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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Deuxième session extraordinaire de 2011-2012

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du mardi 25 septembre 2012

SOMMAIRE ÉLECTRONIQUE

SOMMAIRE


Présidence de M. Christophe Sirugue

1. Mobilisation du foncier public en faveur du logement et renforcement des obligations de production de logement social

Discussion des articles (suite)

Après l'article 3 (suite)

Amendement no 420

Mme Annick Lepetit

Suspension et reprise de la séance

Avant l'article 4A

Amendement no 307

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure de la commission des affaires économiques

Mme Cécile Duflot, ministre

Amendements nos 397 rectifié, 83, 306, 305

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques

Amendements nos 471 (sous-amendement), 304

Rappels au règlement

M. Martial Saddier

M. Yves Jégo

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques

Avant l’article 4 A (suite)

Amendements nos 303, 21

Article 4 A

M. Jean Lassalle

Amendement no 408

Après l’article 4A

Amendements nos 274, 275

Article 4

M. Michel Piron

Mme Colette Capdevielle

M. William Dumas

M. Serge Bardy

Mme Marie-Françoise Clergeau

M. Marcel Rogemont

M. Philippe Folliot

M. Henri Plagnol

M. André Chassaigne

M. Michel Liebgott

M. Guillaume Larrivé

M. Martial Saddier

M. Alain Chrétien

Amendements nos 204, 205, 206, 207, 208, 209, 210, 212, 213, 216, 218, 219, 220, 441

Suspension et reprise de la séance

Article 4 (suite)

Amendements nos 77, 276 rectifié, 345, 126, 24, 119, 267, 278 rectifié, 149 rectifié, 150, 332

Suspension et reprise de la séance

Rappel au règlement

M. Martial Saddier

Article 4 (suite)

Amendements nos 329, 317, 327, 454 rectifié, 104, 103, 105, 106, 121, 122, 123, 87, 330, 331, 335, 129, 283, 400

2. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de M. Christophe Sirugue,
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

1

Mobilisation du foncier public en faveur
du logement et renforcement des obligations
de production de logement social

Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, relatif à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social. (nos 195, 200, 196).

Discussion des articles (suite)

M. le président. Cet après-midi, l’Assemblée a continué l’examen des articles, s’arrêtant à l’amendement n° 420 portant article additionnel après l’article 3.

Après l'article 3 (suite)

M. le président. L’amendement n° 420 a été présenté mais sa discussion n’est pas achevée.

La parole est à Mme Annick Lepetit.

Mme Annick Lepetit. Monsieur le président, je demande une suspension de séance. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt et une heures trente-cinq, est reprise à vingt et une heures quarante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Personne ne demande la parole sur l’amendement n° 420 ?...

Je vais donc le mettre aux voix.

(L'amendement n° 420 est adopté.)

Avant l'article 4A

M. le président. La parole est à M. Marc Dolez, pour soutenir l'amendement n° 307.

M. Marc Dolez. Notre groupe propose de restaurer un véritable 1 % logement pour redynamiser la construction. Il nous semble en effet que l’on ne peut pas évoquer une mobilisation pour le logement social sans aborder la question centrale du financement de la construction.

Il faut bien reconnaître que le 1 % logement a été petit à petit vidé de sa substance par une succession de réformes. Ainsi, en plusieurs décennies, d’une logique de financement du logement par l’État et de contribution des entreprises, nous sommes passés à une logique incitative fondée sur des exonérations fiscales de toutes sortes.

Ce système est aujourd’hui à bout de souffle, et tous les acteurs publics sont dans des situations financières qui ne leur permettent plus d’assumer ces transferts de compétences.

M. Dominique Tian. Avec 4 milliards d’euros de budget ?

M. Marc Dolez. C’est la raison pour laquelle nous vous soumettons cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Audrey Linkenheld, rapporteure de la commission des affaires économiques.

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure de la commission des affaires économiques. La commission a émis un avis défavorable à cet amendement, considérant que le débat sur le financement du logement aura davantage sa place dans le projet de loi de finances dont la discussion va s’ouvrir.

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’égalité des territoires et du logement.

Mme Cécile Duflot, ministre. L’avis du Gouvernement porte à la fois sur la forme et sur le fond. Aujourd’hui, au titre de la PEEC – la participation des entreprises à l’effort de construction – les employeurs cotisent à hauteur de 0,45 % des rémunérations, et au Fonds national d’aide au logement à hauteur de 0,50 % de la part des rémunérations sous plafond. Cela signifie, monsieur Dolez, que la part contributive des employeurs au titre du logement s’élève quasiment à 1 %. Par ailleurs, l’exonération de cotisation des entreprises de 10 à 20 salariés a été compensée. On peut donc dire que l’effort des entreprises en faveur du logement est maintenu ; il sera d’ailleurs renforcé dans le cadre de l’accord conclu par le Gouvernement avec le mouvement Action logement, afin que ce dernier participe à l’effort de construction de logements locatifs sociaux dès la fin de l’année. Par conséquent, je suis défavorable à votre amendement.

M. le président. La parole est à M. Philippe Folliot.

M. Philippe Folliot. Cet amendement est intéressant et surprenant. On ne peut que souscrire aux propos de Mme la ministre sur la réalité des cotisations des entreprises par le biais du FNAL. Rappelons que le 1 % logement était, lors de la création du premier CIL à Roubaix en 1943 puis du deuxième CIL à Mazamet en 1946, une contribution volontaire des entreprises. Il n’est devenu obligatoire qu’en 1953, lorsque la participation des employeurs à l’effort de construction a été instaurée avec la PEEC. Le problème est que l’État a rogné le 1 % logement en l’utilisant notamment pour alimenter le FNAL. Ce dispositif, qui était un outil de solidarité professionnelle, est progressivement devenu la variable d’ajustement du budget du logement.

M. Henri Plagnol. Vous avez raison !

M. Philippe Folliot. En tout état de cause, ce mécanisme n’a plus pu jouer le rôle de solidarité professionnelle qu’il jouait autrefois. Ainsi, notre collègue Marc Dolez a bien fait de soulever le problème, même s’il n’apporte pas forcément la bonne solution. Un bon amendement eût consisté à supprimer le FNAL pour revenir au véritable 1 % logement et disposer ainsi d’un outil de solidarité professionnelle par le biais des comités interprofessionnels du logement et d’Action logement.

Madame la ministre, j’observe une grande constance : les gouvernements se suivent mais la tentative de spoliation des fonds du 1 % logement demeure ! Sans une mobilisation très forte et un arbitrage rendu par le Premier ministre il y a quelques semaines, vous auriez essayé de capter une fois de plus l’ensemble de ces ressources. Il s’agit d’un problème de fond : les comités interprofessionnels du logement ont la particularité d’être gérés paritairement par les partenaires sociaux. Cet outil est tout à fait intéressant mais il est quelque peu dévalorisé à cause de ces ponctions successives de l’Etat. Cela est assurément très regrettable.

M. Marcel Rogemont. Il fallait le dire avant !

M. le président. La parole est à M. François de Mazières.

M. François de Mazières. Je souhaite revenir à l’amendement n° 420. Nous n’avons pas compris : après une interruption de séance de plusieurs minutes… (« Et alors ? » sur les bancs du groupe SRC.)

Attendez ! L’amendement n° 420 représente une mesure très importante. Nous n’en avons absolument pas débattu ! Nous avons constaté cet après-midi que la position de la ministre était en contradiction avec cet amendement. Maintenant, vous revenez soudain. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Soyons sérieux ! Vous savez qu’il s’agit d’une mesure très importante, ce qui explique d’ailleurs votre insistance. Il faut en discuter sérieusement. Vous êtes conscients de l’impact de cette mesure !

Plusieurs députés du groupe UMP. C’est un hold-up !

M. le président. Je rappelle que nous discutons de l’amendement n° 307 (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), que je vais d’ailleurs mettre aux voix.

(L’amendement n° 307 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Yves Jégo, pour soutenir l’amendement n° 397 rectifié.

M. Yves Jégo. Cet amendement est particulièrement important : il porte sur l’accession des locataires à la propriété, plus précisément sur la possibilité donnée aux locataires qui le souhaitent d’acquérir leur logement.

Dans les textes actuels, il est prévu que le locataire puisse solliciter son bailleur pour acquérir son logement. Le bailleur dispose d’un délai de deux mois pour lui répondre. Nous proposons de modifier cette disposition en donnant au bailleur un délai de deux mois pour engager le processus de vente. Cette disposition permettrait à tout locataire souhaitant acquérir son logement de le faire sans que le bailleur puisse s’y opposer. Nous créerions ainsi un nouveau droit : le droit à l’acquisition du logement occupé par un locataire dans le parc social.

Cette mesure poursuit plusieurs objectifs. En premier lieu, elle permet de répondre à la demande et aux désirs du locataire. Il ne s’agit pas de forcer, mais d’ouvrir un droit nouveau. Nous savons tous qu’un grand nombre de locataires souhaiteraient se rendre acquéreurs de leur logement. Il existe aujourd’hui une série de dispositifs accompagnant et encadrant l’acquisition de logements par les locataires, mais le blocage résulte souvent de l’absence de volonté des bailleurs sociaux, qui trouvent toujours de bonnes raisons pour refuser ou ne pas mettre en vente un nombre suffisant de logements à leurs occupants.

La deuxième vertu de ce dispositif repose sur le fait qu’un logement vendu permet à un bailleur social de construire deux logements neufs. Madame la ministre, j’insiste beaucoup là-dessus : nous disposons d’un levier financier exceptionnel ! Si 1 % des locataires demandaient à devenir propriétaires, et que nous arrivions ainsi à faire vendre 1 % du patrimoine des logements sociaux, nous estimons pouvoir financer la construction de 100 000 logements sociaux en quelque temps. Vous le voyez : il s’agit d’un levier puissant !

Je souhaite que cet amendement important fasse l’objet d’une véritable discussion. Cette proposition constitue une révolution. Elle doit permettre au locataire d’acquérir un nouveau droit : le droit d’acheter son logement quand il le décide.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. La commission a émis un avis défavorable, considérant que la production de logements pour répondre à la demande des Français devait se réaliser d’abord par la construction de logements neufs, et pas nécessairement par la vente de logements existants. Par ailleurs, la commission considère que le dispositif actuel, qui permet de répondre favorablement à la demande d’un locataire, est un dispositif équilibré ; néanmoins le principe de la vente doit rester du ressort du bailleur d’une part, des communes et EPCI concernés d’autre part.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. L’avis du Gouvernement est défavorable. D’une part, pour des raisons de stratégie patrimoniale : en mettant les organismes HLM dans la situation de devoir gérer, de fait, un nombre important de copropriétés dont feraient partie leurs anciens locataires, cette mesure pourrait fragiliser leur gestion. D’autre part, dans les communes où il n’existe pas de larges possibilités de développement de l’offre locative, il ne me paraît pas opportun d’ouvrir ce droit à l’achat. C’est pourquoi je suis défavorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Marcel Rogemont.

M. Marcel Rogemont. Avec cet amendement, on poursuit toujours la même logique : on nie la capacité des organismes HLM à développer une stratégie patrimoniale et à gérer en fonction des contraintes.

Votre amendement n’a d’intérêt que dans la mesure où la puissance publique finance la construction de ces logements locatifs. De ce fait, vous considérez qu’il peut y avoir un retour pour le locataire. Je souhaite donc vous poser une question. Les dispositifs Borloo et Scellier se caractérisent également par un financement public. Pourquoi ne proposez-vous pas que le locataire d’un dispositif Borloo puisse acquérir son logement de droit, au bout de dix ans par exemple ? Pourtant, vous ne le proposez pas, car certains intérêts doivent être défendus. Personnellement, je défends les intérêts d’une stratégie patrimoniale de la puissance publique, qui est non seulement celle des organismes HLM mais aussi celle des collectivités locales et nationale qui financent le logement locatif public.

M. le président. La parole est à M. Henri Plagnol.

M. Henri Plagnol. Je suis très étonné des éléments de réponse apportés pour neutraliser un amendement cosigné par l’ensemble des membres du groupe UDI. Cet amendement démasque la philosophie politique et sociale sous-jacente à l’ensemble du projet de loi.

Mme la rapporteure nous dit qu’il faut privilégier les constructions neuves. Or Yves Jégo vous a excellemment expliqué que c’est précisément en remettant en circulation une partie du patrimoine des offices HLM qu’on pourra créer au moins deux logements neufs pour un logement dont l’occupant accéderait à la propriété.

M. Marcel Rogemont. Où allez-vous les construire ?

M. Henri Plagnol. Il n’y a donc aucune contradiction entre le souhait de construire davantage et celui de remettre en circulation une partie du patrimoine HLM.

L’argument selon lequel les offices HLM et les communes devraient pouvoir décider eux-mêmes ou mettre leur veto si un habitant souhaite devenir propriétaire me choque. Nous sommes là au cœur du débat. Nous voulons encourager l’accès à la propriété : c’est l’accès à la propriété qui rend libre !

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. C’est l’égalité qui rend libre !

M. Henri Plagnol. Toutes les enquêtes en témoignent : l’accès à la propriété est le rêve de l’immense majorité des Français. Vous ne voulez pas développer l’accès à la propriété : vous préférez que les personnes restent locataires à vie, qu’elles n’acquièrent pas de patrimoine, parce qu’elles constituent en fait des clientèles captives. (Vives exclamations sur les bancs des groupe SRC et GDR. – Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes UMP et UDI.)

Je le rappelle, les offices HLM gèrent 4,5 millions de logements, et des fonds propres équivalant à 30 milliards d’euros, que nous n’avons pas la possibilité de remettre en circulation.

M. Julien Aubert. C’est le fond du problème !

M. Henri Plagnol. Il s’agit d’un constat d’échec qui démasque l’idéologie de votre projet, lequel s’oppose systématiquement à l’accession à la propriété.

M. Marcel Rogemont. Nous ne sommes pas contre la propriété !

M. le président. La parole est à M. Yves Jégo.

M. Yves Jégo. Monsieur le président, je n’aurais pas repris la parole si on ne m’avait pas interrogé. Dans le parc locatif privé, lorsqu’un propriétaire met son bien en vente, il a l’obligation de proposer à son locataire de l’acquérir. Le dispositif que nous proposons existe donc dans le parc privé.

On nous a répondu en mettant en avant la stratégie patrimoniale des offices HLM. Madame la ministre, j’ai bien compris que vous avez choisi de privilégier les besoins de la structure plutôt que les désirs de l’individu.

M. Henri Plagnol. Bien sûr !

M. Yves Jégo. Nous n’avons pas fait ce choix. Nous pensons que le choix individuel d’une famille dont les conditions de vie se sont améliorées et lui permettent d’acquérir son logement, en restant dans son quartier sans déménager, est un facteur formidable de cohésion et d’équilibre social. C’est le maire d’une ville ayant 73 % de logements sociaux qui vous le dit ! Dans les villes ayant un nombre de logements sociaux beaucoup plus important que ce qu’elles sont capables de supporter, nous permettrions ainsi un certain rééquilibrage.

Puisqu’on ne lui en offre pas la possibilité, un locataire HLM qui aurait voulu accéder à la propriété quitte le quartier et déstabilise ainsi la sociologie du secteur, les nouveaux locataires n’ayant pas forcément les habitudes de vie du quartier.

J’insiste donc vraiment, madame la ministre, pour que vous preniez en compte cette question de l’accession sociale à la propriété, même si ce n’est pas aujourd’hui, sous la forme d’un amendement déposé par votre opposition, ce qui est peut-être gênant pour la majorité. Sur les 4,5 millions de personnes qui vivent dans le logement social, il y en a un grand nombre qui souhaitent acheter leur logement, et le devoir de la société est de leur répondre positivement. Vous ne pouvez pas balayer la question comme ça, simplement parce que cela vous déplaît et que c’est l’opposition qui a proposé cet amendement.

Je vous en supplie, écoutez les locataires quand ils vous disent qu’ils veulent rester dans leur logement et devenir propriétaires. C’est aussi noble d’être propriétaire que d’être locataire.

(L’amendement n° 397 rectifié n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Folliot, pour soutenir l’amendement n° 83.

M. Philippe Folliot. C’est un amendement qui sera, je crois, particulièrement consensuel. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Je vais vous expliquer pourquoi.

C’est un point particulièrement important pour l’accession sociale à la propriété. Les coopératives HLM ont, pendant pas mal d’années, développé un concept original, la location-attribution, qui a fonctionné jusqu’à la fin des années 60 ou le début des années 70. Le système n’a du reste pas été remis en cause dans son principe, mais il n’était pas suffisamment encadré.

Ce que je vous propose, c’est de le remettre en place, pour permettre à des familles de rester locataires de leur logement avec tout ce que cela procure, mais d’en devenir propriétaires pour un euro symbolique au bout de vingt-cinq ou trente ans. C’est un système qui a fonctionné et qui, dans les années 60 jusqu’à la fin des années 80 ou 90, quand il s’est éteint petit à petit, a permis à des dizaines de milliers de familles d’accéder à la propriété en toute sécurité. Si Jean-Louis Dumont ou la présidente de la fédération nationale des sociétés coopératives d’HLM, la sénatrice Marie-Noëlle Lienemann, étaient là, ils vous expliqueraient mieux que moi l’intérêt qu’il y aurait à essayer de le faire revivre.

Je vous propose donc, madame la ministre, une expérimentation pendant quelques années pour essayer de relancer ce système de location-attribution. Ce serait une avancée sociale intéressante, un outil supplémentaire pertinent qui permettrait aux coopératives HLM de jouer leur rôle. Vu leur statut, les locataires attributaires ont une implication plus que particulière dans la gestion des organismes. C’est donc un outil particulièrement intéressant et je suis convaincu qu’il y aura unanimité de la représentation nationale pour s’associer à ce projet.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. Je risque de vous décevoir, monsieur Folliot, mais la commission des affaires économiques a émis un avis défavorable à votre amendement.

M. Philippe Folliot. Oh !

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. L’objet de ce projet de loi n’est pas de trouver de nouveaux moyens de faire de l’accession sociale à la propriété, c’est d’abord d’encourager la construction de logements sociaux.

Par ailleurs, nous avons suffisamment dit depuis le début du débat que nous étions tous attachés à l’accession sociale à la propriété. Vous avez cité Jean-Louis Dumont et Marie-Noëlle Lienemann, il ne vous a sans doute pas échappé qu’il y avait quelque proximité idéologique entre ces deux parlementaires et le groupe auquel j’appartiens. Soyez donc certain que nous sommes très attachés nous aussi à ce dispositif mais, encore une fois, il vient en supplément et non en substitution à la production de logements sociaux, et notamment très sociaux, car c’est aussi là que se situent les besoins des Français.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Défavorable, pour les raisons indiquées par Mme la rapporteure.

M. le président. La parole est à M. Philippe Folliot.

M. Philippe Folliot. Après avoir entendu la réponse de Mme la rapporteure, je suis prêt à retirer cet amendement si vous vous engagez, madame la ministre, à étudier positivement la question dans le prochain texte sur le logement, et nous pourrions peut-être y travailler ensemble. Il y a des sujets sur lesquels on peut s’opposer, mais il y en a d’autres sur lesquels on peut trouver un consensus. Je crois que, sur un tel sujet, nous pouvons tous nous retrouver.

Si vous prenez un engagement et me donnez quelques raisons d’espérer, c’est avec plaisir que je retirerai cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Serge Letchimy.

M. Serge Letchimy. M. Folliot pose un vrai problème, c’est la question du patrimoine HLM existant. D’abord, il ne faut pas laisser croire que ce patrimoine ne peut pas être cédé. Aujourd’hui, toute société peut prendre la décision de vendre les appartements.

Vous voulez aller plus loin. Il y a deux possibilités. Il peut y avoir un turnover, notamment pour les populations les plus démunies qui ont besoin de logements sociaux, sachant que, comme on n’en construit pas énormément, c’est dans le patrimoine ancien qu’on trouve des loyers adaptés à leur réalité sociale.

M. Jego a indiqué que, si l’on cédait un appartement, on pouvait en faire deux. Il faudrait étudier les équations financières pour voir si c’est possible. Cela dit, lorsque vous cédez un appartement dans un immeuble, il faut absolument prévoir les conditions de la gestion de la copropriété car, à partir du moment où vous avez une multitude de personnes, la gestion de la copropriété devient infernale et cela se termine devant l’ANRU avec des démolitions et des risques de toutes sortes.

C’est un vrai débat, madame la ministre, qui mérite que l’on y consacre du temps, avec un texte derrière. La question est intéressante : comment utiliser le patrimoine actuel soit en turnover locatif pour ceux qui en ont besoin, soit en cession mais maîtrisée avec des mécanismes de prise en charge en matière de copropriété

M. le président. Maintenez-vous votre amendement, monsieur Folliot ?

M. Philippe Folliot. J’attends la réponse.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Cécile Duflot, ministre. Monsieur Folliot, je ne peux pas m’engager à mettre en œuvre ce que vous proposez dans votre amendement, mais la question pourra être étudiée lors de la préparation de la loi sur le logement, comme toutes celles qui sont relatives aux relations entre bailleurs et locataires, en particulier dans le parc social, mais pas exclusivement puisqu’il s’agira d’une refonte de la loi de 1989.

Je suis très attentive à ce qui a été dit sur la mise en copropriété, c’est un vrai sujet. Ce n’est pas la question des individus contre les opérateurs, monsieur Jégo. Gérer quinze copropriétés et gérer quinze immeubles, ce n’est pas du tout le même métier, ce ne sont pas les mêmes charges, les mêmes conséquences en matière d’organisation, et cela ne se fait donc pas à la légère.

Je suis favorable à ce que l’on étudie des dispositifs équilibrés et l’on pourra travailler sur la solution que vous proposez, mais je ne peux m’engager à accepter votre amendement.

M. le président. La parole est à M. Philippe Folliot.

M. Philippe Folliot. Je considère que vos propos sont encourageants, madame la ministre, et je retire mon amendement. Nous en rediscuterons dans le cadre du futur texte sur le logement.

(L’amendement n° 83 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Marc Dolez, pour soutenir l’amendement n° 306.

M. Marc Dolez. Nous proposons de saisir l’occasion de ce projet de loi pour envoyer un signal fort en interdisant les expulsions des familles sans ressources qui sont de bonne foi.

À l’approche de l’hiver 2012, la situation est malheureusement extrêmement sérieuse. La pénurie générale de logements se conjugue à la situation exsangue de l’hébergement d’urgence pour promettre, hélas, un hiver 2012 particulièrement difficile. Près de 3 000 places d’hébergement ont été fermées fin juin faute de financement, plusieurs centres ont fermé fin août et, la semaine dernière, madame la ministre, vous avez vous-même reconnu que l’hiver 2012 provoquerait l’une des situations les plus graves depuis quinze ans. C’est la raison pour laquelle nous proposons que notre assemblée fasse un geste fort en interdisant l’expulsion des familles non solvables.

Chaque année, de nombreuses municipalités prennent des arrêtés anti-expulsion, mais ces arrêtés sont annulés par les tribunaux administratifs faute de fondement juridique.

Notre amendement ne méconnaît pas le droit de propriété puisque les recours juridiques habituels pour les propriétaires resteraient inchangés. Mais la décision d’expulsion ne pourrait être prise à l’encontre des familles matériellement incapables de verser leurs loyers. C’est donc une mesure de sauvegarde temporaire qui prendrait nécessairement fin dès que le relogement ou l’évolution de la situation de la famille permettrait à celle-ci de quitter les lieux.

Notre amendement rejoint des propositions très semblables déposées il y a quelques mois encore par nombre de nos collègues de l’actuelle majorité. J’ai donc l’espoir que cet amendement pourra être voté ce soir par notre assemblée, ce qui, je le répète, serait un signe fort.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. Défavorable. La commission s’est évidemment montrée sensible à la situation que vous venez de décrire et vous avez très justement rappelé que des propositions sur ce sujet avaient pu être formulées par le passé, mais, aussi sensible que soit cette question, elle est aussi très complexe et il est préférable de l’inclure dans un dispositif législatif ayant vraiment trait aux relations entre locataires et propriétaires, plutôt que de l’aborder au détour de ce projet de loi consacré d’abord au foncier, et, nous allons le voir dans quelques instants, au renforcement de la production de logement social.

M. Marc Dolez. Le problème, c’est qu’il y a urgence !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Le Gouvernement est évidemment très sensible à cette question car la ministre du logement que je suis est confrontée jour après jour à la réalité de ce que signifie le mot expulsion.

Votre amendement tel qu’il est rédigé est une atteinte au droit de propriété, protégé constitutionnellement, ce qui, du coup, créerait de grandes difficultés d’application, mais vous connaissez la préoccupation qui est la nôtre et vous avez rappelé mes propos sur la crise en matière d’hébergement. Le Premier ministre a annoncé la semaine dernière le déblocage d’une enveloppe de 50 millions d’euros qui permettra de rouvrir des places d’hébergement et d’hébergement plus durable, et de répondre en partie à la situation.

La prévention des expulsions et, surtout, l’identification précoce des impayés, avant la dégradation de la situation, est l’un des éléments clés que nous travaillerons pour la loi du printemps. Nous pouvons aller bien plus loin et travailler également sur les questions de la garantie et de la protection des locataires, ce qui permettra, en anticipant les difficultés, y compris pour les ménages dont les ressources vitales sont en baisse, d’éviter ces situations qui, à chaque fois, quelles qu’en soient les causes, sont tragiques.

C’est pourquoi je suis défavorable à votre amendement mais très favorable à ce que des solutions soient trouvées. Nous travaillons, et vous en aurez des démonstrations concrètes, aux problèmes que vous posez.

(L’amendement n° 306 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n° 305.

M. André Chassaigne. Je suis très touché par l’expression réitérée de la sensibilité de notre ministre et de notre rapporteure, si bien que cet amendement ne s’adressera pas à leur sensibilité mais à leur raison. (Sourires.)

Chacun sait qu’une des pistes à suivre pour lutter contre le mal-logement, c’est la lutte contre les logements vacants. On en compte 2,3 millions, d’après l’INSEE, alors que notre pays recense huit millions de mal-logés. Une étude montre qu’un quart des propriétaires de ces logements vacants n’ont strictement aucun projet pour leur bien : ils n’ont pas l’intention de le remettre sur le marché ni d’en préparer l’habitabilité.

Il existe déjà plusieurs leviers de lutte contre cette sous-occupation du parc privé, comme la faculté de réquisition des logements vides, laquelle n’est malheureusement pas appliquée. La taxe sur les logements vacants, mise en œuvre dans huit communes témoins, donne quant à elle des résultats positifs, puisque les chiffres de logements remis sur le marché y augmentent notablement.

Aussi convient-il d’agir sur les dispositions existantes. C’est l’objet du présent amendement, qui propose de réduire le délai de constatation de la vacance d’un logement de dix-huit à douze mois. Il s’agit de sensibiliser les propriétaires des biens à la nécessité de les remettre au plus vite sur le marché. Il convient en effet de signaler que la durée moyenne de vacance, pour ce que nous en savons, dépasse fréquemment les deux ans dès lors que le logement est en travaux. Il existe donc une vraie utilité à se doter d’outils d’alerte et d’accélération du rythme. L’objectif est de lutter contre les propriétaires qui immobilisent des surfaces dans le seul but de spéculer. Voilà pourquoi je fais appel à votre raison.

M. Marc Dolez. Très bien !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. La commission, conjuguant sensibilité et raison, a émis un avis favorable. Dès lors qu’il n’existe aucun obstacle juridique et que l’intégration de la taxation sur les logements vacants dans le prochain projet de loi de finances a d’ores et déjà été annoncée par le Gouvernement, il paraît raisonnable d’adopter dès ce soir cette disposition.

M. Michel Piron. Le cœur a ses raisons que la raison ne connaît point !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Vous m’embarrassez, monsieur Chassaigne, car je ne voudrais pas vous laisser croire, par ma réponse qui, en partie, vous satisfera, que vous me trouveriez plus réceptive à vos arguments en vous adressant à ma raison plutôt qu’à ma sensibilité. (Sourires.)

La durée de vacance permettant la réquisition est aujourd’hui de dix-huit mois ; vous proposez de l’abaisser à douze. Il est légitime de penser que ce délai de douze mois est suffisant pour relouer son bien, notamment dans les zones tendues, qui seraient les plus susceptibles d’opérations de réquisition. En conséquence, je m’en remets à cette assemblée du soin d’équilibrer sa sensibilité et sa raison, le droit de propriété et le droit au logement. Je m’en remets à sa grande sagesse.

M. le président. La parole est à M. Serge Letchimy.

M. Serge Letchimy. Je soutiens M. Chassaigne, par raison et par sentiment, pour le bon développement urbain, mais il se présente une difficulté pour les départements et régions d’outre-mer, dans la mesure où l’article 18 ne s’applique pas à la première partie du texte. L’amendement est fondamental pour les centres-bourgs, compte tenu des logements vacants qui s’y trouvent. Je demande donc à Mme la ministre de trouver le moyen, au cours de la navette ou par un sous-amendement, d’en permettre l’application à l’outre-mer.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Cécile Duflot, ministre. Je propose un sous-amendement dans le sens que vient d’indiquer M. le député, précisant que le dispositif est également applicable outre-mer.

M. le président. Il me faut un texte écrit, madame la ministre.

Mme Marie-Christine Dalloz. C’est du pilotage à distance !

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Je suggère que le Gouvernement sous-amende la proposition de M. Chassaigne en précisant qu’elle s’applique aux départements et territoires d’outre-mer. Nous voterons ainsi le sous-amendement et l’amendement sous-amendé.

M. le président. Je suis donc saisi d’un sous-amendement du Gouvernement, qui se voit attribuer le n° 471 et auquel la commission est bien entendu favorable. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

(Le sous-amendement n° 471 est adopté.)

(L’amendement n° 305, sous-amendé, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Marc Dolez, pour soutenir l’amendement n° 304.

M. Marc Dolez. Avec cet amendement, nous proposons une autre piste pour améliorer le dispositif de lutte contre les logements vacants : supprimer la possibilité laissée au propriétaire d’un logement vide d’envoyer un simple projet d’aménagement de son bien pour échapper à la taxe sur les logements vacants. Vous avez vous-même reconnu, madame la ministre, qu’il suffit pratiquement, aujourd’hui, d’envoyer un courrier pour être exonéré de la taxe. C’est très problématique, quand on sait que 2,3 millions de logements sont concernés. On imagine aussi aisément les marges de manœuvre qui se dégageraient si cette forme de contournement de l’impôt prenait fin. Nous souhaitons que notre assemblée adopte cet amendement le plus largement possible.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. Cohérente dans son raisonnement, la commission a émis un avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. L’amendement limiterait les possibilités pour un propriétaire d’échapper à la procédure de réquisition parun simple engagement d’effectuer des travaux. Je sais, et je l’ai dit, que cette faculté est aujourd’hui utilisée pour échapper à la taxe sur les logements vacants, mais nous allons, à l’occasion du PLF, modifier les dispositifs pour lever ces échappatoires inacceptables. Inversement, la procédure de réquisition est une procédure lourde, très fortement attentatoire au droit de propriété, et qui doit donc légitimement s’accompagner de garanties et de protections. Ces deux points étant considérés, je m’en remets une nouvelle fois à la sagesse de l’Assemblée.

Rappels au règlement

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier, pour un rappel au règlement.

M. Martial Saddier. Fondé, monsieur le président, sur l’article 58-1.

Loin de moi l’idée de remettre en cause la présidence. Néanmoins, sur un texte que nous étudions en procédure accélérée, nous avons, au début de la séance, attendu un quart d’heure pour commencer nos travaux, alors que l’opposition était en nombre et travaille dans un esprit constructif. Après cette suspension a eu lieu un vote un peu compliqué, sur lequel nous avons dû demander des explications, et l’Assemblée vient à l’instant de voter un sous-amendement qui n’a été ni écrit ni distribué. Je formule le vœu, au nom de mes collègues de l’opposition, que nous puissions continuer à travailler dans un esprit constructif.

C’est mon troisième mandat de député, et je me permets de dire que, dans les législatures précédentes, pour bien moins que cela, nous aurions eu le droit à des suspensions de séance, à des rappels au règlement en série, nous aurions perdu plusieurs demi-heures de travail. Je souhaite que nous puissions poursuivre nos travaux sereinement. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Yves Jégo.

M. Yves Jégo. Je m’associe à la remarque de notre collègue. Madame la ministre, vous ne cessez de dire, à chaque amendement de l’opposition : « Ce n’est pas le sujet, il faut en rester à la mobilisation du foncier. » Or les propositions d’André Chassaigne n’ont rien à voir avec la mobilisation du foncier ; elles auraient parfaitement leur place dans le projet de loi dont vous nous dites qu’il balaiera très large. Sans doute afin de parvenir à un accord au sein de votre majorité, vous laissez voter ces amendements, dans des conditions de travail plutôt surprenantes. Il s’agit pourtant d’un sujet important sur lequel on ne peut légiférer au doigt mouillé. S’il faut rester concentré sur la mobilisation du foncier, il serait sage que les amendements de la majorité aussi attendent le fameux texte du printemps, et que nous ne travaillions pas dans de telles conditions. On a le sentiment que la vérité qui vaut pour les uns ne vaut pas pour les autres ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Je rappellerai à Martial Saddier comment les choses se sont passées. Le groupe socialiste a demandé une suspension au début de la séance. Elle a duré un peu plus longtemps que prévu, je vous l’accorde. Cependant, il ne s’agit pas d’un retard dans le redémarrage de nos travaux, mais d’une suspension de séance, qui est de droit.

De même, le sous-amendement présenté oralement ne portait pas sur le fond mais sur un point technique, et je peux vous dire que, lorsque j’étais député de l’opposition, votre majorité a accepté de tels sous-amendements. Ce n’est pas un phénomène nouveau. Si le texte est long de quatre lignes, il convient évidemment de le rédiger, mais quand il s’agit seulement d’une précision comme celle en question, ne soyons pas rigoristes. J’y insiste à l’attention de nos nouveaux collègues, qui pourraient penser que nous faisons n’importe quoi et que jamais une séance n’a connu de telles choses. Ce n’est pas n’importe quoi et cela a déjà été fait. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Avant l’article 4 A (suite)

M. le président. Personne ne demande plus la parole sur l’amendement n° 304 ?...

(L’amendement n° 304 est adopté.)

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n° 303.

M. André Chassaigne. Je ferai remarquer à notre collègue Yves Jégo que produire du logement social, ce n’est pas seulement le construire mais aussi l’offrir à ceux qui en ont besoin. Il suffit de regarder le titre de la loi.

Dans le droit fil de nos amendements précédents, celui-ci propose une petite mesure : doubler la taxe annuelle sur les logements vacants. Notre objectif reste le même, il s’agit d’enclencher la remise sur le marché d’une bonne partie des logements vides, c’est-à-dire, comme le dit le titre de la loi de mobiliser du logement social. Nous proposons en outre une progressivité au fil des ans, afin d’inciter les propriétaires à réduire la durée de vacance de leur logement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. Toujours aussi raisonnable, la commission demande le retrait de cet amendement, considérant qu’il a davantage sa place dans le projet de loi de finances.

M. Michel Piron. C’est évident !

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. À défaut de quoi, l’avis serait défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Monsieur Chassaigne, je vous propose également de retirer votre amendement, au profit d’une disposition encore plus sévère, tant en termes de taux que de durée considérée pour la vacance et de limitation des possibilités d’exonération de la taxe, disposition qui sera présentée dans le cadre de la loi de finances.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Très sensible à cette demande et faisant preuve de raison, je retire l’amendement. (Sourires.)

(L’amendement n° 303 est retiré.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz. Cet amendement a une double visée. Tout d’abord, il propose que, pour les opérations immobilières privées, le seuil de logements sociaux soit limité à 10 %. En effet, il s’agit de permettre à la mixité sociale de produire tous ses effets au sein de ces opérations. De plus, il vise à obliger le promoteur à informer les personnes qui souhaiteraient accéder à la propriété de l’existence de logements sociaux et du pourcentage de ceux-ci dans l’ensemble de la construction. Il s’agit donc de leur garantir une meilleure information dans le contexte d’une opération immobilière privée. Je crois que c’est du bon sens.

Plusieurs députés du groupe SRC. Mais pas vraiment de la mixité sociale !

Mme Marie-Christine Dalloz. On peut aussi aborder la mixité sociale à travers les opérations privées.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. Avis défavorable. Je vous renvoie, madame Dalloz, à la règle des trois tiers : dans une même opération, quelle que soit son échelle, on doit pouvoir avoir du logement libre, du logement social et du logement intermédiaire. Par ailleurs, le seuil de 10 %, au regard du titre II dont nous allons débattre, a paru un peu faible à la commission.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Même avis. Nous aurons en effet à revenir sur la question du pourcentage de logements sociaux à intégrer dans les opérations privées. Je note que, pour toutes les communes soumises à l’article 55 de la loi SRU, votre amendement pourrait contribuer à faire descendre le pourcentage de logements sociaux puisque le seuil que vous proposez est inférieur au pourcentage requis par la loi.

M. le président. Madame Dalloz ?...

Mme Marie-Christine Dalloz. Je ne retire évidemment pas mon amendement, monsieur le président. J’aurais souhaité une réponse concernant sa seconde partie, à savoir l’obligation d’information de la part du promoteur vis-à-vis de toute personne désireuse d’accéder à la propriété dans le cas de figure que j’ai évoqué.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Cécile Duflot, ministre. Le sous-entendu de votre amendement, madame la députée, me paraît singulier : considérer qu’un promoteur devrait informer qu’il y a du logement social serait de nature à créer une ambiance quelque peu particulière ; de même il n’a pas à informer des différents statuts ou des différents modes de financement d’opérations en accession sociale ou en accession libre. Je ne vois donc pas quelle explication vous attendez de ma part.

(L’amendement n° 21 n’est pas adopté.)

Article 4 A

M. le président. La parole est à M. Jean Lassalle, inscrit sur l’article.

M. Jean Lassalle. Monsieur le président, madame la ministre, madame la rapporteure, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, je profite de ce débat sur le renforcement des obligations de production de logement social pour attirer l’attention de notre assemblée sur le fait que nous sommes en présence d’un projet de loi beaucoup plus urbain que rural,…

M. Philippe Folliot. Très juste !

M. Jean Lassalle. …et qui n’est pour le moins pas très adapté aux campagnes, soit 70 % à 80 % de notre pays.

Cela étant, je ne suis pas un maire opposé à la construction de logements sociaux dans sa commune puisque j’en ai construit sept… Il faut dire que ma commune n’a que cent cinquante et un habitants. Il s’agit de sept pavillons HLM, qui ont été construits juste devant ma porte, c’est-à-dire la porte de ma maison familiale. Pourquoi ? Parce que c’était le seul terrain disponible : le seul terrain qui n’était pas inclus dans une zone d’avalanche, ni pris par Natura 2000 ou par le parc national, pas non plus situé en zone inondable, qui ne faisait pas l’objet d’un glissement de terrain (Sourires) et que RFF pouvait céder sans risque de voir le trajet des trains compromis. Vous le voyez, mes chers collègues, je suis un maire très ouvert au social, je tenais à le dire. Ainsi, j’ai augmenté de 25 % la population de ma commune avec des logements sociaux. Il existe donc des maires sociaux.

Un dernier point : l’article 4 prévoit de contraindre le maire pour la production de logement social. Je le comprends, mais on prend un peu trop l’habitude de contraindre le maire, il est contraint partout. Ici, au moins, on a le mérite de le dire ; ailleurs, on le tait mais on le contraint tout de même. Certains ont même envie de le faire disparaître. Pourtant, le maire est le meilleur garant de l’équilibre social et de la République dans notre pays. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement rédactionnel, n° 408, présenté à titre personnel par Mme la rapporteure.

(L’amendement n° 408, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 4 A, amendé, est adopté.)

M. le président. Nous en venons à deux amendements portant articles additionnels après l’article 4 A.

Après l’article 4A

M. le président. La parole est à Mme Marion Maréchal-Le Pen, pour soutenir l’amendement n° 274.

Mme Marion Maréchal-Le Pen. L’amendement que j’ai déposé avec M. Collard a pour objet d’inscrire le principe de priorité nationale et subsidiairement de priorité européenne dans les grands principes de la politique du logement social. Il ne s’agit pas ici d’exclure les étrangers, mais de faire en sorte qu’un ordre de priorité soit fixé pour les modalités d’attribution, commençant logiquement par les nationaux, surtout en période de crise.

La pénurie de logement s’explique sur le long terme par des évolutions sociologiques lourdes qui ont créé des besoins nouveaux : éclatement des familles, développement des structures monoparentales, allongement de la durée de vie, ou encore accroissement global de la population. Mais il s’agit là de données rigides sur lesquelles il n’est pas possible d’agir. En revanche, il existe une variable centrale dans l’économie du logement social qui n’est jamais évoquée : celle de l’immigration. Dans le contexte d’un pays ayant largement ouvert ses frontières et faisant bénéficier les étrangers issus de pays à faible niveau de vie des mêmes droits sociaux que ses nationaux, l’offre crée toujours sa propre demande, elle fournit aux candidats à l’exil une nouvelle raison de franchir le pas, tandis que les différences de revenu avec les nationaux rendent les étrangers mécaniquement prioritaires. Dans un pays où les deux tiers des ménages sont éligibles au logement social, cela crée un effet d’éviction fort au détriment de nos compatriotes.

La crise du logement n’est donc pas tant une crise de l’offre qu’une crise de la demande. En d’autres termes, on aura beau bétonner toute la France, on ne logera pas toute la misère du monde. Comme il n’est pas question de restreindre la capacité de logements sociaux offerte, il convient d’inscrire le principe de priorité nationale dans les objectifs des politiques d’attribution de logements sociaux.

(L’amendement n° 274, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Gilbert Collard, pour soutenir l’amendement n° 275.

M. Gilbert Collard. J’ai l’honneur de présenter l’amendement suivant, qui devrait recevoir un accueil démocratique : « Après le troisième alinéa de l’article L.441-2 du code de la construction et de l’habitation, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : “Les réunions de la commission d’attribution sont ouvertes au public. Un décret fixe les modalités d’affichage ou de diffusion garantissant l’information préalable du public.” ».

Avant-hier, dans Le Monde, on lisait : « Logement social à Paris : du flou subsiste dans les mécanismes d’attribution ». En proposant cet amendement, nous voulons que le peuple, concerné par les attributions de logements sociaux, puisse librement voir la manière dont les choses se passent ; nous voulons que, grâce à vous, mes chers collègues, dans un esprit démocratique, on ouvre les portes de la commission d’attribution afin que les intéressés puissent voir comment les choses se passent, vérifier qu’il n’y a pas de combines, de petits trafics, de clientélisme, de favoritisme. Voilà le seul but de cet amendement.

(L’amendement n° 275, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Article 4

M. le président. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article 4.

La parole est à M. Michel Piron.

M. Michel Piron. Monsieur le président, je m’exprimerai en fait sur l’article en soutenant un amendement.

M. le président. La parole est à Mme Colette Capdevielle.

Mme Colette Capdevielle. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je souhaite vous alerter sur les difficultés de certaines communes à honorer l’objectif d’augmentation du seuil de 20 % à 25 % de logements locatifs sociaux dans les zones de marché immobilier fortement tendu. Chacun sait que la bonne volonté de l’État et des collectivités se heurte à la réalité du terrain. Il convient d’en rappeler les difficultés afin qu’un nouveau texte à venir intègre ces contraintes.

Mon expérience locale sur la côte basque me permet d’identifier trois points de blocage : premièrement, la pénurie de propriétés foncières de l’État – il n’y en a quasiment pas ; deuxièmement, le prix du foncier ; troisièmement, par voie de conséquence, la réticence des propriétaires privés à céder les terrains à l’État plutôt qu’à un acquéreur fortuné.

Le projet de loi impose aux communes des obligations supplémentaires sans leur donner les moyens de les remplir ni de résoudre la quadrature du cercle pénurie-prix-rétention foncière. Dans mon département, une procédure de financement du surcoût du foncier a été mise en place pour les opérations de logements sociaux : un financement tripartite État-département-intercommunalité a permis la réalisation d’opérations immobilières, mais à un prix très lourd à supporter pour les finances publiques.

Une autre procédure consiste à imposer, par le biais du PLU, un pourcentage obligatoire de logements sociaux pour les opérations de plus de dix logements. Malheureusement, en favorisant la vente en l’état futur d’achèvement – la VEFA – par les promoteurs privés à des organismes publics ou para-publics, cette méthode exclut les organismes sociaux de la maîtrise d’ouvrage et les prive donc de la maîtrise de la conception et de la construction, alors qu’ils devront en assumer la gestion.

Enfin, les critères d’évaluation des prix du foncier par France Domaine ne prennent en compte que l’état du marché local, ce qui entérine de facto le maintien de la pression et la spéculation foncière.

Madame la ministre, prenons donc le temps d’envisager les mécanismes adéquats d’encadrement des prix du foncier pour les opérations réalisées sous maîtrise d’ouvrage publique. Un meilleur encadrement tiendrait compte de la nature des programmes qui doivent y être développés. La méthode dite du compte à rebours semble également une très bonne base de réflexion et de travail pour améliorer l’encadrement du prix du foncier privé tout en réfléchissant à des mesures incitatives, éventuellement fiscales ; portant par exemple sur la taxation de la plus-value.

M. le président. La parole est à M. William Dumas.

M. William Dumas. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’article 4 prévoit le renforcement de la loi SRU. En effet, cette loi a permis l’incitation à la construction de logements sociaux et a favorisé la mixité sociale. Malheureusement, elle n’est pas toujours appliquée et reste encore insuffisante pour répondre aux besoins. Élever de 20 à 25 % le pourcentage minimum de logements sociaux dans les communes de plus de 3500 habitants me paraît une très bonne chose.

Toutefois, je pense que les communes de moins de trois mille cinq cents habitants doivent aussi être concernées par la création de logements sociaux. Il s’agit pour elles de participer à l’effort national, d’être solidaires et responsables. Je suis conscient de la réalité des finances dans nos petites communes, mais j’estime qu’aujourd’hui, on ne peut plus élaborer un PLU sans y inscrire une obligation de création de logements à loyer modéré.

Par ailleurs, vous savez, madame la ministre, que les collectivités territoriales inscrivent souvent dans leur programme d’actions politiques des mesures pour favoriser le cadre de vie des zones rurales et aménager durablement nos territoires.

Ces aides apportées par les collectivités doivent à mon sens être proportionnelles à l’effort des communes pour permettre la création de logement social. Ce sont des pistes de travail que je voulais vous soumettre. C’est pour moi une question de solidarité nationale eu égard à cette crise du logement à laquelle nous devons répondre.

M. Daniel Goldberg. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Serge Bardy.

M. Serge Bardy. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’article 4 du projet de loi que nous examinons aujourd’hui vient compléter et renforcer la loi SRU de décembre 2000 et parachève ainsi la volonté que le ministre Jean-Claude Gayssot et le gouvernement Jospin manifestaient il y a douze ans déjà pour favoriser la mixité sociale sur l’ensemble de notre territoire.

Or force est de constater que trop de communes se sont émancipées des obligations qui leur sont faites et, douze ans plus tard, trop de territoires sont encore dotés de trop peu de logements sociaux permettant l’accueil des familles les moins aisées.

Le constat montre sans ambiguïté les limites du dispositif existant et la nécessité de le réaménager. C’est ce que se propose de faire cette nouvelle loi en augmentant à 25 % l’objectif du taux minimum de logements sociaux dans les communes et collectivités concernées. Je me réjouis bien entendu de cette initiative et de la réalisation de cet engagement pris par le président François Hollande lors de la campagne présidentielle.

Cependant, madame la ministre, je souhaite vous interroger sur un aspect concret de la majoration de ce seuil légal minimum. Dans ma circonscription du Maine-et-Loire, une commune fait état de taux de logements locatifs sociaux bien inférieurs à 10 %, alors même que l’obligation SRU s’y applique.

Depuis les élections municipales de 2008, un conseil municipal et un maire socialistes ont pris les commandes de cette municipalité et s’évertuent depuis à proposer des programmes pour tous, en faveur de l’intégration et de la mixité sociale. Le retard dont souffre cette commune en matière de logements sociaux montre clairement les orientations choisies par la précédente équipe municipale menée par une élue UMP.

Ce cas de figure est loin d’être isolé. Cela pose bien entendu le problème de l’héritage, de la responsabilité et de la charge de ce retard. L’effort qui est demandé à ces communes pour rattraper leur retard est herculéen.

Je souhaiterais vous interroger, madame la ministre, sur les mesures d’accompagnement qui seront proposées à ces communes dont l’état des lieux en termes de construction de logements locatifs sociaux est particulièrement préoccupant. Je vous remercie donc pour les précisions et autres éléments d’information que vous me donnerez.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau.

Mme Marie-Françoise Clergeau. Avec l’article 4, nous voilà au cœur des outils destinés à promouvoir la mixité sociale dans le logement.

Cet objectif est partagé par la grande majorité des Françaises et des Français parce que chacun comprend qu’il est la condition de l’ouverture aux autres, de notre enrichissement par la différence et du dépassement de nos égoïsmes sociaux.

Trop souvent la mixité sociale demeure un objectif abstrait qui ne se réaliserait jamais. L’enjeu est pourtant de taille quand le coût du logement repousse les salariés de plus en plus loin de leur lieu de travail, quand la réalité de nos vies semble s’éloigner de la promesse républicaine et démocratique d’une égalité des citoyens.

Nous ne sommes pas naïfs. Nous savons que la mixité sociale, qui consiste à accueillir des populations aux revenus variés dans un même quartier, n’implique pas forcément l’établissement de relations sociales, lesquelles s’organisent bien souvent spontanément au sein de milieux identiques.

Nous savons combien sont importantes les questions d’accès à l’école, à la formation, au marché du travail, aux services publics mais aussi aux transports, car les liens d’un quartier avec l’extérieur participent au mieux-vivre de ses habitants.

La mixité sociale dans le logement est le premier pas pour mettre fin au mécanisme de ségrégation mais, lorsque l’on aborde sa mise en œuvre concrète, le consensus sur l’objectif général se dissout car il y a toujours une bonne raison de ne rien faire, de repousser les échéances : « Laissez-nous encore cinq ans, dix ans, quinze ans et, promis, nous serons exemplaires. »

Il y a toujours des petits malins qui veulent trier leurs habitants, sous prétexte que certains seraient faits pour leur ville et d’autres non. Il y a toujours ceux qui laissent bien volontiers aux autres le devoir de solidarité nationale.

Les trop nombreuses demandes de logements insatisfaites appellent à la mobilisation de toutes les communes. Elles obligent à tenir les échéances des différents objectifs triennaux sous peine de sanctions financières réévaluées. La diversité de production de logements sociaux, intermédiaires et autres doit répondre à la diversité des revenus des Français.

Comme je vous l’ai dit, nous savons que ces pourcentages de logements sociaux ne résolvent pas tout mais, ici, le seul enjeu est l’accès au logement pour tous, d’où l’importance de l’article 4.

M. le président. La parole est à M. Marcel Rogemont.

M. Marcel Rogemont. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, abordant cet article 4 et le deuxième volet de ce texte, je voudrais rappeler à quel point la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbain a modifié la pensée et l’action des acteurs locaux à l’égard du logement social, malgré le fait qu’il puisse y avoir ici ou là – mais surtout là-bas, à droite – des récalcitrants qui en arrivent même à publier dans leurs documents électoraux la note à payer pour ne pas construire de logements sociaux. Tout cela n’est pas très ragoûtant.

Parlant de récalcitrants, je note aussi que, dans quelques instants, nous allons étudier un amendement tout à fait particulier : il proposera sérieusement que les places de prison soient comptabilisées dans le parc de logement social. Nous en arrivons là à un sommet dans l’insulte, ce que je trouve intolérable alors qu’il est question du vivre-ensemble et de sa construction. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC. – Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Cela étant, je ne voudrais pas évoquer la loi SRU par le seul biais de ces quelques personnes car la réalité objective de ce texte est d’avoir créé un mouvement profond de construction de logements sociaux. Si certains pensent qu’il y a eu beaucoup de logements sociaux construits au cours des dernières années, nous le devons aussi à la loi SRU, et pas seulement à telle ou telle action qui aurait pu être menée.

Voilà ce que je voulais dire sur l’actualité de la loi SRU.

M. le président. Veuillez conclure, monsieur Rogemont.

M. Marcel Rogemont. Maintenant ? C’est diabolique ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. Vous avez déjà dépassé votre temps de parole.

M. Marcel Rogemont. J’en viens donc à ma conclusion sous forme de deux questions à Mme la ministre.

À partir du moment où le taux de 25 % est à atteindre en 2025, pourquoi l’ambition de parvenir au taux de 20 % en 2020 pourrait-elle être remise en cause par notre texte ? Cette exigence de construction de logements sociaux n’intéresse pas seulement les communes actuellement visées par la loi SRU, mais aussi les communes littorales par exemple, qui sont de moindre importance. Ne pourrait-on pas soumettre ces communes à des exigences de construction de logement locatif public adaptées ?

Madame la ministre, j’attends vos réponses à ces deux questions.

M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole est de deux minutes.

La parole est à M. Philippe Folliot.

M. Philippe Folliot. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, avec cet article 4 nous en sommes à un moment important du débat qui permet aussi des diversions.

Si la juste répartition des logements sociaux sur notre territoire national est un vrai problème, si des abus ont été commis par certaines communes tout à fait condamnables, doit-on pour autant jeter la suspicion sur l’ensemble des communes et des maires ? Parfois, l’impossibilité d’atteindre le seuil de 20 % peut-être lié à des réalités de terrain. Tout à l’heure, dans sa présentation des faits, notre collègue socialiste du Pays basque a dit des choses fort justes à ce sujet.

Finalement, toute l’ambiguïté est là : une mesure de portée nationale tente de répondre à des problèmes locaux très différents d’une ville à l’autre, d’une agglomération à l’autre, d’une commune à l’autre, d’un département à l’autre, d’une région à l’autre. Une approche législative de ce type donne certains maires en pâture à l’opinion, jette l’opprobre sur certaines collectivités, mais ne résoudra pas les difficultés.

Nonobstant les propos de Mme la ministre ou de Mme la rapporteure, la triste réalité est qu’après PSA, Renault, Petroplus, Freescale, Goodyear, la SNCM et autres, le plus grave des plans sociaux est à venir : 40 000 à 50 000 suppressions d’emplois vont intervenir dans les semaines et les mois à venir dans le secteur du logement. Et ce n’est pas ce texte qui va résoudre le problème.

Nous devrions prendre conscience de cette situation car il ne s’agit pas de la suppression de quelques dizaines ou centaines d’emplois dans un même endroit, mais de la perte d’unités d’emplois un peu partout sur le territoire national. Malheureusement, ce texte en général et l’article 4 en particulier ne répondent pas à la gravité et à l’urgence de la situation dans la filière du bâtiment.

M. le président. La parole est à M. Henri Plagnol.

M. Henri Plagnol. Sur les bancs de la gauche, on se réjouit de porter l’obligation en matière de logement social à 25 %. Mes chers collègues, c’est très facile de voter cela au détour d’une séance de nuit (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) ; c’est beaucoup plus difficile de l’inscrire dans la réalité. J’en veux pour preuve que deux parlementaires des bancs de la gauche, représentant la côte basque et le Maine-et-Loire, ont dit qu’ils rencontraient chez eux des difficultés objectives.

En d’autres termes, la France est la seule démocratie avancée dont le Parlement croit résoudre le problème du logement en votant un taux applicable à toutes les communes, tous les territoires, quelles que soient leur histoire et leur identité. Cela n’a tout simplement pas de sens.

D’ailleurs, contrairement à ce que vous dites, la loi SRU a produit très peu de logements supplémentaires. Ce n’est pas elle qui a permis d’augmenter le nombre de logements sociaux mais la mobilisation d’outils fiscaux, financiers et réglementaires visant à créer du logement, essentiellement le plan Borloo. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Dans les communes où il n’y a objectivement pas de foncier d’État disponible, le foncier est rare et cher. La construction d’un logement social a des coûts très supérieurs à la moyenne nationale. Il ne sert à rien d’augmenter encore le taux puisque ces communes n’arrivent déjà pas à 20 %. En plus, vous instaurez ce taux, le sachant impossible à atteindre, avec pour seul objectif de mettre ces communes à l’amende.

Chers collègues, c’est une atteinte fondamentale au principe d’autonomie des collectivités locales (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Il est dangereux que le Parlement stigmatise des maires en les mettant à l’amende au lieu d’être dans une logique incitative, réaliste, afin de créer, en concertation avec les maires et les élus des territoires concernés, dans le respect de leurs compétences, un chemin pour faire plus de logements. Vous faites l’inverse. À l’arrivée, il n’y aura pas un logement de plus mais il y aura une fracture de plus dans la démocratie et le respect des institutions en France.

M. Bertrand Pancher. Très bien !

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Mon discours n’ira pas forcément dans le même sens que celui de l’intervenant précédent. L’urgence, bien identifiée par ce projet de loi, est justement de renforcer les obligations pesant sur les collectivités en matière de construction de logements sociaux. C’est tout le but de cet article 4.

La définition des objectifs nécessite que les collectivités aient les moyens de faire face, ce qui suppose au préalable que le Gouvernement engage une véritable réforme de la fiscalité locale. Nous aurons l’occasion d’y revenir.

Concernant les objectifs et eu égard à la gravité de la crise, sans vouloir jouer les « monsieur Plus », nous considérons qu’il est nécessaire de relever les obligations à 30 % de logements locatifs sociaux en zone tendue. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Philippe Meunier et M. Philippe Gosselin. Soyons fous !

M. le président. Vous avez la parole, monsieur Chassaigne.

M. André Chassaigne. Pardon d’avoir excité les fauves ! Pour les calmer, je précise que notre proposition a été rejetée au titre de l’article 40.

Une telle majoration se justifie d’autant mieux que vous reportez l’échéance de cinq années : 2025 au lieu de 2020. Maintenir l’objectif de 20 % en zone non tendue revient donc à diminuer les objectifs de construction à l’horizon 2020.

Une telle mesure n’est donc pas à la hauteur des enjeux. Ce sont 1 700 000 personnes qui sont aujourd’hui dans l’attente d’un logement social ! Nous devons, collectivement, nous montrer plus ambitieux. L’application du taux de 25 %, selon l’étude d’impact, permettrait de renforcer les objectifs de production annuelle. Sur la même période triennale, ils passeraient de 66 000 à près de 190 000, ce qui représente la mise en chantier de 60 000 logements sociaux par année.

Nous pensons sincèrement que nous pouvons aller plus loin, a fortiori si François Hollande a défini un objectif de 150 000 mises en chantier de logements locatifs sociaux par année. En l’état actuel du projet de loi, nous en sommes, comme je viens de le dire, à 60 000 ! Seul un taux de 30 % permettrait d’atteindre les objectifs annoncés par le Président de la République.

M. le président. La parole est à M. Michel Liebgott.

M. Michel Liebgott. Je me félicite des deux priorités, l’emploi et l’avenir, qui ouvrent ce quinquennat. Ce sont des politiques publiques qui sont aujourd’hui nécessaires. Que nos collègues de l’opposition se rassurent : je suis frontalier et, aujourd’hui, la pression est telle que ce sont les Luxembourgeois qui viennent habiter en France – le bâtiment ne se porte pas si mal – et les Français qui se replient à l’intérieur du pays pour construire ou chercher un logement social.

Et je rassurerai en même temps les représentants du Front national, qui nous ont quittés après avoir présenté un amendement à la limite du scandale : ceux qui viennent voir les maires présents dans cet hémicycle sont souvent des Français de souche, mais qui, avec un nom à consonance maghrébine, ont du mal à trouver un logement, comme ils ont du mal à trouver un emploi. C’est cela, la réalité quotidienne.

Je me félicite donc de cette priorité donnée au logement et de son aspect non seulement quantitatif, mais aussi qualitatif. Dans les années 60, un logement neuf, c’était un logement avec salle de bains. Aujourd’hui, c’est un logement mieux insonorisé, mieux protégé, mieux chauffé, qui permet à des personnes âgées de se reloger au rez-de-chaussée… bref, qui donne un peu de confort aux plus défavorisés de notre société.

Que nos collègues de droite ne s’inquiètent pas : il y aura toujours des communes pour œuvrer dans le sens contraire, pour accueillir des gens qui n’ont aucun problème, pour les rassembler, par le biais d’influences diverses, en excluant les autres. Le prix du foncier sera là pour les indiquer. Ce ne sera pas écrit, parce que c’est illégal, mais on sait que cela se fait, d’autant que les taxes foncières et d’habitation sont aujourd’hui les principales ressources indépendantes des communes, et même les seules qui peuvent encore évoluer à l’initiative des élus locaux.

M. le président. La parole est à M. Guillaume Larrivé.

M. Guillaume Larrivé. Nous abordons avec l’article 4 le cœur de votre projet, qui lie deux dispositions très pernicieuses : le relèvement à 25 % du seuil de logements sociaux et le quintuplement des sanctions contre les communes qui ne respecteraient pas cet objectif. Autrement dit, selon vous, un Français sur quatre doit habiter dans un logement social et les communes doivent être très sévèrement punies si elles ne respectent pas cette obligation.

Je tiens, avec mes collègues du groupe UMP, à dire non à cette logique punitive. Je vous rappelle qu’en France les communes sont libres, et que la libre administration des collectivités locales est même un principe constitutionnel. Le devoir des parlementaires est de le respecter, de préserver le libre choix des communes et de sortir de cette logique idéologique, collectiviste et punitive qui inspire votre projet (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. Puisqu’il est facile, sur ce sujet, de caricaturer, je précise que la commune dont j’ai l’honneur d’être l’élu depuis plus de dix-sept ans n’est pas concernée par ce dispositif, puisqu’elle dépasse largement les 25 % de logements sociaux, et que ma programmation pour l’année prochaine est parmi les plus importantes du département.

Madame la ministre, chers collègues de la majorité, vous venez de refuser tous les amendements qui auraient permis à nos yeux de mettre plus facilement le foncier à disposition afin de faciliter la construction de logements sociaux. Des rendez-vous ont été pris : vous verrez que l’avenir nous donnera raison et que vous regretterez de ne pas nous avoir écoutés sur cette première partie du texte, de ne pas avoir été plus ouverts à nos propositions.

Avec cet article 4, vous semblez vouloir continuer dans le même aveuglement. Vous voulez porter le taux à 25 %. Il faut rappeler qu’avec 17 % de logement social, la France est un des meilleurs élèves de l’Union européenne et que son mouvement la porte à atteindre les 20 % d’ici à 2022. Vous allez aujourd’hui couper l’élan de maires qui ont pris du temps pour convaincre leur population et leur conseil municipal, qui ont mis en place des programmations et étaient sur le point d’aboutir. Vous allez leur asséner comme un coup de bambou que cela ne suffit pas et qu’il faut passer à 25 %. Cela va avoir un impact psychologique sur la construction, égal à celui que vous avez sur l’économie en général depuis que vous êtes arrivés au pouvoir.

Madame la ministre, écoutez votre propre camp ! La France n’est pas uniforme. Des députés parmi vous ont rappelé les problématiques des risques naturels, du coût du foncier, de la façade maritime, de la montagne. Pitié, faites un peu confiance aux élus locaux ! Renforcez le dispositif pour arriver plus rapidement aux 20 % de logements sociaux, certes, car il y a sûrement des mauvais élèves – et si l’on s’amuse à creuser, on trouvera des bons et des mauvais de chaque côté de l’hémicycle –, mais, s’il vous plaît, ne coupez pas cet élan psychologique que nous avons créé afin d’obtenir les 20 %, ne votez pas l’article 4 !

M. le président. La parole est à M. Alain Chrétien.

M. Alain Chrétien. La mesure contenue dans cet article 4 est effectivement idéologique. Pourquoi 25 %, plutôt que 27 ou 30 ? On ne sait trop d’où sort ce chiffre. Il s’agit une fois de plus d’une mesure uniforme et brutale – deux qualificatifs qui semblent être la marque de fabrique de cette nouvelle majorité. Une mesure totalement déconnectée du contexte local. Vous voulez imposer la même chose à chacun, quelles que soient ses contraintes.

Je suis maire d’une commune de 15 000 habitants qui a 34 % de logements sociaux. Je suis un maire de droite et pourtant je fais la promotion du logement social et je travaille bien avec mon office HLM (Applaudissements sur divers bancs.) Arrêtez donc de vous présenter de façon si manichéenne comme les seuls promoteurs du logement social ! Vous ne vous grandirez pas en défendant ce genre d’argument devant nos concitoyens.

Pourquoi ne pas permettre au préfet d’adapter les objectifs en fonction des contextes locaux ? En faire un peu plus si c’est possible, mais aussi tenir compte des contraintes. D’autant que les pénalités seront écrasantes. Certaines communes seront peut-être mises sous tutelle à cause de ce quintuplement que leur budget ne pourra tout simplement pas assumer, car certaines villes cumulent tous les déficits.

Par ailleurs, j’imagine, si vous êtes cohérents, que nous trouverons dans le projet de loi de finances pour 2013 l’argent tant attendu pour financer l’augmentation du logement social : il suffira d’augmenter une fois de plus les impôts…

Enfin, nous regrettons que la date butoir, que la loi SRU avait fixée à 2022, ne soit pas reculée. Cela aurait été au moins un geste de votre part, madame la ministre. Nous aurions un peu plus de temps pour répondre à l’exigence des 25 %. Vous devez prendre conscience de l’uniformité et de la brutalité de ce projet, et le reconsidérer un peu plus raisonnablement.

M. le président. Sur l’article 4, je suis saisi d’une série d’amendements de suppression.

La parole est à M. François de Mazières, pour soutenir l’amendement n° 204.

M. François de Mazières. Cet amendement vise donc à supprimer l’article 4. Vous essayez de faire croire que les maires n’ont pas fait d’efforts. Or ils sont mobilisés, ils savent que nous avons besoin de logements sociaux. Nous avons besoin de toutes les formes de logement, d’ailleurs, et c’est une des différences entre nos deux logiques.

Ce qui est inquiétant, dans cette réforme, c’est l’accumulation des contraintes qui pèsent sur les maires : le passage de 20 à 25 %, les effets de seuil, qui seront absolument insupportables en termes budgétaires. Or, aujourd’hui, les villes sont confrontées à des problèmes nombreux. C’est la crise, les dépenses s’accumulent. Certaines n’arriveront pas à faire face à des amendes multipliées par cinq.

Il faut dire que ce calcul est fait sur des stocks, sur une histoire qui n’est pas de la responsabilité de l’équipe municipale en place. Gardez en tête que vous ne pouvez sanctionner les gens pour ce qui n’est pas de leur fait. Vous pouvez les sanctionner sur les flux, autrement dit sur l’effort qu’ils ne font pas, mais certainement pas sur les stocks.

Aujourd’hui, donc, vous accumulez des contraintes insupportables. La seule solution sera que le préfet s’asseye dessus. Franchement, à quoi cela sert-il ? Ce texte est-il un simple effet d’annonce ? La politique du logement est une question grave. Il faut vite relancer la construction, pour des raisons d’emploi. Nous avons l’impression que vous faites exactement le contraire. Vous démobilisez les élus qui travaillent depuis des années sur des bases que vous changez du jour au lendemain. Ce n’est pas sérieux. Voilà pourquoi nous proposons la suppression de cet article.

M. le président. La parole est à Mme Josette Pons, pour soutenir l'amendement n° 205.

Mme Josette Pons. Je reprends tous les arguments qui viennent d’être énoncés. Vous êtes en train de changer ce qui était prévu dans la loi SRU. Vous abandonnez au milieu du gué les maires, de toutes tendances, qui ont fait beaucoup d’efforts pour tendre vers le seuil de 20 %. Vous changez les règles en plein milieu, et ce n’est pas normal. Augmenter le pourcentage de 20 à 25 % tout en multipliant par cinq les pénalités, c’est énorme. Les maires ne pourront pas y arriver.

Vous ne tenez pas compte de la réalité du terrain. Dans ma circonscription par exemple, mais c’est le cas dans beaucoup d’autres, le foncier est très cher, et rare. C’est une circonscription rurale, qui compte 32 communes dont la plus grande a 15 000 habitants, mais où 90 % des maires sont obligés de construire des logements sociaux. Ils essaient tous de le faire, les maires de gauche comme ceux de droite, et sont confrontés aux mêmes difficultés pour trouver le foncier. C’est pourquoi je vous demande de supprimer cet article et de revenir au seuil de 20 % qui était prévu dans la loi SRU (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement n°206.

M. Martial Saddier. Lorsqu’on prend ses fonctions de maire, lorsqu’on accède aux responsabilités avec son équipe, on ne peut, certes, se contenter de constater une situation, en matière de logement social comme dans d’autres domaines, mais on ne peut pas non plus tout bouleverser du jour au lendemain ; dans cet hémicycle, nous le savons tous. Dans une commune, il y a le poids de l’histoire. La présence du logement social, son importance relative sont des données de l’histoire de la commune. Au fil des années, que la majorité soit de droite, de gauche ou du centre, on a toujours tendance à faire davantage de logement social là où il y en a déjà et, quelle que soit la bonne volonté du nouveau maire et de son équipe, il est toujours très difficile de susciter une dynamique pour faire du logement social là où il n’y en avait pas, là où il y en avait peu.

Je le répète : je ne suis pas concerné par le dispositif. Je peux donc en parler d’autant plus librement.

Votre projet de loi, madame la ministre, est fondé essentiellement sur la mise à disposition du foncier public par l’État ou par les établissements publics. Cependant, sur certains territoires, il n’y a pas de foncier public qui puisse être mis à disposition, et ce tout simplement pour les mêmes raisons qui empêchent les maires d’atteindre le niveau de 25 % de logement social.

Prenons l’exemple des zones littorales. Personne, dans cet hémicycle, ne remettrait en cause la loi littoral. De même, y a-t-il, parmi nous ce soir, un seul député qui remettrait en cause la loi montagne ? Y a-t-il un seul député qui remettrait en cause tous les efforts que nous avons faits ensemble à la suite des catastrophes diverses et variées que nous avons connues, les inondations, les avalanches ? Nous avons, ensemble, durci la législation et nous avons, ensemble, pris les précautions nécessaires et imposé des contraintes qui ne sont pas simples à gérer dans nos communes, qu’il n’est pas simple de faire passer dans les schémas de cohérence territoriale et dans les plans locaux d’urbanisme. Qui donc, dans cet hémicycle, remettrait en cause les trames vertes, les trames bleues, la protection – évoquée tout à l’heure – des terres agricoles ? C’est pour toutes ces raisons qu’un maire ne peut atteindre le taux de 25 % de logement social et ce sont ces mêmes raisons qui font que l’État ne possède pas de foncier dans les régions concernées. Le foncier y est hors de prix, il est menacé par les risques naturels…

M. le président. Il faut conclure, monsieur le député.

M. Martial Saddier. …et la topographie naturelle, qu’on soit au bord de la mer ou à la montagne, rend impossible la construction.

Ce dispositif ne marchera donc pas, car il n’y aura pas de foncier mis à disposition et parce que les maires rencontreront les plus grandes difficultés, voire des difficultés matérielles insurmontables. Ainsi allez-vous, madame la ministre, casser un élan que nous avons mis du temps à susciter, nous, élus qui faisons du logement social.

Ce texte est absolument impossible à mettre en œuvre pour les raisons que je viens d’évoquer.

M. le président. La parole est à M. Éric Straumann, pour soutenir l’amendement n° 207.

M. Éric Straumann. Cet amendement vise également à supprimer l’article 4. De nombreuses communes sont dans l’impossibilité pratique d’atteindre l’objectif de 25 %, tout simplement, comme cela vient d’être indiqué, faute de terrains disponibles. Certains maires sont dans une situation tout à fait kafkaïenne : d’un côté, l’État leur demande de construire des logements sociaux ; de l’autre, il leur interdit toute construction, par exemple en raison d’un risque supposé d’inondation qui ne s’est jamais réalisé ou de la découverte d’une galerie de hamsters, alors qu’il n’y a plus de hamsters dans le secteur. On pourrait multiplier les exemples. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement n° 208.

M. Dominique Tian. Je partage complètement le point de vue de mes collègues qui se sont exprimés.

Il est vrai que la loi SRU a permis de franchir une étape. Si elle a été mise en place par Lionel Jospin, ce sont quand même des gouvernements de droite qui l’ont ensuite appliquée, et ils l’ont fait, je crois, avec zèle. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Cela a montré un certain nombre de clivages, dans les communes de droite comme dans les communes de gauche. Je crois d’ailleurs que, dans les Bouches-du-Rhône, ce sont surtout les communes de gauche qui ne remplissent pas les obligations auxquelles elles sont soumises. (Nouvelles exclamations sur les mêmes bancs.) Mais oui ! Allez donc à Allauch, par exemple, ou dans d’autres villes. En tout cas, Marseille les remplit très largement.

Au-delà de cette absurdité de la multiplication par cinq des pénalités, qui est à l’évidence complètement irresponsable, de la folie, il y a aussi la question du rôle de l’État, la question de savoir si l’on veut ou non faire confiance aux élus locaux. Sont-ce toujours l’État centralisateur, l’État parisien, le Gouvernement, les conseillers techniques de Paris, qui ne descendent jamais voir les réalités locales, qui doivent encore prendre ces décisions ? Dans de nombreuses communes, 25 % de logement social, ce n’est tout simplement pas possible, et la sanction financière est d’une dureté totalement disproportionnée.

Vous avez face à vous des maires qui sont des gens responsables, qui ont une morale, qui connaissent leur population, leur territoire, les contraintes. Quand on ne peut pas faire, eh bien, on ne peut pas faire, et cette sanction n’est pas acceptable ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Patrice Verchère, pour soutenir l’amendement n° 209.

M. Patrice Verchère. Pour construire plus de logements locatifs sociaux, vous voulez imposer aux communes un quota, qui passera de 20 % à 25 % d’ici à l’année 2025. Cette augmentation se fera sans nul doute au détriment d’autres types de logements. Ce ne sont effectivement pas seulement des logements sociaux qu’il faut construire, ce sont aussi des logements intermédiaires. Ainsi, il y a toute une partie de la population, notamment de jeunes cadres qui débutent, des professions intermédiaires, qui ne trouvent pas à se loger car ils n’ont pas accès aux logements sociaux en raison de leurs revenus, certes supérieurs aux seuils fixés pour l’accès au logement social mais pas non plus mirobolants. Le relèvement de 20 % à 25 % de la proportion minimale obligatoire de logements sociaux aggravera donc encore le manque de logements intermédiaires.

L’impact de ce relèvement doit également être considéré dans la perspective de l’objectif gouvernemental d’engager un programme de production de 150 000 logements locatifs sociaux à compter de 2013, soit 30 000 logements supplémentaires par an. Le passage de 20 % à 25 % du taux de logements sociaux impliquera qu’il y ait 62 000 logements locatifs sociaux dans les communes SRU contre 40 000 aujourd’hui. À taux de répartition en produits financiers – PLAI, PLU, PLS – inchangés par rapport à 2011 et coût de financement moyen constaté, l’étude d’impact évalue à 2,7 milliards d’euros annuels le budget qui devra être redéployé sur la période 2014-2016.

Les subventions de l’État seront-elles, madame la ministre, à la hauteur de cet objectif ?

Nul doute que les crédits du programme 135 du projet de loi de finances initiale pour l’année 2013, que nous examinerons dans quelques semaines, feront, comme d’habitude, reposer sur les finances des collectivités locales et les fonds propres des bailleurs sociaux cet effort démesuré dans une période de forte contrainte budgétaire. Pire, l’appareil productif du secteur de la construction du logement social n’est pas en mesure de réaliser plus de 90 000 logements par an. Les collectivités devront donc recourir aux promoteurs privés et financeront elles seules les équipements publics complémentaires.

Pour toutes ces raisons, nous vous proposons de supprimer l’article 4.

M. le président. La parole est à M. Olivier Audibert-Troin, pour soutenir l’amendement n° 210.

M. Olivier Audibert-Troin. Monsieur le président, madame la ministre, cela vient d’être dit : relever le seuil minimum des logements sociaux de 20 % à 25 % de manière aussi brutale ne sert à rien. En matière d’insécurité routière, on sait bien que, lorsque les véhicules ne respectent pas la limitation de vitesse, et ce de manière réitérée, il ne sert à rien de la baisser encore : ils ne la respecteront toujours pas. Ce qu’il faut, évidemment, c’est renforcer les dispositifs.

Au-delà, ce dispositif est totalement injuste pour les communes. Un certain nombre de collègues l’ont dit, y compris dans les rangs du groupe socialiste.

Je suis pour ma part élu d’une commune de 40 000 habitants, dans le département du Var, où la pression foncière est énorme, où la pression démographique l’est tout autant. Cette commune est soumise à un plan de prévention du risque inondation qui, à la suite des dernières inondations, sera – et c’est juste – encore renforcé. Eh bien, elle est passée de 14,5 % de logements sociaux à 18 %. Nous sommes tout près de toucher au but.

Voici donc que demain matin, je vais retrouver mes collègues du conseil municipal pour leur dire que, même s’il reste encore un peu de chemin à parcourir, nous avons très bien travaillé, que nous avons fait des efforts budgétaires incroyables, mais que nous sommes récompensés par le vote de cette disposition qui nous contraint à aller encore plus loin, alors que nous n’en avons pas les capacités budgétaires.

J’en appelle, madame la ministre, à votre sensibilité. Écoutez-nous, écoutez les élus locaux : nous ne pouvons pas appliquer de façon uniforme le texte que vous nous proposez. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Guillaume Chevrollier, pour soutenir l’amendement n° 212.

M. Guillaume Chevrollier. Je propose la suppression de l’article 4 car je considère que le texte proposé est inutile, qu’il est dogmatique et qu’il est très politique.

Prenons l’exemple du territoire rural qui est le mien, le département de la Mayenne. Certaines communes de plus de 3 500 habitants en périphérie de la ville préfecture n’atteignent déjà pas le taux de 20 %, et le développement de logements sociaux en périphérie de la ville centre a pour conséquence de vider les logements sociaux de celle-ci. Voilà un effet néfaste de cette politique de quotas.

Je crois qu’il faut, en matière de politique du logement, faire confiance aux acteurs locaux. Ceux-ci peuvent déjà, aujourd’hui, prévoir, dans certaines opérations immobilières, un quota de logements sociaux supérieur à 20 %. Je le sais pour avoir rencontré de nombreux professionnels de l’immobilier. Dans le programme local de l’habitat, le PLH, on peut imposer une servitude de logement social, avec 30 % de logements sociaux sur une opération, 10 % de prêt locatif social et le reste en accession libre.

Moi qui suis un nouveau député, élu pour la première fois en juin dernier, je demande que cette assemblée légifère moins, qu’elle soumette les acteurs locaux à moins de contraintes. Faisons confiance aux élus locaux pour gérer au mieux leur territoire, et je pense que notre pays s’en portera mieux.

Dernier élément, développer davantage le logement social sur un territoire, c’est renchérir le coût de l’accession à la propriété. Quand il n’y a plus de logement social, une péréquation s’opère, et l’accession à la propriété en pâtit car elle coûte plus cher. Du moins est-ce ainsi que cela fonctionne dans les opérations avec une part de privé et du social.

Mesurez donc bien cela : 25 % de logements sociaux, c’est une accession à la propriété qui est rendue plus difficile. Or nous souhaitons que les Français deviennent propriétaires et qu’ils n’aient pas pour seule perspective de rester dans un logement social. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. Marcel Rogemont. Qu’avez-vous fait pendant dix ans ?

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement n° 213.

Mme Marie-Christine Dalloz. Je souhaite évoquer certaines disparités dont, j’en suis sûre, vous n’avez pas conscience, madame la ministre, et certaines réalités dans les territoires, sur lesquelles vos services ne vous ont pas alertée.

Je prendrai l’exemple d’une ville du Haut-Jura dont le maire est plutôt de la même sensibilité que la majorité parlementaire. Il n’est pas loin d’atteindre l’objectif de 20 % : la proportion de logements sociaux est de 17 %. Las, il va être obligé de détruire au moins deux grandes barres d’immeubles parce qu’elles sont totalement vides, absolument vides. En l’absence de mixité sociale et pour d’autres raisons, les locataires ont déserté ces immeubles.

Alors que cette ville allait bientôt pouvoir atteindre les 20 %, la proportion de logements sociaux va redescendre avec la destruction de ces deux barres d’immeubles, et l’effort pour atteindre le taux de 25 % va être colossal. De surcroît, il n’y a pas de demande.

Je ne comprends pas, et c’est un peu pour cette raison que je m’insurge contre votre texte : vous allez, encore une fois, créer de l’inégalité territoriale. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Sous couvert de créer de l’égalité territoriale, vous ne cessez d’aggraver l’inégalité. Prenez donc en compte les disparités de notre territoire. Ainsi, dans le Jura, l’État n’est propriétaire d’aucun terrain, et vous ne pourrez céder du terrain à ce maire pour qu’il puisse mener à bien un programme d’immobilier social. C’est pourquoi je m’insurge : il y a une vraie inégalité entre les territoires, selon qu’ils comptent ou non des propriétés de l’État, selon l’attractivité foncière. Vous allez donc aggraver les déséquilibres et je trouve que ce n’est pas admissible.

Je demande donc la suppression de l’article 4. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Laurent Furst, pour soutenir l'amendement n° 216.

M. Laurent Furst. Madame la ministre, comme mes collègues, j’en appelle à votre sagesse pour retirer cet article 4.

M. Marcel Rogemont. C’est nous qui le voterons !

M. Laurent Furst. Nous votons collectivement, cher collègue !

Je vous engage à le retirer pour une raison simple. Nous avons la chance d’être encore un certain nombre d’élus locaux dans cette assemblée. J’ai le sentiment que ce texte ne se contente pas de sanctionner les communes, mais qu’il fustige également les élus municipaux. C’est à ce titre quelque chose de grave pour l’avenir de nos communes.

En second lieu, vous prévoyez des sanctions lourdes et évolutives. Or quelle est la santé financière des communes françaises à l’heure actuelle ? Est-elle particulièrement saine ? Je rappelle tout d’abord que les collectivités locales réalisent les trois quarts des investissements publics dans notre pays. Et les communes en assurent l’essentiel. Or ce sont elles que vous sanctionnerez !

N’oublions pas le contexte dans lequel nous nous trouvons, avec la fin prévue du Fonds national de garantie individuelle des ressources, la montée de la péréquation horizontale, l’accroissement probable des cotisations de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales pour les communes, et le gel annoncé des dotations de l’État.

M. Marcel Rogemont. Par qui ? Par Sarkozy !

M. Laurent Furst. Ma question est donc simple : une évaluation d’ensemble de l’incidence du cumul de ces mesures sur les communes a-t-elle été réalisée ? Si tel n’est pas le cas, madame la ministre, il serait sage de revenir à la raison ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l'amendement n° 218.

M. Patrick Hetzel. Ce texte montre bien que vos valeurs sont l’uniformité…

M. Marcel Rogemont. L’égalité !

M. Patrick Hetzel. …et une totale déconnexion par rapport au terrain ! Il faut prendre en compte les capacités de construction : de toute évidence, vous n’avez pas raisonné en termes économiques. De surcroît – cela a déjà été dit, et je me permets de le répéter –, ce texte stigmatise et jette l’opprobre sur les élus locaux et les collectivités locales, alors que, précisément, vous devriez prendre en compte le principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales.

Tous ces éléments montrent bien la forte différence philosophique et idéologique qui nous sépare sur cette question. Il y a à mon sens une seule chose à faire : procéder à la suppression de cet article 4. C’est la raison pour laquelle nous proposons cet amendement de suppression. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Valérie Lacroute, pour soutenir l'amendement n° 219.

Mme Valérie Lacroute. Depuis 12 ans, la loi SRU a permis une véritable prise de conscience chez les maires de gauche comme de droite. Ils font, dans leur majorité, des efforts considérables pour faire face aux besoins en logements sociaux, et pour atteindre l’objectif de 20 % d’ici à 2022.

Certes, des efforts sont encore à faire pour les nouvelles constructions, mais il n’est pas réaliste de relever l’objectif à 25 %. Les élus municipaux héritent en effet souvent d’une situation dont ils ne peuvent être entièrement tenus pour responsables. J’ai moi-même, en tant que maire, hérité en 2008 d’une commune d’Île-de-France qui compte 47 % de logements sociaux, alors que les communes voisines n’en comptent pas 20 %. Je ne vois pas comment ces communes pourraient atteindre cet objectif sans, par la même occasion, être obligées de financer des équipements publics tels que des écoles, des garderies ou des centres de loisirs. Les finances des collectivités territoriales sont exsangues. Avec ce dispositif, vous les mettrez encore plus en difficulté en période de crise. C’est pour cette raison que nous demandons la suppression de cet article. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Le Callennec, pour soutenir l'amendement n° 220.

Mme Isabelle Le Callennec. Madame la ministre, je vous ai entendue nous dire à plusieurs reprises qu’il faut construire plus là où se trouvent réellement les besoins. Je suppose que cela vaut également pour les logements sociaux. Je suis donc très étonnée par cette disposition qui vise à relever de 20 à 25 % le pourcentage de logements sociaux sur l’ensemble du territoire.

Nous aimerions bien savoir, par ailleurs, comment vous comptez financer tous ces logements sociaux, sachant que les élus locaux et les bailleurs sociaux ont consenti d’énormes efforts ces dernières années, ce qu’il faut saluer. Comment ferez-vous pour multiplier, sur l’ensemble du territoire, les logements sociaux comme les pains de l’Évangile ?

Je donnerai un exemple différent de ceux de mes collègues. Dans ma circonscription, plusieurs communes de plus de 3500 habitants, qui respectent la règle des 20 %, ont des difficultés à trouver des locataires pour ces logements sociaux, parce qu’elles sont plus éloignées des villes, qu’elles disposent de moins de services, et que les gens ont aujourd’hui plutôt tendance à revenir habiter dans les villes du fait du prix de l’essence. Il y a des vacances dans les logements sociaux ! Je comprends qu’en région parisienne cela puisse choquer, compte tenu de la demande qui s’y exprime. Sachez toutefois que dans certains territoires français des logements sociaux sont vacants. Comment combattre cela ?

Dernière chose : vous augmentez le taux de logements sociaux de 20 % à 25 %, alors que des efforts ont déjà été réalisés. Or que nous demandent les élus locaux ? De la stabilité dans les règles applicables. Les maires souhaitent également une véritable mixité sociale : du logement social, du logement intermédiaire, du logement en lot libre, et de l’accession sociale à la propriété. Nous attendons vos propositions sur tous ces points. C’est la raison pour laquelle nous ne souhaitons pas que le taux de logements sociaux obligatoires passe de 20 % à 25 % sur tout le territoire français. Des efforts sont faits sur le terrain, qui sont suffisants dans certains territoires, et qui sont à poursuivre dans d’autres ; mais, de grâce, ne changeons pas les règles sans cesse ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Bompard, pour soutenir l'amendement n° 441.

M. Jacques Bompard. Ce projet de loi me semble assez consensuel. J’écoute les débats avec intérêt, même s’ils ne manquent pas de me surprendre. J’entends beaucoup parler de mixité sociale : qui peut y être hostile ? Cela était même de tradition, en d’autres temps, dans notre pays. La mixité a aujourd’hui disparu dans certaines cités, et dans certaines écoles, par exemple dans le Sud de la France.

Aujourd’hui, le communautarisme actif, qui est parfois violent, exclut les Européens et même les couples mixtes qui ne pratiquent pas la religion dominante du quartier, ou qui la pratiquent mal. Je ne vois rien dans le projet de loi dont nous débattons aujourd’hui qui apporte un début de solution à ce dramatique état de choses. Je ne vois rien non plus pour lutter contre la détérioration des logements sociaux existants, et Dieu sait s’il y en a qui sont détériorés !

Bien au contraire, dans nos départements, cette loi contribuera à empirer cet état des choses dont les événements de Marseille ne sont qu’une conséquence prévisible. Cette loi traite la France comme si elle était uniforme, comme si les problèmes y étaient les mêmes partout. Agir ainsi, c’est refuser de voir la réalité. Lorsque l’on refuse la réalité, la nature réagit, quelquefois avec violence : les écologistes doivent le savoir, madame la ministre ! J’espère que le bon sens prévaudra dans notre assemblée.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces amendements de suppression ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. La commission des affaires économiques a émis un avis défavorable à l’ensemble de ces amendements de suppression, cela ne vous étonnera pas. Nous considérons que cet article est un des piliers du projet de loi, et qu’il permet de répondre à une grande partie des besoins en matière de logement en France. Si la commission a adopté cet article, c’est parce qu’elle a constaté l’élan positif qu’a entraîné la loi SRU depuis dix ans. Je vous rappelle quelques chiffres qui figurent à la page 33 du rapport : les objectifs atteints par les communes concernées sont passés de 49 % sur la période 2002-2004 à 63 % sur la période 2008-2010, ce qui montre bien que cette loi a eu un effet d’entraînement sur l’ensemble des communes. Cet effet s’observe pour les communes concernées par l’article 55 de la loi SRU comme pour les autres, puisque le taux de réalisation dépasse largement 100 %.

M. Martial Saddier. On n’a donc pas besoin de cette loi !

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. La commission considère qu’il faut encourager cet élan. Certes, des communes ont objectivement des difficultés, qu’elles soient délibérées ou involontaires. Mais quand un élève a des difficultés, on ne demande pas à toute la classe de redoubler ! Il ne nous a donc pas paru nécessaire de maintenir toutes les communes à20 % de logements sociaux parce que certaines d’entre elles sont récalcitrantes ou ont des difficultés. Il nous semble au contraire indispensable de les encourager à passer à 25 %.

Je vous rappelle que la loi prévoit également que, dans certaines circonstances, des communes peuvent rester au taux de 20 %. C’est notamment le cas des communes qui peuvent démontrer que la demande de logements sociaux y est inférieure à l’offre.

Pour toutes ces raisons, la commission des affaires économiques émet un avis défavorable sur ces amendements de suppression. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Vos interventions demandant la suppression de l’article 4 renvoient en fait à la discussion générale. Je reprendrai quelques points.

On peut toujours taxer un projet de loi d’idéologique. Il s’agit de fait d’un projet de loi très politique, et qui s’assume comme tel. Nous souhaitons trouver le moyen de construire davantage de logements sociaux dans les communes qui se trouvent en zone tendue. Le taux de 25 % ne s’appliquera pas sur l’ensemble du territoire de manière uniforme, comme l’a rappelé la rapporteure, mais bien aux endroits où cela est nécessaire.

Il est inexact de dire que les communes qui font des efforts et sont limités par les contraintes de leur foncier verront leurs pénalités quintupler. J’ai souhaité maintenir la possibilité pour les préfets de ne pas infliger de pénalités aux élus de bonne foi qui ne peuvent respecter le taux de logements sociaux. Le débat a eu lieu sur la question de l’automaticité du quintuplement des pénalités. Je pense pour ma part qu’il faut conserver la souplesse que donne la possibilité de déroger aux sanctions. Cette souplesse a permis l’an dernier à dix-huit communes qui, en dépit de la bonne volonté de leurs élus, n’ont pu satisfaire à leurs obligations, de ne pas faire l’objet de pénalités.

Je comprends bien la difficulté que cela représente pour certaines communes, quelle qu’en soit la couleur politique. Il faut cependant rappeler que c’est à force de volonté qu’on lève les difficultés. J’ai lu à mes heures perdues les débats sur la loi SRU. Ils sont très édifiants. Tout le monde disait que c’était impossible, irréaliste, et scandaleux. Il a fallu, entre la première proposition de M. Besson en 1990 et l’adoption de la loi SRU en 2000, dix ans de mûrissement du débat pour que ce dispositif devienne une sorte de patrimoine commun du paysage politique français – comme la loi montagne et la loi littoral, même si ces deux lois sont parfois sujettes à quelques attaques. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Cela ne concerne pas quelques derniers des Mohicans. Oui, monsieur Plagnol ! Je ne voulais pas citer votre nom car vous risqueriez d’être agacé !

M. Henri Plagnol. Absolument pas !

Mme Cécile Duflot, ministre. Mais je pense que l’exemple des excès de vitesse est très intéressant. Nous avons en effet pu notamment prouver qu’en ville, quand on passe de cinquante à trente kilomètres à l’heure, les conséquences sur la vie d’un piéton renversé par un véhicule sont sans commune mesure. Dans 90 % des cas, à cinquante kilomètres à l’heure, le piéton est décédé contre moins de 10 % des cas à trente kilomètres à l’heure. Vous avez raison : ce n’est pas parce qu’il y a un panneau de limitation de vitesse que le véhicule ralentit. C’est exactement le bilan de la loi SRU d’il y a dix ans. Il y a dix ans, nous étions, comme vous venez de le dire, incitatifs. Nous faisions confiance aux élus locaux et nous avions prévu un dispositif triennal glissant, lequel figure encore dans la loi, permettant de s’adapter à la réalité. Qu’est-ce que cela a donné ? Certains élus très volontaristes ont rempli leurs obligations et ceux qui ne l’étaient pas ont eu toute latitude pour échapper au dispositif. Tirant les leçons de ces dix ans d’expérience, de ces dix ans de responsabilité et de confiance données aux élus locaux, on constate que, pour certains – oh, quelques-uns : environ 160 sur les 900 communes visées par la loi ! – l’incitatif, l’appel à la responsabilité, émanant également de vos bancs n’a pas été suffisant. En revanche, il est légitime que toutes les communes, quelle que soit leur couleur politique, bénéficient de cette mutualisation des fonds, de cette participation collective que constitue le prélèvement. Mais ne nous cachons pas derrière notre petit doigt, certains élus ont obstinément refusé de se soumettre et en ont fait un argument de campagne électorale ; certains propos portant sur cette loi ont été absolument scandaleux. Pour ceux-là, quintupler les pénalités est une bonne logique. Nous allons effectivement devenir plus dissuasifs. Et je constate qu’en matière de sécurité routière, puisque vous aimez que l’on trouve des éléments positifs dans le bilan de l’ancienne majorité, un certain nombre de dispositifs beaucoup plus coercitifs ont eu un effet très efficace.

M. Daniel Fasquelle. Comme le traité européen ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Mme Cécile Duflot, ministre. Quand on est ennuyé par un sujet, on en trouve un autre ! Vous en êtes un bel exemple ! Restons dans le débat. Je réponds longuement à vos objections réitérées !

Ce projet de loi est très politique et je crois que la majorité est très fière de porter, au début de cette mandature, un projet de loi très politique qui a, au cœur de ses valeurs, la solidarité. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Ce sera votre responsabilité de le refuser et la nôtre de l’assumer et de le proposer. Le Gouvernement est défavorable à vos amendements de suppression. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

(Les amendements identiques nos 204, 205, 206, 207, 208, 209, 210, 212, 213, 216, 218, 219, 220 et 441 ne sont pas adoptés.)

M. François de Mazières. Monsieur le président, je demande une suspension de séance.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-trois heures cinquante, est reprise à vingt-trois heures cinquante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Article 4 (suite)

M. le président. La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l'amendement n° 77.

M. Dominique Tian. Cet amendement traduit l’inquiétude de nombreux élus de Paris, Lyon et Marseille quant à l’application du seuil des 20, puis de 25 % par arrondissement. Ce serait très injuste. Vous connaissez en effet la façon dont Paris, Lyon et Marseille se sont construites. La loi doit s’appliquer sur l’ensemble du territoire, or il est des lieux où c’est impossible.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. La commission a beaucoup de respect pour Paris, Lyon et Marseille, mais comme l’amendement vise tout simplement à supprimer les alinéas 2 et 4, lesquels constituent le cœur de l’article, à savoir le relèvement du taux de 20 à 25 %, elle a émis un avis défavorable.

M. Daniel Goldberg. Très bien !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Avis identique à celui de la rapporteure.

(L'amendement n° 77 n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l'amendement n° 276 rectifié.

M. Patrick Hetzel. Vous l’avez souligné tout à l’heure, madame la ministre, notre point de vue diffère effectivement sur cette question. Beaucoup de communes, notamment rurales, rencontrent aujourd’hui d’importantes difficultés pour atteindre le seuil de 20 % actuellement en vigueur. Avec le dispositif que vous proposez, comme je l’ai expliqué précédemment, vous allez contribuer à stigmatiser ces communes qui se trouvent déjà en difficulté. Cet amendement propose donc de moduler le déclenchement de l’obligation du taux de 25 % en fonction du nombre d’habitants par commune, afin de fixer des objectifs réalisables, qui tiennent compte du terrain et des communes, et évidemment plus conformes à la demande de logements locatifs sociaux.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. La commission émet un avis défavorable. Elle préfère, à la modulation en fonction du nombre d’habitants telle qu’elle est proposée, la modulation des objectifs triennaux à atteindre.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Le Gouvernement considère que l’objectif de la loi est de diversifier l’offre de logements locatifs sur l’ensemble des communes de la même manière, afin d’éviter de créer des ghettos proportionnels à la taille de la commune. Donc avis défavorable.

(L'amendement n° 276 rectifié n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. François de Mazières, pour soutenir l'amendement n° 345.

M. François de Mazières. Cet amendement vise à intégrer dans les quotas de logements sociaux les logements en accession sociale à la propriété financés par le PSLA, le prêt social location-accession.

Cette proposition ne vous étonnera pas ; nous avons souvent mis en avant notre souci d’élargir le champ à l’accession à la propriété car cela nous paraît essentiel. De nombreux Français y aspirent et ce serait de votre part une action très symbolique.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. La commission a émis un avis défavorable, ce qui ne vous étonnera pas non plus. Elle a considéré que le périmètre de la loi SRU tel qu’il a été défini, incluant uniquement les logements locatifs sociaux et excluant ceux en accession sociale à la propriété, était le bon périmètre, ce qui n’empêche pas les communes qui le souhaitent de faire du logement social et de l’accession sociale à la propriété.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Il est très intéressant de faire du PSLA, car c’est une offre complémentaire à celle du logement locatif social. Le périmètre retenu n’empêche nullement les communes qui le souhaitent d’engager des programmes de PSLA et de favoriser ainsi la diversification de l’offre.

(L'amendement n° 345 n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l'amendement n° 126.

M. Bertrand Pancher. Cet amendement a pour objet de relever le seuil de 3 500 à 5 000 habitants. Les communes de plus petite taille sont confrontées à des difficultés financières plus importantes que les communes plus peuplées. Il suffit de se reporter aux statistiques des fédérations d’élus locaux pour s’en apercevoir. Les petites communes ont moins de moyens ; elles ne disposent d’aucune ingénierie technique et n’ont même pas d’adjoints en charge du logement. En outre, elles sont souvent très éloignées des grands pôles urbains. C’est la raison pour laquelle nous proposons, au nom de notre groupe, de relever le seuil de cette obligation.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. L’avis de la commission est défavorable. Depuis dix ans, le bilan de la loi SRU a montré que, dans les communes comprises entre 3 500 et 5 000 habitants, il était tout à fait possible d’atteindre les objectifs fixés. Il n’y a donc pas de raison d’y revenir.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Une telle augmentation modifierait l’esprit du projet de loi. Cela reviendrait à considérer que les communes de moins de 5 000 habitants n’ont pas à pas à apporter leur pierre à l’édifice de la mixité sociale. Avis défavorable donc.

M. le président. La parole est à M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Vous avez changé l’esprit de la loi SRU en quintuplant les amendes. D’un projet incitatif, on est passé à un projet coercitif. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) C’est la raison pour laquelle je suis favorable à l’amendement de notre collègue Bertrand Pancher.

Je prendrai un exemple dans ma circonscription. Pour une commune de 4 000 habitants, le quintuplement de l’amende représentera sur cinq ans l’équivalent du budget annuel dédié à toutes les écoles de son ressort. Il faut être sérieux.

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. Nous sommes sérieux.

M. Julien Aubert. Dès lors que l’on accroît le volume de l’amende, il serait prudent d’appliquer le fameux principe de précaution. Avant de tester le dispositif sur de petites communes qui ont peu de moyens, et pour lesquelles cela risque de représenter immédiatement un apport financier incommensurable, il serait bon d’y aller par étapes, de manière pragmatique. C’est pourquoi je considère que nous devrions voter cet amendement. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

(L'amendement n° 126 n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, n°s 24 et 119.

La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l'amendement n° 24.

M. Lionel Tardy. L’article 4 relève de 20 à 25 % le seuil de logements sociaux dans une commune. Si la loi SRU a eu des effets positifs, c’est parce qu’elle a été intégrée progressivement dans les objectifs des collectivités locales. On ne passe pas, du jour au lendemain, à 25 % de logements sociaux.

M. Daniel Goldberg. D’ici à 2025, ce n’est pas du jour au lendemain.

M. Lionel Tardy. C’est le fruit d’un travail de longue haleine. Il a fallu réfléchi à l’ensemble des problématiques : trouver des terrains, étudier leur localisation pour aboutir à un bon équilibre. Cela s’intègre dans des plans locaux de long terme. Passer brutalement de l’objectif de 20 à 25 % peut remettre en cause l’équilibre de cette planification de long terme. Dans de nombreuses communes qui ont fait l’effort d’arriver jusqu’à 20 %, en tout cas, de s’en approcher, il va falloir tout remettre sur le métier.

Mme Annick Lepetit. Mais non !

M. Lionel Tardy. C’est le plan d’urbanisme qu’il faut revoir, les réserves foncières, ainsi que les équilibres sociaux. Dans de nombreuses villes, cela nécessitera une densification de l’habitat, des espaces verts plus réduits, des immeubles plus hauts et plus rapprochés. Il faudra réorienter les réserves foncières, donc transférer des équipements vers des communes voisines alors même que les répartitions avaient fait l’objet d’équilibres subtils et délicats.

Cette mesure, vous l’imaginez sans peine, aura des répercussions très importantes pour un résultat négligeable en nombre de logements sociaux les premières années, car l’on n’augmentera pas les budgets dédiés au logement social sur un claquement de doigt.

L’objet de cet amendement est de comptabiliser les 25 % de logements sociaux à l’échelle de l’agglomération ou de l’établissement de coopération intercommunale à fiscalité propre.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. La commission a débattu assez longuement de la question de la mutualisation à l’échelle intercommunale et a souhaité souligner, à plusieurs reprises, que le chemin parcouru vers l’intercommunalité était intéressant et qu’il fallait poursuivre en ce sens.

M. Michel Piron. Le chemin est long !

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. Cependant, la commission a également considéré que mutualiser les 25 % à l’échelle intercommunale revenait à dénaturer le principe même de la loi, qui se fonde sur l’échelle communale. Elle a donc émis un avis défavorable. Fixer cet objectif de 25 % à l’horizon de 2025 alors que nous sommes en 2012 ne lui a pas semblé brutal et elle n’a pas considéré que cela devait se faire du jour au lendemain : il reste treize ans pour le faire.

M. François de Mazières. Il y a des étapes !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Avis défavorable, car ces amendements ont pour vocation de vider le principe de la loi SRU de sa substance en calculant une moyenne sur l’ensemble des communes d’une agglomération et en permettant ainsi à certaines d’entre elles de ne pas remplir leurs obligations. Il est très important, y compris dans une agglomération, que les équilibres soient répartis entre les différentes communes de manière partagée. C’est pourquoi je suis favorable à cet amendement qui s’appuie sur la même logique d’élargissement du périmètre de comptage.

Plusieurs députés du groupe UMP. Vous y êtes favorable ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Non, j’y suis défavorable !

Plusieurs députés du groupe UMP. Nous avons eu peur ! (Sourires.)

Mme Cécile Duflot, ministre. Je voulais vérifier si vous suiviez. (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. Arnaud Richard pour défendre l’amendement n° 119.

M. Arnaud Richard. J’apprécie le ton de Mme la ministre, car je m’attendais à plus de vindicte, de véhémence de sa part.

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Jamais !

M. Arnaud Richard. Le fond de la loi SRU consistait à sortir de la politique des grands ensembles. On est alors en 1973 et on se dit qu’il faut répartir les difficultés sur toutes les communes du territoire. Vous avez toujours, chers collègues, cette vision des choses. Cela étant, les avis de Mme la rapporteure donnent à penser que vous êtes en train de progresser. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Rien ne dit que ce soit la bonne manière de faire. Chaque commune a son histoire. Vous stigmatisez des maires qui ne font qu’appliquer la loi en faisant le choix de payer la taxe. On peut ne pas être d’accord avec eux, et je partage le sentiment qu’il est nécessaire de produire du logement social, mais ils ne sont pas hors-la-loi.

M. Alexis Bachelay, rapporteur pour avis. Ils la contournent !

M. Arnaud Richard. Ils appliquent la loi, qui prévoit le paiement de la taxe.

Dans le cas d’agglomérations qui ont déjà globalement 25 % de logement social, il est inutile d’en rajouter, car l’exercice n’est pas facile, loin de là. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Restons-en au principe de 20 % dans chaque commune, qui était l’esprit de la loi de 1973, au moment où l’on s’est planté sur les grands ensembles. On s’est dit alors qu’il fallait mieux répartir pour réaliser ce que l’on appelle pudiquement aujourd’hui la mixité sociale, alors que personne ne sait ce que cela veut dire. Ce qui arrange d’ailleurs certains.

Cette question ne devrait pas être un sujet de clivage, mais un sujet de réflexion, et je répète que produire du logement social est une bonne chose. Je me suis battu pour cette loi SRU lorsque j’exerçais d’autres responsabilités, souvent contre un certain nombre de mes collègues, ici et au Sénat.

Je vous invite à vous demander pourquoi nous en sommes arrivés là, pourquoi Louis Besson a proposé cette loi dès 1990, puis en 2000, et s’il est vraiment nécessaire d’atteindre 20 % de façon absolue dans chaque commune alors qu’une agglomération peut être à 25 %.

M. le président. Cet amendement étant identique au précédent, les avis de la commission et du Gouvernement sont défavorables.

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. Madame la ministre, j’avais demandé la parole avant que vous ne nous disiez que vous étiez favorable aux amendements… Malheureusement, vous êtes revenue sur votre position. (Sourires.)

En fait, notre amendement n° 24 n’est pas assez exhaustif. Les outils qui permettent la progression du logement social sont à l’échelle intercommunale, qu’il s’agisse du SCOT, du PLH ou de l’OPAH. Nous aurions donc dû prévoir de permettre aux EPCI de comptabiliser les logements sociaux à l’échelle de l’intercommunalité pour une mise en cohérence avec ces outils ; cela devrait être consensuel et s’affirmer comme une réponse d’avenir. Il s’agit d’inciter les intercommunalités à réaliser davantage d’intégration fiscale et à prendre en main l’aménagement du territoire, car c’est une compétence intercommunale.

Nous étions ensemble, madame la ministre, à la table ronde sur la biodiversité. J’ai cru comprendre, et je ne dévoile aucun scoop, que vous n’étiez pas tout à fait opposée au fait que l’urbanisme et le PLU deviennent une compétence intercommunale.

M. Arnaud Richard et M. Michel Piron. Très bien !

M. Martial Saddier. Vous l’avez dit au cours de cette table ronde. Au fond, vous y êtes favorable. Si notre amendement était complété par la mention des outils intercommunaux tels le PLH et l’OPAH, il me semble que cela irait dans le bon sens, y compris le vôtre. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Bertrand Pancher.

M. Bertrand Pancher. Nous avons été nombreux, lors de la précédente législature, à nous battre pour mettre en place des outils d’urbanisme et des politiques de logement au plan intercommunal, notamment dans le cadre de la commission du développement durable. Déjà à cette époque, nous pensions que la cohésion territoriale était indispensable. Il s’en était fallu de quelques voix pour que nous y parvenions. Cela étant, même sans cette loi, nous observons que de plus en plus de communautés de communes s’emparent de cette compétence. Il importe aussi de parvenir à une cohésion par le biais du logement social, d’autant que cela réglerait des problèmes de tension et d’équilibre, et permettrait de faire passer ce projet de loi en douceur.

M. le président. La parole est à M. Michel Lesage.

M. Michel Lesage. L’amendement n° 263 de Mme Estelle Grelier et de moi-même portait sur le même sujet. Il est vrai que les intercommunalités ont des compétences dans le domaine du logement et de l’habitat. Certaines élaborent des PLU intercommunaux, des PLH et prennent la compétence de délégation des aides à la pierre tout en respectant l’objectif de 20 % pour chacune des communes composant l’EPCI. Il nous paraît souhaitable que la comptabilisation du nombre de logements sociaux – les 25 % – se fasse sur la base de l’intercommunalité. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Cécile Duflot, ministre. Puisque vous engagez ce débat, je vais vous répondre.

Effectivement, si les intercommunalités avaient la délégation des aides à pierre, la compétence en matière d’habitat et un PLU intercommunal, elles agiraient de fait comme agissent les communes aujourd’hui, c’est-à-dire en disposant de réelles possibilités d’action pour assurer un équilibre au sein de leur territoire. Dans ces conditions, on pourrait trouver logique que cette disposition s’applique, mais ce n’est pas dans ce cadre que nous agissons aujourd’hui. Vous avez raison, c’est un débat que nous aurons. Je peux avoir une position personnelle ; je défendrai devant vous la position du Gouvernement au moment de ce débat.

Il me semble extrêmement intéressant de faire avancer la réflexion en matière de niveaux de compétences et d’exercice de ces compétences en vue d’une politique d’aménagement équilibrée mettant l’accent sur la gestion des espaces plutôt que sur un plan local d’urbanisme. Vous avez évoqué la conférence environnementale. La question de l’artificialisation des sols est en effet très liée au débat que nous avons. Il me semble bien plus utile de recourir à de nouveaux outils permettant la réaffectation de grandes friches commerciales, d’anciennes usines, plus coûteuse en termes de fiscalité et de dépollution que l’utilisation de terres agricoles. Ce débat, nous devons l’avoir et nous l’aurons. Et ce sera sans doute une fierté pour l’ensemble des parlementaires que de contribuer à la clarification des règles, à une nouvelle étape de l’aménagement urbain mais aussi – qui sait ?– de l’organisation des intercommunalités.

M. le président. La parole est à M. Arnaud Richard.

M. Arnaud Richard. Madame la ministre, ce n’est pas tous les jours que l’on parvient à une solution partagée d’un bord à l’autre de l’hémicycle ou presque, et je trouve un peu dommage que vous bottiez en touche alors que nous étions prêts à trouver une position où la loi SRU n’aurait pas eu d’effet clivant. J’ai l’impression que vous ne voulez pas qu’elle cesse d’être « clivante » car, pour vous, il s’agit d’un sujet très politique. Je le répète, c’est dommage.

M. le président. La parole est à M. Michel Piron.

M. Michel Piron. Monsieur le président, j’aimerais, avec votre autorisation, présenter dès à présent mon amendement n° 87, car il traite exactement du même sujet tout en apportant des précisions qui permettront peut-être de parvenir au compromis qui pourrait se dessiner sur tous les bancs.

M. le président. Si chacun d’entre vous me demande de présenter un amendement ultérieur parce qu’il porte sur le même sujet, cela va prendre un moment. Mais je vous donne la parole pour présenter celui-ci, monsieur Piron.

M. Michel Piron. Dans cette affaire, c’est la question du bon périmètre de l’urbanisme qui est posée, notamment celle du périmètre intercommunal. Là où il y a un PLH ou un PLU intercommunal, là où l’intercommunalité a la compétence en matière d’habitat, là où il y a une réflexion intercommunale sur la politique de l’habitat, il est logique que l’on se saisisse de cette question du pourcentage de logements sociaux à l’échelle intercommunale.

Pour éviter toute ambiguïté et toute dénaturation de l’article 55 de la loi SRU, j’ai proposé dans cet amendement n° 87 que le taux de 20 % s’impose obligatoirement à chaque commune, qui ne saurait déroger à cette règle, mais que le taux de 25 % soit apprécié à l’échelle intercommunale de façon à tenir compte des différences de situations géographiques, de contraintes physiques, de données démographiques des communes. Il me semble que cette façon de respecter la contrainte des 20 % pour chaque commune tout en ouvrant le jeu pour les 25 % à l’échelon intercommunal pourrait recueillir un large assentiment sur nos bancs dès aujourd’hui, sans que nous ayons à attendre une loi sur les compétences qui, en réalité, ne changera rien au passage de 20 à 25 %.

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. Pour faire plaisir à Mme la ministre, il faudrait présenter un sous-amendement – et je me reproche encore de ne pas lui avoir demandé de le rédiger – visant à comptabiliser les 25 % au niveau des EPCI ayant les compétences concernant les aides à la pierre, les PLH et les OPAH.

(Les amendements identiques nos 24 et 119 ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Julien Aubert, pour soutenir l'amendement n° 267.

M. Julien Aubert. Cet amendement vise à limiter à 33 % le nombre de logements locatifs sociaux dans une commune. Autrement dit, il s’agit d’instaurer un plafond en plus d’un plancher. « Il faut sauver la mixité sociale », telle pourrait être sa philosophie en résumé.

M. Alexis Bachelay, rapporteur pour avis. Tout un programme !

M. Julien Aubert. Vous avez fait de cette mixité le cœur de la loi SRU, mais cela risque d’être un objectif difficilement atteignable avec des villes dortoirs comprenant 70 % à 80 % de logements sociaux.

Vous avez parlé de projet politique. J’ai noté que, comme l’Unesco, vous décerniez des labels de « patrimoine commun ». Toutefois, en rejetant tous les amendements de la droite, vous ne pourrez pas prendre ce chemin. Cet amendement vient jeter un pont entre vous et nous en défendant un objectif commun, la mixité sociale : adoptez-le donc. Cela dit, je suis de ceux qui pensent qu’il aurait fallu abroger la loi SRU et si, un jour, nous reprenons le pouvoir, je plaiderai en faveur de son abrogation. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.)

Le problème de votre vision législative, c’est que vous êtes obsédés par les taux et par les chiffres. Vous devriez savoir qu’il faut se méfier des pourcentages.

M. Daniel Goldberg. C’est vous qui voulez en fixer un dans cet amendement !

M. Julien Aubert. Ce n’est pas parce qu’on fixe à 3 % le déficit selon les critères de Maastricht que ce taux est respecté. De même, ce n’est pas parce la loi impose 25 % de logements sociaux que nous les aurons.

Il manque à cette loi une dimension qualitative. Il est bon de construire des logements sociaux, encore faut-il les adapter pour que les gens puissent y vivre normalement. Cet amendement aurait pour effet de limiter l’effet boule de neige du plancher de 25 % que mes collègues et moi n’approuvons pas.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. Je dois dire, monsieur Aubert, que la commission s’est interrogée sur ce que les communes devraient faire de toutes les personnes qui vivent dans des logements sociaux quand ceux-ci dépassent le plafond de 33 % que vous voulez imposer. Vous ne nous l’avez pas dit.

Par ailleurs, elle s’est montrée favorable à la règle des trois tiers bâtis et donc à une mixité sociale fonctionnant dans les deux sens.

Avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Défavorable également.

(L'amendement n° 267 n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Le Callennec, pour soutenir l'amendement n° 278 rectifié.

Mme Isabelle Le Callennec. Cet amendement rejoint ce que j’indiquais tout à l’heure à propos de la nécessité de prendre en compte le taux de 25 % à l’échelle intercommunale. Il prévoit que « si, dans un ensemble intercommunal, la ville centre dispose d’un taux de logements sociaux dépassant l’obligation réglementaire à laquelle elle est tenue au titre de l’article 4, les communes de plus de 3 500 habitants appartenant à cet ensemble qui ne sont pas en capacité de respecter ladite obligation dans les délais impartis peuvent bénéficier d’une minoration de celle-ci dans la limite du nombre de logements excédentaires de la ville centre ».

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. Sans hésitation, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement qui n’est pas dans l’esprit de la mutualisation évoqué tout à l’heure. M. Piron a bien précisé en défendant son amendement que les communes, dans leur ensemble, restaient soumises à l’obligation des 20 % même si le taux de 25 % pouvait s’apprécier à l’échelle intercommunale. Selon votre amendement, madame Le Callennec, le taux de 25 % ne s’appliquerait qu’à la ville centre et toutes les autres communes alentour seraient exonérées de l’obligation établie par la loi SRU.

Avis défavorable donc.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Le Gouvernement, comme il l’a exposé précédemment, estime que la mutualisation constitue pour certaines communes un moyen de s’exonérer de l’obligation de contribuer à l’équilibre dans la répartition des logements sociaux.

Avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Daniel Goldberg.

M. Daniel Goldberg. Il me paraît bon de réfléchir à ce que donnerait l’application très concrète du mécanisme proposé par nos collègues de l’opposition. C’est en fait celui qui s’applique actuellement dans trois villes : Paris, Lyon et Marseille. À la ville centre correspondent les arrondissements qui respectent ou dépassent les obligations légales ; aux villes de la périphérie correspondent les arrondissements qui ne les respectent pas. Avec votre raisonnement, madame Le Callennec, ou celui suivi par M. Aubert, il faudrait punir un arrondissement comme le 19e d’avoir trop de logements et exempter le 16e arrondissement, ou le beau 7e arrondissement dans lequel se tiennent nos débats, de toute production de logement social.

Il faut bien voir ce à quoi conduit ce type de proposition. Voilà ce que nous combattons.

M. Marcel Rogemont. Excellente intervention !

(L'amendement n° 278 rectifié n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l'amendement n° 149 rectifié.

M. Denis Baupin. Nous venons de rejeter plusieurs amendements au motif qu’ils auraient dénaturé la loi SRU en appliquant le taux de logements sociaux au niveau de l’agglomération. M. Goldberg vient de citer l’exemple de Paris, Lyon et Marseille où la logique défendue par nos collègues manifeste ses effets les plus pervers. Ce sont en effet trois villes dont la taille s’apparente à celle d’une agglomération et dont les arrondissements s’apparentent à des villes. Nous avons vu que des déséquilibres importants s’étaient déjà établis : à Paris, trois arrondissements, le 13e, le 19e, le 20e, concentrent à eux seuls la moitié des logements sociaux de la ville tandis que d’autres n’en ont que très peu : 3,7 % dans le 16e, 2,4 % dans le 8e et 1,3 % dans le 7e. Nous avons créé des ghettos, des ghettos d’assujettis à l’ISF.

Notre amendement vise à remédier à la dénaturation qu’induit l’application d’objectifs à l’échelle de l’agglomération. Il tend à rééquilibrer dans ces territoires les obligations en matière de logements sociaux, lesquelles n’ont pas été respectées dans les années passées parce que des élus locaux ont refusé la mise en place de logements sociaux.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. Après en avoir débattu, la commission a émis un avis défavorable à cet amendement.

Elle n’est pas opposée à l’idée, très juste, que le nombre de logements sociaux devrait être équitablement réparti, soit dans les quartiers pour certaines communes, soit dans les arrondissement pour Paris, Lyon et Marseille.

Mais la commission a considéré qu’un tel amendement était prématuré tant que le prélèvement restera communal : en effet, les arrondissements que vous avez cités, et qui se situent sous le seuil de 25 %, pourraient continuer de ne pas augmenter le taux, tandis que la ville de Paris dans son ensemble serait toujours contrainte de payer le prélèvement.

Peut-être pourrons-nous reprendre cette discussion après l’adoption de la réforme territoriale ; en attendant, la commission a jugé préférable de se prononcer contre cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. La question de la répartition équitable est en effet très importante, je l’ai dit lors du débat sur le comptage au niveau des agglomérations.

Mais la capacité d’action est indispensable. Or, il n’est aujourd'hui pas possible pour un arrondissement de conduire cette politique de manière autonome. De plus, il ne peut pas être fait de distinction dans l’application des pénalités et du prélèvement au titre de la loi SRU. C’est pourquoi, monsieur Baupin, bien que je comprenne pleinement l’esprit qui vous anime, je me vois dans l’obligation d’être défavorable à votre amendement.

M. le président. La parole est à M. Olivier Audibert-Troin.

M. Olivier Audibert-Troin. Tout comme madame la ministre, j’y suis également défavorable, mais pas pour les mêmes raisons.

On se demande quel périmètre d’application de la loi est le plus pertinent : on nous parle de l’arrondissement, mais peut-être va-t-on nous proposer de descendre au niveau de la rue ? Ce serait bien, en effet, des rues avec une grande mixité sociale ! On peut même raisonner par immeuble, par étage, par pièce…

Il faut sortir d’une logique de sur-normalisation, selon laquelle tout doit être encadré. La France n’est pas un jardin à la française !

Lorsque l’on évoque les ghettos, le 7e arrondissement, qui dispose de très peu de logements sociaux, est cité. J’aimerais que l’on parle également de ces villes dortoirs qui comptent 75 à 80 % de logements sociaux.

M. Daniel Goldberg. Lesquelles ? Citez-les !

M. Olivier Audibert-Troin. Je ne comprends pas cette forme d’aveuglement, qui vous pousse à ne considérer que la moitié du problème. Vous souhaitez absolument remodeler ce pays par la loi, et uniquement elle, en créant des contraintes pour les édiles.

Voilà pourquoi je considère que cet amendement n’a pas lieu d’être.

M. le président. La parole est à M. Henri Plagnol.

M. Henri Plagnol. Je trouve ce débat sur Paris, Lyon et Marseille extrêmement intéressant : c’est une tartufferie ! Les arguments invoqués par la commission et la ministre ne dupent personne !

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. Merci ! Un peu de respect pour la commission !

M. Henri Plagnol. En réalité, le maire de Paris sait très bien qu’il n’est pas aussi facile de construire du logement accessible dans ce que vous avez appelé les « beaux arrondissements » que dans les arrondissements populaires.

M. Daniel Goldberg. Je n’ai pas utilisé le terme de « beaux arrondissements » !

M. Henri Plagnol. Pourquoi ? Parce que le coût de construction d’un logement social dans le 16e arrondissement, ou dans le 7e pour reprendre votre exemple, est évidemment très supérieur à celui d’un logement de même type dans les arrondissements qui en comptent déjà beaucoup. On exonère donc le maire de Paris de ce qu’on impose à tous les autres !

Depuis le début, nous expliquons que certaines communes, en raison de leur histoire, de leur qualité de vie, de leur urbanisme, de leurs contraintes propres, ne peuvent pas atteindre cet objectif.

Il serait donc infiniment plus intelligent de raisonner, comme à Paris, à l’échelle d’une ville ou d’un bassin de vie. Or vous le refusez, en arguant que toutes les communes, à l’exception des trois villes déjà citées, doivent passer sous la même toise.

L’exemple parisien prouve que votre logique est irréaliste, inadaptée, et finalement, comme le répète d’ailleurs fréquemment Mme la ministre au cours de nos débats, fondamentalement politique. La démonstration en est faite !

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin.

M. Denis Baupin. J’ai bien entendu les arguments de la commission et de Mme la ministre ; mais je maintiens néanmoins cet amendement, afin qu’un signal soit envoyé concernant la nécessité d’un rééquilibrage.

Monsieur Plagnol, si ce rééquilibrage n’a pas eu lieu sur le territoire parisien, même si la ville de Paris atteindra le seuil de 20 % de logements sociaux six ans avant la date de 2020, soit à la fin de la mandature municipale, c’est parce que vos amis politiques ont fait obstruction dans les arrondissements concernés !

M. Henri Plagnol. Obstruction des Verts !

M. Denis Baupin. Si j’ai cité les 7e, 8e et 16e arrondissements, ce n’est pas par hasard ! Ce sont des arrondissements qui refusent les logements sociaux ! D’ailleurs, votre combat contre la loi SRU le confirme.

Il est important, même si je comprends bien vos arguments, que nous puissions soumettre cet amendement au vote, afin de souligner la volonté de rééquilibrage des logements sociaux sur le territoire de ces communes.

(L'amendement n° 149 rectifié n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. François de Rugy, pour soutenir l'amendement n°150.

M. François de Rugy. Cet amendement concerne l’équilibrage des logements sociaux sur le territoire de toutes les communes.

Dans les communes de taille plus modeste, entre 1 500 et 3 500 habitants, les besoins en logements sociaux existent aussi. Mais, contrairement à ce que vous soutenez, nous ne voulons pas leur appliquer ce texte de façon brutale et uniforme. Pour cette raison, nous proposons que le dispositif soit encadré : la répartition concernerait, quelle que soit leur taille, les communes situées au sein d’une agglomération de plus de 50 000 habitants et comprenant une ville centre de 15 000 habitants.

J’ai entendu des arguments un peu étranges au cours de ce débat : on nous dit d’abord que certaines villes, notamment les villes centres, n’ont plus de foncier disponible, tandis que les communes plus petites en possèdent davantage. Puis, on nous affirme l’inverse : il ne faut surtout pas appliquer ce texte aux petites communes, qui comptent moins d’habitants et disposent souvent de plus de foncier disponible !

Nous proposons enfin qu’un seuil de 10 % de logements sociaux soit retenu pour cette catégorie intermédiaire des communes de 1 500 à 3 500 habitants.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. Voilà une heureuse surprise ! Cet amendement rejoint des propositions faites lors de la précédente législature par des députés du groupe SRC, toujours présents. La commission émet donc un avis favorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Cet élargissement n’était pas prévu dans le projet de loi initial. Néanmoins, après avoir entendu les propos de Mme la rapporteure concernant l’attachement de nombreux groupes à cette disposition, le Gouvernement s’en remet à la sagesse de l’Assemblée.

M. le président. La parole est à Mme Annick Lepetit.

Mme Annick Lepetit. Nous proposions un amendement similaire. Cette question devrait d’ailleurs réunir tous les membres de cette assemblée !

J’ai beaucoup entendu parler d’égalité territoriale, ou plutôt d’inégalité territoriale. En abaissant le seuil, nous permettrons aux maires qui le souhaitent de construire du logement social même s’ils se trouvent en dehors du périmètre de la loi SRU.

M. Julien Aubert. Rien ne les en empêche ! Vous êtes des apprentis sorciers.

Mme Annick Lepetit. Cet amendement constitue une véritable incitation, et mérite donc d’être voté à l’unanimité.

M. le président. La parole est à M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Ce débat souffre d’un tropisme parisien. Résidant dans un village de 1 500 habitants en milieu rural, je vous donnerai un avis de bon sens.

Décréter qu’on doit construire des logements sociaux dans les petits villages est une bonne chose – pourquoi pas ? Mais il ne suffit pas d’affirmer qu’on va le faire pour que cela ait un sens : les petites communes de 1 500 à 3 500 habitants sont en territoire rural, et souffrent de difficultés économiques ainsi que d’un manque d’emplois. Leur problème aujourd'hui est de parvenir à attirer des entreprises. Si on installe des logements sociaux dans ces petites communes, loin des bassins d’emploi, quel sera le résultat ? Les habitants seront au chômage, et n’arriveront pas à trouver d’emplois sur place.

Ces personnes qui résidaient autrefois en ville obtiendront un logement social dans ces petits villages, à 45 minutes, une heure des villes – je vous parle du vrai pays, pas de Paris ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Mme Annick Lepetit. Nous aussi !

M. Julien Aubert. Les petits villages de 1 500 habitants, à mon avis, chère madame, vous n’avez pas dû en voir beaucoup !

M. Daniel Goldberg. Arrêtez de donner des leçons !

M. Julien Aubert. Une fois installée dans son logement social en pleine campagne, comment voulez-vous qu’une personne trouve un emploi ? Il faut savoir raison garder ! On ne peut pas manipuler la réalité en pensant qu’elle va forcément s’adapter à nos fantasmes !

En l’occurrence, je considère que cet amendement est très dangereux, parce qu’il va créer des poches de pauvreté dans les campagnes.

M. le président. La parole est à M. Marcel Rogemont.

M. Marcel Rogemont. M. Aubert a rappelé tout à l’heure qu’il était contre la loi SRU : il s’oppose donc à la grande majorité des députés de son groupe, qui sont favorables à cette même loi. Il est donc minoritaire parmi les minoritaires !

M. Julien Aubert. Ne parlez pas pour nous, et occupez-vous de votre propre minorité !

M. Marcel Rogemont. Par ailleurs, nous avons la responsabilité de construire le vivre-ensemble. Pour cela, il faut l’assumer collectivement, en adoptant des mesures à l’échelle de chacune des communes. Leur capacité à participer à l’effort de construction du logement locatif public est en effet importante.

À ce sujet, je suis un peu étonné, monsieur le président, car nous avions présenté avec mes collègues socialistes un amendement comparable, retoqué au titre de l’article 40… Ah, pardon, nous l’avons retiré !

J’en viens donc à ma conclusion. Je demanderai à mes collègues, à l’exception de ceux qui sont contre la loi SRU, de respecter l’esprit de ce texte, qui vise à partager l’effort de solidarité ; c’est l’essence même de la loi SRU. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. Guillaume Larrivé.

M. Guillaume Larrivé. J’ai cru comprendre que le Gouvernement était depuis quelques mois très attaché à multiplier les consultations, les commissions et les concertations.

Je poserai donc une simple question, avant que les députés ne se prononcent sur cet amendement : l’Association des maires de France, l’Association des maires ruraux et les autres associations représentant les petites communes ont-elles été consultées ? Si vous ne l’avez pas fait, vous vous apprêtez alors à leur imposer une charge supplémentaire qu’elles découvriront de façon inopinée.

Je ne voudrais pas contrarier la joyeuse improvisation dans laquelle se déroulent nos débats, mais je crains qu’elle ne s’avère finalement irresponsable.

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Le Callennec.

Mme Isabelle Le Callennec. Je me demande ce qui motive cet amendement. Vous aviez évoqué un texte et un article très politiques, mais là, c’est ultrapolitique !

Les communes de moins de 3 500 habitants commencent à constater de la vacance dans les logements sociaux. Leurs problèmes aujourd'hui portent plutôt sur la revitalisation des bourgs ruraux et la rénovation des maisons dans les bourgs.

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Pas dans les agglomérations !

Mme Isabelle Le Callennec. C’est plus prioritaire pour elles que de construire du logement social. Aujourd'hui, compte tenu des contraintes budgétaires, il faudrait raisonner un peu plus en priorités, et un peu moins en idéologie.

Ce soir, les maires des communes de 1 500 à 3 500 habitants se sont couchés en pensant être exemptés de cette obligation de construire.

M. Alain Chrétien. Ils vont mal dormir !

Mme Isabelle Le Callennec. Votre majorité s’apprête à voter cet amendement, qui aura des conséquences énormes : attendez-vous à de très vives réactions au prochain congrès des maires !

Cet amendement n’est pas anodin : ses conséquences seront considérables…

M. François Brottes, président de la commission. Dans les agglomérations !

Mme Isabelle Le Callennec. …mais personne n’en avait jamais parlé ! On le découvre dans la nuit, et demain les maires de ces communes de 1 500 à 3 500 habitants se réveilleront avec la gueule de bois !

M. le président. La parole est à M. Yves Jégo.

M. Yves Jégo. Madame la ministre, essayons d’être un peu cohérents. Tout à l’heure, vous avez refusé un amendement qui prévoyait que l’effort demandé aux communes soit proportionnel entre 3 500 et 5 000 habitants au motif que le pourcentage de 25 % devait s’appliquer pour tous. Or le présent amendement dispose que, pour les communes de plus de 1 500 habitants et de moins de 3 500 habitants, le taux devient proportionnel, à 10 %. Si c’est proportionnel, il faut que ce le soit pour tout le monde, en fonction de la taille des communes.

Une telle mesure n’est évidemment pas raisonnable pour des communes aussi petites. Je rappelle que le seuil de 3 500 habitants est celui au-delà duquel il y a un scrutin bloqué.

Mais surtout, vous changez totalement de raisonnement. Vous ne pouvez pas casser votre logique pour faire tout à coup de la proportionnalité. Si vous voulez aller au bout de votre raisonnement, dites que, pour les communes de 1 500 à 3 500 habitants, il faut aussi 25 % de logements sociaux ! Au moins, ce serait cohérent avec votre dispositif.

Je demande donc un scrutin public pour que les maires sachent qui décide de quoi, et dans quelles conditions on va imposer à de petites communes et au milieu rural un dispositif complètement inapplicable et incohérent avec le reste du débat.

Retirez cet amendement quitte à le représenter dans un autre texte, car on ne peut pas discuter subrepticement d’un tel sujet. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.)

M. le président. La parole est à M. Gérald Darmanin.

M. Gérald Darmanin. Monsieur Rogemont, vous ne pouvez pas caricaturer de la sorte les propos de M. Aubert.

Ce qui nous différencie, c’est que nous préférons une France de propriétaires à une France de logements sociaux.

Monsieur de Rugy, je ne comprends pas pourquoi vous ne misez pas sur l’intercommunalité alors que vous faites des villes de 15 000 habitants une condition de votre dispositif. L’intercommunalité ne pourrait-elle pas être le moyen d’imposer des logements sociaux sans toucher les villes qui comptent de 1 500 à 3 500 habitants ?

On parle beaucoup de l’intelligibilité et de la simplification de la loi. Or vous allez introduire un dispositif assez compliqué puisqu’il concerne les communes de 1 500 habitants à 3 500 habitants hors Île-de-France, qui sont dans une agglomération de plus de 50 000 habitants comprenant au moins une commune de plus de 15 000 habitants. Soit cette mesure concerne votre politique territoriale et il faut nous l’expliquer, soit, comme l’a dit M. Jégo, vous partez d’un seuil qui influence les électeurs.

Ne pourrait-on pas simplifier la loi ? Si vous voulez imposer les 25 %, faites-le au niveau de l’intercommunalité, mais pas pour les communes de 1 500 à 3 500 habitants.

M. Daniel Goldberg. Vous n’avez pas lu la loi SRU !

M. le président. Sur l'amendement n° 150, je suis saisi par le groupe Union des démocrates et indépendants d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Michel Piron.

M. Michel Piron. Cet amendement me semble quelque peu improvisé, quel que soit l’enthousiasme de M. de Rugy en matière d’intercommunalisation des documents d’urbanisme. En tout cas, le dispositif qu’il nous propose mériterait quelques éclaircissements.

D’abord, je suis convaincu que certaines communes de 1 500 habitants, situées en bordure d’une agglomération beaucoup plus importante où la tension est extrême, mériteraient en effet d’être soumises à la loi SRU précédente. En revanche, pour de nombreuses communes au-delà de 1 500 habitants, cela ne se justifie pas. J’aimerais savoir combien d’agglomérations et de communes seraient concernées par cet amendement. Une étude d’impact me semblerait la moindre des choses.

Madame Lepetit, on n’a pas forcément besoin d’une loi SRU pour faire du logement social, y compris dans de très petites communes. Je préside une communauté de douze communes rurales qui ont toutes des logements sociaux, y compris celles qui n’ont que 400, 500 ou 700 habitants.

Je suis convaincu que le pourcentage de 25 % de logements sociaux serait justifié dans certaines communes de 1 500 à 3 500 habitants alors qu’il ne l’est pas dans d’autres.

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. Une fois de plus, mais nous en avons l’habitude, il est surprenant que des députés imposent à d’autres dans un même amendement ce qu’ils s’excluent eux-mêmes. Les députés d’Île-de-France notamment déposent un amendement pour pouvoir imposer à tout le reste du pays ce qu’ils refusent de s’imposer. C’est scandaleux ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Marcel Rogemont. N’importe quoi !

M. Martial Saddier. Par ailleurs, cet amendement n’a pas été soumis à une étude d’impact. Madame la ministre, vous n’y êtes pour rien, mais c’est un problème grave.

Voilà un amendement discuté à minuit passé qui va bouleverser en profondeur le texte en discussion. Tout à l’heure, M. Brottes a dit qu’il s’agissait d’agglomérations de plus de 50 000 habitants, mais on sait que des départements ruraux sont entièrement couverts par des agglomérations au sens de l’INSEE. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Avec cette mesure, vous couvrez presque la totalité du territoire.

Enfin, le groupe socialiste a eu l’honnêteté d’avouer qu’il s’était auto-censuré, et cet amendement a été déposé par le groupe écologiste. Puisque Mme la ministre en a appelé à la sagesse de l’Assemblée, et je l’en remercie, quel troc y a-t-il eu entre le groupe socialiste et le groupe écologiste sur le dos des communes rurales ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Protestations sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)

M. le président. La parole est à M. Paul Molac.

M. Paul Molac. J’ai été surpris par la présentation quelque peu misérabiliste que nous font certains du milieu rural. On avait l’impression d’être avec Cosette ou dans Germinal ! Pour ma part, je suis un élu rural et j’ai toujours vécu en milieu rural. Je n’aime donc pas beaucoup recevoir de leçons en la matière.

Il y a une ville de 9 500 habitants, c’est tout, dans ma circonscription,. Dans les communes rurales qui en font partie, les maires essaient de faire du logement social. Et ils y arrivent. Du reste, j’ai, sur mon bureau, le dossier d’un maire qui me demande une partie de ma réserve parlementaire, précisément pour créer des logements sociaux. Bien évidemment, je l’aiderai.

Ce n’est pas vrai, tous les territoires ruraux ne seront pas touchés. Je suis bien placé pour le savoir, car une ville qui n’est pas située dans ma circonscription aimerait bien compter 50 000 habitants pour pouvoir créer une communauté d’agglomération. Voilà pourquoi je soutiendrai cet amendement. (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à M. Laurent Furst.

M. Laurent Furst. Je rappelle à Mme la ministre que je lui ai posé tout à l’heure une question sur l’évaluation financière des pénalités pour une commune. Je souhaitais savoir si une étude croisée avec les autres mesures qui auront des impacts sur les finances des communes avait été réalisée. Mais nous n’avons pas eu de réponse, pour la simple raison qu’aucune étude et aucune évaluation n’ont été faites. J’ai le sentiment, permettez-moi de le dire, qu’on assiste à du bricolage.

Enfin, il ne faut pas oublier qu’en milieu rural on a souvent beaucoup de mal à trouver des promoteurs pour réaliser de petites opérations car elles sont très difficiles et à gérer et à équilibrer financièrement. Contrairement à ce que certains pourraient penser, il y a des élus qui souhaitent faire du logement social en milieu rural, mais dans le cadre d’une politique sérieuse et évaluée.

M. le président. La parole est à M. Daniel Goldberg.

M. Daniel Goldberg. Je ne reviendrai pas sur les noms d’oiseaux qui ont été lancés par les orateurs de l’opposition.

Vous nous parlez de cohérence. Je vous demande donc de lire la loi telle qu’elle existe aujourd’hui. L’avez-vous lue avant de dire que l’amendement que nous proposent nos collègues du groupe écologiste est mal rédigé ? Car c’est l’exacte rédaction de l’article L. 302-5 du code de la construction, c’est l’exacte rédaction de l’article 55 de la loi SRU, qui existe depuis maintenant depuis plus de dix ans.

Aujourd’hui, nous vous proposons de dire que la crise du logement n’existe pas seulement dans les communes de plus de 3 500 habitants. Dans les communes plus petites, il y a aussi une demande de logements sociaux. Tout à l’heure, vous avez prétendu que c’était une histoire de députés franciliens. Or vous ne savez même pas que ce seuil de 3 500 habitants n’existe pas en Île-de-France ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Vous ne savez même pas que la loi SRU s’applique en Île-de-France aux communes de moins de 3 500 habitants ! Commencez donc par connaître la loi car, en tant que parlementaires, vous en êtes les garants devant vos concitoyens !

La crise du logement existe sur tout le territoire national. Avec cet amendement, que je soutiens, je demande qu’un effort soit fait, y compris dans les petites communes, pour construire du logement social. Mais vous avez peur du logement social (« C’est faux ! » sur les bancs du groupe UMP) et des deux tiers des Français qui pourraient en bénéficier !

Vous ne vous êtes jamais demandé si, y compris dans les petites communes situées hors de l’agglomération francilienne, le fait de produire des logements sociaux pouvait être une réponse pour leur propre développement, et notamment pour le développement de leurs écoles.

M. le président. Monsieur Goldberg, je vous demande de conclure, car beaucoup d’orateurs sont inscrits sur l’amendement.

M. Daniel Goldberg. L’article 10 du projet de loi indique que les communes en décroissance démographique ne seront pas assujetties au seuil de 25 %. Pour ma part, je propose qu’elles ne soient pas assujetties à l’obligation de parvenir, en 2025, au taux de 10 % lorsqu’elles comptent de 1 500 à 3 500 habitants.

M. Julien Aubert. Quelle improvisation !

M. le président. La parole est à M. François de Mazières.

M. François de Mazières. Nous avons eu à débattre ce soir de deux amendements qui témoignent effectivement d’une improvisation incroyable bien qu’ils aient une très grande portée.

Tout à l’heure, nous avons senti votre gêne, madame la ministre, à propos de l’amendement relatif à la suppression d’établissements publics fonciers. Je ne sais pas comment vous allez pouvoir gérer une telle mesure. Soyons raisonnables : les collectivités travaillent avec ces établissements, et des engagements financiers ont été pris. Nous sommes vraiment stupéfaits par une telle improvisation.

La deuxième improvisation est celle à laquelle nous assistons en ce moment. Je suis désolé, mais il faut tout de même un minimum d’étude d’impact ! Vous nous dites en substance : « C’est la loi actuelle. » Non, c’est l’application d’un nouveau dispositif, d’ailleurs assorti de sanctions multipliées par cinq. Ce n’est donc pas du tout la même chose.

Que va-t-il se passer ? Ces petites communes, soudain, vont se retrouver face à des pénalités extrêmement élevées. Et vous allez freiner la construction. Pourquoi ? La commune de 1 400 habitants va bloquer ses programmes. Voilà ce qui va se produire. Par conséquent, étudiez les effets de seuil ! Depuis tout à l’heure, nous vous disons que vous allez introduire des effets de seuil absolument insupportables pour les communes. C’est cela, le changement fondamental que vous apportez dans la loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

M. le président. La parole est à M. Alain Chrétien.

M. Alain Chrétien. Tout à l’heure, je parlais de brutalité. Eh bien, nous sommes en plein dedans. Avec quelle brutalité vous proposez cette disposition, en pleine nuit !

Depuis quatre mois, le Gouvernement ne parle que de concertation, de missions d’information, de réunions, de rapports, etc. Vous avez créé une multitude de comités Théodule afin de ne décider de rien, et voilà qu’aujourd’hui, cette nuit, vous nous imposez cette disposition sans même avoir demandé l’avis de l’AMF, sans même avoir demandé l’avis de l’AMR. Je voudrais bien savoir quelle va être, demain matin, la position de vos amis dans ces deux instances importantes. Pourquoi ne créez-vous pas un énième comité Théodule pour demander leur avis aux élus locaux qui se verront imposer cette disposition ?

Au fond, il y a deux discours. Il y a ce fameux discours qui enfume tout le monde, où il s’agit de créer des commissions qui ne rendront jamais aucun avis. Et puis, il y a, en pleine nuit, des dispositions qui vont s’imposer à tout le monde dès demain matin. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.) Voilà le double langage du Gouvernement ! Voilà la vérité qui doit être dite aux Français, en pleine nuit, à une heure du matin.

Vous devrez rendre compte, demain matin, de cette disposition. Vous jouez avec le feu ! Vous êtes des apprentis sorciers ! Et vous devrez en assumer les conséquences très vite. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

M. le président. La parole est à M. Arnaud Richard.

M. Arnaud Richard. Paris n’est pas la France, et l’Île-de-France n’est pas la France ! Alors, s’il vous plaît, monsieur Goldberg, restez calme quand vous vous adressez à vos collègues, qui ont lu la loi SRU et son article 55 comme vous. Je suis désolé, mais vous avez peut-être été un peu véhément.

Tout à l’heure, nous n’étions pas loin de la concorde sur la question de la relation entre le logement social et l’intercommunalité. Il est dommage de repartir dans une folie comme celle que vous nous proposez à présent.

Comme l’a très bien dit M. Piron, on ne sait pas ce que sont les agglomérations dont parle cet amendement. Ses auteurs pourront peut-être nous expliquer exactement lesquelles sont visées. Il convient de savoir exactement ce que cela incarne dans le paysage français.

Au reste, pourquoi en restez-vous à 10 % ? Allez-y à fond, soyez cohérents, mettez « 20 % » ! Au moins, vous serez cohérents avec vous-mêmes.

M. Benoist Apparu. Et pourquoi pas 25 % ? N’ayons pas peur !

M. Arnaud Richard. Ou même 25 %, en effet.

Je suis très inquiet, madame la ministre, parce que la question du DALO n’est pas du tout évoquée. Le DALO s’appliquera-t-il dans ces communes également ? J’imagine que oui. Le contentieux et la jurisprudence s’y emploieront.

À la rigueur, cette idée pourrait marcher – je suis désolé si mes collègues de l’opposition s’inquiètent de ce que je vais pouvoir dire – si l’on faisait le choix d’appliquer à ces logements l’intermédiation locative. Dans ces cas-là, ce serait certainement assez habile. Cela ne déséquilibrerait pas totalement la production de logements dans ces départements, et cela démontrerait la volonté, soit des populations soit des élus, d’accueillir sur leur territoire des gens un peu plus fragiles.

Je suis quand même frappé qu’à l’avant-veille du congrès de l’USH,…

M. Marcel Rogemont. Il a commencé hier !

M. Arnaud Richard. Merci, cher collègue. Cela veut donc dire que cette disposition, qui occupe quand même une place majeure dans le paysage de la politique du logement en France, a été débattue avec toutes les familles du logement social. Du moins, je l’imagine.

M. Marcel Rogemont. Exactement !

M. le président. La parole est à M. François de Rugy.

M. François de Rugy. Chers collègues, certains ont évoqué l’heure tardive, mais je vois qu’ils sont tout de même bien réveillés. Nous avons un débat, et c’est bien normal : nous sommes des législateurs.

Je veux relever combien était scandaleuse, monsieur Aubert, votre description – et heureusement qu’elle figurera au compte rendu – de la fonction du logement social. Amener des chômeurs dans une commune ! Rendez-vous compte ! Cela ne mérite même pas que l’on s’y attarde.

Monsieur Saddier, vous nous aviez habitués à plus de modération et à plus de justesse dans vos propos. Vous me connaissez, nous étions tous deux députés sous la précédente législature. Franchement, ce que vous avez dit est assez choquant. Vous savez, dans mon groupe, il y a des députés de toutes les régions de France. Je suis moi-même député de province, de la région nantaise, et j’en suis très heureux. Donc, arrêtez de fantasmer sur le fait que nous serions tous des députés d’Île-de-France. Et quand bien même…

Mme Annick Lepetit. Oui, quand bien même !

M. François de Rugy. …des députés d’Île-de-France s’exprimeraient à ce sujet – et certains l’ont fait, y compris dans votre groupe –, ils sont égaux devant le Parlement. Tous les députés, ici, ont le droit de s’exprimer sur tous les sujets, sans restriction. Aucun sujet n’appartient à un député plutôt qu’à un autre. Cela, c’est une question de principe. (Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste et SRC.)

Je voudrais maintenant répondre concrètement à notre collègue qui évoquait le cas d’une commune de 1 500 habitants. Je me suis livré à un rapide calcul. Disons qu’il y a dans cette commune entre 500 et 700 logements. L’objectif à atteindre serait donc compris entre 50 et 70 logements sociaux, en plusieurs années. Et vous croyez que c’est là un objectif totalement hors d’atteinte ? Eh bien, non. Cette disposition est tout à fait concrète et elle répond à des besoins. Les offices publics HLM départementaux sont là pour apporter un appui aux communes qui veulent s’engager. Et je vais tout vous dire :dans mon département de Loire-Atlantique, celui qui m’en a parlé un jour, c’est un sénateur UMP, maire d’une petite commune. Vous le retrouverez facilement, puisqu’il n’y en a plus qu’un, de sénateur UMP. (Sourires.)

C’est une évolution de la loi SRU que nous proposons, et sans précipitation aucune. Car, comme l’a dit Mme la ministre, la loi SRU a mûri pendant dix ans. Son évolution est demandée par des élus et par des citoyens depuis plus d’une dizaine d’années. Nous avons l’occasion de la voter maintenant. Faisons-le ! (Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste et SRC.)

M. le président. La parole est à Mme Annick Lepetit.

Mme Annick Lepetit. D’abord, il est permis de discuter sereinement.

Cela fait plusieurs fois que j’entends nos collègues dire que nous improvisons, que nous débarquons avec un amendement à cette heure-là.

M. Alain Chrétien. Je confirme : ce que vous faites, c’est du bricolage improvisé !

Mme Annick Lepetit. Mais, mes chers collègues, nous avons débattu de ces sujets en commission. Jeudi dernier, toute la journée, de neuf heures et demie du matin à huit heures du soir, nous avons eu l’occasion de débattre aussi de ces amendements-là. Ils ne débarquent pas comme ça ! Ils ont été déposés, et ils sont dans les liasses depuis le début de la discussion générale. Ce n’est donc pas une surprise.

Deuxièmement, ceux qui étaient là sous la précédente législature se souviendront que nous avons aussi eu l’occasion, à la faveur de l’examen de plusieurs propositions de loi, d’aborder ces sujets. Là encore, nous ne débarquons pas en venant de nulle part.

Troisièmement, je suis surprise qu’un certain nombre d’entre vous, qui connaissent bien ces sujets, aient oublié que depuis douze ans, ces deux seuils – 1 500 et 3 500 habitants – s’appliquent déjà pour les communes d’Île-de-France,…

M. Gérald Darmanin. Et alors ?

Mme Annick Lepetit. …la proportion de logements sociaux demandée par la loi pouvant aller jusqu’à 20 %.

Enfin, c’est un objectif de 10 % de logements sociaux, à atteindre d’ici à 2025, que l’amendement fixe à ces communes de 1 500 à 3 500 habitants.

Donc, calmons-nous. Nous ne sommes pas en train de tout révolutionner, bien au contraire. Vous avez tous, nous avons tous parlé de mixité sociale et d’égalité territoriale. Je pense que cet amendement apporte, justement, une plus grande égalité territoriale dans notre pays. Je suis donc surprise que vous ayez une telle réaction.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. J’avais prévu, en tant que rapporteure, de rappeler un certain nombre de choses – mais d’autres l’ont fait avant moi – sur ce que dit aujourd’hui l’article 55 de la loi SRU, et sur ce que dit réellement cet amendement : il vise toutes les communes, hors Île-de-France, qui ne sont pas encore concernées par la loi, et il fixe un taux de 10 % qui ne me paraît pas tout à fait scandaleux. Je vous rappelle l’amendement n° 21 défendu tout à l’heure par l’une de vos collègues, qui elle-même proposait de faire référence à ce seuil de 10 % dans toutes les opérations immobilières privées, quel que soit le nombre d’habitants de la commune concernée.

Toutes ces choses-là ont été dites. Je n’y reviens pas. Je voudrais simplement rassurer l’ensemble des collègues ici présents : votre rapporteure n’est issue ni de Paris ni de la région Île-de-France. Elle est aussi du « vrai pays », monsieur Aubert. M. Darmanin, qui partage avec moi le bonheur d’être élu dans la métropole lilloise, pourra en témoigner. Je pense que le « vrai pays », il est partout. Vous pouvez me faire confiance : cela fait plusieurs jours que je travaille sur ces questions, et la vision qui vous est proposée est bien celle de la République tout entière. Elle ne s’arrête ni aux frontières de Paris, ni à celles de l’Île-de-France. Et comme l’a dit M. de Rugy, tous les députés sont égaux devant le Parlement. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. Je vais maintenant mettre aux voix l’amendement n° 150.

(Il est procédé au scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 146

Nombre de suffrages exprimés 143

Majorité absolue 72

(L’amendement n° 150 est adopté.)

(Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste et SRC.)

M. le président. La parole est à M. Benoist Apparu, pour soutenir l’amendement n° 332.

M. Benoist Apparu. Je vous remercie vivement, monsieur le président, de m’avoir donné la parole sur l’amendement précédent. J’apprécie ce geste de bonne volonté de votre part…

Le présent amendement tend à calculer le taux de la loi SRU dans le cadre de l’intercommunalité, dès lors qu’il existe un PLU intercommunal. Je parle sous le contrôle de M. Piron, avec qui nous avions souhaité et défendu l’intercommunalisation des PLU – mais nous n’avons pas abouti, à l’époque, M. Brottes s’en souviendra.

Nous considérons qu’à partir du moment où, dans certaines collectivités locales, il a été décidé d’adopter le principe du PLU intercommunal, à partir du moment où le PLH est lui-même déjà intercommunal – environ 10 % des collectivités locales sont sous ce régime –, à partir du moment, donc, où l’ensemble des documents d’urbanisme et de planification sont à l’échelle intercommunale, il est essentiel de pouvoir calculer le taux de la loi SRU au niveau intercommunal.

Et ce d’autant plus qu’après l’adoption de cet amendement n° 150 pour le moins bizarroïde et improvisé, c’est maintenant l’ensemble des communes composant une intercommunalité qui seront concernées par l’application, à différents degrés, de la loi SRU.

Je reviens brièvement à l’amendement que vous venez de voter, chers collègues de la majorité. Je passe sur le côté très improvisé de ce texte, sur l’incapacité où vous êtes – où sont, en tout cas, ceux qui l’ont déposé – de nous indiquer combien de communes seraient concernées. Je passe également sur la différence d’appréciation que je crois avoir constatée entre les députés écolos et leur ministre. Encore une fois, semble-t-il, leurs positions divergent, comme sur d’autres sujets.

Je note enfin que, s’agissant d’un texte important, et alors qu’il était possible de trouver un équilibre entre les positions des uns et des autres avec un taux fixé à 25 %, vous êtes en train de rompre cet équilibre de façon totalement improvisée, ce qui est particulièrement regrettable.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. L’avis est défavorable. Nous avons déjà longuement débattu de cette question tout à l’heure, monsieur Apparu, même si vous n’étiez pas physiquement parmi nous. Je ne reviens pas sur les arguments qui ont été mis en avant concernant la mutualisation et l’intercommunalisation. La commission des affaires économiques souhaite maintenir le taux de 25 % à l’échelle des communes.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Tout à l’heure, j’ai longuement échangé avec l’ensemble de votre assemblée, en exprimant la volonté d’imaginer une politique intercommunale du logement avec tous ses outils. Mais la réalité, aujourd’hui, n’est pas celle-là.

M. Benoist Apparu. Je parle des PLUI.

Mme Cécile Duflot, ministre. Oui, monsieur Apparu. C’est ce dont nous avons parlé tout à l’heure. Je ne reprendrai donc pas tous les arguments qui me conduisent à être défavorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Gérald Darmanin.

M. Gérald Darmanin. Je comprends bien les arguments de Mme la rapporteure et de Mme la ministre, mais Benoist Apparu a tout de même soulevé une question importante.

Mme Linkenheld a bien voulu rappeler, et je l’en remercie, que j’étais comme elle un élu de la métropole lilloise. Or je trouve étonnant qu’elle veuille assimiler la réalité de ladite métropole à celle du pays tout entier, surtout quand on rappelle que la présidente de la communauté urbaine, Mme Aubry, que vous connaissez bien, s’évertue à tort ou à raison à imposer à l’échelle intercommunale la construction de logements sociaux.

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. À hauteur de 30 % !

M. Gérald Darmanin. Je constate que Mme la ministre ne m’écoute pas.

M. Marcel Rogemont. Mme la ministre est très attentive !

M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur Darmanin.

M. Gérald Darmanin. La moindre des choses serait tout de même que le Gouvernement écoute la représentation nationale.

M. Marcel Rogemont. La ministre ne vote pas, c’est nous qui votons !

M. Gérald Darmanin. J’entends bien mais c’est la moindre des politesses et vous en serez, j’imagine, d’accord, mon cher collègue. Je suis sûr que vous étiez très vigilant quant à l’attention des ministres UMP lorsque vous étiez dans l’opposition.

M. Marcel Rogemont. Toujours !

M. Gérald Darmanin. Pour en revenir à M. Apparu, ses arguments me paraissent très justes. Je ne pense pas que le débat ait eu lieu à l’occasion de la discussion de l’amendement précédemment voté par la majorité. Je comprends bien la position de Mme la rapporteure. On a maintenu les quotas de logements sociaux à l’échelle communale. Mais, pour reprendre l’explication de M. Apparu et faire écho à M. de Rugy, il n’est pas forcément idiot, si l’on veut vraiment atteindre l’objectif fixé, de raisonner à l’échelle intercommunale plutôt que d’avoir la folie d’imposer un quota de logements sociaux à de petites communes qui n’en ont pas les moyens, qui n’ont pas de promoteurs, qui ne peuvent pas payer les amendes prévues par la loi.

L’amendement de M. Apparu mérite donc mieux que d’être balayé d’un revers de la main par la ministre et la rapporteure.

M. le président. La parole est à M. Alain Chrétien.

M. Alain Chrétien. Cet amendement est très intéressant et nous le soutenons. Madame la ministre, sachez que ce que vous avez imaginé existe déjà. Je suis président d’une agglomération pourvue d’un PLUI, d’un PLH, qui a signé une convention de délégation des aides à la pierre et qui mène une politique du logement.

M. Michel Piron. Très bien !

M. Alain Chrétien. Nous sommes en train de préparer un PLUI conforme aux dispositions du Grenelle de l’environnement. Donc tout ce que vous souhaitez instaurer, je le répète, existe déjà : j’en suis le premier praticien dans mon agglomération de Vezoul et j’en suis très fier.

Vous n’avez rien inventé puisque nous appliquons des dispositions votées par le précédent gouvernement et que nous menons une politique du logement social en pleine concertation avec l’office départemental des HLM, géré par la gauche, et avec lequel nous avons établi une convention de partenariat.

Vous avez fait un rêve, madame la ministre, nous l’avons réalisé et je vous invite à Vezoul pour le constater.

M. le président. La parole est à M. Marcel Rogemont.

M. Marcel Rogemont. Il n’y a pas ici de député de l’Île-de-France ou de Rennes ou de je ne sais où ; nous sommes tous des députés de la République et il serait bon que nous nous le rappelions. Les expériences locales des uns et des autres les regardent. Nous sommes ici, j’y insiste, des députés de la République.

M. Alain Chrétien. Tâchez donc de vous en inspirer !

M. Marcel Rogemont. Cela précisé, je dois bien admettre que je suis très sensible à l’amendement présenté par Benoist Apparu, tant il est vrai que l’avenir de l’urbanisme se situe à l’échelon intercommunal à travers la définition d’un PLUI.

J’ai bien compris, madame la ministre, que nous aurons un prochain rendez-vous avec l’examen d’un autre texte sur le logement. J’attends donc avec impatience le printemps des PLUI.

M. Alain Chrétien. Venez à Vezoul, nous allons vous montrer comment faire !

M. Marcel Rogemont. Chalon-sur-Saône me suffit !

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. L’Assemblée vient de voter un amendement qui a profondément bouleversé le texte ; nous ne parvenons pas à sortir du débat sur les PLUI ; nous sommes en train, manifestement, de déraper. Monsieur le président, il est bientôt une heure et demie du matin.

M. François Pupponi. Nous ne sommes pas fatigués !

M. Martial Saddier. Je souhaite savoir comment vous entendez poursuivre nos travaux.

M. le président. Pour l’instant nous poursuivons nos travaux jusqu’au moment où nous considérerons devoir y mettre un terme.

M. Gérald Darmanin. Voilà qui est très clair…

M. le président. Il n’est pas prévu pour le moment que nous nous arrêtions.

M. Gérald Darmanin. C’est de la navigation à vue !

M. le président. La parole est à M. Yves Jégo.

M. Yves Jégo. Il serait sage de nous arrêter, monsieur le président.

M. François Pupponi. Vous êtes fatigué ?

M. Yves Jégo. Pas du tout, je vous rassure, mais lorsqu’on délibère de façon chaotique on vote de mauvais textes.

M. Gérald Darmanin. C’est exact !

M. Yves Jégo. Alors que nous ne sommes pas très loin d’un consensus sur le niveau d’application des textes, objet de l’amendement que nous sommes en train d’examiner, on nous demande d’attendre le printemps, le printemps des PLUI. « La loi sera formidable, dites-vous, laissez-nous le temps de formater les choses ! ». Et il y a deux minutes, sur un sujet fondamental, vous nous avez expliqué qu’il fallait décider tout de suite, que les communes de 1 500 à 3 500 habitants ne pouvaient pas attendre.

Nous ne sommes plus dans le domaine du raisonnable. Aussi, au nom de mon groupe, je vous demande une suspension de séance afin que nous ayons le temps, tranquillement, de réfléchir. Sur un sujet aussi fondamental, l’Assemblée doit sortir de l’amateurisme dans lequel elle s’est enfermée. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.)

M. Julien Aubert. Exactement !

M. Yves Jégo. Je n’ai jamais vu, en dix ans, sur des sujets aussi importants, qu’on vote ainsi au gré des vents, des humeurs et des atmosphères. Nous devons retrouver un peu de sérénité.

La minorité n’est en rien fatiguée mais a un souci d’apaisement pour voter de bonnes lois, ce qui n’est possible qu’avec l’esprit clair.

M. le président. Je vais faire droit à votre demande, monsieur Jégo, après le vote sur l’amendement.

La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. Puisque M. Darmanin a ouvert une page de publicité locale, je me vois contrainte de préciser qu’au sein de la communauté urbaine de Lille, dont vous avez bien voulu rappeler qu’elle était présidée par Martine Aubry, nous disposons en effet d’un PLU intercommunal, d’un PLH,…

M. Alain Chrétien. C’est obligatoire !

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. …de la délégation des aides à la pierre ; mais vous avez omis de souligner que nous avons imposé l’obligation d’un quota de 30 % de logements sociaux dans toutes les opérations à partir de 17 logements. Et si M. Apparu veut bien reprendre cette disposition,…

M. Benoist Apparu. Ah non !

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. …peut-être trouverons-nous un arrangement.

(L’amendement n° 332 n’est pas adopté.)

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue pour quelques minutes.

(La séance, suspendue le mercredi 26 septembre à une heure vingt-cinq, est reprise à une heure trente.

M. le président. La séance est reprise.

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier, pour un rappel au règlement.

M. Martial Saddier. Mon intervention se fonde sur l’article 58, alinéa 1, et concerne le déroulement de nos travaux.

Encore une fois, très sereinement, je rappelle qu’il est une heure et demie du matin. Si tous les députés sont concernés par le texte, les membres de deux commissions permanentes – celle des affaires économiques et celle du développement durable et de l’aménagement du territoire – sont particulièrement impliqués. Cette dernière réunit son bureau à huit heures demain matin, juste avant une réunion de la commission. Je crois que la commission des affaires économiques a également une réunion. Et, demain après-midi, les deux sont de nouveau sur le feu – si j’ose m’exprimer ainsi – avec l’examen du texte relatif à la tarification progressive de l’énergie.

Nous ne pourrons pas achever cette nuit l’examen des 240 amendements restants. Les députés de tous les bancs font certes preuve de beaucoup de bonne volonté, d’une capacité physique certaine. Reste que, très sincèrement, dans le souci de la sérénité des débats, il conviendrait, monsieur le président, d’envisager de lever la séance.

M. le président. Je vous propose, mes chers collègues, de travailler encore une heure, à savoir jusqu’à deux heures et demie, l’idéal étant d’achever l’examen de l’article 4.

Article 4 (suite)

M. le président. La parole est à M. Benoist Apparu, pour soutenir l’amendement n° 329.

M. Benoist Apparu. Cet amendement vise à abaisser le taux obligatoire de logements sociaux prévu par la loi SRU – et j’imagine l’accueil qui lui sera réservé – de 20 à 15 % dans des cas particuliers, évidemment.

L’idée est la suivante : si j’en crois le texte que nous présente aujourd’hui Mme la ministre, le taux de 20 % sera maintenu dans les communes dont on considère qu’elles n’ont pas besoin de logements sociaux supplémentaires. Vous entendez par là, je pense, que les communes sur lesquelles s’exerce une faible tension n’auront pas l’obligation d’atteindre le taux de 25 %.

Je vous propose d’aller plus loin. Il existe aujourd’hui, sur notre territoire, des communes qui, avec un taux de logements sociaux de l’ordre de 12 ou 13 % seulement, sont déjà en situation de surcapacité, parce qu’il n’y a pas, chez elles, de différence importante entre les loyers du secteur privé et ceux du logement social. Dans ces communes, il me semblerait logique d’abaisser le seuil à 15 %.

Faisons du logement social là où c’est nécessaire, c’est-à-dire là où il existe une différence importante entre les loyers du privé et les loyers sociaux. Là où ces loyers sont les mêmes, continuer à construire du logement social revient à gaspiller l’argent public.

Plusieurs députés du groupe SRC. Mais non !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. C’est une déception, pour la commission, de constater que c’est vous, M. Apparu, qui proposez d’aller en deçà du seuil de 20 %, désormais considéré comme historique. Un beau débat a eu lieu l’année dernière, à l’occasion du dixième anniversaire de la loi, au cours duquel nous avions pu constater que les tensions s’étaient apaisées et qu’une majorité approuvait cette loi.

En même temps qu’elle exprime sa déception, la commission émet un avis défavorable.

M. Benoist Apparu. Mais pourquoi maintenir un tel taux, là où ce n’est pas nécessaire ?

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Avec ce projet de loi, nous faisons un pas en avant, et non un pas en arrière : ce texte permet d’aller plus loin dans l’ensemble des communes, sauf dans celles où la construction de logements supplémentaires n’est pas nécessaire.

Par ailleurs, d’une manière plus générale, on peut estimer qu’un taux de 20 % de logement social est un bon seuil de mixité sociale.

L’avis du Gouvernement est donc défavorable.

M. le président. La parole est à M. Yves Jégo.

M. Yves Jégo. Permettez-moi de m’étonner de ce que j’entends. Il existe désormais une jurisprudence : celle de l’amendement adopté à une heure moins le quart, qui a introduit un seuil différent. (Sourires et applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Pourquoi, à présent, l’idée d’introduire un seuil différent est-elle considérée comme aberrante ? Les choses ont changé à une heure moins le quart : depuis lors, la fixation d’un seuil à 10 % ne doit plus être considérée comme attentatoire au bon sens que vous voulez défendre et au patrimoine commun que vous évoquiez, madame la ministre ! Pourquoi ce qui était vrai à une heure moins le quart ne le serait-il plus à une heure et demie ? Est-ce parce que c’est l’opposition qui, à présent, est à l’origine de la proposition ?

M. Benoist Apparu. Cette fois, c’est un amendement de l’UMP !

M. Yves Jégo. En adoptant cet amendement funeste, qui, j’en suis certain, va bientôt disparaître, vous êtes entrés dans une nouvelle logique, et la proposition de notre collègue mérite, par conséquent, d’être examinée. Je voterai en faveur de cet amendement, pour la simple raison que vous lui avez ouvert la porte en votant tout à l’heure un taux de 10 %.

M. le président. La parole est à M. Benoist Apparu.

M. Benoist Apparu. Je tiens à préciser, madame la rapporteure, que je n’ai pas proposé de baisser le taux de 20 à 15 % sur l’ensemble du territoire et dans l’ensemble des communes. Je dis simplement qu’il faut faire du logement social là où c’est nécessaire. Nous sommes quelques-uns, sur les bancs de la droite, à accepter l’idée d’un taux à 25 % dans les communes où l’écart entre les loyers du secteur privé et ceux des logements sociaux est tel qu’il rend nécessaire la construction de nouveaux logements sociaux.

C’est le cas à Paris et dans certaines communes d’Île-de-France : lorsque le prix du mètre carré est de 25 euros dans le secteur privé, contre 5 à 12 euros dans le logement social, il est logique de produire plus de logements sociaux, afin que les familles aux revenus modestes ou moyens puissent se loger. En revanche, dans des communes de l’Allier ou de l’Aveyron, en Champagne-Ardenne ou en Picardie, dans des zones où il existe déjà 13 à 14 % de logement social, où le taux de vacance est important et où la croissance démographique est atone, pourquoi faudrait-il produire du logement social ?

Vous allez obliger toutes les communes à atteindre le seuil des 20 %, alors que le territoire n’a pas uniformément besoin de logements sociaux. Le logement social, je le répète, a pour vocation de permettre à ceux qui n’ont pas les moyens de se loger dans le privé de le faire dans le social : ce n’est pas indispensable dans toutes les communes de France.

M. le président. La parole est à M. Alain Chrétien.

M. Alain Chrétien. La proposition de M. Apparu est dictée par un souci de pragmatisme, alors que, de votre côté, vous ne nous avez opposé, depuis le début de l’examen de ce projet de loi, que de l’idéologie et de la politique.

Il y a un élément très important, dans la politique du logement, que vous n’évoquez jamais : le taux de vacance. Outre la vacance structurelle, liée au passage des appartements d’un locataire à un autre, il existe également une tendance lourde dans les agglomérations rurales, où le taux peut atteindre 10 à 15 %. Pourquoi obliger des agglomérations qui ont déjà un taux de vacance de 15 % à atteindre le seuil de 20 % de logements sociaux ?

Soyez réalistes et admettez que certaines zones n’ont pas besoin de logements sociaux supplémentaires. Nous ne les repoussons pas par idéologie : nous faisons simplement le constat qu’il n’existe pas partout des besoins avérés. Nous opposons à votre idéologie un pragmatisme de bon sens qui n’a rien à voir avec la vision manichéenne que vous essayez d’imposer depuis quelques heures, selon laquelle la gauche serait du côté des pauvres et des HLM, et la droite du côté des riches et des villas sur la Côte d’Azur. C’est là une vision très simpliste, et l’opinion publique n’est pas dupe.

(L'amendement n° 329 n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Fromantin, pour soutenir l'amendement n° 317.

M. Jean-Christophe Fromantin. L’idée qui sous-tend cet amendement est assez simple et répond également à un souci de pragmatisme.

Les villes carencées qui refusent de construire des logements sociaux peuvent être contraintes par l’État de participer financièrement à hauteur de 13 000 euros par logement. Or, les villes qui font preuve de bonne foi et qui développent volontairement le logement social peuvent débourser jusqu’à quatre fois cette somme pour chaque logement.

M. Henri Jibrayel. À Neuilly !

M. Jean-Christophe Fromantin. Oui, à Neuilly, par exemple : je vous remercie de le rappeler. Certaines villes dépensent ainsi volontairement beaucoup plus que ce qui leur serait imposé par l’État si elles faisaient preuve de mauvaise volonté. Je propose donc, par cet amendement, que les villes qui dépensent trois à quatre fois plus que les 13 000 euros imposés par l’État, puissent se contenter d’un taux de 20 % de logements sociaux, étant donné qu’elles font preuve d’une bonne volonté manifeste et d’un engagement réel en faveur du logement social.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. La commission a émis un avis défavorable, considérant que le taux de logements sociaux, compris entre 20 et 25 %, doit être fixé, non pas en fonction des capacités financières des communes concernées, mais en fonction des besoins de la population.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Il est nécessaire que le dispositif de la loi SRU conserve une parfaite lisibilité. Pour cette raison, je suis favorable au maintien d’une règle simple, dans le respect, cela va de soi, de la liberté et des choix des parlementaires.

Le Gouvernement émet un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Fromantin.

M. Jean-Christophe Fromantin. Je veux insister sur les incohérences de ce texte : il est plus intéressant, pour une commune, de rester inactive et de laisser l’État lui imposer une dépense de 13 000 euros, que de débourser trois ou quatre fois plus d’argent pour créer volontairement des logements. Il manque, dans ce dispositif, des mesures incitatives. Dans ma commune, je finance chaque logement à hauteur de 50 000 euros ; si je ne fais rien, l’État peut me contraindre, au maximum, à payer 13 000 euros. Pourquoi dépenserais-je davantage ?

(L'amendement n° 317 n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Benoist Apparu, pour soutenir l'amendement n° 327.

M. Benoist Apparu. En France, chaque nouvelle loi relative au logement introduit un nouveau zonage : il existe le zonage propre aux APL, le zonage lié au logement social, le zonage Scellier…

M. Jean-Luc Laurent. Et le zonage Apparu ?

M. Benoist Apparu. Ce texte de loi en crée encore un nouveau : il s’agit au moins du quatrième, et quatre zonages, ce sont trois de trop. Peut-être conviendrait-il, par conséquent, de simplifier les choses et d’adopter un zonage unique, suffisamment bien fait pour prendre en compte l’ensemble des différences territoriales. Je propose donc d’harmoniser les périmètres existants, en prenant pour référence le zonage Scellier, qui, si ma mémoire est bonne, est révisé tous les trois ans, et devrait l’être en 2012.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. La commission est évidemment sensible à toutes les propositions visant à une simplification. Néanmoins, elle a émis un avis défavorable car, pour des raisons propres à cet amendement, mais aussi pour beaucoup d’autres raisons, il ne lui a pas semblé que le zonage Scellier devait être choisi comme référence.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Les propositions de M. Apparu peuvent s’entendre, mais ce ne sont pas celles que le Gouvernement a retenues. L’avis du Gouvernement est défavorable.

(L'amendement n° 327 n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Benoist Apparu, pour soutenir l'amendement n° 454 rectifié.

M. Benoist Apparu. Je reviens à la nécessité de produire du logement social là où c’est nécessaire.

Aujourd’hui sont exemptées de la loi SRU les communes dont le taux de croissance démographique est négatif. Ce critère me paraît trop restrictif et je suggère d’exempter également les communes dont la croissance démographique est inférieure à la moyenne.

Pourquoi une telle proposition ? Produire du logement social est une nécessité pour notre pays, et particulièrement dans les territoires sous tension. Or, le système, tel qu’il existe, nous pousse à construire des logements sociaux à peu près partout, sauf là où ce serait nécessaire. Permettez-moi, madame la ministre, puisque je vous vois faire la moue, de vous rappeler quelques chiffres : en 2009, les trois quarts des logements sociaux voyaient le jour dans des zones moyennement ou faiblement tendues. Cela signifie que les zones où le manque de logements sociaux se faisait particulièrement sentir n’en accueillaient que 25 %.

Ce taux est aujourd’hui de 38 %, et il faut bien évidemment poursuivre notre effort. Cependant, en abaissant, comme vous voulez le faire, le seuil de population aux communes de 1 500 habitants, en maintenant un financement constant, et en contraignant toutes les communes à atteindre un taux de 25 %, le résultat que vous obtiendrez est évident : vous verrez, madame la ministre, le taux de logement social produit en zone A chuter l’année prochaine.

En imposant de nombreuses contraintes à des communes qui n’étaient pas concernées jusqu’à aujourd’hui, vous produirez moins de logements sociaux là où ils seraient nécessaires. Pour cette raison, je vous suggère de réserver l’essentiel du logement social aux zones A et B1 dans les collectivités locales où nous avons besoin d’en produire. Si vous élargissez le périmètre, vous obtiendrez l’effet inverse : on continuera à produire du logement social à Châlons-en-Champagne ou à Amiens, c’est-à-dire dans des collectivités locales qui n’en ont pas besoin et où nous avons d’ores et déjà des taux de vacance de l’ordre de 10 %. Dans ma commune, le délai d’attente pour obtenir un logement social est de quatre mois seulement, et vous voulez continuer à y construire des logements sociaux ? C’est une stratégie dont le sens m’échappe.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. La commission a émis un avis défavorable. J’attire par ailleurs votre attention sur le fait que l’exposé sommaire de l’amendement propose, dans ces communes, un retour au taux de 15 %, mesure contre laquelle nous nous sommes déjà exprimés.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. C’est fort habilement que M. Apparu évoque la commune de Châlons-en-Champagne, qu’il connaît bien et qui est chère à son cœur. Il est naturel que le délai d’attribution d’un logement social y soit très bref, puisque, si mes chiffres sont exacts, Châlons possède…

M. Benoist Apparu. 42% de logements sociaux.

Mme Cécile Duflot, ministre… 48,5 % d’après mes documents. Il va de soi qu’une ville comme Châlons n’est absolument pas concernée par ce projet de loi, puisqu’elle se situe déjà bien au-delà du taux de 25 %.

Je crois vraiment que le principe de mixité est essentiel et que les dispositions qui permettent d’exonérer certaines communes de l’objectif obligatoire de 25 % ont été incluses dans la loi – ce qui n’était pas l’esprit initial du texte. Ces dispositions existent et elles me paraissent suffisantes à ce stade. Pour cette raison, je suis défavorable à votre amendement.

(L'amendement n° 454 rectifié n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Fromantin, pour soutenir l’amendement n° 104.

M. Jean-Christophe Fromantin. Cet amendement a pour objet de cadrer un débat qui repose sur beaucoup d’éléments assez subjectifs.

Quand le constat de carence est fait, à l’issue des périodes triennales, c’est le préfet, représentant de l’État, qui essaie d’évaluer objectivement la situation des communes et autorise la saisine de la Commission nationale du logement.

Nous gagnerions à préciser les moyens de faire ce constat de manière objective, en créant un indicateur qui s’appliquerait à tous et permettrait de mesurer la réelle capacité d’une commune à construire plus ou moins vite. C’est ce que j’ai appelé dans l’amendement un indice de potentiel foncier.

Cet indicateur pourrait être organisé autour de quatre éléments. Le premier serait le foncier disponible, incluant celui que l’État met à disposition de la commune. Le deuxième serait le taux de renouvellement du bâti : dans certaines communes, dont la mienne, il est de 0,004 %, ce qui constitue un indicateur intéressant des difficultés existantes. Le troisième serait le taux de préemption du bâti : dans beaucoup de communes carencées les préemptions ne peuvent pas se faire car l’État ne peut pas les exercer ee égard à la valeur des biens. Enfin, le quatrième élément qui entrerait dans cet indice serait la valeur moyenne du foncier.

Je pense que, pour la sérénité du débat et des conditions d’application de la loi SRU, disposer d’un indicateur objectif de mesure du potentiel foncier serait bénéfique, et l’appréciation de la bonne ou de la mauvaise volonté des villes en serait simplifiée.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. La commission a émis un avis défavorable, tout comme elle l’a fait sur l’amendement précédent qui portait sur la valeur foncière, tout comme elle l’a fait sur les amendements à venir. Bien que rédigés de manière parfois différente, ils reviennent tous à l’idée de rajouter des cas d’exemption à ceux déjà prévus, que la commission a jugés tout à fait équilibrés.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Je voudrais dire avec beaucoup de gentillesse à M. Fromantin que les communes qui sont dans les situations les plus difficiles pour construire du logement social sont celles qui en ont le moins construit pendant le plus longtemps. Ceci pouvant expliquer cela.

M. Michel Piron. C’est le poids de l’histoire !

Mme Cécile Duflot, ministre. Au motif que ces communes n’ont pas construit de logements sociaux depuis des années, et que c’est donc aujourd’hui plus difficile, elles bénéficieraient de plus de souplesse et de largesses ? Ce ne serait pas d’une grande justice à l’égard de celles qui ont fait davantage d’efforts. Je le dis sans intention polémique, et le lien peut être fait avec la situation que nous évoquions, celle des communes qui, du fait d’un changement d’élus, changent de politique à l’égard du respect de la loi SRU.

Demeure une appréciation dynamique, au regard de la réalité de la situation, qui est laissée aux préfets pour pouvoir dispenser les communes du paiement des pénalités, que nous avons effectivement pour objectif de quintupler.

La souplesse existe donc toujours pour juger de la bonne foi, mais elle n’exonère pas par principe ceux et celles qui sont les causes de l’adoption de cette loi, il y a dix ans de cela.

M. le président. La parole est à M. Yves Jégo.

M. Yves Jégo. Madame la ministre, c’est le maire d’une commune qui a fait beaucoup d’efforts pour le logement social, que vous connaissez bien et qui est chère à votre cœur comme au mien, qui vous parle.

Si vous rejetez l’amendement, ne rejetez pas pour autant l’idée de l’indice de potentiel foncier. Certes, nous pouvons laisser l’appréciation de la bonne foi aux préfets. Mais la fonder sur un indicateur équilibré et cohérent serait sans doute mieux que des appréciations préfectorales qui peuvent varier selon les époques, les régions ou les gouvernements en place.

Construire un outil permettant de mesurer de la façon la plus pragmatique et transparente possible les difficultés d’une commune pour construire du logement social me semble une bonne piste. Ne pouvez-vous pas accepter la création d’un groupe de travail qui nous permettrait, dans la perspective de la loi à venir au mois d’avril, d’essayer de créer un indicateur partagé par tous et qui évite les contestations ? Vous avez parlé de l’appréciation des préfets, mais elle est sujette à bien des discussions et des polémiques.

J’attire vraiment votre attention sur cette proposition, et je vous tends la main pour que ce groupe de travail puisse essayer de bâtir l’indicateur qui nous manque.

M. le président. La parole est à M. Gérald Darmanin.

M. Gérald Darmanin. Je pense que je réutiliserai l’argumentaire que vient de nous donner Mme la ministre à propos d’autres sujets. J’entends dire que les cabinets ministériels préparent une mesure dans la loi de finances s’agissant des dotations aux collectivités locales, afin que les communes les plus vertueuses, qui sont les moins endettées, reçoivent moins de dotations de l’État que celles qui ont fait moins d’efforts. J’utiliserai alors à nouveau l’argument de la vertu : ceux qui ont fait plus d’efforts ne doivent pas être désavantagés par rapport à ceux qui n’en ont pas fait. C’est un argument qui me semble intéressant de la part d’un Gouvernement socialiste et vert.

En deuxième lieu, je note que tout le monde fait ici état de ses capacités d’élu local, à l’écoute du territoire. Je me dis que nos débats seraient bien différents si vous imposiez le non-cumul des mandats, et si nous n’avions ici que des élus hors sol qui ne pourraient pas témoigner de ce qu’ils vivent en tant que maires.

M. Julien Aubert. Très bien !

M. Gérald Darmanin. Cela vous priverait d’ailleurs d’un argument très fort : vous ne pourriez pas dire à M. Fromantin, maire de Neuilly-sur-Seine, que sa commune n’a pas fait suffisamment d’efforts auparavant. Cela me semble un argument étonnant de la part de quelqu’un qui défend le non-cumul des mandats.

En troisième lieu, et j’en finirai ainsi car il est tard et la sagesse voudrait que nous arrêtions maintenant nos débats, vous ne répondez pas sur le fond à la question de M. Fromantin.

M. le président. La parole est à M. François de Mazières.

M. François de Mazières. Pour appuyer l’intervention de M. Jégo, je comprends que vous n’acceptiez pas l’amendement liant l’indice de potentiel foncier aux 25 %, mais il n’en demeure pas moins que l’indice de potentiel foncier est un instrument utile.

L’article 1er A de ce projet de loi, que notre assemblée a adopté, dispose : « Le Gouvernement remet au Parlement, dans les douze mois suivant la promulgation de la présente loi, un rapport sur les caractéristiques que pourrait revêtir un mécanisme d’encadrement de la définition de la valeur foncière fondé sur des indicateurs concrets et adossé à l’évolution de l’indice de la construction. » Cela correspond exactement à la définition d’un indice de potentiel foncier.

Vous avez donc proposé à l’article 1er A de nous doter d’outils utiles ; l’indice de potentiel foncier en fait partie, et je crois qu’il serait intéressant que vous l’intégriez à votre réflexion, même déconnecté de la proposition de M. Fromantin.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Cécile Duflot, ministre. Effectivement monsieur Jégo, la commune qui est chère à votre cœur et au mien a connu une autre époque, durant laquelle on construisait des milliers de logements sociaux simultanément au même endroit, sans même demander l’avis du maire. Le sens de cette loi est justement d’éviter de reproduire ce qui s’est passé alors. Il fallait loger les gens, et la construction de ces immenses quartiers a été décidée de manière autoritaire. Solidifier et renforcer la loi SRU permettra d’éviter de reproduire de telles erreurs.

Messieurs de Mazières et Fromantin, vous avez raison, la question du potentiel foncier est une réalité. Il est évident que dans les communes saturées par les contraintes d’urbanisme, la situation est différente de celle des communes disposant d’un foncier constructible énorme. Vouloir construire dans un cas ou dans l’autre n’est pas la même chose, et la bonne foi doit se juger de manière différente. Je tiens donc à vous rassurer : dans la circulaire que j’adresserai aux préfets pour l’évaluation de la bonne foi des élus et l’appréciation de la possibilité de ne pas appliquer les pénalités, ce sera pris en compte.

D’ailleurs, afin de démontrer à quel point je suis sensible à la bonne foi et à l’engagement des élus qui se trouvent dans des situations plus difficiles, j’ai donné un avis favorable à un amendement que le Sénat a adopté permettant aux communes de déduire de leurs prélèvements pendant deux années successives les investissements contractés au cours d’une seule année. Cet amendement était proposé par un sénateur UMP, si je me souviens bien.

M. Henri Plagnol. C’est vrai.

Mme Cécile Duflot, ministre. Enfin sur la question du cumul des mandats, il se trouve que les mandats ne s’exercent pas forcément de façon simultanée. On peut avoir été un élu local, j’ai moi-même été maire adjointe à l’urbanisme, et ensuite décider de ne pas cumuler ce mandat avec d’autres fonctions.

Par ailleurs, je pense que l’on peut siéger à l’Assemblée nationale en étant pleinement disponible pour se préoccuper de l’avenir et des lois de notre pays, tout en étant ancré sur son territoire et en connaissant très bien le terrain. Il n’est pas forcément nécessaire d’être maire pour bien connaître la réalité d’un territoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste et du groupe SRC.)

(L'amendement n° 104 n'est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 103, présenté par M. Jean-Christophe Fromantin, est défendu.

(L'amendement n° 103, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Fromantin, pour soutenir l'amendement n° 105.

M. Jean-Christophe Fromantin. Là encore, l’idée est de créer des indicateurs de la bonne foi des maires. Deux sont proposés par cet amendement.

On peut avancer les arguments de l’équité ou de l’égalité, il reste que l’histoire qui a abouti à la réalisation de logements sociaux ou à leur absence varie selon les communes. Cet amendement propose de prendre en compte le foncier mis à disposition par l’État et les dépenses déductibles excédentaires, qui constituent aussi un outil permettant de montrer combien de logements sociaux les communes peuvent subventionner.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. Puisque l’idée est à peu près la même, l’avis de la commission est le même : défavorable.

(L'amendement n° 105, repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Fromantin, pour soutenir l'amendement n° 106.

M. Jean-Christophe Fromantin. Cet amendement propose de reprendre la règle des trois tiers, c’est-à-dire de prendre en compte le cas des communes qui sont au-delà de 30 % de logements sociaux dans la production globale de logements sur la période triennale, et de reconnaître que cet effort est un gage de bonne foi permettant de pondérer les objectifs.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. La commission se réjouit d’entendre que l’on parle déjà de la règle des trois tiers, y compris sur les bancs de l’opposition, puisque, avant de devenir une règle, il s’agissait pour nous d’un engagement présidentiel. Je constate que c’est maintenant également une règle pour les députés de l’opposition, et je pense que cela augure bien de l’avenir. Néanmoins, l’avis de la commission est défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Monsieur Fromantin, la proportion de logements locatifs sociaux dans la construction de logements est un signe majeur de la bonne foi des élus concernés par l’application de la loi, et je me propose donc de reprendre cet indicateur dans la circulaire qui permettra l’analyse au cas par cas des situations par les préfets. L’avis du Gouvernement est néanmoins défavorable.

M. le président. La parole est à M. Yves Jégo.

M. Yves Jégo. Madame la ministre, vous nous annoncez l’encadrement des décisions des préfets par voie réglementaire, mais ne serait-il pas possible de mettre en place un groupe de travail qui participerait à quelques réunions dans votre ministère, réunissant des représentants de toutes les sensibilités de cette assemblée ? Ce groupe pourrait essayer de faire en sorte que le décret que vous allez publier soit cohérent et reprenne l’ensemble de nos attentes. Il s’agit de sujets majeurs, sur lesquels il est possible de trouver des consensus et qui méritent un travail en commun.

Je vous demande vraiment d’accepter un travail en partenariat sur ce décret qui précisera les conditions de détection ou d’évaluation de la bonne foi des maires pour les exempter de sanctions.

Vous ne pouvez pas refuser cette perspective : la coproduction entre le Parlement, en charge de la loi, et le Gouvernement, en charge de l’aspect réglementaire, va dans le bon sens. Depuis le début de l’examen de ce texte, j’ai le sentiment que les propositions de l’opposition ont été systématiquement balayées, chacun s’est enfermé dans un débat politique, mais je ne crois pas que cela doive déboucher sur une loi politicienne. Nous n’avons pas été capables ensemble – et nous portons peut-être notre part de responsabilité en tant qu’opposants – de trouver des points de convergence.

L’occasion se présente à ce sujet, et j’aimerais que vous acceptiez que des parlementaires issus de chaque groupe puissent travailler avec vos services et donner leur sentiment sur le décret que vous allez publier. Cela me semblerait sage et bienvenu.

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. Concernant la circulaire, car, si j’ai bien compris, il s’agit d’une circulaire et non d’un décret…

Madame la ministre, si vous continuez à vous entretenir avec les membres de votre cabinet plutôt que de m’écouter, je vais bouder !

Mme Cécile Duflot, ministre. Je vais continuer, alors : vous êtes trop mignon ! (Sourires.)

M. Martial Saddier. Merci. Je disais qu’il s’agissait d’une circulaire plutôt que d’un décret. Pouvons-nous avoir votre engagement qu’au-delà des parlementaires, les grandes associations d’élus pourraient être associées à l’écriture de cette circulaire ?

Mme Cécile Duflot, ministre. J’ai une grande expérience du débat participatif à 120 : ce n’est donc pas quelque chose qui m’effraie. Au contraire, ce serait un plaisir ! Cependant je pense qu’il convient de limiter l’exercice à quelques participants.

Vous boudiez, monsieur Saddier, parce que j’échangeais avec le directeur adjoint de mon cabinet, qui me rappelait qu’il est contraire à la Constitution de soumettre une circulaire aux parlementaires. Mais nous effectuerons un travail convivial et chaleureux sous les boiseries de l’Hôtel de Castries pour échanger avec des interlocuteurs constructifs qui admettront que ces discussions ne constitueront pas une échappatoire après le vote de la loi.

Dans ce cadre, je suis donc très favorable à votre proposition. Pour autant, je ne suis pas sûre qu’il soit opportun de multiplier le nombre d’associations d’élus invitées…

Mme Marie-Christine Dalloz. L’AMF est généraliste !

Mme Cécile Duflot, ministre. En échange, vous pourriez retirer votre amendement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Noël Carpentier.

M. Jean-Noël Carpentier. Je me satisfais des annonces de Mme la ministre. Discuter ensemble permettra peut-être, en effet, de réaménager certaines dispositions que plusieurs maires ont relevées. Cependant, il est essentiel que la loi ne soit pas dénaturée par ce décret : c’est bien ce que vous proposez, madame la ministre !

Quant à moi, j’avais déposé un amendement n° 31 qui devrait arriver très tard dans la discussion. Je le retire, puisque la circulaire annoncée par Mme la ministre me comble de joie. (« Oh ! » sur les bancs du groupe SRC.)

M. Alain Chrétien. Il est temps que cela s’arrête ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. Gérald Darmanin.

M. Gérald Darmanin. Madame la ministre, je tiens à rassurer le directeur-adjoint de votre cabinet qui a eu bien raison de vous faire cette remarque. Cependant, ce que dit M. Jégo concernant la circulaire me paraît très important. Je pense que les débats parlementaires éclaireront les décisions des préfets et les délibérations des tribunaux administratifs le cas échéant. Malheureusement, votre circulaire n’est qu’une promesse non inscrite dans la loi ; et vous savez très bien que le Conseil d’État considère qu’une circulaire n’est pas opposable si elle n’est pas prévue par une loi qui en précise l’esprit.

Il est vraiment très désagréable de parler sans être entendu… (« Oh ! » sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. Monsieur Darmanin, s’il-vous-plaît !

M. Gérald Darmanin. Si vous le souhaitez, nous pouvons demander une suspension de séance. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. Monsieur Darmanin, vous avez la parole : exprimez-vous !

M. Gérald Darmanin. Madame la ministre, pouvez-vous préciser devant l’Assemblée ce que vous avez dit à M. Fromantin lorsqu’il a défendu son amendement, c’est-à-dire que votre circulaire prévoira que les préfets puissent juger au cas par cas, dans l’esprit de cet amendement ? Je ne sais pas s’il souhaite le retirer devant vos assurances. Cependant, à défaut de soumettre la circulaire aux parlementaires, cette précision devrait faire plaisir aux élus le jour où ils auront un problème avec l’autorité préfectorale, ce qui peut arriver de temps en temps.

(L’amendement n° 106 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Arnaud Richard, pour soutenir l’amendement n° 121.

M. Arnaud Richard. Le sujet de la richesse des communes et de leurs populations est rarement évoqué dans le cadre de la loi SRU. Pour des raisons historiques diverses et variées, certaines communes peuvent avoir un revenu moyen par habitant inférieur ou très inférieur à la strate régionale, sans pour autant s’approcher du taux de 20 %, alors même que leur mixité sociale ne peut être remise en cause. Cet amendement conserve néanmoins le taux de 20 % pour les petites communes, mais les exempte du taux de 25 %.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. La commission émet un avis défavorable, au nom de la future règle des trois tiers, car il n’est pas souhaitable de concentrer les populations les plus défavorisées aux mêmes endroits. Néanmoins, je pense que les populations ayant des revenus inférieurs à la moyenne verraient d’un œil très favorable la possibilité de bénéficier du logement social, et donc de loyers modérés, plutôt que de rester dans le parc privé où elles doivent payer un loyer relativement important.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Cette question a été évoquée lors de la discussion générale, où il a été affirmé que ce sont les revenus des personnes qui importent, quelle que soit la qualité du logement occupé. Je suis en désaccord avec cette opinion : on constate tous les jours qu’il est possible de loger des personnes aux revenus très faibles dans des logements qui leur coûtent parfois 50 ou 55 % de leurs ressources mensuelles. C’est donc la qualité d’un parc et la modestie de ses loyers qui sont importantes pour la mixité, et non la qualité des personnes qui peuvent être logées dans de très mauvaises conditions avec des revenus faibles. C’est pourquoi je suis réellement défavorable à votre amendement.

(L’amendement n° 121 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Arnaud Richard, pour soutenir l’amendement n° 122.

M. Arnaud Richard. Avec cet amendement, je contenterai peut-être certains de nos collègues du groupe écologiste. Il existe des communes dont la population s’est accrue, mais qui n’appartiennent pas à des agglomérations de plus de 50 000 habitants : on pourrait imaginer les faire entrer dans ce dispositif. Chers collègues de la majorité, vous ne pouvez pas ne pas voter cet amendement !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. On observe une convergence entre cet amendement et certains amendements précédents. Néanmoins, il me semble qu’il n’intègre aucun seuil relatif au nombre d’habitants : tel qu’il est rédigé, il s’appliquerait donc à partir de zéro habitant, ce qui ne respecte pas tout à fait l’esprit de nos échanges. À moins que je n’aie mal compris, j’émets donc un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. J’ai la même lecture que Mme la rapporteure : aucun seuil de population n’est précisé dans l’amendement. Il s’agit peut-être d’une maladresse de rédaction, monsieur Richard ? Pouvez-vous préciser ?

M. Arnaud Richard. Mon collègue Yves Jégo va le sous-amender.

M. le président. La parole est à M. Yves Jégo.

M. Yves Jégo. Je propose un sous-amendement précisant que ce dispositif s’applique dans les communes de plus de 3 500 habitants.

M. le président. Nous ne rédigerons pas de sous-amendement par écrit.

Madame la rapporteure, quel est votre avis sur cette proposition ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. La commission a réfléchi, pour ne pas dire débattu, à ce sujet.

M. Arnaud Richard. Nous voilà rassurés !

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. En effet, certains députés envisagent parfois de déposer des amendements qui, pour des raisons qui nous échappent, n’arrivent pas en commission. Sans doute comprendrez-vous à quoi je veux faire allusion.

Certains membres de la commission ont donc réfléchi à cette idée intéressante. La situation du logement peut en effet être considérée comme tendue dans des villes qui ne sont pas pour autant inscrites dans une agglomération telle que définie par la loi SRU, c’est-à-dire comptant plus de 50 000 habitants avec une ville centre de plus de 15 000 habitants.

Nous n’avons pas eu l’occasion d’aller plus loin dans cette réflexion, mais elle a abouti plutôt favorablement. Notre idée consistait plutôt à fixer le seuil à 25 %, avec des exemptions à 20 % telles qu’elles sont prévues pour les autres communes. Cependant, puisque votre amendement nous permet de contourner les obstacles auxquels nous nous étions heurtés, je propose d’émettre un avis favorable à son adoption tel qu’il vient d’être rectifié. (« Oh ! » sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Voilà la bonne nouvelle de deux heures du matin, après un sous-amendement oral de M. Jégo et l’avis favorable de la rapporteure…

M. Alain Chrétien. Cela va faire jurisprudence !

Mme Cécile Duflot, ministre. Tout le monde conviendra qu’il est possible de sous-amender oralement, dans le cadre d’une jurisprudence commune à tous nos débats !

L’avis du Gouvernement est favorable.

M. le président. Sous réserve, madame la ministre, que M. Jégo nous indique à quel endroit il convient d’insérer les quelques mots qu’il vient de prononcer.

M. Alain Chrétien. C’est de l’équilibrisme !

M. Yves Jégo. Le début de l’amendement serait ainsi rédigé : « Ce taux est fixé à 20 % pour les communes de plus de 3 500 habitants dont le nombre d’habitants », etc.

M. le président. Je considère donc que l’amendement n° 122 est ainsi rectifié.

(L’amendement n° 122 rectifié est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Arnaud Richard, pour soutenir l'amendement n°123.

M. Arnaud Richard. Madame la ministre, c’est votre dernière chance d’assumer le fait que vous êtes ministre du logement mais aussi de l’urbanisme ! Il est dommage que nous n’ayons pas eu le réflexe de demander un scrutin public tout à l’heure, car nous regrettons votre refus d’appliquer le taux de 25 % aux agglomérations ayant un PLU intercommunal. Mais saisissez cette dernière chance…

M. Michel Piron. Non ! Il y en aura encore une après !

M. Arnaud Richard. …d’assumer vos deux casquettes !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. J’ai déjà donné une longue réponse à cette question, et même répété cette réponse pour les députés dont le dîner s’est terminé après la reprise de la séance.

M. Benoist Apparu. Ce n’est pas très urbain !

Mme Cécile Duflot, ministre. Pourquoi vous dénoncez-vous, monsieur Apparu ? (Sourires.)

Vous me dispenserez donc de répondre une troisième fois ! Mon avis est défavorable.

(L’amendement n° 123 n’est pas adopté.)

M. le président. Monsieur Piron, vous avez déjà défendu l’amendement n° 87.

M. Michel Piron. Juste une phrase de plus, monsieur le président, si vous le permettez. Tout à l’heure, Mme la ministre n’a pas répondu à ma proposition beaucoup plus précise consistant à sanctuariser l’article 55 de la loi SRU mais à prendre en compte le taux de 25 % à l’échelle intercommunale. J’espère qu’un amendement au moins parmi tous ceux que nous avons proposés pourra être retenu. Cela nous permettrait de passer une meilleure nuit, et ce serait de bon aloi pour la suite !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Alain Chrétien.

M. Alain Chrétien. Il aurait été sympathique de la part de la majorité d’aller dans le sens de l’intercommunalité. Mais je reviens brièvement à l’amendement n° 122. Je demande au Gouvernement de faire bien attention à ce qui a été voté. À cette heure tardive, la proposition de l’UDI emporte des conséquences sans doute plus importantes qu’on pourrait le croire…

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques et Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. Cela ne nous a pas échappé !

M. Alain Chrétien. …et je crains que, demain matin, certains ne se réveillent avec la gueule de bois !

(L’amendement n° 87 n’est pas adopté.)

M. Michel Piron. C’est désespérant !

M. le président. La parole est à M. Bernard Reynès, pour soutenir l’amendement n° 330.

M. Bernard Reynès. Les EPCI classés en zone « espace protégé » ne disposent généralement que de peu de foncier disponible dédié à la réalisation de nouvelles constructions. Les communes et EPCI concernés par ce classement ayant, de fait, des difficultés à atteindre le taux actuel de 20 %, il paraît incohérent de le porter à 25 %.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. Nous discuterons tout à l’heure ou demain d’une série d’amendements visant à compléter les cas dans lesquels certaines communes peuvent être exemptées, comme elles le sont déjà aujourd’hui quand plus de la moitié de leur territoire se situe dans des zones de type SEVESO, par exemple.

Quant à l’amendement n° 330, puisqu’il ne fait pas référence à la surface mais que toute la ville serait concernée, l’avis de la commission est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. En effet, des amendements répondront bientôt à la question des inconstructibilités. Toutefois, vous évoquez ici des espaces protégés qui occasionnent des contraintes et non des inconstructibilités. Mon avis est donc défavorable.

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. Les amendements nos 330 et 331 sont des amendements d’appel, soit pour la circulaire destinée aux préfets, soit pour les amendements à venir sur les inconstructibilités, afin que l’on tienne compte de la spécificité d’un certain nombre de communes déjà très largement évoquées cet après-midi.

(L’amendement n° 330 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Reynès, pour soutenir l’amendement n° 331.

M. Bernard Reynès. C’est la même exemption pour les communes et EPCI soumis à un risque naturel élevé.

(L’amendement n° 331, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Reynès, pour soutenir l’amendement n° 335.

M. Bernard Reynès. Je souhaiterais que soient « exemptés les communes et établissements publics de coopération intercommunale de moins de 20 000 habitants disposant d’une cellule habitat indigne telle que définie dans le plan départemental d’actions pour le logement des personnes défavorisées 2008-2012 ».

Les cellules habitat indigne participent à la réhabilitation de logements dégradés occupés par des ménages ne disposant pas des ressources financières nécessaires pour pouvoir quitter leur logement insalubre. Les communes et EPCI dotés d’une telle structure participent donc à l’amélioration des parcs locatifs de qualité, au bénéfice des ménages les plus modestes, et traduisent une volonté manifeste des pouvoirs publics locaux de venir en aide aux populations les plus modestes.

Maintenir le taux de logements sociaux à 20 % dans les communes et EPCI dotés d’une cellule habitat indigne favoriserait la mise en place de telles structures, et ce à travers tout le territoire. Cela permettrait enfin de lutter efficacement et durablement contre les « vendeurs de sommeil », qui profitent du désarroi des personnes les plus démunies et mettent à leur disposition des logements insalubres et dangereux, avec des conséquences parfois dramatiques.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. Défavorable. Ce n’est pas parce qu’il y a dans une commune du logement social de fait, comme c’est souvent le cas avec l’habitat indigne, qu’il ne doit pas y avoir de logement social.

(L’amendement n° 335, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Yves Jégo, pour soutenir l’amendement n° 129.

M. Yves Jégo. Cet amendement vise à prendre en compte les difficultés financières des petites communes où il n’y a pas de terrains de l’État mis à disposition. Il s’agit de s’appuyer sur des lissages et des modes de financement programmés pour permettre aux maires de construire dans de bonnes conditions financières.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. Défavorable. Les objectifs triennaux sont prévus en tant que tels par le projet de loi et il n’y a pas de raison de distinguer les conditions de financement selon la taille de la commune. On peut être une petite commune et ne pas avoir de problèmes de financement, on peut être une grande commune et avoir des problèmes de financement, et inversement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Je souhaiterais présenter un sous-amendement pour prendre en compte le changement de seuil adopté tout à l’heure, l’idée étant que l’établissement d’un contrat avec le représentant de l’État soit une possibilité pour les communes de moins de 5 000 habitants.

M. le président. Je me permets de rappeler, monsieur Aubert, qu’aux termes de la loi organique, les sous-amendements ou les amendements doivent être déposés auparavant. Nous nous livrons à cet exercice de manière peut-être un peu excessive et je plaide pour que nous soyons raisonnables. Je ne retiens donc pas votre sous-amendement.

(L’amendement n° 129 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l’amendement n° 283.

M. Martial Saddier. Madame la ministre, je souhaiterais que, comme vous l’avez proposé pour la circulaire aux préfets, nous puissions réfléchir calmement aux types de logements qui, dans une ville ou, demain, une communauté de communes, au-delà de la définition du logement social telle qu’on la connaît, seraient susceptibles d’entrer dans les critères d’éligibilité des logements sociaux.

Je l’ai souligné tout à l’heure, l’histoire des logements sociaux dans une commune remonte à loin, souvent bien au-delà du maire et de l’équipe municipale en place, et, fréquemment, au fil des années, la tendance a été de mettre encore un peu plus de logements sociaux là où il y en avait, tout en essayant d’en mettre là où il n’y en avait pas.

Je pense que nous pouvons tous être d’accord pour dire qu’en général, dans un département, quand on cherche du foncier pour installer de l’accueil d’urgence, les gens du voyage, la prison départementale, ce n’est pas forcément dans la commune la plus riche et la plus résidentielle du département que cela se termine. C’est bien souvent dans des communes où, pour des raisons historiques, le pourcentage de logement social est déjà extrêmement élevé.

J’en parle très librement parce que je suis le maire d’une commune dépassant très largement le quota et que j’ai l’avantage de cumuler tout ce qu’il est possible de cumuler dans une commune. J’ai été le bon élève puisque j’ai réalisé des accueils d’urgence, des accueils de jour, des accueils de nuit, qu’il y a un établissement de santé, un hôpital, des soins de suite et de réadaptation, un EHPAD et que, enfin, j’ai le bonheur d’avoir depuis 1969 dans ma commune la maison d’arrêt départementale, pour la réhabilitation de laquelle je me suis battu au cours de mon précédent mandat, la mairie ayant d’ailleurs mis de l’argent pour l’environnement.

Cet amendement en appelle donc d’autres, ce sont des amendements d’appel. Pourrait-on avoir une discussion avec vos services pour voir si, en tenant compte de tout ce que j’ai cité, mais il y a probablement d’autres exemples, on ne pourrait pas élargir ce que l’on considère comme un logement social ?

Quand un directeur d’EHPAD, d’établissement de soins de suite, d’accueil de jour ou de maison d’arrêt pousse la porte du maire, la première chose qu’il lui demande, c’est de loger ses fonctionnaires et de lui trouver des places en priorité sur son parc de logement social. Il y a donc un vrai effort réalisé par la collectivité. Vous savez que ces établissements rapportent peu. Grosso modo, en dehors de la redevance transport, aucun argent ne rentre dans les caisses de la collectivité, mais il faut pourtant loger les salariés, les transporter, éduquer les enfants dans les écoles. Nous aurions donc intérêt sur tous les bancs à ouvrir calmement le dossier, au-delà de la caricature.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. Encore une fois, nous sommes bien d’accord pour dire que la mixité sociale ne se mesure pas seulement au nombre de logements sociaux dans une commune et qu’il y a bien d’autres indicateurs.

En l’occurrence, l’objectif, c’est tout de même de construire du logement social. Si l’on intègre tous les logements dans lesquels il y a des personnes percevant de l’APL dans le quota de logements sociaux, les communes qui, contrairement à la vôtre, ne sont pas encore aux 20 ou aux 25 % se verront automatiquement exonérer de l’obligation de construire des logements qui, par définition, s’adressent en premier à ces populations éligibles à l’APL.

Telle est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable à votre amendement, tout en laissant à Mme la ministre le soin de répondre, si elle le souhaite, à votre appel.

(L’amendement n° 283, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Yves Jégo, pour soutenir l’amendement n° 400.

M. Yves Jégo. C’est le point autour duquel nous tournons depuis tout à l’heure : la définition du périmètre pertinent pour appliquer la politique du logement.

Nous vous proposons de réfléchir à une cartographie des bassins de vie. Le Gouvernement pourrait définir des bassins de vie naturels cohérents, fondés sur plusieurs critères et incontestables, auxquels s’appliqueraient toutes les dispositions.

On pourrait alors sortir du débat que nous avons eu à plusieurs reprises depuis le début de la nuit sur la ville de Paris. Les arrondissements ne sont pas pris en compte, on ne demande pas au maire de Paris d’appliquer les 25 % arrondissement par arrondissement alors qu’il en a les moyens. En fonction des circonstances, on retient ou non des agglomérations. C’est totalement illisible pour le citoyen à la recherche d’un logement, qui ne sait pas s’il est dans une agglomération au titre de telle cartographie ou s’il est dans un lieu concerné par le dispositif Scellier. Il cherche un logement dans un bassin de vie, parfois dans une commune différente parce que les deux communes sont séparées par une simple rue et que, pour lui, cela n’a pas beaucoup de sens.

Le groupe UDI souhaiterait donc que le Gouvernement s’engage, pas forcément ce soir, madame la ministre, et pas forcément en adoptant cet amendement, à travailler à cette logique de simplification des mesures en faveur du logement, sur une base claire, avec une cartographie unique, globale, des bassins de vie sur lesquels s’appliqueraient tous les dispositifs, toutes les obligations, tous les critères en matière de logement ou de mixité.

C’est un appel à une forme de révolution intellectuelle. Je sais que cela bousculera bien des habitudes dans les administrations, bien des systèmes dans lesquels nous nous sommes inscrits. Je voudrais que, ce soir, nous partions de l’habitant, du citoyen, du Français, pour qu’il comprenne les politiques qui le concernent et qu’il sache dans quel périmètre elles s’appliquent. C’est un sujet autour duquel nous avons tourné toute la soirée, essayons de convenir qu’il faut s’en sortir autour de quelque chose de simple et de global.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. La commission a souhaité affirmer son attachement à la définition du périmètre tel qu’il a été défini dans la loi SRU dès l’an 2000, à savoir la commune. C’est d’ailleurs à cette échelle qu’on élabore le plan local d’habitat quand ce n’est pas à l’échelle intercommunale. L’idée des bassins de vie, même si je comprends bien que les habitants ne s’arrêtent pas toujours aux frontières administratives, ne nous paraît donc pas pertinente, tout du moins pour l’examen de ce projet de loi.

La commission est défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. Même débat que tout à l’heure. Avis défavorable.

(L’amendement n° 400 n’est pas adopté.)

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

2

Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :

Suite du projet de loi relatif à la mobilisation du foncier public en faveur du logement ;

Proposition relative à la tarification progressive de l’énergie.

La séance est levée.

(La séance est levée, le mercredi 26 septembre, à deux heures trente.)