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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. PHILIPPE HOUILLON

1. Décision du Conseil constitutionnel sur une requête en contestation d'opérations électorales (p. 2987).

2. Responsabilité de l'administration fiscale. - Discussion d'une proposition de loi. (p. 2987).

M. François Goulard, rapporteur de la commission des finances.

DISCUSSION GÉNÉRALE (p. 2988)

MM. Marc Laffineur, Thierry Carcenac, Jean-Luc Warsmann, Jean Vila,

MM. Pierre Hériaud, Gilbert Gantier

Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget.

Clôture de la discussion générale.

L'Assemblée, consultée, décide de ne pas passer à la discussion des articles ; la proposition de loi n'est pas adoptée.

3. Ordre du jour de l'Assemblée (p. 2998).

4. Désignation d'un candidat à un organisme extraparlementaire (p. 2998).

5. Ordre du jour des prochaines séances (p. 2999).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. PHILIPPE HOUILLON,

vice-président

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures.)

1 DÉCISION DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL

SUR UNE REQUÊTE EN CONTESTATION D'OPÉRATIONS ÉLECTORALES

M. le président.

En application de l'article L.O. 185 du code électoral, j'ai reçu du Conseil constitutionnel communication d'une décision de rejet relative à une contestation d'opérations électorales.

C onformément à l'article 3 du règlement, cette communication est affichée et sera publiée à la suite du compte rendu intégral de la présente séance.

2 RESPONSABILITÉ DE L'ADMINISTRATION FISCALE Discussion d'une proposition de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de M. François Goulard et plusieurs de ses collègues relative à la mise en place d'une véritable responsabilité pour faute de l'administration fiscale et d'un droit général d'indemnisation pour les contribuables (nos 2218, 2295).

La parole est à M. François Goulard, rapporteur de la commission des finances, de l'économie générale et du plan.

M. François Goulard, rapporteur de la commission des finances, de l'économie générale et du plan.

Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat au budget, mes chers collègues, il m'appartient de vous présenter ce matin, au nom de la commission des finances, un rapport sur la proposition de loi relative à la mise en place d'une véritable responsabilité pour faute de l'administration fiscale et d'un droit général d'indemnisation pour les contribuables. Cette proposition est signée, je le rappelle, par l'ensemble des députés de l'opposition.

La commission, suivant en cela le rapporteur général, M. Didier Migaud, a décidé de ne pas procéder à l'examen des articles et, en conséquence, de ne pas formuler de conclusions, en application de l'article 94 de notre règlement. Je tenais à vous le dire d'emblée, comme je tiens aussi à remercier les services de la commission des finances de m'avoir assisté dans l'élaboration de ce rapport en me fournissant une analyse très pertinente de la législation et de la jurisprudence.

Le texte qui vous est soumis comporte plusieurs dispositions relativement modestes, de nature différente, mais inspirées par une même philosophie : rétablir l'équilibre entre le droit du contribuable et celui de l'administration, mieux affirmer le principe de la responsabilité pour faute de l'administration fiscale, et, partant, le droit à indemnisation du contribuable, corriger des dispositions abusives qui comportent pour le contribuable des sanctions ou des quasi-sanctions excessives.

Le premier point sur lequel il est proposé de modifier la loi fiscale est l'article 207 du livre des procédures fiscales. Cet article pose un assez curieux principe d'irresponsabilité de l'Etat dans le cas où une réclamation contentieuse est admise en totalité ou en partie. C'est anormal. Ce n'est pas parce que l'administration a reconnu son erreur que le droit à indemnisation éventuelle du contribuable doit être écarté par principe. Le mal peut être fait. La notification d'un redressement peut causer la défaillance d'une entreprise par exemple, et ce n'est pas une hypothèse d'école, c'est une réalité de tous les jours.

Le deuxième sujet abordé par cette proposition de loi est la nature de la faute entraînant la responsabilité de l'Etat. Au terme d'une jurisprudence subtile, sans doute susceptible d'évolution, mais aujourd'hui fixée, pour ne pas dire figée, le juge administratif exige une faute lourde de l'administration fiscale pour que le contribuable pénalisé ait droit à une indemnisation du préjudice qu'il a subi.

M. Jean-Luc Warsmann.

Absolument !

M. François Goulard, rapporteur.

Le contribuable, par hypothèse victime d'une erreur de l'administration, a déjà, vous le savez, du mal à trouver son juge. La répartition de compétences suivant la nature de l'imposition entre le juge judiciaire et le juge administratif comme juge de l'impôt, la compétence du juge judiciaire pour connaître de la régularité des actes de poursuite, la compétence du juge administratif pour les actions en dommages et intérêts, voilà qui simplifie sa tâche ! S'il parvient à faire valoir son bon droit après appel et pourvoi en cassation que lui aura sans nul doute opposés l'administration s'il a eu gain de cause en première instance, notre contribuable n'est pas quitte pour autant. Il lui faut engager une nouvelle action en responsabilité.

A ce stade, qui se mesure en années de procédures coûteuses, le juge administratif a choisi de lui opposer l'exigence d'une faute lourde : si l'administration s'est banalement trompée, commettant une faute simple dans les opérations d'établissement ou de recouvrement de l'impôt, le droit à indemnisation du préjudice subi dix ans plus tôt s'évanouit.


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Pourquoi cette exigence d'une faute lourde de la part de l'administration fiscale pour établir un droit à une indemnisation du contribuable lésé ? Pour une raison dont l'évidence n'échappe à personne : selon la jurisprudence, la tâche de l'administration fiscale est particulièrement complexe du fait de la multiplicité des textes applicables et de leur rapide évolution. Mes chers collègues, de quoi parle-t-on ? De responsabilité de l'Etat. Et qui fait la loi fiscale sinon l'Etat ? Pourtant, l'Etat voit sa responsabilité atténuée en matière fiscale parce que la loi qu'il fabrique lui-même est trop complexe pour être appliquée sans risque d'erreur.

Il est temps d'établir tout simplement la justice dans ce pays, car, si la justification d'une responsabilité atténuée de l'Etat est plus que sujette à caution, les préjudices subis par les contribuables peuvent être considérables.

Des centaines d'entreprises, chaque année, sont condamnées au dépôt de bilan à cause de redressements fiscaux infondés, qui entraînent l'inscription de privilèges du Trésor sur les actifs de l'entreprise, la défiance des créanciers et souvent, malheureusement, l'enchaînement fatal qui conduit à la faillite. Une mise en jeu plus facile de la responsabilité de l'Etat est probablement de nature à rendre son administration un peu plus attentive.

Autre point que cette proposition de loi entend corriger, l'iniquité, largement reconnue, du taux de l'intérêt de retard. Celui-ci, rappelons-le, n'est ni une pénalité ni une sanction. Il n'exprime que le prix du temps. Or, en dépit de la baisse considérable des taux d'intérêt dans notre pays depuis environ cinq ans, le taux de l'intérêt de retard en matière fiscale reste obstinément fixé à 0,75 % par mois, soit 9 % par an, c'est-à-dire plus que le taux de l'usure pour certaines catégories de crédits. En dépit des efforts de parlementaires de toutes tendances, sur tous les bancs de cet hémicycle, l'administation campe sur ses positions, comme si le souci de faire rentrer de l'argent dans les caisses publiques devait l'emporter définitivement sur celui de l'équité. Il est tout bonnement proposé d'aligner le taux de l'intérêt de retard sur le taux légal.

La proposition tend également à réviser à la baisse plusieurs taux de pénalités dites d'assiette, et en particulier la fameuse majoration automatique de 10 % lorsque le contribuable dépose sa déclaration ne serait-ce qu'un jour en retard. De la part d'une administration coutumière des retards les plus extravagants lorsqu'une formalité lui incombe, ce couperet est particulièrement sévère. Aussi est-il proposé de limiter à 5 % pendant les quinze premiers jours la pénalité applicable. Les pénalités d'assiette de 40 % et de 80 % sont, quant à elles, ramenées respectivement à 30 % et 60 %.

En revanche, et cela illustre l'intention des auteurs de la proposition, qui n'est pas, bien entendu, d'encourager en quoi que ce soit la fraude, mais seulement de protéger le contribuable, il n'est pas proposé de modifier la majorité de 80 % en cas d'activité occulte.

Dernier point, la proposition de loi, à l'instar de nombreuses initiatives parlementaires précédentes, restées d'ailleurs largement lettre morte, vise à améliorer la transparence du contrôle fiscal.

Le contrôle fiscal, évidemment nécessaire, est une arme formidable placée entre les mains de l'administration. Le doute plane parfois sur l'usage qui en est fait. De discrétionnaire, il peut facilement devenir arbitraire, quand il n'est pas détourné de son véritable objet.

L'absence de transparence fait aussi fréquemment soupçonner une tendance de l'administration à gonfler les chiffres de la fraude et ceux des résultats de ses contrôles.

L'écart entre les montants des redressements notifiés et celui des recouvrements effectifs est un vrai sujet d'interrogation.

Améliorer l'information sur le contrôle fiscal grâce à une mesure objective du taux de non-conformité des déclarations fiscales sous le contrôle d'une commission indépendante, voilà qui fait l'objet du dernier article de cette proposition de loi.

En définitive, les dispositions de cette proposition sont tout simplement inspirées par le bon sens et le souci de l'équité.

En voyant les choses a contrario, qui peut prétendre que l'irresponsabilité de l'Etat organisée par la loi est acceptable ? Qui peut affirmer qu'un préjudice grave subi par un contribuable ne doit pas être indemnisé au motif que la faute commise par l'administration était, si j'ose dire, banale et non pas lourde ? Qui peut tenir pour juste un taux d'intérêt de retard infligé au contribuable trois fois supérieur à celui que l'Etat s'applique à lui-même quand il doit de l'argent aux contribuables ? Qui peut dire, enfin, que l'information, en particulier de notre Parlement, sur les conditions d'exercice du contrôle fiscal est aujourd'hui satisfaisante ? Mes chers collègues, nous sommes certains à penser que l'administration n'a pas tous les droits. Nous sommes certains à penser que le droit du contribuable, le droit du citoyen est aussi respectable que celui de l'Etat. Nous sommes certains à penser que le législateur doit sans cesse veiller à ce que l'Etat n'abuse pas des pouvoirs que lui confère la loi.

Notre loi fiscale comporte de nombreuses manifestations d'abus de prérogatives de puissance publique. C'est, à notre sens, une profonde erreur et une profonde injustice de ne pas s'y attaquer dès aujourd'hui. Cependant, il est de mon devoir de rappeler, comme je l'ai fait en introduction, que la commission des finances a décidé de ne pas formuler de conclusions et de ne pas procéder à l'examen des articles. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

Discussion générale

M. le président.

Dans la discussion générale, la parole est à M. Marc Laffineur.

M. Marc Laffineur.

Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, cette proposition de loi vise à lutter contre le harcèlement administratif, l'abus de pouvoir et les vérifications à répétition dont nos compatriotes peuvent parfois être les victimes. Très simplement, il s'agit de reconnaître dans notre cadre juridique que l'administration fiscale peut faire des erreurs.

