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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 14 DÉCEMBRE 1999

SOMMAIRE

PRE

SIDENCE DE M. LAURENT FABIUS

1. Décès d'un député (p. 10878).

2. Questions au Gouvernement (p. 10878).

CHOIX DU SITE D'ASSEMBLAGE DE L'A3XX (p. 10878)

MM. Dominique Baudis, Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

CANDIDATURE DE LA TURQUIE À L'ADHE

SION À L'UNION EUROPE

ENNE (p. 10879)

MM. Renaud Donnedieu de Vabres, Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères.

REVENU D'AUTONOMIE POUR LES JEUNES DE MOINS DE VINGT-CINQ ANS (p. 10879)

Mmes Marie-Hélène Aubert, Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

PARITARISME DANS LES ORGANISMES SOCIAUX (p. 10880)

M. Jacques Godfrain, Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

PROJET SUCRIER EN GUYANE (p. 10881)

MM. Léon Bertrand, Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer.

GRANDES E

COLES (p. 10881)

MM. Yves Deniaud, Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

TRANSPORTS DE MARCHANDISES (p. 10882)

MM. André Lajoinie, Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

PROBLE

MES DES PE

CHEURS EN ME

DITERRANE E (p. 10883)

M M. François Liberti, Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

CONSEIL EUROPE EN D'HELSINKI (p. 10884)

Mme Nicole Feidt, M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères.

NAUFRAGE DU PE TROLIER ERIKA (p. 10884)

Mme Jacqueline Lazard, M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

TRANSPORT FERROVIAIRE (p. 10885)

MM. Jean-Jacques Filleul, Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

D

IFFICULTE S DES CAISSES D'ALLOCATIONS FAMILIALES (p. 10886)

Mmes Nicole Bricq, Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

CANDIDATURE DE LA TURQUIE À L'ADHE

SION À L'UNION EUROPE

ENNE (p. 10886)

MM. Pierre Lequiller, Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères.

Suspension et reprise de la séance (p. 10887)

PRE

SIDENCE DE M. PATRICK OLLIER

3. Droit applicable outre-mer. Discussion, en deuxième lecture, de trois projets de loi de ratification d'ordonnances (p. 10887).

M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer.

M me Marie-Françoise Clergeau, suppléant M. Daniel Marsin, rapporteur de la commission des affaires culturelles, pour le projet de loi no 1967.

M. Yves Tavernier, rapporteur de la commission des finances, pour le projet de loi no 1969.

M. Jérôme Lambert, rapporteur de la commission des lois, pour le projet de loi no 1968.

DISCUSSION GE NE RALE COMMUNE (p. 10891)

MM. François Rochebloine, Pierre Goldberg, Dominique Bussereau, Léon Bertrand, Henry Jean-Baptiste.

Clôture de la discussion générale commune.

M. le secrétaire d'Etat.

Projet de loi no 1967 Article 1er bis. - Adoption (p. 10897)

Article 3 bis. - Adoption (p. 10897)

Articles 6, 7 et 8. - Adoption (p. 10897)

Adoption de l'ensemble du projet de loi Projet de loi no 1969 Article 1er bis. - Adoption (p. 10898)

Article 3 (p. 10898)

Le Sénat a supprimé cet article.

Articles 5 à 11. - Adoption (p. 10898)

Adoption de l'ensemble du projet de loi.

Projet de loi no 1968 Articles 1er bis, 2, 2 bis à 2 quater. - Adoption (p. 10898)

Articles 3 bis à 3 duodecies. - Adoption (p. 10899)

Articles 4 bis et 4 ter. - Adoption (p. 10900)

Articles 5 bis à 5 quater. - Adoption (p. 10900)

Articles 7 et 8. - Adoption (p. 10900)

Adoption de l'ensemble du projet de loi Suspension et reprise de la séance (p. 10900)

4. Lutte contre la corruption. - Discussion d'un projet de loi adopté par le Sénat (p. 10900).


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Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

M. Jacky Darne, rapporteur de la commission des lois.

DISCUSSION GE NE RALE (p. 10906)

MM. Patrick Braouezec, Jean-Antoine Leonetti, Mme Marie-Hélène Aubert,

M.

Dominique Bussereau.

Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.

5. Ordre du jour de la prochaine séance (p. 10911).


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COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. LAURENT FABIUS

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1 DÉCÈS D'UN DÉPUTÉ (Mmes et MM. les députés ainsi que Mmes et MM. les membres du Gouvernement se lèvent.)

M. le président.

Mes chers collègues nous avons appris avec beaucoup de tristesse le décès de notre collègue et ami Roland Carraz, député de la Côte-d'Or.

Je prononcerai son éloge funèbre lors d'une prochaine séance.

En hommage à notre collègue décédé, j'invite l'Assemblée à observer une minute de silence (Les députés ainsi que Mmes et MM. les membres du Gouvernement se recueillent quelques instants.)

2

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

M. le président.

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Nous commençons par les questions du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.

CHOIX DU SITE D'ASSEMBLAGE DE L'A3XX

M. le président.

La parole est à M. Dominique Baudis.

M. Dominique Baudis.

Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

La réunion la semaine dernière du conseil de surveillance d'Airbus a provoqué à Toulouse une certaine perplexité.

Certes, la volonté de réaliser un avion très gros porteur, l'A3XX, a été réaffirmée. C'est d'ailleurs une nécessité absolue, puisque ce chaînon manquant dans la famille Airbus est notre principale faiblesse face à Boeing.

En revanche, le choix du site d'assemblage, soit Toulouse soit Hambourg, n'a pas été fait à l'occasion de cette réunion. Or il nous a toujours été indiqué que les infrastructures nécessaires devraient être prêtes au début de l'année 2001. Acquérir, aménager, desservir une zone d'activités de quelque deux cents hectares demande du temps, cela ne se fait pas du jour au lendemain. Si l'on veut être prêt à temps, il faut connaître au plus tôt le choix du site.

Toulouse, vous le savez, présente les meilleures caractéristiques techniques et industrielles. Elle possède l'expérience la plus complète grâce à la présence d'équipes européennes d'ouvriers, de techniciens, d'ingénieurs extrêmement qualifiés, qui travaillent ensemble depuis déjà trente ans.

Il me paraît indispensable de déterminer le choix du site d'assemblage en fonction d'une analyse comparative, fondée sur des critères objectifs entre les dossiers présentés par Toulouse et par Hambourg, et non pas, permettez-moi d'insister, monsieur le Premier ministre, sur un marchandage ou un troc qui pourrait affaiblir gravement le pôle aéronautique et spatial toulousain.

L'Etat est un des actionnaires majeurs du groupe Aérospatiale-Matra. Il est donc lui-même un actionnaire essentiel d'Airbus. J'aimerais connaître la position du Gouvernement, monsieur le Premier ministre, sur le choix du site d'assemblage et sur la façon de procéder à ce choix.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe Démocratie libérale et Indépendants et sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Monsieur le député, le conseil de surveillance d'Airbus qui s'est tenu le 8 décembre dernier est un conseil important. Vous évoquez une certaine perplexité. On pourrait prendre la question sous l'angle du verre à moitié vide ou à moitié plein.

L'important, c'est que la viabilité du gros porteur ait été reconnue. Ce n'était pas gagné d'avance. Le conseil de surveillance l'a confirmé. Il est en effet nécessaire, dans la concurrence avec Boeing, de pouvoir couvrir toute la gamme, ainsi que vous l'avez souligné.

Une décision de pré-ATO, c'est-à-dire de pré-autorisation de mise en commercialisation, a été prise. Airbus devrait lancer, dans les trois mois, les offres de vente.

Par ailleurs, je vous informe, monsieur le député, mais vous avez pu le constater lors de la discussion du budget, que le Gouvernement a pris toutes les dispositions pour que le budget 2000 permette déjà d'alimenter les aides au développement et les avances remboursables pour l'avion A3XX.

Des études de prix de revient doivent encore être menées - le prix au siège doit être suffisamment performant, chacun en est conscient. En outre, l'évolution de la société Airbus en société intégrée, évolution qui est facilitée par la fusion Aéro-Matra-Dasa-Casa, doit se poursuivre.

Quant au choix du site, monsieur le député, il ne saurait tarder. Comme vous, je suis certain, même si ce sont les industriels qui décident, que le site de Toulouse dispose de tous les atouts.


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Il est évident que la décision sera prise en dehors de tout marchandage. Tout le monde doit y gagner. En effet, plus que d'un nouvel avion, il s'agit d'un nouvel investissement en termes économiques et d'emplois.

Il n'y a pas de temps perdu. Comme vous l'avez dit, le calendrier de commercialisation prévoit de lancer la phase de fabrication en 2001. Nous sommes donc dans les temps, même pour l'aménagement des 200 hectares de terrain qui seront nécessaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

CANDIDATURE DE LA TURQUIE A L'ADHE SION A L'UNION EUROPE

ENNE

M. le président.

La parole est à M. Renaud Donnedieu de Vabres.

M. Renaud Donnedieu de Vabres.

Ma question s'adresse également au Premier ministre.

Monsieur le Premier ministre, l'accord donné à la candidature de la Turquie à l'Union européenne pose la question de la nature de l'Europe que nous voulons construire. En effet, si nous sommes nombreux à considérer que les questions de sécurité internationale peuvent rendre légitime le choix d'un large périmètre en vue d'as-s urer une défense commune, l'union politique de l'Europe, en revanche, exige un périmètre plus rétréci.

Ainsi, si nous pensons que des considérations de sécurité i nternationale devraient un jour conduire des pays comme la Tunisie et le Maroc à intégrer un dispositif de sécurité garanti par l'Europe, nous pensons que l'Europe politique suppose un préalable politique. Et au moment où se trouve posée la question de la candidature de la Turquie, nous pensons - vous vous en doutez - au sort des Arméniens par exemple. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la Démocratie française-Alliance.)

M a question, monsieur le Premier ministre, est simple : acceptez-vous que les Français, par l'intermédiaire des représentants que nous sommes, aient le droit de s'exprimer ? Acceptez-vous, avant que la position de l'exécutif français n'engage notre pays, d'organiser un débat parlementaire suivi d'un vote sur la question de l'adhésion de la Turquie à l'Europe ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance, du groupe Démocratie libérale et Indépendants et sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.

M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères.

Monsieur le député, la question turque, qu'ont eu à traiter le Président de la République depuis 1995 et ce gouvernement depuis 1997, se présentait de la façon suiv ante : depuis 1963, tous les dirigeants européens successifs, de l'Europe des Six, des Neuf, des Douze, des Quinze, ont reconnu à la Turquie une vocation européenne - c'est le terme qui figure dans tous les accords passés entre les communautés, puis l'Union européenne.

M. Pierre Lellouche.

C'est bien comme çà !

M. le ministre des affaires étrangères.

On pouvait d'ailleurs légitimement se poser la question, s'agissant d'un pays situé en partie dans les Balkans et en Asie mineure, à cheval donc sur l'Europe et sur l'Asie. Depuis 1963, toutes les forces modernistes de Turquie, qui essaient d'y implanter et d'y renforcer la modernité, la démocratie, l'Etat de droit et de faire progresser le respect des minorités, qui n'est pas assuré aujourd'hui de façon satisfaisante, toutes ces forces s'appuient sur cette promesse, cette main tendue, cette perspective.

Il fallait donc trancher la question d'une façon ou d'une autre, mais en créant une dynamique.

Après avoir longuement examiné la question et longuement réfléchi, les Quinze ont décidé que la meilleure réponse, la plus utile pour l'avenir, pour l'Europe, pour la Turquie, pour les citoyens turcs quels qu'ils soient, était de reconnaître la candidature de la Turquie. Cette reconnaissance ne signifie absolument pas l'ouverture de la négociation du jour au lendemain. Il est clairement dit que la Turquie doit s'inscrire dans le processus de respect des critères de Copenhague, lesquels reprennent nos valeurs communes, nos conceptions en matière de démocratie, de respect de l'Etat de droit et de respect des minorités.

La Turquie doit avancer dans cette direction. Alors seulement la négociation pourra s'ouvrir, dans le but d'aboutir, un jour, à une adhésion, qui, naturellement, sera appelée à être ratifiée.

(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

M. Philippe Séguin et M. Pierre Lellouche.

Très bien ! Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.

Et le débat au Parlement ?

M. le président.

Nous en venons à une question du groupe Radical, Citoyen et Vert.

REVENU D'AUTONOMIE

POUR LES JEUNES DE MOINS DE VINGT-CINQ ANS

M. le président.

La parole est à Mme Marie-Hélène Aubert.

Mme Marie-Hélène Aubert.

Ma question s'adresse à

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Madame la ministre, le constat est, hélas ! devenu récurrent : proportion de jeunes qui s'adressent aux restos du coeur pour survivre, qui dorment dehors, qui galèrent de petits boulots sous-payés en stages à durée limitée est de plus en plus importante.

Face à cette situation, que vous n'ignorez pas, vous avez opté pour une politique volontariste d'aide à l'emploi et à l'insertion que nous avons soutenue, avec les emplois-jeunes et le programme TRACE inclus dans la loi sur les exclusions.

La couverture maladie universelle permettra également de soigner ces jeunes dans de meilleures conditions.

L'allocation d'études, quant à elle, ne répond que partiellement aux problèmes spécifiques des étudiants.

Seulement voilà, pour accéder à ces dispositifs, pour se loger, se déplacer, se former, faire des démarches, il faut disposer déjà d'un minimum de ressources.

Le problème numéro un de la permanence d'accueil, d'information et d'orientation dans ma circonscription, comme dans beaucoup d'autres, j'imagine, est de trouver un logement et un moyen de transport pour des jeunes qui n'ont rien parce qu'ils ne peuvent plus ou ne veulent plus habiter chez leurs parents, eux-mêmes souvent en grande précarité. Quand on a entre dix-huit et vingt-cinq ans, on n'a droit à aucune allocation ou à aucun revenu minimum.

Il ne s'agit pas, madame la ministre, de transformer les jeunes en assistés, il s'agit au contraire de leur permettre de sortir de cette adolescence prolongée le plus souvent


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contrainte et d'être autonomes le plus vite et dans les m eilleures conditions possible. Selon une étude de l'INED sortie la semaine dernière, un tiers des jeunes de vingt-cinq ans vivent encore chez leurs parents. C'est beaucoup.

Alors, madame la ministre, à quand un revenu d'autonomie pour les dix-huit vingt-cinq ans, seule mesure à même d'enrayer le désespoir, les dérives et la pauvreté croissante des jeunes les plus défavorisés ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Madame la députée, vous l'avez indiqué, le Gouvernement a fait le choix du retour à l'emploi et de la priorité à l'emploi principalement pour ces jeunes. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si le taux de chômage des jeunes s'est réduit de 25 % en deux ans.

C'est, bien sûr, le résultat de la croissance que nous avons consolidée par les mesures que nous avons prises, c'est aussi dû à la création des 210 000 emplois-jeunes, même s'ils n'aiment plus ce terme car ils considèrent aujourd'hui qu'ils exercent un métier comme nous l'ont dit les jeunes que certains de mes collègues et moi-même avons rencontrés à Lille ce week-end. C'est aussi l'accélération des processus d'aide aux jeunes les plus en difficulté.

Tout jeune qui entre dans un processus d'insertion ou de formation a droit à une rémunération. C'est vrai s'il signe un contrat emploi-solidarité, c'est vrai s'il entre dans une entreprise d'insertion, c'est vrai s'il bénéficie du programme TRACE qui l'accompagnera pendant dix-huit mois, c'est bien sûr vrai s'il entre en formation en alternance - l'apprentissage et les contrats de qualification ont augmenté de 15 % depuis 1997 - et c'est vrai encore s'il entre en stage de formation professionnelle.

Il faut que nous soyons capables d'aider tous les jeunes qui font un pas vers l'insertion et vers les qualifications, en leur accordant, dans ce cas, une rémunération.

Par ailleurs, la loi contre les exclusions a prévu, vous le savez, de doubler l'intervention de l'Etat au titre du fonds d'action pour les jeunes. Ainsi, 250 millions, qui aujourd'hui sont loin d'être dépensés, sont destinés à aider les jeunes dans leur parcours d'entrée et d'insertion dans la vie active.

Par ailleurs, mon collègue Louis Besson a pris des mesures pour faciliter l'accès des jeunes au logement.

C'est un vrai problème. Par exemple, la caution pourra dorénavant être prise en charge par le 1 % logement. Les m issions locales et la PAIO rendent aujourd'hui publiques ces mesures qui rencontrent déjà un succès très important auprès des jeunes.

En outre, la couverture maladie universelle va dorénavant permettre à tout jeune de plus de seize ans en rupture de famille ou en difficulté d'avoir recours aux soins gratuitement.

La politique du Gouvernement est bien de tourner le dos à l'assistance pour apporter une aide, une rémunération chaque fois que le jeune fait un pas concret vers l'insertion et la formation. Nous avons intérêt à garder ce cap. Rien ne serait pire pour les jeunes que de se voir offrir, pour leurs premiers pas dans la société, un chèque sans contrepartie. Ce qu'il faut leur donner, ce sont les véritables moyens de trouver un emploi. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Nous en venons aux questions du groupe du Rassemblement pour la République.

PARITARISME DANS LES ORGANISMES SOCIAUX

M. le président.

La parole est à M. Jacques Godfrain.

M. Jacques Godfrain.

Madame la ministre de la solidarité et de l'emploi, de plus en plus de Français se posent des questions au sujet de votre action personnelle. Dans la plupart des textes que vous avez fait voter, non sans mal d'ailleurs, par votre propre majorité, et particulièrement celui sur les 35 heures, nous avons constaté l'intransigeance et le refus d'un travail longuement concerté en amont. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Aujourd'hui, le climat social, avec les syndicats et leso rganisations professionnelles, est devenu détestable.

(Nouvelles exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Contrairement à ce qu'a déclaré François Hollande dans La Dépêche du Midi, dimanche dernier, votre manière de faire n'est pas de nature à réconcilier les Français avec l'avenir. Vous espériez nous amener une société de confiance, et nous trouvons une société de méfiance.

(Mêmes mouvements.)

Je vous demande donc, madame la ministre, si pour le cas où, par votre faute, le paritarisme social viendrait à volet en éclats, vous avez une stratégie de repli ou de remplacement, bref si vous avez mesuré les risques que vous faisiez courir à tous ceux qui pratiquent la concertation sociale depuis des décennies. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur le député, comme l'a souligné Jean Le Garrec lors de la discussion du projet de loi, jamais une loi n'a autant fait l'objet de concertations que la loi sur les 35 heures. Nous avons procédé par deux foix.

Avec la première loi, nous avons lancé un appel à la négociation et, même si cela déplaît à certains, nous avons été entendus. Aujourd'hui, 8 millions de salariés couverts par des accords de branche et plus de 2,5 millions de salariés couvers par 18 000 accords d'entreprise sont déjà concernés par des accords de passage aux 35 heures. C'est sur le fondement même de ces accords, là aussi n'en déplaise à certains, qu'a été préparée l a seconde loi sur la réduction du temps de travail en concertation avec l'ensemble des organisations patronales et syndicales.

Je voudrais simplement vous rappeler, parce que je pensais bien que vous reprendriez les propos d'autres personnes, que, par exemple, quatre réunions ont eu lieu au plus haut niveau, c'est-à-dire avec le président ou les viceprésidents du MEDEF, pour la préparation de la seconde loi, les 11, 16, 18 et 28 juin. Encore à la rentrée et jusqu'aux derniers jours, puisque les deux dernières réunions ont eu lieu le 30 septembre et le 1er octobre, nous avons discuté des propositions du MEDEF sur la réduction de la durée du travail et les entreprises. La discussion s'est poursuivie sur l'UNEDIC et la durée du travail par trois réunions, les 18, 19 et 22 octobre.

La concertation, c'est notre méthode.

Je prends un dernier exemple : la couverture maladie universelle. J'ai reçu moi-même la semaine dernière les mutuelles, l'ensemble des partenaires représentant des


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 14 DÉCEMBRE 1999

maires, des conseils régionaux, la CNAF, toutes les associations de lutte contre les exclusions pour faire en sorte que cette loi entre dans les faits.

En réalité, monsieur le député, ce qui intéresse aujourd'hui les Français, ce n'est pas ce que pense tel ou tel de la politique de concertation, ce sont les résultats de la politique menée par le Gouvernement.

Si, par notre faute, le chômage baisse, si, par notre faute, la sécurité sociale est à l'équilibre, si, par notre faute, six millions de Français pourront être soignés, à partir du 1er janvier, sans dépenser le moindre franc (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République), je suis fière d'appartenir à ce gouvernement qui pratique la concertation et surtout la politique, c'est-à-dire qui fait ce qu'il a dit.

On a le droit d'être en désaccord, et je suis la première à entendre tous ceux qui posent de vrais problèmes, mais il faut que certaines organisations comprennent que la démocratie consiste d'abord à écouter une majorité qui a été élue pour mettre en oeuvre une politique et qui continuera à le faire.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

PROJET SUCRIER EN GUYANE

M. le président.

La parole est à M. Léon Bertrand.

M. Léon Bertrand.

Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

« La Guyane craque » est le titre choisi par L'Express de cette semaine. Sur fond de succès spatial, les populations vivent, en effet, dans des conditions intolérables. Elles ont l'impression que la France s'intéresse davantage aux commodités que procure ce territoire, en matière spatiale avec Ariane, ou dans le domaine écologique avec le parc national, qu'à leur sort.

E xplosion démographique, immigration, insécurité, retard scolaire, chômage, les problèmes s'accumulent. On laisse les élus se débrouiller avec la crise. De plus, les efforts sont loin d'être encouragés. J'en veux pour preuve les blocages incompréhensibles dont fait l'objet un projet sucrier, dont la faisabilité et la viabilité ont été démontrées par de nombreuses études et qui est soutenu par l'ensemble des collectivités locales. Or il présente un intérêt économique majeur puisqu'il permettrait de créer plusieurs centaines d'emplois et aurait un effet moteur pour les petits agriculteurs.

Monsieur le Premier ministre, nous voulons prendre en charge notre destinée. Nous savons que ce projet est porteur d'espérances pour la jeunesse et peut rétablir la confiance des investisseurs. Quel sort comptez-vous réserver à ce projet important pour l'avenir de la Guyane ? A l'heure où est préparé un projet de loi d'orientation, votre réponse nous donnera une indication de la volonté de votre gouvernement de s'engager en faveur de l'outre-mer dans le domaine économique.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat à l'outre-mer.

M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer.

Monsieur le député, le projet dont vous venez de parler a une grande envergure puisqu'il concerne l'aménagement d'un ensemble de 10 000 hectares et vise une production de 60 000 tonnes de sucre. Sur le plan financier, il mobiliserait environ un milliard de francs d'investissements, tant privés que publics. Il est certes porté par une société privée, la Compagnie sucrière de l'Ouest guyanais, mais, compte tenu de l'intérêt que les collectivités locales y portent, il est normal qu'il fasse l'objet d'une étude sérieuse de faisabilité.

Il est notamment indispensable d'étudier les conditions économiques de ce projet, c'est-à-dire la capacité des sols à permettre un tel type de production qui n'existe pratiquement pas en Guyane, sa rentabilité industrielle, ses conséquences sur l'environnement, son intégration dans ce que l'on appelle l'OCM sucre, c'est-à-dire l'organisation commune du marché du sucre sur le plan européen.

Demain se réunira un comité de pilotage constitué d'élus locaux de représentants des ministères concernés et des promoteurs du projet.

Par ailleurs, le contrat de plan prévoit d'ores et déjà un crédit de 5 millions de francs pour prolonger les études.

Si les conditions étaient réunies, si la mobilisation des fonds rendait ce projet viable, il n'y aurait aucune raison de ne pas le soutenir.

J'ajoute que la Guyane est la première région française au titre des contrats de plan selon le critère du montant des crédits au regard du nombre d'habitants. Elle bénéficie, en effet, de 7 700 francs par habitant. Compte tenu du fait que la Guyane est éligible à l'objectif 1, c'est-àdire aux fonds structurels européens, d'importants crédits pourront, dans le prochain contrat de plan 2000-2006, être affectés au développement de la Guyane.

S'il était viable, ce projet pourrait être concerné, mais on ne peut pas dire que la Guyane est oubliée en matière de crédits publics et de projets de développement.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

GRANDES ÉCOLES

M. le président.

La parole est à M. Yves Deniaud.

M. Yves Deniaud.

Monsieur le ministre de l'éducation nationale, cet automne, mais ce n'est pas la première fois, vous vous êtes illustré par une attaque contre une grande école, l'Ecole centrale en l'occurrence, en méprisant l'avis du conseil d'administration, puisque, avant même qu'il ne soit formulé, vous avez lancé un appel à candidatures pour le poste de directeur. Vous aviez déjà agi de la même façon auparavant dans un cas similaire pour l'Ecole normale supérieure.

Les grandes écoles ne sont pas les repaires d'une vieille élite ringarde. Elle sont de plus en plus nombreuses, partout, y compris dans les provinces. Il en existe même une, dont le fonctionnement est remarquable, dans ma bonne ville d'Alençon, qui n'est pourtant pas très grande.

Monsieur le ministre, quelle est la raison de cette agressivité particulère à l'encontre des grandes écoles, outils pourtant essentiels de formation de l'élite française dans tous les secteurs et héritières de la tradition nationale ? Comptez-vous rompre avec cette habitude de ne jamais tenir compte des avis des organismes que vous consultez ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et sur divers bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 14 DÉCEMBRE 1999

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Monsieur le député, je veux d'abord souligner que, dans la République, les écoles n'appartiennent pas à leurs anciens élèves ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Ensuite, je dois vous rappeler que la loi s'applique à tous. Cela est d'autant plus justifié en l'espèce qu'il s'agit d'une disposition voulue par les grandes écoles. En effet, lorsque la loi d'orientation a été modifiée, l'Ecole centrale a demandé que le conseil d'administration ne propose pas le directeur et se borne à donner un avis au ministre. En l'occurrence, trois candidats s'étaient manifestés, mais aucun avis n'a été donné sur deux d'entre eux. J'ai donc remis le processus en route, parce que c'était conforme à la loi.

J'ajoute que le directeur actuel de l'Ecole centrale est en place depuis plus de vingt et un ans. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et d u groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Au moment où nous mettons en oeuvre bien des dispositions en faveur du renouveau, il n'est pas souhaitable de continuer à l'identique pendant encore vingt et un ans.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Yves Deniaud.

Zéro !

M. Pierre Lequiller.

Ridicule !

M. le président.

Nous en venons aux questions du groupe communiste.

TRANSPORTS DE MARCHANDISES

M. le président.

La parole est à M. André Lajoinie.

M. André Lajoinie.

Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le ministre de l'équipement et des transports.

(Rires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean-Louis Debré.

Allô !

M. le président.

Mes chers collègues, un peu de calme !

M. André Lajoinie.

L'opinion publique se prononce massivement pour le développement des transports de marchandises par le rail (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) plutôt que par la route, pour des raisons de sécurité et de défense de l'environnement.

(« Très bien ! » sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Le conseil des ministres européens des transports vient de prendre, à l'initiative surtout de la France, des dispositions de nature à assurer l'essor du fret ferroviaire, notamment en encourageant la coopération des entreprises de chemin de fer de l'Union européenne, en développant l'interopérabilité, c'est-à-dire le franchissement des frontières, et en favorisant la fluidité des réseaux ferrés de fret par la suppression des goulots d'étranglement.

Monsieur le ministre, quelles mesures le Gouvernement, la SNCF, Réseau ferré de France proposent-ils de prendre pour que la France, l'un des premiers pays de transit de l'Union européenne, relève de manière exemplaire ce défi du développement du fret ferroviaire ? Par ailleurs, quelles dispositions la France proposera-telle à l'Union européenne pour empêcher la concurrence déloyale de certaines entreprises de transport routier, notamment pour imposer l'harmonisation sociale par le haut et favoriser le développement des transports combinés rail-route, seuls susceptibles d'assurer l'avenir de la route et du rail en empêchant l'asphyxie des transports de marchandises qui menace nos pays ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert, ainsi que sur quelques bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Monsieur le député, vous avez raison de souligner le poids de l'opinion publique en ce qui concerne l'évolution des transports. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean-Claude Lefort.

Cela ne les intéresse pas ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Je suis en effet surpris par ces réactions, d'autant qu'il y a eu unanimité au sein de l'Assemblée pour demander une meilleure complémentarité entre les modes de transport.

Le poids de l'opinion publique est une chance. Cela a d'ailleurs été perceptible lors de la dernière réunion du conseil des ministres des transports à l'échelle européenne.

Vous avez souligné qu'il s'agissait d'un véritable défi et vous avez raison. Il s'agit d'un défi parce qu'il faut sortir de la situation de blocage que nous connaissons depuis des années, mettre en oeuvre le développement du transport ferroviaire pour enrayer le déclin auquel nous avons assisté pendant des années. Il s'agit d'un défi parce que nous avons proposé que soient garantis l'accès et la fluidité du trafic de transit des marchandises, quel que soit le mode d'exploitation : libéralisation comme le prônent certains pays ou coopération comme le propose le Gouvernement. Il s'agit d'un défi parce que nous devons sortir du laisser-aller qui consistait à favoriser le tout routier a u détriment des autres modes de transport plus économes tant au plan économique, qu'en ce qui concerne l'environnement.

M. Philippe Briand.

Ça n'avance pas vite ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Nous avons marqué des points lors du dernier conseil des ministes des transports, notamment avec l'acceptation de la proposition de créer un réseau de fret ferré européen, avec la décision de financer la résorption des goulets d'étranglement et avec la mise en oeuvre de moyens de nature à assurer l'interopérabilité.

M. Philippe Briand.

Quand cela commence-t-il ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 14 DÉCEMBRE 1999

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

En ce qui concerne la question du transport routier et de l'harmonisation je vais d'abord vous donner une information.

M. Jean-Louis Debré.

Nous n'avons pas lu L'Humanité ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Vous avez certainement remarqué, mesdames, messieurs les députés, que, contrairement à ce qui avait été affirmé lors du précédent conseil des ministres des transports, la levée des interdictions de circulation le week-end n'est pas revenue à l'ordre du jour.

M. Michel Bouvard.

Très bien ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Cela est à mettre à l'actif de la position de la France et de l'Allemagne : cette interdiction est maintenue. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur divers bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

J'ai également demandé et obtenu que la question de l'harmonisation sociale par le haut dans le transport routier soit considérée comme prioritaire par la Commission et par la présidence du conseil des ministres des transports européen, lors des prochains conseils des ministres.

Il s'agit, je le répète, de réaliser une harmonisation sociale par le haut sur le temps de travail, afin de lutter contre le dumping économique et social dans ce secteur.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur quelques bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

PROBLÈMES DES PÊCHEURS EN MÉDITERRANÉE

M. le président.

La parole est à M. François Liberti.

M. François Liberti.

Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Le mercredi 1er décembre, les pêcheurs de Corse, de PACA, de Languedoc-Roussillon ont barré les ports de la façade méditerranéenne afin que certains dossiers présentés depuis de nombreux mois soient enfin examinés, en particulier celui relatif à l'inscription obligatoire au registre du commerce imposée par la loi d'orientation sur la pêche, mais totalement inadaptée aux pêcheries méditerranéennes, et la question de la hausse vertigineuse du carburant qui, depuis le mois de janvier, a augmenté de plus de 100 %.

Ainsi que j'ai eu l'occasion de l'exposer au nom du groupe parlementaire communiste et apparentés lors des débats budgétaires, poursuivre le renouvellement de la flotte, garantir l'accès à la ressource et les métiers traditionnels, favoriser la commercialisation, traiter le dossier de la fiscalité, exige un calendrier et un plan de marche précis pour rendre lisibles les engagements pris.

Les réponses apportées sur ces différents points par le cabinet à la délégation des pêcheurs qui a été reçue a u ministère le vendredi 3 décembre vont dans le bon sens et j'en remercie le ministre. De même, la décision de reporter l'inscription obligatoire au registre du commerce, prévue initialement le 1er janvier 2000, a été reçue avec satisfaction et soulagement.

Les dossiers transmis par le comité de liaison méditerranéen des comités régionaux des pêches exposent avec précision les risques que fait courir cette inscription au registre du commerce dont personne, au moment du vote de la loi d'orientation, n'a mesuré les conséquences sur le statut des pêches maritimes.

(« La question ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Afin de tenir compte des spécificités de chaque façade maritime, il convient en effet d'amender la loi pour rendre cette inscription facultative et non obligatoire. Au nom du groupe communiste et apparentés, j'ai d'ailleurs déposé une proposition de loi afin de modifier l'article 14 de la loi d'orientation.

Quelles mesures allez-vous prendre pour faciliter, avec le Parlement, la modification de la loi attendue et souhaitée par tous ? C'est la première question.

(Exclamationss ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Quelles dispositions comptez-vous prendre pour aider les pêches françaises face à l'augmentation du poste carburant qui met gravement en danger l'équilibre fragile des armements ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Monsieur le député, je réponds à la place de mon collègue Jean Glavany qui représente actuellement la France au conseil agricole à Bruxelles.

La hausse du gazole utilisé par les pêcheurs qui vous inquiète tient à deux raisons qui se conjuguent : l'augmentation du prix du pétrole fixé en dollars et la hausse du dollar.

M. Philippe Briand.

Et la fiscalité ? M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Je vais y venir.

A cet égard, il convient de relativiser les choses dans la mesure où, il y a un an, le baril valait 10 dollars, ce qui était, en termes réels, le prix le plus faible depuis 1973.

Cela dit, monsieur le député, vous avez raison de souligner que l'augmentation du prix du gazole a des conséquences pour les pêcheurs, notamment sur la rémunération des marins qui sont payés à la part.

Je tiens aussi à dire aux parlementaires de l'opposition que la fiscalité n'y est pour rien, parce que l'Etat exonère le gazole utilisé pour la pêche tant de la taxe sur les produits pétroliers que de la TVA. Au-delà de cet effort important, mon collègue Jean Glavany demeure très attentif à ce problème. Il l'a d'ailleurs montré en recevant les élus concernés.

Par ailleurs, vous avez souligné l'ampleur de l'action menée par le Gouvernement pour relancer la construction et le renouvellement de la flotte, à la suite, notamment, des états généraux des pêcheurs méditerranéens qui se sont tenus en janvier 1999. Cela confirme bien que le Gouvernement porte une attention particulière aux difficultés des pêcheurs de la façade méditerranéenne.

Enfin, vous avez évoqué l'inscription obligatoire au registre du commerce. Je vous rappelle que, comme vous l'avez indiqué, la décision a été prise de reporter cette mesure, ce qui permettra à Jean Glavany de mieux apprécier la situation en concertation avec les élus et les professionnels concernés. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

Nous en venons aux questions du groupe socialiste.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 14 DÉCEMBRE 1999

CONSEIL EUROPÉEN D'HELSINKI

M. le président.

La parole est à Mme Nicole Feidt.

Mme Nicole Feidt.

Monsieur le ministre des affaires étrangères, les chefs d'Etat et de gouvernement de l'Union européenne réunis à Helsinki le week-end dernier ont pris des décisions importantes pour l'avenir de l'Union européenne.

Le processus d'élargissement a été un élément central de ce conseil européen. Désormais, tous les pays candidats seront sur un pied d'égalité en ce qui concerne les négociations, comme l'a toujours demandé le Gouvernement français. L'Union européenne ouvrira donc des négociations en février 2000 avec six nouveaux Etats : la Slovaquie, la Lettonie, la Lituanie, la Roumanie, la Belgique et Malte.

Confirmant la priorité politique que constitue ce processus d'élargissement, les Quinze ont parallèlement lancé la réforme préalable des institutions et défini l'agenda de la prochaine conférence intergouvernementale afin que l'Union européenne puisse être en mesure d'accueillir les nouveaux Etats membres le plus rapidement possible et sans que ce dossier vienne freiner les prochaines adhésions.

La défense européenne a été l'autre dossier central de ce conseil européen.

Après une année dynamique et décisive à laquelle la France a contribué de manière déterminante, les Quinze ont véritablement entamé la construction d'une Europe de la défense en décidant la création d'une force d'action rapide et de structures de décisions et de commandement.

Cet ensemble doit permettre à l'Union européenne, à l'horizon 2000-2005, d'assurer de manière autonome des actions humanitaires, des opérations de maintien et de rétablissement de la paix sur le continent européen.

Monsieur le ministre, pensez-vous que les décisions prises à Helsinki permettront à l'Union européenne d'atteindre les objectifs que sont l'Europe de la défense et l'élargissement ? Dans quelle mesure la prochaine présidence française de l'Union contribuera-t-elle à asseoir les décisions d'Helsinki ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.

M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères.

Madame la députée, le Conseil européen d'Helsinki a bien été extrêmement important. En effet, depuis une dizaine d'années, c'est-à-dire depuis la chute du mur de Berlin, les Européens étaient partagés entre ceux qui plaidaient pour un élargissement très rapide, sans aucun préalable, pour des raisons de générosité, de retrouvailles européennes et ceux qui, comme nous, voulaient le maîtriser. S'il était clair que l'on ne pouvait pas refuser tout élargissement, il était aussi évident que plusieurs façons de procéder étaient envisageables.

Cette controverse, qui a longtemps opposé les Européens, s'est conclue par une synthèse nouvelle à Helsinki qui doit beaucoup aux idées françaises et au travail franco-allemand. Nous avons ainsi décidé d'ouvrir les négociations avec tous les candidats, sans fixer de date arbitraire a priori pour l'entrée des pays. Les négociations doivent être sérieuses.

Chacun se souvient des difficultés rencontrées pour l'entrée de la Grande-Bretagne, de l'Espagne, du Portugal et de la Grèce. Or, aujourd'hui, les problèmes sont encore plus sérieux. C'est pourquoi il fallait déterminer non pas une date fixe a priori pour l'entrée de tel ou tel pays, mais une date à laquelle l'Europe serait prête à accueillir ces Etats.

C'est une démarche rationnelle selon nous. Nous avons fixé une date objective à laquelle l'Europe sera prête à accueillir de nouveaux pays, c'est-à-dire 2003. C'est dire que nous devons tout faire pour que la réforme institutionnelle préalable, qui constitue un gain récent puisqu'il y a encore deux ans, nos partenaires ne l'admettaient pas, soit réalisée dans les meilleurs délais. Nous ferons tout pour qu'elle aboutisse sous notre présidence, même si, naturellement, cela ne dépend pas que de nous.

Je saisis cette occasion pour dire que la clé des discussions sur les trois sujets qui n'ont pas été réglés à Amsterdam est la repondération des voix afin que la représentation des grands pays de l'Europe soit mieux proportionnée avec leur importance réelle qu'aujourd'hui, où l'écart est très grand.

Voilà comment nous allons travailler.

Dans le même temps, on peut affirmer qu'à Helsinki, après les efforts franco-britanniques de Saint-Malo, après la réunion de Cologne, cette chimère qu'était la défense européenne, qui n'a fait l'objet que de discours pendant longtemps sans avancer, a commencé à devenir une réalité.

Sur tous ces plans, le Conseil européen d'Helsinki aura marqué les orientations stratégiques vers lesquelles nous allons tendre dans les années à venir. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

NAUFRAGE DU PÉTROLIER ERIKA

M. le président.

La parole est à Mme Jacqueline Lazard.

Mme Jacqueline Lazard.

Ma question, que je pose au nom des députés socialistes du Finistère, s'adresse à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Monsieur le ministre, au moment où je vous parle, l'inquiétude est grande dans le Finistère. De nouveau, après le Torrey Canyon , l' Olympic Bravery , le Bohlen, l' Amoco Cadiz, le Gino et le Tanio, un navire transportant 30 000 tonnes de fioul lourd a coulé au large de nos côtes. Les vingt-six membres d'équipage du pétrolier Erika ont pu être sauvés grâce à l'extraordinaire courage des sauveteurs de la marine nationale et de la SNSM, que je souhaite saluer.

Pour ce qui concerne une éventuelle marée noire, le pire n'est pas sûr à l'heure où je vous parle. Mais ce naufrage, qui a réveillé de sombres souvenirs, prouve que la vigilance ne doit pas faiblir. Il est peut-être trop tôt pour désigner des responsabilités clairement établies. Toutefois, il semble que la conception du navire soient autant que les conditions climatiques à l'origine de ces événements.

C'est donc encore une fois la question des pavillons de complaisance qui est posée.

Comment, monsieur le ministre, accepter qu'au large de nos côtes, des navires construits conformément à des normes anciennes et aujourd'hui dépassées continuent à transporter des cargaisons dangereuses pour l'environnement ? Plus grave encore, comment accepter que des hommes soient mis en danger, comme les membres indiens de l'équipage de ce navire immatriculé à Malte et dont l'armateur est italien ? Le progrès de la réglementation du transport maritime et de la formation des marins est l'un des éléments indispensables de la régulation que nous appelons de nos voeux.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 14 DÉCEMBRE 1999

Au-delà des mesures immédiates que les autorités maritimes ont pu prendre pour éviter un drame humain, comment, monsieur le ministre, entendez-vous prévenir les risques économiques réels pour le sud de la Bretagne ? Et plus généralement, que comptez-vous faire pour réduire le plus possible le risque que de tels événements se reproduisent ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Madame la députée, dès que le centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage en mer - le CROSS - d'Etel a reçu à six heures du matin l'appel de détresse, la première question qui lui était posée était celle du sauvetage de l'équipage. Je veux saluer l'efficacité et le courage des sauveteurs. Cinq membres d'équipage, puis les vingt et un autres ont été hélitreuillés. Le premier objectif était de sauver les hommes.

Cela dit, le risque que vous avez évoqué est réel, même s'il ne prend pas les mêmes dimensions que pour l' Amoco Cadiz ou les autres sinistres que vous avez cités.

En effet, il y a tout de même près de 30 000 tonnes de pétrole dans les cales du navire.

Sur la zone, il y a toujours de la tempête, de la houle et encore des creux de six mètres, et l'orientation des vents peut être inquiétante. Etant donné la situation, toutes les précautions doivent être prises car le risque d'une catastrophe écologique n'est pas à exclure. Il faut donc s'en prémunir.

Le plan Polmar-terre sera décidé, le cas échéant, en prenant en compte, évidemment, le risque réel et le lieu précis du risque. Les décisions seront prises en fonction du déplacement de la nappe de pétrole.

Vous avez tout à fait raison de parler de prévention.

Dès le début, j'ai diligenté une enquête technique et administrative pour connaître les causes du naufrage, et même si le bateau avait été certifié. Nous voulons en savoir plus. Une enquête judiciaire a également été ouverte. Comme vous le faisiez observer fort justement, la rentabilité et la recherche d'économies à tout prix sur le matériel et sur les hommes ne doit pas être de règle s'agissant du transport de marchandises, à plus forte raison de produits pouvant menacer gravement l'environnement en cas de naufrage.

Voilà pourquoi le gouvernement français a décidé de renforcer les centres de sécurité qui assurent les contrôles.

Nous avons également proposé, à l'échelle européenne, le projet EQUASIS, qui a été d'ailleurs repris par les EtatsUnis, le Japon et Singapour, projet grâce auquel nous pourrions, en temps réel, connaître l'état de chaque navire circulant dans le monde et auprès des côtes.

Je suis de votre avis, madame la députée : ce n'est pas la « complaisance » qui doit prévaloir dans le trafic maritime mais la sécurité et la fiabilité des matériels. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

TRANSPORT FERROVIAIRE

M. le président.

La parole est à M. Jean-Jacques Filleul.

M. Jean-Jacques Filleul.

Ma question s'adresse à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Monsieur le ministre, grâce à l'adoption d'une proposition de résolution, les députés ont combattu avec vous, en juin dernier, les excès des propositions d'ouverture à la concurrence du transport ferroviaire avancées par la Commission européenne. Celle-ci a pourtant, comme vous et comme de plus en plus de citoyens français et européens, l'ambition de développer le transport des marchandises par le train et de résoudre ainsi les multiples problèmes, liés à l'environnement et à l'insécurité, que pose le tout-routier.

Ce sont nos manières d'y parvenir qui divergent. La commission prône la dérégulation. Or nous voyons ce que la loi de la jungle dans le transport routier entraîne pour les conditions de travail des salariés et pour la vie quotidienne de chacun de nos concitoyens. C'est pourquoi le gouvernement français, à travers vous, monsieur le ministre, défend la mise en place d'une politique européenne des transports régulée, respectueuse de l'environnement et des conditions sociales.

M. Renaud Donnedieu de Vabres.

Envoyez les violons !

M. Jean-Jacques Filleul.

Le conseil des ministres européens des 9 et 10 décembre a pris, dans ce contexte, d'importantes décisions concernant l'avenir du transport ferroviaire en France et en Europe. Nous aimerions savoir si un accord a été trouvé permettant d'éviter les aspects les plus négatifs des directives, de ce qu'on appelle le paquet d'infrastructures.

Quelles conséquences auront les décisions de ce conseil sur le service public ferroviaire français ? Par ailleurs, nous aimerions connaître les moyens financiers que l'Union européenne entend consacrer plus précisément au développement du transport ferroviaire de marchandises au sein de l'enveloppe consacrée au transport ferroviaire.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Monsieur le député, vous m'avez fait part, avant la réunion du conseil des ministres des transports, au titre de votre responsabilité au conseil supérieur du service public ferroviaire, de vos inquiétudes à propos des propositions de la Commission.

Au mois de juin, vous avez raison, les velléités de libéralisation étaient très fortes mais nous avons pu les mettre en échec. Ensuite, au conseil des ministres des transports d'octobre, la France s'est efforcée de faire accepter l'idée que, quel que soit le mode d'exploitation choisi, il fallait garantir l'accès au rail pour développer le trafic international de marchandises. Cette démarche a débloqué la situation et le Conseil a ensuite travaillé dans cet esprit.

Plus précisément, j'avais proposé qu'un observatoire soit mis en place. Acte nous en a été donné.

Par ailleurs, alors que la Commission européenne suggérait de séparer les fonctions respectives des entreprises ferroviaires et des Etats notamment en ce qui concerne la sécurité, il n'en a rien été, et nous avons émis l'idée d'un label européen.

Un réseau de fret ferroviaire européen est en train de se mettre en place.

S'agissant de la tarification, la France, ainsi que d'autres pays, est favorable à ce qu'on appelle le prix au

« coût marginal ». Si cette notion n'a pas été spécifiée dans la déclaration, la notion de « coût attractif » a été acceptée par tout le monde. La Commission a même


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 14 DÉCEMBRE 1999

accepté ma proposition de réduire le coût des péages pour les lignes sous-utilisées et dont le développement est d'ores et déjà décidé - pour la France, je pense, par exemple, à la ligne Béziers-Neussargues-Clermont.

Quant aux goulets d'étranglement, et sans mettre en cause les financements prévus entre autres pour le TGVest européen, 200 millions d'euros, soit 1,2 milliard de francs, seront débloqués pour s'attaquer à ce problème qui concerne surtout les pays de transit comme la France.

Enfin, la directive 91-440 va être modifiée pour préciser davantage les choses en matière d'interopérabilité et nous avancerons sur cette question d'ici à la fin 2001.

Ce qui est en marche, ce n'est donc pas la libéralisation à tout crin, comme le voudraient certains, mais le développement du fret ferroviaire dans l'intérêt des pays et de l'Europe.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

DIFFICULTÉS DES CAISSES D'ALLOCATIONS FAMILIALES

M. le président.

La parole est à Mme Nicole Bricq.

Mme Nicole Bricq.

Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

La mise en place du système informatique dénommé

« Cristal » a profondément perturbé le fonctionnement des caisses d'allocations familiales. C'est particulièrement le cas en Ile-de-France où elles souffraient déjà d'un déséquilibre structurel, du fait d'un stock important de dossiers très lourds à gérer. J'ai pu constater en Seine-etMarne que, en dépit des efforts accomplis pour faire face au flux de demandes nouvelles, notamment en matière de RMI, lesquelles ont d'ailleurs toutes pu être satisfaites, le stock continue de grossir et ne peut pas être traité.

Vous avez autorisé, madame la ministre, un plan d'urgence qui a permis de mettre à la disposition des caisses d'Ile-de-France des personnels venant des autres régions, fort utiles pour traiter les demandes téléphoniques. Vous avez en outre autorisé le recrutement de personnels temporaires.

Mais ces mesures d'urgence, par définition, vont s'interrompre, au moment pourtant où les caisses vont devoir appliquer rapidement les mesures que vous avez annoncées la semaine dernière et que, fort légitimement, les chômeurs attendent dans les délais que vous avez prescrits.

Au-delà de ces mesures conjoncturelles, quelles mesures structurelles pourraient remédier à ce qui apparaît tout de même comme une défaillance devant la montée de la demande sociale ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Madame la députée, depuis plusieurs mois, en effet, les caisses d'allocations familiales connaissent des difficultés et les allocataires constatent des retards de paiement. Bien que la gestion soit paritaire, j'ai été très attentive à ce dossier, que j'ai suivi avec la présidente de la caisse.

Au départ, nous pensions qu'il s'agissait surtout de difficultés liées à la mise en place du système informatique

« Cristal », qui se sont d'ailleurs essentiellement manifestées en Ile-de-France et dans le Nord Pas-de-Calais, le système ayant fonctionné d'une manière relativement correcte dans les autres caisses. Dès qu'il fonctionnera partout de façon satisfaisante, il représentera une amélioration en permettant aux agents de consacrer plus de temps à s'occuper des usagers. C'est, je crois, une bonne chose.

M. Yves Nicolin.

Et les 35 heures ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Je vais y venir, monsieur le député. (« Ah ! » sur les sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du g roupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Comme

Mme Bricq l'a rappelé, j'ai proposé un plan d'urgence, afin que les situations les plus délicates soient traitées sans tarder, que, par exemple, des contacts soient noués avec les bailleurs lorsqu'on constatait des retards de paiement de loyer. Mais je crois que c'est insuffisant, et j'ai proposé à la présidente de la CNAM - qui l'a acceptée - qu'ait l ieu, dans les plus brefs délais - et elle a déjà commencé -, une inspection générale des affaires sociales, afin d'établir un diagnostic des besoins réels et, si nécessaire, d'anticiper des embauches liées à la réduction de la durée du travail.

A cet égard, je regrette que l'UCANSS ait tardé à engager les négociations sur la réduction de la durée du travail.

Je saisis l'occasion pour rendre hommage aux agents des caisses qui reçoivent quotidiennement des personnes en difficulté : la directrice générale de la CNAF vient de me faire savoir que les primes annoncées par le Premier ministre seraient versées partout avant Noël. C'est dire qu'en dépit des difficultés, que nous sommes en train de résoudre, ces personnels se mobilisent chaque fois qu'il s'agit d'aider les plus démunis.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Nous passons au groupe Démocratie libérale et Indépendants.

CANDIDATURE DE LA TURQUIE À L'ADHÉSION À L'UNION EUROPÉENNE

M. le président.

La parole est à M. Pierre Lequiller.

M. Pierre Lequiller.

Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères et reprend celle que posait tout à l'heure mon collègue Donnedieu de Vabres sur les frontières de l'Europe, à laquelle il n'a pas répondu.

Dans une démocratie digne de ce nom, le Gouvernement consulte le Parlement avant de prendre des décisions majeures.

M. Renaud Donnedieu de Vabres.

Il a raison !

M. Pierre Lequiller.

Or, c'est sans consultation aucune du Parlement que le Gouvernement a pris, à Helsinki, position en faveur de la candidature de la Turquie.

Cette décision est pourtant fondamentale car elle détermine l'avenir de l'Union. Elle déplace ses limites géographiques, transforme sa nature et remet en cause sa cohérence conceptuelle et culturelle. Dès lors que l'on accepte la Turquie, qui compte 63 millions d'habitants, et dont une partie tout à fait marginale se situe sur le territoire européen, on justifie de facto la candidature d'autres pays, à commencer par la Géorgie, l'Ukraine ou la Russie, qui font déjà partie du Conseil de l'Europe.

Mieux aurait valu renforcer le statut d'associé à l'Union européenne, plus approprié à ces pays.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 14 DÉCEMBRE 1999

Au nom du groupe Démocratie libérale, j'ai déjà posé cette question à plusieurs reprises. Notre groupe fait valoir, depuis longtemps, qu'il n'est pas cohérent de défendre la candidature de la Turquie, alors que son entrée dans l'Union n'est, pour beaucoup, en France comme en Europe, ni souhaitable ni souhaitée.

M. François Goulard.

Très bien !

M. Pierre Lequiller.

Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement. A ce jeu de dupes, on risque soit de transformer la nature de l'Europe que nous voulons, soit d'entretenir en Turquie des espoirs fallacieux qui soulèveront des problèmes diplomatiques plus graves encore à l'avenir.

Alors que, vous le disiez tout à l'heure, monsieur le ministre, la priorité est à l'approfondissement, on dilue, on fragilise plus encore la construction européenne.

Ce n'est pas en catimini que l'on prend de telles décisions sur les frontières futures de l'Union. Il faudra même, à terme, selon notre Constitution, soit une réunion en Congrès, soit un référendum, qui peut se révéler nécessaire sur un sujet aussi fondamental.

Toute adhésion nouvelle doit recueillir l'accord unanime des pays membres, donc de la France. Vous n'avez pas à engager notre pays dans un tel processus sans l'accord exprès du Parlement.

C'est pourquoi je reviens sur la question qui était posée tout à l'heure. Le groupe Démocratie libérale souhaite solennellement l'organisation, dans les plus brefs délais, d'un débat en séance plénière sur les frontières de l'Union, suivi d'un vote : oui ou non, le ferez-vous ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants et sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.

M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères.

Monsieur le député, j'ai rappelé tout à l'heure que, depuis 1963, tous les dirigeants européens qui se sont succédé dans l'Europe des Six, des Neuf, des Douze, des Quinze, ont reconnu la vocation européenne de la Turquie.

M. François d'Aubert.

Inutile de continuer !

M. le ministre des affaires étrangères.

Le problème était de savoir comment traiter cette question et comment se servir de cette aspiration de la Turquie comme d'un levier pour sa modernisation et sa démocratisation.

Depuis 1995, le Président de la République s'est fait c onstamment, dans toutes les enceintes, en France comme à l'étranger, l'avocat de l'acceptation de la candidature turque.

M. Yves Nicolin.

Demandez au Parlement !

M. le ministre des affaires étrangères.

Ensuite, il y a eu un débat public. Aucune décision n'a été prise en catimini. Rien n'est plus transparent qu'un Conseil européen ? Et il faut s'en réjouir ! Donc les arguments en faveur de l'une et l'autre thèse ont été parfaitement soupesés.

M. Yves Nicolin.

A quoi servons-nous ?

M. le ministre des affaires étrangères.

Je vous demande de ne pas confondre la décision d'Helsinki avec une adhésion : aux termes des textes, les parlements des pays de l'Union, le jour venu, seront saisis des nouvelles adhésions et devront les ratifier.

M. François d'Aubert.

Il faut un référendum !

M. le ministre des affaires étrangères.

Ce n'est pas ce qui a été décidé à Helsinki, où l'on a simplement pris acte de la candidature de la Turquie et décidé de ne pas même commencer les négociations parce que ce pays est encore trop éloigné du respect des critères de Copenhague, lesquels définissent notre conception de la démocratie, selon nos valeurs, le respect du droit et des minorités.

Quand la Turquie se sera rapprochée de ces critères, la négociation commencera. Elle sera évidemment difficile.

Elle l'est déjà avec tous les pays aujourd'hui candidats qui sont au nombre de douze : les six avec lesquels elle a commencé, il y a quelques mois, les six avec lesquels elle va commencer dans quelques semaines.

Je me réjouis que votre curiosité et votre intérêt soient aussi forts sur cette orientation stratégique. Grâce aux commissions spécialisées, vous serez constamment informés. Ce n'est que le jour venu, après une négociation qui n'a pas encore commencé puisque les conditions de son engagement ne sont pas encore réunies, que, naturellement, les vraies décisions sur l'adhésion seront prises dans le respect des textes et de la Constitution, et dans la plus grande transparence.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

Suspension et reprise de la séance

M. le président.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de M. Patrick Ollier.)

PRÉSIDENCE DE M. PATRICK OLLIER,

vice-président

M. le président.

La séance est reprise.

3

DROIT APPLICABLE OUTRE-MER Discussion, en deuxième lecture, de trois projets de loi de ratification d'ordonnances

M. le président.

L'ordre du jour appelle la discussion, en deuxième lecture : du projet de loi portant ratification des ordonnances no 98-522 du 24 juin 1998, no 98-731 du 20 août 1998, no 98-773 du 2 septembre 1998 prises en application de la loi no 98-145 du 6 mars 1998 portant habilitation du Gouvernement à prendre, par ordonnances, les mesures législatives nécessaires à l'actualisation et à l'adaptation du droit applicable outre-mer (nos 1967, 2008) ; du projet de loi portant ratification des ordonnances no 98-524 du 24 juin 1998, no 98-525 du 24 juin 1998, no 98-581 du 8 juillet 1998, no 98-775 du 2 sep-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 14 DÉCEMBRE 1999

tembre 1998 prises en application de la loi no 98-145 du 6 mars 1998 portant habilitation du Gouvernement à prendre, par ordonnances, les mesures législatives nécessaires à l'actualisation et à l'adaptation du droit applicable outre-mer (nos 1969, 2014) ; et du projet de loi portant ratification des ordonnances no 98-580 du 8 juillet 1998, no 98-582 du 8 juillet 1998, no 98-728 du 20 août 1998, no 98-729 du 20 août 1998, no 98-730 du 20 août 1998, no 98-732 du 20 août 1998, no 98-774 du 2 septembre 1998 prises en application de la loi no 98-145 du 6 mars 1998 portant habilitation du Gouvernement à prendre, par ordonnances, les mesures législatives nécessaires à l'actualisation et à l'adaptation du droit applicable outre-mer (nos 1968, 2003).

La conférence des présidents a décidé que ces trois textes donneraient lieu à une discussion générale commune.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat à l'outre-mer.

M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer.

M onsieur le président, mesdames, messieurs, le 10 juin 1999, vous adoptiez quatre projets de loi de ratification des ordonnances prises en application de la loi du 6 mars 1998 portant habilitation du Gouvernement à prendre, par ordonnances, les mesures législatives nécessaires à l'actualisation et à l'adaptation du droit applicable outre-mer.

C es projets ont été examinés par le Sénat le 24 novembre 1999. L'un d'entre eux est définitivement adopté. Les trois autres ont fait l'objet d'amendements.

J'ai l'honneur de les soumettre à nouveau à votre examen en souhaitant que vous les adoptiez de façon définitive.

L e Sénat a adopté plusieurs amendements, pour l'essentiel rédactionnels et de cohérence, ainsi que quelques dispositions de fond. Ces amendements ont été approuvés par le Gouvernement.

Le Sénat a également supprimé un article qui résultait d'un amendement déposé par M. Buillard. Il a en cela rejoint les observations formulées par la commission des finances de votre assemblée dans son rapport du 9 juin dernier.

Le Sénat a aussi adopté quatre amendements du Gouvernement au projet de loi de ratification no 421 - que vous retrouvez dans le projet no 1968 qui vous est aujourd'hui soumis.

L'article 3 bis nouveau a pour objet d'étendre à la collectivité territoriale de Mayotte la procédure des amendes forfaitaires, procédure permettant de réprimer rapidement les infractions au code de la route, qui sont en constante progression à Mayotte. Ainsi, je pense, nous ferons oeuvre en matière de sécurité routière.

L'article 4 bis nouveau est une disposition technique qui permettra le fonctionnement effectif de la chambre territoriale des comptes de Polynésie française.

Vous le savez, l'article 207 de la loi organique du 19 mars 1999 a abrogé les articles L. 262-14 et L. 272-15 du code des juridictions financières, selon lesquels le f onctionnement des deux chambres territoriales des comptes de Nouvelle-Calédonie et de Polynésie française pouvait être assuré par les mêmes magistrats. Le Parlement a souhaité, en effet, qu'il y ait des chambres territoriales distinctes, l'une pour la Nouvelle-Calédonie, l'autre pour la Polynésie française.

Le Gouvernement en a tiré les conséquences. Il a pris les mesures nécessaires pour que la chambre territoriale des comptes de Polynésie française puisse fonctionner : les magistrats devant y siéger vont être désignés dans les jours qui viennent et les moyens matériels de fonctionnement sont prévus dans le projet de loi de finances pour 2000.

Toutefois, la charge de travail à accomplir ne justifie pas la présence d'un commissaire du Gouvernement à temps plein en Polynésie et une bonne utilisation des deniers publics plaide pour que le même magistrat assure ces fonctions en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française. Cette solution n'est pas sans précédent devant les juridictions administratives puisque le tribunal administratif de Cayenne, par exemple, fonctionne avec un commissaire du Gouvernement qui est en poste à Fortde-France.

Cette adaptation mineure permettra à la chambre territoriale des comptes de Polynésie française de fonctionner de façon effective dès le début de l'an 2000. Une rentrée solennelle est d'ailleurs prévue pour bien marquer l'installation de cette chambre territoriale, qui devra évidemment vérifier les comptes du territoire, des communes et des établissements publics.

L'article 4 ter nouveau concerne la Nouvelle-Calédonie.

Il vise à modifier la loi du 3 janvier 1969 relative au FIP, le fonds intercommunal de péréquation. En effet, l'article 9-2 de cette loi écarte du bénéfice de ce fonds les communes qui ont reçu, par contrat conclu avec l'Etat, des aides pour leurs programmes d'investissement. Etaient visés dans ce cadre les contrats de ville, notamment un contrat d'agglomération concernant Nouméa et trois communes environnantes. Or, l'article 3 de la loi du 19 mars 1999 permet aux communes, en application de l'accord de Nouméa, de conclure avec l'Etat des contrats dans les domaines économique, social et culturel. Ces deux articles sont donc incompatibles. Les dispositions de la loi du 3 janvier 1969 excluant du bénéfice du FIP toutes les communes bénéficiant de dispositifs contractuels pourraient aboutir à en exclure la grande majorité des communes de Nouvelle-Calédonie, ce qui ne correspond pas à la volonté du législateur. C'est pourquoi nous vous proposons de supprimer cette incompatibilité pour les contrats conclus en application des dispositions nouvelles de l'article 3 de la loi du 19 mars 1999.

Enfin, le Sénat a adopté un amendement gouvernemental relatif à la composition des conseils d'administration des deux universités du Pacifique, qui sont actuellement sous un régime provisoire et qui devraient connaître leur plein développement au début de l'année 2000.

Nous avons tenu compte du souhait de votre assemblée de voir augmenter le nombre des représentants de la Nouvelle-Calédonie et de la Polynésie dans ces conseils, mais nous avons aussi souhaité que les personnalités extérieures puissent y siéger, dans un cadre comparable à celui défini par des dispositions en vigueur pour les établissements d'enseignement supérieur dans l'ensemble du territoire.

Voilà quelles sont les modifications que le Gouvernement a souhaité introduire à l'occasion de cette discussion devant le Sénat.

Je vous remercie, mesdames, messieurs les députés, de l'attention que vous porterez à ces trois projets de loi de ratification, qui sont importants pour la modernisation du droit de l'outre-mer. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, suppléant M. Daniel Marsin, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales pour le projet de loi no 1967.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 14 DÉCEMBRE 1999

Mme Marie-Françoise Clergeau, suppléant M. Daniel Marsin, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales pour le projet de loi no 1967.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le projet de loi que nous examinons aujourd'hui a été adopté par l'Assemblée nationale en première lecture le 10 juin 1999. Il tend à ratifier trois ordonnances relatives au droit du travail et aux questions sanitaires et sociales outre-mer, prises en application de la loi d'habilitation du 6 mars 1998.

Ce projet a été examiné le 29 novembre 1999 par le Sénat, qui en a modifié le texte. Les modifications ne remettent pas en cause le dispositif adopté en première lecture par l'Assemblée nationale, mais le Sénat a introduit cinq articles additionnels, dont quatre résultent d'amendements de sa commission des affaires sociales et un d'un amendement gouvernemental.

Après l'article 1er , un nouvel article tend à prendre en compte le changement de statut de la Nouvelle-Calédonie, qui n'est plus un territoire d'outre-mer.

Le nouvel article 3 bis remplace, par référence à l'une des ordonnances, l'appellation « grossesse apparente » par celle de « grossesse médicalement attestée » dans la disposition du code du travail relative à la dispense de délaicongé applicable dans les départements et dans celle applicable en Nouvelle-Calédonie. La nouvelle rédaction est à la fois plus conforme à l'état des connaissances médicales et plus protectrice de la femme enceinte, car elle permet une prise en compte plus précoce de son état.

L'article 6 précise une rédaction et l'article 7, introduit par le Gouvernement, rectifie une erreur de référence.

Enfin, l'article 8 précise que, dans les départements d'outre-mer, la liste des spécialités pharmaceutiques remboursables prend en compte l'endémie de paludisme. La loi d'habilitation autorisait cette extension, mais aucune des ordonnances ne traitait de cette question, le Gouvernement ayant estimé qu'il s'agissait d'une disposition de nature réglementaire. Toutefois, même s'il apporte une précision peut-être superflue, cet article additionnel est inspiré par le souci légitime d'attirer l'attention sur un grave problème de santé publique dans le département de la Guyane.

Somme toute, s'ils sont de portée variable, les compléments introduits par le Sénat ont paru à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales pouvoir être acceptés.

Suivant la proposition du rapporteur, M. Marsin, empêché d'être présent aujourd'hui, la commission a adopté sans modification le texte du Sénat et je demande, en son nom, à notre assemblée de faire de même.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Yves Tavernier, rapporteur de la commission des finances, de l'économie générale et du plan pour le projet de loi no 1969.

M. Yves Tavernier, rapporteur de la commission des finances, de l'économie générale et du plan pour le projet de loi no 1969.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, voilà un texte, une fois n'est pas coutume, qui rencontre un assentiment unanime dans les deux chambres du Parlement.

Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez conclu un accord avec le Sénat et nous aurions mauvaise grâce à ne pas vous suivre.

De quoi s'agit-il ? Notre assemblée est saisie aujourd'hui, en deuxième lecture, d'un projet de loi portantr atification d'ordonnances découlant de la loi du 6 mars 1998 portant habilitation du Gouvernement à prendre par ordonnances les mesures législatives nécessaires à l'actualisation et à l'adaptation du droit applicable outre-mer.

Conformément à l'article 38 de la Constitution, le seul dépôt d'un projet de loi de ratification conditionne la validité juridique des ordonnances prises en application d'une loi d'habilitation. Le Gouvernement a tenu à ce que ce projet de loi de ratification soit renvoyé aux différentes commissions compétentes et soumis à l'examen du Parlement. Ce texte correspond donc à la volonté du Gouvernement de ne pas écarter le Parlement, provisoirement dessaisi de ses compétences constitutionnelles, du processus d'édiction du droit applicable outre-mer. Ce souci est assez rare pour être souligné. Il est amplement justifié et par le caractère particulièrement large de l'habilitation et par l'importance des questions traitées.

On peut également supposer que les recours déposés devant le Conseil d'Etat sur une de ces ordonnances ne sont pas étrangers à cette volonté d'obtenir une ratification explicite des ordonnances.

Quatre ordonnances, dont la ratification doit être opérée par le présent projet de loi, ont été prises par le Gouvernement dans des matières relevant de la compétence de la commission des finances. Je les rappelle brièvement.

Celle du 24 juin 1998 portant dispositions relatives à la déclaration périodique entre les départements de Guadeloupe et de Martinique concerne le problème de l'octroi de mer.

U ne deuxième ordonnance, datant également du 24 juin 1998, est relative à la modernisation des codes des douanes et au contrôle des transferts financiers avec l'étranger dans les territoires d'outre-mer et les collectivités territoriales de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon.

L'ordonnance du 8 juillet 1998 porte actualisation et adaptation des règles relatives aux garanties de recouvrement et à la procédure contentieuse en matière d'impôts en Polynésie française.

Enfin, l'ordonnance du 2 septembre 1998 est relative au régime des activités financières dans les territoires d'outre-mer et les collectivités territoriales de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon.

Le 10 juin dernier, notre assemblée a adopté en première lecture le projet de loi de ratification, après lui avoir apporté quelques modifications, que vous avez rappelées, monsieur le secrétaire d'Etat.

Le premier amendement était un amendement de cohérence ; un autre dispensait de timbre les procèsverbaux des douanes ; un troisième étendait à une série d'autres taxes la portée du privilège réservé, dans le projet de loi, aux taxes communales perçues en Polynésie française ; un quatrième, enfin, adopté malgré l'opposition de la commission des finances et celle du Gouvernement, transférait à l'assemblée de Polynésie française le pouvoir de déterminer le montant des amendes applicables à certaines infractions douanières.

L e Sénat a discuté du projet ainsi modifié le 24 novembre dernier et l'a adopté, après l'avoir amendé, en suivant le vote de sa commission des finances. Il a supprimé l'article additionnel portant sur l'ordonnance no 98-525, que votre assemblée avait adopté contre l'avis de votre commission. Je ne peux donc qu'être favorable à cette modification.

En outre, il a adopté huit autres amendements, qui ne posent vraiment pas de problèmes de fond.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 14 DÉCEMBRE 1999

Le premier est un amendement de précision, qui remplace, dans chacune des ordonnances, la référence aux territoires d'outre-mer par la référence aux territoires d'outre-mer et à la Nouvelle-Calédonie.

L'amendement relatif à l'ordonnance no 98-581 apporte une autre précision : il substitue les mots « tribunal de première instance » aux termes « juge de l'exécution », car cette fonction n'existe pas en Polynésie française. Là encore, nous ne pouvons, naturellement, qu'être d'accord avec cet amendement.

Les autres amendements, relatifs à l'ordonnance no 98775, visent pour l'essentiel à rattraper le retard du droit applicable outre-mer en le modifiant conformément aux normes métropolitaines les plus récentes, et non pas selon les normes antérieures à la date de promulgation de la loi portant habilitation du Gouvernement à prendre par ordonnances les mesures législatives nécessaires à l'actualisation et à l'adaptation du droit applicable outre-mer. En effet, si le Gouvernement devait respecter l'habilitation législative, le Parlement n'est pas soumis à la même contrainte et peut étendre à l'outre-mer des dispositions prises postérieurement à la loi d'habilitation.

L es articles additionnels introduits par le Sénat répondent ainsi à un appréciable souci de cohérence, de précision ou d'actualisation, qui ne saurait entraîner l'opposition de notre assemblée, d'autant que le Gouvernement les a approuvés.

Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, je vous demande, au nom de la commission des finances, d'adopter le projet tel que modifié par le Sénat.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Jérôme Lambert, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République pour le projet de loi no 1968.

M. Jérôme Lambert, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République pour le projet de loi no 1968.

Monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, sept ordonnances, publiées entre juillet et septembre 1998, concernant l'actualisation et l'adaptation du droit applicable outre-mer ont été regroupées dans un projet de loi de ratification dont l'examen a été confié à la commission des lois en juin dernier. Prises dans le cadre d'une habilitation autorisée par la loi du 6 mars 1998, ces sept ordonnances s'ajoutent à treize autres, regroupées dans trois projets de loi de ratification, dont les examens ont été confiés, selon les thèmes, à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, à la commission des finances, de l'économie générale et du Plan et à la commission de la production et des échanges.

Etait également présenté avec ces projets de loi de ratification un projet de loi habilitant le Gouvernement à procéder de nouveau par ordonnances pour l'adaptation et l'actualisation à l'outre-mer d'une série de mesures législatives.

Adoptés le 10 juin dernier par l'Assemblée nationale, ces projets ont été l'occasion pour votre rapporteur d'insister sur l'ampleur de la modernisation du droit applicable outre-mer qui a été entreprise.

Cette avancée importante a également été saluée par le Sénat ; l'utilisation de l'article 38 de la Constitution pour parvenir à une remise à niveau rapide sur des textes souvent techniques et disparates n'a pas été contestée.

Examiné le 6 octobre dernier, le projet de loi d'habilitation a ainsi pu être adopté sans modification par les sénateurs et a fait l'objet d'une publication définitive au Journal officiel du 26 octobre.

Le projet de loi de ratification que nous examinons aujourd'hui a été, lui, examiné au Sénat en séance publique le 24 novembre dernier et a été modifié par un nombre important d'amendements. Il convient de souligner dès maintenant, avant de procéder à un examen plus approfondi - qui, en réalité, a déjà été fait par M. le secrétaire d'Etat -, qu'aucun de ces amendements ne remet fondamentalement en cause les dispositifs législatifs proposés par les ordonnances. De plus, les modifications p roposées ne paraissent pas soulever de difficulté.

L'Assemblée nationale devrait donc pouvoir, en deuxième lecture, adopter sans modification le texte du Sénat.

Dix-huit amendements ont été adoptés sur proposition du rapporteur de la commission des lois du Sénat, notre ancien collègue Jean-Jacques Hyest.

Trois articles additionnels sont issus d'amendements présentés par le Gouvernement. Enfin, un amendement a été adopté sur proposition de M. Gaston Flosse, sénateur de Polynésie. Au total, notre assemblée se trouve donc saisie de vingt-deux articles additionnels supplémentaires.

Les amendements présentés par la commission des lois du Sénat modifient quatre des sept ordonnances présentées à la ratification. Ces amendements ne reviennent pas sur le fond du dispositif présenté par ces ordonnances ; ils ont pour objet, dans un souci de simplification et de bonne lisibilité des textes applicables outre-mer, de rétablir l'alignement sur le régime de droit commun du régime applicable outre-mer lorsque aucune spécificité ne justifie le maintien de divergences ou, au contraire, de mieux prendre en compte les spécificités locales, d'étendre des dispositions législatives intervenues depuis la publication des ordonnances, de supprimer des dispositions qui ont pu déjà faire l'objet d'une ratification, notamment par la loi du 19 mars 1999 relative à la NouvelleCalédonie, de mieux respecter le partage entre loi organique et loi ordinaire en supprimant, conformément à la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur l'article 38 de la Constitution, toute disposition pouvant relever de la loi organique. Enfin, un nombre important d'articles additionnels permettent de corriger des erreurs matérielles, des oublis et des rédactions imprécises.

Les trois amendements portant articles additionnels présentés par le Gouvernement complètent le projet de loi de ratification soit en insérant des dispositions supplémentaires dans les ordonnances, soit, en dehors de toute référence aux ordonnances, en modifiant des dispositions déjà existantes.

Le premier de ces amendements étend à Mayotte la procédure de l'amende forfaitaire pour de nombreuses contraventions. Le deuxième amendement modifie le code des juridictions financières afin d'aménager les fonctions de commissaire du Gouvernement dans les deux chambres territoriales des comptes de Nouvelle-Calédonie et de Polynésie française. Enfin, le troisième amendement permet de faire bénéficier du fonds intercommunal de péréquation des communes de Nouvelle-Calédonie ayant passé avec l'Etat des contrats de développement dans les domaines économique, social et culturel.

L'amendement présenté par M. Gaston Flosse, adopté par le Sénat, permet de créer, en Polynésie française, des groupements d'intérêt public dans les domaines de la culture, de la jeunesse, de l'enseignement et de l'action sanitaire et sociale.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 14 DÉCEMBRE 1999

Concernant les amendements adoptés par l'Assemblée nationale en première lecture, le Sénat n'a modifié qu'un seul d'entre eux, celui de M. Michel Buillard, qui introduisait à l'article 2 une disposition concernant la représentation des membres du territoire de la NouvelleCalédonie et de la Polynésie française au sein des conseils d'administration de leurs universités respectives. En effet, un autre amendement du Gouvernement a été adopté par les sénateurs, portant à trois le nombre des représentants de ces territoires au sein de chaque conseil d'administration, alors que le projet initial ne prévoyait que deux représentants. Nous notons cette avancée, monsieur le secrétaire d'Etat.

Deux ordonnances, celle concernant le délai de déclaration des naissances en Guyane et celle relative à l'application de l'article 21-3 du code civil à Mayotte n'ont été modifiées par aucune des deux assemblées.

La commission des lois a donc approuvé sans réserve ni modification le texte adopté par le Sénat, et j'invite l'Assemblée à faire de même.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Discussion générale commune

M. le président.

Dans la discussion générale commune, la parole est à M. François Rochebloine, premier orateur inscrit, pour dix minutes.

M. François Rochebloine.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous sommes appelés à examiner aujourd'hui en seconde lecture un ensemble de projets de loi visant à ratifier diverses ordonnances adoptées dans le cadre de la dernière loi d'habilitation du 6 mars 1998.

Au total, vingt ordonnances sont soumises à notre ratification aujourd'hui, tandis qu'une quinzaine d'autres devraient l'être dans le cadre de la nouvelle loi d'habilitation qui a été adoptée en première lecture et votée conforme par le Sénat. Il s'agit donc bien d'un projet de réformes de grande ampleur, touchant à des domaines aussi divers que le droit du travail, la santé, l'état civil, ou encore le droit pénal, et concernant aussi bien les départements que les territoires d'outre-mer, ainsi que les collectivités à statut particulier comme Mayotte et SaintPierre-et-Miquelon.

Il est vrai que l'article 38 de la Constitution prévoit expressément ce type de procédure qui correspond à la nécessité d'adapter le droit commun au statut particulier des pays d'outre-mer. Il résulte du principe de spécialité législative un retard parfois important quant à l'application du droit outre-mer : c'est pourquoi la procédure des ordonnances a le mérite de la rapidité et permet de répondre à certaines urgences. La pratique des ordonnances s'est généralisée, puisque l'utilisation de l'article 38 pour l'outre-mer représente aujourd'hui le tiers des lois d'habilitation.

La ratification des ordonnances n'est pas nécessaire à leur validité, le simple dépôt d'un projet de loi de ratification la garantissant. De 1960 à 1990, seules trente des 158 ordonnances prises en application de l'article 38 de la Constitution ont été expressément ratifiées. Cependant, sans cette ratification, les ordonnances n'ont que la valeur d'actes administratifs. La ratification par le Parlement leur donne donc force de loi.

Cette procédure constitue un indéniable dessaisissement du législateur au profit de l'exécutif et ne doit donc pas être prise à la légère. Il est en effet rare que le Parlement se dessaisisse de ses compétences dans des domaines aussi divers et parfois aussi spécifiques.

Certes, les conseils généraux sont consultés pour avis, de même que le Parlement lors de la procédure de ratification. Toutefois, il faut souligner que les avis des conseils généraux ne sont généralement pas suivis lorsqu'ils sont défavorables. En outre, les dispositions prises en vertu des ordonnances sont applicables dès leur inscription au Journal officiel, avant même leur ratification par le Parlement.

A ce sujet, nous vous savons gré d'avoir cependant permis que les commissions saisies au fond puissent examiner et amender ces ordonnances, alors qu'auparavant seule la commission des lois était consultée. C'est un progrès appréciable, mais je souhaiterais cependant que, dans leur rédaction, les projets de loi prennent mieux en compte l'outre-mer, afin d'éviter, d'une part, des retards préjudiciables et, d'autre part, de recourir aux ordonnances, qui, malgré tout, ne doivent pas constituer la règle.

Une circulaire du 15 juin 1990 relative à l'applicationo utre-mer des textes législatifs et réglementaires recommandait de veiller à l'insertion d'une mention spécifique dans les projets, afin de rendre les textes applicables outre-mer. Ces recommandations sont pour le moment restées lettre morte, ce qui oblige à avoir recours aux ordonnances.

N ous allons être amenés très prochainement, je l'espère, à examiner le projet de loi d'orientation sur l'outre-mer au cours de la discussion de ce texte, nous aurons l'occasion d'avoir une véritable discussion sur l'avenir de celui-ci.

M. Henry Jean-Baptiste.

Très bien !

M. François Rochebloine.

En préalable à cette discussion, je voudrais présenter quelques remarques sur les grandes lignes de ce projet que vous avez rendu publiques la semaine dernière, monsieur le secrétaire d'Etat.

La situation économique et sociale difficile à laquelle est confronté l'outre-mer implique de mettre en place une politique adaptée. Le développement économique est conditionné par la levée des handicaps propres à l'outremer : isolement, étroitesse des marchés, absence de matières premières pour certains. Il est donc nécessaire de maintenir outre-mer des dispositions particulières pour y réduire considérablement le coût de l'emploi. Ainsi, à Saint-Pierre-et-Miquelon, la cherté de la vie est telle que le coût salarial global y est supérieur de 27 % par rapport à celui de la France métropolitaine et de 200 % par rapport à celui de Terre-Neuve.

Par ailleurs, compte tenu de l'étroitesse du marché local, les activités économiques doivent majoritairement s'orienter vers l'exportation : il faut donc aussi prendre en compte le coût du transport des marchandises.

Je souhaiterais vous interroger, monsieur le ministre, sur les conséquences de l'arrivée à échéance, au printemps 2000, de la loi Perben sur l'insertion, l'emploi et le développement économique dans les DOM et à SaintPierre-et-Miquelon. Ce texte, qui prévoit notamment des exonérations sectorielles, permet de réduire les charges sociales patronales dans la limite du SMIC pour tous les produits transformés et destinés à l'exportation : produits de la mer, activités de service, hôtellerie, restauration, entre autres.

Il est essentiel pour le développement économique de l'outre-mer de maintenir des dispositions économiques favorables, car la disparition des mesures de la loi Perben entraînerait, par exemple, pour les entreprises de première transformation de Saint-Pierre-et-Miquelon, un surcoût salarial de 22 %, surcoût qu'elles ne pourraient supporter.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 14 DÉCEMBRE 1999

Il est d'autant plus urgent d'élaborer des dispositifs dynamiques d'aide à l'emploi que la situation sociale reste particulièrement délicate. Ainsi, en Martinique et en Guadeloupe, le taux de chômage dépasse les 30 %, les secteurs traditionnels de l'économie connaissent une crise structurelle et les relations sociales se dégradent, comme en attestent les nombreux mouvements sociaux.

Vous avez publié récemment un bilan positif de la loi Perben montrant que les secteurs bénéficiaires des exonérations de charges ont accru leurs effectifs de 14 %, soit quatre fois plus que dans les secteurs non exonérés.

M. Henry Jean-Baptiste.

C'est vrai !

M. François Rochebloine.

Lors de la première lecture, vous aviez indiqué que le Gouvernement envisageait de mettre en place un nouveau dispositif dans le cadre de la future loi d'orientation. Ainsi, nous constatons, dans les grandes lignes du projet de loi d'orientation qui nous sont connues, que vous proposez de substituer aux orientations de la loi Perben un « nouveau système d'exonération de cotisations sociales de plus grande ampleur ».

Celui-ci concernerait, d'une part, toutes les entreprises de moins de onze salariés, qui bénéficieraient d'une exonération totale de cotisations patronales de sécurité sociale pour les salaires inférieurs ou égaux à 1,3 fois le SMIC, et, d'autre part, certains secteurs d'activité comme le tourisme ou les entreprises dynamiques à l'exportation.

Je suis pour ma part favorable à une certaine stabilité des dispositifs qui ont fait la preuve de leur efficacité : les entreprises d'outre-mer, comme ailleurs, en ont besoin. Je partage l'opinion de mon ami Henry Jean-Baptiste, député de Mayotte, pour qui « le meilleur moyen d'encourager l'esprit d'entreprise réside dans l'utilisation cohérente des aides, l'amélioration du statut fiscal des entreprises et la formation des hommes ».

Parallèlement, l'aide et le soutien fournis par la métropole dans un esprit de solidarité appellent de la part de ces territoires une plus grande responsabilité. Il nous faut passer d'une situation trop souvent qualifiée par l'opinion publique de dépendance et d'assistance à une conception plus dynamique et responsable du développement, qui donne toute sa chance à la créativité locale. L'opération récente des défis jeunes a permis de révéler de nombreux projets et de faire connaître de futurs créateurs d'entreprise qu'il nous faut encourager.

Enfin, le dernier élément que je souhaitais évoquer - et ce n'est pas le moindre - concerne le développement institutionnel de ces territoires.

Vous annoncez, monsieur le secrétaire d'Etat, une

« nouvelle étape dans la décentralisation ». Dans ce cadre, vous avez eu raison de consulter les élus locaux, les parlementaires et les responsables économiques et sociaux des DOM, ainsi que les opinions publiques locales lors d'un récent sondage. La majorité de cette opinion a montré qu'elle est favorable aux mesures destinées à élargir la décentralisation et la déconcentration, assorties d'un accroissement des responsabilités du conseil général et du conseil régional, mais qu'elle ne souhaite ni la remise en cause ni le bouleversement du statut départemental. Nous sommes également favorables dans ce domaine à un approfondissement des relations entre les territoires de l'outre-mer et les Etats qui les entourent.

En conclusion, je voudrais rappeler combien il est essentiel de se donner les moyens d'une politique de l'outre-mer ambitieuse. En effet, ces territoires, répartiss ur l'ensemble des continents, constituent, pour la France, une chance supplémentaire de rayonnement culturel, politique et économique dans le monde.

La politique de l'outre-mer doit respecter la diversité et la spécificité de chacun de ces pays : spécificités institutionnelles, géographiques et culturelles. Saint-Pierre-etMiquelon, Wallis-et-Futuna, la Guadeloupe ont finalement peu de chose en commun. l'outre-mer est plurielle.

Cette spécificité nécessite l'adoption de règles particulières.

Le groupe UDF estime que l'Europe peut jouer un rôle essentiel dans le cadre de cette politique de l'outremer. Il soutient les orientations prises dans le cadre de la résolution sur l'avenir du régime d'association à la Communauté européenne, adoptée par la majorité des pays et territoires d'outre-mer PTOM français le 28 avril 1999 : ces derniers réclament certaines adaptations du régime d'association permettant de mieux prendre en compte les handicaps structurels des économies d'outremer ainsi que leurs particularités institutionnelles.

Je souhaite donc, monsieur le secrétaire d'Etat, que la loi d'orientation sur l'outre-mer, dont la discussion est prévue au premier semestre 2000, soit véritablement l'occasion d'ouvrir une réflexion sur l'avenir de l'outre-mer.

En attendant, le groupe UDF votera les projets de loi de ratification de ces différentes ordonnances.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

La parole est à M. Pierre Goldberg.

M. Pierre Goldberg.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, cette discussion en deuxième lecture est pour nous l'occasion renouvelée de réaffirmer notre opposition de principe à la procédure des ordonnances prévue par l'article 38 de notre Constitution. En effet, quelque justification conjoncturelle que l'on puisse y trouver, nous demeurons, pour ce qui nous concerne, persuadés que le recours à cette technique constitue bel et bien un dessaisissement des prérogatives du Parlement au profit de l'exécutif.

D'ailleurs, la navette à laquelle donne lieu l'examen de ces projets de loi de ratification - ce qui est une bonne chose - démontre la volonté du législateur de ne pas voir cette procédure des ordonnances banalisée, transformée en je ne sais quel blanc-seing. Ainsi, les amendements adoptés par notre assemblée et par le Sénat traduisent pleinement la nécessité et la pertinence de l'intervention du Parlement dans des domaines qui relèvent de son champ de compétences.

Aussi, ce rappel et ce constat étant faits, convient-il, monsieur le secrétaire d'Etat, de se féliciter au moins du fait, que ces quatorze ordonnances aient donné lieu à trois projets de ratification permettant à chaque commission compétente sur le fond de procéder à un examen approfondi.

De plus, s'agissant du droit applicable outre-mer, nous nous réjouissons également que la consultation des assemblées des collectivités d'outre-mer ait été à ce propos plus ambitieuse. Rien, ni la Constitution, ni la loi, ni le décret du 26 avril 1960, ni même la jurisprudence du Conseil constitutionnel, ne prévoit de requérir l'avis préalable de ces assemblées dans le cadre de ces ordonnances.

Aussi voulons-nous croire que la prochaine loi d'orientation sur l'outre-mer procédera bien du même esprit de concertation et de dialogue, et ce compte tenu du fait que, au-delà de tout clivage partisan, les présidents des conseils régionaux de Guadeloupe, de Guyane et de la Martinique ont unanimement adopté le 1er décembre dernier une déclaration commune visant à la création d'un


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nouveau statut de région d'outre-mer dont l'assemblée cumulerait à la fois les compétences du conseil régional et du conseil général.

Cette initiative s'inscrit dans le contexte économique et social de ces collectivités, qui n'a cessé, c'est évident, de se détériorer. Et loin d'enrayer ce déclin dont souffrent les populations locales, le cadre mono-départemental de ces régions d'outre-mer n'a pas permis de surmonter l'état d e dépendance qu'elles connaissent dans plusieurs domaines.

Les élus d'outre-mer souhaitent, par conséquent - nous semble-t-il -, disposer des moyens d'un développement durable, porteur de progrès pour ces populations. La déclaration commune dite de « Basse-Terre » ne saurait donc se limiter à un quelconque effet d'annonce, d'autant qu'elle fait suite à la bi-départementalisation envisagée pour la Réunion, qui a d'ailleurs reçu l'assentiment du Président de la République.

Dès lors, les départements d'outre-mer ont en commun leur désir de ne plus voir leur conseil régional se superposer à un conseil général unique. Toutefois, la volonté exprimée par les élus dans la déclaration de Basse-Terre nécessiterait, à l'évidence, une révision constitutionnelle pour créer un nouveau statut de région d'outre-mer. En effet, étant donné la jurisprudence du Conseil constitutionnel et l'application qui est faite du principe d'assimilation législative figurant dans les articles 72 et 73 de la Constitution, une loi serait insuffisante.

Aussi, monsieur le ministre, face à ces chantiers d'avenir qui ne manqueront pas de marquer la loi d'orientation sur l'outre-mer que nous serons prochainement amenés à examiner, les députés communistes voteront vos projets de loi de ratification, car ils souscrivent à la modernisation qui peut résulter de l'actualisation et de l'adaptation du droit applicable outre-mer.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. Dominique Bussereau.

M. Dominique Bussereau.

La procédure de ratification d'ordonnances est, bien évidemment, une procédure tout à fait classique et habituelle. Toutefois, on peut se demander, comme l'a fait François Rochebloine, si, sur le plan juridique, il n'y a pas dessaisissement du Parlement, ou s'interroger, comme l'a fait M. Golberg, sur l'arrièreplan politique de la procédure.

Le reproche que l'on peut faire à cette procédure, c'est que, dans certains cas, elle vise à réparer des oublis dans la rédaction de certains textes. Je pense qu'une excellente manière de l'empêcher serait peut-être, en dehors du rôle naturel que devrait jouer le secrétariat général du Gouvernement, que le ministère chargé de l'outre-mer ait dans chaque ministère, dans chaque grande administration, un correspondant ultra-marin vérifiant que l'outre-mer n'est pas oublié dans les textes. Cela permettrait d'éviter ces procédures de ratification ou tout simplement ces oublis dont la commission des lois doit souvent délibérer.

Les projets de loi n'appellent pas de remarques particulières, sinon pour observer - avec amusement - que, dans certains cas, la ratification précède le texte luimême.

(Sourires.)

Ainsi, dans le projet de loi no 1968, dont le rapporteur est M. Lambert - ce qui ne m'étonne pas connaissant le grand amour que notre collègue porte à ce millésime -,...

M. Jérôme Lambert, rapporteur.

En 1968, j'étais encore un peu jeune !

M. Dominique Bussereau.

... il est fait état de l'article 2 ter de la loi relative aux polices municipales.

Or, monsieur le secrétaire d'Etat, vous n'ignorez sans doute pas, vous qui avez assuré l'intérim de M. le ministre de l'intérieur, que tous les décrets relatifs à cette loi ne sont pas encore publiés, ce qui fait que ce texte très attendu par tous les maires de France, par les préfets et par les procureurs, est pour l'instant inapplicable. En effet, en raison de différends entre la Chancellerie et la place Beauvau,...

M. Jean-Luc Warsmann.

Cela n'arrive jamais !

M. Dominique Bussereau.

... les décrets d'application du texte ne sont pas publiés. Or vous l'étendez alors qu'il n'est pas encore applicable sur le territoire métropolitain.

Je me permet de vous le signaler, monsieur le secrétaire d'Etat, et je vous demande de transmettre le message à M. Chevènement quand il se sera remis de la journée d'hier ! (Sourires.)

De même, l'article concernant l'organisation juridictionnelle dans la collectivité territoriale de Mayotte pose problème - je le dis devant mon collègue Henry JeanBaptiste, qui a été témoin des réactions de la commission des lois lors du voyage de celle-ci à Mayotte. Nous souhaitons - même si cela n'a rien a voir avec le contenu même de l'article - que l'ensemble de l'organisation du système judiciaire à Mayotte fasse l'objet d'une réflexion.

Il est vrai que la justice caïdale, quel que soit son intérêt, pose de réelles difficultés d'application, ainsi que l'a fait observer la commission des lois.

Monsieur le secrétaire d'Etat, puisqu'il n'y a pas grandchose à dire sur cette procédure de ratification, sauf des choses positives - ce qui, vous en conviendrez, est triste pour un député de l'opposition (Sourires) -, permettezmoi d'évoquer le projet de loi d'orientation sur l'outremer dont le contenu commence à être connu.

Nos premières réactions - en attendant la phase de concertation qui va s'engager - sont plutôt teintées d'insatisfactions. Nous aurions souhaité plus. Vous savez que, à titre personnel - mais c'est aussi l'opinion du groupe auquel j'appartiens -, je suis opposé à la création de deux départements à la Réunion. Vous me rétorquerez sans doute, monsieur le secrétaire d'Etat, que de grandes fées se sont penchées sur le berceau de la bidépartementalisation, mais vous avez pu noter tout à l'heure dans la réponse qu'a faite M. Védrine sur un tout autre sujet que tous les saints de l'opposition ne suivaient pas toujours les mêmes fées.

(Sourires.)

Bref, nous nous interrogeons sur la nécessité administrative, sur le coût de fonctionnement et sur l'intérêt réel de la création d'un deuxième département à la Réunion, même si l'ensemble de nos collègues réunionnais sont d'accord sur ce point. Je souhaite que, en cette affaire, on ne cède pas à l'effet de mode et que la réflexion se poursuive.

Autre point qui nous paraît insuffisant : le fait de prévoir l'assemblée unique pour certains cas seulement.

Pourquoi ne pas aller jusqu'au bout de la logique ? Pourquoi ne pas prendre en compte les déclarations des trois présidents de conseils régionaux, de Guyane et des deux départements des Antilles, et réflechir à la création d'une assemblée véritablement unique pour éviter des chevauchements ? Même si, sur ce point, votre projet de loi va dans le bon sens, il ne me semble pas aller jusqu'au bout.

Ce que vous prévoyez pour le RMI correspond à un souhait. Mais nous savons quels ont pu être parfois - et paradoxalement - les dégâts causés par le RMI en matière


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de développement de l'économie ultramarine. Je me demande si, en dehors de l'effet d'annonce - car la mesure en question, qui se conçoit très bien sur le plan social, sera accueillie avec sympathie -, il ne faut pas réfléchir davantage à tout cela, même si le système envisagé permet un retour au travail qui paraît intéressant.

A l'occasion de la discussion de ces projets de loi portant ratification d'ordonnances, projets qui ne posent pas problèmes, je tenais à présenter ces quelques réflexions sur un texte beaucoup plus ambitieux et dont nous aurons à débattre dans quelques mois.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. Léon Bertrand.

M. Léon Bertrand.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, vous connaissez l'attachement profond que les gaullistes portent depuis toujours à l'outre-mer. Le groupe RPR est, vous le savez, celui qui compte en son sein le plus grand nombre d'élus de ces départements et de ces territoires, lesquels manifestent à chaque consultation électorale la ferme volonté de leurs habitants de maintenir et de renforcer leur ancrage dans la communauté nationale.

Certes, le recours à l'article 38 de la Constitution n'est pas nouveau s'agissant de l'outre-mer. Depuis 1976, près de huit lois d'habilitation ont été votées. Cependant, vous le comprendrez aisément, aucun parlementaire ne peut accepter de gaîté de coeur de délivrer au Gouvernement un blanc-seing par lequel il se dessaisirait de son propre rôle.

Quelques mots tout d'abord sur la Guyane. Mes questions ne sont pas nouvelles puisque je les évoque régulièrement depuis de nombreuses années. Elles touchent notamment au problème de l'état civil des populations vivant de manière traditionnelle. Beaucoup de cas sont encore en suspens et, même si le délai pour la démarche de déclaration de naissance à l'officier d'état civil a été allongé, il reste encore a apurer le passé.

Comment régulariser la naissance de tous ceux qui sont toujours sans état civil ? La situation me semble bloquée et nous risquons d'être longtemps encore confrontés à une situation inextricable du seul fait d'un manque d'effectifs au tribunal de Cayenne qui ne permet pas d'apurer le déficit lié au passé. Je souhaiterais à ce propos savoir où en est le travail entrepris par cette instance judiciaire. Pour régler ce problème efficacement, une fois pour toutes, il conviendrait de mener l'opération rapidement, en quelque sorte de « frapper un grand coup ».

M. Jean-Luc Warsmann.

Très bien !

M. Léon Bertrand.

J'exprime aussi, une nouvelle fois, au nom de tous mes collègues, l'appréciation critique du groupe RPR sur l'utilisation de la technique des ordonnances, que le désir d'efficacité ne saurait justifier à lui seul. La précipitation est souvent mauvaise conseillère ! Vous pouvez compter sur notre vigilance ; les prérogatives du Parlement doivent être pleinement respectées.

Si je critique la méthode, c'est aussi parce qu'elle d énote, sans aucun doute, l'absence d'une vision d'ensemble. Je vous l'avais déjà dit à cette même tribune, en décembre 1997, lors de mon intervention sur le projet de loi portant habilitation du Gouvernement à prendre par ordonnances les mesures législatives nécessaires à l'actualisation du droit applicable à l'outre-mer : « Il est urgent d'oser ! Il est urgent d'innover ! » Cette double urgence est toujours et plus que jamais d'actualité. Je ne conteste pas la nécessité de moderniser et de remettre à niveau un ensemble de textes souvent techniques et disparates. Mais, vous le savez aussi bien que moi, les départements d'outre-mer sont aujourd'hui dans une situation telle qu'il est impératif d'adapter le droit à la réalité et non l'inverse.

La méthode des ordonnances, qui consiste à procéder par touches successives, ne saurait tenir lieu de politique sérieuse, ni d'ambition réelle pour l'outre-mer français.

Aussi, je saisis l'occasion qui m'est offerte aujourd'hui, au-delà du texte que nous examinons, pour exprimer mes attentes et mes craintes sur la nouvelle loi d'orientation qui devrait être présentée en conseil des ministres à la mimars. Vous nous avez remis ces jours-ci un document qui cadre les principes et les orientations de votre projet de loi, et vous nous avez du même geste invités à vous faire part de nos observations et propositions d'ici au 15 janvier 2000. J'ai été sensible à votre volonté d'associer les élus à la phase d'élaboration du projet de loi, mais permettezmoi de regretter la proximité de cette date butoir. En effet, il apparaît illusoire de vouloir recueillir les plus larges avis des diverses institutions et organisations de nos départements et de nos territoires dans un délai aussi bref. Comment cerner en trois semaines les tenants et les aboutissants d'un document important, dont le but avéré est de promouvoir un pacte de développement pour une économie viable dans un cadre institutionnel stable et garanti ? La concertation mérite d'être mieux organisée. Il s'agit d'engager une discussion de fond et d'y associer sérieusement tous les partenaires. Mais c'est la fin de l'année et nous savons bien, surtout outre-mer, qu'elle donnera lieu à de nombreuses festivités et que tout le monde ne sera pas disponible en permanence.

Je n'entrerai pas dans le détail des multiples propositions qui nous sont faites, notamment du projet consistant à diviser la Réunion en deux départements, ainsi que l'a souhaité le Président de la République lors de son récent déplacement. A ce propos, je me réjouis fort, à titre personnel, de voir le Gouvernement prendre progressivement des mesures pour arriver à plus ou moins long terme à un découpage similaire dans le département de la Guyane.

Cette future loi d'orientation sur l'outre-mer, vous la présentez vous-même comme un projet d'envergure. Il s'agit de respecter l'esprit et la lettre de l'ambition que vous affichez. Il s'agit surtout de ne pas manquer l'occasion de dessiner pour l'outre-mer, qui confère à la France une dimension planétaire, de réelles perspectives d'avenir et de développement.

L'enjeu dépasse de loin une simple adaptation des institutions et des structures administratives. Il nous revient d'achever l'égalité sociale et de restaurer un climat de confiance donnant à chacun des raisons d'espérer ; il s'agit en un mot de dire enfin, haut et fort, ce que la France attend de son outre-mer, et de se donner les moyens d'agir en toute sérénité.

Sortons une fois pour toutes des incertitudes et des ambiguïtés statutaires qui obscurcissent l'horizon. Comment définir une politique cohérente et véritablement ambitieuse si le cadre dans lequel évolue l'outre-mer est sans cesse la proie de bouleversements ? Il n'y a pas de confiance sans stabilité. Or le texte que vous nous avez soumis comporte un certain nombre de lacunes.

La pérennité du dispositif de défiscalisation n'est pas évoquée de manière précise. La loi Pons est prolongée en l'état jusqu'en 2002. Mais qu'adviendra-t-il après ? Si les


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gens veulent changer de statut, c'est précisément parce que le cadre économique ne répond pas à leurs besoins spécifiques.

Il n'y a pas de spécificité de l'outre-mer en général. Je me réjouis que vous en ayez bien pris note dans le futur projet de loi d'orientation. Mais il faut aller encore plus loin et abandonner définitivement l'idée absurde de globaliser les problèmes et les solutions. Il y a une spécificité de chaque département, de chaque territoire, de chaque collectivité concernée. Aussi, je redis très clairement notre attachement très fort à la loi sur les investissements défiscalisés. Ne la remettez pas sans cesse en cause. C'est une bonne loi ! Je rappelle à ce propos que la mission parlementaire qui s'est rendue en Martinique, en Guadeloupe et en Guyane il y a maintenant près de deux ans a pu se rendre compte par elle-même de l'impact économique et social réel de cette loi.

M. Jean-Luc Warsmann.

Très bien !

M. Léon Bertrand.

Elle a en effet été et reste un levier de développement économique essentiel.

Par ailleurs, ce texte n'indique pas véritablement comment seront financées les réformes proposées. De nombreux doutes subsistent, de nombreuses craintes persistent. Permettez-moi d'émettre un voeu qui me tient particulièrement à coeur. Je souhaite que la loi d'orientation, qui devrait être examinée avant cet été, nous permette enfin d'obtenir une réponse claire à une question simple : que veut la France pour son outre-mer ? Ayez davantage d'audace ! Fondez vos objectifs sur le formidable potentiel de dynamisme que recèle l'outremer ! Confortez enfin la fierté des habitants de l'outremer d'être des Français à part entière ! Voilà quelques principes qui doivent nous guider, voilà aussi quelques raisons d'espérer.

