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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE

DE

M.

PATRICK

OLLIER

1. Chasse. - Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, d'un projet de loi (p. 2700).

DISCUSSION GÉNÉRALE (suite) (p. 2700)

MM. Marc Dolez, Jean Proriol, Pierre Ducout, René André, Stéphane Alaize, Patrice Martin-Lalande, Jean-Pierre Dufau, Jean Auclair, Mme Monique Denise,

MM. François Baroin, Jean Espilondo, Yvon Montané, Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

M. François Patriat, rapporteur de la commission de la production.

Clôture de la discussion générale.

DISCUSSION

DES ARTICLES (p. 2716)

Avant l'article 1er (p. 2716)

Amendement no 53 de la commission de la production :

M. le rapporteur, Mme la ministre. - Adoption.

Amendement no 319 de M. Giscard d'Estaing : MM. Charles de Courson, le rapporteur, Mme la ministre. - Adoption.

Amendement no 320 de M. Baroin : MM. François Baroin, le rapporteur, Mme la ministre, M. Noël Mamère. Rejet.

Article 1er (p. 2718)

MM. Michel Vauzelle, Jean-Pierre Brard, Christian Estrosi, André Vauchez, Thierry Mariani, Jean-Claude Viollet.

Amendement no 321 de M. Baroin : MM. François Baroin, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.

Amendement no 23 de Mme Perrin-Gaillard : Mme Genev iève Perrin-Gaillard, M. le rapporteur, Mme la ministre. - Adoption de l'amendement no 23 rectifié.

Amendement no 55 de la commission : M. le rapporteur,

Mme la ministre. - Adoption.

L es amendements nos 240 de Mme Bassot, 381 de M. Martin-Lalande, 283 de M. Mariani et 24 de Mme Perrin-Gaillard n'ont plus d'objet.

Amendement no 238 de Mme Bassot : MM. Eric Doligé, le rapporteur, Mme la ministre, M. Charles de Courson. Rejet.

A mendements nos 56 de la commission et 239 de Mme Bassot : M. le rapporteur, Mme la ministre. Adoption de l'amendement no 56 ; l'amendement no 239 n'a plus d'objet.

A mendement no 281 de M. Mariani : MM. Thierry Mariani, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet de l'amendement no 281 rectifié.

A mendement no 282 de M. Mariani : MM. Thierry Mariani, le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.

Amendement no 57 de la commission, avec le sousamendement no 123 rectifié de M. Brottes : M. le rapporteur, Mme la ministre, MM. François Brottes, Charles de Courson. - Adoption du sous-amendement no 123 rectifié et de l'amendement no 57 modifié.

Amendement no 54 de la commission, avec le sousa mendement no 180 de M. de Courson : M. le rapporteur, Mme la ministre, MM. Charles de Courson, Christian Jacob, François Sauvadet. - Rejet du sousamendement no 180 ; adoption de l'amendement no

54. Amendements nos 58 rectifié de la commission, 146 de M. de Courson et 284 de M. Mariani : M. le rapporteur,

Mme la ministre.

Sous-amendements à l'amendement no 58 rectifié : Sous-amendement no 370 de M. Le Nay : M. Jacques Le Nay.

Sous-amendements nos 343 de M. Mariani et 181 de M. Le Nay : MM. Thierry Mariani, Jacques Le Nay, le rapporteur, Mme la ministre, MM. Charles de Courson, Jean-Claude Lemoine, Christian Jacob.

Sous-amendement oral du Gouvernement à l'amendement no 58 rectifié : MM. le rapporteur, Christian Jacob. Adoption.

Rejet des sous-amendements nos 370, 343 et 181.

Mme la ministre, M. le rapporteur.

D euxième sous-amendement oral du Gouvernement à l'amendement no 58 rectifié. - Adoption.

Rappel au règlement (p. 2730)

MM. Charles de Courson, le président.

Reprise de la discussion (p. 2731)

MM. Jean-Claude Lemoine, le président. - Adoption de l'amendement no 58 rectifié et modifié ; les amendements nos 146 et 284 n'ont plus d'objet.

Adoption de l'article 1er modifié.

Après l'article 1er (p. 2731)

Amendement no 60 de la commission : M. le rapporteur,

M me la ministre, MM. Noël Mamère, Charles de Courson, François Liberti, Christian Bataille, JeanClaude Lemoine.

Suspension et reprise de la séance (p. 2732)

MM. François Baroin, le rapporteur, Charles de Courson, Mme la ministre. - Rejet de l'amendement no

60. Amendement no 322 de M. Baroin : MM. François Baroin, le rapporteur, Mme la ministre, MM. Christian Jacob, Christian Bataille, Noël Mamère. - Rejet.

Amendements nos 25 de M. Bonrepaux et amendements identiques nos 19 de M. Deprez, 22 de M. Bouvard et 221 d e M. Proriol : MM. Augustin Bonrepaux, Michel Bouvard, Paul Patriarche, le rapporteur, Mme la ministre, MM. Noël Mamère, Christian Estrosi.

M. Christian Bataille.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

Suspension et reprise de la séance (p. 2740)

MM. le président, Christian Bataille.

Sous-amendement no 400 de M. Bataille à l'amendement no

25. Sous-amendement no 401 de M. Estrosi à l'amendement no 25 : M. le rapporteur, Mme la ministre, MM. Eric Doligé, Augustin Bonrepaux.

Deuxième et troisième sous-amendements de M. Estrosi à l'amendement no 25 : Mme Christine Boutin, M. Christian Estrosi. - Rejet du sous-amendement no 401 ; adoption du sous-amendement no 400 ; les deuxième et troisième sous-amendements de M. Estrosi n'ont plus d'objet ; adoption de l'amendement no 25 modifié ; les amendements nos 19, 22 et 221 n'ont plus d'objet.

Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.

2. Dépôt d'une proposition de loi constitutionnelle (p. 2742).

3. Dépôt de propositions de loi (p. 2742).

4. Dépôt de rapports (p. 2743).

5. Ordre du jour des prochaines séances (p. 2743).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. PATRICK OLLIER,

vice-président

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures.)

1 CHASSE Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, d'un projet de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à la chasse (nos 2182, 2273).

Discussion générale (suite)

M. le président.

Cet après-midi, l'Assemblée a commencé d'entendre les orateurs inscrits dans la discussion générale.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Marc Dolez.

M. Marc Dolez.

Monsieur le président, madame la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, chers collègues, notre discussion de cet après-midi l'a montré, nous sommes nombreux, sur tous les bancs de cette assemblée, à partager l'objectif d'une chasse responsable et apaisée. Pour cela, nous avons besoin d'une grande loi, globale, qui s'inscrive dans la durée et réponde de manière précise aux différents problèmes qui se posent, notamment à ceux qui sont source de contentieux.

Pour atteindre cet objectif, il nous faut un texte équilibré. Mme la ministre elle-même a employé cette expression, cet après-midi, et j'espère que la suite de notre discussion permettra de trouver ce point d'équilibre qui n'existe pas encore dans le projet de loi.

M. Michel Hunault.

Quel aveu !

M. Marc Dolez.

Nous sommes nombreux à penser qu'il aurait gagné à s'inspirer davantage des conclusions du rapport de notre collègue Patriat.

Je souhaite que le Gouvernement accepte plusieurs des amendements qu'ont préparés les différents groupes notamment le groupe socialiste - et dont certains ont déjà été adoptés par la commission de la production et des échanges. Ils pourraient permettre à tout un chacun de voter ce texte...

M. Michel Hunault.

Ils pourraient surtout permettre de l'améliorer !

M. Marc Dolez.

... et, bien sûr, de l'améliorer. En déposant ces amendements, nous ne faisons que notre travail de parlementaires, et je souhaite que le Gouvernement montre qu'il est à l'écoute de la représentation nationale. Je crois au rôle du Parlement : pour ce texte, comme pour tous les autres, il faut mettre dans la loi tout ce qui peut y être mis, et renvoyer aussi peu que possible aux décrets. Cela me semble une condition indispensable, si nous voulons, au terme de ces deux jours de discussion, voter une grande loi, qui s'inscrive dans la durée.

Cela dit, je voudrais faire deux remarques concernant deux grands points qui figurent au coeur de notre débat.

M. le président.

Il va falloir conclure !

M. Marc Dolez.

Et je conclurai en même temps.

Mme la ministre nous a rappelé cet après-midi la proposition du Gouvernement sur la chasse de nuit : elle vise à instaurer une dépénalisation expérimentale et limitée. Je suis en désaccord complet avec cette proposition, qui ne réglera rien et maintiendra l'interdiction. Le groupe socialiste souhaite que soit légalisée la chasse de nuit, et que la liste des départements concernés par cette pratique traditionnelle figure dans la loi.

Je me permets de vous rappeler que, le 22 février dernier, les parlementaires qui, à une large majorité, ont renvoyé en commission la proposition de loi qui leur était soumise l'ont fait par souci de cohérence. Ils savaient que, quelques semaines plus tard - c'est-à-dire aujourd'hui -, ils allaient avoir à débattre d'un texte plus global. Mais c'était à la condition qu'y figure la légalisation de la chasse de nuit.

M. le président.

C'est votre conclusion, monsieur Dolez ?

M. Marc Dolez.

Ma conclusion, monsieur le président, concerne un autre point clé de ce texte, les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse. La directive n'en fixe pas et ne définit que des critères. Pour ma part, je souhaite que, lors de la discussion des amendements, nous puissions aboutir à des dates échelonnées, fixées en fonction des espèces, et qui tiennent compte des avis motivés de la commission européenne. Cela me semble fort possible. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Michel Hunault.

C'est un avertissement !

M. le président.

Chers collègues, je vous demande de respecter vos temps de parole, car la discussion va être longue.

La parole est à M. Jean Proriol.

M. Jean Proriol.

Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, notre assemblée a beaucoup travaillé sur la chasse depuis la loi du 3 juillet 1998, qui avait modifié, on s'en souvient, l'article L.

224-2 du code rural. Surtout, elle a beaucoup travaillé depuis l'arrêt du Conseil d'Etat du 7 avril. Le sujet est explosif, dit-on. Je dirai plutôt que le climat est conflictuel. Et je rappellerai quelques dates.

En 1999, pendant de longs mois, un parlementaire en mission a été chargé de déminer le terrain et de trouver un compromis. Cela nous a valu le rapport Patriat 1. Fin


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1999, début 2000, se sont déroulées de nombreuses réunions du groupe « chasse », avec des auditions tous azimuts, de celle du président de l'Union des fédérations, Pierre Daillant, à celle d'Alain Bougrain-Dubourg, président de la LPO. Ce travail, mené par le président Henri Sicre, s'est terminé en apothéose, avec le colloque sur la chasse du lundi 31 janvier dernier, colloque dont plus personne ne parle. Le silence, volontaire ou imposé, du président Henri Sicre - dont je veux saluer la très grande bonne volonté - en dit long sur les tiraillements internes de la majorité actuelle.

Le 22 février dernier, dans cette enceinte, nous avons discuté de la proposition de loi de Courson sur la chasse de nuit : il s'en est fallu d'une poignée de voix qu'elle ne soit adoptée.

M. Charles de Courson.

Il s'en est fallu de cinq voix !

M. Jean-Pierre Brard.

Louis XVI a perdu sa tête pour une voix ! (Sourires.)

M. Jean Proriol.

Enfin, Mme la ministre a déposé son projet de loi, que notre rapporteur, le dévoué François Patriat, a tenté de récrire une nouvelle fois, pour le sauver. Et cela nous a donné le rapport Patriat 2, issu, lui aussi, de la commission de la production et des échanges.

Quel bon Samaritain, ce rapporteur ! (Sourires.)

Au demeurant sympathique, jouant tour à tour le rôle du terre-neuve, du saint-bernard, du braque, de l'épagneul, et même du fox-terrier.

M. Patrice Martin-Lalande.

Cela nous ramène à la niche parlementaire ! (Sourires.)

M. Charles de Courson.

Excellent !

M. Jean Proriol.

Je n'aborderai que quelques points et parlerai d'abord de la chasse et de l'Europe. Tout est parti de la directive « oiseaux » de 1979, interprétée strictement par nos tribunaux. Son article 9 prévoit pourtant des dispositions dérogatoires, qui laissent aux Etats membres une certaine marge de manoeuvre. Depuis 1979, cette marge de manoeuvre a été élargie par le vote du traité de Maastricht, qui confirme le principe de subsidiarité. Le président Giscard d'Estaing l'a dit : pour les oiseaux migrateurs, il faut s'inscrire dans le texte de l'Union européenne, avec les restrictions ou les dérogations que nous pouvons lui apporter ; pour les mammifères et les non-migrateurs, cela relève de la compétence nationale.

Nous avons eu de longs débats sur la définition de la chasse. Il conviendrait d'en donner une qui soit plus positive, et donc de réécrire l'article 2 du projet. Ne présentons pas la chasse comme un exercice ou une manoeuvre militaire, comme un sport dangereux. On ne peut qu'être stupéfait à la lecture de l'exposé des motifs d'un amendement déposé par un de nos anciens collègues, devenu, depuis hier, secrétaire d'Etat, M. Hascoët :

« La chasse est une activité qui comporte de nombreux dangers du fait du maniement des armes à feu. Sa pratique est souvent source de conflit avec les autres utilisateurs de la nature, à commencer par les promeneurs.

Pour garantir une totale tranquillité et une plus grande sécurité à ceux-ci, notamment aux enfants, le choix du dimanche apparaît aussi judicieux que celui du mercredi pour les jours sans chasse. Il concerne une population beaucoup plus importante que le seul mercredi. » La

chasse ne doit pas être présentée comme un exercice particulièrement dangereux. Le président Jean Saint-Josse l'a dit : « Nous, les chasseurs, nous ne sommes pas des tueurs d'enfants. »

Je voudrais maintenant évoquer quelques points de désaccord et de rupture.

M. le président.

Pour conclure, monsieur Proriol !

M. Jean Proriol.

J'y viens, monsieur le président.

Notre porte-parole, Antoine Carré, les a déjà signalés.

Comme le précédent orateur du groupe socialiste, nous considérons que les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse doivent figurer dans la loi.

Nous trouvons d'autre part le projet trop restrictif pour la chasse de nuit qu'il limite à vingt départements côtiers. La proposition initiale en comptait quarantedeux ; nous sommes passés à trente et un, ce qui paraissait très raisonnable. Enfin, le débat reste ouvert pour ce qui est de la liberté, accordée aux fédérations départementales de chasse, de choisir un jour de fermeture. En ce qui concerne le guichet unique pour la délivrance des permis de chasser, les mairies peuvent être un point d'accueil des différentes autorités qui accordent et le visa et la validation du permis.

Pour conclure, monsieur le président, je voudrais saluer le travail des fédérations départementales de chasse, notamment de leurs personnels techniques et administratifs dont on a peu parlé ici. Ils représentent 1 100 personnes sur l'ensemble de notre territoire et sont légitimement inquiets de voir leur rôle réduit au profit de l'ONC, et donc d'une certaine recentralisation que nous condamnons.

M. Patrice Martin-Lalande.

Tout à fait !

M. Jean Proriol.

Madame la ministre, en l'état, votre projet n'envoie pas au monde de la chasse ni aux amoureux de la nature et aux promeneurs les signes d'apaisement, de réconciliation et d'équilibre qu'ils en attend aient.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. Pierre Ducout.

M. Pierre Ducout.

Madame la ministre, chers collègues, le projet de loi que nous examinons traduit une ambition légitime : permettre une pratique responsable et apaisée de la chasse. Les contentieux engendrés par la directive européenne d'avril 1979 ont conduit le Parlement à légiférer en 1994, puis en 1998. Mais, dans l'esprit de tous, la loi de 1998 ne pouvait présenter qu'un caractère provisoire.

Ayant participé à la discussion de ces lois, je voudrais me référer en introduction à la proposition de loi adoptée en 1996, concernant le droit particulier des départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle. Comme intervenant principal du groupe socialiste, j'avais relevé les éléments positifs de cette loi qui tenait compte de l'évolution des modes de gestion, de la nécessité d'un équilibre entre les différents usages des espaces naturels. Il fallait aussi noter la bonne gestion du patrimoine cynégétique et le bon niveau de concertation, sérieuse et responsable, en Alsace-Moselle.

J'avais souligné que ce sérieux et cette responsabilité pouvaient se retrouver chez la très grande majorité des utilisateurs de l'espace, mais également dans la très grande diversité des cultures cynégétiques, des terroirs, dans les différentes régions françaises. A ce titre, même si l'on peut regretter que nos régions n'aient pas le même niveau de compétences que dans des pays européens voisins pour exprimer leur spécificité en matière d'environnement et de culture, j'avais noté la déclaration très positive que


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vous aviez faite, madame la ministre, dans un grand journal du soir : « l'activité cynégétique est très différente selon les régions.[...] Je ne méconnais pas la situation qui existe dans certains départements du Sud-Ouest de la France, mais je dis qu'une solution doit y être apportée comme ailleurs, par le dialogue et dans le respect mutuel de tous les interlocuteurs. »

En soulignant que vous ne souhaitiez ni l'interdiction de la chasse ni la disparition des chasseurs, vous aviez proposé au Premier ministre de nommer François Patriat, parlementaire en mission. Je veux ici féliciter M. Patriat pour la qualité de son travail, son sens du dialogue, l'excellence de son rapport, son sérieux et son sens de la pédagogie.

M. René André et M. Jean-Claude Lemoine.

C'est vrai !

M. Pierre Ducout.

Tous nos collègues le reconnaîtront certainement.

M. René André.

Oui, Patriat a bien travaillé !

M. Pierre Ducout.

Le groupe socialiste propose plusieurs amendements, adoptés par la commission de la production et des échanges, qui enrichissent le texte dans l'esprit de ce rapport et confortent l'équilibre recherché.

Nous pourrons ainsi montrer notre sérieux et notre sens des responsabilités vis-à-vis de nos partenaires européens, même si, nous le savons, nous demandons des sacrifices à certains chasseurs et nous risquons de ne pas satisfaire les plus extrémistes de chaque camp.

Des signes forts sont ainsi donnés aux non-chasseurs, avec l'affirmation du droit de non-chasse, la détermination d'un jour de non-chasse, la limitation des dates de chasse aux oiseaux migrateurs, créant, comme l'a souhaité Mme la ministre, « les conditions d'une coexistence paisible entre les chasseurs et les autres usagers des espaces naturels en redéfinissant la place de la chasse dans la gestion de l'espace et des espèces ».

Je voudrais souligner les points qui, dans le projet de loi et les amendements que nous proposons, paraissent importants de mon point de vue d'élu d'une circonscription à la fois périurbaine et partie intégrante de la grande forêt landaise, dont certaines traditions sont plusieurs fois millénaires, comme en témoigne le poète aquitanoromain Ausone.

Le problème de la gestion de l'espace et du partage de l'espace dans les communes périurbaines exige un dialogue permanent entre les utilisateurs - cavaliers, vététistes, sportifs, promeneurs, chasseurs - et les propriétaires, la forêt étant privée à 90 %. Nous signons des conventions avec les propriétaires pour obtenir le droit de chasse, mais aussi le droit de promenade toute l'année et éviter que des enclos couvrent l'ensemble de notre territoire : c'est un risque réel.

M. René André.

C'est très important, en effet !

M. Pierre Ducout.

Le problème de la sécurité est avant tout de la responsabilité des chasseurs, qui ne doivent pas tirer en direction des maisons ; dans ce cas, en effet, ils sont indéfendables. Mais il faut aller plus loin pour la sécurisation des battues au grand gibier ; les accidents sont de moins en moins nombreux, mais ils sont inadmissibles : c'est le sens de l'amendement que nous avons déposé après l'article 9, mon collègue Vauchez et moimême.

Dans le cadre du partage de l'espace, et dans le sens de la position exprimée par le Parti socialiste, nous proposons d'assimiler les postes fixes pour les quarante-cinq jours de chasse à la palombe à un enclos : la chasse à la palombe dans les palombières en forêt est un art, nécessite une connaissance, une communion avec la nature.

C'est une pratique particulièrement populaire, très conviviale.

U ne précédente ministre de l'environnement, Mme Bouchardeau, l'avait reconnu en se rendant dans notre région. Vous y seriez la bienvenue, madame la ministre.

M. René André.

Huguette Bouchardeau a été une grande ministre !

M. Pierre Ducout.

D'après un amendement de la commission, la chasse de nuit au gibier d'eau serait limitée aux vingt départements où sa pratique est traditionnelle, ancienne et importante. Elle doit se pratiquer dans des installations existant au 1er janvier 2000, avec un suivi et un contrôle strict des prélèvements, des engagements forts de mise en valeur et d'entretien des zones humides auxquelles nous sommes tous attachés, et correspondre à des pratiques respectueuses et populaires, qui ne présentent pas de risque réel de confusion des espèces.

Dans ces limites, elle peut être légalisée.

Enfin, les chasseurs pourraient devenir l'espèce la plus menacée de disparition. Même en Gironde, qui est le plus grand département de France, et qui compte le plus grand nombre de chasseurs, le nombre de ceux-ci est en forte diminution depuis vingt ans. Une telle évolution représenterait une perte importante pour le maintien d'une diversité des cultures et des modes de loisirs. La pérennité de la chasse nécessite donc, à côté d'un équ ilibre de gestion durable agricole, sylvicole et cynégétique, une information intelligente de tous nos concitoyens, pour ne pas opposer les urbains et les ruraux, et une formation des chasseurs, et en particulier des jeunes. La possibilité de chasse accompagnée dès quatorze ans va dans le bon sens.

Ainsi amendé, le texte que nous nous apprêtons à voter, et avec nous, nous l'espérons, les groupes de l'opposition, est équilibré et responsable, comme la loi chasse d'Alsace-Moselle de 1996.

M. Michel Hunault.

Attendez la discussion !

M. René André.

Pour le moment, on n'a pas amendé le texte.

M. Pierre Ducout.

Nous vous faisons confiance, madame la ministre, pour prendre en compte, avec le Gouvernement, les propositions constructives de groupe socialiste. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. René André.

M. René André.

Tout au long de votre intervention, madame la ministre, vous avez exprimé la volonté de parvenir à un texte équilibré et à des relations apaisées entre c hasseurs et non-chasseurs. Or votre propos n'a comporté, du moins à mon avis, aucune ouverture. A tel point que, pas une seule fois vous n'avez laissé entendre que vous pourriez accepter certains des amendements discutés en commission.

Tout a été dit. Je me contenterai de vous poser quelques questions. Et si vous avez réellement la volonté d'arriver à l'équilibre et à l'apaisement que vous avez évoqué dans votre propos liminaire, vous aurez tout loisir d'y répondre positivement à la fin de la discussion générale.

Etes-vous prête, madame la ministre, à accepter la légalisation de la chasse de nuit telle qu'elle est pratiquée aujourd'hui ? Je dis bien telle qu'elle est pratiquée


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aujourd'hui parce que je crains que des décrets d'application que vous prendrez ne soient susceptibles de limiter cette pratique. Nous ne vous avons pas entendue sur ce point.

Etes-vous prête, madame la ministre, à reconnaître le droit de chasser à la passée deux heures avant le lever du soleil et deux heures après le coucher du soleil ? Dans votre intervention, vous avez écarté cette possibilité. J'espère que le débat vous permettra de revenir sur cette position.

Etes-vous prête, madame la ministre, à accepter l'échelonnement des dates d'ouverture de la chasse au gibier d'eau de juillet à février ? Sur ce point non plus, vous n'avez pas répondu.

Etes-vous prête, madame la ministre, à respecter scrupuleusement, c'est un point auquel j'attache beaucoup d'importance, le droit du fermier à chasser sur la terre qu'il exploite ou, s'il ne voulait pas ou pouvait pas chasser, à être indemnisé par le propriétaire ? Etes-vous prête, madame la ministre, à renoncer à la fixation autoritaire d'un jour de non-chasse ? Vous avez été fort peu claire, dans votre intervention. Pouvez-vous indiquer clairement que le mercredi n'est pas nécessairement le seul jour possible, que d'autres jours peuvent être retenus ? Etes-vous prête, madame la ministre, à prendre l'engagement que les décrets que vous allez publier n'organiseront pas - pardonnez-moi l'expression, je n'en ai pas trouvé d'autre - le noyautage des structures de la chasse par les adversaires des chasseurs ? Les avant-projets de décret que vous nous avez communiqués ne sont pas clairs. Or nous avons tout lieu d'être inquiets compte tenu de l'état d'esprit que nous vous prêtons, peut-être à tort mais que vous ne faites rien pour démentir.

Etes-vous prête enfin, madame la ministre, à cesser, vous ou votre ministère, d'alimenter la guérilla entre Bruxelles et Paris et à mettre tout en oeuvre pour expliquer à l'Europe la position française telle qu'elle s'exprime au sein de cette assemblée et la défendre ? Si vous ne répondez pas positivement tout à l'heure à l'ensemble de ces questions, cela signifiera que vous ne respectez pas la volonté clairement exprimée par notre assemblée et surtout que vous ne dites pas la vérité quand v ous prétendez vouloir l'équilibre et l'apaisement.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Stéphane Alaize.

M. Stéphane Alaize.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi que nous examinons aujourd'hui vient de loin. Voilà bientôt une décennie que les conflits se multiplient et se durcissent, suscitant amalgames et excès. Ce texte constitue donc une réelle opportunité de solder les difficultés du passé pour écrire la page de la chasse d'aujourd'hui.

Si des adaptations globales étaient nécessaires - un toilettage législatif est le bien venu, notamment pour assurer l'équilibre entre les différents usages de la nature, pour moderniser les structures de la chasse et leur organisation - il est un rendez-vous capital qu'il ne faut pas manquer, je veux parler de la fixation des périodes de chasse aux oiseaux migrateurs, aquatiques et terrestres.

En effet, c'est là que réside, à mon avis, la discorde majeure, et c'est là que doit être recherché le point d'équilibre. Là portera donc mon propos, les autres dispositions étant consensuelles, à une ou deux exceptions près.

Les ambiguïtés et les approximations qui ont prévalu jusqu'à présent nous ont empêché de trouver une solution législative à un sujet pourtant simple à régler.

Sous couvert de droit communautaire, on a justifié des régressions abusives au droit de chasse. Surtout, les chasseurs les plus modestes ont été touchés, sans raison écologique sérieuse ni base juridique solide.

Que dit la directive communautaire 79/409 à propos de la chasse aux oiseaux migrateurs ? L'article 7, alinéa 4, stipule que « les Etats membres s'assurent que la pratique de la chasse (...) respecte les principes d'une utilisation raisonnée et d'une régulation équilibrée du point de vue écologique des espèces d'oiseaux concernées (...) Lorsqu'il s'agit d'espèces migratrices, ils veillent en particulier à ce que les espèces auxquelles s'applique la législation de la chasse ne soient pas chassées pendant leur période de reproduction et pendant leur trajet de retour vers leur lieu de nidification ».

L'article 9, alinéa 1, ajoute que « les Etats membres peuvent déroger aux articles 5, 6, 7 et 8 s'il n'existe pas d'autre solution satisfaisante, pour les motifs ci-après »...

Et le paragraphe c est très précis : « pour permettre, dans des conditions strictement contrôlées et de manière sélective, la capture, la détention ou toute autre exploitation judicieuse de certains oiseaux en petites quantités. »

Toutes ces notions sont reprises dans les annexes de la directive.

L'article 9, alinéa 2, précise que les dérogations doivent mentionner les espèces qui font l'objet des dérogations, les conditions de risque et les circonstances de temps et de lieu, l'autorité habilitée à accorder les dérogations et les contrôles qui seront opérés.

Ce principe dérogatoire, inscrit dans le texte même de la directive, trouve sa logique dans les considérants 10, 11 et 13. Il est largement utilisé par d'autres Etats membres pour la chasse à des espèces d'oiseaux sauvages refusée en France depuis bientôt une décennie, mettant ainsi un terme à des pratiques historiques qui n'avaient pourtant jamais mis à mal les espèces concernées.

Il est temps de lever durablement les ambiguïtés, les approximations de la législation française actuelle pour faire entrer la chasse aux oiseaux migrateurs, à tous les oiseaux migrateurs, dans la stabilité offerte par la législation européenne. En effet, cette stabilisation n'est contradictoire ni avec la directive, je viens de le démontrer, ni avec l'écologie.

Elle permettrait en outre de satisfaire pleinement la proposition no 50 du rapport Patriat dont vous nous avez dit tout le bien que vous en pensiez. Elle serait surtout la voie de l'apaisement que vous appelez de vos voeux.

En transposant dans notre droit interne des dispositions communautaires raisonnables, vous donnerez à notre pays quatre motifs d'être satisfait du nouveau texte de loi. Vous lui permettrez, vous vous permettrez en tant que ministre compétent pour la chasse, de négocier en position de force avec la Commission européenne. En effet, je ne vois pas comment la Commission pourrait refuser à notre pays des dérogations à la chasse à certaines espèces, je pense ici notamment aux pigeons ramiers ou aux palombes, quand elle les accorde déjà à d'autres

Etats. L'Espagne chasse le pigeon ramier jusqu'au mois d'avril par exemple, et l'espèce continue sa prolifération.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

M. Jean Auclair.

Très bien !

M. François Patriat, rapporteur de la commission de la production et des échanges.

Ce n'est pas un oiseau migrateur.

M. Stéphane Alaize.

Par voie de conséquence, je ne vois pas comment le Conseil d'Etat pourrait y trouver à redire, le droit communautaire prévalant désormais sur le droit national. Exit donc le problème des dates dans la loi.

Vous réconcilierez par là même le monde cynégétique avec l'Europe, trop souvent perçue à tort comme un espace de décisions hostile au monde rural et à ses pratiques sociales et culturelles dont la chasse occupe une place de choix.

Vous éviterez surtout une division inutile entre les chasseurs aux oiseaux migrateurs aquatiques et les chasseurs aux migrateurs terrestres.

M. Jean Auclair.

Très bien !

M. Stéphane Alaize.

En interdisant la chasse aux migrateurs terrestres pendant leur migration au bénéfice des migrateurs aquatiques, votre décret opère une sélection arbitraire maladroite, mais peut-être est-ce un peu intentionnel.

Surtout, vous permettrez aux parlementaires que nous sommes de croire encore dans le bon sens législatif.

L'objection soulevée par certains en commission, et reprise par ailleurs, n'est pas recevable. Prétendre en effet que la transposition que j'évoque est déjà faite par le biais de l'article L. 224-4 du code rural me semble abusif. Ce texte reprend bien les dispositions générales de la directive mais pour les restreindre très au-delà de ce qu'autorise la directive en excluant notamment la chasse à tir.

M. le président.

Monsieur Alaize, pouvez-vous conclure, s'il vous plaît ?

M. Jean Auclair.

Laissez-le parler, monsieur le président. Pour un socialiste, il parle bien.

