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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE

DE

M.

CLAUDE GAILLARD

1. Désignation d'un représentant de l'Assemblée au sein d'un organisme extraparlementaire (p. 9800).

2. Transposition par ordonnances de directives communautaires. - Suite de la discussion d'un projet de loi d'habilitation, adopté par le Sénat après déclaration d'urgence (p. 9800).

QUESTION PRÉALABLE (p. 9800)

Question préalable de M. Alain Bocquet : MM. Gilbert B iessy, Gérard Fuchs, Christian Estrosi, Maxime Gremetz, François Goulard, Yves Bur. - Rejet par scrutin.

DISCUSSION GÉNÉRALE (p. 9807)

MM. Didier Quentin, Roger Meï, Yves Bur, Gérard Charasse, François Goulard, Jean-Paul Chanteguet, Michel Bouvard, Jacques Desallangre, Mme Odile Saugues,

M.

Jean-Claude Lemoine, Mme Marie-Hélène Aubert,

MM. François Brottes, Christian Bataille.

Clôture de la discussion générale.

Suspension et reprise de la séance (p. 9824)

MOTION DE

RENVOI EN

COMMISSION (p. 9824)

Motion de renvoi en commission de M. Jean-Louis Debré : MM. Christian Estrosi, Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement ; Mme Geneviève PerrinGaillard, MM. Didier Quentin, François Goulard, Yves Bur. - Rejet par scrutin.

DISCUSSION

DES ARTICLES (p. 9832)

Article 1er (p. 9832)

A mendements identiques nos 12 de M. Meï, 19 de M. Goulard et 34 de M. Quentin : MM. Roger Meï, François Goulard, Didier Quentin, Jacques Floch, rapporteur de la commission des lois ; le ministre. - Rejet.

Amendements identiques nos 20 de M. Goulard et 35 de M. Quentin : MM. François Goulard, Didier Quentin, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

A mendements identiques nos 13 de M. Meï, 21 de M. Goulard et 36 de M. Quentin : MM. Roger Meï, François Goulard, Didier Quentin, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendements identiques nos 14 de M. Meï et 37 de M. Quentin : MM. Roger Meï, Didier Quentin, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendement no 15 de M. Meï : MM. Roger Meï, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendements identiques nos 22 de M. Goulard et 38 de M. Quentin : MM. François Goulard, Didier Quentin, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendements identiques nos 23 de M. Goulard et 39 de M. Quentin : MM. François Goulard, Didier Quentin, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendements identiques nos 16 de M. Meï et 47 de M. Bataille : MM. Roger Meï, Christian Bataille, le rapporteur, le ministre, François Goulard. - Adoption.

Amendement no 42 de M. Quentin : MM. Didier Quentin, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendements identiques nos 24 de M. Goulard et 40 de M. Quentin : MM. François Goulard, Didier Quentin, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendements identiques nos 17 de M. Meï et 46 de M. Bataille : MM. Roger Meï, Christian Bataille, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendement no 41 de M. Quentin : MM. Didier Quentin, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

A mendement no 26 de M. Goulard : MM. François Goulard, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendement no 18 de M. Meï : MM. Roger Meï, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendement no 43 de M. Quentin : MM. Didier Quentin, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendement no 1 du Gouvernement, avec le sous-amendement no 44 de M. Bataille : MM. le ministre, Christian Bataille, le rapporteur. - Retrait du sous-amendement no

44. M. François Goulard. - Adoption de l'amendement no

1. A mendement no 28 de M. Goulard : MM. François Goulard, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

A mendement no 29 de M. Goulard : MM. François Goulard, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

A mendement no 25 de M. Goulard : MM. François Goulard, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendement no 45 de M. Bataille : M. Christian Bataille. Retrait.

Adoption de l'article 1er modifié.

Article 2 (p. 9840)

M. Henri Nayrou.

Adoption de l'article 2.

Après l'article 2 (p. 9840)

Amendement no 2 deuxième rectification du Gouvernement : MM. le ministre, le rapporteur.

Sous-amendement no 55 de M. de Courson : M. Charles de Courson.

Sous-amendements nos 49 de M. Estrosi, 51 de M. Idiart, 54 de M. Chanteguet et 6 rectifié de la commission des lois : MM. Christian Estrosi, Jean-Louis Idiart, Jean-Paul C hanteguet, le rapporteur, le ministre, Charles de Courson. - Retrait du sous-amendement no

55. MM. François Goulard, Christian Estrosi, Michel Bouvard, Mme Marie-Hélène Aubert, MM. Bernard Roman, président de la commission des lois ; le rapporteur. - Retrait du sous-amendement no 6 rectifié.

M. le ministre. - Rejet des sous-amendements nos 49 et 51 ; adoption du sous-amendement no 54 rectifié.


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Sous-amendement no 56 de M. Bouvard : MM. Michel Bouvard, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Sous-amendement no 53 de M. Floch : MM. le rapporteur, le ministre, Charles de Courson. - Adoption.

Sous-amendements nos 50 rectifié de M. Estrosi et 33 de M. Quentin, et sous-amendements identiques nos 7 rectifié de la commission et 5 deuxième rectification de M. Chanteguet : MM. Christian Estrosi, Didier Quentin, le rapporteur, Michel Bouvard, le ministre. - Rejet des sous-amendements nos 50 rectifié et 33 ; adoption du sous-amendement no 7 deuxième rectification ; le sousamendement no 5 deuxième rectification est satisfait.

Adoption de l'amendement no 2 deuxième rectification modifié.

Amendement no 48 de M. Bataille : MM. Christian Bataille, le rapporteur, le ministre, François Goulard, François Brottes. - Adoption.

Article 3 (p. 9851)

M. Roger Meï, Mme Geneviève Perrin-Gaillard, M. Guy Hascoët, secrétaire d'Etat à l'économie solidaire.

Amendements de suppression nos 11 de M. Préel, 27 de M. Goulard, 30 de M. Bur, 31 de M. Desallangre et 32 de M. Myard : MM. François Goulard, Yves Bur, Jacques Desallangre, Michel Bouvard, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet.

Adoption de l'article 3.

Article 4 (p. 9856)

MM. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement ; Roger Meï.

Amendement no 52 de M. Meï : MM. Roger Meï, le rapporteur, le ministre de l'équipement. - Rejet.

MM. Roger Meï, le président, le ministre de l'équipement.

Adoption de l'article 4.

Article 5 (p. 9860)

Amendement no 3 du Gouvernement : MM. le ministre de l'équipement, le rapporteur. - Adoption.

Adoption de l'article 5 modifié.

VOTE

SUR L'ENSEMBLE (p. 9860)

Adoption de l'ensemble du projet de loi.

3. Dépôt d'une proposition de loi (p. 9860).

4. Dépôt d'un rapport (p. 9860).

5. Dépôt d'un projet de loi rejeté par le Sénat (p. 9860).

6. Ordre du jour des prochaines séances (p. 9860).


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COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. CLAUDE GAILLARD,

vice-président

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

1 DÉSIGNATION D'UN REPRÉSENTANT DE L'ASSEMBLÉE AU SEIN D'UN ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE

M. le président.

J'ai reçu de M. le Premier ministre une demande de désignation d'un membre de l'Assemblée nationale au sein de l'Observatoire national de la sécurité des établissements scolaires et d'enseignement supérieur.

Conformément à l'alinéa 2 de l'article 26 du règlement, j'ai confié à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales le soin de présenter un candidat.

La candidature devra être remise à présidence avant le mercredi 13 décembre 2000, à dix-huit heures.

2 TRANSPOSITION PAR ORDONNANCES DE DIRECTIVES COMMUNAUTAIRES Suite de la discussion d'un projet de loi d'habilitation adopté par le Sénat après déclaration d'urgence

M. le président.

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat après déclaration d'urgence, portant habilitation du Gouvernem ent à transposer, par ordonnances, des directives communautaires et à mettre en oeuvre certaines dispositions du droit communautaire (nos 2691, 2766).

Question préalable

M. le président.

J'ai reçu de M. Alain Bocquet et des membres du groupe communiste une question préalable, déposée en application de l'article 91, alinéa 4, du règlement.

La parole est à M. Gilbert Biessy.

M. Gilbert Biessy.

Monsieur le président, monsieur le ministre des relations avec le Parlement, mes chers collègues, le groupe communiste a opposé la question préalable au projet de transposition de certaines directives européennes par ordonnances pour exprimer un double désaccord, de forme et de fond.

Ce projet est une première dans notre droit. Avec 176 directives à transposer, dont 136 après expiration du délai de transposition, notre pays a sans aucun doute accumulé les retards.

Mais ce qui, d'emblée, apparaît grave, c'est que la procédure choisie s'apparente à un constat d'irresponsabilité.

En effet, plusieurs transpositions sont antérieures au Marché unique et concernent les gouvernements qui se sont succédé depuis vingt ans.

M. Robert Lamy.

Dont quinze de socialisme !

M. Gilbert Biessy.

Cela aurait été à la rigueur envisageable si, comme pour une loi d'amnistie, nous légiférions pour faire table rase du passé. Mais voter une habil itation aujourd'hui, ne serait-ce pas constituer un précédent, et permettre que les erreurs, les atermoiements, la récidive trouvent un point d'appui pour l'avenir ? Même s'il peut parfois s'avérer nécessaire d'assurer dans l'urgence la transposition d'une directive, nous ne sommes pas, ici, en présence d'une simple négligence, mais bien d'un enchaînement de problèmes politiques liés au contenu même des textes comme à leur environnement social, législature après législature. Sinon, on aurait déjà trouvé le temps d'organiser, dans de nombreux cas, un débat devant le Parlement, d'autant plus que le Gouvernement est le maître incontesté de l'ordre du jour. On a donc esquivé les débats de fonds. Comment accepter que cette esquive soit avalisée, sinon récompensée, sans qu'aucun débat ait lieu sur les différentes transpositions envisagées ? Peut-on donner simplement quitus d'une négligence institutionnalisée ? A l'époque de leur adoption, l'idée même d'un règlement qui ne serait pas applicable directement, mais après transposition, avait été acceptée pour ne pas heurter les Européens convaincus, mais inquiets devant l'avalanche de directives liées au Marché unique et à Maastricht.

M. Michel Bouvard.

Il y avait de quoi !

M. Gilbert Biessy.

Au fil des années, ces transpositions sont devenues encombrantes et aujourd'hui, plutôt que d'affronter le problème en face, on esquive une fois de plus le débat. N'est-ce pas simplement la preuve que l'Europe, la Commission, le conseil des ministres, pour être crédibles, devraient rompre avec cette boulimie normative...

M. Michel Bouvard.

Très bien !

M. Gilbert Biessy.

... et simplement faire moins mais mieux ?

M. Jean-Claude Lefort.

Très bien !

M. Gilbert Biessy.

On avance que plus de soixante procédures d'infraction pour défaut de transposition sont engagées contre la France. Mais il serait exagéré de s'en inquiéter et de les considérer comme une tare. Tous les pays européens sont plus ou moins dans le même cas.

M. Michel Bouvard.

C'est vrai !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

M. Gilbert Biessy.

La logique voudrait que soit négocié le principe général d'un nouveau délai pour la transposition des directives.

S'agissant du projet de loi, on a dit que cette procédure d'habilitation par ordonnances devait rester d'un usage exceptionnel. Mais n'est-ce pas une façon polie de dire qu'elle sera institutionnalisée, et que d'autres gouvernements, voire le même, la mettront en oeuvre dans l'avenir ? On prétend que le rayonnement de notre pays serait en cause. Cet argument ne relève-t-il pas de la plus banale rhétorique, dès lors que, s'il s'agit de montrer les mauvais élèves du doigt, toute la classe est concernée ? C'est bien la démocratie qui est en cause, ainsi que le pouvoir, aussi essentiel qu'élémentaire, du Parlement de voter la loi.

M. Michel Bouvard.

Très bien !

M. Gilbert Biessy.

Sur le plan juridique, la situation semble aujourd'hui plus grave que lors des précédents recours à l'article 38 de la Constitution. Dans le passé, l'emploi de cette procédure, qui a été l'occasion de plusieurs conflits politiques et sociaux majeurs, était utilisé soit, le plus souvent, pour éviter que le Parlement ne se fasse l'écho de plus en plus sonore de protestations populaires - je pense aux ordonnances de 1967 et de 1995 sur la sécurité sociale -, soit pour des exigences de rapidité, comme dans le cas des ordonnances de 1982 sur le programme social du Gouvernement. Dans les deux cas, on pouvait dire à la rigueur qu'il s'agissait de conflits francofrançais entre la gauche et la droite.

Or, il est aujourd'hui évident que tout recours aux ordonnances, qu'on le veuille ou non, discrédite le Parlement, alors que les abstentions massives lors des consultations récentes montrent qu'il est au contraire urgent de réconcilier les citoyens avec leurs représentants.

M. Michel Bouvard. Excellent !

M. Gilbert Biessy.

Le problème, dans le cas présent, est celui de la suprématie des organes législatifs nationaux et du rôle qui leur est concédé.

Ce qui interroge, c'est bien le décalage qui existe entre les discours lénifiants et unanimistes sur les droits du Parlement et la réalité, aussi prosaïque que cruelle pour la démocratie pluraliste et l'Etat de droit,...

M. Michel Bouvard.

Très bien !

M. Gilbert Biessy.

... que génère le libéralisme actuellement aux commandes en Europe.

Ce qui frappe, c'est que tous les Français et leurs élus au plan national ont été tenus à l'écart des questions qui sont en jeu.

M. Michel Bouvard.

Tout a fait !

M. Gilbert Biessy.

Sur le fond, ce qui est posé, c'est donc bien la question, majeure pour l'équilibre de la démocratie, de la séparation et du partage des pouvoirs.

Dans quel tiroir de typologie constitutionnelle faudrait-il placer un pays où le Gouvernement négocierait sans partage le droit communautaire, tout en étant le seul maître de la transposition des directives en droit interne ? A quoi sert le Parlement, pourtant censé exercer directement la souveraineté nationale ? Cette procédure d'habilitation apparaît d'autant plus inquiétante que Maastricht n'a généré qu'un droit formel pour l'Assemblée nationale et le Sénat de donner un avis sur les projets de directives.

M. Michel Bouvard.

C'est le fond du problème !

M. Gilbert Biessy.

Cet avis serait-il voté à l'unanimité par les commissions compétentes des deux assemblées ainsi qu'en séance publique, il n'aurait pas plus de valeur juridique, il ne serait pas plus porteur d'ardentes obligations qu'un article de presse. Le déficit démocratique est d'autant plus évident que l'exécutif, toujours intransigeant sur son monopole de direction de l'ordre, demande ici au législatif de corriger ses propres erreurs de gestion du calendrier parlementaire.

Nos réticences à l'égard de la procédure actuelle seraient beaucoup moins importantes si, dans les négociations européennes, le Gouvernement prenait en compte, comme c'est la pratique ordinaire, par exemple, au Danemark et en Finlande, les orientations définies par le Parlement.

M. Roger Meï.

Exactement !

M. Gilbert Biessy.

Avant même sa transposition dans le droit national, la directive, fruit de débats dans lesquels, même indirectement, les élus nationaux auraient participé, serait ainsi déjà porteuse de compromis.

L'absence de participation du Parlement, sa mise à l'écart du processus d'élaboration des textes européens, se font cruellement sentir, et ôtent tout crédit à la procédure. C'est pourquoi il est difficile d'être rassuré par l'annonce d'un projet de loi de ratification des ordonnances. Il s'agit là d'une clause constitutionnelle dont personne n'ignore la valeur seulement formelle, puisque son dépôt n'implique aucune discussion, et que même si celle-ci avait lieu, elle ne permettrait ni un débat approfondi, ni le dépôt d'amendements sur les articles de chacune des lois de transposition.

On ne peut donc que constater un recul préoccupant pour la démocratie parlementaire.

(M. Michel Bouvard applaudit.)

La tendance à une supranationalité sans frein a pour obstacle principal la loi nationale et sa procédure d'élaboration et de vote. En France, la récente réduction à cinq ans du mandat présidentiel n'est pas neutre. Elle marque la présidentialisation du régime, surtout si elle s'accompagne d'une réforme destinée à faire précéder l'élection des députés par celle du Président de la République, alors qu'il n'y a aucune raison que l'une procède de l'autre.

M. Michel Bouvard et M. Robert Lamy.

Exactement !

M. Gilbert Biessy.

Le déséquilibre des institutions nationales « plombe » de longue date toutes les avancées démocratiques dans notre pays. C'est pourquoi les députés communistes militent pour une Assemblée nationale élue, en tout ou partie, à la proportionnelle, fixant les grandes orientations de la politique nationale et désignant un gouvernement responsable devant elle pour les mettre en oeuvre.

Au lieu de cela, on assiste à une personnalisation outrancière du débat public, voire à l'abêtissement mécanique de l'opinion, à qui on ne propose, que l'on soit ou en non en période de cohabitation, que l'opposition entre les deux individus qui se retrouveront au second tour.

Dans une démocratie, la meilleure chance d'aborder au fond tous les problèmes de société, d'élever le niveau de responsabilité - ce qui implique le pluralisme des choix -e t de faire en sorte que l'expression « démocratie citoyenne » ne relève pas seulement de l'incantatoire, c'est bien que les représentants du peuple, élus au suffrage universel pour exercer la souveraineté nationale, discutent et votent la loi.


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Le champ de la loi mériterait sans doute d'être étendu.

Au lieu de cela, avec ce projet d'habilitation, ce qui était déjà une chambre d'enregistrement le deviendrait doublement, d'une manière presque caricaturale, en assurant une sorte de « service rapide » de la procédure législative, dans lequel une seule habilitation autoriserait à modifier plusieurs dizaines de lois.

Il existe des cas où l'on peut comprendre le recours à une telle procédure. Elle a pu par exemple servir à résoudre des problèmes géographiques précis, comme ceux qui touchent aux possessions françaises du Pacifique, tout en permettant aux représentants élus de ces territoires d'être partie prenante dans les nouvelles lois.

Mais ce recours devient un piège quand il s'agit, comme aujourd'hui, d'un inventaire de dizaines de sujets hétéroclites, complexes, dont l'énumération est souvent surprenante, mais qui ne sont pas pour autant anodins.

L'habilitation concerne la santé au travail, la sécurité sociale, les assurances et le code de la mutualité,...

M. Michel Bouvard.

Elle annonce aux Français ce qui se prépare dans leur dos !

M. Gilbert Biessy.

... la consommation, l'environnement, la voirie et le régime d'exploitation des autoroutes, certaines contributions indirectes, les postes et télécommunications : ces sujets concernent donc une petite moitié des ministères qui compose le Gouvernement.

Il n'est pas question ici de polémiquer ou de chercher des sourires faciles en passant de la profession d'agent artistique aux substances qui appauvrissent la couche d'ozone. Mais une lecture rapide de quelques thèmes abordés par le projet de loi ne peut qu'éveiller l'intérêt et, je crois, l'inquiétude de tout parlementaire.

M. Michel Bouvard.

Très bien !

M. Gilbert Biessy.

Un règlement sur l'application ou non de la CSG aux travailleurs frontaliers. Combien d'entre nous ont été saisis de ce problème et ont interpellé le Gouvernement à ce sujet, par exemple sous forme de question écrite ?

M. Michel Bouvard.

Tout à fait !

M. Maxime Gremetz.

Très juste !

M. Gilbert Biessy.

Une directive sur la protection de la vie privée dans le domaine des télécommunications. Qui peut dire spontanément que c'est anecdotique ? Une directive sur la mise en oeuvre du principe d'égalité entre hommes et femmes dans les régimes de sécurité sociale. N'y a-t-il aucun risque de niveler - par le bas, comme toujours - le système français de protection sociale ? La directive sur la santé des travailleuses enceintes. Elle concerne le travail de nuit des femmes enceintes. N'est-il pas inquiétant de lire qu'il leur faudra démontrer une atteinte particulière à leur sécurité ou à leur santé pour justifier l'arrêt du travail de nuit ?

M. Michel Bouvard.

Ce sont les Anglais qui mènent la danse !

M. Gilbert Biessy.

La directive sur les jeunes au travail, où l'interdiction du travail de nuit pour les moins de seize ans s'accompagne de dérogations complexes et ambiguës. Est-ce tolérable, alors que l'interdiction du travail de nuit des jeunes, des enfants, devrait être impérative ? La directive sur l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs. Un tel sujet ne mérite-t-il pas un débat de fond, alors même que le MEDEF fait des propositions pour réduire l'efficacité de la médecine du travail ? Quant à la refonte du code de la mutualité, quand bien même les fédérations concernées se sont accordées sur cette réforme,...

M. Michel Bouvard.

M. Bébéar sera content !

M. Gilbert Biessy.

... elle mérite un débat, tant pour réfléchir sur le statut fiscal des mutuelles que pour éviter que certaines sociétés d'assurances ne revêtent leurs contrats classiques d'une « vocation solidaire » pour bénéficier d'un régime plus favorable.

Un autre ensemble concerne l'environnement, avec Natura 2000,...

M. Michel Bouvard.

C'est scandaleux !

M. Gilbert Biessy.

... et la chasse, pour laquelle l'application des dérogations est plus qu'hypothétique.

M. Michel Bouvard.

Tout à fait !

M. Gilbert Biessy.

Un autre ensemble encore concerne les marchés de travaux publics, la concurrence dans les télécommunications et les services postaux.

Tous ces sujets importants méritent bien évidemment débat.

En fin de compte, le plus irritant, c'est l'impression d'un débat euthanasié et abandonné aux lois du fatalisme,...

M. Maxime Gremetz.

Absolument !

M. Gilbert Biessy.

... une impunité tranquille qui renforce la toute puissance de l'exécutif en écrasant un peu plus l'initiative parlementaire.

M. Maxime Gremetz.

Tout à fait !

M. Gilbert Biessy.

Les députés ne doivent pas être complices d'une démarche qui pourrait être évitée sans psychodrame.

Ne faisons pas de grandes phrases. N'évoquons pas le risque de voir, sans cette loi, se ternir le lustre de la présidence française alors qu'il va se diluer naturellement dans quelques semaines avec l'installation d'une autre présidence. N'invoquons pas la nécessité d'opérer un choix entre le respect des prérogatives du Parlement et le risque de laisser s'accentuer notre retard en refusant des transpositions automatiques. Ce choix n'est pas en cause.

Entre plusieurs dilemmes, il faut choisir le moindre, mais le choix de l'habilitation ne serait pas le plus judicieux. Si l'intérêt supérieur de notre pays et de l'Europe exige une attitude responsable, ce n'est sûrement pas celle du tout ou rien.

Je suis convaincu que ce texte pose des cas de conscience sur tous les bancs de cette assemblée.

M. Michel Bouvard.

Tout à fait !

M. Gilbert Biessy.

Même parmi ceux que leur groupe a invités à permettre l'adoption du projet de loi, beaucoup ne sont pas convaincus de sa pertinence.

On peut être européen et ne pas apprécier d'être manipulé, instrumentalisé (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République)...

M. Michel Bouvard.

Tout à fait !

M. Jacques Floch, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

Quelle belle alliance, messieurs de l'opposition !

M. Gilbert Biessy.

... dans ce qui fait ici notre première raison de siéger ensemble, c'est-à-dire le fait d'être des élus du peuple pour faire la loi et contrôler l'action du Gouvernement.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

On ne saurait opposer droite et gauche dans ce débat puisque le gouvernement actuel est loin d'être le seul responsable. Il ne sert à rien non plus de polémiquer en invoquant un coup de force ou une infamie.

M. Jacques Floch, rapporteur.

Très bien !

M. Gilbert Biessy.

Il faut savoir raison garder et donc essayer de s'accorder sur le bon sens, c'est-à-dire la démocratie parlementaire.

Un refus de l'habilitation n'aurait rien de catastrophique. Il conduirait simplement le Gouvernement à revenir dans quelques jours devant le Parlement avec un projet de loi d'habilitation écartant toute référence aux directives qui soulèvent des difficultés particulières.

M. Maxime Gremetz.

Tout à fait !

M. Michel Bouvard.

Très bien !

M. Gilbert Biessy.

Le Gouvernement devrait aussi inscrire à l'ordre du jour de nos assemblées d'autres projets de loi portant transposition de directives communautaires, comme il l'a fait en matière de transport et d'agriculture, et permettre des discussions groupées, voire soumises à la procédure d'adoption simplifiée.

La fermeté raisonnable de l'Assemblée préviendrait le renouvellement du problème dans l'avenir.

Le vote de la question préalable inciterait aussi tous les gouvernements européens à s'entendre pour réadapter les délais de transposition et mieux prendre en compte l'opignon de leur Parlement.

C'est le sens que nous donnons à cette question préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert ainsi que sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants).

M. le président.

Dans les explications de vote sur la question préalable, la parole et à M. Gérard Fuchs, pour le groupe socialiste.

M. Gérard Fuchs.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'usage d'ordonnances ne saurait satisfaire quelque parlementaire de gauche que ce soit, d'autant que je le rappelle, ce n'est pas nous qui les avons créés, et que tous ceux qui, parmi nous, sont en âge de l'avoir fait ont combattu les institutions de la Ve République. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. Yves Bur.

Oh !

M. Michel Bouvard.

Mitterrand l'a trouvée très bien finalement !

M. Gérard Fuchs.

Notre excellent collègue Gilbert Biessy s'est demandé si cette loi d'habilitation n'allait pas créer un précédent dangereux. C'est une vraie question qui mérite examen. Mais il y a été répondu ce soir. Le ministre chargé des relations avec le Parlement, le rapporteur de la commission des lois et le président de la délégation pour l'Union européenne ont tous reconnu que les procédures parlementaires françaises actuelles permettant la transposition des directives n'étaient pas adaptées et que, si nous voulions éviter la répétition de telles situations, il nous faudrait d'une manière ou d'une autre - une gamme de propositions nous a été exposée, mais, comme je ne dispose que d'un temps de parole de cinq minutes, je ne les reprendrai pas - nous doter d'une méthode et d'une structure qui nous permettent de suivre au jour le jour l'élaboration des directives à Bruxelles et surtout leur évolution et leur devenir.

Par ailleurs, je rappelle à mes collègues du groupe communiste que la procédure d'amendement est possible sur une projet de loi d'habilitation et que cette procédure nous permet d'encadrer la liberté donnée au Gouvernement.

M. Michel Bouvard.

C'est le Gouvernement qui

« encadre » notre liberté !

M. Gérard Fuchs.

J'en ai usé moi-même en tant que rapporteur il y a quelques mois à propos d'un texte relatif à l'euro, et le Gouvernement a bien voulu accepter les règles ou les contraintes fixées à sa liberté. Nous aurons donc cette nuit, sur les sujets les plus sensibles, qu'il s'agisse de La Poste, de Natura 2000 ou de certaines directives sociales, tout le loisir de réaffirmer qu'en aucun cas la loi d'habilitation ne doit violer tel ou tel principe.

M. François Goulard.

Comment peut-on dire ça ?

M. Gérard Fuchs.

Il me semble que la possibilité d'un tel encadrement par amendement est de nature à lever les interrogations et les inquiétudes de nos collègues du groupe communiste et de certains autres groupe de la majorité.

Je rappelle, en outre, à l'intention plus particulièrement du Mouvement des citoyens, que les directives dont il est question ont tout de même fait l'objet d'un contrôle parlementaire.

M. Michel Bouvard.

Sur Natura 2000, jamais !

M. Gérard Fuchs.

Certes, elles n'ont pas été soumises et je le déplore - au contrôle de notre Parlement national mais elles l'ont été à celui du Parlement européen, qui est lui aussi, je tiens à le rappeler, une représentation des citoyens.

M. Michel Bouvard.

Nous sommes sauvés alors !

M. Gérard Fuchs.

Monsieur Bouvard, vous hochez la tête, mais j'imagine - en tout cas, je le souhaite - que vous êtes allé voter lors des élections européennes.

M. Michel Bouvard.

Je fais partie de ceux qui y vont encore !

M. Gérard Fuchs.

Il y a donc quand même eu une certaine forme de contrôle parlementaire.

M. Michel Bouvard.

Il faut dissoudre les parlements nationaux si le Parlement européen fait tout ! L'argument est tout à fait extravagant.

M. Gérard Fuchs.

Je dirai quelques mots sur les directives sociales, qui ont fait naître des inquiétudes, au demeurant tout à fait compréhensibles.

Il est vrai qu'elles peuvent laisser craindre certains reculs. Mais n'oublions pas que, dans l'article 137 du traité d'Amsterdam et les clauses de non-régression contenues dans chacune des directives, il est bien spécifié que chaque Etat membre de la Communauté dont la législation est plus avancée que celle contenue dans la directive a le droit de la conserver.

M. Maxime Gremetz.

Absolument !

M. Gérard Fuchs.

Je prendrai l'exemple du problème du licenciement des femmes enceintes, au sujet duquel j'ai moi-même reçu quelques courriers. La directive européenne, non seulement garantit la même protection aux femmes en congé de maternité mais encore accorde, ce que ne fait pas aujourd'hui la législation française, une p rotection contre le licenciement pour les femmes enceintes. Donc, non seulement les directives sociales que


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

nous transcrivons ne nous font pas, du fait de leurs clauses de non-régression, courir de risques, mais, en plus, elles introduisent dans notre législation un certain nombre de mesures nouvelles positives.

M. François Goulard.

Tout est bien alors !

M. Michel Bouvard.

Tout va bien dans le meilleur des mondes !

M. Jacques Floch, rapporteur.

Presque !

M. Gérard Fuchs.

Deux remarques pour terminer.

Nous répondons à une urgence et j'en appelle donc à notre assemblée, à toute notre assemblée, car la France sera représentée à Nice, non seulement par le Premier ministre mais aussi, vous le savez bien, par le Président de la République.

M. François Goulard.

Heureusement !

M. Yves Bur.

Ne vous en servez pas trop !

M. Christian Estrosi.

On ne vous a jamais entendu autant vanter les mérites du Président de la République ! C'est extraordinaire !

M. Gérard Fuchs.

Je souhaite que notre pays, qui occupe la présidence de l'Union européenne et qui jouera un rôle décisif dans le succès ou l'échec du conseil européen de Nice, puisse s'y présenter dans des conditions qui lui donnent un droit de parole exempt de toutes critiques, dans des conditions qui lui permettent de jouer son rôle à l'abri de tout reproche.

M. Jean-Claude Lefort.

C'est déjà joué !

M. Michel Bouvard.

Il y a des soumissions qui sont plus graves que les échecs !

M. Gérard Fuchs.

C'est, je crois, mes chers collègues, l'un des défis qui nous est lancé ce soir : créer les conditions d'être écoutés de la meilleure manière à ce sommet.

M. Yves Bur.

Vous ne manquez pas de culot, monsieur Fuchs !

M. Gérard Fuchs.

Ma seconde et dernière remarque est à l'intention du Gouvernement. Monsieur le ministre, je veux croire, et tous les membres de la majorité plurielle avec moi, que la méthode qui nous est proposée aujourd'hui est et restera une exception et que de nouvelles procédures d'examen des directives nous seront rapidement proposées de façon que nous ne soyons plus jamais placés dans une telle situation.

M. Yves Bur.

Ne soyez pas naïf. Il y en aura encore beaucoup !

M. Michel Bouvard.

Vour rêvez !

M. François Goulard.

C'est la repentance avant l'acte !

« Nous ne le ferons plus ! C'est juré ! »...

M. Gérard Fuchs.

Cela étant dit, j'invite l'Assemblée nationale à rejeter la question préalable et donc à accepter cette exception. Nous nous engageons à faire en sorte qu'elle le reste. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Christian Estrosi, pour le groupe RPR.

M. Christian Estrosi.

Monsieur le ministre, vous prétextez, pour justifier cette procédure d'habilitation, le retard pris dans la transposition de certaines directives communautaires et votre souci de ne pas encombrer l'agenda du Parlement. Cette attitude, personnellement, me heurte profondément et elle doit - ou devrait - heurter l'ensemble des parlementaires sur tous les bancs de notre assemblée. Finalement, ce qui m'étonne le plus, c'est que votre majorité semble méconnaître la procédure parlementaire.

M. Jacques Floch, rapporteur.

Oh !

M. Jean-Claude Lefort.

Comment ça ?

M. Christian Estrosi.

Mais oui ! Vous semblez ignorer les dispositions prévues aux articles 103 à 107 de notre règlement relatives à la procédure d'adoption simplifiée.

M. Bruno Le Roux.

Pourquoi n'avez-vous pas déposé de projets de loi de transposition quand vous étiez au gouvernement ?

M. Christian Estrosi.

Cette procédure a pour unique but d'alléger les travaux de notre assemblée en abrégeant certaines phases de la discussion, valorisant ainsi les travaux des commissions. Elle a l'avantage de ne pas tronquer le débat démocratique en permettant un examen au fond du texte sur lequel nous devons nous prononcer alors que l'ordonnance érigée en système de gouvernement, utilisée cinq fois déjà depuis votre entrée en fonction, transforme notre assemblée en chambre d'enregistrement, puisque nous n'avons pas la possibilité de nous prononcer en toute connaissance de cause.

Par ailleurs, alors que le Président de la République, dont nous découvrons avec satisfaction depuis cet aprèsm idi un certain nombre d'inconditionnels sur ces bancs,...

M. Bruno Le Roux.

On l'aime bien, nous, le Président de la République ! Ce n'est pas comme vous. (Sourires.)

M. Christian Estrosi.

... s'apprête à ouvrir le sommet de Nice et que certains dans votre majorité préconisent un renfort du rôle du Parlement, il me semble regrettable de demander aux parlementaires de vous donner un blanc-seing sur des sujets aussi importants. Il eût été opportun de valoriser le rôle de notre assemblée. Cette conviction est partagée dans vos rangs, puisque le MDC et le PC défendent des motions de procédure.

Si nous ne partageons pas l'essentiel des options du parti communiste - ce qui ne surprendra personne dans cette assemblée,...

M. Jacques Floch, rapporteur.

Ah bon ?

M. Gérard Fuchs.

Sur l'Europe, par exemple ?

M. Christian Estrosi.

... il n'en demeure pas moins, que sur ce terrain, nous considérons comme lui qu'il nous appartient - et qu'il vous appartient aussi, mesdames, messieurs les socialistes - de défendre avant tout les droits du Parlement, parce que nous sommes les représentants du peuple français dans cet hémicycle et parce que c'est non pas nous qui encadrons la liberté du Parlement, mais le Gouvernement.

M. Marc Dolez.

Et la Constitution alors ?

M. Christian Estrosi.

Pour toutes ces raisons, le groupe RPR votera la question préalable. Nous estimons qu'il n'y a pas lieu de légiférer dans ces conditions ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Maxime Gremetz, pour le groupe communiste.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

M. Maxime Gremetz.

Un député socialiste a dit ce soir dans une dépêche que le projet de loi posait un problème sérieux, Gilbert Biessy a indiqué tout à l'heure que ce problème dépassait les clivages.

M. Michel Bouvard.

C'est vrai !

M. Richard Cazenave.

Absolument !

M. Maxime Gremetz.

J'ajouterai qu'il remet en cause les principes républicains et les droits du Parlement.

M. Michel Bouvard.

Tout à fait !

M. Maxime Gremetz.

Aucun parlementaire, quel que soit le banc sur lequel il siège, ne peut accepter de se démettre du peu de droits qu'il a ici.

Pendant l'examen du budget, on passe des centaines d'heures pour finalement ne faire bouger que quelque 10 milliards sur 1 700 milliards !

M. Michel Bouvard.

C'est vrai !

M. Maxime Gremetz.

Nous avons déjà si peu de droits que vouloir les réduire encore pose quand même un problème !

M. Jean-Claude Mignon.

Absolument !

M. Maxime Gremetz.

Vous nous dites que c'est tout à fait exceptionnel et qu'on ne le fera qu'une fois.

M. Michel Bouvard.

On l'a déjà fait !

M. Maxime Gremetz.

Je veux bien faire confiance, mais c'est un pari sur l'avenir. Or - croyez-en mon expérience - la vie politique est ainsi faite que les majorités, et les gouvernements, changent.

M. Jacques Myard.

Ça va venir !

M. François Goulard.

Vous êtes un véritable prophète, monsieur Gremetz !

M. Maxime Gremetz.

Et personne ne peut dire, pas même le ministre d'aujourd'hui qu'on ne le fera plus ! C'est un précédent inscrit dans l'histoire du Parlement.

M. Jean-Claude Mignon.

Un précédent fâcheux !

M. Maxime Gremetz.

Et un précédent grave ! D'ailleurs, dans l'exposé des motifs, il est indiqué que ce n'est pas la première fois que ça se fait. Donc, on n'invente rien !

M. Michel Bouvard.

Tout à fait !

M. Maxime Gremetz.

Les membres de la majorité de demain pourront très bien dire : « Cela a été fait en 1958, avec les ordonnances sur la sécurité sociale et aussi en l'an 2000 ! Vous voyez ! (C'est courant dans la vie parlementaire ?

M. Yves Bur.

Prenons le pari !

M. Maxime Gremetz.

C'est grave ! Deuxièmement, ce ne sont pas des questions mineures qui sont abordées dans ces directives, Gilbert Biessy en a rappelé le contenu. Certaines portent sur des problèmes de société. D'autres sur des problèmes du droit du travail.

D'autres encore concernent l'environnement.

Il faut quand même se rendre compte que l'on nous demande aujourd'hui de ne pas soumettre à la loi des questions aussi importantes que les mesures à prendre pour la sécurité alimentaire ! Avouez qu'on est en pleine actualité.

M. Robert Lamy.

C'est effectivement scandaleux !

M. Maxime Gremetz.

On ne discutera pas des farines animales, de la crise de la vache folle, etc.

M. Michel Bouvard.

Voilà !

M. Maxime Gremetz.

On propose que soient réglées par ordonnance les questions de la sécurité alimentaire !

M. Michel Bouvard.

C'est inadmissible !

M. René André.

Inacceptable.

M. Maxime Gremetz.

C'est inimaginable ! Enfin, parmi les textes qu'on nous propose de transposer par ordonnance, il y a la directive Oiseaux 79/409.

Nous avons voté une loi chasse - et nous avons fait des efforts pour la faire passer - pensant qu'elle nous permettrait de négocier avec la Commission européenne et même de bénéficier de dérogations. Et, aujourd'hui, qu'est ce qui ce passe ? le Gouvernement français - ou plutôt le ministre de l'environnement français - n'a pas discuté avec la Commission européenne ni pour faire lever la sanction qui pèse sur la France...

M. Michel Bouvard.

C'est vrai !

M. Jean-Claude Mignon.

Il a raison !

M. Maxime Gremetz.

... - il y a toujours une plainte de déposée contre elle - ni pour négocier des dérogations concernant les dates de chasse.

M. Richard Cazenave.

C'est vrai !

M. Michel Bouvard.

Le ministère de l'environnement se moque de nous !

M. Maxime Gremetz.

Vous pouvez être sûrs de voir, le 1er janvier, quand ça va tomber, les chasseurs dans la rue ! Ce sont tous ces éléments qui nous conduisent à dire ce n'est pas une petite affaire ! Cela touche au contraire à la démocratie et aux droits du Parlement.

M. Michel Bouvard.

Très bien !

M. Maxime Gremetz.

Cela concerne des questions de fond qui mériteraient un débat entre nous.

C'est pourquoi je demande à nos collègues, quelles que soient leurs opinions, de bien réfléchir et d'adopter la question préalable excellemment présentée par Gilbert Biessey. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, ainsi que sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. François Goulard, pour le groupe DL.

M. François Goulard.

De la même façon que nous sommes associés, avec des motivations sans doute différentes des siennes, à la motion défendue par Georges Sarre nous soutiendrons la motion de procédure présentée par le groupe communiste,...

M. Jacques Myard.

Ils sont pris en étau !

M. François Goulard.

... même si, là encore, nous ne partageons sans doute pas les mêmes conceptions.

M. Jean-Claude Lefort.

C'est certain !

M. François Goulard.

Reste que tous ceux qui s'opposent au coup de force que tente ce soir le Gouvernement ont quelque chose en commun : pas un de nous ne croit un seul instant aux motifs que celui-ci avance, relayé par certains membres de sa majorité.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

« Un texte technique » nous dit-on. Maxime Gremetz en a parlé à l'instant. Au regard de l'article 34 de notre constitution, les directives relèvent tantôt du domaine législatif, tantôt du domaine réglementaire. Or la partie qui est en cause est, de l'avis même du Conseil d'Etat, législative. Peut-on dès lors arguer que des dispositions qui relèvent de la loi seraient d'ordre purement technique ? A l'évidence non. Leur importance requiert qu'elles soient débattues à l'Assemblée nationale et au Sénat.

M. Michel Bouvard.

Tout à fait !

M. François Goulard.

Autant dire que cet argument ne tient pas.

Vous alléguez ensuite un retard historique de la France qui nous placerait en position de mauvais élève de l'Europe pour l'adoption des directives.

M. Richard Cazenave.

C'est faux !

M. François Goulard.

Il est pour le moins extraordinaire que ce soit vous qui nous avanciez cet argument aujourd'hui, alors que vous êtes au pouvoir depuis trois ans et demi ! Que n'avez-vous fait ce constat au moment de votre arrivée, et proposé au Parlement d'adopter par parties successives les directives dont la transposition était en retard ? Le dernier argument nous a été exposé, fort brillamment, par M. Fuchs à l'instant : « C'est évidemment péché de procéder ainsi, mais nous ne le ferons plus, c'est une fois pour toutes. » La repentance avant l'acte, en

quelque sorte... C'est une novation intéressante ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance.) Au total, toute cette présentation ne peut convaincre que ceux qui veulent l'être à toutes fins alors que la réalité est beaucoup plus simple : ce gouvernement est très gêné vis-à-vis de sa majorité dès lors qu'il s'agit de trans poser dans notre droit de nombreuses directives européennes.

M. Richard Cazenave.

La voilà, la vérité !

M. François Goulard.

Pourquoi ? Parce qu'au fond de vous-mêmes, vous ne souscrivez pas à la philosophie qui sous-tend les directives en question.

M. Michel Bouvard.

Nous non plus !

M. François Goulard.

Ainsi, vous ne voulez pas procéder à la transposition par voie législative des directives sur la poste ou sur les télécommunications, tout simplement parce que votre majorité n'est pas d'accord avec les évolutions auxquelles celles-ci nous conduisent.

M. Michel Bouvard.

Nous non plus !

M. François Goulard.

Ayez au moins le courage de l'avouer ! Force est de constater que, depuis quelques semaines, nous abordons une nouvelle phase du gouvernement Jospin.

Nous avons connu le Premier ministre impeccable, au sens étymologique du terme : celui qui ne pèche pas, le Premier ministre à la figure immarcescible devant laquelle nous étions priés de nous incliner. Et voilà que ce Premier ministre se permet maintenant d'inverser le calend rier électoral pour des convenances personnelles...

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. René André.

Scandaleux !

M. Marcel Rogemont.

Ce n'est pas lui, c'est Bayrou !

M. François Goulard.

... et que son gouvernement s'apprête ce soir à faire adopter à la va-vite cinquante directives par voie d'ordonnances ! C'est ce changement dans la méthode gouvernementale que nous voulons dénoncer ce soir. Le Jospin nouveau est annoncé : c'est un Jospin préélectoral. Ce Jospin-là, je ne suis pas sûr qu'il convaincra les Français ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

Mme Yvette Benayoun-Nakache.

Jaloux !

M. le président.

La parole est à M. Yves Bur, pour le groupe UDF.

M. Yves Bur.

Nous avons déjà eu l'occasion de le dire lors de la première motion : la majorité, nous le sentons bien, est mal à l'aise.

M. Jean-Marc Ayrault.

Ah !

M. Yves Bur.

Mal à l'aise pour aborder ce grand débat parlementaire, pour faire passer et adopter toutes ces directives européennes qui ne sont pas mineures que l'on essaie de nous le faire croire depuis le début.

Cette transposition touche en effet à des thèmes aussi importants que la mutualité qui, au-delà des parlementaires intéresse l'ensemble des Français. Elle concerne également le service postal, confronté à une mutation lourde de conséquences ; autant de sujets incontournables qu'une bonne part de la majorité a les plus grandes difficultés à aborder pour bien préparer l'avenir.

Aucune des justifications que le Gouvernement a tenté de nous donner tient la route ; la preuve en est que si une cinquantaine de ces directives pourront être ainsi transposées, brutalement et sans débat, il en reste encore quatre-vingts en attente ! Ce n'est pas, je le répète, rendre service à la cause européenne que de vouloir traiter en catimini des sujets aussi importants. Il est essentiel, M. Barrau l'a reconnu lui-même, de revoir nos méthodes de travail pour faire en sorte que les sujets traités au niveau européen soient l'occasion d'un véritable débat au sein de notre assemblée. Il eût été de loin préférable de chercher à y associer notre Parlement plutôt que de tenter de le court-circuiter.

M. Alain Cacheux.

C'est laborieux !

M. Yves Bur.

Depuis le début, le Gouvernement montre qu'il est sur la défensive, faute de pouvoir compter sur sa propre majorité. Une fois n'est pas coutume, mes collègues de l'opposition s'associeront à cette motion de procédure ; si nous n'en partageons pas tous les aspects, nous sommes d'accord sur le fond, à savoir que le Parlement doit être respecté dans ses droits, notamment pour tout ce qui touche au domaine européen, déterminant pour l'avenir de notre pays et l'avenir de l'Europe. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République, et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Sur la question préalable, je suis saisi par le groupe communiste d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

....................................................................


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

M. le président.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

Je vais maintenant mettre aux voix la question préalable de M. Alain Bocquet.

Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même, et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été cou plés à cet effet.

Le scrutin est ouvert.

....................................................................

M. le président.

Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin : Nombre de votants ...................................

191 Nombre de suffrages exprimés .................

191 Majorité absolue .......................................

96 Pour l'adoption .........................

72 Contre .......................................

119 (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

Discussion générale

M. le président.

Dans la discussion générale, la parole est à M. Didier Quentin.

M. Didier Quentin.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi que nous examinons ce soir peut ne paraître qu'une énumération fastidieuse de directives, alors qu'il s'agit en fait d'une procédure exceptionnelle et inédite à plus d'un titre. Ce qui est en cause, c'est la conception que nous avons de la construction européenne, c'est l'idée même que nous nous faisons du rôle du Parlement, de notre rôle, dans cette construction.

L'ampleur de cette habilitation a de quoi étonner à quarante-huit heures du sommet européen de Nice qui ponctuera la présidence française de l'Union européenne.

En effet, nous sommes tenus de nous prononcer sur une soixantaine de directives - excusez du peu ! -, de règlements, de décisions ou autres mesures communautaires.

Les trois précédents des années soixante sont sans commune mesure avec le texte actuel. A elles trois, les l ois de décembre 1964, de juillet 1966 et de décembre 1969, permettant la transposition par ordonnances de directives du Marché commun, n'avaient débouché que sur sept ordonnances, et de portée limitée.

Pour justifier sa demande de recours à des ordonnances, le Gouvernement invoque la charge de travail pesant sur le Parlement, qui rendrait difficile, voire impossible, l'adoption des directives par des procédures législatives normales, avec un véritable débat.

M. Michel Bouvard.

Si l'on avait passé moins de temps sur le PACS !

M. Didier Quentin.

L'ordre du jour prioritaire du Parlement, rappelons-le, aux termes de l'article 48 de la Constitution, est déterminé par le Gouvernement. Vous êtes-vous demandé si tous les textes que vous avez inscrits à l'ordre du jour prioritaire des assemblées le méritaient bien ?

M. Michel Bouvard.

La modification du calendrier électoral, par exemple !

M. Didier Quentin.

Le Parlement n'est donc pour rien dans ces retards. Il est prêt à débattre de la transposition des directives, comme nous l'avons fait pour l'électricité.

Rappelons aussi que le Sénat a adopté, en 1998, une proposition de loi tendant à transposer la directive Natura 2000, initiative que Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement avait alors qualifiée de prématurée !

M. Michel Bouvard.

C'est vrai !

M. René André.

C'est scandaleux !

M. Didier Quentin.

Or, deux ans plus tard, vous venez nous demander de vous autoriser à transposer ce texte par voie d'ordonnance. Où est la cohérence ?

M. Michel Bouvard.

Mme Voynet se moque du monde !

M. René André.

Elle est contre les chasseurs, contre la ruralité !

M. Didier Quentin.

A plusieurs reprises, l'opposition a mis l'accent sur la lenteur avec laquelle votre gouvernement transposait des directives importantes. C'est notamment le cas du projet de loi relatif au gaz pour lequel aucune date de discussion n'est arrêtée, alors que la France est déjà mise en demeure pour avoir laissé passer la date limite du 10 août 2000. Pire, 176 directives communautaires sont actuellement en attente de transposition dans notre pays.

M. Jacques Myard.

Il y en a trop !

M. Michel Bouvard.

Ça, c'est vrai !

M. Didier Quentin.

Dans ces conditions, le recours aux ordonnances est particulièrement choquant, voire suspect, puisque certaines directives à transposer ont plus de vingt ans !

M. Jacques Myard.

Elles sont obsolètes !

M. René André.

C'est se moquer du monde !

M. Didier Quentin.

Sur cette période, je le rappelle, la gauche a occupé le pouvoir les deux tiers du temps. C'est donc bien vous qui avez la plus grande part de responsabilité dans cette sédimentation, pour reprendre l'expression de M. le Premier ministre cet après-midi. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. Michel Bouvard.

Allons ! C'est notre faute !

M. Didier Quentin.

Alors qu'il y a peu, le président Forni souhaitait que notre Parlement retrouve toute sa place,...

M. Michel Bouvard.

On est mal partis !

M. Didier Quentin.

... qu'il soit au coeur de nos institutions et non une simple chambre d'enregistrement, vous venez, avec cette transposition massive par ordonnances, de lui porter un mauvais coup, tout comme à l'expression de la souveraineté populaire.

M. Michel Bouvard.

Et nationale !

M. Didier Quentin.

Vous portez également un mauvais coup à l'idée européenne. Les directives européennes sont les lois de l'Union européenne, des lois à la préparation et à l'approbation desquelles nous devons apporter un soin tout particulier, dans la mesure où elles intéressent plus de 350 millions de personnes dans quinze pays.

Il est donc clair qu'aucune institution bruxelloise ne peut légiférer pour nous ni a fortiori contre nous. Il appartient aux Européens de se donner leurs lois, et la loi de l'Europe ne peut être une loi au rabais. Or que se passe-t-il ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

M. René André.

On se le demande !

M. Didier Quentin.

Des directives adoptées à Bruxelles par le Conseil des ministres, c'est-à-dire par les gouvernements, sont transcrites à Paris, dans la législation française, par ordonnances, à nouveau par le Gouvernement, et par le Gouvernement seul ! Soyons bien conscients qu'en procédant de la sorte, vous ne rapprochez pas les Européens d'une Europe à leurs yeux trop souvent lointaine et technocratique.

M. Michel Bouvard.

A juste titre !

M. Didier Quentin.

Vous ne mettez pas les Français en situation de s'approprier la loi européenne. Vous donnez ainsi le sentiment à nos concitoyens qu'il s'agit de diktats tombant d'en haut. Vous ne construisez pas l'Europe des citoyens que vous semblez appeler de vos voeux dans vos discours.

M. Jacques Myard.

C'est foutu !

M. Didier Quentin.

Vous rendez donc un bien mauvais service à l'idée européenne.

Et ne venez pas nous dire que c'est la faute des institutions européennes. Notre retard ne leur est nullement imputable. Si, dans ce domaine, la France est lanterne rouge du peloton européen, c'est bien que les autres Etats membres ont su et ont pu faire preuve de plus de diligence. Pourquoi y parviendraient-ils et pas nous ? Il conviendrait donc, monsieur le ministre, dans l'esprit de repentance dont parlait tout à l'heure François Goulard, que vous nous confirmiez que votre motivation européenne se traduira bien à l'avenir, dans notre ordre du jour, par la priorité donnée à la transposition des directives européennes. Il serait en effet désastreux que les Français s'habituent à voir dans l'Union une sorte de monstre froid et lointain qui nous condamnerait à mal légiférer à Paris pour éviter d'être punis à Bruxelles.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Sortons de cette impasse. La construction européenne est un grand dessein historique et vous lui portez un mauvais coup chaque fois que vous escamotez un vrai débat européen. Au moins autant que la loi des Etats, la loi de l'Europe doit être adoptée par les parlements nationaux.

J'en viens maintenant au fond de ces textes, qui remettent en question des pans entiers de notre organisation collective.

En effet, ce projet de loi ne mêle pas moins d'une soixantaine de textes communautaires qui concernent les domaines les plus variés - les télécommunications, l'environnement, la protection des consommateurs, les transports, la propriété intellectuelle et bien d'autres.

Pour ma part, je m'attacherai à parler des directives s'appliquant aux services postaux et au réseau Natura 2000, laissant le soin à mes collègues Christian Estrosi, Jean-Claude Lemoine et Michel Bouvard d'aborder les autres points essentiels de ce projet de loi.

M. Michel Bouvard et M. Christian Estrosi.

On va en parler !

M. Didier Quentin.

Non content de porter un mauvais coup contre le Parlement et contre l'idée européenne, vous portez aussi un mauvais coup contre la ruralité.

M. René André.

Natura 2000 !

M. Didier Quentin.

Plusieurs d'entre nous avaient demandé qu'une loi d'orientation postale soit discutée pour transposer la directive mais aussi pour aborder les questions de fond qui conditionnent l'avenir de ce secteur, au moment où La Poste envisage la fermeture de bureaux dans de nombreuses communes rurales, pour lesquelles ce service public constitue souvent le dernier lien social.

M. Michel Bouvard.

Très bien !

M. René André.

Ils n'ont que mépris pour le monde rural !

M. Didier Quentin.

Alors que nous devons, dans l'urgence, transcrire cette directive, elle est déjà en cours der évision ! Ce secteur devient en effet extrêmement concurrentiel, avec notamment, dans quelques semaines, la cotation en bourse de la poste allemande,...

M. Jacques Floch, rapporteur.

Voilà où vous voulez en venir !

M. Didier Quentin.

... tandis que la France n'a toujours pas fait les grands choix stratégiques pour ce secteur et risque ainsi de fragiliser un service public de qualité.

M. Jacques Floch, rapporteur.

Vous voulez livrer La Poste à la Bourse !

M. Didier Quentin.

Votre gouvernement avait d'ailleurs annoncé la discussion d'un projet de loi à ce sujet par la voix de Christian Pierret, à l'Assemblée nationale, le 2 février 1999 : « J'ai proposé au Premier ministre que le Gouvernement dépose un projet de loi qui donnera aux activités postales un cadre juridique complet. Il permettra de débattre largement du service public. » Ce projet de

loi d'ensemble, nous l'attendons toujours.

La Poste est un service public cher au coeur des Français. Il ne peut être indéfiniment traité par des expédients, un amendement par-ci, une ordonnance par-là.

M. Jacques Floch, rapporteur.

Vous voulez appauvrir La Poste !

M. Didier Quentin.

A cet égard, comment interpréter l'exposé des motifs de vos ordonnances, qui affirme que

« l'habilitation n'est pas demandée pour les directives dont l'objet et la portée politique justifient un débat par la représentation nationale » ? Faut-il en conclure, monsieur le ministre, que l'avenir du service public postal ne justifie pas un vrai débat ?

M. Jacques Myard.

C'est un scandale !

M. Didier Quentin.

C'est pourquoi je m'opposerai, au nom du groupe RPR, au rétablissement de l'amendement de la directive postale, afin d'obtenir la discussion d'une vraie loi postale. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

Pour Natura 2000, les conditions déplorables de mise en oeuvre de cette directive expliquent la très grande méfiance qui continue de l'entourer.

M. Michel Bouvard.

Tout à fait !

M. Didier Quentin.

Le recours aux ordonnances risque de raviver inutilement les inquiétudes et les craintes de l'ensemble des acteurs du monde rural.

M. Jacques Myard.

Les Trois Glorieuses arrivent !

M. Didier Quentin.

Le réseau Natura 2000 ne saurait être conduit à bien que dans un climat de confiance et de concertation débouchant sur une véritable contractualisation.

M. Jacques Myard et M. René André.

Ce n'est pas possible !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

M. Didier Quentin.

Il conviendrait d'accompagner ces textes visant à la transposition des directives Habitats et Oiseaux par des garanties sérieuses pour contribuer à l'indispensable apaisement des esprits.

On peut se féliciter que le dialogue que nous souhaitions depuis longtemps ait enfin repris entre les différents acteurs de terrain concernés par Natura 2000, mais force est de constater que ce projet d'ordonnance appelle des précisions que les dernières réunions au ministère de l'environnement n'ont pas apportées.

Les dispositions concernant le rôle des comités départementaux et des comités de pilotage demeurent particulièrement floues...

M. Michel Bouvard.

Tout à fait !

M. Didier Quentin.

... et ne paraissent pas assurer le déroulement d'une réelle concertation.

M. René André.

C'est du tripatouillage une fois encore !

M. Didier Quentin.

Il est indispensable que ces structures soient systématiquement consultées lors de la désignation des zones spéciales de conservation, les fameuses ZSC, et des zones de protection spéciale, les ZPS. Il est également souhaitable qu'elles soient consultées lors de l'élaboration du document d'objectifs, de l'arrêté de mise en oeuvre et de la liste de travaux soumis à autorisation préalable.

Il est aussi nécessaire d'assurer l'information des acteurs concernés, et en particulier des titulaires de droit réel. Il convient notamment que le zonage des sites fasse l'objet de mesures de publicité foncière, seul outil pertinent pour informer clairement les propriétaires.

De plus, rien ne permet aujourd'hui de garantir une juste rémunération de l'entretien des parcelles. En effet, des difficultés se font jour, par exemple pour l'accès des exploitants agricoles et forestiers aux aides accordées pour les zones Natura 2000. Autant de points sur lesquels il serait urgent d'apporter des assurances fermes à de très nombreux acteurs de la ruralité.

M. Michel Bouvard.

Il faut changer de ministre de l'environnement.

M. Didier Quentin.

Comme vous le savez, monsieur le ministre, 1 029 sites ont déjà fait l'objet d'une désignation par Bruxelles. Ils représentent près de 5 % de notre territoire national.

M. René André.

C'est une spoliation du territoire national !

M. Didier Quentin.

Il subsiste néanmoins un contentieux européen sur les insuffisances quantitatives de nos propositions. Il a été évoqué une liste de 350 autres sites réclamés par la Commission européenne. Quels sont ces sites, monsieur le ministre ? Quelle superficie supplémentaire représentent-ils ? Des réponses précises auraient dû être données dans un véritable débat parlementaire, dont nous sommes aujourd'hui privés.

M. René André.

Il est incapable de nous les donner !

M. Didier Quentin.

Votre gouvernement s'est engagé à transmettre des propositions complémentaires, le 31 mai 2001, en ce qui concerne les régions alpines,...

M. Michel Bouvard.

C'est un scandale, on a déjà donné ! Voynet veut empêcher le développement des Alpes !

M. René André.

Elle méprise la ruralité !

M. Didier Quentin.

... atlantiques et méditerranéennes, et le 31 juillet 2001 pour le centre de notre pays. Sur quelle base vont se faire ces transmissions ? Les procéd ures de concertation pourront-elles être respectées compte tenu des délais ? Par exemple, dans mon département de CharenteMaritime, où vingt-deux sites ont été proposés à la Commission européenne lors de la consultation effectuée en 1999, on nous annonce trois propositions complémentaires de sites concernant des chauves-souris,...

M. René André.

Voynet est pour le loup !

M. Didier Quentin.

... mais, dans le même temps, l'on nous précise que ces propositions ont déjà fait l'objet d'une validation sur le plan scientifique au niveau national. Où est la concertation avec les utilisateurs de ces espaces ?

M. René André.

Le loup et l'ours, c'est la seule chose qui l'intéresse !

M. Didier Quentin.

Je rappelle, de plus, qu'à l'initiative de nos collègues sénateurs une proposition de loi sur Natura 2000 avait été adoptée en juin 1998 contre l'avis du Gouvernement, qui, pour s'y opposer, prétextait l'imminence d'un projet de loi sur cette question.

M. René André.

Elle nous a toujours trompés !

M. Didier Quentin.

Votre gouvernement excelle dans les effets d'annonce, mais, après, il est urgent d'attendre.

Force est de constater que, deux ans après, c'est l'expédient des ordonnances qui nous est proposé, véritable confiscation du pouvoir parlementaire !

M. René André.

Jusqu'où va-t-elle abuser de notre confiance ?

M. Didier Quentin.

Enfin, j'ajoute que le contenu des mesures envisagées touche de près à l'exercice du droit de propriété et devait, à l'évidence, faire l'objet d'un débat devant le Parlement.

C'est pourquoi je m'opposerai également, au nom du groupe RPR, au rétablissement par amendement des directives Natura 2000 (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République) et je vous ai compris ! je présenterai un amendement de repli précisant certains aspects de la mise en oeuvre de ce programme. Il ne saurait être question de renoncer à un débat démocratique indispensable sur la mise en oeuvre de ce réseau écologique européen.

Vous aurez donc compris, monsieur le ministre, que, pour toutes ces raisons, le groupe RPR s'opposera à ce mauvais coup contre le Parlement,...

M. René André.

Et contre l'agriculture !

M. Didier Quentin.

... à ce mauvais coup contre l'idée européenne, à ce mauvais coup contre la ruralité...

M. René André.

Bravo !

M. Didier Quentin.

... que représente cette charrette d'ordonnances,...

M. Jacques Myard.

Ça les mènera à la guillotine !

M. Didier Quentin.

... triste exemple de mauvaise gouvernance. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. Roger Meï.

M. Roger Meï.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cinquante et une directives sont concernées par la procédure des ordonnances que


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

vous demandez au Parlement d'accepter. Certaines sont anodines, c'est vrai, mais d'autres ont une répercussion considérable sur la vie de nos concitoyens.

La France préside la Communauté et, au dernier moment, par la procédure d'urgence, vous nous demandez de décharger, de déposséder le Parlement de certaines de ses prérogatives. C'est, je crois, un aveu d'impuissance de la présidence ou la volonté de diminuer le pouvoir des députés, déjà limité par la Constitution.

Je voudrais rappeler les engagements du Premier ministre sur sa volonté de faire jouer au Parlement un rôle plus important, engagement répété à plusieurs reprises.

Je voudrais aussi rappeler les engagements des dirigeants de la gauche plurielle, le 7 novembre, d'élargir encore la démocratie, avec notamment des propositions pour que les citoyens soient plus concernés. Aujourd'hui, je le dis avec déception, vous nous proposez de prendre le chemin inverse, ce que la droite n'avait jamais osé faire.

Permettez-moi aussi de rappeler que ces directives sont élaborées par une vingtaine de commissaires, une poignée de personnalités désignées par les exécutifs sans aucune légitimité démocratique : une vingtaine de personnes décident pour 300 millions d'Européens ! L es ordonnances vont répondre à des situations d'urgence ! Oui, sans doute, parce qu'on n'a pas pris les dispositions pour que les questions viennent à temps devant les parlementaires.

Que faire alors ? Il faut demander des délais - nous sommes bien placés avec la présidence de la France - puis mettre en place, avec la représentation nationale, des procédures d'examen raccourcies : nous sommes prêts à participer à leur élaboration.

Nous ne saurions accepter que l'on dépossède le Parlement de sa souveraineté, déjà réduite par notre Constitution, qui donne de grands pouvoirs au Président de la République et au Gouvernement.

Permettez-moi une dernière fois de rappeler que, sur une question qui ne posait pas problème, le quinquennat sec, qui n'aura que peu d'influence sur la vie quotidienne de nos concitoyens, on a consulté les Français par référendum et, sur cinquante et une questions, dont certaines sont importantes, on veut réglementer par ordonnances.

C'est un véritable déni de démocratie, je le dis avec force à cette tribune !

M. Christian Estrosi.

Oh oui !

M. Didier Quentin.

Il a raison !

M. Roger Meï.

Monsieur le ministre, vous aviez, à trois ou quatre reprises, sur des questions techniques, eu l'aval du Parlement pendant cette législature. Ce n'est pas cette fois, pour l'essentiel, des questions techniques.

Certaines directives semblent promouvoir une évolution acceptée par l'ensemble des acteurs concernés. Je pense notamment à l'article 3, relatif à la refonte du code de la mutualité, approuvée par les fédérations mutualistes.

Nombreuses sont, en revanche, les propositions qui semblent fort critiquables sur le fond, allant à l'encontre de la conception d'une Europe de justice sociale, démocratique et solidaire pour laquelle nous nous battons.

Il en va ainsi de la directive 96/97, relative à la mise en oeuvre du principe d'égalité de traitement entre les hommes et les femmes dans les régimes professionnels de sécurité sociale. Il s'agit, sous prétexte d'égalité, de niv eler par le bas notre système de protection sociale, à la suite de l'invalidation par la Cour de justice européenne des dérogations touchant à la fixation de l'âge de la retraite et aux conditions d'attribution des pensions de réversion.

M. Maxime Gremetz.

Très bien !

M. Roger Meï.

La transposition de cette directive ne saurait être discutée dans le champ restreint de la présente habilitation.

De même, la directive 92/85 concernant la sécurité et la santé des travailleuses enceintes ou allaitantes au travail implique bien qu'au-delà de leur état de grossesse, ces femmes devront démontrer une atteinte particulière à leur sécurité ou à leur santé pour justifier l'arrêt du travail de nuit. Cela rejoint les préoccupations que nous avons exprimées pour nous opposer, en général, au travail de nuit.

Quant à la directive 94/33 relative à la protection des jeunes au travail, entraînant à la fois un renforcement de l'interdiction du travail de nuit pour les jeunes âgés de moins de seize ans et une adaptation des dérogations à cette interdiction en cas d'extrême urgence, son caractère ambigu ne correspond pas à notre exigence d'interdire le travail de nuit des jeunes et des enfants. Cela méritait un véritable débat parlementaire.

Enfin, la directive 89/391 concernant la sécurité et la santé des travailleurs au travail traite de l'organisation de la prévention en entreprise et de l'implication des travailleurs. S'inscrivant dans la réforme de la médecine du travail qui est en cours, un tel débat ne doit pas être éludé, surtout au moment où le MEDEF concentre toutes ses forces pour déréglementer et faire disparaître la médecine du travail.

L'article 4 révèle un autre aspect de la démarche de ce projet. Les dispositions ayant trait à l'évolution du secteur routier vont largement au-delà du champ de la directive.

Au Sénat, il était ni plus ni moins proposé de supprimer le principe de gratuité autoroutière, considérant que

« l'habilitation demandée par le Gouvernement prend ainsi place dans un projet de réforme ambitieux, permettant de pérenniser et d'étendre le système français de concessions autoroutières tout en l'ouvrant à la concurrence et à la compétitivité ».

M. Maxime Gremetz.

Voilà !

M. Roger Meï.

Le groupe communiste républicain et citoyen du Sénat a montré, une fois de plus, que nous ne pouvions nous passer d'un véritable débat parlementaire.

Nous sommes satisfaits de constater aujourd'hui que le Gouvernement accepte le maintien du principe de gratuité, même si, pour le moment, elle n'est pas en général appliquée.

J'évoquerai la directive Natura 2000, celle sur la poste, celle sur la chasse, et quelques autres.

Monsieur le ministre, le groupe communiste ne peut cautionner la procédure d'ordonnances. La gauche plurielle doit être conséquente avec ses engagements sur la démocratie, sur le rôle de l'Assemblée nationale et du Sénat. Je le dis avec force à mes collègues socialistes.

Nous ne pouvons accepter que l'on signe « PO le Parlement ». Le groupe communiste votera contre le dessai-s issement des prérogatives de l'Assemblée nationale.

Il votera contre l'affaiblissement de l'Assemblée nationale.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. Yves Bur.

M. Yves Bur. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la France, cela a été répété aujourd'hui, figure parmi les plus mauvais élèves des Etats


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

membres de l'Union européenne quant aux délais de transposition des directives européennes : elle occupe le douzième rang en ce qui concerne le taux de transcription des directives.

Cette situation conduit notre pays à être celui qui a fait l'objet du plus grand nombre de plaintes et de procédures pour manquement à ses obligations d'application du droit communautaire. Ainsi, au 31 décembre 1999, les dossiers en cours concernaient 236 mises en demeure contre 160 pour l'Italie, qui est en deuxième position sur cette liste, 144 avis motivés contre 94 pour l'Italie, 63 saisines de la Cour de justice de la Communauté européenne contre 44 pour l'Italie.

Cette situation peu honorable risque de condamner notre pays à payer de lourdes astreintes.

Cette situation donne aussi de notre pays une image déplorable, alors que la France entend jouer un rôle moteur dans la construction européenne.

Cette situation, aussi peu reluisante soit-elle, justifiet-elle pour autant le recours aux ordonnances pour que notre pays se mette plus rapidement en conformité ? Nous ne le pensons pas, et nous ne pouvons accepter comme seul justificatif la charge de travail qui pèse sur le Parlement alors que le Gouvernement a la maîtrise du calendrier de nos travaux.

J'en veux pour preuve que ce qui était considéré comme une initiative prématurée par Mme Voynet lorsque le Sénat avait adopté en 1998 une proposition de loi visant à transposer la directive de 1992 dite « Natura 2000 » est devenu, à la fin 2000, une urgence justifiant le recours aux ordonnances.

Il eût fallu faire preuve de la même volonté politique qui conduit aujourd'hui le candidat à l'élection présidentielle Lionel Jospin à bousculer, non seulement le calendrier électoral de 2002, mais aussi le calendrier parlementaire, que le Gouvernement trouve par ailleurs si chargé qu'il entend éviter un surcroît de débats en légifé rant par ordonnances.

L'habilitation demandée par le Gouvernement revêt une nature particulière, dans la mesure où elle concerne le droit communautaire, un domaine où le Parlement n'exerce déjà qu'un droit de regard limité.

De nombreuses mesures communautaires relevant du domaine de la loi, au sens de l'article 34 de la Constitution, sont adoptées sans intervention directe du Parlement.

Certes, depuis la révision constitutionnelle de 1992, le Gouvernement est tenu de soumettre au Parlement les propositions d'actes communautaires comportant des dispositions de nature législative.

Toutefois, ce droit de regard du Parlement, par le biais de résolutions votées au stade de l'élaboration du droit communautaire, ne saurait justifier qu'il soit privé de toute intervention au stade de sa mise en oeuvre par le biais de la transposition des directives, d'autant qu'en pratique, le retard est tel que la plus grande partie des textes conernés par le projet de loi ont été adoptés avant l'entrée en vigueur de l'article 88-4 de la Constitution.

L'UDF demande que le Gouvernement prenne enfin les mesures adéquates pour que l'ensemble des institutions françaises soient en mesure de mieux prendre en compte le droit communautaire en amont, lors de la négociation comme lors de la transposition. Il s'agit d'éviter que les Français n'aient l'impression que l'Union européenne impose ses règles sans débat démocratique et sans tenir compte de l'avis de la France.

Comme de nombreux collègues, à droite comme à gauche, nous ne pensons pas que les directives concernées par l'habilitation aient, dans leur ensemble, une portée mineure qui justifierait par elle-même l'absence de débat parlementaire.

En effet, qui peut imaginer un instant que la directive concernant la conservation des habitats naturels, ainsi que de la faune et de la flore sauvage, appelée communémant

« Natura 2000 », serait de portée mineure, quand on connaît l'émotion qu'une application bureaucratique avait suscitée sur l'ensemble du territoire national ? Sur ce dossier sensible, nous avons tous l'impression que le Gouvernement fuit un débat qu'il sait difficile - aussi difficile, voire davantage que celui sur la chasse - et dont il n'est pas certain que l'issue lui soit favorable.

Qui peut imaginer un instant, par ailleurs, que la mise en conformité des mutuelles par rapport au droit européen de l'assurance soit un acte mineur quand on connaît les difficultés pour élaborer un cadre juridique spécifique à la mutualité et compatible avec la directive européenne ? Cela nous paraît d'autant plus inacceptable qu'avec l'article 3 du projet de loi d'habilitation, le Gouvernement a fait le choix de modifier en profondeur le code de la mutualité. Nous pouvons avoir le sentiment que l'on cherche à escamoter un débat important, qui touche un large pan de l'économie solidaire. Le Parlement peut-il accepter que les secteurs concernés par une loi décident seuls avec le Gouvernement de leur cadre législatif spécifique ? Est-ce là un précédent auquel pourraient se référer d'autres groupes d'intérêt pour convenir avec le Gouvernement d'un blanc-seing législatif ? Ce n'est pas au seul motif de notre attachement à l'esprit mutualiste que nous devrions accepter un tel contournement du Parlement, lieu d'expression de l'intérêt général. Ce débat aurait en particulier permis d'approfondir notre réflexion sur la place des mutuelles dans le système de santé et de son financement.

M. François Goulard.

Excellent !

M. Yves Bur.

Enfin, qui peut imaginer qu'un débat concernant les règles communes pour le développement du marché intérieur des services postaux et l'amélioration de la qualité du service serait inutile quand on connaît les mutations profondes et lourdes de conséquences que ce secteur a connues et devra encore affronter dans les années à venir. Nous mesurons les considérables efforts d'adaptation de notre Poste pour affronter ce nouvel environnement, mais nous savons aussi les risques pour le client comme pour l'entreprise que ces évolutions font peser sur le service postal.

Ces quelques exemples illustrent clairement l'erreur d'appréciation du Gouvernement, qui minimise l'intérêt de ces directives et ose prétendre que les droits du Parlement sont préservés.

Je voudrais plus particulièrement revenir sur les conditions de modification du code de la mutualité prévue à l'article 3. Nous ne pouvons que regretter qu'un débat préalable concernant les champs d'application des directives n'ait pu avoir lieu dans les différentes commissions.

Ainsi, concernant le secteur de la mutualité, la commission des affaires culturelles, familiales et sociales aurait pu procéder à un examen du texte que le Gouvenement avait préparé avant de décider de solliciter l'autorisation de recourir à l'ordonnance et que M. Hascoët présentait comme quasi définitif.


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Nous nous sommes heurtés à un refus de la commission et nous le regrettons, car les questions sont nombreuses et concernent divers aspects du fonctionnement des organismes mutualistes, dans le cadre de l'assurance comme dans celui de la santé.

Nous aurions pu utilement débattre au fond du principe de spécialisation auquel Bruxelles semble très attentif. Il concerne notamment la gestion des réalisations sanitaires et sociales, c'est-à-dire les prestations en nature que certains organismes mutualistes intégraient jusqu'à présent dans la gestion de leur risque. Sommes-nous assurés de la transparence de cette spécialisation ou continuera-t-on d'entretenir le flou dans la gestion des structures au risque d'un rejet de ces propositions par Bruxelles ? Comment se feront les transferts financiers entre les mutuelles soeurs afin qu'ils ne permettent pas de fausser les conditions de la concurrence dans le domaine des prestations sanitaires ? De même, il eût été intéressant d'aborder le thème toujours délicat de la fiscalité appliquée aux organismes d'assurances selon leur catégorie, en particulier lorsque cette fiscalité différenciée repose sur l'absence de sélection du risque applicable aux seules mutuelles. Les distorsions actuelles au regard de la taxe supplémentaire sur les conventions d'assurance maladie ne sont-elles pas incohérentes, et plus encore lorsqu'on sait que tous les Français ne peuvent accéder aux soins faute d'être couverts par un contrat d'assurance maladie complémentaire, quand on sait que le cahier des charges défini dans le projet de code dont nous avons pu avoir connaissance ne concerne que les mutuelles régies par le code de la mutualité, mais semble en fait taillé sur mesure pour les acteurs de la mutualité de la fonction publique ?

M. Jacques Floch, rapporteur.

Eh oui !

M. Yves Bur.

Que signifie en effet, pour ces mutuelles de la fonction publique, l'interdiction de toute sélection sur questionnaire médical ? Dans les faits, elles s'appuient sur l'examen médical préalable à toute entrée dans la fonction publique.

Cela crée des problèmes de distorsion non seulement avec les sociétés d'assurances mais aussi avec les autres mutuelles, qui ne peuvent bénéficier de la sélection automatique de la fonction publique.

S'agissant du fonctionnement des organismes mutualistes et du statut de l'élu mutualiste, je ne doute pas que le Parlement aurait trouvé un réel intérêt à renforcer cette forme de responsabilité solidaire si utile dans notre société. Enfin, la mise en place d'un système de garantie et de tutelle sera-t-elle à même d'éviter les dérives qu'ont connues certains organismes mutualistes qui ont dévié de leur mission, ou ne doit-il servir qu'à mettre en place un système monopolistique sous couvert d'agrément des mutuelles ? A travers les questions que soulève cette seule transposition et son complément que constitue le code le la mutualité, nous mesurons l'importance des problèmes abordés, et nous demandons au Gouvernement d'accepter à tout le moins de retirer l'article 3 afin que nous puissions aborder sur le fond la réforme de la mutualité.

Vous comprendrez, monsieur le ministre, que les conditions ne sont pas réunies pour un débat serein, digne de la représentation nationale. Ce n'est pas rendre service à l'idéal européen que de priver le niveau national de son pouvoir d'appréciation et le Parlement de ses droits législatifs. L'UDF considère que la mise à l'écart du Parlement à propos de sujets aussi importants que ceux qui sont traités dans les directives n'est certainement pas le meilleur moyen de faire progresser l'adhésion des citoyens et des élus à la construction communautaire.

M. Michel Hunault.

Très bien !

M. Yves Bur.

Nous ne pouvons que nous élever contre ce débat tenu en catimini à un moment où la France se doit de jouer un rôle moteur dans la construction européenne, qui affronte un sommet particulièrement difficile à Nice.

Ce dont la France a besoin d'une manière urgente, ce n'est pas de voir la représentation nationale courtcircuitée mais associée, dans la clarté et la transparence, à la construction européenne. C'est parce que vous avez fait un choix différent, qui réfute les droits du Parlement, que l'UDF votera contre ce texte.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Gérard Charasse.

M. Gérard Charasse.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le Gouvernement sollicite du Parlement l'autorisation de transposer par ordonnances des directives communautaires et de mettre en oeuvre certaines dispositions du droit européen.

Si je souhaite consacrer l'essentiel de mon propos au coeur du sujet, je ne peux éviter de dire quelques motss ur la méthode employée, à savoir l'utilisation de l'article 38 et des ordonnances. C'est une méthode expéditive, qui a ses commodités. Dans le cas présent se pose néanmoins un problème de cohérence. On ne peut pas sans cesse arguer de l'importance que revêtira l'Europe dans un ou deux ans, avec la mise en circulation de la monnaie unique, et la faire entrer dans le droit national par la petite porte des ordonnances.

Je formule ce reproche, monsieur le ministre, tout en sachant que l'urgence n'est pas de votre fait, et que c'est le laxisme de votre prédécesseur de droite,...

(Protestationss ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. François Goulard.

Il faut oser !

M. Yves Bur.

Quel culot !

M. Gérard Charasse.

... qui a préféré ne rien affronter plutôt que sa majorité - même au prix des astreintes -, qui nous conduit ce soir à cette extrémité.

M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement.

C'est une vérité.

M. Gérard Charasse.

Je sais, monsieur le ministre, qu'en votre temps vous avez, vous aussi, dit son fait à l'article 38.

M. Yves Bur.

Il a la mémoire qui flanche !

M. Gérard Charasse.

Il existe un bon moyen d'amender cette législation d'exception : inscrire à l'ordre du jour - et non seulement déposer - le projet de loi de ratification. Le Gouvernement voudra-t-il s'engager sur ce point ? Sur le fond, il est vrai que nous ne pouvons décemment pas nous inscrire dans un processus long qui ne nous permettrait pas de faire face à l'obligation de moyen qui est la nôtre et qui nous conduirait au paiement d'astreintes fort importantes.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

En deuxième lieu, j'ai bien entendu et constaté que la norme européenne, dans certains cas, reste moins favorable que le droit français. Elle permet cependant à des pays frères d'accéder, d'un coup, à un confort social que les luttes syndicales, par exemple, n'avaient pas encore permis d'atteindre. Pour la France, le droit domestique reste applicable quand il est meilleur. C'est le plus important.

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Très bien !

M. Gérard Charasse.

En troisième et dernier lieu, je dois vous dire que ces textes ont été l'occasion d'un toilettage dans nos principes. Ramener la mutualité à ce qu'elle est dans la définition formulée à sa création -

« contribuer selon ses moyens, recevoir selon ses besoins » - n'est pas inutile. Cela nous permettra de lutter contre des dynamiques purement financières, voire spéculatives, qui se sont malicieusement répandues à l'abri de ce concept qui donnait au libéralisme ordinaire un vernis militant de bon aloi.

Je saisirai l'occasion pour introduire dans mon intervention deux « cavaliers oratoires ».

Je dirai d'abord l'inquiétude que nous inspire la modification programmée de l'article 133 du traité, dès lors que les institutions resteront en l'état.

M. Jean-Claude Lefort.

Très bien !

M. Gérard Charasse.

L'avenir des services publics - je pense à La Poste et à France Télécom, mais aussi à EDFGDF - reste un sujet fort, et je ne voudrais pas que l'on se réfugie derrière l'obligation européenne pour éluder un vrai débat, pour oublier l'aménagement du territoire et la notion d'utilité publique.

D'autre part, je voudrais revenir sur l'exercice de délégation du pouvoir législatif auquel nous participons.

Nous allons reparler de ce principe à l'occasion du débat sur la Corse. Ainsi, l'Assemblée devrait, par deux fois, céder son pouvoir, une fois au Gouvernement, une fois à une collectivité territoriale. C'est une pente dangereuse ! Aussi dois-je le redire ici : nous n'avons pas à céder cette prérogative que nous tenons de l'élection. Mais nous devons aller au coeur du sujet, et travailler à remanier cet article 34 qui nous donne tout à faire ou tout à céder. Je prends la volonté de Mme la secrétaire d'Etat au budget de remanier l'ordonnance de janvier 1959 comme un signal que cette majorité est prête à se lancer dans un travail de réforme de nos textes fondamentaux.

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Absolument !

M. Gérard Charasse.

Si nous conduisions ce travail au bout, plus personne n'aurait à répéter à cette tribune ce que je vais y dire maintenant : monsieur le ministre, les radicaux de gauche voteront pour le Parlement vous délègue son pouvoir de transposer des directives communautaires et de mettre en oeuvre certaines dispositions du droit européen. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la France connaît un vrai problème de transposition des directives et il n'est pas à son honneur d'être, dans ce domaine, un des plus mauvais élèves de la classe européenne. Non, monsieur le ministre, la méthode retenue n'est pas la bonne, et je ne suis pas le premier à vous le dire. Le seul fait qu'elle soit critiquée sur tous les bancs de cette assemblée devrait, à tout le moins, vous inciter à la réflexion et vous préoccuper.

La méthode n'est pas bonne, car une critique forte s'exprime, touchant l'absence de contrôle démocratique sur ce qui se passe à Bruxelles et à Strasbourg. Nombre de nos concitoyens ont le sentiment d'être coupés de ce qui se passe au sein de l'Union européenne. Si ce sentiment est bien réel, est-il pour autant fondé ? Partiellem ent sans doute. La construction européenne est complexe, ses institutions ne sont pas simples. L'élargissement conduira à adopter des règles de majorité qualifiée dans de nouveaux domaines de compétence. On peut donc concevoir qu'existe dans les pays de l'Union, et en particulier en France, un sentiment d'éloignement.

Le mode de désignation des députés européens à la proportionnelle sur liste nationale accentue encore ce sentiment de coupure et éloigne l'électeur de l'élu, le député de ceux qui l'ont désigné. C'est pourquoi le recours aux ordonnances que vous nous proposez ce soir est spécialement malvenu, car il ajoute à cet éloignement européen l'absence de véritable débat au sein de notre Parlement national. De fait, nous allons cumuler les m otifs d'incompréhension, parce que cela vient de l'Europe, et parce que le Parlement n'aura pas eu l'occasion de débattre.

Cela ne veut pas dire que nous réfutions tout droit à l'utilisation de l'article 38. Le Gouvernement précédent a utilisé les ordonnances pour traiter de très grands sujets, d'une importance capitale. Mais, lorsqu'il s'agit d'un texte unique, pour important qu'il soit, les orientations du Gouvernement sont connues. Elles sont exposées et font l'objet d'un débat d'orientation général dans la loi d'habilitation. Ici, nous ne sommes évidemment pas dans ce cas de figure, puisque ce ne sont pas moins de cinquante directives abordant autant de sujets différents dont il s'agit. Il est impossible que nous ayons la moindre discussion sur leur contenu à toutes.

Ainsi, c'est par voie d'ordonnances que le Gouvernem ent va transposer des directives touchant à des domaines d'une importance considérable, sans aucun débat au Parlement. Cela est grave et cela choque, les débats de ce soir l'ont montré. Vous invoquez des raisons pratiques, monsieur le ministre. Sans faire de procès d'intention, je crois, pour ma part - je vous l'ai dit tout à l'heure -, que le Gouvernement use en réalité d'une commodité qui lui permet d'éviter un débat au Parlement et, surtout, au sein de sa majorité, sur des sujets qui fâchent.

J'en citerai quelques-uns. Natura 2000 est l'un d'eux.

Chacun se rappelle le débat sur la chasse, au cours duquel on a vu la majorité se diviser, se chercher parfois, être vertement critiquée par telle de ses composantes, tandis que telle autre adoptait une position exactement opposée.

Natura 2000 est un sujet tout aussi sensible, car il touche aux racines, au territoire. C'est un sujet de contestation, qui ne peut laisser aucun de nous indifférent. Vous avez trouvé commode, facile, d'écarter une discussion sur Natura 2000 : c'est pratique, mais ce n'est pas remarquablement courageux.

D'autres débats vous ont laissé des souvenirs qui ne sont pas forcément très agréables, ceux qui concernaient la libéralisation de ce qui était autrefois du ressort de grands services publics monopolistiques.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

N'y a-t-il pas un paradoxe à traiter les deux directives Poste, d'une part, et Télécommunications, d'autre part, par le biais des ordonnances, alors que nous avons eu, ici, il y a peu, un grand débat sur la transposition de la directive Electricité ? Ce débat, c'est vrai, n'a pas été facile, et votre collègue Christian Pierret y a été souvent en butte à une certaine surenchère de la part du groupe communiste, qui défendait d'ailleurs des conceptions parfaitement légitimes. Au sein même du groupe socialiste, ou chez les Verts, s'exprimaient des positions divergentes par rapport à la ligne proposée par le Gouvernement, lequel était évidemment tenu par la directive européenne et devait faire ses choix dans ce cadre contraignant, mais qui lui laissait tout de même une certaine marge de liberté.

Pour difficile qu'ait été cette discussion pour le membre du Gouvernement qui siégeait à votre place, je crois que ces débats-là ne sont pas inutiles, qu'ils sont même extrêmement fructueux. Ils permettent à chacun de préciser sa pensée et à tous les Français de prendre conscience des enjeux, des évolutions qui touchent, tour à tour, ces grands domaines de l'économie et de la société.

Cette fois-ci, des élections décisives pour notre pays devant intervenir dans quelques mois, vous avez préféré n e pas renouveler l'expérience de vous retrouver confronté à la difficulté d'accorder une majorité qui, sur nombre de sujets, n'a jamais été aussi disparate.

Je voudrais évoquer plus particulièrement le sujet peutêtre le plus contestable parmi ceux que vous avez rangés dans ce texte vous habilitant à légiférer par voie d'ordonnances. Mon collègue Yves Bur l'a abordé il y a quelques instants, en termes parfaitement pertinents, il s'agit de la mutualité.

Ce point tranche par rapport aux autres. En effet, non seulement vous demandez au Parlement d'accepter que la transposition en droit français se fasse par ordonnance, mais vous lui demandez en plus de vous autoriser à refondre intégralement le code de la mutualité également par voie d'ordonnance.

D'ailleurs, la genèse de ce dossier montre une hésitation de la part du Gouvernement. Nous sommes quelques-uns ici à l'avoir suivi au fil des mois.

La ministre de l'emploi et de la solidarité de l'époque, Mme Aubry, avait contacté les différents groupes parlementaires pour les informer que le Gouvernement, à la demande d'ailleurs de la mutualité, qui s'impatientait de voir cette réforme longtemps promise mais toujours différée, s'apprêtait à procéder par voie d'ordonnance. A la condition, nous disait-elle, que tous les groupes parlem entaires donnent leur accord à cette procédure.

M me Aubry ajoutait que les trois fédérations de mutuelles qui existent dans notre pays étaient unanimes et pour recommander la voie de l'ordonnance et pour approuver le texte préparé par le Gouvernement. J'avais, à l'époque, dû contredire Mme Aubry car je savais qu'une fédération au moins n'était absolument pas en phase avec les projets gouvernementaux.

Or, malgré l'absence d'unanimité chez tous les groupes parlementaires, le Gouvernement a persévéré dans son intention et nous demande ce soir un blanc-seing pour réformer la mutualité.

Quelles que soient nos options politiques, nous pouvons nous accorder pour reconnaître le rôle éminent joué par les mutuelles dans notre pays, et ce rôle, à mon avis, va croissant. Il est souhaitable que la place des mutuelles soit non seulement reconnue, affirmée, et consolidée, mais encore qu'elle se développe, tant il est vrai que les m utuelles constituent souvent, notamment dans le domaine social, un mode de gestion qui satisfait à la fois un besoin de diversité et un besoin de proximité avec les mandants. Les mutuelles, dans notre pays, sont diverses par leur objet, par leur taille, par les catégories de nos compatriotes qu'elles regroupent. Elles doivent le rester.

Et pourtant, ce soir, je suis inquiet face à cette réforme de la mutualité que vous vous apprêtez à conduire et dont aujourd'hui nous ne connaissons pas encore les termes dans le détail.

Mes interrogations portent par exemple sur les projets qui semblent être ceux du Gouvernement en matière d'agrément. Je voudrais mettre en garde le Gouvernement contre toute procédure qui donnerait un pouvoir excessif a ux fédérations dans l'agrément des mutuelles. Les mutuelles, y compris les plus petites d'entre elles, y compris celles qui ne sont pas du ressort des plus grandes fédérations, doivent pouvoir survivre et continuer leur activité. Pour cela, la procédure d'agrément doit être transparente et ne donner à personne un avantage qui serait dénué de fondement.

Autre point extrêmement sensible, la garantie de place.

Le projet semble donner aux fédérations un rôle de garant pour les mutuelles qu'elles regroupent. Etant donné la disparité de taille des fédérations de mutuelles, il me semble que cette fonction va introduire, parce que la concurrence existe aussi dans le secteur mutualiste, une distorsion de concurrence qui sera préjudiciable aux plus petites d'entre elles. Au moins sur ces deux points, leso rientations dont nous pouvons avoir connaissance, puisque, malheureusement, nous ne disposons pas des textes définitifs que vous mettrez en oeuvre par ordonnances, nous paraissent inquiétantes.

En conclusion, monsieur le ministre, les nombreuses critiques formulées sur ce texte, si elles concernent évidemment directement les sujets sur lesquels le Parlement ne pourra débattre, elles touchent, plus largement, à la conduite du Gouvernement, qui a évolué au fil des mois.

Ce gouvernement, parangon de vertu parlementaire, ne se vantait-il pas de ne jamais utiliser les facilités que la Constitution donne au pouvoir exécutif ? A quelques mois d'échéances déterminantes, nous constatons, pour le regretter, qu'il tombe dans cette facilité de la plus mauvaise façon. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants et du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

La parole est à M. Jean-Paul Chanteguet.

M. Jean-Paul Chanteguet.

Monsieur le secrétaire d'Etat à l'économie solidaire, le projet de loi que vous nous soumettez vise à autoriser le Gouvernement à transposer par ordonnances des directives européennes et à mettre en oeuvre certaines dispositions du droit communautaire.

Première remarque, est-il normal que seule la commission des lois ait été saisie, alors que d'autres commissions, comme la commission de la production et des échanges, auraient pu l'être pour avis dans les domaines relevant de leur compétence ? Au Sénat, quatre commissions, celles des affaires économiques et du Plan, des finances, des affaires sociales et des affaires culturelles ont été saisies pour avis.

Le recours proposé par le Gouvernement à la procédure des ordonnances prévu par l'article 38 de la Constitution n'est pas nouveau. Malgré tout, il nous heurte, dans la mesure où il dessaisit le Parlement et porte atteinte à ses droits.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

Ce dessaisissement suscite une grande réprobation, que je partage en tant que parlementaire. Nous ne pouvons accepter d'être privés de notre droit de légiférer.

Les raisons avancées par M. le ministre lors de l'examen du texte par le Sénat pour justifier le dépôt de ce projet de loi d'habilitation, je veux bien les considérer avec pragmatisme, qu'il s'agisse de compléter des transpositions déjà largement engagées pour la plupart de ces directives, ou de limiter le nombre de contentieux, ou de réduire l'insécurité juridique qui découle de l'absence de transposition. Quant à l'argument qui vous conduit à préciser que, au terme de la procédure, le Parlement sera amené à se prononcer sur les projets de loi de ratification que le Gouvernement déposera, je crains fort que nous n'arrivions malheureusement, comme ce fut déjà le cas pour d'autres ordonnances, à une habilitation implicite, faute d'inscription à l'ordre du jour du Parlement.

T ous ces arguments ne sont pas complètement convaincants. Néanmoins, la raison devant l'emporter, je crois utile de progresser dans l'examen de ce texte.

Dans ce projet de loi, la directive 92/43 du Conseil du 21 mai 1992, qui concerne la conservation des habitats naturels ainsi que la faune et la flore sauvages, retient tout particulièrement notre attention.

En effet, cette directive, qui prévoit la constitution d'un réseau écologique cohérent d'espaces dénommé Natura 2000, suscite depuis de nombreux mois de vives réactions.

M. Jean Proriol.

C'est vrai !

M. Jean-Paul Chanteguet.

Que n'avons-nous pas entendu, tant au plan local qu'au plan national ? Natura 2000 va créer d'inviolables sanctuaires écologiques. La chasse sera interdite dans ces zones ainsi que les activités humaines. La transposition de cette directive n'a fait l'objet d'aucune concertation. Les mesures de protection seront imposées d'autorité.

Qu'en est-il exactement ? Devons-nous suivre le Sénat, qui propose de retirer cette directive...

M. Michel Bouvard.

Il a raison.

M. Jean-Paul Chanteguet.

... ou, après un examen attentif des propositions faites et des assurances apportées par le Gouvernement, devons-nous accepter son maintien ? Il n'est pas inutile tout d'abord de rappeler brièvement les objectifs de la directive « habitat ».

Il s'est avéré que la pérennité de l'espèce humaine dépend des conditions de vie et des ressources du milieu naturel. L'avenir des hommes est lié au devenir des espèces et des écosystèmes et à leur diversité biologique.

En Europe, la variété des climats, des paysages et des cultures induit une grande diversité biologique dont le maintien est un facteur clé, en particulier dans les zones rurales, pour un développement durable et maîtrisé.

Le maintien de cette biodiversité suppose non seulement que les habitats de la flore et de la faune soient préservés, mais aussi que les interrelations entre ces milieux soient maintenues.

L'Union européenne s'est donné les moyens de préserver le patrimoine biologique, en prenant deux directives, l'une en 1979, l'autre en 1992, afin de donner aux Etats membres un cadre et des moyens pour assurer cette préservation.

Le réseau Natura 2000, qui comprend des zones spéciales de conservation, ZSC, pour la conservation des types d'habitats naturels et des habitats d'espèces, et des zones de protection spéciale, ZPS, pour la conservation des habitats des espèces d'oiseaux, vise à assurer la préservation de la diversité biologique.

L'objectif de ce réseau est aussi de contribuer à la mise en oeuvre d'un développement durable en cherchant à concilier, au sein des sites qui le composeront, les exigences écologiques des habitats naturels et des espèces en cause, avec les exigences économiques, sociales et culturelles, ainsi que les particularités régionales et locales.

Il faut aussi rappeler que le classement des sites comme la transposition du cadre juridique ont été soumis à rude épreuve.

En effet, la publication en avril 1996 d'une première liste de sites élaborée sous l'égide du Muséum d'histoire naturelle, couvrant 15 % du territoire et huit millions d'hectares, provoqua une protestation des milieux socioéconomiques et des élus locaux, ceux-ci reprochant l'absence de concertation, contestant la pertinence scientifique du classement et dénonçant la menace de créer un

« sanctuaire de la nature ».

M. Michel Bouvard.

Et le Conseil d'Etat nous a donné raison !

M. Jean-Paul Chanteguet.

Face à ces réactions, le Premier ministre d'alors décida de geler l'application de la directive.

Le renforcement de la concertation au plan national, au travers de la mise en place d'un comité national de suivi, et au plan local, au travers de comités locaux de pilotage sur les 37 sites tests, permit le redémarrage de la procédure. Dès le mois de juillet 1997, la dynamique Natura 2000 fut relancée et, dès octobre 1997, une proposition de 543 sites fut transmise à la Commission.

A ce jour, la France a pu adresser à Bruxelles 1029 propositions de sites couvrant 5,8 % du territoire.

La transposition en droit français de la directive « habitats » devient urgente.

En effet, le 6 avril, la France a été condamnée en manquement par la Cour de justice des communautés européennes pour transposition incomplète de cette directive.

En juillet dernier, la Commission européenne a adressé au gouvernement français une mise en demeure pour non-exécution de l'arrêt de la cour. Cette mise en demeure pourrait être suivie d'une nouvelle saisine de la cour. Celle-ci pourrait alors prononcer une astreinte à l'encontre de la France.

Par ailleurs, il est à noter que cette transposition aidera à la constitution de ce réseau Natura 2000, et donc éloignera de nous les menaces avancées par Bruxelles, de lier l'approbation des DOCUP objectifs 1 et 2 et des plans de développement rural à la transmission de listes de sites Natura 2000 conformes.

Enfin, il y a urgence parce que les acteurs locaux, les élus, les gestionnaires de l'espace ne peuvent être confrontés plus longtemps aux incertitudes qui existent quant au mode de mise en oeuvre des mesures de préservation des sites retenus.

L'argument mettant en avant l'absence de concertation est infondé, quand on sait que depuis de nombreux mois tous les partenaires - chasseurs, pêcheurs, forestiers, naturalistes, agriculteurs, propriétaires, élus, utilisateurs de l'espace - réfléchissent au sein du Comité national de suivi.

M. Michel Bouvard.

Il ne se réunit qu'épisodiquement !

M. Jean-Paul Chanteguet.

Mais si, monsieur Bouvard.

M. Michel Bouvard.

Mais non ! J'y siège, je le sais bien.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

M. Jean-Paul Chanteguet.

Tous ces partenaires réfléchissent au contenu des textes devant d'une part, porter la transposition de l'article 4 de la directive 79/409 du Conseil du 2 avril 1979 et des articles 4 et 6 de la directive 92/43 du Conseil du 21 mai 1992, d'autre part, définir un cadre juridique pour une gestion contractuelle des sites Natura 2000. La gestion des sites Natura 2000 se fera sur la base du volontariat et sous forme contractuelle entre les titulaires de droits réels et personnels portant sur des biens immobiliers et l'autorité administrative.

M. Michel Bouvard.

C'est le même volontariat que pour le STO !

M. Bernard Roman, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration de la République.

Oh !

M. Jean-Paul Chanteguet.

En effet, la mise en oeuvre d'une gestion durable des espaces naturels dans le cadre du réseau Natura 2000 ne peut relever que d'une action associant tous les acteurs concernés. C'est pourquoi, pour chaque site, sera élaboré un document d'objectifs définissant des orientations de gestion et les mesures de préservation contractuelle, sous la responsabilité du préfet du département, en étroite concertation avec les partenaires locaux réunis au sein d'un comité de pilotage local.

Celui-ci précisera, en outre, les moyens financiers d'accompagnement et les modalités de mise en oeuvre des mesures contractuelles.

Par ailleurs, les personnes chargées de la gestion et de l'entretien du patrimoine naturel qui adhéreront au document d'objectifs dans le cadre de ces contrats bénéficieront d'une rémunération correspondant aux prestations et services rendus à la collectivité.

Localement, il existe aujourd'hui une réelle dynamique de concertation. Elle a permis de transmettre à Bruxelles 1 029 propositions de sites. Près de 300 sont dotés d'un comité de pilotage et d'un opérateur - chambre d'agriculture, parc naturel régional, ONF - chargé d'élaborer un document d'objectifs. Cent documents d'objectifs devraient être finalisés avant la fin de l'année.

Les moyens financiers importants mobilisés pour la mise en place du réseau Natura 2000 dans le cadre du fonds de gestion des milieux naturels, doté de 118 millions de francs en 2001, expliquent aussi en partie les résultats obtenus.

Néanmoins, nous souhaitons renforcer, au niveau de la détermination des propositions départementales contribuant à la liste des sites susceptibles d'être classés zones spéciales de conservation ou zones de protection spéciale, la procédure de consultation des communes afin que les délibérations motivées des conseils municipaux concernés, portant sur les remarques et propositions relatives au projet de périmètre soient mieux prises en compte par l'autorité préfectorale. C'est l'objet d'un des amendements déposés par le groupe socialiste.

Enfin, il me paraît important de faire écho aux inquiétudes des chasseurs, préoccupés par la notion de « perturbation » touchant les espèces pour lesquelles les zones ont été désignées, pour autant que ces perturbations soient susceptibles d'avoir un effet significatif eu égard aux objectifs de conservation. Consciente de cela, la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement a, dès le 30 juillet 1997, mis en place, avec la participation de l'Union nationale des fédérations départementales de chasseurs, un groupe de travail. Celui-ci a conclu qu'en règle générale, la chasse ne constituait pas une activité perturbante car elle n'entraînait pas de déclin durable ou de disparition d'espèces. Face à un tel constat et pour rassurer les milieux cynégétiques, nous avons fait adopter un amendement le précisant.

La transposition par ordonnances de la directive « habitats » n'a pas été la seule contestée dans ce processus.

J'ai retenu trois autres sujets sur lesquels l'attention de l'opinion s'est ou a été focalisée : des thèmes sociaux, en relation avec le droit du travail ; la question postale ; la mise en extinction de ce que l'on a appelé « l'adossement autoroutier ». Chacun de ces sujets mérite un développement.

En matière sociale, la question du travail des mineurs a été soulevée. Sur un plan général, je dirai à nos contradicteurs qu'heureusement, la transposition du droit social obéit à un principe protecteur de l'individu : la primauté du droit le plus favorable. Aujourd'hui comme à l'avenir, partout où notre droit applicable sera plus protecteur que le cadre communautaire, il s'imposera.

Pour être plus précis, notamment en ce qui concerne le travail des mineurs, la directive 94/33/CE du 22 juin 1994 aborde ce sujet. Permettez-moi, chers collègues, de vous en lire l'article 1er : « Les Etats membres prennent les mesures nécessaires pour interdire le travail des enfants.

Ils veillent, dans les conditions prévues par la présente directive, à ce que l'âge minimal d'admission à l'emploi ou au travail ne soit pas inférieur à l'âge auquel cesse l'obligation scolaire à temps plein imposée par la législation nationale ni, en tous cas, à quinze ans. » Est-ce là la

régression que certains ont dénoncée ou à laquelle certaines campagnes ont voulu nous faire croire ? Quelle désinformation ! La question postale à présent. Si un sujet est emblématique de la nécessité de recourir aux ordonnances - sauf à compromettre les chances de la France - c'est bien celui-ci.

En matière postale, nos collègues du Sénat ont cru judicieux d'éliminer de la transposition la directive 97/67/CE du 15 décembre 1997 concernant des règles communes pour le développement du marché intérieur des services postaux. Leur intention ne nous échappe pas : une partie de la directive, celle qui concerne la définition du service universel et le champ des services réservés a, en effet, été transposée par l'article 19 de la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire du 25 juin 1999, transposition qui doit beaucoup à notre collègue François Brottes.

M. Michel Bouvard.

C'est vrai !

M. Jean-Paul Chanteguet.

Il ne reste donc plus à prendre en compte que les dispositions posant le cadre des activités en concurrence. Sur ce point, la majorité sénatoriale, tout en tentant de s'approprier ce débat, vient d'« annoncer la couleur » avec le dépôt d'une proposition de loi de privatisation de La Poste.

Chers collègues, voulons-nous protéger La Poste par ordonnances ou la privatiser par une proposition de loi ? Pour nous, pas d'hésitation. Je rappellerai à nos collègues qui seraient tentés par le second choix que la Deutsche Post, qui vient d'entrer en Bourse avec tonitruance, a nnonce déjà des fermetures de centres de tri et 4 000 suppressions d'emplois.

Enfin, un dernier argument emporte la décision dans ce domaine : comment la France peut-elle espérer faire accepter ses vues à Bruxelles dans la difficile négociation de la future directive postale si elle n'apure pas au plus vite le passif de transposition ? Là encore, le doute n'est pas permis : il faut transposer par ordonnances.


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J'aborderai à présent le cas autoroutier.

M. le président.

Brièvement, je vous prie !

M. Jean-Paul Chanteguet.

Et je voudrais m'adresser à ceux qui imaginent dans ces transpositions une liquidation organisée de nos intérêts.

De quoi s'agit-il ? Nous allons simplement, à la demande de la Commission européenne, devoir mettre fin au système de l'« adossement » des extensions autoroutières, système qui consistait à financer les nouveaux tronçons par des surpéages au réseau existant.

Cette obligation découle à la fois d'une directive, la directive « travaux » 93/37/CEE du 14 juin 1993, qui pose la règle de l'appel d'offres dans tous les marchés publics de travaux, ainsi que de l'article 86 du traité de l'Union européenne interdisant les entraves à la libre concurrence.

Nombreux sont ceux qui redoutent un nouveau système plus défavorable que le précédent, avec notamment une inflation des péages. Je pense, et j'espère vous en convaincre, que le futur système sera au contraire plus favorable, notamment grâce au savoir-faire dont on peut créditer l'équipe actuellement chargée de l'équipement et des transports autour de son ministre.

Ce système sera tout d'abord plus favorable pour l'usager, avec la disparition des surpéages. Par ailleurs, plusieurs aménagements seront introduits en compensation : participation des collectivités publiques, - et l'on retrouve certes là l'usager-contribuable - mais aussi allongement des concessions existantes à treize, voire quinze ans, c'est une des mesures de l'ordonnance de transposition.

Par ailleurs, le statut des six sociétés d'économie mixte concessionnaires d'autoroutes sera ajusté afin qu'elles puissent soumissionner dans une concurrence équilibrée : elles seront certes privées de la garantie de l'Etat - c'est la deuxième mesure importante de l'ordonnance - mais seront dotées d'un capital susceptible, et c'est le fait nouveau, de produire des dividendes.

M. le président.

Je vous prie de bien vouloir conclure.

M. Jean-Paul Chanteguet.

Monsieur le secrétaire d'Etat, malgré les réserves que j'ai formulées et qui ne manqueront pas d'être rappelées par d'autres orateurs, et compte tenu des engagements pris et des modifications qui ont été acceptées, le groupe socialiste vous apportera son soutien. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Bernard Roman, président de la commission.

Excellent !

M. le président.

La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, beaucoup de choses ont déjà été dites sur les motifs de rejet de ce projet de loi prévoyant une transposition massive de directives européennes par voie d'ordonnances.

Sur les interventions successives qui ont traduit l'attachement des parlementaires au droit d'élaboration de la loi et de contrôle du Gouvernement qui est le nôtre, je ne reviendrai pas, sauf pour rappeler que ce qui est en cause ce soir, ce n'est pas seulement le droit du Parlement par rapport au Gouvernement, mais c'est aussi le droit du Parlement national par rapport à l'Europe.

Certes, il y a un péché originel dans le traité de Maastricht que beaucoup d'entre nous ont ici combattu à juste titre parce qu'il n'aboutissait qu'à la mise en oeuvre d'une subsidiarité au rabais, d'une subsidiarité qui ne définissait pas clairement ce qui relevait de la compétence de l'Union européenne et ce qui relevait de la compétence des Etats nations, mais qui conduisait à considérer que les

Etats étaient seulement autorisés à légiférer dans les domaines où l'Union européenne ne pouvait être meilleure.

Le paquet de directives qui nous est aujourd'hui présenté est le résultat de cette dérive d'une Europe qui légifère trop. Mais au moins pouvions-nous, jusqu'à ce jour, nous prononcer sur les contenus des directives, exprimer notre point de vue sur les conditions de leur application en France, faire valoir les garanties demandées quant à leur mise en oeuvre. Tel n'est plus désormais le cas : il faut bien constater que le Parlement est dépouillé de son pouvoir et le fait que le Parlement européen ait eu à étudier les directives, comme l'a rappelé l'orateur du groupe socialiste lors d'une explication de vote, ne peut être pour moi en aucun cas une justification, à moins de considérer que les parlements nationaux sont désormais frappés d'obsolescence et que leur mission est devenue inutile.

Est-ce comme cela que la parti socialiste conçoit la souveraineté partagée ? L'exposé des motifs du texte qui a été présenté au Sénat précisait que la loi d'habilitation n'est pas demandée pour des directives dont l'objet et la portée politique justifient un débat de la représentation nationale.

On croit rêver quand on examine la liste des sujets concernés.

La réécriture du code de la mutualité, et non la simple transposition d'une directive qui, par ailleurs, marginalise et menace l'existence même du système français de mutualité, constitué sur le principe de solidarité, ne justifie-t-elle pas un débat de la représentation nationale, monsieur le secrétaire d'Etat ? La modification de l'organisation du financement du système autoroutier, dont le rôle est essentiel pour le développement économique du pays, pour les échanges et pour l'aménagement du territoire, ne justifie-t-elle pas un débat, ne serait-ce qu'au regard des enjeux financiers pour le budget de l'Etat ? D ois-je rappeler que la précédente réforme des SEMCA a fait l'objet dans cet hémicycle d'un long débat engagé par le gouvernement d'Edouard Balladur, lequel s'est conclu par l'adoption d'un schéma autoroutier d'ensemble ? Pourquoi ce qui a été possible pour la transcription de la directive ferroviaire ne l'est pas pour les autoroutes ? Pouvons-nous admettre que le Parlement ne se prononce pas sur la réorganisation du secteur autoroutier alors qu'il n'aura déjà même plus à se prononcer sur les investissements futurs puisque Mme Voynet a refusé les amendements que nous avons défendus pour permettre à la représentation nationale de voter les schémas de services collectifs de transports créés par la loi d'aménagement du territoire ? L'organisation du service postal, dont plusieurs élus avant moi, notamment Georges Sarre et Gilbert Biessy, ont rappelé la place qu'il tient dans le monde rural, ne justifie-t-elle pas un débat au Parlement après que le Gouvernement a mis un terme au moratoire Pasqua sur les services publics en zone rurale ? J'en viens à l'élément à mon sens le plus représentatif d'une certaine méfiance du Gouvernement vis-à-vis du Parlement : la directive Natura 2000.

La transposition de la directive Natura 2000 n'était pas prévue dans la liste initiale des ordonnances, puisqu'elle devait faire l'objet d'un projet de loi, qui avait même donné lieu à une discussion au sein du Comité national


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de pilotage des sites Natura 2000, créé après une première révolte, en 1996, des élus de toutes sensibilités contre la mise en oeuvre du dispositif prévue par Mme Lepage. Des élus, siégeant sur tous les bancs, ont protesté et le gouvernement Juppé a suspendu la procédure et mis en place un système de concertation pour la mise en oeuvre de Natura 2000 en France, avec une révision à la baisse des objectifs du classement.

M. Jean-Claude Lemoine.

C'est vrai !

M. Michel Bouvard.

Or, mes chers collègues, je suis quelque peu étonné par la façon dont les choses se sont passées : l'abandon du projet de loi que nous étions en train de discuter en concertation n'a fait l'objet d'aucune information de la ministre vis-à-vis des membres du Comité national de suivi Natura 2000, dont je fais encore partie pour quelque temps en tant que président de l'ANEM, l'Association nationale des élus de la montagne. Nous n'avons même pas été informés par elle que cela se ferait par voie d'ordonnances.

Une fois de plus, la ministre de l'environnement et de l'aménagement du territoire fait preuve d'une défiance totale vis-à-vis des acteurs du monde rural, et notamment des acteurs du monde de la montagne.

Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République.

Scandaleux ! Mme Geneviève Perrin-Gaillard et M. Jean-Paul Chanteguet.

Mais c'est faux !

M. Bernard Roman, président de la commission.

Vous faites un procès d'intention !

M. Michel Bouvard.

Pourtant, monsieur le secrétaire d'Etat, la directive Natura 2000 peut encore être sauvée,...

M. Guy Hascoët, secrétaire d'Etat à l'économie solidaire.

Cela fait plaisir !

M. Michel Bouvard.

... d'autant qu'il est de l'intérêt de notre pays d'avoir une gestion intelligente des zones d'intérêt écologique. Elle peut être sauvée si vous maintenez la disposition adoptée par le Sénat et si donc nous avons ici un débat permettant d'intégrer, dans le texte de loi, une déclaration interprétative sur la manière dont nous appliquerons la directive en France, comme cela a été fait en son temps par un gouvernement précédent pour la ratification de la convention alpine, texte qui, pour les élus que nous sommes et singulièrement pour les élus montagnards, comportait autant d'inconvénients et suscitait autant de craintes que Natura 2000.

I l serait donc possible de sauver la procédure Natura 2000 et d'arriver à un résultat concerté, qui certes prendrait du temps et mériterait qu'on en discute.

Si, en revanche, nous empruntons la voie des ordonnances, ne vous faites aucune illusion : il y aura un conflit ouvert, il y aura une réelle fracture territoriale dans ce pays car nous n'avons pas l'intention de nous laisser imposer un dispositif qui porte en lui-même un certain nombre de dangers.

M. Christian Estrosi.

C'est clair !

M. Michel Bouvard.

Quand on examine l'article 5 de la directive, qui dispose que l'Etat français peut être privé de la liberté d'inscrire ou non un site, ou d'autres de ses dispositions, qui prévoient que des activités humaines pourront être interdites si elles portent atteinte à l'intégrité d'un site, comment ne pas être inquiet ? Comment ne pas être inquiet lorsque l'on sait comment les choses ont été engagées depuis quelques années ? Dois-je rappeler que la première liste envoyée par Mme Voynet à Bruxelles a fait l'objet d'une contestation d'une dizaine d'associations représentées au sein du comité national Natura 2000 et d'un recours devant le Conseil d'Etat, et qu'elle a été annulée pour excès de pouvoir et défaut de concertation ? Comment ne pas être inquiet, compte tenu de ce passé, devant le fait que la directive pourra être ratifiée par voie d'ordonnances, en l'absence de tout débat parlementaire ? Comment ne pas être inquiet lorsqu'on sait qu'un certain nombre de sites ont été transmis sans l'aval des communes ? Alors même que les gouvernements successifs se sont engagés à ce que les choses se passent sur la base du volontariat, plusieurs centaines de communes ont vu des sites transmis sans avoir donné leur accord. L'Association nationale des élus de la montagne a d'ailleurs établi un décompte exact de ces communes.

Qui plus est, alors que le débat avait pu repartir sur des bases saines après des rappels à l'ordre du comité national du suivi, avec une réduction des sites dans certains cas, nous avons vu quantité de modifications entre ce qui avait été accepté dans les comités départementaux Natura 2000 et ce qui était effectivement transmis à Bruxelles.

Vous comprendrez que notre inquiétude soit totale.

J'ajoute qu'à la directive Natura 2000 est venue par la suite s'ajouter la directive « Oiseaux » et qu'on a dit qu'il fallait classer encore plus. Aujourd'hui, on nous dit qu'il n'y a pas encore assez de sites classés.

M. le président.

Si vous pouviez arriver à votre conclusion, mon cher collègue...

M. Bernard Roman, rapporteur de la commission.

M. Bouvard s'emporte !

M. Michel Bouvard.

Je vais en terminer, monsieur le président.

Il y a un an, alors que plus de 20 % du territoire de montagne du massif alpin étaient déjà classés, on nous a dit que ce n'était pas assez.

Vraiment, il me semble qu'un débat doit avoir lieu ici même...

M. Didier Quentin.

M. Bouvard a raison !

M. Michel Bouvard.

... sur la manière dont on entend faire vivre la procédure. Cela ne peut pas se faire par voie d'ordonnances : ce serait une marque de défiance vis-à-vis du Parlement, ce serait une marque de défiance vis-à-vis des élus locaux, qui n'ont aucune leçon à recevoir en matière de protection de l'environnement.

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

Ce n'est pas sûr !

M. Michel Bouvard.

Si, aujourd'hui en France, les territoires de montagne abritent le plus grand nombre d'espèces faunistiques et floristiques du pays, c'est parce que des générations de montagnards ont permis que ces espèces soient protégées et qu'elles arrivent jusqu'à nous.

M. Jean-Paul Chanteguet.

On connaît ce discours !

M. Michel Bouvard.

Cela relève du fantasme que de considérer que les montagnards voudraient tout liquider.

Nous savons où est l'intérêt de la collectivité, mais nous n'admettons pas que, sans notre accord, on protège, on définisse des modes de gestion sans notre accord, on interdise l'exploitation de forêts parce qu'il faut protéger des insectes xylophages, on bloque des possibilités de développement touristique - nécessaire à l'emploi et au maintien de l'activité humaine dans nos régions - au


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motif que nous sommes à proximité d'un site répertorié à l'inventaire futur de Natura 2000. Or tout cela, nous le vivons depuis maintenant cinq ans. Nous souhaitons, je le dis très fermement, que le débat puisse avoir lieu ici même, et non dans les coulisses du ministère de l'environnement.

Je terminerai, monsieur le président, en disant que, pour cela, l'Association nationale des élus de la montagne, réunie à Remiremont il y a quelques semaines, a adopté une motion à l'unanimité, toutes sensibilités politiques confondues.

Nous vous demandons, monsieur le secrétaire d'Etat, que le débat puisse avoir lieu à l'Assemblée et que le Gouvernement ait la sagesse de ne pas revenir sur les dispositions adoptées par le Sénat. Ce serait le meilleur moyen de permettre à la France de respecter ses engagements européens et d'arriver à une solution consensuelle.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

Il faudrait que les temps de parole soient mieux adaptés car, visiblement, cinq minutes ne suffisent pas.

M. Michel Bouvard.

Comment faire pour traiter soixante textes en cinq minutes ?

M. le président.

Il s'agit d'un problème à régler au sein des groupes.

La parole est à M. Jacques Desallangre.

M. Jacques Desallangre.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, l'omnipotence du Parlement a-telle pu un jour nuire à l'action du pouvoir exécutif et à la conduite de la politique de la nation ? Aujourd'hui, l'impotence du Parlement va-t-elle conduire à l'affaiblissement de la démocratie, de la République et de leur corollaire, la souveraineté populaire ? La ratification des traités de Maastricht et d'Amsterdam a dépossédé le Parlement de sa mission devant les Français : définir l'intérêt général. Face à la multiplication des règlements et directives européennes, le Parlement n'est plus maître de l'opportunité. La transposition est alors pour nous l'unique occasion de déterminer les moyens mis en oeuvre pour appliquer des règles, des règles définies par d'autres.

La procédure instituée par l'article 88-4 de la Constitution ne saurait à cet égard être satisfaisante car elle borne de façon draconienne les pouvoirs du Parlement. Le Parlement est juste consulté. Il s'agit là d'un pouvoir illusoire qui permet de conserver une bonne conscience démocratique ou une mauvaise.

Notre rapporteur, désabusé, n'avoue-t-il pas que la transposition des directives « constitue la seule fenêtre d'expression parlementaire » ?

M. Bernard Roman, président de la commission.

C'est du réalisme !

M. Jacques Floch, rapporteur.

Je n'ai jamais dit ça !

M. Jacques Desallangre.

La construction européenne a considérablement réduit notre rôle.

De surcroît, le Gouvernement nous demande de renoncer à nos attributions. Nous devenons progressivement une chambre consultative et d'enregistrement. Nous ne pouvons plus que « nous exprimer », entre guillemets, sur une loi faite par d'autres. Il est symptomatique que seule notre commission des lois ait été saisie et qu'elle se soit bornée à reconnaître la recevabilité du projet.

Cette façon de procéder par ordonnances sur des sujets majeurs illustre le décalage entre le discours entendu et largement répandu en faveur du renforcement des pouvoirs du Parlement et la pratique qui nous confisque même notre expression.

Les députés de Mouvement des citoyens ne peuvent accepter que la représentation légitime des citoyens soit a insi considérée. Comment demander aux citoyens d'adhérer, de faire confiance aux politiques si leurs représentants sont dessaisis de leurs prérogatives, de leur droit et de leur devoir : faire la loi et définir l'intérêt général ? Malheureusement, la loi n'est plus l'expression de la volonté générale. Les ordonnances qui verront le jour n'auront pas été débattues, mais négociées avec Bruxelles et les groupes d'intérêt. Il est, certes, légitime d'avoir des échanges avec les représentants des intérêts sectoriels, mais cela ne saurait être suffisant pour dégager l'intérêt géné ral. Et le consensus entre le Gouvernement et le Président de la République ne saurait remplacer la légitimité du pouvoir législatif.

Le Gouvernement invoque l'extrême urgence de ces transpositions, dont certaines patientent pourtant depuis près de dix ans. Il est paradoxal que le pouvoir exécutif tire argument de ses propres lenteurs et dysfonctionnements pour soustraire au Parlement ses prérogatives.

Par ailleurs, la France serait peut-être moins en retard pour les transpositions si un grand nombre de directives n'était pas contraire à notre modèle de société et aux intérêts des citoyens.

On nous dit que l'habilitation ne serait pas demandée

« pour les directives dont la portée politique justifie un d ébat devant la représentation nationale ». Mais la réforme du code de la mutualité, l'avenir de La Poste, les services publics face à la concurrence, l'aménagement de notre territoire - les autoroutes et Natura 2000 -, ne sont pas des sujets techniques : ce sont de vraies problématiques politiques qui intéressent les citoyens dans leur vie quotidienne...

Il est inecceptable que soit escamoté le débat, si souvent réclamé, sur l'avenir de La Poste en particulier et sur les services publics en général. Nous devrions définir précisément les concepts, leur étendue et les modes de financement afin d'éviter, comme pour les télécommunications, que le service public ne se décompose progressivement face à la politique libérale de la Commission européenne.

De même, il est inconcevable que nous ne puissions débattre de la refonte complète du code de la mutualité.

Le projet impose aux mutuelles de justes principes, que le Mouvement des citoyens souhaiterait voir imposés également aux assurances : absence de sélection et de questionnaires médicaux, interdiction de toute exclusion. Mais, dans le même temps, le Gouvernement se soumet à l'injonction de transposer les directives assurancielles pour créer un marché unique de l'assurance complémentaire maladie.

M. Michel Bouvard.

Un cadeau pour Bébéar !

M. Jacques Desallangre.

Or les sociétés d'assurances fondent leur démarche sur l'évaluation précise du risque individuel et sur l'exclusion de certaines pathologies non rentables.

Il y a bien deux perceptions opposées. Qu'adviendrat-il lorsque les assureurs et les mutuelles se concurrenceront réellement sur un même marché ? Allons-nous vers un système à multiples vitesses, balayant la mutualisation du risque maladie et la péréquation ? Les mutuelles pourront-elles faire face à cette


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concurrence déloyale, conserver à la fois leurs oeuvres sociales, leurs valeurs et l'équilibre financier imposé par les règles prudencielles ? Toutes ces interrogations ne sont en rien techniques : elles sont politiques et méritent un large débat de la représentation nationale devant les citoyens. C'est pourquoi je défendrai tout à l'heure un amendement visant à supprimer l'article 3 du projet de loi.

M. Michel Bouvard.

Très bien !

M. Jacques Desallangre.

Sur tous ces sujets éminemment politiques, les députés du Mouvement des citoyens ne sauraient accepter que le Parlement se mutile en capitulant face aux directives et projets d'ordonnances,...

M. Michel Bouvard.

Très bien !

M. Jacques Desallangre.

... car nous amputerions ainsi la souveraineté populaire. (M. Michel Bouvard applaudit.)

Nous voterons contre le projet d'habilitation. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

La parole est à Mme Odile Saugues.

Mme Odile Saugues.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, mon intervention portera sur l'article 4 du projet de loi, qui traite de la modernisation du régime d'exploitation des autoroutes.

Avant d'en venir au coeur de la réforme que nous propose le Gouvernement, je ferai deux remarques préalables.

La première, c'est que nous avons quelque peu tardé à traduire dans les faits une réalité que nous connaissons depuis longtemps puisque le système de financement de notre politique autoroutière était incompatible avec la directive européenne « travaux » du 14 juin 1993.

Nous savons aussi que cette politique autoroutière, ses réussites, mais aussi ses excès ont fait l'objet de nombreux rapports, dont certains sont éloquents - je pense à ceux de l'inspection générale des finances, aux travaux de la commission d'enquête sénatoriale...

M. Michel Bouvard.

Certains disaient que l'on n'avait pas besoin d'autoroute en Maurienne et que les morts avaient été pris en compte dans les calculs économiques !

Mme Odile Saugues.

Mes chers collègues, je vois que vous vous réveillez, et je vous en remercie,...

M. le président.

Monsieur Bouvard, laissez

Mme Saugues s'exprimer.

Mme Odile Saugues.

... tout en remarquant votre courtoisie.

Je pense également aux sept rapports de la Cour des comptes, qui pointe régulièrement et sans concession les dérives liées à l'adossement.

J'en viens à ma seconde remarque.

Notre politique autoroutière mériterait un vrai débat et ce débat devrait avoir lieu ici même. En effet, notre système autoroutier, dans sa configuration actuelle, repose sur des choix politiques actés dans les années 50. Sa mise en oeuvre, ses évolutions, ses accélérations, ont bien souvent échappé au contrôle du Parlement, parfois du fait de la volonté même du législateur.

Les exemples européens ne manquent pas. Ainsi, aux Pays-Bas, un schéma national intermodal est validé par le Parlement. De même, le Parlement est associé à l'approbation des schémas directeurs en Suisse, en Espagne, en Autriche et en Suède.

Ces deux remarques faites, je veux vous faire part, monsieur le secrétaire d'Etat, de mon appréciation sur votre texte et, au-delà, vous indiquer mon attente d'une vraie réforme autoroutière en France.

Avec votre projet d'ordonnance, vous proposez de mettre un terme au système d'adossement et de faire désormais respecter les principes de transparence et d'égalité de traitement lors du choix du concessionnaire de nouvelles sections autoroutières. Dorénavant, les marchés seront passés de façon ouverte et il faudra donc que les six sociétés d'économie mixte concessionnaires d'autoroutes soient à égalité de chances avec les autres soumissionnaires. Elles s'apparenteront donc à des sociétés de droit commun.

Pour y parvenir, l'ordonnance préparée par le Gouvernement prévoit la suppression de la garantie de l'Etat à ces sociétés et un allongement substantiel de la durée de la concession, procurant ainsi un meilleur délai d'amortissement des investissements et une meilleure rentabilité des opérations.

Pour ma part, je soulignerai que ce nouveau système me paraît être un progrès, en particulier parce que la politique routière devrait bénéficier du recyclage des dividendes des sociétés mixtes concessionnaires d'autoroutes.

Enfin, je me félicite de la volonté que vous avez manifestée de ne pas occulter le débat sur les péages en prévoyant un projet de loi spécifique.

Au-delà de ses aspects techniques, cette adaptation est en fait une réforme de grande ampleur. Elle participe à la moralisation des pratiques comptables dans un secteur qui n'a pas toujours été à l'abri des scandales financiers, mais aussi de décisions discutables sur le plan économique, malheureuses sur le plan environnemental, étonnantes en matière d'aménagement du territoire, incohérentes en matière de tracé, et parfois contestables en matière de concertation.

Elue du Massif central, j'ai en mémoire le feuilleton de l'autoroute A 89 reliant Clermont-Ferrand à Bordeaux.

Quel que soit le scénario retenu, elle ne connaîtra pas un trafic supérieur à 6 000 véhicules par jour. Quant à son coût prévisionnel de 163 milliards de francs, il est déjà dépassé. En 1995, la direction de la prévision concluait même à une perte financière supérieure à 10 milliards de francs pour la société concessionnaire.

Par cet exemple concret, je veux montrer que nous ne pouvions pas faire l'économie de cette réforme, pour les SEMCA, pour l'Etat, et pour tous les contribuables.

Certes, le régime des concessions et de l'adossement a permis à notre pays de se doter d'un réseau autoroutier très performant, avec une très grande qualité de service et un haut niveau de sécurité. Mais force est de constater l'existence de faiblesses et de dérives dans le système. Oui, il y a eu des surinvestissements, des doubles emplois dans les dépenses publiques, des dépassements fréquents des coûts prévisionnels et des excès qui n'étaient pas toujours justifiés par l'infrastructure, notamment en matière de remembrements.

Nous devons faire face à un endettement préoccupant du secteur autouroutier avec des SEMCA fragilisées par une situation financière hors normes et l'accélération brutale, décidée en novembre 1993, de la réalisation du schéma directeur.

Cet article 4 du projet de loi ne corrigera pas tous les excès de notre politique autoroutière mais il constitue la première étape d'une réforme plus globale visant à inscrire notre système autoroutier dans le cadre d'une politique intermodale des transprots plus respectueuse de


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l'environnement et plus soucieuse de l'attente des Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. Jean-Claude Lemoine.

M. Jean-Claude Lemoine.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le Gouvernement justifie le recours aux ordonnances, d'une part, par le retard pris par notre pays dans la transposition des directives et l'urgence de le combler, d'autre part, par le caractère très technique des dispositons en cause dont « la teneur, fortement contrainte par les dispositions communautaires, n'appellerait qu'une intervention limitée du législateur », ce qui veut sans doute dire que les élus n ationaux que nous sommes sont incapables de comprendre et d'adapter ces textes.

Certes, les dispositions combinées de l'article 38 de la Constitution et de l'article 249 du traité instituant la C ommunauté européenne fondent juridiquement le recours à cette procédure. Des précédents existent en la matière : les lois du 14 décembre 1964, 6 juillet 1968, 26 décembre 1969 ont ainsi autorisé le Gouvernement à prendre les ordonnances nécessaires à l'application des directives permettant de réaliser la liberté d'établissement et de prestations de services à l'intérieur de la Communauté. Toutefois, cette procédure est restée exceptionnelle.

L'actuel projet de loi n'est pas acceptable : d'abord en raison de son ampleur - il porte sur pas moins de quarante-sept directives et sept règlements ; ensuite en raison de la multiplicité des thèmes abordés puisqu'il nous est demandé d'habiliter le Gouvernement à transposer des directives portant sur des sujets aussi divers que la santé, le travail, la consommation ou le code de la mutualité.

En réalité, ce texte prive le Parlement de la possibilité d'étudier dans le détail les dispositions transposant le d roit communautaire dans notre droit interne et l'empêche donc de l'améliorer. Or, certaines directives portent sur des préoccupations majeures des Français et ne sauraient être entérinées en catimini. De plus, une telle démarche va à l'encontre de l'objectif que nous d evons poursuivre : faire accepter l'Europe par les citoyens français.

M. Michel Hunault.

Très juste !

M. Jean-Claude Lemoine.

Il n'est pas acceptable que le P arlement dépouillé de ses prérogatives essentielles comme le droit d'amendement, accorde un blanc-seing au Gouvernement. Comme le disait le rapporteur du Sénat, si une directive est négociée et transposée par le Gouvernement, que reste-t-il au Parlement ? Bien sûr, on sait que certaines directives attendent depuis près de vingt ans d'être transposées dans le droit interne. Mais, à l'évidence, l'examen de certains textes aurait pu être différé pour nous mettre à l'abri des sanctions prévues et nous permettre d'étudier les dispositions de manière approfondie.

J'en veux pour preuve, l'examen, la semaine dernière, du projet de loi portant adaptation au droit communautaire en matière de santé des animaux et de qualité sanitaires des denrées d'origine animale.

M. Michel Bouvard.

Exactement !

M. Jean-Claude Lemoine.

Le débat parlementaire consacré à la transposition de cette directive a en effet permis d'enrichir notablement le texte initial.

Le Sénat, en première lecture, a retiré du projet de loi les directives concernant Natura 2000, les services postaux, la sauvegarde des droits à pension complémentaires des travailleurs salariés et non salariés qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté. Cette position, même si elle va dans le bon sens, reste à mon sens insuffisante.

L'importance des sujets évoqués dans ces directives et leurs implications pour la vie quotidienne interdit l'éviction du débat démocratique.

Telles sont les raisons, parmi bien d'autres, pour lesquelles je voterai contre ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à Mme Marie-Hélène Aubert.

Mme Marie-Hélène Aubert.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, chers collègues, comme beaucoup de mes collègues, je marquerai tout d'abord ma réprobation devant la procédure utilisée. (Applaudissementss ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) La pratique des ordonnances nous ramène loin en arrière, à l'époque des décrets-lois. Elle ne peut que laisser perplexes les députés Verts, attachés à la démocratie parlementaire, qui espéraient, et espèrent toujours, de cette majorité un renforcement du rôle du Parlement. Or nous avons plutôt le sentiment d'une grande désinvolture,...

M. Christian Estrosi, M. Michel Inchauspé et M. Michel Bouvard.

Très juste !

M me Marie-Hélène Aubert. ... malgré les avancées indéniables qu'apportent pourtant la plupart de ces textes, dont nous pourrons à peine discuter.

Tout d'abord, transposer par ordonnances, c'est s'interdire d'entrer dans le détail des textes...

M. Michel Hunault.

Très juste !

Mme Marie-Hélène Aubert.

... votés ici en quatre articles au lieu d'être discutés sujet par sujet. C'est offrir carte blanche au Gouvernement en ayant simplement la possibilité de ratifier des mesures d'ici à quatre ou huit mois selon les textes.

Nous devrions nous exprimer illico sur vingt-cinq directives. Mon temps de parole étant de cinq minutes, cela fait donc approximativement douze secondes par directive pour les députés Verts. (Applaudissement sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Qui plus est, ces sujets sont extrêmement techniques.

Il est d'usage de souligner le décalage entre l'élu généraliste et les sujets de plus en plus complexes et spécifiques, sur lesquels il faut légiférer. Comment en effet se prononcer sérieusement sur les rayonnements ionisants, la mise sur le marché de produits biocides, les accidents majeurs impliquant des substances dangereuses ou encore les médicaments vétérinaires ? Si le politique est parfois à la traîne, sur la maladie de la vache folle, par exemple, a-t-il réellement les moyens de traiter ces sujets ? Si la liste des directives n'est disponible que depuis le 24 novembre, certains textes ont pu faire l'objet de rapports ou de discussions avant l'adoption desdites directives. Mais le rôle et les moyens de la délégation pour l'Union européenne sont trop limités et les débats en séance publique qu'elle demande ne sont pas toujours inscrits à l'ordre du jour. Je ne citerai qu'un exemple récent, celui de la directive 90/220, en cours de révision, relative aux organismes génétiquement modifiés. Voilà


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bien un sujet sur lequel les Français aimeraient avoir l'occasion d'entendre la représentation nationale avant que ne soient prises les décisions définitives. Mais il n'y avait, paraît-il, pas de place dans l'ordre du jour pour un débat.

Qu'en est-il de la possibilité pour le Parlement de débattre de ces directives avant que nos ministres les signent ? Car ce n'est plus tellement maintenant que la France s'est engagée qu'il faut nous consulter, mais en amont.

Cela dit, on est européen ou on ne l'est pas ! L'Europe ne peut se concevoir à la carte et je voudrais me réjouir de la transposition de presque toutes les directives qui sont souvent utiles, bienvenues. Dans la majorité des cas, elles améliorent notre législation. Quand ce n'est pas le cas, libre à nous de garder notre mieux-disant social.

Il est inadmissible qu'un Etat comme la France qui prétend jouer un rôle sur la scène internationale et en Europe accumule un retard aussi honteux dans la transposition de directives qu'il a pourtant approuvées. Il y a là un dysfonctionnement, pire, une lâcheté des exécutifs successifs qui n'osent pas assumer leurs votes et leurs décisions devant les Français en préférant parfois les faire apparaître comme d'insoutenables diktats européens.

M. Michel Hunault.

C'est un peu exagéré !

Mme Marie-Hélène Aubert.

Je me réjouis donc que nous entamions résolument une mise à niveau. Elle n'a rien de glorieux, mais elle est tout simplement indispensable. Quelle crédibilité aurait à Nice une présidence européenne qui se situe parmi les tout derniers de la classe en matière de transposition ? Il en va de même pour beaucoup de textes internationaux d'ailleurs. Ne s'apprête-t-on pas, cinquante ans après, à ratifier le protocole no 1 de la convention de Genève ? Je me félicite également de la transposition des directives Natura 2000 - directive « habitats » et directive

« oiseaux » - utiles et nécessaires. Les ratages initiaux dus aux blocages de certaines personnes mal informées ou de mauvaise foi, à une certaine froideur administrative aussi, il est vrai, ne doivent pas nous détourner de l'objectif de recenser les parties de notre territoire abritant les espèces de la faune et de la flore sauvages qui le méritent, afin de les préserver, pour que nos enfants et petits-enfants puissent en profiter un jour.

M. Michel Bouvard.

Pour ça, il n'y a pas besoin de directive.

Mme Marie-Hélène Aubert.

Il est important que la France, dont le patrimoine naturel est encore si riche, malgré de sévères dégradations, fasse ce travail rapidement et sérieusement.

La transposition d'aujourd'hui constitue un pas important. Rappelons que par rapport au délai maximal prévu pour la transposition, nous avons six ans de retard, pour la directive « habitats »...

M. Jacques Floch, rapporteur.

C'est vrai !

Mme Marie-Hélène Aubert.

... et dix-neuf pour la directive « oiseaux ». Nous risquons cette année, outre des astreintes, d'être privés du versement des fonds structuels.

Or, sur le terrain, les choses avancent. Plus de mille propositions ont été envoyées et la concertion s'est largement améliorée et tout le monde commence à voir l'intérêt de cette démarche. Il était grand temps.

Qu'il faille un débat orienté et serein sur le rôle et l'application de Natura 2000, nous en sommes d'accord.

Mais quand on voit à quelles caricatures, à quels dérapages ont conduit les débats sur la chasse,...

M. Michel Bouvard.

La faute à qui ? N'oubliez pas la décision du Conseil d'Etat.

Mme Marie-Hélène Aubert.

... on imagine hélas avec quelle mauvaise foi aurait été traitée cette directive, c omplètement dénaturée par l'obsession de certains d'entre vous pour la chasse. Il n'y a qu'en France qu'on voit ça ! Si aucun parlementaire ne peut accepter une procédure par ordonnance, nous pas plus que les autres, je ne vois pas néanmoins quelles solutions auraient pu être trouvées pour combler un tel retard.

C'est pourquoi les députés Verts, tout en demandant une réforme énergique pour permettre à notre assemblée de mieux apprécier en amont les projets de textes européens, voteront cette transposition, même par ordonnances, des directives communautaires. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste.)

M. Michel Bouvard.

Ce n'est vraiment pas glorieux !

M. le président.

La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes.

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, en tant que rapporteur pour avis du budget des postes et télécommunications, je me suis plus particulièrement intéressé aux dix directives que le projet de loi d'habilitation nous propose de transposer par ordonnances dans ces deux domaines.

Je tiens d'ailleurs à préciser que la commission supérieure du service public de la poste et des télécommunications, à laquelle j'appartiens comme d'autres collègues de cette assemblée et dans laquelle siègent à parité députés et sénateurs, a été saisie au fond du texte pour le moins sibyllin de la loi d'habilitation mais aussi des ordonnances mêmes. C'est la loi et le Gouvernement l'a donc respectée.

S'agissant des télécommunications, je ne suis pas certain pour la moitié des directives concernées, qu'elles aient besoin d'être transposées puisqu'elles ont déjà fait l'objet de transpositions en droit français. Mais peut-être que deux précautions valent mieux qu'une.

Toujours est-il que sur le fond, ces directives n'appellent pas de ma part de remarque particulière car elles viennent préciser voire actualiser notre droit dans un secteur en mutation constante et rapide. Elles confirment toutefois la nécessité de desserrer le carcan de l'homologation des tarifs de France Télécom. Notre collègue Bataille a déposé quelques amendements à ce sujet.

Quant au secteur postal, il s'agit aujourd'hui d'achever la transposition de la directive du 15 décembre 1997, déjà opérée pour partie par l'article 19 de la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire. Cet article définit le contenu du service universel qui doit être garanti à chaque Européen. Dans notre pays, c'est La Poste qui assume avec succès le service universel. Il délimite en outre le périmètre des services réservés - ce que d'autres appellent le « monopole » - à La Poste pour que celle-ci puisse compenser les charges inhérentes à la fourniture d'un service public postal de qualité tout en assurant les mêmes prix sur l'ensemble du territoire.

M. Michel Bouvard.

Importante préoccupation !

M. François Brottes.

Je rappellerai que, dans sa définition du service universel et des services réservés, la France a retenu la totalité des possibilités offertes par la directive de 1997.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

Il nous est proposé dans ce projet de loi de terminer la transposition de la directive de 1997. Rien de plus. Plusieurs mesures de transposition manquent à l'appel. Il faut établir un régime de licence d'opérateur postal précisant le contenu des obligations, les modalités d'attribution, les règles de contrôle pour ne pas livrer le marché, en dehors du service réservé, à n'importe quel intervenant. Il faut modifier le régime de sanctions et rectifier les dispositions législatives obsolètes en matière de distribution.

Pour autant, dans cette transposition, le Gouvernement ne souhaite pas créer une autorité indépendante de régulation du marché postal. La directive ne contient d'ailleurs aucune obligation en ce sens. La régulation sera donc assurée, y compris pour l'attribution des licences et le contrôle, par le ministre chargé des postes.

En première lecture, le Sénat a supprimé du champ d'habilitation la transposition de la directive postale, jugeant la question trop importante pour qu'elle donne lieu à une ordonnance.

M. Jean Besson.

Il a raison.

M. François Brottes.

En réalité, chers collègues, il s'agit là d'un prétexte et même d'un piège tendu au service public postal.

Un prétexte car la majorité sénatoriale entend se saisir de l'occasion offerte par la transposition partielle pour privatiser La Poste - une proposition de loi a été déposée en ce sens -, pour briser l'unicité des services en isolant les services financiers, pour accélérer la dérégulation et l'ouverture à la concurrence, bref pour fragiliser le service public postal. Sur ce point précis, remarquons que le Sénat a adopté une résolution portant sur la future directive européenne postale d'après 2003, de M. Bolkestein, qui préconise une réduction du service réservé dont bénéficie La Poste supérieure au niveau voté par les députés européens, toutes tendances confondues, en commission des politiques régionales. Je veux d'ailleurs ici leur rendre hommage car ce vote contrecarre efficacement le projet du commissaire Bolkestein qui portait définitivement atteinte au service public.

Nous voyons donc, avec ce prétexte dont s'est servi le Sénat, que certains peuvent encore tenir dans leur département des discours sur le service public qui sont en totale opposition avec leurs actes au Parlement.

Mais je parlais aussi de piège. Je suis très favorable à la transposition par ordonnances : il y a urgence à nous mettre en règle par rapport aux autres pays de manière à peser de façon plus crédible dans les arbitrages à venir et à neutraliser la tentative de libéralisation totale de M. Bolkestein. Et j'ai bien compris que parmi ceux qui refusent l'habilitation, certains ont dans l'idée d'instaurer une autorité de régulation du secteur postal pour donner un signal d'accélération de la concurrence.

M. Michel Hunault.

Vous dites n'importe quoi !

M. François Brottes.

Je parlais de piège car je veux dénoncer ceux qui proposent de reporter l'achèvement de la transposition de la directive postale de 1997 dans le seul but de fragiliser la position de la France dans les négociations en cours, qui permettront, je l'espère, de rejeter le projet inacceptable de directive de M. Bolkestein.

Oui, dans le cas qui nous préoccupe et avec la loi d'habilitation, je considère que la fin justifie les moyens.

Certains parmi ceux qui réclament un grand débat sur le secteur postal au détour de ce texte d'habilitation ont bel et bien des arrière-pensées. Ils les expriment d'ailleurs haut et fort en prenant comme modèle d'autres postes européennes qui, après leur privatisation, ferment des agences et suppriment des milliers d'emplois.

En conclusion, chers collègues, je veux réaffirmer que si l'on soutient la préservation d'un service public postal fort, on ne peut qu'être favorable à la loi d'habilitation.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. Christian Bataille, dernier orateur inscrit.

M. Christian Bataille.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dernier orateur inscrit dans ce débat,...

M. Henri Nayrou.

Mais quel orateur !

M. Christian Bataille.

... je n'interviendrai que de manière très générale. Je ne m'étendrai pas sur les questions de fond que soulève cette démarche d'habilitation ; elles ont été largement exposées. J'insisterai plutôt sur le droit d'amendement dont feront usage le groupe socialiste et ses élus car, si le Parlement a le droit imprescriptible de voter la loi et si la procédure des ordonnances, d'autres l'ont dit, n'est pas entièrement satisfaisante, nous voulons quand même aménager ce texte.

A cet égard, je suis heureux que le Gouvernement ait fait preuve de son ouverture dans plusieurs domaines.

En ce qui concerne d'abord la directive « habitats », je me félicite ainsi qu'ayant décidé de réintégrer cette directive 92/43/CEE dans la liste des textes à transposer, le Gouvernement l'ait fait non par un alinéa anonyme, mais au moyen d'un article spécifique permettant des développements explicatifs. Parmi ces développements, nos amendements vont, par exemple, insérer l'obligation d'une consultation des conseils municipaux avant tout classement d'une zone ou d'un site.

Nous allons également préciser la place de la chasse dans le dispositif Natura 2000. Qu'il me soit permis, monsieur le ministre, de m'arrêter un instant sur ce point. Nous avons eu sur la chasse, il y a quelques mois, des débats passionnés, en présence de Mme Voynet. Elle a accepté ici même un certain nombre d'amendements qui nous ont permis d'aboutir à un texte d'équilibre, car nous avons constamment recherché l'équilibre entre ceux qui veulent respecter la nature et ceux qui veulent pratiquer une activité humaine qui n'est pas contestée, la chasse.

M. Jean Besson.

Ce n'est pas antinomique !

M. Christian Bataille.

Nous acceptons donc que, dans la directive concernant Natura 2000, la chasse soit encadrée, mais elle ne doit être ni brimée ni incomprise. Au groupe socialiste, nous resterons vigilants.

M. Jean Besson.

Les électeurs aussi ! M. Christian Bataille. Nous veillerons à ce que cette directive ne soit pas la porte ouverte à un retour en arrière sur des équilibres que nous avons acceptés et que nous avons tous solennellement votés, non sans difficultés. Nous porterons la plus grande attention à la manière dont Mme Voynet traduira la loi sur la chasse dans les décrets d'application. Un certain nombre de collègues du groupe socialiste sont très inquiets de ce qui se passe actuellement. C'est pourquoi nous demandons aussi u ne grande prudence pour la transcription de Natura 2000, texte qui touche à la gestion de la nature mais qui ne saurait, en aucun cas, remettre en cause les dispositions de la loi sur la chasse.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

J'ai par ailleurs déposé, à titre personnel, quelques amendements concernant les télécommunications. Le plus important limite au service universel l'obligation faite à l'opérateur historique de déférer à une habilitation de ses tarifs. Nous nous en expliquerons le moment venu.

Au-delà de ces sujets précis, je voulais montrer que, grâce à son droit d'amendement, le Parlement montre qu'il existe, même dans une procédure qui, tout en n'étant pas entièrement satisfaisante, ouvre malgré tout la porte à des modifications. Je vous remercie, monsieur le ministre, de bien vouloir, au nom du Gouvernement, nous permettre d'exercer ce droit. Pour restreint qu'il soit, nous saurons en user pleinement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La discussion générale est close.

Suspension et reprise de la séance

M. le président.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue le mercredi 6 décembre 2000 à zéro heure quinze, est reprise à zéro heure vingt-cinq.)

M. le président.

La séance est reprise.

Motion de renvoi en commission

M. le président.

J'ai reçu de M. Jean-Louis Debré et des membres du groupe du Rassemblement pour la République une motion de renvoi en commission, déposée en application de l'article 91, alinéa 6, du règlement.

La parole est à M. Christian Estrosi.

M. Christian Estrosi.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, c'est avec un certain étonnement que nous avons pris connaissance de ce projet de loi portant habilitation du Gouvernement à transposer par ordonnances des directives communautaires.

Etonnement à plusieurs titres.

D'abord à cause de l'ampleur de ce projet : en seulement cinq articles, ce sont près de soixante-dix textes communautaires, directives ou parties de textes, que vous souhaitez transposer par ordonnances. Cette abondance ne peut que nuire à la qualité des débats.

E tonnement encore du fait de la diversité des domaines visés : en partant de la réforme du code de la mutualité ou des textes sur les assurances, et en passant par la reconnaissance de diplômes ou la réglementation des poids lourds, on aboutit à Natura 2000, directive à laquelle je reviendrai dans quelques instants. Mais je vous ferai grâce de citer de façon exhaustive l'ensemble des domaines concernés, car je craindrais d'y épuiser mon temps de parole ! E tonnement, enfin, en raison de la procédure employée par votre gouvernement : l'urgence.

L'urgence grâce à laquelle vous évitez un grand débat de fond devant le Parlement sur les sujets qui vous embarrassent.

L'urgence qui vous permet de sortir de votre beau chapeau un projet quand vous ne pouvez plus reculer.

L'urgence dont vous abusez en permanence depuis 1997.

L'urgence que vous érigez en système de gouvernement, alors que cette procédure n'avait été prévue que pour être utilisée de façon exceptionnelle.

J'ajoute qu'au sein même de votre majorité, le parti communiste et le MDC ont critiqué cette procédure, par exemple en ces termes : « Ce projet de loi constitue un mauvais signal du point de vue de la nécessaire revalorisation du rôle du Parlement. » Et notre rapporteur de pré-

ciser en commission des lois que l'utilisation d'un tel procédé « aboutissait à priver le Parlement d'un débat de fond approfondi sur de nombreuses matières essentielles ».

M. Jacques Floch, rapporteur.

C'est l'article 38 de la Constitution !

M. Christian Estrosi.

Pour justifier cette procédure, vous invoquez encore le retard pris par la France dans la transposition des normes communautaires. Il est vrai que près de 180 directives n'ont pas été rendues applicables en droit interne. Sur un plan strictement formel, je dirai simplement que ce retard ne peut être imputé au Parlement. Notre assemblée comme le Sénat avaient déposé des propositions de loi visant à rendre applicables des dispositions communautaires.

Ce fut le cas, par exemple, de la proposition de loi sur Natura 2000 déposée en 1998 au Sénat. Je note d'ailleurs que M. Hascoët s'est engagé, devant le Sénat, à ce qu'un grand débat ait lieu au Parlement sur le code de la mutualité.

M. Jean-Claude Lemoine.

C'est vrai !

M. Christian Estrosi.

Nous aimerions obtenir des précisions sur cet engagement d'un membre du Gouvernement.

Ce fut le cas aussi, en mai dernier, pour la directive gaz, dont le délai de transposition expirait le 10 août.

Vous êtes au gouvernement, que je sache, depuis plus de trois ans.

M. Jacques Floch, rapporteur.

Eh oui ! Et encore pour quelques années !

M. Christian Estrosi.

Depuis votre arrivée, notre assemblée a siégé 232 jours, pour 561 séances. Et vous nous proposez d'examiner ce projet rapidement alors qu'un grand débat aurait dû être organisé et les commissions intéressées saisies. Peut-être auriez-vous dû inscrire moins de textes guidés par l'idéologie et plus de textes associés à de vrais projets, à de vrais enjeux pour notre pays en Europe puisque, je le rappelle, aux termes de l'article 48 de la Constitution, le Gouvernement est maître de l'ordre du jour prioritaire.

Par ailleurs, si l'urgence était votre seule motivation, vous auriez pu utiliser une autre procédure, que nous aurions éventuellement acceptée, celle offerte par les articles 103 à 107 de notre règlement, à savoir la procédure d'examen simplifiée, qui a l'avantage, au moins, de ne pas tronquer le débat démocratique, tout en conservant une certaine rapidité pour l'adoption du texte.

Je note, à ce sujet, l'intérêt que présente la circulaire du 9 novembre 1998 - prise il y a tout juste deux ans relative à la procédure de suivi de la transposition des directives communautaires en droit interne, adressée par le Premier ministre aux ministres et publiée au Journal officiel du 10 novembre 1998. En substance, le Premier ministre y précise que chaque ministère doit assumer la responsabilité de la transposition des directives en amont de la procédure. Il ajoute que la transposition doit être préparée dès que le la directive a été adoptée. Il pré cise encore qu'à partir de la notification de la directive, chacun des ministères participant à la transposition doit adresser un échéancier de l'adoption des textes. Si ce travail avait été fait, sans doute l'urgence n'aurait-elle pas été nécessaire.


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Enfin, de nombreux projets de loi auraient pu autoriser la transposition de textes européens. Ainsi la récente réforme de la loi relative à la liberté de communication vous offrait la possibilité d'acquitter les engagements européens de la France en ce domaine, mais vous avez laissé passer l'occasion et les directives concernées ont été intégrées au projet que nous examinons aujourd'hui.

C'est donc bien votre gouvernement qui est responsable de ce retard.

Pour justifier l'urgence, vous invoquez encore le fait que les mesures à transposer revêtiraient plus un caractère technique qu'un caractère politique. Une telle argumentation me heurte et, j'en suis persuadé, heurte la grande majorité des parlementaires. Serions-nous incapables d'appréhender des sujets comme la protection de la nature ou les investissements autoroutiers qui, certes, sont techniques, mais représentent aussi et surtout un caractère et un enjeu intéressant le débat politique et démocratique ? Le technique et le politique ne sont pas contradictoires mais complémentaires. Avant de rentrer plus avant dans le texte, je noterai, et c'est assez rare pour le souligner, que sur les trois motions de procédure défendues aujourd'hui, deux sont le fruit de votre majorité.

M. Jean-Paul Chanteguet.

C'est cela la diversité !

M. Bernard Roman, président de la commission.

C'est la gauche plurielle !

M. Christian Estrosi.

C'est la preuve du mécontentement profond qui règne sur tous les bancs de notre assemblée par rapport à une pratique qui rabaisse le Parlement au rang de chambre d'enregistrement.

M. Michel Hunault.

Eh oui !

M. Jean-Louis Idiart.

Changez la constitution !

M. Christian Estrosi.

Il existe toutefois une différence essentielle entre les motions de votre majorité et la nôtre.

Nous n'entendons pas remettre en cause la construction de l'Union européenne telle qu'elle est mise en oeuvre.

M. Henri Nayrou.

Les gaullistes vont se retourner dans leurs tombes !

M. Christian Estrosi.

Bien au contraire, ce que nous critiquons, c'est bel et bien votre façon de procéder. Cela va sans dire et encore mieux en le disant.

J'en viens maintenant à votre projet proprement dit. Je l'ai dit tout à l'heure, près de soixante-dix textes d'envergure différente sont concernés dans des domaines variés.

Par principe, nous sommes favorables à la transposition des directives dans notre droit interne, d'abord parce que nous sommes européens, ensuite parce que la France fait régulièrement l'objet de recours en manquements et que cela est préjudiciable à notre position en Europe puisque nous nous trouvons à l'avant-dernière place au tableau d'honneur du suivi des transpositions des textes d'origine commuantaire, à seulement quelques encablures du bonnet d'âne.

Nous n'entendons pas rejeter en bloc la voie de la transposition, ce qui exposerait notre pays à des sanctions. Dois-je rappeler que nous avons déjà été condamnés à sept reprises et que nous sommes en voie de l'être à nouveau ? Certains de ces textes ne soulèvent d'ailleurs pas de difficultés particulières car ils ne sont que des compléments de directives déjà existantes. Ils n'appellent donc pas de discussion parlementaire de fond.

D'autres, en revanche, monsieur le ministre, auraient nécessité un débat au fond compte tenu de leur incidence sur la législation et sur la vie des Français.

C'est le cas par exemple de certaines directives qui concernent la protection des travailleurs : la directive 89/391 du 12 juin 1989 visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail, qui constitue le socle d'une douzaine de directives plus techniques, aurait, je pense, mérité un examen approfondi du Parlement.

Il en est de même de la directive 92/85 du 19 octobre 1992 sur l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées, ou allaitantes au travail.

M. Michel Hunault.

Ils ont rétabli le travail des femmes la nuit, alors !

M. Christian Estrosi.

Concernant le diagnostic in vitro, là encore, en pleine révision des lois bioéthiques, est-il réellement indispensable de procéder par la voie d'ordonn ances, alors qu'un grand débat va prochainement s'ouvrir ? Je m'interroge.

Pour ce qui est des consommateurs, cinq directives visent à les protéger dans leurs relations commerciales. Je le répète : compte tenu de la matière, compte tenu de ce que nous pouvons, chacun ici, lire, entendre dire, ou tout simplement vivre, un débat parlementaire eût été préférable pour régler certains problèmes importants.

Deux autres domaines suscitent davantage encore mon interrogation quant à l'opportunité de leur transposition par ordonnances.

Le premier concerne les denrées alimentaires et l'alimentation animale. L'actualité, me semble-t-il, aurait légitimé un débat parlementaire plus approfondi.

M. Michel Bouvard.

C'est le moins qu'on puisse dire !

M. Christian Estrosi.

La psychose, parfois justifiée, parfois irrationnelle, mais bien présente, provoquée par l'accroissement des cas de vaches folles et par les terribles images diffusées à la télévision, n'est pas retombée. Le c ontrôle des denrées alimentaires, l'organisation de contrôles officiels dans le domaine de l'alimentation animale, le traitement des denrées et ingrédients alimentaires traités par ionisation, et la détermination de leur liste, ne sont pas des sujets secondaires ! Ils sont au coeur des préoccupations des Français ! Les incidences morales et financières pour les agriculteurs, déjà largement pénalisés par cette crise, et les i nterrogations des Français méritaient, j'en suis convaincu, un débat démocratique.

Par ailleurs, alors que les pays membres de l'Union se sont accordés sur l'interdiction des farines animales, nous aurions également souhaité aborder la question des tests de dépistage de l'ESB, sur lesquels il ne semble exister aucun consensus.

J'en viens au second domaine majeur visé par ce projet, l'environnement. Ici encore certaines directives n'appellent pas de discussion au fond : la directive 96/82 du 9 décembre 1996, dite « Seveso II » ; la directive 92/32 du 30 avril 1992 sur la classification et l'étiquetage des matières dangereuses...

M. Michel Bouvard.

Très bien !

M. Christian Estrosi.

... la directive 90/313 du 7 juin 1990 concernant la liberté d'accès à l'information en matière d'environnement...

M. Michel Bouvard.

Pas de problème !

M. Christian Estrosi.

... ou encore le règlement 258/93 du 1er février 1993 relatif à la surveillance et au contrôle des transferts de déchets à l'entrée et à la sortie de la Communauté, ne méritent, à mon avis, aucun débat.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

M. Michel Bouvard.

Nous sommes pleins de bonne volonté !

M. Christian Estrosi.

Mais tel n'est pas le cas en revanche de deux directives visées par l'article 1er : la directive du Parlement et du Conseil du 16 février 1998 concernant la mise sur le marché des produits biocides ; et la directive 92/43 du 21 mai 1992 dite « Habitats naturels ».

La directive 98/8 sur les produits biocides n'est pas sans susciter quelques inquiétudes. Elle concerne la mise sur le marché de substances actives ou des préparations c ontenant de telles substances destinées à détruire, repousser ou rendre inoffensifs les organismes nuisibles.

C ette directive aurait dû être transposée avant le 14 mai 2000. Votre gouvernement disposait donc de d eux ans pour la transposer. La circulaire du 9 novembre 1998 à laquelle je faisais référence au début de mon propos était là pour cela. A moins qu'elle n'eût servi que d'alibi ! Et si la France a été mise en demeure par la Commission pour non-transposition, c'est, là encore, de votre responsabilité.

Quoi qu'il en soit, l'application de la procédure instituée par ce texte communautaire, au-delà des points positifs, aura un impact économique important pour le sect eur industriel français intéressé, et notamment les entreprises de taille moyenne, pour lesquelles elle va représenter un coût énorme. Dès lors, le Parlement aurait peut-être dû réfléchir aux moyens à mettre en oeuvre pour compenser ces nouvelles charges qui pèsent sur les entreprises.

L'autre directive à laquelle je faisait référence est la directive « Habitats naturels », plus connue sous le nom e Natura 2000. En la matière, nous nous trouvons en pleine incohérence !

M. Michel Bouvard.

Tout à fait !

M. Christian Estrosi.

La France est condamnée pour manquement à ses obligations communautaires,...

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Elle est mise en demeure.

M. Christian Estrosi.

... alors qu'un texte d'origine parlementaire avait été déposé et étudié au Sénat en 1998 ! (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Je ne reviendrai pas sur le contenu de la directive. Je crois que chacun d'entre nous le connaît, puisqu'une grande partie de notre territoire est touchée. Cette directive a été retirée du champ d'habilitation de votre projet par le Sénat. La commission des lois de notre assemblée propose sa réintroduction dans le texte.

M. Michel Bouvard.

C'est un scandale !

M. Christian Estrosi.

Je tiens à préciser que, là encore, nous ne sommes pas opposés à une démarche européenne en matière de protection de l'environnement. Pour autant, cette démarche ne doit concerner que quelques grandes lignes directrices d'une politique de préservation des espaces naturels. Ce qui est vraiment en cause, c'est l'interprétation a maxima de cette directive par le Gouvernement...

M. Michel Bouvard.

Par la ministre de l'environnement !

M. Christian Estrosi.

... dans une absence totale de concertation, tant au niveau parlementaire qu'au niveau local. En cherchant à imposer plutôt qu'à dialoguer, en cherchant à satisfaire les écologistes de salon, non seulement vous vous êtes attiré le courroux des élus locaux, mais encore celui des vrais amoureux de la nature.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Comme dans le débat sur la chasse, Mme Voynet a exacerbé les passions, elle a fait preuve de son dogmatisme coutumier. Plutôt que de privilégier l'apparition d'un consensus, fruit de la négociation, elle a privilégié la contrainte.

M. Michel Bouvard.

Tout à fait ! C'est de la provocation ! C'est l'intégrisme vert !

M. Christian Estrosi.

Or nous ignorons toujours les véritables incidences futures de Natura 2000, et cela est particulièrement préoccupant. Des populations entières ne peuvent vivre dans l'insécurité juridique, voir leurs activités ancestrales, sociales, économiques et culturelles menacées au profit de la protection d'un rocher rare, d'un insecte original ou d'un oiseau précieux. (Rires sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme Nicole Feidt.

C'est du délire !

M. Christian Estrosi.

Vous pouvez rire, monsieur le ministre. Le Parlement se doit de veiller à ce que l'homme soit la première espèce protégée par cette directive. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.) Le petit ou le grand rhinolophe, la vipère d'Orsini, l'hydromante, l'alouette « Lulu »,...

M. Jean-Louis Idiart.

Mais que fait Lulu là ?

M. Christian Estrosi.

... le scarabée xylophage « Rosalie », dont la préservation se trouve à la base du choix de certains sites intégrés dans le réseau Natura 2000 dans m on département, méritent certes le respect, mais Mme Voynet m'autorisera à leur préférer cette espèce menacée qui souffre et se bat dans des conditions difficiles, dans une zone de montagne, et qui s'appelle...

M. Michel Bouvard.

Le berger !

M. Christian Estrosi.

... l'espèce humaine.

M. Michel Hunault.

Quel grand discours !

M. Christian Estrosi.

De quoi s'agit-il ? La directive fixe comme objectif d'assurer la préservation de la diversité biologique européenne au moyen principal de la constitution d'un réseau écologique de sites abritant les habitats naturels et les habitats d'espèces de faune et flore sauvage d'intérêt communautaire.

M. Jean-Paul Chanteguet.

C'est vrai !

M. Christian Estrosi.

Les termes de l'article 2 de cette directive visent à concilier protection de la nature et exigences économiques, sociales et culturelles des Etats membres. Et c'est là que le bât blesse.

M. Jean-Paul Chanteguet.

Pourquoi ?

M. Christian Estrosi.

Votre conception étroitement naturaliste vous a conduit a tout baser sur la conservation de la nature sans chercher à maintenir et préserver les activités humaines et sociales dans les zones spéciales de conservation,...

M. Michel Bouvard.

C'est vrai !

M. Christian Estrosi.

... zones pour lesquelles il n'existe aucune procédure juridique préétablie et transparente !

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

Vous ne savez pas ce que c'est ! (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

M. Christian Estrosi.

J'en sais certainement beaucoup plus que vous, madame ! Par ailleurs, cela me semble contraire aux approches modernes du développement durable dont vous ne cessez de vous réclamer et qui, pourtant, visent à concilier l'environnement, le social et l'économique.

Vous avez tous misé sur la coercition, l'obligation et l'opacité,...

M. Jean-Paul Chanteguet.

Ce n'est pas vrai !

M. Christian Estrosi.

... procédé par ailleurs dénoncé par le juge administratif !

M. Michel Bouvard.

Tout à fait !

M. Christian Estrosi.

Un arrêt du Conseil d'Etat du 27 novembre 1999,...

M. Michel Bouvard.

C'est l'Association des élus de la montagne qui a déposé le recours !

M. Christian Estrosi.

... désormais célèbre, en effet, annulait une circulaire du ministre de l'environnement du 11 août 1997 qui prescrivait aux préfets de transmettre les premières listes de sites sans respecter la procédure fixée par un décret de mai 1995 et qui précisait les consultations effectuées et les avis à recueillir.

M. Michel Bouvard.

Très bien !

M. Christian Estrosi.

Les termes mêmes de l'arrêt sont à ce propos intéressants, mes chers collègues.

M. Michel Bouvard.

Il faut le lire !

M. Christian Estrosi.

Il est dit « qu'en édictant de telles dispositions, contraires à celles du décret du 5 mai 1995, le ministre de l'environnement a excédé sa compétence ».

(« Bravo ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Le Conseil d'Etat utilise même les termes de « concertation officieuse ».

M. Michel Bouvard.

La consultation Voynet !

M. Christian Estrosi.

La haute juridiction administrative a annulé les trois décisions du ministre pour lesquelles ont été transmises à la Commission européenne les premières listes de sites dont la France demandait l'inscription dans le réseau Natura 2000, puisque prises sur le fondement d'un texte illégal.

M. Michel Bouvard.

Tout à fait !

M. Christian Estrosi.

Ce qui est important dans cet arrêt, c'est la dénonciation de la non-concertation, de la non-consultation. Le refus du ministre de l'environnement de débattre devant le Sénat en juin 1998 d'une proposition qui visait à transposer des dispositions de cette directive en est un autre exemple.

Pourquoi un tel refus, qui vous impose aujourd'hui la précipitation, alors même que Mme la ministre de l'environnement avait précisé qu'un projet de loi sur ce sujet était imminent ? Nous avons attendu. Promesses probablement perdues dans les méandres de l'administration ! C'est dire en tout cas toute l'opacité entretenue par votre gouvernement sur un sujet pourtant majeur pour nos régions, et dont dépend la qualité de vie de nos concitoyens.

M. Michel Bouvard.

Absolument !

M. Christian Estrosi.

La mise en oeuvre de cette directive aurait pu être l'occasion de réfléchir sur un nouveau mariage de l'homme et de la nature,...

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

Quel poète !

M. Christian Estrosi.

... et d'expérimenter une politique novatrice en ce domaine.

M. Bernard Roman, président de la commission.

Un Pacs !

M. Jean Besson.

Il a dit nature, pas contre-nature !

M. Bernard Roman, président de la commission.

Vous n'avez rien compris au Pacs !

M. Christian Estrosi.

Plutôt que de tenter d'opposer les associations de protection de la nature et de l'environnement avec le monde rural, plutôt que de les percevoir comme des adversaires, il aurait été de bonne augure de les considérer comme des partenaires. Comment expliquer que le zonage soit établi sans règles de concertation officielle, sans l'accord des principaux intéressés, et notamment les communes ?

M. Michel Bouvard.

Très bien !

M. Christian Estrosi.

En commission des lois, il a été précisé que les communes concernées seraient effectivement consultées, avant de renvoyer à l'ordonnance les modalités de cette consultation. J'aurais préféré que notre assemblée en débatte. Quelle valeur aura cette concertation ? Sera-t-elle un simple avis, une délibération concordante des communes visées par la zone ?

M. Michel Bouvard.

Elle sera comme celle d'avant.

M. Christian Estrosi.

Le préfet pourra-t-il s'écarter de cette délibération ?

M. Michel Bouvard.

C'est ce qu'il fait déjà.

M. Christian Estrosi.

Bref, ces questions importantes méritaient plus qu'un simple blanc-seing donné à votre gouvernement. Que sont les promesses de concertation devenues ? Pour nous, il est impossible qu'un site puisse être intégré dans le réseau Natura 2000 sans l'accord exprès du conseil municipal de la commune territorialement concernée. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République.) Vous semblez oublier que ce sont les élus locaux, les agriculteurs, les chasseurs et les propriétaires fonciers qui entretiennent nos espaces,...

M. Jean-Paul Chanteguet.

Et les forestiers !

M. Christian Estrosi.

... et qui permettent une utilisation multimodale de la nature, un juste partage entre tourisme, activités agricoles et protection de la nature.

Cela serait-il l'apanage des Verts ?

M. Bernard Roman, président de la commission.

Non !

M. Christian Estrosi.

Concernant les 350 sites réclamés par la Commission européenne et son contentieux sur ce sujet, la représentation nationale aurait souhaité connaître vos intentions. Cela méritait débat. Rien que pour la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, 18,4 % du territoire régional - le pourcentage le plus élevé de France - sont concernés, pour soixante-dix sites. En comparaison, la région Rhône-Alpes...

M. Michel Bouvard.

La Maurienne, c'est 26 %.

M. Christian Estrosi.

... abrite cent dix sites - ce qui n'est pas peu - pour 6,2 % de son territoire, tandis que dans le Nord Pas-de-Calais, vingt et un sites sont concernés, pour moins de 1 % du territoire régional.

M. Bernard Roman, président de la commission.

Ce n'est pas de notre faute.


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M. Christian Estrosi.

A mon avis, avec tous les dégâts industriels que vous avez causés là-bas, vous auriez mieux fait d'assurer au contraire une plus large protection de votre territoire.

M. Bernard Roman, président de la commmission.

C'est le capitalisme sauvage qui a causé des dégâts. Ce n'est pas nous !

M. Christian Estrosi.

En Rhône-Alpes et Alpes-Provence-Côte d'Azur, nous avons su, sans Natura 2000, assurer la protection de nos territoires.

M. Jacques Floch, rapporteur.

Vous avez bétonné la Côte d'Azur !

M. Christian Estrosi.

Justement, voyez-vous, il y a plus de nature protégée chez nous.

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

Il n'en reste plus !

M. Christian Estrosi.

Cela veut dire qu'on a su mieux gérer que vous, et sans Natura 2000 !

M. Bernard Roman, président de la commission.

Arrêtez !

M. Christian Estrosi.

Pour en terminer sur Natura 2000, je dirai que vous avez tout simplement fait ce qu'il ne fallait pas faire. Mais quoi qu'il en soit, un dessaisissement du Parlement sur une matière qui touche près de 27 000 kilomètres carrés de superficie, 4 700 kilomètres carrés de surfaces maritimes, et 3 116 kilomètres de cours d'eau, soit 4,9 % du territoire total, et des centaines de milliers de Français, un tel dessaisissement me semble inacceptable et intolérable pour les parlementaires que nous sommes.

M. Michel Bouvard.

Très bien !

M. Christian Estrosi.

Nous nageons en plein déni de parlementarisme. Natura 2000 méritait mieux qu'une ordonnance.

J'en viens maintenant à un autre point qui me préoccupe, l'article 4, qui vise les aménagements autoroutiers.

C'est un bon article...

M. Jacques Floch, rapporteur.

Ah, l'alliance avec le PC !

M. Christian Estrosi.

... car il permettra d'engager des investissements attendus par tous, alors que vous n'avez eu de cesse d'entraver les programmes autoroutiers depuis trois ans. Je me réjouis de la clairvoyance de M. Gayssot, qui s'est opposé à une disposition visant à redéfinir les règles relatives à l'institution de péage. Il me semblait pourtant que la circulaire de novembre 1998 précisait la responsabilité du ministre concerné quant à la transposition des directives entrant dans son domaine de compétences. Le ministre de l'équipement et des transports était contre cette disposition, proposée malgré cela dans ce projet. En plus de mettre en doute la capacité des parlementaires, vous interrogeriez-vous sur celle de vos collègues ? Ma dernière observation, après l'urgence et l'examen du projet, concerne plus particulièrement la procédure d'ordonnance. La Constitution n'a pas rendu obligatoire la ratification. Elle impose simplement au Gouvernement, à peine de caducité, de déposer dans un délai prédéterminé dans la loi d'habilitation un projet de loi de ratification - soit deux mois selon les termes de l'article 5 sans contraindre le Gouvernement à l'inscrire à l'ordre du jour.

A compter du dépôt du projet de loi de ratification, deux situations sont possibles.

Soit vous n'inscrivez pas à l'ordre du jour du Parlement ce projet de ratification et vous laissez le soin au Parlement de se référer à l'ordonnance dans une loi ultérieure. L'ordonnance acquiert alors valeur législative par ratification implicite. A défaut, elle aura valeur réglementaire.

Soit vous soumettez le projet au vote de notre assemblée, ce qui, entre parenthèses, relève plus de l'hypothèse d'école que de la pratique parlementaire. Si nous l'adoptons, l'ordonnance aquiert valeur législative. Si nous la rejetons, l'ordonnance cesse d'être appliquée.

Je crains malheureusement que, au vu de la tâche qui vous attend, vous fassiez le choix du moins-disant législatif et que vous usiez de la procédure de la ratification implicite,...

M. Michel Bouvard.

Il a raison de le craindre !

M. Christian Estrosi.

... dessaisissant doublement les pouvoirs de notre assemblée, alors que la voie de la ratification expresse permet au Parlement de se prononcer sur le contenu de l'ordonnance. En effet, je ne vois pas comment vous pourriez inscrire plus de cinquante projets de ratification à l'ordre du jour de notre assemblée sans provoquer une surcharge de travail, prétexte pourtant invoqué dans l'exposé des motifs de votre projet.

Par ailleurs, vous n'enlevez rien à la complexité et à l'insécurité juridique que vous entendez réduire, puisque, selon les cas, ce sera tantôt le Conseil d'Etat tantôt le Conseil constitutionnel qui sera compétent pour apprécier la légalité des dispositions contenues dans l'ordonnance.

Je terminerai cette motion de renvoi en commission en reprenant les mots du professeur Guy Carcassonne, qui est de vos amis. Il indiquait que l'on n'avait rien inventé de mieux pour faire de bonnes lois que le Parlement. Et en guise de conseil, il invitait à n'utiliser les ordonnances qu'avec modération. Mais il est vrai que les conseilleurs ne sont pas les payeurs.

Les Romains avaient un adage en hommage à la vertu :

« In medio stat virtus » - « Au milieu se trouve la vertu, la sagesse ». Le moins que l'on puisse dire, c'est que, depuis votre entrée en fonction, le juste milieu penche du mauvais côté. (Sourires.)

Pour la cinquième fois depuis 1997 et la quatrième en moins d'un an, vous nous demandez de vous habiliter à prendre par ordonnances des dispositions législatives.

Cette dérive est préoccupante en ce qui concerne le droit européen. Et ce qui l'est encore plus, c'est la fausse prévenance qui vous anime lorsque vous précisez dans l'exposé des motifs que ce projet de loi « préserve les droits du Parlement en allégeant son programme de travail ».

M. Bernard Roman, président de la commission.

Bien sûr !

M. Jean Besson.

Quelle hypocrisie !

M. Michel Bouvard.

On peut même ne plus rien soumettre au Parlement pour accroître encore plus ses droits ! (Sourires.)

M. Christian Estrosi.

L'exercice relève plus de l'humour noir que d'un propos responsable.

Or c'est parce que le Parlement ne s'assimile pas à une institution fantôme, c'est parce que nous croyons que le débat législatif répond à une logique rigoureuse et démocratique, c'est parce que notre travail repose sur une base très simple - la discussion éclairée par la confrontation ouverte des idées, des opinions, de nos visions propres de l'avenir -, que nous demandons le renvoi en commission.

M. Jean-Louis Idiart.

C'est beau !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

M. Christian Estrosi.

Ce n'est pas un simple artifice de procédure. En usant de l'urgence, en voulant procéder par ordonnance sur des sujets qui touchent presque tous les domaines d'intervention de l'Etat et qui concernent l'ensemble des Français, vous rognez tout simplement le travail des élus en confisquant le débat, à une époque où certains dans vos rangs affichent l'intention de renforcer le rôle de notre assemblée.

A l'heure où notre pays préside l'Union européenne, associer l'Europe à de telles pratiques si peu démocratiques,...

M. Michel Hunault.

Oui !

M. Christian Estrosi.

... c'est tout simplement offrir un f ormidable encouragement à l'euroscepticisme, car réconcilier les Français avec l'Europe, cela passe aussi et d'abord par plus de démocratie. Cela ne peut donc se concevoir sans une présence active du Parlement français dans le processus de décision.

M. Michel Bouvard.

Très bien !

M. Michel Hunault.

Excellent !

M. Christian Estrosi.

Monsieur le ministre, le Parlement veut jouer pleinement son rôle. Le Gouvernement doit lui permettre de le faire dans de bonnes conditions et, comme il n'est jamais trop tard pour remettre l'ouvrage sur le métier, je sollicite le renvoi du projet en commission ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre des relations avec le Parlement.

M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement.

Je souhaite répondre à M. Estrosi sur deux points.

Premièrement, le Gouvernement a déjà proposé, depuis 1997, la transposition de plus d'une cinquantaine de directives qui se sont traduites dans différents projets de loi. Je citerai, entre autres, la protection juridique des bases de données, la protection des acquéreurs, le droit de vote et d'éligibilité, auquel les gouvernements précédents s'étaient opposés, des ressortissant européens aux élections municipales.

M. Christian Estrosi.

Et pour cause !

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Je rappele que la loi d'orientation agricole a permis de transposer une douzaine de directives.

M. Michel Bouvard.

C'est très bien ça ! Il fallait continuer !

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Je citerai encore la loi relative à l'épargne et à la sécurité fina ncière, celle sur l'aménagement durable du territoire l'Assemblée en a discuté longuement...

M. Michel Hunault.

Vous abondez dans notre sens.

M. le ministre des relations avec le Parlement.

... la loi sur la modernisation et le développement du service public de l'électricité, celle sur la réglementation des ventes aux enchères publiques, la réforme de l'audiovisuel -, et j'en passe.

M. Michel Bouvard.

Pourquoi ne pas continuer ainsi ?

M. Michel Hunault et M. Didier Quentin.

Cela va dans le sens de l'intervention de M. Estrosi.

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Cela prouve que l'inaction n'a pas prévalu dans ce domaine.

Bien au contraire. On peut dire que, depuis 1997, il a été proposé au Parlement de transposer presque autant de directives qu'aujourd'hui par la voie législative.

M. Michel Hunault.

Vous semblez le regretter, monsieur le ministre !

M. le ministre des relations avec le Parlement.

On ne peut donc pas dire que le Gouvernement ait négligé le débat parlementaire en la matière. Vous avez d'ailleurs reconnu que la transposition de nombre de ces directives était fondée.

Le second point sur lequel je veux revenir est Natura 2000, sur lequel a porté l'essentiel de votre exposé, monsieur Estrosi. Vous en faites une interprétation fausse.

M. Michel Bouvard et M. Christian Estrosi.

Non !

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Il ne s'agit pas d'opposer les milieux naturels aux activités humaines.

M. Jean Besson.

C'est pourtant ce qui se passe !

M. Christian Estrosi.

On en parlera tout à l'heure lors de l'examen des amendements.

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Vous avez dit dans un emportement verbal que l'homme était l'espèce menacée dans les zones Natura 2000. Soyons sérieux, monsieur Estrosi !

M. Christian Estrosi.

On voit que vous ne vous êtes jamais heurté aux méthodes autoritaires et technocratiques des préfets sur le terrain !

M. le ministre des relations avec le Parlement.

L'objectif de la directive n'est pas de faire des sanctuaires de la nature où seraient proscrits, une fois pour toutes, toutes les activités humaines.

M. Michel Bouvard.

Si ! C'est ce que veut Mme Voynet !

M. le ministre des relations avec le Parlement.

En fait, sauf cas exceptionnels, monsieur Bouvard,...

M. Michel Bouvard.

Merci de préciser qu'il existe des exceptions !

M. le ministre des relations avec le Parlement.

... ces différents espaces sont des supports de productions agricole et forestière et d'activités économiques et touristiques.

M. Michel Bouvard.

On enverra votre discours à

Mme Voynet.

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Et ils constituent des atouts pour notre pays.

Mme Nicole Feidt.

Tout à fait !

M. Michel Bouvard.

Non ! On nous dit qu'on ne peut pas couper le bois à cause des insectes xylophages !

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Vous nous avez parlé, monsieur Bouvard, de la Maurienne.

Tout le monde sait - et je suis moi aussi un élu de la région Rhône-Alpes - à quel point le développement industriel a pu dénaturer certaines vallées.

M. Michel Bouvard.

C'est fini, ça !

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Il s'agit de préserver en Maurienne des sites naturels. D'ailleurs, vous manifestez bien parfois pour protéger certains secteurs du passage des camions.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

M. Michel Bouvard.

Nous avons créé le premier parc naturel de France, monsieur le ministre ! Mais nous avons vu aussi que des dérives étaient possibles. Et nous savons que Mme Voynet veut sanctuariser le territoire.

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Oui, monsieur Bouvard, il faut protéger la nature et la concilier avec les activités humaines.

Concernant la procédure Natura 2000, M. Estrosi s'est plaint du manque de concertation. Un décret précise que l e préfet du département consulte les maires des c ommunes concernées en vue de recueillir leurs remarques et propositions sur le projet de périmètre, les dispositions envisageables et les difficultés actuelles, et ce dans un délai de deux mois.

M. Christian Estrosi.

C'est le conseil d'Etat qui le dit ! Vous allez le contester ?

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Il est bien précisé que le préfet consulte.

M. Christian Estrosi.

Oui, mais il ne le fait pas !

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Ce décret, monsieur Estrosi, date du 5 mai 1995...

M. Christian Estrosi.

Rappelez-en les termes à vos préfets car ils outrepassent leurs droits !

M. le ministre des relations avec le Parlement.

... et il est signé Edouard Balladur et Michel Barnier.

Alors, ne venez pas nous reprocher un manque de concertation sur ce sujet. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Michel Bouvard.

C'est le décret que Mme Voynet n'a pas respecté. Et c'est pour cette raison que le Conseil d'Etat a annulé la circulaire !

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Donc soyons clairs sur ce sujet.

Quand le Gouvernement a pris ses fonctions, il a mis en route des groupes de pilotage pour la détermination des espaces naturels figurant au titre de la directive Natura 2000 et, tout à l'heure, nous discuterons de dispositions complémentaires prévues dans le cadre du projet de loi d'habilitation que nous vous soumettons qui visent justement à renforcer les procédures de consultation.

Regardons les choses clairement. Alors qu'en 1995, vous avez essayé de passer en force sur ce terrain, nous, avons, nous, au contraire, rétabli des procédures de consultation que nous conforterons tout à l'heure.

M. Didier Quentin.

Qui est-ce qui passe en force, aujourd'hui ?

M. Robert Lamy.

Vous ne manquez pas de culot !

M. Jean Besson.

C'est scandaleux !

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Ces précisions méritaient d'être apportées pour répondre au procès d'intention que vous nous faites ce soir.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Nous en venons aux explications de vote sur la motion de renvoi en commission.

La parole est à Mme Geneviève Perrin-Gaillard, pour le groupe socialiste.

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

A la fin de la discussion générale et après la défense de la troisième motion de procédure...

M. Christian Estrosi.

La troisième déposée par l'opposition plurielle !

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

... qui s'est soldée par des contrevérités et des propos provocants et démagogiques qui ne sont pas glorieux pour le Parlement, je veux répondre à M. Estrosi qui s'étonne de l'abondance des textes à transposer et de l'urgence invoquée.

Monsieur Estrosi, il eût peut-être été de bon ton, entre 1993 et 1997, de transposer les 28 directives qui étaient à ce moment-là transposables.

M. Bernard Roman, président de la commission.

Eh oui !

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

Si vous l'aviez fait, nous n'aurions pas autant de textes à transposer aujourd'hui.

M. Christian Estrosi.

Et vous, qu'avez-vous fait depuis 1997 ?

M. Robert Lamy.

Et qu'avez-vous fait avant 1993 ?

M me Geneviève Perrin-Gaillard.

Comme Mme Saugues l'a fait remarquer, il y avait même déjà en 1993 des textes que vous auriez pu transposer.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Bernard Roman, président de la commission.

Bravo !

M. Christian Estrosi.

Et vous, pourquoi avez-vous attendu jusqu'à aujourd'hui ?

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

Je crois qu'il faut être humble de temps en temps.

M. Christian Estrosi.

Vous manquez vraiment d'arguments !

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

Par ailleurs, nous avons entendu beaucoup de contrevérités sur la procédure Natura 2000. Si M. Juppé n'avait pas gelé la procédure,...

M. Robert Lamy.

Heureusement qu'il l'a fait !

M. Christian Estrosi.

Il a bien fait ! Bravo Juppé !

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

... s'il avait prévu un mode de consultation un peu meilleur et s'il avait favorisé celle-ci, nous n'en serions pas arrivés là. (« Bravo ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Christian Estrosi.

Il était lucide, Juppé !

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

Parmi les directives à transposer, certaines sont, cela a été dit, utiles et bienvenues. D'autres ne posent pas de difficultés particulières.

Renvoyer le texte en commission alors que nous assurons la présidence de l'Union européenne créerait, me semblet-il, de nombreuses difficultés. C'est pourquoi nous devons repousser la motion.

Il est vrai que la procédure par ordonnance n'est pas complètement satisfaisante. Mais ce n'est pas parce qu'une seule commission, la commission des lois, a été consultée que le travail qui a été fait est mauvais.

M. Michel Hunault.

Merci pour elle !

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

Elle s'est réunie à plusieurs reprises et un certain nombre d'amendements ont été déposés. Je crois que le Parlement a joué son rôle et que le Gouvernement a raison de vouloir...

M. Robert Lamy.

Passer en force !

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

... transposer ces textes aujourd'hui.

M. Jean Besson.

C'est le principe qui est mauvais !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

Le groupe socialiste ne votera pas la motion de renvoi en commission. (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Didier Quentin, pour le groupe RPR.

M. Didier Quentin.

Lors de sa déclaration de politique générale, le 19 juin 1997,...

M. Michel Bouvard.

Ah oui ! c'était un grand moment !

M. Didier Quentin.

... M. Jospin a indiqué qu'il souhaitait impliquer davantage le Parlement dans la construction européenne.

M. Michel Bouvard.

Ils disent tous cela !

M. Didier Quentin.

Nous en sommes loin ce soir. En mettant le Parlement en demeure de vous laisser agir par ordonnances, vous accentuez en fait le déficit démocratique dont souffre la construction européenne.

M. Michel Bouvard.

Ce n'est pas peu dire !

M. Didier Quentin.

Au Sénat, quatre commissions ont été saisies pour examiner le projet de loi. A l'Assemblée, une seule, la commission des lois. Vous auriez pu avoir recours à la procédure d'examen simplifiée, dont il a été question à plusieurs reprises ce soir. En effet, comme l'a dit excellemment Christian Estrosi il y a quelques minutes,...

M. Christian Estrosi.

Merci ! Je suis très sensible à votre appréciation !

M. Didier Quentin.

... beaucoup de sujets méritaient un examen approfondi : la protection des travailleurs, l'amélioration de la sécurité des travailleuses enceintes, le diagnostic in vitro, la protection des consommateurs et, bien sûr, le contrôle des denrées alimentaires et les sujets liés à l'environnement, que ce soit la mise sur le marché des produits biocides, les habitats naturels, ou le réseau Natura 2000.

M. Michel Bouvard.

La majorité coule Natura 2000 !

M. Didier Quentin.

Et, pardonnez-moi de vous le dire, mais, malgré les explications que vous avez données il y a quelques minutes, le « grand méchant flou », comme dirait mon ami Bouvard, continue de sévir.

(« Que c'est drôle ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

Nous ignorons toujours les implications de Natura 2000. Vous avez cherché à imposer plutôt qu'à dialoguer. Aujourd'hui - et c'est un bien triste bilan pour la journée - vous avez confisqué le pouvoir démocratique. Et parmi les espèces menacées recensées par Natura 2000, on pourrait ajouter ce soir les députés français.

(Sourires.)

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

N'importe quoi !

M. Didier Quentin.

Pour toutes ces raisons, le groupe RPR soutient la demande de renvoi en commission de Christian Estrosi.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Avant de donner la parole aux deux derniers orateurs inscrits pour les explications de vote, j'indique d'ores et déjà, que, sur le vote de la motion de réunion en commission, je suis saisi d'une demande de scrutin public de la part du groupe du Rassemblement pour la République.

Je vais faire annoncer le scrutin de manière à permettre à nos collègues de regagner l'hémicycle.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. François Goulard, pour le groupe DL. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. François Goulard.

Je vous remercie, monsieur le président, de me donner la parole et je remercie mes collègues d'accueillir ma prise de micro par leurs acclamations.

(Sourires.)

Je ferai un bref rappel du déroulement du débat de ce soir.

Deux motions de procédure ont tout d'abord été défendues, l'exception d'irrecevabilité et la question préalable, qui, si elles avaient été adoptées, auraient eu pour effet d'interrompre l'examen du projet de loi.

La motion de renvoi en commission qui vient d'être soutenue propose, elle, non pas l'interruption de la procédure, mais la reprise d'une étape importante, à savoir l'examen du texte par la commission saisie au fond. D'ailleurs, j'aimerais apporter une correction orthographique à cette motion de renvoi en commission qui vient de nous être présentée. J'aimerais que soit ajouté un "s" à la fin du mot : "commission". Car, incontestablement, toutes les commissions de notre assemblée auraient été compétentes, compte tenu du nombre et de la diversité des directives concernées par ce projet de loi d'habilitation.

M. Yves Bur.

Vous avez raison.

M. François Goulard.

Il est vraiment très dommage monsieur le ministre, que vous ayez choisi la procédure d'examen la plus réduite et la plus rapide possible, la procédure minimaliste. Même si nous acceptions, ce que nous ne faisons pas, le choix que vous avez fait de légiférer par voie d'ordonnances, vous auriez pu organiser un débat parlementaire plus riche. La manière dont les sénateurs ont travaillé aurait pu vous inspirer.

Pour cette raison de simple procédure parlementaire, pour le choix que vous avez fait d'accélérer au maximum l'examen des cinquante directives concernées, il va de soi que le groupe Démocratie libérale votera la motion de renvoi en commission éloquemment défendue par Christian Estori.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. Yves Bur, pour le groupe de l'UDF.

M. Yves Bur.

Monsieur le président, mes chers collègues, l'importance des sujets abordés par les directives qui vont se voir appliquer un nouveau cadre de transposition justifie amplement que nous votions la motion de renvoi en commission.

J'ai évoqué tout à l'heure les questions que soulevaient la transposition de la directive assurance et la refonte du code de la mutualité. Notre collègue Estrosi a parlé des difficultés que pose la transposition de Natura 2000. Les dispositions de cette directive ont en effet suscité en leur temps une forte émotion sur tout le territoire...

M. Michel Bouvard.

Elles suscitent encore une forte émotion !

M. Yves Bur.

... chez l'ensemble des élus et des acteurs de la ruralité.

Le fait de refuser le débat parlementaire nous fait craindre que cette transposition soit en fait un acte d'autorité de plus.

M. Michel Bouvard.

D'autoritarisme !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

M. Yves Bur.

Et les aménagements proposés par le Gouvernement ne sauraient constituer des garanties suffisantes en l'absence d'un débat clair et transparent, que, visiblement, vous craignez.

Pour nombre d'autres directives, la France prend également le risque une fois de plus d'entretenir la méfiance vis-à-vis de l'Europe et de laisser passer une occasion de mieux faire partager aux Français les apports de la construction communautaire.

C'est parce que nous pensons qu'il faut donner à l'Europe plus de lisibilité que nous refusons la démarche autoritaire dont fait preuve une fois de plus le Gouvernement et que nous voterons cette motion de renvoi en commissions, avec un «s » à « commission » comme l'a suggéré mon collègue Goulard.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Mes chers collègues, je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

Je vais maintenant mettre aux voix la motion de renvoi en commission.

Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même, et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été cou plés à cet effet.

Le scrutin est ouvert.

....................................................................

M le président.

Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin : Nombre de votants ...................................

85 Nombre de suffrages exprimés .................

81 Majorité absolue .......................................

41 Pour l'adoption .........................

21 Contre .......................................

60 L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

Discussion des articles

M. le président.

J'appelle maintenant, dans les conditions prévues par l'article 91, alinéa 9, du règlement, les articles du projet de loi dans le texte du Sénat.

Article 1er

M. le président.

« Art. 1er Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre, par ordonnances, les dispositions législatives nécessaires à la transposition des directives ou parties de directives suivantes, ainsi que les mesures d'adaptation de la législation liées à cette transposition :

« I. 1o Directive 81/851/CEE du Conseil du 28 septembre 1981 concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives aux médicaments vétérinaires ;

« 2o Directive 81/852/CEE du Conseil du 28 septembre 1981 relative au rapprochement des législations des Etats membres concernant les normes et protocoles a nalytiques, toxico-pharmacologiques et cliniques en matière d'essais de médicaments vétérinaires ;

« 3o Directive 89/48/CEE du Conseil du 21 décembre 1988 relative à un système général de reconnaissance des diplômes d'enseignement supérieur qui sanctionnent des formations professionnelles d'une durée minimale de trois ans ;

«4o Directive 89/391/CEE du Conseil du 12 juin 1989 concernant la mise en oeuvre de mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail ;

« 5o Directive 90/167/CEE du Conseil du 26 mars 1990 établissant les conditions de préparation, de mise sur le marché et d'utilisation des aliments médicamentaux pour animaux dans la Communauté ;

« 6o Directive 90/313/CEE du Conseil du 7 juin 1990 concernant la liberté d'accès à l'information en matière d'environnement ;

« 7o Directive 90/641/Euratom du Conseil du 4 décembre 1990 concernant la protection opérationnelle des travailleurs extérieurs exposés à un risque de rayonnements ionisants au cours de leur intervention en zone contrôlée ;

« 8o Directive 90/676/CEE du Conseil du 13 décembre 1990 modifiant la directive 81/851/CEE concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives aux médicaments vétérinaires ;

« 9o Directive 92/32/CEE du Conseil du 30 avril 1992 p ortant septième modification de la directive 67/548/CEE concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives relatives à la classification, l'emballage et l'étiquetage des substances dangereuses ;

« 10o Supprimé ;

« 11o Directive 92/49/CEE du Conseil du 18 juin 1992 portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'assurance directe autre que l'assurance sur la vie et modifiant les directives 73/239/CEE et 88/357/CEE (troisième directive

« assurance non vie ») ;

« 12o Directive 92/51/CEE du Conseil du 18 juin 1992 relative à un deuxième système général de reconnaissance des formations professionnelles, qui complète la directive 89/48/CEE ;

« 13o Directive 92/74/CEE du Conseil du 22 septembre 1992 élargissant le champ d'application de la directive 81/851/CEE concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives relatives aux médicaments vétérinaires et fixant des dispositions complémentaires pour les médicaments homéopathiques vétérinaires ;

« 14o Directive 92/85/CEE du Conseil du 19 octobre 1992 concernant la mise en oeuvre de mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au t ravail (dixième directive particulière au sens de l'article 16, paragraphe 1, de la directive 89/391/CEE), à l'exception de son article 7 relatif au travail de nuit ;

« 15o Directive 92/96/CEE du Conseil du 10 novembre 1992 portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'assurance directe sur la vie et modifiant les directives 79/267/CEE et 90/619/CEE (troisième directive « assurance vie ») ;

« 16o Directive 93/40/CEE du Conseil du 14 juin 1 993 modifiant les directives 81/851/CEE et 81/852/CEE concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives aux médicaments vétérinaires ;


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

« 17o Directive 94/33/CE du Conseil du 22 juin 1994 relative à la protection des jeunes au travail ;

« 18o Directive 96/29/Euratom du Conseil du 13 mai 1996 fixant les normes de base relatives à la protection sanitaire de la population et des travailleurs contre les dangers résultant des rayonnements ionisants ;

« 19o Directive 96/82/CE du Conseil du 9 décembre 1996 concernant la maîtrise des dangers liés aux accidents majeurs impliquant des substances dangereuses ;

« 20o Directive 96/97/CE du Conseil du 20 décembre 1996 modifiant la directive 86/378/CEE relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes dans les régimes professionnels de sécurité sociale ;

« 21o Directive 97/43/Euratom du Conseil du 30 juin 1997 relative à la protection sanitaire des personnes contre les dangers des rayonnements ionisants lors d'expositions à des fins médicales, remplaçant la directive 84/466/Euratom ;

« 22o Directive 97/74/CE du Conseil du 15 décembre 1997 étendant au Royaume-Uni la directive 94/45/CE concernant l'institution d'un comité d'entreprise européen ou d'une procédure dans les entreprises de dimension communautaire et les groupes d'entreprises de dimension communautaire en vue d'informer et de consulter les travailleurs ;

« 23o Directive 98/8/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 février 1998 concernant la mise sur le marché des produits biocides ;

« 24o Supprimé ;

« 25o Directive 98/79/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 octobre 1998 relative aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro ;

« 26o Directive 99/62/CE du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 1999 relative à la taxation des poids lourds pour l'utilisation de certaines infrastructures.

« II. - 1o Directive 89/104/CEE du Conseil du 21 décembre 1988 rapprochant les législations des Etats membres sur les marques ;

« 2o Directive 89/397/CEE du Conseil du 14 juin 1989 relative au contrôle officiel des denrées alimentaires ;

« 3o Directive 90/388/CEE de la Commission européenne du 28 juin 1990 relative à la concurrence dans les marchés des services de télécommunication ;

« 4o Directive 92/12/CEE du Conseil du 25 février 1992 relative au régime général, à la détentio n, à la circulation et aux contrôles des produits soumis à accise ;

« 5o Directive 92/83/CEE du Conseil du 19 octobre 1992 concernant l'harmonisation des structures des droits d'accises sur l'alcool et les boissons alcooliques ;

« 6o Directive 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs ;

« 7o Directive 95/53/CE du Conseil du 25 octobre 1995 fixant les principes relatifs à l'organisation des contrôles officiels dans le domaine de l'alimentation animale ;

« 8o Directive 96/19/CE de la Commission du 13 mars 1996 modifiant la directive 90/388/CEE en ce qui concerne la réalisation de la pleine concurrence sur le marché des télécommunications ;

« 9o Directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 1997 concernant la protection des consommateurs en matière de contrats à distance ;

« 10o Directive 97/13/CE du Parlement européen et du Conseil du 10 avril 1997 relative à un cadre commun pour les autorisations générales et les licences individuelles dans le secteur des services de télécommunications ;

« 11o Directive 97/33/CE du Parlement européen et du Conseil du 30 juin 1997 relative à l'interconnexion dans le secteur des télécommunications en vue d'assurer un service universel et l'interopérabilité par l'application des principes de fourniture d'un réseau ouvert (ONP) ;

« 12o Directive 97/51/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 octobre 1997 modifiant les directives 90/387/CEE et 92/44/CEE en vue de les adapter à un environnement concurrentiel dans le secteur des télécommunications ;

« 13o Directive 97/55/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 octobre 1997 modifiant la directive 84/450/CEE sur la publicité trompeuse afin d'y inclure la publicité comparative ;

« 14o Directive 97/66/CE du Parlement européen et du Conseil du 15 décembre 1997 concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des télécommunications ;

« 15o Supprimé ;

« 16o Directive 98/10/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 1998 concernant l'application de la fourniture d'un réseau ouvert (ONP) à la téléphonie vocale et l'établissement d'un service universel des télécommunications dans un environnement concurrentiel ;

« 17o Directive 98/26/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 mai 1998 concernant le caractère définitif du règlement dans les systèmes de paiement et de règlement des opérations sur titres ;

« 18o Directive 98/27/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 mai 1998 relative aux actions en cessation en matière de protection des intérêts des consommateurs ;

« 19o Directive 98/71/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 octobre 1998 sur la protection juridique des dessins ou modèles ;

« 20o Directive 98/78/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 octobre 1998 sur la surveillance complémentaire des entreprises d'assurance faisant partie d'un groupe d'assurance ;

« 21o Directive 99/2/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 février 1999 relative au rapprochement des législations des Etats membres sur les denrées et ingrédients alimentaires traités par ionisation ;

« 22o Directive 99/3/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 février 1999 établissant une liste communautaire de denrées et ingrédients alimentaires traités par ionisation ;

« 23o Directive 99/5/CE du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 1999 concernant les équipements hertziens et les équipements terminaux de télécommunications et la reconnaissance mutuelle de leur conformité ;

« 24o Directive 99/64/CE de la Commission du 23 juin 1999 modifiant la directive 90/388/CEE en vue de garantir que les réseaux de télécommunications et les réseaux câblés de télévision appartenant à un seul et même opérateur constituent des entités juridiques distinctes. »

Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 12, 19 et 34.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

L'amendement no 12 est présenté par M. Meï et les membres du groupe communiste, l'amendement no 19 est présenté par M. Goulard ; l'amendement no 34 est présenté par M. Quentin.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer le quatrième alinéa (4o ) du I de l'article 1er »

La parole est à M. Roger Meï, pour soutenir l'amendement no

12.

M. Roger Meï.

La transposition d'une directive concernant la médecine du travail et son indépendance paraît totalement inappropriée par voie d'ordonnances. Je crois qu'il n'est pas besoin de développer. Chacun comprend la portée de cet amendement.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard, pour soutenir l'amendement no

19.

M. François Goulard.

J'ai trouvé parfaite la présentation de mon collègue Meï. Je my rallie.

M. le président.

Vous faites de même, monsieur Quentin, pour la défense de l'amendement no 34 ?

M. Didier Quentin.

Oui.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Floch, rapporteur.

La commission rejette ces amendements.

M. Michel Bouvard.

Elle a tort !

M. Charles de Courson.

Peut-on savoir pourquoi ?

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Avis défavorable. Il y a eu transcription partielle de cette directive mais la commission européenne, dans une mise en demeure de mars 1997, a reproché à la France une transposition insuffisante sur deux points : d'une part en ne prévoyant pas pour l'ensemble des entreprises le principe de la consultation des travailleurs lors de l'introduction dans l'entreprise de nouvelles technologies, d'autre part en ne prévoyant pas de formation des délégués du personnel qui ont une mission d'hygiène et de sécurité dans les entreprises de 11 à 50 salariés.

Il s'agit donc ici de se prémunir contre des risques de contentieux. J'ajoute qu'il y a eu consultation des partenaires sociaux au sein du conseil supérieur de prévention des risques professionnels en février 2000 et qu'ils se sont prononcés favorablement à cette mesure.

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 12, 19, 34.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 20 et 35.

L'amendement no 20 est présenté par M. Goulard ; l'amendement no 35 est présenté par M. Quentin.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer le sixième alinéa (6o ) du I de l'article 1er »

La parole est à M. François Goulard, pour soutenir l'amendement no

20.

M. François Goulard.

La directive du Conseil du 7 juin 1990 touche à la liberté d'accès à l'information en matière d'environnement. Son énoncé même montre à quel point il eût été souhaitable qu'elle fît l'objet d'une véritable discussion parlementaire.

M. le président.

La parole est à M. Didier Quentin, pour soutenir l'amendement no

55.

M. Didier Quentin.

Par cet alinéa, le Gouvernement souhaite notamment introduire la définition communautaire de l'information en matière d'environnement dans le dispositif juridique français. Cette information pourrait être communiquée de plein droit sans que le demandeur soit obligé de faire valoir un intérêt.

Ainsi que vient de le dire François Goulard, l'importance des sujets abordés rend un débat au Parlement nécessaire pour procéder à cette transposition.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Floch, rapporteur.

La commission a suivi la sagesse du Sénat et repoussé ces deux amendements.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Le Gouvernement demande le rejet de ces amendements. La transposition répond à une obligation forte, puisqu'un contentieux en manquement pour transposition incorrecte de cette directive en droit interne est pendant devant la Cour de justice des Communautés européennes. La condamnation de la France est prévisible.

Ajoutons qu'en garantissant à tout citoyen le droit d'accès à l'information en matière d'environnement, ce texte répond à une attente très forte du public, des associations et des élus.

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 20 et 35.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 13, 21 et 36.

L'amendement no 13 est présenté par M. Meï et les membres du groupe communiste ; l'amendement no 21 est présenté par M. Goulard ; l'amendement no 36 est présenté par M. Quentin.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer le quatorzième alinéa (14o ) du I de l'article 1er »

La parole est à M. Roger Meï, pour soutenir l'amendement no

13.

M. Roger Meï.

M. Gilbert Biessy a fort bien expliqué dans son intervention notre position sur le travail de nuit des femmes et sur le travail de nuit en général. Ce sujet nous semble devoir être discuté dans le cadre d'un véritable texte de loi.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard, pour soutenir l'amendement no

21. M. François Goulard. Je me rallie à l'argumentation de mon collègue Meï. (Sourires.)

M. le président.

Je vois qu'il en est de même pour M. Quentin et son amendement no

36.

M. Didier Quentin.

En effet !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Floch, rapporteur.

La commission a constaté que le travail de nuit des femmes avait déjà fait l'objet d'un très long débat. Sur ce point également, elle a suivi la sagesse du Sénat et repoussé ces amendements.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Là encore, la directive avait été incomplètement transposée, tant et si bien qu'une action en contentieux a été lancée par la Commission à l'encontre du Gouvernement français.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

Précisons que des dispositions qui restent à transposer ont trait à la protection des femmes enceintes ou allaitantes exposées sur leur lieu de travail à des risques pour leur santé ou leur sécurité. Elles leur permettront d'être reclassées sur un poste plus adapté ou, lorsque le reclassement est impossible, d'obtenir la suspension de leur contrat de travail sans perte de rémunération. Autant de mesures qui constituent un réel progrès social. C'est pourquoi je vous demande de repousser ces amendements.

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 13, 21 et 36.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 14 et 37.

L'amendement no 14 est présenté par M. Meï et les membres du groupe communiste ; l'amendement no 37 est présenté par M. Quentin.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer le dix-septième alinéa (17o ) du I de l'article 1er »

La parole est à M. Roger Meï, pour soutenir l'amendement no

14.

M. Roger Meï.

L'alinéa que nous proposons de supprimer concerne le travail des jeunes. Je ne reprendrai pas l'argumentation développée dans mon intervention en discussion générale ; en tout état en cause, cette directive ne saurait être transposée sans un véritable débat au Parlement. Elle constitue une véritable régression.

M. le président.

La parole est à M. Didier Quentin, pour soutenir l'amendement no

37.

M. Didier Quentin.

Sans être un compagnon de route, je me rallie à l'argumentation de M. Meï. (Sourires.)

M. Jean-Louis Idiart.

C'est beau ! (Sourires.)

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Floch, rapporteur.

La commission a regardé de très près ces amendements. Pour commencer, elle a remarqué que le Sénat avait accepté cette directive.

Ensuite et surtout, il faut insister sur le fait que, en la matière, le droit national étant supérieur à la directive, c'est le droit français qui s'applique. Dès lors, prétendre que l'on va faire travailler les jeunes Français ou habitant en France à treize ans est un mensonge éhonté.

M. Charles de Courson.

Qui a dit cela ?

M. Jacques Floch, rapporteur.

Cela a été dit dans des tracts.

M. Charles de Courson.

Des tracts de qui ?

M. Jacques Floch, rapporteur.

Le simple fait que vous ayez proposé cet amendement laisse entendre que vous reprenez cet argument.

M. François Goulard.

Pas du tout !

M. Charles de Courson.

Pas le groupe UDF en tout cas. Soyez précis, monsieur le rapporteur !

M. Jacques Floch, rapporteur.

C'est pourtant bien ce que dit la « majorité unie » par la bouche de M. Quentin, qui demande la suppression de cet alinéa.

(Exclamations sur divers bancs.)

M. Christian Bataille.

Vous voulez dire l'opposition !

M. le président.

Chacun avait traduit ! (Sourires.)

M. Jacques Floch, rapporteur.

C'est un sujet sérieux qui ne doit pas prêter à plaisanterie,...

M. Michel Bouvard.

Absolument.

M. Jacques Floch, rapporteur.

... mais je ne saurais accepter cette fausse argumentation laissant entendre que, du fait de cette directive, des mesures moins protectrices que le droit national s'appliqueraient dans notre pays.

M. Michel Bouvard.

C'est pourtant ce qui vient d'être fait pour le travail de nuit !

M. Charles de Courson.

Ce sont les communistes qui tiennent de tels propos.

Mme Nicole Feidt.

En l'occurrence, vous vous associez à eux !

M. Jacques Floch, rapporteur.

En droit social, c'est le droit national qui s'applique : dans l'état actuel des choses, il est supérieur au droit communautaire. Je veux l'affirmer avec force et c'est pourquoi, mon cher collègue Meï, nous repousserons votre amendement.

M. Charles de Courson.

Elle est belle, la majorité plurielle !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Même avis que la commission : défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 14 et 37.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

M. Meï et les membres du groupe communiste ont présenté un amendement, no 15, ainsi rédigé :

« Supprimer le vingtième alinéa (20o ) du I de l'article 1er »

La parole est à M. Roger Meï.

M. Roger Meï.

Cet amendement vise à exclure du champ de ces ordonnances de transposition la directive 96/97 relative à la mise en oeuvre du principe d'égalité de traitement entre les hommes et les femmes dans les régimes professionnels de sécurité sociale.

Cette directive est venue modifier celle qui précédait à la suite d'un arrêt du 17 mai 1990 de la Cour de justice des Communautés européennes, lequel a invalidé les dérogations contenues dans le code de la sécurité sociale touchant à la fixation de l'âge de la retraite et aux conditions d'attribution des pensions de réversion. Il s'agit donc bel et bien de revenir sur des avancées sociales accordées aux femmes, sous prétexte d'une égalité qui n'a pas encore su trouver un ancrage suffisant dans les réalités de la vie quotidienne et des entreprises.

M. Michel Bouvard.

Tout à fait !

M. Roger Meï.

Nous proposons en conséquence de supprimer cet alinéa, afin d'empêcher que notre système de protection sociale soit nivelé par le bas.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Floch, rapporteur.

Au nom des mêmes arguments que tout à l'heure, la commission a repoussé l'amendement de M. Meï.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Même avis : défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

15. (L'amendement n'est pas adopté.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 22 et 38.

L'amendement no 22 est présenté par M. Goulard ; l'amendement no 38 est présenté par M. Quentin.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer l'avant-dernier alinéa (25o ) du I de l'article 1er »

La parole est à M. François Goulard, pour soutenir l'amendement no

22.

M. François Goulard.

Encore un échantillon de la longue liste des directives que nous avons choisies pour montrer que nous touchons absolument à tous les sujets : celui-ci mérite à l'évidence que l'on en débatte, puisque la directive visée dans cet alinéa a trait aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro.

M. le président.

Monsieur Quentin, les arguments de M. Goulard suffisent-ils pour défendre votre amendement no 38 ?

M. Didier Quentin.

Absolument, monsieur le président.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?

M. Jacques Floch, rapporteur.

La commission a repoussé ces amendements, suivant en cela la sagesse du Sénat.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Il apparaît urgent de procéder à cette transposition dans la mesure où la France a d'ores et déjà fait l'objet d'une mise en demeure de la Commission européenne, en date du 13 juillet 2000. Ajoutons que la transposition rapide des dispositions de la directive permettra à l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, autorité sanitaire compétente, de contrôler tous les produits utilisés dans le domaine du diagnostic in vitro , ce qui conforte l'intérêt de cette transposition.

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 22 et 38.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 23 et 39.

L'amendement no 23 est présenté par M. Goulard ; l'amendement no 39 est présenté par M. Quentin.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer le deuxième alinéa (2o ) du II de l'article 1er »

La parole est à M. François Goulard, pour soutenir l'amendement no

23.

M. François Goulard.

Il s'agit ici du contrôle officiel des denrées alimentaires. L'actualité montre à quel point il est malheureux que nous soyons privés d'une discussion.

M. le président.

La parole est à M. Didier Quentin, pour soutenir l'amendement no

39.

M. Didier Quentin.

Le projet d'ordonnance prévoit notamment de préciser dans le code de la consommation les conditions dans lesquelles les agents chargés du contrôle peuvent opérer des vérifications sur place. En pleine crise de la vache folle, on mesure l'intérêt d'un débat sur un sujet aussi sensible.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Floch, rapporteur.

La commission a estimé qu'il y avait d'autant plus d'intérêt à transposer cette directive afin d'instaurer au plus vite un contrôle officiel des denrées alimentaires. C'est pourquoi elle a repoussé ces amendements.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Avis également défavorable.

Je précise à M. Goulard et à M. Quentin qu'il s'agit de transposer une disposition technique touchant aux conditions de contrôle des agents vérificateurs et de préciser les mesures à prendre en cas de constatation d'irrégularités. On comprendra qu'il faille agir rapidement.

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 23 et 39.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 16 et 47.

L'amendement no 16 est présenté par M. Meï et les membres du groupe communiste ; l'amendement no 47 est présenté par M. Bataille.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer le troisième alinéa (3o ) du II de l'article 1er »

La parole est à M. Roger Meï, pour soutenir l'amendement no

16.

M. Roger Meï.

Cet amendement vise à soustraire du champ de l'habilitation la directive cadre 90/388 relative à l'introduction de la concurrence dans le secteur des télécommunications. Cette directive fondatrice est à la base de toute la déréglementation de ce secteur.

En habilitant le Gouvernement à la transposer, tout comme les directives 96/19 et 97/51 qui font également l'objet d'un amendement de suppression de mon groupe, nous autoriserions le Gouvernement à modifier, sans débat devant la représentation nationale, la majeure partie du droit des télécommunications.

Rien qu'à ce titre le Gouvernement pourrait revoir le régime du fonds de service universel, modifier les modalités de fixation des tarifs des « opérateurs puissants », modifier le régime de fixation du catalogue d'interconnexion de France Télécom, modifier la réglementation applicable aux réseaux de fibres des collectivités locales.

Autant de domaines, vous en conviendrez, qui conditionnent l'avenir de ce secteur et qui nécessiteraient que l'on prenne le temps de les examiner avant de se prononcer.

Nous refusons donc, sur le fond et par principe, d'accorder un tel chèque en blanc au Gouvernement.

L'accepter reviendrait à dessaisir deux fois la représentation nationale : si une directive négociée par le Gouvernement est transposée par ce même Gouvernement, que reste-t-il au Parlement ? Rappelons enfin que M. Pierret s'était engagé à déposer un projet de loi sur ce thème...

M. le président.

La parole est à M. Christian Bataille, pour défendre l'amendement no

47.

M. Christian Bataille.

La suppression de cet alinéa se justifie par le fait que la directive du 28 juin 1990 a déjà été intégralement transposée.

M. François Goulard.

C'est partiellement vrai.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

M. Jacques Floch, rapporteur.

La commission avait repoussé cet amendement mais, après vérification, il apparaît effectivement que cette directive a d'ores et déjà été transposée par la loi du 30 décembre 1990.

M. François Goulard.

Incomplètement !

M. Jacques Floch, rapporteur.

A titre personnel, je suis donc favorable à l'adoption de ces amendements.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Le Gouvernement se rallie à la position du rapporteur.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. Alain Barrau, président de la délégation pour l'Unione uropéenne.

Voilà qui est intéressant : nous allons entendre la position de M. Goulard qui va défendre le libéralisme !

M. François Goulard.

Dans le domaine des télécommunications, le Gouvernement a la manie de priver le Parlement de tout droit à la discussion. Le groupe communiste vient de le mettre en lumière : si la transposition de la directive...

Mme Nicole Feidt.

C'est déjà fait !

M. François Goulard.

... était entièrement effectuée, je suppose que l'on ne nous proposerait pas de la refaire. Il s'agit donc, à tout le moins, de la compléter.

Mais il y a un autre sujet, au moins aussi important, sur lequel ce gouvernement s'est refusé au débat : la concession des licences de téléphonie dites de troisième opération, dites UMTS,...

M. François Brottes.

Cela n'a rien à voir !

M. François Goulard.

... une affaire de l'ordre de 130 milliards de francs, excusez du peu !

M. François Brottes.

Ce n'est pas une directive !

M. François Goulard.

Alors que la procédure n'avait pas été fixée par la précédente loi sur les télécommun ications, alors que les enjeux financiers et les choix étaient loin d'être évidents, le Gouvernement a décidé arbitrairement d'écarter le Parlement de toute discussion, comme il a tout aussi arbitrairement décidé de la formule retenue pour l'attribution de ces licences et de leurs heureux bénéficiaires.

Il s'agit donc d'une matière interdite... Les télécommunications favorisent a priori la circulation de l'information, mais celle-ci s'arrête aux portes du Parlement !

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 16 et 47.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président.

M. Quentin a présenté un amendement, no 42, ainsi rédigé :

« Supprimer le sixième alinéa (6o ) du II de l'article 1er »

La parole est à M. Didier Quentin.

M. Didier Quentin.

La directive 93/13 du Conseil du 5 avril 1993 concerne les clauses abusives dans les contrats avec les consommateurs. Un complément de transposition de cette directive au sein du code de la consommation apparaît nécessaire afin d'apporter des précisions sur la rédaction des clauses essentielles du contrat.

Un débat au Parlement serait nécessaire.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Floch, rapporteur.

Cet amendement n'a pas été examiné par la commission, mais je propose à l'Assemblée de voter contre, estimant qu'il convient de suivre le Sénat, qui a accepté cette transposition après un excellent débat.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Même opinion : avis défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

42. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 24 et 40.

L'amendement no 24 est présenté par M. Goulard ; l'amendement no 40 est présenté par M. Quentin.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer le septième alinéa (7o ) du II de l'article 1er »

La parole est à M. François Goulard, pour soutenir l'amendement no

24.

M. François Goulard.

Il est défendu.

M. le président.

La parole est à M. Didier Quentin, pour maintenir l'amendement no

40.

M. Didier Quentin.

Il est défendu.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Floch, rapporteur.

Ces amendements ont été repoussés par la commission.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Défavorable également, pour des raisons déjà exprimées.

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 24 et 40.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 17 et 46.

L'amendement no 17 est présenté par M. Meï et les membres du groupe communiste ; l'amendement no 46 est présenté par M. Bataille.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer le huitième alinéa (8o ) du II de l'article 1er »

La parole est à M. Roger Meï, pour soutenir l'amendement no

17.

M. Roger Meï.

Il est défendu. J'ai déjà développé mon argumentation tout à l'heure.

M. le président.

La parole est à M. Christian Bataille, pour soutenir l'amendement no

46.

M. Christian Bataille.

Il est également défendu. Même argument que précédemment.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Floch, rapporteur.

La commission a repoussé ces amendements et je maintiens cette fois-ci ma position.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Le Gouvernement est défavorable à ces amendements, dans la mesure où nous devons adapter la transposition déjà effectuée, la Commission ayant saisi sur cette question la Cour de justice des Communautés européennes.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 17 et 46.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

M. Quentin a présenté un amendement, no 41, ainsi rédigé :

« Supprimer le neuvième alinéa (9o ) du II de l'article 1er »

La parole est à M. Didier Quentin.

M. Didier Quentin.

Cet amendement concerne la protection des consommateurs en matière de contrats à distance, et cela me semble aussi mériter un débat au Parlement.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Floch, rapporteur.

La commission n'a pas examiné cet amendement, mais, à titre personnel, j'y suis défavorable et je demande à l'Assemblée de le repousser.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Je demande également à l'Assemblée de le repousser dans la mesure où la directive en question tend à compléter le code de la consommation sur des sujets essentiels comme la clarification de la définition de la vente à distance et des services qui ne peuvent être proposés par ce moyen, par exemple services financiers ou enchères, et à apporter diverses précisions sur la protection des consommateurs, notamment le délai de rétractation ou l'exigence d'un accord préalable pour proposer un contrat par télécopie.

Il s'agit donc de consolider le droit des consommateurs dans un esprit européen.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

41. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Goulard a présenté un amendement, no 26, ainsi rédigé :

« Supprimer le onzième alinéa (11o ) du II de l'article 1er »

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Cet amendement est défendu.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Floch, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

26. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Meï et les membres du groupe communiste ont présenté un amendement, no 18, ainsi rédigé :

« Supprimer le douzième alinéa (12o ) du II de l'article 1er »

La parole est à M. Roger Meï.

M. Roger Meï.

Cet amendement est défendu.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Floch, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

18. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Quentin a présenté un amendement, no 43, ainsi rédigé :

« Supprimer le quatorzième alinéa (14o ) du II de l'article 1er »

La parole est à M. Didier Quentin.

M. Didier Quentin.

Cet amendement concerne un sujet éminemment sensible, puisque c'est le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des télécommunications. Cela me semble justifier un débat au Parlement.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Floch, rapporteur.

Cet amendement n'a pas été examiné par la commission, mais, à titre personnel, j'en demande le rejet.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Comme le relève l'auteur de l'amendement, cette directive est en cours de transposition, et son contenu est pour l'essentiel de nature réglementaire, sauf sur un point technique, qui requiert une mesure législative, c'est-à-dire l'exigence d'un accord préalable de l'abonné pour que les appels de prospection commerciale lui soient adressés sur son fax ou au moyen d'un automate d'appels.

C'est donc un point voisin de celui que nous venons d'évoquer sur les contrats négociés à distance. Là encore, il s'agit d'une protection des consommateurs ou des usagers.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

43. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Le Gouvernement a présenté un amendement, no 1, ainsi libellé :

« Rétablir le quinzième alinéa (15o ) du II de l'article 1er dans la rédaction suivante :

« 15o Directive 97/67/CE du Parlement européen et du Conseil du 15 décembre 1997 concernant des règles communes pour le développement du marché intérieur des services postaux de la Communauté et l'amélioration de la qualité du service ; ».

Sur cet amendement, M. Bataille a présenté un sousamendement, no 44, ainsi rédigé :

« Compléter l'amendement no 1 par les mots : "dans ses termes tels qu'ils figurent au Journal officiel des Communautés européennes du 21 janvier 1998". »

La parole est à M. le ministre, pour soutenir l'amendement no

1.

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Il s'agit de rétablir les dispositions relatives à la directive postale qui avaient été supprimées par le Sénat.

Pour l'essentiel, cette directive a été transposée par la loi d'orientation sur l'aménagement et le développement durable du territoire, mais des mesures complémentaires sont nécessaires, qui se limitent à transposer des dispositions techniques : procédures d'autorisation pour les nouveaux entrants, moyens permettant d'assurer le respect du monopole postal. Ces dispositions ont reçu un avis favorable de la commission supérieure du service public des postes et télécommunications.

Il s'agit donc de renforcer le service public postal. Au moment où des négociations sont engagées par la Commission européenne, nous devons manifester claire-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

ment notre soutien à ce service public. C'est d'ailleurs dans cet esprit que la commission de la production et des échanges a adopté une résolution la semaine dernière, et c'est dans le même esprit que la commission compétente du Parlement européen s'est prononcée à une très large majorité pour la préservation du service public postal.

C'est pourquoi le Gouvernement demande le rétablissement de ces dispositions.

M. le président.

La parole est à M. Christian Bataille, pour soutenir le sous-amendement no

44.

M. Christian Bataille.

C'est un sous-amendement de précision.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur l'amendement et le sous-amendement ?

M. Jacques Floch, rapporteur.

La commission a adopté l'amendement proposé par le Gouvernement. Elle n'a pas examiné le sous-amendement présenté par M. Bataille, mais, à titre personnel, j'y suis très favorable parce qu'il permet de préciser que la transposition se fera dans sa rédaction actuelle. Je demande donc à l'Assemblée d'accepter la proposition de M. Bataille, ainsi, bien sûr, que l'amendement du Gouvernement ainsi sous-amendé.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement sur le sous-amendement no 44 ?

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Monsieur Bataille, le Gouvernement est entièrement d'accord avec l'objectif de votre sous-amendement et avec son exposé sommaire, mais je vous rassure : le texte de l'amendement précise bien que l'habilitation concerne la directive 97/67 du Parlement européen et du Conseil du 15 décembre 1997. Il ne comporte donc aucune ambiguïté sur le fait qu'il s'agit bien de transposer la directive en vigueur. Compte tenu de ces explications, je pense que vous pouvez retirer votre sous-amendement.

M. le président.

Monsieur Bataille ?...

M. Christian Bataille.

Le sous-amendement est retiré, monsieur le président.

M. le président.

Le sous-amendement no 44 est retiré.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Le Gouvernement est en retard d'une guerre puisque nous parlons de la transposition d'une directive alors que la Commission prépare la directive suivante. Nous avons simplement un train de retard !

M. Jacques Floch, rapporteur.

C'est justement pour cela qu'il faut adopter cet amendement.

M. Bernard Roman, président de la commission.

C'était urgent !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

1. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Goulard a présenté un amendement, no 28, ainsi rédigé :

« Supprimer le seizième alinéa (16o ) du II de l'article 1er »

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Cet amendement est défendu.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Floch, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Défavorable, parce qu'il s'agit, à travers la transposition de cette directive, de mettre en place l'annuaire téléphonique universel qui regroupera les abonnés de tous les opérateurs, y compris les opérateurs mobiles.

M. François Brottes.

Très important !

M. le ministre des relations avec le Parlement.

C'est un annuaire universel qui est attendu par tous les Français. Il est donc essentiel qu'il puisse être mis en place rapidement. France Télécom, opérateur chargé du service public, a l'obligation de mettre en place un tel annuaire, et la transposition de cette directive est indispensable pour cela.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

28. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Goulard a présenté un amendement, no 29, ainsi rédigé :

« Supprimer le dix-huitième alinéa (18o ) du II de l'article 1er »

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Avec tout le respect que je vous dois, monsieur le ministre, c'est un argument récurrent de dire que le sujet est important, et l'apport utile à notre législation. Sans doute, mais nous ne le nions pas (Sourires) , c'est la méthode qui nous paraît contestable. Vous pouvez donc nous faire cette objection à chaque fois, nous garderons pour notre part notre réserve à l'égard de la méthode que vous avez retenue.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Floch, rapporteur.

Rejet.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

29. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Goulard a présenté un amendement, no 25, ainsi rédigé :

« Supprimer les vingt et unième et vingt deuxième alinéas (21o et 22o ) du II de l'article 1er »

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Cet amendement est défendu.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Floch, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

25. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Bataille a présenté un amendement, no 45, ainsi rédigé :

« Supprimer le dernier alinéa (24o ) du II de l'article 1er »

La parole est à M. Christian Bataille.

M. Christian Bataille.

L'amendement est retiré.

M. le président.

L'amendement no 45 est retiré.

Je mets aux voix l'article 1er , modifié par les amendements adoptés.

(L'article 1er , ainsi modifié, est adopté.)


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Article 2

M. le président.

« Art. 2. Dans les mêmes conditions, le Gouvernement est autorisé à prendre, par ordonnances, les dispositions législatives requises pour l'application du droit communautaire dans les domaines suivants, ainsi que les mesures d'adaptation de la législation liées à cette application :

« I. 1o Articles 43 et 49 du traité instituant la Communauté européenne en ce qui concerne la profession d'agent artistique ;

« 2o Règlement (CEE) no 1408/71 du Conseil du 14 juin 1971 relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, en ce qui concerne l'assujettissement à la contribution sociale généralisée (CSG) et à la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) des revenus d'activités et de remplacement des personnes qui sont à la charge d'un régime de sécurité sociale d'un autre Etat membre de la Communauté européenne ;

« 3o Règlement (CEE) no 2455/92 du Conseil du 23 juillet 1992 concernant les exportations et importations de certains produits chimiques dangereux ;

« 4o Règlement (CEE) no 259/93 du Conseil du 1er février 1993 concernant la surveillance et le contrôle des transferts de déchets à l'entrée et à la sortie de la Communauté européenne ;

« 5o Règlement (CEE) no 793/93 du Conseil du 23 mars 1993 concernant l'évaluation et le contrôle des risques présentés par les substances existantes ;

« 6o Règlement (CE) no 2037/2000 du Parlement européen et du Conseil du 29 juin 2000 relatif à des substances qui appauvrissent la couche d'ozone.

« II. 1o Article 28 du traité instituant la Communauté européenne en ce qui concerne les règles d'apposition des poinçons de garantie sur les ouvrages en métaux précieux ;

« 2o Articles 43 et 49 du traité instituant la Communauté européenne en ce qui concerne la profession d'agent en brevets ;

« 3o Règlement (CEE) no 2238/93 de la Commission du 26 juillet 1993 relatif aux documents accompagnant les transports des produits viti-vinicoles et aux registres à tenir dans le secteur viti-vinicole ;

« 4o Règlement (CE) no 40/94 du Conseil du 20 décembre 1993 sur la marque communautaire ;

« 5o Décision du Conseil du 31 décembre 1998 sur les arrangements monétaires relatifs aux collectivités territoriales françaises de Saint-Pierre-et-Miquelon et Mayotte. »

La parole est à M. Henri Nayrou, inscrit sur l'article.

M. Henri Nayrou.

Je serai bref, mais clair.

M. Charles de Courson.

Ça, on ne le sait qu'après !

M. Henri Nayrou.

Je n'apprécie pas le principe des ordonnances, mais j'en admets la nécessité pour cause d'urgence, tout en n'appréciant pas non plus certaines choses à propos de Natura 2000.

Pour l'anecdote, j'ai connu Mme Aubert mieux avisée.

Elle est contre les ordonnances, sauf pour Natura 2000, domaine pour lequel elle souhaitait un débat expéditif.

Pour ma part, je regrette à l'inverse que le débat parlementaire sur Natura 2000 se résume à un article, deux amendements et huit sous-amendements au milieu de plus de cinquante directives à examiner ce soir à la course.

M. Yves Bur.

C'est scandaleux !

M. Henri Nayrou.

Le sujet méritait une mise à plat à la mesure des enjeux pour la conservation des habitats et le respect des habitants. On ne saurait se féliciter qu'il y ait eu concertation si celle-ci n'a pas été menée à un terme acceptable.

Certes, des améliorations vont être apportées par des amendements donnant juste un peu plus de poids aux conseillers municipaux, juste la possibilité d'émettre un avis motivé, mais on est loin du compte.

Très franchement, je n'ai pas le coeur à donner ce soir un chèque en blanc à tous ceux qui pensent que la préservation du têtard à tête creuse justifie que l'Europe se passe de l'avis de ceux qui vivent sur son territoire sans jamais l'avoir vu...

M. Michel Bouvard.

Très bien !

M. Henri Nayrou.

... je veux bien sûr parler du têtard à tête creuse (Sourires).

M. Charles de Courson.

Vous êtes réactionnaire ! (Rires.)

M. le président.

Je mets aux voix l'article 2.

(L'article 2 est adopté.)

Après l'article 2

M. le président.

Le Gouvernement a présenté un amendement, no 2 deuxième rectification, ainsi rédigé :

« Après l'article 2, insérer l'article suivant :

« Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, et pour la transposition de l'article 4 d e la directive 79/409/CEE du Conseil du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages et des articles 4 et 6 de la directive 92/43/CE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages, le Gouvernement est autorisé à prendre, par ordonnances, les dispositions législatives requises, ainsi que les mesures d'adaptation de la législation qui leur sont liées, pour :

« 1o Donner une existence juridique aux zones de protection spéciale et aux zones spéciales de conservation, désignées sous l'appellation commune de "sites Natura 2000" de façon qu'un régime de conservation contractuel ou réglementaire puisse s'appliquer dans tous les cas ;

« 2o Définir un cadre juridique pour une gestion contractuelle entre l'autorité administrative et les titulaires de droit réels et personnels portant sur des biens immobiliers ;

« 3o Organiser la concertation nécessaire à l'élaboration des orientations de gestion de chaque site ;

« 4o Définir un régime d'évaluation approprié des incidences ainsi qu'un régime d'autorisation des plans et des projets susceptibles d'affecter significativement un site Natura 2000, y compris les possibilités de dérogation et prévoir les mesures y afférentes. »

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Cet amendement a pour objet d'ajouter au champ de l'habilitation législative la transposition des directives concernant la conservation des habitats naturels - Natura 2000 ainsi que de la faune et de la flore sauvages, et la conservation des oiseaux sauvages, et de préciser le cadre de transposition.


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Comme ont pu le constater les rapporteurs du texte au Sénat et à l'Assemblée nationale à qui il a été transmis, le projet d'ordonnances vise à donner une existence juridique aux zones spéciales de conservation, à consacrer l'option d'un régime de projection instauré par voie contractuelle, à organiser la concertation nécessaire à l'élaboration des orientations de gestion de chaque site et à instaurer un régime d'évaluation et d'autorisation des plans et des projets susceptibles d'affecter significativement un site.

Il faut noter à ce sujet que la proposition de loi débattue au Sénat dont certains députés se sont fait l'écho ne constituait en aucun cas une transposition car elle traitait exclusivement des modalités de gestion des sites, qui sont de nature réglementaire.

Toutefois, pour faire écho aux préoccupations exprimées par M. Nayrou, le Gouvernement se ralliera aux sous-amendements proposés par la commission qui visent à renforcer les procédures de concertation pour l'adoption de la directive.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur cet amendement ?

M. Jacques Floch, rapporteur.

La commission a adopté cet amendement avec des sous-amendements pour parvenir à un texte équilibré et bien construit.

M. le président.

Plusieurs sous-amendements ont en effet été déposés sur l'amendement no 2 deuxième rectification.

M. de Courson a présenté un sous-amendement, no 55, ainsi rédigé :

« Compléter le 2o de l'amendement no 2 deuxième rectification par les mots : "y compris les droits de pêche et de chasse". »

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson.

Ceux qui ont participé au débat sur la loi relative à la chasse savent dans quelles conditions on a arraché un vote à un certain nombre de membres de la représentation nationale - on appelle ça un viol en termes juridiques - de façon à parvenir d'extrême justesse à une majorité relative acquise à six voix.

On comprend dès lors pourquoi le Gouvernement ne veut à aucun prix d'un débat au Parlement. On ne manquerait pas, à cette occasion, d'évoquer de nouveau le problème des droits de chasse et de pêche.

Si j'ai déposé ce sous-amendement - il y aura d'autres, au moins sur la chasse, peu ont parlé de la pêche - c'est parce que toute cela fait partie du droit de propriété.

Déléguer au Gouvernement de tels pouvoirs de légiférer en ce domaine, c'est-à-dire de porter atteinte à un certain nombre des libertés qui constituent le socle de notre République, ça me paraît être la démission totale du Parlement français. Il est vrai que, pour ce qu'il lui reste d'autorité, on n'est plus à ça près...

Moi, monsieur le ministre, je suis très inquiet quand je lis votre texte.

Dans le 1o , vous parlez d'un régime de conservation contractuel ou réglementaire. Cela veut dire que, si les propriétaires du secteur ou ceux qui détiennent des droits réels ne sont pas d'accord sur le contrat que vous leur proposez, on passera à un régime réglementaire. Comment ce pouvoir réglementaire sera-t-il encadré ? Je voudrais bien que vous soyez plus précis sur cette possibilité de passer du contractuel au réglementaire.

Dans le 2o , vous parlez de biens immobiliers. Pourriezvous nous préciser ce que deviennent les droits de pêche et de chasse qui sont des éléments constitutifs du droit de propriété relatif aux biens immobiliers que sont les terres puisque c'est lié à la propriété foncière ?

M. le président.

Je suis saisi de quatre sous-amendements, no 49, 51, 54 et 6 rectifié, pouvant être soumis à discussion commune.

Le sous-amendement no 49, présenté par MM. Estrosi, Jean-Claude Lemoine et Doligé, est ainsi rédigé :

« Après le troisième alinéa (2o ) de l'amendement no 2 deuxième rectification, insérer l'alinéa suivant :

« 2o bis S'assurer, préalablement à la détermination des propositions départementales contribuant à la liste nationale des sites susceptibles d'être classés en zones spéciales de conservation ou zones de protection spéciale, de l'accord par délibération des c onseils municipaux concernés, portant sur les remarques et propositions relatives au projet de périmètre, les dispositions envisageables et les difficultés éventuelles, et dont l'autorité préfectorale ne peut s'écarter. »

Le sous-amendement no 51, présenté par M. Idiart, est ainsi rédigé :

« Après le troisième alinéa (2o ) de l'amendement no 2 deuxième rectification, insérer l'alinéa suivant :

« 2o bis Prévoir, préalablement à la détermination des propositions départementales contribuant à la liste nationale des sites susceptibles d'être classés zones spéciales de conservation ou zones de protection spéciale, la consultation, et en zone de montagne l'approbation, des conseils municipaux concernés sur les propositions relatives au projet de périmètre. »

Le sous-amendement no 54, présenté par M. Chanteguet, est ainsi rédigé :

« Après le troisième alinéa (2o ) de l'amendement no 2 deuxième rectification, insérer l'alinéa suivant :

« 2o bis Prévoir, préalablement à la notification à la Commission européenne des zones de protection spéciale et des propositions de zones spéciales de conservation, la consultation des conseils municipaux concernés sur le projet de périmètre ; ceux-ci rendent un avis motivé dont le représentant de l'Etat dans le département ne peut s'écarter que de façon motivée. »

L e sous-amendement no 6 rectifié, présenté par M. Floch, rapporteur, est ainsi rédigé :

« Après le troisième alinéa (2o ) de l'amendement no 2 deuxième rectification, insérer l'alinéa suivant :

« 2o bis Prévoir, préalablement à la détermination des propositions départementales contribuant à la liste nationale des sites susceptibles d'être classés zones spéciales de conservation ou zones de protection spéciale, la consultation des conseils municipaux concernés sur les propositions relatives au projet de périmètre ; ceux-ci rendent un avis motivé dont le représentant de l'Etat dans le département ne peut s'écarter que de façon motivée. »

La parole est à M. Christian Estrosi, pour soutenir le sous-amendement no

49.

M. Christian Estrosi.

Le Gouvernement tente par son amendement de réintroduire une disposition annulée par le Sénat, en l'occurrence la directive dite Natura 2000, et nous essayons par ce sous-amendement de restaurer le


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débat démocratique, conformément d'ailleurs à l'esprit de la directive européenne que ne respecte pas le Gouvernement français.

Que ce soit d'ailleurs pour moi, monsieur le ministre, l'occasion de vous dire que, tout à l'heure, sur la motion de renvoi en commission, faire référence à l'arrêté de 1995 de M. Balladur qui ouvrait concertation était un piètre argument. Ce dont il est question aujourd'hui, ce n'est pas de l'arrêté du Premier ministre Edouard Balladur, c'est de celui pris par la ministre de l'environnement,

Mme Voynet, en date du 11 août 1997.

Vous êtes d'ailleurs totalement contredit par le conseil d'Etat, puisque, dans son arrêt du 27 septembre 1999, il démontre que vos arguments étaient faux. Il a, en effet, annulé une circulaire du ministre de l'environnement du 11 août 1997 du fait qu'elle prescrivait au préfet de transmettre les premières listes de sites sans respecter la procédure fixée par un décret du 5 mai 1995 qui précisait les consultations à effectuer et les avis à recueillir.

M. Didier Quentin.

Très juste !

M. Christian Estrosi.

Le Gouvernement d'Edouard Balladur, en mai 1995, avait choisi la voie démocratique de la consultation et de la concertation sur le terrain, et votre Gouvernement s'est vu retoquer par le Conseil d'Etat pour avoir voulu annuler ces dispositions. (« Tout à fait ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) C'est donc bel et bien vous, monsieur le ministre, qui êtes sanctionné aujourd'hui !

M. François Goulard.

Bien sûr !

M. Christian Estrosi.

Cette procédure a été déclarée illégale, et vous nous proposez aujourd'hui de réintroduire une disposition tout aussi illégale ! Pour essayer d'en atténuer les effets, nous proposons p ar ce sous-amendement que la concertation sur Natura 2000 ne puisse en aucune circonstance contourner les avis et l'accord des conseils municipaux concernés par les périmètres que vous voudriez mettre en place d'autorité.

Je connais, pour l'avoir vécue, la procédure de concertation et de consultation sur Natura 2000, mais peut-être d'autres élus locaux ont-ils été confrontés à la même situation.

M. Michel Bouvard.

En effet !

M. Charles de Courson.

Ce n'était pas triste !

M. Christian Estrosi.

Le préfet des Alpes-Maritimes nous a invités, fort courtoisement, avec l'ensemble des maires des territoires visés. Il nous a communiqué une liste qu'il avait dressée d'autorité et qui devait s'imposer à tous.

M. Jacques Floch, rapporteur.

Ce n'est pas ce que nous proposons !

M. Christian Estrosi.

Si vous voulez que vos conseils municipaux délibèrent pour nous donner un avis, a-t-il ajouté, libre à vous, mais nous n'en retiendrons que ce qui nous paraîtra utile.

M. Michel Bouvard.

Des oukases !

M. Christian Estrosi.

Telle est la réalité. Au terme de cette procédure, l'Etat, représenté par le préfet, n'a, à aucun moment, tenu compte des avis formulés par les conseils municipaux...

M. Michel Bouvard.

Comme d'habitude ! Et ça continue.

M. Christian Estrosi.

... et a imposé cette liste. Nous savons ce que le Conseil d'Etat a pensé de cette méthode que votre Gouvernement a mise en place. Or, voilà que, aujourd'hui, vous nous proposez purement et simplement de réintroduire le même dispositif...

M. Jacques Floch, rapporteur.

Mais non !

M. Christian Estrosi.

... et de poursuivre avec la même méthode.

M. Jacques Floch, rapporteur.

Non !

M. Christian Estrosi.

Si vous avez, aujourd'hui, la volonté démocratique...

M. Jacques Floch, rapporteur.

Oui !

M. Christian Estrosi.

... d'en appeler au peuple et à ses représentants, permettez au moins aux élus locaux de donner un avis qui puisse, seul, s'imposer sur toute autre décision de l'Etat. C'est la raison pour laquelle nous demandons que soit précisé dans ce texte que, sans l'accord des conseils municipaux, aucun périmètre ne pourra être imposé par les préfets de la République.

M. François Goulard.

Il a raison !

M. le président.

La parole est à M. Jean-Louis Idiart, pour soutenir le sous-amendement no

51.

M. Michel Bouvard.

Excellent sous-amendement !

M. Jean-Louis Idiart.

Les élus de la montagne, dont je préside le groupe à l'Assemblée nationale, sont préoccupés par cette directive...

M. Michel Bouvard.

Oui. Nous sommes très inquiets.

M. Jean-Louis Idiart.

... et par la façon dont le débat est en train de tourner court. Au niveau national, nous avons participé aux différents groupes de travail et n'avons cessé de répéter que nous souhaitions une concertation aussi transparente que possible. Nous voulions que les propositions qui étaient faites sur le territoire soient clairement exprimées et analysées, après quoi nous pourrions nous prononcer en toute connaissance de cause.

Aujourd'hui, on inverse le processus.

M. Michel Bouvard.

C'est vrai !

M. Jean-Louis Idiart.

Et nous sommes particulièrement inquiets.

M. Charles de Courson.

C'est vrai ! Et il n'y a pas qu'en montagne !

M. Jean-Louis Idiart.

Dans certains endroits du territoire, la concertation s'est faite un peu mieux qu'ailleurs, mais, la plupart du temps, nous le voyons à l'occasion de différentes réunions, conseils d'administration ou assemblées générales, les élus du territoire nous disent qu'ils ne sont pas satisfaits par la façon dont les choses se passent sur le terrain. Ils sont en effet constamment confrontés à une administration de l'Etat qui ne sait pas mener la concertation...

M. François Goulard.

Il a raison !

M. Jean-Louis Idiart.

... qui ne sait pas discuter et qui leur impose des décisions.

M. Michel Bouvard.

C'est une dictature indirecte !

M. Jean-Louis Idiart.

Le sentiment général, dans le pays, c'est qu'on ne discute pas de cela. Si, aujourd'hui, l'Assemblée nationale évacue le débat, elle confirmera ce


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sentiment. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

A cet égard, nous devons, tous, être particulièrement vigilants.

En zone de montagne, l'approbation des conseils municipaux concernés par ces propositions est indispensable. Ainsi, dans ma circonscription se trouve une vallée qui communique avec l'Espagne, le val d'Aran.

M. Charles de Courson.

Très belle vallée !

M. Jean-Louis Idiart.

C'est, de plus, l'endroit où l'on a réintroduit l'ours. Il s'agit donc de zones qui sont déjà protégées. Certaines parties de cette vallée sont assez encaissées entre les collines, des éboulements se produisent et, chaque année, les chutes de rochers causent des dégâts énormes. Aussi a-t-on gelé des périmètres importants. On en a gelé d'autres dans les zones inondables.

M. Michel Bouvard.

Voilà, c'est exactement ça !

M. Jean-Louis Idiart.

Vous comprenez donc l'anxiété des populations et des élus de ce territoire à qui l'on promet qu'il y aura une discussion, mais qui voient que la concertation n'est pas complètement menée aujourd'hui et que, pour des raisons qui tiennent, par exemple, à la nature, on va geler d'autres espaces, alors que ces gens-là vivent près de la nature, la protègent et savent ce qu'il faut faire.

M. Charles de Courson.

On est des Indiens !

M. Jean-Louis Idiart.

En général, on leur envoie des spécialistes, des théoriciens de la nature, et ces gens-là se sentent complètement bloqués.

M. Charles de Courson.

Voilà !

M. Michel Bouvard.

Tout à fait !

M. Jean-Louis Idiart.

Il faudrait que l'Assemblée nationale leur dise que les procédures de concertation ne pourront être menées jusqu'à leur terme ? Cela me semble particulièrement grave.

Dans son esprit, cette directive peut être conçue comme acceptable, servant à protéger des espaces en danger. Mais en quoi concerne-t-elle ces endroits que les gens ont su protéger ? Il est nécessaire de créer un véritable climat de confiance dans les territoires. Ce n'est pas nous qui allons dicter les décisions. Il faut y aboutir par la discussion, avec la meilleure garantie qui soit, l'avis des conseils municipaux. Leur acceptation de ces dispositions est indispensable à leur bonne application. C'est la seule solution pour éviter les situations de blocage. Sinon, il faudra dire à ceux qui vivent sur ces territoires qu'ils n'en ont pas la libre disposition et qu'ils n'ont pas, non plus, le droit de libre expression.

M. Charles de Courson.

Ce sont des Indiens !

M. Jean-Louis Idiart.

Si mon sous-amendement n'était pas adopté, il va de soi que je ne pourrais pas voter l'amendement.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Paul Chanteguet, pour soutenir le sous-amendement no

54.

M. Jean-Paul Chanteguet.

Il s'agit de préciser les modalités de consultation des conseils municipaux sur les projets de périmètre des zones Natura 2000, mais aussi d'indiquer que la consultation se fait préalablement à la notification à la Commission européenne des ZPS, les zones de protection spéciale, et des propositions de ZSC, les zones spéciales de conservation. En effet, ces deux types de zone ont des processus de désignation différents.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter le sous-amendement no 6 rectifié.

M. Jacques Floch, rapporteur.

Au nom de la commission, je souhaite répondre à M. Estrosi et à M. Idiart, qui ont posé un vrai problème, celui de l'absence de consultation des conseils municipaux dans le cadre de cette directive.

M. Christian Estrosi.

Ce n'est pas l'absence de consultation, c'est le non-respect !

M. Michel Bouvard.

Le non-respect de leur position !

M. Jacques Floch, rapporteur.

Dans certains départements, les communes n'ont pas du tout été consultées. Il faut corriger cela.

M. Michel Bouvard.

C'est vrai aussi !

M. Jacques Floch, rapporteur.

Mais vous êtes parlementaires et vous comprenez que l'on ne peut pas faire une loi différente pour chaque commune. Par contre, la loi peut disposer que les conseils municipaux sont consultés, qu'ils donnent des avis motivés après consultation, c'est-à-dire qu'ils votent sur les limites et sur les modalités d'application des règlements qu'on pourrait leur proposer.

M. Charles de Courson.

Ils ont des objectifs !

M. Jacques Floch, rapporteur.

Exactement. Cela veut dire que, en fait, les conseils municipaux pourront et devront dire leur sentiment, exprimer leur point de vue, faire leurs propositions, mais qu'ils devront les motiver.

M. Michel Bouvard.

Et il faudra les respecter !

M. Jacques Floch, rapporteur.

Une zone naturelle ne s'arrête pas à la limite d'une commune, mais s'étend sur plusieurs communes, sur un territoire vaste. La description que vient de faire notre collègue Idiart le montre bien. Mais les zones de montagne ne sont pas les seules concernées. Dans ma circonscription se trouve le très grand lac de Grand Lieu. Les quatorze communes qui se partagent le territoire périphérique n'ont jamais donné un avis commun, mais une règle commune est appliquée aujourd'hui pour la gestion des marais qui entourent ce lac et pour le lac lui-même. Pourquoi ? Parce que, à un moment donné, quelqu'un a arbitré.

C'est pourquoi je me rallie au sous-amendement de M. Chanteguet...

M. Michel Bouvard.

Celui de M. Idiart est préférable !

M. Jacques Floch, rapporteur.

... car il faudra bien que quelqu'un, le représentant de l'Etat en l'occurrence, arbitre entre plusieurs communes qui n'auraient pas eu le même avis. Une zone ne pourra s'arrêter à la limite d'une commune sous prétexte que son conseil municipal aura décidé de ne pas s'y intéresser. Si le préfet établit, par u ne argumentation motivée, qu'il y a un intérêt majeur évident, cet intérêt sera pris en compte. Si plusieurs communes rejettent la proposition et motivent leur refus, le préfet sera obligé de tenir compte de cet avis.

Nous ne travaillons pas sur des limites communales, cantonales, départementales ou régionales, mais sur des limites naturelles qui couvrent plusieurs territoires. Il est évident que les représentants de ces territoires doivent être consultés, mais il faut bien que, à un moment donné, un arbitrage intervienne.

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Absolument !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

M. Jacques Floch, rapporteur.

Le sous-amendement de M. Chanteguet, auquel je me rallie, précise bien qu'il y a consultation obligatoire des conseils municipaux, ce qui n'existait pas avant et qui constitue donc un progrès considérable par rapport à la situation de mise devant le fait accompli décrite tout à l'heure par M. Estrosi. Les conseils municipaux débattront, proposeront, et leur avis motivé ne sera transmis qu'au représentant de l'Etat dans le département, qui sera lui-même contraint de se justifier s'il veut s'écarter de la décision d'un conseil municipal.

Ce progrès devrait satisfaire à la fois la demande de M. Idiart et le souci de M. Estrosi qui pousse très loin son objectif et qui demande, en fait, que la loi soit faite commune par commune.

M. le président.

Monsieur le rapporteur, vous retirez donc votre sous-amendement no 6 rectifié et il va de soi que vous êtes favorable à l'amendement no 2 rectifié du Gouvernement.

M. Jacques Floch, rapporteur.

Oui, monsieur le président.

M. le président.

Quel est votre avis sur le sousamendement de M. de Courson ?

M. Jacques Floch, rapporteur.

Le sous-amendement de M. de Courson pose une vraie question.

M. Yves Bur.

D'où l'intérêt d'avoir un vrai débat !

M. Jacques Floch, rapporteur.

Je ne suis ni pêcheur ni chasseur.

M. Charles de Courson.

Hélas !

M. Jacques Floch, rapporteur.

A chacun ses vices, et je ne vous dirai pas quels sont les miens ! Ils sont aussi valables que les vôtres, car je crois que vous êtes un éminent chasseur et un grand pêcheur devant l'éternel.

(Sourires.)

Cela dit, on peut prendre en compte, dans ce texte, les droits de pêche et de chasse, mais aussi, pourquoi pas, les droits des promeneurs, les droits de pâturage, tous ces droits qui peuvent être liés à un territoire. Le sousamendement no 7 rectifié devrait cependant donner en partie satisfaction à cette exigence. Je dis « en partie », parce que je n'ai pas trouvé d'autres formules que celleci : « réaliser, dans les zones concernées, la conciliation entre les objectifs de conservation et le maintien d'activités humaines lorsque celles-ci n'ont pas d'effets significatifs à leur égard, étant précisé que la chasse et les autres activités cynégétiques, pratiquées dans les conditions et sur les territoires autorisés par les lois et règlements en vigueur, ne constituent pas des activités perturbantes ou ayant de tels effets. »

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Je voudrais dire d'abord que le sous-amendement de M. de Courson est satisfait par l'amendement du Gouvernement. Dans le 2o , en effet, il est bien fait mention des titulaires de droits réels portant sur des biens immobiliers avec l'autorité administrative. Les droits de pêche et les droits de chasse sont attachés au droit de propriété et constituent donc des droits réels. En conséquence, ils sont couverts par le texte gouvernemental.

En ce qui concerne les préoccupations qu'ont exprimées les parlementaires, je voudrais confirmer l'avis que vient de donner M. Floch et dire que le Gouvernement, en se ralliant au sous-amendement de la commission et au sous-amendement de M. Chanteguet, introduit de nouvelles garanties.

Premièrement, ce n'est plus un décret, mais une loi, c'est-à-dire une norme juridique supérieure qui s'imposera largement aux autorités administratives.

Deuxièmement, la consultation obligatoire des conseils municipaux est maintenant actée par la loi. Elle donne lieu à avis motivé, le préfet prenant sa décision sur avis motivé. Il y a donc transparence des décisions et possibilité de recours contre l'autorité devant les tribunaux administratifs.

Ces conditions me paraissent répondre à la préoccupation exprimée par les parlementaires. On ne peut pas établir, par la loi, un régime discriminatoire entre les zones de montagne et les autres zones.

M. Michel Bouvard.

Ce n'est pas vrai !

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Malgré les souhaits qui peuvent s'exprimer, un principe d'égalité de traitement s'impose à nous.

D'autre part, me ralliant à la position qu'a exprimée Jacques Floch, je voudrais dire qu'on ne peut pas imaginer que les décisions des conseils municipaux s'imposent automatiquement, car il faut éviter que les zones de protection soient de véritables peaux de léopard qui ne rempliraient plus ces obligations. Les garanties sur lesquelles le Gouvernement s'engage aujourd'hui sont fortes, préservent les élus locaux, leur pouvoir de proposition, de consultation, et ne lient pas l'autorité administrative sur le plan formel mais lui donnent tout de même une indication et l'incitent, en cas de désaccord sur la délimitation d'une zone, à rechercher l'accord le plus large. Le Gouvernement acceptera donc le sous-amendement rectifié, qui a été défendu par M. Floch et le sousamendement no 54 de M. Chanteguet.

M. le président.

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson.

Je suis prêt à retirer le sousamendement no 55 au profit du sous-amendement no 7 rectifié sous réserve de l'adoption d'une modification. En effet, après le mot « cynégétiques », je souhaite que soient ajoutés les mots « et piscicoles » parce que le sousamendement no 7 rectifié vise les problèmes de droits de chasse mais pas de droits de pêche.

J'en profite pour souligner que la dernière partie de la phrase du sous-amendement no 7 rectifié, sur les activités perturbantes, est très importante.

M. le président.

Nous n'en sommes pas encore là.

M. Charles de Courson.

Elle a en effet le mérite de couper court à certaines interprétations selon lesquelles la chasse serait une activité perturbante en tant que telle.

Quant au sous-amendement no 54 de notre ami Chanteguet, il soulève deux problèmes.

D'une part, il parle de l'avis que rendent les conseils municipaux. Mais, mes chers collègues, que se passe-t-il si les conseils municipaux ont des positions pas forcément contradictoires mais sensiblement différentes ? Il se peut qu'ils n'arrivent pas à se mettre d'accord sur un avis. Je vous suggère de mettre l'expression « un avis motivé » au pluriel pour éviter les blocages.

D'autre part, je voudrais évoquer, parce que c'est un problème que je connais dans ma circonscription en tant que président d'un grand syndicat d'aménagement touristique, le cas des établissements publics de coopération intercommunale. Ils ont la compétence dans ce domaine.

M. François Goulard.

C'est vrai !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

M. Charles de Courson.

Le texte ne fait référence qu'aux communes. Mais il faut tenir compte des zones.

Le syndicat que je préside comprend cinquante-deux communes. Chargé de l'aménagement touristique du lac du Der-Chantecoq, il a déjà créé deux zones Natura - nous sommes même très en avance puisque les documents d'objectifs sont prêts - et un troisième site est en cours de réalisation. La DIREN s'adresse directement au syndicat, puisque nous regroupons les communes.

Je vous propose donc, ce serait une seconde rectification au sous-amendement no 54, de remplacer les mots

« la consultation des conseils municipaux », par les mots :

« la consultation des organes délibérants des communes concernées et des établissements publics de coopération intercommunale ayant compétence dans ce domaine ».

Comment les communes pourraient-elles donner un avis quand elles ont transféré la compétence environnement à un établissement public ?

M. Alain Barrau, président de la délégation pour l'Union européenne.

On a compris !

M. le président.

Le sous-amendement no 55 est retiré.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Cette discussion et la diversité des opinions émises montrent bien qu'un tel sujet méritait une discussion parlementaire. Or, après l'adoption de ces dispositions extrêmement générales, à laquelle nous allons procéder dans quelques instants, ce sont les fonctionnaires des bureaux qui vont se voir chargés de rédiger dans le détail les textes qui s'appliqueront. Vous avez pourtant montré, les uns et les autres, par vos interventions, à quel point notre compétence d'élus est indispensable pour trancher dans de pareilles matières.

Deuxième réflexion, l'absence de consultation sérieuse des conseils municipaux est un vrai problème. Je vous ferai remarquer, à cette occasion, que c'est une constante de notre administration locale, due à la survivance de l'institution napoléonienne qu'est le préfet. Le jour où, dans ce pays, nous aurons compris que les élus discutent mieux avec d'autres élus qu'avec des fonctionnaires, nous aurons fait un grand pas en avant. Naturellement, on ne peut pas laisser les conseils municipaux décider souverainement dans de telles matières, car les politiques seraient parcellaires, mais, pour ma part, je suis favorable à ce que donnions à la région la capacité d'être l'arbitre pour ces questions d'environnement.

M. Michel Bouvard.

Oh ! là ! là !

M. François Goulard.

Les élus s'entendraient et trouveraient de bonnes solutions, comme dans tous les autres pays européens ou presque. Cessons de maintenir cette fiction de l'autorité partout présente de l'Etat à travers un f onctionnaire. Faisons enfin confiance aux élus et confions à la région cette compétence qui devrait être naturellement la sienne.

M. Michel Bouvard.

Je préfère pour ma part le préfet à la région.

M. le président.

La parole est à M. Christian Estrosi.

M. Christian Estrosi.

J'apprécie, bien sûr, la main tendue du rapporteur à l'égard d'une démarche que nous avons introduite concernant notre proposition de prévoir dans la loi la consultation et surtout l'approbation des conseils municipaux et je ne peux que l'en remercier.

M. Jacques Floch, rapporteur.

Vous avez l'art de la récupération.

M. Christian Estrosi.

Simplement, j'observe qu'il se propose de le faire dans le cadre d'une disposition déclarée illégale par le Conseil d'Etat.

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Quand la loi sera votée.

M. Jacques Floch, rapporteur.

C'est nous qui faisons la loi, pas les conseillers d'Etat !

M. Christian Estrosi.

Ce que vous nous proposez ne nous apporte aucune garantie, car la seule consultation ne peut être satisfaisante.

Récemment, M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement a, par exemple, conformément à la loi, consulté l'ensemble des collectivités concernées et le conseil régional de Provence-Alpes-Côte d'Azur sur le futur tracé de l'autoroute A 51 entre Grenoble et Sisteron. Tout le monde s'est prononcé dans le même sens en choisissant un tracé, en souhaitant la réalisation de cette autoroute. Mais le ministre, estimant que ce projet ne lui convenait pas, a décidé, contre l'avis des autorités consultées, de ne pas réaliser cette autoroute.

Certes le ministre applique la loi, en consultant les intéressés, mais il n'en fait qu'à sa tête.

Souvenons-nous aussi de la circulaire Voynet, qui est venue démolir la circulaire Balladur, ce qui a amené le Conseil d'Etat à sanctionner la circulaire Voynet.

M. Michel Bouvard.

Le décret Balladur !

M. Christian Estrosi.

Nous ne sommes à l'abri ni d'un changement de méthode, ni d'un changement de position, quelle que soit la consultation engagée selon les termes de la loi et quelles que soient les positions prises par les conseils municipaux.

C'est la raison pour laquelle nous avons une préférence pour le sous-amendement que j'ai proposé ou le sousamendement proposé par notre collègue Idiart auquel je suis tout à fait prêt à me rallier à condition de requérir l'accord des conseils municipaux et non le simple avis des conseils municipaux. Nous savons ce que l'Etat, les préfets et les gouvernements sont habitués à faire des avis des uns et des autres.

M. le président.

La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard.

Les élus de la montagne, JeanLouis Idiart l'a fort bien dit, souhaitent que les conseils municipaux s'expriment et que le Gouvernement tienne compte de leur avis. Il ne s'agit pas, monsieur le ministre, de légiférer différemment. Vous nous avez dit tout à l'heure qu'on ne pouvait pas légiférer différemment selon les parties du territoire.

M. Charles de Courson.

Hélas !

M. Michel Bouvard.

Mais, monsieur le ministre, la loi montagne de 1985...

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Je sais bien.

M. Michel Bouvard.

... stipule expressément - c'est même le fondement juridique de cette loi qui a été défendue ici par Louis Besson, par Robert de Caumont et d'autres - que les territoires de montagne ont droit à une législation qui tienne compte de leurs spécificités.

E n défendant le sous-amendement de Jean-Louis Idiart, nous ne faisons rien d'autre que de demander que l a loi montagne s'applique aussi s'agissant de Natura 2000. Pourquoi ? Parce que, aujourd'hui, d'après la dernière mise à jour du ministère 5,7 % du territoire


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

national est classé au titre de Natura 2000. La France n'est pas très en retard : l'Italie est un peu plus avancée, mais la Grande-Bretagne est à 5,5 % et l'Allemagne est à 4 %.

M. Charles de Courson.

Nous en sommes à la moitié.

M. Michel Bouvard.

Mais sur le massif alpin, 686 000 hectares sont déjà classés, soit 22,3 % du territoire alpin. Dans certaines communes, le territoire est classé à plus de 50 à 60 %. Une fois enlevé ce qui est utile, une fois pris en compte les plans de protection des risques naturels, les PPRN évoqués par Jean-Louis Idiart, les plans de protection des risques d'inondation, la législation, ex-amendement Dupont, sur la construction de part et d'autre des routes, etc.

M. Jacques Floch, rapporteur.

Cela ne concerne pas seulement la montagne !

M. Michel Bouvard.

... au final, le maire n'a même plus besoin d'un plan d'occupation des sols : les choses sont déterminées.

M. Jacques Floch, rapporteur.

6 % du territoire est inconstructible à cause des inondations.

M. Michel Bouvard.

Nous demandons simplement que les conseils municipaux dans les zones de montagne, non seulement soient consultés, mais que leur accord soit nécessaire et que les services de l'Etat veuillent bien respecter cet accord.

Ensuite, monsieur le ministre, vous avez développé l'argument de « la peau de léopard ».

M. le président.

Il faut raccourcir, monsieur Bouvard.

M. Michel Bouvard.

Oui, mais comme nous n'aurons pas d'autre débat, il faut bien que nous nous exprimions maintenant.

L'esprit du réseau Natura 2000 ne consiste pas à vouloir classer en continuité forcément des communes entières. Je vais prendre un exemple très précis. Les inspecteurs chargés de Natura 2000 se sont rendus, sans prévenir le maire, dans une commune de ma circonscription qui s'appelle Orelle. Là, ils ont vu des trèfles des rochers.

Ils ont décidé de les classer et de réaliser une zone Natura 2000 sur le trèfle des rochers. Comme par hasard, les trèfles des rochers en question poussaient à l'endroit où la commune avait prévu de faire passer une remontée mécanique. D'autres endroits de la commune en étaient également pourvus, mais les inspecteurs de Natura 2000 ou bien ne le savaient pas, ou bien ne les avaient pas vus, ou encore ne voulaient pas les voir.

M. Jacques Floch, rapporteur.

Ils auraient dû consulter le conseil municipal !

M. Michel Bouvard.

Heureusement, l'affaire a pu être arrangée.

Plusieurs députés du groupe socialiste.

Ah !

M. Michel Bouvard.

On a pu faire classer les bonnes stations de trèfles des rochers sans classer celles qui posaient problème. Mais avec l'argument que vous développez, monsieur le ministre, il aurait fallu classer tout le périmètre pour ne pas avoir la peau de léopard.

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Mais non !

M. Michel Bouvard.

En outre, il serait bon que les élus - c'est un point sur lequel il faudrait que vous puissiez vous engager - sachent ce qui est classé aussi dans le reste du massif. Nous ne voulons pas tout classer intégralement, il s'agit simplement de faire en sorte que les espèces faunistiques ou floristiques intéressantes ne disparaissent pas. Pour cela, il faut que des quantités suffisantes de zones soient classées.

M. le président.

S'il vous plaît, monsieur Bouvard...

M. Michel Bouvard.

Depuis quatre ans, les communes frontalières veulent, par exemple, savoir ce qui est classé sur le versant italien. Depuis quatre ans, on refuse de nous le dire. Pourtant, le fait de savoir que de l'autre côté de la frontière, à cent mètres, une espèce est classée permettrait peut-être de dégager des territoires constructibles ou utilisables chez nous.

M. le président.

Je crois que l'on a compris, monsieur Bouvard.

M. Michel Bouvard.

En conclusion, je préfère le sousamendement de Jean-Louis Idiart. Nous demandons le respect de la loi montagne.

M. le président.

Monsieur Bouvard, j'ai laissé aux uns et aux autres la parole beaucoup plus longtemps que le règlement ne le permet, pour éclairer le débat.

M. Michel Bouvard.

C'est un texte d'exception !

M. le président.

Mais si vous abusez, je serai contraint de revenir strictement au règlement. Ce serait dommage.

Je demande donc à chacun de faire un effort pour permettre à tout le monde de s'exprimer.

La parole est à Mme Marie-Hélène Aubert.

Mme Marie-Hélène Aubert.

Je voudrais d'abord revenir sur les raisons du retard qu'a pris l'application de cette directive. En effet, nous avons dix-neuf ans de retard.

M. Christian Estrosi.

2000 moins 19 ans égale 1981 !

Mme Marie-Hélène Aubert.

Ce retard est notamment dû à la lenteur de la prise de conscience de l'intérêt de protéger la bio-diversité et les espaces remarquables dans notre pays.

M. Jean-Louis Idiart.

C'est parce que la méthode a été mauvaise !

Mme Marie-Hélène Aubert.

Et, parfois, nous craignons que derrière des arguments tel celui sur la consultation ne se dissimulent tout simplement la faiblesse de la prise de c onscience de l'intérêt de préserver ces espaces et l'absence de volonté.

M. Michel Bouvard.

Les parcs naturels français ont quand même été créés à la demande des gaullistes !

Mme Marie-Hélène Aubert.

Il est faux de prétendre qu'on n'avance pas et qu'on n'arrive pas à faire progresser le débat. Nous avançons. Car, enfin, il ne s'agit pas de refaire la directive Natura 2000, mais de voir comment on la transpose effectivement en droit français.

M. Henri Nayrou.

Voilà qui méritait débat !

Mme Marie-Hélène Aubert.

Et les propositions qui nous sont faites me paraissent aller dans le bon sens.

Comme je l'ai dit tout à l'heure, cette directive a en effet parfois été mal « vendue » par les exécutifs successifs, sans pédagogie ni concertation suffisantes.

Nous disposons dorénavant des éléments qui nous permettent de répondre à ces besoins. En réalité, il s'agit toujours du même conflit entre un intérêt général global, qui impose de préserver certains espaces - c'était d'ailleurs le sens de la loi littoral comme de la loi montagne et des intérêts particuliers à court terme.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

M. Charles de Courson.

C'est la vie !

M. Michel Bouvard.

La loi montagne n'est pas une loi de protection.

Mme Marie-Hélène Aubert.

Nous sommes en permanence confrontés à cette opposition entre les activités h umaines, les aménagements, les équipements, les constructions, etc., pour lesquels on suit des critères d'utilité, d'opportunité et de faisabilité, et la nécessaire préservation des ressources naturelles et du patrimoine naturel pour les générations futures.

Aujourd'hui, par exemple, on ne demande pas aux conseils municipaux s'ils sont d'accord ou non pour gérer leurs déchets en fonction de la perception qu'ils ont des nuisances qu'occasionnent ces déchets ! M. Michel Bouvard Ça n'a rien à voir !

Mme Marie-Hélène Aubert.

La loi, née d'une prise de conscience globale de la nécessité de gérer les déchets, s'impose à tous, sans que personne songe à dire qu'il ne l'appliquera pas, parce qu'il préfère faire autrement. Le problème est le même ici.

La première chose à comprendre, c'est la nécessité urgente, impérieuse, de préserver ces espaces et cette biodiversité.

M. Charles de Courson.

Respecter les Indiens qui y vivent ?

Mme Marie-Hélène Aubert.

Mais non, absolument pas ! Il ne s'agit pas de mettre la nature sous cloche !

M. le président.

Nous n'allons pas refaire tout le débat !

Mme Marie-Hélène Aubert.

Assez de caricatures sur la préservation de telle espèce végétale ou animale ! Nous avons depuis longtemps dépassé ces considérations.

M. Michel Bouvard.

On n'a pas attendu les écolos pour préserver !

Mme Marie-Hélène Aubert.

En conclusion, je soutiens l'amendement du Gouvernement et le sous-amendement de M. Chanteguet.

Quant à la chasse et à la pêche, ce n'est pas un problème de principe, puisque le principe de l'autorisation de ces activités sur ces espaces est déjà posé dans la directive Natura 2000. La question est de savoir comment on pratique la chasse, la pêche, ou d'autres activités, dans ces espaces.

Il me semblait utile de clarifier ce point.

En tout cas, les propositions qui nous sont faites sont équilibrées, elles vont dans le bon sens, et nous les soutenons.

M. le président.

La parole est à M. le président de la commission.

M. Bernard Roman, président de la commission.

Monsieur le président, je soutiens la proposition du rapporteur et je note que le débat que nous venons d'avoir présente un grand intérêt.

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Absolument !

M. Bernard Roman, président de la commission.

Il est légitime que les élus locaux, les communes, souhaitent sortir des dérives que nous avons décrites les uns et les autres. Elles relèvent quelquefois de la conception du pouvoir de représentation de l'Etat exercé dans tel ou tel département - les choses ne se font pas partout de la même manière. Pour cela, il faut que le texte aille au maximum de la sollicitation de l'avis des conseils municipaux.

M. Floch a eu raison de le souligner, on ne fait pas une politique nationale, y compris quant on adapte des directives européennes, en considérant que cette politique nationale peut être la somme d'avis des conseils municipaux.

M. Jean-Louis Idiart.

Ce n'est pas « la somme » !

M. Bernard Roman, président de la commission.

En revanche, la proposition selon laquelle les avis des conseils municipaux doivent être motivés, ainsi que les réponses du représentant de l'Etat, me paraît bonne. Nous allons aussi loin que nous pouvons aller pour préserver cet équilibre entre la nécessité d'une politique globale, qui s'intègre à ces directives européennes, et la prise en compte de l'avis des élus locaux.

Je comprends parfaitement le point de vue exprimé à travers le sous-amendement de M. Idiart par les élus des zones de montagne, et à l'instant par M. Bouvard, mais je dois prévenir mes collègues que si nous adoptions ce sous-amendement, touts les autres tomberaient.

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Absolument !

M. Bernard Roman, président de la commission.

Nous ne serions peut-être pas fiers d'avoir pris en compte, dans un souci maximaliste, la spécificité des zones de montagne, en laissant l'ensemble du territoire sans aucune explicitation sur la manière dont nous souhaitons voir la directive Natura 2000 s'appliquer.

M. Michel Bouvard.

Nous pourrions demander une suspension de séance pour rédiger un texte !

M. Bernard Roman, président de la commission.

Je pense que la proposition du rapporteur visant à adopter l'amendement du Gouvernement modifié par le sous-amendement de M. Chanteguet est la meilleure solution - la moins mauvaise, diront certains - à laquelle nous puissions arriver ce soir.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jacques Floch, rapporteur.

Je vais essayer d'être concis et de proposer à l'Assemblée une bonne décision.

Je vous invite donc, mes chers collègues, à adopter l'amendement du Gouvernement, mais de rejeter le sousamendement no 49 de MM. Estrosi, Lemoine et Doligé, pour les raisons indiquées tout à l'heure.

Je vous invite de même à repousser le sous-amendement de M. Idiart car son adoption ferait que les autres communes que celles qui sont directement visées seraient dans un vide juridique. Ce sous-amendement est d'ailleurs satisfait par d'autres sous-amendements.

M. Michel Bouvard.

Non !

M. Christian Estrosi.

Ce n'est pas vrai !

M. Jacques Floch, rapporteur.

Je propose que le sousamendement no 6 rectifié, que j'ai eu l'honneur de signer, soit retiré, au profit du sous-amendement de M. Chanteguet, sous réserve des deux modifications suivantes.

D'une part, les mots « la consultation des conseils municipaux » devraient être remplacés par les mots « la consultation des organes délibérants ». En effet, ce que nous a dit tout à l'heure M. de Courson me paraît tout à fait valable : les établissements publics concernés doivent pouvoir se prononcer.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

D'autre part, il conviendrait de substituer aux mots

« un avis motivé », les mots « des avis motivés ».

M. Michel Bouvard.

Il faudrait préciser : la formule « la c onsultation des organes délibérants des collectivités concernées » me semblerait préférable.

M. Jacques Floch, rapporteur.

Dans le droit communal ordinaire, quand on parle d'« organes délibérants », on sait de quoi il s'agit : on vise à la fois les conseils municipaux et des organes qui regroupent différentes collectivités locales. Et ils rendent des avis motivés.

M. Michel Bouvard.

Il faut le préciser !

M. Jacques Floch, rapporteur.

Ce n'est pas la peine car c'est déjà dans nos codes.

M. le président.

Le sous-amendement no 6 rectifié est retiré.

Quel est l'avis du Gouvernement sur le sous-amendement no 54 tel qu'il vient d'être rectifié ?

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Le Gouvernement est favorable à la proposition du rapporteur.

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no

49. (Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no

51. (Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 54, tel qu'il a été rectifié.

(Le sous-amendement, ainsi rectifié, est adopté.)

M. le président.

Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.

M. Michel Bouvard a présenté un sous-amendement, no 56, ainsi rédigé :

« Compléter le quatrième alinéa (3o ) de l'amendement no 2 deuxième rectification par les mots : "dans le respect des activités agricoles et sylvicoles existantes". »

La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard.

L'ajout que je propose est important.

Les contraintes de gestion qui vont être imposées aux sites dans le cadre des directives Natura 2000 doivent prendre en compte les activités agricoles et sylvicoles existantes, qui sont en général, si l'on en juge par les espèces faunistiques et floristiques qui sont parvenues jusqu'à nous, respectueuses de l'environnement.

J'ai tout à l'heure fait allusion à des insectes xylophages que l'on voulait protéger. Mais les protéger signifirait-il que l'exploitation de forêts exploitées depuis plusieurs siècles soit maintenant interdite ?

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Floch, rapporteur.

Ce sous-amendement n'a pas été examiné par la commission. La précision qu'il tend à introduire est inutile dans la mesure où l'amendement du Gouvernement prévoit la concertation nécessaire à l'élaboration des orientations de chaque site. Les activités agricoles et piscicoles seront donc prises en compte.

M. Michel Bouvard.

Cela ne va pas de soi !

M. Jacques Floch, rapporteur.

Si ! Je demande à l'Assemblée de rejeter le sous-amendement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Le Gouvernement souhaite que le sous-amendement soit rejeté, d'autant plus que celui-ci est satisfait par le sousamendement no 7 rectifié de la commission, dont l'un des objectifs est de favoriser la conciliation entre les objectifs de conservation et le maintien d'activités humaines. Et les activités agricoles et sylvicoles sont bien des activités humaines - je le rappelle pour le Journal officiel. (Sourires.)

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no

56. (Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Floch a présenté un sousamendement, no 53, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le dernier alinéa (4o ) de l'amendement no 2 deuxième rectification :

« 4o Définir un régime d'évaluation et d'autorisation des projets susceptibles d'affecter significativement un site Natura 2000 et prévoir la possibilité de dérogations permettant la réalisation de ces projets ; instituer des sanctions en cas de méconnaissance de ces obligations. »

La parole est à M. Jacques Floch.

M. Jacques Floch, rapporteur.

Ce sous-amendement tend à préciser l'habilitation en vue de la transposition des directives Natura 2000.

En effet, sur les sites Natura 2000, des projets pourront être réalisés, s'ils ont fait l'objet d'une évaluation et d'autorisations. Mais il faut prévoir des dérogations : des activités peuvent être anciennes et de nouvelles susceptibles de s'installer, sans toutefois perturber le site.

Je propose donc que la loi définisse un régime d'évaluation et d'autorisations des projets susceptibles d'affecter significativement un site Natura 2000, afin d'éviter ce q ue certains ont appelé une « mise sous cloche » d'espaces...

M. Michel Bouvard.

Une sanctuarisation !

M. Jacques Floch, rapporteur.

... tellement protégés que les activités humaines, même les plus simples, ne pourraient pas s'y exercer. Il y a des sites où, depuis des millénaires, des animaux viennent pâturer et je ne vois pas pourquoi ils ne continueraient pas.

M. Michel Bouvard.

Parce qu'il y a des hommes et qu'on va trouver que cela dérange !

M. Jacques Floch, rapporteur.

Justement ! Les hommes doivent prendre conscience que des activités humaines peuvent être autorisées dans ces zones.

C'est la raison pour laquelle je prévois la possibilité de dérogations permettant la réalisation de tels projets et des sanctions en cas de méconnaissance des obligations. Il faut fixer une règle pour éviter des confrontations stupides qui feraient que des secteurs risqueraient d'être mis complètement sous cloche.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Favorable.

M. le président.

La parole est à M. Charles de Courson.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

M. Charles de Courson.

Au moment de la ratification, surgira la grande question : de quel régime d'autorisation s'agit-il ? Dans l'esprit de l'auteur du sous-amendement, s'agit-il d'autorisations données dans le cadre des documents d'urbanisme et dans le respect de la répartition des pouvoirs existants ?

M. le secrétaire d'Etat à l'économie solidaire.

C'est évident !

M. Charles de Courson.

Ce n'est pas aussi évident que cela, monsieur le secrétaire d'Etat. En effet, on peut parfaitement écrire dans une loi que l'Etat peut imposer en dérogation à un POS, ou plutôt à un ex-POS, arrêté par un conseil municipal.

Le rapporteur pourrait-il nous apporter des précisions à ce sujet ?

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jacques Floch, rapporteur.

Monsieur de Courson, les territoires concernés ne sont pas hors la loi.

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Evidemment !

M. Jacques Floch, rapporteur.

On a voulu faire de la directive Natura 2000 quelque chose de tellement ordinaire qu'on en fait quelque chose d'extra-territorial et d'extra-légal : nous n'aurions plus le droit d'aller sur les sites concernés car ils seraient superprotégés...

M. Michel Bouvard.

C'est ce qui se passe en pratique !

M. Jacques Floch, rapporteur.

Je suis comme vous un écologiste conscient : je veux pouvoir profiter des paysages et des sites parce qu'ils sont beaux, intéressants, parce qu'ils apportent quelque chose à ma culture. Mais je ne veux pas que, sur ces sites-là, la loi nationale et la loi européenne, c'est-à-dire la directive, ne puissent pas s'appliquer car, comme je l'ai dit à la tribune, je me sens pleinement européen. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle je ne souhaite pas que le ministère des affaires européennes reste toujours rattaché au ministère des affaires étrangères car, aujourd'hui, les affaires européennes ne sont pas des affaires étrangères : elles nous concernent tous.

Quoi qu'il en soit, le régime d'évaluation et d'autorisations doit s'insérer dans le cadre de la loi sur l'urbanisme - je pense notamment aux permis de construire.

M. Charles de Courson.

Très bien !

M. Jacques Floch, rapporteur.

Si je propose que cela soit précisé dans le projet de loi, c'est parce que je souhaite, c'est parce que je veux que le Gouvernement l'écrive dans l'ordonnance.

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no

53. (Le sous-amendement est adopté.)

M. le président.

Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.

Je suis saisi de quatre sous-amendements, nos 50 rectifié, 33, 7 rectifié et 5 deuxième rectification, pouvant être soumis à une discussion commune.

Le sous-amendement no 50 rectifié, présenté par M. Estrosi, est ainsi rédigé :

« Compléter l'amendement no 2, deuxième rectification, par l'alinéa suivant :

« 5o Assurer la conservation intégrale des activités cynégétiques pratiquées sur les sites concernés par l'application de cette directive. »

Le sous-amendement no 33, présenté par M. Quentin, est ainsi rédigé :

« Compléter l'amendement no 2, deuxième rectification, par l'alinéa suivant :

« 5o Réaliser, dans les zones concernées, la conciliation entre les objectifs de conservation et le maintien d'activités humaines lorsque celles-ci n'ont pas d'effets significatifs à leur égard, la chasse et les autres activités de loisirs, exercées dans les conditions et territoires autorisés par les lois et règlements en vigueur, ne constituant pas des activités perturbantes ou ayant de tels effets. »

Les sous-amendements nos 5 deuxième rectification et 7 rectifié sont identiques.

Le sous-amendement no 5 deuxième rectification est présenté par MM. Chanteguet, Bataille et Ducout ; le sous-amendement no 7 rectifié est présenté par M. Floch, rapporteur, M. Vidaliel et M. Dufau.

Ces sous-amendements sont ainsi rédigés :

« Compléter l'amendement no 2 deuxième rectification par l'alinéa suivant :

« 5o Réaliser, dans les zones concernées, la conciliation entre les objectifs de conservation et le maintien d'activités humaines lorsque celles-ci n'ont pas d'effets significatifs à leur égard, étant précisé que la chasse et les autres activités cynégétiques, pratiquées dans les conditions et sur les territoires autorisés par les lois et règlements en vigueur, ne constituent pas des activités perturbantes ou ayant de tels effets. »

La parole est à M. Christian Estrosi, pour soutenir le sous-amendement no 50 rectifié.

M. Christian Estrosi.

Même si nous n'avons pas entière satisfaction, je trouve que cette partie de notre débat a permis bien des avancées.

Le problème auquel nous sommes confrontés est celui de la rigueur la plus froide de l'Etat ou d'un gouvernement qui s'abat sur une collectivité, un département, un territoire. Le Parlement a le devoir d'essayer d'apporter la dimension humaine nécessaire dans les relations de l'Etat avec le citoyen. Si, aujourd'hui, le citoyen prend autant de distance avec la vie publique, avec la vie politique, c'est parce qu'il a le sentiment que cette dimension humaine est en train de disparaître.

C'est pourquoi je me réjouis, monsieur le rapporteur, que vous ayez déposé le sous-amendement no 53, qui s'inscrit dans le droit fil de nombre de voeux qui ont été exprimés tout au long de notre discussion.

Dans le même esprit, j'ai déposé un sous-amendement permettant d'assurer la conservation intégrale des activités cynégétiques pratiquées sur les sites concernés par l'application de la directive. En fait, il vient en complément de votre démarche.

Nous savons que la circulaire de Mme Voynet du mois d'août 1997, rejetée par le Conseil d'Etat en 1999, a eu l'effet d'un véritable couperet pour les élus locaux, les populations et l'ensemble des fédérations de chasse, particulièrement traumatisées non seulement par le débat sur la loi relative à la chasse, mais également par la démarche Natura 2000, issue de la circulaire.

Les fédérations de chasse, je le rappelle, sont à l'origine des recours déposés devant le Conseil d'Etat. C'est grâce à leur action et, celle de l'ANEM, l'Association nationale des élus de la montagne, que le Conseil a annulé la circulaire de Mme Voynet d'août 1997. Aussi, pour renforcer la dimension humaine que nous sommes en train


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

d'introduire dans le texte et rassurer pleinement les fédérations, je souhaiterais que mon sous-amendement soit adopté.

M. le président.

La parole est à M. Didier Quentin, pour défendre le sous-amendement no

33.

M. Didier Quentin.

Je voudrais moi aussi relever que la tournure qu'a prise la séance depuis trois quarts d'heure justifie ce que nous n'avons cessé de demander tout au long de la soirée : un véritable débat.

M. Michel Bouvard.

En effet !

M. Didier Quentin.

Or on s'aperçoit que ce débat est fructueux et qu'il aboutit à améliorer le texte. Dommage qu'il ait fallu attendre deux heures pour en arriver là !

M. Jean-Paul Chanteguet.

Presque trois heures !

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Il ne fallait pas déposer de motions de procédure ! (Sourires.)

M. Didier Quentin.

Le sous-amendement no 33 vise à préciser certains aspects de la mise en oeuvre en droit français du programme Natura 2000, notamment en disposant que la chasse, les autres activités cynégétiques et les activités de loisirs ne constituent pas des activités pert urbantes. En effet, la transposition des directives Natura 2000 devrait réaliser la conciliation entre leso bjectifs de conservation et le maintien d'activités humaines non perturbantes.

Cette précision permettrait d'inclure dans la définition des activités considérées comme non perturbantes toutes les activités cynégétiques - ce n'est peut-être pas la peine de faire la distinction entre la chasse et les autres activités cynégétiques - et les autres activités de loisirs.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir le sous-amendement no 7 rectifié.

M. Jacques Floch, rapporteur.

Si vous le permettez, monsieur le président, je donnerai en même temps l'avis de la commission sur les deux sous-amendements nos 50 rectifié et 33.

M. le président.

Je vous en prie, monsieur le rapporteur.

M. Jacques Floch, rapporteur.

Je suis généralement un homme aimable et il suffit de s'adresser à moi gentiment pour que je réponde positivement aux demandes. (Sourires.) Le sous-amendement de M. Estrosi n'a pas été examiné par la commmission, mais celui-ci est satisfait par le sousamendement no 7 rectifié.

M. Michel Bouvard.

Je ne suis pas d'accord avec vous !

M. Jacques Floch, rapporteur.

Le sous-amendement de M. Quentin n'a pas non plus été examiné par la commission.

Les activités de loisirs sont des activités humaines. Le maintien de telles activités, lorsque celles-ci n'ont pas d'effets significatifs, est rendu possible par le texte.

J'invite donc l'Assemblée à rejeter le sous-amendement no 50 rectifié et le sous-amendement no 33,...

M. Christian Estrosi.

Dommage !

M. Jacques Floch, rapporteur.

... mais à adopter le sous-amendement no 7 rectifié, qui doit donner satisfaction à nos collègues.

Ce sous-amendement tend à autoriser le Gouvernement à prendre des ordonnances pour « réaliser, dans les zones concernées, la conciliation entre les objectifs de conservation et le maintien d'activités humaines » - donc d'activités de loisirs - « lorsque celles-ci n'ont pas d'effets significatifs à leur égard, étant précisé que la chasse et l es autres activités cynégétiques [...] ne constituent pas des activités perturbantes ou ayant de tels effets ».

M. de Courson m'a aimablement demandé de faire référence aux activités piscicoles, en plus de la chasse et des « autres activités cynégétiques ». J'accepte volontiers de rectifier le sous-amendement en ce sens.

Pourquoi parler d'« autres activités cynégétiques » ? Moi qui ne suis pas chasseur, je me suis renseigné.

Lorsqu'on fait une battue parce qu'il y a trop de lapins ou trop de renards, il est évident que l'on n'accomplit pas un acte de chasse, mais une activité cynégétique. Il en est de même lorsqu'on « réalimente » des espaces parce qu'une espèce en a disparu.

La chasse et les autres activités cynégétiques doivent être « pratiquées dans les conditions et sur les territoires autorisés par les lois et règlements en vigueur ». Il est évident que le braconnage ne sera pas autorisé.

La chasse a été l'objet d'un débat extraordinaire, auquel je n'ai pas participé car, chers collègues, vous étiez très nombreux à être de bons spécialistes.

Reconnaître que la chasse est une activité humaine qui n'est, lorsqu'elle est bien pratiquée, pas perturbante, est un bel effort que pourrait faire le Parlement.

M. le président.

Le sous-amendement no 7 rectifié devient le sous-amendement no 7 deuxième rectification.

La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard.

Le ministre a indiqué que le sousamendement no 7 rectifié satisfaisait le sous-amendement sur le respect des activités agricoles et sylvicoles existantes que j'avais déposé et qui a été refusé. Or il y est seulement question « d'activités humaines ». Je préférerais, si vous en êtes d'accord, monsieur le rapporteur, que l'on précise qu'il s'agit « des activités humaines existantes ». Le

« maintien d'activités humaines » peut simplement concerner un petit échantillon. L'expression « des activités humaines existantes » paraît plus forte car elle prend en compte l'ensemble des activités.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jacques Floch, rapporteur.

Je suis d'accord pour intégrer la modification proposée par M. Bouvard, à condition qu'il vote l'ensemble du projet de loi ! (Rires.)

Le marché vous convient-il, mon cher collègue ?

M. Michel Bouvard.

Non, certainement pas !

M. Jacques Floch, rapporteur.

Alors, je maintiens

« d'activités humaines ». (Sourires.)

M. Christian Estrosi.

En tout cas, les termes du marché figureront dans le Journal officiel !

M. Michel Bouvard.

C'est une procédure inouïe !

M. le président.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Ce sous-amendement réalise un bon équilibre, il précise les activités qui peuvent être organisées et, je rassure M. Bouvard, dans l'esprit du Gouvernement, il s'agit bien des

« activités agricoles et sylvicoles ». Je me rallierai à la proposition de rectification qui introduit « les activités piscicoles » avant « la chasse et les autres activités cynégétiques ».

Si ce sous-amendement est voté, nous aurons accompli un grand progrès législatif en ce qui concerne les directives Natura 2000. A cet égard, je souligne l'excellent tra-


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vail réalisé par le rapporteur et par la commission des lois sur un texte controversé. Les consultations, M. Bouvard le disait, sont souvent difficiles sur des sujets comme les autoroutes ou les problèmes de classement. Sur ce point, le Parlement a fait son travail en encadrant l'habilitation législative. C'est bien dans ce sens qu'il n'y a pas lieu ce soir de parler de son dessaisissement, permettez-moi de le signaler.

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 50 rectifié.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no

33. (Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Avant de le mettre aux voix, je rappelle que le sous-amendement no 7 deuxième rectification doit se lire ainsi :

« Compléter l'amendement no 2 deuxième rectification par l'alinéa suivant :

« 5o Réaliser, dans les zones concernées, la conciliation entre les objectifs de conservation et le maintien d'activités humaines lorsque celles-ci n'ont pas d'effets significatifs à leur égard, étant précisé que les activités piscicoles, la chasse et les autres activités cynégétiques, pratiquées dans les conditions et sur les territoires autorisés par les lois et règlements en vigueur, ne constituent pas des activités perturbantes ou ayant de tels effets. »

Je mets aux voix le sous-amendement no 7 deuxième rectification.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président.

Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.

Le sous-amendement no 5 deuxième rectification est satisfait.

Je mets aux voix l'amendement no 2 deuxième rectification, modifié par les sous-amendements adoptés.

(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président.

M. Bataille a présenté un amendement, no 48, ainsi rédigé :

« Après l'article 2, insérer l'article suivant :

« Outre les mesures législatives nécessaires à la transposition des directives 97/13/CE, 97/33/CE, 97/51/CE et 98/10/CE mentionnées à l'article 1er , le Gouvernement est autorisé à prendre, par ordonnances, les mesures législatives requises pour limiter au service universel le champ de l'homologation des tarifs de télécommunications. »

La parole est à M. Christian Bataille.

M. Christian Bataille.

Nous passons à un tout autre domaine, l'homologation des tarifs de télécommunications. Aujourd'hui, deux catégories de tarifs téléphoniques sont soumis à homologation des ministres chargés des télécommunications et de l'économie, après avis de l'Autorité de régulation des télécommunications : les tarifs et objectifs tarifaires pluriannuels du service universel et les tarifs des services pour lesquels il n'existe pas de concurrence sur le marché.

L'homologation tarifaire avait été introduite dans la loi du 26 juillet 1996 pour réguler de manière transitoire un marché qui allait être ouvert à la concurrence et n'était, en outre, exigée par aucun texte communautaire. L'habilitation législative proposée dans le présent amendement fait suite aux habilitations précédemment données au Gouvernement et permet d'inscrire la loi dans un cadre mieux adapté au droit communautaire.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Floch, rapporteur.

Cet amendement n'a pas été examiné par la commission. A titre personnel, j'y suis favorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des relations avec le Parlement.

Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée, monsieur le président.

M. le président.

La parole est à M. François Goulard.

M. François Goulard.

Monsieur le président, je m'exprimerai contre l'amendement de M. Bataille, d'une part, pour des raisons de principe parce qu'il étend encore l'habilitation donnée au Gouvernement pour légiférer par voie d'ordonnances et, d'autre part, parce qu'il me paraît très mal fondé.

La deuxième catégorie de tarifs, ceux des services pour lesquels il n'existe pas de concurrents sur le marché, relève, selon moi, d'une homologation par le Gouvernement. Je préférerais qu'elle soit confiée à une autorité indépendante mais il se trouve que la loi actuelle prévoit un avis de l'ART. Reste que pour des raisons évidentes, il est nécessaire, en l'absence de concurrence, que les tarifs soient encadrés.

Cette objection n'a rien de théorique. On constate que chaque fois que l'opérateur principal, France Télécom, a la possibilité de majorer ses tarifs là où il n'y a pas de concurrence, il ne s'en prive pas. L'existence même de la concurrence sur certains créneaux de son marché l'incite, au contraire, à être extrêmement gourmand pour des services dont il a l'exclusivité. La législation actuelle me paraît donc justifiée.

M. le président.

La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes.

Pour ma part, je m'exprimerai pour l'amendement. En réalité, l'ouverture à la concurrence du secteur des télécommunications le 1er janvier prochain, la maturité du marché que la presse ne cesse d'évoquer, les précisions incluses dans l'une des directives concernant le service universel justifient pleinement que nous desserrions le carcan de l'homologation des tarifs de France Télécom.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

48. (L'amendement est adopté.)

M. François Goulard.

C'est une disposition purement corporatiste ! Article 3

M. le président.

« Art. 3. Outre les mesures législatives nécessaires à la transposition des directives 92/49 et 92/96 mentionnées à l'article 1er , le Gouvernement est autorisé à procéder, par ordonnances, dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, à la refonte du code de la mutualité et à la modification du code des assurances, du code de la sécurité sociale, de la loi no 78741 du 13 juillet 1978 relative à l'orientation de l'épargne vers le financement des entreprises et de la loi no 89-1009 du 31 décembre 1989 renforçant les garanties offertes aux personnes assurées contre certains risques, afin :


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

« 1o D'assurer l'harmonisation des règles applicables aux organismes mutualistes, institutions de prévoyance et entreprises d'assurance ;

« 2o De garantir les droits et d'assurer la protection des intérêts des membres des organismes mutualistes ou des institutions de prévoyance et de leurs bénéficiaires, ainsi que des assurés, souscripteurs, adhérents et bénéficiaires de contrats d'assurance ;

« 3o Et d'assurer la participation effective des membres des organismes mutualistes au fonctionnement de leurs instances dirigeantes. »

La parole est à M. Roger Meï, inscrit sur l'article.

M. Roger Meï.

La mutualité semble favorable à la transposition de ces directives. Mais il existe des menaces importantes, notamment celle d'une pénétration des assurances privées. Le groupe communiste s'abstiendra donc sur cet article.

M. le président.

La parole est à Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

Au-delà de la mise en conformité du code de la mutualité avec les directives européennes sur l'assurance, le mouvement mutualiste a souhaité que celles-ci lui fournissent l'occasion d'adapter ses règles d'activité au monde contemporain dans le respect des valeurs sociales et humanistes qui ont marqué son histoire.

De ce point de vue, le travail engagé par le Gouvernement est remarquable par la méthode et par ses conclusions.

S'agissant de la méthode, notons le rôle important joué par Michel Rocard dans la recherche d'une transposition respectueuse des engagements internationaux et des principes fondamentaux régissant le monde mutualiste. Les discussions menées avec le Gouvernement ont repris nombre des demandes et attentes de ce secteur, en particulier la suppression du système de tutelle administrative sur les créations hérité de celui instauré en 1852 par Napoléon III. Alors que nous allons fêter le centenaire de la loi de 1901 sur la liberté d'association, je suis heureuse de constater que le mouvement mutualiste obtiendra enfin une égalité de traitement dans ce domaine.

Soulignons aussi que celui-ci a accepté et proposé des mécanismes permettant de réaliser la nécessaire transparence dans l'activité de ce mouvement. Je pense en particulier à la volonté de créer, sous l'autorité d'un conseil national de la mutualité rénové, un registre national des mutuelles où chacun pourra consulter toutes les informations utiles à leur gestion.

Espérons ainsi que le secret ayant permis d'occulter pendant un temps les dérives de certains opérateurs qui ont cru pouvoir profiter du mouvement mutualiste prendra fin.

M. François Goulard.

Il y a eu quelques autres dérives dans le monde mutualiste !

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

... et que le mouvement retrouvera la vigueur dont il a tant besoin et à laquelle les populations aspirent.

Au-delà de l'adoption de ce texte, je souhaiterais que le Gouvernement entende et retienne les demandes du mouvement concernant son régime fiscal. Les mutuelles, qui n'ont pas d'actionnaires, sont aujourd'hui assujetties à un impôt sur les sociétés particulier. Aussi ne faudrait-il pas leur imposer des obligations fiscales équivalentes à celles des sociétés d'actionnaires et leur demander de respecter les conditions de solvabilité qu'on exige de celles-ci.

Compte tenu des engagements que le monde mutualiste accepte de prendre en termes de non-sélection médicale, de garantie viagère, d'absence de modulation des cotisations en fonction de l'état de santé, il serait nécessaire, monsieur le secrétaire d'Etat, de maintenir un régime d'exonération de la taxe sur les conventions d'assurance.

M. Michel Bouvard.

Ce n'est pas euro-compatible.

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

En outre, pourquoi ne pas instaurer un crédit d'impôt pour assurer aux personnes qui adhèrent volontairement à une mutuelle une égalité de traitement en matière de fiscalité ? Leur situation serait alors presque aussi bonne que celle des salariés des grandes entreprises bénéficiant d'une déduction de revenus au titre de leur contrat d'entreprise.

M. Michel Bouvard.

Vous proposez ce que la directive va interdire.

Mme Geneviève Perrin-Gaillard.

J'espère, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous aurez à coeur de travailler à ces deux questions fiscales.

M. Alain Barrau, président de la délégation pour l'Union européenne.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat à l'économie solidaire.

M. Guy Hascoët, secrétaire d'Etat à l'économie solidaire.

Je comprends les débats que peuvent susciter le recours à l'article 38 de la Constitution et le fait de procéder par ordonnances. Mais le secteur de la mutualité est plongé depuis huit ans dans une insécurité juridique qu'est venu renforcer un rappel à l'ordre de la Commission indiquant que notre retard inacceptable allait très prochainement entraîner des sanctions financières.

M. Michel Bouvard.

C'est la bébéarisation !

M. le secrétaire d'Etat à l'économie solidaire.

Le recours aux ordonnances est prévu dans la Constitution.

Il permet au Gouvernement, en accord avec le Parlement, de faire face à certaines situations particulières. Or, ainsi que l'a fait remarquer mon collègue Jean-Jack Queyranne, la France se trouve, en matière de transposition des directives européennes, dans une situation singulière, notamment pour celles de juin et novembre 1992 relatives aux assurances.

Le Sénat, où j'ai défendu l'article 3 il y a quelques semaines, a d'ailleurs suivi, malgré l'opposition de la commission des finances, l'avis de la commission des lois et de la commission des affaires sociales, également consultées, et a adopté cet article. Il a, au bout du compte, souhaité faire pencher la balance du côté d'une mise en sécurité du secteur mutualiste et ainsi mettre fin à une incertitude juridique qui fait planer très concrètement une menace sur son existence même et empêche d'apporter des réponses plus adaptées à l'ensemble des affiliés qui représentent, faut-il le rappeler, entre 31 et 32 millions de nos concitoyens.

Comme je l'ai fait devant les sénateurs, je voudrais vous rappeler les quatre raisons principales pour lesquelles le Gouvernement a été conduit à proposer l'article 3.

D'abord, la directive ne pouvait être transposée dans le cadre du code tel qu'il existait. Aussi un chantier a-t-il été ouvert pour travailler à une refonte du code conciliant sa réalité antérieure et les exigences nouvelles qui apparaissent dans la directive.

Ensuite, pour réformer le code, la voie parlementaire ordinaire avait été initialement retenue. Les dispositions liées à la transposition et celles liées à la modernisation


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du code s'entremêlaient donc de telle sorte que, aujourd'hui, séparer l'une et l'autre apparaîtrait comme une gageure dans le délai de l'habilitation imparti.

En outre, il existe une nécessaire cohérence entre les dispositions résultant de la transposition des directives et les autres dispositions régissant les mutuelles. Maintenir des dispositions de l'ancien code dans un code remanié par nécessité à l'occasion de la transposition n'est pas possible de ce point de vue.

Enfin, le recours à la procédure de l'ordonnance s'accompagne d'un engagement du Gouvernement à déposer et à inscrire à l'ordre du jour des assemblées un projet de loi de ratification, donnant ainsi au Parlement la possibilité d'exercer son droit d'initiative pour réformer le code.

Le texte préparé par le Gouvernement avant la décision de solliciter l'autorisation de recourir à l'ordonnance permet de satisfaire à nos obligations européennes, notamment par la mise en oeuvre du principe de spécialité et des règles prudentielles, tout en reconnaissant - j'allais dire en réaffirmant - la spécificité des mutuelles, qui est au coeur du débat.

Le projet de code a été élaboré en concertation avec l'ensemble des fédérations de mutuelles, puis, soumis aux différents organismes consultatifs intéressés. J'ai moimême eu l'occasion de le présenter devant le Conseil supérieur de la mutualité. Il a également été présenté devant le Conseil national des assurances et le Conseil supérieur de la fonction publique.

M. Charles de Courson et M. Yves Bur.

C'est bien mieux qu'au Parlement !

M. le secrétaire d'Etat à l'économie solidaire.

Il est certainement perfectible. Après la décision de recourir à l'ordonnance, nous avons souhaité rencontrer de nouveau l'ensemble des fédérations, qui nous font connaître leurs observations.

M. Michel Bouvard.

Mais pas les parlementaires !

M. le secrétaire d'Etat à l'économie solidaire.

Cependant, le Gouvernement n'entend pas réécrire un nouveau projet de code.

A l'issue de cette consultation, un projet d'ordonnance sera présenté aux différentes instances concernées. Ces consultations ne sauraient se substituer, bien sûr, à un débat parlementaire, mais elles participent à la transparence souhaitée par le Gouvernement.

L'ordonnance qui sera prise dans un délai que je souhaite bref ne devrait donc pas être substantiellement différente du projet de code, diffusé pour consultation, dont beaucoup d'entre vous ont eu connaissance.

En conclusion, je tiens à vous rappeler la place occupée par les mutuelles dans notre dispositif de santé. Elles assurent plus de 60 % de la couverture complémentaire maladie et contribuent ainsi à la protection de plus de la moitié des Français. Elles participent à la gestion d'un régime obligatoire de sécurité sociale et jouent un rôle a ctif dans le dispositif de la couverture maladie universelle.

M. François Goulard.

Du moins, avec les miettes qu'on veut bien leur laisser.

M. le secrétaire d'Etat à l'économie solidaire.

Nous ne pouvions pas attendre davantage et laisser les mutuelles dans l'incertitude. C'est pourquoi, mesdames, messieurs les députés, je vous invite à voter l'article 3.

Et je répondrai à Mme Perrin-Gaillard que la réforme entreprise comportera deux temps. Nous commencerons par refondre le code et redéfinir le cadre juridique. Après l'adoption du présent projet de loi, viendra le moment où il faudra repenser les spécificités fiscales, en tenant compte de la nouvelle directive. Nous aurons vraisemblablement l'occasion d'en discuter lors du débat budgétaire de l'année prochaine.

M. le président.

Sur l'article 3, je suis saisi de cinq amendements identiques, nos 11, 27, 30, 31 et 32.

L'amendement no 11 est présenté par M. Préel ; l'amendement no 27 est présenté par M. Goulard ; l'amendement no 30 est présenté par M. Bur ; l'amendement no 31 est présenté par M. Desallangre ; l'amendement no 32 est présenté par M. Myard.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Supprimer l'article 3. »

La parole est à M. François Goulard, pour soutenir l'amendement no

27.

M. François Goulard.

Je veux d'abord vous remercier, monsieur le secrétaire d'Etat, d'être venu si tardivement, pour nous relire très exactement la déclaration que vous aviez faite au Sénat.

M. le secrétaire d'Etat à l'économie solidaire.

Et alors ? C'est le respect des assemblées.

M. François Goulard.

Mais nous souhaitons vraiment faire adopter la suppression de l'article 3, car il est entaché d'un vice fondamental.

Que l'on veuille aller vite en matière de transposition, on peut le comprendre, tant il est vrai que le secteur des mutuelles a souffert de l'insécurité juridique. Il est vrai aussi que la transposition posait des problèmes juridiques délicats, les spécificités de la mutualité française étai t difficilement compatibles avec l'esprit de la directive.

M. Michel Bouvard.

Tout à fait !

M. François Goulard.

Il fallait donc rechercher un équilibre assez subtil. Je ne sais pas si le Gouvernement l'a trouvé. En tout cas, une chose est certaine : le Parlement ne sera pas associé à cette recherche.

Mais ce qui me choque le plus, c'est que, dans les ordonnances, on ajoute à la transposition de la directive la refonte intégrale du code de la mutualité. Alors qu'il s'agit d'un pan entier de notre économie sociale, dont vous avez rappelé à quel point il compte dans la protection maladie de nos compatriotes - protection complémentaire, mais également protection au titre de la couverture maladie universelle, dans toute la mesure où les c aisses primaires d'assurance maladie laissent aux mutuelles une part de cette importante fonction -, le Parlement va être totalement écarté de la grande réforme de la mutualité.

C'est regrettable, et vos tentatives d'explication, pardonnez-moi, avaient une tonalité très déplaisante. Vous nous dites que vous avez consulté, que vous avez rencontré les fédérations, les conseils, la profession. Mais si j'étais méchant, monsieur le secrétaire d'Etat, je vous répondrais que vous avez pratiquement donné une définition du salazarisme, du franquisme ou du pétainisme qui, dans l'édiction des lois, faisaient fi des représentations parlementaires et voulaient donner à leurs textes la seule légitimité de l'approbation par les organismes professionnels. Voilà à quoi ressemblait votre démonstration laborieuse. Eh bien non ! Quand il s'agit d'un secteur de cette importance qui touche autant de Français et joue un rôle aussi considérable dans la protection sociale, on en débat tout simplement au Parlement.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

Nous serons donc écartés. Nous ne saurions, évidemment, débattre cette nuit des dizaines d'articles que comportera demain le nouveau code de la mutualité.

Nous pouvons simplement émettre quelques voeux.

Ces voeux reposent sur le constat que, contrairement à certaines déclarations gouvernementales, votre projet, tel qu'il est, ne fait pas l'unanimité des mutuelles. Certes, il recueille l'assentiment de la principale fédération. Mais l'une des richesses de la mutualité française, c'est sa diversité et il serait criminel d'aller à son encontre. Toutes les mutuelles sont aussi respectables à nos yeux. Toutes ont le droit de continuer d'exister. Et il faut prendre garde à la manière dont les textes seront rédigés, pour qu'ils ne comportent aucune disposition qui viendrait entamer la liberté d'établissement et la diversité de la mutualité.

J'ai cité tout à l'heure deux points qui me semblaient délicats.

Le premier concerne l'agrément. On doit éviter que les plus grosses fédérations ne se voient reconnaître un quasipouvoir d'agrément des mutuelles. Dans les projets qui nous sont communiqués sous le manteau, il y a du reste une disposition qui nous paraît contestable, c'est l'obligation de se faire à nouveau agréer, y compris pour les mutuelles existantes, ce qui est assez paradoxal.

L'autre sujet sérieux est celui de la solvabilité et de la garantie que doivent présenter les mutuelles. L'organisation de cette garantie au sein des fédérations est, à mon sens, une sorte d'entorse à la concurrence. Il serait infiniment préférable que, comme nous l'avons fait pour le secteur financier, soit mise en oeuvre une garantie de place qui a l'énorme avantage de mettre tout le monde sur un pied d'égalité.

Voilà quelques critiques, rapidement esquissées, fondées sur des textes que nous ne connaissons que très peu et très indirectement. Elles vous montrent, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'au moins sur ces exemples un débat parlementaire nous aurait permis d'être mieux éclairés et de vous faire part de nos légitimes préoccupations. Vous avez manqué l'occasion d'un vrai débat sur un vrai dossier social.

M. le président.

La parole est à M. Yves Bur, pour défendre l'amendement no

30.

M. Yves Bur.

A l'évidence, la refonte du code de la mutualité dépasse largement le cadre d'un débat aussi restreint. Mais le Parlement va être privé de ses droits. Vous avez rappelé, monsieur le secrétaire d'Etat, que ce projet a été présenté à peu près partout, à de nombreux interlocuteurs, sauf aux parlementaires, sauf à la commission, qui n'a même pas pu analyser la version actuelle d'un texte dont nous connaissons déjà plusieurs moutures.

La directive relative aux assurances mentionnée à l'article 1er n'est pas anodine ; elle induit une révision du code de la mutualité dont nous jugeons qu'elle relève essentiellement du Parlement parce qu'elle concerne un secteur très important de l'économie sociale et de très nombreux Français.

Nous ne pouvons accepter que le législateur soit mis de côté et que les débats relatifs à la préparation du futur code de la mutualité se déroulent en catimini entre le Gouvernement et les acteurs de ce secteur. C'est ici, au Parlement, que s'exprime l'intérêt général et nous ne pouvons que regretter de n'avoir pas notre mot à dire. C'est la raison pour laquelle nous demandons au Gouvernement de retirer l'article 3 afin que ce projet suive le cheminement normal de la procédure parlementaire.

Certes, nous ne méconnaissons pas la nécessité d'adapter le code de la mutualité aux exigences induites notamment par cette directive, transposée dans la douleur après de longues années d'attente. Mais il importe que cette modernisation se fasse dans la transparence et la clarté.

L'accord auquel vous avez pu aboutir avec la Fédération nationale des mutuelles de France ne justifie pas que nous fassions l'économie d'un débat qui a eu lieu, en son temps, pour les assurances et les institutions de prévoyance. Au-delà de la réforme du code, ce débat nous aurait permis de discuter de la place importante qu'occupe la mutualité dans la politique de santé et pour le financement des besoins de santé des Français, aux côtés de l'assurance maladie et des assurances.

Comme je ne doute pas, malheureusement, que vous passiez outre à nos demandes...

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Heureusement !

M. Yves Bur.

... je souhaite que la commission des affaires culturelles, familiales et sociales soit saisie de ce texte, afin que nous puissions l'analyser et en débattre, au moins dans ce cadre-là.

Vous avez rappelé que le Gouvernement s'était engagé à déposer dans les plus brefs délais un projet de loi de ratification qui permettrait au Parlement d'exercer son droit d'initiative pour réformer le code. Mais savez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, que, malgré le dépôt des projets par les gouvernements successifs, pratiquement aucun débat de ratification n'a eu lieu. Je crois donc que vous vous faites beaucoup d'illusions. Je ne suis pas convaincu que vous ferez mieux que les gouvernements précédents.

M. François Goulard.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Jacques Desallangre, pour soutenir l'amendement no

31.

M. Jacques Desallangre.

L'article 3 vise à refondre par voie d'ordonnances l'ensemble du code de la mutualité et à procéder aux harmonisations rendues ainsi nécessaires en droit interne avec d'autres codes ou lois.

Pour la transposition des directives européennes dans le code de la mutualité, le mécanisme est prévu à l'article 1er

Mais la demande d'habilitation du Gouvernement à réformer l'ensemble du code de la mutualité par ordonnances ne procède pas du même souci. Rien ne justifie en effet que cette refonte et l'adoption des mesures d'harmonisation des différents codes et textes visés à l'article 3e mpruntent cette voie. Le Parlement doit pouvoir débattre de l'avenir du mouvement mutualiste au regard des nombreux défis que doit relever la protection sociale.

Mon collègue Georges Sarre ayant déjà excellemment parlé du sujet, j'irai directement à ma conclusion. Les termes de la demande d'habilitation ainsi formulée sont très vagues et ne semblent qu'assez peu conformes aux décisions du Conseil constitutionnel exigeant que l'habilitation soit précise quant aux mesures concernées et quant à leur finalité. Nous demandons la suppression de l'article 3 pour pouvoir débattre ultérieurement de ce projet.

M. le président.

La parole est à M. Michel Bouvard, pour soutenir l'amendement no

32.

M. Michel Bouvard.

Je défendrai l'amendement de mon collègue Jacques Myard, retenu par une réunion municipale à Maisons-Laffitte.

(Sourires.)

M. Jacques Floch, rapporteur.

La pesée ? (Sourires.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

M. Bernard Roman, président de la commission.

A cette heure-là, sa réunion doit être finie !

M. Michel Bouvard.

Le groupe RPR demande la suppression de l'article 3 essentiellement pour deux raisons.

Premièrement, la réécriture du code de la mutualité aurait mérité un débat parlementaire, s'agissant d'un secteur qui concerne 32 millions de Français, c'est-à-dire la majorité de nos concitoyens. Nous sortons vraiment, en l'occurrence, des domaines techniques, voire anecdotiques, visés par certaines directives.

Deuxièmement, nous craignons que la mise en oeuvre de la directive en droit interne ne provoque une déstabilisation profonde de la mutualité française. Il est vrai qu'il s'agit d'un système original en Europe, puisqu'il n'y a guère que la Belgique qui connaisse un secteur comparable, et, de ce fait, il est difficile à défendre dans le cadre de la rédaction d'une directive européenne. Mais nous redoutons que cette banalisation de la mutualité due à la transposition et celle, qui en résultera automatiquement, de son régime fiscal ne soient la porte ouverte à l'absorption progressive d'un certain nombre de mutuelles par des sociétés d'assurance de dimension européenne, qui n'attendent que cela. Je crains, pour tout dire, l'inéluctable « bébéarisation » de la mutualité française et la disparition de ce qui fait son originalité et sa richesse, celles d'un système constitué par plusieurs générations de Français sur la base de solidarités professionnelles ou géographiques.

Pour toutes ces raisons, il aurait été préférable que le débat sur le devenir de la mutualité française - en ce qui concerne aussi bien la transposition de la directive que la réforme du code de la mutualité - ait lieu devant l'Assemblée nationale tout entière et que ces problèmes ne soient pas traités par voie d'ordonnances.

Je ne reprendrai certes pas les termes de mon collègue Goulard, car certaines comparaisons avec tel régime que notre pays a connu ou avec des régimes dictatoriaux de certains pays étrangers m'ont paru un peu excessives.

Mais il reste qu'il y a quelque chose de choquant, monsieur le secrétaire d'Etat, à s'entendre dire en substance :

« Vous connaissez évidemment ce qui est prévu dans le nouveau code de la mutualité, puisqu'il a été soumis à consultation. » Eh bien non, le Parlement n'est pas une

chambre consultative ! Et on ne peut pas considérer qu'il ait été informé parce qu'un document a été diffusé auprès des fédérations de la mutualité française.

M. Bernard Roman, président de la commission.

Il y a eu pire !

M. le secrétaire d'Etat à l'économie solidaire.

Ce n'est pas ce que j'ai dit, monsieur Bouvard.

M. Michel Bouvard.

Ce n'est sans doute pas ce que vous avez voulu dire, mais c'était inutilement blessant pour la représentation parlementaire,...

M. Jacques Desallangre.

Cela avait au moins le mérite de la franchise !

M. Michel Bouvard.

... et cela ne peut que fragiliser la procédure des ordonnances.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur les cinq amendements de suppression ?

M. Jacques Floch, rapporteur.

La commission les a rejetés, s'inspirant de la sagesse du Sénat qui a adopté l'article 3.

M. Michel Bouvard.

Le Sénat a bon dos !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d'Etat à l'économie solidaire.

Je serai bref, monsieur le président. Je pensais être aimable en venant converser, à cette heure matinale, avec M. Goulard, et je ne m'attendais pas à entendre que la Constitution de 1958 pouvait être de nature franquiste ou pétainiste. J'avoue que j'ai été surpris.

M. François Goulard.

Je n'ai pas dit cela !

M. Michel Bouvard.

C'est Mitterrand qui le disait.

M. le secrétaire d'Etat à l'économie solidaire.

Enfin presque...

M. Michel Bouvard.

Quand il parlait du coup d'Etat permanent.

M. le secrétaire d'Etat à l'économie solidaire.

Cela dit, je peux aisément prendre l'engagement de venir présenter le contenu des ordonnances devant la commission et d'en débattre avec elle. Je voudrais d'ailleurs revenir sur quelques points qui me paraissent appeler des précisions.

Il n'y a pas d'obligation à adhérer au système de garantie fédéral, c'est facultatif. Mais, à défaut, on doit cotiser à la caisse nationale.

Vous parlez, monsieur Bouvard, de la diversité du paysage mutualiste. Je suis éminemment favorable, vous le savez, à la diversité, et à tous les points de vue. Mais ce paysage dessine une certaine représentativité, qu'on peut contester, mais qui est ce qu'elle est. On est donc obligé de tenir compte de l'existence des regroupements, des fédérations que les mutuelles ont souhaité constituer.

Pour ce qui est de l'urgence, je ne peux pas, ayant siégé moi-même il y a quelques mois sur vos bancs, ne pas être sensible à certains arguments. Je dis simplement qu'il faut se rappeler les raisons d'une telle urgence. Ce sont les mutuelles qui ont demandé à être « raccrochées » à une directive dont elles pensaient qu'elle organisait l'espace d'assurance européen sans elles, au risque de leur banalisation, voire de la négation de leur existence même.

I l a donc fallu emprunter un chemin juridique complexe...

M. Michel Bouvard.

Une chausse-trappe !

M. le secrétaire d'Etat à l'économie solidaire.

... pour arriver à articuler cette nouvelle obligation et la réalité française. Cela a pris du temps. L'initiative a été relancée de manière franche et nette par le rapport confié à Michel Rocard et les pistes de réflexion qu'il avait tracées.

Il a conduit à un processus d'élaboration : nous y sommes.

A l'impatience manifestée par l'ensemble des acteurs de terrain et au risque soit de la banalisation, soit de l'impasse, se sont ajoutées des décisions très claires. La Cour d e justice européenne, dans son arrêt du 16 décembre 1999, a jugé que les autorités françaises avaient « manqué aux obligations qui leur incombent » en vertu des directives.

M. Michel Bouvard.

Il ne fallait pas ratifier Maastricht !

M. le secrétaire d'Etat à l'économie solidaire.

Une nouvelle procédure a été engagée le 4 avril 2000 - il y a quelques mois - en vue d'obtenir devant la Cour la condamnation de la France à des sanctions pécuniaires.

Si donc nous avons décidé d'accélérer le processus, c'est parce que des années et des années de retard avaient été prises. De fin 92 à 97, je ne vous fais pas de dessin...

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 11, 27, 30, 31 et 32.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

M. le président.

Les amendements nos 8 et 10 ne sont pas défendus.

Je mets aux voix l'article 3.

(L'article 3 est adopté.)

Article 4

M. le président.

« Art. 4. Outre les mesures législat ives nécessaires à la transposition de la directive 1999/62/CE du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 1999, relative à la taxation des poids lourds pour l'utilisation de certaines infrastructures mentionnée à l'article 1er , et afin de faciliter, notamment, la mise en oeuvre des dispositions du droit communautaire relatives aux marchés publics de travaux, le Gouvernement est autorisé à prendre, par ordonnances, dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, les mesures législatives requises pour :

« - supprimer la garantie de reprise de passif accordée par l'Etat aux sociétés d'économie mixte concessionnaires d'autoroutes ;

« - prolonger les durées actuelles des concessions desdites sociétés ;

« - prévoir les conditions dans lesquelles ces modifications seront appliquées dans les comptes des sociétés au titre de l'exercice ouvert au 1er janvier 2000. »

La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, le Gouvernement a entrepris de modifier les conditions d'attribution et de fonctionnement des concessions d'autoroutes pour rendre celles-ci compatibles avec les nouvelles exigences juridiques et pour poursuivre, dans le cadre de la politique de rééquilibrage intermodal des transports, un développement maîtrisé de la politique des transports et du réseau routier.

Le projet de loi qui est soumis à votre examen comporte un article visant à autoriser le Gouvernement à prendre par ordonnance les dispositions de nature législative nécessaire à cette réforme.

L'évolution du droit communautaire et du droit national des délégations de service public nous a conduits, en effet, à procéder à une réforme de fond du financement du développement de notre réseau autoroutier et, en particulier, à rompre avec l'adossement.

Cette technique, qui consiste à financer la construction de nouvelles sections d'autoroutes au moyen des péages provenant des sections déjà en service, a permis à la France, il faut le reconnaître, de se doter d'un réseau autoroutier de haut niveau de service et de qualité.

M. Michel Bouvard.

Il est bon de le rappeler ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Certes, mais, à au moins deux reprises, le conseil d'Etat l'a remis en cause : la première fois en cassant la décision d'attribution de la concession de l'A 86 ouest, malgré les décrets signés par mon prédécesseur. Et je ne le critique pas : il avait, en quelque sorte, l'aval de la section « travaux publics » du Conseil d'Etat. Malheureusement le contentieux a remis ce grand projet en question, et il a fallu tout arrêter.

Une deuxième fois également, le conseil d'Etat a confirmé, en réponse à une demande d'avis du Gouvernement, que la technique de l'adossement n'était plus compatible avec les principes de transparence et d'égalité de traitement qui gouvernent désormais les procédures des choix des concessionnaires. Pourquoi ? Parce qu'elle avantageait les concessionnaires en place.

Par ailleurs, ce système, qui s'était révélé utile, a cependant montré ses limites ; nous étions arrivés à un stade de développement du réseau autoroutier où, après avoir réalisé les axes les plus nécessaires et les plus fréquentés, le risque existait que nous nous lancions dans de nouveaux projets à l'utilité pas toujours assurée, tout simplement en raison du caractère indolore de l'adossement pour les finances publiques.

Pour autant, il y a et il y aura encore des autoroutes à construire, pour des raisons de sécurité et d'aménagement du territoire, ainsi que pour participer au maillage. Il convenait donc d'adapter le secteur autoroutier à cette évolution juridique et économique, et c'est de cela dont il est question ce soir.

Avec la suppression de l'adossement, disparaît la ressource financière implicite qu'il représentait. L'équilibre financier de chaque nouvelle section d'autoroute doit désormais être réalisé en faisant appel à une durée plus longue de la concession, mais aussi, si nécessaire, à une subvention publique financée par l'Etat et les collectivités locales, puisque nous sommes toujours en partenariat, de manière analogue au volet routier des contrats de plan

Etat-régions. L'évolution des conditions de fonctionnement des sociétés d'économie mixte concessionnaires d'autoroutes, les SEMCA, qui ne sont pas privées, mais détenues essentiellement par l'Etat, a ainsi pour objet, d'une part, de permettre à ces sociétés de continuer à jouer leur rôle sur le marché des concessions, d'autre part, d'apporter une solution au financement des futures sections d'autoroutes.

A cet effet, l'ordonnance que le Gouvernement souhaite pouvoir prendre, grâce au présent article 4, allongera la durée des concessions actuelles des SEMCA de douze à quinze ans, comme la Commission européenne l'a accepté au début du mois d'octobre dernier, après près de deux années de discussions - ce qui explique que nous ne l'ayons pas présenté plus tôt.

Cet allongement permettra un allégement des charges annuelles d'amortissement et pourra déboucher sur un résultat d'exploitation positif. Il faut bien comprendre ce mécanisme. Après paiement de l'impôt sur les sociétés, les sociétés concernées auront donc la possibilité de verser des dividendes à son actionnaire, l'Etat. Ces dividendes seront recyclés à due concurrence dans le budget du ministère de l'équipement.

Cette ressource supplémentaire permettra de conduire une politique des transports équilibrée, en particulier pour financer la part Etat des subventions publiques aux nouvelles concessions autoroutières ou pour financer des investissements d'infrastructure ferroviaire.

M. Michel Bouvard.

Très bien.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Quelle responsabilité prendrions-nous si nous nous opposions à la nouvelle politique des transports, qui prévoit de réaliser un certain équilibre, en développant le transport combiné et les « routes roulantes », comme on les appelle maintenant, c'est-à-dire ce qu'attendent non seulement les cheminots, bien entendu, mais la société tout entière.

Le projet d'ordonnance prévoit que les modifications résultant de cette réforme seront applicables à l'exercice comptable 2000, afin de pouvoir disposer de cette nou-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

velle ressource dès 2001, dans des délais compatibles avec l'attribution des concessions en cours de négociation comme l'A 28 entre Rouen et Alençon, ou en préparation comme l'A 19 entre Orléans et Courtenay et l'A 41 entre...

M. Michel Bouvard.

Cruseilles et Annecy ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

... Annecy et Genève.

Les dispositions pour lesquelles le Gouvernement souhaite obtenir cette habilitation constituent la pièce maîtresse d'un projet de réforme ambitieux, permettant de pérenniser - dans le cadre européen concurrentiel - le système français des concessions autoroutières et - j'insiste sur ce point - de poursuivre le développement des sociétés publiques concessionnaires d'autoroutes aux côtés des sociétés privées.

Cette réforme s'inscrit aussi dans une réflexion plus globale permettant à la route et au transport routier de trouver toute sa place aux côtés des autres modes de t ransport, dans une perspective de développement durable, et de répondre ainsi de façon adaptée à la croissance des besoins de déplacements. Je me suis engagé auprès de vos collègues du Sénat à ce que le projet de loi de ratification de ces ordonnances soit déposé avant la fin de l'actuelle session, c'est-à-dire avant la fin du mois de juin 2001, et à l'inscrire à l'ordre du jour du Parlement avant la fin de la législature. Je renouvelle cet engagement devant vous.

Pour terminer, je voudrais préciser que les dispositions prévues par ce projet de loi sont tout à fait neutres sur le régime et le niveau des péages : les autoroutes gratuites - qui ont été financées par le contribuable - comme les autoroutes de Bretagne, la A 75, sauf le viaduc de Millau, ou les autoroutes péri-urbaines, resteront gratuites ; les autoroutes à péage conserveront évidemment leurs péages.

Voilà, mesdames et messieurs les députés, les quelques observations que je voulais faire avant l'examen de cet article 4. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Roger Meï, inscrit sur l'article 4.

M. Roger Meï.

Monsieur le ministre, je ne reviendrai pas plus longuement sur notre opposition de principe au recours à la procédure des ordonnances de l'article 38 de la Constitution ; mon ami Gilbert Biessy l'a justement développée et défendue au cours de la discussion de la question préalable.

Quant au fond des dispositions contenues au sein du présent article, elles ne sont pas sans poser des questions d'importance sur l'avenir du pays et de ses infrastructures.

Tout d'abord, nous ne pouvons que nous réjouir, bien entendu, de la disparition de l'alinéa qui prévoyait initialement la suppression du principe de gratuité sur les péages autoroutiers, même si celui-ci est de moins en moins respecté.

Toutefois, au nom de la libre concurrence et de la compétition ultralibérale prônées actuellement dans le cadre de la construction européenne, l'abandon du système de l'adossement et le retrait des garanties financières dont bénéficient certaines sociétés d'économie mixte de concessions autoroutières font peser de graves menaces sur la maîtrise et l'équilibre du développement de notre réseau autoroutier.

J'évoque à dessein cette question de l'équilibre, pour soutenir les actions que vous avez engagées, monsieur le ministre, sur le devenir du service public ferroviaire en Europe. Notre préoccupation d'un rééquilibrage en faveur du rail demeure en effet intacte.

Par ailleurs, cette volonté d'équilibre ne peut pas être disjointe de celle de justice sociale, s'agissant de la question des péages urbains et périurbains auxquels sont c onfrontés une grande partie de nos concitoyens, modestes, qui utilisent souvent ces tronçons pour des trajets professionnels, et souvent en l'absence de moyens de transports collectifs.

Le groupe communiste a pour sa part déposé le 16 février dernier une proposition de loi visant à rendreo bligatoire la gratuité sur les sections autoroutières urbaines et périurbaines.

Ne pourrait-on pas, monsieur le ministre, envisager rapidement la mise en place d'une telle gratuité ou, à défaut, des formules d'abonnement comparables à celles proposées par la SNCF ? Les réponses que vous serez en mesure de nous donner sur ce point conditionneront l'attitude des députés communistes. Pour le moment, nous jugeons l'article 4 inacceptable. Nous réservons notre position. Si vous savez faire des concessions, monsieur le ministre, nous saurons aussi ajuster notre vote.

M. le président.

M. Meï et les membres du groupe communiste ont présenté un amendement, no 52, ainsi rédigé :

« Compléter l'article 4 par l'alinéa suivant :

« envisager rapidement la mise en place de la gratuité obligatoire sur les sections autoroutières urbaines et périurbaines ou, à défaut pour les trajets p rofessionnels, de formules d'abonnement conséquent comparables à celles retenues par le

SNCF ».

La parole est à M. Roger Meï.

M. Roger Meï.

Je voudrais évoquer le problème des autoroutes en milieu périurbain et urbain, et notamment celles que je connais plus particulièrement, les autoroutes de la région marseillaise. Je rappellerai d'abord que, dans la région parisienne, on peut faire cent à cent cinquante kilomètres sans rien devoir payer, ce qui n'est pas le cas dans notre région.

Je prends l'exemple d'un Aixois se rendant à Marseille.

Par l'autoroute nord, c'est gratuit. Mais par Aubagne, ce qui représente à peu près la même distance, c'est payant : 30 francs l'aller-retour. Or il y a des travailleurs qui, cinq jours par semaine, et, cinquante semaines par an, effectuent ce trajet entre leur domicile et leur lieu de travail. On peut dès lors considérer qu'ils ont payé de multiples fois ces tronçons d'autoroute. J'ajoute que, lorsqu'ils ne les empruntent pas, ils passent par des petits villages,...

M. Michel Bouvard.

Oui.

M. Roger Meï.

... notamment par la vallée de l'Huveaune, dans laquelle une petite route serpente entre diverses localités, ce qui entraîne des embouteillages et porte la durée de leur trajet à deux heures le matin et deux heures le soir - sans parler des problèmes de pollution. Et l'exemple de Marseille vaut pour Toulouse, Nice ou d'autres villes.

M. Michel Bouvard.

Chambéry !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

M. Roger Meï.

Je pense qu'il faut faire quelque chose.

Vous me direz qu'il existe déjà des abonnements. Certes, mais la réduction de prix n'est que de 10 à 20 %, et implique l'obligation de prendre une carte,...

M. Michel Bouvard.

Le conseil général peut prendre une part de la charge.

M. Roger Meï.

... ce qui ne les rend pas très intéressants. On peut également rétorquer que, si on ne veut pas faire payer les usagers, il faut s'adresser aux contribuables et demander au conseil général ou à la région de participer aux frais en achetant le tronçon.

M. Michel Bouvard.

Oui.

M. Roger Meï.

Mais, je le répète, à mes yeux, les travailleurs ont payé de multiples fois. Je ne me bats pas pour les usagers occasionnels, mais pour les gens qui empruntent ce chemin pour aller travailler. Ce sont de modestes travailleurs, qui n'ont souvent pas d'autres moyens de se rendre à leur travail que de prendre leur voiture.

Je pense, monsieur le ministre, que, si nous décidons de prolonger de quinze ans la durée des concessions d'autoroutes, il faut également faire un effort envers ces travailleurs. Je souhaite donc qu'on puisse établir la gratuité des autoroutes. Je prends un exemple dans ma région : on pourrait par exemple accorder la gratuité aux possesseurs de véhicules immatriculés dans les Bouches-du-Rhône et dans le Var. Pour les autres, le problème ne se pose pas.

Voilà ma première proposition - j'exposerai ultérieurement un amendement de repli.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Floch, rapporteur.

La commission n'a pas examiné cet amendement, mais notre collègue pose un vrai problème.

Le Sénat a supprimé les dispositions autorisant le Gouvernement à légiférer par ordonnance sur les péages et nous n'avons pas souhaité les réintégrer. Cela veut dire qu'à terme il faudra que nous ayons un débat dans l'Assemblée au sujet de ces tronçons, qui sont parfois très longs.

M. Michel Bouvard.

Ce sera intéressant !

M. Jacques Floch, rapporteur.

Mais il est vrai qu'un effort considérable doit être fait pour l'utilisation des transports en commun autour des grandes agglomérations françaises. Beaucoup d'entre elles, d'ailleurs, et heureusement, ont réussi à substituer au transport en voiture individuelle un important réseau de transports publics. C'est un vaste débat qui nous permettrait éventuellement de régler le problème posé.

A titre personnel - ne le prenez pas mal, mon cher collègue - je serais d'accord pour faire voter cet amendement, à condition que le groupe communiste vote l'ensemble du texte.

(Sourires.)

M. Michel Bouvard.

Encore ! Il passe des marchés avec tout le monde ! (Sourires.)

Il est à la recherche d'une majorité !

M. Jacques Floch, rapporteur.

Le sujet est suffisamment important pour qu'on puisse, un jour ou l'autre, débattre dans les meilleurs délais sur le problème que vous avez posé.

M. Michel Bouvard.

Ce n'est pas un rapporteur, c'est un maquignon...

M. Jacques Floch, rapporteur.

La commission n'ayant pas examiné cet amendement, je demande à l'Assemblée de ne pas le prendre en considération.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Monsieur le président, j'ai eu peur que M. le rapporteur demande aussi au groupe communiste de voter l'inversion des dates concernant le calendrier des élections (Sourires)...

M. le président.

Cela rendrait la soirée intéressante.

(Sourires.)

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

... en échange d'un avis favorable à l'amendement.

Je ne peux que comprendre et partager la préoccupation que M. Meï exprime vis-à-vis des usagers qui empruntent l'autoroute pour se rendre à leur travail. Il s'agit d'un amendement de justice sociale.

Mais il faut rappeler que les autoroutes sont toujoures payées par quelqu'un : soit l'usager, soit le contribuable.

On peut présenter le problème dans tous les sens, c'est comme cela que ça se passe.

Il n'existe pas d'autoroute véritablement gratuite, pas plus qu'il n'existe de route gratuite, car ces infrastructures ont un coût de réalisation.

Par ailleurs, le péage permet aussi, dans une certaine mesure, de réguler le trafic. Lorsque nous en créons les conditions, il permet d'orienter une partie des besoins de déplacement vers le transport en commun. Or je suis favorable au développement du transport en commun.

Avant d'aborder au fond la question posée par cet amendement, je voudrais tout d'abord vous indiquer, monsieur Meï, comme d'ailleurs à tous les parlementaires et à mes amis du groupe communiste, que les autoroutes qui restent à construire le seront, de toute manière, toujours de deux façons : soit directement par l'Etat, et elles seront alors gratuites, soit sous le régime de la concession, et dans ce cas elles entreront dans le cadre des nouvelles dispositions proposées par l'article 4. Il sera toujours possible de réaliser directement, sans avoir recours au péage, des autoroutes interurbaines, des autoroutes urbaines ou des autoroutes ayant une vocation d'aménagement du territoire.

Cet article pose avant tout les principes essentiels de la réforme que nous devons mettre en oeuvre pour les sociétés publiques d'autoroutes. J'ai essayé de la résumer tout à l'heure, vous m'avez bien entendu. De quoi s'agit-il ? Cet article a des limites, mais ne lui faisons pas dire autre chose que ce qu'il signifie : il s'agit de créer les conditions de l'intermodalité rail-route.

Il s'agit de donner aux sociétés publiques d'autoroutes la possibilité de participer aux appels d'offres portant sur d es sections d'autoroutes concédées qui restent à construire.

Sachez, monsieur le député, que je comprends le sens de votre amendement. Il est vrai qu'il existe dans notre p ays des autoroutes concédées, donc à péage, qui contournent certaines agglomérations, et qui peuvent jouer le rôle de rocade urbaine sur quelques dizaines de kilomètres. C'est le cas, par exemple, à Toulouse ou au nord-est de Marseille.

La situation dans l'agglomération de Marseille est en effet quelque peu paradoxale puisque les personnes qui résident à l'est de Marseille roulent sur des autoroutes sans péage alors que celles qui viennent de Gardane sont soumises au péage. Cette situation est particulièrement pénalisante pour les trajets domicile-travail. Vous l'avez souligné.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

Pour pallier cette situation, il n'existe que deux pistes de solutions explorées actuellement.

Je rappelle, tout d'abord, qu'il n'est juridiquement pas possible d'exonérer de péage les utilisateurs locaux tout en continuant à faire payer le transit national et international.

Une telle situation, si elle était mise en place, serait de toute évidence sanctionnée au moindre recours par les juridictions administratives et donc par le Conseil d'Etat pour rupture du principe constitutionnel d'égalité.

La première piste consiste à réfléchir dans le cadre de ce qu'on appelle le rachat du péage par les collectivités concernées, qui pourraient rembourser à la société concessionnaire le manque à gagner qu'entraînerait pour elles la levée du péage. Cela s'est fait dans quelques endroits.

M. Michel Bouvard.

C'est cher ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Cette solution est bien évidemment très onéreuse pour les contribuables locaux et, par définition, toutes les sommes qui y sont consacrées ne serviront pas au développement des autres modes de transport qui ont l'avantage d'être moins polluants et, tout compte fait, souvent plus efficaces du point de vue économique et social.

La seconde piste de solution à explorer pourrait consister à développer un système d'abonnement au bénéfice des usagers qui utilisent l'autoroute le plus souvent et notamment pour ceux qui font régulièrement le trajet domicile-travail. Les abonnements classiques pratiqués par les sociétés d'autoroutes ne sont cependant pas toujours suffisants pour ceux qui se rendent quotidiennement au travail en utilisant l'autoroute. Dans ce cas, il faut voir, et cela est possible, avec les collectivités locales...

M. Michel Bouvard.

Eh oui ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement. ... comment elles peuvent contribuer à en faire baisser encore le prix en subventionnant les abonnements.

M. Michel Bouvard.

On vient de le faire ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Des solutions de ce type pourraient être recherchées aux abords de certaines agglomérations, et, particulièrement, dans votre région.

C'est pourquoi je vous propose, monsieur le député, de demander au préfet des Bouches-du-Rhône d'organiser rapidement sur place une table ronde avec la direction de la société Escota, le conseil général, les représentants des collectivités locales concernées, l'Etat, afin de favoriser autant qu'il sera possible cette démarche pour réduire la dépense occasionnée pour les déplacements quotidiens et réguliers entre le domicile et le lieu de travail.

Enfin, monsieur le député, je souhaite que, sous le bénéfice de ces explications, vous retiriez votre amendement. Je ne vais pas mettre en avant qu'il tombe sous le coup de l'article 40, car vous posez un débat de fond.

Mais votre amendement ne présente pas d'utilité juridique particulière pour réaliser des opérations qui sont d'ores et déjà possibles et qui continueront à l'être après l'entrée en vigueur de l'ordonnance prise en application de l'article 4, de ce projet de loi, d'autant plus que, comme vous l'avez dit lors de la discussion au Sénat, un paragraphe a été retiré.

Le Gouvernement souhaite donc le retrait de cet amendement. A défaut, il ne pourrait qu'y être défavorable.

M. le président.

La parole est à M. Roger Meï.

M. Roger Meï.

Je rapporterai tout d'abord à notre rapporteur les paroles que m'a dites un de ses collègues éminents quand il est passé à côté de moi tout à l'heure :

« Tu sais, Roger », m'a-t-il avoué « on n'est pas fier de voter les ordonnances telles qu'elles se présentent. » Je ne

citerai pas son nom ! Quant à moi, je crois que je ne remettrais plus les pieds à l'Assemblée nationale si j'acceptais le marché que vous me proposez, monsieur le rapporteur.

M. Jacques Desallangre.

Très bien !

M. Michel Bouvard.

Le rapporteur l'a proposé à tout le monde !

M. Jacques Floch, rapporteur.

Oui, mais vous ne l'avez pas accepté !

M. Roger Meï.

Monsieur le ministre, vous êtes certainement comme moi sensible au problème des travailleurs et aux inconvénients causés par leurs déplacements quotidiens domicile-travail. Ce sont en effet en général pour les travailleurs modestes que les frais occasionnés par ces trajets sont les plus lourds car, n'ayant pas les moyens de se loger en ville, ils s'installent en banlieue.

Ces travailleurs, monsieur le ministre, ont payé je le répète, de multiples fois les sections d'autoroute qu'ils parcourent tous les jours. S'il y a un problème de justice sociale à régler il est bien sur ces tronçons d'autoroute. Il faut que, comme le prévoyait la loi initiale, ils deviennent gratuits. Au bout d'un certain nombre d'années, une fois les dépenses amorties, les autoroutes tombaient dans le domaine public. La loi qui a été votée par nos précécesseurs doit être appliquée.

Que vous vouliez prolonger les concessions pour pouvoir, s'il le faut, construire un autre tronçon d'autoroute, je le comprends bien. C'est l'adossement. Mais vous avez proposé quelque chose de différent. Et, de toute façon, je considère qu'il y a une contrepartie à donner aux plus modestes de notre pays. C'est pourquoi je souhaite que mon amendement sur la gratuité soit voté.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

52. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. Roger Meï.

Dans mon amendement, il y a une deuxième partie destinée à servir d'amendement de repli en cas de vote négatif.

M. le président.

C'est, du point de vue de la procédure, totalement impossible, monsieur Meï.

M. Roger Meï.

Avec votre permission, monsieur le président, j'aimerais pouvoir m'expliquer quelques minutes de plus.

Monsieur le ministre, sans demander la participation des collectivités locales, la SNCF offre des possibilités d'abonnements très intéressants aux étudiants et aux travailleurs. Est-ce que l'on ne pourrait pas appliquer cette méthode sur les autoroutes ?

M. Michel Bouvard.

C'est ce que propose le ministre !

M. le président.

Monsieur le ministre, je veux bien vous donner encore la parole mais nous arrivons au bout du débat, comprenez le bien ! M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Tout à fait, monsieur le président ! Monsieur Meï, j'ai proposé une rencontre et vous maintenez votre amendement alors que j'en ai demandé le retrait après vous avoir expliqué que le problème que


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

vous soulevez ne pouvait se régler dans le cadre de cette ordonnance. J'ai compris le problème et j'ai proposé une table ronde pour que l'on discute de la suggestion que vous faites dans la deuxième partie de votre amendement.

Vous n'en tenez pas compte ! Je suis obligé de m'en tenir à ma position initiale. Je veux tout faire pour trouver une solution qui aille dans le sens que vous souhaitez, mais les choses ne sont pas à sens unique.

M. le président.

Je mets aux voix l'article 4.

(L'article 4 est adopté.)

Article 5

M. le président.

« Art. 5. Les ordonnances prévues par la présente loi devront être prises dans les délais suivants :

« a) Dans les quatre mois suivant la promulgation de la présente loi pour celles :

« 1o Transposant en tout ou en partie les directives mentionnées au I de l'article 1er ;

« 2o Mettant en oeuvre le droit communautaire dans les domaines mentionnés au I de l'article 2 ;

« 3o Prenant les mesures prévues à l'article 3 et à l'article 4 ;

« b) Dans les huit mois suivant la promulgation de la présente loi pour celles :

« 1o Transposant en tout ou en partie les directives mentionnées au II de l'article 1er ;

« 2o Mettant en oeuvre le droit communautaire dans les domaines mentionnés au II de l'article 2.

« Des projets de loi de ratification des ordonnances devront être déposés devant le Parlement au plus tard le dernier jour du deuxième mois à compter de l'expiration des délais mentionnés aux alinéas précédents. »

Le Gouvernement a présenté un amendement, no 3, ainsi rédigé :

« Dans le cinquième alinéa (3o ) de l'article 5, après le mot : "prévues", insérer les mots : "à l'article 2 bis, ". »

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Il s'agit d'un amendement de coordination.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Floch, rapporteur.

L'amendement a été adopté par la commission.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

3. (L'amendement no 3 est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'article 5, modifié par l'amendement no

3. (L'article 5, ainsi modifié, est adopté.)

Vote sur l'ensemble

M. le président.

Personne ne demande plus la parole ?...

M. Michel Bouvard.

Nous nous sommes déjà largement exprimés.

M. le président.

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(L'ensemble du projet de loi est adopté.)

3 DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI

M. le président.

J'ai reçu, le 5 décembre 2000, de M. Alain Barrau et plusieurs de ses collègues, une proposition de loi complétant l'article 6 bis de l'ordonnance no 58-1100 du 17 novembre 1958 en vue d'améliorer le contrôle du Parlement sur la transposition des normes européennes dans la législation française.

Cette proposition de loi, no 2781, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

4 DÉPÔT D'UN RAPPORT

M. le président.

J'ai reçu, le 5 décembre 2000, un rapport, no 2780, fait au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, en vue de la lecture définitive du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (no 2779) : Recettes et équilibre général (M. Alfred Recours) ; Assurance maladie et accidents du travail (M. Claude Evin) ; Assurance vieillesse (M. Denis Jacquat) ; Famille (Mme Marie-Françoise Clergeau).

5 DÉPÔT D'UN PROJET DE LOI

REJETÉ PAR LE SÉNAT

M. le président.

J'ai reçu, le 1er décembre 2000, transmis par M. le Premier ministre, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture et qui a fait l'objet d'un vote de rejet en nouvelle lecture par le Sénat au cours de sa séance du 30 novembre 2000.

Ce projet de loi, no 2779, est renvoyé à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, en application de l'article 83 du règlement.

6

ORDRE DU JOUR

DES PROCHAINES SÉANCES

M. le président.

Aujourd'hui, à quinze heures, première séance publique : Questions au Gouvernement ; Fixation de l'ordre du jour ;


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

Discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi no 2620, relatif à l'archéologie préventive : M. Marcel Rogemont, rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (rapport no 2743).

Discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2000, no 2704 : M. Didier Migaud, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport no 2775, tomes I et II) ; M. François Lamy, rapporteur pour avis au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées (avis no 2764).

A vingt et une heures, deuxième séance publique : Suite de l'ordre du jour de la première séance.

La séance est levée.

(La séance est levée, le mardi 5 décembre 2000, à quatre heures.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT

TEXTES SOUMIS EN APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION Transmissions

M. le Premier ministre a transmis, en application de l'article 88-4 de la Constitution, à M. le président de l'Assemblée nationale, les textes suivants : Communication du 4 décembre 2000 No E 1612 Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant les activités des institutions de retraite professionnelle (COM [2000] 507 final).

Communication du 5 décembre 2000 No E 1613 Demande de dérogation en application de l'article 27, paragraphe 2, de la sixième directive du Conseil du 17 mai 1977 en matière de TVA (matériaux usagés et déchets) formulée par l'Espagne.

Retraits Il résulte d'une lettre de M. le Premier ministre, en date du 1er décembre 2000, qu'ont été retirés par les instances communautaires, le 8 juin 2000, les textes suivants : No E 34 (COM [1992] 394 final). - Proposition de règlement du Conseil établissant un système de licences pour les activités de pêche des navires battant pavillon d'un Etat membre ou enregistrés dans un port de la Communauté, exercées dans la zone de réglementation définie par la convention NAFO.

No E 114 (COM [1993] 355 final). - Proposition de décision du Conseil relative à la conclusion d'un accord entre la CEE et la Fédération de Russie concernant les services des lancements spatiaux.

No E 185 (SEC [1993] 1559 final). - Proposition de décision du Conseil concernant la conclusion de certains accords entre la CEE et certains pays tiers sur le commerce de produits textiles (Lettonie, Lituanie).

Cette proposition de décision concernait des accords textiles avec huit pays. Six d'entre eux ont été adoptés au Conseil ECOFIN du 13 octobre 1997 : Albanie, Arménie, Fédération de Russie, Slovénie, Tadjikistan, Ouzbékistan (lettre no 521/97/FM/NA du 16 octobre 1997).

La commission procède aujourd'hui au retrait de la proposition s'agissant des accords avec la Lettonie et la Lituanie.

La procédure de l'article 88-4 est donc achevée pour l'ensemble du document.

No E 209 (COM [1994] 002 final). - Proposition de décision du Conseil relative à l'exercice de la compétence externe de la Communauté aux conférences internationales du travail en cas de compétences appartenant ensemble à la Communauté et à ses Etats membres.

No E 402 (COM [1995] 053 final). - Proposition de décision du Conseil relative à un soutien communautaire à des actions en faveur des personnes âgées.

No E 463 (COM [1995] 282 final). - Proposition de décision d u Conseil portant adoption d'un programme de mesures non législatives pour améliorer la sécurité et la santé sur le lieu de travail : communication de la commission sur un programme communautaire dans le domaine de la sécurité, de l'hygiène et de la santé sur le lieu de travail (1996-2000).

No E 494 (COM [1995] 399 final). - Proposition de règlement du Conseil relatif à la suspension de taux appliqués à l'intérieur de contingents tarifaires pour certains produits agricoles.

No E 987 (COM [1995] 546 final). - Proposition de décision du Conseil instituant un fonds européen de garantie pour encourager la production cinématographique et télévisuelle.

No E 1430 (COM [2000] 129 final). - Proposition de règlement (CE) du Conseil portant suspension de certaines concessions prévues par l'accord européen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs

Etats membres, d'une part, et la République de Lettonie, d'autre part (beurre).

CONVOCATION EXCEPTIONNELLE DE LA CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS La Conférence, constituée conformément à l'article 48 du règlement, est convoquée pour le mercredi 6 décembre 2000, à 12 heures , dans les salons de la présidence.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2000

ANNEXES AU PROCÈS-VERBAL de la 3e séance du mardi 5 décembre 2000 SCRUTIN (no 276) sur la question préalable opposée par M. Bocquet au projet de loi portant habilitation du Gouvernement à transposer, par ordonnances, des directives communautaires et à mettre en oeuvre certaines dispositions du droit communautaire.

Nombre de votants .....................................

191 Nombre de suffrages exprimés ....................

191 Majorité absolue ..........................................

96 Pour l'adoption ...................

72 Contre ..................................

119 L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN Groupe socialiste (255) : Pour : 1. - M. Marcel Rogemont.

Contre : 110 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Non-votant : M. Raymond Forni (président de l'Assemblée nationale).

Groupe RPR (138) : Pour : 40 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe UDF (71) : Pour : 5 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Contre : 1. - M. Arthur Paecht.

Non-votant : M. Claude Gaillard (président de séance).

Groupe Démocratie libérale et Indépendants (43) : Pour : 8 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe communiste (35) : Pour : 15 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe Radical, Citoyen et Vert (30) : Pour : 3. - MM. Jacques Desallangre , Gérard Saumade et Michel Suchod.

Contre : 8 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Non-inscrits (5).

Mises au point au sujet du présent scrutin (Sous réserve des dispositions de l'article 68, alinéa 4, du règlement de l'Assemblée nationale) M. Arthur Paecht, qui était présent au moment du scrutin ou qui avait délégué son droit de vote, a fait savoir qu'il avait vou lu voter « pour ».

M. Marcel Rogemont, qui était présent au moment du scrutin ou qui avait délégué son droit de vote, a fait savoir qu'il avait voulu voter « contre ».

SCRUTIN (no 277) sur la motion de renvoi en commission, présentée par M. Debré, du projet de loi portant habilitation du Gouvernement à transposer, par ordonnances, des directives communautaires et à mettre en oeuvre certaines dispositions du droit communautaire.

Nombre de votants .....................................

85 Nombre de suffrages exprimés ....................

81 Majorité absolue ..........................................

41 Pour l'adoption ...................

21 Contre ..................................

60 L'Assemblée nationale n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN Groupe socialiste (255) : Contre : 55 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Non-votant : M. Raymond Forni (président de l'Assemblée nationale).

Groupe RPR (138) : Pour : 16 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe UDF (71) : Pour : 3 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Non-votant : M. Claude Gaillard (président de séance).

Groupe Démocratie libérale et Indépendants (43) : Pour : 2 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe communiste (35) : Abstentions : 4 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Groupe Radical, Citoyen et Vert (30) : Contre : 5 membres du groupe, présents ou ayant délégué leur droit de vote.

Non-inscrits (5).