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APRÈS L'ART. 3
N° 14
ASSEMBLÉE NATIONALE
26 novembre 2010

LUTTE CONTRE LES MARCHANDS DE SOMMEIL - (n° 2943)

Commission
 
Gouvernement
 

AMENDEMENT N° 14

présenté par

M. Le Bouillonnec, M. Brottes, M. Jibrayel, M. Dumas, M. Goldberg, M. Pupponi,
M. Rogemont, Mme Guigou, Mme Maquet, Mme Robin-Rodrigo, M. Letchimy,
M. Goua, M. Jean-Louis Dumont, M. Cacheux, Mme Lepetit, Mme Darciaux,
M. Vaillant, Mme Mazetier, M. Valax
et les membres du groupe Socialiste, radical, citoyen et divers gauche

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ARTICLE ADDITIONNEL

APRÈS L'ARTICLE 3, insérer l'article suivant :

L’article 6 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 est complété par six alinéas ainsi rédigés :

« Il est créé un permis de louer.

« Ce permis sera délivré par la commune après déclaration de la part de la part du propriétaire bailleur de la conformité du logement proposé aux normes de décence définies par le décret n° 2002-120 du 31 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent. Le logement devra en outre assurer l’inviolabilité de la vie privée des occupants et comporter un système de chauffage adapté et conforme aux normes en vigueur.

« Ce permis sera exigé préalablement à toute mise en location par un propriétaire bailleur, personne physique ou morale, du parc privé d’un logement de moins de 28 mètres carrés, ou situé dans un immeuble de plus de trente ans ou non initialement prévu pour l’habitation et sera annexé au contrat de bail.

« Un décret déterminera les normes nécessaires et leur application dans les différents types d’habitats.

« Le bénéfice du paiement en tiers payant des aides personnelles au logement est subordonné à la production du permis.

« Sur décision du maire de la commune, les services communaux d’hygiène et de santé pourront réaliser des visites pour vérifier la conformité effective du logement aux normes définies pour le permis de louer. Tout propriétaire bailleur qui se rendra coupable de fausse déclaration dans l’attribution du permis de louer, ou qui aura mis en location un logement visé par le troisième alinéa du présent article sans permis de louer sera passible d’une amende de 500 à 5 000 euros pour une première infraction, et de 5 000 à 50 000 euros en cas de récidive dans les cinq années suivant une première condamnation. ». »

EXPOSÉ SOMMAIRE

La pénurie de logements sociaux permet aux « marchands de sommeil » de prospérer.

Parce qu’il n’y a pas assez de logements abordables, certains propriétaires louent à des tarifs scandaleux des habitations insalubres et dégradées, voire des garages ou d’autres bâtiments inadaptés, qui n’ont pas été conçus pour être des logements.

Si la construction de logements sociaux doit être la première priorité, une partie du domaine privé représente un logement social de fait. Un moyen de garantir un seuil minimal de décence à ceux qui louent dans le privé doit impérativement être trouvé.

Le décret de janvier 2002 sur le logement indécent, pris dans le cadre de l’application de la loi SRU, et qui s’attaquait à ce problème, n’a cependant pas donné les résultats espérés. Peu d’actions ont abouti et le problème perdure car c’est sur le locataire que porte la responsabilité d’engager une action or les locataires de marchands de sommeil connaissent généralement mal leurs droits, et ne sont souvent pas à même de les faire valoir. La crainte de se retrouver complètement privés de logement les rend parfois complices involontaires de leur propriétaire indélicat. La situation est trop inégalitaire pour qu’ils puissent faire valoir leurs droits.

Il faut donc renverser la charge de la preuve : c’est au propriétaire bailleur de prouver que son logement respecte les normes.

Pour cela, il est nécessaire d’instaurer un permis de louer.

La Belgique a déjà décidé d’instaurer ce permis de louer ou « permis de location », et le système semble bien fonctionner. Il faut s’en inspirer pour proposer l’instauration d’un permis de louer pour certains immeubles ou logements, définis par leur taille, leur ancienneté ou leur usage initial. Pour les immeubles visés par le dispositif, les propriétaires devront déclarer la conformité des logements qu’ils mettent en location aux normes de décence: normes de surface, d’équipement, de sécurité et de salubrité, notamment celles définies par le décret du 31 janvier 2002. Ces normes de décence doivent en outre inclure le chauffage, qui est à l’origine de beaucoup d’accidents et de maladies, et la protection de la vie privée (serrures aux portes, boîtes aux lettres.) D’autres éléments pourraient s’avérer nécessaires : un décret d’application permettra d’adapter ces normes aux réalités du terrain. Le décret permettrait en outre de définir avec plus de souplesse des éléments tels que l’ancienneté des bâtiments ou leur situation géographique, pour mieux prendre en compte les spécificités du logement rural. Sur la base de cette déclaration, les services municipaux délivreront un permis de louer, préalable à toute mise en location. Sur proposition du maire de la commune, des visites des Services Communaux d’Hygiène et de Sécurité vérifieront si le logement est effectivement conforme aux déclarations du propriétaire ; et les sanctions en cas d’infraction doivent être lourdes, particulièrement pour la récidive. Pour éviter que l’instauration de ce permis ne renchérisse les loyers, ce permis doit ouvrir le droit au versement en tiers payant des allocations logement.

Le logement locatif mérite un tel contrôle, car le logement est un bien de première nécessité, qui conditionne la réalisation de droits fondamentaux comme le droit à la santé, ou le droit à un emploi. Il ne s’agit pas, par ce permis, de soupçonner les propriétaires en général d’être des marchands de sommeil. La grande majorité respectent les règles de décence et font faire les travaux qui s’imposent dès qu’ils en voient la nécessité. D’autres encore n’ont pas les moyens de faire les travaux nécessaires, et ceux-là il faut pouvoir les aider. Mais précisément le permis de louer, par la déclaration préalable qu’il implique pour déclencher la procédure, permet de manifester cette bonne foi. Ce n’est qu’ainsi que nous pourrons réellement définir une politique volontariste de lutte contre le logement indécent.