Conséquence de cette vérité simple à admettre, les fautes de l'administration fiscale doivent être réparées à la hauteur du préjudice moral ou financier qu'elles ont causé.

Ce texte va dans le sens de l'égalité, il va dans le sens de l'équité.

L'idée que l'administration peut faire des erreurs n'est pas en soi une idée neuve. Elle est déjà admise et appliquée dans la plupart des branches de l'action publique.

La jurisprudence administrative est explicite. Il existe une responsabilité administrative normale, dont l'intensité varie selon la gravité de la faute. Le principe de l'indemnisation des victimes des fautes administratives existe également, très logiquement.


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Cependant, ce raisonnement logique n'est pas parvenu jusqu'à l'administration fiscale, qui demeure très largement irresponsable juridiquement. Quand on prononce le mot faute, on pense aujourd'hui à la faute du contribuable. L'éventualité de la fraude autorise alors toutes les enquêtes, toutes les méthodes, souvent au mépris des droits du citoyen.

Cette situation est inacceptable.

Rien ne saurait justifier que l'on n'applique pas à l'administration fiscale les règles qui prévalent pour les autres administrations. De la même façon que l'on accepte le principe d'une responsabilité pour faute simple dans d'autres secteurs publics, on doit étendre ce principe au secteur fiscal, d'autant que les erreurs commises sont assez nombreuses, puisque 40 % des contentieux fiscaux se terminent à l'avantage des contribuables redressés à tort ou abusivement.

Prévoir et organiser une responsabilité de l'administration fiscale, en assortissant cette responsabilité d'indemnités, ne pourrait que rassurer ces contribuables sur le mode de fonctionnement du fisc et inciterait certainement l'administration fiscale à faire preuve de davantage de prudence.

J'ajoute que l'existence d'une possible responsabilité de l'administration fiscale corrigerait l'image qu'ont de c elle-ci nos concitoyens. Reconnaître que des abus peuvent être commis, en finir avec une totale impunité, indemniser les victimes des fautes, voilà des éléments que les contribuables apprécieraient, voilà des éléments qui renforceraient une certaine conception de la justice fiscale.

Aujourd'hui, il existe un verrou légal, l'article 207 du livre des procédures fiscales, qui empêche toute possibilité d'indemnisation à la suite de poursuites abusives ou de redressements injustifiés. Le juge ne peut donc pas étendre la jurisprudence qui est la sienne aux autres domaines de l'action administrative.

Avec la proposition de loi que nous étudions ce matin, nous donnerions une base légale à la responsabilité des services fiscaux. L'article 3 se traduira, en effet, par la possibilité d'engager cette responsabilité sur faute simple.

En faisant cela, nous ne ferions d'ailleurs qu'harmoniser le contentieux administratif, en soumettant le contentieux fiscal aux mêmes règles que les autres.

Très logiquement, l'actuelle proposition de loi rendra possible la reconnaissance d'un préjudice matériel ou moral résultant de la faute de l'administration fiscale. Le juge pourra donc ordonner le versement de dommages et intérêts, en faveur des contribuables poursuivis abusivement ou redressés à tort.

C'est fondamental. La charge psychologique d'un contrôle fiscal est déjà forte. Mais quand, en plus, cette démarche s'accompagne d'un harcèlement administratif ou d'un redressement injustifié, les conséquences sur l'activité du contribuable peuvent être terribles.

Bien sûr, dans de nombreux cas, les opérations se déroulent normalement, mais pour tous les abus qui sont commis, et même s'il n'y en avait qu'un, il est du devoir de la représentation nationale d'organiser la juste indemnisation des préjudices subis. D'autant qu'il existe en droit fiscal cette notion de bonne foi et de mauvaise foi, et que, là encore, on applique ces concepts à sens unique, puisqu'ils ne concernent que les contribuables. Cela sans se demander si certains agents de l'administration fiscale ne pourraient pas mériter, en certaines occasions, ces mêmes qualificatifs.

Enfin, les articles 4 et 5 de la proposition de loi reviennent sur les taux d'intérêt pratiqués par l'administration fiscale. Aligner l'intérêt moratoire sur le régime de l'intérêt légal me semble raisonnable. Le taux de 9 % pratiqué aujourd'hui est en effet en complet décalage avec le contexte économique et bancaire que nous connaissons.

Je considère également la révision du taux de majoration automatique comme un élément positif. La proposition de retenir un dispositif plus progressif me semble fondée et l'idée de commencer par un taux de majoration de 5 % est bonne, car elle souligne le fait que de petits retards ne sont pas à proprement parler des fautes.

Améliorer l'image de l'administration fiscale, harmoniser le contentieux administratif, appliquer une règle simple, la responsabilité pour faute, avec une conséquence logique, la réparation des préjudices subis, voilà bien les objectifs de ce texte.

Cette proposition de loi n'est pas un encouragement à la fraude, elle n'est pas un moyen d'éviter le redressement de ceux qui trichent. Non, elle a simplement pour but de garantir l'équité fiscale. Les procédures de redressement, si légitimes que soient ceux-ci, doivent aussi respecter certaines formes et certaines règles.

M. Jean-Luc Warsmann.

Absolument !

M. Marc Laffineur.

Dans le cadre de cette proposition de loi, est prévue la création d'une commission d'enquête statistique sur les contrôles fiscaux, afin de pouvoir déterminer les causes les plus fréquentes de non-conformité.

Là aussi, on touche à des notions importantes de transparence, de devoir d'information, de nécessité de réforme.

En fait, avec la discussion de ce texte, nous abordons la question de la modernisation de l'Etat et de ses rapports aux citoyens. C'est aussi une question d'état d'esprit. Cette proposition de loi, nos compatriotes l'attendent. Il s'agit d'affirmer qu'il existe un droit à indemnisation suite à des abus manifestes ou à des comportements fautifs de l'administration fiscale, comme c'est déjà le cas lorsque ces comportements émanent d'autres administrations. Au nom de l'égalité, du respect des droits des citoyens, je vous demande, mes chers collègues, d'adopter cette proposition de loi. Elle aura en plus le mérite de rendre notre administration fiscale plus souple, plus proche des contribuables, plus juste et plus équitable. A l'heure où se pose avec insistance la question de la réforme de l'Etat, voilà une occasion de commencer à répondre concrètement à cette exigence forte.

Bien entendu, le groupe Démocratie libérale votera cette proposition de loi et j'espère bien, madame la secrétaire d'Etat, que nous aurons votre appui.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance.)

M. François Goulard, rapporteur.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Thierry Carcenac.

M. Thierry Carcenac.

Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, dans le système fiscal déclaratif qui est le nôtre, l'administration fiscale a pour mission de s'assurer de la régularité des déclarations d'impôt, qui sont présumées exactes et sincères. Le contrôle fiscal est la nécessaire contrepartie de ce système.

Il permet de réprimer les comportements peu scrupuleux de certains contribuables. Il permet de rectifier les erreurs de déclarations. Il permet enfin de dissuader ceux qui, en son absence, seraient tentés de se soustraire à leurs obligations fiscales.


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Dès lors, dans un contexte national de baisse des impôts - baisse souhaitée et annoncée par le Premier ministre et le Gouvernement -, le consentement à l'impôt est plus que jamais l'un des piliers essentiels de la démocratie. C'est dans cet environnement qu'il convient de replacer la proposition de loi relative à « la mise en place d'une véritable responsabilité pour faute de l'administration fiscale et d'un droit général d'indemnisation pour les contribuables », présentée par les trois groupes de l'opposition. Elle m'apparaît fondée sur des motifs purement démagogiques.

M. Marc Laffineur.

Et voilà, ça commence ! La justice, c'est la démagogie !

M. Thierry Carcenac.

Les termes employés, « harcèlement du contribuable », « mauvaise foi des agents du f isc », « poursuites abusives », « malveillance fiscale »,

« irresponsabilité de fait », « véritable responsabilité », dénotent la volonté réelle de l'opposition de dénigrer les fonctionnaires...

M. Jean-Louis Idiart.

Très bien !

M. Jean-Luc Warsmann.

C'est scandaleux d'entendre cela !

M. Thierry Carcenac.

... et de se fondre dans l'air ambiant.

M. Jean-Luc Warsmann.

C'est vous qui avez mis les agents du fisc dans la rue ! Un peu d'objectivité !

M. Thierry Carcenac.

Deux ouvrages récents vont dans le même sens : Contribuables, vous êtes cernés, publié au Seuil ; La Traque fiscale, chez Albin Michel. Ceux-ci nous feraient douter que nous sommes dans un Etat de droit.

M. Marc Laffineur.

Il n'y connaît rien !

M. Thierry Carcenac.

Je précise que sur 31,2 millions de déclarations d'impôts, seulement 4 500 font l'objet d'un contrôle fiscal externe annuel, que sur 3,3 millions d'entreprises, 42 000 par an font l'objet d'une vérification de comptabilité...

M. Marc Laffineur.

Ce n'est pas le problème ! Ça n'a rien à voir !

M. Thierry Carcenac.

... et que seulement 800 plaintes fiscales sont déposées après autorisation de la commission des infractions fiscales. Il n'est donc pas surprenant de voir les groupes de l'opposition mobilisés pour sanctionner les délits sociaux, en réclamant plus de devoirs de la part de nos concitoyens et entonner le chant de « plus de droits » lorsqu'il s'agit des délits économiques.

M. Jean-Luc Warsmann.

C'est vraiment n'importe quoi !

M. Thierry Carcenac.

C'est ainsi : la roue tourne toujours dans le même sens.

M. Jean-Luc Warsmann.

Ce n'est pas le bon discours !

M. Marc Laffineur.

Il n'y connaît rien ! Son groupe lui a donné le mauvais discours !

M. Thierry Carcenac.

S'agissant de la responsabilité, l'expression « fraude fiscale », bien qu'aucun texte légal ne l'emploie, est consacrée par la doctrine et la jurisprudence. Le contribuable, outre l'avis de vérification, reçoit la Charte du contribuable, qui n'est pas un gadget qualifié de « cosmétique ayant peu d'effet », comme vous le dites. C'est un document, opposable à l'administration, qui donne des indications concrètes sur le déroulement du contrôle. Je rappelle que les procédures employées sont, dans leur grande majorité, contradictoires et que le contribuable contrôlé dispose de voies de recours diversifiées. En outre, comme toutes les activités administratives, le contrôle fiscal est soumis au contrôle du juge. Aussi, la procédure en deux temps qu'implique l'article L.

207 du livre des procédures fiscales pour la mise en jeu de la responsabilité de l'Etat en matière fiscale ne pose pas problème au juge chargé de l'appliquer.

Si la responsabilité fiscale déroge au droit commun, il n'en reste pas moins que la responsabilité des services fiscaux est presque toujours susceptible d'être engagée sur la base de la faute simple.

M. Jean-Louis Idiart. Tout à fait ! M. Thierry Carcenac. La responsabilité de l'Etat continue à être engagée sur le fondement de la faute simple pour des opérations qui ne se rattachent pas aux procédures d'établissement ou de recouvrement de l'impôt.

S'agissant de ces dernières, il faut rappeler que les erreurs commises par l'administration fiscale ne sont, en principe, en raison des difficultés que présente généralement leur mise en oeuvre, susceptibles d'engager la responsabilité de l'Etat que si elles constituent une faute lourde. Il en va différemment, cependant, lorsque l'appréciation de la situation du contribuable ne comporte pas de difficultés particulières. La jurisprudence relative à la responsabilité de l'Etat à raison des fautes commises par les services fiscaux connaît d'ailleurs une évolution analogue à celle des autres branches du contentieux.

M. François Goulard, rapporteur.

Ce n'est pas vrai.

M. Thierry Carcenac.

S'éloignant du principe de l'irresponsabilité de l'Etat, la jurisprudence a d'abord admis que la responsabilité de celui-ci pouvait être engagée pour une faute d'une gravité exceptionnelle, ensuite pour faute manifeste et d'une particulière gravité, puis pour faute lourde, et enfin, dans certains cas limités, pour faute simple.

M. Jean-Luc Warsmann. Donc, tout va bien ! M. Marc Laffineur. Tout est parfait ! M. Thierry Carcenac. Faut-il, dès lors, donner une base légale à la responsabilité des services fiscaux - qui pourrait être engagée, dans tous les cas, sur faute simple - et restreindre ainsi les facultés d'appréciation du juge administratif ? On peut en douter alors que le Conseil d'Etat a tenu à maintenir le principe de l'exigence de la faute lourde, en raison de la complexité de l'activité des services fiscaux,...

M. Jean-Luc Warsmann. Mais c'est nous qui votons la loi, monsieur Carcenac ! Le Conseil d'Etat, il l'applique ! M. Thierry Carcenac. ... en raison de la nature des relations avec le contribuable, qui a un intérêt symétriquement inverse à celui de l'administration, en raison dur isque particulier de commettre une illégalité dans l'assiette ou le recouvrement de l'impôt, en raison, enfin, du caractère régalien de l'activité des services fiscaux.

J'en viens maintenant à la question des sanctions pécuniaires. En ce qui concerne l'alignement du taux de l'intérêt de retard sur le taux de l'intérêt légal, je rappe lle que l'intérêt de retard est « le prix du temps » et non une sanction, comme vous l'avez indiqué tout à l'heure, monsieur Goulard.

Ainsi, le taux fixé à 0,75 % par mois, c'est-à-dire 9 % l'an, n'est pas aussi éloigné que cela des taux pratiqués par les établissements bancaires.


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Actuellement, le taux est fixé à 1,20 % par mois, soit 14,40 % par an. L'Etat n'est pas et ne saurait être le banquier des contribuables.

S'il nous fallait toutefois réexaminer ce point, les lois de finances nous le permettraient aisément.

M. Jean-Luc Warsmann.

C'est ahurissant d'entendre ça ! M. Thierry Carcenac. S'agissant de la diminution des pénalités d'assiette, on ne peut approuver la proposition de ramener de 10 % à 5 % la majoration prévue lorsque les contribuables ont laissé expirer le délai qui leur était imparti pour faire leur déclaration d'impôt durant les quinze premiers jours suivant l'expiration du délai, puis de revenir à 10 %. M. Marc Laffineur. Voilà un discours moderne ! Bravo ! C'est cela, la modernité de l'Etat !

M. le président.

Monsieur Laffineur, laissez l'orateur s'exprimer ! M. Jean-Louis Idiart. C'est vous, monsieur Laffineur, qui incarnez l'archaïsme !

M. Thierry Carcenac.

En effet, cette proposition ne tient pas compte de l'article 26 de la loi de finances rectificative pour 1999, qui prévoit que la motivation des pénalités devra intervenir trente jours au moins avant la notification de l'avis de mise en recouvrement ou de l'avis d'imposition. Cette nouvelle obligation procédurale rallonge, de fait, de trente jours le délai permettant à l'administration de prononcer les pénalités d'assiette. A quoi bon alors assouplir un régime qui vient de l'être ? La proposition de diminuer le barème des majorations de 40 % à 30 % lorsqu'un contribuable n'a pas réagi à des mises en demeure de l'administration n'est pas sérieuse. Après mise en demeure, peut-on considérer que le contribuable est toujours de bonne foi ? Je vous laisse apprécier le bien-fondé d'une telle disposition.

Enfin, s'agissant de la création d'une nouvelle commission, je rappelle que, suivant l'article 66 de la loi de finances pour 1976, les résultats du contrôle fiscal sont publiés dans le cadre du fascicule Voies et moyens annexé au projet de loi de finances. Doit-on créer une nouvelle commission ? La commission des finances ne se suffit-elle pas à elle-même ? J'admets néanmoins que l'information sur le contrôle fiscal est importante pour le Parlement.

M. Jean-Luc Warsmann.

Quelle confession !

M. Thierry Carcenac.

C'est pourquoi nous avons adopté l'article 108 de la loi de finances pour 1999, qui prévoit que les résultats du contrôle fiscal externe seront détaillés, ainsi que le recouvrement des dettes rappelées et les conséquences de la justice gracieuse sur le nonrecouvrement de ces droits. Madame la secrétaire d'Etat, appliquons l'article 108 plutôt que de créer une nouvelle commission.

En conclusion, vous comprendrez que le groupe socialiste ne suive pas l'opposition dans cette suspicion, illégitime et infondée, à l'égard des fonctionnaires, qui ont le sens de l'intérêt général et qui sont là pour faire respecter la loi votée par le Parlement.

M. Jean-Louis Idiart.

Très bien !

M. Jean-Luc Warsmann.

Quelle suspicion ? De tels propos sont scandaleux !

M. Marc Laffineur.

Il doit être fonctionnaire !

M. Thierry Carcenac.

Les redressements effectués correspondent à 4 % des rentrées fiscales et sont supérieurs aux allégements fiscaux, annoncés pour l'année 2000.

Les missions fiscales sont particulièrement difficiles, comme le reconnaît le Conseil d'Etat, et justifient une autonomie de la matière fiscale.

Nous préférons suivre le Gouvernement et l'inciter à renforcer la lutte contre les nouveaux risques de fraude organisée en matière d'économie souterraine, de fraude fiscale internationale et de TVA intra-communautaire.

M. Marc Laffineur.

Ça n'a rien à voir !

M. Thierry Carcenac.

Nous préférons inciter le Gouvernement à suivre l'amélioration des rappels d'imposition faisant suite à des contrôles fiscaux plutôt que d'affaiblir le dispositif de dissuasion en vigueur aujourd'hui.

M. Jean-Luc Warsmann.

C'est scandaleux !

M. Marc Laffineur.

Voilà le modernisme au pouvoir !

M. Thierry Carcenac.

Cependant, nous ne sommes pas figés. Les rapports d'information de notre collègue Brard devant la commission des finances sur la lutte contre la fraude et l'évasion fiscale ont mis en évidence, devant cette intolérable atteinte à l'impôt citoyen, la nécessité de retrouver l'égalité devant l'impôt. Ils contiennent des propositions d'amélioration des relations entre l'administration fiscale et les contribuables. Nous en avons déjà adopté plusieurs lors de l'examen des lois de finances.

D'autres, concernant la révision d'ensemble du dispositif des sanctions fiscales, sont suggérées au Gouvernement et demandent une réflexion de fond.

Mais notre collègue précise encore : « Beaucoup a été fait depuis la réforme législative issue des travaux de la commission présidée par M. Maurice Aicardi en 1986. Il ne convient donc pas de remettre en cause l'équilibre qui a été trouvé et qui fait l'objet d'un consensus ».

En conséquence, le groupe socialiste souhaite que l'Assemblée rejette cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Jean-Luc Warsmann.

M. Jean-Luc Warsmann.

Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, voilà donc que, ce matin, nous entamons ce débat sur une proposition de loi relative à la mise en place d'une véritable responsabilité pour faute de l'administration fiscale.

Nous sommes bien là au coeur de la nécessaire modernisation de l'Etat, au coeur également d'un débat voulu par nos concitoyens, lesquels réclament la suppression des privilèges qui ne sont pas justifiés.

De quoi s'agit-il ? Il s'agit de débattre de prérogatives accordées jusqu'à maintenant à l'administration fiscale, qui empêchent le contribuable lésé d'obtenir une juste réparation des erreurs qu'elle commet. Il ne s'agit absolument pas de désarmer l'administration fiscale face aux fraudes internationales et aux fraudes à la TVA, comme cela vient d'être dit. Il s'agit tout simplement de savoir si un contribuable lésé est en droit d'obtenir une juste réparation des erreurs qui ont été commises à son encontre.

M. Dominique Dord et M. Marc Laffineur.

Voilà !

M. Jean-Luc Warsmann.

Quel est le problème juridique ? Il est très simple. L'article L.

207 du livre des procédures fiscales prévoit que « lorsqu'une réclamation contentieuse est admise en totalité ou en partie, le contribuable ne peut prétendre à des dommages-intérêts ou à


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des indemnités quelconques ». Même dans les cas de défaillance de leur part, les services fiscaux continuent donc à bénéficier d'un principe et d'une jurisprudence qui, disons-le, sont désuets.

Monsieur Carcenac, la jurisprudence applique la loi, et lorsque la jurisprudence n'est pas bonne il nous appartient bien, à nous législateurs, de rectifier la loi.

M. Jean-Louis Idiart.

Ça, on le sait !

M. Jean-Luc Warsmann.

Cette jurisprudence considère que les erreurs commises lors de l'exécution d'opérations qui se rattachent aux procédures d'établissement ou de recouvrement de l'impôt ne sont, en principe, susceptibles d'engager la responsabilité de l'Etat que si elles constituent une faute lourde, sauf lorsque l'appréciation de la situation du contribuable ne comporte pas de difficultés particulières.

Soyons clairs, cette jurisprudence est la survivance d'une époque où prévalait l'irresponsabilité de la puissance publique - période qui a pris fin dans de nombreux autres domaines au XIXe siècle ! - et elle est critiquée, à juste titre, par la doctrine.

M. François Goulard, rapporteur.

Très juste !

M. Jean-Luc Warsmann.

De plus, il faut rappeler que l'administration dispose de prérogatives pour appliquer des pénalités lourdes et, disons-le, couramment disproportionnées au regard des comportements de nos concitoyens.

La proposition de loi dont nous discutons aujourd'hui tend donc à remédier à ces déséquilibres en instituant un régime de responsabilité pour faute simple de l'administration fiscale, régime applicable dès lors qu'une réclamation contentieuse est admise en totalité ou en partie. Elle vise également à aligner le taux de l'intérêt de retard sur un taux plus proche du taux de l'intérêt légal, et à diminuer les pénalités d'assiette prévues par l'article 1728 du code général des impôts.

Première question : y a-t-il lieu d'assouplir le droit à indemnisation des contribuables lésés par l'administration ? Sur ce point, je ne souscris pas au tableau idyllique qui a été dressé par mon prédécesseur à cette tribune.

Tout d'abord, parce qu'il existe de nombreuses difficultés de compétences entre les ordres judiciaire et administratif lorsqu'un de nos concitoyens veut porter son différend avec l'administration fiscale devant le juge.

