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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE

DE Mme

CHRISTINE LAZERGES

1. Vente de meubles aux enchères publiques. - Discussion, en deuxième lecture, selon la procédure d'examen simplifiée, d'un projet de loi (p. 3056).

Mme la présidente.

Mme Catherine Tasca, ministre de la culture et de la communication.

Mme Nicole Feidt, rapporteuse de la commission des lois.

DISCUSSION GÉNÉRALE (p. 3058)

MM. Henri Plagnol, Jean Vila, Pierre Lellouche, Jérôme Lambert, Philippe Houillon.

Mme la ministre.

Clôture de la discussion générale.

DISCUSSION

DES ARTICLES (p. 3064)

Article 2 bis (p. 3064)

Amendement no 1 de la commission des lois : M. Christian Paul, Mme la ministre, M. Henri Plagnol. - Adoption.

L'article 2 bis est ainsi rédigé.

Articles 6 et 8 (p. 3065)

Article 11 (p. 3065)

Amendements nos 28 de Mme Feidt et 16 de M. Plagnol :

M me la rapporteuse, M. Henri Plagnol, Mme la ministre. - Adoption de l'amendement no 28 ; l'amendement no 16 n'a plus d'objet.

Adoption de l'article 11 modifié.

Après l'article 11 (p. 3066)

A mendement no 17 de M. Houillon : MM. Pierre Lellouche, Jérôme Lambert, Mmes la rapporteuse, la ministre. - Rejet.

Article 12 (p. 3067)

Amendement no 3 de la commission : Mmes la rapporteuse, la ministre, M. Pierre Lellouche. - Adoption.

Adoption de l'article 12 modifié.

Article 14 (p. 3068)

Amendement no 4 de la commission : Mmes la rapporteuse, la ministre, M. Pierre Lellouche. - Adoption.

Adoption de l'article 14 modifié.

Article 16 bis (p. 3069)

Article 18 (p. 3069)

Amendement no 5 de la commission : Mmes la rapporteuse, la ministre, M. Pierre Lellouche. - Adoption.

Adoption de l'article 18 modifié.

Article 29 (p. 3070)

Amendement no 6 de la commission : Mmes la rapporteuse, la ministre. - Adoption.

Adoption de l'article 29 modifié.

Article 33 (p. 3070)

Amendement no 27 de M. Bloche : M. Jérôme Lambert,

Mmes la rapporteuse, la ministre. - Rejet.

Adoption de l'article 33.

Article 35 (p. 3070)

Amendement no 7 de la commission : Mme la rapporteuse,

M. Henri Plagnol, Mme la ministre. - Adoption.

L'article 35 est ainsi rédigé.

Article 36 (p. 3071)

Amendement no 8 de la commission : Mmes la rapporteuse, la ministre, M. Henri Plagnol. - Adoption.

Adoption de l'article 36 modifié.

Article 37 (p. 3072)

Amendement no 9 de la commission : Mmes la rapporteuse, la ministre, M. Pierre Lellouche. - Adoption.

L'article 37 est ainsi rédigé.

Article 41 (p. 3073)

(coordination) Amendement no 10 de la commission : Mmes la rapporteuse, la ministre. - Adoption.

Adoption de l'article 41 modifié.

Article 43 (p. 3073)

Amendement no 11 de la commission : Mmes la rapporteuse, la ministre. - Adoption.

Amendement no 12 de la commission : Mmes la rapporteuse, la ministre. - Adoption.

Adoption de l'article 43 modifié.

Article 43 quinquies (p. 3074)

Amendement de suppression no 13 de la commission : Mmes la rapporteuse, la ministre, M. Henri Plagnol. Adoption.

L'article 43 quinquies est supprimé.

Article 44 A (p. 3074)

Amendement no 18 du Gouvernement : Mmes la ministre, la rapporteuse, M. Pierre Lellouche. - Adoption.

L'article 44 A est ainsi rédigé.

Article 48 bis A (p. 3075)

Amendement de suppression no 15 de la commission :

Mmes la rapporteuse, la ministre. - Adoption.

L'article 48 bis A est supprimé.

Articles 52 et 53 (p. 3075)

VOTE

SUR L'ENSEMBLE (p. 3076)

Adoption de l'ensemble du projet de loi.

2. P rotection des trésors nationaux. - Discussion, en deuxième lecture, selon la procédure d'examen simplifiée, d'une proposition de loi (p. 3076).


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Mme Catherine Tasca, ministre de la culture et de la communication.

M. Jean Rouger, rapporteur de la commission des affaires culturelles.

DISCUSSION GÉNÉRALE (p. 3078)

MM. Bernard Outin, Michel Herbillon, Pascal Terrasse, Christian Kert, Pierre Lellouche.

Mme la ministre.

Clôture de la discussion générale.

DISCUSSION

DES ARTICLES (p. 3083)

Article 2 (p. 3083)

Amendement no 1 de la commission des affaires culturelles :

M. le rapporteur, Mme la ministre. - Adoption.

Adoption de l'article 2 modifié.

Article 5 (p. 3083)

Amendement no 2 de la commission : M. le rapporteur,

Mme la ministre. - Adoption.

Amendement no 3 de la commission : M. le rapporteur,

Mme la ministre. - Adoption.

Adoption de l'article 5 modifié.

Article 7 (p. 3084)

VOTE

SUR L'ENSEMBLE (p. 3084)

Adoption de l'ensemble de la proposition de loi.

3. P ublication du rapport d'une commission d'enquête (p. 3084).

4. Dépôt de propositions de loi (p. 3085).

5. Dépôt d'un rapport en application d'une loi (p. 3085).

6. Dépôt d'un avis (p. 3085).

7. Ordre du jour des prochaines séances (p. 3085).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE Mme CHRISTINE LAZERGES,

vice-présidente

Mme la présidente.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures quinze.)

1

VENTES DE MEUBLES AUX ENCHÈRES PUBLIQUES Discussion, en deuxième lecture, selon la procédure d'examen simplifiée, d'un projet de loi

Mme la présidente.

L'ordre du jour appelle la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi portant réglementation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques (nos 2199, 2301).

Je rappelle que ce texte fait l'objet d'une procédure d'examen simplifiée.

Madame la ministre de la culture, je voudrais vous dire le plaisir que j'ai à vous voir siéger au banc du Gouvernement dans votre nouvelle fonction, alors qu'il y a quelques jours encore, vous étiez notre présidente de la commission des lois. C'est un heureux hasard qui fait que, présidant pour la première fois ce soir les travaux de notre assemblée, je vous trouve en face de moi pour prendre la parole au nom du Gouvernement.

La parole est à Mme la ministre de la culture et de la communication.

Mme Catherine Tasca, ministre de la culture et de la communication.

Madame la présidente, c'est aussi avec émotion que je me retrouve à cette place dans cet hémicycle, et je vous remercie infiniment de vos paroles si accueillantes.

Mesdames, messieurs les députés, votre assemblée est à nouveau saisie du projet de loi réformant les ventes volontaires de meubles aux enchères publiques que

Mme Catherine Trautmann, puis Mme Elisabeth Guigou, ont défendu avec force et conviction.

Madame la garde des sceaux, qui soutient en ce moment même devant le Sénat le projet de loi relatif à la présomption d'innocence, regrette de ne pas être parmi vous. Je suis heureuse d'être aujourd'hui au banc des ministres pour la poursuite de ce débat.

La ministre de la culture et de la communication que je suis aborde les débats qui reprennent avec une grande confiance et avec la volonté de poursuivre, dans la continuité de l'action gouvernementale, cette réforme que je sais ambitieuse et essentielle.

J'ai pu, en qualité de présidente de la commission des lois, mesurer la volonté de la représentation nationale de réformer en profondeur la réglementation fort ancienne des ventes aux enchères et le statut des commissaires priseurs, pour adapter notre droit aux exigences communautaires mais aussi aux contraintes économiques et culturelles d'un marché de plus en plus international. J'ai également mesuré la qualité de vos travaux et des débats sur un sujet d'une grande technicité.

Comme vous le savez, de nombreuses dispositions ont été votées conformes par les deux assemblées, souvent avec le soutien du Gouvernement. Je m'en réjouis.

Je constate, en effet, que nous nous accordons tous sur les axes essentiels de la réforme.

Je pense notamment : à la définition du périmètre de la nouvelle réglementation, à la recherche d'une compétitivité accrue des professionnels français, qui doivent pouvoir exercer dans des structures commerciales adaptées, ou encore aux exigences déontologiques et aux garanties auxquelles doivent être soumis les opérateurs, qui traitent le plus souvent avec de simples consommateurs et interviennent fréquemment sur le marché de l'art.

Vous connaissez parfaitement l'ensemble de ces questions. Je n'y reviendrai pas et ne développerai que les principaux points qui n'ont pu, à ce stade de la discussion, faire l'objet d'un vote conforme.

Le premier point qui doit être débattu est sur la réglementation qu'il convient d'appliquer aux ventes aux enchères sur Internet.

En réalité, la problématique est plus technique que politique.

Les transactions sur réseau numérique correspondentelles à des ventes aux enchères ? Si oui, le projet de loi doit-il s'appliquer dans son ensemble ou, pour partie, aux opérations concernées ? Faut-il, au contraire, prévoir une réglementation spécifique à Internet ? L'ensemble de ces questions méritent réflexion.

Le Sénat a souhaité, dès la première lecture, englober purement et simplement les ventes « en ligne » dans le champ d'application du projet de loi.

Le Gouvernement, dans ce contexte, a confié, en janvier dernier, une mission d'expertise à un avocat général à la Cour de cassation et à un inspecteur général de l'administration des affaires culturelles. Leur rapport est particulièrement riche d'enseignements.

Il a tout d'abord mis en évidence que, sur la plupart des sites, les opérateurs du réseau numérique ne procèdent pas à de véritables ventes aux enchères. En effet, le vendeur et l'acheteur, sélectionnés après une mise en concurrence, sont simplement mis en relation par un prestataire de services, mais demeurent libres de contracter ou non.

Dans le cadre de véritables ventes aux enchères, à l'inverse, la société de vente agit, non comme intermédiaire, mais comme mandataire du vendeur et le transfert de propriété est automatique à la clôture des opérations.

Le texte en discussion, et je partage le point de vue de la commission des lois sur cette question, n'a pas pour objet, a priori, de réglementer les transactions qui ne répondent pas aux critères traditionnels de définition de


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la vente aux enchères. C'est là tout le sens du premier alinéa de l'amendement de la commission, auquel le Gouvernement apportera son soutien.

M. Christian Paul.

Très bien !

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Ce rapport conclut aussi à la nécessité de renforcer le dispositif lorsque les opérations portent sur des objets d'art.

Il est indispensable de préserver notre patrimoine national et de protéger l'acquéreur, qui, sur le marché de l'art, est dans une situation de plus grande vulnérabilité.

Il s'agit, en effet, d'éviter, pour les biens culturels, tous les procédés de contournement qui ne tendraient qu'à éluder la nécessaire protection des acquéreurs et les objectifs de conservation du patrimoine.

C'est pourquoi l'amendement, dans son troisième alinéa, étend les garanties découlant de la loi, non seulement aux enchères stricto sensu, mais aussi, plus largement, à toutes les formes de ventes de biens culturels s'y apparentant.

Le dispositif qui vous est proposé est, j'en suis convaincue, équilibré.

La seconde question que je souhaite aborder devant vous est l'indemnisation des commissaires-priseurs.

Le Gouvernement ainsi que votre assemblée estiment que l'atteinte à la valeur pécuniaire du droit de présentation ne constitue pas une expropriation au sens de l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

M. Pierre Lellouche.

Et pourtant !

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Le Gouvernement a cependant pris résolument le parti d'indemniser les commissaires-priseurs du préjudice qu'ils subiront du fait de l'ouverture à la concurrence des ventes volontaires, et ce en vertu du principe d'égalité devant les charges publiques.

Sur ce point, j'ajouterai simplement que l'Etat a fait le c hoix de financer intégralement l'indemnisation des commissaires-priseurs et que le Gouvernement a pris l'engagement solennel d'assurer la neutralité fiscale des transformations juridiques imposées par la réforme.

Je ne voudrais pas conclure ces propos sans saluer l'important travail accompli par la commission des lois. Je souhaite rendre un hommage particulier à Mme Nicole Feidt, rapporteuse du projet. Grâce à sa volonté, à son travail et à ses qualités d'analyse, nous abordons aujourd'hui ce débat dans les meilleures conditions, débat dans lequel, je le sais, plusieurs d'entre vous, sur tous les bancs de l'Assemblée, se sont engagés avec un grand intérêt et parfois beaucoup de passion. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Mme la présidente.

La parole est à Mme la rapporteuse de la commission des lois constitutionnelles, de la l égislation et de l'administration générale de la République.

Mme Nicole Feidt, rapporteuse de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

Madame la présidente, madame la ministre, puis-je me permettre d'adresser un clin d'oeil complice aux deux personnes qui siégeaient récemment à mes côtés à la commission des lois et qui ont été promues, l'une ministre, l'autre première vice-présidente de l'Assemblée nationale.

Mme Yvette Benayoun-Nakache.

Bravo !

Mme Nicole Feidt, rapporteuse.

Après une deuxième lecture au Sénat, l'Assemblée nationale examine ce soir le projet de loi portant réglementation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques.

Il reste dix-neuf articles en navette, dont trois introduits par le Sénat en deuxième lecture, treize ayant été adoptés conformes.

Le Sénat a réaffirmé sa position initiale, opposée à celle de l'Assemblée nationale et du Gouvernement, sur quelques points importants et sur certaines dispositions plus ponctuelles : la vente par Internet, les ventes réalisées de gré à gré, le prix d'adjudication minimal, la composition du conseil de vente aux enchères publiques, le nombre de spécialités pour lesquelles un expert peut être agréé, les modalités d'indemnisation des commissaires-priseurs et les dispositions fiscales introduites par le Sénat pour accompagner la réforme.

Le Sénat précise que la présente loi s'applique aux ventes électroniques à l'article 2 bis.

Concernant la vente volontaire aux enchères réalisée par voie électronique, il est nécessaire de trouver un équilibre qui permette de satisfaire simultanément plusieurs objectifs. Il est avant tout essentiel d'apporter aux personnes qui achètent des biens aux enchères par ligne des garanties substantielles. En même temps, il apparaît indispensable de ne pas nuire au développement en France du commerce électronique ainsi qu'à celui des sociétés qui le pratiquent et qui créent des emplois.

Les auditions des sociétés concernées ont permis de mettre en évidence le fait que très peu d'opérations réalisées par voie électronique constituaient effectivement des ventes aux enchères au sens de la loi.

Plusieurs sites proposent la vente d'objets en recourant à la technique des ventes aux enchères, mais ils ne sont que des intermédiaires mettant en contact le vendeur avec des personnes ayant présenté les offres les plus élevées. Ils ne procèdent pas, bien sûr, à l'adjudication du bien, et n'agissent pas comme mandataires du vendeur. Il s'agit de courtage aux enchères.

C'est ce qui se passe actuellement dans la plupart des cas, et il est apparu nécessaire à votre rapporteuse de soumettre les sociétés qui procèdent à une vente sous forme d'enchères par Internet aux dispositions de la loi pour les ventes d'objets d'art et de biens culturels.

Pour ce qui est des véritables ventes aux enchères par Internet, la loi doit s'appliquer. La société agit comme mandataire du propriétaire, elle procède à l'adjudication du bien au mieux-disant, en réalisant un transfert immédiat avec les garanties prévues par la loi en termes de publicité ou d'expertise des oeuvres, par exemple. Ce sont les dispositions prévues à l'article 2 bis, que la commission des lois a adoptées.

Je pense que les futures sociétés commerciales de vente aux enchères sauront mettre en avant les garanties qu'elles apportent, et que les utilisateurs feront une distinction entre vente aux enchères et courtage aux enchères.

A l'article 8, la définition du régime de la vente de gré à gré, par l'intermédiaire de la société de vente volontaire de meubles aux enchères, d'un bien déclaré non adjugé n'a pas été adoptée par le Sénat.

L'Assemblée nationale avait accepté l'allongement du délai préconisé par le Sénat, mais n'avait pas suivi ce dernier sur les conditions de telles ventes, estimant à juste raison que celles-ci doivent rester exceptionnelles et strictement encadrées, pour éviter les dérives. C'est la raison


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

pour laquelle la commission des lois a repoussé les amendements de notre collègue Houillon, qui allaient dans le sens du Sénat.

En revanche, la commission a adopté un amendement de votre rapporteuse garantissant un prix d'adjudication minimal, afin d'éviter les ententes illicites.

La commission a également accepté un amendement autorisant à garantir un prix d'adjudication minimal pour les seules sociétés de ventes ayant passé, avec un organisme d'assurance ou un établissement de crédit, un contrat au terme duquel celui-ci s'engage, en cas de défaillance de la société, à rembourser la différence entre le montant garanti et le prix d'adjudication, si le montant du prix garanti n'est pas atteint lors de la vente aux enchères.

En ce qui concerne l'indemnisation des commissairespriseurs, la position du Sénat reste opposée à celle de l'Assemblée nationale et du Gouvernement.

Le Sénat a réaffirmé son attachement à une indemnisat ion des commissaires-priseurs fondée juridiquement, d'une part, sur la « perte du droit de présentation de leur successeur en matière de ventes volontaires de meubles aux enchères », et, d'autre part, sur la « suppression du monopole qui leur était confié dans ce domaine », et non sur le « préjudice subi du fait de la dépréciation de la valeur pécuniaire de leur droit de présentation ».

Le droit de présentation, je le rappelle, ne semble pas constituer un droit de propriété : les commissairespriseurs n'en disposent pas librement. Mais même en supposant que le droit de présentation de son successeur constitue un droit de propriété, le commissaire-priseur ne subit pas, du fait de la loi, une expropriation puisque ce droit est maintenu pour les ventes judiciaires. Il ne connaît qu'une perte de valeur pécuniaire que la présente loi se propose d'indemniser. Indemnisation que nous examinerons aux articles 36 et 37.

Il découle de la logique du fondement retenu pour l'indemnisation par le Sénat diverses dispositions que la commission a rejetées.

L'introduction par le Sénat d'un nouvel article, l'article 44 A, modifierait l'article L.

122-5 du code de la propriété intellectuelle. Il s'agit de l'exonération du droit de reproduction, qui, à l'heure actuelle, ne concerne que les catalogues des ventes aux enchères effectuées en France par un officier public ou ministériel.

L'article additionnel adopté par le Sénat viserait à élargir le champ de l'exception faite dans le cadre du monopole des offices à toutes les ventes d'oeuvres d'art, graphiques ou plastiques.

Cette disposition serait susceptible d'exposer la France à un contentieux communautaire, les exceptions en matière de droits de reproduction devant rester très limitées. En outre, l'application actuelle des règles du droit commun ne semble pas constituer un facteur déterminant dans le choix de la localisation d'une vente à l'étranger.

La commission a accepté l'amendement du Gouvernement limitant l'exonération du droit de reproduction aux seules ventes judiciaires.

M. Pierre Lellouche.

C'est regrettable !

Mme Nicole Feidt, rapporteuse.

Voilà, mes chers collègues, retracés rapidement, les travaux de la commission des lois. Les commissaires-priseurs et leurs organes professionnels attendent depuis des années que la réforme devienne réalité, de même que les professionnels qui gravitent autour de la vente aux enchères de meubles.

Cette réforme est attendue avec impatience. Je vous propose donc d'en délibérer sans plus attendre. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) Discussion générale

Mme la présidente.

Dans la discussion générale, la parole est à M. Henri Plagnol.

M. Henri Plagnol.

Je suis heureux, madame la présidente, de vous saluer à mon tour, et je suis sûr que vous remplirez au mieux votre nouvelle fonction, car j'ai déjà pu apprécier la pertinence de vos interventions en commission des lois.

De même, je suis heureux, madame la ministre, de vous féliciter. Et permettez-moi, puisque chacun sait qu'un ministre connaît toujours un état de grâce surtout quand il est, comme vous, précédé d'une aura culturelle -, de vous lancer un appel pour le marché de l'art français. Peut-être pourrez-vous obtenir, avec le concours complice d'un ministre des finances qui nous promet des baisses d'impôts et qui est forcément sensible aux questions culturelles, ce qu'aucun de vos prédécesseurs n'a pu obtenir de Bercy, c'est-à-dire un effort sérieux, qui permette de profiter réellement de la nouvelle donne dans laquelle s'inscrit notre texte et de redonner à la place de Paris le rôle et le rayonnement qui pourraient être les siens.

Je me bornerai ici aux trois points de désaccord entre nous. S'agissant du geste que la place de Paris et les commissaires-priseurs attendent, il y a tout d'abord deux points sur lesquels vous pourriez facilement agir dès maintenant.

Le premier concerne l'indemnisation des commissairespriseurs. Et là, je m'inscris en faux contre ce que vient de dire Mme la rapporteur. Cette indemnisation, vous le savez, est fixée à un taux de 50 %, qui relève de l'escroquerie intellectuelle et morale. C'est tellement vrai que le Sénat vient d'adopter pour adapter, d'ailleurs, une directive européenne, comme c'est le cas du texte que nous examinons - une proposition de loi sur les courtiers maritimes, qui prévoit d'indemniser ceux-ci à hauteur de 65 %. Il n'y a aucune différence juridique qui justifie une telle discrimination. L'argument, invoqué par le ministre ce n'était pas vous, madame la ministre - dans sa réponse à la question d'un sénateur, consistant à dire que le problème ne se pose pas dans les mêmes termes puisque n'est pas remis en cause le monopole des ventes judiciaires, cet argument ne vaut rien, puisque, dans l'assiette du préjudice indemnisé, il n'y a pas le montant des ventes judiciaires.

Vous courrez donc un risque sérieux de censure constitutionnelle, et l'opposition, au nom du principe d'égalité devant les charges publiques, et au nom de la jurisprudence constante du Conseil constitutionnel et de la Cour européenne des droits de l'homme en matière d'expropriation, déposera un recours si vous ne faites pas un geste conséquent. Vous pourriez a minima aligner le taux de l'indemnisation sur celui qui va être appliqué aux courtiers maritimes.

Le deuxième geste très attendu, et nous avons déposé un amendement en ce sens, concerne la fiscalité. Il c onvient de supprimer les quelques handicaps qui plombent la place de Paris et qui représentent, en termes de masse pour les finances publiques, des sommes extrêmement faibles. Je pense, bien entendu mais il est inutile d'entrer dans le détail, nous en avons abondamment


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

parlé -, au taux de la TVA à l'importation et au droit de suite. Sur ce point, des réformes ont été envisagées, étudiées, il y a eu de nombreux rapports, notamment le rapport Chandernagor...

M. Pierre Lellouche.

Et le mien, alors ? (Sourires.)

M. Henri Plagnol.

... et il est temps de passer aux actes.

Enfin, j'en viens au point qui est probablement le plus intéressant dans notre débat de ce soir, celui qui concerne l'opportunité ou non de légiférer sur les ventes par Internet. Je suis heureux de constater que les avertissements de l'opposition - et pas seulement de l'opposition, d'ailleurs, car je n'oublie pas ceux de quelques éminents collègues, notamment Christian Paul, spécialiste de cette question ont été entendus. Il était inconcevable, comme je l'avais dit à votre prédécesseur, que, une fois de plus, nous votions une loi pour rien. J'avais rappelé, lors de la première lecture, qu'il était très symbolique que, alors même que nous nous apprêtions à voter l'abrogation du monopole des commissaires-priseurs, venait d'avoir lieu sur Internet la première vente aux enchères en matière d'art contemporain. Cette vente aux enchères sans commissaire-priseur a d'ailleurs donné lieu à une plainte, dont nous ne connaisons pas encore l'issue judiciaire.

Il est donc à mes yeux absolument indispensable de légiférer, et je suis persuadé que si nous avons le courage de prendre nos responsabilités de législateurs, les ventes par Internet donneront une chance supplémentaire aux sites français. Car nous avons des professionnels dont la fiabilité est reconnue, nous avons une expertise incontestée et, bien entendu, nous avons la chance d'avoir des richesses exceptionnelles en termes de patrimoine. Et puisque les ventes par Internet échapperont à nos vices jacobins et fiscaux traditionnels, je suis absolument persuadé que si nous savons nous doter d'un minimum de règles pour rassurer les vendeurs et les acheteurs, et pour assurer la sécurité et la confidentialité nécessaires à ces ventes, la place française y gagnera. Vous avez dit à juste titre, madame la ministre, que jusqu'à présent les ventes aux enchères ne concernaient que marginalement le chiffre d'affaires du marché de l'art, et surtout des objets de faible valeur. En revanche, Drouot s'est doté d'un site qui, à l'aide de technologies numériques, et sans procéder aux enchères, permet à tous ceux qui le souhaitent d'assister en temps réel au déroulement de la vente. Ce site connaît déjà un succès important. Il faut donc conforter cette voie, ne pas avoir peur de la modernité et tenir compte de la réalité du marché mondial. Notre pays, qui est riche de son patrimoine et de ses facultés de création, a tout à gagner à ce qu'une loi intelligente le fasse passer, si j'ose dire, du

XIXe siècle au

XXIe siècle en ce qui concerne les ventes d'objets d'art.

M. Philippe Houillon et M. Pierre Lellouche.

Très bien !

Mme la présidente.

La parole est à M. Jean Vila.

M. Jean Vila.

Madame la présidente, madame la ministre, chers collègues, le projet de loi que nous examinons aujourd'hui en seconde lecture vise, comme chacun le sait, à décider la fin du monopole des commissairesp riseurs sur les ventes volontaires de meubles aux enchères publiques. Cette réforme, qui nous est imposée dans le cadre d'une harmonisation européenne, permettra d'ouvrir le marché à une certaine concurrence. Mais permettra-t-elle à notre pays de revenir au tout premier plan sur le marché de l'art mondial ? L'enjeu est d'autant plus important que nous allons passer d'une idée spécifiquement française, selon laquelle l'Etat est le gardien du patrimoine national, à l'ère de la libéralisation du marché, entendu comme le moyen privilégié de la modernisation du marché de l'art français.

Notre système de ventes volontaires sera ainsi calqué sur celui de la Grande-Bretagne : absence de monopole, libre concurrence, absence de tarifs imposés, utilisation de techniques de ventes telles que les transactions de gré à gré, les avances sur fonds propres ou encore les prix garantis.

On comprend, dans ces conditions, les raisons qui ont conduit le Gouvernement à déposer ce projet de loi, qui viserait, à travers certaines de ses dispositions, à réglementer plus strictement les ventes dans le souci d'assurer la protection du consommateur et du vendeur.

Mais l'encadrement juridique ainsi proposé pour accéder à cette libéralisation suffit-il à rasséréner ceux qui restent sceptiques sur l'efficacité d'une telle démarche quant aux résultats escomptés ? Ayant attentivement écouté nombre de représentants de la profession, je m'autoriserai à penser que face à cette réforme, l'enthousiasme que l'on croit déceler chez les commissaires-priseurs français n'est peut-être pas celui que l'on croit.

Cette réforme semble être plus attendue par les maisons de ventes aux enchères anglo-saxones que par nos commissaires-priseurs. Dans leur grande majorité, ceux-ci redoutent les agissements des sociétés de ventes les plus importantes, les plus prestigieuses, qui, au gré des disparités fiscales et économiques, déplacent les oeuvres d'art dans le monde.

Deux d'entre elles n'ont-elles pas déjà investi massivement pour améliorer leurs techniques commerciales et élargir leur surface financière ? Contre les géants anglo-saxons notamment, les mesures envisagées sont-elles suffisamment protectrices et susceptibles de hisser la France au niveau qui lui revient dans ce secteur, ou sont-elles de nature à vouer notre pays à devenir un marché d'exportation de notre patrimoine ? Je relève avec satisfaction, madame la ministre, que votre volonté n'est pas la libéralisation totale de ce secteur d'activité mais une redynamisation du marché, sous condition d'exigences déontologiques et de garanties au bénéfice des consommateurs.

En ce sens, je partage l'inquiétude du groupe communiste, républicain et citoyen, ainsi que celle du groupe socialiste au Sénat, qui, en s'abstenant sur le texte modifié par les amendements adoptés par la droite sénatoriale, ont souhaité marquer leur opposition à une plus grande libéralisation de notre marché de l'art.

Nous souhaitons pour notre part que l'assemblée revienne sur certaines dispositions du texte, pour entourer cette libre concurrence des plus grandes garanties.

Je ne développerai pas l'ensemble des interrogations que j'avais exprimées en première lecture, mais certains points nous semblent devoir être examinés très attentivement.

Il s'agit d'abord de l'indemnisation prévue pour les commissaires-priseurs en contrepartie de la perte de leur monopole.

Des différents débats entendus, il ressort une volonté commune de donner à ces professionnels les moyens de réaliser les investissements qu'induit cette réforme. Il ne semble pas que les propositions initiales du projet répondent à l'attente des commissaires-priseurs concernés.


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Une disposition limite, en toute hypothèse, le montant de l'indemnisation à 50 % de la valeur théorique de l'office, calculée selon les critères qu'a proposés la commission mise en place par le ministre de la justice en 1997, aboutissant ainsi à une véritable privation de patrimoine sans indemnisation intégrale, dans la mesure où une indemnisation forfaitaire, quel qu'en soit le montant, ne peut être conforme aux obligations de réparation intégrale du préjudice.

Les commissaires-priseurs craignent de se trouver rapidement dans une situation difficile, qui les conduirait à céder leurs offices à certaines sociétés.

De la même manière, les conséquences de cette réforme sur la situation des commissaires-priseurs de province inquiètent légitimement les intéressés.

M. Pierre Lellouche.

Bravo !

M. Jean Vila.

Ils représentent les trois quarts des commissaires-priseurs français, établis dans 262 villes, dont une grande majorité de moins de 50 000 habitants.

Ils contribuent par ce maillage à assurer, outre leur mission de service public, un service de proximité à l'usage des consommateurs.

Le projet propose une indemnisation dont l'enveloppe globale est, dès le départ, simplement inférieure à l'endettement professionnel des commissaires-priseurs...

M. Pierre Lellouche.

Très bien !

M. Henri Plagnol.

Bravo !

M. Jean Vila.

... et dont le mode de calcul ne respecte pas le principe d'égalité devant les charges publiques, créant une inégalité avec les nouvelles sociétés de ventes et une discrimination entre Paris et la province.

M. Henri Plagnol.

Il a raison !

M. Pierre Lellouche.

Oui, on va finir par l'applaudir !

M. Jean Vila.

Privés de moyens financiers face à des multinationales aux réserves financières importantes, on a peine à imaginer que même les plus dynamiques puissent conquérir des parts de marché substantielles.

M. Pierre Lellouche.

Et voilà !

M. Jean Vila.

Dernier point : les ventes volontaires de meubles aux enchères publiques réalisées à distance par voie électronique. Cette question a fait l'objet d'un large débat au Sénat. Depuis, la réflexion a certainement évolué. Je vous saurai gré, madame la ministre, de bien vouloir nous informer avec précision des dispositions que vous entendez prendre pour rompre avec le flou juridique qui prévaut actuellement.

Pour conclure, je dirai que si nous n'approuvons pas le texte adopté par le Sénat, nous souhaitons que les modifications qui seront apportées ce soir par l'Assemblée nationale nous permettent d'adopter ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Pierre Lellouche.

M. Pierre Lellouche.

Je tiens tout d'abord, madame la présidente, à vous féliciter à mon tour de votre brillante promotion à une fonction dans laquelle je sais que vous excellerez.

Quant à vous, madame la ministre, quelle joie de vous voir au banc du Gouvernement ! En tant que parisien et député du quartier Drouot, mais aussi de Christie's et de Sotheby's, je considère que c'est un honneur de vous avoir ce soir devant nous. Paris a récemment perdu un candidat de la gauche plurielle qui s'intéressait à la culture - du moins le prétendait-il. Ce soir, Paris gagne une ministre de la culture qui, j'en suis sûr, fera de grandes choses.

J'espère, madame, pouvoir compter sur vous pour aider notamment Drouot, les galeries et le marché de l'art à Paris.

Vous avez dit que ce texte était ambitieux. Nécessaire, sans doute, pour moderniser et adapter notre marché de l'art au regard du droit européen, mais ambitieux, hélas ! il ne l'est point.

En effet, il est totalement silencieux sur les grands dossiers fiscaux qui conditionnent pourtant l'essentiel du marché de l'art : fiscalité générale, fiscalité spécifique aux oeuvres d'art, TVA à l'importation, droit de suite. A ce propos, je regrette vivement que la France ne se soit pas opposée à un accord scandaleux.

M. Henri Plagnol.

Très juste !

M. Pierre Lellouche.

Cet accord non seulement maintient le droit de suite à 3 %, mais, en plus, accorde aux Britanniques, hostiles au droit de suite, un délai de grâce de quinze années.

M. Philippe Houillon.

C'est insensé !

M. Pierre Lellouche.

J'avais proposé à la délégation pour l'Union européenne, qui l'avait acceptée, une disposition invitant le Gouvernement à modifier cette fiscalité à l'approche de la présidence française de l'Union européenne. Mais, du fait de l'acceptation par le Gouvernement de cet accord, cette proposition de résolution a été mise au rencard. Pourtant, la fiscalité devient de plus en plus dirimante, hostile à la reconstitution de la place de Paris comme coeur du marché de l'art. Ce marché conditionne environ 60 000 emplois directs et il concerne la vie culturelle de la capitale, comme de nombreuses autres villes.

Ce texte était donc attendu, mais il n'assure en fait qu'un service minimum. L'examen de ce texte étant soumis à la procédure simplifiée, je serai bref.

Je me félicite d'abord que le Gouvernement ait enfin accepté de légiférer sur les ventes aux enchères sur Internet. Nous avions fait ici même en première lecture des propositions en ce sens. Nos amendements avaient été, à l'époque, rejetés. Je suis heureux de voir que, sous la pression des sénateurs et de certains membres de votre majorité, vous proposez aujourd'hui un bon texte, que nous voterons.

Je rappellerai ensuite les scories qui encombrent le projet.

A l'article 12, la garantie de remboursement des avances consenties au vendeur va handicaper les petites structures par rapport aux très grosses qui vont venir s'installer à Paris, comme Sotheby's ou Christie's.

A l'article 14, je ne comprends toujours pas, mais j'y reviendrai plus longuement tout à l'heure, pourquoi un ressortissant européen, prestataire de services en France, est mieux traité qu'un prestataire français au regard du droit pénal. Sur quoi fonder, en droit européen, de telles distinctions ? L'indemnisation des commissaires-priseurs, problème clef de ce texte, ne vise pas, comme le prévoit l'article 35, à réparer un « préjudice subi du fait de la dépréciation de la valeur pécuniaire de leur présentation » mais bien « la perte du droit de présentation ». Il s'agit, dès lors, d'une véritable expropriation de fait. Or qui dit expropriation


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dit réparation à des conditions légales, reconnues à l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme. L'indemnisation forfaitaire à 50 % qui est proposée n'a aucune base légale, ni en droit français, ni en droit européen. Vous vous exposez donc, madame le ministre, à la censure du Conseil constitutionnel que le groupe RPR, comme sans doute les autres groupes de l'opposition, ne manquera pas de saisir sur ce point qui nous paraît contraire aux principes fondamentaux de notre droit.

Par ailleurs, la taxation du droit de reproduction nous paraît pénaliser injustement la place de Paris.

Enfin, la composition du Conseil des ventes volontaires, sur laquelle j'avais fait des propositions en première lecture et sur laquelle le Sénat vous a proposé de trouver un équilibre entre les personnalités nommées par le Gouvernement et les personnalités venant du marché de l'art, a été bouleversée. Vous avez à nouveau étatisé inutilement le Conseil des ventes volontaires. Là aussi, la version du Sénat me semble meilleure.

Mais nous serons appelés à nous exprimer sur tous ces points lors de la discussion des amendements.

Au total, ce texte est évidemment mieux que rien.

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Merci.

M. Philippe Houillon.

C'est la bonne expression !

Mme Nicole Feidt, rapporteuse.

Vous êtes bien bon !

M. Pierre Lellouche.

Il avait d'ailleurs été commencé sous Jacques Toubon.

Mme Nicole Feidt, rapporteuse.

Tout à fait !

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Je sais !

M. Pierre Lellouche.

Puis il a été poursuivi par votre prédécesseur, madame.

Mais, vous en conviendrez avec moi, il ne règle ni les problèmes de fond en matière financière et fiscale, ni l'indemnisation des commissaires-priseurs.

L'insuffisance des indemnités prévues me fait craindre une aggravation de la situation financière de certains offices de commissaires-priseurs. Je suis inquiet pour leur pérennité, comme pour celle de Drouot. Je rappelle que les sommes prévues pour l'indemnisation qui étaient, au départ, de l'ordre de 2,5 milliards, s'élèvent aujourd'hui à moins de 500 millions de francs pour plus de 400 études, soit moins de un million pour chacune d'entre elles, ce qui ne va pas sans poser problème, surtout pour les jeunes.

Il ne s'agit pas de protéger les riches, mais d'essayer de reconstituer à Paris un marché de l'art. Or je ne crois pas que l'équilibre général de ce texte y contribue.

M. Henri Plagnol et M. Philippe Houillon.

Très bien !

Mme la présidente.

La parole est à M. Jérôme Lambert.

M. Jérôme Lambert.

Madame la présidente, à mon tour, permettez-moi de vous féliciter et de vous dire combien je suis heureux de vous voir présider nos travaux.

Quant à vous, madame la ministre, vous avez, depuis longtemps, une bonne connaissance des dossiers culturels et nous savons que nous pouvons compter sur votre écoute. Aussi sommes-nous heureux de vous voir ce soir au banc du Gouvernement.

La deuxième lecture devant notre assemblée du texte relatif à l'organisation des ventes aux enchères publiques devrait nous permettre de procéder à quelques avancées significatives sur des points dont nous avons largement débattu lors de la première lecture.

En quelques mots, je voudrais préciser les attentes des députés socialistes. Les sénateurs ont approuvé beaucoup de dispositions que nous avions nous-mêmes votées, mais il reste quelques articles sur lesquels nous devons nous pencher, faute d'un accord entre nos propositions et le texte adopté par le Sénat, du moins pour le moment.

Au cours de cette lecture, plusieurs articles pourront être approuvés conformes ; d'autres méritent une réécriture ou resteront marqués par les opinions différentes de nos deux assemblées. Mais je souhaite qu'à l'issue de ce débat nous puissions rapidement arriver à un accord définitif permettant l'application rapide de ce texte.

Comme je le disais lors de la première lecture, les orientations générales de ce texte sont attendues depuis des années. Reste à définir quelques dispositions particulières dans l'intérêt bien légitime de l'organisation des ventes aux enchères, c'est-à-dire de tous les opérateurs et de tous ceux qui souhaitent le développement du marché de l'art dans notre pays. Là est véritablement l'enjeu des dispositions que nous examinons. Cette réforme, nécessaire sur le plan des règles de l'Union européenne, doit aussi être utile aux quelque 60 000 acteurs du marché de l'art français, professionnels ô combien compétents.

L es sociétés de ventes volontaires aux enchères publiques de droit français seront les moteurs de la reconquête de notre marché. Déjà, avant même l'adoption du projet de loi, nous observons de vastes mouvements dans la profession de commissaire-priseur, qui montre ainsi sa capacité à faire évoluer le système qui lui est propre. D'autres opérateurs internationaux sont, eux aussi, d'ores et déjà présents sur notre marché. Leur anticipation traduit la confiance que les professionnels du monde entier ont dans le marché français.

Je refuse d'adopter une attitude misérabiliste qui considérerait les autres comme définitivement meilleurs que nous, estimant que nos règles, propres à notre modèle culturel et social, seraient un frein considérable face au marché mondial. Je vois plutôt nos atouts, qui tiennent en premier lieu à la qualité des professionnels que compte notre pays dans le domaine du marché de l'art. Je ne veux pas copier le système américain ou japonais, même si leur marché de l'art semble avoir connu une pleine croissance, car ces systèmes s'appuient sur des règles sociales et culturelles qui nous sont étrangères et qui, je l'espère, le resteront.

Un mot, donc, sur quelques dispositions que nous allons réexaminer.

En premier lieu, l'article 2 bis , qui traite des conditions d'application de la présente loi sur les enchères par mode électronique. J'avais souhaité à l'occasion de la première lecture que la réflexion que nous avions engagée puisse aboutir. Je suis presque certain que, dans quelques minutes, nous allons trouver un accord global utile et même indispensable à un tel dispositif législatif.

La question de l'indemnisation du préjudice que pourront subir les commissaires-priseurs en raison de l'application des nouvelles règles de leur profession mérite également d'être réexaminée. Entre le texte que nous avions adopté et celui voté par le Sénat apparaît une divergence portant sur les conditions du calcul de l'indemnisation et


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sur son fondement. Je connais les arguments qui s'opposent à la position de l'Assemblée. Mais il ne faut pas se tromper de débat.

Nous n'allons pas « nationaliser » les commissairespriseurs et nous ne sommes pas fondés à leur allouer une indemnisation en rapport avec une forme de dépossession de propriété. Ils garderont, en effet, l'entière propriété d es fonds de commerce qu'ils constitueront pour satisfaire aux dispositions de la loi. Ils perdront la possibilité de vendre leur droit de présentation, ce que nous allons indemniser, mais ils conserveront, bien entendu, la possibilité de vendre leurs entreprises commerciales et d'en tirer alors une rémunération, tout comme lorsqu'ils appliquaient le droit de présentation. Les commissairespriseurs sont donc loin de tout perdre ; ils ont même à gagner car, bénéficiant d'une certaine indemnisation, ils pourront aussi percevoir justement les fruits de leur travail futur, qui repose sur les fondements qu'ils ont déjà construits et dont il ne s'agit aucunement de les spolier.

J'en appelle donc à un juste examen de la situation particulière qui doit leur être appliquée, quitte à trouver des modalités permettant de prendre en compte, avec certitude, tous les cas de figure, sans se limiter obligatoirement aux propositions actuelles, mais sans aller jusqu'à considérer qu'il s'agirait de les indemniser pour la perte totale de leur outil de travail, ce qui est profondément inexact.

Je m'arrêterai un instant sur les dispositions adoptées par le Sénat en matière d'indemnisation des courtiers maritimes pour répondre à M. Plagnol. Vous ne semblez pas, cher collègue, trouver à redire sur le principe de cette indemnisation allouée aux mandataires maritimes. Or ce principe est le même que celui que nous allons appliquer aux commissaires-priseurs, que vous remettez en cause. Je vois là une contradiction.

Quant au montant, il est certe de 50 % pour les commissaires-priseurs et de 65 % pour les courtiers maritimes. Mais il y a une possibilité de modulation de 15 % supplémentaires pour les commissaires-priseurs, qui permettrait d'atteindre 65 %, donc de retrouver la même situation que les mandataires maritimes.

Mon temps de parole étant largement entamé, voire déjà dépassé, je me réserve la possibilité d'intervenir l ors de la présentation des amendements qui me semblent être les plus significatifs.

Je conclurai en souhaitant que le débat de ce soir, à l'instar de ce qu'il a pu être en première lecture, soit une source d'enrichissement du texte. Je souhaite aussi que nous puissions rapidement l'adopter définitivement pour faire face aux défis que nous voulons relever, et redonner à la France une place plus honorable dans le marché mondial de la culture et de l'art. C'est là un enjeu très important, qui dépasse largement les aspects culturels p our avoir des répercussions importantes dans les domaines économique, touristique et social.

Le texte qui nous est présenté va dans la bonne direction. Le débat que nous allons avoir devrait permettre de l'améliorer encore. Soyez certaine, madame la ministre, de la volonté des députés socialistes d'accompagner toute évolution qui irait dans ce sens. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Philippe Houillon.

M. Philippe Houillon.

Madame la ministre, je me réjouis, moi aussi, de voir notre ancienne présidente de la commission des lois au banc du Gouvernement. Je suis sûr que vous saurez, madame, insuffler à celui-ci le vent de dynamisme et de modernité qui soufflait de temps en temps à la commission des lois, et ce texte est une bonne occasion pour commencer.

Le texte que nous examinons aujourd'hui en deuxième lecture est relativement consensuel dans son principe.

Tout le monde s'accorde à dire qu'il était grand temps de réformer le marché de l'art français, et particulièrement celui des ventes aux enchères publiques.

La plus grande libéralisation des ventes que ce texte organise, par l'intermédiaire notamment des ventes de gré à gré, des techniques de garantie de prix, devrait apporter la bouffée d'oxygène dont les commissaires-priseurs français ont besoin pour être en mesure de faire face à la concurrence étrangère.

Pour autant, on a le sentiment d'une évolution à contrecoeur. Et le projet de loi témoigne encore de certaines réticences, qui se traduisent notamment par le maintien d'une réglementation encore trop stricte. Malgré les demandes des professionnels, malgré nos incitations et malgré le constat quotidien de l'importance de la concurrence étrangère sur un marché où, compte tenu du patrimoine artistique de notre pays, la France devrait, en principe, être aux premières places, malgré tout cela, on reste dans un cadre encore trop conservateur, qui risque de pénaliser les professionnels français. Je vous rappelle que le déficit d'échanges avec l'étranger en matière d'oeuvres d'art s'élève encore à 2 milliards de francs par an.

Réglementation trop stricte et je pense là aux experts, à la composition du conseil des ventes, avec une mainmise du Gouvernement.

M. Michel Herbillon.

Tout à fait !

M. Philippe Houillon.

Certes, il faut trouver un équilibre entre la libéralisation du marché, vitale pour les professionnels, et la nécessité de protéger le consommateur.

Mais, à force de résister, nous risquons de vider la réforme de sa substance et de la faire passer à côté de son objectif premier qui est de redynamiser le marché de l'art français.

Pour cette raison, nous ne pouvons que nous féliciter de la décision de la commission d'inclure les ventes sur Internet dans le champ d'application du projet.

N éanmoins, permettez-moi d'exprimer quelques craintes quant aux moyens dont disposeront les commissaires-priseurs pour s'adapter rapidement à la nouvelle donne. La révolution que constitue pour eux la suppression de leur monopole rend indispensable que nous leur fournissions les moyens de faire face immédiatement à la concurrence étrangère. Sinon, le marché français risque d'être littéralement submergé par les sociétés de ventes étrangères. Et alors, encore une fois, nous passerions à côté de l'objectif recherché.

D'abord, il faut prévoir une indemnisation digne de ce nom. La formule proposée n'est pas satisfaisante. Tout à l'heure, je vous ai entendu, madame la ministre, parler de préjudice et de réparation du préjudice. Nous sommes d'accord, mais nous considérons qu'il y a en fait expropriation. Pourquoi un préjudice ne se réparerait-il pas totalement ?

M. Michel Herbillon.

Tout à fait !

M. Henri Plagnol.

Très bien !

M. Philippe Houillon.

Pourquoi fixer arbitrairement le montant de l'indemnisation à 50 % ? Et que dire de la décrédibilisation de la parole de l'Etat, s'agissant d'offices


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ministériels ? Comme mes collègues l'ont annoncé, si ce point n'est pas modifié, nous soumettrons le texte au Conseil constitutionnel.

J'évoquais tout à l'heure la modernité et le dynamisme.

Tout le monde sait que le marché français est pénalisé par la fiscalité, et je pense à la TVA, au droit de suite.

Pour permettre aux professionnels français de faire face à la concurrence étrangère, qui est déjà importante, il faudrait une indemnisation plus conséquente et surtout répondre aux vraies questions. Or, ce texte a un goût d'inachevé. Nous avons le sentiment de rester au milieu du gué.

C'est la raison pour laquelle le groupe Démocratie libérale et Indépendants s'abstiendra, en espérant que les commissaires-priseurs et, plus généralement, le marché de l'art français n'auront pas trop à souffrir de ce manque de bon sens et de lucidité.

M. Pierre Lellouche et M. Henri Plagnol.

Très bien !

Mme la présidente.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Malgré les critiques, il me semble que nous nous rejoignons sur l'objectif : dynamiser le marché de l'art français, mettre nos professionnels, sur un marché de plus en plus ouvert à la concurrence, dans la meilleure position possible et leur ouvrir des perspectives économiques solides.

Je partage aussi votre souci d'entourer cette ouverture à la concurrence de garanties conformes, tant pour le vendeur que pour l'acheteur, à la déontologie qui a toujours prévalu dans notre pays.

Si nous sommes d'accord sur les objectifs, j'ai bien sûr noté les doutes ou les critiques qui ont pu être formulés.

Nous reviendrons sur certains d'entre eux lors de l'examen des articles et des amendements. Mais je relève d'ores et déjà plusieurs de vos remarques.

Je conçois tout à fait, monsieur Plagnol, que vous mettiez au premier rang de vos préoccupations, qui sont aussi les nôtres, la fiscalité. Ce dossier est certes important et l'ensemble du Gouvernement est conscient des difficultés qui pèsent aujourd'hui sur le marché de l'art, mais je crois que cela ne devait pas l'empêcher d'avancer, d'entreprendre les réformes nécessaires, et le texte que vous allez adopter en fait partie. Pour ma part, je m'emploierai à réexaminer la situation fiscale de ce marché, mais j'estime que ce n'était pas le problème prioritaire du moment.

M. Michel Herbillon.

Dommage !

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Votre collègue Jérôme Lambert l'a rappelé, ce texte est en gestation depuis fort longtemps et, je le répète, quelles que soient les divergences entre les deux chambres et au sein même de cette assemblée, nous avons le devoir de le faire aboutir le plus rapidement possible, car il est urgent que l'ensemble des professionnels connaissent le cadre juridique dans lequel s'inscriront leur activité et leurs perspectives d'avenir.

Monsieur Vila, vous avez exprimé un double souci que je partage : celui de la modernisation et de la dynamisation du marché de l'art, donc de l'ouverture à la concurrence, mais aussi celui de la protection de notre patrimoine, à laquelle nous devons tous être attachés. De ce point de vue, le projet de loi marque un net progrès de notre législation. Sachez que je serai très attentive, dans la fonction qui est la mienne, à la protection du patrimoine.

La France est riche de toutes ses oeuvres d'art. Elle doit veiller à ce que cette richesse ne puisse pas s'évader, disparaître, au gré de la vigueur nouvelle du marché de l'art.

Vous avez aussi exprimé, monsieur Vila, une préoccupation particulière, relative aux petites études, notamment celles qui sont installées en province. Je souligne cependant qu'elles ont une activité judiciaire beaucoup plus importante que les grandes et qu'elles conserveront le monopole dans ce domaine ; elles devraient donc trouver leur équilibre économique, ne pas pâtir de la nouvelle organisation de la profession. En outre, grâce à l'indemnisation prévue par le Gouvernement, elles devraient pouvoir investir pour mieux garantir le développement futur de leur activité.

Monsieur Lellouche, vous avez, bien sûr, soulevé vous aussi le problème de la fiscalité. Je n'y reviendrai pas. Il faut s'en soucier, mais ce n'était pas la condition préalable à la réforme que nous sommes en train de mener.

Vous avez assimilé la modification de la composition du conseil des ventes à une étatisation. Je reconnais bien là la passion que vous mettez dans votre participation aux débats de l'Assemblée, et votre vocabulaire, qui souvent dépasse même votre pensée. On ne peut vraiment pas parler d'étatisation.

M. Pierre Lellouche.

Mais si ! C'est la vérité !

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Non ! Ces sujets, en particulier, sur lesquels nous ne sommes pas divisés par des clivages politiques fondamentaux...

M. Pierre Lellouche.

Vous préférez peut-être que je parle de « fonctionnarisation » ?

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Non. Il ne s'agit pas de fonctionnarisation.

M. Philippe Houillon.

Il s'agit de nationalisation !

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Monsieur Lellouche, je vous rappellerai simplement que le conseil des ventes joue un rôle de puissance publique, un rôle de contrôle et de régulation. Ce n'est pas un organe représentatif des professionnels. L'équilibre qui est proposé dans la composition de ce conseil des ventes est donc conforme à sa mission.

M. Pierre Lellouche.

Vous voulez dire le déséquilibre !

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Je parle bien d'équilibre. La responsabilité reste là où elle doit rester.

Plusieurs d'entre vous ont salué les réponses proposées, concernant Internet. Beaucoup de parlementaires s'étaient exprimés sur ce thème en première lecture. Je dois dire que je me réjouis de votre approbation. Le Gouvernement avait besoin de temps pour formuler des propositions dans ce domaine foncièrement nouveau qui, chaque jour, nous oblige tous, que nous soyons membres du Gouvernement ou du Parlement, à réfléchir très vite, car nous sommes confrontés à des problèmes inédits. Les suggestions que vous avez émises en première lecture ont largement nourri le travail du Gouvernement.

Le texte que nous examinons ce soir apporte une prem ière réponse très concrète, juridiquement bien construite : il constitue une chance supplémentaire pour le développement du marché de l'art ; le processus auquel nous assistons quotidiennement ne sera pas freiné. Toutefois, les dispositions qui vous sont soumises encadrent cette nouvelle aire des ventes de garanties qui me paraissent tout à fait indispensables. Le changement du support, le changement de la technique ne doit pas nous faire renoncer à la tradition et aux règles qui ont toujours enserré l'activité des ventes aux enchères publiques. Nous


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offrons une possibilité nouvelle, mais nous ne devons absolument pas renoncer aux garanties en matière d'expertise, en matière d'assurance, dont dépendent le label de qualité de la place française du marché de l'art et la sécurité de tous les acteurs qui y interviennent.

Je tiens vraiment à remercier les parlementaires, et en particulier M. Lambert, qui ont fortement incité le Gouvernement à réfléchir sur ce problème, auquel nous apportons, je crois, des réponses sérieuses. Je remercie aussi M. Lambert pour avoir soutenu la thèse portée par votre rapporteuse, Mme Feidt, et par le Gouvernement.

Nous y reviendrons lors de l'examen des amendements, il ne s'agit pas, en l'occurrence, d'une expropriation, mais bien de l'indemnisation d'un préjudice réel et reconnu, puisque le Gouvernement en assumera la charge intégrale, ce qui est assez rare pour être souligné.

M. Pierre Lellouche.

Votre raisonnement est arbitraire !

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Monsieur Lellouche, certes, 500 millions, ce n'est pas 2,5 milliards, mais ces 500 millions sont garantis, ils sont sur la table, contrairement aux 2,5 milliards que vous proposiez. Pour l'avenir de l'activité des commissairespriseurs, c'est un tiens qui vaut beaucoup mieux que deux, tu l'auras.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. Pierre Lellouche.

Dès que nous le pourrons, nous ferons en sorte qu'ils obtiennent ces « deux » !

Mme la présidente.

La discussion générale est close.

Discussion des articles

Mme la présidente.

En application de l'article 91, alinéa 9, du règlement, j'appelle maintenant, dans le texte du Sénat, les articles du projet de loi sur lesquels les deux assemblées du Parlement n'ont pu parvenir à un texte identique et qui font l'objet d'amendements.

Mes chers collègues, je vous rappelle qu'aux termes de l'article 106 du règlement, le droit de parole sur les amendements est limité, outre le Gouvernement, à l'auteur de l'amendement, à la commission et à un orateur contre.

Article 2 bis

Mme la présidente.

« Art. 2 bis. Les ventes volontaires de meubles aux enchères publiques réalisées à distance par voie électronique sont soumises aux dispositions de la présente loi. »

M me Feidt, rapporteuse, M. Christian Paul et M. Lambert ont présenté un amendement, no 1, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi l'article 2 bis :

« Constitue une vente aux enchères publiques, au sens de la présente loi, le fait en agissant comme mandataire du propriétaire, de proposer un bien aux enchères publiques, y compris à distance par voie électronique, pour l'adjuger au mieux-disant des enchérisseurs.

« Les opérations de courtage aux enchères réalisées à distance par voie électronique, se caractérisant par l'absence d'adjudication et d'intervention dans la conclusion de la vente d'un bien entre les parties, ne constituent pas une vente aux enchères publiques.

« Sont également soumises aux dispositions de la présente loi, à l'exclusion des articles 6 et 15, les opérations de courtage aux enchères portant sur des biens culturels réalisées à distance par voie électronique. »

La parole est à M. Christian Paul.

M. Christian Paul.

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la rédaction de l'article 2 bis est un enjeu très important, voire essentiel du projet de loi.

La question de son application aux ventes aux enchères sur l'Internet s'était posée dès la première lecture et le Sénat avait alors tranché dans un sens qui risquait de compromettre le développement de ces nouvelles activités.

Il avait en effet appliqué la loi sans discernement, de façon uniforme, à toutes les formes d'enchères électroniques, ce qui n'aurait pas manqué de poser des difficultés. Le Gouvernement et notre assemblée ont pris le temps de la réflexion, dont voici le produit.

Avec Mme Nicole Feidt et M. Jérôme Lambert, nous proposons une nouvelle rédaction de l'article 2 bis, qui distingue entre deux formes d'enchères : d'une part, les enchères classiques et les véritables enchères électroniques à distance, pour lesquelles l'opérateur agit en tant que mandataire - cette notion est fondamentale -, seront soumies à la loi que nous allons sans doute voter ce soir ; d'autre part, les enchères électroniques relevant d'une activité de courtage, aux termes de laquelle les parties restent libres, sans véritable adjudication ni conclusion de vente, resteront soumises au droit commun des contrats, les consommateurs bénéficiant bien sûr des protections habituelles.

La nouvelle rédaction de l'article 2 bis permet d'exonérer de l'application de la future loi ces nouvelles activités qui offrent des biens et services de toutes natures, souvent à de faibles prix et avec des coûts d'intermédiation très faibles. C'est donc un encouragement au commerce électronique qui préserve néanmoins toutes les garanties du consommateur.

Enfin, le dernier alinéa de notre amendement soumet à la loi sur les enchères publiques les ventes de biens culturels. Mme la ministre vient d'évoquer la question. Qu'il s'agisse de vente aux enchères ou de courtage aux enchères, le Gouvernement comme la commission des lois ont souhaité faire prévaloir l'intérêt supérieur de la protection de notre patrimoine.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Avec votre permission, madame la présidente, je m'attarderai quelque peu sur cet amendement, qui est véritablement au coeur du texte.

Je suis tout à fait favorable à l'amendement adopté par votre commission des lois, dont le double principe est particulièrement adapté aux réalités du commerce électronique.

Juridiquement, il est indispensable d'étendre la nouvelle réglementation aux opérations qui, sur le réseau numérique, constituent effectivement des ventes aux enchères. Or l'amendement de la commission des lois propose une définition des ventes aux enchères qui correspond parfaitement à la réalité juridique de ce type d'opérations.

La jurisprudence distingue déjà enchères publiques et enchères privées et précise que le public doit être tenu informé en temps réel de l'évolution des enchères. Il restait donc seulement à préciser que le commissaire-priseur


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ne peut réaliser la vente, c'est-à-dire assurer le transfert de propriété de l'objet au profit de l'adjudicataire, que s'il est mandaté par le vendeur à cette fin. Tel est, au demeurant, le sens des dispositions proposées par la commission, qui confient à la société de vente le soin non seulement d'organiser la vente, mais aussi de la réaliser.

L'amendement no 1 permet également de distinguer nettement les ventes aux enchères ainsi définies de toutes les opérations de simple mise en relation du vendeur et d'un acheteur, lorsque ce dernier est sélectionné par une mise en concurrence s'apparentant, en la forme, à des enchères. Ces opérations, les plus fréquentes sur Internet, que votre amendement qualifie très justement d'« opérations de courtage », n'ont pas vocation à entrer dans le champ d'application de la loi. En effet, ces activités ne créent pas, pour les parties, un risque particulier justifiant les mesures de protection qu'exigent les véritables ventes aux enchères. Et sur le plan économique, il est important de ne pas entraver le développement considérable de cette forme de commerce électronique par une réglementation inadaptée et sans objet.

Par contre, le second principe que votre commission des lois vous propose de retenir sécurise l'ensemble des transactions portant sur des biens culturels, cette fois sans distinguer entre vente aux enchères et courtage aux enchères. Je partage cette analyse. La nécessaire protection du patrimoine national et des parties en situation de plus grande vulnérabilité sur le marché de l'art justifie la création d'un espace sécurisé pour l'ensemble des opérations sur les biens culturels.

Votre amendement, dans son esprit, rejoint celui que le Gouvernement avait déposé en deuxième lecture devant le Sénat, mais il est enrichi par cette notion de

« courtage aux enchères », qui clarifie le sens et la portée de ses dispositions.

Mme la présidente.

La parole est à M. Henri Plagnol.

M. Henri Plagnol.

Je me réjouis de la qualité du travail accompli par notre collègue Christian Paul. Je crois comme vous, madame la ministre, qu'il s'agit là d'un amendement important parce qu'il éclaire la voie au législateur sur le problème général d'Internet. Il faut en effet concilier deux exigences : d'une part, l'introduction d'un minimum de règles propres à garantir la sécurité des parties et à définir un cadre fiscal et juridique ; d'autre part, la souplesse indispensable pour ne pas entraver l'essore xtrêmement rapide du commerce électronique, et notamment de la pratique du courtage sur Internet.

C'est une activité en pleine croissance, comme en témoigne la réussite du site de Drouot, que j'ai déjà donné en exemple. C'est pourquoi, dans notre démocratie, le législateur doit prendre ses responsabilités et ne pas les abandonner au juge. Celui-ci élabore en effet la jurisprudence en raisonnant au cas par cas.

Nous devons donc prendre nos responsabilités, mais soyons très attentifs à ne pas entraver l'essor de cette activité. Je suis convaincu, comme Christian Paul, que c'est une chance pour la place française. Nous disposons de tous les atouts : la compétence de nos professionnels, le renom de nos experts, la richesse de notre patrimoine et la modernité de nos technologies - pour que, avec le virage du numérique, la place française retrouve sa compétitivité et son prestige sur le marché mondial.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

1. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

En conséquence, l'article 2 bis est ainsi rédigé.

Articles 6 et 8

Mme la présidente.

Les articles 6 et 8 ne font l'objet d'aucun amendement.

J'en donne lecture :

« Art. 6. Les sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques donnent au Conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques toutes précisions utiles sur les locaux où auront lieu de manière habituelle les expositions de meubles offerts à la vente ainsi que les opérations de ventes aux enchères publiques. Lorsque l'exposition ou la vente a lieu dans un autre local, ou à distance par voie électronique, la société en avise préalablement le conseil. »

« Art. 8. Les personnes mentionnées à l'article 7 sont seules habilitées à diriger la vente, à désigner le dernier enchérisseur comme adjudicataire ou à déclarer le bien non adjugé et à dresser le procès-verbal de cette vente.

« Le procès-verbal est arrêté au plus tard un jour franc après clôture de la vente. Il mentionne les nom et adresse d u nouveau propriétaire déclarés par l'adjudicataire, l'identité du vendeur, la désignation de l'objet ainsi que son prix constaté publiquement.

« Dans le délai de quinze jours à compter de la vente, le vendeur peut, par l'intermédiaire de la société, vendre de gré à gré les biens déclarés non adjugés à l'issue des enchères. Cette transaction n'est précédée d'aucune exposition, ni publicité. Elle ne peut être faite à un prix inférieur à la dernière enchère portée avant le retrait du bien de la vente ou, en l'absence d'enchères, au montant de la mise à prix. Le dernier enchérisseur est préalablement informé s'il est connu. Elle fait l'objet d'un acte annexé au procès-verbal de la vente. »

Article 11

Mme la présidente.

« Art. 11. - Une société de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques peut garantir au vendeur un prix d'adjudication minimal du bien proposé à la vente. Si le bien a été estimé, ce prix ne peut être fixé à un montant supérieur à l'estimation mentionnée à l'article 10.

« Si le montant du prix garanti n'est pas atteint à l'issue des enchères, la société visée au premier alinéa est déclarée adjudicataire du bien au prix garanti.

« Par exception aux dispositions du second alinéa de l'article 3, elle peut revendre ce bien aux enchères publiques, à condition qu'il soit fait mention de l'appartenance du bien à la société dans la publicité. »

Je suis saisie de deux amendements, nos 28 et 16, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 28, présenté par Mme Feidt et M. Lambert, est ainsi rédigé :

« Substituer aux deux derniers alinéas de l'article 11 l'alinéa suivant :

« Cette faculté n'est offerte qu'à la société qui a passé avec un organisme d'assurance ou un établissement de crédit un contrat aux termes duquel cet organisme ou cet établissement s'engage, en cas de défaillance de la société, à rembourser la différence entre le montant garanti et le prix d'adjudication si le montant du prix garanti n'est pas atteint lors de la vente aux enchères. »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

L'amendement no 16, présenté par M. Plagnol et M. Christian Martin, est ainsi rédigé :

« Compléter le deuxième alinéa de l'article 11 par les mots : "sauf stipulation expresse contraire du vendeur lors de la détermination du prix garanti". »

La parole est à Mme Nicole Feidt, pour soutenir l'amendement no

28.

Mme Nicole Feidt, rapporteuse.

Cet amendement prévoit un remboursement de la différence entre le montant garanti et le prix d'adjudication à l'assurance si le montant du prix garanti n'est pas atteint lors de la vente aux enchères.

Il s'agit d'une solution intermédiaire entre la proposition du Sénat et celle qui avait été adoptée par l'Assemblée nationale en première lecture.

Mme la présidente.

La parole est à M. Henri Plagnol, pour soutenir l'amendement no

16.

M. Henri Plagnol.

Il s'agit d'introduire une clause de sauvegarde pour ce qui concerne les dispositions relatives aux garanties de prix. Cet amendement précise que l'adjudication automatique à la société de ventes des biens n'ayant pas atteint le montant du prix garanti doit réserver le cas où le vendeur ne souhaiterait pas procéder à cette adjudication automatique.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

M me Nicole Feidt, rapporteuse.

La commission a repoussé cet amendement parce qu'il est incompatible avec le dispositif qu'elle a retenu.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Le Gouvernement est favorable à l'amendement no 28, qui lui paraît doublement opportun.

Cet amendement rétablit l'intervention d'un organisme d'assurance ou d'un établissement de crédit en tant que garant à l'égard du vendeur du paiement du prix garanti tel qu'il aura été préalablement négocié avec la société de vente. A ce titre, il sécurise la transaction, non seulement pour le vendeur, mais aussi pour la société de vente qui ne sera pas pénalisée par des engagements trop audacieux consentis sous la pression de la concurrence.

Cet amendement présente également le mérite de simplifier le mécanisme de garantie. L'organisme d'assurance ou l'établissement de crédit ne devient pas propriétaire du bien si le prix garanti n'est pas atteint, ce qui aurait pu les dissuader d'accorder leur garantie. Et même si ce prix n'est pas atteint, le dernier enchérisseur devient néanmoins adjudicateur, ce qui est somme toute bien normal dans la mesure où il n'est pas concerné par les accords passés entre le vendeur et la société de vente.

Pour toutes ces raisons, je suis favorable à cet amendement. Comme la commission des lois, je suis défavorable à l'amendement no

16.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

28. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

En conséquence, l'amendement no 16 tombe.

Je mets aux voix l'article 11, modifié par l'amendement no

28. (L'article 11, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 11

Mme la présidente.

MM. Houillon, Lellouche et Plagnol ont présenté un amendement, no 17, ainsi rédigé :

« Après l'article 11, insérer l'article suivant :

« I. Dans le deuxième alinéa du 1 du I de l'article 262 ter du code général des impôts, les mots : "ne s'applique pas", sont remplacés par les mots : "s'applique également".

« II. - En conséquence, l'article 278 septies du code général des impôts est supprimé.

« III. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par le relèvement des droits prévus aux artcles 575 et 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. Pierre Lellouche.

M. Pierre Lellouche.

Madame la ministre, je ne me fais guère d'illusions sur le sort de cet amendement. Il est de nature à la fois politique et un peu rhétorique, puisqu'il n'a pas de chance d'être adopté. Il concerne la TVA à l'importation.

Il vise à exonérer les ventes de meubles et objets d'art aux enchères publiques de la TVA à l'importation qui touche jusqu'à présent toute oeuvre extra-communautaire acquise par un Européen et qui s'élève à 5,5 %.

Cette exonération est indispensable à la redynamisation du marché de l'art européen et parisien en particulier. Si l'on veut redynamiser les maisons de ventes françaises par rapport à leurs concurrentes américaines, il faut faire en sorte que cette taxe soit supprimée. Celle-ci n'existe pas à New York ni sur aucun marché extérieur. Elle ne rapporte que très peu d'argent - 40 millions de francs par an - mais agit comme un très fort levier de délocalisation des grandes ventes sur le marché américain.

Madame la ministre, puisque vous venez d'arriver au Gouvernement, je profite de l'occasion pour vous demander de soulever à nouveau ce problème auprès du Premier ministre, de sorte que la question de la TVA à l'importation devienne l'une des priorités de la présidence française de l'Union.

Mme la présidente.

La parole est à M. Jérôme Lambert.

M. Jérôme Lambert.

Je voudrais m'exprimer contre l'amendement présenté par notre collègue de l'opposition.

D'abord, je ne suis pas persuadé que le fait d'adopter une fiscalité semblable à celle des Américains, des Japonais ou de je ne sais qui encore, rendrait forcément les entreprises de l'Union européenne qui travaillent dans le marché de l'art plus compétitives.

Chaque Etat, les Etats-Unis, ceux du marché asiatique, mais aussi ceux de l'Europe doivent garder un fondement propre, que ce soit dans le domaine fiscal comme dans le domaine culturel ou social. Je ne suis pas pour l'uniformisation des cultures ni de la fiscalité.

M. Pierre Lellouche.

Parlez-en à Laetitia Casta !

M. Jérôme Lambert.

Si on voulait tout mettre à plat, il faudrait parler de tout et pas uniquement de quelques aspects marginaux.

Voilà pourquoi je suis contre cet amendement.

J'ajouterai que la France n'est pas spécialement en cause ici. Il s'agit d'une fiscalité européenne qui fait aujourd'hui l'objet d'une harmonisation à l'échelle de l'ensemble de l'Union.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Nicole Feidt, rapporteuse.

La commission a rejeté cet amendement. Comme l'ont dit justement les deux orateurs précédents, il convient de ne pas déroger aux p rincipes définis par le droit communautaire. En l'occurrence, je rappelle que la directive du 14 février 1994,...

M. Pierre Lellouche.

Changez-la !

Mme Nicole Feidt, rapporteuse.

... qui précise le régime de TVA applicable aux oeuvres d'art, interdit toute exonération des importations d'oeuvres d'art.

M. Pierre Lellouche.

Changez-la ! Sinon, à quoi sert un gouvernement ?

Mme Nicole Feidt, rapporteuse.

Voilà pourquoi la commission a rejeté cet amendement.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Il est également défavorable. Tel qu'il est rédigé, l'amendement aurait pour effet, d'une part, d'exonérer de TVA les livraisons intracommunautaires de biens d'occasion, d'oeuvres d'art, d'objets d'antiquité ou de collection effectuées par des négociants ou des galeries ; d'autre part, de supprimer le taux réduit de TVA pour les importations et acquisitions intracommunautaires d'oeuvres d'art, d'objets de collection ou d'antiquités ainsi que pour les livraisons d'oeuvres d'art effectuées par leur auteur. Dès lors, les i mportations et acquisitions intracommunautaires d'oeuvres d'art, d'objets de collection ou d'antiquités deviendraient de facto soumises au taux normal de 19,6 % de TVA, ce qui nuirait considérablement à l'enrichissement des collections nationales. De même, les livraisons d'oeuvres d'art effectuées par les artistes se trouveraient soumises à ce taux de 19,6 %, ce qui n'irait pas dans le sens de la promotion du marché de l'art.

Bien évidemment, tel n'est pas le souhait des auteurs d e l'amendement qui, d'après l'exposé des motifs, demandent en réalité une exonération de TVA pour les importations de meubles et objets d'art vendus aux enchères publiques. A cet égard, je vous rappelle que le régime des oeuvres d'art est défini en matière de TVA par la septième directive communautaire du 14 février 1994 qui est entrée en application en janvier 1995. Or cette directive interdit toute exonération des importations d'oeuvres d'art. Comme vous le savez, les Etats membres doivent se conformer au cadre et au principe définis par le droit communautaire ; toute infraction serait lourdement sanctionnée et irait à l'encontre de l'harmonisation fiscale. Entreprendre une telle action à trois mois de la présidence française de l'Union européenne me paraît peu raisonnable et, à vrai dire, pas envisageable.

Au-delà du fait que le faible rendement d'une taxe ne suffit pas à justifier sa suppression, je voudrais rassurer l'Assemblée quant à l'action négative qu'aurait actuellement la TVA à l'importation sur le dynamisme du marché de l'art. D'une part, le taux réduit de 5,5 % appliqué en France aux importations d'oeuvres d'art et d'objets d'antiquité ou de collection est un des plus faibles de la Communauté. La dérogation permettant au RoyaumeUni de soumettre les importations au taux de 2,5 %, qui devait théoriquement expirer le 30 juin 1999, a effectivement pris fin au cours de l'été dernier, un taux de 5 % s'appliquant dorénavant. D'autre part, certaines exonérations de TVA à l'importation sont d'ores et déjà prévues, notamment pour les biens destinés aux établissements agréés par le ministère de la culture.

Je rappelle aussi que, dans le rapport qu'il a produit récemment, votre ancien collègue M. Douyère a conclu que la TVA n'était pas un facteur de nature à perturber le développement de ce marché.

Dernier point, monsieur Lellouche, parce que je ne vous ai pas répondu tout à l'heure concernant le droit de suite : dans de nombreux pays, un tel droit n'existait pas avant à cette législation communautaire. Nous avons, en effet, opté pour l'harmonisation. C'était une chose très importante. Le délai que vous déplorez - cinq ans plus dix ans - était une des conditions de cette harmonisation.

M. Pierre Lellouche.

Blair n'en voulait pas du tout ! Vous lui en avez donné quinze ans.

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Or l'harmonisation signifie que les pays qui ont une certaine avance aident les autres et les tirent vers ce qui sera demain notre règle commune.

M. Pierre Lellouche.

Pourquoi pas nous ?

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Je rappelle par ailleurs que cette réglementation sera immédiatement applicable, sans délai, aux oeuvres d'art contemporain, celles des artistes vivants.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

17. (L'amendement n'est pas adopté.)

Article 12

Mme la présidente.

« Art. 12. Une société de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques peut consentir au vendeur une avance sur le prix d'adjudication du bien proposé à la vente. »

Mme Feidt, rapporteuse, a présenté un amendement, no 3, ainsi rédigé :

« Compléter l'article 12 par les deux alinéas suivants :

« Le remboursement de cette avance doit être garanti par un organisme d'assurance ou un établissement de crédit.

« La société de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques ne peut détenir aucune participation dans l'organisme ou l'établissement avec lequel elle contracte. »

La parole est à Mme la rapporteuse.

Mme Nicole Feidt, rapporteuse.

Cet amendement propose le retour au texte adopté par l'Assemblée nationale en première lecture et qui impose que le remboursement de l'avance sur le prix d'adjudication consenti soit garanti par un organisme d'assurances. Cette pratique est fréquente dans la région parisienne, un peu moins en province.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Avis favorable, pour les raisons qui viennent d'être exprimées par la rapporteuse.

Cet amendement prémunit les sociétés de ventes contre la tentation de se lancer dans des opérations financières aventureuses en proposant des avances excédant leurs capacités. Telle doit être notre préoccupation, notamment dans les moments de forte « chauffe » du marché de l'art et lorsque la concurrence est extrêmement vive.

Cette disposition sécurise le remboursement des fonds avancés lorsque la transaction n'aboutit pas ou est conclue à un prix inférieur à l'avance.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

M me la présidente.

La parole est à M. Pierre Lellouche.

M. Pierre Lellouche.

Ce texte introduit des rigidités supplémentaires inutiles. Le Sénat avait supprimé les deuxième et troisième alinéas de l'article 12. Cela me paraissait être une solution beaucoup plus sage.

Vous allez pénaliser les petites structures qui ne vont pas pouvoir assumer le coût de l'assurance et favoriser les grands groupes étrangers, au moment où nous essayons, justement, de maintenir en vie les successeurs des maisons de ventes françaises, à savoir les commissaires-priseurs.

Mais la « sagesse » de la majorité l'emportera...

(Sourires.)

Mme la présidente.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Certes, monsieur Lellouche, cette assurance est une charge pour les commissaires-priseurs. Mais elle constitue véritablement une garantie.

Nous devons préserver ce marché de tout ce qui pourrait l'engager dans des voies un peu aventureuses, qui ne seraient pas forcément conformes à la déontologie qui a toujours présidé au fonctionnement de cette profession.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

3. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'article 12, modifié par l'amendement no

3. (L'article 12, ainsi modifié, est adopté.)

Article 14

Mme la présidente.

« Art. 14. - I. - Est puni de deux ans d'emprisonnnement et de 2 500 000 F d'amende le fait de procéder ou de faire procéder à une ou plusieurs ventes volontaires de meubles aux enchères publiques :

« si la société qui organise la vente ne dispose pas de l'agrément prévu à l'article 4, soit qu'elle n'en est pas titulaire, soit que son agrément a été suspendu ou retiré à titre temporaire ou définitif ;

« ou si le ressortissant d'un Etat membre de la Communauté européenne ou d'un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen qui organise la vente n'a pas procédé à la déclaration prévue à l'article 21 ;

« ou si la personne qui dirige la vente ne remplit pas les conditions prévues à l'article 7 ou est frappée d'une interdiction à titre temporaire ou définitif de diriger de telles ventes.

« Les personnes physiques coupables de l'une des infractions aux dispositions prévues au présent article encourent également les peines complémentaires suivantes :

« 1o L'interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, d'exercer une fonction publique ou d'exercer l'activité professionnelle ou sociale dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise ;

« 2o L'affichage ou la diffusion de la condamnation prononcée dans les conditions prévues par l'article 131-35 du code pénal ;

« 3o La confiscation des sommes ou objets irrégulièrement reçus par l'auteur de l'infraction, à l'exception des objets susceptibles de restitution.

« II. Non modifié. »

Mme Feidt, rapporteuse, a présenté un amendement, no 4, ainsi rédigé :

« Supprimer le troisième alinéa du I de l'article

14. » La parole est à Mme la rapporteuse.

Mme Nicole Feidt, rapporteuse.

Il s'agit de revenir au texte adopté par l'Assemblée nationale en première lecture.

Comme en première lecture, la commission a rejeté l'extension des sanctions pénales aux ressortissants des

Etats membres de l'Union européenne intervenant en France dans le cadre de la libre prestation de services et ayant omis de procéder à la déclaration prévue à l'article 21 du projet, pour le motif suivant : un Etat membre ne peut subordonner l'exécution de la libre prestation de services sur son territoire à l'observation de toutes les conditions requises pour son établissement.

Le Sénat avait estimé qu'il appartiendrait au juge d'adapter le cas échéant la gravité de la sanction prononcée afin de respecter le principe de proportionnalité de la sanction à la gravité de l'infraction.

Il apparaît néanmoins préférable que le législateur donne des orientations claires, plutôt que de se décharger sur un juge du soin de respecter les engagements communautaires de la France.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Avis favorable. Le prestataire de services est déjà soumis à la législation de son Etat d'établissement. En outre, les sanctions disciplinaires telles que l'interdiction d'exercer sur le territoire français paraissent suffisamment dissuasives pour garantir le respect de la loi.

J'ajoute que les sanctions pénales spécialement prévues à l'encontre des ressortissants de l'Union seraient immanquablement considérées comme disproportionnées, au sens de la jurisprudence de la Cour de justice des communautés européennes relative à la libre prestation de services. Ces sanctions seraient sans doute considérées comme constitutives d'une entrave à l'une des libertés fondamentales instituées par le traité.

M me la présidente.

La parole est à M. Pierre Lellouche.

M. Pierre Lellouche.

Je ne souhaite pas prolonger ce débat, en raison de l'heure tardive, mais à mon sens, vous commettez une erreur de droit. J'ai soulevé la question en première lecture, et j'y reviens aujourd'hui.

Je ne comprends pas pourquoi le principe de nondiscrimination et la règle de l'assimilation au ressortissant national, qui sont les règles fondamentales de l'Union européenne, ne trouvent pas leur application en l'espèce dans la lecture que fait le Gouvernement du droit communautaire.

L'article 50 du traité de l'Union prévoit que dans le cadre de la prestation de services le prestataire exerce son activité « dans les mêmes conditions que celles que ce pays impose à ses ressortissants ». Cela vaut aussi pour les sanctions. Et il existe toute une jurisprudence, dont je vous ferai l'économie ce soir, réglementant notamment les professions d'avocat et de médecin, selon laquelle un Etat a parfaitement le droit d'imposer des sanctions pénales et de traiter sur le même plan un ressortissant national et un ressortissant étranger exerçant sur son sol. Or vous établissez dans ce texte une discrimination inverse, qui est proprement inexplicable.

En droit européen, un Etat a parfaitement le droit d'infliger des sanctions pénales à une personne qui viole sa législation nationale, quelle que soit la législation du


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

pays d'origine de la personne concernée. Tout dépend en fait de la compatibilité de la législation nationale avec le droit communautaire. En l'occurrence, il n'y a rien d'incompatible entre les sanctions prévues pour les ressortissants français telles qu'elles sont édictées dans cet article et le droit communautaire. Cela fait partie de l'exercice normal de la prestation de services.

Je ne comprends pas pourquoi - et je pense qu'il y a erreur de droit - un ressortissant étranger assurant les mêmes services sur notre sol qu'un citoyen français échapperait aux sanctions pénales applicables à ce dernier.

J'aimerais qu'on m'explique. Votre raisonnement, madame, ne me paraît fondé sur rien. On verra à l'usage, mais il y a là une discrimination et je suis surpris que les services juridiques du Gouvernement aient laissé passer une chose pareille !

Mme la présidente.

La parole est à Mme la ministre de la culture.

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Nous n'allons pas prolonger ce cours de droit, mais permettez-moi un bref complément pour expliquer sur quoi nous fondons notre position.

La différence de régime ne repose absolument pas sur le critère de nationalité mais, indépendamment de leur nationalité, sur la distinction entre ceux qui sont établis en France et ceux qui, étant établis dans un autre Etat membre, viennent en France pour y réaliser une vente occasionnelle. Cette distinction est imposée par les principes communautaires de libre prestation de services.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

4. (L'amendement est adopté.)

Je mets aux voix l'article 14, modifié par l'amendement no

4. (L'article 14, ainsi modifié, est adopté.)

Article 16 bis

Mme la présidente.

Cet article ne fait l'objet d'aucun amendement.

J'en donne lecture :

« Art. 16 bis. - Le Conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques et la Chambre nationale des commissaires-priseurs judiciaires assurent conjointement l'organisation de la formation professionnelle en vue de l'obtention de la qualification requise pour diriger les ventes. »

Article 18

Mme la présidente.

« Art. 18. - Le Conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques comprend onze membres désignés pour quatre ans :

« cinq personnes qualifiées nommées par le garde des sceaux, ministre de la justice ;

« six représentants élus des professionnels, dont deux experts.

« Le mandat des membres du conseil n'est renouvelable qu'une seule fois.

« Le président est élu par les membres du conseil en leur sein.

« Des suppléants sont désignés en nombre égal et dans les mêmes formes.

« Un magistrat du parquet est désigné pour exercer les fonctions de commissaire du Gouvernement auprès du Conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques.

« Le financement du conseil est assuré par le versement de cotisations professionnelles acquittées par les sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques et par les experts agréés. Le montant de ces cotisations est fixé par le conseil en fonction de l'activité des assujettis. »

Mme Feidt, rapporteuse, a présenté un amendement, no 5, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi les trois premiers alinéas de l'article 18 :

« Le Conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques comprend onze membres nommés pour quatre ans :

« six personnes qualifiées désignées par le garde des sceaux, ministre de la justice ;

« cinq représentants des professionnels, dont un expert. »

La parole est à Mme la rapporteuse.

Mme Nicole Feidt, rapporteuse.

La commission souhaite rétablir la composition du Conseil des ventes adoptée en première lecture, c'est-à-dire six personnes qualifiées désignées par le garde des sceaux et cinq représentants des professionnels, afin d'assurer à cet organisme une certaine indépendance vis-à-vis de la profession et donc une certaine impartialité. Le Sénat était favorable à la proportion inverse.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Nous avons déjà amorcé ce débat dans la discussion générale. Je ne peux que répéter que je suis favorable à l'amendement no

5. En revenant à la rédaction adoptée par l'Assemblée en première lecture, je pense que nous donnerons au Conseil des ventes sa juste composition. Ce doit être en effet une instance de régulation, exerçant ses prérogatives à l'égard des sociétés de ventes avec une grande indépendance.

Plus accessoirement, les écueils d'une désignation des représentants des professionnels par voie d'élection, dont on imagine mal les modalités s'agissant des experts, sont ainsi évités.

Le Gouvernement considère qu'il s'agit d'une vraie responsabilité de l'Etat et non pas d'une simple délégation à un organisme représentatif des professionnels.

M me la présidente.

La parole est à M. Pierre Lellouche.

M. Pierre Lellouche.

Je ne suis pas sûr, madame le ministre, que vous ayez totalement raison sur la responsabilité étatique. Les choses sont plus complexes. En réalité, le monopole des commissaires-priseurs laisse place à des maisons de ventes et le conseil que vous créez n'est pas un organisme étatique. Ce n'est pas un démembrement du ministère, ce n'est pas non plus un tribunal ou une cour juridictionnelle, c'est simplement un comité des sages chargé de coopter certaines personnes et de veiller à la moralité des opérations.

En ce sens, une composition équilibrée représentative des différentes professions artistiques me paraît nécessaire.

Le texte du Sénat, qui reprend d'ailleurs un certain nombre de suggestions faites ici même, vise précisément à l'équilibre avec, d'un côté, cinq personnalités désignées par le garde des sceaux et un commissaire du Gouverne-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

ment, que vous avez oublié de nommer, et, de l'autre, six représentants élus des professionnels, soit six contre six. Dans le système que vous envisagez, celui de la première lecture à l'Assemblée nationale, le rapport des forces est de cinq contre sept. C'est tout à fait exagéré.

Cela revient à fonctionnariser ou à étatiser une structure qui n'a pas cette vocation-là. Vous n'êtes pas en train de démembrer le ministère de la culture ou de la justice ; vous créez une sorte de comité de surveillance de ce marché et rien d'autre.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

5. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'article 18, modifié par l'amendement no

5. (L'article 18, ainsi modifié, est adopté.)

Article 29

Mme la présidente.

« Art. 29. Tout expert agréé doit être inscrit dans l'une des spécialités dont la nomenclature est établie par le Conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques. »

Mme Feidt, rapporteuse, a présenté un amendement, no 6, ainsi rédigé :

« Compléter l'article 29 par l'alinéa suivant :

« Nul ne peut l'être dans plus de deux spécialités, à moins qu'il ne s'agisse de spécialités connexes aux précédentes dont le nombre ne peut être supérieur à deux. »

La parole est à Mme la rapporteuse.

Mme Nicole Feidt, rapporteuse.

Cet amendement vise à rétablir la limitation du nombre des spécialités dans lesquelles un expert peut être agréé. L'expertise n'est en effet pas compatible avec un champ trop vaste de spécialités. La solution la plus raisonnable est de s'en tenir à deux.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de la culture et de la communication.

La limitation du nombre des spécialités est, pour les consommateurs, une garantie essentielle de professionnalisme des experts, qui ne doivent pas devenir de simples généralistes. La profession elle-même est très favorable à cette limitation.

Les compétences techniques doivent être pointues, spécialement en matière d'oeuvres d'art. En outre, les experts peuvent engager lourdement leur responsabilité et une spécialisation accrue est de nature à prévenir et limiter les contentieux.

Je suis donc favorable à cet amendement qui rétablit le texte adopté en première lecture.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

6. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'article 29, modifié par l'amendement no

6. (L'article 29, ainsi modifié, est adopté.)

Article 33

Mme la présidente.

« Art. 33. Le Conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques peut prononcer le retrait de l'agrément d'un expert en cas d'incapacité légale, de faute professionnelle grave, de condamnation pour faits contraires à l'honneur, à la probité ou aux bonnes moeurs. »

M. Bloche a présenté un amendement, no 27, ainsi rédigé :

« A la fin de l'article 33, substituer aux mots : "à l'honneur, à la probité ou aux bonnes moeurs", les mots : "à l'honneur ou à la probité". »

La parole est à M. Jérôme Lambert, pour soutenir cet amendement.

M. Jérôme Lambert.

La notion de bonnes moeurs apparaît aujourd'hui un peu désuète. Il me semble que la référence à l'honneur et à la probité suffit amplement.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Nicole Feidt, rapporteuse.

Bien qu'elle ait reçu tardivement cet amendement, la commission l'a examiné ce matin et l'a repoussé. En effet, même si elle peut paraître désuète, la notion de bonnes moeurs, c'est-à-dire d'ordre public moral, figure dans de nombreux textes du code civil. Elle semble avoir disparu du code de la fonction publique, mais elle n'en reste pas moins usitée. Je pense qu'il n'est pas opportun de remettre cette notion en cause à l'occasion de l'examen de dispositions relatives à des experts agréés.

M. Pierre Lellouche.

Moi aussi, je crois encore aux bonnes moeurs !

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Je vais me contenter de la sagesse.

M. Michel Herbillon.

Est-elle compatible avec les bonnes moeurs ? (Sourires.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

27. (L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'article 33.

(L'article 33 est adopté.)

Article 35

Mme la présidente.

« Art. 35. - Les commissairespriseurs sont indemnisés en raison de la perte du droit de présentation de leur successeur en matière de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques et de la suppression du monopole qui leur était conféré dans ce domaine jusqu'à l'entrée en vigueur de la présente loi. »

Mme Feidt, rapporteuse, a présenté un amendement, no 7, ainsi rédigé :

« Rédiger ainsi l'article 35 :

« Les commissaires-priseurs sont indemnisés en raison du préjudice subi du fait de la dépréciation de la valeur pécuniaire de leur droit de présentation résultant de la suppression du monopole conféré jusqu'à l'entrée en vigueur de la présente loi à ces officiers ministériels dans le domaine des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques. »

La parole est à Mme la rapporteuse.

Mme Nicole Feidt, rapporteuse.

Il s'agit là encore d'un retour au texte adopté par l'Assemblée nationale en première lecture. Il paraît préférable de fonder l'indemnisation des commissaires-priseurs sur une rupture de l'égalité


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devant les charges publiques. En effet, le droit de présentation, qui fonde la valeur de l'office, est réduit aux seules ventes aux enchères judiciaires mais ne disparaît pas. En outre, il n'est pas assimilable à un droit de propriété.

M. Pierre Lellouche.

Ben voyons !

Mme la présidente.

La parole est à M. Henri Plagnol.

M. Henri Plagnol.

J'avoue ne pas comprendre l'acharnement du Gouvernement à contester ce qui relève du b on sens. Les commissaires-priseurs achetaient leur charge. Par conséquent, nul ne le conteste, ils en étaient propriétaires et l'abrogation de leur monopole revient à une expropriation qui entre dans le champ de la jurisprudence classique du Conseil constitutionnel, fondée sur le principe de la Déclaration des droits de l'homme qui exige « une juste et préalable indemnité » en cas d'expropriation.

Les deux arguments que vous employez, madame la rapporteuse, sont fallacieux.

Le premier consiste à dire qu'il ne s'agit pas d'une perte mais d'une dépréciation, puisque les commissairespriseurs conservent leur monopole pour les ventes judiciaires. Or, nous vous l'avons dit à maintes reprises, il n'est question dans ce débat que de l'indemnisation de la perte liée à toutes les autres activités. Les ventes judiciaires ne sont donc pas comprises dans l'assiette de l'indemnisation et cette objection ne vaut rigoureusement rien en droit.

Le deuxième argument fait référence à la notion totalement abstraite et théorique selon laquelle les commissaires-priseurs n'auraient pas eu la libre disposition du patrimoine lié à la propriété de leur charge. Je rappelle qu'ils étaient à ce titre, il le sont encore d'ailleurs, imposables sur la fortune, ce qui veut bien dire que leur charge est considérée, en tout cas par l'administration fiscale, comme un élément constitutif du patrimoine.

Quant à la possibilité pour la puissance publique de ne pas laisser jouer le droit de présentation avec toutes ses conséquences patrimoniales, elle n'a jamais été utilisée.

Pour les commissaires-priseurs, le droit de présentation est bien ce qui fondait, à l'acquisition, la valeur même de leur charge ; ils en étaient propriétaires et avaient donc la possibilité de le revendre. Beaucoup d'entre eux se sont d'ailleurs lourdement endettés.

Je rappelle enfin que le seul rachat de deux charges respectivement par Sotheby's et Christie's se monte à 400 millions de francs, soit pratiquement la somme que vous allez allouer à l'ensemble des commissaires-priseurs.

Est-ce réellement équitable ? Est-ce respectueux de la parole de l'Etat ? Est-ce conforme au principe absolu de respect du droit de propriété qui figure dans la Déclaration des droits de l'homme ? Certainement pas ! Mme la Présidente Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Avis favorable à l'amendement de la commission, qui rétablit la rédaction du Gouvernement en fondant l'indemnisation sur le principe de l'égalité devant les charges publiques. C'est entre nous, monsieur Plagnol, un point de désaccord formel. Mais je ne crains pas de persévérer dans ce que vous appelez l'acharnement, d'autant que le doyen Vedel nous conforte dans cette lecture juridique, ce qui suffit à en attester le sérieux.

Le projet de loi procède à la libéralisation du secteur des ventes volontaires, mais il maintient le régime actuel des ventes judiciaires, qui continueront à être faites par les commissaires-priseurs au sein de leurs offices ministériels. En conséquence, le droit de présentation sera maintenu et devra être exercé par les commissaires-priseurs lorsqu'ils céderont leur activité de ventes judiciaires. On ne peut donc parler de « perte » de ce droit et asseoir l'indemnisation des commissaires-priseurs sur le fondement de l'expropriation.

En revanche, ce droit perdra de sa valeur du fait de l'ouverture du marché pour les ventes volontaires. C'est cette dépréciation de la valeur pécuniaire du droit de présentation qu'il convient d'indemniser. Je confirme donc l'interprétation que nous avons donnée depuis le début de l'examen de ce texte.

J'ai, bien sûr, écouté les réflexions tirées du parallèle avec la réforme concernant les courtiers maritimes.

M. Pierre Lellouche.

J'allais y venir.

Mme la ministre de la culture et de la communication.

L'une et l'autre de ces professions ne se trouvent pas dans la même situation économique et juridique au regard du principe de l'indemnisation de leurs préjudices. Les différences sont multiples.

D'une part, les commissaires-priseurs conservent le monopole des ventes judiciaires, alors que les courtiers maritimes ne conservent aucune activité privilégiée.

D'autre part, les commissaires-priseurs ont vocation à poursuivre leur activité de ventes volontaires au sein de sociétés de ventes tandis que, pour les courtiers maritimes, l'ouverture du marché unique le 1er janvier 1993 s'est accompagnée d'une suppression des procédures douanières pour les navires battant pavillon d'un Etat membre, les privant ainsi d'une part importante de leur activité.

C'est pourquoi le dispositif d'indemnisation des courtiers-interprètes et conducteurs de navires n'est pas transp osable aux commissaires-priseurs, qui doivent être indemnisés selon un régime spécifique adapté à leur situation particulière.

Je rappelle aussi qu'aux 50 % d'indemnisation peuvent s'ajouter 15 %. Ce sera examiné au cas par cas, et c'est un élément d'adaptation à la réalité de la situation de chacun d'entre eux.

M. Pierre Lellouche.

Je demande la parole.

Mme la présidente.

M. Plagnol s'est déjà exprimé contre l'amendement.

Je mets aux voix l'amendement no

7. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

En conséquence, l'article 35 est rétabli et se trouve ainsi rédigé.

Article 36

Mme la présidente.

« Art. 36. - La valeur de l'office, limitée à l'activité des ventes volontaires, est calculée :

« - en prenant pour base la somme de la recette nette moyenne au cours des cinq derniers exercices dont les résultats seraient connus de l'administration fiscale à la date de la promulgation de la présente loi et de trois fois le solde moyen d'exploitation de l'office au cours des mêmes exercices ;

« - en affectant cette somme d'un coefficient de 0,5 pour les offices du ressort des compagnies de commissaires-priseurs autres que celle de Paris et de 0,6 pour les offices du ressort de la compagnie des commissairespriseurs de Paris ;


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« - en ajoutant à ce résultat la valeur nette des immobilisations corporelles, autres que les immeubles, inscrite au bilan du dernier exercice clos à la date d'entrée en vigueur de la présente loi ;

« - en multipliant le total ainsi obtenu par le rapport du chiffre d'affaires moyen de l'office correspondant aux ventes volontaires au cours des cinq derniers exercices dont les résultats seraient connus de l'administration fiscale à la date de la promulgation de la présente loi sur le chiffre d'affaires global moyen de l'office au cours des mêmes exercices.

« La recette nette est égale à la recette encaissée par l'office, retenue pour le calcul de l'imposition des bénéfices, diminuée des débours payés pour le compte des clients et des honoraires rétrocédés.

« Le solde d'exploitation est égal aux recettes totales retenues pour le calcul de l'imposition des bénéfices, augmentées des frais financiers et des pertes diverses et diminuées du montant des produits financiers, des gains divers et de l'ensemble des dépenses nécessitées pour l'exercice de la profession, telles que retenues pour le calcul de l'imposition des bénéfices en application des articles 93 et 93 A du code général des impôts.

« Les données utilisées sont celles qui figurent sur la déclaration fiscale annuelle et dans la comptabilité de l'office. »

Mme Feidt, rapporteuse, a présenté un amendement, no 8, ainsi rédigé :

« I. - Dans le deuxième alinéa de l'article 36, substituer aux mots : "au cours des cinq derniers exercices", les mots : "de l'exercice 1992 au dernier exercice".

« II. - En conséquence, procéder à la même substitution dans le cinquième alinéa de cet article. »

La parole est à Mme la rapporteuse.

Mme Nicole Feidt, rapporteuse.

La commission a souhaité revenir à la période de référence qu'avait retenue l'Assemblée nationale en première lecture pour le calcul de la valeur de l'office sur laquelle sera fondée l'indemnité des commissaires-priseurs. Cet amendement propose donc une période de référence plus longue - depuis 1992 que celle retenue par le Sénat, afin de mieux refléter la valeur de l'office.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Avis favorable.

Mme la présidente.

La parole est à M. Henri Plagnol.

M. Henri Plagnol.

Je constate encore une fois l'archarnement de la majorité, il n'y a pas d'autre mot ! Elle élargit abusivement aux mauvaises années la plage de référence, pour diminuer encore ce qui reste de cette indemnité peau de chagrin. Cinq ans est la référence usuelle. Il n'y a absolument aucune raison d'aller au-delà.

M. Lambert a souligné à juste titre la durée de l'accouchement de ce modeste projet de loi. Ce n'est pas une raison pour apprécier sur la même durée la valeur des charges des commissaires-priseurs !

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

8. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'article 36, modifié par l'amendement no

8. (L'article 36, ainsi modifié, est adopté.)

Article 37

Mme la présidente.

« Art. 37. - Le préjudice indemnisé en application de l'article 35 est évalué sur la base de la valeur de l'office déterminée à l'article 36, en tenant compte de la valeur des éléments d'actifs incorporels de nature à être cédés par le titulaire de l'office en cas de cessation de son activité de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques.

« Le titulaire de l'office peut demander le bénéfice d'une indemnisation forfaitaire fixée à 50 % de la valeur déterminée à l'article 36. »

Mme Feidt, rapporteuse, a présenté un amendement, no 9, ainsi rédigé :

« Rédiger ainsi l'article 37 :

« Le préjudice subi du fait de la dépréciation de la valeur pécuniaire du droit de présentation est fixé à 50 % de la valeur déterminée à l'article 36. L'indemnisation correspondante peut être augmentée ou diminuée de 15 % au plus par la commission prévue à l'article 43 est fonction de la situation particulière de chaque office et de son titulaire. »

La parole est à Mme la rapporteuse.

Mme Nicole Feidt, rapporteuse.

Retour au texte de première lecture. Les modalités de calcul de l'indemnité retenues par le Sénat sont en effet complexes. Elles donnent une prime à l'inertie économique et supposeraient, si les commissaires-priseurs souhaitent avoir une indemnité individualisée, des délais relativement longs, alors que les professionnels souhaitent pouvoir bénéficier rapidement de leur indemnité pour la réinvestir dans les sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Je souscris à l'analyse de la commission : avis favorable.

M me la présidente.

La parole est à M. Pierre Lellouche.

M. Pierre Lellouche.

S'agissant de l'indemnisation, madame la ministre, je constate deux ou trois failles dans votre raisonnement.

Encore une fois, nous comptons saisir le Conseil constitutionnel de cette question qui touche au fond du droit. Dans sa décision du 29 décembre 1999, relative aux emprunts russes, le Conseil s'est prononcé sur les problèmes de spoliation et d'indemnisation forfaitaire.

Constatant que le forfait était imposé par un gouvernement étranger, en l'occurrence par un oukase de la Russie, et qu'il était alloué dans le cadre d'un traité signé par la France, le Conseil en a reconnu la constitutionnalité, bien que l'indemnisation n'ait pas été suffisante au regard des principes généraux de notre droit au motif que les accords internationaux ont une valeur supérieure à la loi française.

En l'espèce, l'oukase, c'est M. Jospin et Bercy qui le prononcent en fixant unilatéralement à 50 % de la valeur de l'office le taux d'indemnisation des commissairespriseurs. C'est une spoliation, suivie d'une indemnisation forfaitaire sans aucune base légale et contraire à tous les principes de notre droit.

Le deuxième problème, et vous y avez fait allusion, réside dans la différence constatée entre ce projet de loi et celui relatif aux courtiers maritimes qui a été discuté au Sénat le 1er février 2000. Contrairement à ce que vous venez de nous dire, nous sommes très exactement dans le


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même cas de figure : c'est parce que des directives c ommunautaires nouvelles sont intervenues que des monopoles sont supprimés. Et la situation des courtiers maritimes est « moins pire », si j'ose dire, que celle des commissaires-priseurs puisque, pour les premiers, la moitié de l'activité demeure, tandis qu'elle disparaît en totalité pour les seconds, à l'exception de 10 % ou 15 % d'activités résiduelles consacrées aux ventes judiciaires.

Pourtant, votre collègue compétent en la matière, l'excellent M. Gayssot, a obtenu que ces quatre-vingts courtiers maritimes bénéficieraient d'une indemnisation forfait aire fixées à 65 % de la valeur de l'office. Les commissaires-priseurs devront, quant à eux, se contenter de 50 %. Certes, et c'est le troisième point que je souhaitais aborder, vous nous avez expliqué qu'un bonus de 15 % pourraient s'ajouter à ces 50 %. Mais cela relève d'une discussion de marchands de tapis. On est dans les souks et non plus dans le domaine du droit. Vous devez choisir : soit vous considérez qu'il y a expropriation et l'indemnisation doit être un préalable et complète, aux termes de l'article XVII de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen annexée à notre Constitution ; soit vous assumez le fait qu'il s'agit d'un oukase et nous sommes dans l'arbitraire et non plus dans le droit. C'est tantôt Eltsine et ses 2 milliards de francs pour les emprunts russes, et tantôt Jospin et ses 400 millions pour les commissaires-priseurs ! Madame la ministre, je vous le dis en toute amitié, votre raisonnement juridique, de la qualification que vous appelez dépréciation et qui est en fait une expropriation, aux modalités d'indemnisation, ne tient pas la route.

C'est d'autant plus vrai que deux textes sur le même sujet donnent des taux d'indemnisation différents, sans aucun critère économique - et pour cause ! - ni juridique. Nous allons donc saisir le Conseil constitutionnel et il appartiendra au juge constitutionnel trancher.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

9. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

En conséquence, l'article 37 est rétabli et se trouve ainsi rédigé.

Je vais maintenant appeler l'article 41 du projet de loi qui a été adopté par les deux assemblées dans un texte identique, mais sur lequel la commission a déposé l'amendement no 10 pour coordination.

Article 41 (coordination)

Mme la présidente.

« Art. 41. La demande d'indemnité doit être présentée par les commissaires-priseurs dans le délai de deux ans à compter de la publication du décret en Conseil d'Etat prévu à l'article 43. L'indemnité est versée dans les six mois suivant le dépôt de la demande. Ce versement est subordonné, d'une part, à la production d'une attestation d'assurance couvrant la responsabilité encourue par le commissaire-priseur à l'occasion de l'exercice des ventes volontaires à compter de son entrée en fonction et au plus pour les dix années antérieures à la promulgation de la présente loi et, d'autre part, à la production d'un quitus délivré par la compagnie des commissaires-priseurs. »

Mme Feidt, rapporteuse, a présenté un amendement, no 10, ainsi rédigé :

« Dans l'article 41, substituer à la référence : "article 43", la référence : "article 57". »

La parole est à Mme la rapporteuse.

Mme Nicole Feidt, rapporteuse.

Conformément au cinquième alinéa de l'article 108 du règlement de l'Assemblée, il est proposé de modifier l'article 41, qui a été adopté dans les mêmes termes par l'Assemblée nationale et le Sénat, afin d'assurer sa coordination avec les dispositions de l'article 57 du projet de loi, en remplaçant

« article 43 » par « article 57 ».

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Favorable.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

10. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'article 41, modifié par l'amendement no

10. (L'article 41, ainsi modifié, est adopté.)

Article 43

Mme la présidente.

« Art. 43. Les demandes d'indemnisation sont portées devant une commission nationale présidée par un magistrat de l'ordre judiciaire et comprenant, en nombre égal, d'une part, des représentants des commissaires-priseurs et, d'autre part, des personnes qualifiées désignées par le garde des Sceaux, ministre de la justice. Des suppléants sont désignés en nombre égal et dans les mêmes formes. Les modalités de constitution et de fonctionnement de la commission sont fixées par décret en Conseil d'Etat.

La commission évalue le montant de l'indemnisation, conformément aux règles prévues par les articles 35 à 38.

La commission établit un rapport annuel sur le déroulement de l'indemnisation et l'équilibre financier du fonds.

Les décisions de la commission peuvent faire l'objet d'un recours devant la cour d'appel de Paris. »

Mme Feidt, rapporteuse, a présenté un amendement, no 11, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le premier alinéa de l'article 43 :

« Les demandes d'indemnisation sont portées devant une commission nationale présidée par un membre du Conseil d'Etat. »

La parole est à Mme la rapporteuse.

Mme Nicole Feidt, rapporteuse.

Retour au texte adopté par l'Assemblée nationale en première lecture. Par coordination avec le choix fait par notre assemblée s'agissant du fondement de l'indemnisation, il paraît préférable de faire présider la Commission nationale de l'indemnisation par un membre du Conseil d'Etat.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Avis favorable. Cette disposition s'impose compte tenu du fondement de l'indemnisation retenu dans le projet de loi qui repose sur le principe de l'égalité devant les charges publiques, lequel relève du droit public.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

11. (L'amendement est adopté.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

Mme la présidente.

Mme Feidt, rapporteuse, a présenté un amendement, no 12, ainsi rédigé :

« A la fin du dernier alinéa de l'article 43, substituer aux mots : "la Cour d'appel de Paris", les mots : "le Conseil d'Etat". »

La parole est à Mme la rapporteuse.

Mme Nicole Feidt, rapporteuse.

Il s'agit là encore d'un amendement de coordination avec le choix fait quant au fondement de l'indemnisation des commissaires-priseurs.

Il est préférable de confier au Conseil d'Etat plutôt qu'à la Cour d'appel de Paris les contentieux des décisions qui sont prises par la commission nationale chargée de l'indemnisation desdits commissaires-priseurs.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Favorable.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

12. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'article 43, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 43, ainsi modifié, est adopté.)

Article 43 quinquies

Mme la présidente.

« Art. 43 quinquies I. Les indemnités versées aux commissaires-priseurs en application des articles 41 et 42 de la présente loi sont soumises à l'impôt au taux prévu au I de l'article 39 quindecies du code général des impôts, sous réserve des dispositions des II et III ci-dessous.

« II. L'impôt n'est dû que pour la part de l'indemnité non affectée au remboursement de la dette contractée pour l'acquisition de l'office.

« III. En cas d'affectation de la totalité de l'indemnité à la souscription de parts ou d'actions d'une société de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques, l'imposition due en application du I fait l'objet d'un report jusqu'à la date de la cession des titres acquis au moyen de l'indemnité.

« IV. Les pertes de recettes résultant des II et III sont compensées, à due concurrence, par un relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

Mme Feidt, rapporteuse, a présenté un amendement, no 13, ainsi rédigé :

« Supprimer l'article 43 quinquies »

La parole est à Mme la rapporteuse.

Mme Nicole Feidt, rapporteuse.

De même qu'en première lecture, la commission n'a pas souhaité maintenir cet article qui précise le régime fiscal de l'indemnité versée aux commissaires-priseurs. Les aménagements proposés sont contraires aux principes généraux de l'impôt.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de la culture et de la commission.

Favorable. La première mesure n'a pour objet que de préciser le régime fiscal de l'indemnisation. Or le Gouvernement a déjà pris l'engagement - et je vous le confirme aujourd'hui - que l'application du régime des plus-values professionnelles serait précisé dans le cadre d'une instruction administrative dès la publication de la loi.

Quant aux deux autres dispositions contenues dans l'article 43 quinquies, le Gouvernement ne peut qu'être favorable à leur suppression. La mesure consistant à ne pas imposer l'indemnité à concurrence du remboursement des emprunts contractés pour l'acquisition de l'office de commissaire-priseur serait contraire aux principes généraux de l'impôt sur le revenu. Je vous rappelle en effet que l'indemnisation a pour objet de réparer le préjudice subi du fait de la dépréciation de la valeur pécuniaire du droit de présentation. Dès lors, il ne serait pas justifié de traiter différemment, sur le plan fiscal, les commissairespriseurs selon qu'ils ont ou non à rembourser un emprunt lié à l'acquisition du droit de présentation.

L'institution d'un report d'imposition en cas de réinvestissement de l'indemnité dans une société de ventes volontaires ne serait pas non plus justifiée dès lors que le versement de l'indemnité s'effectuerait en une seule fois - article 41 du projet de loi - et que les commissairespriseurs disposeraient tout de suite des sommes nécessaires pour payer l'impôt correspondant à la plus-value.

Les sommes disponibles après paiement de l'impôt que les commissaires-priseurs auraient en tout état de cause la possibilité de réinvestir dans les sociétés de ventes volontaires représenteraient un pourcentage non-négligeable du montant de l'indemnité compte tenu du taux d'imposition très modéré des plus-values à long terme - 26 %, prélèvements sociaux inclus. Là encore, il s'agit d'un emploi du revenu qui, comme tel, ne justifie pas l'application d'un régime fiscal particulier.

Mme la présidente.

La parole est à M. Henri Plagnol.

M. Henri Plagnol.

Mme la ministre, dont je salue la capacité d'adaptation, nous lit laborieusement une copie excellemment préparée par des collaborateurs manifestement très compétents. Mais, au risque de lasser, je dirai que c'est là un signe supplémentaire du refus total de la majorité de tenir compte de la situation concrète des commissaires-priseurs. Peut-on, quand on a la chance de représenter les arts et la culture de ce pays, s'abriter derrière la lettre fiscale, pour refuser - et ces propos figureront au Journal officiel - que la part du montant de l'indemnité consacrée au remboursement des emprunts éventuellement contractés par les commissaires-priseurs pour l'acquisition de leur office ne soit pas imposée, comme le proposait fort sagement le Sénat ? Est-ce là votre rôle, madame la ministre ? Est-ce ce que l'on est en droit d'attendre du ministère de la culture, protecteur des arts ?

M. Michel Herbillon et M. Pierre Lellouche.

Très bien !

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

13. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

En conséquence, l'article 43 quinquies est supprimé.

Article 44 A

Mme la présidente.

« Art. 44 A. - Le huitième alinéa (d du 3o ) de l'article L. 122-5 du code de la propriété intellectuelle est ainsi rédigé :

« d) Les reproductions intégrales ou partielles d'oeuvres d'art graphiques ou plastiques offertes à la vente, mises à la disposition du public sur les lieux ou à l'occasion de la vente. »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

Le Gouvernement a présenté un amendement, no 18, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi l'article 44 A :

« Dans le d du 3o de l'article L. 122-5 du code de la propriété intellectuelle :

« 1o Les mots "aux enchères publiques", sont remplacés par le mot "judiciaire" ;

« 2o Les mots "par un officier public ou ministériel" sont supprimés ;

« 3o Les mots "qu'il met" sont remplacés par le mot "mis". »

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Dans un souci de coordination, il convient de modifier l'article L. 122-5 d du code de la propriété intellectuelle.

En effet, cette disposition, dans sa rédaction issue de la loi du 27 mars 1997, article 17, prévoit une exception au droit de reproduction en faveur des officiers publics ou ministériels qui réalisent des ventes aux enchères.

Or cette exception fait l'objet de critiques de la Commission européenne. En tout état de cause, les commissaires-priseurs et, accessoirement les notaires et les huissiers de justice, perdent leur monopole en matière de ventes volontaires. Seules les ventes judiciaires sont réservées à ces officiers publics ou ministériels.

Dans ces conditions, la portée de l'article L. 122-5 d doit être limitée à cette hypothèse. En opportunité, il est souhaitable de maintenir l'exception pour les ventes judiciaires en raison du principe de gratuité de la justice et du caractère spécifique de ces ventes. Tel est le sens de l'amendement déposé par le Gouvernement.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Nicole Feidt, rapporteuse.

Avis favorable.

M me la présidente.

La parole est à M. Pierre Lellouche.

M. Pierre Lellouche.

Mon collègue Plagnol a tenté en vain de vous convaincre de ne pas taxer les opérations les plus élémentaires comme les remboursements d'emprunts.

Voilà que vous allez faire pire : non contente d'avoir exproprié ces malheureux commissaires-priseurs, vous allez en plus les taxer sur les droits de reproduction dans les catalogues ! Mais tout cela serait bel et bon si cette taxe avait le moindre sens par rapport aux objectifs qui devraient être ceux de votre ministère. Je rappelle que ce texte était censé recréer un marché de l'art à Paris et mettre la France à égalité avec ses concurrents. Et voilà que vous excipez de l'exception précédente pour nous dire qu'il faut absolument taxer les catalogues ! Or le droit de reproduction des oeuvres figurant dans les catalogues n'existe ni en Grande-Bretagne ni en Allemagne ni aux Pays-Bas ni en Autriche ni en Suisse en Norvège ou en Suède et pas davantage aux Etats-Unis.

M. Henri Plagnol.

Eh oui !

M. Pierre Lellouche.

Avec cette disposition, vous allez donc imposer une charge supplémentaire aux maisons de vente françaises, dont le travail - et ce devrait être le vôtre aussi - consiste à favoriser le redémarrage du marché de l'art à Paris. Vous aggravez ainsi une situation fiscale déjà exorbitante par rapport à tous nos compétiteurs.

Contrairement à ce que vous prétendez, il n'y a dans tout cela aucune cohérence, ni juridique ni économique. Nous sommes en pleine contradiction par rapport aux objectifs que vous avez vous-même fixés dans votre discours d'introduction. C'est fort regrettable.

M. Michel Herbillon et M. Henri Plagnol.

Très bien !

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

18. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

En conséquence, l'article 44 A est ainsi rédigé.

Article 48 bis A

Mme la présidente.

« Art. 48 bis A. - Pour la constitution initiale du conseil de ventes, les représentants des professionnels seront désignés par le garde des sceaux, ministre de la justice, sur proposition de la Chambre nationale des commissaires-priseurs judiciaires. »

Mme Feidt, rapporteuse, a présenté un amendement, no 15, ainsi rédigé :

« Supprimer l'article 48 bis A. » La parole est à Mme la rapporteuse.

Mme Nicole Feidt, rapporteuse.

Le Sénat ayant souhaité que les membres du Conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques représentant les professionnels soient élus, cet article vise à contourner les difficultés suscitées par la constitution initiale du Conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques.

Puisque l'Assemblée a préféré que les représentants des professionnels au Conseil des ventes soient nommés, cet article est devenu inutile.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Avis favorable. Le Sénat a en effet souhaité que les membres du Conseil des ventes qui représentent la profession soient élus. Mais faute de collège électoral, cette disposition ne pouvait entrer en vigueur immédiatement.

Le Sénat a donc adopté un article 48 bis A prévoyant, à titre transitoire, la nomination de tous les membres du Conseil des ventes pour la première composition de cette instance. Toutefois, l'amendement de suppression s'impose dès lors que l'élection n'est pas retenue par votre assemblée comme mode de désignation des représentants de la profession au sein du Conseil.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

15. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

En conséquence, l'article 48 bis A est supprimé.

Articles 52 et 53

Mme la présidente.

Les articles 52 et 53 ne font l'objet d'aucun amendement.

J'en donne lecture :

« Art. 52. Les ventes en gros de marchandises aux enchères publiques continuent à être faites par le ministère des courtiers de marchandises assermentés dans les cas, conditions et formes indiqués par les lois et règlements en vigueur.

« Les ventes aux enchères publiques de meubles appartenant à l'Etat définies à l'article L.

68 du code du domaine de l'Etat, ainsi que toutes les ventes de biens meubles effectuées en la forme domaniale dans les


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conditions prévues à l'article L.

69 du même code, continuent d'être faites selon les modalités prévues par ces articles. Toutefois, par dérogation aux dispositions des articles L.

68, L.

69 et L.

70 du même code, ces ventes peuvent également être faites avec publicité et concurrence, pour le compte de l'Etat, par les sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques dans les conditions prévues par la présente loi.

« Les ventes de meubles aux enchères publiques relevant du code des douanes continuent d'être faites selon les modalités prévues par le même code. Toutefois, par dérogation aux dispositions du code des douanes, ces ventes peuvent également être faites avec publicité et concurrence, pour le compte de l'Etat, par les sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques dans les conditions prévues par la présente loi. »

« Art. 53. L'article 37 de la loi du 31 décembre 1922 portant fixation du budget général de l'exercice 1992 est ainsi rédigé :

« Art. 37 L'Etat peut exercer, sur toute vente publique d'oeuvres d'art ou sur toute vente de gré à gré d'oeuvres d'art réalisée dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article 8 de la loi no du portant réglementation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques, un droit de préemption par l'effet duquel il se trouve subrogé à l'adjudicataire ou à l'acheteur.

« La déclaration faite par le ministre chargé de la culture, qu'il entend éventuellement user de son droit de préemption, est formulée, à l'issue de la vente, entre les mains de l'officier public ou ministériel dirigeant les adjudications ou de la société habilitée à organiser la vente publique ou la vente de gré à gré.

« L'officier public ou ministériel chargé de procéder à la vente publique des biens mentionnés au premier alinéa ou la société habilitée à organiser une telle vente en donne avis au ministre chargé de la culture au moins quinze jours à l'avance, avec toutes indications utiles concernant lesdits biens. L'officier public ou ministériel ou la société informe en même temps le ministre du jour, de l'heure et du lieu de la vente. L'envoi d'un catalogue avec mention du but de cet envoi peut tenir lieu d'avis.

La société habilitée à procéder à la vente de gré à gré des biens mentionnés au premier alinéa notifie sans délai la transaction au ministre chargé de la culture, avec toutes indications utiles concernant lesdits biens.

« La décision du ministre doit intervenir dans le délai de quinze jours après la vente publique ou après la notification de la transaction de gré à gré.

« L'Etat peut également exercer ce droit de préemption à la demande et pour le compte des collectivités territoriales. »

Vote sur l'ensemble

Mme la présidente.

Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(L'ensembe du projet de loi est adopté.)

2

PROTECTION DES TRÉSORS NATIONAUX Discussion, en deuxième lecture, selon la procédure d'examen simplifiée, d'une proposition de loi

Mme la présidente.

L'ordre du jour appelle la discussion, en deuxième lecture, de la proposition de loi relative à la protection des trésors nationaux et modifiant la loi no 92-1477 du 31 décembre 1992 relative aux produits soumis à certaines restrictions de circulation et à la complémentarité entre les services de police, de gendarmerie et de douane (nos 2259, 2306).

Je rappelle que ce texte fait l'objet d'une procédure d'examen simplifié.

La parole est à Mme la ministre de la culture et de la communication.

Mme Catherine Tasca, ministre de la culture et de la communication.

Madame la présidente, mesdames, messieurs les députés, la relance du marché de l'art et la protection de notre patrimoine constituent deux priorités essentielles de la politique gouvernementale dans mon domaine d'action. Tels sont les objectifs poursuivis dans le cadre du projet de loi sur les ventes volontaires de meubles aux enchères publiques et de la proposition de loi sur la protection des trésors nationaux du sénateur Serge Lagauche, que je tiens à le féliciter pour son initiative qui a permis au Parlement de mesurer l'importante nécessité d'améliorer le présent dispositif législatif.

Je ne reviendrai pas sur les effets bénéfiques de la loi de 1992, votre rapporteur Jean Rouger a souligner son utilité, lors des débats précédents. Il a rappelé que plus de t rente chefs-d'oeuvre déposés dans les collections publiques ont été acquis par cette procédure. Néanmoins, il est apparu indispensable d'apporter des améliorations au texte initial, notamment pour la durée de validité du certificat d'exportation, l'établissement d'un prix de vente, en référence au marché international et pour une meilleure concertation avec les professionnels.

La très grande majorité des articles de la proposition de loi du sénateur Serge Lagauche ont été votés conformes par les deux chambres. La cohérence générale du texte et l'équilibre des droits entre les deux parties concernées, le propriétaire du trésor national et l'Etat, en sortent renforcés. Il reste toutefois quelques points de désaccord qui ont fait l'objet d'amendements de votre commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Ils tendent, d'une part, à rétablir le caractère obligatoire du renouvellement du refus de certificat et, d'autre part, à ouvrir la possibilité d'une nouvelle estimation du trésor national après un refus de vente opposé à l'Etat par le propriétaire. Ces deux dispositions me semblent devoir être retenues puisqu'elles participent d'un partage équilibré entre les propriétaires et l'Etat, de leurs responsabilités et de leurs droits.

Enfin, j'ai examiné avec la plus grande attention les débats suscités par la proposition souhaitée par le Sénat de voir supprimer la possibilité d'indemnisation du préjudice éventuel résultant d'un refus d'exportation d'un trésor national après une proposition d'achat faite par l'Etat au prix du marché international et refusée par le propriétaire du trésor national.


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Le Sénat a fait savoir que s'en remettre à l'appréciation des juridictions administratives risquait, en créant des sources de contentieux, d'avoir pour effet, dans la pratique, de priver la réforme souhaitée de son efficacité.

L'analyse de la jurisprudence du Conseil d'Etat permet de soutenir que le renouvellement d'un refus de certificat de circulation d'un trésor national ne causerait aucun préjudice indemnisable pour le propriétaire du bien, dans l'hypothèse où il se serait opposé à une proposition d'acquisition par l'Etat au prix du marché international. En effet, dans ce cas, le propriétaire ne pourrait justifier d'aucun préjudice financier résultant d'une dépréciation de la valeur marchande du bien.

Ces diverses raisons ont conduit votre commission à se rallier, en définitive, à la proposition du Sénat de supprimer le principe de l'indemnisation des refus d'exportation des trésors nationaux.

Après avoir étudié les arguments débattus en faveur ou contre cette proposition et, surtout, en avoir évalué les conséquences, notamment sur l'efficacité de la réforme qui, je le rappelle, a fait l'objet d'un large consensus dans son principe et ses caractéristiques principales, je me range à la proposition de votre commission sur cette question pour les raisons que je développerai au cours de l'examen des articles.

En conclusion, je voudrais souligner l'excellent travail accompli par votre commission des affaires culturelles et par votre rapporteur, M. Jean Rouger.

M. Pascal Terrasse.

Excellent en effet !

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Enfin, je me félicite de l'heureuse initiative parlementaire qui permet de réformer la loi du 31 décembre 1992 sur la circulation des biens culturels. Cette réforme, attendue depuis plusieurs années, nous dotera d'une législation plus protectrice du patrimoine national tout en améliorant les procédures et processus de décision de nature à faciliter la circulation des oeuvres d'art.

Je suis donc favorable, mesdames, messieurs les députés, à l'adoption de la présente proposition de loi.

(Applaudissement sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Mme la présidente.

La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

M. Jean Rouger, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd'hui en deuxième lecture cette proposition de loi que le Sénat a lui aussi examiné en deuxième lecture, le 21 mars dernier.

Ce texte a, je vous le rappelle, comme double objectif de protéger notre patrimoine national et de permettre aux citoyens de retrouver la liberté d'échanger des biens culturels de grande valeur.

A cette fin, la proposition de loi vise à organiser plus précisément l'octroi ou non du certificat d'exportation nécessaire pour les biens culturels d'une certaine valeur.

La durée initiale du certificat était de cinq ans. Désormais, lorsque le certificat est accordé, sa durée est de vingt ans pour les biens de moins de cent ans, et il devient permanent pour ceux plus âgés.

Ce certificat, lorsqu'il est refusé, prévoit que le bien ne peut quitter le territoire douanier pendant une période de trente mois - au lieu de trois ans actuellement. Au terme de ce délai, l'Etat peut proposer une offre d'achat, qui peut être complétée par une procédure d'expertise contradictoire. Si le propriétaire refuse cette offre, le refus de certificat doit être renouvelé.

Les dispositions d'ordre fiscal, qui, tout comme au Sénat, avaient alimenté nos débats n'ont pas été réintroduites. Car les sénateurs ont le 9 mars dernier, adopté une proposition de loi de M. Yann Gaillard et de ses collègues, portant diverses mesures fiscales tendant au développement du marché de l'art et à la protection du patrimoine national.

Les propositions qui y sont faites sont intéressantes et méritent d'être étudiées. Mais, comme je l'ai dit lors de la première lecture, c'est dans le cadre d'une réforme de la loi de 1913 que des mesures fiscales doivent être envisagées.

M. Michel Herbillon.

Il faudrait le faire rapidement.

M. Jean Rouger, rapporteur.

Je souhaiterais également redire aujourd'hui ma conviction que l'on doit ajuster la loi sur le classement aux réalités actuelles. Mais tel n'est pas notre débat d'aujourd'hui.

M. Pascal Terrasse.

C'est vrai.

M. Jean Rouger, rapporteur.

On peut légitimement se féliciter du caractère constructif de la navette entre les deux assemblées sur ce texte, qui a permis, dans des délais assez brefs, de l'enrichir et de préciser ses dispositions afin de les rendre plus efficaces et protectrices des intérêts, tant de l'Etat que des collectionneurs privés.

Concernant l'article 2, le Sénat a précisé que tous les avis de la commission devaient être publiés. Il semble que cette disposition aille dans le bon sens.

Il reste cependant des points de désaccord sur le fond, à l'article 5 notamment, qui détermine les modalités d'acquisition par l'Etat des biens culturels auxquels le certificat d'exportation a été refusé.

Ainsi, le Sénat a considéré que le renouvellement du refus de délivrance du certificat doit avoir un caractère facultatif et non automatique, lorsque l'Etat a présenté une offre d'achat au prix d'expertise et que le propriétaire l'a refusée. Sur ce point, la commission propose de revenir au texte initial de notre assemblée. Il convient, en effet, de conserver la logique de la procédure, en précisant que le refus de délivrance du certificat d'exportation par l'administration est automatique en cas de refus de vente par le propriétaire. Il s'agit d'une simple conséquence du refus du propriétaire de vendre son bien, qualifié de trésor national, à l'Etat.

Le Sénat a souhaité en outre conserver la possiblité pour le propriétaire de demander à tout moment une nouvelle expertise lorsque le refus de certificat a été renouvelé.

Il n'est pas souhaitable de déséquilibrer cette procédure en faveur d'une des parties : le propriétaire en l'occurrence, en lui permettant de relancer seul une procédure d'expertise, au moment où il le souhaite, compte tenu de l'évolution des prix sur le marché de l'art. Cela aurait pour effet pervers de contraindre l'Etat à en assumer le coût et à faire une offre d'achat, sans avoir eu le temps de réunir les fonds nécessaires.

Enfin, le Sénat a réaffirmé sa volonté que soit inscrit dans la loi le principe de non-indemnisation du refus de délivrance de certificat.

Je souhaite que cette modification soit retenue. En effet, il semble utile de prévoir dans la loi, sans attendre que la juridiction administrative soit éventuellement amenée à trancher sur ce point de droit, qu'aucune indemnité


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

ne soit due au propriétaire, qui, ayant refusé l'offre d'achat de l'Etat, se voir refuser la délivrance du certificat d'exportation. De plus, pour l'équilibre de l'ensemble de la procédure, aucune indemnité ne doit être accordée au titre du refus de délivrance du certificat, quel que soit le moment de la procédure.

La commission a souhaité que l'on aille dans le sens du Sénat sur ce point, et que l'on améliore sa proposition, en modifiant l'article 2 afin d'appliquer ce principe de non-indemnisation dès l'ouverture de la procédure, à l'occasion du premier refus de délivrance du certificat.

Moyennant ces quelques précisions techniques, nous pouvons considérer que la France sera dotée d'une procédure moderne et efficace de protection de son patrimoine culturel, dans le respect des règles du marché international de l'art. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. Michel Herbillon.

Une procédure sans moyens !

M. Pascal Terrasse.

Il faut augmenter les impôts !

M. Michel Herbillon.

Demandez à Fabius ! Discussion générale

Mme la présidente.

Dans la discussion générale, la parole est à M. Bernard Outin.

M. Bernard Outin.

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, lors de la première lecture, nous avions exprimé notre soutien à un système visant à concilier la fluidité de la circulation des oeuvres, l'existence du marché de l'art et la protection de nos trésors nationaux. Nous avions insisté pour que cette visée implique un rôle plus dynamique et toujours revalorisé de l'Etat comme gardien de notre patrimoine national, notamment en termes de moyens financiers nouveaux.

Un des éléments qui lui permettra de mieux jouer ce rôle, sera notamment la clarification des relations entre l'Etat, les propriétaires et les acteurs du marché de l'art français. Avec la loi de 1992 qui assouplissait le mécanisme des exportations de biens culturels dans le sens de la libéralisation, l'Etat n'avait guère que la possibilité de retarder la sortie des oeuvres majeures, à moins de les acquérir.

Mais la solution de l'acquisition, outre le fait qu'elle pose la question des moyens financiers de l'Etat, a ellemême ses limites, l'Etat se trouvant jusqu'à maintenant à la merci d'un refus du propriétaire de se dessaisir de son bien faute notamment d'une procédure d'évaluation de celui-ci.

Le texte qui nous revient du Sénat montre que nous avançons dans la construction de cette proposition de loi, puisqu'un certain nombre d'articles ont désormais été adoptés conformes. Mais il demeure quelques zones de désaccord, notamment à l'article 2 et plus particulièrement à l'article 5.

A l'article 2, le Sénat a prévu le principe de publication des avis de la commission chargée de donner un avis sur les refus de certificat, notre assemblée l'ayant limité aux seules décisions de refus. Or quel objectif poursuivons-nous ? N'est-ce pas l'amélioration des relations entre les propriétaires et l'Etat en assurant une plus grande clarté et une meilleure connaissance des critères de qualité artistique et historique qui sont retenus pour la qualification des trésors nationaux ? Il nous semble donc que la proposition du Sénat va dans le bon sens.

Le but de ce projet de loi est de restaurer la capacité d'action de l'Etat en matière de protection du patrimoine et des biens culturels reconnus trésors nationaux. C'est en cela que l'article 5 est fondamental et qu'il mérite notre attention.

Durant la période de refus du certificat d'exportation, l'Etat peut décider d'une offre d'achat au prix du marché international pour lui permettre de l'acquérir. Il est important au regard de la protection du patrimoine et de la préservation des intérêts de l'Etat - donc de l'intérê t général - que pendant toute la procédure d'offre d'achat le trésor national soit maintenu sur le territoire français.

C'est pourquoi la rédaction du sixième alinéa de l'article 5 ne peut pas à nos yeux, présenter un caractère de nonobligation. Il ne s'agit pas de « souplesse » comme l'avait précisé le Sénat. Autoriser cette souplesse serait prendre le risque de voir s'évaporer nos trésors nationaux.

Nous souhaitons donc revenir à la rédaction proposée par notre assemblée, qui dispose que si le propriétaire refuse l'offre d'achat, le refus de délivrance du certificat est renouvelé. En effet, la décision de la délivrance du certificat ne peut être librement laissée à l'appréciation de l'administration, car celle-ci est tenue par les conséquences inhérentes à la décision de reconnaissance du bien comme « trésor national ».

L'autre avantage que nous y voyons, c'est que désormais l'Etat ne pourra plus être exclu du jeu du marché que le propriétaire ne pourra plus opposer un refus systématique de vente à la puissance publique, comme c'est le cas aujourd'hui.

Nous parlions tout à l'heure de trouver un judicieux équilibre entre protection du patrimoine et marché de l'art. La rédaction de l'article 5 reflète cette problématique délicate. Vouloir introduire la souplesse reviendrait à faciliter le caractère spéculatif de ce marché.

Par ailleurs, nous rejoignons la proposition du Sénat de prévoir dans le texte le principe de non-indemnisation du refus de délivrance du certificat. Il est difficile d'admettre que le refus - et il serait pour le moins scabreux de l'admettre - par le propriétaire d'un trésor national, de l'offre d'achat au prix du marché international présentée par l'Etat, puisse lui permettre de justifier d'un quelconque préjudice ouvrant droit à indemnisation, car le refus est en réalité un refus de vente.

De même, n'est-il pas souhaitable de permettre au propriétaire de relancer, seul, une procédure d'expertise. Je rappelle qu'il s'agit de biens culturels particuliers, classés trésors nationaux et destinés à être conservés sur le territoire français. Laisser cette initiative aux propriétaires qui pourraient relancer une procédure d'expertise à tout moment, surtout quand les fluctuations du marché de l'art lui seraient favorables, amènerait l'Etat à perdre le trésor national, faute de moyens suffisants pour l'acquérir.

Dans ces conditions, il serait impossible de mener une politique du patrimoine pour enrichir nos collections nationales.

Nous souhaitons donc que les dispositions de cette proposition de loi aboutissent à une meilleure prise de conscience collective face à un patrimoine national commun à protéger et à enrichir, qu'il relève de la sphère privée ou publique. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, et du groupe socialiste.)

M. Pascal Terrasse.

Voilà quelqu'un qui connaît son dossier !

Mme la présidente.

La parole est à M. Michel Herbillon.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

M. Michel Herbillon.

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je me réjouis que la proposition de loi sur la protection des trésors nationaux revienne aussi vite en deuxième lecture devant notre assemblée. La célérité manifeste, qui a caractérisé la navette entre le Sénat et l'Assemblée, illustre la volonté commune du Gouvernement et du Parlement d'améliorer rapidement le dispostif actuel de contrôle des exportations des oeuvres d'art tel qu'il résulte de la loi du 31 décembre 1992.

Les objectifs sont clairs : il convient d'endiguer l'exode actuel d'oeuvres majeures de notre patrimoine vers l'étranger - 2 milliards par an - et dans le même temps de simplifier les procédures administratives qui pénalisent inutilement le marché de l'art français et dissuadent les collectionneurs d'acheter et de domicilier leurs biens en France.

Mais cette nouvelle lecture s'inscrit dans un contexte p articulier. Le remaniement gouvernemental de la semaine passée n'a pas épargné le ministère de la culture.

Et la nouveauté, madame la ministre, étant source inépuisable d'interrogations, nous aurons naturellement de nombreuses questions à vous poser, sur vos projets et sur ceux du secrétaire d'Etat au patrimoine qui vous est rattaché. Ceci d'autant plus que l'examen de la proposition de loi sur la protection des trésors nationaux a lieu à un moment où des chantiers législatifs, étroitement liés au texte présenté aujourd'hui, sont ouverts ou en passe de l'être. Je pense, bien sûr, à la réforme des ventes aux enchères publiques, texte que nous venons de voter, mais aussi à la modification annoncée de la loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques, je pense enfin aux deux propositions de loi de notre collègue sénateur Yan Gaillard, adoptées récemment par le Sénat et qui préconisent une série de réformes fiscales favorables au développement du marché de l'art et à la protection du patrimoine national.

J'ajoute par ailleurs que les demandes pressantes, émanant à la fois de l'opposition dans cet hémicycle et de la majorité sénatoriale, pour que soit engagée une réforme ambitieuse de notre système de protection des trésors nationaux, ont conduit le Gouvernement à prendre devant la représentation nationale un certain nombre d'engagements sur lesquels nous attendons, madame la ministre, vous le comprenez, que vous vous prononciez.

En effet, j'avais souligné en première lecture qu'on ne pouvait se contenter, pour garantir le maintien sur notre sol des trésors nationaux, de défendre, comme le faisaient le Gouvernement et le rapporteur, la seule amélioration du processus d'acquisition de ces biens par la puissance publique. Car si cette mesure va dans le bon sens, elle ne répond cependant pas au problème de fond qui réside dans l'incapacité financière actuelle de l'Etat à assurer seul la préservation de notre patrimoine et de nos trésors nationaux. D'où les propositions concrètes que nous avions présentées en première lecture pour répondre efficacement à cette carence.

C'est ainsi que mes collègues de l'opposition et moimême avions proposé en première lecture, selon d'ailleurs des modalités assez proches, d'accroître les crédits d'acquisition de l'Etat en créant, sur le modèle britannique, un prélèvement sur les recettes de la Loterie nationale ou de La Française des jeux.

De même, nous pensons que la majorité gouvernementale aurait été avisée de ne pas rejeter, comme ce fut le cas, les dispositions fiscales que nous avions suggérées en première lecture, et dont l'objectif était d'inciter les particuliers et les entreprises à participer, plus encore qu'aujourd'hui, à la défense de notre patrimoine national et de permettre le maintien sur notre sol de ses oeuvres majeures.

Le Gouvernement, en première lecture, a rejeté tous les amendements de l'opposition et préféré défendre une position minimaliste. Je le regrette. Cependant les débats que nous avons eus et les propositions de réforme que nous avons faites sur le financement de la protection de notre patrimoine n'ont pas été vaines. J'en veux pour preuve les engagements pris par votre prédécesseur, madame la ministre, en termes de financement et d'aménagements fiscaux. Mme Trautmann, reconnaissant l'insuffisance des moyens d'acquisition de trésors nationaux en passe de quitter le territoire, s'était engagée à défendre avec fermeté auprès de Bercy l'obtention cette année de crédits supplémentaires. Nul doute que vous aurez le même souci, madame la ministre : nous espérons que vous serez entendue par le nouveau ministre de l'économie et des finances.

Mme Trautmann avait par ailleurs indiqué, en réponse à notre demande d'exonération partielle des droits de mutation à titre gratuit pour les objets mobiliers classés avec l'accord de leur propriétaire, que le Gouvernement entendait présenter ce semestre une réforme du régime de classement tel qu'il résulte de la loi du 31 décembre 1913 et proposer à cette occasion des aménagements fiscaux favorisant la protection de notre patrimoine. Nous attendons de vous, madame la ministre, que vous confirmiez ce soir ces lignes directrices et ces intentions.

Je ne saurais conclure sans vous interroger sur une question centrale : l'exonération des oeuvres d'art de l'impôt de solidarité sur la fortune. Nos discussions présentes seraient vaines si le Gouvernement entendait supprimer cette exonération, car une telle décision serait d'un effet désastreux pour le développement du marché de l'art et l'enrichissement du patrimoine français. C'était d'ailleurs l'opinion de Mme Trautmann qui, le 9 mars dernier, déclarait au Sénat que la priorité du Gouvernement était de maintenir cette exonération. Toutefois, la religion de la gauche sur cette question étant plurielle, selon une exquise litote de notre collègue Alfred Recours que je fais volontiers mienne, je souhaiterais, madame la ministre, que vous précisiez sur ce point votre position et celle de votre secrétaire d'Etat au patrimoine. Les professionnels du marché de l'art et les 40 000 salariés qui travaillent dans ce secteur seront, à n'en pas douter, très attentifs à vos propos.

Vous le voyez, madame la ministre, le groupe Démocratie libérale et, au-delà, l'ensemble de l'opposition attendent de vous des éclaircissements sur la politique que vous entendez mener pour préserver notre patrimoine national et dynamiser le marché de l'art.

Le Premier ministre nous a indiqué que son nouveau gouvernement plaçait son action sous le signe de la réforme. Vous avez, ce soir, madame la ministre, avec votre première prise de parole publique devant la représentation nationale en tant que ministre de la culture, une extraordinaire occasion de nous démontrer que ce n'était ni un slogan ni une incantation. Aussi l'opposition attend-elle que, à la faveur de cette proposition de loi, vous proposiez des pistes de réforme ambitieuses et non pas une politique de petits pas. S'il devait en être autrement, nous aurions eu avec vous un premier rendez-vous manqué.

M. Christian Kert et M. Pierre Lellouche.

Très bien !

Mme la présidente.

La parole est à M. Pascal Terrasse.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

M. Pascal Terrasse.

Madame la ministre, je voudrais d'abord vous adresser, au nom du groupe socialiste, toutes mes félicitations pour votre accession à de nouvelles fonctions. Je serais heureux de pouvoir engager avec vous un dialogue sur l'important dossier de la grotte Chauvet, trésor national, qui a défrayé la chronique judiciaire pendant de longs mois et sur lequel les services juridiques et les services du patrimoine du ministère de la culture n'ont abouti que très récemment à un compromis. Il me plairait de vous accueillir dans le département de l'Ardèche pour visiter cette grotte Chauvet, dont la découverte a été une fabuleuse aventure.

M. Michel Herbillon.

Sortez votre agenda !

M. Pierre Lellouche.

L'exportation des grottes n'est pas encore au programmes ! (Sourires.)

M. Pascal Terrasse.

C'est aussi un trésor national, monsieur Lellouche, et je vous invite également. Paris n'est pas très loin de l'Ardèche.

M. Michel Herbillon.

Nous avons bien compris que vous vouliez organiser une petite visite avec Mme la ministre ! (Sourires.)

M. Pascal Terrasse.

La proposition de loi relative à la protection des trésors nationaux, visant à modifier, à l'initiative du sénateur Serge Lagauche, la loi de 1992, nous revient aujourd'hui en seconde lecture. Je tiens à rendre hommage au travail fructueux qui a été accompli jusqu'à ce jour dans le cadre de l'examen parlementaire. Il a permis de clarifier le texte initial et de le doter d'un corps juridique équilibré. Le rapporteur l'a d'ailleurs souligné.

Il convient toutefois d'approfondir certains points pour en parachever la cohérence. Le texte dont nous avons à discuter a subi une profonde évolution depuis sa première présentation devant l'Assemblée nationale, le 1er mars dernier. Il comportait alors un ensemble de dispositions d'ordre fiscal, dont certaines avaient été introduites à l'initiative de la commission des finances du Sénat contre l'avis du Gouvernement. Notre assemblée les avait supprimées, considérant qu'elles risquaient de déséquilibrer l'ensemble du dispositif. Je m'en réjouis, estimant qu'elles doivent faire l'objet d'un examen approfondi dans le cadre d'une refonte globale de la loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques. Plusieurs de mes prédécesseurs à la tribune l'ont rappelé. Je souhaite que cette réforme de la loi du 31 décembre 1913 vienne rapidement devant notre assemblée.

Allégé de ses dispositions fiscales, le texte s'équilibre autour de la procédure d'acquisition par l'Etat des oeuvres d'intérêt national détenues par des personnes privées, et qui sont susceptibles de quitter notre territoire. Cette procédure d'acquisition de gré à gré doit être encadrée de manière à trouver le meilleur compromis possible entre les intérêts des particuliers propriétaires de ces oeuvres et les objectifs légitimes que poursuit l'Etat pour conserver sur son territoire un patrimoine culturel et historique majeur.

Le système défini par la loi de 1992 pèche essentiellement sur un point : le délai de trois ans, au-delà duquel le refus de certificat de sortie expire, débouche sur un vide juridique qui permet, sans aucune contrainte et sans aucun recours, d'exporter librement n'importe quelle oeuvre d'intérêt national qui n'a pas fait l'objet d'une t ransaction librement consentie entre l'Etat et son propriétaire.

C'est sur ce point particulier qu'il est nécessaire de renforcer la législation. La procédure d'acquisition de gré à gré doit d'abord pouvoir s'accompagner d'un dispositif d'autorisation de sortie efficace, qui ne permette pas la fuite par défaut des trésors nationaux.

Cette procédure s'appuie sur la délivrance d'un certificat autorisant la sortie de l'oeuvre du territoire national.

Le refus de cette autorisation constitue le premier acte de préservation des oeuvres d'intérêt national. Pour en conserver l'efficacité, je vous demanderai, madame la ministre, de vous ranger à l'avis de la commission des affaires culturelles et d'inscrire dans la loi la reconduite automatique du refus de l'autorisation de sortie dès lors que le propriétaire rejette l'offre d'achat de l'Etat.

Le second point en discussion concerne la procédure d'acquisition proprement dite. Elle est le contrepoids logique de la suspension par l'Etat de l'exportation d'un bien. La procédure d'acquisition nous paraît aujourd'hui la meilleure solution pour les deux parties.

Il faut conserver présente à l'esprit l'idée que le refus de délivrer un certificat de sortie marque le déclenchement d'un processus qui doit conduire à l'acquisition de l'oeuvre par l'Etat ou, à défaut, à sa mise sur le marché. Il n'est pas un acte coercitif. Il n'est, par conséquent, pas un préjudice suffisant pour justifier une indemnisation.

En contrepartie, des garanties seront apportées aux propriétaires : d'une part, ils auront la garantie d'être entendus dans le cadre d'une procédure contradictoire ; d'autre part, ils auront celle que le prix d'achat proposé se fera au plus proche des prix du marché - c'est un élément essentiel - au moment où aura été prise la décision de vendre ; enfin, ils auront la garantie de pouvoir recourir à un expert indépendant en cas de désaccord sur l'expertise.

Si l'Assemblée adopte le texte dans le respect de l'ensemble de ce dispositif, l'équilibre global auquel nous parvenons me paraît satisfaisant pour répondre à l'enjeu actuel.

Je voudrais, avant de conclure, dire quelques mots sur les moyens financiers qu'il nous faudra mobiliser pour compléter ce dispositif.

L'évolution du marché et les cotes vertigineuses atteintes par certaines oeuvres qui sont concernées au premier chef par cette proposition de loi ne nous permettent pas de prétendre avoir résolu définitivement le problème qui nous est posé aujourd'hui.

A ce titre, nous ne pourrons pas faire l'économie d'un débat sur l'accroissement des sources de financement du fonds national d'acquisition. Ce budget doit être porté à un niveau satisfaisant, qu'il n'atteint pas aujourd'hui. On a parlé, je crois, de 200 à 250 millions de francs : c'est un budget bien inférieur à celui dont le ministère a besoin pour acquérir ces oeuvres d'art. Certains de nos collègues proposent d'élargir, le cas échéant, la possibilité de financement au titre de la loterie nationale, comme dans certains pays voisins, l'Angleterre notamment. C'est une question que nous devrons nous poser à l'occasion de la réforme de la loi de 1913.

M. Michel Herbillon.

C'est surtout la réponse que nous devrions avoir !

M. Pascal Terrasse.

Enfin, le texte dont nous débattons aujourd'hui doit prendre sa place dans un ensemble législatif cohérent. La réforme envisagée de la loi de 1913 relative aux monuments historiques nous permettra de nous pencher sur les mesures qui doivent inciter également le secteur privé à participer à l'effort national de préservation de notre patrimoine. Ces mesures ne devront


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

pas se limiter à un arsenal d'avantages fiscaux sans contreparties. Cela ne répondrait pas à l'intérêt collectif que nous poursuivons. Ce faisant, nous pourrons relever efficacement les enjeux actuels : conserver sur notre territoire la richesse patrimoniale qui est le ferment de notre culture et le socle sur lequel s'édifie l'avenir de nos enfants. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Christian Kert.

M. Christian Kert.

Madame la ministre, votre présence sur le banc du Gouvernement nous rajeunit - vous plus que moi bien entendu (Sourires) - et j'espère qu'elle contribuera à rajeunir également le débat parlementaire dans le domaine de la culture et de la communication. Je vais vous éviter la litanie des dossiers qui intéressent mon département. Sachez que vous y êtes également la bienvenue. (Sourires.)

M. Michel Herbillon.

Il n'y a pas de grotte Chauvet, chez vous ?

M. Christian Kert.

Bien que le débat de ce soir soit discret, nous abordons un sujet majeur : la protection de notre patrimoine culturel qui, mes collègues l'ont rappelé, est fortement menacé.

Au début des années cinquante, la France se plaçait au premier rang du marché mondial de l'art. Elle a connu, ces dix dernières années, une baissse de près de 25 % de l'activité dans ce secteur, alors que, dans le même temps, le montant des ventes augmentait de plus de 50 % en Grande-Bretagne. Les anciennes collections françaises alimentent désormais les enchères de Londres et de New York. C'est ainsi Christie's, qui à Londres, en juin prochain, sera chargé de la vente d'un manuscrit de Marcel Proust. A Drouot, les lots vedettes de l'année 1999 ont pour la plupart franchi ensuite les frontières. Tel est le c as d'un dessin d'Ingres représentant un portrait d'homme, adjugé 4,5 millions de francs à un collectionneur américain. Il sort chaque année de France pour 2 milliards de francs d'objets d'art, dont les trois quarts partent vers les Etats-Unis.

Le danger d'un appauvrissement de notre patrimoine est donc réel. Il me paraît justifier l'adoption de mesures efficaces, à la hauteur du défi à relever.

Notre environnement a changé. Dans un contexte de mondialisation croissante, nous devons avoir pour objectif d'élaborer une politique de protection du patrimoine national, sur un marché de l'art où prévalent les règles du libre-échange et où les moyens actuels de l'Etat, notamment les moyens financiers, sont notoirement insuffisants.

Le budget annuel consacré à l'achat d'objets d'art s'élève à une centaine de millions de francs, soit le prix que peut atteindre un seul tableau.

Dans ce contexte, la législation actuelle, avec la loi du 31 décembre 1992, s'est révélée inapplicable et lourde d'effets pervers. Il existe en effet aujourd'hui un marché unique européen où les biens circulent librement, même si les biens culturels relèvent d'une législation spécifique.

Surtout, l'évolution de la jurisprudence, résultant de l'affaire dite du Jardin à Auvers de Van Gogh, a rendu en grande partie le dispositif inopérant. Dans la mesure où l'Etat est maintenant dans l'obligation d'indemniser les propriétaires sur la base du prix du bien estimé sur le marché, il n'a plus les moyens de s'opposer à la sortie des oeuvres du territoire national.

La législation a également eu des effets pervers en dissuadant des collectionneurs d'acheter et de domicilier leurs biens en France, ce qui a attisé les conflits entre propriétaires et collectionneurs, alors qu'une relation de confiance est indispensable.

La proposition de loi que nous examinons ce soir comporte, il est vrai, des mesures susceptibles de remédier en partie à ces faiblesses. Toutes vont dans le bon sens, mais je suis néanmoins persuadé qu'elles seront insuffisantes pour redynamiser le marché de l'art dans notre pays.

Ainsi, nous regrettons profondément que les mesures adoptées à l'initiative de la commission des finances du Sénat n'aient pas été retenues. Elles avaient le mérite d'apporter un remède aux handicaps fiscaux qui pénalisent lourdement le marché de l'art en France. Ainsi, tout achat effectué en dehors d'un pays de l'Union européenne est soumis à une TVA à l'importation qui s'élève à 5,5 % pour les oeuvres d'art, voire à près de quatre fois plus pour les meubles de plus de cent ans, les bijoux et les manuscrits. Cette taxe à l'importation est nulle aux

Etats-Unis, et ne se monte qu'à 2,5 % en GrandeBretagne. Un collectionneur français qui voudrait acheter une toile impressionniste vendue à New York par un autre Français devrait payer 5 % de plus qu'un collectionneur américain. Cette réglementation a abouti à la délocalisation, hors Communauté, de nombreux ensembles français. Le marché des bijoux, par exemple, s'est déplacé de Paris à Genève.

Le droit de suite crée un droit moral pour les artistes et les ayants droit. Il ne s'agit donc évidemment pas de le supprimer mais il est nécessaire de l'adapter. La proposition du Sénat tendant à encourager l'offre privée par une exonération partielle des droits de mutation allait dans le bon sens.

Nous comprenons mal pourquoi le Gouvernement est aussi obstiné à refuser les offres des propriétaires privés.

Pas davantage que dans le passé, l'Etat n'a les moyens de tout faire.

Faute de prendre les véritables mesures, nous craignons que le dispositif dont nous discutons ce soir reste sans effet réel. On ne pourra pas faire l'économie d'une réforme de la fiscalité sur les oeuvres d'art.

En conclusion, je regrette une fois de plus la faiblesse des moyens dont dispose l'Etat pour acquérir des oeuvres d'art. Les crédits d'acquisition sont sacrifiés : dans le budget de 1999, seuls 10 millions de francs leur étaient consacrés. Pourquoi ne pas s'inspirer - au-delà des polémiques actuelles - de ce qui se passe en Angleterre, où les recettes de la loterie nationale contribuent en partie à l'achat d'oeuvres d'art.

Répétons-le, l'Etat ne peut pas tout. Dans ce cadre, une grande loi sur le mécénat nous paraît indispensable.

La proposition de loi que nous examinons ce soir est une première étape. Cependant, faute de se donner de véritables moyens, elle risque d'être insuffisante. C'est pourquoi, sans vouloir bloquer son adoption, le groupe UDF s'abstiendra.

M. Michel Herbillon et M. Pierre Lellouche.

Très bien !

M me la présidente.

La parole est à M. Pierre Lellouche.

M. Pierre Lellouche.

Mes deux collègues de l'opposition ont dit l'essentiel, et je partage, au mot près, leur analyse. Le groupe RPR s'abstiendra également. La mécanique juridique de la proposition de loi est infiniment préférable au système précédent. Elle apporte plusieurs


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innovations utiles, notamment la permanence du certificat de sortie pour les objets de plus de cent ans, l'allongement à vingt ans de la validité du certificat pour les objets de moins de cent ans, l'automaticité de l'attribution du certificat pour toutes les oeuvres importées en France depuis moins de cinquante ans, la validité du refus de sortie ramenée de trente-six mois à trente mois et, surtout, la fixation du prix de vente après expertise contradictoire entre l'Etat et le vendeur.

Cette procédure est équitable et nous sommes globalement d'accord avec l'économie du texte. Ce qui manque, cela a déjà été dit en première lecture, c'est naturellement le nerf. Comme vient de le rappeler Christian Kert, dans une économie générale de l'art caractérisée par l'hémorragie de notre patrimoine, c'est l'argent qui fait défaut.

Nous avions plusieurs solutions pour permettre à la collectivité de protéger les trésors nationaux. La première consistait à augmenter massivement la dotation, comme l'ont fait les Britanniques, en cherchant des ressources auprès de la loterie nationale. Pour des raisons que j'ignore, le Gouvernement n'a pas repris ce système que nous avions proposé : c'est regrettable.

Une autre solution était de permettre aux intervenants privés résidant en France d'acheter les trésors nationaux pour éviter qu'ils ne soient exportés. Cela impliquerait que l'Etat joue le rôle d'intermédiaire entre l'acheteur privé résidant en France et le vendeur. Il s'agissait aussi, par un dispositif de défiscalisation, d'encourager le mécénat.

Ces deux mesures, proposées par la commission des finances du Sénat, ont été refusées par le Gouvernement.

Au final, le système juridique est meilleur que le précédent, mais aucun moyen ne permet d'aboutir aux objectifs que le Gouvernement s'est fixés et que nous approuvons.

On est donc exactement dans le même cas de figure que pour la loi précédente : il y a une économie générale, et, de la même façon qu'il fallait ouvrir les maisons de vente françaises et moderniser, il fallait changer de système juridique pour protéger nos trésors nationaux, mais le volet financier et fiscal est totalement absent et vous ne pouvez pas, au prix qu'atteignent un certain nombre de ces objets, prétendre défendre utilement les trésors nationaux de notre patrimoine sans argent.

C'est la raison pour laquelle le groupe RPR s'abstiendra. Nous regrettons vraiment qu'à l'occasion de ces deux textes, le Gouvernement ne se soit pas donné les moyens d'une vraie politique culturelle à la hauteur de notre patrimoine, de ce qui reste à défendre dans ce pays, et, surtout, des mutations fondamentales du marché de l'art mondial dans une époque de mondialisation.

Ce rendez-vous est manqué. Peut-être qu'une autre majorité, un jour, relèvera le défi !

M. Michel Herbillon et M. Christian Kert.

Très bien !

Mme la présidente.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Consciente de l'importance du texte dont nous débattons ce soir pour la protection de notre patrimoine national, je me réjouis tout d'abord qu'il reste finalement fort peu de points de désaccord entre les deux assemblées et je tiens à féliciter votre rapporteur, M. Rouger, pour le travail accompli et notamment pour la bonne concertation qu'il a su engager avec l'autre assemblée.

Monsieur Outin, vous avez souligné l'intérêt de la nouvelle procédure, qui permet à l'Etat d'acquérir des oeuvres majeures de notre patrimoine en respectant la règle du juste prix pour le propriétaire. Les garanties données par ce texte, le prix étant fixé par deux, voire trois experts, sont je crois, de nature à lever tout soupçon sur la relation entre l'Etat et le propriétaire, et je pense que c'est une excellente chose.

Monsieur Herbillon, je respecterai bien évidemment les engagements pris par mon prédécesseur, et je vous confirme mon intention de poursuivre le débat engagé par Catherine Trautmann sur la réforme de la loi de 1913 relative aux monuments historiques. Ce projet de réforme devrait aboutir à l'adoption d'un projet de loi par le conseil des ministres dans les tout prochains mois.

M. Pascal Terrasse.

Très bien !

Mme la ministre de la culture et de la communication.

J'ajoute que ce projet de loi comportera un volet fiscal de manière à répondre à nombre des attentes exprimées par votre assemblée.

S'agissant de l'exonération des oeuvres d'art pour l'ISF, je fais totalement mienne la position de mon prédécesseur. Il faut bien évidemment, avant même d'inventer de nouvelles mesures fiscales, s'appuyer sur celles qui existent et cette exonération est pour moi plus qu'un signe, c'est une condition de la politique que mène le Gouvernement en ce domaine.

Monsieur Terrasse, vous avez exprimé votre accord global et sans réticence sur ce texte, et vous m'avez interpellée sur la grotte Chauvet. Bien évidemment, je p oursuivrai le travail de pacification entrepris par Mme Trautmann. Cette découverte, essentielle pour notre connaissance de l'histoire de l'humanité, ne doit pas être gâchée, occultée, compromise par des malentendus ou des querelles. Avant mon arrivée, un protocole d'accord a été signé avec les inventeurs, le 15 février dernier, et je le mettrai en oeuvre sans délai. Je tenais à vous le confirmer devant la représentation nationale.

M. Pascal Terrasse.

Merci !

M. Bernard Outin.

Ça s'arrose ! (Sourires.)

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Monsieur Kert, sur les quatre-vingts trésors nationaux, l'Etat a pu en acquérir trente-deux. C'est justement pour lui permettre de continuer à accroître les collections publiques que le présent dispositif me paraît réellement approprié. L'harmonisation fiscale européenne répond, elle aussi, à cette nécessaire continuité entre les Etats de la Communauté.

Vous avez lancé une information alarmante sur les chiffres d'acquisition et je voudrais rétablir ici la réalité.

Vous avez évoqué, je crois, 10 millions. En fait, ce sont 400 millions qui sont consacrés à ces acquisitions. Ce sont des ordres de grandeur déjà respectables même si, pour moi comme pour vous, il est souhaitable que l'Etat poursuivre son effort en ce domaine.

M. Lellouche a exprimé la même préoccupation que M. Herbillon et M. Kert sur les moyens consacrés par l'Etat à la politique de protection du patrimoine, qui est essentielle. Je crois que le Gouvernement fait accomplir à cette politique des progrès très notables. Soyez assurés que, personnellement, je me battrai au sein de mon Gouvernement pour que nous continuions dans cette voie, et j'espère vous trouver à mes côtés à l'occasion de la disc ussion budgétaire.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Mme la présidente.

La discussion générale est close.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

Discussion des articles

Mme la présidente.

En application de l'article 91, alinéa 9, du règlement, j'appelle maintenant, dans le texte du Sénat, les articles de la proposition de loi sur lesquels les deux Assemblées du Parlement n'ont pu parvenir à un texte identique et qui font l'objet d'amendements.

Article 2

Mme la présidente.

« Art. 2. - L'article 7 de la loi no 92-1477 du 31 décembre 1992 précitée est ainsi modifié :

« 1o Le deuxième alinéa et ainsi rédigé :

« Il est accordé aux biens culturels licitement importés dans le territoire douanier depuis moins de cinquante ans. »

;

« 2o Le quatrième alinéa est ainsi rédigé :

« Le refus de délivrance du certificat ne peut intervenir qu'après avis motivé d'une commission composée à parité de représentants de l'Etat et de personnalités qualifiées et présidée par un membre du Conseil d'Etat. Un décret en Conseil d'Etat fixe ses modalités de désignation et les conditions de publication de ses avis. »

;

« 3o Au début de la première phrase du dernier alinéa, après le mot : "décision", sont insérés les mots : "de refus" » ;

« 4o La dernière phrase du dernier alinéa est complétée par les mots : "et publiée dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat". »

M. Rouger, rapporteur, a présenté un amendement no 1, ainsi libellé :

« Après le premier alinéa de l'article 2, insérer l'alinéa suivant :

« 1o A Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : "Aucune indemnité n'est due en cas de refus de délivrance du certificat". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean Rouger, rapporteur.

Il s'agit d'un amendement de cohérence avec l'article 5, qui précise qu'aucune indemnité n'est due au titre du renouvellement du refus de certificat. Sans cette précision, on pourrait considérer a contrario qu'une indemnité serait possible lors du premier refus de certificat, ce qui n'est pas souhaitable car cela enlèverait tout son intérêt à cette loi. Il faut que le principe de la non-indemnisation du refus de certificat d'un bien qualifié de trésor national s'applique à toutes les étapes de la procédure.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Je souscris à l'argumentation de votre rapporteur et je suis donc favorable à cet amendement, mais vous me permettrez, parce que je crois qu'on touche là à un sujet juridique d'une très grande importance, de développer cette argumentation.

Le Conseil d'Etat admet la possibilité d'accorder une indemnisation des dommages résultant de la création d'une servitude administrative « si le législateur n'a pas entendu exclure toute indemnisation et dans la mesure où ce préjudice présente un caractère direct, certain, grave et spécial ». Dans ce cas, l'indemnité est octroyée, à raison non pas de la servitude, mais des dommages qui en ont résulté. L'assujetti a la charge de prouver qu'il a subi un préjudice matériel direct et certain.

E n l'absence de précision dans la loi du 31 décembre 1992, le préjudice résultant pour le propriétaire d'un trésor national des restrictions à la circulation de son bien serait donc apprécié dans son principe et ses c onditions d'indemnisation conformément à cette jurisprudence.

Dans ces conditions, il est permis d'affirmer que les j uridictions administratives n'auraient pas considéré comme direct et certain le préjudice financier résultant d'une perte d'accès au marché international de l'art, dans la mesure où cette sujétion trouve sa cause dans le refus même du propriétaire du trésor national de le vendre à l'Etat à sa juste valeur, déterminée par référence au marché international.

A partir de cette analyse, le Gouvernement avait estimé préférable de laisser dans la loi le principe de l'indemnisation et de s'en remettre à l'appréciation souveraine des juridictions pour apprécier l'existence et le montant du préjudice financier éventuel.

Toutefois, il est permis de s'interroger sur l'utilité de laisser subsister le principe d'une indemnisation qui devrait se révéler dans la pratique sans intérêt, puisque dépourvue d'objet.

En définitive, il apparaît préférable de poser sans ambiguïté le principe de la suppression de l'indemnisation des conséquences du refus d'exportation des trésors nationaux.

L'amendement de cohérence de votre commission relatif à la suppression de l'indemnisation du premier refus de certificat relève, dans la logique de la réforme, de la même analyse et participe à l'efficacité du nouveau dispositif. J'y suis donc favorable.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

1. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'article 2, modifié par l'amendement no

1. (L'article 2, ainsi modifié, est adopté.)

Article 5

Mme la présidente.

« Art. 5. - Après l'article 9 de la loi no 92-1477 du 31 décembre 1992 précitée, sont insérés les articles 9-1 à 9-4 ainsi rédigés :

« Art. 9-1. - Dans le délai prévu au premier alinéa de l'article 9, l'autorité administrative peut, dans l'intérêt des collections publiques, présenter une offre d'achat. Cette offre tient compte des prix pratiqués sur le marché international.

« Si le propriétaire du bien n'accepte pas l'offre d'achat dans un délai de trois mois, l'autorité administrative peut faire procéder à une expertise pour fixer le prix du bien dans les conditions fixées aux troisième et quatrième alinéas.

« L'autorité administrative et le propriétaire du bien désignent, chacun à leurs frais, un expert. En cas de carence, le président du tribunal de grande instance statuant en la forme des référés procède à la désignation.

Ces experts rendent un rapport conjoint dans un délai de trois mois à compter de leur désignation.

« En cas de divergences entre ces experts, le prix du bien est fixé par un expert désigné conjointement par l'autorité administrative et le propriétaire du bien ou, à défaut d'accord, par le président du tribunal de grande


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

instance statuant en la forme des référés. Cet expert, dont la rémunération est supportée pour moitié par chacune des parties, rend son rapport dans les conditions prévues au troisième alinéa.

« L'autorité administrative dispose d'un délai de deux mois à compter de la remise du rapport d'expertise fixant le prix du bien pour adresser au propriétaire une offre d'achat à la valeur d'expertise. A l'issue de ce délai, en l'absence d'offre d'achat présentée par l'Etat, le certificat ne peut plus être refusé.

« Si, dans un délai de deux mois à compter de l'offre d'achat, le propriétaire la refuse ou n'a pas fait savoir qu'il l'acceptait, le refus de délivrance du certificat peut être renouvelé. Aucune indemnité n'est due à ce titre.

« Si le propriétaire du bien accepte l'offre d'achat, le paiement doit intervenir dans un délai de six mois à compter de l'accord du propriétaire à peine de résolution de la vente.

« En cas de renouvellement du refus du certificat, le propriétaire du bien peut faire procéder à une expertise dans les conditions prévues aux troisième et quatrième alinéas. Si l'autorité administrative refuse d'acquérir le bien au prix d'expertise, le refus de délivrance ne peut être renouvelé.

« L'autorité administrative peut également procéder à l'acquisition des biens visés au deuxième alinéa de l'article 9 pour le compte de toute personne publique.

« Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du présent article.

« Art. 9-2 à 9-4. - Non modifiés. »

M. Rouger, rapporteur, a présenté un amendement, no 2, ainsi rédigé :

« A la fin de la première phrase du sixième alinéa du texte proposé pour l'article 9-1 de la loi du 31 décembre 1992, substituer aux mots : "peut être", le mot : "est". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean Rouger, rapporteur.

C'est un amendement qui nous fait revenir au texte tel que nous l'avions adopté en première lecture. Dans la logique de la procédure, le refus de délivrance du certificat d'exportation par l'administration doit être automatique en cas de refus de vente du propriétaire.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Je suis très favorable à cet amendement.

En cas de refus de vente du trésor national, le refus du certificat d'exportation de ce bien doit être automatique.

C'est le coeur même de la nouvelle législation. Cette décision ne peut être laissée à l'appréciation de l'administration, qui demeure tenue par l'acte administratif der econnaissance du statut de trésor national et par l'ensemble des obligations qui y sont attachées, en particulier le maintien du bien sur le territoire français.

L'amendement de la commission rétablit la cohérence juridique de la procédure d'estimation et d'acquisition des trésors nationaux.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

2. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

M. Rouger, rapporteur, a présenté un amendement, no 3, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le huitième alinéa du texte proposé pour l'article 9-1 de la loi du 31 décembre 1992 :

« En cas de renouvellement du refus de délivrance du certificat, la procédure prévue aux alinéas précédents demeure applicable. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean Rouger, rapporteur.

Avec cet amendement, nous revenons encore au texte que nous avions adopté en première lecture.

Lors du renouvellement du refus de certificat, lorsque le propriétaire a décliné l'offre d'achat, la procédure doit pouvoir recommencer au début. Il n'y a pas de raison de donner au propriétaire le moyen de relancer seul la procédure à partir de l'expertise.

Il s'agit là de respecter l'équilibre des parties. La loi propose en effet une procédure de négociation simple et claire. Elle doit imposer une méthode rigoureuse pour les échanges commerciaux et ne pas laisser les fluctuations du marché de l'art régenter la procédure.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Favorable. M. le rapporteur s'était d'ailleurs très clairement exprimé dans son intervention initiale sur ce point, et je souscris tout à fait à son analyse et au principe de l'équilibre des parties. Si la discussion doit être réouverte, elle doit pouvoir l'être à l'initiative de chacune des deux parties.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

3. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'article 5, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 5, ainsi modifié, est adopté.)

Article 7

Mme la présidente.

L'article 7 ne fait l'objet d'aucun amendement.

J'en donne lecture :

« Art. 7. Les dispositions de la présente loi, à l'exception de celles du 1o de l'article 4, sont applicables aux biens culturels auxquels a été délivré le certificat prévu par l'article 5 de la loi no 92-1477 du 31 décembre 1992 précitée ou qui, à la date d'entrée en vigueur de la loi, font l'objet d'un refus de certificat. »

Vote sur l'ensemble

Mme la présidente.

Personne ne demande la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.

(L'ensemble de la proposition de loi est adopté.)

3

PUBLICATION DU RAPPORT D'UNE COMMISSION D'ENQUÊTE

Mme la présidente.

Le 29 mars 2000, j'ai informé l'Assemblée nationale du dépôt du rapport de la commission d'enquête sur la transparence et la sécurité sanitaire de la filière alimentaire en France.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

Je n'ai été saisie, dans le délai prévu à l'article 143, ali néa 3, du règlement, d'aucune demande tendant à la constitution de l'Assemblée en comité secret afin de décider de ne pas publier tout ou partie du rapport.

En conséquence, celui-ci sera imprimé et distribué sous le no 2297.

4 DÉPÔT DE PROPOSITIONS DE LOI

Mme la présidente.

J'ai reçu, le 4 avril 2000, de M. François Sauvadet, une proposition de loi accordant aux maires la possibilité de saisir pour avis les chambres régionales des comptes.

Cette proposition de loi, no 2312, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 4 avril 2000, de M. Guy Teissier, une proposition de loi visant à dispenser des obligations du service national les jeunes gens ayant bénéficié d'un report d'incorporation en raison de la détention d'un contrat de travail.

Cette proposition de loi, no 2313, est renvoyée à la commission de la défense nationale et des forces armées, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 4 avril 2000, de M. Yves Nicolin et plusieurs de ses collègues, une proposition de loi tendant à permettre la mise en cause de la responsabilité pénale des parents de mineurs délinquants.

Cette proposition de loi, no 2314, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 4 avril 2000, de M. Jean-Pierre Brard, une proposition de loi relative à la création d'une agence santé-environnement.

Cette proposition de loi, no 2315, est renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 4 avril 2000, de M. Georges Sarre, une proposition de loi visant à l'extension du fichier national des traces et empreintes génétiques par ADN.

Cette proposition de loi, no 2316, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 4 avril 2000, de M. Alain Ferry, une proposition de loi instituant le maintien des allocations familiales pour le dernier enfant à charge des familles de quatre enfants.

Cette proposition de loi, no 2317, est renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 4 avril 2000, de M. Alain Ferry, une proposition de loi visant à favoriser la vie associative et le bénévolat.

Cette proposition de loi, no 2318, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

5 DÉPÔT D'UN RAPPORT EN APPLICATION D'UNE LOI

Mme la présidente.

J'ai reçu, le 1er avril 2000, de M. le Premier ministre, en application de l'article 17 de la loi no 89-487 du 10 juillet 1989 relative à la prévention des mauvais traitements à l'égard des mineurs et à la protection de l'enfance, un rapport sur l'enfance maltraitée.

6 DÉPÔT D'UN AVIS

Mme la présidente.

J'ai reçu, le 4 avril 2000, de M. Jean-Yves Le Déault, un avis, no 2319, présenté au nom de la commission de la production et des échanges, sur les titres Ier et II de la deuxième partie du projet de l oi relatif aux nouvelles régulations économiques (no 2250) ; 7

ORDRE DU JOUR

DES PROCHAINES SÉANCES

Mme la présidente.

Aujourd'hui, à quinze heures, première séance publique : Questions au Gouvernement ; Discussion du projet de loi (no 2183) autorisant l'approbation du protocole de Kyoto à la conventioncadre des Nations unies sur les changements climatiques (ensemble deux annexes) : Mme Marie-Hélène Aubert, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères (rapport no 2296) ; Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat (no 1421), autorisant l'approbation de la convention sur l'évaluation de l'impact sur l'environnement dans un contexte transfrontière (ensemble sept appendices : Mme Marie-Hélène Aubert, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères (rapport no 2221) ; (Procédure d'examen simplifiée. - Art. 107 du règlement.) Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat (no 1928), autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des Etats-Unis du Mexique sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements : M. François Loncle, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères (rapport no 2222) ; (Procédure d'examen simplifiée. - Art. 107 du règlement.) Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat (no 1925), autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouver-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 4 AVRIL 2000

nement de la République de Slovénie sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements : (ensemble un protocole) : M. Charles Ehrmann, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères (rapport no 2224) ; (Procédure d'examen simplifiée. - Art. 107 du règlement.) Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat (no 1926), autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Kazakhstan en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole) : M. René André, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères (rapport no 2223) ; (Procédure d'examen simplifiée. - Art. 107 du règlement.) Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat (no 1930), autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Kazakhstan sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements (ensemble un protocole) : M. René André, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères (rapport no 2223) ; (Procédure d'examen simplifiée. - Art. 107 du règlement.) Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat (no 1929), autorisant l'adhésion de la République française à la convention internationale contre la prise d'otages : Mme Monique Collange, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères (rapport no 2261) ; (Procédure d'examen simplifiée. - Art. 107 du règlement.) Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat (no 1923), autorisant la ratification de la convention relative à l'adhésion de la République d'Autriche, de la République de Finlande et du Royaume de Suède à la convention concernant la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, ainsi qu'au protocole concernant son interprétation par la Cour de justice, avec les adaptations y apportées par la convention relative à l'adhésion du Royaume de Danemark, de l'Irlande et du Royaume-Uni de GrandeBretagne et d'Irlande du Nord par la convention relative à l'adhésion de la République hellénique et par la convention relative à l'adhésion du Royaume d'Espagne et de la République portugaise : M. Jean-Yves Gateaud, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères (rapport no 2262) ; (Procédure d'examen simplifiée. - Art. 107 du règlement.) Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat (no 1934), autorisant la ratification de la convention relative à l'adhésion de la République d'Autriche, de la République de Finlande et du Royaume de Suède à la convention sur la loi applicable aux obligations contractuelles, ouverte à la signature à Rome le 19 juin 1980, ainsi qu'aux premier et deuxième protocoles concernant son interprétation par la Cour de justice : M. Jean-Yves Gateaud, rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères (rapport no 2262) ; (Procédure d'examen simplifiée. - Art. 107 du règlement.) A vingt et une heures, deuxième séance publique : Discussion de la proposition de loi, adoptée par le Sénat (no 2121), tendant à préciser la définition des délits non intentionnels : M. René Dosière, rapporteur au nom de la commisssion des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (rapport no 2266) ; La séance est levée.

(La séance est levée, le mercredi 5 avril 2000, à zéro heure vingt-cinq.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT

Prix du numéro : 0,64 - 4,20 F Imprimerie, 26, rue Desaix, Paris (15e ). - Le préfet, Directeur des Journaux officiels : Jean-Paul BOLUFER 103000300-000400