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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 15 NOVEMBRE 1999

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. PIERRE-ANDRÉ WILTZER

1. Hommage aux victimes des inondations dans le Midi (p. 9295).

2. Loi de finances pour 2000 (deuxième partie). - Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 9295).

TOURISME M. Michel Bouvard, rapporteur spécial de la commission des finances.

M. Jean-Pierre Defontaine, rapporteur pour avis de la commission de la production.

MM. Léonce Deprez, Robert Honde, Jean-Michel Couve, Jean Vila,

MM. André Capet, Michel Meylan, Marc Dumoulin, François Liberti, Jean-Pierre Dufau, François Goulard.

Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat au tourisme.

Réponses de Mme la secrétaire d'Etat aux questions de : M. Jean-Michel Couve, Mme Martine Aurillac, M. Michel Meylan.

Les crédits du tourisme seront appelés à la suite de l'examen des crédits du logement.

Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.

3. Ordre du jour des prochaines séances (p. 9319).


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COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. PIERRE-ANDRÉ WILTZER,

vice-président

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à dix heures.)

1

HOMMAGE AUX VICTIMES

DES INONDATIONS DANS LE MIDI

M. le président.

Nos compatriotes du midi de la France viennent de payer un très lourd tribut aux intempéries qui les ont accablés.

En votre nom à tous, je voudrais exprimer l'émotion de l'Assemblée nationale devant les conséquences catastrophiques des inondations, concernant tant les personnes que les biens, qui ont frappé plusieurs départements, en particulier l'Aude, les Pyrénées-Orientales et le Tarn.

En hommage aux vingt-sept victimes de ces événements dramatiques, je vous invite à vous recueillir quelques instants.

(Mmes et MM. les députés et Mme la secrétaire d'Etat au tourisme se lèvent et observent une minute de silence.)

2 LOI DE FINANCES POUR 2000

DEUXIÈME PARTIE Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2000 (nos 1805, 1861).

TOURISME

M. le président.

Nous abordons l'examen des crédits du secrétariat d'Etat au tourisme.

Nous aurons peut-être un peu de mal à terminer l'examen de ce budget avant treize heures, à moins que chacun ne veuille faire preuve de concision.

(Sourires.)

La parole est à M. le rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du plan.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du plan.

Monsieur le président, je m'associe d'autant plus à l'hommage que vous venez de rendre aux victimes des sinistres qui ont frappé le sud du pays que nombre de régions de montagne sont une nouvelle fois touchées.

J'en viens au budget.

Si, chaque année, au moment de la discussion budgétaire, les rapporteurs égrènent les bons chiffres du tourisme et exaltent le premier rang qu'occupe la France parmi les pays visités, c'est sans doute pour convaincre de l'importance qu'occupe le secteur touristique dans l'économie de notre pays. Mais c'est aussi pour souligner la modestie des crédits publics qui lui sont consacrés au regard de son importance économique et, surtout, au regard des formidables potentialités qu'il recèle, notamment sur le plan de l'emploi.

Je me limiterai à rappeler qu'en France les activités touristiques représentent plus d'un million d'emplois d irects et autant d'emplois indirects, près de 200 000 entreprises dans les activités caractéristiques et un chiffre d'affaires de 612,5 milliards de francs, soit 7,3 % de notre PIB.

Le tourisme joue par ailleurs un rôle considérable dans l'aménagement du territoire, la conservation de notre patrimoine et le maintien d'activités dans des zones rurales autrefois en voie de désertification, ou dans le développement de territoires à forts handicaps géographiques, comme la montagne et les îles.

Pour conforter ses performances sur un marché mondial en pleine croissance, où s'exerce une vive concurrence, notre pays doit avoir une politique dynamique.

Les interventions publiques en faveur du tourisme ne se limitent heureusement pas aux crédits du secrétariat d'Etat au tourisme : d'autres ministères y contribuent aussi. Il en est de même des régions, qui dépassent largement, en termes budgétaires, la part du secrétariat d'Etat au tourisme. Cependant, le secrétariat d'Etat joue un rôle essentiel en assurant la cohérence de ces interventions et leur coordination avec les initiatives du secteur privé et associatif.

Les objectifs affichés par le Gouvernement - l'amélioration de l'observation économique, le développement local, la politique sociale, la valorisation de l'offre et la coopération internationale - poursuivent la politique engagée et vont dans le sens souhaitable. Je partage, madame la secrétaire d'Etat, ces orientations.

Pour la deuxième année consécutive, le projet de loi de finances propose une hausse des crédits du tourisme.

Fixés à 423,5 millions de francs, ceux-ci enregistrent une progression de 13,8 % par rapport aux crédits inscrits au projet de loi de finances pour 1999. La hausse est significative, rapportée à la progression générale de 0,9 % du budget de l'Etat, même si une partie des crédits est appelée à compenser l'assujettissement de Maison de la France à la TVA.

La plus forte progression de crédits porte sur l'amélioration de l'observation économique : 10 millions de francs supplémentaires sont en effet accordés à l'adminis-


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tration centrale pour financer le lancement d'une enquête aux frontières rénovée. Cette enquête, qui mesure les flux des touristes non-résidents et les caractéristiques de leurs séjours, permettra d'obtenir les informations précédemment déduites de l'observation du poste « voyages » de la balance des paiements, dont une partie va disparaître avec la mise en place de l'euro. La nouvelle enquête qui sera mise en place enrichira l'information actuellement disponible par sa plus grande précision et la permanence de son dispositif.

Madame la secrétaire d'Etat, j'avais demandé ici même, l'an dernier, qu'un travail soit accompli afin de fiabiliser les données statistiques du tourisme. Je me réjouis donc de cette avancée. Je souhaite également que la présidence française du Conseil des ministres du tourisme de l'Union européenne vous permette d'obtenir une harmonisation des statistiques, à laquelle vous travaillez.

S'agissant des moyens de fonctionnement de l'administration centrale et de la capacité d'intervention du secrétariat d'Etat, je souhaite insister sur trois points.

D'abord, je renouvelle mon souhait de voir la direction du tourisme installée dans des locaux appartenant à l'Etat. En effet, avec 8 millions de francs, les loyers sont actuellement le premier poste de crédits de fonctionnement, absorbant le quart du chapitre 34-98. Ces locaux, peu fonctionnels et mal situés, ne correspondent pas, de surcroît, à l'image qui doit être celle du tourisme français vis-à-vis des partenaires extérieurs et notamment étrangers. Je rappelle que, sous la précédente législature, le ministère de l'environnement, qui dispose également d'un petit budget et dont une grande partie des recettes était absorbée par des loyers, a trouvé une solution en se logeant dans des locaux appartenant à l'Etat. Grâce à des efforts conjugués, nous devons en l'occurrence parvenir à la même situation.

Ensuite, je souhaite saluer l'effort accompli en faveur des DRT, les délégations régionales au tourisme, avec la mise à disposition en 1999 dans le cadre d'une expérimentation avec la direction du personnel et les services du ministère de l'équipement. Elle permet de répondre p artiellement à la faiblesse chronique des moyens humains de celles-ci. J'ai noté que cette action devait être prolongée en 2000 avec sept agents. Elle doit évidemment s'accompagner de moyens financiers de fonctionnement. Les 500 000 francs qui avaient été adjugés pour l'exercice 1999 ont été à peine suffisants, mais un nouvel abondement est prévu pour 2000.

Enfin, je veux dire l'importance qu'il y a à garder, au sein du SEATM, le service d'études et d'aménagement de la montagne, et de l'AFIT, l'Agence française de l'ingénierie touristique, la polyvalence des compétences et des expertises qui sont réunies par des personnels d'origines diverses. Disant cela, je pose le problème de la mise à disposition du SEATM et de l'AFIT de personnels d'autres ministères. Ces mises à disposition ont été fragilisées depuis quelques années par la tendance des ministères à rapatrier leurs personnels faute de postes suffisants. Il convient donc de stabiliser ces postes, et d'assurer une plus grande souplesse de gestion des besoins pour le ministère du tourisme dans le cadre de conventions pluriannuelles. Vous avez indiqué y travailler lors de votre audition en commission, et je souhaite que ces démarches aboutissent. En ce qui concerne l'AFIT, l'appel à des contrats de droit privé devra être renforcé afin de mieux répartir les compétences de l'Agence.

Les crédits consacrés aux contrats de plan Etat-régions bénéficieront, pour 2000, d'une dotation globale de 50,3 millions de francs, soit 30 millions de francs en crédits d'intervention et 20,3 millions de francs en crédits de paiement au titre des investissements, contre 32,8 millions de francs en 1999.

La nouvelle génération de contrats de plans, dont l'exécution doit s'étendre entre 2000 et 2006, doit répondre aux objectifs qui ont été fixés par le ministère et qui s'articulent autour des axes suivants : l'amélioration de la qualité de la commercialisation des hébergements et la réhabilitation de l'immobilier touristique ; l'organisation et la mise en oeuvre d'un dispositif de mesures stratégiques de l'économie touristique ; l'adaptation des entreprises du tourisme aux évolutions du marché, la concrétisation du droit aux vacances pour tous et le renforcement de l'attractivité des territoires fondé sur leur développement durable.

Au regard de ces ambitions partagées, l'enveloppe consacrée au tourisme reste fort modeste, même si elle enregistre une importante progression. J'insiste sur la nécessité d'abonder ses crédits lors de la réunion du comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire du mois de décembre, qui doit répartir la deuxième enveloppe.

Il est en effet regrettable que le tourisme reste le parent pauvre du contrat de plan alors que sa contribution à l'aménagement du territoire et à l'emploi peut être l'une des plus fortes en résultats.

A cet égard, je souhaite, madame la secrétaire d'Etat, évoquer parmi les priorités fixées pour les contrats de plan trois points.

S'agissant de la réhabilitation de l'immobilier touristique, il y a deux urgences.

La première urgence concerne le parc réalisé dans le cadre du plan neige et de l'aménagement du littoral. Je ne peux que regretter que le dispositif fiscal mis en oeuvre à l'initiative du Parlement, il y a un an, par voie d'amendements dans le cadre de la loi de finances pour 1999 ne soit toujours pas opérationnel un an après, faute de décrets d'application. Cette situation n'est admissible ni au regard des droits du Parlement ni au regard de l'urgence. Sans doute, madame la secrétaire d'Etat, partagezvous mon sentiment pour vous être heurtée vous-même à des pesanteurs en essayant de débloquer la situation.

L'autre urgence concerne l'hôtellerie familiale, qui constitue un maillage indispensable du tourisme dans le monde rural des stations familiales et pour les itinéraires touristiques.

S'agissant des contrats de plan, j'insiste sur la nécessité de prendre en compte dans les régions concernées des programmes en faveur du renouvellement du parc de remontées mécaniques pour les stations moyennes, en raison même de l'évolution des coûts liés au renforcement de la réglementation.

Il en va de même de la nécessité du développement de la neige de culture, garantie indispensable eu égard aux aléas climatiques, notamment en début et en fin de saisons. J'attire votre attention, madame la secrétaire d'Etat, sur le fait que l'Autriche, notre principal concurrent, a réalisé en 1999 pour 108 millions d'euros de neige de culture, contre 30 millions seulement en France - les Autrichiens ont un domaine de neige de culture beaucoup plus important que le nôtre, comme cela a été rappelé lors des discussions de la convention alpine - et que nos concurrents italiens et autrichiens nous dépassent pour la première fois pour ce qui concerne les investissements en téléportés. Il s'agit là d'une situation nouvelle qui doit attirer tout particulièrement notre attention.


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Troisième point : la jonction entre le contrat de plan et les fonds structurels européens. Ce point concerne notamment les territoires les plus fragiles, ceux du futur objectif 2 et ceux qui sortiront de l'objectif 5 b et qui disposeront du dispositif compensatoire.

Vous avez fixé vos priorités pour les contrats de plan.

Il importe que les futurs DOCUP - documents uniques de programmation - de l'objectif 2 intègrent ces priorités afin de mobiliser les crédits communautaires sur ceux-ci.

Les moyens existants sont supérieurs aux crédits propres du ministère dans ce secteur et doivent remplir leur rôle de levier.

Au registre des crédits d'investissement, il y a lieu de saluer l'achèvement du plan « patrimoine », qui a permis la réhabilitation de nombreux hébergements touristiques à caractère associatif notamment grâce aux efforts effectués depuis trois ans, conjugué aux contributions des régions et à celles de l'Agence nationale pour le chèque-vacances.

Enfin, pour ce qui concerne l'action propre du ministère, je voudrais attirer votre attention sur le besoin urgent de mettre en place une politique volontariste en faveur du tourisme dans les départements et territoires d'outre-mer. Cette activité représente, dans presque tous les cas, le premier secteur économique et emploie jusqu'à 8 à 9 % de la population. Cependant, de nombreux handicaps freinent son développement. Il est en particulier urgent d'instaurer pour ces territoires un dispositif fiscal cohérent et stable, tenant compte des réalités des concurrences régionales dans la Caraïbe, s'agissant des départements antillais, ou dans l'océan Indien, s'agissant de la Réunion par rapport, entre autres, à l'île Maurice.

Mes chers collègues, il ne m'est pas possible d'évoquer dans le détail les autres sujets. Je vous renvoie donc au rapport de la commission des finances. Je souhaite néanmoins citer la nécessité de conforter encore les moyens financiers de Maison de la France face aux moyens mobilisés par nos concurrents, plus importants, et à l'émergence du commerce électronique dans le tourisme.

Du strict point de vue des crédits, nous pouvons reconnaître que ce budget va dans la bonne voie, et je veux pour cette raison, madame la secrétaire d'Etat, saluer votre action personnelle. S'il ne s'était agi que de cela, j'en aurais vraisemblablement proposé l'approbation. Mais au-delà, trois questions restent en l'état, qu'il ne m'est pas possible de passer sous silence compte tenu de leur importance pour l'économie touristique tout entière.

La première est la réhabilitation de l'immobilier de loisir. Je ne reviendrai pas sur ce que j'ai dit au sujet de l'absence des décrets. Nous sommes dans une situation d'urgence : nous entrons dans la période hivernale et les clients sont là et nous pourrions donc motiver les gens pour qu'ils réhabilitent leurs logements. Mais comme le dispositif n'est pas en place, c'est une saison qui sera perdue.

Deuxième question : la TVA appliquée à la restauration.

Je ne relancerai pas le débat qui a eu lieu lors de la discussion de la première partie du projet de loi de finances, me contentant de rappeler qu'il s'agit d'abord de mettre fin à une distorsion réelle de concurrence au niveau intérieur entre fast food et restauration traditionnelle, et au niveau extérieur entre la France et ses principaux concurrents touristiques européens au détriment de notre pays.

Nous souhaitons que le Gouvernement accepte d'accorder à nos professionnels, qui en ont besoin, ce que nous allons soutenir pour le Portugal.

Troisième question : la dotation touristique au sein de la dotation globale de fonctionnement.

La dotation touristique, d'un montant de plus de 1,1 milliard de francs, fait l'objet depuis 1994 d'une cristallisation au sein de la DGF, même si, grâce au combat de l'ANEM, l'Association nationale des élus de la montagne, l'identification a été maintenue.

Un rapport remis au Parlement au début de l'année, avec plusieurs années de retard dont sont responsables plusieurs gouvernements, a convenu des injustices créées par la cristallisation. Celle-ci a un effet de rente au bénéfice des communes qui investissent moins que par le passé au détriment des stations en développement, qui ne bénéficient d'aucune mesure d'accompagnement, leur dotation touristique étant gelée pour les mieux placées, voire nulle pour les stations les plus récentes.

Il ne s'agit pas de demander globalement plus pour les communes touristiques, mais, dans un premier temps, d'utiliser la croissance naturelle de la dotation pour supprimer progressivement ces injustices. Tel est le sens du travail commun engagé par l'Association des maires des stations classées et communes touristiques, l'Association des maires des stations de sports d'hiver et d'été et l'Association nationale des élus de la montagne.

Le 5 novembre, ici même, lors de la discussion du texte concernant la DGF, j'ai eu l'occasion de défendre des amendements dans ce sens. Malgré l'avis défavorable du rapporteur, votre collègue Jean-Pierre Chevènement a bien voulu reconnaître la justesse du problème posé et accepter un travail commun sur le sujet. Je souhaite que vous puissiez nous appuyer et que ce travail aboutisse au cours de l'année 2000 pour redonner vie à une dotation qui est aujourd'hui le principal instrument d'intervention du budget de l'Etat en faveur du tourisme.

T elles sont les trois raisons qui m'ont conduit, madame la secrétaire d'Etat, à recommander à notre commission des finances de s'abstenir sur votre budget, afin de marquer notre impatience. A une voix d'écart, celle-ci s'est toutefois prononcée en faveur du vote des crédits.

En conséquence, je me dois de demander à l'Assemblée, au nom de la commission des finances, d'émettre à son tour un vote favorable. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission de la production et des échanges.

M. Jean-Pierre Defontaine, rapporteur pour avis de la commission de la production et des échanges.

Monsieur le président, je m'associerai à votre déclaration liminaire. Le Nord Pas-de-Calais, en d'autres circonstances dramatiques, a pu mesurer la légitimité de la solidarité nationale en de tels cas.

Madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je suis chargé de vous présenter l'avis rendu par la commission de la production et des échanges sur le projet de budget du tourisme pour 2000. La commission déplore depuis plusieurs années que les dotations budgétaires, pour ce secteur d'activité, soient si réduites - à l'instar des crédits de la jeunesse et des sports, d'ailleurs - et qu'elles occupent une part relative si faible du budget général de l'Etat, au regard de tout ce que le tourisme apporte aux équilibres économiques, sociaux et territoriaux.


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Je réitère cette remarque pour le projet de budget 2000, mais en la nuançant considérablement, car nous avons confiance dans l'action inventive et résolue que vous conduisez depuis plus de deux années, madame la secrétaire d'Etat. Cette action, en dépit de la modicité des crédits, contribue de manière décisive aux succès multiples que la France continue d'obtenir dans le domaine du tourisme.

Ainsi que l'a rappelé M. Bouvard, notre pays est resté, en 1998 et au début de 1999, la première destination touristique mondiale, le nombre global de visiteurs étrangers ne cessant de croître et ayant dépassé les 70 millions.

Le triomphe obtenu par nos footballeurs lors de la Coupe du monde, à l'été 1998, y est sûrement pour quelque chose.

D'une façon générale, les activités touristiques apparaissent de plus en plus comme un secteur économique essentiel, qui contribue au rayonnement de la France dans le monde. Représentant 7,3 % du PIB, contribuant pour 71 milliards de francs à l'excédent de la balance des paiements, il regroupe au moins 600 000 emplois salariés, près de 180 000 entreprises ; de plus, c'est le seul secteur dans lequel la modernisation des processus de production s'accompagne de créations d'emplois.

Les différentes formes de tourisme, je le rappelle dans mon rapport écrit, obtiennent de grands succès et, dans un univers de plus en plus concurrentiel, réalisent des progrès constants.

Tel est le cas pour le tourisme rural, qui bénéfice toujours d'un engouement marqué, en particulier auprès des étrangers, pour qui notre pays constitue la destination verte par excellence. Disposant d'atouts réels - existence d'un patrimoine national et culturel significatif, variété des paysages, qualité de l'offre -, le tourisme rural français tend à rattraper le retard qu'il présente encore par rapport à celui de nos principaux partenaires. La mise en place d'un serveur national de réservation du tourisme en espace rural, programmée en juin 1994, vient par ailleurs combler une lacune importante. Pourtant, il semblerait qu'un léger tassement de la fréquentation touristique de nos campagnes se fasse sentir depuis plusieurs années.

Quelles marges de progrès existent pour ce type de tourisme ? Le tourisme du littoral et celui de la montagne disposent eux aussi, bien évidemment, d'atouts considérables, mais sont confrontés à des défis parfois similaires : la nécessité de conquérir de nouvelles clientèles, la nécessité pour les professionnels de s'organiser pour améliorer la qualité de leurs produits. S'agissant du tourisme en zone littorale, on ne peut que souhaiter que se développent les actions en matière de loisirs nautiques, visant en particulier à renforcer la sécurité. S'agissant du tourisme en montagne, il faut, d'une part, entreprendre une véritable réhabilitation de l'immobilier touristique, d'autre part, poursuivre les études et réflexions sur les moyens de contrecarrer le manque de plus en plus fréquent d'enneigement dans les montagnes françaises.

J'en arrive au tourisme d'affaires, secteur dans lequel notre pays occupe une position enviable, Paris étant, depuis maintenant de nombreuses années, la capitale mondiale des réunions internationales, et l'offre française se situant au deuxième rang mondial, après les EtatsUnis. Il sera essentiel, dans les années qui viennent, de disposer d'outils performants pour maintenir ces positions.

Le tourisme thermal et la thalassothérapie sont symboliques, eux aussi, de l'excellence française, faisant vivre nombre de stations et contribuant ainsi au maintien de l'emploi et à l'aménagement du territoire.

Cependant, en ce qui concerne le thermalisme, deux points sont inquiétants. D'abord, certaines propositions de la Caisse nationale d'assurance maladie ont donné à penser à une réduction des possibilités de remboursement des cures thermales. Pouvez-vous, madame la secrétaire d'Etat, réitérer devant notre assemblée les assurances que vous avez données sur ce point devant la commission de la production et des échanges ? Il en va de la survie de p lusieurs de nos stations, celles notamment qui a ccueillent moins de 1 000 curistes chaque année.

Deuxième inquiétude : comment faire pour rendre le thermalisme plus ludique, plus dynamique, peut-être, et susceptible d'attirer une clientèle plus jeune ? Les défis lancés à la thalassothérapie, qui connaît un succès croissant depuis le début de la décennie, sont beaucoup moins lourds. Ils concernent plutôt la commercialisation du produit, la thalassothérapie peinant pour élargir sa clientèle.

Le tourisme fluvial et la navigation de plaisance, enfin, qui connaissent un succès réel depuis plusieurs décennies, doivent se développer encore, pour faire face à une demande mal analysée, mais qui s'étend et se diversifie.

Face à toutes ces évolutions, le budget du tourisme pour 2000 maintient un cap très sûr, les moyens de paiement prévus augmentant de 7,7 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1999. Enregistrée pour la deuxième année consécutive, cette progression contraste avec la politique suivie dans le passé.

Dans ce projet de budget, nous avons noté en particulier que les crédits d'étude nécessaires à la réalisation de la nouvelle enquête aux frontières, qui doit être adaptée aux contraintes résultant de la mise en place de l'euro, augmentent de 137 %. Les crédits de l'Agence française de l'ingénierie touristique, l'AFIT - outil principal de l'Etat pour la valorisation de l'offre touristique, dont la structure a été reconduite pour une durée de six ans s'accroissent quant à eux de 1 million de francs, pour atteindre 9 millions de francs. Quant aux dotations de Maison de la France, qui joue un rôle très important de promotion de la France à l'étranger, elles augmentent de 13,4 %, cet accroissement compensant en particulier le coût de l'assujettissement de l'organisme à la TVA. Enfin, les moyens financiers attribués aux contrats de plan Etatrégions s'élèvent à 30 millions de francs, soit une hausse de près de 70 %.

Ces évolutions sont de bon augure, à l'heure où la concurrence se fait plus vive et où la demande française et étrangère se révèle plus exigeante.

Pourtant, plusieurs questions se posent à propos de ces divers outils de la politique touristique.

Au cours des dernières années, Maison de la France a dû, en raison de difficultés budgétaires, annuler des opérations de promotion, voire fermer des représentations à l'étranger. Quelles assurances pouvez-vous nous apporter, madame la secrétaire d'Etat, sur le maintien de moyens importants au profit de cet instrument décisif de promotion de nos produits ? Nous sommes, par ailleurs, nombreux à estimer que les dotations consacrées à la promotion sont sensiblement inférieures au niveau qu'elles atteignent chez nos principaux partenaires.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial.

C'est vrai !


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M. Jean-Pierre Defontaine, rapporteur pour avis.

Quelles actions peuvent être menées pour remédier à cette situation ? Quant à l'AFIT, on a souvent estimé qu'elle était insuffisamment dotée en personnels, ce qui peut être jugé préoccupant étant donné son rôle stratégique en matière de valorisation de l'offre touristique. Quels éclaircissements pourrez-vous nous apporter à ce sujet, madame la secrétaire d'Etat ? J'en viens maintenant à un type d'actions qui est significatif de votre approche et dont chacun, ici devrait se féliciter : la mise en oeuvre du droit aux vacances pour tous. La politique originale et vigoureuse que vous avez su conduire prend notamment appui sur les dispositions de l'article 140 de la loi du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions, qui a posé le principe d'un égal accès de tous aux vacances.

Un premier dispositif a été mis en place, à titre expérimental, dès l'été dernier : la bourse solidarité vacances, qui a permis d'organiser le départ en vacances de 1 200 personnes issues de milieux défavorisés et de recenser pas moins de 6 000 offres d'hébergement, présentées par les opérateurs du tourisme. Cette expérience semblant satisfaisante, un mécanisme de pérennisation du dispositif est en train de s'ébaucher, sous la forme d'un groupement d'intérêt public. Il devrait permettre de proposer aux familles concernées 10 000 places d'hébergement de vacances en 2000. Il faut également noter l'intérêt qu'a suscité la bourse solidarité vacances auprès des transporteurs.

De la même façon, vous avez su organiser le départ en vacances de jeunes en grande difficulté, à partir de projets montés par de petites associations de quartier, ayant pour but de faciliter leur intégration, en modifiant leur relation à l'environnement et à la société. Plus de 500 jeunes issus de milieux défavorisés ont pu bénéficier de ce dispositif, par le biais de vingt-deux associations.

On n'aurait garde d'oublier enfin, s'agissant du tourisme social, l'extension du chèque vacances aux employés des entreprises de moins de cinquante salariés, grâce à la loi du 12 juillet 1999.

Toutes ces actions sont utiles : elles permettent enfin à des familles qui sont parmi les plus démunies d'accéder aux vacances ; elles renforcent la cohésion sociale ; elles sont dignes d'une société véritablement démocratique.

J e voudrais d'ailleurs rapprocher de cela l'action conduite pour assurer l'intégration des personnes handicapées, à la faveur des vacances et des loisirs, qui s'inscrit dans les priorités du secrétariat d'Etat au tourisme.

Pour la deuxième année consécutive, une vaste campagne nationale de sensibilisation à l'accueil des personnes handicapées sur les lieux de vacances a été ainsi conduite au mois de juillet 1999, ce qui permet tout à la fois de combler le retard que présente encore notre pays et de répondre, là encore, aux exigences de l'intégration et de la démocratie.

Le débat en commission de la production et des échanges a conduit à soulever d'autres problèmes : celui de l'application au secteur du tourisme de la loi sur les 35 heures ; celui, récurrent, de la disparité des taux de TVA pesant sur les différentes formes de restauration. Sur ces points, madame la secrétaire d'Etat, vous nous avez donné des réponses très complètes, que vous pourrez réitérer devant la représentation nationale.

Le projet de budget du tourisme va dans le bon sens.

Il permet en effet de soutenir efficacement le tourisme de notre pays, pour l'aider, dans l'avenir, à être pourvoyeur d'emploi et d'activité. Nous avons confiance dans votre action, notamment dans la dimension sociale tout à fait significative que vous avez su donner à la politique touristique. La commission de la production et des échanges a donné un avis favorable à l'adoption de ces crédits et je souhaite que nous soyons très nombreux à les voter.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

Mes chers collègues, avant de donner la parole à M. Léonce Déprez, premier orateur inscrit, je demande aux différents intervenants de bien vouloir respecter le temps qui leur est imparti, afin que nous puissions tenir dans les délais prévus.

Monsieur Déprez, vous avez la parole.

M. Léonce Deprez.

Nous sommes tous unis dans une même pensée et le groupe UDF a apprécié la minute de recueillement que vous avez demandée, monsieur le président. Nous pensons à ceux qui souffrent dans le Sud de la France, notamment dans des régions à vocation touristique.

Madame la secrétaire d'Etat, je connais trop la pensée profonde des rapporteurs Michel Bouvard et Jean-Pierre Defontaine pour ne pas approuver ce qu'ils ont dit l'un et l'autre. Sachant que vous aurez à coeur de leur répondre précisément, j'éviterai de revenir sur leurs propos excellents - je pense notamment à ceux de JeanPierre Defontaine relatifs au tourisme pour tous.

Je crois toutefois utile de le préciser, c'est la treizième année consécutive - d'abord comme rapporteur, puis au nom du groupe de l'UDF - que je m'exprime à l'Assemblée nationale pour proposer de jeter les bases d'une véritable politique d'économie touristique de la France, à la lumière de mon expérience.

Depuis treize ans, et particulièrement depuis dix ans, c'est-à-dire depuis l'événement choc de la chute du mur de Berlin, les uns et les autres, nous sommes conduits à insister chaque année davantage sur les perspectives de l'industrie touristique de notre pays, en termes de croissance du chiffre d'affaires, de milliards d'excédent de la balance des paiements, d'apport de devises et d'emplois nouveaux.

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme - comme ses prédécesseurs, d'ailleurs - a été heureuse et fière d'insister sur les résultats révélés par les statistiques officielles de 1998 et 1999. Et nous partageons d'autant plus sa fierté et son bonheur qu'elle travaille avec une fraîcheur intellectuelle et un esprit de militant qui nous est sympathique - militant du tourisme, bien entendu... (Sourires.)

Car je suis de ceux qui pensent que la politique touristique devrait faire l'objet d'une mobilisation nationale et d'un accord général sur tous les bancs de cette assemblée.

Il n'y a pas lieu, en la matière, de manifester un esprit partisan. D'ailleurs, sur les points essentiels, les positions des uns et des autres se rejoignent finalement assez souvent.

Mais plus que d'un budget exprimant de bonnes intentions, comme celui-ci, l'économie touristique a besoin d'une volonté politique plus forte et plus clairement définie.

En effet, nous ne devons pas laisser penser que le mouvement naturel de développement des échanges entre nations et donc de développement des voyages internationaux - pour les vacances ou les affaires - va suffire pour atteindre le triplement des flux touristiques attendu par la France, d'ici à 2010, objectif que vous avez proposé, à juste titre, en début d'année.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 15 NOVEMBRE 1999

D'autant - et je le dis tout spécialement à l'intention de ceux qui, comme moi, y sont très favorables -, l'économie de liberté, c'est-à-dire l'économie de marché, même si nous voulons la transformer en une économies ociale de marché, comporte des risques et des contraintes. Elle peut connaître des périodes de freinage, des cycles de croissance, mais aussi de décroissance. Et surtout, la croissance peut se réaliser dans le désordre et accentuer les déséquilibres démographiques, économiques et sociaux dont souffrent déjà les régions françaises.

L'économie touristique doit être au contraire jugée comme une chance de rééquilibre au profit des régions les moins favorisées.

S'il est vrai que l'évolution historique vers la réduction du temps de travail aboutira, globalement, à augmenter les temps libres, donc d'évasion et de vacances, hors du cadre de travail quotidien, il serait trompeur de laisser croire qu'elle créera des emplois générateurs de salaires et de pouvoir d'achat.

Première idée essentielle que j'exprimerai : la mondialisation impose de mener une politique d'économie touristique plus volontariste.

Je tire argument de mes propos introductifs pour demander aux gouvernants de la France, pour la treizième fois, de la tribune de l'Assemblée nationale, une politique nationale plus cohérente, plus dynamique, et en réalité plus volontariste, en vue de permettre à l'économie touristique de consolider chaque année sa position de première source de vie de l'économie nationale, devant les industries agroalimentaire et automobile.

Je le dis au nom de mon groupe : il est impératif que l'économie touristique de la France soit plus clairement définie qu'elle s'insère désormais chaque année un peu plus, comme toutes les autres branches de l'économie nationale, dans l'économie mondiale, c'est-à-dire dans une compétition qui s'est ouverte sur tous les continents dans la dernière partie du XXe siècle.

La découverte de nouveaux continents et de nouveaux espaces est devenue une motivation de plus en plus forte de déplacements et de séjours touristiques hors de la France, et même hors de l'Europe, pour les jeunes générations comme pour les aînés. Cette ouverture sur le monde, très heureusement, fait que l'économie touristique représente aujourd'hui 11,5 % du PIB mondial.

Mais elle aboutit aussi à une régression de 17 points des parts de marché de l'Europe depuis 1970, selon les conclusions des études du Conseil économique et social.

Il nous appartient donc de nous donner comme ambition d'augmenter chaque année la part de la France dans les 49 % des recettes mondiales que l'Europe conserve dans l'économie touristique.

Il nous appartient aussi, et la France devra jouer un rôle moteur en ce domaine, de convaincre nos partenaires européens de mieux coordonner leurs efforts et de mieux harmoniser leurs législations, notamment en matière de TVA dans la restauration, pour que l'Europe, selon les capacités naturelles des pays qui la composent, cesse de perdre du terrain en recettes touristiques dans l'évolution du marché touristique mondial.

Le second volet de mon intervention repose sur une interrogation assortie d'une réponse : comment faire pour passer d'une économie correspondant à un « laisser-faire les gens », à un « laisser-courir les clients » ou à un « laisser-dormir les territoires », à une économie touristique de développement durable ?

M. André Capet.

Très bien !

M. Léonce Deprez.

L'année 2000, après les dix dernières années du siècle que nous venons de vivre, doit sonner le départ d'une mobilisation nationale qui pourrait passer par la presse, mais qui doit être engagée à l'Assemblée nationale.

Pour quoi faire ? Pour obtenir de nos gouvernants une cohérence interministérielle beaucoup plus claire des mesures à prendre pour le développement de l'économie touristique à travers la France et au profit des Français et des Européens.

Pour obtenir des partenaires publics et privés liés à nos territoires à capacité d'accueil touristique une cohésion beaucoup plus forte dans leurs efforts, cohésion qui doit être stimulée par des textes législatifs qu'il nous faut avoir le courage de réformer sans plus attendre pour les adapter à l'évolution du pouvoir d'achat des citoyens et à leur exigence d'une vie plus équilibrée.

La cohérence interministérielle des mesures à prendre doit tendre, d'abord, à vaincre le vice trop longtemps caché de l'économie touristique par rapport aux autres branches de l'économie nationale, vice dont nous souffrons tous, nous qui sommes les défenseurs de l'économie touristique, et qui tient à la limitation des activités de l'économie touristique et donc de son rendement à quelques mois par an.

Sous le gouvernement de M. Edouard Balladur, j'ai déjà fait le tour de France pour convaincre que le tourisme ne devait plus s'enfermer dans la prison d'une seule saison, mais que l'avenir devait être le tourisme des

« quatre saisons ». Ce tourisme des quatre saisons mettra fin au grand point négatif des bilans même flatteurs présentés chaque année par le ministère du tourisme. Ce point négatif se résume à quelques chiffres : sur un million d'emplois directs générés par l'économie touristique, 420 000 sont encore saisonniers, 310 000 en été, 110 000 en hiver.

Il n'est plus possible de parler du tourisme sans penser économie touristique. J'ai d'ailleurs constaté, madame la secrétaire d'Etat, que vous êtes maintenant la première à parler d'économie touristique.

La limitation d'une production à la durée d'une saison de deux à trois mois sur douze est un handicap économique difficilement supportable pour les investisseurs publics et privés. Une production limitée à deux, trois ou même six mois par an serait-elle être vivable dans les autres branches de l'économie ? Certainement pas.

Ces emplois dits saisonniers sont aussi une plaie ouverte sur le corps social de la nation. Bien sûr, on peut envisager, comme l'a fait un récent rapport, un certain nombre de mesures pour un traitement social des conséquences humaines de cette activité professionnelle limitée à quelques mois par an. Mais le meilleur traitement pour ces emplois, comme pour le chômage en général, est le traitement économique, qui impose des mesures d'aménagement du temps et des espaces.

J'ai voulu démontrer dans le Pas-de-Calais - et pourtant disaient certains, c'est le « Nord » - que l'économie touristique pouvait se développer sur douze mois. La station du Touquet a ainsi mérité d'être citée en exemple comme « station des quatre saisons ». La région du Nord Pas-de-Calais est en train d'adopter le même thème, et je m'en réjouis.

M. Jean-Pierre Defontaine, rapporteur pour avis.

C'est vrai !

M. Léonce Deprez.

De l'enduro de février aux salons de novembre et aux illuminations de décembre, cette station vit et fait vivre. Il peut en être ainsi à travers toute la


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France, là ou existent des pôles d'économie touristique.

M ais il s'agit d'abord de comprendre et de faire comprendre que l'économie touristique ne doit plus se limiter au temps dit des grandes vacances, ni même aux temps de vacances tout court. Elle a comme matière première précieuse le temps libre. Le temps libre, c'est le temps qui n'est pas affecté au travail quotidien ou hebdomadaire.

Cette définition est illustrée depuis quelques années par la « libération » qu'offrent les fins de semaine, libération qui pousse déjà des millions de Français à aller chercher en dehors de leur lieu de travail l'évasion dont ils ont besoin, en famille si possible, pour assurer l'équilibre de leur vie.

Encore faut-il que cette évasion ne se limite pas à un déplacement sans repos et sans attrait et qu'elle soit orientée sur un séjour en un autre lieu doté de capacités d'accueil et d'animation.

Les temps libres des uns deviendront le temps de travail des autres dans la mesure où ils seront compris comme temps d'enrichissement et non d'appauvrissement pour l'individu, pour la famille et pour la société. Il s'agit donc de prendre, au niveau gouvernemental, toutes les mesures interministérielles qui s'imposent pour que les temps libérés de travail pour les uns deviennent des temps source de travail pour les autres.

Qu'est-ce qui peut motiver des déplacements et des séjours touristiques tout au long de l'année ? Toutes les formes de la vie de l'esprit, de la vie du corps, de la vie des familles peuvent s'intégrer dans des temps de séjour touristique pourvu qu'un effort soit fait pour offrir des activités sportives, culturelles, des activités de santé et de cure, de congrès et de séminaires, de découverte de la nature ou de l'histoire de France.

C'est ce tout qui fait le tourisme des quatre saisons. Et c'est ce tout qu'il faut rendre accessible aux Français, par une meilleure organisation de leur temps de vie, grâce à des contrats entre partenaires sociaux, mais aussi, par une politique routière et ferroviaire axée sur les communes ou pays ruraux à capacité d'accueil touristique.

Pour prendre un exemple dans ma région, les liaisons est-ouest devant relier la métropole Nord au littoral du Pas-de-Calais souffrent encore, en cette fin de siècle dit de progrès, d'un scandaleux retard ! Tous les députés qui représentent le Nord Pas-de-Calais en conviennent.

Mais pour aboutir à ce progrès économique et à ce progrès social d'un tourisme des quatre saisons, il faut combler le vide législatif qui handicape notre économie touristique en promouvant une organisation territoriale de l'économie touristique.

La politique d'aménagement du territoire doit s'accompagner d'un effort d'organisation territoriale.

Amorcé timidement par des textes législatifs qui ont permis de créer des comités régionaux, puis des comités départementaux, puis des offices du tourisme régis par la loi de 1901 ou constitués sous forme d'EPCI, cet effort d'organisation territoriale doit tendre aussi, par d'autres textes législatifs et réglementaires, à clarifier et à préci ser les conditions du développement d'une économie de partenariat au sein même des offices de tourisme.

J'ai pris note, madame la secrétaire d'Etat, que vous tiendrez compte de la proposition de loi que j'ai déposée à la présidence de l'Assemblée nationale et qui tend à promouvoir une organisation territoriale de l'économie touristique capable de dynamiser la vie touristique sur notre territoire. Vous avez exprimé de bonnes intentions à cet égard. Je ne doute pas qu'au cours de l'année 2000, avec l'ardeur qui vous caractérise, vous les transformerez en actions concrètes avec le concours de tous ceux qui vous entourent.

Stations thermales, stations de montagne, stations littorales, stations-villes d'art et d'histoire, villes de congrès, pays d'attrait rural intercommunal, ont besoin d'une reconnaissance de leurs charges et de leurs efforts par une labellisation officialisant leur vocation de participer au chiffre d'affaires de l'économie touristique.

Ces collectivités communales ou intercommunales ont aussi besoin d'une dotation touristique stimulante, justifiée par les « temps libres heureux » qu'elles offrent à des millions de Français. Il est temps que cette dotation touristique sorte de la clandestinité où on l'a, bien à tort, camouflée dans l'enveloppe de la DGF.

Madame la secrétaire d'Etat, nous ne pouvons pas moralement nous opposer à votre budget. Nous ne pouvons pas non plus l'approuver des deux mains.

M. Jean-Pierre Dufau.

Une seule suffira !

M. Léonce Deprez.

Nous attendons de votre part des réponses aux propositions que le rapporteur et moi-même vous avons faites. Je ne doute pas que vous nous les apporterez l'an prochain. En attendant, sans nous opposer à votre projet de budget, nous vous encourageons à aller plus loin. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Robert Honde, pour quinze minutes.

M. Robert Honde.

Madame la secrétaire d'Etat, votre projet de budget traduit la volonté du Gouvernement d'intervenir de façon plus dynamique encore, non seulement pour conforter, moderniser et développer un secteur essentiel de l'activité économique de la France, mais aussi pour contribuer à l'aménagement de notre territoire.

Avec des moyens qui augmentent de près de 14 % par rapport à 1999, le budget du tourisme a pour ambition : D'assurer une meilleure prise en compte des réalités et des potentialités de chaque territoire et de chaque filière par des moyens d'observation économique renforcés ; De soutenir, en particulier dans le cadre des contrats de plan Etat-région, la mise en place de politiques de développement local, en encourageant la définition de schémas régionaux et départementaux d'aménagement et de développement touristique ; De renforcer la politique sociale du tourisme ; De mobiliser l'ensemble des acteurs du secteur pour d iversifier, améliorer, commercialiser et promouvoir l'offre touristique française, en mettant notamment l'accent sur les nouvelles technologies de l'information et de la réservation ; De développer la politique de coopération internationale et de valorisation de nos savoir-faire à l'étranger ; Enfin, de poursuivre l'effort d'amélioration des moyens et conditions de travail des délégations régionales au tourisme.

Cette approche globale est complétée par une approche sectorielle.

En ce qui concerne le tourisme rural, on constate que 73 % de la fréquentation touristique de la France n'intéressent que 20 % du territoire alors que nos régions rurales disposent d'un potentiel extraordinaire et peuvent proposer une diversité de paysages et d'activités unique en Europe.


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Je suis l'élu d'un département qui représente un concentré d'activités de pleine nature mais qui peine encore à s'affirmer. La mise en place des schémas régionaux et départementaux d'aménagement et de développement touristique permettra de coordonner les actions de tous les acteurs du tourisme. Je souhaite que, dans le cadre des contrats de plan Etat-région, des politiques de développement local puissent être élaborées en fonction de ces potentialités et que le tourisme soit un réel outil de développement, créateur d'emplois dans nos zones rurales.

Il convient en particulier de renforcer l'action en faveur de l'agrotourisme. Que ce soit par le développement des hébergements locatifs au sein des exploitations agricoles ou par l'amélioration de la commercialisation des produits du tourisme en espace rural, l'agrotourisme permet en effet de proposer une alternative économique intéressante aux exploitants agricoles qui peuvent ainsi compléter leurs revenus...

M. Jean-Pierre Defontaine, rapporteur pour avis.

Très bien !

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial.

C'est beaucoup mieux que le loup ! (Sourires.)

M. Robert Honde.

... tout en continuant à s'inscrire dans des démarches de qualité au moment où la France se positionne à un niveau mondial pour le respect du consommateur et la qualité des productions agricoles.

S'agissant du tourisme en montagne, la montagne française a réalisé des investissements très importants qui lui ont permis de se constituer un patrimoine dont il convient de poursuivre et d'améliorer la valorisation.

Je pense que, pour rester dans cette logique de développement harmonieux du territoire, outre les actions spécifiques visant à optimiser le fonctionnement des stations par le montage et le financement de projets de stations, il reste indispensable de développer des actions par filière qui auront pour vocation l'aide au développement des activités touristiques de pleine nature, que ce soit la randonnée, la découverte des espaces naturels de haute montagne ou le développement des routes et chemins touristiques à thème.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial.

Très bien !

M. Robert Honde.

Cette organisation du territoire doit également intégrer la notion de patrimoine et, à travers celle-ci, prendre en compte le développement de produits de tourisme culturel.

Les potentialités de notre territoire attirent une nombreuse clientèle étrangère. Toutes les actions qui visent à renforcer la promotion et la commercialisation de notre offre touristique à l'extérieur de nos frontières, en particulier au moyen des nouvelles technologies de l'information, doivent permettre à l'ensemble des acteurs du tourisme, y compris les prestataires touristiques des zones rurales, de développer leurs moyens de commercialisation.

Ce renforcement passe par la formation des acteurs du tourisme, qui pourront ainsi optimiser leurs prestations en tenant encore mieux compte des attentes de la clientèle.

L'augmentation de la clientèle étrangère, qui est l'un de nos objectifs, ne doit pas faire oublier que, de surcroît, nos concitoyens profitent déjà des effets de la diminution d u temps de travail, laquelle représente quelque 180 heures de temps libre par an. Ce paramètre nouveau est un atout supplémentaire, réduit certes au niveau national, mais qui influera malgré tout de façon tangible sur la demande touristique.

Madame la secrétaire d'Etat, votre projet de budget, tel qu'il nous est présenté, rencontre toute mon approbation.

Mais je me permets à nouveau d'insister sur l'impérieuse nécessité d'intégrer plus encore, dans ces efforts en faveur du tourisme, l'élément structurant que représente cette activité économique pour les zones rurales, car le tourisme peut être un moyen d'insertion dans la modernité sans perdre son âme. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

Je vous remercie, mon cher collègue, de votre concision.

L a parole est à M. Jean-Michel Couve, pour dix minutes.

M. Jean-Michel Couve.

Monsieur le président, je voudrais, au nom de mon groupe, m'associer à l'hommage que vous avez rendu aux victimes des intempéries du Sud-Ouest, faire part de notre solidarité aux familles lourdement touchées et assurer de notre reconnaissance tous les sauveteurs qui ont déjà sauvé bien des vies et poursuivent courageusement leur action.

Madame la secrétaire d'Etat, le budget du tourisme que vous nous proposez pour l'année 2000 s'élève, en moyens de paiement, à 423,5 millions de francs. Il est en augmentation de 13,8 % par rapport aux crédits inscrits et de 7,67 % par rapport aux crédits votés en loi de finances initiale pour 1999.

Concernant un secteur d'activité si riche en perspectives de développement, toute augmentation de moyens mérite d'être soulignée. Je voudrais toutefois analyser cette progression pour la relativiser à l'aune de certaines réflexions.

Tout d'abord, 19,5 millions de francs supplémentaires alloués à Maison de la France n'auront pour objet que de compenser son assujettissement à la TVA. Il s'agit donc là d'une opération blanche pour le budget de l'Etat. Pour autant, Maison de la France n'aura guère plus de moyens réels de fonctionnement et d'action que l'an dernier. A noter d'ailleurs que cette augmentation constitue déjà une p art importante du pourcentage de croissance de l'ensemble des crédits de cette année, qui resteront toujours trop modestes et insuffisants.

De plus, dans ce cadre déjà très restreint, les dotations apparaissent, selon les articles et les chapitres, bien contrastées. Par exemple, on ne peut que se féliciter des 10 millions de francs supplémentaires que vous inscrivez aux crédits d'études, effort notable mais obligatoire pour prendre en charge la nouvelle enquête aux frontières suite à la mise en place de l'euro.

En revanche, statu quo en ce qui concerne la promotion et la communication, dont le budget reste à 3,2 millions de francs. La campagne « Bonjour » stagne, alors que nous savons bien que la qualité de l'accueil conditionne la fidélisation des clientèles et que nous devrions capitaliser sur les investissements réalisés les années antérieures pour cette opération.

Et que dire de la participation de votre ministère à la promotion des manifestations de l'an 2000 ? Voilà bien une occasion qu'il ne faudrait pas manquer. Or je n'ai pas trouvé de ligne budgétaire clairement identifiée sur ce thème et je crains qu'en réalité nous ne manquions de crédits pour tirer pleinement avantage de cette opportunité.

Quant au million consenti au service d'étude et d'aménagement touristique de la montagne, il ne lui permettra pas de mieux faire pour conforter nos stations de sports


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d'hiver, qui constituent pourtant, monsieur le rapporteur spécial, un des fers de lance de la « destination France ».

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial.

Certes !

M. Jean-Michel Couve.

Encore plus regrettable, et je tiens à y insister à nouveau cette année, est l'état de quasi-abandon dans lequel on laisse les vingt-six délégations régionales au tourisme. Ce ne sont ni les quelques fonctionnaires supplémentaires de catégorie A mis à leur d isposition à titre expérimental ni les symboliques 500 000 francs que vous leur attribuez en plus cette année, soit 19 300 francs supplémentaires par délégation, qui pourront y changer quoi que ce soit. Alors qu'en 1995 leurs missions avaient été précisées dans le cadre d'un plan de charge justement ambitieux, comment pourraient-elles l'assumer avec une allocation de 8 millions de francs ? Je reste persuadé que, pour contrôler les réglementations, aider à la coordination des politiques locales, optimiser l'utilisation des fonds de l'Etat et de l'Europe, mettre en oeuvre une véritable politique de formation, rendre plus fiables les méthodes d'observation et assister les préfets de région dans tous les domaines d'activité qui impliquent le tourisme, il faudrait porter un autre regard sur ces délégations régionales, les qualifier et leur donner enfin les moyens de réussir la déconcentration des missions impératives de suivi et d'arbitrage de l'Etat.

Je rappelle que, dans le domaine sanitaire, la réforme mise en oeuvre par Alain Juppé a permis la création des agences régionales de l'hospitalisation, services déconcentrés du ministère de la santé sans lesquels la politique de complémentarité public-privé n'aurait pu prospérer. Pourquoi ne pas s'en inspirer dans le domaine du tourisme pour nous garantir une meilleure consommation des crédits, éviter les surconsommations et les redondances, mettre mieux en adéquation les produits avec les marchés et mieux en phase les politiques de l'Etat avec celles des collectivités ? Une telle démarche de meilleure gestion des fonds publics constituerait déjà un pilier fort d'une véritable politique nationale du tourisme.

A propos de l'AFIT, je tiens à féliciter chaleureusement les cadres et les personnels de l'agence pour la qualité de leurs interventions, l'attention qu'ils portent aux préoccupations exprimées sur le terrain et l'engagement et l'assiduité dont ils font preuve sur chacun des dossiers traités. L'AFIT constitue bien un rouage essentiel de notre tourisme. Mais je ne suis pas convaincu que le million supplémentaire qui lui sera alloué cette année lui permette d'élargir son champ d'activité comme le souhaiteraient la plupart des acteurs du tourisme.

Quant au GIE Maison de la France, si l'on exclut les 19,5 millions de francs qui seront consacrés à la TVA, ce budget ne lui accorde qu'un million de francs supplémentaires. Je relève cependant que la subvention de l'Etat a ura augmenté de quelque 40 millions de francs depuis 1997, ce que je salue.

Cette évolution peut paraître satisfaisante car la preuve a été apportée de la corrélation étroite entre le montant des crédits dont cette structure bénéficie et les résultats obtenus en termes de fréquentation étrangère. Cela témoigne de l'efficacité de Maison de la France. Néanmoins, notre effort de promotion à l'étranger demeure inférieur à celui de certains pays européens comme l'Espagne et la Grande-Bretagne. Au plan mondial, nous nous situons en onzième ou douzième place. Nous devrions pourtant garder à l'esprit que, depuis 1990 et alors que le tourisme mondial et européen ne cesse de se développer, l'augmentation de nos recettes reste nettement inférieure à celle de l'Espagne et de l'Italie, par exemple.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial.

Tout à fait !

M. Jean-Michel Couve.

Pour renverser favorablement cette tendance et plutôt que de s'engager dans une surenchère de dépenses, il serait sans doute judicieux de renforcer les relations entre Maison de la France et les CRT pour les amener à mieux calibrer leurs produits et leurs destinations régionales en fonction des marchés. Pour cela, il faudrait engager en direction des CRT et même des CDT une campagne d'information et de rappel sur les missions générales de Maison de la France, sur les contraintes et les modes de fonctionnement des bureaux à l'étranger et sur les choix et méthodes à mettre en oeuvre par les régions afin d'être mieux promues et vendues.

Enfin, il serait grand temps de mettre un terme aux aléas budgétaires annuels de l'Etat en définissant, avec les partenaires du GIE, un programme d'engagement financier pluriannuel au moins sur trois ans. Cet effort s'accorderait avec celui que s'imposent en général les entreprises et, de plus en plus, les collectivités. Il poserait, lui aussi, les bases d'une véritable politique de promotion.

Je continue à déplorer les fermetures de certains bureaux, par exemple au Portugal, en Norvège, à Toronto et à Berlin, opérées au bénéfice d'un choix de nouveaux marchés pour le moins incertains comme la Chine, la Pologne et l'Europe de l'Est en général.

Je persiste également à regretter qu'un effort de promotion plus important ne soit pas consenti sur de grands pays de l'hémisphère sud, dont, je le rappelle, les grandes vacances se situent dans notre période hivernale ; je pense en particulier à l'Australie.

Les XIIe contrats de plan Etat-région prendront effet en 2000 et s'étendront, cette fois, sur sept années.

L'enveloppe relative au tourisme a été arrêtée à un montant bien trop modeste de 520 millions de francs. Encore une fois, le tourisme restera, comme l'indique très justement notre rapporteur spécial, le parent pauvre de ces nouveaux contrats du moins le craignons-nous beaucoup, ce qui signifierait que, pour la décennie à venir, n'aurait pas été pris en compte l'incomparable potentiel de richesses et d'aménagement du territoire de notre industrie touristique.

La politique sociale dont vous avez fait l'une de vos priorités, à laquelle nous souscrivons, bénéficiera de crédits sensiblement identiques à ceux de l'an dernier. Seul le soutien au secteur associatif voit ses moyens augmenter de 800 000 francs. Il faut reconnaître que cela est bien peu.

Quant à l'extension du dispositif des chèques-vacances, votée par votre majorité en juin dernier, elle me paraît toujours vouée à rester trop limitée pour les salariés des PME-PMI, compte tenu des plafonds et des contraintes que vous avez imposés. Elle restera difficilement accessible aux non-salariés et aux retraités du fait de l'absence, dans le texte, de toute norme et de tout soutien leur permettant d'en bénéficier.

Je ne reviendrai pas sur le choix opéré par le Gouvernement de faire bénéficier les travaux de logement de l'opportunité qui se présentait d'une baisse de TVA dans le cadre de l'expérimentation européenne sur les services à forte intensité de main-d'oeuvre. Je souligne simplement qu'il ne faut pas, en la matière, opposer la restauration au logement.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial.

Très bien !


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M. Jean-Michel Couve.

Ce choix peut se comprendre, mais je n'ai connaissance d'aucune intervention du Gouvernement français proposant d'intégrer les services de la restauration à l'annexe H de la sixième directive comme l'avait demandé la commission des finances du Sénat en mai dernier. Que comptez-vous faire à ce sujet, madame la secrétaire d'Etat, et dans quels délais ? Nous déplorons également, depuis des années, la cristallisation de la dotation touristique au sein de la dotation globale, car elle accroît injustement les distorsions entre les communes qui s'investissent fortement dans le développement touristique et celles qui continuent à bénéficier d'un effet de rente sans s'investir. Quand le Gouvernement prendra-t-il des mesures pour réformer les conditions d'attribution de la dotation touristique aux communes ? Une nouvelle fois, cette année, madame la secrétaire d'Etat, nous sommes contraints de ne débattre que sur de simples ajustements budgétaires.

M. André Capet.

Oh !

M. Jean-Michel Couve.

En réalité, depuis des années et des années, les budgets du tourisme restent notablement insuffisants.

M. André Capet.

Beaucoup moins avec nous !

M. Jean-Pierre Dufau.

C'est mieux depuis quelques années !

M. Jean-Michel Couve.

C'est vrai.

Même si d'autres ministères participent financièrement au développement du tourisme, l'enveloppe dont vous disposez et que vous maîtrisez ne peut permettre de mettre en oeuvre une véritable politique du tourisme favorisant une réelle impulsion pour le secteur privé et une mise en cohérence pour les collectivités. Nous continuons à vivre sur nos acquis sans d'ailleurs nous donner les moyens de valoriser nos atouts.

Pourtant, votre gouvernement bénéficie d'une embellie économique exceptionnelle.

M. André Capet.

Il n'en bénéficie pas ! Il l'a provoquée, il l'a organisée !

M. Jean-Michel Couve.

C'était donc le moment ou jamais d'accorder au tourisme la part qui lui revient et de conforter durablement la destination France.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial.

Eh oui !

M. Jean-Michel Couve.

Or tel ne sera encore pas le cas, ce qui est bien regrettable.

Quant aux ajustements que vous proposez cette année, au-delà du fait qu'ils sont discutables, ils ne changeront rien à ce constat. C'est la raison pour laquelle mes collègues du groupe du Rassemblement pour la République et moi-même voterons contre ce budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Jean Vila, pour cinq minutes.

M. Jean Vila.

Permettez-moi d'abord, monsieur le président, de vous remercier d'avoir fait rendre hommage, dès l'ouverture de la séance, aux victimes du désastre qui a frappé nos départements. Au-delà des drames personnels et familiaux, ils ont été frappés, en quelques heures, par une véritable catastrophe économique.

Mon département, les Pyrénées-Orientales, déjà sinistré par la mévente des productions maraîchères et fruitières, est de nouveau très durement touché. La récolte de salades, principale production du moment, qui venait de débuter, est pratiquement anéantie. Les divers réseaux de distribution, les routes, les maisons ont terriblement souffert, les sites touristiques ont évidemment subi aussi des dégâts considérables. J'espère que, au-delà des déclarations, le Gouvernement va mettre immédiatement en oeuvre les moyens permettant de soulager les souffrances et de commencer à réparer les dégâts.

Madame la secrétaire d'Etat, nous nous félicitons de constater que votre budget connaît une progression non négligeable, puisqu'il augmente de plus de 13,8 % par rapport au projet de loi de finances 1999, avec une enveloppe globale de 423 millions de francs. Cette progression récompense la ténacité de vos efforts. Elle est aussi la reconnaissance du travail accompli depuis vingt-huit mois.

Il s'agit certes d'un budget modeste. Néanmoins, nous espérons que la hausse affichée cette année se poursuivra dans les années à venir, car il faut donner enfin à ce ministère les moyens qu'il mérite.

En effet, le tourisme, à travers son industrie, est un secteur créateur d'emplois. Par conséquent, il est de notre devoir de favoriser son développement. Pour ce faire, il c onvient que votre ministère dispose de véritables moyens, mais il faut aussi, et surtout, donner les moyens aux Français de partir en vacances.

J'aborde ainsi une question qui est chère à notre groupe, à savoir celle du droit aux vacances pour tous.

Pour être tout à fait précis, je devrais parler du droit au départ en vacances. Je précise, car cela est important, que l'année dernière nous avons inscrit dans la législation la disposition suivante qui figure dans l'article 140 de la loi contre les exclusions : « L'égal accès de tous, tout au long de la vie, à la culture, à la pratique sportive, aux vacances et aux loisirs constitue un objectif national. »

Pourtant, nous sommes au regret de constater qu'aujourd'hui 40 % des Français ne partent pas en vacances et la moitié des 60 % qui partent, se rendent dans leur famille. Plus grave, selon un sondage CSA d'avril 1999 commandé par votre secrétariat d'Etat, 34 % des 40 % qui ne partent pas indiquent qu'ils y sont contraints par manque de moyens. Pour nous, cela est intolérable. Nous ne pouvons nous résigner à l'accepter.

La bourse solidarité vacances, qui a déjà pu profiter à un millier de personnes, s'attaque à cette injustice. Nous espérons qu'en l'an 2000, cette initiative, grâce à la création du groupement d'intérêt public, pourra être élargie à la majorité des personnes, qui ont en besoin, afin qu'elles puissent jouir de ce droit fondamental.

L'élargissement du chèque vacances aux salariés des PME permet également d'aller dans le sens d'une vraie démocratisation des vacances. Ainsi, six millions de personnes devraient pouvoir en bénéficier.

Je tiens, à ce propos, à exprimer mon inquiétude face à la diminution des crédits d'action sociale dans le budget de la fonction publique. En effet, elle aura certainement des conséquences sur les chèques vacances, donc sur le départ en vacances des fonctionnaires. Je pense notamment aux travailleurs précaires, qui sont nombreux dans la fonction publique, et aux emplois-jeunes. Peut-être pourriez-vous me rassurer sur ce point, madame la secrétaire d'Etat ? Les actions favorisant les séjours à l'étranger et les échanges bilatéraux pour les jeunes en difficulté doivent être poursuivis. En effet, tous les élus sont confrontés à


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cette dure réalité des enfants qui ne peuvent partir en vacances. Je pense que personne, ici, n'est insensible à ce problème.

Je suis conscient que cette question du droit au départ ne relève pas uniquement des compétences de votre ministère, mais qu'elle est liée à des problèmes beaucoup plus vastes et prioritaires. Ainsi, pour permettre à tous les Français de partir en vacances, il faut prendre des mesures pour s'attaquer à de vrais questions de fond : lutte contre le chômage, réduction du temps de travail sans diminution de salaire, augmentation du pouvoir d'achat et des minima sociaux...

Ce combat pour le droit au départ mérite d'être mené, tant pour des raisons humaines, qui sont prioritaires, que pour des raisons économiques. En effet, par le développement du tourisme, nous aidons à la création d'emplois.

De même, dans le cadre de l'aménagement du territoire, une augmentation des départs en vacances permettrait aux régions visitées de se développer.

L'emploi dans le tourisme est une autre de nos préocc upations. Or il est aujourd'hui encore synonyme d'emplois précaires et sous payés.

Le rapport de M. Anicet Le Pors, qui date de janvier dernier, sur les travailleurs saisonniers du tourisme fait état de situations difficilement tolérables sur les plans social et professionnel. Il formule d'ailleurs des propositions pour les améliorer et soulève de vrais problèmes.

Ainsi, les conditions de logement de ces travailleurs saisonniers sont le plus souvent difficiles. Il fait également état des difficultés de transport auxquelles ils sont confrontés, car, contraints par des raisons financières, ils doivent se loger loin de leur domicile habituel.

Néanmoins, la question qui reste la plus importante est celle de leur statut. En effet, en raison de la durée de leurs contrats - trente-huit jours en moyenne l'été et trente-deux jours en hiver -, ils ne peuvent bénéficier de la plupart des dispositions protectrices du droit du travail.

Pourtant, ils sont des travailleurs comme les autres et devraient pouvoir bénéficier, eux aussi, de la protection de la législation du travail.

Pour cela, il faut appliquer le droit existant et accepter d'élargir leurs droits, malgré la durée de leur contrat de travail. Je pense notamment au droit à la formation, à l'indemnisation du chômage, à l'assurance maladie et à la prise en compte de l'ancienneté. Ces saisonniers, qui étaient évalués à 420 000 en 1996, ne peuvent être ignorés par la législation du travail.

Voilà de nombreux chantiers pour les années à venir.

Ils nécessitent la mobilisation de moyens, tant de votre ministère que, surtout, de l'ensemble du Gouvernement.

Les différentes mesures que vous avez prises depuis votre arrivée au ministère du tourisme vont dans le sens souhaité, mais, face à une telle tâche, vous ne pouvez être seule ; d'autres ministères doivent être mis à contribution.

Cette mobilisation est loin d'être superflue, dans la mesure où elle touche aux conditions de vie des Français, à la création d'emplois et à la protection des droits des t ravailleurs. Madame la secrétaire d'Etat, le groupe communiste votera votre budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. André Capet pour cinq minutes.

M. André Capet.

Monsieur le président, je tiens d'abord, au nom du groupe socialiste, à vous indiquer que nous approuvons votre décision d'avoir fait observer à l'Assemblée une minute de silence, à l'ouverture de la séance. Nous partageons totalement votre émotion face à ce sinistre et nous veillerons à ce que la solidarité nationale soit rapidement mise en oeuvre pour apporter aux victimes toutes les aides dont elles ont besoin.

Madame la secrétaire d'Etat, permettez-moi de vous exprimer notre satisfaction à l'égard de votre budget pour l'an 2000, mais cela n'est sans doute pas une surprise pour vous. Vos crédits sont en progression. Certes, on peut toujours espérer davantage, mais la hausse continue, depuis trois années, du budget du tourisme ne peut que nous réjouir.

Cette évolution atteste d'une véritable volonté de notre gouvernement de considérer le tourisme comme un secteur intégré de notre économie. C'est pourquoi, à l'occasion de ce troisième exercice de présentation budgétaire et compte tenu de l'excellence des rapporteurs qui m'ont précédé, je ne traiterai pas directement des chapitres budgétaires, préférant me livrer à une analyse plus générale d'un budget qui traduit, indéniablement, l'orientation vers le choix d'un concept touristique correspondant davantage à une évolution sociologique réelle que votre secrétariat d'Etat tient à prendre en compte.

J'en veux pour preuve la décision d'étendre l'utilisation des chèques-vacances aux salariés des PME-PMI. Certes, comme un orateur précédent l'a souligné, il faudra sans doute revoir les plafonds de ressources définis.

M. Jean-Michel Couve.

Ah !

M. André Capet.

Je suppose d'ailleurs que vous allez vous nourrir de l'expérience et faire établir des statistiques afin d'apporter certaines corrections au dispositif, si cela s'avérait nécessaire.

M. Jean-Michel Couve.

Bonne nouvelle !

M. André Capet.

L'observation des situations a toujours été l'une des préoccupations du secrétariat d'Etat au tourisme et Mme la secrétaire d'Etat ne manque pas d'être très attentive à ces résultats.

Les états généraux, organisés au niveau national, ont également attesté de sa volonté d'appréhender le tourisme au-delà du simple aspect budgétaire. Certes, les finances sont souvent le nerf de la guerre, mais l'existence de projets est aussi importante sinon davantage. Ils sont en effet indispensables à la formation de demandes d'augmentations budgétaires légitimées et explicitées.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial.

Il faut les deux !

M. André Capet.

Un ministre qui n'a pas de projets ne peut demander des finances supplémentaires, monsieur le rapporteur ! Il en a besoin pour les justifier. D'ailleurs l'ancien ministre des finances, M. Strauss-Kahn avait bien entendu ce message. Son départ, que nous regrettons, n'a en rien annihilé cette volonté et le Gouvernement continuera à doter l'outil touristique dont nous avons besoin ; soyez-en persuadé, monsieur le rapporteur.

Si les états généraux ont mis en avant une nouvelle conception du tourisme, ils ont aussi permis d'exprimer des inquiétudes et des interrogations légitimes.

Selon moi, les régions pourraient devenir des relais essentiels sur le terrain. Celle du Nord Pas-de-Calais s'est située dans cette perspective et je vous remercie de l'appui que vous lui avez apporté en la matière.

Ainsi, de grandes interrogations sont apparues à propos du tourisme social, qu'il s'agisse du patrimoine, de la formation du personnel ou de la nature de la clientèle. Par exemple, malgré les aides, l'accès direct des familles défavorisées aux vacances n'a guère été développé.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 15 NOVEMBRE 1999

Par ailleurs, les associations ont démontré qu'elles étaient des instruments indispensables de la politique du tourisme.

Madame la secrétaire d'Etat, vous avez su entendre tout cela et je sais que vous allez en tenir compte. Cela est indispensable car il s'agit de l'un des volets de la politique touristique sur lesquels nous avons la volonté d'agir.

En effet, il faut absolument développer le tourisme social.

Je veux également insister sur certains aspects législatifs de la politique du tourisme.

Je pense d'abord à la TVA sur la restauration, dont il a déjà été question. Il est certes nécessaire d'aborder le sujet, mais pas en mettant en parallèle ce cas et la TVA sur un secteur porteur d'emplois comme celui du BTP pour lequel une décision a été prise à l'échelon européen

Malgré notre volonté, il n'a pas encore été possible d'obtenir une harmonisation de la TVA sur le taux réduit dans ce domaine. Il est bien évident qu'il faut continuer d'agir en ce sens, car je suis persuadé que, à force de conviction, en faisant la démonstration, notamment au regard des instances européennes, que le tourisme est un secteur porteur d'emplois, nous devrions pouvoir aboutir positivement. Je sais, madame la secrétaire d'Etat, que vous vous consacrez à cette tâche.

Toujours dans le domaine législatif, l'évolution vers les 35 heures favorisera forcément, grâce à l'accroissement des temps libres, la nouvelle conception d'un loisir de proximité. L'un de mes collègues a parlé de « désaissonalité ». Il est évident que la multiplication des temps de loisir ouvrira des plages beaucoup plus importantes pour un tourisme de loisir de proximité intégré, qui ne sera pas exclusivement organisé dans le cadre de la politique de la ville, mais qui pourra faire l'objet d'une véritable politique d'insertion avec une volonté d'apprentissage touristique.

Enfin, je veux citer, dans le domaine législatif, les lois en cours de discussion qui concernent l'intercommunalité. En effet, elles vont, surtout en milieu rural, contribuer à un aménagement effectif du territoire, propice à un développement touristique accompagné d'un souci de respect écologique et environnemental, gage d'une évolution positive vers un tourisme de qualité.

Pour évoluer, le tourisme a besoin de moyens financiers adéquats et de dispositifs législatifs pertinents, favorisant la consommation touristique en l'élargissant sociologiquement. Il convient, en effet, de développer le concept du tourisme pour tous, géographiquement organisé par l'implication directe des régions dans la réflexion, notamment dans le cadre des contrats de plan, afin de faire apparaître le concept du tourisme partout, et appuyé sur la législation relative au temps de travail, qui fait émerger le concept du tourisme de tous les temps.

L'évolution que nous constatons, soutenue par la volonté gouvernementale, de donner les moyens et les outils ne fait que répondre, comme en écho, à une évolution nette de notre société, non seulement au niveau démographique, mais également sur le plan des mentalités car nos concitoyens sont de plus en plus tentés par de nouveaux types de sports, sensibles à de nouveaux concepts de santé et prêts à porter de nouveaux regards sur la nature.

A ce propos, madame la secrétaire d'Etat, je tiens à vous faire part d'une inquiétude que j'ai relevée très récemment dans l'ensemble des organes de presse au regard de certaines méthodes commerciales. J'ai, en effet, constaté que la grande distribution propose des modes de vacances avec des clichés qui nous interpellent par rapport à la nécessité d'assurer le professionnalisme dans l'organisation des vacances. Certes, il est sans doute bon de commercialiser les vacances pour tous, mais encore faut-il veiller à assurer d'abord la place aux professionnels. Se borner à des coups publicitaires qui peuvent effectivement attirer le client, sans se soucier du contenu ou de la valeur touristique des produits présentés, risque d'être terriblement négatif pour une politique touristique, car cela nous échappe et vous échappe totalement. Il conviendrait donc peut-être de prévoir certains garde-fous par la loi.

Tels sont, madame la secrétaire d'Etat, quelques éléments que je voulais soumettre à votre réflexion en soulignant que le groupe socialiste émettra un vote favorable à votre budget en l'assortissant de toutes ses félicitations.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. Michel Meylan, pour dix minutes.

M. Michel Meylan.

Je voudrais, au nom du groupe DL, m'associer à l'hommage que l'Assemblée a rendu aux victimes du Sud de la France et partager l'émotion suscitée dans le pays et la douleur des familles. Ayant, malheureusement, eu à vivre de telles épreuves en début d'année - les catastrophes des avalanches de Chamonix et du tunnel du Mont-Blanc - je connais la douleur des familles, qu'il faut aujourd'hui soulager, et la peine des élus qui, demain, auront à réparer.

Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le tourisme est devenu, en une vingtaine d'années, un secteur clé de notre économie. Fort de 200 000 entreprises, d'un million de salariés et d'un million d'emplois induits, c'est un secteur créateur de richesse et d'emplois. Il représente aujourd'hui 7,3 % de notre produit intérieur brut, avec un chiffre d'affaires de plus de 700 milliards de francs et un excédent de la balance des paiements de 71 milliards.

Les prévisions mondiales laissent présager un doublement du flux touristique d'ici à 2020, avec la création de 2 à 3 millions d'emplois supplémentaires.

Face à ces données, le budget du secrétariat d'Etat au tourisme est-il à la hauteur des ambitions ? Il n'atteint que 0,03 % du budget total de l'Etat et les dépenses de fonctionnement en représentent la part la plus importante au détriment des dépenses d'investissement, qui chutent de 20 %.

Si tant est que l'Etat doive intervenir dans ce secteur économique, il doit le faire en créant un environnement favorable au développement du tourisme, en particulier en allégeant les charges qui pèsent sur les entreprises.

La baisse de la TVA, tant attendue par les professionnels du tourisme, est encore une fois repoussée. Elle permettrait pourtant de rendre concurrentielle notre hôtellerie-restauration traditionnelle par rapport à la restauration rapide mais aussi par rapport à d'autres pays à destination touristique tels que la Grèce ou l'Espagne où sont appliqués des taux de TVA moins élevés.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial.

Très juste !

M. Michel Meylan.

Je n'aurai pas la cruauté, madame la secrétaire d'Etat, de vous rappeler ce que déclaraient les futurs ministres en 1998 mais je me demande bien pourquoi la France est opposée à l'intégration de ce secteur


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 15 NOVEMBRE 1999

dans l'expérimentation décidée par la Commission européenne sous la présidence finlandaise. Un député de la majorité plurielle n'a-t-il pas - paroles dures - qualifié les réponses du ministre d'un peu « paresseuses ». Au nom de quoi le Gouvernement refuse-t-il aux restaurateurs ce qu'il a accordé au secteur du bâtiment ? Le tourisme est une activité à forte densité de maind'oeuvre. A ce titre, la baisse généralisée des charges sociales sur les bas salaires, et pas uniquement dans le cadre du passage aux 35 heures, permettrait aux entreprises touristiques d'embaucher et de pérenniser les emplois dans ce secteur d'activité.

En effet, la précarité est le problème principal qui se p ose aux emplois-jeunes dans le tourisme. Si 4 700 embauches ont été dénombrées sur un objectif de 6 000 d'ici à la fin de 1999, la mise en place des subventions au titre des emplois-jeunes ne peut avoir que des conséquences néfastes sur une précarité déjà existante.

Pour répondre aux exigences de qualité des prestations, tant pour l'accueil des vacanciers que pour la valorisation de notre patrimoine, il reste encore beaucoup à faire, notamment la formation et dans le domaine de la professionnalisation de ces jeunes.

La réduction du temps de travail représente une autre entrave. Comme vous l'avez fort justement souligné au congrès national des Logis de France, le 11 octobre dernier, l'application des 35 heures dans l'hôtellerie-restauration ne va pas sans poser de difficultés.

L'application de la réduction du temps de travail pose également des difficultés aux travailleurs saisonniers. Dans nos départements de montagne, nombreux sont ceux qui exercent une double activité, en station l'hiver et dans le bâtiment l'été. Ils doivent travailler souvent près de 42 heures par semaine pour livrer leurs chantiers en temps voulu. Dans ce cas, comme dans bien d'autres, la flexibilité des horaires est une nécessité et la réduction du temps de travail constitue un frein supplémentaire au développement de l'activité touristique. Il est donc urgent qu'un véritable statut du travailleur pluriactif soit mis en place. Un rapport vous a été présenté, début 1999, par M. Le Pors sur la situation des personnels saisonniers et vous venez récemment d'éditer un guide pratique à leur u sage. Quelles propositions concrètes comptez-vous mettre en oeuvre pour la reconnaissance des pluri-actifs ? J'en viens à la promotion et à la valorisation de nos produits touristiques qui exigent que des efforts soient réalisés dans le domaine des infrastructures, notamment pour le réseau ferré. Cette dimension doit être intégrée plus fortement qu'elle ne l'est aujourd'hui dans le cadre des nouveaux contrats de plan Etat-régions. A titre d'exemple, pour accéder depuis Paris aux stations de ski de la haute vallée de Chamonix ne faut-il pas près de sept heures de transport alors que, dans le même laps de temps, nous pouvons rallier l'Amérique ? La réhabilitation et la rénovation de notre parc hôtelier traditionnel est également un enjeu économique majeur pour l'avenir du tourisme. Votre effort budgétaire en ce domaine est orienté, en priorité, vers la rénovation des hébergements touristiques à caractère social. Je ne suis pas indifférent, tant s'en faut, aux différents dispositifs mis en oeuvre pour permettre à tous nos concitoyens d'accéder à cette forme de loisirs.

Néanmoins, des moyens supplémentaires doivent être dégagés en faveur des investissements réalisés pour la modernisation de l'hébergement touristique de l'hôtellerie traditionnelle, investissements qui sont très lourds.

Vous envisagez, madame la secrétaire d'Etat, de mettre en place un fonds de garantie semblable à celui de la restructuration de la dette hôtelière. Dans quel délai ce projet pourrait-il être applicable et quelles en seront les modalités pratiques ? Sous peine de voir disparaître la petite hôtellerie indépendante, nous devons nous pencher sérieusement sur la question, importante également, de la transmission de l'entreprise. On pourrait, par exemple, faciliter de telles opérations par des incitations fiscales.

Avec 71 millions de touristes étrangers en 1998, la France demeure la première destination touristique au monde. Pourtant, en termes de recettes, notre pays se place seulement au troisième rang mondial avec 177 milliards de francs, loin derrière les Etats-Unis et l'Italie.

La dotation budgétaire attribuée à Maison de la France pour la promotion de la France à l'étranger progresse de 13,4 %. On pourrait s'en réjouir. Mais cette augmentation ne vise qu'à compenser le coût de l'assujettissement à la TVA de cette administration et masque l'absence de progression réelle des crédits qui lui sont alloués.

Par ailleurs, en tant qu'élu de la montagne, mon attention a été particulièrement retenue par les études en cours relatives au tourisme de montagne, sur le devenir des stations thermales et climatiques et donc du tourisme de santé, sur l'accès aux vacances des handicapés et sur la réhabilitation des équipements des stations de sports d'hiver.

Les services de votre ministère procèdent actuellement à la réalisation d'un nouvel état des lieux de l'offre touristique en montagne. Dans le courant de l'année 1999, des études ont été menées sur les structures d'organisation des stations de sports d'hiver ainsi que sur l'assurance ou la mutualisation du risque de manque d'enneigement. Je souhaiterais savoir quelles en sont les conclusions et quelles réponses vous comptez y apporter.

S'agissant des stations thermales et climatiques, les propositions de la Caisse nationale d'assurance maladie ont suscité de vives inquiétudes quant à leur devenir. Dans le cadre de la réflexion que mène la ministre de l'emploi et de la solidarité sur l'avenir du thermalisme, il est à mon sens impératif de prendre en compte l'impact du tourisme de santé. Une remise en cause du système actuel aurait des conséquences désastreuses sur l'économie locale.

Vous avez pu, madame la secrétaire d'Etat, vous en rendre compte lorsque vous avez visité la station de Passy-Plateau d'Assy.

En 1998, votre secrétariat d'Etat lançait une campagne nationale de sensibilisation sur l'accès des personnes handicapées aux lieux de vacances. Je partage pleinement cette volonté d'arriver, par une dynamique entre les associations de personnes handicapées et les professionnels du tourisme, à élargir l'offre de tourisme adaptée aux handicapés.

Néanmoins, pour accéder au domaine skiable, ces personnes rencontrent encore de nombreuses difficultés : inadaptation des équipements, réglementation interdisant l'accès de pistes aux paraplégiques, manque de formation d es différents acteurs concernés et éducation des consciences. Madame la secrétaire d'Etat, quelles actions comptez-vous entreprendre en la matière ? Afin de fidéliser la clientèle des stations de ski de notre pays et de faciliter l'accès des personnes handicapées, des investissements sont nécessaires, en particulier pour la réhabilitation et la modernisation des remontées mécaniques. D'autant, madame la secrétaire d'Etat, que, dans


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ce domaine, le rapport d'investissement entre la France et l'Autriche est de 1 à 3,5. Quelles mesures envisagez-vous pour permettre à nos stations de rester la première destination hivernale ? L'inscription de ces investissements dans le cadre des contrats de plan Etat-régions, avec accès à des prêts à taux bonifiés pour les sociétés de remonté es mécaniques ou les collectivités, pourrait constituer une réponse adaptée à cette préoccupation.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial.

Très juste !

M. Michel Meylan.

Je serai très attentif, madame la secrétaire d'Etat, aux réponses que vous m'apporterez sur les différents points que je viens d'évoquer.

Le groupe Démocratie libérale votera contre votre budget, qui, en l'état, ne permettra pas à la France de relever le défi du tourisme du troisième millénaire.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance.)

M. le président.

La parole est à M. Marc Dumoulin pour cinq minutes.

M. Marc Dumoulin.

Monsieur le président, permettezmoi tout d'abord de m'associer à l'Assemblée qui s'est recueillie quelques instants en hommage aux populations touchées par les catastrophes de ces derniers jours.

Madame la secrétaire d'Etat, je voudrais vous remercier pour la détermination et la ténacité que vous mettez à défendre les actions de votre département ministériel et l'ensemble des partenaires institutionnels du tourisme.

Il faut saluer, après celle de l'année précédente, la nouvelle augmentation du budget du tourisme, de 14 %, ainsi que l'effort consenti pour conforter l'action de l'Agence française de l'ingénierie touristique. Mais il faut bien admettre que le budget de l'Etat consacré au tourisme n'en demeure pas moins squelettique et qu'il ne permet pas d'engager une véritable politique d'aménagement touristique du territoire, pourtant plus que jamais indispensable.

Nous constatons des concentrations anormales de flux touristiques dans le temps et dans l'espace. Elles occasionnent de plus en plus de phénomènes de rejet des populations locales concernées et des phénomènes de saturation touristique. Par ailleurs, nous constatons aussi des concentrations des capacités d'hébergement en périphérie des villes au détriment de l'hôtellerie familiale en milieu rural, qui perd progressivement ses capacités d'hébergement touristique. Il est nécessaire de rétablir l'équilibre en faveur des zones rurales si l'on veut maintenir une offre touristique française harmonieuse, diversifiée et attractive.

Afin de conforter le développement touristique local, il me semble urgent d'intervenir au moins dans trois directions.

Il convient d'abord de créer un fonds d'intervention en faveur de l'hôtellerie familiale. J'ai vu avec beaucoup de satisfaction que vous aviez l'intention de constituer un fonds de garantie. Il faut aller plus loin et inciter les régions à participer, à travers les contrats de plan, au financement de la rénovation, de la modernisation et de la transmission de l'hôtellerie familiale en milieu rural, qui a perdu, ces dix dernières années, 120 000 chambres et 30 000 emplois.

Ensuite, il faut donner les moyens aux collectivités locales d'organiser les infrastructures nécessaires au développement touristique. Il est indispensable que la dotation touristique redevienne un outil d'aménagement touristique du territoire à part entière et soit identifiée en tant que telle, afin de permettre à de nouvelles collectivités communales et intercommunales d'en bénéficier dans le cadre de leur développement touristique.

Enfin, il faut permettre aux collectivités de financer des équipements touristiques de qualité et des structures d'accueil performantes. Cette troisième proposition suppose par une réforme en profondeur de la taxe de séjour. Cette taxe est aujourd'hui mal acceptée par les touristes qui se sentent taxés sans contrepartie, mal comprise par les hébergeurs qui se sentent imposés, mal vécue par les collectivités qui ne perçoivent que très partiellement le revenu espéré. Pour que cet outil de développement local redevienne efficace, il faut que cette taxe ne soit plus une taxe mais une contribution, avec des contreparties pour les touristes, à l'exemple des cartes d'hôtes qui se développent particulièrement dans les stations de montagne.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial.

Tout à fait !

M. Marc Dumoulin.

Les hébergeurs ne doivent plus être les seuls collecteurs de cette taxe. Elle doit non seulement répondre aux besoins réels des collectivités mais aussi pouvoir alimenter un fonds de péréquation pour organiser l'accueil touristique sur l'ensemble du territoire et non plus seulement sur les secteurs à flux touristiques concentrés.

Telles sont, madame la secrétaire d'Etat, les quelques propositions que je souhaitais faire. Elles n'ont d'autre but que de conforter l'action, par ailleurs efficace, de votre département et de compenser la faiblesse chronique du budget du tourisme. C'est pourquoi je m'abstiendrai lors du vote sur ce projet de budget.

M. le président.

La parole est à M. François Liberti, pour cinq minutes.

M. François Liberti.

Je m'associe aux propos de mon collègue Jean Vila et à l'hommage de l'Assemblée aux populations des départements des Pyrénées-Orientales, de l'Aude, du Tarn et de l'Hérault. Bien évidemment, il conviendra de mettre en oeuvre les moyens nécessaires pour exprimer la solidarité du pays, et reconstruire.

Votre projet de budget, madame la secrétaire d'Etat, témoigne d'une volonté forte : outre une augmentation significative des crédits, il lui est donné un sens bien particulier, ce qui lui permet de poursuivre les mesures positives déjà prises.

L'amélioration des conditions de vie et de travail des saisonniers est traitée comme une question essentielle, notamment en matière de logement, de santé, de formation, de statut. De même, le chèque-vacances est étendu aux salariés des PME et PMI, des projets sont financés pour favoriser le départ des jeunes à l'étranger et des mesures prises pour permettre l'accès sur les lieux de vacances des personnes handicapées ; sans oublier les bourses « solidarité vacances ». Autant de mesures qui ont permis de valoriser le secteur du tourisme social et associatif.

La structure du budget 2000 fait ressortir trois points forts : action sociale pour répondre à l'urgence du droit aux vacances pour tous ; tourisme intégré à la politique d'aménagement du territoire ; meilleure exploitation du potentiel de notre patrimoine culturel, de nos savoir-faire et de nos filières touristiques.

La démarche ainsi affirmée répond bien à des changements de comportement des vacanciers, qui choisissent de plus en plus l'étalement des vacances et des séjours ciblés vers d'autres lieux, bref qui ont d'autres aspirations. Tous


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ces éléments doivent, au-delà du débat budgétaire, nous conduire à porter un regard nouveau sur l'activité touristique.

Ainsi, même si l'on peut se féliciter d'une fréquentation touristique en augmentation, démontrant les potentialités de notre pays, il n'en reste pas moins que 40 % des Français ne partent pas en vacances. C'est dire combien il faut renforcer l'usage du chèque-vacances, les mesures en faveur des jeunes et les dispositions favorisant l'accès des handicapés aux équipements touristiques. C'est dire aussi combien la réduction du temps de travail est importante pour favoriser l'ouverture aux loisirs, à la rencontre, à la découverte, ce qui implique aussi des moyens en termes de pouvoir d'achat et d'emplois.

Une approche nouvelle doit nous permettre d'appréhender le développement touristique comme un facteur d'aménagement du territoire. Trop souvent, au cours des dernières décennies, le « tout-tourisme » a été considéré comme la panacée, présenté comme le moyen de faire table rase des autres activités humaines, si bien qu'a prévalu une conception affairiste et trop souvent spéculative de l'immobilier.

Or le tourisme ne peut se développer dans un désert social et économique.

Dans ma ville, la pêche et la vie portuaire, première activité de main-d'oeuvre, est devenue aujourd'hui le principal attrait touristique. La vie culturelle et le patrimoine, le savoir-faire gastronomique, la protection et la mise en valeur du site et du milieu naturel, le développement d'une politique locale pour faire reculer le chômage et la précarité sont des facteurs décisifs pour favoriser l'activité et le développement touristiques.

Telles sont les raisons pour lesquelles il me paraît fond amental de rendre complémentaires les politiques publiques mises en oeuvre par les différents ministères, les collectivités territoriales et locales.

Enfin, permettez-moi de dire un mot sur le tourisme et l'emploi. Là aussi, une approche nouvelle est nécessaire. Trop souvent, dans le passé, l'emploi touristique a signifié emploi précaire, sous-payé, non qualifié, fortement dévalorisé. Or, le secteur touristique est un gisement d'emplois important qu'il faut bonifier. Déjà 200 000 salariés sont concernés par des accords de réduction du temps de travail et le secteur touristique est un de ceux qui ont créé un nombre significatif d'emplois nouveaux.

Avec les emplois-jeunes, avec les 35 heures, avec la formation, il faut aller beaucoup plus loin encore.

Tous les professionnels le reconnaissent, la formation et la pérennité de l'emploi constituent des facteurs cruciaux pour améliorer la qualité de l'accueil. On peut même dire que la pénurie de main-d'oeuvre qualifiée pénalise d'ores et déjà les développements possibles.

Encore un mot à propos du littoral méditerranéen et notamment du Languedoc-Roussillon, qui est aujourd'hui la trentième destination touristique mondiale.

Quatre dossiers majeurs doivent trouver réponse dans l'action gouvernementale.

Premièrement, les grandes stations touristiques, cela a été évoqué il y a un instant, celles qui relèvent en particulier sur le littoral de la mission Racine, doivent impérativement faire l'objet d'un important plan de rénovation pour requalifier l'habitat et l'accueil.

Deuxièmement, comme le ministère de l'équipement s'y est engagé, la protection du trait de côte, gravement en danger, doit faire l'objet d'un financement pluriannuel pour assurer les travaux de protection et de reconstitution du cordon dunaire. Les collectivités locales ne peuvent plus rester seules face à une question qui relève de la politique d'aménagement du territoire et à la survie du patrimoine national.

Troisièmement, comme cela a été évoqué sur le plan national, même si ce n'est pas la seule mesure pour garantir les activités de restauration, il n'en demeure pas moins que la baisse du taux de la TVA pour la restauration traditionnelle constitue une mesure urgente et indispensable car elle touche un secteur à forte densité de main-d'oeuvre.

Enfin, je souhaite que les mesures en faveur des travailleurs saisonniers qui ont été annoncées et examinées en conseil des ministres soient traitées avec une attention particulière, pour les saisonniers fort nombreux sur le littoral méditerranéen et notamment en Languedoc-Roussillon.

Pour l'ensemble de ces raisons, madame la secrétaire d'Etat, mon groupe votera en faveur de ce budget.

M. Jean Vila.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Dufau, pour cinq minutes.

M. Jean-Pierre Dufau.

Monsieur le président, je m'associe, avec le groupe socialiste, à l'hommage que vous avez rendu, au nom de la représentation nationale, aux victimes de la catastrophe dans le Sud-Ouest, à leurs familles et aux collectivités. Je souhaite que des moyens soient dégagés très rapidement par le Gouvernement et par la solidarité sous toutes ses formes pour leur venir en aide.

Madame la secrétaire d'Etat, chacun peut constater que le projet de budget que vous défendez est un bon budget pour l'an 2000. Avec 423,4 millions de francs, il marque une progression de 13,8 % par rapport au projet de budget de l'an passé. Au-delà de son annualité, il s'inscrit dans une stratégie de développement économique et social et traduit la volonté politique du Gouvernement, à la hauteur des enjeux d'un tourisme moderne.

Ayant laissé à mon ami André Capet, dont je partage l'analyse, le soin de souligner la dimension sociale du tourisme, je limiterai mon intervention à l'enjeu économique, avec trois points prioritaires : la place du tourisme dans l'économie nationale, son importance dans l'aménagement du territoire, sa contribution dans la recherche du plein emploi.

Premier point : le tourisme dans l'économie nationale.

Le poids du tourisme est essentiel à la bonne santé de notre économie. Avec 612,5 milliards de francs de consommation intérieure, ce secteur représente 7,3 % du PIB et dégage un excédent de 71,6 milliards de francs en faveur de la balance des paiements. Structurer et renforcer une politique touristique dynamique face à la concur-r ence internationale grandissante constitue un enjeu majeur.

Certes, la France est la première destination mondiale avec 71 millions de touristes étrangers accueillis, mais elle se place au troisième rang des recettes liées à ces fréquentations, avec 176,6 millions de francs. Vigilance, invention, imagination sont nécessaires pour rester dans le peloton de tête et, pourquoi pas, encore progresser dans cette compétition mondiale. Je sais que vous avez pleinement conscience du défi à assumer.

Deuxième point : le tourisme dans l'aménagement du territoire.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 15 NOVEMBRE 1999

Aujourd'hui, 80 % des séjours français et étrangers sont concentrés dans huit régions : Paris Ile-de-France, littoral et montagne. Sans négliger ces destinations, qu'il faudra même moderniser tant pour les équipements que pour la gestion, il faut adapter et diversifier l'offre touristique, notamment en direction du tourisme vert et patrimonial. Les contrats de plan Etat-région constituent un levier décisif. Avec 520 millions de francs du comité interministériel d'aménagement du territoire de juillet dernier, l'essentiel est acquis. Néanmoins, la deuxième enveloppe avant la finalisation définitive doit permettre de faire plus et mieux. Notre soutien vous est acquis pour ces arbitrages délicats. Ainsi, la petite hôtellerie-restauration rurale a besoin d'aides pour se moderniser. Un fonds de garantie est à l'étude pour ce faire. Pouvez-vous nous en dire davantage sur ce point ? Enfin, le tourisme et l'emploi.

On considère que les 200 000 entreprises du secteur du tourisme engendrent 2 millions d'emplois, 1 million d'emplois directs, dont 420 000 saisonniers, et 1 million d'emplois indirects. Des études récentes annoncent un fort développement du tourisme à court et moyen terme, faisant de ce secteur d'activités un vivier d'emplois, hélas ! trop souvent précaires et saisonniers.

La publication du rapport de M. Anicet Le Pors sur les travailleurs saisonniers oblige à considérer l'amélioration des conditions de vie et de travail de ces salariés comme un objectif prioritaire. Sans méconnaître les spécificités du travail saisonnier dans le tourisme, quel statut peut être envisagé pour les salariés, notamment dans le contexte de la loi sur les 35 heures ? Pouvez-vous nous éclairer sur le travail interministériel engagé par le Gouvernement sur cette question ? Pour terminer, je vous confirme le soutien du groupe socialiste pour le vote de ce budget et, au-delà, pour l'action positive et opiniâtre que vous menez en faveur du tourisme.

J'ai évoqué la nécessaire modernisation du tourisme face à la concurrence et son impact économique en faveur de l'emploi. Devant son évolution, pourquoi, après les états généraux du tourisme social, ne pas organiser en France en 2001 les états généraux du tourisme du troisième millénaire ?

M. le président.

La parole est à M. François Goulard, dernier orateur inscrit, pour cinq minutes également.

M. François Goulard.

Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, comment ne pas s'associer aux propos qui ont été tenus par tous les orateurs sur le drame subi par nos compatriotes du Languedoc-Roussillon ? L'élu d'une région qui a souvent, malheureusement, payé un lourd tribu aux excès de la nature ne peut qu'être sensible à une telle tragédie.

Le budget du tourisme est parfois l'occasion de s'autocongratuler sur les performances de cette industrie dans notre pays. Je voudrais exprimer, pour ma part, un sentiment de modestie à cet égard.

D'abord, si nous sommes la première destination touristique au monde, nous sommes assez loin derrière d'autres pays pour la durée du séjour et, au total, nous avons sans doute encore des progrès à faire face à d'autres compétiteurs.

Il faut être modeste également quand on voit l'action de l'Etat. Le budget que vous nous présentez est extrêmement modeste et nous savons que les résultats du tourisme en France doivent davantage, et c'est parfaitement naturel, à l'ensemble des professionnels de ce secteur qu'à l'action de votre ministère, sans pour autant en minimiser l'importance.

L'action des professionnels passe par le dynamisme des entreprises de toutes tailles, car il y a à la fois des groupes multinationaux et un très grand nombre de très petites entreprises dont les performances permettent au tourisme d'être aujourd'hui l'un des secteurs majeurs de notre économie.

Comme l'a fort bien dit M. Meylan, et d'autres avec lui, le rôle de l'Etat est certainement de créer des conditions favorables à l'expansion du tourisme et il conviendrait que vous soyez totalement persuasive à l'égard de vos collègues pour qu'il en soit toujours ainsi.

Je voudrais simplement prendre un exemple parmi d'autres. Dans une région côtière comme la mienne, l'application par trop pointilleuse de la loi littoral est bien souvent un obstacle réel au développement économique en général et au développement touristique en particulier.

M. Michel Meylan.

Tout à fait !

M. François Goulard.

Les élus locaux sont parfaitement conscients des enjeux de la défense de l'environnement. Il n'appartient à aucun ministre de leur faire la leçon, comme c'est malheureusement trop souvent le cas.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial.

Très juste !

M. François Goulard.

Ils sont conscients de leurs responsabilités, mais ils savent aussi ce qu'ils doivent aux nécessités du développement économique au bénéfice de notre population, et une application excessivement tatillonne de la réglementation va parfois à l'encontre de cet objectif.

M. Michel Meylan.

C'est vrai !

M. François Goulard.

S'agissant des conditions favorables à l'expansion touristique, on ne peut pas ne pas évoquer le dossier difficile des 35 heures et toutes les contraintes, rigidités et charges nouvelles que cela va générer pour les entreprises concernées de près ou de loin par le tourisme.

La réponse classique du Gouvernement, c'est la baisse des charges sociales, mais on a déjà dit à plusieurs reprises à cette tribune que cette prétendue baisse était en réalité une compensation partielle à l'augmentation du coût du salaire horaire que vont subir l'ensemble de nos entreprises. On sait très bien que, dans le tourisme, l'organisation du travail et des horaires nécessite, sans doute plus qu'ailleurs, de la souplesse et de la liberté. On aura un contraste parfois peu supportable. Les professionnels indépendants, les commerçants, les artisans seront obligés de faire des semaines fort longues, alors que la loi imposera de réduire le temps de travail des salariés, pas forcément d'ailleurs à leur bénéfice, notamment en termes de pouvoir d'achat.

S'il est un domaine où l'action de l'Etat ne doit pas être remise en cause, c'est bien la promotion de notre pays à l'étranger. Elle relève pour une part de la responsabilité des collectivités locales, et elles l'assument - les régions, en particulier, commencent à être présentes à l'étranger, c'est très bien - mais il y a aussi une responsabilité de l'Etat : nous devons vendre la destination touristique française à l'extérieur. Or les crédits qui y sont consacrés ne sont pas considérables, nous sommes plutôt derrière d'autres pays.

Plus qu'à l'importance des crédits, je pense surtout à la mesure de l'efficacité de la politique qui est conduite.

Votre budget est en augmentation, une part de celle-ci


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étant mangée par l'assujettissement à la TVA de Maison de la France, mais là n'est pas la question. Moi, je souhaiterais vivement que, comme dans d'autres politiques de communication gouvernementales d'ailleurs, il y ait une mesure de l'efficacité de la politique de promotion.

Les entreprises privées le savent, quand on engage de grosses sommes d'argent pour une campagne publicitaire, on s'attache à mesurer la performance, et il y a des techniques pour cela. Les politiques publiques devraient s'imposer une telle rigueur et présenter, à l'occasion du vote du budget, les performances de la politique de promotion que vous menez. Ce serait un bon éclairage de l'efficacité de votre action.

Enfin, si j'ai dit tout à l'heure que les professionnels étaient certainement les premiers acteurs de la réussite du tourisme en France, il y en a eu d'autres que sont les collectivités locales. Nous le savons bien les uns et les autres, les collectivités locales apportent au tourisme un appui considérable, parfois modeste et à l'échelle de leurs possibilités, mais toujours nécessaire.

A cet égard, je voudrais vous signaler un problème que connaît bien votre collègue de l'économie et des finances, la fiscalité des associations. Comme vous le savez, un grand nombre d'offices de tourisme, de syndicats d'initiative et d'acteurs du tourisme local sont constitués en forme associative. Le Gouvernement a décidé il y a un an et demi à peu près de clarifier la fiscalité des associations et il a précisé en particulier celles d'entre elles qui étaient soumises aux impôts commerciaux. Or, en dépit de cet effort de clarification, nous sommes aujourd'hui encore sur le terrain dans le flou le plus complet...

M. Michel Meylan.

Oui, c'est vrai !

M. François Goulard.

... et des offices de tourisme interrogent en vain les services fiscaux pour savoir si leurs prestations sont ou non assujetties aux impôts commerciaux. Pour l'efficacité de l'action locale, qui est quelquefois très modeste, je le répète, mais qui est très nécessaire dans chacune de nos communes, il ne faut pas entraver le dynamisme des acteurs du tourisme local et compliquer inutilement la tâche des associations.

Telles sont les questions simples que nous voulions vous poser, madame la secrétaire d'Etat. Je vous fais part, comme mon collègue Michel Meylan, de notre insatisfaction sur l'ensemble de votre budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants et du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat au tourisme.

Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les députés, avant de répondre à vos questions, permettez-moi d'exprimer à mon tour mon émotion face aux terribles images des inondations qui ont touché ce week-end les départements de l'Aude, des Pyrénées-Orientales, du Tarn et de l'Hérault. Je veux témoigner ici toute la compassion du Gouvernement et de la solidarité de la nation tout entière envers les familles des victimes et tous ceux qui ont été éprouvés par cette catastrophe. Je rends hommage au courage et à l'efficacité des secours civils et militaires et j'adresse aux familles touchées par cette catastrophe l'expression de ma solidarité et de ma plus vive sympathie.

Au-delà de la solidarité que le Gouvernement est en train de mettre en oeuvre, j'ai été sensible au fait que de nombreux sites touristiques aient été touchés. Je missionnerai sans tarder une inspection générale afin d'évaluer rapidement l'étendue des dégâts et surtout leurs conséquences.

Je remercie MM. les rapporteurs de la commission des finances et de la commission de la production et des échanges pour la qualité de leur travail et leur soutien à une meilleure prise en compte de l'économie touristique dans le budget de la nation. Je remercie également tous les orateurs des différents groupes pour l'intérêt qu'ils portent à la question du développement touristique.

Alors que nous nous apprêtons à franchir le cap de l'an 2000, en ayant enregistré cette année encore d'excellents résultats pour le tourisme français, le projet de budget du tourisme dont nous discutons aujourd'hui et sur lequel vous m'interpellez affiche une volonté d'intervenir de façon plus cohérente et plus dynamique encore pour conforter, moderniser et développer un secteur essentiel à l'activité économique de la France mais aussi à l'aménagement du territoire.

L'an dernier, ici même, j'avais déjà eu l'occasion de vous dire combien le tourisme est un secteur d'activité en croissance dans le monde, combien, surtout dans notre pays, il est créateur de richesses et d'emplois et combien, et vous l'avez à nouveau fortement souligné, il est porteur d'espoir pour notre économie nationale et pour l'ensemble de nos concitoyens.

Un an d'exercice supplémentaire, et les très bons résultats du premier bilan de la saison 1999 ne font que renforcer davantage cette conviction.

Parmi les raisons de ce nouveau succès, il faut noter qu'on a retrouvé en 1999 le même esprit de convivialité et de fraternité autour d'événements festifs qu'en 1998 autour de la Coupe du monde. Il n'y a qu'à regarder, pour s'en convaincre, l'extraordinaire engouement populaire qu'ont engendré le rendez-vous du 11 août autour de l'éclipse et l'Armada du siècle. Je suis convaincue que les manifestations liées aux célébrations de l'an 2000 devraient encore renforcer cette tendance et profiter largement à notre économie touristique nationale.

M. André Capet.

C'est vrai !

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Permettez-moi de revenir quelques instants sur les principaux résultats enregistrés depuis le début de l'année. Je puis vous confirmer que nous battrons encore en 1999 des records de fréquentation comme de consommation et que les retombées sur la croissance et l'emploi seront très significatives.

Je citerai à titre d'illustration quelques chiffres révélateurs. Ainsi, le record de l'an dernier de 71 millions de visiteurs étrangers devrait être dépassé puisque, pendant la saison estivale, leur nombre était en hausse de 10 %, croissance qui s'est également confirmée durant les premiers mois d'automne.

Cette fréquentation accrue a eu des effets positifs au niveau des hébergements, le taux d'occupation enregistrant globalement une croissance de plus de deux points, et dans les transports. Ainsi, notre compagnie nationale Air France a vu son trafic progresser de plus de 14 % tandis que les lignes TGV affichaient une progression de 7,8 %.

Les répercussions sur l'emploi sont tout aussi significatives comme en témoignent les excellents résultats du sect eur hôtels-cafés-restaurants. Celui-ci a connu entre juin 1998 et juin 1999 une augmentation de près de 4 % de ses effectifs salariés, qui s'est traduite par la création de plus de 25 000 emplois.


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Vous avez été plusieurs à rappeler que l'activité touristique nationale, qui représente désormais plus de 7,3 % du produit intérieur brut, a rapporté plus de 71 milliards de francs de solde positif à la balance des paiements en 1998, ce qui la place au tout premier rang de notre économie. Ce solde sera une fois encore en progression en 1999, si j'en crois les huit premiers mois de l'année, qui affichent une croissance de cet indicateur de 17,9 %.

Ces bons résultats constituent un encouragement pour la politique que je conduis depuis plus de deux ans, une politique qui affirme son ambition de développer un tourisme durable, équilibré et harmonieux sur tout le territoire national, encourage la croissance économique du secteur et la création d'emplois, et favorise, enfin, l'accès de tous aux vacances et aux loisirs.

Cette politique s'inscrit autour de trois convictions fortes.

Premièrement, le tourisme doit être reconnu à sa juste valeur, comme un important secteur économique de notre pays.

Deuxièmement, il correspond à une aspiration légitime de notre population à partir en vacances, à découvrir d'autres horizons, d'autres cultures. Favoriser ce droit légitime à l'épanouissement personnel et familial que constitue le temps des vacances devient alors, au-delà d'un acte de solidarité, un véritable acte de citoyenneté.

Enfin, le tourisme est une activité économique à laquelle se rattache une éthique fondée sur des valeurs, celles de l'amitié, de la solidarité, de l'échange des cultures. Il porte en lui le progrès pour la tolérance et pour la paix.

Pour répondre à tant d'attentes et d'ambitions, il nous faut mener une action publique forte et cohérente, qui fédère les acteurs et les énergies, les soutient et les accompagne dans leurs efforts pour offrir les meilleures prestations à leurs visiteurs, et promouvoir, dans notre pays comme à l'étranger, l'image d'une France séduisante et accueillante.

Une telle politique nécessite, vous l'avez tous souligné, des moyens qui soient à la hauteur des ambitions affichées. Aussi le budget dont nous discutons aujourd'hui est-il en hausse de près de 14 % par rapport à celui de 1999. Il constitue, pour la deuxième année consécutive, un signe fort envers la grande famille du tourisme.

En effet, les moyens consacrés au tourisme seront ainsi passés, en deux ans, de 335 millions à 423,5 millions.

Cela ne tient compte, c'est vrai, monsieur le rapporteur, ni du milliard de francs que représente la dotation touristique ni des crédits issus des autres ministères, qui viennent soutenir les démarches touristiques de territoires et de filières. J'envisage d'ailleurs, d'ici à 2001, de les identifier plus précisément afin d'offrir une meilleure lisibilité de l'intervention globale de l'Etat dans ce secteur.

M. Jean-Pierre Dufau.

Très bien !

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Ce budget 2000 devrait donc contribuer à donner au tourisme les moyens de mieux exprimer ses potentialités en matière de croissance et d'emploi, comme vous avez d'ailleurs été nombreux à le souligner.

Cela passe, en premier lieu, par la valorisation des atouts de nos terroirs et par un soutien actif aux initiatives de développement local. Cette indispensable mise en désir et en tourisme des territoires s'appuiera avant tout sur les contrats de plan tourisme, à la préparation et à la définition desquels j'ai attaché la plus grande importance.

Ceux-ci ne pouvaient être, en effet, un simple catalogue de bonnes intentions ni une procédure élitiste réservée à quelques initiés, mais au contraire, comme MM. les rapporteurs et vous-même, monsieur Honde, l'avez souligné, un soutien au développement local de nos pays et agglomérations, qui repose sur les potentialités de notre territoire. Un soutien également aux dynamiques qui se créent sur le terrain et qui sont, ne l'oublions pas, l'expression des attentes d'une population. L'enveloppe qui leur est consacrée est en augmentation de plus de 69 % sur le titre IV, soit 30 millions de francs en crédits d'intervention et 20 millions en crédits de paiement au titre des investissements.

Certes, monsieur Bouvard, il serait souhaitable que ceux-ci soient confortés dans le cadre de la seconde enveloppe, où s'afficheront plus particulièrement les priorités des régions, et dont les derniers arbitrages, vous le savez, sont en cours.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial.

En effet !

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Si je ne puis, a ujourd'hui, vous annoncer un chiffre, et vous le comprendrez aisément, soyez certains que j'ai fait en sorte que le tourisme y voie son enveloppe abondée de façon très significative. De même, je puis vous assurer que j'agis pour qu'il figure en bonne place dans les DOCUP, connaissant l'enjeu que représentent les fonds structurels européens pour le financement du développement touristique.

Bien sûr, monsieur Defontaine, le tourisme rural devra trouver toute sa place dans ce développement et dans ces contrats. D'autant que, comme vous l'avez fort justement rappelé, il correspond de plus en plus aux nouvelles attentes, tel le besoin de nature, de culture, de retour aux racines et à la connaissance des traditions. De plus, son développement s'inscrit dans la logique d'une meilleure répartition touristique des flux sur l'ensemble du territoire, dans la perspective d'une croissance qui s'affirme.

Enfin, nous le savons, son action de revitalisation économique est un ballon d'oxygène pour l'agriculture, le commerce et l'artisanat. Je suis convaincue que le travail que j'ai engagé depuis maintenant un an avec les acteurs du monde rural, et en liaison avec mes collègues Jean Glavany et Dominique Voynet, devrait permettre de redonner à cette forme de tourisme l'élan et le dynamisme souhaitables, en s'appuyant, bien sûr, sur les contrats de plan, mais aussi sur les nouvelles politiques issues des lois d'orientation agricole et d'aménagement et de développement du territoire.

Dans quelques semaines verra ainsi le jour la Confé-r ence permanente du tourisme rural, qui fédérera l'ensemble des acteurs oeuvrant dans cette filière et qui deviendra l'interlocuteur privilégié des pouvoirs publics intervenant en faveur de son développement. Gageons que ce nouvel outil permettra une nouvelle efficacité de nos interventions dans cette filière pleine de promesses.

A l'image de l'espace rural, la montagne, et en particulier la moyenne montagne, fera l'objet d'une attention particulière de mon ministère, dans l'esprit de la mission qui m'a été confiée par M. le Premier ministre à l'occasion du dernier Conseil national de la montagne. Celle-ci s'articule, je le rappelle, autour de logiques de diversifications, d'amélioration de la qualité de l'offre et de plurisaisonnalité des activités. Ici comme ailleurs, sur le littoral ou dans nos villes d'art et d'histoire, nous nous attacherons en effet à privilégier l'étalement de la fréquentation touristique sur l'ensemble des mois de l'année.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 15 NOVEMBRE 1999

A ce propos, je suis convaincue, monsieur Deprez, que le mouvement du tourisme des quatre saisons, qui vous est cher, est désormais en marche, puisque de plus en plus de nos concitoyens réduisent la durée de leurs vacances estivales au profit de séjours additionnels plus ou moins longs et aux motivations très variées. Je n'en veux pour preuve que cette saison d'été 1999, qui a vu la durée moyenne de séjour estival tomber à 12,1 jours, au profit d'un minimum de quatre séjours additionnels. Et je suis tout aussi convaincue que le tourisme et les loisirs de proximité constituent de nouveaux enjeux, tant le besoin d'activités de fin de semaine s'exprime de plus en plus fortement chez nos concitoyens. Enjeux d'autant plus pressants que la réduction du temps de travail devrait encore en amplifier les effets et les attentes.

M. André Capet.

Tout à fait !

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Les filières du tourisme d'affaires, du tourisme vert, culturel ou fluvial, que vous avez évoquées, monsieur Defontaine et monsieur Capet, constituent autant de réponses à ces attentes et de perspectives de développement. Elles peuvent également contribuer à un élargissement dans le temps de la fréquentation de nos régions, villes et stations. Elles contribuent également à élargir le champ de nos touristes potentiels.

Mais puisque j'évoquais, il y a quelques instants, le développement de nos filières et territoires, et en particulier en montagne, je souhaiterais répondre aux inquiétudes qui ont été formulées par les différents orateurs concernant le thermalisme et la nécessaire adaptation de nos stations de sports d'hiver.

Je vous rappelle que mes collègues Martine Aubry et Dominique Gillot ont précisé devant votre assemblée, lors du débat du projet de loi de financement de la sécurité sociale, que le thermalisme est une composante traditionnelle du système de santé, que les cures thermales sont reconnues dans leur fonction sanitaire et qu'elles contribuent au bien-être de la population. C'est à ce titre qu'elles ont rejeté la proposition de la CNAMTS prévoyant le déremboursement de certaines cures thermales, ce qui permet de préserver les intérêts du secteur, mais aussi et surtout de poursuivre le travail engagé pour moderniser les stations et les adapter à la double exigence médicale et touristique.

Mon ministère poursuivra donc l'action qu'il a entreprise et qui se traduit par la réalisation de diagnostics des activités et hébergements, pour les stations qui le souhaitent, et dont l'objectif est d'y mettre en oeuvre, de façon individualisée, des schémas de mise en tourisme.

Dans le même esprit, et comme cela a été rappelé par M. Meylan, j'ai engagé une réflexion sur les problèmes d'organisation, de modernisation et d'adaptation des stations et équipements de sports d'hiver, dans la perspective d'une revitalisation de leurs activités et de leur fréquentation mais aussi d'une amélioration de la sécurité des activités qui y sont proposées.

Si, une fois encore, des solutions peuvent être apportées dans le cadre des contrats de plan, comme par exemple la mise en place de plans qualité dans les stations, l'organisation de l'offre de produits, le soutien à la promotion, je rappelle que bon nombre de réponses aux problèmes qui ne manqueront pas d'être identifiés dans le cadre de cette réflexion en cours et auxquels vous faisiez référence, monsieur Bouvard, ne relèvent pas directement de mon ministère...

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial.

Malheureusement !

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

... et nécessitent donc, à ce titre, un important travail interministériel, que je suis prête à initier.

Il en est de même de certaines difficultés rencontrées par le littoral français dans son développement. Vous avez évoqué à ce propos, monsieur Liberti, le délicat problème du trait de côte. Mon collègue Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement, s'est, vous le savez, inquiété dès son arrivée à ce ministè re de l'insuffisance des moyens apportés pour défendre nos côtes contre l'érosion marine. Il s'est employé à développer ces moyens, passés de 3 à 6 millions de francs, puis à 14 millions au projet de budget 2000.

Une telle enveloppe permet désormais à l'Etat de proposer aux régions les plus concernées qui le souhaitent de contractualiser cette intervention pour la durée du prochain plan. Ce sera l'occasion de replacer la défense contre l'érosion marine dans un contexte plus large de suivi et de maintien du trait de côte.

M. François Liberti.

Très bien !

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Concernant nos départements et territoires d'outre-mer, soyez assurés que le Gouvernement est particulièrement soucieux d'y mettre en oeuvre une politique cohérente, dynamique et volontariste en faveur du tourisme. C'est ce qu'a affirmé, ces derniers jours, M. le Premier ministre en Guadeloupe et en Martinique et c'est pour préparer cette politique qu'après m'être rendue dans nos îles de la Caraïbe je me rendrai dès ce soir à la Réunion. Notre ambition est d'aider nos départements d'outre-mer à professionnaliser encore leur offre, dans le cadre de démarches régionales cohérentes, qui pourront bien sûr s'appuyer sur de nombreux atouts, au premier rang desquels leur double appartenance culturelle et leur environnement protégé. Elles pourront s'appuyer aussi sur l'optimisation de projets plus globaux, sur des dispositifs fiscaux spécifiques ainsi que sur des moyens accordés par l'Union européenne, qui sont d'ailleurs particulièrement importants.

Favoriser la croissance et l'emploi signifie bien sûr répondre à la multitude et à la diversité des attentes en termes d'aménagement et d'équipement de nos territoires.

Cela passe aussi par la mobilisation de l'ensemble des acteurs pour améliorer, diversifier, commercialiser et promouvoir l'offre touristique française avec, pour mot d'ordre, vous le savez, la qualité : la qualité de l'offre, bien sûr, mais aussi la qualité de l'accueil.

I l nous faut donc accompagner les quelque 200 000 petites entreprises françaises investies dans le tourisme, qui sont effectivement, monsieur Goulard, les premiers acteurs du succès de notre économie touristique et qui contribuent fortement à notre première place dans le monde. C'est la raison pour laquelle nous les soutenons dans leurs efforts pour moderniser leurs équipements et adapter leur offre aux nouveaux comportements et aux nouvelles exigences des vacanciers. D'autant que, à l'instar de la mobilisation autour de la Coupe du monde de football, les célébrations de l'an 2000 en France nous offrent l'opportunité d'accomplir encore d'importants progrès.

Là encore, les contrats de plan Etat-régions pourront utilement soutenir les initiatives publiques, privées ou associatives prises en la matière. C'est pourquoi l'essentiel des augmentations du titre VI, sur l'enveloppe « investissements » de ces contrats de plan, devra permettre d'encourager les démarches qualité et la modernisation de l'hébergement touristique, en particulier celui de la petite hôtellerie indépendante.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 15 NOVEMBRE 1999

Vous avez été nombreux à m'interroger ici sur le financement de l'investissement touristique et sur les mesures à prendre en faveur des petites et moyennes entreprises, en particulier pour faciliter leur désendettement et leur accès au crédit. Je souhaiterais, en réponse, vous indiquer quelles sont mes principales pistes de travail.

Mon ministère envisage, vous l'avez évoqué, monsieur le rapporteur, afin d'aider les PME du secteur qui souhaiteraient adapter leurs équipements et améliorer les services qu'elles rendent, la mise en place d'un fond de garantie. Ce secteur, comme vous le savez, est un secteur de services particulièrement spécifique, étant à la fois à forte intensité capitalistique et de main-d'oeuvre, et à faible taux de marge. Il souffre en outre d'une mauvaise image auprès des milieux bancaires.

C'est à partir de ce constat que je fais procéder actuellement par mes services à une analyse micro-économique d'une centaine de PME, panel de l'hôtellerie-café-restauration, dans huit départements, afin d'identifier les besoins en investissement du secteur au niveau national.

Cette étude permettra d'affiner l'identification de l'enveloppe nécessaire à ce fonds de garantie, que j'espère voir mis en place au plus tard en 2001.

Ce fonds, une fois mis en oeuvre, viendra utilement compléter le dispositif existant de restructuration de la dette des entreprises hôtelières au travers des crédits SOFARIS et les prêts bonifiés accordés au secteur de la restauration pour financer ses travaux de mise aux normes.

Vous avez aussi évoqué le poids de la TVA sur les entreprises de restauration. Je crois qu'il faut, dans ce domaine, rester attentif à la complexité de ce dossier et aux risques forts que pourraient faire naître des mouvements à la baisse pour certains, comme la restauration à la place, à la hausse pour d'autres, comme la restauration collective, scolaire par exemple, et d'autres modes très sociaux de restauration.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial.

La restauration scolaire n'est pas en cause. Personne ne songe à y toucher !

M. Jean-Michel Couve.

En effet, ce n'est pas le problème !

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Si, si ! Cependant, le dossier reste ouvert, et le débat continue de progresser, comme l'a indiqué récemment au Sénat le ministre de l'économie et des finances, mon collègue Christian Sautter. Mais je continue de penser que la baisse de la TVA ne constitue pas le seul levier en matière de création d'emplois dans ce secteur. Ainsi, les allégements de charges que nous étudions, notamment dans le cadre de la loi sur la réduction du temps de travail, complétés par un ambitieux plan emploi-formation -, à la préparation duquel je m'attache depuis plusieurs mois - constituent également des pistes de réflexion pour répondre aux graves problèmes d'attractivité du secteur pour les jeunes, et pour favoriser la création d'emplois et leur meilleure qualification. Ils peuvent également contribuer, au final, à l'amélioration des marges des entreprises.

Concernant le financement des collectivités, vous avez rappelé, monsieur Bouvard, que la loi de 1993 a gelé la dotation aux communes touristiques et thermales, ce qui entraîne, il faut le reconnaître, des inégalités de situation entre les stations.

J'ai, pour ma part, appelé l'attention du ministre de l'intérieur sur ces distorsions et les inégalités qu'elles engendrent. Aussi, je me réjouis qu'en réponse une réflexion s'engage, à l'initiative de mon collègue JeanPierre Chevènement et sous l'égide de la direction générale des collectivités locales, sur l'ensemble du mécanisme de péréquation. Le Gouvernement est en effet prêt, je vous le confirme, à examiner dans les meilleurs délais, avec les communes touristiques, mais aussi hospitalières, les problèmes spécifiques qu'elles rencontrent en matière de dotation forfaitaire. Et je ne doute pas que nous pourrons identifier, au travers de cette réflexion, les nouveaux outils indispensables au renouvellement de notre offre touristique nationale, en particulier sur le littoral.

D'autres mesures, dont j'avais annoncé ici même, l'an dernier, qu'elles allaient être mises en chantier, entrent désormais en vigueur et contribueront, elles aussi, à cet effort qualitatif sur notre offre touristique nationale.

Je pense en premier lieu à la concrétisation du dispositif « Villages résidentiels de tourisme », qui a pour objectif, vous l'avez rappelé, de favoriser la rénovation et la mise en marché de l'immobilier de loisirs de nos stations littorales ou de montagne, en particulier celles qui ont vieilli et qui doivent s'adapter aux nouvelles attentes des touristes. Je tiens à vous confirmer, monsieur Bouvard, que les textes d'application liés à ce dispositif viennent d'être validés au niveau interministériel et que la saisine du Conseil d'Etat a été visée vendredi dernier.

M. Jean-Michel Couve.

Bonne nouvelle !

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Je mettrai tout en oeuvre pour que ces textes paraissent au Journal officiel avant la fin de l'année.

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial.

C'est bien ! Ce sera notre cadeau de Noël !

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Je pense aussi au nouveau processus de classement des restaurants de tourisme que mon ministère vient de mettre en place en partenariat avec la profession.

Je pense, enfin, aux mesures d'incitation et de promotion du classement des meublés de tourisme, définies en liaison avec les loueurs et leurs représentants, et qui devraient permettre un meilleur suivi qualitatif du parc de meublés et faciliter sa mise en marché, en particulier auprès de nos visiteurs étrangers.

Vous avez évoqué, monsieur Defontaine, le nécessaire soutien à la promotion et à la mise en marché de cette offre ainsi renouvelée et le recours aux technologies nouvelles liées à l'informatique.

Chacun le sait ici, le tourisme est un secteur aux évolutions rapides. Le fractionnement des séjours, que je rappelais il y a quelques instants, les mutations du monde du travail, les changements intervenus dans la structure familiale ou encore l'essor considérable des nouvelles technologies et l'irruption du commerce en ligne, sonte ffectivement autant d'éléments que ces entreprises doivent prendre en compte, et nous devons les y aider.

Concernant les domaines de l'information et de la réservation, nous avons soutenu les projets défendus par les professionnels et les grandes fédérations territoriales du tourisme.

Je pense surtout à Résinfrance, qui est entré en service cette année et qui constituera un outil essentiel de la commercialisation de nos produits, tant en France qu'à l'étranger. Ce système permet, je le rappelle, d'une part le regroupement en un même site d'une offre représentative de la production touristique française et surtout de sa diversité, d'autre part d'en favoriser la lisibilité.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 15 NOVEMBRE 1999

Je pense aussi à Tourinfrance, qui permet désormais d'harmoniser, par un langage commun à tous, le recensement des données et informations sur l'offre touristique nationale et qui favorise l'interconnexion de l'ensemble des bases de données développées au niveau des différents échelons territoriaux.

Pour favoriser la connaissances des clientèles, la perception de leurs attentes, et pour aider les porteurs de projets et les PME du secteur à bâtir des projets viables, j'ai souhaité, comme je m'y étais engagée devant vous l'an dern ier, soutenir l'élaboration d'un dispositif national d'observation et d'analyse des phénomènes touristiques à la hauteur des enjeux économiques et sociaux de ce secteur, et développer l'action de conseil et d'accompagnement conduite par l'Agence française d'ingénierie touristique.

C'est la raison pour laquelle le chapitre « Etudes » du titre III est en augmentation de 137 %, pour atteindre 17,3 millions de francs. Cette forte progression permettra, comme vous l'avez rappelé, monsieur le rapporteur, de réaliser la nouvelle enquête aux frontières, rendue nécessaire pour s'adapter aux nouvelles contraintes de l'euro et qui constitue un outil majeur d'aide à la décision tant pour les pouvoirs publics que pour les professionnels.

J'ai demandé dans le même temps, dans l'esprit de la réforme de l'Etat, que la direction du tourisme procède à une réorganisation qui lui permette de mieux prendre en compte l'ensemble des éléments de la politique que ce budget traduit.

Priorité sera donnée à la mise en oeuvre de cette chaîne de production, d'analyse et de diffusion des informations statistiques indispensables aux acteurs de l'économie touristique. Elle s'accompagnera de la constitution d'une unité de recherche et de prospective sur le tourisme.

Dans le même esprit, l'Agence française d'ingénierie touristique, outil très apprécié des investisseurs publics et privés, vous l'avez d'ailleurs rappelé, monsieur Couve, ...

M. Jean-Michel Couve.

C'est vrai !

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

... verra ses crédits augmenter de 12,5 %, ce qui portera son budget total à 9 millions, afin de développer ses missions en faveur de la valorisation et de l'adaptation de l'offre touristique française.

Vous avez été plusieurs à souligner la nécessité de conforter encore cet outil, en particulier au niveau de son personnel. A cet égard, j'ai engagé une double démarche, qui concerne d'ailleurs mon administration dans toutes ses composantes. Elle consiste en premier lieu à stabiliser les effectifs en situation de mise à disposition par la signature de conventions-cadres avec leurs ministères de tutelle. Elle vise aussi à conforter progressivement non seulement mon administration centrale et déconcentrée, mais également ses satellites, par un soutien important en personnel issu de l'équipement, soutien que j'ai obtenu de mon collègue Jean-Claude Gayssot.

Cela devrait également répondre à votre préoccupation, monsieur Couve, de voir les délégations régionales au tourisme dotées en moyens suffisants pour accomplir leur mission auprès des collectivités et du secteur associatif et privé. Vous avez pu noter l'effort budgétaire qui a été de nouveau consenti cette année.

Quant au problème des locaux, monsieur Bouvard, ne nous trompons pas. Les solutions étudiées à ma demande ces derniers mois, y compris dans des espaces propriétés de l'Etat, se sont avérées extrêmement coûteuses et n'ont pu aboutir à un choix économiquement viable.

Enfin, et vous l'avez tous noté, pour promouvoir notre offre touristique ainsi renouvelée et modernisée, le chapitre « Promotion à l'étranger » de ce budget pour 2000 est à nouveau conforté, ce qui permet d'augmenter la dotation de Maison de la France dans la logique de redressement budgétaire engagée en 1999 et d'assurer son assujettissement à la TVA.

S'agissant des fermetures de bureaux, elles ne sont nullement le signe d'un affaiblissement. Elles résultent d'une optimisation des moyens d'intervention en fonction des p erspectives de développement des marchés vers la France.

L'efficacité et le professionnalisme du GIE Maison de la France sont reconnus internationalement, ce qui lui vaut d'ailleurs d'être sollicité en matière de transfert de savoir-faire. Du reste, M. Bouvard en a fait lui-même la constatation lors de sa visite de la représentation de Bruxelles, reconnaissant lui-même que les sommes que nous investissons sont davantage optimisées que celles investies par nos concurrents étrangers.

Pour accompagner les entreprises mais aussi et surtout les collectivités locales dans leur développement au service de la croissance et de l'emploi, vous avez insisté, monsieur Deprez, sur la nécessité de combler le vide législatif qui handicape notre économie touristique.

M. Léonce Deprez.

C'est vrai !

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Vous savez à quel point je suis sensible à ce que nos textes et règlements évoluent en même temps que le secteur pour favoriser son développement et non le pénaliser. Or le caractère diffus de ces textes ne favorise pas, c'est vrai, la lisibilité et la prise en compte, dans toute sa dimension, du secteur touristique.

L'année dernière, ici même, j'avais évoqué la possibilité de recenser et de réformer l'ensemble de ces textes dans le cadre d'une grande loi d'orientation. Un premier travail de recensement exhaustif des difficultés rencontrées par les opérateurs du tourisme a été établi à ma demande par l'inspection générale du tourisme. A l'occasion de cette démarche, il est apparu que l'examen et le toilettage des textes actuels pouvaient être délicats et surtout extrêmement longs. Aussi ai-je préféré effectuer ce toilettage au travers de l'élaboration d'un code du tourisme que je proposerai très prochainement au Premier ministre. Sa mise en oeuvre devrait se faire à l'horizon 2001.

Nous allons installer très prochainement le comité de pilotage. Bien entendu, nous ferons appel à tous ceux qui, de par leur expérience, pourront nous aider dans cette tâche qui, il faut le reconnaître, est extrêmement délicate.

Dans le cadre de cet indispensable toilettage des textes, il nous faut, en effet, monsieur Dumoulin, remettre à plat ceux régissant la taxe de séjour. Il me semble intéressant de réfléchir à son mode de perception, encore trop inefficace. Les cartes d'hôte me semblent à ce titre un exemple intéressant à analyser, voire à étendre.

De même, comme vous le faites remarquer, il est important de faire bénéficier le monde rural de cette recette essentielle à son développement touristique, que ce soit par l'instauration d'un système de péréquation ou par la reconnaissance territoriale et fiscale des pays d'accueil touristique. L'élaboration du code du tourisme permettra d'apporter une réponse adaptée à cette question.

Vous avez tous souligné l'intérêt que vous portez à la politique sociale du tourisme que je mène. Permettez-moi d'y revenir pour en souligner les avancées.


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Pour la deuxième année consécutive, nous avons maintenu le doublement des crédits d'aide à la réhabilitation du patrimoine social : plus de cent projets de rénovation ont été ainsi soutenus.

Toutefois, j'ambitionne de mener une action beaucoup plus globale. Et vous avez raison de dire, monsieur Vila, qu'elle ne relève pas uniquement de mes compétences. Le plein emploi, un meilleur pouvoir d'achat et la réduction du temps de travail sont des facteurs importants pour faire progresser le droit aux vacances.

M. André Capet.

Très juste !

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Mais rien ne s'oppose à une action volontariste en vue de réduire les inégalités. Toute l'histoire du tourisme social et associatif en témoigne.

C'est pourquoi j'ai souhaité ne pas mener cette action seule, mais y associer les régions, les départements et les collectivités locales, qui en apprécient souvent les retombées pour leurs territoires en termes de développement local et touristique.

J'ai d'ailleurs eu le plaisir d'inaugurer, dimanche dernier, dans le massif vosgien, un équipement rénové et modernisé. Grâce à cette rénovation, il est aujourd'hui capable d'accueillir des clientèles diversifiées - jeunes, familles, retraités - toute l'année, dans le cadre d'un brassage social harmonieux. Cette action a pu être réalisée grâce à un partenariat efficace réunissant l'Etat, la région, les départements, la CNAF et l'Agence nationale pour le chèque-vacances. Cette réalisation illustre parfaitement les réflexions menées dans le cadre des états généraux du tourisme social et associatif. Nous assistons, comme vous le rappeliez, monsieur Capet, à l'émergence d'une nouvelle étape vers de nouveaux besoins.

Quelques mois après ces états généraux, je suis en mesure de vous annoncer que les principales propositions qui en sont issues sont en cours de réalisation.

Ainsi, la coordination nationale du tourisme social et associatif, qui réunira toutes les associations ainsi que les comités d'entreprise dans un espace d'échanges et de propositions et qui aura à réfléchir à la mutualisation des équipements, sera créée dans les semaines à venir.

De même sera institué un agrément national dont l'objectif est de clarifier la mission sociale des associations.

Les décrets et arrêtés le concernant ont été validés au niveau interministériel et paraîtront dans les toutes prochaines semaines. Enfin, l'an prochain, sera lancée une campagne de communication institutionnelle pour promouvoir l'image et les valeurs du tourisme social et associatif.

Vous le savez, une politique plus globale en ce domaine implique d'en diversifier les modes d'action.

Ainsi, le chèque-vacances, qui a montré son efficacité, est aujourd'hui renforcé par son extension aux salariés des petites et moyennes entreprises. Ce nouveau dispositif est en train de se mettre en place. Comme vous l'aurez remarqué, une campagne de communication à ce sujet se déroule actuellement sur les radios et dans la presse spécialisée.

Nous allons pouvoir signer prochainement les prem ières conventions entreprises ANCV. Une dizaine devraient l'être avant la fin de l'année.

Enfin, une rencontre paritaire entre l'Union professionnelle artisanale et les partenaires sociaux devrait se tenir la semaine prochaine en vue de la préparation d'un accord de branche pour la diffusion du chèque-vacances dans l'artisanat et le commerce.

Vous avez formulé, monsieur Vila, des inquiétudes en ce qui concerne la diffusion du chèque-vacances dans la fonction publique. Je puis vous confirmer qu'il y aura non réduction des crédits mais réorientation de ceux-ci dans le cadre d'un recentrage du chèque-vacances sur son objet social, et les sommes qui y seront consacrées seront en augmentation très significative.

Celles-ci ont, rappelons-le, doublé en l'espace de sept ans, cela mérite d'être souligné. M. le ministre de la fonction publique a d'ailleurs inscrit au projet de loi de finances pour 2000, sur la ligne chèque-vacances, une somme de 270 millions de francs contre 245 millions de francs en 1999.

Je note par ailleurs qu'à l'issue d'un débat qui a eu lieu au sein du comité interministériel d'action sociale, les emplois jeunes pourront désormais bénéficier du chèquevacances.

Enfin, cette politique sociale du tourisme n'aurait pas de sens si elle ne mettait pas en lumière l'invisible, c'està-dire celles et ceux qui, étant exclus du travail, exclus des fruits du progrès, sont d'autant plus exclus du droit aux vacances. C'est pourquoi il fallait, à leurs yeux, mais aussi à ceux de la puissance publique, revaloriser ce droit. C'est la raison pour laquelle il a été affiché clairement dans la loi contre l'exclusion comme un droit fondamental.

C'est dans ce cadre que la bourse solidarité vacances a vu concrètement le jour cet été. Le budget pour 2000 renforcera encore les moyens budgétaires de cette structure, dont le statut juridique est celui d'un groupement d'intérêt public, lequel sera officiellement installé la semaine prochaine. Le groupement permettra l'optimisation de ce partenariat solidaire qui associe, sous l'autorité de l'Etat, les professionnels du tourisme et les associations humanitaires.

Cet été, 1 300 familles sont parties en vacances grâce à ces bourses. L'objectif est maintenant de faire fonctionner cette structure toute l'année et de permettre le départ d'au moins 10 000 familles en l'an 2000.

Je ne saurais clore ce chapitre sans citer l'action en faveur des voyages des jeunes à l'étranger. Vous l'avez rappelé, 500 jeunes se sont investis dans des projets c ulturels ou solidaires avec des associations locales.

L'objectif pour 2000 est de travailler, avec mes collègues de la jeunesse et des sports, de la ville et de la coopération, à la coordination de nos actions en ce domaine, mais surtout d'ouvrir, ensemble, le grand chantier du tourisme des jeunes pour l'inscrire dans une nouvelle ambition conforme aux aspirations et enjeux futurs.

Vous avez été plusieurs à le souligner, l'emploi dans le tourisme est au coeur des enjeux de son développement.

En effet, c'est de l'importance des progrès que nous réaliserons en ce domaine que dépendent la qualité et la compétitivité de ce secteur, pour lequel nous souhaitons que la croissance apporte stabilité et pérennité.

C'est animée de cette ambition que j'ai demandé, avec Martine Aubry, un rapport sur les saisonniers du tourisme à M. Anicet Le Pors. Moins d'un an après la remise de ce rapport, monsieur Dufau, on peut déjà parler d'une prise de conscience, d'une sensibilisation, voire d'une première mobilisation de tous les acteurs concernés.

Grâce à ce rapport, nous savons désormais que ces 420 000 saisonniers vivent une grande diversité de situations et qu'il convient d'en aborder les problèmes dans leur extrême complexité.


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J'ai donc choisi une méthode de travail qui passe par un important travail interministériel, une mobilisation des services de l'Etat sur le terrain pour aborder le mieux possible la diversité des situations, une sensibilisation et une concertation des partenaires sociaux.

Qu'en est-il dix mois après la parution du rapport ? Un guide des saisonniers est sorti depuis deux mois en 20 000 exemplaires. Il est déjà épuisé et un retirage est prévu.

Nous travaillons à la mise en place de deux maisons de saisonniers expérimentales avec les collectivités locales concernées, l'une située dans les Alpes, l'autre dans les Pyrénées.

Pour ce qui concerne le logement, les réflexions que nous menons avec mon collègue Louis Besson s'inscrivent autour de deux axes : la premier concerne l'instauration d'une aide à la pierre spécifique à la création de logements saisonniers ; le second a trait à la mise en oeuvre d'une aide à la personne par l'adaptation des textes en vigueur à la problématique du salarié saisonnier.

Pour ce qui concerne la formation, je tiens à signaler que les travaux du rapport Le Pors ont été intégrés dans le chantier de la réforme de la formation professionnelle.

Par ailleurs, nous travaillons à une reconnaissance des acquis, des compétences et de la polyvalence de l'exercice des métiers du tourisme.

Une opération expérimentale sera menée dans la région PACA en partenariat avec l'Etat et la fédération hôtelière.

Elle permettra, en dehors des saisons touristiques, l'organisation de formations bi-qualifiantes, rémunérées à destination des saisonniers.

Enfin, toutes les questions concernant le respect du droit du travail en vigueur, les contrats de travail, la sécurisation des embauches, les conditions d'exercice du dialogue social font l'objet d'un examen conjoint avec le ministère de Martine Aubry.

Sur le terrain, je me suis attachée, à mobiliser les services de l'Etat, sous la responsabilité des préfets, en Savoie, en Haute-Savoie, dans l'Ardèche, en CharenteMaritime, dans l'Hérault, dans les Côtes d'Armor ou encore dans les Hautes-Pyrénées, où se sont engagées des actions locales d'information, de formation, d'échanges entre les sites et les saisons et des expériences de pluriactivités.

Enfin, je vous informe que ce sujet fera l'objet d'une communication en conseil des ministres dans la première quinzaine de décembre.

M. le rapporteur Defontaine et vous-même, monsieur Couve, avez souhaité être plus informés sur le bilan des 35 heures dans le secteur du tourisme.

Alors que, pour beaucoup, il était impossible d'imaginer cette perspective - la nature des métiers y ferait obligatoirement obstacle -, force est de constater que la réalité vient démentir avec force ces mauvais augures, nous offrant ainsi la possibilité de relever le défi.

A ce jour, ce sont près de 200 000 salariés du tourisme qui sont concernés par les accords aujourd'hui signés. La plupart, monsieur Dufau, sont des accords offensifs et donc avec création d'emplois.

J'en rappellerai, à titre d'illustration, les principaux : ils concernent l'ensemble des salariés du tourisme social et associatif,...

M. Jean-Michel Couve.

On pouvait s'y attendre !

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

... les structures territoriales de tourisme - CRT, CDT, OTSI -, les parcs de loisirs, les salariés de la restauration rapide et de la grande restauration de chaîne, en particulier dans les gares et aéroports, et ceux des agences de voyages et touropérateurs tels Havas et Nouvelles Frontières. Le Club Méditerranée négocie également une réduction du temps de travail des personnels des agences et des villages.

Des négociations identiques sont engagées actuellement au niveau de la branche des hôtels-cafés-restaurants.

Je ne saurais terminer cette intervention sans souligner l'effort porté sur la ligne internationale.

En observant comme vous, monsieur Deprez, que la croissance des flux touristiques mondiaux annoncée pour les vingt ans à venir pourrait donner le vertige à ses promoteurs et conduire à des désordres, il m'est apparu très vite indispensable d'engager une réflexion et une concertation aux plans tant européen que mondial.

Cette maîtrise des flux et de leurs conséquences sur l'environnement fait l'objet dans notre pays d'un réel savoir-faire issu d'une longue expérience.

C'est précisément ce savoir-faire que j'ai souhaité mettre au service de nos voisins européens, d'abord, et des pays avec lesquels nous avons engagé des démarches de coopération, ensuite, des démarches de coopération q ui soient réellement synonymes d'enrichissement mutuel.

Je ne développerai pas ici tous les projets que je conduis, que ce soit avec des Etats d'Afrique, d'Asie, de la Caraïbe ou d'Amérique du Sud. Ils s'articulent tous autour de la notion de développement durable et du respect d'un code d'éthique que j'entends défendre partout où je me rends, et dont j'ai appelé de mes voeux la définition lors de la dernière assemblée générale de l'Organisation mondiale du tourisme, le mois dernier, à Santiago du Chili.

Ce code d'éthique du tourisme, élaboré par 138 pays membres de l'OMT, ambitionne de jouer le rôle de garde-fou face au triplement des flux mondiaux annoncé pour les prochaines années. Ce code prône un tourisme respectueux des hommes, des cultures locales et de l'environnement. Il sera conforté dans les deux ans à venir par la création d'un « comité mondial d'éthique du tourisme », dont les membres pourront être saisis d'une demande de règlement en cas de litige.

C'est animée de la même conviction que j'ai pris une initiative forte en ce qui concerne le tourisme en Palestine et en Israël, notamment au cours d'un déplacement que j'ai effectué récemment dans ces pays, autour de la constitution d'un circuit de la Paix, qui unira la Palestine, Israël, la Jordanie et l'Egypte, et valorisera cette région, berceau du monde et de nos civilisations.

M. Jean-Pierre Defontaine, rapporteur pour avis.

Très bien ! Mme la secrétaire d'Etat au tourisme. En effet, développer la coopération pour assurer un développement durable des pays partenaires et bénéficiaires, défendre un code d'éthique mondial du tourisme, c'est aussi agir pour la paix. Car le tourisme, je le répète sans cesse, est porteur de valeurs fortes, tolérance, amitié entre les peuples, échange des cultures et des savoirs.

C'est ce sens que je souhaitais redonner à la politique touristique de France. C'est ce qui m'enthousiasme et me guide dans l'ensemble des combats que je livre au service de ce secteur essentiel à la société que nous allons construire ensemble. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

M. Léonce Deprez. Très bien !


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M. le président.

Nous en arrivons aux questions.

Je rappelle que les questions comme les réponses ne doivent pas dépasser deux minutes.

Pour le groupe RPR, la parole est à M. Jean-Michel Couve.

M. Jean-Michel Couve. Madame la secrétaire d'Etat, vous avez indiqué que 200 000 salariés bénéficieraient de mesures de réduction du temps de travail dans les métiers du tourisme ; mais vous ne parlez pas des salariés de ce secteur qui ne sont pas encore passés aux 35 heures. Or c'est au 1er janvier 2000 que la loi doit entrer en vigueur pour les entreprises de plus de vingt salariés.

Il est évident qu'une grande flexibilité, voire une annualisation du temps de travail et l'acceptation d'une période d'adaptation seraient nécessaires dans l'hôtellerierestauration.

Quelle politique comptez-vous mener dans ce secteur ? Quels conseils allez-vous donner aux professionnels ?

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme. Monsieur le député, votre question me permet de faire à nouveau part de ma conviction que les mesures de réduction du temps de travail peuvent et doivent s'appliquer à la branche des hôtels, cafés et restaurants.

En effet, ce secteur est en butte à une grande difficulté : son manque d'attractivité, lié aux conditions de travail et de rémunération de ses salariés. Cela a pour conséquence, je le constate tous les jours sur le terrain, une véritable pénurie de main-d'oeuvre.

J'ai donc pris l'initiative, avec les organisations professionnelles du secteur, d'engager sur le terrain, dans les entreprises, une démarche très pragmatique d'étude des modalités pratiques et des conditions de cette évolution.

Mon département ministériel mène donc actuellement, dans huit départements, des actions visant à aider à la modernisation sociale et économique des entreprises hôtelières et de la restauration. Des réunions se tiennent actuellement sous l'autorité des préfets. Elles associent le ministère de l'emploi, la Banque de France, les délégations régionales au tourisme, des professionnels représentatifs de la diversité des entreprises et les syndicats de la branche. Le travail porte sur deux aspects : l'équilibre économique des entreprises et leur besoin de modernisation, d'une part, l'organisation du travail et la réduction du temps de travail, d'autre part. Un premier bilan devrait être dressé fin décembre.

Je puis cependant indiquer d'ores et déjà les premiers résultats provisoires concernant la région Limousin. Ils font apparaître que l'application des deux lois de ma collègue Martine Aubry permettrait une création d'emplois représentant 20 % des effectifs, sans augmentation de la masse salariale.

M. le président.

La parole est à Mme Martine Aurillac.

Mme Martine Aurillac.

Madame la secrétaire d'Etat, vous avez déjà évoqué en partie les deux points que je souhaite soulever, mais les professionnels ont besoin d'être rassurés.

Selon les chiffres que vous avez présentés lors du conseil des ministres du 15 septembre dernier, le bilan de la saison touristique 1998 serait très positif, et nous nous en réjouissons. Le tourisme a en effet représenté une consommation intérieure de 612 milliards de francs, et la clientèle étrangère a atteint 70 millions de visiteurs, nous plaçant, ainsi que vous l'avez rappelé, au premier rang mondial, avec 10 % du marché mondial des voyages. Il est donc tout naturel d'encourager ce secteur phare de notre économie.

Or votre volonté de favoriser ce secteur par une augmentation des crédits qui lui sont consacrés n'est pas en réel accord avec les réponses données dernièrement par le ministre des finances sur l'abaissement du taux de TVA applicable à la restauration.

Depuis des mois, l'opposition soutient cette demande parfaitement justifiée du secteur de la restauration traditionnelle, qui, bien entendu, ne concerne pas la restauration scolaire.

M. François Liberti.

La seule chose que vous ayez faite, c'est d'augmenter la TVA !

Mme Martine Aurillac.

Actuellement, sept pays européens appliquent un taux de TVA réduit, et le Portugal est en passe d'obtenir une autorisation des autorités de Bruxelles. La France, première destination touristique, ne peut pas ignorer cette revendication, dont la satisfaction permettrait de créer près de 15 000 emplois et améliorerait la compétitivité du tourisme français par rapport à ses concurrents étrangers, qui bénéficient d'un taux plus faible.

De surcroît, le Gouvernement a annoncé, à grand renfort médiatique, pour les prochains mois, un projet de taxation des emplois précaires, auxquels on assimile, abusivement d'ailleurs, les emplois saisonniers. Or l'hôtellerie et la restauration emploient un très grand nombre des alariés pendant des périodes particulières, parfois réduites, afin de répondre aux aléas de la demande. De nouvelles dispositions restrictives ne pourraient que fragiliser ce secteur d'activité à très fort taux de main-d'oeuvre, qui fait vivre, directement ou indirectement, 2 millions de personnes, dont 612 000 dans le domaine de la restauration et de l'hôtellerie, qui a créé près de 20 000 emplois entre mars 1998 et mars 1999.

Comment le Gouvernement entend-il concilier l'effet d'annonce d'un budget du tourisme en hausse et les mesures restrictives qu'il s'apprête à proposer à la représentation nationale pour limiter les emplois précaires dans ce secteur ? En second lieu, entend-il défendre auprès du Conseil européen les intérêts de la restauration traditionnelle et demander l'autorisation de diminuer la TVA applicable à ce secteur ? Celui-ci n'intéresse pas que les seuls touristes, ni les gens les plus fortunés, il constitue un véritable gisement d'emplois.

M. Jean-Michel Couve.

Très bien !

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Madame la députée, je crois avoir déjà longuement répondu à cette question, mais je développerai mon argumentation.

Je rappelle d'abord que j'ai trouvé dans ma corbeille le problème de la TVA concernant la restauration en arrivant au ministère ; il se pose donc depuis très longtemps et a été considérablement aggravé, je le rappelle, par l'augmentation de deux points du taux de la TVA,...

M. Jean-Pierre Dufau.

Bien sûr !

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

... qui a porté celle-ci à 20,6 %. Cette augmentation a été très difficile à supporter par la restauration, qui n'a pas augmenté ses prix et a absorbé cette charge supplémentaire en prenant sur sa marge.


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Je suis tout à fait consciente du problème mais le débat a considérablement progressé, il est devenu public et l'Assemblée discute en permanence de cette question.

Mais la solution est difficile à trouver : sinon, vous auriez vous-même réglé le problème depuis très longtemps.

Les efforts du Gouvernement concernant la fiscalité ont porté cette année sur les travaux liés au logement.

Pour ce qui est de la TVA sur la restauration, le débat continue, y compris au niveau européen, où ce problème est maintenant au coeur de la discussion.

Il s'agit d'une question importante, mais ce n'est pas là le seul levier permettant d'améliorer la situation des entreprises de restauration, et j'envisage toutes les mesures susceptibles de les aider.

Vous m'avez également fait part de votre inquiétude concernant la taxation des emplois précaires. Le projet de loi de Mme Aubry n'est pas encore définitivement arrêté et je ne pense pas qu'il concernera les emplois saisonniers.

Nous étudions avec ma collègue les conclusions du rapport Le Pors sur les saisonniers du tourisme. Nous travaillons dans la concertation, dans l'intérêt des salariés de ce secteur mais aussi dans le souci de la bonne marche des entreprises.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Michel Couve, pour poser une seconde question.

M. Jean-Michel Couve.

Madame la secrétaire d'Etat, nous avons tous beaucoup insisté ce matin sur l'intérêt, comme l'a dit Léonce Deprez, de « désaisonnaliser » l'activité touristique. Dans le département du Var, nous avons même créé une deuxième saison, quasiment ex nihilo , et d'autres communes font de même. Cela va dans le bon sens mais nécessite des engagements humains et financiers très importants.

Comptez-vous, dans le cadre du douzième contrat de plan Etat-régions, aider ces opérations de création de nouvelles saisons ou de « désaisonnalisation » ?

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Monsieur le député, je vous confirme que la préoccupation que vous avez exprimée figure dans les objectifs du contrat de plan ; il faut en effet adapter notre offre touristique aux nouvelles attentes et aux nouveaux besoins. Au demeurant, comme je l'ai déjà dit, la « désaisonnalisation » s'impose car les touristes sont déjà en train de modifier c omplètement la manière dont ils prennent leurs vacances. Il s'agit d'un point très important. J'encourage les régions à contractualiser les postes nécessaires car je pense que c'est de cette façon qu'on pourra faire face à l'augmentation des flux touristiques et aux enjeux futurs de la croissance.

M. le président.

Pour le groupe DL, la parole est à

M. Michel Meylan.

M. Michel Meylan.

Madame la secrétaire d'Etat, lors de la présentation de votre budget en commission, vous avez émis le souhait d'atteindre pour la fin de la législature, en 2003, un objectif de 700 millions de francs pour le budget du tourisme.

Cette progression constituerait une augmentation de 65 % en seulement trois ans. Vous vous doutez bien que cet objectif ne peut que satisfaire l'ensemble de la profession et les élus. Nous considérons pour notre part que cet effort particulièrement important devrait s'orienter essentiellement vers les acteurs du tourisme.

Une forte augmentation des crédits de fonctionnement du ministère ne servirait en effet qu'à fonctionnariser un secteur économique qui n'en n'a pas besoin et serait hautement préjudiciable au développement de l'industrie touristique.

Aussi, il serait intéressant de savoir quels postes budgétaires devraient, selon vous, bénéficier de cette augmentation.

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.

Mme la secrétaire d'Etat au tourisme.

Monsieur le député, l'objectif de 700 millions de francs à l'horizon 2003 que je me propose d'atteindre pour le budget vise à parvenir dans différents secteurs à la masse critique en ce qui concerne les interventions. Cela va à l'encontre de votre inquiétude.

Il s'agit en particulier de renforcer le secteur de l'observation économique et les études pour améliorer le traitement ; les moyens de fonctionnement des délégations régionales au tourisme, relais essentiels de l'action de l'Etat au niveau local ; la promotion de la France à l'étranger et en France ainsi que les actions de communication ministérielles ; la promotion de l'ingénierie et du savoir-faire français à l'étranger ; l'aide à la modernisation des entreprises du secteur ; un renforcement significatif des moyens dans le domaine social, la formation et la professionnalisation des personnels employés dans le secteur du tourisme.

L'essentiel des moyens que j'ambitionne de voir affecter à mon département ministériel serait consacré aux investissements et au développement de ce secteur créateur de richesses et d'emplois, et non, comme vous le craignez, à sa fonctionnarisation. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

M. Michel Meylan, M. Jean-Michel Couve et M. Léonce Deprez.

Très bien !

M. Michel Bouvard, rapporteur spécial.

Nous avons la même ambition !

M. le président.

Nous en avons terminé avec les questions.

Les crédits du tourisme seront appelés à la suite de l'examen des crédits du logement.

La suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances est renvoyée à la prochaine séance.

3

ORDRE DU JOUR

DES PROCHAINES SÉANCES

M. le président.

Cet après-midi, à quinze heures, deuxième séance publique : Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2000, no 1805 : M. Didier Migaud, rapporteur général au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan (rapport no 1861).

Outre-mer et article 72 : M. Claude Hoarau, rapporteur pour avis au nom de la commission de la production et des échanges (avis no 1866, tome XVI).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 15 NOVEMBRE 1999

Départements d'outre-mer : M. François d'Aubert, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan (annexe no 36 au rapport no 1861) ; M. Jérôme Lambert, rapporteur pour avis au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (avis no 1865, tome VII).

Pays et territoires d'outre-mer : M. Philippe Auberger, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan (annexe no 37 au rapport no 1861).

Territoires d'outre-mer et Nouvelle-Calédonie : M. Jean-Yves Caullet, rapporteur pour avis au nom de la commission des lois contitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (avis no 1865, tome VIII).

A vingt et une heures, troisième séance publique : Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.

La séance est levée.

(La séance est levée à douze heures cinquante-cinq.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT