. Yves Cochet, un projet de loi concernant la rénovation et la solidarité urbaines est en cours de préparation. Il sera présenté prochainement.

Il est au coeur des objectifs du Gouvernement pour cette seconde partie de la législature.

M. Yves Cochet.

Très bien ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Nous devons retrouver une vision plus cohérente et plus globale de l'urbanisme, de l'habitat et des déplacements, et mettre en place des outils et des procédures permettant des politiques globales, au lieu de la superposition de politiques sectorielles qui a caractérisé les décennies d'après-guerre.

Nous ne pouvons nous satisfaire d'une évolution qui a amené certains quartiers à être marginalisés dans la ville, alors qu'ils doivent être, comme les autres, vivifiés, aménagés, desservis et protégés.

Pour que la liberté de circuler soit compatible avec la qualité de l'environnement, il faudra aussi une approche plus intégrée des outils de déplacement - usage et partage de la voirie, politiques de stationnement et des transports collectifs -, avec la montée en puissance d'autorités organisatrices des déplacements urbains.

C'est dans les grandes agglomérations que le choix d'un développement accru des transports collectifs est particulièrement décisif pour maintenir l'échange et la solidarité dans la ville, en même temps qu'il constitue un choix rationnel sur le plan économique et environnemental.

Dans cet esprit, j'ai le plaisir de faire remarquer à M. Yves Cochet que le budget 2000 marque une nouvelle avancée en faveur des transports collectifs.

Ainsi, pour l'Ile-de-France, les autorisations de programme progressent de 36 % et s'élèvent à 470 millions de francs. Ces crédits permettront de bien commencer la première année du contrat de plan, avec des opérations de qualité des services et des opérations de développement, comme la prolongation de Météor jusqu'à Saint-Lazare. Mais je pense aussi aux tangentielles, aux prolongations du métro, aux bus en site propre et aux tramways.

M. Jean-Pierre Blazy.

C'est important ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Pour les agglomérations de province, les autorisations de programme s'élèvent à près de 750 millions de francs, ce qui représente, sur les trois derniers budgets consécutifs, une progression de 37 %, que M. Biessy a soulignée. Les opérations portent essentiellement sur onze projets en cours de réalisation, soit huit projets de tramway à Montpellier, Nantes, Orléans, Grenoble, Strasbourg, Lyon, Bordeaux et Valenciennes, et trois projets de métro, à Lille, Toulouse et Rennes. Au total, 175 kilomètres de voies de transports collectifs sont à ce jour pris en considération.

Mais on ne peut pas à la fois investir et encourager les transports en commun et laisser se dégrader la sécurité, ce point a été souligné par plusieurs intervenants. C'est pourquoi une attention particulière a été portée à la réh umanisation des réseaux de transports, soit par redéploiements d'effectifs, soit par de nouveaux recrutements, notamment par la biais d'emplois-jeunes.

Sur les réseaux d'Ile-de-France, 4500 agents supplémentaires seront mis au contact du public entre 1998 et 2000.

En province comme dans la région parisienne, des équipements de veille et de protection sont installés. Je rappelle par ailleurs que la loi a décidé que les peines en cas d'atteinte aux agents des entreprises de transport public seraient aggravées.

Monsieur Idiart, monsieur Biessy, vous avez, avec d'autres, souhaité l'extension aux transports collectifsde l'avantage fiscal sur le carburant accordé au transport routier de marchandises. Je suis, vous vous en doutez, très ouvert à une telle proposition, qui est actuellement à l'étude.

J'en termine avec l'organisation des déplacements par la réforme, en cours, du syndicat des transports parisiens.

M. Yves Cochet.

Il était temps ! Très bien ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Elle prévoit l'entrée de la région au conseil d'administration du STP, avec cinq administrateurs, soit autant que la ville de Paris. En outre, les rapports entre l'Etat, le STP, les collectivités territoriales et les entreprises de transport - RATP, SNCF - seront contractualisés. Il s'agit d'un enjeu important puisque l'Etat apporte, dans le projet de lois de finances pour 2000, une indemnité compensatrice de 5,4 milliards au fonctionnement des transports collectifs franciliens.

C'est un objectif d'efficacité économique et social qui est au coeur de notre démarche. Bien entendu, le statut des entreprises de transport et de leurs agents sera maintenu.

M. Jean-Claude Lefort.

Bravo ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Les priorités du budget de 2000 sont en cohérence avec la préoccupation consistant à développer des modes de déplacement de qualité, sans pour autant sousestimer les problèmes qui se posent en ce qui concerne tant l'interurbain que le monde rural.

Les possibilités offertes par ce budget me permettent d'indiquer trois grandes orientations autour desquelles s'ordonnent les politiques conduites par mon ministère et qui permettent de les comprendre : La sécurité, et en premier lieu, la sécurité des déplacements ; L'investissement et je puis affirmer que nous aurons commencé, en 2000, à reconstituer les moyens d'investissement, en liaison avec la dynamique des contrats de plan ; La solidarité et l'emploi, au sein du ministère et comme résultante des politiques conduites en faveur de l'emploi, notamment dans le BTP.

J'insisterai sur quelques élements de cadrage qui influent sur les politiques de transport que mène le Gouvernement. Ils tiennent, à ce stade de mon intervention, en trois mots : la géographie, l'Europe et le partenariat.

La géographie est contraignante. La France est un pays de transit, et cette réalité façonne les flux touristiques et de marchandises qui traversent notre pays. Elle influe aussi sur les propositions que j'ai faites à Bruxelles.

L es questions communautaires et européennes p rennent une importance croissante dans tous les domaines, qu'il s'agisse du contentieux, de la préparation


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1999

des directives communautaires ou de la recherche des financements européens. La question européenne a surt out progressé sur les aspects « marché intérieur » : concurrence et liberté de circulation. Il faut aller plus loin et faire progresser au même rythme, au nom même de l'efficacité de nos entreprises, publiques et privées, l'harmonisation sociale par le haut et l'harmonisation fiscale dans l'espace européen.

M. Jean-Jacques Filleul, rapporteur pour avis.

Tout à fait !

M. Jean-Claude Lefort.

Très bien ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du l ogement.

L'ensemble des décisions d'infrastructures s'inscrit désormais dans une politique de partenariat avec les collectivités territoriales, que ce soit dans le cadre des contrats de plan ou dans un partenariat de projet hors contrat de plan. Les contraintes budgétaires, et surtout de nouvelles règles de financement destinées à éviter le surendettement des entreprises publiques, expliquent cette évolution. Je pense essentiellement à RFF - auparavant, le développement du réseau ferroviaire n'était financé que par le surendettement de la SNCF - ainsi qu'aux sociétés concessionnaires d'autoroutes. Avec les décisions concernant le TGV-Est européen, les règles du jeu sont désormais plus claires pour tout le monde.

A ce propos, je tiens à répondre à ceux d'entre vous qui ont souhaité une évolution dans les modes de financement. En juillet dernier, le Gouvernement a décidé d'élargir l'utilisation des fonds d'épargne au financement de certaines dépenses d'intérêt général. Ainsi, pour des investissements de très longue durée d'amortissement, les maîtres d'ouvrage pourront avoir recours à des prêts à trente ou quarante ans, à faible coût. J'espère que ce dispositif pourra accompagner les futurs contrats de plan.

J'aborde maintenant le thème de la sécurité, en premier lieu de la sécurité routière. Vous êtes nombreux à avoir insisté sur ce point, notamment M. Jean-Pierre Baeumler et M. Gilbert Biessy. Je partage votre souci. On peut affirmer que cette dimension est réhabilitée dans le budget avec un accroissement de ses moyens de 17 %, soit 530 millions de francs.

Ce budget permet de renforcer les actions de communication menées aux niveaux national et local, avec une hausse de 50 % des crédits qui leur sont consacrés. Cet effet sera amplifié en 2000, puisque la sécurité routière sera proclamée « grande cause d'intérêt national ».

Il me semble en effet important de responsabiliser tous les usagers de la route quant à la réalité des accidents et aux drames humains que dissimulent les statistiques ; M. Baeumler a insisté sur ce point. L'engagement plus fort de l'Etat doit accompagner une motivation plus importante de tout le corps social pour lutter contre la fatalité de l'insécurité routière.

Les crédits consacrés à la formation des conducteurs seront en augmentation de 17 millions, pour atteindre 55 millions de francs. Ils permettront notamment d'assurer un meilleur contrôle de la formation et du fonctionnement des auto-écoles et de recruter trente inspecteurs du permis de conduire supplémentaires.

Ma réflexion en matière de sécurité a été marquée, vous vous en doutez, par les différents drames survenus en France ces dernières années naufrage d'un chalutier au large de Camaret, passage à niveau de Port-Sainte-Foy, tunnel du Mont-Blanc, etc -, mais aussi par les catastrophes à l'étranger comme celle des chemins de fer au Royaume-Uni ou le récent crash aérien aux Etats-Unis.

Ces événements mobilisent les opinions publiques et obligent à infléchir l'action publique.

Pour éviter que de tels drames ne se produisent, nous devons mettre en place de nouveaux moyens d'intervention. Ainsi, un effort particulier sera engagé en 2000 dans le domaine des ouvrages d'art tunnels et ponts - avec des programmes spéciaux de mise en sécurité des tunnels routiers et ferroviaires financés sur le fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables.

J'aurais d'ailleurs prochainement l'occasion de faire une communication à ce sujet au conseil des ministres. Enfin, les aménagements de sécurité sur la voirie nationale seront dotés de 200 millions de francs d'autorisations de programme, en progrès de 5 % par rapport à 1999.

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont.

Très bien ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

La sécurité dans les transports, ce n'est pas seulement la route.

En mer et dans les ports, la priorité est aussi donnée à la sécurité. Celle-ci est de la responsabilité éminente de l'Etat. Les moyens de paiement en matière de sécurité en mer sont augmentés de 14 %, passant à 137 millions.

M. Daniel Paul.

Très bien ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Les centres de surveillance et de sauvetage CROSS - pourront ainsi assurer de nouvelles obligations de service en matière de veille de la fréquence radio au large, de diffusion des avis urgents aux navigateurs ou d'aide médicale en mer. Le plan de professionnalisation de ces centres sera poursuivi pour une plus grande sécurité. Il prévoit notamment le remplacement des appelés par des engagés.

La modernisation des phares et balises, engagée en 1998, se poursuit au bénéfice, en 2000, du Havre,

M. Daniel Paul sera certainement satisfait...

M. Daniel Paul.

Merci, monsieur le ministre.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

... de Dunkerque et de Brest. Il permettra de financer la construction de deux bateaux de travaux à Dunkerque et Ouistreham.

M. Lengagne et M. Capet ont déploré la baisse d'un million de francs de la subvention à la Société nationale de sauvetage en mer. Cela ne doit pas masquer l'effort considérable engagé en faveur de la sécurité en mer.

Cependant, je puis vous annoncer qu'en accord avec

M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et du budget, je viens d'obtenir le rétablissement du million manquant dans le cadre du collectif 1999.

(« Très bien ! » et applaudissements sur tous les bancs.)

Ainsi, la subvention d'équipement de la SNSM sera maintenue à 9,7 millions de francs.

Dans le domaine aérien, la croissance du trafic pose - M. Blazy et M. Cochet, notamment, l'ont dit - de redoutables problèmes d'adaptation et de croissance des moyens pour maintenir le haut niveau de sécurité qui caractérise l'aviation civile française et européenne. J'y reviendrai.

Quelques mots maintenant sur la capacité retrouvée de ce ministère en matière d'investissement. Il est de notre responsabilité de préparer l'avenir et d'engager dès maintenant les opérations qui verront le jour au cours du

XIIe plan, en concertation et en partenariat avec les collectivités territoriales.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1999

Notre ministère, vous le savez, est le premier ministère civil par la taille de ses investissements directs, ce qui donne la mesure de nos responsabilités dans l'aménagement de la France et de son économie.

En écoutant tout à l'heure M. Daubresse, il m'a semblé entendre le catalogue des infrastructures promises par les précédents gouvernements et non financées.

(« Très juste ! » sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

M. Jean-Jacques Filleul, rapporteur pour avis.

C'est vrai ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Il est possible que la difficulté à discerner les orientations à long terme de notre gouvernement soit tout simplement due à l'effet de rémanence de la politique de mes prédécesseurs qui empêche de saisir ce qui a changé depuis deux ans.

M. Daniel Paul.

Très juste ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Depuis 1998, les dépenses en capital - les crédits d'investissements - en ce qui concerne l'équipement et les transports ont connu une augmentation de 5,7 % par an en moyenne. Pour 2000, les autorisations de programme progressent de 8,1 %, pour atteindre 15,3 milliards de francs.

Certains ont évoqué la baisse des crédits de paiement.

Je leur rappellerai qu'à mon arrivée il y avait un retard de 3 milliards de francs sur ces crédits.

M. Michel Bouvard.

Cela date un peu ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Retard qu'il a bien fallu rattraper ! (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

L'an dernier encore, nous avons été amenés à rattraper encore 800 millions de francs de retard de crédits de paiement. Dans ces conditions, la baisse de 11 % prend une autre signification. D'autant que c'est la correspondance entre crédits de paiement et autorisations de programme qui importe dans une politique budgétaire saine, vous le savez mieux que moi. Or, une fois cette donnée prise en compte, la baisse n'est plus de 11 %, mais de 4 %. Vous me direz que c'est encore trop. Eh bien, je vous annonce que j'ai obtenu l'accord du ministère de l'économie et des finances...

M. Francis Delattre.

C'est le Père Noël ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

... pour que soient inscrits 300 millions de francs supplémentaires dans le collectif de fin d'année .

Là encore, c'est une marque de la détermination du Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Jean-Claude Lefort.

Bravo ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

J'en viens aux réductions fiscales destinées à aider le secteur du logement. Elles s'élèvent à 28 milliards de francs. Vous en connaissez le détail : réduction du taux de TVA à 5,5 % sur les travaux d'entretien, suppression en deux ans du droit de bail, nouvelle baisse du droit de mutation. Ces mesures apporteront plus d'équité dans la situation des locataires - je pense aux 9 millions de ménages locataires du privé ou du public qui verront baisser le montant de leur quittance, ce qui n'était jamais arrivé -. De plus, elles contribueront à l'investissement dans le logement social, et surtout à une baisse du chômage.

Après six années de recul de l'activité, 1998 a été l'année de la reprise dans le bâtiment et les travaux publics. Au deuxième trimestre 1999, la croissance a été de 5,7 %. En 1999, l'effectif salarié du secteur pourrait progresser d'environ 40 000 emplois, ce qui rend nécessaire une politique de recrutement et de formation exceptionnelle. Je vais ainsi engager des discussions avec les professionnels du bâtiment, mais aussi avec ceux de l'éducation et de la formation. A tous ceux qui veulent travailler, nous devons proposer le principe suivant : « Si tu sais, on te prend ; si tu ne sais pas, on t'apprend. Mais on se débrouille pour qu'on puisse travailler dans un secteur qui a actuellement besoin d'emploi. »

L'amélioration concerne le bâtiment, avec une forte hausse des constructions de logements, mais aussi les travaux publics. Si ce secteur a perdu des emplois en 1998, et davantage encore les années précédentes, la tendance est aujourd'hui au redressement, même si, il faut le reconnaître, elle est encore modeste.

J'en arrive aux principaux modes de transports. Au fur et à mesure des progrès de notre économie, la demande de déplacements s'accroît. Nous devons répondre à cette demande par la création d'infrastructures nouvelles, bien sûr, mais aussi par une meilleure utilisation des réseaux existants. Il faut tirer parti des avantages de chacun des modes de transports, en assurant leur complémentarité et en opérant les rééquilibrages nécessaires au profit du transport ferroviaire et de la voie d'eau, contribuant ainsi à améliorer la sécurité et à minimiser les impacts environnementaux.

M. Yves Cochet.

Très bien ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Comme pour le BTP, la conjoncture économique et sociale dans le secteur des transports est plus favorable aujourd'hui. Les transports terrestres de marchandises sont en progression de plus de 5 % par rapport à l'année dernière, et l'activité des ports français progresse en moyenne de 6,5 % pour les marchandises en conteneurs.

En ce qui concerne les transports de voyageurs, contrairement à ce qui a été dit tout à l'heure, les transports collectifs urbains d'Ile-de-France voient leurs résultats progresser de 3 à 4 %, et l'activité de la SNCF se maintient à son niveau de 1998, qui était déjà élevé.

Dans le transport aérien, la croissance se poursuit et Air France progresse sensiblement : + 15 % pour le transport international, + 9 % pour le transport intérieur. Une nouvelle fois, les augures qui avaient prédit un déclin inéluctable d'Air France parce que l'entreprise publique n'avait pas été privatisée, se sont trompés.

M. Jean-Jacques Filleul, rapporteur pour avis.

Oui, mais M. Bussereau est parti.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

La croissance nous oblige, d'un autre côté, à mener une politique active pour prévenir les conséquences néfastes sur la sécurité et l'environnement des riverains. Les pouvoirs publics se doivent d'anticiper sur les évolutions à venir. Des choix volontaires, notamment dans le transport de marchandises, sont nécessaires pour préserver la part du trafic des transports ferroviaires et fluviaux et éviter la saturation des axes routiers. Le budget porte la marque de ce choix éminemment politique de rééquilibrage.

Dans le secteur ferroviaire, la volonté du Gouvernement de renforcer la progression des capacités d'investissement de Réseau ferré de France est clairement confirmée.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1999

La consolidation financière de RFF se poursuit, avec une dotation en capital de 12 milliards de francs en 2000.

Elle participe de l'engagement pris d'apporter à l'établissement public 37 milliards supplémentaires en trois ans, pour stabiliser l'endettement. Monsieur Bouvard, je ne suis pas certain que vous ayez bien suivi les déclarations que j'ai faites au cours de l'année à propos des investissements de RFF : j'ai indiqué qu'il était bien en mesure d'investir près de 12 milliards de francs par an, tout en stabilisant son endettement.

Quant aux crédits du FITTVN consacrés aux transports ferroviaires et combinés, ils augmentent fortement avec 2,3 milliards de francs - c'est le double de la dotation de 1997. Ces sommes permettront de subventionner les investissements neufs sur les lignes à grande vitesse mais aussi de moderniser le réseau classique et de développer le fret ferroviaire et le transport combiné.

J'ai fixé l'objectif ambitieux et pourtant nécessaire de doubler le volume des marchandises transportées par la voie ferrée au cours des dix prochaines années - il faudra aller plus loin -...

M. Michel Bouvard.

Il s'agit d'un simple maintien des parts de marché ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

... mais aussi de le multiplier par quatre dans les zones sensibles comme les Alpes et les Pyrénées - j'ai eu l'occasion d'en parler avec M. Michel Bouvard. Cela implique un développement du fret ferroviaire beaucoup plus soutenu que dans le passé ainsi qu'une mobilisation de tous les acteurs.

Monsieur Launay, en réponse à votre question, je vous informe que la subvention au transport combiné en 2000 sera de l'ordre de 500 millions de francs, soit un quasidoublement.

Au conseil des ministres européens des transports du 6 octobre, la France n'a pas ménagé sa peine pour que soient adoptées, au petit matin, des conclusions plus conformes à nos positions. Au rebours d'une libéralisation forcenée prônée par certains, et reprise ici par M. Bussereau et M. Delattre, ces conclusions préparent une ère nouvelle pour le développement du fret et du chemin de fer en Europe. Beaucoup de travail reste à faire d'ici au p rochain conseil des ministres des transports le 10 décembre. Je souhaite que les propositions de la France en matière de réseau européen de fret ferroviaire, d'interopérabilité et de décongestion de certaines lignes soient entendues. Le développement du fret ferroviaire de transit dans l'espace européen doit se faire par la voie qui convient le mieux à chacun des Etats. Nous n'avons pas à faire de ce problème un débat idéologique et dogmatique.

Que ceux qui veulent libéraliser, libéralisent ; pour notre part, nous préférons la coopération et la réciprocité.

Lors de ce même conseil européen, la France a déposé auprès de la Commission un mémorandum sur le transport dans les Alpes, après la catastrophe du Mont-Blanc.

Ses propositions ont été accueillies favorablement par plusieurs Etats et la Commission a entrepris une réflexion sur la sécurité dans les tunnels.

Concernant les traversées alpines, monsieur Bouvard, monsieur Daubresse, monsieur Biessy, la détermination du Gouvernement se traduit également par des actes : l'accent a été mis sur des expérimentations en matière de ferroutage. Par ailleurs, pour la liaison Lyon-Turin, j'ai annoncé tout récemment au sommet franco-italien de Nîmes avec mon homologue italien, M. Treu, qu'en plus des prospections géologiques, les études préalables allaient être accélérées, y compris pour les galeries de reconnaissance. Nous devons nous retrouver au mois de mars : nous entendons avancer le plus rapidement possible, en particulier sur le financemement et les moyens de réalisation, sans attendre le moment où la décision finale sera prise, à l'automne 2000, lors du prochain sommet francoitalien.

Le système ferroviaire français aura connu en trois ans de grandes transformations. Pour éclairer ces évolutions, et garantir l'unicité du secteur public ferroviaire, j'ai souhaité la mise en place d'une structure nouvelle d'étude et de propositions, à laquelle est associé le Parlement : le Conseil supérieur du service public ferroviaire. A ceux qui semblent regretter qu'elle comporte trop de syndicalistes, je rappellerai que ceux-ci contribuent aussi à l'unicité et à la défense du service public.

Le Conseil a commencé à travailler sous l'autorité de son président, Jean-Jacques Filleul, votre rapporteur pour avis. Son programme est déjà très chargé puisqu'il doit prochainement lancer les états généraux du fret ferroviaire européen. Il aura également à donner un avis sur la généralisation de l'expérimentation en matière de services régionaux de voyageurs. Le dispositif permettant le transfert de compétence de ces services aux régions devrait être intégré dans le projet de loi sur l'urbanisme, l'habitat et les déplacements évoqué il y a quelques instants.

Au-delà de ce rééquilibrage modal, le premier poste d'investissement de ce ministère est celui des infrastructures routières. Au cours des huit premiers mois de cette année, on a enregistré une progression du trafic de 4,2 % sur les routes nationales et de 6 % sur les autoroutes.

De réels problèmes de sécurité et d'environnement sont posés. Pour y faire face, je propose d'agir dans plusieurs directions : une bonne maintenance des infrastructures, une action forte pour améliorer les comportements des usagers, une rationalisation de l'usage de la voirie en ville et une politique volontariste en faveur de l'intermodalité des transports.

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont.

Très bien ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Les moyens d'engagement pour les routes - dépenses ordinaires, autorisations de programme et comptes d'affectation spéciale pris ensemble - destinés aux travaux neufs ou d'entretien s'établissent à 8,6 milliards, soit une hausse de 5 %. Les négociations des contrats de plan avec les régions ont révélé la permanence d'une forte exigence d'amélioration, de sécurisation et de poursuite de la modernisation du réseau routier. Nous pourrons faire face aux futurs engagements du XIIe plan, avec pour 2000, une enveloppe de 3,6 milliards de francs d'autorisations de programme. Il s'agit là d'une croissance très importante - + 17 % - qui permettra de lancer un plus grand nombre d'opérations et de tenir les engagements de l'Etat sur la durée du plan dès lors que ce rythme est maintenu, voire développé, dans les projets de loi de finances suivants.

A deux reprises, il a été souligné que, pour le XIe plan, l'enveloppe s'élevait à 27 milliards, alors que dans le présent budget, la première enveloppe n'était que de 21 milliards. Mais la vérité m'oblige à dire qu'entre les promesses et la réalité il y a eu un fossé, car seulement 23,5 milliards ont été effectivement dépensés !

M. Jean-Jacques Filleul, rapporteur pour avis.

Eh oui ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Pour que vous disposiez de l'ensemble des éléments, j'ajoute qu'avec les sommes prévues dans le cadre


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1999

des contrats de plan et les crédits hors contrats de plan, et sans même parler de la deuxième enveloppe, nous parvenons d'ores et déjà à des montants équivalents à ceux dépensés dans le précédent contrat de plan.

Par ailleurs, les grandes opérations de désenclavement du Massif central que sont l'autoroute A 75 ClermontFerrand Béziers, la liaison à l'autoroute A 9, et la RN 7 entre Nevers et Roanne ainsi que les travaux de mise en sécurité de la RN 10 dans les Landes seront poursuivis. Il en sera de même avec les travaux de la route CentreEurope-Atlantique, la RCEA, entre la Saône-et-Loire et la Charente-Maritime.

En matière d'entretien et de maintenance de la voirie nationale, les inflexions amorcées depuis 1998 sont poursuivies. Ainsi, la dotation du budget général consacrée à la réhabilitation des ouvrages d'art s'élèvera à 362 millions de francs, en hausse de 28 %. Elle sera consacrée, pour partie, à la rénovation du pont d'Aquitaine à Bordeaux.

Enfin, je puis vous annoncer que, dans le cadre des discussions sur le collectif pour 1999, j'ai obtenu 300 millions de francs de crédits de paiement supplémentaires pour les routes. Je tiendrai donc les engagements que j'avais pris, avec mon collègue Dominique Strauss-Kahn et les professionnels du BTP, en septembre dernier.

Ainsi, l'opération de rattrapage des crédits de paiements routiers, entreprise depuis 1997, touche à son terme. Il y avait, je vous le rappelle, plus de 2 milliards de francs de retard par rapport aux autorisations de programmes ouvertes.

Monsieur Idiart, vous avez évoqué le nouvel objet routier. Je suis prudent, car il faut tester cette nouveauté technologique avant de la généraliser et je voudrais être certain qu'il n'y a pas de problème de sécurité.

Les moyens que le Gouvernement consacre aux investissements fluviaux progressent de plus de 40 % depuis 1997. Certains trouvent néanmoins que ce n'est pas assez.

C'est alors que nous étions tombés bien bas ! Une dotation de 500 millions provenant du FITTVN est prévue, après les 450 millions de 1999, soit plus de 11 % d'augmentation.

Versés pour l'essentiel à l'établissement public Voies navigables de France, ces crédits permettront, en partenariat avec les collectivités locales, notamment dans le cadre des contrats de plan, de poursuivre la restauration et la mise en valeur du réseau existant. Il faut à la fois intervenir sur les voies essentielles au transport de marchandises et sur celles où l'on peut accueillir le tourisme fluvial, qui peut apporter beaucoup en termes économiques, d'emploi et d'aménagement du territoire.

Nous souhaitons mettre le réseau existant à la hauteur des enjeux économiques. C'est le sens du projet SeineNord, qui doit s'entendre comme une liaison globale entre le Port du Havre, Paris, Dunkerque et le bassin de l'Escaut. Dans ce projet global, les priorités portent sur les extrémités. Les aménagements sur le tronçon Dunkerque-Escaut, comme le relèvement des ponts, de ce que l'on appelle le tirant d'air, doivent permettre d'accueillir un nouveau trafic européen de grand gabarit. Le tronçon Oise-aval et la Seine peuvent aussi être modernisés dans un souci d'amélioration de la gestion des crues, permettant ainsi une augmentation durable du trafic fluvial dans les régions concernées, notamment en Ile-de-France.

Concernant la partie centrale de Seine-Nord, je dois très prochainement m'en entretenir avec les élus concernés avant de prendre une décision sur le tracé.

Par ailleurs, monsieur Daubresse, après l'abandon du canal Rhin-Rhône, des investissements ont été prévus pour rénover complètement la liaison Freycinet entre la Saône et le Rhin. La liaison TGV Rhin-Rhône est également envisagée sans attendre la fin de la réalisation du TGV-Est européen.

Pour améliorer durablement la compétitivité de nos ports et attirer les flux de marchandises vers les ports français, il faut réaliser les extensions portuaires justifiées par les évolutions du trafic.

De manière générale, pour ce qui est du budget de la mer, je remercie M. Guy Lengagne d'avoir bien noté l'évolution très signifiative des crédits maritimes et portuaires, soit 1,8 milliards de francs - hors ENIM -, qui connaissent une très forte hausse de 15 %, notamment dans les investissements portuaires après la stabilité des deux années précédentes.

La plus importante des extensions portuaires concerne Le Havre avec le projet « Port 2000 ». Les travaux doivent débuter en 2000, en vue d'une mise en service des installations nouvelles fin 2002, début 2003. Le projet de budget prend donc en compte l'engagement d'une première tranche de travaux d'infrastructures avec un engagement de l'Etat de 220 millions de francs dès l'an prochain.

D'autres investissements de capacité ou de modernisation, de dimension plus modeste, mais nécessaires pour accompagner les évolutions des trafics, doivent être engagés dans d'autres ports, également en l'an 2000, notamment dans le cadre des futurs contrats de plan Etatrégions : modernisation du terminal agroalimentaire de Montoir à Nantes-Saint-Nazaire, requalifications et aménagements de quai à Marseille-Fos, ainsi qu'à Dunkerque.

Par ailleurs, l'année 2000 verra l'achèvement des travaux d'infrastructure du terminal à conteneurs de la Pointedes-Givres, à la Martinique.

Comme vous l'avez souligné, l'amélioration de la desserte terrestre des ports est aussi une composante importante, décivise même, de leurs compétitivité. C'est une de mes priorités pour les prochains contrats de plan.

S'agissant du cabotage maritime, monsieur Capet, je souhaite voir aboutir l'harmonisation des règles au niveau européen afin de favoriser ce mode de transport écologique et sûr.

Mais l'efficacité, M. Daniel Paul y a beaucoup insisté, tient également à la qualité des rapports sociaux, notamment au niveau local. C'est cette politique que j'ai été amené à réaffirmer récemment et que je continuerai à impulser et à appliquer, notamment sur les dossiers importants que vous citez - préretraites et réduction du temps de travail -, animé par le souci de favoriser l'emploi et le développement.

Monsieur Fleury, vous avez, avec d'autres, évoqué la

SNCM : l'assemblée territoriale corse va bientôt se prononcer sur l'organisation de l'appel d'offres sur la continuité territoriale. L'Etat, actionnaire de la SNCM, fera son devoir pour placer la compagnie dans les meilleures conditions pour répondre au mieux à cet appel d'offres.

Enfin, dernier mode de transport pour lequel le développement du trafic conduit à anticiper sur la capacité des infrastructures : le transport aérien. La croissance attendue du trafic à l'horizon 2020, notamment au niveau intra-européen à partir des aéroports de province, conduit à examiner les conditions dans lesquelles, le moment venu, il conviendra de développer les capacités d'accueil des aéroports.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1999

Les schémas de services de transports doivent être l'occasion d'afficher les besoins sur les moyen et long termes, et donc les projets prioritaires en fontion des niveaux de services attendus. Je pense ici notamment à l'éventualité d'un troisième aéroport pour le Grand Bassin parisien, à la perspective de l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes pour le Grand Ouest, à la recherche d'un site pour un nouvel aéroport toulousain, à la démarche de précaution pour l'aéroport de Lyon-Satolas qui s'est traduite par l'approbation de l'avant-projet de plan de masse. C'est à partir de tous ces éléments, en intégrant toutes ces considérations, que nous devrons répondre à la demande future.

J'en viens maintenant au volet emploi et solidarité, et plus largement aux multiples activités et professions concernées par ce ministère. Quand je parle d'emploi, je pense bien sûr aux emplois du ministère - M. Biessy et d'autres en ont parlé -, à ceux des entreprises dont j'ai la tutelle et à ceux qui résultent des investissements effectués sous la responsabilité de ce ministère.

Loin de considérer que tout est réglé - je sais bien qu'il y a encore beaucoup à faire -, je crois honnêtement, que ce ministère concourt largement à la réalisation de l'objectif de plein emploi, à l'horizon de dix ans, fixé par le Premier ministre.

En tant qu'employeur direct, l'Etat a une lourde responsabilité pour préserver l'emploi. De ce point de vue, j'ai tenu à infléchir la tendance aux réductions d'emplois qui affectait le ministère de l'équipement. Nous sommes sortis de la logique qui voulait que, depuis quinze ans, ce ministère perde environ 1 000 postes par an.

Dès mon arrivée au ministère, je me suis attaché à sortir de cette logique, qui, en dépit des importants efforts de modernisation accomplis par le personnel, était de nature à compromettre le bon exercice des nombreuses et importantes missions assurées par les services, et notamment par les DDE.

Ainsi, dans le cadre de la politique gouvernementale du maintien de l'emploi public, j'ai obtenu un traitement plus équitable. Les réductions des effectifs ont été ramenées à 490 emplois en 1999 et à 365 dans le projet de budget pour 2000. Cela est-il totalement satisfaisant ? Non, mais c'est incontestablement une rupture nette avec les politiques passées.

Dans la catégorie des agents d'exploitation - M. Biessy a insisté sur ce point -, qui avait particulièrement souffert, la baisse est divisée par quatre, la réduction d'emplois étant ramenée à 130. Vous voyez la différence avec la situation d'il y a deux ou trois ans ! Cela me permettra de prendre en compte la situation de la vingtaine de départements où les difficultés liées à l a viabilité hivernale sont les plus grandes et de voir comment n'y supprimer aucun poste d'agent d'exploitation.

Par ailleurs, une création nette de 180 emplois est prévue dans la navigation aérienne, pour faire face aux futurs départs en retraite et à la croissance du trafic. De plus, je v iens d'obtenir trente recrutements supplémentaires, dès 1999.

Au total, les effectifs du ministère seront affectés d'une baisse de 0,18 %, soit six fois moins que lorsque nous sommes arrivés, en 1997.

Comme vous l'avez tous souligné, l'action du ministère est d'abord l'oeuvre de ses agents, ces 110 000 hommes et femmes implantés sur l'ensemble du territoire et dont la compétence et le sens du service public sont très appréciés des élus, des citoyens et des partenaires professionnels. Je souhaitais leur rendre hommage ici.

Je voudrais également souligner le rôle des entreprises publiques du secteur des transports dans la bataille pour l'emploi, sous l'effet en particulier de la réduction du temps de travail et du développement des services et de l'activité. Je donnerai deux exemples.

L a SNCF a programmé 25 000 embauches sur trois ans. C'est la première fois depuis cinquante ans, me disait le président Gallois il y a quelques jours, lors de notre déplacement sur la ligne ferroviaire Béziers-Neussargues-Clermont, que la SNCF crée des emplois statutaires. Je me doute bien que tout le monde ne va pas s'en réjouir, mais cela montre que c'est possible ! Air France doit créer 5 000 emplois supplémentaires jusqu'en 2002, pendant notre législature, auxquels s'ajouteront les embauches destinées à remplacer les départs.

Enfin la RATP comptera bientôt 40 000 agents à statut et plus de 17 000 emplois-jeunes ont été créés dans les entreprises et services des secteurs du logement, des transports et du tourisme.

(M. Yves Cochet remplace Mme Nicole Catala au fauteuil de la présidence.)

PRE SIDENCE DE M. YVES COCHET,

vice-président

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

A ce stade de ma présentation, je n'évoquerai que pour mémoire certaines des professions et activités de ma sphère de compétence, alors même que les enjeux en termes de sécurité et de compétitivité y sont très importants. Je veux parler notamment des conducteurs routiers.

Je ne souhaite pas opposer un mode de transport à un autre, même si je pense qu'il faut les rééquilibrer. En effet, je suis de ceux qui considèrent que nous avons besoin de la route et d'une politique des transports routiers qui soit non seulement efficace, mais aussi socialement acceptable. Les conducteurs routiers sont au coeur du développement économique et de la croissance dans l'espace européen. Ils méritent qu'on recherche, pour la sécurité et la qualité de vie de tous, des règles et des conditions de travail positives ; c'est l'harmonisation sociale par le haut. L'aide à la formation professionnelle a été reconduite, monsieur Fleury, alors même que les engagements du contat de progrès étaient terminés en 1999. J'en profite pour vous dire qu'il n'y a pas besoin de nouveau décret pour procéder à l'immobilisation des poids lourds. Une loi a été votée à l'unanimité.

En février 1998, 27 000 immobilisations de véhicules ont été effectuées, peut-être ne le dit-on pas assez.

Je veux aussi parler des bateliers, qui seront confrontés, à compter de l'an prochain, à la suppression du « tour de rôle ».

Je souhaite enfin souligner l'importance, pour la vie quotidienne de nos concitoyens comme pour les entreprises, des établissements, que sont l'Institut géographique national - l'IGN - et Météo-France. Je salue enfin la qualité des programmes de recherche conduits sous l'égide de mon ministère dans ses écoles ou à l'INRETS.

Je reviendrai un peu plus longuement sur les secteurs maritimes et aériens.

S'agissant du transport maritime, le projet de budget pour 2000 poursuit la politique de soutien à la flotte de commerce et à l'emploi maritime. La flotte de commerce française a connu une forte décroissance - M. Lengagne l'a dit - à partir des années soixante-dix, pour se stabiliser


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1999

aujourd'hui autour de 210 navires. Par les mesures arrêtées au comité interministériel de la mer d'avril 1998, le Gouvernement est déterminé à redresser la situation de notre flotte de commerce, dans le respect des réglementations internationale et européenne.

Je rappelle que le soutien de l'Etat à l'investissement naval fait l'objet, depuis 1998, de mesures d'allégement fiscal pour les groupements d'intérêt économique, les GIE

« fiscaux », qui acquièrent un navire. Cette mesure a perm is de soutenir depuis 1998 l'investissement dans sept navires de transport pour un montant dépassant le milliard de francs. Une vingtaine de dossiers sont à l'étude, représentant une trentaine de bateaux. On voit bien l'efficacité de cette disposition qui a remplacé les fameux quirats.

M. Jean-Yves Besselat.

On en reparlera ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Par ailleurs, le projet de budget pour 2000 reconduit le dispositif d'aide à la flotte de commerce mis en place dès cette année.

Les entreprises directement confrontées à la concurrence internationale se voient rembourser les contributions sociales patronales afférentes aux risques vieillesse, maladie et accidents du travail des marins. La dépense pour 2000 est estimée à 133 millions de francs.

Enfin, je voudrais dire à M. Capet que nous suivons avec attention les conséquences de la fin du commerce hors taxes sur les armements français. Ces conséquences avait été largement anticipées par les pouvoirs publics et avaient constitué l'enjeu de la réunion à laquelle j'ai participé, le 3 juin dernier, avec mon collègue ministre de l'économie et des finances, ainsi que les élus locaux et les personnels. A cette occasion avait été élaboré un plan pour assurer et consolider l'avenir de Sea-France. Il est en cours de mise en place : la décision de recapitaliser SeaFrance a été prise et l'actionnaire SNCF a autorisé l'entreprise à lancer les études pour l'acquisition d'un nouveau bateau. Il faut également regarder les autres compagnies françaises - je pense en particulier à BrittanyFerries.

La protection du littoral et sa mise en valeur constituent un enjeu important d'aménagement du territoire avec 5 500 kilomètres de côtes. Ce budget enregistre un quasi-doublement des crédit : 43 millions à comparer aux 22 millions de francs de l'an dernier.

J'évoquerai un seul dossier, que je suis assez fier d'avoir contribué à faire aboutir, celui du Mont-Saint-Michel, qui était menacé par l'ensablement. Ce grand projet s'engagera à partir de l'an prochain : les crédits sont affectés.

L'an 2000, enfin, verra la création d'un service public de l'enseignement maritime avec passage sous statut public du personnel de l'association de gérance des écoles maritimes et aquacoles - l'AGEMA : 315 postes budgétaires ont été créés dans le projet de loi de finances à cet effet. Cette mesure montre tout l'intérêt que porte le Gouvernement à un enseignement professionnel bien adapté aux évolutions du marché de l'emploi dans ce secteur, et qui accroît ses effectifs.

Le secteur aérien, avec l'accélération des échanges mondiaux, est un des atouts majeurs d'une puissance industrielle, économique et culturelle comme la France. La dimension internationale et concurrentielle est caractéristique du transport aérien. M. Asensi a beaucoup insisté sur cet aspect. Mais j'aurais garde d'oublier ses autres dimensions, qui relèvent du développement durable : l'aménagement du territoire, le développement économique et l'environnement. J'ai été très sensible à la qualité et à la pertinence du rapport de M. Asensi sur les enjeux du transport aérien. Quant à M. Gantier, il est tellement imprégné du souci de défendre le libéralisme qu'il n'a pas bien vu la dimension de ces enjeux.

M. Francis Delattre.

« Cadeau au grand capital » ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Chacun connaît la place particulière, en France et en Europe, de la construction aéronautique civile et son importance pour l'emploi, le développement technologique et l'équilibre du territoire. Je ne reviens pas sur les succès d'Airbus. J'évoquerai seulement la décision de lancer l'A 318 - 107 places -, dont la « bi-motorisation », qui n'était pas acquise, permettra aux compagnies aériennes des économies de gestion. Cela permettra aussi à la SNECMA, entreprise publique française qui travaillle à égalité avec la plus grande entreprise du monde, General Electric, entreprise américaine privée, de fabriquer également ce moteur. Cela prouve que l'on peut travailler en coopération dès lors que l'intérêt est réciproque.

Les chefs des gouvernements français et allemand annonçaient, le 14 octobre dernier à Strasbourg, la fusione ntre Aerospatiale-Matra et DASA. Cette opération - EADS - constitue une étape dans le regroupement des capacités aérospatiales civiles et militaires permettant de constituer un groupe européen capable de rivaliser avec les concurrents américains. Cette opération, qui n'était pas gagnée d'avance, renforce l'axe franco-allemand et souligne que, loin d'être un handicap, la présence d'un actionnaire public constitue un atout et un facteur de stabilité pour l'avenir. A cet égard, j'ai bien senti les inquiétudes qui se sont exprimées. Et comment ne pas les comprendre quand on voit que les fusions qui se réalisent dans d'autres domaines entraînent souvent des suppressions d'emplois et que la règle de la rentabilité à court terme prend alors le pas sur l'efficacité et l'intérêt général ? Les actionnaires allemands sont privés ; côté français, ils sont en partie publics et en partie privés.

M. Francis Delattre.

Ça ne durera pas longtemps ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

C'est ce que vous souhaitez, je le sais bien.

Dans deux ou trois ans, ou peut-être dans dix ans si nous restons plus longtemps au pouvoir, vous me demanderez toujours : « Pourquoi n'avez-vous toujours pas privatisé ? »

M. Francis Delattre.

Mais vous allez le faire ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Chaque année, j'entends la même question.

Plus ça marche et plus vous nous demandez pourquoi nous ne privatisons pas Air France !

Mme Muguette Jacquaint et M. Jean-Claude Lefort.

Mais parce que ça marche !

M. Jean-Yves Besselat.

Ça c'est vous qui le dites ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Effectivement, c'est parce que ça marche ! Ce que je voulais vous dire, c'est que la part de l'actionnaire public est réduite par rapport à un total qui est doublé !

M. Francis Delattre.

En deux ans, vous avez privatisé plus que Balladur et Juppé ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Et, pour qu'il n'y ait pas de doute, la participation de l'Etat dans EADS est accompagnée de garanties, notamment sur les décisions stratégiques et les cessions, ainsi que par la priorité de rachat accordée à la partie française.


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Les crédits dont je disposerai en 2000 en matière d'appui à l'industrie aéronautique, si ce projet de loi de finances est voté par le Parlement bien sûr, permettront d'aider les entreprises à réaliser leurs actions de recherche et de développement. Je pense à la poursuite des deux grands programmes de l'hélicoptère EC 165 et aux nouvelles versions de l'Airbus A 340, et tout particulièrement au projet A 3 XX, le fameux gros porteur qui doit compléter l'ensemble. J'ai déjà prévu à cet égard une dotation de 240 millions de francs pour l'aide aux avances remboursables.

Ce projet qui vise à élargir, pour la première fois dans le domaine des très gros porteurs, la gamme du constructeur Airbus, me paraît incontournable. Il faut qu'il soit réalisé à l'horizon 2005. Avec la constitution d'EADS, je considère qu'une des conditions essentielles de son lancement est maintenant satisfaite.

En ce qui concerne Air France, il est utile d'indiquer que, pour la quatrième année consécutive, la compagnie nationale présente un résultat d'exploitation positif. Le redressement est donc bien là. Si vous n'êtes pas convaincu, on peut cependant vous reconnaître, monsieur Gantier, le mérite de la persévérance. Vous, au moins, avez compris qu'Air France n'était pas privatisée. Le soutien de l'Etat a bien sûr été déterminant pour accompagner les efforts consentis par les personnels.

Air France a décidé de bâtir à son tour une « alliance globale ». Mais peut-être cela vous a-t-il échappé, parce que c'était juste au début des vacances. Une telle alliance va au-delà de simples accords de partage de code et permet d'offrir aux passagers un réseau mondial constitué par l'ensemble des réseaux de chaque partenaire. Dans cette perspective, Air France et Delta Air Lines ont signé le 22 juin 1999 un accord exclusif afin de créer avec d'autres partenaires « une alliance globale » dans le transport aérien.

La forte croissance du trafic aérien - 4 à 5 % en moyenne par an - est bénéfique, mais peut être génératrice de risques de dysfonctionnements qu'il nous appartient de surmonter.

L'extension de l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle, avec deux nouvelles pistes, s'est accompagnée de la mise en place de mesures de lutte contre les nuisances sonores, aujourd'hui toutes mises en oeuvre. M. Blazy a souligné cet aspect. L'engagement que j'avais pris concernant le maintien de l'énergie sonore à son niveau de 1997, de jour comme de nuit, a été respecté en 1998 et le sera en 1999.

Je tiens à préciser que l'autorité indépendante de contrôle des nuisances sonores aéronautiques, l'ACNUSA, mise en place par la loi du 12 juillet dernier, sera opérationnelle début janvier, et compétente sur les neuf principaux aéroports de France. Le projet de décret va être transmis au Conseil d'Etat. La représentation parlementaire sera consultée. Je sais, monsieur Blazy, que vous attendez ce moment, et je vous précise que le crédit de 5 millions de francs qui est inscrit doit couvrir les dépenses de l'ACNUSA.

Beaucoup d'entre vous, M. Blazy et M. Schwartzenberg notamment, ont évoqué les suites du rapport Lachenaud : j'y reviendrai plus précisément dans la soirée.

Comme vous le savez, j'ai entamé un large débat sur l'avenir de l'aéroport d'Orly et de sa zone d'activité économique afin de lui redonner une dynamique de croissance. Désireux de lutter contre ce déclin, j'ai proposé vingt mesures, en cours de mise en oeuvre. Ainsi, pour améliorer la synergie entre les deux aéroports, j'ai souhaité la création d'une gare TGV à Rungis-laFraternelle permettant une liaison rapide entre Orly et Roissy.

M. Francis Delattre.

Ce serait bien ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Si nous parvenons à réaliser ce projet, la liaison prendrait sans doute moins d'une demi-heure.

Un mot rapide sur le FIATA, ce fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien mis en place l'an passé pour répondre aux décisions du Conseil d'Etat en matière de financement des dépenses de sûreté et de sécurité dans le transport aérien.

Avec la nouvelle taxe d'aéroport, les gestionnaires d'aéroport disposent désormais de ressources juridiquement sûres pour financer les tâches de sûreté et de sécurité, qui leur incombent dans ce domaine. Ce n'était pas le cas auparavant puisque le Conseil d'Etat avait mis en cause les pratiques de financement qui existaient bien avant que nous n'arrivions au gouvernement.

Par ailleurs, à compter de 2000, nous parachevons le dispositif, comme je l'avais annoncé l'an passé, pour lui donner davantage de transparence : le FIATA reprendra les dépenses directes de l'Etat en matière de sûreté, précédemment inscrites sur le budget annexe de l'aviation civile, et recevra une part plus grande de la taxe de l'aviation civile : 23 % contre 10 % cette année, le reste de cette taxe allant au budget annexe. Le projet de budget du FIATA qui comporte aussi, je vous le rappelle, les subventions à certaines lignes d'aménagement du territoire, s'établit ainsi à 361 millions de francs.

En ce qui concerne le contentieux avec les compagnies aériennes sur les redevances, je vous annonce, monsieur Gantier, que les demandes des redevables pourront être satisfaites dès lors qu'elles respecteront les prescriptions relatives au droit de recours.

Il est vrai, monsieur Gantier, que, globalement le niveau des ressources du budget annexe de l'aviation civile, est stabilisé, voire réduit pour certaines d'entre elles. Mais c'est délibérément que nous avons opté pour une baisse des taux de redevance, de manière à ne pas peser excessivement sur le coût du transport aérien et à ne pas pénaliser l'usager.

Le niveau de la taxe de l'aviation civile, dont le produit sera de 1,3 milliard en 2000, reste inchangé. Le taux de la redevance de route sera diminué de près de 9 % et le taux de la redevance pour services terminaux de la circulation aérienne de 1,70 %. Ainsi, on peut constater que l'aviation civile maîtrise ses coûts, plus 3,1 % globalement en 2000, tout en faisant face à une très vive croissance du trafic, 7 % en France pour 1999.

Les moyens mis à la disposition de la navigation et du contrôle aérien sont revalorisés pour permettre un haut niveau de sécurité. Je crois que tout le monde approuvera cette démarche. Ainsi, les dépenses de personnel, qui s'élèvent à 4,36 milliards de francs, progressent de 3,9 %, ce qui permettra de créer 180 emplois pour faire face au développement de l'activité et aux besoins de formation.

Une centaine de contrôleurs aériens seront recrutés en 2000.

Enfin, nous bouclons le budget annexe par le maintien de la subvention du budget général - 215 millions de francs y compris les crédits de l'ACNUSA - et un emprunt de 830 millions de francs, égal à celui de 1999.

Nous nous plaçons ainsi dans une perspective de stabilisation de l'endettement du budget annexe.

Cette année, la guerre avec la Yougoslavie a certes été à


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l'origine de difficultés, mais c'est l'augmentation du trafic aérien qui a posé le plus de problèmes en termes de qualité du service. La France a pris la mesure de ces problèmes. Pour que réellement la situation s'améliore ou au moins ne se dégrade pas, des mesures sont envisagées au niveau international sous l'égide d'EUROCONTROL, mais aussi au niveau national avec l'amélioration des moyens de contrôle et de coordination. Ces mesures seront-elles suffisantes ? C'est un des points très importants pour l'avenir du transport aérien. Il convient, en ce domaine, de pousser la réflexion et de développer notre capacité d'anticipation.

Avant de conclure, je voudrais développer quelques thèmes qui dessinent le cadre des politiques pour l'avenir.

Je souhaite d'abord vous apporter quelques indications sur la réforme du financement des sociétés concessionnaires d'autoroutes, les SEMCA. Cette réforme est en cours. Je sais que vous l'attendez : vous m'interpellez souvent sur ce point - M. Jean-Louis Idiart l'a encore fait tout à l'heure -, notamment après les travaux de la Cour des comptes et ceux de la mission d'évaluation et de contrôle, que je veux remercier pour la qualité de ses propositions.

J'ai accéléré la réflexion après la condamnation par le Conseil d'Etat, en février 1998, des procédures qui avaient abouti à l'attribution de la concession de l'autoroute A 86 Ouest.

Quels sont les objectifs de la réforme ? Je vous les rappelle : Améliorer la transparence et la rationalité des choix d'investissements entre une autoroute concédée et un aménagement à deux fois deux voies d'une route nationale ; Accroître de manière sensible les moyens pour l'entretien, l'exploitation et la remise à niveau du réseau ; Poursuivre le programme autoroutier pour des raisons d'aménagement et de sécurité : la sécurité routière est mieux assurée sur les autoroutes que sur les routes nationales ; Consentir un effort particulier pour le milieu urbain, où les coûts de construction sont plus élevés.

Pourquoi une réforme était-elle nécessaire ? Il fallait se mettre en conformité avec le droit européen et notamment la directive 93/97 du 14 juin 1993 sur les marchés de travaux.

Il s'agit désormais de publier les projets de concession, de manière à faire jouer la concurrence et à placer les entreprises dans des conditions d'égale concurrence.

La technique de l'adossement ne peut plus être utilisée.

Cela signifie que chaque nouvelle concession doit être financièrement équilibrée, en jouant sur plusieurs paramètres : la durée de la concession, les tarifs des péages et, s'il y a lieu, les subventions publiques de l'Etat et des collectivités locales en cas d'insuffisance de trafic. Cela signifie aussi que les SEMCA, si elles veulent présenter des offres en vue d'une nouvelle concession, doivent fonctionner sans distorsion de concurrence, avec des règles comptables et fiscales de droit commun.

Pour tenir ces objectifs, la réforme passe par un certain nombre d'évolutions : La modification du régime d'amortissement, qui sera plus proche de l'amortissement physique et comparable à l'amortissement pratiqué par la société privée COFIROUTE ; La suppression des clauses de garantie de reprise de passif par l'Etat, contraires à la définition des concessions en droit communautaire ; L'allongement des concessions d'environ vingt ans, nécessaire pour financer les autres éléments de la réforme.

Cependant, comme cet allongement n'est pas conforme au droit européen et à la directive « travaux », nous avons, dès juillet 1998, engagé une négociation avec la Commission pour en préciser les modalités et en assurer la conformité. Il était prévu de conclure en mars 1999.

La démission des commissaires a perturbé ce calendrier et retardé la conclusion de la négociation. La nouvelle Commission a été saisie dès septembre de la demande d'allongement des concessions. J'attends pour fin novembre la conclusion de cette négociation.

Cette réforme se concrétisera par un projet de loi comportant notamment l'allongement de la durée des concessions et des dispositions modifiant le code de la voirie routière. Il devrait être déposé dès retour de l'avis de Bruxelles, avant la fin de l'année.

Des dispositions financières sur l'affectation des dividendes seront également prévues dans le collectif budgétaire 1999.

Cette réforme prend du temps, mais ce n'était pas si simple. Nous n'avons d'ailleurs pas attendu son aboutissement pour commencer à nous mettre en accord avec le droit communautaire. Des avis de nouvelles concessions font désormais l'objet de publication. Ce fut le cas pour la mise en concession de l'A 86 Ouest qui vient d'aboutir et que le Conseil d'Etat a validée. Ce sera prochainement le cas pour la concession du viaduc de Millau, que le Conseil d'Etat a également validée.

Je souhaite, bien entendu, que les SEMCA, dès lors qu'elles disposent des fonds propres nécessaires et qu'elles se situent dans des conditions normales de concurrence, puissent présenter des offres.

Monsieur Idiart, je ne partage pas le point de vue que vous exprimez dans votre rapport, au demeurant très complet et très précis. Vous souhaitez que, dans l'attente d'un projet de loi de programmation des infrastructures de transport, aucune nouvelle autoroute ne soit lancée.

C'est un peu abrupt, me semble-t-il, et cela ne tient pas compte des souhaits de tous vos collègues qui me réclament une autoroute pour leur région.

Il me semble surtout que les objectifs que l'on doit rechercher dans la loi de programmation seront satisfaits par les schémas de services, qui participent d'une vision plus intermodale de la prospective.

J'en viens à la question des comptes d'affectation spéciale qui font partie intégrante de mon budget. Je veux parler du FARIF et du FITTVN, qui, selon les rapports de M. Idiart, Capet et Filleul, devrait être supprimé.

Le projet de loi de finances pour 2000 supprime le Fonds d'aménagement de la région Ile-de-France. Cette solution, proposée par le ministère des finances, m'a semblé, à moyen terme, de nature à préserver les financements et les priorités de l'Etat en Ile-de-France. En effet, depuis la loi dite « Pasqua » de 1995, les ressources du FARIF étaient amputées de 120 millions de francs supplémentaires chaque année. On s'orientait donc vers un épuisement de la ressource.

Je ne reviens pas sur ce dossier. J'ai veillé à ce que des chapitres budgétaires spécifiques « Ile-de-France » soient créés dans mon budget, de manière à assurer une totale transparence sur l'évolution des crédits destinés à ce territoire.


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J'en viens au FITTVN, sur lequel le Conseil constitutionnel a eu à se prononcer en décembre 1997. Il a rappelé que les comptes d'affectation spéciale étaient soumis à l'approbation du Parlement dans le cadre de la loi de finances. Cela signifie que ni la clarté des comptes publics ni l'exercice par le Parlement de ses prérogatives budgétaires ne sont affectés. Le Conseil a également précisé que le financement éventuel, par le FITTVN, des investissements et du gros entretien du réseau routier national et de dépenses entrant dans le cadre des contrats de plan

Etat-régions, dans le domaine des transports, ne contrevenait pas aux missions assignées à ce fonds.

Je l'avoue franchement : je ne comprends pas l'acharnement contre le FITTVN. Et l'argument comme quoi c'est sous un gouvernement précédent que ce fonds a été instauré n'est pas suffisant, à mes yeux, pour justifier une condamnation sans appel.

M. Michel Bouvard.

Très bien !

M. Jean-Louis Idiart, rapporteur spécial.

Il ne faut pas travestir les crédits ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Bien sûr, comme l'a souligné la Cour des comptes, il y a peut-être trop de comptes d'affectation spéciale qui bénéficient de ressources affectées.

M. Jean-Louis Idiart, rapporteur spécial.

Certes ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Le ministre des finances a commencé à en supprimer. Mais pourquoi vouloir à tout prix remettre en cause un outil qui est en train de conquérir une dimension intermodale ? Ainsi, en 2000, pour la première fois, les crédits destinés au secteur ferroviaire et au transport combiné représenteront plus de 53 % des ressources du fonds. Jean-Jacques Filleul l'a dit fort justement, même s'il a souligné, comme je le pense moi-même, que l'utilisation du FITTVN devrait encore mieux financer de nouveaux programmes.

Pourtant, s'agissant du ferroviaire, je me dois de vous rappeler qu'avant 1997 aucun crédit d'Etat n'était affecté a u financement des TGV, d'où le surendettement destructeur de la SNCF. C'est par le FITTVN qu'on a pu financer les opérations engagées par mon prédécesseur sur le TGV-Méditerranée.

Désormais, le FITTVN constitue l'instrument financier d'une politique intermodale des transports. Je considère, et sans doute nombre d'élus avec moi notamment MM. Biessy, Cochet et Delattre - qu'on doit conserver et développer un tel outil. Le respect des engagements de l'Etat dans les futurs contrats de plan est à ce prix.

Christian Sautter, à l'occasion d'un débat qui a eu lieu au petit matin...

M. Michel Bouvard.

Le matin déjà s'annonçait ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

... s'est engagé à ce qu'une solution soit trouvée pour renforcer les moyens en faveur de l'intermodalité. Je ne doute pas que nous y parviendrons ensemble.

Je voudrais terminer cette intervention sur deux mots,

« développement » et « actionnariat public », qui témoignent du chemin accompli.

Que ce soit à Air France ou à EADS, la place de l'actionnaire public est aujourd'hui de moins en moins contestée comme étant contraire à l'efficacité. Après un débat difficile et rigoureux, avec les médias, avec nos partenaires allemands, la présence de l'Etat au sein d'une entreprise du secteur concurrentiel est plutôt considérée, aujourd'hui, comme un élément de stabilité, une référence, je dirais même le mot est à la mode - un élément de « régulation » permettant de valoriser les acquis sociaux et l'intérêt général.

Cette réhabilitation du public et de l'intérêt général est facteur de dynamisation des entreprises, qui ont compris que, elles aussi, peuvent et n'ont d'autre choix que de jouer la carte du développement pour se positionner durablement dans la compétition européenne.

Pour conclure, je voudrais une fois encore souligner combien ce budget est positif je suis heureux, monsieur Blazy, que vous l'ayez aussi spontanément souligné parce qu'il permet une progression des moyens, notamment en matière d'investissement, et que cela constitue une bonne base pour les futurs contrats de plan, parce qu'il se situe dans le cadre d'une politique globale des transports, du logement social et du tourisme qui prend mieux en compte les problèmes fondamentaux de la société l'emploi, la sécurité, l'environnement - et permet de faire émerger une alternative à une conception ultralibérale de la construction européenne, dangereuse pour la cohésion sociale et territoriale.

M. Francis Delattre.

Il n'y a plus que des sociauxdémocrates ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Notre conception de la construction européenne n'a rien d'une conception défensive et craintive.

Je pense même qu'elle représente une solution efficace pour assurer un développement respectueux des intérêts de chacun.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

M. le président.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

2

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

M. le président.

Ce soir, à vingt et une heures quarante-cinq, deuxième séance publique : Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2000, no 1805 : M. Didier Migaud, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport no 1861) ; Equipement et transports (suite) : Mer : M. Guy Lengagne, rapporteur spécial, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe no 27 au rapport no 1861) ; Transports aériens et météorologie : M. Gilbert Gantier, rapporteur spécial, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe no 29 au rapport no 1861) ; Transports aériens : M. François Asensi, rapporteur pour avis, au nom de l a commission de la production et des échanges (avis no 1866, tome XIII) ;


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Transports terrestres : M. Jean-Louis Idiart, rapporteur spécial, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe no 30 au rapport no 1861) ; Equipement et transports terrestres : M. Jean-Jacques Filleul, rapporteur pour avis, au nom de la commission de la production et des échanges (avis no 1866, tome XIV) ; Transports maritimes et fluviaux : M. André Capet, rapporteur pour avis, au nom de la commission de la production et des échanges (avis no 1866, tome XV).

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures vingt.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT