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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE

DE Mme

NICOLE CATALA

1. Loi de finances pour 2001 (première partie). - Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 7105).

DISCUSSION

DES ARTICLES (suite) (p. 7105)

Après l'article 4 (suite) (p. 7105)

Amendement no 93 de M. Jégou : MM. Pierre Méhaignerie, Didier Migaud, rapporteur général de la commission des finances ; Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie ; Jean-Jacques Jégou. - Rejet.

Amendement nos 441 de M. Cuvilliez, 141 de M. Cochet et 206 de M. Dray et amendements identiques nos 67 de

M. Dray, 461 de Mme Robin-Rodrigo, 462 de M. Rossignol, 463 de M. Sarre, 464 de M. Lefort, 465 de M. Galut et 521 de M. Maurice Leroy : MM. JeanPierre Brard, Yves Cochet, Julien Dray, Yann Galut, Georges Sarre, Jean-Claude Lefort, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Henri Emmanuelli, président de la commission des finances ; François Goulard, Jean-Jacques Jégou, Maurice Adevah-Poeuf, Augustin Bonrepaux. Rejet des amendements nos 441 et 141 ; rejet, par scrutin, d e l'amendement no 206 ; rejet des amendements identiques.

Article 5 (p. 7116)

MM. Christian Cuvilliez, Michel Bouvard.

M. le secrétaire d'Etat.

Suspension et reprise de la séance (p. 7119)

Amendement de suppression no 94 de M. Méhaignerie : MM. Pierre Méhaignerie, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Augustin Bonrepaux. - Rejet.

Amendement no 257, deuxième rectification, de M. Besselat : MM. Jean-Yves Besselat, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Charles de Courson, Germain Gengenwin. Rejet.

Amendement no 505 de M. Douste-Blazy : MM. Charles de Courson, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. Rejet.

Amendement no 152 de M. Cochet, avec le sous-amendement no 546 de M. Michel Bouvard : MM. Yves Cochet, Michel Bouvard, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Charles de Courson. - Rejet du sous-amendement et de l'amendement.

Amendement no 316 de M. Carrez : MM. Gilles Carrez, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Rejet.

Amendement no 36 de la commission des finances : MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption.

Amendement no 486 de M. Migaud, avec le sous-amendement no 540 du Gouvernement : MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Jean-Jacques Jégou, Gilles Carrez. - Adoption du sous-amendement et de l'amendement modifié.

Amendement no 551 de M. Cuvilliez : MM. Christian Cuvilliez, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. Adoption de l'amendement modifié.

Amendement no 37 de la commission des finances : MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption.

Amendements nos 317 de M. Carrez et 526 de M. Besselat : MM. Gilles Carrez, Jean-Yves Besselat, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Augustin Bonrepaux, Maurice Adevah-Poeuf. - Rejet, par scrutin, de l'amendement no 317 ; rejet de l'amendement no 526.

Amendement no 96 de M. Méhaignerie : MM. Pierre Méhaignerie, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Augustin Bonrepaux. - Rejet.

Adoption de l'article 5 modifié.

Après l'article 5 (p. 7132)

Amendement no 264 de M. Michel Bouvard, amendements identiques nos 82 de M. Auberger et 318 de M. Carrez, et amendement no 449 de M. Cuvilliez : MM. Michel Bouvard, Philippe Auberger, Gilles Carrez, Christian Cuvilliez, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, JeanJacques Jégou. - Rejets.

Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.

2. Dépôt d'une proposition de loi organique (p. 7135).

3. Dépôt d'une proposition de résolution (p. 7135).

4. Dépôt de rapports d'information (p. 7135).

5. Dépôt d'un projet de loi modifié par le Sénat (p. 7135).

6. Ordre du jour des prochaines séances (p. 7135).


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COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE Mme NICOLE CATALA,

vice-présidente

Mme la présidente.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures quinze.)

1 LOI DE FINANCES POUR 2001

PREMIÈRE PARTIE Suite de la discussion d'un projet de loi

Mme la présidente.

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2001 (nos 2585, 2624).

Discussion des articles (suite)

Mme la présidente.

Cet après-midi, l'Assemblée a continué l'examen des articles et s'est arrêtée à l'amendement no 296 de M. Gatignol portant article additionnel après l'article 4.

Après l'article 4 (suite)

Mme la présidente.

L'amendement no 295 n'est pas défendu.

M

M. Jégou, Méhaignerie, Barrot, Mme Idrac,

M. Hériaud et M. Ligot ont présenté un amendement, no 93, ainsi libellé :

« Après l'article 4, insérer l'article suivant :

« I. Après l'article 885 L du code général des impôts, il est inséré un article 885 M ainsi rédigé :

« Art. 885

M. I. Les souscriptions en numéraires au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés non cotées intervenant avant le 31 décembre de la quatrième année qui suit la constitution de ces sociétés ne sont pas comprises dans les bases d'imposition à l'impôt de solidarité sur la fortune. La souscription doit être faite pour une durée minimale de trois ans par un redevable n'exerçant pas de fonction dirigeante dans cette société.

« Cette exonération est applicable lorsque les c onditions visées aux a, b et c du I de l'article 199 terdecies0 A sont remplies.

« II. Lorsque tout ou partie des actions ou parts ayant bénéficié de l'exonération prévue au I est cédé avant le 31 décembre de la troisième année suivant celle de la souscription, l'impôt de solidarité sur la fortune est recalculé pour chacune des années concernées en incluant dans l'assiette imposable le montant total des versements effectués. »

« II. La perte de recettes pour le budget de l'Etat est compensée à due concurrence par le relèvement des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. Pierre Méhaignerie.

M. Pierre Méhaignerie.

J'ai mesuré, avant la pause du dîner, ce que pouvait être la valeur des symboles - en l'occurrence l'ISF - même lorsque ces symboles peuvent conduire à l'appauvrissement du pays. Ce pourrait être la conséquence du non-plafonnement de l'ISF lorsque le cumul de celui-ci et de l'impôt sur le revenu est supérieur au revenu global.

M. Henri Emmanuelli, président de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

Vous le devez à M. Juppé !

M. Pierre Méhaignerie.

Exactement.

Beaucoup reconnaissent ici à voix basse, quelle que soit leur sensibilité, les conséquences négatives du nonplafonnement de l'ISF. Peut-on avoir le courage de regarder la vérité en face, d'en voir les conséquences sur l'investissement du pays, sur les délocalisations, sur les départs de capitaux et sur les pertes de recettes fiscales ? Un plafonnement à 85 %, tel celui mis en oeuvre par Pierre Bérégovoy il y a quelques années, serait plus efficace pour accroître les ressources fiscales du pays. L'humilité devrait nous conduire à constater que tous les pays européens sont, sans exception, arrivés à ce plafonnement.

Peut-être que la deuxième lecture offira une ouverture sur ce point.

Comme, pour le moment, cela paraît difficile, l'amendement que nous vous proposons avec certaines de mes collègues de l'UDF, tend simplement à permettre la naissance d'entreprises et la constitution du capital de jeunes sociétés de moins de quatre ans en rendant déductible de l'assiette imposable à l'ISF les sommes investies pour une durée minimale de trois ans lorsque le redevable n'exerce par de fonction dirigeante.

Il ne s'agit que d'une ouverture timide qui tend essentiellement à éviter que des entreprises ne quittent le territoire ou ne soient, comme c'est le cas actuellement, reprises par des capitaux étrangers.

Mme la présidente.

La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour donner l'avis de la commission sur cet amendement.

M. Didier Migaud, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

Madame la présidente, la commission a repoussé cet amendement...

M. Germain Gengenwin.

C'est pourtant le bon sens !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

... et invite l'Assemblée à faire de même, souhaitant que nous en restions à l'équilibre trouvé en 1998, même si je suis de ceux qui regrettent le raisonnement bien dogmatique que nombre d'entre nous ont pu tenir alors quant à l'ISF.


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Je le concède, l'ISF tel qu'il existe actuellement engendre quelques effets pervers. Il faudrait sans doute remettre l'ouvrage sur la table et rendre cet impôt plus

« intelligent » qu'il ne l'est aujourd'hui. Mais j'estime que, compte tenu des choix qui ont été faits, il faut en rester là pour le moment. D'ailleurs, nous avons, lors de la précédente séance, adopté une mesure concernant notamment la transmission des entreprises, qui me semble positive et prendre bien en compte la réalité économique.

En tout cas, compte tenu du contexte, j'invite notre assemblée à rejeter cet amendement.

M. Germain Gengenwin.

Et les start-up ?

Mme la présidente.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat à l'industrie, pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement no

93.

M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie.

Je suis défavorable à l'amendement présenté par M. Méhaignerie et cosigné par M. Jégou pour trois raisons.

D'abord, il est construit de telle manière que l'avantage consenti aux investisseurs n'exerçant aucune fonction de direction au sein de la société visée serait équivalent à celui dont bénéficient les investisseurs au titre des biens professionnels, qui est conditionné par la détention d'au moins 20 % des parts sociales et l'exercice d'une fonction de direction. Or ces deux types de personnes n'ont rien de comparable. L'exercice d'une fonction de direction est essentiel à la détermination des biens professionnels.

Ensuite, ce dispositif propre à l'ISF se cumulerait avec la réduction existant en matière d'impôt sur le revenu, qui permet à ces personnes de déduire 25 % du montant des souscriptions réalisées.

Enfin, une telle disposition est contraire au principe même de l'ISF mais c'est ce que vous recherchez -, qui est d'appréhender les facultés contributives des contribuables les plus fortunés, indépendamment de l'affectation donnée à leurs biens.

Il existe d'autres réponses et le Gouvernement a commencé à en apporter même si l'on peut aller plus loin - pour faciliter la création de nouvelles entreprises innovantes, de « jeunes pousses ». Je les ai évoquées la nuit dernière, je n'y reviens pas.

Pour les trois raisons qui tiennent à l'architecture de l'amendement et parce que le Gouvernement mène, par d'autres voies, une politique favorable à l'innovation, je demande à l'Assemblée de repousser l'amendement.

Mme la présidente.

La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.

M. Jean-Jacques Jégou.

Monsieur le secrétaire d'Etat, je voudrais vous faire partager la confiance que le groupe UDF a dans les entreprises. D'ailleurs l'appréciation que vous avez portée sur notre précédent amendement montre que votre culture en la matière n'est pas très éloignée de la nôtre.

En effet, nous ne pouvons pas nous contenter de cette sorte de Yalta alors que, comme le rapporteur général, Didier Migaud, vous semblez vous satisfaire de cette liturgie fiscale selon laquelle on est riche à partir d'un certain niveau d'imposition.

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Non !

M. Jean-Jacques Jégou.

Je le sais, monsieur le secrétaire d'Etat, mais vous défendez une position qui n'est pas forcément la vôtre.

En tout cas je peux vous dire que, pour être considéré comme riche en Ile-de-France, il suffit d'avoir pu, grâce à son travail, acquérir son domicile et acheter une résidence secondaire en province, en Bretagne par exemple, ce qui est mon cas. Je suis donc riche !

M. Jean-Pierre Brard.

Et un chalet !

M. Jean-Jacques Jégou.

Non, je n'ai même pas un chalet, mais peut-être en avez-vous un ? Par ailleurs, il ne vous a sans doute pas échappé, puisque Germain Gengenwin vous a interpellé sur le problème des start-up avec son bon sens coutumier, qu'il est une certaine philosophie de la culture d'entreprise que nous n'arrivons pas à faire accepter dans ce pays. Pourtant il est des gens qui, parce qu'ils ont réussi leur vie professionnelle, ont créé des richesses, que vous ne refusez d'ailleurs pas d'accueillir, monsieur Brard, en tant que maire de Montreuil. Certains, qui ont pourtant déjà c onstitué un patrimoine conséquent, sont tellement imprégnés de la culture d'entreprise qu'ils ont envie, également parce qu'ils aiment leur pays, d'aider des jeunes à créer à leur tour leur propre entreprise.

Monsieur le secrétaire d'Etat, avez-vous une seule bonne raison de vouloir limiter l'intervention de ceux que l'on appelle, dans le langage anglo-saxon, des business angels, des anges providentiels ? (Murmures sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Encore une exception française ! Pourquoi, dans notre pays, ne veut-on pas admettre que certains sont prêts à donner de leur argent pour que des jeunes créent des entreprises et de l'emploi ?

M. Jean-Pierre Brard.

Où est le problème ? Qu'ils le donnent !

M. Jean-Jacques Jégou.

Existe-t-il une seule disposition fiscale de nature à inciter des gens à mettre leur argent en jeu dans le capital-risque ?

M. Yann Galut.

Des philanthropes !

M. Jean-Jacques Jégou.

Pourtant le risque existe, on le voit bien aujourd'hui : alors qu'au début de l'année on considérait que celui qui créait une start-up allait presque automatiquement devenir riche, chacun peut constater que la nouvelle économie n'a pas vraiment démontré qu'elle permettait de gagner de l'argent.

Cet amendement tend donc à éviter que l'on impose les gens bêtement, au seul motif qu'ils sont considérés comme riches. Sans le dire ouvertement, monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez d'ailleurs vous-même implicitement admis que l'ISF n'était pas le plus intelligent des impôts. Il vaudrait mieux faire en sorte que l'on incite les intéressés à utiliser cet argent pour créer de nouvelles richesses.

Au cours d'un forum sur l'emploi auquel j'ai participé avec Mme Lebranchu, lorsqu'elle était encore secrétaire d'Etat aux PME - et avec vous, monsieur Fabius, des engagements avaient été pris pour favoriser la création d'entreprises, car, dans notre pays, il ne se crée pas d'entreprises.

M. Henri Emmanuelli, président de la commission.

Mais si !

M. Jean-Yves Besselat.

Très peu !

M. Jean-Jacques Jégou.

Non, monsieur le président de la commission ! Nous avons un problème en matière de création d'entreprises en France.


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Il faut encourager ceux qui ont réussi à gagner de l'argent au cours de leur carrière professionnelle à le réinvestir pour amorcer la pompe de la création d'entreprises, q u'elles s'intéressent aux nouvelles technologies ou qu'elles relèvent de l'économie traditionnelle.

M. Jean-Pierre Brard.

Donc ils ne sont pas si désintéressés que ça !

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

93. (L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

Je suis saisie de dix amendements, nos 441, 141, 206, 67, 461, 462, 463, 464, 465 et 521, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 441, présenté par MM. Cuvilliez, Bocquet, Brard, Feurtet, Vila et les membres du groupe communiste, est ainsi libellé :

« Après l'article 4, insérer l'article suivant :

« Après l'article 985 du code général des impôts, il est inséré un article 985 bis ainsi rédigé :

« Art. 985 bis. Il est institué une taxe spéciale sur les opérations au comptant ou à terme sur les devises, dont le taux est fixé à 0,05 %.

« Sont exonérés de cette taxe les opérations afférentes :

« aux acquisitions ou livraisons intracommunautaires ;

« aux exportations ou importations de biens et services ;

« aux investissements directs au sens du décret no 89-938 du 29 décembre 1989, modifié réglementant les relations financières avec l'étranger ;

« aux opérations de change réalisées par les personnes physiques et dont le montant est inférieur à 300 000 francs.

« La taxe est due par les établissements de crédit, les institutions et les services mentionnés à l'article 8 de la loi no 84-46 du 24 janvier 1984 relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit, les entreprises d'investissement visées à l'article 7 de la loi du 2 juillet 1996 de modernisation des activités financières et par les personnes physiques et morales visées à l'article 25 de la loi no 90-614 du 12 juillet 1990 relative à la participation des organismes financiers à la lutte contre le blanchiment de capitaux provenant du trafic des stupéfiants.

« La taxe spéciale est établie, liquidée et recouvrée sous les mêmes garanties et sanctions que le prélèvement mentionné à l'article 125 A.

« Elle est due pour les opérations effectuées à compter de la promulgation de la loi no d u relative aux nouvelles régulations économiques.

« Un décret fixe les modalités d'application du présent article. »

L'amendement no 141, présenté par MM. Cochet, Aschieri, Mme Aubert, M. Mamère et M. Marchand, est ainsi libellé :

« Après l'article 4, insérer l'article suivant :

« Après l'article 985 du code général des impôts, il est inséré un article 985 bis ainsi rédigé :

« Art. 985 bis. Il est institué une taxe spéciale sur les opérations, au comptant ou à terme, portant sur les devises, dont le taux est fixé à 0,05 %.

« Sont exonérées de cette taxe les opérations afférentes :

« aux acquisitions ou livraisons intracommunautaires ;

« aux exportations ou importations de biens et de services ;

« aux investissements directs au sens du décret no 89-938 du 29 décembre 1989 modifié réglementant les relations financières avec l'étranger ;

« aux opérations de change réalisées par les personnes physiques et dont le montant est inférieur à 500 000 francs.

« La taxe est due par les établissements de crédit, les institutions et les services mentionnés à l'article 8 de la loi no 84-46 du 24 janvier 1984 relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit, les entreprises d'investissement visées à l'article 7 de la loi no 96-597 du 2 juillet 1996 de modernisation des activités financières et par les personnes physiques ou morales visées à l'article 25 de la loi no 90614 du 12 juillet 1990 relative à la participation des organismes financiers à la lutte contre le blanchiment de capitaux provenant du trafic de stupéfiants.

« La taxe spéciale est établie, liquidée et recouvrée sous les mêmes garanties et sanctions que le prélèvement mentionné à l'article 125 A.

« Elle est due pour les opérations effectuées à compter du 1er janvier 2001.

« Un décret fixe les modalités d'application du présent article. »

L'amendement no 206, présenté par MM. Dray, Galut, Rossignol et Mme Picard, est ainsi libellé :

« Après l'article 4, insérer l'article suivant :

« Après l'article 985 du code général des impôts, il est inséré un article 985 bis ainsi rédigé :

« Art. 985 bis. I. Il est institué une taxe spéciale sur les opérations, au comptant ou à terme, portant sur les devises, dont le taux est fixé à 0 %.

« Sont exonérées de cette taxe les opérations afférentes :

« aux acquisitions ou livraisons intracommunautaires ;

« aux exportations ou importations de biens et de services ;

« aux investissements directs au sens du décret no 89-938 du 29 décembre 1989 modifié réglementant les relations financières avec l'étranger ;

« aux opérations de change réalisées par les personnes physiques et dont le montant est inférieur à 500 000 francs.

« La taxe est due par les établissements de crédit, les institutions et les services mentionnés à l'article 8 de la loi no 84-46 du 24 janvier 1984 relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit, les entreprises d'investissement visées à l'article 7 de la loi no 96-597 du 2 juillet 1996 de modernisation des activités financières et par les personnes physiques ou morales visées à l'article 25 de la loi no 90-614 du 12 juillet 1990 relative à la participation des organismes financiers à la lutte contre le blanchiment de capitaux provenant du trafic de stupéfiants.

« La taxe spéciale est établie, liquidée et recouvrée sous les mêmes garanties et sanctions que le prélèvement mentionné à l'article 125 A.


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« II. Lorsque les pays de l'Union européenne ont mis en place une taxe équivalente à celle définie au I du présent article, le taux prévu au I est corrigé de telle sorte à le porter au taux moyen des taxes instaurées par les pays membres de l'Union européenne.

« Cette modification est effectuée le 1er janvier de l'année suivant celle durant laquelle il aura été c onstaté que l'ensemble des pays membres de l'Union européenne ont mis en place une taxe équivalente à celle définie au I.

« Les modifications ultérieures résultant des variations de taux de ladite taxe constatées dans les pays membres de l'Union européenne sont effectuées le 1er janvier de chaque année. Le taux moyen retenu est calculé sur la base des taux nationaux maxima appliqués dans les pays membres de l'Union européenne au cours de l'année précédente.

« Le taux moyen est calculé en faisant la moyenne a rithmétique des taux appliqués dans les pays membres de l'Union européenne.

« III. Le ministre chargé des finances constate par arrêté les modifications de taux appliquées par la France à la taxe définie au I.

« Ces modifications résultent des dispositions contenues aux I et II du présent article.

« IV. Un décret d'application fixe les modalités d'application du présent article. »

Les amendements nos 67, 461, 462, 463, 464, 465 et 521 sont identiques.

L'amendement no 67 est présenté par MM. Dray, Galut et Mme Picard ; l'amendement no 461 est présenté par Mme Robin-Rodrigo et M. Honde ; l'amendement no 462 est présenté par M. Rossignol ; l'amendement no 463 est présenté par MM. Sarre, Desallangre, Suchod, Jean-Pierre Michel et Saumade ; l'amendement no 464 est présenté par MM. Lefort, Asensi, Clary, Liberti, Outin, Moutoussamy, Daniel Paul, Billard, Biessy et Sandrier ; l'amendement no 465 est présenté par M. Galut, Mmes Ledoux, Roudy, Benayoun-Nakache, Perrin-Gaill ard, Lignières-Cassou, Laurence Dumont, Bousquet, MM. Blisko, Bascou, Launay, Jung, Bacquet, Grégoire, Vergnier et Seux ; l'amendement no 521 est présenté par

M. Maurice Leroy.

Ces amendements sont ainsi libellés :

« Après l'article 4, insérer l'article suivant :

« Après l'article 985 du code général des impôts, il est inséré un article 985 bis ainsi rédigé :

« Art. 985 bis. Il est institué une taxe spéciale sur les opérations, au comptant ou à terme, portant sur les devises, dont le taux est fixé à 0,05 %.

« Sont exonérées de cette taxe les opérations afférentes :

« aux acquisitions ou livraisons intracommunautaires ;

« aux exportations ou importations de biens et services ;

« aux investissements directs au sens du décret no 89-938 du 29 décembre 1989 modifié réglementant les relations financières avec l'étranger ;

« aux opérations de change réalisées par les personnes physiques et dont le montant est inférieur à 500 000 francs.

« La taxe est due par les établissements de crédit, les institutions et les services mentionnés à l'article 8 de la loi no 84-46 du 24 janvier 1984 relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit, les entreprises d'investissement visées à l'article 7 de la loi no 96-597 du 2 juillet 1996 de modernisation des activités financières et par les personnes physiques ou morales visées à l'article 25 de la loi no 90614 du 12 juillet 1990 relative à la participation des organismes financiers à la lutte contre le blanchiment de capitaux provenant du trafic de stupéfiants.

« La taxe spéciale est établie, liquidée et recouvrée sous les mêmes garanties et sanctions que le prélèvement mentionné à l'article 125 A. » La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour soutenir l'amendement no 441.

M. Jean-Pierre Brard.

Dans le rapport d'information remarquable qu'ont rédigé Gérard Fuchs et Daniel Feurtet sur la régulation de la mondialisation financière, nos collègues, avec un esprit d'une rare pertinence, ont écrit :

« A force d'examiner la taxe Tobin au regard de la rentabilité économique, on oublie trop souvent que la politique a pour fonction de corriger les déséquilibres de tous ordres, y compris et surtout lorsque le marché ne peut opérer cette correction. »

Si ce rapport avait été le seul fruit du travail de Daniel Feurtet, vous auriez peut-être pu avoir des doutes, monsieur le secrétaire d'Etat, bien que chacun connaisse sa modération et son objectivité. Mais son talent, conjugué à celui de M. Fuchs, débouche sur la révélation d'une vérité incontestable. Ils poursuivent, d'ailleurs : « Chacun conviendra que l'aménagement du territoire n'est pas non plus rationnel ; qu'il est des dépenses coûteuses avec le maintien de services publics en zone rurale, mais que cette dépense est indispensable à la cohésion de la nation. »

Après le projet sur les régulations économiques, qui tend, en fait, à faciliter, en les renforçant, les opérations boursières, la discussion sur la taxe Tobin apparaît emblématique du débat central sur la nécessité de nouvelles régulations, de véritables régulations, et de nouvelles solidarités internationales, contrepoids indispensables à une globalisation financière sans finalité et sans âme.

Cet amendement ne vise évidemment pas à pénaliser les mouvements de capitaux orientés vers l'économie réelle. Si M. Jégou est cohérent avec ses propos, il trouvera du bon sens dans notre proposition, car elle tend à taxer fortement les opérations spéculatives souvent dévastatrices en termes d'emplois. En effet, monsieur Jégou, cet argent qui flotte a pour but non pas d'aider les entrepreneurs qui veulent développer leur entreprise et dont vous avez affirmé - pourquoi en douter ? - qu'ils aiment leur pays, mais d'enrichir ceux qui, au contraire, n'hésitent pas à partir avec leur pays sous leurs semelles, ignorant l'intérêt national.

Mme la présidente.

La parole est à M. Yves Cochet, pour soutenir l'amendement no 141.

M. Yves Cochet.

La défense de cette proposition est presque une coutume, dont j'espère qu'elle prendra fin ce soir, puisque c'est la troisième année consécutive que je présente un amendement tendant à la création de la taxe dite Tobin.

L'an dernier, le Gouvernement nous avait répondu que l'idée n'était pas si saugrenue que cela, qu'il allait y réfléchir et élaborer un rapport sur le sujet. De notre côté, M. Bonrepaux avait estimé qu'il convenait de préparer un rapport parlementaire. Nous avons donc confié cette mission à quelques-uns de nos collègues, que vous avez cités, monsieur Brard. La délégation pour l'Union européenne


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s'est aussi emparée du sujet pour examiner si tout cela était bien raisonnable. Je vais essayer de vous convaincre que tel est le cas, en reprenant les orientations proposées dans le rapport du Gouvernement, dont nous avons eu connaissance au début du mois de septembre.

Les deux premières ne posent aucun problème puisque, au lieu de l'instauration d'une taxe Tobin, qu'il rejette, le Gouvernement estime préférable de lutter contre la délinquance financière - nous sommes tous d'accord - et de renforcer la coopération monétaire régionale, ce qui va de soi. Il n'en va pas de même pour les deux dernières orientations sur lesquelles je m'interroge : renforcer le rôle et les pouvoirs du FMI et mettre en oeuvre une libéralisation financière ordonnée.

Avant de renforcer le FMI, ne faudrait-il pas dresser un bilan critique de son action depuis plusieurs années ? Je constate en effet qu'il n'a réussi ni à résoudre le problème de la dette du tiers-monde ni à éviter les crises répétées de la mondialisation des années quatre-vingt-dix, par exemple, en Asie du Sud-Est. Les politiques qu'il a proposées ou qu'il a imposées à ces pays ont plutôt aggravé leur situation sociale sans offrir de solution économique.

Pour ce qui est de la libéralisation financière ordonnée, il faut d'abord rappeler que la libéralisation des marchés est déjà presque totale. Or le marché, très libéralisé, a uner esponsabilité entière dans les crises économiques récentes. Souvenons-nous de l'histoire fantastique de LTCM, il y a encore quelques mois.

Nous proposons donc de mettre un peu d'ordre - quelques grains de sable, comme disait Tobin lui-même dans cette spéculation planétaire quotidienne, avec un moyen qui, je vais tenter de le démontrer, est le plus doux parmi tous ceux auxquels on peut penser.

Trois arguments majeurs militent en faveur de l'instauration de la taxe Tobin.

Le premier est qu'elle réduit la spéculation à court terme qui ne profite en rien à l'économie réelle. Le calcul montre en effet qu'une telle taxe, à taux très faible nous proposons 5 p. 10 000 -, est une désincitation très forte à des transactions à court terme, mais constitue une désincitation très faible pour des flux financiers de long terme plus productifs d'investissements.

En outre, la taxe Tobin est préventive lorsque la spéculation est faible et elle devient curative devant la montée d'une crise spéculative. Ces qualités sont spécifiques de la taxe Tobin. Aucune autre forme de contrôle des transactions financières ne les possède, ce qui fait la beauté de la taxe Tobin. (Sourires.)

M. François Goulard.

L'argument esthétique est donc essentiel !

M. Yves Cochet.

Deuxièmement, la taxe Tobin prélève plus efficacement que toute autre forme de taxe. Ainsi, même avec un taux de 5 p. 10 000, son rapport pourrait être de l'ordre de quelques centaines de milliards de francs par an à l'échelon mondial. Or la désirabilité d'une telle somme est forte puisque son affectation serait le développement durable des pays du Sud. Tout le monde convient que cet objectif est noble.

Troisièmement, la taxe Tobin est l'outil le plus doux pour freiner la folie spéculative. Certains pays ont déjà mis en oeuvre des outils beaucoup plus durs. Le Chili, par exemple, impose à une partie des capitaux entrants de rester au moins un an avant de repartir. Cela est beaucoup plus rigoureux et l'on pourrait même songer, si l'on était nostalgique, au contrôle des changes. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Vous avez raison : quelle horreur ! Pourtant il était encore en vigueur dans notre cher pays dans les années quatre-vingt.

Au lieu de moyens aussi forts pour réduire la spéculation, nous proposons un instrument qui est le plus doux de tous, mais le plus efficace et, en effet, le plus beau : la taxe Tobin.

C'est pourquoi, monsieur le ministre de l'économie et des finances, chers collègues, nous devons l'adopter ce soir.

M. Georges Sarre et M. Jean-Claude Lefort.

Très bien !

Mme la présidente.

La parole est à M. Julien Dray, pour soutenir l'amendement no 206.

M. Julien Dray.

Monsieur le ministre de l'économie, monsieur le secrétaire d'Etat, la discussion autour de cette fameuse taxe dite Tobin a effectivement lieu régulièrement depuis plusieurs années dans cette enceinte. Au-delà de ces débats et des prises de position des uns et des autres, il a cependant semblé se dégager tel a été le cas l'année dernière - une sorte de majorité sur l'idée que la création de cette taxe serait une bonne disposition et qu'elle constituerait un bon instrument, sinon pour faire la révolution, du moins pour contrôler certains mouvements de capitaux.

Le principal argument avancé par ceux qui la refusent tient au fait que, pour qu'elle soit véritablement opérationnelle, il faudrait qu'elle soit pratiquée au moins à l'échelle de l'Europe. Selon eux, si la France était seule à la créer, elle n'aurait pas l'efficacité nécessaire ; elle aurait au contraire des effets pervers sur les mouvements spéculatifs.

Nous proposons donc, au travers de cet amendement no 206, de voir si nous sommes bien tous d'accord dans cet hémicycle sur l'idée même de la taxe Tobin, avant d'envisager la mise en place d'un mécanisme précis. En fait il n'est proposé que d'accepter le principe de la taxe Tobin, puisque le taux prévu est de 0 %, en attendant q u'à l'échelle de l'Europe les ministres chargés de défendre son instauration puissent obtenir les accords nécessaires. Lorsque ceux-ci auront été recueillis, quand la bataille menée à l'échelle de l'Europe aura été gagnée, le taux de cette taxe poura être fixé par décret.

La spécificité du dispositif proposé, quelque peu nouveau, est de permettre une clarification des positions dans cet hémicycle en évitant que certains puissent encore se retrancher derrière divers prétextes, européens notamment, pour ne pas avoir à se prononcer sur le principe même de la taxe.

L'adoption de cet amendement ne pénaliserait donc pas la France dans un premier temps, mais elle témoignerait d'une volonté politique. Il s'agirait d'un signe qui permettrait d'avoir une référence dans le cadre des discussions européennes.

Mme la présidente.

La parole est à M. Yann Galut, pour soutenir l'amendement no

67.

M. Yann Galut.

Nous avons donc à nouveau déposé un amendement tendant à la création de la taxe Tobin.

Messieurs les ministres, mes chers collègues, il y a un an, face aux arguments que nous avions développés dans cet hémicycle sur la faisabilité de cette taxe, le rapporteur général nous avait proposé de voter un amendement permettant au Gouvernement de donner sa position et pris l'engagement intéressant de confier à deux parlementaires l'élaboration d'un rapport sur ce sujet.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

Aujourd'hui, si nous avons obtenu le rapport de nos collègues en temps et en heure, le dépôt de celui du Gouvernement a un peu tardé, puisque nous l'avons reçu fin août, alors que nous l'attendions fin mai. Maintenant, nous devons faire avec ces deux rapports dont l'un, celui des parlementaires, prône, entre autres, l'instauration de cette taxe dite Tobin, tandis que l'autre, celui du Gouvernement, reprend les arguments avancés par le ministère des finances lors de ces deux dernières années, à savoir que si l'idée de la taxe Tobin est intéressante, sa mise en place serait impossible, voire dangereuse.

Mes chers collègues, le fait qu'il y ait deux rapports contradictoires montre que cette affaire est non pas technique, mais politique.

L'Assemblée nationale voudra certainement, par cette mesure symbolique, sûrement, et pédagogique, donner l'exemple et porter au niveau européen le débat sur la nécessaire régulation financière pour lutter contre les déstabilisations qu'entraînent les flux de capitaux non productifs. A cet égard, nous attendons du Gouvernement une réponse politique, car nous savons tous que nous pourrions développer de nouveaux arguments techniques qui pourraient être contredits par d'autres arguments tout aussi techniques.

D'ailleurs, la délégation pour l'Union européenne a demandé que la France fasse de ce dossier une des priorit és de sa présidence. Le Gouvernement en est-il d'accord ? Par nos amendements nous avons toujours voulu que la question soit au moins posée aux autres gouvernements de l'Union européenne. En effet le principe de cette régulation par la taxe Tobin recueille une adhésion de plus en plus large tant au niveau gouvernemental des chefs de gouvernement se sont prononcés en sa faveur - qu'au niveau parlementaire puisque des dizaines de parlementaires du monde entier ont fait de même.

Ce soir, nous devons avoir un débat de clarification, dans lequel chacun doit s'exprimer sur cette question qui revient année après année. L'année dernière nous avons repoussé le débat d'un an. Il faudrait qu'aujourd'hui nous obtenions une réponse claire sur une mesure qui, de mon point de vue, ne changera pas la face du monde, mais contribuera à donner un signe fort de notre volonté de réguler la mondialisation financière.

M. Jean-Claude Lefort.

Très bien !

Mme la présidente.

L'amendement no 461 n'est pas défendu.

La parole est à M. Julien Dray, pour défendre l'amendement no 462.

M. Julien Dray.

Il est défendu.

Mme la présidente.

La parole est à M. Georges Sarre, pour défendre l'amendement no 463.

M. Georges Sarre.

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, chers collègues, comme l'an passé, nous sommes un certain nombre à défendre, à l'occasion de l'examen du projet de budget, un amendement tendant à instaurer la taxe Tobin, c'està-dire un prélèvement sur les mouvements de capitaux.

L'argument de fond est bien connu : dans les années 1970, les échanges de devises représentaient cinq fois les valeurs des échanges de marchandises et de services dans le monde. Ce rapport est aujourd'hui de soixante. Une bonne part de ces échanges est faite de spéculation, ce qui, naturellement, déstabilise les économies.

La taxe Tobin, c'est le moyen le plus modeste d'amorcer un rééquilibrage. C'est aussi un instrument de prise de conscience des méfaits de la mondialisation libérale non maîtrisée. Nous aurions pu militer pour le contrôle des changes, ou la constitution de réserves de capitaux non rémunérés préalables à leur entrée sur le territoire national. Nous préférons la taxe Tobin, car nous voulons être réalistes.

Lors de l'examen de la dernière loi de finances, le Gouvernement avait pris l'engagement de faire réaliser un rapport sur la taxe. Le ministre de l'économie et des finances avait ainsi mis un terme au débat, au moins provisoirement. Ce rapport conclut que la taxe Tobin est une idée généreuse, mais impraticable. Celle-ci méritait mieux qu'un dénigrement systématique. Annoncé, ce rapport n'a donc été qu'une manoeuvre de retardement.

Publié, c'est un enterrement. Nous ne voulons pas nous y prêter.

Revenons un instant sur les arguments avancés.

La spéculation la plus déstabilisante ne serait pas efficacement combattue par la taxe ! Justement, nous préconisons une taxe à double taux : de 0,1 % en situation de calme financier, il serait augmenté en cas de crise pour répondre aux attaques spéculatives.

Il y aurait une contradiction entre les objectifs antispéculatifs et les objectifs fiscaux de la taxe ! C'est une bien curieuse façon de voir les choses. Nous sommes réalistes, nous savons bien que la spéculation ne disparaîtra pas. L'objectif premier est de lutter contre les dérives spéculatives de la finance et non de produire des recettes fiscales.

La taxe Tobin serait nuisible car elle réduirait la liquidité du marché indispensable au fonctionnement de l'économie et pénaliserait les mouvements de capitaux non spéculatifs ! A cela, nous répondons qu'étant donné le volume des échanges sur devises, la liquidité du marché demeurerait très importante. Quant aux mouvements non spéculatifs, ils ne seraient que marginalement frappés. Le caractère dissuasif de la taxe s'applique en revanche aux aller-retour, c'est-à-dire aux mouvements de capitaux à caractère répétitif.

En lieu et place de la taxe Tobin, le rapport propose de donner plus de pouvoir au FMI dans la régulation du système financier international. A nos yeux, il est vraiment choquant de donner davantage de pouvoir au FMI tel qu'il est, sans critique de son fonctionnement.

Le rapport préconise également de mieux impliquer le secteur privé dans la lutte contre la spéculation, notamment en soutenant les travaux du forum de stabilité financière sur la régulation financière. Si cela revenait à déléguer aux opérateurs privés le soin de contrôler euxmêmes, ce serait bien sûr un recul de l'intérêt général.

C'est a priori l'inverse qu'il faudrait faire, à savoir développer et renforcer le rôle des pouvoirs publics.

Le débat autour de la taxe Tobin n'est pas technique mais politique. Il ne s'agit de rien d'autre que de reconquérir des espaces pour la démocratie confisqués par les marchés. Affirmer que l'instauration de la taxe Tobin serait impossible en raison du refus prévisible de nos partenaires révèle une certaine conception de l'action politique. Ce n'est pas la nôtre.

Nous ne pouvons pas aujourd'hui compter sur les autres Européens. Il faut donc que quelqu'un prenne l'initiative et donne le branle et nous pensons que c'est à la France de le faire. Si elle ne le fait pas, personne ne le fera.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

C'est pourquoi, chers collègues, je vous invite à voter cet amendement.

M. Yves Cochet et M. Yann Galut.

Très bien.

Mme la présidente.

La parole est à M. Jean-Claude Lefort, pour soutenir l'amendement no 464.

M. Jean-Claude Lefort.

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous ne pouvons naturellement pas aborder cette année le débat sur la taxe Tobin sans évoquer le fameux rapport publié par Bercy. Les arguments techniques qu'il contient cachent mal, à nos yeux, une rhétorique de laisser-faire devant les marchés financiers. Et comme nous n'acceptons pas, par principe, le fatalisme en politique, nous souhaiterions aujourd'hui répondre à un certain nombre des arguments qui nous sont opposés.

Ce rapport, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, est parfaitement contradictoire. D'un côté, il dresse à l'excès un tableau alarmiste des méfaits de la taxe Tobin sur les flux financiers mais, d'un autre, il précise que cette taxe serait bien insuffisante pour lutter contre la spéculation ! C'est tout et son contraire.

En vérité, il faut resituer la taxe Tobin à son juste niveau. Nous ne cachons pas que le but est d'en faire un premier pas pour que le politique reprenne le contrôle de l'économie et que cela passe ensuite par des mesures d'une autre ampleur que la seule taxe Tobin. Dans l'immédiat, cette taxe - et c'est toute sa qualité - serait un frein à la spéculation, un grain de sable dans les rouages financiers. Pas plus, mais pas moins... Et ce serait déjà beaucoup au regard du mur de refus auquel nous nous heurtons.

La peur de l'évasion des capitaux est une vieille antienne des libéraux contre toute fiscalité. Elle est contredite par le fait qu'il existe déjà des impôts boursiers - qui sont même plus élevés aux Etats-Unis qu'en Europe. Elle est invalidée par le fait que la taxe Tobin ne peut être considérée comme le seul et unique élément d'appréciation du comportement des agents financiers.

Il en existe bien d'autres et, à suivre ce raisonnement, tout impôt serait par principe dissuasif ! De plus, si elle était appliquée à l'échelon européen, on imagine mal les grandes entreprises et les grandes banques contourner notre continent pour cause de taxe Tobin.

Par ailleurs, on ne peut pas utiliser l'argument d'une fuite possible des capitaux vers les « paradis fiscaux » à cause de cette taxe et indiquer, d'un autre côté, la ferme volonté de la France de lutter contre la « concurrence fiscale dommageable » et de renforcer la coopération internationale contre ces paradis. Voudriez-vous nous dire, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, que tous les efforts de la France dans ce domaine ne sont que de simples effets d'annonce ? En ce qui concerne des arguments plus techniques sur la collecte de la taxe, le rapport est obligé de reconnaître que l'informatique permet de détecter très précisément les transactions, au plus près du marché, ce qui réduit d'ailleurs les possibilités de se soustraire à cette taxe. Mais il relativise cet instrument en expliquant qu'une partie encore conséquente des transactions est effectuée par téléphone.

Le téléphone, obstacle technique à la taxe Tobin dans un monde où les communications électroniques sont en plein essor, il fallait toute l'imagination des services de Bercy - qui semble sans limite - pour y penser ! (Sourires.) La vérité - soyons sérieux - est que l'informatisation, l'unification et la sécurité des systèmes de paiement des banques centrales donnent au contraire les meilleurs arguments techniques de la faisabilité de la taxe Tobin.

En ce qui concerne l'utilisation du produit de la taxe, une proposition, parmi d'autres, consisterait à en confier la gestion à l'ONU ou à l'un de ses organismes pour financer l'aide au développement.

M. François Goulard.

Et pourquoi pas à l'Internationale socialiste ?

M. Jean-Claude Lefort.

La seule réponse du rapport à cette proposition est d'évoquer « l'opposition de certaines opinions publiques, notamment américaine, qui estiment que les moyens affectés aux organisations internationales sont d'ores et déjà trop importants ».

La taxe Tobin impossible parce que les Américains sont contre l'ONU ! Il fallait y penser ! Rappelons que les Américains sont aussi - entre autres - contre une réforme du FMI, qui est pourtant préconisée par le gouvernement français.

En réalité, le fond des arguments apparaît à la fin de ce rapport. Il est dit que la taxe Tobin n'est pas possible parce qu'elle remettrait en cause le principe de la libre circulation des capitaux contenu dans les traités communautaires et l'objectif de libéralisation des transactions de change contenu dans les statuts du FMI. Voilà pourquoi la taxe Tobin est une question politique.

Nous sommes conscients que son application à notre seul pays serait de portée limitée. Une résolution de la délégation pour l'Union européenne et un rapport de la commission des finances demandent que la France prenne une initiative sur la taxation des transactions financières à l'occasion de la présidence française de l'Union européenne. Ils n'ont pas pour l'heure été suivis d'effets. Notons également que le Premier ministre et même le Président de la République se sont déclarés ouverts à cette question au début de la présidence française.

Mme la présidente.

Monsieur Lefort, il faut conclure !

M. Jean-Pierre Brard.

Madame la présidente, il ne faut pas interrompre M. Lefort quand il parle du Président de la République !

M. Jean-Claude Lefort.

J'en ai terminé, madame la présidente.

A cela s'ajoute le fait que l'assemblée parlementaire paritaire Union européenne-pays ACP, soit les représentants de 86 pays, s'est prononcée en faveur de la taxe Tobin la semaine dernière.

M. Yves Cochet.

Très bien !

M. Jean-Claude Lefort.

Enfin, je constate que la motion présentée par François Hollande à l'occasion du congrès du Parti socialiste, motion soutenue par de très nombreuses personnalités telles que Raymond Forni, président de notre assemblée, Jean-Marc Ayrault, président du groupe socialiste à l'Assemblée nationale, vous-même, monsieur Pierret, ainsi que Laurent Fabius, demande la mise en place de cette taxe au niveau de l'OCDE.

Mme la présidente.

Monsieur Lefort, il faut vraiment conclure !

M. Jean-Claude Lefort.

Aussi, dès lors que nous avons interpellé le Premier ministre sur ce fait, il faut que le Gouvernement passe aux actes et propose la taxe Tobin sous peine de perdre bien du crédit. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe socialiste.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

Mme la présidente.

La parole est à M. Yann Galut, pour soutenir l'amendement no 465.

M. Yann Galut.

L'amendement est défendu.

Mme la présidente.

L'amendement no 521 de M. Maurice Leroy est-il défendu ?

M. Julien Dray.

Monsieur Méhaignerie, faites un effort !

M. Pierre Méhaignerie.

Non, l'amendement n'est pas défendu.

M. Philippe Auberger.

Quelle motion a-t-il signé au congrès socialiste ?

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission sur cette série d'amendements ?

M. Didier Migaud, rapporteur général.

La commission n'a pas adopté ces amendements.

M. Yann Galut.

Quelle surprise !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Je vous rapporte les travaux de notre commission des finances. Elle a confirmé le caractère séduisant de cette idée...

M. François Goulard.

Et son caractère esthétique !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

... et elle a bien évidemment exprimé son accord sur les objectifs assignés à cette taxe Tobin : étouffer la spéculation, éviter les crises financières et financer le développement.

M. François Goulard.

Et garantir le beau temps !

M. Philippe Auberger.

Venons-en au fait !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Cela dit - et la façon dont certains de ces amendements sont rédigés me donne raison - chacun reconnaît que cette idée est d'application difficile, pour ne pas dire contestée. D'ailleurs, le rapport de nos collègues Feurtet et Fuchs auquel il a été fait référence...

M. Philippe Auberger.

Fuchs n'est pas là pour le défendre !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

... montre bien, au-delà de ce qu'on peut lui faire dire dans la conclusion, que les difficultés sont nombreuses au niveau de l'application.

M. Christian Cuvilliez.

Nous sommes là pour les résoudre !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

D'ailleurs, Tobin lui-même...

M. Philippe Auberger.

N'y croit pas.

M. Didier Migaud, rapporteur général.

... précisait que cette taxe n'était pertinente qu'à partir du moment où elle s'appliquait à l'échelle mondiale. Si tel n'était pas le cas, observait-il, on pourrait y échapper en réalisant des transactions dans des zones où elle ne serait pas en vigueur.

M. Philippe Auberger.

Toutes choses étant égales par ailleurs !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Force est de constater que cette taxe n'existe nulle part dans le monde.

M. Philippe Auberger.

Il y a l'exception française !

M. Julien Dray.

Comme pour les 35 heures !

M. Yann Galut.

Au Canada, elle a été votée !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Elle a été votée, mais elle n'est pas appliquée.

M. Yann Galut.

Nous proposons la même logique qu'au Canada !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Il nous est proposé d'instaurer une taxe à taux zéro, c'est-à-dire une taxe qui ne serait appliquée que lorsque l'ensemble des pays de la Communauté européenne, notamment, l'aurait instituée. Ce peut être une pétition intéressante sur le plan du principe...

M. Philippe Auberger et M. Michel Bouvard.

Confiez-la à Duisenberg !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

... mais n'y a-t-il pas un peu d'hypocrisie en la matière, à partir du moment où on sait parfaitement que les pays de la Communauté européenne ne sont pas sur le point de voter une telle taxe Tobin.

M. Yann Galut.

Il faut leur demander !

M. Philippe Auberger.

En tout cas, on n'a pas besoin de la taxe Tobin pour faire chuter l'euro !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Une action est engagée par le Gouvernement sur le plan mondial afin de mieux lutter contre la spéculation et d'éviter les crises financières. Il faut la poursuivre. C'est l'orientation qu'a prise votre commission des finances et c'est pour cette raison qu'elle vous propose de ne pas accepter ces amendements, tout en reconnaissant que les objectifs assignés à cette taxe méritent d'être pris en compte, et que la réflexion doit être poursuivie, mais à partir des principaux axes défendus aujourd'hui par le Gouvernement.

M. Philippe Auberger.

Allez, à l'ATTAC !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Il faut aussi profiter de ce que la France exerce la présidence européenne pour donner davantage d'ampleur à nos initiatives. De ce point de vue-là, nous faisons confiance au Gouvernement pour que des progrès importants puissent être réalisés d'ici au mois de décembre, c'est-à-dire avant la fin de la présidence française. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Julien Dray.

Il a été meilleur, notre rapporteur général !

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

On nous demande une réponse politique.

M. Julien Dray.

Et technique !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Et technique.

La première réponse politique, c'est que le Gouvernement a tenu ses engagements (Rires et exclamations sur divers bancs)...

M. Yann Galut.

Merci, monsieur le secrétaire d'Etat !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

... puisque, lors de la discussion de la loi de finances initiale pour 2000, le Gouvernement s'est engagé à discuter de cette question.

Il s'était également engagé à élaborer un rapport et à engager, avec le Parlement et l'ensemble de ses composantes, un dialogue.

M. Michel Bouvard.

On ne nous a pas proposé de dialogue, à nous !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Ce dialogue a au moins permis à plusieurs des orateurs qui viennent de s'exprimer d'approfondir la question et de reprendre,


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

comme l'ont fait M. Sarre, M. Cochet ou M. Galut, pour ne citer que ces orateurs, un certain nombre d'analyses, très nouvelles et très pointues sur la concurrence fiscale dommageable et sur la caractérisation de la spéculation et d'une situation fiscale qui oppose les Etats au lieu de les réunir progressivement sur des mêmes données, comme la fiscalité de l'épargne, par exemple.

M. Philippe Auberger.

C'est un sujet pour un prix Nobel, ça !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Les travaux qui ont été menés au cours de la dernière année ont abouti à des avancées incontestables qui permettent aujourd'hui d'étayer des raisonnements.

Comme l'a dit le rapporteur général et, hier, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie lorsqu'il a répondu à certains orateurs, comme je l'ai moimême précisé à nouveau cette nuit en réponse à M. Julien Dray qui était intervenu sur cette question, l'objectif politique qui consiste à lutter contre la spéculation, à moraliser les relations financières internationales, à développer l'économie, en particulier des pays les moins avancés, et donc à stabiliser les relations financières internationales, est partagé par le Gouvernement et celui-ci défend ces objectifs dans les instances du monde entier.

Par exemple, lorsqu'il appuie le renforcement du rôle du Fonds monétaire international comme instance de décision et de coordination - même si ce n'est pas forcément sur les bases actuelles -, lorsqu'il promeut une action allant dans le sens de la coordination contre la spéculation internationale, au niveau de cette instance, il affirme la nécessité de cette coordination réelle et il le fait par des actes ; quand il préconise la coopération monétaire régionale au sein de l'Union européenne, quand il fait en sorte que les interventions du GAFI aient une réalité, quand il lutte contre l'idée d'une libéralisation financière désordonnée et cherche à donner, au contraire, une cohérence et un contenu antispéculatif aux mouvements de capitaux, le Gouvernement est en accord avec ce que les députés qui se sont exprimés ce soir veulent que soit son action politique.

Et c'est bien sur ces bases qu'il souhaite continuer à agir, notamment au sein de l'Union européenne. C'est un grand débat actuellement et la présidence française fera certainement avancer l'idée d'une harmonisation fiscale européenne et d'une coordination de nos politiques en matière d'épargne.

C'est bien sur ces bases que, dans les enceintes financières internationales, il continue à peser dans le bon sens, celui que vous souhaitez, mesdames, messieurs les députés, pour maîtriser les comportements spéculatifs sur les marchés financiers et pour mettre en oeuvre des moyens, enfin efficaces, de lutter contre les crises monétaires et financières internationales.

La vraie question qui se pose en effet, et les promoteurs de ce mouvement la posent eux-mêmes, est de savoir quelle efficacité peut avoir une taxe discutée et décidée dans un seul Etat...

M. François Goulard.

Ce n'est pas une mauvaise question !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

... alors que, je le rappelais dans un précédent débat, l'ensemble des mouvements quotidiens, portant sur des masses financières de 1 400 à 1 500 milliards de dollars, ne peuvent évidemment pas être maîtrisés par un seul Etat, ni même par la conjonction de quelques Etats qui se seraient ralliés à cette taxe.

M. Georges Sarre.

Alors que faire ?

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Aujourd'hui, on ne peut que mettre en doute son efficacité au regard de l'objectif généreux qui est celui des promoteurs de la taxe.

Nous ne pouvons pas affirmer que d'autres que nous sont sur le point d'accepter l'instauration de cette taxe. La réflexion doit donc se poursuivre et l'Assemblée nationale doit continuer à soutenir l'action du Gouvernement dans les instances européennes et internationales. Je demande donc aux rédacteurs de ces amendements de tenir compte de la détermination politique qui est la nôtre et de bien vouloir les retirer, et si ce n'était pas possible, j'invite l'Assemblée nationale à les repousser.

Mme la présidente.

La parole est à M. le président de la commission des finances, de l'économie générale et du plan.

M. Henri Emmanuelli, président de la commission.

Madame la présidente, messieurs les ministres, il est exact que la commission des finances a rejeté ces amendements.

Mais, en tant que président de la commission des finances, je suis aussi parlementaire, et j'ai donc pour ma part un gros problème à trancher.

Je conçois bien qu'une taxe à taux zéro constituerait une pétition de principe, mais certains Etats, comme le Canada, n'ont pas hésité à voter une résolution. Et je mesure bien qu'une simple taxe n'est pas de taille à asphyxier la spéculation sur les capitaux à court terme.

Je n'accepte pas l'idée que l'on confonde cette problématique avec celle de l'argent sale qui est tout à fait différente. Je le précise parce qu'il nous est souvent répondu qu'on lutte déjà contre les paradis fiscaux ou le blanchiment de l'argent sale. Mais ce n'est pas du tout la même chose ! Il s'agit, dans un cas, d'enrayer les mouvements de capitaux à court terme et la spéculation, la hot money, comme on dit, dans l'autre ; de lutter contre la fraude, voire le crime.

Alors, que faire ? Si on admet que la taxe serait inopérante, on ne fera jamais rien. Et si on se contente d'une pétition de principe, ça ne servira pas à grand-chose.

A titre personnel, je serais plutôt pour la pétition de principe parce qu'on ne peut pas éternellement répéter que ce serait une bonne idée, à condition que les autres la mettent aussi en oeuvre. On sait bien qu'ils ne le feront pas. Ne soyons pas hypocrites !

M. Georges Sarre.

Absolument !

M. Henri Emmanuelli, président de la commission.

Si, ce soir, la taxe Tobin était votée dans cette assemblée, la France serait sans doute le seul pays en Europe à avoir pétitionné par voie législative en la matière. Mais serait-ce la première fois que la France innove ?

M. Yann Galut.

Ce serait tout à son honneur !

M. Jean-Jacques Jégou.

Ça ne va pas faire remonter l'euro !

M. Julien Dray.

Duisenberg non plus ne fait pas remonter l'euro !

M. Michel Bouvard.

Il ne fallait pas confier la BCE à Duisenberg !

M. Henri Emmanuelli, président de la commission.

Le problème de l'euro est trop sérieux, ne jouons pas avec ça ! Nous en avons parlé tout à l'heure, exprimant quelques doutes sur la manière dont est géré l'euro !

M. Philippe Auberger.

Plus que des doutes !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

M. Henri Emmanuelli, président de la commission.

Nous n'avons pas le sentiment que la hausse répétée des taux d'intérêt soit de nature à favoriser l'investissement que vous appelez de vos voeux, monsieur le ministre.

M. Michel Bouvard.

Très bien !

M. Henri Emmanuelli, président de la commission.

Vous a vez rappelé vous-même que les investissements augmentent de 15 % aux Etats-Unis et vous y voyez l'une des explications de la durée de la croissance dans ce pays.

Je ne veux pas rouvrir ce dossier délicat parce que je ne veux pas envenimer les choses. Mais qu'on ne me parle pas de l'euro ! Pour résumer, le président de la commission des finances doit à la vérité de dire que la commission n'était pas favorable à cet amendement. Mais Henri Emmanuelli, lui, est pour et il l'assume. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe socialiste.)

Mme la présidente.

La parole est à M. François Goulard.

M. Yves Cochet.

C'est un banquier, il est bien évidemment contre !

M. Philippe Auberger.

Emmanuelli aussi était banquier !

M. François Goulard.

La question telle qu'elle se présente a une signification hautement politique au sein de la majorité, et je ne voudrais surtout pas interférer dans une discussion interne. En revanche, il y a une question de fond extrêmement sérieuse sur laquelle je voudrais exprimer mon point de vue, le plus sincèrement possible et sans aucune considération politicienne.

Il s'agit de savoir si les activités de marché sur les devises sont nuisibles, car c'est bien cela que vous entendez combattre.

M. Yann Galut.

Oui, la spéculation !

M. François Goulard.

La question est celle des parités et des ajustements de change entre les devises car les activités de marché n'ont d'autres supports que d'éventuelles variations de ces cours.

Peut-on rêver, dans le monde qui est le nôtre, que les parités de change soient un jour définitives et intangibles ? La réponse, vous en conviendrez, est non. Les parités de change sont appelées à évoluer pour des raisons évidentes qui tiennent à l'évolution divergente des économies.

Cela étant dit, préférez-vous, mes chers collègues, que ces variations de parité des devises se fassent par à-coups, avec de fortes amplitudes et de façon espacée, ou, au contraire, qu'elles s'opèrent de manière continue et quotidienne par le jeu des marchés ?

Mme Nicole Bricq.

Ce n'est pas le sujet !

M. François Goulard.

La question est vraiment là : puisque les parités ne seront jamais fixes, il faut bien admettre qu'elles continuent à varier. Cette variation se fera-t-elle, comme il y a vingt ou trente ans, par des dévaluations ou des réévaluations survenant tous les deux ans ou trois ans ou, comme aujourd'hui, au jour le jour, sur les marchés ? Vous avez pour a priori que les activités de marché qui assurent les ajustements quotidiens et infra-quotidiens des devises les unes par rapport aux autres sont nuisibles.

Moi, je pense le contraire. Il vaut mieux, selon moi, que les marchés jugent, en continu, leurs valeurs respectives.

C'est la raison pour laquelle j'estime que ces amendements n'ont pas de fondement. Les ajustements en douceur opérés par les marchés sont utiles aux économies et sont préférables aux variations brutales d'antan.

Mes chers collègues, quand vous employez le terme de

« spéculation », vous sous-entendez qu'il y a des méchants d'un côté et des bons de l'autre, les méchants qui gagnent et les bons qui perdent. La réalité est tout autre : parmi ceux que vous appelez les spéculateurs, certains gagnent, d'autres perdent. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Yann Galut.

On va les plaindre !

M. François Goulard.

Mes chers collègues, si vous avez des objections techniques à me faire, je suis tout prêt à les entendre ! Mais il faut bien que vous compreniez que, dans les activités de marché, ce sont les acteurs financiers qui sont tantôt gagnants, tantôt perdants et que, à chaque instant, ils participent à un jeu à somme nulle.

Ainsi il n'y aurait pas des spéculateurs qui voleraient, par exemple, des petits épargnants ou des Etats pauvres...

M.

Yves Cochet.

Allez donc demander aux Thaïlandais !

M. François Goulard.

Mais des acteurs financiers qui, à certains moments gagnent, à d'autres perdent. Sortez donc de vos esprits cette idée que les spéculateurs font perdre de l'argent à certains : ils n'en font perdre qu'à d'autres spéculateurs ! Par conséquent, je conteste la finalité même de votre impôt.

A supposer même que vous ayez raison et que les activités de marché sur les devises soient nuisibles, serait-il efficace ? Il faut, à cet égard, s'interroger sur le périmètre de son instauration et sur son taux.

Il ne doit pas vous échapper que l'extension d'une taxe Tobin à l'Union européenne, si tant est que cela soit possible, ne résout en rien le problème. Il suffit que, sur la planète, en un seul lieu, les échanges soient libres, pour qu'ils se produisent dans ce lieu-là. Les télécommunications d'aujourd'hui permettent d'opérer...

M. Henri Emmanuelli, président de la commission.

C'est vite dit !

M. François Goulard.

... à condition d'avoir un centre juridique où puisse s'effectuer l'échange. Ce centre juridique ferait que la taxe deviendrait inopérante parce que toutes les transactions sur devises se feraient en un point unique, qu'il s'agisse des Etats-Unis, des îles Caïmans, des Grenadines ou de n'importe quel autre lieu. Vous ne sauriez résoudre votre problème en étendant la taxe Tobin à l'OCDE ou, plus modestement, à l'Union européenne. Il faudrait qu'elle soit généralisée à l'ensemble de la planète

La question du périmètre est donc centrale et vos solutions, techniquement, ne sont pas solides.

Pour le taux, la plupart d'entre vous proposent 0,05 %.

Mme la présidente.

Soyez bref, maintenant, monsieur Goulard !

M. François Goulard.

D'autres ont excédé leur temps de parole !

Mme la présidente.

Certes...

M. François Goulard.

La question du taux mérite également quelques commentaires. Celui retenu, qui est d'un vingtième de point car empêcherait les échanges quotidiens tels qu'ils se pratiquent aujourd'hui : les écarts entre les devises sont plus faibles que la taxe que vous prétendez instaurer.


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En revanche - et c'est là que la proposition de M. Sarre apparaît seule réaliste - il est clair que, dans des périodes dites spéculatives, c'est-à-dire de forte tension sur les devises, les écarts de valeurs sont tels que le taux de 0,05 % deviendrait totalement inopérant. Vous n'empêcherez pas ces crises périodiques très fortes, avec des espoirs de gains, ou des pertes très supérieurs à ce taux.

Sous le double angle du périmètre et du taux, quel qu'il soit, sauf à empêcher absolument toute transaction, la taxe Tobin me paraît totalement inopérante, je le répète. Je la conteste dans son principe car je ne crois pas qu'elle soit utile, et dans ses modalités, car elle n'est pas susceptible d'apporter une réponse efficace au problème que vous posez.

Mme la présidente.

La parole est à M. Jean-Jacques Jégou. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Jacques Jégou.

Mes chers collègues, ces exclamations sont franchement désagréables, parce que j'ai écouté, pour ma part, sans mot dire, avec beaucoup de patience, des propos qui ne me convenaient pas.

Mme Christiane Taubira-Delannon.

C'est vrai !

M. Jean-Jacques Jégou.

Le plus élémentaire respect de la démocratie voudrait que l'on accepte d'entendre d'autres arguments que les siens. Je serai d'ailleurs bref, madame la présidente, en dépit de votre mansuétude, car les choses sont assez simples.

Sur le plan de l'affectivité, les arguments m'ont parfois paru tout à fait recevables. Mais, n'oublions pas que nous sommes en train d'examiner la loi de finances pour 2001.

Quant à la journée d'aujourd'hui, on peut la qualifier de noire, car notre monnaie unique n'est jamais tombée à un taux aussi bas. Certains s'en félicitent...

Mme Nicole Bricq et M. Michel Bouvard.

Non, personne ne s'en félicite !

M. Jean-Jacques Jégou.

... car ils estiment que c'est l'aboutissement d'une mauvaise idée : la construction de l'Europe. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

La formation que je représente ici n'a aucune leçon à recevoir de personne ! Nous assumons notre tripe européenne.

Les arguments que j'ai entendus étaient politiques, nullement techniques. Je ne parle pas pour vous, monsieur le président de la commission : vous avez eu le courage de donner votre sentiment, qui était minoritaire au sein de la commission des finances.

L'exception française commence à être pesante, surtout depuis le début de la discussion de cette loi de finances.

Nous chargeons un peu trop la barque, messieurs les ministres ! Pendant que l'euro se tasse, nous créons des impositions supplémentaires. Et, nous targuant de notre histoire glorieuse, d'avoir été à la pointe de tous les progrès, d'être la lumière du monde, nous entendons lui donner encore une leçon en votant cette taxe que - vous l'avez reconnu vous-même monsieur Emmanuelli - aucun p ays de la communauté européenne n'acceptera d'adopter.

Nous sommes, comme les start-up, dans le domaine du virtuel. Vous faites de la politique virtuelle et vous vous montrez généreux à bon compte. Tout cela n'existe pas : le monde dans lequel nous vivons n'est pas toujours plaisant. La spéculation ne l'est pas forcément non plus, mais on spécule toujours contre des économies ou des monnaies qui ne sont pas en bonne santé !

M. Christian Cuvilliez.

Bel aveu !

M. Jean-Jacques Jégou.

Nous ne pouvons pas continuer à épiloguer, chaque année, sur une taxe, esthétique dites-vous, qui ferait plaisir à certains bons esprits mais qui mettrait notre économie par terre !

M. Yann Galut.

N'importe quoi !

M. Jean-Jacques Jégou.

La nuit dernière, aujourd'hui et ce soir encore, à cause d'une minorité de la majorité plurielle, nous avons dû supporter une aggravation de notre fiscalité. Pourtant, les ministres ne cessent d'évoquer l'harmonisation des fiscalités au sein de l'Union européenne. Chacun sait que cette harmonisation se fera vers le bas. Or nous sommes en train de tirer la nôtre vers le haut ! Mes chers collègues, vous nous jouez chaque année cette partition, à l'instigation de l'association ATTAC, qui compte un certain nombre de députés.

M. Yves Cochet.

Y compris des députés de l'UDF !

M. Jean-Jacques Jégou.

Cette action, si généreuse soit-elle, n'a pas de réalité dans le monde dans lequel nous vivons !

Mme la présidente.

La parole est à M. Maurice Adevah-Poeuf.

M. Maurice Adevah-Poeuf.

Moi, je ne fais pas partie du comité ATTAC car je ne crois pas, indépendamment du patronyme, à la taxe Tobin. Cela fait longtemps que je le dis puisqu'on en parle depuis deux ou trois décennies ! Je ne me laisse pas séduire par l'illusion que des solutions simplistes peuvent régler des problèmes complexes, et je ne crois pas non plus qu'il faille mélanger une tentative de maîtriser les mouvements erratiques de capitaux spéculatifs - objectif politique que tout le monde partage - avec l'aide publique au développement. Il n'y a pas de rapport ! Ou alors il faut imaginer des montages complexes, auxquels je ne suis pas sûr que le groupe communiste souscrirait. Ainsi, si le produit de la taxe Tobin perçu en France par le Gouvernement français devait être reversé à l'ONU, je ne sais pas si vous seriez pour, mais c'est un autre problème et ne mélangeons pas tout.

Moi, je crois à des solutions plus complexes.

Lutte contre les paradis fiscaux : oui. Il n'y a pas que le blanchiment d'argent dans les paradis fiscaux.

Relèvement des ratios prudentiels dans l'ensemble de la c ommunauté internationale à travers des structures comme l'OCDE : c'est très difficile, mais c'est possible.

Harmonisation de la fiscalité de l'épargne dans l'Union européenne : nous y croyons tous, en tout cas nous en avons tous la volonté.

Je ne reproche rien au Gouvernement. Les paradis fiscaux, il y en a sur le territoire de l'Union européenne, dans de grands Etats, ou tout juste à côté. Je salue le courage du ministre de l'économie et des finances et de la ministre de la justice, qui se sont adressés publiquement à une principauté voisine pour lui rappeler quelques-uns des devoirs qui sont les siens. Mais tout cela ne va pas vite, et va même très lentement.

J'avoue que l'amendement no 206 de M. Dray a un côté séduisant, dans le mesure où il ne crée pas un dispositif, et qu'il peut faire passer un signal fort, mais je ne le voterai pas. Il est clair que, les premières parties des lois de finances se suivant et se ressemblant - nous avons eu l'impôt sur le revenu, nous avons la taxe Tobin, nous aurons dans un moment la TVA sur la restauration, les


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pelles à neige, les couches-culottes, le chocolat, la TIPP, et j'en oublie assurément... -, si cet amendement n'est pas adopté, nous en discuterons de nouveau l'année prochaine. Si aucun progrès n'a alors été fait au niveau international, et je ne crois pas que ce sera la responsabilité de notre gouvernement, que je soutiens sans état d'âme, je serai de ceux qui seront disposés à adopter un tel amendement, ne serait-ce que pour permettre à la France d'adresser un signal fort au moins à ses partenaires de l'Union européenne.

Que l'on cesse d'opposer des arguments techniques face à un problème qui reste fondamentalement politique.

La volonté politique existe en France. Je ne sais pas si elle est majoritaire, j'ai la faiblesse de le croire. A un moment ou à un autre, il faudra que nous trouvions les moyens que cela se sache.

Mme la présidente.

Mes chers collègues, je vous indique d'ores et déjà que, sur l'amendement no 206, je suis saisie par le groupe communiste d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Augustin Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux.

Je serai certainement plus bref que beaucoup d'orateurs. Je crois d'ailleurs que, si nous voulons terminer dans un délai raisonnable, il faudra expliquer nos positions d'une façon un peu succincte.

Madame la présidente, vous avez le devoir d'y veiller.

M. Philippe Auberger.

C'est la troisième fois qu'il fait une telle remarque !

M. Augustin Bonrepaux.

La taxe Tobin, c'est vrai que nous en avons discuté à plusieurs reprises. C'est vrai aussi que chacun de nous, et je pense d'ailleurs que cela dépasse les bancs de la gauche, a le souci de lutter contre la spéculation. Si, ce soir, nous avions un dispositif efficace qui permette de le faire, je crois que nous serions nombreux à l'accepter.

Seulement, nous nous rendons compte, et ceux qui exercent les plus hautes responsabilités devraient s'en rendre compte plus que les autres, que ce n'est pas en votant un texte ici que nous obtiendrons satisfaction et que nous réglerons les problèmes. Il serait d'ailleurs facile de le faire et nous aurions une satisfaction, mais ce serait un peu hypocrite.

Mme Nicole Bricq.

Tout à fait !

M. Augustin Bonrepaux.

Nous adopterions un texte, celui d'Yves Cochet, par exemple, ou celui de Julien Dray, instituant une taxe avec un taux zéro. Voyez le ridicule de la situation ! Je crois que nous avons un devoir de responsabilité.

C'est en tout cas le sentiment du groupe socialiste, que j'exprime ici. En commission d'ailleurs, je n'ai pas entendu d'autres observations lorsque le rapporteur général a proposé le rejet des amendements. Je demande au groupe socialiste de rejeter l'ensemble de ces amendements.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 441.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 141.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

Je vais mettre aux voix, par scrutin public, l'amendement no 206.

Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même, et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été cou plés à cet effet.

Le scrutin est ouvert.

....................................................................

Mme la présidente.

Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin : Nombre de votants ...................................

63 Nombre de suffrages exprimés .................

61 Majorité absolue .......................................

31 Pour l'adoption .........................

22 Contre .......................................

39 L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

M. Yves Cochet.

Pas mal comme résultat !

M. Jean-Pierre Balligand.

L'an prochain, vous aurez vingt-trois voix !

Mme la présidente.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 67, 462, 463, 464 et 465.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Article 5

Mme la présidente.

« Art. 5. - I. Le code général des impôts est ainsi modifié :

« 1o L'article 1599 F est ainsi rédigé :

« Sont exonérés de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur :

« a) Les personnes physiques, à raison des voitures particulières, des véhicules carrosés en caravanes ou spécialement aménagés pour le transport des handicapés, et dont elles sont propriétaires ou locataires en vertu d'un contrat de crédit-bail ou de location de deux ans ou plus ;

« b) Les associations et les établissements publics ayant pour unique activité l'aide aux handicapés, à raison des véhicules qui leur appartiennent ou qu'ils prennent en location en vertu d'un contrat de crédit-bail ou de location de deux ans ou plus, et qui sont réservés exclusivement au transport gratuit des personnes handicapées. »

« 2o Il est inséré un article 1599 I bis ainsi rédigé :

« Art. 1599 I bis. La taxe différentielle sur les véhicules à moteur est exigible à l'ouverture de la période d'imposition, soit dans le mois de la première mise en circulation des véhicules en France métropolitaine ou dans les départements d'outre-mer soit dans le mois au cours duquel le véhicule cesse d'être en situation de bénéficier d'une exonération ou d'une dispense. Toutefois, elle n'est pas due pour la période en cours si la première mise en circulation a lieu entre le 15 août et le 30 novembre. »

« II. Les dispositions du I s'appliquent à compter de la période d'imposition s'ouvrant le 1er décembre 2000.

« III. Les pertes de recettes résultant pour les collectivités de l'application du 1o du I sont compensées chaque année soit par une majoration des attributions de dotation générale de décentralisation, soit par des diminutions des ajustements prévus au deuxième alinéa de l'article L.

1614-4 du code général des collectivités territoriales.

« Cette compensation est calculée en 2001 sur la base du produit résultant de l'application des tarifs votés par l es assemblées délibérantes en application des


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articles 1599 G et 1599 decies du code général des impôts au titre de la période d'imposition du 1er décembre 2000 au 30 novembre 2001 à l'état du parc automobile par collectivité constaté au 31 décembre 2000, majoré des recettes de taxe différentielle sur les véhicules à moteur encaissées pour le compte de chaque collectivité en 2000 au titre de la période d'imposition du 1er décembre 1999 au 30 novembre 2000. Le montant obtenu est réduit des recettes de taxe différentielle sur les véhicules à moteur encaissées pour le compte de chaque collectivité au titre de la période d'imposition du 1er décembre 2000 au 30 novembre 2001. Le montant de la compensation ainsi définie, revalorisé en fonction de l'évolution de la dotation globale de fonctionnement au titre de 2001, évolue chaque année comme la dotation globale de fonctionnement à partir de 2002.

« IV. Pour l'année 2001, par dérogation au troisième alinéa de l'article 25 de la loi de finances pour 1984 (no 83-1179 du 29 décembre 1983), le montant mensuel de l'avance versée est déterminé sur la base de un douzième de la prévision d'encaissement total de recettes au cours de cette même année telle qu'elle figure dans la présente loi de finances, répartie entre départements proportionnellement au produit qu'ils ont perçu au titre de l a période d'imposition du 1er décembre 1999 au 30 novembre 2000. Les montants servant de base au calcul des avances versées en 2001 sont fixés par département par arrêté conjoint des ministres chargés de l'intérieur et du budget.

« V. Pour l'année 2000, par dérogation au cinquième alinéa de l'article 25 de la loi de finances pour 1984 (no 83-1179 d 29 décembre 1983), le montant total des avances versées est égal au produit résultant de l'application des tarifs votés par les conseils généraux en application de l'article 1599 G du code général des impôts au titre de la période d'imposition du 1er décembre 2000 au 30 novembre 2001 à l'état du parc automobile par département constaté au 31 décembre 2000, majoré des recettes de taxe différentielle sur les véhicules à moteur encaissées pour le compte des départementse n 2000 au titre de la période d'imposition du 1er décembre 1999 au 30 novembre 2000. Le montant ainsi calculé est réduit, le cas échéant, des prélèvements effectués en application de l'article L.

1614-4 du code général des collectivités territoriales.

« VI. Pour l'année 2000, les pertes de recettes résultant pour la collectivité territoriale de Corse de l'application du 1o du I sont compensées par une majoration des attributions de dotation générale de décentralisation. Cette compensation est calculée en 2000 sur la base du produit résultant de l'application des tarifs votés par l'assemblée de Corse en application de l'article 1599 decies du code général des impôts au titre de la période d'imposition du 1er décembre 2000 au 30 novembre 2001 à l'état du parc automobile constaté en Corse au 31 décembre 2000, minoré des recettes de taxe différentielle sur les véhicules à moteur encaissées pour le compte de la collectivité en 2000 au titre de la période d'imposition du 1er décembre 2000 au 30 novembre 2001. »

Sur cet article, deux orateurs sont inscrits.

La parole est à M. Christian Cuvilliez.

M. Christian Cuvilliez.

Je vais me faire l'apôtre de cet article.

La vignette fut créée dans les années 1956-1957, en pleine crise de Suez,...

M. François Goulard.

Par Guy Mollet et Paul Ramadier !

M. Christian Cuvilliez.

... pour alimenter un fonds de solidarité vieillesse à une époque où la France avait un parc de voitures qui était le dixième de ce qu'il est aujourd'hui. Je crois que personne, de bonne foi, ne peut regretter la disparition de cette taxe impopulaire, détournée quasiment dès son origine de son objet.

Il n'y a plus aujourd'hui aucun lien entre l'objet de l'impôt et l'objet de l'imposition, à la différence d'ailleurs, on y reviendra peut-être de la redevance audivisuelle.

Je voudrais répondre aux objections nombreuses que cette suppression a suscitées.

On a parlé, par exemple, de l'inégalité qu'elle créerait entre les possesseurs de grosses voitures, de grosses cylindrées, et les possesseurs de petites voitures, de petites cylindrées. L'écart entre le prix payé par les uns et celui payé par les autres est sans doute vingt fois inférieur à l'écart qui existe entre les basses tranches de l'impôt sur le revenu et la tranche à 54 %.

J'ajoute que ceux qui ont une grosse cylindrée sont naturellement pénalisés par la consommation de leur voiture...

M. Jean-Jacques Jégou.

Il défend même les riches maintenant !

M. Christian Cuvilliez.

... et que, l'effort réalisé sur le prix de l'essence étant le même pour tout le monde, les gros consommateurs d'essence seront davantage exonérés de la TIPP. L'argument ne tient donc pas ! La disparition de la notion de puissance fiscale d'une voiture permettra sans doute de rétablir la notion de puissance motrice, et les constructeurs pourront donner aux acheteurs potentiels des éléments d'information plus proches de la vérité sur les performances, la sécurité et le prix de l'automobile.

Les buralistes sont privés d'une recette. Il faudra sans doute envisager de leur fournir des activités complémentaires dans le rôle de percepteurs publics qu'ils assument pour l'alcool, le tabac et peut-être encore pour les timbres fiscaux.

Il y a deux autres points que je voudrais souligner.

Le premier, c'est le champ d'application de la mesure.

Elle est destinée aux particuliers, et la commission des finances a admis que les artisans, les commerçants, ceux qui utilisent à des fins professionnels un véhicule personnel, véhicule mixte en somme, le même pour les loisirs et pour le travail, pourront en bénéficier. Il faudra sans doute s'interroger sur le sort des professions de santé, des gens qui utilisent leur voiture pour des besoins miprofessionnels mi-personnels. Dans un avenir probablement proche, il faudra sans doute supprimant se débarrasser du problème en supprimant la vignette sur la totalité des véhicules.

M. Yves Cochet.

Non ! De la voiture ! (Sourires.)

M. Christian Cuvilliez.

Je n'en suis pas là, monsieur Cochet. Les temps ne sont pas encore arrivés pour une telle mesure et l'évolution que l'on constate ne nous donne pas à penser que c'est pour demain.

Le second point, ce sont les conséquences de la mesure sur l'autonomie fiscale des départements.

Vous savez que nous avons demandé - et j'espère que nous allons l'obtenir - qu'au moins dans un premier temps cette mesure bénéficie aux collectivités locales pour le service public qu'elles rendent et aux associations loi 1901, ne serait-ce que pour célébrer l'anniversaire de


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leur création, qui sera, l'an prochain, un grand moment de fête et de consolidation de ces réseaux extrêmement actifs de la vie sociale.

Reste le problème des départements. La commission Mauroy a esquissé quelques solutions de remplacement,...

M. Michel Bouvard.

La suppression du département !

M. Christian Cuvilliez.

... la disparition de la vignette mettant sous les feux de l'actualité une ressource équitable, pérenne et adaptée au financement des départements. Il faudra tout de même se poser la question à un moment donné car aucun dédommagement prévu ne me paraît très satisfaisant du point de vue de l'équité.

M. Michel Bouvard.

C'est bien de le dire !

M. Christian Cuvilliez.

En Seine-Saint-Denis, par exemple - je choisis un département qui n'est pas proche de ma circonscription -, le président du conseil général avait pris la décision, d'exonérer de la vignette la totalité des habitants, ce qu'il ne peut pas faire car la loi l'en empêche. Ce département avait fait preuve de modération fiscale compte tenu du grand nombre d'usagers à faibles revenus. Il ne faudrait pas qu'il soit pénalisé par le mode de compensation et que soient récompensés du même coup des départements qui avaient fait de la concurrence déloyale à leurs voisins.

Tout le monde le sait, les loueurs de voiture sont allés en masse inscrire leurs véhicules dans le département 51.

On voit des plaques immatriculées 51 partout. C'est la vignette qui avait engendré ce désordre fiscal apparent.

Il faut donc trouver des solutions satisfaisantes, justes et pérennes.

En tout cas, et un débat a eu lieu à la commission des finances sur la vignette et la redevance, avec la redevance, au moins, il y a lien entre l'objet imposé et l'objet de l'imposition.

M. Michel Bouvard.

Très bien !

Mme la présidente.

La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard.

Je voudrais revenir, pas trop longtemps, compte tenu de l'heure, sur la suppression de la vignette et faire quelques remarques, sur la forme et sur le fond.

Depuis maintenant plusieurs mois, la commission des finances mène des réflexions sur l'efficacité de l'impôt et de la dépense publique. Jusqu'à maintenant, nos travaux, nos orientations et nos discussions avec le Gouvernement avaient plutôt tourné autour de la suppression de la redevance audiovisuelle, et c'est donc avec une grande surprise que nous avons appris, pendant l'été, que le Gouvernement, sans doute inquiet des réactions de la population face à la montée du prix des carburants, avait décidé, pour calmer les automobilistes, de leur accorder la gratuité de la vignette, du moins aux particuliers.

Cette action a été engagée sans aucune concertation avec la commission des finances, sans aucune concertation non plus avec les collectivités directement concernées, c'est-à-dire les conseils généraux.

Les planches de vignettes étaient déjà prêtes pour la campagne totale de l'année 2001 : c'est dire à quel point d'improvisation on en est arrivé. En fait, on a supprimé, en cours d'exercice, une recette des départements. Il est vrai qu'ils en encaissent un douzième chaque mois et que, en novembre, quand la campagne de rentrée de la vignette est terminée, une opération de régularisation intervient, mais on ne connaît même pas le montant de la recette supprimée.

Pour calculer ce qui, dans le budget du département, provient de la vignette, je me suis tourné vers la direction des services fiscaux, et j'ai eu la grande surprise de découvrir que personne n'était capable de me dire quelle était la répartition du parc entre les véhicules d'entreprise et les véhicules particuliers, et donc, sur les 104 millions, combien allaient manquer à l'appel, ni quel serait le mode de compensation qui allait être mis en place.

Il y a là quelque chose d'anormal au regard des rapports de confiance qui doivent exister entre l'Etat et les collectivités locales. On ne peut pas comme ça, au gré des problèmes conjoncturels qui peuvent se poser dans le pays, supprimer une recette des collectivités locales sans qu'il y ait eu un minimum de débat avec elles, et là, je ne porte pas de jugement sur le fait de savoir si c'était un bon ou un mauvais choix. Je vais y revenir.

Sur le fond, se posent deux problèmes évidents pour tout le monde.

En choisissant la vignette plutôt que la redevance audiovisuelle qui avait été envisagée et qui avait, semblet-il, les faveurs d'un grand nombre de parlementaires, notamment au sein de la commission des finances, on a choisi de supprimer un impôt profondément inégalitaire.

Dans le département dont je suis l'élu, la vignette la moins chère, pour les véhicules de un à quatre chevaux de plus de cinq ans d'âge, est de 135 francs - même pas la moitié d'un plein ! -, mais il y a tout de même quarante-deux propriétaires de véhicules de plus de vingtq uatre chevaux qui acquittent une vignette à 13 000 francs, soit un écart de un à cent, monsieur le secrétaire d'Etat ! On supprime donc, je le répète, un impôt profondément inégalitaire ! Le deuxième problème est l'accroissement de la dépendance fiscale des collectivités locales vis-à-vis de l'Etat, problème que Gilles Carrez a excellemment exposé hier.

Pour ma part, je me livre depuis quelques années à un petit exercice qui consiste à calculer le taux de dépendance fiscale du département au sein duquel je suis chargé des relations avec l'Etat sur le plan financier. Ce taux s'accroît d'année en année ! Il y a des dotations anciennes, comme la DGF. Mais il y a aussi la dotation forfaitaire, la dotation de péréquation, la dotation au titre du CAS, le compte d'affectation spéciale. Il y a des compensations, qui n'ont fait que croître : sur la taxe d'habitation, sur le foncier bâti, sur la taxe professionnelle - avec notamment les mesures de suppression de la part salariale -, sur le foncier bâti - avec des mesures sur les droits de mutation qui, là aussi, ont évolué.

Dans un département comme le nôtre, qui n'a jamais fait de dumping fiscal, le produit de la vignette est nécessaire pour assurer les dépenses lourdes qui sont les siennes. Je pense notamment aux dépenses d'action sociale, mais aussi aux dépenses d'entretien de la voirie : celles-ci sont cinq fois supérieures à la moyenne nationale par kilomètre, avec un coût de viabilité hivernale qui, à lui seul, représente 40 millions de francs. Avec la vignette, ce sont, sur le papier, 7 % des recettes de mon département qui sont appelées à disparaître, tout de suite ou progressivement, car dès lors qu'on aura exonéré les particuliers, il est évident qu'on sera progressivement amené à exonérer tout le monde. Je ne vois pas comment les choses pourraient se terminer autrement. Au bout du compte, c'est une part croissante de notre budget dont nous n'aurons plus la maîtrise.

Cela intervient à un moment où, parallèlement, la commission Mauroy rend ses conclusions. Moi, je crois qu'il va tout de même falloir que le Gouvernement dise


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clairement ce qu'il souhaite. S'il souhaite que le département reste une collectivité utile dans ce pays, il faut lui laisser le minimum d'autonomie fiscale dont il a besoin pour ne pas en être réduit à constater simplement les recettes transférées par l'Etat et les dépenses obligatoires qu'il a à acquitter. Parce que, si tel devait être le cas, il n'y aurait même plus besoin d'assemblée délibérante ! S'il n'y a que des recettes et des dépenses à constater, s'il n'y a plus de marge de manoeuvre, il n'y a plus besoin d'élus pour fixer des orientations en termes de politique départementale. Autant nommer un préfet pour remplacer l'exécutif départemental !

M. Jean-Jacques Jégou.

Tout à fait !

M. Pierre Méhaignerie.

Absolument !

M. Michel Bouvard.

Soit on considère que le département a encore une utilité, et alors on lui laisse des marges de manoeuvre budgétaires,...

M. Yves Cochet.

Soit on supprime le département.

M. Michel Bouvard.

... soit on considère, ce qui est légitime et qui peut se comprendre, que cette collectivité n'a plus d'utilité, et à ce moment-là autant dire clairement qu'il faut la supprimer.

Entre les deux branches de l'alternative, il faut choisir.

Mais on ne peut pas décider de la faire mourir à petit feue n lui enlevant progressivement toute marge de manoeuvre budgétaire.

Mme la présidente.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Madame la présidente, je demande une suspension de séance d'une dizaine de minutes.

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-deux heures cinquante-cinq, est reprise à vingt-trois heures dix.)

Mme la présidente.

La séance est reprise.

MM. Méhaignerie, Jégou, de Courson, Mme Idrac, MM. Barrot, Hériaud et Ligot ont présenté un amendement, no 94, ainsi rédigé :

« Supprimer l'article 5. »

La parole est à M. Pierre Méhaignerie.

M. Pierre Méhaignerie.

Depuis plusieurs mois, nous proposons de concentrer une part importante des baisses d'impôt afin d'aboutir à une franchise sur les cotisations sociales. Dans un premier temps, en 2001, ce dispositif s'appliquerait aux salariés touchant entre 1 et 1,3 SMIC et dans un deuxième temps, en 2002, il s'appliquerait aux salariés percevant entre 1,3 et 1,8 SMIC.

Le Gouvernement a choisi de disperser les baisses d'impôt. La conséquence de cet étalement, c'est que les baisses seront faibles. Ainsi, pour un salarié touchant 1,2 SMIC, la baisse ne sera que de 180 francs par mois, et au bout de trois ans. Autant dire qu'une baisse de 180 francs par mois étalée sur trois ans ne permettra pas d'obtenir l'efficacité sociale recherchée. Pire, elle peut créer une trappe à bas salaires.

Pourquoi voulons-nous donner la priorité à la baisse des cotisations sociales ? Tout simplement parce qu'il existe une forte attente en termes de pouvoir d'achat, mais que cette attente ne peut pas être satisfaite du fait de l'application des 35 heures. Je rappelle que l'ensemble des décisions et des protocoles d'accord entre entreprises et organisations syndicales prévoient dans la majorité des cas une stagnation des salaires.

Dans le même temps, si l'on fait une comparaison à l'échelle européenne, on constate que le salaire payé par l'employeur français est légèrement supérieur à la moyenne européenne, alors que le salaire net reçu par les alarié est nettement inférieur. La raison en est simple : nous sommes le pays qui fait peser le plus de charges sur le travail.

L'anomalie fiscale française, ce ne sont pas mes taxes locales, c'est un peu l'impôt sur le revenu, mais c'est surtout le poids des charges sociales pesant sur le travail ! La baisse de la vignette est injuste et peu significative : pour 50 % des propriétaires d'automobile, elle représentera moins de 200 francs par an.

M. Michel Bouvard.

Même pas un plein !

M. Pierre Méhaignerie.

Et je n'évoquerai pas le dossier de l'atteinte à l'autonomie fiscale. Vous me répondriez sans doute qu'il y a remboursement au franc le franc.

Mais c'est ce qui avait été dit pour la DCTP, et nous avons vu ce que ça a donné.

N otre proposition, monsieur le secrétaire d'Etat, consiste donc à concentrer l'effort d'allégement fiscal. Ces 12,5 milliards consacrés à la suppression de la vignette pourraient, s'ils étaient transférés sur l'abaissement des charges sociales, permettre à 7 millions de salariés touchant entre 1 et 1,4 SMIC d'améliorer leurs revenus de 450 francs par mois.

M. Jean-Jacques Jégou.

Tout de suite !

M. Pierre Méhaignerie.

Vaut-il mieux offrir 200 francs une fois pour toutes - soit moins qu'un plein d'essence aux salariés ayant une voiture de plus de cinq ans ou permettre, avec 40 milliards sur deux ans, à 7 millions de salariés de bénéficier d'une amélioration substantielle de leurs salaires ? J'ajoute que les pénuries de main-d'oeuvre ne seront pas colmatées uniquement par de la formation professionnelle.

En outre, toutes les études montrent que l'absence de différence significative entre les revenus des prestations et ceux du SMIC n'incite pas à la reprise d'un emploi.

Telles sont les raisons pour lesquelles, nous pensons - et c'est une position courageuse - qu'il vaut mieux concentrer l'effort de baisse d'impôt, via les cotisations sociales, sur les salariés qui en ont le plus besoin. C'est une mesure d'efficacité, mais plus encore de justice.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe du Rassemblement pour la République.)

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Didier Migaud, rapporteur général.

La commission n'a pas adopté cet amendement, pour la raison bien simple qu'elle a voté les propositions formulées par le Gouvernement et qu'elle estime qu'il ne faut pas isoler une mesure par rapport à un plan d'ensemble qui a sa cohérence.

Vous reprochez à la mesure de suppression de la vignette de concerner tous nos concitoyens, monsieur Méhaignerie. Eh bien, ce n'est pas injuste dès lors que nous faisons en sorte que les plus faibles d'entre eux soient davantage concernés que ceux qui sont assujettis aux tranches supérieures de l'impôt sur le revenu.


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M. Germain Gengenwin et M. Pierre Méhaignerie.

C'est justement l'inverse !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

C'est pour cela qu'une disposition concerne l'impôt sur le revenu, qu'une autre disposition est relative à la CSG et que, depuis juin 1997, un certain nombre de dispositions sont prises pour corriger celles que vous aviez prises quand vous étiez, vous, dans la majorité et qui aggravaient les inégalités !

M. Michel Bouvard.

C'est pourtant vous qui aviez créé la vignette ? (Sourires.)

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Je ne le pense pas !

M. Jean-Louis Idiart.

Il devait bien y avoir quelques centristes pour voter la mesure !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

J'ajoute pour Michel Bouvard que la vignette donne lieu à de grandes inégalités d'un département à l'autre puisque son prix peut varier dans un rapport de un à deux et demi.

Le Gouvernement nous propose d'exonérer les personnes physiques et les voitures particulières. Nous avons proposé plusieurs modifications du dispositif, mais peutêtre sont-elles insuffisantes. Il conviendra vraisemblablement de l'améliorer encore. A partir du moment où nous nous sommes engagés dans une suppression qui concerne beaucoup de monde, peut-être faudra-t-il, monsieur le secrétaire d'Etat, aller jusqu'au bout, l'année prochaine ou dans un délai rapproché, sachant qu'un élargissement total des conditions d'exonération de la vignette coûterait 2,5 milliards supplémentaires.

La commission, s'inscrivant dans la logique du Gouvernement, appelle donc l'Assemblée à voter contre l'amendement de suppression de l'article 5.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Avant de donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement j'annonce que le Gouvernement demandera une deuxième délibération sur l'article additionnel résultant de l'adoption des amendements nos 34 et 447.

M. Philippe Auberger.

Bonne digestion, messieurs !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Je réponds maintenant aux interventions de M. le rapporteur général et de M. Méhaignerie mais aussi à celles des députés qui se sont exprimés sur l'article.

D'abord, j'indique que la ressource sera transférée aux départements par l'Etat dans le cadre des lois de décentralisation. Comme une des premières interrogations consiste à savoir s'il y aura compensation et comment elle s'effectuera, à savoir si elle sera juste et adaptée à la ressource que les départements vont ainsi apparemment perdre, je précise que le manque à gagner pour les départements dû à la modification de la fiscalité devrait être intégralement compensé par une attribution de dotation générale de décentralisation, conformément aux dispositions de l'article 1614-5 du code général des collectivités territoriales.

La compensation prévue ne pénalisera pas les départements, puisque l'évolution de la DGF sur les dix dernières années - plus 2,8 % par an en moyenne - est légèrement supérieure à celle du produit de la vignette perçue par les départements au cours de la même période : plus 2 % par an en moyenne.

En effet, la progression du produit de la vignette a sensiblement fléchi ces dernières années, compte tenu d'une stabilisation, voire d'une baisse des taux votés : moins 1,2 %, pour la seule année 2000. Je réponds ici à une objection qu'a soulevée M. Méhaignerie hier au cours de la discussion générale.

M. Jean-Jacques Jégou.

L'accroissement du nombre des voitures roulant au diesel a également eu une influence. Vous semblez l'oublier !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Compte tenu du contexte économique, l'indexation de la DGF - plus 3,42 % en 2001 - devrait être supérieure ces prochaines années à l'évolution du produit de la vignette au cours des dernières années. Telle est la réponse que je voulais apporter à une question forte qui a été posée tout à l'heure.

Autre question : l'autonomie fiscale des départements est-elle remise en cause ?

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Non !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Le produit de la vignette des particuliers ne représente que 5 % environ des recettes totales hors emprunts des départements, et 10 % de leurs recettes fiscales totales. Après prise en compte des effets de la suppression totale de la part salaires de la TP en 2003, les recettes fiscales des départements devraient encore, cette année-là, représenter environ 43 % de leurs recettes totales hors emprunts.

Le Conseil constitutionnel statuant à propos de la suppression de la part régionale de la taxe d'habitation, laquelle ramène la part des recettes fiscales des régions à 37 % de leurs ressources totales, a jugé qu'un tel niveau ne remettait pas en cause l'autonomie fiscale d'une collectivité territoriale. Par conséquent, avec 43 % d'autonomie financière, les départements se situent au-dessus de la limite acceptée par le Conseil constitutionnel pour les régions.

L e Gouvernement s'engage donc à garantir une compensation, laquelle évoluera plutôt plus vite que les ressources procurées jusqu'à présent aux départements par la vignette. Il garantit par là le maintien d'une autonomie fiscale jugée jusqu'à présent suffisante par des décisions récentes du Conseil constitutionnel.

Telles sont les précisions que je voulais apporter à propos de la situation des départements après la réforme.

J'en viens maintenant aux propositions qui ont été faites par la commission des finances et son rapporteur général. Le Gouvernement s'y rallie bien volontiers et considère qu'elles sont de nature à améliorer le dispositif.

Quant à l'amendement de M. Méhaignerie, qui, naturellement, est radicalement opposé à l'esprit du texte, je demande à l'Assemblée nationale de le repousser tant pour les raisons évoquées par le rapporteur général que pour celles que je viens de développer.

Mme la présidente.

La parole est à M. Augustin Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux.

Je voterai contre cet amendement. Il faut tout de même corriger certaines choses et je remercie M. le rapporteur général pour son rapport qui nous fournit d'utiles renseignements.

M. Méhaignerie nous dit que la suppression de la vignette ne représente qu'un allégement de moins de 200 francs. Autrement dit, il se réfère aux deux départements exemplaires que sont la Marne et la Manche, qui ont effectivement baissé leurs taux.

M. Pierre Méhaignerie.

Non, il y en a beaucoup d'autres !


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M. Augustin Bonrepaux.

Monsieur Méhaignerie, consultez le tableau qui figure dans le rapport : même l'Ille-et-Vilaine excède les deux cents francs, puisque, pour les véhicules de moins de quatre chevaux, le montant de la vignette est de 222 francs ! La baisse la plus importante concerne les véhicules de quatre à sept chevaux, mais le montant de la vignette est déjà supérieur à six cents francs.

Il est vrai qu'il y a deux catégories de départements : ceux qui ont les moyens, ceux qui ont des bases importantes et pour qui la vignette représente une ressource annexe. Cela leur permet de baisser les taxes afin que d'autres véhicules viennent se faire immatriculer chez eux.

C'est ce qu'a fait la Marne - et le rapport est très édifiant à ce sujet -, ce qui lui a permis de bénéficier d'une progression du produit de la vignette de 55 % en 1996, lequel est passé de 91 millions à 141 millions, de 38 % en 1997 et de 22 % en 1998. Bien sûr, l'Assemblée nationale a été vigilante et a bien voulu me suivre en adoptant un amendement tendant à corriger cette situation, si bien que, en 1999, la Marne a perdu 55 % de ce qu'elle avait indûment enlevé aux autres départements.

M. Michel Bouvard.

Et elle va être compensée sur cette base-là !

M. Augustin Bonrepaux.

Cela dit, on constate que les taux sont plutôt à la baisse, car les départements qui osent augmenter sont montrés du doigt ! De sorte, qu'évoquer le risque de perte d'autonomie fiscale n'est pas un argument sérieux.

Quant au mode de compensation retenu, il est très favorable aux départements les plus modestes.

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie et M. Didier Migaud, rapporteur général.

C'est vrai !

M. Augustin Bonrepaux.

Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez fait état d'une augmentation du produit de la vignette supérieure à 2 %. J'aurais bien voulu que ce soit le cas dans le mien ! Par exemple, pour le Cantal, le produit de la vignette a augmenté de 1,8 % en 1996, mais baissé de 0,1 % en 1997.

M. Philippe Auberger.

On ne va pas faire le tour de France !

M. Augustin Bonrepaux.

Pour les Landes, les chiffres sont les suivants : plus 1,5 % en 1998, moins 0,18 % en 1999 et plus 1,4 % en 2000. En 2001, la progression sera de 3,4 %, ce qui ne peut qu'être avantageux pour ce département.

S'agissant du Gers, c'est encore pire : la progression a été au même rythme mais, après avoir augmenté les taux en 2000, on a constaté une baisse du produit.

Il ne faut pas venir nous dire que cela relève de l'autonomie des départements.

La mesure que vous nous proposez, monsieur le secrétaire d'Etat, est une mesure de solidarité. Elle permettra à tous les départements d'avoir des augmentations au même rythme, garantissant ainsi une sorte de péréquation.

Pour ces raisons, nous voterons contre l'amendement de M. Méhaignerie. (« Très bien ! » et applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Pierre Méhaignerie.

M. Pierre Méhaignerie.

Je ne voudrais pas que l'on se méprenne sur les motivations de l'amendement, monsieur Bonrepaux.

D'abord, plusieurs millions de salariés en France ne s'estiment pas, du fait de leurs salaires, appartenir à la classe moyenne. Si les salaires nets sont faibles en France par rapport à ceux pratiqués par nos voisins européens, c'est à cause du poids des charges qui pèsent sur le travail.

M. Philippe Auberger.

C'est bien vrai !

M. Pierre Méhaignerie.

Notre volonté est, compte tenu des 35 heures, d'améliorer les salaires nets.

Dans un département que je connais, sur 570 000 propriétaires de véhicules, 270 000 paient une vignette de moins de deux cents francs et, parmi ces 270 000, il y en a beaucoup qui ont des salaires inférieurs à 6 500 ou 7 000 francs par mois. Je peux vous assurer qu'ils préféreraient la mesure que nous proposons parce qu'elle est plus conforme au souci de justice et de revalorisation du travail.

M. Augustin Bonrepaux.

Nous avons réduit la CSG !

M. Pierre Méhaignerie.

C'est la raison pour laquelle je dis que la dispersion des impôts prévue par le ministre de l'économie n'a pas été efficace.

Je suis pour ma part convaincu que les Français auraient bien compris la concentration de l'effort de baisse des impôts sur les salaires les plus faibles. Je suis également convaincu qu'il n'y aurait pas eu de manifestations pour demander : « Et moi ? et moi ? et moi ? » si cet effort de justice avait été concentré sur la revalorisation des salaires directs.

C'est pourquoi je propose le transfert des 12,5 milliards que coûteraient la suppression de la vignette.

Je comprends, monsieur Bonrepaux, que l'Ariège ait des problèmes. Mais j'ai toujours défendu une meilleure péréquation des ressources entre les départements et entre les villes par le biais de la DGF, et je reste attaché à cette péréquation.

Parmi les départements à potentiels fiscaux plus faibles, on peut citer ceux de la Lozère, du Lot-et-Garonne, de la Haute-Saône, de la Dordogne, de l'Aude, du Tarn et des Côtes-d'Armor.

M. Michel Bouvard.

Regardez les charges !

M. Pierre Méhaignerie.

Il peut, certes, y avoir des anomalies. Mais ne dites pas que ce sont les départements riches qui ont des vignettes faibles. La dispersion est telle que vous ne pouvez arriver à cette conclusion. De nombreux départements à faible potentiel fiscal ont des vignettes faibles.

M. Jean-Louis Idiart.

Votre raisonnement est complètement démagogique !

M. Pierre Méhaignerie.

Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez dit qu'il y avait une baisse de 1,5 % en 2000 par rapport à 1999. Dans ces conditions, prenez au moins comme référence l'année 1999 pour calculer la compensation en faveur des départements ! Vous assurez que la compensation se fera au franc le franc. Nous reviendrons là-dessus lorsque nous discuterons de la dotation de compensation de taxe professionnelle, qui a diminué dans beaucoup de collectivités de 20 %. De plus, vous ne pouvez vous engager sur trois ou quatre ans : l'engagement que vous prenez pour une compensation au franc le franc ne vaudra pas pour vos successeurs, pas plus que celui qui a été pris sur la DCTP ne vaut aujourd'hui pour vous.


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Pour des raisons de justice, notre proposition va dans le sens de la revalorisation des salaires des sept millions de salariés. Il y avait la possibilité de leur accorder 450 francs par mois, étalés sur deux ans, dès le 1er janvier prochain.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

94. (L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

M. Besselat a présenté un amendement, no 257, deuxième rectification, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi l'article 5 :

« I. - Le articles 1599 C à 1599 J du code général des impôts sont supprimés.

« II. - 1o La perte de recettes pour les collectivités est compensée à due concurrence par une compensation de la dotation globale de fonctionnement.

« 2o Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575, 575 A et 575 B du code général des impôts. »

La parole est à M. Jean-Yves Besselat.

M. Jean-Yves Besselat.

L'Assemblée nationale vient de refuser la logique de l'amendement de M. Méhaignerie.

Je le regrette non seulement parce que les arguments de notre collègue étaient forts, mais aussi parce que je ne suis pas tout à fait sûr que le Gouvernement soit aussi heureux qu'il veut bien le dire de nous proposer la suppression de la vignette.

Cependant, comme le réalisme nous oblige à constater que c'est la direction dans laquelle nous nous engageons, l'amendement que je vais défendre tend à aller au bout de la logique. D'ailleurs, étendant le principe qui l'a conduit à proposer à l'Assemblée la suppression de la vignette pour les seuls particuliers, le Gouvernement souhaite désormais, appuyé par la commission des finances, en faire bénéficier un certain nombre d'autres catégories.

Or, très franchement, je pense qu'il serait plus simple et plus équitable de prévoir, et c'est le sens de mon amendement, la suppression totale de la vignette.

Nous proposons donc d'étendre la mesure proposée par le Gouvernement dans le cadre du projet de loi de finances à l'ensemble des catégories qui paient aujourd'hui la vignette. La perte de recettes ferait l'objet d'une compensation à due concurrence de la dotation globale de fonctionnement. Il faudra, à cet égard, veiller à ce que la parole de l'Etat soit respectée.

J'ai déposé cet amendement pour deux raisons fortes.

La première tient à l'équité, car prévoir dans le dispositif initial que la mesure s'appliquera aux particuliers mais pas aux professionnels revient à classer implicitement, même si ce n'est pas par une volonté délibérée, les Français en deux catégories. Cela me paraît très ennuyeux.

La seconde raison tient au principe constitutionnel posé par l'article 1er de notre loi fondamentale, aux termes duquel la France assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction. Cette raison d'ordre public me paraît s'imposer à l'ensemble de notre assemblée.

J'ajouterai un dernier élément.

Certes, le Gouvernement, soutenu dans sa démarche par la commission des finances, propose que d'autres catégories soient exonérées. Mais quelles seront les catégories qui seront exonérées et celles qui ne le seront pas ? Il y a là une casuistique qui révèle tout de même une certaine impréparation.

Le souci d'équité et de simplicité, c'est-à-dire d'efficacité de la mesure, doit nous conduire à supprimer la vignette dans le cadre de la loi de finances pour 2001.

Enfin, comme le texte gouvernemental, mon amendement prévoit une application rétroactive de la mesure.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Didier Migaud, rapporteur général.

La commission n'a pas adopté cet amendement.

Il n'y a pas rupture d'égalité lorsque, des personnes étant dans des situations différentes, des critères objectifs sont prévus pour justifier les différences de traitement.

La mesure proposée par le Gouvernement est déjà forte p uisqu'elle coûte 12,5 milliards. Quant au

« complément » souhaité par notre collègue, il représente une somme elle aussi très importante : 2,5 milliards.

Je sais bien que, dans l'oppostion, on peut développer une logique du « toujours plus », mais je crois qu'il ne serait pas responsable de l'adopter. C'est pourquoi la commission des finances s'est inscrite dans la logique proposée par le Gouvernement, tout en souhaitant des adaptations, notamment pour les petits véhicules utilitaires dont se servent les personnes physiques dans le cadre d'une entreprise individuelle.

Un autre amendement prend en compte la situation des associations.

De telles adaptations confortent la proposition du Gouvernement.

Je ne nie pas qu'il soit nécessaire, un jour prochain, d'aller encore plus loin tout en préservant, bien sûr, la capacité budgétaire de l'Etat, et donc en veillant à trouver des mécanismes de compensation. La réflexion devra se poursuivre et je pense que le Gouvernement y sera favorable.

En l'état actuel des choses, je propose à l'Assemblée, au nom de la commission des finances, d'en rester là et de rejeter en conséquence l'amendement no 257, deuxième rectification.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Le Gouvernement rejoint la grande sagesse exprimée à l'instant par M. le rapporteur général. Il se déclare à nouveau favorable aux deux améliorations, l'une émanant de la commission des finances, l'autre du groupe communiste.

M. Jean-Yves Besselat.

C'est du sectarisme !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Il s'en tiendra là.

Comme le rapporteur général, il ne demande pas tout et tout de suite, sachant qu'il faut progresser avec raison et pondération.

M. Jean-Yves Besselat.

Oh ! là ! là !

Mme la présidente.

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson.

Monsieur le secrétaire d'Etat, avez-vous fait travailler vos services sur le problème du respect du principe d'égalité ? Je pense en particulier à la location de véhicules.

Les sociétés qui louent des véhicules continueront à payer la vignette. Or, selon les cas, elles louent soit à des personnes physiques qui, si elles étaient propriétaires du véhicule qu'elles utilisent, seraient exonérées parce qu'elles l'utilisent à des fins personnelles, soit à des sociétés ou des entreprises individuelles à des fins professionnelles.

Un problème se pose donc pour les loueurs, dont les véhicules ont une double utilisation.


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Je pourrais citer, comme on l'a fait à Mme Parly au Comité des finances locales, d'autres cas de figure où un véritable problème de respect du principe d'égalité se pose. Des situations équivalentes devraient induire un traitement fiscal équivalent.

L'amendement de notre collègue est radical puisqu'il propose de supprimer les 2,5 milliards qui restent sur les 15 milliards. Mais comment allez-vous faire pour contrôler ?

M. Germain Gengenwin et M. Gilles Carrez.

Bonne question !

M. Charles de Courson.

Vous n'arriverez plus à contrôler. Il est vrai que le contrôle actuel a déjà beaucoup dépéri.

A ujourd'hui, tous véhicules doiuvent porter une vignette. Mais s'ils ne sont plus que 20 % demain, comment ferez-vous pour savoir si telle ou telle voiture sans vignette est ou non la propriété d'une personne physique et utilisée à des fins non professionnelles ? Vous allez être confronté à une fraude massive. Comment vous y prendrez-vous pour la réprimer ? Nous nous retrouverons dans la situation que connaissait la France à l'époque où l'on n'était pas obligé d'apposer la vignette sur son pare-brise et où l'on avait entre 5 et 10 % de fraude.

Pourriez-vous, avant que nous ne votions sur l'amendement de notre collègue, vous expliquer sur le respect du principe d'égalité, en particulier à l'égard des loueurs, et nous dire si vous avez examiné le problème communautaire qui se pose ? Vos services négocient depuis au moins deux ans un avant-projet de directive tendant à harmoniser la situation des loueurs. L'amendement Bonrepaux, déposé alors que l'on était en pleine négociation, a fait naître de grosses difficultés.

M. Augustin Bonrepaux.

Il a un peu moralisé les choses !

M. Charles de Courson.

Non, il a enrichi les riches.

Merci, Augustin, d'avoir enrichi encore un peu plus les riches ! Cet amendement a profité aux plus riches de France et aux Hauts-de-Seine. Charles Pasqua peut donc remercier Augustin Bonrepaux, et M. Tiberi peut faire de même.

Monsieur le secrétaire d'Etat, pourriez-vous nous éclairer avant que nous ne votions ?

Mme la présidente.

La parole est à M. Germain Gengenwin.

M. Germain Gengenwin.

Monsieur le secrétaire d'Etat, il n'y a aucune honte à reconnaître que l'on s'est trompé et à faire marche arrière. (Sourires sur les bancs du groupe socialiste.)

Au moment où vous avez lancé l'idée des 120 milliards de francs de réductions d'impôts, tout le peuple croyait qu'il serait exonéré d'impôts. Vous avez pensé que l'on viendrait au bord des routes vous applaudir. Or tous ceux qui sont venus étaient ceux qui n'étaient pas satisfaits.

A propos de la suppression de la vignette, on va assister à un marchandage, qui a déjà commencé, concernant ceux qui seront exclus de la mesure et ceux qui ne le seront pas. Charles de Courson a mis le doigt sur la difficulté : en réalité, la situation devient incontrôlable sur le terrain.

Monsieur le secrétaire d'Etat, il faut aller au bout de votre raisonnement : ou bien vous renoncez à supprimer la vignette, comme vient de le proposer Pierre Méhaignerie, ce qui serait la sagesse, ou bien vous supprimez tout !

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 257, deuxième rectification.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. Jean-Yves Besselat.

Les Français apprécieront !

M me la présidente.

MM. Douste-Blazy, Mattei, Debré, Méhaignerie, Jégou, de Courson, Mme Idrac, MM. Barrot, Hériaud, Ligot et Loos ont présenté un amendement, no 505, ainsi libellé :

« I. - Rédiger ainsi le I de l'article 5 :

« I. - A compter de la période d'imposition s'ouvrant le 1er décembre 2000, les articles 1599 C à 1599 J du code général des impôts sont abrogés. »

« II. - Compléter cet article par le paragraphe suivant :

« 1o Les pertes de recettes pour les collectivités locales sont compensées à due concurrence par le relèvement de la dotation globale de fonctionnement.

« 2o Les pertes de recettes pour le budget de l'Etat sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson.

Je crois avoir déjà largement défendu cet amendement.

A partir du moment, mesdames, messieurs, où vous avez fait l'erreur de vouloir supprimer pour certains la vignette, il faut que vous buviez le calice jusqu'à la lie.

Sinon vous aurez de graves problèmes.

M. Jean-Louis Idiart.

Il n'y a jamais eu de lie dans un calice !

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Défavorable.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Défavorable également.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 505.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M me la présidente.

MM. Cochet, Aschieri, Mme Aubert, M. Mamère et M. Marchand ont présenté un amendement, no 152, ainsi rédigé :

« Compléter le deuxième alinéa du 1o du I de l'article 5 par les mots : "d'une puissance fiscale strictement inférieure à 10 CV." » Sur cet amendement, M. Michel Bouvard a présenté un sous-amendement, no 546, ainsi rédigé :

« Dans l'amendement no 152, substituer aux mots : "10 CV" les mots : "23 CV". »

La parole est à M. Yves Cochet, pour soutenir l'amendement no 152.

M. Yves Cochet.

Si je voulais faire sourire, je dirais que le problème de la vignette n'est pas un problème départemental mais un problème planétaire. (Sourires.)

M. Michel Bouvard.

Ah bon ?

M. Yves Cochet.

Cela fait sourire, je le sais bien.

Il est probable, hélas, que, dans vingt ans, nos enfants sourient moins, et je vais essayer de vous montrer pourquoi.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

M. Gilles Carrez.

Rapidement, alors !

M. Yves Cochet.

D'abord, on n'a pas senti de mouvement social massif ni même vu de manifestation en faveur de la suppression de la vignette.

S'agissant du budget « voiture » des ménages, je dispose de deux enquêtes.

D'après une enquête de l'INSEE, un ménage possédant a u moins une voiture en 1999 y a consacré 33 454 francs.

Une autre enquête, faite par l'Automobiles Club, fait état des chiffres suivants : pour un petit véhicule du type Clio, la dépense s'élève en moyenne à 3 200 francs par mois. Quelle est sa répartition ? 27,2 % sont consacrés à l'achat de la voiture elle-même, 18,9 % au carburant, 19,4 % aux frais de parking, 7,6 % à l'assurance, 2,7 % aux péages et 0,7 % à la vignette.

Autrement dit, la suppression de la vignette est disons

« epsilonnesque »...

M. Charles de Courson.

Pas pour les riches !

M. Yves Cochet.

... pour 99 % des ménages. Elle est en fait indolore, même si elle est forte en chiffre absolu pour le pourcentage restant, c'est-à-dire pour les riches qui possèdent des voitures de luxe.

Donc, à l'échelle individuelle, pour chaque ménage, la suppression de la vignette sera invisible. Par contre, pour les départements et pour l'Etat, cela fait 12,5 milliards de francs en moins. On se demande bien pourquoi on a imaginé cette proposition ! Financièrement, c'est donc mauvais, mais symboliquement, c'est encore plus grave, car c'est un très mauvais signal de relâchement vis-à-vis des effets indésirables de la pollution atmosphérique. En effet, même si la puissance effective des véhicules, dont dépend le niveau de pollution, n'est pas tout à fait proportionnelle à la puissance fiscale, elles sont corrélées et les acheteurs se disent maintenant : la puissance, peu importe ! Vous hésitez entre une sept chevaux et une neuf chevaux. Oh, il n'y a plus de vignette ! Allez, on va au Mondial de l'auto s'offrir une neuf chevaux ! Eh bien non ! En outre, par rapport aux engagements internationaux que nous avons pris à Kyoto en 1997 et aux accords plus détaillés que nous allons ratifier, je l'espère, à La Haye dans un mois, c'est aussi un très mauvais signal.

Mais ce n'est pas tout. J'entends maintenant qu'on serait prêt, par voie d'amendement, à étendre la suppression de la vignette à d'autres véhicules que ceux des particuliers, c'est-à-dire aux petits véhicules des entreprises individuelles, voire à d'autres.

Eh bien non ! Moi, je demande que l'on maintienne à tout le moins la vignette pour les véhicules de plus de dix chevaux, ces véhicules pour les riches qui sont aussi les plus polluants.

Mme la présidente.

La parole est à M. Michel Bouvard, pour soutenir le sous-amendement no 546.

M. Michel Bouvard.

M. Cochet a une curieuse vision des véhicules pour les riches. A dix chevaux, ce n'est pas vraiment le cas.

M. Yves Cochet.

C'est ce qu'on appelle les grosses voitures.

M. Michel Bouvard.

Je ne reviens pas sur la profonde inégalité de la suppression de la vignette par rapport à celle de la redevance télé. Mais j'ai noté que, dans mon département, les véhicules de plus de vingt-trois chevaux il n'y en a que quarante-deux - représentent tout de même 500 000 francs de recettes. Je n'ai pas les chiffres au niveau national, mais quand je vois les difficultés qu'ont les élus à trouver des crédits supplémentaires pour tel ou tel budget, je me dis que c'est un peu dommage que l'Etat supprime la vignette pour ces véhicules et soit ainsi amené à verser une compensation à tous les conseils généraux.

Dans mon seul petit département, cela fait déjà 500 000 francs. Ce n'est pas négligeable. Au niveau n ational - M. Pierret nous donnera peut-être le décompte -, la somme doit atteindre un bon nombre de millions.

M. Charles de Courson.

Vous avez quarante Ferrari...

M. Michel Bouvard.

Eh oui, monsieur de Courson.

Des Ferrari Testa Rossa, des Rolls Royce, etc.

Il nous faut être cohérents. Tout au long de cette soirée, nous avons tous réclamé des mesures de justice fiscale. En voilà une.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission sur l'amendement et le sous-amendement ?

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Elle ne les pas retenus.

Monsieur Cochet, le Gouvernement et la commission des finances n'ont pas la prétention de régler le problème de la pollution d'origine automobile par la suppression de la vignette. Cela paraît évident.

M. Michel Bouvard.

Si ça ne tenait qu'à ça...

M. Philippe Auberger.

Il faudrait au moins la doubler ou la tripler...

M. Didier Migaud, rapporteur général.

D'ailleurs, la carte grise existe toujours et son prix est fonction de la puissance du véhicule. On retrouve là la différenciation qui existait au niveau de la vignette.

En réalité, il s'agit d'un allégement d'impôt et d'une mesure de simplification pour les contribuables. Nous avions du reste souhaité un dispositif d'accompagnement, compte tenu des conséquences que cette mesure de simplification pouvait entraîner pour la profession de buraliste. Le Gouvernement avait pris des engagements à cet égard. Je souhaite que vous profitiez de l'occasion, monsieur le secrétaire d'Etat, pour confirmer qu'ils seront tenus.

Je vous rappelle également, monsieur Cochet, que d'autres dispositions devraient nous permettre de réduire la pollution d'origine automobile. Elles font partie d'une politique globale, qui consiste notamment à rééquilibrer les différents modes de transport. On ne peut pas apprécier la cohérence et la pertinence d'une politique à travers une seule mesure.

M. Yves Cochet.

Certes !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Compte tenu de la complexité de la situation fiscale qui résulterait de l'adoption des mesures proposées, compte tenu, aussi de tous les arguments que j'ai avancés, j'invite l'Assemblée à rejeter aussi bien l'amendement que le sous-amendement.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

L'amendement de M. Cochet poursuit un objectif social et écologique.

M. Philippe Auberger.

Et durable !

M. Michel Bouvard.

Et citoyen ! (Sourires.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

M. Cochet le sait, je partage intimement cette motivation. Cela étant, la puissance administrative des véhicules mis en circulation avant 1998 ne tenait pas compte de leur caractère polluant. On a corrigé depuis cette situation, mais uniquement pour les véhicules les plus récents.

M. Michel Bouvard.

C'est vrai !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Deuxième remarque, la puissance administrative des véhicules n'est pas calquée sur leur nocivité relativement à l'environnement et sur leur émission de pollution. Un véhicule diesel moderne de dix chevaux, muni d'un rail commun, est beaucoup moins nocif, eu égard à l'émission de gaz à effet de serre, qu'un véhicule de sept chevaux, donc de puissance inférieure, mû par un moteur à essence. Le progrès technologique a changé complètement les données en émission de Nox, de CO et de CO 2 . Tout cela est parfaitement connu.

M. Yves Cochet.

Mais ce n'est pas le cas pour les particules !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Si le véhicule est muni d'un filtre à particules, il n'en émet pratiquement plus.

M. Yves Cochet.

Il reste les plus petites.

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Ecologie et vignette sont donc deux choses difficilement conciliables, aujourd'hui, en raison du progrès technique.

Je rappelle aussi - même si ce n'est pas le cas de M. Cochet - qu'il ne faut pas être anti-voiture. En France, 1,3 million d'emplois sont liés à la construction automobile, qu'il défend certainement comme moi.

M. Charles de Courson.

Construisons des patinettes ! (Sourires.)

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Par ailleurs, la puissance administrative d'un véhicule n'est pas systématiquement gage de l'opulence de son propriétaire. Par exemple, l'achat d'un véhicule monospace de dix chevaux est motivé le plus souvent par des considérations familiales, beaucoup plus que par des considérations de revenus.

M. Maurice Adevah-Poeuf.

Nous sommes des défenseurs de la famille ! (Sourires.)

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Pour l'ensemble de ces motifs, je vous demande, monsieur Cochet, de bien vouloir retirer votre amendement. Si vous ne l'estimez pas possible, j'en demanderai le rejet, de même que pour le sous-amendement.

Monsieur le rapporteur général, vous m'avez posé une question sur l'accord entre le Gouvernement et les débitants de taba. Cet accord a été conclu ce matin, et je suis heureux de pouvoir vous donner quelques indications précises.

M. Philippe Auberger.

Il était temps !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Les négociations avec les débitants de tabac se sont déroulées dans un excellent climat, bien qu'un peu enfumé. (Sourires.)

Audelà des conséquences de la suppression de la vignette, toutes les questions évoquées par la profession ont été examinées avec le désir mutuel d'aboutir.

En accord avec les représentants de la confédération, une augmentation significative de la rémunération des buralistes sera accordée. En 2004, la franchise sera augmentée. Un tiers des buralistes verront leur redevance considérablement allégée ; les deux autres tiers verront leur rémunération annuelle augmenter quel que soit le niveau de leur activité.

Au-delà de l'augmentation de la rémunération, la gestion des stocks sera améliorée. Nous avons souhaité qu'un dialogue s'établisse entre les buralistes et leurs fournisseurs pour examiner toutes les questions liées à l'approvisionnement. Un comité de suivi a été mis en place entre les différents partenaires.

Au travers de ce plan d'accompagnement, le Gouvernement manifeste son attachement au monopole confié aux buralistes en confortant un réseau de proximité très apprécié pour les services qu'il offre, notamment en zone rurale.

M. Michel Bouvard.

Très bien !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Voilà une mesure qui est dans l'esprit du temps et qui ne manquera pas de plaire sur tous les bancs. (Sourires.)

Je vous remercie d'approuver l'action du Gouvernement. Merci pour les buralistes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme la présidente.

Monsieur Cochet, retirez-vous votre amendement ?

M. Yves Cochet.

Je le maintiens.

Mme la présidente.

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson.

Moi, je ne comprends pas M. Cochet !

M. Yves Cochet.

Je vais tout vous expliquer !

M. Charles de Courson.

Pourquoi donc veut-il empêcher la gauche caviar de supprimer la vignette pour récompenser Eddy Barclay d'avoir de grosses voitures ?

M. Jean-Louis Idiart.

Ça suffit, le moralisateur !

M. Charles de Courson.

Ce n'est pas moralisateur.

Vous vous révélez tels que vous êtes !

M. Jean-Louis Idiart.

La droite champagne mange sûrement plus de caviar que nous !

M. Charles de Courson.

Vous supprimez un impôt pour donner plus à ceux qui ont déjà beaucoup. C'est pas beau, ça ? C'est une vraie politique de gauche !

Mme la présidente.

Monsieur de Courson, vous vous êtes déjà exprimé tout à l'heure.

M. Charles de Courson.

Je serai bref, madame la présidente.

Pouvez-vous me rappeler, monsieur le secrétaire d'Etat, combien la distribution des vignettes rapportait aux buralistes ? Quelque chose comme 200 millions, disons 170 ou 180. Avec les mesures que vous venez de nous annoncer, de combien allez-vous compenser leurs pertes ?

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Ce sera un peu plus.

M. Charles de Courson.

Vous plaisantez, monsieur le rapporteur général.

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Ce sera équilibré.

M. Charles de Courson.

Même en comptant le taux d'intérêt sur la variation du stock, ce n'est absolument pas comparable.

D'autre part, monsieur le secrétaire d'Etat, vous savez que la rémunération pour la vente des vignettes était très variable. Pour le buraliste de Neuilly, c'était considérable.

Alors que dans certaines zones rurales, comme chez moi, c'était très peu de chose.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

M. Michel Bouvard.

Chez nous, le buraliste ne vend pas que des Davidoff !

M. Philippe Auberger.

Il n'a pas de cave à cigares !

M. Charles de Courson.

Il n'y aura donc aucune homogénéité entre les compensations et les pertes. C'est toujours le raisonnement des technos, qui globalisent les calculs en vous expliquant qu'on donne tant et qu'on reprend tant. En réalité, ça ne colle pas du tout, monsieur le secrétaire d'Etat !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Si ! Les réponses sont adaptées.

Mme la présidente.

Monsieur Bouvard, maintenezvous votre sous-amendement ?

M. Michel Bouvard.

Oui, je veux voir s'il y a des gens, ici, qui estiment normal qu'on fasse un cadeau aux propriétaires de Testa Rossa ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix le sous-amendement no 546.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 152.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

M. Carrez et les membres du groupe du Rassemblement pour la République ont présenté un amendement, no 316, ainsi libellé :

« I. Dans le a du 1o du I de l'article 5, après les mots : "voitures particulières", sont insérés les mots : "les véhicules utilitaires".

« II. En conséquence, rédiger ainsi le premier alinéa du III de cet article :

« Les pertes de recettes résultant pour les collectivités de l'application du 1o du I sont compensées chaque année par un relèvement de la dotation globale de fonctionnement. »

« III. Compléter cet article par le paragraphe suivant :

« Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575, 575 A et 575 B du code général des impôts. »

La parole est à M. Gilles Carrez.

M. Gilles Carrez.

Tout le monde se demande, comme à l'instant M. Cochet, pourquoi le Gouvernement a finalement jeté son dévolu sur la vignette, alors qu'il y avait bien d'autres choix possibles.

En fait, je crois qu'il pensait faire un coup de génie et même faire coup double, d'une part, en masquant, grâce à la suppression de la vignette, l'envolée du prix de l'essence et, d'autre part, en poursuivant de façon méthodique, avec la complicité ou la passivité de la majorité plurielle, la recentralisation financière au détriment des collectivités locales.

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Non ! Vous savez que c'est un mauvais argument.

M. Gilles Carrez.

Pour le prix de l'essence, personne n'a été dupe. Les Français se sont bien rendu compte que la vignette n'était qu'une aumône, un rideau de fumée, et la manoeuvre n'a trompé personne. Ces 12 milliards n'ont absolument rien à voir avec les mesures qu'il aurait fallu prendre sur le prix de l'essence, par exemple la suppression de la TVA sur la TIPP.

Quant à la rencentralisation financière, on en est à la cinquième mesure, en l'espace de deux ans, visant à la suppression méthodique des impôts locaux : part salariale de la taxe professionnelle, droits de mutation, part régionale puis exonérations diverses de la taxe d'habitation, et maintenant la vignette.

M. Pierret nous dit que, depuis dix ans, l'indexation de la DGF semble plus favorable que l'évolution de la vignette. C'est peut-être vrai et je ne le conteste pas. Mais j'aimerais qu'il nous précise ce qu'il en est de l'indexation de la DGF s'agissant de la compensation de la suppression de la taxe professionnelle sur les salaires depuis l'origine de la mesure, c'est-à-dire depuis deux ans. Là, je peux citer les chiffres.

Entre l'indexation de la DGF et l'évolution de la part salaire telle qu'on peut la déduire des données figurant dans la loi de financement de la sécurité sociale, il y a déjà 2,5 % d'écart en 1999 et, pour 2000, il y aura 3 % d'écart. Autrement dit, entre l'indexation de la DGF et l'évolution de la masse salariale depuis deux ans, les collectivités ont déjà subi une perte de 5 %. Il est trop facile, mes chers collègues, de tenir un double langage. Je faisais partie de la commission Mauroy. J'y ai entendu tous les élus de gauche protester contre cette recentralisation financière, se lamenter contre l'indexation des dotations qui ne suivait absolument pas l'évolution qui aurait été celle des impôts qu'elles remplaçaient. Ils ont cité, les uns après les autres, l'exemple de la dotation de compensation de la taxe professionnelle, divisée par plus de deux en l'espace de dix ans.

M. Pierre Méhaignerie.

C'est exact !

M. Gilles Carrez.

Voilà ce qui nous attend ! Et ce sont les mêmes plaintes qu'on entend dans toutes les associations d'élus locaux, qu'il s'agisse des associations départementales ou de l'Association des maires de France. Mais ici même, dans l'hémicycle, les mêmes élus sont incapables de résister à la recentralisation financière délibérée que conduit ce gouvernement. C'est le double langage permanent. Il faudrait être au clair avec la réalité. C'est trop facile d'accepter ici, dans la passivité, la recentralisation pour aller s'en plaindre à l'extérieur.

Nous avons, avec la vignette, le couronnement d'un véritable bouleversement de nos finances locales.

M. Augustin Bonrepaux.

Ce n'est pas sérieux !

M. Gilles Carrez.

Nous sommes passés brutalement, en deux ans, d'une autonomie fiscale où les collectivités locales décidaient de plus de la moitié de leurs recettes, à un système de dépendance où elles en contrôlent moins de 40 %. Le résultat, comme l'a indiqué Michel Bouvard, c'est que, compte tenu de l'exiguïté de l'assiette fiscale sur laquelle continue de s'exercer la responsabilité des collectivités territoriales, il faudra augmenter de 10 % pour les communes, de 15 % pour les départements, de 20 % pour les régions, les taux des impôts locaux subsistants pour faire face à un besoin d'augmentation de 4 à 5 % seulement des dépenses de fonctionnement. Voilà à quoi votre liberté financière est aujourd'hui réduite.

Mais, puisque vous allez naturellement poursuivre dans cette voie, il nous a bien fallu déposer quelques amendements, dont le meilleur était à l'évidence celui de JeanYves Besselat.

M. Augustin Bonrepaux.

Il a été rejeté !

M. Gilles Carrez.

Comme le disait Charles-Amédée de Courson, il est en effet absolument impossible de distinguer entre les exceptions qui devraient être faites à


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

l'exemption de la vignette. Ce sera impossible à contrôler.

Il y a manifestement une rupture d'égalité. Et on voit déjà fleurir toute une liste d'amendements qui sont comme un inventaire à la Prévert. Il me semble en avoir vu un qui exonérerait de la vignette les véhicules appartenant à des associations ou à des syndicats. Quels syndicats, d'ailleurs ? Plutôt la CGT, si j'ai bien compris. Voilà où on en est !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Madame la présidente !

M. Michel Bouvard.

Sans oublier les congrégations ! Le Parti communiste s'achète des indulgences ! (Sourires.)

M. Maurice Adevah-Poeuf.

Ah, les pères blancs !

M. Gilles Carrez.

Eh oui ! J'ai remarqué qu'en Alsace et en Lorraine les véhicules appartenant à des congrégations pourraient également être exonérés de la vignette.

Je propose un amendement de repli, qui consiste à faire bénéficier de la suppression de la vignette tous les véhicules utilitaires appartenant à des personnes physiques. Il a au moins l'avantage de couvrir l'ensemble des p rofessions indépendantes, commerçants et artisans, toutes professions assujetties aux BIC ou aux bénéfices non commerciaux.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Nous avions compris le raisonnement de notre collègue, madame la présidente.

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Et pour cause, il l'a répété deux fois !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Mais surtout, il a éprouvé le besoin de consacrer cinq minutes à un sujet autre que celui de l'amendement. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. Gilles Carrez.

Pas du tout ! Je me suis abstenu d'intervenir sur l'article pour ne défendre mes arguments qu'une fois !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Je regrette, mon cher collègue, que vous vous fassiez parfois le champion de la caricature. (Mêmes mouvements.)

Ce que vous avez dit sur les atteintes à l'autonomie financière...

M. Gilles Carrez.

C'est la réalité !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

... n'est pas du tout conforme à la réalité, comme j'ai essayé de le démontrer dans le rapport écrit.

M. Gilles Carrez.

Je vous invite au congrès de l'Association des maires de France, dans un mois, monsieur le rapporteur général, vous verrez !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Certains chiffres sont incontestables, en tout cas vous ne pouvez pas les contester.

En ce qui concerne l'amendement, j'invite notre assemblée, au nom de la commission des finances, à le rejeter. La commission s'est efforcée de prendre en compte une partie du problème soulevé par nos collègues.

Il est difficile de faire mieux en l'état actuel de nos possibilités. La réflexion pourra continuer à mûrir, mais pour le moment, nous vous proposons d'en rester à l'équilibre accepté par la commission des finances.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

J'ai le même avis que le rapporteur général.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 316.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

M. Migaud, rapporteur général, a présenté un amendement, no 36, ainsi rédigé :

« Dans le quatrième alinéa (a) du I de l'article 5, après les mots : "des handicapés,", supprimer le mot : "et". »

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Amendement rédactionnel.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Accord.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

36. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

MM. Migaud, Emmanuelli, Bonrepaux, Idiart et Bapt ont présenté un amendement, no 486, ainsi rédigé :

« I. Après le a du I de l'article 5, insérer l'alinéa suivant :

« a bis) Les personnes physiques, à raison des véhicules autres que ceux visés au a, d'un poids total autorisé en charge n'excédant pas deux tonnes, dont elles sont propriétaires ou locataires en vertu d'un contrat de crédit-bail ou de location de deux ans ou plus ; »

« II. 1.

Dans le premier alinéa du III de cet article, après les mots : "1o du I", insérer les mots : ", à l'exception du a bis,".

«

2. Compléter cet article par le paragraphe suivant :

« VII. 1o La perte de recettes résultant du cinquième alinéa (a bis ) du I est compensée à due concurrence par la création, au profit des collectivités concernées, d'une majoration de la dotation globale de fonctionnement.

« 2o La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par la création, à son profit, d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

Sur cet amendement, le Gouvernement a présenté un sous-amendement, no 540, ainsi rédigé :

« Supprimer le II de l'amendement no 486. »

La parole est à M. Didier Migaud, pour soutenir l'amendement no 486.

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Pour répondre à certaines préoccupations exprimées par les groupes socialiste et communiste, la commission des finances propose d'étendre aux véhicules utilitaires des personnes physiques dont le poids total autorisé en charge n'excède pas deux tonnes le bénéfice de l'exonération de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur. C'est une mesure positive, qui prend en compte la spécificité des professions de commerçant, d'artisan ou d'agriculteur. Nous souhaitons, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous puissiez l'accepter, comme vous nous l'avez laissé entendre hier.

Mme la présidente.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat pour soutenir le sous-amendement no 540 et donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement no 486.

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Le Gouvernement est très satisfait de la qualité du travail de M. le rapporteur général et de la commission des finances. Il approuve


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sans réserve cet amendement exonérant les véhicules dont le poids total autorisé en charge n'excède pas deux tonnes.

Pour ce qui est du sous-amendement, il procède tout simplement, en supprimant le II de l'amendement, à la levée du gage.

Mme la présidente.

La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.

M. Jean-Jacques Jégou.

M. le rapporteur général et ses collègues ont sans doute pensé aux artisans, mais ceux d'entre eux qui ont choisi le statut d'EURL ou de SARL auront tout faux : pour le même type de véhicule, ils n'auront pas droit à l'exonération de la vignette. Bravo ! M. le secrétaire d'Etat à l'industrie et M. Didier Migaud, rapporteur général.

Ce sont les sociétés qui la paient !

Mme la présidente.

La parole est à M. Gilles Carrez.

M. Gilles Carrez.

Jean-Jacques Jégou vient de mettre en évidence une nouvelle contradiction.

Cela dit, je me réjouis car avec cet amendement le rapporteur général, inspiré par le groupe socialiste et par le groupe communiste, se rallie à celui que j'ai défendu voilà cinq minutes. La seule différence, c'est qu'il a fixé une limitation à deux tonnes, ce qui montre, à l'évidence, qu'il ne connaît pas la profession d'agriculteur. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Je vous en prie !

M. Gilles Carrez.

Dans mon amendement, les agriculteurs sont inclus dans le dispositif au même titre que les commerçants, artisans et professions indépendantes.

Vous, visiblement, vous les excluez.

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Je les connais sûrement mieux que vous !

Mme la présidente.

Je mets aux voix le sous-amendement no 540.

(Le sous-amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 486, modifié par le sous-amendement no 540.

(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

Mme la présidente.

MM. Cuvilliez, Brard et les membres du groupe communiste et apparentés ont présenté un amendement, no 551, ainsi rédigé :

« I. Après le b du 1o du I de l'article 5, insérer l'alinéa suivant :

« b bis) Les associations régies par la loi du 1er juillet 1901, les associations régies par la loi locale en vigueur dans les départements de la Moselle, du BasRhin et du Haut-Rhin, les fondations reconnues d'utilité publique, les fondations d'entreprise, les congrégations et les syndicats professionnels visés à l'article L.

411-1 du code du travail, à raison des voitures particulières, des véhicules carrossés en caravane ou spécialement aménagés pour le transport des personnes handicapées, et des autres véhicules d'un p oids total autorisé en charge n'excédant pas 2 tonnes, dont ils sont propriétaires ou locataires en vertu d'un contrat de crédit-bail ou d'un contrat de location de deux ans ou plus ; »

« II. Dans le premier alinéa du III de cet article, après les mots : "1o du I", insérer les mots : ", à l'exception du b bis, ".

« III. Compléter cet article par le paragraphe suivant :

« VII. 1o La perte de recettes résultant du sixième alinéa (b bis ) du I est compensée à due concurrence par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.

« 2o La perte de recettes pour l'Etat est compensé à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. Christian Cuvilliez.

M. Christian Cuvilliez.

L'article 5 propose de supprimer la vignette due par les personnes physiques sur leur véhicule particulier. Ne sont donc pas concernés, ce que nous trouvons légitime, les véhicules de société, même si la question devra sans doute être reconsidérée à l'avenir. Il s'agit bien d'une mesure destinée à alléger l'impôt pesant sur les ménages. L'extension du champ d'application que nous proposons, je l'ai dit dans mon intervention sur l'article, n'en remet pas en cause la philosophie.

Nous souhaitons, en effet, élargir le dispositif, vous l'aviez pressenti, monsieur Carrez, aux associations et aux organisations syndicales.

M. Michel Bouvard.

Et aux congrégations !

M. Gilles Carrez.

Toutes les organisations syndicales ?

M. Christian Cuvilliez.

Toutes les organisations syndicales représentatives.

Cet amendement, d'ailleurs, témoigne de notre souci plus général de soutenir la vie associative, notamment par l'exonération fiscale des cotisations versées. Dans quelques mois nous célébrerons le centenaire de la loi de 1901. Il nous paraît essentiel que cet anniversaire ne soit pas une simple commémoration. Cet amendement pourrait être le premier acte d'une série visant à encourager la vie associative. Voilà le geste que nous proposons aujourd'hui.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Didier Migaud, rapporteur général.

La commission n'a pas examiné cet amendement, mais connaissant sa sensibilité envers les associations et les organisations syndicales, je pense qu'elle aurait exprimé un avis favorable sur une mesure dont on peut estimer le coût à 50 millions de francs. Il serait donc souhaitable, monsieur le secrétaire d'Etat, si, comme je l'espère, vous acceptiez cet amendement, que vous puissiez lever le gage.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Voilà un vrai progrès fiscal dont je veux féliciter le groupe communiste.

(Exclamations sur divers bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. Jean-Jacques Jégou.

Vous n'y êtes pas obligé, monsieur le secrétaire d'Etat !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Je remarque que les associations, pour être essentiellement visées, ne seront pas les seules à être exonérées.

M. Pierre Méhaignerie.

C'est pour digérer les oeuvres d'art !

M. Jean-Jacques Jégou.

C'est l'Alka Seltzer ! (Sourires.)

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Les fondations et les congrégations religieuses - je vous félicite - (Exclamations sur divers bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance),...


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

M. Philippe Auberger.

C'est Don Camillo et Peppone !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

... ainsi que les syndicats professionnels, seront aussi bénéficiaires de l'exonération.

J'observe également, le reproche étant souvent adressé au législateur par M. Gengenwin et d'autres députés d'oublier - et cela peut arriver aussi au Gouvernement l'Alsace-Moselle, qu'ici, elle est mentionnée. Je vous en félicite, monsieur le député.

M. Pierre Méhaignerie.

Vive la simplification !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Quant au gage, le Gouvernement le lève en raison de l'avis très positif qu'il porte sur l'amendement.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 551, compte tenu de la suppression du gage.

(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

Mme la présidente.

M. Migaud, rapporteur général, a présenté un amendement, no 37, ainsi rédigé :

« Dans la première phrase du dernier alinéa du 2o du I de l'article 5, après le mot : "exigible", insérer le mot : ", soit". »

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Amendement rédactionnel.

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Favorable.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

37. (L'amendement est adopté.)

Mme la présidente.

Je suis saisie de deux amendements, nos 317 et 526, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 317, présenté par M. Carrez, est ainsi libellé :

« I. Compléter le I de l'article 5 par un 3o ainsi rédigé :

« 3o Il est inséré avant le dernier alinéa de l'article 1599 F bis du code général des impôts un alinéa ainsi rédigé :

« Le conseil général peut, sur délibération, exonérer de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur les véhicules immatriculés dans le département. »

« II. En conséquence, compléter le III de cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« Les pertes de recettes résultant pour les collectivités de l'application du 3o du I sont compensées chaque année par un relèvement de la dotation globale de fonctionnement. »

« III. Compléter cet article par le paragraphe suivant :

« Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575, 575 A et 575 B du code général des impôts. »

L'amendement no 526, présenté par M. Besselat, est ainsi rédigé :

« I. Compléter le I de l'article 5 par les alinéas suivants :

« 3o a) A titre exceptionnel, les conseils généraux sont autorisés, jusqu'au 28 février 2001, à minorer le tarif défini à l'alinéa premier de l'article 1599 G du code général des impôts, à raison de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur exigible pour la période d'imposition du 1er décembre 2000 au 30 novembre 2001.

« b) Les dispositions de l'article 1599 C à 1599 J du code général des impôts s'appliquent à partir du nouveau tarif défini à partir du 1o

« c) Le montant des taxes différentielles acquitées avant la délibération du conseil général prise en application du 1o est remboursé à chaque redevable concerné. Un décret fixe les modalités de ce remboursement.

« d) La minoration des tarifs de la taxe différentielle décidée en vertu du 1o est sans effet sur l'application des III, IV, V et VI. »

« II. Compléter cet article par le paragraphe suivant :

« 1o Les pertes de recettes pour les collectivités sont compensées chaque année par un relèvement de la dotation globale de fonctionnement.

« 2o Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575, 575 A et 575 B du code général des impôts. »

La parole est à M. Gilles Carrez, pour soutenir l'amendement no 317.

M. Gilles Carrez.

Cet amendement, que je dirais salvateur (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), ...

M. Jean-Louis Idiart.

C'est le Salve Regina !

M. Gilles Carrez.

... va permettre à l'Etat de sortir de l'ornière où il est en train de s'enliser, comme vient encore de le montrer M. le secrétaire d'Etat en acceptant l'amendement du groupe communiste. Le système que vous êtes en train de mettre en place à coup de dérogations plus contestables les unes que les autres est absurde, injuste, inacceptable, et incontrôlable ! Grâce à mon amendement, la sagesse des collectivités locales pourra venir au secours de l'Etat. En effet, il laisse aux départements la possibilité d'étendre - bien entendu sans compensation de l'Etat - la suppression de la vignette à tous les justiciables qu'ils souhaiteront exonérer.

M. Maurice Adevah-Poeuf.

La vignette n'est pas une condamnation !

M. Gilles Carrez.

Si, elle sera considérée comme une sanction par ceux qui auront encore à la payer.

Mme la présidente.

La parole est à M. Jean-Yves Besselat, pour défendre l'amendement no 526.

M. Jean-Yves Besselat.

Mon amendement va dans le sens même de celui de Gilles Carrez.

Mais en préambule et en quelques mots, je voudrais tout de même dire que le spectacle offert par le Gouvernement et sa majorité est d'une totale incohérence (Protestations sur les bancs du groupe socialiste).

Quelles sont les limites aux amendements que nous pouvons déposer s'il n'y a pas de décision claire ? A l'évidence, nous travaillons ce soir dans une totale impréparation !

M. Henri Emmanuelli, président de la commission.

C'est la première fois qu'on vous voit !

M. Jean-Yves Besselat.

Je tiens à le signaler parce que certains arguments ont tout de même suscité chez moi une certaine surprise.

M. Jean-Louis Idiart.

Nous travaillons là-dessus depuis deux mois, nous !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

M. Jean-Yves Besselat.

Monsieur le secrétaire d'Etat, je suis tout de même sensible à la remarque que vous m'avez faite à propos de l'amendement no 257 qui selon vous, contribuait au déficit public. Comme Gilles Carrez, je propose de laisser la liberté aux collectivités locales de décider d'étendre ou non la mesure d'exonération à des catégories non couvertes par la proposition initiale maintenant amendée de multiples façons -, éventuellement à des catégories marginales pas encore identifiées. Il y a un précédent en la matière. Le Parlement, dans sa grande sagesse, a en effet autorisé les conseils généraux à exonérer de la vignette, en totalité ou partiellement, les véhicules roulant au GPL.

Je rejoins là l'une des préoccupations des groupes de l'opposition s'agissant de la libre administration et de l'autonomie des collectivités locales. Je ne vois pas pourquoi l'Assemblée nationale refuserait maintenant de donner la possibilité aux conseils généraux de faire ce qu'ils souhaitent.

Si l'Assemblée n'adoptait pas cet amendement, - et je souhaite que les Français soient témoins de ce choix -...

M. Augustin Bonrepaux.

De votre démagogie surtout !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Tout ce qui se passe ici est public, monsieur le député !

M. Jean-Yves Besselat.

... elle nous priverait certainement d'un résultat concret. Ma proposition, en effet, constitue une incitation à la baisse du prix de la vignette pour les véhicules professionnels qui ne sont pas couverts par votre mesure. Je pense, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous serez sensible à cet argument.

Comme Gilles Carrez, je défends la possibilité pour les conseils généraux de fixer à leur guise le taux de la vignette ou de la supprimer. Tout comme j'ai tenu compte de vos observations liminaires, monsieur le secrétaire d'Etat, j'espère que vous et votre majorité considérerez de façon bienveillante cet amendement.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Il est assez osé de la part de notre collègue de nous reprocher une certaine impréparation quand on voit toutes les corrections qui ont dû être apportées à son amendement. Car, s'il y a un amendement mal rédigé et mal préparé, c'est bien le sien !

M. Jean-Yves Besselat.

Il n'y a eu qu'une seule rédaction !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Oui, mais le service de la séance a été obligé de le modifier considérablement pour le rendre recevable. Vous devriez peut-être davantage préparer vos textes.

M. Jean-Yves Besselat.

Quel ton suffisant !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Non, mais nous avons l'habitude, à la commission des finances, de travailler sérieusement. Si vous participiez activement et peutêtre plus régulièrement, à nos travaux, vous verriez que nous portons une grande attention aux amendements qui nous sont soumis.

Votre proposition est très complexe. Le système de remboursement que vous envisagez n'a absolument rien d'évident. Sachez que rien n'empêchera les conseils généraux de voter les taux qui leur semblent convenables, mais il leur faudra pour cela attendre le millésime 2002.

Pour 2001, cela ne nous apparaît pas possible. C'est pourquoi la commission vous propose de rejeter l'amendement.

M. Jean-Yves Besselat.

C'est lamentable !

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Même avis que le rapporteur général.

Mme la présidente.

La parole est à M. Gilles Carrez.

M. Gilles Carrez.

J'estime inacceptable le mépris avec lequel le rapporteur général traite l'amendement de M. Besselat...

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Je vous en prie ! Nous ne sommes ni au cinéma ni au théâtre !

M. Gilles Carrez.

... qui pose le principe fondamental du respect de la liberté des collectivités locales. Vous venez de nous expliquer que le pouvoir fiscal des collectivités locales était sauvegardé puisqu'il continuait de s'exercer sur près de 40 % de l'ensemble de leurs recettes.

Eh bien, avec cet amendement, nous ne vous demandons pas autre chose que de permettre aux départements d'user en totalité de leur pouvoir d'exonérer ou non de la vignette, sachant qu'ils le font déjà pour certains véhicules. Le Gouvernement adopte là une démarche centralisatrice en imposant des exonérations pour telle ou telle catégorie de véhicules, qui, à l'évidence, relèvent de l'imp rovisation, de l'impréparation, de l'injustice, du désordre.

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Madame la présidente, pourrions-nous avoir un peu d'ordre dans l'organisation des travaux ?

M. Gilles Carrez.

C'est comme si vous recherchiez votre salut dans une annulation plus que probable par le Conseil constitutionnel. Avec l'amendement de M. Besselat et le mien est clairement affirmé le principe qu'une collectivité locale est maître de fixer l'assiette de l'impôt dont elle est responsable. Vous le refusez. C'est vraiment la gauche jacobine qui veut ignorer les libertés locales, à commencer par la liberté fiscale ! Vous ne tenez aucun compte de l'article 72 de la Constitution sur la libre administration des collectivités locales. Cela témoigne de votre mépris à leur égard. Du reste, vous affichez la même attitude envers notre collège sous prétexte qu'il n'est pas membre de la commission des finances.

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Je n'ai pas dit cela !

M. Jean-Yves Besselat.

Vous l'avez insinué !

M. Gilles Carrez.

Mais quiconque ici peut faire de très bons amendements en matière fiscale même sans être membre de la commission des finances. C'est le cas de M. Besselat.

Mme la présidente.

Sur l'amendement no 317, je suiss aisie par le groupe du Rassemblement pour la République d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Augustin Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux.

Je demande à mes collègues de l'opposition de garder leur calme et leur sang-froid et de se montrer un peu plus responsables. Vous êtes pleins de contradictions, mes chers collègues ! Vous nous dites qu'il faut maintenir la vignette au nom de l'autonomie des collectivités locales.

M. Christian Cabal.

Vous n'avez rien compris !

M. Augustin Bonrepaux.

Les collectivités locales ont la possibilité de diminuer leur taux comme elles le veulent.

En témoigne l'exemple fâcheux de la Marne.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

M. Gilles Carrez.

Fâcheux ?

M. Augustin Bonrepaux.

Oui très fâcheux car il a eu des répercussions négatives sur l'ensemble des collectivités locales. A propos, je remarque que Monsieur le moralisateur n'est pas là pour me couper la parole, sinon que n'aurais-je entendu !

M. Philippe Auberger.

Donneur de leçons !

M. Augustin Bonrepaux.

Vous êtes pleins de contradictions !

M. Philippe Auberger.

Pas de leçons !

M. Augustin Bonrepaux.

Vous dites qu'il faut la liberté pour les collectivités locales. Vous l'avez, mais vous demandez aussi la compensation.

M. Jean-Yves Besselat.

Pas là !

M. Gilles Carrez.

Vous n'avez pas lu l'amendement !

M. Augustin Bonrepaux.

Vous ne pouvez pas tout avoir ! On ne peut pas demander le beurre et l'argent du beurre !

M. Julien Dray.

Et la crémière avec !

M. Augustin Bonrepaux.

Donc, nous sommes contre cet amendement.

M. Gilles Carrez.

M. Bonrepaux n'a pas compris : on ne demande pas de compensation dans ce cas.

Mme la présidente.

La parole est à M. Maurice Adevah-Poeuf.

M. Maurice Adevah-Poeuf.

Ce qui semblait clair n'a fait que s'obscurcir au fil d'un débat quelque peu surréaliste à certains moments. Ainsi, il me paraît pour le moins osé d'invoquer la rupture d'égalité afin de justifier le maintien de sociétés de louage de véhicules dans tel département.

Je n'ai pas de jugement à porter sur la rédaction des amendements de nos collègues. En revanche, je ne comprends pas qu'ils harcèlent le rapporteur et le Gouvernement depuis des heures sur le thème : « Vous ne savez pas ce que vous voulez ; vous faites n'importe quoi ; nous sommes pour la baisse des impôts ».

M. Jean-Yves Besselat.

C'est vrai !

M. Maurice Adevah-Poeuf.

La suppression de la vignette ne serait-elle pas une baisse des impôts ? En tout état de cause il n'est qu'un élément que les Français retiendront. En effet depuis plus de quarante ans, tous les automobilistes se plaignent de la vignette, les plus anciens se gaussent même d'un ancien ministre des finances, Ramadier,...

M. Philippe Auberger.

Un ami à vous !

M. Maurice Adevah-Poeuf.

... qui l'avait instaurée pour un an, afin d'alimenter les caisses du fonds de solidarité vieillesse. Les Français retiendront donc que cet impôt détestable et détesté sera supprimé à partir de cette anné e.

M. Philippe Auberger.

Ponctuellement !

M. Maurice Adevah-Poeuf.

A mon sens, c'est ce qui compte.

(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 317.

Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même, et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été cou plés à cet effet.

Le scrutin est ouvert.

....................................................................

Mme la présidente.

Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin : Nombre de votants ...................................

49 Nombre de suffrages exprimés .................

49 Majorité absolue .......................................

25 Pour l'adoption .........................

16 Contre .......................................

33 L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 526.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

MM. Méhaignerie, Jégou, de Courson, Hériaud, Ligot et Mme Idrac ont présenté un amendement, no 96, ainsi libellé :

« I. Rédiger ainsi le III de l'article 5 :

« III. Les pertes de recettes résultant pour les collectivités, de l'application du 1o du I sont compensées chaque année par une majoration de la dotation globale de fonctionnement. Cette compensation est calculée en 2001 sur la base du produit résultant de l'application des tarifs votés par les a ssemblées délibérantes en application des articles 1599 G et 1599 decies du code général des impôts au titre de la moyenne, majorée de l'indice des prix hors tabacs constituée par les trois périodes c omprises entre le 1er décembre 1997 et le 30 novembre 2000, minoré du différentiel constaté entre les recettes perçues au titre de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur au titre de la période c omprise entre le 1er décembre 1999 et le 30 novembre 2000 et les recettes perçues au titre de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur au t itre de la période comprise entre le 1er décembre 2000 et le 30 novembre 2001. »

« II. Compléter cet article par le paragraphe suivant :

« Les pertes de recettes pour le budget de l'Etat sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. Pierre Méhaignerie.

M. Pierre Méhaignerie.

Le secrétaire d'Etat a précisé que le Gouvernement rembourserait au franc le franc le produit de la vignette. Dans la mesure où huit départments dont les Ardennes, la Corrèze, le Lot-et-Garonne, l'Orne et la Vienne ont baissé le coût de leurs vignettes entre 1999 et 2000, ne serait-il pas possible de prendre pour référence 1999 ou la moyenne des trois dernières années ? Il serait normal d'accepter ce tout petit geste.

Enfin, j'ai l'énorme plaisir d'informer M. Bonrepaux que, à ma surprise d'ailleurs, le département de l'Ariège a exactement le même potentiel fiscal par habitant que celui d'Ile-et-Vilaine.

M. Philippe Auberger.

Eh bien !

M. Pierre Méhaignerie.

Nous sommes aux cinquantedeuxième et cinquante-troisième rangs avec une moyenne de 1 900 francs exactement par habitant, celle des départements les mieux classés étant de 50 000 francs.

Vos discours caricaturaux sur les départements riches et les départements pauvres n'ont donc pas de sens.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Didier Migaud, rapporteur général.

La commission n'a pas accepté cet amendement. La compensation par l'intermédiaire de la DGD est le mode normal prévu par les lois de décentralisation en cas de modification affectant la fiscalité transférée. On aurait même pu concevoir qu'aucune disposition spécifique ne figure dans le présent article, comme pour l'allégement des DMTO en loi de finances pour 2000.

J'ajoute que les départements ayant diminué le tarif de la vignette ces dernières années l'ont fait en vertu du p rincipe de libre administration, en adaptant leurs recettes à leurs dépenses. Le système proposé par l'amendement leur fournirait donc des ressources dont ils n'ont apparement pas besoin. Pour toutes ces raisons j'invite l'assemblée à voter contre l'amendement.

M. Pierre Méhaignerie.

Ce n'est pas gentil !

M. Michel Bouvard.

Quel sectarisme !

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Monsieur Méhaignerie, la compensation doit prendre en compte l'état des tarifs des vignettes dans chaque département en ce moment, car il reflète la libre politique de chaque département.

M. Henri Emmanuelli, président de la commission.

Bien sûr !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Comment pourrait-on imaginer prendre une autre référence que celle résultant de l'autonomie des collectivités locales ?

M. Jean-Louis Idiart.

Absolument !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Nous nous fonderons donc sur 2000, parce qu'il s'agit du dernier état de la libre administration exercée par les collectivités locales en vertu de l'article 72 de la Constitution.

M. Jean-Louis Idiart.

Ce n'est pas parce que vous changez d'avis tous les ans qu'on doit vous suivre !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Pour être plus précis, je tiens à rappeller certains chiffres, car je veux qu'ils figurent au Journal officiel, afin que M. Méhaignerie puisse expliquer les évolutions dans son propre département.

Entre 1990 et 1999 la progression annuelle moyenne de la DGF a été de 2,8 % contre 2,07 % pour celle du produit de la vignette. Les propositions du Gouvernement permettront donc un gain réel pour les départements.

Mieux : de 1996 à 1999, la progression annuelle moyenne de la DGF a été de 2,29 % contre 1,47 %, pour celle du produit de la vignette. Cela démontre que les dispositions proposées par le Gouvernement sont plus qu'équilibrées. Elles sont même à l'avantage des départements.

M. Gilles Carrez.

Et qu'en est-il pour la taxe professionnelle, monsieur le secrétaire d'Etat ? (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme la présidente.

La parole est à M. Augustin Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux.

L'opposition est pleine de contradictions. Ainsi, M. Méhaignerie, qui prône la libre administration des collectivités locales nous demande maintenant de fonder la compensation sur les années précédentes parce que, l'année dernière, certains départements ont décidé de baisser leurs taux. Quand des décisions sont prises il faut en assumer les conséquences.

Par ailleurs, je pensais que M. Méhaignerie était plus au fait de la fiscalité locale. Il aurait ainsi dû savoir que dans un département où les maisons abandonnées non habitées sont nombreuses, les bases fiscales font apparaître un potentiel fiscal qui ne correspond pas à la réalité, car il est divisé par un nombre d'habitants beaucoup plus faible.

Mme la présidente.

La parole est à M. Pierre Méhaignerie.

M. Pierre Méhaignerie.

Toutes les mesures prises depuis quelques années sont des incitations à la dépense.

(Murmures sur les bancs du groupe socialiste).

Mon département se situe au cinquante-deuxième rang, pour le potentiel fiscal par habitant. Comme d'autres il a voulu consentir des efforts de gestion. Or, comme il n'était pratiquement pas possible de toucher aux quatres taxes en raison des liens établis entre elles, la seule solution pour participer à la reprise de l'emploi était de réduire le prix des vignettes.

Ceux qui auront ainsi accompli de efforts de gestion seront tout sauf récompensés. Une nouvelle fois vous prenez une décision qui est une formidable incitation à la dépense.

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Non !

M. Gilles Carrez.

On encourage le vice et non la vertu !

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no

96. (L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'article 5, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 5, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 5

Mme la présidente.

L'amendement no 222 de M. Gantier n'est pas défendu.

Je suis saisie de quatre amendements, nos 264, 82, 318 et 449, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 264, présenté par M. Michel Bouvard et les membres du groupe du Rassemblement pour la République, est ainsi libellé :

« Après l'article 5, insérer l'article suivant :

« I. Le II de l'article 1641 du code général des impôts est ainsi rédigé :

« II. Pour frais d'assiette et de recouvrement, l'Etat perçoit 5,4 % du montant des taxes visées au I. Ce taux est réduit à 4,4 % pour les impositions perçues au profit des collectivités locales et de leurs groupements.

« Par exception, les frais d'assiette et de recouvrement ne sont pas perçues en ce qui concerne la taxe d'habitation ».

« II. La perte de recettes résultant pour l'Etat est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

Les amendements nos 82 et 318 sont identiques.

L'amendement no 82 est présenté par M. Auberger ; l'amendement no 318 est présenté par M. Carrez.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Après l'article 5, insérer l'article suivant :

« I. Dans la première phrase du II de l'article 1641 du code général des impôts, le taux : "4,4 %" est remplacé par le taux : "4 %".

« II. Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensés par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts ».

L'amendement no 449, présenté par MM. Cuvilliez, Bocquet, Brard, Feurtet, Vila et les membres du groupe communiste, est ainsi rédigé :

« Après l'article 12, insérer l'article suivant :

« I. Dans la dernière phrase du II de l'article 1641 du code général des impôts, le taux : "4,4 %" est remplacé par le taux : "4 %".

« II. Le taux de l'impôt sur les sociétés est relevé à due concurrence. »

La parole est à M. Michel Bouvard, pour soutenir l'amendement no 264.

M. Michel Bouvard.

Puisqu'il semble, depuis la loi de finances rectificative et maintenant avec le projet de budget pour 2001, que l'Etat souhaite alléger la fiscalité au travers des impôts votés par les collectivités locales après la part régionale de la taxe d'habitation, c'est aujourd'hui le cas de la vignette -, je vous propose une autre mesure d'allègement de la fiscalité locale pour le contribuable, mais qui ne serait pas opérée au travers d'une réduction de la ressource des collectivités. Elle consisterait à supprimer les frais d'assiette et de recouvrement perçus par l'Etat sur la taxe d'habitation, d'autant qu'ils ont tendance à croître plus rapidement que les taux et que la part encaissée par les collectivités locales. Ils sont même souvent supérieurs à la part perçue par les groupements de communes.

Cette disposition permettrait de régler en même temps le problème du fameux 0,4 % qui avait été institué pour financer la révision générale des bases d'imposition, laquelle n'a jamais été mise en oeuvre.

J'espère, monsieur le secrétaire d'Etat - et mon collègue Philippe Auberger présentera un amendement plus précis sur ce sujet - que vous nous donnerez une réponse différente de celle de M. Sautter qui s'était contenté de dire qu'il en avait besoin et qu'il n'y avait pas d'autre explication à donner.

Mme la présidente.

La parole est à M. Philippe Auberger, pour soutenir l'amendement no

82.

M. Philippe Auberger.

Ceux qui siégeaient déjà sur ces bancs se souviennent que lorsque la révision des bases a été envisagée, M. Charasse, alors ministre du budget, nous a dit qu'il avait besoin d'argent et que la seule façon qu'il avait trouvée pour financer cette opération, notamment pour payer les vacataires qui allaient en être chargés, était d'alourdir les frais d'assiette et de recouvrement.

Or si cette opération, qui a coûté plusieurs milliards de francs, a été réalisée, elle n'a servi à rien. Il aurait don c sans doute été possible d'en faire l'économie. En tout cas, il n'y a absolument plus aucune justification au prélèvement de cette cotisation. Mon amendement tend donc à la supprimer.

Nos concitoyens sont de plus en plus sensibles à l'importance de ces frais d'assiette et de recouvrement.

En fait, il y a désormais quatre parts dans la fiscalité locale : la part communale, et, de plus en plus souvent intercommunale, la part départementale, la part régionale et celle de l'Etat. Or si l'on tient compte des frais d'assiette et de recouvrement ainsi que des frais de nonvaleur, elle se situe en moyenne à 7 ou 8 %. Elle est donc supérieure à la part régionale, ce qui étonne les contribuables qui viennent nous voir avec leur feuille d'impôt.

Puisque l'Etat veut accomplir un effort d'allègement fiscal, il serait normal qu'il diminue cette cotisation qui n'a plus aucune justification.

Mme la présidente.

La parole est à M. Gilles Carrez, pour soutenir l'amendement no 318.

M. Gilles Carrez.

J'ajouterai seulement une question aux remarquables arguments de mes deux excellents collègues. Avec l'adoption de mesures comme la suppression de la part régionale de la taxe d'habitation ou l'augmentation des dégrèvements et certaines dispositions retenues en commission des finances - abattement sur les valeurs locatives au titre du foncier bâti, sortie des logements HLM des exonérations -, on voit bien que le Gouvernement a fait son deuil définitif de la révision des valeurs locatives.

Je voudrais que vous le confirmiez, monsieur le secrétaire d'Etat, et que, dans la ligne de cette confirmation probable, vous acceptiez cet amendement dont l'objet est de supprimer la séquelle qui subsiste encore de la révision avortée des valeurs locatives.

Mme la présidente.

La parole est à M. Christian Cuvilliez, pour soutenir l'amendement no 449.

M. Christian Cuvilliez.

Il est défendu.

Mme la présidente.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Je pense que la révision des valeurs cadastrales doit rester d'actualité.

(« Ah ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. Gilles Carrez.

C'est un scoop !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Je ne sais pas si c'est un scoop mais il est évident que des dysfonctionnements subsistent dans le mode de calcul de la taxe d'habitation.

Cela étant, mes chers collègues, j'ai été tout étonné en vous écoutant vous exprimer sur ce sujet. Vous devriez en effet savoir qu'il n'existe plus aucun lien entre le 0,4 % et la révision des valeurs cadastrales depuis le projet de loi de finances pour 1996 rapporté par mon prédécesseur Philippe Auberger ! (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme Nicole Bricq.

Ils ont oublié !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Présentant l'article 19 dans son rapport général, sur ce projet de loi de finances, il expliquait qu'il convenait de pérenniser cette majoration pour tenir compte non plus de la nécessité de réviser les valeurs cadastrales, mais de la participation croissante de l'Etat dans le financement de la fiscalité directe locale. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Christian Cuvilliez.

Tel est pris qui croyait prendre.

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Messieurs, il devrait y avoir une limite dans l'expression et il faudrait éviter de déposer des amendements dictés, sinon par l'hypocrisie, du moins par une certaine amnésie. (Sourires.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

Certes nous regrettons sans doute la hauteur des prélèvements de l'Etat en la matière. Cependant il faut avoir l'honnêteté de mettre en regard l'importance des efforts que l'Etat consent en faveur des collectivités locales dans le domaine de la fiscalité locale. Ainsi la réforme de la taxe d'habitation que nous avons votée dans le collectif a représenté un coût de 11 milliards de francs et permis d'exempter totalement un million de contribuables supplémentaires.

M. Gilles Carrez.

Je l'ai dit !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Pour toute ces raisons, j'appelle notre assemblée à voter contre cet amendement.

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Excellent !

Mme la présidente.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Le Gouverneemnt ne peut que reprendre la formule qui sera désormais célèbre, et que vient de rappeler M. le rapporteur général.

En effet, en 1996, Auberger Philippe, rapporteur général, a déclaré : « Tout d'abord, le maintien des frais de gestion se justifie pleinement par la part croissante prise par l'Etat dans le financement de la fiscalité directe locale au cours de ces dernières années. »

M. Didier Migaud, rapporteur général.

CQFD.

M. Gilles Carrez.

La culture de Bercy est vraiment tenace. (Sourires.)

M. Philippe Auberger.

Il est vraiment difficile de chasser les bons auteurs. Ils reviennent au galop !

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

La seule chose dont nous ne faisons pas notre deuil, monsieur Carrez, est une réforme d'ensemble de la fiscalité locale à laquelle nous réfléchissons, à laquelle les travaux de la commission Mauroy auxquels un certain nombre d'entre vous ont participé va nous conduire. Soyez assurés que la réflexion qu'il faut mener aujourd'hui doit tendre à remettre de l'ordre dans une fiscalité locale trop complexe, trop éparpillée, sans logique véritable.

Je veux également répondre de manière précise à l'ensemble de ces amendements.

En matière de taxe d'habitation, les dégrèvements et admissions en non-valeur qui sont à la charge de l'Etat se sont élevées à 11,6 milliards en 1999 contre seulement 7,3 milliards en 1992, ce qui représente une augmentation de 60 % en sept ans. C'est la première justification du maintien du texte tel que le Gouvernement le propose.

Sur la même période, les recettes perçues par l'Etat en contrepartie sont passées de 679 millions en 1992 à 876 millions en 1999, soit une augmentation de moins de 30 %. Donc, d'un côté, les charges supportées par l'Etat se sont accrues de 60 %, alors que, de l'autre, la compensation par les recettes perçues par l'Etat n'a augmenté que de 30 %.

C'est pourquoi, plutôt que de procéder à des corrections à la marge comme vous nous y invitez, le Gouvernement a préféré supprimer la part régionale de la taxe d'habitation, et, fidèle en cela à l'impératif de justice sociale et fiscale qu'il s'est fixé.réaménager les dispositifs de dégrèvement pour les contribuables ayant les revenus les plus faibles. Cela nous a conduit, dès 2000, à un allégement substantiel des cotisations à la charge des redevables dont le total, - part régionale et dégrèvement, est de 11 milliards de francs. Ce dispositif est beaucoup plus significatif pour le contribuable local, et nous évite de bricoler, à la marge, des impôts qui, de toute façon, devront être profondément réformés !

Mme la présidente.

La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.

M. Jean-Jacques Jégou.

Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez toujours des mots qui font mouche et vous finissez toujours par une envolée sur cette fameuse réforme dont on nous parle depuis le début de la discussion sur la loi de finances pour 2001, alors que M. Fabius lui-même a officiellement indiqué que cette loi de finances ne comportait aucune réforme.

Vous promettez maintenant une réforme de la fiscalité locale. A la bonne heure, mais je crois que nous l'attendrons encore très longtemps.

Vous avez parlé de l'amnésie de certains parlementaires. Il me semble que, depuis le début de notre disc ussion, la majorité plurielle fait, elle, preuve de cynisme...

M. Henri Emmanuelli, président de la commission.

Pas de mots qui fâchent ! M. Jean-Jacques Jégou. Il y a ici plusieurs élus de la région Ile-de-France. Mon ami Gilles Carrez connaît bien l'importance de la fiscalité départementale, et ce que représente la taxe d'habitation ou le foncier bâti d'un habitant moyen du Val-de-Marne. En fait, ce qui est en cause ici, ce sont les frais de confection de rôle. Souvent, les gens viennent nous demander ce que c'est. Il nous est difficile de leur expliquer que, sur 8 000 francs de taxe d'habitation ou de foncier bâti qu'ils paient pour leur maison, plus de 7 % sont prélevées pour la confection de la feuille. Et c'est poutant ce qu'on est obligé de leur dire, puisque tout est écrit sur la feuille : il suffit de la retourner pour avoir l'explication.

Aujourd'hui, comme l'a très justement dit Gilles Carrez, avec la baisse de la part régionale apparaît un vrai problème. Dans l'impôt local, il y a un impôt d'Etat, et sa part n'est pas négligeable. M. le rapporteur général et M. le secrétaire d'Etat ont été particulièrement sévères avec Philippe Auberger. Mais lorsque en tant que rapporteur général, il a fait la déclaration qui a été citée, l a situation financière, il faut l'avouer, n'était pas la même...

M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.

Elle était pire pour les collectivités locales !

M. Jean-Jacques Jégou.

Je parle des possibilités dégagées par la croissance que nous connaissons aujourd'hui.

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Ce n'est par un argument !

M. Jean-Jacques Jégou.

Peut-être...

M. Christian Cabal.

Il n'y avait pas de cagnotte !

M. Jean-Jacques Jégou.

... mais, sur leur feuille d'impôt, les contribuables voient, même si les taux sont abaissés par leurs élus, qu'une somme d'argent importante est prélevée par l'Etat, et ils ne le comprennent pas.

Vous parlez de réforme : il faudra quand même un jour qu'on puisse expliquer aux contribuables ce qu'ils paient.

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Je suis d'accord.

Il faut rendre la feuille d'impôt plus claire.

M. Jean-Jacques Jégou.

S'ils sont souvent encore attachés à leurs élus locaux, c'est parce qu'ils voient ce qui est fait avec leur argent. Aujourd'hui, il y a dans cet impôt


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

des sommes plus importantes que la part régionale. Ces frais de confection de rôle sont une réalité particulièrement abstraite pour un contribuable moyen.

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Les feuilles d'impôt sont mal rédigées, je le reconnais.

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 264. (L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 82 et 318.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente.

Je mets aux voix l'amendement no 449.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance qui aura lieu à neuf heures trente pour tenir compte du souhait de la commission des finances.

2 DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI

ORGANIQUE

Mme la présidente.

J'ai reçu, le 19 octobre 2000, de M. Bernard Charles et plusieurs de ses collègues, une p roposition de loi organique visant à modifier l'article L.O. 121 du code électoral en vue de la concomitance de l'élection présidentielle et des élections législatives.

Cette proposition de loi organique, no 2665, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la l égislation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

3 DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Mme la présidente.

J'ai reçu, le 19 octobre 2000, de Mme Michèle Rivasi, rapporteure de la délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne, une proposition de résolution sur le Livre vert de la Commission européenne sur la responsabilité civile du fait des produits défectueux (COM [1999] 396 final - document E 1296), déposée en application de l'article 151-1 du règlement.

Cette proposition de résolution, no 2670, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

4 DÉPÔT DE RAPPORTS D'INFORMATION

Mme la présidente.

J'ai reçu, le 19 octobre 2000, de M. Alain Barrau, un rapport d'information, no 2667, déposé par la délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne, sur des textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution du 20 au 25 septembre 2000 (nos E 1545, E 1547, E 1555 à E 1557) et sur les textes nos E 1202, E 1220, E 1429, E 1437, E 1481, E 1483, E 1488 à E 1491, E 1500, E 1501, E 1506, E 1508, E 1511, E 1521, E 1523, E 1525, E 1526, E 1532, E 1538, E 1542 et E 1543.

J'ai reçu, le 19 octobre 2000, de M. Alain Barrau, un rapport d'information, no 2668, déposé par la délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne sur la

XXIIIe Conférence des organes spécialisés dans les affaires communautaires (COSAC), tenue à Versailles les 16 et 17 octobre 2000.

J'ai reçu, le 19 octobre 2000, de Mme Michèle Rivasi, un rapport d'information, no 2669, déposé par la délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne sur le Livre vert de la Commission européenne sur la responsabilité civile du fait des produits défectueux.

5 DÉPÔT D'UN PROJET DE LOI

MODIFIÉ PAR LE SÉNAT

Mme la présidente.

J'ai reçu, le 19 octobre 2000, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, modifié par le Sénat après déclaration d'urgence, relatif aux nouvelles régulations économiques.

Ce projet de loi, no 2666, est renvoyé à la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, en application de l'article 83 du règlement.

6

ORDRE DU JOUR

DES PROCHAINES SÉANCES

Mme la présidente.

Aujourd'hui, à neuf heures trente, première séance publique : Suite de la discussion des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2001, no 2585 : M. Didier Migaud, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport no 2624).

A quinze heures, deuxième séance publique : Suite de l'ordre du jour de la première séance.

A vingt et une heures, troisième séance publique : Suite de l'ordre du jour de la première séance.

La séance est levée.

(La séance est levée, le vendredi 20 octobre, à zéro heure cinquante-cinq.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT

CONVOCATION DE LA CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS La conférence, constituée conformément à l'article 48 du règlement, est convoquée pour le mardi 24 octobre 2000, à 10 heures, dans les salons de la présidence.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

TEXTES SOUMIS EN APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION Transmissions

M. le Premier ministre a transmis, en application de l'article 88-4 de la Constitution, à M. le président de l'Assemblée nationale, les textes suivants : Communication du 18 octobre 2000 No E 1569. Proposition de décision du Conseil fixant les lignes directrices financières pluriannuelles pour la gestion des fonds de la « CECA en liquidation » (COM [2000] 520 final).

No E 1570. Proposition de règlement du Conseil relatif à la mise en oeuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 et 82 du traité et modifiant les règlements (CEE) no 1017/68, (CEE) no 2988/74, (CEE) no 4056/86 et (CEE) no 3975/87 (COM [2000] 582 final).

No E 1571. Proposition de décision du Conseil concernant l'approbation d'un accord sous forme d'échange de lettres entre la Communauté européenne et chacun des pays de l'AELE donneurs de préférences tarifaires dans le cadre du SPG (Norvège et Suisse), prévoyant que les marchandises originaires de Norvège ou de Suisse seront traitées à leur arrivée sur le territoire douanier de la C ommunauté européenne comme des marchandises incorporant un élément d'origine communautaire (accord réciproque) (COM [2000] 590 final).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 19 OCTOBRE 2000

ANNEXES AU PROCÈS-VERBAL de la 3e séance du jeudi 19 octobre 2000 SCRUTIN (no 259) sur l'amendement no 206 de M. Dray après l'article 4 du projet de loi de finances pour 2001 (institution d'une taxe sur les mouvements de capitaux spéculatifs dite « taxe Tobin ») Nombre de votants .....................................

63 Nombre de suffrages exprimés ....................

61 Majorité absolue ..........................................

31 Pour l'adoption ...................

22 Contre ..................................

39 L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN Groupe socialiste (254) : Pour : 15. - MM. Stéphane Alaize , Jean-Marie Aubron , Jacky Darne , Yves Dauge , Jean Delobel , François Deluga , Julien Dray , Philippe Duron , Henri Emmanuelli , Yann Galut , Gilbert Mitterrand , Yvon Montané , Alain Néri , Mmes Geneviève Perrin-Gaillard et Christiane Taubira-Delannon.

Contre : 25 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Non-votants : MM. Raymond Forni (président de l'Assemblée nationale) et François Patriat (membre du Gouvernement).

Groupe R.P.R. (138) : Contre : 7 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Abstentions : 2. - Mme Martine Aurillac et M. Michel Bouvard

Non-votant : Mme Nicole Catala (président de séance).

Groupe U.D.F. (70) : Contre : 6 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe Démocratie libérale et Indépendants (44) : Contre : 1 membre du groupe, présent ou ayant délégué son droit de vote.

Groupe communiste (35) : Pour : 5 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe Radical, Citoyen et Vert (29) : Pour : 2 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Non-inscrits (5).

SCRUTIN (no 260) sur l'amendement no 317 de M. Carrez à l'article 5 du projet de loi de finances pour 2001 (possibilité donnée aux conseils génér aux d'exonérer de la vignette l'ensemble des véhicules).

Nombre de votants .....................................

49 Nombre de suffrages exprimés ....................

49 Majorité absolue ..........................................

25 Pour l'adoption ...................

16 Contre ..................................

33 L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN Groupe socialiste (254) : Contre : 30 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Non-votants : MM. Raymond Forni (président de l'Assemblée nationale) et François Patriat (membre du Gouvernement).

Groupe R.P.R. (138) : Pour : 10 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Non-votant : Mme Nicole Catala (président de séance).

Groupe U.D.F. (70) : Pour : 6 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe Démocratie libérale et Indépendants (44).

Groupe communiste (35) : Contre : 2 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe Radical, Citoyen et Vert (29) : Contre : 1 membre du groupe, présent ou ayant délégué son droit de vote.

Non-inscrits (5).