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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 24 NOVEMBRE 1999

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. YVES COCHET

1. Loi de financement de la sécurité sociale pour 2000. Suite de la discussion, en nouvelle lecture, d'un projet de loi (p. 10099).

DISCUSSION GÉNÉRALE (suite) (p. 10099)

Mme Jacqueline Fraysse,

MM. Gérard Terrier, Jean-Louis Fousseret.

M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles.

Clôture de la discussion générale.

MOTION DE RENVOI EN COMMISSION (p. 10104)

Motion de renvoi en commission de M. Philippe DousteBlazy : MM. Yves Bur, Alfred Recours, rapporteur de la c ommission des affaires culturelles, Jean-Luc Préel, Mme Jacqueline Mathieu-Obadia, MM. le président de la c ommission, François Goulard, Gérard Terrier,

Mme Muguette Jacquaint. - Rejet.

Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

DISCUSSION DES ARTICLES (p. 10116)

Article 1er (p. 10116)

L'article 1er est réservé jusqu'à la fin de l'examen des articles.

Article 1er bis (p. 10116)

MM. Jean-Luc Préel, Bernard Accoyer, François Goulard.

Amendement de suppression no 4 de la commission : M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles, pour les recettes et l'équilibre général, Mme la secrétaire d'Etat.

- Adoption.

L'article 1er bis est supprimé.

Article 1er ter (p. 10118)

MM. Jean-Luc Préel, François Goulard.

Amendement de suppression no 5 de la commission : M. le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat, M. François Goulard. - Adoption.

L'article 1er ter est supprimé.

Après l'article 2 C (p. 10119)

Amendement no 56 de M. de Courson ; MM. Jean-Luc Préel, le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat. - Rejet.

Amendements nos 107 et 108 de M. Rossi : MM. François Goulard, le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat. Rejets.

Amendements nos 1 et 2 de Mme Fraysse : MM. Claude Billard, le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat. - Rejets.

Amendements nos 58 et 57 de M. de Courson : MM. JeanLuc Préel, le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat. Rejets.

Article 2 (p. 10122)

MM. Jean-Luc Préel, Bernard Accoyer, François Goulard, Mme Muguette Jacquaint.

Amendement no 6 de la commission : M. le rapporteur,

Mme la secrétaire d'Etat, M. François Goulard.

S ous-amendements nos 159 et 158 de M. Accoyer : MM. Bernard Accoyer, Mmes Marie-France Clergeau, rapporteur de la commission des affaires culturelles, pour la famille ; la secrétaire d'Etat. - Rejets.

Sous-amendement no 137 de M. Préel : M. Jean-Luc Préel,

Mmes le rapporteur, la secrétaire d'Etat. - Rejet.

Sous-amendement no 157 de M. Accoyer : MM. Bernard Accoyer, le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat. - Rejet.

Sous-amendement no 110 de M. Rossi : MM. François Goulard, le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat. - Rejet.

Sous-amendement no 111 de M. Debré : MM. Bernard Accoyer, le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat. - Rejet.

Sous-amendement no 112 de M. Debré : MM. François Goulard, le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat. - Rejet.

Sous-amendements nos 155 de M. Accoyer et 113 de M. Rossi : MM. François Goulard, le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat. - Rejets.

Sous-amendement no 114 de M. Douste-Blazy : MM. JeanLuc Préel, le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat. Rejet.

Sous-amendement no 60 de Mme Fraysse : Mme Muguette Jacquaint, M. le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat. Rejet.

Sous-amendement no 115 de M. Rossi : MM. François Goulard, le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat. - Rejet.

Sous-amendement no 156 de M. Accoyer : MM. Bernard Accoyer, le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat. - Rejet.

Adoption de l'amendement no 6 modifié.

L'article 2 est ainsi rétabli.

Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.

2. Dépôt d'un projet de loi (p. 10134).

3. Dépôt d'une proposition de résolution (p. 10135).

4. Dépôt de rapports (p. 10135).

5. Dépôt d'un rapport sur une proposition de résolution (p. 10135).

6. Dépôt d'un rapport d'information (p. 10135).

7. Dépôt d'une proposition de loi adoptée par le Sénat (p. 10135).

8. Ordre du jour des prochaines séances (p. 10136).


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COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. YVES COCHET,

vice-président

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures.)

1

LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2000 Suite de la discussion, en nouvelle lecture, d'un projet de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 (nos 1943, 1946).

Discussion générale (suite)

M. le président.

Cet après-midi, l'Assemblée a commencé d'entendre les orateurs inscrits dans la discussion générale.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

M me Jacqueline Fraysse.

Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale, mes chers collègues, nous abordons l'examen en seconde lecture du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour l'année 2000. Le texte qui nous revient du Sénat a été, bien évidemment, profondément modifié. Je ne surprendrai personne en déclarant d'emblée qu'il est, pour nous, inacceptable en l'état.

Je ne relèverai pas les propos démagogiques qui ont émaillé les discours des groupes de droite. Je m'en tiendrai aux faits.

Prétendant défendre la famille, la droite a maintenu la baisse du pouvoir d'achat des prestations familiales pour l'année 2000. Elle a fait de même pour les pensions de retraite.

Prétendant défendre les malades et les médecins, elle n'a cessé de revendiquer le plan Juppé, alors que chacun se souvient de l'accueil qui lui a été réservé.

En ce qui concerne les centres de santé, leur reconnaissance constitue un progrès que nous avons salué lors de la première lecture. Je me félicite, à cet égard, du travail de concertation qui a permis d'avancer. Or, la droite, au Sénat, a voté leur mise sous enveloppe budgétaire spécifique, avec la volonté de les opposer aux médecins libéraux, alors que tout conduit à privilégier une coopération entre les divers secteurs de la médecine au profit des patients. Cette disposition n'est pas acceptable.

Quand à la branche accidents du travail-maladies professionnelles, non seulement la droite refuse de prendre en compte les transferts sur l'assurance maladie, pourtant mis en lumière par plusieurs rapports, mais le rapporteur de la commission du Sénat a même osé invoquer le nombre excessif d'accidents du travail déclarés, mettant en cause l'honnêteté des victimes de ces accidents.

Comment pourrait-il en être autrement, puisque la droite n'a d'autre objectif que de baisser les ressources de la protection sociale, en diminuant la contribution des entreprises pour augmenter toujours plus leurs profits, et donc la part détournée de la production de richesses, vers les marchés financiers ? Le Sénat a ainsi supprimé l'article 3 instaurant une contribution pourtant modeste sur les bénéfices des sociétés, ainsi que l'article 4 concernant la taxe générale sur les activités polluantes. La droite ne propose rien d'autre : il s'agit donc bien, pour elle, de réduire le budget de la sécurité sociale, et par conséquent les dépenses consacrées à la protection sociale, c'est-à-dire les dépenses de santé, celles de la politique familiale et celles des pensions de retraite, celles de la prévention et de la réparation des accidents du travail et maladies professionnelles.

La deuxième lecture conduira sans doute à revenir au texte voté par l'Assemblée nationale. Mais, comme nous l'avons déjà dit, le simple retour au texte adopté en première lecture serait, à nos yeux, très insuffisant. Le groupe communiste avait exprimé de vives réserves icimême, le 28 octobre dernier, sur la nature et le volume du financement de la sécurité sociale, compte tenu des besoins.

Malheureusement, les faits confirment nos craintes, et ces craintes sont partagées par beaucoup de nos concitoyens.

En ce qui concerne les hôpitaux, je tiens à rappeler nos réserves générales sur l'objectif national de dépenses d'assurance maladie défini à l'avance et s'imposant aux besoins. L'expérience en a montré les limites, ce qui vous a conduit cette année à fixer cet objectif en fonction des dépenses réalisées, et non en fonction de l'objectif précédent. C'est mieux, mais malheureusement, le budget proposé ne traduit pas ce constat.

La déclinaison par secteur confirme ce que nous avons souligné en première lecture : le financement ne permet pas d'atteindre les objectifs sanitaires et sociaux pourtant annoncés.

Ainsi, la progression prévue pour les hôpitaux correspondant tout juste à l'estimation qui avait été avancée par la Fédération hospitalière pour maintenir l'existant. Mais elle ne tient pas compte des missions nouvelles imposées aux services hospitaliers, avec la montée en puissance des dispositions de la loi contre l'exclusion, la lutte contre la douleur, contre les maladies nosocomiales.

Elle ne tient pas compte non plus de l'évolution des carrières des personnels, et donc des traitements, ni de la mise en oeuvre des 35 heures. Il n'est pas envisageable de laisser à l'écart d'un progrès social indéniable les personnels hospitaliers, déjà trop souvent soumis à des horaires difficiles et modulables. Personne ne peut ignorer les


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conditions de travail très tendues, les repos impossibles à prendre et les retards de congés qu'impose la continuité du service public, parce qu'on manque de personnel.

Certes, les 35 heures dans la fonction publique hospitalière ne se mettront pas en place dans les prochaines semaines. Mais il est nécessaire d'engager dès maintenant la réflexion - y compris en termes de formation des personnels - et de prévoir des moyens.

Enfin, l'augmentation de la cotisation employeur à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, la CNRACL, qui représente un surcoût de plus de 400 millions de francs, absorbera elle aussi une partie de la hausse prévue.

C'est dans ce contexte que la Fédération hospitalière de France vient de critiquer vivement ce budget qui, selon elle, est en réalité insuffisant pour la simple reconduction des activités. A cet égard, je tiens à rappeler que nous avions notamment proposé de réduire le taux de la TVA appliqué aux travaux dans les hôpitaux, ce qui aurait apporté un peu d'oxygène sur le plan financier. Il est encore temps de réexaminer cette proposition au cours de la navette.

Quant à la répartition régionale de l'enveloppe, elle vise à corriger les inégalités. L'objectif est louable, et nous le partageons. Mais pour corriger ces inégalités, il faut donner un minimum de moyens suffisants à tous. Sinon, à force d'étouffer financièremenet ceux que vous estimez

« surdotés », ils auront tous besoin de mesures de rattrapage, et, là non plus, ce ne sera pas possible sans accroître le financement de la sécurité sociale.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité a évoqué les disparités à l'intérieur des régions. A ce sujet, qu'il me soit permis de m'étonner de ce qu'elle ait cité au rang des plus favorisés les établissements hospitaliers de SeineSaint-Denis, alors que nous pouvons y mesurer l'ampleur des manques, et que les améliorations arrachées l'ont été au prix de luttes menées par les médecins, les personnels et la population.

J'ajoute que les outils disponibles pour évaluer l'activité des hôpitaux ne sont pas pertinents. Ils servent le plus souvent l'objectif pour lequel ils ont été conçus, à savoir uniquement la maîtrise des dépenses. C'est le cas du PMSI et des points ISA, qui ne prennent pas en compte les caractéristiques sociales des populations, et donc l'éventail des missions de service public qui incombent à l'hôpital. On peut faire des moyennes sur le papier, mais dans la vie, la prise en charge et les soins d'une personne sans domicile fixe nécessitent souvent des interventions multiples et une hospitalisation plus longue que pour un patient régulièrement suivi.

Mme Jacqueline Mathieu-Obadia.

Tout à fait !

M. Pierre Morange.

Excellent !

Mme Jacqueline Fraysse.

Des mouvements sociaux se font jour sur fond d'inquiétude, une inquiétude que l'annonce de la suppression de plus de 10 000 lits au cours des six prochaines années en Ile-de-France, ainsi que des restructurations sans moyens suffisants, ont ravivée. L'ARH justifie ces suppressions par le raccourcissement de la durée d'hospitalisation. C'est un aspect des choses. Mais il y en a d'autres. A-t-on pris en compte les besoins nouveaux ? De même, il nous semble indispensable de remettre sur le métier l'organisation de la transfusion sanguine. Mon collègue Claude Evin, rapporteur, a d'ailleurs reconnu que le problème est réel. Je me permets d'insister sur ce point, d'une part parce que la question écrite du 19 juillet que j'ai posée est restée sans réponse, d'autre part parce que celle que vous nous avez faite, madame la secrétaire d'Etat, le 29 octobre dernier, me semble courte. Vous avez affirmé que la concertation a eu lieu de manière satisfaisante. Mais si tel est le cas, je m'étonne de recevoir de si nombreux courriers ; je m'étonne d'ailleurs que vous en receviez, vous aussi, comme vous nous l'avez dit. On ne peut s'en tenir à une explication mettant en avant les malentendus ou les incompréhensions. Ces personnels connaissent leur travail, ils savent de quoi ils parlent, et s'ils posent ces questions, c'est parce qu'ils ont, à juste titre, le souci de la qualité des soins et de la sécurité des patients, face à l'expérience qu'ils vivent quotidiennement.

Au cours du débat sur la couverture maladie universelle, Mme Aubry a déclaré : « Un Français sur quatre dit avoir un jour renoncé à se faire soigner pour des raisons financières. C'est considérable. Et la situation, loin de s'améliorer, continue d'empirer. »

M. Yves Bur.

Eh oui !

Mme Jacqueline Fraysse.

Eh bien, nous ne pouvons nous satisfaire de ce constat, au moment où nous débattons du troisième projet de loi de financement de la sécurité sociale présenté par un gouvernement de gauche.

C'est la raison pour laquelle il nous semble urgent de commencer à relever le taux moyen de remboursement des soins. Car, comme vous l'avez reconnu, c'est parce que le ticket modérateur et le forfait hospitalier représentent des dépenses importantes que tant de personnes renoncent aux soins.

Nous avons certes voté il y a quelques mois la création de la couverture maladie universelle. Mais le problème reste posé pour des centaines de milliers de personnes qui, malgé leurs faibles revenus, n'y auront pas droit.

Je veux d'ailleurs à ce propos exprimer mon inquiétude face aux récentes informations qui nous parviennent sur la mise en oeuvre de ce texte, et, en particulier, sur le plafonnement des soins dentaires et optiques proposés dans ce cadre. Le principe de plafonds de remboursements individuels nous semble en contradiction avec ce qui avait été annoncé.

M. Yves Bur.

C'est l'heure de vérité maintenant !

Mme Jacqueline Fraysse.

Mme la ministre souhaitait que les moins favorisés de nos concitoyens aient droit au même système que l'ensemble des Français et qu'ils ne soient pas traités différemment avec une carte de santé spéciale gérée par la sécurité sociale.

Avec un remboursement complémentaire de 358 francs par an au maximum pour les lunettes et de 1 300 francs pour les soins dentaires, couronnes comprises, on ne les reconnaîtra peut-être pas à leur carte de sécurité sociale, et c'est tant mieux, mais sans doute à leurs lunettes et peut-être à leur sourire.

L es sociétés d'assurances peuvent être satisfaites.

Encouragées, elles annoncent d'ailleurs dans la foulée leur intention de rembourser au premier franc à leurs assurés des médicaments innovants que la sécurité sociale ne prend pas en charge. Cela ne contribuera pas à réduire les inégalités d'accès aux soins, que vous avez pourtant, à juste titre, déplorées.

Enfin, nous souhaitons être informés des dispositions prises pour que les CPAM soient en mesure d'assurer l'instruction des dossiers CMU, en particulier concernant les nouveaux personnels annoncés. Où en sommes-nous ? Qu'est-ce qui est envisagé pour leur formation ?


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Je pourrais d'ailleurs poser une question semblable en ce qui concerne les caisses d'allocations familiales. La situation est explosive. Les délais d'attente sont insupportables pour des personnes à faible revenu. Certains directeurs nous ont fait part de leur crainte face à la capacité du système informatique de franchir sans problème le passage à l'an 2000.

M. Yves Bur.

Cela va être terrible !

Mme Jacqueline Fraysse.

Là aussi, il nous semble que des dispositions doivent être prises. Mais, bien évidemment, elles exigent, encore une fois, des moyens.

C'est la même chose concernant les retraités. La baisse du pouvoir d'achat de leurs pensions a été prévue par le projet de loi adopté ici en première lecture et confirmée par le Sénat, ce qui a provoqué une vive émotion et une réaction unie de leurs organisations syndicales, qui s'est traduite par une pétition signée en quelques jours par 450 000 d'entre eux. Ils demandent à juste titre une réelle revalorisation des pensions de retraite, la prise en charge de la dépendance, et le maintien des systèmes de retraite par répartition.

Certes, la concertation engagée sur l'avenir des retraites doit permettre un examen d'ensemble aboutissant à des choix conformes aux aspirations et aux possibilités. Mais dès lors que des engagements ont été pris, et je pense notamment à l'indexation des pensions sur les salaires, ils doivent être tenus. Et au minimum, cette année, le budget devrait prévoir le maintien de leur pouvoir d'achat.

Cette disposition pour les pensions et les allocations familiales pourrait être financée par une augmentation de moins de deux points de la cotisation sociale sur les bénéfices. Je rappelle que le pouvoir d'achat des retraités s'est dégradé ces dernières années, en raison notamment de la hausse des prélèvements fiscaux et sociaux sur les pensions. Un retraité sur cinq touche moins de 3 000 francs par mois.

Nous ne doutons pas de votre sensibilité à tous ces problèmes. Si la loi de financement ne peut répondre de manière satisfaisante à ces attentes, c'est faute de moyens.

Nous l'avions dit, et nous le maintenons, au risque de nous répéter, car tout le confirme : il est indispensable d'accroître le financement de la protection sociale sur des bases justes et efficaces, pour répondre aux aspirations de ceux qui en ont le plus besoin.

M. Yves Bur.

Très bien !

Mme Jacqueline Fraysse.

Ce n'est ni de l'obstination, ni un attachement borné à un quelconque dogme. C'est une réalité criante.

Lorsque la sécurité sociale a été mise en place au lendemain de la guerre, le taux de la cotisation employeur, assise sur les salaires et donc sur pratiquement toute la richesse produite, n'a pas mis les employeurs sur la paille, ni le pays, au contraire.

Aujourd'hui, à l'inverse, on nous dit et on nous répète depuis des années qu'il faut alléger ces cotisations trop lourdes pour les entreprises, et ce afin de favoriser l'emploi.

Mme Jacqueline Mathieu-Obadia.

Les conditions sont totalement différentes !

Mme Jacqueline Fraysse.

On multiplie les dispositifs allant dans ce sens. Si les créations d'emplois qu'on en attend restent à démontrer, le désengagement des entreprises du financement de la sécurité sociale est, par contre, une évidence C'est une véritable question de société, d'efficacité et d'équité.

Nous sommes tout à fait favorables à un changement de l'assiette des cotisations employeurs, car la part des salaires dans la richesse produite a considérablement diminué depuis l'époque où cette assiette a été déterminée, mais un tel changement doit être mené dans le souci de faire contribuer les entreprises qui ont beaucoup de moyens. C'est le sens de nos propositions et de nos amendements.

C'est la raison pour laquelle nous soumettrons à nouveau à la discussion nos amendements relatifs au financement de la protection sociale, avec une cotisation sociale appliqués aux revenus du capital, qui atteindront près de 400 milliards de francs pour les seules sociétés non financières, selon l'INSEE. Dès lors qu'ils ne sont pas utilisés pour la production, rien ne justifie qu'ils soient exemptés des cotisations auxquelles sont soumis les revenus du travail.

Nous proposerons également une modulation des cotisations patronales assises sur la part des salaires dans la valeur ajoutée.

Cette mesure permettrait, ce qui est indispensable, de favoriser l'emploi plutôt que les placements en bourse, et d'accroître le budget de la sécurité sociale pour commencer à avancer vers les objectifs que nous nous sommes fixés ensemble.

Ce sont des questions essentielles. Il est inutile de se raconter des histoires : sans moyens nouveaux, on ne répondra pas aux besoins, on ne permettra pas à tous d'avoir des soins d'une qualité identique.

Mme Muguette Jacquaint.

Tout à fait !

Mme Jacqueline Fraysse.

On note une série de reculs successifs sous la pression du patronat, qui ne désarme pas ; le MEDEF menace parfois de quitter les organismes de sécurité sociale. Faute de s'appuyer avec détermination sur le mouvement social qui nous fait confiance, les meilleures intentions resteront au stade des intentions et les espoirs risquent de se transformer en amères désillusions.

C'est ce qui explique notre inquiétude et ces critiques vives que nous préférerions ne pas avoir à formuler. Mais il faut avoir le courage de dire la vérité. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. Gérard Terrier.

M. Gérard Terrier.

Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le projet de loi que nous avons voté en première lecture est un bon projet,...

Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Merci !

M. Gérard Terrier.

... qui représente une étape supplémentaire vers l'augmentation de la qualité des soins et l'abondement du fonds de réserve des retraites. Il a d'ailleurs été amélioré par l'Assemblée, qui a proposé des a mendements auxquels vous avez su être sensible, madame la secrétaire d'Etat. Malheureusement, le Sénat a comme il en a, pris l'habitude, dénaturé ce projet ; il nous faut donc rétablir les avancées importantes que l'Assemblée avait apportées.

Je reviendrai sur ces avancées, qui font aujourd'hui l'objet d'un débat. En effet, de quoi s'agit-il ? La première observation, et elle a son importance, est que la fin de l'année 2000 verra l'équilibre des comptes de la sécurité sociale.

Mme Jacqueline Mathieu-Obadia.

Grâce à la croissance !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 24 NOVEMBRE 1999

M. Gérard Terrier.

Cela devrait donner satisfaction à l'ensemble des députés de l'Assemblée car, depuis de nombreuses années, tous les gouvernements appellent de leurs voeux ce retour à l'équilibre qui garantira l'avenir de la sécurité sociale.

M. Denis Jacquat, rapporteur.

Bien dit !

M. Gérard Terrier.

Tous ont enregistré un échec ; celui-ci y parvient, et chacun devrait le reconnaître.

Deuxième constat, qui me semble devoir être partagé par tous : cet équilibre est obtenu sans augmentation des contributions et sans aucune diminution des dépenses de santé. Bien au contraire, l'objectif national des dépenses de l'assurance maladie est en augmentation de 2,5 %. J'ajoute, car c'est encore plus significatif, que cette augmentation n'est plus assise sur l'objectif de l'an dernier, mais, comme vous nous le demandiez mes chers collègues de l'opposition, sur les dépenses réellement constatées.

Troisième motif de satisfaction : pour la première fois, nous abordons le fonds de réserve des retraites, sujet qui fera l'objet d'un large débat entre nous. Nous pouvons constater que, à la fin de l'exercice pour lequel nous votons le budget, ce sont plus de 20 milliards qui alimenteront ce fonds de réserve. Bien entendu, nous savons que ce montant est encore insuffisant.

M. Denis Jacquat, rapporteur.

Tout à fait !

M. Yves Bur.

Largement !

M. Gérard Terrier.

Mais la satisfaction que nous en tirons, c'est que le fonds est enfin créé, qu'il est alimenté et qu'il le sera encore à l'avenir, afin de répondre aux besoins de nos concitoyens.

Nous avons un autre motif de satisfaction, mais l'opposition n'est peut-être pas décidée à partager notre analyse. Nous poursuivons en effet l'indispensable chantier de la modification de l'assiette des charges patronales, modification amorcée par le basculement des contributions salariales sur la CSG.

Cela n'a pas été suffisamment souligné dans nos débats, et pourtant cette orientation est d'une importance capitale quand on constate que le fruit du travail perd de l'importance et recule par rapport au fruit du capital, et que le progrès technologique se substitue au travail des hommes, ce qui en soi est une bonne chose, à condition de prendre en compte cette donnée sur le plan social, c'est-à-dire en ce qui concerne l'emploi et les financements qui s'y rapportent.

Pour conclure, j'ajouterai que ce projet constitue une avancée sociale et économique.

En effet, en intégrant la baisse des cotisations patronales sur les bas salaires et en l'appliquant aux salaires atteignant 1,8 fois le SMIC, il réaffirme la justice sociale, puisqu'il évite l'effet de trappe à bas salaires et diminue le coût des charges patronales, permettant ainsi aux entreprises d'améliorer leur compétitivité et de poursuivre le retour vers le plein-emploi. Cette mesure est d'ailleurs saluée par beaucoup, y compris par le FMI.

Sur le chapitre de la famille, des avancées également significatives sont soit maintenues soit amorcées, je pense en particulier au maintien de l'allocation de rentrée scolaire, qui est appréciée sinon par nos collègues de l'opposition, du moins par les familles qui en bénéficient et qui savent que, sur ce point également, notre politique de la famille est faite non de mots, mais d'avancées réelles.

Nous avons affirmé de façon très forte les orientations qui sont les nôtres. Ainsi, l'ensemble des Français peuvent être rassurés quant aux objectifs visés par le Gouvernement, objectifs qui sont amplement traduits dans ce projet de loi. C'est pourquoi le groupe socialiste le soutiendra. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Jean-Louis Fousseret.

M. Jean-Louis Fousseret.

Madame la secrétaire d'Etat, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale est un bon projet, beaucoup l'ont déjà dit et je ne reviendrai donc pas sur ce thème.

Mais je voudrais profiter de ce débat pour m'exprimer sur un problème grave, même s'il n'est pas nouveau, le remboursement des prothèses de personnes handicapées, c'est-à-dire les prothèses oculaires, faciales, auditives ou même orthopédiques. Je traiterai en particulier du remboursement des prothèses auditives pour les personnes sourdes et malentendantes.

Avant d'entrer dans des considérations générales, j'illustrerai mon propos de situations concrètes que je connais bien, afin que vous puissiez mesurer le caractère urgent des mesures à prendre en la matière.

Prenons le cas de ce jeune sourd profond d'une vingtaine d'années, qui tente tout pour réussir et parfaire son insertion professionnelle, comme notre société l'attend de lui.

Voilà qu'arrive le moment où il doit renouveler sa paire de prothèses auditives, sans laquelle il ne peut évidemment rien entreprendre. Son fournisseur, un audioprothésiste, lui facture le matériel agréé par les caisses, pour la somme de 16 000 francs.

Et le parcours du combattant commence pour lui. Il devra élaborer laborieusement un montage financier, car il est évident que ses revenus, vu son âge, ne lui permettront pas de payer une telle somme.

Sur ces 16 000 francs, la sécurité sociale lui rembourse 850 francs ! Elle ne prend en compte qu'une seule prothèse, que la personne sourde soit appareillée des deux oreilles ou non. La mutuelle, plus ou moins généreuse, lui accorde 1 700 francs environ.

Restent donc à trouver 13 500 francs. Ce jeune a plu-s ieurs possibilité d'aide : l'AGEFIPH, et le centre communal d'action sociale, mais au prix de beaucoup de dossiers, de temps, d'énergie et d'espoir, qui déboucheront finalement sur une grande désillusion par rapport à une société prétendument intégratrice.

Je parlerai également de la situation d'une jeune fille, sourde profonde, du même âge. A elle aussi, une paire de prothèses auditives est absolument nécessaire dans sa vie quotidienne et professionnelle. Madame la secrétaire d'Etat, savez-vous quelle solution on a trouvé ? Récupérer les prothèses de sa grand-mère décédée ! C'est morbide, je le sais, mais c'est une réalité vécue, même s'il s'agit, j'en conviens, d'un cas extrême.

Ces deux jeunes gens ont la tête sur les épaules et sont en mesure de supporter ces tracas. Mais qu'en est-il de ceux qui n'ont pas cette force et baissent tout de suite les bras au premier obstacle ? De ceux qui ont des difficultés à entreprendre des démarches administratives complexes ? De ceux qui ne supporteront pas de voir leur handicap remis en cause à chaque formulaire ou dossier à compléter ? On note une lourdeur des procédures de prise en charge, des conditions de remboursement restrictives, une rigidité du tarif interministériel des prestations sanitaires.


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Sommes-nous en droit de demander de tels efforts à ces jeunes personnes handicapées qui doivent d'abord faire l'apprentissage de la langue française, réussir leur intégration scolaire, puis envisager et affronter leur intégration professionnelle ? N'est-ce pas un peu trop ? Madame la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale, vous avez remis au Premier ministre, lorsque vous étiez parlementaire, un excellent rapport sur le droit des sourds. Il trace de véritables perspectives quant à une meilleure intégration des personnes sourdes dans notre société. Vous évoquiez fort justement les problèmes posés par le mauvais remboursement, voire l'absence de remboursement des prothèses auditives. Vous proposiez tout naturellement une meilleure prise en charge de ces frais.

Je me permets donc de me faire le relais de ces propositions, qui doivent être mises en place très rapidement.

La sécurité sociale prend totalement en charge les frais prothétiques jusqu'à l'âge de 16 ans. C'est déjà une bonne chose pour les parents de ces enfants. Mais ensuite ? Sauf miracle, ce qui arrive rarement, ces enfants restent toujours sourds ; le problème de la prise en charge des prothèses auditives se posera donc toute leur vie.

L'allocation pour adulte handicapé couvre de tels frais, me répondrez-vous, mais elle n'est perçue qu'en l'absence de revenus, donc d'emploi. Cruel dilemme.

Si j'évoque ce sujet ce soir, c'est parce que je ne vois pas qui serait mieux placé que les organismes de sécurité sociale pour remplir cette mission. Ces appareils doivent être pris en charge totalement, sur la base de la dépense engagée.

M. Yves Bur.

D'accord.

M. Jean-Louis Fousseret.

De plus, la nomenclature du tarif interministériel des prestations sanitaires doit être revue chaque année de telle sorte que les progrès techniques puissent profiter aux personnes handicapées auditives.

En conclusion, au risque de me répéter, je dirai que notre devoir est de soulager les personnes sourdes de ce fardeau trop lourd à porter. Nous devons être cohérents avec nous-mêmes et encourager ces personnes qui ne veulent pas baisser les bras et se battent pour s'intégrer à la société.

Nous nous devons d'assurer une meilleure égalité entre tous nos concitoyens, et de permettre à ces jeunes et à ces moins jeunes de ne pas être plus pénalisés qu'ils ne l'étaient au départ.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Yves Bur et M. Pierre Morange.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Je ferai quelques remarques en réponse aux orateurs qui sont intervenus.

Lorsque nous exprimons une position, nous défendons nos convictions ; nous nous livrerions sinon à un jeu de rôles excécrable.

Madame Mathieu-Obadia, vous vous êtes exprimée avec une grande sincérité, mais je dois dire que je suis en total désaccord avec vous. Je ne sais si je pourrai vous convaincre, mais je reprendrai quelques-unes de vos expressions.

Vous avez parlé d'« étatisation ». Mais c'est le contraire que nous sommes en train de faire, et je veux vous en donner la preuve. Que se passe-t-il depuis un certain nombre d'années ? Lorsqu'il y a une difficulté pour équilibrer les comptes de la protection sociale, on se retourne vers le Gouvernement, quel qu'il soit, pour qu'il prenne des mesures permettant un rétablissement. Mais on sait en quoi consistent ces mesures : augmentation des prélèvements, diminution des remboursements, parfois les deux. Et il est clair que, depuis quelques années, nous avions atteint la limite de ce qu'il était possible désormais, de faire en ce domaine. Il est hors de question d'augmenter les prélèvements et de diminuer les remboursements.

M. Yves Bur.

Il faut cependant les revoir !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Effectivement, dès que ce sera possible, il faudrait les revoir.

Nous sommes obligés d'aller vers une maîtrise des dépenses de santé, ce qui n'est cependant pas contradictoire avec la qualité de soins, je l'affirme très clairement.

Mme Jacqueline Mathieu-Obadia.

Jusque là, nous sommes d'accord !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Vous ne pouvez donc parler d'« étatisation ».

En partant des propositions de M. Evin, que je remercie une fois de plus, nous essayons, dans un contexte complexe, de mieux définir le champ des responsabilités et de donner, par exemple, à la CNAM une délégation de gestion lui permettant de gérer conventionnellement avec les professions de santé les politiques de maîtrise et de qualité des soins. C'est cela que nous essayons de faire, ne me dites pas le contraire ; c'est l'esprit du texte que nous défendons. On ne peut, je le répète, parler d'étatisation alors que nous déléguons des responsabilités à la CNAM pour éviter que l'Etat ne doive, comme ces dernières années, prendre des dispositions qui relèvent de cette caisse.

J'irai plus loin. Cet après-midi, et M. Alfred Recours en est témoin, j'ai réuni le bureau de notre commission, j'ai demandé que l'on mette en place un groupe de travail - M. Denis Jacquat était présent.

M. Denis Jacquat, rapporteur.

C'est vrai !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

... et j'ai obtenu l'approbation du bureau de la commission. Ce groupe de travail sera présidé par M. Evin, et j'espère, madame Mathieu-Obadia, que vous y participerez. Il réfléchira à ce que peut être une régionalisation des politiques de santé.

Ainsi, non seulement nous donnons une délégation de gestion à la CNAM, mais la commission joue pleinement son rôle et entend le jouer totalement. Nous lançons une réflexion afin de donner à cette volonté de régionalisation des politiques de santé un contenu qui est encore, pour l'instant, relativement imprécis. M. Dubernard était également présent à cette réunion de la commission.

Vous ne pouvez donc, madame Mathieu-Obadia, nous reprocher le contraire de ce que nous essayons de construire.

Si nous ne définissions pas le champ des responsabilités - qui fait quoi ? Quels sont les outils ? - vous auriez raison ; nous irions vers la privatisation ou l'étatisation ; mais nous refusons ces deux éventualités. Vous devriez approuver, madame, ce que nous faisons.

Deuxième remarque : vous parlez en permanence de plan comptable. Arrêtez ! Cela n'a pas de sens !

M. Yves Bur.

Mais si !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 24 NOVEMBRE 1999

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Les médecins exercent certes un métier complexe. Ils traitent de la santé, de la vie, de l'humaine condition, de la mort.

Mais ils sont aussi ordonnateurs de dépenses publiques.

M. Yves Bur.

Certes !

Mme Jacqueline Mathieu-Obadia.

Et alors ?

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Et, à ce titre, il est normal qu'ils soient soumis au contrôle de la dépense publique. S'ils ne l'acceptent pas - mais j'espère qu'ils le feront, grâce à la négociation -, l'ensemble du système sur lequel ils s'appuient sera remis en cause.

Prenons l'exemple de la répartition des médecins sur le territoire. Chaque médecin sortant d'une formation est conventionné, d'accord. Mais faut-il pour autant que tous les médecins, choississant librement de s'installer où bon leur semble, bénéficient des abattements sur les cotisations sociales ? Voilà une bonne question.

Mme Jacqueline Mathieu-Obadia.

En effet !

Mme Hélène Mignon.

Une excellente question !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Vous pourrez me répondre, madame Mathieu-Obadia. Cela ne me dérange pas. Au contraire. Je souhaite débattre avec vous, car j'écoute toujours ce que vous dites avec beaucoup d'attention.

On pourrait illustrer le problème avec la carte de l'implantation des médecins. C'est dans la région Nord Pasde-Calais que l'inégalité devant la mort est la plus sensible : on y vit quatre ou cinq ans de moins qu'ailleurs - c'est terrible -, pour des raisons liées à la culture, à l'alimentation, voire à l'alcoolisme, j'ose le dire. Nous essayons d'y faire face et d'améliorer la prévention. C'est aussi l'héritage de la vie industrielle du

XIXe siècle, qui a d'ailleurs inspiré beaucoup de romans majeurs, comme ceux de Zola.

Mais en me penchant sur l'implantation des médecins, j'ai découvert, et ce n'est pas un secret, que les spécialistes les mieux payés de France sont ceux du Nord Pas-deCalais.

M. Claude Evin.

Absolument !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Pourquoi ? Parce qu'ils ne sont pas assez nombreux. Tous les spécialistes bénéficient d'avantages identiques, comme la réduction des cotisations sociales. Mais ceux qui s'installent dans votre région, madame Mathieu-Obadia, pour gagner honorablement leur vie, doivent multiplier les actes.

Mme Jacqueline Mathieu-Obadia.

C'est vrai !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Il faudra bien qu'on ait le courage de le dire un jour.

Que les médecins soient conventionnés, qu'ils disposent de la liberté d'installation, cela va sans dire. Mais puisque l'ensemble de la protection sociale fait un effort pour garantir un abaissement sensible des cotisations sociales, le conventionnement ne devrait être octroyé, me semble-t-il, que dans la mesure où l'implantation correspond à un besoin de santé publique.

Mais quand on tient ces propos, neuf médecins sur dix sont choqués. Pourtant, en appelant le corps médical à la responsabilité, on reconnaît qu'il joue un rôle majeur.

A lors, il va falloir que vous nous aidiez à faire comprendre les problèmes de ce genre. Il ne s'agit pas de compter, mais de maîtriser les dépenses de santé en améliorant la qualité des soins.

M. Yves Bur.

Pour le moment, on se contente de compter.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Troisième remarque, vous avez parlé des pauvres. Mais quand on ne compte pas, ce ne sont pas les ménages aisés qui paient, ce sont les pauvres.

Mme Jacqueline Mathieu-Obadia.

Tout à fait !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Vous prétendez qu'il y aura une médecine pour les pauvres.

Non ! Vous n'avez pas le droit de dire cela. La mise en place de la couverture maladie universelle...

M. Yves Bur.

Ce n'est pas encore fait !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Je suis d'accord ; c'est compliqué. Mais ce sera bientôt une réalité.

M. Yves Bur.

Rien n'est moins sûr !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

La loi est votée. Les responsables des mutuelles, des caisses maladie, vont bouger. Et si rien ne bouge, vous serez les missi dominici de la réforme, vous-mêmes, sur le terrain.

J'ai nommé un rapporteur pour suivi ; vous lui rendrez compte, le sujet reviendra en discussion devant la commission, et, le cas échéant, nous prendrons acte que la loi n'était pas suffisante et nous l'améliorerons.

M. Yves Bur.

Méfiez-vous ! (Sourires.)

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Non, madame Mathieu-Obadia, ne dites pas que nous négligeons ce problème, puisqu'à travers le débat mené depuis deux ans sur l'exclusion, à travers la couverture maladie universelle, nous prenons en compte pour la première fois l'aggravation des inégalités en matière de santé.

Je voudrais vous convaincre, car je sais que vous êtes sincère. Mais en parlant d'étatisation, de volonté de maîtrise comptable, de médecine des pauvres, vous vous trompez. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radial, Citoyen et Vert.)

M. Claude Evin.

Très bien !

M. Alfred Recours, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour les recettes et l'équilibre général.

Excellent !

M. le président.

La discussion générale est close.

Mme Jacqueline Mathieu-Obadia.

Pourrais-je répondre à la commission ?

M. le président.

Pas à cet instant du débat. Mais la discussion des articles vous en donnera sans doute l'occasion.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Je vous y engage, madame Mathieu-Obadia.

Motion de renvoi en commission

M. le président.

J'ai reçu de M. Philippe Douste-Blazy et des membres du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance une motion de renvoi en commission, déposée en application de l'article 91, alinéa 6, du règlement.

La parole est à M. Yves Bur.

M. Yves Bur.

Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'opposition a déjà eu largement l'occasion, ici même et au Sénat, de vous dire


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 24 NOVEMBRE 1999

combien elle déplorait que le débat sur le financement de la sécurité sociale ait été détourné de l'objet que lui confère les lois constitutionnelles et organiques. Nous restons persuadés que le volet du financement des 35 heures n'avait pas sa place dans ce débat, qui doit en effet rester centré sur l'état et le devenir de la sécurité sociale.

Ce faisant, le risque existe désormais que la finalité de la loi de financement de la sécurité sociale soit chaque a nnée accommodée aux contraintes politiques du moment.

La sécurité sociale, la retraite, la santé des Français et le financement de notre système de solidarité constituent des enjeux suffisamment importants. Pourquoi inclure dans la loi de financement de la sécurité sociale des projets qui devraient rester à la charge exclusive de l'Etat et figurer dans son budget, selon les principes établis par la loi de 1994 ? Cette dérive a d'ailleurs été dénoncée par les organismes sociaux et les organisations syndicales. Ils n'entendent pas accepter que l'on remette en cause la loi de juillet 1994, qui a contribué à la clarification des responsabilités dans les comptes sociaux : l'Etat doit assumer toutes les conséquences de ses choix politiques et les financer.

Malgré vos dénégations, malgré le revers que vous ont infligé les organismes sociaux unanimes, il n'en reste pas moins que le détournement d'une partie des taxes sur l'alcool du fonds de solidarité vieillesse vers le fonds de financement des 35 heures représente un manque à gagner pour le fonds de réserve pour les retraites. Cette modification va en effet diminuer significativement les excédents du FSV, destinés par la loi de financement pour 1999 à amorcer timidement l'abondement du fameux fonds de réserve pour les retraites, lequel, à ce jour, reste virtuel. Finalement, des sommes déjà dérisoires au regard du besoin de financement des retraites vont encore être amputées pour financer votre politique de réduction du temps de travail.

Nous comprenons mal ce meccano financier. L'envergure du problème des retraites semble effrayer le Gouvernement, qui n'engage pas les réformes pourtant nécessaires, et même inévitables.

Si les organismes sociaux, dans une belle unanimité, ont mis à mal vos projets de contribution forcée pour financer les 35 heures, vous n'avez pas renoncé au réflexe de la taxation.

La taxe sur les activités polluantes, d'abord, contrairement à ce que laisserait croire son titre, ne servira en rien à financer des actions en faveur de la protection de l'environnement, mais bien à assurer temporairement l'équilibre du fonds de financement des 35 heures.

La taxe sur les entreprises, ensuite, s'ajoute à la TGAP et au coût déjà bien lourd de la mise en oeuvre des 35 heures, contraignant les entreprises à financer le fonds de la réduction du temps de travail avec la contribution sociale sur les bénéfices et la taxe sur les heures supplémentaires.

Malgré tout cet arsenal de taxes supplémentaires, l'équilibre du fonds de financement des 35 heures est loin d'être assuré à plein régime. Face à ce montage financier incertain, nous avons le sentiment que l'échec de votre tentative de hold-up sur les organismes sociaux n'est que partie remise et que le débat sur ce sujet est loin d'être clos, au risque de mettre à bas le paritarisme, dont l'autonomie est pourtant plus que limitée par l'interventionnisme excessif de l'Etat.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 reflète bien les limites de notre exercice et nous sommes nombreux, sur tous les bancs de cette assemblée, à appeler de nos voeux une évolution du cadre législatif dans lequel s'inscrit ce débat. C'est particulièrement vrai pour tout ce qui concerne la santé des Français.

En effet, les débats s'inscrivent dans une perspective strictement comptable et les propositions du Gouvernement ne visent qu'à tendre vers un hypothétique équilibre des comptes, qu'on nous avait déjà promis l'année dernière à pareille époque, que l'on nous promet maintenant pour l'an prochain. Nous verrons.

Or, sur la santé, notre objectif politique ne peut se cantonner à une approche financière. Même si le débat annuel sur les conditions de l'équilibre des comptes sociaux constitue un progrès de la démocratie et tend à a méliorer la transparence du fonctionnement de la sécurité sociale, il nous apparaît de plus en plus nettement que nous ne pouvons réduire le débat à ces aspects financiers et comptables, ne vous en déplaise.

Il est indispensable que la discussion des moyens à mettre en oeuvre dans la loi de financement s'inscrive elle-même dans une approche de santé publique, qui est de nature à constituer un objectif de l'action politique.

M. Alfred Recours, rapporteur.

Tout à fait !

M. Yves Bur.

Si l'on peut comprendre que l'urgence, il y a quelque temps, était de créer des conditions plus propices à l'équilibre des comptes, il est temps à présent de dépasser cette approche, qui risque de conduire la sécurité sociale dans une impasse.

Ce que nous vous reprochons, madame la secrétaire d'Etat, c'est de vous contenter d'objectifs financiers, certes louables, mais dont nous pressentons bien qu'ils restent extrêmement fragiles. La croissance abonde les recettes, mais elle engendre aussi une augmentation notable de la consommation médicale.

Comme Jean-Marie Spaeth, nous constatons les effets positifs de la croissance, mais comme lui, nous estimons que si la croissance permet de « faire baisser la fièvre », elle ne traite pas « le foyer infectieux ».

En outre, nous regrettons que le contexte de la croissance ne soit pas mis à profit pour rénover le dialogue avec les différentes professions médicales, qui ne peuvent se figer dans leur crispation actuelle.

Et même si les professionnels de santé ne peuvent éluder leur responsabilité économique, il nous paraît indispensable de reprendre les échanges constructifs, sur la base d'objectifs de santé publique mobilisant l'ensemble des acteurs. Mais les conclusions de la conférence nationale de santé sont absentes des propositions du Gouvernement et du débat. C'est tout à fait symptomatique. Et en créant les outils de régulation prévus à l'article 17, qui instituent un système de lettres clés flottantes, vous ne prenez pas le chemin de la reprise du dialogue...

Ce manque de perspectives de dialogue avec tous les acteurs de la santé porte en lui les germes des difficultés futures, voire de l'échec de l'approche comptable que vous proposez.

C'est la raison pour laquelle nous estimons qu'une grande loi d'orientation sur la santé publique est nécessaire, afin de mettre en perspectives les actions engagées, de mieux prendre en compte les priorités sanitaires, de définir les moyens à mettre en oeuvre avec l'ensemble des professionnels médicaux, d'assurer un niveau de financement acceptable par la population et pour les comptes sociaux de la nation.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 24 NOVEMBRE 1999

Hélas ! nous sommes encore loin du compte et attendons que le Gouvernement, dans ce domaine, comme dans celui du financement des retraites, fasse preuve de plus de volonté et de courage, car nous savons que la matière est délicate.

Le déficit reste très préoccupant, car il perdure, cette année, malgré l'appoint des 51 milliards de francs de recettes nouvelles tirées de la croissance. De plus, il risque d'être affecté par les nombreuses incertitudes, comme celles liées à la croissance des dépenses de santé, qui semblent inéluctablement accompagner la croissance du PIB, ou celles qui découlent de la mise en oeuvre de la CMU.

Comme notre collègue Bernard Accoyer, hier lors, des questions d'actualité, je m'attarderai à présent quelque peu sur les conditions de mise en oeuvre de la couverture maladie universelle. A la lecture des informations sur les négociations en cours entre votre ministère et les responsables de l'assurance maladie et des organismes complémentaires, nous mesurons combien le dispositif que vous êtes en train de mettre en place s'éloigne des principes énoncés lors du débat parlementaire.

Mme Aubry ne cessait alors de répéter que le dispositif du Gouvernement constituait une avancée sociale bien plus conséquente que l'assurance maladie universelle envisagée par ses prédécesseurs. Elle devait aussi constituer un net progrès par rapport aux conditions actuelles d'accès aux soins proposées par les départements, notamment par l'intermédiaire des cartes santé, dans le cadre de l'aide médicale gratuite - aide sociale de proximité que risquent d'ailleurs de regretter bientôt un certain nombre de bénéficiaires.

Même si nous ne partageons pas votre approche pour assurer le droit à des soins de qualité, étant plutôt parti-s ans d'une allocation personnalisée santé, je reste convaincu qu'il s'agit d'un vrai problème social, auquel il faut par conséquent apporter une réponse. Or aujourd'hui, nous sommes inquiets.

Inquiets, nous le sommes quand nous constatons, avec des associations, que l'effet de seuil sera encore renforcé.

Nous n'avons cessé de le dénoncer, car il est injuste. Fixé par la loi à 3 500 francs, le seuil élimine déjà les personnes âgées relevant du fonds national de solidarité, mais aussi les personnes handicapées bénéficiaires de l'allocation adultes handicapés - leur revenu minimum social ne le dépasse que de 40 francs. La prise en compte d'une partie de l'allocation logement dans le calcul du plafond de ressources, tout comme celle des bourses de l'enseignement supérieur, entre autres conditions à l'acceptation des étudiants, inquiètent les associations humanitaires et les syndicats étudiants : à leurs yeux, les restrictions que vont apporter les décrets sont en retrait par rapport aux annonces généreuses du Gouvernement.

Si ces inquiétudes devaient se confirmer, contrairement à ce que vous ne cessiez d'affirmer, la CMU représentera un réveil douloureux pour beaucoup de bénéficiaires de la carte santé et de l'aide médicale gratuite, quand leur caisse primaire d'assurance maladie leur annoncera qu'ils ne sont « plus assez pauvres » pour avoir droit à la CMU.

Inquiets, nous le sommes aussi quand nous constatons qu'à un mois du transfert de compétences des conseils généraux vers les caisses primaires d'assurance maladie, aucun décret n'est encore publié, aucune procédure n'est encore définie.

Comment les caisses primaires feront-elles pour absorber cette nouvelle mission, à laquelle elles ne semblent guère préparées ? Comment pouvons-nous être assurés qu'au 1er janvier, la prise en charge des personnes en difficulté sera meilleure qu'actuellement ? Je rappelle que les caisses de sécurité sociale affichent des retards records pour les remboursements aux assurés, totalement inacceptables, voire scandaleux au regard des moyens informatiques disponibles. Certes, les caisses ont obtenu de votre part le droit d'embaucher 1 400 agents supplémentaires sur les 3 000 demandés. Mais cela suffira-t-il, en un si court délai, à assurer un bon service, alors qu'elles sont déjà confrontées aux conséquences de la réorganisation liée à la mise en oeuvre des 35 heures ? Nous sommes nombreux à en douter et nous craignons que la mise en place de la CMU ne soit en fait « le grand bogue social de l'an 2000 ».

Inquiets, nous le sommes enfin quant au panier de soins. Celui-ci est défini dans l'urgence et sur des bases d éconnectées de la santé publique, uniquement comptables.

M. François Goulard.

Il a raison !

M. Yves Bur.

C'est bien le coût supporté par les organisations de couverture santé qui va déterminer les conditions de la prise en charge.

Si les conditions d'accès aux soins courants et l'hospitalisation ne posent pas de problèmes nouveaux par rapport aux dispositifs d'aide médicale gratuite, la prise en charge des frais de prothèses dentaires et d'optique est loin des espérances affichées par votre majorité.

Lors de la discussion législative sur la CMU, vous aviez refusé d'aborder tous les problèmes de mise en oeuvre très concrets qui ont été finalement réglés dans l'urgence et sans véritable dialogue avec les professions concernées.

Ainsi, pour la profession dentaire, les discussions se limitent à la présentation par les organismes de couverture obligatoire et complémentaire d'une grille tarifaire à prendre ou à laisser, sans discussion sur la qualité des soins retenus et sans que soit abordée la remise en route des dispositions conventionnelles signées en 1997 et suspendues l'an dernier, ni même la nécessaire remise en place de l'ensemble de la nomenclature et de la prise en charge de base, pourtant reconnue comme indispensable par la Caisse nationale d'assurance maladie.

Quant à l'Union nationale des opticiens qui fédère la m ajorité des professionnels de l'optique, les grands réseaux, mais aussi les indépendants, elle n'a été invitée à discuter sérieusement de la couverture maladie universelle que le 10 novembre dernier. Nous avons voté la loi le 30 juin de cette année ! Par conséquent, les professionnels vont être mis devant le fait accompli, sans qu'ils aient eu vraiment la possibilité de discuter d'une offre de soins de qualité.

Où est donc le progrès promis ? Certainement pas dans les propositions tarifaires que vous venez d'imposer.

Certes, les prothèses mobiles ou quasi complètes ne seraient pas comprises dans le plafond annuel ou biannuel retenu, mais en pratique cela obligera les assurés relevant de la CMU et leur chirurgien-dentiste à se résigner aux extractions et à des solutions prothétiques qui nous ramènent trente ans en arrière.

De même, s'agissant des frais de lunettes, la prise en charge ne pourra excéder le niveau négocié pour les enfants de moins de seize ans, soit 358 francs pour les corrections les plus courantes et 700 francs pour les autres. Aujourd'hui, dans les centres mutualistes - je me suis renseigné cet après-midi -, le premier prix pour les verres de correction pour la myopie et la presbytie est de 561 francs le verre, verre très épais, d'ancienne génération


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 24 NOVEMBRE 1999

et peu esthétique - mais l'objectif n'est pas l'esthétique -, soit, pour une paire de lunettes, un coût global de 1 402 francs, incluant le premier prix de monture, à savoir 280 francs. A ce prix, on ne peut craindre une surconsommation de frais d'optique par les personnes défavorisées.

Elles n'en auront pas les moyens.

En fait, si nous voulons réellement améliorer la prise en charge de base des frais dentaires et d'optique, ce qui est une nécessité pour tous les assurés sociaux et pas seulement pour les plus démunis, nous ne pourrons y parvenir que par une remise à plat complète du système de prise en charge et la mise au point d'une nomenclature moderne. Le temps des invectives est dépassé. Il est urgent d'agir, madame la secrétaire d'Etat. Je crois d'ailleurs que malgré vos dénégations, malgré les affirmations de M. le président de la commission, nous allons droit vers une médecine à deux vitesses. L'engagement tardif des discussions avec les professions concernées auxquelles on oppose une approche strictement comptable n'est pas un facteur de réussite. Les organismes d'assurance maladie et de complémentaire ne s'engagent que sur ce qu'ils estiment pouvoir rembourser dans un panier de soins fixé à 1 500 francs. Nous assistons en réalité à la mise en place d'une tutelle sur les professions de santé, tutelle fondée sur les seuls critères économiques, et non sur de véritables objectifs de santé publique et de soins de qualité.

Enfin, nous sommes inquiets, madame la secrétaire d'Etat, quant au coût réel de la CMU, dont nous n'avions cessé de répéter lors du débat parlementaire qu'il dépasserait les 9 milliards de francs annoncés. La CNAM avance même le chiffre de 14 milliards de francs. Elle a demandé et, semble-t-il, obtenu du Gouvernement que les défraiements forfaitaires des organismes complémentaires, aujourd'hui fixés à 1 500 francs, soient réexaminés pour être notablement réévalués. De ce fait, l'équilibre des comptes de l'assurance maladie paraît déjà compromis. Dès lors, comment décider du montant des dépenses de santé alors qu'il reste encore tant d'incertitudes non levées ? Pour toutes ces raisons, nous estimons que ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 doit être amélioré, afin notamment d'atteindre les objectifs de santé publique et d'équité auxquels chacun d'entre nous et tous les Français, plus particulièrement les plus démunis, sont très attachés. Aussi, je vous propose, mes chers collègues, de voter cette motion de renvoi en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

M. Alfred Recours, rapporteur.

Deux points me paraissent devoir être relevés dans la défense de cette motion de renvoi en commission. D'abord, je m'étonne que l'on s'étonne que la loi de financement débattue par le Parlement porte sur des comptes.

Au cours de la séance précédente, notre collègue désigné pour démontrer l'éventuelle irrecevabilité du texte nous rappelait la Constitution, que vous avez modifiée lors de la législature précédente, fait obligation au Parlement de voter, une fois par an, une loi de financement de la sécurité sociale qui porte précisément sur les comptes de celle-ci. Je trouve extraordinaire que l'on nous dise aujourd'hui allant d'ailleurs ainsi à l'opposé de ce qui a été soutenu dans le cadre de l'exception d'irrecevabilité, que nous sommes là pour faire du qualitatif et pas du quantitatif. Il faut avoir le courage d'assumer la continuité historique des responsabilités des uns et des autres sur cette question. Pour ma part, je ne me plains pas du tout - je l'ai déjà dit plusieurs fois - que le Parlement puisse débattre de cet aspect du financement de la sécurité sociale qui est la garantie même de sa pérennisation. Je constate simplement que la Constitution nous oblige précisément à le faire. Si vous vouliez aller jusqu'au bout de votre logique, monsieur Bur, il vous faudrait aujourd'hui proposer de réformer la Constitution pour revenir sur les modifications que vous avez opérées lors de la législature précédente.

Vous nous dites ensuite que le niveau de dépenses prévu pour les bénéficiaires de la couverture maladie universelle ne sera pas suffisant pour couvrir les frais de manière optimale...

M. Yves Bur.

Minimale !

M. Alfred Recours, rapporteur.

... d'un point de vue médical et pas comptable. Vous en concluez qu'il faudra peut-être un jour augmenter la part prévue pour les assurances complémentaires et nous pouvons être d'accord sur ce point. Le Gouvernement a d'ailleurs déjà annoncé certaines choses. Mais nous ne pouvons plus vous suivre lorsque vous vous plaignez des coûts éventuels qu'engendrera pour l'avenir la couverture maladie universelle. On ne peut à la fois dire qu'il faudra dépenser plus et se plaindre qu'on dépense déjà trop. Vous avez peut-être une vision médicale s'agissant de l'aspect général du financement de la sécurité sociale, mais vous avez une vision bien comptable pour ceux qui seront concernés par la couverture maladie universelle.

Concrètement, vous réservez l'approche comptable à ceux qui bénéficieront de la couverture maladie universelle. C'est regrettable.

M. Yves Bur.

Je n'ai pas dit cela !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Si tels sont les points centraux qui fondent votre demande de renvoi en commission, cela justifie que nous ne l'adoptions pas. En tout état de cause, vous n'arrivez pas à résoudre vos propres contradictions.

M. Claude Evin.

rapporteur, pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

Très bien !

M. le président.

Dans les explications de vote, la parole est à M. Jean-Luc Préel, pour le groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.

M. Jean-Luc Préel.

Je m'incline devant notre rapporteur : il aime tant le paradoxe qu'à la fin, on ne sait plus très bien ce qu'il a voulu démontrer ! (Sourires.)

M. Alfred Recours, rapporteur.

Du moment que la majorité de l'Assemblée a compris, ça suffit !

M. Jean-Luc Préel.

Nous souhaitons, quant à nous, que la loi de financement de la sécurité sociale parte des besoins de la population, pour aboutir ensuite à des présentations de comptes. Il faut des comptes pour la retraite, la famille et la santé, bien sûr, mais ils doivent partir des besoins. C'est quelque chose qui nous sépare, c'est vrai, mais admettons-le ! Bien entendu, le groupe UDF votera cette motion de renvoi en commission excellemment défendue avec talent et compétence par notre collègue Yves Bur. Le Sénat a largement amélioré le projet de loi, mais le rapporteur a présenté en commission des amendements tendant à revenir au texte initial de l'Assemblée, ne retenant aucune des avancées réalisées par les sénateurs qui sont pourtant les sages de la République.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 24 NOVEMBRE 1999

Je ne reviendrai pas ici sur les conditions dans lesquelles la commission s'est réunie hier matin et sur le fait que le président ait été contraint de proposer plusieurs suspensions de séance. Il me paraîtrait tout à fait judicieux et souhaitable de reprendre les débats pour pouvoir juger sérieusement de l'intérêt de chaque amendement et rediscuter des articles. Ce retour en commission me paraît s'imposer.

Yves Bur nous a donné des informations intéressantes et nouvelles sur la préparation de la mise en oeuvre de la CMU. La définition du panier de soins est loin d'être claire. La prise en charge des lunettes et des prothèses dentaires va poser de réels problèmes, et nous allons effectivement aboutir à une médecine à deux vitesses, puisqu'il y aura des prothèses différentes, à des prix différents, pour les personnes relevant de la CMU.

Le plafond de ressources de 3 500 francs pour la CMU semble par ailleurs remis en cause alors que les départements avaient mis en place des dispositifs intéressants. La carte santé de Paris, notamment, présentait un intérêt nettement supérieur à celui qui découlera de la CMU. Il nous paraît important d'y revenir.

En outre, nous l'avions déjà souligné à plusieurs reprises lors du débat sur la CMU, les CPAM ne sont pas prêtes aujourd'hui et ne disposent pas du personnel nécessaire.

Avec la CMU, vous remettez en cause les principes essentiels sur lesquels est fondée notre protection sociale à la française, à savoir le paritarisme et une séparation claire entre régime de base et complémentaires, celles-ci étant assurées par les mutuelles, les institutions de prévoyance et les assurances. En permettant au régime de base de faire de la complémentaire, vous allez remettre en cause l'un des piliers essentiels de notre protection sociale. Il me paraît donc indispensable de retourner en commission pour discuter de tous ces problèmes. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Pour le groupe du Rassemblement pour la République, la parole est à Mme Jacqueline Mathieu-Obadia.

Mme Jacqueline Mathieu-Obadia.

Si le président de la commission, qui me croit sincère et que je crois sincère lui aussi, reste sur ses positions il nous faut vraiment retourner en commission. Monsieur le président de la commission, vous disiez tout à l'heure qu'il fallait maîtriser les dépenses de santé. Mais nous en sommes tous d'accord, et les médecins avec nous. Ne croyez pas qu'ils sont irresponsables. Ils savent qu'il y a un dérapage et qu'il faut trouver des solutions. Or il en ont des solutions, mais on ne les leur demande pas ! C'est en cela que vous appliquez des méthodes autoritaires qui conduisent tout droit à l'étatisation. Certes, je vous l'accorde, vous êtes persuadés que ce sont les meilleures, mais demandez au moins à ceux qui exécuteront vos décisions ce qu'ils en pensent ! D'autant que les médecins, auxquels vous reprochez d'être des ordonnateurs de dépenses publiques, sont en fait les producteurs d'une richesse sans pareille, à savoir la santé. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Et vous ne tenez pas c ompte de leurs propositions ! C'est là que nous divergeons.

M. Alain Calmat.

Est-ce que vous vous souvenez des propositions qu'ils ont faites à Juppé ?

Mme Jacqueline Mathieu-Obadia.

Les médecins ont pensé, eux aussi, à la meilleure façon de procéder pour que les praticiens s'installent là où on a besoin d'eux.

Parlez-en avec eux ! Demandez-leur leurs solutions ! Ils ont des propositions à vous faire.

M. Alfred Recours, rapporteur.

Vous avez raison : ils l'ont dit aux dernières élections législatives !

Mme Jacqueline Mathieu-Obadia.

On n'impose pas brutalement, autoritairement ! Il faut en parler avec ceux qui sont les acteurs du système que l'on veut réformer.

Nous avons parlé de la CMU, de la médecine des riches et des pauvres. La CMU est une idée généreuse à laquelle nous souscrivons, bien évidemment, mais cela étant, ne soyons pas hypocrites ! Vous donnez des droits aux patients, mais ils n'auront pas les moyens de les exercer. Vous êtes en parfaite contradiction. Quant à nous, nous ne sommes pas en contradiction. Nous ne calculons pas ; nous savons ce que cela va coûter. Si vous voulez donner la santé, mettez-y les moyens ! Ce n'est pas ce que vous faites. Voilà pourquoi il faut absolument revenir en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Je voudrais dire à M. Jean-Luc Préel et à Mme Mathieu-Obadia que je suis prêt à créer les conditions d'une réouverture du débat, mais le retour en commission ne me paraît pas être le meilleur moyen pour cela. La réunion de la commission prévue hier à dix-sept heures n'a pas eu lieu, car il n'y avait pas d'amendements. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Bernard Accoyer.

Enfin, monsieur le président ! Il a fallu suspendre parce qu'il n'y avait pas de membres de la majorité ! Vous auriez dû parler d'autre chose !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

A vingt et une heures, la commission ne s'est pas réunie non plus parce qu'il n'y avait toujours pas d'amendements. Quant à la réunion de ce matin, en application de l'article 88 de notre règlement, elle n'a pas eu lieu, car je n'avais pas un seul amendement ! Je ne pense donc pas, madame Mathieu-Obadia, que nous pourrions poursuivre le débat dans ces conditions. Mais je prendrai des initiatives - hier je l'ai dit avec M. Evin - pour que nous arrivions à vous convaincre des erreurs d'analyse que vous faites.

M. le président.

Pour le groupe Démocratie libérale et Indépendants, la parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Le groupe Démocratie libérale et I ndépendants votera la motion de renvoi en commission...

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Pour examiner les amendements que vous n'avez pas déposés ?

M. François Goulard.

... qui a été défendue de manière extrêmement pertinente par M. Bur.

Je dois reconnaître que la demande de renvoi en commission est une arme assez classique de l'opposition, mais en l'occurrence, nous avons de réels motifs de le demander. En effet, ne l'oubliez pas, mes chers collègues, lors de la première lecture le Gouvernement a apporté


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des modifications substantielles à l'architecture de son texte, en particulier aux premiers articles qui touchent au financement des 35 heures. Et la commission n'a alors pas pu se prononcer valablement sur l'intégralité du texte ! Voilà une première raison qui milite pour un examen plus approfondi.

Quant à l'examen en commission avant la deuxième lecture en séance publique, vous savez que nous travaillons sur le texte du Sénat. Cela explique, monsieur le président Le Garrec, que l'opposition présente relativement peu d'amendements.

M. Alfred Recours, rapporteur.

M. de Courson en a déposé !

M. François Goulard.

Nous avons plutôt déposé des sous-amendements aux amendements de rétablissement proposés par le rapporteur. Et puisque le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales nous a expliqué que la réunion de la commission avait été en définitive assez rapide, je lui rappellerai qu'il a eu un certain mal à trouver dans ses propres rangs une majorité pour adopter ces amendements.

Toutes les conditions sont donc réunies pour que ce texte soit à nouveau examiné en commission. Cela permettrait de sortir de la « superficialité » qui est sa marque première, d'aborder les questions de fond et surtout les questions d'avenir de la protection sociale qui sont très largement éludées par le projet gouvernemental.

Nous sommes tout à fait d'accord avec les propos d'Yves Bur sur la couverture maladie universelle, question extrêmement sensible et d'actualité puisque son application est fixée au 1er janvier de l'an 2000. Personne, aujourd'hui, sauf Mme Aubry, mais elle a un talent très particulier pour cela, ne peut dire que la CMU pourra s'appliquer dès cette date. Nous savons tous que cela sera matériellement impossible dans nos départements. Voilà encore un motif, parmi tant d'autres, qui devrait nous amener à réexaminer plus sérieusement ce texte.

Enfin, pour répondre au rapporteur, sans doute y a-t-il des délais constitutionnels pour l'adoption d'un projet de loi de financement de la sécurité sociale. Mais pour avoir assez bien lu la Constitution, je peux dire aussi que je n'y ai pas vu l'obligation, pour les membres de cette assemblée, de voter les textes proposés par le Gouvernement pour des raisons de délai. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. Gérard Terrier.

M. Gérard Terrier.

Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, malgré toute la sympathie que j'ai pour

M. Bur,...

M. Jean-Luc Préel.

Cela commence bien !

M. Gérard Terrier.

... je ne peux partager l'ensemble de son analyse.

M. Bernard Accoyer.

Non, cela commence mal ! (Sourires.)

M. Gérard Terrier.

En effet, l'opposition, et c'est naturellement son jeu, nous ne pouvons pas le lui reprocher...

M. Yves Bur et M. Jean-Luc Préel.

Son rôle !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Son jeu de rôle !

M. Gérard Terrier.

Je parle de jeu car il y a manifestement répartition des rôles : certains groupes de l'opposition nous expliquent qu'il ne faut surtout pas débattre du texte, tandis que d'autres veulent, au contraire, retourner en commission pour en discuter davantage.

M. Patrick Delnatte.

Ce n'est pas du jeu, c'est une position de repli !

M. Gérard Terrier.

Mais, au-delà de ce jeu auquel nous acceptons de nous prêter, il est important, puisque nous en sommes à la deuxième lecture et que la commission a abondamment travaillé sur ce sujet, que le débat ait lieu ici même, dans cet hémicycle, devant chaque député qui se sent concerné par ce texte.

Sur le fond, la motion de renvoi en commission n'étant qu'un prétexte pour exposer à nouveau des points de vue, certes respectables mais pas partagés, je me dois de repréciser certaines choses.

S'agissant de la maîtrise comptable, dois-je vous rappeler qui a défini l'enveloppe globale ? Qui a parlé de lettres clés flottantes ? M. Barrot lui-même ! Quant au secteur II, dont nul n'ignore les problèmes qu'il pose, c'est M. Barre qui l'a créé en 1979. Or, à moins que le jeune parlementaire que je suis ne se trompe, ces gens-là ne font pas partie de la gauche. Aujourd'hui, vous nous reprochez en fait ce que nous ne voulons pas et, plus grave, ce que vous-mêmes avez mis en place.

M. Bernard Accoyer.

Pas du tout ! C'est vous qui voulez supprimer le secteur II !

M. Gérard Terrier.

Monsieur Accoyer, qui donc a mis en place la tutelle des caisses, le CMR, les RMO ? C'est le plan Juppé !

M. Bernard Accoyer.

Personne ne conteste les RMO !

M. Gérard Terrier.

Ignorez-vous encore le coût électoral de telles mesures ? Voilà pourquoi nous ne pouvons pas vous suivre, monsieur Bur. Une nouvelle discussion en commission n'apporterait rien s'agissant de décisions du passé dont vous portez la responsabilité. C'est pour cela que nous voterons contre cette motion de renvoi en commmission.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour le groupe communiste.

Mme Muguette Jacquaint.

Je ne ferai l'injure à personne de dire que quelqu'un ici pourrait ne pas connaître les besoins de la population. Vous n'êtes pas les seuls, monsieur Préel, à vouloir partir de ces besoins, nous aussi.

D'ailleurs, si nous n'avions pas voulu les entendre, les organisations et les associations, par la voix desquelles ils se sont fortement exprimés ces derniers temps, nous les a uraient rappelés. Mais, monsieur Préel, comment peut-on répondre aux besoins de la population en demandant, jour après jour, la diminution des dépenses publiques ? Plusieurs députés du groupe socialiste.

Très bien !

Mme Muguette Jacquaint.

Alors que, et M. Le Garrec vient de le rappeler, la dégradation des conditions de vie se poursuit pour certains de nos concitoyens, que les inég alités grandissent, que des milliers de femmes et d'hommes ne peuvent pas se soigner, que les retraites ne permettent toujours pas de vivre dignement,...

M. Lucien Degauchy.

Ça c'est le résultat de votre politique !

Mme Muguette Jacquaint.

... il faut au contraire des moyens plus importants. A cet égard, le débat en commission ne réglera pas la question.


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Aujourd'hui, nous avons à discuter des moyens à prévoir pour répondre aux besoins qui s'expriment. Faisons-le tout de suite ! (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Je mets aux voix la motion de renvoi en commission.

(La motion de renvoi en commission n'est pas adoptée.)

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, messieurs les rapporteurs, madame la rapporteuse,...

M. François Goulard.

Pourquoi pas Mme la rapportrice ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Je vous expliquerai les règles de grammaire plus tard ! Sans vouloir trop abuser de votre temps, il me faut revenir sur un certain nombre de points qui appellent quelques réponses du Gouvernement ou quelques observations. Tout d'abord, je voudrais remercier les députés Pascal Terrasse, Jean-Paul Bacquet, Hélène Mignon, JeanLouis Fousseret, qui ont fait l'effort de lire le texte.

Ils sont entrés dans sa logique et ont présenté des observations très constructives. Cela montre bien que nous sommes sur la bonne voie et que nous sommes soutenus quand même par une partie de cette assemblée.

M. Alain Néri.

Qui est majoritaire ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

A certains moments, quand on est au banc des ministres et qu'on porte la responsabilité, on pourrait penser devant la difficulté de la tâche qu'on s'est trompé de voie. Heureusement, des interventions de la qualité de celles que j'ai citées tout à l'heure donnent le courage de continuer. C'est important de le souligner.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale est un texte riche par nature. Mais sans tomber dans un inventaire à la Prévert, je vais m'efforcer de suivre la trame du projet et de répondre à tous ceux qui se sont exprimés.

Tout d'abord, sur les cotisations patronales. La réforme des cotisations patronales instituée dans ce projet de loi de financement pour l'an 2000 est un dispositif essentiel pour l'emploi. Martine Aubry l'a dit et redit maintes fois.

M. Bernard Accoyer.

Ça ne change rien aux choses ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

A cet égard, j'avoue ne pas bien comprendre, monsieur Accoyer, les critiques rabâchés par l'opposition.

Vous vous êtes toujours déclarés favorables aux allégements de charges sur les bas salaires, mais vous ne les avez jamais faits lorsque vous étiez aux responsabilités.

(Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Bernard Accoyer.

Si, c'est nous qui les avons faites ! C'est le gouvernement Juppé !

M. Jean-Luc Préel.

De tels propos ne sont pas sérieux, madame la secrétaire d'Etat ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Aujourd'hui, le Gouvernement soumet au Parlement un dispositif qui exonère 85 % des cotisations patronales au niveau du SMIC 21 500 francs sur 25 000 francs , qui concernera les deux tiers de salariés salaire inférieur à 1,8 SMIC alors que moins d'un tiers des salariés est touché par la ristourne dégressive a ctuelle. La voilà votre ristourne Juppé, monsieur Accoyer ! Votre fameuse ristourne dégressive. Mais nous, nous faisons beaucoup mieux.

M. Bernard Accoyer et M. François Goulard.

Pas du tout ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Notre dispositif, après la prise en compte du financement des 35 heures, conduira à une baisse du coût d u travail de 5 % pour les salaires inférieurs à 10 000 francs par mois. Mais vous n'avez de cesse de critiquer, de vous opposer. Vous faites du bruit pour empêcher qu'on entende nos arguments.

Ainsi, vous critiquez l'affection de la TGAP à cet allégement de charges. Je vous rappelle que son extension était d'ores et déjà programmée, à l'instar de ce qu'ont fait d'autres partenaires européens avant nous.

M. Jean-Luc Préel.

Pas pour financer les 35 heures ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Vous devriez vous réjouir, monsieur Préel, qu'elle soit mise en oeuvre sans prélèvement nouveau. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie franç aise-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

S'il vous plaît ! Seule Mme la secrétaire d'Etat a la parole ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Vous devriez vous féliciter avec M. Recours de la volonté du Gouvernement de rechercher, par cette affectation à des baisses de charges, un double bénéfice : un sur l'environnement et un sur l'emploi.

M. Bernard Accoyer et M. François Goulard.

Mais non ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

En fait, ce qui vous gêne, c'est que nous abordons la lutte contre le chômage sans dogmatisme et en pesant sur tous les leviers favorables à l'emploi. La vérité c'est que vous aviez fait des allégements de charges sur les bas salaires votre unique proposition pour l'emploi et qu'aujourd'hui vous êtes désemparés car ce que vous n'avez pas réussi à mettre en place, faute de financement, nous le faisons à votre place. Je comprends votre désappointement.

Nous préférons écouter les 800 000 entreprises de l'UPA qui, par l'intermédiaire de leurs représentants, saluent cette réforme qui « répond enfin à l'urgence de réduire le coût du travail dans les entreprises de maind'oeuvre » - c'était une déclaration de l'UPA en date du 22 octobre.

Cette réforme, les petits entrepreneurs l'appelaient de leurs voeux non seulement parce qu'elle est favorable à l'emploi, mais également parce qu'il s'agit de réparer l'injustice de prélèvements sociaux qui, étant assis sur les salaires, pèsent plus lourdement sur les entreprises de main-d'oeuvre, notamment le commerce et l'artisanat, m ais également sur les industries de main-d'oeuvre comme l'habillement.

Par ailleurs, vous concentrez vos critiques sur les circuits de financement qui vous paraissent incohérents.

Mais il n'y a pas d'argent détourné du fonds de réserve pour les retraites.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 24 NOVEMBRE 1999

M. Bernard Accoyer.

Tiens donc !

M. François Goulard.

Cela va tomber du ciel ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Les ressources qui devaient provenir du FSV viendront de la sécurité sociale et de manière plus assurée puisqu'il y a affectation directe des recettes.

Vous évoquez des prélèvements nouveaux. La réalité c'est qu'il n'y en aura pas, ni sur les entreprises ni sur les m énages, pour financer la réforme des cotisations patronales.

M. Jean-Luc Préel.

Et l'impôt sur les bénéfices, qui va le payer ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Concernant les entreprises, la TGAP et la contribution sur les bénéfices correspondent précisément au montant des allégements supplémentaires. Il s'agit d'un pur rééquilibrage et les entreprises seront d'ailleurs glob alement gagnantes avec la réforme de la taxe professionnelle.

M. Jean-Luc Préel.

Grâce à l'impôt sur les bénéfices ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

S'agissant des ménages, les droits sur l'alcool ne sont pas augmentés, mais simplement affectés au fonds de financement. Il en va de même pour le tabac.

Sur la CMU et les moyens qui y sont affectés, sachez, madame Fraysse, que la commission de gestion compétente de la CNAM, qui a délibéré, a estimé que 1 400 embauches supplémentaires étaient nécessaires pour faire face à la charge nouvelle que constitue la mise en place de la CMU. Le Gouvernement a approuvé ces embauches et en accord avec la CNAM a donné mission à l'IGAS de vérifier si ce niveau d'embauche était adéquat. La CNAM dispose donc aujourd'hui des moyens qu'elle a elle-même définis pour mettre en oeuvre la CMU. Cela a été garanti par une évaluation.

M. François Goulard.

Ce n'est pas ce que disent les CPAM ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Ce sont elles qui l'ont demandé ! Nous avons demandé une particulière vigilance à la direction de la CNAM pour que tous les bénéficiaires de la CMU qui vient au 1er janvier puissent faire valoir leurs droits.

M. Bernard Accoyer.

Les assurés ne peuvent pas se faire rembourser !

M. Jean Delobel.

Pourriez-vous avoir la courtoisie d'écouter et de cesser d'interrompre, messieurs ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Mes chers collègues, reprenons notre calme ! Mme secrétaire d'Etat a seule la parole.

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Nous avons donc demandé une particulière vigilance à la direction de la CNAM pour que tous les bénéficiaires de la CMU puissent bénéficier de ce droit dès le 1er janvier de l'année qui vient. Je sais que les caisses se sont engagées sans restriction pour que ce projet, auquel elles sont attachées, réussisse, et nous allons avancer avec elles.

Sur le contenu de la CMU, la CNAM nous a proposé, se faisant ainsi l'écho de discussions conduites avec les assurances et le secteur mutualiste, de plafonner le montant des dépassements pris en charge, notamment pour les prothèses dentaires.

M. Bernard Accoyer.

C'est la sécurité sociale à deux niveaux ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Ce plafonnement étant la règle dans les contrats d'assurance et de mutuelle, nous avons jugé le plafonnement qui nous était proposé trop restrictif. Aussi, nous avons demandé à la CNAM de définir un dispositif où, en cas de nécessité médicale attestée, il n'y ait plus aucun plafond. Nous avons également demandé à la CNAM de porter sur deux ans de 1 700 à 2 600 francs le plafond qui nous était proposé.

M. Bernard Accoyer.

Ce sont les mutualistes qui vont payer ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Je vous confirme, par conséquent, que nous entendons offrir, dans le cadre de la CMU, un remboursement à 100 %. Les caisses négocient actuellement pour cela des tarifs adaptés avec les professionnels pour les bénéficiaires de la CMU. En cas d'échec de ces négociations, le Gouvernement prendra ses responsabilités et sera amené à se substituer à l'accord négocié.

M. Bernard Accoyer.

Comme d'habitude ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Comment M. Bur peut-il dire à la fois que la CMU coûtera plus cher que prévu et qu'elle n'entraînera aucun progrès ? Cela manque pour le moins de logique.

La CMU se met en place en concertation avec les associations. Il n'y a aucun recul par rapport à ce que nous avions annoncé. Nous avons toujours dit que les ressources seraient appréciées comme dans le cas du RMI. A cet égard, je vous rappelle, mesdames, messieurs, que vous étiez opposés à cette loi, à vos yeux trop coûteuse.

Vous êtes donc aujourd'hui malvenus de nous dire qu'elle n'est pas assez généreuse.

M. Bernard Accoyer.

C'est une régression, c'est tout ?

M. François Goulard.

Surtout dans certains départements ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'actions ociale.

Concernant les retraites, M. Gantier, tout comme M. Accoyer, nous ont reproché de ne pas aller assez vite. Le Gouvernement sait parfaitement qu'une réforme des systèmes de retraite s'impose. Il souhaite cependant prendre le temps de la concertation et de la négociation afin de garantir l'adhésion du plus grand nombre aux réformes à effectuer.

La méthode adoptée est claire. Elle a été exposée en maintes occasions et se résume en trois mots : diagnostic, dialogue, décision.

Le diagnostic a été établi par le Commissariat général du plan et il a donné lieu à un rapport publié en avril dernier. La deuxième phase a débuté au mois de juillet et elle se poursuit actuellement avec la consultation des partenaires sociaux et des organisations concernées. Au début de l'année 2000, le Premier ministre annoncera les objectifs généraux de la réforme et le cadre dans lequel devront s'inscrire les négociations spécifiques à chaque régime.

Nous suivrons la méthode et le calendrier que le Premier ministre a défini, sans succomber aux appels, quels qu'ils soient, sans céder à ceux qui nous pressent de p rendre immédiatement des mesures sans, le pluss ouvent, préciser lesquelles, ou à ceux qui nous conseillent de repousser indéfiniment la solution du problème. En la matière, vous pouvez compter sur la détermination du Gouvernement.


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D'ores et déjà, le fonds de réserve pour les retraites a été constitué dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 afin d'amortir l'impact du choc démographique. Le but est bien de diversifier les sources de financement du fonds de réserve afin de l'abonder au maximum. Au total, il devrait être doté de 22 milliards de francs à la fin de l'année 2000. A cet égard, je vous rappelle que les gouvernements précédents n'avaient constitué aucune réserve pour financer les retraites des générations futures.

M. Bernard Accoyer.

Mais ils ont réformé les systèmes de retraite de treize millions de Français ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Au contraire, ils n'ont laissé que des dettes (Vives protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) ...

M. Bernard Accoyer.

Scandaleux ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

... - plus de 200 millions de francs de déficit pour la période 1994-1997 - que l'ensemble des Français sera obligé de rembourser jusqu'en 2014. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Bernard Accoyer.

Sans la réforme de 1995, vous auriez eu 15 milliards de francs de déficit supplémentaires chaque année !

M. Jean-Luc Préel.

Mme la secrétaire d'Etat dit n'importe quoi !

M. le président.

Monsieur Accoyer, du calme ! Vous aurez le temps de vous exprimer.

M. François Goulard.

Elle dit des contrevérités !

M. Alain Néri.

Je vous trouve bien nerveux, messieurs de l'opposition !

M. Bernard Accoyer.

On n'a pas le droit de dire de telles contrevérités ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'actions ociale.

Relayant les observations de l'AFHF, Mme Fraysse a fait part de son inquiétude à propos de la CNRACL. Je tiens donc à souligner l'action de l'Etat qui, satisfaisant une ancienne revendication des collectivités locales et des hôpitaux, a engagé une réduction de la surcompensation. Les efforts nécessaires pour équilibrer la CNRACL sont ainsi partagés entre l'Etat, les employeurs, les collectivités locales et les hôpitaux.

Pour ce qui est du niveau des retraites, le Gouvernement s'efforce de ne pas laisser les retraités au bord du chemin. Les décisions qu'il a prises permettront d'accroître de 1 % en deux ans le pouvoir d'achat des retraites. Par ailleurs, un effort particulier a été consenti en faveur des retraites les plus modestes. Ainsi, la revalorisation du minimum vieillesse de 2 % en 1999 et de 1 % en 2000 assurera une croissance du pouvoir d'achat de 2,3 %.

De nombreux orateurs se sont aussi inquiétés de la politique familiale, notamment M. Gantier. Or vous savez tous, même si certains feignent d'ignorer, que la p olitique familiale, rénovée, est désormais organisée autour d'une exigence de justice et de solidarité. Elle repose sur une méthode : large concertation avec le mouvement familial et les partenaires sociaux.

M. François Goulard.

Ceux qui vous arrangent ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Elle est matérialisée chaque année par la réunion de la conférence de la famille présidée par le Premier ministre.

M. François Goulard.

Une demi-journée ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Chaque année, des priorités sont définies en accord avec les partenaires et le mouvement familial.

Ensuite, nous arrêtons des orientations et des mesures que nous vous soumettons lors du débat sur la loi de financement.

Rappelons les progrès réalisés depuis deux ans : extension de l'allocation de rentrée scolaire à toutes les familles d'un enfant, réévaluation des loyers plafonds pour les allocations de logement familial, avec la perspective d'un alignement sur l'APL en trois ans, ouverture du bénéfice des majorations pour âge aux titulaires du RMI, augmentation du budget de l'action sociale de la CNAF pour soutenir le développement de structures de l'accueil d'enfants, soit 1 milliard en 1999 et 700 millions en 2000.

M. Bernard Accoyer.

Donc ça diminue ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Avec un apport supplémentaire de 1,7 milliard en deux ans, vous trouvez que ça diminue ? Ce budget n'avait jamais atteint un tel niveau, monsieur Accoyer.

Vous faites preuve d'une mauvaise foi évidente. Je sais d'ailleurs que vous êtes coutumier du fait parce que je connais très bien votre manière de travailler sur le budget de la famille. Votre apostrophe vous disqualifie ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Bernard Accoyer.

Allons ! Allons ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Je reprends la liste des progrès réalisés depuis deux ans : prolongation du bénéfice des prestations familiales jusqu'à vingt ans pour toutes les familles, fixation à vingt et un an de l'âge limite pour bénéficier de l'allocation logement et du complément familial.

Il y a donc une véritable politique familiale.

M. Bernard Accoyer.

Pas du tout ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Si, et vous le savez ! Elle se construit dans la durée et la concertation et, à la différence de la précédente, elle s'appuie sur des comptes de la branche famille équilibrés, clarifés, année après année, avec la prise en compte de ce que vous appeliez, en 1997, les charges indues qui sont reprises régulièrement par l'Etat.

M. Bernard Accoyer.

Lesquelles ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Le FACIS, l'API sont les deux premières, et nous allons continuer. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Bernard Accoyer.

Et le financement du RMI ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Lorsque j'entends M. Gantier demander la prolongation à vingt-deux ans de toutes les prestations familiales, j'ai envie de lui répondre que le Gouvernement agit dans la cohérence et la reconnaissance des besoins réels des familles, à la différence de celui de M. Balladur, et ne fait pas de politique familiale à crédit. Nous nous attachons à régler vraiment les problèmes des familles pour le logement, pour la garde des enfants, pour la sécurisation de l'avenir des jeunes.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 24 NOVEMBRE 1999

Par ailleurs, je lui indique que ce gouvernement s'est engagé à pérenniser la majoration de l'allocation de rentrée scolaire afin qu'elle reste à 1 600 francs. Il s'agit bien d'une prestation familiale, que je sache. Loin de constituer une débudgétisation, sa prise en charge progressive par la branche famille est une garantie pour les familles.

L'indexation sur l'évolution du PIB leur en donne une autre.

M. Bernard Accoyer.

L'Etat ne payait-il pas avant ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Henri Nayrou.

Regardez-nous, madame la secrétaire d'Etat ! Ne faites pas attention à lui ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Je vais répondre, parce qu'il dit des bêtises.

M. Alain Néri.

Non, il ne le mérite pas ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Cela n'a pas d'importance ! Certes, monsieur Accoyer, le supplément de l'ARS était financé par le budget de l'Etat, mais il n'y avait aucune garantie.

M. Bernard Accoyer.

Vous en imposez le financement à la branche famille ! Elle supportera donc une charge supplémentaire ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Cela relève de la clarification entre le budget de l'Etat et celui de la branche famille, monsieur Accoyer.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Bernard Accoyer.

Il s'agit d'une charge supplémentaire pour la branche famille. C'est bien ce que nous disions !

M. François Goulard.

C'est un transfert de charges ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

La progression des recettes permet d'opérer cette clarification et d'asseoir les ressources de la branche famille sur l'évolution du PIB.

Je rappelle à M. Préel qui nous reproche de ne pas avoir financé cette réforme, en deux ans et demi, que nous avons hérité d'une branche famille en déficit de 14,5 milliards de francs. Aujourd'hui, elle est excédentaire. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.) Enfin, monsieur Préel, faut-il considérer jusqu'à vingtdeux ans les jeunes comme des enfants en ouvrant à leurs parents le bénéfice des allocations familiales ? Nous préférons estimer qu'à cet âge ils sont de jeunes adultes et nous voulons favoriser leur autonomie, laquelle passe notamment par l'accès à l'emploi. Le meilleur appui que nous ayons apporté aux familles est la baisse de 25 % le chômage des jeunes en deux ans.

Pour ce qui est de l'accueil de la petite enfance, Mme Mignon m'a interpellée sur deux sujets bien particuliers.

Vous savez d'abord que permettre un développement des services d'accueil de la petite enfance correspondant à l'évolution des besoins des familles est une priorité du Gouvernement. Cela n'est d'ailleurs pas simple, car cette action implique que l'on revoie la totalité de l'offre de garde. En effet, il faut adapter les modes de garde aux besoins des familles et non l'inverse, sauf à rompre l'égal accès de toutes les familles au mode de garde de leur choix, comme le souhaite Mme Mignon.

C'est pourquoi, lors de la dernière conférence sur la famille, le Premier ministre a demandé à M. Pierre-Louis Rémy, le délégué interministériel à la famille, d'effectu er, en liaison avec toutes les administrations compétentes et de façon concertée avec les associations familiales, les organisations gestionnaires de la branche famille et toutes les parties prenantes concernées, une remise à plat, un réexamen total des prestations liées à la petite enfance. Il doit formuler des propositions de nature à être prises en compte dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 et dans le contrat pluriannuel entre l'Etat et la CNAF pour la période 2001-2004.

Parallèlement, la rénovation du cadre juridique applicable à tous les établissements d'accueil collectif, - crèches collectives, crèches parentales, multi-accueil, haltes-garderies et jardins d'enfants - devrait permettre une plus grande souplesse dans l'accueil collectif des jeunes enfants tout en offrant une garantie de qualité. Après une ultime phase de concertation, le nouveau décret sur le mode d'accueil collectif devrait être publié dans les prochaines semaines.

Mme Mignon a aussi évoqué la situation des enfants qui peuvent être placés jusqu'à l'âge de dix-huit mois auprès de leur mère en détention, en l'absence d'opposition du juge des enfants ou du père. Dans ce dernier cas, le juge tranche sur le placement éventuel.

Ce placement est de droit si la mère n'est pas déchue de l'autorité parentale pendant sa détention.

Mme Mignon a évoqué la nécessité de favoriser des placements à l'extérieur pour faciliter la sortie de ces enfants de l'univers carcéral. Je lui indique donc que l'administration pénitentiaire, qui a la responsabilité de ces enfants, prend des mesures incitant aux placements extérieurs de jour dans des crèches ou des haltes-garderies, souvent avec le concours, variable selon les départements, des conseils généraux ou des municipalités. Cependant, dans un contexte de pénurie de modes de garde dans certains cas, les demandes exprimées par la prison ne paraissent pas souvent prioritaires, d'autant que la mère est censée pouvoir s'occuper de son enfant. Or cela n'est pas toujours vrai dans la mesure où la mère peut travailler en prison pour constituer un pécule afin d'améliorer son ordinaire.

A contrario, certaines mères ne veulent pas que leur enfant sorte, malgré les incitations, et cette volonté est respectée au nom de l'autorité parentale.

L'administration pénitentiaire, consciente de ce problème, incite chaque établissement pénitentiaire recevant des enfants à signer avec les centres de protection maternelle et infantile qui relèvent des conseils généraux, ou avec les municipalités, des conventions incluant l'organisation des modes de sortie et de garde extérieure des enfants. De telles conventions existent. En revanche, le principe même de laisser un enfant jusqu'à dix-huit mois avec pour seul univers de vie la prison, me semble devoir être remis en question.

Sur la maîtrise des dépenses de ville, M. Préel et M. Bardet ont défendu la proposition du Sénat. L'amendement adopté par ce dernier se borne à indiquer que la convention prévoit des outils de maîtrise médicalisée. Or nous n'avons pas besoin de légiférer en la matière car cela est déjà possible. En revanche, le Sénat supprime toutes les dispositions qui pourraient concrètement inciter les m édecins à s'associer à cette maîtrise médicalisée : contrats de bonne pratique et accords de bon usage des soins. Sa démarche relève donc de l'intention vertueuse, n ous le concédons, mais elle demeure purement incantatoire.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 24 NOVEMBRE 1999

En effet, le Sénat propose un disposititif qui ne débouche sur rien. Si un dépassement est constaté l'année n, on établit des contrats régionaux l'année n +

1. Mais rien n'est dit de ces contrats, sinon qu'ils permettent de réagir à un dépassement une fois l'année écoulée. Comment ? Par quelle mesure ? Personne ne le sait et nous n'avons aucune explication.

Le Sénat a également prévu que serait dressé, en année n + 1, un bilan de ces contrats de fin d'année. Or, à ce moment-là, le dépassement de l'année n est déjà bien loin. Douze mois au moins se sont écoulés. Si rien n'a alors changé, quelles conséquences concrètes y aura-t-il ? Mystère ! Il est seulement indiqué que les parties conventionnelles en tirent les conséquences, c'est tout.

Telle est la proposition du Sénat. A aucun moment n'est prévue une intervention pour faire respecter l'objectif national de dépenses d'assurance maladie.

M. Bernard Accoyer.

Et avec vous nous débattons d'un objectif dont on ne connaît pas le point de départ ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

On ne se préoccupe d'éventuels dépassements qu'avec un an de retard. Et dire que c'est vous qui nous reprochez de ne pas respecter l'ONDAM !

M. Bernard Accoyer.

Ce n'est pas exactement ce que l'on vous dit ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Mme Jacqueline Mathieu-Obadia a reproché à notre dispositif de régulation des soins de ville d'être trop complexe. Or M. Spaeth lui-même a indiqué que la CNAM l'appliquera.

Il serait d'ailleurs étonnant que la CNAM veuille gérer plusieurs dizaines de milliards de francs en ne faisant le point qu'une fois par an.

Mme Jacqueline Mathieu-Obadia.

Ce n'est pas nous qui le disons, mais M. Spaeth ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Toute entreprise, tout établissement dispose aujourd'hui d'un tableau de bord mensuel qui lui permet de corriger la trajectoire en cours d'année quand elle est mauvaise.

M. François Goulard.

Elle n'arrive même pas à présenter des comptes annuels ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Le projet de loi n'institue que trois rendez-vous par an, ce qui est peu au regard des masses en jeu.

M. François Goulard.

La CNAM est totalement incapable de présenter des comptes mensuels ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Le Gouvernement l'a bien fait. Je ne vois pas pourquoi la CNAM ne le ferait pas ! (Rires et exclamationss ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Ces rendez-vous sont justement l'occasion de nouer, entre les caisses et les professionnels, le dialogue que vous appelez tant de vos voeux. La CNAM ne sera pas obligée d'intervenir tous les quatre mois sur toutes les professions.

Mme Jacqueline Mathieu-Obadia.

Je n'ai fait que rapporter les propos de M. Spaeth ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Elle devra simplement regarder et agir en tant que de besoin, comme nous l'avons fait précédemment, par un dialogue avec les professionnels.

Nous offrons des outils variés qui appellent une méthode de travail plus exigeante, car elle impose de s'intéresser, avec les professionnels, au détail de l'activité.

Est-ce à dire que la CNAM ne saurait pas faire son métier ? Nous ne voulons pas le croire.

Mme Jacqueline Mathieu-Obadia.

C'est M. Spaeth qui le dit, pas nous ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

L'Etat a su le faire. Il a montré que cela était possible. La CNAM devrait donc en être également capable.

M. Jean-Louis Fousseret, à travers deux témoignages, a posé une question que je connais bien et qui me tient fortement à coeur. Je l'en remercie.

Actuellement, la prise en charge des matériels médicaux, notamment les prothèses auditives, est assurée selon la procédure du TIPS, le tarif interministériel des prestations sociales. A ce jour, l'inscription d'un matériel au TIPS est réalisée par arrêté ministériel pris après avis de la commission consultative des prestations sanitaires, qui regroupe des représentants des directions ministérielles concernées, de la CNAM, des associations de malades, des industriels et des syndicats.

A ce jour, le bilan en matière de qualité et de régulation des dépenses est peu satisfaisant, c'est le moins que l'on puisse dire, et les exemples donnés, même s'ils sont un peu extrêmes, reflètent la réalité.

M. Bernard Accoyer.

Il est vrai que l'on a de moins en moins accès aux nouvelles technologies ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Une réforme en profondeur du cadre législatif et réglementaire applicable aux dispositifs médicaux est indispensable.

La nécessité de réviser le TIPS est inscrite dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, avec pour objectif d'assurer une meilleure garantie de sécurité des dispositifs médicaux et un meilleur accès des patients aux soins pris en charge.

M. Bernard Accoyer.

Il n'y aura donc pas d'amélioration pour l'accès aux nouvelles technologies ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'actions ociale.

La réforme se déroulera en deux phases distinctes.

La première sera une phase d'évaluation qui sera réalisée au sein de l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, avec élaboration de critères d'évaluation propres à la prise en charge. Ainsi le remboursement de ces produits sera subordonné à leur inscription sur une liste établie après avis d'une commission dont le secrétariat sera assuré par l'AFSSAPS. La liste pourra subordonner le remboursement au respect de spécifications techniques, d'indications thérapeutiques et de conditions particulières de prescription et d'utilisation.

La seconde phase, économique, sera confiée au comité économique du médicament, qui deviendra le comité économique des produits de santé. Il sera chargé de proposer les tarifs de remboursement et, le cas échéant, les prix des produits inscrits. Nous engagerons un dialogue avec les fournisseurs, avec les fabricants, afin qu'il soit possible de faire bénéficier les handicapés sensoriels des progrès réalisés grâce aux nouvelles technologies.

M. Bernard Accoyer.

Il y aura beaucoup à faire !

M. François Goulard.

On n'est pas sorti de l'auberge !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 24 NOVEMBRE 1999

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

M. Préel s'est inquiété des possibilités d'investissement offertes aux établissements sanitaires. A cet égard je lui rappelle que le fonds d'investissement pour la modernisation des hôpitaux, créé par la loi de finances pour 1998, a été doté de 500 millions de francs en 1998 et de 250 millions de francs en 1999. En 2000, 200 millions de francs sont prévus.

L'objectif du FIMHO est d'aider les opérations de modernisation, qu'elles tendent à rénover le parc hospitalier ou contribuent à réorganiser le fonctionnement dess ites hospitaliers concernés, notamment en mettant l'accent sur les complémentarités entre établissements.

L'effort amorcé en 1998 se poursuit et nous examinons régulièrement les dossiers proposés.

M. Jean-Luc Préel.

Combien de crédits ont été utilisés ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Si vous ne craignez pas que j'allonge le débat, je peux vous le dire ! Ont été proposés en 1999, soixante-quinze dossiers et trente-deux ont été retenus, qui privilégient les complémentarités entre établissements publics et privés et l'amélioration de la prise en charge psychiatrique : neuf opérations concernant des établissements psychiatriques pour 38 millions de francs, sept opérations de regroupement entre établissements publics de santé pour 62 millions de francs,...

M. Bernard Accoyer.

Ce n'est rien du tout ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

... sept opérations de complémentarité entre public et privé pour 82 millions de francs, cinq opérations de restructuration d'établissements publics de santé pour 31 millions de francs, quatre opérations de regroupement entre établissements privés participant au service public pour 37 millions de francs.

En 1998, quarante-six opérations avaient été agréées : douze concernant les établissements psychiatriques pour 50 millions de francs...

M. Alfred Recours, rapporteur.

Je crois que les choses sont claires !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Oui, c'est net ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Oui, mais je veux aller jusqu'au bout ! Ont donc été également agréées dix opérations de restructuration d'établissements publics de santé pour 73 millions de francs, neuf opérations de restructuration d'établissements publics de santé pour 135 millions de francs, huit opérations de complémentarité entre public et privé pour 212 millions de francs...

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Ils ont compris ! Ne les assommez pas ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

... et sept opérations de regroupement entre établissements privés participant au service public hospitalier pour 130 millions.

M. Bernard Accoyer.

Au total, cela fait combien ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

M. Préel a aussi stigmatisé les insuffisances en matière de prévention. A ce propos, je ne reviendrai pas sur les propos que j'ai tenus à plusieurs reprises concernant la prévention, les constats, les programmes de prévention de la toxicomanie ou des maladies évitables, et la lutte contre le suicide. Je vous renvoie simplement aux précédents comptes rendus. Vous y trouverez la totalité des actions que nous développons dans ces domaines.

M. Jean-Luc Préel.

Je ne suis pas satisfait pour autant ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

J'en viens aux mesures de glissement vers la prise en charge totale des actes des CDAG, des CPEF, les centres de planification et d'éducation familiale, et des cures de sevrage des toxicomanes par l'assurance maladie.

M. Bernard Accoyer.

Encore un transfert de charges ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Il s'agit non d'un transfert de charges, monsieur Accoyer, mais d'une clarification du rôle des acteurs avec l'unité d'action de l'assurance maladie en matière de prévention secondaire, c'est-à-dire de dépistage et de soins curatifs directs aux personnes.

M. Bernard Accoyer.

La lutte contre le sida n'est plus une priorité !

M. Jean-Luc Préel.

Alors que l'Etat les finançait auparavant, ces actions seront désormais à la charge de la CNAM. Ce sera bien un transfert de charges ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Pas du tout ! Avec l'argent dégagé nous développerons des programmes de prévention et d'éducation q ui permettront d'améliorer l'état sanitaire de la population.

M. Bernard Accoyer.

Ce n'est pas le travail des caisses, mais celui de l'Etat ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Le dépistage organisé des cancers n'a pas été sous-estimé par le Gouvernement, mais la mise en place du dispositif législatif est complexe en raison de l'importance des problèmes soulevés pour la première fois à cette échelle. C'est pourquoi un important travail de concertation et de mobilisation des acteurs a été accompli.

Quatre groupes thématiques chargés d'élaborer les référentiels techniques ont été constitués pour mettre en place les instruments nécessaires à l'information et à la formation des professionnels concernés, monsieur Préel.

Ces référentiels sont en voie de finalisation, mais la difficulté de se mettre d'accord et de trouver du matériel adapté, performant, fiable, ralentit un peu le temps de réalisation de ces programmes qui ne couvrent effectivement pas encore la totalité du territoire français.

Enfin, Mme Fraysse a souhaité la remise en chantier de la réorganisation de la transfusion sanguine. Il s'agit d'une obligation que nous impose la loi du 1er juillet 1998.

L'Agence française du sang doit laisser la place à l'Etablissement français du sang à la fin de l'année. La restructuration de la transfusion sanguine est nécessaire et elle se prépare en concertation au sein des commissions régionale d'organisation de la transfusion sanguine.

J'avais déjà apporté des réponses sur cette question au cours de la première lecture. On peut certes estimer que cette transformation se réalise d'une manière telle que de nombreux personnels sont dans l'expectative à la fois quant à leur situation et pour le devenir de la transfusion en général, dans un cadre nouveau et avec des pratiques nouvelles. Cela étant, je le répète, la loi nous contraint à le réaliser.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 24 NOVEMBRE 1999

Nous sommes très attentifs aux réactions des personnels. Nous suivons de près les discussions en cours. Et, même si nous devons respecter l'autonomie de l'établissement, le calendrier sera observé en dialogue avec les représentants du personnel, sous la responsabilité du directeur de l'établissement.

Notre souci fondamental est que cette opération soit un succès, qu'elle apporte la garantie et la sécurité nécessaires. L'acceptation de la réforme par les personnels est, de notre point de vue, l'un des éléments importants de cette réussite et nous y mettons beaucoup de soins et y attachons beaucoup d'importance. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Discussion des articles

M. le président.

En application de l'article 91, alinéa 9, du règlement, j'appelle maintenant, dans le texte du Sénat, les articles du projet de loi, sur lesquels les deux assemblées n'ont pu parvenir à un texte identique.

M. Jean-Luc Préel.

Hélas !

M. Bernard Accoyer.

Ce n'est pas par manque de bonne volonté de la part de l'opposition !

M. le président.

A la demande du Gouvernement, l'article 1er est réservé jusqu'à la fin de l'examen des articles.

Article 1er bis

M. le président.

« Art. 1er bis. - Le quatrième alinéa de l'article L.

114-1 du code de la sécurité sociale est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Elle est assistée par un secrétariat général permanent, qui assure l'organisation de ses travaux ainsi que l'établissement de ses rapports.

« Le secrétariat général de la commission des comptes de la sécurité sociale est placé sous l'autorité d'un secrétaire général, nommé pour trois ans renouvelables une fois, par le ministre chargé de la sécurité sociale, sur proposition conjointe des présidents des deux assemblées. »

Sur cet article, plusieurs orateurs sont inscrits.

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel.

Je regrette, madame la secrétaire d'Etat, que vous ayez à nouveau repoussé en fin de débat l'examen de l'article 1er , c'est-à-dire du rapport.

C'est une habitude, monsieur le rapporteur, mais elle est mauvaise. Pourquoi persister dans l'erreur ? Il serait préférable de commencer l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale par son article 1er

Pourquoi ? On reproche à l'ONDAM d'être essentiellement comptable. Une bonne façon de montrer que ce n'est pas exact serait de commencer, en examinant le rapport, par présenter clairement les problèmes de santé publique et les besoins de la population pour, ensuite, faire les propositions qui s'imposent accompagnées de leur financement.

M. Alfred Recours, rapporteur.

C'est pour cette raison que tout cela est dans l'article 1er

M. Jean-Luc Préel.

Mais non, monsieur le rapporteur, c'est complètement différent ! Si on étudiait maintenant les orientations et les objectifs présentés dans le rapport, on partirait des besoins : c'est une démarche complètement différente de la vôtre. Si vous ne comprenez pas ce que je veux dire, je le regrette.

M. Alfred Recours, rapporteur.

Mais si, je comprends !

M. Jean-Luc Préel.

La différence me paraît pourtant de taille.

Nous proposerons d'ailleurs des modifications au rapport par voie d'amendements mais, hélas ! ceux-ci viendront en discussion en fin de parcours. Permettez-moi de vous rappeller à ce sujet, monsieur le président, que l'examen du rapport en première lecture a été, je ne dirais pas bâclé, mais pour le moins précipité, puisqu'il a été é tudié entre cinq et six heures du matin lors de la quatrième nuit de débat. Ce n'est pas très convenable !

M. François Goulard.

Eh oui !

M. Jean-Luc Préel.

Nous aurions pu commencer aujourd'hui par l'examen du rapport : cela aurait permis d'étudier les problèmes en toute clarté.

J'en viens à l'article 1er bis.

Conscient du rôle important de la commission des comptes de la sécurité sociale et de celui, majeur, joué au sein de cette commission, par le secrétaire général, le Sénat a souhaité renforcer la position de ce dernier en proposant que - dans une démarche proche de celle du CSA - sa nomination soit faite sur proposition conjointe des présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat. Cette demande n'est bien entendu pas liée à la personne du secrétaire récemment nommé même s'il a intégré, dans la présentation des comptes, lors de la dernière réunion de la commission, des mesures préparées par le Gouvernement qui n'avaient pas encore été votées.

I l paraîtrait également important de distinguer les comptes tendanciels des comptes modifiés.

Nous souhaitons que la commission des comptes soit réellement indépendante et présente des comptes en droits constatés, ce qui, malheureusement, n'est toujours pas le cas. Nous demandons donc, monsieur le rapporteur, le maintien de l'article 1er bis, quitte à ce que le Gouvernement l'amende, pour que la commission soit à la fois indépendante et efficace.

M. François Goulard.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Il a donc été décidé que, au cours de cette nouvelle lecture du projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous ne parlerions pas de santé, et que nous ne réfléchirions pas aux moyens qui seront affectés à la protection sociale en évaluant les besoins sanitaires de nos concitoyens et les priorités en la matière.

Une nouvelle fois, le Gouvernement en a décidé ainsi.

Certains orateurs, des plus éminents et des plus compétents, ont bien compris que là n'était pas le débat puisqu'ils n'ont même pas évoqué la question de la santé dans leur intervention. L'objectif du Gouvernement est, à l'évidence, de financer - d'ailleurs partiellement - les 35 heures et, pour le reste, de faire progresser l'étatisation de notre système de soins, étatisation qui constituera la première étape vers la privatisation de celui-ci car elle se soldera, bien évidemment, hélas, par un échec ! Dans les articles 1er bis et 1er ter , le Sénat a décidé de mettre un peu de clarté.

Les membres de l'opposition s'élèvent en effet solennellement, madame la secrétaire d'Etat, contre l'utilisation qui est faite par le Gouvernement de la commission des comptes de la sécurité sociale. Cette commission, qui devrait être un organisme indépendant où seraient analysées de manière objective, dans une comptabilité en droits constatés comme cela est demandé depuis bien long-


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temps, des données chiffrées précises de façon à connaître exactement l'état des comptes et de procéder à des projections à partir de ceux-ci, est devenue un moyen de communication politique du Gouvernement. La nomination de son secrétaire général est laissée à la discrétio n du Gouvernement en fonction d'objectifs ou de missions qui ne sont pas suffisamment clairs pour nous satisfaire. Les dates de convocation sont telles qu'aucun travail sérieux ne peut être fait d'autant que les membres de la commission trouvent désormais le rapport, qui fait plusieurs centaines de pages, sur leur table, le jour de la réunion.

En réalité, elle est devenue une commission fantoche par la seule volonté du Gouvernement et les manipulations de la part de celui-ci sont maintenant tellement habituelles que cela en devient intolérable.

Nous considérons que le Sénat a fait oeuvre de salubrité en affirmant, dans les articles 1er bis et 1er ter , la nécessité de modifier l'architecture et le fonctionnement de la commission des comptes de la sécurité sociale. C'est pourquoi nous souhaitons le maintien de ces articles.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Je ne ferai pas comme l'orateur précédent, qui est intervenu sur les deux premiers articles.

Je limiterai mon propos à l'article 1er bis

M. le président.

Je vous y invite, monsieur Goulard.

M. François Goulard.

Je ferai, tout d'abord, remarquer que, systématiquement, quand une disposition est proposée par le Sénat, la majorité de cette assemblée s'empresse de proposer un amendement de suppression.

M. Bernard Accoyer.

C'est du parti pris !

M. François Goulard.

Il y a là un parti pris systématique à l'égard du travail de l'autre chambre qui ne nous paraît pas de bonne méthode. Nous aurions certainement bénéfice à mieux considérer le travail de nos collègues sénateurs.

L'article 1er bis ne fait pas exception à cette règle, puisque la commission des affaires sociales en demande la suppression. Or le point abordé par le Sénat mérite autre chose que la motivation soutenue par le rapporteur.

En effet, il n'est pas neutre de préciser la manière dont le secrétaire général de la commission est nommé. Le fonctionnement de celle-ci n'est pas non plus un sujet secondaire qui devrait échapper à la compétence législative - le rapporteur songe sans doute à l'article 34 de notre Constitution. Bien au contraire, dans la mesure où beaucoup des conséquences des dispositions qui seront probablement adoptées dans ce projet de loi sont déterminées par les comptes de la sécurité sociale et, notamment, par les évolutions de dépenses, il est nécessaire que l'institution qu'est la commission des comptes de la sécurité sociale donne des garanties de transparence et d'impartialité. Or il y aurait beaucoup à dire sur les insuffisances constatées à cet égard.

Mon collègue Accoyer a eu des mots fermes à l'endroit des choix et des méthodes de la commission. Sa composition, son fonctionnement, et le choix de son secrétaire général ne sont en effet pas, à l'heure actuelle, entourés de toutes les garanties qui permettent d'assurer son indépendance, et cela est dommage. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

M. Recours, rapporteur, a présenté un amendement, no 4, ainsi rédigé :

« Supprimer l'article 1er bis »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Alfred Recours, rapporteur.

Comme nous devons constamment rétablir les faits, je répondrai de manière lapidaire.

Le Sénat a voté conformes seize articles du texte adopté par l'Assemblée nationale. Il y a donc bien un travail commun entre les deux assemblées.

Par ailleurs, sept amendements au moins de nos collègues du Sénat, devenus articles nouveaux dans le texte qui nous revient, ont reçu l'avis favorable de la commission des affaires sociales.

M. Jean-Luc Préel.

Bravo !

M. François Goulard.

Vous êtes trop bon, monseigneur !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Je ne sais pas s'il faut ou non dire bravo. En tout cas, vous ne pouvez pas dire que l'Assemblée ne tient pas compte des travaux du Sénat.

C'est tout.

Concernant la suggestion faite par les sénateurs à l'article 1er bis , il a semblé à la commission que ce n'était pas aux assemblées d'intervenir dans le processus de nomination d'un haut fonctionnaire. Permettez-moi de vous rappeler, cher collègue Goulard, que le poste en question est occupé par un magistrat de la Cour des comptes.

M. François Goulard.

Oui, choisi par le Gouvernement !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Il n'en est pas moins magistrat de la Cour des comptes.

M. François Goulard.

Il a été nommé au tour extérieur !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Si vous voulez vraiment poser le problème du statut de la commission des comptes, ce n'est pas la nomination de son secrétaire général qu'il faut remettre en cause, mais les procédures et sa composition.

M. Bernard Accoyer.

Ce n'est pas de cela que nous parlons !

M. Alfred Recours, rapporteur.

En tout cas, c'est autre chose qu'il faut viser : sa qualité d'instance indépendante de régulation ou que sais-je encore ?

M. Bernard Accoyer.

Ce n'est pas ce que nous disons !

M. François Goulard.

Mais nous pouvons en parler !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Ces motifs justifient qu'on ne puisse pas retenir cette proposition du Sénat.

D'autres le seront.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Accord avec le rapporteur. Donc rejet.

M. le président.

Le Gouvernement est défavorable ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Défavorable.

M. Jean-Luc Préel.

Défavorable à l'amendement ! (Sourires.)

M. le président.

Non, monsieur Préel !

M. Bernard Accoyer.

Mme la secrétaire d'Etat a dit qu'elle était défavorable. Il s'agit de l'amendement ! (Sourires.)

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

J'ai dit : « accord avec le rapporteur ».


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M. Bernard Accoyer.

Mais vous avez dit « rejet ».

M. le président.

Le Gouvernement a dit qu'il était défavorable à l'article 1er bis puisqu'il était d'accord avec le rapporteur, qui a déposé un amendement de suppression de cet article.

M. Bernard Accoyer.

C'est un peu compliqué tout cela !

M. le président.

Pas du tout. Deux négations valent une affirmation, monsieur Accoyer. Vous devriez le savoir.

Je mets aux voix l'amendement no

4. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

En conséquence, l'article 1er bis est supprimé.

Article 1er ter

M. le président.

« Art. 1er ter. - I. - Après l'article L.

114-1 du même code, il est inséré un article L.

114-2 ainsi rédigé :

« Art. L.

114-2. - Les régimes obligatoires de sécurité sociale communiquent leurs comptes au secrétaire général de la commission des comptes avant le 31 mars de l'année suivant l'exercice considéré.

« Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions d'application du présent article. »

« II. - Après l'article L. 114-1 du même code, il est inséré un article L. 114-3 ainsi rédigé :

« Art. L. 114-3. - Les organismes de sécurité sociale décrivent leurs opérations à l'aide d'un plan comptable unique.

« Le suivi d'application de ce plan comptable est assuré par le secrétariat de la commission des comptes de la sécurité sociale.

« Un décret détermine les modalités d'application du présent article. »

« III. - Les dispositions du présent article s'appliquent pour la première fois aux comptes de l'année 2001. »

Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article.

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel.

Monsieur le président, contrairement à M. Bernard Accoyer qui s'est exprimé en même temps sur les articles 1er bis et 1er ter, je ne me suis exprimé que sur le premier.

M. Bernard Accoyer.

C'est exact, je peux en témoigner.

M. Jean-Luc Préel.

Je souhaite donc dire quelques mots sur l'article 1er ter également important.

Nous venons de voir que la commission des comptes de la sécurité sociale jouait un rôle important en théorie puisqu'elle est chargée de la vérification des comptes de la sécurité sociale. Nous avons souhaité renforcer son indépendance, car celle-ci ne nous paraît pas aujourd'hui totalement assurée.

Dans l'article 1er ter, le Sénat a souhaité que la commission des comptes puisse disposer des comptes des différents régimes au plus tard le 31 mars de l'année suivant l'exercice clos, dans le cadre d'un plan comptable unique pour tous les organismes de sécurité sociale.

J'ajoute que nous souhaitons, comme je l'ai déjà rappelé, que les comptes soient établis en droits constatés.

Cette proposition, monsieur le rapporteur, paraît raisonnable : à l'époque de l'informatique, il ne paraît pas impossible de connaître les comptes dès le 31 mars. Cela nous paraît même la moindre des choses.

Le respect de ce délai est indispensable si l'on veut que la Cour des comptes, le Gouvernement et le Parlement puissent travailler sur des comptes précis et exacts suffisamment en amont de la préparation des projets de loi de financement de la sécurité sociale.

Rejeter cette proposition, monsieur le rapporteur, reviendrait à reconnaître que la CNAM ne peut pas établir ses comptes trois mois après la clôture d'un exercice, ce qui serait regrettable.

I l me paraît donc indispensable de maintenir l'article 1er ter introduit par le Sénat.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, tout en déplorant que mon collègue M. Accoyer ait choisi de ne pas parler sur cet article important (Sourires), j'interviendrai dans le même sens que M. Préel.

Notre sécurité sociale, comme la plupart des organismes publics, souffre de retards considérables dans l'établissement de sa comptabilité. Aussi bien pour les règles comptables appliquées, qui relèvent bien souvent beaucoup plus de la comptabilité de la ménagère que d'une comptabilité moderne...

M. Bernard Accoyer.

C'est vrai. La sécurité sociale en est encore au boulier !

M. François Goulard.

... que pour la rapidité d'établissement des comptes, nous sommes à des années lumière de ce que nous serions en droit d'exiger aujourd'hui d'un instrument de pilotage d'organismes aussi importants pour la vie collective.

L'exigence de production des comptes avant le 31 mars me paraît tout à fait raisonnable. Elle est comparable à ce qui est exigé des entreprises, qui doivent faire approuver leurs comptes d'abord par les conseils, et ensuite par les assemblées générales. Les plus grandes entreprises mondiales disposent en général de comptabilités qui leur permettent d'avoir des chiffres à peu près définitifs moins d'un mois après la clôture de l'exercice.

L'ensemble de nos administrations et, en l'occurrence, la sécurité sociale doivent se doter de comptabilités dignes de ce nom, afin que leurs délais d'établissement des comptes soient en harmonie avec les possibilités techniques d'aujourd'hui.

M. Jean-Luc Préel.

Très bien !

M. le président.

M. Recours, rapporteur, a présenté un amendement, no 5, ainsi rédigé :

« Supprimer l'article 1er ter. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Alfred Recours, rapporteur.

Notre collègue Préel nous reprochera sans doute encore une fois de n'avoir pas commencé la discussion sur le projet de loi par l'examen de l'article 1er je signale au passage que les sénateurs terminent toujours, eux aussi, par cet article - et de n'avoir donc pu faire rétablir par l'Assemblée nationale la disposition qu'elle avait adoptée en première lecture lors de l'examen de cet article engageant le Gouvernement « à promouvoir l'harmonisation des plans comptables des différents régimes et l'accélération de la publication des comptes, ainsi qu'à présenter en annexe au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 » c'està-dire l'année prochaine - « les principaux agrégats en droits constatés et les éléments permettant le passage d'une présentation à l'autre ». C'est une première étape vers ce que vous souhaitez.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 24 NOVEMBRE 1999

Il est donc très largement tenu compte de la proposition du Sénat traduite par l'article 1er ter dans ce que nous avons adopté en première lecture et que nous rétablirons, je l'espère, au terme de nos débats.

Dans ces conditions, je maintiens, cher collègue, la proposition de suppression de l'article 1er ter.

M. Jean-Luc Préel.

A quelle date aurons-nous les comptes ?

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Avis favorable !

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Monsieur le rapporteur, nous n'avons pas oublié la mention faite dans le rapport que nous examinerons à la fin du débat, mais émettre un voeu dans un rapport depuis des décennies et voter une disposition contraignante sont des choses bien différentes. On demande aux organismes de sécurité sociale d'améliorer la tenue de leurs comptes. Malheureusement, sans aller jusqu'à dire que rien n'a été fait, force est de constater que ces demandes réitérées n'ont à l'évidence pas suffi.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

5. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

En conséquence, l'article 1er ter est supprimé.

Après l'article 2 C

M. le président.

MM. de Courson, Hériaud, Loos, Sauvadet, Dutreil, Gengenwin et Perrut ont présenté un amendement, no 56, ainsi rédigé :

« Après l'article 2 C, insérer l'article suivant :

« I. - Les VI et VII de l'article 1003-7-1 du code rural sont supprimés.

« II. - Les pertes de recettes sont compensées par la majoration à due concurrence du taux visé à l'article 1609 unvicies du code général des impôts. »

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel.

M. de Courson, qui est, on le sait, un grand spécialiste du droit et du monde rural et de surcroît rapporteur pour le BAPSA, souhaite-t-il appeler notre attention sur le problème suivant. L'article 1003-7-1 du code rural met à la charge des personnes qui dirigent une exploitation ou une entreprise agricole dont l'importance est inférieure à la moitié de la surface minimum d'installation et supérieure à un minimum fixé par décret - vous voyez comme tout est simple -, une cotisation de solidarité calculée en pourcentage de leurs revenus profes-s ionnels ou de l'assiette forfaitaire définie à l'article 1003-12 du code rural.

A compter de 1999, les personnes relevant de l'article 1003-7-1-VI du code rural vont donc payer 17 % de cotisations de solidarité et 10 % au titre de la CSG, CRDS et prélèvement social, soit 27 %, alors qu'elles ne payaient que 19 % au titre de 1998.

M. Bernard Accoyer.

C'est fou !

M. Jean-Luc Préel.

Autrement dit, à revenu égal, le prélèvement aura augmenté en un an de 42 %. Outre la distorsion des taux de prélèvement, cela aura pour conséquence de frapper des personnes de condition très modeste. M. de Courson propose de supprimer la cotisation de solidarité depuis qu'existe la CSG, la CRDS et le prélèvement social. Vous ne pouvez, madame le secrétaire d'Etat, qu'être sensible à ses arguments.

M. François Goulard.

Il faut l'espérer !

M. Bernard Accoyer.

Un peu de coeur pour les agriculteurs !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Alfred Recours, rapporteur.

Je ne suis pas comme M. de Courson un expert en droit constitutionnel, ni un spécialiste des exceptions d'irrecevabilité comme certains autres. Je constate cependant qu'il arrive souvent au Conseil constitutionnel de ne pas être très en phase avec les allégations d'inconstitutionnalité avancées ici même.

Mais, pour une fois, et vous m'en excuserez, je vais me permettre d'aborder le problème de la constitutionnalité que posent plusieurs amendements portant articles additionnels, en particulier celui-ci, et cette argumentation vaudra pour les autres.

Le 25 juin 1998, le Conseil constitutionnel a décidé que les seuls amendements susceptibles d'être adoptés après la réunion de la commission mixte paritaire devaient ou être en relation directe avec une disposition du texte en discussion, ou bien être dictés par la nécessité d'assurer une coordination avec d'autres textes en cours d'examen par le Parlement.

Peu de temps après, dans une décision du 29 juillet 1998, le Conseil constitutionnel a censuré l'article 152 de la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions - que vous lui aviez soumise, messieurs -, lequel tendait à substituer au Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts, un nouveau conseil de l'emploi. Le Conseil avait en effet considéré que cet article n'était pas en relation directe avec l'article 153 du projet de loi créant un observatoire national de la pauvreté et de l'exclusion sociale, alors même que les deux organismes avaient une mission similaire et que cette substitution avait conduit à modifier par un amendement de coordination l'autorité de rattachement à l'observatoire. La relation directe, exigée par le Conseil constitutionnel, semble donc ne concerner que les amendements de complément d'un dispositif déjà prévu ou des amendements de coordination, comme ce fut le cas avec l'article 14 de la loi précédente.

Enfin, dans une décision du 23 juillet 1999, le Conseil constitutionnel a précisé, et j'attire particulièrement votre attention sur ce point, que même si un amendement identique a été discuté au fond en première lecture, puis retiré ou rejeté, il ne peut être repris en nouvelle lecture après CMP. De ce fait, tout amendement portant article additionnel, comme c'est le cas ici, doit être considéré comme irrecevable à ce stade de la procédure, à moins qu'il ne s'agisse d'assurer la coordination avec une disposition d'un autre texte en cours d'examen.

M. François Goulard.

C'est le cas.

M. Alfred Recours, rapporteur.

Le débat se voit donc, par principe, limité aux articles restant en discussion. Par conséquent, monsieur le président, j'émets un avis défavorable à cet amendement, comme à tous les autres amendements portant articles additionnels qui présentent les mêmes caractéristiques.

M. Bernard Accoyer.

C'est dommage, car cette disposition aurait été intéressante pour les agriculteurs !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Même avis que le rapporteur.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 24 NOVEMBRE 1999

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

56. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

MM. Rossi, Douste-Blazy, Debré et les membres du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe du Rassemblement pour la République ont présenté un amendement, no 107, ainsi rédigé :

« Après l'article 2 C, insérer l'article suivant :

« I. Dans le deuxième alinéa de l'article L. 241-10 du code de la sécurité sociale, après les mots : " a) Des personnes âgées ayant atteint un âge déterminé et", sont insérés les mots : ", à l'exception des personnes âgées de plus de soixante-quinze ans,".

« II. Les pertes de recettes pour les régimes de sécurité sociale résultant des dispositions du I sont compensées, à due concurrence, par une cotisation additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts dont le produit est affecté aux régimes de sécurité sociale. »

La parole est à M. François Goulard.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

L'amendement no 107, comme b eaucoup d'autre d'ailleurs, est commun aux trois groupes de l'opposition. Pour gagner du temps, monsieur le président, je me propose de présenter en même temps l'amendement 108.

M. le président.

Je vous en remercie.

Cet amendement, des mêmes auteurs, est ainsi rédigé :

« Après l'article 2 C, insérer l'article suivant :

« I. Dans le deuxième alinéa (a) du I de l'article L. 241-10 du code de la sécurité sociale, après les mots : "déterminé et", sont insérés les mots : ", à l'exception des personnes âgées de plus de soixante-quinze ans, atteintes d'une des affections longues et coûteuses visées aux quatrième (3o ) et cinquième (4o ) alinéas de l'article L. 322-3,".

« II. Les pertes de recettes pour les régimes de sécurité sociale sont compensées, à due concurrence, par une cotisation additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts dont le produit est affecté aux régimes de sécurité sociale. »

Poursuivez, monsieur Goulard.

M. François Goulard.

L'argumentation que vient de développer M. le rapporteur nous amènera à saisir le Conseil constitutionnel sitôt ce texte adopté. Nous aurions pu l'éviter si nous avions eu la bonne chance de voir certains de nos amendements acceptés.

M. Bernard Accoyer.

Bien sûr !

M. François Goulard.

Nous n'aurions pas soumis vos principaux textes à la censure du juge constitutionnel : c'est bien votre position qui nous oblige à déposer des recours.

M. Bernard Accoyer.

Exactement ! M. Recours nous pousse au recours !

M. François Goulard.

Les amendements nos 107 et 108 reprennent deux dispositions que nous avions tenté d'introduire en première lecture afin d'aider les personnes de plus de soixante-quinze ans qui ont besoin d'une aide à domicile. Nous proposions une disposition plus généreuse que celle actuellement en vigueur, à savoir une exonération totale de charges.

Le premier amendement, no 107, vise à l'accorder à toutes les personnes âgées de plus de soixante-quinze ans.

Le second, no 108, est un amendement de repli, en ce qu'il limite le bénéfice de cette disposition aux personnes de plus soixante-quinze ans atteintes d'une affection longue et coûteuse, au sens traditionnel du terme.

M. Bernard Accoyer.

Voilà qui mériterait un vote unanime !

M. le président.

Même argumentaire de principe, monsieur le rapporteur ?

M. Alfred Recours, rapporteur.

Oui, monsieur le président. Je précise seulement que, parmi les dispositions rejetées par le Conseil constitutionnel à la suite du dernier recours, figurait un amendement que j'avais moimême accepté et qui avait été déposé par notre collègue Accoyer. Vous ne pouvez donc pas prétendre que si vos amendements étaient adoptés, comme cela fut le cas la d ernière fois, vous ne saisiriez pas le Conseil constitutionnel.

M. Bernard Accoyer.

Vous n'en avez accepté qu'un sur deux cents !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Et cela me permet de rappeler qu'il m'arrive d'approuver des amendements de M. Accoyer et de les faire voter par le Parlement, même s'ils sont ensuite recalés par le Conseil constitutionnel !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Rejet !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 107.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 108.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Mme Fraysse, Mme Jacquaint, M. Gremetz et les membres du groupe communiste ont présenté un amendement no 1, ainsi libellé :

« Après l'article 2 C, insérer l'article suivant :

« Il est inséré dans le paragraphe 1 de la soussection 2 de la section 1 du chapitre II du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale, un article L. 242-4-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 242-4-1. Le taux de la cotisation est modulé pour chaque entreprise selon la variation de sa masse salariale dans la valeur ajoutée globale. Le comité d'entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel, sont associés au contrôle de ce ratio. »

M. le président.

La parole est à M. Claude Billard.

M. Claude Billard.

Cet amendement propose d'engager une réelle réforme des cotisations patronales, tout à fait réalisable. Le but est de rééquilibrer les contributions entre revenus du travail et revenus du capital. Dans le droit fil des recommandations du rapport Chadelat, nous proposons de moduler les cotisations en fonction de la part consacrée aux salaires dans la valeur ajoutée globale.

Cette réforme devrait entraîner un effet dynamique sur l'emploi en favorisant les entreprises à fort taux de maind'oeuvre et les petites et moyennes entreprises, tout en alourdissant la contribution des entreprises fortement capitalistiques. Le but est de privilégier les entreprises qui créent des emplois et de pénaliser celles qui licencient et spéculent. Elle répond au besoin de notre protection


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 24 NOVEMBRE 1999

sociale de dégager des ressources pérennes et supplémentaires afin de mieux répondre aux attentes de la population.

Mme Muguette Jacquaint.

Vous devriez le voter, monsieur Préel.

M. le président.

Puis-je considérer que l'amendement no 2, dont l'objet est très similaire, a par avance été défendu ?

M me Muguette Jacquaint.

C'est pratiquement le même objet, monsieur le président.

M. le président.

A cette seule différence qu'il ne porte pas sur la même cotisation.

C et amendement, également présenté par Mmes Fraysse, Jacquaint, M. Gremetz et les membres du groupe communiste, est ainsi rédigé :

« Après l'article 2 C, insérer l'article suivant :

« Il est inséré dans le paragraphe 2 de la soussection 2 de la section 1 du chapitre II du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale, un article L. 242-4-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 242-4-2. Le taux de la cotisation est modulé pour chaque entreprise selon la variation de sa masse salariale dans la valeur ajoutée globale. Le comité d'entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel, sont associés au contrôle de ce ratio. »

Q uel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?

M. Alfred Recours, rapporteur.

L'argumentation qui valait tout à l'heure pour les amendements portant les articles additionnels s'applique également à ces deux amendements. Si rien ne nous empêche d'en discuter, nous ne pouvons, en tout état de cause, pas davantage les adopter par le fait qu'ils introduisent des dispositions tout à fait nouvelles par rapport à ce que nous avons adopté en première lecture. Chat échaudé craint l'eau froide, dit-on. J'ai été échaudé l'an dernier par le Conseil constitutionnel en acceptant des articles additionnels. Je viens de vous rappeler la jurisprudence du Conseil : même motif, même peine. Je ne puis leur donner un avis favorable.

M. Bernard Accoyer.

Ce n'est pas pour cette raison que le Conseil avait rejeté les articles incriminés.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Même avis, monsieur le président.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

1. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

2. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements, nos 58 et 57, pouvant eux aussi faire l'objet d'une présentation commune.

L'amendement no 58, présenté par MM. de Courson, Gengenwin, Jégou, Préel, Méhaignerie et Bur, est ainsi rédigé :

« Après l'article 2 C, insérer l'article suivant :

« I. Il est institué un remboursement de la contribution sociale généralisée, de la contribution pour le remboursement de la dette sociale et du prélèvement social en faveur de la caisse nationale des allocations familiales et de la caisse nationale d'asssurance vieillesse des travailleurs salariés en faveur des ménages non imposables titulaires de revenus de placement.

« II. La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée par la majoration à due concurrence des taux de la contribution sociale généralisée, de la contribution de remboursement de la dette sociale et des prélèvements mentionnés à l'article L.

245-16 du code de la sécurité sociale. »

L'amendement no 57, présenté par MM. de Courson, Jégou, Gengenwin et Bur, est ainsi rédigé :

« Après l'article 2 C, insérer l'article suivant :

« I. Il est institué un remboursement de la contribution sociale généralisée, de la contribution pour le remboursement de la dette sociale et du prélèvement social en faveur de la caisse nationale des allocations familiales et de la caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés en faveur des ménages titulaires de revenus de placement, dont le revenu annuel net global, au sens de l'impôt sur le revenu, est inférieur par part au minimum vieillesse.

« II. La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée par la majoration à due concurrence des taux de la contribution sociale généralisée, de la contribution de remboursement de la dette sociale et des prélèvements mentionnés à l'article L.

245-16 du code de la sécurité sociale. »

La parole est à M. Jean-Luc Préel, pour soutenir ces deux amendements.

M. Jean-Luc Préel.

Ces deux amendements, dont M. de Courson est encore à l'origine, ont un but social évident.

Tout le monde sera conscient du problème soulevé, qui peut à bien des égards s'apparenter à une véritable injustice.

En effet, les personnes non redevables de l'impôt sur le revenu n'en restent pas moins astreintes à payer la CSG, la CRDS et le prélèvement social sur les revenus de leurs placements. L'amendement no 58 de M. de Courson propose d'instituer un remboursement de la CSG, de la CRDS et du prélèvement social dus sur les revenus de leurs placements en faveur des personnes non imposables ; l'amendement no 57 propose la même disposition, mais en le réservant aux ménages dont le revenu net global n'excède pas, par part, le minimum vieillesse.

En dépit de votre crainte de voir ces amendements

« retoqués » par le Conseil constitutionnel, un avis favorable de votre part, monsieur le rapporteur, montrerait combien vous êtes sensible à ces problèmes.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements.

M. Alfred Recours, rapporteur.

Je suis bien entendu extrêmement sensible à tous les arguments de nos coll ègues Préel et de Courson, y compris quand ils entendent nous donner des leçons quant à la constitutionnalité de nos textes.

Une précision cependant à propos de la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Vous observerez que celle-ci est très récente : 1998 et 1999. Doit-on y voir une relation avec l'arrivée de l'un de nos anciens collègues au conseil ? Je l'ignore. Quoi qu'il en soit, il est certain qu'elle se répète et se confirme.

J'y vois pour ma part deux justifications. Premièrement, elle témoigne du souci de faire avancer le débat en considérant que, au fil des passages à l'Assemblée et au Sénat, les discussions ne doivent plus porter que sur les


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points qui n'auraient pas fait l'objet d'un accord en CMP, et ne sauraient remettre en permanence sur le tapis des éléments déjà discutés en première lecture ou en introduire de nouveaux.

Mais un deuxième élément me paraît également très important et de nature lui aussi à justifier la position du Conseil : il peut s'agir, d'une certaine façon, de protéger le Parlement d'éventuels amendements du Gouvernement en seconde lecture après passage en CMP. Celui-ci en effet, pas plus que nous, n'a le droit aux termes de cette jurisprudence, de déposer des amendements au petit matin, comme cela s'est parfois produit. A cet égard, la jurisprudence du Conseil constitutionnel peut être également considérée comme un moyen de préserver les prérogatives du Parlement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Rejet !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

58. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

57. (L'amendement n'est pas adopté.)

Article 2

M. le président.

Le Sénat a supprimé l'article 2.

Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article.

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel.

Puisque vous me sollicitez, monsieur le président, je ne saurais résister au plaisir de vous dire quelques mots sur l'article 2...

M. le président.

Vous pouvez renoncer à la parole !

M. Jean-Luc Préel.

... dont l'importance dans ce projet de loi est certaine, puisqu'il s'agit de créer un fonds des 35 heures.

Pourquoi créer un nouveau fonds ? On sait, madame la secrétaire d'Etat, que dans ce gouvernement vous adorez ces « machins administratifs » avec conseil d'administation, conseil de surveillance, où vous prenez d'ailleurs bien soin de réserver la meilleure place aux représentants de l'Etat, ce qui ne témoigne pas d'un souci excessif d'ouverture à ce que l'on appelle la société civile. Mais, surtout, vous cherchez à financer les 35 heures. Ce fonds sera alimenté par des recettes dont chacune d'elles devrait avoir, nous semble-t-il, une destination plus appropriée.

Je ne reviens pas sur la façon dont vous aviez improvisé un premier mode de financement, avant de reculer sous la pression des syndicats à la veille du débat, pour arriver finalement à ce bricolage que j'ai tout à l'heure qualifié d'ingénieux...

M. Bernard Accoyer.

Perfide !

M. Jean-Luc Préel.

Ingénieux, disais-je, mais qui n'en relève pas moins de l'usine à gaz ! En fait, votre principal tort est d'être revenus sur la loi de 1994. Celle-ci prévoyait que l'Etat, afin de ne pas pénaliser la protection sociale, devait intégralement compenser les exonérations qu'il décidait auquel cas la création d'un fonds aussi curieux que celui-là ne devait pas avoir lieu d'être.

Les sénateurs, partageant notre position, ont donc refusé de financer les 35 heures par le biais d'un fonds.

M. le rapporteur souhaite le réintroduire, et je le regrette.

En effet, la taxe sur le tabac devrait être réservée aux soins des malades victimes du tabac et à la prévention.

Rappelons que le produit des droits sur le tabac s'élève à 39,5 milliards ! Il en est de même pour les 5,6 milliards de droits sur les alcools.

Vous proposez, madame la secrétaire d'Etat, un nouvel impôt sur les bénéfices des entreprises, qui devrait rapporter 4,3 milliards en 2000 et, dans un proche avenir, d'après ce que nous indique clairement M. Recours à la page 15 de son rapport, 12,5 milliards. Toujours sur le dos des entreprises, madame la secrétaire d'Etat, mais vous persistez à dire qu'elles ne seront pas pénalisées ! La taxe sur les activités polluantes elle aussi sera affectée au financement des 35 heures. Toujours à la page 15, M. le rapporteur nous apprend que celle-ci rapportera 3,2 milliards en 2000 et 12,5 milliards très rapidement.

Le produit d'une taxe sur les activités polluantes devrait pourtant servir à améliorer la qualité de l'environnement, de l'eau et de l'air. En intervenant vous-même sur le sujet, monsieur le président, vous avez parlé d'un double je ne sais quoi... Je n'ai pas très bien compris...

M. Alfred Recours, rapporteur.

Moi, j'ai bien compris !

M. le président.

Le « double dividende », monsieur Préel. M. Recours l'a bien fort compris. Il parle même d'un triple dividende. Il va vous expliquer.

(Sourires.)

M. Jean-Luc Préel.

Je comprends pour ma part que les entreprises seront pénalisées et devront payer, et les agriculteurs également.

M. François Goulard.

Où est le dividende ?

M. Jean-Luc Préel.

Où est effectivement le dividende puisque tout cela sert à financer les 35 heures ? Par conséquent, nous n'améliorerons pas la qualité de l'air et de l'eau et l'environnement, et je pense, monsieur le président, que vous devriez trouver un autre système...

M. le président.

Je ne peux pas prendre part au débat, monsieur Préel. J'ai bien envie de vous répondre, mais je ne peux pas.

M. Jean-Luc Préel.

Nous verrons ça ultérieurement.

Le Gouvernement, par ailleurs, taxe les heures supplémentaires, pour 7 milliards.

Par conséquent, le financement de ce fonds ne nous paraît pas parfaitement satisfaisant, d'autant que, sur un coût final de 105 milliards prévus à terme, il reste 20 milliards à financer. Je serais très heureux de savoir comment ils seront financés car il me semble, mais je ne suis sans doute pas un grand expert, que les 35 heures ne sont pas aujourd'hui financées, pas plus d'ailleurs que la CMU, mais je n'en dirai pas plus, car, si l'on repartait sur la CMU, on en aurait encore pour quelque temps. Nous demandons simplement que le Gouvernement, lorsqu'il décide des exonérations de charges, les compense, comme cela a été prévu par la loi de 1994.

M. le président.

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

L'article 2 que le Gouvernement et le président de la commission veulent réintroduire est important pour le Gouvernement puisqu'il s'agit pour lui d'essayer de couvrir une partie du surcoût du travail imposé par la réduction généralisée du temps de travail.

Le Gouvernement cède à son habitude puisque trois nouveaux prélèvements sont prévus pour financer le fonds créé par cet article : une contribution sociale sur les bénéfices des entreprises, l'extension de la taxe générale sur les activités polluantes à certains produits, notamment les


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lessives, les assouplissants et les produits phytosanitaires, et une taxe sur les heures supplémentaires, dont une partie du coût sera assumée par les salariés eux-mêmes, ce qui est évidemment une atteinte fondamentale à l'égalité des droits des salariés.

Dans cet article 2, il convient de dénoncer une nouvelle mystification gouvernementale. En dépit du manège qui a consisté à faire croire le contraire, ce sont bien les finances sociales qui supporteront le financement des 35 heures, car détourner 5,6 milliards de recettes de la taxe sur les alcools du fonds de solidarité vieillesse pour les affecter au fonds pour les 35 heures constitue bien un prélèvement à la source sur les recettes de la sécurité sociale. Excusez la formule, madame la secrétaire d'Etat, mais le Gouvernement ment au Parlement et à la nation.

Ce mensonge est à l'origine du fait que certains partenaires sociaux vont probablement cesser de gérer les caisses. Vous êtes donc en train non seulement de menacer l'avenir de sécurité sociale, mais aussi de mettre à bas le paritarisme. C'est particulièrement préoccupant, surtout que c'est en vous appuyant sur un postulat évidemment faux que vous en arrivez à cette conséquence.

Vous partez, en effet, du principe que l'on pourrait travailler moins en gardant les mêmes salaires et la même protection sociale, laquelle n'est finalement que des salaires différés. Partant de là, vous voudriez faire croire que l'on pourrait financer les 35 heures sans que ce soient les salariés eux-mêmes qui en acquittent le poids par une modération des revenus, l'augmentation d'un certain nombre de cotisations et de charges, l'augmentation de la pression exercée sur eux. Par ailleurs, les mesures que vous adoptez, tant la TGAP que la taxe sur les salaires, toucheront les Français eux-mêmes.

Permettez-moi de souligner la mesure particulièrement inique qui consiste à financer la réduction du temps de travail en taxant les produits phytosanitaires - j'y reviendrai tout à l'heure -, c'est-à-dire en faisant payer les agriculteurs, puisqu'ils ne pourront pas répercuter ce coût sur les prix à la vente de leur production. Vous faites donc financer la réduction du temps de travail par la partie de la population française qui travaille le plus : plus de deux fois 35 heures par semaine, toutes les semaines de l'année. C'est insupportable. C'est pour cette raison que nous nous opposerons à l'article 2.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

L'article 2 est une manière de réécrire l'histoire, car nous savons très bien quelle est la genèse de ce financement extraordinaire que nous trouvons dans le projet de loi sur la sécurité sociale.

Le Gouvernement, effrayé, à juste titre, par les conséquences des 35 heures, a estimé que, sans certaines aides, les 35 heures ne seraient pas supportables pour un grand nombre d'entreprises françaises, en particulier celles qui emploient le plus de main-d'oeuvre. Il en a conclu qu'il fallait mettre en place certains allégements de charges pour compenser partiellement le surcoût entraîné par la réduction du temps de travail.

D'abord, on nous présente cette opération comme une volonté autonome du Gouvernement de baisser les charges sociales, nouveauté dans le discours de la majorité socialiste et du Gouvernement. Tout à coup, celui-ci devient un chaud partisan de la baisse des charges sociales ! Ensuite, on veut nous faire croire que les recettes affectées au financement de la baisse des charges sociales ont été choisies parce qu'elles étaient particulièrement adaptées. La réalité est tout autre. Quand on a plus de 100 milliards de francs à financer, somme qui n'est pas mince, on se heurte d'emblée, nous le savons bien, à une opposition résolue du ministre de l'économie et des finances. Il s'agissait d'un autre ministre lors de l'examen du texte en première lecture, il y a quelques semaines, certains événements ayant amené l'ancien titulaire du poste à retrouver sa liberté, sans doute pour vaquer à des occupations professionnelles lucratives.

Mme Hélène Mignon.

Oh !

M. François Goulard.

Toujours est-il qu'il y a eu un arbitrage à la suite d'un conflit entre le ministre des finances et le ministre de l'emploi et de la solidarité, et que l'on a retenu un certain nombre de recettes, pas plus adaptées les unes que les autres, dont certaines présentent des inconvénients extrêmement sérieux. Nous aurons l'occasion de l'évoquer, mais il n'y a strictement aucune logique à affecter des droits de consommation sur le tabac ou sur l'alcool au financement des 35 heures, ou un surcroît d'impôt sur les bénéfices. Il y a une logique inverse à ponctionner les revenus de ceux qui font des heures supplémentaires pour financer les 35 heures.

Le plus absurde, c'est l'affectation de la taxe générale sur les activités polluantes au financement des 35 heures.

Cela ne rime à rien et c'est totalement contre-productif, puisque le Gouvernement va souhaiter que son produit continue à augmenter pour répondre aux besoins de financement du plan d'allégement des charges sociales.

Cette taxe, qui était destinée à décroître au fur et à mesure des efforts des entreprises françaises pour réduire leurs activités les plus polluantes, devra augmenter pour financer les 35 heures.

Cette architecture est totalement improvisée. Vous avez dû la mettre en place dans la précipitation lorsqu'il vous a été impossible de ponctionner l'UNEDIC et les régimes sociaux. Vous le faites sur la sécurité sociale, parce que, là, vous avez tout pouvoir ! Ce bricolage, selon le terme employé par plusieurs orateurs aujourd'hui, est présenté comme une politique délibérée, établie de longue date et faisant partie intégrante du projet gouvernemental. La réalité est tout autre et je crois que vous n'abusez que vous-même et vos propres partisans en présentant ainsi les choses. Il nous appartient à nous de dire que vos motivations étaient tout autres.

M. le président.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint.

La droite, au Sénat, a supprimé l'article portant sur le financement du passage aux 35 heures et de la sécurité sociale. Cette attitude, relayée ici, en dit long sur sa conception du rôle des entreprises, en particulier dans le rôle actif qu'elles ont à jouer dans le financement de la protection sociale.

La droite sénatoriale a rejeté le financement d'une loi sociale d'envergure puisqu'il s'agit de la réduction du temps de travail. Elle ne veut pas d'une loi qui doit avoir comme objectif de permettre aux salariés de travailler moins, mieux, dans de meilleures conditions, sans pertes d'acquis durement obtenus, et qui doit surtout être créatrice d'emplois. Si toutes ces conditions ne sont pas encore pleinement acquises à l'issue de la première lecture, la seconde permettra d'y parvenir.

L'autre motif évoqué par la majorité sénatoriale est la surcharge des entreprises, mais la démonstration est faite que ce n'est pas le cas.

La taxe sur les bénéfices représente 4,3 milliards. Dans le même temps, il leur est offert 65 milliards d'exonérat ion, est supprimée la surtaxe sur les sociétés,


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12,5 milliards, auxquels il convient d'ajouter l'exonération de la taxe professionnelle, 2 milliards. Où est l'augmentation des charges et des prélèvements ? La commission propose de rétablir le texte voté en première lecture, contre lequel nous nous étions prononcés.

Nous nous étions félicités que l'UNEDIC ne soit plus mise à contribution. L'ensemble des partenaires sociaux y é taient opposés et le Gouvernement a fait preuve d'écoute. Cela se justifiait d'autant plus que 41% des chômeurs ne sont pas indemnisés ou très mal et que, comme l'a souligné Mme Aubry devant la Haute assemblée, le régime d'assurance chômage est excédentaire.

Néanmoins, nous renouvelons les réserves que nous avons émises en première lecture. Le mode de financement choisi encourage une logique d'exonération de charges qui n'a pas fait les preuves de son efficacité en termes d'emploi. Elle est même plutôt contestable, car elle tend à tirer les salariés vers le bas. De plus, la compensation de ces exonérations repose sur les ménages, les consommateurs et les salariés. Enfin, ce financement, loin de constituer une véritable réforme des cotisations patronales, n'assure en rien de façon pérenne les ressources de la sécurité sociale.

Nous souhaitons vivement que les entreprises participent davantage à ce financement. Il ne faut pas les dédouaner de ce rôle fondamental de solidarité et de justice. En ce sens, le prélèvement de 3,3 % sur leurs bénéfices est insuffisant au regard des moyens dont elles disposent. La contribution sur les bénéfices, faut-il le rappeler, ne représente que 0,23 % des recettes de la sécurité sociale.

Il nous semble plus juste de nous engager sur la voie d'un prélèvement sur les revenus financiers des entreprises - je sais bien que nous sommes en deuxième lecture mais, en première lecture, la réponse avait été la même pour répondre aux besoins qui se manifestent quotidiennement : problèmes dans les CAF ou les hôpitaux, faible niveau des remboursements, absence d'indexation sur l'évolution prévisionnelle des prix des prestations familiales ou des pensions de retraite. A cet égard, porter à 5 % la contribution sur les bénéfices permettrait de financer l'indexation des pensions et des retraites sur l'évolution prévisionnelle des prix. Ce serait un véritable geste de solidarité.

Si nous voulons, comme Mme Aubry l'a affirmé devant le Sénat, dégager des marges de manoeuvre pour prendre en compte les besoins nouveaux, ou encore « servir un meilleur remboursement dans le domaine de la dentisterie ou de l'optique ou une meilleure prise en charge des personnes handicapées » - et j'ajouterai à ces objectifs l'amélioration du taux moyen de remboursement -, il faut toucher aux revenus financiers. Une contribution de 3,3 % appliquée à ces revenus apporterait immédiatement 70 milliards.

Tout comme vous, nous souhaitons l'équilibre financier de la sécurité sociale pour assurer une protection efficace. Pour cela, il faut prendre l'argent là où il est, et assurer un financement pérenne, ce que ne fait toujours pas l'article 2 rétabli par la commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste.)

M. le président.

M. Recours, rapporteur, a présenté un amendement, no 6, ainsi rédigé :

« Rétablir l'article 2 dans le texte suivant :

« I. Il est inséré, au titre III du livre Ier du code de la sécurité sociale, un chapitre Ier quater ainsi rédigé :

« C HAPITRE Ier quater

« Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale

« Art. L.

131-8. Il est créé un fonds dont la mission est de compenser le coût, pour la sécurité sociale, des exonérations de cotisations patronales aux régimes de base de sécurité sociale mentionnées à l'article L.

131-9 et d'améliorer le financement de la sécurité sociale par la réforme des cotisations patronales.

« Ce fonds, dénommé "Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale", est un établissement public national à caractère administratif. Un décret en Conseil d'Etat fixe la composition du conseil d'administration, constitué de représentants de l'Etat, ainsi que la composition du conseil de surveillance, comprenant notamment des membres du Parlement et des représentants des organisations syndicales de salariés et des organisations d'employeurs les plus représentatives au plan national. Ce décret en Conseil d'Etat fixe également les conditions de fonctionnement et de gestion du fonds.

« Art. L.

131-9. Les dépenses du fonds sont constituées :

« 1o Par le versement, aux régimes de sécurité sociale concernés, des montants correspondant :

« a) A la prise en charge de l'allégement visé aux articles L.

241-13-1 et L. 711-13-1 du présent code et aux articles 1031, 1062-1 et 1157-1 du code rural au titre des dispositions correspondantes ;

« b) A la prise en charge de l'aide visée à l'article 3 de la loi no 98-461 du 13 juin 1998 d'orientation et d'incitation relative à la réduction du temps de travail ;

« c) A la prise en charge de la réduction visée aux articles L.

241-13 et L. 711-13 du présent code et aux articles 1031, 1062-1 et 1157-1 du code rural au titre des dispositions correspondantes ainsi qu'au IV de l'article 1er de la loi no 95-882 du 4 août 1995 relative à des mesures d'urgence pour l'emploi et la sécurité sociale.

« 2o Par les frais de gestion administrative du fonds.

« Les versements mentionnés aux a, b et c du 1o ci-dessus se substituent à la compensation par le budget de l'Etat prévue à l'article L.

131-7 du présent code sous réserve que cette compensation soit intégrale. Dans le cas contraire, les dispositions prévues à l'article L.

131-7 s'appliquent.

« Art. L.

131-10. Les recettes du fonds sont constituées par :

« 1o Une fraction du produit du droit de consommation visé à l'article 575 du code général des impôts, dans les conditions fixées par l'article 29 de la loi de finances pour 2000 (no ... du...)

;

« 2o La contribution sociale sur les bénéfices des sociétés visée aux articles 235 ter ZC et 1668 D du code général des impôts ;

« 3o La taxe générale sur les activités polluantes visée aux articles 266 sexies à 266 terdecies du code des douanes ;

« 4o Une fraction fixée à 47 % du produit du droit de consommation visé à l'article 403 du code général des impôts, à l'exception du produit de ce


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droit de consommation perçu dans les départements de la Corse et du prélèvement effectué au profit du budget annexe des prestations sociales agricoles selon les dispositions de l'article 1615 bis du même code ;

« 5o La contribution visée aux articles L.

212-5 du code du travail et 992-2 du code rural ;

« 6o Les produits non consommés de l'exercice précédent ;

« 7o Une contribution de l'Etat, dans les conditions fixées par la loi de finances.

« Les recettes et les dépenses du fonds doivent être équilibrées dans les conditions prévues par la loi de financement de la sécurité sociale. Le solde annuel des dépenses et des recettes du fonds doit être nul.

« Art. L.

131-11. Les relations financières entre le fonds et les organismes de protection sociale, d'une part, le fonds et l'Etat, d'autre part, font l'objet de conventions destinées notamment à garantir la neutralité en trésorerie des flux financiers pour les organismes de sécurité sociale. »

« II. Dans le 2o de l'article L.

135-3 du code de la sécurité sociale, le taux : "55 %" est remplacé par le taux : « 8 % ».

« III. Les dispositions du présent article entrent en vigueur au 1er janvier 2000. Les dispositions du 4o de l'article L.

131-10 du code de la sécurité sociale et du II du présent article sont applicables aux versements effectués au profit respectivement du fonds institué à l'article L.

131-8 du code de las écurité sociale et du fonds mentionné à l'article L.

135-1 du même code à compter du 1er janvier 2000.

« A titre transitoire et jusqu'à la date de création du fonds institué à l'article L.

131-8 du code de las écurité sociale, les produits mentionnés à l'article L.

131-10, à l'exception de ceux mentionnés au 5o , sont versés à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, et les produits mentionnés au 5o de l'article L.

131-10 sont centralisés par l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale. L'Agence centrale suit lesdits produits dans des comptes spécifiques ouverts à cet effet.

« IV. La perte de recettes pour l'Etat est compensée par une augmentation à due concurrence du droit de consommation visé à l'article 575 du code général des impôts. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Alfred Recours, rapporteur.

Cet amendement vise à rétablir l'essentiel du texte adopté en première lecture. Il supprime toutefois, par cohérence avec l'article 2B adopté conforme par l'Assemblée et le Sénat, le fait que les frais d'assiette et de recouvrement des impositions affectées au fonds de financement soient mis à la charge du fonds.

Je voudrais revenir sur deux ou trois points concernant le débat qui s'instaure sur les différents modes de financement du fonds d'allégement des charges patronales de sécurité sociale.

Dans les entreprises n'ayant pas fait l'objet d'un accord de passage aux trente-cinq heures, l'horaire légal sera également de trente-cinq heures et les heures travaillées audelà de la trente-cinquième seront payées en heures supplémentaires, sans aucune participation des salariés. Certains nous chantent maintenant que les pauvres salariés des entreprises qui ne sont pas passées aux trente-cinq heures seront pénalisés de 10 % sur leurs heures supplémentaires. C'est tout à fait inexact.

M. Bernard Accoyer et M. François Goulard.

Ah !

M. Alfred Recours, rapporteur.

L'entreprise sera taxée mais rien ne changera pour le salarié par rapport aux trente-neuf heures.

M. Bernard Accoyer.

Il y aura une différence par rapport au salarié de l'entreprise située de l'autre côté de la rue.

M. Alfred Recours, rapporteur.

C'est bien ce que j'avais compris. Vous ne protestez pas contre le fait que les salariés gagnent moins, ce qu'on aurait pu comprendre à entendre vos discours. Dans ce cas-là, et en attendant le passage aux trente-cinq heures de leur entreprise, ils ne perdent absolument rien.

M. François Goulard.

Et l'Etat y gagne !

M. Bernard Accoyer.

Mais ils gagnent moins que le salarié de l'entreprise située de l'autre côté de la rue !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Ils perdent le manque à gagner en cas d'heures supplémentaires pour les salariés des entreprises passées à la réduction du temps de travail.

Ce n'est pas du tout la même chose et ce n'est pas ce que vous avez dit.

M. Bernard Accoyer.

Si !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Par ailleurs, compte tenu du fait que notre président préside...

M. François Goulard.

Ce qui est relativement normal ! (Sourires.)

M. Alfred Recours, rapporteur.

... et qu'il ne peut donc pas intervenir dans le débat, je voudrais dire quelques mots de la TGAP. Ainsi que je l'ai souligné en première lecture, l'un des charmes de la majorité plurielle auquel les Français sont sensibles, c'est que chacune de ses composantes l'enrichit d'une manière ou d'une autre.

M. Jean-Luc Préel.

Madame Jacquaint, tous les espoirs sont permis ! (Sourires.)

M. Alfred Recours, rapporteur.

Sur cette question, l'apport de nos collègues Verts a été fondamental.

Je crois que certains d'entre vous finiront d'ailleurs par comprendre aussi le mécanisme.

M. François Goulard.

Oui, nous avons compris qu'il n'y avait pas de contrôle !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Le premier principe, sur lequel tout le monde est d'accord, c'est le principe du pollueur-payeur.

M. Jean-Luc Préel.

Nous sommes d'accord !

M. François Goulard.

Ce n'est pas le cas dans le texte !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Ce principe justifie l'existence même d'une TGAP.

M. Bernard Accoyer.

Ça, c'était l'année dernière !

M. Alfred Recours, rapporteur.

La loi de financement de la sécurité sociale ne procède donc qu'à une extension.

Le principe, lui, existe déjà.

M. François Goulard.

A ceci près, tout de même, qu'on augmente un peu la taxe.

M. Alfred Recours, rapporteur.

Deuxièmement, et c'est là qu'apparaît la difficulté...

M. François Goulard.

Conceptuelle !

M. Alfred Recours, rapporteur.

... de compréhension du dispositif qui est proposé, il n'est pas souhaitable - et je parle sous le contrôle de notre président de séance - que


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cette taxe puisse donner aux gens qui la paient le sentiment qu'ils sont désormais exonérés - et justement parce qu'ils la paient - de tout effort visant à améliorer l'environnement et à moins polluer. Et c'est là le sens, me semble-t-il, de la théorie qui a été défendue : si l'on ne veut pas qu'il en soit ainsi, alors, précisément, il ne faut pas que le produit de cette taxe...

M. Jean-Luc Préel.

... serve à améliorer l'environnement !

M. Alfred Recours, rapporteur.

... soit affecté à des actions qui pourraient être considérées par ceux qui la paient comme compensant, au fond, les atteintes qu'ils portent à l'environnement. Et...

M. François Goulard.

Mais cela n'était pas le cas l'an dernier ! La TGAP était une recette du budget général !

M. Bernard Accoyer.

C'est un détournement de plus !

M. Alfred Recours, rapporteur.

... c'est d'ailleurs la raison pour laquelle les recettes de l'ADEME ne sont plus issues de la TGAP,...

M. François Goulard.

C'était déjà le cas l'année dernière !

M. Alfred Recours, rapporteur.

... ce qui ne veut pas dire qu'elles diminuent. Il n'y a aucune diminution, il y a même augmentation des crédits pour l'amélioration de l'environnement. Pour autant, la TGAP n'alimente pas ces crédits, alors qu'il aurait été facile au Gouvernement - c'est une simple affaire d'écriture comptable - de donner au fonds d'allégement des charges sociales ce qu'il donne à l'ADEME, et d'abonder les recettes de celle-ci par la TGAP. Ce choix a été écarté.

M. François Goulard.

Mais il n'y a là rien de nouveau.

M. Alfred Recours, rapporteur.

Au total, si l'on examine l'ensemble des recettes, celles de l'Etat et celles de la sécurité sociale, on voit que le dispositif n'a pas été conç u dans le but de donner à l'Etat des recettes supplémentaires. Les choses sont claires de ce côté-là.

A partir du moment - et c'est là que l'on rejoint la question que j'ai posée en introduction - où cette recette n'est pas affectée au budget de l'Etat, à l'ADEME, par exemple,...

M. François Goulard.

Mais l'ADEME, ce n'est pas le budget de l'Etat, c'est un établissement public !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Au budget de l'Etat ou à l'ADEME - j'ai peut-être gommé le mot « ou », monsieur Goulard. A partir de là, disais-je, il faut bien que cette recette soit affectée quelque part.

M. François Goulard.

Ça oui, il ne faut pas la perdre ! (Rires sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la Républiquee t du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. Alfred Recours, rapporteur.

Voilà, je crois que notre collègue Goulard commence à comprendre. En effet, c'est bien le sens de la théorie du double dividende.

M. François Goulard.

Il vous faut prendre des cours particuliers auprès du professeur Cochet, monsieur le rapporteur !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Peut-être, en effet, que j'ai encore des choses à apprendre. Vous savez, au sein de la majorité plurielle, on peut encore progresser. Cette taxe doit être affectée, disais-je, à autre chose qu'à l'environnement. Et en l'occurrence, elle peut être affectée à quelque chose d'essentiel, à savoir l'allégement des charges patronales, qui va précisément permettre de doper encore l'emploi, ce que le Gouvernement ne cesse d'ailleurs de faire depuis le début de cette législature. Je vous rappelle au passage qu'au terme de l'année 2000, un million d'emplois auront été créés grâce à l'ensemble des élé ments qui concourent à l'emploi - la croissance, bien sûr, mais aussi toutes les mesures d'accompagnement prises depuis deux ans et demi par le Gouvernement.

Pour résumer, il faut, premièrement, que les pollueurs paient, et, deuxièmement, que le produit de cette taxe ne soit pas affecté à des actions qui, comme par manière de compensation, diminuent la pollution qu'ils ont accrue. Il faut choisir une autre affectation. Et quelle meilleure affectation que celle qui contribue à doper l'emploi ? La démonstration est ainsi faite qu'il ne s'agit pas du tout, comme vous le dites, de financer les 35 heures. Il s'agit bien de financer le fonds d'allégement des charges patronales, qui permettra aux entreprises de bénéficier de conditions plus favorables pour embaucher.

Le dernier point que je souhaitais aborder concerne la contribution sur les bénéfices. Celle-ci est bien destinée - je le dis à l'intention d'une autre composante de la majorité plurielle - à élargir les recettes de financement de la sécurité sociale. Elle s'applique à toutes les entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 50 millions et payant plus de 5 millions d'impôts. Ces conditions réduisent quand même de beaucoup le nombre des entreprises concernées.

C'est donc là l'amorce d'une participation des entreprises les plus capitalistiques au financement de la sécurité sociale, participation qui n'était pas assurée de manière pérenne jusqu'à présent. Grâce à cette loi de financement de la sécurité sociale, elle le sera. Ceux qui se disent favorables à un élargissement des ressources de la sécurité sociale devraient, me semble-t-il, tenir compte de cette avancée.

J'ajouterai peut-être une remarque sur les 20 milliards q ui manqueraient, prétendent certains, pour assurer l'équilibre.

M. Jean-Luc Préel.

Oui, c'est un point fort intéressant, en effet !

M. Bernard Accoyer.

Sur lequel Mme la secrétaire d'Etat nous éclairera peut-être !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Moi, en tout cas, je vais vous donner ma réponse. Elle figure d'ailleurs dans mon rapport écrit du premier tour. (Sourires.)

M. François Goulard.

Il y a ballotage !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Il y a ballotage partout.

M. Jean-Luc Préel.

Favorable ou pas ?

M. Alfred Recours, rapporteur.

Je me suis d'ailleurs demandé si le ballotage n'expliquait pas le nombre assez limité d'amendements que la commission a eu à examiner ce matin au titre de l'article 88.

Sur les 20 milliards, donc, il y a une explication très simple. En année de croisière - c'est-à-dire dans un ou deux ans - il y aura 20 milliards à trouver. Mais nous respectons le principe de l'annualité budgétaire.

M. François Goulard.

Autrement dit, on cherche ! Il faudrait faire une affiche : « Etat cherche 20 milliards ».


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M. Alfred Recours, rapporteur.

Pour l'année 2000 - puisque nous discutons bien de la loi de financement pour l'année 2000 -, il y a 63,9 milliards de dépenses à financer, et elles sont financées. Cela dit, d'autres évolutions auront lieu, et ne doutez pas, chers collègues,...

M. Jean-Luc Préel.

Que vous trouverez de nouvelles taxes !

M. Alfred Recours, rapporteur.

... que la croissance nous y aidera encore en 2000.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement no 6 ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Il ne peut qu'être favorable.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Après la brève intervention de M. le rapporteur et le développement explicatif de Mme la secrétaire d'Etat (Sourires) , je voudrais revenir sur ce sujet, qui n'est tout de même pas mince.

Monsieur le rapporteur a axé l'essentiel de son explication autour de la TGAP, montrant par là que c'est un problème auquel il est, qu'il le veuille ou non, sensible.

M. Alfred Recours, rapporteur.

C'est vous qui l'avez abordé !

M. François Goulard.

Je ne suis pas sûr qu'il ait écouté très attentivement les leçons du professeur qu'il a choisi pour se faire expliquer la théorie du double dividende, ou alors, c'est que la logique de l'Eure - je parle du département, mon cher collègue (Sourires) - n'est pas celle du Morbihan ! Qu'est-ce, en réalité, que ce double dividende dont vous parlez ? C'est, très simplement, une vérité et un truisme.

La vérité, c'est que, quand on augmente les prix par une taxation, il y a une réaction du marché : les producteurs, naturellement, s'adaptent à ces prix plus élevés. Et, du coup, on peut espérer une baisse de la pollution, parce que le produit polluant qui, par exemple, entre dans un processus de fabrication va devenir plus cher. C'est le premier dividende.

Le deuxième dividende, celui qu'attendent les promoteurs de la TGAP, relève d'un truisme. Ils nous disent : l'argent que nous allons tirer de cette taxe, eh bien figurez-vous qu'on peut l'utiliser ! Et on peut même l'utiliser à des choses utiles ! Ce qu'ils nous apprennent, c'est que les finances publiques, ce sont, d'une part, des recettes prélevées sur l'ensemble de nos concitoyens, et ce sont, d'autre part, des dépenses, et même des dépenses qui peuvent, mais oui, servir à quelque chose ! Quelle merveilleuse découverte que ce « deuxième dividende » ! Eh bien voyez-vous, au risque de vous surprendre, je vous dirai que je suis parfaitement d'accord avec cette analyse. Oui, il est normal de taxer les activités polluantes. Oui, il est assez normal, finalement, d'utiliser cet argent à des activités positives et utiles à l'ensemble de nos concitoyens.

M. Alfred Recours, rapporteur.

Eh oui ! Bravo ! vous avez compris, monsieur Goulard !

M. François Goulard.

Mais là où le bât blesse, mon cher collègue, c'est que, au-delà de ces vérités d'évidence, la TGAP serait un excellent impôt s'il était, d'abord, parfaitement calibré à son objet,...

M. Alfred Recours, rapporteur.

Ça, c'est un tout autre problème !

M. François Goulard.

... c'est-à-dire conçu, dans ses taux comme dans son assiette, pour être le plus efficace possible,...

M. Alfred Recours, rapporteur.

Là nous sommes d'accord. La question mérite d'être discutée sur le terrain.

M. François Goulard.

... pour traquer de la manière la plus précise possible toutes les activités polluantes.

Et cet impôt serait utile, deuxièmement, si son affectation au budget général de l'Etat n'était pas une incitation constante à en maintenir le rendement. Et c'est bien là que votre dispositif se montre particulièrement nocif. En effet, vous décidez d'affecter le produit de cette taxe à un fonds dont les dépenses ne vont faire que croître et embellir - vous nous avez d'ailleurs avoué à l'instant que vous étiez à la recherche de 20 milliards pour l'année prochaine. Vous pourriez peut-être, soit dit en passant, faire apparaître une annonce dans les journaux pour qu'on vous aide dans cette recherche.

M. Alfred Recours, rapporteur.

N'ayez aucune inquiétude à cet égard, monsieur Goulard !

M. François Goulard.

Quoi qu'il en soit, les dépenses financées par ce fonds étant appelées à croître, la recette qui l'alimente ne pourra que croître elle aussi. Voilà qui n'incitera pas les pollueurs à réduire leurs pollutions : ils sauront en effet que s'ils le font, les taux de l'imposition a ugmenteront afin que les recettes continuent à progresser ! Vos deux dividendes, auxquels vous tenez tant, seront donc plus qu'absorbés par l'effet pervers de l'affectation de la TGAP au financement des 35 heures. Bref, l'ensemble de ce dispositif de financement n'est pas la traduction d'une politique consciente, mais d'un arbitrage malheureux. D'une taxe utile, recommandée, et même imposée, par l'Europe, vous allez obtenir l'effet contraire de celui que vous recherchez. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

Avant que nous abordions l'examen des sous-amendements, pourriez-vous nous dire, madame la secrétaire d'Etat, si vous lèveriez le gage au cas où l'amendement no 6 serait adopté.

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Oui, monsieur le président.

M. le président.

Bien. Nous voilà rassurés.

M. Accoyer a présenté un sous-amendement, no 159, ainsi rédigé :

« I. - Dans le troisième alinéa du I de l'amendement no 6, substituer aux mots : "Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale", les mots : "Fonds de compensation partielle du surcoût du travail lié à la réduction du temps de travail".

« II. - En conséquence, procéder à la même substitution dans le reste de l'article. »

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Pour aller plus vite, vous me permettrez sans doute, monsieur le président, de défendre en même temps le sous-amendement no 158.

M. le président.

Mais certainement.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 24 NOVEMBRE 1999

M. Accoyer a présenté un sous-amendement, no 158, ainsi rédigé :

« Dans le premier alinéa du texte proposé pour l'article L. 131-8 du code de la sécurité sociale de l'amendement no 6, après le mot : "compenser", insérer le mot : "partiellement". »

Poursuivez, monsieur Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Le sous-amendement no 159 concerne le nom de baptême du nouveau fonds proposé par les socialistes, dont on sait qu'ils sont les spécialistes des créations de fonds divers et variés et d'impôts nouveaux. Leur nouvelle création, ils l'appellent « Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale ». Il est bien évident que cette appellation est une mystification.

D'abord, il n'y a pas véritablement de réforme. Il y a baisse des charges sur certaines catégories de bas salaires.

Ensuite, et surtout, les socialistes, subitement convertis à la baisse des charges après en avoir dit pis que pendre, manifestent ici, tout simplement, leur volonté d'assurer le financement des 35 heures. C'est d'ailleurs ce qui est écrit en toutes lettres dans le texte sur la réduction du temps de travail que l'Assemblée vient d'adopter.

Mais en réalité, ce fonds ne couvre pas, loin s'en faut, la totalité du surcoût du travail qu'engendre cette diminution du temps de travail. En effet, et c'est une autre mystification, un autre mensonge du Gouvernement, la baisse supplémentaire de charges introduite pour des salaires situés entre 1,3 fois le SMIC - la baisse de charges pour les salaires inférieurs existait depuis 1995 et 1,8 fois le SMIC, cette baisse de charges qui cette année va coûter 25 milliards de francs, ne couvre pas, loin s'en faut, la hausse du coût du travail dont auront à pâtir la plus grande partie des entreprises concernées par la réduction autoritaire et généralisée du temps de travail.

Il faut le répéter, la France sera non seulement la seule à réduire ainsi la durée du travail, mais elle sera aussi la seule à augmenter par là même le coût du travail, sans qu'augmente pour autant le salaire net global des salariés travaillant dans les entreprises localisées en France.

On connaît les conséquences de ces décisions. Elles seront pour l'essentiel supportées par les salariés, soumis à de nouvelles pressions sur le rythme de travail, sur la productivité, sur la modération salariale, ainsi que sur leur emploi - car, n'en doutons pas, un certain nombre d'activités seront délocalisées, alors que d'autres ne se développeront pas. Ils subiront des injustices, car le sort sera très différent selon qu'ils appartiennent à une entreprise qui pourra ou non appliquer la réduction autoritaire et bénéficier d'un certain nombre d'avantages - à cet égard, on peut faire confiance à la grande distribution, notamment, pour user de tous les moyens qui seront mis à sa disposition pour profiter encore davantage de notre système de financement et des aides à l'emploi.

Il y a bien là une confusion absolue entre les dépenses sociales et les dépenses pour l'emploi.

Ces sous-amendements soulignent donc l'iniquité que cherche à masquer l'appellation de ce nouveau fonds, ce qui est tout à fait inacceptable.

Mme Jacqueline Mathieu-Obadia.

Très bien !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M me Marie-Françoise Clergeau, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour la famille.

Avis défavorable.

M. Bernard Accoyer.

Et pourquoi ?

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 159.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 158.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

MM. Préel, Bur, Barrot, Foucher, B lessig, de Courson, Méhaignerie, Jégou, Morin, Mme Boisseau et M. Gengenwin ont présenté un sousamendement, no 137, ainsi rédigé :

« Dans l'amendement no 6, supprimer le texte proposé pour l'article L.

131-8 du code de la sécurité sociale. »

La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel.

Ce sous-amendement propose, comme vous l'avez remarqué, la suppression du texte proposé pour l'article L.

131-8 du code de la sécurité sociale.

Je reviendrai cependant sur la démonstration que vient de faire Bernard Accoyer. En effet, changer le titre du fonds que propose de créer l'amendement no 6, c'est en changer la philosophie.

M. Bernard Accoyer.

Oui, complètement !

M. Jean-Luc Préel.

Et j'ai été très étonné que Mme la

« rapporteuse », car c'est comme cela qu'il faut dire, d'après ce que j'ai compris,... (Sourires.)

M. François Goulard.

Moi, je préfère « rapportrice », mais enfin, bon !

M. Jean-Luc Préel.

... nous ait répondu : « Défavorable », sans autre explication. La présentation de Bernard Accoyer était pourtant extrêmement intéressante. La modification qu'il proposait aurait tout changé. Nous n'avons eu aucune explication, ni de Mme la rapporteuse, ni de Mme la secrétaire d'Etat. Je le regrette très profondément.

M. François Goulard.

Et c'est un homme navré qui vous parle ! (Sourires.)

M. Jean-Luc Préel.

Avec le sous-amendement no 137, nous vous proposons de supprimer l'article L.

131-8. En effet, cet article est celui qui crée le fonds dont la mission est de compenser le coût pour la sécurité sociale des exonérations de cotisations patronales. Nous avons expliqué tout à l'heure pourquoi nous étions défavorables à sa création, comme d'ailleurs à la composition de son c onseil d'administration, constitué, comme de bien entendu, de représentants de l'Etat. Il aurait été tellement plus simple d'en rester à la loi de 1994 ! Elle prévoyait tout simplement que quand l'Etat décide des exonérations de charges, il les compense. Pourquoi créer un fonds ?

M. Bernard Accoyer.

C'est de la poudre aux yeux !

M. Jean-Luc Préel.

Il y a là quelque chose que je n'ai pas encore compris, et je souhaite obtenir une réponse.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ? Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteur pour la famille.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Défavorable également.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 24 NOVEMBRE 1999

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 137.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Accoyer a présenté un sousamendement, no 157, ainsi rédigé :

« A l'amendement no 6, dans la deuxième phrase du dernier alinéa du texte proposé pour l'article L. 131-8 du code de la sécurité sociale, après le m ot : "comprenant", supprimer le mot : "notamment". »

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

J'aimerais que Mme le rapporteur nous donne des explications un peu plus substantielles lorsqu'elle indique l'avis de la commission.

L'amendement no 157 précise la composition du nouveau conseil de surveillance qui a été créé pour surveiller le fonds dont a excellemment parlé Jean-Luc Préel il y a quelques instants, et sur l'existence duquel nous n'avons pas obtenu de réponse.

Je propose de supprimer l'adverbe « notamment », qui est un peu vexatoire pour le Parlement,...

M. François Goulard.

C'est délibéré !

M. Bernard Accoyer.

... le conseil de surveillance devant comprendre « notamment » des parlementaires.

M. François Goulard.

Si on ne trouve pas mieux !

M. Bernard Accoyer.

Nous pensons quant à nous que les parlementaires ont une légitimité pour siéger dans une telle instance aux côtés des partenaires sociaux, qui ne figurent d'ailleurs pas au sein du conseil d'administration.

C'est dire le peu de cas que fait le Gouvernement des représentants légitimes des salariés et des citoyens.

M. Jean-Luc Préel.

Du peuple !

M. Bernard Accoyer.

Je ne doute pas que j'obtiendrai une réponse précise de Mme la rapporteur ou de Mme la secrétaire d'Etat, et je reviendrai sur l'amendement Jaffré, que l'Assemblée a adopté récemment. On savait déjà que le Gouvernement légiférait sur le mode symbolique, mais il légifère aussi sur le mode émotionnel. Et comme il fallait donner certain signaux, cet amendement a été adopté.

Mais nous sommes saisis - et vous le serez aussi, chers collègues de la majorité - par des salariés qui sont licenciés car les dispositions de la loi sur la réduction du temps de travail contraignent les entreprises à se séparer de certains de leurs personnels, en particulier dans les grands groupes internationaux. Il s'agit parfois de salariés dont le salaire est raisonnable et qui obtiennent des indemnités de licenciement supérieures à ce que la loi prévoit. Ils seront désormais assujettis aux prélèvements sociaux. Je ne crois pas que cela ait été voulu par la majorité, mais sa façon de légiférer entraîne des effets particulièrement dommageables.

Il m'a donc semblé utile de revenir sur cet amendement, qui a été adopté par le Sénat, mais, pour l'heure, je propose de donner toute leur place aux parlementaires dans l'instance qui a été créée à l'article 2.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ? M. Alfred Recours, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Défavorable également.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 157.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Sur l'amendement no 6, MM. Rossi, Debré, Douste-Blazy et les membres des groupes Démocratie libérale et Indépendants, du Rassemblement pour la République et de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance ont présenté un sous-amendement, no 110, ainsi rédigé :

« I. - Supprimer le troisième alinéa (2o ) du texte proposé pour l'article L. 131-10 du code de la sécurité sociale.

« II. - Compléter cet article par le paragraphe suivant :

« Les pertes éventuelles de recettes pour la sécurité sociale sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts affectée aux organismes de sécurité sociale. »

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Il s'agit d'un sous-amendement déposé en commun par les trois groupes de l'opposition.

Nous proposons de supprimer la majoration de l'impôt sur les bénéfices prévue à l'article 2 adopté en première lecture. Je ne doute pas que j'obtiendrai, comme mon collègue Accoyer à l'instant et comme mon collègue P réel, des réponses circonstanciées, argumentées et construites, de la part aussi bien de Mme le rapporteur que de Mme la ministre...

Si nous sommes opposés à cette augmentation de l'impôt sur les sociétés, joliment baptisée « contribution sociale », c'est tout simplement parce que nous pensons que cette redistribution, qui va atteindre le montant considérable de 110 milliards de francs en régime permanent, présente de multiples inconvénients.

Ceux-ci tiennent à l'inégalité qui va être engendrée entre les différentes catégories d'entreprises. Certaines bénéficieront d'allégements qui compenseront partiellement le coût des 35 heures ; d'autres, parce qu'elles font des bénéfices, parce que leurs activités sont, avec un certain arbitraire, jugées polluantes, ou encore parce qu'elles ne remplissent pas les critères, dans certains cas trop restrictifs, qui conditionnent le bénéfice des allégements de charges sociales, seront placées dans des conditions de concurrence parfaitement déloyales.

Ce dispositif, massivement introduit dans notre économie, entraînera des inconvénients majeurs et se traduira toujours par des disparitions d'entreprises. Nous condamnons par conséquent globalement la volonté de redistribuer massivement des prélèvements, d'un côté, et d'accorder des réductions de cotisations, de l'autre, alors même que les prélèvements obligatoires, en particulier ceux qui pèsent sur les entreprises, ont déjà atteint un niveau extrêmement élevé et contribuent à fausser très largement le jeu de l'économie.

S'agissant de la majoration de l'impôt sur les entreprises, seules celles qui font un bénéfice supérieur à 5 millions de francs sont concernées, mais cette taxation ne va pas toucher exclusivement, contrairement à ce que vous prétendez, de très grandes entreprises, elle va également toucher des entreprises moyennes, qui seront pénalisées par rapport à leurs concurrentes, françaises ou étrangères.

C'est pourquoi nous proposons la suppression pure et simple de cette majoration, en gageant notre proposition de suppression de recettes par une majoration très classique des articles 575 et 575 A du code général des impôts, dont je rappelle que le produit ira pour 85,5 % au fonds de financement dont nous parlons.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur ce sous-amendement ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 24 NOVEMBRE 1999

M. Alfred Recours, rapporteur.

Je remercie notre collègue Goulard d'avoir souligné, car j'avais oublié de le faire, que, désormais, 85,5 % du produit des droits de consommation sur le tabac visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts bénéficieront à la protection sociale et à l'allégement des charges.

M. François Goulard.

Non : pas à la protection sociale !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Si : à la protection sociale et à l'allégement des charges, donc à l'emploi.

M. Bernard Accoyer.

Il ne s'agit pas de dépenses sociales mais de dépenses d'Etat.

M. Alfred Recours, rapporteur.

Mais l'amélioration de l'emploi permet ensuite d'accroître les recettes de la sécurité sociale.

M. François Goulard.

Tout est dans tout et réciproquement !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Tout à fait ! Nous voyons d'ailleurs déjà que les dispositions que nous avons prises ont permis de créer massivement des emplois dans le secteur marchand et, par conséquent, d'améliorer les recettes de la sécurité sociale.

Je ferai deux remarques.

L'exposé des motifs de ce sous-amendement affirme que l'augmentation en question est la simple pérennisation de la contribution provisoire créée en 1997. Notre collègue Goulard a pourtant précisé que seules les entreprises payant plus de 5 millions de francs tomberaient sous le coup de cette imposition, alors que ce n'était pas le cas jusqu'à présent ; on ne peut donc parler d'une pérennisation.

En second lieu, je ne sache pas que, depuis 1997, cette disposition ait eu un effet négatif sur la croissance et sur l'emploi, puisque ceux-ci se sont améliorés de manière significative.

Je ne développerai pas davantage, car nous avons déjà longuement débattu de ce point, et je conclus bien entendu au rejet de ce sous-amendement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Défavorable également.

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 110.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Sur l'amendement no 6, MM. Debré, Douste-Blazy, Rossi et les membres des groupes du Rassemblement pour la République, de l'Union pour la démocratie française-Alliance et Démocratie libérale et Indépendants ont présenté un sous-amendement, no 111, ainsi rédigé :

« I. - Supprimer le quatrième alinéa (3o ) du texte proposé pour l'article L. 131-10 du code de la sécurité sociale.

« II. - Compléter cet article par le paragraphe suivant :

« Les pertes éventuelles de recettes pour la sécurité sociale sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts affectée aux organismes de sécurité sociale. »

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Ce sous-amendement propose de supprimer l'extension de la taxe générale sur les activités polluantes visant à financer une partie du surcoût lié aux 35 heures. Le rapporteur ne nous a pas convaincus. Peutêtre eût-il été intéressant que M. le secrétaire d'Etat à l'industrie reste quelques instants de plus dans l'hémicycle pour éclairer l'Assemblée sur ces mécanismes purement fiscaux. Alors que nous examinons une loi sur la sécurité sociale et ses différentes branches, maladie, famille et vieillesse, nous ne sommes pas éclairés sur les questions que nous soulevons.

Cette taxe est en réalité détournée de son objet de manière tout à fait stupéfiante et, monsieur le rapporteur, s'il y a un surplus de recettes, il pourrait être affecté au fonds de réserve de la retraite par répartition qui, vous le savez, reste désespérément vide. Un vide impressionnant, vertigineux,...

M. Alfred Recours, rapporteur.

Vingt-deux milliards !

M. Bernard Accoyer.

... malgré les allégations mensongères qui voudraient nous faire croire qu'il y a quelque chose dans ce fonds, tout comme sont mensongères les allégations qui voudraient nous faire croire que le Gouvernement a fait quelque chose pour garantir l'avenir des retraites, prévenir la réduction de leur pouvoir d'achat - alors qu'il a commencé à les réduire - et pour prévenir un conflit intergénérations qui sera, n'en doutons pas, particulièrement préjudiciable. La responsabilité du Gouvernement en ce domaine est immense et la TGAP vient brouiller un peu plus les cartes. Elle est inique et fera payer aux consommateurs, notamment aux ménagères, du fait de l'augmentation du coût des lessives et des assouplissants, un certain nombre de charges nouvelles ; elle imposera également des charges nouvelles aux paysans et aux agriculteurs en augmentant le prix des produits phytosanitaires. C'est particulièrement préoccupant et Mme le rapporteur, que je vois rire, aurait mieux fait de lire attentivement le contenu de ce texte qui pénalise spécifiquement les entreprises situées en France, par le biais de la TGAP mais ménage - et c'est probablement le résultat d'un lobbying habile - les intérêts des grands groupes multinationaux.

Il est vrai que le Gouvernement a l'habitude de procéder ainsi : tout est fait pour cette catégorie d'industries, d'activités et de distributeurs. Nous ne le voulons pas et c'est pourquoi nous avons déposé ce sous-amendement.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Alfred Recours, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Défavorable également.

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 111.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Sur l'amendement no 6, MM. Debré, Douste-Blazy, Rossi et les membres des groupes du Rassemblement pour la République, de l'Union pour la démocratie française et Démocratie libérale et Indépendants, ont présenté un sous-amendement, no 112, ainsi rédigé :

« I. - Supprimer le cinquième alinéa (4o ) du texte proposé pour l'article L.

131-10 du code de la sécurité sociale.

« II. - Compléter cet article par le paragraphe suivant :

« Les pertes éventuelles de recettes pour la sécurité sociale sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts affectée aux organismes de sécurité sociale. »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 24 NOVEMBRE 1999

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Le sous-amendement est défendu.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Alfred Recours, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Défavorable également.

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 112.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Sur l'amendement no 6, je suis saisi de deux sous-amendements, nos 155 et 113, pouvant être soumis à une discussion commune.

Le sous-amendement no 155, présenté par M. Accoyer, est ainsi rédigé :

« I. - Dans le cinquième alinéa du texte proposé pour l'article L. 131-10 du code de la sécurité sociale, substituer au taux : "47 %" le taux "10 %".

« II. - Compléter cet article par le paragraphe suivant :

« Les pertes de recettes sont compensées par la création, à due concurrence, d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

Le sous-amendement no 113, présenté par MM. Rossi, Debré et Douste-Blazy et les membres des groupes D émocratie libérale et Indépendants, Rassemblement pour la République et de l'Union pour la démocratie française-Alliance, est ainsi rédigé :

« I. - Dans le cinquième alinéa (4o ) du texte proposé pour l'article L. 131-10 du code de la sécurité sociale, substituer au taux : "47 %" le taux de "20 %".

« II. - Compléter cet article par le paragraphe suivant :

« Les pertes éventuelles de recettes pour la sécurité sociale sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts affectée aux organisme de sécurité. »

La parole est à M. François Goulard, pour soutenir ces deux sous-amendements.

M. François Goulard.

Ces sous-amendements pourraient entraîner une remarque désobligeante du rapporteur - mais je sais que ce n'est pas dans sa manière -, qui pourrait nous faire observer que nous diminuons la part des droits de consommation sur les alcools pour, en gage, augmenter ceux sur le tabac, mais, comme il le sait, c'est un vieil usage parlementaire de solliciter fréquemment les articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Nous voulons, par ces deux sous-amendements, dénoncer le caractère parfaitement arbitraire de l'affectation de 47 % dans un cas, de 85,5 % dans l'autre, de droits de consommation au financement des 35 heures. On voit bien qu'il s'agit d'un dispositif totalement improvisé, sans aucune logique. C'est cela que nous dénonçons, en rappelant qu'il s'agit, dans les deux cas, de taxes sur les ménages qui frappent les consommateurs pour financer les 35 heures.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Alfred Recours, rapporteur.

Nous voyons effectivement disparaître une partie des recettes du fonds de solidarité vieillesse,...

M. François Goulard.

Il l'avoue !

M. Alfred Recours, rapporteur.

... mais, dans le même temps, parce que nous avons effectué une grande opération de clarification, nous réabondons ce fonds pour un montant identique en prélevant 49 % du prélèvement social de 2 % sur les revenus financiers.

M. Jean-Luc Préel.

C'est vraiment une grande clarification.

M. François Goulard.

C'est un détournement !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Pas du tout ! Chaque fois que nous prévoyons une mesure, il y a le financement correspondant. Pour l'instant, nous parlons de l'alimentation du FSV et je répète devant l'Assemblée que, malgré tout ce qui a été dit depuis le début du débat, il n'y a pas une diminution des recettes de ce fonds mais substitution d'une recette à une autre, ce qui n'est pas du tout la même chose.

M. Bernard Accoyer.

Il y a une diminution des ressources sociales !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Pourquoi procédonsnous ainsi ? Parce que chacun sait que, grâce à la croissance, aux emplois nouveaux, à la politique générale menée par le Gouvernement sur le plan économique, ...

M. François Goulard.

Grâce à Dieu !

M. Alfred Recours, rapporteur.

... le prélèvement social de 2 % est une recette beaucoup plus dynamique - Dieu merci - que les droits sur les alcools.

Cette substitution garantit donc au FSV de meilleures recettes dans l'avenir. On voit mal dans ces conditions pourquoi il faudrait adopter ces sous-amendements qui pénaliseraient gravement le fonds de solidarité vieillesse.

M. Bernard Accoyer.

Vous ne croyez pas vous-même à ce que vous dites !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement sur les sous-amendements en discussion ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Rejet !

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 155.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 113.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Sur l'amendement no 6, MM. DousteBlazy, Rossi, Debré et les membres des groupes de l'Union pour la démocratie française-Alliance, Démocratie libérale et Indépendants et du groupe du Rassemblement pour la République ont présenté un sous-amendement, no 114, ainsi rédigé :

« I. Supprimer le sixième alinéa (5o ) du texte proposé pour l'article L.

131-10 du code de la sécurité sociale.

« II. Compléter cet article par le paragraphe suivant :

« Les pertes éventuelles de recettes pour la sécurité sociale sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts affectée aux organismes de sécurité sociale. »

La parole est à M. Jean-Luc Préel.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 24 NOVEMBRE 1999

M. Jean-Luc Préel.

Nous avons vu les différents modes de financement du fonds, les prélèvements divers, les taxes les plus variables, et nous arrivons là à un prélèvement qui nous paraît tout à fait anormal,...

M. Bernard Accoyer.

Inique !

M. Jean-Luc Préel.

... car le Gouvernement affecte au fonds de réforme des cotisations patronales, qui vise à diminuer les cotisations patronales de sécurité sociale, la contribution sur les heures supplémentaires, prélevée sur la travail des salariés dont l'entreprise n'est pas passée aux 35 heures, et qui doit rapporter 7 milliards.

Cette contribution de 10 % décidée dans le projet de loi sur la réduction du temps de travail aboutit à une rupture d'égalité inadmissible entre les salariés.

Les entreprises et leurs salariés seront en difficulté lorsque le carnet de commandes sera important, surtout les petites entreprises, dont les commandes sont soumises à des cycles saisonniers que nous connaissons tous. Il est tout à fait anormal de prélever une taxe sur les heures supplémentaires, qui sont souvent indispensables aux entreprises pour honorer leurs commandes.

Par conséquent, nous ne comprenons pas que cette taxe soit par ailleurs affectée au fonds de financement des 35 heures, lui-même intégré au financement de la sécurité sociale. Comme nous sommes opposés au fonds, vous l'aurez sans doute compris, nous sommes opposés à cette taxe supplémentaire.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Alfred Recours, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 114.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Mme Fraysse, Mme Jacquaint, M. Gremetz et les membres du groupe communiste ont présenté un sous-amendement, no 60, ainsi libellé :

« Dans l'amendement no 6, rédiger ainsi le 5o du texte proposé pour l'article L.

131-10 du code de la sécurité sociale :

« 5o Une contribution assise sur leur montant net versée par les sociétés, les entreprises et autres personnes morales, assujetties en France à la déclaration de l'impôt sur les sociétés, au titre de l'article 206 du code général des impôts. Des revenus de capitaux mobiliers, des plus-values, gains en capital et profits réalisés sur les opérations menées sur titres, les opérations menées sur les marchés réglementés et sur les marchés à terme d'instruments financiers et de marchandises, ainsi que sur les marchés d'options négociables.

« Pour les sociétés placées sous le régime de l'article 223 A du code général des impôts, la contribution est due par la société mère.

« Le taux de cette contribution sociale sur les revenus financiers des entreprises est fixé à 10 %. La contribution sociale est contrôlée et recouvrée selon les mêmes règles que les cotisations sociales. »

La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint.

Notre sous-amendement tend à supprimer la mise à contribution des organismes sociaux et le prélèvement sur les heures supplémentaires effectuées par les salariés pour financer le dispositif d'exonération de charges, en créant une contribution sociale sur les revenus financiers des entreprises.

Celle-ci permettrait d'accroître les ressources de la sécurité sociale pour répondre plus largement aux besoins des assurés sociaux, mais également de pénaliser, dans un souci de justice et d'efficacité, les placements financiers effectués au détriment de l'investissement productif et de la création d'emplois.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Alfred Recours, rapporteur.

Le sous-amendement de Mme Jacquaint avait peut-être un sens fort en première lecture. Mais les dispositions proposées par le Gouvernement et adoptées en première lecture règlent le problème, d'une certaine façon, puisque les organismes sociaux ne sont plus mis à contribution.

D'autre part, la contribution sociale sur les bénéfices s'applique aux entreprises les plus capitalistiques, donc à celles qui effectuent le plus de placements financiers et en touchent le produit. Par conséquent, à mes yeux, son institution satisfait aussi en partie - et seulement en partie, je le reconnais - votre sous-amendement. Je rappelle que nous ne soumettons pas à la CSB les éventuels bénéfices des entreprises réalisant un chiffre d'affaires de moins de 50 millions, dans la logique que nous avons suivie jusqu'ici pour favoriser l'emploi non qualifié.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Le rapporteur a très bien expliqué les raisons pour lesquelles nous ne pouvons pas accepter ce sousamendement. Il est nécessaire de maintenir l'équilibre fixé et de garantir la stabilité de l'assiette des contributions.

Avis défavorable.

Je mets aux voix le sous-amendement no

60. (Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

MM. Rossi, Douste-Blazy, Debré et les membres des groupes Démocratie libérale et Indépendants, Union pour la démocratie française-Alliance et Rassemblement pour la République ont présenté un sousamendement, no 115, ainsi rédigé :

« Supprimer le II de l'amendement no

6. » La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

M. le rapporteur nous jure ses grands dieux, comme Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité l'avait fait en première lecture, qu'aucun prélèvement n'est opéré sur la sécurité sociale. Malheureusement pour lui, le temps qui a passé nous a permis de vérifier ce que nous affirmions alors : c'est clair, le manque à gagner, pour la sécurité sociale dans son ensemble, quelle que soit la présentation qui en est faite, aussi floue soit-elle, représente 5,6 milliards de francs.

M. Bernard Accoyer.

C'est évident !

M. François Goulard.

Comment voulez-vous qu'il en soit autrement, puisque le Gouvernement, dans un premier temps, avait prévu de ponctionner l'UNEDIC et la sécurité sociale ? Il a modifié à la marge un certain nombre d'autres ressources mais il manque toujours 5,6 milliards. Nous continuons donc à affirmer, sans courir aucun risque d'être démentis, que le financement des 35 heures nécessite une ponction sur la sécurité sociale de 5,6 milliards de francs.

M. Bernard Accoyer.

C'est clair, c'est net !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 24 NOVEMBRE 1999

M. Alfred Recours, rapporteur.

Vous prétendez qu'il manque 5,6 milliards. Vous auriez raison s'il n'était pas prévu d'affecter 20 milliards au fonds de réserve pour les retraites. Si ces 5,6 milliards vous gênent, proposez donc d'amputer de cette somme l'enveloppe versée au fonds de réserve pour les retraites ! Il ne resterait plus que 14,4 milliards de francs.

M. François Goulard.

Voilà ! Il le reconnaît enfin !

M. Bernard Accoyer.

C'est un aveu.

M. Alfred Recours, rapporteur.

Pas du tout ! C'est au contraire la preuve que nous ne prélevons pas 5,6 milliards sur un fonds quelconque pour alimenter le financement de la réduction du temps de travail.

Manifestement, l'excédent global prévisionnel de la CNAV atteint 20 milliards de francs ; si l'on retranche les 3 milliards de la caisse des dépôts, il reste 17 milliards, qui permettront d'abonder le fonds de réserve pour les retraites. Il ne s'agit donc pas d'une ponction de 5,6 milliards de francs sur les caisses de la protection sociale, mais, grâce à l'ensemble des dispositifs de l'assurance vieillesse, de l'utilisation d'un excédent de 20 milliards de francs, dont, en dernière analyse, 5,6 milliards peuvent provenir.

Nous avons déjà essayé de vous l'expliquer en première lecture, mais vous n'aviez pas semblé tout comprendre.

M. François Goulard.

C'est comme le double dividende, il faut faire un effort pour comprendre ! (Sourires.)

M. Alfred Recours, rapporteur.

Les 5,6 milliards sont contrebalancés par 20 milliards de francs qui vont bien à la protection sociale dans son ensemble. Par conséquent, nous disposons d'un surfinancement de 14,4 milliards de francs pour abonder le fonds de réserve pour les retraites, en plus des 5,6 milliards de francs dont vous parliez.

Ainsi, on arrive bien à un total de 20 milliards de francs, dont les Français pourront bénéficier dans l'avenir.

On ne résout pas les problèmes relatifs aux retraites futures des Français par des paroles, mais par des actes et une volonté opiniâtre d'abonder chaque année le fonds de réserve pour les retraites de la somme la plus élévée possible. En fait, s'il était adopté, votre sous-amendement appauvrirait les réserves que nous voulons accumuler pour les futurs retraités.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Rejet !

M. François Goulard.

Les rejets de Mme la secrétaire d'Etat sont pires que ceux de La Hague. (Rires.)

C'est inquiétant. Il faut diligenter une étude spéciale...

M. le président.

En général, le Gouvernement émet un

« avis défavorable » ; le rejet, c'est le résultat du vote de l'Assemblée.

M. François Goulard.

Mme la secrétaire d'Etat fait de la provocation.

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 115.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Accoyer a présenté un sousamendement, no 156, ainsi rédigé :

« Compléter le II de l'amendement no 6 par les mots : "après consultation du conseil d'administration et du comité de surveillance mentionnés à l'article L. 135-1". »

La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer.

Les réponses de Mme la secrétaire d'Etat à l'opposition sont lapidaires. Je m'étonne de l'inégalité de traitement notable entre les députés de l'opposition et les quelques membres du groupe communiste,...

Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Cela vous rend malheureux ?

M. Bernard Accoyer.

... auxquels elle accorde bien de l'attention, moult sourires et de longues phrases, chaque fois qu'elle refuse un de leurs amendements. (Exclamations sur les bancs du groupe communiste.) Pour notre part, nous n'avons droit qu'à un bref rejet, qui s'apparente presque à un borborygme. (Rires sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

J e m'adresserai maintenant au rapporteur Alfred Recours : sincèrement, vous ne savez pas mentir.

M. Jean-Luc Préel.

C'est une qualité !

M. Bernard Accoyer.

Votre démonstration, sans cesse réitérée, tend à nous faire croire que le passage aux 35 heures ne serait pas financé par les comptes sociaux.

Mais vous avez beau y mettre de la ténacité, vous ne convainquez personne, et vous-même savez très bien que ce n'est pas vrai.

Si les circonstances étaient différentes, si le Gouvernement était un peu moins dogmatique, le texte sur les 35 heures, qui aura force d'obligation dans cinq semaines, n'aurait jamais vu le jour. Et que se passerait-il aujourd'hui ?

M. Alfred Recours, rapporteur.

Je vous le dirai dans un instant.

M. Bernard Accoyer.

Le fonds de solidarité vieillesse serait tout simplement abondé de 5,6 milliards de francs supplémentaires, issus du produit de la taxe sur les alcools. Et les éventuels excédents du fonds de solidarité vieillesse abonderaient eux-mêmes le fonds de réserve de la retraite par répartition.

Mme Jacqueline Mathieu-Obadia.

C'est exact !

M. Bernard Accoyer.

Ce ne serait pas inutile, car à cette heure, il n'y a toujours rien dedans.

Monsieur le rapporteur, vous nous dites, un brin pervers - mais ce masque vous sied fort mal...

M. François Goulard.

Son âme est bonne !

M. Bernard Accoyer.

... et vous n'arrivez pas à nous convaincre -, que les 5,6 milliards de francs proviennent certes du produit de la taxe sur les alcools pour aller au financement des 35 heures, mais que ce n'est pas grave.

Pourquoi ? Parce que les prélèvements sur l'épargne, qui jusqu'à présent allaient à la branche vieillesse et à la branche famille, sont délestés et que 5,6 milliards, précisément, sont détournés vers le fonds de solidarité vieillesse.

Cela s'appelle tout bonnement un détournement de fonds, monsieur le rapporteur. Et comme vous n'êtes pas c outumier de ces malversations, vous ne pouvez convaincre personne. Les 35 heures sont bien financées par les fonds de la sécurité sociale.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 24 NOVEMBRE 1999

M. François Goulard.

Très bien !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Alfred Recours, rapporteur.

On peut faire toutes les démonstrations que l'on veut. Je constate quand même qu'il est prévu de verser 20 milliards sur le fonds de réserve pour les retraites.

M. François Goulard.

Il est prévu !...

M. Jean-Luc Préel.

Combien seront réellement affectés ?

M. Bernard Accoyer.

Combien y a-t-il dans le fonds pour le moment ?

Mme Jacqueline Mathieu-Obadia.

Rien !

Mme Muguette Jacquaint.

Vous n'avez qu'à organiser une collecte !

M. François Goulard.

Nous donnerons un franc chacun !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Ecoutez, il est de notre responsabilité de voter des textes. Dans un deuxième temps, le Gouvernement prend des engagements. Dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999, nous avons effectivement prévu de verser 2 milliards de francs.

S i cette somme n'était pas versée avant le 31 décembre 1999, je reconnaîtrais volontiers que la loi de financement ne serait pas respectée. Mais la loi de financement ne prévoyait pas que le versement intervienne avant le 31 décembre 1999.

M. François Goulard.

Le Gouvernement peut garder les 2 milliards ! De toute façon, il n'a plus rien !

M. Alfred Recours, rapporteur.

En 2000, si nous votons ces dispositions, le Gouvernement devra organiser le versement des 20 milliards de francs - ou plutôt des 17 milliards, puisque 3 milliards viendront de la Caisse des dépôts...

M. Jean-Luc Préel.

Il aura un an pour le faire ?

M. Alfred Recours, rapporteur.

Il pourra éventuellement attendre un an pour le faire. Mes chers collègues, vous auriez bien aimé, il y a qelques années, pouvoir abonder un fonds de réserve des retraites de 20 milliards de francs sur un seul exercice.

Mme Jacqueline Mathieu-Obadia.

La croissance n'a pas toujours été au rendez-vous !

M. Bernard Accoyer.

Je vous signale qu'en 1993, nous avons réformé les retraites. Vous, vous n'avez rien fait !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Vous en aviez peut-être l'intention, mais vous ne l'avez pas fait.

M. Bernard Accoyer.

Sans la réforme des retraites, le déficit atteindrait 10 milliards de francs supplémentaires chaque année !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Aujourd'hui, le fonds existe bien. Il sera abondé en 1999 et 2000 à hauteur des montants prévus.

Il est vrai que nous avons rencontré quelques difficultés avec le Gouvernement, au cours de l'élaboration de la loi, et que les propositions de financement ont été modifiées pratiquement en pleine première lecture. Je comprends donc très bien vos propos. Toutefois, aujourd'hui, les choses sont claires.

A l'époque, chers collègues, j'avais même proposé d'abonder la branche assurance maladie par le produit d'une taxation particulière sur les accidents du travail. Je suppose qe vous vous souvenez de cette proposition.

M. Jean-Luc Préel.

Eh oui ! Elle n'était pas bien raisonnable.

M. François Goulard.

Proposition heureusement retirée !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Je l'ai retirée sans aucun complexe, mais j'y reviendrai,...

M. Jean-Luc Préel.

Oh !

M. Alfred Recours, rapporteur.

... parce que de graves problèmes relatifs aux accidents du travail ne sont pas encore réglés. Cependant, dans la mesure où les recettes de la sécurité sociale permettaient d'abonder largement les fonds dont il est question, j'ai estimé qu'il n'était peutêtre pas nécessaire d'en rajouter cette année.

Et je le répète, si la RTT n'avait pas été engagée, pour reprendre votre raisonnement par l'absurde, nous aurions disposé d'un peu d'argent de 5,6 malheureux milliards.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Bernard Accoyer.

L'aveu !

M. François Goulard.

Il a avoué ! Et nous n'avons même pas eu besoin de le torturer !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Mais le fonds de solidarité vieillesse et le fonds de réserve pour les retraites n'auraient pas été abondés de 20 milliards. J'en reviens à la démonstration que j'ai déjà faite tout à l'heure.

Je suis désolé de vous le dire. D'ailleurs, vous me reconnaissez une qualité : je ne saurais pas mentir.

M. Bernard Accoyer.

Vous mentez maladroitement ! (Sourires.)

M. Alfred Recours, rapporteur.

Pour l'instant, vous ne pouvez pas nous reprocher quoi que ce soit. Vous pourrez éventuellement le faire fin 2000, si nos objectifs ne sont pas atteints. Quoi qu'il en soit, nous avons la conviction d'oeuvrer pour l'ensemble de la protection sociale et les retraites en particulier.

M. François Goulard.

C'était très clair !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Je demande le rejet. (Sourires.)

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 156.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 6, compte tenu de la suppression du gage.

(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président.

En conséquence, l'article 2 est rétabli et se trouve ainsi rédigé.

M. Bernard Accoyer.

Je note les communistes n'ont pas voté !

M. le président.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

2 DÉPÔT D'UN PROJET DE LOI

M. le président.

J'ai reçu, le 24 novembre 1999, de M. le Premier ministre, un projet de loi de finances rectificative pour 1999.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 24 NOVEMBRE 1999

Ce projet de loi, no 1952, est renvoyé à la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, en application de l'article 83 du règlement.

3 DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE RÉSOLUTION

M. le président.

J'ai reçu, le 24 novembre 1999, de M. François d'Aubert et plusieurs de ses collègues, une proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête sur les dysfonctionnements des services des ministères de l'intérieur et de la justice.

Cette proposition de résolution, no 1962, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

4 DÉPÔT D'UN RAPPORT

SUR UNE PROPOSITON DE RÉSOLUTION

M. le président.

J'ai reçu, le 24 novembre 1999, de M. Jean Le Garrec, un rapport, no 1959, fait au nom de l a commission des affaires culturelles, familiales et sociales, sur la proposition de résolution de M. Alain Barrau (no 1942) sur la communication de la Commission. Proposition de lignes directrices pour les politiques de l'emploi des Etats membres en 2000 (COM [1999] 441 final/no E 1306).

5 DÉPÔT DE RAPPORTS

M. le président.

J'ai reçu, le 24 novembre 1999, de Mme Monique Denise, un rapport, no 1953, fait au nom de la commission de la production et des échanges, sur la proposition de loi, adoptée par le Sénat, tendant à modif ier l'article 6 ter de l'ordonnance no 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires (no 1694).

J'ai reçu, le 24 novembre 1999, de M. René André, un rapport, no 1954, fait au nom de la commission des affaires étrangères, sur le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de la convention d'assistance administrative mutuelle entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie pour la prévention, la recherche et la poursuite des fraudes douanières (no 1307).

J'ai reçu, le 24 novembre 1999, de M. René André, un rapport, no 1955, fait au nom de la commission des affaires étrangères, sur le projet de loi, adopté par le S énat, autorisant l'approbation de la convention d'entraide d'assistance administrative mutuelle entre le Gouvernement français et le Gouvernement macédonien pour la prévention, la recherche, la constatation et la sanction des infractions douanières (no 1308).

J'ai reçu, le 24 novembre 1999, de M. René André, un rapport, no 1956, fait au nom de la commission des affaires étrangères, sur le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de la convention d'assistance administrative mutuelle en matière douanière entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République hongroise (no 1306).

J'ai reçu, le 24 novembre 1999, de M. Georges Hage, un rapport, no 1957, fait au nom de la commission des affaires étrangères, sur le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation d'un accord, entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire, sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements (ensemble un échange de lettres interprétatif) (no 1198).

J'ai reçu, le 24 novembre 1999, de M. Xavier Deniau, un rapport, no 1958, fait au nom de la commission des affaires étrangères, sur le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'adhésion de la République française à la convention sur les privilèges et immunités des institutions spécialisées, approuvée par l'Assemblée générale des Nations unies le 21 novembre 1947 (ensemble dix-sept a nnexes approuvées par les institutions spécialisées) (no 1429).

J'ai reçu, le 24 novembre 1999, de Mme Claudine Ledoux, un rapport, no 1960, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, sur la proposition de loi, modifiée par le Sénat, instituant un Médiateur des enfants (no 1915).

J'ai reçu, le 24 novembre 1999, de M. Thierry Mariani, un rapport, no 1961, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, sur la proposition de loi de M. Charles Cova et plusieurs de ses collègues, modifiant les conditions d'acquisition de la nationalité française par les militaires étrangers servant dans l'armée française (no 1815).

6 DÉPÔT D'UN RAPPORT D'INFORMATION

M. le président.

J'ai reçu, le 24 novembre 1999, de M. Roland Blum, un rapport d'information, no 1963, déposé en application de l'article 145 du règlement par la commission des affaires étrangères, sur la mondialisation.

7 DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI ADOPTÉE PAR LE SÉNAT

M. le président.

J'ai reçu, le 24 novembre 1999, transmise par M. le président du Sénat, une proposition de loi, adoptée par le Sénat, relative au régime local d'assu-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 24 NOVEMBRE 1999

rance maladie complémentaire obligatoire des départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, a pplicable aux assurés des professions agricoles et forestières.

Cette proposition de loi, no 1964, est renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, en application de l'article 83 du règlement.

8

ORDRE DU JOUR

DES PROCHAINES SÉANCES

M. le président.

Aujourd'hui, à neuf heures trente, première séance publique : Discussion, en deuxième lecture, de la proposition de loi no 1915 instituant un Médiateur des enfants : Mme Claudine Ledoux, rapporteuse au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport no 1960).

Suite de la discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi, no 1943, de financement de la sécurité sociale pour 2000 : MM. Alfred Recours, Claude Evin, Denis Jacquat et Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteurs au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (rapport no 1946).

A quinze heures, deuxième séance publique ; Suite de l'ordre du jour de la première séance.

A vingt et une heures, troisième séance publique : Suite de l'ordre du jour de la première séance.

La séance est levée.

(La séance est levée, le jeudi 25 novembre 1999, à une heure.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT

ERRATUM au texte publié en annexe du compte rendu intégral de la deuxième séance du 18 novembre 1999 (Journal officiel, Débats de l'Assemblée nationale, no 91 [2] AN [CR] du vendredi 19 novembre 1999) Page 9671, 3e ligne : Au lieu de :

« des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République ».

Lire :

« de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales ».