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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 7 NOVEMBRE 2000

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE

DE

M.

CLAUDE GAILLARD

1. Loi de finances pour 2001 (deuxième partie). - Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 8077).

AFFAIRES ÉTRANGÈRES (suite) (p. 8077)

MM. Roland Blum, Yves Dauge, Jean-Bernard Raimond, Jean-Pierre Michel, Mme Odette Trupin,

MM. Jacques Myard, Maurice Ligot, Mme Yvette Roudy,

MM. François Loos, Michel Vauzelle, Mme Monique Collange.

M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères.

M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Réponses de M. le ministre délégué aux questions de :

M. Charles Ehrmann, Mme Monique Collange, MM. Bruno Bourg-Broc, Bernard Schreiner et Marc Reymann.

ÉTAT B

Titres III et IV. - Adoption (p. 8098)

ÉTAT C

Titres V et VI. - Adoption (p. 8098)

Avant l'article 49 (p. 8098)

Amendement no 49 rectifié de la commission des finances : MM. Maurice Adevah-Poeuf, rapporteur spécial de la commission des finances, pour la coopération ; le ministre délégué, Bernard Schreiner, François Loncle, président de la commission des affaires étrangères. - Retrait.

M. le président de la commission des affaires étrangères.

Renvoi de la suite de la discussion budgétaire à la prochaine séance.

2. Dépôt d'une proposition de résolution (p. 8102).

3. Dépôt d'un rapport en application d'une loi (p. 8102).

4. Ordre du jour des prochaines séances (p. 8102).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 7 NOVEMBRE 2000

COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE

DE

M.

CLAUDE GAILLARD,

vice-président

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures.)

1

LOI DE

FINANCES

POUR 2001

DEUXIÈME PARTIE Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2001 (nos 2585, 2624).

AFFAIRES ÉTRANGÈRES (suite)

M. le président.

Nous reprenons l'examen des crédits du ministère des affaires étrangères.

La parole est à M. Roland Blum.

M. Roland Blum.

Monsieur le président, monsieur le ministre délégué à la coopération et à la francophonie, mes chers collègues, avec le budget consacré aux affaires étrangères pour 2001, nous saluons un budget de stabilisation, et ce pour la deuxième année consécutive. Je parle bien de stabilisation et non de progression, puisque l'augmentation des crédits est uniquement due à la prise en compte d'abondements inévitables en matière de dépenses obligatoires.

Or les crédits consacrés aux affaires étrangères doivent être suffisamment importants pour permettre à la France d'exercer pleinement le rôle attendu de la part d'une puissance d'influence européenne et mondiale.

S'agissant des dépenses internationales dans leur volet obligatoire, l'augmentation de 852 millions de francs dont elles bénéficient en 2001 risque de se révéler insuffisante. L'exercice 2000 avait déjà été l'objet d'une sousévaluation importante et il est à craindre que le prochain exercice ne soit dans le même cas.

C es dépenses obligatoires, qui financent plus de 1 30 organisations internationales au premier rang desquelles l'ONU, sont en effet directemement tributaires de la variation du dollar et des crises internationales pour le règlement desquelles la France se voit sollicitée.

Or l'hypothèse retenue pour élaborer le budget était celle d'une monnaie américaine à 6,57 francs.

M. Jacques Myard.

En euro, cela fait combien ?

M. Roland Blum.

La simple réalité d'un dollar fort remet donc en cause la prévision budgétaire.

De leur côté, les crédits consacrés aux opérations de maintien de la paix sont également susceptibles d'augmenter alors que le règlement des crises s'inscrit de plus en plus dans la durée et que de nouveaux conflits peuvent toujours apparaître.

Dès lors, nos engagements européens risquent de souffrir de la sous-évaluation prévisible des contributions obligatoires. C'est en effet le solde hors ONU qui se trouve réparti entre des instances essentielles comme le Conseil de l'Europe ou encore l'Organisation de sécurité et de coopération européenne.

Plus préoccupant paraît être l'insuffisance des crédits inscrits au titre des contributions volontaires. D'un montant total de 318 millions de francs, ces crédits ne permettent pas, en effet, à la France de peser du poids qui devrait être le sien sur la scène internationale.

Je me permets de vous rappeler que les nouveaux programmes lancés par l'ONU sont financés par ce type de contributions. En se révélant un modeste contributeur, la France subit une perte d'influence et dessert ses intérêts auprès de l'ONU, puisqu'elle n'a aucun poids pour y placer ses hommes, ses idées et ses entreprises.

Le même constat de faiblesse s'impose en matière d'aide humanitaire. Alors que nos principaux partenaires européens - le Royaume-Uni, l'Allemagne ou l'Italie allouent 200 à 300 millions de francs au fonds d'urgence humanitaire, la France lui consacre la modique somme de 60,79 millions de francs. Dès lors, la crédibilité de la position française est en jeu.

J'en viens aux crédits consacrés à la francophonie inscrits dans le budget des affaires étrangères et qui s'élèvent, pour l'exercice 2001, à 244,3 millions.

La France doit financer, à partir de ce montant, le plan d'action défini lors du dernier sommet francophone qui s'est tenu au Canada en septembre 1999. Si les priorités qui ont été réaffirmées à cette occasion ne sont pas contestables, la lisibilité des actions mises en place demeure, quant à elle, beaucoup plus problématique.

Identifier sous un même chapitre les crédits destinés aux programmes et aux projets multilatéraux francophones représente, certes, un premier pas dans le sens de cette lisibilité, mais cette présentation comptable doit s'accompagner d'une meilleure définition et d'une plus grande communication autour des programmes francophones entrepris.

Une telle réflexion s'impose alors que la politique francophone souffre d'un déficit d'image et que le prochain sommet de la francophonie est prévu dans moins d'un an maintenant.

En conclusion, monsieur le ministre, tout en soulignant la difficulté de l'exercice consistant à arrêter des crédits en fonction d'une actualité internationale par définition mouvante, j'estime que le budget que vous nous présentez ne donne pas complètement à la France les moyens d'une intervention influente sur la scène internationale.


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C'est pourquoi le groupe Démocratie libérale, au nom duquel j'interviens à cette tribune, ne votera pas le projet de budget des affaires étrangères pour l'exercice 2001.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

La parole est à M. Yves Dauge.

M. Yves Dauge.

Monsieur le ministre mon intervention portera sur l'Agence française de développement et sur les centres culturels.

S'agissant d'abord de l'Agence française de développement, quelques constats paraissent s'imposer.

D'abord - tout le monde l'a dit, mais je le rappelle tout de même - l'agence a étendu son champ géographique et elle est désormais présente dans soixante et un pays, dont certains comme le Nigeria, l'Afrique du Sud ou le Vietnam pèsent très lourd.

L'agence intervient aussi dans des secteurs géographiques situés hors de sa zone d'intervention prioritaire : Albanie, Macédoine, Kosovo, Serbie, Bulgarie. Cela va accroître sa charge de travail.

Ensuite, le contenu des missions de l'agence évolue, pas seulement parce que le champ d'intervention de l'agence s'est étendu, mais aussi parce que le métier se complexifie. Je pense notamment à la prise en compte de secteurs comme la santé et l'éducation. On est passé de projets relativement identifés et simples à des questions de développement très complexes qui exigent beaucoup de professionnalisme et des moyens humains en conséquence.

En dépit de ces deux constats, les crédits budgétaires ne sont malheureusement pas là, même si j'ai en tête ce qui a été dit sur l'arrêt de la décroissance des moyens.

Cette situation est à mettre en parallèle avec l'annulation de la dette.

En fait, quand on annule la dette d'un pays, on ne se contente pas de faire une opération mathématique, on agit de la sorte pour réaffecter les moyens financiers à une politique de développement. Il faut donc encadrer l'action, ce qui nécessite des moyens humains et une présence. D'autant que, comme le Gouvernement l'a promis, la remise de dette doit être additionnelle à l'aide publique au développement.

M. Jacques Myard.

Vous avez raison !

M. Yves Dauge.

Merci, monsieur Myard.

L'annulation de la dette ne doit pas entraîner l'arrêt de l'aide additionnelle.

M. Jacques Myard.

On ne peut pas être en même temps à Bruxelles et en Afrique !

M. Yves Dauge.

Comment va-t-on financer cette aide additionnelle ? Si les moyens financiers de l'agence, que je connais bien puisque je suis le représentant de l'Assemblée nationale au sein de son conseil d'administration, ont été stabilisés, il n'en demeure pas moins que la subvention

« aide projet » est passée de 2 555 millions en 1990 à 1 145 millions en 2000, soit une chute de 50 %.

M. Jacques Myard.

C'est la Berezina !

M. Yves Dauge.

Fort heureusement, on essaie de rétablir le niveau de cette subvention. Toutefois, il est évident que face aux demandes que j'ai évoquées, au développement des champs d'intervention, à l'extension de la zone géographique concernée et aux missions qui se complexifient, les moyens financiers ne sont pas suffisants. M. Hubert Védrine a déclaré ce matin : « Pas de proclamations, des actes ». Je suis d'accord, mais il y a surtout eu beaucoup de proclamations...

Cela dit, il faut bien reconnaître que, malheureusement, vos amis du budget ne vous ont pas aidé malgré tout le travail que vous avez accompli et auquel les parlementaires ont participé.

S'agissant des moyens de l'agence - j'en dis un mot car on lui a demandé beaucoup en termes de rigueur -, il faut savoir qu'ils n'ont pas bougé depuis cinq ans et qu'ils s'élèvent toujours à 1 210 personnes. De même, les frais généraux ont été bloqués depuis cinq années. Malgré cette rigueur, l'agence a fait preuve de beaucoup d'efficacité. Mais combien de temps pourra-t-elle tenir sans moyens humains supplémentaires ? Il faut aussi regarder de près la capacité de nos opérateurs et voir si les moyens dont ils disposent sont en adéquation avec les demandes politiques.

Je dirai maintenant quelques mots des centres culturels.

J'ai essayé, monsieur le ministre, et c'est très difficile, de connaître le budget exact affecté aux centres culturels.

Certaines lectures nous laissent à penser que les lignes budgétaires augmentent ; d'autres nous laissent supposer le contraire. Finalement, pour me faire une opinion, je suis allé voir sur le terrain ce qui se passe dans certains centres culturels.

J'ai pu établir un constat d'où il ressort que les budgets d e programmation culturelle représentent une part minime des budget totaux des centres culturels : 5,6 % du compte financier à Tokyo, 6 % à Barcelone, 10 % à Munich, 21 % à Amsterdam - ce chiffre représentant le pourcentage maximal atteint. Or les budgets de programmation culturelle peuvent être comparés à l'essence servant à faire tourner le moteur. A quoi bon équiper une armée avec du matériel et des hommes pour faire fonctionner celui-ci s'il n'y a pas d'essence ? Les crédits de programmation culturelle constituent vraiment la ressource indispensable pour faire fonctionner l'outil ! Un jour, on nous dira qu'il n'y a qu'à supprimer l'outil puisqu'il n'est pas efficace. Mais on aura tout fait pour le tuer ! Ça, c'est la technique budgétaire ! Je l'ai vue fonctionner dans d'autres secteurs que je connais bien, comme le logement : on sait tuer les mécanismes dans le dos des ministres, on sait rendre inapplicables les décisions que nous prenons.

Ces crédits de programmation sont vraiment minimes, mais comme ce sont les seuls flexibles, c'est sur eux qu'on joue : ils servent de variables d'ajustement.

On gardera les bâtiments, on maintiendra quelques postes bien sûr, mais on tuera le contenu, tout en tenant un discours magnifique sur la présence de la France dans le monde ! J'y insiste, il faut vraiment que les ministres mènent une action avec nous - ce qu'ils font - pour arrêter ce massacre budgétaire, qui de surcroît porte sur des sommes dérisoires.

En tout état de cause, ces budgets culturels, même en valeur absolue, sont dérisoires. Je prends l'exemple du centre de Barcelone que je connais bien : il reçoit 6 00 000 francs par an, soit 67 000 francs par moiso uvrable, pour fonctionner. Or Barcelone compte 3,5 millions d'habitants. La France pourrait tout de même tenter d'atteindre un autre niveau car les Catalans sont en droit d'attendre de notre pays qu'il consacre plus de 67 000 francs par mois à la culture. L'immeuble est


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magnifique, et il sera, bien entendu, fait ce qu'il faut pour l'entretenir, mais il n'y aura plus de crédits pour mener une véritable action culturelle.

Je peux citer d'autres exemples. A Berlin, le budget culturel est de 800 000 francs. Berlin, tout de même ! A Tokyo, il est de 1,6 million, mais compte tenu des prix locaux, il faut le réduire de moitié. Autrement dit, on est vraiment au-dessous du minimum vital.

Dans ces conditions, il est inutile de conduire des politiques de développement culturel si, par ailleurs, on est incapable de garder en état l'outil et le réseau magnifiques que nous avons.

Etant donné la situation, il est évident que les équipes se découragent. J'ai pu en juger sur place dans le cadre d'un rapport que je suis en train d'établir. J'ai rencontré beaucoup de gens remarquables, compétents et a priori motivés. Mais, franchement, si cette situation perdure, les meilleurs ne demanderont plus ces postes-là.

Et je passe sur les relations humaines, souvent négatives malheureusement, qui se sont établies entre l'ambassadeur ou le conseiller culturel et le directeur du centre ; ce dernier est souvent considéré comme un personnage d'un niveau inférieur, ce qui n'est pas acceptable.

En fin de compte, les crédits sont insuffisants en pourcentage, bien faibles en valeur absolue et, de surcroît, en baisse. Ainsi, Barcelone qui avait reçu 950 000 francs de crédits de fonctionnement en 1998, n'en perçoit plus aujourd'hui que 600 000 ! Et je pourrais citer d'autres exemples.

Ce n'est donc pas la peine de faire une grande direction générale si on tue les antennes que nous avons sur le terrain ! Ce n'est pas une critique que je vous adresse, monsieur le ministre, car je sais ce que Hubert Védrine et vous avez fait - aidés en cela par les députés -, pour arrêter le massacre, mais ayant été sur le terrain et ayant rencontré les gens sur place, je fais remonter l'information : en l'espace de quelques mois, on risque de détruire tous les acquis que nous avons accumulés au cours des âges !

Mme Yvette Roudy.

Très juste ! Il faut le dire !

M. Yves Dauge.

On est dans le cadre d'une politique de déstructuration, de destruction, malgré un affichage j'ai envie de dire un camouflage - qui laisse entendre que tout va bien.

Alors, oui à la politique culturelle, oui aux centres culturels, mais donnons-leur, comme à l'Agence française de développement, le minimum de moyens indispensables pour répondre aux grandes ambitions de la France en ce domaine.

M. Jacques Myard.

Très bien !

M. Yves Dauge.

Allons jusqu'au bout, tirons les conclusions qui s'imposent et ne nous laissons pas diriger par les chefs de bureau du budget (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Jacques Myard.

Bravo !

M. le président.

La parole est à M. Jean-Bernard Raimond.

M. Jean-Bernard Raimond.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais, dans le bref temps qui m'est imparti, évoquer deux problèmes internationaux, qui n'ont aucun rapport entre eux, mais dont la nature montre combien une Europe politiquement et économiquement puissante, avec des capacités militaires correspondantes, est de plus en plus nécessaire pour contrebalancer l'excès de puissance américaine. Je veux parler du cas de l'Irak et de celui de l'exYougoslavie.

Aujourd'hui, la situation en Irak et autour de l'Irak est représentative, sans réserve aucune, d'un échec total de la communauté internationale. Au contraire, le retour inespéré à aussi court terme de la démocratie dans l'exYougoslavie, processus que M. Hubert Védrine a tenu à saluer en se rendant immédiatement à Belgrade, ne peut qu'inspirer d'utiles réflexions.

Après la guerre du Golfe, l'embargo et le contrôle de l'armement irakien avaient conduit, en quelques années, à une possible réinsertion de l'Irak dans la communauté i nternationale. En 1996, il était possible de lever l'embargo, tout en maintenant un contrôle permanent de l'armement de Bagdad. La France y était favorable. Le régime de Saddam Hussein avait rempli ses obligations en procédant au désarmement de son arsenal nucléaire et des missiles, même si quelques interrogations pouvaient subsister sur l'armement chimique - le biologique étant comme partout incontrôlable - et en reconnaissant le Koweït.

Par ailleurs, l'acceptation de la résolution 986 par l'Irak - dite pétrole contre nourriture - avait permis un allégement très relatif de l'embargo et, en même temps, avait constitué un geste en direction d'un retour dans la communauté internationale. On pouvait même envisager l'arrêt des survols au sud et au nord de l'Irak. Or la politique américaine bloqua tout progrès, parce que, pour Washington, il s'agissait désormais, contrairement aux engagements de 1990-1991, de renverser Saddam Hussein.

La crise nouvelle et proprement dite culmina en 1998 avec les bombardements américains et britaniques et le départ de la commission de contrôle.

A l'heure actuelle, la politique négative américaine a mené la communauté internationale à une situation irrationnelle : maintien d'un embargo de plus en plus contourné légalement ou illégalement et absence totale, depuis deux ans, d'un contrôle de la position militaire de l'Irak, à moins que, par un renversement inattendu, les

Etats-Unis choisissent d'être les premiers à profiter des richesses potentielles de l'Irak, détenteur des deuxièmes réserves de pétrole. L'impuissance de la France, dont la politique était pourtant raisonnable, souligne que jusqu'à aujourd'hui, c'est-à-dire pendant presque dix ans, les

Etats-Unis ont imposé à l'Europe une politique absurde dans ses conséquences.

En revanche, la situation dans l'ex-Yougoslavie est différente, même si jusqu'en 1995 les Etats européens, directement confrontés à un défi au coeur même du continent, ont laissé faire les Nations unies, qui ont démontré leur incapacité à imposer la paix. De juin à décembre 1991, la communauté internationale est restée complètement passive devant l'agression contre les Croates. En 1992, les mêmes erreurs, en Bosnie-Herzégovine, prolongeait, malgré la présence impuissante des Casques bleus, les massacres et l'expansion totalitaire de la Serbie de M. Slobodan Milosevic. Il a fallu qu'un européen, en fait le Président de la République, M. Jacques Chirac, décide de réagir coûte que coûte, entraînant avec lui les Britanniques, pour que la communauté internationale prenne ses responsabilités et que les Américains, sortant d'une n eutralité quasi totale malgré quelques opérations aériennes, interviennent en Bosnie avec les accords de Dayton et la création, sous l'égide de l'OTAN, de l'IFOR


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puis de la SFOR. Dès lors, le commandement militaire échappait enfin aux Nations unies, la guerre cessait et le changement radical du monde se traduisait par la pré-s ence d'un contingent russe, sous commandement OTAN, qui plus est dans le secteur américain. La suite est connue. Aujourd'hui, le peuple serbe a montré magnifiquement qu'il avait tout compris en portant à sa tête un h omme éminemment démocrate, Vojislav Kostunica, auquel il faut laisser le temps de consolider progressivement la démocratie en Serbie.

Les résultats au Kosovo en faveur de M. Ibrahim Rugova s'inscrivent dans la logique des événements et rendent justice à la clairvoyance et à la ténacité de Bernard Kouchner. Le rôle de la France et de la majorité des Européens dans la crise balkanique n'a pu se définir que lentement, parce que rien ne pouvait se faire sans les capacités militaires de l'OTAN et des Etats-Unis. Si la construction de l'Europe de la défense avait été engagée plus tôt, les longues tergiversations depuis 1989 en Yougoslavie auraient pu être évitées.

La conclusion va de soi. Elle rejoint ce que je disais hier sur les crédits de la défense. La présidence française devrait être marquée par des progrès significatifs en m atière de défense européenne et surtout dans le domaine de la réforme des institutions préalable à un élargissement aux pays candidats à l'adhésion. La chronologie permettrait ainsi à l'Europe de débuter d'un bon pied en face du président des Etats-Unis, dont nous allons connaître le nom dans quelques heures. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Michel.

M. Jean-Pierre Michel.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes quelques observations tourneront autour de la politique arabe de la France,...

M. Jacques Myard.

Il n'y en a plus !

M. Jean-Pierre Michel.

... que je crois nécessaire.

Tout d'abord, s'agissant de l'Algérie. Après la visite flamboyante - peut-être un peu trop - du président Bouteflika à Paris, qu'en est-il de nos relations avec ce pays ? J'ai vu avec satisfaction que notre consulat avait rouvert à Annaba, avec des services à la population d'ailleurs réduits. Qu'en est-il à Oran ? Comment le Gouvernement compte-t-il résoudre la question d'Air France ? Il est ubuesque...

M. François Loncle, président de la commission des affaires étrangères.

Scandaleux !

M. Jean-Pierre Michel.

... et scandaleux que cette entreprise nationale n'assure pas de vols à destination de l'Algérie.

S'agissant, ensuite, du conflit israélo-palestinien, monsieur le ministre délégué, le temps joue contre la paix, tout le monde le voit bien. Avec Sharon d'un côté, le Hamas de l'autre, les nouvelles crispations que l'on enregistre aujourd'hui peuvent conduire à une terrible régression. On ne parle même plus des accords qui ont été signés à Oslo, puis à Charm el-Cheikh. Or, de mon point de vue, le Proche et le Moyen-Orient peuvent et doivent échapper à la spirale de la guerre et du maldéveloppement. C'est un enjeu de civilisation à la fois pour l'Orient et l'Occident. Mais la paix, cela veut dire avant tout la justice. Il n'y a pas de paix possible sans justice.

Or, la justice, cela signifie deux choses, et d'abord le droit d'Israël à des frontières sûres et reconnues, ce qui implique le retour dans le jeu de la Syrie. Dans ce pays, le personnel politique a changé. Il y a eu un rajeunissement. Des signes positifs ont été donnés dans le sens de la démocratisation du régime. M. Akhtam Nuaysa, avocat emprisonné en 1991, président du comité de défense des droits de l'homme en Syrie, vient d'obtenir un passeport et un visa pour la France où il est en ce moment. Que fait la France avec la Syrie aujourd'hui ? Comment compte-t-elle réintroduire la Syrie, qui est à mon avis incontournable, dans le processus de paix au ProcheOrient ? Mais la justice, c'est aussi le droit des Palestiniens à obtenir un Etat qui soit un espace géographique continu, et non une dentelle de territoires isolés ici ou là. Tant que les grandes puissances ne pourront pas dégager, dans cette zone, un tel espace géographique, rien ne sera possible, et je crois que la Jordanie doit verser son écot.

Israël ne doit pas être seul à céder des territoires à la Palestine. On ne parle jamais de la Jordanie. Cela paraît être une affaire entendue. Or certains territoires jordaniens pourraient fort opportunément faire partie du nouvel Etat palestinien.

Dans ce conflit du Proche-Orient, la diplomatie française joue un rôle très utile et je m'en félicite, car la partialité excessive de la médiation américaine confère à celle-ci des limites évidentes. Si les Etats-Unis voulaient vraiment la paix, il leur suffirait de menacer l'Etat d'Israël de réduire de quelques dollars les millions ou les milliards qu'ils lui distribuent chaque année. Les dirigeants israéliens adopteraient alors immédiatement une position plus raisonnable. Au lieu de cela, on réunit tout le monde à la Maison-Blanche et l'on se garde bien d'exercer quelque pression que ce soit, surtout financière, sur l'Etat d'Israël.

Cela dit, quand on connaît le lobby sioniste aux EtatsUnis, on comprend que cela ne soit pas très faisable en période préélectorale.

Telles sont les quelques réflexions que je voulais faire, mais puisque M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie est là, je voudrais évoquer la situation à Djibouti.

Un rapport élaboré par la commission de la défense, en relation avec le ministère des affaires étrangères, vient très opportunément de rappeler, chiffres à l'appui, l'aide considérable que la France apportait sur le plan militaire à Djibouti. Au cours de la dernière commission mixte qui s'est tenue au printemps dernier, monsieur le ministre, vous avez obtenu des engagements de la part des autorités djiboutiennes. Or, aujourd'hui, ces engagements ne sont pas tenus. L'armée est encore sur le terrain dans le nord du pays et empêche les populations civiles de vivre normalement. Par ailleurs, les forces rassemblées autour d'un front démocratique à Djibouti ont fait des propositions dans le cadre de réunions avec les autorités. Mais ces propositions sont restées lettre morte. Aucune suite ne leur a été donnée. Malgré les belles promesses qui ont été faites au gouvernement français, la situation à Djibouti est inchangée. Que comptez-vous faire de ce point de vue, monsieur le ministre ? Pour conclure, je dirai que les députés du Mouvement des Citoyens voteront ce budget.

(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste).

M. le président.

La parole est à Mme Odette Trupin.

Mme Odette Trupin.

La francophonie, est-il besoin de le rappeler, est l'organisation rassemblant les pays ayant le français en partage. Elle a été conçue par ses fondateurs


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comme un espace d'amitié et d'échanges. Elle a acquis depuis une dimension politique, institutionnelle et économique. Il s'agit, non pas d'assurer la défense de la langue française à proprement parler, mais de lui permettre de s'affirmer. A ce titre, la francophonie apparaît aujourd'hui plus que jamais nécessaire.

En effet, la mondialisation des marchés conduit peu à peu à la convergence de beaucoup de langues vers l'anglais. A l'avenir - et cet avenir est très proche - de plus en plus de gens dans le monde seront « nomades », pour reprendre l'expression de Jacques Attali, et anglophones. Il est possible qu'ils ne choisissent plus leur avenir personnel en fonction de leur appartenance à une c ommunauté territoriale ou linguistique, mais qu'ils veuillent se rattacher individuellement au monde de l'emploi, de la technologie et de la distraction dominante, c'est-à-dire au monde anglo-saxon. En outre, le droit privé étant de plus en plus anglo-saxon, de très nombreuses professions risquent d'évoluer exclusivement en anglais. Et c'est en anglais qu'on créera la majorité des concepts, donc des mots liés à la modernité - c'est déjà le cas avec Internet ou start-up. Cela signifie évidemment que les Etats-Unis sont en train de confirmer leur statut d'« hyperpuissance » et l'anglais son statut d'« hyperlangue », du moins à court et moyen terme, car il est concurrencé par l'espagnol.

Si l'on tente d'inscrire l'avenir du français dans cette perspective, force est de constater qu'il ne cesse de perdre du terrain. Il convient cependant de considérer cette question avec un certain recul, une certaine prudence. Le monde eût certes été différent si la langue française n'avait pas existé, et il sera différent si le français disparaît. Mais peut-on imaginer un monde sans français ?

M. Jacques Myard.

Certains l'ont déjà imaginé !

Mme Odette Trupin.

Certes, le français ne mérite pas d'être plus défendu qu'une autre langue.

Mme Yvette Roudy.

Si !

Mme Odette Trupin.

Il ne faut pas fonder sa défense sur l'affirmation d'un sentiment de supériorité culturelle, ni faire un discours sur le génie français, la manifestation d'une supériorité culturelle ou ethnique. Le français est simplement un élément, parmi d'autres, de la diversité humaine qu'il importe de préserver, comme les autres.

Naturellement, il n'y a pas de langue française sans France. La grandeur de la France, sa survie comme nation, comme source d'emplois, de richesses, de culture, comme rayonnement, est fondamentale à la survie de la langue. Tout comme la langue française paraît indispensable à la France. Contrairement à ce que pensent beaucoup de Français, la part grandissante de l'anglais ne doit cependant pas être acceptée comme une fatalité. Il ne faut pas décréter que la guerre est perdue d'avance. La population francophone est actuellement estimée à près de 113 millions de personnes et, comme l'a précisé M. le ministre délégué ce matin, 500 millions d'individus s'expriment en français. La francophonie est encore un enjeu de taille.

Dans ce cadre, la France doit faire porter ses efforts plus particulièrement sur deux points : d'une part, la défense de sa langue au sein de l'Union européenne et dans les institutions internationales ; d'autre part, le renforcement de son action au sein de la francophonie, dont elle est le moteur et le principal bailleur de fonds, afin de donner plus de poids à l'organisation.

Le débat sur la diversité culturelle qui a lieu en ce moment dans tous les pays européens, la nécessaire protection des diverses langues de la Communauté, non seulement au niveau national - dans les médias, par exemple -, mais aussi dans les groupes de travail de la Communauté même, montrent que le rêve européen peut devenir, s'il est mal encadré, un facteur de déclin de la langue française.

M. Jacques Myard.

Le rêve européen ? C'est déjà un cauchemar !

Mme Odette Trupin.

La situation du français demeure enviable en tant que langue officielle de l'Union. Cependant, comme le soulignent bien des observateurs, depuis dix ans, son emploi dans les institutions communautaires accuse un recul aggravé par la récente adhésion des pays du Nord, qui privilégient l'anglais. Les documents de travail de la Commission et du Conseil sont très souvent adressés aux administrations françaises en anglais...

M. Jacques Myard.

C'est scandaleux !

Mme Odette Trupin.

... et nos partenaires africains francophones se plaignent souvent que les documents en provenance de l'Union leur soient également envoyés en anglais. Un groupe de travail interministériel sur le français dans l'Union européenne a lancé plusieurs actions depuis 1996, mais qu'en est-il réellement ? Ne devrait-il pas déjà être fait obligation à tous les fonctionnaires français de veiller au respect du plurilinguisme dans les institutions européennes ? Les mêmes questions méritent d'être posées en ce qui concerne la place du français dans les grands organismes internationaux comme l'ONU, où la traduction en français des documents de travail n'est pas toujours assurée.

La France devrait se montrer plus vigilante et plus ferme à cet égard. Cette situation, très préjudiciable à son image et à celle du français, pourrait, à moyen terme, léser les intérêts nationaux et handicaper la représentation de la France sur la scène internationale. Il faut par conséquent envisager des mesures propres à garantir le respect du plurilinguisme au sein de l'Union européenne et des organisations internationales.

La participation de la France à l'Organisation internationale de la francophonie mérite par ailleurs une attention particulière. En effet, cinquante et un Etats et gouvernements membres font partie de cette organisation, qui a donc, potentiellement, un poids certain. Aujourd'hui, à mi-chemin entre le huitième sommet des chefs d'Etat de Moncton, au Canada, qui a eu lieu en septembre 1999, et le prochain sommet, qui se tiendra à Beyrouth à l'automne 2001, il convient d'envisager des moyens permettant de renforcer la francophonie. Celle-ci a acquis une légitimité et une véritable représentation depuis le sommet des chefs d'Etat de Hanoi de 1997, avec la nomination de M. Boutros Boutros-Ghali au secrétariat général de l'Organisation. Cependant, l'OIF souffre de nombreux maux, notamment du manque de lisibilité et de cohérence de ses actions. La création d'un secrétariat général de la francophonie est une étape encourageante vers la rationalisation de ses structures.

Toutefois, n'aurait-il pas été préférable de fédérer pré alablement la cinquantaine d'institutions et les quelque 3 00 associations et organismes intervenant dans ce domaine ? L'offre, notamment française, en matière de francophonie est importante et la demande reste forte.

Néanmoins, les bonnes volontés risquent de s'épuiser si l'ensemble du dispositif n'est pas réévalué.

En France, la francophonie serait, comme l'a dit Yves Tavernier, un « objet budgétaire non identifié ». Ce jugement impitoyable concerne, d'une part, la contribution de la France à la francophonie institutionnelle et, d'autre


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part, l'ensemble des actions francophones françaises multi et bilatérales. Les crédits sont répartis entre divers ministères et directions. Il est très difficile d'obtenir des chiffres fiables et il ne semble pas qu'une évaluation systématique des moyens soit mise en oeuvre.

L'Organisation internationale francophone a récemment engagé une évaluation des principaux opérateurs de la francophonie : après l'Agence universitaire de la francophonie, l'Agence internationale de la francophonie et l'université Léopold-Senghor font actuellement l'objet d'un audit. Comme l'a rappelé ce matin M. le ministre, il serait souhaitable de « diffuser une vraie culture de l'évaluation » et, parallèlement à l'action de l'OIF, de procéder à une évaluation rigoureuse de l'efficacité de l'action francophone de la France et de l'utilisation des nombreuses aides accordées par notre pays.

L'enjeu est de taille, car le plurilinguisme constitue un rempart contre l'uniformisation des modes de vie et des cultures. Est-il permis d'espérer que les citoyens français, de plus en plus sensibles au rayonnement de la France, pourront avoir accès aisément à une information claire dans ce domaine ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Jacques Myard.

M. Jacques Myard.

Etre ministre des affaires étrangères, aujourd'hui, emporte l'obligation de relever deux défis : celui de maintenir l'outil diplomatique et celui de conduire une politique étrangère digne de la France.

Sur le premier point, comme cela a déjà été souligné, votre budget, monsieur le ministre, affiche un accroissement de 1,131 milliard de francs, soit de 5,3 % par rapport à l'année 2000. Mais, vous le savez, l'apparence est trompeuse puisque vous reconnaissez vous-même qu'en réalité, à périmètre constant, ce budget stagne à 40 millions de francs près. Les effectifs baissent une fois de plus, certes de trois unités seulement, mais après une purge continue depuis plusieurs années.

Monsieur le ministre, je ne vous l'apprendrai pas, vous n'avez pas un bon budget. Je crois que vous êtes un malaimé. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme Yvette Roudy.

Nous l'aimons bien, nous !

M. Jacques Myard.

Des députés, quel que soit le banc où ils siègent, souhaitent pourtant accroître vos crédits.

J'ai moi-même essayé, cette année encore, de déposer des amendements. Mais une commission des finances « scélérate » les a rejetés ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Impossible en effet d'amender par chapitres, l'ordonnance de 1959 ne permettant que des amendements qui portent sur les titres. Voilà pourquoi, malgré ma bonne volonté, je n'ai pas pu présenter quelque amendement, que le rapporteur M. Tavernier aurait sans aucune doute voté des deux mains, vu son opposition de l'an passé...

M. Yves Tavernier, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

Il faudra être moins maladroit la prochaine fois !

M. Jacques Myard.

C'est à vous d'avoir un peu plus de courage, monsieur le rapporteur ! En réalité, monsieur le ministre, on ne vous dit pas tout. On vous cache, notamment, le poids réel de votre budget dans l'ensemble des crédits consacrés par la France à ses relations avec le reste du monde. C'est ainsi que nous ne disposons plus, à l'inverse des années précédentes, de ce petit fascicule bien utile, qui nous permettait de contrôler ces crédits, et de constater qui était le véritable ministre des affaires étrangères : je veux parler du ministre de l'économie et des finances ! C'est sans doute pour mieux vous disputer vos crédits et les rogner allègrement, alors que Bercy dispose de bien davantage de moyens que vous.

Cette quasi-stagnation est grave, car il s'agit de notre action extérieure, en particulier dans certains domaines qui vous sont chers, monsieur le ministre chargé de la coopération, comme celui de l'aide au tiers-monde.

Avant d'évoquer la nécessité d'une refondation de notre politique étrangère, je voudrais vous faire part d'un regret. Nous avons construit une nouvelle ambassade à Berlin sur la Pariser Platz, et je m'en félicite. Mais à l'évidence, nous nous apprêtons, si cela n'est pas déjà fait, à vendre le fameux château Ernich, à Remagen, sur le Rhin.

L'Allemagne n'est plus la Prusse. D'ailleurs, chaque fois que cela a été le cas, nous nous en sommes tous mordu les doigts ... Il serait donc judicieux j'espère que c'est encore possible - de garder Ernich pour en faire un grand centre d'études françaises en Rhénanie, une sorte de Villa Medicis sur le Rhin, qui pourrait renforcer la présence française dans cette partie de l'Allemagne, qui nous est proche.

J'en viens maintenant à la conduite de la politique étrangère. La France dispose d'un outil, qui est sans doute l'un des plus denses parmi les grandes puissances, le second au monde après celui des Etats-Unis. Mais pour quoi faire ? Le ministre Hubert Védrine, que j'aime citer, a écrit dans un de ses ouvrages qu'il y a toujours eu une sorte de « volonté française de vouloir » : expression bien à l'image de cette volonté française d'exister, quel que soit d'ailleurs le Gouvernement, pour porter un message. Or, je le regrette, aujourd'hui j'ai le sentiment que cette volonté de vouloir n'existe plus, ou du moins qu'elle s'étiole dans le maquis des procédures bruxelloises qui paralysent l'action, puisqu'à chaque fois il faut essayer de rechercher des stratégies communes ou des positions du même nom ... Et certains, à l'évidence, se réjouissent que la France, qui dérange souvent, rentre dans le rang.

Le « tout-Europe » de notre action diplomatique, relève selon moi de la névrose obsessionnelle. Tout se passe comme s'il n'y avait rien d'autre au monde que les directives et les règlements de Bruxelles et l'on ne fait que mouliner à longueur de temps les mêmes textes pour encadrer tel ou tel domaine d'activité. Or le monde ne se réduit pas à l'univers technocratique de la bureaucratie bruxelloise. La France néglige désormais l'essentiel.

Cet essentiel, comme l'a souligné à juste titre notre collègue M. Dauge, c'est la Méditerranée, c'est l'Afrique, c'est le Proche et le Moyen-Orient, qui s'éloignent de nous. C'est là que les fractures deviennent évidentes et vont engendrer dans la ou les décennies à venir des bouleversements, qui nous frapperont directement, car toutes ces régions sont à notre porte immédiate. Ces peuples sont nos voisins de palier, et nous les ignorons superbement ! Il faut, monsieur le ministre, ouvrir les yeux. Cessons de nous épuiser dans une construction européenne qui existe déjà et qui doit d'ailleurs se recentrer sur l'essentiel.

Cessons de nous épuiser dans la rédaction de textes superfétatoires qui ne sont là que pour justifier l'existence d'une technocratie qui a pris le pouvoir. Et de grâce ! Occupons-nous de ce qui se passe à nos portes, autour de la Méditerranée, au Proche-Orient et en Afrique. Cela va de soi. C'est là que sont les dangers, c'est là que se joue notre avenir, c'est là que nous devons être présents.


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Ne me dites pas que l'Europe va faire le travail à notre place. Vous savez très bien que nombre de nos partenaires, qui sont loyaux dans certains domaines, n'ont cure de l'Afrique ou de la Méditerranée. C'est donc à nous d'agir.

C'est à nous de reprendre l'initiative en reconstituant notre aide publique au développement qui est passée de 0,57 % ou 0,58 % de notre PIB, il y a une dizaine d'années, à 0,37 % aujourd'hui et qui s'apprête encore à baisser. La France doit retrouver son autonomie de décision dans ces régions. Elle doit entraîner les autres plutôt que de les supplier dans des procédures qui n'aboutissent à rien. Au demeurant, la gifle que la France vient de recevoir dans l'affaire de la Corée du Nord devrait tout de même ramener un certain nombre de choses à leurs justes proportions. La France, Hubert Védrine l'a souvent dit, en s'adressant sans doute à ses amis du Parti socialiste, est une puissance mondiale, et il a raison. Elle peut, elle doit agir seule en montrant la voie. Les autres suivront. Il est vain de les attendre.

Du Moyen-Orient, avec l'Irak qui doit revenir dans le c oncert des nations il faut que nous levions l'embargo -, au Maghreb et à l'Afrique, en passant par le Proche-Orient, le monde nous attend. Il n'attend pas

M. Solana.

Monsieur le ministre, reprenez l'initiative. Vous avez les moyens d'agir, vous avez notre soutien. Redonnez à la France une ambition mondiale... avec, je vous l'accorde, un zeste d'Europe. (Mme Bernadette Isaac-Sibille applaudit.)

M. le président.

La parole est à M. Maurice Ligot.

M. Maurice Ligot.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'un des principaux défis de la politique extérieure de la France, c'est de faire que l'élargissement de l'Union européenne aux pays d'Europe centrale et orientale soit une réussite aboutisse véritablement à la « réunification de l'Europe », selon le mot si juste du président Mazowieski, ancien premier ministre polonais. Car il s'agit bien de cela.

L'enjeu pour la France, c'est, en particulier, la réussite de l'adhésion de la Roumanie. Ses affinités avec la France sur les plans historique et culturel sont particulièrement fortes et sa présence politique au sein de l'Union répondrait aux voeux de notre pays. Mais, il faut être conscient que son adhésion espérée depuis la chute du totalitarisme communiste - est freinée par dix ans de tâtonnements.

En effet, la Roumanie n'a fait le choix ni de la thérapie de choc, comme la Pologne ou la Hongrie, ni de la transition de velours, comme la République Tchèque. Elle s'est enlisée d'abord dans une fausse transition, sous la présidence Iliescu, de 1992 à 1996, puis dans une transition maladroite et brouillonne avec la nouvelle majorité issue des élections de 1996. L'immobilisme a fait place à des querelles intestines et à des réformes disparates et sans vision d'ensemble ; sans compter une situation économique extrêmement difficile contraction du produit intérieur brut de 20 % en trois ans -, une très forte inflation et des difficultés extérieures liées aux crises de la Yougoslavie. Souvenons-nous que le Danube est coupé par les ponts détruits de la Yougoslavie.

Ces constats ont conduit la Commission européenne à exprimer de sévères critiques sur l'absence d'une stratégie économique bien définie, sur la lenteur du processus de privatisation, sur les décisions politiques défavorables aux réformes économiques et administratives.

Néanmoins, le Conseil européen du Luxembourg de décembre 1997 a intégré la Roumanie dans le cycle des négociations d'adhésion grâce à un assouplissement des critères économiques fixés à Copenhague, lors d'un Conseil européen précédent.

Le Conseil européen d'Helsinki, en décembre 1999, a invité la Roumanie à accomplir un effort particulier dans deux directions : une réforme structurelle de ses centres de l'enfance et une stratégie économique à moyen terme concernant le droit de propriété, les réglementations économiques, les disciplines financières et la réduction de l'économie souterraine.

Après une longue traversée du désert, l'année 2000 représente pour la Roumanie, l'année de tous les espoirs, dans la mesure où elle a commencé enfin à recueillir les premiers fruits de ses efforts, mais aussi l'année de toutes les incertitudes, avec les échéances électorales de ce mois qui risquent de remettre en cause le consensus sur les réformes indispensables.

Le choix électoral du 26 novembre est en effet capital.

Le nouveau pouvoir maintiendra-t-il le consensus et la volonté sur les réformes à réaliser ? Quel nouveau regroupement apparaîtra ? Si l'ancien président Iliescu, produit du régime communiste, l'emporte, changera-t-il d'orientation ou de rythme dans leur mise en oeuvre ? Cette grande question inquiète très profondément tous les Roumains.

Une chose est sûre : sans réformes considérables pour sortir le pays de son enlisement et de son très faible niveau de PIB 27 % de la moyenne de l'Union européenne, à l'avant-dernier rang des douze pays candidats à l'adhésion -, l'adhésion de la Roumanie reculera dans le temps. C'est une perspective tout à fait défavorable.

Et pourtant, les potentialités de ce pays sont considérables en raison de sa position stratégique, de ses richesses naturelles que sont le pétrole, le bois, la terre d'une grande fertilité, mais aussi de la capacité des hommes et des femmes, quand ils sont bien formés. C'est ainsi que le directeur de Renault en Roumanie, lors de la mission que j'ai effectuée en tant que vice-président de la délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne, parlait, à propos de Dacia, de la capacité « époustouflante » de ses collaborateurs roumains à s'adapter à l'économie moderne.

Mais la mise en oeuvre efficace de ces richesses exige que la priorité soit donnée à des réformes et, d'abord, à la réforme du système administratif énorme - et du système éducatif qui maintiennent une absence généralisée de responsabilité, sécrétée par l'ancien régime totalitaire.

Par ailleurs, de grands efforts sont à faire pour remettre l'agriculture sur la voie de la modernité, songez qu'elle représente encore 40 % de l'emploi total de la population ; de même, pour poursuivre la réduction des effectifs pléthoriques des grandes entreprises anciennement nationalisées et qui, pour s'adapter, doivent réduire leurs effectifs. Dans les deux cas, il y va de la compétitivité de l'économie roumaine.

Il est facile de se rendre compte des obstacles politiques et sociologiques - entre autres - qui s'opposent à ces réformes.

Pour faciliter son adaptation au monde contemporain, à la fois exigeant et évolutif, il faut donner à la Roumanie, c'est-à-dire à sa population, un espoir. Et cet espoir passe forcément par son adhésion à l'Union européenne.

Une adhésion, non pas sans conditions, bien entendu, mais sans arrière-pensées. Le rôle de la France, et c'est pour cela que je me tourne vers vous, messieurs les


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ministres, est d'être le porte-parole et l'un des artisans actifs de l'adhésion de ce pays à l'Europe, donc un artisan actif de cet espoir. L'attente de la Roumanie à l'égard de la France est considérable, pressante et, j'ajouterai, émouvante. C'est l'effet de l'omniprésence de la langue et de la culture françaises, qu'il convient de maintenir, comme le disait Mme Trupin à l'égard d'autres pays. Mais cette attente n'est pas moins importante sur les plans économique et technique.

La reprise de la société Dacia par Renault est un bon exemple de ce que peut faire la France pour aider la Roum anie dans son effort de modernisation. D'autres devraient suivre.

Messieurs les ministres, dans la grande tradition de l'amitié séculaire de la France et de la Roumanie - qui reconnaît la part que nous avons prise, sous Napoléon III, dans son accession à l'indépendance -, je vous demande d'être les promoteurs de cet espoir grâce à l'action que vous menez au nom de la France, comme au sein de l'Union européenne, et grâce à l'action que mènent tous les agents de la France qui travaillent en Roumanie au nom de la France comme au nom de l'Union européenne pour la reconstruction de ce pays et, comme je le disais au début, pour la réunification de l'Europe. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

La parole est à Mme Yvette Roudy.

Mme Yvette Roudy.

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je dirai quelques mots sur la francophonie et sur les droits de l'homme.

Il y a un an, se tenait la conférence de Moncton. Elle donnait le signal d'un nouveau tournant pour la francophonie, celui d'une francophonie plus politique. Il avait été décidé de créer un observatoire de la démocratie afin de « pousser », parmi les pays membres de l'organisation, les « retardataires » en matière de droits de l'homme.

C'était là une démarche d'une urgente nécessité, mais qui est encore à cet instant très incomplète et très insuffisante, dans un domaine qui appelle des actions plus ciblées et plus fermes.

La programmation pour 2000-2001 de l'Agence intergouvernementale de la francophonie prévoit de préciser ses fonctions conformément aux axes et engagements pris à Moncton et ce, notamment, dans le suivi des conclusions du symposium sur les pratiques de la démocratie.

C e symposium s'est tenu la semaine dernière à Bamako. Vous y étiez, monsieur le ministre. Et ce matin, vous souhaitiez que la francophonie puisse servir la démocratie. Vous avez dit aussi qu'à Bamako le dialogue avait été vif et fécond. Serait-il possible d'en savoir plus sur les conclusions, voire les décisions, tout au moins les orientations retenues ? Il est clair qu'on ne peut se contenter de dénoncer les manquements à la démocratie. Il faut maintenant passer aux actes, passer à une autre étape. Et le moment est venu de songer aux sanctions.

P ourquoi ne pas s'inspirer de la méthode du Commonwealth, qui a exclu le Nigeria en 1995 ? Cela semble être une proposition pertinente, en adéquation avec l'évolution de la francophonie. Elle mériterait d'être soumise à nouveau lors des prochains sommets des chefs d'Etat et de gouvernement ayant le français en partage, comme nous le disons si joliment.

Il semblerait logique, afin que la francophonie conserve toute sa crédibilité au niveau international, de sanctionner les pays qui ne respecteraient pas les droits de l'homme.

Une telle proposition ne saurait surprendre, venant d'un pays qui se plaît à dire qu'il est celui des droits de l'homme.

En outre, au-delà des actions internationales, nous savons que le soutien de la francophonie par la France représente un effort non négligeable de la part des contribuables français. Il apparaît difficilement acceptable de soutenir des projets dans les pays où les droits de l'homme sont régulièrement bafoués. Je pense, monsieur le ministre, en particulier à Djibouti, dont Jean-Pierre Michel rappelait tout à l'heure le mauvais exemple. Vous ne serez pas surpris que je fasse allusion à une affaire que je considère comme tout à fait symbolique.

Je poserai des questions sur l'affaire Borrel jusqu'à ce que réponse soit donnée sur le destin tragique de ce magistrat, intègre et remarquable, que j'ai fort bien connu. Il ne s'est certainement pas suicidé mais a plutôt été assassiné pour d'obscures raisons, dont on me dit qu'elles seraient des raisons d'Etat.

Il faut savoir que Mme Borrel n'abandonnera pas cette recherche de la vérité. Elle la poursuivra inlassablement jusqu'à ce que justice soit rendue et que l'honneur de son mari soit restitué. Elle le fera pour elle-même, mais également pour la mémoire de cet homme, et aussi pour ses enfants, qui ont huit, dix et douze ans et que l'on ne peut pas laisser grandir avec une image injustement salie de leur père.

Je pense que nos relations privilégiées avec ce pays peuvent nous permettre d'élucider cette affaire, au-delà de je ne sais quelle raison d'Etat, parce que ce n'est pas la raison d'Etat qui permettra d'élever ces enfants. J'aimerais donc, monsieur le ministre, que vous nous donniez des précisions, si du moins vous avez les moyens de les obtenir. Je sais que vous faites le maximum et, pour le cas où vous auriez quelques indications sur cette affaire, si vous pouviez les partager avec la représentation nationale, je vous en remercierais très vivement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. François Loos.

M. François Loos.

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je parlerai du budget de la coopération.

A en juger par le faible niveau des crédits de coopération, de surcroît par leur baisse, ce qu'ont souligné tous les rapporteurs, à en juger par la diminution importante de l'assistance technique depuis deux ou trois années, et même ces dix dernières années, où l'on est passé de 7 000 coopérants à moins de 2 000, l'action de coopération que mène la France apparaît réellement en recul. Les chiffres le montrent et nos amis africains le constatent.

M. Jacques Myard.

C'est la Berezina !

M. François Loos.

Cette évolution est le signe d'un profond changement non seulement de la politique suivie, mais aussi de la place de la France dans le monde, voire de la confiance dans la France.

Aujourd'hui, à l'évidence, il faut reconstruire une politique de coopération qui permette à la fois de lutter vraiment contre la pauvreté des pays les moins avancés, dont la dette est exorbitante, et de favoriser le décollage économique de tous les pays qui peuvent être des partenaires de la croissance mondiale.

Il faut d'abord redonner de l'espoir aux pays les plus démunis pour la lutte contre la pauvreté. La générosité est certes nécessaire, mais elle ne suffit pas. Elle sera d'abord mise en oeuvre par le système de remise de


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dettes. Mais à la remise de dettes doit s'ajouter une aide publique au développement au moins équivalente, et ces deux termes doivent être en progrès par rapport aux chiffres actuels. La remise de dettes, l'aide à l'investissement productif, le soutien aux investissements structurels de santé ou d'éducation, les efforts structurels et politiques, tous ces moyens doivent être employés simultanément pour sortir ces pays du drame humain que l'extrême pauvreté constitue.

Deuxièmement, il faut jeter les bases d'une économie moderne.

A cet égard, la relance de l'aide - programme est bien sûr une bonne chose, mais l'aide - projet doit suivre et, pour cela, une relance de l'assistance technique sera nécessaire.

A défaut d'être au niveau financier de nos ambitions, il nous semble qu'une priorité de l'Etat doit être de tout mettre en oeuvre pour que les aides bilatérales et multilatérales fonctionnent en synergie. Cela vaut en premier pour l'Union européenne, dont les crédits dorment, et nous tenons en ce moment la présidence de l'Union. A quoi va servir la conférence Euroméditerranée des 16 et 17 novembre ? Mais la coopération, ce n'est pas seulement les institutions de Bretton Woods, ce n'est pas seulement le Club de Paris et les banquiers internationaux, c'est aussi l'établissment de liens de confiance entre deux pays, deux cultures, deux visions du monde, entre deux économies aussi : entre les pays qui tirent la croissance et ceux qui n'ont rien. Au-delà des considérations d'efficacité de la finance internationale, il importe que nos concitoyens puissent se mobiliser au service de la cause de la coopération.

L'universalisme des idées républicaines, le besoin d'expansion des entreprises, la volonté de participer aux grandes causes humanitaires, toutes ces raisons militent pour que la coopération devienne une grande cause nationale. Je souhaite, pour ma part, une grande loi qui permettrait à tous les Français et à toutes les PME qui le souhaitent d'obtenir d'importants avantages fiscaux pour les actions de coopération qu'ils peuvent engager.

Pourquoi n'inciterait-on pas réellement, au-delà des accords de codéveloppement, au-delà de l'action de la PROPARCO ou de la COFACE, les PME françaises à investir dans des pays comme l'Algérie ou le Maroc ? Pourquoi ne construit-on pas ce monde méditerranéen sur la base de l'échange avec nos PME ? Sans un effort extraordinaire, nous savons bien que les résultats seront très longs à obtenir.

Pourquoi ne favorise-t-on pas également l'investissement systématique dans les pays de l'Est ? Il faut, messieurs les ministres, sortir d'une politique de coopération au seul usage des professionnels et donner aux Français, à leurs collectivités locales, à leurs PME, le goût du travail en coopération. C'est à un véritable plan Marshall européen que je vous appelle ; il fait évidemment très largement défaut aux propositions de ce budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Michel Vauzelle.

M. Michel Vauzelle.

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, j'entendais, en montant à cette tribune, murmurer le mot « Méditerranée ». C'est bien d'elle, en effet, que je veux vous parler ce soir : une fois de plus.

M. Jacques Myard.

Enfin !

M. Michel Vauzelle.

Je pense que la France doit garder les moyens d'une diplomatie digne d'elle. Et je pense, aussi, comme vous tous, que le développement des moyens modernes de communication et des nouvelles techniques de l'information ne réduit pas, bien au contraire, le champ de la diplomatie, mais induit une autre façon de faire de la diplomatie, tout en restant au service de la France et de l'idéal qu'elle incarne.

Encore faut-il, bien entendu, en avoir les moyens. Les moyens humains, notre diplomatie les a sans doute. Mais il lui faut aussi les moyens matériels. Et, de ce point de vue, je pense que rien n'est négligeable. Je rentre d'une réunion de parlementaires à Djakarta, où il m'a semblé que la résidence de notre ambassadeur n'était pas à la hauteur de ce qu'on peut attendre d'une résidence qui est celle de la France et où l'on doit recevoir au nom de la France, avec la dignité que cela suppose. Ce que j'ai vu à Djakarta, on peut certainement l'observer dans d'autres régions du monde. Il est souhaitable, assurément, que la République sache investir dans des lieux qui lui permettent de développer sa politique dans le cadre qui convient.

Mme Bernadette Isaac-Sibille.

Très bien !

M. Michel Vauzelle.

Au-delà de ce problème de forme, le fond de la politique est aussi en cause. Il faut garder à la France une politique étrangère qui soit à la hauteur de notre idéal de liberté et de notre identité culturelle, qui nous sont si chers et qui nous font ce que nous sommes.

Avec, cependant, quelques questions qui se posent. Dans le phénomène de mondialisation, dans la construction européenne, certains doutes s'emparent des meilleurs d'entre nous, des plus patriotes.

M. Jacques Myard.

Ah !

M. Michel Vauzelle.

Heureusement, monsieur le ministre, dans votre livre Les Cartes de la France à l'heure de la mondialisation , que chacun a sur sa table de nuit...

M. Pierre Lequiller.

C'est vrai !

M. Michel Vauzelle.

... et qui est un excellent ouvrage pédagogique, vous démontrez que nous avons toutes raisons d'espérer dans l'avenir de la France et de sa politique étrangère, contrairement à ce que disait tout à l'heure un collègue très attachant du RPR.

Vous prouvez dans ce livre que la présence d'une hyperpuissance, quelquefois un peu encombrante, et l'évolution de l'économie mondiale ne nous empêchent pas de développer notre diplomatie et de diffuser notre message, ce message de liberté que, depuis plusieurs siècles, le monde attend de notre pays.

Notre politique étrangère doit conserver ses sources d'inspiration, dont l'une est certainement la Méditerranée. Tous les orateurs qui se sont succédé à cette tribune ont insisté sur la présence nécessaire de l'idée de la Méditerranée dans notre politique, surtout à l'heure où, dans un Proche-Orient qui n'a jamais été aussi proche de nous, jusqu'à être confondu même avec nos propres cultures nationales et nos propres origines ethniques, nous sommes confrontés à un drame que nous devons contribuer, comme vous le faites, et comme le fait l'Europe, à résoudre le plus vite possible.

Président de la région Provence Alpes-Côte d'Azur, je ne peux pas ne pas évoquer la rencontre qui, je l'espère, aura lieu dans quelques jours à Marseille, cette conférence que l'on appelle Barcelone IV, mais dont nous espérons surtout qu'elle sera Marseille I. Nous attendons d'heure


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en heure des nouvelles venant du Proche-Orient et de nos partenaires dans le cadre du processus de Barcelone pour savoir si cette conférence se tiendra et dans quelles conditions. Bien entendu, on ne peut pas confondre le processus d'Oslo et celui de Barcelone. Mais si le processus d'Oslo ne doit pas gêner, à cause des troubles majeurs qui traversent le Proche-Orient et des grandes souffrances infligées aux peuples palestinien et israélien, le développement de la coopération en Méditerranée, celui-ci, en revanche, peut être fort utile à l'apaisement des coeurs et des esprits dans cet espace qui, pour nous, est un espace de sécurité et aussi d'inspiration.

Mais l'inspiration ne peut être séparée de l'expression.

Je suis frappé de voir, année après année, que quand je parle à cette tribune de la Méditerranée avec la foi d'un Méditerranéen, je ne manque jamais de souligner qu'il faut renforcer l'expression de la France dans des formes modernes et adaptées à la relative minceur de ses moyens.

Nous ne pouvons pas avoir dans chaque ville du monde un institut ou un lycée français, c'est entendu.

Mais peut-être pourrions-nous avoir, ici ou là, quelques satellites bien placés qui puissent diffuser sur l'ensemble de la planète notre langue et notre culture.

M. Pierre Lequiller.

Très bien !

M. Michel Vauzelle.

En effet, à peine franchies nos frontières, en Italie ou en Espagne..

M. Jacques Myard.

En Corse !

M. Michel Vauzelle.

Je vous en prie ! ... il est déjà impossible de capter une seule chaîne française tandis que quand je zappe, à l'exemple de mes enfants, je peux recevoir une quantité extraordinaire de chaînes en langue anglaise ou allemande.

On me dira que l'anglais est maintenant la langue universelle. Mais l'allemand, que je sache, n'est pas plus une langue universelle que le français, l'italien ou l'espagnol.

Pourquoi, messieurs les ministres, peut-on capter si aisément de par le monde, y compris à Djakarta, puisque je citais cet exemple, une abondance de chaînes espagnoles, italiennes ou allemandes, alors que si l'on souhaite avoir des nouvelles de la France et de sa culture, on ne peut saisir que quelques images de ragondins, de pays francophones sans doute (Sourires), mais sans rapport avec l'information que l'on est en droit d'attendre sur la culture française et sur le message assez riche, aussi riche en tout cas que celui de nos voisins, que peut transmettre notre pays ? Voilà ce que je voulais vous dire, en soulignant pour conclure, et je salue le ministre de la coopération sur ce point, que la région Provence Alpes-Côte-d'Azur jouera pleinement le rôle qui lui est maintenant confié dans le rapprochement entre les régions de la partie méditerranéenne de notre espace d'influence. Nous comptons beaucoup, pour ce faire, sur la conférence de Barcelone IV qui doit se tenir dans quelques jours. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à Mme Monique Collange.

Mme Monique Collange.

Monsieur le président, messieurs les ministres, chers collègues, je vous parlerai de l'OIT et du travail des enfants.

Si l'on en croit les données du Bureau international du travail, plus de 250 millions d'enfants de moins de quatorze ans travaillent aujourd'hui à travers le monde. Leur labeur n'est rien d'autre qu'une quête de subsistance dont l'issue est connue par avance. Aucune perspective d'épanouissement ne s'offre à ceux qui se trouvent dans l'obligation de travailler dès leur plus jeune âge. Ils n'ont plus la force de repousser le crépuscule de leur vie tant leur santé est violée, chaque jour, par des conditions de travail extrêmement dures, voire dégradantes.

Face à une telle situation, nous ne pouvons que nous indigner. Et nous nous indignons. Mais si cette réaction est saine, elle ne manquerait pas, cependant, d'être insultante si elle devait procéder d'une stratégie économique.

Or, de ce point de vue, la posture adoptée depuis des décennies par les pays les plus riches à l'égard des pays que l'on dit en développement est plus que suspecte.

La dénonciation de la précarité des conditions de travail des populations de ces pays, comme la condamnation de l'exploitation des enfants, n'ont pas manqué de servir les politiques commerciales des pays occidentaux. Elles sont venues justifier la mise en place de mesures protectionnistes visant à prémunir nos entreprises contre ce que certains appellent le dumping social.

Outre qu'elle ne manque pas de cynisme, cette attitude est inefficace. La promotion des droits les plus fondamentaux ne peut reposer sur l'exercice d'une forme de chantage. Aussi devons-nous repenser les bases des relations que nous entretenons avec les pays en voie de développement.

N on, l'exploitation des plus jeunes, cette forme moderne de l'esclavage, n'est pas acceptable.

Oui, l'abolition définitive du travail des enfants doit être notre ambition.

Mais cette exigence suppose l'adhésion de l'ensemble de la communauté internationale. Dans cette perspective, il est clair que la réflexion doit être menée en priorité au sein non pas de l'Organisation mondiale du commerce mais de l'Organisation des Nations unies.

M. Jean-Claude Lefort.

Très bien !

Mme Monique Collange.

C'est seulement en sortant du cadre exclusif de la négociation commerciale que nous pourrons retrouver une relation de coopération et de réciprocité.

Interrogé à de nombreuses reprises par plusieurs de mes collègues sur la position défendue par le gouvernement français, vous avez, monsieur le ministre, souligné la nécessité du développement d'instruments internationaux « normatifs » plus protecteurs encore que ceux qui sont en vigueur.

La convention no 182 de l'Organisation internationale du travail constitue de ce point de vue une avancée non négligeable. Mais sa mise en oeuvre doit s'accompagner d'une participation croissante de la France aux programmes internationaux de scolarisation, par exemple.

Au-delà de son soutien financier, matériel et humain à l'action de l'UNICEF, le gouvernement français a notamment apporté sa contribution à un vaste projet visant à améliorer dans les pays d'Afrique francophones les conditions d'éducation des jeunes filles. Ces initiatives doivent être encouragées et amplifiées. Elles contribuent directement à une amélioration des conditions de vie des populations les plus jeunes et leur offrent une chance de construire un avenir. Elles permettent surtout de restaurer des rapports de confiance avec des peuples qui ont pu, par le passé, se sentir méprisés.

Vous l'aurez compris, monsieur le ministre, je crois aux vertus de la confiance et du respect mutuel des nations.


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Or nous savons que la confiance ne se décrète pas.

Pour ne pas la compromettre, l'attitude des Occidentaux doit être exemplaire.

C'est pourquoi il me paraît nécessaire de contrôler à l'échelle mondiale les politiques de délocalisation d'entreprises. L'exploitation de l'avantage relatif d'un pays, dans les productions à forte densité de main-d'oeuvre, ne doit pas être synonyme de recours massif au travail des enfants.

Cette question pourrait être prise en compte dans les mesures destinées à éliminer les effets négatifs des implantations étrangères d'unités de production. En effet, des règles ont été fixées pour les investissements des entreprises qui se délocaliseraient à l'étranger. Elles imposent que certaines conditions soient remplies avant tout projet de délocalisation, par exemple l'embauche d'ingénieurs locaux. Ces mesures participent de la volonté d'engager un processus de développement qui favorise le tissu économique et social. Pour compléter ces règles strictement industrielles et économiques, je propose de réfléchir à un volet social qui inclurait notamment l'interdiction absolue d'employer des mineurs dans le cadre de ces unités de production.

Voilà, monsieur le ministre, les observations que je voulais porter à votre connaissance sur un sujet qui ne peut que profondément toucher les parents que nous sommes tous. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.

M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères.

Mesdames, messieurs les députés, je répondrai, pour ma part, à une partie des questions qui ont été posées au cours de ce débat. Charles Josselin répondra ensuite de manière précise à d'autres questions. J'espère que nous satisferons ainsi votre curiosité légitime et vos interrogations.

Il m'a semblé que, dans l'ensemble, l'analyse des rapp orteurs avait montré un vrai intérêt pour notre démarche, avait comporté une analyse précise, très poussée, une vraie compréhension et un vrai soutien. J'ai même senti cette compréhension et ce soutien chez nombre d'intervenants qui sont évidemment corsetés dans une discipline politique qui les empêche d'aller au-delà.

Cette compréhension soutient Charles Josselin et moimême dans l'effort que nous menons, et Pierre Moscovici partage certainement ce sentiment.

Je répondrai maintenant à certaines des questions qui ont été posées. Vous m'excuserez de passer d'un sujet à un autre, mais c'est dans la nature de l'exercice, les questions posées étant très précises et extrêmement diverses.

M. Pierre Lequiller et M. Roland Blum se sont préoccupés du cours du dollar retenu pour l'élaboration de la loi de finances. Cette question se pose, en réalité, chaque année puisque le cours du dollar est fixé de façon un peu arbitraire très longtemps avant l'année d'exécution du budget. Ainsi, comment savoir en février dernier, à quel niveau serait le dollar en 2001 ? Du reste, on ne le connaît toujours pas. Il faut savoir que la variation de cette devise est en grande partie compensée lors de l'exécution du budget. C'est le cas pour les rémunérations, mais également pour les interventions les plus sensibles, en particulier les contributions obligatoires. Il s'agit donc à la fois d'une vraie et d'une fausse question. Il est normal de s'interroger à l'avance mais, d'une façon ou d'une autre, la compensation est obtenue, même si elle est plus difficile à déterminer, sur les crédits de fonctionnement.

Evidemment, quand tout les comptes seront en euros, ce sera plus simple. Mais nous n'en sommes pas encore là.

D'ici là, ayez confiance dans les négociations que nous mènerons avec le ministère des finances pour ne pas être trop lésés en cours d'année par des variations erratiques du cours du dollar.

J'en viens à une remarque formulée par M. Myard en mon absence - j'en suis navré - et qui m'a été rapportée, concernant le sort de l'ancienne résidence de nos ambassadeurs en République fédérale d'Allemagne, à Ernich. Sa mise en vente, dont le principe est acquis, s'inscrit dans une politique dynamique du patrimoine immobilier.

M. Jacques Myard.

Dynamique ou dynamite ?

M. le ministre des affaires étrangères.

Dynamique, dans le cas d'espèce. Nous avons réfléchi à un autre emploi possible de cette belle résidence d'Ernich à laquelle s'attachent beaucoup de souvenirs, mais il n'y a pas de solution idéale. Vous le savez, aujourd'hui, les activités ne sont plus à Bonn. Les transformations envisagées en centre de rencontres culturelles, de colloques ou autres ne fonctionnent pas. L'effort budgétaire que nous consentons pour notre nouveau dispositif à Berlin doits'accompagner d'un mouvement sur la destination d'autres immeubles dont nous n'avons plus l'usage et Ernich en fait partie, même si cela doit nous rendre nostalgiques.

M. Jacques Myard.

Faites-en un centre de propagande ! (Sourires.)

M. le ministre des affaires étrangères.

Il faut s'adapter à cette réalité qu'est le déplacement des activités de Bonn à Berlin.

Une question importante sur la réforme des Nations unies m'a été posée par M. Pierre Lequiller, dont l'intervention, d'ailleurs, était essentiellement composée de questions. Elle concerne la position de la France sur le rapport Brahimi. Je précise très clairement que nous avons approuvé les propositions de ce rapport Brahimi, mais il faut dire un mot sur le contexte.

Depuis quelques années, compte tenu de l'état du monde - nombre de pays sont en état de déstructuration, des conflits de toutes sortes se développent -, nous sommes souvent face à des situations qui nécessitent des opérations de maintien de la paix, qui, en réalité, sont souvent des opérations de rétablissement de la paix.

Comme les opinions publiques occidentales ont du mal à comprendre que l'Occident triomphant ne soit pas en mesure d'établir sa loi, son ordre et sa paix partout, il y a une pression très forte sur l'ensemble des gouvernements et il arrive qu'on fasse pression sur l'ONU pour lancer des opérations de maintien de la paix dans des situations où la paix n'est pas établie. Pourtant l'honnêteté intellectuelle et politique doit conduire le Gouvernement à dire dans certains cas que, l'accord de paix n'étant pas signé, on ne peut pas envoyer des troupes de l'ONU ou de n'importe quel autre organisme régional, si elles doivent elles-mêmes être prises à partie voire prises en otage ou en tout cas impuissantes.

Si l'on veut une vraie politique de l'ONU en matière de maintien de la paix et que les choses s'améliorent progressivement, il faut commencer par avoir le courage de dire ce que je viens de dire.

Certes, on ne peut pas le faire dans tous les cas. Pour prendre un exemple précis, je ne crois pas que les conditions soient réunies pour déclencher une grande opération de maintien de la paix dans l'Afrique des Grands lacs, même si celle-ci a été préparée techniquement. Il faudrait d'abord dix fois plus d'hommes que ce qui a été envisagé


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jusqu'à maintenant pour assurer un contrôle relatif des frontières dans ces zones immenses, et ensuite que l'accord politique entre les protagonistes ait été obtenu. Il faut donc avant tout clarifier les choses. C'est ce que M. Brahimi préconise et que j'approuve totalement puisque, selon lui, le mandat confié aux opérations de paix doit être clair et réaliste. C'est la condition sine qua non.

M. Brahimi a également raison quand il indique que

« des ressources suffisantes doivent être mises à la disposition de l'ONU et notamment du siège afin de renforcer sa capacité à déployer rapidement, à conduire et à soutenir efficacement des opérations sur le terrain ». Je crois que le chiffre actuel doit être de dix-sept personnes pour gérer l'ensemble des opérations de maintien de la paix sous toutes leurs formes dans le monde. Ce chiffre est évidemment insuffisant.

Nous sommes pleinement d'accord lorsque M. Brahimi indique que « l'organisation interne et les procédures du siège des Nations unies doivent être rationalisées » et

« qu'il faut développer la coopération entre l'ONU et les organisations régionales et sous-régionales ».

Le rapport Brahimi est un bon rapport ; il est clair. Il ne correspond pas du tout à cette espèce de rhétorique multilatérale un peu vague et confuse, pétrie de bonnes intentions mais qui n'est pas opérationnelle. Au contraire, c'est une base réaliste que nous soutenons.

A l'avenir, on ne doit pas décider d'opérations de façon irréfléchie. Il faut que les troupes aient des mandats clairs, qu'elles puissent les appliquer et que le mécanisme de commandement et d'instruction soit rationalisé.

Notre position est tout à fait nette. J'ai d'ailleurs eu l'occasion de l'exprimer à pluisieurs reprises auprès du secrétaire général des Nations unies.

M. Jean-Pierre Michel m'a posé une question sur l'Algérie, et plus précisément sur la réouverture du consulat d'Oran. Sa réouverture est prévue en 2001. Les discussions immobilières sont en cours avec les Algériens. A cet égard, des positions de principe avaient été prises d'abord très tôt par moi-même lorsque je m'étais rendu en Algérie après l'accession à la présidence de Bouteflika et confirmées quand celui-ci était venu à Paris. Comme nous avons affaire à une administration qui n'est pas tropr apide, nous rencontrons des problèmes juridiques, immobiliers et en matière de travaux qui ralentissent la mise en oeuvre concrète de cette décision politique dont le principe n'est pas remis en cause et dont la direction reste la même.

En ce qui concerne Air France, les discussions se poursuivent entre la compagnie et les autorités algériennes, mais elles n'ont malheureusement pas encore pu aboutir.

Vous savez que c'est le point précis du mode de contrôle de la sécurité sur l'aéroport qui n'a pas encore trouvé de solution parfaite.

J'ai été interrogé par M. Pierre Lequiller et par Mme Bernadette Isaac-Sibille sur l'évolution des crédits d'équipement, en particulier après le pic dû à la construction de l'ambassade à Berlin. Les crédits d'équipement s'élèveront à 459,5 millions de francs en autorisations de programme et à 309,5 millions de francs en crédits de paiement. Le budget immobilier retrouve ainsi un niveau comparable à celui des années antérieures, avant le dossier de la construction de l'ambassade de Berlin. Il nous permettra de poursuivre la modernisation de la politique immobilière que j'ai entreprise. C'est l'un des volets i mportants de la modernisation de la gestion de l'ensemble du ministère. Il s'agit d'une évolution normale et la dotation correspond à nos besoins.

Les principales opérations pour 2001 sont constituées par la poursuite de celles déjà engagées en 2000. Trois ambassades sont concernées : Berlin, Kingston et Moscou.

Deux consulats font l'objet d'une réhabilitation, Annaba et Bamako. Enfin, des travaux sont réalisés à l'administration centrale, à la fois rue La Pérouse et au Quai d'Orsay.

Des opérations seront également soumises au prochain comité de politique immobilière que je réunirai au mois de décembre. Cela concerne cinq ambassades et résidences : Abuja, Moroni, Kiev, Pretoria et Varsovie - il s'agit soit de constructions, soit d'acquisitions, soit de réhabilitations -, la réhabilitation des consulats d'Istanbul et d'Hô Chi Minh-Ville, enfin deux lycées, à Moscou et Milan.

M. Jean-Pierre Michel a posé plusieurs questions sur le Proche-Orient que je rapprocherai d'une interrogation de M. Mangin sur le même point, mais d'une tonalité différente.

M. Michel s'est demandé comment la France entendait réintégrer la Syrie dans le jeu. Ce n'est pas à la France d'intégrer, de réintégrer ou d'exclure du jeu tel ou tel pays. Cela dépend d'abord d'eux. Ne faisons pas de paternalisme. Ce sont des pays indépendants, actifs, qui ont des politiques précises. Ils savent ce qu'ils veulent ou ce qu'ils ne veulent pas.

Vous vous souvenez que lorsque le président Assad était au pouvoir, les discussions avaient avancé, mais sans atteindre un point suffisant pour que l'accord final puisse être conclu sur l'affaire du Golan et du lac de Tibériade, qu'elles avaient été suspendues pour une série de désaccords de chronologie dans la mise en oeuvre des solutions.

Depuis le changement de président en Syrie, aucun élément nouveau ne permet d'espérer, à court terme, une reprise des discussions. Par ailleurs, M. Barak a été luimême pris par les événements que vous savez. Il y a donc une situation objective qui fait que le volet israélo-syrien est, pour le moment, au point mort. Il ne dépend pas directement de nous de modifier la position syrienne ou la position israélienne pour que la discussion reprenne, même si nous pouvons encourager les uns et les autres.

Elle reprendra un jour ou l'autre, en son temps. Et, le paradoxe, quand on y regarde de plus près, c'est que le dossier israélo-syrien paraît plus facile à régler sur le papier que la question israélo-palestinienne, qui est la plus compliquée.

M. Mangin, pour sa part, m'a interrogé sur la division des Quinze lors du vote de la résolution.

Lorsque l'Europe avait décidé, il y a déjà quelques années - et cela s'était concrétisé dans le traité de Maastricht - de s'engager dans une politique étrangère commune, ce n'était pas naïvement. Ceux qui avaient engagé ce mouvement savaient très bien que les positions des Européens sur la politique étrangère sont très différentes et qu'elles le sont d'autant plus que la période est difficile. En temps normal, on arrive à se mettre d'accord sur des grands principes ; en temps de crise, les désaccords réapparaissent parce que les sensibilités nationales sont là et sont très fortes.

M. Jacques Myard.

Comme sur la Corée ?

M. le ministre des affaires étrangères.

Sur la Corée, vous savez bien monsieur Myard, car vous êtes un spécialiste, que le fait d'entretenir ou non des relations diplomatiques ne définit pas toute une politique. Il est assez


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banal d'avoir des relations diplomatiques et cela ne signifie pas qu'on approuve la politique du pays avec lequel on a ces relations diplomatiques. La France a entretenu des relations diplomatiques avec l'Albanie d'Enver Hoxha, par exemple, et cela ne signifiait pas qu'elle approuvait ce qui s'y passait. En réalité, l'établissement de relations diplomatiques est relativement secondaire. Ce qui est important, c'est la politique que l'on mène une fois les relations diplomatiques établies.

En ce qui concerne la Corée du Nord, les Européens ont adopté des positions différentes : certains d'entre eux n'ont jamais rompu leurs relations, d'autres n'en ont que depuis l'an dernier - c'est le cas de l'Italie - et d'autres envisageaient d'en avoir par étapes lentes.

Etant donné cette disparité, nous n'avons pas trouvé utile d'essayer de créer une harmonie artificielle sur le principe de base de l'établissement des relations diplomatiques. En revanche, si les Quinze décident de développer leurs relations et leur coopération avec la Corée du Nord, ils feront en sorte d'harmoniser leur politique.

Il faut donc bien distinguer les relations diplomatiques, qui constituent l'élément basique, en quelque sorte et la politique de fond. Mais c'était une parenthèse.

Je reprends le fil de mon exposé. Depuis une vingtaine d'années, les pays de l'Union européenne se sont énormément rapprochés sur la question du Proche-Orient, notamment sous l'influence de la France. Sinon, ils ne seraient pas parvenus à adopter la fameuse déclaration de Berlin, qui définit leur position et énonce plusieurs grands principes en vue de parvenir à un règlement, y compris sur la question de l'Etat palestinien. Mais la crise des dernières semaines a suscité des réactions différentes.

Au début des affrontements entre l'armée israélienne et les Palestiniens, alors que l'on comptait déjà un certain nombre de morts, une tentative a été faite pour que la question soit traitée au Conseil de sécurité. Mais elle a été bloquée par les Etats-Unis qui ont refusé que le Conseil de sécurité se prononce mécaniquement, le débat a donc été porté devant l'Assemblée générale. Au sein de l'Assemblée générale, notre position, qui, je crois, était correctement équilibrée par rapport au sujet, mais aussi par rapport aux autres pays européens, a consisté à faire en sorte que le texte retenu ne soit pas partial, ne soit pas unilatéral, qu'il évoque les violences des deux côtés, même si elles n'ont pas la même nature, ni parfois pas la même intensité, et surtout qu'il préserve toutes les chances d'avenir. Les Quinze sont tombés d'accord sur un certain nombre d'amendements. Ceux-ci ont ensuite été proposés aux pays arabes qui, après concertation, les ont tous acceptés. Nous étions donc parvenus à un texte de résolution amélioré par cette démarche européenne animée par la présidence française qui avait adopté une attitude équitable, équilibrée, et surtout constructive.

D'autant que le sommet arabe du Caire devait avoir lieu juste après. Nous cherchions donc à envoyer un message, depuis l'Assemblée générale, qui incite le sommet arabe du Caire à une certaine modération, pour qu'il ne ferme pas la voie du dialogue, la voie de la négociation et de la recherche de la paix.

Alors que les Quinze étaient d'accord et que la France avait fait son travail de la présidente, on a assisté à une sorte de contre-offensive de la diplomatie américaine, pour d'autres raisons, peut-être liées au calendrier, expliquant aux Européens qu'il était tout à fait impossible qu'ils votent un texte de ce type en ce moment. Alors que les mêmes Européens venaient de se mettre d'accord sur les amendements, sur la réponse aux amendements, sur le texte final et sur le vote commun, certains d'entre eux ont décidé, en définitive, de s'abstenir. Certes, cela n'a pas mis en évidence un désaccord considérable - ce n'est pas comme si certains avaient voté « pour » et d'autres « contre », - mais on a assisté à une différence d'attitude dont je tenais à vous donner la genèse et la chronologie pour vous montrer que la présidence française, en tout cas, avait fait son travail.

Voilà pour les interrogations sur le Proche-Orient. .

Une autre question concerne les Conseils européens de Biarritz et de Nice. L'apport principal de Biarritz a été de clarifier les enjeux et l'état de la négociation. Celle-ci avait commencé sous la présidence portugaise. Les Portugais avaient déployé tous leurs efforts. Toutefois, la négociation n'avait pas beaucoup progressé. Au début de la présidence française, elle n'a pas non plus beaucoup avancé. Mais en septembre, grâce aux efforts de Pierre Moscovici et de moi-même, certains pays ont commencé à accepter de modifier certaines de leurs positions et à se préparer à un compromis, sans que cela aille pour autant très loin.

L'avantage du Conseil européen de Biarritz, c'est que les choses ont été mises sur la table. On distingue désormais clairement quels sont, parmi les quatre points qui sont en négociation jusqu'au Conseil de Nice, les deux sujets pour lesquels un accord est, sinon à portée de main, en tout cas envisageable. Il s'agit, d'une part, des coopérations renforcées que nous voulons assouplir, et nous y parviendrons et, d'autre part, de l'extension des votes à la majorité qualifiée. Sur ce dernier point, le débat se poursuit car la règle de la majorité qualifiée ne peut être appliquée à tous les domaines. Néanmoins, sur certains points précis, dans certains domaines particuliers, la négociation avance et l'accord sera trouvé.

En revanche, sur deux autres sujets, la composition de la Commission et la repondération des voix, le désaccord est clair. Il faudra bien trouver une solution. Le Conseil de Biarritz a eu l'avantage de clarifier les choses. La France continue à plaider pour une repondération substantielle, tandis que d'autres pays plaident pour une double majorité. Le débat va se poursuivre. Nous avons fait notre choix. On verra bien comment les choses se présenteront avant et pendant le Conseil européen de Nice.

M. Jacques Myard.

Ou après !

M. le ministre des affaires étrangères.

Nous avons des contacts constants avec nos partenaires. Le Président de la République, le Premier ministre, Pierre Moscovici, et moi-même allons continuer à plaider en ce sens.

Sur la question de la Commission, et sur elle seule, est apparue une sorte d'antagonisme entre les petits pays et les grands. Cela concerne seulement - et encore, la présentation est exagérée - un sujet sur quatre - et cela ne définit pas l'ensemble de la négociation. Pourquoi ? Parce que nous avons simplement dit, ce qui nous paraît de bon sens - et je crois que tout le monde ici est d'accord sur ce point -, que si on laisse la Commission grandir au fur et à mesure des élargissements, un jour elle sera tellement grande qu'elle sera ingouvernable et qu'elle ne pourra plus jouer son rôle d'impulsion dans l'Europe de demain. Cela a heurté un certain nombre de pays qui ne veulent pas renoncer à leurs commissaires alors que ce que je viens d'exprimer supposerait que l'on plafonne le nombre de commissaires et que, à un moment donné, tous les pays n'aient pas en même temps un commissaire - cela suppose un système de rotation. C'est notre position. On peut être pour ou contre. Nous pensons qu'elle est plus fidèle à l'esprit des institutions, plus efficace pour


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l'avenir. En tout cas, ce n'est pas une attaque des

« grands » contre les « petits » puisque tout le monde fera un sacrifice dans cette affaire. Nous demandons donc à chacun un sacrifice pour que le système marche mieux.

C'est cela qui a été abusivement interprété comme une offensive contre les petits pays. Je le répète, ce n'est pas le cas.

En tout cas, ces deux points sont clairs après la rencontre de Biarritz. Nous savons au moins où nous en sommes. Nous entrons progressivement dans la phase finale de la négociation et je suis convaincu, que lors de la rencontre de Nice, nous déboucherons sur une solution. En effet, si chaque pays est convaincu qu'il doit défendre ses intérêts nationaux légitimes, ce que je ne conteste pas, il est également pénétré de l'idée que, au bout du compte, il existe une sorte d'intérêt européen global qui doit l'emporter.

Voilà comment nous poursuivons notre action en ce domaine.

Beaucoup d'interventions comportaient des analyses très intéressantes, dont nous tirerons parti, mais ne comprenaient pas de questions proprement dites. Elles n'appellent donc pas de réponse de ma part. D'ailleurs Charles Josselin et moi-même avions répondu en quelque sorte par avance ce matin à nombre des problèmes évoqués ce soir.

Je reviendrai sur quelques remarques très globales.

Pour M. Godfrain, la politique en Afrique doit s'affirmer avec plus de clarté et de lisibilité. Je crois pouvoir dire que l'action du Gouvernement concernant la question de la Côte-d'Ivoire est, depuis un an, tout à fait claire et lisible. Notre engagement vis-à-vis de nos partenaires africains restera toujours très actif mais nous voulons marquer une ligne entre, d'une part, l'engagement, la coopération, l'amitié, l'assistance, nos attentes les concernant au nom d'un certain nombre de principes démocratiques et du respect de certaines conditions nécessaires à un vrai développement - exigences que nous rappelons à tous nos partenaires quels qu'ils soient - et, d'autre part, l'ingérence. En effet, quelles que soient les arrière-pensées et les motivations qui peuvent expliquer celle-ci, au bout du compte, on se substitue aux acteurs, on décide à leur place ou on leur impose nos décisions.

Nous entretenons tout simplement des rapports sains, normaux, modernes avec des pays indépendants depuis quarante ans. Et l'on ne peut présenter ce refus d'ingérence comme une forme quelconque d'indifférence ou de désengagement.

Malheureusement, les commentaires sur la politique africaine évoluent moins vite que la politique africaine elle-même ! J'appelle donc de mes voeux une modernisation de ceux-ci. Ce serait utile pour tout le monde, je crois !

M. Pierre Brana, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères.

Surtout pour les journalistes !

M. le ministre des affaires étrangères.

Je ne dis pas ça spécialement pour M. Godfrain. Sa question m'amène simplement à faire ce commentaire.

Mme Aubert a regretté que le budget se situe en-deça des espérances de son groupe en matière de politique étrangère. Je lui rappelle qu'elle a voté l'année dernière un budget qui était moins bon. J'espère que, quand il sera encore meilleur, elle joindra à nouveau sa voix aux nôtres. (Sourires sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Mangin a souhaité que le Parlement soit associé de façon plus intense et plus en amont à la préparation du budget. L'Assemblée nationale et le Sénat ont été largement associés à la préparation du budget, en la personne notamment des rapporteurs. Mon cabinet, comme celui de Charles Josselin, a eu de nombreux contacts avec eux, y compris pendant les phases de négociation avec Bercy, c'est-à-dire très en amont ! J'observe d'ailleurs que ce contact avec les parlementaires, et notamment avec les rapporteurs, a été particulièrement efficace. Les commentaires et les analyses dont ils nous ont fait part tout au long de l'année et pas seulement au moment du vote du budget sont pour beaucoup dans la stabilisation des moyens, comme des effectifs, que nous avons obtenue pour une année de plus. Cette stabilisation est très importante pour le moral au sein du ministère et pour renforcer la confiance que celui-ci a dans sa propre mission. Je veux en remercier à nouveau les parlementaires.

Rien ne s'oppose d'ailleurs à ce que cette coopération soit intensifiée lors de la préparation du budget pour 2002.

Je ne peux pas répondre sur l'ensemble des sujets abordés. Du fait de la nature même de ce débat, de la multiplicité des intervenants et de la diversité de leurs intérêts, l'ensemble du champ de la politique étrangère a en effet été couvert et je ne peux pas parler pendant des heures et des heures.

Mme Bernadette Isaac-Sibille.

Nous sommes là pour ça !

M. le ministre des affaires étrangères.

Sachez que rien n'est oublié dans les questions qui ont été posées. M. Josselin répondra après moi avec une extrême précision à beaucoup d'autres questions. Nous nous sommes en quelque sorte répartis les réponses.

Je répondrai pour terminer à M. Michel Vauzelle sur la Méditerranée, car c'est un sujet qui nous lie depuis longtemps et parce que, sur un plan plus objectif, c'est une dimension essentielle de notre action. Mais il faut qu'il connaisse les difficultés que nous rencontrons.

La question méditerranéenne est pour nous un des axes importants de la politique française. Nous en sommes au sein de l'Union européenne l'un des rares avocats. Pas plus de quatre ou cinq pays ont la même démarche que nous. Cela se traduit à la fois par un moindre intérêt de la part des autres pays pour les réunions et les déclarations et par des discussions budgétaires difficiles. Il faut, p our des raisons multiples, tenir dans l'enveloppe d'Agenda 2000, et quand il s'agit de répartir les programmes d'actions extérieures de l'Union européenne entre les Balkans, la Méditerranée et le reste du monde, peu de pays reconnaissent la nécessité d'accorder au programme MEDA une importance significative.

L'actualité nous fournit un exemple des difficultés que nous rencontrons. Dans quelques jours se tiendra, à Marseille - Michel Vauzelle le sait mieux que quiconque -, une réunion du processus de Barcelone. Or celle-ci est contestée par certains pays participants. La Syrie notamment a déclaré cet après-midi que, compte tenu du contexte au Proche-Orient, elle ne voulait pas participer, en ce moment, à une réunion avec les Israéliens.

Pour ma part, je considère que, si nous avons mis en place le processus de coopération dit de Barcelone entre l'Europe et l'ensemble de la Méditerranée, c'est précisément pour essayer de voir plus loin que les aléas du processus de paix. Par moments, celui-ci progresse et nous sommes optimistes et confiants. A d'autres moments, il semble arrêté et nous sommes presque désespérés. En fait, nous ne le sommes jamais parce que nous ne baissons pas les bras.


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L'idée du processus de Barcelone consiste à avancer un peu dans toutes les circonstances, parce que la coopération entre la Méditerranée et l'Europe est une nécessité, en dépit de ses vicissitudes.

J'ai donc décidé de maintenir la réunion de Marseille parce qu'elle est, pour les ministres réunis, très utile.

Nous ferons le bilan du programme MEDA 1. Nous c hercherons à comprendre avec la Commission, et notamment avec le commissaire Patten, qui travaille tout à fait dans la même ligne que nous, pourquoi ce programme a eu tellement de mal à commencer et pourquoi il a rencontré autant de difficultés. Et nous parlerons aussi du programme MEDA 2.

Sachez, monsieur Vauzelle, qui êtes souvent dans cette enceinte le porte-parole de la dimension méditerranéenne, que celle-ci nous importe aussi. Mais je me dois de rappeler que les obstacles sont réels. Nous persévérons, mais cela ne va pas de soi, ce n'est pas automatique, ce n'est pas aussi facile qu'on pourrait le croire.

Bref, la réunion de Marseille devrait avoir lieu quand même. J'espère que, au prix d'un effort intellectuel consistant à se projeter un peu plus loin dans l'avenir afin de dépasser la situation extrêmement préoccupante du Proche-Orient à l'heure actuelle, nous pourrons envoyer un message de confiance à tous les peuples concernés.

Voilà pour la Méditerranée. Je m'excuse auprès de ceux dont je n'ai pas développé autant qu'ils auraient pu le souhaiter le thème particulier qu'ils avaient mis en avant, mais il ne fait nul doute que Charles Josselin va très utilement compléter mes réponses. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Après toutes les interventions que nous venons d'entendre et compte tenu des nombreux sujets a bordés, je serais tenté, mesdames, messieurs, de commencer par la phrase un peu convenue : nous veillerons à répondre par écrit aux questions auxquelles il n'aurait pas été répondu ce soir. (Sourires.) M. Pierre Lequiller a été le premier orateur à s'exprimer après les rapporteurs et l'intervention de M. Védrine et de moi-même. Il a évoqué notamment les contours de la zone de solidarité prioritaire. Nous avions indiqué ce matin sur quels critères avaient été choisis les soixante pays qui la composent : les aspects économiques, la situation de pauvreté de la plupart de ces pays, les relations que nous avions déjà avec beaucoup d'entre eux, nos ambitions stratégiques - eh oui, les intérêts de la France entrent aussi en ligne de compte - et en particulier notre volonté de constituer des ensembles régionaux dans lesquels les départements français d'Amérique soient impliqués.

J'ai d'ailleurs rappelé que nous avions la même préoccupation dans l'Océan indien. Non seulement, nous avons souhaité que Cuba, qui était évidemment très demandeur, puisse entrer dans la zone de solidarité prioritaire mais en plus nous sommes de ceux qui pensent qu'il serait intéressant qu'il fasse partie des pays Afrique, Caraïbes, Pacifique qui ont une relation privilégiée avec l'Europe. Ce n'est pas le cas actuellement. J'espère que cela se fera, convaincu que je suis que nous pouvons ainsi aider Cuba à bouger. Par ailleurs, je fais observer que, si le respect des droits et libertés publics ne correspond pas dans ce pays à ce que nous voudrions, les droits sociaux, et notamment l'accès à la santé et à l'éducation, sont très supérieurs à ceux de nombreux pays qui ont une relation privilégiée avec nous. C'est une réalité qu'il faut avoir aussi présente à l'esprit.

M. Pierre Lequiller m'a demandé comment nous allions compenser la diminution du nombre des coopérants militaires. Nous avons commencé à répondre à cette question, d'une part, avec le volontariat civil et, d'autre part, en mettant en place un certain nombre de postes destinés à compenser le manque d'informaticiens que nous redoutons. Beaucoup des volontaires du service national étaient employés à ces tâches. Autrement dit, il faut que nous poursuivions les efforts entrepris pour faire réussir le volontariat civil.

Le centre d'information sur le volontariat civil, que nous avons inauguré il y a quelques semaines, a reçu 515 candidatures : 260 filles et 252 garçons. Lorsque nous avons voté la loi portant création de ce volontariat civil, nous avions insisté sur la nécessité de promouvoir la mixité, ce qui est une innovation par rapport au système actuel. Celle-ci est totalement vérifiée. Pour votre information, je vous indique que 35 % ont un niveau bac + 5 et 24 % un niveau bac + 3 ou 4. Tel est le niveau sur lequel nous allons pouvoir fonder cette autre présence française. Les filières les plus représentées sont les DESS et les doctorats, les écoles de commerce et de gestion - pour 16 % - et les écoles d'ingénieurs - pour 10 %.

Les candidats sont à la recherche d'activités en entreprise pour 25 %, humanitaires pour 17 %, de coopération culturelle pour 17 %.

Voilà un instantané de la demande telle qu'elle se présente actuellement. J'ai pensé qu'il était utile d'en informer la représentation nationale.

Cela étant, il faut, c'est vrai, se préparer à encadrer ces jeunes volontaires. Et l'Etat doit pour cela faire ce qu'il convient. D'où les postes que nous entendons mettre en place.

M. Godfrain n'a pas pu être des nôtres ce soir, mais la question qu'il a posée concernant l'influence de la France dans les instances multilatérales mérite une réponse. Je donnerai un exemple qui illustre la manière dont la France essaie, avec ses partenaires européens, de mieux se faire entendre au sein des grandes instantes, qu'il s'agisse de l'ONU ou des institutions de Bretton Woods : la décision très récente du Congrès américain de débloquer une première tranche de 435 millions de dollars, dans le cadre de l'initiative sur la dette. Je crois, en toute immodestie que la manière dont nous en avons parlé dans les instances internationales et l'insistance avec laquelle nous avons mis les Américains devant leurs responsabilités ont contribué, avec évidemment l'appui de nos partenaires européens et des pays en développement, à faire bouger le Congrès américain sur cette question.

Notre influence dans les instances multilatérales sera bien entendu d'autant plus forte que l'Europe s'exprimera d'une manière plus forte et plus homogène. Le Conseil de développement qui se tiendra vendredi à Bruxelles sous la présidence française devrait être l'occasion pour les partenaires européens de fonder, ou refonder, leur politique en matière d'aide au développement. C'est bien l'ambition qui était, je crois, contenue dans la demande exprimée par M. Godfrain d'une meilleure influence dans les instances multilatérales.

La francophonie est aussi un moyen utilisé pour peser plus lourd dans les instances multilatérales et, si nous avions le temps je pourrais citer quelques exemples où


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une mobilisation avant la réunion des pays de la francophonie a permis de réunir la majorité qui a fait basculer l'assemblée dans le sens que nous voulions.

M. Godfrain a regretté que la France ou plutôt que les entreprises françaises ne jouent pas en matière de déminage le rôle qu'elles espèrent. Si les contributions de la France en la matière sont importantes, il faut en effet déplorer la pénurie d'opérateurs français.

Je rappelle que les actions de déminage sont financées à l'échelle internationale mais que c'est par procédure d'appels d'offres que les crédits sont ensuite attribués. Il est à souhaiter que les entreprises françaises sachent mieux se battre et obtiennent une part plus significative de ces crédits afin que leur participation soit à la hauteur de la contribution de la France.

Dans un ordre d'idées tout à fait différent, la question du « basculement » des boursiers dans le monde anglosaxon, pour reprendre la formule employée par M. Godfrain, a été soulevée par plusieurs orateurs. J'ai déjà eu l'occasion de m'en expliquer. Il est incontestable qu'un certain nombre de jeunes Africains se dirigent aujourd'hui vers les universités nord-américaines. Il faut considérer cela comme une donnée du problème que nous cherchons à résoudre, à savoir attirer le maximum d'étudiants dans nos universités. Cela dit, il n'y a rien d'extraordinaire à ce qu'un certain nombre d'étudiants africains veuillent aller aux Etats-Unis ou au Canada. Après tout, les jeunes Français ont souvent la même ambition.

Mais j'observe que le jeune Noir africain se sent souvent mieux accueilli, en tant que Noir, aux Etats-Unis, en particulier dans certaines villes américaines, qu'à Paris ou dans d'autres villes de province en France.

M. Pierre Brana, rapporteur pour avis.

Hélas ! M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Il faut en être également conscient. Les conditions d'accueil comptent au moins autant que l'offre universitaire stricto sensu

Selon M. Godfrain encore, la défense de la francophonie devient pathétique ! C'est une bataille difficile, c'est clair, mais les moyens que nous mobilisons sont importants.

Il me suffira d'évoquer les efforts très importants qui ont été faits pour donner à l'audiovisuel extérieur davantage d'influence. La réunion ministérielle qui s'est tenue en Suisse il y a quelques jours, au cours de laquelle nous avons clairement exprimé notre volonté de redresser l'image de TV 5, en particulier le signal émis à partir de Montréal en direction de l'Amérique du nord et de l'Amérique latine. Nous avons clairement dit que, si nous n'arrivions pas à mettre en place une organisation qui permette de redresser la qualité de ce signal, la France se réservait la possibilité d'émettre elle-même, à partir de Paris, en direction notamment de l'Amérique latine, car on ne peut pas tolérer une telle dégradation. Nous sommes donc tout à fait mobilisés. Nous aurons l'occasion d'en reparler car c'est dans les trois mois qui viennent qu'une décision devrait être prise à cet égard.

M. Lefort a soulevé la question de nos relations avec les grandes agences onusiennes. Je lui réponds sans hésiter : oui, nous avons bien l'intention de les renforcer, y compris avec le FNUAP qu'il a cité. Des opérations articulant tout à la fois le multilatéral et le bilatéral ont été lancées. Elles seront développées.

D'une manière plus générale, alors que nos contributions volontaires à ces agences avaient beaucoup baissé au cours des dernières années, vous aurez remarqué que nous avons entrepris depuis trois ans de les remonter, du moins pour un certain nombre d'entre elles. Certes, il reste encore des progrès à faire. Je vous fais toutefois observer que la part du bilatéral a sensiblement augmenté au cours des trois dernières années.

La situation des pays en voie de développement s'améliore-t-elle ou s'aggrave-t-elle ? Sur cette question, monsieur Lefort, je serais tenté de vous renvoyer aux rapports du PNUD ou de la Banque mondiale, qui font apparaître qu'en dépit des efforts entrepris et des moyens mobilisés, la pauvreté continue statistiquement à s'aggraver. Quelque 3 milliards d'individus vivent avec moins de deux dollars par jour, 1,2 milliard avec moins d'un dollar par jour. Et d'autres indicateurs sont tout aussi préoccupants, qu'il s'agisse de l'accès à l'éducation ou de la progression foudroyante de certaines pandémies - on pense évidemment au sida. A l'évidence, le compte n'y est pas, la question du développement reste posée et elle ne peut se limiter aux moyens mobilisés : celle de la requalification de l'aide publique au développement, pour reprendre l'expression de Mme Aubert, doit également nous retenir.

Cela m'amène à parler du désendettement. Plusieurs d'entre vous, M. Dauge en particulier, ont appelé, à juste raison, au maintien du principe d'additionalité. Je crois m ême que les programmes liés au désendettement devraient permettre une meilleure utilisation de l'aide publique au développement. Qu'il s'agisse des Américains, qui ont posé leurs conditions au niveau du Congrès, ou de la France qui entend mettre en oeuvre les siennes dans le cadre des contrats de désendettementdéveloppement, dans tous les cas de figure, les pays qui font l'effort d'effacer leurs créances vont souhaiter que les marges de manoeuvre ainsi dégagées au profit des pays pauvres soient consacrées à la lutte contre la pauvreté. En d'autres termes, nous allons en quelque sorte obliger les intéressés à bâtir des documents stratégiques définissant des priorités, des programmes et les moyens à mobiliser.

Si nous savons additionner la créance effacée et l'aide publique maintenue, nous devrions être capables d'entrer dans un nouveau cycle de lutte contre la pauvreté et de développement.

Autre observation à laquelle je veux vous rendre attentifs : la question du commerce s'apprécie désormais par rapport à des pays qui n'ont en fait pas de production.

Or l'aide publique au développement joue un rôle essentiel dans la mise en place des moyens et services publics et des infrastructures, mais également et surtout, on a eu tort de l'oublier, dans l'aide à l'investissement industriel.

Imaginer une liberté du commerce entre des pays industrialisés et d'autres qui ne le sont pas est une escroquerie.

La lutte pour le développement doit désormais intégrer, mieux que nous n'avons su le faire, l'aide à l'investissement pour la production. Si nous ne pouvons évidemment maîtriser les flux de l'investissement privé, nous pouvons les encourager. L'OADA est un moyen de sécuriser ces investissements et c'est la raison pour l aquelle la France accompagne fortement cet effort d'harmonisation du droit des affaires.

M. Loos a suggéré la mise en place de facilités fiscales en faveur des investissements dans ces pays. Un tel dispositif peut s'imaginer, pour peu qu'il respecte les règles internationales en la matière. Il faudrait aussi que l'Europe s'y emploie en tant que telle. A cet égard, la relation Europe-ACP est un cadre qui peut être mis à contribution pour voir comment encourager davantage les investissements industriels dans ces pays, avec des incitations plus fortes que celles que nous avons pu mobiliser jusqu'à présent. Quoi qu'il en soit, l'expression de notre


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collègue Lefort, « la dérive sociale des continents », illustre malheureusement très bien la réalité.

La question de la réforme du Fonds européen de développement, dans le but d'améliorer son efficacité, a été évoquée. La déclaration de politique générale que nous allons esssayer de faire adopter vendredi doit s'accompagner d'un plan d'action que la Commission est en train de préparer. Celui-ci proposera notamment des modifications des procédures, une meilleure coordination entre l'Europe et les pays membres et une meilleure répartition des tâches entre le niveau central, Bruxelles, et le terrain, c'est-à-dire les postes diplomatiques. Je suis convaincu que des améliorations pourront être ainsi apportées en matière de procédures. L'assemblée paritaire a été informée de ces dossiers, le Parlement européen a reçu communication du projet de déclaration et je dois normalement rencontrer le président de la commission du développement du Parlement européen demain soir à Bruxelles pour parler de ces questions. Enfin, votre assemblée pourra, comme elle l'a fait au début de cette année, débattre au fond de ces questions de coopération internationale et de développement, en s'appuyant sur un rapport que nous préparerons, mais également sur celui du Haut conseil de la coopération internationale et du développement, qui devrait normalement être prêt au printemps prochain.

Mme Aubert a considéré que la baisse de notre aide p ublique au développement faisait douter de notre volonté de participer à la lutte contre la pauvreté. Il est exact que l'APD a diminué et je peux même vous annoncer sans ménagement qu'elle diminuera encore, tout au moins au niveau des statistiques, puisque nous allons en sortir les TOM, ce qui risque de nous faire perdre l'an prochain, précisément au moment où nous commencerons à mettre en oeuvre l'ambition affichée par plusieurs d'entre vous d'une hausse de l'APD, quelques places dans le classement des pays donateurs. Reste que nous sommes toujours le premier donateur du G 7, avec un taux de 0,39 % du PIB, devant le Japon à 0,35 %, l'Allemagne à 0,26 %, la Grande-Bretagne à 0,23 % et les Etats-Unis à 0,10 %. Ce déséquilibre dans la générosité tire en quelque sorte vers le bas l'ensemble de l'aide publique au développement, dans la mesure où le fait de savoir que l'on paie trois fois plus qu'un autre pays, lui-même tenté de récupérer davantage, n'incite guère à accroître son effort. C'est malheureusement une réalité qu'il faut avoir présente à l'esprit.

Cela dit, la diminution de l'aide publique française s'explique également par quelques raisons objectives dont il n'y a pas forcément à s'affliger. Certains efforts ont eu des effets bénéfiques. Ainsi, les aides accordées à certains pays lors de la dévaluation du franc CFA marquent logiquement une diminution par le fait que plusieurs bénéficiaires ont su restaurer leurs grands équilibres macroé conomiques, même si depuis leur situation, pour d'autres raisons, s'est de nouveau dégradée. Rappelons également que la France a voulu recentrer son aide en la limitant à certains types de coopération internationale ; cela aussi concourt à expliquer la baisse relative de l'APD.

Mme Isaac-Sibille a évoqué la question des visas et la réduction des personnels consulaires. En 1999, l'activité de délivrance des visas s'est accrue de 7,5 % par rapport à 1998.

Mme Bernadette Isaac-Sibille.

En effet.

M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Deux millions de visas ont été délivrés, chiffre considérable, par nos 216 postes consulaires. Sur les 1 500 agents qui occupent des fonctions consulaires, près de 1 000 sont affectés au service des visas. C'est dire l'importance de cette activité. Sur quatre-vingt-douze emplois dégagés en loi de finances 2000, dix-huit ont été affectés dans les sections de visas, précisément pour résorber l'excès de recrutés locaux que vous aviez dénoncé à juste titre. Dans le projet de loi de finances pour 2001, c'est encore neuf des quatorze emplois dégagés qui seront affectés dans les services des visas. Cela montre bien que nous sommes conscients du problème soulevé ; sans doute faudrait-il encore davantage de moyens, mais nous devons gérer au mieux ce que nous avons réussi à obtenir au terme d'une discussion qui ne fut pas si facile avec la rive droite de la Seine.

Les investissements immobiliers ont quant à eux été très importants. En trois ans, près de 120 millions ont été consacrés à l'aménagement des locaux et à l'amélio ration de l'accueil dans les services des visas. Parmi les programmes les plus importants, citons l'Algérie, le Mali, la Chine, le Maroc, la Tunisie et bien d'autres. Enfin, l'informatique consulaire a fait l'objet d'un gros effort dans le cadre de notre politique de modernisation et un réseau mondial « visas » est désormais mis en place dans tous les postes consulaires.

Une extension du fonds de solidarité prioritaire en direction du Sud-Caucase ? On peut avoir cette ambition...

Mme Bernadette Isaac-Sibille.

C'est une grande question ! M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

... mais il va falloir attendre un peu. Nous avons déjà déployé le FSP dans de nouveaux pays par rapport à l'ancien champ. Je connais les besoins qui peuvent exister en Arménie...

Mme Bernadette Isaac-Sibille.

En Géorgie surtout ! M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

... ou en Géorgie, vous y avez fait référence tout à l'heure. Mais il existe d'autres moyens que le Fonds de solidarité prioritaire, même si celui-ci permet une coopération plus soutenue.

S'agissant de l'AEFE, vous avez évoqué la baisse du nombre d'expatriés dans le programme. La question a été soulevée par les enseignants de l'AEFE eux-mêmes. C'est un réseau tout à fait important.

Mme Bernadette Isaac-Sibille.

Ils sont 663 ! M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

En effet. Le problème est qu'il faudrait accroître dans le même temps le nombre de résidents. Afin d'harmoniser une situation caractérisée par de profondes inégalités entre des enseignants qui concourent pourtant au même service et qui font le même travail, une réforme a été entreprise. La discussion est engagée depuis de longs mois avec les responsables syndicaux pour trouver un point d'équilibre ; nous avons déjà introduit plusieurs améliorations, sous la forme notamment de compléments familiaux pour aider les personnels concernés à faire face à leurs charges familiales ou scolaires. J'espère qu'elle aboutira dans les semaines qui viennent. Quoi qu'il en soit, nous sommes tout à fait décidés à reformer un système que chacun s'accorde à reconnaître essentiel pour l'enseignement du français à l'étranger, puisque cette agence gère un nombre considérable d'établissements, dont près de 250 directement.

M. Blum a regretté un manque de lisibilité et de visibilité de la francophonie. Il conviendra pourtant que nous avons fait des progrès dans la présentation du bud-


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get 2001. Sans doute faudra-t-il faire mieux ; la DGCID s'en préoccupe, tout comme le service des affaires francophones. Nous veillerons en tout cas à améliorer votre i nformation sur cette réalité francophone qui, j'en conviens, est très dispersée. A ceux qui se soucient de la bonne utilisation de ces crédits, j'indique que tous les outils, tous les opérateurs de la francophonie font d'ores et déjà l'objet d'une évaluation qui a produit ses effets chez plusieurs opérateurs. Nous avons commencé par l'agence universitaire de la francophonie ; l'institut Senghor d'Alexandrie a également fait l'objet d'un audit.

Yves Dauge a insisté sur le principe d'additionnalité entre l'annulation de la dette et l'aide publique au développement. Il a souligné l'importance des besoins en moyens humains, et rappelé que les moyens de l'Agence française de développement en termes d'aide aux projets avaient baissé sur la longue période, même s'ils se sont stabilisés dans les derniers temps. Il faut maintenant les faire remonter ; nous y sommes, M. Dauge le sait, très attachés.

S'agissant des centres culturels, il est vrai que les crédits que nous accordons sont bien au niveau qu'il a indiqué. Rappelons toutefois que leurs subventions ont augm enté de 3 millions, augmentation modeste, j'en conviens, pour s'établir à 245 millions de francs. Nous ne connaissons pas encore le montant pour 2001, qui dépendra de la programmation des postes. Reste que l'ensemble des ressources des centres culturels s'est élevé à 460 millions de francs, la différence provenant des recettes que les centres sont invités à se procurer, soit en vendant les cours de langues, ce qui arrive parfois, soit en faisant appel au mécénat. Si le centre de Barcelone, par exemple, peut effectivement se plaindre d'une subvention relativement modeste, son budget global n'en est pas moins de 10 millions de francs et ne dépend que pour 7 % de la subvention du ministère des affaires étrangères.

L'explication tient au simple fait que le centre de Barcelone, fort heureusement, peut exercer son activité dans un environnement relativement solvable, ce qui n'est pas le cas de nombreux centres situés dans des pays en développement. C'est également une manière d'équilibrer les moyens des uns et des autres que de demander aux centres situés dans les pays plus riches - ou moins pauvres - de recourir davantage au mécénat ou aux activités payantes. Quoi qu'il en soit, de nombreux centres demandent à juste titre des moyens supplémentaires ; nous veillerons à ce que les relations entre les ambassadeurs et les responsables s'améliorent là où la situation n'est pas satisfaisante. Entre l'ambassadeur et le chef de mission de coopération, ou parfois entre l'ambassadeur et le conseiller culturel, il se pose parfois des problèmes de personnes ; chacun doit y mettre du sien.

Jean-Pierre Michel a évoqué le cas de l'Algérie. J'ai déjà annoncé ce matin la réouverture du lycée d'Alger, du consulat d'Annaba et la remise en place progressive du réseau culturel. S'agissant d'Air France, je n'entre pas dans le détail de ce conflit ; le problème a déjà été exposé, me semble-t-il, au ministre des transports dans le cadre des questions d'actualité.

M. François Loncle, président de la commission des affaires étrangères.

Cela fait deux ans qu'on pose la question ! M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Je le sais. Je peux également vous assurer que M. Gayssot s'est beaucoup employé à convaincre la direction d'Air France, et celle-ci à convaincre son personnel, que les conditions de sécurité étaient redevenues satisfaisantes. Les discussions se poursuivent ; j'espère bien que nous sortirons au plus vite d'une situation que les Algériens eux-mêmes sont les premiers à déplorer. La réouverture d'Air France serait un signe très fort et très attendu de la volonté de la France de coopérer autrement, mais surtout le constat d'une amélioration de la situation.

M. François Loncle, président de la commission des affaires étrangères.

C'est de la lâcheté ! M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

La question de Djibouti revient souvent, je peux le comprendre, car c'est un territoire qui a une longue histoire avec la France et où nous avons une très forte présence militaire. La situation sur le terrain, je le dis aussi à Mme Roudy, est tout de même en amélioration sensible. Il n'y a plus de prisonniers politiques, les directeurs de journaux ont été libérés, l'affaire des enfants des rues d'origine éthiopienne est terminée. Nous avions, je ler appelle, envoyé une mission à laquelle participait

Mme Serfaty, de l'Observatoire international des prisons, qui avait conclu que les conditions de détention étaient comparables, malheureusement, à celles que l'on trouve dans d'autres pays en développement, mais donc ni meilleures ni pires. Il est incontestable que, dans les domaines que je viens de citer, il y a des progrès par rapport à la situation antérieure.

Nous n'avons de cesse, lors des rencontres - et elles sont assez fréquentes - avec les autorités djiboutiennes, de mettre l'accent sur la question des droits de l'homme, et en particulier sur l'adoption d'un statut de la magistrature. Au reste, celui-ci n'ayant pas été adopté, nous avons réduit notre coopération dans le domaine de la justice pour sanctionner l'immobilité des autorités djiboutiennes en la matière.

Je rappelle que nous avions exigé une participation de la société civile lors de la dernière commission mixte, ce qui n'avait pas été si facile, mais que nous avions fini par obtenir.

M. François Loncle, président de la commission des affaires étrangères.

Et l'affaire Borrel ? M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Sur le symposium de Bamako, je veux dire à Mme Roudy, qui a évoqué cette possibilité, que la déclaration de Bamako, adopté vendredi dans la capitale du Mali, prévoit, entre autres sanctions, d'exclure de la francophonie les pays qui ne respecteraient pas les droits et libertés énoncés par ladite déclaration, et en allant assez loin, notamment pour tout ce qui touche au statut des oppositions ou au fonctionnement de l'information.

M. Loos a souhaité des avantages fiscaux pour les entreprises qui investiraient, j'y ai fait allusion tout à l'heure, je n'y reviens pas.

S ur la conférence euroméditerranéenne, Hubert Védrine a répondu, insistant auprès de Michel Vauzelle sur l'intérêt qu'aurait cette importante rencontre pour la France. J'observe qu'elle en a aussi pour la région que préside Michel Vauzelle, et singulièrement pour la ville de Marseille qui a, évidemment, le regard tourné vers son environnement méditerranéen.

Michel Vauzelle a déploré ce qu'il considérait comme les mauvaises prestations de la télévision francophone. Je lui ai dit notre volonté de modifier très sensiblement cette situation, en lui faisant observer d'ailleurs que les progrès de TV 5-Europe nous ont valu de reconquérir une part importante de téléspectateurs au cours des deux dernières années.


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Madame Collange, la question du travail des enfants nous préoccupe. Les normes sociales sont une des questions lourdes évoquées à l'Organisation mondiale du commerce. Mais le débat entre les pays du Nord et les pays en développement à leur propos est difficile, ces derniers pays étant tentés de nous dire que si ces mêmes normes nous avaient été appliquées, nous n'aurions jamais pu nous développer. Nous ne saurions entendre cet argument en la forme, même si nous comprenons que ces pays, qui attendent avec impatience les investissements, craignent que l'application en l'état de nos propres normes rende difficile leur développement industriel, alors qu'ils en ont grand besoin. La relation au travail des enfants est souvent particulière dans ces pays, notamment dans le monde rural. Il est vrai que quand nous parlons de travail des enfants, nous ciblons plutôt le risque d'une exploitation industrielle. Je vous invite à y regarder de très près car la question est délicate.

Mesdames, messieurs, telles sont les réponses que je voulais vous faire. Nous aurions pu poursuivre cet échange car toutes les questions n'ont pas eu de réponse.

En tout cas, après Hubert Védrine, je veux vous assurer de notre volonté et de celle de l'ensemble des agents de ce ministère, de conjuguer influence française et la lutte contre les inégalités du monde. Merci à l'Assemblée de bien vouloir nous donner les moyens de le faire en votant ce budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Je ne doute pas que mes collègues seront satisfaits des réponses apportées par les deux ministres en un peu plus d'une heure...

Nous en arrivons aux questions.

Pour le groupe Démocratie libérale et Indépendants, la parole est à M. Charles Ehrmann.

M. Charles Ehrmann.

Le ministre des affaires étrangères n'est pas là, monsieur le président.

M. le président.

Je présume que M. Josselin pourra répondre à votre question, mon cher collègue.

M. Charles Ehrmann.

Monsieur le ministre délégué à la coopération et à la francophonie, je me presse car je crains, paraphrasant Corneille, que le combat ne cesse faute de combattants.

Chaque fois que des problèmes se posent dans l'Union européenne des Quinze, comme en ce moment, on entend ses détracteurs parler et l'opinion s'interroger. Il faut rappeler - c'est un orphelin de la guerre de 14-18 qui parle - que l'Union européenne, c'est avant tout la paix entre les grands Etats. Cela fait cinquante-cinq ans qu'elle règne entre la France et l'Allemagne alors que, depuis 1515, ces deux pays étaient en guerre en moyenne tous les vingt-trois ans.

Puissent les mamans et les épouses n'oublier jamais que la paix est fragile. En 1929 - ces paroles sont dans ma tête - nous avons chassé les canons et les fusils.

Quatre ans après, en 1933, c'était Hitler et, en 1939, la guerre.

Puissent les jeunes d'aujourd'hui se rappeler que l'éclatement de la Yougoslavie aurait pu, s'il n'y avait eu l'Union européenne, déclencher la guerre comme en 1914.

Certes, il faut que l'Europe des Quinze s'élargisse, cher président de la commission des affaires étrangères, afin que la paix règne partout. Mais il faut, avant tout, refaire les institutions : faites pour six Etats, elles sont obsolètes pour quinze. Elargir l'Union d'abord, c'est basculer dans le libre-échange, l'anarchie politique, et laisser la politique extérieure et militaire entre les mains des Américains.

Mais toutes les conférences intergouvernementales, au nombre de cinq, organisées dans ce but ont échoué depuis des années. On attend beaucoup de la présidence française, de juillet à décembre 2000. En dépit des efforts du président de la République, du Premier ministre et du ministre des affaires étrangères, je crains que les résultats proclamés à Nice, les 7 et 8 décembre, ne soient pas à la hauteur des espérances des Européens convaincus, à moins d'un miracle. Puisse-t-il se produire, c'est le souhait que je formule chaque fois que j'interroge le ministre !

M. le président.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Monsieur le président, cette question s'adresse, à l'évidence, au ministre des affaires étrangères. Je ne peux que la lui transmettre.

M. Charles Ehrmann.

Ce n'est pas normal, monsieur le

président

!

M. le président.

M. Ehrmann, notre doyen, a attendu sagement toute la soirée pour poser sa question.

Je prends note de votre mécontentement, mon cher collègue, et le transmettrai.

M. Charles Ehrmann.

Je pardonne au ministre des affaires étrangères qui a beaucoup travaillé à Biarritz. Il nous a exposé tout à l'heure certaines propositions qu'il allait présenter à Nice, ma ville. Mais je ne pense pas que cela suffira pour satisfaire ceux qui aiment l'Europe.

M. le président.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Parce que j'ai des relations anciennes avec

M. Ehrmann...

M. Charles Ehrmann.

J'étais à votre délégation aux affaires européennes ! M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

... je ne voudrais pas rester sur un échange aussi bref avec lui.

Je tiens à souligner la somme considérable d'efforts déployés non seulement par le ministre des affaires étrangères et le ministre chargé des affaires européennes, mais aussi par tous les diplomates qui se sont mobilisés sur ce dossier. Nous savons les difficultés soulevées par certaines questions, notamment institutionnelles, débat entre les petits et les grands pays, nombre des commissaires, majorité qualifiée, tous problèmes qui ne sont pas nouveaux mais qui mettent en jeu des conflits d'intérêts.

Comme le ministre chargé des affaires européennes l'a exprimé ces jours derniers, à Nice, les volontés vont pouvoir se conjuguer pour permettre que la présidence française se conclue sur une avancée institutionnelle très significative. Nous serons alors en mesure d'entreprendre, dans de bonnes conditions, un élargissement que tout le monde considère comme incontournable mais qui suppose, en effet, un approfondissement de nos institutions.

M. Charles Ehrmann.

Monsieur le ministre, je vais vous dire la réponse que m'a faite le ministre des affaires étrangères il y a huit mois : « Vous avez posé la bonne question. Nous ne pouvons pas nous opposer aux négociations sur l'élargissement mais nous n'accepterons pas qu'elles aboutissent avant d'avoir refait de nouvelles institutions. »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 7 NOVEMBRE 2000

M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

On peut réitérer cette intention. Hubert Védrine, s'il avait été parmi nous, aurait volontiers confirmé ce qu'il déclarait il y a huit mois, j'en suis convaincu.

M. le président.

Merci, monsieur le ministre délégué, de vous être attaché à répondre à notre collègue Ehrmann.

Nous passons au groupe socialiste.

La parole est à Mme Monique Collange.

Mme Monique Collange.

Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, la gravité des événements surv enus ces dernières semaines en Palestine ainsi que la transition démocratique enclenchée en ex-Yougoslavie ont quelque peu occulté le référendum danois relatif à l'entrée de ce pays dans l'Union économique et monétaire.

Or, au-delà de son résultat, que l'on peut regretter, c'est le climat politique qui l'a précédé qui doit nous inquiéter. En effet, sans doute motivés par de sombres stratégies électorales, de nombreux responsables politiques, membres du gouvernement danois, se sont laissés aller à des prises de position extrêmement graves. La ministre sociale-démocrate de l'intérieur a notamment proposé, fin août, de placer sur une île déserte les demandeurs d'asile auteurs de délits ou présumés tels durant l'examen de leur dossier. Elle a par la suite suggéré que le Danemark se désengage de la convention européenne de Dublin sur le droit d'asile.

A l'heure où nous nous apprêtons à faire nôtre la charte européenne des droits fondamentaux, à laquelle nous sommes tous, ici, attachés, que penser, monsieur le ministre délégué, de telles déclarations, qui affectent les valeurs humanistes de l'Union européenne ?

M. le président.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Les autorités danoises auxquelles vous avez fait allusion, ont eu tort, madame, de tenir de tels propos. Je pense que M. Védrine ou M. Moscovici pourront compléter ma réponse.

M. le président.

Nous passons au groupe du RPR.

La parole est à M. Bruno Bourg-Broc.

M. Bruno Bourg-Broc.

J'espère que M. le ministre délégué voudra bien me faire une réponse un peu moins courte.

Monsieur le ministre, au nom du groupe d'étude sur la francophonie et la culture française dans le monde, que je préside, je souhaite vous interroger sur les moyens consacrés par votre ministère à l'action en leur faveur.

Comme l'a très bien dit notre collègue Jacque Godfrain ce matin, la défense de la francophonie devient pathétique. Vous-même avez reconnu que la bataille était difficile et vous avez convenu d'une certaine dispersion des moyens.

Alors, y croyons-nous ? Y croyez-vous ? Pensons-nous que c'est une priorité ? Quand aurons-nous un débat dans cette assemblée, sur notre politique en faveur de la francophonie ? J'ai le sentiment que nous passons à côté d'un problème politique fondamental.

Notre collègue Tavernier, dans son récent rapport, a préconisé un certain nombre de réformes ; je souhaiterais connaître leur traduction budgétaire.

Comment se fait-il, s'interrogeait le président Vauzelle, que nous puissions capter des chaînes de radio et de télévision anglophones, hispanophones ou germanophones, mais pas de chaînes francophones ? Je souhaiterais connaître votre point de vue sur la fusion des directions et organismes traitant des affaires francophones et culturelles à l'étranger. Il faut sans doute rationaliser les moyens. A quand, par exemple, l'équivalent français d'un British Council ou d'un Goethe Institut ? Nos partenaires semblent avoir mieux résolu que nous les problèmes liés à la défense de leur langue et de leur culture.

M. le président.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Monsieur le député, j'y crois, et je crois que c'est un beau combat que celui de la francophonie, même s'il est difficile à mener et même si le comportement de certains hauts fonctionnaires ou chefs d'entreprise s'apparentent parfois à la trahison, et nous le leur disons.

M. Bruno Bourg-Broc.

Très bien ! M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Il ne se passe pratiquement pas une semaine sans que l'occasion me soit donnée, hélas ! de rappeler à l'ordre tel ou tel qui, parfois dans un bon anglais mais pas toujours, oublie que le français est langue de travail et qu'il existe des moyens de traduction. Si on n'utilise pas sa propre langue, il ne faudra pas être surpris qu'elle perde son statut de langue de travail et que les moyens de traduction disparaissent aussi. C'est une réalité forte.

Malheureusement, les Français ne mesurent pas l'importance de cette bataille. Nos partenaires en francophonie y sont, eux, plus attentifs parce que le combat autour de la langue renvoie souvent à un combat de politique intérieure, ce qui n'est pas le cas chez nous, si l'on met de côté la question, que je ne sous-estime pas, des langues régionales. Mais c'est un autre débat.

J'ai évoqué tout à l'heure les avancées institutionnelles que le sommet de Cotonou, puis celui de Hanoi, ont permises. S'y ajoutent la structuration de la francophonie, la présence d'un secrétaire général qui permet à celle-ci de s'exprimer d'une seule voix, d'avoir un patron en quelque sorte, et la remise en ordre des opérateurs de la francophonie, notamment de l'Agence universitaire de la francophonie, que nous avons entreprise parce que nous étions convaincus qu'il n'était pas fait le meilleur usage possible des moyens mobilisés. Nous faisons de même pour tous les opérateurs de la francophonie.

Faut-il rappeler Edufrance, la redéfinition de l'offre de formation supérieure à l'attention des étudiants étrangers ? Elle produit des effets. C'est donc bien la preuve que ce combat n'est pas désespéré, puisque les premiers résultats peuvent déjà être enregistrés.

L'audiovisuel est une grande question. La France a fait le choix d'un service audiovisuel extérieur francophone, c'est-à-dire multilatéral et sans doute un peu plus compliqué à organiser. L'émission d'un signal de télévision implique une certaine unité de décision qui est parfois mise à mal lorsque plusieurs pays expriment autant de volontés qui ne sont pas toujours cohérentes.

La question s'est posée à propos de TV 5-Québec Canada, qui a connu quatre présidents en deux ans, ce qui, à l'évidence, traduit un malaise. La qualité du signal émis à Montréal, à destination des Etats-Unis et de l'Amérique du Sud, est ici en cause. Il y a quelques jours, à Vevey, la France a affirmé que, à défaut d'une organisation qui nous permettrait de peser sur ce signal-là, elle avait la volonté d'émettre elle-même, de Paris, en direction de l'Amérique latine ou des Etats-Unis. Je rappelle que le signal de TV 5-Europe concerne non seulement


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l'Europe, mais aussi l'Afrique, le Moyen-Orient et l'Asie.

Il reste des progrès à accomplir, mais des améliorations sensibles, significatives, ont été apportées.

Des discussions ont lieu entre TV 5 et les chaînes publiques françaises : les dernières ont associé M. Teissier et M. Stock, pour ne parler que des deux présidents directement concernés. Ce sujet retient toute notre attention, car nous en mesurons pleinement l'importance.

L'idéal serait une chaîne francophone d'informations, une sorte de CNN francophone, susceptible d'être captée partout où nous pouvons avoir envie de prendre des nouvelles de chez nous.

L es problèmes d'organisation et techniques ne manquent pas, mais la télévision numérique permet aujourd'hui d'envisager des solutions qu'on n'imaginait pas il y a encore quelques années, comme l'idée d'un bouquet francophone, car il paraît difficile de concevoir une seule chaîne qui réponde aux aspirations de publics extraordinairement divers. Il conviendrait ainsi que nous fournissions non pas une chaîne, mais des chaînes francophones couvrant le champ d'intérêt de tous les télespectateurs. Telle est notre ambition.

Nous avons enfin le souci de travailler en partenariat avec d'autres grandes langues - l'espagnol, le portugais -, car la bataille contre l'uniformité culturelle passe aussi par des alliances avec ceux qui ont, comme nous, intérêt à ce que la diversité culturelle prévale.

M. Bruno Bourg-Broc.

Et quand pourrons-nous en débattre ici ?

M. le président.

Le ministre a déjà répondu longuement, monsieur Bruno Bourg-Broc.

M. Bruno Bourg-Broc.

Pourrons-nous avoir ici un débat sur la francophonie, monsieur le ministre ? M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

J'y suis prêt. Si le bureau de l'Assemblée nationale veut organiser un débat sur la francophonie, je n'y vois, quant à moi, que des avantages.

M. le président.

Je ne suis pas sûr que cela ne dépende que du bureau...

La parole est à M. Bernard Schreiner.

M. Bernard Schreiner.

J'associerai à ma question mon collègue M. Jean-Claude Mignon, qui est également membre de l'assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe.

En 2001, pour la quatrième année consécutive, le budget du Conseil de l'Europe sera calculé sur la base d'une croissance zéro en termes réels.

Sans ressources supplémentaires, il est devenu impossible pour le Conseil de l'Europe de mener à bien les activités qui concernent en particulier les nouvelles démocraties de l'Europe centrale et orientale.

En admettant que, pour le budget de l'année 2001, même si le plafond n'est pas encore fixé, les jeux sont déjà faits, qu'en sera-t-il du budget de l'année 2002 qui devrait être fixé au cours du premier trimestre de l'année prochaine ? La France va-t-elle camper sur sa position, en faveur d'une croissance budgétaire zéro, ou va-t-elle proposer une augmentation des ressources budgétaires suffisante pour permettre au Conseil de l'Europe d'être présent sur la scène internationale et de mener à bien sa mission paneuropéenne ? Du point de vue de la politique budgétaire globale du Conseil de l'Europe, le temps est venu de reconsidérer la méthode de financement issue de la résolution 94.31. Les critères d'application qu'elle prévoit sont devenus inapp ropriés et inéquitables. Trop de nouveaux Etats membres, économiquement défavorisés, surtout certains pays d'Europe centrale ou orientale, ne sont pas en mesure de se voir attribuer les mêmes règles que d'autres, économiquement plus favorisés.

Ainsi, pour le budget 2002, la France est-elle prête à abandonner la croissance budgétaire zéro et, à partir du budget 2002, à engager et à soutenir une réflexion sur l'introduction de critères de financement nouveaux et pertinents tenant compte de la réalité économique de chaque Etat membre ? Dans un contexte politique international mouvant, le Conseil de l'Europe a impérativement besoin de ressources budgétaires supplémentaires s'il doit continuer à fonctionner et si nous voulons que son image, c'est-à-dire la nôtre, ne soit pas ternie, car, sur le terrain, sa présence est réduite au profit d'autres organisations financièrement bien mieux loties.

M. le président.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Monsieur le député, le rôle du Conseil de l'Europe ne cesse de se modifier avec les adhésions nouvelles qu'il enregistre.

La dépense à laquelle vous faites allusion est financée au chapitre des contributions obligatoires. La progression des crédits a été la suivante : 169 millions de francs en 1998, 174 millions de francs en 2000. Pour 1999, je n'ai pas le chiffre. Je ne l'ai pas non plus pour 2001, car le montant des contributions n'est pas fixé. Je rappelle qu'il s'agit de contributions obligatoires.

Il est vrai que nous nous efforçons de maîtriser la progression des dépenses du Conseil. Ce choix explique sans doute ce que vous appelez l'« option zéro » en ce qui concerne l'évolution des dépenses de cette institution.

En le regrettant, je ne peux pas prendre l'engagement que la France modifiera sa position. En l'état actuel de mes informations, je dois m'en tenir à cette seule réponse, mais je ne manquerai pas de demander à mes collègues, notamment à M. Pierre Moscovici, qui ne pouvait être ici aujourd'hui en raison d'une réunion concernant l'Europe, si un changement est susceptible d'intervenir à cet égard.

M. Bernard Schreiner.

Mais c'est une question de volonté politique !

M. le président.

Nous passons au groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.

La parole est à M. Marc Reymann.

M. Marc Reymann.

Le Premier ministre vient de confier à l'ancien maire de Strasbourg, M. Roland Ries, une mission interministérielle pour la promotion de la vocation européenne de Strasbourg. Malgré la sympathie qu'on peut éprouver pour M. Roland Ries, je ne vois pas très bien en quoi cette mission permettra de découvrir et de traiter les problèmes inhérents au maintien du parlement européen à Strasbourg.

Ainsi, en ce qui concerne les dessertes, nous savons - ou, du moins, nous espérions - que le TGV sera à Strasbourg en l'an 2006.

M. Bruno Bourg-Broc.

C'est optimiste !

M. Marc Reymann.

Les liaisons avec Berlin sont assurées quotidiennement par Baden-Airport situé à trentcinq kilomètres de Strasbourg. La ville est par ailleurs bien desservie pendant les sessions.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 7 NOVEMBRE 2000

Je ne vois pas ce que ce chargé de mission pourra régler alors que, depuis des années, tous les responsables politiques interviennent régulièrement pour le maintien du Parlement européen à Strasbourg. Je constate malheureusement que le Gouvernement n'a rien entrepris lorsque, dans son calendrier 2001, le Parlement européen a supprimé le vendredi des sessions ordinaires. Allez-vous, dans le cadre de la conférence intergouvernementale, renégocier toutes les sessions à Strasbourg, y compris les sessions additionnelles ? La construction du nouvel hémicycle fut, certes, indispensable, mais pas suffisante, pour fixer définitivement le Parlement à Strasbourg. Les services liés à la session, notamment le greffe, doivent y être installés.

La dispersion des lieux de réunion entre Bruxelles et Strasbourg est insupportable. Aucun Parlement au monde ne travaille dans de telles conditions. On ne peut pas, à la longue, empêcher un Parlement de décider de son lieu de réunion. La présidence française est une occasion unique pour empêcher la dérive en cours.

M. le président.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

L'ancien député européen que je suis ne découvre évidemment pas ce dossier. Le ministère des affaires étrangères est conscient tant de l'absolue nécessité de préserver Strasbourg comme capitale européenne que du besoin de l'aider à conserver cette position.

Je vous rappelle les chiffres qui m'ont été communiqués, en matière de desserte aérienne : 7,380 millions de francs ont été à ce jour déboursés en 2000, 7,3 millions en 1998, 26,5 millions en 1999. Vous savez que cette aide est proportionnelle à la présence des compagnies aériennes. Le fait qu'elle ait baissé en l'an 2000 n'est pas une indication très satisfaisante.

S'agissant des actions de promotion de Strasbourg, 2 millions de francs y ont été consacrés. La direction générale de la coopération internationale et du développement DGCID -, quant à elle, a débloqué 2,5 millions de francs pour le programme frontières humaines. Voilà l'ensemble des actions et des financements que le ministère des affaires étrangères aura apportés à Strasbourg pour défendre cette position dans des conditions difficiles, j'en conviens. Mais la volonté de la France de préserver Strasbourg comme capitale européenne, elle, ne saurait être mise en doute.

M. Bernard Schreiner.

Mais les moyens manquent.

M. le président.

Nous avons terminé les questions.

J'appelle les crédits inscrits à la ligne : « Affaires étrangères ».

ÉTAT B Répartition des crédits applicables aux dépenses ordinaires des services civils (mesures nouvelles)

« Titre III : 513 203 263 francs ;

« Titre IV : 942 689 086 francs. »

ÉTAT C Répartition des autorisations de programme et des crédits de paiement applicables aux dépenses en capital des services civils (mesures nouvelles) TITRE V. INVESTISSEMENTS EXÉCUTÉS PAR L'ÉTAT

« Autorisations de programme : 459 500 000 francs ;

« Crédits de paiement : 137 500 000 francs. »

TITRE VI. SUBVENTIONS D'INVESTISSEMENT ACCORDÉES PAR L'ÉTAT

« Autorisations de programme : 2 318 450 000 francs ;

« Crédits de paiement : 338 850 000 francs. »

Je mets aux voix le titre III.

(Le titre III est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix le titre IV.

(Le titre IV est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre V.

(Les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre V sont adoptés.)

M. le président.

Je mets aux voix les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre VI.

(Les autorisations de programme et les crédits de paiement du titre VI sont adoptés.)

Avant l'article 49

M. le président.

En accord avec la commission des finances, j'appelle maintenant l'amendement no 49 rectifié de la commission tendant à insérer un article additionnel avant l'article 49.

Cet amendement, présenté par M. Adevah-Poeuf, rapporteur spécial, est ainsi rédigé.

« Avant l'article 49, insérer les dispositions suivantes :

« Affaires étrangères

« I. Il est constitué une délégation parlementaire pour le contrôle du financement de la politique d e coopération. Cette délégation compte trente membres : quinze députés et quinze sénateurs.

« II. Les membres de la délégation sont désignés en leur sein par chacune des deux assemblées du Parlement de manière à assurer une représentation proportionnelle des groupes politiques.

« Les députés membres de la délégation sont désignés au début de la législature pour la durée de celle-ci.

« Les sénateurs membres de la délégation sont désignés après chaque renouvellement partiel du Sénat.

« Le mandat des délégués prend fin avec le mandat parlementaire.

« III. La délégation parlementaire pour le contrôle du financement de la politique de coopération a pour mission d'informer les assemblées :

« des protocoles financiers conclus par la France ;

« de l'action de l'agence française du développement ;

« de l'exécution des crédits de la coopération au sein du budget du ministère des affaires étrangères.

« IV. Le Gouvernement présente à la délégation, avant chaque réunion du comité des projets du Fonds de solidarité prioritaire, un rapport sur les projets et programmes inscrits à l'ordre du jour du comité précité.

« V. La délégation définit son règlement intérieur. »

La parole est à M. le rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour la coopération.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 7 NOVEMBRE 2000

M. Maurice Adevah-Poeuf, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, pour la coopération.

Vous connaissez cet amendement, monsieur le ministre, vous savez qu'il s'inscrit dans une continuité que nous commençons - que vous commencez peut-être aussi d'ailleurs - à trouver un peu longue, d'autant qu'elle est relativement peu efficace.

Il y a un an, nous nous étions retrouvés ici, à peu près à la même date, pour une séance qui avait été précédée d'un débat en commission élargie, le 4 novembre 1999, où j'avais soulevé la question du contrôle parlementaire sur les crédits d'intervention de la DGCID en général, de ce qui, à l'époque, était le comité directeur du FAC et qui, depuis, est devenu le Fonds de solidarité prioritaire, et où j'avais évoqué quelques complications sur des hypothèses de contrôle de l'Agence française de développement pour certains de ces programmes, l'établissement financier risquant, si nous n'y prenions garde, de se trouver sous la tutelle d'un comité administratif résultant du FAC de l'époque. Veuillez m'excuser, chers collègues, si tout cela paraît un peu complexe.

E n réponse à l'une de mes questions, le 10 novembre 1999, vous aviez répondu, monsieur le ministre, que vous étiez « très favorables à ce que le contrôle parlementaire conserve sa plénitude ». Et vous aviez ajouté : « Je sais que j'exprime là, bien entendu, le point de vue d'Hubert Védrine sur le sujet. » Réponse on

ne peut plus claire qui signifiait, en toute hypothèse, que l'instance compétente pour décider des projets du Fonds de solidarité prioritaire en cours d'élaboration comporterait une représentation de l'Assemblée nationale et une représentation du Sénat.

En seconde lecture, le 16 décembre 1999, nous avons adopté à l'unanimité et en accord avec les deux commissions des finances du Sénat et de l'Assemblée nationale, un amendement qui disait : « Afin de maintenir le contrôle parlementaire, tous les projets, quel que soit leur montant, financés dans la zone de solidarité prioritaire sur les crédits figurant au budget du ministère des affaires étrangères et qui relevaient de la compétence du fonds d'aide et de coopération ne peuvent être mis en oeuvre par le ministère qu'après l'accord préalable du comité directeur du fonds d'aide et de coopération ou de l'organe de décision qui lui sera substitué, au sein duquel continueront à siéger des représentants de chaque assemblée. » Je ne crois pas qu'il eût été possible d'être plus

clair.

Le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie qui, comme toujours en seconde lecture, représentait le Gouvernement ce jour-là, a donné son accord à cet amendement qui a donc été inscrit dans la loi, mais qui n'est pas pour autant devenu la loi, le Conseil constitutionnel ayant par la suite annulé cette disposition pour des raisons que je ne m'autorise ni à analyser ni à commenter. Mais l'engagement conjoint pris par le ministre des affaires étrangères, par vous-même, monsieur le ministre chargé de la coopération, par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie était clair, et nous attendions sans inquiétude particulière la sortie du décret - dont la gestation fut longue - créant le Fonds de solidarité prioritaire et les organismes chargés de le gérer.

Ce décret est sorti le 11 septembre 2000. O surprise, aucun parlementaire ne figure dans le comité des projets.

Sans doute, un grand ouf de soulagement fut poussé ici ou là par certains de vos collaborateurs sous les lambris dorés du Quai d'Orsay et de la rue Monsieur, et probablement aussi sous les lambris pas dorés, et plus minéraux, situés sur la rive droite de la Seine, assez en amont de l'endroit où nous sommes. (Sourires.)

Ce soupir de soulagement était peut-être fondé - mais je n'en ai entendu que le souffle - dans la mesure où la présence de parlementaires aurait obligé les fonctionnaires à organiser un pré-FAC, c'est-à-dire à se réunir entre eux avant que les trouble-fête que nous sommes tous n'arrivent au comité directeur officiel. Cela faisait déjà deux réunions. Ensuite, il y aurait beaucoup d'interventions de parlementaires, parce que nous y aurions été présents et actifs. Mon collègue M. Brana, qui est un des

« sinistrés » de la réforme en cette matière, pourrait en porter témoignage.

Ainsi, plus de pré-FAC, plus de FAC, plus de comité directeur, mais un grand fonds de solidarité prioritaire, avec un conseil d'orientation et de stratégie et un comité des projets, là où se décident vraiment les dons, et c'est là qu'on nous dit : circulez, il n'y a rien à voir ! Très honnêtement, monsieur le ministre, si ce n'est pas un oubli, c'est plus qu'une malice. Il y a une régression du contrôle parlementaire sur les crédits d'intervention de la coopération.

Je propose donc, à défaut d'autre moyen, que, d'ici la seconde lecture, il soit trouvé une ouverture pour que le décret soit modifié et prévoie « trois députés, deux sénateurs au comité des projets du fonds de solidarité prioritaire ». Ce retour à la situation antérieure nous donnerait satisfaction.

Dans l'attente d'une décision qui ne soit pas susceptible, ou qui soit moins susceptible d'être censurée par le Conseil constitutionnel, je propose de créer une structure - sans doute un peu lourde, le problème pourrait se gérer beaucoup plus facilement - qui est une délégation p arlementaire mixte Sénat-Assemblée nationale. Cet amendement n'a pas d'autre visée. Il sera retiré dès l'instant où vous nous aurez donné des garanties sur le maintien du contrôle parlementaire sur les crédits de la coopération.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Je n'irai pas jusqu'à prétendre, monsieur le rapporteur, que votre amendement de l'an dernier nous a en quelque sorte fermé la porte à une modification du décret mais il est vrai que la décision du Conseil constitutionnel du 29 décembre 1999 relative à la loi de finances a déclaré contraire à la Constitution les articles 96 et 113 de celle-ci. Or, sur ce dernier article, qui est proche de votre amendement, le Conseil constitutionnel a estimé qu'il était inconstitutionnel et qu'il « soulevait une délicate question de séparation des pouvoirs puisque tendant à faire participer les parlementaires à des décisions relevant de l'activité courante du pouvoir exécutif », bref, que cet article était sans conteste un cavalier budgétaire.

Il est vrai que le FAC, puisqu'il s'agissait de lui, avait un fonctionnement particulier, probablement dérogatoire à la règle de séparation des pouvoirs dans la mesure où des parlementaires participaient à la décision de financer ou de ne pas financer des projets d'aide en matière de coopération.

Dans le cadre de la réforme du dispositif de coopération, d'aucuns avaient même imaginé la disparition pure et simple de ce fonds d'aide et de coopération. D'autres et j'en étais - ont voulu le maintien de ce fonds d'aide, qui, par référence à la zone de solidarité prioritaire où il se développe désormais, s'appelle maintenant Fonds de solidarité prioritaire.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 7 NOVEMBRE 2000

Il est vrai que le Gouvernement français - et j'emploie cette expression pour intégrer les autres composantes de la décision - a fait le choix de revenir à une distinction plus stricte des pouvoirs, de distinguer entre un conseil d'orientation auquel les parlementaires pourraient être associés sans difficulté et un comité des projets - qu'au demeurant le ministre ne préside pas alors qu'il préside le conseil d'orientation - qui est lui chargé de décider des financements des projets en question.

Je découvre votre amendement. S'agissant de l'organisation que l'Assemblée nationale entend se donner pour exercer son travail, le Gouvernement n'a évidemment pas la possibilité de s'élever contre : le la fonctionnement de l'Assemblée nationale relève de l'Assemblée et d'elle seule.

Par conséquent, si vous faites le choix de constituer une délégation parlementaire pour contrôler le financement de la politique de coopération, le Gouvernemenet fera ce que cette délégation attend de lui, c'est-à-dire qu'il présentera « à la délégation, avant chaque réunion du comité des projets du Fonds de solidarité prioritaire, un rapport sur les projets et programmes inscrits à l'ordre du jour du comité précité ».

Cela dit, l'ancien parlementaire que je suis et le ministre que je suis devenu s'interroge sur la pertinence d'une structure qui venant s'ajouter à d'autres, risque d'alourdir le travail du Parlement et probablement aussi un peu celui du Gouvernement. Je me demande s'il est encore possible maintenant de donner droit à votre demande tendant à faire en sorte qu'il y ait une meilleure implication des parlementaires. Et c'est sur ce terrain-là que je voudrais me placer.

Le conseil d'orientation stratégique, que l'on appellera le COS - bien qu'il faille se méfier des sigles car celui de COS peut avoir une autre signification - a selon le décret que vous avez cité, pour fonction d'émettre des avis et de formuler des recommandations sur les stratégies de coopération dans lesquelles s'inscrivent les projets et les programmes financés par le fonds, sur les principes d'emploi des crédits du FSP dans le respect des organisations géographiques et sectorielles de l'aide publique au développement, sur l'utilisation des crédits du fonds par secteurs d'activités et par zones géographiques, sur la coordination des interventions du Fonds de solidarité prioritaire avec celle de l'Agence française de développement et des principaux opérateurs de l'aide publique au développement, sur la politique d'évaluation des projets et programmes du FSP, sur l'élaboration et la diffusion des informations relatives au fonctionnement et aux réalisations du FSP.

Vous aurez tout de même observé que nous nous sommes efforcés, dans ce décret, de prendre en compte, le plus largement possible, tout ce qui peut être utile pour « cadrer » le travail du comité des projets.

Vous nous dites : « l'important, ce sont les projets ». Je vous propose donc, monsieur le député, d'inscrire à l'ordre du jour du conseil d'orientation stratégique la présentation d'un rapport sur les décisions prises par le dernier comité des projets, ce qui donnerait aux parlementaires une sorte de pouvoir d'évocation automatique sur les projets qui auront été arrêtés. Il est vrai que ce sera après coup, mais, après tout, vous serez dans votre rôle de contrôle parlementaire en évoquant par la suite les projets au sein du conseil d'orientation.

Je peux également vous faire une autre proposition : adresser la liste des projets aux parlementaires membres du conseil d'orientation avant que le comité des projets ne soit saisi de ces projets. Je ne peux pas vous proposer de vous l'adresser longtemps à l'avance, puisque vous savez comme moi, pour avoir siégé au comité directeur du FAC puis du FSP, que ces projets sont souvent montés au dernier moment.

Cela me permettrait d'éviter de modifier un décret concernant une institution qui n'a pas encore commencé à fonctionner.

Je serais tenté de vous dire : accordez-nous au moins le bénéfice de l'inventaire. Commençons à fonctionner selon les règles que je vous propose et nous verrons, par la suite, s'il y a lieu de reposer la question de la modification du décret. Au demeurant, cela renvoie à l'accord des autres composantes de la volonté gouvernementale, ce qui complique peut-être un peu les choses.

Mes propositions me paraissent répondre très largement à votre préoccupation et témoignent de l'importance que j'accorde au contrôle parlementaire.

M. le président.

La parole est à M. Bernard Schreiner.

M. Bernard Schreiner.

Ayant présidé la commission du budget du Conseil de l'Europe durant un certain temps, je sais bien que les parlementaires peuvent donner un avis, mais que ce sont les fonctionnaires qui régissent le budget.

Tant que le ministère n'exprime pas la volonté de vouloir progresser, ce n'est pas une commission de plus ou de moins qui changera quoi que ce soit à l'action de la France dans le domaine de la coopération et au rayonnement de notre pays.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Maurice Adevah-Poeuf, rapporteur spécial.

Nous ne sommes pas au Conseil de l'Europe. Nous sommes dans une assemblée délibérante, composante de la souveraineté nationale, qui a un peu plus d'ancienneté que le Conseil de l'Europe et qui a quelques pratiques.

Je ne dis pas que le comité directeur du FAC était une enceinte exemplaire. Certes, nous y avons passé des moments utiles, mais aussi d'autres qui l'étaient beaucoup moins - et vous savez de quoi je veux parler, monsieur le ministre.

Au reste, personne n'a prétendu que les quelques représentants du Parlement français siégeant dans une instance de ce genre pouvaient remettre en cause une décision de l'exécutif. Il n'y a jamais eu de mélange des genres. Cela dit, il y avait une grande liberté de parole, et chacun, qu'il appartienne à l'exécutif ou au Parlement, pouvait s'exprimer avec pertinence dans la mesure où les données des dossiers soumis étaient connues suffisamment en amont. A propos de cette liberté de parole, j'ai même parlé de « guerre ethnique », ce qui montre que ce type de conflit n'a pas lieu qu'en Afrique, mais aussi dans les comités qui gèrent les crédits pour les Africains.

(Sourires.)

Nous n'avons pas prétention à dominer le comité directeur. Pas plus qu'au conseil de surveillance de l'Agence française de développement, où les parlementaires sont encore moins nombreux qu'ils ne l'étaient au comité directeur du FAC, nous prétendons décider à nous seuls de la position définitive qui doit être prise par tel ou tel organisme, instrument de la politique française de coopération et donc représentant en priorité de l'exécutif. Jamais personne n'a pensé ou souhaité faire ça. Ce que nous voulons, c'est exprimer un avis fondé en amont, le contrôle s'exerçant par la suite.

Votre proposition est très sympathique, monsieur le ministre, mais elle n'a aucune portée juridique. Certes, je vous connais suffisamment pour savoir que vous ferez ce


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 7 NOVEMBRE 2000

que vous annoncez. Je n'en doute pas car vous êtes un homme de parole. Toutefois, cette simple pratique ne sera inscrite ni dans le marbre de la loi ni dans le travertin du décret. Il pourra y être mis fin à tout instant, sans aucune possibilité de contester cet engagement verbal qui n'aura jamais constitué en soi une formalité substantielle.

Je ne peux donc pas m'en contenter.

Vous avez eu l'amabilité de me citer la décision du Conseil constitutionnel. Je me permets de vous renvoyer l'argument. Le Conseil constitutionnel se borne à constater que, au sens de l'ordonnance de 1959, l'amendement qui avait été adopté dans la loi de finances pour 2000 constituait un cavalier budgétaire, puisque la disposition relevait du domaine réglementaire. Dans ce cas, il revient au Gouvernement d'honorer les engagements qui avaient été pris et de prévoir la présence de représentants de l'Assemblée nationale et du Sénat dans le comité des projets.

Sincèrement, je ne pense pas qu'il y ait une véritable difficulté sur le fond, sinon le problème serait beaucoup plus grave que nos échanges ne peuvent le laisser supposer : cela voudrait dire que le Gouvernement aurait la volonté délibérée de faire régresser le contrôle parlementaire. Il en découlerait une schizophrénie complète entre le discours affiché et la pratique.

M. le président.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Monsieur le rapporteur, selon vous, cet engagement n'aurait aucune valeur pour l'avenir et il ne vaudrait que pour autant que celui qui l'a pris serait en mesure de le faire respecter. C'est oublier qu'il y a une réalité, elle, durable : la présence de parlementaires au conseil d'orientation stratégique.

M. Maurice Adevah-Poeuf, rapporteur spécial.

Où il ne se passe rien ! M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Cela signifie que les parlementaires seront désormais en mesure de faire respecter un usage dont, en outre, je me porterai garant. On peut tout de même faire confiance aux parlementaires qui siègent au sein du conseil d'orientation pour qu'il en soit ainsi. Je serais étonné qu'on puisse revenir si facilement sur un usage que nous aurions ainsi établi ensemble.

A défaut, je peux essayer de changer le décret, mais je ne peux pas prendre ce soir d'engagement à cet égard.

En revanche, je le répète, je peux vous proposer que l'ordre du jour du conseil d'orientation comporte la présentation d'un rapport sur les projets décidés par le comité des projets précédent.

Je peux également vous proposer que vous soyez informés à l'avance de la liste - et non du contenu - des projets susceptibles d'être examinés par le comité des projets suivant.

Convenez qu'il s'agit de propositions de nature à rapprocher nos points de vue.

M. le président.

La parole est à M. le président de la commission des affaires étrangères.

M. François Loncle, président de la commission des affaires étrangères.

Les derniers propos de M. le ministre montrent que nous recherchons à parvenir à un accord entre nous, et j'en appelle à la sagesse des uns et des autres.

Cela dit, Maurice Adevah-Poeuf a eu parfaitement raison de s'étonner de la manière dont les choses ont évolué à partir de notre discussion de l'année dernière. Il est vrai que le décret a choqué beaucoup d'entre nous : une fois de plus, on semblait se méfier du Parlement.

M. le ministre nous fait une proposition, notamment dans la perspective de la deuxième lecture. Elle mérite de retenir l'attention, car la création d'une délégation parlementaire - il s'en est créée une ou deux au cours de cette législature - n'est pas un acte simple sur le plan de procédure ; en outre, c'est par la suite une charge importante pour l'Assemblée nationale. Par conséquent, je ne crois pas que l'on puisse, à cette heure tardive, et en fin de discussion du budget des affaires étrangères, imaginer qu'une délégation puisse se créer de la sorte sans qu'un débat s'engage entre nous sur le sujet.

Je crois que, dans un premier temps, nous pourrions accepter la proposition très directe et sincère du ministre - et on ne peut que l'en remercier -, tout en continuant à examiner entre nous quelle peut être la solution la meilleure pour que le Parlement puisse avoir un droit de regard dans un domaine qui nous intéresse tous.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Maurice Adevah-Poeuf, rapporteur spécial.

Personne n'a pu croire sérieusement, surtout pas vous, monsieur le président, qui avez une expérience parlementaire aussi longue que la mienne, qu'à une heure aussi tardive de la nuit et en présence d'un public aussi nombreux et enthousiaste - en fait, seulement une poignée de spécialistes et de gens qui pensent qu'ils ne vivent pas dans un Hexagone complètement cloisonné ; ce qui prouve que les affaires étrangères et la coopération continuent de n'intéresser personne - j'irai jusqu'au bout de ma démarche et que je proposerai à la majorité de l'Assemblée nationale - majorité qui, à cet instant, est d'ailleurs l'unanimité - de créer une délégation parlementaire.

Chacun a pu se douter depuis le début que cet amendement allait être retiré, et c'est ce que je fais. Toutefois, monsieur le ministre, ce retrait ne vaut pas approbation de votre proposition qui me paraît certes sincère et sympathique, mais aussi insuffisante. Par conséquent, monsieur le ministre, si vous ne voulez pas retrouver ultérieurement cet amendement, dans cet hémicycle ou dans les petites salles voisines, je vous suggère d'explorer sérieusement, avant la deuxième lecture, la possibilité de modifier le décret. Il est tout de même très simple de prévoir au sein du comité des projets une représentation de parlementaires des deux assemblées équivalente à celle qui existait au comité directeur du FAC ; nous n'en demandons pas plus. Si c'était le cas, notre amendement connaîtrait le sort que connaissent la plupart des amendements, c'est-à-dire une durée de vie assez brève. Sinon vous le retrouverez en seconde lecture, à moins même qu'il ne soit adopté entre temps par le Sénat. Mais je conviens que la création d'une délégation parlementaire est un moyen disproportionné pour régler un tel problème.

J'en appelle, non à votre sagesse, monsieur le ministre - et je sais qu'elle est infinie -, mais à celle du Gouvernement que vous représentez ce soir. Essayez de nous rapporter une réponse positive, si possible avant la première lecture du budget au Sénat, et assurément avant la deuxième lecture de celui-ci à l'Assemblée nationale, d'autant que ce point ne me paraît pas poser de problème de fond. Car, je le répète, si modifier une phrase d'un décret pour faire entrer dans le comité des projets trois députés


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et deux sénateurs posait un problème de fond, je ne suis pas sûr qu'une délégation parlementaire suffirait à le régler.

M. le président.

L'amendement no 49 rectifié est retiré.

La parole est à M. le président de la commission des affaires étrangères.

M. François Loncle, président de la commission des affaires étrangères.

Je voudrais remercier M. Adevah-Poeuf d'avoir retiré son amendement et l'inviter à venir en commission des affaires étrangères pour qu'il ait l'occasion de mesurer combien les affaires étrangères intéressent beaucoup plus de monde qu'il ne le croit. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Nous avons terminé l'examen des crédits du ministère des affaires étrangères.

La suite de la discussion budgétaire est renvoyée à la prochaine séance.

2 DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE RÉSOLUTION

M. le président.

J'ai reçu, le 7 novembre 2000, de MM. Philippe Douste-Blazy, Jean-Louis Debré et JeanFrançois Mattei, une proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête sur les conséquences sanitaires de l'alimentation des animaux d'élevage par des farines de viandes et d'os.

Cette proposition de résolution, no 2687, est renvoyée à la commission de la production et des échanges, en application de l'article 83 du règlement.

3 D ÉPÔT D'UN RAPPORT EN APPLICATION D'UNE LOI

M. le président.

J'ai reçu, le 7 novembre 2000, de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, en application de l'article 24 de la loi no 84-46 du 24 janvier 1984 relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit, le rapport pour 1999 du Conseil national du crédit et du titre.

4

ORDRE DU JOUR

DES PROCHAINES SÉANCES

M. le président.

Aujourd'hui, à quinze heures, première séance publique : Questions au Gouvernement ; Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2001, no 2585 ; M. Didier Migaud, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport no 2624).

Agriculture et pêche ; articles 49 et 50 ; budget annexe des prestations sociales agricoles : Agriculture : Mme Béatrice Marre, rapporteure spéciale, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe no 4 du rapport no 2624) ; M. Joseph Parrenin, rapporteur pour avis, au nom de la commission de la production et des échanges (tome I de l'avis no 2629).

Pêche : M. Louis Mexandeau, rapporteur spécial, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe no 5 du rapport no 2624) ; M. René Leroux, rapporteur pour avis, au nom de la commission de la production et des échanges (tome II de l'avis 2629).

Prestations sociales agricoles : M. Charles de Courson, rapporteur spécial, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (annexe no 42 du rapport no 2624).

A vingt et une heures, deuxième séance publique : Suite de l'ordre du jour de la première séance.

La séance est levée.

(La séance est levée, le mercredi 8 novembre 2000, à zéro heure vingt.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT