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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE

DE

M.

RAYMOND

FORNI

M. le président.

1. Questions au Gouvernement (p. 3006).

BAISSE

DES

IMPÔTS (p. 3006)

Mme Anne-Marie Idrac, M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

DETTE

DES PAYS AFRICAINS (p. 3007)

M M. Jacques Rebillard, Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

CATASTROPHE DE L' ÉRIKA (p. 3007)

MM. François Fillon, Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

RESSOURCES

DES ASSOCIATIONS (p. 3008)

M. Philippe Martin, Mme Marie-George Buffet, ministre de la jeunesse et des sports.

COUVERTURE MALADIE

UNIVERSELLE (p. 3009)

M. Pierre Lellouche, Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

ACQUISITION DU

CCF PAR

HSBC (p. 3010)

MM. Christian Cuvilliez, Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

POLITIQUE DE L'EMPLOI (p. 3011)

M. Gaëtan Gorce, Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

ÉDUCATION NATIONALE (p. 3012)

MM. Yves Durand, Jack Lang, ministre de l'éducation nationale.

RISQUES LIÉS AUX DÉCHETS RADIOACTIFS (p. 3013)

Mmes Michèle Rivasi, Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

POLICE DE PROXIMITÉ (p. 3014)

MM. Jean-Pierre Blazy, Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur.

MM. Jean Proriol, le président.

2. Chasse. - Explications de vote et vote sur l'ensemble d'un projet de loi (p. 3015).

Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

M. François Patriat, rapporteur de la commission de la production.

M. le président.

EXPLICATIONS DE

VOTE (p. 3018)

MM. François Liberti, Charles de Courson,

MM. Gérard Charasse, Antoine Carré, Christian Bataille, Christian Estrosi.

VOTE

SUR L'ENSEMBLE (p. 3024)

Adoption, par scrutin, de l'ensemble du projet de loi.

Suspension et reprise de la séance (p. 3024)

PRÉSIDENCE

DE Mme

NICOLE CATALA

3. Nomination d'un député en mission temporaire (p. 3024).

4. Élection des sénateurs. - Discussion, en deuxième lecture, d'un projet de loi (p. 3025).

M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur.

M. Marc Dolez, rapporteur de la commission des lois.

DISCUSSION GÉNÉRALE (p. 3028)

MM. Jean-Luc Warsmann, René Dosière, Pascal Clément, Patrice Carvalho, Emile Blessig.

Clôture de la discussion générale.

DISCUSSION

DES ARTICLES (p. 3035)

Article 1er A (p. 3035)

Le Sénat a supprimé cet article.

Amendement no 1 de la commission des lois : MM. le rapporteur, le ministre, René Dosière, Pascal Clément. Adoption.

L'article 1er A est rétabli et se trouve ainsi rédigé.

Article 1er (p. 3036)

Amendement no 2 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre, Pascal Clément, René Dosière. - Adoption.

L'article 1er est ainsi rédigé.

Article 1er bis A (p. 3038)

Le Sénat a supprimé cet article.

Amendement no 3 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

L'article 1er bis A est rétabli et se trouve ainsi rédigé.

Article 1er bis B (p. 3038)

Le Sénat a supprimé cet article.

Amendement no 4 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

L'article 1er bis B est rétabli et se trouve ainsi rédigé.

Article 1er bis (p. 3038)

Amendement de suppression no 5 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

L'article 1er bis est supprimé.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

Article 2 (p. 3038)

Amendement no 6 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

L'article 2 est ainsi rédigé.

Article 3 (p. 3039)

Amendement no 7 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre, René Dosière. - Adoption.

L'article 3 est ainsi rédigé.

Après l'article 4 (p. 3039)

Amendement no 8 rectifié de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Article 5 (p. 3040)

Amendement no 9 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Adoption de l'article 5 modifié.

Article 6 (p. 3040)

Amendement no 10 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Adoption de l'article 6 modifié.

Article 14 (p. 3040)

Amendement no 11 rectifié de la commission : M. le rapporteur.

Amendement no 12 rectifié de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption des amendements nos 11 rectifié et 12 rectifié.

Adoption de l'article 14 modifié.

Article 15 (p. 3041)

Amendements nos 13 et 14 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoptions.

Adoption de l'article 15 modifié.

Article 15 bis. - Adoption (p. 3041)

Article 16 (p. 3041)

Amendements nos 15, 16 et 17 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoptions.

Adoption de l'article 16 modifié.

Article 18 (p. 3042)

Amendements nos 18 et 19 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoptions.

Adoption de l'article 18 modifié.

VOTE

SUR L'ENSEMBLE (p. 3042)

Adoption de l'ensemble du projet de loi.

5. C andidatures multiples aux élections cantonales. - Discussion d'une proposition de loi adoptée par le Sénat (p. 3042).

M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur.

M. Jacky Darne, rapporteur de la commission des lois.

DISCUSSION GÉNÉRALE (p. 3044)

MM. Patrice Carvalho, Pascal Clément, le ministre, François Loos, Jean-Luc Warsmann.

Clôture de la discussion générale.

M. le ministre.

DISCUSSION

DES ARTICLES (p. 3046)

Article 1er . - Adoption (p. 3046)

Article 2 (p. 3046)

Amendement no 1 de la commission des lois : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

L'article 2 est ainsi rédigé.

Article 3. - Adoption (p. 3047)

Après l'article 3 (p. 3047)

Amendement no 2 de la commission : MM. le rapporteur, le ministre, Pascal Clément, René Dosière. - Adoption.

Amendement no 3 de la commission : MM. René Dosière, le ministre. - Adoption.

VOTE

SUR L'ENSEMBLE (p. 3049)

Adoption de l'ensemble de la proposition de loi.

6. Désignation d'un candidat à un organisme extraparlementaire (p. 3049).

7. Ordre du jour de la prochaine séance (p. 3049).


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COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. RAYMOND FORNI

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

M. le président.

Mes chers collègues, je vous remercie pour votre accueil chaleureux.

Je vous indique dès à présent que la séance ne sera pas suspendue à la fin des questions au Gouvernement.

Nous passerons directement aux explications de vote et au vote, par scrutin public, sur l'ensemble du projet de loi relatif à la chasse.

1

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

M. le président.

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Nous commençons par le groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.

BAISSE DES IMPÔTS

M. le président.

La parole est à Mme Anne-Marie Idrac.

Mme Anne-Marie Idrac.

Monsieur le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, la semaine dernière, en réponse à une question de mon collègue UDF, M. Donnedieu de Vabres, le Premier ministre nous a indiqué que le changement de gouvernement ne signifiait pas changement de politique. Or la politique du Gouvernement en matière de finances publiques, on en connaît les résultats pour 1999 : premièrement, record historique des prélèvements obligatoires ; deuxièmement, croissance des dépenses publiques au rythme de six fois l'inflation.

Monsieur le ministre, vous dites qu'il faut baisser les impôts. Tant mieux. Et vous écrivez même, ou plutôt vous écriviez, qu'à cet effet il faut réduire les dépenses.

C'est de bon sens. C'est d'ailleurs ce que font les autres pays européens et c'est le seul moyen d'assurer concrètement une baisse durable des impôts.

Monsieur le ministre, quelles mesures comptez-vous prendre pour réduire les dépenses publiques, comme vous vous y étiez engagé en tant que président de l'Assemblée nationale ? (Applaudissements et « Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Vous imaginez le plaisir et l'honneur que j'ai à passer la parole à M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, madame la députée, je pense qu'il n'y a pas de contradiction entre les engagements du Gouvernement, que dirige M. le Premier ministre, et les propositions que, comme ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, je serai amené à vous faire.

Sur le plan des dépenses, la France a pris un engagement, qui a été transmis à nos partenaires européens, fixant, sur trois années, une augmentation de 1 %. Cet engagement est public, il engage notre pays et il est hors de question de ne pas le respecter.

Les prélèvements obligatoires, et en particulier les impôts, ont certes augmenté,...

Un député du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.

C'est vrai ! M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

... pour des raisons dont vous avez souvent discuté au cours de ces derniers mois. Le Premier ministre a fixé un objectif clair, et même chiffré : il s'agit, à la fin de la législature, de revenir à 43,7 % du produit intérieur brut, c'est-à-dire, pour être plus clair, d'effacer les hausses d'impôts auxquelles vous-mêmes, en particulier, avez pu contribuer. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Enfin, s'agissant de la dette, il est évident qu'il faudra poursuivre, et même amplifier le mouvement récent qui nous a amenés à une inversion de la tendance. Et j'en profite pour contribuer à tordre le cou, si je le peux,...

M. Franck Dhersin.

Tordre le cou à Jospin ! (Sourires.)

M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

... à ce mot que j'ai moi-même utilisé, comme vous tous : la « cagnotte ».

M. Charles Cova.

Il n'y en a plus ! M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

On peut certes utiliser ce terme pour aller vite, mais il n'est pas vraiment approprié, dans la mesure où le bonus des recettes est de 50 milliards de francs, soit seulement 1 % de la dette de notre pays, qui atteint 5 000 milliards de francs.

M. Jean-Jacques Jégou et M. André Santini.

Très bien ! M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Par conséquent, autant il faut se réjouir que la bonne situation économique ait permis ce bonus, autant il ne faut pas semer d'illusions et laisser planer l'idée que l'on pourrait dépenser sans compter. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance et sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

En effet, je crois que l'un des objectifs poursuivis par notre majorité, par notre gouvernement, c'est de montrer que l'on peut mener une politique efficace en matière d'emplois, une politique juste, tout en gérant correctement la France. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

M. Alain Madelin.

Très bien ! M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Enfin, madame la députée, puisque c'est la première question à laquelle j'ai l'honneur de répondre depuis cette place, je vous assure que j'ai à la fois plaisir et émotion à m'adresser à vous. Je garde le même sentiment de considération vis-à-vis des députés et je m'efforcerai, chaque fois que vous me le demanderez, de répondre aussi précisément que possible à vos questions.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert, et sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Nous passons aux questions du groupe Radical, Citoyen et Vert.

DETTE DES PAYS AFRICAINS

M. le président.

La parole est à M. Jacques Rebillard.

M. Jacques Rebillard.

Monsieur le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, le chef de l'Etat, au Caire, a annoncé l'annulation de la dette des pays africains, s'arrogeant ainsi le bénéfice de l'annonce. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Or c'est bien le budget de la nation, géré par le gouvernement de Lionel Jospin, qui devra en assumer la charge.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous informer des conséquences sur le budget de la France de cette légitime et nécessaire annulation de dette ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, et sur quelques bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, monsieur le député, vous vous rappelez sans doute qu'en juin de l'an dernier, à Cologne, les chefs d'Etat et de Gouvernement du G7 avaient décidé de consentir un effort multilatéral de réduction de dette. Cet effort, ce geste était extrêmement significatif puisqu'il prévoyait d'aller jusqu'à une annulation de 100 % des créances au titre de l'aide publique au développement et de 90 % des créances commerciales. Seulement voilà, les choses vont lentement. J'aurai l'occasion d'insister à nouveau sur cet engagement dans dix jours, lors d'une réunion qui rassemblera les ministres des finances, à Washington.

Cependant, monsieur le député, vous savez que la tradition et, je dirai, l'honneur de la France, c'est de toujours montrer le chemin en ce qui concerne l'aide aux pays les plus pauvres. C'est pourquoi la France veut aller plus loin que les décisions prises à Cologne.

A Tokyo, déjà, au mois de janvier, parlant au nom du Premier ministre, mon prédécesseur avait annoncé que, bilatéralement, cette fois, et non pas multilatéralement, nous entendions aller jusqu'à l'annulation de la totalité des créances commerciales sur les pays pauvres les plus endettés. C'est ce que vient de dire avec force M. le Président de la République.

M. Christian Cabal.

Très bien ! M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Cette mesure représente - je veux le préciser à l'Assemblée nationale, compte tenu de la question précédente - un effort financier d'environ 8 milliards de francs, qui sera vraisemblablement étalé entre 2000 et 2003.

Cela dit, lorsque nous abordons ces questions financières, n'oublions jamais que sur 6 milliards d'hommes et de femmes qui peuplent aujourd'hui notre planète, 4 milliards vivent avec moins de 12 francs par jour. Et, je le répète, c'est la tradition, c'est l'honneur de la France de montrer le chemin, non pas seulement en termes d'idées, mais en termes de décisions concrètes.

C'est la démarche qui a été poursuivie au cours des dernières années, c'est ce qu'avait dit avec force le Premier ministre au début de l'année, et c'est ce qu'a dit hier avec une force égale le Président de la République, en notre nom à tous. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert, et sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe Démocratie libérale et Indépendants et du groupe communiste.)

M. le président.

Nous en venons aux questions du groupe du Rassemblement pour la République.

CATASTROPHE DE L' ÉRIKA

M. le président.

La parole est à M. François Fillon.

M. François Fillon.

Monsieur le Premier ministre...

M. Jacques Myard.

Lequel ? (Sourires sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. François Fillon.

... chaque semaine ou presque, nous sommes contraints de vous interroger sur un nouveau dysfonctionnement du Gouvernement dans le traitement de la crise de la marée noire.

Après les incertitudes et les interrogations sur le danger que pouvaient courir les personnes qui participent au nettoyage du littoral, du fait de la toxicité du fioul de l' Erika, alors même que le FIPOL n'a pas encore versé un franc aux victimes de la marée noire, et les traite d'ailleurs avec le plus profond mépris, nous venons d'apprendre que l'Etat avait signé avec la société TotalFina un accord dont deux dispositions paraissent pour le moins curieuses.

La première, à l'article 4, prévoit que « l'engagement de pompage souscrit par Total constitue une obligation de moyens et non une obligation de résultat. L'Etat ne recherchera pas la responsabilité de Total en cas d'échec de l'opération. » Que cela signifie-t-il, monsieur le Pre-

mier ministre ? Devons-nous comprendre que même si l'opération de pompage échoue, nul ne sera tenu pour responsable ? Quant à l'article 8, il stipule que l'Etat et TotalFina

« s'attachent à limiter la diffusion et à protéger les informations et les documents confidentiels provenant ou concernant l'autre partie dont ils ont eu connaissance dans le cadre de l'exécution du présent protocole. »

Monsieur le Premier ministre, que signifient ces deux dispositions ? Pourquoi organiser l'opacité alors que la transparence est nécessaire ? Et ne me répondez pas qu'il s'agit de protéger des secrets de fabrication de la société TotalFina, puisque M. Gayssot, samedi dernier, a luimême répondu à la question...

Mme Odette Grzegrzulka.

Magistralement !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

M. François Fillon.

... par ces mots, rapportés par un grand journal du soir : « Cette clause est une connerie, mais, à l'époque, Lionel Jospin ne m'avait pas encore confié le dossier. »

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Monsieur le Premier ministre, ma question est très simple : qui, au Gouvernement, est responsable de cette

« connerie » ? (Applaudissements et rires sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement. (Exclamations sur les mêmes bancs.)

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Monsieur le député, le dossier de l' Erika est un dossier majeur, compliqué (Exclamations sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République)...

M. Eric Doligé.

Comme la chasse ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du l ogement.

... parce qu'il reste encore au moins 15 000 tonnes de fioul par 130 mètres de fond,...

M. Pierre Lellouche.

Mme Voynet a pourtant affirmé que ce n'était pas une catastrophe...

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

... dans deux morceaux d'épave, qu'il s'agit de traiter.

Le choix qui a été fait est celui du pompage. Des décisions ont été prises, qui ont permis de responsabiliser l'entreprise Total. Une convention a été passée, et s'il a été fait écho de certains articles de ce document, les choses sont claires : je me suis immédiatement exprimé pour bien signifier que le secret se limitait au secret industriel (Exclamations sur les bancs du du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants)...

M. Jean-Louis Debré.

Ce n'est pas ce que stipule la convention ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

C'est la règle dans tous les cas, vous en savez quelque chose.

Il est exact, monsieur le député, que le Premier ministre m'a confié, le 8 février dernier, la mission du traitement de l'épave,...

M. Pierre Lellouche.

Ce n'est pas ce qu'il a fait de mieux.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

... c'est-à-dire non seulement la coordination technique, mais également le soin de faire en sorte que toutes les informations soient données et que toutes les concertations nécessaires soient menées avec la plus grande diligence, afin que la représentation parlementaire, en particulier, soit tenue au courant à tout instant de la nature des moyens mobilisés en faveur du pompage.

L'opération doit être menée en toute sécurité pour l'environnement et le plus rapidement possible, mais aussi être complète - il est hors de question de laisser 1 000 ou 2 000 tonnes au fond en se disant que l'on a prélevé l'essentiel.

L'appel d'offre a été lancé. Deux sociétés...

M. André Berthol.

La réponse ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Ecoutez donc ! L'appel d'offres a été lancé, deux sociétés se sont portées candidates, et le choix va être fait. Dès qu'il le sera, le pompage des deux morceaux d'épave sera réalisé. On peut penser qu'à partir de la mi-mai, les moyens techniques du prélèvement du pétrole seront réunis.

Vous avez parlé de la manifestation de samedi, monsieur le député. Et je puis vous dire que tous mes interlocuteurs ont reconnu les efforts accomplis par le Gouvernement, la nouvelle donne en matière de sécurité maritime.

J'ajoute que ces efforts, nous sommes non seulement décidés à les mener en France, pour le pompage de l'épave de l' Erika, mais nous sommes aussi déterminés à les porter à l'échelle européenne, et même à l'échelle internationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Jean-Louis Debré.

Vous n'avez pas répondu à la question !

RESSOURCES DES ASSOCIATIONS

M. le président.

La parole est à M. Philippe Martin.

M. Philippe Martin.

Ma question s'adresse à M. le Premier ministre et concerne la pérennité de la vie associative.

Nous le savons tous, la vie associative est une richesse indispensable à la vie de nos cités et de nos villages. Les recettes nécessaires au fonctionnement des associations sont notamment générées par les buvettes (« Ah ! » sur divers bancs) destinées aux membres, sympathisants ou spectateurs à l'occasion de manifestations locales qui participent à l'animation de la commune, particulièrement en milieu rural. Or, depuis quelques semaines, la révolte gronde dans les rangs des présidents des associations locales. Nombre d'entre eux parlent de drame financier et, une fois de plus, d'aveuglement bureaucratique.

M. André Labarrère.

Bravo !

M. Philippe Martin.

En effet, des instructions émanant de vos services, monsieur le Premier ministre, ont amené certaines préfectures à interpréter de manière restrictive...

M. Jean-Paul Charié.

Et à tort !

M. Philippe Martin.

... et discutable l'article L.

48 du code des débits de boissons. Les maires de nombreux départements, dont le mien, ont ainsi été destinataires d'une circulaire préfectorale précisant que les autorisations d'exploiter des débits de boissons temporaires ne pouvaient être délivrées que pour les fêtes traditionnelles ayant plusieurs années d'existence, excluant de facto du régime dérogatoire les bals, les spectacles, les lotos, les dîners dansants, etc. Cette interprétation restrictive est considérée comme un nouveau coup porté en direction des associations. A terme, elle signe l'arrêt de mort de nombre d'entre elles. En effet, vous devriez le savoir, l'argent récolté par les buvettes au cours de ces manifestations contribue pour une large part à leur survie financière.

M. Lucien Degauchy.

C'est une coup de poignard aux bénévoles !

M. Philippe Martin.

En outre, aux termes de l'article

L. 48 du code des débits de boissons, la vente ou la distribution de boissons lors d'événements organisés en dehors d'enceintes sportives relèvent de l'autorisation du maire.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

M. Christian Bourquin.

La question !

M. Philippe Martin.

Oui, le maire est incontestablement le mieux à même de juger de l'opportunité de délivrer une autorisation de buvette (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République), d'évaluer son impact local ou les problèmes qui pourraient en découler, car il détient l'intelligence de proximité.

M. Christian Bourquin.

La question !

M. Philippe Martin.

Cela relève, me semble-t-il, d'une gestion autonome et responsable des affaires locales qui ne nécessite par l'intervention de l'Etat.

M. Christian Bourquin.

La question !

M. Philippe Martin.

Face à ces menaces, quels moyens comptez-vous mettre en oeuvre, monsieur le Premier ministre, pour assurer la pérennité des associations locales et rassurer les maires quant à leurs compétences ? Nous attendons des éléments de réponse clairs et précis.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

Efforcez-vous, mes chers collègues, de raccourcir vos questions ! Je sens M. Pierre Lellouche tout à fait impatient d'entendre la réponse de Mme Buffet, pour qu'il puisse poser ensuite sa propre question ! (Exclamations sur les bancs du du groupe du Rassemblement pour la République.)

La parole est à Mme la ministre de la jeunesse et des sports.

M. Jean-Paul Charié.

C'est le ministre de l'intérieur qui est concerné !

Mme Marie-George Buffet, ministre de la jeunesse et des sports.

Monsieur le député, la vie associative est l'une des grandes préoccupations de ce gouvernement (Exclamationss ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) qui a pris, l'année dernière, la décision de tenir des Assises de la vie associative (« Ah ! » sur les mêmes bancs. Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe communiste et du groupe socialiste) avec l'ensemble du mouvement associatif. Afin de donner plus de moyens aux associations, à la formation des bénévoles, le Premier ministre a décidé de doubler le budget du fonds national de développement de la vie associative, que je présiderai demain après-midi. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

M. Jean-Paul Charié.

Ce n'est pas la question !

Mme la ministre de la jeunesse et des sports.

En ce qui concerne les buvettes (« Ah ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République), votre assemblée a décidé de donner l'autorisation d'ouvrir une buvette dix fois dans l'année dans les enceintes sportives. Il reste un problème d'interprétation de la loi pour les clubs multisports - doit-on parler de section ou de club ? -, mais nous sommes en train de le régler. Je pense pour ma part que la lutte contre l'alcoolisme peut aussi passer par le contrôle des buvettes dans les stades. (« Cela n'a rien à voir ! » sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) D'ailleurs, plusieurs grandes fédérations sportives ont décidé d'établir une charte pour la tenue de leur buvette, car elles savent très bien qu'il vaut mieux accueillir les jeunes dans la convivialité du stade plutôt que les laisser acheter des canettes de bière synthétiques dans des magasins bon marché. Je soutiens donc la démarche des clubs sportifs. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Cela dit, je ne pense pas que les ressources des associations doivent dépendre des buvettes. Le Gouvernement est décidé à donner d'autres moyens pour vivre à ces piliers de la démocratie. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

COUVERTURE MALADIE UNIVERSELLE

M. le président.

La parole est à M. Pierre Lellouche.

M. Pierre Lellouche.

Monsieur le Premier ministre, je voudrais vous interroger sur la magnifique pagaille que vous avez occasionnée dans ce pays en n'anticipant pas de manière satisfaisante la mise en place de la couverture maladie universelle. (Huées sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - « Tiberi ! Tiberi ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Mes chers collègues, je vous en prie ! Le temps de parole du RPR est ce qu'il est et

M. Lellouche a peu de temps pour poser sa question.

Laissez-le parler, s'il vous plaît !

M. Pierre Lellouche.

Cette pagaille touche en priorité les assurés sociaux. Vous n'êtes pas sans le savoir, monsieur le Premier ministre, d'après les statistiques mêmes de la Caisse nationale d'assurance maladie ce sont près de 13 millions de dossiers qui sont aujourd'hui en souffrance et, en région parisienne, les délais de remboursement atteignent des records puisqu'il faut près de sept mois pour être remboursé. Ces retards ne touchent pas seulement les assurés ; ils concernent malheureusement aussi les 427 000 professionnels de santé libéraux, notamment les infirmières libérales, dont nous connaissons tous l'exceptionnelle compétence et le dévouement au service de chacun.

Vous ne le savez peut-être pas, mesdames, messieurs de la majorité, mais une infirmière libérale gagne moins de 10 000 francs par mois en ce moment à Paris, pour douze à quinze heures de travail par jour, y compris le week-end. Une piqûre est tarifée 26,30 francs, dont à peine 9 francs pour le déplacement. Or, les trois quarts des actes étant remboursés à 100 %, notamment au titre de la CMU, beaucoup d'infirmières ne sont plus payées.

Dans ma circonscription, certaines d'entre elles ne l'ont pas été depuis le mois d'octobre. Nombre de ces jeunes femmes doivent désormais emprunter de l'argent à la banque pour nourrir leur famille. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Un député du groupe socialiste.

Populiste !

M. Pierre Lellouche.

Je suis navré de voir que cela ne vous intéresse pas, pourtant cela intéresse beaucoup de nos concitoyens ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Ma question est simple, monsieur le Premier ministre.

Que comptez-vous faire...


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

M. Jean Auclair.

Rien !

M. Pierre Lellouche.

... pour que les remboursements, tant pour les assurés sociaux que pour les infirmières et les professionnels de santé, soient effectués dans des conditions convenables ?

M. Jean Auclair.

C'est l'immobilisme !

M. Pierre Lellouche.

Par ailleurs, une circulaire récente de Mme Aubry invite les infirmières à traiter en priorité les personnes concernées par la CMU. Mais comment ? Avec quel matériel ? Avec quels moyens de télétransmission dès lors que vous n'êtes même pas capables de rembourser les actes que ces femmes font au service de chacun ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Permettez-moi, monsieur le député, de rappeler deux faits que vous paraissez avoir oubliés dans votre question.

D'abord, la couverture maladie universelle, ce n'est pas une grande « pagaille » ; c'est un accès aux soins gratuit pour six millions de personnes dans notre pays ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Ensuite, la Caisse nationale d'assurance maladie est gérée par le patronat et les syndicats, et le Président de la République a rappelé encore récemment combien il était i mportant de respecter l'autonomie des partenaires sociaux. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Cela dit, arrivons-en aux faits ! Dès le mois de novembre, avant même que la CMU soit mise en place puisque, vous en conviendrez, les premiers dossiers sont arrivés début janvier dans les CPAM, il y avait dix millions d'ordonnances en retard.

M. Pierre Lellouche.

Mais pourquoi ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Je m'en suis inquiétée à plusieurs reprises, croyez-le bien, et j'ai demandé à la CNAM de prendre des mesures...

M. Pierre Lellouche.

Qu'attendez-vous ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mais ce sont les partenaires sociaux qui la gèrent ! La Caisse nationale d'assurance maladie compte 90 000 salariés. Or, à l'évidence, il y a un problème d'allocation des ressources, notamment en Ile-de-France. Comme vous, je ne me résous pas à ce retard dans les remboursements qui pose problème aux assurés et aux personnels de santé.

S'agissant de la CMU, la Caisse nationale d'assurance maladie a demandé le renfort de 1 400 personnes supplémentaires, ce qui leur a aussitôt été accordé, et il faut saluer le travail des agents des caisses primaires qui traitent, dans un esprit de service public, les demandes de couverture maladie universelle, dont 40 000 sont satisfaites par semaine.

Malgré les 20 000 contrats à durée déterminée mensuels que j'ai accordés à la Caisse nationale d'assurance maladie il y a quelques semaines, le problème de l'organisation de cette caisse reste en suspens. Je suis très heureuse que vous souleviez cette question, monsieur le député, mais je souhaiterais que vous la posiez à ceux qui la gèrent.

M. Pierre Lellouche.

Vous êtes le ministre de tutelle !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mais ce n'est pas moi qui gère la CNAM et vous me rappelez sans arrêt l'autonomie des partenaires sociaux ! Je leur ai rappelé leurs obligations. J'ai quant à moi pris toutes les décisions pour que la couverture maladie universelle ne porte pas préjudice au fonctionnement des caisses primaires. J'ai accordé tous les moyens qui m'ont été demandés. Mais je souhaite, tout comme vous, car le problème est grave en Ile-de-France, que des mesures soient prises et que la gestion soit plus rigoureuse pour que les assurés sociaux et les personnels de santé ne soient pas confrontés à des délais de remboursement qui, sans atteindre sept mois - là vous avez un peu exagéré -,...

M. Pierre Lellouche.

J'ai parlé de cinq mois !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

... sont en tout état de cause inacceptables.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe communiste.)

M. Didier Boulaud.

C'est le sabotage du MEDEF !

M. le président.

Nous en venons aux questions du groupe communiste.

ACQUISITION DU CCF PAR HSBC

M. le président.

La parole est à M. Christian Cuvilliez.

M. Christian Cuvilliez.

Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Depuis deux jours, une campagne calamiteuse, et peutêtre sans fondement, stigmatise le manque de patriotisme fiscal de Laetitia Tasca...

(Rires et exclamations.)

M. le président.

Mme Tasca est toujours ici, monsieur Cuvilliez ! (Sourires.)

M. Christian Cuvilliez.

C'est de Laetitia Casta dont je veux parler, bien sûr ! On voit bien quelle est la véritable cible.

Mais ceux-là mêmes qui mènent cette campagne célèbrent avec force louanges le succès de la vente à l'encan du Crédit commercial de France par ses actionnaires à l'HSBC - Hong Kong and Shanghai Banking Corporation.

(« Bravo ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Au moment où nous allons aborder la discussion du projet de loi relatif aux nouvelles régulations économiques visant à moraliser les transactions, les OPA et les OPE, à les rendre plus transparentes, à sécuriser le marché, le Crédit commercial de France se vend trois fois et demie le prix de sa valeur comptable dans le secret de négociations de week-end, avec à la clé des plus-values affriolantes pour les principaux cadres actionnaires et dirigeants, sans préjudice dess tock-options pour l'avenir. Cette opération laisse 13 400 salariés du CCF hors du champ de l'information et a fortiori de l'intervention, hors du champ de l'aubaine sur l'échange ou l'achat des actions, et qui plus est dans la crainte d'avoir à payer la rançon d'un tel succès sur la masse salariale. Cette première prise de contrôle d'une banque française par un établissement étranger pose la question de l'intervention de l'autorité publique.

Monsieur le ministre, que compte faire le Gouvernement pour empêcher cette absorption qui n'est librement consentie que par ceux à qui elle profite ? Quelle trans-


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parence, quelle moralisation, quelle protection de notre secteur bancaire à base nationale, quelle garantie pour les emplois allez-vous exiger face à cette appropriation supranationale du CCF par le cheval de Troie anti-euro,

HSBC ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Monsieur le député, vous avez commencé par une allusion à la situation d'une jeune femme, pour centrer ensuite l'essentiel de votre question sur l'opération bancaire CCF-HSBC. Je n'ai pas le temps de traiter les deux sujets. Je me consacrerai donc au second, mais si d'autres veulent que je revienne sur le premier, compte tenu de sa nature ce sera avec plaisir ! (Sourires.)

L a question de l'offre publique d'échange-offre publique d'achat de la société HSBC sur le CCF est très importante puisque c'est la première fois qu'une banque française classée parmi les dix premières du pays fait l'objet d'une acquisition par une grande banque étrangère. A cette question sérieuse, il faut répondre sérieusement, comme vous m'y avez invité.

D'abord, quels sont les faits ? Avant cette opération, le CCF, qui est un établissement très bien géré, représentait, en termes de capitalisation boursière, à peu près 10 milliards d'euros. Dans le passé, plusieurs tentatives avaient été faites, et on le comprend, pour rapprocher cette grande banque d'autres banques françaises. Mais elles a vaient échoué ! Et tous ceux qui, comme vous, connaissent ces questions savent qu'il n'y a pas, sur la place française, de société ayant envisagé de se marier avec le CCF. J'ajoute que, de fait, celui-ci était déjà à majorité étrangère puisque 58 % de son capital était détenu par des groupes étrangers, ING, le principal actionnaire, étant néerlandais,...

M. Pierre Lellouche.

Qu'est-ce qu'on attend pour nos fonds de pension ? M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

... KBC, belge, et Swiss Life étant de nationalité suisse, comme son nom l'indique. Le CCF était donc une proie possible.

A partir de là, à la fin de la semaine dernière, la deuxième banque mondiale asiatique et britannique a fait une proposition pour acquérir le CCF. Quels sont les pouvoirs des autorités françaises et quelle peut être notre réaction ? Sur le plan administratif, l'essentiel est entre les mains du Comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement - CECEI -, autorité qui contrôle les établissements en matière bancaire. Or, il ne s'est pas encore prononcé. Cela dit, dans la mesure où le CCF détient un élément d'une compagnie d'assurance, une autorisation gouvernementale est nécessaire et le ministère des finances peut donc intervenir. Quelle a été notre préoccupation, sans pour autant que nous ayons à donner une approbation formelle ? D'abord, et c'est l'essentiel, nous veillerons à la préservation des intérêts français. Mais l'acquéreur n'étant pas implanté dans la zone euro, il n'y aura pas de compétition entre cette banque et le CCF sur ce plan, alors que cela aurait été le cas si l'acquéreur avait été néerlanda is. Ensuite, il est très important de voir si l'emploi pourra être préservé et si des marges de développement pourront être réalisées. Or, de ce point de vue-là, le conseil d'administration du CCF, où les salariés sont représentés, s'est prononcé à l'unanimité en faveur de ce qui a été proposé à la direction par HSBC. Il n'y a eu ni voix contre ni abstention. Mais, bien évidemment, nous resterons vigilants quant à la bonne fin de l'opération.

J'ajouterai deux remarques.

D'une part, nos établissements prennent aussi des positions et des contrôles sur des banques européennes ou des banques internationales. Dès lors que l'essentiel est respecté, il faut s'attendre à ce que la réciproque puisse exister.

D'autre part et surtout, nous devons tous veiller à ce que des mouvements de cette sorte, mais hostiles ceux-là, ne se produisent pas à l'égard d'autres banques ; et c'est sans doute le sens profond de votre question. Je vous rappellerai donc la jurisprudence du CECEI (Exclamationss ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), dont les termes sont pesés : il faut que la proposition soit claire et concertée. Il n'est pas question qu'il y ait acquisition d'un établissement bancaire important en France sans accord entre l'acquéreur, la banque cédée et les pouvoirs publics.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Nous en venons aux questions du groupe socialiste.

POLITIQUE DE L'EMPLOI

M. le président.

La parole est à M. Gaëtan Gorce.

M. Gaëtan Gorce.

Madame la ministre de l'emploi et de la solidarité, la grande différence entre la situation que nous avons trouvée en juin 1997 (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) et celle qui prévaut aujourd'hui, c'est que les Français commencent à retrouver confiance en l'avenir.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

C'est sans doute que la politique suivie par ce Gouvernement et cette majorité a permis de créer les conditions de ce retour de la confiance.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

L'activité économique est forte, plus forte que depuis bien longtemps, et le chômage recule.

(Nouvelles exclamations sur les mêmes bancs.) Ce qui est important, et on devrait s'en féliciter sur tous les bancs de cette assemblée, c'est que l'on passe aujourd'hui d'un discours qui laissait penser qu'il n'y aurait pas de la place pour tous dans cette société, à une volonté de reconquête du plein emploi et à une société du travail.

Nous avions dépassé les 3 millions de chômeurs. Il y en a aujourd'hui 640 000 de moins.

M. Philippe Briand.

Vous bénéficiez de la croissance !

M. Gaëtan Gorce.

C'est un phénomène sur lequel il faut insister, à la fois parce qu'il faut amplifier ce mouvement de baisse et parce qu'il faut que la reprise de l'emploi profite à tous.

M adame la ministre, comment analysez-vous les chiffres concernant les résultats du chômage, qui viennent d'être publiés ? Dans quelle perspective souhaitez-vous désormais placer votre politique de l'emploi ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)


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M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Effectivement, monsieur le député, le nombre de chômeurs a baissé de 640 000 depuis juin 1997 et de 65 500 en février dernier. C'est un très bon résultat. Il est d'autant plus remarquable que la population active continue à s'accroître en France, contrairement aux autres pays, de près de 200 000 personnes par an. Nous venons de passer en dessous de la barre des 2 500 000 chômeurs.

Cela donne la mesure du chemin parcouru. Qui aurait cru en juin 1997, lorsque nous sommes arrivés, qu'en deux ans et demi nous réduirions le nombre de chômeurs de 640 000 ? Mais cela donne aussi la mesure du chemin à parcourir : 2 500 000 personnes dans notre pays sont encore au chômage.

Comment expliquer ces bons résultats, même s'il nous faut continuer à avancer avec la même énergie ? Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République.

La croissance !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Effectivement, ces résultats tiennent en grande partie à la croissance. Mais la croissance ne tombe pas du ciel ! Il faut l'aider, il faut l'accompagner.

(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

Comment d'ailleurse xpliquerions-nous autrement la situation, nous qui étions, en matière de croissance, en queue de peloton des pays européens les quatre années avant notre arrivée au pouvoir et qui sommes aujourd'hui en tête ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) En vérité, la croissance, il faut la vouloir en relançant la confiance, comme vous l'avez dit, monsieur le député, en relançant la croissance de la consommation, mais aussi en faisant en sorte que cette croissance soit plus favorable à l'emploi. C'est ce que nous avons fait avec les emploisjeunes qui sont aujourd'hui au nombre de 240 000. C'est ce que nous avons fait avec la réduction de la durée du travail, qui concerne aujourd'hui 180 000 emplois. Cela a déjà permis de réduire le nombre des chômeurs de 130 000. Et cela signifie que sans les emplois-jeunes et sans la réduction de la durée du travail, la baisse du chômage aurait été inférieure de 40 % l'année dernière et sans doute de 50 % cette année.

M. François Goulard.

Comment font les Espagnols ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Voilà la réalité de la politique menée auprès du Premier ministre, qui a fait de la lutte contre le chômage sa priorité.

Un dernier mot : toutes les catégories bénéficient de cette reprise, notamment les chômeurs de longue durée.

C'est là l'effet de la loi de lutte contre les exclusions et du programme que nous avons mis en place avec l'ANPE à la suite du processus de Luxembourg.

Cela montre, monsieur le député, que la volonté politique et la priorité donnée par le Gouvernement à l'emploi ont des résultats. Cela montre aussi qu'il nous faut poursuivre avec la même détermination tant qu'il restera autant de chômeurs dans notre pays.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) ÉDUCATION NATIONALE

M. le président.

La parole est à M. Yves Durand.

M. Yves Durand.

Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale.

(« Ah ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Un député du groupe du Rassemblement pour la République.

On va comparer !

M. Yves Durand.

Depuis bientôt trois ans, le Gouvernement a engagé avec courage des réformes nécessaires dans l'éducation nationale.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Aujourd'hui, la poursuite de ces réformes est réclamée par l'immense majorité des enseignants et par la totalité des associations de parents d'élèves.

L'objectif de ces réformes est l'égalité des chances et l'aide à ceux qui en ont le plus besoin. C'est là notre conception du pacte républicain. Est concerné, entre autres, mais pas uniquement, l'enseignement professionnel, qui est trop souvent considéré comme une filière sans issue, alors qu'il doit devenir un pôle d'excellence du système éducatif.

M onsieur le ministre, nous le savons, initier et conduire ces réformes demande du courage et de la détermination. En même temps, cela nécessite, si l'on veut convaincre, de fournir des explications à chaque acteur du système éducatif.

Dès votre arrivée dans ce ministère, vous avez ouvert des discussions avec les organisations syndicales. Pouvezvous déjà nous dire si ces discussions ont permis de dégager des points d'accord avec les organisations syndicales que vous avez reçues ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jack Lang, ministre de l'éducation nationale.

Monsieur le député, le souhait du Gouvernement - et j'accomplis cette mission en son nom avec Jean-Luc Mélenchon, ministre délégué à l'enseignement professionnel est de redonner confiance à l'ensemble des partenaires de l'éducation nationale : professeurs, chefs d'établissement, parents, élèves, étudiants.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Ce dialogue, que j'ai souhaité ouvrir voilà quelques jours, est destiné, non pas à se croiser les bras, mais à innover (« Ah ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) dans un esprit positif, constructif et pragmatique.

(Rires, exclamations et applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Cet état d'esprit a déjà porté ses fruits (« Ah ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) puisque, aujourd'hui même, j'ai le plaisir d'annoncer à l'Assemblée nationale que nous sommes sortis de la crise des lycées professionnels.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe du


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Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Avec le ministre de l'enseignement professionnel, nous avons conclu ce matin une base d'accord.

M. Patrick Devedjian.

Qui paie ?

M. le ministre de l'éducation nationale.

Elle répond à deux principes : d'une part, la reconnaissance en égale dignité des professeurs de l'enseignement professionnel (« Ah ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) et de leurs collègues de l'enseignement général et technologique ;...

M. Patrick Devedjian.

Combien cela coûtera-t-il ?

M. le ministre de l'éducation nationale.

... d'autre part, la poursuite et l'amplification des réformes pédagogiques engagées.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Ces réformes pédagogiques seront fondées d'abord sur la confiance aux professeurs pour le suivi des stages, pour la mise au point des projets pluridisciplinaires (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants)...

Vos hurlements, mesdames et messieurs de l'opposition, ne changent rien ! Je comprends bien qu'un accord positif qui permet de sortir de la crise vous mécontente (Mêmes mouvements), mais cet accord est là et bien là ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) Il comporte aussi toute une série d'actions positives pour soutenir les élèves en mathématiques et en français, pour créer des postes de chefs de travaux dans les formations tertiaires.

M. Maurice Leroy.

C'est la langue de bois !

M. le ministre de l'éducation nationale.

Ce plan, que nous avons arrêté ce matin, est applicable dès la rentrée prochaine puisqu'un effort a été décidé en accord avec le Premier ministre pour moderniser les équipements pédagogiques.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Malgré vos hurlements, je conclus.

(Nouvelles exclamations sur les mêmes bancs.)

M. le président.

Mes chers collègues, je vous en prie !

M. le ministre de l'éducation nationale.

Il est étrange de voir à quel point notre réussite suscite chez vous l'impatience et la colère ! (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Maurice Leroy.

C'est vraiment la langue de bois !

M. le ministre de l'éducation nationale.

Un large consensus s'est dégagé pour que notre enseignement professionnel soit modernisé, pour que les jeunes bénéficient d'une véritable insertion professionnelle et pour que notre économie puisse compter sur des jeunes qualifiés.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) N'en déplaise à la droite (Protestations sur les mêmes bancs), jour après jour, en pleine harmonie avec le pays, nous continuerons ces réformes dans le même état d'esprit ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

RISQUES LIÉS AUX DÉCHETS RADIOACTIFS

M. le président.

La parole est à Mme Michèle Rivasi pour une question courte, et une réponse qui le sera tout autant.

Mme Michèle Rivasi.

Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à Mme la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

Comme vous le savez, il y a en France un certain nombre de sites contaminés par des déchets radioactifs provenant d'installations qui ont parfois cessé leur activité depuis longtemps. Certains sont désaffectés, mais d'autres ont été utilisés pour construire des logements sans décontamination préalable ou après une décontamination partielle ou insuffisante. A partir de quel niveau de risque les pouvoirs publics doivent-ils intervenir afin d'assurer la protection sanitaire des personnes exposées ? L'actualité récente montre qu'il est urgent de répondre à cette question. Une association a, en effet, attiré l'attention des pouvoirs publics sur la situation d'une famille de Gif-sur-Yvette dont la maison a été construite sur un dépôt de déchets radioactifs.

(Murmures sur divers bancs.)

D'après cette association, la dose reçue par les habitants serait l'ordre de 80 millisieverts par an. L'exposition est due, pour l'essentiel, à l'inhalation de radon ; elle induit un risque inacceptable, quatre-vingts fois supérieur à ce que l'on tolère pour le public. Pourtant, l'OPRI Office de protection contre les rayonnements ionisants avait conclu, en décembre 1998, que la situation n'était pas sanitairement dangereuse ! Madame la secrétaire d'Etat, avez-vous commandé une contre-expertise ? Quelles mesures comptez-vous prendre pour garantir, à l'avenir, la fiabilité des expertises officielles ? Ne jugez-vous pas légitime qu'une indemnisation soit accordée aux familles exposées à des niveaux de risques inacceptables du fait de la responsabilité de l'Etat ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur divers bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.

Madame la députée, la gestion du risque lié au radon est une des préoccupations majeures du Gouvernement.

En janvier 1999, les ministres de la santé et du logement ont adressé aux préfets des instructions relatives aux m odalités pratiques d'évaluation du risque et à la conduite à tenir en cas de concentration anormalement élevée.

Dans les lieux accueillant du public et dans les établissements scolaires, une campagne de mesure du radon a été lancée et le traitement des bâtiments a été entrepr is lorsqu'une concentration anormale de radon était constatée. Les populations concernées ont bien évidemment été informées. Des plaquettes et des guides destinés à les


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sensibiliser indiquent les mesures à prendre dans les habitations - ventilation et mesures visant à sécuriser les fondations.

La maison de Gif-sur-Yvette est à l'évidence concernée par ces mesures prises au niveau national. Mais elle présente en outre une particularité, dans la mesure où la présence du radon n'y est pas naturelle mais résulte d'une activité humaine qui a cessé il y a cinquante ans.

Depuis deux ans, à la demande des propriétaires et du préfet, l'Office de protection contre les rayonnements ionisants est intervenu à plusieurs reprises. Les taux de radon mesurés en 1999, de l'ordre de plusieurs milliers de becquerels par mètre cube, sont largement supérieurs au seuil d'alerte, comme vous l'avez indiqué. Ils ont été communiqués aux intéressés, accompagnés de recommandations d'actions, portant notamment sur des aménagements techniques visant à abaisser le taux de radon et à protéger leur santé.

Par ailleurs, après la découverte très récente dans les archives du SCPRI, prédécesseur de l'OPRI, de deux dossiers médicaux concernant sur la santé des enfants ayant résidé dans cette maison voilà vingt ans - lesquels n'ont pas été communiqués aux intéressés - et dont les commentaires formulés à l'époque ne correspondaient pas aux taux constatés et au suivi médical correspondant, le conseil d'administration de l'OPRI, réuni le 8 mars dernier, a suivi la proposition de son président et a transmis le dossier à la justice.

J'ai enfin demandé que des analyses systématiques soient effectuées sur l'ensemble du site. Actuellement, sept maisons ont déjà été expertisées. Le préfet va recev oir les résultats. Ils seront rendus publics. L'enjeu est évidemment d'éviter les expositions inutiles et d'accompagner les propriétaires dans leurs démarches. Je recevrai d'ailleurs bientôt personnellement ceux-ci pour évoquer objectivement la totalité de la situation.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

POLICE DE PROXIMITÉ

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Blazy, pour une courte question.

M. Jean-Pierre Blazy.

Monsieur le ministre de l'intérieur, jeudi dernier, les assises nationales de la police de proximité ont permis de dresser le bilan des expérimentations engagées sur soixante-sept sites, de préciser le corps de doctrine de la police de proximité et de lancer la première des trois phases de généralisation de la réforme : une réforme sans précédent, une véritable révolution culturelle au sein de la police nationale qui suscite de nombreuses attentes de la part de nos concitoyens, soucieux de faire reculer la délinquance et les incivilités au quotidien.

Depuis 1997, le Premier ministre n'a cessé d'affirmer que l'insécurité est une injustice sociale. Ces assises ont été l'occasion de réaffirmer également la nécessaire égal ité de tous les Français devant la sécurité. N'en déplaise aux promoteurs d'une municipalisation ou d'une territorialisation de la police nationale et d'un abandon du pacte républicain en matière de sécurité publique, trop nombreux à droite, la réforme de la police de proximité doit permettre de renouer les liens entre la police et la population et de répondre à une demande sociale de plus en plus fortement exprimée.

Monsieur le ministre, la première phase de généralisation est décisive ; elle doit être réussie. Elle concerne prioritairement les départements très sensibles, les circonscriptions de police qui ont fait l'objet, pour un quartier ou un secteur, d'une expérimentation et les communes qui sont engagées dans un CLS, un contrat local de sécurité.

Autrement dit, la première phase de la généralisation se fera principalement là où la délinquance est la plus forte.

M. le président.

Monsieur Blazy, voulez-vous conclure, s'il vous plaît ?

M. Jean-Pierre Blazy.

Pour être réussie, la généralisation nécessite d'importantes mesures d'accompagnement, qui sont d'ailleurs prévues.

Pouvez-vous rappeler, monsieur le ministre, les enseignements essentiels dégagés par les assises nationales de la police de proximité ? Pouvez-vous nous indiquer avec quels moyens et dans quelles conditions va s'engager la première phase de la généralisation de la police de proximité, qui sera décisive pour la réussite de la réforme, réussite que nous voulons pour les citoyens comme pour les policiers eux-mêmes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'intérieur pour une brève réponse, afin que nous puissions passer à la question du groupe Démocratie libérale et Indépendants.

M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur.

Monsieur le député, la police de proximité est la principale réponse donnée, à la suite du colloque de Villepinte, au problème de l'insécurité au quotidien, dont le Premier ministre avait alors rappelé qu'elle était une injustice sociale qui frappait les plus démunis. C'est une réponse de fond, une nouvelle doctrine d'emploi de la police nationale, jusqu'à présent trop réactive et n'intervenant pas assez en anticipation.

Vous m'avez interrogé sur les enseignements qui ont été tirés des soixante-sept expérimentations menées à l'o ccasion des assises. Il est clair que cette nouvelle doctrine doit être appliquée dans toutes ses composantes. La police doit être territorialisée par secteur, par quartier, responsabilisée, polyvalente, et agir en partenariat, avec le souci de répondre à ces besoins de sécurité.

Par ailleurs, il faut mener une politique intense de communication, une politique systématique de concertation pour impliquer tous les policiers.

Vous m'avez également interrogé sur les moyens.

Comme l'an dernier, 1 200 policiers seront redéployés c ette année. M. le Premier ministre a accordé 2 000 emplois en surnombre et l'effectif de nos écoles est actuellement de 6 131 élèves gardiens, effectif qui n'a jamais été aussi élevé depuis 1982. 3 000 personnels des unités mobiles ont été fidélisés.

Je ne cache pas que la police de proximité est consommatrice d'effectifs, ce qui se comprend aisément puisque c'est une police visible, présente sur la voie publique, autant que possible jusqu'à une heure assez tardive - vingt heures ou même vingt-deux heures. Cela demandera des moyens.

J'ai transmis à M. le Premier ministre et à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie un programme pluriannuel qui prévoit des moyens immobiliers - bureaux de police -, du matériel informatique, des moyens de transmission, des moyens mobiles de déplacement, des moyens de police technique et scientifique notamment le fichier automatisé des empreintes digitales qui sera mis à la disposition de chacun, en tout cas des différents échelons...

M. le président.

Monsieur le ministre, voulez-vous conclure ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

M. le ministre de l'intérieur.

J'en ai terminé, monsieur le président.

Naturellement, ce programme prévoit aussi des moyens en personnels administratifs et techniques, notamment pour la police technique et scientifique et pour l'informatique. Ces moyens sont absolument nécessaires si nous voulons une police moderne qui réponde au besoin de sécurité légitime de nos concitoyens.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur divers bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Pour le groupe Démocratie libérale et Indépendants, la parole est à M. Jean Proriol.

M. Jean Proriol.

Monsieur le président, je constate que l'heure est passée. Dois-je poser ma question aujourd'hui ou m'autorisez-vous à la réserver pour demain ?

M. le président.

Je pense, monsieur Proriol, que vous pouvez poser votre question maintenant. Mais, bien entendu, vous êtes libre de ne pas le faire et, puisque la retransmission télévisée a pris fin, je ne verrais aucun inconvénient à ce que vous la posiez demain.

M. Jean Proriol.

Je choisis demain, monsieur le président.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

2 CHASSE Explications de vote et vote sur l'ensemble d'un projet de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle les explications de vote et le vote, par scrutin public, sur l'ensemble du projet de loi relatif à la chasse (nos 2182, 2273).

La parole est à Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, nous arrivons au terme de l'examen en première lecture par votre assemblée du projet de loi relatif à la chasse présenté par le Gouvernement. Ce texte, vous l'avez longuement discuté, vous l'avez amendé, comme cela est normal, mais vous en avez accepté la philosophie générale. Je m'en réjouis.

M. Christian Jacob.

On n'a rien accepté du tout !

M. Yves Fromion.

Vous le verrez au moment du vote ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Je pense que nous approchons enfin des conditions d'un armistice possible dans les conflits qui opposent les différentes parties en présence au sujet de la pratique de la chasse dans notre pays. Le texte qui vous est soumis représente en effet un compromis comprenant des avancées de part et d'autre.

Les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse seront fixées enfin dans le respect du droit communautaire. Ainsi, je l'espère, pourrons-nous nous épargner la litanie incessante des contentieux devant les diverses jurid ictions administratives nationales ou les instances communautaires, se terminant invariablement par une condamnation du droit en vigueur jusque-là dans notre pays. L'article 10 de la loi propose sagement de transposer dans notre droit national les principes de la directive de 1979 relative à la protection des oiseaux et d'en tirer les conséquences en termes de fixation des périodes de chasse.

M. Pierre Ducout, vice-président de la commission de la production et des échanges, et M. François Patriat, rapporteur de la commission de la production et des échanges.

Très bien ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Des dates butoirs seront fixées par un décret dont le projet vous a été soumis en même temps que le projet de loi sur lequel vous avez délibéré. C'est dans ce contexte clarifié qu'il sera possible, pour certaines espèces d'oiseaux en bon état de conservation, de prévoir des dérogations, qu'il nous faudra évidemment négocier avec la Commission en rassemblant à cet effet les éléments scientifiques permettant d'étayer ces démarches. Je l'avais confirmé pendant l'examen des articles. Je le répète aujourd'hui.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Les personnes s'opposant à l'exercice de la chasse en raison de leurs convictions personnelles pourront désormais faire prévaloir ces convictions sur les préoccupations d'organisation de la pratique cynégétique. Cette reconnaissance du « droit d'objection cynégétique », pour reprendre l'expression consacrée, était attendue.

L'instauration d'un « jour sans fusil », en règle générale le mercredi, constituera également une affirmation très importante, pour l'ensemble de nos concitoyens, de cette volonté de trouver les conditions d'une cohabitation harmonieuse entre chasseurs et non-chasseurs, d'un partage accepté par tous de l'accès aux espaces naturels et ruraux, et aux espèces sauvages.

Il fallait également clarifier les relations entre l'Office national de la chasse, dont le nom et les missions vont être modifiés, et les fédérations départementales de chasseurs. Ce sera chose faite avec ce texte. L'Office national de la chasse verra ses compétences étendues à la faune sauvage. Il n'aura bien entendu pas l'exclusivité en ce domaine, mais le législateur indiquera de cette façon le lien étroit qui existe entre les préoccupations de gestion de toutes les espèces, chassables ou non, et de leurs habitats. Le conseil d'administration de l'Office sera élargi afin que puissent s'y faire entendre les divers usagers de la nature.

Les conditions d'exercice de la police de la chasse seront clarifiées. De nombreuses missions s'étaient achevées sur le constat de la confusion qui régnait dans ce domaine entre les fédérations de chasseurs, d'une part, et l'Office national de la chasse, d'autre part. Désormais, les choses seront claires : la police de la chasse relèvera d'agents publics, principalement de la garderie nationale de l'Office de la chasse, aux côtés des autres agents publics habilités à l'exercer.

Nous avons eu un long débat sur les conditions de réintroduction des espèces sauvages dans la nature. Je pense maintenant pouvoir dire qu'une solution acceptable tant par les défenseurs de l'ours que par les éleveurs sera élaborée dans les prochaines semaines, et qu'elle rendra sans objet la disposition spécifique introduite au cours du débat.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

Les chasseurs seront satisfaits de voir la chasse de nuit reconnue.

M. Jean-Claude Lemoine.

Pas partout ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Cette pratique illégale était, dans les f aits, pratiquée depuis fort longtemps. Si elle est reconnue, elle sera encadrée, ce qui me semble naturellement indispensable. Elle ne pourra être exercée que dans les départements dans lesquels elle a été considérée comme traditionnelle...

M. Jean-Claude Lemoine.

Pas tous !

M. Christian Jacob.

Il en manque ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

... au terme de l'examen minutieux auquel s'est livré François Patriat.

M. Christian Jacob.

Patriat ne sait pas compter ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Cette pratique ne pourra s'exercer que d ans les installations existant au 1er janvier de l'année 2000. Le maintien de ces conditions me paraît bien entendu indispensable à l'acceptation durable de cette reconnaissance.

La pratique de la chasse crépusculaire, qui avait donné lieu à de nombreux contentieux, est elle aussi reconnue par la loi.

Les missions des fédérations de chasseurs sont précisées. Il leur revient de travailler à la gestion des espècess auvages, particulièrement les espèces chassables, de contribuer avec les autres usagers de la nature à la gestion des espaces naturels et des espèces sauvages, de procéder à l'indemnisation des dégâts de gibier. Ce faisant, nous avons également clarifié les relations financières entre les fédérations de chasseurs et l'office.

M. Jean-Claude Lemoine.

Non ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Les outils de gestion de la faune chassable sont modernisés avec la création des schémas de gestion cynégétique et des prélèvements maximaux autorisés.

Voilà, rapidement résumés, les termes de l'équilibre établi par le projet qui est soumis maintenant à votre approbation.

M. Jean-Claude Lemoine.

Il n'y a pas d'équilibre ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Le Gouvernement a eu le courage de se saisir de ce dossier. Il l'a fait en cherchant à proposer des réponses de long terme à l'ensemble des questions qui se posaient au monde de la chasse.

M. Christian Jacob.

Il a échoué ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Il l'a fait en refusant les fausses solutions, celles qui, loin de régler les problèmes, les entretiennent en donnant de fausses satisfactions de court terme.

Il l'a fait après un travail de concertation approfondi, dans lequel votre rapporteur François Patriat a joué un rôle considérable, que je tiens à saluer une fois encore.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste.)

Il l'a fait avec un souci de transparence absolue vis-àvis des députés. C'est pourquoi j'ai tenu à vous présenter en même temps que ce projet de loi les décrets d'application, afin que rien ne reste dans l'ombre, et que vous décidiez en connaissance de cause. Je pense que cette démarche ne peut être qu'appréciée des parlementaires.

Avant de conclure, je voudrais également saluer et remercier le président de la commission de la production et des échanges, André Lajoinie, toujours hospitalisé, ainsi que Pierre Ducout, qui l'a remplacé au pied levé, si j'ose dire.

Je suis consciente qu'au-delà de l'adoption de ce projet par votre assemblée, le travail devra se poursuivre. Mon objectif est d'aboutir à l'adoption définitive de la loi au mois de juin prochain, avant le début de la prochaine saison de chasse. Il faudra pour cela sortir très rapidement l'ensemble des textes d'application, dont vous connaissez déjà l'avant-projet.

Au-delà même de l'adoption définitive, nous devrons tous avoir en tête que la solution durable aux problèmes que nous avons traités pendant toutes ces heures passe par la construction d'un dialogue permanent entre les chasseurs et les autres usagers de la nature, un dialogue construit dans la durée, avec la volonté réelle de trouver des solutions pour permettre une gestion harmonieuse et un accès de tous aux espaces naturels.

Cette coexistence harmonieuse entre tous les usagers de la nature, ce consensus social qu'il faut rebâtir autour de la pratique de la chasse, une loi peut y contribuer, elle n'y suffira pas. Nos efforts à tous seront nécessaires pour faire que cette loi soit un premier pas vers une réconciliation que j'appelle de mes voeux.

Voilà pourquoi, mesdames et messieurs les députés, je vous appelle à voter ce projet de loi.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. François Patriat, rapporteur de la commission de la production et des échanges.

M. François Patriat, rapporteur de la commission de la production et des échanges.

D'où venons-nous ? (Rires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Christian Jacob.

Où allons-nous ?

M. François Patriat, rapporteur.

Il y a moins d'un an, le Premier ministre...

M. Christian Jacob.

Il aurait mieux fait de se taire, celui-là !

M. François Patriat, rapporteur.

... me demandait d'engager une mission pour aboutir à un compromis capable de satisfaire tous ceux qui veulent vivre dans une coexistence pacifique autour de la nature et de la chasse.

M. Christian Jacob.

Ce n'est pas le cas !

M. François Patriat, rapporteur.

Je le remercie aujourd'hui d'avoir tenu parole. Le Premier ministre a dit ce qu'il ferait. Il a fait ce qu'il avait dit en s'engageant, au mois de septembre dernier, à présenter un texte de loi devant l'Assemblée nationale. Ce texte a été rédigé, il a été discuté, et nous allons le voter.

M. Eric Doligé.

Pas nous !

M. François Patriat, rapporteur.

Je me tourne aussi vers vous, madame la ministre, pour vous remercier de votre capacité d'écoute,...

M. Jean Auclair.

Avec des boules Quies !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

M. François Patriat, rapporteur.

... de votre volonté d'aboutir et de votre souhait de mettre fin à ce conflit larvé, latent, parfois exacerbé, passionnel, pour que puissent enfin coexister ceux qui défendent la chasse et ceux qui ne la pratiquent pas, pour que soit derrière nous, demain, ce dossier somme toute secondaire.

M. François Sauvadet.

Le rapporteur a fait ce qu'il a pu.

M. François Patriat, rapporteur.

Ce texte, madame la ministre, permet aux chasseurs de pratiquer leur loisir et d'assumer leurs missions dans la dignité.

M. Jean-Claude Lemoine.

Non !

M. François Patriat, rapporteur.

Il permet à ceux qui sont indifférents ou opposés à la chasse de mieux partager les espaces et de préserver les espèces par l'obligation de gestion faite à tous les acteurs.

M. Jean-Claude Lemoine.

Ce sont les chasseurs qui préservent les espèces !

M. François Patriat, rapporteur.

Ce projet de loi amendé peut conduire à la paix à laquelle nous aspirons tous. Cela n'allait pas de soi. Les réformes proposées par le Gouvernement tracent la voie d'une politique d'avenir de la chasse, ayant pour objectif de concilier l'impératif de préservation de la ressource cynégétique et animale et l'exigence de protection des biens et des personnes. En cela, il modernise le droit de chasse.

Que demandaient les chasseurs ?

M. Christian Jacob.

La loi de 1998 !

M. François Patriat, rapporteur.

Non, pas la loi de 1998 !

M. Jean-Claude Lemoine et M. Yves Fromion.

Si !

M. François Patriat, rapporteur.

Les chasseurs demandaient la légitimation de la chasse : ils l'auront.

Les chasseurs demandaient la définition de l'acte de chasser : ils l'auront !

M. André Billardon.

Très bien !

M. François Patriat, rapporteur.

Les chasseurs demandaient que des missions soient données aux fédérations : elles les auront !

M. Yves Fromion.

Pourquoi ils ne sont pas contents, alors ?

M. Jean-Claude Lemoine.

Pourquoi ils sont dans la rue ?

M. François Patriat, rapporteur.

Ils demandaient des plans de gestion : ils les auront ! Ils demandaient la départementalisation des dégâts de gibier : ils l'auront.

Ils demandaient des agents de développement : ils les auront.

Ils demandaient la chasse crépusculaire, deux heures avant et deux après : ils l'auront.

M. Yves Fromion.

Ils demandaient la peau de Voynet : ils l'ont pas !

M. François Patriat, rapporteur.

Ils demandaient l'adhésion des territoires aux fédérations : ce sera chose faite.

M. Eric Doligé.

Ils demandaient le changement de gouvernement : ils l'ont eu !

M. François Patriat, rapporteur.

Ils demandaient le permis accompagné : il existera.

M. Pierre Ducout, vice-président de la commission.

Très bien !

M. François Patriat, rapporteur.

Ils demandaient le guichet unique : il sera créé demain.

Voilà ce que les chasseurs demandaient dans la motion que j'ai reçue de l'Union nationale.

(Vives exclamationss ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean Auclair.

Va les voir dans la rue ! Va leur dire !

M. François Patriat, rapporteur.

Ne hurlez pas avec la meute, et avec les chiens ! Cela vous dessert ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Quant à ceux qui ne sont pas favorables à la chasse, que demandaient-ils ? Un droit de non-chasse reconnu : ce sera chose faite.

M. Jean-Claude Lemoine.

Les chasseurs n'en voulaient pas !

M. François Patriat, rapporteur.

Un jour sans chasse, comme d'autres pays en Europe : nous le déciderons.

Ils demandaient des dates eurocompatibles, la traduction dans la loi française de la directive européenne : alors que la France était le dernier pays qui ne l'avait pas fait, nous le ferons.

M. Jean-Claude Lemoine.

Non !

M. François Patriat, rapporteur.

Ils demandaient une garderie nationale, un Office national de la chasse et de la faune sauvage indépendant, grâce notamment à la fin des financements croisés, et capable d'assurer la sécurité, la garderie, les choix scientifiques au moyen d'un comité, le développement, l'appui aux fédérations : ce sera chose faite.

Ils demandaient le dialogue, l'éthique et la démocratisation :...

M. Jean-Claude Lemoine.

N'importe quoi !

M. François Patriat, rapporteur.

... le principe « un homme, une voix » sera demain une réalité chez les chasseurs.

M. Francis Delattre.

C'est du bluff !

M. François Patriat, rapporteur.

Alors, mes chers collègues, qu'est-ce qui nous sépare ? Deux choses.

La première est que vous voudriez inscrire dans la loi les dates de la chasse aux oiseaux migrateurs. Or vous savez très bien que le Conseil d'Etat a déjà condamné cette formule quand vous l'avez votée.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Christian Jacob.

C'est faux !

M. François Patriat, rapporteur.

Vous refusez l'instauration d'un jour de non-chasse, alors que tous les pays voisins le pratiquent. Est-ce pour une seule décade, est-ce pour un seul jour que vous allez refuser ce texte d'apaisement ? J'y verrais, de votre part, une vraie mauvaise volonté.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

Tout à l'heure, mes chers collègues, ceux qui voteront ce texte seront les véritables défenseurs de la chasse, des chasseurs et de la nature.

(Vives protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Guy Drut.

Tartarin !

Mme Christine Boutin.

C'est scandaleux ! Cela suffit, monsieur le président !

M. François Patriat, rapporteur.

Madame Boutin, les députés qui voteront ce texte le feront autant pour répondre à ceux qui, à l'extérieur, veulent réduire la chasse à une portion congrue en multipliant les contentieux que pour répondre aux maximalistes qui, comme aujourd'hui, hurlent avec la meute (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et d u groupe Démocratie libérale et Indépendants) et desservent ainsi la cause qu'ils veulent défendre.

Pour toutes ces raisons, la commission a approuvé à une large majorité ce texte de loi.

M. Eric Doligé.

Ce n'est pas vrai ! Pas à une large majorité !

M. Pierre Ducout, vice-président de la commission.

C'est vrai !

M. François Patriat, rapporteur.

Nous l'avons amendé en commun. Merci à tous ceux qui ont participé au débat jusqu'à sept heures, jeudi matin ; merci à ceux qui ont accepté de faire des concession de part et d'autre. Et je remercie par avance tous ceux qui voteront ce texte.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste, du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe communiste.)

M. Francis Delattre.

Que de couleuvres avalées !

M. le président.

Mes chers collègues, un mot avant de passer aux explications de vote. Mon rôle est de défendre les parlementaires, qu'ils appartiennent à l'opposition ou à la majorité.

(« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. Etienne Pinte.

C'est la moindre des choses !

M. le président.

Le droit de manifester est imprescriptible. Mais la présentation qui est faite aujourd'hui de la manifestation qui se déroule à proximité du Palais Bourbon est, à mes yeux, inacceptable par la représentation nationale. Je tenais à le dire, car c'est une dérive qui me paraît dangereuse pour la démocratie.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

Explications de vote

M. le président.

Dans les explications de vote, la parole est à M. François Liberti.

M. François Liberti.

Monsieur le président, madame la ministre, mesdames, messieurs, nous devons aujourd'hui nous prononcer sur un texte sensiblement modifié et amendé après les débats en commissions et en séance publique, les 28 et 29 mars. Les parlementaires communistes se sont attachés, sur le terrain et au cours des auditions avec les responsables du monde de la chasse, les scientifiques, les associations et les représentants des personnels des fédérations de chasse, à définir des propositions susceptibles de contribuer à faire une bonne loi.

C'est avec sérieux et esprit de responsabilité, et dégagés aussi de toute contingence politicienne, que les députés communistes ont défendu de nombreux amendements qui ont été acceptés en commission et votés lors des séances publiques.

Un député du groupe du Rassemblement pour la République.

Pas tous !

M. François Liberti.

Indiscutablement, nous avons aujourd'hui contribué fortement à un rééquilibrage du texte originel. Je pense plus particulièrement à l'officialisation de l'acte de chasse dans la loi, au nouveau rôle dévolu tant à l'Office national de la chasse et de la faune sauvage qu'aux fédérations départementales de la chasse, à la légalisation de la chasse de nuit dans vingt départements, à l'autorisation de la chasse à la passée deux heures avant le lever du soleil et deux après son coucher sur tout le territoire national. Ce sont là des acquis importants et qui, d'ailleurs, constituent pour certains une première en France.

M. Pierre Ducout, vice-président de la commission.

Absolument !

M. François Liberti.

Je pense également à la démocratisation des élections lors des assemblées générales des fédé rations départementales, au renforcement de la responsabilisation des personnes qui ont fait acte de leur opposition à la chasse, à la prise en compte dans la loi des départements où se pratiquent les chasses traditionnelles, avec une possibilité d'ajustement par décret en Conseil d'Etat.

Comme vous le savez, le recours au décret pour la fixation des dates d'ouverture et de fermeture aux oiseaux migrateurs ne correspond pas ce que nous voulions.

Néanmoins, nous prenons acte de l'engagement que vous avez pris, madame la ministre, à l'issue de la nuit du 29 mars, sur la modification de l'arrêté prenant en compte les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse au gibier d'eau et aux oiseaux migrateurs, en fonction d'un calendrier échelonné selon les espèces, engagement que vous venez d'ailleurs de confirmer voilà un instant.

Cela étant, nous sommes conscients que des problèmes restent non résolus. Nous regrettons, ainsi, madame la ministre, de ne pas avoir été entendus sur la prise en compte dans le texte de loi d'un calendrier national des dates d'ouverture et de fermeture tenant compte de la biologie des espèces, de leur statut de conservation, des plans de gestion qui permettent une gestion durable de cette ressource naturelle.

M. François Sauvadet.

Exactement !

M. François Liberti.

Nous déplorons également de ne pas avoir été entendus sur le jour de non-chasse, qui existe de fait dans nombre de départements. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.) Nous demandons qu'il ne s'applique pas aux chasses de gibier d'eau et d'oiseaux migrateurs qui s'effectuent essentiellement la nuit. Une dérogation de ce type a été acceptée pour les chasseurs à la palombière.

De même, nous regrettons de ne pas avoir été entendus à propos des onze départements où se pratique traditionnellement une chasse de nuit et qui sont, à ce jour, exclus de la légalisation obtenue pour vingt autres départements.

Mme Marie-Thérèse Boisseau.

Ce sera ingérable !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

M. François Liberti.

Il y a donc lieu d'améliorer encore ce texte pour qu'il soit voté par notre groupe, qui reste attaché à une chasse populaire, accessible à tous et respectueuse des pratiques traditionnelles, de la protection des espèces et de l'espace naturel.

Entre la discussion au Sénat et le vote de l'Assemblée en deuxième lecture, les possibilités d'amender ce texte existent encore. Nous souhaitons vivement que toutes les pistes possibles soient réellement explorées pour répondre aux aspirations tant des chasseurs que des non-chasseurs.

M. Jean-Claude Lemoine.

Très bien !

M. François Liberti.

Les parlementaires communistes vont s'y employer jusqu'au bout. Tel est le sens politique que nous allons donner à notre vote.

Madame la ministre, ne laissez pas passer la chance de permettre à un gouvernement et une majorité de gauche plurielle de régler, enfin, ce problème qui n'a que trop servi toutes les manipulations politiciennes. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Pour conforter les avancées et les acquis indiscutables obtenus à l'issue de cette première lecture, mais aussi parce qu'il reste encore beaucoup à faire pour améliorer le texte, le groupe communiste s'abstiendra aujourd'hui. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Jean-Pierre Brard.

C'est la chasse à courre !

M. Charles de Courson.

Madame la ministre, après deux jours et deux nuits de discussion, après de nombreuses propositions d'amélioration du texte formulées par le groupe UDF et toute l'opposition, et parfois même par certains de nos collègues de la majorité,...

M. Pierre Ducout, vice-président de la commission.

Nous les avons prises en compte !

M. Charles de Courson.

... après nos tentatives réitérées pour donner à la chasse toute sa légitimité, nous ne pouvons que constater que votre texte ne répond toujours pas à nos attentes et qu'il déçoit bien des espoirs, tant dans nos rangs que dans les vôtres. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

L'objectif du groupe UDF était pourtant simple et, je crois, largement partagé sur les bancs de l'Assemblée. Il s'agissait de légiférer de telle sorte que la chasse, qui, rappelons-le, est un acquis de la Révolution,...

M. Jean-Pierre Brard.

De quoi en perdre la tête ! (Rires sur les bancs du groupe communiste.)

M. Charles de Courson.

... une tradition culturelle et historique, puisse s'exercer dans le respect des droits de chacun et associer, dans une gestion optimale du patrimoine naturel, les chasseurs comme les non-chasseurs.

M. François Sauvadet.

Très bien !

M. Charles de Courson.

Pour apaiser les tensions sur cette question, il fallait accepter d'accorder à la chasse une nouvelle place dans notre société, de la reconnaître comme une activité de gestion harmonieuse de l'espace rural et de la faune sauvage et ne pas hésiter à affirmer, enfin, le rôle primordial des chasseurs comme amoureux de la nature et protecteurs de l'environnement. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie et Indépendants.)

M. Jean-Paul Charié.

Bien sûr !

M. Charles de Courson.

Pour atteindre cet objectif, nous vous avons fait des propositions que nous estimions équilibrées. Je les rappelle très brièvement : Premièrement, clarifier les champs d'intervention respectifs du droit national et du droit communautaire en établissant avec clarté, dans le respect du principe de subsidiarité, que l'Union européenne ne s'intéresse qu'aux principes qui régissent la chasse aux oiseaux migrateurs et que tout le reste relève du droit national ; Deuxièmement, légaliser les pratiques traditionnelles de chasse crépusculaire et de chasse de nuit au gibier d'eau ; Troisièmement, moderniser les structures publiques, en particulier l'ONC et les fédérations, en donnant à celles-ci davantage de responsabilités et en s'appuyant sur elles pour favoriser une gestion cynégétique de proximité ; Quatrièmement, réformer la loi Verdeille en adaptant le statut des ACCA par une reconnaissance du droit de non-chasse, c'est-à-dire du droit de propriété, sans pour autant déstabiliser le droit de chasse.

M. Pierre Ducout, vice-président de la commission.

Tout cela a été fait !

M. Charles de Courson.

Alors que votre projet de loi était, dans sa version initiale, totalement inacceptable, nous avons contribué à obtenir quelques avancées positives au cours de la discussion.

M. François Patriat, rapporteur.

Votez-le alors !

M. Charles de Courson.

Vous nous donnerez acte que l'opposition a largement été à l'origine de ces améliorations (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) ,...

Plusieurs députés du groupe socialiste.

C'est faux !

M. Charles de Courson.

... dont certaines étaient d'ailleurs déjà contenues dans la proposition de loi du groupe UDF discutée le 22 février dernier et repoussée d'extrême justesse.

(« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. Pierre Ducout, vice-président de la commission.

Elles étaient surtout dans le rapport Patriat !

M. Charles de Courson.

Certes, vous avez accepté le principe de la clarification des responsabilités respectives du droit national et du droit communautaire proposé par le président Giscard d'Estaing et moi-même au nom du groupe UDF, dont les convictions européennes ne sont plus à démontrer.

M. Jean-Pierre Brard.

C'est Coblence !

M. Charles de Courson.

Certes, le Parlement a autorisé, sous notre pression et celle de votre majorité, toutefois, la chasse à la passée deux heures avant le lever et deux heures après le coucher du soleil. Et la chasse de nuit est enfin légalisée, mais seulement dans vingt départements et contre la position gouvernementale.

M. Maurice Leroy et M. François Sauvadet.

Eh oui !

M. Charles de Courson.

Quant à l'indemnisation des dégâts de gibier, elle a été confiée aux fédérations c ontre votre volonté, madame la ministre. La nomination des


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présidents de fédérations départementales par le ministre a été abolie, là encore contre votre avis et celui du rapporteur.

M. Jean-Claude Lemoine.

Heureusement !

M. Charles de Courson.

Et le droit de non-chasse a été équilibré par le principe de la responsabilité du propriétaire utilisant ce droit, à l'initiative de l'opposition.

M. Maurice Leroy.

Eh oui !

M. Jean Michel.

Et nous, nous n'avons rien fait dans l'affaire ?

M. Charles de Courson.

Madame la ministre, vous n'avez pas accepté ces modifications de gaieté de coeur et vous avez fait preuve, sur bien d'autres points, d'une réelle volonté de blocage qui ne sert les intérêts ni des chasseurs ni des non-chasseurs. En l'état actuel, votre texte reste donc insuffisant et inacceptable.

(Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. François Goulard.

Très juste !

M. Charles de Courson.

Insuffisant parce qu'il met en place une réforme inachevée des institutions cynégétiques et consacre la dérive de l'ONC vers un Office national de la chasse et de la faune sauvage déséquilibré dans la composition de son conseil d'administration et dans son mode de financement. Insuffisant également parce qu'il n'accorde qu'une responsabilité limitée aux fédérations, alourdissant le contrôle de l'Etat sur leurs actes budgétaires et le recouvrement de leurs recettes.

M. François Goulard.

C'est scandaleux !

M. Charles de Courson.

Insuffisant enfin parce qu'il ne résout pas le problème du financement de l'ONC et qu'il institue un jour de non-chasse obligatoire, probablement anticonstitutionnel, au lieu de confier cette responsabilité aux fédérations.

M. le président.

Veuillez conclure, monsieur de Courson.

(Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Christian Jacob.

C'est important, monsieur le

président

!

M. le président.

C'est sans doute très intéressant, mes chers collègues, mais M. de Courson dispose de cinq minutes, comme tout le monde. Il n'y a pas de privilège.

M. Jean-Pierre Brard.

La particule ne vaut donc pas deux minutes de plus ? (Sourires.)

M. Charles de Courson.

Insuffisant mais aussi inacceptable parce que vous ne légalisez la chasse de nuit que dans vingt départements, laissant ainsi délibérément les dix autres, où elle est traditionnellement pratiquée, dans une situation juridique intenable.

M. Pierre Forgues.

Ce n'est pas vrai !

M. Charles de Courson.

C'est le ministre qui le dit ! Inacceptable encore parce que vous gelez les installations fixes à partir desquelles elle peut être pratiquée, mais surtout parce que, après une reculade de nos collègues socialistes sur la foi de promesses orales bien floues de votre part, vous refusez d'inscrire dans la loi des dates échelonnées de chasse aux oiseaux migrateurs selon les espèces et selon les départements. Et vous vous défaussez en les renvoyant à un décret qui, loin d'éteindre les contentieux, les relancera.

M. Jean-Claude Lemoine.

Exactement !

M. Charles de Courson.

Nous déplorons, madame la ministre, que vous ayez de nouveau refusé de trancher dans la loi des questions aussi essentielles que les dates de chasse et que vous vous complaisiez à entretenir, en compagnie de vos amis Verts, les tensions au sein du monde de la chasse. En conséquence, le groupe UDF votera contre ce projet qui présente, à nos yeux, de graves lacunes et de réelles insuffisances.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Gérard Charasse.

M. Gérard Charasse.

Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, la question de la chasse est à nouveau devant notre assemblée. Ainsi, la promesse de la majorité plurielle de doter le pays d'un texte lui permettant d'en finir avec une application chaotique de dispositions diverses (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) comprises de manière différente selon les territoires et mises en oeuvre avec une homogénéité toute relative a été tenue. Il s'agit bien, en effet, de faire en sorte que le droit soit dit et respecté.

L'exercice est toutefois difficile, tant se sont ajoutés, à la distance vitale que le législateur doit observer quand il oeuvre à l'élaboration de la loi, des comportements inacceptables et des demandes irrecevables qui revenaient finalement à nier la réalité des choses.

Bien sûr, le travail législatif n'est pas terminé, et nous aurons l'occasion, après nos collègues du Sénat, de revenir sur ce texte. Pour l'heure, nous considérons, dans notre majorité, que ce premier travail est satisfaisant, même s'il gagnera en maturité après une nouvelle discussion.

Je veux reprendre quelques points précis qui ont émaillé la discussion.

D'abord, je veux souligner que le moment n'était peutêtre pas le meilleur pour tenter de régler la question de l'ours dans les Pyrénées.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Les radicaux de gauche sont attachés à la sauvegarde des éléments naturels et constitutifs des biotopes que sont, au premier chef, la flore et la faune. Mais si la réintroduction d'espèces animales décimées est intéressante, il importe de ne pas jouer les apprentis sorciers au seul motif, un peu creux et désormais popularisé, du « c'était mieux avant ». Il faut donc faire preuve d'une extrême prudence en la matière ; c'est en ce sens que le texte a été amendé.

Je veux dire ensuite notre satisfaction de voir respectés les engagements pris par la France au niveau européen.

Ceux-ci, définis à partir de la directive communautaire 79-409 d'avril 1979 et de son interprétation par un arrêt de la Cour de justice de janvier 1994, ainsi que des pratiques régionales, conservées pour certaines dans l'esprit, m ais qui pour d'autres ont tous les contours de commodes alibis, devaient faire l'objet d'une synthèse.

L'article 10 de la loi traite ce problème habilement, et vous en voyez les radicaux de gauche satisfaits.

En fait, c'est l'idée de responsabilité qui prime dans le présent texte et tout le monde devrait s'en réjouir. Responsabilité conjointe des chasseurs et des pouvoirs publics pour la délivrance des permis de chasser et pour les plans de chasse, et responsabilité des chasseurs devant leurs actes qui leur seront désormais, et dans des conditions éclaircies, opposables.


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Enfin, la reconnaissance de la chasse comme outil de gestion du patrimoine cynégétique et de ses habitats - question relevant de l'intérêt général - nous semble constituer une avancée importante. Elle a en effet servi, dans d'autres pays, à fonder une politique stable et viable dans ce domaine. Nous souhaitons qu'il en soit de même en France.

Au total, vous avez su, monsieur le rapporteur, madame la ministre, conjuguer les hautes exigences de vos positions sur ces questions, aux contours d'une réalité dont personne ne peut faire l'économie. Nous serons attentifs à l'évolution de ce texte, en particulier au Sénat.

Pour l'heure, monsieur le président du groupe socialiste, mes chers collègues, aucun député du parti Radical de gauche ne votera contre le texte, et le groupe Radical, Citoyen et Vert apportera dans son ensemble et très majoritairement son soutien à ce texte.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Antoine Carré.

M. Antoine Carré.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, on ne peut pas dire que la discussion de ce texte se soit passée de manière sereine.

Le climat était même plutôt conflictuel, particulièrement sur les bancs de la majorité. Nous nous souviendrons longtemps de la suspension de séance demandée par M. Bataille pour éviter que certains députés socialistes ne soient tentés de voter pour l'amendement de M. Sicre sur les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse ! Je regrette pour ma part que les travaux du groupe d'études sur la chasse, et notamment les conclusions du colloque organisé le 31 janvier dernier, aient été passés sous silence. Cette absence a été remarquée par de nombreux observateurs.

La discussion de ce projet a par ailleurs été marquée par un manque de considération vis-à-vis des députés.

Ceux qui le souhaitaient ne pouvaient pas tous être présents. Est-il vraiment sérieux de légiférer sur un texte aussi sensible la nuit, voire jusqu'à sept heures du matin ? Plusieurs députés du groupe socialiste.

Et la chasse de nuit ?

M. Antoine Carré.

Si les chasseurs ont l'impression que le Gouvernement se moque d'eux, on ne peut vraiment pas leur donner tort ! En ce qui concerne les dispositions de ce texte, je regrette que les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse aux oiseaux migrateurs, avec un échelonnement selon les espèces, n'aient pas été inscrites dans la loi. Il s'agit là d'une des principales demandes des chasseurs, qui aurait permis de dépassionner le débat dans le monde rural. Ces dates seront donc fixées par décret par les préfets entre le 10 août et le 10 février.

L'inscription dans la loi d'un jour hebdomadaire de non-chasse n'est pas non plus acceptable. Pourquoi le mercredi, et pourquoi préciser qu'un autre jour peut être choisi ? Le jour de non-chasse ne correpond à aucune tradition dans le milieu cynégétique. Certes, les fédérations départementales des chasseurs sont parfois amenées à en fixer un, mais cela se fait dans des conditions bien précises. C'est cette flexibilité qui disparaît, ce qui est bien regrettable.

La chasse à la passée est désormais autorisée deux heures avant le lever et deux heures après le coucher du soleil, contrairement à ce qui était prévu à l'origine dans ce texte. Ce n'est cependant qu'une maigre consolation par rapport aux autres mesures adoptées.

La question de la chasse de nuit reste notamment en suspens. Certes, elle se voit légalisée, mais dans seulement vingt départements. Les représentants des chasseurs ont pourtant fait des efforts en acceptant de ramener le chiffre des départements où la chasse de nuit est une pratique traditionnelle de plus de quarante à trente et un.

Ces efforts n'ont pas été pris en compte, ni par le rapporteur, ni par le Gouvernement, et nous le déplorons. Cette situation provoquera sans aucun doute des contentieux qui auraient pu être évités.

Par ailleurs, le droit de non-chasse est reconnu, et nous nous en félicitons. Néanmoins, il eût été sage de préciser en même temps le devoir des propriétaires concernés, à savoir leur responsabilité en cas de dégâts occasionnés par le gibier venant de leurs fonds. Là encore, de nombreux contentieux ne vont pas manquer de naître, alors qu'une mesure claire aurait pu les éviter.

Les fédérations départementales de chasseurs vont également subir quelques transformations. Désormais, lors des assemblées générales, un chasseur représentera une voix. Cette disposition ne manquera pas de compliquer l'organisation de ces assemblées et des votes qui y sont émis. Comment feront les fédérations qui comptent plusieurs milliers de chasseurs ? Devront-elles organiser leur assemblées générales sur plusieurs jours, voire sur une semaine ? Enfin, les fédérations se voient désormais placées sous le contrôle des préfets, notamment en ce qui concerne leur budget. Cette mesure sera difficilement acceptée par le monde de la chasse.

Telles sont, rapidement résumées, les dispositions de ce texte qui ne sont pas satisfaisantes et que nos collègues sénateurs ne manqueront pas de modifier à leur tour...

Un député du groupe socialiste.

Si le texte est voté !

M. Antoine Carré.

... avant la réunion de la commission mixte paritaire. Le Gouvernement a encore commis une erreur en décidant la procédure d'urgence pour ce projet, et en limitant ainsi le temps de discussion qui lui est consacré.

Ce projet de loi continue de mécontenter les chasseurs, sans pour autant contenter les associations environnementales.

Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République.

C'est vrai !

M. Antoine Carré.

Pour toutes ces raisons, le groupe Démocratie libérale et Indépendants a décidé de voter contre. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. Christian Bataille.

M. Christian Bataille.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi sur la chasse, dont nous avons achevé l'examen au petit matin, jeudi dernier, après vingt-deux heures de débat, est un parfait exemple de travail parlementaire. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean-Claude Lemoine.

De mauvais travail parlementaire !

M. Christian Bataille.

Le rapporteur y a joué tout son rôle, et les députés ont pu influer, sur les votes, et faire évoluer le texte.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

M. Jean-Claude Lemoine.

Si peu !

M. Christian Jacob.

Demandez à Sicre !

M. Christian Bataille.

La rédaction sur laquelle nous allons nous prononcer est donc le reflet d'un équilibre sans cesse amélioré.

Le projet de loi que nous a présenté Mme Dominique Voynet, au nom du Gouvernement, apporte des éléments novateurs, des garanties à ceux qui, exprimant une demande de nature, de vie au grand air et n'étant pas chasseurs, attendaient qu'on leur reconnaisse des droits. Il encadre les périodes de chasse, institue un jour hebdomadaire de non-chasse ou, encore, accorde à certains propriétaires le droit de non-chasse. Par ailleurs, la France ne pouvait se maintenir plus longtemps en marge des directives européennes.

Après avoir remis au Premier ministre son rapport en faveur d'« une chasse apaisée », notre rapporteur François Patriat a fait un travail équitable et remarquable, respectant les uns et les autres. Il l'a concrétisé par une série d'amendements qui, pour la plupart, ont été adoptés.

(« Oh ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) On retrouve ainsi, dans ce texte, la rédéfinition des missions de l'Office national de la chasse, la dévolution de l'indemnisation des dégâts de gibier aux fédérations, l'instauration de l'apprentissage accompagné de la chasse et le rôle de formation des fédérations. Le texte que nous avons sous les yeux s'est encore rapproché du rapport Patriat : c'est un acquis positif.

Le travail en commission et en séance a permis à tous les groupes de faire des propositions d'amendement. Par son travail, le groupe socialiste a contribué à des avancées importantes, permettant un meilleur équilibre du texte ; c'est l'amendement autorisant la chasse de nuit dans vingt départements, l'amendement autorisant la chasse à la passée deux heures avant et deux heures après le coucher du soleil, l'amendement garantissant l'application du statut du fermage, l'amendement sur les ours dans les Pyrénées présenté par notre collègue Augustin Bonrepaux.

Ce dernier amendement a le mérite d'ouvrir un débat sur les problèmes posés par l'introduction de prédateurs...

M. Henri Cuq.

Il fallait l'ouvrir plus tôt !

M. Christian Bataille.

... sans que toutes les concertations et conditions nécessaires aient été réunies. Il est certain que si, d'ici à la deuxième lecture, les moyens nécessaires à la coexistence du pastoralisme et des ours sont mis en oeuvre en concertation avec les élus et les éleveurs des zones concernées, l'alinéa qui pose problème pourra être retiré. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Un dernier amendement protège certaines chasses saisonnières aux palombes.

Enfin, en réponse à la requête du groupe socialiste concernant la spécificité de la chasse de certaines espèces d'oiseaux migrateurs, Mme Dominique Voynet s'est engagée ici-même à justifier auprès de la Commission européenne d'un calendrier souple, adapté au contexte, et à demander les dérogations qui s'avéreront bien étayées.

M. Jean-Claude Lemoine.

Il était temps !

M. Christian Bataille.

D'autres amendements significatifs, présentés par le groupe communiste, instaurent le principe « un homme, une voix » (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), ou, présentés par le groupe Radical, Citoyen et Vert, précisent les horaires de jours de non-chasse - vingt-quatre heures à partir de six heures du matin -, ce qui n'englobe donc qu'une seule nuit.

Notre groupe a également fait adopter d'autres amendements, parmi lesquels ceux qui prévoient la création du guichet unique pour la délivrance du permis de chasser, la notion de patrimoine faunique et la sécurité des actions de chasse.

Trois défis nous étaient lancés : améliorer le positionnement de la France dans le concert européen ; confirmer, en l'adaptant, la pratique de la chasse ; faire droit à l'objection de conscience cynégétique. Ils ont tous trois été relevés. Le défi européen l'a été grâce à une rédaction raisonnable de l'article 10 et des dérogations attendues que j'évoquais.

M. Jean-Claude Lemoine.

Mais non !

M. Christian Bataille.

Le défi de modernisation l'a été avec une rédaction de l'article 3 développant une conception gestionnaire et responsable des fédérations de chasse.

Le défi du droit de non-chasse l'a été, enfin, par une rédaction équilibrée de l'article 6.

Pour terminer (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République), au moment où nous allons nous prononcer, je me contenterai de dire à ceux de nos collègues que tenterait la polémique ou la surenchère (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République) que nos concitoyens attendent de nous une bonne loi (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants),...

M. Christian Jacob.

Ils n'attendent rien du tout !

M. Christian Bataille.

... une loi d'équilibre, de dialogue, de respect mutuel et de tolérance. J'ai le sentiment que nous y sommes parvenus (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants),...

Plusieurs députés du groupe socialiste.

Très bien !

M. Christian Bataille.

... nous, c'est-à-dire les parlementaires de la majorité, comme, peut-être, ceux de l'opposition (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), tous ceux, en tous cas, qui refusent un clivage politicien...

M. François Sauvadet.

Non !

M. Philippe Briand.

« Politichien » ! (Sourires.)

M. Christian Bataille.

... qu'il nous faut dépasser, dans l'intérêt d'une société où chacun doit pouvoir se parler et se tolérer ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Le groupe socialiste votera pour cette loi (Huées sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République) qui représente une grande chance. Ne la laissons pas passer.

(Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. -


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Avant de donner la parole au dernier orateur inscrit pour les explications de vote, je vais, d'ores et déjà, faire annoncer le scrutin de manière à permettre à nos collègues de regagner l'hémicycle.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Christian Estrosi.

M. Christian Estrosi.

Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, ce débat était attendu par tous ceux qui considèrent, comme nous, que la chasse s'inscrit au plus profond de l'histoire et des traditions de notre pays, par tous ceux qui estiment que les 1,5 million de Français qui s'adonnent à cette passion sont les héritiers d'une culture qui a forgé notre identité nationale, par tous ceux qui estiment à sa juste valeur le rôle économique et social de la chasse en France. Derrière JeanClaude Lemoine, les députés RPR se sont battus avec enthousiasme pour défendre ces valeurs.

Ce débat était aussi attendu par tous ceux - et vous en faites partie, madame la ministre - qui, au mieux, pensent qu'il faut limiter les droits des chasseurs et qui, au pire, estiment que la chasse n'a plus lieu d'être dans notre pays. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Malgré vos provocations, madame la ministre (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert), malgré les agressions multiples de certains de vos amis, véritables intégristes d'une écologie aveugle (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert), nous avions espéré que nous pourrions, au-delà des clivages traditionnels, parvenir à un compromis acceptable par tous.

Le groupe « chasse » a réuni, en effet, dans cette assemblée, des députés de tous les bancs. Nous y avions, de chaque côté de l'hémicycle, réalisé, je crois, un bon travail, permettant de préserver une chasse responsable. Le groupe RPR croyait sincèrement que nous pourrions nous retrouver avec des députés de la majorité, pour défendre une même vision de la chasse. Malheureusement, une fois de plus, les logiques internes de la gauche plurielle ont triomphé. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Chers collègues de la majorité, vous avez capitulé en rase campagne. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste.) A quatre heures du matin, dans la nuit du mercredi 29 mars, l'attitude de ce pauvre M. Sicre, président du groupe « chasse » qui, dans un premier temps, avait refusé de céder aux injonctions pressantes d'émissaires de Matignon,...

Plusieurs députés du groupe socialiste.

Démago !

M. Christian Estrosi.

... venus à la hâte pour mettre de l'ordre dans les rangs de la majorité, en est le meilleur exemple.

M. Jacques Fleury.

A quatre heures du matin, vous étiez dix-neuf de l'opposition !

M. Christian Estrosi.

Vous avez finalement tout lâché pour assurer le maintien de Mme Voynet au Gouvernement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Mme Odette Grzegrzulka.

Chassez-le !

M. Christian Estrosi.

L'article 10, qui devait permettre à l'Assemblée nationale de confirmer la loi de juillet 1998, votée à une écrasante majorité, sera finalement conforme à ce que souhaitait Mme la ministre de l'environnement.

Désormais, les dates d'ouverture de la chasse aux oiseaux migrateurs ne pourront aller au-delà du 10 février. C'est une restriction des périodes de chasse de plus d'un mois et demi. Cette disposition est bien sûr inacceptable.

(Approbation sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Nous l'avons dit à maintes occasions dans le débat : les dates d'ouverture et de clôture de la chasse doivent tenir compte des traditions régionales. L'évidence commande de les adapter en fonction des lieux de chasse. Les mêmes règles ne peuvent valoir du sud du Portugal au nord de l'Irlande.

Ce texte, tel que Mme Voynet l'a voulu, est irréaliste, d'autant plus que, sous couvert d'harmonisation européenne, il impose à notre pays des contraintes que ne connaissent pas les autres membres de l'Union européenne.

M. Henri Cuq.

C'est vrai !

M. Christian Estrosi.

Nous savons bien que, sur ce point, les directives européennes servent d'alibi aux objectifs restrictifs. Le Gouvernement français n'a pas souhaité, l'ensemble des députés qui soutiennent le Gouvernement n'a pas souhaité engager notre pays dans une voie de négociation qui aurait naturellement abouti sur un compromis avec Bruxelles.

Que penser, d'autre part, du sort politicien réservé aux seuls ours slovènes (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), alors que l'on a refusé de traiter le problème des grands prédateurs, et notamment le loup, dans son ensemble ? (« Hou ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Madame la ministre, c'est avec intérêt que tous les chasseurs ont lu votre interview dans le Journal du dimanche, où vous proclamiez que « L'armistice est proche ». L'armistice, cela signifie sans doute, pour vous, la capitulation des chasseurs ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Comment interpréter autrement votre pensée, quand on lit votre communiqué de victoire dans ces mêmes colonnes ? Je vous cite, madame la ministre. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Cette loi sur la chasse « propose des avancées considérables ». (« Oui ! » sur les mêmes bancs.)

« Le droit de non-chasse est reconnu » (« Oui ! » sur les


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert),

« il y aura un jour sans fusil chaque semaine » (« Oui ! » sur les mêmes bancs),

« les dates d'ouverture et de fermeture fixées par l'Europe seront respectées... »

(« Oui ! » sur les mêmes bancs.)

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Oui, enfin !

M. Christian Estrosi.

...

« et les agents de l'Office national de la chasse sont définitivement dégagés de la tutelle des fédérations de chasseurs. »

(« Oui ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Pierre Ducout, vice-président de la commission.

Très bien !

M. Christian Estrosi.

« Les fédérations de chasseurs fonctionneront enfin sur le principe "un homme, une voix". Elles feront l'objet d'un contrôle financier permanent. » «

Les chasseurs ne seront plus majoritaires dans le conseil d'administration de l'Office national de la chasse. »

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) Et vous concluez cet énoncé éloquent avec cette phrase qui, à elle seule, résume tout ce débat parlementaire :

« Que voulez-vous de plus ? »

M. le président.

Voulez-vous conclure, monsieur Estrosi ?

M. Christian Estrosi.

Madame, vous avez gagné parce que les députés de la majorité le veulent bien.

M. Pierre Ducout, vice-président de la commisison.

Parce que c'est un bon texte !

M. Christian Estrosi.

Dans quelques instants, nous aurons, d'un côté, ceux qui considèrent que le texte auquel nous avons abouti est mauvais, et, de l'autre, ceux qui soutiennent votre victoire. Ces derniers doivent savoir que, pour des raisons politiciennes, ils vont prendre la responsabilité de mettre en péril la chasse française.

M. le président.

Concluez, monsieur Estrosi !

M. Christian Estrosi.

Nous, députés du groupe RPR, parce que nous souhaitons défendre la chasse en France, parce que nous souhaitons défendre son mode d'organisation, parce que nous sommes convaincus que la chasse fait partie de notre histoire et de notre culture (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)...

M. le président.

Monsieur Estrosi, voulez-vous conclure ? Vous avez dépassé votre temps de parole.

M. Christian Estrosi.

Je conclus, monsieur le président.

M. le président.

Mes chers collègues, je vous invite à faire silence et à entendre la conclusion de M. Estrosi !

M. Christian Estrosi.

Merci, monsieur le président ! ... nous nous opposerons avec conviction et détermination à ce projet de loi. Pour nous, défendre la chasse dans son mode d'organisation actuel, c'est aussi et d'abord défendre une certaine vision de la protection de l'environnement (Protestations sur les bancs du groupe socialiste), une vision qui s'éloigne des approches technocratiques et bucoliques pour s'enraciner dans les réalités du territoire...

M. Georges Frêche.

Débranchez le micro !

M. Christian Estrosi.

... une vision de l'environnement dans laquelle la chasse trouve toute sa place. Les chasseurs ont, en effet, démontré leur capacité à gérer, à aména ger, à protéger à la fois les espèces et les territoires. A bien des égards, ils n'ont aucune leçon à recevoir des écologistes de salon (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert) en matière d'amour de la nature.

C'est dans cet état d'esprit que nous nous prononcerons pour la protection de l'environnement, pour la protection d'un patrimoine culturel, pour la protection d'une vision équilibrée de l'aménagement du territoire. C'est donc naturellement que nous voterons contre un texte idéologique, déséquilibré et dangereux. (Applaudissementss ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Mes chers collègues, il s'agissait d'une dernière salve (Sourires), mais nous ne sommes pas sur un champ de bataille. Nous sommes dans l'hémicycle, et nous allons voter.

Vote sur l'ensemble

M. le président.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

Je vais mettre aux voix l'ensemble du projet de loi relatif à la chasse.

Je rappelle que le vote est personnel - ô combien ! (Sourires) - et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été couplés à cet effet.

Le scrutin est ouvert.

....................................................................

M. le président.

Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin : Nombre de votants ...................................

563 Nombre de suffrages exprimés .................

527 Majorité absolue .......................................

264 Pour l'adoption .........................

275 Contre .......................................

252 L'Assemblée nationale a adopté. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Suspension et reprise de la séance

M. le président.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinquante-cinq, est reprise à dix-sept heures quinze, sous la présidence de Mme Nicole Catala.)

PRÉSIDENCE DE Mme NICOLE CATALA,

vice-présidente

Mme la présidente.

La séance est reprise.

3 NOMINATION D'UN DÉPUTÉ EN MISSION TEMPORAIRE

Mme la présidente.

J'ai reçu de M. le Premier ministre u ne lettre m'informant de sa décision de charger M. Claude Evin, député de la Loire-Atlantique, d'une


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

mission temporaire, dans le cadre des dispositions de l'article L.O. 144 du code électoral, auprès de Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité et de M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Cette décision a fait l'objet d'un décret publié au Journal officiel du 4 avril 2000.

4 ÉLECTION DES SÉNATEURS Discussion, en deuxième lecture, d'un projet de loi

Mme la présidente.

L'ordre du jour appelle la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi relatif à l'élection des sénateurs (nos 2255, 2300).

La parole est à M. le ministre de l'intérieur.

M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur.

Madame la présidente, mesdames et messieurs les députés, vous êtes aujourd'hui saisis, en seconde lecture, du projet de loi relatif à l'élection des sénateurs. L'examen de ce projet ayant commencé au Sénat - comme il est normal s'agissant d'un tel sujet -, la voie sera ensuite ouverte à la réunion d'une commission mixte paritaire, puis, à défaut d'un accord, sur la probabilité duquel je ne me prononcerai pas, aux ultimes navettes. Il importe en effet que l'examen de cette réforme, commencé en juin 1999, s'achève rapidement, afin que celle-ci puisse s'appliquers ans difficulté aux élections sénatoriales de septembre 2001.

Ce projet de loi avait annoncé dans son exposé des motifs deux autres projets visant à adapter les effectifs du Sénat, afin de tirer les conséquences des évolutions démographiques constatées par le dernier recensement général de la population, conformément au principe constitutionnel de l'égalité du suffrage.

Un projet de loi organique ainsi qu'un projet de loi ordinaire ont ainsi été déposés sur le bureau du Sénat le 23 février dernier. Le projet de loi organique proposait de créer dix-huit sièges de sénateurs supplémentaires dans les départements ; le projet de loi ordinaire répartissait vingtdeux sièges nouveaux dans vingt et un départements et en supprimait quatre dans deux départements, ce qui correspond bien aux dix-huit sièges supplémentaires créés par la loi organique.

Des sièges supplémentaires étaient aussi créés et répartis au profit de la Nouvelle-Calédonie, dont la représentation, qui n'a pas évolué depuis 1946, passait de un à deux sénateurs, et au profit de la Polynésie française, qui aurait, elle aussi, bénéficié d'un deuxième siège de sénateur.

La clé de répartition pour adapter la composition du Sénat à l'évolution démographique intervenue depuis 1976 était, tout simplement, celle retenue non seulement depuis le début de la Ve République mais, plus loin encore, depuis le début de la IVe République pour constituer ce qu'on appelait alors le Conseil de la République ! Le Sénat lui-même avait repris ces critères dans une proposition de loi qui est devenue la loi du 16 juillet 1976 créant trente-trois sièges de sénateur pour « adapter la composition du Sénat de la République à l'évolution démographique intervenue au cours des vingt dernières années », afin que soit « rigoureusement respecté le principe de l'égalité du suffrage universel proclamé par l'article 3 de la Constitution ». Je ne fais que citer le rapporteur et vice-président du Sénat de l'époque, le sénateur Etienne Dailly.

Aussi est-ce contre toute attente que, le 16 mars dernier, le Sénat a adopté la question préalable sur le projet de loi organique qui, au nom des mêmes principes et à partir des mêmes critères, créait dix-huit sièges de sénateur supplémentaires. Que fallait-il faire ? J'ai retiré de l'ordre du jour de cette séance le projet de loi ordinaire, qui n'avait plus de sens et dont l'exposé des motifs indiquait expressément qu'il était « la conséquence et le complément nécessaire du projet de loi organique ».

La modification du nombre des sénateurs implique nécessairement une loi organique « relative au Sénat » au sens de l'article 46 de la Constitution, qui ne peut donc être adoptée qu'avec son accord. Certes, il aurait été possible, comme je l'ai indiqué au Sénat, de procéder, par la loi ordinaire, à un redéploiement des 304 sièges actuels entre les départements. Mais il aurait alors fallu définir une nouvelle clé de répartition. Surtout, il aurait été nécessaire de supprimer treize à vingt sièges, selon la clé retenue, dans certains départements pour les attribuer à d'autres, ce qui est toujours une opération extrêmement douloureuse.

M. René Dosière.

Les sénateurs savent souffrir !

M. le ministre de l'intérieur.

Aussi a-t-il paru préférable de laisser la majorité sénatoriale face à ses contradictions et à son embarras puisqu'elle refuse aujourd'hui une amélioration de la représentativité du Sénat qu'elle avait elle-même proposée en 1975.

Votre commission des lois partage ce point de vue puisqu'elle ne propose pas d'amendement sur ce sujet M. Dolez le confirmera tout à l'heure à l'occasion de l'examen de ce projet de loi relatif à l'élection des sénateurs - comme elle aurait pu le faire, je tiens à le rappeler.

En ce qui concerne les dispositions que vous examinez aujourd'hui, je ne reprendrai pas l'ensemble de l'argumentation que je vous avais présentée lors de votre première délibération - et que vous aviez d'ailleurs fait vôtre pour l'essentiel. Je préfère souligner les questions importantes et indiquer les points d'accord - il y en a peu - et les points de désaccord - ils sont nombreux - entre les deux assemblées.

Le point d'accord principal est au niveau des principes : le Sénat a convenu que ni le Gouvernement ni l'Assemblée nationale ne souhaitait remettre en cause le bicamérisme, mais qu'ils proposaient, au contraire, de le conforter en rendant plus juste l'élection des sénateurs et plus représentatif le Sénat. Le rapporteur de la commission des lois du Sénat s'est félicité que, grâce au dialogue ainsi ouvert, « les deux assemblées du parlement aient abouti à ce constat de convergence qui transcende bien des débats du passé ».

Cette convergence est malheureusement la seule. Toujours au niveau des principes - mais les conséquences pratiques en sont importantes quant à la désignation des délégués sénatoriaux et à l'application de la représentat ion proportionnelle - le Sénat refuse d'appliquer pleinement l'article 3 de notre Constitution, selon lequel : « Le suffrage peut être direct ou indirect dans les conditions prévues par la Constitution. Il est toujours universel, égal et secret. »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

Le principe d'égalité du suffrage s'applique à toutes les élections - le Conseil constitutionnel a déjà eu l'occasion de le rappeler.

Certes, le Sénat, en vertu de l'article 24 de la Constitution, « assure la représentation des collectivités territoriales de la République ». Nul ne conteste cette spécificité. Elle doit être prise en compte dans la définition de son régime électoral. Elle constitue à l'évidence un « motif d'intérêt général », au sens du Conseil constitutionnel, pouvant justifier - davantage que pour l'Assemblée nationale - des assouplissements au principe selon lequel toute élection doit reposer sur des « bases essentiellement démographiques ».

Mais assouplissement ne signifie pas méconnaissance du principe d'égalité du suffrage. D'autant plus que le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 9 avril 1992, a expressément reconnu que, « en sa qualité d'assemblée parlementaire le Sénat participe à l'exercice de la souveraineté nationale ». Comment, dans ces conditions, imaginer que le Sénat puisse se soustraire à l'application d'un principe qui s'applique à l'élection d'un conseil municipal ou d'un conseil régional ? Voilà les principes constitutionnels que j'ai rappelés plus longuement au Sénat, car ils sont au coeur de notre débat et déterminent pour une large part les dispositions ensuite retenues à l'occasion de l'examen des articles.

Le Sénat, en effet, en matière de désignation des délégués sénatoriaux, privilégie sa fonction de représentant des collectivités territoriales au détriment du respect du principe d'égalité du suffrage. Le Gouvernement et l'Assemblée nationale proposent de concilier les deux exigences.

Cette divergence sur la portée du principe de l'égalité du suffrage a une première conséquence, en ce qui concerne l'effectif des délégués des conseils municipaux.

Le Sénat a rétabli, en seconde lecture, le dispositif qu'il avait adopté en première lecture : maintien du système actuel dans les communes de moins de 9 000 habitants, et élection d'un délégué par tranche de 700 habitants en sus de 9 000.

Ce dispositif a, certes, le mérite de faire disparaître l'ctuel seuil de 30 000 habitants, qui n'a plus de justification depuis longtemps, mais il laisse subsister celui de 9 000 habitants, qui n'en a pas davantage.

Surtout, ce dispositif ne corrige pas fondamentalement les inégalités de représentation que j'ai longuement évoquées lors des lectures précédentes, ce qui est l'objet même du projet de loi.

Le Gouvernement a pourtant proposé un dispositif clair, simple, équitable : un délégué pour 500 habitants ou fraction de ce nombre. Ce système corrige les inégalités en s'appuyant sur une base démographique indiscutable. Mais, en même temps, il reste très favorable aux petites communes, pour deux raisons : d'abord, parce que ces communes bénéficient toutes d'au moins un délégué, quelle que soit leur population ; ensuite, parce que le fait d'attribuer un siège supplémentaire par fraction de 500 habitants constitue un avantage pour les petites communes, par exemple de 600 habitants - comme je vous l'avais exposé de manière détaillée en première lecture.

Ce système prend donc en compte le souhait du Sénat d'une pondération du critère démographique en faveur des communes les moins peuplées, et respecte la spécificité constitutionnelle de la Haute Assemblée. Malheureusement, le Gouvernement n'a pas emporté la conviction du Sénat, comme vous le savez.

M. Pascal Clément.

C'est dommage !

M. le ministre de l'intérieur.

Si le Gouvernement n'a pas été entendu par la majorité du Sénat, l'est-il davantage par l'Assemblée nationale ? (Sourires.)

Sans aucun doute, puisque le dispositif que vous aviez adopté en première lecture, et que votre commission des lois vous propose de rétablir aujourd'hui, est fondamentalement le même que celui du Gouvernement. Mais au lieu d'un délégué pour 500 habitants ou fraction de ce nombre, comme le propose le Gouvernement, vous préconisez un délégué pour 300 habitants. Je ne peux que renouveler les réserves que j'avais déjà formulées lors de notre précédent débat sur cette augmentation considérable du nombre des délégués à élire.

Je voudrais rappeler quelques chiffres.

A l'échelon national, un délégué pour 500 habitants c omme le propose le Gouvernement, représente 1 37 365 délégués, soit légèrement moins que les 137 951 délégués actuels. Mais un délégué pour 300 habitants représenterait environ 213 694 délégués, soit une augmentation de 55 %. Encore s'agit-il d'une moyenne, car cette augmentation varie selon les départements.

M. René Dosière.

Si le pourcentage est fort, c'est que l'on part de très bas, monsieur le ministre !

M. Pascal Clément.

Mais non ! Vous dénaturez la démocratie !

M. le ministre de l'intérieur.

Il faut voir comment les choses s'organisent pratiquement. J'y reviendrai tout à l'heure, monsieur le député.

M. Pascal Clément.

Ce sera annulé par le Conseil constitutionnel, c'est stupide !

Mme la présidente.

Mes chers collègues, seul M. le ministre à la parole.

M. le ministre de l'intérieur.

M. Dosière fait une comparaison statistique, c'est son droit. Les statistiques, cependant, sont souvent l'art de montrer l'accessoire pour dissimuler l'essentiel...

Je fais observer que, par exemple, pour le département du Nord...

M. Marc Dolez, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles de la législation et de l'administration générale de la République.

C'est un bon exemple !

M. le ministre de l'intérieur.

... cher à M. Dolez, qui dispose déjà du plus grand nombre de délégués - 5 459 les tranches de 500 donnent pratiquement le même chiffre - 5 426 - alors que les tranches de 300 aboutiraient à 8 826, soit une augmentation de 62 %.

M. Pascal Clément.

C'est complètement fou !

M. le ministre de l'intérieur.

De la même manière, le nombre de délégués doublerait dans la plupart des départements de la région parisienne. A Paris, par exemple, qui constitue à lui seul un département, les 4 246 délégués provoqués par la tranche de 500 habitants sont à comparer aux 2 255 délégués actuels...

M. René Dosière.

Et combien dans le 5e arrondissement ?

M. le ministre de l'intérieur.

... et aux 7 077 délégués qui résulteraient des tranches de 300, soit un triplement du nombre de délégués. Ce ne serait en outre qu'une photographie agrandie du conseil de Paris, sans conséquence politique d'aucune sorte.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

M. Pascal Clément.

C'est ubuesque !

M. le ministre de l'intérieur.

Les difficultés matérielles - je réponds à M. Dosière, monsieur Clément - liées au nombre de personnes à réunir, aux locaux nécessaires et à l'organisation de bureaux de vote sont réelles, même si ce n'est pas pour vous et, je le comprends bien, l'argument le plus convaincant. Mais il existe néanmoins. Et je ne vais pas gloser sur les difficultés d'organisation des traditionnels banquets républicains auxquels je vous sais attachés. Non, je veux insister davantage sur la difficulté, pour les différentes listes, de trouver un si grand nombre de candidats. Et je vous invite, sur cette question qui n'est pas de principe, à trouver une position plus réaliste.

Car, ces candidats, il faudra les trouver.

Les divergences entre le Sénat, d'une part, et l'Assemblée nationale, d'autre part - sur ce point en total accord avec le Gouvernement -, concernent en second lieu l'élection des sénateurs eux-mêmes. Ils sont actuellement élus à la proportionnelle à partir de cinq sièges par département.

Le Gouvernement a proposé d'instituer le scrutin proportionnel à partir de trois sénateurs par département, ce que vous avez approuvé en première lecture.

M. Pascal Clément.

Et c'est très bien !

M. le ministre de l'intérieur.

Le Sénat n'accepte la proportionnelle qu'à partir de quatre sénateurs par département.

M. Pascal Clément.

Alors, suivez le Sénat !

M. le ministre de l'intérieur.

Votre rapporteur vous propose à juste titre de revenir au seuil de trois sénateurs.

M. André Labarrère.

Bravo !

M. le ministre de l'intérieur.

Le seuil de quatre sénateurs n'a, en effet, aucune justification. C'est bien à partir de trois sénateurs que l'application de la proportionnelle a un sens. Je suis content de voir que M. Labarrère m'approuve. (Sourires.)

Il est clair que lorsqu'il n'y a qu'un siège à pourvoir, seul le scrutin majoritaire peut s'appliquer ; lorsqu'il y a deux sièges en jeu, l'application de la représentation proportionnelle est assez factice puisque, dans la plupart des cas, elle conduit à déterminer à l'avance l'attribution des sièges entre les deux principaux courants politiques du département.

A partir de trois sièges, en revanche, la représentation proportionnelle fonctionne convenablement.

M. André Labarrère.

Et moi, j'ai mes chances. (Rires.)

M. Jean-Luc Warsmann.

Quel aveu !

M. le ministre de l'intérieur.

On ne peut justifier la coexistence de deux modes de scrutin pour pourvoir les sièges d'une même assemblée que sur le fondement d'un critère objectif, je tiens à le souligner. C'est pour cette raison que le Gouvernement a retenu le seuil de trois sièges et s'en tient, comme vous, à cette position.

M. Arthur Dehaine.

Pour M. Labarrère !

M. Jean-Luc Warsmann.

C'est la loi Labarrère !

M. le ministre de l'intérieur.

Lors de l'examen des articles, j'aurai l'occasion d'aborder d'autres divergences entre l'Assemblée nationale et le Sénat concernant, par exemple, le mode d'élection des sénateurs par les délégués, ainsi que les difficultés que soulève la volonté, cette fois commune à votre assemblée et au Sénat, de poser, dans la loi, l'obligation de choisir les délégués des conseils municipaux parmi les conseillers municipaux eux-mêmes.

Mais, à ce moment du débat, je voulais, mesdames et messieurs les députés, m'en tenir à l'essentiel de ce qui rapproche ou sépare votre assemblée et le Sénat, et rappeler les principes, difficilement contestables, sur lesquels repose ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Marc Dolez, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

M. Marc Dolez, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre assemblée est saisie, aujourd'hui, en deuxième lecture, du projet de loi relatif à l'élection des sénateurs. Votre commission des lois a examiné le texte tel qu'il est revenu du Sénat.

Mon propos sera bref puisque la Haute Assemblée a confirmé la position qu'elle avait adoptée lors de la première lecture et que votre commission des lois vous propose de rétablir le texte que nous avons adopté en première lecture.

M. Jean-Luc Warsmann.

L'Assemblée a tout rejeté !

M. Pascal Clément.

Perseverare diabolicum !

M. Marc Dolez, rapporteur.

Des points de divergence substantiels demeurent entre les deux chambres, qui ne font manifestement pas le même diagnostic.

L'intérêt du bicamérisme, il faut le souligner, n'est évidemment pas en cause, mais la question est de savoir s'il doit évoluer pour s'adapter à une société en mouvement et ne pas être trop éloigné des aspirations de nos concitoyens.

S'il importe de conserver au Sénat son rôle constitutionnel de représentant des collectivités territoriales, tel que le fixe l'article 24 de la Constitution, celui-ci doit se concilier avec le principe de l'égalité du suffrage. Or, le mode de scrutin actuel ne nous semble pas répondre à cet objectif. Le Gouvernement en convient à travers le projet de loi qu'il nous présente ; le Sénat aussi, d'une certaine manière, puisqu'il accepte de modifier le mode de scrutin en vigueur, même si - et nous le regrettons - il ne va pas assez loin, à notre sens.

La seconde chambre exprime la souveraineté nationale selon les modalités que la Constitution arrête. Cependant, le principe essentiel qui doit demeurer est celui qui apparaît à l'article 3 de notre Constitution : « La souveraineté nationale appartient au peuple. »

M. Jean-Luc Warsmann.

Les élus ne le représentent-ils pas ?

M. Marc Dolez, rapporteur.

Cette réforme s'articule autour de deux axes principaux, auxquels je me limiterai, renvoyant à la discussion des amendements les questions plus secondaires. Le premier est l'élargissement du corps électoral et le second, le mode de scrutin applicable aux élections sénatoriales.

L'objectif du Gouvernement, que nous partageons, est d'élargir le corps électoral des sénateurs, pour l'essentiel composé des délégués des conseils municipaux.

Vous nous proposez, monsieur le ministre, un système clair et lisible, nous en convenons : l'élection d'un délégué par fraction de 500 habitants. Le Sénat, quant à lui, souhaite maintenir le système actuel dans les communes comptant jusqu'à 9 000 habitants et prévoit, au-delà, l'élection d'un délégué supplémentaire par fraction de


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

700 habitants. Notre assemblée a adopté, en première lecture, un dispositif très lisible, prévoyant la désignation d'un délégué pour 300 habitants.

M. Arthur Dehaine.

C'est excessif !

M. Marc Dolez, rapporteur.

Depuis la première lecture, au risque de vous décevoir un peu, monsieur le ministre, nous n'avons pas changé de point de vue, même si j'ai bien entendu les arguments que vous avez développés à l'instant et qui sont pertinents, je le reconnais...

M. Pascal Clément.

Ah !

M. Marc Dolez, rapporteur.

... dans le seul cas de Paris : dès lors qu'une seule collectivité procède à la désignation des grands électeurs, on a une démultiplication qui ne change rien aux rapports de force.

M. René Dosière.

Sans compter les électeurs fictifs du 5e arrondissement !

M. Jean-Luc Warsmann.

Si l'opposition était majoritaire, M. le ministre serait plus heureux !

M. Marc Dolez, rapporteur.

Pour les autres départements, la remarque ne vaut évidemment pas. J'ajoute que le système que nous proposons corrige davantage encore que le vôtre les inégalités existantes...

M. Pascal Clément.

Quelles inégalités ?

M. Jean-Luc Warsmann.

Des exemples !

M. Marc Dolez, rapporteur.

... et que, dans la répartition des grands électeurs proposée, l'élection d'un délégué pour 300 habitants permet de garantir à toutes les communes au moins la répartition dont elle dispose aujourd'hui, ce qui n'est pas le cas avec un délégué pour 500.

Quant à trouver un nombre de grands électeurs suffisant, je ne crois pas que cela présente, dans la pratique, de gros problèmes.

J'ajoute que dans les conseils municipaux, il n'y aura pas obligation, pour la désignation des grands électeurs, de présenter des listes complètes.

Le second point important de ce projet, c'est le mode de scrutin applicable à ces élections sénatoriales. Aujourd'hui, la proportionnelle s'applique à partir de l'élection de cinq sénateurs par département. Le Gouvernement propose trois. Le Sénat avait coupé la poire en deux, en s'arrêtant à quatre. Comme vous l'avez souligné, monsieur le ministre, cela ne se justifie guère puisque c'est à partir de trois que l'application de la proportionnelle a vraiment un sens.

M. Bernard Roman.

C'est vrai ! Trois, c'est bien.

M. Marc Dolez, rapporteur.

C'est la raison pour laquelle, sur ce point-là aussi, la commission des lois vous propose, mes chers collègues, de rétablir le texte que nous avons adopté en première lecture.

Je vais m'arrêter là...

M. René Dosière.

L'essentiel est dit !

M. Marc Dolez, rapporteur.

... en renvoyant la discussion d'un certain nombre de points à la discussion des amendements.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Discussion générale

Mme la présidente.

Dans la discussion générale, la parole est à M. Jean-Luc Warsmann.

M. Jean-Luc Warsmann.

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons cet après-midi, en deuxième lecture, le projet de loi relatif à l'élection des sénateurs. Le texte qui nous est présenté a été examiné par le Sénat et je vous proposerai, dans un premier temps, de l'étudier tout simplement et très objectivement.

Chacun a bien à l'esprit le mode d'élection au suffrage indirect des sénateurs, élus dans chaque département par les grands électeurs, eux-mêmes élus par les conseils municipaux de chacune des communes de chaque département.

Comment caractériser le texte qui a été adopté par le Sénat ? Le mot qui me vient à l'esprit, c'est « équilibre », à deux niveaux.

D'abord, le texte propose un équilibre dans la désignation des grands électeurs entre les communes de moins de 9 000 habitants et celles de plus de 9 000 habitants. Dans les communes de moins de 9 000 habitants, il maintient le système actuel. Dans les communes de plus de 9 000 habitants, il propose que soient élus des délégués supplémentaires, proportionnellement à la population.

Pourquoi ce seuil de 9 000 habitants ? Est-il arbitraire ?

M. René Dosière et M. Bernard Roman.

Oui !

M. Jean-Luc Warsmann.

Non, mes chers collègues !

C'est simplement le seuil de l'équililbre, le seuil médian qui divise la population française en deux parties : les habitants des communes de moins de 9 000 habitants représentent 48 % de la population, ceux des communes de plus de 9 000 habitants 52 %.

M. Bernard Roman.

C'est fumeux !

M. Jean-Luc Warsmann.

C'est un équilibre...

M. Pascal Clément.

Très bien !

M. Jean-Luc Warsmann.

... car, ne vous y trompez pas, si 80 % des Français habitent dans les zones urbaines, 77 % habitent dans des communes de moins de 50 000 habitants. Ne confondez pas zones urbaines et communes de plus de 50 000 habitants !

M. René Dosière.

Il n'y a pas pourtant pas de suffrage direct au Sénat !

M. Jean-Luc Warsmann.

Deuxième point, le niveau auquel appliquer le scrutin proportionnel. Là, l'enjeu est important. Quand les grands électeurs élisent leurs sénateurs au scrutin majoritaire, la première qualité pour être élu, c'est la qualité personnelle de la candidate ou du candidat.

A l'inverse, plus vous étendez la proportionnelle, plus vous donnez de prime à la liste, et donc, par conséquence, à l'étiquette politique. Dans tous les départements qui ont une taille moyenne, les sénateurs sont d'abord élus pour leurs qualités personnelles. On a d'ailleurs vu de grandes personnalités soutenues par des appareils politiques puissants être battues parce que les électeurs et les élus locaux préfèrent des personnes ayant des qualités personnelles certaines à de grands noms.

Aujourd'hui, on vote à la proportionnelle dans les départements où on élit au moins cinq sénateurs, ce qui représente quatorze départements en France et le tiers des sénateurs. Le Sénat propose de respecter le seuil de quatre sénateurs. L'un de mes prédécesseurs à cette tribune le trouve arbitraire. Pas du tout ! C'est celui qui divise précisément en deux le Sénat et qui permettrait de désigner la moitié des sénateurs au scrutin majoritaire et l'autre moitié au scrutin proportionnel, exactement 54 % et 46 %. Voilà encore de l'équilibre.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

Le rapporteur est venu à cette tribune défendre l'existence du bicamérisme, une deuxième chambre permettant d'avoir une discussion entre les deux assemblées. Quelle discussion y a-t-il sur ce texte ? Aucune ! Sur les trentetrois amendements qui sont présentés, trente et un le sont par la commission des lois, dans le but de détruire tout le travail du Sénat. Quel beau contre-exemple de votre prétendu ralliement à l'existence d'une deuxième chambre ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Arthur Dehaine.

Très bien !

M. Jean-Luc Warsmann.

Cette volonté de refuser le travail du Sénat a plusieurs conséquences.

La première, c'est que vous affaiblissez le poids des collectivités locales au Sénat. Je me permettrai de vous rappeler, mes chers collègues, que le rôle du Sénat est défini par notre Constitution, à l'article 24, selon lequel le rôle du Sénat est d'assurer la représentation des collectivités territoriales de la République. Vous faites de la surenchère - le Gouvernement veut 1 délégué pour 500, la majorité 1 pour 300, pourquoi pas 1 pour 200 - et vous courez simplement après un décalque de la représentation de l'Assemblée nationale.

M. Jean-Louis Debré.

Tout à fait !

M. Jean-Luc Warsmann.

Si le Sénat doit être la même assemblée que l'Assemblée nationale, il est inutile. L'intérêt, c'est d'avoir un mode de désignation différent et de respecter sa définition constitutionnelle en tenant compte des collectivités territoriales de la République.

Deuxième conséquence de votre projet, vous affaiblissez considérablement le poids des petites et moyennes communes. Vous réduisez de 11 % le nombre de délégués des petites communes de moins de 3 500 habitantse t de 5 % celui des communes entre 3 500 et 30 000 habitants. C'est selon nous une erreur profonde car l'un des enjeux du développement en France, c'est l'aménagement harmonieux du territoire. L'aménagement du territoire ne se fait pas en fermant des perceptions ou des écoles dans les zones rurales, en diminuant leur poids dans la seule chambre chargée de les représenter. Il se fait en ayant la volonté de représenter harmonieusement le territoire.

M. Bernard Roman.

Ce n'est pas le débat !

M. Jean-Luc Warsmann.

Nous ne pouvons donc pas vous suivre.

En écoutant le ministre et le rapporteur, je me demandais pourquoi on nous proposait un tel projet.

J'ai d'abord pensé qu'une partie de la majorité refusait l'existence d'une deuxième chambre, même si vous nous dites l'inverse. Puis, je me suis dit que la majorité souhaiterait que le Sénat soit un décalque de l'Assemblée.

M. René Dosière.

Mais non !

M. Jean-Luc Warsmann.

Quand on réfléchit un peu plus, on se rend compte que toutes les mesures proposées n'ont qu'une seule conséquence, c'est d'augmenter le nombre de sénateurs de gauche.

M. Jean-Louis Debré.

Eh oui !

M. Jean-Luc Warsmann.

Vous seriez crédibles dans votre volonté de rénover la vie publique si toutes les mesures proposées n'allaient pas dans le même sens. Dans tous les départements où il y a trois sénateurs de la majorité sénatoriale, un siège va passer à la gauche avec la proportionnelle.

M. René Dosière.

Cela vous gêne ?

M. Jean-Luc Warsmann.

J'observe, d'ailleurs, que vous proposez ce projet de loi au moment précis où le Gouvernement a dû retirer sa réforme de la justice parce qu'il ne maîtrisait pas la réforme des trois cinquièmes au Sénat et, comme de nombreux observateurs, je me dis que la finalité de cette modification du mode d'élection des sénateurs, c'est d'essayer de donner un pouvoir de blocage à la gauche plurielle lorsque le Congrès se réunit.

A l'étranger, un tel débat apparaît totalement abstrait.

Allez expliquer à des Américains, chaque Etat, chez eux, étant représenté par deux sénateurs, quel que soit le mode d'élection (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) ,...

M. Marc Dolez, rapporteur.

Cela n'a rien à voir !

M. Jean-Luc Warsmann.

... que vous voulez changer le mode d'élection ! Les démocrates n'ont pas la majorité au Sénat, mais ils ne proposent pas un changement du mode de scrutin ! Nous sommes, hélas ! dans la ligne de la déclaration malheureuse du Premier ministre, qui a expliqué que le Sénat était une anomalie de la République parce que la majorité sénatoriale restait majoritaire. C'est une phrase profondément antidémocratique !

M. Bernard Roman.

C'est faux !

M. Jean-Luc Warsmann.

Ce n'est pas parce que la ville de Lille a, depuis des années, un conseil municipal de gauche que je réclame la dissolution de son conseil municipal ! Ce n'est pas parce que le conseil général de la Marne a une majorité de droite depuis des années que je réclame sa dissolution !

M. Bernard Roman.

Entre des années et l'éternité, il y a une nuance !

M. Jean-Luc Warsmann.

C'est simplement le respect de la démocratie, et cela implique de ne pas modifier les règles du jeu électoral dans le seul but de favoriser ses amis.

M. Patrice Carvalho.

Là, ce sont les électeurs qui votent, cela n'a rien à voir !

M. Jean-Luc Warsmann.

Vous l'avez déjà fait une fois pour les élections régionales, mes chers collègues de la majorité. Il n'y a pas eu de réaction dans l'opinion et vous croyez bénéficier d'une impunité. Vous bissez donc aujourd'hui pour le Sénat, mais aucune majorité n'a modifié les modes électoraux pour favoriser ses propres intérêts sans être sanctionnée par les électeurs. J'espère que la raison triomphera avant la fin de ce débat ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Mme la présidente.

La parole est à M. René Dosière.

M. René Dosière.

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, à l'issue de cette lecture du texte par le Sénat, je voudrais rappeler à nos collègues, et en particulier à ceux de l'opposition, que le bicamérisme ne pose aucune difficulté à la majorité de cette assemblée.

On l'a suffisammnt dit, ce système, on le voit bien et on le verra sans doute demain soir, permet d'améliorer les textes, pour autant naturellement qu'il y ait un dialogue entre les deux assemblées. Ne nous faites pas de faux procès, monsieur Warsmann !

M. Jean-Luc Warsmann.

Vous ressentez le besoin de vous expliquer, c'est tout dire !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

M. René Dosière.

Pas du tout ! Ce qui pose problème, ce n'est pas l'existence d'une deuxième chambre,...

M. Jean-Luc Warsmann.

C'est qu'elle ne soit pas de gauche ! Dites-le !

M. René Dosière.

... qui n'est pas remise en cause, mais son mode d'élection.

M. Jean-Louis Idiart.

Vous, monsieur Warsmann, vous souhaitez qu'elle soit de droite en permanence !

M. Jean-Luc Warsmann.

Gagnez les élections !

Mme la présidente.

Un peu de silence, mes chers collègues !

M. René Dosière.

L'on voit bien que ce mode d'élection est conçu pour éviter l'alternance, quelles que soient les évolutions politiques. Il suffit d'ailleurs de voir ce qui se passe depuis la Libération.

M. Jean-Luc Warsmann.

C'est scandaleux ! Gagnez les élections et vous gagnerez le Sénat !

M. René Dosière.

C'est un scrutin indirect, avec une forte prime pour les communes les plus petites sans que l'on tienne compte des évolutions démographiques qui ont pu se produire dans notre pays.

M. Jean-Luc Warsmann.

C'est faux !

M. René Dosière.

De plus, l'assemblée sénatoriale n'est renouvelée que par tiers.

M. Jean-Luc Warsmann.

Ce n'est pas l'objet de la loi !

M. René Dosière.

Bref, on voit bien que ce mode de scrutin maintient pour des temps immémoriaux une majorité de droite au Sénat.

M. Jean-Luc Warsmann.

Voilà le reproche ! Quel aveu !

M. René Dosière.

Le projet du Gouvernement propose quelques avancées, je le reconnais. La représentativité du Sénat sera améliorée puisque les communes urbaines, plus peuplées, auront une place renforcée. Par ailleurs, dans les départements qui élisent trois sénateurs, le système de la représentation proportionnelle permettra d'apporter un peu de sang neuf, en tout cas davantage de pluralité.

M. Jean-Luc Warsmann.

L'aveu !

M. René Dosière.

De ce point de vue-là, on peut parler de modernisation. J'ajoute qu'avec le texte sur la parité, on verra des femmes entrer en plus grand nombre au Sénat,...

M. Jean-Luc Warsmann.

Ce n'est pas l'objet de ce projet de loi !

M. René Dosière.

... cette féminisation faisant aussi partie de la modernisation de cette assemblée que nous avons voulue.

Cela dit, monsieur le ministre, de nombreux membres de votre majorité regrettent qu'on ne soit pas allé plus loin car, si ces améliorations doivent permettre à la gauche de gagner des sièges,...

M. Jean-Luc Warsmann.

Quel aveu ! Le crime est signé !

M. René Dosière.

... la droite restera fortement majoritaire dans ce Sénat modernisé.

M. Jean-Luc Warsmann.

Quel aveu ! Merci de le reconnaître.

M. Bernard Derosier.

La droite restera la droite, réactionnaire et conservatrice.

M. René Dosière.

Vos protestations, monsieur Warsmann, comme celles du Sénat ne trompent personne, car les sénateurs ne sont pas dupes des conséquences de ce projet. Simplement, leur réaction témoigne d'un conservatisme qui est d'ailleurs encore plus profond que je ne le pensais, et vous avez rappelé, monsieur le ministre, ce qui s'est passé lors de la présentation du texte augmentant le nombre des sénateurs. Vous avez appliqué un dispositif réclamé par le Sénat en 1974 et en 1976. Le Sénat voulait même qu'il soit inséré dans la loi. Ainsi, c'est par décret qu'on aurait pris en conséquence les données du recensement de la population.

M. Jean-Luc Warsmann.

Le nombre de députés, vous voulez l'augmenter aussi ?

M. René Dosière.

On n'aurait pas eu besoin de voter une nouvelle loi. Celle-ci fixe d'ailleurs les seuils que le Sénat avait lui-même proposés et dans des termes que vous avez rappelés. Pour le rapporteur du Sénat de l'époque, M. Dailly, adapter la composition du Sénat de la République à l'évolution démographique de notre pays était une des préoccupations les plus constantes des sénateurs.

M. Jean-Luc Warsmann.

Absolument !

M. René Dosière.

Cela a bien changé, d'ailleurs !

M. Jean-Luc Warsmann.

Pas du tout ! Il n'est pas obligatoire d'augmenter le nombre de sénateurs !

M. René Dosière.

Il ajoutait même que, pour que le Sénat demeure un corps vivant, il fallait suivre l'évolution démographique du pays.

Aujourd'hui, les sénateurs refusent de suivre l'évolution démographique du pays, et on ne peut que le regretter.

M. Jean-Luc Warsmann.

Procès d'intention !

M. René Dosière.

Sur le texte qui nous est proposé et les débats qui ont eu lieu au Sénat, je ne ferai que deuxr emarques, qui montrent d'ailleurs la difficulté du dialogue.

Les campagnes électorales sénatoriales ne faisant l'objet d'aucune réglementation, l'Assemblée a adopté, à mon initiative, un amendement à ce sujet dans le but d'engager le dialogue avec le Sénat. Force est de constater que les sénateurs ont renvoyé ces dispositions d'un revers de la main sans les discuter, alors que nous souhaitions qu'elles soient améliorées.

M. Jean-Luc Warsmann.

La meilleure amélioration, c'était la disparition !

M. René Dosière.

Nous allons vous proposer de les retenir à nouveau, avec l'espoir de les améliorer d'ici à la troisième lecture. Il faudrait par exemple, monsieur le ministre, prévoir un remboursement des campagnes sénatoriales, mais l'Assemblée ne peut pas en prendre l'initiative.

M. Marc Dolez, rapporteur.

Malheureusement !

M. René Dosière.

Je souhaite donc que nous travaillions avec vous pour parvenir à une meilleure rédaction d'ici à la troisième lecture.

Par ailleurs, je regrette que, depuis notre discussion en première lecture, nous n'ayons pas progressé sur la représentation des Français de l'étranger. Je précise tout de suite que les sénatrices et les sénateurs élus par les Français de l'étranger ne sont naturellement pas en cause.

C'est le système qui est pour le moins anormal.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

Il faut tout de même rappeler que douze sénateurs représentent environ 300 000 Français de l'étranger inscrits sur les listes électorales et que, dans le Nord, il y a onze sénateurs pour 2,5 millions d'habitants. Certes, les Français de l'étranger sont un peu disséminés dans le monde, encore qu'un grand nombre d'entre eux soient en Europe, mais, même si l'on admet que cette dispersion nécessite quelques corrections, de telles inégalités sont tout de même difficilement soutenables ! Mais il y a mieux, si l'on peut dire ! Ces douze sénateurs sont élus par les 150 personnes qui composent le Conseil supérieur des Français de l'étranger, et, comme l'élection a lieu tous les trois ans, il suffit de quarante voix environ pour élire un sénateur représentant les Français de l'étranger !

M. Bernard Roman.

Ce n'est pas normal !

M. Pascal Clément.

A l'Académie française, ils sont quarante ! C'est pareil !

M. René Dosière.

Un système qui permet à quarante personnes d'élire un sénateur pour neuf ans ne doit pas perdurer ! En première lecture, nous avions retiré, à votre demande, l'amendement que notre rapporteur avait présenté sur ce point, mais il faut faire évoluer les choses car une telle situation est non seulement anachronique mais inadmissible, et cela peut donner lieu à des dérives sur lesquelles je ne m'étendrai pas.

Telles sont les quelques observations que je voulais faire. Bien entendu, nous soutenons notre rapporteur, qui propose de rétablir le texte voté par l'Assemblée en première lecture.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Pascal Clément.

M. Pascal Clément.

Monsieur le ministre, j'ai écouté avec beaucoup d'attention votre exposé et j'ai surtout noté vos regrets de ne pas être entendu par votre majorité. Et comme je partage ces regrets, je formulerai deux observations liminaires.

Première observation, il est parfaitement clair que l'Assemblée nationale impose le changement de mode de scrutin à l'autre assemblée.

M. Jean-Louis Idiart.

Et alors ?

M. Pascal Clément.

Imaginez un instant la situation inverse : le Sénat imposant à l'Assemblée nationale un nouveau mode de scrutin pour l'élection des députés ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Bernard Roman.

La Constitution ne le permet pas !

M. René Dosière.

La loi, c'est nous !

M. Pascal Clément.

Certes, monsieur Roman, mais je vous demande, psychologiquement, de vous placer dans cette situation. Or vous l'avez froidement écartée et le Sénat n'a aucun droit, si ce n'est celui de se taire !

M. Jean-Louis Idiart.

Souvenez-vous du général de Gaulle : il voulait supprimer le Sénat !

M. Pascal Clément.

Les sénateurs ont pourtant tenté de parler, comme je le fais en ce moment, d'ailleurs. On aurait pu imaginer, en écoutant ce qui se disait en particulier dans les cellules enfumées du Parti socialiste (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)...

M. Jean-Louis Idiart.

Nous ne fumons plus ! (Sourires.)

M. Marc Dolez, rapporteur.

Et puis ce ne sont pas des cellules, mais des sections !

M. Patrice Carvalho.

Ces socialistes sont tous des bolcheviks !

M. Pascal Clément.

On aurait pu imaginer que la majorité sénatoriale n'aurait jamais voulu faire bouger quoi que ce fût.

M. Patrice Carvalho.

Vous ignorez que nous avons fait la révolution !

M. Pascal Clément.

Or je constate, non sans satisfaction, que le Sénat ne s'est pas arc-bouté sur son mode de scrutin,...

M. René Dosière.

Oh !

M. Pascal Clément.

... qui, eu égard à l'évolution démographique, doit impérativement changer. Il a proposé l'élargissement de la proportionnelle à des départements un peu moins urbanisés, d'un peu moins de 1 million d'habitants - ceux qui comptent jusqu'à quatre sénateurs -, et de mieux prendre en compte le critère démographique.

Si le Sénat n'avait jamais bougé, tout ce que vous avez dit tout à l'heure serait crédible, sérieux. Mais tel n'est pas le cas. Le Sénat a fait des propositions, et vous n'avez rien voulu savoir.

Deuxième observation liminaire, monsieur le ministre, tout à l'heure, vous avez dit que le Sénat, pris dans ses contractions, n'avait pas voulu augmenter le nombre de sénateurs.

Ecoutez, il fait une proposition, on ne l'entend même pas, on lui voue le plus profond mépris. Comment voulez-vous qu'il ne manifeste pas une réaction, fût-elle discutable ? Nous en sommes là : le Gouvernement et la majorité socialiste ont rompu le dialogue entamé de par la volonté du Sénat. Le Sénat voulait dialoguer...

M. René Dosière.

Dialoguer ? Le terme est excessif !

M. Pascal Clément.

... et vous vous y êtes refusés.

Sur le fond, permettez-moi de rappeler un souvenir personnel. En 1986, j'étais à votre place, monsieur Dolez, en tant que rapporteur du projet de loi rétablissant le scrutin majoritaire aux élections législatives. Je rappelle la règle qui vaut toujours pour ce scrutin : une circonscription législative comprend 110 000 habitants en moyenne.

Le Gouvernement était favorable à un correctif de plus ou moins 10 % pour prendre en compte le territoire.

J'étais allé plus loin en déposant un amendement proposant plus ou moins 20 %. On m'avait conseillé de me méfier, que le Conseil constitutionnel allait sûrement sanctionner cette disposition, en s'appuyant sur le principe d'égalité des suffrages, dont vous parliez tout à l'heure, monsieur le ministre.

Car qu'est-ce qu'un député ? C'est avant tout le représentant d'une population et, très accessoirement - du moins le pensions-nous -, le représentant d'un territoire. Or que s'est-il passé ? L'opposition de l'époque, c'est-à-dire vousmême ou vos prédécesseurs, a soumis la loi au Conseil constitutionnel, et celui-ci a accepté mon amendement du bout des lèvres, jugeant qu'il contrevenait presque à la règle de la stricte représentation, que le rôle des députés n'était pas de représenter le territoire, mais qu'il voulait bien qu'on impute une pondération maximale de 20 %. Bref, cette disposition, votée sur ma demande, n'avait pas été annulée.

Pourquoi ai-je rappelé cela ?

M. René Dosière.

Oui, on se le demande !

M. Pascal Clément.

C'est parce qu'il s'agissait alors des députés...


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

M. René Dosière.

Et alors ?

M. Pascal Clément.

... et qu'il s'agit aujourd'hui du Sénat - tout le monde le sait, à part vous.

M. Jean-Louis Idiart.

C'est même l'ordre du jour ! (Sourires.)

M. Pascal Clément.

Or le Sénat n'est pas chargé de la stricte représentation de la population.

M. Jean-Luc Warsmann.

Tout à fait !

M. Pascal Clément.

Si le Conseil constitutionnel a accepté la pondération de plus ou moins 20 %, il décidera a fortiori que, dans l'assemblée qui assure la représentation des collectivités locales, les territoires doivent être représentés, et non pas de façon accessoire, mais de façon essentielle.

M. René Dosière.

Vous connaissez des territoires qui votent, monsieur Clément ?

M. Pascal Clément.

A mes yeux, le projet initial du Gouvernement, même s'il allait plus loin, entrait dans les limites de ce que pourra être la décision du Conseil constitutionnel. Mais je pense franchement, sans esprit polémique, qu'à un délégué pour 300 habitants, ce n'est plus le cas : vous ne prenez plus du tout en compte les collectivités locales.

M. René Dosière.

Allons, allons ! Ce sont les hommes et les femmes qui votent, pas les territoires !

M. Pascal Clément.

Vous faites primer la représentation des habitants, avec en particulier une telle sousreprésentation des collectivités rurales par rapport aux collectivités urbaines, que vous n'êtes plus du tout dans l'esprit de la Constitution, s'agissant de la fonction de la Haute Assemblée.

M. René Dosière.

Déférez donc le texte devant le Conseil constitutionnel !

M. Pascal Clément.

Je suis parfaitement convaincu, pour ma part, que ce projet de loi, amendé par les députés socialistes, sera jugé inconstitutionnel.

M. René Dosière.

Déférez donc !

M. Pascal Clément.

Bien entendu, le Sénat lui-même le déférera, et nous aussi.

M. René Dosière.

On y verra plus clair !

M. Pascal Clément.

Au-delà de ces considérations sur la population et de la saisine du Conseil constitutionnel, il faut aussi se poser la question suivante : quelle France de demain voulez-vous ?

M. René Dosière.

Le Sénat, c'est plutôt la France d'hier ! (Sourires.)

M. Pascal Clément.

Justement, nous essayons de construire la France d'aujourd'hui, et la France d'aujourd'hui conditionne la France de demain.

Je le répète, comme le Sénat, j'admets qu'il était normal de faire évoluer le mode de scrutin sénatorial. Mais quelle France de demain voulez-vous ?

C'est le fond du débat, monsieur le ministre. Le rôle du Sénat n'est pas simplement d'assurer la représentation des militants politiques. Or telle est votre arrière-pensée.

Mais je ne veux pas tomber dans la polémique ; d'autant que vous semblez en êtes tellement conscient que ce n'est pas la peine que j'insiste là-dessus. Les élus au Sénat seront avant tout désignés par les partis et, personnellement, je le déplore.

Imaginez une France sans représentants ruraux.

M. René Dosière.

Allons !

M. Pascal Clément.

Car on peut aussi s'interroger sur la pérennité des conseils généraux. Certains d'entre vous souhaiteraient instituer la proportionnelle pour les élections cantonales afin de garantir une meilleure représentation des villes par rapport au monde rural, largement surreprésenté - là encore, principe d'égalité du suffrage.

Cette sur-représentation est réelle au conseil général, elle est réelle au Sénat, mais elle permet de faire vivre la France rurale. Car la France est le plus grand pays agricole d'Europe et le plus grand pays d'Europe par sa superficie.

M. Marc Dolez, rapporteur.

Et alors ?

M. Pascal Clément.

Si vous ne prenez pas en compte l'aspect territorial, l'aspect collectivités locales, d'ici vingt à trente ans, la France sera déserte. Supprimez l'élite - excusez-moi d'employer ce mot, qui ne plaît pas à tout le monde, à gauche, mais le conseil général, le sénateur, dans le monde rural, c'est l'élite locale - et vous ferez mourir à petit feu cette partie de la France qui a pourtant tant d'importance, dont je rappelle que nous sommes tous issus.

M. Jean-Louis Idiart.

Sauf Séguin et Tiberi !

M. Pascal Clément.

Et c'est oublier bien rapidement l'équilibre intrinsèque de la France, et je dirai même son esprit, sa culture et son âme, que de laisser tomber petit à petit le monde rural parce qu'il compterait de moins en moins sous prétexte que la population est de plus en plus concentrée dans le monde urbain.

Ce projet comporte un grand danger pour le monde rural et c'est l'une des raisons fondamentales pour lesquelles, au nom de mon groupe, je m'y oppose fermement.

Je souhaite, monsieur le ministre, que vous vous serviez de tous les moyens constitutionnels - le vote bloqué ou quelque article de la Constitution plus contraignant encore - pour conduire la majorité à revenir à la règle d'un grand électeur pour 500 habitants.

M. Bernard Roman.

L'article 49, alinéa 3 ?

M. René Dosière.

Jamais utilisé depuis 1997 !

M. Jean-Louis Idiart.

C'est la nostalgie du temps de Balladur !

M. Pascal Clément.

Je souhaite que votre gouvernement puisse réunir toute son autorité pour exiger de sa majorité un retour au simple bon sens.

Au-delà du scrutin sénatorial, il y va de l'équilibre de la France, et c'est aussi pour cela qu'il est urgent de prendre cette affaire très au sérieux. Vous avez, pour des raisons partisanes, oublié l'intérêt national.

(Applaudissement sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. Jean-Luc Warsmann.

D'ici à deux ans, on aura tout compris !

Mme la présidente.

La parole est à M. Patrice Carvalho.

M. Patrice Carvalho.

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, après la seconde lecture intervenue au Sénat, le 16 mars dernier, sur le projet de loi relatif à l'élection des sénateurs, un constat s'impose : la droite sénatoriale refuse toute évolution de la Haute Assemblée.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

M. Jean-Luc Warsmann.

C'est faux !

M. Patrice Carvalho.

Un petit courant de démocratisation aurait pu souffler sur cette institution marquée par son immobilisme et son conservatisme, mais une fois encore, la droite se montre réfractaire.

M. Jean-Luc Warsmann.

C'est faux !

M. Patrice Carvalho.

Heureusement, quand il s'agit de débattre d'un problème qui se situe au coeur de la vie démocratique, pour en améliorer les dispositions, nous pouvons, pour surmonter cette obstruction, compter sur la détermination de tous ceux qui veulent donner un coup de fouet à nos institutions.

Le projet de loi visant à modifier le mode de scrutin, tel que le Gouvernement l'a conçu, constitue une amorce de modernisation de l'institution sénatoriale, qui en a tellement besoin...

Le bicamérisme traverse deux siècles de notre histoire institutionnelle.

Si les communistes ont souvent eu à critiquer le Sénat, c'était moins sur le principe de l'existence d'une seconde chambre de réflexion que sur le rôle qu'il a joué ou que l'on a voulu lui faire jouer contre l'expression du suffrage universel direct.

Qu'il s'agisse de son rôle en 1937 pour faire échouer le gouvernement du Front populaire, de son opposition aux réformes des années 80 ou, plus récemment, de son attitude pour faire reculer la parité, le PACS, la limitation du cumul des mandats, les 35 heures, la réforme de la justice, la liste est longue ! Est-ce crédible ? Est-ce cohérent ? Est-ce le reflet de l'aspiration de nos concitoyens ? A l'évidence, non.

On sait que les concepteurs de la Ve République voulaient donner au Sénat un rôle institutionnel d'obstruction.

M. Jean-Luc Warsmann.

Mais c'est faux !

M. Patrice Carvalho.

C'est une vision de la démocratie que nous n'acceptons pas.

La France est-elle une ou multiple ? Y a-t-il deux peuples français, deux suffrages universels, une France plus urbaine, une France plus rurale ? Si au contraire la République est une et indivisible, une seconde assemblée ne peut passer outre la volonté du suffrage universel. Si, dans sa composition, elle ne répond pas à ce qu'est la France, c'est sa légitimité même qui en fait les frais.

M. Jean-Luc Warsmann.

Alors, supprimez le Sénat !

M. Jean-Louis Idiart.

Nous ne sommes pas gaullistes ! (Sourires.)

M. Patrice Carvalho.

Le débat n'est plus le même qu'il y a trente ans. S'agissant d'une assemblée qui vote la loi, même si elle n'a pas le dernier mot, qui participe à la déclaration de guerre, contrôle le gouvernement et peut décider ou non d'une révision constitutionnelle, il va sans dire que sa représentativité pose une grave question.

A l'évidence, le mode de scrutin actuel éloigne toujours plus le Sénat de la France réelle. Alors que tout a bougé dans la vie politique française depuis vingt ans, cette institution reste immuable dans ses composantes, assurant une domination sans partage de la droite et rendant l'alternance impossible.

M. Jean-Luc Warsmann.

Voilà l'aveu !

M. Patrice Carvalho.

Rien d'étonnant, dans ces conditions, à ce que la majorité sénatoriale s'oppose à un quelconque rééquilibrage. Deuxième aveu, mon cher collègue.

M. Jean-Luc Warsmann.

Mais c'est faux ! Elle accepte ce rééquilibrage !

M. Patrice Carvalho.

Le Sénat est en retard. Il est reconnu constitutionnellement comme devant être représentatif des collectivités territoriales, mais son renouvellement par tiers tous les trois ans n'aggrave-t-il pas le décalage entre l'élection sénatoriale et le renouvellement des conseils municipaux et des assemblées territoriales ?

M. Alain Clary.

Remarque pertinente !

M. Patrice Carvalho.

Ne devrait-on pas fixer la durée du mandat des sénateurs à six ans ? Ce serait logique.

D'autre part, le suffrage universel, en France, peut être direct ou indirect, mais constitutionnellement, il devrait toujours être égalitaire. Ce n'est pas le cas aujourd'hui, la représentation des sièges sénatoriaux se fondant sur le recensement de 1975 !

M. Jean-Luc Warsmann.

Ce n'est pas l'objet de la réforme !

M. Patrice Carvalho.

Tenir compte de la poussée d émographique révélée par le dernier recensement conduirait à créer une vingtaine de sièges supplémentaires. Qui pourrait s'opposer, au nom de la démocratie, à des dispositions susceptibles d'entraîner une adéquation entre la représentation sénatoriale et l'évolution démographique ? Une autre distorsion concerne le mode de scrutin, uninominal ici, proportionnel ailleurs.

Nous n'opposons pas la France urbaine à la France rurale, mais une loi électorale doit autant que possible photographier le pays réel et respecter son suffrage.

C'est la raison pour laquelle nous souscrivions pleinement aux dispositions qui conduiraient à appliquer la proportionnelle dans les départements comprenant trois sièges au moins.

M. Alain Clary.

C'est bien.

M. Patrice Carvalho.

D'autre part, si nous sommes pleinement acquis à l'idée d'élargir le corps électoral des grands électeurs par la désignation d'un grand électeur pour 300 habitants, nous ne comprenons pas l'élévation du seuil d'application de la proportionnelle. Nous souhaitons le maintien du seuil fixé par le projet initial, soit 1 000 habitants.

Les dispositions actuelles, que même les partisans du statu quo ne peuvent défendre avec des arguments conventionnels, desservent le Sénat. La démocratie y perd d'autant plus que cette institution participe à l'exercice de la souveraineté nationale.

D'autres mesures pourraient être envisagées pour donner un autre visage à la Chambre haute : augmenter le nombre des sénateurs mais aussi abaisser l'âge à partir duquel on peut le devenir ;...

M. Jean-Luc Warsmann.

Moi, je ne veux pas l'être, alors j'en parle librement ! M. Patrice Carvalho. ... limiter le cumul des mandats à un niveau beaucoup plus restrictif que celui qui résulte des textes a minima que la majorité sénatoriale a imposés ; donner un véritable statut aux élus et rendre applicable la parité le plus vite possible.

En même temps, des conditions de travail différentes pourraient améliorer l'efficacité de la réflexion des deux assemblées. De la même manière, une redéfinition du rôle du Parlement redéfinissant la primauté entre les institutions devrait permettre de revivifier la démocratie et de développer la participation citoyenne.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

Voilà les remarques qu'appelle, à notre avis, ce très opportun projet de loi, que le groupe communiste sera amené à voter après les modifications apportées par notre assemblée, dans le respect de la philosophie du texte gouvernemental. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Emile Blessig.

M. Emile Blessig. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes aujourd'hui réunis pour examiner en deuxième lecture ce texte, qui porte sur le mode d'élection des sénateurs et modifie principalement la composition du collège électoral et les modalités d'élection - le scrutin reste majoritaire dans les départements où l'on élit deux sénateurs et devient proportionnel à partir de trois.

La navette parlementaire, en l'espèce, s'est résumée à une guerre de position :...

M. René Dosière.

Comme en quatorze !

M. Emile Blessig.

... le Sénat, d'un côté ; l'Assemblée de l'autre.

En tout cas, le Sénat avait d'abord balayé les propositions du Gouvernement, puis celles de l'Assemblée. La majorité, aujourd'hui, nous propose de rétablir purement et simplement le texte qu'elle avait adopté en première lecture.

L'Assemblée nationale aura le dernier mot, la majorité et le parti socialiste auront, en dernière analyse, quelques députés, ou plutôt quelques sièges supplémentaires au Sénat. Mais où est passé le débat parlementaire ?

M. Jean-Luc Warsmann.

Très bonne question.

M. Emile Blessig.

Il a été ramené à une confrontation, quelquefois à des calculs arithmétiques, sans échanges, sans dialogue. C'est l'illustration parfaite de ce que ne devrait pas être le bicamérisme. Car, sur le fond, tout le monde est d'accord pour engager une certaine évolution - je dirai même une évolution certaine - de la composition du collège électoral du Sénat.

Mais il faut rappeler que la représentativité du Sénat, en vertu de l'article 24 de la Constitution, est mixte. Elle a deux composantes.

M. Jean-Luc Warsmann.

Tout à fait !

M. Emile Blessig.

Pourquoi s'être focalisé sur la composante démographique en négligeant, en refusant d'examiner la composante territoriale, et également la mission de représentation des étrangers, déjà évoquée à cette tribune ? Pourquoi avoir ainsi restreint le débat ? Je crois que c'est précisément en restreignant le champ d'application du texte que l'on est passé à côté de ce qu'on peut appeler un débat parlementaire pour en arriver à un texte limité, de portée plus politicienne que politique.

En quarante ans, la population française a évolué. Elle a changé en nombre, elle a surtout changé dans sa répartition entre la ville et la campagne. Il était tout à fait logique que l'on tienne compte de ces évolutions. Mais, en quarante ans, le paysage institutionnel de notre pays a a ussi beaucoup évolué, vraisemblablement au moins autant.

Voulons-nous, oui ou non, appliquer la Constitution et doter la France, dans l'intérêt du débat parlementaire, d'une représentation des collectivités territoriales digne d'un pays moderne, qui corresponde au paysage institutionnel de l'an 2000 ?

M. Jean-Luc Warsmann.

Bonne question !

M. Emile Blessig.

Manifestement, ce n'est pas le cas, puisque ce texte continue à se référer exclusivement ou plutôt principalement aux communes, qui désignent environ 97 ou 98 % du corps électoral des délégués sénatoriaux.

Ni l'intercommunalité en tant que telle, ni les communautés d'agglomération, ni les pays ne sont reconnus. La montée en puissance des régions est en quelque sorte niée et, alors qu'ils sont incontournables, les départements n'occupent qu'une place marginale dans la composition du corps électoral. Cela dénote une conception centralisatrice de l'organisation de notre pays.

M. Jean-Luc Warsmann.

Une conception conservatrice !

M. Emile Blessig.

Or, quels que soient les talents au service de l'idée de centralisation et le bénéfice que tirent certains cercles de cette idée, l'avenir est aux réseaux, à la subsidiarité, et nous nous préparons manifestement insuffisamment à cette évolution. Vous auriez pu poser ici le problème.

Notre paysage institutionnel doit se situer dans le contexte national bien sûr ; mais il doit aussi tenir compte de l'évolution de la construction européenne qui intervient sans cesse dans le débat législatif. Nous regrettons que ce texte ait cet aspect politicien. Il aurait pu avoir une autre envergure.

M. Pascal Clément.

Très bien !

M. Emile Blessig.

Le dernier point de mon intervention concerne la situation des sénateurs représentant les Français de l'étranger. Vous vous étiez engagé en première lecture, monsieur le ministre, à nous donner quelques informations. Je considère qu'il s'agit là d'un véritable archaïsme et qu'un examen approfondi s'impose au nom d'une certaine égalité de traitement...

M. René Dosière.

Parfaitement !

M. Emile Blessig.

... et du contrat républicain entre les différents représentants du pays au Parlement.

M. René Dosière.

Au nom de l'éthique aussi !

M. Emile Blessig.

Même si le fait que les Français de l'étranger représentent le monde entier mérite des aménagements, il est clair que la situation actuelle doit être revue.

M. René Dosière.

Tout à fait !

M. Emile Blessig.

J'espère que le Gouvernement s'emploiera à la modifier.

Nous sommes donc passés à côté d'un vrai débat pour des raisons politiciennes. Par ailleurs, le conservatisme n'est le monopole de personne et ce texte est, par essence, profondément conservateur.

M. Jean-Luc Warsmann.

Absolument !

M. Emile Blessig.

On ne touche à rien. Alors qu'on a qualifié le Sénat d'anomalie, on en viendrait presque à conclure que l'anomalie, c'est le nombre insuffisant de sénateurs socialistes !

M. Pascal Clément.

Voilà !

M. Emile Blessig.

Et dès lors que cette anomalie sera réparée, on s'accommodera de l'institution.

M. René Dosière.

Oui, on aurait pu aller plus loin ! M. Emile Blessig Nous aurions effectivement pu aller plus loin...


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

M. René Dosière.

Et faire élire tout le mode à la proportionnelle !

M. Emile Blessig...

en nous attachant à faire de la Haute Assemblée un Sénat moderne, représentant la population dans sa composante démographique, représentant aussi le paysage institutionnel du pays, courroie de transmission entre l'Etat et le comité des régions, sachant que les problèmes qui se posent entre régions, sont de plus en plus nombreux et qu'ils dépassent parfois même le cadre de nos frontières. Voilà pourquoi, monsieur le ministre, le groupe UDF votera sans états d'âme contre votre texte.

M. Jean-Luc Warsmann.

Très bien !

Mme la présidente.

La discussion générale est close.

Discussion des articles

Mme la présidente.

En application de l'article 91, alinéa 9 du règlement, j'appelle maintenant, dans le texte du Sénat, les articles du projet de loi sur lesquels les deux assemblées du Parlement n'ont pu parvenir à un texte identique.

Article 1er A

Mme la présidente.

Le Sénat a supprimé l'article 1er A. M. Dolez, rapporteur, a présenté un amendement, no 1, ainsi libellé :

« Rétablir l'article 1er A dans la rédaction suivante :

« Après l'article L. 52-11-1 du code électoral, il est inséré un article L. 52-11-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 52-11-2. - Pour les élections sénatoriales, il est institué un plafond de dépenses électorales, autres que les dépenses de propagande directement prises en charge par l'Etat, exposées par chaque candidat ou chaque liste de candidats, ou pour leur compte, au cours de l'année précédant le premier jour du mois de l'élection, et ce jusqu'à la date du scrutin.

« Le plafond des dépenses pour l'élection des sénateurs est de 100 000 francs par candidat pour les départements qui ont droit à deux sièges de sénateurs ou moins. Dans les autres départements, ce plafond est de 100 000 francs par liste de candidats.

« Les plafonds sont actualisés tous les trois ans par décret, en fonction de l'indice du coût de la vie de l'Institut national de la statistique et des études économiques.

« A l'exception des articles L. 52-11 et L. 52-11-1 et sous réserve des dispositions des deux premiers alinéas du présent article, les dispositions du chapitre V bis du titre Ier du livre Ier du présent code s'appliquent aux élections sénatoriales. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Marc Dolez, rapporteur.

Cet amendement vise à rétablir le dispositif, adopté par l'Assemblée nationale en première lecture, tendant à étendre aux élections sénatoriales les dispositions du code électoral plafonnant les dépenses de campagne et précisant les modalités de contrôle de ces dépenses. Mon collègue Dosière est intervenu sur cette question tout à l'heure. L'augmentation du nombre de délégués nous paraît justifier ce plafonnement des dépenses. Le Sénat a rejeté ce dispositif pour deux raisons.

La première, c'est que le texte voté par l'Assemblée ne prévoit pas de sanction, c'est-à-dire d'inéligibilité, en cas de dépassement du plafond des dépenses. Pour introduire cette sanction, une loi organique relative au Sénat serait nécessaire. Dans sa logique, la commission serait prête à en envisager l'adoption, mais il faudrait l'accord du Sénat.

La seconde raison pour laquelle le Sénat a refusé ce dispositif, c'est qu'il n'est pas prévu de remboursement des dépenses de campagne par l'Etat. L'article 40 de la Constitution nous interdit, hélas ! d'introduire une telle disposition, qui serait pourtant nécessaire, mais vous avez, monsieur le ministre, la possibilité de prendre une initiative sur ce sujet au nom du Gouvernement.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'intérieur.

Je suis vraiment désolé, monsieur le rapporteur, de ne pas partager votre enthousiasme, mais je dois soumettre à votre appréciation quelques éléments de bon sens.

On pourrait penser utile d'instaurer un système de plafonnement des dépenses électorales pour les élections sénatoriales. Encore faudrait-il que ce système soit adapté.

Or, il faut bien le dire, le calendrier et les caractéristiques des élections sénatoriales se prêtent mal à un plafonnement. La campagne menée au mois de septembre n'a jusqu'ici pas suscité des dépenses telles que leur importance justifierait un plafonnement. La comparaison avec celui appliqué pour les élections législatives n'est pas pertinente, car les élections sénatoriales ne concernent qu'un assez faible nombre d'électeurs par département, même compte tenu de l'augmentation que vous projetez. Le plafond de 100 000 francs prévu par cet amendement paraît très élevé, alors qu'en moyenne le nombre des électeurs sénatoriaux ne dépasse pas 2 000 par département, et son utilité concrète reste, me semble-t-il, à démontrer.

Enfin, l'extension du dispositif de droit commun n'est guère adaptée aux caractéristiques de ce scrutin. Il serait particulièrement difficile, par exemple, d'apprécier pour chaque candidat « les avantages directs ou indirects, les prestations de services et dons en nature dont il a bénéficié » - article L.

52-12 du code électoral - pour une petite élection qui ne concerne, en définitive, qu'un très petit nombre de délégués sénatoriaux.

J'ajoute que l'amendement ne prévoit pas la contrepartie au principe de plafonnement, c'est-à-dire, d'une part, le remboursement forfaitaire par l'Etat d'une partie des dépenses, d'autre part, l'inéligibilité en cas de dépassement du plafond, qui relève de la loi organique. Un tel dispositif serait donc très lourd et, à mon sens, peu adapté. Je le dis avec regret car j'aimerais aller dans votre sens, monsieur le rapporteur, mais en tant que ministre de l'intérieur, je me dois d'être objectif. C'est la raison pour laquelle je ne peux donner d'avis favorable à cet amendement.

Mme la présidente.

La parole est à M. René Dosière.

M. René Dosière.

Je veux bien vous en donner acte, monsieur le ministre, dans sa rédaction actuelle, cet amendement n'est pas satisfaisant. Je souhaite néanmoins qu'il soit maintenu pour que nous puissions, en troisième lecture, soit l'améliorer si nous avons réussi à vous convaincre d'ici là, soit y renoncer.

Cela dit, sur le fond, je ne partage pas votre point de vue, et j'en suis désolé. Selon vous, la nature des campagnes sénatoriales justifierait l'absence de règles de financement. Pourtant, depuis 1982, il y a beaucoup de raisons de s'inquiéter du mode de financement de ces


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

campagnes et de la façon dont elles sont menées. En effet, les sénateurs sont élus par des représentants des petites communes, en général un ou deux par commune, et depuis 1982, les présidents des conseils généraux ont reçu des pouvoirs exécutifs qui les conduisent à distribuer des subventions aux petites communes. La tentation peut dès lors être grande pour un président de conseil général de se présenter au Sénat. Et je ne vois pas comment il pourrait ne pas être élu ! Certes, après l'adoption des amendements de la commission, le nombre des grands électeurs va augmenter et il sera sans doute plus difficile d'obtenir leur faveur à l'occasion de la gestion du budget départemental. Mais le risque subsiste.

J'admets qu'un plafond de 100 000 francs est élevé et qu'il pourrait être abaissé. La réglementation du financement des campagnes a pour objet d'éviter des abus, des dérives. Certes, il faut l'adapter au style propre des élections sénatoriales. Le nombre d'électeurs est en effet limité, mais le prix d'un repas variant entre 300 et 1 000 francs, certaines campagnes peuvent revenir très cher ! (Sourires.)

J'admets donc que l'on puisse émettre des réserves quant à la rédaction, mais sur le fond il n'y a pas de raison de maintenir les sénateurs à l'écart des règles de f inancement des campagnes qui ont représenté un progrès.

J'ajoute - c'est une autre question, mais je n'y reviendrai pas - que l'on pourrait aussi s'interroger sur le mode de financement des campagnes des sénateurs élus par les Français de l'étranger. Je rappelle que quarante voix suffisent pour être élu sénateur des Français de l'étranger pendant neuf ans ! Le rapprochement de ces deux éléments pourrait donner lieu à des développements que je ne me permettrai pas de faire.

Mme la présidente.

La parole est à M. Pascal Clément.

M. Pascal Clément.

Si j'ai bien compris M. Dosière, c ertains de nos collègues souhaitent plafonner les dépenses de campagne pour les élections sénatoriales car ils craignent que des candidats argentés ne reçoivent les grands électeurs dans des restaurants étoilés ! Mais le risque est faible.

Je voudrais vous rappeler ce que notre commission des lois, qui était alors déjà de la même majorité, avait déc idé lors du plafonnement des dépenses de campagne pour les élections cantonales, il y a quelques années. Elle n'avait pas instauré de plafond pour les cantons de moins de 9 000 habitants au motif que celui qui y ferait une campagne trop coûteuse serait sûrement battu parce que cela choquerait tout le monde. Le bon sens prévalait encore un peu alors, ce qui n'est, aujourd'hui, manifestement plus vraiment le cas.

M. René Dosière.

Vous ne pensez pas ce que vous dites !

M. Pascal Clément.

Croyez-le bien, mes chers collègues, le candidat qui inviterait aux meilleures tables du département les grands électeurs par fournées n'aurait pas beaucoup de chances d'être élu, car les grands électeurs sont des gens de bon sens. C'est ma première remarque.

Deuxième remarque, monsieur Dosière, vous venez d'attaquer frontalement les présidents des conseils généraux et je trouve votre argument assez misérable. Un président de conseil général donne, certes, des subventions - il n'est d'ailleurs pas seul, une assemblée décide avec lui - mais, ce faisant, il aide les communes. Or, vous organisez la défaite de ces présidents des conseils généraux avec la surreprésentation des villes et vous leur préférez des maires dont le mérite aura été, non pas de donner des subventions, mais d'être les chefs des partisans.

Croyez-vous que ce soit vraiment mieux ? Autrement dit, vos arguments me paraissent d'une immense pauvreté.

Enfin - ce sera mon troisième et dernier point -, il est indispensable de comprendre que le Parlement doit arrêter de légiférer sans cesse sur ce type de questions. Depuis quelques mois, nous sommes entrés en année préélectorale aux niveaux municipal et cantonal, et, si nous ne la connaissions pas déjà, nous découvrons la jurisprudence récente du Conseil d'Etat. Or, c'est absolument effarant ! Vous ne pouvez plus signer le moindre éditorial comme maire de votre commune ou président de votre département ! L'élection d'un conseiller général d'Ille-et-Vilaine a ainsi dernièrement été annulée parce qu'un membre du cabinet du président - en l'espèce il n'y en avait qu'un d'ailleurs et c'est toujours le cas si je suis bien renseigné -...

M. René Dosière.

Ce n'est pas comme à Paris !

M. Pascal Clément.

... avait proposé à tous ses collègues de procéder au cumul et à la consolidation des subventions qui étaient tombées dans le canton de l'élu en question. A l'époque, la gauche avait refusé et la droite, majoritaire, avait accepté. Eh bien, le Conseil d'Etat, allant très au-delà de la loi que nous avions votée ici il y a de nombreuses années, a annulé l'élection de ce conseiller général parce qu'un membre du cabinet du président venait de rédiger le cumul des subventions du conseiller général dans son propre canton. Maintenant, on ne peut plus rien faire un an avant les élections, donc n'en rajoutez pas ! En raison de l'interprétation extensive que fait la jurisprudence de ce que nous votons ici, il sera bientôt impossible d'exercer un mandat politique un an avant les élections. Je tenais à le dire devant vous, monsieur le ministre de l'intérieur !

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

1. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

En conséquence, l'article 1er est rétabli et se trouve ainsi rédigé : Article 1er

Mme la présidente.

« Art. 1er Dans le dernier alinéa de l'article L.

284 du code électoral, les mots : "des alinéas 2 à 6 de l'article 10 du code de l'administration c ommunale" sont remplacés par les mots : "des articles L.

2113-6 et L.

2113-7 du code général des collectivités territoriales". »

M. Dolez, rapporteur, a présenté un amendement, no 2, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi l'article 1er :

« L'article L.

284 du code électoral est ainsi modifié :

« I. Les six premiers alinéas sont remplacés par les alinéas suivants :

« Les conseils municipaux désignent un nombre de délégués déterminé en fonction de la population des communes, à raison d'un délégué pour 300 habitants ou une fraction de ce nombre.

« Lorsque le nombre de délégués est inférieur ou égal à l'effectif du conseil municipal, les délégués sont élus au sein de ce conseil. Toutefois, lorsqu'en application des articles L.

287 et L.O.

286-1 du


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

code électoral, le conseil municipal n'est pas en mesure d'élire en son sein l'ensemble des délégués, dont le nombre total est arrêté en vertu du premier alinéa, des délégués supplémentaires sont élus pour atteindre ce nombre dans les conditions prévues aux articles L.

288 et L.

289 du présent code.

« Lorsque le nombre de délégués est supérieur à l'effectif du conseil municipal, les membres de ce conseil sont délégués de droit, les autres délégués étant élus dans les conditions fixées à l'article L.

289 du présent code.

« II. Dans le dernier alinéa, les mots : "des alinéas 2 à 6 de l'article 10 du code de l'administration communale" sont remplacés par les mots : "des articles L.

2113-6 et L.

2113-7 du code général des collectivités territoriales". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Marc Dolez, rapporteur.

Cet amendement rétablit les dispositions que nous avions adoptées en première lecture et qui concernent l'élection des délégués municipaux. Il y est proposé que chaque commune désigne un délégué pour 300 habitants, comme je l'ai indiqué tout à l'heure dans mon rapport, le projet de loi n'en prévoyant qu'un pour 500 habitants. La règle que la commission suggère permettra de mieux coller à la réalité démographique sans réduire à la portion congrue les plus petites communes.

M. Jean-Luc Warsmann.

C'est faux !

M. Marc Dolez, rapporteur.

Si le nombre de délégués à désigner est inférieur à l'effectif du conseil municipal, ces délégués seront élus au sein du conseil municipal. Si le nombre de délégués est supérieur à l'effectif du conseil municipal, les conseillers municipaux seront délégués de droit et les autres délégués seront élus en dehors du conseil.

Cet amendement règle aussi le cas où le conseil municipal accueille en son sein des ressortissants de l'Union européenne ou des conseillers généraux, des conseillers régionaux et des députés qui sont déjà ès qualités grands électeurs.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'intérieur.

Le Gouvernement est pris entre deux considérations, monsieur le rapporteur.

S'il est favorable à la fixation du nombre de délégués selon un critère démographique, et c'est un point évidemment essentiel, il constate qu'attribuer un délégué pour 300 habitants au lieu de 500 conduit à augmenter le nombre de délégués trop fortement, comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire.

Par ailleurs, et c'est un autre point de désaccord, en créant l'obligation de désigner les délégués au sein du conseil municipal - obligation qui n'existe pas aujourd'hui dans les communes de moins de 9 000 habitants -, l'amendement complique sérieusement la législation. J'aimerais appeler votre attention sur cette question un peu complexe.

On distinguerait désormais trois sortes de communes.

D'abord, les communes de moins de 2 500 habitants, où les délégués et les suppléants seraient élus au scrutin majoritaire au sein du conseil municipal ; cela ne pose pas trop de problèmes. Ensuite, celles de 2 500 à 8 700 habitants, où l'élection des délégués et des suppléants s'effectuerait à la représentation proportionnelle sur la même liste, mais où seuls les délégués devraient être obligatoirement issus du conseil municipal. Enfin, celles de plus de 8 700 habitants, où les conseillers municipaux seraient délégués de droit et où les délégués s upplémentaires et les suppléants seraient élus à la représenta tion proportionnelle en dehors du conseil municipal.

J'ajoute que votre amendement doit prévoir une élection supplémentaire pour remplacer les conseillers municipaux étrangers de l'Union européenne et les conseillers municipaux qui seraient membres de droit du collège électoral sénatorial au titre d'un autre mandat.

M. Jean-Luc Warsmann.

Comme c'est simple !

M. le ministre de l'intérieur.

On aboutit à un système très compliqué. Dans certains cas d'ailleurs, ce système ne fonctionne pas.

M. Jean-Luc Warsmann.

Absolument !

M. le ministre de l'intérieur.

Il peut y avoir conflit entre la représentation proportionnelle et l'obligation de choisir les délégués au sein du conseil municipal. Si une liste, par exemple, obtient plus de sièges de délégués qu'elle n'a de conseils municipaux, qu'arrivera-t-il ? Des sièges de députés resteront vacants, diminuant ainsi la représentation de la commune dans le collège électoral sénatorial.

C'est un système vraiment très compliqué quand on regarde comment il peut s'appliquer selon les différentes catégories de communes.

C'est la raison pour laquelle je ne peux qu'exprimer des réserves, en espérant que la suite des débats permettra d'aboutir à quelque chose de plus simple.

Mme la présidente.

La parole est à M. Pascal Clément.

M. Pascal Clément.

Je dois reconnaître que je n'ai pas compris grand-chose à l'explication du ministre, qui était très technique. Ce qui est sûr, c'est que nous en sommes à un délégué pour 300 habitants, modification intervenue à l'initiative du groupe socialiste. Très honnêtement, une fois de plus, j'aimerais que la majorité de l'Assemblée nationale retrouve un peu de bon sens.

Avec ce chiffre, un tiers - 35 % au lieu de 8 % - des grands électeurs ne seront pas des élus. Ce seront des partisans. Ainsi, les conseillers municipaux des villes davantage politisés par rapport aux conseillers municipaux du monde rural et qui sont pour la plupart « encartés » vont désigner d'autres militants politiques de leur parti. Voilà ce que vous mettez en place ! Et vous appelez cela la démocratie ? C'est un système strictement partisan, du bas en haut de la pyramide. La Haute Assemblée sera méconnaissable et, je le crains, extrêmement décevante pour la démocratie française.

Mme la présidente.

La parole est à M. René Dosière.

M. René Dosière.

On a parfaitement compris, en écoutant M. Clément, qu'aujourd'hui les grands électeurs sénatoriaux ne font pas de politique, ne sont pas partisans...

M. Pascal Clément.

Ils sont élus !

M. René Dosière.

Le Sénat est une assemblée où l'on fait de la politique ! J'ai même le sentiment que, quelquefois, on en fait trop, ou du moins qu'on y fait de la mauvaise politique...

Monsieur Clément, ne venez pas nous dire que ceux qui seront désignés par le conseil municipal - comme cela existe déjà...

M. Pascal Clément.

La proportion n'est pas la même !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

M. René Dosière.

... même si leur nombre va un peu augmenter - ont moins de qualités et feront preuve de moins de bon sens ou de moins de bon sens politique lorsqu'ils voteront pour les sénateurs que ceux qui se trouvent actuellement dans cette même situation.

En réalité, ce qui vous gêne, c'est que nous passons de un délégué pour 500 habitants à un délégué pour 300 habitants. Inutile de reprendre le débat de la première lecture. Examinez les documents que notre rapporteur a fournis dans son rapport. Vous verrez que ce seuil de 300 habitants assure une représentation plus équilibrée des différentes catégories de communes. En valeur absolue, la représentation des communes rurales ne diminue pas.

M. Jean-Luc Warsmann.

Mais si !

M. Pascal Clément.

Elles sont noyées !

M. René Dosière.

Mais, bien entendu, on augmente celle des villes qui sont plus importantes.

M. Pascal Clément.

C'est hypocrite !

M. René Dosière.

Le corps électoral sénatorial sera modernisé et plus représentatif. Le Sénat lui-même devrait s'en réjouir. Je suis sûr d'ailleurs, qu'au fond d'eux-mêmes, les sénateurs s'en réjouissent...

M. Pascal Clément.

C'est drôle !

M. René Dosière.

L'une des principales critiques que l'on peut aujourd'hui faire au Sénat, c'est précisemment de s'appuyer sur un corps électoral aussi anachronique.

Avec ce texte, ce corps électoral sera sensiblement modernisé.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

2. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

En conséquence, l'article 1er est ainsi rédigé.

Article 1er bis A

Mme la présidente.

Le Sénat a supprimé l'article 1er bis A. M. Dolez, rapporteur, a présenté un amendement, no 3, ainsi libellé :

« Rétablir l'article 1er bis A dans la rédaction suivante :

« La dernière phrase de l'article L. 286 du même code est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :

« Il est augmenté de un par cinq titulaires ou fraction de cinq. Dans les communes visées au chapitre II du titre IV du livre Ier du présent code, les suppléants sont élus au sein du conseil municipal. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Marc Dolez, rapporteur.

Cet amendement vise, là encore, à rétablir le texte adopté en première lecture. Il concerne la réduction du nombre de suppléants pour tenir compte de l'accroissement du nombre de délégués.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'intérieur.

Sagesse.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

3. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

En conséquence, l'article 1er bis A est rétabli et se trouve ainsi rédigé.

Article 1er bis B

Mme la présidente.

Le Sénat a supprimé l'article 1er bis B. M. Dolez, rapporteur, a présenté un amendement, no 4, ainsi libellé :

« Rétablir l'article 1er bis B dans la rédaction suivante :

« Le premier alinéa de l'article L. 287 du même code est ainsi rédigé :

« Les députés, les conseillers régionaux, les conseillers à l'Assemblée de Corse et les conseillers généraux ne peuvent être désignés délégués, élus ou de droit, par les conseils municipaux dans lesquels ils siègent. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Marc Dolez, rapporteur.

Cet amendement vise un cas de figure que j'ai évoqué tout à l'heure : celui des conseillers municipaux qui sont déjà grands électeurs au titre d'un autre mandat.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'intérieur.

Réserve, en cohérence avec l'amendement no

2.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

4. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

En conséquence, l'article 1er bis B est rétabli et se trouve ainsi rédigé.

Article 1er bis

Mme la présidente.

« Art. 1er bis. - Le second alinéa de l'article L. 285 du même code est ainsi rédigé :

« En outre, dans ces communes, les conseils municipaux élisent des délégués supplémentaires à raison de 1 pour 700 habitants en sus de 9 000. »

M. Dolez, rapporteur, a présenté un amendement, no 5, ainsi rédigé :

« Supprimer l'article 1er bis. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Marc Dolez, rapporteur.

Le dispositif rétabli par le Sénat en deuxième lecture nous semble incompatible avec l'économie du projet de loi.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'intérieur.

Cet amendement supprime heureusement une disposition introduite par le Sénat, qui maintenait le seuil de 9 000 habitants. Avis favorable du Gouvernement.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

5. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

En conséquence, l'article 1er bis est supprimé.

Article 2

Mme la présidente.

« Art. 2. L'article L.

288 du même code est ainsi modifié :

« 1o Dans le premier alinéa, les mots : "à l'article 27 du code de l'administration communale" sont remplacés


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

par les mots : "aux articles L.

2121-20 et L.

2121-21 du code général des collectivités territoriales" ;

« 2o Après le premier alinéa de cet article, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les délégués et les suppléants sont élus au sein du conseil municipal. »

M. Dolez, rapporteur, a présenté un amendement, no 6, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi l'article 2 :

« L'article L.

288 du même code est ainsi rédigé :

« Art. L.

288. - Dans les communes visées au chapitre II du titre IV du livre Ier du présent code, l'élection des délégués et celle des suppléants se déroulent séparément dans les conditions suivantes.

Le vote a lieu au scrutin secret majoritaire à deux tours. Nul n'est élu délégué ou suppléant au premier tour s'il n'a réuni la majorité absolue des suffrages exprimés. Au second tour, la majorité relative suffit. En cas d'égalité des suffrages, le candidat le plus âgé est élu.

« Les candidats peuvent se présenter soit isolément, soit sur une liste qui peut ne pas être complète. Les adjonctions et les suppressions de noms sont autorisées.

« Un conseiller municipal empêché d'assister à la séance au cours de laquelle sont élus les délégués et les suppléants peut donner à un autre conseiller municipal de son choix pouvoir écrit de voter en son nom. Un même conseiller ne peut être porteur que d'un seul pouvoir qui est toujours révocable.

« L'ordre des suppléants est déterminé par le nombre de voix obtenues. En cas d'égalité de suffrages, la préséance appartient au plus âgé. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Marc Dolez, rapporteur.

Cet amendement concerne l'élection des délégués dans les communes qui comptent actuellement moins de 3 500 habitants. Il prévoit que l'élection des délégués aura lieu au scrutin majoritaire. Ce seuil de 3 500 permet de tenir compte du mode d'élection des conseils municipaux.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'intérieur.

Favorable.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

6. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

En conséquence, l'article 2 est ainsi rédigé.

Article 3

Mme la présidente.

« Art. 3. L'article L.

289 du même code est ainsi modifié :

« 1o Le début du premier alinéa est ainsi rédigé : "dans les communes de 9 000 habitants et plus, l'élection des délégués et des suppléants a lieu sur la même liste... (Le reste sans changement.)" ;

« 2o Le dernier alinéa est ainsi rédigé : « le vote par procuration est admis dans les conditions fixées par le premier alinéa de l'article L.

2121-20 du code général des collectivités territoriales. »

M. Dolez, rapporteur, a présenté un amendement no 7, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi l'article 3 :

« L'article L.

289 du même code est ainsi modifié :

« 1o Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« Dans les communes visées au chapitre III du titre IV du livre Ier du présent code, l'élection des délégués et des suppléants a lieu sur la même liste suivant le système de la représentation proportionnelle avec application de la règle de la plus forte moyenne, sans panachage ni vote préférentiel. Les listes peuvent comprendre un nombre de noms inférieur au nombre de sièges de délégués et de suppléants à pourvoir. »

« 2o Le dernier alinéa est ainsi rédigé :

« Un conseiller municipal empêché d'assister à la séance au cours de laquelle sont élus les délégués et les suppléants peut donner à un autre conseiller municipal de son choix pouvoir écrit de voter en son nom. Un même conseiller municipal ne peut être porteur que d'un seul pouvoir qui est toujours révocable. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Marc Dolez, rapporteur.

Cet amendement vise logiquement le cas des délégués dans les communes de plus de 3 500 habitants et prévoit, pour leur élection, la représentation proportionnelle.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'intérieur.

Favorable.

Mme la présidente.

La parole est à M. René Dosière.

M. René Dosière.

Si ce seuil électoral était, dans un autre texte en cours de discussion, abaissé à 2 500 habitants, il nous faudrait l'abaisser également dans ce texte lors de la troisième lecture.

Mme la présidente.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Marc Dolez, rapporteur.

Bien sûr ! C'est d'ailleurs le sens de cette disposition adoptée en première lecture.

Nous avions alors déjà apporté cette précision.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

7. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

En conséquence, l'article 3 est ainsi rédigé.

Après l'article 4

Mme la présidente.

M. Dolez, rapporteur, et M. Derosier ont présenté un amendement, no 8 rectifié, ainsi libellé :

« Après l'article 4, insérer l'article suivant :

« L'article L. 290-1 du même code est ainsi rédigé :

« Art. L.

290-1. Les communes associées, créées en application des dispositions de l'article L. 2113-11 d u code général des collectivités territoriales, conservent un nombre de délégués égal à celui auquel elles auraient eu droit en l'absence de fusion.

Ces délégués sont désignés par le conseil municipal de la commune issue de la fusion parmi les conseillers municipaux élus dans la section électorale correspondante ou parmi les électeurs de cette sec-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

tion dans les conditions fixées au présent titre.

Néanmoins lorsqu'il existe un conseil consultatif, les délégués de la commune associée sont désignés en son sein. Lorsque le nombre de délégués de la commune associée est supérieur à l'effectif du conseil consultatif, les membres de ce conseil sont délégués de droit, les autres délégués étant élus parmi les électeurs de la commune associée. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Marc Dolez, rapporteur.

Cet amendement, déposé par notre collègue Derosier, a été repris par la commission. Il vise à étendre le dispositif du projet de loi en l'adaptant aux communes associées. Les délégués seront é lus parmi les conseillers municipaux élus dans la commune associée. S'il existe un conseil consultatif, ce qui n'est pas toujours le cas, les délégués seront désignés soit en son sein, soit parmi les électeurs de la commune associée si le nombre de délégués est supérieur à l'effec tif du conseil consultatif.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'intérieur.

Cet amendement s'expose aux mêmes critiques que celles que j'ai présentées à propos de l'amendement no 2. J'observe qu'il ne prévoit pas non plus de dispositif de remplacement des membres du conseil consultatif lorsque l'un d'entre eux exerce un autre mandat : conseiller général, conseiller régional ou député. L'avis du Gouvernement reste réservé.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 8 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Article 5

Mme la présidente.

« Art. 5. Le premier alinéa de l'article L. 294 du même code est ainsi rédigé :

« Dans les départements qui ont droit à trois sièges de sénateurs ou moins, l'élection a lieu au scrutin majoritaire à deux tours. »

M. Dolez, rapporteur, a présenté un amendement, no 9, ainsi rédigé :

« Dans le dernier alinéa de l'article 5, substituer au mot : "trois" le mot : "deux". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Marc Dolez, rapporteur.

Cet amendement rétablit le dispositif proposé par le Gouvernement et voté par l'Assemblée nationale en première lecture aux termes duquel l'élection des sénateurs a lieu au scrutin majoritaire dans les départements élisant un ou deux sénateurs.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'intérieur.

Favorable. Cet amendement est essentiel.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

9. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'article 5, modifié par l'amendement no

9. (L'article 5, ainsi modifié, est adopté.)

Article 6

Mme la présidente.

« Art. 6. Le premier alinéa de l'article L. 295 du même code est ainsi rédigé :

« Dans les départements qui ont droit à quatre sièges de sénateurs ou plus, l'élection a lieu à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne, sans panachage ni vote préférentiel. »

M. Dolez, rapporteur, a présenté un amendement, no 9, ainsi rédigé :

« Dans le dernier alinéa de l'article 5, substituer au mot : "quatre" le mot : "trois". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Marc Dolez, rapporteur.

Cet amendement propose également un retour au texte que nous avons voté en première lecture. Il vise à instaurer le scrutin proportionnel pour les départements élisant trois sénateurs ou plus.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'intérieur.

Le Gouvernement y est favorable, puisque ce texte rétablit le projet de loi du Gouvernement.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

10. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'article 6, modifié par l'amendement no

10. (L'article 6, ainsi modifié, est adopté.)

Article 14

Mme la présidente.

« Art. 14. - Il est inséré, dans le chapitre V du titre Ier du livre III du code électoral, après l'article L.

334-3, un article L.

334-3-1 ainsi rédigé :

« Art. L.

334-3-1. - Pour l'application à Saint-Pierreet-Miquelon des articles L.

288 (premier alinéa), L.

289 (dernier alinéa) et L.

290 du code électoral, il y a lieu de lire :

« 1o "par l'article L.

121-12 du code des communes a pplicable localement" au lieu de : "aux articles

L. 2121-20 et L.

2121-21 du code général des collectivités territoriales" ;

« 2o "le deuxième alinéa de l'article L.

121-12 du code des communes applicable localement" au lieu de : "le premier alinéa de l'article L.

2121-20 du code général des collectivités territoriales".

« 3o "de l'article L.

121-5 du code des communes applicable localement" au lieu de : "des articles L.

2121-35 et L.

2121-36 du code général des collectivités territoriales".

Le dernier alinéa de l'article L.

284 du présent code n'est pas applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon. »

M. Dolez, rapporteur, a présenté un amendement, no 11 rectifié, ainsi rédigé :

« Dans le premier alinéa du texte proposé pour l'article L.

334-3-1 du code électoral, substituer aux mots : "des articles L.

288 (premier alinéa), L.

289 (dernier alinéa) et", les mots : "de l'article". »

Monsieur le rapporteur, je vous suggère de défendre en même temps l'amendement no 12 rectifié.

M. Marc Dolez, rapporteur.

Volontiers !

Mme la présidente.

L'amendement no 12 rectifié, présenté par M. Dolez, rapporteur, est ainsi rédigé :

« Supprimer les deuxième (1o ) et troisième (2o ) alinéas du texte proposé pour l'article L.

334-3-1 du code électoral. »

Vous avez la parole, monsieur le rapporteur.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

M. Marc Dolez, rapporteur.

Il s'agit là d'amendements de coordination.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'intérieur.

Favorable.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 11 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 12 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'article 14, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 14, ainsi modifié, est adopté.)

Article 15

Mme la présidente.

« Art. 15. Il est inséré, dans le chapitre V du titre II du livre III du code électoral, après l'article L.

334-15, un article L.

334-15-1 ainsi rédigé :

« Art. L.

334-15-1. Pour l'application à Mayotte des articles L.

284 (dernier alinéa), L.

288 (premier alinéa),

L. 289 (dernier alinéa) et L.

290 du code électoral, il y a lieu de lire :

« 1o "des articles L.

112-6 et L.

112-7 du code des communes applicable localement" au lieu de : "aux articles L.

2113-6 et L.

2113-7 du code général des collectivités territoriales" ;

« 2o "par l'article L.

121-12 du code des communes a pplicable localement" au lieu de : "aux articles

L. 2121-20 et L.

2121-21 du code général des collectivités territoriales" ;

« 3o "le deuxième alinéa de l'article L.

121-12 du code des communes applicable localement" au lieu de : "le premier alinéa de l'article L. 2121-20 du code général des collectivités territoriales" ;

« 4o "de l'article L.

121-5 du code des communes a pplicable localement" au lieu de : "des articles

L. 2121-35 et L.

2121-36 du code général des collectivités territoriales". »

M. Dolez, rapporteur, a présenté deux amendements, nos 13 et 14, qui peuvent faire l'objet d'une présentation commune.

L'amendement no 13 est ainsi rédigé :

« Dans le premier alinéa du texte proposé pour l'article L.

334-15-1 du code électoral, supprimer les mots : " , L.

288 (premier alinéa), L.

289 (dernier alinéa)". »

La parole est à M. le rapporteur.

L'amendement no 14 est ainsi rédigé :

« Supprimer les troisième (2o ) et avant-dernier (3o)

alinéas du texte proposé pour l'article L.

334-15-1 du code électoral. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Marc Dolez, rapporteur.

Il s'agit, là encore, d'amendements de coordination.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'intérieur.

Favorable.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

13. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

14. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'article 15, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 15, ainsi modifié, est adopté.)

Article 15 bis

Mme la présidente.

« Art. 15 bis L'article 16 de la loi no 85-691 du 10 juillet 1985 relative à l'élection des députés et des sénateurs dans les territoires d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie est ainsi rédigé :

« Art. 16. Les dispositions du titre III, des chapitres Ier et IV à VII du titre IV et celles du titre VI du livre II du code électoral, à l'exception de l'article L.

301, sont applicables à l'élection des sénateurs en Polynésie française, à Wallis-et-Futuna et en Nouvelle-Calédonie, sous réserve des dispositions prévues aux articles 3, 4, 4-1 et 6 de la présente loi. »

Je mets aux voix l'article 15 bis

(L'article 15 bis est adopté.)

Article 16

Mme la présidente.

« Art. 16. La loi no 85-691 du 10 juillet 1985 précitée est ainsi modifiée :

« I. Il est inséré, après l'article 16, deux articles 16-1 et 16-2 ainsi rédigés :

« Art. 16-1 Pour l'application en Polynésie française des articles L.

284 (dernier alinéa), L.

288 (premier alinéa), L.

289 (dernier alinéa) et L.

290 du code électoral, il y a lieu de lire :

« 1o "des articles L.

112-6 et L.

112-7 du code des communes applicable localement" au lieu de : "des articles L.

2113-6 et L.

2113-7 du code général des collectivités territoriales" ; 2o "l'article L.

121-12 du code des communes applicable localement" au lieu de : "aux articles L.

2121-20 et 2121-21 du code général des collectivités territoriales" ; 3o "le deuxième alinéa de l'article L.

121-12 du code des communes applicable localement" au lieu : "le premier alinéa de l'article L.

2121-20 du code général des collectivités territoriales" ; 4o "l'article L.

121-5 du code des communes applicable localement" au lieu de : "des articles L.

2121-35 et

L. 2121-36 du code général des collectivités territoriales".

« Art. 16-2 Pour l'application en Nouvelle-Calédonie de la présente loi, il y a lieu de lire :

« 1o "des articles L.

112-6 et L.

112-7 du code des communes de la Nouvelle-Calédonie" au lieu de : "des articles L.

2113-6 et L.

2113-7 du code général des collectivités territoriales" ;

« 2o "l'article L.

121-12 du code des communes de la Nouvelle-Calédonie" au lieu de : "aux articles L.

2121-20 et 2121-21 du code général des collectivités territoriales" ;

« 3o "le deuxième alinéa de l'article L.

121-12 du code des communes de la Nouvelle-Calédonie" au lieu de : "le premier alinéa de l'article L.

2121-20 du code général des collectivités territoriales" ;

« 4o "l'article L.

121-5 du code des communes de la Nouvelle-Calédonie" au lieu de : "des articles L.

2121-35 et L.

2121-36 du code général des collectivités territoriales" ».


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

« II. Non modifié »

M. Dolez, rapporteur, a présenté trois amendements nos 15, 16 et 17, qui peuvent faire l'objet d'une présentation commune.

L'amendement no 15 est ainsi rédigé :

« Dans le deuxième alinéa (art. 16-1) du I de l'article 16, supprimer les mots : "L.

288 (premier alinéa), L.

289 (dernier alinéa)". »

L'amendement no 16 est ainsi rédigé :

« Supprimer les quatrième (2o ) et cinquième (3o)

alinéas du I de l'article 16. »

L'amendement no 17 est ainsi rédigé :

« Supprimer les neuvième (2o ) et avant-dernier (3o ) alinéas du I de l'article 16. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Marc Dolez, rapporteur.

Ce sont, tous trois, des amendements de coordination.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'intérieur.

Favorable.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

15. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

16. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

17. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'article 16, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 16, ainsi modifié, est adopté.)

Article 18

Mme la présidente.

« Art. 18. - L'article 3 de la loi no 66-504 du 12 juillet 1966 portant modification des dispositions du code électoral relatives à l'élection des sénateurs est abrogé. »

M. Dolez, rapporteur, a présenté deux amendements, nos 18 et 19, qui peuvent faire l'objet d'une présentation commune.

L'amendement no 18 est ainsi rédigé :

« Au début de l'article 18, insérer le paragraphe suivant :

« I. - L'article L.

285 et le deuxième alinéa de l'article L.

287 du code électoral sont abrogés. »

L'amendement no 19 est ainsi rédigé :

« Compléter l'article 18 par le paragraphe suivant :

« III. - Le deuxième alinéa de l'article 20 de la loi no 85-691 du 10 juillet 1985 précitée est supprimé. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Marc Dolez, rapporteur.

Ces amendements proposent de rétablir le dispositif initial du projet de loi.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'intérieur.

Le Gouvernement ne peut qu'y être favorable.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

18. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

19. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'article 18, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 18, ainsi modifié, est adopté.)

Vote sur l'ensemble

Mme la présidente.

Je ne suis saisie d'aucune demande d'explication de vote.

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(L'ensemble du projet de loi est adopté.)

5 CANDIDATURES MULTIPLES AUX E

LECTIONS CANTONALES Discussion d'une proposition de loi adoptée par le Sénat

Mme la présidente.

L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, interdisant les candidatures multiples aux élections cantonales (nos 1948, 2219).

La parole est à M. le ministre de l'intérieur.

M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur.

Madame la présidente, mesdames, messieurs les députés, le Sénat a adopté le 23 novembre 1999, à l'initiative de M. Dreyfus-Schmidt et de M. Joly, une proposition de loi tendant à interdire les candidatures multiples aux élections cantonales. C'est cette proposition qui vous est soumise aujourd'hui.

Le Gouvernement a en effet inscrit ce texte d'origine parlementaire à votre ordre du jour prioritaire. C'est dire qu'il approuve les deux objets de la proposition de loi du Sénat : interdire aux élections cantonales, comme aux autres élections, les candidature multiples ; résoudre les difficultés apparues en cas de fusion de cantons n'appartenant pas à la même série de renouvellement.

Le code électoral interdit aujourd'hui les candidatures multiples à toutes les élections - on se souvient que le général Boulanger avait été élu dans de très nombreuses circonscriptions - sauf aux élections cantonales et aux élections municipales dans les communes de moins de 3 500 habitants. Dans ces petites communes, il n'y a pas d'interdiction possible puisqu'il n'y a pas d'acte de candidature formel et obligatoire. Il en va différemment des élections cantonales.

Jusqu'à ces dernières années, ces différences de traitement entre scrutins pour les dépôts de candidature n'ont pas posé de véritable problème : benign neglect, disent les Anglo-Saxons. Comme la simple symétrie des dispositions du code électoral entre les différents scrutins ne justifiait pas à elle seule de légiférer, le Gouvernement n'aurait pas été favorable à une évolution de la législation en la matière si des éléments nouveaux n'étaient intervenus dans la période récente.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

En premier lieu, depuis la loi de 1990 sur le financement public des campagnes, les candidats aux élections cantonales, dans les cantons de 9 000 habitants et plus, peuvent recevoir des dons, déductibles des revenus des donateurs, et doivent rendre un compte de campagne.

Depuis la loi du 19 janvier 1995, les dépenses électorales de ces mêmes candidats font l'objet d'un remboursement forfaitaire par l'Etat, égal à 50 % du plafond prévu par la loi.

En second lieu, la même loi de 1995 a supprimé l'obligation de déposer un cautionnement lors du dépôt des candidatures aux différents scrutins, y compris aux élections cantonales. Cette évolution législative va dans le sens d'une plus grande facilité accordée aux candidats et justifie, pour maintenir le sérieux des candidatures, l'adoption de mesures complémentaires interdisant les candidatures multiples.

Faute de telles mesures, on a assisté, lors des dernières élections cantonales, à des initiatives individuelles dont le développement - c'est le moins qu'on puisse dire - pouvait avoir des conséquences fâcheuses. On a ainsi constaté le dépôt de candidatures simultanées d'une seule personne dans tous les cantons renouvelables d'un même département - qui n'était pas le territoire de Belfort, je tiens à le préciser. (Sourires.) On a vu aussi des dépôts de candidatures de la même personne dans deux départements. Au total, quarante-trois personnes se sont présentées dans plusieurs cantons en 1998 et ces candidatures ont concerné 221 cantons, ce qui n'est pas négligeable.

Le trouble reste, certes, limité, mais les nouvelles règles de financement public des campagnes électorales pourraient encourager le développement de tels comportements, qui sont de nature à générer la confusion. Mieux vaut y mettre un terme avant que cela ne se produise.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est favorable à l'interdiction des candidatures multiples aux élections cantonales comme aux autres élections.

Au point de vue technique, le dispositif me paraît satisfaisant. Les candidatures multiples seront, comme pour les autres élections, détectées lors de l'enregistrement des candidatures à la préfecture. Les préfets refuseront l'enregistrement de la candidature d'une personne qui s'est déjà présentée dans un autre canton. Encore une extension du pouvoir des préfets, me direz-vous. En fait, dans la seconde hypothèse, c'est-à-dire en cas de dépôt d'une même candidature dans plusieurs départements, c'est tout simplement le traitement informatique des candidatures qui permettra d'informer les préfets, comme cela se fait d'ores et déjà pour les élections législatives.

C'est donc, au total, une amélioration qui est apportée au code électoral par la proposition de loi.

L'article 2 du texte qui vous est soumis provient d'un amendement adopté par le Sénat au texte initial de la proposition de loi de M. Dreyfus-Schmidt et de M. Joly, afin de résoudre des difficultés apparues à l'occasion de fusions de cantons, lorsque les deux cantons fusionnés appartiennent à des séries de renouvellement différentes.

La combinaison des textes actuels et la jurisprudence du Conseil d'Etat conduisent à ce que l'on considère que le canton dont le renouvellement est le plus tardif absorbe celui dont le renouvellement se présente le plus immédiatement. Ainsi, la fusion de deux cantons renouvelables l'un en 2001, l'autre en 2004, conduit à ce que le nouveau canton issu de la fusion ne soit renouvelé qu'en 2004 et soit représenté jusque-là par le conseiller général renouvelable en 2004.

Cette solution n'est pas satisfaisante car elle ne tient pas compte de la taille des cantons. En effet, un petit canton peut être considéré comme « absorbant » un gros canton. Dans ce cas, les électeurs de ce dernier sont empêchés de s'exprimer à l'issue du mandat de leur conseiller général puisqu'ils sont représentés pendant les trois ans qui restent à courir par le conseiller général du canton dont le renouvellement intervient le plus tard.

Il fallait toute la perspicacité des sénateurs pour percevoir la faille qui s'était introduite dans le système à la faveur de nos règles et de la jurisprudence du Conseil d'Etat. J'ajoute que, dans ce cas, le conseiller général du canton le plus important voit son mandat cesser en 2001, mais doit attendre 2004 pour se présenter à nouveau devant les électeurs, ce qui est peu démocratique et peut frustrer certains conseillers généraux qui se trouveraient ainsi privés de mandat.

La solution de la proposition de loi, complétée à juste titre par le Sénat, est préférable puisqu'elle fait trancher les électeurs le plus tôt possible, c'est-à-dire avec la série dont le renouvellement est le plus proche.

Le problème qui se pose alors est celui du sort du mandat du conseiller général du canton appartenant à la série non renouvelable, qui n'a exercé qu'un mandat de trois ans lors de l'élection - celui, dans mon exemple, qui ne serait pas renouvelable en 2001 - alors que le premier alinéa de l'article L. 192 du code électoral prévoit que les conseillers généraux sont élus pour six ans. Que se passera-t-il en pareil cas ? Votre commission des lois, comme le Sénat, propose de lui permettre de terminer son mandat initial, c'est-à-dire de le conserver jusqu'en 2004.

Le maintien du mandat du conseiller général devenu surnuméraire constitue une exception temporaire à la règle selon laquelle chaque conseiller général est l'élu d'un canton. Cet assouplissement sera utile pour faciliter les remodelages cantonaux futurs en rendant moins difficiles les suppressions de cantons devenus trop peu peuplés.

Le Gouvernement est donc, comme la commission des lois, favorable à l'ensemble de la proposition de loi ainsi amendée. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Jacky Darne, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

M. Jacky Darne, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

Monsieur le ministre, j'ai été impressionné par votre intervention très détaillée sur une proposition de loi qui ne comporte que quelques lignes et qui a pour objet de remédier à une bizarrerie, car personne, parmi nous, ne savait qu'il était possible d'être candidat simultanément dans plusieurs cantons.

M. René Dosière.

Je crois même ne pas l'avoir signalé dans mon ouvrage.

M. Jacky Darne, rapporteur.

Vous ne manquerez pas de le faire dans la prochaine édition. (Sourires.)

M. René Dosière. Dès septembre, en effet. (Sourires.)

M. Jacky Darne, rapporteur.

Il y a eu néanmoins quelques candidatures multiples. C'est une survivance du

XIXe siècle.

M. René Dosière. Comme le Sénat !

M. Jacky Darne, rapporteur.

Il y en a d'autres ! M. Jean-Luc Warsmann. Le socialisme ?...


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

M. Jacky Darne, rapporteur.

Le Sénat a adopté une proposition de loi pour mettre fin à cette bizarrerie.

Comment ne pas le suivre ? Les candidatures multiples déposées lors des élections de 1992 à aujourd'hui ne présentaient pas - vous l'avez dit, monsieur le ministre - les risques de celles du

XIXe siècle. Vous avez cité le cas du général Boulanger.

Nous l'avons noté aussi dans le rapport, puisque c'est une référence dans l'histoire électorale de la République.

Pour les élections cantonales, les statistiques s'établissent comme suit : 35 candidatures multiples en 1992 ; 49 en 1994 et 39 aux élections de 1998, mais qui concernaient 203 cantons. Ces chiffres, s'ils ne sont pas très élevés, justifient néanmoins l'intervention du législateur.

Les élections cantonales ne sont pas les seules où les candidatures multiples soient possibles. C'est également le cas pour les élections municipales dans les communes de moins de 3 500 habitants. Il n'est pas nécessaire d'y faire acte de candidature et on peut donc être candidat dans plusieurs de ces communes, pour autant que l'on respecte les autres règles d'éligibilité.

L'évolution des modalités du financement des partis, en particulier la possibilité de recevoir des dons - je passerai sur la suppression du cautionnement -, justifie également que l'on légifère aujourd'hui.

Le dispositif proposé par le Sénat est assez simple et vous nous avez garanti, de surcroît, monsieur le ministre, que les moyens informatiques permettraient de l'appliquer aisément dans les préfectures.

Le premier alinéa de l'article 1er pose le principe de l'interdiction des candidatures multiples aux élections cantonales dans des termes similaires à ceux qui figurent dans le code électoral pour les élections législatives. Le second alinéa précise que le préfet refusera l'enregistrement de la candidature d'une personne qui se serait déjà portée candidate dans un autre canton.

L'article 2 de la proposition de loi ne s'appliquera pas non plus très fréquemment puisqu'il concerne les fusions de cantons et les conséquences qu'il faut en tirer pour les conseillers généraux élus lorsque les dates de renouvellement des deux conseils généraux sont différents. Le problème ne se pose pas, en effet, lorsque les deux cantons appartiennent à la même série de renouvellement : l'élection a lieu dans le canton résultant de la fusion et un nouveau conseiller général est élu.

Le Conseil d'Etat a tranché en 1985. Il a considéré que lorsqu'on est élu pour six ans, on doit rester élu pour six ans, et que le renouvellement devait donc avoir lieu à la date la plus éloignée. En conséquence, dans le régime actuel, le conseiller général dont le mandat est renouvelable le plus tôt ne peut pas se représenter au terme de son mandat et doit attendre pendant trois ans que l'élection soit organisée dans le canton résultant de la fusion.

Le dispositif proposé par le Sénat est simple. L'élection a lieu au premier renouvellement. Les deux conseillers généraux peuvent y être candidats et celui qui est battu - c'est une fleur qu'on lui fait - peut néanmoins conserver son siège jusqu'à la fin de son mandat. Ainsi, le conseiller général battu dans le nouveau canton pourra continuer de représenter un canton qui n'existe plus.

Cette disposition, bien qu'étonnante, est néanmoins meilleure que celle retenue par le Conseil d'Etat parce qu'elle facilite la fusion des cantons. Elle permet aussi aux conseillers généraux de ne pas être privés de trois ans de mandat alors qu'ils ont été élus pour six.

On ne peut donc que soutenir cette proposition. Le Sénat contribue ainsi, sinon à moderniser notre vie politique, du moins à rendre plus aisée la fusion de cantons, opération trop rare et qu'il convient de favoriser. Nombreux, en effet, sont les tout petits cantons, et si on pouvait en fusionner davantage, il est probable qu'en termes de représentativité des conseillers généraux, on ferait un pas vers plus d'équité.

Enfin, j'aurai l'occasion de présenter, lors de la discussion des articles, deux amendements qui viennent compléter la proposition de loi et qui ont également pour objet d'améliorer le fonctionnement des collectivités locales.

Discussion générale

Mme la présidente.

Dans la discussion générale, la parole est à M. Patrice Carvalho.

M. Patrice Carvalho. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui vise deux objectifs : d'une part, interdire les candidatures multiples aux élections cantonales et, d'autre part, éclaircir les règles électorales applicables en cas de fusion de deux cantons qui n'appartiennent pas à la même série de renouvellement.

J'indique d'emblée que les députés communistes voteront ces dispositions qui contribueront sans aucun doute à rompre avec des pratiques qui brouillaient les enjeux de l'élection et conduisaient les électeurs à s'interroger sérieusement.

Les chiffres révélés dans le rapport de notre collègue Jacky Darne montrent que le phénomène des candidatures multiples ne se situe pas à la marge et qu'il était temps de légiférer. Pour ne prendre que le dernier exemple, comment accepter qu'en 1998 trente-neuf personnes aient été candidates dans plus d'un canton, certaines même n'hésitant pas à se présenter dans douze, quinze, vingt-sept ou vingt-huit cantons simultanément ? C'est la démocratie qui est ainsi en cause.

Le Gouvernement considère que cette tendance pourrait encore se renforcer du fait de l'évolution de la législation en matière de financement de la vie politique, qui est de nature à faciliter les candidatures en limitant les obstacles matériels. Je crois que nous devons aller au-delà de cette réflexion, même si votre analyse, monsieur le ministre, est pertinente.

En une semaine, en effet, c'est la seconde fois que nous abordons la question des élections cantonales pour en dénoncer les dysfonctionnements. Jeudi dernier, mon amie Muguette Jacquaint est intervenue sur le projet de loi relatif à la parité, en déplorant, comme elle l'avait fait en première lecture, la situation de blocage où nous nous trouvons dans notre recherche d'une solution permettant de tendre à une juste représentation des femmes dans les conseils généraux. Je ne rappelle pas les chiffres actuels.

Le bilan est affligeant.

Aucune mesure contraignante n'a pu être trouvée, ni en termes de recevabilité des candidatures, ni en termes de pénalisation financière. Cette seconde hypothèse a certes été retenue pour les élections législatives, mais, dans la mesure où aucune obligation de résultat n'est imposée, le risque est grand que le nombre de femmes élues dans de cet hémicycle reste du même ordre. Aussi louables que soient les décisions prises, il se peut qu'elles ne suffisent pas à inverser la tendance.

La question du mode de scrutin est essentielle et nous regrettons vivement qu'elle ait si peu retenu l'attention.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

Comme l'attestent les faits, le scrutin de liste permettrait, le plus simplement du monde, d'atteindre l'objectif visé.

Certes, le débat sur la proportionnelle est au moins centenaire. On reproche en France à ce mode de scrutin de ne pas dégager de majorité et de favoriser l'émiettement des partis. Mais peut-on accuser un mode de scrutin de ne pas résoudre en lui-même les problèmes d'alliance politiques qui se posent dans un pays comme le nôtre, où aucun parti ne peut obtenir seul la majorité ? Notre attachement au scrutin proportionnel vise à établir dans toutes les assemblées, y compris à l'Assemblée nationale, une représentation aussi équitable que possible de la volonté des électeurs, car il est le plus respectueux du choix de nos concitoyens. Donner à chacune et à chacun le droit d'être réellement et équitablement représenté dans les diverses instances de la vie politique du pays, n'est-ce pas la condition d'une représentation citoyenne ? Et ne serait-ce pas une étape pour avancer sur tous les autres aspects ? Je pense notamment au cumul des mandats.

Le scrutin majoritaire à deux tours est un obstacle à ces avancées démocratiques. La société civile attend autre chose que l'immobilisme. L'occasion aurait pu être saisie d'un véritable pas en avant. Nous y viendrons, j'en suis convaincu.

Au bénéfice de ces observations, le groupe communiste votera cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Pascal Clément.

M. Pascal Clément.

Je n'ai pas grand-chose à ajouter à ce qui a été dit sur les candidatures multiples puisqu'il s'agit d'un sujet de consensus : le vote de la Haute Assemblée le prouve à l'évidence.

Je me permettrai simplement d'appeler l'attention sur l'amendement sénatorial concernant les fusions de cantons. La question est si complexe que je ne suis pas sûr d'avoir compris moi-même.

M. René Dosière.

Décidément, aujourd'hui, vous ne comprenez pas grand-chose !

M. Pascal Clément.

Parfois, il faut se mettre à la portée de ses collègues, et cela demande beaucoup de modestie.

Soyez donc aussi modeste que moi.

(Sourires.)

Je conçois que l'on puisse critiquer la jurisprudence du Conseil d'Etat relative au canton d'Allos, près de Colmars, puisqu'elle a eu pour résultat d'empêcher le conseiller général de ce canton de se représenter au terme de son mandat et l'a contraint à attendre trois ans.

Pour autant, décider qu'un conseiller général puisse conserver son mandat sans avoir de territoire au prétexte, d'ailleurs fondé, qu'il représente tout le département, c'est une solution qui ne me paraît pas non plus absolument géniale.

Pour ma part, je vois une troisième solution qui ne me paraît pas présenter de difficulté, mais peut-être est-ce là que je n'ai pas tout compris et je suis sûr que des savants comme M. Dosière vont m'expliquer en quoi. Si le ministre de l'intérieur convenait de ne procéder à une fusion qu'un an au plus avant le renouvellement, le problème serait réglé. Autrement dit, le problème ne se pose que si le ministère opère des fusions à des dates éloignées des élections. Ou alors, je le répète, c'est que je n'ai pas tout compris et je souhaite une explication.

M. le ministre de l'intérieur.

Puis-je vous répondre d'un mot, monsieur le député ?

M. Pascal Clément.

Avec joie, monsieur le ministre.

Mme la présidente.

La parole est à M. le ministre, avec l'autorisation de l'orateur.

M. le ministre de l'intérieur.

Tous les cantons ne sont pas renouvelables en même temps. Le problème se pose donc quand il s'agit de fusionner deux cantons dont l'une st renouvelable, par exemple, en 2001 et l'autre en 2004.

Mme Nicole Feidt.

C'est le cas en Meurthe-et-Moselle !

M. le ministre de l'intérieur.

Que se passe-t-il à ce moment-là ?

M. Pascal Clément.

... Ah, oui !

M. le ministre de l'intérieur.

Je vois que vous m'avez compris ! (Sourires.)

M. Pascal Clément.

Mais dans ces cas-là, mieux vaut mettre soi-même un terme à son mandat et avoir la chance d'être réélu plutôt que d'attendre la fin de celui-ci avec la certitude de ne pas l'être parce que le siège est pris. C'est pourtant ce que prévoit l'amendement de la commission. Finalement, tout cela est d'une simplicité biblique : l'élu aura le choix, dans ce cas exceptionnel, entre finir son mandat et ne plus jamais être élu, ou y mettre fin lui-même pour avoir une chance d'être élu.

C'est ce que je craignais d'avoir compris. (Sourires.)

Certes, le redécoupage cantonal est un problème difficile, et vous n'agissez, monsieur le ministre, qu'avec parcimonie - mais peut-être tout de même à bon escient. Il n'en reste pas moins que le problème sera pratiquement insoluble pour l'intéressé, qui se retrouvera dans une situation injuste. Je souhaiterais donc que l'on ne puisse procéder à ce type d'opération que dans des cas très précis.

Mme la présidente.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l'intérieur. Cette discussion, qui paraît théorique, est fort intéressane et c'est pour le plaisir d'une véritable joute intellectuelle (Sourires) que je réponds à M. Clément, qui semble avoir sous-estimé la perspicacité des deux sénateurs franc-comtois, M. Joly et M. Dreyfus-Schmidt, auxquels je tiens à rendre hommage. Il arrive que le Conseil d'Etat nous enjoigne de fusionner des cantons ; il en est ainsi, par exemple, dans le Rhône. Dans ce cas, un conseiller général qui n'a pas terminé son mandat peut très bien se représenter dans le canton fusionné mais il peut aussi ne pas vouloir le faire et néanmoins pouvoir bénéficier de la loi qui prévoit qu'il a été élu pour six ans.

M. Pascal Clément.

Puis-je ajouter un mot, madame la

présidente

?

Mme la présidente.

Je vous en prie !

M. Pascal Clément.

Ainsi, monsieur le ministre, le conseiller général qui aura fait le choix de se représenter alors que son mandat lui permettrait de gagner trois ans encore et qui aura été battu pourra cependant continuer de siéger trois ans durant au conseil général. Qui va y comprendre quelque chose ?

M. Jacky Darne, rapporteur.

D'autres, si ce n'est vous !

M. le ministre de l'intérieur.

L'électorat n'est pas le même, monsieur Clément !

M. Pascal Clément.

Tout le monde voit bien qu'il y a un problème.

M. le ministre de l'intérieur.

Il est battu par d'autres !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

Mme la présidente.

Je vous invite à poursuivre cet échange par courrier. Il semble en effet difficile d'aller jusqu'au bout des éclaircissements dont vous auriez besoin, monsieur Clément...

M. Pascal Clément.

Un conseiller général battu restera finalement élu trois ans de plus. C'est ubuesque ! Et je me devais de le souligner en séance.

M. Patrice Carvalho.

Mais il aura déjà été élu auparavant !

M. le ministre de l'intérieur.

C'est en quelque sorte un prix de consolation, monsieur le député.

Mme la présidente.

La parole est à M. François Loos.

M. François Loos.

La présente proposition de loi vise à combler deux lacunes du code électoral.

Il faut d'abord empêcher les candidatures multiples aux cantonales. Comme pour les législatives, il s'agit d'avoir des candidats dont le but est d'être élu au mandat qu'ils sollicitent dans la circonscription dans laquelle ils sont candidats, les candidats étant tous à égalité de moyens dans ces circonscriptions. Si cette exigence est facilement acceptable aujourd'hui car elle donne à la démocratie un certificat d'authenticité, il faut s'entendre sur le mode de contrôle et sur les sanctions éventuelles.

Pour les élections législatives, le préfet saisit le tribunal administratif, qui doit statuer dans les trois jours, et les voix qui se sont portées sur lui sont réputées nulles. Pour les élections cantonales, il est proposé tout simplement de ne pas enregistrer les candidatures. Cela annulerait, en effet, toutes les candidatures et constituerait une sanction appropriée pour celui qui essaierait.

On peut cependant s'interroger sur la possibilité de candidature dans deux conseils généraux différents. En fait, cette situation est déjà réglée par l'article L.

208 du code électoral qui stipule que nul ne peut être membre de plus d'un conseil général. Mais être candidat malheureux dans plusieurs départements serait encore possible, à moins que les préfets ne soient tenus de vérifier que les candidats de leur département ne sont pas aussi candidats dans d'autres départements. Cela nécessite une centralisation des informations que le ministre de l'intérieur pense pouvoir faire sans difficulté pratique.

Un tel dispositif pourrait un jour être repris pour les législatives car, finalement, la sanction prévue est plus forte et préalable au vote, en quelque sorte. Celui qui essaie de s'inscrire plusieurs fois est éliminé avant même l'élection. Dans le cadre des élections législatives, ses voix sont nulles mais déforment le scrutin pour les autres candidats.

En tout cas, on voit bien que les dispositions les plus sévères sont préférables pour éviter que les candidatures multiples existent. La candidature doit presque constituer un engagement à siéger si l'élection est acquise. La présente disposition va dans ce sens. Elle n'oblige pas un candidat à siéger mais il se trouve ainsi engagé. Reste la question du candidat déjà élu dans un autre canton. Le Sénat a considéré qu'il fallait laisser au candidat le choix de son siège à l'issue du vote, et je partage son avis. En effet, il ne faudrait pas aller jusqu'à obliger à une démission préalable tout candidat qui a été élu ailleurs auparavan, sauf à ne plus avoir de candidat de cette sorte.

Cela nous amène au cas des fusions de communes. Le système actuel a besoin d'une clarification législative. Il serait normal qu'après une fusion, l'élection cantonale ait lieu à la date la plus proche pour que le nouveau canton puisse compter sur un conseiller général valablement élu.

Ce dispositif nous paraît plus raisonnable que la jurisprudence « commune d'Allos » qui s'apparente, en fait, à une fusion absorption d'un canton par un autre plutôt qu'à une véritable fusion à égalité. C'est pourquoi la solution préconisée par la proposition de loi du Sénat, que j'avais d'ailleurs également déposée à l'Assemblée nationale, me paraît juste. L'UDF votera donc ce texte.

Mme la présidente.

La parole est à M. Jean-Luc Warsmann.

M. Jean-Luc Warsmann.

Sur le fond, il s'agit de dispositions techniques qui ne posent pas beaucoup de difficultés, si ce n'est celle que vient de soulever Pascal Clément. Il est en effet choquant pour le bon sens et les électeurs qu'un candidat battu soit néanmoins amené à siéger trois ans supplémentaires.

Je limiterai mon intervention à deux points. Je voudrais tout d'abord souligner que, si cette proposition de loi est votée, la majorité de cette assemblée aura, cet a près-midi, successivement adopté deux textes qui réduisent le poids du monde rural : l'un au niveau du collège d'élection des sénateurs, et l'autre au niveau des conseils généraux en facilitant les fusions de cantons.

Ensuite, et pour finir, cette intervention qui sera l'une des plus brèves de la journée si ce n'est de l'année (Sourires) , je souhaiterais simplement que M. le ministre précise si la date des élections municipales et cantonales est fixée et si ces élections auront lieu le même jour.

Mme la présidente.

La discussion générale est close.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l'intérieur.

Monsieur Warsmann, la date sera fixée dans les conditions prévues par la loi. Et les deux élections devraient, en effet, intervenir le même jour.

S'agissant de votre première observation, je rappelle que le conseiller général élu d'un canton disparu avait bien été élu pour six ans. Qu'il soit battu en se représentant dans un canton désormais plus vaste n'y change rien.

Encore une fois, c'est toute la finesse et la perspicacité des sénateurs francs-comtois qui m'ont permis de trouver cette solution destinée à faciliter certaines fusions de cantons.

M. Jean-Luc Warsmann.

Les sénateurs du territoire de Belfort ! (Sourires.)

Discussion des articles

Mme la présidente.

J'appelle maintenant dans les conditions prévues à l'article 91, alinéa 9, du règlement, les articles de la proposition de loi dans le texte du Sénat.

Article 1er

Mme la présidente.

« Art. 1er Après le troisième alinéa de l'article L. 210-1 du code électoral, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« Nul ne peut être candidat dans plus d'un canton.

« Si le candidat fait, contrairement aux prescriptions de l'alinéa précédent, acte de candidature dans plusieurs cantons, sa candidature n'est pas enregistrée. »

Je mets aux voix l'article 1er

(L'article 1er est adopté.)

Article 2

Mme la présidente.

« Art. 2. L'article L. 192 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Lorsqu'un nouveau canton est créé par la fusion de deux cantons et que les anciens cantons n'appartiennent pas à la même série de renouvellement, nonobstant ce fait


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

il est procédé à une élection ouverte à tous les candidats afin de pourvoir le siège du nouveau canton.

« Le conseiller général de l'ancien canton non renouvelable, s'il n'est pas élu au siège du nouveau canton, achève son mandat jusqu'à son terme légal. »

M. Darne, rapporteur, a présenté un amendement, no 1, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi l'article 2 :

« L'article L. 192 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsqu'un nouveau canton est créé par la fusion de deux cantons qui n'appartiennent pas à la même série de renouvellement, il est procédé à une élection à la date du renouvellement le plus proche afin de pourvoir le siège de ce nouveau canton. Dans ce cas, et malgré la suppression du canton où il a été élu, le conseiller général de celui des deux anciens cantons qui appartient à la série renouvelée à la date la plus lointaine peut exercer son mandat jusqu'à son terme. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jacky Darne, rapporteur.

Amendement rédactionnel.

Le texte proposé par le Sénat ne nous a pas semblé facile à comprendre. En écoutant certains orateurs, j'ai toutefois eu l'impression que la rédaction de la commission des lois n'était pas plus claire. Nous nous sommes pourtant efforcés de préciser les choses sans modifier le fond. Lorsqu'un nouveau canton est créé par la fusion de deux cantons n'appartenant pas à la même série de renouvellement, il est procédé à une élection à la date du renouvellement la plus proche, les deux conseillers généraux sortants pouvant être candidats. Celui qui sera battu pourra exercer le mandat du canton qui a disparu jusqu'à son terme. J'ai conscience qu'il s'agit là d'un dispositif exceptionnel.

Mais il fallait bien trouver une solution.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'intérieur.

Favorable.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

1. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

En conséquence, l'article 2 est ainsi rédigé.

Article 3

Mme la présidente.

« Art. 3. La présente loi est applicable à Mayotte. »

Je mets aux voix l'article 3.

(L'article 3 est adopté.)

Après l'article 3

M me la présidente.

M. Darne, rapporteur, Mme Ledoux, M. Dosière et Montebourg ont présenté un amendement, no 2, ainsi libellé :

« Après l'article 3, insérer l'article suivant :

« I. Le dernier alinéa de l'article L. 2132-6 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :

« Le maire soumet ce mémoire au conseil municipal lors de la plus proche réunion tenue en application des articles L. 2121-7 et L. 2121-9.

« II. L'avant-dernier alinéa de l'article L. 3123-1 du même code est ainsi rédigé :

« Le président du conseil général soumet ce mémoire au conseil général lors de la plus proche réunion tenue en application des articles L. 312-9 et L. 3121-10.

« III. L'avant-dernier alinéa de l'article L. 4143-1 du même code est ainsi rédigé :

« Le président du conseil régional soumet ce mémoire au conseil régional lors de la plus proche réunion tenue en application des articles L. 4132-8 et L. 4132-9.

« IV. L'avant dernier alinéa de l'article L. 5211-58 du même code est ainsi rédigé :

« Le président de l'établissement public de coopération intercommunale soumet ce mémoire à l'organe délibérant de l'établissement lors de la plus proche réunion tenue en application de l'article L. 5211-11. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jacky Darne, rapporteur.

Lors de l'examen du projet de loi relatif aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration, l'Assemblée a adopté, jeudi dernier, deux dispositifs différents pour les conseils généraux et pour les conseils régionaux s'agissant du droit de substitution d'un contribuable. Le présent amendement, qui a d'ailleurs fait l'objet de discussions et d'un accord entre les différents représentants des groupes politiques, vise donc à harmoniser les textes et à prévoir l'examen de la requête du contribuable au cours de la séance suivante du conseil général ou du conseil régional, et non plus, comme cela avait été initialement envisagé, à autoriser u ne convocation extraordinaire de l'assemblée en question.

M. Pascal Clément.

C'est complètement fou !

M. Jacky Darne, rapporteur.

C'est donc une mesure de simplification, qui correspond à l'attente de l'ensemble des députés.

M. Pascal Clément.

C'est une honte !

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'intérieur.

Le Gouvernement n'est pas défavorable à cette disposition.

Mme la présidente.

La parole est à M. Pascal Clément.

M. Pascal Clément.

J'ai honte pour vous, monsieur le ministre ! Comment pouvez-vous ne pas être défavorable à ce type d'amendement ? Les bras m'en tombent !

M. Jérôme Lambert.

Dommage que ce ne soit pas la langue !

M. Pascal Clément.

N'ayant pu être présent jeudi dernier, j'ai demandé à François Goulard de s'exprimer à ma place. Que je sache, monsieur Darne, François Goulard ne vous a pas donné son accord, tant s'en faut ! L'opposition a d'ailleurs sauvé la mise des conseils généraux mais n'a malheureusement pas pu en faire autant pour les conseils régionaux.

De quoi s'agit-il ? Je rappelle d'abord que tout a commencé avec M. Montebourg. C'est lui, en effet, qui le premier a créé une association de contribuables à Paris.

C ela a débouché sur l'affaire de l'appartement de M. Juppé. Puis, d'autres associations de ce type sont nées ici et là dans un certain nombre de départements.

M. Jérôme Lambert.

C'est très utile !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

M. Pascal Clément.

Ainsi, monsieur le ministre, n'importe quel contribuable mécontent, ou n'importe quel parti politique - un jour vous, un jour nous car les choses changent toujours - pourra harceler l'exécutif en place - municipal, départemental ou régional - qui sera obligé de se défendre en présentant un mémoire.

M. Jacky Darne, rapporteur.

Ce n'est pas l'objet de l'amendement !

M. Pascal Clément.

Certes, on est revenu sur l'ahurissante proposition qui consistait à réunir sur-le-champ l'assemblée en question. Il reste toutefois que, dès la prochaine réunion de cette assemblée, il faudre se justifier.

Dans quelle République vivons-nous ? Voilà quelques années nous sommes déjà revenus sur une disposition visant à protéger les ministres. Ceux-ci étaient jusqu'alors passibles de la Haute Cour de justice car le législateur, dans sa sagesse, avait cherché à éviter que n'importe quel contribuable, électeur, citoyen, puisse harceler les membres du Gouvernement. Il s'agissait, là encore, de laisser l'exécutif travailler. Or, sous prétexte de progrès et de transparence, nous sommes revenus sur cette disposition. Les gens ne le savent pas encore ou ne l'ont pas compris mais cela viendra. Un jour, les membres du Gouvernement seront victimes de harcèlement judiciaire. Aujourd'hui, on s'attaque aux collectivités territoriales. Mais dans quel pays vivons-nous, mon-s ieur le ministre ? Allez-vous accepter une pareille mesure ? Nous marchons sur la tête ! Avec les amendements d'excités socialistes, tel M. Montebourg, aucun exécutif ne pourra plus diriger. Je suis scandalisé par cet amendement.

M. Jean Michel.

Ce qui est scandaleux, c'est le classement sans suite !

Mme la présidente.

La parole est à M. René Dosière.

M. René Dosière.

Monsieur Clément, soyez rassuré : cet amendement a initialement deux co-auteurs à droits égaux qui sont Arnaud Montebourg et votre serviteur.

M. Pascal Clément.

Cela ne me rassure pas !

M. René Dosière.

J'en suis désolé ! Par ailleurs, sachez que cet article additionnel a un simple objectif d'harmonisation. Du fait des votes intervenus jeudi dernier, en effet, nous avons des dispositions différentes pour les conseils généraux et pour les conseils régionaux, ainsi d'ailleurs que pour les communes.

Sur le fond, il ne faut pas dramatiser outre-mesure.

Depuis très longtemps, un contribuable peut défendre les intérêts de sa commune dès lors que le conseil municipal s'est prononcé et a refusé de le faire. Mais cette procédure est considérablement encadrée, puisque le tribunal administratif doit d'abord être saisi et donner son avis. Il faut voir cette disposition comme un élément de respiration de notre démocratie. Aujourd'hui, il s'agit de l'étendre au conseils généraux et aux conseils régionaux tout en simplifiant la procédure, ce qui devait vous satisfaire.

En effet, le code des collectivités territoriales prévoyait une réunion extraordinaire du conseil municipal. Or comme le Sénat l'a souhaité - et il semble que ce soit également votre cas -, dorénavant il suffira simplement que, lors de la réunion suivante, le conseil municipal, le conseil général ou régional se saisisse de l'affaire en question et se prononce. Il n'y a là rien qui puisse être source de désordre dans le fonctionnement de nos assemblées locales. En outre, il est légitime de permettre aux citoyens, dès lors que la majorité d'une assemblée locale ne veut pas défendre les intérêts de cette collectivité.

C'est une très bonne chose si la procédure est bien encadrée.

Mme la présidente.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jacky Darne, rapporteur.

En complément, je veux rappeler à M. Clément que cette possibilité de substitution n'est pas une nouveauté, mais qu'elle existe dans les communes depuis 1884.

Deuxièmement, l'objet de l'amendement n'est pas de créer cette possibilité pour le conseil général ou pour le conseil régional. Cela a été fait à l'occasion des précédentes lectures du texte.

Troisièmement, il convient de tenir compte d'un commentaire pertinent du Sénat, qui conseille de ne pas convoquer l'assemblée délibérante en réunion extraordinaire, et qui considère qu'une assemblée ordinaire suffira.

Quatrièmement, il ne s'agit pas d'organiser une discussion avec l'exécutif, de le paralyser, mais d'informer une assemblée délibérante. J'espère que M. Clément est ainsi pleinement rassuré.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

2. (L'amendement est adopté.)

M me la présidente.

M. Darne, rapporteur, et M. Dosière ont présenté un amendement, no 3, ainsi rédigé :

« Après l'article 3, insérer l'article suivant :

« I. - Dans la deuxième et la troisième phrases du cinquième alinéa du I de l'article 204-0 bis du code général des impôts, le nombre "1 000" est remplacé par le nombre "500".

« II. - Le deuxième et le troisième alinéa de l'article 28 de la loi no 92-108 du 3 février 1992 relative aux conditions d'exercice des mandats locaux sont supprimés.

« II. - Ces dispositions entent en application à compter de la date d'entrée en vigueur de la loi no du relative à la limitation du cumul des mandats électoraux et des fonctions et à leurs conditions d'exercice. »

La parole est à M. René Dosière.

M. René Dosière.

Cet amendement de coordination concerne la fiscalisation des indemnités des élus locaux.

Dès lors que la loi sur le cumul des mandats a augmenté les indemnités des élus locaux, on a automatiquement augmenté la part des indemnités bénéficiant d'une exonération fiscale. Il s'agit de revenir à l'esprit de cette loi et d'éviter que ce montant ne soit relevé.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'intérieur.

Le Gouvernement est favorable. Il remercie d'ailleurs M. Dosière d'avoir, par cet amendement, bien voulu maintenir à son niveau actuel le montant de l'exonération fiscale applicable aux indemnités de fonction des maires dans le cadre du régime de la retenue à la source.

On se souvient que cet amendement avait été adopté par le Sénat, mais n'avait pu être repris par l'Assemblée nationale, puisque, aussi curieux que cela puisse paraître, le Sénat lui-même avait rejeté l'ensemble du texte. Ces errements seront ainsi réparés.

Mme la présidente.

Je ne suis saisie d'aucune demande d'explication de vote.

(L'amendement est adopté.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

Vote sur l'ensemble

Mme la présidente.

Je ne suis saisie d'aucune demande d'explication de vote.

Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.

(L'ensemble de la proposition de loi est adopté.)

6 DÉSIGNATION D'UN CANDIDAT À UN ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE

Mme la présidente.

J'ai reçu de M. le Premier ministre une demande de remplacement d'un membre de l'Assemblée nationale au sein de la commission de surveillance et de contrôle des publications destinées à l'enfance et à l'adolescence.

Conformément aux précédentes décisions, le soin de présenter un candidat a été confié à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

La candidature devra être remise à la présidence avant le mercredi 26 avril 2000, à dix-huit heures.

7

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

Mme la présidente.

Ce soir, à vingt et une heures quinze, troisième séance publique : Discussion, en deuxième lecture, du projet de loi, no 2199 portant réglementation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques : Mme Nicole Feidt, rapporteur au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport no 2301).

(Procédure d'examen simplifiée - Art. 106 du règlement.) Discussion, en deuxième lecture, de la proposition de loi, no 2259, relative à la protection des trésors nationaux et modifiant la loi no 92-1477 du 31 décembre 1992, relative aux produits soumis à certaines restrictions de circulation et à la complémentarité entre les services de police, de gendarmerie et de douane : M. Jean Rouger, rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (rapport no 2306).

(Procédure d'examen simplifiée - Art. 106 du règlement.) La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures quarante-cinq.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

ANNEXE AU PROCÈS-VERBAL de la 2e séance du mardi 4 avril 2000 SCRUTIN (no 235) sur l'ensemble du projet de loi relatif à la chasse Nombre de votants .....................................

563 Nombre de suffrages exprimés ....................

527 Majorité absolue ..........................................

264 Pour l'adoption ...................

275 Contre ..................................

252 L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN Groupe socialiste (252) : Pour : 244. - MM. Yvon Abiven , Maurice Adevah-Poeuf , Stéphane Alaize , Damien Alary , Mme Sylvie AndrieuxBacquet , MM. Léo Andy , Jean-Marie Aubron , JeanMarc Ayrault , Jean-Paul Bacquet , Dominique Baert , Jean-Pierre Baeumler , Jean-Pierre Balduyck , Jean-Pierre Balligand , Gérard Bapt , Alain Barrau , Jacques Bascou , Christian Bataille , Jean-Claude Bateux , Jean-Claude B eauchaud , Mme Yvette Benayoun-Nakache , MM. Henri Bertholet , Eric Besson , Jean-Louis Bianco , A ndré Billardon , Jean-Pierre Blazy , Serge Blisko , Patrick Bloche , Jean-Marie Bockel , Jean-Claude Bois , Daniel Boisserie , Maxime Bono , Augustin Bonrepaux , André Borel , Jean-Michel Boucheron , Jean-Claude Boulard , Didier Boulaud , Pierre Bourguignon , Christian Bourquin , Mme Danielle Bousquet , MM. Jean-Pierre Braine , Pierre Brana , Mme Frédérique Bredin , M. JeanPaul Bret , Mme Nicole Bricq , MM. François Brottes , Vincent Burroni , Alain Cacheux , Jérôme Cahuzac , A lain Calmat , Jean-Christophe Cambadelis , André C apet , Thierry Carcenac , Christophe Caresche , Mme Odette Casanova , MM. Laurent Cathala , JeanYves Caullet , Bernard Cazeneuve , Jean-Paul Chanteguet , Michel Charzat , Guy-Michel Chauveau , JeanClaude Chazal , Daniel Chevallier , Didier Chouat , Alain Claeys , Mme Marie-Françoise Clergeau , MM. Jean C odognès , Pierre Cohen , François Colcombet , Mme Monique Collange , MM. François Cuillandre , Jean-Claude Daniel , Jacky Darne , Camille Darsières , Michel Dasseux , Yves Dauge , Mme Martine David , MM. Bernard Davoine , Philippe Decaudin , Marcel Dehoux , Jean Delobel , François Deluga , Jean-Jacques Denis , Mme Monique Denise , MM. Bernard Derosier , Claude Desbons , Michel Destot , Paul Dhaille , Marc Dolez , François Dosé , René Dosière , Mme Brigitte D ouay , MM. Julien Dray , Tony Dreyfus , Pierre Ducout , Jean-Pierre Dufau , Mme Laurence Dumont , MM. Jean-Louis Dumont , Dominique Dupilet , Yves Durand , Jean-Paul Durieux , Philippe Duron , Henri Emmanuelli , Jean Espilondo , Michel Etiévant , Claude Evin , Alain Fabre-Pujol , Albert Facon , Mme Nicole Feidt , MM. Jean-Jacques Filleul , Jacques Fleury , Jacques Floch , Pierre Forgues , Raymond Forni , Jean-Louis Fousseret , Michel Françaix , Christian Franqueville , Georges Frêche , Gérard Fuchs , Robert Gaïa , Yann Galut , Roland Garrigues , Jean-Yves Gateaud , Jean Gaubert , Mme Catherine Génisson , MM. André Godin , Gaëtan Gorce , Alain Gouriou , Gérard Gouzes , Bernard Grasset , Michel Grégoire , Mmes Odette Grzegrzulka , Paulette Guinchard-Kunstler , MM. Jacques Guyard , Francis Hammel , Mme Cécile Helle , MM. Edmond Hervé , Jacques Heuclin , François Hollande , Jean-Louis Idiart , Mme Françoise Imbert , MM. Claude Jacquot , Serge Janquin , Jacky Jaulneau , Armand Jung , Jean-Noël Kerdraon , Bertrand Kern , Jean-Pierre Kucheida , André L abarrère , Mme Conchita Lacuey , MM. Jérôme L ambert , Pierre-Claude Lanfranca , Jean Launay , Mme Christine Lazerges , MM. Gilbert Le Bris , JeanYves Le Déaut , Mme Claudine Ledoux , MM. Jean-Yves Le Drian , Michel Lefait , Jean Le Garrec , Jean-Marie Le Guen , Patrick Lemasle , Georges Lemoine , Bruno Le Roux , René Leroux , Jean-Claude Leroy , Mme Raymonde Le Texier , MM. Alain Le Vern , Michel Liebgott , Mme Martine Lignières-Cassou , MM. Gérard Lindeperg , François Loncle , Bernard Madrelle , René Mangin , J ean-Pierre Marché , Daniel Marcovitch , Jean-Paul Mariot , Mme Béatrice Marre , MM. Daniel Marsin , Marius Masse , Didier Mathus , Gilbert Maurer , Guy

M enut , Louis Mermaz , Roland Metzinger , Louis Mexandeau , Jean Michel , Didier Migaud , Mme Hélène Mignon , MM. Gilbert Mitterrand , Yvon Montané , Gabriel Montcharmont , Arnaud Montebourg , Philippe Nauche , Bernard Nayral , Henri Nayrou , Mme Véronique Neiertz , MM. Alain Néri , Michel Pajon , Joseph Parrenin , François Patriat , Christian Paul , Vincent P eillon , Germinal Peiro , Jean-Pierre Pernot , Mmes Marie-Françoise Pérol-Dumont , Geneviève Per-r in-Gaillard , Annette Peulvast-Bergeal , Catherine Picard , MM. Paul Quilès , Alfred Recours , Gérard Revol , Mme Marie-Line Reynaud , M. Patrick Rimbert , Mme Michèle Rivasi , MM. Alain Rodet , Marcel Rogemont , Bernard Roman , Yves Rome , Gilbert Roseau , Mme Yvette Roudy , MM. Jean Rouger , René Rouquet , Michel Sainte-Marie , Mme Odile Saugues , MM. Bernard Seux , Patrick Sève , Henri Sicre , Michel Tamaya , Mme Christiane Taubira-Delannon , MM. Pascal Terrasse , Gérard Terrier , Mmes Marisol Touraine , Odette Trupin , MM. Joseph Tyrode , Daniel Vachez , André Vallini , André Vauchez , Michel Vauzelle , Michel Vergnier , Alain Veyret , Alain Vidalies , Jean-Claude Viollet , Philippe Vuilque et Kofi Yamgnane

Abstentions : 2. - MM. Jean-Paul Dupré et Jean-Claude Perez

Non-votants : MM. Laurent Fabius (membre du Gouvernem ent), Jack Lang (membre du Gouvernement) et Mme Catherine Tasca (membre du Gouvernement).

Groupe R.P.R. (137) : C ontre : 137. - MM. Jean-Claude Abrioux , Bernard Accoyer , Mme Michèle Alliot-Marie , MM. René André , André Angot , Philippe Auberger , Pierre Aubry , Jean Auclair , Gautier Audinot , Mmes Martine Aurillac , Roselyne Bachelot-Narquin , MM. Edouard Balladur , Jean Bardet , François Baroin , Jacques Baumel , Christian Bergelin , André Berthol , Léon Bertrand , Jean-Yves Besselat , Jean Besson , Franck Borotra , Bruno Bourg-Broc ,


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

Michel Bouvard , Victor Brial , Philippe Briand , Michel Buillard , Christian Cabal , Gilles Carrez , Mme Nicole Catala , MM. Jean-Charles Cavaillé , Richard Cazenave , Henry Chabert , Jean-Paul Charié , Jean Charroppin , Philippe Chaulet , Jean-Marc Chavanne , Olivier de Chazeaux , François Cornut-Gentille , Alain Cousin , JeanMichel Couve , Charles Cova , Henri Cuq , Jean-Louis Debré , Lucien Degauchy , Arthur Dehaine , Jean-Pierre D elalande , Patrick Delnatte , Jean-Marie Demange , Xavier Deniau , Yves Deniaud , Patrick Devedjian , Eric Doligé , Guy Drut , Jean-Michel Dubernard , Jean-Pierre Dupont , Nicolas Dupont-Aignan , Christian Estrosi , Jean-Claude Etienne , Jean Falala , Jean-Michel Ferrand , François Fillon , Roland Francisci , Pierre Frogier , Yves Fromion , Robert Galley , René Galy-Dejean , Henri de Gastines , Jean de Gaulle , Hervé Gaymard , JeanMarie Geveaux , Jean-Pierre Giran , Michel Giraud , Jacques Godfrain , Louis Guédon , Jean-Claude Guibal , Lucien Guichon , François Guillaume , Gérard Hamel , Michel Hunault , Michel Inchauspé , Christian Jacob , Didier Julia , Alain Juppé , Jacques Kossowski , Jacques L afleur , Robert Lamy , Pierre Lasbordes , Thierry Lazaro , Pierre Lellouche , Jean-Claude Lemoine , Arnaud Lepercq , Jacques Limouzy , Thierry Mariani , Alain Marleix , Franck Marlin , Jean Marsaudon , Philippe Martin , Patrice Martin-Lalande , Jacques Masdeu-Arus , Mme Jacqueline Mathieu-Obadia , MM. Gilbert Meyer , JeanClaude Mignon , Charles Miossec , Pierre Morange , Renaud Muselier , Jacques Myard , Jean-Marc Nudant , Patrick Ollier , Mme Françoise de Panafieu , MM. Robert Pandraud , Jacques Pélissard , Dominique Perben , Pierre Petit , Etienne Pinte , Serge Poignant , Bernard Pons , Robert Poujade , Didier Quentin , Jean-Bernard Raim ond , Jean-Luc Reitzer , Nicolas Sarkozy , André Schneider , Bernard Schreiner , Philippe Séguin , Frantz Taittinger , Michel Terrot , Jean-Claude Thomas , Jean Tiberi , Georges Tron , Anicet Turinay , Jean Ueberschlag , Léon Vachet , Jean Valleix , François Vannson , R oland Vuillaume , Jean-Luc Warsmann et Mme Marie-Jo Zimmermann

Groupe U.D.F. (70) : Contre : 66. - MM. Jean-Pierre Abelin , Pierre-Christophe Baguet , Raymond Barre , Jacques Barrot , Dominique Baudis , Jean-Louis Bernard , Claude Birraux , Emile Blessig , Mme Marie-Thérèse Boisseau , MM. Jean-Louis B orloo , Bernard Bosson , Mme Christine Boutin , MM. Loïc Bouvard , Jean Briane , Dominique Caillaud , Hervé de Charette , Jean-François Chossy , René Couanau , Charles de Courson , Yves Coussain , Marc-Philippe D aubresse , Jean-Claude Decagny , Léonce Deprez , Renaud Donnedieu de Vabres , Philippe Douste-Blazy , Renaud Dutreil , Jean-Pierre Foucher , Claude Gaillard , Germain Gengenwin , Valéry Giscard d'Estaing , Gérard Grignon , Hubert Grimault , Pierre Hériaud , Patrick Herr , Mmes Anne-Marie Idrac , Bernadette Isaac-Sibille , MM. Henry Jean-Baptiste , Christian Kert , Edouard Landrain , Jacques Le Nay , Jean-Antoine Leonetti , François Léotard , Maurice Leroy , Roger Lestas , Maurice Ligot , François Loos , Christian Martin , Pierre Méhaignerie , Pierre Menjucq , Pierre Micaux , Mme Louise Moreau , MM. Hervé Morin , Jean-Marie Morisset , Arthur Paecht , Dominique Paillé , Henri Plagnol , JeanLuc Préel , Marc Reymann , Gilles de Robien , François Rochebloine , Rudy Salles , André Santini , François Sauvadet , Michel Voisin , Jean-Jacques Weber et PierreAndré Wiltzer

Abstentions : 3. - MM. Pierre Albertini , Yves Bur et Alain Ferry

Groupe Démocratie libérale et Indépendants (44) : Contre : 44. - Mme Nicole Ameline , M. François d' Aubert , Mme Sylvia Bassot , MM. Jacques Blanc , Roland Blum , Dominique Bussereau , Pierre Cardo , Antoine Carré , Pascal Clément , Georges Colombier , Bernard Deflesselles , Francis Delattre , Franck Dhersin , Laurent Dominati , Dominique Dord , Charles Ehrmann , Nicolas Forissier , Gilbert Gantier , Claude Gatignol , Claude Goasguen , François Goulard , Pierre Hellier , Michel Herbillon , Philippe Houillon , Denis Jacquat , Aimé Kerguéris , Marc Laffineur , Jean-Claude Lenoir , Pierre Lequiller , Alain Madelin , Jean-François Mattei , Michel Meylan , Alain Moyne-Bressand , Yves Nicolin , Paul Patriarche , Bernard Perrut , Jean Proriol , Jean Rigaud , Jean Roatta , José Rossi , Joël Sarlot , Jean-Pierre Soisson , Guy Teissier et Gérard Voisin

Groupe communiste (35) : Pour : 4. - MM. Jean-Pierre Brard , Daniel Feurtet , JeanClaude Lefort et Ernest Moutoussamy

Abstentions : 31. - MM. François Asensi , Gilbert Biessy , C laude Billard , Bernard Birsinger , Alain Bocquet , Patrick Braouezec , Jacques Brunhes , Patrice Carvalho , Alain Clary , Christian Cuvilliez , René Dutin , Mme Jacqueline Fraysse , MM. André Gerin , Pierre Goldberg , Maxime Gremetz , Georges Hage , Guy Hermier , Robert H ue , Mmes Muguette Jacquaint , Janine Jambu , MM. André Lajoinie , Patrick Leroy , Félix Leyzour , François Liberti , Patrick Malavieille , Roger Meï , Bernard Outin , Daniel Paul , Jean-Claude Sandrier , Michel Vaxès et Jean Vila

Groupe Radical, Citoyen et Vert (32) : Pour : 26. - M. André Aschieri , Mmes Marie-Hélène Aubert , Huguette Bello , MM. Pierre Carassus , Gérard Charasse , Bernard Charles , Yves Cochet , Jacques Desallangre , Roger Franzoni , Claude Hoarau , Elie Hoarau , Robert Honde , Guy Lengagne , Noël Mamère , JeanMichel Marchand , Mme Gilberte Marin-Moskovitz , MM. Jean-Pierre Michel , Jean-Paul Nunzi , Jean Pontier , Jacques Rebillard , Mme Chantal Robin-Rodrigo , MM. Georges Sarre , Gérard Saumade , Michel Suchod , Alain Tourret et Emile Vernaudon

Non-votants : MM. Guy Hascoët (membre du Gouvernement) et Roger-Gérard Schwartzenberg (membre du Gouvernement).

Non-inscrits (7).

Pour : 1. - M. Marcel Cabiddu

Contre : 5. - MM. Marc Dumoulin , Jean-Jacques Guillet , Lionnel Luca , Charles Millon et Philippe de Villiers

Mises au point au sujet du présent scrutin (Sous réserve des dispositions de l'article 68, alinéa 4, du règlement de l'Assemblée nationale) M. Yves Tavernier , qui était présent au moment du scrutin ou qui avait délégué son droit de vote, a fait savoir qu'il avait voulu voter « pour ».

M. Jean-Pierre Defontaine , qui était présent au moment du scrutin ou qui avait délégué son droit de vote a fait savoir qu'il avait voulu « s'abstenir volontairement ».