En effet, la procédure d'action en dommages-intérêts soulève, en matière fiscale, des problèmes de délimitation de compétences. Le juge administratif est normalement compétent pour connaître de toutes les actions en domm ages-intérêts dirigées contre l'Etat. Le juge fiscal, comme juge de l'impôt, relève soit de l'ordre administratif, soit de l'ordre judiciaire. En effet, le juge judiciaire est compétent pour connaître de la régularité en la forme des actes de poursuites.

Dans l'état actuel du droit, cette mise en oeuvre pose problème, principalement du fait de la position prise par le juge administratif. En effet, les juridictions judiciaires jugent comme en matière de droit commun. Ainsi, la Cour de cassation considérait, dès 1872 - nous sommes encore au XIXe siècle ! -, que le principe de responsabilité inscrit dans les articles 1382 et suivants du code civil est général.

En résumé, l'administration fiscale engage sa responsabilité, même en l'absence de mauvaise foi ou d'animosité personnelle de ses agents, lorsqu'elle commet des erreurs grossières en agissant sans preuves solides et sans les précautions qui s'imposent en la matière.

Quelle est la position de la juridiction administrative qui nous pose problème ce matin ?

Alors qu'on constate, depuis des décennies, une évolution tendancielle vers un accroissement de la mise en jeu de la responsabilité de la puissance publique, la juridiction administrative n'a pas mené à terme ce processus s'agissant de l'administration fiscale, contrairement à ce qui s'est passé dans de nombreux autres domaines.

M. François Goulard, rapporteur.

C'est vrai !

M. Jean-Luc Warsmann.

S'agissant des opérations qui ne se rattachent pas aux procédures d'établissement ou de recouvrement de l'impôt, le juge administratif considère que la responsabilité de l'Etat continue, comme auparavant, à être engagée sur le fondement de la faute simple.

S'agissant des procédures d'établissement et de recouvrement de l'impôt, les erreurs commises par l'administration fiscale ne sont en principe susceptibles, en raison des difficultés que présente généralement la mise en oeuvre de ces procédures, d'engager la responsabilité de l'Etat que si elles constituent une faute lourde.

L'action des communes en réparation du préjudice que leur a causé une perte de ressources fiscales doit suivre le même régime que l'action des contribuables en réparation du préjudicie que leur a causé une imposition non justifiée.

Initialement marquée par le principe de l'irresponsabilité de l'Etat, la jurisprudence avait d'abord admis que la responsabilité de celui-ci pouvait être engagée pour faute d'une gravité exceptionnelle, ensuite pour faute manifeste et d'une particulière gravité, puis pour faute lourde. La confirmation par l'arrêt « Commune d'Arcueil » met donc un point d'arrêt au processus de banalisation du contentieux de la responsabilité en matière fiscale.

Certains membres du Conseil d'Etat perçoivent d'ailleurs le régime de la faute lourde « comme un héritage édulcoré d'un ancien principe d'irresponsabilité de la puissance publique » dont la disparition « est inscrite à moyen ou long terme dans l'évolution du droit public français. » Il s'agit ce matin de se poser cette simple ques-

tion : devons-nous le faire aujourd'hui ? A cette question, je réponds : oui.

M. Dominique Dord.

Bravo !

M. Jean-Luc Warsmann.

La proposition de loi vise donc à donner une base légale à la responsabilité des services fiscaux, responsabilité qui pourra être engagée dans tous cas sur faute simple, ce qui unifierait et simplifierait le régime de responsabilité de l'Etat du fait de l'action des services fiscaux et harmoniserait le contentieux fiscal avec les autres branches du contentieux administratif.

Le deuxième objectif de cette proposition de loi est la diminution des sanctions pécuniaires.

Le taux d'intérêt de retard est actuellement fixé à 0,75 % par mois, soit 9 % l'an. Il s'applique sur le montant des sommes mises à la charge du contribuable ou dont le versement a été différé. Si le groupe socialiste considère cette situation très satisfaisante, ce n'est pas le cas de l'opposition. En effet, le taux de l'intérêt légal pour l'année 2000 est de 2,74 % ! On peut donc s'étonner légitimement que l'administration ne s'applique pas à elle-même ce qu'elle entend appliquer aux contribuables.

Nous sommes au coeur du débat de fond qui veut que, en l'an 2000, nos concitoyens n'admettent plus de privilèges dans notre société que s'ils sont justifiés par des situations particulières. Ces privilèges accordés à l'Etat sont-ils justifiés par des situations particulières ? La


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réponse est non. La proposition de loi tend donc à procéder à l'alignement du taux d'intérêt de retard sur un taux plus conforme à la réalité financière actuelle.

Enfin, la proposition de loi vise à approfondir l'information sur le contrôle fiscal.

Force est de constater que le rapport sur les résultats du contrôle fiscal, bien que toujours utile, n'est pas entièrement satisfaisant, puisqu'il contient des éléments statistiques peu détaillés. La proposition de loi souhaite améliorer l'information du Parlement en mettant en évidence le grand nombre de manquements aux règles déclaratives et comptables qui résultent non d'une intention de fraude délibérée, mais du désarroi des contribuables face à une réglementation excessivement foisonnante, changeante et complexe. Il prévoit donc que le rapport annuel sur le contrôle fiscal doit retracer les résultats d'une enquête statistique annuelle, comportant examen contradictoire des p ersonnes physiques et vérification de comptabilité d'entreprises, et portant sur un échantillon représentatif de l'ensemble des contribuables.

J'ajoute que c'est là un moyen, pour nous législateurs, de mieux faire notre travail. En effet, nous avons biens ouvent le sentiment que les services de Bercy compliquent à ce point les dispositifs fiscaux que nous adoptons que cela permet de nourrir un contentieux.

Nous avons bien souvent l'impression que des dispositions qui nous semblent claires lors de leur adoption sont finalement appliquées de manière complexe, ce qui a pour conséquence de fragiliser la situation juridique des contribuables. Ajoutons, car c'est fréquemment la réalité, que de nombreux contribuables qui sont censés bénéficier des dispositifs que nous votons récupèrent en récompense un contrôle fiscal quelques années plus tard. Cela n'est pas satisfaisant, c'est le moins que l'on puisse dire.

En conclusion, je dirai, mes chers collègues, que nous sommes là au coeur d'un débat ayant pour objet d'accroître la confiance de nos concitoyens dans l'Etat. Le groupe du Rassemblement pour la République avait déjà ouvert ce débat, il y a quelques mois, grâce à la proposition de loi de Nicolas Sarkozy portant sur la nonrétroactivité des lois fiscales. Il s'agissait à l'époque de soumettre l'Etat à une règle de droit commun, c'est-àdire tout simplement de prévoir qu'une loi fiscale ne pouvait pas être rétroactive. Hélas ! nous n'avions pas réussi à convaincre la majorité.

Aujourd'hui, nous tentons de nouveau d'accroître la confiance de nos concitoyens envers l'Etat en voulant appliquer à ce dernier le régime satisfaisant de responsabilité pour faute simple. En adoptant ce texte, nous ferions un grand pas en ce sens. C'est pour cette raison que le groupe du Rassemblement pour la République votera cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la Républilque, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole st à M. Jean Vila.

M. Jean Vila.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le texte aujourd'hui soumis à notre examen avance un certain nombre de propositions visant à renforcer la responsabilité pour faute de l'administration fiscale et à instituer un droit général à indemnisation pour les contribuables.

Renforcer les garanties apportées aux contribuables de bonne foi, donner à ces derniers tous les moyens de mieux connaître la loi fiscale, les obligations qu'elle implique mais aussi les droits qu'elle accorde, favoriser la médiation en cas de litige nous apparaissent comme autant de soucis légitimes participant de la promotion d'une approche citoyenne et républicaine de l'impôt.

Mais telle n'est manifestement pas la conception sur laquelle repose la proposition de loi aujourd'hui en discussion.

Les propos souvent outranciers de ses rédacteurs suffiraient pour s'en convaincre : la stigmatisation des abus de pouvoir si ce n'est de l'irresponsabilité de l'administration fiscale et la dénonciation du harcèlement dont seraient sans cesse victimes les contribuables relèvent plus d'un effet de tribune que du souci constructif de renforcer l'Etat de droit.

On ne peut légitimement dissocier le renforcement des droits du contribuable de la nécessité d'assurer une véritable égalité devant l'impôt. Cela implique non seulement d'oeuvrer pour plus de justice fiscale, ce qui ne peut d'ailleurs que renforcer la légitimité de l'impôt, mais aussi d'agir pour une meilleure efficacité du contrôle et de la lutte contre la fraude et l'évasion fiscale.

Nous demeurons attachés au principe républicain qui veut que chacun participe aux dépenses communes en fonction de ses réelles capacités contributives. Ce principe a beaucoup souffert de la dérive libérale qu'a connue notre pays ces dernières décennies, car, pour les milieux libéraux, l'impôt est quasiment entaché du péché originel.

Or l'histoire est là pour démontrer que l'action publique et, en conséquence, son financement, notamment par l'impôt, ont toujours été nécessaires, et ce y compris dans les phases les plus libérales du capitalisme, pour développer les infrastructures ou pour assurer des services collectifs indispensables au développement économique lui-même.

M. Marc Laffineur.

Nous sommes d'accord sur ce point !

M. Jean Vila.

Réaffirmer la légimité de l'impôt implique d'améliorer conjointement l'efficacité sociale de la dépense publique. C'est d'ailleurs à l'initiative de notre groupe que l'Assemblée a adopté, il y a quelques semaines, une proposition visant à un meilleur contrôle des fonds publics mais aussi à l'évaluation de l'efficacité des centaines de milliards de francs de fonds publics versés aux entreprises, notamment au nom de l'emploi.

Nous sommes également convaincus que la fiscalité doit jouer un rôle beaucoup plus incitatif pour une utilisation des ressources, y compris dans les entreprises, dans un sens plus favorable à un développement économique réel servant une conception de la compétitivité fondée sur l'épanouissement des hommes.

Que dire enfin de l'enjeu que constitue une réforme des services fiscaux se donnant réellement l'ambition et les moyens d'une amélioration de la qualité du service rendu à l'usager, lequel ne doit plus être considéré comme un administré mais comme un citoyen ayant certes des devoirs, mais aussi des droits ? Des progrès en la matière sont indispensables, et pas seulement pour éviter que notre pays puisse être mis en cause par les juridictions européennes défendant les droits de l'homme. Nous ne pouvons que partager le souci qui s'est manifesté en commission de voir réexaminer les modalités du taux d'intérêt de retard pour les contribuables de bonne foi.

Nous sommes convaincus que le Gouvernement trouvera la voie de cette réforme, au demeurant nécessaire si l'on veut concrétiser plus avant une relation renouvelée entre l'administration fiscale et le contribuable, tout en réaffirmant la légitimité républicaine de l'impôt.


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Le fait que la réforme engagée il y a quelques mois n'avait pas pour objet l'objectif affiché d'une meilleure qualité du service public, mais la recherche d'économies en postes de travail pour permettre un redéploiement d'autant plus pressant que l'on s'inscrivait dans le souci d'un respect strict du dogme du gel de l'emploi public, n'est pas pour rien dans la situation de blocage que nous connaissons actuellement, mais qui ne saurait être considérée comme irrémédiable.

Le débat mériterait d'être relancé avec tous les acteurs concernés, en particulier avec les élus locaux. Il devra porter sur les missions confiées aux services fiscaux, sur l'organisation en conséquence de ces derniers et sur les moyens qui leur seront garantis dans la durée. Cela implique d'associer réellement les personnels et leurso rganisations syndicales représentatives, car aucune réforme efficace ne pourra voir le jour sans les fonctionnaires chargés de la mettre en oeuvre, et encore moins contre eux.

La proposition de loi défendue aujourd'hui par les formations de l'opposition est contraire à cette démarche équilibrée et constitue l'affirmation d'un point de vue largement unilatéral.

Nous sommes attachés à ce que tous les textes d'initiative parlementaire puissent faire l'objet d'une discussion et d'un vote. Toutefois, nous considérons que nous sommes aujourd'hui en présence d'un texte bien particulier. Sous couvert de remédier aux abus de l'administration, c'est en fait le principe de la légitimité des sanctions si ce n'est celui de la légitimité de l'impôt lui-même que les formations de droite de notre assemblée entendent implicitement et de fait contester et mettre en cause.

Cette conception que nous combattons peut être légitimement défendue, mais encore faudrait-il qu'elle le soit franchement.

En vérité, l'opposition entend conduire un tout autre débat que celui affiché par le contenu de la proposition de loi. Or, de notre point de vue, on ne saurait entretenir la confusion. C'est d'ailleurs ce qui nous apparaît avoir motivé le refus de commission des finances d'examiner les articles, de ne pas formuler de conclusions, et qui fonde le vote du groupe communiste. (Applaudissement sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Pierre Hériaud.

M. Pierre Hériaud.

Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la proposition de loi de nos collègues François Goulard et José Rossi part d'un constat simple : de nombreux Français et beaucoup de petites entreprises sont chaque année victimes de redressements à la suite de contrôles fiscaux, et il n'est pas rare de voir des redressements atteindre des montants dix fois supérieurs aux sommes finalement exigées, voire être sans fondement.

Ainsi, des entrepreneurs qui font l'objet de contrôles fiscaux sur place - ce qui est normal - sont souvent conduits à la suite de redressements fiscaux successifs, qu'ils ne comprennent pas toujours, à fermer leur entreprise. C'est le cas notamment lorsque les bénéfices que peut faire l'entreprise ne servent qu'à payer les intérêts de retard.

Mais plutôt que de me perdre en longs discours, je citerai quelques exemples.

En avril 1997, un jeune mécanicien achète pour 200 000 francs un fonds de garage situé dans une commune de 3 000 habitants. L'établissement avait fermé ses portes depuis six mois, l'ancien propriétaire ayant préféré se réinstaller dans une commune plus importante située à cinq kilomètres. Après un an d'exploitation, le chiffre d'affaires de ce garagiste n'atteint que la moitié de celui de son prédécesseur, car les clients ont suivi leur ancien garagiste. Un malheur n'arrivant jamais seul, un inspecteur des impôts invoque une notification du 9 juin 1996 qui autorise l'administration des impôts à rectifier le prix ou l'évaluation d'un bien ayant servi de base à la perception d'une imposition lorsque le prix ou cette évaluation paraît inférieur à la valeur vénale réelle des biens transmis ou désignés dans les actes de déclaration. Après avoir comparé le prix de vente à celui de cinq transactions portant sur des fonds de garage dans cinq villes différentes, l'inspecteur en conclut que la valeur d'un fonds de garage est égale à 15 % du chiffre d'affaires, et, en conséquence, estime à 530 000 francs le fonds acheté par le jeune mécanicien, à qui il réclame un rappel de droits de 23 100 francs, assorti d'intérêts de retard d'un montant de 1 905 francs. Le prix payé était pourtant celui mentionné dans les actes. De plus, la réinstallation de l'ancien garagiste à une distance proche a eu pour conséquence un transfert de clientèle. Enfin, cette affaire n'était pas un fonds de commerce, puisque le garage avait été fermé pendant six mois. Pourtant, la demande de paiement par le fisc court toujours.

Autre cas, celui d'un électricien créant sa propre entrep rise d'électricité. Comme la plupart des créateurs d'entreprise, il cherche à limiter ses investissements et, à cette fin, il transforme sa voiture, une Fiat Uno, afin de l'utiliser pour transporter ses outils et ses matières premières, sa société supportant les dépenses d'entretien, d'essence et d'assurance. Cette SARL fait l'objet d'une vérification de comptabilité, qui se solde par un avis d'absence de redressement. Pourtant, auparavant, elle s'est vu notifier un redressement en matière de taxe sur les véhicules de tourisme des sociétés, taxe qui a pour objet d'éviter que les dirigeants soient tentés de déduire de leur base imposable le coût des grosses cylindrées. Le fisc a considéré que la Fiat Uno entrait dans la catégorie des voitures taxées et que, en conséquence, il y avait lieu d'assujettir la société en question à cette taxe dont le montant s'élève à 16 170 francs, auquel s'ajoutent des intérêts de retard de 0,75 % par mois, une majoration de 10 % et une amende de 80 %.

M. Jean-Louis Idiart.

Cet électricien aurait dû acheter une Renault !

M. Pierre Hériaud.

Cet électricien a contesté le redressement, mais, à ce jour, il n'a toujours pas obtenu de réponse.

A utres exemples : celui d'une fabrique de cycles employant 130 salariés qui a été taxée sur une base de 27 millions de chiffre d'affaires pour ne payer finalement que 140 000 francs, mais qui, entre-temps, a été conduite à la liquidation ; celui d'un restaurateur, qui après avoir subi en 1987 un redressement supérieur à un million de francs et avoir été condamné au pénal, se voit, après dix ans de bataille juridique, totalement innocenté, mais ne reçoit qu'une indemnité de 5 000 francs ; ou encore celui d'un agent immobilier redressé sur des salaires qu'il n'a jamais pu percevoir, puisque son entreprise subissait des pertes.

M. Jean-Luc Warsmann.

On n'entend plus la majorité !

M. Jean-Louis Idiart.

C'est parce que nous ne connaissons pas les dossiers !

M. Pierre Hériaud.

Il faut les consulter, mon cher collègue.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

Je m'arrête là car ces exemples sont suffisamment éclairants.

Une des explications de cette situation tient à la législation qui protège l'administration fiscale de toute responsabilité, grâce, notamment, à l'article 207 du livre des procédures fiscales, qui exclut tous dommages et intérêts ou indemnités en faveur du contribuable, à l'exception d'intérêts moratoires.

Ce pouvoir de l'administration fiscale est d'autant plus pénalisant pour les PME et certains contribuables que celle-ci a plusieurs procédures à sa disposition pour recouvrer sa créance sans attendre le résultat d'éventuelles actions contentieuses.

En matière de redressement, l'administration fiscale peut notamment décider unilatéralement des impositions supplémentaires sans que le contribuable puisse formuler ses observations : c'est la taxation d'office. Elle peut également remettre en cause les avantages fiscaux accordés au contribuable.

En matière de recouvrement, l'administration fiscale est dispensée de recourir à l'intervention des tribunaux pour procéder au recouvrement forcé des dettes fiscales des contribuables : elle dispose du commandement à payer, des voies d'exécution de droit commun, de l'avis à tiers détenteur et de la possibilité d'engager des poursuites pénales.

Il apparaît donc indispensable d'envisager l'introduction dans notre code fiscal d'une responsabilité de l'administration en cas d'erreur d'imposition, d'examiner la façon dont sont exercés les contrôles fiscaux et, enfin, de réviser les modalités du taux de l'intérêt de retard : c'est ce que nous proposent François Goulard et José Rossi.

Il est vrai que, dans un arrêt du 16 juin dernier,...

M. François Goulard, rapporteur.

L'arrêt Tripot !

M. Pierre Hériaud.

... le Conseil d'Etat a jugé que les dommages et intérêts versés à l'entreprise pouvaient se cumuler avec des indemnités qui seraient versées aux personnes physiques dans l'entreprise. Toutefois, cette jurisprudence récente n'a pas été confirmée et demeure fragile.

Par ailleurs, une enquête statistique annuelle sur les résultats des contrôles fiscaux et les raisons qui les ont motivés ainsi qu'un état des principaux cas de nonconformité à la loi fiscale, comme cela se fait à l'étranger, permettraient d'évaluer plus précisément le taux réel de non-conformité des déclarations - puisque nous sommes dans un système déclaratif -, la part des erreurs et celle de la fraude intentionnelle.

Enfin, la réflexion sur le problème de l'intérêt de retard mérite d'être poursuivie.

Les modalités d'application du taux d'intérêt de retard pour les contribuables de bonne foi doivent être réformées. Elles peuvent, en l'état, aboutir à exiger des entrepreneurs et des contribuables quand la procédure a duré plusieurs années, le versement de sommes disproportionnées par rapport au montant du redressement. En effet, les intérêts de retard continuent à courir tout au long de la procédure de recours contentieux devant l'administration ou les tribunaux. Lors de l'examen en commission des finances, le président Emmanuelli a d'ailleurs proposé de revenir sur cette question à l'occasion de la discussion du prochain collectif budgétaire.

Le groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance est très attaché au recouvrement de l'impôt. Mais les élus que nous sommes rencontrons souvent des contribuables, des entrepreneurs qui, bien que leur bonne foi ait été confirmée par le jugement rendu par le tribunal administratif, ont dû continuer à payer des intérêts de retard. Cela les met dans une réelle précarité voire dans l'impossibilité de poursuivre leurs activités.

Nous nous faisons aujourd'hui les interprètes de ces nombreux citoyens, entrepreneurs et particuliers, qui rencontrent des difficultés à faire admettre aux agents locaux du fisc le caractère justifié de leurs réclamations.

La proposition de loi qui vous est proposée, et que nous souhaiterions voir adoptée, correspond à une nécessité toute simple, celle de rétablir l'équité et la présomption de bonne foi à laquelle chaque citoyen a droit.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. François Goulard, rapporteur.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Gilbert Gantier.

M. Gilbert Gantier.

Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, à l'heure où tous nos concitoyens viennent d'effectuer leur devoir fiscal en envoyant leur déclaration d'impôt, à l'heure où l'administration fiscale vient de sacrifier une réforme et un ministre sur l'autel du conservatisme,...

M. Marc Laffineur.

Eh oui !

M. Jean-Louis Idiart.

Ça vous va bien de parler de conservatisme !

M. Gilbert Gantier.

... cette proposition de loi arrive à point nommé pour poser la question de la responsabilité de la puissance publique en matière fiscale.

Nous connaissons tous le particularisme français du fonctionnement de l'administration fiscale, à la fois tentaculaire et cloisonnée. Son développement s'est accompagné d'une pesanteur et d'une complexité de gestion qui la rendent de plus en plus contestée tant par les contribuables qu'au sein de l'Etat lui-même. Emissions de télévision, ouvrages, articles de journaux aux titres évocateurs - « Contribuables, vous êtes cernés » ou « La Traque fiscale » - nourrissent la polémique sur la toute-puissance de l'administration fiscale.

Pourquoi cette question se pose-t-elle avec tant d'acuité aujourd'hui ? Pour trois raisons essentielles.

D'abord parce que notre pays a atteint un niveau de prélèvements obligatoires historique, avec 45,6 % du PIB en 1999, qui s'est traduit par une charge de plus en plus lourde sur les contribuables. Ceux-ci supportent de moins en moins l'inquisition fiscale et la malveillance des contrôleurs du fisc. Il n'y a qu'à voir la fuite de nos cerveaux, de nos jeunes cadres à l'étranger ; en particulier en Grande-Bretagne. Et je ne m'étendrai pas sur une affaire récente, que tout le monde a en tête et qui est très symptomatique. (Sourires.)

Ensuite parce que le discours politique du Gouvernement et de sa majorité reprend presque toujours à son compte la rhétorique de la direction générale de la législation fiscale. On ne cesse de parler de redistribution par l'impôt, d'impôt citoyen, disqualifiant d'emblée toute contestation fiscale, et on confond allègrement évasion fiscale et fraude fiscale - les titres des deux rapports de n otre collègue Jean-Pierre Brard, dont je regrette l'absence ce matin, sont à ce propos évocateurs.

Le consentement à l'impôt, madame la secrétaire d'Etat, est à la source de toute démocratie, par delà les siècles. Mais ce consentement n'a-t-il pas justement pour origine la contestation fiscale ?


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Enfin, parce que, à l'heure du rapprochement du régime de responsabilité administrative avec celui de la responsabilité de droit commun, la survivance d'un contentieux fiscal dérogatoire ne tient plus dans un Etat de droit.

Alors qu'on lui faisait remarquer la disproportion qui existait entre les moyens dont dispose l'administration

« pour faire rentrer l'argent » et les droits limités des contribuables pour défendre leur cause, un directeur départemental des impôts a rétorqué que l'administration agissait sous le contrôle du juge administratif, qui sanctionnait les fautes. Non ! ce contrôle du droit n'est que théorique. Dans un rapport récent, le Conseil d'Etat soulignait l'augmentation du stock d'affaires non traitées.

M. Jean-Luc Warsmann.

Le délai moyen, en appel, est de cinq ans.

M. Gilbert Gantier.

La lenteur de la justice administrative, la complexité du droit à réparation, la persistance du régime de la faute lourde, le fait que les intérêts de retard continuent de courir pendant les voies de recours dissuadent souvent le contribuable d'aller devant les tribunaux.

Le juge administratif sanctionne, certes, les abus les plus criants. A cet égard, l'exemple du sieur Tripot est édifiant. Après avoir été à la tête de sociétés pro spères, le sieur Tripot s'est trouvé ruiné par des contrôles fiscaux à répétition. Incapable de poursuivre son activité, bloquée par des avis à tiers détenteurs multiples, il a été obligé de vendre ses sociétés pour un franc symbolique.

M. Jean-Louis Idiart.

Comme Thomson !

M. Gilbert Gantier.

Et il est devenu fou.

M. Jean-François Mattei.

Et voilà !

M. Gilbert Gantier.

Le Conseil d'Etat a reconnu les fautes lourdes de l'administration fiscale. Mais il l'a fait le 16 juin 1999, seize ans après les actes fautifs. Un tel retard est-il admissible dans un Etat de droit ?

M. Marc Laffineur.

C'est ce qu'ils pensent, eux !

M. Jean-Louis Idiart.

Certainement pas ; c'est tellement caricatural !

M. Gilbert Gantier.

La responsabilité de l'Etat en matière fiscale est actuellement fixée par la jurisprudence

« Commune d'Arcueil », du 29 décembre 1997.

M. Jean-Luc Warsmann.

Absolument !

M. Gilbert Gantier.

Mais, le rapporteur l'a souligné, cette jurisprudence n'est pas satisfaisante car elle préverve ce que j'appellerai l' imperium administratif sous prétexte que la fin - la collecte de l'impôt - justifierait les moyens.

M. François Goulard, rapporteur.

Absolument !

M. Gilbert Gantier.

La faute lourde demeure donc la règle, la faute simple n'étant prise en compte que dans un nombre restreint de cas.

Non seulement ce régime laisse un pouvoir prétorien au juge, qui est libre d'évaluer la nature de la faute, lourde ou légère, mais il fait également bénéficier l'administration fiscale d'une responsabilité que même les hôpitaux, qui agissent pourtant dans des conditions particulièrement difficiles, ne connaissent plus.

Nos collègues José Rossi et François Goulard nous proposent donc, sur le plan de la faute, d'aligner le contentieux fiscal sur les autres branches du contentieux administratif, et, par conséquent, que la faute simple suffise pour engager la responsabilité de l'Etat en matière fiscale ; sur le plan procédural, d'admettre le droit à réparat ion dans la phase précontentieuse et de lever l'interdiction faite au juge d'accorder des dommages et intérêts ; sur le plan des pénalités fiscales, d'aligner l'intérêt de retard pratiqué par l'administration sur le taux de l'intérêt légal. En effet, l'intérêt de 9 % l'an est un taux usuraire quand on sait que les intérêts moratoires auxquels a droit le contribuable ne se montent, madame la secrétaire d'Etat, qu'à 2,74 %.

M. Jean-Luc Warsmann.

Tout à fait !

M. Gilbert Gantier.

Jugez de la différence !

Il convient de réparer cette injustice flagrante, surtout quand la doctrine et la jurisprudence reconnaissent que les intérêts de retard ne constituent pas une sanction.

J'avais moi-même réclamé cet alignement lors des débats du projet de loi de finances pour 2000. Je suis heureux que le nouveau président de la commission des finances ait repris cette idée que je soutiens, en vain, depuis des années.

La proposition de loi a pour but de protéger le contribuable injustement redressé ou sanctionné, en facilitant le droit à dédommagement, ainsi que le contribuable de bonne foi vis-à-vis des pénalités fiscales. Elle ne touche en rien les pénalités appliquées en cas de mauvaise foi ou d'opposition à contrôle fiscal. Même notre collègue JeanPierre Brard, pourfendeur de la fraude fiscale, a reconnu que le harcèlement était dans la culture de l'administration des impôts. Paul Champseur, corédacteur de la mission 2003 sur la réforme des services fiscaux, a admis, lui aussi, la myopie des redressements et l'aveuglement de la répression fiscale dans certains cas.

La proposition de loi vise donc à mettre un terme au règne de l'impunité de fait de l'administration fiscale, à la malveillance fiscale ordinaire, en soumettant le fisc au droit commun de la faute, comme cela doit être le cas dans une démocratie, tout en renforçant les droits du contribuable de bonne foi.

Cette proposition de loi est modérée et pertinente, elle va dans le sens d'un renforcement de l'Etat de droit et de la justice, en posant le principe, madame le secrétaire d'Etat, qu'avant d'être des assujettis, les contribuables n'en sont pas moins des citoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat au budget.

Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget.

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, cette proposition de loi a principalement pour objet non pas d'instaurer, puisqu'elle existe déjà, mais d'étendre une responsabilité pour faute de l'administration fiscale et de diminuer certaines pénalités fiscales. Les auteurs de cette proposition considèrent en effet qu'en matière de contrôle fiscal et de redressement, l'administration fiscale agirait sans discernement et dans l'irresponsabilité.

M. Jean-Luc Warsmann.

Mais non !

Mme la secrétaire d'Etat au budget.

Permettez-moi de ne pas partager cette vision des choses car elle ne correspond pas à la réalité.

M. Jean-Luc Warsmann.

Vous caricaturez !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

Mme la secrétaire d'Etat au budget.

S'agissant du contrôle fiscal et du prétendu harcèlement des contribuables, dont quelques exemples ont été donnés à travers des titres de publications récentes, quelle est la vérité ? Le contrôle fiscal est d'abord nécessaire.

M. Jean-Luc Warsmann.

Personne ne le conteste.

Mme la secrétaire d'Etat au budget.

D'abord, pour faire respecter le principe d'une juste répartition de l'impôt entre les contribuables et assurer les conditions de l'égalité de concurrence entre les entreprises.

M. François d'Aubert.

Il n'y a pas d'égalité devant le contrôle !

Mme la secrétaire d'Etat au budget.

Ensuite, pour éviter des pertes de recettes publiques.

Le contrôle fiscal est donc un outil de lutte indispensable contre les inégalités. C'est, comme l'a très justement rappelé M. Gantier, l'un des piliers essentiels de notre démocratie.

Mais le contrôle fiscal doit s'exercer dans le strict respect de la loi et sous le contrôle du juge.

M. François Baroin.

Absolument !

M. François Goulard, rapporteur.

Nous ne disons rien d'autre.

Mme la secrétaire d'Etat au budget.

Les droits et garanties dont bénéficient les contribuables doivent être strictement respectés. Les privilèges de l'administration fiscale évoqués par M. Warsmann me paraissent abusifs, car l'administration fiscale a toujours, faut-il le rappeler, la charge de la preuve devant le contribuable qui a fait sa déclaration et tenu sa comptabilité, de bonne comme de mauvaise foi. De ce point de vue, je ne citerai qu'un exemple, l'exemple des Etats-Unis, qui passe tout de même pour être une grande démocratie, où la charge de la preuve appartient non pas l'administration mais aux contribuables.

M. Jean-Luc Warsmann.

Ce n'est pas notre modèle !

Mme la secrétaire d'Etat au budget.

Cette règle de la charge de la preuve est le contrepoids du pouvoir de contrôle de l'administration. Elle est le fondement d'un système, dont la vocation est bien de respecter les citoyens et leurs droits.

M. Pierre Hériaud a cité de nombreux exemples, sur lesquels il m'est difficile de me prononcer sans avoir eu accès aux dossiers, mais il a passé sous silence les droits et garanties dont bénéficient les contribuables. Je les rappelerai brièvement : possibilité pour celui-ci de contester un rappel, possibilité de faire appel à l'interlocuteur départemental, possibilité de saisir des commissions départementales de conciliation, enfin possibilité de demander des sursis de paiement.

M. François Baroin.

Donc, tout va bien !

Mme la secrétaire d'Etat au budget.

Votre assemblée a d'ailleurs renforcé les garanties dont bénéficient les contribuables dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 1999 en généralisant le dispositif de motivation des pénalités, comme l'a fort justement rappelé Thierry Carcenac. C'est une excellente initiative.

M. Jean-Luc Warsmann.

C'est la moindre de choses !

Mme la secrétaire d'Etat au budget.

Enfin, le contrôle fiscal doit être concentré sur son objet, c'est-à-dire la lutte contre la fraude. Nous avons ainsi demandé aux services fiscaux de s'attaquer à la fraude véritable et de donner la priorité aux dossiers qui constituent un enjeu budgétaire réel.

Cette conception n'exclut pas un contrôle plus large, à finalité dissuasive, consistant à couvrir l'ensemble du territoire. Mais il faut adapter les moyens aux enjeux en consacrant l'essentiel du contrôle à la lutte contre les comportements frauduleux.

Depuis deux ans, et grâce notamment aux initiatives de la commission des finances et de M. Jean-Pierre Brard, les moyens de lutter contre la fraude internationale, contre la fraude à la TVA intracommunautaire et contre l'économie souterraine, ont été renforcés. C'est contre ces fraudes qu'il nous faut lutter. C'est cette politiue qui est mise en oeuvre aujourd'hui par la direction générale des impôts, à laquelle je rends hommage pour la grande qualité de son travail.

S'agissant de la responsabilité de l'administration fiscale, il n'est pas exact d'affirmer que les comportements fautifs de l'administration n'ouvrent pas droit à indemnité. En effet, contrairement à ce qu'a dit M. Goulard, les contribuables peuvent bénéficier d'une indemnisation pour faute de l'administration. Dans ce cas, ils agissent non pas sur le fondement de l'article 207 mais sur le droit commun de la responsabilité. En effet, quand le juge estime que l'action de l'administration présente une difficulté particulière, seule la faute lourde est indemnisée.

Quand tel n'est pas le cas, même les fautes simples sont indemnisées. D'ailleurs, contrairement à ce qu'a affirmé M. Laffineur, plusieurs condamnations pour faute sont prononcées chaque année à l'encontre de l'administration fiscale, je tiens des exemples à votre disposition. La responsabilité de l'administration fiscale ouvre donc bien droit à indemnisation.

Dans la période récente, la jurisprudence a connu un infléchissement favorable au contribuable en sanctionnant, comme je l'indiquais à l'instant, les fautes simples commises par l'administration.

A cet égard, l'article L.

207 du livre des procédures fiscales ne limite pas le pouvoir d'appréciation du juge qui demeure souverain dans sa prise de décision. Cet article n'empêche pas le juge d'accorder, dans le cadre d'une action en responsabilité contre les services fiscaux, des dommages et intérêts ou des indemnités quelconques.

L'administration fiscale ne bénéficie donc pas d'un traitement particulier lors de la mise en cause de sa responsabilité, et la ligne de partage qui a été tracée récemment par la jurisprudence en matière de responsabilité de l'administration fiscale constitue un bon équilibre. Il n'y a donc pas lieu de modifier la loi en la matière.

M. Dominique Baert.

Très bien !

Mme la secrétaire d'Etat au budget.

En revanche, il y a lieu d'améliorer la qualité du service rendu par l'administration fiscale à l'usager qu'est le contribuable. C'est, comme l'a souligné M. Vila, par la voie de la concertation et de la négociation...

M. Jean-Luc Warsmann.

C'est ce que vous avez fait ?

Mme la secrétaire d'Etat au budget.

... que le Gouvernement entend désormais engager cette démarche.

La proposition de loi envisage une révision des modalités d'établissement du taux de l'intérêt de retard. C'est un débat important qui a déjà donné lieu à des discussions approfondies au sein de votre assemblée.

D'abord, je ne voudrais pas que l'on confonde, comme M. Gantier l'a fait, je le crains, les intérêts moratoires et les intérêts de retard.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

M. Gilbert Gantier.

Je ne confonds pas les deux.

M. François d'Aubert.

Mais non !

Mme la secrétaire d'Etat au budget.

En effet, si, au terme de la procédure contentieuse, c'est le contribuable qui gagne, l'Etat paye bien, comme vous l'avez précisé, des intérêts moratoires au taux de 2,4 %. Si c'est le contribuable qui perd, c'est lui qui paye les intérêts moratoires. Il s'agit donc bien des mêmes intérêts.

M. Marc Laffineur.

Pas aux mêmes taux !

Mme la secrétaire d'Etat au budget.

Pour les intérêts de retard, c'est tout à fait différent, puisqu'il s'agit d'éviter que certains contribuables n'opèrent des arbitrages entre le fait de payer des impôts et le fait de ne pas les payer. Si ces contribuables savent qu'ils supporteront des intérêts de retard très faibles, ils auront intérêt à fai re autre chose avec leur argent - c'est humain - entre le moment où ils ne payent pas l'impôt et le moment où on leur réclamera.

M. Thierry Carcenac.

Très juste !

Mme la secrétaire d'Etat au budget.

Il est donc normal que les intérêts de retard soient supérieurs aux intérêts moratoires.

S'agissant des intérêts de retard, la principale difficulté est d'ordre budgétaire. Ces intérêts rapportent aujourd'hui plusieurs milliards de francs. J'ai la conviction que cette somme est mieux utilisée à financer nos priorités qu'elle ne le serait à baisser purement et simplement ces intérêts. D'ailleurs, le taux des intérêts de retard, qui est de 9 % l'an, demeure globalement comparable à ceux pratiqués par les établissements bancaires, qui ont varié, au cours du premier trimestre 2000, entre 6,05 % et 12,04 % selon leur nature.

Certains d'entre vous ont évoqué la complexité de la loi fiscale, dont je rappelle qu'elle n'est pas toujours, même si c'est souvent le cas, le fait du Gouvernement. Il est indispensable, c'est vrai, de retenir une méthode de calcul simple. Mais l'adoption d'un taux d'intérêt variable indexé sur celui de l'intérêt légal entraînerait, de ce poin t de vue, des complications excessives. De même, la réduction du taux des majorations applicables au dépôt tardif des déclarations risque d'avoir pour effet de ne plus inciter les contribuables à respecter les délais légaux, ce qui serait fâcheux.

Enfin, la proposition de loi prévoit la création d'une commission chargée d'établir une enquête statistique annuelle sur les résultats des contrôles fiscaux. Cette commission ne me paraît pas utile. En effet, des amélio-r ations ont été apportées aux documents existants, notamment par un enrichissement des données relatives au contrôle fiscal et mentionnées dans le fascicule « Voies et moyens », conformément à ce que prévoit l'article 108 de la loi de finances pour 1999. Ainsi que Thierry Carcenac l'a rappelé, le Gouvernement devait, à partir de la loi de finances pour 2000, détailler les résultats du contrôle fiscal par région et il devra détailler, à partir de la loi de finances pour 2001, ces mêmes résultats non seulement par région, mais aussi par département de plus d'un million d'habitants en distinguant à chaque fois les droits simples et les pénalités. Le Gouvernement appliquera donc cet article 108 et il ne lui semble en conséquence pas utile de créer une commission spéciale.

Pour l'ensemble de ces raisons, le Gouvernement, rejoint le souci exprimé par la commission des finances...

M. Jean-Luc Warsmann.

C'est triste ! C'est vraiment une occasion ratée !

Mme la secrétaire d'Etat au budget.

... et est donc défavorable à l'adoption de la proposition de loi.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La discussion générale est close.

Vote sur le passage à la discussion des articles

M. le président.

La commission n'ayant pas présenté de conclusions, l'Assemblée, conformément à l'article 94, alinéa 3, du règlement, est appelée à statuer sur le passage à la discussion des articles du texte initial de la proposition de loi.

Conformément aux dispositions du même article du règlement, si l'Assemblée vote contre le passage à la discussion des articles, la proposition de loi ne sera pas adoptée.

Je ne suis saisi d'aucune demande d'explication de vote.

Je mets aux voix le passage à la discussion des articles de la proposition de loi.

(L'Assemblée décide de ne pas passer à la discussion des articles.)

M. Jean-Luc Warsmann.

Quelle honte !

M. le président.

L'Assemblée ayant décidé de ne pas passer à la discussion des articles, la proposition de loi n'est pas adoptée. (« C'est triste ! » sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

3

ORDRE DU JOUR DE L'ASSEMBLÉE

M. le président.

L'ordre du jour des séances que l'Assemblée tiendra jusqu'au jeudi 4 mai 2000 inclus a été fixé ce matin en conférence des présidents.

Cet ordre du jour sera annexé au compte rendu de la présente séance.

4 DÉSIGNATION D'UN CANDIDAT À UN ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE

M. le président.

J'ai reçu de M. le Premier ministre une demande de remplacement d'un membre de l'Assemblée nationale au sein du conseil d'administration de l'établissement public de financement et de restructuration.

Conformément aux précédentes décisions, le soin de présenter un candidat a été confié à la commission des finances, de l'économie générale et du plan.

La candidature devra être remise à la présidence avant le mercredi 3 mai 2000, à dix-huit heures.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

5

ORDRE DU JOUR

DES PROCHAINES SÉANCES

M. le président.

Cet après-midi, à quinze heures, deuxième séance publique : Questions au Gouvernement ; Explications de vote et vote, par scrutin public, sur l'ensemble du projet de loi relatif à la chasse ; Discussion, en deuxième lecture, du projet de loi, no 2255, relatif à l'élection des sénateurs : M. Marc Dolez, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport no 2300) ; Discussion de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, no 1948, interdisant les candidatures multiples aux élections cantonales : M. Jacky Darne, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport no 2219) ; Discussion, en deuxième lecture, du projet de loi, no 2199, portant réglementation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques : Mme Nicole Feidt, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport no 2301) ; (Procédure d'examen simplifiée - Art. 106 du règlement) Discussion, en deuxième lecture, de la proposition de loi, no 2259, relative à la protection des trésors nationaux et modifiant la loi no 92-1477 du 31 décembre 1992 relative aux produits soumis à certaines restrictions de circulation et à la complémentarité entre les services de police, de gendarmerie et de douane : M. Jean Rouger, rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (rapport no 2306) ; (Procédure d'examen simplifiée - Art. 106 du règlement.) A vingt et une heures, troisième séance publique : Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix heures vingt-cinq.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT

ERRATUM au compte rendu intégral de la 1re séance du 28 mars 2000 (Journal officiel, Débats de l'Assemblée nationale, no 27 [1] du 28 mars 2000) Page 2630 : 1re colonne, 11e ligne : Au lieu de :

« enfants privés de parents et d'affectation... »,

Lire :

« enfants privés de parents et d'affection... ».

ORDRE DU JOUR ÉTABLI EN CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS (Réunion du mardi 4 avril 2000) L'ordre du jour des séances que l'Assemblée tiendra du mardi 4 avril au jeudi 6 avril, puis après la suspension des travaux, du mardi 25 avril au jeudi 4 mai inclus, a été ainsi fixé : Mardi 4 avril 2000 : Le matin, à neuf heures : Discussion de la proposition de loi de M. François Goulard relative à la mise en place d'une véritable responsabilité pour faute de l'administration fiscale et d'un droit général d'indemnisation pour les contribuables (nos 2218-2295).

(Ordre du jour complémentaire.)

L'après-midi, à quinze heures, après les questions au Gouvernement, et le soir, à vingt et une heures : explications de vote et vote par scrutin public sur le projet de loi relatif à la chasse (nos 2182-1443-1717-17631768-1796-1848-2145-2273) ; discussion, en deuxième lecture, du projet de loi relatif à l'élection des sénateurs (nos 2255-2300) ; discussion de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, interdisant les candidatures multiples aux élections cantonales (nos 1948-2219) ; discussion, en deuxième lecture, du projet de loi portant réglementation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques (nos 2199-2301) ; discussion en deuxième lecture, de la proposition de loi relative à la protection des trésors nationaux et modifiant la loi no 92-1477 du 31 décembre 1992 relative aux produits soumis à certaines restrictions de circulation et à la complémentarité entre les services de police, de gendarmerie et de douane (nos 2259-2306).

(Ces deux derniers textes faisant l'objet d'une procédure d'examen simplifiée, en application de l'article 106 du règlement.)

Mercredi 5 avril 2000 : L'après-midi, à quinze heures, après les questions au Gouvernement : discussion du projet de loi autorisant l'approbation du protocole de Kyoto à la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (ensemble deux annexes) (nos 2183-2296) ; discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de la convention sur l'évaluation de l'impacts ur l'environnement dans un contexte transfrontière (ensemble sept appendices) (nos 1421-2221) ; discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des Etats-Unis du Mexique sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements (nos 1928-2222) ; discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Slovénie sur l'encouragement et la protection récip roques des investissements (ensemble un protocole) (nos 1925-2224) ; discusion du projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Kazakhstan en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et la fortune (ensemble un protocole) (nos 1926-2223) ; discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Kazakhstan sur l'encouragement et la protection récip roques des investissements (ensemble un protocole) (nos 1930-2223) ; discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'adhésion de la République française à la convention internationale contre la prise d'otages (nos 1929-2261) ; discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de la convention relative à l'adhésion de la République d'Autriche, de la République de Finlande et du Royaume de Suède à la convention concernant la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, ainsi qu'au protocole concernant son interprétation par la Cour de justice, avec les adaptations y apportées par la convention relative à l'adhésion du Royaume de Danemark, de l'Irlande et du Royaume-Uni


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord par la convention relative à l'adhésion de la République hellénique et par la convention relative à l'adhésion du Royaume d'Espagne et de la République portugaise (nos 1923-2262) ; discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de la convention relative à l'adhésion de la République d'Autriche, de la République de Finlande et du Royaume de Suède à la convention sur la loi applicable aux obligations contractuelles, ouverte à la signature à Rome le 19 juin 1980, ainsi qu'aux premier et deuxième protocoles concernant son interprétation par la Cour de justice (nos 1934-2262).

(Ces huit derniers textes faisant l'objet d'une procédure d'examen simplifiée, en application de l'article 107 du règlement.)

Le soir, à vingt et une heures : Discussion de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, tendant à préciser la définition des délits non intentionnels (nos 2121-2266).

Jeudi 6 avril 2000 : Le matin, à neuf heures : Suite de la discussion de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, tendant à préciser la définition des délits non inten tionnels (nos 2121-2266) ; Discussion, en deuxième lecture, du projet de loi relatif au référé devant les juridictions administratives (nos 2186-2302).

(Ce texte faisant l'objet d'une procédure d'examen simplifiée, en application de l'article 106 du règlement.)

Discussion, sur le rapport de la commission mixte paritaire, du projet de loi modifiant le code pénal et le code de procédure pénale et relatif à la lutte contre la corruption (no 2260) ; Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, portant organisation de la consultation de la population de Mayotte (nos 2276-2304) ; Discussion, en deuxième lecture, de la proposition de loi tendant à la reconnaissance de la traite et de l'esclavage en tant que crimes contre l'humanité (no 2277).

L'après-midi, à quinze heures, et éventuellement le soir, à vingt et une heures : Suite de l'ordre du jour du matin.

Mardi 25 avril 2000 : Le matin, à neuf heures : Discussion de la proposition de loi de M. André Aschieri, tendant à la création d'une agence française de sécurité san itaire environnementale (no 2279).

(Séance mensuelle réservée à un ordre du jour fixé par l' Assemblée, en application de l'article 48, alinéa 3, de la Constitution.) L'après-midi, à quinze heures, après les questions au Gouvernement, et le soir, à vingt et une heures : Discussion du projet de loi relatif aux nouvelles régulations économiques (nos 2250-2309).

Mercredi 26 avril 2000, l'après-midi, à quinze heures, après les questions au Gouvernement, et le soir, à vingt et une heures et Jeudi 27 avril 2000, l'après-midi, à quinze heures, et le soir, à vingt et une heures : Suite de la discussion du projet de loi relatif aux nouvelles régulations économiques (nos 2250-2309).

Mardi 2 mai 2000 : Le matin, à neuf heures : Discussion de la proposition de loi constitutionnelle de M. André Aschieri tendant à compléter l'article 3 et à supprimer l'article 88-3 de la Constitution et relative au droit de vote et à l'éligibilité des résidents étrangers pour les élections aux conseils des collectivités territoriales (no 2063).

(Ordre du jour complémentaire.)

L'après-midi, à quinze heures, après les questions au Gouvernement, et le soir, à vingt et une heures : Discussion du projet de loi portant habilitation du Gouvernement à adapter par ordonnance la valeur en euros de certains montants exprimés en francs dans les textes législatifs (no 2236) ; Discussion du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire en matière de santé des animaux et de qualité sanitaire des denrées d'origine animale et modifiant le code rural (no 2253).

Mercredi 3 mai 2000 : L'après-midi, à quinze heures, après les questions au Gouvernement, et le soir à vingt et une heures : Discussion, en lecture définitive, du projet de loi tendant à favoriser l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives ; Discussion, en troisième lecture, du projet de loi organique tendant à favoriser l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats de membre des assemblées de province et du congrès de la Nouvelle-Calédonie, de l'assemblée de la Polynésie française et de l'assemblée territoriale des îles Wallis-et-Futuna.

(Ces deux textes faisant l'objet d'une discussion générale commune.)

Discussion, soit sur rapport de la commission mixte paritaire, soit en nouvelle lecture, du projet de loi relatif à l'élection des sénateurs ; Discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi modifiant la loi no 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives (no 2239).

Jeudi 4 mai 2000 : L'après-midi, à quinze heures, et le soir, à vingt et une heures : Suite de la discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi modifiant la loi no 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives (no 2239).

DÉCISION SUR UNE REQUÊTE EN CONTESTATION D'OPÉRATIONS ÉLECTORALES (Communication du Conseil constitutionnel en application de l'article L.0.185 du code électoral) Décision no 2000-2581 du 30 mars 2000 (A.N., Landes, 3e circonscription) Le Conseil constitutionnel, Vu la requête no 2000-2581 présentée par M. Robert Lucas, demeurant à Artasssenx (Landes), enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 14 février 2000 et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été pro cédé les 30 janvier et 6 février 2000 dans la 3e circonscription des Landes pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationa le ; Vu les observations présentées par le ministre de l'intérieur, enregistrées comme ci-dessus le 3 mars 2000 ; Vu le mémoire en défense présenté par M. Henri Emmanuelli, député, enregistré comme ci-dessus le 8 mars 2000 ; Vu le mémoire en réplique présenté par M. Lucas, enregistré comme ci-desus le 15 mars 2000 ; Vu l'article 59 de la Constitution ; Vu l'ordonnance no 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu la loi no 95-65 du 19 janvier 1995 relative au financement de la vie politique ; Vu le code électoral ; Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ; Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ; Le rapporteur ayant été entendu ; Considérant que M. Lucas demande l'annulation de l'élection de M. Emmanuelli en soutenant que ce dernier était inéligible, à la date de cette élection, en application des dispositions du premier alinéa de l'article LO 130 du code électoral et de celles de l'article L.

7 du même code ; Considérant que l'article LO 130 du code électoral dispose :

« Les individus dont la condamnation empêche temporairement l'inscription sur une liste électorale sont inéligibles pendant une période double de celle durant laquelle ils ne peuvent être inscrits sur la liste électorale.

Sont en outre inéligibles : 1o Les individus privés par décision judiciaire de leur droit d'éligibilité, en application des lois qui autorisent cette privation ; 2o Les personnes pourvues d'un conseil judiciaire » ;


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

Considérant qu'aux termes de l'article L.

7 du code électoral, dans sa rédaction issue de la loi susvisée du 19 janvier 1995 :

« Ne doivent pas être inscrites sur la liste électorale, pendant un délai de cinq ans à compter de la date à laquelle la condamnation est devenue définitive, les personnes condamnées pour l'une des infractions prévues par les articles 432-10 à 432-16, 433-1, 433-2, 433-3 et 433-4 du code pénal ou pour le délit de recel de l'une de ces infractions, défini par les articles 321-1 et 321-2 du code pénal » ; Considérant que M. Emmanuelli a été condamné, par un arrêt de la cour d'appel de Rennes en date du 13 mars 1996, à une peine de dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis et à une amende de 30 000 francs pour le délit de recel de trafic d'influence, faits prévus et réprimés par les articles 321-1, 3219, 321-10, 433-2, 433-22 et 433-23 du code pénal ; que la cour d'appel a, en outre, prononcé à son encontre l'interdiction des droits de vote et d'éligibilité mentionnés aux 1o et 2o de l'article 131-26 du code pénal pour une durée de deux ans ; que le pourvoi qu'il a formé contre cet arrêt a été rejeté par u n arrêt de la Cour de cassation en date du 16 décembre 1997 ; Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des termes mêmes de l'article LO 130 du code électoral que son premier alinéa s'applique aux personnes dont une condamnation empêche de plein droit l'inscription sur une liste électorale et non à celles qui ont été condamnées expressément à la peine de privation de leurs droits de vote et d'éligibilité par une décision judiciaire ; que s'appliquent exclusivement à ces dernières les dispositions du 1o du second alinéa dudit article ; Considérant, en conséquence, que la situation de M. Emmanuelli relève des seules dispositions du 1o du second alinéa de l'article LO 130 ; que la période de deux ans d'interdiction des droits de vote et d'éligibilité à laquelle il a été condamné était expirée à la date de l'élection contestée ; Considérant, en second lieu, que les faits pour lesquels M. Emmanuelli a été condamné ont été commis entre 1988 et 1990, soit avant l'entrée en vigueur de la loi susvisée du 19 janvier 1995 ; que, dès lors, les dispositions de l'article L.

7 du code électoral ne lui sont pas applicables ; Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la requê te doit être rejetée, Décide : Art.

1er La requête de M. Robert Lucas est rejetée.

Art.

2. La présente décision sera notifiée à l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 30 mars 2000, où siégeaient : MM. Yves Guéna, président, Georges Abadie, Michel Ameller, Jean-Claude Colliard, Alain Lancelot, Mme Noëlle Lenoir, M. Pierre Mazeaud et Mmes Monique Pelletier et Simone Veil.

TEXTE SOUMIS EN APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION Transmission

M. le Premier ministre a transmis, en application de l'article 88-4 de la Constitution, à M. le président de l'Assemblée nationale le texte suivant : Communication du 31 mars 2000 No E 1432. - Proposition de la Commission relative aux prix des produits agricoles (2000/2001), volume I : exposé des motifs ; volume II : répercussions financières ; volume III : actes juridiques (COM [2000] 77 final).