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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 2 MARS 2000

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE Mme NICOLE CATALA

1. Relations des citoyens avec les administrations. - Discussion, en nouvelle lecture, d'un projet de loi (p. 1481).

M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.

Mme Claudine Ledoux, rapporteuse de la commission des lois.

DISCUSSION GÉNÉRALE (p. 1483)

MM. Gilbert Gantier, Patrice Carvalho, Emile Blessig, François Colcombet, Georges Tron.

Clôture de la discussion générale.

M. le ministre.

DISCUSSION DES ARTICLES (p. 1490)

Articles 2 et 4. - Adoption (p. 1490)

Article 8 (p. 1490)

Amendement no 8 de M. Evin : M. Claude Evin, Mme la rapporteuse, M. le ministre. - Adoption.

Adoption de l'article 8 modifié.

Article 8 bis. - Adoption (p. 1491)

Article 10 (p. 1491)

Amendement no 5 de M. Colcombet : M. François Colcombet.

Amendement no 6 de M. Colcombet : M. François Colcombet, Mme la rapporteuse, M. le ministre. - Adoption des amendements nos 5 et 6.

Adoption de l'article 10 modifié.

Articles 13 bis et 13 ter. - Adoption (p. 1493)

Article 14 (p. 1493)

Amendement no 7 de M. Colcombet : M. François Colcombet, Mme la rapporteuse, M. le ministre. - Adoption.

Adoption de l'article 14 modifié.

Articles 21, 22 et 22 bis. - Adoption (p. 1493)

Article 24 (p. 1494)

MM. Patrice Carvalho, Georges Tron, le ministre.

Adoption de l'article 24.

Article 24 bis. - Adoption (p. 1495)

Article 25 (p. 1496)

Amendement no 1 de la commission des lois : Mme la rapporteuse, M. le ministre. - Adoption.

Adoption de l'article 25 modifié.

Article 26. - Adoption (p. 1496)

Article 26 ter A (p. 1496)

MM. Georges Tron, François Colcombet, le ministre.

Adoption de l'article 26 ter A. Article 26 quater (p. 1497)

MM. Patrice Carvalho, le ministre.

Adoption de l'article 26 quater

Article 26 quinquies. - Adoption (p. 1499)

Article 27 AA (p. 1499)

Amendement no 2 de la commission : Mme la rapporteuse, MM. François Colcombet, le ministre, Georges Tron. Adoption.

L'article 27 A A est ainsi rédigé.

Article 27 (p. 1500)

Amendement no 3 de la commission : Mme la rapporteuse,

M. le ministre. - Adoption.

L'article 27 est ainsi rédigé.

L'amendement no 4 de M. Buillard n'a plus d'objet.

Article 27 bis. - Adoption (p. 1500)

EXPLICATIONS DE VOTE (p. 1500)

MM. Georges Tron, François Colcombet, Patrice Carvalho.

VOTE SUR L'ENSEMBLE (p. 1502)

Adoption de l'ensemble du projet de loi.

M. le ministre.

2. Dépôt d'un rapport (p. 1502).

3. Dépôt d'un projet de loi organique modifié par le Sénat (p. 1503).

4. Ordre du jour des prochaines séances (p. 1503).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 2 MARS 2000

COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE Mme NICOLE CATALA,

vice-présidente

Mme la présidente.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

RELATIONS DES CITOYENS AVEC LES ADMINISTRATIONS Discussion, en nouvelle lecture, d'un projet de loi

Mme la présidente.

M. le président a reçu de M. le Premier ministre la lettre suivante :

« Paris, le 19 janvier 2000.

« Monsieur le président,

« J'ai été informé que la commission mixte paritaire n'a pu parvenir à l'adoption d'un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.

« J'ai l'honneur de vous faire connaître que le Gouvernement demande à l'Assemblée nationale de procéder, en application de l'article 45, alinéa 4, de la Constitution, à une nouvelle lecture du texte qu'elle a adopté le 23 novembre 1999.

« Je vous prie d'agréer, Monsieur le président, l'assurance de ma haute considération. »

En conséquence, l'ordre du jour appelle la discussion, en nouvelle lecture, de ce projet de loi (nos 2123, 2130).

La parole est à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.

M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.

Madame la présidente, madame la rapporteuse, mesdames, messieurs les députés, le projet de loi que je vous propose d'adopter à présent, relatif aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, a déjà été débattu deux fois dans cette enceinte. Vous connaissez à présent son contenu et ses objectifs. Vos travaux ont largement contribué à l'améliorer et à régler la plupart des difficult és qui ont été soulevées au cours de ces débats. Nous faisons ainsi ensemble un pas de plus dans une réforme de longue haleine.

Nous tous, ici, comme nos concitoyens, nous voulons des administrations plus simples d'accès, plus rapides dans leurs réponses, moins opaques dans leur fonctionnement, bref, plus respectueuses des droits des citoyens, et c'est ce que nous sommes en train de décider. Certes, en sortant de cette enceinte nous n'allons pas, vous et moi, nous dire entièrement satisfaits ou penser que la réforme de l'Etat est chose faite, que nous arrivons au bout du chemin, mais ce projet de loi permet de franchir une étape importante.

De nombreuses dispositions sont désormais adoptées par les deux chambres dans une rédaction conforme.

Toutefois, à mon grand regret, et en dépit des efforts de tous, notamment de votre rapporteuse, Mme Ledoux, la commission mixte paritaire qui s'est réunie le 19 janvier dernier n'a pas abouti à un accord, et c'est ce qui provoque cette nouvelle lecture. Tout au moins, les désaccords sont désormais peu nombreux et clairement circonscrits. Je pense que notre débat en sera rendu plus dense et, je l'espère, encore plus riche.

Vous allez vous prononcer aujourd'hui sur la même rédaction du texte que celle que vous avez adoptée le 23 novembre 1999. Quelques modifications y seront toutefois introduites par amendements. Celles qui ont été adoptées par votre commission des lois n'apportent que quelques nuances ou précisions résultant des entretiens avec des personnalités qualifiées, qui se sont poursuivis tout au long des débats.

Je ne vais pas entrer dans le détail du texte, nous aurons l'occasion d'y revenir. Je me bornerai à évoquer en introduction les principaux points que nous allons revoir ensemble.

Le premier a trait à la rédaction de l'article 10. Vous aviez, en première lecture, adopté un amendement créant une obligation de transparence des comptes à l'égard tant des administrations auxquelles elle ne s'imposait pas encore que des associations qui reçoivent des subventions de personnes publiques. Vous avez voté, lors de la deuxième lecture, un amendement du Gouvernement, qui déclinait aussi précisément que possible les obligations imposées aux unes et aux autres pour favoriser l'information des contribuables. Enfin, vous avez adopté des amendements qui précisent encore le texte et dissipent des inquiétudes que certaines associations vous ont et nous ont fait connaître. J'y suis favorable, car je souhaite que ce texte simplifie l'accès à l'information de l'ensemble des usagers, sans pour autant faire peser de charges supplémentaires sur la catégorie particulière d'usagers que sont les associations.

Le titre IV bis portant des dispositions relatives à la fonction publique a été adopté dans une rédaction identique par les deux assemblées pour la majeure partie de ses articles. Les seuls sujets de désaccord entre les deux assemblées sont les articles qui tirent les conséquences de la jurisprudence dite « Berkani » du tribunal des conflits.

Vous vous en souvenez, du fait de cette décision, les agents des administrations qui, sous l'empire des jurisprudences antérieures, étaient considérés comme « de droit privé », car ne participant pas directement à l'exercice du service public, sont désormais régis par le droit public, dès lors qu'ils sont employés par une personne publique gérant un service public administratif. Par cette décision, le tribunal des conflits a donc supprimé une exception à la règle statutaire selon laquelle les agents de l'Etat, des collectivités locales et de leurs établissements publics administratifs sont des agents publics.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 2 MARS 2000

Le Gouvernement vous propose, par deux articles, d'en tirer les conséquences pour les personnels qui avaient été recrutés sur des contrats de droit privé sous le régime de la jurisprudence antérieure : mon souci est de clarifier la situation juridique de ces agents et de préserver leurs droits. C'est pourquoi ces articles leur offrent l'accès à des contrats à durée indéterminée de droit public, pour ne pas les priver d'une situation stable qu'ils avaient acquise sous leur statut antérieur, ainsi qu'un droit d'option pendant un an pour choisir entre les deux statuts.

En effet, ils peuvent avoir, dans certains cas, avantage à conserver leur statut de droit privé, notamment pour pouvoir cumuler plusieurs emplois lorsqu'ils ne travaillent pour une administration qu'à temps très incomplet.

J'ajoute d'ailleurs, à propos de ce dernier point, que le Gouvernement a engagé une réflexion d'ensemble sur le régime des cumuls d'activité des agents publics, car il souhaite apporter une solution réaliste et équilibrée aux problèmes très réels rencontrés par les agents exerçant à temps incomplet.

Les deux articles en question appliquent donc la jurisprudence Berkani, l'un aux agents de l'Etat et l'autre à ceux des collectivités territoriales. Ce sont ceux qui ont provoqué l'échec de la commission mixte paritaire. Le Sénat, soutenu par la droite de votre assemblée, a en effet adopté un texte moins favorable aux agents et aux termes duquel les salariés qui, actuellement, bénéficient de contrats à durée indéterminée dans le régime de droit privé auquel ils appartiennent, deviendraient, en choisissant d'être salariés de droit public, des contractuels à durée déterminée. Le Gouvernement ne peut pas souscrire à un tel retour en arrière. Ce serait mettre en situation de précarité des salariés qui, pour le moment, ont pour la plupart une situation stable. Ce désaccord n'a pas pu être surmonté. Bien entendu, je vous demanderai d'adopter le texte telque vous l'avez déjà voté en deuxième lecture et de conserver aux agents le bénéfice de leur situation plus favorable.

Nous entamons ce débat avec assez peu de désaccords.

Les points litigieux essentiels sont désormais bien circonscrits et ont déjà été débattus. Nous devrions donc nous diriger vers une discussion sereine qui nous permettra d'améliorer encore le texte. Je sais que votre volonté de répondre toujours mieux aux besoins de la population et aux exigences de notre temps en matière de services publics rejoint la mienne.

La modernisation des services publics participe en première ligne aux grandes politiques impulsées par ce Gouvernement, qu'il s'agisse d'intégration, de lutte contre les exclusions ou de politique de la ville, car les services publics jouent un rôle crucial dans la mise en pratique de ces politiques sur le terrain, y compris, voire surtout là où c'est difficile : ils sont des éléments essentiels du pacte républicain.

Je sais à quel point les agents publics ont à coeur de prendre toute leur place dans cette tâche. Nous contribuons, en adoptant ce texte, à tracer précisément les engagements auxquels ils doivent se tenir face aux citoyens de ce pays. Ceux-ci attendent beaucoup de leurs services publics et leur font confiance. La réponse prompte et efficace des agents publics lors des récentes tempêtes et de la marée noire n'a fait que renforcer cette confiance. C'est au bénéfice de cette vision que, je crois, nous partageons tous ici, que je vous demanderai tout à l'heure d'adopter le texte qui revient devant vous.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Mme la présidente.

La parole est à Mme le rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

Mme Claudine Ledoux, rapporteuse de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'Assemblée nationale est aujourd'hui appelée à examiner, en nouvelle lecture, le projet de loi relatif aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.

La commission mixte paritaire qui s'est réunie le 19 janvier dernier n'est en effet pas parvenue, en dépit de notre volonté de négocier, à élaborer un texte sur les points restant en discussion. Les travaux du Sénat et de l'Assemblée nationale au cours des deux lectures avaient pourtant permis d'aboutir à un accord sur de nombreuses dispositions.

Ce projet de loi comporte une série de mesures qui concernent la vie quotidienne de nos concitoyens et qui visent à rendre les autorités administratives moins lentes, moins opaques, plus accessibles et plus proches des usagers. Il contient par exemple des dispositions de portée très concrète, telles que l'obligation pour l'administration d'accuser réception d'une demande, ou encore celle de raccourcir les délais au terme desquels on considère qu'il y a décision implicite. Sur l'ensemble de ces points, le Sénat s'est prononcé dans les mêmes termes que notre assemblée. De même, le champ d'application de la loi, la mise en cohérence des lois relatives à la CNIL et aux archives, ainsi que les dispositions concernant le Médiateur de la République ont fait l'objet d'un vote conforme.

Cependant, il faut bien convenir que, sur un certain nombre d'autres articles, le Sénat a préféré retenir, au cours des précédentes lectures, une conception souvent très conservatrice - pour certains sénateurs, on pourrait même dire archaïque - des relations entre l'administration et le citoyen, en contradiction avec la philosophie qui a inspiré le projet de loi. Les sénateurs ont notamment refusé d'inscrire dans la loi, à l'article 2, le principe général d'un accès simple aux règles de droit, au motif que cette disposition était dépourvue de valeur normative.

La commission estime, au contraire, que cet article, en réaffirmant que la mise à disposition et la diffusion des textes juridiques constituent une mission de service public, a toute sa place dans un projet de loi qui vise notamment à rapprocher l'administration des citoyens.

De surcroît, les sénateurs ont introduit un article 5 bis qui impose aux associations formant un recours contre une décision d'urbanisme de consigner une somme d'argent auprès du greffe du tribunal administratif. Outre que cette disposition visant à lutter contre les recours abusifs est contraire au principe de valeur constitutionnelle d'égalité des citoyens devant la justice, elle ne peut évidemment pas figurer dans un texte dont l'objet est d'accroître les droits des citoyens, et non de les restreindre.

Le Sénat a également choisi, au mépris de l'esprit général du texte, d'insérer l'ensemble des mesures concernant les maisons de service public dans la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire du 4 février 1995. Ces dispositions relèvent pourtant d'une logique d'amélioration des relations entre les administrations et les usagers, et non d'une logique d'aménagement du territoire.


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Le Sénat a, par la même occasion, éliminé les précisions concernant le statut des personnels de ces maisons, alors que ces dispositions avaient pour objectif d'empêcher le développement de l'emploi précaire.

Enfin, le Sénat a supprimé les amendements du Gouvernement ayant pour objet de transcrire dans la loi la jurisprudence dite « Berkani » qui permet aux agents de catégorie C actuellement en exercice de bénéficier de contrats de droit public à durée indéterminée. Il y avait pourtant urgence à légiférer dans ce domaine, compte tenu des conséquences positives de l'arrêt du tribunal des conflits Berkani de 1996 en termes de statut, de rémunération et de droits sociaux.

C'est sur ce dernier point, c'est-à-dire les articles 26 quater et 26 quinquies, que la commission mixte paritaire a échoué. Les sénateurs proposaient, pour les agents concernés par la jurisprudence Berkani, des contrats à durée déterminée de trois ans renouvelables.

L'amendement du Sénat constituait un net recul par rapport au texte du Gouvernement pour les 15 000 agents concernés. Il aurait en effet abouti à aggraver les situations de précarité rencontrées par les personnels, situations que les dispositions proposées par le Gouvernement visaient justement à résorber. Les positions du Sénat et de l'Assemblée nationale sont donc apparues inconciliables au cours de la commission mixte paritaire.

En conséquence, l'Assemblée nationale se trouve saisie du texte qu'elle a elle-même voté, le 23 novembre dernier, en deuxième lecture. La commission a en effet adopté sans modification l'ensemble des articles du projet de loi, les quelques amendements qu'elle vous propose n'étant que techniques et rédactionnels.

Je vous invite donc à confirmer les choix que nous avons opérés lors de la deuxième lecture et qui sont conformes à l'esprit qui a guidé les rédacteurs du texte.

La philosophie de ce projet de loi s'inscrit en effet dans la volonté de restaurer le pacte républicain, réaffirmée avec vigueur et constance depuis juin 1997 par le Premier ministre. Ce texte est un élément parmi d'autres de l'entreprise ambitieuse initiée par le Gouvernement, pour rapprocher les citoyens des administrations, au moment où l'oeuvre de résorption des inégalités et de lutte contre les exclusions nécessite plus que jamais que les Français reprennent confiance dans la capacité d'action et de transformation de leurs services publics.

Les services publics français sont reconnus dans le monde entier pour leur efficacité dans leur rôle de maintien de la cohésion sociale et de renforcement de la solidarité nationale. L'approfondissement de l'Etat de droit et de la démocratie, que nous appelons de nos voeux avec ce texte, ne pourra pas s'opérer sans le concours des agents de la fonction publique.

Le texte que nous examinons ne saurait fournir un prétexte pour décrier des fonctionnaires méritants, il doit, au contraire, être l'occasion de rapprocher les citoyens de leurs administrations.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Discussion générale

Mme la présidente.

Dans la discussion générale, la parole est à M. Gilbert Gantier.

M. Gilbert Gantier.

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, tout d'abord, un point d'histoire : le texte que nous examinons aujourd'hui en nouvelle lecture reprend globalement l'économie du projet de loi relatif à l'amélioration des relations entre les administrations et le public qui avait été présenté par le gouvernement d'Alain Juppé et dont l'examen législatif était presque achevé au moment où est intervenue la dissolution de l'Assemblée nationale en avril 1997.

Personne ne peut nier que ce texte est animé des meilleures intentions. Il est en effet fondamental de rapprocher l'administration des citoyens qu'elle est supposée servir. Le problème n'est pas nouveau, loin s'en faut. Depuis des années, les protagonistes de tous bords tentent de dénoncer le caractère impénétrable des voies de l'administration.

Il ne s'agit pas ici de faire le procès de l'administration.

Cependant qui, dans sa modeste existence, peut prétendre n'avoir jamais été confronté à ce que l'on appellera poliment « des tracas administratifs » ? Oh ! cela n'est généralement pas bien méchant. Mais une simple formalité peut parfois se transformer en cauchemar.

Il ne faut pas perdre de vue que l'administration ne constitue pas le lieu d'évolution naturel du citoyen.

Lorsque nous nous déplaçons, lorsque nous effectuons une démarche administrative, nous sommes nombreux à nous sentir en terrain plus ou moins miné. Les arcanes de l'administration sont étrangères à la plupart d'entre nous.

Ceci est d'autant plus vrai que, la plupart du temps, nous n'avons pas affaire à l'administration pour le plaisir.

En principe, l'administration est là pour nous aiguiller, nous conseiller, nous informer. Or, c'est précisément l'exacte image inverse qu'elle renvoie, celle d'un méandre de procédures complexes qui mettent le citoyen à la merci du bon vouloir de quelques fonctionnaires.

Ainsi, un certain nombre de dispositions de ce projet, qui apparaissent anodines, n'en auront pas moins un impact important - notre objectif étant d'améliorer lesr elations quotidiennes entre l'administration et les citoyens. Je pense à l'obligation qui sera désormais faite à l'administration - et c'est heureux ! - d'accuser réception des demandes qu'elle reçoit. Cette nouveauté mérite d'être signalée.

Je pense également à la réduction du délai au bout duquel le silence de l'administration sera considéré comme une décision implicite d'acceptation, ou encore à la multiplication des cas où le silence de l'administration sera considéré comme une décision implicite d'acceptation.

Toutes ces mesures vont dans le sens souhaitable d'une administration au service du public, telle qu'annoncée par les gouvernements successifs, qu'ils soient de droite ou de gauche.

Pour autant, je ne peux, et je le regrette, me livrer à un satisfecit complet. En effet, ce texte se caractérise avant tout par son contenu disparate. J'ai vraiment du mal, je dois l'admettre, à distinguer une architecture d'ensemble, une logique cohérente qui structurerait l'économie générale de ce projet de loi.

T outes les mesures prises individuellement, qu'il s'agisse de la transparence administrative, de la transparence financière, de l'amélioration des procédures administratives ou des maisons des services publics vont dans le bon sens. Mais je ne suis pas convaincu que ce saupoudrage réponde avec pertinence au besoin de clarificatione t de simplification du fonctionnement de l'administration.


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A l'évidence, l'administration et l'homme de la rue ne parlent pas toujours le même langage. Cette incompréhension réciproque, ce manque de considération, voire cette défiance l'un envers l'autre posent problème.

L'administration apparaît comme un monde à part, avec sa logique qui lui est propre mais qui échappe à la plupart d'entre nous : or ce texte ne contribuera pas, autant qu'on pourrait le souhaiter, à changer fondamentalement la perception que les citoyens ont de l'administration.

Cela est vrai non seulement sur le fond de ce projet de loi, mais aussi sur sa forme. On est en effet en droit d'attendre d'un texte qui entend simplifier les relations entre l'administration et les citoyens qu'il s'applique à luimême ce qu'il préconise.

Or le projet de loi est considérablement alourdi par des dispositions inutiles, la plupart d'entre elles figurant déjà dans d'autres textes. C'est le cas notamment des dispositions relatives aux maisons des services publics.

Dans ses articles 24 à 26, le projet de loi prévoit un cadre juridique souple pour la création et la pérennisation de ces maisons des services publics. L'article 24 prévoit par exemple qu'une convention fixera les conditions dans lesquelles les personnes morales mettront les locaux à la disposition de la maison des services publics ou fixera les modalités de désignation du responsable de ces maisons, les décisions qu'ils pourront prendre, etc.

Mon objectif n'est pas ici de critiquer le principe de la création des maisons des services publics bien que le titre retenu me paraisse quelque peu étrange. Je constate simplement que la loi du 25 juin 1999 d'orientation pour l'aménagement du territoire prévoit déjà la possibilité pour l'ensemble des acteurs locaux et pour l'Etat de mettre en commun des moyens pour assurer l'accessibilité et la qualité des services publics. Je ne vois donc pas ce que le fait de répéter ces dispositions dans ce texte apporte de nouveau.

Deux autres points méritent attention.

Le Sénat a, à bon droit, introduit un article 5 qui prévoit le dépôt d'une sorte de caution par les associations lorsqu'elles forment un recours contre une décision d'urbanisme. Là encore, ne vous méprenez pas. Il ne s'agit en aucun cas de brimer les associations, qui constituent un vivier essentiel de la société civile et dont les contre-pouvoirs sont utiles. Mais j'ai cru comprendre que le but de ce texte est d'améliorer le fonctionnement de l'administration et d'accroître sa transparence. Le dépôt d'une caution s'inscrit dans ce cadre, car cette mesure est de nature à permettre aux pouvoirs publics d'agir rapidement, sans être paralysés par des recours excessifs qui relèvent davantage de la défense d'intérêts personnels que de celle de l'intérêt général.

En outre, les dispositions prévues aux articles 26 quater et 16 quinquennies ne sont pas sans poser problème. Ces articles visent en effet à transposer dans la loi la jurisprudence Berkani du tribunal des conflits de 1996. En vertu de cette jurisprudence, « les personnels non statutaires travaillant pour le compte d'un service public administratif sont des agents contractuels de droit public, quel que soit leur emploi ».

Vous l'avez souligné, madame le rapporteur, cette disposition ne devait concerner que les personnels de catégorie C. Vous avez par ailleurs précisé que les personnes déjà en poste pourraient choisir entre un régime de droit privé ou un régime de droit public. En revanche, les personnels recrutés après l'entrée en vigueur de la loi devraient pouvoir bénéficier d'un contrat de droit public à durée déterminée. J'ai bien peur, monsieur le ministre, que ces dispositions n'oublient tout bonnement un des principes essentiels du statut de la fonction publique, à savoir l'interdiction du cumul d'un emploi public et d'une activité privée. De plus, en voulant établir une certaine stabilité et des garanties sociales supplémentaires aux agents du service public, cette disposition risque d'engendrer un recours accru à la sous-traitance pour les activités ne nécessitant que quelques heures de travail par semaine ou les activités saisonnières.

En définitive, si nombre de dispositions de ce projet de loi répondent à des besoins évidents, elles ne font pas preuve d'une originalité particulière. Certaines reprennent des dispositions réglementaires, d'autres ne font qu'institutionnaliser des mesures déjà existantes.

Parallèlement, d'autres mesures laissent à penser que la réforme de l'Etat ne fait pas véritablement partie des priorités du Gouvernement. Le meilleur exemple en est la suppression du commissariat à la réforme de l'Etat, remplacé par une simple délégation interministérielle placée sous la direction du directeur général de l'administration et de la fonction publique. Or, monsieur le ministre, cette structure ne dépend que du ministère de la fonction publique, ce qui laisse à penser qu'elle aura plus de mal à s'imposer face à la citadelle de Bercy.

Pour le groupe Démocratie libérale et Indépendants, qui aspire à une grande et véritable réforme de l'Etat, ce texte « fourre-tout » manque d'ambition. S'il n'y est pas hostile, il ne peut l'approuver pour les raisons que je viens d'expliquer. Le groupe DL s'abstiendra donc dans le vote général.

M. Georges Tron et M. Emile Blessig.

Très bien !

Mme la présidente.

La parole est à M. Patrice Carvalho.

M. Patrice Carvalho.

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voici de nouveau réunis pour discuter en nouvelle lecture du projet de loi relatif aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.

Participant au mouvement plus vaste de la réforme de l'Etat, ce texte est d'autant plus avenant qu'il a permis à chacun d'entre nous de développer ses conceptions en matière de modernisation des services publics. C'est précisément dans le cadre de cette discussion que le groupe communiste entend rappeler, une nouvelle fois, les enjeux fondamentaux qui ont trait à l'efficacité d'une administration plus proche de nos concitoyens.

Pour satisfaire véritablement les attentes de l'ensemble des citoyens, nos services publics se doivent de répondre efficacement aux défis majeurs que sont la lutte contre les exclusions et l'aménagement durable du territoire.

Cependant, pour que l'administration représente réellement un moyen efficace de réduire les inégalités tant sociales que géographiques, encore faudrait-il qu'elle dispose de moyens suffisants pour assumer au mieux ses missions de service public.

Les personnels de nos administrations ne sont, biene ntendu, nullement en cause, puisque, également confrontés au sentiment de carence des services publics qui grandissait jusqu'ici parmi les usagers, ils sont les premiers à reconnaître et à regretter le manque de moyens humains et logistiques. Une traduction pleine et fidèle de la jurisprudence dite « Berkani » du tribunal des conflits pourrait permettre une meilleure satisfaction des exigences de nos concitoyens quant à la qualité du service public. Il


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n'est que justice que l'ensemble des personnels employés par une personne publique gestionnaire d'un service public administratif soient des agents publics.

De même, la mise en place des maisons des services publics nous paraît devoir s'accompagner d'un certain niveau d'exigence. Nous devons rompre à ce propos avec la logique du gouvernement précédent, illustrée par le projet de loi Perben, qui visait à rationaliser le service public, car l'essence même du service public le rend antinomique avec tout rationnement.

Le cadre législatif dévolu aux maisons des services publics ne doit pas, selon nous, leur conférer un air de

« service public minimum », qui ne serait qu'un palliatif, voire un pis-aller. Les maisons des services publics ne doivent aucunement être l'occasion de poursuivre le mouvement de désengagement entrepris en banlieue et dans les zones rurales. Elles doivent, en revanche, participer réellement à améliorer la proximité des services publics, en accord avec l'aménagement et le développement durable de l'ensemble du territoire.

Certes, l'objectif est fort louable de vouloir réunir en un seul lieu différents services afin de faciliter les démarches des usagers. Toutefois, pour éviter que la formule du « guichet unique » ne se transforme en une simple parure du pauvre, il convient d'apporter certaines garanties quant aux conditions dans lesquelles s'exercera la polyvalence de ces services publics.

Nous demeurons préoccupés par les moyens qui devront être alloués au développement de ces maisons des services publics. Nous pensons, à cet égard, qu'il conviendrait de garantir au mieux la compétence des personnels qui leur seront affectés, en faisant que ces maisons ne fonctionnent qu'avec le concours d'agents titulaires.

Par conséquent, comme au cours des lectures précédentes, qui ont vu l'adoption d'un certain nombre de nos amendements, nous resterons attachés à renforcer la philosophie de ce texte qui permet une amélioration sensible des droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.

Mme Claudine Ledoux, rapporteuse.

Très bien !

Mme la présidente.

La parole est à M. Emile Blessig.

M. Emile Blessig.

Monsieur le ministre, nous sommes réunis pour une nouvelle lecture d'un projet de loi qui vise à améliorer les droits des citoyens face à l'administration. Votre texte marque des avancées auxquelles tout le monde souscrit légitimement : un meilleur accès aux règles de droit pour tous et une meilleure transparence a dministrative, notamment avec la création d'une commission d'accès aux documents administratifs dotée d'une compétence horizontale très large. L'amélioration de la transparence financière et des procédures administratives va dans le même sens.

Tous les élus le reconnaissent, nous devons prendre garde d'une « judiciarisation » croissante de notre vie publique et de notre société en général.

Sans aller jusqu'à l'exigence d'une caution, comme le Sénat l'a proposé, je considère qu'il y a un véritable problème d'équilibre entre les droits des citoyens, largement consentis, et ceux des collectivités locales ou de l'administration au sens large du terme. Il faut veiller à maintenir un équilibre et éviter que des particuliers ne détournent les procédures et ne les utilisent abusivement. C'est tout le problème de la protection de l'action de l'administration face aux abus de procédure qui se trouve posé.

Aujourd'hui, il est de bon ton de rendre hommage aux associations, qui sont souvent très utiles. Mais quelle est leur légitimité ? On sait qu'il existe des associations ad hoc , dont la légitimité est pour le moins discutable et qui, par un recours systématique à la procédure, parviennent à retarder, voire à bloquer bon nombre de projets.

Mais rappelons-nous que, dans notre système, la légitimité a partie liée avec la démocratie : de ce point de vue, l'élu est porteur de l'intérêt général.

Comme cela été relevé en première lecture, les droits que prévoit le texte vont dans le bon sens mais, d'une manière générale, ils ne protègent pas l'administration des abus.

Permettez-moi de me réjouir de l'émergence des maisons des services publics. Elles seront fort utiles. Il était bon que le texte que nous examinons précise les modalités de leur fonctionnement. Je m'en félicite d'autant plus que, dans la circonscription dont j'ai l'honneur d'être l'élu, il y a une sorte de préfiguration de maison des services publics : dans une friche industrielle transformée à l'initiative d'une collectivité intercommunale est mise en oeuvre une déconcentration de la sous-préfecture, mais également de la mutualité sociale agricole, de la sécurité sociale, des allocations familiales, de l'ANPE, de la PAIO et d'associations de formation.

Compte tenu de la demande croissante de services à l'administration de la part de nos concitoyens, nous n'échapperons pas à de nouvelles méthodes de travail ni à une certaine mutualisation. C'est vrai en ce qui concerne la politique de la ville, mais ça l'est tout autant en ce qui concerne le milieu rural.

Monsieur le ministre, votre texte fournit une première réponse : il tend à éviter une désertification rampante de l'administration.

Trop souvent et conformément à ce que j'appellerai la pensée unique administrative rationalisée, on élague les extrémités pour concentrer les moyens sur les centres. Il y a deux jours, nous avons discuté de la signature électronique et des nouvelles technologies. Je souhaiterais que l'on profite de l'occasion pour réfléchir à un meilleur partage du travail administratif grâce aux technologies de manière à permettre, non seulement en milieu rural, mais partout où la présence des services administratifs est menacée, le maintien d'une administration compétente et de proximité. En effet, c'est un leurre que de penser qu'un jour un terminal d'ordinateur remplacera un fonctionnaire. D'ailleurs, je ne pense pas que ce soit votre souhait. Il n'en reste pas moins qu'il y a là un risque que je refuse de faire courir au milieu rural.

Telles sont, monsieur le ministre, les observations que je souhaitais faire au nom du groupe UDF.

Parce que des incertitudes et un certain déséquilibre par rapport à l'administration déconcentrée et aux collectivités locales subsistent, parce que, s'agissant des maisons des services publics, nous aurions pu aller plus loin pour intégrer une évolution que nous risquons de subir si nous ne l'anticipons pas, le groupe UDF s'abstiendra.

Mme la présidente.

La parole est à M. François Colcombet.

M. François Colcombet.

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voici arrivés au terme de longs débats. S'ils ont été, à mon avis, exagérément longs, nous devons en retenir les aspects positifs, et en particulier le fait que la CMP n'ait pas abouti car cela nous permettra d'ajouter, à la faveur de l'article 88 du règlement, quelques précisions qui seront les bienvenues.

En réalité, monsieur le ministre, il ne s'agit pas d'une loi révolutionnaire, mais d'une loi de réforme, d'une loi d'ajustement d'une situation qui existait déjà : un Etat


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 2 MARS 2000

démocratique, qui a besoin de mieux fonctionner. Il n'était pas question de mettre à bas la maison, ni de penser que poser des fenêtres symétriques en augmenterait le confort. Il était question de ménager de nouvelles ouvertures, d'aérer les institutions et de les rendre plus vivables pour tout un chacun.

C'est dans cet esprit que nous avons tous travaillé.

Cela ne signifie pas que nous ne nous soyons pas penchés sur l'essentiel car les relations entre les administrations et les citoyens sont au centre même du fonctionnement de la démocratie. Des relations harmonieuses font que les citoyens sont attachés à leur pays et en sont fiers, ils sont heureux et épanouis « chez eux ». Au contraire, des relations malvenues peuvent leur donner le sentiment d'être étrangers dans leur propre pays. Il convient donc d'être particulièrement attentif à tous ces détails. Le Sénat et l'Assemblée ont beaucoup travaillé en ce sens.

Ainsi que vous l'avez dit, monsieur le ministre, l'Etat n'est pas un objet étranger aux citoyens : le premier appartient aux seconds, il est à leur service, mais les seconds sont aussi subordonnés au premier et, à certains moments, ils peuvent même être au service de la collectivité et doivent alors souvent abandonner leurs prérogatives personnelles, leurs intérêts privés au profit de cette collectivité.

L'Etat dispose pour agir des administrations. Mais, dans le même esprit, celles-ci ne sont pas des adversaires des citoyens : elles sont à leur service. Ainsi que je le dis fréquemment, l'administration ne doit pas être protégée par des vitres pare-balles, des hygiaphones, des textes tatillons, des interdits ! Elle doit être accessible, respectée et respectable.

Quant aux fonctionnaires, il est utile de rappeler qu'ils ne sont pas propriétaires de leur fonction, de même que le secret de l'instruction n'est pas fait pour le confort des juges mais pour celui des citoyens, et que le secret médical n'est pas fait pour le confort des docteurs mais pour protéger la vie privée des citoyens.

M. Claude Evin.

Absolument !

M. François Colcombet.

Les fonctionnaires ont un statut qui n'est pas fait pour leur confort de fonctionnaires : ce statut permet aux citoyens d'avoir en face d'eux des gens qui soient protégés contre les emprises de l'Etat ou de tiers, des gens recrutés selon des règles claires, en ce qui concerne tant leur formation que leur avancement.

C'est dans cet esprit qu'il faut considérer l'arrêt Berkani du Tribunal des conflits.

Sur un plan général, nous nous trouvons face à deux logiques. Le Sénat représente plutôt l'une, et nous représentons plutôt l'autre.

La première découle du cumul actuel des mandats et de la décentralisation, l'autre conduit à dénoncer les pouvoirs de l'administration.

Beaucoup d'entre nous, à la tête de mairies et de conseils généraux, sont à la tête d'une structure à laquelle s'appliquent toutes les règles que nous voulons imposer à l'administration. Nous savons très concrètement - les sénateurs l'expriment peut-être plus que les députés - ce que c'est que d'être confronté à des usagers du droit insupportables qui se présentent au moment où les bureaux ferment ou qui font un mauvais usage des informations qu'on leur donne. Nous savons ce que c'est que d'être confronté à des associations qui ont la volonté de démolir ce que prépare une bonne mairie ou un bon conseil général.

Il est assez normal que les sénateurs, qui sont plutôt favorables au cumul des mandats et dont nombre représentent de petites collectivités locales, fassent état de ce type de situation. C'est tout à fait légitime. Les administrations doivent être protégées contre les « allumés ».

Mais nous, députés, nous recevons en nos permanences des gens, isolés ou regroupés en associations, qui se sont heurtés à l'administration de l'Etat ou à celle des collectivités locales. Une grande partie de notre travail consiste à rédiger la lettre indispensable sans laquelle une requête ne peut jamais être entendue.

Entre ces deux logiques qui sont parfaitement légitimes, il s'agit de trouver un équilibre, et je crois que cette loi y contribue. Cela dit, nous sommes tous persuadés qu'il faudra retravailler le sujet dans l'avenir car l'équilibre que je viens d'évoquer ne pourra être que provisoire, comme tous les équilibres en la matière. La décentralisation n'offre-t'elle pas l'exemple même de la nécessité d'une adaptation générale du fonctionnement de notre service public ?

Quoi qu'il en soit, nous avons, dans cet esprit, bien travaillé. Mais il faut peut-être insister sur la question des associations.

Les associations peuvent être détestables et recouvrir des activités qui nous hérissent : des sectes s'appellent

« associations » ; nos adversaires politiques utilisent des associations...

M. Georges Tron.

De tout bord ! (Sourires.)

M. François Colcombet.

... et des adversaires de notre nation font de même. La dénomination « association » peut cacher le pire, mais il peut aussi s'agir du meilleur, comme le progrès social : c'est en se regroupant en associations que les citoyens expérimentent des idées que, très souvent, le corps social reprend à son compte.

Je rappelle que les associations ont joué un rôle important dans notre histoire. Obligatoires sous l'Ancien régime, parce que les individus n'existaient qu'en tant que membres d'un corps social, elles ont été interdites sous la Révolution par la loi Le Chapelier, qui proscrivait les syndicats. Il faut se souvenir que l'on faisait passer en correctionnelle et que l'on envoyait en prison toute personne qui constituait une association. Puis les syndicats ouvriers ont été autorisés et les associations mises en forme ; on a alors considéré que le droit d'association était un droit fondamental de notre démocratie. Et j'ai la conviction qu'à cela, comme d'ailleurs à la loi sur la presse, il ne faut pas toucher, sauf exception.

Je m'explique.

Depuis 1901, les atteintes au droit d'association n'ont été portées que dans des périodes de durcissement politique ou de grands troubles, dans les périodes de guerre, les périodes d'occupation ou dans l'après-mai 68. Certains qui sont ici se souviennent peut-être d'une loi Marcellin qui a voulu subordonner la constitution des associations à une autorisation préfectorale. Le Conseil constitutionnel a, fort sagement, rendu un décision de principe reconnaissant que l'on avait le droit de se constituer en association, quitte à être sanctionné mais ultérieurement. Cette idée doit rester très forte dans nos esprits : elle vaut pour nous qui connaissons une période de paix - nous ne sommes ni dans l'après-mai 68 ni dans une situation de guerre : nous sommes dans une période de développement normal de la démocratie. Les associations doivent pouvoir agir, même si elles sont gênantes, quitte à être sanctionnées ensuite.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 2 MARS 2000

J'en terminerai par une idée qui m'est chère : le texte que nous examinons aujourd'hui doit prendre place dans un ensemble plus large.

Diverses dispositions ont été évoquées au cours de nos débats : la nécessité d'une codification, l'accès facile au droit, le référé administratif, qui fait l'objet d'un texte en cours de discussion, c'est-à-dire la possibilité de débloquer très rapidement les situations créées par des associations qui intenteraient des recours abusifs. Je n'oublie pas la possibilité donnée aux magistrats par l'article 700 du code de procédure civile de faire payer à ceux qui abuseraient du droit des pénalités élevées.

C'est dans ce cadre qu'il convient de considérer le projet de loi.

Je suis moi-même élu local et je cumule, comme tout le monde, au moins trois mandats.

(Sourires.)

M. Claude Evin et M. Georges Tron.

Pas comme tout le monde !

M. François Colcombet.

Il m'arrive donc fréquemment d'être agacé par des associations et même de leur être opposé. Mais il convient de ne pas céder à la tentation de se donner des pouvoirs excessifs. Si, quand on est en position de force, la démocratie présente des inconvénients, elle impose également des devoirs. La majorité a donc le devoir de faire en sorte que le texte soit voté car il est indispensable au fonctionnement de la démocratie.

Bien évidemment, le groupe socialiste, quant à lui, l'adoptera.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Georges Tron.

M. Georges Tron.

Monsieur le ministre, comme vous l'avez constaté depuis la première lecture, nous avons une appréciation assez commune de l'esprit qui anime votre projet de loi. Mon propos d'aujourd'hui ne contredira pas mes propos antérieurs.

Il s'agit d'un texte qui va manifestement dans le sens de ce qu'il faut faire, et je pourrais à bien des égards reprendre ce qu'a dit à ce sujet M. Colcombet. (Sourires sur les bancs du groupe socialiste.)

M. François Colcombet.

Très bien !

M. Georges Tron.

On n'est pas obligé d'être désagréable sous prétexte qu'on est dans l'opposition, même si c'est ce que veut la tradition. Quand je ne suis pas d'accord, je le dis. Mais en l'occurrence, je le suis, en tout cas pour ce qui concerne les deux tiers du texte.

Nombre des dispositions proposées vont donc dans le bon sens. Il faut le souligner car il importe d'améliorer les relations entre l'administration et les citoyens. C'est là un point fondamental, comme l'a dit avant moi M. Gantier.

En effet, nombre de nos concitoyens ont encore une mauvaise image de l'administration au sens le plus large du terme. Cette mauvaise image est, par exemple, celle des centres de sécurité sociale, que l'on assimile à une administration. Quand les gens forment des files d'attente comme celles que l'on a vues ces dernières semaines, ils se disent que ce n'est pas normal.

Il est vrai aussi que certaines réponses lapidaires de l'administration ne sont pas acceptables - je pense notamment à celles de l'URSSAF qui parviennent, quand elles lui parviennent, à tel ou tel artisan qui a expliqué que, pour une raison parfaitement justifiée, il n'a pu honorer ses obligations dans les délais prévus.

Les arguments des usagers ne sont quasiment jamais pris en compte, même lorsqu'ils sont justifiés. Cela donne une mauvaise image de l'administration. Si le premier objectif de votre texte est d'améliorer cette image, je dirai que c'est une bonne chose.

J'en viens à un deuxième point, et croyez bien qu'en l'évoquant, monsieur le ministre, je ne veux pas jeter de pierre dans votre jardin car je vous assure que tel n'est pas mon état d'esprit aujourd'hui. Il est important de bien faire comprendre que l'on doit également répondre à c ertaines aspirations légitimes des fonctionnaires et prendre en considération leurs inquiétudes. J'ai à l'esprit des problèmes cruciaux qui font naître une tension chez les fonctionnaires car ils sont bien conscients de leur gravité. C'est le cas du problème des retraites de la fonction publique. Je sais bien que ce n'est pas notre sujet, mais je suis profondément convaincu que nous devons rapidement répondre aux inquiétudes des fonctionnaires à cet égard car ce problème pèse sur leur avenir.

Les fonctionnaires seront d'autant plus à l'écoute de nos concitoyens qu'ils auront le sentiment que des questions de cette nature, qui sont d'importance, seront des questions sur lesquelles nous aurons travaillé, parfois en accord, parfois en désaccord, en tout cas avec la volonté de ne pas les laisser en suspens.

Il ne faut pas mettre en accusation des fonctionnaires !

Il s'agit, dans leur immense majorité, de gens qui assurent plus que correctement les missions difficiles qui leur sont confiées.

En tant qu'élus, nous savons ce que c'est que d'être en relation avec les administrés. Vous-même, monsieur Colcombet, vous avez dit ce que vous pensiez des associations. Les élus sont bien placés pour savoir que, de temps en temps, le contact avec l'administré qui dit qu'il veut tout, tout de suite et d'une certaine façon, est difficile. Et les agents de la fonction publique - du moins ceux qui sont en contact direct avec nos concitoyens - le savent aussi bien que nous.

Après ce préambule, je ferai quelques remarques sur les dispositions dont nous discutons.

En premier lieu, il y a celles que nous approuvons et sur lesquelles je passerai assez rapidement. Je me permettrai cependant de souligner au passage que nous les approuvons sans faire de distinguo entre les positions de l'Assemblée et celles du Sénat. Je crois très sincèrement que le conservatisme n'est pas d'un côté ou de l'autre : il y a simplement, peut-être, une façon différente d'aborder les problèmes. En commission mixte paritaire, nous, députés, avons eu des positions qui étaient parfois différentes de celles de nos amis sénateurs, sans que cela soit lié à nos appartenances politiques.

Nous approuvons les dispositions visant à rendre le fonctionnement de l'administration plus lisible pour les citoyens. Il en va ainsi, notamment, de l'article 4, qui affirme le principe de la levée de l'anonymat dans les relations entre l'administration et les citoyens. A cet égard, si je comprends la logique juridique qui a conduit la majorité et le Gouvernement à exclure les services publics industriels et commerciaux du champ d'application de cette disposition, je comprends tout autant la position du Sénat, qui souhaitait au contraire l'élargir à l'ensemble des services publics industriels et commerciaux. En la matière, le conservatisme n'est peut-être pas du côté où on l'attend et, sur ce point en tout cas, le Sénat est moins en retrait que ce que certains auraient pu imaginer.


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L'article 8, qui tend à élargir les compétences de la CADA quant à la communication des documents administratifs et à permettre notamment la communication de documents par une administration même si elle n'en est pas l'auteur va dans le bon sens, car nos concitoyens n'ont pas à entrer dans des considérations propres au fonctionnement de l'administration.

L'article 10 permettra la consultation par le public des comptes des autorités administratives et des organismes aidés ou subventionnés. C'est très bien ! En effet, s'agissant d'argent public, je ne vois pas pourquoi le citoyen n'aurait pas la possibilité de demander des comptes et de les vérifier lui-même.

L'article 14 est relatif aux modalités de transmission d'une demande à l'administration. Je n'y reviendrai pas, mais je trouve ces dispositions tout à fait positives.

Les articles 21 et 22 concernent à la fois les droits des intéressés préalables à la décision administrative et la réforme relative au retrait par les autorités administratives des décisions implicites d'acceptation. L'homogénéisation prônée va dans la bonne direction.

Je m'attarderai un peu plus sur l'article 22 bis et la procédure contradictoire en cas de reversement des prestations sociales, car ces dispositions mettront fin à une situation que j'estime profondément injuste. En effet, l'administré est actuellement obligé de rembourser du jour au lendemain des prestations indûment perçues à la suite d'une erreur de l'administration, même s'il est dans une situation extrêmement difficile, et si c'est lui qui se trompe, il est également confronté à une obligation de remboursement immédiat, même si sa bonne foi est évidente.

Mme Claudine Ledoux, rapporteuse.

Tout à fait.

M. Georges Tron.

De telles dispositions n'appellent donc aucune réserve de notre part.

Mme Claudine Ledoux, rapporteuse.

Très bien !

M. Georges Tron.

Voilà pour le premier type de remarques qui, comme vous avez pu le constatez, vont plutôt dans le bon sens.

J'en viens à la deuxième série de remarques, qui sont d'ailleurs plutôt des réserves, pour être plus précis. Notre objectif doit être d'éviter les dérives, dans un sens ou dans un autre. Mon prédécesseur à cette tribune a évoqué l'article 5 bis . A nous aussi, il nous a posé problème. Fallait-il ou non partir de l'idée selon laquelle des abus pouvaient être commis par les associations ? Comme vous, monsieur Colcombet, je pense qu'il y a des abus en la matière. Pour autant, faut-il prendre des dispositions aussi radicales que celles prônées par le Sénat ? Je ne le pense pas !

Mme Claudine Ledoux, rapporteuse.

Très bien !

M. Georges Tron.

Suivre le Sénat reviendrait en effet à instaurer une sorte de degré censitaire dans la façon dont une association pourrait s'exprimer. Or la bonne foi nous conduit à admettre, les uns et les autres, au-delà des seuls bancs du Rassemblement pour la République, qu'une association microscopique regroupant des gens véritablement animés d'un sentiment d'injustice peut avoir des raisons de déposer un recours et que l'on ne peut dès lors entraver son action par des mesures de cette nature. C'est la raison pour laquelle, là encore, nous avons suivi l'Assemblée.

Mme Claudine Ledoux, rapporteuse.

Très bien !

M. Georges Tron.

En revanche, il convient d'être attentifs à deux risques de dérive.

Le premier est lié aux articles 13 bis et 13 ter visant à permettre l'exercice par les contribuables des actions appartenant au département et à la région. Certes, puisque cette possibilité a été reconnue en matière communale, il peut paraître logique de l'élargir en matière départementale et régionale. Cela dit - c'est une considération générale qui rejoint ce que vous avez dit tout à l'heure, monsieur Colcombet, et sur laquelle j'insiste chaque fois que je suis amené à m'exprimer sur un texte - veillons à ne pas donner le sentiment que le législateur entend capter une partie des prérogatives des élus ! Il est en effet important que ceux qui gèrent les collectivités territoriales puissent décider eux-mêmes s'il faut agir ou non. Je ne conteste pas le principe de ces dispositions, mais prenons garde à ne pas aboutir un jour ou l'autre, sur un plan général, à dessaisir les élus de leurs compétences.

S'agissant des articles 24 et 24 bis sur les maisons des services publics, je reprendrai à mon compte les observations formulées par M. Gantier. L'idée est plutôt bonne mais, dans ce domaine comme dans d'autres, il ne faudrait pas que l'on aboutisse insidieusement, de façon plus ou moins occulte et à plus ou moins long terme, à transférer une partie des coûts sur les collectivités locales. On constate en effet, notamment dans les banlieues comme celle dont je suis l'élu, une forme de désaisissement de l'Etat de ses prérogatives de nature régalienne, et je le regrette. Comme je l'ai dit lors du débat sur le cumul des mandats, nombre de collectivités locales, en particulier en banlieue, sont aujourd'hui confrontées à des difficultés financières. Si on leur demande de participer financièrement au fonctionnement des maisons des services publics, elles risquent de ne plus pouvoir suivre car cette participation, minime au début, ira en s'accroissant. C'est le second risque de dérive.

Après les remarques positives et les réserves, j'en viens à une troisième série de remarques qui portent plus sur la forme que sur le fond, et qui sont plus négatives. Il y a q uelques semaines, alors que nous discutions avec M. Chevènement et Mme Tasca du texte sur le cumul des mandats, un député du groupe socialiste avait défendu un amendement visant à clarifier les règles en matière de financement des campagnes électorales, en particulier dans la perspective des prochaines élections municipales, au motif qu'il était actuellement difficile de savoir ce qu'un maire sortant pouvait faire et ne pouvait pas faire. Objectivement, cet amendement était bon. Je l'ai dit au nom du groupe RPR, et je l'ai d'ailleurs même repris lorsque son auteur l'a retiré. Mais que nous a répondu M. Chevènement ? Que nous n'avions pas tort sur le fond, mais que cet amendement n'avait rien à voir avec ce texte, qu'il s'agissait d'un cavalier et qu'il ne pouvait donc l'accepter. Or voilà que vous nous proposez aujourd'hui un texte qui comporte au moins deux cavaliers.

D'abord, sur tout ce qui a trait à l'arrêt Berkani - c'est important, je l'ai bien compris - nous aurions dû aboutir en commission mixte paritaire. Nous le souhaitions d'ailleurs, Mme la rapporteuse peut en témoigner ici. Si tel n'a pas été le cas, c'est parce qu'il s'agit effectivement d'un cavalier et qu'il y a eu achoppement entre le Sénat et l'Assemblée nationale sur ce point. Des questions ont été posées par le Sénat et Mme la rapporteuse elle-même a reconnu en commission mixte paritaire qu'elles étaient pertinentes. J'attends donc des réponses du Gouvernement. Par exemple, quel est l'intérêt, pour les personnes concernées, de se retrouver sur un statut public par


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 2 MARS 2000

rapport à la situation pro ante ? C'est une vraie question, vous l'avez vous-même admis, madame la rapporteuse. Je voudrais savoir ce qu'il en est.

Ensuite, il y a l'amendement Gouzes-Montebourg qui vise en fait à clarifier - on se demande d'ailleurs pourquoi - par des détails qui n'ont rien à voir avec le sujet, une disposition issue du texte de M. Chevènement sur l'intercommunalité. Faute de temps, je ne vous lirai pas les déclarations qui ont été faites lors de l'examen en commission des lois avant la seconde lecture, mais M. Gouzes avait alors dit que s'il s'agissait de soustraire à l'autorité du président de l'assemblée territoriale les personnels mis à la disposition des groupes politiques, il serait contre et il s'était insurgé contre « la pression constante, à laquelle sont soumis les élus locaux que l'on cherche sans répit à culpabiliser ». Quant à M. Colcombet, il a considéré qu'il était normal que les collaborateurs ne rendent compte qu'à l'autorité territoriale auprès de laquelle ils sont placés et M. Bernard Derosier s'est associé à tout cela. Ma critique n'est pas personnalisée, mais s'il suffit qu'un parlementaire, aussi éminent soit-il, émette le désir de modifier un texte pour que cela justifie le dépôt d'un amendement dans le premier projet qui vient en discussion, alors qu'il n'y a aucun rapport entre les deux, nous ne nous y retrouverons plus ! Puisque nous prétendons éclaircir les relations entre les citoyens et l'administration, appliquons-nous, à nous législateurs, la règle qui consiste à faire preuve d'un peu de rigueur dans nos textes ! N'en faisons pas des fourretout ! Sur les dispositions faisant suite à l'arrêt Berkani ets ur l'amendement Gouzes-Montebourg, vous l'aurez compris, j'attends que le Gouvernement nous fasse un petit signe, sous une forme ou une autre, et alors nous déterminerons notre position et notre vote.

M. Emile Blessig.

Très bien !

Mme la présidente.

La discussion générale est close.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.

Après cette discussion générale, dont j'ai apprécié le ton, je tiens à apporter quelques précisions, surtout sur les questions dont nous n'aurons pas l'occasion de discuter lors de l'examen des articles et que je ne voudrais pas laisser sans réponse.

M. Gantier a souligné que ce texte s'inscrivait dans la continuité de celui relatif à l'amélioration des relations entre les administrations et le public - ARAP - élaboré par mon prédécesseur, Dominique Perben. Je ne m'en suis d'ailleurs jamais caché. J'ai repris ce texte en supprimant très peu de mesures, qui me paraissaient inopportunes, mais en l'enrichissant : celui que je vous propose va beaucoup plus loin. Voilà pourquoi j'ai été un peu surpris d'entendre M. Gantier faire comme principal reproche à ce texte de manquer d'ambition.

Plusieurs intervenants sont revenus sur l'article 5 bis introduit par le Sénat et visant à obliger les associations de sauvegarde de l'environnement qui déposent un recours pour excès de pouvoir contre une autorisation d'urbanisme à verser une caution. Nous sommes bien d'accord pour dire, comme François Colcombet, qu'il faut se garder de « sataniser » les associations. Il peut y avoir des cas difficiles, mais depuis 1901 la vie associative est l'un des temps forts de notre démocratie. Certes, il faudrait être d'une grande naïveté pour imaginer que tous les recours sont inspirés par des intentions d'une pureté absolue. Mais je regrette que le Sénat ait fait une telle fixation sur cette question, à tel point que c'est sans doute elle qui nous vaudra une quatrième lecture dans cette assemblée. Nous aurions pu en faire l'économie.

Il nous a semblé paradoxal de créer une sorte de droit censitaire d'agir en justice pour les associations à l'occasion d'un texte visant à faciliter l'accès aux droits. Le paradoxe est d'ailleurs d'autant plus choquant que, même si en étant très pessimiste, on imaginait des associations soutenues, voire intéressées par un promoteur concurrent, le dépôt d'une caution ne serait pas de nature à les décourager. En revanche, il pourrait décourager des associations pauvres et vertueuses sur lesquelles ne pèserait pas une telle suspicion. M. Blessig est intervenu à peu près dans les mêmes termes sur les recours en matière d'environnement et je l'en remercie. Avant d'en terminer avec ce point, je tiens simplement à rappeler qu'au cours de la précédente lecture je m'étais engagé à ce que ce problème des procédures abusives soit examiné par Mme la garde des sceaux, dans son ensemble et non par le petit bout de la lorgnette.

M. Carvalho, M. Blessig, M. Colcombet, notamment, ont parlé des maisons des services publics généralement de manière positive, mais en exprimant la crainte qu'elles n'offrent que des services au rabais. Or ce sera exactement le contraire. Nous aurons là, je l'affirme, des services publics de pointe et de meilleure qualité. Des entités assurant des services publics délivrés par des personnes morales différentes - Etat, communes ou autres - seront regroupées au même endroit. Certes, cela ne permettra pas de répondre positivement à la demande de M. Carvalho qui souhaite que tous les agents intervenant dans ces maisons des services publics soient des agents titulaires. En revanche, le texte précise bien que le respon-s able de la structure d'ensemble devra être un fonctionnaire. Cela doit être clair.

M. Blessig a dit que jamais un ordinateur ne pourrait remplacer un visage humain. Bien entendu ! Il ne s'agit pas de déshumaniser le service public, bien au contraire.

Nous voulons le rendre accessible. Je pense en effet que l'ordinateur parfois tant décrié permettra d'éviter de

« trimballer » l'usager d'un guichet à un autre. Si tel agent dans une maison des services publics, ayant en face de lui une dame avec son bébé dans les bras, peut demander à l'ordinateur de lui adresser le certificat nécessaire et éviter ainsi de faire revenir cette dame le lendemain, le service public aura progressé sans pour autant avoir perdu son visage humain.

Mme Claudine Ledoux, rapporteuse.

Très bien ! M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.

Je remercie François Colcombet d'avoir dit, avec les termes qu'il a utilisés, ce qu'il faut penser de l'importance des fonctionnaires dans le service public. Il a fort justement rappelé que les fonctionnaires avaient des droits et des devoirs. Ils ont le devoir impératif de chercher sans cesse à améliorer le service public. Mais ils ont aussi des droits et je suis très heureux que M. Tron les ai rappelés en des termes parfaitement convenables, dans une partie de l'hémicycle qui considère parfois que l'on en fait un peu trop pour les fonctionnaires. J'entends même quelquefois dire qu'ils seraient trop nombreux, trop bien traités, qu'ils seraient des privilégiés.

M. Alain Cousin.

Ce n'est pas incompatible ! M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.

Je reviens sur l'explication esquissée par François Colcombet. Oui, les fonction-


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naires ont droit à la protection ! Et pourquoi ? Simplem ent parce qu'ils doivent obéir à l'Etat, au Gouvernement, au prince, mais en même temps ils doivent être impartiaux et le prix de cette impartialité, pour qu'ils servent de la même façon tous les usagers quelles que soient les différences de race, de fortune, de religion, de croyance, d'origine sociale, c'est leur protection. Il fallait le rappeler parce qu'on oublie souvent l'origine de cette protection des fonctionnnaires.

Enfin, M. Tron s'est étonné de l'existence d'une sorte de droit d'ester en justice à la place des collectivités en craignant que cela n'alourdisse, ne complique et ne judiciarise beaucoup notre vie publique. Je rappelle simplement, pour vous rassurer, monsieur Tron, que ce droit d'ester en justice existe déjà pour les communes.

M. Georges Tron.

Oui, je l'ai dit ! M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.

Le texte propose de l'étendre aux actions appartenant aux départements et aux régions, mais en l'encadrant strictement. Ce droit est d'ailleurs subordonné à l'autorisation du juge administratif, de telle sorte que, s'agissant des communes, il n'est aujourd'hui que très rarement utilisé.

Nous parlerons de la jurisprudence Berkani et des quelques cavaliers lors de la discussion des articles. Je vous ai bien entendu, monsieur Tron. Le cavalier n'est certes pas la manière idéale de procéder, mais le Parlement, dans sa sagesse, en accepte parfois l'usage pour fluidifier la vie publique et résoudre des problèmes urgents nonobstant l'encombrement du calendrier parlementaire.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Discussion des articles

Mme la présidente.

En application de l'article 91, alinéa 9, du règlement, je vais maintenant appeler, dans le texte précédemment adopté par l'Assemblée nationale, les articles du projet de loi pour lesquels les deux assemblées du Parlement n'ont pu parvenir à un texte identique.

Articles 2 et 4

Mme la présidente.

« Art. 2. - Le droit de toute personne à l'information est précisé et garanti par le présent chapitre en ce qui concerne la liberté d'accès aux règles de droit applicables aux citoyens.

« Les autorités administratives sont tenues d'organiser un accès simple aux règles de droit qu'elles édictent. La mise à disposition et la diffusion des textes juridiques constituent une mission de service public au bon accomplissement de laquelle il appartient aux autorités administratives de veiller.

« Les modalités d'application du présent article sont déterminées, en tant que de besoin, par décret en Conseil d'Etat. »

Je mets aux voix l'article 2.

(L'article 2 est adopté.)

« Art. 4. - Dans ses relations avec l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er , toute personne a le droit de connaître le prénom, le nom, la qualité et l'adresse administrative de l'agent chargé d'instruire sa demande ou de traiter l'affaire qui la concerne ; ces éléments figurent sur les correspondances qui lui sont adressées. Si des motifs intéressant la sécurité publique ou la sécurité des personnes le justifient, l'anonymat de l'agent est respecté.

« Toute décision prise par l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci. » - (Adopté.)

Article 8 Mme la présidente.

« Art. 8. Le titre Ier de la loi no 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal est ainsi modifié :

« 1o Non modifié ;

« 2o Le deuxième alinéa de l'article 1er est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Sont considérés comme documents administratifs, au sens du présent titre, tous dossiers, rapports, études, comptes rendus, procès-verbaux, statistiques, directives, instructions, circulaires, notes et réponses ministérielles qui comportent une interprétation du droit positif ou une description des procédures administratives, avis, prévisions et décisions, qui émanent de l'Etat, des collectivités territoriales, des établissements publics ou des organismes de droit public ou privé chargés de la gestion d'un service public. Ces documents peuvent revêtir la forme d'écrits, d'enregistrements sonores ou visuels, de documents existant sur support informatique ou pouvant être obtenus par un traitement automatisé d'usage courant.

« Ne sont pas considérés comme documents administratifs, au sens du présent titre, les actes des assemblées parlementaires, les avis du Conseil d'Etat et des juridictions administratives, les documents de la Cour des comptes mentionnés à l'article L. 140-9 du code des juridictions financières et les documents des chambres régionales des comptes mentionnés à l'article L. 241-6 du même code et les documents d'instruction des réclamations adressées au Médiateur de la République. »

;

« 3o L'article 2 est ainsi rédigé :

« Art. 2. Sous réserve des dispositions de l'article 6, les autorités mentionnées à l'article 1er sont tenues de c ommuniquer les documents administratifs qu'elles détiennent aux personnes qui en font la demande, dans les conditions prévues par le présent titre.

« Le droit à communication ne s'applique qu'à des documents achevés. Il ne concerne pas les documents préparatoires à une décision administrative tant qu'elle est en cours d'élabration. Il ne s'exerce plus lorsque les documents font l'objet d'une diffusion publique. Il ne s'applique pas aux documents réalisés dans le cadre d'un contrat de prestation de services exécuté pour le compte d'une ou de plusieurs personnes déterminées.

« L'administration sollicitée n'est pas tenue de donner suite aux demandes abusives, en particulier par leur nombre, leur caractère répétitif ou systématique. »

;

« 4o Non modifié ;

« 5o Les deux premiers alinéas de l'article 5 sont remplacés par trois alinéas ainsi rédigés :

« Une commission dite "Commission d'accès aux documents administratifs" est chargée de veiller au respect de la liberté d'accès aux documents administratifs et aux archives publiques, dans les conditions prévues par le présent titre et par le titre II de la loi no 79-18 du 3 janvier 1979 sur les archives. Elle émet des avis lorsqu'elle est saisie par une personne qui rencontre des difficultés


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 2 MARS 2000

pour obtenir la communication d'un document administ ratif ou pour consulter des documents d'archives publiques, à l'exception des documents mentionnés au 3o de l'article 3 de la loi no 79-18 du 3 janvier 1979 précitée. La saisine de la commission pour avis est un préalable obligatoire à l'exercice d'un recours contentieux.

« Elle conseille les autorités compétentes sur toute question relative à l'application du présent titre et des dispositions susmentionnées de la loi no 79-18 du 3 janvier 1979 précitée. Elle peut proposer, à la demande de l'autorité compétente ou à son initiative, toutes modifications de ces textes et toutes mesures de nature à faciliter l'exercice du droit d'accès aux documents administratifs et aux archives publiques et à renforcer la transparence administrative.

« La commission établit un rapport annuel qui est rendu public. Ce rapport retrace notamment les principales difficultés rencontrées par les personnes, au regard des différentes catégories de documents ou d'archives. »

;

« 6o Après l'article 5, il est inséré un article 5-1 ainsi rédigé :

« Art. 5-1. La Commission d'accès aux documents administratifs est également compétente pour examiner, dans les conditions prévues aux articles 2 et 5, les questions relatives à l'accès aux documents administratifs mentionnés aux dispositions suivantes :

« l'article L. 2121-26 du code général des collectivités territoriales ;

« l'article L. 28 du code électoral ;

« le b de l'article L.

104 du livre des procédures fiscales ;

« l'article L. 111 du livre des procédures fiscales ;

« l'article 5 de la loi du 1er juillet 1901 relative au c ontrat d'association et l'article 2 du décret du 16 août 1901 ;

« l'article 79 du code civil local d'Alsace-Moselle ;

« les articles L.

213-13 et L.

332-29 du code de l'urbanisme. »

;

« 7o à 9o Non modifiés. »

M. Evin a présenté un amendement, no 8, ainsi rédigé :

« Compléter le cinquième alinéa de l'article 8 par les mots : "et les documents préalables à l'élaboration du rapport d'accréditation des établissements de santé visé à l'article L.

710-5 du code de la santé publique". »

La parole est à M. Claude Evin.

M. Claude Evin.

Cet amendement vise à prévoir que l'ensemble des documents établis dans le cadre des procédures d'accréditation menées par l'Agence nationale d'accrédidation et d'évaluation en santé ne présentent pas le caractère de documents administratifs soumis à la loi du 17 juillet 1978, et donc ne devront pas être communiqués.

Mes chers collègues, je vous le rappelle, l'ANAES, qui concerne tant les hôpitaux publics que les cliniques privées, a été créée par les ordonnances d'avril 1996 et tend à établir, comme son nom l'indique, l'accréditation et l'évaluation des établissements. Cette procédure comporte plusieurs phases. Au cours de la première, les responsables des établissements doivent se soumettre à une autoévaluation et remplir un certain nombre de questionnaires qui sont ensuite envoyés à l'Agence. Or, par cet amendement, il est proposé que cette procédure d'autoévaluation ne puisse pas être rendue publique. Il s'agit d'éviter une certaine réticence des chefs d'établissement qui pourraient être tentés de ne pas répondre en totale sincérité.

Cela étant, il est hors de question de rendre inacessibles aux citoyens les documents du rapport d'accréditation. Celui-ci comprendra notamment le rapport des éval uateurs indépendants qui se rendront dans les établissements de santé et les réponses qu'on leur apportera, et le rapport du collège d'accréditation. A la fin de la procédure d'accréditation, l'ensemble de ces documents seront rendus publics et chacun pourra connaître la qualité d'un établissement de santé, qu'il soit public ou privé.

Cet amendement tend donc à consolider la procédure d'accréditation et d'évaluation des établissements de santé en évitant qu'elle puisse être biaisée, tout en respectant par ailleurs le droit à l'information de nos concitoyens sur la qualité des établissements de santé.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ? Mme Claudine Ledoux, rapporteuse.

La commission s'est déclarée favorable à cet amendement.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M.

le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.

J'ai bien entendu qu'il s'agissait par cet amendement de ne pas nuire à la sincérité des évaluations conduites par l'ANAES. Mais je n'ai pas pu procéder à une évaluation complète des conséquences de cette disposition. Cela étant, je suis tès sensible à la compétence de M. Evin en la matière. Je m'en remets donc à la sagesse de l'Assemblée.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

8. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'article 8, modifié par l'amendement no

8. (L'article 8, ainsi modifié, est adopté.)

Article 8 bis Mme la présidente.

« Art. 8 bis. L'article L.

140-9 du code des juridictions financières est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« A ce titre, elles ne sont notamment pas applicables aux rapports de vérification et avis des comités régionaux ou départementaux d'examen des comptes des organismes de sécurité sociale visés à l'article L.

134-2. »

Je mets aux voix l'article 8 bis.

(L'article 8 bis est adopté.)

Article 10

Mme la présidente.

« Art. 10. Les budgets et les comptes des autorités administratives mentionnées à l'article 1er et dotées de la personnalité morale sont communicables à toute personne qui en fait la demande, dans les conditions prévues par la loi no 78-753 du 17 juillet 1978 précitée.

« La communication de ces documents peut être obtenue tant auprès de l'autorité administrative concernée que de celles qui les détiennent.

« L'autorité administrative qui attribue une subvention doit, lorsque cette subvention dépasse un seuil défini par décret, conclure une convention avec l'organisme qui en bénéficie, définissant l'objet, le montant et les conditions d'utilisation de la subvention attribuée.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 2 MARS 2000

« Lorsque la subvention est affectée à une dépense déterminée, l'organisme bénéficiaire doit produire un c ompte d'emploi qui atteste de la conformité des dépenses effectuées à l'objet de la subvention. Le compte d'emploi est déposé auprès de l'autorité administrative qui a versé la subvention dans les six mois suivant la fin de l'exercice pour lequel elle a été attribuée.

« Le budget et les comptes de tout organisme ayant reçu une subvention, la convention prévue au présent article et le compte d'emploi de la subvention doivent être communiqués à toute personne qui en fait la demande par l'autorité administrative ayant attribué la subvention ou celles qui les détiennent, dans les conditions prévues par la loi no 78-753 du 17 juillet 1978 précitée.

« Les organismes ayant reçu annuellement de l'ensemble des autorités administratives une subvention supérieure à un montant fixé par décret doivent déposer à la préfecture du département où se trouve leur siège social leur budget, leurs comptes, les conventions prévues au présent article et, le cas échéant, les comptes d'emploi des subventions reçues pour y être consultés. »

M. François Colcombet a présenté un amendement, no 5, ainsi rédigé :

« I. - Dans le troisième alinéa de l'article 10, après le mot : "organisme", insérer les mots : "de droit privé".

« II. - En conséquence, procéder à la même insertion :

« 1o Dans la première phrase du quatrième alinéa de cet article ;

« 2o Dans l'avant-dernier alinéa de cet article ;

« 3o Dans le dernier alinéa de cet article. »

Monsieur Colcombet, peut-être pourriez-vous présenter en même temps votre amendement no 6 ?

M. François Colcombet.

Volontiers, madame la présidente.

Mme la présidente.

Je donne lecture de l'amendement no 6 présenté par M. Colcombet :

« I. - Dans la première phrase du quatrième alinéa de l'article 10, substituer aux mots : "compte d'emploi", les mots : "compte rendu financier".

« II. - En conséquence, procéder à la même insertion :

« 1o Dans la dernière phrase du quatrième alinéa de cet article ;

« 2o Dans l'avant-dernier alinéa de cet article ;

« 3o Dans le dernier alinéa de cet article. »

Vous avez la parole, monsieur Colcombet.

M. François Colcombet.

Les deux premiers alinéas de l'article 10 sont consacrés à la transparence des comptes des autorités administratives mentionnées à l'article 1er du projet de loi. Le troisième alinéa et les suivants sont destinés à faire la transparence sur l'utilisation de la partie des deniers publics que les administrations consacrent à subventionner des organismes privés - par exemple des associations - qui vont alors agir, dans l'utilisation des fonds reçus à cet effet, selon les objectifs que leur désigne la collectivité qui les finance. La mention « de droit privé » précise plus clairement l'intention de ces alinéas en la distinguant de l'objectif recherché par les deux premiers alinéas de l'article.

Quant à l'amendement no 6, il vise à introduire une précision. En effet, les mots « compte d'emploi » sont sujets à ambiguïté, compte tenu de leur utilisation dans des textes de loi ayant des objets différents. Il est préférable de s'en tenir à un terme ayant le même objectif mais ne prêtant pas à discussion. Le contenu des mots

« compte rendu financier » sera précisé, je l'espère, dans le décret d'application.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?

M me Claudine Ledoux, rapporteuse.

Favorable. La commission a considéré que ces deux amendements étaient bienvenus.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.

Sur l'amendement no 5, je partage entièrement le point de vue de M. Colcombet. En effet, l'article 10 traite de deux sujets distincts, la transparence sur les comptes des administrations qui fait l'objet des deux premiers alinéas de l'article 10, et la transparence sur les subventions publiques qui est traitée aux alinéas suivants. Et chacun de ces deux aspects a sa logique propre.

S'agissant des administrations, la transparence a vocation à porter sur la totalité de leurs comptes. Cela inclut bien sûr les subventions qu'elles reçoivent à un titre ou un autre, mais il n'y a pas lieu d'attacher spécialement des obligations de compte rendu à ces subventions.

Lorsque le texte traite spécifiquement de subventions publiques, c'est bien entendu des subventions reçues par les personnes privées qu'il s'agit car, en ce cas, l'exigence de transparence résulte directement du fait qu'elles bénéficient de deniers publics et qu'il est légitime de leur demander de rendre compte de l'emploi qu'elles en font.

Ces deux sujets sont distincts. Il n'est évidemment pas question de demander à des collectivités locales ou à des établissements publics, qui sont déjà tenus de mettre la totalité de leurs comptes à la disposition du public, d'établir un document spécifique retraçant l'utilisation de telleo u telle subvention réglementée. L'amendement de M. Colcombet précise utilement ce point et j'y souscris entièrement.

J'en viens à l'amendement no 6. Au cours des discussions et des consultations intervenues à propos de l'article 10, le monde associatif a estimé que les termes actuels de « compte d'emploi » étaient inappropriés et risquaient de créer une incertitude sur la nature et les caractéristiques du document d'information qui sera demandé aux bénéficiaires de subventions publiques.

A titre personnel, je ne suis pas entièrement convaincu de la réalité de ce risque. Cela dit, si le monde associatif, pour des raisons qui lui sont propres, estime ces termes inadaptés et lui préfère ceux de « compte rendu financier », je n'y vois pas d'inconvénient majeur. Cela ne change rien sur le contenu du document en question qui sera précisé par le décret d'application de l'article 10. Je donnerai donc également un avis favorable à l'amendement no

6.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

5. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

6. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'article 10, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 10, ainsi modifié, est adopté.)


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Articles 13 bis et 13 ter

Mme la présidente.

« Art. 13 bis Le titre III du livre Ier de la troisième partie du code général des collectivitéss territoriales est complété par un chapitre III ainsi rédigé :

« C HAPITRE

III

« Exercice par un contribuable des actions appartenant au département

« Art. L.

3133-1 Tout contribuable inscrit au rôle du département a le droit d'exercer, tant en demande qu'en défense, à ses frais et risques, avec l'autorisation du tribunal administratif, les actions qu'il croit appartenir au département, et que celui-ci, préalablement appelé à en délibérer, a refusé ou négligé d'exercer.

« Le contribuable adresse au tribunal administratif un mémoire.

« Le président du conseil général soumet ce mémoire au conseil général spécialement convoqué à cet effet. Le délai de convocation peut être abrégé.

« Lorsqu'un jugement est intervenu, le contribuable ne peut se pourvoir en appel ou en cassation qu'en vertu d'une nouvelle autorisation. »

Je mets aux voix l'article 13 bis.

(L'article 13 bis est adopté.)

« Art. 13 ter. - Le titre IV du livre Ier de la quatrième partie du même code est complété par un chapitre III ainsi rédigé :

« C HAPITRE

III

« Exercice par un contribuable des actions appartenant à la région

« Art. L. 4143-1. - Tout contribuable inscrit au rôle de la région a le droit d'exercer, tant en demande qu'en défense, à ses frais et risques, avec l'autorisation du tribunal administratif, les actions qu'il croit appartenir à la région, et que celle-ci, préalablement appelée à en délibé rer, a refusé ou négligé d'exercer.

« Le contribuable adresse au tribunal administratif un mémoire.

« Le président du conseil régional soumet ce mémoire au conseil régional spécialement convoqué à cet effet. Le délai de convocation peut être abrégé.

« Lorsqu'un jugement est intervenu, le contribuable ne peut se pourvoir en appel ou en cassation qu'en vertu d'une nouvelle autorisation. » -

(Adopté.)

Article 14

Mme la présidente.

« Art. 14. - Toute personne tenue de respecter une date limite ou un délai pour présenter une demande, déposer une déclaration, exécuter un paiement ou produire un document auprès d'une autorité administrative peut satisfaire à cette obligation au plus tard à la date prescrite au moyen d'un envoi postal, le cachet de la poste faisant foi, ou d'un procédé télématique ou informatique homologué permettant de certifier la date d'envoi. Ces dispositions ne sont pas applic ables aux procédures pour lesquelles la présence personnelle du demandeur est exigée en application d'une disposition particulière.

« Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat. »

M. Colcombet a présenté un amendement, no 7, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi la dernière phrase du premier alinéa de l'article 14 :

« Ces dispositions ne sont applicables ni aux procédures régies par le code des marchés publics, ni à celles pour lesquelles la présence personnelle du demandeur est exigée en application d'une disposition particulière. »

La parole est à M. François Colcombet.

M. François Colcombet.

Chacun le sait, le code des marchés publics est un chef-d'oeuvre particulièrement délicat. (Sourires.) Mieux vaut donc éviter de perturber ce secteur. En outre, les cas dans lesquels il est nécessaire qu'une personne se présente elle-même sont prévus par des très nombreuses lois ou textes particuliers. Aussi, plutôt que d'abroger une série de dispositions qui ont leur légitimité, nous préférons préciser que ce texte les exclut.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ? Mme Claudine Ledoux, rapporteuse. Favorable.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.

Le Gouvernement est également favorable à cet amendement. Et comme il s'agit d'un changement de position, je tiens à m'en expliquer.

Lorsque cette question a été soulevée pour la première fois au cours des travaux du Parlement, il m'avait semblé qu'il appartenait à l'administration d'adapter ses propres procédures à la règle posée par l'article 14 plutôt que l'in verse. Toutefois, la poursuite de la discussion m'a convaincu des difficultés réelles qu'entraînerait l'application de cet article à la procédure très particulière des marchés publics et, en définitive, je me rallie à la position de M. Colcombet et de la commission. Dans un souci de sécurité juridique et dans l'intérêt même des soumissionnaires aux appels d'offres, il vaut effectivement mieux mettre à part le cas des marchés publics.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

7. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'article 14, modifié par l'amendement no

7. (L'article 14, ainsi modifié, est adopté.)

Articles 21, 22 et 22 bis

Mme la présidente.

« Art. 21. - Une décision implicite d'acceptation peut être retirée, pour illégalité, par l'autorité administrative :

« 1o Non modifié.

« 2o Pendant le délai de deux mois à compter de la date à laquelle est intervenue la décision, lorsque aucune mesure d'information des tiers n'a été mise en oeuvre ;

« 3o Non modifié. »

Je mets aux voix l'article 21.

(L'article 21 est adopté.)

« Art. 22. - Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi


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no 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. L'autorité administrative n'est pas tenue de satisfaire les demandes d'audition abusives, notamment par leur nombre, leur caractère répétitif ou systématique.

« Les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables :

« 1o à 3o Non modifiés.

« Les modalités d'application du présent article sont fixées en tant que de besoin par décret en Conseil d'Etat. » -

(Adopté.)

« Art. 22 bis. - Les décisions des organismes de sécurité sociale et de mutualité sociale agricole de salariés ou de non-salariés ordonnant le reversement des prestations sociales indûment perçues sont motivées. Elles indiquent les voies et délais de recours ouverts à l'assuré, ainsi que les conditions et les délais dans lesquels l'assuré peut présenter ses observations écrites ou orales. Dans ce dernier cas, l'assuré peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix ». - (Adopté.)

Article 24

Mme la présidente.

« Art. 24. - Afin de faciliter les démarches des usagers et d'améliorer la proximité des services publics sur le territoire en milieu urbain et rural, une maison des services publics réunit des services publics relevant de l'Etat ou de ses établissements publics, des c ollectivités territoriales ou de leurs établissements publics, des organismes de sécurité sociale ou d'autres organismes chargés d'une mission de service public parmi lesquels figure au moins une personne morale de droit public.

« Les agents exerçant leurs fonctions dans les maisons des services publics sont régis par les dispositions prévues par leur statut ou les dispositions législatives et réglementaires les concernant. Le responsable de la maion des services publics est désigné parmi les agents soumis aux dispositions de la loi no 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.

« La maison des services publics est créée par une convention qui est approuvée par le représentant de l'Etat dans le département.

« Cette convention définit le cadre géographique dans lequel la maison des services publics exerce son activité, les missions qui y sont assurées, les modalités de désignation de son responsable, les prestations qu'elle peut délivrer et les décisions que son responsable peut prendre dans le domaine de compétence de son administration ou signer sur délégation de l'autorité compétente. La convention prévoit également les conditions dans lesquelles les personnels relevant des personnes morales qui y participent exercent leurs fonctions. Elle règle les modalités financières et matérielles de fonctionnement de la maison des services publics ainsi que les modalités d'accès aux services publics des personnes ayant des difficultés pour se déplacer. Les services publics concernés peuvent être proposés, notamment en milieu rural, de façon itinérante dans le cadre géographique défini par la convention.

« Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat. »

La parole est à M. Patrice Carvalho, inscrit sur l'article.

M. Patrice Carvalho.

Le présent projet de loi entend donner un cadre juridique aux maisons des services publics. En effet, ces institutions nées de manière plutôt empirique sont censées répondre à l'éparpillement des services publics dans certaines parties du territoire.

Or il nous paraît justement important de revenir sur les raisons profondes qui ont conduit à l'apparition de ces maisons des services publics, précédées en cela par l'expérience de « points publics », puis de « plates-formes des services publics », traductions respectives du comité interministériel de développement et d'aménagement rural et du pacte de relance pour la ville.

On se doit donc de remarquer que ces diverses mises en place de services publics dits polyvalents n'ont eu lieu qu'au sein de zones urbaines très sensibles, ainsi que de zones rurales trop souvent victimes de désertification. En un mot, les maisons des services publics ne concernent principalement que nos banlieues et nos campagnes, où l'on sait que l'éparpillement des services publics résulte, notamment, d'un désengagement de l'Etat fort regrettable.

M. Georges Tron.

Eh oui !

M. Patrice Carvalho.

Aussi ne s'étonnera-t-on pas que nous exigions quelques garanties quant au saut qualitatif que doivent constituer les maisons des services publics en matière de proximité et d'efficacité de l'administration.

En effet, il serait inacceptable que la formule du guichet unique ne serve qu'à dissimuler une sorte d'« accès minimum au service public ».

A ce propos, nous tenons pour regrettable le fait que l'expérience des maisons des services publics démontre que celles-ci ont concentré jusqu'à présent leur activité sur les prestations sociales. Cette action nécessaire et louable ne risque-t-elle pas, dans les faits, d'être la traduction d'« un service public minimum », réduit à l'expression d'une peau de chagrin ? C'est pourquoi, résolument déterminés à voir ces maisons des services publics jouer leur rôle de facilitation et de rapprochement des démarches administratives, nous nous efforcerons de les voir dotées de moyens satisfaisants à même de garantir à la fois l'efficacité et la proximité d'une administration proche des citoyens.

C'est d'ailleurs dans cet esprit que nous serons attentifs, monsieur le ministre, aux engagements que vous serez en mesure de prendre aujourd'hui devant la représentation nationale s'agissant du recours aux agents titulaires, partout où cela sera possible compte tenu du régime des groupements d'intérêt public, et ce afin de garantir la qualité du service rendu au public.

M. François Colcombet.

Très bien !

Mme la présidente.

La parole est à M. Georges Tron.

M. Georges Tron.

Monsieur le ministre, vous n'avez pas répondu à ma question portant sur la dérive prévisible des coûts de fonctionnement des maisons des services publics. Comme l'a souligné fort justement M. Carvalho, nous assistons aujourd'hui à une dispersion des services dans les banlieues. Cela s'explique sans doute par la possibilité de disposer de locaux à moindre coût. Dans un premier temps, les conventions vont nous permettre de régler le mode de fonctionnement. Mais je crains que, sans une participation financière importante des collectivités locales nous ne soyons confrontés au problème de la pérennisation des maisons des services publics. Certes, et je ne vous fais pas là un procès d'intention, vous pouvez


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toujours me répondre qu'il n'en sera pas ainsi, et que les conventions vont tout régler. Il n'en reste pas moins que la réalité est différente.

Je ne donnerai qu'un seul exemple : lorsqu'un commissariat - et en l'occurrence il s'agit d'une fonction régalienne - est construit, on demande une participation financière de la collectivité locale. Ainsi, la commune dont je suis maire et qui compte 30 000 habitants, a dû débourser 2 millions sur un investissement de 20 millions pour bénéficier d'un commissariat. Alors que la décision de la construction de ce dernier avait été prise au début des années 90, l'opération n'a finalement été lancée qu'en 1998 lorsque la commune a fait savoir qu'elle participerait à la dépense à hauteur de 10 % du prix. Et je ne parle pas des coûts de fonctionnement dérivés que vous connaissez, puisque vous avez été maire - réseau de voirie, etc.

Sans présumer en rien de la qualité des maisons des services publics - elle dépendra en grande partie de l'esprit de la collectivité qui l'accueillera -, je m'interroge sur le mode de prise en charge des coûts de fonctionnement. Je ne vous cache pas, monsieur le ministre, que je suis très dubitatif.

Mme la présidente.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.

Monsieur Carvalho, il faut être bien clair sur le problème statutaire des occupants des maisons des services publics. Celles-ci ayant vocation à rassembler des services différents de multiples natures et de statuts services publics d'Etat, de la sécurité sociale, de la collectivité, voire d'EDF, etc. - on ne peut imposer à l'une ou à l'autre des administrations concernées un statut particulier pour son personnel. En outre, et c'était là une démarche décisive pour rassurer ceux qui sont attachés au caractère public des agents de service public, nous avons précisé dans la loi que le responsable de la maison des services publics devait, quant à lui, être fonctionnaire statutaire.

M. François Colcombet.

Très bien ! M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.

C'est très clair. Mais vous ne me ferez pas dire que les agents d'EDF travaillant dans la structure seront des fonctionnaires. Ce n'est pas possible.

Vous avez pris, monsieur Tron, l'exemple de l'implantation d'un commissariat. En effet, l'Etat demande à la commune de participer à l'investissement que cela représente selon une logique de « donnant, donnant ». Mais en ce qui concerne les problèmes de coût de fonctionnement des maisons des services publics, nous ne sommes pas du tout dans la même logique.

Plusieurs personnes morales choisissent de mettre en commun leurs moyens. A priori, je ne vois pas en quoi une commune qui choisit de construire un bâtiment commun avec l'Etat pour loger tel service communal serait pénalisée par cet investissement. Tout est ficelé par une convention entre les différentes entités, convention dûment visée par l'AMF et les représentant de toutes les collectivités. Aucune dérive financière n'est à craindre. Je ne nie pas qu'on puisse en concevoir dans certains cas de figure, mais pas pour les maisons des services publics. Il y a même quelque espoir que les investissements soient réduits, tout au moins dans la phase de décollage des maisons des services publics. En effet, le fonds pour la réforme de l'Etat doté d'une centaine de millions de francs cette année peut intervenir à ce titre, même si ce n'est pas son seul objectif et la convention prévoit le partage des frais communs, mais je vois, monsieur Tron, que vous ne semblez pas d'accord avec ce que je dis.

M. Georges Tron.

Je souhaiterais simplement vous répondre très brièvement.

Mme la présidente.

Monsieur Tron, je vais faire une entorse à la procédure pour que vous puissiez répondre au ministre.

Vous avez la parole.

M. Georges Tron.

Je vous remercie, madame la présidente, d'autant plus que la procédure n'est pas véritablement mise à mal par la virulence de nos interventions ! (Sourires.)

Monsieur le ministre, ma crainte ne porte pas sur les investissements. Si j'ai pris l'exemple des commissariats, c'est pour souligner que l'Etat s'appuie de plus en plus sur les collectivités territoriales pour mener à leur terme les missions qui lui incombent, et il est vrai qu'il participe à l'investissement.

Mais, quand les maisons des services publics auront été installées sur le territoire de la commune, une accoutumance naîtra, qui finira par créer le besoin. La pérennisation du système risque même de susciter une sorte de chantage sur la collectivité pour la contraindre à participer aux frais de fonctionnement des maisons des services publics car, vous le savez comme moi, le maire est tenu pour responsable de la bonne marche des services situés sur sa commune. Le principe de la maison des services publics repose sur la mixité des opérateurs, et je persiste donc à croire, car vous ne m'avez pas convaincu, qu'il y a un risque réel de dérive pour les finances des collectivités.

Mme la présidente.

Veuillez poursuivre, monsieur le ministre.

M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.

Vous opérez, monsieur Tron, une distinction entre investissement et frais de fonctionnement. Sur l'investissement, vous m'en avez donné acte, il n'y a aucun problème.

Conformément à un principe selon lequel les bonnes choses crééraient un besoin, vous craignez que les maisons des services publics ne soient une trop bonne chose ! Votre argument est pour le moins paradoxal. Je vous remercie cependant pour cet hommage aux maisons des services publics ! Mais, je le répète, la convention prévoit de manière pérenne le partage des frais de fonctionnement.

M. Georges Tron.

Cela ne me rassure pas ! M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.

Si au départ on a contracté librement, la pérennité du partage des frais de fonctionnement est acquise.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'article 24.

(L'article 24 est adopté.)

Article 24 bis

Mme la présidente.

« Art. 24 bis I. La première phrase du deuxième alinéa de l'article 29-1 de la loi no 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire est ainsi rédigée :

« A cette fin, les organismes visés au premier alinéa peuvent, dans les conditions prévues par les articles 24 et 25 de la loi no du relative aux droits des


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citoyens dans leurs relations avec les administrations, créer des maisons des services publics ou participer à leur fonctionnement, afin d'offrir aux usagers un accès simple, en un lieu unique, à plusieurs services publics ; ces organismes peuvent également, aux mêmes fins et pour maintenir la présence d'un service public de proximité, conclure une convention régie par l'article 26 de la même loi. »

« II. Dans le IV de l'article 30 de la loi no 99-533 du 2 5 juin 1999 d'orientation pour l'aménagement et l e développement durable du territoire, après les mots : "maisons des services publics", sont insérés les m ots : "prévues par l'article 24 de la loi no du relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations". »

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'article 24 bis

(L'article 24 bis est adopté.)

Article 25

Mme la présidente.

« Art. 25. Une ou des maisons des services publics peuvent être créées sous la forme d'un groupement d'intérêt public régi par les dispositions de l'article 21 de la loi no 82-610 du 15 juillet 1982 d'orientation et de programmation pour la recherche et le développement technologique de la France et soumis aux règles de la comptabilité publique et du code des marchés publics, dans les conditions définies à l'article 24. Les fonctionnaires qui y travaillent sont mis à disposition ou détachés.

« Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat. »

Mme Ledoux, rapporteuse, a présenté un amendement, no 1, ainsi rédigé :

« Compléter la première phrase du premier alinéa de l'article 25 par les mots : "de la présente loi". »

La parole est à Mme la rapporteuse.

Mme Claudine Ledoux, rapporteuse.

Il s'agit d'un amendement rédactionnel. En effet, la rédaction de l'article 25 présente un éventuel risque de confusion quant au champs d'application de deux lois, la loi du 15 juillet 1982 et la présente loi.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.

Favorable.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

1. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'article no 25, modifié par l'amendement no

1. (L'article 25, ainsi modifié, est adopté.)

Article 26

Mme la présidente.

« Art. 26. Une convention régie par les dispositions des troisième et quatrième alinéas de l'article 24 peut être conclue par une personne morale chargée d'une mission de service public avec l'Etat, une collectivité teritoriale ou une autre personne morale chargée d'une mission de service public afin de maintenir la présence d'un service public de proximité. »

Je mets aux voix l'article 26.

(L'article 26 est adopté.)

Article 26 ter A

Mme la présidente.

« Art. 26 ter A. - Le dernier alinéa de l'article 110 de la loi no 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Cette disposition ne saurait interdire aux juridictions compétentes et aux autorités administratives chargées du contrôle de légalité d'exercer leurs missions dans les conditions de droit commun. »

La parole est à M. Georges Tron, inscrit sur l'article.

M. Georges Tron.

En ce qui concerne les « cavaliers » législatifs, l'argument de la fluidité avancé par M. le ministre me fait un peu sourire. J'ai évoqué tout à l'heure la discussion que nous avons sur le cumul des mandats et dans laquelle M. Chevènement a montré une conception de la fluidité radicalement différente de la vôtre, monsieur le ministre, puisqu'il a refusé un amendement sur lequel tout le monde était d'accord. On ne peut pas nous dire d'un côté que cela fluidifie et de l'autre que cela rigidifie. Il faut savoir ce que l'on veut faire des « cavaliers. »

Je comprends bien l'urgence de transcrire dans la loi la jurisprudence Berkani et j'ai regretté - je parle sous le contrôle de Mme la rapporteuse -, que l'on ait échoué en commission mixte paritaire, alors même que l'on était sur le point de trouver un accord. Sont restées en suspens des questions relatives à l'inclusion dans notre droit interne des dispositions de l'arrêt Berkani.

En ce qui concerne l'amendement de M. Gouzes et de M. Montebourg qui visait à supprimer une disposition introduite par l'article 77 de la loi du 12 juillet 1999 relative à la coopération intercommunale aux termes duquel les collaborateurs d'une autorité territoriale ne peuvent rendre compte qu'à celle-ci, laquelle décide des conditions et des modalités d'exécution du service qu'ils accomplissent auprès d'elle.

Au moment de la discussion de l'amendement Montebourg en commission, nos collègues de la majorité ont réagi avec beaucoup de bon sens.

M. Gouzes a précisé qu'il fallait s'insurger contre la pression constante à laquelle sont soumis les élus locaux que l'on cherche, sans répit, à culpabiliser. M. Colcombet a considéré qu'il était normal que les collaborateurs ne rendent compte qu'à l'autorité territoriale auprès de laquelle ils sont placés. M. Derosier s'est associé à ces avis.

Je regrette que M. Montebourg ne soit pas présent car, en déposant cet amendement avec la fougue qu'on lui connaît, il est tombé, qu'il le veuille ou non, dans les travers dénoncés par M. Colcombet et M. Gouzes.

Il ne s'agit même pas, monsieur le ministre, d'une disposition d'urgence, comme je peux, à la limite, l'admettre en ce qui concerne l'arrêt Berkani, mais simplement de faire plaisir à M. Montebourg. Si je dialogue avec lui dans le cadre du cumul des mandats, je trouve que le discours qu'il tient sur ce sujet est absolument sans nuance et, de l'avis unanime, y compris des députés de la majorité, cet amendement n'a rien à faire ici.

On reconnaîtra que nous avons adopté une position d'ouverture sur l'ensemble du texte et je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous ayez l'obligeance de


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manifester, sinon votre reconnaissance, en tout cas une ouverture identique à notre égard. Le Gouvernement ne devrait donc pas imposer ou refuser les « cavaliers » selon que cela l'arrange ou non. Si un cavalier peut être utilisé, ce doit être pour des motifs justifiés. Par conséquent, je souhaiterais que le Gouvernement et éventuellement la commission répondent aux questions posées par le Sénat en CMP sur le bien-fondé de l'application de la jurisprudence Berkani aux 15 000 collaborateurs employés à l'étranger.

Quelle que soit la sympathie que l'on éprouve pour M. Montebourg, on ne fait pas oeuvre de législateur lorsqu'on vote un amendement pour lui faire plaisir, de l'aveu même de M. Gouzes, qui avait trouvé une formule de synthèse lors de la discussion en deuxième lecture.

Mme la présidente.

La parole est à M. François Colcombet.

M. François Colcombet.

Je ne pense pas que l'amendement ait été adopté uniquement pour faire plaisir à M. Montebourg. D'un côté, il y a la logique des responsables d'administrations - représentés par les sénateurs qui ne souhaitent pas que leurs collaborateurs parlent trop dans les couloirs... De l'autre, il y a la logique des usagers et des justiciables, défendue par M. Montebourg, selon laquelle toute information doit être accessible. Personne n'en est propriétaire.

La modification au texte de 1999 n'est pas intervenue à la suite d'un véritable débat démocratique, mais à la fin de la CMP, entre initiés.

M. Georges Tron.

C'est vrai !

M. François Colcombet.

Il est donc assez normal, puisque l'on aborde un sujet voisin, qu'on en reparle publiquement ici.

M. Georges Tron.

Cela a été voté par la majorité.

M. François Colcombet.

Tout à fait ! D'une certaine façon, la décision prise en CMP s'apparente davantage à un « cavalier » que le vote de l'amendement de M. Montebourg, qui avait donné lieu à une véritable discussion en commission et en séance publique. Il consiste à dire que les collaborateurs ne doivent rendre compte qu'aux personnes qui les dirigent mais que, confrontés à un magistrat instructeur habilité à poser des questions, ou bien - car le texte va un peu plus loin - à un inspecteur des finances ou à une autorité de contrôle quelconque, ils doivent répondre.

M. Georges Tron.

Cela va de soi !

M. François Colcombet.

Cela va de soi, mais mieux vaut le dire. C'est un texte d'équilibre selon lequel le secret est absolu, sauf quand la justice ou les corps de contrôle interrogent le fonctionnaire. Il n'y a là absolument rien de choquant.

A mon avis, plus que notre façon de procéder, c'est le fait d'avoir retouché le texte en CMP au point d'en fausser partiellement la perspective qui appelle la critique.

En tout état de cause, nous sommes d'avis que ce texte doit être adopté tel qu'il a été voté après le débat d émocratique de la lecture précédente.

Mme la présidente.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.

Je répondrai à M. Tron, qui fait un amalgame entre les différents articles.

S ur l'amendement Gouzes-Montebourg, j'adhère à l'argumentation de M. Colcombet.

Je m'en étais déjà remis à la sagesse de l'Assemblée ; je m'en tiendrai à cette position. Voilà pour l'article 26 ter A. Je reviendrai sur la jurisprudence Berkani quand nous aborderons les articles 26 quater et quinquies.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'article 26 ter A. (L'article 26 ter A est adopté.)

Article 26 quater

Mme la présidente.

« Art. 26 quater. - I. - Les agents non titulaires de l'Etat et de ses établissements publics à caractère administratif, en fonctions à la date de publication de la présente loi et qui n'ont pas été recrutés en application des articles 3, 4, 6 et 27 de la loi no 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, bénéficient d'un contrat à durée indéterminée lorsqu'ils assurent :

« 1o Soit des fonctions du niveau de la catégorie C concourant à l'entretien ou au gardiennage de services administratifs ;

« 2o Soit des fonctions de même niveau concourant au fonctionnement de services administratifs de restauration, des hôtels de représentation du Gouvernement dans les régions et les départements, des hôtels de commandement ou des services d'approvisionnement relevant du ministère chargé de la défense.

« Les fonctions mentionnées ci-dessus peuvent être exercées à temps incomplet.

« II. Les personnels mentionnés au I ci-dessus peuvent demander que le contrat de travail sur la base duquel ils ont été engagés soit un contrat de droit privé soumis aux dispositions du code du travail. Les intéressés disposent d'un délai d'un an à compter de la date de p ublication de la présente loi pour présenter leur demande. Le bénéfice des dispositions du présent paragraphe leur est reconnu à compter de la date de leur engagement initial.

« III. Les dispositions des I et II ci-dessus ne s'appliquent pas aux personnels contractuels qui ont été recrutés sur place, avant la date de publication de la présente loi, par les services de l'Etat à l'étranger, sur des contrats de travail soumis au droit local, quelles que soient les fonctions qu'ils exercent.

« IV. Les dispositions de la loi no 96-1093 du 16 décembre 1996 relative à l'emploi dans la fonction publique et à diverses mesures d'ordre statutaire ne s'appliquent pas aux agents mentionnés au III ci-dessus.

« V. Lorsque les nécessités du service le justifient, les services de l'Etat à l'étranger peuvent, dans le respect des conventions internationales du travail, faire appel à des personnels contractuels recrutés sur place, sur des contrats de travail soumis au droit local, pour exercer des fonctions concourant au fonctionnement desdits services.

« Dans le délai d'un an suivant la publication de la présente loi, et après consultation de l'ensemble des organisations syndicales représentatives, le Gouvernement présentera au Parlement un rapport portant sur l'évaluation globale du statut social de l'ensemble des personnels sous contrat travaillant à l'étranger.


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« VI. Les agents visés aux I, II et III du présent a rticle ne peuvent bénéficier des dispositions des articles 73 et suivants de la loi no 84-16 du 11 janvier 1984 précitée, à l'exception de ceux qui ont obtenu une décision de justice passée en force de chose jugée. »

La parole est à M. Patrice Carvalho, inscrit sur l'article.

M. Patrice Carvalho.

Présenté comme la traduction de la désormais célèbre jurisprudence Berkani du tribunal des conflits, en date du 25 mars 1996, l'article 26 quater nous pose toutefois deux problèmes.

Soucieux de tout ce qui peut contribuer à la résorption de la précarité des agents des services publics, nous ne pouvons que soutenir ce mouvement de transposition législative ; à la seule condition, je le répète, que celle-ci s'opère dans la plénitude de la lettre et de l'esprit de cette j urisprudence, qui entend faire de toute personne employée par une personne publique gestionnaire d'un service public administratif un agent de droit public - et ce, quel que soit l'emploi qu'elle occupe.

A ce titre, nous entendrons veiller à ce que la loi ne reste pas en retrait, en évitant une interprétation par trop restrictive de l'appréciation du juge.

Par ailleurs, le recours par les services de l'Etat à l'étranger à des personnels recrutés sur place et soumis à des contrats de droit local nous paraît totalement inacceptable.

Cette précarisation ne saurait, à l'évidence, s'expliquer que par le seul manque de moyens de l'administration, que nous n'avons cessé de dénoncer, et qui apparaît ici dans un texte pourtant destiné à garantir aux citoyens une meilleure efficience des services publics.

C'est pourquoi, plutôt que d'avaliser une telle pratique qui va à l'encontre de tous les principes, nous continuerons de revendiquer les moyens nécessaires à une administration qui satisfasse au mieux les attentes des citoyens.

Car, en l'absence de tout volontarisme en ce sens, les agents des services publics ne pourront être sérieusement en mesure de répondre aux exigences d'un service public de qualité, soumis qu'ils sont à la double pression qui s'exerce sur eux : d'une part, l'inacceptable tendance à la précarisation à laquelle les contraint l'absence de moyens suffisants ; d'autre part, le sentiment croissant de carence des services publics auxquels sont confrontés chaque jour les usagers.

Ici aussi, le problème de fond demeure celui de la nécessité de rompre avec un certain mouvement de désengagement de l'Etat.

Mme la présidente.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.

Je ne voudrais pas laisser M. Carvalho sans réponse, car il a exprimé des préoccupations parfaitement respectables.

Je rappellerai à nouveau la démarche suivie par le Gouvernement pour lever les dernières incertitudes. Que dit la décision Berkani du tribunal des conflits ? Tout agent travaillant pour l'Etat, une collectivité locale et les établissements publics administratifs, est un agent de droit public. Elle met ainsi un terme à la jurisprudence antérieure et, il faut le dire, complexe qui, selon la nature des fonctions exercées, amenait à qualifier certains de ces agents d'agents de droit privé. Elle met donc fin à une exception aux règles de droit commun qui gouvernent le recrutement des personnels de l'Etat, des collectivités locales et des EPA. C'est-à-dire les règles du statut général de la fonction publique. Depuis l'arrêt Berkani, ce recrutement ne peut désormais intervenir, s'agissant de services publics administratifs, que sous un régime de droit public. Les choses sont donc parfaitement claires pour les recrutements à venir.

Il convient cependant de régler la situation des agents recrutés sous le régime antérieur en leur offrant des garanties au moins équivalentes à celles dont ils bénéficient sous un régime de droit privé. Il ne faut pas qu'ils reculent ! C'est pourquoi le Gouvernement a entendu leur offrir, de manière un peu inhabituelle au regard du droit commun de la fonction publique, des contrats à durée indéterminée de droit public, assortis d'un délai d'option d'un an entre droit public et droit privé. Ce droit d'option permettra notamment à ceux qui le souh aitent de continuer à cumuler plusieurs activités publiques et privés.

L'objectif unique poursuivi par le Gouvernement est de garantir la solution la plus favorable pour chacun de ces agents. Voilà pour l'économie générale du dispositif proposé.

Je voudrais en outre souligner deux points.

Premier point : pourquoi lister les fonctions des agents concernés ? La réponse est simple : en premier lieu, un recensement très précis des personnels concernés a été réalisé et a permis d'identifier le niveau et la nature des fonctions assurées par les « Berkaniens », si vous me permettez cette expression. Par définition, ces fonctions ne peuvent être que des fonctions d'exécution « détachables » du service public : concierges, femmes de ménage, agents de restauration. En deuxième lieu, la précision de la rédaction sera un atout précieux, tant pour les agents que pour les employeurs, lors de la mise en oeuvre concrète du dispositif.

Compte tenu des multiples concertations auxquelles ce texte a donné lieu, je crois pouvoir affirmer que cette liste est exhaustive.

Deuxième point, qui a été évoqué dans le débat : pourquoi écarter les recrutés locaux de ce dispositif ? Je me suis longuement exprimé devant vous sur ce point lors des débats en seconde lecture. Nous sommes parvenus, grâce à ces débats et aux amendements qui ont été adoptés, M. le député, et à votre propre demande, à une solution équilibrée. Et je voudrais souligner ici l'attachement du Gouvernement, et le mien, personnellement, à ce que le rapport au Parlement sur la situation de ces agents apporte des solutions concrètes de nature à améliorer sensiblement la situation.

Je tiens enfin à souligner que la demande que vous faites en matière de contrat à durée indéterminée, va très au-delà de la simple transposition de la jurisprudence Berkani. Cette demande aboutirait en effet à offrir un contrat à durée indéterminée à l'ensemble des agents non titulaires en situation précaire, tant dans la fonction publique de l'Etat que dans la fonction publique territoriale. Je ne crois pas que la question de la précarité, puisque c'est bien cela qui est en cause, puisse être réglée dans ce cadre. Le Gouvernement, vous le savez, s'apprête à engager une concertation sur la résorption et la nonreconstitution de l'emploi précaire en liaison avec les organisations syndicales dans les semaines à venir. Il serait à mon sens peu opportun de légiférer dès à présent en la matière.

Telles sont les différentes raisons, mesdames, messieurs les députés, pour lesquelles je vous demande d'adopter ces deux articles tels qu'ils vous sont proposés par la commission.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 2 MARS 2000

Troisièmement, le Sénat, ainsi que M. Pandraud en commission, ont fait observer à juste titre que, dès lors que l'on demandait au Parlement de rattraper par son vote une telle erreur, il était pour le moins logique d'en rechercher le responsable. Or, soyons clairs, qui dit recherche des responsabilités dit - éventuellement - prise de sanctions afin d'éviter la répétition d'erreurs de même nature : reconnaissons en toute objectivité que notre rôle n'est pas de venir sans cesse les corriger. Nous le faisons parce que nécessité fait loi - c'est le cas de le dire ! -, mais le procédé me semble en l'occurrence assez contestable.

Mme la présidente.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.

Il me paraît difficile de faire dans le cas présent procès au Gouvernement en le soupçonnant d'enjamber le Parlement, dans la mesure où il s'agit d'un amendement d'origine parlementaire et où nous nous en étions remis à la sagesse de l'Assemblée - sagesse qui l'a conduite à l'adopter.

Je veux bien donner acte à M. Colcombet et, partant, à M. Tron que, dans la mesure où il s'agit de corriger une erreur administrative, une recherche en responsabilité et, le cas échéant, un prise de sanction me paraissent relever d'une certaine logique. Je signalerai donc la chose et transmettrai au ministre compétent - en l'occurrence mon collègue de l'éducation nationale - le souhait du Parlement.

M. François Colcombet.

Très bien !

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

2. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

En conséquence, l'article 27 AA est ainsi rédigé.

Article 27

Mme la présidente.

« Art. 27. - I. - Les articles 1er à 4, 6 à 8 bis, 10 et 28 ainsi que les articles du titre II, à l'exception de l'article 15, sont applicables en NouvelleCalédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna aux administrations de l'Etat et à leurs établissements publics. Pour leur application en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna, les références à la loi no 79-18 du 3 janvier 1979 sur les archives sont remplacées par les références aux dispositions applicables localement en matière d'archives.

« II. - Les articles 1er à 10, 24 à 26 et 28 ainsi que les articles du titre II, à l'exception de l'article 15, sont applicables dans la collectivité territoriale de Mayotte. »

Mme Ledoux, rapporteuse, a présenté un amendement, no 3, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi l'article 27 :

« I. Les articles 1er à 4, 6 à 8, 10 et 28 ainsi que le titre II à l'exception des articles 15 et 22 bis sont applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna aux administrations de l'Etat et à leurs établissements publics.

« Pour leur application en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna, les références à la loi no 79-18 du 3 janvier 1979 sur les archives sont remplacées par les références aux dispositions applicables localement en matière d'archives.

« A l'article 10, pour son application en NouvelleCalédonie, en Polynésie française et à Wallis-etFutuna, les mots : "préfecture du département" sont remplacés respectivement par les mots : "HautCommissariat de la Nouvelle-Calédonie", "HautCommissariat de la Polynésie française" et "Administration supérieure des îles Wallis-et-Futuna".

« II. Les articles 1er à 4, 6 à 8, 9, 10, 28, le titre II à l'exception des articles 15 et 22 bis ainsi que le titre IV à l'exception de l'article 24 bis sont a pplicables dans la collectivité territoriale de Mayotte.

« A l'article 10, les mots : "préfecture du département" sont remplacés par les mots : "représentation du Gouvernement dans la collectivité territoriale". »

La parole est à Mme la rapporteuse.

Mme Claudine Ledoux, rapporteuse.

Cet amendement tend à réécrire l'article 27 en prenant en compte les spécificités des territoires d'outre-mer et de la NouvelleCalédonie.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.

Favorable.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

3. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

En conséquence, l'article 27 est ainsi rédigé. C'est l'amendement no 4 de M. Buillard tombe.

Article 27 bis

Mme la présidente.

« Art. 27 bis. - Le mandat des représentants titulaires et suppléants au comité technique paritaire ministériel institué par le décret no 94-360 du 6 mai 1994 modifié relatif au comité technique paritaire ministériel du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, est prorogé pour la période du 5 juillet 1997 au 30 juin 2000. »

Je mets aux voix l'article 27 bis.

(L'article 27 bis est adopté.)

Explications de vote

Mme la présidente.

Dans les explications de vote, la parole est à M. Georges Tron, pour le groupe du RPR.

M. Georges Tron.

Madame la présidente, je m'exprimerai également au nom de mon collègue Blessig, pour le groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance.

Ainsi que vous l'avez vous-même indiqué, monsieur le ministre, nous retrouvons dans ce texte bon nombre d'éléments d'une réflexion à long terme initiée par votre prédécesseur et qui vont dans la bonne direction.

Au-delà, nous devons être bien conscients que la réforme de l'Etat constitue un de nos chantiers les plus importants. Or cette réforme ne doit pas viser seulement l'amélioration des relations entre l'Etat, l'administration et les administrés ; elle doit également tendre à un objectif tout aussi important à mes yeux : le respect de tous les acteurs de la vie politique et de la vie sociale.

Ce respect des acteurs de la vie politique et sociale suppose l'affirmation d'un principe : chacun d'eux a des droits, mais est également soumis à des obligations. Et


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c'est dans la mesure où les uns et les autres sauront se respecter mutuellement, dans leurs droits et leurs devoirs, que l'Etat, dans sa plénitude, pourra correctement fonctionner.

Ce texte, je l'ai dit, va dans le bon sens en corrigeant certains de ces travers qui conduisent l'administré à se sentir face à l'Etat dépouillé de toute prérogative ou moyen de défense. Il nous faut cependant, je le dis notamment pour deux ou trois des derniers amendements que nous avons votés, garder à l'esprit deux idées précises.

Premièrement, notre administration sera d'autant plus respectée qu'elle sera soumise à des règles strictes en matière de déontologie et de droit. Trop souvent, l'administré a le sentiment d'être astreint à des obligations que l'Etat ne daigne pas s'appliquer à lui-même. Faisons en sorte, j'y insiste, d'instaurer un sentiment partagé chez l'administré et dans la fonction publique, un sentiment d'équilibre entre les obligations et les droits de l'un et de l'autre.

Deuxièmement, nous devons conduire une véritable réflexion d'ensemble sur la place de l'élu. Vous m'aviez répondu en deuxième lecture, monsieur le ministre, que ce n'était pas l'objet du texte, mais je veux y insister à nouveau en conclusion de la troisième. Je vous demande donc d'apprécier à cet égard mes réflexions sur l'amendem ent Montebourg-Gouzes. J'ai regretté à certains moments que l'élu ait été un peu absent de votre texte. Je suis de ceux qui pensent - cela n'a certes rien d'original que la démocratie fonctionne également grâce à des élus.

Or, même si ce n'était pas l'objet de ce projet d'en traiter directement, j'ai eu le sentiment qu'il y avait un absent : l'élu.

Une démocratie ne peut bien fonctionner que si les prérogatives de l'élu sont affirmées. Or, dans certaines des dispositions que nous avons adoptées, il m'a paru un peu en retrait, pour ne pas dire gommé. J'ai évoqué tout à l'heure le problème de la saisine directe par les administrés au lieu de la collectivité locale, département ou région, et vous m'avez répondu. Mais d'autres aspects également vont dans le sens d'un effacement de l'élu. Je v ous assure en particulier que l'amendement à l'article 26 ter est à bien des égards inutile, pour ne pas dire plus.

En conclusion, le groupe du Rassemblement pour la République, ayant le sentiment de n'avoir pas reçu toutes les réponses qu'il pouvait souhaiter, s'abstiendra, de même que le groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.

Mme la présidente.

La parole est à M. François Colcombet, pour le groupe socialiste.

M. François Colcombet.

Je partirai précisément de la dernière remarque de mon collègue, sur le rôle et la présence de l'élu dans ce texte.

D'une façon générale, on peut trouver que l'élu, notamment national, n'a peut-être pas toute la place qui devrait lui revenir. Mais c'est aussi un des effets, nous le savons, de la Constitution sous laquelle nous vivons, et des interprétations qui en ont été données, qui tendent très souvent à renvoyer à des décisions relevant du Gouvernement bon nombre des règles dont nous parlons et qui préoccupent nos concitoyens. Or nous souhaitons tous que notre Constitution évolue, soit dans les règles, soit dans la pratique, afin que certaines matières, et particulièrement tout ce que l'on appelle la procédure, remontent davantage au Parlement.

Certes, la procédure pénale est de notre compétence.

Mais tout ce qui relève de la procédure civile ou administrative reste encore trop à mon goût du domaine du Gouvernement. Il faudra trouver le moyen, dans les réformes futures, de donner plus souvent à notre instance l'occasion de discuter des sujets que nous venons d'aborder. Car nous nous sommes bel et bien, c'est vrai, saisis aujourd'hui de questions qui se trouvent aux confins des pouvoirs du Gouvernement.

Dans ce contexte de décentralisation, les élus se retrouvent, je l'ai dit plusieurs fois, à vivre deux réalités totalement différentes : celle des simples usagers, que nous représentons ici et qui, lorsqu'ils se heurtent à l'administration, ont tendance à penser que les fonctionnaires les comprennent mal, qu'ils ne les accueillent pas gentiment, qu'ils expliquent mal ou en des termes incompréhensibles ; celle aussi de personnes proches d'une administration que nous utilisons du fait du cumul des mandats ou dans laquelle nous avons parfois fait carrière, nous retrouvant par le fait au four et au moulin. Nous savons aussi qu'il nous faut à un certain moment avoir les moyens d'exercer les prérogatives dont nous sommes dépositaires.

Cette discussion, nous l'avons eue constamment tout au long de l'examen de ce projet de loi. Pour ma part, je n'ai jamais accusé le Sénat de s'être montré dans cette affaire particulièrement rétrograde ou obscurantiste. Peutêtre exprime-t-il mieux que les membres de l'Assemblée l'autre réalité, tout aussi légitime. Nous avons parfois recherché un équilibre ; je crois que nous l'avons en grande partie trouvé. M. le ministre a du reste fait preuve à l'égard des élus que nous sommes d'une bienveillance, d'une patience tout à fait admirables. Vous avez dit, monsieur Tron, que M. Chevènement vous avait parfois renvoyés dans vos buts...

M. Georges Tron.

Pas du tout !

M. François Colcombet.

M. Zuccarelli en tout cas ne l'a jamais fait.

Reste un point, peut-être un peu secondaire, qui concerne l'application de ces dispositions à la NouvelleCalédonie. Nous venons d'adopter un amendement qui exclut les collectivités locales calédoniennes de son application, réservée par voie de conséquence aux seules administrations de l'Etat. Je souhaite pour ma part que ce texte vienne assez rapidement à s'appliquer aux collectivités locales des territoires d'outre-mer, car il n'y a aucune raison que cette bonne loi ne s'applique pas à tout le monde.

Quoi qu'il en soit, le groupe socialiste votera évidemment des deux mains cette loi à laquelle il aura beaucoup contribué et qui rendra, nous en sommes persuadés, nos concitoyens davantage en paix avec leur administration et donc plus heureux dans leur pays.

Mme la présidente.

La parole est à M. Patrice Carvalho pour le groupe communiste.

M. Patrice Carvalho.

Monsieur le ministre, cette loi sera sans doute l'occasion de renforcer la démocratie dans notre pays en permettant au citoyen de s'exprimer plus facilement et d'engager des procédures sans avoir à dépenser d'argent. C'est une bonne chose d'avoir rejeté l'amendement du Sénat qui souhaitait instaurer une barrière de l'argent fort peu démocratique dans un pays comme le nôtre.

Reste le problème des moyens que nous allons y consacrer. Créer des maisons de service public, c'est formidable ; encore faut-il qu'elles soient capables de fonctionner correctement.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 2 MARS 2000

J'ai toutefois une inquiétude : j'ai entendu que celui qui dirigera cette maison de service public sera un fonctionnaire. J'aurais aimé, monsieur le ministre, que vous nous répondiez de façon plus approfondie. S'il s'agit d'une association qui vient proposer de la formation, association intermédiaire ou autre, on comprend que ce ne soit pas un fonctionnaire, puisque, de fait, ce sera un membre de cette association. Mais s'il s'agit d'impôts, il faut croire que ce sera un titulaire de l'administration des impôts qui viendra ; de même pour le représentant d'une collectivité. Nous aurions souhaité une réponse précise, car le sujet est important.

En conclusion, ce projet de loi ne suscite aucun désaccord profond et le groupe communiste, évidemment, le votera. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.) Vote sur l'ensemble

Mme la présidente.

Personne ne demande plus la parole ? Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(L'ensemble du projet de loi est adopté.)

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme la présidente.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.

Monsieur Carvalho, j'ai bien indiqué que chaque entité procédera par mise à disposition de ses propres personnels auprès de la structure. Je crois donc avoir apporté une réponse tout à fait rassurante à votre interrogation.

Mesdames, messieurs, nous voilà arrivés au terme de cette troisième lecture à l'Assemblée nationale. Si le Sénat émet, dans sa sagesse, un vote conforme, nous n'aurons pas à revenir sur ce texte ; sinon, il nous faudra nous retrouver pour une quatrième lecture et nous serons alors arrivés au terme d'un long parcours.

Ce projet nous vient de très loin, puisqu'il a repris notamment des obligations instaurées sous forme de circulaire, puisque l'Etat peut se contraindre lui-même, et qui remontent, me semble-t-il, à l'époque de Michel Rocard, il y a douze ans déjà. Quoi qu'il en soit, ce texte arrivera en son temps. Je me félicite de la qualité de ce débat ; j'en remercie tous les intervenants, et particulièrement Mme la rapporteuse pour le travail considérable qu'elle a fourni.

La loi DCRA, soyons clairs, est faite pour créer des obligations à ceux qui « donnent » du service public, et particulièrement, à l'Etat. Celui-ci pouvait le faire par circulaire mais c'est désormais dans la loi, c'est maintenant encore plus fort. Cela vaudra également pour les collectivités et pour d'autres organismes à caractère administratif.

Nous ne créons donc pas d'obligations supplémentaires pour l'usager, mais avant tout pour tous ceux qui lui donnent du service public. Les collectivités se retrouvent ainsi implicitement mises au même rang que l'Etat au titre du service public qu'elles assurent et dont elles sont des acteurs essentiels.

Comme de nombreux intervenants l'ont rappelé, c'est évidemment un pas dans la réforme de l'Etat. Cette réforme de l'Etat, on en parle quelquefois sur un mode un peu ironique, comme s'il s'agissait d'une sempiternelle Arlésienne. Moi-même, lorsque j'ai hérité des fonctions de ministre de la réforme de l'Etat, j'ai eu droit à quelques sourires dubitatifs.

C'est que la réforme de l'Etat ne saurait se faire d'un claquement de doigt. Et elle touche à bien des domaines.

Elle ne peut se réduire à un seul texte, aussi important soit-il, comme c'est le cas de celui-ci. Elle doit se faire dans la durée, elle doit se faire dans les différents secteurs, elle doit se faire enfin de manière déterminée. Or, je tiens à le dire devant l'Assemblée nationale, ce Gouvernement est bien déterminé à faire bouger les choses. Vous le toucherez du doigt dans ce domaine de la relation, de la relation intime, allais-je dire, entre l'usager et ceux qui lui donnent du service public.

Vous le toucherez du doigt également, et d'une manière très forte, avec l'organisation que l'Etat va s'imposer pour être plus efficace, lorsque vous verrez se concrétiser sur le terrain la réorganisation des services déconcentrés de l'Etat, en application du texte du 20 octobre dernier.

Vous parliez à l'instant de votre rôle dans les collectivités ; vous verrez très prochainement, dans le cadre des fontions que vous y exercez, votre interlocuteur Etat devenir plus efficace.

J'aurais pu également vous parler de notre effort de modernisation et notamment de l'introduction des nouvelles technologies de l'information et de la communication dans l'administration ; il ne s'agit évidemment pas de mettre en place je ne sais quel Big Brother ou autre Moloch, mais de donner aux fonctionnaires des outils pour les rendre plus efficaces encore dans leur tâche.

J'aurais pu vous parler enfin d'évaluation. Nous avons totalement relancé les procédures d'évaluation, car il n'est pas question pour celui qui donne du service public de s'endormir dans l'autosatisfaction sans aller voir ce qui se passe réellement sur le terrain, sans aller vérifier si les améliorations engagées se traduisent concrètement dans les faits.

Voilà, mesdames, messieurs les députés, ce que je voulais vous rappeler. Nous travaillons avec la plus grande détermination à la réforme de l'Etat. Nous aurons définitivement franchi dans quelques semaines, s'il est besoin d'une quatrième lecture, l'étape décisive de cette loi DCRA : ce sera pour nous un encouragement à poursuivre. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

2 DÉPÔT D'UN RAPPORT

Mme la présidente.

J'ai reçu, le 2 mars 2000, de M. Patrick Rimbert, un rapport, no 2229, fait au nom de la commission de la production et des échanges, sur le projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains (no 2131) : Tome I : discussion générale, examen des articles ; Tome II : tableau comparatif ; Tome III : amendements non adoptés par la commission.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 2 MARS 2000

3 DÉPÔT D'UN PROJET DE LOI ORGANIQUE

MODIFIÉ PAR LE SÉNAT

Mme la présidente.

J'ai reçu, le 2 mars 2000, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi organique, modifié par le Sénat, tendant à favoriser l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats de membre des assemblées de province et du congrès de la NouvelleCalédonie, de l'assemblée de la Polynésie française et de l'assemblée territoriale des îles Wallis-et-Futuna.

Ce projet de loi, no 2230, est renvoyé à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

4

ORDRE DU JOUR

DES PROCHAINES SÉANCES

Mme la présidente.

Mardi 7 mars 2000, à neuf heures, première séance publique : Discussion de la proposition de loi, no 2132, de Mme Catherine Génisson et plusieurs de ses collègues, relative à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes : Mme Catherine Génisson, rapporteur, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (rapport no 2220) ; Mme Nicole Feidt, rapporteur pour avis, au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et d e l'administration générale de la République (avis no 2225) ; M. André Vallini, rapporteur, au nom de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes (rapport d'information no 2226).

Fixation de l'ordre du jour.

A quinze heures, deuxième séance publique : Questions au Gouvernement.

A dix-sept heures quinze : Suite de l'ordre du jour de la première séance.

A vingt et une heures, troisième séance publique : Suite de l'ordre du jour de la première séance.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-sept heures vingt.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT

TEXTE SOUMIS EN APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION Transmission

M. le Premier ministre a transmis, en application de l'article 88-4 de la Constitution, à M. le président de l'Assemblée nationale, le texte suivant : Communication du 29 février 2000 No E 1416. Proposition de règlement du Conseil portant ouverture et mode de gestion de contingents tarifaires communautaires autonomes pour certains produits de la pêche.

CONVOCATION DE LA CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS La conférence, constituée conformément à l'article 48 du règlement, est convoquée pour le mardi 7 mars 2000, à 10 heures, dans les salons de la présidence.