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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Session extraordinaire de 2012-2013

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du jeudi 25 juillet 2013

SOMMAIRE

Présidence de M. Marc Le Fur

1. Soins sans consentement en psychiatrie

Discussion des articles

Article 1er

Amendement no 41 rectifié

M. Denys Robiliard, rapporteur de la commission des affaires sociales

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Article 2

M. Bernard Accoyer

Article 3

Amendements nos 42 deuxième rectification , 1

Avant l’article 4

Amendement no 43

Article 4

M. Bernard Accoyer

Amendement no 5

Article 5

M. Gilles Lurton

M. Gérard Sebaoun

Amendements nos 3 , 4 , 54 , 40 , 45

Article 6

M. Gilles Lurton

M. Gérard Sebaoun

M. Bernard Accoyer

M. Gérard Sebaoun

Amendements nos 56 , 2

Article 6 bis

Article 7

Article 7 bis

Article 8

Amendements nos 6 , 49

Article 9

Amendement no 7

Article 10

Amendement no 46

Article 11

Amendements nos 58 , 44 rectifié , 59

Article 12

Amendement no 55

Article 13

Amendement no 57

Titre

Amendement no 48

Explications de vote

Mme Annie Le Houerou

M. Bernard Accoyer

Mme Jacqueline Fraysse

M. Jean-Louis Roumegas

M. Édouard Fritch

Vote sur l’ensemble

2. Nombre et répartition des sièges de conseiller de Paris

Présentation

M. Manuel Valls, ministre de l’intérieur

M. Pascal Popelin, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

Discussion générale

M. Philippe Goujon

M. Édouard Fritch

M. François de Rugy

Mme Sandrine Mazetier

M. Bernard Debré

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet

M. Claude Goasguen

M. Manuel Valls, ministre

Discussion des articles

Article 1er

M. Bernard Debré

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet

Amendement no 1

Article 2

Amendement no 2

Article 3

Explication de vote

Vote sur l’ensemble

M. Manuel Valls, ministre

3. Clôture de la session extraordinaire

Présidence de M. Marc Le Fur

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

Soins sans consentement en psychiatrie

Suite de la discussion d’une proposition de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion, après engagement de la procédure accélérée, de la proposition de loi relative aux soins sans consentement en psychiatrie (nos 1223, 1284).

Discussion des articles

M. le président. J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi.

Article 1er

M. le président. La parole est à M. Denys Robiliard, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour soutenir l’amendement n41 rectifié.

M. Denys Robiliard, rapporteur de la commission des affaires sociales. Il s’agit d’un amendement rédactionnel, monsieur le président.

M. le président. La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé, pour donner l’avis du Gouvernement sur cet amendement.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Avis favorable.

(L’amendement n41 rectifié est adopté.)

(L’article 1er, amendé, est adopté.)

Article 2

M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer. Monsieur le président, votre diligence remarquable, que je tiens à saluer, ne m’a pas permis de prendre la parole à l’article 1er. Je voudrais tout de même souligner son importance. En effet, l’article 1er passe un peu rapidement sur une avancée majeure de la loi de 2011, qui avait substitué à la notion d’hospitalisation sous contrainte celle de soins sans consentement. Cette loi avait ouvert la voie à des pratiques beaucoup plus conformes aux besoins des malades et permis d’apporter une réponse à leur souffrance, à leur maladie et à leur trouble.

Des avancées considérables avaient pu être observées grâce au dispositif qui consiste, d’une certaine façon, à contraindre un malade à suivre des soins sans pour autant le faire entrer dans le mécanisme d’une hospitalisation sans consentement. Prenons l’exemple d’un psychotique : lorsqu’il est en hospitalisation sous contrainte et qu’il suit son traitement, ses symptômes s’estompent, et même disparaissent. Son état est infiniment meilleur pour lui et pour ceux qui l’entourent. Mais lorsqu’il sort, si son traitement a des effets secondaires pénibles par exemple, et comme de surcroît il n’est pas conscient de son état pathologique, ou en tout cas de ce qu’il pourrait revenir, il arrête son traitement et rechute dans des souffrances et des comportements qui sont évidemment gênants pour lui, pour les autres et pour la société, parfois même dangereux.

Ce mécanisme de la contrainte des soins en ambulatoire a donc apporté, dans de nombreux cas, des avancées considérables, en particulier chez des malades psychotiques chroniques qui passaient constamment de l’hôpital aux soins ambulatoires. Comme ils ne respectaient plus les contraintes d’administration de neuroleptiques en soins ambulatoires, ils rechutaient, suscitant la plus vive inquiétude parmi leurs proches : c’était une souffrance indescriptible. Ce mécanisme a apporté, de l’avis de tous, un progrès considérable, qui est indiscutable et qui doit être souligné. Il faut donc, au sujet de l’article 1er comme de l’article 2, souligner les avancées de la loi de 2011.

L’article 2, quant à lui, rétablit la possibilité des sorties de courte durée, que l’on appelait autrefois les « sorties d’essai ». Cet article présente donc beaucoup d’avantages, et il reprend même ce qu’avait proposé Guy Lefrand, rapporteur de la loi de 2011. En conséquence, nous le voterons.

(L’article 2 est adopté.)

Article 3

M. le président. La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir l’amendement n42, deuxième rectification.

M. Denys Robiliard, rapporteur. Il s’agit d’adapter à la décision du Conseil constitutionnel les modalités de reprise en charge d’une personne qui est en rupture de soins.

(L’amendement n42, deuxième rectification, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Roumegas, pour soutenir l’amendement n1.

M. Jean-Louis Roumegas. Cet amendement vise à permettre aux parlementaires de visiter les lieux de privation de liberté en milieu psychiatrique, comme ils le font pour les établissements pénitentiaires, mais aussi les locaux de garde à vue ou les centres de rétention et les zones d’attente.

Cette disposition garantirait d’abord l’exercice du contrôle parlementaire, ce qui serait une bonne chose, puisqu’il s’agit bien d’un cas de privation de liberté et que le juge des libertés intervient en ce domaine. Ce serait également une expérience intéressante pour les parlementaires, à titre d’information sur des sujets sensibles. Et plus largement, on peut souhaiter que la psychiatrie ne soit pas un espace qui échappe au contrôle démocratique. Mais de cela, nous reparlerons évidemment à l’occasion de l’examen de la loi de santé publique.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Denys Robiliard, rapporteur. Favorable. J’insiste, dans vos propos, monsieur Roumegas, sur le fait que cette disposition n’est évidemment pas dirigée contre les établissements hospitaliers. Il s’agit, comme vous l’avez indiqué, d’un droit de regard, et ce doit aussi être l’occasion d’un dialogue entre les élus et les soignants. Vous avez fait référence, lors de votre intervention dans la discussion générale, aux conseils locaux de santé mentale, les CLSM. Je crois que nous sommes dans le même état d’esprit et que c’est par le dialogue que l’on parviendra à comprendre ce qui se passe et à lutter contre la stigmatisation.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Je donne un avis favorable à cet amendement, qui va dans le sens d’une plus grande transparence et d’une plus grande ouverture de ces lieux qui peuvent susciter des interrogations du fait même qu’ils ne peuvent pas être visités par les représentants de la nation.

(L’amendement n1 est adopté.)

(L’article 3, amendé, est adopté.)

Avant l’article 4

M. le président. La parole est à Mme Martine Pinville, pour soutenir l’amendement n43.

Mme Martine Pinville. Cet amendement vise à mieux protéger les droits des mineurs hospitalisés en soins psychiatriques à la demande de leurs parents. Il faut faire respecter les droits des mineurs de seize à dix-huit ans qui sont hospitalisés. Chaque année, environ 20 % des adolescents ont un problème de santé mentale, le plus souvent de dépression ou d’anxiété. Les expériences de violence, d’humiliation, de dévalorisation et de pauvreté accroissent ce risque. Le suicide est aussi l’une des principales causes de mortalité chez les jeunes. Nous nous devons donc de protéger ces enfants et de leur donner des droits. Tel est le but de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Denys Robiliard, rapporteur. La commission a examiné cet amendement et l’a repoussé. En effet, même s’il est très clair qu’il s’agit d’une vraie question, je crois pour l’instant que nous n’avons pas trouvé la bonne solution.

Deux questions se posent. Il faut d’abord voir si le problème se pose uniquement en matière psychiatrique, auquel cas l’étendue de ce droit est à définir précisément. Par ailleurs, il y a mineur et mineur et la réponse ne peut pas être la même de zéro à dix-huit ans, elle dépend de l’âge. Sur ces deux points, il faut mener une réflexion approfondie. Honnêtement, nous avons identifié le problème, qui a été posé à la fois par M. Jean-Marie Delarue et par le Syndicat de la magistrature. Il faut à présent poursuivre notre réflexion, pour lui trouver une solution adaptée.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. J’ai compris de l’intervention liminaire de M. Sebaoun dans la discussion générale qu’il s’agissait là d’un amendement d’appel. Je vais donc vous indiquer les raisons pour lesquelles je souhaite que vous le retiriez, faute de quoi, dans l’état actuel du droit et de la situation à laquelle nous sommes confrontés, je serai obligée de lui donner un avis défavorable.

D’abord, rien ne permet de considérer qu’en matière de soins psychiatriques, il y aurait des règles particulières à définir pour les mineurs, par opposition à d’autres secteurs. Si nous commençons, à l’occasion de ce débat spécifique, à dire que les mineurs des seize à dix-huit ans constituent une catégorie à part, nous serons amenés, dans d’autres domaines qui ne relèvent pas nécessairement de la santé, à nous demander s’il serait justifié de distinguer une catégorie de jeunes. Il vaudrait mieux avoir une démarche globale et nous interroger sur les conditions générales dans lesquelles les mineurs de seize à dix-huit ans peuvent être pris en charge en tenant compte de l’expression de leur volonté et de leur liberté.

Par ailleurs, je veux tout de même rappeler qu’un mineur, fût-il mineur, ne peut évidemment pas être hospitalisé sans cause médicale. Les parents ne peuvent pas à eux seuls décider de l’hospitalisation de leur enfant au motif, par exemple, qu’il serait turbulent. Imaginons l’hypothèse où des parents débordés ou dépassés par un adolescent difficile auraient le sentiment, infondé, que son cas relève d’une hospitalisation : l’hospitalisation ne serait pas possible, dès lors qu’il n’y aurait pas d’avis médical allant dans ce sens. On ne peut quand même pas se baser sur l’hypothèse que des psychiatres professionnels se plieraient à la volonté des parents alors qu’il n’y aurait pas de raisons médicales menant à prononcer une hospitalisation. J’entends votre préoccupation, mais je vous demande de retirer cet amendement, afin que nous puissions avoir un débat plus large sur cette question.

M. le président. La parole est à Mme Martine Pinville.

Mme Martine Pinville. Merci madame la ministre. Nous entendons vos arguments et nous allons donc retirer cet amendement. Il n’en demeure pas moins qu’il s’agit d’un vrai sujet sur lequel nous aurons à travailler.

(L’amendement n43 est retiré.)

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Je tiens à souligner l’importance de ce sujet. Nous retenons les arguments cohérents avancés par le rapporteur et la ministre : ils nous invitent à creuser la question, car il est vrai qu’il doit forcément y avoir une cause médicale, et heureusement. Il est aussi vrai que l’on ne peut pas traiter un jeune de seize ou dix-huit ans comme un enfant de cinq ans, la place des parents n’est pas la même. Je crois donc qu’il est nécessaire de progresser sur ce point. Dans la suite de la mission, peut-être aurons-nous l’occasion d’approfondir cette question.

Article 4

M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer, inscrit sur l’article.

M. Bernard Accoyer. Cet article rétablit l’article L. 3211-12 du code de la santé, qui a été annulé par le Conseil constitutionnel, en supprimant les conditions spécifiques de mainlevée des mesures de soin. Au lieu de les préciser, comme le Conseil constitutionnel invitait le Parlement à le faire, le rapporteur nous propose tout bonnement de les supprimer. Il s’agit notamment de l’avis de la commission du suivi médical ou de la sortie prononcée par le préfet après avis concordant de deux psychiatres.

Certes, le dispositif est lourd, mais les enjeux sont importants. Le plus préoccupant dans cet article est que le dispositif va rester uniquement valable pour les malades déclarés pénalement irresponsables pour des faits passibles de dix ans de prison pour les atteintes aux biens, et de cinq ans de prison pour les atteintes aux personnes. Un passage à l’acte est donc exigé. Cela va à l’encontre du fondement même des soins en matière psychiatrique, qui sont centrés sur la prévention des risques que le malade présente pour lui-même avant tout et qu’il peut également présenter pour des tiers.

Les passages à l’acte sont extrêmement rares, chacun le sait. Les malades psychiatriques ne sont pas des gens dangereux. Ils peuvent parfois l’être et c’est bien pour cela qu’il faut être attentif. Ils peuvent être dangereux pour eux-mêmes, et méritent d’être pris en charge à ce titre

Plusieurs dispositions avaient été prises pour encadrer de façon plus précise ces situations, notamment dans le décret d’application, mais le Conseil constitutionnel a considéré que cela relevait de la loi, et bien entendu, par principe, il a raison.

À cette demande du Conseil constitutionnel, la présente proposition de loi répond en balayant tout et en fermant la porte à la prévention, et donc aux soins, car les unités pour malades difficiles et les programmes de soins renforcés sont avant tout des outils thérapeutiques, de prévention et de traitement.

M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer, cette fois pour soutenir l’amendement n5.

M. Bernard Accoyer. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Denys Robiliard, rapporteur. Avis défavorable. Monsieur Accoyer, vous avez défendu cet amendement lors de votre intervention sur l’article 4. Ce qui est intéressant, c’est que nous faisons la même analyse de ce qu’est une UMD : c’est bien un dispositif de soins. Nous n’en tirons néanmoins pas la même conclusion : vous pensez que cela justifie, pour ceux qui y ont passé un an, un dispositif particulier de sortie de l’hospitalisation sous contrainte. J’estime pour ma part qu’il s’agit d’un dispositif thérapeutique et que nous n’avons pas à en tirer des conséquences du point de vue de la levée de l’hospitalisation, qu’elle soit d’office ou à la demande d’un tiers.

M. Bernard Accoyer. Ce n’est pas du droit !

M. Denys Robiliard, rapporteur. Monsieur Accoyer, je ne vous ai pas interrompu, nos débats ont été de qualité jusqu’à présent, veillons à continuer ainsi.

Le Syndicat de la magistrature avait un raisonnement qui me paraissait impeccable de ce point de vue : il est favorable à un alignement de la procédure de levée des hospitalisations sous contrainte des personnes ayant été placées en UMD sur le régime du droit commun, s’agissant d’une modalité de prise en charge médicale. Ce qui compte, en effet, c’est l’état du patient au moment où le juge doit statuer sur le bien-fondé de l’hospitalisation en cours.

J’ajoute un point technique sur la question des irresponsables pénaux : votre amendement ne me paraît pas prendre en compte la décision du Conseil constitutionnel. Vous donnez des garanties supplémentaires s’agissant des UMD mais pas des irresponsables pénaux. Si, par impossible, nous adoptions votre amendement, il encourrait donc la même cause d’inconstitutionnalité que celle déjà jugée par le Conseil.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Même avis défavorable. Le fait d’être en séjour en UMD n’est pas un facteur pertinent pour apprécier la dangerosité d’un patient. C’est une unité de soins qui a une signification thérapeutique. Il ne faut pas mélanger les appréciations qui peuvent être portées sur une personne. Il est bien question ici de la nature des soins qu’il convient de lui apporter, et non de sa dangerosité. Il ne semble donc pas pertinent de prendre en compte le passage en UMD pour apprécier l’opportunité de laisser sortir un patient.

M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer. La divergence que j’ai avec la ministre et le rapporteur est qu’un nombre important de malades psychiatriques présentent une menace pour eux-mêmes, beaucoup plus souvent d’ailleurs que pour les tiers. Cette dangerosité, les cliniciens la repèrent. Elle peut justifier des soins renforcés, des protocoles propres qui s’inscrivent dans les mécanismes des unités pour malades difficiles.

C’est cela que vous occultez dans ce vaste mouvement de rejet des dispositions de la loi de 2011, qui s’inscrit dans cet accès maniaque qui vous fait abroger tout ce qui a été fait avant le changement de gouvernement. En l’occurrence, on ne peut pas s’accommoder de cette attitude manichéenne et dogmatique. Nous débattons des soins, de malades pour qui les décisions d’aujourd’hui vont avoir des conséquences énormes. C’est pourquoi, tout en sachant que des missions sont conduites et vont s’achever avec la présente proposition de loi, il est important dès maintenant de se préparer aux conséquences délétères des mesures que l’Assemblée adoptera peut-être tout à l’heure, contre notre avis.

(L’amendement n5 n’est pas adopté.)

(L’article 4 est adopté.)

Article 5

M. le président. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article. La parole est à M. Gilles Lurton.

M. Gilles Lurton. Le texte qui nous est proposé s’attache à répondre à la décision du Conseil constitutionnel du 20 avril 2012 qui a censuré deux dispositions du code de la santé publique sur le régime dérogatoire applicable à la sortie des personnes ayant séjourné en unité pour malades difficiles ou pénalement irresponsables.

La proposition de loi envisage plus largement un toilettage de la loi de 2011. Au volet judiciaire, l’article 5 prévoit de réduire de quinze à dix jours le délai dans lequel doit s’effectuer le contrôle obligatoire du juge de la liberté et de la détention pour toute mesure d’hospitalisation sans consentement.

Avancer le contrôle du juge au dixième jour entraînera une augmentation du nombre de saisines de 40 %, et de 20 % du nombre des audiences, accentuant considérablement les tâches de tous les intervenants. J’interviendrai à nouveau à ce sujet d’ici quelques instants à l’article 6, et je veux insister sur les conséquences de ces dispositions sur le travail des juges. Le contrôle des hospitalisations psychiatriques constitue une charge particulièrement lourde que les tribunaux ont le plus grand mal à assumer compte tenu des nombreuses vacances de poste de magistrats et de greffiers et de la réduction drastique de leur budget.

La simple proclamation de principes ne suffira pas et une loi votée sans moyens de l’appliquer ira, dans les faits, à l’opposé du renforcement des droits des patients.

Pour ma part, j’aurais souhaité disposer au moins d’une étude sur les conséquences de ces décisions sur le travail des juges

M. le président. La parole est à M. Gérard Sebaoun.

M. Gérard Sebaoun. Nous avons déjà parlé de cet article 5 lors de la discussion générale. Il a pour objet de permettre au juge d’intervenir plus précocement. Aujourd’hui, la loi prévoit un délai de quinze jours. L’ensemble des personnes que nous avons auditionnées, dont Mme Fraysse s’est faite l’interprète ce matin, souhaitaient voir le juge intervenir plus précocement. La proposition de loi prévoit un délai de dix jours. Le Gouvernement va proposer par amendement de le porter à douze jours.

Cela me semble répondre à l’ensemble de ce que nous avons entendu lors des auditions, et c’est un premier progrès. Le second progrès concerne les certificats : nous présenterons un amendement proposant de supprimer le certificat conjoint et de le remplacer par un certificat unique, plus conforme à la pratique actuelle. Nous y reviendrons.

M. le président. Je suis saisi de trois amendements, nos 3, 4 et 54, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n3.

Mme Jacqueline Fraysse. Comme j’ai eu l’occasion de le dire lors de la discussion générale, l’insuffisance des moyens accordés aux services de la justice pour statuer ne peut pas constituer à nos yeux un argument. La gravité d’une privation abusive de liberté des malades hospitalisés sans leur consentement, ajoutée au fait que, lors des auditions menées dans le cadre de la mission d’information, les psychiatres interrogés aient considéré que soixante-douze heures leur suffisaient pour établir un diagnostic concernant une personne souffrant de troubles mentaux, nous poussent donc à soutenir cet amendement. Il reprend les réflexions menées lors des travaux de la mission et propose donc d’abaisser le délai d’intervention du JLD à cinq jours.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Roumegas, pour soutenir l’amendement n4.

M. Jean-Louis Roumegas. Il a le même objet que celui de Mme Fraysse. C’est une mesure exceptionnelle : il s’agit du cas d’un internement sans consentement abusif. Autant nous pouvons comprendre les arguments administratifs sur les nécessités d’expertise et de contre-expertise, autant, face à ces cas d’abus ou d’erreurs, qui se sont malheureusement déjà produits, une privation de liberté de dix jours qui n’est pas décidée par un juge paraît déjà énorme. D’un point de vue administratif et médical, des délais d’instruction semblent nécessaires, mais du point de vue des droits civiques, il faut aller le plus vite possible, étant entendu qu’il ne s’agit que de cas exceptionnels et abusifs.

M. le président. La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement n54.

Mme Marisol Touraine, ministre. À l’évidence, cette question des délais est importante. J’entends tout à fait la volonté exprimée sur plusieurs bancs de réduire le délai dont dispose le juge des libertés pour statuer. Il ne serait pas acceptable que des personnes se retrouvent privées de leur liberté pour des motifs médicaux qui ne seraient pas avérés et dûment contrôlés par le juge. Je le répète : une des avancées significatives réalisées par la loi de 2011 a été l’introduction du juge des libertés dans le processus – et je rappelle qu’il ne s’agissait pas d’une demande, à l’origine, du gouvernement de l’époque.

Pourtant, peut-on passer du délai de quinze jours en vigueur à un délai de cinq jours comme vous le proposez ou de dix jours comme le prévoit le texte ? Cette réduction paraît trop importante au regard des éléments dont nous disposons.

Les premiers éléments sont de nature administrative. Je ne veux pas m’étendre sur ce sujet, parce que ce ne sont pas les éléments principaux. Reste qu’ils comptent dans la réalité du suivi des patients. Nous devons faire en sorte que la loi soit applicable par les services de l’État et par les juridictions, qui sont aujourd’hui confrontées à des difficultés d’application.

Deuxième élément, à mes yeux essentiel : nous parlons de patients qui sont dans une situation d’instabilité. Il peut donc falloir du temps pour constater la réalité du trouble dont ils souffrent, pour s’assurer que l’hospitalisation n’a pas été elle-même le facteur de ce trouble, pour s’assurer de la nécessité du placement en établissement, ainsi que l’a souligné la présidente de la commission des affaires sociales au cours de la discussion générale. Puisque ce sont par définition des personnes en situation d’instabilité, il faut du temps, j’insiste, pour apprécier la réalité de cette instabilité et des soins nécessaires.

Pour toutes ces raisons, je souhaite que nous puissions aboutir à un compromis. Je comprends le signal que vous souhaitez donner, voire qu’on puisse estimer que le délai de quinze jours en vigueur est excessif du – encore qu’il me paraisse pour ma part correspondre aux besoins. Bref, il me semble que douze jours, comme le propose l’amendement du Gouvernement, constituerait un compromis acceptable par tout le monde.

Je précise pour finir qu’il ne s’agit que d’un délai maximal, qui n’interdit pas aux médecins de décider plus tôt que leur patient peut retrouver la pleine et entière liberté de ses mouvements. Autrement dit, une fois que le patient a été admis dans un établissement, il n’est pas nécessaire d’attendre la décision du juge pour qu’il puisse sortir : nous ne parlons ici que de patients dont les médecins n’ont pas considéré, au moment où le juge se prononce, qu’ils pouvaient sortir. Aujourd’hui, moins de 50 % des patients font l’objet d’une décision du juge, et donc plus de 50 % peuvent sortir avant que le juge n’intervienne.

Pour l’ensemble de ces raisons, je vous demanderai de bien vouloir porter le délai en question à douze jours.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements en discussion commune ?

M. Denys Robiliard, rapporteur. Les amendements de Mme Fraysse et de M. Roumegas, qui nous ont été soumis dans le cadre de l’article 86 du règlement, ont été rejetés par la commission. L’amendement du Gouvernement, quant à lui, n’a pas été examiné par la commission au titre de l’article 88 du règlement. À titre personnel, j’y suis favorable, et pas simplement parce que je suis socialiste et membre de la majorité.

En politique, on a le droit de réfléchir, d’écouter et, me semble-t-il, d’être nuancé. D’où vient la proposition de la mission Santé mentale et avenir de la psychiatrie de ramener le délai à cinq jours ? Elle vient du fait qu’au cours de toutes les auditions auxquelles nous avons procédé, les psychiatres nous ont affirmé qu’au bout de soixante-douze heures, la période d’observation fixée par la loi, ils étaient en mesure de donner un avis sur la nécessité ou non d’un maintien de l’hospitalisation complète sous contrainte.

Dès lors, du point de vue des libertés, pourquoi différer l’intervention du juge ? Si une hospitalisation ne doit pas se poursuivre parce que la personne concernée n’a pas à être hospitalisée, il est souhaitable que la décision du juge soit prise le plus tôt possible.

L’examen du pré-rapport nous a déterminés à aller dans ce sens. Puis une discussion a eu lieu, au cours de laquelle on a attiré notre attention sur deux points. Le premier, ce sont des contraintes administratives certes, mais qui sont à prendre en considération. En effet, monsieur Roumegas, la mainlevée se décide au terme du débat judiciaire. Il n’y a peut-être que 5 % des dossiers qui font l’objet d’une mainlevée, et donc 95 % pour lesquels ce n’est pas le cas, mais on ne peut départager les deux qu’au terme du débat judiciaire. Il a lieu de toute façon. On ne peut donc établir la règle en se basant sur le fait qu’il y a peu de cas. Il faut tenir compte des contraintes inhérentes au débat judiciaire : temps de convocation, temps de communication du dossier, temps laissé à l’hôpital ou à l’ARS suivant qu’il s’agit d’une admission à la demande d’un tiers ou à la demande du préfet au titre de l’ordre public…

Deuxième élément sur lequel était revenue fort opportunément Mme la ministre : l’état de la personne. À quel moment est-il judicieux d’organiser une audience qui permette que le patient participe effectivement au débat judiciaire ? Je vous avoue qu’au cours des auditions auxquelles nous avons procédé, ce qui m’a le plus marqué a été d’entendre le Syndicat de la magistrature expliquer qu’il serait favorable à un délai de cinq jours mais qu’il ne verrait pas l’intérêt de ramener le délai de quinze à dix jours, cela risquant même de desservir les intéressés. J’ai été marqué également par l’intervention du contrôleur général des lieux de privation de liberté, M. Delarue, qui a souligné que le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 26 novembre 2010, avait trouvé un bon équilibre entre les nécessités de la liberté individuelle et la prise en considération de l’état du patient.

La proposition du Gouvernement qui ramène le délai à douze jours permet un équilibre entre les nécessités administratives, les nécessités judiciaires et les nécessités sanitaires. C’est pourquoi j’approuve, à titre personnel, son amendement et pourquoi je demande à Mme Fraysse et à M. Roumegas de retirer les leurs. Ensuite, nous aurions à nous prononcer sur le seul amendement du Gouvernement.

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Je partage l’invitation du rapporteur à réfléchir, ce à quoi je vais tâcher de m’employer le plus intelligemment possible. Je suis sensible à ses arguments. Certes, celui des moyens, qui s’opposerait à ce qu’on statue vite, ne me suffit pas du tout : il faut, face à des sujets de cette importance et de cette gravité, engager les moyens nécessaires pour statuer le plus vite possible, vous l’avez reconnu, madame la ministre. Mais en même temps je vous donne acte du fait que la loi doit être applicable.

M. Guy Geoffroy. Eh oui !

Mme Jacqueline Fraysse. Je vous invite donc à employer les moyens nécessaires pour qu’elle le soit et donc à créer les conditions pour qu’on aille le plus vite possible.

Quoi qu’il en soit, j’entends l’argument selon lequel l’état du patient doit permettre que la rencontre avec le juge soit utile, pour lui-même et en général.

Pour ces raisons, j’accepte de retirer mon amendement qui réduit en effet de beaucoup le délai, ce qui, involontairement, porterait préjudice au patient qui ne serait pas en état de rencontrer le juge utilement. En revanche, je vous dis d’emblée que je ne soutiendrai pas l’amendement du Gouvernement qui prolonge le délai de dix jours prévu par le texte, que je trouvais déjà long.

Je souhaite donc vivement que l’on s’en tienne au texte. Un délai de dix jours me paraît raisonnable en ce qu’il permet, après les auditions auxquelles nous avons procédé je crois pouvoir l’affirmer, que l’état du patient soit suffisamment stabilisé. Je ne voterai donc pas l’amendement du Gouvernement qui propose d’allonger le délai à douze jours.

(L’amendement n3 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Comme Mme Fraysse, je retire mon amendement, sans comprendre les deux jours supplémentaires demandés par le Gouvernement. Je préférerais donc qu’on en reste au texte dans sa rédaction initiale. Ne serait-ce pas là un juste compromis ?

(L’amendement n4 est retiré.)

(L’amendement n54 est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Roumegas, pour soutenir l’amendement n40.

M. Jean-Louis Roumegas. Il est défendu.

(L’amendement n40, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Gérard Sebaoun, pour soutenir l’amendement n45.

M. Gérard Sebaoun. Il s’agit de simplifier la procédure de production de certificats, et notamment le fameux certificat conjoint qui entraîne la saisine du juge. Il est apparu au cours des auditions auxquelles nous avons procédé que ce certificat conjoint était certes doublement signé mais en réalité essentiellement produit par un psychiatre, et qu’on trouvait un second psychiatre pour le contresigner. Dans l’exemple qui nous a été donné, au centre hospitalier Le Vinatier, un seul certificat avait suscité un avis divergent des deux psychiatres.

Aussi, compte tenu des contraintes de l’hôpital, compte tenu de la connaissance qu’a le psychiatre de son patient, il ne nous paraît pas utile de continuer ce qui n’est qu’une pratique de façade. Même si je comprends la nécessité d’une double lecture de la situation, il me semble légitime de remplacer cet avis conjoint par un avis simple. C’est du reste, il me semble, ce que proposait également Mme Boyer dans un de ses amendements.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Denys Robiliard, rapporteur. Favorable. Il convient de se montrer très nuancé sur ce sujet. Un avis conjoint était prévu parce que, au regard du juge, il est important qu’il n’y ait pas que le psychiatre traitant qui puisse se prononcer. Cela étant, de nombreux certificats médicaux ont déjà été signés quand on arrive à ce stade-là. Aussi le juge dispose-t-il d’assez de matière pour se prononcer.

Je suis très sensible à l’argument de M. Sebaoun : il ne faut pas que nous acceptions des leurres. Selon la statistique que nous a donné le centre hospitalier du Vinatier, sur 2 000 avis conjoints, seule une divergence s’était exprimée. Cette disposition légale, dont je comprends tout à fait pourquoi elle avait été instaurée, ne trouve donc pas à s’appliquer, du fait des pratiques médicales ou parce qu’elle n’était pas adaptée à la situation. Par conséquent, plutôt que d’avoir recours à un leurre, autant ne pas se payer de mots et supprimer cet avis conjoint, l’avis lui-même étant évidemment maintenu.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Sagesse. Je comprends bien la préoccupation exprimée par M. Sebaoun : il s’agit de simplifier les procédures, d’autant que l’on sait que, dans l’écrasante majorité des cas, le deuxième avis est strictement conforme au premier avis, ce qui est d’ailleurs rassurant.

Pour autant, le deuxième avis a un sens : il permet au juge de ne pas se prononcer sur le seul fondement de l’avis du médecin en charge du patient et lui évite de recourir à des experts, qui, peu nombreux, sont occupés à de multiples tâches.

Le Gouvernement comprend votre démarche comme il comprend le dispositif actuel. Il ne marque aucune opposition à votre amendement, monsieur Sebaoun.

M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer. Si nous divergeons sur l’appréciation globale portée sur la loi de 2011, je reconnais toutefois qu’elle comportait à l’évidence certaines dispositions qui se sont révélées particulièrement difficiles à appliquer, en particulier le nombre de certificats à produire aux différents stades de la procédure.

Aussi, nous voterons cet amendement qui supprime l’avis conjoint. Cela allégera la procédure et répondra au manque cruel de personnel, notamment de médecins psychiatres, qui ne fait que s’aggraver au fur et à mesure que le temps s’écoule.

(L’amendement n45 est adopté.)

(L’article 5, amendé, est adopté.)

Article 6

M. le président. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article. La parole est à M. Gilles Lurton.

M. Gilles Lurton. Cet article instaure la possibilité de tenir audience à l’hôpital, dans une salle spécialement aménagée pour recevoir le public, plutôt qu’au palais de justice. Je tiens à dire ici que je suis favorable à cette mesure qui améliore considérablement la situation des patients. Mais encore faut-il qu’elle puisse être appliquée concrètement. En retenant le principe du déplacement des juges à l’hôpital alors même qu’ils rencontrent des difficultés pour accomplir leur mission compte tenu d’emplois du temps surchargés, vous prenez le risque de voir les retards s’aggraver dans tous les contentieux.

En commission, monsieur le rapporteur, la semaine dernière, vous m’avez répondu que la loi du 16 juin 2011, qui portait de deux à cinq jours le délai de saisine du juge en matière administrative, avait réduit d’autant la tâche de la justice et dégagé du temps pour le contrôle des hospitalisations sous contrainte. Vous connaissez comme moi la situation de nos tribunaux et les délais auxquels sont soumis les justiciables pour obtenir le rendu des jugements qui les concernent. Vous connaissez aussi le nombre de détenus en préventive qui attendent toujours leur jugement et restent en prison de façon parfois injustifiée, aggravant ainsi le déficit de places.

Je doute que les juges confrontés dans leur vie quotidienne à ces difficultés acceptent ce discours. Je crains qu’ils ne se heurtent à de graves pénuries de moyens pour accomplir cette nouvelle mission dans les hôpitaux.

Je suis surpris de la facilité avec laquelle, lorsque nous préparons une loi, nous nous concentrons sur le secteur concerné sans analyser les conséquences pour d’autres secteurs. J’aurais souhaité avoir l’avis de Mme la garde des sceaux à ce sujet.

M. le président. La parole est à M. Gérard Sebaoun.

M. Gérard Sebaoun. J’aurai une lecture beaucoup moins sombre que M. Lurton de l’article 6. Manifestement, le malade gagne aux nouvelles conditions pratiques de l’audience qu’il instaure. Certes, le juge devra se déplacer, ce qui implique une organisation différente à mettre en place. Mais le malade sera dans de meilleures conditions : l’audience sera publique, sauf si le juge ou le patient et son conseil en décident autrement ; l’avocat sera présent de façon automatique ; la visioconférence deviendra exceptionnelle. Tous ces éléments montrent que le respect du patient est au cœur de cet article. Il ne faut pas s’arrêter au fait que la magistrature devra réorganiser ce qu’elle a déjà réussi à organiser – nous sommes tous conscients des efforts qu’elle a consentis depuis la loi de 2011. Je suis bien évidemment très favorable à cet article.

M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer. Moi non plus, monsieur Sebaoun, je n’ai pas la même lecture que vous de l’article 6. Je crois que vous avez une vision un peu idéalisée de ce qui va se passer, compte tenu de la surcharge des juridictions et de la situation dans laquelle se trouvent de nombreux magistrats, qui finiront pas imposer le lieu où ils se prononceront.

N’y voyez pas de malveillance de ma part, monsieur le rapporteur, mais lorsque vous proposez que le patient soit assisté automatiquement d’un avocat, on peut une nouvelle fois se poser la question du conflit d’intérêts – si vous me permettez cette allusion, cher maître, puisque tout à l’heure vous avez évoqué votre passé professionnel. Depuis le temps que je siège dans cet hémicycle, j’ai vu s’imposer l’avocat dans d’innombrables circonstances. Bien sûr, c’est pour la cause de la défense des droits fondamentaux des citoyens et vous me permettrez simplement cette petite remarque qu’il n’y a pas d’étude d’impact pour évaluer le coût de cette mesure, ni bien entendu la moindre indication d’où proviendront les crédits pour l’aide judiciaire qui sera le plus souvent nécessaire.

Que les audiences aient lieu à l’hôpital, tout le monde est d’accord pour dire que c’est la solution idéale. Malheureusement, il est bien probable que ce n’est pas ce qui se passera.

Enfin, s’agissant de la vidéoconférence, il faut reconnaître que c’était un procédé compliqué.

Ne nous berçons pas d’illusions, il est certain que nous aurons à redélibérer et à revoir les dispositions contenues dans cet article car il y a bien peu de chances que les choses se déroulent comme vous l’imaginez.

M. le président. La parole est à M. Gérard Sebaoun.

M. Gérard Sebaoun. Au nom de mon groupe, je tiens à dire à M. Accoyer que je trouve particulièrement déplacée l’allusion qu’il a faite à la profession de Denys Robiliard, qui tout au long de discussion de cette proposition de loi a montré une remarquable connaissance du sujet.

Mme Jacqueline Fraysse. Je partage cette opinion !

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Comme si vous n’aviez jamais évoqué le fait que vous étiez médecin !

M. le président. La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement n56.

Mme Marisol Touraine, ministre. Cet amendement, que je présente au nom du Gouvernement dans son entier et non pas simplement du ministère des affaires sociales, vise à faciliter la tenue des audiences au sein des établissements de santé en permettant un usage mutualisé de salles pour plusieurs établissements situés dans un même ressort juridictionnel. Il convient pour cela de ne pas préciser que l’usage d’une salle dans un autre établissement doit se faire « en cas de nécessité impérieuse », comme le prévoit actuellement le texte, mais simplement « en cas de nécessité ». Nous allierons ainsi simplification de l’organisation et réalisme.

J’ajoute, monsieur Lurton, que vous êtes bien trop avisé de la façon dont fonctionne le travail parlementaire pour ne pas savoir que je suis ici en train de défendre un texte du Gouvernement. La Chancellerie a bien évidemment participé à l’ensemble des discussions qui ont permis d’élaborer les amendements que je présente ici devant vous.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Denys Robiliard, rapporteur. Cet amendement n’a pas été examiné dans le cadre de la procédure prévue par l’article 88. Par conséquent, je ne peux m’exprimer qu’à titre personnel.

L’intention de la proposition de loi est très claire : il s’agit de faire en sorte que les audiences puissent se tenir dans les établissements de soins où sont pris en charge les patients. Selon les départements, une configuration particulière peut s’avérer nécessaire : un établissement peut avoir plusieurs antennes, un très grand département peut ne compter que quelques patients hospitalisés sans consentement, ce qui rendrait disproportionnée l’installation d’une salle dédiée… La mutualisation s’impose donc dans certains cas.

À quel objectif répondait la formule « nécessité impérieuse » ? Il fallait marquer que la nécessité dont il est question à l’article 6 n’est pas une simple nécessité de service, une commodité, pour dire les choses plus familièrement. Cette rédaction est dans l’intérêt des patients. J’ai pu constater, aussi bien dans la mission Santé mentale qu’avec les personnes à qui j’ai eu affaire en tant que rapporteur, qu’il y a unanimité pour dire que l’audience se passait beaucoup mieux pour les patients quand elle avait lieu à l’hôpital plutôt qu’au palais de justice. Une greffière du Puy ayant connu les deux systèmes nous a décrit l’amélioration de l’audience qu’elle a constatée dans les établissements de soins alors même qu’elle se félicitait de la qualité du travail mené auparavant au palais de justice. C’est de cela qu’il est question.

Je ne m’oppose pas à ce que le mot « impérieuse » soit supprimé, mais je ne renonce pas au principe d’une salle d’audience dédiée au sein de l’établissement : c’est seulement par exception, parce qu’il faut être concret et tenir compte de la diversité des situations auxquelles les tribunaux sont confrontés, qu’il faut accepter parfois une certaine mutualisation.

Je profite de cette occasion pour évoquer la question des moyens, sur laquelle M. Lurton est revenu à plusieurs reprises : que ne vous l’êtes-vous posée quand vous avez voté la loi du 5 juillet 2011, entrée en vigueur dès le 1er août ?

Mme Jacqueline Fraysse. Parfaitement !

M. Bernard Accoyer. M. Lurton n’était pas député alors !

M. Denys Robiliard, rapporteur. Mais vous, monsieur Accoyer, vous l’étiez.

M. Bernard Accoyer. Mais je n’étais pas en position de prendre part au vote !

M. Denys Robiliard, rapporteur. Cette loi, qui s’est traduite par plus de 60 000 saisines, a été mise en œuvre à moyens constants alors que ses effets sont très différents selon les tribunaux – vingt-huit tribunaux traitent à eux seuls la moitié des dossiers ! À cela s’ajoute qu’elle a été mise en œuvre dans un délai extrêmement bref, en plein été. Il est un peu singulier ensuite de venir nous reprocher de ne pas prévoir suffisamment de moyens pour mettre en œuvre la présente proposition de loi !

J’anticipe un peu, mais un amendement ultérieur du Gouvernement vise à différer l’entrée en vigueur des modifications que nous apportons au contrôle judiciaire au 1er septembre 2014. Pourquoi ? Précisément pour pouvoir dégager les moyens qui sont nécessaires, particulièrement pour les tribunaux les plus touchés par les nouvelles dispositions.

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Je suis hostile à cet amendement du Gouvernement. Je comprends et je partage les raisons invoquées par Mme la ministre : il faut assouplir, permettre la mutualisation, tenir compte de l’organisation des acteurs locaux… Il est certain qu’organiser la tenue obligatoire de l’audience sur les lieux de soins n’est pas simple. Il est courageux de le faire : cela exige d’aménager des locaux et de surmonter des difficultés que les juges soulèvent, sans doute à juste titre, concernant les transports – il faut leur permettre de se déplacer dans des conditions correctes. Bref, cela modifie les habitudes.

M. le président. La parole est à M. Gérard Sebaoun.

M. Gérard Sebaoun. Le rapporteur a rappelé les éléments du débat : enlever le mot « impérieuse » revient à passer de la nécessité impérieuse, qui traite d’une exception, à une nécessité pouvant parfois s’accommoder d’une salle mutualisée – cela nous paraît risqué.

J’entends néanmoins ce que dit le Gouvernement qui, a priori, est favorable à l’aménagement de salles dans chacun des hôpitaux, ou du moins dans le plus grand nombre possible ; mais l’on peut dans certains cas, comme l’a indiqué Denys Robiliard, faire face à une vraie difficulté.

Je voudrais être certain, et c’est également le sens de l’intervention de Jacqueline Fraysse, qu’enlever le mot « impérieuse » ne reviendra pas à justifier la mutualisation d’une salle dans le ressort d’un tribunal de grande instance par une simple nécessité de service.

N’ayant pas eu l’occasion d’examiner cet amendement, nous en parlons aujourd’hui ; or mes collègues sont relativement inquiets. Le texte, tel qu’il était rédigé, nous laissait penser que cela resterait une exception et par conséquent ne poserait pas de difficultés. Aussi, enlever le mot « impérieuse » nous oblige à un vote de confiance sur l’amendement que vous nous proposez. Nous pourrions vous soutenir, mais j’aimerais tout d’abord, madame la ministre, que vous nous rassuriez.

M. le président. La parole est à M. Gilles Lurton.

M. Gilles Lurton. Je souhaite faire deux remarques. Tout d’abord, j’aurais selon vous déploré un manque de moyens. Je veux le dire nettement : je suis favorable au déplacement des magistrats dans les hôpitaux, à l’aménagement de salles pour les recevoir dans des conditions d’audience tout à fait normales et à l’accueil du public dans ces salles d’audience aménagées dans les hôpitaux. Mais avant de prendre une telle décision, nous avons besoin de savoir quelles en seront les conséquences sur le terrain, sur les coûts d’aménagement de ces équipements et sur la surcharge de travail que cela donnera aux juges ; or cela n’apparaît absolument pas dans le texte de loi ni dans les études qui ont été faites sur ce sujet.

Par ailleurs, depuis que j’ai été élu il y a un peu plus d’un an, le 17 juin 2012, vous ne cessez, à chaque texte de loi, à chaque intervention, de nous renvoyer à telle ou telle décision que nous avons adoptée auparavant. Moi, je ne me sens comptable d’aucune décision : j’ai été élu sur mon nom, en dissidence de mon parti politique. Lorsque je prends des décisions, je le fais pour l’avenir, en réfléchissant à ce qui est le mieux pour nos concitoyens, en faisant en sorte que leur situation s’améliore, en trouvant les meilleures solutions pour qu’à l’avenir les choses aillent pour le mieux. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Bernard Accoyer. Voilà ! Dans l’intérêt de la nation !

M. Guy Geoffroy. Bravo !

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre. Je veux préciser à nouveau l’objet de cet amendement pour le Gouvernement. Il est absolument clair que l’objectif est d’une salle d’audience par établissement, et que la règle est que l’audience a lieu dans l’établissement dans lequel est hospitalisé le malade qui doit faire l’objet de cette audience et donc être en contact avec un juge.

Il s’agit en outre d’empêcher une aggravation de l’état de fragilité d’un malade du fait d’un déplacement dans un lieu de justice. En effet, un malade souffrant de troubles psychiques, qui se retrouve pour une audience dans un tribunal où sont jugées des personnes pour des raisons totalement différentes, se trouve naturellement très perturbé.

On ne peut pas exclure que le simple fait de se transporter puisse provoquer des difficultés. Le fait de se rendre dans une salle d’audience située dans un autre établissement de santé, même si le malade n’est pas confronté à une multiplicité de prévenus de natures différentes, est particulièrement troublant et choquant pour lui ; même si les situations sont différentes, il faut donc éviter les transports. En conséquence, nous sommes bien d’accord que la règle, l’objectif, le cadre général, c’est une salle d’audience par établissement de santé.

Il n’empêche que, dans certaines situations, parce que plusieurs établissements seraient rapprochés, parce que certains établissements seraient de très petite taille, parce qu’il peut arriver que l’audience ne puisse se tenir dans une salle spécifique à un moment donné, nous devons nous donner les moyens de faire en sorte que la loi soit applicable ; il est alors souhaitable que l’on puisse mutualiser dans certains cas.

Certes, la proposition de loi prévoit ces cas de mutualisation en cas d’impérieuse nécessité. Selon notre analyse, le terme « impérieuse » n’apporte pas d’élément juridique suffisamment précis à la notion même de nécessité pour qu’il soit utile de l’inscrire dans la loi, car cela peut être source de contentieux sur le caractère impérieux ou non de la nécessité.

Nous préférons simplement rappeler qu’en cas de nécessité, la mutualisation est possible. Le simple fait que la loi prévoie déjà une restriction montre bien que ce n’est pas l’objectif et pas la règle générale, mais bien une dérogation à cette règle générale, qui reste posée comme telle.

J’espère, monsieur le député, vous avoir apporté des précisions suffisantes pour que vous soyez à même d’apporter votre vote à cet amendement.

(L’amendement n56 est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Roumegas, pour soutenir l’amendement n2.

M. Jean-Louis Roumegas. Cet amendement vise à restreindre l’utilisation du système de visioconférence. Le recours à ce système, très contesté en matière de soins psychiatriques, a été très inégal selon les juridictions ; on peut donc penser qu’il était utilisé davantage pour des raisons pratiques, de commodité, que dans l’intérêt du patient.

La proposition de loi améliore, il est vrai, l’encadrement de la visioconférence puisqu’elle prévoit explicitement que le directeur de l’établissement doit obtenir l’accord exprès du patient. Cependant, les problèmes posés par la visioconférence sont manifestes ; ils sont d’ailleurs évoqués par la loi, qui permet à l’avocat de s’assurer de l’avis de son client.

On voit bien que cela pose problème. Pour restreindre réellement l’usage de la visioconférence, cet amendement propose que la décision du juge soit dûment motivée. Je sais que cette notion peut être interrogée sur le plan juridique, mais je suis certain qu’elle aura un effet sur le plan pratique et évitera le recours par commodité à la visioconférence.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Denys Robiliard, rapporteur. Cet amendement a été rejeté par la commission. Comme vous l’indiquiez, monsieur Roumegas, on se demande quelle en serait la portée.

Tout d’abord, un consensus s’est exprimé sur ce sujet dans la totalité des auditions auxquelles nous avons procédé. La mise en place de la visioconférence relevait par le passé d’une logique de l’administration de la justice, mais elle n’est pas adaptée aux audiences tenues par les juges des libertés et de la détention à propos des malades mentaux.

En effet, le lien humain que constitue l’audience est essentiel ; il passe extrêmement mal par la visioconférence, et encore plus mal pour certains patients ayant un rapport plus que difficile avec l’audiovisuel – parce qu’ils peuvent entendre des instructions, etc. Sans vouloir développer cet aspect, à l’évidence, cela ne colle pas.

Maintenant que nous sommes d’accord sur le principe, nous n’allons pas conserver le droit en l’état. Bien que très peu pratiquée, la visioconférence l’est parfois ; c’est pourquoi nous avons ajouté « à titre exceptionnel ». Ce n’est donc que par exception que des audiences audiovisuelles pourront se tenir.

Votre amendement prévoit d’insérer les mots « par décision dûment motivée » : cela signifie que la juridiction avant-dire droit devrait prendre une première décision. Du point de vue de la procédure, elle serait susceptible d’appel en même temps que la décision rendue au fond, sauf autorisation du premier président ; cela sera donc extrêmement complexe et surtout n’apportera pas de garantie supplémentaire au patient, qui devra faire appel de la décision au fond devant le premier président pour discuter de la décision qu’aura prise le premier juge de recourir à la visioconférence. Il n’aura donc de toute façon aucune garantie supplémentaire.

Je propose donc que vous retiriez votre amendement en signe de confiance au juge. Les juges en effet entendent ce que nous disons, et ils ont le souci d’appliquer la loi, même lorsqu’ils trouvent que le législateur en prend à son aise avec les moyens dont ils disposent. Ils n’en conservent pas moins le souci d’appliquer la loi et entendent parfaitement que ce n’est qu’à titre exceptionnel qu’il peut être recouru à la visioconférence.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Même position ; je demanderais volontiers à M. Roumegas de retirer son amendement, sinon je serai obligée de lui donner un avis défavorable car, comme cela a été très bien dit à l’instant par le rapporteur, votre amendement, monsieur le député, aboutirait à complexifier les choses sans apporter de garantie supplémentaire.

Les juges ont la volonté d’appliquer la loi dans les meilleures conditions possible pour ces patients. Votre proposition aboutirait à rendre le processus d’ensemble très lourd et très complexe.

M. le président. Retirez-vous votre amendement, mon cher collègue ?

M. Jean-Louis Roumegas. Je le retire.

(L’amendement n2 est retiré.)

(L’article 6, amendé, est adopté.)

Article 6 bis

(L’article 6 bis est adopté.)

Article 7

(L’article 7 est adopté.)

Article 7 bis

M. le président. La parole est à M. Gérard Sebaoun.

M. Gérard Sebaoun. Je souhaite demander au Gouvernement un rapport sur le fameux registre existant aujourd’hui, qui est légal mais apparaît extrêmement moyenâgeux, même s’il est tout à fait indispensable, légal et utile.

Nous devons donc réfléchir à un autre mode de communication que ce rapport papier. La dématérialisation de ce fameux registre, qui existe dans les hôpitaux psychiatriques, constitue une voie d’avenir, mais nous paraît complexe sur le plan du droit. C’est pourquoi nous demandons au Gouvernement un rapport sur ce sujet.

(L’article 7 bis est adopté.)

Article 8

M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement n6.

M. Bernard Accoyer. Cet amendement porte sur une des dispositions-phare du texte qui nous est soumis par la présente proposition de loi, dont l’article 9 abroge l’article L.3222-3 du code de la santé publique.

Il est particulièrement préoccupant que l’article 8 opère une mise en cohérence distinguant les malades ayant fait un séjour en unité pour malades difficiles de ceux ayant été reconnus irresponsables. Seuls ces derniers font l’objet d’une procédure de contrôle de leur dangerosité renforcée, et uniquement lorsque cette irresponsabilité a été prononcée pour des faits punis d’au moins cinq ans d’emprisonnement pour les atteintes à la personne et dix ans pour les atteintes aux biens.

Cette disposition introduite à l’article 8 est tout à fait préoccupante, pour ne pas dire inquiétante. Elle occulte complètement le plus grand nombre des malades psychiatriques qui, évidemment, ne sont pas passés à l’acte, puisque le passage à l’acte est rare, mais qui pour autant peuvent avoir besoin d’une procédure de soutien renforcé car ils peuvent être dangereux pour eux-mêmes. Il arrive aussi qu’avant que le malade passe à l’acte, et c’est même le cas le plus fréquent, le clinicien ait pu repérer une dangerosité évidente.

Ce texte présente donc en la matière une défaillance tout à fait surprenante. Si je parle ainsi, vous allez peut-être me qualifier de dangereux sécuritaire obsessionnel. Permettez-moi en retour de vous dire que vous, vous donnez dans l’angélisme !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Denys Robiliard, rapporteur. Monsieur Accoyer, je ne vous surprendrai pas en vous disant que la commission est défavorable à cet amendement. Celui-ci reprend les mêmes dispositions que l’amendement n5. Aussi, je ne répéterai pas les arguments que j’ai avancés tout à l’heure.

Vous disiez tout à l’heure que j’étais un peu maniaque. Là, je me demande si ça ne tourne pas à la monomanie !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Avis défavorable.

(L’amendement n6 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement n49.

M. Bernard Accoyer. Il s’agit d’un amendement de cohérence qui vise à rétablir l’article L. 3211-8 du code de la santé dans la rédaction issue de la loi de 2011 pour les raisons que je viens d’évoquer.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Denys Robiliard, rapporteur. Il s’agit effectivement d’un amendement de cohérence avec des amendements qui n’ont pas été adoptés. Par cohérence donc, il pourrait être retiré.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

(L’amendement n49 n’est pas adopté.)

(L’article 8 est adopté.)

Article 9

M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement n7.

M. Bernard Accoyer. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Denys Robiliard, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

(L’amendement n7 n’est pas adopté.)

(L’article 9 est adopté.)

Article 10

M. le président. La parole est à M. Gérard Sebaoun, pour soutenir l’amendement n46.

M. Gérard Sebaoun. C’est un amendement de coordination avec un amendement qui a été adopté tout à l’heure.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Denys Robiliard, rapporteur. Favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Comme tout à l’heure j’ai dit que le Gouvernement s’en remettait à la sagesse de l’Assemblée, par cohérence, j’émets le même avis. Sagesse donc.

(L’amendement n46 est adopté.)

(L’article 10, amendé, est adopté.)

Article 11

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n58.

M. Denys Robiliard, rapporteur. C’est un amendement de coordination.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Favorable.

(L’amendement n58 est adopté.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n44 rectifié.

M. Denys Robiliard, rapporteur. Coordination.

(L’amendement n44 rectifié, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n59.

M. Denys Robiliard, rapporteur. Coordination.

(L’amendement n59, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 11, amendé, est adopté.)

Article 12

M. le président. La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement n55.

Mme Marisol Touraine, ministre. Cet amendement vise à décaler l’entrée en vigueur de la loi au 1erseptembre 2014 en ce qui concerne les dispositions relatives à l’intervention du juge, afin que nous ayons le temps d’organiser de façon plus satisfaisante les conditions dans lesquelles aura lieu cette intervention.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Denys Robiliard, rapporteur. Favorable.

Une bonne réforme, c’est aussi celle que l’on se donne le temps de mettre en œuvre. Cela contrastera avec ce qui s’était passé avec la loi du 5 juillet 2011 – mais je n’en fais pas grief à la précédente majorité, car elle était très contrainte par le calendrier que lui avait imparti le Conseil constitutionnel.

M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer. Je ne peux pas vous laisser dire cela, monsieur le rapporteur.

Cette fois-ci, la procédure choisie est précipitée. Cette proposition de loi n’a pas fait l’objet d’une étude d’impact. La dernière fois, il y avait également une décision du Conseil constitutionnel. Le législateur avait disposé de huit mois seulement entre la question prioritaire de constitutionnalité et la date d’effet de la censure. Cinq lectures avaient eu lieu dans les deux assemblées. Cette fois, il disposait dix-huit mois. Or nous légiférons le dernier jour d’une session extraordinaire. Ce n’est pas une bonne méthode pour des questions aussi graves.

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Le dernier jour de l’année, il existe quand même !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Denys Robiliard, rapporteur. Monsieur Accoyer, comme je l’ai dit tout à l’heure, le dernier jour est un bon jour ou alors ce sera l’avant-dernier jour qui sera le dernier et l’on n’en finira pas !

Un long processus a eu lieu à travers la mission conduite par M. Barbier et dont je suis le rapporteur. La consultation qui a eu lieu a pu remplacer avantageusement, me semble-t-il, l’étude d’impact que vous appelez de vos vœux.

(L’amendement n55 est adopté.)

(L’article 12, amendé, est adopté.)

Article 13

M. le président. La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement n57, tendant à supprimer l’article 13.

Mme Marisol Touraine, ministre. Pour que la proposition de loi soit recevable, celle-ci était gagée. Il convient donc de lever le gage s’agissant des frais juridictionnels.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Denys Robiliard, rapporteur. Avis très favorable, à titre personnel.

(L’amendement n57 est adopté et l’article 13 est supprimé.)

Titre

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n48.

M. Denys Robiliard, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de précision.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Favorable.

(L’amendement n48 est adopté et le titre est ainsi rédigé.)

Explications de vote

M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou.

Mme Annie Le Houerou. Je tiens tout d’abord à remercier le rapporteur, Denys Robiliard, pour la qualité de son travail de rédaction de la présente proposition de loi, mais aussi et surtout sur le rapport d’étape de la mission parlementaire sur la santé mentale, mission transpartisane présidée par Jean-Pierre Barbier, député UMP, dont je salue l’absence lors de l’examen de ce texte alors que M. Accoyer réclamait ce matin une mission transpartisane sur le sujet.

Ce travail de fond a servi de base à la rédaction du présent texte. Suite à une question prioritaire de constitutionnalité en date du 20 avril 2012, le Conseil constitutionnel a jugé contraires aux droits fondamentaux plusieurs dispositions relatives à l’admission des patients en unité pour malades difficiles ainsi qu’aux hospitalisations sans consentement des personnes pénalement irresponsables décidées par le préfet. Le Conseil a donné jusqu’au 1er octobre 2013 pour mettre notre législation en conformité.

Ce texte met un terme à une vision sécuritaire et à une banalisation abusive du recours à cette procédure d’urgence qui a prévalu ces dernières années. Ce travail a été réalisé sereinement. Depuis quelques mois, la mission parlementaire a procédé à de nombreuses auditions et fait des recommandations qui sont reprises dans ce texte, qui aurait dû faire l’unanimité puisque M. Accoyer a admis, lors de la discussion générale, les « opportuns ajustements » proposés par notre texte.

Ce texte devance une grande loi de politique publique sur la santé mentale qui ne manquera pas de nous être proposée dans un avenir proche. Dans l’attente, cette approche par le soin et la recherche des solutions les plus humaines possible pour traiter les patients psychiatriques sont proposées ici dans le respect des libertés fondamentales.

Je ne reviens pas sur le contenu qui vient d’être largement débattu : suppression du statut légal des UMD, régime spécifique de levée par le préfet ou de mainlevée par le juge des mesures de soins sans consentement. Le groupe SRC se félicite de cette proposition qui est aussi l’occasion de réviser le régime judiciaire de contrôle des soins psychiatriques sans consentement. La loi se positionne sur le délai de contrôle et d’intervention du juge des libertés et de la détention, qui a été fixé à douze jours, sur le lieu de l’audience et privilégie un lieu dédié préservant l’indépendance de la justice au sein de l’hôpital.

Un amendement d’appel proposait de mieux protéger les droits des mineurs hospitalisés en soins psychiatriques à la demande de leurs parents. Le problème est identifié, la réponse reste à trouver. L’obligation d’assistance par un avocat permet aussi de préserver les droits des personnes.

Pour toutes ces raisons, le groupe SRC soutient cette proposition de loi et la votera. Nous sommes très satisfaits de voter une loi de progrès pour les libertés individuelles tout en préservant la protection des personnes. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer. C’est à contrecoeur que le groupe UMP sera obligé de voter contre ce texte, alors qu’un certain nombre de dispositions, qui reprennent les propositions de M. Lefrand et de M. Blisko, vont dans le bon sens, notamment la diminution du nombre de certificats, le rétablissement des sorties d’essai et le déroulement des audiences avec le juge des libertés au sein même de l’hôpital lorsque c’est possible, en espérant, madame la ministre, que votre amendement n’aura pas des effets insidieux, pour me rapprocher du mot que vous avez utilisé en défendant votre propre amendement.

Nous ne pouvons, hélas, pas voter ce texte, parce qu’il est le fruit d’une précipitation inadmissible sur une question qui touche aux libertés et parce qu’il avait été admis, pendant les deux tiers de la fin de la dernière législature, que jamais on ne légiférerait dans l’urgence sur les questions relatives aux droits fondamentaux des personnes. Or, là, nous touchons aux droits fondamentaux des malades psychiatriques qui ont droit à notre attention et à notre respect.

Nous voterons contre ce texte en raison également de la suppression de la définition légale des unités pour malades difficiles, ce qui créera ipso facto des unités sauvages où il se passera des choses sur lesquelles le législateur n’aura pas eu son mot à dire puisque nous avons décidé d’abandonner de nous prononcer sur cet outil qui est avant tout thérapeutique, d’une très grande utilité et pas seulement pour les malades les plus dangereux.

Enfin, en mettant la barre de ce que vous appelez la dangerosité d’un malade à un niveau de délit qui exige d’abord le passage à l’acte, vous adoptez une démarche difficilement compréhensible et même tout simplement acceptable. De surcroît, en limitant le régime spécifique des irresponsables pénaux, le réservant aux personnes ayant commis des faits passibles de cinq ans de prison en cas d’atteinte aux personnes et de dix ans de prison pour les atteintes aux biens, il y a là une exclusion de facto de la quasi-totalité des malades psychiatriques puisque ceux qui passent à l’acte sont, nous le savons, particulièrement rares.

Pour toutes ces raisons, nous voterons contre ce texte en appelant de nos voeux un travail qui soit beaucoup plus partagé et qui prenne en compte les effets que nous pensons être, hélas, négatifs du texte que vous vous apprêtez à voter.

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Monsieur le président, la présente proposition de loi abandonne la démarche sécuritaire qui présidait au texte de 2011 pour réfléchir avec un seul objectif : l’intérêt des malades. Ce seul aspect pourrait presque suffire à justifier notre vote en faveur de ce texte. Outre la réponse à la sollicitation du Conseil constitutionnel, le texte en profite pour réviser et améliorer la loi de 2011 et il le fait au regard de l’expérience de ces deux années d’application et dans le cadre d’une mission sérieuse et pluraliste qui a permis à tous de réfléchir, d’écouter, d’entendre les professionnels.

Je ne reviens pas sur les insuffisances de ce texte, ni sur ses limites. Je souhaite que les moyens nécessaires à son application dans de bonnes conditions soient mis en œuvre, en milieu hospitalier mais aussi en faveur de la justice, qui a besoin de moyens pour remplir correctement sa mission.

Je souhaite aussi que la réflexion se poursuive dans le cadre de la mission, car, nous l’avons tous dit, la prise en charge de la maladie mentale doit être modernisée, pour aider les patients qui sont nombreux.

Je souhaite enfin qu’une grande loi de santé publique, comme vous en avez pris l’engagement, madame la ministre, avec un volet spécifique concernant la psychiatrie, puisse être examinée et adoptée ici dans les meilleurs délais.

Compte tenu de l’ensemble de ces observations, notre groupe votera ce texte.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Roumegas, pour le groupe RRDP.

M. Jean-Louis Roumegas. Dans mon propos liminaire, je pense que vous pouviez deviner mon intention. Nous voterons ce texte qui met fin à une dérive sécuritaire, mais aussi à une dérive dans le mode d’élaboration des lois : pour répondre à des faits-divers, on nous inventait des lois d’une grande légèreté qui sont aujourd’hui emportées par le vent de l’histoire. C’est une bonne chose.

Dans le débat, nous avons voulu quant à nous renforcer la protection des droits civiques et le contrôle de la privation de liberté. Vous n’avez accepté qu’un seul de nos amendements, mais c’était l’amendement essentiel : celui qui va instituer une mesure qui me paraît, au plan symbolique mais aussi au plan pratique, porteuse d’un contrôle démocratique important, l’instauration d’un droit de visite parlementaire dans ces lieux de privation de liberté, fussent-ils en psychiatrie.

C’était un amendement pour nous très important. Nous nous réjouissons donc du soutien que vous lui avez apporté, car, au delà de cette loi sur les soins sans consentement, il va dans le sens que nous voulons pour la psychiatrie en général. Il faut sortir de cette vision qui fait de la psychiatrie un monde à part, dans lequel on sort les malades de l’espace démocratique et de la société. J’espère que la loi de santé publique que Mme la ministre nous a promise sera dans cet esprit, dans une conception qui intègre davantage la psychiatrie dans notre société, qui développe les soins en milieu ouvert et qui renforce la formation des infirmières et des infirmiers en charge des personnes atteintes de troubles psychiques. J’espère qu’enfin nous irons vers une société qui sache traiter ses malades psychiatriques sans procéder par leur exclusion, une société qui sorte de la peur pour intégrer chacun de ses sujets. (Applaudissements sur les bancs des groupes RRDP, écologiste et SRC.)

M. le président. La parole est à M. Édouard Fritch.

M. Édouard Fritch. Le groupe UDI votera ce texte, qui répond à une nécessité. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et SRC.)

Vote sur l’ensemble

M. le président. Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté. Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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Nombre et répartition des sièges de conseiller de Paris

Discussion d’une proposition de loi adoptée par le Sénat

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion d’une proposition de loi adoptée par le Sénat, après engagement de la procédure accélérée, fixant le nombre et la répartition des sièges de conseillers de Paris.

Présentation

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

M. Manuel Valls, ministre de l’intérieur. Nous sommes aujourd’hui de nouveau réunis pour débattre d’un texte très simple, que vous connaissez déjà, que vous avez déjà adopté, mais qui a connu quelques péripéties suite à une erreur de procédure, il faut tout simplement le reconnaître.

La décision du Conseil constitutionnel du 16 mai 2013, qui validait – je le rappelle au passage – l’essentiel de la loi créant le scrutin binominal majoritaire pour les élections départementales, nous obligeait à fixer le nombre et la répartition par arrondissement des 163 sièges de conseillers de Paris. Pour ce faire et pour aller vite, une proposition de loi du président de la commission des lois de l’Assemblée nationale avait été déposée, débattue et adoptée le 10 juillet dernier. Je ne dévoile aucun secret d’État en vous disant qu’un oubli nous a conduits à modifier ce dispositif : je le regrette, pour vous comme pour moi, même si c’est un plaisir de vous retrouver.

Mme Sandrine Mazetier. Pour nous aussi, monsieur le ministre !

M. Manuel Valls, ministre. Merci, madame. Le décret d’ordre du jour de la session extraordinaire a été modifié et nous examinons donc en première lecture une nouvelle proposition de loi, strictement identique à la première, déposée par le président de la commission des lois du Sénat et adoptée par la Haute Assemblée à une large majorité le mardi 23 juillet.

Revenons maintenant sur le contenu de ce texte. Lorsque je vous ai présenté la légère modification qui figurait dans le projet de loi sur les scrutins départementaux, communaux et intercommunaux, le Gouvernement pensait réellement que cette actualisation ne posait pas de problème constitutionnel, précisément parce que nous respections le plancher de trois conseillers par arrondissement qui figurait dans la loi de 1982, loi qui avait été validée par le Conseil constitutionnel à l’époque.

Mais le Conseil constitutionnel de 2013 n’est pas celui de 1982. Il a considérablement densifié sa jurisprudence et, en particulier, il a souligné de plus en plus nettement son rôle de gardien de l’égalité du suffrage et, donc, sa vigilance en matière d’égalité de représentation dans toutes les circonscriptions.

Et dans sa décision du 16 mai 2013, le Conseil constitutionnel nous a dit que le projet de loi n’allait pas assez loin. Sa censure de l’article consacré à Paris était donc une incitation et même une obligation à aller plus loin dans l’égalité de représentation des Parisiens, arrondissement par arrondissement.

Le Conseil constitutionnel a considéré dans sa décision qu’en conservant un nombre minimal de trois conseillers de Paris par arrondissement, le législateur avait maintenu dans les Ier, IIe et IVe arrondissements un rapport du nombre des conseillers de Paris à la population de l’arrondissement qui s’écartait de la moyenne constatée à Paris dans une mesure « manifestement disproportionnée ».

La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui a ainsi pour objet d’établir un nouveau tableau, conforme au principe d’égalité devant le suffrage défini par le Conseil constitutionnel, sans augmenter le nombre global des conseillers de Paris et sans modifier ni la composition des conseils d’arrondissement, ni leur fonctionnement.

Compte tenu de la proximité des élections municipales, ce nouveau tableau permettra de prendre acte de la décision du Conseil constitutionnel tout en ne bouleversant pas le régime électoral de la capitale. Il permettra également de conserver le parallélisme entre les régimes électoraux de Paris, Lyon et Marseille, sans augmenter le nombre des conseillers de Paris.

Le choix a été fait de conserver la méthode de calcul employée en 1982, c’est-à-dire de répartir les sièges entre les arrondissements à la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne. Cette méthode est également celle qui avait prévalu pour la répartition des conseillers municipaux à Lyon et à Marseille, villes qui n’ont pas connu de changement, sinon un redécoupage, il y a déjà quelques années, sous l’impulsion de Jean-Claude Gaudin.

Certes, un arrondissement de Paris, le Ier, s’écarte de l’écart à la moyenne de plus ou moins 20 % auquel est attaché le Conseil constitutionnel. Mais nous considérons, je le répète ici, à cette tribune, qu’il y a un motif d’intérêt général à assurer la représentation de chaque arrondissement, à assurer la lisibilité du scrutin dans un cadre habituel pour les électeurs, dès lors que l’écart à la moyenne n’excède pas 26 % et est limité à un seul arrondissement.

Voilà, mesdames et messieurs les députés, le sens du texte que nous examinons aujourd’hui. Je crois que le bon sens, la stabilité des règles électorales, la juste représentation des électeurs et des arrondissements plaident pour une adoption rapide et, j’ose l’espérer, définitive, dans un esprit de consensus. En tout cas, c’est la voie que je vous propose. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. Pascal Popelin, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.

M. Pascal Popelin, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République. Je m’efforcerai de faire preuve de la concision qui sied aux propos d’un rapporteur pour le dernier texte inscrit à l’ordre du jour de notre session extraordinaire, texte qui, à son titre près, est rigoureusement identique à celui que nous avons adopté dans cet hémicycle le 10 juillet dernier.

Sur la forme, le ministre vient d’expliquer les raisons de ce nouveau texte qui, ma foi, nous rappellent à notre condition humaine : il peut parfois y avoir un oubli.

Mme Sandrine Mazetier. Humanum est !

M. Pascal Popelin, rapporteur. Sur le fond, il s’agit simplement d’achever ce processus qui a conduit le législateur à actualiser le tableau de répartition des conseillers de Paris par arrondissement pour les prochaines élections municipales. Le législateur a eu raison, puisque le Conseil constitutionnel a considéré que le tableau actuel de répartition des conseillers de Paris, celui qui est en vigueur depuis 1982, n’était plus adapté à l’évolution démographique de notre capitale.

En revanche, le Conseil constitutionnel a considéré que, dans le travail que nous avions fait, nous n’étions pas allés assez loin dans le respect du principe de l’égalité du suffrage, qui est un principe constitutionnel de plus en plus réaffirmé et renforcé par la jurisprudence du Conseil constitutionnel, plus exigeant que dans l’histoire des précédents découpages électoraux.

Ce texte n’est qu’un ajustement, puisque le mode de scrutin n’est pas modifié, ni le nombre des conseillers de Paris, ni le nombre ni le découpage des vingt arrondissements parisiens. Il vise simplement à mettre le tableau de répartition des conseillers de Paris par arrondissement en conformité avec la jurisprudence du Conseil constitutionnel.

Cet ajustement ne porte que sur six sièges et est le fruit d’un calcul purement mathématique : la mise en œuvre de la répartition à la plus forte moyenne, ajustée pour deux sièges sur les écarts à la moyenne afin de se situer dans les limites admises par le Conseil constitutionnel, est proposée. (M. le rapporteur renverse son verre d’eau.)

Il fallait que ça arrive, en cette dernière séance…

Je vous suggère donc d’adopter cette modification, afin de doter de nouveau la ville de Paris d’un tableau de répartition des membres de son assemblée délibérante dans des délais qui permettront à chacune et à chacun de préparer sereinement, dès la rentrée, l’échéance électorale du mois de mars prochain. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Discussion générale

M. le président. La parole est à M. Philippe Goujon, dans quelques secondes, le temps de procéder à quelques ajustements…

M. Philippe Goujon. Je suis habitué au milieu aquatique… (Sourires.)

Que d’eau, que d’eau !

Cette séance me fait l’effet d’une session de rattrapage pour mauvais élève…

M. Pascal Popelin, rapporteur. L’important, c’est de réussir l’examen !

M. Philippe Goujon. Cette séance manque pour le moins de sens, puisque nous sommes amenés à débattre de nouveau, de façon assez injustifiée, reconnaissez-le – vous l’avez dit, cher rapporteur, monsieur le ministre –, sur un texte exactement identique à celui que nous avons examiné il y a tout juste une semaine, du fait d’une erreur de débutant – avouez-le ! – commise par le Gouvernement et qui vous oblige à repartir de zéro. (M. le ministre agite les mains.) Le ministre de l’intérieur n’en est pas responsable : je tiens à le dire à cette tribune ! (Sourires.) Je ne dénoncerai personne. (Mêmes mouvements.)

Au-delà de sa méconnaissance de la procédure parlementaire – il faut le dire, quand même ! –, le Gouvernement affiche son mépris pour le fonctionnement du Parlement et pour les parlementaires dans une session extraordinaire déjà outrancièrement surchargée. En omettant d’engager la procédure accélérée sur la proposition de loi de M. Urvoas, qui résultait déjà elle-même d’une grave censure que le Conseil constitutionnel avait infligée au Gouvernement…

M. Pascal Popelin, rapporteur. Gravissime ! (Sourires.)

M. Philippe Goujon. …– d’une censure gravissime, si vous préférez, cher collègue –, ce dernier expose ce texte à une nouvelle censure du Conseil constitutionnel sur le fondement de la violation des articles 42, alinéa 3, et 45 de la Constitution.

À ce cafouillage qui ridiculise d’une certaine manière le Gouvernement – pas trop méchamment, mais il le ridiculise un peu quand même ! – s’ajoute le bricolage juridique. Pour réparer son erreur grossière, le Gouvernement a imposé au Parlement l’examen, en moins d’une semaine, d’un soi-disant nouveau texte, déposé cette fois par Jean-Pierre Sueur, réplique de la proposition de loi Urvoas. Je remarque d’ailleurs, mes chers collègues, que le rapport du sénateur Madec ne consacre pas une seule ligne aux raisons que je viens de décrire ; l’exposé des motifs de la proposition de loi Sueur adopte le même silence pudique.

Des conditions d’examen aussi invraisemblables constituent en réalité une marque de mépris à l’égard non seulement du Parlement, mais aussi des élus parisiens. Tout cela pour satisfaire – mes collègues parisiens ici présents le savent bien – les ambitions d’une première adjointe au maire de Paris en perte de vitesse ! Mais ces arguties ne suffiront pas à faire d’une éternelle seconde la première à Paris.

Aussi les députés du groupe UMP ont-ils manifesté, tout comme leurs collègues sénateurs, leur indignation…

M. Pascal Popelin, rapporteur. Leur mauvaise humeur !

M. Philippe Goujon. …devant des procédés aussi honteux en refusant de siéger en commission des lois pour examiner ce texte. Le ridicule a des limites, quand même !

Votre co-rapporteur tient néanmoins à rappeler les raisons qui l’avaient déjà conduit à émettre un avis défavorable à la proposition de loi Urvoas. Le fait que les deux présidents de commission des lois de l’Assemblée nationale et du Sénat se prêtent à ces petits jeux politiciens ne les grandit pas vraiment.

La répartition proposée des conseillers de Paris, même si elle est plus juste démographiquement,…

M. Pascal Popelin, rapporteur. Merci de le reconnaître !

M. Philippe Goujon. …risquera tout de même de produire mécaniquement un solde de trois à cinq sièges supplémentaires en faveur de la gauche, sans doute dans le but d’éviter à Mme Hidalgo une défaite trop cuisante. Mais si l’argument démographique était réel, la répartition des sièges aurait dû être modifiée simultanément à Paris, Lyon et Marseille, les trois villes étant régies par le même statut,…

M. Claude Goasguen. Absolument !

M. Philippe Goujon. …et tenir compte de l’impact de projets d’urbanisme majeurs – comme celui des Batignolles, dans le 17arrondissement, par exemple –, faute de quoi cette répartition sera rapidement condamnée à l’obsolescence.

Surtout, monsieur le ministre, et c’est là le point essentiel, vous ratez l’occasion de rendre clair et transparent aux yeux des Parisiens le mode de scrutin de la capitale en l’alignant sur le droit commun municipal. C’est tout ce que nous demandions et c’est ce que proposait l’amendement de notre collègue Bernard Debré. Alors que le Gouvernement vient d’imposer soudainement l’élection des conseillers métropolitains au suffrage universel direct,…

M. Pascal Popelin, rapporteur et Mme Sandrine Mazetier. Pour 2020 !

M. Philippe Goujon. Certes ! Je ne vois pas pourquoi nous légiférons si longtemps à l’avance…

M. Claude Goasguen. C’est demain ! (Sourires.)

M. Philippe Goujon. En tout cas, l’élection au suffrage universel direct conférera à chaque conseiller métropolitain une légitimité démocratique supérieure à celle du maire de Paris lui-même. Il aurait été plus que justifié et cohérent de faire élire le maire de la capitale au suffrage universel par tous les Parisiens, et de lui donner ainsi une légitimité au moins égale à celle des conseillers métropolitains. Cette modification aurait permis de résoudre le paradoxe actuel, selon lequel les maires d’arrondissement, qui ne sont pas des maires de plein exercice, sont élus par tous les électeurs du territoire qu’ils administrent – l’échelle infra-municipale que constitue l’arrondissement – alors que le maire de Paris, qui est le maire de plein exercice détenant tous les pouvoirs décisionnels, n’est pas élu à l’échelle administrative qu’il administre – celle de la commune de Paris –, puisqu’il n’est pas choisi par les électeurs de toute sa ville, mais seulement par ceux de l’arrondissement dans lequel il se présente.

Il est faux d’affirmer, comme je l’ai entendu, que cette démocratisation desservirait les arrondissements qui, maintenus tels quels, bénéficieraient au contraire de la légitimité accrue du maire de Paris, celle-ci le renforçant par rapport à l’État, particulièrement prégnant à Paris, et non à l’égard des maires d’arrondissement sur lesquels il a déjà tout pouvoir, ceux-ci n’en ayant aucun en matière administrative, réglementaire, fiscale ou budgétaire, n’émettant que des avis et n’étant même pas dotés de la personnalité morale.

Le renforcement des pouvoirs des maires d’arrondissement ne tient pas au mode d’élection du maire de Paris mais à la volonté de ce dernier de leur transférer ou non des compétences réelles. Vous venez d’ailleurs de faire l’inverse en les ignorant superbement dans la création de la métropole du Grand Paris : c’est le seul maire de Paris qui vient d’être prodigieusement renforcé – contre l’avis du Gouvernement, d’ailleurs – en se voyant conférer tous les pouvoirs du préfet de police en matière de circulation et de stationnement – ce dont, avec Nathalie Kosciusko-Morizet et les élus parisiens, nous nous réjouissons par ailleurs.

La vraie raison de votre peu d’appétence démocratique comme de ces petits tripatouillages électoraux, c’est votre crainte que, si tous les Parisiens pouvaient voter pour le maire de Paris à la tête de sa liste municipale, comme dans toutes les villes de France, ce ne soit pas la dauphine de M. Delanoë qui soit élue, mais celle qui veut redonner leur fierté et leur liberté aux Parisiens, Nathalie Kosciusko-Morizet. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Pascal Popelin, rapporteur et Mme Annick Lepetit. Ce n’est pas un meeting électoral !

Mme Sandrine Mazetier. Où est-elle, d’ailleurs ? Comme d’habitude, elle n’est pas là !

M. Philippe Goujon. Les députés socialistes de Paris ne sont pas très présents non plus !

Mme Sandrine Mazetier. Je suis présente et, à titre personnel, je ne suis pas candidate à la mairie de Paris !

M. le président. La parole est à M. Édouard Fritch.

M. Édouard Fritch. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, il y a deux jours, notre assemblée débattait d’un projet de loi relatif à l’élection des sénateurs. Aujourd’hui, nous examinons pour la seconde fois une proposition de loi relative à l’élection des conseillers de Paris. Décidément, cette fin de session aura été en grande partie rythmée par les modifications de calendriers, de modes de scrutin et de règles électorales ! Élections municipales, cantonales, régionales, sénatoriales : jour après jour, mois après mois, vous avez procédé, pas à pas, au bouleversement et au démantèlement progressif de l’ensemble de notre édifice électoral. Le groupe UDI n’a cessé de le dire : ces nombreuses réformes vont à l’encontre d’un principe démocratique qui nous est cher, selon lequel on ne modifie pas les règles électorales à moins d’un an des élections. Or nous sommes à neuf mois des municipales.

Nous tenons également à dénoncer les conditions d’examen de ce texte. Cela a été rappelé précédemment : à cause d’une erreur de procédure du Gouvernement, l’urgence n’a pas été déclarée. Sous la menace d’une nouvelle censure du Conseil constitutionnel pour vice de forme, vous vous êtes trouvés dans l’obligation de déposer une proposition de loi identique, sur laquelle l’urgence a cette fois été déclarée. Nous voici donc contraints d’examiner ce texte en seconde lecture dans l’urgence, le dernier jour de la session extraordinaire et seulement deux jours après son adoption par le Sénat. Une nouvelle fois, le respect du Parlement est mis à mal.

Sur le fond, le présent texte vise à modifier le nombre et la répartition des sièges de conseiller de Paris dans les arrondissements de la commune, en tenant compte à la fois de l’évolution démographique et de la décision du Conseil constitutionnel sur la loi du 17 mai 2013 relative à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires. Ont été censurées les dispositions relatives aux conseillers de Paris introduites dans la loi du 17 mai 2013, dont l’article 30 modifiait la répartition des sièges des conseillers de Paris entre arrondissements, dans un sens naturellement favorable à la gauche puisqu’elle diminuait le nombre de conseillers des arrondissements tenus par la droite pour augmenter celui des arrondissements tenus par la gauche. Cette volonté de corriger les déséquilibres démographiques était d’autant moins crédible qu’elle se limitait au cas de Paris, sans prévoir la moindre modification concernant Lyon et Marseille.

M. Claude Goasguen. Eh oui !

M. Édouard Fritch. C’est donc bien le caractère arbitraire de cette répartition que le Conseil constitutionnel a déclaré inconstitutionnel. L’argument démographique ne tenait pas,…

Mme Annick Lepetit. Mais si !

M. Édouard Fritch. …puisque cette nouvelle répartition laissait subsister des écarts démographiques disproportionnés : d’un arrondissement à l’autre, le nombre d’habitants représentés par un conseiller de Paris pouvait aller du simple au triple, l’écart maximal par rapport à la moyenne étant de 57 %. Le Conseil constitutionnel a donc, bien légitimement, censuré une disposition qui ne respectait pas les principes établis par la Constitution en matière électorale. Le principe d’égalité devant le suffrage, sur lequel était basée la précédente réforme de l’élection des conseillers de Paris, est celui-là même qui a servi de fondement à la décision des sages.

La solution proposée à travers la présente proposition de loi ne nous satisfait pas davantage car nous y voyons, là encore, la tentative d’une manœuvre électorale mal dissimulée. Par ailleurs, la proposition de loi aurait pu clarifier l’élection du maire de Paris.

M. Claude Goasguen. Très bien !

M. Édouard Fritch. Un système électoral identique à celui des autres communes françaises aurait été plus clair et plus logique. Cela non plus, vous ne l’avez pas pris en compte.

Mais ce texte témoigne d’autres imperfections. Tout d’abord, cette nouvelle répartition aura des conséquences directes sur le mode de scrutin dans le 1er arrondissement, qui ne comptera plus qu’un conseiller de Paris, et dans les 2et 4arrondissements, qui n’en éliront plus que deux. Il y aura ainsi un effet équivalent à un scrutin purement majoritaire dans les arrondissements où les citoyens auront à élire un ou deux conseillers de Paris.

Ensuite, cette nouvelle répartition aura un impact sur le nombre de conseillers d’arrondissement, notamment par la hausse proportionnelle du nombre des conseillers de certains arrondissements de Paris.

Enfin, cette nouvelle répartition emportera inévitablement d’autres conséquences pour Paris, comme pour Lyon et Marseille : la suppression de la disposition selon laquelle le maire d’arrondissement est élu au sein du conseil d’arrondissement parmi les membres du Conseil de Paris, ainsi que la suppression de l’obligation pour l’un des adjoints d’être conseiller municipal.

M. Claude Goasguen. Absolument !

M. Édouard Fritch. Chers collègues, la censure du Conseil constitutionnel aurait dû être l’occasion de nous interroger sur le mode d’élection actuel du Conseil de Paris.

M. Claude Goasguen. Très bien !

M. Édouard Fritch. C’était l’occasion d’étudier une réforme plus moderne, plus juste, en créant une circonscription électorale unique. Dans ce système, les électeurs voteraient pour deux listes : une liste pour le Conseil de Paris, commune à tous les arrondissements, et une liste propre à chaque arrondissement. Cette solution permettrait de remédier à une inégalité démocratique…

M. Bernard Debré. Évidemment !

M. Édouard Fritch. …en instaurant une élection du maire de Paris au suffrage universel direct.

À l’heure où nous examinons ce texte pour la deuxième fois, nous ne sommes pas davantage convaincus par les arguments qui tentent de justifier le bien fondé de cette proposition de loi. Nous ne pouvons cautionner aucune réforme qui serait visiblement électoraliste et uniquement guidée par des intérêts partisans. C’est pourquoi le groupe UDI votera contre cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. François de Rugy.

M. François de Rugy. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, chers collègues, il est un peu étrange de devoir adopter une loi – l’ordre juridique français est ainsi fait – pour procéder à un ajustement du nombre de conseillers de Paris par arrondissement en fonction de la démographie.

M. Pascal Popelin, rapporteur. Ce n’est pas faux !

M. François de Rugy. Il n’y a pas que Paris en France. Dans nos belles et grandes ou petites villes de province, des ajustements sont effectués régulièrement, en fonction des recensements, avant les élections.

M. Philippe Goujon. Cela n’a pas grand chose à voir avec la présente proposition de loi !

M. François de Rugy. On change alors, évidemment, le nombre de conseillers municipaux d’une commune sans passer par la loi. Si nous devions passer par la loi pour les 36 600 communes de France, où irions-nous ?

Nous aurions pu imaginer qu’un décret en Conseil d’État permette de procéder à ces modifications, comme cela sera le cas – et comme cela a toujours été le cas – pour les ajustements et même les redécoupages des cantons – ce qui va beaucoup plus loin que ce texte, qui ne propose pas de redécouper les arrondissements de Paris. Je ne sais pas si nous continuerons à les appeler « cantons » ;…

M. Philippe Goujon. C’est bien dommage !

M. François de Rugy. …en tout cas, je continue à parler d’élections cantonales. Pour ce scrutin un peu étrange et novateur, un décret sera pris en Conseil d’État. La règle du Conseil d’État est très claire : il s’agit de respecter les équilibres démographiques.

Monsieur le ministre, je salue votre intervention à la fois calme et franche : ce sont là, sans doute, deux qualités nécessaires à l’exercice de votre fonction.

Je pensais être, dans cette discussion générale, le seul élu non parisien, puisque, lors de l’examen de la première proposition de loi, c’est Denis Baupin qui s’était exprimé au nom du groupe écologiste. Or, sur la feuille jaune de la séance, j’ai constaté que nous étions quatre : notre collègue de Polynésie, Édouard Fritch, qui s’est exprimé avec beaucoup de précision et de justesse, ainsi que deux députés de l’Essonne – département que vous connaissez bien, monsieur le ministre –, Carlos Da Silva et Nathalie Kosciusko-Morizet que j’aperçois dans l’hémicycle.

M. Pascal Popelin, rapporteur. C’est finement observé !

M. François de Rugy. Nous pouvons en effet tous nous exprimer sur ce sujet. Tout d’abord, comme l’annonçait Denis Baupin il y a quelques semaines, nous sommes favorables à ce texte ainsi qu’au strict respect, autant que faire se peut, de la démographie – c’est en tant que représentant de la nation que je le dis – pour que nos concitoyennes et nos concitoyens…

Mme Annick Lepetit. Surtout nos Parisiennes et nos Parisiens !

M. François de Rugy. …soient totalement égaux devant le suffrage. Le rapport montre très clairement qu’il existe actuellement un déséquilibre pouvant aller du simple au triple. Par exemple, un élu du 1er arrondissement au conseil de Paris représente 5 000 habitants quand, dans le 5e arrondissement, un conseiller de Paris en représente quelque 15 000. Ces écarts, nous les connaissons aussi dans le cas des élections cantonales – nous les « connaissions », devrais-je dire, car j’espère, monsieur le ministre, que cela ne durera pas. Il existe parfois des écarts surréalistes, de un à dix ou même à trente, qui mettent gravement en cause l’égalité devant le suffrage. Je regrette que l’UMP et la droite s’opposent systématiquement…

M. Bernard Debré. Nous ne nous opposons pas, nous proposons quelque chose de nouveau !

M. François de Rugy. …à l’égalité des Françaises et des Français devant le suffrage. De fait, chers collègues, vous vous y êtes opposés lors de la réforme du mode de scrutin des élections départementales, puisque vous avez défendu des amendements qui visaient à instaurer une dérogation à la règle, prétendant ne voir dans cette réforme qu’un tripatouillage électoral.

M. Bernard Debré. En effet !

M. Pascal Popelin, rapporteur. Pour eux, c’est un tripatouillage.

M. François de Rugy. L’égalité devant le suffrage est un principe à valeur constitutionnelle autour duquel nous devrions tous nous retrouver. Vous avez d’ailleurs eu maintes occasions de prouver votre bonne volonté en la matière, puisque, il y a à peine plus d’un an, vous étiez majoritaires dans cette assemblée. Le gouvernement que vous souteniez aurait pu proposer cette modification, il aurait même dû le faire – je souhaiterais pour ma part que cela soit automatique. Il est donc pour le moins surprenant que vous n’ayez pas voulu le faire.

M. Claude Goasguen. C’est incroyable !

M. François de Rugy. Dans ces conditions, n’est-il pas d’autant plus étonnant d’entendre nos collègues, Philippe Goujon et Édouard Fritch, avancer qu’il aurait fallu profiter de cette réforme pour modifier de fond en comble le mode de scrutin des élections municipales parisiennes, en créant une élection au suffrage universel direct du maire de Paris ?

M. Philippe Goujon. Ce n’est pas mon propos !

M. François de Rugy. Mais aucun maire de France n’est élu au suffrage universel direct ! Les maires en France sont élus par leur conseil municipal. Il est assurément fréquent que la tête de liste soit ensuite élue maire par le conseil municipal, mais il n’est pas moins fréquent qu’en cours de mandat quelqu’un d’autre soit appelé à exercer cette fonction, après avoir été élu par le conseil municipal.

M. Philippe Goujon, rapporteur. Tout cela n’est pas bien clair !

M. François de Rugy. La question que vous posez est donc d’autant plus étrange que vous n’en avez jamais eu l’idée quand vous étiez majoritaires – et cela, non seulement pendant les dix années, ou presque, où vous aviez la majorité à l’Assemblée nationale et au Sénat, mais également – même si j’étais à l’époque un enfant,…

M. Manuel Valls, ministre. Mais vous l’êtes toujours, monsieur de Rugy ! (Sourires.)

M. François de Rugy. …j’ai lu des livres d’histoire – de 1983 à 2001, quand la droite a géré la mairie de Paris et qu’elle a réalisé le « grand chelem » en ayant le pouvoir dans tous les arrondissements. À l’époque, vous n’étiez pas gênés par les déséquilibres ni par quelques arrangements avec un suffrage et un scrutin qui se doivent d’être égalitaires et transparents, mais la justice s’en est mêlée et a depuis lors révélé un certain nombre de choses…

M. Claude Goasguen. Cela n’a rien à voir !

M. François de Rugy. Vous auriez pu saisir bien des occasions de conduire des réformes ; vous ne l’avez pas fait. Le moins que l’on puisse faire désormais est donc de rétablir, avant les élections municipales, l’égalité devant le suffrage.

Je voudrais également réagir aux propos de M. Goujon sur l’élection au suffrage universel direct des conseils métropolitains. Vous savez, chers collègues, qu’avec le groupe socialiste et le Gouvernement le groupe écologiste est à l’origine de l’amendement – présenté et adopté la semaine dernière – qui prévoit l’élection au suffrage universel direct d’au moins la moitié des conseils des futures métropoles. Votre position est étrange, puisque vous dites aujourd’hui qu’il faudrait élire le maire de Paris au suffrage universel direct – ce qui n’existe nulle part ailleurs –,…

M. Claude Goasguen. Mais bien sûr que si !

M. François de Rugy. …quand la semaine dernière – je ne remonte pas dix années en arrière, encore moins à 1983 – vous avez voté contre !

M. Claude Goasguen. Cela n’a rien à voir !

M. François de Rugy. C’est incompréhensible. Soit vous êtes pour le suffrage universel direct et ce principe doit être valable en tous lieux et circonstances, soit vous êtes contre. Je note d’ailleurs qu’hier ou avant-hier, à propos du Sénat, vous étiez également contre. Pis encore, si vous étiez contre le suffrage universel, vous étiez surtout contre un ajustement portant sur quelques milliers de grands électeurs sur un total de plus de 150 000. Il faut un peu de cohérence ! Vous ne pouvez pas défendre une position pour les élections municipales et l’exact inverse pour les élections intercommunales.

M. Claude Goasguen. Un peu de calme ! N’oubliez pas que votre parti n’a fait que 2 % au suffrage universel direct…

M. François de Rugy. De notre côté, nous sommes tout à fait favorables à une réflexion sur le mode d’élection du conseil de Paris et à sa révision – y compris s’agissant des pouvoirs des maires d’arrondissements, de l’articulation entre les arrondissements, le conseil de Paris et, demain peut-être, la métropole parisienne. Je suis l’élu d’une ville de province de taille plus modeste, mais, si vous n’aviez qu’une liste pour les deux millions d’habitants de Paris et aucune représentation des arrondissements, vous prendriez, me semble-t-il, le risque d’instaurer une vraie distance entre l’habitant et son élu.

M. Bernard Debré. Ce n’est pas la question !

M. François de Rugy. Dans les grandes villes, nous en sommes plutôt à envisager les conseils de quartier, car il faut toujours trouver le bon équilibre entre le lien de proximité, le local et la cohérence globale. De plus, tout le monde comprend très bien compris qui se présente pour être maire de Paris et, partant, serait éventuellement porté à la mairie par les élus conseillers de Paris, après les votes dans chaque arrondissement. Nous sommes tout à fait disposés à envisager une révision plus globale dans la perspective d’une prochaine élection, mais, s’agissant de celle-ci, nous sommes favorables à l’adoption de ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Manuel Valls, ministre. Remarquable !

M. Bernard Debré. Vous n’avez pas lu l’amendement !

M. le président. La parole est à Mme Sandrine Mazetier.

Mme Sandrine Mazetier. Je ne reviendrai pas sur le contenu de cette proposition de loi, qui reçoit évidemment la pleine approbation du groupe socialiste, mais je voudrais répondre à quelques-uns des propos que nous avions entendus le 10 juillet et que nous avons de nouveau entendus aujourd’hui, alors qu’il n’en avait mystérieusement pas été question pendant les dix dernières années, années où la droite était aux responsabilités. Je vois que le deuxième signataire des amendements de Bernard Debré – qui ont toute leur cohérence, puisqu’il les avait présentés le 10 juillet et qu’il les présente de nouveau aujourd’hui – est François Fillon, récent député de Paris,…

Mme Annick Lepetit. Ah oui, j’avais oublié !

Mme Sandrine Mazetier. …mais qui fut surtout Premier ministre pendant cinq ans. Il avait alors tout loisir de faire des propositions sur le mode d’élection à Paris ou ailleurs. La seule modification que l’on doit à M. Fillon et à son gouvernement, c’est un redécoupage douloureux des circonscriptions, au demeurant couronné d’un succès moindre que celui imaginé. Je suis donc étonnée de voir ceux qui ont été aux responsabilités il n’y a pas si longtemps faire de telles propositions. Quand j’entends nos collègues qui ne sont pas parisiens, je ne leur en veux pas de méconnaître le fait que les conseillers de Paris sont aussi des conseillers généraux et que le conseil de Paris n’est pas un simple conseil municipal. Le maire de Paris est élu comme tous les autres maires de France par les conseillers municipaux, et le président du conseil général de Paris est, comme tous les présidents de conseils généraux de France, élu par les conseillers généraux.

Chers collègues de l’opposition, vous ne vous êtes jamais préoccupés de l’inégalité des Parisiens devant le suffrage. Par exemple, les habitants de ma circonscription étaient trois fois moins bien représentés au conseil de Paris que les habitants du 1er arrondissement.

M. Claude Goasguen. C’est faux !

Mme Sandrine Mazetier. Vous souhaiteriez qu’il y ait une liste de conseillers municipaux et de conseillers généraux totalement déconnectés des arrondissements,…

M. Claude Goasguen. Mais non !

Mme Sandrine Mazetier. …et qui ne prennent donc pas en charge ce que prennent en charge nseulement les conseils d’arrondissement, mais aussi les conseils généraux. Pour les collèges, par exemple, il est particulièrement important d’être rattaché à un arrondissement. Votre proposition déconnecterait complètement les élus parisiens de la réalité de leurs mandants et du terrain parisien. Si je peux comprendre que celui-ci est improprement et insuffisamment connu de nos collègues qui ne sont pas parisiens, je vous reproche à vous de le méconnaître à ce point et de si peu le respecter.

M. Philippe Goujon. Vous n’avez pas lu les amendements !

Mme Sandrine Mazetier. Vous aviez voté contre le projet de loi du Gouvernement qui s’engageait prudemment sur la voie de l’égalité de tous devant le suffrage. Je me félicite qu’à votre initiative le Conseil constitutionnel ait encouragé le Gouvernement et cette majorité à aller au bout…

M. Philippe Goujon. Il a été censuré !

Mme Sandrine Mazetier. …de cette logique de l’égalité devant le suffrage. Vous nous reprochez tout et son contraire : de rétablir l’égalité devant le suffrage, et de le faire avant les élections, sans modifier radicalement le cadre auquel les Parisiennes et les Parisiens sont habitués pour voter. Mais si nous avions engagé une réforme de plus grande ampleur, par exemple en bouleversant le périmètre des arrondissements ou en créant des mairies de secteur, comme cela existe à Marseille, vous nous auriez fait le reproche inverse. C’est pourquoi je suis fascinée de découvrir que des élus parisiens de longue ou de plus fraîche date – mais ayant été Premier ministre –, ou d’autres encore qui souhaitent le devenir, méconnaissent à ce point les réalités de la capitale et l’aspiration historique des Parisiennes et des Parisiens à être dignement représentés. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Philippe Goujon. N’importe quoi ! Vous n’avez pas lu les amendements !

M. le président. La parole est à M. Bernard Debré.

M. Bernard Debré. La session extraordinaire prend fin ce soir, mais nous sommes appelés à débattre d’un texte qui a déjà fait l’objet de plusieurs heures d’échanges dans notre hémicycle, il y a deux semaines à peine, sur la répartition des conseillers de Paris. Pas une virgule n’a changé, pas un mot ou presque n’a été modifié.

M. Manuel Valls, ministre. Grâce à vous, monsieur Popelin !

M. Bernard Debré. Vous avez tout de même corrigé une coquille…

M. Manuel Valls, ministre. C’est déjà cela ! (Sourires.)

M. Bernard Debré. …dans l’exposé des motifs où vous confondiez – ce qui est assez symptomatique – conseillers de Paris et conseillers d’arrondissement. Cela révèle la confusion qui existe dans votre esprit.

M. Pascal Popelin, rapporteur. Nous nous sommes améliorés !

M. Bernard Debré. Il reste beaucoup à faire !

Malgré toute la subtilité de notre débat, il faut se souvenir du titre du texte : ce n’est plus le même. Nous ne débattons plus de la proposition de loi relative à l’élection des conseillers de Paris, enregistrée à à la présidence de l’Assemblée le 13 juin et validée par le décret du 14 juin, mais de la proposition de loi fixant le nombre et la répartition des sièges de conseiller de Paris, déposée en catastrophe par le sénateur Sueur et enregistrée à la présidence du Sénat le 12 juillet.

Pourquoi en sommes-nous arrivés là ? La raison, c’est que le 12 juillet, nous avons atteint le paroxysme de l’incompétence parlementaire. Je le dis sans juger qui que ce soit ni pointer personne du doigt, mais c’est un fait, dû peut-être à votre mépris de la représentation nationale, monsieur le rapporteur. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Pascal Popelin, rapporteur. Que d’excès !

M. Bernard Debré. Nous avions déjà été témoins, tout au long de cette première année de la législature, des petits arrangements de vous et de vos collègues, de votre mépris du Parlement : suspension de séance refusée… ou abusive, députés de la majorité qui votent pour plusieurs de leurs collègues alors que c’est interdit et que cela a été relevé par la présidence. Cependant, je dois dire qu’avec cette proposition de loi vous avez touché le fond, atteint le comble de l’amateurisme en vous prenant lamentablement les pieds dans la Constitution. Vous aviez prévu de faire examiner par le Sénat la proposition relative à l’élection des conseillers de Paris quelques jours seulement après que nous en avons débattu ici. Mais, patatras, vous n’aviez pas le droit car vous aviez oublié d’engager la procédure accélérée sur ce texte de notre collègue Urvoas. S’agit-il vraiment d’un oubli ? Peut-être est-ce une intention rentrée, une volonté non exprimée de fouler aux pieds notre parlement.

Mme Sandrine Mazetier. C’est la boîte à fantasmes !

M. Bernard Debré. Monsieur le ministre, quand vous êtes-vous aperçu de cette bévue ? Juridiquement, ce texte ne pouvait être examiné par le Sénat avant quatre semaines – ce n’est pas moi qui le dis, mais l’article 42 de la Constitution. Comment peut-on faire preuve d’autant de nonchalance lorsque l’on préside aux destinées de notre pays, surtout quand celui-ci va si mal ?

De plus, monsieur le ministre, vous avez fait déposer cette proposition de loi alors que, s’agissant d’une question relative à l’organisation territoriale, le Sénat aurait dû avoir la primauté de l’examen, comme c’est le cas pour le projet d’aujourd’hui. Cela prouve que ce texte était téléguidé. Vous êtes peut-être passé, là aussi, à côté de la légalité. Vous avez usé de malice car votre proposition de loi avait toutes les chances de se faire, elle aussi, censurer par les Sages, et vous avez demandé à Jean-Pierre Sueur de déposer le texte à l’identique au Sénat, en changeant le titre pour pouvoir l’ajouter à l’ordre du jour.

Mais passons sur votre amateurisme. Votre nouvelle proposition de répartition des conseillers de Paris poursuit le même objectif que celui retoqué par le Conseil constitutionnel le 16 mai dernier : protéger l’héritière du maire de Paris et tenter de lui assurer la victoire. Ne vous inquiétez pas : elle ne l’aura pas.

En outre, vous supprimez des sièges de conseillers de Paris au nom de l’égalité devant le nombre de suffrages, mais c’est totalement taux. Ainsi, même dans le 1erarrondissement, il y aura un écart de 26 %. Dans le 17e arrondissement, vous n’avez pas du tout tenu compte de l’évolution programmée de la population alors qu’il y aura 12 000 habitants supplémentaires aux Batignolles dans les mois qui viennent. Vous auriez pu en tenir compte, mais vous avez préféré retirer un conseiller de Paris et deux conseillers d’arrondissement au 17e, car c’est mieux de les donner aux arrondissements de gauche. Il est vrai que cela conforte votre pouvoir, mais ne vous inquiétez pas : il est chancelant.

On voit depuis un certain temps, monsieur le ministre, que vous voulez changer les scrutins, magouiller, peut-être pour affirmer votre volonté de rester au pouvoir malgré tout. « Rome remplaçait Sparte, déjà Napoléon perçait sous Bonaparte » : on voit un peu de totalitarisme arriver. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Bref, nous ne pouvons pas accepter cette proposition de loi. Nous allons tout de même vous proposer des modifications que nous avons évoquées tout à l’heure.

M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue.

M. Bernard Debré. Je vais conclure, monsieur le président, mais je tiens à rappeler à M. de Rugy que nous conservons dans notre proposition les arrondissements : il aurait dû la lire.

M. Claude Goasguen. Bien sûr !

M. Bernard Debré. Il n’y a donc pas de volonté hégémonique.

De plus, dans notre proposition de loi, le maire n’est pas élu directement mais par son équipe.

Nous voulons la démocratie. Vous ne la voulez pas. Encore une fois, vous cherchez à modifier le nombre de conseillers à votre avantage. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Kosciusko-Morizet.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet. Et dire que vous pensiez en avoir fini avec ce texte ! Et dire que vous pensiez avoir enfin réussi à faire voter en première lecture un tripatouillage électoral dans le dos des Parisiens, considérant que le contrôle de constitutionnalité ne serait plus qu’une formalité qui laverait l’affront de la précédente censure ! Nous pensions nous-mêmes que votre angoisse, bien visible, de perdre les élections avait fini par l’emporter sur l’exigence que nous portons ensemble de rendre plus démocratique le scrutin parisien. L’affaire paraissait réglée.

Pourtant, c’est la cinquième fois en six mois que vous présentez à l’Assemblée nationale un tableau sur mesure de répartition des conseillers de Paris : trois lectures pour la loi relative à l’élection des conseillers départementaux, municipaux et communautaires, une lecture pour la proposition de loi du président de notre commission des lois, Jean-Jacques Urvoas, qui n’est pas parmi nous aujourd’hui, et maintenant la proposition de loi du président de la commission des lois du Sénat, Jean-Pierre Sueur. Faites attention : vous n’aurez bientôt plus de président de commission des lois en réserve pour déposer une nouvelle proposition de loi en cas de problème.

M. Pascal Popelin, rapporteur. C’est presque drôle !

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet. Les règles constitutionnelles s’acharnent contre vos arrangements politiciens.

Votre premier texte était d’une audace singulière : le 4e arrondissement, aujourd’hui acquis à la gauche, perdait 17,6 % de sa population, et conservait pourtant ses trois sièges, tandis que le 17e arrondissement, qui ne perdait que 0,62 % de sa population et qui s’attend à une forte augmentation avec le quartier des Batignolles, perdait un siège ! Tout était bon pour s’accrocher à la majorité au conseil de Paris, au point d’oublier un principe démocratique fondateur garanti par la Constitution : le principe d’égalité devant le suffrage. Le commentaire de la décision de censure du Conseil constitutionnel est limpide, je vous le relis, mes chers collègues : « Les écarts par rapport à la moyenne sont manifestement disproportionnés et ne permettent pas de respecter le principe d’égalité devant le suffrage. »

Il y a donc eu un second texte. Nous l’avons étudié il y a seulement quinze jours, et il ne résolvait rien, ne servant qu’à vous préserver d’une censure du Conseil constitutionnel par une répartition certes subtile, mais ne répondant absolument pas à l’impératif démocratique. Cette fois, c’est votre amateurisme qui a été sanctionné. En ne déclarant pas l’urgence et en faisant discuter le texte moins d’un mois après son dépôt, vous avez ignoré l’article 42 de notre Constitution qui impose un délai minimal de six semaines entre le dépôt d’un texte et sa discussion en séance. Bref, vous vous dirigiez donc vers une deuxième censure du Conseil constitutionnel, jusqu’à ce que vous vous rendiez compte, mais après le vote, de votre erreur.

Vient donc maintenant le temps de la précipitation. La proposition de loi de notre collègue Jean-Pierre Sueur déposée et discutée en urgence au Sénat est ainsi, comme l’a noté à l’instant Bernard Debré, le dernier texte en discussion de la session extraordinaire de notre assemblée.

Ces méthodes, Bernard Debré, François Fillon, Claude Goasguen, Philippe Goujon, Jean-François Lamour, Pierre Lellouche, Guy Geoffroy et moi-même, nous les contestons, nous les rejetons fermement. Non seulement parce qu’elles sont une perte de temps pour le Parlement, mais parce qu’elles considèrent avec légèreté et bien peu de rigueur les conditions d’exercice du suffrage des Parisiens.

L’enjeu est en effet bien plus important que la seule question de l’écart par rapport à la moyenne et des délais d’étude de textes. Il s’agit pour la représentation nationale de décider si elle souhaite offrir un nouveau souffle démocratique au scrutin parisien.

Notre proposition est simple et portée par Bernard Debré : offrir aux Parisiens la liberté de choisir par eux-mêmes la majorité qu’ils souhaitent au conseil de Paris et par extension de dessiner le visage de leur maire. Nous proposons qu’ils puissent voter séparément pour une liste d’arrondissement et pour une liste au conseil de Paris. Il ne s’agit nullement de réduire le pouvoir des maires d’arrondissement, comme vous tentez de le faire croire alors que c’est vous qui réduisez leurs marges de manœuvre, et aujourd’hui davantage encore avec votre projet de loi sur la métropole du Grand Paris. Au contraire, en dissociant les deux listes, nous renforçons la légitimité du maire de Paris, mais aussi celle des équipes locales parce que leur l’élection sera considérée comme un scrutin à part entière et non pas seulement comme une simple étape pour composer le conseil de Paris. Ce sera bon pour le maire de Paris, pour les maires d’arrondissement, pour la démocratie et pour les Parisiens. Nous ne comprenons vraiment pas votre obstination à refuser cette proposition, de même que la défiance du Gouvernement et de nos collègues socialistes vis-à-vis du choix direct des Parisiens, comme s’ils en avaient peur.

Notre proposition est plus transparente, moins partisane et plus démocratique. Je vous appelle à faire confiance aux Parisiens et à leur offrir un scrutin lisible pour la désignation de leur maire. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Claude Goasguen.

M. Claude Goasguen. Monsieur le président, monsieur le ministre, j’ai entendu beaucoup de belles paroles, mais il faut bien comprendre dans quel cadre s’inscrit cette loi : celui d’une sanction sans ambiguïté imposée au texte du Gouvernement et au parti socialiste, désavoués totalement par le Conseil constitutionnel. Les raisons sont évidentes : par un arrangement très politique, le parti socialiste s’attribuait dans les arrondissements où il était majoritaire trois sièges de plus, au détriment de ceux où il se considère à juste titre comme minoritaire, qui perdaient trois sièges.

C’est dire…

Mme Sandrine Mazetier. C’est dire que vous n’avez aucune argumentation !

M. Claude Goasguen. …que toutes les leçons que l’on nous fait sur le problème démographique ne manquent pas de sel. Vous avez été sanctionné par le Conseil constitutionnel, monsieur le ministre, et vous le serez aussi politiquement car, lorsque vous invoquez la démographie parisienne, je ne vois pas ce qui vous permet de dire que Marseille et Lyon sont demeurées dans une stabilité démographique. Changez Paris mais ne pas changer en même temps Lyon et Marseille – le dernier recensement à Marseille date de 1987, et rien à Lyon, comme par hasard ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Pascal Popelin, rapporteur. Les écarts y sont conformes à la jurisprudence du Conseil constitutionnel !

M. Claude Goasguen. Vous n’avez pas proposé de modifications démographiques alors que vous le faites à Paris, pour des raisons prétendument démographiques.

M. Pascal Popelin, rapporteur. Avez-vous seulement regardé les chiffres ?

M. Claude Goasguen. Puis-je continuer, monsieur le rapporteur ?

M. Pascal Popelin, rapporteur. Je vous répondrai tout à l’heure !

M. Claude Goasguen. Moi, j’ai lu la loi et, à ma connaissance, elle ne faisait pas mention de modifications démographiques à Lyon et Marseille. Si vous en êtes d’accord, laissez-moi continuer.

S’agissant de démographie, il faudra réfléchir un jour à l’un des considérants du Conseil constitutionnel, qui me paraît intéressant. Le Conseil constitutionnel évoque depuis plusieurs années l’égalité devant le suffrage, se fondant sur une loi de 1883. Vous savez évidemment qu’en France les circonscriptions sont établies en fonction des habitants et non des électeurs. Nous sommes le seul pays en Europe à calculer le nombre des députés et des élus locaux en fonction du nombre d’habitants. Cette loi de la fin du XIXe siècle, qui était sans doute une juste loi, devient l’objet d’une réflexion. Sans vouloir la changer – le débat viendra en son temps –, il faudra un jour examiner, à l’intérieur des circonscriptions du moins législatives, la proportion entre les électeurs et les habitants.

Mme Annick Lepetit. Dans le 5earrondissement, il y a beaucoup d’électeurs !

M. Claude Goasguen. Dans les découpages législatifs encore plus que dans les découpages municipaux, il serait intéressant de voir où sont les progressions démographiques des électeurs.

M. Pascal Popelin, rapporteur. Dans le 5e arrondissement de Paris !

M. Claude Goasguen. On verrait sans doute que les progressions démographiques dont vous vous vantez à tour de bras sont inversement proportionnelles aux sièges supplémentaires que vous avez accordés. Je respecte la loi, mais cela ne m’empêche pas d’y réfléchir et de me dire que, tôt ou tard, compte tenu de l’évolution de notre pays, il faudra examiner la proportion d’électeurs à l’intérieur des circonscriptions fondées sur le nombre d’habitants. C’est dire que tous ces éléments, dont vous tenez absolument à vous vanter, sont sujets à caution, sont politiciens, fondés sur une conception qui fausse en grande partie la réalité démographique des électeurs.

Je suis consterné aussi par le fait que vous n’ayez pas eu le courage d’aborder véritablement la question parisienne. En fait, si, vous l’avez abordée. De quoi avez-vous peur à Paris, outre de perdre les élections ? Il faudrait un jour sortir de cette conception historique selon laquelle Paris est une ville sous tutelle. Paris est écrasée par le haut, par le préfet de police.

Mme Annick Lepetit. De moins en moins !

M. Claude Goasguen. Nous venons d’ailleurs de voir, dans un amendement voté contre l’avis du Gouvernement que, sur la question de la circulation, certains députés avaient manifesté leur intention de sortir d’une tutelle abusive de la préfecture de police qui date…

Mme Annick Lepetit. Nous avons déposé et adopté un amendement !

M. Claude Goasguen. Ce n’est pas vrai : le gouvernement socialiste était hostile.

Mme Annick Lepetit. Il a été adopté ! Il faut suivre le débat, de temps en temps !

M. Claude Goasguen. Ne nous dites pas que vous étiez favorables : vous étiez contre, et nous verrons lors de la deuxième lecture si vous votez pour.

M. le président. Vous auriez pu vous inscrire dans la discussion générale, madame Lepetit.

Mme Annick Lepetit. Je répondrai, si vous m’y autorisez.

M. Claude Goasguen. C’est la vieille formule : Paris ville laborieuse, ville dangereuse. Non seulement vous ne réduisez pas cette tutelle insupportable, mais vous êtes en train de l’aggraver. Monsieur de Rugy, votre invention sur les métropoles…

M. François de Rugy. Ce n’est pas mon invention !

M. Claude Goasguen. …est en réalité, à l’égard de Paris, une organisation tutélaire qui vient se substituer au pouvoir déjà faible de la ville quant à sa souveraineté : ce tuteur sera le président du Grand Paris. Vous savez bien que c’est vrai.

Pourquoi avez-vous peur de Paris, outre le fait de perdre la ville dans quelques mois ? Pourquoi avez-vous peur de modifier le scrutin en donnant au maire de Paris la pleine légitimité historique que nous demandons depuis des décennies ?

M. François de Rugy. Pourquoi ne l’avez-vous pas fait ?

M. Claude Goasguen. À partir de la loi de 1977, elle a été profondément ralentie par l’usage qu’en a fait la droite, mais aussi par l’usage qu’en fait la gauche qui a non seulement conforté mais aussi politisé la tutelle administrative de la ville. Paris est sous tutelle politique, tenue par un parti qui tient tout et qui exerce tous les pouvoirs, mais aussi par une administration pléthorique.

Ne parlez pas des arrondissements : ils n’ont aucun pouvoir, et la ville de Paris s’est bien gardée de tenir les engagements qui avaient été pris en 2002 par M. Delanoë. Jamais les arrondissements n’ont été aussi taillés. Madame Mazetier, vous n’êtes plus au conseil de Paris, vous ne savez pas ce qui s’y passe.

Mme Annick Lepetit. On ne vous y voit pas souvent non plus !

M. Claude Goasguen. Essayez de vous renseigner auprès de vos proches collègues. Quand je vous entends parler de Paris, je me dis que vous n’avez que des souvenirs. Comme vous n’y êtes plus, renseignez-vous un peu sur l’évolution.

Tout cela pour vous dire, mes chers collègues, que nous allons proposer, sous forme d’amendement, une bonne loi qui donnera au maire de Paris la même légitimité que celle dont jouissent les autres maires, dans toutes les communes. Paris en a marre d’être sous tutelle. Paris a envie de s’exprimer. Cette espèce de volonté, que vous manifestez depuis quelques mois, de brider Paris parce que vous allez la perdre, est une tactique politicienne et de profondément malhonnête à l’égard des électeurs parisiens. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme Sandrine Mazetier. Rien que de vous entendre, ça nous donne de l’énergie !

M. le président. La discussion générale est close.

La parole est à M. le ministre.

M. Manuel Valls, ministre. Je voudrais apporter quelques éléments de réponse. Il y a eu, c’est vrai, une erreur de procédure concernant ce texte de loi, erreur que le Gouvernement assume. D’ailleurs, nous aurions pu et pourrions nous retrouver ici pour d’autres lectures, si des modifications étaient apportées dans quelques instants.

M. Pascal Popelin, rapporteur. Absolument !

M. Manuel Valls, ministre. Il n’y a donc aucun problème à revenir devant la représentation nationale. Il faut adopter ce texte pour des raisons évidentes, puisque des élections municipales se dérouleront en mars, à Paris comme ailleurs.

En revanche, je n’accepte pas votre discours sur le prétendu mépris de la représentation nationale, monsieur Debré. Je ne vous renverrai même pas au passé et à la manière dont on a parfois traité les oppositions. En tout cas, pour ce qui concerne le Gouvernement et le ministre de l’intérieur, je suis présent et nous discutons sur tous les textes. Que nous ne soyons pas d’accord, c’est la vie politique, mais en tout cas nous discutons.

J’entends vos cris d’orfraie sur la décision du Conseil constitutionnel. Vous ne vous attendiez pas à cette décision ! Vous le savez bien, et je ne reprendrai pas les exclamations de Pierre Charon, mardi soir au Sénat.

M. Claude Goasguen. C’est notre recours qui l’a permise, quand même !

M. Manuel Valls, ministre. Pas là-dessus ! Monsieur Goasguen, je sais que vous êtes le plus intelligent…

M. Claude Goasguen. Oui, c’est vrai ! (Sourires.)

M. Manuel Valls, ministre. …et le plus capable dans tous les domaines, et que vous vous énervez très facilement sur ce sujet dès qu’on vous titille.

M. Claude Goasguen. Pas vous !

M. Guy Geoffroy. C’est un expert qui parle !

M. Manuel Valls, ministre. Vous vous énervez tandis que moi j’ai des convictions, ce n’est pas la même chose ! (Rires.) Mais vous êtes très compétent sur tous ces sujets, je vous l’accorde. M. Larrivé vient d’arriver, cela tombe bien.

Pour en revenir au recours devant le Conseil constitutionnel, il portait sur le scrutin binominal, et vous le savez bien. Le Conseil constitutionnel prend une décision ; nous la respectons. Monsieur Debré, monsieur Goasguen, madame Kosciusko-Morizet, nous sommes cohérents, contrairement à vous : vous critiquez le Conseil constitutionnel…

M. Claude Goasguen et M. Bernard Debré. Jamais !

M. Manuel Valls, ministre. …quand ses décisions ne vous arrangent pas et, en revanche, vous le saluez quand ses décisions vous arrangent. Nous, membres du Gouvernement ou de la majorité, nous le respectons. À partir du moment où il y a une décision du Conseil constitutionnel, nous revenons devant le Parlement. Cela s’imposait puisque, comme je le disais à l’instant, il y a un rendez-vous électoral.

Vous nous proposez un chambardement des élections municipales à Paris. Je me permets de vous rappeler qu’en 1987, seule Marseille, à l’initiative de Jean-Claude Gaudin, a vécu un changement et l’intégration d’évolutions démographiques. Que je sache, ni le maire de Marseille ni celui de Lyon – j’ignore ce qu’il en est pour leurs opposants – ne proposent un dispositif de ce type.

M. Claude Goasguen. Ce sont donc les maires qui décident ?

M. Manuel Valls, ministre. Je ne dis pas que le débat n’est pas légitime, mais il faut que les choses soient claires : comme j’ai eu l’occasion de le rappeler mardi soir, votre projet, que vous le vouliez ou non, est la négation de la vieille réalité que sont les arrondissements parisiens.

M. Claude Goasguen. Non !

M. Manuel Valls, ministre. Si. Je le regrette d’ailleurs pour les maires d’arrondissements que vous êtes, messieurs Goasguen et Goujon, mais votre proposition signe la fin de cette spécificité parisienne. Avec votre système, vous écraserez les conseillers d’arrondissement,…

M. Claude Goasguen. Nous sommes déjà écrasés !

M. Manuel Valls, ministre. …alors qu’en tant que maires d’arrondissement vous demandez davantage de pouvoirs par rapport au maire de Paris – un débat au demeurant légitime.

M. Claude Goasguen. C’est le contraire !

M. Manuel Valls, ministre. Il y a une incohérence que je n’arrive absolument pas à comprendre.

M. Claude Goasguen. Je ne suis pas masochiste !

M. Manuel Valls, ministre. Non, vous n’êtes pas masochiste mais d’autres sont amateurs. Très honnêtement, monsieur Goujon, vous qui avez été l’un des organisateurs de la primaire de l’UMP, ne venez pas nous expliquer ici qu’il y a des amateurs d’un côté et des professionnels de l’autre. (Rires sur les bancs du groupe SRC.) Je pense qu’il y a des arguments qu’il ne vaut mieux pas utiliser

M. Philippe Goujon. Je ne comprends pas votre allusion !

M. Guy Geoffroy. C’est le café du commerce !

M. Manuel Valls, ministre. Quant à vos leçons, madame Kosciusko-Morizet… Vous parlez de tripatouillage – je descends sur un terrain plus politique – alors que vous avez un problème évident dans le 5arrondissement, que l’on vous rappelle ce qui s’est passé il y a quelques années à Paris, et que vous-même – vous êtes toujours députée de l’Essonne, je n’en dis pas plus – n’avez pas hésité à nommer l’un de vos opposants à l’inspection générale. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Madame, ne nous parlez pas de « tripatouillages » car vous n’avez aucune leçon à donner !.

Je me permets de rappeler que l’hémicycle n’est pas une tribune pour l’élection à la mairie de Paris. Ce sont les Parisiens, et non pas seulement les électeurs de l’arrondissement où vous serez candidate, que vous devrez convaincre. Nous verrons bien quel sera le choix des électeurs parisiens au mois de mars. Madame, vous n’avez aucune leçon à nous donner. Vous connaissez parfaitement le métier. Bien plus : vous n’avez aucune leçon à donner alors que vous venez de l’Essonne…

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet. Et vous, d’où venez-vous, monsieur Valls ?

M. Manuel Valls, ministre. …pour être candidate à Paris. Respectez-vous les électeurs parisiens ? De toute façon, ils seront les seuls juges. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Philippe Goujon. Aucun argument sur le fond, seulement une diarrhée verbale !

Discussion des articles

M. le président. J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi.

Article 1er

M. le président. La parole est à M. Bernard Debré, inscrit sur l’article 1er.

M. Bernard Debré. Monsieur le ministre, il faut garder ses nerfs. Vous auriez dû assister à la discussion du texte précédent, durant laquelle nous avons parlé des problèmes psychiatriques en France. Je n’oserais pas faire quelque assimilation que ce soit, bien entendu. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Il faudrait aussi avoir une bonne lecture de la loi que nous proposons sous forme d’amendement. Les arrondissements ne disparaissent en aucune façon, bien au contraire. Ainsi que Nathalie Kosciusko-Morizet vous le disait tout à l’heure, les maires d’arrondissement vont prendre tout d’un coup une envergure beaucoup plus importante puisqu’il y aura un vote direct pour le maire d’arrondissement, ou plus exactement – pardonnez-moi de refaire la même erreur – pour l’équipe qui sera menée par le futur maire d’arrondissement. De même, il faut parler de l’équipe à la tête de laquelle sera le maire de Paris.

Vous êtes en train d’essayer de nous faire croire que l’on supprime les arrondissements, alors qu’ils sont confortés. Vous essayez de nous faire croire qu’une élection au suffrage universel pour élire l’équipe du maire de Paris ne serait pas démocratique.

M. Claude Goasguen. On voit que vous êtes maire d’arrondissement !

M. Bernard Debré. C’est quand même extraordinaire ! C’est vrai que le maire d’arrondissement n’a pas de pouvoir et qu’il en a de moins en moins. C’est vrai qu’avec vos métropoles vous êtes en train de retirer également le pouvoir au maire de Paris. Vous avez une drôle de conception de la démocratie : vous faites élire les maires d’arrondissement et leur équipe, sans pouvoirs ; ces hommes sans pouvoirs…

Mme Sandrine Mazetier. Rassurez-vous, il y aura quelques femmes aussi !

M. Bernard Debré. …vont élire le maire de Paris, auquel vous retirez aussi ses pouvoirs. Mon Dieu, quelle difficulté !

Le point fondamental est que vous avez peur des Parisiens, et vous avez d’ailleurs raison. Vous supprimez donc des conseillers au nom de l’égalité démographique. Vous ne touchez pas au 16arrondissement, mais vous ajoutez un conseiller dans le 15arrondissement. C’est vrai que Mme Hidalgo s’y présente… On ne sait jamais, elle pourrait ainsi gagner un conseiller, mais elle va en perdre tant d’autres.

M. François de Rugy. Arrêtez d’anticiper !

M. Bernard Debré. Vous oubliez le 17arrondissement, mais on vous l’a rappelé : il va bientôt compter 12 000 électeurs supplémentaires.

M. le président. Merci de conclure, mon cher collègue. Je vous redonnerai la parole tout à l’heure pour défendre vos amendements.

M. Bernard Debré. Voilà pourquoi nous voterons contre votre article 1er.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Kosciusko-Morizet.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet. Le ministre a jugé utile de terminer son intervention par une référence aux élections dans l’Essonne et, puisqu’il est ici question d’une loi électorale, nous sommes en plein dans le sujet.

Je veux lui faire trois observations.

D’abord, il a jugé utile de rappeler des accusations qui avaient été portées par l’opposition municipale de Longjumeau lors de la précédente élection, qui avaient été jugées par la justice comme étant fausses. Je pense qu’il est bon de le lui rappeler, sauf à le lui rappeler devant la justice.

Deuxième chose, le même ministre, pendant la campagne suivante, celle des élections suivantes, a, entre les deux tours, diffusé sur de très nombreux répondeurs des électeurs de la circonscription, un message qui commençait par : « Coucou, c’est le ministre de l’intérieur, je vous invite à voter pour le candidat socialiste ! » Peut-être est-ce aussi le lieu de lui faire remarquer, puisqu’il juge utile de parler des élections dans l’Essonne, que ce n’est pas légal.

M. Manuel Valls, ministre. Je n’ai jamais fait ça ! Ce doit être quelqu’un d’autre !

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet. Enfin, troisième remarque, pendant cette même semaine où il diffusait ce message agréable sur les boîtes téléphoniques de la circonscription, la candidate du Front national à l’élection présidentielle, Marine Le Pen, a fait une conférence de presse, au cours de laquelle elle appelait à voter pour le candidat socialiste. Le ministre de l’intérieur socialiste, aux valeurs revendiquées, qui nous sert de la République trois fois par discours, quand ce n’est pas trois fois par phrase, ce même ministre qui avait eu le temps de laisser un message sur les boîtes vocales de tous les électeurs de la circonscription, pour les appeler à voter pour le candidat socialiste, ne l’a pas trouvé pour dénoncer un appel du Front national à voter pour le candidat qu’il soutenait, non plus que des tracts en ce sens distribués par les militants du Front national.

M. le président. La parole est à M. Bernard Debré, pour soutenir l’amendement n1.

M. Bernard Debré. Les dispositions qui sont l’objet de cet amendement sont les seules, véritablement les seules, qui auraient changé quelque chose à Paris. C’est vrai, nous aurions cette joie, et les Parisiens l’auraient partagée avec nous, si nous pouvions changer ce mode de scrutin. Vous avez failli le faire, monsieur le ministre ! Vous l’avez avoué il n’y a pas très longtemps, puisque vous avez dit que vous aviez failli regrouper le 1er, le 2e, le 3e et peut-être même le 4arrondissement ! Vous étiez prêt à y aller, il fallait faire un petit effort supplémentaire. Nous aurions eu une seule circonscription, des maires d’arrondissement avec une vraie lisibilité et un maire de Paris véritablement démocratiquement élu.

Peut-être pourrait-on en discuter, mais vous ne le voulez pas. Vous préférez vos petits arrangements, pour pouvoir assurer à Mme Hidalgo plus de chances qu’elle n’en a aujourd’hui.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Pascal Popelin, rapporteur. Sous couvert d’amendement, M. Debré nous recycle la proposition de loi qu’il a déposée,…

M. Bernard Debré. Cela s’appelle la constance !

M. Pascal Popelin, rapporteur. …sans d’ailleurs que son groupe juge utile de l’inscrire dans les niches parlementaires dont l’UMP dispose dans cette assemblée.

M. Bernard Debré. On peut changer d’avis !

M. Pascal Popelin, rapporteur. C’est vrai, monsieur Debré, la position que vous défendez est la vôtre depuis longtemps.

M. Bernard Debré. Merci !

M. Pascal Popelin, rapporteur. Vous aviez déjà déposé une proposition de loi similaire au mois d’août 2007. Sans doute étiez-vous bien seul à l’époque, puisque vous n’avez pas été écouté par la majorité à laquelle vous apparteniez.

M. Bernard Debré. J’espérais être écouté par la nouvelle majorité !

M. Pascal Popelin, rapporteur. Peut-être était-ce parce que nous étions alors très près de l’échéance des élections municipales du mois de mars 2008. Si tel est le cas, c’est à bon droit que le gouvernement de l’époque n’a pas inscrit cette proposition de loi à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale, car on ne modifie pas profondément les règles d’un scrutin à une année de l’élection. Ce n’est pas une règle, mais c’est une tradition républicaine.

M. Claude Goasguen. Il ne fallait pas que vous y touchiez, alors !

M. Pascal Popelin, rapporteur. Mais ensuite, monsieur Debré, durant les cinq années de la précédente législature, votre force de conviction n’a manifestement pas été efficace auprès de vos amis politiques, puisque à aucun moment le précédent gouvernement, dirigé par M. Fillon, dont on s’est aperçu qu’il s’intéressait beaucoup à Paris, ne s’est préoccupé d’inscrire une telle réforme à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale. Et, comme par enchantement, c’est non pas au début cette législature, mais il y a quelques semaines, que vous proposez tout de go cette modification importante.

M. Claude Goasguen. C’est votre faute !

M. Pascal Popelin, rapporteur. Et c’est vous qui nous dites que, de ce côté-ci de l’hémicycle, nous ne serions pas confiants ? Quand c’est vous qui proposez, à la dernière minute, cette modification, après avoir, tardivement, rallié l’ensemble des collègues de votre groupe ?

M. Claude Goasguen. Bah, oui !

M. Pascal Popelin, rapporteur. J’ai une question, que je vous avais déjà posée, lorsque nous avions examiné la proposition de loi de M. Urvoas : pourquoi seulement Paris ? Si vous considérez que le mode de scrutin par arrondissement est mauvais, pourquoi proposez-vous qu’il soit modifié simplement à Paris et non pas également à Lyon et à Marseille ? En effet, en 1982, c’est pour ces trois principales villes de France que ce type de scrutin a été instauré.

Et M. Goasguen, qui sait tout et qui pense que les autres ne savent rien,…

M. Claude Goasguen. C’est souvent vrai !

M. Pascal Popelin, rapporteur. …nous reproche de ne procéder à la modification du tableau des conseillers que pour Paris, mais, si nous ne le faisons que pour Paris, c’est tout simplement parce que, si l’on considère les huit secteurs de Marseille, aucun ne présente des écarts à la moyenne qui contreviennent à la jurisprudence du Conseil constitutionnel.

M. Claude Goasguen. Et à Lyon ?

M. Pascal Popelin, rapporteur. Et à Lyon, sur neuf arrondissements, un seul présente un petit dépassement,…

M. Claude Goasguen. Ah, voilà !

M. Pascal Popelin, rapporteur. …avec un écart de 21,04 %. Pour les mêmes raisons que, lorsque l’on procède au découpage à Paris, la mathématique rend impossible – nous l’avons expliqué lors de l’examen de la proposition Urvoas – de rester dans le « tunnel » des plus ou moins 20 %.

Voilà pourquoi la proposition de loi ne parle que de Paris. Voilà pourquoi le projet de loi initial du Gouvernement, dont j’étais déjà le rapporteur, ne se proposait de traiter que de Paris. Voilà pourquoi personne, à Lyon ou à Marseille, que ce soit dans la majorité ou dans l’opposition, n’a demandé que l’on modifiât ce tableau de répartition, qui est tout simplement conforme aux exigences de la jurisprudence du Conseil constitutionnel.

M. Claude Goasguen. Alors qui l’a demandé pour Paris ? La majorité parisienne ?

M. Pascal Popelin, rapporteur. Vous nous avez également dit, monsieur Debré, au cours de la discussion générale, que nous voulions modifier le nombre de conseillers à notre avantage. Libre à vous de considérer que la démographie est à notre avantage ! Je ne suis pas loin de partager cette opinion, mais telle ne doit pas être la préoccupation du législateur. Celui-ci doit s’en tenir à ceci : légiférer de manière juste. Je suis frappé que chaque fois que nous évoquons, dans cet hémicycle, les questions relatives aux élections, les propos tenus sont dignes d’un bureau politique de parti (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) : « Je vais gagner ceci, je vais gagner cela. » Tout à l’heure, c’étaient, à la tribune, des propos qui donnaient l’impression que nous étions dans un meeting de la campagne des élections municipales de Paris.

M. le président. La parole est à M. Philippe Goujon.

M. Philippe Goujon. Les arguments du rapporteur et du Gouvernement sont vraiment loin de nous convaincre, tant ils sont inspirés par la mauvaise foi et la volonté, vraiment, de modifier toutes les règles électorales dans ce pays, jusqu’à celles de Paris, pour faire gagner leur parti. Ne parlez donc pas, monsieur le rapporteur, de propos politiciens, je vous en prie.

Je ne vois vraiment pas ce qui vous fait peur pour que vous refusiez à Paris un scrutin de liste sur une circonscription unique, comme dans toutes les villes de France, dans le respect absolu de l’existence administrative des arrondissements, puisque le mode de scrutin régissant l’élection des élus d’arrondissement serait maintenu, sans aucunement rompre le lien qui les unit au Paris, puisque ces derniers figureraient également sur les listes des conseils d’arrondissement. Tous les arguments avancés par les orateurs de gauche à ce propos sont totalement faux. Ils n’ont pas lu l’amendement, ou alors ils sont de mauvaise foi, c’est l’un ou l’autre.

En tant que maire d’arrondissement – nous sommes deux maires d’arrondissement présents dans cet hémicycle –, je veux le dire : vraiment, faire croire qu’en élisant le maire de Paris sur une circonscription et les conseillers de Paris sur une circonscription unique, même si c’est au suffrage indirect pour le maire, comme partout en France, on va affaiblir les maires d’arrondissement et les arrondissements, cela ne tient pas !

M. Manuel Valls, ministre. Si !

M. Philippe Goujon. De qui dépendent les maires d’arrondissement ? Qui détermine leurs pouvoirs et leurs compétences ? Ce sont le maire de Paris et le Gouvernement. C’est à ces deux seules autorités d’en décider, et ce n’est pas parce que le maire de Paris sera élu de façon beaucoup plus démocratique dans une circonscription unique par tous les habitants de Paris que les maires d’arrondissement s’en trouveront affaiblis.

M. Claude Goasguen. Au contraire !

M. Philippe Goujon. Le seul résultat, c’est que, si le maire de Paris est élu par tous les habitants, il renforcera, effectivement, son pouvoir par rapport à l’État, par rapport au Gouvernement, qui est déjà si prégnant à Paris que vous ne voulez pas lâcher une once de pouvoir au maire de Paris et aux élus parisiens. La meilleure preuve en est que, quand tous les élus parisiens ici réunis proposent, quels que soient les bancs sur lesquels ils siègent, de transférer les pouvoirs de police en matière de circulation et de stationnement, du préfet de police, de l’État, au maire de Paris, eh bien, c’est le Gouvernement qui s’y oppose !

Mme Annick Lepetit. Relisez votre interview, monsieur Goujon !

M. Philippe Goujon. Chers collègues parisiens socialistes ou Verts, vous pourriez être un peu cohérents et renforcer, en votant cet amendement, les pouvoirs du maire de Paris face au Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. Claude Goasguen.

M. Claude Goasguen. Vous venez de nous apprendre quelque chose d’important, monsieur le rapporteur. Voyez, je vous rends hommage !

Vous venez de nous dire qu’en réalité ni la majorité ni l’opposition n’ont demandé, à Lyon, un changement du mode de scrutin, que cela n’a pas non plus été demandé pour Marseille, mais que cela a sûrement été demandé par la majorité socialiste du conseil de Paris ! C’est ce que vous avez dit. Comme l’opposition n’a pas demandé de modification, il faut bien que quelqu’un l’ait demandé. Je vous remercie d’en donner acte : la majorité socialiste du conseil de Paris a donc fait la demande au Gouvernement, et celui-ci s’y est plié. Et il a été sanctionné par le Conseil constitutionnel.

Je veux aussi répondre à une remarque que vous avez faite. Les pouvoirs du maire de Paris et ceux des maires de Marseille et de Lyon ne sont pas les mêmes. D’ailleurs, je vous signale que la loi qui avait mis ensemble Lyon, Marseille et Paris avait été faite par M. Defferre non pas pour aider Paris, mais au contraire pour noyer Paris dans le phénomène PLM. En réalité, vous savez très bien que les mairies de Lyon et de Marseille sont des mairies historiques, avec une forte tradition démocratique – peut-être un peu dévoyée de temps en temps, j’en conviens –, tandis que la mairie de Paris est une création extrêmement récente. Le maire de Paris est tenu en laisse par le préfet de police.

Je vous rappelle aussi que la règle du minimum de trois sièges est issue d’un amendement socialiste. C’est, me semble-t-il, un député socialiste du 19e arrondissement qui l’avait déposé, car cette règle était à l’époque favorable au Parti socialiste, et M. Defferre l’avait approuvée.

Par conséquent, ce qu’il faut donner à Paris, c’est une impulsion démocratique. Cette impulsion démocratique, nous ne la trouvons pas dans ce texte. En plus, nous trouvons contre nous des adversaires déterminés, avec l’absence de modification du mode de scrutin, avec la métropole, formidable handicap pour le développement futur de Paris, avec l’écrasement des maires d’arrondissement.

Je souhaite donc qui nous puissions engager une véritable réflexion – je regrette que nous ne puissions le faire aujourd’hui – sur la distinction entre, d’une part, Paris et, d’autre part, Lyon et Marseille, et sur un nouveau mode de scrutin, qui s’impose.

(L’amendement n1, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

(L’article 1 est adopté.)

Article 2

M. le président. La parole est à M. Bernard Debré, pour soutenir l’amendement n2.

M. Bernard Debré. Il est défendu.

(L’amendement n2, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

(L’article 2 est adopté.)

Article 3

(L’article 3 est adopté.)

Explication de vote

M. le président. La parole est à M. Bernard Debré, pour une explication de vote au nom du groupe Union pour un Mouvement Populaire. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Bernard Debré. Ne vous inquiétez pas, mon intervention ne durera que quelques instants.

Je dirai simplement que nous voterons contre cette proposition de loi, car nous sommes très tristes de voir que vous n’avez pas accepté de rendre la parole aux Parisiens. Je trouve dommage que vous ayez peur du scrutin direct. Je crois que c’est une faute grave que vous commettez là. Je regrette infiniment que les Parisiens n’aient pas été mieux considérés. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Vote sur l’ensemble

M. le président. Je mets aux voix l’ensemble de la proposition de loi.

(La proposition de loi est adoptée.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Manuel Valls, ministre. Je remercie, tout d’abord, la majorité. Je salue également le travail imaginatif de l’opposition.

Monsieur le président, si vous le permettez, en tant que membre du Gouvernement, mais aussi en tant qu’ancien parlementaire durant dix ans, je salue M. Yves Cadeil, chef des huissiers, qui participe pour la dernière fois à une séance de l’Assemblée nationale. (Applaudissements sur tous les bancs.)

3

Clôture de la session extraordinaire

M. le président. Le Président de l’Assemblée nationale prendra acte de la clôture de la session extraordinaire par avis publié au Journal officiel.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-huit heures cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance

de l’Assemblée nationale

Nicolas Véron