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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 NOVEMBRE 2000

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. PATRICK OLLIER

1. Loi de finances pour 2001 (deuxième partie). - Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 7927).

ENVIRONNEMENT M. Michel Suchod, rapporteur spécial de la commission des finances.

M. Stéphane Alaize, rapporteur pour avis de la commission de la production.

MM. Jacques Pélissard, Bernard Deflesselles, Mme Annette Peulvast-Bergeal,

MM. Claude Gaillard, Claude Billard, Patrice Martin-Lalande, Jean-Pierre Blazy, Jean-Pierre Brard, Daniel Marcovitch.

Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

R éponses de Mme la ministre aux questions de : MM. Robert Galley, Yves Cochet, Mme Nicole Bricq,

M. Robert Gaïa, Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

PRÉSIDENCE DE M. CLAUDE GAILLARD

Réponses (suite) de Mme la ministre aux questions de :

M. Francis Hillmeyer, Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ET ENVIRONNEMENT

II. Environnement

Etat B

Titre III (p. 7958)

Amendement no 105 du Gouvernement : Mme la ministre,

M. le rapporteur spécial. Adoption.

Adoption du titre III modifié.

Titre IV (p. 7958)

Amendement no 104 de M. Galley : MM. Robert Galley, le rapporteur spécial, Mme la ministre. Rejet.

Adoption du titre IV.

Etat C

Titre V. Adoption (p. 7958)

Titre VI (p. 7958)

Amendement no 106 du Gouvernement : Mme la ministre,

M. le rapporteur spécial. Adoption.

Adoption du titre VI modifié.

Renvoi de la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances à la prochaine séance.

2. Ordre du jour des prochaines séances (p. 7960).


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COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. PATRICK OLLIER,

vice-président

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1 LOI DE FINANCES POUR 2001

DEUXIÈME PARTIE Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2001 (nos 2585, 2624).

ENVIRONNEMENT

M. le président.

Nous abordons l'examen des crédits du ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement, concernant l'environnement.

La parole est à M. Michel Suchod, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du plan.

M. Michel Suchod, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du plan.

Monsieur le président, madame la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, mes chers collègues, c'est la quatrième fois, au cours de cette législature, que nous examinons le budget de l'environnement. Autant dire que nous pouvons déjà nous essayer à un premier bilan.

Votre action, madame la ministre, se caractérise par une indéniable opiniâtreté. Vous n'avez eu de cesse de vouloir renforcer les moyens humains de votre ministère, afin qu'il soit en mesure d'assumer ses missions. Votre ténacité a été récompensée puisqu'il verra en 2001 ses effectifs augmenter une nouvelle fois, avec la création de 103 emplois budgétaires au bénéfice de l'administration centrale et de 165 emplois au sein des directions régionales de l'environnement.

Le ministère contribue également très activement aux actions sur les emplois-jeunes, et je l'en félicite. Seule petite fausse note, à mon sens, l'insignifiante augmentation des effectifs des inspecteurs des installations classées, avec cinq créations d'emplois seulement, alors qu'on connaît le besoin dans l'ensemble du pays.

Certes, les tenants du libéralisme critiqueront le coût de ces mesures, une cinquantaine de millions de francs, et y verront l'interventionnisme croissant de l'Etat. J'y vois, pour ma part, plutôt l'affirmation que votre ministère doit être désormais un ministère de plein exercice. Et s'il est un domaine où l'Etat doit poser sa marque, affirmer son autorité et donner des repères, c'est bien celui de l'environnement. Faut-il rappeler les événements de ces derniers mois qui justifient parfaitement un effort dans ce sens : les tempêtes de décembre qui ont décimé 15 % de nos forêts - je suis bien placé pour en parler, élu du département de la Dordogne tellement sinistré que le Premier ministre est venu lui-même se rendre compte sur p lace de la situation dans ce département où 40 000 foyers sont restés sans électricité pendant vingt jours - la marée noire de l' Erika , mais aussi les pollutions de l'eau douce par les nitrates, les pics de pollution de l'air dans nos agglomérations, etc.

Nous arrivons à une situation où des actes simples et naturels, comme respirer ou boire de l'eau, deviennent presque un luxe. La plupart des solutions ne dépendent pas, bien sûr, madame la ministre, de votre seul ministère. Vos collègues des transports, de l'agriculture, des finances ou de la santé ont leur rôle à jouer, mais il vous appartient de mettre en place les politiques de prévention, d'organiser rationnellement la gestion des ressources naturelles et d'inspecter les établissements qui peuvent présenter un danger pour l'environnement. A cet égard, nous regrettons la faiblesse des effectifs en inspecteurs des établissements classés. J'espère que la navette parlementaire sera l'occasion d'une révision à la hausse de vos crédits en ce domaine.

Avec 4,69 milliards en crédits de paiement, la dotation de votre ministère augmente de 10,2 %. Les autorisations de programme sont stabilisées à 2,99 milliards de francs.

Bien sûr, l'augmentation globale des crédits résulte partiellement d'un effet d'optique puisqu'elle provient de l'intégration, au sein de votre département, du budget de l'Institut de protection et de sûreté nucléaire. A périmètre constant, votre budget est plutôt en diminution, même si les agrégats qui composent le coeur de votre politique, à savoir la protection de la nature ou la préservation de l'eau, progressent d'environ 11 %. En résumé, vous présentez un bon budget, dont le sens est moins le montant des crédits que la continuité d'une politique qui a su déterminer des priorités.

Un bon budget ne peut néanmoins masquer les préoccupations et interrogations qui émaillent la politique de l'environnement, et dont vous avez sans doute eu quelques échos en prenant connaissance des travaux de notre commission des finances.

En premier lieu, celle-ci a approuvé le financement du fonds de gestion des espaces naturels mais s'est rappelée que ce fonds était chargé de la mise en oeuvre du programme communautaire Natura 2000. Mes collègues de la commission ont vivement souhaité que la directive européenne soit transcrite en droit français par la loi, et non par décret. Ils veulent en débattre car ils considèrent que c'est un véritable enjeu politique qui met à nouveau en pleine lumière la manière dont nous concevons et g érons l'espace rural. Toute proportion gardée, Natura 2000 comporte la même problématique que la loi sur la chasse. Il s'agit de concilier la protection de la


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nature et l'exploitation de celle-ci sur un même territoire.

Le sujet est suffisamment polémique pour que le débat se déroule dans cette enceinte, là où toutes les sensibilités s'expriment.

M. Jacques Pélissard.

Très bien !

M. Michel Suchod, rapporteur spécial.

Il serait dommage qu'il soit mené ailleurs, en catimini, et que les parlementaires soient obligés d'en traiter au niveau de la presse, comme trop souvent.

Autre préoccupation : la diminution des crédits consacrés au Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres. Cette diminution n'est pas logique au regard de la pression foncière que subissent les espaces côtiers. Il s'agit de milieux écologiques fragiles dont la protection ne peut être assurée que par une politique plus vigoureuse. Il en est de même pour la lutte contre la taxifolia, cette algue tueuse qui anémie la faune sous-marine. Le silence de l'Etat sur cette question est plus que préoccupant, au point que je me demande s'il ne cherche pas à protéger des relations diplomatiques avec Monaco ou à ménager certains membres de l'université qui n'ont de cesse de minimiser le problème. Le temps n'est plus à l'étude mais à l'action. La taxifolia a tué les fonds marins des AlpesMaritimes et elle s'approche dangereusement du parc naturel de Port-Cros. Même si cela semble un travail de très longue haleine, il faut s'atteler à l'arrachage systématique de cette algue. En tout cas, il convient de donner au Conservatoire de l'espace littoral les moyens qui s'imposent.

J'en viens à des questions d'ordre financier. Lors de la discussion de la première partie du projet de loi de finances, l'attention de notre assemblée a été attirée par les recettes et le montant de la trésorerie du Fonds national de solidarité pour l'eau. Les recettes du Fonds ont vocation à rééquilibrer les moyens entre les six agences de bassin. Mais le poids des dotations au fonds de roulement a doublé entre 1995 et 1997, ce qui n'est pas de votre fait, pour atteindre 1,3 milliard de francs, soit 11 % des recettes annuelles. Le fonds de roulement a encore augmenté de 664 millions en 1998, au point que nous devons nous interroger sur l'aisance financière des agences qui, en tant qu'établissements publics, n'ont pas stricto sensu vocation à faire des bénéfices aussi considérables.

Or, les agences prennent prétexte du prélèvement de solidarité pour diminuer leurs aides aux programmes mis en oeuvre par les collectivités locales. Que le Gouvernement n'oublie pas que la politique de l'environnement est conduite à 60 % par les communes et les départements, et qu'à ce titre les diminutions de dotations affectent directement la vie de nos concitoyens. Il y a quelque urgence à se pencher sur le problème. Il faudrait que vous indiquiez au Parlement vers quelles solutions vous vous orientez.

L'autre urgence concerne l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, autrement dit l'ADEME. Je suis tenté, je dois l'avouer, pour l'année qui me reste, de faire cette fameuse inspection sur pièces et sur place tants ouhaitée par notre rapporteur général, M. Didier Migaud. L'ensemble de mes collègues de la commission des finances se sont livrés à un constat sévère de la gestion de cette agence, et leur analyse rejoint la mienne.

Faut-il également rappeler que l'inspection des finances, à l'issue de sont audit sur l'ADEME, a conclu à la nécessité d'une refonte totale des procédures de gestion et de contrôle de cet établissement ?

Mme Nicole Bricq.

Il serait temps !

M. Michel Suchod, rapporteur spécial.

Nous sommes en effet arrivés à une situation irrationnelle : l'agence bénéficie, en effet, de plus de crédits qu'elle n'en a jamais eu : 1,95 milliard de francs sont ainsi inscrits en autorisations de programme pour 2001.

M. Jean-Pierre Blazy.

Mais cette agence est quand même indispensable !

M. Michel Suchod, rapporteur spécial.

Mais les crédits d e paiement s'effondrent, passant de 1,71 milliard en 2000 à 491 millions de francs pour 2001. L'ADEME a en effet bénéficié, dans le cadre de la réforme de la fiscalité sur l'environnement, de deux dotations de l'Etat de 500 millions en 1999 et en 2000, sans être en mesure de pouvoir les consommer.

D'où une gestion que je qualifierai de gestion en accordéon, puisque nous sommes obligés sur un exercice de pratiquer de fortes hausses allant jusqu'à 1,95 milliard de francs, et l'année suivante, de redescendre à 491 millions en crédits de paiement. C'est inacceptable.

A la décharge de l'ADEME, je rappellerai à notre assemblée que nous lui avons conféré un statut d'établissement public industriel et commercial, alors que 95 % de ses ressources proviennent désormais de dotations budgétaires. La contradiction est trop nette pour que l'ADEME puisse être gérée selon un mode orthodoxe, d'autant qu'il lui a incombé de mettre en oeuvre très rapidement de nouvelles missions, en 1997 et 1998, et de faire également face à un afflux de demandes en 1999, compte tenu du fait que son conseil d'administration avait cessé d'exister dans les deux années précédentes, et d'intervenir, à partir de 1999, dans la lutte contre le bruit. Cela n'excuse pas pour autant les lacunes dans la conduite des projets, l'absence de contrôle interne, le manque de sécurité dans la passation des marchés. L'audit de l'inspection des finances n'a pas révélé de malhonnêteté.

Mme Nicole Bricq.

Quand même pas !

M. Michel Suchod, rapporteur spécial.

Mais il a mis en lumière suffisamment de dysfonctionnements et je pense que le ministre de tutelle - que vous êtes madame la ministre - doit mettre en oeuvre rapidement une réforme des procédures d'instruction et de décision de l'ADEME.

A ce jour, seules quatre personnes à mi-temps assurent l'audit interne de l'agence, qui plus est toutes quatre en préretraite. Je n'ai rien contre les préretraités, ils ont certainement du temps, mais cela donne quand même une idée de l'absence d'actions dans ce domaine. La définition d'outils de gestion, mais aussi le recrutement de collaborateurs supplémentaires sont autant de pistes, à la condition cependant que l'Etat formalise avec plus de netteté les missions qu'il attend de l'agence.

Mme Nicole Bricq.

Voilà un rapporteur qui fait bien son travail !

M. Michel Suchod, rapporteur spécial.

Je remercie

Mme Bricq de ce jugement si favorable.

M. Jean-Pierre Brard.

Et si rarement formulé !

M. Michel Suchod, rapporteur spécial.

... d'autant qu'elle est, chacun le sait, habituellement assez sévère.

Dernier point de mon intervention, l'approfondissement de la fiscalité écologique. En instituant la TGAP à partir du 1er janvier 1999, le législateur avait très vite souhaité l'élargissement de son assiette, ce qui fut chose faite dès 2000 lorsqu'on a inclu dans son champ les produits détergents ainsi que les installations classées. Le rende-


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m ent de la taxe est supérieur aux prévisions. La seule TGAP applicable aux eaux a ainsi déjà généré, sur les six premiers mois de l'année 2000, 640 millions de francs, à comparer à une prévision initiale de 550 millions sur une année, c'est-à-dire 220 % de ce qui était prévu.

L'extension, dans les jours à venir, de la taxe aux consommations intermédiaires d'énergie va dans le bon sens, d'autant qu'elle s'inscrit dans une politique à l'échelle communautaire. Il nous reviendra d'en définir avec précision le champ d'application pour concilier les impératifs de l'écologie avec l'efficacité économique.

Madame la ministre, en résumé, vous présentez un budget qui réaffirme les priorités essentielles d'une vraie politique de l'environnement, malgré les difficultés que j'ai évoquées. Pour cette raison, la commission des f inances a approuvé les crédits de l'environnement pour 2001 et invite l'Assemblée à faire de même.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. Stéphane Alaize, rapporteur pour avis de la commission de la production et des échanges.

M. Stéphane Alaize, rapporteur pour avis de la commission de la production et des échanges.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi de finances pour 2001 est marqué par une nouvelle croissance des crédits affectés au budget de l'environnement. Ces derniers passent en effet de 4,303 à 4,691 milliards de francs en 2001. On ne peut, bien évidemment, que se féliciter de cette progression, qui démontre, au premier coup d'oeil, que le ministère chargé de l'environnement dispose de moyens satisfaisants pour mener ses politiques. Et encore, n'apparaissent pas là les 500 millions de francs du Fonds national de solidarité pour l'eau, qui portent le budget à 5,2 milliards de francs.

Il est nécessaire de souligner, cependant, que cette forte croissance du budget de l'environnement s'accompagne d'une extension du champ d'action du ministère, puisque l'IPSN, l'Institut de protection et de sécurité nucléaire, jusqu'alors pris en charge par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, serait désormais placé sous la cotutelle du ministère chargé de l'environnement, sans que l'utilité et la finalité de cette cotutelle ne soient vraiment démontrées.

Cette extension des compétences du ministère s'accompagne, par ailleurs, d'un renforcement de ses structures internes qui fait suite à l'instauration progressive d'une fiscalité écologique avec la TGAP, amorcée les années précédentes. On constate ainsi la montée en puissance de la nouvelle direction des études économiques et de l'évaluation environnementale, destinée à devenir un instrument d'expertise et d'aide à la décision en matière économique et environnementale, et la création ex nihilo de trois nouvelles structures : le service d'inspection générale de l'environnement, l'institut de formation de l'environnement et l'Agence française de sécurité sanitaire environnementale, d'origine parlementaire.

Comme je l'ai signalé dans mon rapport, reprenant certaines interrogations manifestées en commission, des précisions sur la nature des emplois créés, les modalités de recrutement et d'installation de ces nouveaux personnels s'imposent, même s'il ne doit échapper à personne que la dissémination ministérielle actuelle de vos agents nuit à l'efficacité de votre action.

La question de la coordination des activités de ces nouveaux services avec les structures déjà existantes doit aussi être posée.

Sur cette question de l'emploi, on notera avec satisfaction le rythme tout à fait respectable de création d'emplois-jeunes dans le domaine de l'environnement, puisque 20 462 jeunes étaient embauchés à travers ce dispositif au 30 juin 2000.

S'agissant des crédits affectés au « noyau dur » des polit iques environnementales, ils augmentent eux aussi, puisque le budget de l'environnement, hors IPSN et hors ADEME, progresse de 11,13 % en « dépenses ordinaires plus crédits de paiement ». Cette appréciation mérite cependant d'être nuancée selon les agrégats.

En ce qui concerne l'agrégat 21 - protection de la nature, sites et paysages - qui perd 4,3 % de ses crédits, on notera avec circonspection l'importante baisse de crédits sur certains postes - Fonds de gestion des milieux naturels, réserves naturelles, sites et paysages -, alors que les dotations à d'autres structures augmentent sensiblement - parcs nationaux, conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres, parcs naturels régionaux -, voire énormément - Museum national d'histoire naturelle, conservatoires botaniques nationaux, école du paysage.

Il est regrettable que les moyens destinés à constituer le réseau Natura 2000 diminuent dans le projet de loi de finances pour 2001, et l'on peut légitimement se demander quelle est la stratégie de moyen terme menée sur ce point.

En outre, le recours à la procédure des ordonnances pour la transposition de la directive « habitats » en droit interne - et je rejoins là l'avis de mon collègue Michel Suchod - ne va pas dans le sens de la clarification et de la transparence sur ce dossier pourtant très sensible. Cette situation doit donc être revue sous peine de s'aggraver et d'entraîner une incompréhension durable entre, d'une part, les citoyens, notamment ruraux, qui sont exclusivement concernés par le dispositif Natura 2000 et, d'autre part, la Commission, dont les intentions, certes louables, sont parfois opaques en la matière.

Quant aux crédits consacrés aux réserves naturelles et au conservatoire, ils suscitent des inquiétudes, mais votre amendement, madame la ministre, s'agissant notamment du conservatoire, devrait satisfaire les attentes des personnels.

Sur l'agrégat 22 - Protection de l'eau et des milieux aquatiques -, qui progresse de 5,4 %, il n'appelle que des remarques positives, mais nous aurons à débattre à nouveau de ce sujet dans le cadre de la réforme en profondeur de la politique de l'eau, devenue priorité du Gouvernement depuis trois ans, chiffres à l'appui.

Mais, actualité oblige, la lutte contre les pollutions marines accidentelles, fortement relancée avec le naufrage de l' Erika, revient au centre des préoccupations avec celui du Ievoli Sun. Plutôt que de tergiversations et de discussions à tout va dans la presse, c'est d'actions que la mer a besoin, pour ne plus être seulement tributaire des mesures de réparation qui arrivent évidemment trop tard, du fait des hésitations de nos partenaires européens.

Saluons tous ici le travail conduit par le Gouvernement, qui doit enfin déboucher à Bruxelles, peut-être en reprenant la proposition de notre collègue Cazeneuve de créer un Institut européen de la mer.

Une dernière remarque à ce sujet : j'ai beaucoup entendu, ces derniers jours, l'ancienne majorité, aujourd'hui opposition, s'exprimer sur ces questions. J'ai surtout noté les cris d'orfraie de l'ancienne ministre de l'envi-


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ronnement. A l'écouter, j'ai l'impression d'entendre Shéhérazade nous raconter les aventures d'Ali Baba en milieu marin.

M. Bernard Deflesselles.

Que c'est beau !

M. Stéphane Alaize, rapporteur pour avis.

C'est peutêtre pour cette raison que je trouve salées les critiques d'une ancienne haute responsable politique à l'égard de son successeur, n'observant pas en la circonstance la plus élémentaire distance entre son ancienne fonction de ministre de l'Etat et son actuelle fonction d'avocate spécialisée en écologie. Mais plutôt que « Sésame, ouvretoi », on croit entendre « Océans du monde, enrichissezmoi ».

Mme Nicole Bricq.

Bien vu !

M. Stéphane Alaize, rapporteur pour avis.

Les crédits consacrés à l'agrégat 23 - Prévention des pollutions et des risques - augmentent de 7,8 %. Un objectif de 5 000 p lans de prévention des risques naturels prévisibles - PPR - a été défini pour 2005. Au 1er août 2000, on en comptait 2 344, auxquels il convient d'ajouter 1 948 plans de surfaces submersibles qui valent PPR. Par ailleurs, 2 368 PPR ont été prescrits, qui n'ont pas encore fait l'objet d'une approbation à ce jour, mais ça ne saurait tarder. Nous pouvons donc être raisonnablement optimistes quant à la réalisation des objectifs fixés pour 2005, ce qui est un point tout à fait positif.

En ce qui concerne la prévention des risques technologiques, il est prévu la création de cinquante postes dans les DRIRE, les directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement, et de cinq emplois pour l'inspection des installations classées agricoles et agroalimentaires, ce qui est le gage d'une plus grande vigilance en la matière. Ainsi, c'est plus de 3 000 sites industriels pollués qui devraient, à terme, faire l'objet d'un traitement, ce qui constitue une avancée sensible.

S'agissant de la pollution de l'air, on ne peut que regretter l'absence de lancement d'un plan national de lutte contre l'effet de serre, pourtant souhaité par le Premier ministre à Lyon dans la perspective de la conférence de La Haye. De même, on peut trouver surprenant le silence réservé par le ministère au rapport Cochet. Il convient tout de même de faire observer que sur soixante-seize plans de déplacements urbains prévus, dix sont aujourd'hui approuvés, tandis qu'une quarantaine sont en phase de concertation ou d'approbation.

Pour ce qui est du dispositif national de surveillance de la qualité de l'air, constitué actuellement de trente-neuf associations agréées, il est désormais tout à fait opération nel grâce au niveau d'équipement matériel atteint : 520 millions de francs ont été consacrés à ce type d'investissement en près de cinq années.

En ce qui concerne la lutte contre le bruit, les dépenses ordinaires augmentent de 5,5 %, tandis que celles d'investissement progressent de 32 %, grâce à une explosion des subventions d'investissement consacrées à la résorption des « points noirs » et à l'aide aux collectivités locales pour engager la même démarche. Toutes les sources de nuisances sont concernées : rail, transport aérien, route, a vec respectivement 100 millions, 100 millions et 150 millions de francs. Là encore, la satisfaction est de mise.

L'agrégat 31 - Soutien aux politiques environnementales - augmente de 22,8 %. C'est certainement ici qu'apparaît le mieux la croissance opérationnelle du ministère.

La création de la nouvelle agence sur la sécurité s'accompagne d'une enveloppe permettant son démarrage dès 2001. La volonté d'expertise et d'évaluation est, au travers de la DGE, correctement servie. On sent bien là se dessiner un nouveau souffle pour le ministère.

On regrettera cependant le décalage entre les créations d'emplois prévues dans l'administration centrale et celles prévues dans les services déconcentrés, ce qui risque de créer une dichotomie de fonctionnement : une action théorique riche et générale, mais une action pratique freinée par un manque de moyens humains. Il ne faudrait pas que cette situation conduise insidieusement à laisser aux associations spécialisées le soin d'orienter les politiques environnementales du terrain, fragilisant ainsi l'action des services de l'Etat compétents.

Ainsi que nous venons de le voir, l'évolution globale des moyens affectés aux politiques environnementales est bien le signe de la prise en compte du ministère de l'environnement comme ministère de plein exercice, muni de moyens techniques et humains correspondants.

Il reste à espérer que ces efforts permettront de construire un véritable service public de l'environnement, le niveau désormais atteint par les dotations budgétaires offrant enfin les moyens financiers sollicités depuis des années pour satisfaire les attentes citoyennes.

Pour autant, il existe de légitimes interrogations quant aux capacités concrètes d'action du ministère pour satisfaire au mieux les attentes citoyennes. En effet, au-delà du nombre élevé des créations d'emplois, emplois qui viennent d'abord servir l'administration centrale, c'est la situation de l'ADEME elle-même qui inquiète.

Véritable bras armé du ministère, l'agence semble traverser une crise d'autant plus inquiétante que les besoins en matière de gestion des déchets et de maîtrise de l'énergie sont colossaux. Or c'est précisément ce moment qui est choisi pour réduire les crédits attribués à l'ADEME pour le secteur des déchets - moins 75,35 % en crédits de paiement, moins 16 % en autorisations de programme -, et ce après une sous-consommation des crédits attribués en 2000 et une révision à la baisse du barème des aides octroyées par l'agence.

Quant aux moyens consacrés à la maîtrise de l'énergie, ils chutent de 80,6 % en crédits de paiement et sont maintenus à 293 millions de francs en autorisations de programme.

Visiblement l'ADEME n'arrive plus à assurer correctement ses missions, alors qu'elle n'a jamais disposé de tels moyens pour le faire.

C ette remarque est d'autant plus légitime que l'INERIS, autre bras armé du ministère, a su, lui, se sortir avec succès d'une réorganisation entamée après celle de l'ADEME.

Il apparaît donc absolument nécessaire de clarifier la situation de l'ADEME, l'utilité de cette agence étant indéniable ; une commission d'enquête pourrait peut-être aider à y voir plus clair.

Cette nécessité est confortée par le décalage de croissance qui s'installe peu à peu entre les moyens de l'administration centrale et ceux de l'administration déconcentrée, décalage que le soutien important aux associations ne saurait corriger. Si nous n'y prenons pas garde, nous risquons d'avoir un ministère à la tête bien pleine, mais sans bras ni jambes appropriés à ce remarquable cerveau.

De toute évidence, le ministère de l'environnement c ontinue de croître, ainsi qu'en témoignent les 700 emplois créés en quatre exercices budgétaires, dont 300 en 2001, et les 880 emplois créés dans les établisse-


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ments publics. Cela lui permet d'élargir son champ d'action et son ancrage institutionnel. Toutefois, force est de constater la relative fragilité de cette croissance, laquelle devra faire la preuve de sa pertinence dans le temps. Car c'est bien sur les nouveaux champs d'action du ministère que portent les interrogations, le noyau dur de ses polit iques traditionnelles, hormis celle conduite par l'ADEME, s'accomplissant de manière convaincante.

La nouvelle étape qui s'ouvre devant lui cette année devra donc être abordée avec pragmatisme et méthode, faute de quoi c'est la capacité même du ministère à assimiler cette croissance qui se trouvera compromise et, avec elle, sa crédibilité.

Face à une telle situation, j'ai pensé à Pygmalion. Vous êtes, madame la ministre, un peu tel Pygmalion devant sa créature. A vous de ne pas vous faire le démiurge d'un colosse au pied d'argile, car la bienveillance de nos assemblée pour l'environnement - aussi lucide que celle d'Aphrodite envers Pygmalion - ne doit pas vous éloigner de l'essentiel : utiliser avec raison votre passion pour l'écologie.

Vous le savez : qui aime bien, châtie bien. C'est pour cette seule raison que mes critiques sont vives. Mais, pour le moment, au vu des progrès historiques que vous avez su faire accomplir aux politiques environnementales, donnant ainsi une dimension concrète à l'écologie, vous ne pouvez que garder notre confiance, qui se double cependant d'un accroissement de notre vigilance proportionnel à celui des moyens qui vous sont accordés. Et si je dis

« nous », c'est parce que je suis persuadé que nos collègues de l'opposition, soucieux eux aussi d'écologie, sauront apprécier ce saut qualitatif et quantitatif que vous nous proposez, n'ayant pas pu l'obtenir des gouvernants précédents.

Ces précisions apportées, et compte tenu des attentes citoyennes que votre action entend globablement servir avec des moyens appropriés, j'émets donc un avis favorable à l'adoption des crédits de votre ministère, comme l'a souhaité la commission de la production et des échanges.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. Jacques Pélissard, premier orateur inscrit.

M. Jacques Pélissard.

Madame la ministre, nous sommes peu nombreux à être présents dans cet hémicycle, mais tous les députés qui sont là sont, quels que soient les bancs sur lesquels ils siègent, des fervents défenseurs de la cause de l'environnement, cet environnement qui a été mis à mal ces derniers temps, avec le réchauffement climatique, les atteintes à la sécurité alimentaire et la pollution maritime, toutes questions qui doivent être réglées non seulement sur le plan français, mais aussi sur les plans européen et mondial.

Mon propos sur votre budget sera articulé en trois parties.

La première partie concernera le budget lui-même.

Votre budget est en diminution, les rapporteurs l'ont d'ailleurs souligné. Le 22 octobre 1998, vous nous disiez ici même : « La qualité d'un budget ne se mesure pas à la seule aune de sa progression. » C'est dire que vous aviez

une vision prémonitoire et réaliste de l'avenir.

Alors que les crédits du budget de l'environnement progressaient de 14,8 % dans la loi de finances de 1999 et de 8,6 % dans celle de 2000, l'évolution du présent budget est, à périmètre constant et hors IPSN, négative.

C'est ce qu'écrit M. Alaize à la page 64 de son rapport.

Seul l'IPSN, avec une masse représentant 28,5 % du budget total de l'environnement, donne l'illusion - et l'illusion seulement - d'une augmentation.

Toutefois, certains aspects positifs méritent d'être soulignés, qu'il s'agisse du renforcement de la Direction des études économiques de l'évaluation environnementale - la fameuse D4E créée l'année dernière - avec une augmentation du titre III et du titre V, ou qu'il s'agisse de l'accent mis sur l'évaluation en matière de politique environnementale ou sur l'expertise.

En revanche, vous « consolidez » - le terme revient pour la troisième année consécutive sous la plume de notre collègue Suchod - l'administration centrale, les moyens déconcentrés restant, selon le rapporteur pour avis, insuffisants. Certes, il est prévu cent trente emplois supplémentaires dans les DIREN - directions régionales de l'environnement -, mais l'effort en la matière reste trop modeste. C'est encore M. Alaize qui le dit.

Bref, malgré l'articulation des nouveaux fonds de l'IPSN, votre budget est en diminution, madame la ministre.

J'en viens à la deuxième partie de mon propos. La faiblesse de votre budget révèle en vérité des dysfonctionnements dans les politiques conduites. Pour illustrer mon propos, je prendrai deux exemples : la politique conduite en matière de déchets ; et la mise en oeuvre du réseau Natura 2000 et le rôle du FGMN, le fonds de gestion des milieux naturels.

En ce qui concerne la politique des déchets, le discours officiel consiste à dire que l'échéance 2002 sera respectée.

Pour ce faire, les collectivités locales ont, sous l'égide de l'Association des maires de France, négocié avec des organismes agréés - avec Eco-Emballages, avec ADELPHE une augmentation forte du barème Eco-Emballages au profit des collectivités locales, avec un effet rétroactif au 1er janvier 1998. C'était un premier signe positif fort en direction des collectivités locales.

Deuxième signe fort, la baisse de TVA à 5,5 % sur les collectes sélectives, et vous en avez été, madame la ministre, l'avocate efficace. J'ai l'honnêteté et le plaisir de vous rendre cet hommage, car c'est à votre action que nous devons cette mesure.

En revanche, le troisième signe a été, si je puis dire, un

« contre-message » adressé aux collectivités locales : je veux parler de la forte diminution des subventions versées par l'ADEME. Souvenons-nous que, en janvier 1999, l'ensemble des dossiers a été gelé, puis que, à partir du conseil d'administration de mai 1999, les subventions ont diminué, le taux passant, par exemple, de 50 % à 20 % pour les installations de collecte, de tri ou pour les compostières. Pour justifier cette baisse, on nous a dit à l'époque que l'ADEME était exsangue, qu'elle ne parviendrait plus à financer dans les mêmes proportions. Le

« contre-message » adressé aux collectivités locales a été, hélas, très bien perçu par les syndicats de communes et par les communes, qui ont annoncé l'abandon ou le report de leur investissements, parfois même alors qu'elles avaient déjà délibéré sur ceux-ci. C'est ce qui explique la t résorerie pléthorique de l'ADEME, qui s'élève à 2,15 milliards de francs.

A mon sens, cette malencontreuse baisse des taux, qui a donc induit des décisions d'abandon ou de report de projets d'installation de traitement des ordures ménagères, de la part des collectivités locales remet en cause l'objectif 2002. M. Suchod, à la page 33 de son rapport, n'hésite par à évoquer l'« irrationnelle exécution » des crédits de l'ADEME. Je ne serai pas aussi sévère que lui, mais


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j'estime que la gestion des fonds de l'ADEME a été, c'est le moins qu'on puisse dire, erratique et s'est faite au détriment de la gestion efficace et pérenne des déchets ménagers.

S'agissant de la politique des déchets extérieurs au secteur des emballages, plusieurs dossiers sont en panne.

Nous attendons depuis deux ans le décret sur les pneumatiques usagés. Nous attendons toujours une réglementation sur les COUNA, les fameux courriers non adressés, sur les publicités et sur les gratuits qui inondent nos boîtes aux lettres et qui représentent 50 kilogrammes par ménage en zone urbaine. S'agissant de ce problème, les collectivités locales attendent toujours la mise en place d'une réglementation ; pour le moment, elles traitent ces déchets sans aucune aide financière.

Nous attendons également la création de l'observatoire sur les coûts des traitements des déchets ménagers, conformément à l'annonce que vous aviez faite lors de v otre communication en conseil des ministres, en août 1998.

Nous attendons toujours des actions et des financements en matière de valorisation biologique. Vous avez affiché, comme l'ADEME, la valorisation biologique comme une des priorités pour les années à venir. Au-delà de l'affichage, il n'y a, pour le moment, ni action ni financement.

Nous attendons encore des actions et des financements s'agissant des déchets inertes des artisans du bâtiment.

Une circulaire du 15 février 2000 adressée aux préfets leur donne mission, et c'est une bonne chose, de dresser le schéma au niveau départemental des lieux d'accueil des déchets des artisans du bâtiment, les fameuses décharges de classe 3. Mais, aujourd'hui, dans un département que nous connaissons bien l'un est l'autre, madame la ministre, il n'existe aucune possibilité de financement réel de tels sites par l'ADEME ! Nous attendons, enfin, au-delà du collectif pour 2000, que soit réglée la situation difficile née de la loi du 12 juillet 1999, dite loi Chevènement, qui impose à une communauté de communes ou à un syndicat intercommunal la mise en place généralisée et obligatoire soit de la taxe soit de la redevance d'enlèvement dès lors qu'ils assurent la collecte des ordures ménagères. Cette règle générale et impersonnelle nuit à la capacité de décision financière de chaque commune, elle constitue un véritable carcan qui entrave les possibilités d'adaptation de chaque conseil municipal, qu'il s'agisse du choix des modalités de la redevance ou du choix de la taxe.

A utre exemple, la mise en place du réseau Natura 2000. Le 22 octobre 1998, dans ce même hémicycle, vous évoquiez « la relance d'une concertation large et loyale qui a permis - s'agissant de Natura 2000 - de faire retomber la tension ». Il est vrai que vous avez mis en place un Comité national de suivi réunissant des agriculteurs, des chasseurs, des représentants du monde de l'environnement, du monde associatif et des collectivités locales, et que ce comité a bien fonctionné jusqu'en octobre 1999, date avant laquelle lui ont été présentées différentes moutures du projet de loi sur la transposition en droit français de Natura 2000. Or, depuis octobre 1999, il ne s'est plus rien passé, et le Comité national de suivi est en sommeil. En outre, on nous annonce aujourd'hui que la transposition se fera finalement par voie d'ordonnances.

Madame la ministre, nous ne sommes pas d'accord. Le 24 octobre dernier en commission des finances, JeanLouis Idiart et Augustin Bonrepaux ont souhaité que la directive Natura 2000 soit transcrite en droit français par le biais de la loi afin qu'il y ait un débat sur ce sujet au Parlement. Après le manque de concertation initiale auquel il a été remédié, ne soyez pas complice, madame la ministre, d'une confiscation du débat. Au contraire, il faut faire en sorte que Natura 2000 fasse l'objet d'une appropriation collective.

Autre contradiction, financière celle-là, le FGMN fonds de gestion des milieux naturels - est ramené de 241 millions de francs en dépenses ordinaires et crédits de paiement en 2000 à 233 millions en 2001, soit une baisse de 3,48 %. Or le FMGN doit permettre la poursuite de la mise en oeuvre du réseau Natura 2000. Il existe donc un décalage entre la position juridique du Gouvernement, qui veut gagner du temps en recourant à une ordonnance, et sa position financière qui se caractérise par une diminution de la dotation du FMGN, fonds destiné à acc ompagner financièrement la mise en place de Natura 2000.

J'en viens à la troisième partie de mon intervention.

J'ai le sentiment, madame la ministre, que l'environnement sert, en vérité, à « habiller » l'aggravation de la pression fiscale. Ainsi, vous revêtez la TGAP d'une tunique environnementale pour l'étendre à toutes les formes d'énergie, créant par là même des risques en matière de délocalisation et des distorsions de concurrence. En vérité, vous cherchez moins à condamner les comportements polluants qu'à accroître la pression fiscale, que ce soit sur l'énergie électrique, que celle-ci soit d'origine hydraulique ou nucléaire, que ce soit sur les mises en décharge, même si elles ont lieu dans le cadre de centres d'enfouissement techniques respectant votre arrêté du 9 septembre 1997, ou que ce soit sur les lessives, même si elles ne contiennent aucun phosphate. Bref, vous êtes davantage animée par une volonté de capter une richesse fiscale que par un souci de protéger l'environnement.

Compte tenu de ce contexte, le groupe du RPR ne votera pas votre budget, madame la ministre. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Bernard Deflesselles.

M. Bernard Deflesselles.

Madame la ministre, vous vous félicitez d'une augmentation de 8 % du budget de l'environnement. Vous me pardonnerez de ne pas partager votre satisfaction car, avec 4,7 milliards, les crédits de l'environnement ne représentent même pas 1 % du budget de l'Etat, lequel s'élève à 1 689 milliards, mais tout juste 0,28 %, soit l'un des quatre plus petits postes budgétaires.

En outre, l'évolution de vos crédits est en trompe-l'oeil.

Le rapporteur spécial, Michel Suchod, n'a-t-il pas parlé d'« effet d'optique » ? Leur forte augmentation est en réalité due à l'intégration du budget de l'Institut de protect ion et de sûreté nucléaire, pour un montant de 1 335 millions, qui représente près de 28 % de votre budget total.

A périmètre constant, l'évolution des crédits est donc négative.

Nous sommes bien loin, madame la ministre, de votre ambition affichée, celle de constituer un grand ministère de plein exercice. Cette ambition suscite d'ailleurs notre opposition - une opposition de fond.

Vous voulez un grand ministère qui vous permette de répondre à toutes les sollicitations.


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Nous disons oui à un ministère de mission, de médiation, d'arbitrage. Mais nous disons non à un ministère de gestion, qui veut développer les tentacules d'une administration cherchant à s'approprier, sur les administrations voisines, quelques arpents de compétences supplémentaires.

M. Yves Cochet.

Oh !

M. Bernard Deflesselles.

Nous disons non à une écologie administrée parce qu'elle s'enroule dans une spirale bureaucratique sans fin : de plus en plus de lois, de règlements, d'interdictions, d'impôts, mais de moins en moins d'implication personnelle et affective des citoyens.

Là où vous souhaitez mobiliser quelques centaines de fonctionnaires supplémentaires, nous souhaiterions mobiliser 60 millions de Français.

M. Jean-Pierre Blazy.

Démagogie !

M. Bernard Deflesselles.

Là où vous multipliez les gisements de parafiscalité, nous souhaitons que la fiscalité écologique se substitue à la fiscalité existante, et qu'elle ne s'y superpose pas.

Néanmoins, votre budget pour 2001 présente, il faut le reconnaître, quelques aspects positifs : la création de l'Institut de formation de l'environnement, la création de l'Agence française de sécurité sanitaire environnementale, adoptée à l'unanimité par les députés le 25 avril dernier, et le volet « environnement » accordé aux contrats de plan, qui passe de 1,3 milliard à 3,2 milliards pour toutes les régions françaises.

Hélas, ces quelques bonnes mesures ne suffisent pas à masquer de graves incohérences et de véritables déceptions.

Déception, d'abord, en ce qui concerne l'agrégat de la protection de la nature, des sites et des paysages, qui reste à périmètre constant alors qu'il regroupe des domaines importants comme les parcs nationaux, le conservatoire du littoral, les réserves naturelles.

Déception devant les crédits accordés à la protection de l'eau et des milieux aquatiques qui n'augmentent que de 3 % - et encore faut-il inclure les autorisations de programme qui, chacun le sait, ne sont pas nécessairement traduisibles budgétairement.

Déception, toujours, en ce qui concerne votre politique de prévention des risques naturels et des pollutions marines.

J'ai sous les yeux votre déclaration à la presse du 20 septembre 2000. Vous affirmiez alors, à propos des pollutions maritimes, que « faisant suite à la marée noire qui a touché les côtes bretonnes le fonds POLMAR bénéficiera de 2001 d'une dotation permanente de 10 millions de francs permettant une intervention rapide des services de l'Etat en cas de nouveaux sinistres ».

La dotation de 10 millions de francs - 10 petits millions de francs - accordée au fonds POLMAR à compter de 2001 sera-t-elle suffisante, madame la ministre, quand on constate les dégâts considérables causés par la catastrophe de l' Erika ? Sera-t-elle à la hauteur pour réparer les désordres écologiques engendrés par le naufrage du chimiquier italien Ievoli Sun mardi, au large des côtes françaises ? Permettez-nous d'en douter.

Dix mois après la catastrophe de l' Erika , ce nouveau naufrage montre que tout n'a pas été mis en oeuvre pour éviter que ne se reproduise un sinistre maritime aux conséquences aussi lourdes. Il est regrettable que, malgré ses dires et ses bonnes intentions affichées, je le reconnais, votre gouvernement n'ait pas suffisamment profité de la présidence française de l'Union européenne pour faire avancer un dossier auquel les Français sont très attachés, celui de l'évolution de la législation en faveur de la sécurité du transport maritime.

Déception, enfin, face à la faiblesse des crédits de paiement affectés à la lutte contre le bruit, alors que la pollution sonore constitue l'une des principales nuisances ressenties par les Français.

Quant aux incohérences de votre budget, madame la ministre, elles tiennent non seulement à son déséquilibre substantiel, provoqué par l'envolée des dépenses de fonctionnement et le recul des investissements, mais aussi à son inefficacité.

Votre budget est, en effet, déséquilibré.

Sa première caractéristique est une très forte augmentation des dépenses de fonctionnement. Le titre III

« Moyens des services » augmente de 17 %. L'augmentation est de 12 % pour ce qui concerne la rémunération du personnel et de 20 % pour ce qui concerne les allocations et indemnités diverses.

Au total, les dépenses ordinaires progresseront de 81 %, marquant s'il en était besoin une spectaculaire bureaucratisation de l'environnement.

La seconde caractéristique de votre budget est a contrario un très net recul des investissements.

Les investissements exécutés par l'Etat baissent de 14 %, ceux qui sont consacrés à la prévention des pollutions et des risques diminuant de 31 % et ceux consacrés à la protection de la nature, des sites et des paysages accusant également une faible réduction, comme l'a relevé l'un de nos rapporteurs.

D'autre part, les subventions d'investissement accordées par l'Etat connaissent aussi une très forte baisse pusqu'ils diminuent de 54 %.

Au-delà du très fort déséquilibre entre fonctionnement et investissement, d'autres déséquilibres tout aussi préoccupants affectent les politiques sectorielles.

En premier lieu, aucun effort n'a été consenti en faveur des crédits affectés à la recherche, qui stagnent par rapport à l'année dernière et dont les 81 millions ne représentent que 1,7 % du budget total de l'environnement. Certes, les autorisations de programme progressent mais chacun sait qu'elles ne seront pas nécessairement traduites budgétairement.

C'est à mon sens l'un des points les plus préoccupants de votre budget car, de ce point de vue, celui-ci ne répond pas, mais alors pas du tout, aux préoccupations exprimées par nos concitoyens. Il n'est pas à la hauteur des enjeux technologiques et scientifiques du siècle à venir ni des défis environnementaux à relever : nucléaire, déchets nucléaires, gestion de l'eau, lutte contre la pollution marine, problèmes liés aux déchets industriels et ménagers.

En deuxième lieu, nous restons très préoccupés par l'agrégat correspondant à la protection de l'eau et des milieux aquatiques. Le compte spécial du Trésor créé l'an dernier et doté de 512 millions de francs ponctionnés sur les agences de l'eau vient au secours de cette politique qui voit ses crédits stagner d'une année sur l'autre. Ce fonds spécial, qui remplace pour moitié des fonds de concours, porte atteinte au principe de l'autonomie de gestion des agences.

On ne peut donc que regretter cette ponction supplémentaire qui voit l'Etat récupérer une partie des ressources dévolues aux collectivités territoriales et aux acteurs socio-économiques qui font dans ce domaine preuve d'une réelle efficacité.


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En troisième lieu, nous sommes scandalisés - le mot n'est pas trop fort - par la baisse des crédits de l'ADEME. Déjà l'an dernier, je vous avais alerté sur les risques qu'entraînerait la budgétisation de l'ADEME, notammment en ce qui concerne son autonomie et ses crédits. Force est de constater aujourd'hui que je ne m'étais pas trompé. Cette année, les crédits inscrits au titre des subventions d'investissement chutent de 1,7 milliard à 491 millions de francs, soit une baisse vertigineuse de 71 %.

Et ce ne sont pas vos explications, que je qualifierai de pseudo-comptables, sur les « stocks de trésorerie suffisante », qui nous rassureront. Aujourd'hui, en baissant spectaculairement les crédits de l'ADEME, vous consacrez sa perte d'autonomie et, plus grave, sa perte d'efficacité.

Votre budget est inefficace.

Il est inefficace quant à la gestion des effectifs.

L'envolée des dépenses de fonctionnement est le coroll aire de l'augmentation spectaculaire des effectifs : 300 postes de plus cette année, soit une progression de 10 % des effectifs du ministère, laquelle marque en fait le passage d'une administration de mission à une administration de gestion.

Vous vous glorifiez d'avoir augmenté le nombre des fonctionnaires depuis votre arrivée, mais cela s'est effectué au détriment des directions régionales de l'environnement qui, elles, ont besoin de moyens supplémentaires sur le terrain pour oeuvrer en synergie avec les élus locaux.

E n revanche, vous distribuez allégrement l'argent public aux associations : saupoudrage, voire clientélisme,...

Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Il ne faut quand même pas dire n'importe quoi !

M. Bernard Deflesselles.

... sont les maîtres mots d'une politique marquée par l'absence de transparence dans l'utilisation réelle des moyens financiers mis en oeuvre.

Outre le risque de dérive des dépenses publiques, nous assistons à une recentralisation des procédures de gestion et de décision, là où la politique interministérielle devrait être déconcentrée et décentralisée.

Votre budget est inefficace quant à la multiplicité de ses structures. La gestion du ministère se caractérise en effet par une multiplicité de structures dépendantes, associées ou extérieures. Agences, instituts, comités, fonds de gestion, groupements d'intérêt public, conseils, et j'en passe, participent à un empilement des structures, qui nuit à une nécessaire transparence tout en diluant les responsabilités.

Votre budget est inefficace sur le plan de la fiscalité.

Même si la TGAP n'est pas l'objet de ce débat puisqu'elle sera examinée lors de la prochaine loi de finances rectificative, je souhaiterais en dire un mot.

Vous prétextez que son extension a pour objectif de renforcer la lutte contre l'effet de serre dans le cadre des engagements internationaux de la France et qu'elle est un instrument d'incitation et de prévention.

Tous ces beaux objectifs, louables par ailleurs, ne sauraient masquer la réalité des mesures prises par le Gouvernement : l'augmentation - une de plus - d'un impôt, et d'un impôt dont la préservation de notre environnement ne tirera aucun bénéfice d'un impôt tout entier sacrifié sur l'autel des 35 heures qui, rappelons-le, coûteront plus de 85 milliards de francs à l'Etat en 2001.

En fait, la TGAP est assise sur des assiettes larges, avec des taux faibles. Elle ne procède en rien d'une fiscalité incitative, mais elle a tout d'une fiscalité de financement.

Cette année, en l'étendant aux consommations intermédiaires d'énergie, c'est 3,8 milliards de francs que vous ponctionnerez sur les entreprises. Et en affirmant que seules 40 000 entreprises sur 2,8 millions seront taxées, vous omettez de dire que celles-ci ont un besoin vital d'énergie pour leur processus de fabrication.

Dans ces conditions, madame la ministre, le groupe Démocratie libérale votera contre ce budget.

Il votera contre car ce budget ne répond pas aux défis du siècle qui s'avance.

Il votera contre car ce budget n'indique pas quelles places tiendront la science et la recherche dans un domaine complexe fait de repères scientifiques et d'exigence démocratique.

Il votera contre car les vrais enjeux ne sont pas suffisamment mis en avant : lutte contre le bruit, la pollution atmosphérique et la pollution marine, mise en place de mesures incitatives, telles qu'une fiscalité allégée sur les carburants propres ou le développement d'un parc de véhicules électriques.

Enfin, le groupe Démocratie libérale votera contre votre budget car sa fiscalité n'incite pas à la responsabilité.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à Mme Annette Peulvast-Bergeal.

Mme Annette Peulvast-Bergeal.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, depuis trois ans le Gouvernement s'est attaché à faire du ministère de l'environnement un ministère de plein exercice, capable d'élaborer et de mettre en oeuvre une véritable politique de développement durable.

Tous les ans, nous constatons que nos concitoyens s'intéressent de plus en plus à la préservation et à l'amélioration de leur cadre de vie, et donc à l'environnement.

Par conséquent, l'augmentation constante des moyens et l'évolution du périmètre d'intervention du ministère répondent aux attentes de nos concitoyens.

Ces attentes - je devrais dire : ces exigences - sont de plus en plus fortes, compte tenu notamment des diverses catastrophes, qu'il s'agisse des marées noires, des dégâts forestiers, des tempêtes, des inondations ou de la pollution.

Si le projet de budget pour 2001 s'inscrit dans un contexte où les questions d'environnement présentent souvent un caractère d'urgence pour nos concitoyens, la réforme de la fiscalité de l'environnement laisse augurer une politique plus volontariste, plus axée sur la prévention.

Après les fortes augmentations intervenues en 1999 et 2000, le budget augmentera à nouveau sensiblement en 2001. Les crédits passeront de 4,3 milliards à 4,69 milliards de francs, soit une progression de 10,2 %. Par ailleurs, les autorisations de programme bénéficient d'une quasi-stabilisation.

Si la progression des crédits résulte principalement de l'intégration du budget de l'Institut de protection et de sûreté nucléaire, les agrégats qui composent l'essentiel de la politique de l'environnement augmentent néanmoins d'environ 11 %.


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Comme le temps m'est compté, je me contenterai d'évoquer deux aspects du budget de l'environnement : les moyens du ministère et les actions menées dans le cadre de la lutte contre les pollutions, dont celle de l'air, qui préoccupe en priorité nos concitoyens.

En 2001, la politique de création d'emplois engagée depuis trois ans se poursuivra. C'est bien évidemment la condition sine qua non pour la consolidation d'un ministère de plein exercice avec un nombre suffisant d'emplois p érennes : 300 emplois, hors établissements publics, seront donc créés, représentant une progression de 10 % des effectifs par rapport à cette année et de 30 % depuis 1997, alors que cette croissance était limitée à 2 % sur les exercices 1994 à 1997. En l'espace de quatre exercices budgétaires, ce sont près de 700 emplois qui auront vu le jour, et 880 emplois dans les établissements publics.

On ne doit pas bouder notre plaisir devant une telle progression, mais il faut reconnaître que l'on revient de loin. Le ministère commence à avoir les moyens de répondre aux attentes des Français en matière de développement des politiques publiques environnementales.

Vous avez rappelé, madame la ministre, notamment lors de nos travaux en commission, combien vous étiez attachée à la qualité des politiques menées, ce souci impliquant un nécessaire renforcement des capacités d'expertise, d'évaluation et aussi de formation.

La nouvelle direction des études économiques et de l'évaluation environnementale est d'ailleurs la principale bénéficiaire de la création de 108 nouveaux postes en administration centrale. Elle disposera des moyens d'évaluer les conséquences économiques et l'impact environnemental des politiques de chacun des ministères.

De même, vous avez installé un service d'inspection générale de l'environnement afin d'apprécier l'efficacité et la rigueur des agents publics dans la mise en oeuvre des politiques définies par votre ministère. Nous ne pouvons que nous féliciter de cette mesure, mais je pense qu'il faudrait en expliciter les conditions d'intervention, puisqu'il s'agit à terme d'encadrer une vraie politique environnementale.

L'Institut de formation de l'environnement, qui verra le jour en 2001, sera destiné à former l'ensemble des agents des administrations ayant à traiter les sujets environnementaux, quel que soit leur ministère de tutelle.

Je me suis déjà exprimée sur ce sujet pour souligner la nécessité pour vos services d'avoir suffisamment de personnes formées en matière de géophysique, de géographie physique, de géomorphologie, de climatologie, de sciences de la terre, par exemple. En effet, qu'il s'agisse d'aménagement, d'urbanisme ou de plans d'occupation des sols, l es scientifiques sont trop souvent oubliés, leurs remarques sont négligées en raison d'intérêts supérieurs et ne sont prises en compte que lorsque la crise est là et que les problèmes doivent être résolus, souvent dans l'urgence.

Les grands corps de l'Etat devraient voir intégrés dans leur formation les soucis environnementaux, puisque votre administration n'a pas de corps propre.

M. Patrice Martin-Lalande.

Très juste !

Mme Annette Peulvast-Bergeal.

Par ailleurs, le projet de loi de finances anticipe la mise en place effective de la future Agence de sécurité sanitaire environnementale, établissement public national placé sous la cotutelle des ministères de l'environnement et de la santé, en prévoyant une dotation prévisionnelle de 40 millions de francs pour les deux ministères.

J'étais intervenue ici même lors de la discussion de la loi prévoyant la création de cette agence, et il me paraît fondamental d'avancer très vite dans sa mise en oeuvre.

Les crédits consacrés à la prévention des pollutions et des risques naturels augmentent de 7,8 %, progression en partie due à l'intégration des crédits de l'Institut de protection et de sûreté nucléaire.

Il se trouve que l'examen de ces crédits arrive après un naufrage qui montre la nécessité d'accélérer la prise de mesures efficaces, voire draconiennes, au niveau européen.

Dans le domaine de la lutte contre la pollution marine qui est, hélas ! à nouveau d'actualité, les moyens alloués augmentent de plus de 400 %, atteignant plus de 25 millions de francs, contre 5 millions l'an passé, pour mieux lutter contre la pollution marine au quotidien et mieux organiser la prévention avec une dotation de 10 millions de francs pour le fonds POLMAR.

Ces crédits sont appelés à être utilisés rapidement en cas de catastrophe. Espérons tous sur ces bancs que ces 10 millions de francs seront suffisants.

Pour terminer, j'évoquerai la poursuite de la politique de lutte contre la pollution de l'air, à laquelle je m'intéresse particulièrement actuellement.

Le dispositif de la loi sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie bénéficieront de 215 millions de francs, dont 75 millions en autorisations de programme, inscrits en subvention du budget de l'ADEME. Il s'agit de financer l'achat de capteurs, de matériel informatique, d'outils de réglage, pour le dispositif national de surveillance de la qualité de l'air, dispositif qui compte aujourd'hui trenteneuf ou quarante associations de surveillance agréées par le ministère.

Dans le projet de loi de finances pour 2000, cette ligne budgétaire s'élevait à 115 millions de francs. La baisse peut s'expliquer par le taux d'équipement aujourd'hui satisfaisant des associations, qui effectuent, je tiens à le souligner, un travail indispensable.

Par contre, les crédits d'aide au fonctionnement des associations de gestion des réseaux de surveillance de la qualité de l'air et de la banque de données sur la qualité de l'air atteignent 70 millions de francs, soit une augmentation de 27,3 % par rapport à 2000. Cette augmentation de 15 millions de francs est justifiée par les besoins encore insatisfaits dans le domaine de la surveillance : extension de la surveillance, tant sur le plan géographique qu'en ce qui concerne les paramètres suivis, notamment pour mieux contrôler les polluants qui présentent les risques sanitaires les plus importants, prévision de la qualité de l'air, assurance de la qualité des mesures.

L'amélioration de la qualité de l'air, notamment en milieu urbain, est aujourd'hui l'objet d'une forte préoccupation des Français puisque 80 % des personnes qui vivent en milieu urbain reconnaissent que la pollution de l'air et le bruit sont des problèmes majeurs.

Il convient donc d'aller plus loin dans l'incitation et la promotion des filières de véhicules propres car, si les émissions de polluants atmosphériques d'origine industrielle et domestique ont baissé, celles issues notamment du trafic routier urbain posent problème. Ce phénomène, cumulé avec le recul des autres modes de déplacement, tend à créer une situation dont les conséquences environnementales sont importantes.

Les plans de déplacements urbains, dont chacune des c inquante-huit agglomérations françaises de plus de 100 000 habitants doit se doter avant le 30 juin 2000,


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visent à inverser ce processus avec une affectation prioritaire de l'espace public aux moyens de transport peu ou non « nuisants ».

Mais les modes alternatifs à l'utilisation du véhicule individuel à moteur ne peuvent répondre à tous les besoins de déplacement, pas plus en milieu urbain qu'à la périphérie des agglomérations. Il est donc nécessaire, en plus de cette politique structurelle tendant à opérer une ventilation entre les différents modes de transport, de réduire les nuisances à la source pour chaque type de véhicules.

Le comité interministériel sur les véhicules propres a rendu un rapport au Premier ministre au mois de juin.

Ses conclusions vont dans le sens d'un soutien au développement des véhicules alternatifs, fonctionnant au GPL ou au GNV, ou électriques.

Il serait peut-être temps de profiter de la malencontreuse et malheureuse flambée des prix du pétrole pour lancer une politique plus large de développement des énergies non polluantes.

Sans nul doute, madame la ministre, l'année 2001 verra votre ministère prendre l'ampleur qu'il mérite et qui est attendue par nos concitoyens. Nos concitoyens sont de plus en plus conscients qu'ils ne sont que les locataires de la planète et non pas ses propriétaires.

Votre budget, madame la ministre, peut se résumer à deux maîtres mots : vigilance dans les actions, persévérance dans les moyens. C'est pourquoi le groupe socialiste le votera. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Claude Gaillard.

M. Claude Gaillard.

Madame la ministre, j'interviens après mes deux collègues de l'opposition Jacques Pélissard et Bernard Deflesselles. Partageant, pour l'essentiel, ce qu'ils ont dit, je ne m'étendrai pas sur le montant de votre budget.

Je relèverai cependant qu'après avoir augmenté deux années de suite, il baisse cette année d'une manière significative. Cela dit, je suis un peu de votre avis : l'évolution d'un budget n'est pas forcément déterminante.

Je m'en tiendrai à quelques réflexions de fond.

D'abord, on retrouve une fois de plus dans votre budget les signes d'une forte tentation centralisatrice. Qu'il serve de paravent, d'alibi ou de prétexte à une nouvelle fiscalité, à de nouveaux impôts, qu'il montre de façon évidente que vous passez d'une administration de mission à une administration de gestion et, surtout, qu'il confirme la faiblesse dramatique des efforts de prévention, tout cela a été dit.

Certes, il y a le fonds POLMAR, mais l'actualité confirme cette analyse. Pour illustrer ces affirmations, je prendrai quelques exemples.

S'agissant de l'ADEME, je serai bref, car les rapporteurs eux-mêmes, qui sont pourtant de votre bord, madame le ministre, ont souligné clairement l'évolution négative des crédits de l'Agence. Je remarque simplement que si l'on avait additionné les anciennes taxes, l'ADEME aurait eu 2,1 milliards de francs, alors qu'elle n'a eu que 1,7 milliard l'année passée. La budgétisation et la filière Bercy présentent donc de toute évidence des risques pour l'avenir.

Deuxième exemple : la TGAP. L'essentiel en la matière semble être non pas l'incidence sur l'environnement, mais plutôt ce que vous appelez le « second dividende », c'està-dire que vous confisquez les choix environnementaux au profit du financement des 35 heures. En 2000, la TGAP a rapporté 3,2 milliards de francs, mais il faudra y ajouter en 2001 les 3,8 milliards de francs qui résulteront de l'extension de cette taxe aux consommations d'énergie des entreprises. Les grosses entreprises ne seront d'ailleurs pas les seules touchées, puisque 40 000 entreprises seront concernées, ce qui est considérable. Et si l'on tient compte de l'effet sur la valeur ajoutée, il semblerait, d'après les premières estimations, que les entreprises soient deux fois plus taxées que la moyenne européenne.

De toute évidence, l'objectif est d'accroître les ressources publiques en alourdissant la fiscalité pesant sur les entreprises. Au moins, dites-le clairement ! Mais, comme le disait l'un des orateurs précédents, prenez garde, madame la ministre, à ne pas devenir un collecteur d'impôts ! Le troisième exemple concerne le Fonds national de solidarité pour l'eau, doté de 512 millions de francs, qui passe lui aussi par un compte d'affectation spéciale et a uquel on peut reprocher la même fragilité qu'à l'ADEME. C'est de toute évidence l'illustration d'une recentralisation et j'espère qu'il n'évoluera pas trop vite dans les années qui viennent. Il serait agréable au président du comité de bassin que je suis de vous entendre confirmer, madame la ministre, que les 512 millions de francs du FNSE ne seront pas développés. De quels moyens disposez-vous pour les maîtriser ? Mon quatrième exemple concerne la faiblesse de lar echerche pilotée. Je pense notamment aux boues urbaines. En effet, plus ça va, plus il y en a, et l'on ne sait plus quoi en faire, d'autant que le principe de précaution nous interdit de les épandre. L'évacuation des boues urbaines est donc un vrai problème et le fait qu'il ne soit pas résolu révèle l'insuffisance de la recherche en la matière.

Mon cinquième exemple est relatif à la sécurité. Certes, cela concerne non seulement les transports, mais aussi l'aménagement du territoire et l'environnement. S'agissant des transports urbains, la loi de 1996 a prévu un plan régional de la qualité de l'air et des plans de déplacements urbains, mais ceux-ci ne semblent pas relayés de f açon dynamique au niveau ministériel. Je regrette l'absence d'une ambition plus forte pour lutter contre ce problème de la pollution de l'air.

Par ailleurs, la politique de transport régional sera transférée aux régions le 1er janvier 2002 et je voudrais savoir, madame la ministre, comment vous avez intégré cette évolution dans l'ensemble de vos responsabilités.

J'aimerais aussi connaître votre avis sur une question plus personnelle. Que pensez-vous de l'implantation d'une gare à l'interconnexion d'un TGV et d'un réseau TER qui a pour but de mailler une région et d'inciter nos concitoyens à délaisser la voiture pour les transports en commun ? S'agissant des transports, toujours, le Gouvernement affiche sa volonté de développer l'approche multimodale par souci de sécurité, mais cette volonté a du mal à se traduire dans les faits. En effet, s'agissant des voies d'eau, j'ai appris, par exemple, que la liaison Seine-Moselle allait être abandonnée. Ne pensez-vous pas que l'on pourrait résoudre ce problème essentiel de la sécurité en enlevant de l'autoroute certains poids lourds pour les mettre sur les voies ferrées ou les voies d'eau ? Pour conclure, je citerai des chiffres impressionnants que nous rappelle l'actualité la plus récente : 250 naufrages par an sont dénombrés dans le monde, ce qui est considérable ; 300 millions de tonnes d'hydrocarbures circulent


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au large des côtes françaises, ce qui est non moins considérable, et l'on compte environ 600 navires par jour dans la Manche et un navire toutes les quatre minutes au large de Calais ! Face à ces risques potentiels, qui restent majeurs, l'implication du Gouvernement n'est pas à la hauteur de ce que l'on était en droit d'attendre.

« En dehors des propositions, des rapports, rien de décisif n'a été entrepris depuis le naufrage de l' Erika. »

Ces propos sont de votre ami Georges Sarre ! Je voudrais donc savoir quel est votre engagement sur ces grands problèmes de prévention qui concernent l'océan. En effet, on ne ressent pas, chez vous, la même détermination que celle qui vous a animée pour lutter contre la pollution des nappes phréatiques et autres, l'Etat ayant alors soutenu les agences de l'eau pour prendre des mesures importantes.

Telles sont, madame la ministre, les quelques réflexions que je souhaitais ajouter aux propos de mes collègues de l'opposition. Vous le comprendrez aisément, pour toutes ces raisons, le groupe UDF ne votera pas votre budget.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Claude Billard.

M. Claude Billard.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ce budget de l'environnement mérite d'être observé avec une attention toute particulière. En effet, la progression de 9,2 %, par rapport au budget de l'an passé, n'est en fait qu'apparente. Notre rapporteur, Stéphane Alaize, au nom de la commission de la production et des échanges, l'a d'ailleurs fort justement signalé. Ainsi, il doit être mis en perspective avec un élément essentiel : la prise en charge de l'Institut de protection et de sûreté nucléaire - l'IPSN -, qui représente 28,5 % du budget global de l'environnement. Cette réforme, qui nous est présentée comme vertueuse, suscite d'ailleurs, dans le secteur concerné, bien des inquiétudes, qui ne sont pas sans fondements.

A périmètre constant le budget est donc en diminution. Toutefois, nous ne pouvons non plus nous fier à cette approche pour en avoir une vision juste. Il convient, pour ce faire, de tenir compte de la réduction du budget de l'ADEME, qui voit ses crédits de paiement chuter de plus de 70 %. En fait, si l'on ne prend pas en compte les crédits alloués à l'IPSN et à l'ADEME, la progression est de 11 %. Ce pourcentage m'apparaît le plus juste pour analyser l'évolution de votre budget, madame la ministre, car il prend en compte les agrégats qui composent l'essentiel de la politique environnementale.

Bien évidemment, le groupe communiste se félicite de cette progression, qui confirme votre volonté d'orienter votre ministère vers un ministère de plein exercice, et de la reconnaissance par le Gouvernement du rôle essentiel que doit jouer la politique environnementale dans sa politique générale.

La nécessité de donner une vraie place à l'environnement n'est, à mon sens, plus à prouver. En revanche, le retard pris par notre pays dans la prise en compte des vrais enjeux environnementaux mérite que nous soyons toujours vigilants quant aux moyens qui lui sont accordés.

A ce titre, je me dois de saluer la création de 300 emplois, qui représente une progression de 10 % des effectifs. Cette progression va permettre d'aller dans le sens de l'objectif que vous vous êtes fixé, madame la ministre, à savoir le renforcement du socle du ministère pour que celui-ci devienne une véritable administration de plein exercice à la hauteur de l'attente des citoyens.

Cet objectif doit être atteint, nous en sommes convaincus. Pour autant, il ne doit pas nous entraîner vers une dérive. J'entends par là que la mise en place d'une administration de proximité et du quotidien ne doit pas nous faire perdre de vue l'importance, en matière environnementale, d'une administration de prospective.

P ermettez-moi, maintenant, madame la ministre, d'aborder avec vous nos inquiétudes quant à ce budget.

S'agissant, tout d'abord, de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, comme je l'ai dit dans l'introduction de mon intervention, le budget de cette agence voit ses crédits de paiement chuter de 71,37 %. En revanche, les subventions qui lui sont accordées au titre IV augmentent de 6,2 %. Les missions de cet EPIC sont telles que l'inquiétude suscitée par ces chiffres, et qui a été relayée par la majorité de mes collègues, est légitime. Dois-je rappeler que les champs d'intervention de l'établissement sont multiples, variés, mais surtout qu'ils sont essentiels dans la conduite de la politique environnementale du Gouvernement ? Une telle chute dans son budget de ses crédits de paiement mérite, par conséquent, d'être pleinement justifiée.

Lors de votre audition devant la commission de la production et des échanges, le 3 octobre dernier, vous avez apporté une justification, madame la ministre, à cette baisse considérable. Cette baisse des crédits de l'ADEME est liée, avez-vous dit, « au montant de trésorerie inutilisée de celle-ci, qui résulte des difficultés de mise en oeuvre des politiques de traitement des déchets et de maîtrise de l'énergie. La trésorerie de l'agence s'élevant à 2 154 millions de francs, elle ne manque pas de crédits de paiement ». Cette explication claire et cohérente nous interroge néanmoins. Si le projet de budget qui nous est soumis aujourd'hui ajuste les crédits de l'ADEME à ses prévisions réelles de dépenses, je souhaite que vous puissiez nous rassurer quant à la non-pénalisation de ses moyens effectifs.

Concernant les pollutions sonores, par exemple, je crains que les crédits accordés ne soient insuffisants. La lutte contre le bruit mérite, en effet, une mobilisation certaine des moyens, si l'on veut résorber cette gêne ressentie par les Français comme la plus insupportable. Il semble que l'ADEME ait pris du retard dans l'instruction des dossiers d'aide à l'insonorisation. Pourtant, le bruit occasionné par les transports, le bruit au voisinage des aéroports sont autant de fléaux à combattre. C'est en connaissance de cause que je vous en parle, étant moimême élu de la région parisienne, laquelle est l'une des premières concernées.

Je souhaite maintenant aborder la question de la taxe générale sur les activités polluantes. Vous nous avez transmis, madame la ministre, lors de votre audition, une note conjointe du secrétariat d'Etat à l'industrie et de votre ministère exposant le futur mécanisme de l'extension de cette taxe aux consommations intermédiaires d'énergie des entreprises. Ce dispositif doit nous être soumis dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2000, sa mise en place étant prévue au 1er janvier 2001.

Permettez-moi, toutefois, de vous faire part d'ores et déjà des réflexions suivantes.

Concernant, tout d'abord, la philosophie générale de cette taxe. Vous savez, madame la ministre, le groupe communiste vous en ayant fait part à plusieurs reprises,


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que nous sommes plutôt sceptiques sur l'efficacité de ce dispositif. En effet, l'application du principe « pollueurpayeur » peut nous entraîner vers bien des dérives.

L'exemple des Etats-Unis en est une parfaite illustration, avec l'instauration d'un droit à polluer pourvu que l'on paye.

Par souci d'efficacité, nous estimons pour notre part que le produit de la TGAP doit être affecté au financement de programmes concrets impliquant les acteurs concernés pour rendre les processus de production plus propres, tout en développant l'emploi. Le rendement de cette taxe, qui sanctionne des comportements pollueurs, doit, en effet, profiter à la lutte contre toutes les formes de pollution. Une taxe doit être lisible pour être efficace et pouvoir jouer pleinement son rôle. Pour ce faire, il doit y avoir une liaison entre la taxe et son objet.

D'ailleurs, le Conseil économique et social a voté, le 25 octobre dernier, un projet d'avis présenté par M. Jean Gonnard au nom de la section des activités productives, de la recherche et de la technologie, sur le « suivi de l'effet de serre ». Cet avis souligne les carences de la TGAP en ces termes : « La taxation satisfait au principe "pollueur-payeur", dès lors qu'elle identifie son objectif avec précision (...) et que son produit est totalement affecté à la réalisation de l'objectif qu'elle poursuit. » Le

président de cette section, M. Didier Simond, ajoute :

« La taxation des entreprises est justifiée dès lors qu'elle sert à l'effort de réduction des émissions de gaz polluants, sinon il s'agit d'un impôt, un simple droit à polluer acheté par les entreprises sans retour pour la collectivité. »

Vous l'avez compris, madame la ministre, la taxe générale sur les activités polluantes ne peut être parée, en l'état, de toutes les vertus d'une politique active de préservation de l'environnement.

Je souhaite désormais attirer votre attention sur le budget des réserves naturelles françaises. Ce budget, dans le projet qui nous est soumis aujourd'hui, est reconduit. Or, il apparaît qu'une simple reconduction est dommageable, ce budget nécessitant des moyens supérieurs à ceux de l'an passé. Ainsi, l'objectif d'application, dans toutes les réserves naturelles, de la charte du personnel ne semble pouvoir être atteint sans déblocage de fonds supplémentaires. Pourtant, la grille salariale des agents des réserves naturelles est déjà inférieure à celle des agents d es parcs naturels, alors qu'ils sont de même catégorie. De plus, alors que deux réserves naturelles ont été créées depuis décembre 1999 et que cinq devraient être créées d'ici à mars 2001, le budget n'augmente pas. La gestion de ces réserves ne pourra donc être assurée qu'en prélevant sur la dotation des réserves existantes, ce qui aggravera encore leur situation. Je pense, par conséquent, qu'une dotation supplémentaire pour les réserves naturelles françaises serait plus que souhaitable.

C e sujet me conduit vers un autre : le réseau Natura 2000. La directive 92/43 du 21 mai 1992, dite

« directive Habitats », concerne la conservation des habitats naturels ainsi que la faune et la flore. Elle vise à maintenir les éléments vitaux du patrimoine naturel dans un état de conservation favorable. A cette fin, ce texte é tablit un réseau écologique européen dénommé Natura 2000. Selon cette directive, chaque Etat membre doit dresser un inventaire des sites d'intérêt communautaire sur son territoire national de l'annexe I et des espèces de l'annexe II de cette directive.

Le projet de loi « portant habilitation du Gouvernem ent à transposer, par ordonnances, des directives communautaires et à mettre en oeuvre certaines dispositions du droit communautaire », qui va être soumis à notre assemblée très prochainement, prévoit, dans son article 1er , que la directive 92-43 est concernée par cette transposition. Le groupe communiste aura l'occasion de s'exprimer sur la question lors de l'examen de ce texte.

Néanmoins, d'ores et déjà, bien que nous ne nous opposions pas au principe même de Natura 2000, nous contestons cette procédure pour la transposition de cette directive.

M. Robert Galley.

Nous aussi !

M. Claude Billard.

Nous regrettons en effet que le débat législatif soit écarté.

M. Patrice Martin-Lalande.

Exact !

M. Claude Billard.

La transposition de cette directive, et des autres d'ailleurs, mérite un débat démocratique.

Vous même, madame la ministre, lors du congrès de l'Association nationale des élus de la montagne, le 29 octobre 1999, avez déclaré : « Je suis bien convaincue que la mise en oeuvre de la directive "Habitats" ne saurait se faire sans l'accord des élus. » Vous comprendrez, dès

lors, notre étonnement lorsque nous avons constaté que Natura 2000 était concernée par ce projet de loi.

Le temps qui m'est imparti ne me permet pas d'aborder toutes les questions qui nous sont chères. Je dirai donc simplement un mot du projet de loi sur l'eau qui devrait nous être soumis lors de cette session parlementaire. L'an dernier, mon ami Patrick Malavieille, vous avait fait part, lors de l'examen du projet de budget pour 2000, de nos inquiétudes et de nos propositions sur ce sujet. Elles restent évidemment d'actualité.

Telles sont, madame la ministre, nos observations et interrogations concernant le projet de budget de l'environnement pour 2001, sur lequel le groupe communiste et apparentés émettra un vote positif. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Patrice MartinLalande.

M. Patrice Martin-Lalande.

Dans les quelques minutes qui me sont imparties, je voudrais vous interroger, madame la ministre, d'abord sur ce que le Gouvernement compte faire au plan européen après le vote de la loi chasse et dans le cadre de Natura 2000, ensuite sur les problèmes les plus aigus auxquels sont confrontées les zones humides.

La loi chasse devait apaiser les contentieux. Au plan européen, madame la ministre, qu'avez-vous fait et obtenu pour que la Commission européenne retire sa plainte contre le gouvernement français ? Quelles autres conditions faut-il réunir, alors que la France préside actuellement l'Union européenne depuis quatre mois et que votre gouvernement a fait voter par sa majorité à l'Assemblée nationale une loi réduisant fortement la chasse aux oiseaux migrateurs ? Ma deuxième question, toujours au plan européen, concerne l'action que vous avez engagée, madame la ministre, pour obtenir en temps utile les dérogations permettant de chasser certaines espèces, tels l'oie cendrée, la grive ou le pigeon ramier, dans certaines zones, entre la fin janvier et la fin février.

Par ailleurs, nous devons constater, au plan national, que les contentieux se multiplient, démontrant ainsi clairement que, pour les ultras de l'écologie, la « chasse apaisée » n'est qu'une chasse toujours plus réduite.

Puisque l'apaisement ne peut, hélas, venir de la loi, il faut aller plus loin dans la connaissance scientifique d'un des sujets majeurs de polémique : la chasse aux oiseaux migrateurs.


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Lors de l'examen de la loi chasse, vous m'aviez donné à plusieurs reprises une réponse favorable sur la proposition que j'avais faite de créer, par l'intermédiaire de l'Union européenne, un observatoire des oiseaux migrateurs du paléarctique occidental. Cet organisme nous perm ettrait de disposer d'une connaissance scientifique incontestable sur la base de laquelle on pourrait instaurer une gestion des espèces sous forme de prélèvement et renoncer au système actuel des calendriers de chasse, souvent contradictoires d'un pays à l'autre. Mais, en vertu du principe de subsidiarité, la gestion de ces prélèvements demeurerait naturellement confiée à chaque pays.

La présidence du conseil des ministres européens de l'environnement, que vous assumez depuis juillet dernier, s'achève malheureusement dans deux mois. Comment allez-vous pouvoir concrétiser cette proposition qui assurerait une connaissance indiscutable du niveau de prélèvement compatible avec la pérennité des espèces, notre objectif à tous ? Selon les informations qui circulent dans nos départements à propos de Natura 2000, un élargissement du zonage est demandé en urgence aux préfets et aux DIREN. Le Gouvernement va-t-il recommencer, comme cela lui a été reproché, notamment par le Conseil d'Etat, de décider sans délai de réflexion ni véritable concertation ? Je vous l'ai déjà demandé lors de ma question d'actualité du 6 octobre 1999 : qu'en est-il des restrictions de la durée de chasse dans les zones Natura 2000 ? Et, surtout, quels modes de gestion seront imposés aux actuels responsables du patrimoine naturel dans les futurs sites classés ? Si nous ne savons pas à quels modes de gestion seront soumis ces sites, nous aurons des difficultés importantes pour obtenir des propositions de classement de site. On peut le comprendre, ceux qui seraient amenés à s'engager souhaitent savoir... à quoi ils vont s'engager.

Enfin, toujours sur Natura 2000, pourquoi recourir à l'ordonnance ? La transposition de l'article 6 de la directive Habitats est une occasion de clarifier et de soumettre au débat, devant les représentants du peuple, certains points importants pour la vie, notamment dans nos zones rurales. Il n'y aurait pas d'urgence, madame la ministre, si le Gouvernement n'avait pas laissé « pourrir » ou du moins traîner le dossier Natura 2000. Il faut disjoindre cette question de l'ensemble des ordonnances prévues et déposer en urgence un projet de loi sur Natura 2000.

Ainsi, le débat pourrait avoir lieu devant le Parlement, comme ce fut le cas pour la loi chasse, et l'opinion publique être éclairée sur les tenants et aboutissants de cettre grande opération au niveau européen.

M. Bernard Deflesselles.

Vous avez raison !

M. Patrice Martin-Lalande.

Je voulais évoquer par ailleurs les dangers que courent certaines zones humides.

Je suis obligé de constater, avec tous ceux qui sont sur le terrain, que la procédure actuellement utilisée pour réguler les cormorans est dramatiquement inefficace. Les cormorans continuent de proliférer. Ils nichent de plus en plus en France, détruisent la faible rentabilité économique de la pisciculture ; ils condamnent même celle-ci à disparaître dans de vastes zones. Les activités de pêche sportive sont également pénalisées. La prolifération des cormorans prive les zones humides de la principale activité assurant la gestion de ce patrimoine naturel essentiel. Au nom de la protection de l'environnement, pour une espèce qui n'a plus besoin d'être protégée, on est en train de mettre gravement en péril celle des milieux humides qui, sans ce mode de gestion qu'apporte la pisciculture, vont se trouver dégradés ! Il faut opérer une régulation à la source, sur les lieux de nidification, puisque les autres tentatives ont échoué. Quelles initiatives, madame la ministre, avezvous prises en ce sens dans le cadre de la présidence française de l'Union européenne ? Autre point : la vidange des étangs. Le décret d'application de la loi sur l'eau, publié le 27 août 1999, oblige les propriétaires à obtenir une autorisation administrative pour vidanger leurs étangs. Une procédure dite simplifiée - j'ai pu voir sur le terrain que ce n'était pas si simple que cela - a été instituée pour les étangs exploités en p isciculture. Les propriétaires qui, en toute honnêteté, déclareront n'avoir aucune activité piscicole, se verront appliquer la procédure dite normale : dépôt d'un dossier administratif accompagné d'une note d'incidence et d'une enquête publique pour les étangs de plus de trois hectares. Le coût de vidange d'un tel étang s'élèverait à plus de 10 000 francs. Il est probable que l'application de ce décret agira comme une interdiction de vidanger les étangs, assainissement pourtant indispensable. Là aussi, au nom de préoccupations que l'on peut tout à fait comprendre, la mise en oeuvre, les modalités d'application d'une mesure aboutissent à décourager certains comportements traditionnels, qui étaient favorables au maintien de ces milieux et donc à l'environnement. Dans une région comme la Sologne où l'invasion des cormorans a déjà largement contribué à fragiliser l'activité piscicole, les nouvelles contraintes qui pèsent sur les propriétaires d'étangs, qui en conséquence ont dû cesser toute activité piscicole, sont difficilement supportables. Allez-vous donc modifier ce régime de vidange des étangs, madame la ministre ? Toutes ces interrogations, ces craintes, ces menaces, que j'ai résumées et qui peuvent être vérifiées sur le terrain, rendent difficile, sinon impossible, la mobilisation de tous les responsables et de tous les acteurs du patrimoine naturel.

Il faut arrêter, madame la ministre, de vouloir protéger le patrimoine naturel en montrant du doigt ses gestionnaires à qui nous devons pourtant largement ce trésor national qu'est la nature de notre pays. (Applaudissementss ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.

M. Jean-Pierre Blazy.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, mon intervention portera essentiellement sur la politique du bruit. Alors que le bruit est considéré comme la principale pollution par nos concitoyens, l'action contre le bruit constitue encore le parent pauvre des politiques publiques environnementales. Je dis « encore », parce que, avant 1997, le bruit n'avait pas droit de cité au ministère de l'environnement, ou si peu...

Il s'agit pourtant d'un enjeu de santé publique en même temps que de justice sociale. M. Claude Lamure, dans un rapport sur la résorption des points noirs du bruit dû aux transports terrestres, qui vous a été remis, madame la ministre, en décembre 1998 a montré les conséquences néfastes du bruit sur la santé humaine ainsi que la progression de l'inégalité sociale face au bruit.

Le bruit est devenu un critère de choix essentiel pour le logement. On sait que les populations les plus fragiles socialement sont les plus exposées aux nuisances sonores et on constate la paupérisation croissante des zones les plus bruyantes.


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Je ne peux donc que me féliciter, madame la ministre, du fait que la lutte contre le bruit bénéficiera de 100 millions de francs d'autorisations de programme en 2001.

Cette nouvelle mesure sera consacrée à financer des opérations d'insonorisation par traitement des façades des logements exposés au bruit des transports terrestres dans le cadre du programme de rattrapage des points noirs du réseau routier national et du réseau ferroviaire arrêté par le Gouvernement à la fin de l'année 1999. Cette mesure vient en complément des actions menées par le ministère de l'équipement, des transports et du logement. L'objectif poursuivi est de traiter 200 000 logements en dix ans par la mise en place de protections à la source, complétées par des aides à l'insonorisation. Madame la ministre, je souhaiterais que vous nous précisiez les modalités de mise en oeuvre de cette mesure nouvelle et son articulation avec les interventions du ministère de l'équipement.

Il est évident que la lutte contre le bruit ne peut relever uniquement de l'action de votre ministère. Celle-ci nécessite une gestion interministérielle active, sur un sujet qui couvre les champs d'action d'un grand nombre de ministères. De ce point de vue, les blocages sont multiples. Un seul exemple - je pourrais en citer plusieurs -, la non-mise en oeuvre du rapport Burger-Moyen concernant la réduction des nuisances sonores générées par les aérodromes militaires illustre la nécessité d'une volonté politique forte au niveau du Gouvernement, et pas seulement du ministère de l'environnement.

Sur le plan local, il faut favoriser la poursuite du développement des pôles de compétence bruit, qui, quand ils existent - dans un peu plus d'un département sur deux -, ont permis, par la mise en commun des moyens et des savoir-faire, d'identifier localement l'ensemble des sources de nuisances sonores, de développer des actions concertées à l'échelle du département et d'apporter un soutien efficace aux collectivités locales. Madame la ministre, je sais votre attachement à ces pôles de compétence et j'attire votre attention sur la nécessité de favoriser leur création dans les départements où ils n'existent pas encore.

En outre, j'attire de nouveau votre attention, après d'autres, sur la gestion très peu satisfaisante à ce jour de l'ADEME, s'agissant en particulier de l'aide aux riverains.

A l'occasion de l'examen du budget pour 2000, alors rapporteur pour avis, j'avais obtenu, à vos côtés, une rallonge substantielle de 85 millions de francs, qui a porté à près d e 160 millions de francs les dotations versées à l'ADEME pour financer l'aide à l'insonorisation.

Cet effort nécessaire a été reconduit pour 2001. Mais je déplore que les délais d'instruction des dossiers soient encore trop longs et que l'ADEME ait attendu l'été pour prendre les mesures indispensables à la mise en oeuvre de sa nouvelle mission.

Je tiens de nouveau à vous faire part de mon vif mécontentement, en tant que maire d'une commune riveraine de l'aéroport de Roissy. Chaque jour, on constate l'augmentation des nuisances sonores. Pourriez-vous me rassurer sur les délais de résorption des retards accumulés par l'ADEME, alors même que le Parlement s'était assuré des moyens financiers mis à sa disposition ?

Mme Nicole Bricq.

Très bien !

M. Jean-Pierre Blazy.

Vous le savez, madame la ministre, le Conseil national du bruit travaille à vos côtés pour faciliter l'application pleine et entière de la loi sur le bruit. Et j'attire votre attention sur la nécessité de publier les décrets d'application encore attendus - installations sportives, loisirs bruyants, locaux de santé et d'enseignement.

Par ailleurs, la France préside l'Union européenne et il serait évidemment souhaitable que, pendant cette période, la rédaction et l'adoption de la directive « bruit » aboutissent. Pouvez-vous apporter à la représentation nationale des éléments sur l'état d'avancement de cette directive essentielle ?

M. Patrice Martin-Lalande.

C'est très important !

M. Jean-Pierre Blazy.

Enfin, le Gouvernement a pris la décision de construire une troisième plate-forme internationale dans le grand bassin parisien.

M. Yves Cochet.

Plus loin !

M. Jean-Pierre Blazy.

Cette décision devra s'accompagner d'une politique suffisamment volontariste en matière de transport ferroviaire et de redéploiement maîtrisé du trafic aérien vers la province, politique indispensable pour respecter les engagements pris en matière de plafonds de trafic à Roissy et à Orly.

Vous le savez, madame la ministre, j'ai beaucoup agi pour que cette décision soit prise et je vous rejoins entièrement sur la nécessité de ne pas réitérer les erreurs du passé et pour que ce troisième aéroport soit exemplaire sur le plan environnemental. A cet égard, j'ai une question à vous poser : comment concevez-vous la mise en place et les modalités du débat public annoncé par le Premier ministre ?

M. Jean-Pierre Brard.

Question cruelle ! M. Blazy est sadique !

M. Jean-Pierre Blazy.

Pour conclure, madame la ministre, ce budget est un bon budget, parce qu'il accroît les moyens de lutter contre le bruit. Le président du Conseil national du bruit que je suis y trouve des raisons d'être satisfait pour 2001, et des raisons d'espérer encore mieux au-delà. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Stéphane Alaize, rapporteur pour avis.

Après les élections ?

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard.

Monsieur le président, madame la ministre, la progression, encore modeste malgré les apparences, du budget de l'environnement pour 2001 et les créations de postes qui l'accompagnent répondent pour une part à nos demandes, réitérées les années passées, d'accorder des moyens nouveaux à ce département ministériel.

S'il faut donc noter ces éléments positifs, il faut aussi constater que les problèmes et même ces crises environnementales s'amplifient beaucoup plus rapidement que les moyens de votre ministère.

L'accentuation de l'effet de serre, avec le réchauffement qu'il entraîne, est un des grands problèmes planétaires auxquels nous sommes immédiatement confrontés. A cet égard, l'étude publiée dans Le Monde, hier, n'était pas particulièrement rassurante. Ce phénomène aura des conséquences, notamment, sur le cycle de l'eau et sur les accidents climatiques. Outre la montée du niveau des mers, on voit se brouiller rapidement la carte des risques que nous connaissons bien et les catastrophes climatiques - sécheresses prolongées, pluies diluviennes, tempêtes violentes - se multiplient sur l'ensemble de la planète, y compris dans notre pays.

Les tempêtes à répétition ont des conséquences sévères en matière de transport maritime. En moins d'un an, deux naufrages - celui de l' Erika et celui du Ievoli Sun -


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 NOVEMBRE 2000

ont frappé nos côtes. L'augmentation des risques de naufrage appelle, à l'évidence, des mesures nouvelles, des normes plus sévères, plus protectrices et un contrôle rigoureux des navires transportant des produits polluants ou dangereux. Nos concitoyens se demandent ce qu'il en est s'agissant de l'action de la présidence française de l'Union et des résultats obtenus.

Autre problème auquel nous sommes confrontés : celui du coût et de la diversification des sources d'énergie. Le conflit du mois de septembre dernier a souligné la nécessité de stratégies à long terme dans ce domaine. Le Premier ministre a annoncé un programme d'économies d'énergie dont la traduction dans les faits est urgente. On ne répétera jamais assez que le kilowattheure le moins polluant et le moins cher est celui que l'on ne consomme pas (Sourires) - à condition, bien sûr, que cette nonconsommation ne tienne pas à la pauvreté matérielle des familles.

La baisse des crédits de l'ADEME n'est pas satisfaisante. Elle traduit un dysfonctionnement dans l'utilisation des crédits. Cela a été souligné au sein de la commission de la production et des échanges et de la commission des finances. Comme se fait-il qu'un établissement comme ADEME se trouve dans l'incapacité de dépenser l'ensemble de ses dotations, alors que la lutte contre la pollution de l'air et la maîtrise de l'énergie sont annoncées comme des priorités ? Aujourd'hui, tant pour l'indépendance énergétique que pour la protection de l'environnement ou la lutte contre l'effet de serre, le développement des énergies renouvelables est urgent. Les propositions de notre collègue Yves Cochet peuvent évidemment y contribuer et il faut absolument bannir le critère du coût à court terme pour privilégier le développement de telle ou telle source d'énergie. M. Roussely, président d'EDF, a reconnu luimême que le premier électricien français avait trop longtemps commis cette erreur ; on ne peut que se satisfaire de le voir prendre quelques mesures pour la corriger. Ce ne sont d'ailleurs que des premiers gestes, qui méritent d'être confirmés pour devenir crédibles.

M. Yves Cochet.

EDF fait encore de la publicité pour le chauffage électrique !

M. Jean-Pierre Brard.

Eh oui, monsieur Cochet, vous avez raison. Ce n'est pas elle qui paie les factures ! Si tel était le cas, comme dans les HLM, il en irait évidemment autrement.

Si le montant du budget de l'environnement est un indicateur, dans la mesure où il permet d'apprécier la prise en compte des préoccupations environnementales, il ne saurait être le seul. De ce point de vue, et vous reconnaîtrez là le pluralisme qui s'exprime dans le groupe des députés communistes et apparentés, et qui fait son charme permanent (Sourires) ...

M. Bernard Deflesselles.

Ah ?

M. Jean-Pierre Brard.

Vous être envieux !

M. Bernard Deflesselles.

Non, admiratif !

M. Jean-Pierre Brard.

C'est l'hommage du vice à la vertu...

De ce point de vue, disais-je, il faut regretter le recul enregistré sur la taxe générale sur les activités polluantes.

Après le lobbying des industries potentiellement concernées, sa montée en puissance s'est fortement réduite. Avec Mme Nicole Bricq, j'ai participé à un colloque où les porte-voix de ces industries, dont on ne sait pourtant pas que les comptes soient en difficulté, sont venus pleurer misère et ont refusé de contribuer comme il conviendrait, dans un esprit de responsabilité.

Alors que la TGAP devait initialement rapporter autour de 8 milliards de francs dès 2001, elle ne rapporterait plus que 3,8 milliards, alimentant toutefois non plus le budget de la sécurité sociale, mais le budget de l'Etat.

M. Jean-Pierre Blazy.

Deux fois moins, donc.

M. Jean-Pierre Brard.

J'ai entendu quelques collègues qui étaient un peu « en déphasage » et qui en étaient encore au budget de l'année dernière.

Mme Nicole Bricq.

Ils ne suivent pas !

M. Jean-Pierre Brard.

Hélas ! Ça leur arrive souvent !

M. Daniel Marcovitch.

La politique va trop vite pour eux !

M. le président.

Moi, je suis, et il est temps de conclure, monsieur Brard ! (Sourires.)

M. Jean-Pierre Brard.

Monsieur le président, pour vous être agréable, je vais déférer à votre demande.

M. le président.

Je vous en suis reconnaissant.

M. Jean-Pierre Brard.

Je vous remercie pour votre amabilité.

Je terminerai, madame la ministre, par un autre regret : l'absence de mesures fiscales symboliques au sein de la partie recettes du projet de loi de finances. Nous étions plusieurs à les souhaiter.

M. Yves Cochet.

Ce n'est pas faute d'avoir essayé !

M. Jean-Pierre Brard.

Il nous a été répondu à de nombreuses reprises que les amendements proposés étaient malheureusement euro-incompatibles.

Alors que la France assume la présidence de l'Union jusqu'à la fin du mois de décembre, nous vous demandons, madame la ministre, de faire avancer le dossier de la baisse des taxes, et notamment de la TVA, sur les produits respectueux de l'environnement. Il est essentiel, en effet, que la fiscalité écologique comporte ce double volet de la pénalisation des activités polluantes et de l'encouragement à l'usage de produits qui ne le sont pas ou le sont moins.

Madame la ministre, votre budget est intéressant et, comme l'a déjà dit M. Claude Billard, il permettra de poursuivre des politiques essentielles. C'est pourquoi nous le voterons. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. Daniel Marcovitch, dernier orateur inscrit.

M. Daniel Marcovitch.

Monsieur le président, je n'utiliserai vraisemblablement pas les cinq minutes qui me sont imparties puisque je remplace, un peu au pied levé,

M. Philippe Duron, qui n'a pas pu venir à temps.

Madame la ministre, lors de votre communication au conseil des ministres du 27 octobre 1999, vous proposiez la création d'un instrument de solidarité nationale et de péréquation entre les bassins, le Fonds national de solidarité pour l'eau, alimenté par un prélèvement sur les recettes des agences de l'eau à hauteur de 500 millions de francs, soit environ 4 % du budget des agences. Nous savons que ce prélèvement pourrait être porté progressivement à 8 %, selon les besoins considérés. Néanmoins, le


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projet de budget pour 2001 voit le maintien du taux de 4 % et ce jusqu'à la fin du VIIe plan des agences de bassin.

Il est clair qu'à ce prélèvement a correspondu un allégement équivalent des charges des agences qui ont été transférées vers l'Etat. Il s'agit principalement des actions de solidarité nationale menées dans le domaine de l'eau, des grandes orientations nationales dépassant le cadre des agences telles que les réseaux patrimoniaux de connaissance de la ressource en eau, la politique de préservation des zones humides, les économies d'eau dans le secteur de l'habitat social dégradé, enfin le financement du futur Haut conseil du service public de l'eau et de l'assainissement.

Pour cette année, vous nous proposez, après un an d'expérience budgétaire, une simplification de la nomenclature, et c'est dans ce cadre que le FNSE financera les actions de connaissance et d'intérêt commun aux bassins alors que le budget général prendra en charge les missions régaliennes de l'Etat ainsi que les plans risques et le plan Loire. Nous savons également que, pour 2001, le prélèvement de 500 millions de francs sera complété par 12 millions de francs de recettes diverses.

Rien de cela n'est de nature à remettre en cause le bon fonctionnement des agences et leurs capacités d'intervention financière, tant dans la lutte contre les pollutions que pour le maintien d'une ressource de qualité. Mais, si le prélèvement devait atteindre 8 % de la masse financière des agences, soit 1 milliard de francs, il devrait être compensé par un transfert équivalent des charges des agences de l'Etat.

Madame la ministre, nous connaissons votre attachement à la gestion décentralisée par bassin versant - dite école française de l'eau -, dont le principe est repris dans la directive européenne de gestion de l'eau. La future loi sur l'eau prévoit d'encadrer le montant des redevances et des programmes d'investissement des agences, qui devront ensuite être votés par le Parlement sur proposition des comités de bassin. Il s'agit ainsi de rétablir le droit qui avait été malmené dans la loi de 1964. En effet, les redevances de nature fiscale devaient être votées par une assemblée élue. Cette réforme est donc nécessaire et positive.

C'est non seulement en tant que parlementaire mais aussi en tant qu'administrateur de l'agence Seine-Normandie que je vous transmets les craintes des membres des comités de bassin.

M. Bernard Deflesselles.

Eh oui !

M. Daniel Marcovitch.

En effet, le risque existe qu'un encadrement trop strict mène à une recentralisation de la gestion de la ressource, dont je rappelle qu'elle a été, bien avant les grandes lois Defferre sur la décentralisation, un exemple de gestion décentralisée, même si elle n'a pas été exempte de critiques.

Il est donc indispensable d'introduire davantage de démocratie au sein des comités de bassin en assurant une meilleure représentation des élus des grandes agglomérations et des associations d'usagers afin de permettre un contrôle accru de la gestion des dépenses. Toutes ces réformes, aussi importantes et nécessaires soient-elles, doivent s'accompagner d'une réaffirmation de la liberté et de l'autonomie de gestion des acteurs de terrain que sont les comités de bassin, car ce sont les meilleurs connaisseurs des besoins locaux et de la gestion locale, chaque bassin et chaque sous-bassin ayant leur spécificité.

Si je m'écarte un peu de notre sujet, madame la ministre, c'est-à-dire du projet de budget que vous nous présentez et que nous voterons, c'est parce que je souhaite que vous nous rassuriez en nous disant qu'il ne s'agit pas là d'une reprise en main par l'administration centrale de la gestion à la française de l'eau,...

M. Patrice Martin-Lalande.

Ce n'est pas imaginable !

M. Bernard Deflesselles.

Soyez rassuré, monsieur Marcovitch !

M. Daniel Marcovitch.

... mais d'une simple remise à p lat et d'une constitutionnalisation des redevances.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les députés, comme l'a dit Jean-Pierre Brard, il semblerait, à bien des égards, que la dégradation de l'environnement progresse plus rapidement que la montée en puissance du budget du ministère de l'environnement. C'est une analyse que je partage, et je citerai certains des exemples avancés par Jacques Pélissard, avant d'en ajouter d'autres.

Il a évoqué, en effet, le réchauffement climatique, les pollutions marines, les problèmes de sécurité alimentaire.

J'y ajouterai la dégradation de la qualité de l'eau par des p roduits phytosanitaires, l'accumulation de déchets nucléaires, la pollution des sols par des métaux lourds.

Mais il serait trop facile de considérer qu'on pourrait, grâce au budget de l'environnement, même en forte progression, réparer les dégâts causés par des pratiques, des comportements, dont les conséquences à long terme ont été longtemps sous-estimées, voire niées en dépit de l'alerte donnée par les écologistes et de leur invitation à opérer des changements stratégiques et politiques avant que les catastrophes ne soient avérées.

Mme Annette Peulvast-Bergeal.

Très bien ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Alors, je vois bien combien la tentation est grande de considérer que la quasi-totalité des ministères pourrait continuer le business as usual , pendant que le ministère de l'environnement serait sommé de trouver des solutions dans l'urgence si le problème est devenu d'une brûlante actualité.

Je m'attends, par exemple, à ce que l'on me demande de trouver rapidement des solutions techniques à l'incinération de millions de tonnes de déchets animaux et de farines animales, quand la décision de suspendre l'autorisation de commercialisation et d'usage de ces farines sera arrêtée, ce dont je ne doute pas. Mais ce sont ceux qui, aujourd'hui, me pressent de trouver des solutions, qui, hier, ricanaient quand certains faisaient remarquer qu'une vache, jusqu'à preuve du contraire, était un herbivore.

Nous devons garder présent à l'esprit la nécessité de penser des politiques en amont, privilégiant la prévention, et non pas des politiques en aval, même au moyen de budgets de l'environnement en forte progression.

Mme Nicole Bricq.

Et ça coûterait moins cher ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Cela dit, ce projet de budget est en progression pour la quatrième année consécutive, et je crois qu'il conforte la politique voulue par le Gouvernement dès 1998 dans le domaine de l'environnement.


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Clairement identifié au rang des priorités gouvernementales, ce budget de l'environnement progressera, en 2001, de 9 % en paiements et de 30 % en engagements - j'y reviendrai -, compte tenu, vous l'avez tous noté, de l'extension des compétences du ministère en matière de protection et de sûreté nucléaire. Il s'établit donc à 4 692 millions de francs en dotations ordinaires plus crédits de paiements et à 6 438 millions de francs en dotations ordinaires plus autorisations de programme.

Si cette évolution conforte dans la durée les avancées opérées, je ne vous cache pas que le poids des retards accumulés sur les dernières années, avec un budget en stagnation autour de 0,13 % du budget civil de l'Etat pendant une dizaine d'années, rendait hautement nécessaire une politique de rattrapage volontariste sur plusieurs exercices.

Même s'ils sont bons, ce dont je me félicite, les chiffres du projet de loi de finances pour 2001 doivent bien évidemment être relativisés au regard des sommes en jeu : le budget du ministère de l'environnement ne représente toujours que 0,26 % du budget de l'Etat. Bien des étapes devront encore être franchies pour concrétiser le véritable service public de l'environnement que Stéphane Alaize appelle de ses voeux et que M. Deflesselles semble craindre par-dessus tout.

La première caractéristique de ce budget tient à l'extension considérable du périmètre d'intervention du ministère en charge de l'environnement. Le transfert du financement de l'Institut de protection et de sûreté nucléaire, l'IPSN, du ministère de l'industrie à celui de l'environnement en 2001, pour un montant de 1 334 millions de francs, marque une réelle extension du champ d'action de ce ministère en matière de sûreté nucléaire.

Cet institut sera désormais placé sous la cotutelle du ministère.

Sur ce point, j'entends les inquiétudes qui se font jour deci, delà sur les conséquences de ce transfert pour l'avenir de l'IPSN. D'une manière générale, il ne m'apparaît pas que lorsque l'environnement prend la tutelle ou assure le financement d'un établissement public, celui-ci se porte plus mal ou éprouve davantage de difficultés sur le plan financier. Un exemple : le traitement réservé à l'INERIS depuis quelques années.

Je tiens donc à vous rassurer sur le fait qu'il n'y a pas de bouleversements immédiats à attendre de ce transfert.

La stratégie à moyen terme du Gouvernement pour cet établissement vise, bien évidemment, à assurer en permanence l'indépendance et la qualité scientifique de l'expertise qu'il est conduit à délivrer. Un projet de révision de ses statuts fait l'objet de textes en cours de préparation, qui visent à assurer une meilleure séparation des activités d'exploitation, d'appui technique et de contrôle et à rapprocher les contrôles de la sûreté nucléaire et de la radioprotection. Cette réforme se traduira par une séparation du CEA et par une fusion avec une partie de l'OPRI.

Sur le plan budgétaire, cette extension de périmètre est naturellement intégrée dans la progression globale de 9 % des crédits de paiement, qui porte le budget de l'environnement à 4 692 millions de francs, mais ne l'explique pas à elle seule. L'accroissement total de nos moyens est le résultat de mouvements croisés qui méritent explication.

Le transfert du budget de l'IPSN est, en effet, partiellement compensé par une baisse des crédits de paiement de l'ADEME, qui sont ramenés de 1,7 milliard de francs en 2000 à 500 millions cette année, par une adaptation aux besoins de trésorerie de l'agence réellement identifiés pour 2001.

Je comprends aisément que cette nette diminution des crédits de paiement de l'ADEME soulève des interrogations. Claude Billard les a exprimées assez clairement en donnant une partie de la réponse.

Je tiens, en tout cas, à vous rassurer pleinement sur le fait que la politique est conduite en plein accord avec l'équipe de direction de l'établissement et qu'elle ne portee n rien préjudice aux capacités d'intervention de l'ADEME. Elle n'est pas non plus la conséquence, comme certains peuvent le suggérer, d'une déficience dans la gestion de l'établissement.

Vous savez, en effet, que depuis des années les reports de crédits de paiement d'un exercice sur l'autre ont toujours été très importants à l'ADEME.

En 1997, j'ai trouvé une trésorerie tout à fait considérable et qui s'explique simplement par le fait que nombre de projets étaient bloqués depuis des années, notamment la mise en oeuvre de la loi de 1992 sur les déchets.

Nous avons augmenté, de façon un peu paradoxale, les moyens de l'ADEME, notamment par une relance de la politique de maîtrise de l'énergie, à hauteur de 500 millions de francs par an. A l'occasion de la mise en place de la TGAP, nous n'avons pas souhaité pénaliser l'établissement, qui était alors dans un contexte de mutation profonde, et nous avons décidé de le doter, pour ses premières années, d'un montant de crédits de paiement égal à celui des autorisations de programme ouvertes, par dérogation aux règles de financement habituellement retenues. Or, les investissements soutenus par l'ADEME étant par nature de grande ampleur et conduits sur un échéancier pluriannuel, il était bien normal de constater un rythme réel des dépenses assez nettement en dessous des crédits de paiement disponibles...

M. Jacques Pélissard.

Les taux avaient baissé ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

... et cela d'autant plus que nous continuions, année après année, à promener la trésorerie excédentaire constatée en 1997.

M. Bernard Deflesselles.

Tout va bien ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

La relance de la politique des déchets a été tout à fait vigoureuse, avec la révision des plans départementaux de traitement des ordures ménagères, mais aussi, et cela a été noté tout à l'heure, avec la décision d'augmenter le taux des aides au début de 1998 pour permettre de relancer la mécanique. Nous avons dû ramener ce taux à un niveau plus raisonnable en 1999, mais je noterai qu'il reste supérieur à celui de 1997.

M. Pélissard connaît parfaitement l'évolution du coût du traitement de la tonne de déchets. La combinaison des taux d'aide de l'ADEME, des barèmes d'intervention d'Eco-emballage et de la baisse de la TVA sur la mise en décharge des déchets, conduit en fait à une baisse du coût à la tonne qui, j'en conviens, reste conséquent, mais qui ne saurait justifier le reproche d'abandon d'une politique ambitieuse de traitement des ordures ménagères que certains d'entre vous ont cru pouvoir adresser.

De plus, si nous avons attendu l'exercice 2001 avant de modifier la règle de financement à l'ADEME, générant de ce fait une accumulation exceptionnelle de trésorerie, c'est parce que le calendrier de préparation de la loi de finances pour 2000 qui s'établit, vous le savez, au


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premier trimestre de l'année 1999, était trop rapproché de la mise en place de la TGAP pour que nous puissions disposer du recul suffisant pour envisager une adaptation des modalités de financement de l'établissement. La règle d'un crédit de paiement pour une autorisation de programme avait donc été maintenue en 2000.

Il s'agissait aussi de rassurer ceux qui, comme Claude Gaillard, craignaient le passage par la case Bercy. Je tenais beaucoup ce que le signal d'une stabilité des moyens d'intervention de l'ADEME soit donné.

Aujourd'hui, au vu des reports disponibles à la fin de l'exercice 1999, connus avec certitude au moment de l'élaboration du projet de loi de finances pour 2001, et q ui s'établissent à 3 648 millions de francs, dont 1 493 millions de francs sur crédits budgétaires, le Gouvernement a décidé d'adapter le montant des crédits de paiement pour 2001 aux besoins effectifs de l'établissement.

Vous conviendrez avec moi qu'il s'agit d'une normalisation de la situation, d'un ajustement des crédits de l'ADEME à ses prévisions réelles de dépenses, mais en a ucun cas d'une pénalisation des moyens réels de l'agence.

Par ailleurs, en ce qui concerne les procédures de gestion de l'établissement, il est bien évident que les conclusions de la mission conduite par l'inspection générale des finances au début de cette année seront pleinement prises en compte, notamment dans le cadre du contrat pluriannuel qui doit être conclu prochainement entre l'Etat et l'agence. L'ensemble de l'équipe de l'ADEME y travaille d'ores et déjà.

En entendant M. Michel Suchod tout à l'heure, on pouvait avoir l'impression que cette gestion était décidément désastreuse. Toutefois, j'ai été plutôt rassurée en lisant le travail de la Cour des comptes comme celui de l'Inspection générale des finances. Il s'agit d'un péché véniel et non d'un dysfonctionnement majeur.

M. Claude Gaillard.

M. Suchod n'a pas compris ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Nous souhaitons donc évidemment tirer le meilleur parti de ce travail pour améliorer encore la gestion. J'ai noté, en tout cas, une interpellation de M. Michel Suchod qui me paraît juste : les moyens de l'ADEME consacrés à la gestion de l'établissement sont sans doute encore insuffisantes.

Si l'on ne tient pas compte de l'ADEME ni du transfert de l'IPSN, le socle du budget de l'environnement, ses politiques propres, progressent à structure constante de 10,8 % entre 2000 et 2001. Je remercie M. Claude Billard de l'avoir relevé.

Au-delà de ces chiffres de progression qui n'ont qu'une valeur très relative, même quand ils sont bons, je préfère prendre comme références l'efficacité de la dépense publique et l'adéquation des moyens d'un ministère à ses missions plutôt qu'une valeur brute de croissance budgétaire. Je tiens aussi à insister sur la continuité des efforts et sur la cohérence de la politique conduite depuis trois ans pour transformer ce ministère afin qu'il soit capable de mieux assurer les missions qui lui sont confiées.

Le ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement, tel que le photographie le projet de budget pour 2001, n'a en effet plus grand-chose à voir avec celui de 1997 ! Les changements opérés au cours des trois dernières années dans sa structure et dans son périmètre d'intervention répondent à l'évolution des attentes des citoyens. Parce qu'il ne saurait y avoir de conduite efficace des politiques publiques en l'absence d'une structure étoffée de conception et de mise en oeuvre, j'ai fait du renforcement des moyens du ministère en charge de l'environnement l'une des priorités de long terme de mon action.

Ainsi que je l'avais annoncé dès ma prise de fonctions, je n'ai eu de cesse de construire une administration et, par ce biais, un service public de l'environnement à la hauteur de ses responsabilités.

Les effectifs du ministère ont progressé de près de 30 % depuis 1997, chiffre à mettre en perspective avec une croissance limitée à 2 % durant les quatre exercices précédents, de 1994 à 1997. Avec la création de près de 700 emplois en quatre exercices budgétaires au sein du ministère dont 300 en 2001, auxquels il faut ajouter 880 postes créés dans les établissements publics, ce sont plus de 1 500 agents supplémentaires qui mettent leur compétence au service de la mise en oeuvre des politiques environnementales. Nous avons donc opéré un réel rattrapage du retard accumulé au fil des ans, même s'il reste encore beaucoup à faire.

Sur la base de l'ouverture de 300 emplois en 2001, j'ai décidé, cette année, d'accorder une priorité, dans les affectations, à la situation des services déconcentrés.

Cela concernera d'abord les DIREN afin de permettre une mise à niveau de leurs moyens au regard de la complexité des enjeux nouveaux : 137 postes budgétaires au total leur seront ainsi ouverts.

Monsieur Deflesselles, vous ne pouvez donc pas prétendre que l'augmentation des effectifs en administration centrale se ferait au détriment des services déconcentrés.

M. Bernard Deflesselles.

Si ! Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

L'année dernière, nous avions donné la priorité aux services déconcentrés et créé très peu de postes en administration centrale. Pour 2001, nous avons décidé un équilibre plus raisonnable au profit de cette dernière, mais les DIREN et les DRIRE ne sont pas mal traitées.

Ainsi, j'ai aussi souhaité poursuivre l'appui aux services d'inspection des installations classées, maîtres d'oeuvre de la politique ambitieuse de prévention des pollutions et des risques que nous entendons mener. Quand Michel Suchod a évoqué le chiffre de cinq créations d'emploi dans les installations classées, il visait les cinq nouveaux postes dans les directions des services vétérinaires au-delà de ceux créés l'année dernière. En revanche, il ne prenait pas en compte les cinquante postes qui seront ouverts en DRIRE pour les inspections des installations classées.

Les services déconcentrés du ministère auront ainsi été confortés de 431 postes budgétaires depuis 1998, dont 272 en DIREN, 134 en DRIRE et 25 en DSV. Les services en charge de l'inspection des installations classées auront bénéficié de près de 40 % de ce renforcement sur la période.

Sortant d'une situation de sous-effectif dramatique, le ministère acquiert peu à peu les moyens de répondre aux sollicitations et aux attentes de la population. D'autres étapes devront suivre.

J'ai également attaché la plus grande attention au renforcement des capacités d'expertise et d'évaluation sur lesquelles mon ministère peut appuyer ses décisions et son action.

A cet égard, je veux citer d'abord la création d'une nouvelle direction d'administration centrale : la direction des études économiques et de l'évaluation environne-


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mentale, qui a vu le jour en 2000. Elle sera un instrument d'expertise, de conseil et d'aide à la décision. Avec elle, mon ministère s'est doté des moyens d'évaluer les conséquences économiques et l'impact environnemental des politiques dont j'ai la responsabilité ainsi que des politiques conduites par les autres ministères.

Ensuite un service d'inspection générale de l'environnement, installé cette année, me permettra d'évaluer l'efficacité des services dans la mise en oeuvre des politiques définies par mon ministère, qu'il s'agisse des services propres du ministère, de ses établissements publics ou des services des autres ministères ayant des responsabilités en matière environnementale.

J'ai bien entendu l'expression de certaines inquiétudes sur la nécessité de garantir la cohérence de l'intervention de ces structures. Leurs missions sont distinctes et néanmoins complémentaires : expertise et appui technique en amont pour la D4E, inspection et évaluation des politiques conduites en aval pour l'inspection générale de l'environnement. En 2001, un institut de formation de l'environnement, dont Mme Annette Peulvast-Bergeal a souligné l'intérêt, verra également le jour. Il sera destiné à former aussi bien les agents de mon ministère que ceux des autres administrations ayant à intervenir dans ce domaine. Cette « école de l'environnement » aura vocation à assurer non seulement la formation initiale des agents de certains de nos établissements publics ONC, CSP et parcs nationaux mais aussi la formation continue de l'ensemble des agents du ministère. Je souhaite également qu'elle soit en mesure d'assurer le verdissement des formations dispensées dans d'autres établissements, notamment les écoles d'ingénieurs auxquelles le ministère fait appel.

Il s'agira d'une structure souple, d'un service à compétence nationale placé auprès du directeur général de l'administration, des finances et des affaires internationales qui jouera le rôle de tête de réseau des établissements existants tels que le GIP-ATEN, les écoles du Bouchet et du Paraclet pour la formation des gardes-chasse et des gardes-pêche, et qui collaborera avec les institutions sous tutelle d'autres ministères.

Ce renforcement interne s'est accompagné d'une extension notable du périmètre d'intervention du ministère, je l'ai déjà évoquée, directement perceptible à la lecture du PLF 2001. A côté du transfert du budget de l'institut de protection et de sûreté nucléaire sur lequel je ne reviendrai pas, le budget 2001 anticipe la mise en place effective de la future agence de sécurité sanitaire environnementale, établissement public sous double tutelle des ministères de l'environnement et de la santé, en prévoyant une dotation provisionnelle de 40 millions de francs répartie sur les deux ministères.

Ces évolutions auront fait passer le budget de mon ministère de moins de 2 milliards en 1997 à 4,7 milliards en 2001, et même à 5,2 milliards de francs compte tenu de la contribution du fonds national de solidarité pour l'eau. Ce budget témoigne donc incontestablement de la priorité réelle que le Gouvernement accorde à l'environnement.

Des moyens sont également dégagés pour de nouveaux projets au service d'une politique environnementale de grande ambition. En effet, nous avons beaucoup avancé sur d'importants chantiers depuis 1997.

Tel a d'abord été le cas de l'implication du ministère dans le programme « Nouveaux services - nouveaux emplois » qui a permis l'embauche de 26 000 jeunes dans le secteur de l'environnement. A ce propos, je tiens à remercier Michel Suchod et Stéphane Alaize de l'avoir souligné parce que cela nécessite beaucoup d'investissement de la part tant des agents du ministère et de nos partenaires dans le monde associatif que des collectivités locales.

Je veux également évoquer le soutien accru au monde associatif, non seulement en termes financiers, mais aussi par un encouragement à une implication renforcée des associations dans l'ensemble des enceintes de prises de décisions publiques. En effet, j'estime que les associations sont des partenaires incontournables de la mise en oeuvre de nos politiques. J'entends donc favoriser leur participation aux instances publiques et conforter leur rôle d'opérateur, notamment dans le cadre des contrats de plan.

Une importante augmentation des crédits contractualisés au bénéfice des associations est ainsi prévue en 2001, avec une mesure nouvelle de 6,9 millions de francs, complétée d'un accroissement de 2 millions de francs des dotations destinées à soutenir l'emploi associatif au travers des postes FONJEP. Le nombre de postes subventionnés sera ainsi porté à 207 en 2001.

A cet égard, M. Deflesselles a cru pouvoir parler de clientélisme.

M. Bernard Deflesselles.

Oui.

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Je peux le rassurer : il n'en est rien.

D'une part, l'écrasante majorité de ces sommes n'est pas distribuée par le ministère de l'environnement, mais déléguée aux préfets et utilisée dans le cadre de procédures contractuelles sur la base de critères objectifs arrêtés d'un commun accord avec l'ensemble des partenaires concernés.

D'autre part, il serait assez déraisonnable voire incompréhensible de demander au monde associatif de s'engager, par exemple dans le programme « Nouveaux services nouveaux emplois », d'être partenaires de l'Etat dans une politique aussi ambitieuse que celle de l'entretien des espaces naturels et de la lutte contre le chômage des jeunes, et de ne pas reconnaître ces efforts.

Nous l'avons donc fait et je peux vous assurer, monsieur Deflesselles, que nous sommes extrêmement vigilants et très rigoureux quant à l'utilisation de ces fonds.

Je ne décide jamais seule ou avec mon cabinet l'octroi d'une subvention. Nous le faisons toujours sur la base d'un dossier étayé en utilisant les critères qui ont été arr êtés et qui sont complètement transparents.

Je vous invite à venir constater avec quel souci nous travaillons pour échapper à cette critique.

M. Jean-Pierre Brard.

C'est comme à Paris ! ( Sourires.

)

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Parallèlement, et afin de disposer de données objectives sur l'évaluation de notre action, j'ai demandé à la toute nouvelle inspection générale de l'environnement d'établir un premier bilan de la politique de soutien au monde associatif conduite par le ministère.

Je veux préciser que le monde associatif ne se résume pas, pour nous, aux associations de protection de l'environnement. Nous aidons très souvent des associations d'élus, des associations qui rassemblent de très nombreux partenaires au niveau local, des fédérations de chasseurs, des associations de pêche.

M. Bernard Deflesselles.

Oh ! Peu, certainement ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Mais si, monsieur Deflesselles, pas toutes, mais faites votre travail.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 NOVEMBRE 2000

M. Bernard Deflesselles.

Je l'ai fait.

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Consultez la liste et regardez les projets qui sont financés.

M. Jean-Pierre Brard.

Demain matin sur le pré vert ! (Sourires.)

M. le président.

Monsieur Brard, ce n'est pas vous qui avez la parole.

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Ces avancées importantes sont également notables, entre autres domaines, dans la réorientation de la politique des déchets et dans le renforcement des crédits de l'ADEME consacrés à cette politique, ou dans la lutte contre la pollution de l'air qu'illustre de manière symbolique la journée « en ville sans ma voiture ».

Une étape nouvelle a été franchie en 2000 qui doit permettre de constater, dans les sept années à venir, l'intégration des préoccupations environnementales dans les contrats de plan Etat-région. Les crédits contractualisés du ministère sont passés de 1,3 à 3,2 milliards de francs sur la période, auxquels s'ajoutent 3,3 milliards de crédits de l'ADEME. L'effort est encore modeste puisqu'il ne représente que 3 % des crédits contractualisés, mais il s'agit d'une inflexion de long terme des politiques sectorielles, dont les premières incidences se manifestent dans le budget 2001.

Pour 2001, parallèlement à la consolidation des politiques fondamentales du ministère, telles celle de l'eau ou celle de la nature et des paysages, le projet de budget traduit, pour la troisième année consécutive, la volonté de consentir un effort très significatif en faveur du renforcement de la politique de prévention des risques et de la lutte contre les nuisances.

La politique de prévention des risques naturels et des inondations constitue un axe fort des contrats de plan

Etat-région conclus pour la période 2000-2006 dans leur v olet environnemental. Malheureusement, toutes les régions n'ont pas voulu s'engager alors que presque toutes étaient concernées par la politique des risques. Je souhaite donc que nous continuions à convaincre les régions de travailler avec nous dans ce domaine.

Je voudrais que ces contrats contribuent à ce que, enfin, dans notre pays, la prévention soit systématiquement privilégiée dans la lutte contre les risques tant naturels, qu'industriels ou technologiques et contre les pollutions de toutes origines, par rapport à la réparation des dommages. Nous n'en sommes malheureusement pas encore là.

S'agissant des plans de prévention des risques naturels prévisibles, les PPR, je poursuis la réalisation de l'objectif, rappelé par Stéphane Alaize, que je me suis fixé : mettre en place cinq mille plans à l'horizon 2005 dans les communes les plus exposées à un risque naturel. Au 1er octobre 2000, 2 400 PPR approuvés étaient recensés, auxquels s'ajoutent 2 638 documents prescrits et en cours de réalisation.

Dans cette perspective, les moyens financiers consacrés à l'élaboration des plans et des documents d'information préventive des citoyens ont doublé depuis 1997.

Par ailleurs, la possibilité ouverte l'an dernier de financer les études préalables à l'élaboration des PPR sur le fonds de prévention des risques naturels majeurs, permet encore d'accroître significativement les moyens budgétaires de l'Etat consacrés à cet objet.

Pour ce qui est de la prévention des inondations, le Gouvernement entend tirer tous les enseignements des événements dramatiques de la fin de l'année 1999, et s'attache à améliorer sa politique de prévention de ce risque naturel le plus fréquent en France. Pour limiter le plus possible les conséquences de ces catastrophes, la stratégie de l'Etat repose sur le tryptique : prévention, prévision, protection.

En matière de prévention, le ministère entend accélérer le rythme de réalisation des PPR inondations, dont l'objectif est de cartographier précisément les zones soumises à ce risque. Sur les 2 400 PPR approuvés au 1er octobre, 1 876 traitent du risque d'inondations et 171 PPR inondations ont été approuvés depuis le 1er janvier 2000.

A la suite du rapport de M. Yves Dauge, le ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement a ainsi mis l'accent sur les procédures de concertations préalables à l'élaboration des plans et financé de premiers diagnostics sur la sensibilité aux inondations d'établissements industriels proches de la Loire.

Pour assurer dans les meilleures conditions la prévision de survenue de ces événements, l'Etat doit, par ailleurs, disposer d'un dispositif d'alerte météorologique performant. Ainsi, une convention passée avec Météo-France permet un meilleur accès aux données pluviométriques.

Enfin, le ministère a accru ses interventions en faveur de la modernisation du système d'annonce de crues, notamment par le financement de radars. Nous en avons inauguré un il y a quelques semaines à Bollène ; un autre le sera bientôt dans la Haute-Loire.

Dans le domaine de la mémoire des risques et du retour d'expérience, le ministère a engagé des travaux dans un cadre partenarial réunissant assureurs et administrations afin d'améliorer le système d'information utilisé pour recenser les événements naturels significatifs. Les b ases de données actuelles seraient ainsi utilement complétées par des informations retraçant une description plus fine de l'événement, en qualifiant l'intensité, et renseignant sur le coût des dommages.

Le budget de la politique de prévention des inondations sera, à cette fin, largement renforcé en 2001, pour assurer le financement des actions contractualisées avec les régions, notamment dans le cadre des avenants conclus à la suite des événements de décembre 1999 : les moyens de la direction de l'eau seront renforcés de 60 millions de francs en 2001, dont 40 millions de subventions accordées aux collectivités locales pour l'amélioration des ouvrages de protection des villes contre les inondations fluviales, pour atteindre 274 millions de francs en 2001.

Ces moyens permettront de conforter également la protection des zones déjà urbanisées, troisième volet de l'intervention pour lequel l'Etat ne dispose pas d'une responsabilité directe, mais intervient comme « facilitateur ».

Dans la ligne des conclusions du rapport que m'a remis M. Galley, au nom des six présidents de comité de bassin - et je l'en remercie encore - sur les conditions d'intervention des agences de l'eau en matière de prévention des inondations, j'ai également souhaité que plusieurs dispositions sur ce sujet figurent dans le projet de loi sur l'eau qui vous sera soumis au printemps. L'instauration d'une redevance pour modification du régime des eaux procède de cette logique.

Outre l'intervention des agences de l'eau, des dispositions législatives sont prévues pour élargir la capacité d'intervention des collectivités locales dans la gestion des cours d'eau en situation d'urgence, et permettre aux pré-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 NOVEMBRE 2000

fets d'instituer des servitudes d'utilité publique au bénéfice des collectivités territoriales, garantissant le bon fonct ionnement d'aménagements destinés à la rétention temporaire des crues. Par ailleurs, je souhaite que le fonds de prévention des risques majeurs puisse être mobilisé en matière de prévention des inondations.

Ces propositions sont destinées à renforcer l'efficacité des efforts financiers de solidarité décidés par le Gouvernement pour la prévention des inondations.

Monsieur Marcovitch, outre le renforcement du principe pollueur-payeur dans la réforme des redevances perçues par les agences de l'eau, un projet de loi sur l'eau est en préparation. J'ai souhaité y associer largement les parlementaires, qu'ils siègent dans les comités d'administration des agences et dans les comités de bassin, ou qu'ils soient membres du groupe de travail sur l'eau de l'Assemblée, auquel vous participez de façon active.

Ce projet de loi prévoit de faire voter par le Parlement en 2001 les règles relatives à l'assiette de ces redevances et l'encadrement de leurs taux, ainsi que des programmes pluriannuels d'intervention pour les années 2003-2008. Je n'y vois aucune recentralisation, car ce sont les parlementaires, et non le seul Gouvernement, qui assureront cet encadrement. Comme en matière de collectivités territoriales, il appartiendra au Parlement d'être le garant du traitement équitable de toutes les catégories de redevables.

Dans l'esprit de la directive-cadre sur l'eau qui vient d'être adoptée, les conseils d'administration des agences et les comités de bassin conserveront une grande marge de manoeuvre pour l'adoption des programmes pluriannuels d'intervention et des SDAGE, pour le vote des taux, pour le choix des zonages de redevances, dans la limite des fourchettes et des critères nationaux fixés par le Parlement. Ils pourront également continuer à définir les conditions des aides et leur mode d'attribution.

Depuis 1996, la représentation dans les instances de bassin des grandes agglomérations, des consommateurs, des associations de protection de la nature a été accrue. Je n'exclus pas d'adapter à nouveau cette représentation en fonction du renforcement de l'application du principe pollueur-payeur à certaines catégories de redevables.

Enfin, la création du fonds national de solidarité pour l'eau a permis de lancer des actions innovantes : le plan pesticide, les économies d'eau dans les quartiers relevant de la politique de la ville, le plan « après-mines » en Lorraine, le plan de sauvegarde des zones humides. Elle a permis également d'amplifier des actions de solidarité préexistantes, telles que la restauration des rivières ou l'assainissement outre-mer. Il ne s'agit donc pas d'augmenter de façon artificielle les moyens du ministère de l'environnement, mais bien de financer des actions d'intérêt collectif, notamment des actions de connaissance des milieux et de solidarité.

J'ai évoqué assez longuement la question du risque inondations, mais je tiens à insister sur le fait que nous souhaitons agir dans tous les domaines à risques, notamment pour renforcer les moyens affectés à leur connaissance.

A cet égard, nous avons décidé de renforcer les moyens de l'INERIS, qui est un instrument important de connaissance pour le ministère. Ils progresseront fortement en 2001, avec un accroissement de 20 millions de francs en fonctionnement, ce qui autorisera la création d'une vingtaine d'emplois, et une hausse de 17 millions de francs de sa subvention d'investissement, soit 39 %. Vous vous souvenez sans doute que les moyens de l'INERIS avaient été érodés, amputés, année après anné e, lorsqu'il lui avait été demandé d'avoir davantage recours à des contrats privés. Je souhaite faire en sorte que l'autonomie et l'indépendance de cet organisme face aux acteurs privés soient garanties. C'est pourquoi je veux renforcer ses moyens.

Dans la lutte contre les nuisances, la première dont se plaignent les Français reste la pollution sonore, longuement évoquée par Jean-Pierre Blazy. Afin d'en prévenir les effets, la lutte contre le bruit bénéficiera d'une mesure nouvelle de 100 millions de francs en 2001 destinée à assurer notamment le financement de l'insonorisation des façades des bâtiments au voisinage des points noirs du bruit dus aux transports terrestres.

Parallèlement, la mesure exceptionnelle de 75 millions obtenue en 2000 pour la lutte contre le bruit au voisinage des aérodromes a été consolidée dans le budget 2001 de l'ADEME, portant à 159,5 millions de francs ses crédits d'intervention dans ce domaine.

Par ailleurs, en application des recommandations formulées par l'inspection générale des finances, l'ADEME s'est attachée à améliorer son dispositif de gestion des dossiers au titre de l'indemnisation des riverains au voisinage des aéroports, notamment par une simplification de ses procédures internes - déconcentration au niveau des délégations régionales, instruction directe des demandes de diagnostic - et par un renforcement des effectifs de la délégation d'Ile-de-France affectés à cette question.

Cet ensemble de mesures doit permettre de réduire la durée de l'attente pour les demandes de diagnostic de dix-huit mois actuellement - ce qui est beaucoup trop long - à six mois, à l'horizon du premier trimestre 2001.

Ce délai, encore trop long, il pourra pourtant être considéré comme un premier progrès. Je crois pouvoir ainsi répondre aux soucis exprimés tour à tour par Jean-Pierre Blazy et Claude Billard et que je partage.

L'attention accordée à la question du bruit trouve également sa traduction au niveau communautaire dans le soutien qu'apporte la France à la proposition de directive cadre du Conseil et du Parlement sur le bruit que j'ai souhaité inscrire au rang des priorités de la présidence française dans le domaine de l'environnement. Cette directive, qui a pour objet d'évaluer mieux et de façon harmonisée l'exposition au bruit partout en Europe et, sur cette base, de développer des stratégies de prévention et de réduction de cette exposition, devrait constituer un progrès substantiel dans la prise en compte de cette nuisance.

J'ai bon espoir que le conseil des ministres des 18 et 19 décembre prochain puisse adopter une position commune sur cette proposition de directive communautaire relative au bruit.

Je tiens en tout cas à remercier Jean-Pierre Blazy pour l'avis du conseil national du bruit qu'il a bien voulu me transmettre et qui permet d'éclairer les travaux menés dans les instances communautaires sur le projet de directive.

Annette Peulvast-Bergeal a évoqué les questions de pollution de l'air, comme Claude Gaillard. Je rappelle en quelques mots que nous entendons maintenir à un haut niveau notre investissement dans cette lutte pour un air de meilleure qualité.

Pour ce qui est des moyens financiers mobilisés au profit des associations de gestion des réseaux de surveillance de la qualité de l'air, j'indique d'abord que nous avons effectivement prévu une réduction des crédits


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 NOVEMBRE 2000

consacrés à l'équipement des réseaux, car l'essentiel de l'effort d'équipement est aujourd'hui réalisé au profit de l'acquisition de capteurs de surveillance de la pollution atmosphérique. Même si le travail des associations est plus riche et que de nouveaux polluants sont aujourd'hui mesurés, on peut considérer que l'effort à fournir n'est pas équivalent à celui qui a déjà été consenti en la matière.

En revanche, j'ai souhaité renforcer les crédits d'aide au fonctionnement des associations, qu'il s'agisse de consolider les effectifs ou les moyens de fonctionnement quotidiens de ces associations.

Le ministère consacrera 70 millions de francs en 2001 au fonctionnement des réseaux, soit 15 millions de francs de plus qu'en 2000. Une autre enveloppe de 70 millions sera affectée à la poursuite d'études et d'expertises concernant la pollution de l'air et la surveillance de la qualité de l'air ainsi qu'à la mise en oeuvre des plans régionaux de la qualité de l'air et des plans de protection de l'atmosphère évoqués par M. Gaillard.

C oncernant les véhicules propres, de nombreuses mesures ont déjà été arrêtées en 1998, 1999 et 2000. Je ne les rappellerai pas. Après l'abaissement au niveau du plancher communautaire des taxes applicables au GPL et au GNV, après la mise en place d'une prime d'équipement au GPL pour les taxis et d'une prime à l'achat de cyclomoteurs électriques, j'ai souhaité que soit élaboré un dispositif d'aide à l'acquisition de véhicules propres géré à la fois par l'ADEME et par le secrétariat d'Etat à l'industrie. A titre d'exemple, près de 10 millions de francs d'aides directes à l'acquisition de véhicules propres ont été attribués directement en 1999 et 13 millions via l'ADEME. Cette politique doit se poursuivre mais, à ce que je sais, les parlementaires ont pu mesurer ces derniers jours les difficultés qui subsistent pour faire partager cette conviction !

M. Yves Cochet.

On va y revenir !

Mme Nicole Bricq.

La discussion n'est pas finie ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Je suis heureuse de vous l'entendre dire, mes chers collègues. Je ne me satisferai pas, quant à moi, d'une politique de l'environnement qui serait uniquement punitive. Il faut bien sûr prendre des mesures dissuasives à l'égard des pollueurs mais il faut aussi adopter des mesures qui encouragent les comportements vertueux.

M. Yves Cochet.

Voilà ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

J'y reviendrai tout à l'heure !

M. Patrice Martin-Lalande.

Il faut encourager le filtre à particules, par exemple.

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Non ! Ce qui est rentable doit se faire sans aide publique. Il ne faut pas non plus exagérer !

M. Patrice Martin-Lalande.

Cela permettrait de le diffuser plus rapidement ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Mais non !

M. Jean-Pierre Brard.

Vous êtes un libéral, monsieur Martin-Lalande ! Soyez conséquent ! Ne gaspillez pas l'argent public.

M. le président.

Madame la ministre, poursuivez.

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

J'en viens aux crédits prévus pour la politique de la nature et des paysages.

Après avoir connu de très fortes progressions au cours des deux dernières années, avec des taux de croissance de 22 % en 1999 et de 14 % en 2000, les crédits consacrés à la politique de la nature et des paysages sont consolidés à ce haut niveau en 2001 soit 720 millions de francs en

« dépenses ordinaires plus crédits de paiement », en progression de 0,5 % par rapport à 2000.

Une priorité particulière est donnée cette année à la politique d'acquisition conduite par le conservatoire du littoral - qui bénéficiera à ce titre d'une mesure de 20 millions de francs d'autorisations de programmes et de sept créations de postes - et au renforcement du fonctionnement des structures d'appui que sont les parcs nationaux, qui bénéficieront de seize créations d'emplois.

Comme vous le voyez, les moyens d'intervention évoqués tout à l'heure par votre rapporteur sont loin d'être en baisse. Je pense qu'il y a eu une confusion dans la transmission des chiffres. Les crédits du conservatoire du littoral sont bien en croissance.

Le Gouvernement vous proposera dans quelques instants un amendement visant à un transfert de crédits interne au budget de l'établissement - il y est proposé la transformation de 4,6 millions de francs de crédits d'investissement en crédits de fonctionnement - afin de lui permettre de faire face aux obligations liées à son statut de propriétaire dans le respect des règles d'imputation budgétaire.

La baisse toute relative de 3,5 % des crédits du FGMN, qui passent de 242 millions à 233 millions de francs en 2001 - qui a fait naître, je le sais, quelques inquiétudes chez certains d'entre vous -, s'explique par les procédures en cours de négociation pour la mise en oeuvre des documents d'objectifs dans le cadre de Natura 2000, qui en ont ralenti le rythme de consommation. Au total, 109 millions seront en 2001 destinés à accompagner la mise en place de ce réseau : cette somme permettra l'élaboration de nouveaux documents d'objectifs, l'animation et le suivi scientifique des sites, l'élaboration des cahiers d'habitats oiseaux et des actions de formation des gestionnaires de sites.

Les autres interventions du fonds ne seront pas affectées par cette baisse de crédits, en particulier celles qui concourent indirectement, car ce n'est pas l'objet du fonds, à la prévention des risques naturels, telles que les mesures en faveur du maintien des zones humides et des bonnes pratiques d'entretien en forêt, ou la restauration des bocages et des haies qui contribuent à la lutte contre les crues.

M. Billard a plaidé pour une rééavaluation du budget des réserves naturelles. J'ai reçu les responsables du réseau des réserves naturelles, ainsi, d'ailleurs, que ceux du réseau des conservatoires régionaux des espaces naturels.

L'action de lobbying de ces réseaux est connu, et j'y suis sensible. J'y ai d'ailleurs été tellement sensible que les moyens de la protection de l'environnement de la nature ont progressé de façon très forte en 1999 et 2000. Et c'est cette très forte progression qui explique la stabilisation d'aujourd'hui. En 2000, le budget du réseau des réserves naturelles a connu une augmentation de 16 % tant en fonctionnement qu'en investissement.

J'ai bien noté que de nouveaux projets allaient arriver à maturité en l'an 2001. Nous aurons les moyens de faire face à leur mise en place. La superficie des réserves naturelles atteindra ainsi 547 000 hectares.

Je souhaite également que les réserves puissent mobiliser leur capacité d'autofinancement sans nuire à leur vocation première de conservation, et que des finance-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 NOVEMBRE 2000

ments complémentaires des collectivités locales prévus à cet effet puissent être utilisés : je pense notamment au produit de la taxe départementale des espaces naturels sensibles, qui n'est pas perçue par tous les départements.

M. Patrice Martin-Lalande.

Hélas ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Je précise que les réserves peuvent évidemment bénéficier des moyens mobilisés au titre de Natura 2000 quand elles sont concernées.

Quelques mots sur la transposition de la directive Natura 2000.

J'entends bien les préoccupations qui s'expriment face à la proposition du Gouvernement de procéder à cette transposition par voie d'ordonnance. Il m'apparaît toutefois absolument indispensable que la France qui, compte tenu de son exceptionnelle diversité biologique, a une responsabilité particulière dans la constitution du réseau Natura 2000, soit en mesure de répondre très rapidement à ses obligations communautaires.

Or, à cause de plusieurs années d'immobilisme sur ce dossier, ...

M. Patrice Martin-Lalande.

Depuis 1997 ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

... elle se trouve aujourd'hui pénalisée pour avoir tardé à transposer les directives « oiseaux » et

« habitats ».

Pour juger de l'urgence de la transposition, il faut rappeler le chemin parcouru. A mon arrivée au ministère de l'environnement, le processus était bloqué, les gouvernements précédents ayant fui leur responsabilité communautaire. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Depuis, de réels progrès ont été accomplis, avec la transmission de 1 029 sites à la Commission et la mise en place d'instances de concertation, tant au niveau local que national avec le comité national de suivi Natura 2000, qui associe l'ensemble des partenaires, à savoir les associations d'élus, les chasseurs, les pêcheurs, les agriculteurs, les associations de protection de l'environnement, et j'en passe ! La condamnation de la France, le 6 avril 2000, pour défaut de transposition implique qu'elle sera prochainement soumise à des astreintes financières journalières importantes. De surcroît, afin d'obtenir des engagements en matière de transposition et de transmissions de sites, la C ommission conditionne désormais l'attribution des fonds structurels européens au respect de nos engagements communautaires.

M. Patrice Martin-Lalande.

C'est du chantage ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Le chantage est de Michel Barnier. Je suis donc ravie de vous l'entendre dire !

M. Patrice Martin-Lalande.

Cela ne change rien !

M. Jean-Pierre Blazy.

C'est dur mais c'est comme ça !

M. Jean-Pierre Brard.

On n'est jamais trahi que par les siens ! Soyez solidaire ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Dans ce contexte, le Gouvernement souhaite aujourd'hui répondre à ses obligations communautaires.

Le choix de l'ordonnance résulte de l'urgence de cette transposition face à un calendrier parlementaire très chargé, étant entendu que son contenu demeure très proche du texte de la directive.

La seule marge de transposition repose sur le choix des outils de protection des zones Natura. Le Gouvernement a opté pour le recours à l'outil contractuel, qui fait aujourd'hui l'objet d'un fort consensus chez l'ensemble des parties intéressées.

M. Patrice Martin-Lalande.

Il n'y a pas de débat ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Certains, après avoir tout fait pendant des années pour reporter la transposition de l'article 6 de la directive...

M. Patrice Martin-Lalande.

Depuis trois ans et demi que vous êtes au gouvernement ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l 'environnement.

... semblent vouloir faire d'une démarche simple et aujourd'hui largement dépassionnée, une sorte de « match retour » de la loi chasse.

M. Patrice Martin-Lalande.

Ça n'a rien à voir ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Je n'entends absolument pas confisquer le débat, mais je considère que la discussion qui a lieu depuis trois ans et demi et qui s'est déroulée d'abord d'une façon conflictuelle, puis passionnelle, puis dépassionnée, puis aujourd'hui consensuelle au sein du comité national de suivi Natura 2000...

M. Jacques Pélissard.

Depuis octobre 1999.

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

... a été largement menée. Et je ne compte plus les questions d'actualité qui m'ont été posées sur ce sujet au fil du temps ! (« Et alors ? » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Patrice Martin-Lalande.

Acceptez d'en débattre ici, madame ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Loin de moi l'idée de fuir le débat ! Si vous trouvez une autre solution, j'en serai ravie.

M. Patrice Martin-Lalande.

C'est vous qui êtes au gouvernement.

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Mais, pour être directe, non seulement je suis perplexe, mais encore et surtout je ne suis absolument pas convaincue que ce soit ce petit texte-là, parmi tous ceux qu'il vous est proposé d'adopter par ordonnance, qui mérite le plus d'accaparer l'énergie et le temps des parlementaires.

M. Jean-Pierre Blazy.

Ça, c'est vrai ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Le texte sur la mutualité, celui sur La Poste, ou encore celui sur les autoroutes me semblent plus propices à cela.

Ne transformez pas une mesure qui, aujourd'hui, est largement dépassionnée et soutenue par tous ceux qui ont compris que nous privilégierions la démarche contractuelle et que nous ne forcerions personne à refuser de l'argent proposé pour rémunérer le service rendu à la collectivité. Vous me semblez, décidément, faire là une bien mauvaise croisade !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 NOVEMBRE 2000

M. Patrice Martin-Lalande.

Absolument pas !

M. Bernard Deflesselles.

Non, c'est vous ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement Enfin, bien qu'elle ne figure pas dans le projet de loi de finances pour 2001, mon exposé ne serait pas complet si je ne vous disais pas quelques mots de la fiscalité écologique.

M. Jean-Pierre Brard.

Voilà ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

L'année 2001 verra en effet une nouvelle étape dans la mise en place de la fiscalité environnementale avec l'extension de la TGAP aux consommations intermédiaires d'énergie. Cette extension, dont le principe avait été annoncé en mai 1999, a pour objectif de renforcer la lutte contre l'effet de serre dans le cadre de nos engagements internationaux et de mieux maîtriser la consommation de l'énergie. Elle représente une mesure importante du volet du Programme national de lutte contre le changement climatique consacré aux entreprises.

M. Claude Billard a exprimé des doutes sur l'efficacité de la fiscalité pour orienter les choix des entreprises et des consommateurs. Celle-ci est pourtant prouvée ; l'élasticité du système n'est pas aussi importante qu'il n'y paraît.

Il y a quinze jours, trois semaines, le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, le secrétariat d'Etat à l'industrie et mon ministère ont consacré un moment de réflexion, à Bercy, à l'examen de la fiscalité environnementale dans toutes ses acceptions. Je constate q u'un consensus s'est aujourd'hui dégagé pour reconnaître que les consommateurs comme les entreprises sont extrêmement sensibles au signal fiscal.

M. Patrice Martin-Lalande.

Et vous n'allégez pas la fiscalité sur les filtres à particules. Vous êtes en pleine contradiction ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Il s'agit non pas d'acquérir le droit de polluer si on paie - si c'était le cas, je serais contre, monsieur Billard - mais de réaliser que ne pas polluer coûte moins cher que polluer.

M. Jean-Pierre Brard et Mme Odette Grzegrzulka.

Très bien ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

La plupart des entreprises ont d'ailleurs compris qu'elles avaient tout à gagner non seulement à économiser l'énergie et les matières premières mais aussi à d iminuer leurs rejets polluants puisque, ainsi, elles réduisent les frais générés par les efforts de dépollution qui leur sont demandés. Elles ont compris aussi que cela pouvait constituer un moyen précieux pour restaurer la confiance des consommateurs et pour mobiliser leurs équipes et leurs salariés, qui se sentent davantage impliqués quand ils sont associés à des stratégies de réduction de l'impact de l'activité, stratégies auxquelles les citoyens sont aujourd'hui très attentifs.

Bref, il s'agit d'aider les chefs d'entreprise à faire les bons choix en matière de respect de l'environnement.

M. Bernard Deflesselles.

Laissez donc les chefs d'entreprise tranquilles ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Cela suppose que la TGAP ne soit pas fixée à un niveau trop bas. Sinon, elle serait indolore pour les chefs d'entreprise.

M. Jean-Pierre Blazy.

Tout à fait ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Sur la base de la concertation qu'il a menée, le Gouvernement a décidé que les entreprises fortement consommatrices d'énergie et soumises à la concurrence internationale seraient traitées dans le cadre d'un dispositif spécifique. Elles seront incitées, dès 2001, à c ontracter avec l'administration des engagements de réduction conclus pour une période de cinq ans, quantifiés et contrôlables.

La recette attendue de cette extension de la TGAP aux consommations d'énergie des entreprises est estimée à 3,8 milliards de francs environ, et sera affectée au fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale, dans le respect de la théorie du double dividende.

Tout à l'heure, M. Brard m'a tendu une perche.

M. Bernard Deflesselles.

Ce n'est pas une perche, c'est un bambou ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Il a à juste titre souligné que, si les mesures dissuasives en matière de pollution étaient bien prévues, nous attendions toujours les mesures incitatives.

Je les attends aussi.

J'ai entendu le plaidoyer de M. Brard pour une réduction de la TVA sur les produits respectueux de l'environnement. Nombreuses ont été en effet les démarches qui visaient à encourager l'usage des produits recyclables ou recyclés, à inciter les consommateurs à passer à l'acte.

Des mesures ont même été proposées pour encourager l'usage de véhicules propres. Mais je pense également, monsieur Brard, qu'il est nécessaire de passer au niveau communautaire à la majorité qualifiée pour les décisions concernant la fiscalité environnementale, parce qu'il n'est pas possible que, année après année, la position européenne serve de prétexte pour empêcher toute avancée en ce domaine.

M. Jean-Pierre Brard.

Il faudrait passer à la majorité qualifiée pour les décisions concernant la fiscalité en général pour empêcher les Anglais et les Luxembourgeois de truander.

M. le président.

Monsieur Brard !

M. Bernard Deflesselles.

M. Brard est solidaire.

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Oui, M. Brard est solidaire et je partage son point de vue !

M. Jean-Pierre Brard.

Prenez-en de la graine ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

C'est un chouchou, vous savez !

M. Bernard Deflesselles.

Pour nous aussi, d'ailleurs ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

C'est aussi votre chouchou, monsieur Deflesselles ? J'en prends note. (Sourires.)

M. Patrice Martin-Lalande.

A quand notre tour ? Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Avant de conclure, je répondrai brièvement aux orateurs qui se sont exprimés parce que nombre des sujets abordés ne concernent pas réellement le budget.

M. Patrice Martin-Lalande.

Mais ils concernent l'environnement ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Michel Suchod et moi-même n'avons pas les mêmes chiffres concernant la TGAP applicable aux eaux.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 NOVEMBRE 2000

M. Michel Suchod, rapporteur spécial.

Je suis l'antichouchou ! (Sourires.)

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Il y a vraiment un problème de chiffres entre vous et moi, monsieur Suchod.

La direction du budget nous a communiqué le bilan du recouvrement de la TGAP « eaux » en 2000. Pour la TGAP « préparation pour lessive », les recettes s'élèvent à 450 millions de francs pour une prévision initiale de 500 millions. Pour la TGAP « granulats », elles sont de 90 millions seulement pour une prévision initiale de 200 millions. Il faudra analyser les raisons de cet écart.

Pour la TGAP phytosanitaire, les recettes se montent à 100 millions de francs seulement pour une prévision initiale de 300 millions.

Ces chiffres montrent que les agents économiques se sont adaptés à la TGAP et qu'ils ont fait exactement ce qu'on attendait d'eux, à savoir orienter leurs choix vers les produits moins taxés parce que moins pénalisants pour l'environnement. Cela prouve que ce qui importe pour le ministre de l'environnement, ce n'est pas de taxer davantage, mais de donner les signaux qui permettent d'adopter les bonnes pratiques, même si cette efficacité n'enthousiasme pas le ministre de l'économie et des finances.

Michel Suchod s'est également préoccupé - et je partage largement sa préoccupation - de l'extension de l'algue Caulerpa taxifolia en Méditerranée. Mais il reconnaîtra avec moi, que notre sujet majeur de conflit avec Monaco n'est pas, aujourd'hui, la prolifération de cette algue. (Sourires.)

M. Jean-Pierre Brard.

Il s'agit d'une autre sorte d'algue !

M. Michel Suchod, rapporteur spécial.

D'une autre sorte de pollution ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Il faut tout d'abord objectiver le problème. Chaque année, on lit dans les journaux des gros titres sur la progression de « l'algue tueuse ». L'algue n'est pas tueuse. Elle n'est pas toxique. On peut la toucher, elle n'empêche donc pas de se baigner.

Il est toutefois vrai que sa progression pose de nombreux problèmes qui ne sont pas résolus. Nous pressentons que sa prolifération pourrait provoquer une perte de biodiversité et conduire à une raréfaction de certaines espèces de poissons qui ne sont pas friands de cette algue.

Cela dit, l'arbre ne doit pas cacher la forêt. Nombreux sont les problèmes générés par des espèces végétales e t animales au large de nos côtes. Je citerai la multiplication inquiétante de la crépidule sur le littoral atlantique. Ce coquillage originaire des Etats-Unis, a certainement été importé chez nous dans des ballastières.

M. Jean-Pierre Brard.

Comme les doryphores ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Tout à fait ! Il est très difficile de lutter contre les espèces invasives dans le milieu marin car aucune technique n'est efficace.

Nous en avons essayé beaucoup, vous le savez, parmi lesquelles l'utilisation du cuivre et de limaces voraces de l'algue en question, mais l'éradication ne semble pas possible. Il m'apparaît dès lors nécessaire, comme à vous, de protéger les sites qui ne sont pas aujourd'hui envahis par un arrachage précoce dès constatation de la moindre tâche. Cette stratégie est développée à l'intérieur du pa rc de Port-Cros que vous avez évoqué mais c'est très peu par rapport à l'échelle de la Méditerranée.

Nous ne sommes pas inactifs. Nous coordonnons notre action avec les autres Etats méditerranéens qui sont confrontés aux mêmes problèmes. Nous avons, bien sûr, développé l'observation et la recherche, afin de trouver les moyens de lutter contre l'extension de Caulerpa . Le comité interministériel qui pilote le plan associe les trois régions méditerranéennes.

Monsieur Deflesselles, vous avez évoqué le plan POLMAR. Vous avez le droit de faire de la politique - il m'arrive moi-même d'en faire, bien que pas assez à mon goût -...

M. Bernard Deflesselles.

Si c'est interdit, il faut le dire ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

... mais cela ne vous donne pas le droit de dire n'importe quoi.

M. Bernard Deflesselles.

Ce que j'ai dit figure dans votre discours ! Cela vous embête que je vous cite ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Jusqu'en 1997, il n'y avait aucun crédit d'inscrit sur la ligne du plan POLMAR puisque ce n'est pas une ligne d'intervention mais une ligne destinée à accueillir les fonds mobilisés en cas de catastrophe.

Mais, fin 1999, nous avons dû prendre un décret pour dépenses accidentelles pour pouvoir mobiliser de l'argent en catastrophe. C'est pour ne pas nous retrouver dans cette situation que nous avons prévu 10 millions de francs pour les premières actions d'urgence. Cette somme est destinée à nous permettre de faire face en attendant de pouvoir mobiliser les fonds nécessaires. Sachez que 817 millions de francs ont déjà été dépensés sur la ligne POLMAR, monsieur Deflesselles, et non zéro ou 10 millions. Ce n'est pas du tout le même ordre de grandeur.

M. Bernard Deflesselles.

Nous ne parlons pas de la même chose.

M. Patrice Martin-Lalande.

Seraient-ce les mêmes mauvais chiffres que Suchod ? Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Cette ligne est destinée à accueillir des fonds mobilisés en provenance d'autres ministères. Il serait complètement ridicule d'y immobiliser plusieurs centaines de millions en l'absence de catastrophe.

M. Gaillard et M. Deflesselles nous ont demandé quelles mesures avaient été prises pour faire progresser les questions de sécurité maritime.

Il ne paraît pas très raisonnable - et ce serait au demeurant très injuste pour Jean-Claude Gayssot - de considérer que rien n'a été fait pendant la présidence française. Celle-ci n'est pas terminée. Vous savez comme moi qu'au mois de juillet et au mois d'août, ni la Commission, ni le Parlement européen ne sont sur le pont.

M. Bernard Deflesselles.

Ce n'est pas un argument ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Jean-Claude Gayssot a utilisé au mieux les deux mois de présidence française qui se sont déjà écoulés et il utilisera au mieux les deux mois qui restent.

Nous avons bien l'intention d'aboutir à une solution.

La survenue d'un nouveau naufrage est de nature à mettre la pression sur le Parlement européen, qui, jusqu'à présent, je dois le déplorer, n'avait pas donné de signe de mobilisation extraordinaire. Cela dit, je ne suis pas en train de faire de la politique. Je ne faisais aucune allusion à la majorité du Parlement européen.


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M. Patrice Martin-Lalande.

On respire ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Cela dit, je tiens à votre disposition la liste des mesures arrêtées par le comité interministériel de la mer et par le comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire le 28 février 2000 - les deux réunions s'étaient tenues de façon simultanée - et le 27 juin 2000, date à laquelle a eu lieu une seconde réunion du CIADT. Nous avons mobilisé de nouveaux moyens dans le domaine de l'environnement, dans le domaine des transports également. Nous avons amélioré la coordination des plans POLMAR-terre et POLMARmer, facilité aussi le retour d'expériences dans le prolongement avec le travail réalisé par les parlementaires, à l'Assemblée nationale comme au Sénat. Un énorme travail a d'ores et déjà été accompli. Ainsi, dès le naufrage de l' Ievoli Sun, les experts de l'IFREMER, de l'INERIS du CEDRE, de l'Institut du pétrole, de l'AFSA, de l'IFEN et autres ont pu être mobilisés ; cette structure de coordination n'existait pas au moment du naufrage de l' Erika . Je vous communiquerai la liste de ce qui a été fait au niveau national ; vous verrez que c'est tout à fait convaincant.

M. Gaillard a évoqué la question des boues urbaines en la décrivant comme un problème majeur, laissant entendre que rien n'avait été fait. Or, un groupe de travail a associé l'ensemble des partenaires de ce dossier depuis des mois. Un colloque s'est tenu à la Maison de la chimie au mois de juillet, qui a permis de dégager un consensus parmi les parlementaires. Nous sommes en train de sortir du tunnel.

M. Jacques Pélissard.

Il reste la garantie du risque de développement.

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Le dispositif assurantiel a été mis en place et la garantie de l'Etat a été apportée. Tout a été arbitré et rappelé : nous continuons à penser que l'épandage agricole des boues est une bonne solution, pour peu que les garanties nécessaires soient apportées sur la qualité des boues et sur le dispositif à mobiliser en cas d'accident, deux points sur lesquels nous sommes aujourd'hui rassurés.

Les cormorans, monsieur Martin-Lalande, seront le seul point sur lequel je peux vous apporter dès aujourd'hui des réponses concrètes. J'ai interpellé la Commission conformément à l'article 1er de la loi sur la chasse qui prévoyait, à l'initiative de Valéry Giscard d'Estaing et de Philippe Douste-Blazy, la mobilisation communautaire ; je n'ai pas eu encore de réponse. Je lui ai également demandé de se désister des actions en justice qu'elle avait intentées contre nous du fait des lois de 1994 et de 1998, rappelant que notre nouvelle loi respecterait désormais le droit communautaire ; je n'en ai pas reçu davantage.

Je partage votre analyse, monsieur Martin-Lalande, sur les problèmes que posent les cormorans et sur la nécessité de mobiliser ceux de nos partenaires européens qui hébergent ces oiseaux pendant leur phase de reproduction. Le ramassage des oeufs est sans doute la mesure la plus efficace et je suis prête à engager une démarche à cet égard. En effet, les quotas de chasse ont été considérablement élargis à la demande des pêcheurs, mais on ne parvient pas à les atteindre et à tuer le nombre d'oiseaux autorisé.

M. Patrice Martin-Lalande.

Tirer un cormoran, ce n'est pas évident !

M. Jean-Pierre Brard.

Il faut utiliser le lance-pierres ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

D'autres sujets ont été abordés, mais ils sont très éloignés du sujet budget.

Les crédits alloués à la recherche, progressent de 20 % en autorisations de programme et passent de 70 à 84 millions de francs. Ils sont constants en DO+CP mais, vous en conviendrez avec moi, monsieur Deflesselles, ce sont les autorisations de programme qui permettent d'engager les actions nouvelles, non les crédits de paiement. La couverture en CP n'intervenant que par la suite, elle ne nous manquera pas pour assurer le financement de projets de recherche pluriannuels qui ne se traduisent pas par des besoins de financement en 2001. En tout état de cause, l'effort de recherche progresse bel et bien, et c'est normal.

Tels sont, mesdames et messieurs les parlementaires, les éléments dont je souhaitais vous faire part à propos de ce budget. Je remercie celles et ceux d'entre vous qui ont souligné les progrès auxquels donnera lieu l'année 2001, mais également les avancées qui auront été obtenues sur quatre ans au total, qui permettent de juger de l'ambition et de la cohérence d'une politique. (Applaudissement sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

Nous en arrivons aux questions.

Mme la ministre, ayant dépassé de vingt minutes le t emps de parole prévu pour le Gouvernement, je demande à chacun de s'en tenir scrupuleusement aux deux minutes imparties pour chaque question et pour chaque réponse. Nous commençons par le groupe du Rassemblement pour la République.

La parole est à M. Robert Galley.

M. Robert Galley.

Madame la ministre, je souhaite vous interroger sur la logique qui a présidé à la fixation des critères de l'assiette sur les consommations intermédiaires d'énergie par les entreprises.

Vous nous avez affirmé à diverses reprises que votre ligne directrice était le principe « pollueur-payeur ». Soit ! Mais alors, pourquoi taxer forfaitairement l'électricité d'origine hydraulique, énergie renouvelable, qui répond par définition à l'un des critères du comportement vertueux que vous avez défini tout à l'heure ? Y voyez-vous un moyen de rééquilibrer la répartition entre les différentes sources d'énergie, sachant que le prix de l'électricité ne cesse, à la grande satisfaction de l'ensemble des Français, de baisser, à l'inverse de celui du gaz et du charbon ? Afin de souligner le manque de cohérence de ces dispositions, je ne prendrai qu'un seul exemple parmi les 40 000 entreprises qui seront touchées, celui de la RAPT.

La consommation d'énergie de la RAPT dépasse très largement la limite des cent tonnes d'équivalent pétrole par an et son activité n'entre évidemment pas dans le champ des activités agricoles, sylvicoles, piscicoles ou halieutiques. Vous avez pris la précaution, semble-t-il, d'exonérer la part d'énergie liée à la traction. Mais celle-ci ne représente que les deux tiers de la consommation totale de la RAPT. En d'autres termes, le tiers restant sera taxé et ce surcoût se répercutera sur le prix du billet de métro, alors que vous prétendez vouloir, et à juste titre, privilégier le transport en commun. Vous rendez-vous compte, madame la ministre, du risque qui peut résulter, comme le relève du reste le rapport de M. Stéphane Alaize, de la banalisation de cette taxe appelée à devenir un impôt comme les autres et par là même à transformer, un des orateurs le remarquait tout à l'heure, le ministère de l'environnement en un simple collecteur d'impôts ?


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M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Monsieur Galley, vous venez de mettre en évidence quelques-unes des difficultés auxquelles on se heurte sitôt que l'on cherche à mettre en place un dispositif simple.

Le principe est de taxer les énergies fossiles, produits pétroliers, gaz naturel et charbon, en fonction de leur contenu en carbone, mais également l'électricité, de manière forfaitaire, l'objectif étant de dissuader la pollution, mais également le gaspillage énergétique. Le rapport C harpin-Pellat-Dessus - qui concernait l'énergie nucléaire, mais dont les conclusions peuvent être étendues aux autres énergies - a bien montré que les stratégies les plus intéressantes, qu'il s'agisse des émissions de gaz à effet de serre, du coût pour les consommateurs, ou de la gestion des déchets nucléaires, étaient celles qui privilégiaient les économies d'énergie. Aussi entendons-nous donner un double signal : maîtrise de la consommation et maîtrise de l'impact polluant.

Cela dit, nous souhaitions épargner les petites entreprises et, de ce point de vue, elles ne seront pas déçues ; seules 40 000 entreprises seront touchées sur les 2,8 millions que compte notre pays.

M. Robert Galley.

Merci pour elles ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Ni les petits artisans ni les PME ne seront concernés.

Nous n'entendions pas non plus soumettre des entreprises très fortes consommatrices d'énergie et exposées à la concurrence internationale à une TGAP qui pourrait mettre en danger leur activité et l'emploi. Aussi avonsnous prévu d'importants abattements en leur faveur.

L'idée n'est pas de remplir les caisses, mais d'inciter les entreprises à faire tout leur possible, dans des conditions économiquement raisonnables, pour réduire leur consommation énergétique par le biais d'accords volontaires de réduction.

J'ai reçu, il y a une semaine, le responsable européen de BP, qui est venu me démontrer que son groupe s'était engagé à réduire de 8 % ses émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2010, afin de satisfaire aux engagements pris par les Etats européens en la matière. Il a convenu avec moi que c'était une démarche tout à la fois raisonnable et efficace sur le plan économique, en ce qu'elle permettait par la même occasion de rationaliser les pratiques du groupe et de privilégier les meilleures technologies disponibles.

Le but n'est donc pas de pénaliser les entreprises. Il s'agit de leur adresser un signal et en premier lieu un encouragement à économiser l'énergie. Evidemment, les accords volontaires devront être assez sévèrement contrôlés si l'on veut garantir l'efficacité du dispositif.

M. le président.

Nous passons au groupe Radical, Citoyen et Vert.

La parole est à M. Yves Cochet.

M. Yves Cochet.

Ma question a trait au fonctionnement de votre ministère. Votre budget se développe, mais à la différence d'autres ministères, tel celui de l'équipement avec le corps des Ponts, celui de l'agriculture avec les IGREF, ou encore celui des finances avec les inspecteurs des finances, le ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement ne dispose pas d'un corps d'ingénieurs qui lui soit propre ; il n'a que des personnels mis à disposition.

Deux stratégies sont possibles - si l'on écarte la troisième qui consisterait à ne rien faire : ou bien créer de toutes pièces un nouveau corps d'ingénieurs, ou bien rattacher à votre ministère un corps qui semble orphelin ou tout au moins insatisfait de sa situation, je veux parler des ingénieurs des Mines. En effet, certaines informations me laissent penser que ce corps considère que son rattachement actuel au secrétariat d'Etat à l'industrie ne correspond plus à un exercice plein et entier de ses capacités.

En résumé, madame la ministre, entre la création d'un nouveau corps d'ingénieurs et le rattachement du corps des mines, quelle solution vous semble la plus adaptée à vos besoins ?

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Monsieur le président, on me pardonnera de prendre sur mes deux minutes pour donner à M. Cochet un conseil d'ordre sanitaire : je suis très inquiète de sa voix caverneuse et je lui suggère de moins fumer dans la période à venir. (Sourires.)

Sa question en tout cas me permet de répondre à une interrogation devenue assez lancinante depuis trois ans ; un ministère devenu au fil des ans ministère de plein exercice peut-il se passer de gérer lui-même les agents qui travaillent pour lui, de maîtriser totalement, conformément aux règles de la fonction publique, leurs conditions de promotion, d'avancement et de rémunération ? Sans remettre en cause le travail conduit par les ministères de l'équipement, de l'agriculture, de l'industrie, principaux gestionnaires des personnels de l'environnement, force est d'admettre que la situation actuelle n'est pas satisfaisante.

Dans la fonction publique comme dans toute organisation, c'est celui qui paie qui commande et promeut.

Ma première priorité a été de convaincre qu'il ne pouvait y avoir de police de la chasse, de police de la pêche, de police de l'environnement, activités régaliennes s'il en est, sans fonctionnaires affectés à ces activités. Je suis heureuse de vous indiquer que deux premiers corps de l'environnement, de catégories B et C, chargés d'exercer ces missions de police, sont en voie de création. Les projets de décrets sont arbitrés, le Conseil supérieur de la fonction publique d'Etat et le Conseil d'Etat en cours de saisine.

S'agissant des corps de catégorie A, auxquels vous faites allusion, la réflexion est en cours. Mais sachez que je considère déjà le GREF, les Ponts et les Mines comme des corps de l'environnement. J'ai demandé à mes services de veiller avec une particulière attention à ce que les formations de ces ingénieurs soient « verdies » le plus possible - je m'attendais à ce que ce mot suscite des protestations sur les bancs de l'opposition : cela aurait été pour moi l'occasion de vous dire que je n'en suis évidemment pas à l'origine. Le « verdissement » est le terme utilisé dans l'administration d'Etat depuis une quinzaine d'années pour décrire les actions de maîtrise des flux et d'économies utiles à l'environnement. Je souhaite donc que, tout au long du parcours scolaire des futurs ingénieurs, des filières, des modules, des options de nature environnementale soient clairement identifiés.

La création ex nihilo d'un corps supérieur de l'Etat me semble difficile. C'est pourquoi votre proposition de rattachement du corps des Mines au ministère de l'environnement me paraît excellente. J'ai accueilli avec satisfaction le choix du conseil général des Mines de localiser ses bureaux avenue de Ségur plutôt que rue de Bercy.

C'est déjà un premier pas...


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M. le président.

La parole est à M. Yves Cochet, pour poser une seconde question.

M. Yves Cochet.

Madame la ministre, le Gouvernement a présenté le 27 octobre 2000 les neuf schémas de services collectifs prévus par votre loi, que connaît d'ailleurs bien M. le président puisqu'il y a contribué.

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Excellente loi !

M. Yves Cochet.

Parmi ces schémas, celui des services collectifs des espaces naturels et ruraux vise, entre autres, à la préservation ou à la reconquête des ressources naturelles - eau, sol, biodiversité, etc. -, à la lutte contre le bruit ainsi qu'à la constitution d'un réseau national, élément d'un réseau écologique européen, permettant de faire face à des catastrophes écologiques et aux changements climatiques.

Dans le même esprit, vous avez relancé en 1997 le processus de mise en place du réseau Natura 2000, dont l'objectif est la préservation et la restauration de la biodiversité sur un certain nombre de sites en Europe. La France a pour sa part transmis à la Commission européenne, comme vous l'avez répété à satiété aujourd'hui , 1 029 propositions de sites couvrant 2,7 millions d'hectares terrestres, soit 5 % de notre territoire.

Se pose une question de cohérence à la fois sur le plan intérieur et par rapport à l'Europe. D'une part, comment entendez-vous assurer le respect des objectifs des schémas

« espaces naturels et ruraux » par les autres schémas de services collectifs ? D'autre part, comment envisagez-vous d'articuler les schémas de services collectifs décidés par la France avec les exigences du réseau Natura 2000 décidé par l'Europe ?

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Monsieur le député, les orientations stratégiques de l'Etat dans le schéma collectif « espaces naturels et ruraux » constituent une priorité du Gouvernement pour la prise en compte de la biodiversité dans les politiques d'aménagement et d'équipement, avec un souci d'implication des usagers et de négociation au plus près du terrain.

Le schéma collectif « espaces naturels et ruraux » est conçu dans une perspective de long terme. Il traduira, entre autres objectifs, les engagements européens et internationaux de la France dans le domaine de la conservation des milieux naturels. Il n'y aura pas de contradiction entre les deux outils : l'un et l'autre intègrent les impératifs du développement durable, c'est-à-dire une approche visant la protection et la mise en valeur des ressources, notamment au travers d'un usage plus économe de l'espace.

La compatibilité est assurée dès le stade des inventaires, puisque l'inventaire Natura 2000 validé en 1995 par le Muséum national d'histoire naturelle est repris dans le chapitre « diagnostics et objectifs » du schéma collectif.

Enfin, le schéma privilégie le contrat pour assurer la conservation des habitats naturels. Le projet de transposition de Natura 2000 en droit français prend le même parti.

M. le président.

Nous passons aux questions du groupe socialiste.

La parole est à Mme Nicole Bricq.

Mme Nicole Bricq.

Madame la ministre, de budget en budget - c'est le quatrième que nous examinons -, vous renforcez les moyens de votre administration. « Petit à petit, l'oiseau fait son nid », dit l'adage... Peut-être un jour vous envolerez-vous de ce nid : il faudra vous savoir gré d'avoir finalement fait ce que vos prédécesseurs n'avaient pas réussi à faire, c'est-à-dire créé une vérit able administration de l'environnement, en orientant vos efforts sur la création de postes déconcentrés.

Mon interrogation porte sur les moyens donnés aux DRIRE et plus particulièrement sur le renforcement en nombre de postes d'inspecteur des installations classées.

Vous nous avez confirmé tout à l'heure la création de cinquante postes dans le budget 2001 et je vous avais interrogée au printemps dernier sur un problème ponctuel, mais récurrent, concernant la Seine-et-Marne. Mon département se trouve à cet égard sous-administré au regard de son expansion économique, notamment dans sa partie nord, mais aussi de la présence dans cette partie nord d'installations classées Seveso. Vous m'aviez répondu cet été, de manière fort circonstanciée, en m'annonçant qu'un poste serait créé dès l'année 2000, qui permettrait de combler la vacance. Ce poste a bien été pourvu et je vous en remercie. Mais vous aviez ajouté que cette création ne suffirait pas à résoudre l'ensemble des problèmes.

Déjà en 1996, le rapport de la Cour des comptes avait à juste titre stigmatisé le manque de moyens en matière de prévention des pollutions et appelait à un rattrapage au niveau national.

Madame la ministre, comment entendez-vous répartir ces cinquante nouveaux postes ? Si la DRIRE de Seine-etMarne avait été mieux pourvue, vous n'auriez pas eu besoin, par exemple, de mettre à profit la création de l'inspection générale de l'environnement pour procéder aux investigations sur un problème de décharges. Nous aurions pu nous épargner bon nombre de dysfonctionnements si nous aurions eu suffisamment d'inspecteurs des installations classées.

Tout en vous donnant un satisfecit pour votre travail pugnace qui aura permis cette augmentation des postes, ma préoccupation porte sur leur répartition, qui devrait mieux prendre en compte les besoins de certains départements en développement.

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Madame Bricq, nous sommes d'accord sur le diagnostic : la situation n'est pas satisfaisante. Nous avons 63 000 installations classées soumises à autorisation et 500 000 à déclaration. Pour les DRIRE, qui assurent le suivi d'environ 60 % de ces installations, les emplois budgétaires techniques et administratifs consacrés à l'inspection sont au nombre de 819 en l'an 2000, en tenant compte des quarante-quatre postes créés en 2000, lesquels viennent s'ajouter aux trente-deux créés en 1998 et 1999.

La situation reste critique puisque la Cour des comptes avait estimé le besoin total en postes supplémentaires des DRIRE à 465, dans son référé du 31 décembre 1996.

D'autres étapes de renforcement devront donc suivre.

Vous l'avez rappelé, et je ne serai pas plus longue sur ce point, l'un des quarante-quatre postes créés en 2000 a été affecté à la Seine-et-Marne et effectivement pourvu par un ingénieur de l'industrie et des mines. Mais cela ne réglera qu'en partie les graves problèmes que connaît ce département du fait de nombreuses vacances de postes et d'importants mouvements de personnels.

Se pose, de façon plus générale, la question des délais nécessaires pour pourvoir les postes. Leur longueur s'explique par l'obligation de fournir aux personnels des


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 NOVEMBRE 2000

informations sur les postes vacants et d'organiser les concours. Bien que mes services veillent à limiter la durée de ces vacances, on ne peut guère les éviter.

A cette heure, je ne suis pas en mesure de vous garantir qu'avec les postes créés en 2001, nous pourrons renforcer à nouveau les effectifs de la Seine-et-Marne, parce que nous procéderons à leur répartition sur la base d'un examen détaillé de la situation de chaque département, en privilégiant ceux où sont présentes le plus d'installations soumises à la directive Seveso et ceux où les installations entraînent des nuisances, telles que les grosses installations de traitement des déchets ménagers ou industriels.

Pour ce qui concerne les directions des services vétérinaires, nous avons souhaité, cette année, privilégier les départements où prédominent les élevages hors-sol. C'est pourquoi nous affecterons les effectifs, en priorité, à la région de Bretagne.

M. le président.

La parole est à M. Robert Gaïa.

M. Robert Gaïa.

Madame la ministre, face aux dérèglements climatiques répétés, la terrible tempête de l'hiver dernier, par exemple, sans parler de celle que nous venons de vivre, nos concitoyens s'interrogent.

La communauté scientifique semble unanime sur le constat d'un réchauffement de la planète. Sur les causes de ce réchauffement, des doutes subsistent, mais l'hypothèse la plus sérieuse l'impute aux émissions de gaz à effet de serre.

En 1997, la France a adopté le protocole de Kyoto.

Notre assemblée l'a ratifié, fixant ainsi des engagements contraignants de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Nous savons très bien que la France seule ne peut rien en ce domaine.

A partir du 13 novembre prochain, débutera à La Haye une conférence importante pour rediscuter des moyens de stabiliser les émissions mondiales de gaz à effet de serre.

A cette occasion, certains pays tenteront de remettre en cause leur responsabilité et proposeront certainement une négociation autour des permis à polluer.

Depuis trois ans, votre ministère, appuyé en cela par la majorité, mène une politique active en matière de stabilisation des émissions. Par une politique de maîtrise de l'énergie, par la mise en place d'une fiscalité écologique, la France obtient des résultats en ce domaine.

Pouvez-vous nous dire, madame la ministre, quelles informations vous avez sur l'évolution des émissions de gaz à effet de serre pour notre pays, sachant bien entendu que c'est aux niveaux auropéen et mondial que le problème se pose ? Quels sont vos objectifs pour la conférence de La Haye ? Quels seront les principes défendus par la présidence française de l'Union européenne ?

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Monsieur le député, les conséquences des événements climatiques extrêmes qui se sont produits récemment dans de nombreux endroits sont préoccupantes. Ils ne peuvent évidemment être considérés individuellement, avec certitude, comme résultant directement de l'accroissement des concentrations de gaz à effet de serre dans l'atmosphère. Mais leur multiplication ainsi que leur violence nous incitent à penser, comme le font d'ailleurs les experts mobilisés dans le cadre du groupement intergouvernemental d'étude sur l'évolution des climats, que nous devons nous préparer à des bouleversements climatiques de grande ampleur en raison de l'accumulation de gaz à effet de serre dans l'atmosphère.

Ce sont des phénomènes qui ne relèvent pas vraiment des négociations sur les changements climatiques proprement dits mais qui devraient être examinés dans un cadre plus vaste où l'on envisagerait aussi des mesures d'aide d'urgence. Il faut, entre autres, favoriser la prévention des castastrophes par le développement de systèmes d'alerte rapides.

La sixième conférence des parties à la convention-cadre sur les changements climatiques qui se tiendra à La Haye du 13 au 24 novembre 2000 est une réunion très importante qui devra achever le processus engagé avec la signature du protocole de Kyoto en 1997, et adopter les règles et mécanismes d'application prévus par ce protocole. La France aura la lourde responsabilité de présider l'Union européenne lors de cette conférence, qui constitue de ce fait, pour moi, la priorité de la présidence française en matière d'environnement.

La France a pour objectif, dans cette négociation, la conclusion d'un accord large, accepté par toutes les parties, permettant la ratification et l'entrée en vigueur du protocole de Kyoto avant 2002, date du dixième anniversaire de la conférence de Rio, le Sommet de la Terre.

Nous souhaitons un accord solide au plan environnemental, qui comprenne notamment un régime de respect des engagements, suffisamment robuste pour garantir l'intégrité environnementale du protocole. Nous souhaitons des règles et des modalités de fonctionnement saines pour les mécanismes de flexibilité. Il s'agit, comme l'a dit Claude Billard tout à l'heure, de ne pas laisser à penser que nous pourrions fournir aux pollueurs l'occasion d'acheter le droit de continuer à polluer. Il s'agit aussi de confirmer la volonté des pays industrialisés de lutter de manière déterminée par des politiques nationales engagées rapidement.

Si nous ne faisons rien, les consommations d'énergie augmenteront de façon quasi mécanique avec la croissance du produit intérieur brut. Bref, nous devons intensifier nos efforts pour contrer une tendance à la hausse des émissions de gaz à effet de serre constatée depuis 1998, en particulier pour le CO 2 - augmentation de 4,7 % en 1998 par rapport à 1997, de 3,9 % par rapport à 1990.

La France s'est dotée d'un programme ambitieux visant à réduire ses émissions de gaz à effet de serre. Il a été validé le 19 janvier 2000 et ses principaux thèmes sont tout à fait compatibles avec notre souci de réduire la facture énergétique pour les Français. Le programme d'efficacité énergétique que le Premier ministre m'a demandé de préparer va compléter et renforcer le programme national de maîtrise des émissions de gaz à effet de serre.

Je souhaite qu'il soit convaincant sur le plan social et que, en même temps, il réduise la facture pour les Français.

M. le président.

La parole est à Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

La discussion a montré que nous étions tous, dans cet hémicycle, conscients de la nécessité de transposer rapidement dans notre droit l'article 6 de la directive Habitat et oiseaux. Nous avons tous regretté que cent dix-sept directives n'aient toujours pas été transposées en droit interne et qu'il soit prévu de le faire par ordonnance.

Cela dit, je ne suis pas aussi optimiste que vous, madame la ministre, quant à la fin des contentieux. Il n'était que d'entendre M. Martin Lalande revenir sur le dispositif Natura 2000 ! Pourtant, il est nécessaire d'en


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 NOVEMBRE 2000

finir avec les remises en question d'un dispositif injustement décrié, au vu de son potentiel de conservation des milieux, mais aussi de son potentiel socio-économique.

J'aimerais donc, madame la ministre, attirer votre attention sur deux aspects propres à prévenir des contentieux internes, cette fois. Je ne veux pas dénigrer le travail des fonctionnaires mais il m'apparaît que manque parfois un appui local au dispositif dans les directions régionales de l'environnement.

Envisagez-vous à cet égard la présence, dans chaque D IREN, d'un interlocuteur clairement identifié Natura 2000, dont la mission serait principalement d'animer le réseau, d'informer les maires et de balayer leurs préjugés, en y rattachant au besoin des lignes budgétaires ? Cela me semble déterminant pour assurer une bonne mise en place du réseau et en finir avec les résistances locales, qui aujourd'hui encore sont alimentées par de la désinformation. Il semble que certains pays aient procédé de cette façon et que cela se soit révélé positif

A défaut d'envisager une opposabilité aux tiers portée par une procédure assortie d'enquêtes publiques, que pouvons-nous raisonnablement escompter du décret d'application en matière de degré de publicité suffisante, de nature à garantir la transparence et la concertation, nous prémunissant du même coup d'un foisonnement de recours par des communes qui pourraient s'estimer contraintes et considérer les servitudes leur incombant comme un fait accompli ?

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Madame la députée, la mise en oeuvre du réseau Natura 2000 est une priorité pour les DIREN.

Elles y affectent des moyens diversifiés, en fonction des situations régionales, mais je crois pouvoir affirmer que, dans chacune d'entre elles, plusieurs personnes sont spécifiquement affectées aux tâches relevant de la mise en oeuvre des directives Natura 2000. Je ne verrais aucun inconvénient à ce que l'une de ces personnes apparaisse comme « monsieur ou madame Natura 2000 » au niveau de la région.

Les moyens supplémentaires en personnel affectés aux DIREN vont contribuer, cette année encore, à renforcer la capacité d'intervention des services dans ce domaine.

Plusieurs DIREN éditent et diffusent des brochures ou des lettres d'information sur Natura 2000. Elles travaillent en général avec d'autres services de l'Etat qui sont aussi fortement mobilisés, je pense notamment aux DDAF, autant de moyens qui sont appelés à croître en fonction de la configuration définitive du réseau.

Par ailleurs, l'ouverture très prochaine d'un site Internet « Natura » permettra d'assurer une plus large diffusion de l'information. Les documents d'objectif qui proposeront les orientations de gestion des sites seront l'aboutissement d'une large concertation.

L'adhésion des partenaires concernés - les élus, les propriétaires, les usagers - constitue le meilleur gage de réussite à long terme du réseau Natura 2000. Le projet de décret, que vous mentionnez, qui est en cours d'élaboration avec les membres du comité national de suivi déterminera le lieu et les modalités de la concertation que je souhaite le plus près possible du terrain. Elle déterminera aussi les modalités de diffusion et de publicité des documents d'objectifs.

Nous avons tout intérêt à ce que ces documents soient largement diffusés, parce que les lire permet en général de se rendre compte que nous n'adoptons pas une démarche descendante, imposée aux acteurs locaux, mais une démarche de gestion responsable, contractuelle, au plus près du terrain et des habitudes d'utilisation de l'espace.

PRÉSIDENCE DE M. CLAUDE GAILLARD,

vice-président

M. le président.

Nous passons au groupe UDF.

La parole est à M. Francis Hillmeyer.

M. Francis Hillmeyer.

Madame la ministre, les problèmes ne manquent pas. L'environnement n'a jamais été aussi mal traité, notre cadre de vie aussi menacé. La seule chose qu'on puisse regretter dans ce débat, c'est que votre budget soit sans commune mesure avec l'ampleur des attentes et des besoins.

Je veux évoquer, comme vous-même et notre collègue Jean-Pierre Blazy, une agression grave elle aussi, qui affecte de plus en plus nos concitoyens, je veux parler du bruit.

Madame la ministre, une société s'honore de protéger la nature et de combattre les inégalités. Mais face au bruit, croyez-moi, beaucoup de Français se sentent agressés, se sentent inégaux, pour paraphraser Coluche. Le bruit agresse, en effet, fragilise, rend malade. Et lorsque ce bruit est généré par des équipements publics, l'inégalité est encore plus durement ressentie : « on fait souffrir quelques-uns pour le meilleur confort des autres ».

C'est ce que ressentent plus de 10 000 habitants de ma c irconscription, riverains de l'autoroute MulhouseBeaune, l'A 36, et de la gare de marchandises de Mulhouse-Nord.

Vous avez cité, madame la ministre, les « diagnostics bruits » des aéroports. Une gare importante implantée à proximité de quartiers peuplés et qui travaille jour et nuit au triage des wagons sans la moindre protection phonique cause les mêmes désagréments. Quel tintamarre, bien souvent ! Si personne ne met en cause la nécessité du trafic ferroviaire nocturne et diurne, ni celle de porter l'autoroute, dans son tronçon urbain, à deux fois trois voies, personne, par contre, madame la ministre, ne pourra accepter qu'on ne prenne pas, enfin, les moyens d'offrir aux riverains de Sausheim, d'Illzach, de Mulhouse Bourtzwiller, de Pfastatt - ma commune - et de Lutterbach, comme aussi de Reiningue, une protection phonique convenable.

Là passent, chaque jour et nuit, 60 000 véhicules, plus de 2 000 wagons, et les prévisions d'accroissement sur c inq ans doublent presque ces chiffres pour l'axe Beaune-Allemagne. Il faut créer là, dans ce véritable couloir urbain, de vrais murs antibruit.

M. Yves Cochet.

Cela concerne M. Gayssot !

M. Francis Hillmeyer.

On ne peut pas se contenter des normes actuelles dont se prévaut la DDE, ou de traitements de façade, qui condamnent les plus malheureux, souvent les plus pauvres, à vivre toute l'année fenêtres fermées. Qui peut être d'accord avec ce principe ? Mais faute de volonté et de moyens financiers, on n'a prévu que des équipements a minima, souvent franchement

« riquiqui », car il manque 30 millions de francs pour faire mieux.

Certes, vous n'êtes pas le ministre de l'équipement.

Mais ne voulez-vous pas être la ministre de la qualité de vie ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 NOVEMBRE 2000

Vous ne disposez pas non plus de 30 millions, je suppose, puisque seulement 100 millions sont prévus pour lutter contre ce fléau à l'échelle de la nation. Mais si, pour une fois, vous appliquiez à l'Etat les principes que vous imposez aux entreprises, si les ingénieurs de la DDE étaient invités à réaliser des travaux respectueux de l'environnement et du cadre de vie des autres, de grands progrès pourraient être faits, et rapidement. Et là, c'est plus une question de volonté que de moyens.

Alors, ce soir, j'attire solennellement votre attention sur ce dossier de l'A 36 : les gens sont de plus en plus exaspérés et ne laisseront plus faire n'importe quoi ! Les élus non plus !

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Monsieur le député, la ministre de la qualité de la vie a bon dos ! C'est au nom de la qualité de la vie, au nom du caractère transversal de la politique de l'environnement qu'elle est sommée de réparer les conséquences délétères des décisions qui sont prises par d'autres, dans tous les champs d'activité de l'Etat, avec des moyens grotesques au regard des besoins. Je ne tomberai pas dans ce panneau ! C'est en amont, au moment de la conception des infrastructures, que l'on doit interpeller les ministres...

M. Yves Cochet.

Très bien ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

... qui les décident, notamment dans le champ des transports.

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

Exact ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Cela étant, nous avons mobilisé des moyens afin de réparer les dégâts pour ceux qui aujourd'hui souffrent le plus de l'augmentation des nuisances : la pollution de l'air et le bruit, pour ce qui concerne les infrastructures de transport. Vous avez raison de souligner que ce sont les populations modestes, les gens qui ont aussi d'autres motifs de difficulté, qui souffrent en général le plus de ces nuisances. Voilà pourquoi je vous réponds qu'il s'agit là d'une préoccupation majeure pour nous.

Suite à l'enquête publique relative à la mise à deux fois trois voies de l'A 36 sur une portion de dix kilomètres, des murs antibruit ont été prescrits au titre des mesures compensatoires prévues par la loi du 31 décembre 1992, relative à la lutte contre le bruit, et respectent les objectifs fixés par l'arrêté du 5 mai 1995 relatif au bruit des infrastructures routières.

Au droit de la commune de Pfastatt, le commissaire enquêteur n'a émis ni réserve, ni recommandation quant aux mesures proposées par la DDE. Les études concernant ces protections seront engagées en 2001, conclues en 2002, pour une réalisation prévue en 2003, avant que les travaux de mise à deux trois voies ne soient exécutés dans ce secteur. Une somme de 25 millions de francs est inscrite au douzième contrat de plan pour la réalisation des 1 300 mètres de protection phonique. Mes services suivront attentivement leur mise en oeuvre.

Mais je ne peux m'empêcher de penser que si l'A 36 traverse votre commune, elle traverse également la ville dans laquelle je vis. L'idée que nous irions vers une extension à deux fois trois voies de l'A 36 sur la totalité de son tracé, faute d'avoir développé le transport ferroviaire de marchandises, me déplaît profondément et j'espère, de tout coeur, que vous serez à nos côtés pour favoriser les équipements ferroviaires qui sont nécessaires.

S'agissant du deuxième point, la gare du nord de Mulhouse, mes services ne disposent d'aucun dossier à ce sujet, monsieur le député. C'est pourquoi je vous invite à m'en adresser un ainsi, bien sûr, qu'à Jean-Claude Gayssot, ministre des transports.

M. le président.

Nous revenons au groupe socialiste.

La parole est à Mme Geneviève Perrin-Gaillard, pour poser une seconde question.

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

Madame la ministre, ma question se réduira à sa plus simple expression puisque vous avez déjà répondu à Yves Cochet sur le même thème.

Je profiterai donc de l'occasion pour saluer la dotation budgétaire affectée à l'Institut de formation à l'environnement et pour vous féliciter de son inscription au budget.

Par ailleurs, je voudrais souligner qu'il faut faire attention à sa dénomination car l'Institut français de l'environnement, l'IFEN d'un côté, et l'Institut français de formation de l'environnement de l'autre, cela peut prêter à confusion. Il faudra donc y réfléchir.

Je regrette, pour ma part, l'absence d'un véritable corps de l'environnement, vous le savez, je vous l'ai dit à plusieurs reprises. J'ai bien entendu la réponse que vous avez faite à M. Yves Cochet, mais j'irai, quant à moi, un peu plus loin.

Il y a, dans les universités, des médecins, des juristes qui ont besoin, eux aussi, d'une formation en environnement car, désormais, l'environnement, au regard d'objectifs de développement durable, est transdisciplinaire.

A terme, il serait intéressant de réfléchir à une école, ou à je ne sais quelle structure, qui pourrait regrouper en son sein, non seulement les gens des grandes écoles et des Mines, non seulement des universitaires, mais aussi des médecins, des juristes qui devraient pouvoir venir alimenter tous les grands corps de l'Etat.

Nous avons vu, à plusieurs reprises, combien il était difficile - et je vous parle en connaissance de cause - de recruter à l'IFEN, l'Institut français de l'environnement, dans certaines disciplines, des personnels bien formés issus des corps de l'Etat. Envisagez-vous, à terme, après les nécessaires changements qui vont se produire, par le

« verdissement » de certaines formations, par la formation continue, de rassembler à un certain niveau des gens provenant de différents horizons de l'enseignement supérieur ?

M. le président.

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

En effet, madame la députée, je ne répéterai pas ce que j'ai dit tout à l'heure à propos de la mise en place de l'Institut de formation de l'environnement. Toutefois, j'ai pris bonne note de votre remarque sur le sigle de l'institut et vous invite donc à formuler des propositions en la matière.

J'ajoute que nous sommes confrontés à un double problème.

Vous l'avez bien compris, nous souhaitons proposer ces formations, non pas uniquement aux seuls fonctionnaires des corps présents de façon traditionnelle au sein du ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement, mais à tous ceux qui peuvent, sur le terrain, être amenés à mettre en oeuvre, à suivre et à évaluer n os politiques. Cela prendra du temps et passera par une mise en commun des ressources disponibles.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 NOVEMBRE 2000

A cet égard, je précise que nous avons recours à de très nombreux corps de métiers et à des compétences très variées. Un travail qui ne serait pas transdisciplinaire n'aurait guère d'intérêt et ne serait pas très convaincant.

Mais nous nous heurtons également à un autre problème, et c'est évidemment avec beaucoup de précautions que je l'évoque. Les règles de recrutement des fonctionnaires conduisent à une absence de diversité. Certes, nous employons des contractuels dont les spécialités sont très pointues et très originales, mais vous connaissez les difficultés auxquelles nous sommes confrontés pour les intég rer de façon définitive dans nos effectifs. Par conséquent, prévoir l'arrivée au ministère de médecins, de techniciens, de juristes, d'universitaires, de personnalités issues du monde de l'industrie ou de la recherche privée est une chose extrêmement compliquée - j'ai pu le mesurer quand il s'est agi de recruter des personnes susceptibles d'enrichir l'inspection générale de l'environnement.

Pour ma part, je tiens à ce que le fonctionnement de ces inspections soit aussi peu incestueux que possible et que la diversité permette des échanges intellectuels. Mais je crois que nous sommes encore un peu loin du compte.

M. le président.

Nous en avons terminé avec les questions.

AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ET ENVIRONNEMENT II. - Environnement

M. le président.

J'appelle les crédits inscrits à la ligne :

« Aménagement du territoire et environnement :

II. Environnement ».

ÉTAT B Répartition des crédits applicables aux dépenses ordinaires des services civils (mesures nouvelles)

« Titre III : 218 287 566 francs ;

« Titre IV : 1 391 014 012 francs. »

ÉTAT C Répartition des autorisations de programme et des crédits de paiement applicables aux dépenses en capital des services civils (mesures nouvelles)

TITRE

V. INVESTISSEMENTS EXÉCUTÉS PAR L'ÉTAT

« Autorisations de programme : 331 530 000 francs ;

« Crédits de paiement : 121 752 000 francs. »

TITRE

VI. SUBVENTIONS D'INVESTISSEMENT ACCORDÉES PAR L'ÉTAT

« Autorisations de programme : 2 660 952 000 francs ;

« Crédits de paiement : 764 636 000 francs. »

Sur le titre III de l'état B, concernant l'aménagement du territoire et l'environnement (II. Environnement), le Gouvernement a présenté un amendement, no 105, ainsi rédigé :

« Majorer les crédits de 4 600 000 francs. »

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Cet amendement a pour objet de majorer les crédits inscrits sur le chapitre 36-41, article 10,

« Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres » de 4,6 millions de francs, afin de permettre au conservatoire du littoral de satisfaire aux obligations qui sont liées à son statut de propriétaire : impôts locaux, frais d'acquisition, réparations, entre autres.

Ces obligations étaient imputées sur les dépenses d'investissement, alors qu'il convient de les imputer sur les dépenses ordinaires. Le présent amendement a pour objet de régulariser cette situation.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Michel Suchod, rapporteur spécial.

La commission des finances n'a examiné ni cet amendement ni l'amendement no 106, qui, du reste, en est la conséquence. Toutefois, à titre personnel, j'émets un avis favorable, tout en regrettant ce dépôt tardif qui a empêché tout examen en commission.

J'en profite pour faire une remarque qui rejoint le débat que nous avons eu tout à l'heure. Par trois fois, nous avons eu des difficultés sur des chiffres. Or cela ne devrait pas être le cas. Alors que nous travaillons sur les chiffres fournis par les ministères - et, bien entendu, cela ne concerne pas que le vôtre, madame la ministre -, la commission des finances a, à plusieurs reprises, été confrontée à des difficultés avec les « bleus » budgétaires.

Tout cela me conduit à penser que la commission a certainement raison de vouloir avoir la capacité de procéder à sa propre expertise plutôt que d'être tributaire de chiffres fournis par le Gouvernement et qui peuvent donner lieu à des débats qui, au fond, n'auraient pas lieu d'être.

M. Daniel Marcovitch.

Très juste !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 105.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.

Je mets aux voix le titre III, modifié par l'amendement no 105.

(Le titre III, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président.

Sur le titre IV de l'état B, concernant l'aménagement du territoire et l'environnement (II. Environnement), M. Galley a présenté un amendement, no 104, ainsi rédigé :

« Réduire les crédits de 1 334 500 000 francs. »

La parole est à M. Robert Galley.

M. Robert Galley.

Madame la ministre, vous avez obtenu la cotutelle de l'Institut de protection et de sûreté nucléaire, et cela me paraît raisonnable.

En revanche, le motif avancé pour transférer les crédits du secrétariat d'Etat de l'industrie au ministère de l'environnement ne me paraît pas du tout convenable : il s'agirait d'assurer une indépendance accrue de l'IPSN. Je voudrais m'indigner avec véhémence - et je crois que mon indignation rencontre quelques échos dans cet hémicycle contre ce motif qui, en fait, traduit la marque d'une suspicion à l'encontre de la qualité, de la rigueur et de l'indépendance des études réalisées par les scientifiques et les ingénieurs de l'IPSN, rigueur dont vous savez bien, madame, qu'elle a été à l'origine de la sûreté de nos installations nucléaires, citée en exemple partout dans le monde.

Contribuant à la maîtrise des risques nucléaires et menant des recherches et des expertises sur les projets futurs, l'IPSN doit tout naturellement voir ses études


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 NOVEMBRE 2000

coordonnées avec celles décidées par les différents services du secrétariat d'Etat à l'industrie, ce qui implique que, dans le cadre de la cotutelle, les crédits de fonctionnement de l'établissement restent domiciliés au secrétariat d'Etat à l'industrie. Je fais allusion au réacteur hybride et au réacteur à haute température refroidi à l'hélium, qui continueront, dans un futur à moyen terme, à garantir notre indépendance énergétique et à assurer la protection contre l'effet de serre.

M. Yves Cochet.

Ça c'est de l'idéologie !

M. Robert Galley.

Mon amendement prévoit certes une suppression des crédits de l'IPSN, mais, comme nous le savons tous, c'était le seul moyen pour qu'il soit recevable. En fait, je veux, sans pour autant remettre en cause une cotutelle qui, je le répète, me semble acceptable, que ces crédits soient de nouveau inscrits au budget du secrétariat d'Etat à l'industrie.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Michel Suchod, rapporteur spécial.

Je regrette beaucoup que notre collègue Robert Galley n'ait pas présenté son amendement en commission, car ce dernier est de nature à ouvrir un débat de fond qui ne devrait pas avoir lieu en fin de séance.

M. Robert Galley.

J'ai présenté cet amendement en commission de la production !

M. Michel Suchod, rapporteur spécial.

Soit ! Je partage l'idée qu'il a émise suivant laquelle il faut une cotutelle. Mais pourquoi la cotutelle ne pourrait-elle pas être exercée d'un côté ou de l'autre de la barrière ? Après tout, le Gouvernement est un.

Par conséquent, à titre personnel, je ne voterai pas l'amendement proposé. Cela dit, dans la mesure où celui-ci n'a pas été examiné par la commission des finances, je m'en remets, en tant que rapporteur spécial, à la sagesse de l'Assemblée.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

J'espère que vous conviendrez, monsieur Galley, que nous ne sommes pas ici dans une discussion pour ou contre le nucléaire et que je n'ai jamais cherché à tirer parti de mes fonctions de ministre chargé de la cotutelle avec le secrétariat d'Etat à l'industrie du secteur de la sûreté nucléaire pour faire valoir mon propre point de vue. En général, quand je défends mes positions politiques, je ne me cache pas derrière tel ou tel prétexte, je les assume. J'espère que vous reconnaitrez que j'ai toujours exercé ma mission avec la rigueur et l'indépendance d'esprit nécessaires.

Il s'agit de réaliser une des premières étapes du processus qui doit nous permettre de faire davantage travailler ensemble l'Institut de protection et de sûreté nucléaire et l'OPRI, l'Office de protection contre les rayonnements ionisants, qui s'occupe de la radioprotection. D'ailleurs, vous aurez noté que c'est l'IPSN qui a travaillé, par exemple, sur la contamination d'habitations par du radon, alors que cette mission aurait peut-être dû être confiée à l'office de radioprotection. Nous souhaitons donc franchir cette première étape.

Je vous rassure, le ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement n'aura pas la tutelle exclusive sur l'IPSN, mais il me plaît de penser que cet effort de mise en cohérence de nos outils, et aussi cet effort en vue de l'indépendance de l'expertise, indépendance qui nous est indispensable pour étayer nos décisions, peuvent être reconnus par les parlementaires.

J'appelle également votre attention, monsieur le député, sur le fait que, si cet amendement était voté, cela entraînerait de facto une suppression des crédits de l'IPSN, puisqu'il ne serait pas possible, en vertu de l'article 40 de la Constitution, de les rétablir dans le budget du secrétariat d'Etat à l'industrie.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 104.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix le titre IV.

(Le titre IV est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre V.

(Les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre V sont adoptés.)

M. le président.

Sur le titre VI de l'état C, concernant l'aménagement du territoire et de l'environnement (II. Environnement), le Gouvernement a présenté un amendement, no 106, ainsi rédigé :

« Réduire les autorisations de programme de 9 200 000 francs ;

« Réduire les crédits de paiement de 4 600 000 francs. »

La parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Avant de présenter l'amendement, je dirai à Michel Suchod que nous n'avons pas de désaccord sur les chiffres ; nous avons uniquement des désaccords sur la ventilation et l'interprétation de certains d'entre eux. Mais j'entrevois une solution qui pourrait nous faciliter grandement le travail : la ministre pourrait être auditionnée devant la commission des finances de l'Assemblée pour présenter son budget.

M. Claude Billard.

Tout à fait !

M. Jean-Pierre Brard.

Vous nous mettez en appétit ! (Sourires.)

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Je crois que les parlementaires qui étaient présents à la réunion de la commission de la production et des échanges n'ont eu que des raisons de se féliciter de l'échange que nous avons eu.

Quant à l'amendement no 106, il constitue la contrepartie de l'amendement no 105, que l'Assemblée a adopté tout à l'heure : il tend, entre autres, à minorer de 4,6 millions de francs les crédits du conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres inscrits au titre VI, car ces crédits sont désormais inscrits au titre III pour permettre au conservatoire de faire face à ses engagements, notamment en matière de fiscalité locale.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Michel Suchod, rapporteur spécial.

Même opinion que sur l'amendement no 105 : favorable à titre personnel.

J'ajoute que, bien entendu, je me ferai l'avocat de l'audition de Mme la ministre devant la commission des finances, dont les membres seront certainement ravis de l'entendre. (Sourires.)

M. Jean-Pierre Brard.

Tout dépend de ce qu'elle nous dira ! (Sourires.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 106.

(L'amendement est adopté.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 3 NOVEMBRE 2000

M. le président.

Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.

Je mets aux voix les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre VI, modifiés par l'amendement no 106.

(Les autorisations de programmes et les crédits de paiement du titre VI, ainsi modifiés, sont adoptés.)

M. le président.

Nous avons terminé l'examen des crédits du ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement concernant l'environnement.

La suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances est renvoyée à la prochaine séance.

2

ORDRE DU JOUR

DES PROCHAINES SÉANCES

M. le président.

Lundi 6 novembre 2000, à dix heures, première séance publique : Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2001, no 2585 : M. Didier Migaud, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan (rapport no 2624).

Défense, articles 33 et 34 : M. Jean-Michel Boucheron, rapporteur spécial au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan (annexe no 40 du rapport no 2624) ; M. Jean-Bernard Raimond, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires étrangères (tome VI de l'avis no 2626).

Dissuasion nucléaire : M. René Galy-Dejean, rapporteur pour avis au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées (tome II de l'avis no 2627).

Espace, communication et renseignement : M. Bernard Grasset, rapporteur pour avis au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées (tome III de l'avis no 2627).

Forces terrestres : M. Jean-Claude Sandrier, rapporteur pour avis au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées (tome IV de l'avis no 2627).

Marine : M. Jean-Yves Le Drian, rapporteur pour avis au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées (tome V de l'avis no 2627).

Air : M. Yann Galut, rapporteur pour avis au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées (tome VI de l'avis no 2627).

Titre III et personnels de la défense : M. Aloyse Warhouver, rapporteur pour avis au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées (tome VII de l'avis no 2627).

Crédits d'équipement : M. Jean Michel, rapporteur pour avis au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées (tome VIII de l'avis no 2627).

Services communs : M. Michel Meylan, rapporteur pour avis au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées (tome IX de l'avis no 2627).

Gendarmerie : M. Georges Lemoine, rapporteur pour avis au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées (tome X de l'avis no 2627).

A quinze heures, deuxième séance publique : Suite de l'ordre du jour de la première séance.

A vingt et une heures, troisième séance publique : Suite de l'ordre du jour de la première séance.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix huit heures trente-cinq.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT

Prix du numéro : 0,64 - 4,20 F Imprimerie, 26, rue Desaix, Paris (15e ). - Le préfet, Directeur des Journaux officiels : Jean-Paul BOLUFER 103000800-001100