M. Stéphane Alaize.

En toute objectivité, je ne vois rien qui puisse s'opposer à la pleine et entière transposition que je propose, sinon des motifs secondaires totalement étrangers à l'impérieuse nécessité d'apaisement voul ue par la plus grande majorité des députés, par vous-même, madame le ministre, et bien sûr par les chasseurs.

Un dernier mot encore, et je conclus, monsieur le président, pour vous dire, madame la ministre, combien, audelà de nos différences, je respecte les gens courageux dont vous êtes.

M. Jean Auclair.

Pas tant que ça !

M. Stéphane Alaize.

Permettez-moi donc de condamner avec la plus grande fermeté les propos trop souvent désobligeants, voire blessants, tenus par certains qui se laissent emporter par la passion aveugle de leurs convictions profondes quand il est question de la chasse. Puisse ce projet de loi permettre, ici aussi, la mesure verbale et amener chacun à plus de respect mutuel, de compréhension...

M. Jean Auclair.

Il va se déballonner !

M. Stéphane Alaize.

... et à plus de sagesse. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

M. Jean Auclair.

On sait comment il va voter !

M. le président.

La parole est à M. Patrice MartinLalande.

M. Jean Auclair.

La Sologne pénalisée, la Sologne bafouée, la Sologne martyrisée !

M. Patrice Martin-Lalande.

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, il devrait être facile de réaliser la quasiunanimité dans cette enceinte sur l'idée que la chasse doit être pratiquée de manière à assurer la pérennité des espèces.

C'est aussi la conviction profonde et l'engagement concret de toutes les personnes concernées par la chasse, avec lesquelles j'ai mené plusieurs réunions de concertation dans ma circonscription, en Sologne, y compris avec François Patriat, en octobre dernier, et je salue son travail pour la préparation de ce débat.

Les enjeux économiques - un millier d'emplois et 500 millions de francs par an en Sologne - et les forts attraits de ce sport, mode de vie qui sous-tend un vrai rapport à la nature, ne l'emportent jamais sur l'idée de bon sens, admise par tous : en matière de chasse, on ne peut consommer que les intérêts du capital naturel et il n'y a pas d'avenir pour la chasse sans la protection de ce précieux capital d'espèces et d'espaces.

Si, sur certains points, le projet propose des avancées, comme la reconnaissance de la mission d'intérêt général des fédérations, le permis accompagné, sous réserve du tir à balle, ou la réforme des ACCA, sous réserve du droit de chasser pour le fermier, votre texte, madame la ministre, est très éloigné des solutions réalistes et durables qu'il serait nécessaire de trouver pour assurer l'avenir de la chasse en France.

M. Jean Auclair.

Il a dit durable !

M. le président.

Monsieur Auclair, n'interrompez pas l'orateur.

M. René André.

Durable et citoyen !

M. Patrice Martin-Lalande.

Nous reviendrons sur chacun de ces points dans la discussion des articles. Je citerai simplement : La passée, que nous voulons autoriser deux heures après le coucher ou deux heures avant le lever du soleil ; La chasse de nuit, que nous voulons légaliser et non simplement dépénaliser à titre transitoire ; L'accueil des chasseurs étrangers, que nous voulons moins compliqué et moins coûteux afin de ne pas laisser à d'autres pays ces ressources touristiques appréciables ; L'élevage et le lâcher de gibier, qui réalisés sous contrôle sanitaire et selon des règles sportives plus exigeantes, ne devraient plus être montrés du doigt, alors que personne ne s'émeut du réempoissonnement pratiqué à juste titre par toutes les associations de pêche de France ; La tutelle de la chasse, que nous voudrions voir partagée par les ministères de l'agriculture et de l'environnement ; Le maintien de la primauté de la chasse dans les instances, qui sont financées en quasi-totalité par les chasseurs, comme c'est le cas pour l'Office national de la chasse ; La départementalisation des dégâts de gibier, comme le prévoit la proposition de loi que j'ai déposée aux côtés de mon collègue Didier Quentin ; Vous voulez imposer un jour sans chasse, uniforme pour toute la France. Cette idée renvoie, j'imagine, à l'idée d'une nature accessible à tous. Cet idéal est sympathique, mais comment, madame la ministre, la concilier


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a vec le respect du droit de propriété ? Comment, madame la ministre, pouvez-vous à la fois invoquer, à juste titre, le droit de propriété pour refuser la chasse sur certains territoires dans les ACCA et laisser entendre que les utilisateurs de la nature auraient, en tant que tels, des droits d'accès aux propriétés privées ? Quel enseignement tirez-vous de l'exemple des forêts domaniales où des progrès sont encore à réaliser ? L'interdiction de la chasse sur tout le territoire, si elle venait à être instaurée, conduirait probablement tout droit à la multiplication des enclos, c'est-à-dire finalement à la négation de ce que nous cherchons. Le principe de subsidiarité devrait être mis en oeuvre. Et le code rural actuel y suffit, nous le démontrerons dans la discussion des amendements.

Les dates d'ouveture et de fermeture de la chasse au gibier d'eau sont aujourd'hui le principal problème de la chasse en France. Lors du colloque organisé en janvier dernier, sous la présidence d'Henri Sicre, par le groupe d'études sur la chasse de l'Assemblée, le représentant de la Commission européenne a indiqué que l'interprétation restrictive de la directive de 1979 par la Cour européenne de justice et par certains tribunaux français n'était pas conforme à l'esprit de la directive quant aux dates de chasse aux oiseaux migrateurs.

M. Jean-Claude Lemoine.

C'est vrai !

M. Patrice Martin-Lalande.

En particulier pour obtenir la protection d'un certain nombre d'espèces, il n'est pas évident que cette protection passe par des exigences de calendrier.

Pour assurer la protection des oiseaux migrateurs, nous sommes nombreux à penser qu'il faut raisonner en termes de prélèvements plutôt qu'en termes de calendrier. Il faut que cette protection se fasse par une gestion des prélèvements au niveau de toute la zone concernée par les oiseaux migrateurs qui dépasse largement l'Europe. Sur toute cette zone du paléarticque occidental, il faut mettre en place un outil de gestion des oiseaux migrateurs, c'està-dire un suivi scientifique et une régulation des prélèvements, comme on le fait sur le territoire national pour certaines espèces de gibiers sédentaires. Il faut donc un j uge-arbitre qui ait une connaissance scientifique incontestable des espèces.

Je l'avais dit lors de votre audition en commission, madame la ministre, et j'ai déposé un amendement à ce propos : je pense que l'Europe pourrait mettre en place une telle structure qui permettrait d'obtenir cette connaissance objective des espèces devant laquelle tout le monde pourrait s'incliner. Mais il faudra naturellement laisser jouer la subsidiarité pour la gestion au plan national des prélèvements d'oiseaux migrateurs, appuyée sur cette connaissance scientifique.

Madame la ministre, le gouvernement français saisirat-il l'occasion de la présidence française de l'Union européenne pour mettre en place un outil européen de suivi scientifique des oiseaux migrateurs ? En attendant cette gestion par le prélèvement, il faut maintenir dans la loi l'essentiel du dispositif adopté par notre loi de 1998. Le dialogue, la négociation et le contrat resteront impossibles avec ceux qui, derrière les critiques adressées à tel ou tel aspect de la chasse, veulent en définitive la disparition de la chasse.

La préparation de ce projet aurait pu être une occasion de sortir de cette impasse, comme cela s'est passé dans d'autres pays où la chasse fait l'objet d'un accord entre chasseurs et mouvements écologistes.

Le texte proposé ne résout pas, à mon sens, les problèmes de la chasse et ne rendra pas plus facile la recherche du dialogue, malheureusement. C'est pourquoi je ne voterai pas ce projet de loi, symbole d'une occasion manquée. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Dufau.

M. Jean-Pierre Dufau.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, il serait aisé, pour introduire mon propos, de vous inviter à relire la fable de La Fontaine, Le rat des villes et le rat des champs. Qu'il me soit en effet permis d'attirer votre attention sur un des enjeux de ce projet de loi, sur lequel nous avons déjà beaucoup travaillé en commission.

Opposer chasseurs et non-chasseurs, se focaliser sur la question des dates, invoquer des contraintes juridiques, tout cela ne doit pas être l'occasion de régler des comptes. Gardons-nous d'appréhender les problèmes de la chasse seulement en juristes et mesurons nos décisions aussi en termes politiques et sociaux.

Certes, il est toujours possible de regretter que la transcription de la directive se soit faite aussi tardivement.

Sachons gré néanmoins au Gouvernement d'avoir eu le courage de s'attaquer à ce problème, avec une méthode qui privilégie le fond sur la forme, et grâce au travail fourni par M. Patriat dans son remarquable rapport.

Cette démarche doit permettre un débat sur les moyens d'une chasse moderne, responsable et apaisée.

En effet, notre réflexion s'inscrira dans une problématique forte d'aménagement du territoire ou tout au moins d'équilibre entre les territoires et leurs usagers.

Aujourd'hui, nul ne peut ignorer que 80 % de nos concitoyens vivent sur 20 % du territoire national. Cela n'est pas neutre : la France change et les représentations sociales de la nature, de la faune et de la chasse ont évolué. C'est un fait. Dans les zones péri-urbaines, des conflits d'usage apparaissent pour l'utilisation des espaces au moment même où ceux-ci tendent à se raréfier. Je suis convaincu que ce texte saura aussi répondre aux attentes des urbains dont le point de vue est pris en compte avec l'instauration d'un jour de non-chasse, notamment.

Mais si ces données doivent être intégrées, il convient de ne pas mépriser les zones rurales, où les rapports à la nature, à l'espace et au temps ne sont pas les mêmes. Il ne faudrait pas prendre prétexte de contraintes extérieures - même si elles demeurent réelles - pour creuser un fossé ou renforcer un clivage déjà trop fort entre ville et campagne.

La ruralité est en crise. Elle cherche de nouvelles logiques de développement et d'identité. Or, la chasse maintient un lien social dans le monde rural. Elle contribue à l'aménagement et à la gestion durable. Faut-il ici mentionner le rôle qu'ont joué les chasseurs mais aussi les agriculteurs à l'occasion de le tempête ? Grâce à leur présence sur le terrain, de nombreux problèmes ont pu être résolus. Je pense notamment à la remise en état des chemins forestiers. Un aménagement équilibré du territoire passe donc par la présence active, quotidienne d'hommes au coeur des espaces ruraux.

Il faut en outre reconnaître que la chasse a été victime de certains excès de la modernisation de l'agriculture.

Convenons que certaines logiques agricoles, poussées à leurs extrêmes, ont conduit à la disparition de certaines espèces, davantage que la chasse elle-même, y compris la


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chasse de nuit. La raréfaction des zones humides en est la preuve la plus manifeste. L'agriculture productiviste a d'ailleurs atteint ses limites.

Les chasseurs n'ont-ils pas été aussi victimes de la fermeture de certains espaces, voire de leur privatisation ? Là encore, il faut veiller à ne pas faire naître une fracture sociale entre chasse mondaine et chasse populaire. C'est là que réside un malentendu. Pour beaucoup de nos concitoyens, la chasse n'est pas seulement un droit, c'est un espace de liberté issu de la Révolution française que la République doit garantir.

Grâce au texte qui sera adopté, les chasseurs pourront ne pas apparaître comme de simples consommateurs mais être de véritables gestionnaires, conscients de leurs responsabilités. Des avancées significatives comme l'introduction des PMA et des plans de gestion ou la modernisation de leurs organes représentatifs vont dans ce sens.

D'autres voies pourront être approfondies, telle la formation de nouveaux chasseurs.

Mais je sais qu'au-delà de ce texte, les chasseurs euxmêmes sont déjà à l'origine d'initiatives locales en matière de sécurité, d'aménagement de réserves. Le monde de la chasse sait évoluer et faire siens les outils et les préoccupations du développement durable. Que chacun ici en soit persuadé.

Dès lors, les propositions relatives aux dates et à la légalisation maîtrisée de la chasse de nuit, ou à la chasse à la palombe, seront le résultat d'un nécessaire compromis.

Notre vote sera aussi un mandat explicite donné au Gouvernement pour qu'il négocie, le moment venu, auprès des autorités européennes, afin d'obtenir les dérogations que nous sommes en droit d'attendre. Elles ne sont pas des surenchères, elles correspondent à des réalités locales. D'autres pays de l'Union ont su et pu en bénéficier, sans doute parce qu'ils avaient transcrit la directive avant nous. Dont acte.

Pour conclure, j'invite le Gouvernement à veiller à ne pas renforcer l'incompréhension entre zones rurales et zones urbaines et donc à faire preuve d'ouverture - c'est la moindre des choses en matière de chasse ! - quand viendront en discussion les amendements responsables qui ont été déposés. Chacun, ici, connaît le paradoxe d'Alphonse Allais. Pour le paraphraser, je dirai qu'il ne faut pas céder à la tentation de mettre les fantasmes des villes à la campagne. Puisse cette loi sur la chasse rétablir entre tous les partis un peu d'urbanité. Le groupe socialiste y contribuera largement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Félix Leyzour.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Jean Auclair.

M. Jean Auclair.

Madame la ministre, diviser pour mieux régner, telle semble être aujourd'hui votre devise.

Vous allez réaliser l'exploit de légaliser la chasse au gibier d'eau tout en réduisant la période de chasse : de surcroît, vous instaurez un jour de non-chasse et vous abolissez la loi Verdeille. Vous reprenez donc d'une main ce que vous donnez de l'autre !

M. François Patriat, rapporteur.

C'est de la caricature !

M. Jean Auclair.

Vous vous félicitez de présenter cette loi relative à la chasse. Elle aurait dû être faite pour les chasseurs, or elle est faite contre eux et même plutôt pour les « antichasse ». Vous légiférez non pas en faveur d'une activité, mais contre elle.

M. Pierre Ducout, vice-président de la commission.

Vous donnez dans la finesse !

M. Jean Auclair.

Il suffit de lire votre projet de loi pour s'apercevoir qu'il a été rédigé avec la volonté de limiter peu à peu le droit de chasse. La chasse au gibier d'eau en est une illustration parfaite. Vous avez autoritairement retardé la date d'ouverture et avancé celle de la fermeture, tout comme pour la chasse au pigeon ou à la bécasse.

Après avoir écouté attentivement votre intervention, madame la ministre, je ne peux que dénoncer votre langue de bois...

M. Jean-Pierre Brard.

Vous êtes un expert en la matière !

M. Jean Auclair.

... à moins que votre discours n'ait été l'expression de votre naïveté, de votre inconscience ou même de votre perversité. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Jean-Pierre Brard.

Vous parlez comme on le fait au Vatican !

M. Jean Auclair.

Ne vous méprenez pas, les chasseurs ne sont pas des demeurés ! Ils ne demandaient rien d'autre que le statu quo , notamment sur les dates d'ouverture et de fermeture. Mais vous avez engagé, au nom d'une idéologie sectaire, un processus vicieux qui ne tend qu'à la disparition progressive de la chasse.

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Jean-Pierre Brard.

On croirait entendre Mme Boutin !

M. Jean Auclair.

Et ce ne sont pas vos références à une directive européenne, qui ne fait d'ailleurs que des recommandations, qui pourront légitimer les mesures que vous préconisez. Votre loi ne répond qu'à des préoccupations politiques, au mépris de l'intérêt de plus d'un million et demi de chasseurs. Vous cherchez seulement à faire plaisir à vos amis intégristes Verts. Après avoir écouté nos collègues communistes et socialistes, je suis obligé de constater que vous n'avez aucune considération pour vos alliés de la majorité plurielle. C'est sans doute une question d'habitude.

Nous ne manquerons pas de vérifier cette stratégie politicienne tout au long du débat, notamment lors de l'examen des amendements des groupes RPR, UDFAlliance et Démocratie libérale et Indépendants. Déposés dans l'intérêt des chasseurs et dans le respect de la tradition, allez-vous les adopter ou les rejeter ? Je note également que votre projet concerne essentiellement les départements maritimes où l'on chasse surtout le gibier d'eau, les départements de l'intérieur, eux, n'étant pris en compte que pour être pénalisés. Avec la complicité de votre majorité, vous voulez fixer la clôture de la chasse au 31 janvier alors que la directive européenne n'aborde même pas le sujet. En 1988, vos amis antichasse ont fait avancer la date de la fermeture au dernier jour de février. Aujourd'hui, elle passe à fin janvier. Et demain ? En réalité, cette date est autoritairement arrêtée par vos technocrates, qui ne sont inspirés que par la haine des chasseurs et qui vont inévitablement allumer le feu dans nos campagnes. Ils n'ont jamais vu un canard, un pigeon ou une bécasse. Ils ignorent les habitudes des migrateurs qui reviennent en fait des pays chauds gavés de nourriture, et nullement épuisés par un voyage qu'ils font par étapes. Ce sont des oiseaux sauvages et non pas des canaris et des perroquets d'agrément vivant sous les lambris dorés de la République, comme vos amis intégristes et sectaires.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

M. Henri Nayrou.

Monsieur fait dans la nuance !

M. Jean Auclair.

Savez-vous que les pigeons sont chassés jusqu'au dernier jour de février au Portugal, en Espagne, en Belgique, au Luxembourg et en Grèce, jusqu'au 15 avril en Suède, jusqu'au 30 avril en Allemagne et en Autriche, et toute l'année au Royaume-Uni ?

M. Jean-Pierre Brard.

Quelles connaissances géographiques ! (Sourires.)

M. Jean Auclair.

Au nom d'une directive européenne qui ne l'impose pas, vous voulez donc clore la chasse le 31 janvier. Mais vous restez étrangement muette sur les semences de pois traitées au furathiocarbe, qui tuent des milliers d'oiseaux, notamment les pigeons ramiers.

Nous demandons que la date de fermeture soit fixée par la loi et non déterminée par un décret ou laissée à la discrétion du préfet. Elle doit être arrêtée au dernier jour de février pour les pigeons et les bécasses, le nombre d'oiseaux prélevés étant bien sûr pris en compte.

Madame la ministre, si vous voulez montrer un signe d'apaisement, faites valoir le principe de subsidiarité, comme votre collègue ministre de l'agriculture l'a fait en décrétant l'embargo sur le boeuf britannique.

M. François Patriat, rapporteur.

Le boeuf britannique ne se chasse pas !

M. Jean Auclair.

Les oiseaux migrateurs ne peuvent être chassés que lorsqu'ils sont là. Dans le Limousin, ils ne passent qu'en février et ils ne vont certainement par changer leurs habitudes en fonction de votre loi.

Un mot sur la loi Verdeille. Je suis sans doute plus que vous, à gauche, respectueux du droit de propriété et du droit de non-chasse, mais dans un département comme le mien, la Creuse, l'abolition pure et simple de cette loi va entraîner des conflits. C'est une erreur, tant sur le plan cynégétique que sur le plan social. Vous ne respectez même pas le droit des preneurs qui entretiennent la nature. La multiplicité des propriétaires et du parcellaire sera la source de nombreux contentieux. Je vous laisse imaginer ce qui se passera lorsque des chasseurs avec des chiens courants, souvent inmaîtrisables, passeront sur des propriétés interdites. Ce n'est qu'un exemple parmi tous les sujets conflictuels possibles. Vous auriez pu proposer un remembrement cynégétique, mais il n'en est rien.

M. le président.

Monsieur Auclair, veuillez conclure.

M. Jean Auclair.

Nous assisterons impuissants à des massacres sur les terrains des propriétaires en opposition, car ils pourront chasser librement alors que les ACCA, soucieuses d'une bonne gestion, auront à faire respecter le plan de chasse. En fait, le chasseur devra être plus attentif au terrain où il mettra les pieds qu'à son chien ou au gibier.

M. Jean-Pierre Brard.

Eh oui !

M. Jean Auclair.

De plus, sur les propriétés relevant du droit de non-chasse, il faudra procéder à des battues administratives pour éliminer les animaux en trop grand nombre. C'est une aberration.

En Limousin, la chasse est un sport populaire et démocratique. Le paradoxe est là : vous, gens de gauche, qui prétendez être les champions de l'égalité, vous allez tuer la chasse populaire et en faire un loisir réservé aux riches.

D'ailleurs, vous avez commencé, puisque l'an dernier, le prix du permis a augmenté de 14,5 %, et que cette année, il augmentera de 8,5 %.

M. le président.

Monsieur Auclair, c'est votre conclusion.

M. Jean Auclair.

Votre loi va sonner le glas des ACCA, mais ce sera aussi la fin du partage de la nature, car c'est le plus souvent sur une propriété privée que l'on se trouve quand on fait du VTT, qu'on ramasse des champignons ou qu'on se promène dans la nature.

Vous mettez à mal les fédérations qui vont devenir des syndicats de porteurs de fusils. Craignant que vous les affaiblissiez considérablement, leur personnel attend d'ailleurs vos réponses.

En somme, cette loi transpire l'idéologie socialiste qui consiste à tout réglementer et à sur-administrer alors que la nature est un espace de liberté. Mesdames, messieurs de la majorité, nous vous attendons...

M. Alain Clary.

Au coin du bois !

M. Jean Auclair.

... nous sommes à l'affût !

M. Jean-Pierre Brard.

Vous prenez les électeurs pour des pigeons !

M. Jean Auclair.

Votre loi est mauvaise. Nous avons déposé de bons amendements. Naturellement, comme en commission, vous allez les rejeter.

M. François Patriat, rapporteur.

C'est faux !

M. Jean Auclair.

Allez-vous vous ressaisir ou vous mettre au down devant votre ministre anti-chasse, comme des toutous bien dressés ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. François Patriat, rapporteur.

Même vos amis ne sont pas enthousiastes !

M. Jean-Pierre Brard.

Heureusement que vous ne venez pas souvent !

M. le président.

La parole est à Mme Monique Denise.

Mme Monique Denise.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi qui nous réunit aujourd'hui va permettre à notre assemblée de se mettre d'accord, du moins je l'espère, sur un texte rassemblant, dans le plus large consensus possible, chasseurs et non-chasseurs.

Il s'agit de rassurer les uns et de permettre aux autres d'exercer de plein droit un loisir auquel ils sont attachés depuis très longtemps : tradition conviviale d'un côté, respect de la qualité de vie de l'autre.

Le rapport de François Patriat est à cet égard exemplaire : dialogue, écoute, respect des droits de chacun audelà des réactions passionnelles, de l'inquiétude et de l'exaspération de part et d'autre.

La chasse a le droit d'être relégitimée dans le cadre de ce que notre rapporteur a appelé une chasse « responsable et apaisée ».

Nous en sommes au stade concret du vote. Bien des choses ont été dites. Reprenons les principaux sujets, ceux qui fâchent et soulèvent sur certains bancs bien des remous.

En ce qui concerne les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse au gibier d'eau, Mme la ministre vient de nous assurer que les décrets d'application sont prêts et qu'ils assurent cinq mois de chasse, six par dérogation.

Dont acte.

Le jour de non-chasse symbolique est déjà effectif dans soixante-dix départements et que ce soit le mercredi ou un autre jour, il permettra peut-être d'éviter à un gentil joggeur de se retrouver en pleine battue exposé aux balles.

(Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Je l'ai vu !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

Mme Christine Boutin.

N'importe quoi !

Mme Monique Denise.

Pour la chasse à la passée, nous proposons, par voie d'amendement qu'elle puisse être pratiquée deux heures après le coucher et avant le lever du soleil.

M. René André.

Ce n'est pas dans le rapport !

Mme Monique Denise.

Si ! Quant à la chasse de nuit, elle sera légalisée dans vingt départements où la hutte est une pratique traditionnelle reconnue.

M. de Courson a parlé d'amour. Je parlerai peut-être de plaisir.

(Rires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. François Patriat, rapporteur.

Cela peut aller ensemble !

M. Jean-Pierre Brard.

Vous allez pousser M. de Courson à pécher !

M. René André.

Amour, plaisir, passion, que demander de plus !

M. le président.

Gardez votre calme, mes chers collègues. Poursuivez, madame Denise. Mais vous êtes un rien provocatrice ! (Sourires.)

Mme Monique Denise.

Ce sont des plaisirs simples, messieurs ! (Exclamations sur les mêmes bancs.)

Plaisir de voir un huttier atteler ses appelants. Moment magique où il met en batterie ses canettes les plus bavardes en fonction du vent, du plan d'eau et aussi parfois de ses prévisions quant au succès des tirs des chasseurs placés derrière les créneaux de la hutte.

M. Jean Auclair.

Il faut faire faire des stages à Mme la ministre !

Mme Monique Denise.

Et il n'y a pas que la hutte, il y a aussi la chasse en plaine, au cul levé derrière le chien que vous avez dressé pendant des mois. (« Oh ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Regardons le chien quêter en lacets, marquer un bel arrêt...

M. Jean Auclair.

Très juste !

Mme Monique Denise.

... voyons-le, quand son maître a manqué la perdrix ou le lièvre, marquer sa désapprobation, « faire la gueule ».

M. René André.

Belle évocation !

M. Charles de Courson.

Voilà une femme qui sait de quoi elle parle !

Mme Monique Denise.

Et si le gibier est touché dans un grand champ de betteraves, suivons encore le retriever qui rapportera le gibier à son maître.

Plaisirs simples que d'observer l'efficacité du chien,...

M. Jean-Pierre Brard.

C'est bucolique !

Mme Monique Denise.

... l'action du tireur qui sera brocardé pendant des mois par ses copains pour un tir malheureux.

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.

Quelle justesse !

Mme Monique Denise.

La chasse n'est pas que prélèvements, dates d'ouverture ou de fermeture, heures de nuit.

Elle est surtout ce plaisir convivial, amical, simple, ce sport traditionnel que nous nous devons de préserver de toutes nos forces. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, du groupe communiste, du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Charles de Courson.

Monique, vous avez été formidable !

M. le président.

La parole est à M. François Baroin.

M. François Baroin.

Ainsi madame Voynet, vous n'aimez pas la chasse. C'est votre droit et naturellement je le respecte. Mais vous êtes ministre de l'environnement et, à ce titre, garante des efforts poursuivis par le monde de la chasse. Votre rêve le plus cher serait qu'on en termine avec une pratique que vous ne comprenez pas. Et c'est un des grands mérites du rapport Patriat de n'être pas allé dans votre sens. Evidemment, il fallait des compromis et, comme toujours dans les compromis, il y a des concessions qui ne sont pas acceptables.

Mais arrêtons-nous sur l'essentiel, car vous semblez, vous et vos amis l'avoir oublié en chemin.

Vos amis Verts, que vous représentez au sein de ce gouvernement remanié, se drapent dans la vertu environnementale et voudraient percevoir des droits d'auteur sur tout ce qui touche de près ou de loin à l'environnement. Croyez-vous qu'il a fallu attendre la constitution d'un parti écologiste pour que les chasseurs se préoccupent de la protection de l'environnement et de la faune sauvage ? (« Non ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.) Ne craigniez-vous pas, en cédant à ceux qui veulent en finir avec une pratique ancestrale, de prendre un risque considérable de déstabilisation de ce qui est un des piliers de la République ? Car, au-delà de ce clivage qui nous sépare, madame, de cette caricature de débat que vous avez vous-même provoquée par vos propos et vos déclarations, de ce climat devenu trop passionnel pour aborder un sujet important qui réclame au contraire la concorde, c'est bien un acquis républicain - d'autres iraient probablement jusqu'à parler d'acquis social - que vous menacez.

En matière de chasse comme en d'autres, l'élaboration d'un texte de loi qui permettrait d'adapter la législation nationale tout en tenant compte des différentes parties serait un signe de maturité dans une République apaisée sans cesse en construction.

La chasse est un art venu du fond des âges. Elle s'ancre au plus profond de la collectivité nationale, de la vie de la République, elle bat au rythme du coeur de la France rurale. Alors que nous allons bientôt célébrer le centenaire de la loi de 1901, symbole de la démocratie participative, il serait paradoxal que l'on s'attaque sans discernement à une organisation populaire dynamique - plus de la moitié des chasseurs sont des ouvriers, des employés, des agriculteurs ou des membres des professions intermédiaires - qui contribue à l'abolition des barrières sociales, à un loisir qui s'autofinance et qui participe grandement à l'entretien écologique de nos campagnes.

On choisit, mes chers collègues, les études que l'on veut. Je prendrai celle de la COFREMCA car elle permet objectivement de dire la vérité. Les Français reconnaissent que la chasse a une utilité sociale incontestable. D'après eux, elle permet de réguler les espèces, de protéger les espaces ruraux, elle a un rôle économique réel et contribue à l'animation des communes rurales.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

Ainsi, si la réflexion était menée de façon sereine, nous pourrions nous fixer un triple objectif dont on s'approche parfois, n'est-ce pas monsieur Patriat, mais dont ons'éloigne malheureusement souvent, n'est-ce pas madame Voynet. Ce triple objectif pourrait être de conforter et de responsabiliser davantage les fédérations départementales des chasseurs par un meilleur schéma de gestion, de former les chasseurs et de surveiller les chasses. La confiance n'exclut pas le contrôle, encore faut-il qu'un sentiment réel, singulier et puissant existe entre la tutelle et l'organisation chargée d'effectuer cette surveillance.

Il faudrait également assurer la transparence de la décision publique en officialisant le Conseil national de la chasse, en déconcentrant des décisions, en instituant des procédures consultatives qui assureraient un réel dialogue entre l'administration et les usagers, des règles claires qui permettraient d'éliminer des contentieux en respectant le principe : « Il y a une mesure en toute chose », sans séparer les cycles de la nature de nos racines culturelles. Une charte de la chasse en France, par exemple, pourrait venir reconnaître et consacrer ce principe.

Ce sont là, me semble-t-il, des propositions raisonnables et dépourvues de toute connotation partisane.

C'est d'ailleurs dans cet esprit qu'avec bon nombre de collègues du Rassemblement pour la République nous déposerons une série d'amendements, en particulier sur l'article 10 qui demeure un sujet de controverse.

J'aurais pu, madame la ministre, vous parler longuement de l'incohérence qu'il y a à évoquer à travers ce texte l'aménagement du territoire, dont vous avez la responsabilité, alors qu'il menace profondément un de ses points d'appui essentiels.

J'aurais pu également souligner l'incohérence de la suppression de la chasse le mercredi pour que les enfants puissent voir les animaux. Or, s'il y a des animaux, et c'est un paradoxe étonnant, comme le montrent les études, c'est qu'il y a des chasseurs et ce que ce sont eux qui ont favorisé, par l'instauration de plans de chasser igoureux, l'accroissement des populations de grand gibier.

J'aurais pu vous parler de l'organisation, une fois encore, trop centralisée, bureaucratisée, fonctionnarisée, qui ne répond en aucune façon à la réalité du terrain.

J'aurais pu aussi évoquer les dates d'ouverture et de fermeture qui, si cette loi était votée, porteront un coup redoutable au monde et à l'économie de la chasse.

J'aurais pu encore vous parler de la chasse au gibier d'eau et de la volonté silencieuse de votre ministère et de vous-même d'en terminer avec une pratique de chasse, en raison d'une proposition parfaitement inapplicable.

Mais je voulais surtout vous parler de la République, de ses acquis populaires, d'une belle solidarité entre les générations, qui font des chasseurs des acteurs essentiels de la protection de l'environnement. Ces chasseurs, lorsqu'ils le sont vraiment au fond d'eux-mêmes, tolèrent ceux qui ne les comprennent pas et respectent ceux qui leur font confiance. Ceux-là auraient pu comprendre une loi d'équilibre. Ils ne sauraient accepter un texte idéologique. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Jean Espilondo.

M. Jean Espilondo.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, M. Baroin vient de nous faire une leçon de maturité républicaine (« Oui ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Mme Christine Boutin.

Vous n'avez pas l'apanage de la République !

M. Jean Espilondo.

Alors, je demande à M. Baroin s'il considère comme républicains les propos de son collègue M. Auclair, du même parti que lui. M. Auclair, qui s'exprimait peu avant lui, a tenu des propos outranciers et a donné une conclusion indigne ! (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean Auclair.

Merci !

M. le président.

Chers collègues ! Poursuivez, monsieur Espilondo.

M. Jean Auclair.

Les chasseurs jugeront!

M. Jean Espilondo.

Je suis chasseur, je jugerai autant que vous, monsieur Auclair !

M. le président.

Monsieur Espilondo, poursuivez votre intervention!

M. Jean Espilondo.

Quand vous leur direz de se taire !

M. le président.

Ils vont se taire, mais ne les provoquez pas si vous ne voulez pas qu'ils vous interrompent ! (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean Espilondo.

Je ne les provoque pas, monsieur le

président

!

M. le président.

Chers collègues, laissez parler M. Espilondo, s'il vous plaît !

M. Jean Auclair.

Il a peur des chasseurs !

M. Jean Espilondo.

J'ai peur de vous ? C'est sûr...

M. le président.

Monsieur Espilondo, poursuivez votre intervention !

M. Jean Espilondo.

Le projet de loi sur la chasse, que nous sommes amenés à discuter à partir d'aujourd'hui, est tout entier affaire d'équilibre : équilibre entre les chasseurs et les non-chasseurs, équilibre entre la libre passion de la chasse et la nécessaire préservation des espèces, équilibre entre la France et les institutions européennes.

A ucune crispation, mes chers collègues, aucune outrance, aucune invective même...

M. Jean Besson.

Et Mamère ?

M. Jean Espilondo.

... ne parviendront à me convaincre que ces équilibres ne peuvent pas être atteints à force de dialogue, de compréhension, mais aussi de détermination. Ce projet de loi en est la preuve ; le débat qui s'ouvre aujourd'hui devra en être la confirmation.

D es événements très récents nous rappellent au moment opportun que cet équilibre conditionne l'action politique.

Ce projet de loi témoigne, par sa densité, de l'effort accompli pour rechercher et parvenir aux meilleurs compromis. Je dois donc limiter ce propos liminaire et le concentrer sur l'équilibre le plus essentiel à mes yeux : celui qui met en balance la pratique de la chasse et la préservation des espèces.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

Il est, à mes yeux de chasseur et de citoyen, évident que la chasse et l'écologie, loin des caricatures grossières complaisamment véhiculées par les extrêmes, et il y en a, se conjuguent au pluriel dans un amour commun de la nature. Pour ne citer qu'un exemple, c'est ensemble que la chasse et l'écologie doivent faire face aux pollutions industrielles qui défigurent en même temps qu'elles appauvrissent l'environnement.

Aussi, mes chers collègues, le face-à-face fantasmatique doit aujourd'hui céder la place à l'interface constructive.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. Exclamations et rires sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. René André.

Il faut le faire !

M. Jean-Michel Ferrand.

Répétez-le ! Vous-même, vous êtes étonné de ce que vous venez de dire !

M. René André.

Qu'est-ce que ça veut dire ?

M. Jean Espilondo.

Ça veut dire ce que ça veut dire, mais c'est mieux que ce que dit M. Auclair !

M. le président.

Monsieur Espilondo, votre temps de parole s'écoule ! Poursuivez votre intervention, s'il vous plait !

M. Jean Auclair.

Les chasseurs ont compris !

M. le président.

Monsieur Auclair, laissez-le parler, s'il vous plait !

M. Jean Espilondo.

C'est terrible d'être interrompu sans arrêt ! Les invectives, c'est facile ! (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Ils ne veulent pas me laisser parler !

M. le président.

Mais si vous parliez, peut-être qu'on pourrait vous entendre, monsieur Espilondo...

M. Jean Espilondo.

Les chasseurs, comme les pêcheurs, sont les premiers conscients de cette vérité d'évidence : si la ressource naturelle se tarit un jour, la pratique de la chasse mourra avec elle. Cessons donc, ici ou là, de dépeindre les chasseurs sous les traits d'une bande d'irresponsables, assoiffés de sang. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Cette caricature n'engage que ceux qui sont disposés à le croire.

M. Jean Auclair.

Une caricature, comme celle que présente M. Mamère ?

M. Jean Espilondo.

Vous savez, monsieur Auclair, que cette caricature devient réalité quand on vous écoute ?

M. Jean Auclair.

Vous allez voir ce que feront de vous les chasseurs !

M. Jean Espilondo.

Cessons également, au nom d'un certain snobisme urbain, de considérer la chasse comme une survivance barbare, héritée des âges obscurs. La chasse dans mon département des Pyrénées-Atlantiques, dans mon pays basque natal, et M. Inchauspé ne me démentira pas, est une culture. La chasse, mes chers collègues, va bien au-delà des chasseurs. Elle transmet des valeurs, elle entretient des liens sociaux, elle fait vivre des activités économiques.

Je voudrais ici, brièvement, mettre un peu de chair et de couleur dans mes propos.

M. le président.

Il faut conclure !

M. Jean Espilondo.

Je voudrais - mais le puis-je vraiment ? - vous faire toucher du doigt un instant la réalité de la chasse à la palombe en pays basque.

(« Ah ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Cette chasse est une véritable fête populaire. Elle repose sur un mythe ancestral, gravé dans l'âme de chaque pratiquant : le jour du grand passage. Et heureusement qu'ils ne sont pas comme vous, monsieur Auclair ! On ne vous voudrait pas là-bas !

M. René André.

Mais c'est inadmissible !

M. le président.

Monsieur Espilondo, il faut conclure, s'il vous plaît.

M. Jean Espilondo.

Priver les amateurs de chasser ce jour-là, ce ne serait pas tuer une pratique, ce serait tuer un rêve. Et vous le tueriez, si vous étiez là-bas ! (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean Ueberschlag.

Espilondo, facho ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean Espilondo.

C'est intelligent !

M. le président.

Pas d'invectives, s'il vous plaît !

M. Jean Espilondo.

Je n'ai invectivé personne, moi ! Je vous le dis solennellement, mes chers collègues, je ne serai pas de ceux qui tueront ce rêve ! La chasse à la palombe est une rencontre unique et belle entre les hommes et la nature. C'est un plaisir partagé entre voisins, parents et amis, depuis des générations.

Je refuse qu'elle disparaisse (« Ah ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) et avec elle ces solidarités simples et fortes qui irriguent le tissu social de mon département. C'est pourquoi, tout en reconnaissant l'importance du jour de non-chasse, j'ai voulu l'y soustraire en amendant ce projet de loi, avec quelques amis, d'ailleurs du Sud-Ouest. Car s'il lui était appliqué, cette chasse, limitée dans le temps et concentrée sur deux ou trois jours, serait gravement amputée ou réduite à néant.

M. le président.

Vous concluez, monsieur Espilondo ?

M. Jean Espilondo.

Je vous demande, madame la ministre, que ma voix, et, à travers elle, celle de milliers de passionnés, soit entendue dans cette enceinte.

Ce n'est pas en abolissant de telles cultures locales que la nation avancera sur la voie du progrès. A l'heure de l'intégration européenne, de la mondialisation des échanges et de l'internationalisation des économies, ce sont ces cultures qui garderont à la France sa consistance et singularité.

M. Jean-Michel Ferrand.

C'est du baratin !

M. Jean Auclair.

On verra, au moment du vote !

M. Jean Espilondo.

Pourquoi le gouvernement français se réclamerait-il devant les instances européennes...

M. le président.

Monsieur Espilondo, concluez, je vous prie !

M. Jean Espilondo.

... de la fameuse exception culturelle, afin de défendre son cinéma et sa télévision et abandonnerait-il la richesse de ses terroirs ? La réalité est-elle


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

moins noble que la fiction ? Je ne le crois pas. C'est pourquoi, avec nombre de mes collègues, j'ai milité et je militerai encore...

M. Jean Auclair.

Tout à l'heure, vous vous coucherez !

M. Jean-Michel Ferrand.

Espilondo se couchera !

M. Jean Espilondo.

... pour que soient reconnues...

M. le président.

Monsieur Espilondo, voulez-vous conclure ?

M. Jean Espilondo.

... dans cette loi, par nature universelle, les cultures locales, enracinées dans les territoires et les êtres...

Ce n'est pas gentil de couper le micro, monsieur le président...

M. le président.

Monsieur Espilondo, vous avez doublé votre temps de parole. Je vous prie de conclure, sinon je serai amené à vous interrompre.

M. Jean Espilondo.

Mais combien de temps certains ne m'ont-ils pas interrompu ? C'est en consacrant les différences que cette loi conservera son unité.

Je voudrais, mes chers collègues, conclure cette intervention par des mots simples et sincères.

(Exclamationss ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Il n'y aurait rien de pire pour ce débat que la montée aux extrêmes. Le souci d'équilibre ne doit pas conduire cette assemblée à un exercice d'équilibrisme. Car plus dure serait la chute. Arbitrer entre les surenchères respectives, c'est s'interdire de rechercher et d'atteindre l'intérêt général.

M. Jean Auclair.

Couché !

M. Jean Espilondo.

Je souhaite profondément, au contraire, que cette loi soit pour nous l'occasion de jeter les bases d'une chasse libre et responsable.

M. Jean-Louis Debré.

Langue de bois !

M. Jean Espilondo.

Je le prêche ici avec raison, et avec d'autant plus de conviction que je pratique la chasse avec passion.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe communiste.)

M. Thierry Mariani.

Il votera contre sa conviction !

M. le président.

Monsieur Espilondo, vous avez doublé votre temps de parole. Je ne pense pas que ce soit de nature à calmer les débats.

(Protestations sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Mes chers collègues, ce débat n'est pas facile, et si chacun n'y met pas du sien, il risque de se poursuivre dans de mauvaises conditions. Je tiens à vous avertir que je ferai respecter le règlement, de la même façon pour tout le monde.

La parole est à M. Yvon Montané, pour cinq minutes et pas plus.

M. Yvon Montané.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je ne suis pas chasseur, ne vous en déplaise, je représente pourtant un département rural « immergé » dans des activités de loisirs grégaires : la chasse, la pêche, la passéjade, les quilles, etc., un département où les chasseurs, ou du moins beaucoup d'entre eux, sont atteints d'une maladie incurable que l'on appelle d'un joli nom : « le mal bleu ». Non seulement je les comprends, mais je soutiens ce loisir populaire, car, même pour un non-chasseur, une journée en famille ou seul, en palombière, constitue une tranche de vie merveilleusement inoubliable.

M. Jean-Louis Bernard.

C'est beau !

M. Yvon Montané.

Sans aller chercher les récits de Joseph de Pesquidoux, que je vous recommande, c'est une façon de vivre dans la nature, de la protéger, de l'aménager, ce que certains orateurs précédents ont appelé avec juste raison : une vraie culture.

Je voudrais saluer la méthode et le travail du Gouvernement en général (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) et de François Patriat en particulier, sur ce sujet sensible et polémique qu'est la chasse dans notre pays.

François Patriat a pris le temps de venir découvrir ce mode d'être et de vivre, et de venir dialoguer avec les responsables des fédérations de chasse.

M. Jean-Louis Debré.

Il est à l'affût !

M. Yvon Montané.

Le Gouvernement a eu le courage d'ouvrir le débat, de ne pas caricaturer ce dossier, comme l'ont fait certains pro ou anti-chasse, et de s'attaquer à la problématique de la chasse dans sa globalité et sa diversité.

Que les choses soient claires : dans ce débat, il n'est pas question d'interdire la chasse, il n'est pas question de la remettre en cause, car elle fait partie de notre histoire et de notre patrimoine culturel.

Une chasse moderne, apaisée et respectueuse de tous les usagers de la nature mais aussi et surtout une chasse de plein droit, en accord avec la réglementation européenne, tels sont les objectifs de ce projet de loi.

Je crois que les amoureux et les défenseurs de la chasse sauront se retrouver dans la méthode et dans le texte présentés. J'en veux pour preuve le travail de fond réalisé au sein du groupe « chasse » et en commission, où nombre d'amendements ont été adoptés pour adapter ce texte, l'améliorer et le renforcer.

Mais pas d'angélisme : il reste des points à éclaircir à l'occasion de ce débat (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République), des améliorations à apporter. J'ose croire que ce sera l'occasion d'une discussion sincère et constructive...

M. Jean Auclair.

On compte sur vous !

M. Yvon Montané.

... et non, mes chers collègues, d'une foire à la surenchère ou d'une empoignade gauchedroite où le seul perdant serait la chasse.

J'use de l'opportunité qui m'est donnée ce soir pour souligner quelques points qui sont à mon avis primordiaux.

Tout d'abord, j'aborderai le problème des dates d'ouverture et de fermeture de la chasse (Exclamations sur plu-s ieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République), ou plutôt des chasses, car nous ne pouvons traiter cette question sans reconnaître qu'il existe en France plusieurs types de chasse, très différentes, tant dans leur tradition que dans la manière de pratiquer.

Un compromis semble possible avec les dérogations permettant une ouverture de la mi-août à la mi-février.

Sans changer la durée totale d'ouverture de la chasse


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- qui est de six mois -, il conviendrait peut-être d'apprécier ces différents types de chasse et de laisser la possibilité aux préfets, après consultation des acteurs de la chasse, d'avancer ici ou de reculer là d'une dizaine de jours les dates d'ouverture et de fermeture afin de respecter les différentes traditions cynégétiques.

Je prendrai pour exemple la chasse à la palombe, largement pratiquée dans mon département et dans tout le Sud-Ouest, et la chasse au gibier d'eau plus fréquente dans les départements côtiers. Cette dernière se pratique en général fin juillet ou début août ; il serait plus intéressant d'en avancer l'ouverture. A contrario , la chasse à la palombe se déroule habituellement jusqu'à fin février. Par conséquent, un recul de la date de fermeture serait plus approprié ; mais il faudrait distinguer les passages aller des passages retour qui ne sont pas les mêmes dans le Sud-Ouest et dans le Sud-Est.

Il est indispensable, pour conserver un équilibre et apprécier la chasse dans sa diversité, de prendre en compte les coutumes locales elles-mêmes issues d'un compromis et respectueuses souvent, pour ne pas dire toujours, de la nature et des espèces.

M. René André.

C'est vrai !

M. Yvon Montané.

Il en va de même pour le jour de non-chasse. Je ne suis pas contre ce principe, au contraire. Mais là encore, il me semble nécessaire qu'il soit appliqué par département. Ce serait au préfet de fixer, après consultation des conseils départementaux de la chasse, ce jour de non-chasse. Peut-être certains ne le savent pas, ou peut-être ne le disons-nous pas assez, mais dans certains départements les fédérations de chasse appliquent déjà des jours de non-chasse,...

Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République.

Eh oui !

M. Yvon Montané.

... parfois même plusieurs par semaine...

M. Michel Inchauspé.

Trois, dans mon département !

M. Yvon Montané.

... comme c'est le cas durant le premier mois d'ouverture dans mon département.

M. le président.

Monsieur Montané, il vous faut conclure, s'il vous plaît.

M. Yvon Montané.

Fixer le mercredi jour de nonchasse indifféremment pour tous les départements est incompatible avec la pratique spécifique de certaines chasses, comme celle de la palombe que j'ai déjà citée.

M. Jean Auclair.

Très bien !

M. Yvon Montané.

L'application de ce principe doit s'inspirer des réalités.

Enfin, y a lieu de se réjouir que le texte précise et conforte les missions des fédérations de chasse, qu'il réaffirme que le pouvoir cynégétique appartient à ces fédérations et que l'argent de la chasse appartient aux chasseurs.

Les fédérations sont des gestionnaires et des partenaires de terrain précieux et compétents dont nous ne pouvons pas nous passer.

La redéfinition des missions et la transparence que le texte permet ne peuvent que contribuer à la promotion d'une chasse moderne.

Le texte présent, s'il est amendé, constituera une vraie loi pour une chasse moderne, équilibrée et durable.

M. René André.

Et citoyenne !

M. Yvon Montané.

Toutefois, je précise que...

M. le président.

C'est votre conclusion, monsieur Montané...

M. Yvon Montané.

... nous serons attentifs à ses décrets d'application, pour qu'ils prennent en compte les spécificités et la diversité de la chasse en France, et pour éviter que ce qui est permis outre-Pyrénées soit interdit de ce côté-ci. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à Mme Geneviève Perrin-Gaillard, dernier orateur inscrit.

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, avant de vous dire les quelques espoirs que je fonde dans ce texte, d'en souligner les aspects absents, trop timidement traités ou qui n'ont pas été évoqués, je rappellerai que je n'ai pas voté la loi sur les oiseaux migrateurs. J'ai donc, en ce domaine, des convictions propres qui n'ont pas changé et je défie quiconque de les ébranler.

Je voudrais préciser, monsieur Auclair, que je suis une urbaine d'un département rural,...

M. Jean Auclair.

C'est bien !

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

... que je connais la nature et la respecte. Je sais ce qu'est une bécasse, une perdrix rouge, un canard colvert.

M. Jean Auclair.

Vous n'êtes pas la seule !

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

Vous n'êtes donc pas le seul à pouvoir vous prévaloir de ce que vous êtes.

M. René Mangin.

Très bien !

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

Si le texte dont il est question de se doter aujourd'hui ne s'éloigne pas, dans la discussion, de l'esprit et des grands axes du rapport de mon éminent collègue Patriat, nous aurons alors préservé l'essentiel de son équilibre, le but étant de parvenir à une gestion rigoureuse des espaces et des espèces gibiers, et non de se laisser aller à des propositions excessives, mères de tous les conflits, comme j'en ai entendu tout au long de la soirée.

M. René Mangin.

Très juste !

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

Je fais partie des gens qui considèrent que la chasse, en tant que pratique exercée par une minorité, doit jouir d'une relative liberté et d'une reconnaissance culturelle. Mais, à ce titre, elle doit impérativement chercher à s'intégrer dans un contexte qui est déjà, mais pas seulement, celui du respect du droit communautaire.

Ce contexte est aussi celui d'une nature constituant le patrimoine commun de la nation, du respect incontournable du droit de propriété et de la liberté d'association, donc d'un droit de non-chasse, de la reconnaissance d'un droit de l'homme à l'environnement, donc de l'accès à la nature de l'ensemble de ses usagers.

Si nous préservons ses orientations et si nous les complétons sans nous écarter du rapport Patriat, ce texte peut consacrer la chasse-gestion, tant des espaces que des effectifs. Au-delà, si les chasseurs réclament une légitimité sociale, il faut qu'ils endossent tous le rôle de vrais gestionnaires, autant pour eux-mêmes que pour la société dans son ensemble.

J'aborderai aujourd'hui quelques points qui me paraissent importants.

D'abord, concernant les plans de chasse et plans de gestion, la gestion des effectifs cynégétiques doit se définir par une approche dynamique, qui ne se borne pas à fixer


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un niveau de prélèvement en fonction du renouvellement souhaité aux vues d'une équation mettant seulement en rapport le taux de reproduction, le taux de prélèvement et les dégâts de gibier supportables. En effet, il me semble qu'une autre variable doit être intégrée, celle des interactions spécifiques, notamment celles liant les espèces gibiers aux habitats naturels hébergeant aussi des espèces non chassables qui font tout autant partie du patrimoine

« faunique » commun de la nation. En conséquence, le t aux de prélèvement du plan de chasse ne peut méconnaître, par exemple, un prélèvement concurrentiel des prédateurs naturels et ne peut résulter du seul seuil financier de supportabilité de la pression exercée par le gibier sur l'agro-sylvosystème.

La valeur intrinsèque de la faune sauvage ne devant pas s'apprécier à l'aune de sa valeur cynégétique, on doit veiller à ce que la gestion des ressources ne se fasse pas même involontairement - au détriment des espèces non chassables. J'aurais, à cet égard, souhaité qu'on envisage les possibilités de dépoussiérer le concept si peu scientifique de « nuisible et malfaisant », sans remettre en cause les destructions qu'il permet mais en les fondant sur une approche quantitative. D'ailleurs, la qualification introduite par voie réglementaire, qui a préféré la locution :

« susceptible d'être classé nuisible », a déjà une approche quantitative qui est le principe même de toute gestion écologique de la faune sauvage. Ce texte était susceptible de nous en donner l'occasion. Malheureusement, certains semblaient susceptibles tout court, et ma proposition d'amendement n'a pas été retenue. C'est regrettable car là réside aussi une vraie question qui aurait mérité d'être posée et résolue.

M. Thierry Mariani.

Redéposez-le !

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

Revenant au problème des dégâts de gibier,...

M. le président.

Il faut conclure madame !

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

Je n'ai pas tout à fait terminé. (Rires sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. Robert Lamy.

Ce n'est pas grave !

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

Il faudra peut-être se demander un jour si faire reposer, directement ou indirectement, l'indemnisation des dégâts de gibier sur les seuls chasseurs ne constitue pas une erreur et un manque de cohérence.

Concernant la gestion des espaces, nous pouvons nous féliciter de la reconnaissance du droit de non-chasse introduite par le projet. Mais il pourrait s'avérer indispensable de pousser la réflexion sur le droit de suite avec la perspective d'éviter tout conflit d'interprétation ou d'application. Il nous faut ainsi considérer les difficultés de qualification d'un acte qui pourrait n'être que le simple exercice d'un droit de suite mais qui aurait toute l'apparence d'une action de chasse sur une terre où l'on entend précisément interdire toute action de chasse.

M. Robert Lamy.

Qu'est-ce que c'est que ce charabia ?

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

Dans le cadre de la mise en oeuvre de ce droit de non-chasse, je suis favorable à une souplesse d'application qui donnerait la possibilité au propriétaire d'autoriser, sur une période limitée et déterminée, des prélèvements préventifs ou correctifs répondant à la prolifération d'espèces, par chasse ou piégeage.

M. le président.

Je vous en prie, madame PerrinGaillard !

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

Je termine, monsieur le président.

Je vous remercie, madame la ministre, ainsi que M. le rapporteur, pour le temps que vous avez consacré à la gestion de ce dossier et pour les propositions que vous avez faites.

M. René André.

Elle est payée pour cela !

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

J'espère que tous ensemble, nous trouverons un point d'équilibre pour ce texte, en nous montrant, les uns et les autres, suffisamment sages, le domaine naturel de ce sujet étant la passion, pour chasser ce naturel sans qu'il revienne au galop.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Il en va, me semble-t-il, de notre capacité à léguer aux générations futures un patrimoine faunique riche et varié.

(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Personne ici, ni le Gouvernement ni aucun parlementaire, n'a pris position en faveur de l'interdiction de la chasse.

M. Robert Lamy.

Il ne manquerait plus que cela ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Il ne s'agit pas d'instruire de mauvais procès, de créer des débats artificiels, lourds de sousentendus et de fantasmes, pour reprendre le mot de Jean Espilondo, entre les défenseurs de la chasse et ceux qui voudraient la limiter. Parlons de ce qui est réellement en jeu, mesdames, messieurs : les conditions d'une coexistence harmonieuse entre les usagers de la nature, la définition des droits et devoirs de chasseurs responsables contribuant à la gestion des espaces et des espèces, et la mise en conformité du droit national avec le droit communautaire.

M. Robert Lamy.

C'est du pipeau ça ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Tous les orateurs ont évoqué la nécessité de sortir des conflits, de permettre la réconciliation entre les chasseurs et ceux qui ne chassent pas autour d'un texte équilibré permettant une chasse moderne, responsable et apaisée, comme l'ont exprimé la majorité d'entre vous. (« Citoyenne ! » sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

MM. Dolez, Bonrepaux, Dufau et d'autres ont insisté sur ce point.

Si tous ont insisté sur la nécessité de sortir des conflits, tous n'ont pourtant pas dit la même chose. Les orateurs de la majorité ont évoqué, dans le prolongement du rapport Patriat et du projet du Gouvernement, les améliorations qu'il faut apporter à notre législation pour créer les conditions de cette réconciliation. M. Bataille a indiqué avec élégance (« Oh ! » sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) comment le droit de chasse devait trouver son contrepoint dans le respect des consciences. Il a indiqué comment, à ses yeux, l'article 10 du projet de loi apportait une solution au conflit ancien sur les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

M. Jean Auclair.

L'article 10 est catastrophique ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

François Patriat a réaffirmé les voies permettant de donner une issue positive aux problèmes auxquels nous sommes confrontés.

Bref, même s'ils jugent nécessaire de l'amender sur tel ou tel point, les parlementaires de la majorité appuient le Gouvernement dans sa volonté de modernisation du droit de la chasse. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Robert Lamy.

Pas tous !

M. Jean Auclair.

Allô Maxime ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

J'ai entendu de nombreux parlementaires de l'opposition dire que le dialogue est nécessaire, qu'il faut travailler à la réconciliation, qu'il est hors de question d'en rester au statu quo, qu'il faut se doter d'un esprit de respect mutuel, mais que, pour cela, il ne faut surtout rien changer. Ce n'est pas sérieux !

M. René André.

Caricature ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Présenter la loi de 1998 comme la solution à tous les problèmes n'est pas défendable. A ce propos, plusieurs d'entre vous se sont appuyés sur la décision du Conseil d'Etat du 3 décembre 1999 pour décider que la ministre de l'environnement aurait dû fixer des dates de fermeture de la chasse plus précoces que celles qui figurent dans la loi du 3 juillet 1998. Le Conseil d'Etat n'a pas invoqué l'absence de tel ou tel décret d'application. Il a considéré qu'en l'état des connaissances scientifiques, les dispositions introduites au second alinéa de l'article L. 224-2 du code rural par la loi du 3 juillet 1998 sont, dans leur quasi-totalité, incompatibles avec les objectifs de préservation des espèces de l'article 7, paragraphe 4, de la directive 79/409 du 2 avril 1979 telle que celle-ci a été interprétée par l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 19 janvier 1994.

M. René André.

Où est la souveraineté nationale ? Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Je vous invite à vous reporter aux pages 301 à 306 du rapport de la commission de la production et des échanges qui détaillent cette interprétation.

Voilà pourquoi ceux qui proposent de reconduire aujourd'hui le même dispositif, d'inscrire dans la loi des dates échelonnées, comme en 1994 et en 1998, nous conduisent dans une impasse.

M. Charles de Courson.

Mais non ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Monsieur de Courson, ce n'est pas la méthode retenue par le Gouvernement qui préfère explorer une voie, dont je veux bien reconnaître qu'elle est étroite, entre le déni des problèmes et la fuite en avant.

D'ailleurs, je le répète, conformément à ce que suggérait le rapport de François Patriat, nous avons souhaité rappeler dans la loi les principes de la directive - laquelle, en effet, ne fixe pas de dates - et préciser ces dates par décret. Quant à ceux qui, par ailleurs, invitent le Gouvernement à réviser la directive communautaire, ils auraient été bien inspirés de le faire lorsqu'ils étaient au gouvernement. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) C'est parce qu'il n'y parvenait pas que le gouvernement de l'époque a fait adopter la loi du 15 juillet 1994 qui n'a rien réglé, pas plus que celle de 1998.

M. Jean-Louis Bernard.

Oh ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Pour réviser une directive, il faut être quinze. Or, vous le savez, quatorze pays européens ont déjà transposé la directive en prévoyant d'éventuelles dérogations pour telle ou telle espèce. Je n'exclus pas du tout, monsieur Alaize, de demander des dérogations pour des espèces en bon état de conservation mais une pacification des relations entre chasseurs et non-chasseurs est un préalable nécessaire. En effet, les dérogations accordées par la Commission sont, en général, demandées avec l'accord explicite, ou au moins tacite, et des chasseurs et des protecteurs de l'environnement.

M. René André.

Vous voulez prendre les chasseurs en otage ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Le Parlement européen, quant à lui, vous le savez, est devenu un partenaire incontournable depuis l'extension au champ de l'environnement de la procédure de codécision. Il a durci sa position, confirmant son choix d'une date unique de fermeture au 31 janvier. Ce n'est pas, si je vous ai bien compris, ce que souhaite la majorité d'entre vous.

Concernant la chasse de nuit, je ne répéterai pas la réponse que j'avais déjà faite, il y a un mois, à M. de Courson à propos de son interprétation lapidaire sur son autorisation dans six pays européens. Je voudrais, en revanche, dire quelques mots du débat sur l'alternative dépénalisation/légalisation.

Je vous invite à vous reporter à l'ouvrage du légiste M. Rémy qui montre très bien dans quels autres cas le législateur a été amené à retenir des formules de ce type.

J'ai sollicité l'avis du Conseil d'Etat et celui du secrétariat général du Gouvernement qui m'ont paru judicieux.

Tous deux soulignent un risque aggravé de contentieux communautaire si la formule de la légalisation pure et simple de la chasse de nuit était retenue, ainsi que l'accentuation des antagonismes entre chasseurs et nonchasseurs.

Pour ma part, je ne cherche pas à polémiquer sur des mots, mais à régler les problèmes. Nous partons d'une situation dans laquelle la chasse de nuit est interdite depuis plusieurs siècles.

M. Charles de Courson.

Mais non ! Arrêtez de dire cela.

Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Si je propose une démarche pragmatique permettant à chacun d'évaluer les conséquences de cette mesure pendant une période transitoire de cinq ans, c'est avec le souci de convaincre, pas seulement les protecteurs de l'environnement - je crois que ce serait difficile - mais avant tout la Commission. La dépénalisation pour une période de cinq ans, assortie d'un bilan, ne peut être interprétée comme une disposition restrictive.

Concernant le jour sans chasse, j'ai entendu le plaidoyer des uns et des autres en faveur d'une certaine souplesse. Je voudrais redire à René André que l'article 10 prévoit déjà que ce jour est le mercredi ou à défaut un autre jour de la semaine (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) fixé au regard des circonstances locales par l'autorité administrative.

Cela m'étonne de voir que certains d'entre vous le découvrent, parce que cela figure dans le texte de loi initial. Vraiment, c'est satisfaisant de constater que tout le monde ne l'a pas fait ! Quand vous l'aurez vous le trouverez peut-être plus intéressant ! (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur divers bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

S'il vous plaît, chers collègues !

M. Jean-Claude Lenoir.

C'est une provocation inutile !

M. le président.

Monsieur Lenoir, s'il vous plaît ! Madame la ministre, poursuivez.

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

En tout cas, je réaffirme ici qu'une telle souplesse est prévue. Pour ce qui me concerne, je considère que la proposition d'amendement de M. Dessalangre, qui vise à fixer d'un jour à six heures du matin au lendemain même heure le jour de non-chasse me paraît adéquate.

Deux mots encore concernant les problèmes de clarification financière de l'ONC. M. Le Nay a insisté sur la nécessité de bien distinguer les fonds publics qui, seuls, devraient financer des établissements publics, et les fonds privés qui devraient financer le fonctionnement des associations. C'est aussi ma façon de voir. Je renvoie M. Le Nay au rapport Cailleteau qui clarifiait bien ce qui relevait des fonds publics, la redevance cynégétique, des fonds privés, les cotisations aux fédérations. Je crois donc que les choses sont claires.

M. Lemoine et M. Baroin, citant le travail de COFREMCA-Sociovision, en ont évoqué les aspects positifs pour le monde de la chasse. En revanche, ils ont été extrêmement discrets sur la première partie de ce rapport qui montre que bon nombre des chasseurs se posent des questions sur l'organisation de la chasse, notamment sur les circuits financiers au sein du monde de la chasse.

Vous conviendrez avec moi que cette analyse méritait d'être citée complètement.

Concernant « la nomination des présidents de fédération par le Gouvernement », pour citer la phrase de l'un d'entre vous, je vous rappelle que la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement ne faisait que valider, jusqu'à une date récente, la proposition des fédérations. Cette disposition n'existe plus. Ce sont les préfets qui, à la suite de certaines mesures de déconcentration, auront à valider une décision qui permet de s'assurer de la régularité des procédures de l'élection et de la rigueur de candidats qui avaient à gérer de l'argent public. J'indique d'ailleurs que je n'ai eu à poser la question de la validation des candidats proposés par les fédérations que dans deux cas : dans l'un, le président pressenti par la fédération refusait d'organiser le permis de chasser ; dans l'autre, le candidat avait été condamné par la justice pour un fait de droit commun.

Je conclurai sur les propositions de Patrice MartinLalande à propos de l'outil scientifique européen de suivi des migrateurs et du permis provisoire pour les étrangers.

Ces propositions me paraissent tout à fait intéressantes, j'en conviens bien volontiers, même si M. Martin-Lalande a d'ores et déjà annoncé son intention de voter contre le projet de loi du Gouvernement.

(Exclamations sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

J'en ai terminé, monsieur le président. J'aurai l'occasion, bien évidemment, lors de l'examen des articles et des amendements, de revenir plus en détail sur tel ou tel des aspects évoqués par les parlementaires.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur de la commission de la production et des échanges.

M. François Patriat, rapporteur de la commission de la production et des échanges.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens, avant que nous n'abordions la discussion des articles, à revenir très brièvement sur certains propos qui m'ont un peu choqué, soit par leur tonalité soit par la finalité de leur objet.

D'abord, on a tenté de faire une différence entre le rapport Patriat, salué par certains sur ces bancs avec amitié, par d'autres avec un peu d'ironie, et le projet de loi.

Or les pages 10 à 16 du rapport de la commission, déposé ce matin, présentent un comparatif entre les propositions du rapport de mission et les suites données par le texte du projet de loi et les amendements adoptés par la majorité.

M. Maxime Gremetz.

La ministre ne les prend pas en compte.

M. François Patriat, rapporteur.

Chacun pourra constater que les points de convergence sont nombreux et que le texte amendé est beaucoup plus proche de nos propositions que vous ne l'auriez imaginé.

Ensuite, je dois souligner que nous n'allons pas inverser la charge de la preuve. Certes, je conçois fort bien que certains montent à la tribune et, comme M. Ferrand dans ses exclamations, s'évertuent à demander que l'on ne change rien ! Néanmoins si vous choisissiez de faire en sorte qu'un texte de loi sur la chasse, rendu nécessaire par des problèmes juridiques incontournables, ne change rien, mes chers collègues, vous ne défendriez pas la chasse, mais vous la conduiriez dans le mur.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Jean-Michel Ferrand.

Ce n'est pas vrai !

M. François Patriat, rapporteur.

Si les choses demeuraient en l'état actuel, la chasse en France serait vite condamnée, d'abord par une majorité de Français puis par la justice européenne et par la justice française.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean-Michel Ferrand.

Ce n'est pas vrai !

M. Jean-Claude Lemoine.

C'est faux !

M. Jean Auclair.

Vous cherchez à vous convaincre vous-même ! Personne ne vous croit !

M. François Patriat, rapporteur.

En vous conduisant en ultra-conservateurs vous n'êtes donc pas les défenseurs de la chasse. Vous en êtes les fossoyeurs ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Un peu de calme, mes chers collègues.

M. François Patriat, rapporteur.

Je ne voudrais pas non plus que vous vous appropriez le bénéfice d'amendements issus des propositions de mon rapport de mission et


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

déposés par le groupe majoritaire mais que vous avez recopiés ensuite afin de pouvoir prétendre que les dispositions correspondantes auront été adoptées grâce à vous.

(Vives protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Si vous ne votiez pas le texte tout en vous glorifiant de l'avoir amélioré par des amendements, les seuls qui auront défendu une chasse responsable et apaisée, les seuls qui auront fait que, demain, on pourra partager les espèces et les espaces, seront ceux qui auront déposé des amendements et adopté le texte permettant ainsi que les problèmes soient réglés.

M. Jean-Michel Ferrand.

Vous n'aurez rien réglé du tout !

M. François Patriat, rapporteur.

Monsieur de Courson, je me suis amusé aussi à vos rappels de l'héritage révolutionnaire. Comme si la Révolution était passée par vos bancs ! (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Mes chers collègues, je vous demande de vous calmer et d'écouter le rapporteur. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement de la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. René André.

Il n'a pas le monopole de la Révolution !

M. le président.

Calmez-vous !

M. François Patriat, rapporteur.

Je préfère encore l'attitude de M. Martin-Lalande : il dépose des amendements, demande des réponses à cinq questions, obtient trois réponses positives, et, malgré tout, annonce qu'il ne votera pas le texte !

M. Jean-Michel Ferrand.

Il a raison !

M. François Patriat, rapporteur.

Telle est la logique que vous défendez aujourd'hui ! (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Je vous rappelle aussi, monsieur de Courson, que la nuit du 4 août n'a pas donné le droit de chasse à tout le monde mais qu'elle ne l'a accordé qu'aux propriétaires.

La chasse populaire ne date pas de la Nuit du 4 août.

(« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Enfin, à ceux qui, comme M. Baroin, souligne que l'attitude de Mme la ministre est idéologique, je rappelle le contenu d'une dépêche de l'AFP qui est tombée aujourd'hui et dans laquelle les écologistes dénoncent le projet de décret de Mme Voynet qui viserait à instaurer une chasse six mois par an, 10 août 10 février, laquelle se verrait ainsi généralisée. Les écologistes eux-mêmes dénoncent donc l'attitude de leur ministre. (Exclamationss ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean Auclair.

C'est du théâtre !

M. Jean-Michel Ferrand.

Ce n'est pas sérieux !

M. François Patriat, rapporteur.

Cela démontre qu'elle n'est ni idéologue, ni caricaturale, mais qu'elle accepte de faire des concessions afin que l'on aboutisse ensemble.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Félix Leyzour.

Très bien !

M. le président.

Chers collègues, je conçois tout à fait que le débat soit passionné, que chacun y mette toutes ses convictions. Il serait néanmoins tout aussi intéressant si chacun y mettait du sien pour qu'il se déroule dans le calme.

Je vous demande donc de faire l'effort de vous respecter mutuellement. Vous pouvez tenir tous les propos que vous voulez, mais si vous vous écoutez dans le calme, nous pourrons avancer un peu plus rapidement.

M. Maxime Gremetz.

Tout à fait !

M. le président.

La discussion générale est close.

Discussion des articles

M. le président.

J'appelle maintenant, dans les conditions prévues par l'article 91, alinéa 9, du règlement, les articles du projet de loi dans le texte du Gouvernement.

Avant l'article 1er

M. le président.

Je donne lecture de l'intitulé du I :

« De la chasse et de son organisation. »

M. Patriat, rapporteur, a présenté un amendement, no 53, ainsi rédigé :

« Avant l'article 1er , I. Dans l'intitulé, substituer à la référence : "I", les mots : "Titre Ier ".

« II. En conséquence, les divisions II à VI du projet de loi deviennent les titres II à VI. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. François Patriat, rapporteur.

Il s'agit d'un amendement rédactionnel qui ne pose aucun problème.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

53. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

MM. Giscard d'Estaing, de Courson et les membres du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance ont présenté un amendement, no 319, ainsi rédigé :

« Avant l'article Ier , insérer l'article suivant :

« Le Gouvernement déposera, avant le 31 décembre 2000, un rapport précisant ses initiatives européennes visant, en application du principe de subsidiarité :

« 1o A réserver à la loi nationale la fixation de l'ensemble des règles et obligations qui s'appliquent à l'exercice de la chasse des mammifères et des oiseaux non migrateurs sur le territoire national ;

« 2o A réserver au droit communautaire la fixation des principes que doit respecter la loi nationale en matière de fixation des règles et obligations qui s'appliquent à l'exercice de la chasse aux oiseaux migrateurs. »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson.

Le président Giscard d'Estaing (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste) a proposé, avec tout le groupe UDF, cet amendement qui tire la conséquence de la constatation que, depuis des années, de très nombreux débats en France, sur divers problèmes, notamment sur les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse, sont dus à l'absence de définition des champs respectifs du droit communautaire et du droit national.

M. René André.

Exact !

M. Charles de Courson.

S'il était bien précisé que les oiseaux migrateurs relèvent du droit communautaire alors que la compétence est nationale pour la chasse aux oiseaux migrateurs et aux mammifères, la situation serait plus claire. L'application du principe de subsidiarité vient à l'appui de cette proposition.

Cet amendement demande au Gouvernement de présenter au Parlement, avant la fin de cette année, puisque la France présidera l'Union au cours du deuxième semestre, un rapport sur les initiatives qu'il prendra au niveau de l'Europe pour obtenir cette claire distinction.

En effet, si le gouvernement français réussissait à avoir l'accord de nos partenaires au cours de sa présidence, nous aurions accompli un grand pas en avant, qu'il s'agisse de l'articulation entre le droit français et le droit communautaire ou de la résolution durable de différents problèmes.

Ainsi que chacun pourra le constater tout au long de la discussion, si nous n'aboutissions pas à ce résultat, nous serions toujours, quelle que soit la solution retenue, à la merci d'un recours sur bien des points. En effet, des plaignants essaieront d'utiliser l'interprétation de la Cour de justice des Communautés européennes sur tel ou tel point pour nous reprocher d'être allé trop loin ou pas assez loin.

Tel est l'objet de cet amendement, dont le président Giscard d'Estaing est le premier signataire.

M. Jean Michel.

C'est lui qui a fait voter la directive !

M. Charles de Courson.

Avec d'autres, les membres du groupe UDF, ont toujours été de fervents partisans de la construction européenne. Nous estimons qu'il faut aller dans le sens préconisé par l'amendement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et sur divers bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. François Patriat, rapporteur.

La commission n'a pas examiné cet amendement. J'en comprends toutefois d'autant mieux l'esprit que, souvent, certains de nos compatriotes, notamment des chasseurs, s'insurgent contre l'immixtion de l'Europe dans la gestion d'un cheptel ou, plutôt, car ce terme tient à ma formation de vétérinaire, d'une population sédentaire franco-française, qu'il s'agisse d'ongulés, de volatiles ou d'autres animaux.

Pour vous montrer la bonne volonté du rapporteur et l'esprit d'ouverture de la commission, qui contraste avec l'esprit de fermeture de quelques-uns d'entre vous (Murmures sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) , je ne suis, à titre personnel, pas opposé à cette demande d'un rapport sur les actions engagées pour obtenir une interprétation précise de la Commission, afin d'avoir une situation claire et de mettre fin à des contentieux.

Ce premier amendement, déposé par une personnalité de premier rang, qui voulait que son nom apparaisse dans le débat avant l'article 1er , n'est pas anodin, mais votre rapporteur, dans un esprit d'ouverture, lui donne un avis favorable. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Il paraît clair que la directive du 2 avril 1979 sur la conservation des oiseaux sauvages ne concerne pas seulement les espèces migratrices.

Ainsi l'un de ses considérants indique : « Considérant que les espèces d'oiseaux vivant naturellement à l'état sauvage sur les territoires européens des Etats membres sont en grande partie des espèces migratrices, que de telles espèces constituent un patrimoine commun et que la protection efficace des oiseaux est un problème d'environnement typiquement transfrontalier, qui implique des responsabilités communes ». Si les espèces migratrices ne sont qu'une « grande partie » des animaux visés, cela signifie qu'elles ne sont pas l'objet exclusif de la directive.

Par ailleurs la directive rappelle également les dispositions à prendre pour assurer la reproduction et la protection des oiseaux pendant leur phase de dépendance en précisant : « Lorsqu'il s'agit d'espèces migratrices, les Etats veillent en particulier... »

L'objet de la directive est donc clair, et vous savez combien les perspectives de sa renégociation sont limitées.

Cela étant il est possible d'interpeller à nouveau la Commission européenne pour lui demander son avis sur la question. Si un rapport peut vous permettre de valider les démarches entreprises, je n'y vois aucun inconvénient.

Je m'en remets donc à la sagesse de l'Assemblée. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 319.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

MM. Baroin, Jean-Claude Lemoine et Martin-Lalande ont présenté un amendement, no 320, ainsi libellé :

« Avant l'article 1er , insérer l'article suivant :

« L'article L.

200-1 du code rural est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« le principe de l'exploitation durable des ressources naturelles renouvelables qui s'impose aux activités d'usage et d'exploitation de ces ressources.

Par des prélèvements raisonnés sur les espèces sauvages, les chasseurs et les pêcheurs contribuent à la gestion équilibrée des écosystèmes. »

La parole est à M. François Baroin.

M. François Baroin.

Sans revenir sur les propos qu'a tenus M. le rapporteur, je tiens à souligner que nous avons aussi un esprit ouvert et sérieux. A mes yeux, qualifier les Verts d'idéologues n'est pas une insulte. Ils n'ont pas à s'excuser d'avoir des idées anti-chasse. Ils ont un ministre pour les défendre et nous sommes là pour en discuter.

L'article additionnel que je propose avant l'article 1er vise à compléter l'article L.

200-1 du code rural afin de permettre la reconnaissance officielle du rôle des chasseurs et des pêcheurs dans la gestion équilibrée des écosystèmes.

Cet amendement est directement inspiré de l'article 174 du traité de l'Union européenne qui fait référence à

« l'utilisation prudente et rationnelle des ressources », reconnaissent le rôle indiscutable des intervenants dans les milieux cynégétiques et halieutiques.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

La Commission européenne a d'ailleurs elle-même reconnu la validité de cette action. L'OCDE s'est exprimée dans le même sens et le Conseil d'Etat a approuvé, dans une perception synthétique, le rôle que peuvent jouer tous ces acteurs.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. François Patriat, rapporteur.

Monsieur Baroin, je salue la tonalité de vos propos que j'apprécie d'ailleurs en général.

J'avais moi-même déposé cet amendement en commission mais je l'ai ensuite retiré.

Après m'être entretenu avec les présidents de fédération en pensant qu'il fallait citer la chasse le plus tôt possible dans le code rural afin de la légitimer, j'ai constaté que l'article L.

200-1 ne visait que la protection de la nature.

Par ailleurs, nous avons interrogé nos amis pisciculteurs afin de savoir s'ils étaient d'accord pour que l'on traite en même temps de la pêche et de la chasse dans un tel amendement. Ils ne l'ont pas souhaité en faisant remarquer, à juste titre, qu'il était préférable de mentionner la pêche et la chasse dans le futur article L.

220-1 qui précise de manière très positive la nature et le rôle de la chasse.

Je préfère donc la rédaction que nous avons retenue pour le nouvel article L.

220-1 d'autant qu'elle fait référence aux usages de prédation et à l'impossibilité de s'approprier la nature, ce qui n'est pas prévu dans votre amendement.

A titre personnel, je suis donc plutôt défavorable à cet amendement puisque nous en retrouverons l'esprit à une meilleure place dans le code rural.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Monsieur le député, le parallèle avec la loi Pêche a été recherché dans la rédaction du texte proposé pour le nouvel article L.

220-1 du code rural. Vous noterez d'ailleurs que cette définition figure dans le chapitre qui traite de la chasse et non dans celui relatif aux dispositions générales en matière d'environnement et de protection des écosystèmes comme vous le proposez. Mon avis est donc défavorable.

Cela étant, monsieur Baroin, je suis assez grande, Dieu merci, pour exposer mes convictions en matière de chasse. Cependant, à cette heure et à ce banc, je représente le Gouvernement et mes convictions personnelles ne sont pas en cause. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste. - Murmures sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean-Claude Lenoir.

Ce n'est pas ce que disait le Premier ministre cet après-midi !

M. le président.

La parole est à M. Noël Mamère.

M. Noël Mamère.

Mes propos iront dans le sens de ceux tenus par notre rapporteur.

Monsieur Baroin, sans doute le brouhaha était-il trop fort lorsque je me suis exprimé à la tribune au nom des députés Verts de l'Assemblée nationale pour que vous m'entendiez. Je rappelle donc que, comme le rapporteur l'a souligné au cours de son intervention, les Verts, contrairement à quelques caricatures douteuses que l'on fait d'eux, n'ont jamais été contre la chasse ; nous ne sommes pas des anti-chasse (Murmures sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Dans la ligne du rapport de mission de M. Patriat et du projet présenté au nom du Gouvernement par notre ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement ; nous sommes pour une chasse équilibrée et raisonnée. Les Verts, je le répète de manière très officielle, son t favorables à ce que la France se dote d'une grande loi garantissant l'exercice du droit de chasse.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 320.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 1er

M. le président.

« Art. 1er . - I. - L'article L. 220-1 du code rural devient l'article L. 220-2.

« II. Il est inséré, avant l'article L. 220-2 du code rural, un article L. 220-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 220-1 . - La gestion durable du patrimoine cynégétique et de ses habitats est d'intérêt général. La protection de ce patrimoine implique une gestion équilibrée des ressources cynégétiques. La pratique de la chasse, activité à caractère environnemental, social et économique, participe à cette gestion. »

Sur cet article, plusieurs orateurs sont inscrits. Je demande à chacun de respecter strictement son temps de parole, qui est de cinq minutes.

La parole est à M. Michel Vauzelle.

M. Michel Vauzelle.

Avant de dire quelques mots sur ce qui est, à mes yeux, la philosophie de cet article 1er , je veux reprendre à mon compte la volonté des chasseurs sur quatre points dont la prise en considération par le Gouvernement sera, de toute évidence, déterminante pour la plupart d'entre nous : la protection, par la loi, de la chasse de nuit dans vingt départements, dont les Bouches-du-Rhône ;...

M. Francis Hammel.

Très bien !

M. Michel Vauzelle.

... la chasse à la passée deux heures avant le lever du soleil et deux heures après son coucher ;...

M. Francis Hammel.

Excellent !

M. Michel Vauzelle.

... l'assurance que le jour de nonchasse ne sera pas obligatoirement fixé au mercredi pour des raisons évidentes, notamment pour permettre à nos enfants et aux adolescents, s'ils le veulent, d'être initiés à la chasse ; enfin la fixation des dates d'ouverture et de fermeture de la chasse par une décision engageant l'Etat.

M. Francis Hammel.

Très bien !

M. Michel Vauzelle.

Ayant rappelé ces quatre dispositions essentielles à mes yeux, je tiens à souligner l'esprit du texte tel qu'il me paraît ressortir de l'article 1er

L'un des problèmes majeurs auquel nous sommes confrontés dans ce débat est, vous l'avez bien compris mes chers collègues, non pas seulement celui de la chasse, mais, comme l'a souligné le porte-parole de M. Giscard d'Estaing, celui de la prise de décision dans le cadre des institutions européennes, notamment par les directives.

Je suis, comme beaucoup ici, partisan de la construction européenne. Mais autant je crois à l'Europe lorsqu'elle rassemble et renforce les démocraties, lorsqu'elle rassemble nos monnaies et renforce nos économies, lorsqu'elle rapproche nos lois sociales, autant je pense que l'Europe risque de dresser contre elle nos peuples, chaque


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fois qu'elle prétend régenter leurs modes de vie, leurs philosophies de la vie, leurs arts de vivre. S'ils sont évidemment la richesse culturelle de l'Europe dans sa diversité, ils constituent aussi, ensemble, la différence de notre modèle de société par rapport, notamment, au modèle américain. Ils sont finalement l'expression concrète et populaire de notre conception de la liberté : pas de liberté sans liberté de choix ; pas de choix sans le maintien de modèles culturels différents.

Pour cela - nous partageons tous ici ce souci en tant que représentants de la nation - nous avons le devoir sacré de protéger tout autant notre partrimoine culturel que notre patrimoine naturel. Et quand je parle de culture, je ne parle pas du latin d'une élite mais bien de nos traditions populaires. Or, qu'il s'agisse de la chasse ou d'autres domaines, ces traditions ne sont pas les références de je ne sais quel nationalisme replié et figé sur le passé, mais, au contraire, les fondations d'un avenir équilibré et bien vivant.

Il conviendrait donc que, à l'avenir, ni l'Union européenne ni le Conseil d'Etat n'empiètent sur ce qui doit continuer à relever de la souveraineté nationale (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Christian Estrosi.

Excellent !

M. Michel Vauzelle.

C'est au nom de la défense du droit à la différence nationale et du droit à nos différences régionales qu'il faut, dans ce débat, accepter les dispositions que j'ai évoquées au début de mon intervention. Les chasseurs en France ne sont pas à l'image de la caricature grossière que l'on en fait trop souvent par démagogie.

M. François Vannson.

C'est exact !

M. Michel Vauzelle.

Ils sont, en tout cas, - je l'observe dans la Camargue où j'habite - des militants d'un art de vivre, d'un art de se parler, d'une certaine manière de vivre la nature et de sauvegarder les traditions de chasse de nos régions, qu'il s'agisse de la chasse à la passée ou de la chasse de nuit.

M. Patrice Martin-Lalande.

Très bien !

M. Michel Vauzelle.

Gardons donc, mes chers collègues, chaque fois que cela est possible, notre identité nationale. Gardons, chaque fois que cela est possible, nos i dentités régionales, en Provence-Alpes-Côte d'Azur comme dans les autres régions de France. Enfin, à l'heure où la mondialisation nous menace, gardons l'Europe, si cela est possible, des directives attentatoires aux droits de l'homme de vivre selon le modèle culturel de son choix.

(Applaudissements sur de nombreux bancs.)

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard.

Madame la ministre, depuis de nombreuses années, la question des modalités de la chasse dans notre pays soulève un débat vif et singulier qui suscite souvent l'étonnement et l'incompréhension chez nos voisins.

Qu'est-ce qui nourrit donc cette « spécificité française » dont beaucoup de nos concitoyens, si j'en juge par ce que j'entends dans ma ville, se passeraient bien volontiers ? Certes, la France compte un nombre important de chasseurs attachés légitimement à un droit qui n'est d'ailleurs pas contesté sérieusement dans son principe. Mais, au-delà de la grande majorité du million et demi de chasseurs réellement préoccupés de protéger les ressources naturelles et, par là, leur environnement immédiat, il existe un lobby peu nombreux mais puissant, déterminé et peu regardant sur les moyens, notamment sur l'utilisation juridiquement discutable de certains moyens financiers provenant des poches de tous les chasseurs.

M. Noël Mamère.

Absolument !

M. Jean-Pierre Brard.

Certains prétendus défenseurs de la chasse et des chasseurs ont assis et développé leur fonds de commerce politique sur la surenchère à laquelle ils se livrent avec une démagogie effrénée et sans beaucoup de considération pour la protection des fragiles équilibres écologiques. C'est pourquoi il est important et significatif que l'article 1er introduise le concept de gestion durable du patrimoine.

Cette surenchère démagogique et populiste de chasseurs extrémistes constitue manifestement un bon filon politique et financier avec l'exploitation du malaise de certaines zones rurales.

M. Noël Mamère.

Tout à fait !

M. Yves Cochet.

Des noms !

M. Jean-Pierre Brard.

Pour ceux qui veulent que je sois plus explicite, je précise que je pense au lobby SaintJosse, que certains se sont laissé allé à soutenir. Chacun sait que c'est un filon, que je ne qualifierai même pas de politique, mais de politicien, tout à fait condamnable, qui ravale la politique à un niveau indigne de notre pays (Murmures sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance. - Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert), et qui n'est pas, il faut le souligner, représentatif des chasseurs.

Pour en revenir aux pratiques, la justice nous éclairera dans les mois à venir sur le point financier déjà soulevé par les magistrats de la Cour des comptes.

Il n'y a pas grand-chose de bon à espérer pour le débat démocratique de ceux qui manient à longueur de discours et de manifestations l'invective et l'injure, de préférence à connotation sexiste.

P lus curieusement, certains hommes politiques à droite, et parfois à gauche, se sont fait les relais zélés du lobby de la chasse et nous gratifient périodiquement de textes laxistes, déséquilibrés et de surcroît largement illé gaux.

M. François Sauvadet.

Quel cinéma !

M. Jean-Pierre Brard.

Le rapport Patriat, fruit de nombreuses discussions et consultations, a ouvert la voie à l'élaboration d'un projet gouvernemental équilibré dans sa version initiale. Il serait dangereux, et nos concitoyens ne le comprendraient pas, que ce travail de plusieurs mois, qui constitue un compromis acceptable, soit dénaturé pour la satisfaction des intérêts à courte vue d'une petite minorité, au risque d'ailleurs d'encourir la censure des diverses juridictions compétentes qui ont eu et auront à connaître de cette question. L'apaisement que nombre de collègues disent souhaiter aujourd'hui nécessite d'admettre que notre patrimoine naturel appartient autant aux millions de citadins qui n'ont jamais utilisé un fusil de chasse de leur vie qu'aux adeptes de la chasse.

M. François Sauvadet.

De quoi parle-t-il ?

M. Jean-Pierre Brard.

Et, de ce point de vue, il serait lamentable que certains de nos collègues veuillent cacher dans la gibecière qu'ils portent en bandoulière des voix d'électeurs, dont ils sous-estiment certainement l'intelligence : ceux-ci ne confondent pas les rodomontades avec la réalité de convictions qui le plus souvent n'existent p as ! (Protestations sur les bancs du groupe du


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Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Applaudissements sur quelques bancs du groupe communiste et sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. François Sauvadet.

Mais qu'est-ce qu'il dit ?

M. le président.

La parole est à M. Christian Estrosi.

M. Christian Estrosi.

Monsieur le président, madame la ministre, en préalable à l'examen de l'article 1er , je rappellerai à mon tour ma détermination de voir inscrits et réaffirmés dans notre droit, à la fois la pratique de la chasse de nuit et la stricte application de la loi de 1998 sur les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse aux oiseaux migrateurs. Je souhaite que le Conseil d'Etat ne se livre pas à des interprétations des dispositions prises par les représentants du peuple français siégeant dans cette assemblée. De même, je ne reconnais pas à l'Union européenne le droit de se mêler des domaines relevant de notre vie quotidienne et de vouloir réglementer nos traditions et nos pratiques personnelles, familiales et associatives.

La chasse à la passée doit être préservée. Le refus de faire du mercredi un jour de non-chasse est justifié. En décider autrement serait une lourde atteinte aux activités de chasse dans nos départements et au savoir-faire de nos fédérations départementales en matière de gestion.

A l'article 1er , la reconnaissance de la chasse comme activité d'intérêt général doit être affirmée avec for ce.

M. François Patriat, rapporteur.

Nous sommes d'accord !

M. Christian Estrosi.

Vous semblez pourtant hésiter devant cette indispensable reconnaissance. Vous donnez de la chasse une définition technocratique. Elle revient à une « gestion durable du patrimoine cynégétique et de ses habitats » !

M. Jean-Pierre Brard.

C'est trop difficile à comprendre pour vous !

M. Christian Estrosi.

Tout à fait, monsieur Brard ! Beaucoup trop difficile à comprendre pour moi,...

M. Jean-Pierre Brard.

Vous savez au moins faire votre autocritique !

M. le président.

Monsieur Brard, s'il vous plaît !

M. Christian Estrosi.

... comme pour la plupart des Françaises et des Français d'intelligence et de bons sens.

M. Jean-Pierre Brard.

D'intelligence... Ne vous surestimez pas !

M. Christian Estrosi.

Madame la ministre, la complexité de cette définition symbolise à elle seule le profond malaise que l'on perçoit chez vous quand il s'agit de reconnaître à part entière la liberté de chasse dans notre pays. Ces hésitations, ces réserves, ces fausses pudeurs me choquent. La chasse ne peut être aujourd'hui acceptée et inscrite dans la loi de manière subreptice, en catimini, un peu honteusement. Nous devons, au travers de cet article 1er , manifester clairement notre volonté de la voir reconnaître comme une activité à caractère social et économique, qui concourt à une gestion équilibrée des espèces et de la faune sauvage.

La chasse s'inscrit en effet au coeur de l'histoire de notre pays. Elle fait partie intégrante de nos traditions et de notre culture. D'autre l'ont dit avant moi, le droit de chasse est un des acquis essentiels de la Révolution française.

La chasse revêt une dimension humaine et sociale car elle contribue à réunir dans une même passion des personnes d'origines sociales très diverses. Elle concourt aussi à l'aménagement du territoire, car elle demeure souvent, dans de nombreuses communes rurales, la dernière activité associative. Pour en avoir soixante-douze dans ma circonscription, je sais de quoi je parle.

M. François Patriat, rapporteur.

Il y en a deux cent trente-sept dans la mienne !

M. François Sauvadet.

Et trois cent quarante-quatre dans la mienne !

M. Christian Estrosi.

A ce titre, elle participe au maintien d'activités dans des zones gravement menacées par la désertification, une désertification, madame la ministre, largement amplifiée par les lois que vous avez fait voter.

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

C'est nouveau ! J'ai un pouvoir considérable !

M. Christian Estrosi.

La chasse revêt aussi une dimension économique, car elle concerne, directement ou indirectement, plusieurs dizaines de milliers d'emplois en France.

Enfin, je veux souligner la fonction écologique exercée par les chasseurs. Pour moi, les chasseurs sont les premiers écologistes de France.

M. Yves Cochet.

Ah ! Ah !

M. Michel Bouvard.

C'est vrai. Ce sont eux qui sont à l'origine de la création du parc de la Vanoise.

M. Christian Estrosi.

Leur relation à la nature se fonde en effet sur une passion authentique et sincère, bien éloignée des approches bucoliques de certains écologistes de salon, qui n'ont d'autre vision de la nature que celle qu'ils ont depuis leur poste de télévision.

M. Michel Bouvard.

Absolument !

M. Christian Estrosi.

L'article 1er doit nous permettre de saluer le formidable travail accompli par des générations de chasseurs, qui ont su aménager, gérer et développer le territoire national.

M. Michel Bouvard.

Tout à fait !

M. Christian Estrosi.

Je prendrai l'exemple des chasseurs des Alpes-Maritimes. Ce sont eux qui ont été à l'origine, dans les années cinquante, de la création de la réserve du Mercantour, qui a donné naissance, vingt ans plus tard, au parc national du Mercantour.

M. Michel Bouvard.

Eh oui ! Comme pour le parc de la Vanoise !

M. Christian Estrosi.

Entre-temps, des espaces quasiment désertés par les espèces animales avaient été repeuplés. Ce fut le cas notamment pour les chamois, les mouflons, les bouquetins, les cerfs, les chevreuils.

M. Michel Bouvard.

Tout à fait ! Mais les mouflons sont maintenant bouffés par les loups !

M. Christian Estrosi.

Ce ne sont pas les écologistes de salon qui ont repeuplé le parc du Mercantour. Ce sont les chasseurs des Alpes-Maritimes et leur fédération qui ont été, en véritables écologistes et amoureux de la nature, à l'origine de ce repeuplement.

Ce formidable travail doit être aujourd'hui salué et reconnu à sa juste place. Ce capital doit être préservé.

Nous le devons à l'action remarquable conduite par les


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chasseurs depuis des générations.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. André Vauchez.

M. André Vauchez.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, depuis 1964 et le vote de la loi Verdeille qui organisait les ACCA, nous n'avons pas connu de projet de loi aussi dense et aussi global sur la chasse.

M. François Patriat, rapporteur.

Très bien !

M. André Vauchez.

Pendant de longues années, la pratique de la chasse ne posa pas de problème particulier dans nos campagnes profondes. Mais des modifications, apparues successivement, ont fait que ce type de pratique, qui peut être, comme on l'entend, sportive ou de loisir, s'est trouvé confronté à un environnement de plus en plus hostile : modification du biotope par les pratiques culturales, modification des espèces chassées par l'appauvrissement de certaines et le développement d'autres, modification dans la composition sociologique des ruraux et les habitudes des citadins, de plus en plus attirés par la nature, modification enfin résultant de l'émergence des règlements européens et de la montée en puissance de la juridiction communautaire.

Ainsi, au fil des années, les chasseurs se sont sentis assiégés, les non-chasseurs agressés, voire exposés à des d angers, et globalement, les populations rurales incomprises.

M. Michel Bouvard.

Tout à fait !

M. André Vauchez.

Apaiser, moderniser, gérer de façon durable la pratique de la chasse démocratique, tel est l'objet de votre projet de loi, madame la ministre.

M. François Patriat, rapporteur.

Très bien !

M. André Vauchez.

L'article 1er reconnaît d'emblée d'intérêt général la gestion durable des patrimoines cynégétiques et de leurs habitats. Il reconnaît le triple volet de la pratique de la chasse : environnemental, social et économique. Voilà de quoi apaiser l'inquiétude de celles et ceux qui pensaient que, dans le contexte actuel, le droit de chasse était menacé.

M. François Patriat, rapporteur.

Très bien !

M. André Vauchez.

Certes, votre projet, madame la ministre, inspiré du rapport de François Patriat, réécrit le droit à partir des décombres de l'ancienne législation.

Je suis originaire d'un département - le Jura, que vous connaissez, madame - qui appartient à la FrancheComté, la seule région de France où les ACCA issues de la loi Verdeille sont plus nombreuses que les communes : 1826 ACCA pour 1785 communes. J'ai relevé ces chiffres dans le rapport très précis de François Patriat. Et les chasseurs de ma région redoutaient que, dans un territoire naturel encore très morcelé, il ne soit plus possible de créer de nouvelles ACCA, garantes de la chasse démocratique. Votre texte prévoit au contraire cette possibilité en l'assortissant de précautions qui éviteront, je l'espère, à ce texte d'être cassé, en cas de plainte, par la Cour européenne des droits de l'homme, par exemple.

Cette réaffirmation du droit de chasse, comme nous le verrons au fil de l'examen des articles, se décline dans la pratique de diverses chasses, chacune ayant ses problèmes spécifiques, comme cela est ressorti clairement de la discussion générale.

L'ambition du texte est de faire en sorte que, dans l'espace naturel ouvert à tous, cohabitent chasseurs et non-chasseurs, chacun ayant des droits mais aussi des devoirs vis-à-vis des autres. La liberté est toujours partagée et doit être acceptable par l'autre. Sinon, elle n'est plus liberté. Le projet de loi, enrichi d'amendements de la commission, ouvre des perspectives durables pour la chasse et devrait apaiser les tensions.

Ne laissons pas passer cette occasion que nous offre le Gouvernement.

(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

Monsieur le président, mes chers collègues, c'est avec mesure et pragmatisme que je souhaiterais aborder le débat de ce premier article.

M. Jean-Pierre Brard.

Ça craint ! (Sourires.)

M. le président.

Attendez, monsieur Brard, qu'il ait parlé.

M. Jean-Pierre Brard.

Mais vous êtes d'accord avec moi, monsieur le président...

M. Thierry Mariani.

Le rapport de notre collègue Patriat, dont je ne partage pas toutes les conclusions, a néanmoins démontré, s'il en était besoin, la nécessité d'adopter une grande loi sur la chasse afin de mieux fixer le cadre d'exercice de ce loisir tant apprécié en milieu rural.

L'heure n'est plus, mes chers collègues, à l'affrontement idéologique entre les « pro » et « anti » chasse, mais devrait être à la réconciliation de la France rurale, devant un projet commun respectant et acceptant les convictions et les libertés de chacun.

M. François Patriat, rapporteur.

Très bien.

M. Thierry Mariani.

A cet égard, force est de constater, madame la ministre, que votre projet manque, sérieusement d'ambition et souffre de nombreuses lacunes.

Un manque d'ambition tout d'abord.

Votre projet est qualifié de façon unanime, par les chasseurs comme par les non-chasseurs, de « projet bureaucratique ». Votre texte propose une vision à court terme de la chasse et refuse de s'inscrire dans la durée.

Qu'il me soit permis de citer deux exemples à ce sujet.

Alors que l'une des questions les plus épineuses à examiner, à savoir la chasse de nuit, aurait dû être traitée de façon définitive par votre texte, votre projet initial botte en touche et se contente d'une disposition transitoire qui renvoie à plus tard le règlement du problème. Mais, il est vrai que c'est devenu une habitude de ce gouvernement...

Que nous proposez-vous ? Une dépénalisation de la chasse de nuit pendant une période de cinq années dans certains départements, dont la liste sera fixée par la voie réglementaire. Nous ne pourrons, hélas, vous suivre dans cette logique et dans ce double abandon. Le Parlement ne s'honorerait pas en fuyant ses responsabilités et en ne prenant qu'une demi-mesure dont il ne pourrait même pas contrôler les modalités d'application.

Alors qu'on nous annonçait une grande loi, c'est, hélas, madame la ministre, un projet à courte vue qui nous est proposé. En procédant de la sorte, vous parvenez à mécontenter tout le monde, et à faire l'unanimité contre vous.

Manque d'ambition encore quand vous vous contentez d'un simple toilettage de la loi Verdeille sans réelles perspectives.


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En effet, la modification de la loi du 10 juillet 1964 aurait dû être entreprise dans une perspective générale, englobant l'amélioration du système d'organisation de la chasse et une réforme des associations communales de chasse agréées. Sur ce point, vous vous contentez de simples retouches et refusez d'entreprendre une large réforme. La reconnaissance, légitime, du droit de nonchasse aurait dû être comprise dans un cadre bien plus large.

Votre texte, enfin, souffre de lacunes criantes. Je n'en citerai que deux : l'absence de définition de la chasse et l'absence de création de fédérations régionales des chasseurs.

Sur le premier point, l'occasion vous était donnée de pallier une lacune de notre dispositif relatif à la chasse.

En effet, aucune loi n'a jamais défini précisément l'acte de chasse. Il aurait été fort opportun de combler ce vide juridique afin de prévenir toute interprétation hasardeuse.

Lorsque l'on entend, comme vous le faites, mieux encadrer une pratique, encore faut-il définir de façon précise le champ d'application de la matière concernée.

Sauf à multiplier, de façon inutile, les contentieux et les procès-verbaux, une définition de l'acte de chasse me paraît nécessaire. Je ne pourrai donc que soutenir la proposition de la commission qui tente de pallier cette grave lacune de votre texte initial.

La seconde lacune de votre texte concerne votre refus de créer des fédérations régionales des chasseurs.

La région, à mon sens, ne doit pas être laissée de côté dans l'organisation des structures permettant de développer de façon harmonieuse et efficace la chasse sur notre territoire.

L'échelon régional revêt, à ce titre, une importance dont on mesure bien l'utilité, et qui sont la coordination à ce niveau des fédérations départementales, l'élaboration de programmes d'action, la liaison avec les conseils régionaux, la collaboration avec les directions régionales de l'environnement, ou bien encore les instances européennes.

J'espère que le débat des amendements permettra de faire évoluer positivement votre position sur ce point.

En conclusion, madame la ministre, permettez-moi de vous dire que votre projet ne nous satisfait pas en l'état.

Certes des avancées ont été opéréres - c'est indéniabl e lors du travail en commission mais je considère qu'elles sont insuffisantes et ne constituent qu'une première étape.

Votre texte, madame la ministre, est à revoir. Il n'est pas à la hauteur de l'enjeu qu'il entend traiter.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

La parole est à M. Jean-Claude Viollet.

M. Jean-Claude Viollet.

Monsieur le président, madame la ministre, je veux insister sur l'importance de cet article Ier , à mes yeux double : il affirme en effet, d'une part, que la gestion durable du patrimoine cynégétique et de ses habitats est d'intérêt général, engageant par là même tous les intervenants, directs ou indirects, sur ce milieu naturel, d'autre part, que la pratique de la chasse participe à la protection de ce patrimoine à travers la gestion équilibrée des ressources cynégétiques.

Mais il va plus loin encore, et c'est heureux, en reconnaissant le caractère social et économique de la chasse. Cette déclaration de principe me satisfait donc globalement, même si j'avais souhaité voir rappeler le fait que, au-delà de son caractère environnemental, social et économique, la chasse est également, ainsi que le soulignait notre collègue et ami François Patriat en avantpropos de son rapport, partie intégrante du patrimoine de l'humanité. Cela est évidemment difficile à écrire dans la loi ; c'est pourquoi je tenais à l'évoquer dans le débat.

M. Jean Auclair.

Il l'a dit !

M. Jean-Claude Viollet.

La chasse participe en effet d'un rapport originel entre l'homme et la nature. Elle demeure culturellement une marque symbolique du lien que celui-ci entretient avec les autres espèces et leur environnement. Ce faisant, la chasse relève pour partie de l'ordre du symbole et ne peut, de ce fait même, être appréhendée d'une manière purement rationnelle.

Sans doute faut-il y voir, pour l'essentiel, la source des tensions, des crispations passionnées qui ont vu le jour entre une culture urbaine qui voit trop souvent dans la nature un ordre immuable, et une culture rurale qui entretient un rapport sensible, j'allais dire sensuel, avec la nature, à l'animal. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Je tenais à le rappeler, en toute simplicité, car ce n'est, m e semble-t-il, qu'en appréhendant cette réalité complexe, car profondément humaine, que nous pourrons trouver ensemble, aujourd'hui ici, sur le terrain demain, les termes d'un équilibre permettant de pérenniser une chasse démocratique et populaire respectueuse du patrimoine cynégétique et de ses habitats, respectable grâce à une éthique de l'acte de chasse vis-à-vis des espèces comme des autres usagers du territoire, et respectée par tous ceux qui ont une autre pratique de la nature.

Je sais que le chemin est difficile : il nous faudra tout à la fois arrêter les exigences d'une chasse d'avenir, définir les évolutions nécessaires des structures, garantir une gestion durable de la faune sauvage, en particulier des oiseaux migrateurs et de leurs habitats, enfin assurer une gestion partagée du temps et de l'espace.

Mais cela doit nous permettre de légaliser la chasse de nuit ou à la passée dans les départements où cette pratique est ancienne et répandue, de statuer sur le jour de non-chasse en respectant les contraintes des chasses traditionnelles.

Cela nous conduira à vous demander, madame la ministre, de vous engager sans ambiguïté sur les termes du projet de décret qui statuera sur les dates butoirs d'ouverture et de clôture de la chasse aux oiseaux migrateurs, au gibier d'eau et autres oiseaux de passage.

Le rapport remis au Premier ministre par notre collègue et ami François Patriat contient sur l'ensemble de ces points des propositions précises, susceptibles de garantir une chasse responsable et apaisée, dans le cadre d'un consensus durable entre l'immense majorité des chasseurs et les autres utilisateurs de la nature.

Pour moi, qui ai travaillé depuis plusieurs années dans mon département de Charente, avec la fédération départementale des chasseurs comme avec tous les autres utilisateurs de nos espaces naturels et ruraux, c'est là ma seule ambition, mais aussi tout mon engagement.

M. Gérard Hamel.

C'est ce qu'on appelle ratisser large !

M. Jean-Claude Viollet.

Je veux croire que ce que nous ferons ici ensemble dépassera, et de beaucoup, ce que nous pourrions vouloir isolément. La finalité de la politique, qui consiste à résoudre des problèmes, ne saurait se borner à voir chacun défendre son seul point de vue, aussi pertinent soit-il.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

C'est dans cet esprit, madame la ministre, que je voterai cet article 1er et que je soutiendrai les amendements du groupe socialiste, dont, pour un certain nombre, je suis personnellement signataire. Ils me semblent constituer la traduction fidèle de toutes ces préoccupations à travers les différents thèmes abordés dans ce projet de loi relatif à la chasse, qui sortira enrichi de ce débat.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

MM. Baroin, Lemoine et MartinLalande ont présenté un amendement, no 321, ainsi rédigé :

« Substituer au dernier alinéa du II de l'article 1er les quatre alinéas suivants :

« Art. L.

220-1. La gestion durable du patrimoine cynégétique et de ses habitats est d'intérêt général. La pratique de la chasse, activité à caractère environnemental, culturel, social et économique, participe à cette gestion et contribue à l'équilibre entre le gibier, les milieux naturels et les activités humaines.

« L'acte de chasse est un acte volontaire, lié à la recherche, à la poursuite ou à l'attente du gibier, ayant pour but ou pour résultat la capture des espèces de la faune sauvage dont la chasse est autorisée.

« Au sens du présent article, l'acte de chasse ne comprend pas l'acte préparatoire de la chasse et n'est pas accompli par les auxiliaires de chasse.

« Pour les chiens de chasse et les oiseaux de fauconnerie, tous entraînements, concours, épreuves pouvant être autorisés par l'autorité administrative dans le temps où la chasse est fermée ne s'assimilent pas à un acte de chasse. »

La parole est à M. François Baroin.

M. François Baroin.

Cet amendement vise à substituer au dernier alinéa du II de l'article 1er quatre alinéas dont l'objectif est d'inscrire dans le marbre de la loi une définition de l'acte de la chasse, curieusement absente de ce texte : c'est un acte volontaire lié à la recherche, à la poursuite ou à l'attente du gibier ayant pour but ou pour résultat la capture des espèces de la faune sauvage dont la chasse est autorisée. Il y avait là - même si cela peut surprendre M. Cochet - un réel vide juridique qu'il convenait de combler en affichant une définition précise, de manière à éviter toute une série de procès-verbaux d'infractions inutiles.

Enfin, le dernier alinéa tend à fixer un cadre juridique pour certaines activités canines ou de fauconnerie en rapport avec la chasse, comme les entraînements, concours et autres épreuves, dont une bonne part relève, en l'état actuel du droit, de circulaires ministérielles à la portée juridique inexistante.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. François Patriat, rapporteur.

La commission n'a pas examiné cet amendement, pour la bonne et simple raison qu'elle en avait déjà adopté deux, très similaires, reprenant les préoccupations de M. Baroin que je partage.

Nous retrouverons dans ces amendements, adoptés à l'initiative du groupe socialiste, les éléments essentiels de la réécriture globale que M. Baroin a proposée.

Pour commencer, nous reprendrons le premier alinéa dans la rédaction que nous proposons pour l'article L. 220-1 en y ajoutant toutefois - je l'ai indiqué tout à l'heure - une précision sur l'accord agro-sylvo-cynégétique que M. Baroin a oublié. Il devrait avoir, de ce point de vue, entière satisfaction.

De la même façon, la définition de l'acte de chasse sera reprise dans notre amendement no 58 rectifié.

La commission n'a toutefois pas repris le troisième alinéa relatif à l'acte préparatoire...

M. Charles de Courson.

Hélas !

M. François Patriat, rapporteur.

... considérant que celui-ci pouvait être sujet à caution.

En revanche, les dispositions relatives aux entraînements et autres épreuves qu'il était jusqu'à présent impossible d'organiser au mois de mars, avant la période de chasse, nous paraissent totalement justifiées et nous les reprenons également. Nous avons également complété quelque peu la définition de l'acte volontaire. En résumé, d'accord sur le principe, mais avis défavorable sur la réécriture telle qu'elle nous est proposée.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Même avis : l'amendement no 58 rectifié de la commission, que nous examinerons tout à l'heure, va dans le même sens.

M. le président.

La parole est à M. François Baroin.

M. François Baroin.

Si nous sommes animés, semblet-il, du même esprit pour mieux encadrer et définir juridiquement l'acte de chasse, le refus du rapporteur et de la commission de définir l'acte préparatoire va poser des problèmes à tous ceux qui organisent des actes de chasse, qui font le pied, qui organisent les entrées dans les parcelles, aux rabatteurs, porte-carniers et autres, pour lesquels le vide juridique subsistera. Je sais que nous pouvons trouver des points d'accord avec M. Patriat, mais de là à lui faire totalement confiance par avance, c'est un pas que je ne peux franchir. Je maintiens au nom de mes collègues notre volonté d'une définition de l'acte préparatoire.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 321.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Mme Perrin-Gaillard et les membres du groupe socialiste ont présenté un amendement, no 23, ainsi rédigé :

« Dans la première phrase du dernier alinéa du II de l'article 1er substituer au mot : "cynégétique", le mot : "faunistique". »

La parole est à Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

Je propose de remplacer le mot « cynégétique » par le mot : « faunique » - et non « faunistique », adjectif impropre qu'il convient de rectifier. La valeur intrinsèque de la faune sauvage ne devant pas s'apprécier à l'aune de sa seule valeur cynégétique, il nous faut veiller à ce que la gestion des ressources cynégétiques ne se fasse pas au détriment des espaces non chassables.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur cet amendement, qui est désormais l'amendement no 23 rectifié.

M. François Patriat, rapporteur.

Avis favorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Même avis.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 23 rectifié.

(L'amendement est adopté.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

M. le président.

M. Patriat, rapporteur, a présenté un amendement, no 55, ainsi rédigé :

« Supprimer la deuxième phrase du dernier alinéa du II de l'article 1er ».

La parole est à M. le rapporteur.

M. François Patriat, rapporteur.

Cet amendement de suppression est d'ordre strictement rédactionnel : ces dispositions seront reprises dans un amendement ultérieur.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

55. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

En conséquence, les amendements nos 240 de Mme Bassot, 381 de M. MartinLalande, 283 de M. Mariani et 24 de Mme PerrinGaillard tombent.

Mme Bassot a présenté un amendement, no 238, ainsi rédigé :

« Dans la dernière phrase du dernier alinéa du II de l'article 1er , après le mot : "activité", insérer le mot : "traditionnelle". »

M. Eric Doligé.

Il est défendu.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. François Patriat, rapporteur.

Défavorable. La chasse n'est pas avant tout traditionnelle. Elle est d'abord moderne et d'avenir...

M. Robert Lamy.

Et durable !

M. François Patriat, rapporteur.

Et durable, si vous le souhaitez.

M. René André.

Et citoyenne !

M. Jean Auclair.

Et plurielle !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Défavorable.

M. le président.

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson.

Les propos du rapporteur m'étonnent : nous avons tous retenu, et à plusieurs reprises, la notion de tradition ; nous en reparlerons longuement demain à propos de la chasse de nuit ou d'autres formes de chasse traditionnelles. La proposition de notre collègue ne mangeait pas de pain... A vous entendre, monsieur le rapporteur, il n'y aurait qu'une chasse moderne... Qu'est-ce à dire ? Vous n'allez tout de même pas pousser à chasser en 4 4, en tirant par les fenêtres !

M. François Patriat, rapporteur.

C'est M. Dassault qui chasse ainsi !

M. Charles de Courson.

Respectons donc les traditions ! Vous pouvez être pour ou contre l'amendement de Mme Bassot, mais vous ne pouvez tenir des propos excessifs niant que la tradition est un des fondements de la chasse.

M. le président.

La parole est à M. Antoine Carré.

M. Antoine Carré.

Je voudrais insister sur le fait que la chasse est une tradition ancestrale...

M. François Patriat, rapporteur.

Et même moyenâgeuse !

M. Antoine Carré.

Le mot « traditionnelle » n'a donc rien d'excessif.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur.

M. François Patriat, rapporteur.

Je conviens que la chasse est une tradition culturelle, ancestrale, historique, voire préhistorique... Je pourrais, tout comme vous, déposer autant d'amendements que de qualificatifs ! Mais comme l'a dit certain humoriste, parlons plutôt de l'avenir, parce que c'est là que nous allons passer le plus clair de notre temps.

(Sourires.)

Que la chasse ait des racines, c'est évident et nous l'avons dit ; mais si elle veut durer, elle doit être moderne et d'avenir, c'est-à-dire très respectueuse de tout. Il n'est évidemment pas question de 4 4, ni de moto, ni d'autre chose de ce genre !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 238.

M. René André.

Nous défendons la tradition ! (L'amendement n'est pas adopté.)

M. Christian Estrosi.

Heureusement, M. Vauzelle n'a pas osé voter contre la tradition !

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements, nos 56 et 239, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 56, présenté par M. Patriat, rapporteur, et Mme Bassot, est ainsi rédigé :

« Dans la dernière phrase du dernier alinéa du II de l'article 1er , après les mots : "à caractère environnemental,", insérer le mot : "culturel". »

L'amendement no 239, présenté par Mme Bassot, est ainsi rédigé :

« Dans la dernière phrase du dernier alinéa du II de l'article 1er , après les mots : "activité à caractère", insérer le mot : "culturel". »

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement no

56.

M. François Patriat, rapporteur.

Cet amendement précise que la chasse est une activité à caractère culturel.

Vous devriez être contents : le culturel recouvre aussi bien le passé que l'avenir...

Mme Christine Boutin.

Très bien ! Mais est-ce à dire que la tradition ne fait pas partie de la culture ?

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

56. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

En conséquence, l'amendement no 239 tombe.

M. le président.

M. Mariani a présenté un amendement, no 281, ainsi rédigé :

« Dans la dernière phrase du dernier alinéa du II de l'article 1er , après les mots : "social et économique", insérer les mots : "qui s'inscrit dans le patrimoine culturel en tant qu'activité humaine légitime de prélèvement de la faune sauvage,". »

La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

J'espère ne pas déplaire à M. le rapporteur en précisant que la chasse s'inscrit dans le patrimoine culturel en tant qu'activité humaine légitime


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

de prélèvement de la faune sauvage. Mais, pour faire plaisir à la gauche plurielle, je veux bien ajouter : « dans un comportement citoyen et durable ».

(Rires sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur cet amendement ?

M. François Patriat, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel l'avis du Gouvernement ? Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Même avis.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 281.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Mes chers collègues, compte tenu du faible écart entre la majorité et l'opposition, je vous conseille de bien lever la main ; car nous effectuons un décompte très précis des voix et vous risquez d'avoir des surprises...

M. Mariani a présenté un amendement, no 282, ainsi rédigé :

« Dans la dernière phrase du dernier alinéa du II de l'article 1er , après le mot : "participe", insérer les mots : "de façon éminente". »

La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

Il est défendu.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. François Patriat, rapporteur.

Défavorable. Cette précision est inutile et sujette à polémique. Tout le monde participe à la gestion de l'espèce.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Même avis.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 282.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Patriat, rapporteur, a présenté un amendement, no 57, ainsi rédigé :

« Compléter la dernière phrase du dernier alinéa du II de l'article 1er par les mots : "et contribue à l'équilibre entre le gibier, les milieux et les activités humaines". »

Sur cet amendement, MM. Brottes, Bataille et les membres du groupe socialiste ont présenté un sousamendement, no 123 rectifié, ainsi rédigé :

« Compléter le dernier alinéa de l'amendement no 57 par les mots : "en assurant un véritable équilibre agro-sylvo-cynégétique". »

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement no

57.

M. François Patriat, rapporteur.

Cet amendement vise à préciser la fonction écologique, sociale, économique de la pratique de la chasse - autant de vertus d'avenir !

M. Michel Voisin.

Républicaine !

M. René André.

Durable !

M. Thierry Mariani.

Et laïque ! (Rires.)

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Favorable.

M. le président.

La parole est à M. François Brottes, pour présenter le sous-amendement no 123 rectifié.

M. François Brottes.

La présentation de ce sousamendement me donne l'occasion de rappeler une évidence : les jeunes pousses sont vulnérables à la dent du gibier et la prolifération de grands animaux peut contrarier, voire condamner dans nombre nos territoires la régénération des forêts.

Mme Christine Boutin et

M. Michel Bouvard.

Très juste.

M. François Brottes.

Cette régénération, dont on souhaite de plus en plus qu'elle soit naturelle, concernera en particulier les 500 000 hectares de forêt dévastés par l'ouragan voilà quelques semaines. Elle doit redonner des perspectives à des générations de forestiers durement touchés par les conséquences des dernières tempêtes.

Dans le souci de reconstituer les forêts et de faire en sorte que la chasse soit l'un des outils de leur gestion durable, que les forêts en question aient été victimes ou non de l'ouragan, mon sous-amendement entend affirmer clairement, dès l'article 1er du projet de loi, que la chasse joue un rôle d'intérêt général en assurant un véritable équilibre agro-sylvo-cynégétique.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. François Patriat, rapporteur.

Favorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

La notion d'équilibre agricole, sylvicole et cynégétique est déjà présente dans l'article L.

225-2 du code rural. Faut-il la réintroduire dès l'article 1er ...

M. Patrice Martin-Lalande.

Oui ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

... en l'assortissant de l'adjectif « véritable », au demeurant peu solide du point de vue juridique ? Je m'en remets à votre sagesse.

M. Patrice Martin-Lalande.

Est-ce à dire que la vérité n'est pas solide ?

M. le président.

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson.

Nous sommes tous d'accord sur le principe. Mais le vrai, le vieux problème, dont nous aurons l'occasion de discuter longuement, c'est celui de savoir s'il faut ou non indemniser les dégâts commis sur les forêts. Nos débats en commission ont montré que cette affaire n'était pas simple.

Je veux poser une question aux auteurs de ce sousamendement : si nous l'adoptions, iriez-vous jusqu'à retenir le principe de l'indemnisation des dégâts provoqués par un excès de gibier ? Est-ce vraiment cela l'esprit de votre sous-amendement ? Nous devons le savoir avant de passer au vote.

M. le président.

La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes.

La recherche de l'équilibre est davantage une question de volonté qu'une question d'argent. (Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Hervé Morin.

Bravo pour la réponse !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 123 rectifié.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 57, modifié par le sous-amendement no 123 rectifié.

(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président.

M. Patriat, rapporteur, a présenté un amendement, no 54, ainsi rédigé :

« Compléter le II de l'article 1er par l'alinéa suivant :

« Le principe de prélèvement raisonnable sur les ressources naturelles renouvelables s'impose aux activités d'usage et d'exploitation de ces ressources. En c ontrepartie de prélèvements raisonnés sur les espèces sauvages, les chasseurs doivent contribuer à la gestion équilibrée des écosystèmes. La chasse et les usages non appropriatifs de la nature doivent s'exercer dans des conditions compatibles. »

Sur cet amendement, MM. de Courson, André, Carré,

Mme Boutin, MM. Loïc Bouvard, Colombier, Doligé, D utreil, Drut, Estrosi, Grimault, Jacob, JeanClaude Lemoine, Le Nay, Marleix, Christian Martin, Martin-Lalande, Morin, Morisset, Quentin, de Robien et Sauvadet ont présenté un sous-amendement, no 180, ainsi rédigé :

« Supprimer la dernière phrase de l'amendement no

54. » La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement no

54.

M. François Patriat, rapporteur.

C'est l'amendement important que j'évoquais tout à l'heure et qui doit donner satisfaction à M. Baroin. Il légitime la chasse, comme l'ont souhaité les chasseurs, tout en rappelant qu'il peut y avoir un partage des espaces dans des conditions compatibles.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Favorable.

Le sous-amendement no 180, en revanche, ne me paraît pas acceptable et, s'il était adopté, je serais défavorable à l'amendement.

M. le président.

La parole est à M. Charles de Courson, pour défendre le sous-amendement no 180.

M. Charles de Courson. Ce sous-amendement a pour objet de supprimer la dernière phrase de l'amendement de M. Patriat : « La chasse et les usages non appropriatifs de la nature doivent s'exercer dans des conditions compatibles. » Même Mme Voynet est inquiète

! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Non.

M. Charles de Courson. Quel est le problème ? C'est que la chasse s'exerce actuellement dans un cadre légal...

M. Michel Bouvard. Tout à fait.

M. Charles de Courson. ... et que la rédaction proposée par l'amendement du rapporteur pourrait conduire à penser que les autres usages de la nature peuvent s'exercer librement. Or un tel point de vue participe d'une dangereuse logique de socialisation de la nature.

Il faut rappeler que, depuis la Nuit du 4 août,...

M. Alain Clary. Il y tient ! M. Charles de Courson. ... et c'est un principe constitutionnel, le droit de chasse est lié au droit de propriété.

Lorsque l'on chasse sur un territoire, il faut avoir un droit,...

M. Jean Michel. Une autorisation.

M. Charles de Courson. ... une autorisation, un bail, ou un accord du propriétaire, parfois gratuitement.

Même dans le cadre des ACCA, il était prévu un mécanisme d'indemnisation du propriétaire dont les terres sont intégrées dans une ACCA. Sinon, la loi Verdeille aurait été annulée pour non-respect du droit de propriété.

Nous nous sommes donc demandé avec beaucoup d'inquiétude en commission ce que voulait dire le rapporteur. Si cela veut dire que l'on peut se promener n'importe où, faire du VTT, de la moto ou que sais-je, ce n'est pas acceptable. C'est pour cela qu'il a semblé prudent à l'ensemble de l'opposition de supprimer la dernière phrase de l'amendement, qui sera une source de conflits et de brouillage des règles qui régissent actuellement la chasse.

Restent les deux premières phrases.

Vous avouerez, monsieur le rapporteur, que le texte est un peu abscons.

M. Christian Paul. Il n'y a pas que le texte !

M. Charles de Courson.

Je vous lis la première phrase :

« Le principe de prélèvement raisonnable sur les ressources naturelles renouvelables s'impose aux activités d'usage et d'exploitation de ces ressources. »

Vous me direz que l'on aurait pu sous-amender pour la rédiger autrement ! Tout le monde est d'accord sur le principe que des bons chasseurs doivent prélever uniquement la quantité permettant le renouvellement du cheptel à un niveau compatible avec les différentes ressources.

Sinon, cela veut dire que l'on gère mal et, à ce moment-là, le cheptel disparaît.

Quant à la deuxième phrase : « En contrepartie de prélèvements raisonnés sur les espèces sauvages, les chasseurs doivent contribuer à la gestion équilibrée des écosystèmes », nous sommes tous d'accord.

Nous avions soulevé en commission la question de la notion de gestion équilibrée des écosystèmes, pour bien préciser que les écosystèmes, incluaient notamment les activités agricoles et sylvicoles. Le rapporteur nous avait répondu que cela intégrait bien ces différents aspects.

J'aimerais, monsieur le rapporteur, pour que cela figure au compte rendu, que vous nous confirmiez cette interprétation de la notion d'écosystème et, dans ces conditions, si la dernière phrase était supprimée, et bien que le reste ne soit peut-être pas très bien rédigé, mais nos amis sénateurs se chargeront de réécrire tout cela, nous pourrions peut-être voter l'amendement.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur.

M. François Patriat, rapporteur.

Tout d'abord, je réponds positivement à la seconde question.

Pour la première, M. de Courson et Mme Boutin n'aiment pas les termes d'usages non appropriatifs, mais cela ne veut pas dire que tout le monde peut aller partout tous les jours. Certains propriétaires forestiers louent leur forêt pour des jours déterminés. En Côte-d'Or, par exemple, l'ONF loue la forêt de Citeaux ou la forêt d'Issur-Tille deux jours par semaine, qui ne sont pas le weekend, ce qui permet à tous de se promener le dimanche.

C'est cela, la comptabilité.. Chacun doit y penser, et quand un tel dialogue existe, il y a coexistence dans de bonnes conditions.

M. Eric Doligé.

La loi n'est pas faite seulement pour la Côte-d'Or !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

M. François Patriat, rapporteur.

J'ai donné un exemple ! Si vous ne faites pas la même chose chez vous, c'est dommage !

M. le président.

La parole est à M. Christian Jacob.

M. Christian Jacob.

Pour aller dans le même sens que

M. de Courson, la précision que vous venez d'apporter, monsieur le rapporteur, ne clarifie en rien le débat.

M. François Patriat, rapporteur.

Vous faites de la sémantique !

M. Christian Jacob.

Le fait que l'ONF ou d'autres définissent des journées de chasse précises, c'est de nature contractuelle et cela n'a rien à voir. Vous ouvrez la boîte de Pandore sur des activités comme la promenade, la circulation de 4 4 ou autre. Ce n'est pas suffisamment précis.

L'exemple que vous avez donné n'est pas un exemple, c'est contractuel. Lorsqu'on prend une chasse à bail, il peut être défini des journées précises, un type de chasse...

Cela n'a donc rien à voir ! Vous brouillez totalement les cartes et vous ouvrez une brèche qui va nous poser des problèmes, parce qu'un certain nombre de personnes mal intentionnées ou peu informées pourraient en conclure que d'autres activités peuvent être menées en même temps que la chasse, ce qui sera source de conflits. En fait, vous créer un conflit là où il n'y avait pas besoin d'en créer.

M. le président.

La parole est à M. François Sauvadet.

M. François Sauvadet.

Monsieur le rapporteur, la loi présente un caractère normatif. J'avoue que j'ai beaucoup de mal à comprendre ce que vous voulez dire dans votre amendement. Or la loi, pour être compréhensible par nos compatriotes, doit être simple, claire, lisible, accessible.

Vous semblez en sourire, monsieur Cochet, mais, pour que l'article 1er soit compris, vous devrez aller faire de l'explication de texte ! En tout cas, je trouve que cela pose le problème du travail du législateur car ce verbiage n'a aucun caractère normatif et, de surcroît, c'est incompréhensible. J'attire simplement votre attention sur cet aspect des choses.

Comme l'a souligné M. de Courson, « s'exercer dans des conditions compatibles », qu'est-ce que ça veut dire ?

M. Christian Jacob.

Compatibles avec quoi ?

M. François Sauvadet.

Compatibles avec quoi ? Avec qui ? Comment ? Je ne comprends pas ce verbiage.

M. Christian Jacob.

Il faut savoir raison garder, monsieur le rapporteur !

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 180.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

54. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de trois amendements, nos 58 rectifié, 146 et 284, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 58 rectifié, présenté par M. Patriat, rapporteur, MM. de Courson, Grimault, Jean-Claude Lemoine et Sauvadet est ainsi rédigé :

« Compléter le II de l'article 1er par les deux alinéas suivants :

« L'acte de chasse est un acte volontaire lié à la recherche, à la poursuite ou à l'attente du gibier, ayant pour but ou pour résultat la capture ou la mise à mort d'un animal appartenant à une espèce dont la chasse est autorisée.

« Les entraînements, concours et épreuves de chiens de chasse ou d'oiseaux de fauconnerie, autorisés par l'autorité administrative, ne constituent pas des actes de chasse. »

Sur cet amendement, je suis saisi de trois sousamendements, nos 370, 343 et 181.

Le sous-amendement no 370, présenté par M. Le Nay, est ainsi rédigé :

« Avant le dernier alinéa de l'amendement no 58 rectifié, insérer l'alinéa suivant :

« Les auxiliaires de chasse non armés, faisant fuir le gibier pour que d'autres le capturent, n'ont pas à être porteurs d'un permis de chasser. »

Les sous-amendements nos 343 et 181 peuvent être soumis à une discussion commune.

Le sous-amendement no 343, présenté par M. Mariani, est ainsi rédigé :

« Dans le dernier alinéa de l'amendement no 58 rectifié, après le mot "administrative", insérer les mots : "ainsi que les actes préparatoires et les actes des auxiliaires de chasse,". »

Le sous-amendement no 181, présenté par M. Le Nay, est ainsi rédigé :

« Compléter l'amendement no 58 rectifié par l'alinéa suivant :

« Au sens du présent article, l'acte de chasse ne comprend pas l'acte préparatoire à la chasse ; les auxiliaires de chasse ne réalisent pas d'acte de chasse. »

L'amendement no 146, présenté par MM. de Courson, André, Carré, Mme Boutin, MM. Loïc Bouvard, Colombier, Doligé, Dutreil, Drut, Estrosi, Grimault, Jacob, Jean-Claude Lemoine, Le Nay, Marleix, Christian Mart in, Martin-Lalande, Morin, Morisser, Quentin, de Robien et Sauvadet, est ainsi rédigé :

« Compléter le II de l'article 1er par les trois alinéas suivants :

« L'acte de chasse est un acte volontaire lié à la recherche, à la poursuite ou à l'attente du gibier, ayant pour but ou pour résultat la capture d'un animal appartenant à une espèce dont la chasse est autorisée.

« Au sens du présent article, l'acte de chasse ne comprend pas l'acte préparatoire à la chasse ; les auxiliaires de chasse ne réalisent pas d'acte de chasse.

« Les entraînements, concours et épreuves de chiens de chasse ou d'oiseaux de fauconnerie, autorisés par l'autorité administrative, ne constituent pas des actes de chasse. »

L'amendement no 284, présenté par M. Mariani, est ainsi libellé :

« Compléter l'article 1er par le paragraphe suivant :

« III. Il est inséré après l'article L. 220-1 un article L. 220-1-1 ainsi rédigé :

« L'acte de chasse est un acte volontaire lié à la recherche, à la poursuite ou à l'attente du gibier ayant pour but ou pour résultat la capture des espèces de la faune sauvage dont la chasse est autorisée.

« Au sens du présent article, l'acte de chasse ne comprend pas l'acte de préparation de la chasse et n'est pas accompli par les auxiliaires de la chasse.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

« Pour les chiens de chasse ou les oiseaux de fauconnerie, tous entraînements, concours, épreuves pouvant être autorisés par l'autorité administrative, dans le temps où la chasse est fermée ne s'assimilent pas à un acte de chasse. »

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement no 58 rectifié.

M. François Patriat, rapporteur.

Cet amendement vise à définir l'acte de chasse, comme l'ont souhaité les chasseurs. Nous avons enlevé l'acte préparatoire.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Le premier alinéa définit à nouveau l'acte de chasse. La jurisprudence l'a déjà largement fait, et précisément,...

M. Michel Bouvard.

C'est à la loi de le faire ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

... mais cette définition ne pose pas problème. Le second alinéa non plus. Je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée.

M. Michel Bouvard.

C'est le Parlement qui fait la loi, pas les tribunaux !

M. le président.

La parole est à M. Jacques Le Nay, pour soutenir le sous-amendement no 370.

M. Jacques Le Nay.

Il s'agit de permettre à des nonchasseurs qui aiment participer à des journées d'accompagnement, de prise de gibier, de battue de régularisation, de se retrouver quelques instants dans la nature sans permis de chasser.

Quand on fait des reprises de grands animaux, de grands gibiers, on voit souvent des scolaires ou des personnes âgées. Il est évident que cela ne serait plus possible sans ce sous-amendement qui permet de préciser les choses.

M. le président.

La parole est à M. Thierry Mariani, pour soutenir le sous-amendement no 343.

M. Thierry Mariani.

Ce sous-amendement vise à mieux définir la notion d'actes de chasse. Les actes préparatoires et les actes des auxiliaires de chasse ne constituent pas des actes de chasse par eux-mêmes.

M. le président.

La parole est à M. Jacques Le Nay, pour soutenir le sous-amendement no 181.

M. Jacques Le Nay.

Ce sous-amendement permettrait surtout d'éviter des contentieux. Il est évident que certaines actions comme faire le pied devraient être considérées comme des actes préparatoires pour définir ce qu'il y a dans une enceinte, ne pas aller chasser une laie suitée ou des animaux trop jeunes.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur ces trois sous-amendements ?

M. François Patriat, rapporteur.

La commission est défavorable aux sous-amendements nos 370 et 343. Elle n'a pas examiné le sous-amendement no 181.

Pourquoi, M. Le Nay vise-t-il les actes préparatoires à la chasse et pas les actes postérieurs ? Il y a avant la chasse et après la chasse. C'est un peu stendhalien, pour revenir à l'amour dont parlait tout à l'heure M. de Courson. L'acte préparatoire est un concept et non un acte particulier. Il s'agit en fait des actes antérieurs à la recherche effective du gibier.

Quant aux auxiliaires, cela vise deux catégories de personnes : les rabatteurs et les déterreurs. Aujourd'hui, un rabatteur qui accompagne n'a pas besoin de permis de chasser. Par contre, s'il court après le gibier pour l'attraper, c'est un acte de chasse et il doit avoir un permis.

Je suis donc défavorable à ce sous-amendement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Défavorable, mais je voudrais revenir sur l'amendement no 58 rectifié pour expliquer mes réticences.

Le premier alinéa définit l'acte de chasse comme « un acte volontaire lié à la recherche, à la poursuite ou à l'attente du gibier, ayant pour but ou pour résultat la capture ou la mise à mort d'un animal appartenant à une espèce dont la chasse est autorisée. »

On ne peut pas nier que la capture ou la mise à mort d'un animal dont la chasse ne serait pas autorisée correspond aussi à un acte de chasse qu'on peut d'ailleurs qualifier de braconnage. Il se trouve que le braconnage, dans le code pénal, est défini comme la chasse en temps prohibé.

M. Michel Bouvard.

Sauf si un animal menace les troupeaux ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Je proposerai éventuellement un sousamendement pour remplacer les mots « animal appartenant à une espèce dont la chasse est autorisée » par les mots « animal sauvage ».

M. le président.

On reviendra tout à l'heure sur cette modification, madame la ministre.

La parole est à M. Charles de Courson, pour défendre l'amendement no 146.

M. Charles de Courson.

Cet amendement, déposé par les trois groupes de l'opposition, a pour objet de sortir d'une situation juridique qui n'est pas bonne. Vous connaissez tous le code rural et vous savez que le seul texte législatif qui détermine aujourd'hui l'acte de chasse figure dans l'article L.

222-27 du code rural sous la rubrique « chasse maritime ». Je vous lis le dernier alinéa :

« Elle a pour objet, dans les zones définies au 1er alinéa, la poursuite, la capture ou la destruction des oiseaux et autres gibiers. »

Nous avons donc essayé de clarifier le débat.

En commission nos collègues ont été d'accord pour adopter le premier et le troisième alinéa proposés, qui sont devenus l'amendement no 58 rectifié, mais il y a eu un long débat sur le deuxième alinéa, qui a deux aspects : le problème de l'acte préparatoire à la chasse et le statut des auxiliaires de chasse, d'où les sous-amendements Le Nay.

L'acte préparatoire à la chasse, je crois, mes chers collègues, qu'il faut tout de même le définir. Des personnes en déplacement pour commencer l'acte de chasse mais ne l'ayant pas encore commencé ne doivent plus être verbalisées. C'est donc une précision utile.

Quant aux auxiliaires de chasse, le sous-amendement Le Nay est assez précis : quand les rabatteurs ne sont pas armés, ils ne sont pas en acte de chasse, et ils n'ont pas être verbalisés s'ils n'ont pas de permis.

L'idéal serait donc de voter les sous-amendements nos 370 et 181, puis d'adopter l'amendement no 58 rectifié ainsi sous-amendé, ce qui permettrait de clarifier la situation des chasseurs par rapport aux non-chasseurs et de définir l'acte de chasse.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

M. François Sauvadet.

Voilà qui est clair !

M. le président.

La parole est à M. Jean-Claude Lemoine, pour soutenir l'amendement no 284.

M. Jean-Claude Lemoine.

Il est défendu. Il va tout à fait dans le même sens.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos 146 et 284 ?

M. François Patriat, rapporteur.

Je crois m'être déjà exprimé, monsieur le président.

Sur le premier alinéa, définition de l'acte de chasse, on est d'accord, ainsi que sur le troisième alinéa relatif aux concours, à la fauconnerie et aux épreuves sportives.

L'acte préparatoire, cela ne veut rien dire. A la limite, si M. de Courson parlait d'actes antérieurs à la recherche effective du gibier, je comprendrais, mais l'acte préparatoire, ça ne veut rien dire.

Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République.

Mais si !

M. François Patriat, rapporteur.

Mettre une carabine chargée dans sa voiture, c'est un acte préparatoire et ce n'est pas délictueux. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Hervé Morin.

C'est interdit !

M. Eric Doligé.

Vous n'avez jamais chassé !

M. François Patriat, rapporteur.

Où commence l'acte préparatoire, où s'arrête-t-il ? C'est comme le bonheur !

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Poursuivez, monsieur Patriat !

M. François Patriat, rapporteur.

La commission est défavorable à ces amendements.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Défavorable.

M. le président.

Je vous donne la parole, monsieur Jacob, mais soyez bref car je pense que l'Assemblée commence à être largement informée sur ce sujet.

M. Christian Jacob.

Je n'en suis pas convaincu, monsieur le président, à écouter M. le rapporteur.

Sur l'acte préparatoire de chasse, vous prenez, monsieur le rapporteur, excusez-moi de vous le dire, des exemples un peu démagogiques.

Si vous saviez ce qu'est la chasse, monsieur Mamère, vous sauriez qu'on peut pas transporter un fusil chargé dans une voiture, qu'il doit être cassé, mis dans un étui et déchargé. Cet exemple est donc fatalement démagogique. Avant de vous intéresser à ce débat sur la chasse, vous auriez dû commencer par pratiquer et par accompagner les chasseurs. Vous sauriez un certain nombre de choses qui vous auraient permis d'éviter les dérapages auxquels on a pu assister tout à l'heure.

Faire le pied, monsieur le rapporteur, c'est un acte de préparation de chasse.

M. François Patriat, rapporteur.

Personne ne le remet en cause !

M. Christian Jacob.

Aller identifier le gibier ou se mettre au poste aussi. C'est la raison pour laquelle nous souhaitons apporter des précisions.

M. le président.

M. le rapporteur, accepterait-il de rectifier son amendement, no 58 rectifié, en ajoutant le mot

« sauvage » après le mot « animal », ou Mme la ministre propose-t-elle un sous-amendement ? Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Monsieur le président, j'ai indiqué par erreur qu'il s'agissait d'ajouter le mot « sauvage » après le mot « animal ». En fait, c'est après le mot « espèce ».

M. le président.

Je vois que plusieurs orateurs demandent la parole. Le fait que Mme la ministre intervienne n'ouvre pas automatiquement droit à intervention.

(Protestations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Patrice Martin-Lalande.

C'est un élément nouveau !

M. Michel Bouvard.

Certains sangliers sont à moitié sauvages !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur ce sous-amendement du Gouvernement à l'amendement no 58 rectifié ?

M. François Patriat, rapporteur.

Favorable.

M. Christian Jacob.

C'est un élément nouveau !

M. le président.

Monsieur Jacob, je veux bien que vous interveniez, mais faites-le calmement. Vous avez la parole, monsieur Jacob.

M. Christian Jacob.

Monsieur le président, je pensais que mon calme était légendaire dans cet hémicycle. (Rires sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

J'ai failli l'oublier, monsieur Jacob ! (Sourires.)

M. Christian Jacob.

Je désapprouve la proposition de Mme la ministre. Elle semble en effet impliquer que, lorsque des chasseurs réintroduisent du gibier d'élevage, on ne peut plus parler d'animaux sauvages. C'est restreindre le texte et interdire aux chasseurs de réintroduire du gibier. (« Non ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Patrice Martin-Lalande.

Si, il y a un sérieux risque !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. François Patriat, rapporteur.

M. Jacob, qui s'adonne pourtant volontiers à la sémantique, n'a pas compris : avec le sous-amendement du Gouvernement, il serait question « d'animaux appartenant à une espèce sauvage ».

Or, les faisans réintroduits appartiennent à une espèce sauvage : cela ne pose donc aucun problème pour eux.

M. Jean-Pierre Brard.

Exactement !

M. François Patriat, rapporteur.

De même, tout à l'heure, M. Jacob a pris de mauvais exemples. Loin de moi l'idée de remettre en cause certaines pratiques. Moi aussi, je fais le pied ; moi aussi, je vais me mettre au poste - rarement en voiture et plutôt à pied. Ce ne sont pas des actes préparatoires, et M. Jacob soulève de faux problèmes. Il fallait résoudre le problème des concours qui se déroulent en dehors de la période de chasse, celui de l'acte de chasser : nous l'avons fait l'ensemble. Restait celui des espèces sauvages. Nous sommes en train de le régler.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement oral du Gouvernement.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 370.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 343.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 181.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Nous revenons maintenant à l'amendement no 58 rectifié, sous-amendé, le mot « sauvage » ayant été ajouté après le mot « espèce ».

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Monsieur le président, nous n'avons pas seulement ajouté le mot « sauvage » : toute la fin de la phrase tombe.

Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République.

Ah non, madame, non, non !

M. Christian Jacob.

Cela n'a jamais été précisé ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Chasser une espèce de gibier qui n'est pas chassable, c'est toujours un acte de chasse. C'est d'ailleurs la définition du braconnage, qui se déroule quand la chasse est fermée.

M. François Patriat, rapporteur.

Il faut donc supprimer la fin de la phrase !

M. le président.

La phrase serait donc ainsi rédigée :

« L'acte de chasse est un acte volontaire lié à la recherche, à la poursuite ou à l'attente du gibier, ayant pour but ou pour résultat la capture ou la mise à mort d'un animal appartenant à une espèce sauvage. »

M. François Patriat, rapporteur.

C'est cela.

M. le président.

Si cela avait été clair, je n'aurais pas besoin, maintenant, de demander des précisions.

Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.

Mais nous avons déjà voté !

M. Christian Jacob.

C'est de l'approximation, et c'est fait dans la précipitation !

M. le président.

Il faudrait donc déposer un nouveau sous-amendement pour supprimer la fin de la phrase.

M. François Patriat, rapporteur.

C'est ce que nous allons faire.

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

C'est ce que nous allons faire. Monsieur le président, mes explications ont été extrêmement claires (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) et je pensais que vous aviez compris.

J'ai rappelé la définition du braconnage donnée par le code pénal.

M. Jean Michel.

Et le compte rendu en fera foi !

Mme Christine Boutin.

On ne sait plus où on en est !

M. Thierry Mariani.

Suspension de séance !

M. le président.

Dorénavant, je n'accepterai plus d'amendements verbaux.

M. Christian Jacob.

Très bien !

M. le président.

Il faudra préparer le travail et les rédiger. Nous allons cependant passer au vote sur ce sousamendement.

Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.

Mais il n'est pas écrit !

M. Hervé Morin.

Il n'est pas distribué !

M. Thierry Mariani.

Il n'est pas rédigé !

M. Jean-Pierre Brard.

Mariani, ce n'est pas toi qui présides !

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement oral du Gouvernement.

(Le sous-amendement est adopté.)

Rappel au règlement

M. Charles de Courson.

Rappel au règlement.

M. le président.

La parole est à M. Charles de Courson, pour un rappel au règlement.

M. Charles de Courson.

Monsieur le président, si nous respections l'article 100, alinéa 2, du règlement, tout cela n'arriverait pas. Il stipule que « le président ne met en discussion que les amendements déposés sur le bureau de l'Assemblée ».

A deux reprises, nous avons violé cet alinéa 2 de l'article 100 du règlement. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

Laissez parler M. de Courson, qui nous fait une leçon sur le règlement.

M. Charles de Courson.

Chaque fois que, dans une assemblée, on commence à accepter des amendements verbaux...

M. André Billardon.

C'était un sous-amendement !

M. Charles de Courson.

... - ou des sous-amendements, peu importe -, on arrive au même résultat : on croit voter un texte, et on en vote un autre. Ce n'est pas acceptable.

M. Jean-Michel Ferrand.

C'est ce qu'on appelle un amendement sauvage !

M. Christian Jacob.

C'est faire la bordure !

M. le président.

Monsieur de Courson, vous avez raison en ce qui concerne les amendements, mais vous devriez savoir aussi que l'on peut, en séance, sousamender oralement, rectifier un amendement ou un sousamendement. L'article que vous citez ne concerne que les amendements, pas les sous-amendements.

M. Félix Leyzour.

Eh oui !

M. Jean-Pierre Brard.

Ignorant !

M. Alain Clary.

C'est trois pages plus loin !

M. le président.

Toutefois, je répète au Gouvernement que, pour la clarté de nos débats, je n'accepterais plus, à l'avenir, de sous-amendements qui ne soient pas rédigés.

Cette faculté est laissée à la libre appréciation du président de séance.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

Reprise de la discussion

M. le président.

La parole est à M. Jean-Claude Lemoine.

M. Jean-Claude Lemoine.

Monsieur le président, j'aurais aimé m'exprimer avant le vote du sous-amendement ou de la proposition faite par Mme la ministre. En effet, elle a supprimé les mots « dont la chasse est autorisée », ce qui me paraît contraire à tout ce que nous souhaitons pour la préservation des espèces. Madame, imaginons que, dans n'importe quel département - le vôtre par exemple -, la fédération des chasseurs demande au préfet d'interdire pour une année la chasse aux lièvres ou aux perdrix, cette espèce y étant en voie d'extinction. Si l'on supprimait les mots : « dont la chasse est autorisée », cet arrêté serait sans objet et l'on pourrait toujours capturer et mettre à mort un animal appartenant à une espèce sauvage.

M. le président.

Avant de poursuivre notre débat, je rappelle à M. de Courson que l'article 98-3 dispose que

« le défaut d'impression et de distribution d'un amendement ne peut faire obstacle à sa discussion en séance publique ». Cela est laissé à la libre appréciation du président de séance.

J'essaie de simplifier un débat compliqué, et de faire en sorte que chacun, à droite comme à gauche, puisse s'y exprimer en toute liberté.

M. François Patriat, rapporteur.

Très bien !

M. Christian Jacob.

Vous n'êtes pas aidé par le Gouvernement !

M. le président.

Monsieur Jacob, je remercie par avance ceux qui veulent bien m'aider. (Sourires.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 58 rectifié, modifié par les sous-amendements oraux adoptés.

(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président.

En conséquence, les amendements nos 146 et 284 tombent.

Je mets aux voix l'article 1er , modifié par les amendements adoptés.

(L'article 1er , ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 1er

M. le président.

M. Patriat, rapporteur, a présenté un amendement, no 60, ainsi rédigé :

« Après l'article 1er , insérer l'article suivant :

« I. L'intitulé de la section I du chapitre I du titre II du livre II du code rural est supprimé.

« II. En conséquence, à l'article L.

224-11 du code rural, les mots : ", le Conseil national de la chasse et de la faune sauvage entendu," sont supprimés. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. François Patriat, rapporteur.

Cet amendement n'est pas anodin. Il vise en effet à supprimer le Conseil national supérieur de la faune sauvage en tant qu'organisme consultatif. Pour avoir eu l'occasion de participer à ses travaux, j'ai pu constater qu'ils n'étaient que très peu suivis d'effet. C'est la raison pour laquelle je propose que nous puissions créer à sa place, dans les jours ou les mois qui viennent, au fil des lectures du texte, un haut conseil de la chasse et de la faune sauvage où siégeraient des représentants du ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement, du ministère de l'agriculture, du ministère du tourisme, du ministère de l'équipement, des représentants suffisamment nombreux des chasseurs, des acteurs de la protection de la nature ainsi que les experts et usagers de la nature.

M. Jean Auclair.

C'est du bla bla !

M. François Patriat, rapporteur.

Pas du tout !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Cet amendement conduit à la suppression pure et simple du Conseil national de la chasse et de la faune sauvage. Quand il est sollicité, cet organisme consultatif, placé auprès du ministre chargé de la chasse, donne des avis sur les moyens propres à préserver la faune sauvage, à développer le capital cynégétique, dans le respect des équilibres biologiques, et à améliorer les conditions d'exercice de la chasse. Il est également chargé d'étudier les mesures législatives et réglementaires afférentes à ces objets. Ce Conseil est un lieu de réflexion, de consultation, que je considère très utile. Il a d'ailleurs son pendant dans chaque département, auprès des préfets.

D'après son expérience, François Patriat considère que ce Conseil ne fonctionne pas de façon idéale. Soit, mais, au lieu de le supprimer purement et simplement, je préférerais qu'on améliore son fonctionnement. Vous l'avez compris, le Gouvernement n'est pas favorable à l'adoption de cet amendement.

M. le président.

La parole est à M. Noël Mamère.

M. Noël Mamère.

Pour abonder dans le sens de Mme la ministre, nous considérons inacceptable la proposition du rapporteur. D'une part, le fonctionnement du Conseil national de la chasse et de la faune sauvage peut être amélioré ; d'autre part, et surtout, il n'est rien proposé d'autre.

M. François Patriat, rapporteur.

Si, un haut conseil...

M. Noël Mamère.

Non, le remplacement que vous proposez n'est pas inscrit dans le projet de loi. Nous considérons donc que vous supprimez purement et simplement une instance de régulation et de concertation. En outre, cela fait très exactement six heures que nous répétons, les uns et les autres, que la chasse a besoin de dialogue, de concertation. Or vous supprimez une instance qui a peutêtre des défauts, mais qui est la seule qui prône et permette la concertation.

M. le président.

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson.

Pour justifier la suppression de ce conseil supérieur, le rapporteur nous dit qu'il ne sert à rien...

M. Michel Bouvard.

Si l'on devait supprimer tout ce qui ne sert à rien...

M. François Patriat, rapporteur.

On commencerait par vous ! (Sourires.)

M. Charles de Courson.

... et qu'il faut le remplacer par un haut conseil. Il dit en même temps que sa constitution ne relève pas de la loi mais du domaine réglementaire. Il avait même développé initialement l'idée d'inscrire dans la loi un comité interministériel. Mais un comité interministériel relève de l'organisation interne du Gouvernement. Bref, monsieur le rapporteur, le Conseil


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

actuel permet tout de même à l'ensemble des partenaires concernés de donner des avis sur les textes qui nous sont soumis, ce qui est utile lorsque nous légiférons.

Certes, on peut aussi aller consulter toutes les parties prenantes, mais il est tout de même intéressant de connaître les différents arguments qui ont été échangés a u Conseil supérieur. Et surtout, cela permet d'avoir un avis sur tous les textes de nature réglementaire. Comment avons-nous connaissance des avant-projets de décrets d'application de la loi ? Grâce à la saisine du Conseil par le ministre. C'est ainsi que, sachant concrètement ce que le Gouvernement entend faire sur chacune des mesures, nous pouvons intervenir et lui dire éventuellement que ses projets ne sont pas acceptables. Ce Conseil est donc très utile pour le Parlement. On nous propose de le remplacer par un haut conseil, mais on ne sait qui y siègera, puisque le Parlement n'aura pas à se prononcer sur sa composition.

Mes chers collègues, vous nous proposez de renoncer à un mécanisme qui a le mérite de permettre un contrôle.

Libre à nous ensuite de faire notre miel de cet avis, dans un sens ou dans un autre d'ailleurs, mais au moins sommes-nous informés.

J'appelle votre attention sur le caractère dangereux de l'amendement proposé par M. Patriat.

M. Yves Cochet.

Exactement !

M. le président.

La parole est à M. François Liberti.

M. François Liberti.

Le rapporteur devrait préciser sa position. Le débat que nous avons eu en commission portait d'une part, sur l'amélioration de l'efficacité de la structure existante, le Conseil national de la chasse et de la faune sauvage, par son remplacement par une autre structure qui continuerait à donner un avis, d'autre part, sur l'élargissement de la structure pour que d'autres acteurs concernés par l'utilisation des espaces naturels puissent également donner leur avis.

Ces deux préoccupations sont dignes d'intérêt mais il conviendrait d'approfondir la question pour calmer les inquiétudes qui viennent d'être exprimées.

M. le président.

La parole est à M. Christian Bataille.

M. Christian Bataille.

Les arguments développés par le rapporteur nous paraissent tous valables. Je signale d'ailleurs que cet amendement a été adopté par la commission de la production et des échanges, y compris par ceux qui le contestent aujourd'hui. Le groupe socialiste soutient la position du rapporteur.

M. Noël Mamère.

Ça, c'est un argument !

M. le président.

La parole est à M. Jean-Claude Lemoine.

M. Jean-Claude Lemoine.

Monsieur le président, compte tenu des problèmes que pose l'amendement du rapporteur, je vous demande une suspension de séance de dix minutes. Nous en profiterons pour peser les avantages et les inconvénients de cette suppression.

M. le président.

La suspension est de droit,

M. Lemoine ayant délégation de son président de groupe.

Suspension et reprise de la séance

M. le président.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue le 29 mars 2000, à zéro heure vingt, est reprise à zéro heure trente.)

M. le président.

La séance est reprise.

La parole est à M. François Baroin.

M. François Baroin.

Le rapporteur propose la suppression du Conseil national de la chasse et de la faune sauvage. Nous ne comprenons pas très bien cette demande.

L e Gouvernement, lui, propose de maintenir ce conseil. Mais nous pensons que c'est pour une mauvaise raison. Il souhaite pouvoir consulter à sa guise et conserver la faculté de choisir. Ainsi, des décisions ont pu être prises, peut-être douloureuses, mais qui correspondaient à l'optique politique du Gouvernement - confer l'arrêt du Conseil d'Etat de juin 1999 sur l'Association des piégeurs agréés de France, dossier dans lequel le ministre a pu avancer. Il ne faut pas nier l'intérêt objectif sur le plan politique de saisir et de ne pas suivre.

Par la qualité de la représentation à parité entre les représentants de l'Etat et les organisations cynégétiques, ce conseil, organe consultatif et non organe de décision ou d'action - à ne pas confondre avec l'Office national de la chasse -, est utile par les recommandations qu'il peut proposer sur les textes, par sa capacité également, si ses recommandations et ses avis ne sont pas suivis, à saisir le Conseil d'Etat. Dans la logique du statu quo , la représentation à parité du Conseil national de la chasse et de la faune sauvage nous paraît aujourd'hui meilleure que la composition indéterminée d'un haut conseil national de la chasse. Le doute étant pour l'opposition la meilleure des garanties, nous préférons voter contre.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur.

M. François Patriat, rapporteur.

Monsieur Baroin, je vous ferai plusieurs réponses.

Premièrement, depuis le début de l'après-midi, je vous ai entendu suivre assez régulièrement les positions défendues par le monde de la chasse. Or, le monde de la chasse, par l'intermédiaire de ses représentants les plus éminents, approuve cette position.

M. Charles de Courson.

Non !

M. François Patriat, rapporteur.

Je vous donne l'avis que j'ai obtenu cette semaine encore.

Deuxièmement, je siège au CNCSF, qui est consulté avant l'élaboration d'une loi. J'ai, à ce titre, participé aux deux séances de travail au cours desquelles le CNCSF a examiné ce projet. Pendant deux jours, nous avons émis des avis, déposé des amendements. Eh bien, tout cela n'a servi à rien.

(« Ah ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Didier Quentin.

Il avoue !

M. Jean Besson.

A qui la faute ?

M. François Patriat, rapporteur.

Pourquoi ? Parce que cette structure est inadaptée à la consultation. Je propose donc un ONCSF élargi, avec un nombre élevé de représentants de chasseurs. L'ONC et le monde de la chasse pourront être consultés sans qu'il soit nécessaire de passer par un organisme inutile.

Monsieur de Courson, d'habitude, vous êtes économe des deniers de l'Etat opposé aux structures inutiles. Et voilà que, subitement, vous les défendez. Sans doute parce que vous voulez polémiquer.

(« Mais non ! » sur divers bancs du groupe de l'Union pour la démocratie franç aise-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

M. Jérôme Lambert.

Il n'économise pas sa salive en tout cas ! (Sourires.)

M. François Patriat, rapporteur.

Dernier argument, dans son rapport préliminaire, la Cour des comptes, que vous connaissez bien, a émis les plus extrêmes réserves sur la structure et sur le fonctionnement du CNCSF je vous renvoie à mon rapport.

Compte tenu de l'avis de la Cour des comptes, de l'avis du monde de la chasse et de mon expérience personnelle, je vous propose donc de remplacer le CNCSF, qui avait été créé par voie réglementaire, par un haut conseil de la chasse qui, lui, représenterait les différents ministères, les chasseurs, les non-chasseurs et les personnes compétentes pour avoir un avis qualifié.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Michel Bouvard.

C'est l'aveu !

M. François Patriat, rapporteur.

Mais dans le CNCSF aussi, il y a des non-chasseurs.

M. Michel Bouvard.

Combien seraient-ils dans le haut conseil de la chasse ?

M. François Patriat, rapporteur.

En conclusion, je maintiens mon amendement et je m'opposerai, bien entendu, aux amendements que vous avez déposés pour améliorer le CNCSF.

M. le président.

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson.

Mon cher collègue, d'abord je vous indique que le Conseil national de la chasse et de la faune sauvage apparaît à deux reprises dans la partie législative et non pas dans la partie réglementaire du code rural, dans le titre de la section première et dans l'article

L. 224-11. Votre amendement n'aurait pas de sens si le sujet était uniquement d'ordre réglementaire.

Ensuite, il n'est pas exact de dire, comme vous l'avez fait tout à l'heure, que les fédérations de chasseurs sont pour la suppression du CNCFS. Je viens de les rencontrer pour vérifier. De toute façon, qu'elles soient pour ou contre, c'est à l'Assemblée nationale - nous représentons le peuple - de décider. Je tenais malgré tout à rectifier vos propos.

Les fédérations de chasseurs ont une réaction pleine de bon sens, tout comme notre collègue Baroin tout à l'heure. Elle se demandent quelles sont vos intentions, monsieur le rapporteur. Vous voulez un haut conseil.

Soit, mais avec quelle composition ? Vous annoncez qu'il y aura des représentants de l'Etat. Heureusement ! Des représentants des chasseurs. Heureusement ! Et puis, des représentants d'autres catégories. Mais tout l'art de la composition réside dans le dosage. Aujourd'hui, nous connaissons la composition du Conseil, qui, je le répète, doit être consulté obligatoirement tant sur les projets de loi que sur les projets de textes d'application, décrets, arrêtés. Dans sa jurisprudence, le Conseil d'Etat a réaffirmé que la consultation du Conseil était une formalité substantielle. Et, à mon sens, pour le fonctionnement de l'Etat, c'est une bonne chose parce que les avis peuvent permettre d'éviter de faire des boulettes, ne serait-ce que dans les textes d'application.

Par ailleurs, vous me reprochez de ne pas être dans cette affaire économe des deniers de l'Etat puisque ce Conseil coûte de l'argent. Vous en êtes membre, êtesvous indemnisé, mon cher collègue ?

M. François Patriat, rapporteur.

Absolument pas !

M. Charles de Courson.

Bien, comme tous les autres membres d'ailleurs. Alors, ne l'accusez pas de coûter cher.

Au surplus, vous proposez de recréer un haut conseil. Je ne vois donc pas très bien où serait l'économie.

M. François Patriat, rapporteur.

Quatre millions de francs ! M. Charles de Courson. Je préfère garder une structure qui fonctionne - et c'est le cas du Conseil, contrairement à ce que vous indiquiez tout à l'heure - monsieur le rapporteur, que de créer un haut conseil dont nul ne connaîte ncore la composition. D'ailleurs, en attendant, le ministre ne serait plus éclairé par les avis des différentes parties prenantes, ce qui n'est pas du tout satisfaisant.

Il faut voter aujourd'hui contre cet amendement, nous reviendrons plus tard à cette question.

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. En écoutant l'intervention de M. le rapporteur, il ne m'a pas semblé qu'il était hostile au principe d'un organisme consultatif placé auprès du ministre chargé de la chasse. En revanche, je l'ai entendu contester la qualité et la crédibilité du travail aujourd'hui accompli par le Conseil.

Pour ma part, je ressens le besoin de consulter cet organisme sur des sujets souvent très techniques, qui ne relèvent pas uniquement de l'étude des mesures législatives et réglementaires.

Je proposerai volontiers au rapporteur de laisser le texte en l'état pour formuler dans des délais raisonnables - en tout cas avant la prochaine lecture par cette assemblée des propositions rénovant le décret relatif au Conseil national de la chasse et de la faune sauvage. Cela permettrait de mieux coller aux attentes des parlementaires et de pérenniser un lieu où les différents utilisateurs des milieux puissent répondre à des questions techniques afin d'éclairer les décisions des pouvoirs publics en la matière.

(« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Nous sommes en plein travail de commission. La parole est à M. le rapporteur.

M. François Patriat, rapporteur.

Je vous préciserai d'abord, monsieur de Courson, que le coût du Conseil s'élève à 1 % du prélèvement opéré sur les chasseurs. Or, tout à l'heure, vous avez dit qu'il fallait diminuer la pression sur les chasseurs.

M. Charles de Courson. Et le haut conseil ?

M. François Patriat, rapporteur.

Le haut conseil aura un intérêt tout autre, monsieur de Courson, dans la mesure où il mettra en place des politiques horizontales liant le ministère de l'environnement avec les autres ministères, pour tout ce qui concerne la chasse, les habitats et les milieux. Ce sera une structure beaucoup plus efficace car elle intégrera dans une vue d'ensemble toutes les missions que nous allons donner aux chasseurs, et elles sont nombreuses.

M. Eric Doligé. Et qui sera président du haut conseil ? François Patriat ! Compte tenu des éléments apportés par Mme la ministre, votre rapporteur ne peut que s'en remettre à la sagesse de l'Assemblée.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

60. (L'amendement n'est pas adopté.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

M. le président.

MM. Baroin, Lemoine et MartinLalande ont présenté un amendement, no 322, ainsi libellé :

« Après l'article 1er , insérer l'article suivant :

« Dans la section 1 du chapitre Ier du titre II du livre II du code rural, il est inséré un article L.

220-3 ainsi rédigé :

« Art.

L. 220-3. Le Conseil national de la chasse et de la faune sauvage constitue un organisme consultatif auprès des ministres chargés de la chasse, de l'agriculture et de la forêt. Il donne un avis obligatoire sur l'ensemble des projets de textes législatifs et réglementaires relatifs à la chasse et à la faune sauvage dans son ensemble.

« La composition du Conseil national de la chasse et de la faune sauvage est fixée par le décret en Conseil d'Etat, et comprend en nombre égal des représentants de l'Etat et des membres appartenant aux milieux cynégétiques proposés par la Fédération nationale de la chasse, ainsi que des représentants des organisations professionnelles de l'agriculture, de la forêt, de l'élevage et d'organismes scientifiques. »

La parole est à M. François Baroin.

M. François Baroin. En écoutant la proposition de Mme la ministre qui, vous avez raison, monsieur le président, relève plus du travail de commission que de la discussion en séance, je me suis dit que cet amendement pourrait lui offrir une solution. Il vise en effet à confirmer dans la loi, l'existence du Conseil national de la chasse et fixe sa composition à un nombre égal de représentants de l'Etat, de membres des milieux cynégétiques proposés par la Fédération nationale de la chasse et de représentants des organisations professionnelles de l'agriculture, de la forêt, de l'élevage et d'organismes scientifiques.

Cette proposition pourrait rapprocher M. le rapporteur et Mme Voynet, et je dois vous dire que nous serions très h eureux, au groupe du Rassemblement pour la République, de vous aider à dialoguer.

Mais le but poursuivi est surtout de mettre en place une procédure consultative qui permettrait un dialogue plus transparent entre l'administration et les usagers, et peut-être aussi plus contraignant pour la ministre. Je rappelle à cet égard l'arrêt du Conseil d'Etat intervenu en juin dernier à propos de l'Union nationale des fédérations départementales de chasseurs et l'Association des piégeurs agréés. Ces organismes avaient obtenu un avis favorable du Conseil national de la chasse, avis qui n'avait pas été suivi d'effet par le ministère.

Au fond, il nous faut apporter des clarifications et cet amendement nous donne l'occasion de trancher un débat, semble-t-il, assez confus de part et d'autre.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. François Patriat, rapporteur.

Comme tous les amendements de M. Baroin, cet amendement n'a pas été examiné par la commission car il a été déposé après qu'elle s'est réunie.

M. Christian Jacob.

C'est mieux que les sous-amendements oraux !

M. François Patriat, rapporteur.

Cela explique, monsieur Baroin, les quelques dérèglements qu'il y a dans la discussion aujourd'hui. Comme je n'ai pu consulter ni le Gouvernement ni la commission, je suis obligé à chaque fois de réagir à chaud.

M. Michel Bouvard.

La commission aurait pu se réunir avant la séance pour examiner ces amendements.

M. François Patriat, rapporteur.

Je regrette de ne pas avoir été suivi sur l'amendement précédent. Mais après tout, le CNCFS continuera de fonctionner : tant pis pour les chasseurs qui paieront, tant mieux pour vous qui avez souhaité son maintien.

Vous voulez aller plus loin en réservant le CNCFS, aux chasseurs et aux agriculteurs.

M. François Baroin.

Non !

M. François Patriat, rapporteur.

Il n'y aura plus de non-chasseurs, ni de personnalités compétentes. Vous voulez en faire une usine à gaz.

En outre, ces dispositions relèvent du domaine réglementaire.

A titre personnel, je suis donc totalement opposé à cet amendement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

La définition de la composition d'un organisme consultatif ne relève en effet pas de la loi.

Par ailleurs, la chasse n'est pas une compétence partagée entre plusieurs ministères. Elle est devenue en 1972, alors que M. Robert Poujade était ministre, une compétence du ministre de l'environnement.

M. Patrice Martin-Lalande.

Cela peut changer.

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Je ne voudrais pas que la pression de la méfiance ou l'ire que suscite chez vous la personnalité de la ministre vous conduisent à prendre des décisions qui pourraient ensuite s'appliquer à d'autres.

Je vous invite donc rejeter cet amendement.

M. le président.

La parole est à M. Christian Jacob.

M. Christian Jacob.

Une fois encore, monsieur le rapporteur, vous avez cherché à caricaturer les propositions que nous faisons. Si vous aviez pris le temps soit de lire l'amendement, soit d'écouter l'intervention de François Baroin, vous auriez su qu'il propose que le Conseil national de la chasse et de la faune sauvage... comprenne en nombre égal des représentants de l'Etat et des membres appartenant aux milieux cynégétiques.

M. François Patriat, rapporteur.

Et les autres ?

M. Noël Mamère.

Et les associations de protection de la nature !

M. Christian Jacob.

Qu'iraient faire les associations de protection de la nature dans ce conseil ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Noël Mamère.

Et voilà !

M. Christian Jacob.

Sont aussi prévus des représentants des organisations professionnelles de la forêt et de l'élevage et des organismes scientifiques. Ne doit-on pas faire davantage confiance aux organismes scientifiques qu'aux associations de défense de la nature ? D'autre part, il s'agit, monsieur Mamère, pour votre information, du Conseil national de la chasse...

M. Noël Mamère.

Et de la faune sauvage.

M. Christian Jacob.

... et de la faune sauvage. Les personnes qui ont vocation à intervenir à ce sujet...

M. Noël Mamère.

Parce que les associations de défense de la nature n'ont pas vocation à le faire ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

M. Christian Jacob.

Le Conseil national de la chasse, dans sa composition actuelle, ne comprend pas de représentant de ces associations. Or vous venez de voter le maintien de cet organisme. Vous voyez bien que vous êtes d'accord avec moi. Vous cherchez à faire du mauvais esprit.

M. Noël Mamère.

Et les associations indépendantes, et les associations agréées ?

M. Christian Jacob.

Je vais lire l'article R. 221-2 du nouveau code rural car M. Mamère semble avoir quelques difficultés, sans doute est-ce l'heure tardive.

Le Conseil comprend deux représentants du ministre chargé de la chasse, dont le directeur de la protection de la nature, membre de droit, ou leurs suppléants ; un représentant du garde des sceaux ; le directeur général des collectivités locales ; le directeur du budget ; le directeur chargé des forêts ; le directeur général de l'Office national des forêts ; sept représentants élus des régions cynégétiques définies à l'article R.

221-24 ; quatre membres d'associations ou de groupements représentant les différents types de chasse ; ...

M. Alain Clary.

Deux ratons laveurs !

M. Christian Jacob.

... six personnalités qualifiées en raison de leurs compétences cynégétiques ; deux représentants des collectivités locales ; quatre représentants des organisations professionnelles de l'agriculture ; le directeur des pêches maritimes.

Il n'est donc fait aucune mention de représentants d'associations de défense de la nature.

M. Noël Mamère.

Et que faites-vous des personnalités qualifiées ?

M. le président.

Monsieur Mamère, vous n'avez pas la parole ! Seul M. Jacob l'a pour l'instant.

M. Noël Mamère.

Qu'il ne m'interpelle pas alors !

M. le président.

M. Jacob ne vous interpelle pas.

M. Noël Mamère.

Ah, il ne m'interpelle pas !

M. Christian Jacob.

J'ai fait l'argumentation que je souhaitais faire. La composition proposée dans cet amendement permet de toucher l'ensemble des intervenants sur les questions de chasse et de faune sauvage, ce qui clarifie le débat que nous avons eu.

M. le président.

La parole est à M. Christian Bataille.

M. Christian Bataille.

Au sujet du précédent amendement, nous avons bien relevé l'intention du Gouvernement de redéfinir les choses d'ici à une prochaine lecture, et nous nous en félicitons. C'est dans cet esprit-là que nous avons pris position. Nous ne manquerons évidemment pas d'être attentifs à ce qu'il proposera lors des prochaines lectures.

Pour ce qui est de l'amendement 322, nous sommes pleinement de l'avis négatif exprimé par M. le rapporteur.

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Si M. Jacob veut citer des articles du code rural, qu'il les lisent en entier. Il a oublié de mentionner qu'un alinéa prévoit des représentants d'associations agréées au titre de l'article L.

252-1, choisis parmi l es organisations les plus représentatives. Et l'article L.

252-1, que vous connaissez évidemment par coeur, est relatif aux « associations ayant pour objet la protection de la nature et de l'environnement ».

M. le président.

La parole est à M. Noël Mamère.

M. Noël Mamère.

Les Verts suivront évidemment l'avis exprimé par Mme la ministre sur cet amendement. Mais je voudrais répondre à mon collègue Jacob qui ne cesse, intervention après intervention, de nous désigner comme les responsables de la caricature de ses propositions. Caricature pour caricature, monsieur Jacob, quand vous citez le code rural, ayez au moins l'honnêteté de le lire dans son intégralité. Reconnaissez que le Conseil de la chasse et de la faune sauvage comprend aussi des représentants d'associations agréées de protection de la nature.

M. Christian Jacob.

Mais non, cynégétiques !

M. Noël Mamère.

Mais la compétence cynégétique n'appartient pas simplement à ceux qui portent un fusul, elle appartient aussi à ceux qui s'occupent de la faune sauvage et ils n'ont pas forcément de fusil à la main.

M. le président.

La parole est à M. François Baroin.

M. François Baroin.

Madame la ministre, comprenonsnous bien. Il ne s'agit en aucune façon d'attaques personnelles. Ce n'est ni mon genre, ni l'esprit dans lequel le groupe RPR a participé aux travaux sur ce texte. Vous incarnez - et je ne comprends pas pourquoi vous vous en excusez - un mouvement politique qui n'a pas inscrit sur le frontispice de son siège la pratique de la chasse au quotidien.

M. Jean Michel.

Elle représente le Gouvernement, ici, mon cher !

M. François Baroin.

Et je ne nie pas que, parmi les écologistes, il y ait quelques chasseurs. En revanche, je suis convaincu que les défenseurs de l'environnement, au premier rang desquels se trouvent les chasseurs, peuvent trouver une place pleine et entière dans un débat démocratique où les uns et les autres se respectent.

Concernant l'amendement en tant que tel, on voit bien qu'il y a un flou. M. Patriat a visiblement un objectif : la création d'un haut conseil. Aujourd'hui, rien n'est prêt. Mme la ministre nous dit, une fois encore, qu'elle préfère attendre la deuxième lecture. Nous avons ici la possibilité de conforter l'existant qui peut donner pleine et entière satisfaction à condition que les objectifs et les avis du conseil soient respectés. Si la ministre nous donnait l'assurance dès ce soir qu'elle respecterait les avis du Conseil national, il n'y aurait plus tellement de difficultés. Il faudrait simplement procéder à un toilettage des d ispositions relatives à la composition générale du Conseil.

Quand M. Bataille nous dit qu'il est « pleinement » d'accord avec l'avis défavorable du rapporteur, le « pleinement » est donc probablement de trop, car il y a de réelles possibilités d'entente, à condition que chacun respecte ses engagements.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 322.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de quatre amendements, nos 25, 19, 22 et 221, pouvant être soumis à une discussion commune.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

L'amendement no 25, présenté par M. Bonrepaux et les membres du groupe socialiste, est ainsi rédigé :

« Après l'article 1er , insérer l'article suivant :

« Toute réintroduction de prédateurs en vue de contribuer à la conservation d'une espèce menacée d'extinction est précédée d'une étude visant à rechercher si une telle réintroduction serait efficace et acceptable. Cette étude doit notamment comporter :

« l'identification des territoires que l'espèce en question est susceptible d'investir ;

« la mention du seuil de viabilité de l'espèce ;

« le suivi génétique à mettre en place ;

« l'impact de la réintroduction sur les activités humaines, notamment économiques ;

« l'identification de l'ensemble des mesures de prévention et d'indemnisation à adopter, de leur coût et des autorités qui en assurente la responsabilité ;

« le consentement des populations concernées.

« A compter de l'entrée en vigueur de la convention relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l'Europe, il est procédé à la capture de tout animal réintroduit sans avoir respecté ces règles. »

Les amendements nos 19, 22 et 221 sont identiques.

L'amendement no 19 est présenté par M. Deprez ; l'amendement no 22 est présenté par M. Michel Bouvard et M. Ollier ; l'amendement no 221 est présenté par MM. Proriol, Meylan et Patriarche.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Après l'article 1er , insérer l'article suivant :

« L'introduction ou la réintroduction de prédateurs sur un territoire doit être précédée d'études approfondies pour établir si une telle opération serait efficace et acceptable.

« Ces études doivent notamment déterminer très précisémenent : le territoire où ces animaux sont susceptibles de se déplacer, le seuil de viabilité de l'espèce, le suivi génétique mis en place, l'impact sur les activités humaines et économiques, l'acceptation des populations concernées, le coût de toutes les mesures de prévention et d'indemnisation à adopter et les autorités qui en assurent la responsabilité.

« Il est procédé à la capture des animaux introduits sans respecter ces règles, notamment les ours slovènes introduits en 1996 dans les Pyrénées. »

La parole est à M. Augustin Bonrepaux, pour soutenir l'amendement no

25.

M. Augustin Bonrepaux.

Cet amendement, dont j'ai la faiblesse de penser qu'il est meilleur que les autres (Sourires), va peut-être provoquer quelques sourires. Mais je vous assure, mes chers collègues, que ce que nous subissons dans les Pyrénées, depuis maintenant quatre ans, ne nous fait pas rire, et encore moins les éleveurs et les bergers.

Les éleveurs des Pyrénées centrales, qui pratiquent un élevage extensif, ont certainement le revenu le plus faible de toute l'agriculture française : environ 70 000 ou 80 000 francs par an. Les bergers, quant à eux, qui sont de plus en plus rares, touchent un salaire de 5 000 à 6 000 francs par mois, et ils travaillent comme saisonniers pendant quatre ou cinq mois.

Or, depuis quatre ans, à la suite d'une expérience malencontreuse engagée par l'Etat, leurs conditions de travail, déjà difficiles, sont aggravées : on a eu la malheureuse idée de procéder à des lâchers de prédateurs, trois ours qu'on est allé chercher en Slovénie, comme si l'on ne pouvait pas se préoccuper d'abord des ours vivant dans les Pyrénées-Atlantiques. D'autant qu'en Slovénie, les ours provoquent moins de dégâts, parce que l'élevage, là-bas, dégage une plus forte valeur ajoutée, que les troupeaux sont beaucoup plus petits et qu'ils sont rentrés tous les soirs.

Pour que vous compreniez bien la situation, je ferai un historique en essayant cependant d'être bref.

En 1993, M. Barnier a passé une convention avec quatre communes de Haute-Garonne. Souhaitant réaliser un parc de vision, elles avaient pensé qu'il serait bon d'introduire des ours pour accroître la fréquentation.

Quatre ans après, le parc de vision n'est toujours pas réalisé et malheureusement, les ours ne sont plus chez elles mais chez nous ! (Sourires.)

M. Barnier s'était engagé à reprendre ces animaux sur simple délibération du conseil municipal, cette disposition f igure dans le document qui a été signé par les quatre communes. Mais les ours sont maintenant chez nous et on nous dit qu'on ne peut pas les reprendre ! De qui se moque-t-on ? En 1996, Mme Lepage a procédé, avec force médiatisation, au lâcher de ces ours, voulant montrer qu'elle réintroduisait une espèce menacée dans les Pyrénées. Ce fut présenté comme une expérience, dont, au bout de trois ans, on ferait le bilan. En mai dernier, ces trois ans ont passé. Personne n'a fait de bilan. Les services responsables de cette opération ne s'en sont pas préoccupés.

M. Michel Bouvard.

C'est vrai !

M. Augustin Bonrepaux.

L'été dernier a été difficile. Il a fallu être constamment auprès des éleveurs et réclamer à la direction régionale de l'environnement d'intervenir.

Malgré la mobilisation de l'équivalent de deux compagnies de gendarmerie, de douze agents de l'ONC et de l'ONF pour protéger les troupeaux. 200 moutons et deux poulains ont été tués. En une saison, deux ours slovènes ont provoqué davantage de dégâts que les six ours des Pyrénées pendant six années.

A la suite de ces incidents, non avons conclu qu'il nous appartenait à nous élus, représentants des Pyrénéens, de faire ce bilan. Et nous l'avons fait. Vous connaissez le lourd travail des députés, j'ai dû consacrer plusieurs après-midi à auditionner les gens et à examiner les documents pour savoir exactement si cette expérience avait été réalisée avec toute la légalité qu'on prétendait.

J'ai découvert des choses stupéfiantes.

Premièrement, cette opération n'a pas été précédée d'études. Or la convention de Berne prévoit que toute introduction d'espèces doit être précédée d'études tendan t à démontrer le caractère acceptable et efficace de l'opération.

Deuxièmement, les moyens de suivi génétique dont on nous avait vanté l'efficacité n'ont pas été mis en place.

On nous avait promis des résultats rapides. Depuis des mois, alors que tous les échantillons sont réunis, nous n'avons pas de résultat. Les responsables de cette opération - je reconnais, madame la ministre, que vous n'y êtes pour rien - n'ont en fait pas prévu de suivi génétique ? Cela aurait pourtant permis de connaître les déplacements des animaux.

Enfin, on nous a toujours dit que cette opération avait l'aval des plus grands scientifiques. C'est faux ! D'éminents scientifiques nous on fait remarquer qu'ils auraient procédé différemment. D'ailleurs ce sont leurs préconisations que je reprends dans cet amendement.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

Cela vous intéressera sans doute, mes chers collègues, de savoir que cette plaisanterie a coûté chaque année 5 millions de francs, uniquement pour deux ours !

M. Michel Bouvard.

Et voilà !

M. le président.

Monsieur Bonrepaux, veuillez poursuivre.

M. Augustin Bonrepaux.

Mais comme nous sommes responsables, nous avons cherché ce que coûterait, en Ariège, une limitation de la prédation. Et nous l'avons fait évaluer par notre fédération pastorale. Cela représente 40 millions en investissement et 9 millions par an en fonctionnement gardiennage des troupeaux, et plus généralement, tout ce qui permettrait de réduire la prédation.

M. Michel Bouvard.

Voilà ! C'est pareil pour les loups.

M. Augustin Bonrepaux.

Sur sept ans, cela représente 100 millions ! L'Etat, pour cette grande cause nationale, s'engage-t-il à consacrer 100 millions à l'élevage ariégeois ? J'ai communiqué ce rapport. Pour l'instant, je n'ai pas reçu de réponse.

M. le président.

Monsieur Bonrepaux !

M. Augustin Bonrepaux.

Je vais terminer, monsieur le président.

M. Christian Estrosi.

C'est très important !

M. Augustin Bonrepaux.

J'ai proposé cet amendement pour qu'une telle plaisanterie ne puisse pas se reproduire.

M. Michel Bouvard.

Très bien !

M. Augustin Bonrepaux.

Je demande également, et c'est le dernier alinéa auquel je tiens beaucoup, que cette plaisanterie soit interrompue immédiatement. Il s'agit d'une introduction artificielle, que l'Etat a piloté. Il faut que l'Etat prenne ses responsabilités, reconnaisse ses erreurs et tienne ses engagements. Et puisqu'il avait promis de reprendre les ours, qu'il les reprenne ! (Applaudissements sur de nombreux bancs.)

M. le président.

L'amendement no 19 n'est pas défendu.

M. François Sauvadet et M. Jacques Le Nay.

Si ! La parole est à M. Michel Bouvard, pour soutenir l'amendement no

22.

M. Michel Bouvard.

Monsieur le président, cet amendement, dont vous êtes cosignataire, exprime la solidarité totale des élus des zones de montagne, toutes tendances politiques confondues, face au problème du retour des prédateurs.

Le retour des prédateurs, qu'il soit organisé, ce qui est le cas des ours dans une partie des Pyrénées, ou qu'il ne le soit pas, comme dans le massif alpin où l'on ne sait pas dans quelles conditions les loups sont revenus, est un vrai problème pour l'élevage traditionnel, une menace pour l'économie pastorale et il a un coût exorbitant pour le contribuable.

Augustin Bonrepaux vient d'indiquer quel était le coût de l'expérience « ours » dans les Pyrénées, et le coût des mesures de protection qu'il faudrait mettre en oeuvre pour protéger de ces ours les pasteurs.

On n'est pas sûr des conditions dans lesquelles le loup est revenu dans le massif alpin puisque la création d'une commission d'enquête parlementaire nous a été refusée alors qu'elle aurait permis d'aller au fond des choses, même si nos collègues Honde et Chevallier ont accompli un travail important et intéressant. Mais je peux vous dire que le coût de la protection des troupeaux dans le massif alpin contre le loup s'élèverait à 500 millions de francs environ puisque le seul coût chiffré par la direction départementale de l'agriculture de la Savoie, est de 61 millions de francs pour le seul département de la Savoie et que huit départements seront concernés lorsque ce prédateur sera en phase d'expansion totale ; or cela ne saurait tarder, puisque ce dernier est passé maintenant dans l'autre vallée voisine de la Maurienne et qu'il remonte progressivement vers la Suisse.

Il est grand temps que, au nom du vieux principe du droit de l'environnement qui consiste à apprécier le coût pour la collectivité du retour d'un prédateur par rapport à l'avantage qu'elle en tire, de mettre fin aux expériences de réintroduction artificielle des prédateurs. Il est évident que dans le cas de l'ours dans les Pyrénées comme dans le cas du loup dans le massif alpin, le rapport côut n'est plus équilibré.

Au-delà, il conviendra de s'interroger sur la tolérance q u'on peut avoir vis-à-vis d'autres prédateurs qui menacent les équilibres écologiques dans les massifs montagneux, qui menacent le pastoralisme et l'agriculture, or comme l'a dit Augustin Bonrepaux, l'agriculture de montagne a les plus faibles ressources de l'agriculture française...

M. François Patriat, rapporteur.

Ce n'est pas le sujet de ce soir !

M. Michel Bouvard.

Si, parce que nous discutons d'un texte sur la chasse et la faune sauvage, parce qu'on vient de parler du Conseil supérieur et de la chasse et de la faune sauvage et parce que le problème des prédateurs figure dans le code rural ! Le code rural autorise des battues. Le loup comme l'ours, sont encore classés parmi les nuisibles dans le code rural ! On ne peut pas éluder un tel sujet qu'on a d'ailleurs peu souvent l'occasion d'évoquer. C'est un problème réel pour des territoires entiers de notre pays, pour des gens qui y habitent depuis des siècles et qui ont le droit d'y vivre, comme d'autres ont le droit de vivre avec un certain confort dans les zones urbaines.

Voilà pourquoi nous avons déposé cet amendement avec notre collègue Augustin Bonrepaux. Nous soutenons cette position parce que,...

M. François Patriat, rapporteur.

Vous voterez la loi ?

M. Michel Bouvard.

... comme l'avait dit un ministre de l'agriculture au début de la IIIe République, il y va de l'intérêt de notre agriculture et de notre trésor ! (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement

pour la République, du groupe de l'Union pour la Démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Paul Patriarche, pour défendre l'amendement no 221.

M. Paul Patriarche.

Dieu merci, il n'y a pas d'ours chez moi !...

M. Jean-Pierre Brard.

Et pourtant, il y en a même dans Paris !

M. Paul Patriarche.

... mais je me suis associé à cet amendement par solidarité avec M. Bonrepaux et parce que j'habite une région de bergers.

M. le président.

Je vois que vous demandez la parole, monsieur Bataille. Mais vous soutiendrez plus tard...

M. Christian Bataille.

Je voulais demander cinq minutes de suspension de séance.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

M. Christian Estrosi.

Il y a des sous-amendements !

M. le président.

Je suggère que nous en terminions d'abord avec la discussion de ces amendements.

Quel est donc l'avis de la commission ?

M. François Patriat, rapporteur.

La commission a adopté l'amendement no 1 de M. Bonrepaux et repoussé son amendement no

25.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Je comprends tout à fait les exigences nouvelles exprimées aux deux premiers alinéas de l'amendement no 25 et, d'une certaine façon, je les partage.

M. Bonrepaux a raison de souligner qu'on a parfois été léger par le passé en réintroduisant des prédateurs pour contribuer à la conservation d'une espèce menacée d'extinction.

S'il est indispensable de tenir les engagements qui avaient été pris, notamment quand les animaux gênent les activités des régions concernées, il est difficile de poser un principe général de capture des animaux introduits, avec un effet rétroactif à partir de 1990, alors que les règles ne sont pas encore précisées puisqu'elles figureront dans le texte que l'on est en train de discuter.

J'ai déjà dit à plusieurs reprises à Augustin Bonrepaux, notamment lors de la réunion du Conseil national de la montagne à Ax-les-Thermes, qu'il était indispensable de répondre aux inquiétudes des agriculteurs et des éleveurs dont le bétail est détruit...

M. Michel Bouvard.

Massacré ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

... par deux animaux qui n'ont pas un comportement normal.

Mme Christine Boutin.

Si ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Non, dans la mesure où ils n'ont pas peur des êtres humains.

Mme Christine Boutin.

Et alors ? Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Ce n'est pas un comportement considéré comme normal pour un animal sauvage.

Il me paraît donc difficile d'être favorable au troisième alinéa, qui pose un principe général pour deux ours slovènes réintroduits en 1996.

M. le président.

Avant de suspendre la séance je vais donner la parole aux trois orateurs qui veulent s'exprimer, afin que l'Assemblée soit parfaitement informée.

La parole est à M. Augustin Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux.

Je voudrais d'abord répondre au rapporteur et lui demander d'être un peu plus clair dans ses explications.

Monsieur le rapporteur, relisez l'amendement no 1 : il concerne des espèces, non des prédateurs ! Je sais que vous voulez le sous-amender par les mots

« espèces prédatrices », mais je ne suis pas d'accord ! Je m'opposerai à un tel sous-amendement et je retirerai, s'il le faut, l'amendement no 1 ! Il ne faut pas dire ici que la commission a réglé le problème avec l'amendement no

1. En outre, je vous ferai remarquer que j'ai déposé l'amendement no 25 avec les membres du groupe socialiste. J'ai insisté sur le fait que l'introduction d'ours s'était faite en violation des dispositions de la convention de Berne qui régissent de telles opérations. Madame la ministre, il ne faut pas dire aujourd'hui : « Si on n'a pas respecté la convention de Berne, ce n'est pas ma faute ! » Trois ours, qui se sont d'ailleurs multipliés, ont donc été introduits de façon illégale. Or quand on constate qu'une opération a été faite de façon illégale, par exemple un remonte-pente ou une autoroute sans étude d'impact préalable, on a l'obligation d'arrêter les travaux, voire de démolir les constructions. Je demande en l'espèce que puisque cette introduction était illégale, on remette le terrain dans l'état où il se trouvait, c'est-à-dire qu'on retire tous les animaux introduits ! Monsieur le rapporteur, soyez donc fidèle à l'esprit de mes amendements. Quant à vous, madame la ministre, vous comprendrez que je refuse de retirer cet amendement.

(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Noël Mamère.

M. Noël Mamère.

Nous comprenons la position de notre collègue Bonrepaux concernant les problèmes spécifiques à l'Ariège et nous aurions pu voter l'amendement no 1, à condition qu'il accepte le sous-amendement de la commission.

En revanche, nous ne pouvons pas accepter l'amendement no 19 ni l'amendement no 25 parce qu'ils introduisent des dispositions trop restrictives s'agissant de la réintroduction d'espèces sauvages.

M. Michel Bouvard.

Quel aveu !

M. Noël Mamère.

Pour une raison très simple, monsieur Bouvard, que je vais vous dire en quelques mots, en essayant d'être un peu plus bref que vous : nous sommes attachés à la biodiversité et on ne peut pas parler de faune sauvage si l'on ne respecte pas, si l'on ne renforce pas cette biodiversité sur notre territoire.

J'en viens au phénomène que vous avez évoqué concernant les loups. A vous entendre, la présence du loup dans notre pays est un problème très grave. Mais il y a 32 loups en France, contre plus de 900 en Espagne et plus de 600 en Italie.

M. Christian Estrosi.

C'est faux !

M. Noël Mamère.

Et ni l'Italie ni l'Espagne ne se sont engagées dans des politiques aussi drastiques que celle que nous proposons pour éliminer le loup. Rappelons enfin que le loup n'a pas été « réintroduit », puisqu'il n'a jamais réellement quitté le territoire français.

Monsieur Bouvard, vous avez parlé de prédateurs dont la présence déséquilibrerait le système écologique. Avant de parler d'espèces prédatrices qui viendraient troubler le système écologique, il faut rechercher des causes plus profondes à la rupture du système écologique dans notre pays ; je pense en particulier à un type d'agriculture plutôt intensive, qui a contribué à artificialiser la nature.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Christian Estrosi.

Mais non, enfin ! Pas en montagne !

M. Noël Mamère.

Et si l'on devait continuer, monsieur Bouvard...


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

M. Michel Bouvard.

Il ne faut pas dire n'importe quoi !

M. le président.

Monsieur Bouvard !

M. Noël Mamère.

Monsieur Bouvard, vous savez aussi bien que moi que si vous regardez la réalité d'une certaine agriculture française...

M. Michel Bouvard.

L'agriculture intensive dans les Alpes ? J'ai déjà entendu des imbécillités, mais à ce point là, rarement !

M. Noël Mamère.

Vous avez le droit de dire ce que vous voulez. Et contrairement à vos collègues, je ne demande pas d'interruption de séance, car je ne me sens pas insulté lorsque vous me traitez d'imbécile.

M. Michel Bouvard.

Je ne vous ai pas traité d'imbécile.

J'ai dit que vous aviez dit une imbécillité !

M. le président.

Gardez votre calme, chers collègues ! Ecoutez M. Mamère.

M. Noël Mamère.

J'ai encore un peu d'humilité et de capacité d'analyse de moi-même. Chacun à ses limites, monsieur Bouvard, vous en avez, j'en ai. Simplement, vous ne pouvez pas nier l'évolution de l'agriculture française, et en particulier celle du pastoralisme, qui est passé d'une forme extensive à une forme intensive. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Michel Bouvard.

Mais enfin...

M. Noël Mamère.

Et s'il y a tant de dégâts aujourd'hui, c'est que les troupeaux ont atteint une taille extraordinaire, qui ne permet plus un véritable pastoralisme.

(Vives protestations sur les mêmes bancs.)

Vous pouvez retourner le problème dans tous les sens, cela n'y changera rien. Vous pouvez faire comme si la nature n'était pas artificialisée, vous pouvez faire comme si l'agriculture d'aujourd'hui était celle du dix-neuvième siècle, vous pouvez faire comme s'il y avait dans ce pays 90 % d'agriculteurs, vous pouvez faire comme si le monde n'avait pas changé. C'est votre problème ! Mais ça, monsieur Bouvard, pardonnez-moi de vous le dire, ça s'appelle la réaction ! (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Mme Christine Boutin.

Et alors ?

M. le président.

Monsieur Mamère, je regrette, dans un tel débat, que la présidence doive être impartiale. Je vous conseillerai tout de même d'interroger les bergers haut-alpins, ou alpins de manière générale, sur un sujet qui, visiblement, mérite d'être approfondi.

La parole est à M. Christian Estrosi.

M. Jean-Pierre Brard.

Il va nous parler des loups sur la promenade des Anglais !

M. Christian Estrosi.

Monsieur le président, j'ai déposé trois sous-amendements, qui tendent à préciser qu'il s'agit à la fois de réintroduction naturelle et de réintroduction artificielle et à ajouter au mot « capture » le mot : « élimination ».

Je partage bien sûr, la colère de M. Bouvard, comme celle de M. Bonrepaux.

M. Jean-Pierre Brard.

Oui, mais la sienne était sincère ! (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Mme Christine Boutin.

Nous n'avons pas de leçon de sincérité à recevoir de vous, monsieur Brard !

M. le président.

Monsieur Brard, ce n'est pas la bonne manière d'accélérer le débat.

Poursuivez, monsieur Estrosi.

M. Christian Estrosi.

Je ne répondrai pas à M. Brard.

Je partage cette colère, monsieur le président. Je voudrais en expliquer quelques-unes des raisons et préciser pourquoi je propose d'ajouter au mot « naturelle » les mots : « ou artificielle ».

On a essayé de nous faire croire que les deux loups apparus pour la première fois en 1992 dans le massif des Alpes, dans le parc national du Mercantour, dans le vallon de Molière, au coeur de ma circonscription, étaient arrivés de manière naturelle - tenez-vous bien, mes chers collègues - par une voie empruntée depuis le parc des Abruzzes en Italie, à plus de cinq cents kilomètres de distance, sans laisser la moindre trace de leur passage dans la traversée de la ville de Gênes ou de l'autoroute de la vallée du Pô ! Depuis, le loup a proliféré dans l'ensemble du massif alpin, s'est développé dans le parc du Mercantour, dans les Alpes-de-Haute-Provence, dans les Hautes-Alpes, dans l'Isère et dans les Savoies. Et en quelques années, près de 5 200 brebis ont été égorgées ! Vous dites, monsieur le rapporteur, que ce n'est pas le débat d'aujourd'hui. Or je tiens à vous préciser que cette faune sauvage, sagement réintroduite depuis des années dans nos massifs alpins - bien souvent par les sociétés de chasse et par les fédérations de chasse -, est aujourd'hui atteinte. Je pense aux chamois, aux bouquetins ou aux chevreuils. Je pense aux mouflons, qui ont disparu. Ce grand prédateur qu'est le loup a perturbé les équilibres de la faune sauvage et les équilibres cynégétiques. C'est la raison pour laquelle ce débat a pleinement sa place aujourd'hui. Si, depuis 1992, les gouvernements quels qu'ils soient, l'Etat en général, les technocrates, qui ont utilisé nos parcs nationaux comme de véritables laboratoires d'expérimentation, ont essayé de nous faire croire qu'il s'agissait de retours naturels, c'était pour pouvoir s'appuyer sur la convention de Berne et protéger le loup.

Mais voilà, mes chers collègues, la convention de Berne comporte un article 9 qui prévoit une dérogation à cette protection, notamment « dans l'intérêt de la protection de la flore et de la faune ; pour prévenir des dommages importants aux cultures, au bétail, aux forêts, aux pêcheries, aux eaux et aux autres formes de propriété ; dans l'intérêt de la santé et de la sécurité publiques... »

Donc, le gouvernement français, dans le respect des règles européennes, dispose bel et bien des moyens nécessaires pour procéder à l'élimination tant du loup que de l'ours, si l'on devait considérer, même à tort, qu'il s'agisse de retours naturels. C'est la raison pour laquelle nous estimons que ces amendements et sous-amendements ont pleinement leur place dans ce débat et que l'Assemblée nationale doit les adopter.

M. le président.

Monsieur Estrosi, je vous rappelle que vos sous-amendements et les amendements dont vous parlez viendront en discussion ultérieurement.

M. Christian Estrosi.

Vous pourrez alors considérer que je les ai défendus, monsieur le président.

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Monsieur le président, j'ose à peine indiquer que nous sommes en train de nous égarer sur


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

des terrains peu concernés par le présent projet de loi.

Mais puisque M. Estrosi nous a invités à divaguer, je voudrais lui préciser que, par définition, la réintroduction est artificielle. Quand le phénomène est naturel, on parle d'un retour qui s'opère - et pour cause -, sans qu'on n'ait au préalable réalisé les études d'impact prévues par la convention de Berne.

M. Bonrepaux a cité de façon précise, complète, l'article 11 de cette convention. Je lui donne volontiers acte de l'ampleur des problèmes posés par la présence de deux ou trois ours, et je réitère l'engagement que j'avais pris de tout faire pour y remédier. Je m'étonne toutefois de la formulation très générale du troisième alinéa de son amendement. Il y a des espèces sauvages qui ont été réintroduites sans que cela pose problème à quiconque, sans études d'impact, par exemple le gypaète barbu. Va-t-on, sur la base de cet amendement, procéder à la capture de ces animaux qui ne posent pas de problème ?

M. Christian Estrosi.

Ils ne posent pas de problème, en effet.

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Il n'empêche que si vous votiez l'amendement proposé par M. Bonrepaux, on serait amené à procéder à la capture de ces animaux aussi.

M. Christian Estrosi.

C'est une divagation ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Ne pourrait-on pas trouver une formulation qui répondrait de façon plus spécifique au problème particulier qui est ici soulevé ? Quant au loup, monsieur Estrosi, encore une fois, on n'a pas essayé de vous faire croire à son retour miraculeux dans les Alpes. N'allez pas chercher dans X-Files ou dans d'autres feuilletons une vérité qui ne s'y trouve pas.

Toutes les études qui ont été faites montrent que le loup est revenu de façon naturelle. Nous avons à gérer ce retour qui pose, effectivement, de nombreux problèmes.

M. Christian Estrosi.

Vous les avez sortis des coffres pour les jeter dans le parc naturel. Vous avez refusé la création d'une commission d'enquête parce que vous aviez peur de la vérité ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Je vous rappelle qu'une concertation est en cours sur le programme proposé conjointement par le ministère de l'agriculture et de la pêche et le mien, pour permettre de concilier dans les meilleures conditions le pastoralisme et la présence de cette espèce sauvage.

M. Christian Estrosi.

Sûrement pas !

M. Noël Mamère.

Très bien !

M. le président.

M. Bataille a demandé une suspension de séance. Elle est de droit.

Suspension et reprise de la séance

M. le président.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à une heure vingt-cinq, est reprise à une heure trente-cinq.)

M. le président.

La séance est reprise.

M. Bataille nous a fait parvenir un sous-amendement, qui portera le numéro 400, à l'amendement no 25. Je vais en donner lecture.

M. Christian Estrosi.

Je voudrais également déposer un sous-amendement.

M. le président.

Eh bien, rédigez-le rapidement pendant que je lis. Tant qu'à faire on peut en prendre deux ! Ce sous-amendement est ainsi rédigé :

« Remplacer le dernier alinéa de l'amendement no 25 par la phrase suivante :

« Il sera procédé, compte tenu des perturbations qu'ils génèrent, à la capture des ours de Slovénie réintroduits en 1996, sans avoir respecté ces règles ».

Ne pourrait-on pas en améliorer la rédaction ?

Mme Christine Boutin.

Qu'est-ce que c'est que ce travail !

M. Jean Auclair.

Ils font ce qu'ils peuvent pour recoller les morceaux !

M. Christian Bataille.

Monsieur le président, répondant à votre souhait d'une rédaction dans un français correct, je propose le texte suivant :

« Compte tenu de la perturbation que génèrent les ours de Slovénie réintroduits en 1996, il est procédé à leur capture. »

M. Michel Bouvard.

Il faut préciser « dans les Pyrénées ».

M. le président.

Je ne veux pas me mêler de la rédaction du sous-amendement, mais je constate qu'il ne vise que ceux de Slovénie et je présume qu'ils n'ont été réintroduits que dans les Pyrénées. Ce n'est peut-être pas la peine de le préciser.

M. Christian Bataille.

Je veux bien ajouter : « Dans les Pyrénées,... (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. Jean Auclair.

C'est n'importe quoi ! Ont-ils une carte d'identité ? Comment va-t-on les distinguer des autres ?

M. le président.

Monsieur Auclair, je vous trouve bien nerveux ce soir.

M. Jean Auclair.

C'est n'importe quoi !

M. le président.

M. Bataille a le droit de présenter le sous-amendement qu'il entend, monsieur Auclair, et vous avez le droit de voter pour ou contre.

M. Jean Auclair.

Heureusement que le ridicule ne tue pas ! C'est impensable !

M. le président.

M. Estrosi, lui, a déposé un sousamendement qui prend le numéro 401 et qui tend à ajouter, au début de la première phrase du premier alinéa de l'amendement no 25, après les mots : « toute réintroduction », les mots : « naturelle ou artificielle ».

Quel est l'avis de la commission sur ces deux sousamendements ?

M. François Patriat, rapporteur.

Très rapidement : favorable au sous-amendement de M. Bataille ; défavorable au sous-amendement de M. Estrosi. (Murmures sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. Robert Lamy.

Simple, mais sectaire !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Même avis ! (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

M. le président.

La parole est à M. Eric Doligé.

M. Eric Doligé.

Malgré nos efforts, nous avons du mal à rester calmes dans ce genre de débat.

Je veux bien que le sous-amendement de M. Bataille vise les ours de Slovénie - ce qui suppose qu'on les a identifiés - introduits une année bien précise, mais le problème se posera de nouveau si l'on introduit, une autre année, des ours d'une autre origine, qui commettront les mêmes dégâts.

Il n'est pas sérieux de vouloir régler par un texte de loi une question concernant deux ou trois ours ! On n'a jamais vu ça. Apparemment, M. Bataille essaie de sauver le rapporteur et la ministre.

M. Bonrepaux avait déposé un amendement no 25 d'excellente qualité et nous avions bien compris son explication. Il a d'ailleurs été applaudi sur tous les bancs lorsqu'il l'a présenté. Or nous avons maintenant l'impression qu'il se met en retrait uniquement parce qu'on lui a donné une petite satisfaction. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Jean-Pierre Brard.

C'est mal le connaître !

M. Eric Doligé.

Il n'est pas sérieux de procéder ainsi.

C'est lamentable et pitoyable. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. Augustin Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux.

Je tiens à apporter une précision.

L'essentiel de mon amendement, c'est-à-dire les mesures qu'il préconise pour l'avenir avant toute réintroduction, demeure. Cela permettra de garantir la sécurité des populations et des activités socio-économiques.

Pour le passé, je ne connais qu'un fait anormal : l'introduction des ours de Slovénie dans les Pyrénées. En l'occurrence, on peut donc les citer pour corriger une erreur des services de l'Etat. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Eric Doligé.

Je vous donne rendez-vous dans cinq ans !

M. le président.

Mes chers collègues, je précise que M. Estrosi a également déposé deux autres sous-amendements portant sur le dernier alinéa de l'amendement.

Le premier tend à insérer, après le mot : « capture », les mots : « ou l'élimination ».

Le second propose d'insérer après le mot : « réintroduits », les mots : « de manière naturelle ou artificielle ».

Néanmoins ces deux sous-amendements tomberaient si celui de M. Bataille était adopté.

La parole est à Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin.

Je veux simplement souligner, à cette heure avancée de la nuit, monsieur le président, que les conditions dans lesquelles nous travaillons ce soir ne sont pas acceptables. Elles sont indignes de l'Assemblée nationale. Il n'est pas possible de légiférer sérieusement en travaillant de cette façon.

M. Bonrepaux a déposé un amendement, d'ailleurs signé par l'ensemble des membres du groupe socialiste, qui nous semblait intéressant. Or, pour une raison qui nous échappe totalement, est intervenue une suspension de séance à l'issue de laquelle il est proposé que l'amendement ne vise plus qu'une seule race. M. Bonrepaux a essayé de nous donner quelques explications, mais elle ne nous ont pas convaincus. Sans doute s'expliquent-elles par les remarques qui lui ont été présentées pendant la suspension.

En tout cas, monsieur le président, ce n'est pas une façon de travailler et je ne crois pas que cela soit conforme à l'honneur et à la dignité de l'Assemblée nationale.

(Murmures sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Je termine en me demandant, sous forme de boutade, si, en ne visant que les ours de Slovénie, nous n'allons pas instaurer un principe d'inégalité entre les races d'ours.

(Sourires.)

M. le président.

Madame Boutin, je reconnais volontiers que les conditions de travail sont pour le moins aléatoires. Celui que nous faisons en ce moment aurait dû être effectué en commission. Néanmoins je suis tenu, en tant que président de séance, de faire avec ce que l'on me donne.

Mme Christine Boutin.

Pauvre président !

M. le président.

Merci ! J'ose espérer que vos remarques ne tendent pas à mettre la présidence en cause.

Mme Christine Boutin.

Certainement pas, monsieur le président.

M. le président.

Cette précision a au moins le mérite d'apaiser mes inquiétudes.

(Sourires.)

M. Charles de Courson.

Nous avons un très bon président !

M. le président.

La parole est à M. Christian Estrosi.

M. Christian Estrosi.

Comme l'a souligné Mme Boutin, nous approuvions l'amendement généraliste de M. Bonrepaux, qui visait tous les phénomènes que nous connaissons...

M. Augustin Bonrepaux.

Il reste généraliste !

M. Christian Estrosi.

... que ce soit dans les Pyrénées ou dans les Alpes, et qui affectent à la fois le pastoralisme, l'équilibre cynégétique, l'équilibre de la faune et de la flore en général.

Avec le sous-amendement de M. Bataille, on va se limiter à un cas spécifique.

M. Augustin Bonrepaux.

C'est le droit du Parlement.

M. Christian Estrosi.

M. Bonrepaux l'approuve au motif que cela règle son problème pour le passé tout en laissant valable pour l'avenir le reste de son amendement.

Ayant ainsi très égoïstement (Protestations sur les bancs du groupe socialiste)...

M. Robert Lamy.

Magouille !

M. Jean Auclair.

Scandaleux !

M. Christian Estrosi.

... résolu le cas qui le préoccupait, il sacrifie les centaines de milliers d'habitants du monde rural qui connaissent des cas semblables, subissent les mêmes prédations, voient l'équilibre économique et social remis en cause dans leurs zones rurales.

Parallèlement, le rapporteur et la ministre rejettent sans explication mon sous-amendement qui tend simplement à préciser « naturelle ou artificielle », ce qui aurait permis de régler tous ces problèmes dans le massif des Pyrénées comme dans les Alpes.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

Permettez-moi donc de vous faire part de mon incompréhension, monsieur le rapporteur, madame la ministre. Les populations du monde rural de nos massifs apprécieront. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. Jean Auclair.

Ce n'est pas glorieux.

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 401 de M. Estrosi.

M. Christian Estrosi.

Monsieur Clary, attention à Péone !

M. Alain Clary.

Je le vote ! (Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 400 de M. Bataille.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président.

En conséquence, les deux autres sousamendements de M. Estrosi tombent.

M. Jean Auclair.

Heureusement que le ridicule ne tue pas !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 25, modifié par le sous-amendement no 400.

(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président.

En conséquence, les amendements nos 19, 22 et 221 tombent.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

2 DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI CONSTITUTIONNELLE

M. le président.

J'ai reçu, le 24 mars 2000, de M. Pierre Méhaignerie, une proposition de loi constitutionnelle tendant à introduire dans la Constitution un droit à l'expérimentation pour les collectivités locales.

Cette proposition de loi constitutionnelle, no 2278, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la l égislation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

3 DÉPÔT DE PROPOSITIONS DE LOI

M. le président.

J'ai reçu, le 27 mars 2000, de M. André Aschieri, et plusieurs de ses collègues, une proposition de loi tendant à la création d'une agence française de sécurité sanitaire environnementale.

Cette proposition de loi, no 2279, est renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 28 mars 2000, de M. Joël Sarlot et plusieurs de ses collègues, une proposition de loi visant à exonérer de TVA les productions discographiques et vidéographiques au profit d'actions humanitaires ou caritatives.

Cette proposition de loi, no 2280, est renvoyée à la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 28 mars 2000, de M. Roland Blum, une proposition de loi tendant à renforcer la lutte contre le révisionnisme et à permettre les poursuites à l'encontre des négateurs des génocides reconnus par la France ou u ne organisation internationale dont la France est membre.

Cette proposition de loi, no 2281, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'adminsitration générale de la République, en application de l'article l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 28 mars 2000, de M. Bernard Birsinger et plusieurs de ses collègues, une proposition de loi visant à instaurer une protection des personnels qui dénoncent des violences et mauvais traitements faits aux personnes prises en charge par les institutions sociales ou médicosociales.

Cette proposition de loi, no 2282, est renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 28 mars 2000, de M. Jean-Pierre Brard et plusieurs de ses collègues, une proposition de loi tendant à permettre une pleine réparation du préjudice subi par les victimes des spoliations nazies ou du régime de

« l'Etat français ».

Cette proposition de loi, no 2283, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 28 mars 2000, de Mme Nicole Catala et des membres du groupe RPR et apparentés, une proposition de loi portant organisation juridique de la coopération professionnelle entre époux.

Cette proposition de loi, no 2284, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 28 mars 2000, de M. Eric Doligé, une proposition de loi tendant à instaurer un régime dérogatoire aux règles d'autorisation d'exploiter un débit de boissons temporaire au profit des associations organisant des manifestations à caractère non sportif.

Cette proposition de loi, no 2285, est renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 28 mars 2000, de M. Alain Bocquet et plusieurs de ses collègues, une proposition de loi tendant à instituer une journée nationale du souvenir des victimes civiles et militaires de la guerre d'Algérie et des combattants du Maroc et de Tunisie.

Cette proposition de loi, no 2286, est renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 28 mars 2000, de M. François Loos, une proposition de loi relative à la désignation des représentants des communes de Paris, Lyon et Marseille dans les conseils communautaires des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre.

Cette proposition de loi, no 2287, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 28 MARS 2000

J'ai reçu, le 28 mars 2000, de M. Jean-Michel Marchand, une proposition de loi relative à l'exercice de la profession de psychothérapeute, à l'attribution et usage du titre.

Cette proposition de loi, no 2288, est renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 28 mars 2000, de M. Yves Bur, une proposition de loi relative à la taxe sur les salaires due par les employeurs relevant des bénéfices non commerciaux.

Cette proposition de loi, no 2289, est renvoyée à la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 28 mars 2000, de M. Jean-Pierre Michel et plusieurs de ses collègues, une proposition de loi relative à la reconnaissance du 19 mars comme journée nationale du souvenir et de recueillement à la mémoire des victimes civiles et militaires de la guerre d'Algérie et des combats du Maroc et de Tunisie.

Cette proposition de loi, no 2290, est renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 28 mars 2000, de M. Eric Doligé, une proposition de loi tendant à créer un délit de manipulation mentale.

Cette proposition de loi, no 2291, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 28 mars 2000, de M. Dominique Paillé, une proposition de loi tendant à anticiper la date de suppression du service national et à modifier le régime des reports d'incorporation pour contrat de travail à durée indéterminée.

Cette proposition de loi, no 2292, est renvoyée à la commission de la défense nationale et des forces armées, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 28 mars 2000, de M. Pierre Cardo, une proposition de loi tendant à instituer un crédit d'impôt relatif à certains travaux occasionnés par les tempêtes de décembre 1999.

Cette proposition de loi, no 2293, est renvoyée à la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 28 mars 2000, de M. Pierre Cardo, une proposition de loi tendant à étendre le champ d'intervention du fonds de prévention des risques naturels.

Cette proposition de loi, no 2294, est renvoyée à la commission de la production et des échanges, en application de l'article 83 du règlement.

4 DÉPÔT DE RAPPORTS

M. le président.

J'ai reçu, le 28 mars 2000, de M. François Goulard, un rapport, no 2295, fait au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan sur la proposition de loi de M. François Goulard et plusieurs de ses collègues, relative à la mise en place d'une véritable responsabilité pour faute de l'administration fiscale et d'un droit général d'indemnisation pour les contribuables (no 2218).

J'ai reçu, le 28 mars 2000, de Mme Marie-Hélène Aubert, un rapport, no 2296, fait au nom de la commission des affaires étrangères sur le projet de loi autorisant l'approbation du protocole de Kyoto à la conventioncadre des Nations unies sur les changements climatiques (ensemble deux annexes) (no 2183).

5

ORDRE DU JOUR

DES PROCHAINES SÉANCES

M. le président.

Aujourd'hui, à quinze heures, première séance publique : Election du président de l'Assemblée nationale, au scrutin secret à la tribune.

Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi, no 2182, relatif à la chasse : M. François Patriat, rapporteur, au nom de la commission de la production et des échanges (rapport no 2273).

A vingt et une heures, deuxième séance publique : Suite de l'ordre du jour de la première séance.

La séance est levée.

(La séance est levée le mercredi 29 mars 2000, à une heure cinquante.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT

TEXTES SOUMIS EN APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION Transmissions

M. le Premier ministre a transmis, en application de l'article 88-4 de la Constitution, à M. le président de l'Assemblée nationale les textes suivants : Communication du 23 mars 2000 No E 1429. - Livre vert sur l'établissement dans l'Union européenne d'un système d'échange de droits d'émission des gaz à effet de serre (COM [2000] 87 final).

No E 1430. - Proposition de règlement du Conseil portant suspension de certaines concessions prévues par l'accord européen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part,e t de la République de Lettonie, d'autre part (COM [2000] 129 final).