Monsieur le secrétaire d'Etat, pardonnez-moi d'avoir parlé aussi longuement de ce projet de loi d'orientation, sur lequel nous fondons beaucoup d'espoir, mais je ne pouvais pas laisser passer l'occasion.

Je reviendrai à ce qui nous occupe plus précisément aujourd'hui, c'est-à-dire à l'actualisation et à l'adaptation du droit applicable outre-mer. J'ai dit au début de mon intervention que je ne souhaitais pas entrer dans le détail des ordonnances et ma conclusion concernera l'évolution statutaire de la Nouvelle-Calédonie.

Les ordonnances prennent en compte cette évolution ; c'est tout naturel puisque la Nouvelle-Calédonie bénéficie désormais d'un statut propre. Mais, de vous à moi - et j'ose espérer que vous partagerez mon point de vue -, il faut que le discours de l'Etat et du Gouvernement soit clair et ferme.

Pour la Nouvelle-Calédonie, il faut respecter la lettre et l'esprit des accords de Nouméa. La confiance restaurée se fonde sur le respect scrupuleux des engagements et de la parole donnée.

Cette fermeté et cette continuité du discours de la France doivent être constantes dans l'ensemble de l'outremer, dans ses départements, ses territoires et ses collectivités.

On ne gagne rien à donner sans cesse des gages à ceux qui ne sont pas républicains et qui, de toute façon, restent chez nous très largement minoritaires. Ne donnons pas trop d'importance à l'agitation de ces gens-là, une agitation d'ailleurs inversement proportionnelle à leur représentativité. Cette agitation nuit d'ailleurs beaucoup à l'image de l'outre-mer en général. Croyez plutôt, monsieur le secrétaire d'Etat, toutes celles et tous ceux qui forment l'écrasante majorité et qui, par ma voix, vous expriment leur confiance, leur amour et leur attachement pour la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Henry JeanBaptiste.

M. Henry Jean-Baptiste.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les trois projets de loi de ratification des ordonnances publiées et entrées en vigueur depuis plus d'un an, entre juin et septembre 1998, n'appellent pas, de ma part, de longs commentaires. Je répondrai cependant à des objections aussi traditionnelles que légitimes sur le dessaisissement, temporaire quoi qu'en dise M. Goldberg, des prérogatives parlementaires par la mise en oeuvre de cette procédure constitutionnelle.

Mais il faut parfois - ainsi va la vie - savoir choisir entre des inconvénients.

Pour la collectivité territoriale de Mayotte, dont le régime juridique révèle, aujourd'hui encore, de multiples et graves lacunes qui concernent le droit des personnes, en particulier l'état civil et la nationalité, mais aussi l'organisation des tribunaux, des services des douanes ou de police, ou encore le droit commercial, le recours aux ordonnances de l'article 38 de la Constitution apparaît comme un facteur de rattrapage et un élément fondamental de progrès.

Ainsi, une trentaine d'ordonnances ont pu, au cours des récentes années, actualiser, moderniser ou compléter le droit applicable à Mayotte, dans un souci d'adaptation aux spécificités de cette collectivité et avec la participation des parlementaires et des élus locaux mahorais. Je tiens à vous en donner acte, monsieur le secrétaire d'Etat, comme à vos prédécesseurs.

Dans cette longue entreprise de mise à niveau juridique de Mayotte par le recours aux ordonnances, on peut, à coup sûr, affirmer que nécessité fait loi.

Je n'en suis que plus libre pour vous faire part de quelques remarques ou sugestions destinées à améliorer encore l'adaptation de ces ordonnances à la situation économique et sociale de Mayotte, et à faciliter l'existence quotidienne des familles mahoraises.

Ma première observation porte sur l'ordonnance no 98732, qui accorde la possibilité d'une déclaration simplifiée de nationalité à des personnes ayant leur résidence habituelle à Mayotte et qui y sont nées d'un parent originaire d'un ancien territoire français d'outre-mer, en l'occurrence les Comores ou Madagascar.

Il est demandé aux intéressés, outre la condition de résidence discontinue à Mayotte, de faire la preuve qu'ils présentent une possession d'état de Français - sous forme d'une inscription sur les listes électorales - depuis au moins dix ans.

Ces personnes peuvent désormais souscrire une déclaration acquisitive de la nationalité française. Pour être intervenu depuis très longtemps en faveur de cette solution, je dois dire que c'est justice. Il s'agit en effet, le plus souvent, de familles nées à Mayotte, mais dont les ascendants directs étaient originaires des Comores, et qui ont perdu la nationalité française faute d'avoir souscrit, à la suite de l'indépendance du territoire, et souvent par manque d'information, la déclaration de reconnaissance de la nationalité française prévue par les lois du 3 juillet et du 31 décembre 1975.


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C'est pour régulariser cette situation que l'ordonnance du 20 août 1998, que nous ratifierons aujourd'hui, a introduit cette procédure, quelque peu dérogatoire mais limitée dans le temps, de la déclaration acquisitive, dans les conditions prévues par l'article 21-13 du code civil.

L'application de cette ordonnance donne déjà, grâce au travail minutieux des magistrats et des services compétents, des résultats satisfaisants : plus d'une centaine de cas ont d'ores et déjà été réglés.

Mais, pour le conseil général de Mayotte, ce premier progrès, indiscutable, en appelle d'autres. Les élus mahorais vous ont donc fait parvenir une délibération visant à obtenir l'extension de l'ordonnance aux personnes nées hors de Mayotte, aux Comores notamment, mais de parents mahorais.

La chancellerie n'y est pas favorable pour diverses raisons, en particulier à cause des risques évidents de fraude liés à la forte émigration étrangère et clandestine à Mayotte. Il nous est recommandé de poursuivre le long et patient travail de modernisation et de clarification de l'état civil mahorais.

C'est sur ce point précis que je souhaite prendre date, en rappellant qu'une autre loi d'habilitation, du 25 octobre 1999, a prévu trois projets d'ordonnance visant à doter - enfin ! - Mayotte d'un état civil précis et fiable.

Il s'agit d'organiser les services communaux d'état civil dans chacune des mairie de l'île, et surtout de moderniser les règles juridiques de déclaration dans les mairies ainsi que les modalités d'établissement et de transmission des noms patronymiques.

Ce travail a commencé sur le terrain. Il doit se poursuivre sur des bases bien établies et reconnues : c'est pourquoi j'insiste auprès de vous pour que ces trois ordonnances relatives à l'état civil mahorais soient prises rapidement et pour qu'elles soient ratifiées dans des délais plus brefs que ceux que nous connaissons aujourd'hui.

Toujours sous le signe de l'attente et de l'urgence, je vous interrogerai sur le sort de l'ordonnance, depuis longtemps rédigée, annoncée et promise aux instituteurs mahorais, concernant la création à Mayotte d'un institut de formation des maîtres et réalisant l'unification du statut de ce personnel enseignant. J'avais cru comprendre que cet important projet serait intégré dans le présent train d'ordonnances - je devrais d'ailleurs dire cette vague d'ordonnances, car l'image maritime vaut mieux que la comparaison ferroviaire, s'agissant de Mayotte. (Sourires.)

Or il n'en est rien, et nous sommes nombreux à Mayotte à le regretter.

Quoi qu'il en soit, ces ordonnances sont, dans leur ensemble, d'une extrême diversité. Je rappelle que certaines d'entre elles ont fait très récemment l'objet d'une ratification par la loi du 9 décembre 1999, qui vient d'être publiée au Journal officiel : elles concernent respectivement l'action foncière, l'activité des offices d'intervention - tels l'ODEADOM et le CNASEA, qui nous rendent de grands services dans les secteurs de l'agriculture et de la pêche -, l'aide au logement ou encore l'urbanisme commercial à Mayotte.

Quant aux ordonnances aujourd'hui soumises à ratification, on appréciera la présentation, en quelque sorte

« fonctionnelle », qui en a été faite par grands objectifs.

Il s'agit de renforcer l'expression de la citoyenneté à Mayotte : ce sont les dispositions qui concernent la nationalité et la modernisation de l'état civil ou encore l'actualisation du droit électoral. A cet égard, l'ordonnance no 98-730 aligne les dates des élections cantonales sur celles de la France métropolitaine et je remercie François Rochebloine d'avoir bien voulu soutenir et défendre mon amendement sur ce point.

Le deuxième thème, relatif au développement économique et social, regroupe plusieurs ordonnances relatives à la réforme du droit commercial, au contrôle des transports vers l'étranger et à la surveillance de la circulation automobile. Malheureusement, en ce qui concerne le nombre des accidents, nous sommes déjà dans le droit commun de la République car les risques de la circulation sont importants à Mayotte, eu égard à l'exiguïté du territoire.

Enfin, le fonctionnement des services publics de la justice et de la police judiciaire à Mayotte sera vraisemblablement amélioré par les nouvelles dispositions.

Tous ces textes ont été examinés par les élus mahorais et répondent pour la plupart à leurs demandes.

M. le président.

Mon cher collègue, il faut conclure !

M. Henry Jean-Baptiste.

Je termine, monsieur le président.

Je veux simplement m'associer, avec gratitude, à une suggestion présentée au Sénat par mon ami Jean-Jacques Hyest, qui a effectué un remarquable travail d'amendement et d'amélioration des ordonnances pour Mayotte, notamment de celles figurant dans le projet de loi no 421.

Il faudra en effet songer à codifier l'ensemble un peu foisonnant de cette législation nouvelle, accompagnée, parfois avec trop de retard, de textes d'application. Outre l'information des praticiens et des fonctionnaires, il convient d'assurer aux étudiants et aux chercheurs des instruments fiables de connaissance et d'analyse du droit applicable à Mayotte, de nos aspirations statutaires, que vous connaissez, et de notre constante volonté d'affermir la collectivité dans les lois de la République.

C'est dans cet esprit que je voterai ces projets de loi de ratification des ordonnances prises en application de la loi d'habilitation du 6 mars 1998.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La discussion générale commune est close.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'Etat à l'outre-mer.

Je remercie les rapporteurs et les orateurs, et je donnerai quelques précisions concernant la procédure.

M. Henry Jean-Baptiste a parlé d'un dessaisissement temporaire du Parlement. C'est bien dans cet état d'esprit que nous avons conçu les ordonnances, puisqu'il y a eu une loi d'habilitation. Le débat qui a préludé à cette loi a permis de préciser certains domaines, voire d'introduire de nouvelles dispositions. Maintenant, les lois de ratification permettront aux ordonnances de passer du domaine réglementaire au domaine législatif. Ce dessaisissement temporaire est donc encadré par l'exercice des droits du Parlement et j'ai tenu à ce qu'il en soit ainsi en proposant ces lois de ratification, qui ne sont pas toujours de règle, même si cette pratique procède de la Constitution de 1958.

Dans ce domaine, nous devons réparer des oublis et mettre fin à de nombreux retards dans le domaine législatif. Parfois même, et M. Bussereau l'a remarqué avec humour, nous allons plus vite qu'en métropole ; ainsi, le régime de la police municipale en Polynésie s'appliquera alors que les dispositions réglementaires n'ont pas encore été prises en métropole.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 14 DÉCEMBRE 1999

Sur le fond, je ne reviendrai pas sur les premières prises de position à propos de la loi d'orientation ; nous aurons le temps d'en discuter. Mais il est bon que déjà s'expriment des opinions.

Monsieur Bertrand, après le 15 janvier, la phase statutaire de consultation, qui durera un mois, nous permettra de prendre encore mieux en compte les avis des collectivités locales et plus particulièrement des assemblées conseil général et conseil régional. Nous aurons donc encore l'occasion d'alimenter la réflexion et je pense qu'il n'y a pas lieu d'ouvrir le débat dans le cadre de ces ratifications.

Sachez en tout cas que nous sommes à votre écoute.

Je vais donner quelques éléments de réponse aux questions qui ont été posées.

Monsieur Rochebloine, la loi Perben, dont nous étudions l'évolution possible, sera maintenue l'année prochaine, si vous votez la loi de finances pour 2000. Il n'y aura donc pas de rupture dans l'application des dispositions. Nous verrons ensuite - vous avez énoncé les propositions du Gouvernement - comment ce dispositif de la loi du 25 juillet 1994 peut être amélioré en tenant compte des expériences.

En ce qui concerne l'état civil en Guyane, monsieur Bertrand, suite aux opérations effectuées sous le contrôle de l'autorité judiciaire, 2013 requêtes de ressortissants français dépourvus d'acte de naissance ont été enregistrées, émanant principalement de riverains du Maroni ou de l'Oyapock. A la fin du mois de septembre, un peu plus de 800 demandes avaient été examinées. Nous avons sollicité la chancellerie et un fonctionnaire a été nommé au tribunal de grande instance de Cayenne pour assister les magistrats dans cette opération. Je souhaite qu'elle soit terminée courant 2000. Ainsi, ces quelque 2 000 concitoyens, qui étaient français, auront un état civil déclaré.

Monsieur Jean-Baptiste, je vous indique que la réforme concernant l'état civil va être entreprise en 2000, suite à la loi d'habilitation qui a été votée. Elle permettra de reconstituer les actes d'état civil qui ont été détérioré s ou perdus ; de ce fait, les Mahorais pourront apporter plus aisément la preuve de leur nationalité française. Les trois ordonnances sont en consultation interministérielle.

Elles devraient être publiées d'ici à trois mois. Les dispositions en vigueur depuis 1998, applicables jusqu'en 2001, ont bénéficié à une centaine de Mahorais et ce nombre augmentera peut-être un peu dans les mois qui viennent. Si certains cas ne sont couverts par aucune des deux réformes, il faudra peut-être préciser à nouveau les dispositions.

En ce qui concerne le statut des instituteurs enseignant à Mayotte, il a été décidé qu'une mission conjointe du ministère de l'éducation nationale et du secrétariat d'Etat à l'outre-mer se rendra à Mayotte pour établir un état des lieux, définir une politique éducative et proposer les moyens de réaliser les objectifs fixés dans le cadre de celle-ci. Et c'est au vu du rapport de la mission qu'il conviendra d'apprécier les mesures à prendre pour parfaire la formation des instituteurs de Mayotte et, le cas échéant, pour adapter leur statut. Le ministère de l'éducation nationale a en effet préféré que nous menions ce travail préalable plutôt que de prendre les dispositions proposées par le secrétariat d'Etat à l'outre-mer. Cela permettra peut-être d'améliorer le statut des instituteurs, qui jouent un rôle essentiel dans la formation des nombreux jeunes de Mayotte.

Je remercie les rapporteurs et les différents orateurs, qui, tout en marquant quelques réserves sur la procédure, ont approuvé, au fond, le dispositif présenté.

PROJET DE LOI No 1967

M. le président.

En application de l'article 91, alinéa 9, du règlement, j'appelle maintenant, dans le texte du Sénat, les articles du projet de loi no 1967 sur lesquels les deux Assemblées du Parlement n'ont pu parvenir à un texte identique.

Article 1er bis

M. le président.

« Art. 1er bis . - Dans chacune des ordonnances visées à l'article 1er , la référence aux territoires d'outre-mer est remplacée par la référence aux territoires d'outre-mer et à la Nouvelle-Calédonie. »

Je mets aux voix l'article 1er bis

(L'article 1er bis est adopté.)

Article 3 bis

M. le président.

« Art. 3 bis . - I. - A l'article L. 122-32 du code du travail, les mots : "en état de grossesse apparente" sont remplacés par les mots : "en état de grossesse médicalement attesté".

« II. - Au dernier alinéa de l'article 41 de l'ordonnance no 85-1181 du 13 novembre 1985 précitée, modifié par le XVIII de l'article 24 de la loi no 96-609 du 5 juillet 1996 portant dispositions diverses relatives à l'outremer, les mots : "en état de grossesse apparente" sont remplacés par les mots : "en état de grossesse médicalement attesté". »

Je mets aux voix l'article 3 bis

(L'article 3 bis est adopté.)

Articles 6, 7 et 8

M. le président.

« Art. 6. - Au d du IV de l'article L. 678 du code de la santé publique, issu de l'article 1er de l'ordonnance no 98-773 du 2 septembre 1998 précitée, dans la première phrase du texte prévu par cet article pour l'article L. 674-6 dudit code, après les mots : "article 511-7", sont insérés les mots : "du même code". »

Je mets aux voix l'article 6.

(L'article 6 est adopté.)

« Art. 7. - Au IV de l'article L. 678 du code de la santé publique, tel qu'il résulte de l'article 1er de l'ordonnance no 98-773 du 2 septembre 1998 précitée, le premier alinéa du c est ainsi rédigé :

« c) L'article L. 674-5 du code de la santé publique est rédigé comme suit : » (Adopté.)

« Art. 8. - Le deuxième alinéa de l'article L. 753-4 du code de la sécurité sociale est complété par les mots : ", notamment dans le domaine de la prophylaxie et de la thérapeutique palustres". » (Adopté.)

M. le président.

Je ne suis saisi d'aucune demande d'explication de vote.

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(L'ensemble du projet de loi est adopté.)

PROJET DE LOI No 1969

M. le président.

En application de l'article 91, alinéa 9, du règlement, j'appelle maintenant, dans le texte du Sénat, les articles du projet de loi no 1969 sur lesquels les deux Assemblées du Parlement n'ont pu parvenir à un texte identique.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 14 DÉCEMBRE 1999

Article 1er bis

M. le président.

« Art. 1er bis. - Dans chacune des ordonnances mentionnées à l'article 1er , la référence aux territoires d'outre-mer est remplacée par la référence aux territoires d'outre-mer et à la Nouvelle-Calédonie. »

Je mets aux voix l'article 1er bis.

(L'article 1er bis est adopté.)

Article 3

M. le président.

Le Sénat a supprimé cet article.

Articles 5 à 11

M. le président.

« Art. 5. - Dans le dernier alinéa de l'article 10 de l'ordonnance no 98-581 du 8 juillet 1998 précitée, les mots : "juge de l'exécution" sont remplacés par les mots : "tribunal de première instance". »

Je mets aux voix l'article 5.

(L'article 5 est adopté.)

« Art. 6. - L'article 14 de l'ordonnance no 67-833 du 28 septembre 1967 instituant une commission des opérations de bourse, inséré par l'article 2 de l'ordonnance no 98-775 du 2 septembre 1998 précitée, est ainsi rédigé :

« Art. 14. - La présente ordonnance est applicable dans les territoires d'outre-mer, en Nouvelle-Calédonie et dans la collectivité territoriale de Mayotte, à l'exception du IV de l'article 6. » -

(Adopté.)

« Art. 7. - I. - Dans le premier alinéa de l'article 38 de la loi no 70-1300 du 31 décembre 1970 fixant le régime applicable aux sociétés civiles autorisées à faire publiquement appel à l'épargne, inséré par l'article 3 de l'ordonnance no 98-775 du 2 septembre 1998 précitée, et dans l'article 8 de l'ordonnance no 98-775 du 2 septembre 1998 précitée, les mots : "dans sa rédaction antérieure à la promulgation de la loi no 98-546 du 2 juillet 1998" sont supprimés.

« II. - Dans le premier alinéa du III de l'article 94 de la loi no 81-1160 du 30 décembre 1981 portant loi de finances pour 1982, inséré par le I de l'article 4 de l'ordonnance no 98-775 du 2 septembre 1998 précitée, les mots : "dans leur rédaction antérieure à la promulgation de la loi no 98-546 du 2 juillet 1998" sont supprimés. » -

(Adopté.)

« Art. 8. - Dans l'article 5 de l'ordonnance no 98-775 du 2 septembre 1998 précitée, les mots : "dans leur rédaction antérieure à la promulgation de la loi no 98-546 du 2 juillet 1998," sont supprimés. » -

(Adopté.)

« Art. 9. - Dans l'article 45 de la loi no 85-1321 du 14 décembre 1985 modifiant diverses dispositions du droit des valeurs mobilières, des titres de créances négociables, des sociétés et des opérations de bourse, inséré par l'article 6 de l'ordonnance no 98-775 du 2 septembre 1998 précitée, les mots : "à l'exception du dernier alinéa de l'article 10-I", sont remplacés par les mots : "à l'exception du quatrième alinéa de l'article 10-I", et les mots : "dans leur rédaction antérieure à la promulgation de la loi no 98-546 du 2 juillet 1998" sont supprimés. » -

(Adopté.)

« Art. 10. - Le premier alinéa de l'article 53 de la loi no 88-1201 du 23 décembre 1988 relative aux organismes de placement collectif en valeurs mobilières et portant création des fonds communs de créances, inséré par l'article 7 de l'ordonnance no 98-775 du 2 septembre 1998 précitée, est ainsi rédigé :

« La présente loi est applicable dans les territoires d'outre-mer, en Nouvelle-Calédonie et dans la collectivité territoriale de Mayotte, à l'exception des articles 20, 21, 22-1, du cinquième alinéa du II de l'article 23-3, des articles 42 à 44, 50 et 52, et sous réserve des adaptations suivantes : ». - (Adopté.)

« Art. 11. - Dans le premier alinéa du II de l'article 107 de la loi no 96-597 du 2 juillet 1996 de m odernisation des activités financières, inséré par l'article 10 de l'ordonnance no 98-775 du 2 septembre 1998 précitée, les mots : "dans leur rédaction antérieure à la promulgation de la loi no 98-546 du 2 juillet 1998" sont supprimés. » -

(Adopté.)

M. le président.

Je ne suis saisi d'aucune demande d'explication de vote.

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(L'ensemble du projet de loi est adopté.)

M. le président.

Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.

PROJET DE LOI No 1968

M. le président.

En application de l'article 91, alinéa 9, du règlement, j'appelle maintenant, dans le texte du Sénat, les articles du projet de loi no 1968 sur lesquels les deux Assemblées du Parlement n'ont pu parvenir à un texte identique.

Articles 1er bis, 2, 2 bis à 2 quater

M. le président.

« Art. 1er bis. Dans chacune des ordonnances visées à l'article 1er , la référence aux territoires d'outre-mer est remplacée par la référence aux territoires d'outre-mer et à la Nouvelle-Calédonie. »

Je mets aux voix l'article 1er bis.

(L'article 1er bis est adopté.)

« Art. 2. La seconde phrase du dernier alinéa de l'article 72 de la loi no 84-52 du 26 janvier 1984 sur l'enseignement supérieur, tel qu'il résulte de l'article 1er de l'ordonnance no 98-582 du 8 juillet 1998 précitée, est ainsi rédigée :

« Toutefois, dans les conseils d'administration siègent trois représentants de la Nouvelle-Calédonie ou de la Polynésie française et un représentant du territoire des îles Wallis-et-Futuna, les autres catégories de personnalités extérieures disposant d'au moins un représentant. » -

(Adopté.)

« Art. 2 bis. L'article 3 de l'ordonnance no 98-728 du 20 août 1998 précitée est ainsi rédigé :

« Art. 3. Il est inséré, dans le code de procédure pénale, un article 879-1 ainsi rédigé :

« Art. 879-1. Pour l'application des articles 16 à 19, les officiers de police de la collectivité territoriale de Mayotte mis à la disposition de l'Etat sont assimilés, selon les dispositions et dans les conditions prévues par ces articles, aux fonctionnaires titulaires du corps de commandement et d'encadrement de la police nationale.

« Pour l'application des articles 20 à 21, les agents de police de la collectivité territoriale de Mayotte mis à la disposition de l'Etat sont assimilés, selon les dispositions et dans les conditions prévues par ces articles, aux agents de la police nationale. » -

(Adopté.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 14 DÉCEMBRE 1999

« Art. 2 ter. Le titre II de l'ordonnance no 98-728 du 20 août 1998 précitée est complété par un article 4 bis ainsi rédigé :

« Art. 4 bis. Il est ajouté, dans la loi no 99-291 du 15 avril 1999 relative aux polices municipales, un article 27 ainsi rédigé :

« Art. 27. Les articles 13, 14, 15 et 16 de la présente loi sont applicables en Nouvelle-Calédonie, dans les territoires de la Polynésie française et des îles Wallis-etFutuna, ainsi que dans la collectivité territoriale de Mayotte. » -

(Adopté.)

« Art. 2 quater. I. Dans le premier alinéa de l'article 6 de la loi du 2 juin 1891 ayant pour objet der églementer l'autorisation et le fonctionnement des courses de chevaux, inséré par le I de l'article 6 de l'ordonnance no 98-728 du 20 août 1998 précitée, le mot : "six" est remplacé par le mot : "dix".

« II. Dans le premier alinéa du même article, les mots : "hors des hippodromes," sont remplacés par les mots : "en quelque lieu et", et la somme : "60 000 F" est remplacée par la somme : "220 000 CFP".

« III. Le dernier alinéa du même article est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Toutefois, jusqu'à l'organisation effective de courses de chevaux par des sociétés de courses autorisées conformément aux dispositions de l'alinéa précédent, l'interdiction édictée par cet alinéa ne s'applique pas aux paris offerts ou reçus dans les hippodromes. » (Adopté.) Articles 3 bis à 3 duodecies

M. le président.

« Art. 3 bis. Après l'article 9 de l'ordonnance no 98-728 du 20 août 1998 précitée, il est inséré un article 9 bis ainsi rédigé :

« Art. 9 bis. A l'article 877 du code de procédure pénale, les références : "529 à 530-3" sont supprimées. »

Je mets aux voix l'article 3 bis.

(L'article 3 bis est adopté.)

« Art. 3 ter. Au deuxième alinéa du II de l'article L. 952-11 du code de l'organisation judiciaire, inséré par l'article 1er de l'ordonnance no 98-729 du 20 août 1998 précitée, après les mots : "Lorsque l'audience est collégiale,", sont insérés les mots : "par dérogation aux dispositions de l'article L. 952-9,". » (Adopté.)

« Art. 3 quater. I. Au début du quatrième alinéa de l'article 3 de l'ordonnance no 98-729 du 20 août 1998 précitée, la référence : "Art. 902" est remplacée par la référence : "Art. 902-1".

« II. L'article 926 du code de procédure pénale, inséré par l'article 3 de l'ordonnance no 98-729 précitée, est ainsi rédigé :

« Pour l'application du premier alinéa de l'article 399, le président du tribunal supérieur d'appel, après avis du président du tribunal de première instance et du procureur de la République, fixe par ordonnance, pendant la première quinzaine du mois de décembre, le nombre des audiences correctionnelles pour l'année judiciaire suivante. »

« III. Dans le titre III du livre VI du code de procédure pénale créé par l'article 3 de l'ordonnance no 98-729 précitée, il est inséré un article 928-1 ainsi rédigé :

« Art. 928-1. Pour l'application du premier alinéa de l'article 511, le président du tribunal supérieur d'appel, après avis du procureur de la République, fixe par ordonnance, pendant la première quinzaine du mois de décembre, le nombre des audiences correctionnelles pour l'année judiciaire suivante. » (Adopté.)

« Art. 3 quinquies . - Le titre II de l'ordonnance no 98729 du 20 août 1998 précitée est complété par un article 6 bis ainsi rédigé :

« Art.

6 bis. - Dans l'article 890 du code de procédure p énale, les mots : "après avis du procureur de la République" sont remplacés par les mots : "après avis du président du tribunal de première instance et du procureur de la République". » -

(Adopté.)

« Art. 3 sexies . - Dans la deuxième phrase du dernier alinéa du I de l'article L.

471 du code de la santé publique, inséré par l'article 7 de l'ordonnance no 98-729 du 20 août 1998 précitée, les mots : "au conseil national" sont remplacés par les mots : "au tribunal administratif". » -

(Adopté.)

« Art. 3 septies . - I. - Les deuxième (1o ) et troisième alinéas du IV de l'article

L. 471 du code de la santé publique, inséré par l'article 7 de l'ordonnance no 98-729 du 20 août 1998 précitée, sont supprimés.

« II. - En conséquence, dans le premier alinéa du IV susvisé, la référence : "L.

457," est supprimée.

« III. - En conséquence, les 2o , 3o , 4o et 5o du IV du même article deviennent respectivement les 1o , 2o , 3o et 4o » -

(Adopté.)

« Art.

3 octies . - L'article 8 de l'ordonnance no 98-729 du 20 août 1998 précitée est ainsi rédigé :

« Art.

8. - I. - Dans le premier alinéa de l'article L. 423 du code de la santé publique, après les mots : "le conseil régional", sont insérés les mots : "ou la chambre territoriale de discipline".

« II. - Dans la dernière phrase du dernier alinéa dudit article, après les mots : "conseils départementaux", sont insérés les mots : "ou organes territoriaux". » -

(Adopté.)

« Art.

3 nonies . - I. - Le I de l'article 1er de l'ordonnance no 98-730 du 20 août 1998 précitée est ainsi rédigé :

« I. - A l'article 17 et à l'article 21 de la loi no 77-729 du 7 juillet 1977 susvisée, les mots : "dans chaque département et dans chaque territoire" et les mots : "pour chaque département ou territoire" sont remplacés par les mots : "dans chaque département, territoire ou collectivité territoriale". »

« II. - A. - Dans le premier alinéa de l'article 26 de la loi no 77-729 du 7 juillet 1977 susvisée, rédigé par le II de l'article 1er de l'ordonnance no 98-730 du 20 août 1998 précitée, les mots : "la collectivité territoriale de Mayotte" sont remplacés par les mots : "les collectivités territoriales de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon".

« B. - En conséquence, dans le second alinéa de l'article 26 susvisé rédigé par le II de l'article 1er précité, les mots : "cette collectivité territoriale" sont remplacés par les mots : "la collectivité territoriale de Mayotte". » -

(Adopté.)

« Art.

3 decies . - L'article 8 de l'ordonnance no 98-730 du 20 août 1998 précitée ainsi que la division titre III et son intitulé sont abrogés. » -

(Adopté.)

« Art.

3 undecies . - Le premier alinéa de l'article 9 de l'ordonnance no 98-730 du 20 août 1998 précitée est ainsi rédigé :

« L'article 4 de la loi no 52-1175 du 21 octobre 1952 susvisée est complété par trois alinéas ainsi rédigés : ». (Adopté.)

« Art.

3 duodecies . - Dans le premier alinéa de l'article 13-1 de la loi no 61-814 du 29 juillet 1961 conférant aux îles Wallis et Futuna le statut de territoire d'outre-mer, inséré par l'article 14 de l'ordonnance


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 14 DÉCEMBRE 1999

no 98-730 du 20 août 1998 précitée, après les mots : "les dispositions du titre Ier ", sont insérés les mots : "du livre Ier ". » -

(Adopté.)

Articles 4 bis et 4 ter

M. le président.

« Art.

4 bis . - Le code des juridictions financières est ainsi modifié :

« 1o Aux articles L.

262-24 et L.

272-24, les mots : "choisis parmi les magistrats de la chambre" sont remplacés par les mots : "choisis parmi les magistrats d'une chambre territoriale" ;

« 2o Aux articles L.

262-25 et L.

272-25, les mots : "Des magistrats de la chambre territoriale des comptes" sont remplacés par les mots : "Des magistrats de chambre territoriale des comptes" ;

« 3o Aux articles L.

262-26 et L.

272-26, les mots : "par un magistrat de la chambre" sont remplacés par les mots : "par un magistrat d'une chambre territoriale". »

Je mets aux voix l'article 4 bis

(L'article 4 bis est adopté.)

« Art.

4 ter. - Le quatrième alinéa de l'article 9-2 de la loi no 69-5 du 3 janvier 1969 relative à la création et à l'organisation des communes dans le territoire de la Nouvelle-Calédonie et dépendances est ainsi rédigé :

« Les communes ayant, pour la réalisation de leurs programmes d'investissement, conclu avec l'Etat des contrats autres que ceux passés en application de l'article 3 de la loi no 99-210 du 19 mars 1999 relative à la NouvelleCalédonie ne sont pas éligibles à ce fonds pendant leur durée d'exécution. » -

(Adopté.)

Articles 5 bis à 5 quater

M. le président.

« Art.

5 bis . - Les deux dernières phrases du premier alinéa de l'article L.

665-18 du code de la santé publique, inséré par le II de l'article 3 de l'ordonnance no 98-774 du 2 septembre 1998 précitée, sont ainsi rédigées :

« La transformation, la distribution ou la cession d'un élément ou produit du corps humain peuvent être suspendues ou interdites dans les conditions prévues par la réglementation en vigueur en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française. Aux mêmes conditions, leurs utilisations peuvent être suspendues, interdites ou restreintes. »

Je mets aux voix l'article 5 bis.

(L'article 5 bis est adopté.)

« Art.

5 ter . - I. - Le premier alinéa du I de l'article 8 de l'ordonnance no 98-774 du 2 septembre 1998 précitée est ainsi rédigé :

« La loi du 17 mars 1909 susvisée est complétée par un article 38 ainsi rédigé : »

« II. - L'article 38, ajouté dans la loi du 17 mars 1909 relative à la vente et au nantissement des fonds de commerce par l'article 8 de l'ordonnance no 98-774 du 2 septembre 1998 précité, est ainsi modifié :

« A. - Le deuxième alinéa a du 1o est ainsi rédigé :

« a) Au premier alinéa, les mots : "dans l'arrondissement ou le département dans lequel le fonds est exploité" sont remplacés par les mots : "dans la collectivité territoriale" pour Saint-Pierre-et-Miquelon et Mayotte, par les mots : "dans la province ou en Nouvelle-Calédonie" pour la Nouvelle-Calédonie, et par les mots : "dans le territoire" pour les territoires d'outre-mer ;

« B. - Dans le cinquième alinéa (2o ), les mots : "civiles et" sont supprimés.

« C. - Le sixième alinéa (3o ) est ainsi rédigé :

« 3o Aux articles 3 et 34, les mots : "président du tribunal de grande instance" sont remplacés par les mots : "président du tribunal de première instance ou le magistrat délégué par lui" ;

« D. - Le début du neuvième alinéa (6o ) est ainsi rédigé :

« Aux articles 1er , 7, 10, 13, 15,... (Le reste sans changement). » -

(Adopté.)

« Art.

5 quater . - Dans le septième alinéa (4o ) de l'article 23 de la loi no 51-59 du 18 janvier 1951 relative au nantissement de l'outillage et du matériel d'équipement modifié par l'article 9 de l'ordonnance no 98-774 du 2 septembre 1998 précitée, les mots : "prévues à" sont supprimés. » -

(Adopté.)

Articles 7 et 8

M. le président.

« Art.

7. - Après l'article 17 de l'ordonnance no 98-774 du 2 septembre 1998 précitée, il est inséré un aricle 17 bis ainsi rédigé :

« Art. 17 bis. - L'article 22 de la loi no 87-571 du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat est applicable en Polynésie française. »

Je mets aux voix l'article 7.

(L'article 7 est adopté.)

M. le président.

« Art.

8. - L'article 25-1, inséré dans la loi no 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs par l'article 13 de l'ordonnance no 98774 du 2 septembre 1998 précitée, est ainsi modifié :

« 1o Au premier alinéa, les mots : ", des articles 16 à 20 et 25" sont remplacés par les mots : ", des articles 16 à 20, du deuxième alinéa de l'article 24, et de l'article 25" ;

« 2o Au troisième alinéa (2o ), les mots : "A la dernière phrase du a " sont remplacés par les mots : "A la fin du a " ;

« 3o A l'avant-dernier alinéa (4o ), les mots : "cinquième alinéa" sont remplacés par les mots : "sixième alinéa". » -

(Adopté.)

M. le président.

Je ne suis saisi d'aucune demande d'explication de vote.

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(L'ensemble du projet de loi est adopté.)

M. le président.

Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.

Suspension et reprise de la séance

M. le président.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures trente, est reprise à dix-sept heures quarante.)

M. le président.

La séance est reprise.

4

LUTTE CONTRE LA CORRUPTION Discussion d'un projet de loi adopté par le Sénat

M. le président.

L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, modifiant le code pénal et le code de procédure pénale et relatif à la lutte contre la corruption (nos 1919, 2001).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 14 DÉCEMBRE 1999

La parole est à Mme la garde ses sceaux, ministre de la justice.

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, la lutte contre la délinquance économique et financière constitue l'un des axes principaux de l'action du Gouvernement. Le projet de loi qui est aujourd'hui soumis à votre examen s'inscrit dans cette perspective. Je salue d'ailleurs votre rapporteur, M. Jacky Darne, qui partage cet objectif et qui, dans son excellent rapport, a exprimé son soutien à ce projet.

La lutte contre la corruption suppose une action déterminée. La corruption constitue en effet un véritable fléau qui affecte la bonne gestion des affaires publiques, elle ruine la confiance des citoyens dans la chose publique, elle altère la qualité du pacte social et met en péril celui qui en est le garant : l'Etat.

Sur le plan économique, ses effets sont également désastreux. La corruption freine le développement économique et fausse les conditions de la concurrence. Elle renchérit le coût des investissements publics puisque les prix pratiqués sont augmentés à proportion du montant des commissions occultes versées pour l'obtention de tel ou tel marché.

Enfin, la corruption constitue une forme d'action de la criminalité organisée. L'existence de liens entre corruption et criminalité organisée se vérifie aujourd'hui dans un très grand nombre de pays et contribue à faire de ce phénomène une question de dimension mondiale, particulièrement préoccupante. La sauvegarde de l'impartialité dans l'exercice des fonctions publiques constitue donc une absolue nécessité.

Compte tenu de l'imbrication de plus en plus poussée des économies et pour ce qui concerne plus spécialement l'Union européenne des structures juridiques et politiques, la lutte contre la corruption ne peut être conduite efficacement dans un cadre strictement national. Les corrupteurs et les corrompus tirent en effet adroitement profit des disparités des législations nationales.

Il est nécessaire d'éviter que les actes de corruption échappent à la répression en raison notamment des pesanteurs de l'entraide judiciaire. Dès lors, dans le cadre de cette répression, spécialement lorsque la corruption touche aux pratiques du commerce international, il convient de veiller à ce que les principes fondamentaux d'égalité et de transparence de la concurrence entre les entreprises soient systématiquement sauvegardés.

En définitive, seule la mise en oeuvre concordante d'engagements simultanés et similaires dans les différents pays concernés est de nature à assurer les conditions justes et durables d'une lutte efficace contre la corruption.

C'est la position que la France a soutenue et fait prévaloir dans les enceintes internationales au sein desquelles le problème de la lutte contre la corruption a été abordé au cours des dernières années - chronologiquement, dans le cadre de l'Union européenne, de l'Organisation de coopération et de développement économique, du Conseil de l'Europe et de l'Organisation des Nations unies.

L'ensemble de ces considérations permet de mieux comprendre l'originalité de ce projet de loi qui concerne, non seulement la vie publique nationale mais aussi, dans une certaine mesure, la vie publique de pays étrangers.

L'objectif principal des conventions qui font l'objet du projet de loi qui vous est soumis est de compléter les dispositifs nationaux qui ne prévoient pas d'incrimination de comportements consistant à corrompre les agents publics d'autres Etats. Ces conventions, pour ce faire, n'exigent pas l'uniformité ou une modification des principes fondamentaux du système juridique d'un Etat partie.

Dans le cadre de l'Union européenne, les conventions concernées traitent à la fois de la corruption active et passive et la précision des dispositions de ces conventions est plus grande que celle de la convention OCDE qui ne concerne que la corruption active des agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales.

Le présent projet de loi a donc pour objet de permettre aux juridictions de notre pays de juger les corrupteurs de fonctionaires étrangers, y compris lorsque de tels faits ont lieu, en tout ou en partie, sur le territoire français. En l'état actuel de notre droit, en effet, la corruption d'un fonctionnaire étranger n'est pas punissable ; il est traditionnellement considéré que le délit de corruption a pour objet de garantir l'intégrité et la probité de l'administration publique française et d'elle seule. Une même approche caractérise la plupart des législations pénales étrangères.

La communauté internationale a donc constaté, dans le cadre des diverses enceintes internationales évoquées tout à l'heure, les carences des législations étatiques. Plusieurs conventions ont d'ores et déjà été signées, en particulier dans le cadre de l'OCDE et dans le cadre de l'Union européenne. Elles obligent toutes à incriminer et à sanctionner de manière effective, proportionnée et dissuasive les actes de corruption commis à l'encontre d'agents publics étrangers.

Je vais vous présenter l'économie générale des traités signés dans le cadre de l'Union européenne. J'évoquerai ensuite les grands axes de la convention signée dans le cadre de l'OCDE. Je vous présenterai enfin les dispositions qu'il vous est proposé d'adopter dans le cadre de la loi d'adaptation.

Les traités que nous avons signés dans le cadre de l'Union européenne ont fait l'objet des lois de ratification du 27 mai 1999. Ils s'inscrivent d'abord dans la ligne des efforts entrepris pour assurer une meilleure protection des intérêts financiers des Communautés européennes. C'est ainsi que les fraudes aux recettes comme les fraudes aux dépenses entravent l'action des Communautés, causent un préjudice aux différents Etats membres, mais aussi à chacun des citoyens des pays de l'Union. Une convention et plusieurs protocoles permettent donc de lutter plus efficacement contre cet ensemble de fraudes. La France dispose d'un arsenal législatif suffisant pour en assurer une ferme répression. Ainsi, les exigences de ces traités, convention et protocoles, sont d'ores et déjà satisfaites dans notre droit interne.

Il est apparu toutefois que ces fraudes pouvaient aussi reposer sur des faits de corruption impliquant soit des fonctionnaires communautaires, soit des fonctionnaires nationaux d'autres Etats membres et que les législations nationales présentaient, de ce point de vue, certaines carences. D'où le protocole tendant à la répression des faits de corruption dans la stricte mesure où ils portent atteinte aux intérêts financiers des Communautés. C'est le premier protocole à la convention relative à la projection d es intérêts financiers, suivi d'une convention du 26 mai 1997 tendant à l'incrimination de tout fait de corruption, qu'il ait ou non porté atteinte aux intérêts financiers des Communautés.

Parmi les traités signés dans le cadre de l'Union, c'est pour l'essentiel cette dernière convention qui fait l'objet d'une adaptation de notre droit interne. Son champ


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d'application est large. Il vise tout fait de corruption pour quelque motif et dans quelque domaine qu'il ait lieu.

Tout fait de corruption doit pouvoir être puni. Je remarque, mais je serai plus explicite tout à l'heure, que le champ de la convention OCDE est plus limité.

L'autre caractéristique du protocole et de la convention sur la lutte contre la corruption signés dans le cadre de l'Union, c'est qu'ils visent non seulement la corruption active, mais aussi la corruption passive, à la fois le corrupteur et le corrompu. Il en résulte que pour satisfaire aux exigences de ces traités, les tribunaux français devront pouvoir juger non seulement le corrupteur d'un fonctionn aire communautaire ou national d'un autre Etat membre, mais aussi ce fonctionnaire lui-même, c'est-àdire le corrompu.

Un tel système ne pouvait se concevoir que dans un espace dans lequel les pays ont établi entre eux des liens étroits et forts aussi bien sur le plan juridique qu'économique et politique. C'est évidemment le cas au sein de l'Union européenne.

Les traités signés dans le cadre de l'Union contiennent en outre toutes sortes de dispositions destinées à renforcer la coopération judiciaire entre les Etats. Ces dispositions ne nécessitent pas d'adaptation du droit interne et ne sont donc pas directement concernées par le présent projet de loi. Il va néanmoins de soi que la France entend appliquer avec la plus vive détermination, chaque fois que cela sera nécessaire, les engagements qu'elle a souscrits pour assurer l'efficacité des procédures d'entraide judiciaire et des différentes formes de coopération.

Tels sont les textes que nous avons signés dans le cadre de l'Union européenne et ceux pour lesquels nous avons besoin d'adapter notre droit interne.

J'en viens à la convention que nous avons signée dans le cadre de l'OCDE et qui a aussi fait l'objet d'une ratification le 27 mai 1999. Dans cette convention, il nous faut distinguer plusieurs types de mesures qui ont toutes pour objet de mieux lutter contre la corruption.

Les dispositions qui touchent au droit pénal de fond, celles qui concernent à vrai dire la corruption, sont les plus importantes.

La convention signée dans le cadre de l'OCDE oblige à incriminer les faits de corruption active commis en vue d'obtenir un marché ou un autre avantage indu dans le commerce international. Il en résulte que les juridictions françaises, à condition évidemment qu'elles disposent d'un critère de compétence selon les conditions du droit commun, doivent pouvoir juger les corrupteurs d'agents publics étrangers quels que soient l'Etat ou l'organisation internationale dont relèvent ces agents. La convention n'exige pas en revanche que les juridictions françaises puissent juger les agents publics corrompus.

La convention OCDE a une vocation universelle et vise les faits de corruption commis à l'encontre des agents publics de l'ensemble des Etats du monde. C'est à ces

Etats qu'il appartient de lutter contre la corruption de leurs propres agents.

Nous avons vu tout à l'heure en effet que l'incrimination de la corruption passive d'un agent public étranger, c'est-à-dire d'un fonctionnaire corrompu, n'était envisageable que dans l'Union européenne, espace politiquement et juridiquement homogène. Il aurait été irréaliste de l'envisager dans le cadre d'une convention à vocation universelle, au risque de s'immiscer indûment dans les affaires intérieures d'Etats étrangers.

Seconde différence avec les traités signés dans le cadre de l'Union européenne : le champ d'application du délit est limité. Les faits doivent avoir été commis en vue d'obtenir un marché ou un autre avantage indu dans le c ommerce international. Cette restriction résulte du champ même des compétences de l'OCDE.

Par ailleurs, la convention OCDE fait état d'un certain nombre d'autres mesures qui touchent à l'incrimination du blanchiment des capitaux liés à des opérations de corruption ou à la définition de normes comptables permettant de trouver trace de ces mêmes opérations. Sur ces points, la législation française satisfait d'ores et déjà aux exigences du traité.

Quant aux dispositions concernant l'entraide et l'extradition qui tendent pour l'essentiel à faire en sorte que la coopération judiciaire entre Etats soit prompte et effective, la France s'engage à les respecter et à en favoriser l'application. Aucune modification de notre droit interne n'est nécessaire sur ce point.

Que vous propose le projet de loi d'adaptation de notre droit interne, compte tenu de ces remarques sur ce que préconisent les textes élaborés dans le cadre de l'Union européenne et dans le cadre de l'OCDE et nos propres dispositions de droit interne ? Avec le présent projet de loi, nous entendons compléter notre droit interne pour remplir l'ensemble des engagements contractés dans les différents traités que je viens de rappeler. Le Gouvernement a décidé de s'en tenir strictement aux exigences de ces traités, sans rien y ajouter et sans rien y enlever.

Le projet de loi se décompose en plusieurs articles qui touchent soit au droit pénal de fond, soit à la procédure pénale.

Sur le droit pénal de fond, nous avons préféré rassembler les dispositions dans un nouveau chapitre au sein du livre IV du code pénal. Dans un but pédagogique, les articles nouveaux font systématiquement référence au traité dont ils constituent l'adaptation en droit interne.

Les articles pris pour l'application des conventions signées dans le cadre de l'Union européenne incriminent évidemment la corruption active et la corruption passive.

Les articles pris pour l'application de la convention signée dans le cadre de l'OCDE n'incriminent que la corruption active commise dans le cadre du commerce international.

La définition des agissements tombant sous le coup de ces articles nouveaux correspond à celle qui figure dans les articles actuels relatifs à la corruption active et passive d'un fonctionnaire national. Donc, nous transposons notre droit national à ces textes. Seule la qualité de la personne corrompue change. Il importe de relever que, pour les seules incriminations créées pour l'application de la convention OCDE, le régime des poursuites fait l'objet d'une disposition spéciale.

Si la totalité des faits a lieu à l'étranger, le déclenchement de l'action publique obéit aux principes de droit commun. Seul le ministère public peut engager les poursuites si les faits lui ont été dénoncés dans les conditions légales, et il a la liberté de le faire ou de ne pas le faire.

En revanche, si une partie ou la totalité des faits a lieu sur le territoire national, le droit commun permet à une partie civile de déclencher l'action publique au moyen d'une plainte auprès du juge d'instruction. C'est cette possibilité qu'il a été décidé d'exclure. Une disposition spéciale réserve donc au ministère public, et à lui seul, la possibilité de poursuivre ces faits. Cette disposition a pour but d'assurer une équivalence dans les conditions de poursuite. L'équivalence fonctionnelle entre les mesures


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prises par les Etats est en effet l'un des principes fondamentaux de la convention. Or des pays membres de l'OCDE ne connaissent pas la possibilité du déclenchement de l'action publique par l'action d'une partie civile.

Dans ces conditions, et afin que la France se trouve sur ce point dans une situation comparable à celle de ces pays, il s'est avéré nécessaire d'adopter une mesure limitant la possibilité pour un plaignant de déclencher les poursuites.

Dans le projet du Gouvernement, l'ensemble des incriminations ainsi créées était puni des peines prévues pour les faits de corruption des fonctionnaires nationaux, à savoir dix ans d'emprisonnement et un million de francs d'amende. De la même façon, le projet de loi calquait sur les dispositions déjà existantes, pour les faits de corruption de fonctionnaires nationaux, les peines applicables aux personnes morales déclarées coupables de corruption active d'agents publics étrangers.

Le Sénat a adopté deux amendements dont l'objet, pour le premier, est de réduire la peine prévue à l'encontre des personnes physiques à cinq ans au lieu de dix, et le second, de limiter les peines encourues par les personnes morales à l'amende, à la confiscation ou à l'affichage de la décision et au placement de la personne morale sous surveillance judiciaire.

Votre commission des lois souhaite rétablir le texte dans sa version initiale, ce dont je ne peux que me féliciter. Il ne saurait en effet y avoir de répression de la corruption à géométrie variable selon l'Etat au sein duquel le corrompu exerce ses fonctions. Sauf si nous estimons, et je crois que nul ne peut le soutenir dans cet hémicycle que la corruption internationale génère des effets pervers moindres que la corruption nationale. Ce n'est évidemment pas notre point de vue.

Par ailleurs, si l'on voit mal comment justifier une différence dans les peines réprimant la corruption internationale et la corruption interne, on voit encore plus mal comment en justifier une entre la corruption internationale dans l'Union et la corruption internationale dans le commerce international.

Les amendements du Sénat méconnaissent les obligations de répression auxquelles la France est tenue en application de l'article 3 de la convention OCDE. Cet article prescrit en effet que les sanctions prévues par les droits nationaux doivent être efficaces, proportionnées et dissuasives et que l'éventail de celles-ci doit être comparable à celui des sanctions applicables à la corruption des agents publics de la partie en question.

Pour appliquer le principe de non-rétroactivité d'une loi pénale plus sévère, il a été jugé utile de rappeler q ue les nouveaux articles pris pour l'adaptation de notre droit aux divers traités ne sauraient avoir de portée rétroactive.

Tel est l'objet de l'article 2 du présent projet de loi.

Quant aux dispositions relatives à la procédure pénale qui figurent dans le projet de loi, elles sont de deux ordres : l'une est liée à l'application des traités, l'autre constitue une mesure de bonne administration de la justice.

La disposition prise pour l'application des traités signés dans le cadre de l'Union européenne concerne la compétence des juridictions françaises. En effet, le premier protocole et la convention relative à la lutte contre la corruption prévoient de manière spécifique dans plusieurs hypothèses l'établissement de la compétence territoriale des juridictions françaises dans le cas de commission de faits de corruption ou de fraude portant atteinte aux intérêts financiers des communautés.

Ces hypothèses sont les suivantes : une infraction est commise hors du territoire de l'Union par un fonctionnaire non ressortissant d'un Etat membre mais appartenant à une institution communautaire ayant son siège en France ; une infraction est commise hors du territoire national par un Français ou par un fonctionnaire de la République française qui serait de nationalité étrangère ; une infraction est commise à l'encontre d'un ressortissant français hors du territoire national. Il s'agit, à vrai dire, d'hypothèses marginales. Les traités les ont prises en compte pour éviter toute lacune potentielle dans la répression.

Le principal effet pratique de ces dispositions est de supprimer, dans les cas où elle aurait pu être exigée sur le fondement de l'article 113-6 du code pénal, toute condition de réciprocité d'incrimination. Elles n'auront de portée réelle que lorsque les faits auront eu lieu en dehors du territoire de l'Union, la condition de réciprocité étant systématiquement remplie au sein de l'Union.

En tout état de cause, la France déclarera, conformément à ce que permettent les traités, qu'elle n'appliquera ces règles de compétences que dans certaines conditions procédurales. Ces conditions sont celles que prévoit actuellement le code pénal en cas de commission d'une infraction entièrement en dehors du territoire national.

Les poursuites ne pourront avoir lieu que sur requête du ministère public et devront avoir été précédées d'une plainte de la victime ou d'une dénonciation officielle par l'autorité du pays où les faits ont été commis.

Pour ce qui concerne la disposition relative à la bonne administration de la justice, elle tend à donner compétence aux tribunaux spécialisés en matière économique et financière pour poursuivre, instruire et juger les infractions aux nouvelles dispositions pénales que je viens de vous présenter.

Il s'agira, dans la plupart des cas, d'affaires complexes qui doivent pouvoir être confiées à des juridictions habituées au traitement de procédures économiques et financières.

Laissez-moi vous dire quelques mots, là encore, des dispositions introduites dans le texte par le Sénat tendant à conférer une compétence nationale à la juridiction parisienne pour connaître des faits de corruption commis dans le cadre du commerce international. Je me suis opposée à l'adoption de l'amendement du Sénat par souci de cohérence avec la politique menée en matière de lutte contre la délinquance financière par le Gouvernement.

Comme vous le savez, le Gouvernement conduit, en cette matière, une politique déterminée qui tend, en substance, à professionnaliser et renforcer les moyens des juridictions spécialisées, notamment par la mise en place de pôles économiques et financiers dans les principales d'entre elles. De tels pôles sont déjà en place à Paris, Marseille et Bastia, d'autres sont en cours de constitution à Versailles, Bordeaux et Fort-de-France.

Dans ces conditions, il me semble, tout comme à votre commission des lois, inopportun de dessaisir les juridictions spécialisées de province de ces contentieux, alors qu'au demeurant la juridiction parisienne se trouvera le plus souvent saisie de la plupart des dossiers en raison du siège social des entreprises concernées. Mon objectif étant la mise en place de dix à douze pôles financiers pour lutter contre la délinquance économique et financière sur tout le territoire de la République, je ne souhaite pas que, par un amendement, on en vienne à tout centraliser à Paris. Cela irait à l'encontre du souci d'efficacité.


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J'ai également le souci, outre de transposer dans notre droit interne les avancées que permettent les traités, de réaliser les objectifs que nous nous sommes fixés dans les d ifférentes enceintes de négociation. Ces objectifs consistent en la mise en oeuvre de moyens nouveaux et adaptés pour organiser un véritable combat contre la délinquance économique et financière, dont je rappelle qu'elle porte atteinte à nos économies et à la crédibilité de l'Etat.

Pour conclure, le projet de loi que j'ai l'honneur de vous présenter manifeste la volonté de la France de prendre encore une fois toute la place dans la lutte contre la corruption. Nous avons concrétisé cette volonté par la ratification récente des traités négociés dans le cadre de l'Union européenne puis sous l'égide de l'OCDE. Bien entendu, nous poursuivrons activement dans cette voie, non seulement en transposant dans notre droit interne ces traités, mais également en mettant en place, ce qui n'avait jamais été fait jusqu'ici, des moyens concrets de lutte contre la corruption, c'est-à-dire les pôles économiques et financiers. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Alain Tourret.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Jacky Darne, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la l égislation et de l'administration générale de la République.

M. Jacky Darne, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, je crois indispensable, pour bien analyser ce texte, d'expliquer pourquoi il existe.

Parmi les matériaux que j'ai réunis pour mon rapport, j'ai consulté l' Encyclopaedia Universalis dans sa version cédérom. A partir de l'article sur la corruption, j'ai fait apparaître 500 liens.

M. Jean-Antoine Leonetti.

Y a-t-il des noms ?

M. Jacky Darne, rapporteur.

Bien sûr, je vais vous en parler.

Parmi ces 500 liens, une cinquantaine n'ont rien à voir ; il s'agit d'une approche philosophique du problème lui-même. Sur les 450 liens restants, on relève un grand nombre de pays d'Europe, d'Afrique, d'Amérique et d'Asie.

M. Alain Tourret.

Et le Vatican ?

M. Jacky Darne, rapporteur.

Apparaissent aussi un grand nombre de noms propres de personnes que nous connaissons tous, soit parce qu'elles ont appartenu à l'histoire ancienne, soit parce qu'elles font partie de l'histoire récente.

On ne peut donc pas considérer la corruption comme un problème marginal. Elle est une des causes des difficultés économiques et sociales mais aussi du dysfonctionnement de la démocratie. A la lecture des notices sur les pays, la corruption apparaît comme une des causes des coups d'Etat, des mouvements de révolte, en tout cas de la perte de confiance dans les institutions.

Pourtant, ni la corruption ni son incrimination ne sont d'aujourd'hui. Le code pénal de 1810 traitait déjà ce phénomème et le punissait. Alors, est-ce un effet de mode, ou un retour à un certain ordre moral ? En fait, je vois deux raisons principales au regard neuf que l'on porte aujourd'hui sur la corruption : d'une part, une indépendance accrue de la justice par rapport au pouvoir politique, un pouvoir de la justice renforcé par les moyens de l'information qui permettent de porter à la connaissance du monde entier des phénomènes qui se passent ici ou là ; d'autre part, la révolution économique que nous sommes en train de vivre. Les entreprises mondiales sont de plus en plus grandes mais elles sont de moins en moins nombreuses à intervenir sur les mêmes marchés. Ces marchés sont eux-mêmes de plus en plus importants et les sommes en jeu sont donc très élevées.

La corruption est devenue un moyen de gestion dans les secteurs de l'industrie de l'armement, dans les marchés des moyens de transport et ceux d'infrastructures. Si on laisse aller ainsi les choses, c'est tout le système mondial qui risque d'y passer. Le directeur sortant du FMI a, par exemple, affirmé que la corruption était un des facteurs explicatifs de la crise asiatique.

M. Michel Hunault.

Et russe !

M. Jacky Darne, rapporteur.

Bien sûr ! De multiples demandes de régulation sont apparues.

Elles émanent d'entreprises qui commencent à trouver que les pourcentages à payer sont trop élevés. J'ai entendu citer des montants de pots-de-vin de 30 % du marché pour certains pays bien connus. Les responsables politiques, et plus généralement l'opinion publique, ne peuvent plus accepter que le monde soit une jungle.

Cette prise de conscience fait que ce qui était perçu auparavant comme un problème national a pris une dimension internationale, ce qui a conduit les organisations internationales à s'en préoccuper. Mais j'ai le sentiment que l'intervention de trop nombreuses organisations peut conduire à une perte d'efficacité.

Le projet de loi que nous examinons aujourd'hui est une parfaite illustration de cette action internationale puisqu'il s'agit de modifier notre droit afin de le rendre conforme à deux types de conventions internationales signées par la France, d'une part, des accords européens, d'autre part, de la convention de l'OCDE du 17 décembre 1997.

Nos marges de manoeuvre législatives sont limitées en la matière puisque nous devons appliquer dans notre droit les traités que nous avons signés. Je dois d'ailleurs dire que le Gouvernement a pris une place déterminante dans ces négociations et qu'il a fait de la lutte contre la criminalité financière internationale une de ses priorités.

Il l'a encore montré récemment.

Cela ne nous interdit pas de porter un jugement sur ces accords.

Les accords européens ne nécessitent que peu de commentaires, Mme la garde des sceaux les a évoqués. Ils étendent aux fonctionnaires et aux élus communautaires d'un autre Etat membre les délits de corruption active et passive dans des conditions proches de notre droit.

La convention de l'OCDE pose, par contre, plus de p roblèmes. Sans être exhaustif, j'en relève cinq principaux.

Premier problème, le nombre de signataires : les vingtneuf pays de l'OCDE, plus cinq autres pays qui ont signé la convention. Les pays signataires sont essentiellement les pays riches, ceux qui alimentent la corruption comme fournisseurs. Or la corruption est mondiale et nécessite une action internationale.

Je souhaiterais que les négociations de l'OMC, en se déroulant d'une façon autre que ce qu'on a vu récemment, donnent une dimension plus pertinente à cette lutte.


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Deuxième problème : seule la corruption active est ici visée. Il reste la moitié du chemin à parcourir pour traiter la corruption passive. Certes, il faut aller progressivement, mais nous sommes là en deçà des accords européens.

Troisième problème : la convention de l'OCDE ne vise que les actes de commerce international.

Or, vous le savez bien, la corruption dépasse largement ce cadre. Les accords européens quant à eux visent toute la corruption, quel qu'en soit le mobile. Par exemple, les aides au développement sont parfois détournées. Il faudrait pouvoir poursuivre ces agissements.

Quatrième problème, plus subjectif : tous les signataires ont-ils vraiment la volonté de combattre la corruption, alors que les marchés obtenus par leurs entreprises sont sources de revenus, d'emplois, de relations politiques et militaires ? En fonction du principe de réalisme, on peut concevoir certains comportements, mais nous sommes en droit de nous interroger sur ce que veulent vraiment les

Etats-Unis par exemple. D'un côté, il faut rappeler qu'ils ont été les premiers, en 1977, à créer une législation afin de lutter contre la corruption à l'étranger, ce qui les a conduits à réclamer l'équivalent pour les autres pays.

Mais la mise en oeuvre de leur législation est telle, par l'initiative des poursuites de l' attorney general, les commissions, la transaction pénale possible, que le nombre de poursuites et de sanctions y est extrêmement modeste.

Quoi qu'ils en disent, ils devraient modifier leur droit s'ils veulent se conformer à la convention de l'OCDE.

M. Jean-Antoine Leonetti.

Très bien !

M. Jacky Darne, rapporteur.

Dans le domaine de la lutte contre la corruption, ce sont les pays européens qui sont en pointe, non les Etats-Unis !

M. Jean-Antoine Leonetti et M. Alain Tourret.

Très bien !

M. Jacky Darne, rapporteur.

S'ils ne rattrapent pas leur retard, si les actes ne correspondent pas à leurs discours, ils porteront un coup très dur à ces textes, car trop nombreux seraient ceux qui seraient tentés de ne pas les respecter non plus, arguant des conditions de la concurrence. Vous le savez, les entreprises invoquent sans cesse la concurrence pour justifier certains comportements.

Enfin, cinquième et dernier problème : il est possible de contourner les textes. L'imagination des corrupteurs est fertile, vous le savez, et la corruption s'exporte. Certains pays ont déjà anticipé ce mouvement. Les sociétés écrans, comme les intermédiaires, se multiplient. Certaines entreprises peuvent donner une apparence de rigueur, mais demander à d'autres de faire le sale travail.

Il faut aller aussi loin que possible dans la coopération judiciaire ; il faut aller jusqu'à interdire aux entreprises d'être domiciliées dans un paradis où règnent secret bancaire et non-coopération judiciaire. Tels sont les buts que nous devons poursuivre pour que ces accords internationaux ne soient pas bafoués.

Tous ces problèmes n'empêchent pas cette convention d'être une pierre significative d'un édifice qui reste à construire. Que les Etats puissent aujourd'hui dénoncer la corruption, qu'ils créent des peines pour sanctionner ces délits, ce n'est pas rien dans la prise de conscience mondiale, même si ce qui reste à faire est plus important que ce qui est déjà fait.

Après avoir circonscrit les limites des accords internationaux, je souhaite évoquer quelques dispositions du texte qui nous est soumis, j'y reviendrai bien sûr plus en détail lors de la discussions des amendements.

Je précise tout d'abord qu'il est expressément fait référence, dans le projet de loi, aux conventions elles-mêmes.

Ce n'est pas simplement un aspect pédagogique. Cette référence permet de lever certaines ambiguïtés. Il en est ainsi de la définition des fonctionnaires, différente dans les deux conventions. La convention de l'OCDE précise également que les versements de facilitation sont autorisés sous conditions, ce qui est de nature à rassurer les entreprises.

Les peines prévues dans le projet initial du Gouvernement étaient de dix ans d'emprisonnement et de 1 million de francs d'amende, identiques à celles appliquées en cas de corruption de fonctionnaires français. Le Sénat a estimé ces peines excessives par rapport à ce qui existe dans d'autres pays, et a ramené l'emprisonnement à cinq ans. La convention de l'OCDE précise pourtant que les peines qui sont appliquées aux fonctionnaires, où qu'ils soient, doivent être comparables.

Retenir l'avis du Sénat reviendrait à afficher une sorte de mépris envers les fonctionnaires nationaux : comment pourrait-on accepter de diminuer la peine de 50 % en cas de corruption d'un étranger par rapport à la peine infligée en cas de corruption d'un Français ? Les sanctions pénales prévues pour les personnes morales ont aussi été restreintes par le Sénat qui les estime trop lourdes, en considérant que certains pays ne connaissent pas la responsabilité des personnes morales et que d'autres les sanctionnent moins. C'est exact, bien sûr.

Mais, là encore, il n'est pas possible de prévoir des sanctions différentes lorsqu'il y a répression de la corruption en France et lorsqu'elle se passe ailleurs.

L a convention recommande aux pays qui ne connaissent pas cette responsabilité des personnes morales de l'introduire dans leur droit. Il faut constater que la mise en jeu de la responsabilité des personnes morales est faite par les tribunaux français avec beaucoup de prudence et de modération puisqu'il n'y a eu jusqu'à présent que des peines d'amende.

La question de la date d'application de la convention est plus complexe. La plupart des pays qui ont déjà introduit dans leur législation la convention OCDE n'ont rien précisé sur ce point, laissant s'appliquer les règles générales de leur droit. Nous aurions pu faire de même et ne pas écrire l'article 2.

S'il a paru nécessaire de l'introduire en France, c'est qu'il faut régler le problème des contrats signés avant l'entrée en vigueur du texte pour des commissions qui sont payées après. Si tel n'était pas le cas, les « pots de vins » versés après l'entrée en vigueur de la loi pourraient être poursuivis par les tribunaux français en fonction de la jurisprudence actuelle. Le délit de corruption est en effet un délit successif, commis à l'occasion de chacun des versements, même si le pacte est antérieur bien évidemment. A l'inverse, la formulation retenue dans le projet qui nous est soumis est telle que l'on peut craindre que la loi soit largement contournée.

Si l'on affirmait simplement que les contrats antérieurs ne sont pas sanctionnés, il existerait trop de moyens simples pour perpétuer des pratiques devenues illégales et éviter d'appliquer la loi : antidater des documents ou faire des avenants. Nous donnerions ainsi un signal très négatif aux entreprises.

Je voudrais, pour terminer, dire un mot du difficile problème de la prescription. Il a été évoqué tout au long d'auditions auxquelles j'ai procédé, et cité dans de nombreux articles et études. C'est une question essentielle.


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Les termes du débat peuvent être ainsi résumés : la prescription de droit commun pour les délits, trois ans, est trop brève en matière de corruption, ce qui aboutit trop souvent à mettre en échec les poursuites. Tel est, entre autres, l'avis du service central de prévention de la corruption.

M. Alain Tourret.

Il faut le porter à six ans !

M. Jacky Darne, rapporteur.

La conséquence est soit l'absence de poursuites, soit des poursuites sur la base d'une autre qualification des faits, celle d'abus de biens sociaux, dont la prescription, en application de la jurisprudence, ne court qu'à partir du moment où les faits sont dévoilés.

Les solutions possibles sont soit d'appliquer à la corruption la jurisprudence de l'abus de biens sociaux,...

M. Alain Tourret.

Non !

M. Jacky Darne, rapporteur.

... ce qui est une hypothèse, soit d'augmenter le délai de prescription, lequel est plus long dans la plupart des autres pays, en le portant, par exemple, à six ans.

M. Alain Tourret.

Très bien !

M. Michel Hunault.

Quelle est votre préférence ?

M. Jacky Darne, rapporteur.

Je n'ai retenu aucune de ces deux hypothèses pour deux raisons.

M. Michel Hunault.

Prenez vos responsabilités !

M. Jacky Darne, rapporteur.

Je les prends ! Merci de vos recommandations.

M. le président.

Monsieur le rapporteur, ne vous laissez pas interrompre, poursuivez !

M. Jacky Darne, rapporteur.

La première est que la corruption ne se prescrit qu'à partir du dernier fait de corruption, par exemple à compter du dernier versement et non de la signature du contrat. Cela ouvre des possibilitéts de poursuites suffisamment longues dans beaucoup de cas.

La seconde, plus importante, est qu'il ne serait pas de bonne méthode de modifier, à l'occasion de la transposition d'une disposition internationale en droit interne, la prescription pour ce seul délit, alors que la question se pose pour la quasi-totalité des délits financiers.

M. Michel Hunault.

Nous avons déjà entendu ça !

M. Jacky Darne, rapporteur.

Il me semble néanmoins indispensable qu'un réexamen global de cette question soit entrepris prochainement, peut-être à l'occasion de la réforme du droit des sociétés ou lors de l'examen du texte relatif aux délits financiers.

Se pose enfin le choix de la juridiction compétente.

Le Sénat, avec d'autres, considère que les magistrats de Paris sont les plus à même de traiter des infractions de corruption : la jurisprudence serait plus rapidement cohérente, donc la justice globalement meilleure. Néanmoins, sont également nombreux ceux qui, au contraire, affirment qu'à Paris la qualité n'est pas supérieure à ce qu'elle est en province.

En effet, la création des pôles économiques et financiers qu'a rappelée Mme la garde des sceaux, disposent de moyens matériels et humains, dont les assistants spécialisés, donne déjà - et cela sera encore plus vrai demain des ressources locales significatives. Par ailleurs, l'instruction des affaires de corruption n'est ni plus facile ni plus difficile que celle d'autres délits financiers.

Il est en conséquence souhaitable de revenir à la version initiale du projet de loi...

M. Alain Tourret.

Très bien !

M. Jacky Darne, rapporteur.

... accordant compétence concurrente aux tribunaux de grande instance spécialisés en matière économique et financière.

M. Arthur Dehaine.

Très bien !

M. Alain Tourret.

C'est de bon sens !

Mme Marie-Hélène Aubert.

Tout à fait !

M. Jacky Darne, rapporteur.

Madame la garde des sceaux, vous êtes engagée et nous sommes engagés avec vous dans un beau combat, celui de la lutte contre la criminalité financière. Ce texte en constitue l'une des étapes.

Marquer des points dans ce combat est une nécessité, non seulement pour créer les conditions d'une saine concurrence, mais aussi, mais surtout pour éviter que soit minée la vie démocratique.

J'espère que politiques, dirigeants d'entreprise, juristes a uront la même volonté, la même détermination.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Michel Hunault.

Ce n'est pas très courageux ! Discussion générale

M. le président.

Dans la discussion générale, la parole est à M. Patrick Braouezec, premier orateur inscrit.

M. Patrick Braouezec.

Comme vous l'avez dit, madame la garde des sceaux, en ratifiant les conventions élaborées dans le cadre de l'Union européenne et de l'OCDE, la France s'obligeait à se donner les moyens pour satisfaire les engagements pris tendant à respecter l'objectif de répresssion et de prévention efficace de ces crimes de corruption. Il nous appartient donc aujourd'hui de transposer dans notre droit interne les conséquences juridiques de ces textes ratifiés.

En effet, notre droit pénal actuel n'incrimine que les infractions de corruption de personnes dépositaires de l'autorité publique, chargées d'une mission de service public ou investies d'un mandat électif, mais ne concerne pas les agents publics étrangers. Par ailleurs, le principe de la territorialité de la loi pénale fait obstacle à la poursuite en France de délits perpétrés à l'étranger, sauf appli cation de la double incrimination.

Au-delà de cette adaptation de notre droit, il est un fait qu'il est utile de rappeler : s'agissant de la dimension internationale, les dégâts dus à la corruption sont considérables.

M. Michel Hunault.

Surtout en Russie !

M. Patrick Braouezec.

L'absence de rigueur en ce domaine serait absolument désastreuse.

S ans prétendre développer l'ensemble des méfaits induits par la corruption et le blanchiment de l'argent sale, il est des éléments qui nous permettent de connaître l'ampleur des phénonèmes et d'en mesurer la nocivité sociale, politique et économique. Ainsi, selon les estimations du FMI, le volume des transactions internationales est tel que le coût des actes de corruption, qui font l'objet du texte en discussion, s'élèverait, compte tenu à la fois des sommes détournées et des pertes occasionnées par la distorsion de concurrence, à 500 milliards de dollars par an, soit 2 % du produit intérieur brut mondial, c'est-à-dire plus du double du budget de notre pays.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 14 DÉCEMBRE 1999

S'il est vrai que la corruption est un phénomène ancien, nous ne pouvons nous habituer à vivre avec, d'autant que Jacky Darne l'a souligné - l'explosion des moyens de communication et, surtout, des transactions financières, a donné, aux corrupteurs comme aux corrompus, des moyens de gérer leur activité criminelle sans commune mesure avec ce que l'on a connu ces dernières années. C'est dire combien les intérêts liés aux transactions commerciales dans le cadre des relations économiques internationales ont supplanté les exigences du droit.

Face à cette situation, chaque pays a été tenté de protéger son propre Etat contre les dérives, en tolérant de moins en moins les comportements illicites à l'intérieur de son territoire, en rendant passibles des tribunaux, par exemple, ceux de ses agents publics coupables de corruption passive et, par voie de conséquence, les auteurs de la corruption active.

Cette attitude, qui tend, en quelque sorte, à cantonner la corruption à l'étranger en tolérant la corruption des fonctionnaires étrangers par ses propres entreprises nationales, n'est pas satisfaisante. On peut même dire qu'elle constitue une véritable incitation à la corruption à l'étranger. Partout, ce sont les bases mêmes de la République et de la démocratie qui sont atteintes par ce vide juridique et ces atermoiements.

La criminalité organisée, les mafias, le blanchiment de l'argent sale, occupent une place grandissante et insupportable en Europe et dans le monde. Cela constitue un véritable défi de civilisation, un défi économique, politique et éthique.

Nous ne pouvons tolérer que l'argent issu des trafics illicites, de la corruption ou de la fraude fiscale puisse circuler en toute impunité et alimenter l'économie légale. Il est vrai que l'anonymat, l'opacité, l'absence de démocratie, mais aussi un système libéral qui opte pour le « tout à la finance » et la course à la rentabilité, facilitent cette dérive.

A l'échelle internationale, des décisions ont été prises pour s'attaquer à ce phénomène et apporter plus de transparence et de moralisation. Ces premiers pas sont timides et doivent être suivis de mesures plus fortes, plus radicales, à la hauteur du défi auquel notre société continue d'être confrontée. Transparence et efficacité ont, dans ce domaine aussi, partie liée.

Permettre à la France de sanctionner ces pratiques jugées répréhensibles, condamnables, voire criminelles, y compris lorsqu'elles sont perpétrées hors du territoire national, contribuera à redonner à l'opinion publique, notamment à la jeunesse, une plus grande confiance dans la démocratie et dans la vie politique, une confiance qui n'a jamais été à ce point malmenée.

La multiplication des affaires, l'implication toujours plus grande de l'argent dans la politique suscitent légitimement la défiance. L'opacité alimente les amalgames et le soupçon de la corruption généralisée. Ce projet de loi participe à un début de clarification indispensable pour convaincre les citoyens de la détermination du Gouvernement à combattre la corruption.

La France et l'Europe peuvent et doivent aller bien plus loin et montrer l'exemple en rendant réelle l'existence d'un espace judiciaire européen.

En déposant ce projet de loi, le Gouvernement confirme la priorité qu'il entend donner à la lutte contre la délinquance économique et financière, nous nous en félicitons. Un tel objectif pourrait-il susciter autre chose que l'adhésion générale ?

M. Michel Hunault.

Nous le verrons plus tard !

M. Patrick Braouezec.

Non seulement je ne le pense pas, mais je suis convaincu que nous ne devons faire preuve, en ce domaine, d'aucune complaisance ou hésitation.

Vous comprendrez donc que le groupe communiste ne puisse souscrire aux orientations de la majorité sénatoriale, qui, tout en approuvant les objectifs poursuivis par le projet de loi, en a considérablement limité la portée.

D'abord, elle a réduit de moitié la peine d'emprisonnement encourue en matière de corruption d'agent public étranger dans le commerce international. A cet égard, je rejoins Jacky Darne, il faut revenir au projet de loi initial qui proposait, pour la corruption d'agents publics étrangers, une peine semblable à celle prévue pour la corruption d'agents publics français, c'est-à-dire dix ans d'emprisonnement et un million de francs d'amendes. Adopter une autre logique contrarierait sans aucun doute l'obligation de résultats à laquelle la France s'est engagée.

Ensuite, le Sénat a limité la liste des peines applicables aux personnes morales à l'amende, à la confiscation, à l'affichage de la décision et au placement sous surveillance judiciaire. En opérant ce choix, la majorité sénatoriale n'a pas respecté la nécessaire cohérence avec les peines prévues par notre droit interne en cas de corruption d'un fonctionnaire national par une personne morale. Est notamment prévue l'interdiction temporaire ou permanente de participer à des marchés publics ou d'exercer une activité commerciale.

Outre le fait que les parlementaires communistes sont profondément hostiles aux modifications apportées par la droite sénatoriale, ils sont aussi choqués par les motifs qui l'ont conduite à retenir ces dispositions. En effet, rien ne saurait justifier le laxisme dans la lutte contre ces pratiques inacceptables.

M. Robert Bret n'a d'ailleurs pas pu contenir son indignation au Sénat quand il a constaté, lors du débat en commission, que d'aucuns pouvaient soutenir que « la France serait perdante si elle sanctionnait trop sévèrement ces pratiques de corruption car elle serait alors défavorisée par rapport à ses concurrents ». Cet argument est inacceptable !

M. Michel Hunault.

C'est la réalité !

M. Patrick Braouezec.

Abordant le projet de loi, dans le texte que notre commission des lois nous propose de retenir, je ne reviendrai ni sur le contenu des conventions conclues sous l'égide de l'Union européenne et de l'OCDE, car elles ont fait l'objet de longs débats il y a quelques mois, ni sur le détail des propositions qui nous sont présentées. Elles répondent à ce que nous attendions.

Ainsi, tout en distinguant les dispositions européennes des dispositions signées dans le cadre de l'OCDE en ce qu'elles ne recouvrent pas le même champ d'application, tant d'un point de vue géographique qu'au regard des infractions, votre projet, madame la garde des sceaux, et nous en prenons acte, s'attache à ne faire aucune différence de traitement entre les délits de corruption selon qu'ils auront visé un fonctionnaire français ou un agent public étranger. Il faut en effet se donner les moyens de sanctionner cette corruption et inclure la fermeté et la rigueur nécessaires dans les dispositions de notre code pénal. Pour toutes ces raisons, le groupe communiste votera en faveur de ce projet.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. Jean-Antoine Leonetti.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 14 DÉCEMBRE 1999

M. Jean-Antoine Leonetti.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous sommes tous d'accord pour reconnaître que la corruption internationale est aujourd'hui un véritable fléau.

Sur le plan moral d'abord, car elle met en péril la démocratie.

Sur le plan économique ensuite, car la corruption internationale altère l'économie et empêche le développement des pays émergents en détournant l'argent vers des secteurs non productifs, vers des projets qui ne sont pas de réelles priorités nationales. Elle fausse ainsi les conditions du marché et augmente le coût des investissements publics.

Enfin, nous le savons tous, la corruption est une force d'action de la criminalité organisée.

Pour lutter contre ce fléau, de multiples initiatives ont déjà été prises, notamment par le Conseil de l'Europe, par l'Assemblée générale des Nations unies, par le Fonds monétaire international et par la Banque mondiale.

Dès 1987, en effet, la Communauté européenne s'était dotée d'une unité de coordination de lutte anti-fraude qui enquête sur les fraudes au budget communautaire.

Toutes ces initiatives ont abouti au projet de loi qui nous est présenté aujourd'hui, lequel vise à compléter le code pénal et le code de procédure pénale pour permettre la pleine application, par la France, de conventions conclues dans le cadre de l'Union européenne et de l'OCDE tendant à limiter les faits de corruption des agents publics et des fonctionnaires étrangers.

Cependant, si la nécessité d'agir et de légiférer en la matière n'est pas contestable, nous devons être lucides quant à la véritable efficacité de ce projet de loi, car il subsiste de nombreux motifs d'inquiétude non négligeables.

D'abord, la lutte contre la corruption dans le commerce international n'a de chance d'être efficace que si elle est menée avec la même fermeté par tout le monde.

M. Michel Hunault.

Tout à fait !

M. Jean-Antoine Leonetti.

Or les risques de distorsion de concurrence ne doivent pas être sous-estimés. La convention de l'OCDE du 17 décembre 1997 n'a, en effet, été signée que par trente-quatre Etats sur près de deux cents, et certains pays qui jouent un grand rôle dans le commerce mondial ne l'ont pas signée, tels que Israël, l'Afrique du Sud, la Chine, l'Inde et, surtout, la Russie.

Pourtant, chacun sait que la corruption y est très ancienne ; elle concernerait 50 % de ses contrats internationaux.

Par ailleurs, l'application varie beaucoup selon les pays signataires. Il existe donc un risque véritable qu'elle ne soit pas appliquée de manière homogène.

Le champ de votre projet de loi est limité au cas de corruption publique. Il laisse donc de côté un pan entier des phénomènes de corruption qui perturbent aujourd'hui le commerce international. En particulier, le problème des multiples intermédiaires porteurs de valise, qui gravitent souvent autour des agents publics, n'est pas réglé.

En outre, seule la corruption active est concernée par la convention de l'OCDE, alors que, pour lutter efficacement contre la corruption, il faut évidemment sanctionner non seulement le corrupteur, mais aussi le corrompu.

Cette convention comporte également des risques de contournement par les entreprises, notamment par les plus importantes d'entre elles qui auront les moyens de recourir à des sociétés écran ou de passer par des paradis fiscaux. A cet égard, il est souhaitable que la France poursuive l'action entamée dans les enceintes internationales pour lutter contre les centres financiers offshore, c'est-àdire ces pays ou territoires qui offrent des services financiers sans contrôle ni réglementation suffisants, et souvent sous couvert d'un secret bancaire très strict.

Nous approuvons nombre de modifications apportées par le Sénat, notamment celle qui consiste à confier au procureur, au juge d'instruction et au tribunal correctionnel de Paris une compétence concurrente à celle de la juridiction territorialement compétente.

En effet, les infractions sont souvent commises en recourant à des mécanismes complexes de droit international privé et public, de droit commercial, voire de l'arbitrage international. Il est donc nécessaire que des magistrats très spécialisés puissent se pencher sur ces dossiers, si l'on veut pouvoir assurer une répression objective et efficace. La centralisation à Paris nous paraît donc être un gage d'efficacité, mais nous n'en faisons pas un point de principe.

Le Sénat a également ramené de dix à cinq ans la peine d'emprisonnement encourue. A ce propos, j'ai entendu dire que cela pouvait être considéré comme une marque de mépris vis-à-vis des fonctionnaires français qui subiraient des peines plus lourdes que leurs homologues étrangers. Pourtant, force est de constater que les transpositions de la convention qui ont déjà été opérées dans certains Etats signataires ont abouti à des applications extrêmement divergentes de ses dispositions. Par exemple, les peines d'emprisonnement prévues par nos principaux partenaires sont les suivantes : un an en Norvège, deux ans en Suède, trois ans en Belgique, en Hongrie, en Islande et au Japon, cinq ans en Allemagne, au Canada, en Grèce et six mois au Royaume-Uni, sauf en cas de récidive. Vous avez même évoqué, à juste titre, monsieur le rapporteur, la possibilité de transaction prévue aux

Etats-Unis, laquelle altère profondément le principe de la sanction.

Il serait donc paradoxal que la France édicte des peines au moins deux fois plus lourdes que les plus sévères prévues ailleurs en Europe. Ne faudrait-il pas, si nous voulons inscrire dans notre droit de telles peines, exercer une influence suffisamment forte sur les pays européens pour qu'ils appliquent les mêmes sanctions que nous ? L'article 2 du projet de loi énonce la non-rétroactivité de la future loi. Les faits commis à l'occasion de contrats signés antérieurement à l'entrée en vigueur de la convention ne seraient donc pas concernés par les nouvelles infractions définies dans le projet de loi. Les pots-de-vin que les entreprises françaises verseraient à des agents publics étrangers resteraient donc légaux, à condition qu'ils aient été prévus par des contrats antérieurs à l'entrée en vigueur de la convention.

Vous avez déclaré, madame la ministre, qu'« il serait difficilement compréhensible que l'exécution de ces engagements, passés dans un temps où la loi pénale française ne punissait pas leur conclusion, rendent leurs auteurs passibles des tribunaux français ». Vous avez même précisé, à juste titre, qu'il s'agissait simplement d'une application du principe de non-rétroactivité de la loi pénale la plus sévère, qui a valeur constitutionnelle. Toutefois, en précisant la portée de la non-rétroactivité de ces dispositions, vous limitez les possibilités d'interprétation par les juridictions et, partant, l'efficacité de la répression qui pourrait, sans cela, être plus pénalisante.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 14 DÉCEMBRE 1999

A cet égard, je rappelle qu'un arrêt de la Cour de cassation du 27 octobre 1997 précise, comme l'a souligné le rapporteur, que la corruption continue tout le temps que les commissions sont réglées. Or, dans la pratique, les entreprises versent souvent les commissions au fur et à mesure des livraisons.

La commission des lois a adopté un amendement liant la non-application de la loi aux commissions afférentes à des contrats signés avant l'entrée en vigueur des conventions à leur déclaration auprès de l'administration fiscale, afin de « légaliser, pour des raisons de sécurité juridique, les commissions liées à des contrats anciens ». Nous y sommes favorables, à condition que le délai de déclaration soit ramené à un an.

L'esprit des engagements internationaux que ce texte vise à transposer en droit français ne saurait en aucun cas être contesté.

Si ce projet de loi est imparfait, son adoption conditionne l'application d'instruments internationaux initiés sous la précédente législature, ce qui constitue une étape importante et nécessaire dans la lutte contre la corruption.

Nous tenons à souligner la nécessité de continuer à renforcer les outils de la lutte contre la corruption, tant internationale que nationale. C'est ce que le conseil européen de Tampere a mesuré en décidant la création d'EUROJUST, qui aura pour mission de contribuer à une bonne coordination entre les autorités nationales chargées des poursuites et d'apporter son concours aux enquêtes relatives aux affaires de criminalité organisée.

La corruption internationale ne doit pas être le mal nécessaire de la mondialisation des échanges. La France, dans l'Europe, doit participer de toute sa force à la lutte contre ce fléau.

Lorsque nous avons évoqué ce problème, je n'ai pu m'empêcher de penser à la question du dopage. En effet, lorsque nous en avons traité, certains, à cette tribune, ont fait valoir que, si la France sanctionnait plus lourdement ses athlètes dopés, ces derniers seraient moins compétitifs sur le plan international. Il en va de la morale et de l'honneur de notre pays d'être en avance, voire le premier dans ce domaine, comme dans celui des droits de l'homme et du respect de l'individu.

Bien que sa portée soit limitée, ce projet de loi va dans le bon sens et le groupe UDF ne s'y opposera pas.

M. le président.

La parole est à Mme Marie-Hélène Aubert.

Mme Marie-Hélène Aubert.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, il était temps ! Entrée en vigueur en février dernier, la convention de l'OCDE contre la corruption des agents publics étrangers n'avait pas encore connu de transposition dans notre droit interne, retardant ainsi un processus de ratification pourtant de plus en plus nécessaire.

En effet, la mondialisation des échanges, les fusions et concentrations d'entreprises donnant naissance à de véritables mastodontes économiques et financiers, la faiblesse de bon nombre d'Etats à cet égard, rendent urgente et indispensable une politique coordonnée au niveau européen et international de lutte contre la corruption.

La France, interpellée par la ou les affaires Elf notamment - qui rebondit maintenant en Allemagne - ne pouvait rester en retrait de ce mouvement salutaire. Rappelons aussi qu'indirectement, c'est de la moralisation de la vie politique qu'il s'agit ici, dans les pays du Nord comme du Sud.

C'est pourquoi nous nous réjouissons d'avoir à examiner aujourd'hui un tel projet de loi, pour lequel nous devons avoir deux soucis majeurs : rester fermes et clairs sur les principes, d'une part ; veiller à l'harmonisation par le haut des dispositions adoptées par l'ensemble des parties de la convention, d'autre part. C'est ce que cherchent à faire d'ailleurs le Gouvernement et le rapporteur de la commission des lois, malgré quelques points discutables sur lesquels je reviendrai.

A ce titre, on peut regretter que l'attitude du Sénat, inspirée de celle d'un certain nombre d'entreprises françaises, ait davantage consisté à défendre étroitement nos intérêts à court terme en faisant preuve d'indulgence vis-à-vis de pratiques qu'on aimerait voir appartenir définitivement au passé, qu'à se montrer exemplaire et volontariste pour contrer un phénomène inacceptable éthiquement et dangereux pour nos démocraties.

Ainsi, les sanctions prévues dans le projet de loi doivent correspondre à celles qui sont prises pour la corruption interne, même, et surtout, si la France est particulièrement sévère sur ce point. De même, il n'y a pas de raison de laisser au seul tribunal de Paris, et encore moins à des juridictions spécialisées, le soin de traiter ce type d'affaires. Il faudra néanmoins, si l'on veut que cette convention ait une chance d'être appliquée réellement, renforcer considérablement les moyens humains et financiers des services chargés de contrôler les comptes des entreprises concernées et de mener, s'il y a lieu, des procédures judiciaires à leur terme.

Il convient également de faire progresser, dans notre droit et dans le droit international la responsabilité pénale des personnes morales, régie aujourd'hui de façon assez différente d'un pays à l'autre. Pourtant, lors des discussions sur la création de la Cour criminelle internationale, avait déjà été évoquée la question de la respo nsabilité pénale des personnes morales, eu égard au rôle considérable qu'elles peuvent jouer, directement ou indirectement, dans la délinquance financière, les violations des droits de l'homme ou les catastrophes écologiques.

Dans ces deux derniers domaines, très sensibles en termes d'image, les entreprises ont bien compris qu'elles devaient dorénavant prendre les devants, en adoptant par exemple des codes de bonne conduite évalués en toute transparence. Mais la transparence financière des grands contrats passés à l'étranger reste à conquérir.

Enfin, le projet de loi ne permet pas la constitution de plainte avec parties civiles, spécificité française il est vrai, seul le ministère public étant habilité à le faire. Il est dommage néanmoins que les victimes - individus ou a ssociations - ne puissent pas déclencher l'action publique en ce cas. La prise de conscience et la mobilisation de la société civile font pourtant beaucoup dans l'avancée du droit pour que les entreprises rendent des comptes aux élus et à l'Etat, qui doivent à leur tour assumer pleinement leurs responsabilités. La crainte, légitime mais tout de même exagérée, de manipulation ou de multiplication des contentieux pourrait s'estomper si l'on encadrait précisément le droit des parties civiles.

Mais le problème essentiel de ce projet de loi réside dans le deuxième alinéa 2 de l'article 2 qui stipule que les nouveaux articles du code pénal inscriminant la corruption d'agents publics étrangers « ne s'appliquent pas aux faits commis à l'occasion de contrats signés antérieurement à l'entrée en vigueur de la convention visée par ces articles ».


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 14 DÉCEMBRE 1999

Il est fort contestable, en effet, de considérer cette disposition comme une simple application du principe constitutionnel de non-rétroactivité de la loi pénale. Dans un arrêt du 27 octobre 1997, la chambre criminelle de la Cour de cassation a jugé que « si le délit de corruption est une infraction instantanée, consommée dès la conclusion du pacte entre le corrupteur et le corrompu, il se renouvelle à chaque acte d'exécution dudit pacte ».

M. Jean-Antoine Leonetti.

Très bien !

Mme Marie-Hélène Aubert.

Cet arrêt ne fait que c onfirmer un arrêt de la même chambre du 9 novembre 1995. Il s'agit donc d'une jurisprudence bien établie, qui ne met pas en cause le principe de nonrétroactivité mais qui en précise seulement la portée en matière de corruption. Certes, la cour d'appel et la Cour de cassation examinaient alors la question sous l'angle de la prescription. Mais pourraient-elles, sous celui de la rétroactivité, définir le délit de corruption différemment ? C'est difficile à concevoir.

Il semble en tout cas que, si nous votions cet article, il pourrait être contesté par le comité de suivi de l'OCDE comme contrevenant à la convention. Je plaiderai, pour ma part, pour son abandon.

M. Jean-Antoine Leonetti.

Bravo !

Mme Marie-Hélène Aubert.

Outre qu'elle est choquante sur le principe, aucun autre pays n'a prévu une pareille clause dans ses textes de transposition. Il vaudrait mieux rester dans la logique de nos positions en adoptant une solution moins accommodante, qui ne manquerait pas de faire rapidement des émules, et en faisant en sorte que la même rigueur s'applique à tous.

Cela permettrait un débat - nécessaire - avec nos partenaires sur la façon dont on doit apprécier le principe de non-rétroactivité en matière de corruption, ce qui n'est pas facile, j'en conviens. Mais ce serait bien préférable à l'adoption d'une posture d'emblée complaisante.

Cet alinéa pourrait conduire par ailleurs à une fraude difficilement contrôlable et à des contournements de la convention, de nouveaux pots-de-vin pouvant alors être rattachés à des contrats anciens. Ainsi, une compagnie pétrolière ou une entreprise d'armement - au hasard ! qui aurait proposé à un chef d'Etat, pour obtenir un contrat ou un permis de recherche, de lui verser une certaine somme sur un compte en Suisse pendant dix ans, ne tomberait pas sous le coup de la loi. C'est aberrant !

M. Jean-Antoine Leonetti.

Bon exemple !

Mme Marie-Hélène Aubert.

La sagesse paraît donc de supprimer le deuxième alinéa de l'article 2, en attendant une interprétation claire et commune du principe de non-rétroactivité dans le domaine de la corruption.

Il serait tout de même dommage que l'on ne retienne de ce projet de loi qui, même tardif, va incontestablement dans le bon sens, que l'ouverture par la France d'une brèche dans un dispositif voulu par elle-même comme rigoureux. Un comble ! J'espère, madame la ministre, chers collègues, que le débat sur les amendements qui va suivre nous permettra de sortir la tête haute d'une question difficile, mais sur laquelle nous n'avons plus le droit de tergiverser.

La corruption, en effet, coûte très cher aux entreprises, à tous points de vue, et c'est un calcul à bien courte vue que de croire qu'elle est un mal nécessaire, dans un contexte de concurrence mondiale acharnée, qui mène à toute les dérives et qu'il nous faudra bien, tôt ou tard, maîtriser. Il en va également de la crédibilité de notre action politique et du droit que nous élaborons, dépassés aujourd'hui par l'importance et la rapidité des flux financiers, qu'ils soient propres ou sales. De grâce, ne ratons pas une étape aussi décisive, alors même qu'elle ne concerne en plus qu'un aspect de la corruption ! Les Verts et le groupe Radical, Citoyen et Vert voteront ce projet de loi, en espérant néanmoins que seront retenus les amendements qui vont vers une plus grande clarté et une plus grande rigueur de la loi.

Et c'est, contrairement à ce qui est dit souvent, dans l'intérêt de nos entreprises, des élus que nous sommes, de la classe politique et de la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste.)

M. le président.

Mes chers collègues, je vous rappelle que, en raison de la réception qui est donnée pour le deuxième centenaire du Conseil d'Etat à l'Hôtel de Lassay, je serai conduit à lever la séance aux environs de dix-neuf heures.

La parole est à M. Dominique Bussereau.

M. Dominique Bussereau.

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, le projet de loi que nous examinons aujourd'hui entend favoriser la lutte contre la corruption dans le commerce international.

A l'évidence, nous ne pouvons que nous féliciter d'un tel objectif, tant la corruption constitue un mal endémique qui porte directement atteinte aux principes de la démocratie et déstabilise de nombreux pays dont le développement et la prospérité économiques s'en trouvent, de fait, grevés.

La corruption est un phénomène, hélas, bien connu qui a fait l'objet d'une prise de conscience internationale.

A ce titre, madame la garde des sceaux, l'esprit de ce texte ne peut qu'être approuvé. Il permet en effet - cela a été rappelé par notre rapporteur - l'incrimination de la corruption active et passive de fonctionnaires communautaires mais aussi de fonctionnaires des Etats membres de l'Union européenne, incrimination jusqu'à présent impossibles en droit français puisque ces infractions figurent dans le livre IV du code pénal consacré « aux crimes et délits contre la nation, l'Etat et la paix publique ».

De même, ce projet prévoit, opportunément, que les nouvelles infractions ne concerneront pas les faits commis dans le cadre de contrats signés avant l'entrée en vigueur des conventions. Il respecte ainsi le principe à valeur constitutionnelle de non-rétroactivité de la loi pénale, sauf si elle est moins sévère, permettant par conséquent aux contrats en cours d'exécution, de bénéficier de la sécurité juridique.

Par ailleurs, je suis favorable à la disposition selon laquelle la mise en mouvement de l'action publique en matière de corruption d'agent public étranger, dans le cadre du commerce international, est réservée au ministère public. En effet, en principe, en France, le dépôt d'une plainte avec constitution de partie civile entraîne automatiquement la mise en mouvement de l'action publique. Dans cette hypothèse, les entreprises françaises pourraient se trouver dans une situation pénalisante par rapport à leurs concurrents étrangers, notamment américains, si ces derniers pouvaient utiliser à leur encontre les possibilités que leur offre la procédure française, alors que les entreprises françaises ne disposeraient pas à l'étranger des mêmes possibilités.

Néanmoins, je tiens à mettre en garde contre un autosatisfecit français qui tendrait à verser dans l'angélisme. Il ne faut pas perdre de vue que le domaine d'application


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 14 DÉCEMBRE 1999

de ce texte n'est autre que le commerce international, lié à la compétition internationale - difficile - pour la conquête des marchés à l'exportation. L'enjeu est donc de taille et nombre de ses acteurs, à commencer par les entreprises et les Etats eux-mêmes, sont prêts à tout pour grapiller ne serait-ce que quelques parts de marché, parts de marché qui peuvent s'élever, à l'échelle internationale, à plusieurs millions de dollars, voire beaucoup plus.

Dans ces conditions, et sans vouloir jouer les oiseaux de mauvais augures, je pense qu'il est bon de garder à l'esprit que ces dispositions ne seront significatives qu'à partir du moment où elles seront appliquées non seulement par le plus grand nombre mais aussi avec la même rigueur.

Or, madame la garde des sceaux, nous avons précisément quelques doutes sur ce point. Comme vous le savez, le premier signe inquiétant concernant la volonté politique de certains pays de lutter plus efficacement contre la corruption internationale, n'est autre que le nombre de signataires de la convention de l'OCDE : trente-quatre pays seulement l'ont signée et parmi les non-signataires figurent des pays considérables comme la Russie, la Chine ou l'Afrique du Sud, réputés pour être d'importants Etats exportateurs ou importateurs de produits dépendant fortement de la commande publique.

Seule la naïveté, au vu de ces chiffres, peut ainsi laisser croire que cette convention portera un véritable coup à la corruption dans le commerce international. L'impact quantitatif ou géographique de ces accords est donc sujet à caution, mais leur impact qualitatif l'est tout autant. La lutte contre la corruption internationale, qui est un bon objectif, ne peut être effective qu'à partir du moment où les textes qui la mettent en oeuvre sont appliqués de manière homogène. Or, qu'en est-il vraiment ? D'abord, d'un point de vue procédural - notre rapporteur l'a démontré - il est évident que des divergences significatives existent entre les différents pays signataires.

Aux Etats-Unis, par exemple, la mise en mouvement de l'action publique en matière de corruption est réservée à l' attorney general, qui doit en plus avoir l'autorisation d'un grand jury. On se doute bien, dans ces conditions, que les mises en mouvement de l'action publique ne risquent pas d'être nombreuses.

De même, les Américains connaissent une procédure qui permet à quelqu'un de plaider coupable et de transiger sur la peine afin d'éviter un procès public et une médiatisation particulièrement préjudiciable pour l'entreprise en cause.

La conséquence directe de ces divergences est bien sûr, non seulement le non-respect du principe d'équivalence fonctionnelle posé par la convention mais, surtout, l'établissement de distorsions importantes de concurrence dont les entreprises françaises seront les cibles privilégiées.

Les entreprises françaises seront d'autant plus les victimes de ces distorsions que le régime de sanctions pénales prévu par le projet de loi semble disproportionné au regard de ce que les autres Etats signataires pratiquent.

Comme l'a fort justement souligné le Sénat, la peine de dix ans d'emprisonnement encourue par les personnes physiques en cas de corruption active d'agents publics étrangers est de toute évidence excessive, sachant, comme l'a excellemment rappelé notre collègue Jean-Antoine Leonetti, que les peines prévues par les autres Etats signataires sont nettement moins sévères.

Par conséquent, la disposition votée par le Sénat, mes chers collègues, de cinq ans d'emprisonnement nous paraît être une disposition sage permettant à la France de ne pas s'isoler.

Cette remarque vaut également pour la responsabilité pénale des personnes morales. Ce projet prévoit la possibilité d'infliger de lourdes peines, telles que la fermeture d'établissement, alors que la plupart des pays signataires ne connaissent même pas la responsabilité pénale des personnes morales. C'est donc, à nos yeux, très judicieusement que le Sénat a limité la liste des peines encourues.

Enfin, mes chers collègues, pour terminer, malheureusement sur une note de scepticisme, je pense que ce projet de loi risque de n'être qu'une anecdotique goutte d'eau dans l'univers si particulier et si dur du commerce international. Ce texte n'empêchera pas les stratégies de contournement dans ce domaine.

Et les pratiques répréhensibles - quelles que soient la volonté et la bonne foi française, et européenne peutêtre - consistant à utiliser des sociétés de droit local, des sociétés écrans ou encore les fameux paradis fiscaux, continueront. Malheureusement, le présent texte n'aura aucun impact sur elles.

Mes chers collègues, comme cela a déjà été dit par certains d'entre nous, si, indéniablement, l'esprit de ce texte est bon, je crains que son impact, dans la pratique, ne soit limité.

Pour ces raisons, le groupe Démocratie libérale votera ce texte, mais sans enthousiasme.

M. le président.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

5

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

M. le président.

Ce soir, à vingt et une heures, troisième séance publique : Suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, no 1919, modifiant le code pénal et le code de procédure pénale et relatif à la lutte contre la corruption.

M. Jacky Darne, rapporteur, au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport no 2001) ; Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, no 1682, relatif au référé devant les juridictions administratives.

M. François Colcombet, rapporteur, au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport no 2002).

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-huit heures cinquante-cinq.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT