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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 JANVIER 2001

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. RAYMOND FORNI

1. Questions au Gouvernement (p. 378).

M. le président.

RETRAITE COMPLÉMENTAIRE (p. 378)

M. Jean Le Garrec, Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité.

CRISE DE LA VACHE FOLLE (p. 379)

MM. Jean Auclair, Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche.

LICENCIEMENTS DANS LE GROUPE DANONE (p. 380)

M. Gilbert Biessy, Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité.

AVENIR DES RETRAITES DES FONCTIONNAIRES (p. 381)

MM. Francis Delattre, Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

DROITS DE L'HOMME EN IRAN (p. 381)

M me Chantal Robin-Rodrigo, M. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes.

MISE EN CAUSE D'UN JUGE D'INSTRUCTION (p. 382)

M. François d'Aubert, Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux, ministre de la justice.

SOCIÉTÉ DE L'INFORMATION (p. 383)

M. Patrick Bloche, Mme Catherine Tasca, ministre de la culture et de la communication.

TAXE SUR LES DISQUES DURS (p. 384)

M. Olivier de Chazeaux, Mme Catherine Tasca, ministre de la culture et de la communication.

GROUPE DANONE (p. 385)

Mme Odette Grzegrzulka, M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche.

AUGMENTATION DE LA DÉLINQUANCE (p. 386)

M. Henri Plagnol, Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux, ministre de la justice.

ÉVOLUTION DE LA CRIMINALITÉ À PARIS (p. 387)

Mme Nicole Catala, M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur.

POLITIQUE AFRICAINE DE LA FRANCE (p. 388)

Mme Marie-Hélène Aubert, M. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes.

TREMBLEMENT DE TERRE AU SALVADOR (p. 388)

MM. Jean-Jacques Filleul, Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes.

Suspension et reprise de la séance (p. 389)

PRÉSIDENCE DE M. CLAUDE GAILLARD

2. Epargne salariale. - Discussion, en nouvelle lecture, d'un projet de loi (p. 389).

M. le président.

M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur de la commission des finances.

DISCUSSION GE NE RALE (p. 393)

MM. Gérard Charasse, Jacques Godfrain, Jean Vila, Claude Goasguen, Mme Nicole Bricq,

MM. Jean-Jacques Jégou, Yves Cochet, Pascal Terrasse.

Clôture de la discussion générale.

M. François Patriat, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

DISCUSSION DES ARTICLES (p. 401)

Article 1er A. - Adoption (p. 401)

Avant l'article 1er (p. 401)

Amendement no 93 de M. Cuvilliez : MM. Jean Vila, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet.

Article 1er (p. 402)

Amendement no 121 de M. Balligand : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.

Adoption de l'article 1er modifié.

Article 2 (p. 403)

Amendement no 1 de la commission des finances : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.

Amendement no 2 de la commission, avec le sous-amendement no 114 de M. Jégou : MM. le rapporteur, JeanJacques Jégou, le secrétaire d'Etat. - Adoption du sousamendement no 114 rectifié et de l'amendement no 2 modifié.

Amendement no 142 de M. Balligand : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.

Adoption de l'article 2 modifié.

Article 3 (p. 405)

Amendement no 3 de la commission : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.

Amendement no 133 de M. Balligand : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.

Les amendements nos 4 corrigé de la commission, 116 de M. Jégou, 151 du Gouvernement, 5 et 6 de la commission, 134 de M. Balligand et 115 de M. Jégou tombent.

Amendement no 7 de la commission : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 JANVIER 2001

Amendement no 8 rectifié de la commission : M. le rapporteur. - Retrait.

Adoption de l'article 3 modifié.

Article 3 ter. - Adoption (p. 407)

Article 3 quater A (p. 407)

Amendement de suppression no 9 de la commission : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.

L'article 3 quater A est supprimé.

Article 3 quater (p. 407)

Le Sénat a supprimé cet article.

Amendement no 10, deuxième rectification, de la commission : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.

L'article 3 quater est ainsi rétabli.

Article 3 quinquies (p. 408)

Amendement no 152 du Gouvernement : MM. le secrétaire d'Etat, le rapporteur. - Adoption.

Adoption de l'article 3 quinquies modifié.

Article 3 sexies. - Adoption (p. 408)

Article 3 septies (p. 408)

Le Sénat a supprimé cet article.

Amendement no 11 rectifié de la commission : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.

L'article 3 septies est ainsi rétabli.

Article 4 (p. 409)

Amendement no 94 de M. Cuvilliez : MM. Jean Vila, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet.

Amendement no 95 de M. Cuvilliez : MM. Jean Vila, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet.

Amendement no 12 rectifié de la commission : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.

Amendement no 96 de M. Cuvilliez : MM. Jean Vila, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Retrait.

Amendement no 13 de la commission : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.

Amendement no 14 de la commission : MM. Yves Cochet, Jean-Jacques Jégou, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. Rejet.

Amendement no 122 de M. Balligand : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.

Adotpion. 157 du Gouvernement : MM. le secrétaire d'Etat, le rapporteur. - Adoption.

Adoption de l'article 4 modifié.

Après l'article 4 (p. 412)

Amendement no 97 de M. Cuvilliez : MM. Jean Vila, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet.

Amendement no 99 de M. Cuvilliez : MM. Jean Vila, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet.

Article 5 (p. 413)

Amendement no 123 de M. Balligand : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.

Amendement no 153 du Gouvernement : MM. le secrétaire d'Etat, le rapporteur. - Adoption.

Adoption de l'article 5 modifié.

Après l'article 5 (p. 414)

Amendement no 98 de M. Cuvilliez : MM. Jean Vila, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet.

Article 5 bis . - Adoption (p. 414)

Article 6 (p. 414)

Amendement no 100 de M. Cuvilliez : MM. Jean Vila, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet.

Amendements nos 15 de la commission et 117 de M. Jégou : MM. le rapporteur, Jean-Jacques Jégou, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement no 15 ; l'amendement no 117 n'a plus d'objet.

Amendement no 16 de la commission : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.

Adoption de l'article 6 modifié.

Article 6 bis (p. 416)

Le Sénat a supprimé cet article.

Article 6 ter . - Adoption (p. 416)

Article 7 (p. 416)

Amendement no 19, deuxième rectification, de la commission : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.

Amendement no 102 de M. Cuvilliez : MM. Jean Vila, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Retrait.

Amendement no 101 de M. Cuvilliez : MM. Jean Vila, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet.

Amendement no 137 de la commission : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.

Amendement no 138 de la commission. - Adoption.

Amendement no 139 de la commision. - Adoption.

Amendement no 17 rectifié de la commission, avec le sousamendement no 113 de M. Cochet : MM. le rapporteur, Yves Cochet, le secrétaire d'Etat. - Adoption du sousamendement no 113 et de l'amendement no 17 rectifié et modifié.

Les amendements nos 154 du Gouvernement et 91 de M. Dumont n'ont plus d'ojet.

Amendements nos 140 de la commission et 103 de M. Cuvilliez ; MM. le rapporteur, Jean Vila, le secrétaire d'Etat. Adoption de l'amendement no 140 ; l'amendement no 103 tombe.

Amendement no 141 de la commission : MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.

Amendement no 18 de la commission, avec les sousamendements nos 144 de M. Cochet et 104 rectifié de M. Cuvilliez, et amendement no 120 de M. Cuvilliez : MM. le rapporteur, Jean Vila. - Retrait de l'amendement no 120.

MM. le secrétaire d'Etat, Yves Cochet, le rapporteur, JeanJacques Jégou. - Rejet du sous-amendement no 144.

MM. Jean Vila, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet d u sous-amendement no 104 rectifié ; adoption de l'amendement no

18. Adoption de l'article 7 modifié.

Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.

3. Nomination d'un député en mission temporaire (p. 422).

4. Ordre du jour de la prochaine séance (p. 422).


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COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. RAYMOND FORNI

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

M. le président.

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Je vous rappelle, mes chers collègues, que la séance des questions se déroulera selon la procédure que je vous ai décrite la semaine dernière.

RETRAITE COMPLE

MENTAIRE

M. le président.

La parole est à M. Jean Le Garrec, pour le groupe socialiste.

M. Jean Le Garrec.

Monsieur le président, je suis heureux et très honoré d'inaugurer cette nouvelle procédure.

Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité, mais elle intéressera, je crois, tous les membres de cette assemblée, ceux de la majorité en tout cas. Elle concerne en effet les retraites, sujet qui préoccupe des centaines de milliers de nos concitoyens, très légitimement inquiets. Il m'est difficile de la poser avec tout ce mouvement dans l'hémicycle...

M. le président.

Mes chers collègues, je vous prie de cesser les conversations particulières et de gagner vos places.

Poursuivez, monsieur Le Garrec.

M. Jean Le Garrec.

Je vous remercie, monsieur le président.

Je commencerai par une affirmation : la retraite à soixante ans est et demeure une avancée considérable.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Jean-Pierre Soisson.

A cinquante ans, c'est mieux ! (Sourires.)

M. Jean Le Garrec.

Elle a permis à des centaines de milliers de salariés, femmes et hommes, qui souvent ont commencé à travailler à quatorze ans, de profiter légitimement de quelques années de repos, de bonheur.

M. Michel Lefait.

Très bien !

M. Jean-Pierre Soisson.

Bravo Le Garrec !

M. Jean Le Garrec.

Je voudrais ensuite rappeler que, pour que cette retraite soit complète, ses composantes doivent avancer du même pas : d'un côté, la retraite de base - la retraite de la sécurité sociale, comme disent nos concitoyens -, de l'autre les retraites complémentaires. A cette fin a été créée en 1983 une structure de financement, l'ASF...

M. Bernard Accoyer.

Vous n'êtes pas crédible ! Vous êtes le fossoyeur de la répartition !

M. Jean Le Garrec.

Ce sujet, très attendu par nos concitoyens, mérite un peu d'attention.

M. Yves Fromion.

Que n'y avez-vous prêté attention depuis des années ?

M. Jean Le Garrec.

L'ASF a pour objectif de gérer paritairement - j'insiste sur le mot - le financement des retraites complémentaires.

M. Bernard Accoyer.

Vous n'êtes pas crédible, monsieur Le Garrec, je le répète !

M. Jean Le Garrec.

Passé en 1983, renouvelé par trois fois, en 1990, 1993 et 1996, cet accord est aujourd'hui remis en cause, le MEDEF présentant des propositions jugées inacceptables par l'ensemble des organisations syndicales.

M. Yves Fromion.

Vous n'aviez qu'à en présenter, mais vous n'avez rien fait !

M. Didier Boulaud.

Et vous, qu'avez-vous fait ?

M. Jean Le Garrec.

Comment leur refus ne serait-il pas fondé, puisque le MEDEF propose ni plus ni moins, par le biais des retraites complémentaires, de remettre en cause la retraite à soixante ans ! C'est cela, la réalité ! Madame la ministre de l'emploi et de la solidarité, p ouvez-vous rassurer ceux qui nous écoutent ? Les moyens actuels de l'ASF permettent-ils de liquider les retraites jusqu'au 31 mars ? Deuxièmement, je rappelle que nous sommes partisans de la gestion paritaire. Nous souhaitons que la négociation aboutisse, même si nous avons quelques inquiétudes à ce sujet. Le Gouvernement est-il prêt à intervenir si nécessaire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Bernard Accoyer.

Courage, fuyons !

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur le président de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale (

« Ah ! » sur plu-

s ieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance ), vous venez d'exprimer l'inquiétude que ressentent des millions de nos concitoyens alors que se déroulent des négociations entre partenaires sociaux sur la retraite à soixante ans.

Vous venez à très juste titre de rappeler que la retraite à soixante ans a été une grande conquête sociale, en particulier pour celles et ceux de nos concitoyens qui ont commencé à travailler très jeunes.

Je veux d'abord préciser que les négociations en cours entre les partenaires sociaux ne concernent pas le régime de retraite de base, financé par la sécurité sociale, ni évi-


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demment les droits de ceux qui sont déjà à la retraite.

Elles portent exclusivement sur les droits à la retraite complémentaire des personnes qui partiront dans le futur à la retraite.

Je vous précise que, en tout état de cause, le financement des retraites complémentaires peut être assuré jusqu'à la fin mars. Il est donc très important que les négoc iations aboutissent au plus vite à un compromis acceptable. Nous souhaitons par conséquent que les partenaires sociaux puissent se mettre d'accord et le blocage actuel est très préoccupant.

Le Gouvernement n'a évidemment pas à se substituer a priori aux partenaires sociaux, les retraites complémentaires relevant de leurs compétences et l'autonomie conventionnelle étant dans ce domaine extrêmement large. Vous me permettrez cependant de remarquer le comportement paradoxal du MEDEF - qui n'exprime d'ailleurs pas l'opinion de tout le patronat sur ce sujet,...

M. Kofi Yamgnane.

Parfaitement !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

... la C GPME et l'union professionnelle artisanale ayant exprimé leur volonté d'aboutir à un accord. Le MEDEF, tout en préconisant un élargissement du champ de la négociation, adopte une attitude qui revient à bloquer la négociation et à refuser tout compromis.

Le Gouvernement, vous l'avez compris, entend rester extrêmement vigilant sur cette question, même s'il ne veut pas interférer dans les discussions entre partenaires sociaux. En tout état de cause , nous suivons de très près la situation et, s'il le fallait, l'Etat prendrait ses responsabilités.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

CRISE DE LA VACHE FOLLE

M. le président.

La parole est à M. Jean Auclair, pour le groupe du RPR.

M. Jean Auclair.

Monsieur le ministre de l'agriculture (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance ), je vous interroge régulièrement par écrit ; malheureusement, vous me répondez rarement.

Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République.

Eh oui !

M. Jean Auclair.

Alors que la crise de la vache folle débutait, je vous ai interpellé, mais vous m'avez répondu par des pirouettes ou par un discours déplorable, excessif, donc dérisoire.

M. Bernard Accoyer.

Comme d'habitude ! J'espère que, face à l'ampleur de la catastrophe, vous serez pour une fois précis dans vos réponses.

Les éleveurs sont descendus dans la rue la semaine dernière, car ils attendent avec impatience des compensations. Qu'allez-vous proposer à la Commission, puisque vous vous réfugiez derrière elle ? Pourquoi n'avoir pas fait appel au principe de subsidiarité - mais en aviez-vous seulement la volonté ? Quelle profession accepterait de subir une baisse de 30 % de son revenu sans rien dire ? Sachez que nous serons des observateurs attentifs.

Deuxième question : comment allez-vous régler le problème de la PSBM, sachant que, l'an dernier, le nombre de bovins mâles déclarés dans les directions départementales de l'agriculture a fortement progressé ? Les éleveurs seront-ils pénalisés, bien que le montant de la prime ait été fixé par la dernière réforme de la PAC ? Ils attendent aujourd'hui de vous des réponses concrètes.

Troisièmement, pour désengorger le marché, vous avez décidé de faire abattre et d'incinérer des milliers d'animaux de plus de trente mois. Vous-même avez parlé la semaine dernière d'un immense gâchis. Je dirai même : une immense pagaille ! La filière est plongée dans l'anarchie la plus complète.

Or la responsabilité vous en incombe : comme pour le dépistage systématique, tout a été fait à la sauvette, dans l'approximation la plus totale.

M. François Guillaume.

Tout à fait !

M. Yves Fromion.

Comme pour le reste !

M. Jean Auclair.

Comment respecter les prix de retrait fixés par l'OFIVAL alors que les abatteurs ne savent pas comment ils seront dédommagés ni à quelle date ? Qui va payer les notes d'équarrissage ? Au niveau de la commercialisation de la viande, les prix à la consommation s'envolent alors qu'ils baissent à la production. Qui va payer les tests ? Les clients des abattoirs ne sont quasiment plus couverts par les assurances traditionnelles comme la COFACE. Les exportations sont devenues quasi nulles. La levée de l'embargo par l'Italie n'est qu'un effet d'annonce, puisqu'elle ne concerne pas les jeunes bovins abattus en France et que les broutards sont menacés. Le chômage menace de plus en plus les employés de la filière.

M. le président.

Monsieur Auclair, pouvez-vous tourner un instant votre tête vers la gauche pour voir le clignotant qui indique que votre temps de parole est dépassé ?

M. Jean Auclair.

J'ai terminé, monsieur le président.

Monsieur le ministre, allez-vous réagir concrètement ? Il y va de la pérennité de beaucoup d'emplois et de la survie de toute une filière ! Ultime question : que se passe-t-il à l'OFIVAL, dont le directeur vient d'être remercié ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie Libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche.

Monsieur Auclair, je vais essayer de répondre à la batterie de questions que vous m'avez posées, en essayant d'être aussi mesuré que vous dans mes propos.

Pour ce qui concerne la compensation financière, je ne m'abrite pas derrière la Commission. Je respecte les lois et règlements européens, et pour une raison simple : il est arrivé à des gouvernements d'accorder , en contradiction avec la réglementation communautaire, des subventions à des entreprises et d'être ensuite obligés de les faire rembourser, tout simplement parce que c'est strictement interdit.

Plusieurs députés du groupe socialiste.

Borotra !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Je n'entends pas, moi, payer les éleveurs français en monnaie de singe. Le jour où ils seront compensés, ce sera sur la base de décisions prises au plan européen, conformément à ce que nous aurons décidé ensemble , et qui est à l'ordre du jour du prochain Conseil européen de l'agriculture.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 JANVIER 2001

Pour ce qui concerne la PSBM, le problème est réglé et les éleveurs le savent. Nous avons demandé l'autorisation à l'Union européenne - nous l'avons obtenue au Conseil européen de l'agriculture et cela a été confirmé en comité de gestion - que les lois et règlements européens, pour ce qui concerne la PSBM, tiennent compte de cette crise et que les exigences à l'égard des éleveurs soient modulées en fonction de l'évolution du marché.

S'agissant de l'opération concernant les bovins de plus de trente mois, cela a sûrement été, comme vous l'avez dit, la pagaille, l'impréparation, l'échec, la désorganisation, bref, tout ce que vous voulez... Quoi qu'il en soit, j'entends tenir l'Assemblée informée de l'évolution de ce programme. Je vous avais dit la semaine dernière que 14 357 tests avaient été réalisés la première semaine. La deuxième semaine, nous sommes passés à 29 010 tests.

En d'autres termes, nous avons, dès janvier, dépassé, et largement, l'objectif fixé par le Premier ministre de réaliser 20 000 tests par semaine avant la fin du mois de janvier. En y ajoutant l'achat-destruction, qui vient en complément, de plus de 12 000 bovins la semaine dernière, nous avons traité au total 41 000 bovins la semaine dernière.

Nous sommes en train de résoudre le problème posé par la crise. Certes, nous n'en avons pas encore fini et je ne dis pas que la crise est derrière nous. Nous avons eu ce matin une table ronde avec l'ensemble de l'interprofession pour traiter les dernières difficultés. Compte tenu de la reprise de la consommation, encore timide certes, mais qui se confirme de jour en jour, compte tenu de la reprise des cours, qui elle aussi se confirme, je crois que, à défaut d'être sortis de la crise, nous sommes désormais entrés dans un scénario de sortie de crise. Et je suis sûr, monsieur Auclair, que là où vous êtes, vous nous aiderez, pour le bien des éleveurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

LICENCIEMENTS DANS LE GROUPE DANONE

M. le président.

La parole est à M. Gilbert Biessy, pour le groupe communiste.

M. Gilbert Biessy.

Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Permettez-moi, avant de poser ma question, d'avoir une pensée particulière pour le peuple du Salvador, qui vient de connaître une terrible tragédie venue s'ajouter aux violences, aux guerres et catastrophes naturelles qu'il a dû subir ces dernières années. La France a déjà annoncé un certain nombre d'initiatives et je ne peux qu'appeler à la plus large solidarité. (Applaudissements sur tous les bancs.)

Madame la ministre, Danone vient d'annoncer son i ntention de supprimer 3 000 emplois en Europe, dont 1 700 en France. Sept usines seraient fermées dans notre pays alors que le groupe a annoncé un résultat net de 4,5 milliards de francs en 1999 et que les profits ont encore progressé de 3,2 % au premier semestre 2000. Le seul argument avancé pour justifier la restructuration annoncée est la marge de rentabilité de 7,9 % de la branche biscuits, jugée insuffisante. Renault à Vilvorde, Michelin dans ses usines de pneumatiques, Danone désormais, mais encore Bull ou Dassault et combien d'autres ! Pour le patronat, la refondation sociale rime avec l'impératif absolu donné à la croissance des revenus financiers, pourtant déjà très florissants.

Une nouvelle fois, la démonstration est faite que ce n'est pas en protégeant l'essor des profits que se construira le plein emploi, mais en en orientant une bonne part vers les salaires, la formation et l'investissement.

Les dispositions adoptées dans le cadre de la loi de modernisation sociale sont encore insuffisantes face à la détermination d'une multinationale d'augmenter à tout prix ses profits. Nous proposons, vous le savez, une nouvelle définition juridique du licenciement économique et en premier lieu l'instauration d'un moratoire sur les suppressions d'emplois dans ces entreprises.

Madame la ministre, la crédibilité du Gouvernement et de l'action de la gauche plurielle pour l'emploi, qui jusqu'à ce jour a produit des effets positifs, est en jeu.

Quelles dispositions le Gouvernement entend-il prendre pour relever ce défi ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur quelques bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur le député, j'ai comme vous été très surprise d'apprendre, par la presse, les projets de restructuration de la branche biscuits du groupe Danone. Et, comme vous tous, je partage l'émotion et l'inquiétude des salariés.

J'observe qu'il faut d'abord attendre la réunion du comité d'entreprise européen de Danone, convoqué pour demain, et celle du comité central pour connaître précisément les intentions du groupe ainsi que leurs répercussions sur des unités situées en France. La première urgence, c'est que l'entreprise s'explique et fasse connaître la réalité de ses projets.

Danone est une grande entreprise française. Elle a des responsabilités vis-à-vis de ses salariés comme des territoires sur lesquels elle est implantée. Je sais que les élus des zones concernées par l'éventuelle restructuration de Danone sont nombreux sur les bancs de votre assemblée ; les responsabilités du groupe sont tout à la fois d'ordre légal et d'ordre citoyen.

Vous avez évoqué, monsieur le député, le projet de loi de modernisation sociale que l'Assemblée a voté la semaine dernière. Je rappelle que ce texte, voulu par le Gouvernement pour éviter que ne se répètent des restructurations brutales comme celles que nous avons connues à Michelin et à Renault-Vilvorde, prévoit que les licenciements soient différés et évités autant que possible. Il c ontient des dispositions précises qui imposent à l'employeur une information du comité d'entreprise préalablement à toute annonce publique portant sur des projets ayant des répercussions importantes sur l'emploi. Il précise également qu'aucune procédure de licenciement pour motif économique ne peut être lancée avant que l'entreprise ait négocié les 35 heures - ce que Danone a fait - ou supprimé tout recours structurel aux heures supplémentaires. Ce texte accroît enfin les obligations des entreprises en matière de reclassement des salariés.

Ces mesures nouvelles, il serait évidemment souhaitable de les voir appliquer chez Danone, même si le texte voté en première lecture par l'Assemblée nationale n'est pas encore définitivement adopté par le Parlement. Dans l'attente du vote définitif de ce texte, sur lequel l'urgence a été déclarée par le Gouvernement, sachez que je serai très attentive à l'évolution de la situation et que je veillerai à ce que le groupe Danone, qui dispose de moyens importants, utilise toutes les possibilités pour réduire au


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 JANVIER 2001

minimum les licenciements et reclasser les salariés dont le poste serait supprimé. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Lucien Degauchy.

Baratin ! AVENIR DES RETRAITES DES FONCTIONNAIRES

M. le président.

La parole est à M. Francis Delattre, pour le groupe UDF.

M. Francis Delattre.

Ma question s'adresse à M. le Premier ministre, et je la pose au nom des trois groupes de l'opposition. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Didier Boulaud.

Où avez-vous mis Tiberi et le RPF ?

M. Francis Delattre.

Depuis 1981, les gouvernements socialistes successifs ont assuré la gestion de notre pays pendant quinze ans. C'est dire si, sur nombre de dossiers lourds, leur responsabilité est incontestable.

C ette remarque vaut pour la dette, qui atteint 6 000 milliards de francs et continue à filer ; c'est une façon de transférer sur les générations futures le coût d'une générosité pratiquée à crédit.

Le financement des 35 heures illustre bien cette méthode.

M. Edouard Landrain.

Tout à fait !

M. Francis Delattre.

Plus grave encore, s'agissant du financement des retraites, nous allons de commission en table ronde et en observatoire.

En 1981, mes chers collègues, quand vous êtes arrivés aux affaires, quatre actifs finançaient un retraité. En 2010-2020, un actif financera un retraité pour une durée de vingt-cinq ans. Il n'est pas besoin de nouvelles tables rondes ni d'observatoires pour savoir que des réformes structurelles importantes sont aujourd'hui indispensables.

Or, depuis quatre ans, vous faites du surplace. Sauf, ô surprise, dans un document intitulé Programmation pluriannuelle des finances publiques de la France, où M. Fabius indique à la commission des finances que, afin de garantir les retraites des fonctionnaires, le Gouvernement leur a proposé de conclure un pacte sur les retraites qui comporterait l'alignement progressif de la durée de leurs cotisations sur celle des salariés du secteur privé.

Nous sommes d'accord avec ce qui serait une mesure d'équité pour l'ensemble des Français mais cette proposition, qui pourrait constituer un des moyens de sauver la retraite par répartition, est-elle une base de travail pour le Gouvernement ou simplement une intuition du ministre des finances ?

Répondre clairement à cette question claire signifierait, monsieur le Premier ministre, que vous souhaitez aujourd'hui gérer non plus les échéances électorales, mais un dossier dans l'intérêt général des Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Monsieur le député, je vous remercie de votre question.

(Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la Démocratie française-Alliance.)

Sur les retraites, le Gouvernement, par la bouche de M. le Premier ministre, ou de Mme Guigou, a eu l'occasion de s'exprimer à plusieurs reprises.

M. Bernard Accoyer.

Courage, fuyons ! M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Nous croyons à la retraite par répartition, et la meilleure façon de prouver cette conviction, c'est de faire d'abord, en sorte comme nous l'avons fait, que le fonds de réserve pour les retraites soit abondé.

M. Bernard Accoyer.

Imposture ! M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

C'est bien le cas : il sera abondé à hauteur de 100 milliards, et nous avons l'intention de monter en régime progressivement.

Par ailleurs, différentes instances de travail ont été réunies et une commission, sous la direction d'une personnalité extrêmement compétente,...

M. Bernard Accoyer.

Vous voulez parler de M. Charpin ! M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

... est en train d'envisager les différentes solutions possibles.

La formulation employée dans le document auquel vous avez fait allusion, monsieur Delattre - et qui engage, bien sûr, tout le Gouvernement - répond exactement celle que le Premier ministre a utilisée il y a quelques mois pour indiquer quelles étaient les pistes de travail du Gouvernement.

A cette occasion, M. Jospin avait dit dans quel esprit il convenait de faire des propositions concernant les fonctionnaires. Les choses ne sont donc pas modifiées. Nous continuons à affirmer que garantir les retraites des Français est, bien évidemment, essentiel.

M. Bernard Accoyer.

Et alors ? M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

L'une des façons de les garantir est de mettre les affaires publiques en bon ordre, ce qui n'était pas le cas il y a quelques années. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Monsieur le député, si votre question signifie que vous êtes attaché à l'équilibre des retraites, je pense qu'elle est très bienvenue, mais si elle ne devait être qu'un rideau de fumée destiné à dissimuler les attaques dirigées par ailleurs contre les retraites, vous seriez alors l'objet d'un retour à l'envoyeur. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

DROITS DE L'HOMME EN IRAN

M. le président.

La parole est à Mme Chantal RobinRodrigo, pour le groupe RCV.

Mme Chantal Robin-Rodrigo.

Monsieur le Premier ministre, depuis de nombreuses années, la situation des droits de l'homme en Iran inquiète sérieusement la c ommunauté internationale. Le dernier rapport des Nations unies confirme la persistance, et la gravité de violations systématiques et flagrantes par les autorités en place. Il souligne le nombre élevé d'exécutions sommaires, et la pratique de la torture, les atteintes à la liberté de la presse et des associations, les discriminations et les persécutions dont sont toujours l'objet les femmes, en particulier, et les minorités religieuses.

Force est de constater que, malgré la volonté de réforme affichée par le président Khatami, la situation en Iran pose de nombreuses questions. Certes, ce régime a été condamné, à de nombreuses reprises, par les Nations unies, mais ces résolutions restent lettre morte.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 JANVIER 2001

Nous ne pouvons tolérer que les victimes de ce régime sombrent dans l'oubli au nom d'intérêts politiques et économiques.

La France peut-elle accepter une telle situation ? Monsieur le Premier ministre, quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre, en liaison avec ses partenaires européens, pour faire pression sur le gouvernement iranien afin que cessent les atteintes aux droits des personnes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre délégué chargé des affaires européennes.

M. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes.

Madame la députée, depuis son élection, en mai 1997, le président Khatami a engagé des réformes politiques afin d'établir l'Etat de droit en Iran, avec des effets sensibles. Aux élections législatives de 2000, les électeurs, notamment les jeunes, ont apporté un soutien massif aux candidats réformateurs, confirmant ainsi leur volonté de changement.

La nouvelle majorité parlementaire a inscrit le développement des libertés dans son programme, qui suscite de fortes attentes dans la société iranienne.

Toutefois, vous avez raison de souligner que la situation des droits de l'homme en Iran demeure préoccupante. Elle s'est même dégradée récemment, du fait des luttes internes entre les réformateurs et ceux qui s'opposent au changement. Le pouvoir judiciaire a suspendu plus de vingt titres de presse depuis avril 2000 et multiplie les procédures contre les intellectuels et les militants politiques. Des manifestations ont été sévèrement réprimées.

La France, vous le savez, demeure très vigilante sur la question des droits de l'homme en Iran. Les autorités françaises ont souligné l'importance qu'elles attachent à ce problème lors de leurs contacts avec les autorités iraniennes dans le cadre bilatéral.

Par ailleurs, dans le cadre de la commission des droits de l'homme des Nations unies, l'Union européenne a présenté, l'année passée, une résolution sur la situation en Iran.

Enfin, à l'occasion de l'assemblée générale des Nations unies, la France, au titre de la présidence de l'Union européenne, a présenté une résolution sur les droits de l'homme en Iran, qui a été adoptée en décembre 2000.

Toutes nos initiatives montrent clairement aux autorités iraniennes tout le prix que la France et les pays de l'Union attachent à la question des droits de l'homme.

J'ajoute, car c'est d'actualité, que, suite aux condamnations à de lourdes peines de prison infligées à des intellectuels ayant participé à une conférence sur l'Iran à Berlin, une déclaration de l'Union européenne est en ce moment même en cours d'élaboration et pourrait être rendue publique dans les prochaines heures. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

MISE EN CAUSE D'UN JUGE D'INSTRUCTION

M. le président.

La parole est à M. François d'Aubert, pour le groupe DL.

M. François d'Aubert.

Madame la garde des sceaux, la semaine dernière, au terme de sa détention préventive, M. Jean-Christophe Mitterrand, relayé par des membres de sa famille, a porté des attaques et des injures d'une extrême gravité contre un magistrat juge d'instruction dans une affaire le concernant.

Je cite : « un juge qui sue la haine avant d'ouvrir la bouche », « qui fait preuve d'une hostilité poisseuse »,

« avec une véritable expression de haine ». Sans parler de la caution de 5 millions de francs, qualifiée de « rançon », comme si M. Mitterrand était l'otage de la justice française ! Ces attaques grossières, ces insultes suscitent l'indignation de la magistrature et de tous ceux pour lesquels le respect de l'institution judiciaire et des magistrats est un des piliers de la justice et de la démocratie.

Délibérés, concertés en famille, médiatisés, les propos de M. Mitterrand semblent, hélas, correspondre à un véritable système de défense visant d'abord à faire pression sur les magistrats pour obtenir l'annulation partielle ou totale de la procédure, voire le dessaisissement du juge. Ils visent aussi à cacher l'essentiel, à savoir l'implication de M. Jean-Christophe Mitterrand dans une affaire de vente d'armes qui a alimenté une guerre civile en Angola, une guerre meurtrière qui a fait des centaines de milliers de morts et qui a abouti - c'est l'aspect le plus sordide de l'affaire - au dépôt de 13 millions de francs sur un compte en Suisse.

Tenu à l'obligation de réserve par le statut de la magistrature, un juge attaqué et injurié n'a pas les moyens juridiques de se défendre. Or l'article 2 du statut de la magistrature fait un devoir juridique et moral d'assurer la protection des magistrats et de défendre leur honneur. Et c'est à vous, madame la garde des sceaux, qu'il incombe de le faire, en prenant l'initiative de demander au parquet général d'engager des poursuites contre les auteurs de ces attaques.

M. François Goulard.

Très bien !

M. François d'Aubert.

Vous le savez, cela est demandé par des magistrats et par d'autres voix qui se sont élevées depuis plusieurs jours.

Qu'attendez-vous pour le faire ? Ne laissez pas interpréter votre silence ou votre éventuelle passivité comme une sorte de quitus donné aux déclarations injurieuses et déplacées de la famille Mitterrand, ou encore comme une volonté de lui accorder une protection particulière, alors même que pareils propos contre la justice de notre pays et contre l'indépendance et l'intégrité d'un magistrat, tenus par n'importe quel autre citoyen, seraient immédiatement poursuivis. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance.)

M. le président.

La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux, ministre de la justice.

Monsieur le député, vous avez fait référence à des propos qui ont été repris par la presse ou la télévision. J'en ai eu connaissance mais je voudrais, pour rétablir la vérité, rappeler que de nombreuses personnes, dont certaines sont d'ailleurs présentes sur ces bancs, ont prononcé des phrases dures à cet égard. Il n'y a donc pas eu un seul fait, il y en a eu beaucoup.

J'ai choisi de ne pas prendre le même chemin,...

M. Jean-Louis Debré.

Tout le monde n'est pas garde des sceaux !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 JANVIER 2001

Mme la garde des sceaux.

... c'est-à-dire d'aller vers le micro ou le stylo d'un journaliste et d'entrer dans une médiatisation que je juge excessive et qui, dans cette affaire comme dans d'autres, nuit à la sérénité et à l'apaisement nécessaire.

Mme Yvette Roudy.

Voilà qui est sage !

Mme la garde des sceaux.

Une autre raison pour laquelle je ne vous suivrai pas, monsieur le député,...

M. José Rossi.

C'est pourtant de votre responsabilité !

Mme la garde des sceaux.

... est que vous n'évoquez qu'un aspect, que vous ne prenez pas en compte l'ensemble du dossier. Vous savez - et je pense que tout le monde s'en réjouit - que l'indépendance de la justice (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants),...

Mme Odette Grzegrzulka.

Ils ne savent pas ce que c'est !

Mme la garde des sceaux.

... si elle n'est pas encore dans le droit - et nous le regrettons - existe déjà dans les faits et dans l'esprit des citoyens.

M. Patrick Devedjian.

Elle est dans le droit !

Mme la garde des sceaux.

Pour éviter l'expression médiatique, j'ai choisi de recevoir les magistrats instructeurs de notre pays par le biais de leurs organes représentatifs - une association en l'occurrence - pour discuter avec eux de ce qu'il convenait de faire devant l'hypermédiatisation de certaines affaires.

Les magistrats font un travail difficile,...

M. Yves Fromion.

Ça, on le sait !

Mme la garde des sceaux.

... ils rendent la justice au nom du peuple français,...

M. Lucien Degauchy.

Baratin !

Mme la garde des sceaux.

... ils sont là pour défendre la loi commune. Et je pense qu'ils ont besoin non seulement de respect mais aussi de sérénité. C'est pourquoi le garde des sceaux doit éviter, par des propos repris dans la presse...

M. Patrick Devedjian.

Ce n'est pas la question !

Mme la garde des sceaux.

... que cette ambiance générale ne déstabilise l'ensemble des magistrats de notre pays.

C'est pourquoi je protégerai les magistrats avec force ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Et devant vous, ici, au Parlement, où je savais devoir répondre à cette question, je répète que je protège les magistrats, que je condamne tout propos inacceptable à leur encontre et que, avec eux, je m'efforcerai de redonner à la justice le climat apaisé et serein qui convient. (Exclamations sur les mêmes bancs.)

Par ailleurs, je vous rappelle, monsieur le député, que de telles affaires ne représentent que 0,01 % de l'activité de notre justice. Les citoyens nous demandent aussi d'assurer la justice de proximité, la justice quotidienne ; magistrats, avocats, greffiers et auxiliaires de justice assurent ensemble une mission plus large.

Gardons-nous, par une polémique politicienne (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), de déstabiliser la justice, qui est d'abord et avant tout le garant de la démocratie. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Patrick Devedjian.

Vous êtes partiale !

SOCIÉTÉ DE L'INFORMATION

M. le président.

La parole est à M. Patrick Bloche, pour le groupe socialiste.

M. Patrick Bloche.

Ma question s'adresse à Mme la ministre de la culture et de la communication.

Madame la ministre, en abordant la question essentielle de la rémunération des auteurs et des créateurs dont les oeuvres sont disponibles sur Internet, vous avez voulu rappeler une évidence :...

M. Christian Estrosi.

C'est du racket !

M. Patrick Bloche.

... sans contenus, il n'y a pas de société de l'information.

Alors que la seule décision prise aujourd'hui concerne les supports vierges amovibles, de type CD ou DVD, et en aucune façon les mémoires intégrées, comme celle des ordinateurs et des terminaux, il apparaît sans doute souhaitable de préciser les conditions de répartition et d'utilisation de cette rémunération, qui va intégralement aux auteurs, aux ayants droit et, pour une part non négligeable, au soutien à la création. Parler d'impôt nouveau à cet égard relève de la contre-information.

M. Patrick Devedjian.

C'est un impôt déguisé !

M. Patrick Bloche.

Le Parlement a d'ailleurs pris ses responsabilités en inscrivant dans la loi du 1er août 2000 - ce n'est pas si vieux - les conditions d'une plus grande transparence dans la gestion des sommes ainsi collectées.

En conséquence, pouvez-vous, madame la ministre, nous indiquer les voies qui, selon vous, permettront de trouver le juste équilibre entre des préoccupations parfois contradictoires, qui prennent en compte, tout d'abord, l'absolue nécessité du maintien de la copie privée, dont on ne saurait oublier qu'elle est au coeur des pratiques culturelles et de la transmission des savoirs, ensuite, la juste et transparente rémunération des créateurs de contenus et des ayants droit, et, enfin, la poursuite d'un objectif majeur défini par le Premier ministre dès 1997, à savoir la démocratisation de l'accès à l'Internet et de son usage dans notre pays, notamment par une baisse constante des coûts d'utilisation. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de la culture et de la communication.

Mme Catherine Tasca, ministre de la culture et de la communication.

Monsieur le député, je vous remercie de cette question (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), qui me permettra, je l'espère, d'apaiser les inquiétudes, du moins celles qui sont sincères. C'est en effet une bonne vieille tactique que de crier « au feu ! » avant qu'il n'y ait un incendie, l'ampleur des réactions donne la mesure des passions que suscitent les nouvelles technologies, notamment dans le monde de l'Internet, et aussi des appétits économiques qui s'y attachent.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 JANVIER 2001

Je souhaite ramener le débat à sa réalité.

M. Jean-Luc Préel.

Encore un impôt !

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Le Gouvernement ne taxe pas les ordinateurs et n'a pas l'intention de le faire. D'ailleurs, les décisions qui viennent d'être prises par la commission ne concernent pas les ordinateurs, elle a statué sur les supports numériques amovibles, CD et DVD vierges, en rapprochant efficacement des points de vue souvent fort différents. La décision qui a été publiée au Journal officiel ne concerne que ces supports et elle est légitime dans la logique de la loi de 1985.

Mais vous abordez aussi, monsieur le député, à juste titre, la question essentielle de l'économie des contenus dans l'univers numérique. Il ne peut y avoir, dans ce pays comme ailleurs, de création durable et de qualité sans garantir une rémunération juste de l'ensemble des ayants droit.

M. Jean-Claude Lefort Très bien !

Mme la ministre de la culture et de la communication.

La rémunération pour copie privé, en particulier dans l'univers numérique, est l'un des éléments de cette dynamique.

En quinze ans, la loi de 1985 en faveur de la création a fait preuve de son efficacité. Toutes les professions concernées le soulignent d'ailleurs aujourd'hui, et je m'indigne qu'elles puissent être considérées par certains ici comme une petite minorité d'obligés et d'assistés. Ce mépris pour nos auteurs n'honore pas ceux qui tiennent de tels discours.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Christian Jacob.

N'importe quoi !

Mme la ministre de la culture et de la communication.

De surcroît, je pense vraiment que, dans le nouvel environnement numérique, opposer culture et industrie en négligeant la rémunération des contenus est une aberration pour l'économie même de la société de l'information. Tous s'accordent sur l'importance vitale des contenus.

En conséquence, nous serons extrêmement vigilants dans l'examen des propositions qui émaneront de la commission. Je le répète : nous n'envisageons pas de taxer les ordinateurs, qui ne sont pas le support exclusif de la copie, et tout le monde sera attentif aux conséquences économiques, industrielles et sociétales des décisions.

Vous avez évoqué la nécessaire transparence. Celle-ci relèvera de la commission de contrôle des sociétés d'auteurs, comme le Parlement en a décidé au mois d'août 2000. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

TAXE SUR LES DISQUES DURS

M. le président.

Pour le groupe RPR, la parole est à M. Olivier de Chazeaux, qui est sorti des embouteillages !...

M. Olivier de Chazeaux.

Absolument, monsieur le président, et cela me permet de répondre avec un grand intérêt à Mme Tasca, en soulignant une fois de plus l'incohérence du Gouvernement en la matière.

Madame la ministre, la réponse que vous venez de faire à l'orateur précédent est surprenante.

M. Jean-Pierre Soisson.

Tout à fait !

M. Olivier de Chazeaux.

Elle est en contradiction avec vos propros parus dans Le Figaro, ...

Mme Odette Grzegrzulka.

Ce n'est pas le Journal officiel !

M. Olivier de Chazeaux.

... où vous avez expressément indiqué que vous vouliez créer une nouvelle taxe sur les ordinateurs ou, plus exactement, sur les disques durs.

Ainsi, le Gouvernement avait l'intention de créer une vingt-deuxième taxe en trois ans.

M. Jean-Claude Lenoir.

Un impôt supplémentaire !

M. Christian Jacob.

Scandaleux !

M. Olivier de Chazeaux.

Le ministre de l'économie et des finances, aujourd'hui même, dans une dépêche de l'AFP, a indiqué qu'il était opposé à cete déclaration.

Ma question, monsieur le Premier ministre, s'adresse donc à vous car il est temps que vous remettiez de l'ordre et que vous mettiez un peu de cohérence dans la polit ique gouvernementale, notamment en ce domaine.

Comme l'a très bien rappelé notre collègue Patrick Bloche, nous devons tous faire en sorte que la France entre de manière efficace dans la société de l'information.

Nous avons tous conscience, bien évidemment, qu'il convient de protéger les droits d'auteur. Nous avons pris bonne note des déclarations à ce sujet, et notamment sur les supports, qu'a évoqués Mme la ministre, mais cette disposition n'est pas suffisante et ne va pas dans le bon sens.

Monsieur le Premier ministre, je ne crois pas que nous puissions toujours apporter une solution à un problème en créanr une surtaxe, bien au contraire.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean-Pierre Soisson.

Il a raison !

M. Jean-Claude Lefort.

Il n'y connaît rien !

M. Olivier de Chazeaux.

C'est surtout le prix du disque qui est à l'origine du piratage et des copies illicites et dans ce prix figure bien évidemment au premier rang la TVA de 19,6 %.

M. Jean-Claude Lefort.

C'est l'Europe !

M. Olivier de Chazeaux.

Plutôt que d'envisager une nouvelle surtaxe, le Gouvernement serait mieux inspiré de baisser le taux de TVA de 19,6 % à 5,5 %, comme pour les livres ou les oeuvres cinématographiques.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Ainsi, vous concourrez effectivement au développement de la société de l'information.

Monsieur le Premier ministre, il est temps que vous nous apportiez un éclairage sur cette question et j'espère que, par votre réponse, vous ferez émerger l'économie de la culture et non la culture fiscale que vous affectionnez tant. (Applaudissements sur les nombreux bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de la culture et de la communication. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 JANVIER 2001

M. le président.

Mes chers collègues !

Mme Catherine Tasca, ministre de la culture et de la communication.

Je veux souligner, monsieur de Chazeaux, sans répéter ce que j'ai dit à M. Bloche, qu'il y a une volonté de confusion qui confine vraiment à la désinformation. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Le Gouvernement, je le répète, n'a pas créé de taxe sur les disques durs, et il n'a pas l'intention de le faire. Il a simplement observé la juste application de la loi de 1985, qui confie à une commission indépendante, où siègent toutes les professions concernées, y compris les industriels, le soin d'actualiser une tarification qui doit être revue à la lumière du développement du numérique.

Vous vous acharnez à présenter cela comme une taxe, alors qu'il s'agit de la légitime rémunération des ayants droit,...

M. Pierre Lellouche.

Baissez la TVA !

Mme la ministre de la culture et de la communication.

... à laquelle nous sommes attachés mais qui semble être de bien peu de poids à vos yeux. (Exclamations sur plu-s ieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Les décisions de la commission tendent à instaurer une rémunération supplémentaire sur les supports amovibles.

Rien n'a été fixé, décidé, aménagé en ce qui concerne les supports intégrés, et notamment les disques durs des ordinateurs. Je fais pour ma part confiance à la commission compétente pour aboutir à des propositions raisonnables. Je l'ai dit tout à l'heure, l'ordinateur sert à bien d'autres choses qu'à la copie.

Puisque vous insistez sur la taxation, je rappellerai deux éléments de force et de cohérence de la politique du Gouvernement.

Nous sommes résolument engagés dans la baisse des taxes (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) et nous ne créons pas de taxe ; c'est votre discours qui s'efforce d'infuser cette conviction dans l'opinion.

J'ajoute que, depuis 1997, alors que nous avions pris un retard considérable, Lionel Jospin a engagé une action concrète (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) et déterminante pour faire entrer rapidement la France dans la société de l'information.

La protection des droits des auteurs fait intimement partie de notre politique d'entrée moderne, efficace et respectueuse de la culture dans la société de l'information, et vous ne nous en détournerez pas.

M. Pierre Lellouche.

Rendez-nous Lang !

Mme la ministre de la culture et de la communication.

Il est vraiment dommage que vous choisissiez à cette occasion d'attiser des peurs qui sont totalement infondées ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupede l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

GROUPE DANONE

M. le président.

La parole est à Mme Odette Grzegrzulka, pour le groupe socialiste. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

Mme Odette Grzegrzulka.

Il y a moins d'une semaine, la presse annonçait d'importants projets de restructuration de la filière biscuits de l'entreprise Danone qui se tradui-r aient par le licenciement de 1 700 salariés dans l'ensemble du pays.

M. le président.

Pardon de vous interrompre madame Grzegrzulka, mais j'ai commis une erreur. J'aurais dû donner la parole à M. Plagnol ! Je vous prie de bien vouloir m'excuser, monsieur Plagnol, j'appellerai votre question immédiatement après. J'ai été surpris par ce nouveau système, par cette expérimentation. J'avais tellement hâte d'entendre Mme Grzegrzulka !

Mme Odette Grzegrzulka.

Je vous comprends !

M. le président.

Poursuivez, ma chère collègue.

Mme Odette Grzegrzulka.

Tout le monde a compris que je parlais du douloureux problème que constituerait le plan de licenciement de 1 700 salariés de l'entreprise Danone en France, si celui-ci était avéré comme la presse l'a annoncé la semaine dernière.

C'est pourquoi je vous pose ma question, monsieur le Premier ministre, au nom de tous mes collègues et amis dont les départements sont concernés, en particulier le Doubs, les Ardennes et le Pas-de-Calais.

M. Julien Dray.

Et l'Essonne !

M me Odette Grzegrzulka.

Dans l'Aisne, plus de 500 emplois seraient supprimés dans deux sites : Jussy et Château-Thierry.

Cette annonce surprenante, brutale,...

M. Lucien Degauchy.

Due aux 35 heures !

Mme Odette Grzegrzulka.

... est d'autant plus choquante qu'elle concerne une entreprise extrêmement prospère, dont les bénéfices sont de 11 %. Pour enrichir les actionnaires, pour augmenter encore plus les dividendes de leur capital, les salariés devront-ils se résigner au cauchemar annoncé ?

M. Lucien Degauchy.

Le résultat des 35 heures commence à se faire sentir !

Mme Odette Grzegrzulka.

Nous ne pouvons accepter que se renouvelle le scandale Michelin-Wolber de l'an dernier ! Comment les milliers de salariés de Danone pourraient-ils accepter un plan de licenciement alors qu'ils viennent d'être félicités par leur patron pour le bon travail effectué ? Ils n'accepteront jamais d'être jetés comme le papier d'emballage des biscuits qu'ils fabriquent ! Ils nous regardent aujourd'hui, ils comptent sur nous pour apaiser leur intense émotion, leur légitime colère.

Monsieur le Premier ministre, quels moyens envisagezvous de mettre en oeuvre pour empêcher cette logique financière de s'imposer, pour faire respecter par les dirigeants de Danone la dimension humaine et sociale et, surtout, pour préserver les milliers d'emplois et les outils de production extrêmement performants qui font la fierté de notre pays ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche, pour une réponse brève.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 JANVIER 2001

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche.

Je vais essayer d'être le plus bref possible, monsieur le président, encore que la question de Mme Grzegrzulka mérite de longs développements. Mme Guigou a déjà répondu au nom du Gouvernement sur ce sujet tout à l'heure, et je ne peux pas dire mieux. J'ajouterai simplement deux précisions, madame la députée.

La semaine dernière, après la parution de cet article, le 11 janvier, le P-DG de Danone a pris contact avec moi pour en démentir le contenu. Je lui ai dit que ce n'était pas à moi mais à lui de le démentir auprès de l'opinion et des salariés.

Du point de vue de l'opinion, un démenti paraît aujourd'hui dans le journal qui avait révélé l'information la semaine dernière. Quant aux salariés, je pense que le groupe va intervenir à ce sujet auprès du comité de groupe qui se réunit à Genève ou à Lausanne aujourd'hui, ou auprès du comité central d'entreprise qui se réunit à Evry le 18 janvier.

Dès l'annonce de cet article, vu l'émotion provoquée dans plusieurs circonscriptions, et en particulier dans la vôtre, qui est touchée dans les unités de Jussy et de Château-Thierry, j'ai mis en place, aussi bien dans mon cabinet que dans mes services, une cellule de suivi des problèmes au jour le jour, que vous connaissez puisque vous avez travaillé avec elle.

Je puis vous assurer que, tant au ministère de l'emploi et de la solidarité qu'au ministère de l'agriculture et de la pêche, nous allons continuer à suivre très attentivement ce dossier de sorte que les obligations légales et, au-delà, les obligations citoyennes de ce groupe soient scrupuleusement respectées, et que les droits et les intérêts des travailleurs soient scrupuleusement défendus.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, et sur quelques bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Jean-Pierre Soisson.

Très bien ! AUGMENTATION DE LA DÉLINQUANCE

M. le président.

La parole est à M. Henri Plagnol, pour le groupe UDF.

M. Henri Plagnol.

Ma question s'adresse à Mme la ministre de la justice.

Madame la ministre, vous nous avez déclaré tout à l'heure que vous souhaitiez concentrer l'essentiel de votre action sur les 99,9 % de dossiers qui relèvent de la justice du quotidien. Je voudrais précisément vous demander comment vous comptez faire face aux inquiétudes grandissantes exprimées par les magistrats de notre pays, qui estiment qu'ils n'ont plus les moyens de remplir leur mission dans des conditions correctes.

Je prendrais à titre d'exemple les propos tenus par le procureur de la République du Val-de-Marne à l'occasion de l'audience solennelle de rentrée du tribunal de Créteil.

Il a d'abord contredit les propos lénifiants de votre collègue le ministre de l'intérieur en soulignant une augmentation spectaculaire de la délinquance (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) : il n'est plus possible a ujourd'hui de transmettre des images minimalistes lorsque la délinquance globale augmente de 12 % en un an et lorsque celle des vols avec violence progresse de 40 % ! Il a terminé ses propos par un cri d'alarme auquel, je crois, aucun élu, quelle que soit son appartenance politique, ne peut rester indifférent. Comment rester insensible devant cette multiplication des agressions violentes sur la voie publique ou à domicile, ces meurtres pour quelques francs, ces coups de couteau gratuits, ces agressions sexuelles ? Les propos du procureur ont été partagés par le président du tribunal de grande instance, le président du tribunal pour enfants et l'ensemble de ses collègues magistrats, et des propos identiques sont tenus dans tous les départements de France au fil des audiences solennelles de rentrée. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Tous les magistrats, quelle que soit leur appartenance syndicale, défilent avec des pancartes, parlant d'une justice sans moyens...

M. Francis Hammel.

Parlons-en !

M. Henri Plagnol.

... et bafouée, d'une justice à la dérive, disant qu'ils en ont assez des réformes médiatiques, inapplicables sur le terrain faute de moyens.

(« Très bien » sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Mes chers collègues, je vous en prie !

M. Jean-Paul Charié.

C'est très grave !

M. Henri Plagnol.

Ma question est simple, madame la ministre : face à ce malaise et même à ce découragement,...

M. Jean-Paul Charié.

Ce désarroi !

M. Henri Plagnol.

... grandissant chez les magistrats chargés précisément d'appliquer la justice au quotidien, qui sont las de voir adopter des réformes médiatiquement correctes mais inapplicables sur le terrain faute de moyens, comment comptez-vous, en relation avec le ministre de l'intérieur, remobiliser, en tenant compte des réalités du terrain, tous les hommes et les femmes chargés de faire appliquer la justice dans notre pays ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean-Paul Charié.

Il faut des moyens !

M. le président.

La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux, ministre de la justice.

Monsieur le député, je ne crois pas à la violence des mots pour traiter la violence d'une société.

(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste) , et je pense que nous devons aborder ce problème sereinement.

M. Maurice Leroy.

Et les moyens ?

Mme la garde des sceaux.

Les magistrats ont davantage de moyens, ils le reconnaissent, et vous allez m'écouter, sans violence, ce qui sera plus intéressant.

Environ 730 postes budgétaires ont été créés, que vous avez d'ailleurs votés, et c'est bien,...

M. Jean-Paul Charié.

Pour combler les trous !

Mme la garde des sceaux.

... et 600 magistrats sont d'ores et déjà arrivés sur le terrain, dont 345 vont répondre aux besoins de la nouvelle loi. Il y a donc une marge pour un meilleur fonctionnement de la justice. Le Premier ministre, Mme Guigou et moi-même sommes


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intimement convaincus que l'effort engagé depuis 1997 doit durer bien au-delà et qu'il faudra encore 600 magistrats supplémentaires sur le terrain dans les trois ans qui viennent pour avoir un fonctionnement de la justice permettant de meilleures relations entre le monde de la justice, le monde de la police et le monde de la gendarmerie. Il est vrai que, nos structures ayant besoin de moyens, nous n'avons pas pu favoriser leurs relations, comme nous l'aurions souhaité, ainsi que les ministres de l'intérieur successifs et le ministre de la défense, pour diminuer le nombre d'affaires classées parce que leurs auteurs sont inconnus.

Nous avons donc un travail collectif à faire. Comme je le disais aux magistrats, aux policiers et aux gendarmes que je recevais hier soir pour les voeux du ministère de la justice, de tels moyens ne seront pas suffisants, même si, l'an dernier, 10 000 dossiers de plus environ ont été

« déstockés », ce qui montre que les moyens supplémentaires ont déjà eu un effet, et, grâce à la nouvelle promotion des greffiers, nous allons pouvoir engager la j uridictionnalisation de l'application des peines, par exemple. Eponger une absence totale de promotion de greffiers en 1997 - 200 personnes en moins - ce n'est pas simple pour moi, comme cela n'a pas été simple pour Elisabeth Guigou ! En dépit de tous ces efforts, nous aurons besoin du concours de tous sur le terrain, nous avons besoin d'un langage de justice dans ce pays,...

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.

Mitterrand !

Mme la garde des sceaux.

... d'un langage de sécurité et de liberté, passant par un meilleur travail, que Daniel Vaillant, Alain Richard et moi-même mettons en place, mais aussi par l'adhésion de tous à un système d'équilibre et de sérénité.

Merci d'avoir posé cette question pour que nous puissions répéter ces précisions. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

ÉVOLUTION DE LA CRIMINALITÉ À PARIS

M. le président.

La parole est à Mme Nicole Catala, à qui je demande d'être brève, si possible, car il ne reste que deux minutes quarante-cinq au groupe RPR.

Mme Nicole Catala.

Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.

Monsieur le ministre, votre vérité n'est pas la nôtre ou, plus exactement, les chiffres relatifs à la criminalité dans la capitale qui ont été publiés récemment ne correspondent en rien à la réalité telle que la vivent les habitants de Paris.

La réalité, c'est que, si l'activité des services de police a progressé, comme nous le dit le préfet de police, la délinquance, elle, progresse plus vite encore,...

M. Didier Boulaud.

Il faut regarder du côté de l'hôtel de ville !

M me Nicole Catala.

... puisque, au cours de l'année 1999, elle a augmenté de près de 2 %, 1,73 % très exactement. Les vols avec violence ont augmenté de 17 % et les vols à main armée de 47 %. La plupart des pharmacies parisiennes ont fait l'objet d'un braquage.

Dans certaines rues, tous les commerçants ont été victimes d'un cambriolage ou d'un vol.

C'est cela, monsieur le ministre, la réalité de l'insécurité à Paris !

M. Marcel Rogemont.

C'est une image d'Epinal ! (Sourires.)

M. Francis Hammel.

Mais que fait Tiberi ?

M. Didier Boulaud.

Il faut changer de maire !

Mme Nicole Catala.

Le préfet de police se dit préoccupé par deux évolutions : la montée de la violence et la p art importante des mineurs dans les infractions commises.

Monsieur le ministre, indépendamment de la récente nomination de cinquante-huit policiers dans le 18e arrondissement (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe des Républicains et Indépendants), quelles dispositions allez-vous prendre pour mettre un terme à l'insécurité ? (Applaudissements sur les mêmes bancs.)

M. Didier Boulaud.

Virer la droite ! (Rires sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'intérieur, pour une brève réponse, s'il vous plaît.

M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur.

Madame la députée, la sécurité est une préoccupation permanente, tant pour le Gouvernement (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) que pour les Parisiennes et les Parisiens. Il faut cependant apprécier les chiffres avec honnêteté et rigueur.

M. Eric Doligé.

Ils sont faux !

M. le ministre de l'intérieur.

Si nous ne disposons pas encore des statistiques nationales, nous connaissons déjà celles qui concernent la capitale, où 295 000 faits de délinquance ont été constatés au cours de l'année 2000.

Ce chiffre correspond à la moyenne des années précédentes. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Eric Doligé.

Donc et alors ?

M. le ministre de l'intérieur.

Je comprends que cela puisse vous déranger, mais je cite les chiffres tels qu'ils sont. (Exclamations sur les mêmes bancs.) Par rapport à 1999, on remarque les tendances suivantes : d'abord, une nette diminution - de 6,2 % - des délits de voie publique.

M. Eric Doligé.

Donc tout va bien !

M. le ministre de l'intérieur.

Les principales infractions ont toutes baissé. (Exclamations sur les mêmes bancs.)

Cambriolages : moins 16 %. (« C'est faux ! » sur les mêmes bancs.) Vols à la roulotte : moins 13,5 %. (« C'est faux ! » sur les mêmes bancs.) Vols de voitures : moins 11,2 %.

(« C'est faux ! » sur les mêmes bancs.)

M. Lucien Degauchy.

Menteur !

M. Maurice Leroy.

Désinformation !

M. le ministre de l'intérieur.

Cette évolution reflète l'engagement de la police dans...

M. Maurice Leroy.

Le XVIIIe arrondissement !


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M. le ministre de l'intérieur.

... un travail de proximité depuis avril 1999. L'augmentation de l'activité des services de police, que vous avez d'ailleurs vous-même reconnue, madame la députée, progresse aussi en ce qui concerne le taux d'élucidation.

Malheureusement, la dernière tendance tradit une progression pénalisante de la délinquance économique et financière...

M. Pierre Lellouche.

Incroyable ! Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République.

Mitterrand !

M. le ministre de l'intérieur.

... à savoir principalement l'usage frauduleux de numéros de cartes de crédit et de la téléphonie mobile. A elle seule, la progression de la délinquance économique explique la croissance globale de 1,7 %.

M. Maurice Leroy.

Personne ne vous croit !

M. le ministre de l'intérieur.

La police ne peut, à elle seule, faire reculer l'ensemble des faits d'insécurité. Pour cela, il faut coproduire la sécurité. C'est ce partenariat avec la police que, depuis si longtemps, vos amis de la ville de Paris n'ont pas su produire. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.) Ce que vous n'avez pas fait, d'autres le feront ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

POLITIQUE AFRICAINE DE LA FRANCE

M. le président.

La parole est à Mme Marie-Hélène Aubert, pour le groupe RCV.

Mme Marie-Hélène Aubert.

Ma question s'adresse à M. le Premier ministre et concerne la politique africaine de la France, car aucun sujet n'appartient à un quelconque domaine réservé.

Demain, 17 janvier, s'ouvre à Yaoundé, capitale du Cameroun, le sommet franco-africain des chefs d'Etat et de gouvernement. Cette grand-messe accueillera malheureusement encore trop de dirigeants de régimes bien peu démocratiques et autres dictateurs de pays producteur, de pétrole.

M. Didier Boulaud.

L'opposition s'en va ! L'Afrique ne l'intéresse pas !

Mme Marie-Hélène Aubert.

Ce énième sommet, qui aura pour thème la mondialisation, ne pourra faire l'impasse sur la situation plus critique que jamais qui affecte l'Afrique subsaharienne et Madagascar, où plus de 220 millions de personnes vivent aujourd'hui avec moins d'un dollar par jour.

M. Didier Boulaud.

L'opposition s'en va quand on parle de l'Afrique !

M. le président.

Mes chers collègues, les questions ne sont pas terminées. Je vous invite à regagner vos places ou à sortir rapidement.

Veuillez poursuivre, madame Aubert.

Mme Marie-Hélène Aubert.

La dette de ces pays a triplé en seize ans. L'environnement y subit de graves dommages. L'échec des politiques de la Banque mondiale et du FMI s'y confirme, suscitant au sein de ces organismes un débat salutaire mais trop tardif. Plus récemment, des affaires concernant des ventes d'armes ont défrayé la chronique et montré, que, pour le moins, la transparence et le contrôle de notre coopération avec ces pays doivent être renforcés d'urgence.

Monsieur le Premier ministre, quelles mesures le Gouvernement entend-il proposer à Yaoundé en vue de promouvoir à la fois le véritable assainissement des relations franco-africaines qui s'impose et la relance de celles-ci sur des bases nouvelles, comme le propose d'ailleurs fort utilement le Haut Conseil de la coopération, que vous avez vous-même mis en place ? Quel sera le volume des moyens alloués à l'indispensable coopération francoafricaine et quels mécanismes seront mis en place pour contrôler plus efficacement ces sommes ? Enfin, la France entend-elle définir des critères politiques et éthiques dans son soutien aux pays africains et ses échanges commerciaux avec eux, notamment pour les ventes d'armes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre délégué chargé des affaires européennes.

M. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes.

Madame la députée, comme vous l'avez indiqué, le sommet franco-africain s'ouvre demain à Yaoundé, ce qui explique d'ailleurs l'absence d'Hubert Védrine et de Charles Josselin, qui participent dès aujourd'hui à la réunion ministérielle préparatoire à cette conférence, le Président de la République partant demain.

A la veille de ce sommet, le vingt et unième, vous comprendrez que je ne puisse vous répondre qu'en vous rappelant les principes qui fondent désormais la politique africaine de la France.

C'est d'abord la solidarité, puisque notre coopération avec ces pays reste l'une des plus importantes au monde.

Nous leur consacrons près de 35 milliards de francs, soit 55 % de l'aide publique bilatérale française.

C'est ensuite la non-ingérence et la transparence ; vous avez prononcé le mot et une page a bel et bien été tournée, comme l'atteste l'ampleur de la réforme de la coopération voulue par le Premier ministre et mise en oeuvre, notamment, par Charles Josselin. L'ambition du Gouvernement étant de rompre avec ce que d'aucuns appelaient la « diplomatie parallèle », c'est désormais un autre dialogue, fondé sur un partenariat de confiance, des projets et une transparence accrue, qui nourrit notre coopération avec l'Afrique.

J'ajoute que le fait que l'ensemble des pays du continent africain soient invités au sommet francoafricain de Yaoundé montre également que nous avons tourné le dos à ce que l'on appelait jadis le « pré carré ».

Enfin, dans le cadre des accords euro-africains de Cotonou, des procédures ont été mises en oeuvre pour contrôler notre coopération et la suspendre lorsque la situation politique du pays l'exige.

Tels sont nos principes : solidarité, non-ingérence mais sans indifférence, exigence enfin. C'est donc le message que nous adresserons, à Yaoundé encore, à nos partenaires africains, avec lesquels nous continuons et continuerons d'entretenir des relations privilégiées.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

TREMBLEMENT DE TERRE AU SALVADOR

M.

le président.

La parole est à M. Jean-Jacques Filleul, pour le groupe socialiste.


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M.

Jean-Jacques Filleul.

Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Je voudrais tout d'abord, au nom du groupe d'amitié France-Salvador, que je préside, et de l'ensemble de la représentation nationale adresser un message de solidarité à l'égard des pays d'Amérique centrale touchés par le violent séisme du week-end dernier. Je recevais, dans ma circonscription, en novembre dernier, l'ambassadeur du Salvador qui s'est fait l'écho de l'admiration de son pays pour le nôtre. Je voudrais aujourd'hui, dans ce moment tragique pour son peuple, lui témoigner notre amitié et notre soutien.

La Salvador est le pays le plus durement touché, puisque l'épicentre du séisme a été localisé au large de la côte salvadorienne. Au lendemain de la catastrophe, la désolation règne dans tout le pays, le bilan ne cesse de s'alourdir, on parle aujourd'hui de plus 600 morts, de 2 300 blessés, de plusieurs centaines de disparus et de milliers de sans-abris. Les dégâts matériels sont à la hauteur de ce terrible sinistre et le président salvadorien, Francisco Flores, en appelle à l'aide internationale.

Monsieur le Premier ministre, je souhaiterais connaître les dispositions d'urgence que le Gouvernement entend prendre pour venir en aide à un pays qui a déjà été lourdement frappé, dans son histoire récente, par d'autres catastrophes naturelles, la dernière en date étant le cyclone Mitch en 1998.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M.

le président.

La parole est à M. le ministre délégué chargé des affaires européennes.

M.

Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes.

Monsieur le député, bien entendu, notre pays et l'Union européenne ne pouvaient rester insensibles à la catastrophe qui vient de se produire au Salvador et à l'appel à la solidarité internationale lancé par le président salvadorien.

Chaque heure compte car les chances de survie des personnes encore ensevelies s'amenuisent. Il faut par ailleurs assurer la subsistance des survivants. C'est pourquoi le gouvernement du Salvador a demandé à la France une aide médicale en personnels et en matériel, ainsi qu'un appui pour le traitement de l'eau.

Dans ce contexte, la cellule d'urgence du ministre des affaires étrangères, en alerte dès la nuit du 13 au 14 janvier, a pu, en étroite coordination avec le ministère de l'intérieur et le ministère de la défense, organiser l'acheminement au Salvador des secours demandés, en mettant l'accent sur les moyens de la sécurité civile, qui sont essentiels dans la gestion de ce type de catastrophe.

Un DC-10 affrété par le ministère des affaires étrangères a quitté Orly hier soir. Il achemine un détachement de cinquante-six agents de la sécurité civile et du SAMU, tous médecins, infirmiers ou techniciens du traitement des eaux, ainsi que de nombreux équipements. Il s'agit donc d'un dispositif important, auquel s'est jointe une unité de la sécurité civile allemande, comprenant quatorze agents.

Je souligne enfin que des ONG françaises se mobilisent pour apporter des secours aux survivants, notamment la Croix-Rouge française et Médecins du monde, et je note la multiplication des initiatives associatives et privées.

Voilà où nous en sommes. Nous agissons déjà, et le Gouvernement continuera de suivre avec la plus grande attention l'évolution des besoins sur place, tels qu'ils seront précisés au fil des heures par le comité d'urgence salvadorien. Il adaptera en conséquence l'importante contribution que la France entend apporter pour aider à remédier à cette situation dramatique.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

Suspension et reprise de la séance

M. le président.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures dix, est reprise à seize heures vingt-cinq, sous la présidence de Claude Gaillard.)

PRE SIDENCE DE M. CLAUDE GAILLARD,

vice-président

M. le président.

La séance est reprise.

2 ÉPARGNE SALARIALE Discussion, en nouvelle lecture, d'un projet de loi

M. le président.

M. le président de l'Assemblée nationale a reçu de M. le Premier ministre la lettre suivante :

« Paris, le 30 novembre 2000.

« Monsieur le président,

« J'ai été informé que la commission mixte paritaire n'a pu parvenir à l'adoption d'un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de lois ur l'épargne salariale, l'actionnariat salarié et l'épargne retraite.

« J'ai l'honneur de vous faire connaître que le Gouvernement demande à l'Assemblée nationale de procéder, en application de l'article 45, alinéa 4, de la Constitution, à une nouvelle lecture du texte que je vous ai transmis le 9 novembre 2000.

« Je vous prie d'agréer, Monsieur le président, l'assurance de ma haute considération. »

En conséquence, l'ordre du jour appelle la discussion, en nouvelle lecture, de ce projet de loi (nos 2693, 2792).

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Mesdames, messieurs les députés, je vous présente d'abord tous mes voeux.

Celles et ceux qui sont dans cette enceinte connaissent admirablement l'objectif de ce projet de loi : il s'agit de généraliser l'accès à l'épargne salariale, de faciliter le financement des entreprises et d'encourager la négociation collective et le dialogue social.

La réforme des modalités de mise en oeuvre des produits d'épargne salariale dans notre pays était nécessaire.

Deux chiffres en témoignent : 97 % des salariés des PME,


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 JANVIER 2001

donnée désormais connue, ne bénéficient ni de la participation ni de l'intéressement ; un salarié du secteur privé sur trois seulement peut y prétendre.

Au sein même des entreprises qui ont développé des dispositifs d'épargne salariale, les inégalités sont fortes.

Une étude intéressante de l'INSEE, publiée il y a quelques jours, l'a confirmé : moins de 3 millions de salariés du secteur privé et des entreprises publiques, c'est-à-dire à peine un quart du total, détenaient de l'épargne en entreprise.

Il est donc important de démocratiser et de simplifier l'accès à l'épargne collective, actuellement peu connue.

Sur une base volontaire - j'insiste sur cet aspect -, des centaines de milliers de salariés auront la possibilité, si vous adoptez ce texte, d'accroître leur rémunération globale, de mieux s'associer au devenir de l'entreprise et de concrétiser des projets qu'ils n'auraient pas pu concrétiser sans cela.

L'entreprise maîtrisera sans doute, elle aussi, mieux son destin, puisque le nouveau dispositif lui permettra de renforcer ses fonds propres, condition nécessaire pour le développement et la modernisation de notre économie.

C'est bien dans ce double avantage au profit du salarié et de l'entreprise que réside l'esprit de ce projet. Les grandes sociétés françaises, dont 36 % des capitaux sont étrangers, trouveront les outils qui leur permettront de mieux défendre leur indépendance. Les PME, qui connaissent souvent des difficultés pour financer leurs investissements - on l'observe dans nos circonscriptions -, et les start-up, autrement dit les jeunes pousses, se verront offrir une ressource plus facile d'accès qui favorisera leur développement. Les instruments dont nous proposons la création le plan d'épargne interentreprises et le plan partenarial d'épargne salariale volontaire, aux sorties libres et différenciées - constitueront également un atout pour nos grandes entreprises. Tout cela devrait renforcer ce qu'on appelle, dans le nouveau jargon, l'attractivité du site France. En tout cas, l'investissement, l'activité et l'emploi y trouveront leur compte.

Ce texte se traduira également par le renforcement du rôle de la négociation collective dans le champ de l'épargne, sujet qui, je le sais, vous est cher. Si elles ne sont pas quantitativement mesurables, l'information, la participation, l'association et la responsabilité sont sûrement des éléments essentiels dans l'économie moderne.

Cela permet, et c'est important, d'améliorer le degré de satisfaction des salariés dans l'accomplissement de leurs missions.

A l'obligation annuelle de négocier sur la durée et l'organisation du travail, nous proposons d'ajouter celle qui concerne la mise en place de l'épargne salariale. Le rôle accru des partenaires sociaux aidera à faire reculer toute une série d'inégalités. Je suis sûr que les représentants des salariés sauront agir pour que chacun puisse bénéficier d'un accès aux plans d'épargne. Du reste, j'ai été frappé par la volonté des organisations syndicales d'entamer, dès la publication de la loi, des négociations sur l'épargne salariale dans les entreprises, ce qui prouve, s'il en était encore besoin, la nécessité de la réforme et le bien-fondé de nos discussions.

Je veux, avant de terminer ce court propos, saluer la qualité du travail qui a été accompli par les uns et les autres, notamment votre rapporteur, M. Balligand, qui portera désormais le surnom de « démiurge de l'épargne salariale » (Sourires),...

M. Jean-Jacques Jégou.

Je ne suis pas sûr que cela lui fasse plaisir ! M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

... titre qu'il partagera avec Jean-Baptiste de Foucauld. Je tiens également à souligner l'apport décisif de votre rapporteur pour avis, M. Terrasse, et le travail fait par chacune et chacun. Je veux notamment rappeler le travail collectif mené lors de la première lecture par tous les groupes, mais en particulier par les groupes socialiste et communiste, ce qui a permis, outre des améliorations formelles importantes, de renforcer sur le fond l'assise de ce texte et l'équilibre général du projet de loi. Je sais aussi l'importance que les Verts, dans leur propre pluralité (Sourires) - et je tiens à saluer la présence de M. Cochet - accordent au volet « solidaire » de cette loi. Je souhaite enfin, puisque c'est la période des voeux, évoquer l'attitude constructive des députés de l'opposition qui, tout en marquant leur désaccord avec certaines dispositions du texte, ce qui est bien légitime en démocratie, ont su contribuer, par leurs interventions et leurs remarques, à la précision d'un dispositif qu'ils ne sont toutefois pas allés jusqu'à approuver.

Cette nouvelle lecture permettra - je la conçois pour ma part ainsi - de rétablir l'équilibre que nous avions su construire ensemble lors de la discussion en première lecture. Je suis certain que nous parviendrons à ce résultat à l'issue de nos travaux. Pour cela, il vous faudra redonner au texte de ce projet de loi une forme correspondant aux objectifs simples et prioritaires qui sont les nôtres et non à ceux, un peu plus étrangers à nos valeurs, que la majorité sénatoriale a voulu lui assigner.

Les sénateurs n'ont pas voulu s'inscrire dans la logique de l'épargne salariale et du renforcement de la démocratie sociale. Certes, et je leur en donne acte, plusieurs des dispositions adoptées par vos collègues du Sénat ont amélioré le projet de loi. Néanmoins, il faut reconnaître que le texte qui revient devant vous diffère grandement de celui que vous aviez adopté. Même son titre n'a pas survécu à la tourmente qui semblait régner dans les travées pourtant généralement sages du Palais du Luxembourg lors de l'examen de cette loi. Ainsi la majorité sénatoriale a-t-elle voulu réduire ce texte à un projet de loi sur l'épargne retraite. La position du Gouvernement n'a pas changé : nous sommes attachés au système de la répartition ; l'affectation d'une partie des recettes tirées de l'attribution des licences de téléphonie mobile de nouvelle génération va dans ce sens.

Mesdames, messieurs les députés, je sais, avec François Patriat, secrétaire d'Etat aux PME, qui m'aidera dans cette tâche, et Guy Hascouët, secrétaire d'Etat à l'économie solidaire, pouvoir compter sur la représentation nationale pour redonner à ce texte son équilibre, sa dimension sociale et solidaire. Il passera ensuite à nouveau devant le Sénat puis reviendra devant vous en lecture définitive à la fin de ce mois ou au début du mois prochain. Ainsi, avant la fin de l'hiver, il pourra devenir loi de la République et permettre de créer dans les entreprises, notamment les plus petites d'entre elles, de meilleures relations sociales qui associeront davantage les salariés à leur gestion tout en favorisant une meilleure rétribution du travail des salariés et une bonne allocation des ressources pour financer l'activité.

Proposer sans imposer, ouvrir des possibles sans créer de contraintes inutiles, garantir les traditions du monde du travail, articuler politique économique de l'emploi et gestion démocratique du social, telles sont les idées que nous défendons. L'épargne salariale est, nous le croyons, une réforme utile, voire nécessaire. Je vous remercie chaleureusement, mesdames, messieurs les députés, de lui


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apporter votre soutien. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur de la commission des finances, de l'économie générale et du plan.

M. Jean-Pierre Brard.

Alias le démiurge de l'épargne salariale ! (Sourires.)

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, quelques semaines après l'examen en première lecture du projet de loi sur l'épargne salariale par le Sénat, au mois de novembre dernier, c'est au tour de notre assemblée de se saisir, en nouvelle lecture, de ce texte.

Dans un premier temps, je souhaite rappeler les raisons de cette réforme. Je ferai ensuite connaître mon sentiment sur la démarche que le Sénat a choisi d'adopter en première lecture. A cet égard, j'exposerai les raisons qui ont poussé la commission des finances à rejeter plusieurs des dispositions adoptées par le Sénat, tandis que je pré-s enterai brièvement quelques-unes des modifications adoptées par celui-ci et que la commission a jugé utile de conserver - après les avoir ou non modifiées - dans la mesure où elle a considéré qu'elles étaient conformes au texte que nous avions adopté en première lecture.

A ce stade de mon propos, je voudrais rappeler brièvement « l'itinéraire conseillé » que nous avions proposé pour réformer l'épargne salariale, itinéraire qui, il me semble, a été scrupuleusement respecté et conforté, tant dans la phase d'élaboration du projet de loi que lors de la première lecture de celui-ci à l'Assemblée nationale.

Le premier axe de la réforme est celui de la démocratisation de l'épargne salariale.

Le coeur de la réforme de l'épargne salariale ne réside pas dans la promotion de l'actionnariat salarié, mais dans la démocratisation de l'accès des différents mécanismes de l'épargne salariale au plus grand nombre des salariés. La démocratisation de l'épargne salariale n'est pas une fin en soi : elle doit servir aux salariés de ce pays à rééquilibrer le partage de la valeur ajoutée à leur profit, sans toutefois fragiliser les entreprises ni se substituer à la progression du pouvoir d'achat dont la revendication s'exprime d'autant plus logiquement que le marché du travail se rapproche du plein emploi.

La démocratisation de l'épargne salariale est une nécessité. J'en veux pour preuve l'étude de l'INSEE, qui vient de paraître, extraite de l'enquête sur le patrimoine de 1998 : elle confirme les conclusions du rapport remis en janvier 2000 au Premier ministre et l'orientation du projet de loi.

Que dit cette étude ? Que 22 % seulement des salariés du secteur privé détiennent de l'épargne placée en entreprise ; à titre de comparaison, 33 % des salariés déclarent posséder des titres d'assurance vie. Il s'agit en priorité de salariés à hauts revenus, titulaires de contrats à durée indéterminée, et pour la plupart anciens dans l'entreprise.

Quant aux montants d'épargne capitalisée en entreprise, l'INSEE confirme que la majorité des salariés déclare posséder moins de 10 000 francs d'encours, lesquels sont le plus souvent placés dans un plan d'épargne entreprise.

Je crois qu'il est important que l'on médite un instant ce résultat : la logique redistributive de l'épargne salariale est en panne. Plus de 40 % des salariés gagnant plus de 12 000 francs par mois possèdent un PEE, tandis que moins de 20 % des salariés rémunérés en deçà de 8 000 francs déclarent en posséder un.

Quelles raisons invoquer pour expliquer cette carence redistributive ? L'écart est dû, ce qui n'est pas surprenant, à une plus faible capacité des salariés disposant de faibles revenus à épargner. Mais il tient aussi au fait que les salariés en situation précaire et faiblement rémunérés sont souvent dans des PME où la participation n'est pas obligatoire et où les sociétés de gestion de l'épargne salariale rechignent à prospecter car la mise en place de cette épargne est peu rentable.

De ce point de vue, il est essentiel que l'abondement versé par l'entreprise soit un véritable outil de redistribution de la valeur ajoutée. L'abondement patronal doit être d'autant plus élevé que la capacité d'épargne des salariés est faible. C'est ainsi que l'on créera les conditions d'une consolidation de la croissance, synonyme de réduction des inégalités salariales dans notre pays.

C'est là que se situe la responsabilité du législateur : fournir un outil démocratique de l'épargne salariale. Cet outil de redistribution de la valeur ajoutée entre salariés du secteur privé, c'est le PEI, le plan d'épargne interentreprises. Associé aux incitations fiscales prévues dans le projet de loi, comme la PPI, la provision pour investissement, le PEI de branche ou territorial contribuera à réconcilier l'épargne salariale avec une logique redistributive, tout en consolidant les fonds propres des PME. Sur ce point, je voudrais souligner l'espoir qu'ont déjà fait naître les PEI chez les acteurs de la société civile et les partenaires sociaux qui, alors même que le texte n'est pas voté et que les décrets ne sont pas parus, discutent déjà de leur mise en place.

M. Pascal Terrasse.

Tout à fait !

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Deuxième axe de la réforme : fournir aux salariés qui le souhaitent un plan d'épargne salariale à dix ans, le PPESV, le plan partenarial d'épargne salariale volontaire, dont l'objectif est de favoriser le retour en fonds propres vers les entreprises qui en ont prioritairement besoin, les PME.

Troisième axe, enfin : améliorer la démocratie sociale au sein des entreprises, quelle que soit leur taille et qu'il y ait ou non un dispositif d'actionnariat salarié.

Après avoir rappelé les trois axes principaux du projet de loi, il m'est plus facile de distinguer, dans le travail du Sénat, ce qui est de nature à affaiblir l'équilibre du texte de ce qui peut au contraire le renforcer.

Sur un plan général, le Sénat a abordé le projet de loi d'une manière relativement constructive. Cependant, il faut bien reconnaître que, dès les premiers articles, le Sénat, en modifiant l'intitulé même du texte par l'introduction d'une référence à la retraite, a cru bon de verser dans l'idéologie en tentant une greffe de la loi Thomas, alors même que notre assemblée a abrogé cette dernière dans le cadre de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001.

Sur ce point, l'attitude raisonnable de l'Assemblée en première lecture doit être rigoureusement respectée : alors que les partenaires sociaux sont associés à la réforme du régime général de retraites par répartition au sein du comité d'orientation des retraites et que les organisations de salariés et patronales s'opposent sur les retraites complémentaires, le projet de loi relatif à l'épargne salariale ne doit pas s'immiscer dans le débat ni dans les réformes en cours sur les retraites.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 JANVIER 2001

Pour bien séparer les dossiers, je tiens à rappeler que l'Assemblée a voulu supprimer la sortie en rente, tandis qu'elle a souhaité instaurer un prélèvement de 8,2 % sur l'abondement supérieur à 15 000 francs, destiné à alimenter le fonds de solidarité vieillesse. Les montants actuels de l'épargne salariale par salarié sont faibles. Mais il est socialement juste d'avoir prévu une telle disposition pour le cas où l'épargne salariale connaîtrait un engouement si important qu'elle serait alors susceptible de fragiliser l'assiette des cotisations du régime général.

M. Pascal Terrasse.

Très bien !

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Au total, en réintroduisant le prélèvement de 8,2 %, le produit fixe de dix ans et le produit glissant sans sortie en rente, la commission des finances a voulu laisser aux salariés la liberté de choix entre un produit, le PPESV à terme fixe, destiné à constituer un capital, et le PPESV glissant, qui leur permettra de caler la gestion de leur épargne sur celle de l'actuel plan d'épargne entreprise à cinq ans.

Dans ces conditions, il ne pouvait être question pour l'Assemblée de valider la tentative de greffe des fonds de pensions sur l'épargne salariale. A cet égard, la volatilité actuelle des marchés est un avant-goût de ce qui risque de se passer dans les dix ans qui viennent : on aura des difficultés à gérer sans tensions le fameux « papy krach ».

A quoi devons-nous ce risque ? A l'effet déstabilisant provoqué par la vente massive, par les fonds de pensions américains, de leurs actions pour honorer les pensions des retraités concernés. En observant les remous que connaît actuellement la bourse américaine, nous constatons que la très forte volatilité des marchés traduit l'inquiétude des investisseurs vis-à-vis du scénario de récession aux EtatsUnis. Il y a tout lieu de penser que, chez nous, face à une incertitude de même ampleur, les investisseurs adopteront un comportement très moutonnier. Je crois d'ailleurs, à la différence du Sénat, que l'actionnariat salarié ne sera pas un long fleuve tranquille. Cela signifie qu'il ne faut pas opposer les salariés dans leur ensemble aux actionnaires-salariés, parce qu'ils ont en commun le destin de leur entreprise. Pour cette raison, la commission a rétabli l'obligation faite aux assemblées générales de se prononcer tous les trois ans, dès lors qu'au moins 3 % du capital est détenu par les salariés, sur deux questions : la représentation des salariés-actionnaires et celle des salariés dans leur ensemble.

A côté de sa contribution idéologique, le Sénat a tout de même apporté des modifications à certains aspects du texte, que la commission des finances a estimé, moyennant quelques précisions, devoir conserver ou intégrer.

Ainsi, nous avons validé la définition des accords de groupe. A l'origine, le texte du Gouvernement voulait clarifier cette définition pour isoler les accords qui donnent lieu à des distributions d'actions. En réduisant les accords de groupe aux entreprises financièrement dépendantes, nous nous coupions de certaines pratiques des secteurs coopératif, associatif et mutualiste. A ce stade de la discussion, j'ai le sentiment que nous sommes parvenus à trouver un bon compromis pour les futurs accords de groupe. Je défendrai un amendement prévoyant une rédaction plus légère et plus simple.

Sur un autre sujet, le calcul de l'intéressement dans les holdings, le Sénat a plutôt contribué à améliorer le texte adopté en première lecture. La commission des finances a cependant précisé que le calcul de l'intéressement dans les holdings, que nous souhaitons bien sûr voir rester en France, doit intégrer les filiales situées en France, et dans lesquelles deux tiers au moins des salariés sont couverts par des accords, les autres filiales qui n'atteindraient pas ce niveau disposant de quatre mois pour conclure un accord d'intéressement.

Après avoir distingué la contribution « idéologique » du Sénat de sa démarche constructive, j'évoquerai la suppression du livret d'épargne salariale. La commission des finances a, au contraire, souhaité le réintroduire et revenir sur deux aspects qui ont été peu soulignés jusqu'à présent mais qu'il nous a paru utile de renforcer : il s'agit, d'une part, de l'effet positif qu'auront les SCR sur l'économie solidaire et, d'autre part, du rôle de l'éthique dans la politique de placement de l'épargne salariale.

Le Sénat a donc cru bon de supprimer le livret d'épargne salariale. Celui-ci est cependant utile pour trois raisons au moins.

En premier lieu, le livret permettra de tarir l'épargne salariale qui, aujourd'hui, alimente les fonds en déshérence, dont on parvient difficilement à chiffrer le montant exact, lequel est sans doute supérieur aux 354 millions que nous avions révélés dans notre rapport au Premier ministre.

En deuxième lieu, le livret doit permettre aux salariés d'obtenir des relevés récapitulatifs de situation enfin standardisés et compréhensibles, quelle que soit la société de gestion.

En troisième lieu, le livret d'épargne salariale doit être, par essence, l'outil des salariés dans les plans d'épargne interentreprises : pour que les PEI fonctionnent, il faut garantir aux salariés l'accès à un document, dont on pourra discuter avec les professionnels s'il doit être matérialisé ou non, leur permettant de passer d'une entreprise à une autre, tout en conservant la « traçabilité » de leur épargne salariale.

Je tiens par ailleurs à souligner l'impact positif qu'aura sur l'acheminement de fonds vers l'économie solidaire la décision de la commission des finances d'introduire les sociétés de capital-risque. En effet, notre commission a souhaité profiter du toilettage fiscal effectué à l'occasion du projet de loi de finances pour 2001 pour étendre l'activité des SCR au champ de l'économie solidaire.

Dorénavant, il n'y aura plus guère de différence entre les FCPR, les fonds communs de placements régionaux, déjà prévus dans les emplois possibles de l'épargne salariale, et les SCR. Il était, de ce point de vue, cohérent et rassurant d'introduire de l'intermédiation dans le domaine de l'économie solidaire, par le biais des SCR.

J'en arrive, enfin, à la question de l'investissement socialement responsable.

L'épargne salariale est un moyen pour les salariés de s'interroger sur la politique de placement des OPCVM dans lesquels les FCPE placent leurs avoirs. Il est essentiel d'avoir à l'esprit que la prise de conscience de la dimension éthique et socialement responsable gagne du terrain, y compris là où l'on s'y attend le moins, c'est-à-dire dans les fonds d'investissement anglo-saxons.

M. Yves Cochet.

Ah !

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Le vent est manifestement en train de tourner pour les entreprises qui attendent des plans de réduction de leurs effectifs les applaudissements des marchés.

Le Royaume-Uni a ainsi voté, au mois de juillet 2000, une disposition obligeant les fondés de pouvoir des fonds d'investissement à rendre publique leur politique en matière d'investissements socialement responsables.

Alors que la bourse française prétend jouer un rôle important dans l'Europe financière de demain, je crois que le texte qui nous est soumis concourt à innover et à


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 JANVIER 2001

insuffler une dimension que nous aurions tort de ne pas intégrer.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe communiste.)

Discussion générale

M. le président.

Dans la discussion générale, la parole est à M. Gérard Charasse.

M. Gérard Charasse.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous devons une nouvelle fois examiner le texte portant création d'une véritable épargne salariale.

J'avais, en première lecture, posé comme principes préalables à l'examen de tout texte touchant à ce sujet, la préservation de l'intégrité financière et sociale du salariat et du système de retraites par répartition. Voilà pourquoi les radicaux de gauche avaient souhaité que l'on accordât u ne bienveillante attention aux amendements qu'ils avaient, dans ce sens, déposés et soutenus. Ces amendements portaient sur trois points précis : la sécurité de l'actionnariat salarié, le lien entre les mécanismes inventés par le texte et le système classique de retraite, les mécanismes de sortie de liquidités des plans en question.

Sur le premier point, nous avions imaginé un dispositif d'assurance collective garantissant le nominal placé et assorti d'un intérêt de base. La proposition de garantie du seul nominal ne nous semblait en effet pas suffisante au regard de la durée possible de l'épargne. Le texte qui nous revient apporte mais par des voies plus indirectes, une réponse à ces préoccupations.

Dans le même souci de sécurité, monsieur le ministre, nous vous avions alerté sur les modalités de gestion paritaire des fonds, qui pouvaient mettre les salariés en situation de subir des décisions d'un partenaire plus aguerri à ce type de mécanismes. La réponse proposée reste insuffisante et nous serions prêts à encourager toute initiative permettant d'améliorer le texte.

Voilà pour ce qui concerne l'aspect sécurité.

J'avais également insisté sur la forme de concurrence possible entre cette nouvelle épargne à long terme et le système de retraite par répartition. Il ne fait aucun doute que la possibilité de recevoir la rémunération du capital sous forme de rente ne fait qu'accroître cette appréhension. Cela dit, on ne peut pas priver les salariés de l'utilisation sécurisée d'un ressort économique permettant d'améliorer leur situation. On ne peut pas réserver une telle possibilité à des classes sociales déjà avantagées par ailleurs.

De plus, au nom de quoi interdirait-on à toute une catégorie de la population l'utilisation, avec ceinture et bretelles, d'un moyen d'action sur son propre état ? Néanmoins, notre rôle de politique, est de ne pas méconnaître les aspects aléatoires de ce nouveau système, et donc de conserver un moyen d'action collectif et solidaire qui a fait ses preuves : le système de retraites par répartition.

Notre proposition destinée à rendre les deux systèmes complémentaires en soumettant les sommes versées aux cotisations sociales, en particulier pour les retraites audessous d'un seuil à déterminer au-delà duquel, dans des conditions minimales de marché, le nouveau système serait beaucoup plus efficace que l'ancien, n'a pas été retenue. Je le regrette. Je fonde cependant quelques espoirs dans la discussion que nous aurons.

Enfin, nous avions suggéré de revoir les modalités de sortie du plan. Nos propositions ont été en partie prises en compte, hormis quelques modifications qui seront présentées par nos collègues communistes et que nous soutiendrons.

Telle est, monsieur le ministre, l'analyse que nous faisons de la manière dont a été prise en compte notre participation à l'élaboration du texte en première lecture.

Nous souhaitions mieux protéger nos compatriotes.

Les radicaux de gauche seront attentifs aux suites que vous donnerez à leurs propositions renouvelées, car ils entendent bien participer, de manière constructive mais intransigeante quant aux valeurs, à ce nouveau grand chantier de la majorité plurielle.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. Jacques Godfrain.

M. Jacques Godfrain.

Monsieur le président, monsieur le ministre, pour avoir suivi, dans d'autres enceintes, les travaux et les rapports de M. Balligand, j'avoue, avec bon nombre de spécialistes de la participation qui siègent sur les bancs de l'opposition et qui revendiquent historiquement la paternité de cette idée aux côtés de la personne qui est son origine, le général de Gaulle, que nous avions espéré une brillante conversion intellectuelle de la part de celui qui, au nom du parti socialiste, a diffusé et valorisé cette idée, et je pense aux propos enthousiastes qu'il a tenus devant le Conseil supérieur de la participation.

Mais j'avoue qu'entre le Joffre de la participation que nous attendions et le Badinguet d'aujourd'hui, l'écart s'est très profondément creusé.

(Murmures sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Badinguet ? Mais, c'est Séguin !

M. Jacques Godfrain.

Le ton quelque peu désinvolte avec lequel M. le ministre des finances a ouvert le débat tout à l'heure ne nous a guère enthousiasmés pour être à vos côtés dans cette affaire...

M. Jean-Pierre Brard.

Dieu nous en préserve ! (Sourires.)

M. Jacques Godfrain.

Monsieur Balligand, il y a quelques mois, alors que j'évoquais à la tribune le général de Gaulle, n'aviez-vous pas réagi à mes propos en vous écriant : « C'est du sous-Badinguet ! » ?

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Vous avez bonne mémoire !

M. Jacques Godfrain.

C'est donc un prêté pour un rendu ! Nous, gens de la campagne, avons la mémoire longue ! La mobilisation des salariés actionnaires est très forte.

Récemment, la Fondation pour l'actionnariat salarié a réalisé un sondage auprès de 12 000 salariés actionnaires répartis dans plusieurs centaines d'entreprises. Un tel taux de réponses a rarement été égalé à l'occasion de semblables opérations. La mobilisation de celles et de ceux qui, salariés d'entreprises, ont pu bénéficier ou espèrent bénéficier de l'actionnariat salarié, est donc très forte.

Entre notre débat du mois d'octobre et aujourd'hui, il y a eu un débat sénatorial. Le texte est revenu du Sénat modifié. Je m'en tiendrai à deux points sur lesquels le Sénat a véritablement amélioré le texte.

Le Sénat a d'abord prévu l'obligation de réserver 5 % des actions nouvelles aux salariés en cas d'augmentation du capital de l'entreprise. Cette mesure est sage et elle


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 JANVIER 2001

s'inscrit dans le droit-fil de la philosophie de à la participation. La décision d'augmenter le capital d'une entreprise est lourde de sens pour le conseil d'administration.

La mesure votée par le Sénat est l'occasion, unique allais-je dire, de montrer que les salariés n'y sont pas étrangers et qu'ils sont en quelque sorte mariés avec la vie de l'entreprise, son évolution, son devenir, sa stratégie, telle que la définit le conseil d'administration.

Mais cette mesure que le Sénat avait prise dans sa sagesse a été finalement rejetée. C'est pour nous une première déception.

En revanche - soyons équitables -, nous avons appris avec une certaine satisfaction que la commission des finances avait adopté ce matin un amendement reconnaissant expressément l'existence d'accords de participation d'intéressement ou de plans d'épargne de groupe, sans enfermer la notion de groupe, à l'exclusion des plans d'épargne avec accession au capital, dans une définition qui, même élargie par amendements successifs, risquait de remettre en cause les accords existants ou d'empêcher à l'avenir la conclusion de tels accords. Cette idée de M. Balligand me paraît bonne. J'espère qu'elle sera soutenue lors du vote de l'amendement concerné et que l'Assemblée reprendra à la rédaction que la commission des finances a adoptée majoritairement dans sa sagesse.

En revanche, s'agissant des retraites, je pense vraiment - comme de nombreux collègues - que la majorité plurielle ne peut pas rester arc-boutée sur une position purement idéologique. (Exclamations sur les bancs du groupe communiste.)

J'appelle d'ailleurs le groupe communiste à se rendre compte de l'impasse dans laquelle il enferme les salariés et les retraités français en restant sur cette ligne.

Le Sénat a fait des propositions ; elles sont ce qu'elles sont et je me doute bien que vous n'êtes pas prêts à les adopter. Mais, compte tenu de l'actualité, je souhaite que l'Assemblée fasse un geste d'ouverture concernant les retraites, qu'elle examine la façon dont nous pourrions marier le système d'intéressement des salariés avec la préparation de la retraite. Vous pourrez utiliser la dénomination qu'il vous plaira car je sais combien, par votre culture politique, bien française, vous restez accrochés aux vieilles lunes. Quoi qu'il en soit, si, à l'occasion de ce texte, que vous voterez - c'est évident - sans aucun enthousiasme, vous faisiez une ouverture susceptible de faire évoluer fortement la notion de retraite, nous pourrions reconsidérer notre vote.

M. le président.

La parole est à M. Jean Vila.

M. Jean Vila.

Monsieur le ministre, mesdames, messieurs, qui ne pourrait souscrire à l'exposé des motifs du projet de loi ? Il convient assurément de démocratiser l'accès à l'épargne salariale, aujourd'hui limité aux plus grosses entreprises, et de renforcer les droits collectifs des salariés. Il est nécessaire de mieux mobiliser l'épargne et, plus généralement, l'ensemble des financements au service du développement économique pour l'emploi.

Une toute récente enquête de l'INSEE confirme l'ampleur des inégalités d'accès à l'épargne salariale : moins de trois millions de nos concitoyens détiennent de l'épargne salariale, les principaux bénéficiaires se recrutant parmi les hauts revenus, titulaires d'un contrat à durée indéterminée et anciens dans l'entreprise.

Cette enquête précise : « Plus de 40 % des salariés du privé gagnant au moins 12 000 francs par mois possèdent ce type de placement contre moins de 20 % pour ceux rénumérés en deçà de 8 000 francs. »

Lorsqu'on sait qu'en 1997 la moitié des salariés gagnait moins de 8 830 francs nets par mois et qu'un quart gagnait moins de 6 920 francs, on peut légitimement penser que, au-delà des mesures fiscales ou de la mise en place de nouveaux supports de placements, l'augmentation du pouvoir d'achat des salariés est une des conditions de la réduction des inégalités dans la répartition de l'épargne salariale.

L'épargne salariale ne saurait donc servir de substitut à l'augmentation des salaires, ni fragiliser d'une quelconque manière notre régime de retraite par répartition. Or exonérer de cotisations sociales les sommes abondées par les entreprises au titre de l'épargne salariale constitue objectivement un formidable encouragement pour les directions d'entreprise à arbitrer, au détriment des salaires.

Le fait, dans le cadre du nouveau plan partenarial d'épargne volontaire, de soumettre à une contribution de 8 ,2 % l'abondement des employeurs dépassant 15 000 francs, mesure positive que nous avons bien évidemment soutenue en première lecture, peut-il être considéré comme suffisant pour s'opposer à une telle dérive ? Sincèrement, nous ne le pensons pas ; cette conviction est d'ailleurs partagée par nombre d'acteurs syndicaux.

Alors que 44 % de nos concitoyens affirment que la première de leur préoccupation est le relèvement de leur salaire, la part des salaires dans la valeur ajoutée, loin de progresser, s'est réduite en 2000.

Faire dépendre la demande globale de plus-values boursières aléatoires et réversibles ou la consolider par l'accroissement de l'activité réelle et des rémunérations : tel est l'enjeu auquel nous sommes aujourd'hui confrontés.

C'est dire qu'on ne saurait dissocier le texte soumis à notre examen de son contexte et du débat sur les orientations de politique économique et sociale qu'il convient de mettre en oeuvre aujourd'hui pour conforter l'activité économique en partageant mieux les fruits de la croissance.

La majorité sénatoriale, cohérente avec son projet politique, a supprimé toute contribution sociale pour le PPESV et a même introduit plusieurs articles additionnels visant à mettre en place la retraite par capitalisation qu'elle appelle de ses voeux. Refuser cette option libérale implique d'annuler ces dispositions et d'affirmer de manière beaucoup plus explicite qu'en première lecture le principe exclusif d'une sortie en capital du PPESV ; nous souhaitons d'ailleurs que soient précisés dans le texte les aléas de la vie autorisant une sortie anticipée du plan d'épargne.

La préservation et l'amélioration de notre système de protection sociale et de retraite s'imposent si l'on veut faire reculer les inégalités sociales dans notre pays. Pour nous, vous le savez, c'est le principe même de l'exonération de cotisations sociales de l'épargne salariale qui mériterait aujourd'hui d'être revu.

Le projet de loi entend faire de l'épargne salariale un instrument privilégié d'association des salariés à la croissance de l'entreprise.

Mais quel type de croissance de l'entreprise veut-on favoriser ? Celle qui engendre la création d'emplois, l'effort de formation, l'augmentation avec la qualification de la part des salaires dans la valeur ajoutée, en faisant reculer les produits financiers ? Ou, au contraire, celle qui donne la priorité à la croissance de la valeur pour l'actionnaire ? C'est dire l'enjeu que constitue l'affectation des sommes issues de l'épargne salariale. Nous avons proposé, sans être entendus, qu'une partie de l'épargne puisse être


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centralisée à la Caisse des dépôts et consignations afin d'assurer le financement d'activités et de projets d'intérêt général. Nous reviendrons sur ce sujet en proposant d'élargir l'utilisation de l'ensemble des fonds d'épargne qui sont aujourd'hui sous-employés.

C ette proposition traduit notre souci de voir construire, notamment à partir du pôle public financier, de nouveaux modes de financement moins soumis aux exigences de rentabilité dont sont porteurs aujourd'hui les marchés financiers, et donc plus favorables au développement de l'économie réelle et de l'emploi.

Une partie de cette épargne mériterait de contribuer à alimenter des fonds régionaux pour l'emploi et la formation, qui, placés sous le contrôle des salariés et de leurs représentants, et fiscalement encouragés, permettraient de mobiliser le crédit bancaire pour financer les investissements des PME les plus créatrices d'emplois.

De même, assurer l'avenir et le développement des comptes courants bloqués de la participation pourrait p ermettre, avec la montée en puissance des plans d'épargne interentreprises, la constitution d'une épargne interentreprises non boursière concourant à la création d'emplois, à la formation et à la recherche à l'échelle des bassins d'emploi et des régions.

La perspective d'un taux de rémunération supérieur grâce à la mise en place du PPESV à des conditions particulièrement attractives risque d'accentuer l'évolution qui a abouti ces dernières années à l'affectation de plus en plus fréquente des sommes collectées au titre de la participation aux placements financiers, au détriment des comptes courants bloqués et de l'investissement dans l'entreprise.

Une telle perspective serait des plus préjudiciables alors que les PME-PMI rencontrent aujourd'hui de vraies difficultés pour se financer à des conditions compatibles avec des objectifs réels de production, de développement des investissements et de l'emploi qualifié.

Ce n'est pas porter atteinte à la liberté imprescriptible des partenaires sociaux de choisir l'utilisation de l'épargne salariale qute d'affirmer que la priorité nationale à l'emploi mais aussi les avantages sociaux et fiscaux accordés par la collectivité justifient que la loi précise qu'une partie au moins de l'épargne salariale soit mobilisée en faveur du financement direct des entreprises - financement lui-même conditionné par les choix économiques de ces dernières - en accordant effectivement la priorité à la formation et à l'emploi.

S'il convient indéniablement de sécuriser les fonds distribués aux salariés, affirmer que la plus grande sécurité résiderait pour ces derniers dans des placements spéculatifs à haut rendement serait paradoxal et témoignerait d'un profond cynisme. Cela reviendrait à nier les risques boursiers et le fait que, si le CAC 40 a effectivement beaucoup progressé ces dernières années, c'est au prix d'exigences de rentabilité au sein des entreprises ; c'est ainsi que de grands groupes, comme Michelin ou tout récemment Danone, considèrent qu'une progression des profits de 7 % ou 8 % est insuffisante et qu'il convient en conséquence de réduire toujours plus les effectifs, de fermer en France des unités de production, de délocaliser et d'organiser la précarité.

Revendiquer, comme nous le faisons, qu'une partie au moins des fonds de la participation contribue de manière directe à des investissements dans l'entreprise concernée ou, dans le cas d'un plan interentreprises, dans les entreprises d'un même bassin d'emploi, est cohérent avec nos propositions visant à renforcer les droits des salariés, non seulement sur les profits distribués au titre de l'épargne salariale mais aussi, plus globalement, sur l'usage que fait l'entreprise de l'ensemble de ses ressources.

L'enquête de l'INSEE que nous avons déjà citée confirme cette exigence : 63 % des fonds de l'épargne salariale sont aujourd'hui placés sur des PPE et leur gestion est généralement déléguée par l'employeur à un investisseur institutionnel, les salariés étant de fait très peu impliqués dans les choix d'affectation de ces fonds, pourtant fruit de leur travail.

Renforcer le droit d'intervention des salariés, qu'ils soient actionnaires ou non, est pour nous tout à fait décisif, car c'est le contenu effectif de la réforme de l'épargne salariale, y compris dans sa mise en oeuvre concrète, qui est en jeu.

C'est en fonction d'assurances précises sur l'engagement de ce chantier capital que, prenant en compte des évolutions non négligeables apportées au texte et auxquelles il a d'ailleurs largement contribué, notre groupe a émis un vote positif d'appel lors de la première lecture.

M. Yves Cochet.

Tout à fait !

M. Jean Vila.

Cet appel n'a pas été entendu pour le moment. L'annonce, dans cet hémicycle, de la création d'un groupe de travail chargé de proposer des dispositions concrètes pouvant trouver place, notamment, dans la loi sur la modernisation sociale, n'a pas été suivie d'effet.

Si la première lecture du projet de loi de modernisation sociale a intégré le principe d'une certaine représentation des salariés actionnaires dans le conseil d'administration, c'est le statu quo s'agissant de l'extension plus générale des droits des salariés.

S'il est effectivement nécessaire de réformer et de démocratiser l'épargne salariale, une réforme de progrès ne saurait marquer une dérive libérale vers une conception patrimoniale du salaire ni drainer plus largement encore qu'aujourd'hui l'épargne des salariés vers les marchés financiers. Cela nous apparaît contradictoire avec le souci justement affirmé du développement de l'emploi.

Le salarié actionnaire doit demeurer avant tout un salarié qui, par delà le choix d'un produit financier, doit pouvoir mieux participer à la vie de son entreprise tout en disposant de droits lui permettant d'intervenir sur des choix économiques et financiers qui conditionnent directement son avenir et celui de ses enfants. Nous avons d onc déposé plusieurs amendements cohérents et constructifs dans ce sens. De leur prise en compte lors de cette nouvelle lecture dépendra le vote positif ou l'abstention de notre groupe.

M. le président.

La parole est à M. Claude Goasguen.

M. Claude Goasguen.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis plusieurs décennies, une idée court dans les milieux intellectuels et économiques mais elle court peu dans les milieux politiques : c'est l'idée de la participation. On en parle beaucoup et on en fait peu.

Nous avions pensé que cette idée juste, indispensable à l'efficacité de l'économie française, pourrait trouver dans un texte une juste concrétisation. Renforcer l'épargne salariale semble dorénavant faire l'unanimité - ou à peu près -, et nous nous en réjouissons. Bien sûr, il y a encore des réticences d'ordre idéologique, qui s'expriment dans une partie de la majorité. Mais l'idée de bon sens selon laquelle il faut permettre que soit distribuée aux salariés une partie des bénéfices de l'entreprise est aujourd'hui reconnue.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 JANVIER 2001

Cette idée qui court méritait un cadre juridique qui lui aurait permis de se développer. A ce jour, en effet, selon l'INSEE, moins d'un salarié sur quatre possède un compte d'épargne placé en entreprise. Cela fait de la France une exception dont nous nous passerions volontiers, car elle traduit notre difficulté d'adaptation à une économie moderne.

Or, monsieur le ministre, ce texte est loin de créer les conditions d'un développement durable et solide de l'épargne salariale dans notre pays ; il ne fait que compliquer un système qui l'était déjà suffisamment.

Malgré l'important dispositif législatif et réglementaire mis en place depuis 1959, des améliorations étaient indispensables ; mais celles-ci ne pouvaient tourner qu'autour d'une idée : assouplir un système trop rigide et donc peu intéressant. Pourtant, vous ne l'avez pas assoupli ; au contraire, vous l'avez rigidifié. Vous avez cédé à ce penchant, traditionnel dans la majorité, de réglementer encore et toujours un peu plus. Vous avez donc fait fausse route.

Ce refus de simplification constitue pour nous une première raison de ne pas soutenir votre texte ; mais il y en a d'autres.

Pourquoi une telle réticence de votre part ? Pourquoi cet excès de réglementation ? Parce que vous restez attachés à des racines culturelles marquées par une idéologie où l'on oppose encore, même si l'on s'y réfère de moins en moins explicitement, le capital au travail.

M. Jean-Pierre Brard.

Vous, vous n'avez même plus de racines !

M. Claude Goasguen.

Les vôtres, mon cher collègue, mieux vaudrait ne pas aller les chercher trop loin, car il n'y aurait pas de quoi s'en vanter.

M. Jean-Pierre Brard.

Mais si !

M. Claude Goasguen.

Restons-en au capital et au travail...

M. Jean-Pierre Brard.

Vous, vous êtes pour le capital !

M. Claude Goasguen.

Je vous en prie, prenez les choses avec humour ! J'ai écouté M. Balligand, que je trouve très sympathique et compétent ; et il se réfère à certaines valeurs intellectuelles qui conduisent à opposer malgré un certain assouplissement-capital et travail.

M. Pascal Terrasse.

Libéralisme et socialisme !

Mme Nicole Bricq.

C'est pourtant comme ça que ça fonctionne !

M. Claude Goasguen.

Me permettrez-vous, de temps en temps, d'avoir des idées divergentes des vôtres ?

M. Jean-Pierre Brard.

Le problème n'est pas d'avoir des idées divergentes, mais des idées tout court !

M. Claude Goasguen.

Permettrez-vous à ceux qui ne sont pas dotés de votre puissant intellect de vous soumettre, de temps en temps, quelques idées allant à l'encontre de votre pensée dominante et unique ?

M. Jean-Pierre Brard.

Essayez !...

M. Claude Goasguen.

Voulez-vous bien que je vous dise que je discerne dans ce texte des réminiscences idéologiques.

Mme Nicole Bricq.

C'est la réalité liées à l'opposition entre le capital et le travail ? Je n'ai pas l'impression de me livrer à une quelconque inquisition : c'est une réalité.

Assumez-la ! C'est la raison pour laquelle nous sommes réticents.

M. Jean-Pierre Brard.

C'est une pensée atrophiée !

M. Claude Goasguen.

Me permettez-vous, mon cher collègue, d'être réticent ?

M. Jean-Pierre Brard.

Je vous le permets, et j'ai du mérite !

M. Claude Goasguen.

C'est vrai, eu égard à votre passé !

M. le président.

Poursuivez, monsieur Goasguen.

M. Claude Goasguen.

L'Europe et la mondialisation vous imposent certains schémas. Nous y entrons à reculons car les velléités libérales ne font que vous effrayer. Cela dit, il faudrait vraiment chercher à la loupe ce qu'il pourrait y avoir de libéral dans votre texte. Car les solutions que vous proposez ont un caractère contraignant, elles sont difficiles à comprendre pour les salariés et souvent inapplicables. Modeste enseignant en droit du travail, je suis fasciné par l'extraordinaire complexité des lois en ce domaine,...

Mme Nicole Bricq.

C'est vrai !

M. Claude Goasguen.

... alors que, de toute évidence, les salariés et les petits patrons, qui n'ont pas les moyens de se payer des conseils juridiques et des conseillers sociaux, attendent des dispositions claires, adaptables et souples. Et on trouve le moyen, en ce début de

XXIe siècle, non seulement de ne pas leur simplifier la tâche, malgré les meilleures intentions du monde, mais encore de la leur compliquer ! Si cela continue, le code du travail ne tiendra plus dans un seul volume, mais dans une collection qu'il faudra mettre sur la table de chaque parlementaire. Tout devient incompréhensible, inapplicable et la législation risque donc de ne pas être appliquée.

Si nous voulons réglementer le travail de telle manière que la justice sociale soit reconnue dans ce pays, il faut simplifier fondamentalement les textes et arrêter d'empiler les alinéas sur les alinéas car de toute évidence, la complexité ne fait que rendre caduques les meilleures intentions du monde.

Vous vous êtes efforcé, monsieur le ministre, et c'est méritoire, de prouver à votre majorité que vous ne mettiez pas en place les fameux fonds de capitalisation qui lui font si peur, toujours par crainte d'adhérer à une terminologie supposée libérale. Quand on a parlé récemment de crédit d'impôt ou d'impôt négatif, c'était aussi trop libéral, alors on a inventé une nouvelle terminologie. En l'occurrence, il faut surtout éviter que l'on puisse penser à un quelconque moment à l'idée terrible des fonds de pension.

Mme Nicole Bricq.

Pas terrible : inadaptée !

M. Claude Goasguen.

Si, finalement, le Gouvernement s'est rallié à une idée que nous avons toujours soutenue, les réticences de sa majorité et le souci de ménager les susceptibilités plurielles l'ont conduit à présenter un projet confus que nous ne pourrons pas voter.

De fait, en prétendant régler à la fois le problème de la participation et celui des retraites, le Gouvernement donne dans la confusion des genres et ne règle rien. Vous avez couru deux lièvres à la fois mais finalement, vous êtes resté dans un immobilisme qui ne trompe personne, notamment, et M. Godfrain l'a souligné, en ce qui concerne les retraites.

La principale mesure de ce texte, l'instauration du plan partenarial d'épargne, aboutit à un dispositif d'une extraordinaire complexité, qui ne rencontrera pas le succès que


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lui promet M. Balligand. Le Gouvernement cède une fois encore à la tentation de contraindre, et je trouve qu'il ne prend pas suffisamment au sérieux les modifications apportées par le Sénat.

Je sais bien qu'il est de bon ton, dans cette assemblée, de ne pas évoquer le travail des sénateurs, mais je voudrais en rappeler la teneur, même si je dois être le seul à le faire.

Mme Nicole Bricq.

Non : le rapporteur l'a déjà fait !

M. Claude Goasguen.

Alors, ce sera pour mémoire.

M. Jean-Pierre Brard.

Pour mémoire, d'accord !

M. Claude Goasguen.

Ne méprisez pas le Sénat, monsieur Brard, c'est une assemblée parlementaire et vous avez des collègues qui y siègent !

M. Jean-Pierre Brard.

Ce n'est pas une raison !

M. Claude Goasguen.

Peut-être, mais n'insultez pas les sénateurs ! Il y avait d'abord, dans le texte sénatorial, une distinction claire entre ce qui relève de l'épargne salariale et ce qui relève de l'épargne retraite. Vous l'avez gommée.

On y trouvait aussi une simplification des dispositifs d'intéressement et de participation, les modalités de négociation du plan d'épargne interentreprises et la transformation du plan partenarial d'épargne salariale en plan glissant, idée qui me paraît très intéressante, l'échéanc e de dix ans n'étant plus fixée à partir du premier versement mais en fonction de chaque versement.

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

C'est aussi ce que nous proposons !

M. Claude Goasguen.

Les modalités d'institution du plan étaient élargies. La contribution de 8,2 % sur la fraction du versement complémentaire de l'employeur était supprimée.

Toutes ces mesures me paraissaient aller dans le bon sens et je voudrais quand même que l'on puisse en débattre.

Par ailleurs, le texte sénatorial enrichissait le volet consacré à l'actionnariat salarié en y insérant les dispositions de la proposition de loi du 16 décembre 1999 qui me paraissaient, là encore, aller dans le bon sens.

Enfin, le Sénat instaurait des plans et des fonds de retraite pour les 14 millions de salariés du secteur privé, afin de leur permettre tout simplement d'assurer leur avenir, car nous ne voyons toujours pas se profiler, en France, les solutions qui leur en donneraient les moyens.

Ce qui se passe aujourd'hui montre que le problème des retraites ne relève plus d'un débat théorique intéressant les seuls partenaires sociaux, mais que la majorité de nos concitoyens se sentent désormais concernés, car leur avenir les angoisse. Je souhaite donc, mes chers collègues, que vous écoutiez les membres de l'opposition qui vous appellent à oeuvrer utilement et avec plus de célérité dans ce domaine.

P arce que vous n'avez pas pris en compte les recommandations judicieuses du Sénat, qui nous auraient amenés à émettre un vote positif, et parce que, après avoir entendu M. Balligand, j'ai le sentiment que la tentation de la dérive vous reprend, le groupe Démocratie libérale votera vraisemblablement contre votre projet de loi sur l'épargne salariale.

M. Pascal Terrasse.

Au moins, c'est clair !

M. Jean-Pierre Brard.

Et c'est même rassurant !

M. le président.

La parole est à Mme Nicole Bricq.

Mme Nicole Bricq.

Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, si nous avions eu besoin d'une justification au vote positif que le groupe socialiste a émis en première lecture à l'Assemblée, nous l'aurions sans doute trouvée dans l'étude publiée par l'INSEE le 4 janvier, puisque l'une de nos motivations essentielles était de réduire les inégalités entre salariés. Si l'on devait, à par tir de cette étude, dresser le profil type du détenteur d'un plan d'épargne salariale, ce serait en effet un cadre, et même plutôt un cadre supérieur, disposant de bons revenus, travaillant dans une grande entreprise depuis plusieurs années et titulaire d'un contrat à durée indéterminée. Or, bien évidemment, l'objet même de notre vote était de faire en sorte que tous les salariés puissent profiter des plans d'épargne salariale.

Le bon équilibre auquel nous étions parvenus en première lecture au sein de la gauche plurielle a été détruit, au Sénat, par la réintroduction du débat sur les fonds de pension, que nous avions tranché de manière législative.

Je tiens cependant à faire une mise au point à l'intention de M. Goasguen et de M. Godfrain.

M. Jean-Pierre Brard.

Ils sont partis faire leur deuxième journée sur les trottoirs de Paris !

Mme Nicole Bricq.

Eh bien, ils liront le compte rendu.

Je veux qu'ils sachent que nous ne sommes pas terrorisés par les fonds de pension. Nous pensons simplement qu'ils sont totalement inadaptés pour régler le problème des retraites et qu'on ne peut plus raisonner, alors que nous retrouvons le chemin du plein emploi et que nous nous efforçons d'augmenter le taux d'activité dans notre pays, comme la droite a raisonné au début des années 90, pour aboutir à la loi Thomas.

Nous avons tranché sur les fonds de pension en première lecture, notamment en refusant que la sortie en capital soit remplacée par une sortie en rente. Nous n'allons pas reprendre ce débat aujourd'hui. Il faut, avec sagesse, revenir à l'équilibre du texte.

Nous avons également tranché de manière raisonnable la question de l'assujettissement à une cotisation sociale de l'abondement versé par l'entreprise en ne le prévoyant qu'au-delà de 15 000 francs. Il faut, là encore, rétablir le texte de l'Assemblée, auquel, je le souligne, certains parlementaires de l'opposition avaient contribué de façon très positive.

Nous étions enfin motivés par le renforcement des droits des salariés. A cet égard, nos collègues de la commission des affaires sociales ont fait adopter dans le projet de loi de modernisation sociale, à l'initiative du président Jean Le Garrec et d'un des trois rapporteurs, Gérard Terrier, un amendement qui vise à assurer la représentation des salariés actionnaires au conseil d'administration ou au directoire des entreprises, dès lors qu'ils détiennent 3 % du capital.

M. Jean-Pierre Brard.

Très bien ! Cet amendement reprend d'ailleurs l'une de nos propositions !

Mme Nicole Bricq.

Ayant engagé ce débat en commission des finances, nous avions pensé que la commission des affaires sociales était mieux placée pour y répondre.

Cela introduit une petite distorsion avec la disposition que nous avons nous-mêmes adoptée en première lecture, mais j'ai entendu la réponse de Mme Guigou et je pense que le problème n'est pas insurmontable. La solution retenue va dans le sens de la volonté que nous avions exprimée les uns et les autres, ce qui devrait rassurer tous nos collègues, y compris du groupe communiste.


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M. Jean-Jacques Jégou.

Surtout du groupe communiste !

Mme Nicole Bricq.

Monsieur le ministre, nous voterons bien évidemment ce texte. Il représente assurément une avancée sociale et si, du point de vue économique, il nous permet aussi de contribuer modestement à la création et au renforcement d'une épargne longue productive, nous aurons fait un très bon travail de législateur.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.

M. Jean-Pierre Brard.

C'est le pilier de la yourte mongole ! Le seul qui soutienne encore l'opposition !

M. Jean-Jacques Jégou.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voici au seuil de la deuxième lecture de ce fameux projet de loi sur l'épargne salariale. Il a fait couler beaucoup d'encre...

M. Jean-Pierre Brard.

Et de salive !

M. Jean-Jacques Jégou.

... et j'espère que ce n'aura pas été vain. Mais ce que vient de nous dire Nicole Bricq pour essayer, une dernière fois, de convaincre le groupe communiste nous inciterapeut-être à surveiller le déroulement de cette deuxième lecture.

M. Jean-Pierre Brard.

Soyez vigilant mais ne soyez pas seul !

M. Jean-Jacques Jégou.

Les salariés attendent avec impatience que ce projet aboutisse afin de pouvoir bénéficier du développement et de la croissance de leur entreprise. Depuis le début de la réflexion sur ce texte, de longs mois se sont écoulés, en faitplus d'un an et demi.

Mais après tout, c'est bien normal, quand on se souvient des polémiques de départ au sein de la gauche plurielle, qui a eu décidément bien du mal à se faire à l'idée du partage de la croissance des bénéfices avec les salariés. Ce sont ces désaccords qui ont retardé l'élaboration du projet de loi, au détriment des salariés.

Aujourd'hui, chacun devrait être rassuré, mais j'ai le sentiment que le groupe le plus important de la majorité plurielle est encore inquiet : que vont faire les communistes ?

Mme Nicole Bricq.

Ils nous l'ont dit !

M. Jean-Jacques Jégou.

Pourtant, le projet n'a pas transformé l'épargne salariale en instrument d'un capitalisme débridé, voire d'une retraite par capitalisation.

M. Jean-Pierre Brard.

C'est bien que vous le disiez, vous !

M. Jean-Jacques Jégou.

Nous sommes tous d'accord sur ce point, monsieur Brard, et je suis sûr que vous faites semblant de ne pas vous être aperçu qu'il n'était pas question de retraite par capitalisation.

M. Jean-Pierre Brard. Très bien ! Répétez-le encore !

M. Jean-Jacques Jégou.

C'est cette assurance qui permettra l'adoption du projet par la majorité, mais la conséquence est que la portée de ce texte est très atténuée, et qu'il est même vidé d'une partie de son sens, afin de ne faire peur à personne, et surtout pas au groupe de M. Brard une fois de plus, nous ne pouvons que le regretter.

Le projet sur l'épargne salariale doit avoir pour but d'associer le salarié aux résultats économiques, afin de favoriser son épanouissement et son enrichissement au sein de l'entreprise, mais aussi de lui permettre de se constituer une épargne longue, la plus importante possible, éventuellement dans l'intention de se procurer un complément de retraite pour pallier les défauts du système actuel, dont il faudra bien, monsieur le ministre, que nous discutions un jour.

En fait, il s'agit de faire en sorte que la richesse créée dans l'entreprise profite à tous. C'est le principe même du capitalisme populaire, dont la majorité plurielle n'a pas la culture et qu'elle pratique, comme M. Jourdain la prose, sans le savoir.

Les réponses que vous apportez aux attentes des salariés et des chefs d'entreprise ne sont pas très innovantes. Elles ont cependant le mérite d'exister, et notamment de permettre l'apport de capitaux nouveaux aux entreprises, qui en ont bien besoin, et l'élargissement de l'accès aux divers mécanismes d'épargne salariale.

Pour un premier coup d'essai, monsieur le ministre, ce n'est certes pas un coup de maître, loin s'en faut. Ce n'est qu'un premier pas, et il faudra approfondir la réflexion dans les années à venir. C'est d'ailleurs le problème avec votre majorité. Chaque fois que vous abordez une question, vous ne pouvez aller jusqu'au bout, afin de ne pas faire peur à telle ou telle composante de cette majorité plurielle quelque peu indisciplinée. Il faudra donc reprendre plusieurs fois l'ouvrage avant qu'il ne produise de réels effets. Pour l'instant, le fait que les Français attendent de vraies réponses ne fait pas partie des préoccupations de la majorité, dont le seul souci est de durer jusqu'aux prochaines élections.

L'examen en commission a été assez rapide et sans grand débat, le Sénat ayant apporté de réelles améliorations au texte. Le rapporteur, M. Balligand, a estimé, bien sûr, que le Sénat était resté fidèle à l'idéologi e qui est la sienne et celle de l'opposition nationale, mais qu'il avait néanmoins introduit des modifications appréciées par la commission des finances et qu'elle a décidé de conserver. Cela témoigne de l'adhésion politique de tous à ces mesures.

Le plan partenarial d'épargne salariale volontaire permet la création d'une épargne longue, ce qui est important pour le salarié, mais aussi pour l'entreprise, à laquelle ces capitaux sont bien souvent indispensables. Le PPSEV bénéficiera d'avantages supplémentaires par rapport à l'épargne plus courte. Il sera souscrit sur la base du volontariat et nous ne pouvons que l'approuver.

La mise en place d'un plan glissant est, le rapporteur l'a noté, une amélioration notable qui permettra de mieux adapter le PPSEV aux attentes des salariés.

Le débat rente-capital est oublié, et le chiffon rouge du troisième pilier de retraite écarté. C'est très bien, puisque le sujet n'est pas le même ; comme l'écrit M. Balligand, il ne faut pas « brouiller la réflexion qui est en cours sur l'avenir des régimes de retraite ». Mais, monsieur le rapporteur, il faudra bien en parler.

M. Pascal Terrasse.

Bien sûr !

M. Jean-Jacques Jégou.

Le Gouvernement réfléchit. Il est maintenant nécessaire d'agir, car les échéances se rapprochent. Les années 2005-2006 ne sont plus aussi éloignées qu'elles l'étaient en 1995 ou en 1997. La question des retraites sera au coeur des élections législatives et présidentielle. Mais, à un an de ces élections décisives, il n'est plus temps d'agir, il faut le reconnaître, sur des sujets aussi délicats. Les Français devront donc attendre au moins jusqu'en 2002.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 JANVIER 2001

Pour ce qui est du livret d'épargne salariale, il semble que le débat soit quasiment clos malgré le manque de confidentialité inhérent au dispositif envisagé. Il y a aussi, me semble-t-il, un problème de traçabilité de l'épargne.

J'ai proposé, à ce sujet, un amendement qui a été adopté par la commission des finances. Nous aurons donc, monsieur le ministre, l'occasion d'en discuter.

D'autres problèmes, en revanche, n'ont pas beaucoup avancé entre la première et la deuxième lecture. Par exemple l'économie solidaire, que personne n'est capable, aujourd'hui encore, de définir correctement.

M. Yves Cochet.

Bien sûr que si !

M. Jean-Jacques Jégou.

Monsieur Cochet, j'étais sûr que je vous réveillerais en évoquant ce sujet.

Le débat est ouvert. Ou bien l'économie solidaire tombera dans les oubliettes législatives, déjà bien remplies, ou bien sa définition verra le jour au fur et à mesure, en fonction des besoins. Mais ce n'est pas l'aspect le plus important du texte, loin de là.

Enfin, d'autres problèmes encore ont été réglés dans le projet de modernisation sociale, ce que je trouve contestable car les dispositions, adoptées la semaine dernière, concernant la place des salariés actionnaires dans les conseils d'administration des entreprises auraient dû trouver leur place dans le texte sur l'épargne salariale.

A ce propos, monsieur le ministre, je suis persuadé que, sans pouvoir le dire ici, vous n'êtes pas loin de partager mon sentiment sur l'insertion récurrente des mêmes dispositions dans des projets divers. C'est ainsi que l'abrogation de la loi Thomas figure dans plusieurs textes, sans doute pour mieux exprimer la volonté idéologique d'y mettre fin.

En l'occurrence, je ne crois pas qu'il soit de bonne politique de mélanger les genres et je pense au contraire que le projet sur l'épargne salariale a besoin de clarté.

Comme je l'ai souligné en première lecture, le groupe UDF aurait souhaité l'application de trois principes : simplicité, incitation, souplesse d'application pour les entreprises comme pour les salariés. Sur aucun de ces points nous n'avons obtenu satisfaction. Votre texte propose une épargne salariale qui n'est ni simple, ni vraiment incitative - je redoute que le démarrage soit lent -, ni, surtout, assez souple.

Le sujet, je l'ai dit, est d'une grande importance. Des millions de salariés attendent avec patience de pouvoir bénéficier d'une épargne salariale rénovée, et d'abord les plus modestes. Actuellement, un salarié sur quatre seulement est titulaire d'un plan d'épargne d'entreprise et ceux qui n'ont pas la possibilité de souscrire travaillent, pour la plupart, dans de petites structures. Quant aux chefs d'entreprise, ils ont besoin de capitaux. Dans ces conditions, malgré les faiblesses de ce projet, le groupe UDF s'abstiendra, tout en souhaitant que le débat à venir permette d'améliorer sensiblement le texte.

M. Jean-Pierre Brard.

C'est ce qu'on appelle prêcher dans le désert !

Mme Nicole Bricq.

Pas du tout : nous avons écouté attentivement M. Jégou !

M. le président.

La parole est à M. Yves Cochet.

M. Yves Cochet.

Je vous l'avoue, monsieur le ministre, je suis partagé devant ce projet de loi. D'un côté, je suis inquiet devant certaines des transformations actuelles du salariat sous l'effet de la « financiarisation » de l'économie, et devant certaines propositions de réforme de la protection sociale qui auraient pour effet de marier dangereusement la diminution du niveau des prestations, la fiscalisation du financement et l'appel à l'épargne.

Mais, d'un autre côté, après avoir lu le rapport de Foucauld-Balligand, j'estime qu'il est possible de promouvoir l'épargne salariale pour de mauvaises raisons.

La première serait de vouloir ainsi traiter un problème de déficit d'épargne, alors que, comme nous le savons tous, l'épargne en général est très abondante en France, et qu'il s'agit plutôt de rendre cette épargne économiquement plus active et moins axée sur la rente.

La seconde mauvaise raison serait de tenter de régler

« par la bande » la question de l'assurance vieillesse, comme a tenté de le faire le Sénat. De cela, il n'est pas q uestion, comme vient d'ailleurs de le confirmer

M. Jégou.

Une troisième mauvaise raison serait de chercher à dést abiliser le système salarial afin de faire échapper l'employeur soit à la rémunération fixée légalement ou contractuellement, soit au financement de la protection sociale.

La dernière mauvaise raison serait de présenter la montée en puissance de l'épargne salariale comme une solution miracle au problème de l'insuffisante maîtrise par les actionnaires « nationaux » des fonds propres des entreprises, laquelle, à l'évidence, a d'autres causes.

En fait, une réorganisation de l'épargne salariale doit orienter celle-ci vers des finalités positives.

D'abord, vers l'amélioration de la participation des salariés au gouvernement des entreprises, ce qui est bien un des buts du texte. Deuxièmement, vers la stabilisation d es fonds propres des entreprises, c'est-à-dire leur moindre volatilité. Troisièmement, et c'est ce qui m'intéresse le plus, il s'agit de réorienter les flux financiers vers des stratégies de développement plus respectueuses des équilibres territoriaux, écologiques et sociaux, et des solidarités productives et commerciales internationales.

J'ai donc tendance à considérer que c'est plutôt la désorganisation actuelle de l'offre d'épargne, son absence de transparence, la faiblesse des informations et de l'évaluation de ses impacts qui contribuent à favoriser cette

« financiarisation » excessive de notre économie et, in fine , l'exacerbation des contradictions vécues par le salarié, tantôt considéré comme membre de la communanté de travail, tantôt comme actionnaire, tantôt enfin, à l'autre bout de la chaîne, comme un consommateur. Il s'agit donc de résoudre cette « injonction paradoxale », et j'espère que ce projet de loi y contribuera.

Je me place donc plutôt dans l'hypothèse d'une orientation renforcée de l'épargne salariale vers le développement durable de l'économie solidaire, afin de lui donner plus de crédibilité et plus de sens.

C'est pourquoi, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous avons déposé neuf amendements - vous voyez notre modération - qui seront, je l'espère, favorablement accueillis par le Gouvernement et par notre assemblée, ce qui nous permettra d'exprimer un vote favorable à ce projet de loi.

M. le président.

La parole est à M. Pascal Terrasse, dernier orateur inscrit.

M. Pascal Terrasse.

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous avions déjà dégagé, lors de son examen en première lecture, les quatre principes qui fondent ce projet de loi.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 JANVIER 2001

En premier lieu, il s'agit de réaffirmer que ce texte n'a pas pour but d'augmenter le taux d'épargne, qui représente déjà aujourd'hui près de 15 % du produit intérieur brut, mais d'encourager la constitution d'une épargne plus longue et plus active, l'essentiel de l'épargne se concentrant aujourd'hui sur des produits obligataires, non productifs pour les entreprises. D'où la conséquence, que vous connaissez : près de 40 % de l'actif social de certaines entreprises cotées au CAC 40 sont aujourd'hui détenues par des non-résidents.

En deuxième lieu, le développement de l'épargne salariale ne doit pas constituer non plus une monnaie d'échange pour la réforme des retraites, qui fera l'objet, durant les prochains mois, de propositions et d'initiatives du Gouvernement, dans le prolongement du rapport Charpin et des travaux de la commission spéciale mise en place à l'initiative du Premier ministre. Les produits créés par le projet de loi n'ont pas pour but la mise en place d'une retraite par capitalisation. La répartition doit en effet demeurer le principe de notre système de retraite, système qui a prouvé son efficacité, et auquel l'ensemble de la population est attachée. Ce n'est malheureusement pas la position adoptée par les sénateurs, pour qui l'épargne retraite doit constituer l'une des finalités de l'épargne salariale, qu'ils ont réaffirmée au travers des modifications apportées au texte.

Nous ne pouvons non plus accepter une sortie en rente du PPESV. Dans le projet initial, les salariés étaient libres de choisir, à la sortie, entre le versement du capital en une fois ou le versement d'une rente. En première lecture, nous avons adopté un amendement supprimant cette dernière possibilité au profit d'un dispositif plus souple. Il s'agissait de bien marquer notre différence avec les partisans des fonds de pension, et je souhaite que nous réaffirmions cette position. Après avoir abrogé la loi Thomas qui instituait de tels fonds, notre majorité ne peut accepter ce qui équivaudrait à son rétablissement.

En troisième lieu, il n'est pas question que l'épargne salariale se développe au détriment des salaires ; elle ne doit être qu'un complément de rémunération. Il s'agit par ce texte de mieux répartir la valeur ajoutée générée par les entreprises afin de redistribuer équitablement les fruits de l'expansion. Il permettra d'attribuer aux salariés, qui ont contribué à cette création de valeur, des rémunérations qui, sans ce dispositif, ne leur auraient pas été allouées.

Enfin la modernisation de l'épargne salariale ne clôt pas la question du conflit d'intérêts persistant entre le travail et le capital : ce conflit, inscrit dans notre culture politique - dans celle de certains d'entre nous en tout cas -, a pris tout son sens lors du récent débat autour de l'amendement Michelin.

J'en viens à la représentation des salariés dans les conseils d'administration des entreprises.

Ma collègue Nicole Bricq a eu raison de rappeler que lors de sa première lecture, l'Assemblée a adopté un amendement au projet de loi de modernisation sociale, que j'avais déposé avec mon collègue Maxime Gremetz, visant à rendre obligatoire la représentation des salariés actionnaires au sein du conseil d'administration de toute entreprise dont ils détiennent au moins 3 % des parts sociales.

Pour mémoire, je rappelle que, récemment, à l'occasion d'une OPA non amicale sur un organisme financier qu'ils avaient mise en échec, des salariés actionnaires avaient demandé en contrepartie d'être représentés au sein du conseil d'administration, demande qui, malheureusement, n'a pas été suivi d'effet.

Par ailleurs, un certain nombre d'entreprises publiques qui disposaient de représentants des salariés au sein de leur conseil d'administration les ont maintenus lors de leur privatisation. J'ai eu l'occasion de rencontrer ces salariés, qui m'ont dit tout le bien qu'ils pensaient d'une telle représentation. C'est ce qu'on appelle communément la

« gouvernance d'entreprise », et je suis tout à fait satisfait que cet amendement ait pu être abordé en marge du projet de loi sur l'épargne salariale.

Enfin, le projet définit pour la première fois la notion d'économie solidaire.

M. Yves Cochet.

Très bien !

M. Pascal Terrasse.

Mon prédécesseur à cette tribune, mon collègue Yves Cochet, a, de manière excellente, présenté ce nouveau concept. Sans revenir sur sa présentation, je veux souligner que la combinaison dans notre économie d'éléments marchands et d'éléments non marchands et non monétaires me paraît essentielle.

Comme l'a rappelé Jean-Pierre Balligand dans son propos liminaire, les fonds communs de placement sont aujourd'hui très attentifs aux avancées sociales des sociétés où ils choisissent de placer des fonds. Ainsi certains fonds anglo-saxons cherchent toujours à acquérir des participations dans les entreprises socialement avancées ; il s'agit donc là d'une notion tout à fait pertinente.

Nous avions dégagé au terme de la première lecture, malgré quelques différences, un accord entre un grand nombre de parlementaires déjà présents dans l'hémicycle et qui sont à nouveau là aujourd'hui. Nous devons logiquement retrouver cet accord puisque nous sommes revenus pour l'essentiel au texte adopté à l'issue de la première lecture, texte qui a été profondément dénaturé par le Sénat.

Si l'on s'en tient aux amendements que nous connaissons et qui ont été acceptés par la commission des finances, le groupe socialiste, messieurs les ministres, votera ce projet qui s'inscrit parfaitement dans une évolution nécessaire. En tout cas, les salariés, comme cela a été rappelé par tous les parlementaires, attendent beaucoup de ce texte législatif. C'est pourquoi j'espère qu'après le vote définitif de ce projet les décrets nécessaires à son application seront très rapidement publiés. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La discussion générale est close.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

M. François Patriat, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, m'incombe maintenant la lourde tâche de remplacer Laurent Fabius, qui doit nous quitter. J'espère que, comme au Sénat, mon intervention prendra place, dans un débat serein, constructif et fécond. Et je ne doute pas, après avoir entendu les orateurs inscrits dans la discussion générale, que ces conditions sont réunies.

Je veux d'abord saluer l'intervention du rapporteur, Jean-Pierre Balligand, qui a rappelé nos objectifs : démocratiser l'épargne salariale, en faire un outil de redistribution de la valeur ajoutée et faire progresser la démocratie sociale.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 JANVIER 2001

Il a fait avec objectivité la part des choses entre les améliorations que les sénateurs ont apportées au texte et la tentation indéniable qui est la leur de confondre épargne salariale et épargne retraite.

Je veux réaffirmer, après Laurent Fabius, l'opposition très claire du Gouvernement et de la majorité aux fonds de pension. Il ne s'agit pas de confondre épargne salariale et fonds de pension. La différence n'est pas seulement sémantique, c'est une réalité que chacun des articles du texte traduit, comme lors des deux premières lectures.

Enfin, je veux exprimer l'intérêt du Gouvernement pour les améliorations apportées au texte, qui permettent notamment une affirmation plus forte de la dimension éthique et socialement responsable des placements, améliorations que votre commission des finances a adoptées.

Monsieur Charasse, vous avez insisté sur la volonté de votre groupe de sécuriser l'épargne des salariés...

M. Yves Cochet.

C'est vrai ! M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

... et de préserver les intérêts des régimes de retraite. Le Gouvernement partage ce souci, et le texte tel qu'il ressortira de cet examen en nouvelle lecture vous donnera satisfaction.

Monsieur Vila, vous avez rappelé la nécessité de démocratiser l'épargne salariale et de mobiliser l'épargne en faveur de l'investissement et de l'emploi. Vous savez que le Gouvernement partage pleinement votre point de vue ; et le texte en discussion aujourd'hui répond à ces objectifs.

Je crois pour ma part que le projet de loi institue un bon équilibre entre ces objectifs et le souci d'assurer un développement dynamique des produits d'épargne salariale et de l'actionnariat salarié. Comme l'a rappelé Mme Nicole Bricq, c'est bien le sens des choix opérés en première lecture dans cet hémicycle, comme la sortie en capital à l'issue du PPESV, ou le seuil de 15 000 francs à compter duquel l'abondement de l'entreprise est taxé. Ces mesures s'ajoutent à la disposition adoptée lors du débat sur le projet de loi de modernisation sociale, rendant obligatoire la représentation des salariés au conseil d'administration des entreprises à partir d'un seuil de 3 % d'actionnariat salarié, disposition approuvée par le Gouvernement.

Monsieur Cochet, le Gouvernement a bien compris votre préoccupation d'orienter une partie significative des fonds de l'épargne salariale vers le développement durable de l'économie solidaire, et je pense que nos propositions vous donneront globalement satisfaction.

Monsieur Godfrain, chacun connaît dans cet hémicycle votre attachement à la participation des salariés aux résultats de leur entreprise. Toutefois, j'avoue ne pas bien comprendre le lien que vous tenez absolument à établir entre l'épargne salariale et l'épargne retraite. Vous savez pourtant comme moi que ce sont là des questions différentes, qui doivent être traitées différemment. Et si le soutien du groupe RPR dépend de l'adoption des dispositions relatives à l'épargne retraite, je crains de devoir m'en passer. J'ai déjà eu ce débat avec les sénateurs et j'ai déjà fait les mêmes réponses.

Monsieur Jégou, sachez que les salariés attendent que ce projet aboutisse. Le fait qu'il ne permette pas la retraite par capitalisation ne le vide pas d'une partie de son sens, contrairement à ce que vous prétendez. Je vous remercie cependant d'avoir reconnu que ce texte répond aux attentes des salariés et des employeurs, notamment ceux des PME, bien que vous regrettiez qu'il n'aille pas assez loin. Peut-être le succès que rencontreront les dispositions que l'Assemblée va adopter vous donnera-t-il raison sur ce point.

Vous avez dit souhaiter la simplicité, la souplesse et le caractère incitatif des dispositions relatives à l'épargne salariale. C'est pourquoi je regrette que le groupe UDF n'aille pas jusqu'à approuver un texte qui réunit toutes ces qualités.

M. Goasguen nous a accusés de vouloir rigidifier et complexifier la mise en place de l'épargne salariale. Le Gouvernement ne partage pas cette appréciation. En ce qui concerne l'opposition entre capital et travail qu'il nous reproche, nous ne faisons que constater une réalité ! Quant à la question des retraites, sachez que nous nous y attaquons, mais ce n'est pas l'objet du texte aujourd'hui en discussion.

Enfin, M. Terrasse a eu raison de rappeler notre volonté de faire de l'épargne salariale un outil de redistribution de la valeur ajoutée, et d'insister sur les attentes des salariés.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) Discussion des articles

M. le président.

J'appelle maintenant dans les conditions prévues par l'article 91, alinéa 9 du règlement, les articles du projet de loi sur lesquels les deux assemblées du Parlement n'ont pu parvenir à un texte identique, dans le texte du Sénat.

Article 1er A

M. le président.

« Art. 1er A. I. L'intitulé du livre IV du code du travail est ainsi rédigé : " Les groupements professionnels, la représentation des salariés, l'intéressement, la participation et les plans d'épargne salariale ".

« II. L'intitulé du titre IV du livre IV du même code est ainsi rédigé : "Intéressement, participation et plans d'épargne salariale". »

Je mets aux voix l'article 1er A. (L'article 1er A est adopté.)

Avant l'article 1er

M. le président.

M. Cuvilliez, M. Vila et les membres du groupe communiste ont présenté un amendement, no 93, ainsi libellé :

« Avant l'article 1er , insérer l'article suivant :

« I. - Dans le premier alinéa de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, après les mots : "avantages en argent", sont insérés les mots : "les versements et abondements des plans d'épargne constitués en vertu des dispositions du titre IV du livre IV du code du travail".

« II. - Les dispositions de l'article L. 441-4 du code du travail sont abrogées.

« III. - Le dernier alinéa du I de l'article L. 442-8 du même code est ainsi rédigé :

« Elles ne sont pas soumises à la taxe sur les salaires prévus à l'article 231 du code général des impôts. »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 JANVIER 2001

La parole est à M. Jean Vila.

M. Jean Vila.

Vous savez combien nous tenons à ce que l'épargne salariale ne se transforme pas en un élément de rémunération venant se substituer au salaire. Cet amendement vise en conséquence à remettre en cause l'exonération de prélèvements sociaux accordée dans le cadre de l'épargne salariale pour les dispositifs existants ou pour ceux à venir, parce qu'elle prive les caisses de sécurité sociale et de retraite de ressources précieuses. Elle s'avère donc être un cadeau empoisonné pour les salariés parvenant à l'âge de la retraite. En effet, cette partie des revenus perçus durant la période d'activité n'ayant pas été soumise à cotisation à la caisse vieillesse, la retraite perçue sera diminuée d'autant, parfois de manière substantielle.

L'adoption de cet amendement ne mettrait pas en cause l'attractivité d'une épargne salariale qui continuerait à bénéficier d'un régime fiscal très favorable, mais elle aurait pour mérite de mettre nos actes en cohérence avec la conviction, partagée sur tous les bancs de la majorité, qu'il faut conforter notre système de protection sociale et de retraite fondé sur la répartition.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

La commission a repoussé l'amendement de M. Cuvilliez et de M. Vila.

Sans revenir sur la discussion que nous avons eue en première lecture, je voudrais rappeler les deux thèses en présence.

La première reconnaît un rôle important à l'épargne salariale, à la condition quelle soit encadrée par les conseils de surveillance des FCPE ou les syndicats, comme c'est déjà le cas en France.

La seconde rejette toute possibilité d'épargne salariale dans notre pays.

Je rappelle de surcroît que l'abondement patronal peut être tout à fait substantiel, y compris dans des dispositifs mis en place par de grands groupes français. Chez SaintGobain, par exemple, pour 1 000 francs versés par le salarié, l'employeur verse 3 000 francs, jusqu'à un montant total de 13 000 francs par an. Dans le cadre du travail accompli avec Jean-Baptiste de Foncauld, qui a abouti à la rédaction d'un rapport remis au Premier ministre avant le dépôt de ce projet, j'ai été amené à rencontrer les repré sentants des salariés, y compris ceux appartenant à des organisations syndicales comme la CGT ou la CFDT.

Or je n'ai rencontré personne qui soit opposé à l'épargne salariale. Au contraire, le souhait exprimé est d'aller vers une plus grande démocratisation et la généralisation de ce dispositif, souhait repris par le rapport, et que le Gouvernement a satisfait par ce projet de loi.

Nous l'avions déjà expliqué en première lecture, et Mme Bricq et moi-même l'avons rappelé tout à l'heure : si l'épargne salariale était très développée en France, l'amendement adopté en première lecture à votre initiative aurait bien évidemment un sens.

Nous avions trouvé un compromis qui permettait de ne pas freiner le développement de l'épargne salariale. En effet, l'étude que j'ai citée, de même que Mme Bricq, montre que la structure de l'épargne salariale n'est pas suffisamment démocratisée dans notre pays. C'est à quoi le dispositif essaie de remédier, en prévoyant un assujettissement à partir d'un montant de 15 000 francs, ce qui suppose une épargne salariale importante. Mais s'il s'agit de tuer ce dispositif, ce n'est même plus la peine de légiférer sur cette question. C'est la raison pour laquelle nous avons repoussé cet amendement.

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation, pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement no

93. M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Cet amendement a pour objet de faire prendre en compte dans la législation du travail et de la sécurité sociale les versements et abondements effectués par les employeurs dans le cadre de l'épargne salariale. Une telle mesure, Jean-Pierre Balligand vient de le rappeler à l'instant, entraînerait un dépérissement de l'épargne salariale alors que l'ambition du Gouvernement est précisément de la développer, au bénéfice des salariés, des employeurs et de l'économie française. De surcroît, l'article 8 de la loi introduit une disposition qui prohibe expressément la substitution des abondements des employeurs aux salaires.

Dans ces conditions, partageant l'argumentation du rapporteur, le Gouvernement ne peut être favorable à cet amendement qui remettrait en cause le régime social des versements et abondements des employeurs, et serait c ontraire à l'objectif du Gouvernement en matière d'épargne salariale.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

93. (L'amendement n'est pas adopté.)

Article 1er

M. le président.

« Art. 1er . - I. - Le chapitre IV du titre IV du livre IV du code du travail est complété par un article L. 444-4 ainsi rédigé :

« Art. L. 444-4. - Tous les salariés d'une entreprise compris dans le champ des accords d'intéressement et de participation prévus aux chapitres Ier et II du présent titre ou des plans d'épargne prévus au chapitre III du même titre doivent pouvoir bénéficier de leurs dispositions.

Toutefois, une condition d'ancienneté dans l'entreprise ou dans le groupe défini à l'article L. 444-3 peut être exigée. Elle ne peut excéder trois mois. Pour la détermination de l'ancienneté éventuellement requise sont pris en compte tous les contrats de travail exécutés au cours de la période de calcul et des douze mois qui la précèdent. Le salarié lié par un contrat de travail temporaire est réputé compter trois mois d'ancienneté dans l'entreprise ou dans le groupe défini à l'article L. 444-3 qui l'emploie s'il a été mis à la disposition d'entreprises utilisatrices pendant une durée totale d'au moins soixante jours au cours du dernier exercice. »

« II. - Non modifié. »

M. Balligand a présenté un amendement, no 121, ainsi rédigé :

« Compléter le I de l'article 1er par l'alinéa suivant :

« La condition maximale d'ancienneté de trois mois, prévue à l'alinéa précédent, remplace de plein droit, à compter de la date de publication de la loi no du sur l'épargne salariale, toute condition maximale d'ancienneté supérieure figurant dans les accords d'intéressement et de participation et dans les règlements de plan d'épargne d'entreprise en vigueur à cette même date. »

La parole est à M. Jean-Pierre Balligand.

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Cet amendement précise les conditions d'entrée en vigueur de la diminution de l'ancienneté minimale requise pour bénéficier des


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dispositifs d'épargne salariale. Le délai de condition maximale d'ancienneté de trois mois que nous avons introduit p ermet au salarié d'avoir plus rapidement accès à l'épargne salariale. Nous proposons simplement que cette condition s'applique de plein droit aux accords d'intéressement et de participation en vigueur, comme aux règlements de PEE.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Le Gouvernement est favorable à cet amendement. Le but est de préciser les conditions d'entrée en vigueur de la diminution de l'ancienneté minimale requise pour bénéficier de l'épargne salariale en indiquant que la condition maximale d'ancienneté exigible de trois mois se substitue de plein droit à toute condition supérieure dans les accords déjà en vigueur ; cela semble tout à fait pertinent.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 121.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'article 1er , modifié par l'amendement no 121.

(L'article 1er , ainsi modifié, est adopté.)

Article 2

M. le président.

« Art. 2. - I. - Le code du travail est ainsi modifié :

« 1o Le chapitre IV du titre IV du livre IV est complété par un article L. 444-5 ainsi rédigé :

« Art. L. 444-5. - Tout salarié quittant l'entreprise reçoit un état récapitulatif de l'ensemble des sommes et valeurs mobilières épargnées au sein de l'entreprise dans le cadre des dispositifs prévus aux chapitres Ier à III du p résent titre ou transférées conformément à l'article L. 443-2 ; cet état distingue les actifs disponibles, en mentionnant tout élément utile au salarié pour en obtenir la liquidation ou le transfert, et ceux qui sont affectés au plan prévu à l'article L. 443-1-2, en précisant les échéances auxquelles ces actifs seront disponibles ainsi que tout élément utile au transfert éventuel vers un autre plan. »

;

« 2o L'article L. 443-2 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Les sommes détenues dans un plan d'épargne d'entreprise dont le salarié n'a pas demandé la délivrance lors de la rupture de son contrat de travail et qu'il affecte au plan d'épargne d'entreprise de son nouvel employeur ne sont pas prises en compte pour l'appréciation du plafond mentionné à l'alinéa précédent. Les montants transférés entraînent la clôture du plan précédent et ne donnent pas lieu au versement complémentaire de l'entreprise prévu à l'article L. 443-7. Les conditions dans lesquelles le transfert peut être réalisé sont fixées par décret en Conseil d'Etat.

« Les sommes détenues dans un plan d'épargne interentreprises que le salarié affecte à un plan d'épargne interentreprises de même durée minimum de placement auquel a adhéré son employeur ou à un plan d'épargne d'entreprise conclu dans son entreprise ne sont pas prises en compte pour l'appréciation du plafond prévu au deuxième alinéa. les conditions dans lesquelles le transfert peut être réalisé sont fixées par le décret en Conseil d'Etat mentionné à l'alinéa précédent. »

;

« 2o bis Après le neuvième alinéa de l'article L. 442-5, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les sommes détenues par un salarié, au titre de la réserve spéciale de la participation des salariés aux résultats de l'entreprise, dont il n'a pas demandé la délivrance au moment de la rupture de son contrat de travail, peuvent être affectées dans le plan d'épargne de son nouv el employeur. Les sommes qu'il affecte au plan d'épargne d'entreprise de son nouvel employeur ne sont pas prises en compte pour l'appréciation du plafond mentionné au premier alinéa de l'article L. 443-2. Les montants transférés, suivant des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat, ne donnent pas lieu au versement complémentaire de l'entreprise prévu à l'article L. 443-7. »

;

« 3o L'article L. 443-6 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Pour l'appréciation de ce délai, les périodes d'indisponibilité déjà courues correspondant aux sommes transférées en application de l'article L. 443-2 sont prises en compte, sauf si ces sommes sont utilisées pour souscrire à u ne augmentation de capital prévue à l'article L. 443-5. »

;

« 4o Le premier alinéa de l'article L. 442-7 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Pour l'appréciation de ce délai, les périodes d'indisponibilité déjà courues correspondant aux sommes transférées en application du dixième alinéa de l'article L. 442-5 sont prises en compte, sauf si ces sommes sont utilisées pour souscrire à une augmentation de capital prévue à l'article L. 443-5. »

« II Non modifié »

M. Balligand, rapporteur a présenté un amendement, no 1, ainsi rédigé :

« I. - Dans le troisième alinéa du I de l'article 2, après les mots : "valeurs mobilières épargnées", insérer les mots : "ou transférées".

« II. - En conséquence, dans le même alinéa, supprimer les mots : "ou transférées conformément à l'article L. 443-2". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Amendement rédactionnel.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

1. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Balligand, rapporteur a présenté un amendement, no 2, ainsi rédigé :

« Après le troisième alinéa du I de l'article 2, insérer l'alinéa suivant :

« L'état récapitulatif est inséré dans un livret d'épargne salariale dont les modalités de mise en place et le contenu sont fixées par un décret en Conseil d'Etat. »

Sur cet amendement, M. Jégou a présenté un sousamendement, no 114, ainsi rédigé :

« Compléter l'amendement no 2 par l'alinéa suivant :

« Le numéro INSEE est la référence pour la tenue du livret du salarié. Il peut figurer sur les relevés de compte individuels et l'état récapitulatif. »


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La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement no

2.

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Cet amendement, dont j'ai parlé dans la discussion générale, vise à rétablir le texte que nous avions adopté en première lecture sur la création du livret d'épargne salariale, supprimé par le Sénat.

L'objectif est d'assurer une « traçabilité » pour le salarié. Un système de suivi, en particulier lorsqu'il s'agit d'un PPESV, c'est-à-dire un plan d'épargne à long terme, sur dix ans, est indispensable pour le salarié qui change d'entreprise. Il a besoin d'un état récapitulatif, que celui-ci soit matérialisé ou non. Le sous-amendement no 114 propose même de se servir du numéro INSEE comme référence pour la tenue du livret du salarié.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Jacques Jégou pour présenter le sous-amendement no 114.

M. Jean-Jacques Jégou.

Comme vient de le dire notre rapporteur, Jean-Pierre Balligand, nous avons rétabli en commission des finances le fameux livret d'épargne salariale, qui apporte une sécurité supplémentaire aux salariés.

Cela dit, le risque existe de l'égarer ... Dans le souci d'assurer une « traçabilité » pour prendre les termes du rapporteur, nous proposons d'apporter une sécurité suplémentaire en retenant le numéro INSEE comme référence pour la tenue du livret du usalarié.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur ce sous-amendement ?

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Ce sous-amendement ayant été adopté à l'unanimité par la commission des finances, je ne puis qu'y être favorable. Je propose toutefois de le rectifier en remplaçant l'expression :

« numéro INSEE » par celle, plus explicite, de « numéro d'inscription au répertoire national d'identification des personnes physiques ».

M. Jean-Jacques Jégou.

D'accord.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement no 2 et le sous-amendement no 114 ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

L'amendement de la commission tend à rétablir le livret d'épargne salariale. Comme il s'en est déjà expliqué lors du débat en première lecture, le Gouvernement n'y est pas favorable. En effet, si nous partageons le souci de votre rapporteur d'assurer une information complète et correcte des salariés, qui leur permette de suivre l'évolution des sommes épargnées dans le cadre des différents plans, l'institution par la loi d'un livret d'épargne salariale ne nous paraît pas souhaitable, car ce type de document n'apporte en soi aucune information supplémentaire. En revanche, il nous semblerait utile que les informations données aux salariés fassent l'objet d'une normalisation, en liaison avec les professionnels de la gestion collective.

Ce travail devrait pouvoir aboutir dans des délais très brefs après le vote de la loi. C'est la raison pour laquelle, au bénéfice de cet engagement, le Gouvernement souhaiterait que la commission retire l'amendement no

2. Vous comprendrez, monsieur Jégou, que si le Gouvernement n'est pas favorable au livret d'épargne salariale, il l'est encore moins à votre sous-amendement no 114.

Celui-ci conduirait à centraliser sans l'accord des intéressés des informations sur leur patrimoine. Une telle proposition nous semble de nature à porter atteinte aux libertés individuelles.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Le rapporteur, comme la majorité des membres de la commission des finances, n'entend pas plier devant le Gouvernement sur ce point, d'autant plus qu'il s'agit à ses yeux d'une fausse querelle. Il n'est évidemment pas question de créer un livret matérialisé dont le coût pourrait être élevé. L'es sentiel pour le salarié est d'avoir un état récapitulatif. Mieux vaut l'indiquer dans le texte de loi, et renvoyer au décret pour les modalités d'application.

Quant à la proposition de notre collègue Jégou, mes collègues, y compris le président de la commission des finances, ont estimé qu'elle n'était pas inintéressante.

Aussi avons-nous accepté son sous-amendement no 114, qui participe du même esprit que le rétablissement du livret d'épargne salariale.

Nous entendons évidemment que l'accès direct à cet état récapitulatif soit réservé au seul salarié, et non ouve rt à l'entreprise. Croyez que nous avons bien examiné cet aspect des choses ; nous n'avons nullement l'intention de rappeler de mauvais souvenirs en France et de permettre à l'entreprise de savoir, par le biais de ce livret, par où est passé le salarié auparavant ; ce livret appartient bien en propre au salarié.

Les sociétés de gestion ont d'ailleurs déjà réfléchi pour donner corps à ce dispositif. Dès lors que nous renvoyons les modalités concrètes au décret, pourquoi le législateur ne pourrait-il pas manifester dans la loi sa volonté d'assurer au salarié une « traçabilité » ce n'est pas le bon terme -, et de leur permettre de retrouver, en particulier pour les plus modestes ? Je vous ai indiqué les chiffres tout à l'heure : les détenteurs les plus nombreux de l'épargne salariale en France ne sont pas les salariés qui gagnent 8 000 francs ou moins. Ce projet consiste précisément à élargir la population des intéressés, en ouvrant l'accès à l'épargne salariale aux salariés jusqu'alors les moins informés. Plus que les autres, ceux-ci ont besoin de retrouver les entreprises où ils ont travaillé et combien d'argent a été mis sur leur compte, en particulier au titre de la participation, bloquée pendant cinq années, qui représente aujourd'hui beaucoup plus qu'il y a dix ans, et qui vient directement alimenter les plans d'épargne entreprise. Ce livret est pour eux fondamental. Il n'est pas obligatoire, je le répète, qu'il soit matérialisé et nous laissons au pouvoir réglementaire le soin de définir les modalités concrètes d'application.

Par conséquent, nous ne retirons pas l'amendement no

2.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.

M. Jean-Jacques Jégou.

Monsieur le secrétaire d'Etat, j'aimerais que vous vous rappeliez que vous êtes le ministre des PME...

M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Et des consommateurs !

M. Jean-Jacques Jégou.

... et des consommateurs réunis. Je suis moi-même un ancien patron de PME...

M. André Vauchez.

Un bon patron ?

M. Jean-Jacques Jégou.

Vous savez que notre principal souci, dans le contexte d'une croissance qui conduit de plus en plus de salariés à aller d'un employeur à un autre, est de développer l'épargne salariale dans les petites et moyennes entreprises. Or il nous est apparu intéressant, sinon indispensable, qu'un document regroupe l'ensemble de l'« avoir » du salarié.


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Je vois que votre administration vous a déjà soufflé un certain nombre de renseignements, et indiqué le contenu d'une intervention à laquelle vous n'avez pas assisté,...

M. Daniel Feurtet.

Ne soyez pas désagréable !

M. Jean-Jacques Jégou.

... mais de là à parler d'atteinte aux libertés individuelles ! Quelle honte y aurait-il pour un salarié à retirer l'épargne salariale à laquelle il a droit dans son entreprise ? Ne devrait-il pas enfin pouvoir en éprouver de la fierté ? Pourquoi parler de patrimoine secret ou encore d'atteinte à la liberté, au motif qu'il existerait un document retraçant tout ce qu'il a, grâce à son propre mérite évidemment et à celui de son entreprise, récolté durant toute sa carrière professionnelle ? Ne nous mettons pas à délirer ! Nous avons, tout au contraire, la volonté de rendre service au salarié, voire à son nouvel employeur, en prenant le numéro INSEE, comme moyen d'identification. Ma contribution à l'amendement no 2 du rapporteur répond au même souci de pérenniser, de suivre l'épargne salariale du salarié tout au long de sa carrière.

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Monsieur Jégou, il est vrai que je n'étais pas là lorsque vous êtes intervenu, mais je n'en ai pas moins pris connaissance de votre intervention dès mon arrivée.

Le Gouvernement n'est pas insensible aux arguments que vient de développer le rapporteur. Nous visons les mêmes objectifs et partageons la même volonté de ne pas léser les salariés en leur garantissant une traçabilité afin qu'ils puissent être en tous points informés. Aussi, dans la mesure où le rapporteur précise que ce livret ne sera pas matérialisé, mais qu'il sera bien tel que nous le prévoyions et que je l'ai expliqué dans ma réponse, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée.

Mais de là à prendre le numéro INSEE, monsieur Jégou, je ne puis y être favorable sans avoir mené une expertise préalable, et notamment sans avoir interrogé la commission nationale de l'informatique et des libertés. Laissez-nous le temps de l'interrogation et de la réflexion avant de revoir votre proposition en troisième lecture. Pour l'instant en tout cas, je demande le retrait de votre sous-amendement.

M. le président.

Etes-vous d'accord, monsieur Jégou, avec la rectification suggérée par le rapporteur, consistant à remplacer dans votre sous-amendement les mots :

« numéro INSEE » par les mots : « numéro d'inscription au répertoire national d'identification des personnes physiques » ?

M. Jean-Jacques Jégou.

J'ai donné mon accord tout à l'heure, monsieur le président.

M. le président.

Le sous-amendement no 114 est donc ainsi rectifié.

M. Jean-Jacques Jégou.

Quant à retirer mon sousamendement, la commission l'a adopté et je m'en remets au rapporteur.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

L'amendement no 2 a été examiné au titre de l'article 88 du règlement et adopté par la commission. Nous ne sommes pas en dernière lecture. Le Gouvernement a donc tout le temps de trouver une rédaction qui tienne compte de la volonté du législateur. Je propose tout simplement de maintenir l'amendement no 2 tel qu'il a été adopté en commission, de même que le sous-amendement no 114 rectifié de M. Jégou.

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 114 rectifié.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président.

Je constate que le vote a été acquis à l'unanimité. Je mets aux voix l'amendement no 2, modifié par le sous-amendement no 114 rectifié.

(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président.

M. Balligand a présenté un amendement, no 142, ainsi rédigé :

« A la fin de la première phrase du dernier alinéa du 2o du I de l'article 2, substituer au mot : "deuxième" le mot : "premier".

La parole est à M. Jean-Pierre Balligand.

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Amendement de coordination.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 142.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'article 2, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 2, ainsi modifié, est adopté.)

Article 3

M. le président.

« Art. 3. - I. - Le chapitre IV du titre IV du livre IV du code du travail est complété par un article L.

444-3-1 ainsi rédigé :

« Art. L.

444-3-1. - Les dispositifs prévus aux chapitres Ier , II et III du présent titre peuvent être mis en place au sein d'un groupe d'entreprises incluses dans le même périmètre de consolidation ou de combinaison des comptes en application de l'article L.

233-16 du code de commerce ou, s'agissant des établissements de crédit, de l'article 54 de la loi no 84-46 du 24 janvier 1984 relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit, s'agissant des entreprises régies par le code des assurances, de l'article L.

345-2 de ce code et, s'agissant des institutions de prévoyance, de l'article L.

931-34 du code de la sécurité sociale. Ces dispositifs peuvent également bénéficier aux salariés de la société ou des sociétés qui lui sont l iées au sens de l'article L.

225-180 du code de commerce. Ils peuvent par ailleurs être mis en place au sein d'un groupe constitué par des sociétés régies par la loi no 47-1775 du 10 septembre 1947 précitée, les unions q u'elles ont constituées et les filiales que celles-ci détiennent.

« Les accords et les plans de groupe intervenus en application des dispositions des chapitres Ier , II et III du présent titre conclus antérieurement à la promulgation de la loi no 30 du 30 sur l'épargne salariale, l'actionnariat salarié et l'épargne retraite continuent à produire leurs effets. »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 JANVIER 2001

« II. - L'article L.

443-3 du même code est ainsi modifié :

« 1o Aux cinquième et dernier alinéas, après les mots ; "émises par l'entreprise", sont insérés les mots : "ou par une entreprise du groupe au sens de l'article L.

444-3" ;

« 2o Au cinquième alinéa, les mots : "françaises diversifiées" sont remplacés par les mots : "diversifiées émises par une personne morale ayant son siège dans un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen" » ;

« 2o bis Le cinquième alinéa est complété par les mots : ", en ce compris les titres de capital émis par les entreprises régies par la loi no 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération, sans préjudice des dispositions spécifiques qui régissent le cas échéant la souscription de ces titres par les salariés" ;

« 2o ter Le sixième alinéa est supprimé :

« 3o Le dernier alinéa est complété par les mots : "pour la gestion de cet investissement". »

M. Balligand, rapporteur, a présenté un amendement, no 3, ainsi libellé :

« I. - Rédiger ainsi le premier alinéa du I de l'article 3 :

« I. - L'article L.

444-3 du code du travail est ainsi rédigé : ».

« II. - En conséquence, dans le deuxième alinéa du I, substituer à la référence : "Art. L.

444-3-1" la référence : "Art. L.

444-3". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Retour au texte adopté en première lecture, c'est-à-dire à la référence à l'article L.

444-3 du code du travail.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

3. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Balligand a présenté un amendement, no 133, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi les deuxième et dernier alinéas du I de l'article 3 :

« L'intéressement, la participation ou un plan d'épargne d'entreprise peut être mis en place au sein d'un groupe constitué par des entreprises juridiquement indépendantes, mais ayant établi entre elles des liens financiers et économiques.

« Toutefois, les dispositions de l'article L.

443-5 et du deuxième alinéa de l'article L.

443-7 ne peuvent s'appliquer qu'au sein d'un groupe d'entreprises incluses dans le même périmètre de consolidation ou de combinaison des comptes en application de l'article L.

233-16 du code de commerce ou, s'agis-s ant des établissements de crédit, de l'article L.

511-36 du code monétaire et financier, s'agissant des entreprises régies par le code des assurances, de l'article L.

345-2 de ce code, s'agissant des mutuelles, des dispositions du code de la mutualité et, s'agissant des institutions de prévoyance de l'article L.

931-34 du code de la sécurité sociale. Ces dispositifs peuvent également être mis en place au sein d'un groupe constitué par des sociétés régies par la loi no 47-1775 du 10 septembre 1947 précitée, les unions qu'elles ont constituées et les filiales que celles-ci détiennent. »

La parole est à M. Jean-Pierre Balligand.

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

La nouvelle définition du groupe, telle qu'elle est proposée à l'article 3, a donné lieu à de longs débats dans cet hémicycle, puis au Sénat, où la rédaction est devenue de plus en plus obscure... Le problème tenait en fait à la différence entre l'actuelle définition de la notion de groupe, très large, figurant dans la circulaire de 1995, et celle, plus restrictive, proposée à l'article 3.

En première lecture, l'Assemblée nationale et le Sénat ont tâtonné pour éviter que des accords existants, fondés sur l'ancienne définition du groupe, ne puissent être maintenus en vie. Des amendements de plus en plus extensifs, venant en particulier, pour être franc, des secteurs coopératif et associatif et mutualiste, ont été adoptés sans que l'on en mesure très bien les conséquences.

Soucieux de donner une cohérence et une bonne lisibilité au texte, j'ai proposé une nouvelle rédaction globale de l'article 3 qui prévoit deux définitions distinctes. La première s'applique à la participation, à l'intéressement et au plan d'épargne entreprise et reprend la définition très large du groupe telle qu'elle figure dans la circulaire de 1995. Les accords passés sont donc couverts et de nouveaux accords pourront encore être conclus. La seconde définition, très restrictive, ne serait exigée que dans le cas des augmentations de capital réservées aux salariés, pour lesquelles elle a sa pleine signification.

J'ai essayé, par cet amendement, d'apporter une réponse aux collègues qui défendent le secteur associatif, les coopératives HLM par exemple, qui sont beaucoup intervenus sur cette question, ou encore le secteur mutualiste. Ce n'est pas très facile. Telle est la raison de cette réécriture de l'article 3.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Monsieur le rapporteur, j'ai bien écouté votre intervention. Je comprends votre souci d'élargir la notion de groupe. La formule que vous proposez nous paraît néanmoins complexe, car elle aboutit à prendre en compte pour les accords de participation et d'intéressement une notion différente de celle retenue pour les augmentations de capital réservées aux salariés. Or l'intéressement et la participation sont également des sources d'alimentation de l'actionnariat salarié.

Le Gouvernement avait jugé plus simple de retenir une notion de groupe unique. C'est pourquoi il était plus favorable à l'amendement no 4 corrigé de la commission des finances, qui faisait référence à des liens capitalistiques très larges, puisqu'il suffira d'un lien de 10 % pour que l'accord de groupe puisse être mis en place.

De surcroît, le texte prévoit déjà les dispositions particulières pour les mutuelles et les sociétés coopératives, que vous évoquiez à la fin de votre intervention, ainsi qu'une clause de non-remise en cause des accords existants.

Cela dit, compte tenu de l'accord qui semble avoir été trouvé au sein de la commission et des éléments que vient d'avancer M. le rapporteur, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée nationale.

M. Jean-Pierre Balligand.

C'est vous qui êtes sage, monsieur le secrétaire d'Etat !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 133.

(L'amendement est adopté à l'unanimité.)

M. le président.

Je relève que le vote a été acquis à l'unanimité.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 JANVIER 2001

En conséquence, les amendements nos 4 corrigé de la commission, 116 de M. Jégou, 151 du Gouvernement, 5 et 6 de la commission, 134 de M. Balligand et 115 de M. Jégou tombent.

M. Balligand, rapporteur, a présenté un amendement, no 7, ainsi rédigé :

« Dans le deuxième alinéa (1o ) du II de l'article 3, après les mots : "une entreprise du", insérer le mot : "même". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Amendement de précision.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

7. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Balligand, rapporteur, a présenté un amendement, no 8 rectifié, ainsi rédigé :

« Compléter l'article 3 par le paragraphe suivant :

« III. Dans le dernier alinéa de l'article L.

443-7 du même code, la référence : "L.

225-180 du code d e commerce" est remplacée par la référence "L.

444-3". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Je retire l'amendement no 8 rectifié puisque l'amendement no 133 a été adopté.

M. le président.

L'amendement no 8 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l'article 3, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 3, ainsi modifié, est adopté.)

Article 3 ter

M. le président.

« Art. 3 ter I. L'article L.

442-1 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les entreprises constituant une unité économique et sociale reconnue dans les conditions prévues au dernier alinéa de l'article L.

431-1 et employant habituellement au moins cinquante salariés sont également soumises aux obligations de la présente section, qu'elles mettent en oeuvre soit par un accord unique couvrant l'unité économique et sociale, soit par des accords distincts couvrant l'ensemble des salariés de ces entreprises. »

« II. L'article L.

442-4 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsqu'un accord unique est conclu au sein d'une unité économique et sociale en application de l'article

L. 442-1, la répartition des sommes est effectuée entre tous les salariés employés dans les entreprises constituant l'unité économique et sociale sur la base du total des réserves de participation constituées dans chaque entreprise. »

Je mets aux voix l'article 3 ter

(L'article 3 ter est adopté.)

Article 3 quater A

M. le président.

« Art. 3 quater A. I. - Le cinquième alinéa (3) de l'article L.

442-5 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Ces sommes sont rémunérées pour tous les salariés à un taux identique qui ne peut être inférieur à celui qui est fixé chaque année par arrêté du ministre chargé des finances ; »

« II. Dans le deuxième alinéa de l'article L.

442-12 du même code, après les mots : "à un taux fixé", sont insérés les mots : "chaque année". »

M. Balligand, rapporteur, a présenté un amendement, no 9, ainsi rédigé :

« Supprimer l'article 3 quater A. » La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Outre le fait que le dispositif adopté par le Sénat n'est guère opérant, rien n'interdirait aux arrêtés annuels successifs de reconduire les mêmes taux. L'article irait à l'inverse du but visé par ses rédacteurs s'il aboutissait à faciliter la diminution de la rémunération minimale des comptes courants bloqués.

Il s'agit du dispositif - que le Sénat a voulu introduire de réactualisation des fonds bloqués de la participation.

Comme le système actuellement en vigueur est satisfaisant, j'ai proposé la suppression de cet article supplémentaire.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Le Gouvernement partage l'avis du rapporteur. En effet, l'arrêté de rémunération des comptes courants bloqués doit être pris en fonction de l'évolution des taux d'intérêts et non en fonction d'une périodicité programmée comme telle. Cela me paraît être la sagesse. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement est favorable à l'amendement no

9.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

9. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

En conséquence, l'article 3 quater A est supprimé.

Article 3 quater

M. le président.

Le Sénat a supprimé l'article 3 quater.

M. Balligand, rapporteur, a présenté un amendement, no 10, deuxième rectification, ainsi rédigé :

« Rétablir l'article 3 quater dans la rédaction suivante :

« Le deuxième alinéa de l'article L.

442-7 du code du travail et les deuxième et septième alinéas du paragraphe II de l'article L.

442-8 sont abrogés.

Toutefois, leurs dispositions demeurent applicables dans leur rédaction antérieure à la publication de la présente loi, aux accords en vigueur à cette même date. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Dans le cadre des travaux que nous avions conduits avec Jean-Baptiste de Foucauld, on nous avait demandé de rechercher la simplification.

Normalement, les sommes de la participation sont bloquées pendant cinq ans. Mais il existe aussi un dispositif où elles ne le sont que trois ans et qui a été adopté par 1,3 % des entreprises. Si on veut simplifier le dispositif, il est préférable de n'avoir qu'un seul système, retenant le délai de cinq ans. Les salariés auront ainsi une bonne lisi-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 JANVIER 2001

bilité de l'ensemble des dispositifs. Comme cela ne concerne pas beaucoup d'accords, le mieux est de généraliser le délai de cinq ans.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Le Gouvernement est très attaché à toutes les mesures de simplification. Celle-ci en est une par anticipation et il y est par conséquent favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 10, deuxième rectification.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

En conséquence, l'article 3 quater est ainsi rétabli.

Article 3 quinquies

M. le président.

« Art. 3 quinquies I. L'article

L. 444-1 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les dispositions des deux alinéas précédents sont applicables aux salariés de l'entreprise, membres des conseils de surveillance des fonds communs de placement d'entreprise prévus aux articles 20 et 21 de la loi no 881201 du 23 décembre 1988 relative aux organismes de placement collectif en valeurs mobilières et portant création des fonds communs de créances. »

« II. Dans le premier alinéa du même article, après les mots : "stage de formation économique", sont insérés les mots : ", financière et juridique". »

Le Gouvernement a présenté un amendement, no 152, ainsi rédigé :

« Au deuxième alinéa de l'article 3 quinquies, substituer aux mots : "articles 20 et 21 de la loi no 881201 du 23 décembre 1988 relative aux organismes de placement collectif en valeurs mobilières et portant création des fonds communs de créance" les mots : "articles L.

214-39 et L.

214-40 du code monétaire et financier". »

La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Il s'agit d'un amendement de coordination et de codification.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Cet amendement n'a pas été examiné par la commission des finances. Mais comme il tend à tenir compte de la codification de la loi sur les OPCVM, à titre personnel, je ne puis qu'y être favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 152.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'article 3 quinquies , modifié par l'amendement no 152.

(L'article 3 quinquies , ainsi modifié, est adopté.)

Article 3 sexies

M. le président.

« Art. 3 sexies I. Le chapitre IV du titre IV du livre IV du code du travail est complété par un article L.

444-6 ainsi rédigé :

« Art. L.

444-6. Si la convention ou l'accord instit uant le compte épargne-temps mentionné à l'article L.

227-1 le prévoit, le salarié peut verser dans ledit compte tout ou partie des primes qui lui sont attribuées en application d'un accord d'intéressement, ainsi que, à l'issue de leur période d'indisponibilité, tout ou partie des sommes issues de la répartition de la réserve de participation prévue à l'article L.

442-4, les sommes qu'il a versées dans un plan d'épargne d'entreprise et celles versées par l'entreprise en application de l'article L.

443-7.

« Lorsque des droits à congé rémunéré ont été accumulés en contrepartie du versement des sommes énumérées à l'alinéa précédent, les indemnités compensatrices correspondantes ne bénéficient pas de l'exonération de cotisations sociales prévues aux articles L.

441-4, L.

442-8 et

L. 443-8. Elles sont exonérées de l'impôt sur le revenu des bénéficiaires.

« L'accord d'intéressement précise les modalités selon lesquelles le choix du salarié s'effectuera lors de la répartition de l'intéressement. »

« II et III. Non modifiés. »

Je mets aux voix l'article 3 sexies.

(L'article 3 sexies est adopté.)

Article 3 septies

M. le président.

Le Sénat a supprimé l'article 3 septies.

M. Balligand, rapporteur, a présenté un amendement, no 11 rectifié, ainsi libellé :

« Rétablir l'article 3 septies dans la rédaction suivante :

« I. Il est inséré, après l'article L.

214-40 du code monétaire et financier, un article L.

214-40-1 ainsi rédigé :

« Art. L.

214-40-1. Une société d'investissement à capital variable peut avoir pour objet la gestion d'un portefeuille de valeurs mobilières émises par l'entreprise ou par toute société qui lui est liée dans les conditions prévues à l'article L.

443-3 du code du travail. Les cinquième et sixième alinéas de l'article L.

214-40 s'appliquent à son conseil d'administration. »

« II. Dans le troisième alinéa de l'article L.

443-3 du code du travail, après les mots : "fonds communs de placement", sont insérés les mots : "ou des titres émis par des sociétés d'investissement à capital variable"

« III. Dans le troisième alinéa du paragraphe IV de l'article L.

225-138 du code de commerce, après les mots : "fonds communs de placement", sont insérés les mots : "ou des titres émis par des sociétés d'investissement à capital variable, régies par l'article L.

214-40-1 du code monétaire et financier". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Nous proposons de revenir au texte que nous avions adopté en première lecture en ce qui concerne la création de SICAV dédiées à l'épargne salariale, sous réserve, bien entendu, de la promulgation du code monétaire et financier.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Le Gouvernement est en parfait accord avec le rappor-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 JANVIER 2001

teur. Les SICAV d'actionnariat salarié seront en effet très utiles aux opérations effectuées par des groupes européens multinationaux. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement est favorable à cet amendement.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 11 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

En conséquence, l'article 3 septies est ainsi rétabli.

Article 4

M. le président.

« Art. 4. I. Le 1 du II de l'article 237 bis A du code général des impôts est ainsi modifié :

« 1o Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Ce taux est porté à 50 % pour les accords existant à la date de publication de la loi no du sur l'épargne salariale, l'actionnariat salarié et l'épargne retraite et ceux conclus au plus tard deux ans après cette publication. »

;

« 2o Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Les entreprises employant moins de cent salariés ayant conclu un accord d'intéressement en application du chapitre Ier du titre IV du livre IV du code du travail à la date de la publication de la loi no du précitée ou dans un délai de deux ans après cette publication et ayant un plan d'épargne mis en place en application du chapitre III du titre IV du livre IV du code du travail peuvent constituer, en franchise d'impôt, une provision pour investissement égale à 50 % du montant des sommes mentionnées à l'article L. 443-7 dudit code qui complètent le versement du salarié issu de l'intéressement et affecté au plan d'épargne. »

« II. L'article L.

441-2 du code du travail est ainsi modifié :

« 1o Le premier alinéa est complété par les mots : "ou aux résultats de l'une ou l'autre de ses filiales au sens de l'article L.

233-16 du code de commerce, dès lors qu'une majorité significative, en France et, le cas échéant, à l'étranger, des salariés de ces filiales est couverte par un accord d'intéressement aux performances de l'entreprise ; un décret en Conseil d'Etat précisera les modalités d'application de cette disposition" ;

« 2o Après le huitième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le directeur départemental du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle dispose d'un délai de quatre mois à compter du dépôt de l'accord pour demand er le retrait ou la modification des dispositions contraires aux lois et règlements. Aucune contestation ultérieure de la conformité des termes d'un accord aux dispositions législatives et réglementaires en vigueur au moment de sa conclusion ne peut avoir pour effet de remettre en cause les exonérations fiscales et sociales attachées aux avantages accordés aux salariés au titre des exercices en cours ou antérieurs à la contestation. L'accord peut alors être dénoncé à l'initiative d'une des parties en vue de la renégociation d'un accord conforme aux dispositions législatives et réglementaires. »

;

« 3o Le dernier alinéa est ainsi rédigé :

« Lorsqu'un accord a été conclu ou déposé hors délai, il produit ses effets entre les parties mais n'ouvre droit aux exonérations que pour les périodes de calcul ouvertes postérieurement au dépôt. »

« II bis L'article L.

442-10 du même code est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« L'accord est déposé par la partie la plus diligente suivant sa conclusion à la direction professionnelle du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle du lieu où il a été conclu.

« Le directeur départemental du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle dispose d'un délai de trois mois à compter du dépôt de l'accord pour demander le retrait ou la modification des dispositions contraires aux lois et règlements. Aucune contestation ultérieure de la conformité des termes d'un accord aux dispositions législatives et réglementaires en vigueur au moment de sa conclusion ne peut avoir pour effet de remettre en cause des exonérations fiscales ou sociales attachées aux avantages accordés aux salariés au titre des exercices en cours ou antérieurs à la contestation. L'accord peut alors être dénoncé à l'initiative d'une des parties en vue de la renégociation d'un accord conforme aux dispositions législatives et réglementaires. »

« III. L'article L.

441-4 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La règle de non-substitution ne s'applique pas lorsque les sommes sont distribuées en vertu d'un accord d'intéressement, conclu, modifié ou prévu, avant la date de promulgation de la loi no du sur l'épargne salariale, l'actionnariat salarié et l'épargne retraite, dans le cadre d'un accord de réduction du temps de travail fixant la durée du travail à un niveau au plus égal à la durée mentionnée aux articles L.

212-1 et L.

212-8. »

« IV. Les pertes éventuelles de recettes pour l'Etat résultant de l'application du 1o du II sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

« V. Les pertes éventuelles de recettes pour les régimes obligatoires de base de sécurité sociale résultant de l'application du 1o du II sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droit mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

L'amendement no 73 n'est pas défendu.

M. Cuvilliez, M. Vila et les membres du groupe communiste ont présenté un amendement, no 94, ainsi rédigé :

« Dans le troisième alinéa du I de l'article 4, substituer au taux : "50 %" le taux : "35 %". »

La parole est à M. Jean Vila.

M. Jean Vila.

Nous proposons d'abaisser le taux de la franchise d'impôt de 50 % à 35 % pour le rapprocher notamment du taux actuel de l'impôt sur les sociétés.

Mais, par l'amendement no 95, nous proposons de maintenir ce taux à 50 % lorsqu'il concerne deux types d'utilisation de l'épargne constituée d'une part, les fonds d'investissement créés en vertu des dispositions de l'article L.

442-5 du code du travail par affectation de la réserve de participation qui s'apparentent dans les faits à des fonds propres et, d'autre part, les sommes consacrées au financement de l'économie solidaire telle que définie dans l'article 9 du présent projet de loi.

Nous souhaitons que l'incitation fiscale donne la priorité aux choix d'utilisation les plus porteurs en termes d'emploi et de développement de l'entreprise, sans rechercher a priori une rentabilité financière immédiate.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 JANVIER 2001

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

L'amendement no 94 a été rejeté par la commission parce que le taux d'augmentation de 50 % de la provision pour investissement, tel que prévu dans le texte, est préférable. Il faut qu'il y ait une véritable incitation fiscale à développer l'épargne salariale. Si on veut la généraliser, il faut avoir une PPI uniforme.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Au-delà de ce que vient d'expliquer M. le rapporteur, le Gouvernement est défavorable à l'amendement no 94 pour deux raisons.

D'abord, supprimer cet avantage est contre-productif par rapport à l'esprit de la loi, qui entend développer l'épargne salariale. Ensuite, cette disposition diminuerait l'intérêt pour l'entreprise de soutenir l'effort d'épargne des salariés, et notamment pour les plus modestes d'entre eux ; ce serait donc non seulement contre-productif mais aussi un peu injuste.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

94. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Cuvilliez, M. Vila et les membres d u groupe communiste ont présenté un amendement no 95, ainsi libellé :

« Après les mots : "une provision pour investissement égale à", rédiger ainsi la fin du dernier alinéa du I de l'article 4 :

« 35 % du montant des sommes mentionnées à l'article L. 443-7 dudit code qui complètent le versement du salarié issu de l'intéressement et affecté au plan d'épargne. Ce taux est porté à 50 % lorsque la provision porte sur des investissements destinés à alim enter les fonds créés en vertu du 3 de l'article L. 442-5 du code du travail ou les entreprises définies à l'article L. 443-3-1 dudit code. »

La parole est à M. Jean Vila.

M. Jean Vila.

L'amendement est défendu.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

L'amendement no 95 a été repoussé par la commission.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Défavorable, pour les mêmes raisons.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

95. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Balligand, rapporteur, a présenté un amendement, no 12 rectifié, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le deuxième alinéa (1o ) du II de l'article 4 :

« 1o Le premier alinéa est complété par les mots : "ou aux résultats de l'une ou plusieurs de ses filiales au sens de l'article L. 233-16 du code de commerce, dès lors que, à la date de conclusion de l'accord, au moins deux tiers de salariés de ces filiales situées en France sont couverts par un accord d'intéressement ; un engagement de négocier, dans chacune des filiales qui ne sont pas couvertes par un tel accord, dans un délai maximum de quatre mois à compter de cette même date, doit être pris par l'entreprise". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Cet amendement conserve la référence au périmètre de consolidation introduite par le Sénat puisqu'elle ne suppose pas le calcul d'agrégats particuliers, les données consolidées étant par définition déjà accessibles. S'agissant de la condition de couverture par un accord d'intéressement, l'amendement la limite aux seules filiales françaises, tout en retenant la référence introduite par le Sénat à une majorité de salariés du groupe ; l'amendement fixe ce seuil aux deux tiers, assorti d'un engagement du groupe d'ouvrir des négociations dans les filiales non couvertes dans un délai de quatre mois. Nous avons pensé que c'était raisonnable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

La rédaction proposée par Jean-Pierre Balligand est satisfaisante dans la mesure où elle clarifie et simplifie le texte en faisant référence à une proportion mesurable de salariés couverts par un accord d'intéressement et en ne faisant plus référence aux filiales étrangères.

Le Gouvernement est favorable à cet effort de clarification et de simplification.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 12 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

L'amendement no 74 n'est pas défendu, non plus que l'amendement no

75. M. Cuvilliez, M. Vila et les membres du groupe communiste ont présenté un amendement, no 96, ainsi rédigé :

« Compléter le quatrième alinéa du II de l'article 4 par la phrase suivante : "Il veille notamment, le cas échéant, à ce que l'entreprise soit en conformité avec les dispositions du titre III du livre IV du présent code." » La parole est à M. Jean Vila.

M. Jean Vila.

Cet amendement vise à subordonner la signature d'un accord sur l'épargne salariale au respect par l'entreprise des dispositions du code du travail relatives à la mise en place d'un comité d'entreprise.

Cela vaut en particulier lors de la signature d'un plan épargne interentreprises susceptible de regrouper les entreprises qui, prises individuellement, n'ont pas d'obligation, compte tenu de leur effectif, de mettre en place un comité d'entreprise mais qui, ensemble, regroupent plus de cinquante salariés. Notre amendement vise à donner implicitement à la direction du travail et de l'emploi compétente le pouvoir d'annuler cet accord si elle constate une carence vis-à-vis des obligations légales s'agissant de la mise en place d'un comité d'entreprise.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

La commission a rejeté cet amendement non pas sur le fond mais parce qu'il mélange les genres : le comité d'entreprise n'est pas habilité à délibérer en matière d'épargne salariale.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Une telle disposition existe déjà dans le code du travail, à l'article L. 441-1, qui prévoit que l'intéressement peut être mis en place dans les entreprises qui satisfont aux obligations concernant la représentation du personnel.

Le code du travail vous donne déjà satisfaction, monsieur Vila. Votre amendement est donc superflu. Peutêtre pourriez-vous le retirer ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 JANVIER 2001

M. le président.

Retirez-vous votre amendement, monsieur Vila ?

M. Jean Vila.

Oui, monsieur le président.

M. le président.

L'amendement no 96 est retiré.

M. Balligand, rapporteur, a présenté un amendement, no 13, ainsi rédigé :

« Supprimer le II bis de l'article 4. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

L'extension du dispositif de sécurisation juridique aux accords de participation est inopportune, les directions départementales du travail n'ayant pas les moyens de se livrer à un examen attentif des accords. Je peux même vous dire qu'elles confient aux URSSAF le soin de procéder à ce contrôle.

C'est ce que nous avons constaté, avec Jean-Baptiste de Foucauld.

Inutile d'alourdir le dispositif : ce serait inopérant.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Un dispositif de sécurisation juridique semble en effet inutile, M. le rapporteur vient de le dire, pour les accords de participation, parce que les modalités de calcul de la réserve spéciale de participation sont, à la différence de l'intéressement, très encadrées dans le code du travail. Les incertitudes juridiques sont donc très faibles, voire nulles.

On relève d'ailleurs très peu de contentieux à propos des accords de participation, alors qu'ils sont très nombreux pour l'intéressement. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement est favorable à l'adoption de l'amendement no

13.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

13. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Balligand, rapporteur, M. Jégou et M. Cochet ont présenté un amendement, no 14, ainsi rédigé :

« Supprimer le III de l'article 4. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Je laisse à

M. Cochet le soin de soutenir et amendement.

M. le président.

Vous avez la parole, monsieur Cochet.

M. Yves Cochet.

Nous avons déjà évoqué cette disposition dans la discussion générale. Nous ne croyons évidemment pas que des mécanismes d'épargne salariale doivent se substituer aux salaires. Nous ne voyons pas l'utilité du III de l'article 4, l'épargne salariale n'étant pas un revenu de substitution. Donc nous proposons de le supprimer.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.

M. Jean-Jacques Jégou.

Nous avions, M. Cochet et moi-même, déposé des amendements très proches. Nous avons trouvé incongru que le texte fasse référence à la possibilité d'inciter à la substitution. Ce n'est pas du tout l'esprit de ce qui était proposé. A la quasi-unanimité, la commission des finances a donc souhaité supprimer le III.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Le problème est plus compliqué ! Je n'étais pas d'accord avec la majorité de la commission et je tiens donc à donner mon point de vue.

L'adoption de cet amendement par la commission résulte à mon avis d'un malentendu. Aujourd'hui, le code du travail pose le principe, comme l'a dit M. Cochet, de la non-substitution de l'intéressement à un élément quelconque du salaire ; c'est un bon principe auquel les partenaires sociaux sont attachés.

Le projet de loi initial proposait de ne pas appliquer ce principe lorsque l'accord d'intéressement était conclu ou modifié à l'occasion d'un accord de réduction du temps de travail.

En première lecture, des amendements émanant de tous les bancs de l'Assemblée ont été adoptés pour supprimer cette disposition. C'était légitime car la proposition du Gouvernement avait une portée beaucoup trop large en visant aussi bien les accords passés que ceux à venir.

Le Sénat n'a pas rétabli le texte du Gouvernement. Il a, comme l'Assemblée nationale, refusé que les futurs accords d'intéressement conclus dans le cadre de la RTT puissent déroger au principe de non-substitution. En revanche, il a considéré que les accords passés devaient faire l'objet d'une validation juridique. Cette solution est, je crois, raisonnable. D'une part, ces accords passés ont été conclus de bonne foi sur la base d'une circulaire de 1995 qui les autorisait. Le contenu de cette circulaire a d'ailleurs été confirmé à plusieurs reprises, en 1997 et en 1998, dans des réponses de Mme la ministre à des questions écrites.

Par ailleurs, si cet amendement est adopté, la sanction possible ne sera pas l'annulation des accords concernés mais la remise en cause éventuelle - j'appelle votre attention sur ce point - par les URSSAF ou les services fiscaux des exonérations qui ont profité aux entreprises, certes, mais aussi aux salariés concernés.

Je voulais appeler votre attention sur ce point.

Cela dit, la commission a adopté l'amendement no 14, auquel je n'étais pas, personnellement, favorable pour les raisons que je viens d'exposer.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Je comprends, monsieur le rapporteur, qu'il vous faille parfois être un peu schizophrène ... J'ai connu cela, jadis.

(Sourires.)

Le projet initial du Gouvernement prévoyait que la règle de non-substitution de l'intéressement aux salaires ne s'appliquait pas lorsque les primes d'intéressement étaient versées en substitution d'un élément de salaire en application d'un accord de réduction du temps de travail.

Lors du débat en première lecture, votre assemblée n'avait pas voté cette disposition, car elle estimait que la règle de la non-substitution devait avoir un caractère intangible et donc s'appliquer y compris en cas d'accord sur la réduction du temps de travail ; M. Balligand a parfaitement expliqué la situation.

La disposition adoptée par le Sénat est très différente du projet initial du Gouvernement, puisqu'elle ne s'applique qu'aux accords passés avant la promulgation de la loi. Cette disposition a donc un objet très limité puisqu'elle se borne à sécuriser juridiquement les accords de réduction du temps de travail passés et qui ont pu, de bonne foi, s'affranchir du principe de la non-substitution puisque la circulaire interministérielle du 9 mai 1995


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avait autorisé cette possibilité, que des réponses du ministre à des questions écrites ont encore récemment confirmée.

Il me semble donc que votre assemblée pourrait, sans se contredire, retenir le texte du Sénat, puisque la disposition est différente et a une portée beaucoup plus limitée.

Voilà pourquoi le Gouvernement n'est pas favorable à l'amendement no

14.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

14. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Balligand a présenté un amendement, no 122, ainsi rédigé :

« Dans le deuxième alinéa du III de l'article 4, substituer au mot : "promulgation" le mot : "publication". »

La parole est à M. Jean-Pierre Balligand.

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Le Sénat introduit régulièrement le terme : « promulgation ». Je reviens quant à moi à la terminologie habituelle et j'ai déposé une série d'amendements en ce sens.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Sur cet amendement de fond, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée. (Sourires.)

M. le président.

Très bien, monsieur le ministre ! Je mets aux voix l'amendement no 122.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Le Gouvernement a présenté un amendement, no 157, ainsi rédigé :

« Supprimer les IV et V de l'article 4. »

La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Il s'agit de supprimer des gages.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

La commission n'a pas examiné cet amendement mais, à titre personnel, j'y suis favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 157.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'article 4, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 4, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 4

M. le président.

M. Cuvilliez, M. Vila et les membres du groupe communiste ont présenté un amendement, no 97, ainsi rédigé :

« Après l'article 4, insérer l'article suivant :

« Le premier alinéa de l'article L.

442-1 du code du travail est complété par les mots : "et à contrôler l'utilisation des fonds qui leur reviennent de droit". »

La parole est à M. Jean Vila.

M. Jean Vila.

Si le code du travail prévoit déjà un certain nombre de dispositions qui permettent aux salariés concernés d'avoir un droit de regard sur l'utilisation des fonds de l'épargne salariale, nous souhaitons que soit affirmée de manière explicite la légitimité d'un contrôle effectif des salariés sur l'utilisation des fonds précités.

Il est important pour nous que soit clairement explicité le fait que les fonds attribués au titre de la participation obligatoire sont le produit du travail de l'ensemble des salariés. Le droit des salariés à intervenir sur l'affectation de l'épargne salariale est loin d'aller de soi. Dans la réalité concrète de l'entreprise, ce qui peut apparaître comme une affirmation de principe ne nous semble ni anodin ni inutile.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

La commission n'a pas adopté cet amendement. Quand il y a des accords sur l'intéressement, ils ont été négociés dans l'entreprise ; je ne vois donc pas bien l'intérêt du dispositif proposé.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Là encore, le Gouvernement partage l'objectif, mais l 'article R.

442-19 du code du travail prévoit que l'employeur doit présenter dans les six mois qui suivent la clôture de chaque exercice un rapport au comité d'entreprise sur les éléments de calcul de l'affectation des sommes. Le Gouvernement souhaite donc, monsieur le député, que vous retiriez votre amendement. Sinon, il serait défavorable à son adoption.

M. le président.

Monsieur Vila, qu'en pensez-vous ?

M. Jean Vila.

Je maintiens mon amendement.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

97. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Cuvilliez, M. Vila et les membres du groupe communiste ont présenté un amendement, no 99, ainsi libellé :

« Après l'article 4, insérer l'article suivant :

« Le cinquième alinéa (3) de l'article L.

442-5 du code du travail est ainsi rédigé :

«

3. L'affectation des sommes constituant la réserve spéciale prévue à l'article L.

442-2 ci-dessus à un fonds que les entreprises doivent consacrer à des investissements à hauteur minimale du tiers de ces sommes. Les salariés ont sur l'entreprise un droit de créance égal au montant des sommes versées. »

La parole est à M. Jean Vila.

M. Jean Vila.

Cet amendement est particulièrement important pour nous car il vise à orienter au moins une partie de la réserve spéciale vers le financement de l'investissement et du développement de l'entreprise.

La nécessité de préserver la liberté de choix des partenaires sociaux dans l'affectation des sommes de la réserve de participation a été évoquée pour justifier le rejet de notre amendement en première lecture. Cet argument ne nous paraît pas convaincant. Dès lors qu'est accordée une exonération fiscale et de cotisations sociales, la collectivité est pleinement fondée à demander qu'une partie au moins des sommes de la participation soit affectée à un usage favorable au développement économique de l'entreprise et à l'emploi.

Il ne s'agit pas, en l'occurrence, d'obliger les salariés à financer en quelque sorte leur propre emploi, mais de leur permettre d'orienter une partie des profits dégagés


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p ar l'activité vers des investissements favorables à l'emploi, la qualification et l'amélioration des conditions de travail.

Il s'agit pour nous de préserver un bien et, bien sûr, de rénover ce qu'il peut y avoir de positif dans la participation, en la dégageant du paternalisme et de l'autoritarisme patronal de ses origines.

Cet amendement vise à inverser une tendance qui se concrétise aujourd'hui dans le fait que les deux tiers de la participation sont investis sur les marchés financiers, tendance qui risque de s'accentuer avec la mise en place du nouveau PPESV. Si ces placements peuvent parfois dégager des rendements de 15 %, voire 30 % par an dans certains cas, c'est au prix d'une détérioration des salaires et de l'emploi dans d'autres entreprises.

La mesure que nous proposons va dans le sens de l'intérêt collectif des salariés et de l'intérêt général. Elle est en rupture avec les dogmes libéraux qui affirment, au mépris de la réalité des faits, que ce sont les marchés financiers qui assureraient la meilleure allocation des ressources pour assurer le développement humain. Bien évidemment, elle mériterait de pouvoir prendre appui sur une nouvelle logique de financement de l'économie, moins soumise aux exigences de rentabilité financière qu'exerce la domination sans partage des marchés financiers, mais elle nous semble indispensable si l'on veut que l'épargne salariale favorise non une financiarisation accrue de l'économie, mais l'activité réelle et l'emploi.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Un amendement semblable a déjà été déposé, prévoyant une proportion plus large ; là, vous proposez un tiers. En première lecture, cette suggestion avait été repoussée, et elle ne peut qu'être repoussée, pour la même raison : les sommes issues de la participation appartiennent aux salariés et qu'on ne peut les affecter d'office à l'investissement dans l'entreprise.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Il convient de laisser les partenaires sociaux libres de déterminer l'affectation des sommes de la participation. Il faut de la souplesse en l'occurrence, et de la liberté, parce que les entreprises n'ont pas forcément besoin de la participation pour financer leurs investissements. Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

99. (L'amendement n'est pas adopté.)

Article 5

M. le président.

« Art. 5. - I. - Après l'article L.

443-1 du code du travail, il est inséré un article L.

443-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L.

443-1-1. - Un plan d'épargne interentreprises peut être institué par accord collectif conclu dans les conditions prévues au titre III du livre Ier . Si ce plan est institué entre plusieurs employeurs pris individuellement, il peut également être conclu au sein du comité d'entreprise ou à la suite de la ratification à la majorité des deux tiers du personnel de chaque entreprise du projet d'accord instituant le plan. Dans ce cas, l'accord doit être approuvé dans les mêmes termes au sein de chacune des entreprises et celles qui souhaitent y adhérer doivent recueillir l'accord de leur comité d'entreprise ou de la majorité des deux tiers de leur personnel. L'accord fixe le règlement du plan d'épargne interentreprises qui détermine notamment :

« a) Les entreprises signataires ou le champ d'application professionnel et géographique ;

« b) La nature des sommes qui peuvent être versées ;

« c) Les différentes possibilités d'affectation des sommes recueillies ;

« d) Les conditions dans lesquelles les frais de tenue de compte sont pris en charge par les employeurs ;

« e) Les différentes modalités selon lesquelles les entreprises qui le souhaitent effectuent des versements complémentaires à ceux de leurs salariés ; f) Les conditions dans lesquelles sont désignés les membres des conseils de surveillance des fonds communs de placement prévus par le règlement du plan et les modalités de fonctionnement des conseils.

« Le plan d'épargne interentreprises peut recueillir des sommes provenant de l'intéressement prévu au chapitre Ier du présent titre, de la participation prévue au chapitre II du même titre, de versements volontaires des personnes mentionnées à l'article L.

443-1 appartenant aux entreprises entrant dans le champ de l'accord et, le cas échéant, des versements complémentaires de ces entreprises.

« Le règlement peut prévoir que les sommes issues de la participation mise en place dans une entreprise peuvent être affectées à un fonds d'investissement créé dans l'entreprise en application du 3 de l'article L.

442-5.

« Lorsqu'il prévoit de recueillir les sommes issues de la participation, l'accord instituant le plan d'épargne inter-e ntreprises dispense les entreprises mentionnées à l'article L.

442-15 de conclure l'accord de participation prévu à l'article L.

442-5. Son règlement doit alors inclure les clauses prévues aux articles L.

442-4 et

L. 442-5.

« Par dérogation aux dispositions du troisième alinéa de l'article L.

443-3, le plan d'épargne interentreprises ne peut pas prévoir l'acquisition de parts de fonds communs de placement régis par l'article 21 de la loi no 88-1201 du 23 décembre 1988 précitée. Lorsque le plan prévoit l'acquisition de parts de fonds communs de placement régis par l'article 20 de cette même loi, ceux-ci ne peuvent détenir plus de 10 % de titres non admis aux négociations sur un marché réglementé. Cette limitation ne s'applique pas aux parts et actions d'organismes de placement collectif en valeurs mobilières éventuellement détenus par le fonds.

« Sous réserve des dispositions particulières du présent article, les dispositions relatives au plan d'épargne d'entreprise sont applicables au plan d'épargne interentreprises. »

« II. - Supprimé. »

M. Balligand a présenté un amendement, no 123, ainsi rédigé :

« Dans l'avant-dernière phrase du deuxième alinéa du I de l'article 5, après les mots : "y adhérer", insérer les mots : "ou en sortir". »

La parole est à M. Jean-Pierre Balligand.

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Dans le cas d'un plan d'épargne interentreprises mis en place par des employeurs pris individuellement, la consultation du comité d'entreprise ou du personnel par référendum est obligatoire pour l'adhésion, et je propose qu'il en soit de même pour une éventuelle sortie du PEI.


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M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Le Gouvernement est favorable à cet amendement qui prévoit la symétrie de consultation du comité d'entreprise ou du personnel par référendum lorsqu'une entreprise souhaite sortir d'un PEI conclu entre les entreprises en cause.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 123.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Le Gouvernement a présenté un amendement, no 153, ainsi rédigé :

« Au douzième alinéa du I de l'article 5, substituer respectivement aux mots : "l'article 21 de la loi no 88-1201 du 23 décembre 1988 précitée" et " l'article 20 de cette même loi" les mots : "l'article L.

214-40 du code monétaire et financier" et "l'article L.

214-39 du même code". »

La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Cet amendement tient compte de la codification de la loi sur les OPCVM.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

La commission n'a pas examiné cet amendement mais, comme tout à l'heure, j'y suis favorable à titre personnel.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 153.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'article 5, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 5, ainsi modifié, est adopté.)

Après l'article 5

M. le président.

M. Cuvilliez, M. Vila et les membres du groupe communiste ont présenté un amendement, no 98, ainsi libellé :

« Après l'article 5, insérer l'article suivant :

« I. Le neuvième alinéa de l'article L.

443-1-1 du même code est ainsi rédigé :

« Son règlement doit alors inclure les clauses prévues aux articles L.

442-4 et L.

442-5. »

« II. Le cinquième alinéa de l'article L.

442-5 est ainsi rédigé :

«

3. L'affectation des sommes constituant la réserve spéciale prévue à l'article L.

442-2 ci-dessus à un fonds que les entreprises doit consacrer à des investissements à hauteur minimale du tiers de ces sommes. Les salariés ont sur l'entreprise un droit de créance égal au montant des sommes versées. »

« III. L'avant-dernier alinéa de l'article L.

442-5 est complété par les mots : "qui se met en place dans les mêmes conditions que le plan d'épargne entreprise". »

La parole est à M. Jean Vila.

M. Jean Vila.

L'amendement est défendu. Mêmes arguments que tout à l'heure.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Défavorable, pour les mêmes raisons.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Pour les mêmes raisons de liberté, le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

98. (L'amendement n'est pas adopté.)

Article 5 bis

M. le président.

« Art. 5 bis . I. - Dans le dixième alinéa (9o ) de l'article L.

522-3 du code rural, les mots : "constitués entre des salariés de la coopérative et de ses filiales" sont remplacés par les mots : "souscrits par les salariés de la coopérative ou d'une entreprise comprise dans le champ du même plan ou accord de groupe" ».

« II. Non modifié »

Je mets aux voix l'article 5 bis

(L'article 5 bis est adopté.)

Article 6

M. le président.

« Art. 6. I. Après le deuxième alinéa de l'article L.

443-1 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Dans les entreprises dont l'effectif habituel comprend au moins un et au plus cinq cents salariés, les chefs de ces entreprises, ou, s'il s'agit de personnes morales, leurs présidents, directeurs généraux, gérants ou membres du d irectoire, peuvent également participer aux plans d'épargne d'entreprise. »

« II. Non modifié

« III. L'article L.

443-7 du même code est ainsi modifié :

« 1o Aux premier et second alinéas, après le mot : "salarié", sont insérés les mots : "ou personne mentionnée au troisième alinéa de l'article L.

443-1" » ;

« 1o bis Dans le second alinéa, les mots : "l'article 208-4 de la loi no 66-537 du 24 juillet 1966" sont remplacés p ar les mots : « l'article L.

225-180 du code de commerce" ;

« 2o Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« La modulation éventuelle des sommes versées par l'entreprise ne saurait résulter que de l'application de règles à caractère général, qui ne peuvent, en outre, en aucun cas avoir pour effet de rendre le rapport entre le versement de l'entreprise et celui du salarié ou de la personne visée au troisième alinéa de l'article L.

443-1 croissant avec la rémunération de ce dernier. »

« IV. Les pertes éventuelles de recettes pour l'Etat résultant de la possibilité donnée aux chefs d'entreprises dont l'effectif habituel comprend au plus cinq cents salariés de participer aux plans d'épargne d'entreprise sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

« V. - Les pertes éventuelles de recettes pour les régimes obligatoires de base de sécurité sociale résultant de la possibilité donnée aux chefs d'entreprises dont


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l'effectif habituel comprend au plus cinq cents salariés de participer aux plans d'épargne d'entreprise sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

L'amendement no 76 n'est pas défendu.

M. Cuvilliez, M. Vila et les membres du groupe communiste ont présenté un amendement, no 100, ainsi rédigé :

« Supprimer les I et II de l'article 6. »

La parole est à M. Jean Vila.

M. Jean Vila.

Nous avons entendu les arguments avancés pour justifier la participation des mandataires sociaux des entreprises, au même titre que les salariés, aux plans d'épargne créés par un accord collectif dans le cadre des nouvelles dispositions de ce projet de loi, mais cette évolution demeure de notre point de vue discutable. Elle risque en effet de masquer les autres formes d'intéressement comme les plans de stock-options.

Nous avons le souci que la gestion des fonds de l'épargne salariale ne puisse d'une quelconque manière être instrumentalisée au seul profit des détenteurs majoritaires du capital en vertu des seuls impératifs des mandataires sociaux.

Cette disposition est source de confusion dans la mesure où les mandataires sociaux pourraient choisir d'être représentés comme participants au plan ou bien comme employeurs dans la gestion paritaire des FCPE prévus à l'article 14.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Ce projet de loi vise à étendre l'épargne salariale. Or on sait que, dans les entreprises où s'est développée l'épargne salariale, les mandataires sociaux jouent un rôle très important. Dans l'étude remise au Premier ministre, nous étions peu favorables aux stock-options car c'est un rapport individuel à une valorisation hypothétique : quand la Bourse stagne ou régresse, il n'y a pas de valorisation. Là, nous sommes dans des procédures collectives, et il n'est pas indécent que les mandataires sociaux participent avec leurs salariés à des dispositifs d'épargne solidaire. Mieux vaut une dissociation entre l'épargne salariale et d'autres systèmes de rémunération très individualisés qui se sont énormément développés dans notre pays. Vu l'option que nous avions retenue dans le travail que nous avons fait pour le Gouvernement, nous devons conserver une participation des mandataires sociaux pour développer l'épargne salariale dans notre pays.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Je souscris totalement à l'argumentation qui vient d'être développée par le rapporteur. La mesure introduite par le G ouvernement et adoptée en première lecture par l'Assemblée et par le Sénat correspond à la volonté de développer l'épargne salariale en France, avec les seuils qui ont déjà été évoqués. Si nous voulons créer une épargne salariale qui ne soit pas des fonds de pension, et le faire dans un esprit offensif et efficace, il faut maintenir cette disposition. Le Gouvernement est donc défavorable à l'amendement.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 100.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements nos 15 et 117, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 15, présenté par M. Balligand, rapporteur est ainsi rédigé :

« I. Dans le dernier alinéa du I de l'article 6, substituer au nombre : "cinq cents" le nombre : "cent".

« II. En conséquence, supprimer le IV et le V de cet article. »

L'amendement no 117, présenté par M. Jégou, est ainsi rédigé :

« Dans le deuxième alinéa du I de l'article 6, substituer au mot : "cinq" le mot : "deux". »

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n o

15.

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Cet amendement vise à revenir au texte adopté par l'Assemblée nationale en première lecture, en ce qui concerne le seuil maximal d'accès des mandataires sociaux aux PEE. Le Sénat a fixé ce seuil à 500 salariés. Je propose qu'on revienne à 100, pour généraliser le dispositif dans le secteur des PME, ce qui est notre souci.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Jacques Jégou, pour soutenir l'amendement no 117.

M. Jean-Jacques Jégou.

M. Balligand a expliqué qu'inclure les mandataires sociaux était incitatif pour l'épargne salariale. Il ne s'agit pas du tout de titiller le Gouvernement, et je pense que le Sénat a été trop loin, car une entreprise de 500 salariés n'a plus le caractère de PME.

J'ai l'impression que tout le monde souhaite développer l'épargne salariale dans les PME. Peut-on dire qu'une entreprise de 200 personnes n'est pas une PME ? Je ne le crois pas et il y a en France un grand nombre d'entreprises qui ont entre 100 et 200 salariés. Si nous croyons à l'effert d'entraînement que peuvent avoir les mandataires sociaux présents dans l'entreprise, car ils sont aptes à négocier avec les salariés et à obtenir des résultats intére ssants pour les entreprises, les salariés et notre économie, le seuil de 100 me paraît un peu bas et je pense que, dans un certain nombre d'entreprises, les mandataires sociaux ne seront pas suffisamment mobilisés pour lancer l'épargne salariale.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements nos 15 et 117 ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Le Gouvernement est favorable à l'amendement de M. Balligand, qui vise à revenir au texte adopté par l'Assemblée nationale, et défavorable au seuil de 200 salariés. Le seuil de 100 salariés me paraît le mieux adapté : maintenons-le !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

15. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

En conséquence, l'amendement no 117 tombe.

M. Balligand, rapporteur, a présenté un amendement, no 16, ainsi rédigé :

« Supprimer le troisième alinéa (1o bis ) du III de l'article 6. »

La parole est à M. le rapporteur.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 JANVIER 2001

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Cet alinéa de coordination avec la promulgation du code de commerce est inutile puisqu'il s'agit d'une disposition du code du travail qui n'a pas été modifiée par le projet de loi.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Le Gouvernement est favorable à cet amendement de codification.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

16. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'article 6, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 6, ainsi modifié, est adopté.)

Article 6 bis

M. le président.

Le Sénat a supprimé l'article 6 bis.

Article 6 ter

M. le président.

« Art. 6 ter. - Dans l'article L. 135-6 du code de la sécurité sociale, il est inséré un 8o ainsi rédigé :

« 8o Les sommes issues de l'application du titre IV du livre IV du code du travail et reçues en consignation par la caisse des dépôts et consignations, au terme de la prescription fixée par l'article 2262 du code civil ; ».

Je mets aux voix l'article 6 ter

(L'article 6 ter est adopté.)

Article 7

M. le président.

« Art. 7. I. Après l'article L. 4431-1 du code du travail, il est inséré un article L. 443-1-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 443-1-2. I. Un plan partenarial d'épargne salariale volontaire peut être institué dans toute entreprise à l'initiative de celle-ci ou en vertu d'un accord passé dans les conditions prévues à l'article L. 441-1.

« Les sommes ou valeurs inscrites aux comptes de participants au plan doivent être détenues jusqu'à l'expiration d'un délai minimum de dix ans après leur versement.

« Un décret en Conseil d'Etat énumère les cas, liés à la situation ou aux projets du participant, dans lesquels les sommes ou valeurs mentionnées ci-dessus peuvent être exceptionnellement débloquées avant l'expiration de ces délais.

« Ce plan peut également être créé en tant que plan d'épargne interentreprises dans les conditions prévues à l'article L. 443-1-1.

« Il ne peut être mis en place que si les participants mentionnés à l'article L. 443-1 ont la possibilité d'opter pour un plan de durée plus courte régi par ledit article ou par l'article L. 443-1-1.

« II. Le plan partenarial d'épargne salariale volontaire peut recevoir, à l'initiative des participants, les versements des sommes issues de l'intéressement, de la participation ainsi que d'autres versements volontaires et des contributions des entreprises prévues à l'article L. 443-7.

Peuvent également lui être transférées les sommes inscrites dans les plans d'épargne prévus aux articles L. 443-1 ou L. 443-1-1, avant l'expiration du délai fixé à l'article L. 443-6. Ces transferts ne sont pas pris en compte pour l'appréciation du plafond mentionné au premier alinéa de l'article L. 443-2.

« Par dérogation à l'article L. 443-7, les sommes issues de la participation qui sont versées au plan partenarial d'épargne salariale volontaire peuvent donner lieu à versement complémentaire de l'entreprise dans les limites prévues audit article.

« II bis Le règlement du plan partenarial d'épargne salariale volontaire peut prévoir qu'une partie des sommes recueillies peut être affectée, à l'initiative du participant, à l'acquisition de parts de fonds investis, dans les limites p révues à l'article 20 de la loi no 88-1201 du 23 décembre 1988 précitée, dans les entreprises solidaires définies à l'article L. 443-3-1.

« III. Supprimé.

« IV. Sous réserve des dispositions particulières tant du présent article que des articles L. 443-2, L. 443-5 et L. 443-7, les dispositions relatives au plan d'épargne d'entreprise sont applicables au plan partenarial d'épargne salariale volontaire. »

« I bis Les pertes de recettes résultant pour l'Etat et les organismes de sécurité sociale de la possibilité d'instituer un plan partenarial d'épargne salariale volontaire par d'autres voies que celle de l'accord collectif sont compensées, à due concurrence, par la création de taxes additionnelles aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

« I ter Les pertes de recettes résultant pour l'Etat et les organismes de sécurité sociale de la restriction de la définition du plan partenarial d'épargne salariale volontaire à un plan glissant sont compensées, à due concurrence, par la création de taxes additionnelles aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

« II et III. Supprimés. »

M. Balligand, rapporteur, a présenté un amendement, no 19 deuxième rectification, ainsi rédigé :

« Substituer aux deuxième et troisième alinéas du I de l'article 7 les trois alinéas suivants :

« I. Il peut être mis en place dans les conditions prévues au titre III du livre Ier un plan partenarial d'épargne salariale volontaire qui peut prendre l'une des deux formes suivantes :

« a) Soit les sommes ou valeurs inscrites aux comptes des participants au plan doivent être détenues dans celui-ci jusqu'à l'expiration d'un délai minimal de dix ans à compter du premier versement. Pour les titres souscrits en application de l'article L. 443-5 ce délai minimum est fixé à sept ans à compter de chaque souscription. Toutefois, les titres souscrits dans les trois années suivant le premier versement dans le plan devront être détenus juqu'à l'expiration du délai minimum prévu par celui-ci suivant ce premier versement. Le participant peut conserver les sommes et valeurs inscrites à son compte au-delà de la date d'expiration du plan sans pouvoir y affecter de nouveaux versements à quelque titre que ce soit. Toutefois dans ce cas, à sa demande, il peut renouveler sa participation au plan dans les mêmes conditions.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 JANVIER 2001

« b) Soit les sommes ou valeurs inscrites aux comptes des participants doivent être détenues jusqu'à l'expiration d'un délai minimum de dix ans après leur versement. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

L'amendement no 19 initial rétablissait, à quelques modifications mineures près, le texte adopté par l'Assemblée nationale en première lecture. Il réintroduirait notamment la négociation préalable du PPESV, c'est-à-dire du dispositif d'épargne salariale à dix ans, et prévoyait la liberté de choix entre un plan à terme fixe de dix ans qui était, je vous le rappelle, dans le texte du projet de loi, et un plan glissant sur dix ans introduit par l'amendement que j'ai fait adopter en première lecture.

Cet amendement a été scindé en six amendements pour les besoins de la discussion en séance, d'autres amendements venant en concurrence avec certaines de ses dispositions. Les amendements nos 137, 138, 139, 140 et 141 ne sont que des amendements de cohérence avec celui-ci, et je ne les défendrai donc pas puisqu'ils ont tous le même objet.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Le Gouvernement est favorable à cet amendement et aux suivants puisqu'ils rétablissent le libre choix des partenaires sociaux entre plan à terme fixe et plan à terme glissant. De même, comme vous le savez, le Gouvernement souhaite que la mise en place du PPESV se fasse par voie d'accord et non de façon unilatérale par décision de l'entreprise.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 19, deuxième rectification.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Cuvilliez, M. Vila et les membres du groupe communiste ont présenté un amendement, no 102, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le quatrième alinéa du I de l'article 7 :

« Les sommes versées au plan partenarial d'épargne salariale volontaire peuvent exceptionnellement être débloquées avant l'expiration du délai de dix ans dans les cas suivants : achat de la résidence principale ou de la résidence secondaire, financement des études supérieures des enfants, mariage, divorce, décès du titulaire ou de son conjoint, invalidité du titulaire ou de son conjoint, départ à la retraite du titulaire ou de son conjoint, licenciement, création d'entreprise. »

La parole est à M. Jean Vila.

M. Jean Vila.

Nous confirmons notre souci de voir inscrits dans la loi, sans attendre la publication d'un décret, les aléas de la vie permettant une sortie anticipée du PPESV. Nous souhaitons que, si cet amendement n'est pas retenu, le Gouvernement nous confirme son intention de reprendre intégralement les différentes situations rencontrées par le salarié qui peuvent lui permettre de prétendre au droit de sortie anticipée du plan d'épargne.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

La commission des finances a rejeté cet amendement. Une telle discussion a d'ailleurs déjà eu lieu en première lecture.

L'Assemblée a décidé de ne pas inscrire dans la loi les cas de déblocage anticipé compte tenu des engagements pris en séance publique par le Gouvernement, et il n'y a pas lieu, me semble-t-il, de revenir sur ce sujet.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Pour dissiper les craintes que M. Vila nourrit à propos de la rupture, je réitère publiquement l'engagement qu'a pris le Gouvernement en première lecture : les décrets lui donneront satisfaction et je souhaite qu'il puisse retirer son amendement.

M. le président.

Retirez-vous votre amendement, monsieur Vila ?

M. Jean Vila.

Oui, monsieur le président.

M. le président.

L'amendement no 102 est retiré.

M. Cuvilliez, M. Vila et les membres du groupe communiste ont présenté un amendement, no 101, ainsi libellé :

« Après le mot : "intéressement", rédiger ainsi la fin du septième alinéa du I de l'article 7 : ", et de la p articipation dans les conditions indiquées par l'article L. 442-5-3". »

La parole est à M. Jean Vila.

M. Jean Vila.

Fidèles à la logique qui inspirait l'amendement que nous avons défendu à l'article 5, nous proposons que le plan d'épargne salariale comporte l'obligation d'affecter au moins un tiers des sommes qu'il collecte, lorsqu'elles sont issues de la participation, à un fonds d'investissement créé par l'entreprise. Nous avons largement développpé les arguments qui plaident pour l'adoption de cet amendement.

Pour ce qui est du PPESV, nous avons le souci d'assurer la pérennité des comptes courants bloqués qui, sans représenter la solution à toutes les difficultés que rencontrent les entreprises pour assurer leur financement, jouent néanmoins un rôle positif qui doit être conforté.

La mise en place du PPESV, doté de conditions particulières attractives, risque d'entraîner le déclin d'une modalité de financement de l'entreprise qui a l'immense avantage d'éviter, autant que faire se peut, le recours aux marchés financiers, avec toutes les implications que cela comporte en termes d'exigences de rendement en retour.

L'option que nous défendons est sans conteste en opposition avec le point de vue selon lequel il conviendrait aujourd'hui de favoriser le basculement de l'épargne de nos concitoyens sur les marchés-actions.

Nous pensons au contraire que la perspective du plein emploi, laquelle se traduit par une meilleure sécurité d'emploi ou de formation pour tous, suppose la mise en cause du poids excessif des marchés financiers sur l'économie et la société.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur cet amendement ?

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

L'amendement de M. Vila a des objectifs très louables, déjà exposés tout à l'heure à l'article 5 à propos du PEI à cinq ans et maintenant repris à l'article 7 pour le PPESV. Toutefois, cet amendement aurait pour effet - et c'est un peu dommage - de supprimer certaines possibilités de transfert vers le PPESV, notamment pour financer les entreprises.

Le PPESV à dix ans permet de disposer d'un système de placement diversifié, ce qui est une garantie pour le salarié, mais il permet surtout aux sociétés de gestion de


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 JANVIER 2001

travailler dans la durée. On peut donc d'abord investir dans des fonds communs de placement à risques ou dans des sociétés de capital risque, lesquelles donneront à des PME de telle région ou de telle branche les moyens de leur développement tout en limitant le taux, pour ne pas faire courir trop de risques à l'épargne du salarié.

M. Yves Cochet.

Il ne faut pas mettre tous les oeufs dans le même panier !

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Un tel dispositif sur dix ans est très intéressant, car il permet de travailler de manière évolutive : plus on se rapproche de la sortie, moins les sociétés de gestion prennent de risques ; elles en prennent sur cinq ans, puis elle sécurisent. Elles passent même, vers sept ou huit ans, à des systèmes obligataires et quittent le marché des actions. J'avais d'ailleurs, dans cette optique, fait une proposition de « PPESV glissant ».

Il serait dommage et contreproductif que les entreprises n'aient pas la possibilité de mobiliser des moyens financiers. Cet amendement ne permet aucun transfert vers le PPESV et l'avis de la commission est donc défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Cet amendement est similaire à celui que votre assemblée a examiné à propos du PEI. Compte tenu de l'argumentation qui vient d'être développée, le Gouvernement ne peut qu'être défavorable à son adoption.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 101.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Balligand, rapporteur, a présenté un amendement, no 137, ainsi rédigé :

« Compléter le septième alinéa du I de l'article 7 par les mots et la phrase suivante : "et ne peuvent donner lieu à un versement complémentaire de l'entreprise. Toutefois, ces versements de sommes issues de l'intéressement ou de la participation et ces transferts ne peuvent être effectués moins de cinq ans avant la date d'échéance du plan". »

Cet amendement a été défendu.

Le Gouvernement s'est exprimé.

Je le mets aux voix.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Balligand, rapporteur, a présenté un amendement, no 138, ainsi rédigé :

« Dans le huitième alinéa du I de l'article 7, après les mots : "salariale volontaire", insérer les mots : "plus de sept ans avant la date d'échéance du plan". »

Cet amendement a été défendu.

Le Gouvernement s'est exprimé.

Je le mets aux voix.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

L'amendement no 77 de M. Dray n'est pas défendu.

M. Balligand, rapporteur, a présenté un amendement, no 139, ainsi rédigé :

« Après le huitième alinéa du I de l'article 7, insérer l'alinéa suivant :

« Dans le cas où le plan d'épargne salariale volontaire prend la forme mentionnée au b du I, la condition de délai par rapport à la date d'échéance du plan prévue au premier alinéa ne s'applique pas, et l es versements mentionnés au deuxième alinéa peuvent donner lieu à versement complémentaire de l'entreprise, dans les limites prévues par ce même alinéa. »

Cet amendement a été défendu.

Le Gouvernement s'est exprimé.

Je le mets aux voix.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Balligand, rapporteur, a présenté un amendement, no 17 rectifié, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le neuvième alinéa (II bis) du I de l'article 7 :

« II bis. Le règlement du plan partenarial d'épargne salariale volontaire ne peut être conclu qu'après examen de la question de l'affectation d'une partie des sommes recueillie à l'acquisition de parts d e fonds investis, dans les limites prévues à l'article L.

214-39 du code monétaire et financier, d ans les entreprises solidaires définies à l'article L.

443-3-1. »

S ur cet amendement, MM. Cochet, Aschieri, Mme Aubert, MM. Mamère et Marchand ont présenté un sous-amendement, no 113, ainsi rédigé :

« Dans l'amendement no 17 rectifié, substituer aux mots : "ne peut être conclu qu'après examen de la question de l'affectation d'une partie des sommes recueillies" les mots : "doit prévoir qu'une partie des sommes recueillies peut être affectée". »

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement no 17 rectifié.

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Le Sénat souhaite l imiter les possibilités d'affectation d'une partie de l'épargne collectée, dans le PPESV à dix ans, au profit des fonds solidaires en ne rendant celles-ci que totalement facultatives.

Le texte adopté en première lecture par l'Assemblée nationale risque pour sa part d'entraîner des effets négatifs, dans la mesure où il pourrait interdire la négociation de PPESV tant que l'offre de fonds solidaires est insuffisante pour que les règlements des plans d'épargne à long terme puissent prévoir qu'une partie de leurs fonds y soit affectée.

Il est préférable de prévoir que la négociation du règlement du plan d'épargne à dix ans, le PPESV, doit nécessairement examiner la question d'une telle affectation à des fonds solidaires.

M. le président.

La parole est à M. Yves Cochet, pour soutenir le sous-amendement no 113.

M. Yves Cochet.

Comme vient de le dire excellement M. le rapporteur, il s'agit d'offrir le plus grand choix aux salariés. Aucune affectation autoritaire ne sera de mise ; mais il doit notamment être possible d'orienter l'épargne vers l'économie solidaire. Nous prévoyons donc une obligation de moyens, et non de résultat. Il ne s'agit pas de fixer autoritairement tel ou tel taux - 30 % ou plus -, et le salarié ne sera pas obligé d'investir dans un fonds solidaire, mais il faudra obligatoirement le lui proposer dans le cadre de son plan d'épargne.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Le Gouvernement est favorable à l'amendement de M. le


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rapporteur et au sous-amendement de M. Cochet, parce qu'il est souhaitable que les partenaires sociaux offrent aux salariés la possibilité d'investir leur épargne dans des fonds solidaires.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement ?

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

C'est tout le débat sur « doit » et « peut ». Nous en avons discuté en commission des finances et avons émis un avis favorable : la rédaction proposée par M. Cochet est tout à fait intéressante et va dans le sens de l'amendement.

M. Yves Cochet.

Certainement !

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 113.

(Le sous-amendemnet est adopté.)

Je mets aux voix l'amendement no 17 rectifié, modifié par le sous-amendement no 113.

(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président.

En conséquence, les amendements nos 154 du Gouvernement et 91 de M. Jean-Louis Dumont tombent.

Je suis saisi de deux amendements, nos 140 et 103, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement, no 140, présenté par M. Balligand, rapporteur, est ainsi rédigé :

« Rétablir le dixième alinéa (III) du I de l'article 7 dans la rédaction suivante :

« III. L'accord qui établit le plan partenarial d'épargne salariale volontaire détermine les modalités de délivrance, en une fois, des sommes ou valeurs inscrites aux comptes des participants. A la demande du participant, la délivrance peut être effectuée de manière fractionnée. »

Sur cet amendement, MM. Dray, Galut, Mme Picard et M. Rossignol ont présenté deux sous-amendements nos 86 rectifié et 87 rectifié.

Le sous-amendement no 86 rectifié est ainsi rédigé :

« Compléter l'amendement no 140 par la phrase suivante :

« Ce fractionnement s'effectue sur une durée maximale d'une année. »

Le sous-amendement no 87 rectifié est ainsi rédigé :

« Compléter l'amendement no 140 par la phrase suivante :

« Le nombre de fractionnements est limité à trois. »

L'amendement no 103, présenté par M. Cuvilliez, M. Vila et les membres du groupe communiste, est ainsi rédigé :

« Rétablir le dixième alinéa (III) du I de l'article 7 dans la rédaction suivante :

« III. L'accord qui établit le plan partenarial d'épargne salariale volontaire détermine les modalités de délivrance en une fois des sommes ou valeurs inscrites aux comptes des participants. »

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement no 140.

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Cet amendement se justifie par son texte même.

M. le président.

La parole est à M. Jean Vila, pour soutenir l'amendement no 103.

M. Jean Vila.

La première lecture avait permis, à notre demande, que le principe d'une sortie en rente du PPESV soit abandonné. Il ne s'agit pas d'une clause de style : nous refusons, comme la plupart des organisations syndicales, toute dérive vers les fonds de pension.

Le Sénat, qui défend le principe d'une épargne retraite par la voie de la capitalisation, laisse ouverte, dans la rédaction du texte qui nous revient en nouvelle lecture, cette possibilité de sortie.

Notre amendement propose donc que la sortie du PPESV s'effectue exclusivement en capital. La sortie de manière fractionnée retenue dans le texte adopté en première lecture nous apparaît pour le moins ambigue , et notre point de vue est d'ailleurs partagé par de nombreux spécialistes de l'épargne salariale, qui, par-delà le flou juridique de la formule, évoquent le risque de voir réintroduite la possibilité de fait d'une sortie en rente.

De plus, rien n'est dit quant à la transmissibilité du déblocage fractionné aux ayants droit du participant au plan d'épargne. L'Assemblée se doit de confirmer sans ambiguïté la seule possibilité de sortie en capital.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Le Gouvernement est favorable à l'amendement de coordination présenté par M. le rapporteur, mais défavorable à celui de M. Cuvilliez, pour les raisons qui l'ont déjà conduit à rejeter le sous-amendement no 86 : en fin de compte, il s'agirait de réduire la faculté de choix des salariés. Les sommes arrivées à échéance peuvent être maintenues sur le plan. Ainsi le salarié peut-il parfaitement adapter sa durée de placement à ses projets, et nous souhaitons qu'il puisse conserver cette faculté, qu'il n'y a pas lieu de restreindre.

M. le président.

Le sous-amendement no 86 rectifié n'est pas défendu, non plus que le sous-amendement no 87 rectifié.

Je vais donc mettre aux voix l'amendement no 140.

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Vous ne demandez pas l'avis de la commission sur l'amendement no 103, monsieur le président ?

M. le président.

Etant donné que les deux amendements s'excluent l'un l'autre et que la commission a adopté l'amendement no 140, j'en ai déduit que vous étiez défavorable à l'amendement no 103. Mais si vous voulez intervenir, je vous donne bien volontiers la parole, monsieur le rapporteur.

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Par correction à l'égard de mes collègues Cuvilliez et Vila, je voudrais simplement dire quelques mots.

Cet amendement, comme d'autres, d'ailleurs, vise à réduire la possibilité d'une sortie en capital sous forme fractionnée. Il ne s'agit pas de revenir à une sortie en rente, comme celle que proposait le texte initial du Gouvernement : cette option a été rejetée par un des amendements adoptés en première lecture. Ce serait un malentendu de croire que l'autorisation d'une sortie fractionnée a pour objectif de recréer, de manière déguisée, une sortie en rente. Il s'agit simplement de s'aligner sur ce qui vaut déjà dans le cadre du plan d'épargne entreprise, sur ler égime commun que beaucoup de salariés français connaissent : il vise à permettre aux salariés disposant d'un PPESV arrivé à maturité de ne pas le casser entièrement s'ils n'ont pas besoin de disposer de la totalité de


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leur épargne. Une telle obligation serait en effet contre productive puisqu'elle aurait pour effet de vider d'un coup les PPESV arrivés à terme. La commission a repoussé cet amendement, mais ses auteurs ne doivent avoir aucune inquiétude quant à la signification du fractionnement.

M. Yves Cochet.

Là n'est pas le problème !

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

La formule entend établir une homothétie avec le PEE.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 140.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

En conséquence, l'amendement no 103 tombe.

M. Balligand, rapporteur, a présenté un amendement, no 141, ainsi rédigé :

« Supprimer le I bis et le I ter de l'article 7. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Amendement de cohérence.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 141.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements, nos 18 et 120, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 18, présenté par M. Balligand, rapporteur, est ainsi libellé :

« Rétablir les II et III de l'article 7 dans la rédaction suivante :

« II. Au chapitre VII du titre III du livre Ier du c ode de la sécurité sociale il est inséré un article L.

137-5 ainsi rédigé :

« Art. L.137-3 1.

Il est institué à la charge des employeurs et au profit de la mission du fonds de solidarité vieillesse mentionnée au deuxième alinéa de l'article L.

135-1 une contribution sur la fraction de l'abondement de l'employeur au plan partenarial d'épargne salariale volontaire défini à l'article L.

4431-2 du code du travail, qui excède, annuellement pour chaque salarié, la somme de 2 300 euros majorée, le cas échéant, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article L.

443-7 du même code.

«

2. Le taux de cette contribution est fixé à 8,2 %.

«

3. Les dispositions des articles L.

137-3 et

L. 137-4 sont applicables, s'agissant de la présente contribution. »

« III.

L'article L.

135-6 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« 9o Le produit de la contribution instituée à l'article L.

137-5. »

Sur cet amendement, je suis saisi de deux sousamendements, nos 144 et 104 rectifié.

L e sous-amendement no 144, présenté par MM. Cochet, Aschieri, Mme Aubert, MM. Mamère et Marchand, est ainsi rédigé :

« Dans le deuxième alinéa de l'amendement no 18, substituer aux mots : "2 300 euros" les mots : "1 150 euros".

Le sous-amendement no 104 rectifié, présenté par M. Cuvilliez, M. Vila et les membres du groupe communiste, est ainsi rédigé :

« A la fin de l'avant-dernier alinéa du II de l'amendement no 18, substituer au taux : "8,2 %" le taux : "16 %". »

L'amendement no 120, présenté par M. Cuvilliez, M.

Vila et les membres du groupe communiste, est ainsi libellé :

« Rétablir le II de l'article 7 dans la rédaction suivante :

« II. Il est inséré dans le code de la sécurité sociale un article L.

137-5 ainsi rédigé :

« Art. L.

137-5. Il est institué à la charge des employeurs et au profit de la mission du fonds de solidarité vieillesse mentionnée au deuxième alinéa de l'article L.

135-1 une contribution sur la fraction de la contribution de l'employeur au plan partena-r ial d'épargne salariale volontaire défini à l'article L.

443-1-2 du code du travail qui excède une somme de 460 euros, majorée, le cas échéant, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article L.

443-7 du même code. »

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement no

18.

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Le Sénat a supprimé la contribution de 8,2 % sur la partie de l'abondem ent des entreprises aux PPESV, qui dépasserait 15 000 francs, au profit du fonds de réserve des retraites.

Cet amendement vise à la rétablir.

M. le président.

La parole est à M. Jean Vila, pour présenter l'amendement no 120.

M. Jean Vila.

Je le retire.

M. le président.

L'amendement no 120 est retiré.

Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement no 18 ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Le Gouvernement est favorable à cet amendement qui prévoit un retour au texte judicieux et équilibré adopté par l'Assemblée nationale en première lecture.

M. le président.

La parole est à M. Yves Cochet, pour soutenir le sous-amendement no 144.

M. Yves Cochet.

On se souvient que cette disposition a donné lieu à de nombreuses discussions en première lecture pour déterminer dans quelle mesure ces dispositions risquaient de fragiliser notre système de protection sociale, selon qu'elles étaient ou non soumises à des cotisations. Un compromis a finalement été trouvé au sein de la majorité ; cependant, le plafond me paraît un peu élevé.

En 1997, la prime attribuée au titre de l'intéressement par les employeurs était en moyenne de 5 270 francs.

C'est un peu plus aujourd'hui. On nous propose d'aller jusqu'à 15 000 francs, seuil au-delà duquel on contribuerait au fonds. Cela me paraît beaucoup. A un tel niveau, il n'y aurait pas de contribution du tout. Si l'on fixe le montant à 7 500 francs, c'est-à-dire à 1 150 euros notez ma rapidité de conversion, monsieur le président (Sourires) -, soit la moitié du montant proposé, le dispositif sera opérationnel et une partie de l'abondement n'échappera pas aux cotisations sociales. Si l'on va trop loin, tout y échappera et on n'obtiendra qu'un effet d'affichage.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 JANVIER 2001

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

La commission n'a pas examiné ce sous-amendement, présenté en séance.

A titre personnel, je n'y suis pas favorable car nous devons, en la matière, rester vigilants. Il y a eu une demande d'assujettissement aux cotisations sociales. Nous avons trouvé un compromis à 15 000 francs en première lecture : il fut assez laborieux à trouver et il ne faudrait pas le détruire.

Il est un discours très répandu, aujourd'hui, dans certaines sphères, qui consiste à dire que l'épargne salariale va finir par se substituer au salaire. C'est beaucoup moins évident depuis que l'on connaît les récentes statistiques, dont Mme Bricq et moi-même avons déjà parlé. Si on les compare aux chiffres de 1998, on voit bien que la substitution de l'épargne salariale au salaire est moins criante qu'on ne le dit ici ou là. Honnêtement, il faut donc laisser ce système d'épargne salariale se mettre en place.

Pour encourager ce mouvement, nous avons créé, à côté du PEE qui existait mais ne concernait pas les

PME -, un PEI, qui doit permettre, par accord de branche ou par accord territorial, de fidéliser les salariés dans l'entreprise, et, d'autre part, un dispositif à dix ans.

Les Français qui travaillent dans les entreprises ont des inquiétudes pour leur avenir et aimeraient disposer d'un petit capital : ils le pourront puisque j'ai proposé, tant dans mon rapport au Premier ministre que dans cette enceinte, que la sortie en rente ne puisse être autorisée.

Nombre de collègues l'ont également souhaité, et toutes les ambiguïtés ont été levées. Encore faut-il laisser le dis positif se mettre en place. Si l'on met des taquets très bas, on bloque le développement du produit à dix ans, intéressant pour les salariés comme pour les PME. Si l'on veut avoir un dispositif qui finance vraiment les PME, par le biais des FCPR ou des sociétés à capital risque, les dispositifs à dix ans seront plus utiles que ceux à cinq ans, pour les raisons que j'ai exposées tout à l'heure ; les sociétés de gestion savent fort bien comment pratiquer.

Il ne faut pas vouloir arrêter immédiatement la généralisation. Certes, on crée un produit à dix ans à côté de celui à cinq ans, mais on fixe un seuil au-delà duquel il y a assujettissement aux cotisations sociales. Il faut laisser le dispositif se développer.

Certains craignent que, en cas de développement i mportant, un grand nombre de chefs d'entreprise veuillent substituer l'épargne salariale à une part du salaire, mais c'est oublier que, à partir de 15 000 francs, le mécanisme de l'assujettissement commencera à jouer.

Bref, je crois qu'il faut laisser le mouvement s'enclencher et se généraliser, qu'il s'agisse du produit à cinq ans ou du produit à dix ans.

C'est la raison pour laquelle je souhaite que l'on s'en tienne au texte adopté par l'Assemblée en première lecture, qui prévoit une contribution de 8,2 % sur la partie de l'abondement des entreprises aux PPESV qui dépasserait 15 000 francs.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement sur le sous-amendement no 144 M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Monsieur Cochet, j'ai bien entendu votre argumentation.

Le Gouvernement estime que le dispositif qu'il propose est équilibré et que le seuil de 15 000 francs à partir duquel s'appliquera une taxation de 8,2 % lui paraît bon.

Fixé plus bas, ce seuil serait dissuasif. Cela étant, nous pensons que le dispositif va monter en puissance. Bref, c'est par ce biais que l'on obiendra une taxation significative.

Pour des raisons de sagesse, d'efficacité et d'équilibre, le Gouvernement ne souhaite donc pas l'adoption de votre sous-amendement.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.

M. Jean-Jacques Jégou.

Au coeur de ce débat interne à la majorité plurielle, je voudrais souligner combien je regrette que l'amendement de Jean-Pierre Balligand vise à rétablir un mécanisme de taxation. Comme je l'ai indiqué dans mon intervention générale, le groupe UDF déplore que l'on ait compliqué le système ; pour sa part, il aurait souhaité qu'il fût plus simple. Bien entendu, nous n'approuvons pas le résultat de la négociation qui a permis d'aboutir à ce que M. le secrétaire d'Etat et le rapporteur appellent un équilibre. Et si les choses devaient continuer à s'aggraver, le groupe auquel j'appartiens pourrait revenir sur sa position et ne plus s'abstenir, même si cela ne change rien quant à l'adoption de ce texte par l'Assemblée.

Quoi qu'il en soit, des mesures du type de celles qui nous sont proposées risquent surtout d'entraver l'épargne salariale. Or je ne crois pas que ce soit le souhait du Gouvernement, non plus que d'une partie de la majorité.

C'est pourquoi je voterai contre l'amendement no 18 et contre le sous-amendement de M. Cochet et de ses amis.

M. le président.

La parole est à M. Yves Cochet.

M. Yves Cochet.

Je souhaite intervenir, non pour argumenter à nouveau sur mon sous-amendement, mais pour fournir une indication à M. le rapporteur et à M. le secrétaire d'Etat, qui souhaitent comme nous tous l'extension de l'épargne salariale aux PME et aux PMI si on élabore une loi sur ce sujet, c'est bien pour favoriser c e type d'épargne, ainsi que le développement de l'épargne salariale solidaire, sujet sur lequel nous reviendrons tout à l'heure.

Selon un indicateur de performances défini par les AGF - groupe avec lequel je n'ai pas des rapports fréquents -, l'épargne salariale actuelle est très populaire. Par conséquent, le dispositif que nous proposons risque d'être encore plus populaire. Cela dit, actuellement, le rendement moyen brut des FCPE sur cinq ans et d'environ 25 % pour les FCPE en actions - qui sont les plus rentables, mais aussi les plus risqués -, de 9 % pour les FCPE en obligations et de 18 % pour les FCPE diversifiés. Si l'on ajoute l'abondement des entreprises, il est évident que les niveaux de rendement seront sans équivalent et je pense donc que le système va marcher.

Je propose donc au Gouvernement et à M. le rapporteur que nous nous donnions rendez-vous dans un an, voire dans deux, afin de disposer de statistiques sur les abondements supérieurs à 15 000 francs.

M. Jean-Jacques Jégou.

Donner rendez-vous au Gouvernement dans deux ans quel optimisme !

M. Yves Cochet.

Mais je suis optimiste, monsieur Jégou !

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 144.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

La parole est à M. Jean Vila, pour présenter le sous-amendement no 104 rectifié.

M. Jean Vila.

Il est défendu.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur.

Mon argumentation sur le sous-amendement de M. Cochet vaut également pour celui-ci.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 16 JANVIER 2001

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.

Le Gouvernement est opposé à l'augmentation du montant du prélèvement. Il est donc défavorable à ce sousamendement.

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 104 rectifié.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

18. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je rappelle que l'amendement no 120 a été retiré.

Je mets aux voix l'article 7, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 7, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

3 NOMINATION D'UN DÉPUTÉ EN MISSION TEMPORAIRE

M. le président.

J'ai reçu de M. le Premier ministre u ne lettre m'informant de sa décision de charger M. Michel Charzat, député de Paris, d'une mission temporaire, dans le cadre des dispositions de l'article LO 144 du code électoral auprès de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Cette décision a fait l'objet d'un décret publié au Journal officiel du mardi 16 janvier 2001.

4

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

M. le président.

Ce soir, à vingt et une heures, troisième séance publique : Suite de la discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi, no 2693, sur l'épargne salariale, l'actionnariat salarié et l'épargne retraite :

M. Jean-Pierre Balligand, rapporteur, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport no 2792).

La séance est levée.

(La séance est levée à dix neuf heures vingt-cinq.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT