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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Session ordinaire de 2012-2013

Compte rendu
intégral

Première séance du jeudi 15 novembre 2012

SOMMAIRE ÉLECTRONIQUE

SOMMAIRE


Présidence de M. Marc Le Fur

1. Projet de loi de finances pour 2013 Seconde partie (suite)

Articles non rattachés (suite)

Après l’article 56 (suite)

Amendement no 116

M. Christian Eckert, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué chargé du budget

Amendements nos 577, 566, 302 rectifié, 330, 592, 301, 756, 106 rectifié, 757 (sous-amendement), 754, 114, 113, 137 rectifié, 331, 702, 68 rectifié, 111, 332

Présidence de M. Denis Baupin

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Amendements nos 666, 333

Article 57

Mme Isabelle Le Callennec

M. Gilles Lurton

M. Marcel Rogemont

M. Marc Dolez

M. Éric Alauzet

Amendements nos 686, 567, 667, 427, 751 (sous-amendement)

Présidence de M. Marc Le Fur

Amendements nos 752, 759 (sous-amendement), 688, 483, 484, 704, 678, 679, 680, 681, 463, 696 rectifié, 644, 654, 748 deuxième rectification (sous-amendement), 746 rectifié (sous-amendement), 747 (sous-amendement), 691

Suspension et reprise de la séance

Après l’article 57

Amendements nos 701, 298, 293, 294, 303 rectifié, 391 rectifié, 334, 386, 555, 428, 758 (sous-amendement), 583

Article 58

Amendements nos 346, 663, 552, 345, 662, 550, 549, 548

Article 59

Amendements nos 38, 393 deuxième rectification, 39

2. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de M. Marc Le Fur,
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

Projet de loi de finances pour 2013
Seconde partie (suite)

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2013 (nos 235, 251).

Articles non rattachés (suite)

M. le président. Hier soir, l’Assemblée a continué l’examen des articles non rattachés, s’arrêtant à l’amendement 251 rectifié portant article additionnel après l’article 56.

Après l’article 56 (suite)

M. le président. L’amendement n° 116 portant article additionnel après l’article 56 est défendu.

La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l’avis de la commission.

M. Christian Eckert, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Défavorable

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du budget, pour donner l’avis du Gouvernement.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué chargé du budget. Défavorable.

(L’amendement n° 116 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton, pour soutenir l’amendement n° 577.

M. Hervé Mariton. Après les augmentations d’impôt du collectif budgétaire puis de ce projet de loi de finances, le Gouvernement, en la personne du ministre du budget lui-même, a annoncé qu’il n’y aurait plus d’augmentation d’impôt. Cela a d’ailleurs été souligné hier en commission des finances, lors de la présentation du nouveau collectif budgétaire. À dire vrai, la presse ne s’y est pas tout à fait trompée, qui voit dans l’évolution des règles applicables, par exemple, à certaines donations et certaines cessions, une augmentation d’impôt de fait, avec le risque d’une aggravation dans le temps, comme je l’ai souligné hier en commission.

L’amendement n° 577 a pour objet de traduire dans le droit l’engagement pris par le Gouvernement, donc de prévoir – ce que l’on peut tout à fait faire en seconde partie de loi de finances – l’actualisation du barème fiscal pour les revenus perçus en 2013. Cela apporterait de la stabilité fiscale puisqu’il serait écrit dans les textes qu’il n’y aura pas d’augmentation d’impôt l’an prochain.

Si le Gouvernement refusait cet amendement, cela ne serait pas sans susciter de vives inquiétudes quant à ses intentions : s’il compte effectivement ne pas augmenter les impôts l’an prochain, il doit naturellement accepter cet amendement.

En outre, fixer en amont les règles d’imposition sur les revenus perçus en 2013 me paraît de bonne pratique ; ce serait un progrès par rapport à ce que fait le Gouvernement et à la manière dont on procède depuis si longtemps. Le système, qui s’apparente à une forme de légère rétroactivité, dans lequel on édicte à la fin de l’année 2012 les règles fiscales applicables aux revenus perçus tout au long de celle-ci, n’est pas très heureux.

Par cet amendement, nous proposons donc, premièrement, de rompre avec ce système et de dire que la fiscalité applicable aux revenus de l’année 2013 doit être déterminée juste avant que celle-ci ne commence, deuxièmement, de graver dans la loi de finances l’engagement pris par le Gouvernement de ne plus augmenter les impôts. Il convient donc de préciser comment sera actualisé le barème applicable aux revenus perçus en 2013.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Défavorable.

Nous avons encore un an avant de décider quel sera le barème de l’impôt payé en 2014 sur les revenus de l’année 2013. C’est conforme à l’usage, c’est conforme à l’habitude,…

M. Hervé Mariton. Et le changement, alors ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. …et nul ne peut prévoir, monsieur Mariton, quelles seront alors les conditions financières, budgétaires et économiques de notre pays et de son environnement international.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Indexer sans connaître l’inflation, j’imagine que M. Mariton comprendra que c’est un petit peu compliqué.

En outre, est-il un exemple, dans sa mémoire de parlementaire assidu, d’une disposition de cette nature prise en deuxième partie de loi de finances ? Cela n’a jamais eu lieu, absolument jamais !

M. Hervé Mariton. Non, mais ce serait un progrès !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Troisième remarque, monsieur Mariton, vous avez été élus en 2007 en promettant de baisser les impôts de 80 milliards d’euros. Avez-vous, en deuxième partie de loi de finances pour l’année 2008, inscrit dans le droit, au nom de la stabilité fiscale à laquelle vous semblez très attaché maintenant que vous êtes dans l’opposition, cette baisse de 80 milliards d’impôts sur la législature ? Je n’en ai pas le souvenir.

M. Hervé Mariton. La nature humaine est perfectible !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Vous avez bien fait de ne pas le faire car non seulement vous n’avez pas baissé les impôts de 80 milliards d’euros mais vous les avez augmentés de 30 milliards ! Ne demandez donc pas trop à ceux qui vous ont succédé. Ne demandez pas plus que ce que vous avez réussi à faire.

Nous allons essayer de faire moins mal que vous. Je comprends néanmoins l’exigence que vous manifestez à notre égard. Ce faisant, vous exprimez aussi votre regret de ne pas avoir été plus exigeant avec ceux que vous avez soutenus. Réglez donc cela avec eux et essayez de ne pas nous mêler à cette dialectique, peut-être pertinente dans vos relations avec eux, mais cela ne nous concerne certainement pas.

J’émets donc un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton.

M. Éric Jalton. M. Mariton va faire amende honorable !

M. Hervé Mariton. Je suis un optimiste et je suis toujours plus exigeant avec moi-même, avec les miens et avec les autres.

Je veux simplement rappeler, comme je l’ai fait dans l’exposé des motifs de l’amendement, que l’excellent ministre du budget Jérôme Cahuzac a déclaré le 30 septembre dernier que « les impôts n’augmenteront pas en 2014 ». Il n’y a pas de conditionnel, c’est un indicatif. Or, chacun le sait, dans la pratique de notre assemblée, un indicatif vaut un impératif.

Il faut donc écrire cela dans la loi.

(L’amendement n° 577 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Marc Dolez, pour soutenir l’amendement n° 566.

M. Marc Dolez. Par cet amendement, nous proposons de remplacer la réduction d’impôt accordée aux salariés et retraités au titre des cotisations versées aux organisations syndicales en un crédit d’impôt, qui pourrait donc bénéficier aux salariés qui ne sont pas assujettis à l’impôt sur le revenu.

Une telle disposition permettrait de promouvoir la syndicalisation des salariés modestes, parmi lesquels une majorité de femmes qui subissent les conséquences du temps partiel. S’il était adopté, cet amendement serait donc de nature à favoriser la syndicalisation de ceux qui en ont le plus besoin, en les plaçant sur un pied d’égalité avec les autres salariés.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Vous avez indiqué quels avantages présenterait la disposition que cet amendement tend à instaurer. Son inconvénient est de transformer peut-être un peu vite une réduction d’impôt en crédit d’impôt. Cette nuance mérite d’être examinée de plus près et nous devrions y retravailler.

Pour l’instant, j’émets donc un avis défavorable.

(L’amendement n° 566, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Éric Alauzet, pour soutenir l’amendement n° 302 rectifié.

M. Éric Alauzet. La loi prévoit une déduction fiscale pour les particuliers qui acquièrent des parts de sociétés innovantes. Or il existe des restrictions, qui concernent trois catégories de sociétés. Pour deux d’entre elles, ces restrictions sont levées, dès lors qu’il s’agit d’entreprises solidaires, dans les domaines de l’activité financière ou dans le secteur immobilier.

Le présent amendement aurait pour objet de lever les restrictions également pour la troisième catégorie, celle qui concerne l’activité de production locale d’énergie. Vous le savez, c’est une manière très habile d’associer les riverains lorsque certains projets, par exemple d’éoliennes, suscitent des réticences. L’association des élus locaux a pu doper l’installation de ces dispositifs de production d’énergie, parce qu’elle a favorisé l’appropriation de ceux-ci et les a rendus acceptables ; il s’agit d’associer de manière analogue les riverains à ces projets.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. La commission n’a pas retenu cet amendement. J’émets donc un avis défavorable.

Cet amendement créerait une nouvelle dérogation dans un secteur où cela ne serait pas forcément nécessaire. Les entreprises qui exercent l’activité en question sont déjà fortement soutenues par l’existence des tarifs de rachat réglementés. Il n’est donc pas opportun, et encore moins nécessaire, de créer une nouvelle incitation. Les tarifs réglementés constituent déjà le principal attrait de ce type d’exploitation.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

Vous le savez, l’avantage consenti dans le cadre du dispositif Madelin a pour objet de rémunérer, ou d’aider à rémunérer, la prise de risque. En l’espèce, il n’y a pas de risque, puisque les tarifs sont garantis. Je ne crois donc pas que cette incitation fiscale soit adaptée à l’objet que vous venez de décrire.

En outre, la politique du Gouvernement est plutôt de réduire les niches fiscales que d’en augmenter le nombre ou d’en majorer le coût. Or votre amendement présenterait précisément la double caractéristique de créer une nouvelle niche et d’augmenter la dépense fiscale.

Il est tout à fait classique que les parlementaires veuillent, lors de l’examen des projets de lois de finances, encourager tel ou tel secteur par la dépense fiscale. Il n’est pas moins classique que le Gouvernement tente de s’y opposer en s’efforçant de convaincre la représentation nationale que la dépense fiscale est déjà très élevée, peut-être trop, et qu’il ne faut peut-être pas en rajouter. En l’occurrence, elle n’apparaît en outre pas légitime au regard de l’objet de même de la réduction d’impôt au titre de la loi Madelin.

J’émets donc un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Vous auriez raison, monsieur le ministre, si les tarifs étaient fixés, pour toutes les énergies renouvelables, à un niveau permettant de rentabiliser les investissements. Si votre argument peut se défendre en matière de photovoltaïque et d’éolien, ce n’est pas le cas, en revanche, dans le secteur du biogaz. En effet, quoique sensiblement relevés il y a un an, les tarifs n’assurent toujours pas une véritable rentabilité de cette production. Il me semble donc que nos collègues du groupe écologiste devraient déposer un nouvel amendement qui ne porterait que sur le biogaz.

M. le président. La parole est à M. Éric Alauzet.

M. Éric Alauzet. Je vous remercie, monsieur le rapporteur général, de votre réponse. Vos arguments sont tout à fait recevables, si je puis me permettre, et l’existence des tarifs réglementés ne m’avait pas échappé. Cependant, si l’on considère, même si ce n’est pas toujours très transparent, l’ensemble des aides et le fait que deux autres secteurs d’activité en bénéficient, tout cela est-il bien équitable ? Cela mériterait d’être approfondi.

Je n’en accepte pas moins vos arguments, et je retire mon amendement.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Merci !

(L’amendement n°302 rectifié est retiré.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 330 et 592, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement n° 330 de la commission des finances.

M. Christian Eckert, rapporteur général. On a beaucoup parlé du dispositif Madelin, et nous y reviendrons. Il était censé s’arrêter cette année.

L’amendement approuvé par la commission propose de prolonger son application pour deux ans. Chacun s’accorde en effet à reconnaître l’utilité de ce dispositif ; il favorise l’investissement, particulièrement lorsque des risques sont pris.

Il s’agit donc de prolonger le dispositif Madelin. J’en ai peu parlé hier lorsqu’il en a été question, mais ce point est peut-être plus important encore que la question du plafonnement.

M. Dominique Baert. C’est vrai.

M. le président. La parole est à M. Camille de Rocca Serra, pour soutenir l’amendement n° 592.

M. Camille de Rocca Serra. Le texte de cet amendement se retrouve dans l’amendement n° 330 de la commission.

Je me réjouis de constater que nous revenons à la question du dispositif des fonds d’investissement de proximité, les FIP.

Qu’est-ce que le FIP Corse ? Créé par loi de finances en 2006, il a pour but de mobiliser de l’épargne au bénéfice du capital-investissement.

Au bout de quelques années de mise en œuvre de ce dispositif, je me permets – cela me paraît utile – d’en proposer l’évaluation.

On voit que le coût que représente pour l’État la dépense fiscale est compensé par les recettes procurées par l’investissement. Au bout de trois ans, la différence entre le dispositif général des Fonds d’investissement de proximité et le dispositif applicable en Corse est totalement compensée. Après cinq ans, l’ensemble de la dépense fiscale est absorbée par les recettes qu’elle procure.

Deuxième évaluation : je me suis permis de voir quelle serait l’importance de l’épargne à mobiliser en capital investissement, que ce soit dans le domaine de la transmission ou dans celui de la création. Le besoin, en termes de développement, s’élève à 55 millions d’euros pour les années à venir. En ce qui concerne la transmission d’entreprises, 9 600 sociétés seront concernées dans les années qui viennent, et le besoin s’élève à 900 millions d’euros.

On le voit : le FIP est un outil totalement adapté à la Corse. J’avais demandé une différenciation des taux. Elle est, a priori, maintenue dans l’amendement de la commission des finances qui proroge le FIP. Je ne peux que me réjouir de cette évolution et du maintien des FIP dans le dispositif pour financer l’économie et les fonds propres de nos entreprises dans la durée, ce qui est important.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Notre collègue M. de Rocca Serra l’a dit lui-même, cet amendement est satisfait par l’amendement précédent, dont l’adoption le priverait sans objet.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement est favorable à l’amendement de la commission qui proroge les avantages fiscaux favorables au renforcement des fonds propres des PME. Le Gouvernement partage vos préoccupations, monsieur le rapporteur général. Le souci de la Commission va rigoureusement dans le sens du Gouvernement, si l’on veut bien se souvenir des propos qui ont été tenus lors de la présentation du pacte pour la compétitivité.

Vous proposez donc de proroger jusqu’en 2016 les avantages fiscaux au titre de l’impôt sur le revenu en cas de souscription au capital des PME. Le Gouvernement donne son accord à cet amendement et lève le gage. Votre amendement, monsieur de Rocca Serra, est ainsi satisfait, la réduction d’impôt dite « Madelin », et donc l’ensemble des avantages fiscaux accordés au titre des souscriptions de parts de FIP, de FIP Corse et de FIP Outre-mer, étant de la sorte maintenus jusqu’en 2016. Nous verrons en 2016, ou à tout le moins à la fin de cette année, ce qu’il convient de faire. Ces dispositifs fiscaux resteront quoi qu’il en soit stables pour les quatre années à venir.

M. le président. Dans ces conditions, retirez-vous votre amendement, monsieur de Rocca-Serra ?

M. Camille de Rocca Serra. Oui. Je remercie le Gouvernement et retire mon amendement.

(L’amendement n° 592 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Serge Letchimy.

M. Serge Letchimy. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, je vous poserai la question suivante : les fonds investis dans le cadre du FIP Corse peuvent-ils provenir à la fois de l’ensemble de l’hexagone et de la Corse ? Ne doivent-ils pas provenir uniquement de Corse ?

M. Christian Eckert, rapporteur général, M. Gilles Carrez, président de la commission des finances, et M. Camille de Rocca-Serra. Non !

M. Serge Letchimy. Cette question est très importante pour nous autres, ultramarins. Pour ce qui est de mobilisation de fonds, à l’heure actuelle le FIP Outre-mer ne concerne que des territoires d’outre-mer. Il me semble que le FIP Corse bénéficie à la fois de fonds provenant de Corse et du continent. Puisqu’il s’agit de mobiliser des fonds, il serait normal que le FIP Outre-mer soit élargi. Je n’ai cependant pas présenté d’amendement à ce sujet en séance. J’en avais présenté un, qui n’a pas été retenu lors des travaux en commission.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Et c’est heureux !

M. Serge Letchimy. Pourquoi cela ? Il faudra que vous me l’expliquiez !

M. le président. La parole est à M. Camille de Rocca Serra.

M. Camille de Rocca Serra. J’apporterai une petite précision, afin de répondre à M. Letchimy : le FIP Corse concerne effectivement des investissements réalisés en Corse. Il a été dissocié du FIP de droit commun, dont les investissements devaient à l’origine être réalisés dans une zone géographique couvrant une à trois régions limitrophes, et ne s’appliquait pas sur le territoire de la Corse. Nous avons donc instauré le FIP Corse uniquement pour stimuler le capital investissement dans les entreprises situées en Corse. Les investisseurs, eux, peuvent être originaires de toute la France !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Oui, l’investisseur peut être localisé n’importe où. Je peux moi-même investir en Corse, par exemple.

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Notre groupe est tout à fait favorable à cet amendement que nous avons d’ailleurs soutenu lors de son examen en commission. Je ferai simplement remarquer à M. le ministre qu’il existe plusieurs FIP, comme le rappelle l’exposé sommaire de l’amendement présenté par notre rapporteur général : le FIP, le FIP Corse, et le FIPOM. Une partie du territoire de la République reste non couverte par ces dispositifs : les collectivités d’outre-mer. Le Gouvernement a-t-il l’intention de généraliser à ces collectivités le dispositif du FIP, que tout le monde défend ?

(L’amendement n° 330, modifié par la suppression du gage, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Éric Alauzet, pour soutenir l’amendement n° 301.

M. Éric Alauzet. L’amendement n° 302 rectifié ayant été retiré, celui-ci n’a plus lieu d’être. Je le retire donc également.

(L’amendement n° 301 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir l’amendement n° 756.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Merci, monsieur le président. J’ai fait référence à cet amendement hier soir lorsque, au cours de nos débats, nous discutions du plafonnement global de la dépense fiscale à l’impôt sur le revenu à 18 000 euros plus 4 % du revenu imposable. La question du sort qui serait réservé à certains avantages fiscaux s’est alors posée.

Cet amendement vise donc à reporter pendant cinq ans la réduction d’impôt sur le revenu excédant la limite de 10 000 euros, afin de préserver l’avantage acquis par les contribuables au titre du dispositif Madelin. Il faut articuler les deux plafonds : celui qui est fixé à 10 000 euros, et celui qui est fixé à 18 000 euros plus 4 % du revenu imposable du contribuable. Cet amendement vise à régler ce problème d’articulation, non seulement pour ce qui concerne le dispositif Madelin, mais également pour les FIP, dont nous venons de parler. Il rend donc compatibles le plafonnement global et les plafonnements spécifiques, avec un report en avant de l’avantage qui n’est pas purgé l’année où s’exerce le plafonnement global à 10 000 euros par foyer fiscal. Il me semble, compte tenu des débats d’hier soir, que cet amendement devrait faire consensus.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Cet amendement n’a, bien sûr, pas été examiné par la commission des finances. Compte tenu des débats d’hier soir, et de l’engagement pris par le Gouvernement, j’avais sous-amendé un autre amendement afin que le dispositif Madelin soit soumis au nouveau régime de plafonnement. L’amendement du Gouvernement règle ce problème, y compris pour les FIP.

Je dirai simplement un mot de la question des FIP. J’ai le sentiment, d’après les informations qui m’ont été données, que ce dispositif ne fonctionne pas très bien. Il faudrait peut-être réfléchir, non pas à une remise en cause – je reste prudent, car mes propos sont parfois mal interprétés – mais à une amélioration de ce dispositif, notamment en termes d’efficacité. Les montants sont tout de même relativement faibles. Il a fallu mettre en place des taux de réduction d’impôts très forts afin que des fonds soient réellement collectés en faveur des entreprises. Il faudrait trouver le moyen de rendre ces FIP encore plus incitatifs.

À titre personnel, je donne donc un avis favorable à l’amendement du Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Le débat sur cette question a en partie déjà eu lieu la nuit passée. Le Gouvernement va dans le bon sens en allongeant la période d’application de cette réduction d’impôt. Pour ma part, j’étais plus dur que le rapporteur général sur ce point. J’avais proposé qu’en contrepartie d’un allongement de la durée de cette réduction d’impôt, on augmente le pourcentage de fonds qui doit être investi dans des PME situées dans une zone géographique particulière. Ce pourcentage s’élève actuellement à 60 % : j’avais proposé de le remonter à un taux plus élevé, 70 % par exemple. On peut discuter de ce que devrait être ce taux, mais il devrait quoi qu’il en soit dépasser les 65 %. Le Gouvernement est plus laxiste ; la mesure qu’il propose va toutefois dans la bonne direction.

Notre collègue Christian Eckert a évoqué les difficultés de fonctionnement de ce dispositif. Comme beaucoup de dispositifs comparables, il souffre en effet d’une trop forte rigidité. L’amendement gouvernemental va dans le bon sens, et l’assouplit un peu. Nous le soutiendrons donc.

(L’amendement n° 756 est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 106 rectifié, qui fait l’objet d’un sous-amendement n° 757 du Gouvernement.

La parole est à M. Laurent Grandguillaume, pour soutenir l’amendement.

M. Laurent Grandguillaume. Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, cet amendement vise à soutenir le secteur de l’économie sociale et solidaire, qui est important et représente plus de 10 % des emplois. Ce secteur valorise les associations et la coopération. De plus, ces entreprises ne sont pas susceptibles d’être délocalisées. Les dispositifs fiscaux dits Madelin et ISF-PME permettent aux PME de trouver, auprès des contribuables, des ressources en fonds propres. Les ressources collectées grâce à ces dispositifs sont en général investies via des fonds de capital investissement ou des structures équivalentes. Elles peuvent aussi être investies directement dans les PME par les contribuables. La dépense fiscale correspondant à l’ensemble des PME bénéficiaires représente chaque année un montant de l’ordre d’un milliard d’euros.

Aux côtés des PME classiques, figurent, parmi les bénéficiaires de ce dispositif, les entités de l’économie sociale et solidaire, qui collectent aussi des ressources de l’ordre d’une centaine de millions d’euros, grâce à un volet fiscal adapté à l’économie sociale et solidaire au sein de ce dispositif. Cette ressource est essentielle au financement de ce secteur. Le dispositif général en faveur des PME classiques a été adapté en 2011, afin de mettre un terme à certaines dérives. Parmi les clauses anti-abus introduites à cette fin, figure notamment l’obligation faite aux PME de ne pas désinvestir avant dix ans les apports en capital reçus à la faveur de ce dispositif. Cela met en concurrence les PME classiques et les entités du secteur de l’économie sociale et solidaire. Le secteur de l’économie sociale et solidaire se voit ainsi appliquer le régime actuel d’obligation de détention des titres en capital pendant dix ans applicable aux PME classiques, alors même que l’obligation de détention faite aux fonds de capital investissement classiques n’est que de cinq ans.

Nous proposons donc, par cet amendement, de ramener l’obligation de détention à cinq ans, ce qui permettra aux investisseurs d’investir et aux entreprises de créer des emplois dans le domaine de l’économie sociale et solidaire. Les entités de ce secteur en ont bien besoin, puisque, vous le savez, le capital n’y est pas particulièrement rémunéré, ou en tout cas à des niveaux très faibles.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir le sous-amendement n° 757.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement est sensible à vos préoccupations, monsieur le député. Il est exact que l’économie sociale et solidaire connaît aujourd’hui les mêmes contraintes que l’économie classique. Si ces contraintes sont légitimes pour celle-ci, on peut considérer qu’elles sont trop fortes pour celle-là. Pour autant, l’amendement que vous proposez n’encadre pas suffisamment le dispositif applicable aux entités de l’économie sociale et solidaire. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement propose de sous-amender votre amendement. Si vous êtes d’accord, et si ce sous-amendement était adopté, alors le Gouvernement donnerait un avis favorable à votre amendement, et lèverait le gage.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Le sous-amendement du Gouvernement n’a évidemment pas été examiné par la commission. Je donne, à titre personnel, un avis favorable, pour les raisons qui ont été évoquées.

Pour ce qui est de l’amendement présenté par M. Grandguillaume, la commission s’y est montrée favorable. Il soutient les acteurs de l’économie sociale et solidaire, ce qui est essentiel dans le climat économique actuel. Ces acteurs sont des associations, de coopératives, de mutuelles, d’institutions de prévoyance ou de sociétés dont les dirigeants sont élus par les salariés, les adhérents ou les sociétaires, et remplissent certaines règles de rémunération de leurs dirigeants et salariés, ce qui me paraît extrêmement sain. L’avis de la commission est donc favorable à cet amendement tel qu’il serait modifié par le sous-amendement du Gouvernement, si l’Assemblée nationale l’adoptait.

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Cet amendement est plein de bon sens, puisqu’il homogénéise le dispositif existant par rapport aux règles applicables au dispositif ISF-PME. Simplement, je ne comprends pas une chose concernant le sous-amendement présenté par le Gouvernement. Pourquoi, monsieur le ministre, limitez-vous le bénéfice de ce dispositif aux entreprises « agréées en vertu du même article avant le 31 décembre 2012 » ? Est-ce à dire que les entreprises qui seraient créées ou agréées après cette date n’en bénéficieraient pas ?

(Le sous-amendement n° 757 est adopté.)

(L’amendement n° 106 rectifié, sous-amendé, modifié par la suppression du gage, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir l’amendement n° 754.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Cet amendement a pour objet de proroger de quatre années ce que l’on appelle le « Censi Bouvard », c’est-à-dire la réduction d’impôt sur le revenu en faveur des investissements immobiliers réalisés dans le secteur de la location meublée non professionnelle. Il s’agit pour l’essentiel des résidences pour étudiants et pour personnes âgées. Cela permettra de maintenir une offre de résidences dotées des services correspondants. Je tiens à le souligner, cette prorogation s’appliquera également aux résidences de tourisme, qui permettent la création de nombreux emplois et contribuent incontestablement à l’attractivité touristique de notre pays.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. La commission n’a pas examiné cet amendement. Ce dispositif est néanmoins connu, puisqu’une réduction d’impôt a été instituée pour les résidences de tourisme et pour les résidences de personnes âgées. À titre personnel, je suis donc favorable à cet amendement. J’émettrai simplement une petite alerte : les éléments qui remontent du terrain montrent que, parfois, des opérations sont conduites avec des gestionnaires défaillants. Il faut en effet qu’il y ait une location pendant neuf ans.

Il conviendra, par conséquent, d’avertir, sous une forme ou sous une autre, ceux qui souhaitent utiliser ce type de dispositif de l’importance de s’assurer de la qualité du gestionnaire dont la défaillance peut occasionner de nombreuses désillusions. Il y a eu quelques exemples – qui sont, bien sûr, toujours de trop – d’opérations montées avec des gestionnaires défaillants. Les investisseurs ont alors, certes, bénéficié de la réduction d’impôts, mais ils se sont retrouvés avec des placements pour le moins hasardeux.

Je ne sais pas s’il faudra, un jour, envisager un agrément ou autre, mais il convient au moins de mettre en garde les investisseurs, ce que je viens de faire.

Je suis toutefois favorable à cet amendement.

(L’amendement n° 754 rectifié est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Frédéric Reiss, pour soutenir l’amendement n° 114.

M. Frédéric Reiss. Cet amendement porte sur le crédit d’impôt au titre des dépenses supportées afin d’assurer le remplacement des agriculteurs par un tiers durant la période des congés. Nous souhaitons proroger en 2013 ce dispositif qui, instauré par la loi d’orientation agricole de 2006, arrive à échéance le 31 décembre 2012. Un autre amendement propose pour sa part de le prolonger de quatre années.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général, rapporteur. Cet amendement sera satisfait par l’amendement n° 331, quasi identique, que la commission a adopté, qui proroge de quatre ans ce dispositif fiscal pour permettre aux agriculteurs, et aux éleveurs notamment, de s’échapper de leurs installations, ce qui paraît légitime, dans la limite annuelle de quatorze jours.

Je vous invite, par conséquent à retirer votre amendement au profit de l’amendement n° 331.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Avis défavorable. Je ferai la même remarque que celle du rapporteur général. L’amendement de la commission des finances va au-delà de ce que vous souhaitez, puisqu’il prolonge ce dispositif jusqu’en 2016. Je vous demande donc d’accepter de retirer votre amendement.

M. le président. La parole est à M. Frédéric Reiss.

M. Frédéric Reiss. Je retire l’amendement.

(L’amendement n° 114 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi de plusieurs amendements pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements, n°s 113 et 137 rectifié, sont identiques.

La parole est à Mme Brigitte Allain, pour soutenir l’amendement n° 137 rectifié.

Mme Brigitte Allain. Cet amendement, présenté par le groupe écologiste tend également à proroger ce crédit d’impôt.

Il est fondamental pour les éleveurs de prendre des congés donc de pouvoir se faire remplacer, ce qu’ils ne pouvaient faire auparavant. En effet, avant que ne soit prise cette mesure, il était très souvent fait appel au remplacement en cas de formation, de mandat professionnel, de maladie ou d’accident mais rarement pour des congés. Depuis, les éleveurs, notamment, y recourent beaucoup pour prendre des congés, ce qui nous semble tout à fait essentiel.

Cela étant, je prends acte qu’un amendement de la commission va dans ce sens et je retire donc le nôtre.

(L’amendement n° 137 rectifié est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Frédéric Reiss, pour soutenir l’amendement n° 113.

M. Frédéric Reiss. Au bénéfice des propos qui viennent d’être tenus, je le retire également.

(L’amendement n° 113 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement n° 331.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Je n’ajouterai rien. Cela a été dit, les précédents amendements sont satisfaits par celui-ci.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Avis favorable et je lève naturellement le gage.

(L’amendement n° 331, modifié par la suppression du gage, est adopté. Les amendements suivants tombent.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement n° 332.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Mme Girardin a déposé un amendement n° 197 sur lequel j’ai émis des réserves. La commission en a donc rédigé un autre, n° 332, cosigné par Mme Girardin, à propos duquel je suis également réticent.

L’amendement tend à confier à la Direction générale des finances publiques la tenue du registre sur lequel doivent être inscrits les cabinets de défiscalisation, registre jusqu’alors tenu dans les territoires par les préfets, représentants de l’État.

Notre collègue propose, de plus, dans son amendement n° 197, de supprimer les obligations relatives à la probité – mot un peu fort – des associés du cabinet de défiscalisation, les dirigeants d’un cabinet de défiscalisation se trouvant, pour leur part, dans l’obligation de produire un casier judiciaire vierge. Il me semble normal que cette disposition s’applique aussi aux associés de ces cabinets. La suggestion de Mme Girardin ne me paraît tout de même pas aller dans le sens de la sécurisation de ces dispositifs.

Je suis donc très réservé sur ces amendements. Comme l’avis réservé n’existe pas, je m’en remettrai, par conséquent, à la sagesse de l’Assemblée, après avoir entendu le Gouvernement.

M. le président. Je vous rappelle qu’en l’absence de Mme Girardin, l’Assemblée ne saurait délibérer sur son amendement.

Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement. Nous avons eu, hier, un débat intéressant au terme duquel un consensus s’est dégagé pour stabiliser le dispositif. Nous accomplirons un travail conjoint, évidemment « transpartisan » dont l’ambition sera de sortir du double échec dont on a, je crois, abondamment discuté, hier soir : échec parce que le financement de l’économie ultramarine est insatisfaisant, échec aussi parce que les dispositifs fiscaux qui ont précisément pour but de financer cette économie coûtent très cher pour une efficience contestable et une injustice patente, la captation par les intermédiaires de la richesse ainsi collectée semblant excessive au regard même de l’objet de ces moyens de collecte.

Puisque nous avons décidé, hier soir, la stabilité, je suggérerai que l’on ne touche à rien d’autre, faute de quoi l’impression prévaudrait que certains « encaisseraient » cette stabilité, si j’ose dire, pour tenter ensuite d’assouplir davantage encore ces dispositifs.

Je demande donc à la représentation nationale de ne pas adopter cet amendement, d’autant qu’à l’occasion des débats d’hier, chacun a plus ou moins reconnu que les prélèvements effectués dans cette chaîne par les intermédiaires n’étaient pas faibles, c’est le moins que l’on puisse dire, et que l’on pouvait même se demander si leur niveau était légitime.

Adopter cet amendement donnerait l’impression d’ouvrir davantage encore les vannes à cette captation tout au long de la chaîne. Je ne crois pas que ce serait un bon signal puisque, je l’ai dit, nous avons décidé hier de privilégier la stabilité. La stabilité s’applique à tout. La réforme sera, par conséquent, globale. Puisque cet amendement ne peut être retiré dans la mesure où il a été adopté par la commission, je suggérerai à la représentation nationale de ne pas suivre, en l’espèce, le vote de la commission et de le rejeter.

(M. Denis Baupin remplace M. Marc Le Fur au fauteuil de la présidence.)

Présidence de M. Denis Baupin,
vice-président

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Le rapporteur général l’a rappelé, nous avons eu tout un débat en commission sur ce point et il a été battu. Certains collègues domiens et tomiens, notamment, ont fait valoir que le contrôle central, c’est-à-dire au bureau des agréments, donc à Paris, assurerait une plus grande homogénéité de l’application des critères que le système local. Ils ont, en effet, signalé que, dans certains territoires, le représentant de l’État ne disposait pas des moyens d’assurer ce contrôle. Les avis ont été divers et variés en commission, mais cet amendement a été adopté à la majorité. Je pense, pour ma part, qu’il est préférable d’opter pour le lieu où la compétence est la plus grande et où le contrôle est le meilleur. Monsieur le ministre, êtes-vous assuré que, dans chacun des territoires et des départements, un contrôle local est effectué selon des critères et une rigueur homogènes ?

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Mme Girardin, qui ne pouvait être présente ce matin, m’a demandé d’expliquer sa position, que la commission des finances a retenue. Comme l’a très bien expliqué M. le rapporteur général, l’amendement de notre collègue a deux aspects. Je ne suis pas d’accord sur le second car il convient, bien entendu, de maintenir la présentation d’un extrait de casier judiciaire.

Notre discussion en commission a, en fait, essentiellement porté sur le premier point : faut-il centraliser ou décentraliser les agréments des cabinets de défiscalisation ? Pour avoir travaillé à plusieurs reprises sur ce sujet ces dernières années, j’ai soutenu Mme Girardin. Je pense, en effet, monsieur le ministre, qu’il serait préférable de mettre en place un système d’agréments centralisé. L’expérience a montré, ces dernières années, que la complexité des montages a donné lieu à un certain nombre d’abus. Vos services le savent bien. J’insiste auprès de mes collègues de l’outre-mer, car ce sujet sera porté sur la place publique. Actuellement, les procédures contentieuses et les rappels fiscaux touchent des milliers de contribuables métropolitains, parce qu’ils ont été « embarqués » dans des montages par des cabinets de défiscalisation qui n’auraient pas dû opérer. Les enjeux sont considérables,…

M. Marcel Rogemont. C’est vrai.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. …puisque ces redressements fiscaux s’élèvent à plusieurs millions, voire plusieurs dizaines de millions d’euros. Croyez-moi, si ces contribuables font l’objet de tels redressements, ils se garderont bien d’investir de nouveau en outre-mer, ce qui serait dommage. Je plaide vraiment, comme le faisait notre collègue Gaël Yanno, au cours de la précédente législature, en faveur d’une moralisation et d’une transparence des cabinets de défiscalisation. C’est d’ailleurs le souhait des cabinets qui ont pignon sur rue. Je pense donc qu’un agrément central est meilleur qu’un agrément donné par les différentes préfectures.

M. le président. La parole est à M. Serge Letchimy.

M. Serge Letchimy. Je ferai une observation liminaire et je pense que mon collègue de Courson ne la prendra pas mal. Je réfute toujours l’expression « domiens, tomiens », qui n’est pas bonne, car réductrice. Il est préférable de parler des Guadeloupéens, des Martiniquais…

Je pense honnêtement, s’agissant de cet amendement, que le ministre a raison. Nous avons décidé ici ensemble de trouver des solutions dans les six à huit mois à venir et de présenter des propositions extrêmement concrètes. Mme Girardin suggère, dans un souci de rigueur, la centralisation. Elle ne parle pas d’un contrôle au deuxième niveau, Je n’ai pas lu cela dans son amendement. Je suis personnellement opposé à la centralisation.

Au-delà des stigmates quelque peu traditionnels et classiques, nous sommes d’accord sur deux points.

Premier point, à l’analyse, des financements par la fiscalisation peuvent coûter beaucoup plus cher que la budgétisation mais l’avantage, c’est qu’ils ne dépendent pas des contraintes budgétaires.

Second point, il est clair que les cabinets intermédiaires peuvent aussi poser des problèmes et l’expertise générale au cours des six mois qui viennent doit donc aborder la question de manière globale. On ne peut pas reprocher au Gouvernement et au rapporteur général de tenter de modifier la situation et présenter un amendement d’un autre côté.

Que l’initiative vienne de Mme Girardin, c’est très noble. Cela montre bien que quelqu’un venant des pays d’outre-mer peut chercher à assainir ou, surtout, à rationaliser un dispositif aussi central. Je l’en remercie, mais je suivrai personnellement l’avis du ministre.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Je n’ai peut-être pas été suffisamment clair : l’amendement de la commission concerne la centralisation tandis que celui de Mme Girardin traite en même temps du casier judiciaire des associés.

Il semblerait qu’un consensus se dessine pour que ces registres soient tenus au niveau central, mais l’amendement, qui fait précisément référence au bureau des agréments et rescrits de la direction générale des finances publiques, est mal rédigé parce que l’on ne peut pas viser un bureau de l’administration dans la loi.

Je vous suggère donc que nous retirions cet amendement et que nous traitions la question dans le collectif dans les semaines qui viennent, en tout cas avant la fin de l’année.

Si le président de la commission des finances en est d’accord, je retirerai donc l’amendement de la commission pour qu’il soit réécrit avant la discussion du collectif dans quelques semaines.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Mon intervention est simplifiée par l’accord du président de la commission des finances, que je remercie.

Il y a effectivement deux questions, celle de l’agrément, qui est centralisé, et celle de la tenue des registres des intermédiaires agréés, dont le soin est confié à l’échelon local. Si j’ai bien compris l’amendement propose de passer à l’échelon central.

Sur la finalité, je suis plutôt d’accord moi aussi mais nous reverrons en effet la question dans le collectif en réécrivant l’amendement car on ne peut pas viser un bureau de l’administration dans la loi, c’est du domaine réglementaire.

Le Gouvernement s’engage à régler le problème avec vous dans le collectif, en respectant l’esprit des discussions que nous venons d’avoir. Au bénéfice de cet engagement, il me paraît bien que l’amendement soit retiré.

M. le président. Monsieur le président de la commission ?

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Très bien ! Je suis d’accord.

M. le président. Il y a donc accord sur ce point.

(L’amendement n° 332 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Étienne Blanc, pour soutenir l’amendement n° 666.

M. Étienne Blanc. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Défavorable pour l’instant. Cette question sera probablement réétudiée dans un texte ultérieur.

(L’amendement n° 666, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement n° 333.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Cet amendement a déjà été assez longuement évoqué cette nuit. Il s’agit de demander au Gouvernement un rapport, avant le 1er mai 2013, afin de voir comment faire évoluer les dispositifs de défiscalisation, l’objectif étant à terme de transformer tout ou partie de la dépense fiscale afférente à l’outre-mer en de nouvelles dotations budgétaires.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Très bon amendement !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement est favorable à cet amendement. Ce rapport nous permettra de travailler au financement de l’économie ultramarine. Il n’y aura aucun tabou. Nous examinerons naturellement ce que pourrait être une budgétisation du financement de cette économie autant que l’efficacité des dispositifs fiscaux, dont certains, s’ils sont jugés pertinents, pourraient être améliorés.

Le Gouvernement associera à ce travail les parlementaires qui le souhaitent, notamment les parlementaires ultramarins, afin que nous puissions réfléchir ensemble, à partir d’un diagnostic partagé, à la façon dont pourrait évoluer le financement des économies des outre-mer.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Fruteau.

M. Jean-Claude Fruteau. Si je puis exprimer un petit regret, c’est que l’amendement tel qu’il est rédigé préjuge en quelque sorte la question puisque l’on prévoit déjà de remplacer le système de la défiscalisation par de la dépense budgétaire, mais ce n’est pas bien grave. Sur le fond, je suis d’accord, et je vais le voter.

Je suis d’autant plus d’accord que le débat d’hier soir m’a laissé une impression de malaise. Nous avions le sentiment qu’un certain nombre de non-dits étaient sur le point d’affleurer. Ce n’est pas conforme à l’idée que j’ai de la République, de ses valeurs et de la cohabitation de peuples différents au sein d’une même République française.

Il en sera ainsi chaque année si nous ne faisons pas le point une fois pour toutes et si nous ne trouvons pas un système fiable pour financer les économies ultramarines et la construction de logements. Je ne le souhaite pas parce que ce n’est pas non plus conforme à la visibilité qui est nécessaire dans toute politique économique.

Enfin, je souhaite vivement que la délégation aux outre-mer de notre assemblée soit associée d’une manière ou d’une autre à la réflexion et à ce travail, et je m’adresse évidemment particulièrement à M. le président de la commission des finances et à M. le rapporteur général.

M. le président. La parole est à M. Serge Letchimy.

M. Serge Letchimy. Je voterai bien entendu cet amendement mais, comme M. Fruteau, je vous rappelle qu’il s’agit d’étudier l’opportunité et la possibilité de transformer en dotations budgétaires tout ou partie des dépenses fiscales, et qu’aucune décision n’a encore été prise.

L’analyse doit être très objective ; nous sommes prêts à y participer de manière transparente. Ce que nous cherchons, ce n’est pas une manne financière de plus ou de moins – ce n’est pas cette logique qu’il faut défendre pour l’outre-mer, la plupart des modèles ayant échoué –, ce sont des dispositifs permettant d’aller vers une mutation économique et fiscale en faveur de la production, de la croissance, de la création de richesses, d’activités et d’emplois. C’est cela qui est fondamental pour nous, et nous sommes partenaires.

C’est la raison pour laquelle je suggère au ministre de ne pas s’entourer seulement d’experts comptables, d’experts budgétaires et financiers. Il faut associer à l’équipe qui va travailler des économistes capables d’investir la dimension du développement économique. C’est essentiel pour moi. Cela nous permettra d’avoir un vrai débat. C’est en effet l’objectif qui compte, et non les sommes que vous attribuez ou la source du financement.

M. le président. La parole est à M. Philippe Gomes.

M. Philippe Gomes. Le groupe UDI soutient cet amendement. Il nous paraît effectivement indispensable que le dispositif soit révisé dans le sens d’une plus grande justice fiscale et d’une plus grande efficacité économique.

Comme M. Fruteau, je souhaite que la délégation aux outre-mer soit associée aux travaux qui seront engagés et, comme M. Letchimy j’aimerais que l’on n’ait pas une vision strictement comptable et budgétaire de la question et qu’il y ait également une dimension économique.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Si le rapport a été demandé pour le 1er mai, c’est bien pour ne pas recommencer tous les ans le même débat et avoir des propositions concrètes avant nos travaux budgétaires.

Sur le fait que l’on préjugerait l’issue des travaux, les propos du ministre en séance valent tout de même engagement fort et je m’y associe : on ne va pas élaborer un rapport en se fermant des portes au moment où l’on commence.

Quant à associer l’ensemble des parlementaires d’outre-mer, je suis évidemment favorable à cette façon de travailler.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Alain Muet.

M. Pierre-Alain Muet. La difficulté, monsieur Letchimy, nous la connaissons bien, c’est qu’il faut trouver un dispositif incitatif, la dépense publique engendrant une dépense privée avec un fort effet de levier. C’est bien ce que permettait cette niche fiscale, mais elle avait l’inconvénient d’être totalement injuste du point de vue de la fiscalité. C’est ce type de réflexions qui nous manquent totalement et que nous proposera le rapport.

M. le président. La parole est à M. Jean-Philippe Nilor.

M. Jean-Philippe Nilor. J’émets le vœu, comme l’ont fait mes collègues, que ce rapport ne soit pas une instruction à charge, que l’on enlève les lorgnettes, que l’on sorte de la stigmatisation systématique et que l’on voit les vrais enjeux parce que la recherche systématique et obsessionnelle d’une justice fiscale du point de vue de l’hexagone peut provoquer une forte injustice économique et sociale dans nos territoires.

(L’amendement n° 333 est adopté à l’unanimité.)

Article 57

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Le Callennec, inscrite sur l’article 57.

Mme Isabelle Le Callennec. L’article 57 prévoit le remplacement, le 1er janvier 2013, du dispositif Scellier par le dispositif Duflot.

Alors que les investisseurs et les professionnels du bâtiment, déjà largement touchés par le relèvement du taux de TVA de 7 à 10 %, attendaient avec impatience l’annonce d’un dispositif incitatif à l’investissement locatif pour remplacer le Scellier, le Duflot se révèle particulièrement restrictif.

Si le texte reste en l’état, les zones B2 et C seront exclues. Nous ne pouvons l’accepter et c’est la raison pour laquelle nous avons déposé un amendement.

Le débat sur le zonage a déjà eu lieu au moment du resserrement de la loi Scellier. Il n’est d’ailleurs pas clos. Des députés éclairés sont intervenus pour dénoncer le risque réel d’inégalité entre les communes qui se trouvent en zones A et B1 et celles, parfois limitrophes, qui se trouvent en zones B2 et C. Une fois de plus, les effets de seuil montrent toute la limite de l’exercice. Nous gagnerions en efficacité à faire davantage confiance aux acteurs locaux, par exemple au sein des commissions régionales de l’habitat, pour mesurer les besoins en logements, établir la programmation et appliquer les dispositifs nationaux avec discernement et pragmatisme.

Par l’amendement que nous allons défendre, nous réaffirmons notre volonté que des communes rurales ou moyennes puissent elles aussi bénéficier du Duflot.

Pour éviter les effets d’aubaine et garder l’objectif de construire là où sont les besoins, je propose que nous reprenions l’arrêté du 23 septembre 2010, qui avait été pris pour permettre à des communes exclues du Scellier d’en bénéficier, à tire dérogatoire et après avis du préfet, ce qui fut le cas dans ma circonscription. Je pense à Vitré ou à Châteaugiron, qui ont apporté la preuve qu’il y avait une forte demande en matière de logement compte tenu du dynamisme de leurs bassins de vie. Pour mémoire, l’arrêté prenait en compte dix critères, dont le taux de variation de la population, le nombre de transactions immobilières ou le besoin en logements, et permettait ainsi de coller avec la réalité du terrain.

Avec ces précisions et celles qu’apporteront mes collègues, il nous paraît raisonnable et juste que la représentation nationale soutienne les amendements que nous avons déposés.

M. le président. La parole est à M. Gilles Lurton.

M. Gilles Lurton. Mon intervention rejoindra en partie celle de Mme Le Callenec : nous sommes du même département et nos idées sont donc un peu les mêmes sur ce sujet.

L’article 57 prévoit une aide à l’investissement locatif pour la production de logements neufs qui sera ouverte uniquement aux zones tendues A, A bis et B1. Contrairement à ce qui était le cas dans le Scellier, les zones moins tendues B2 et C ne seront pas éligibles au dispositif, sauf agrément du préfet après avis du comité régional de l’habitat.

Cette exclusion aura des conséquences importantes. La baisse des ventes frappera fortement l’emploi dans toute la chaîne du logement et entraînera inéluctablement une baisse de la production de logements en locatif social car de plus en plus de programmes privés incluent les logements locatifs sociaux dans les plans locaux de l’habitat. Elle réduira les recettes fiscales des collectivités, remettra fortement en cause le principe d’égalité des territoires et favorisera l’étalement urbain des métropoles et des villes moyennes.

En Bretagne, par exemple – je pourrais m’appuyer sur de nombreuses autres régions –, 95 % du territoire sera concerné par cette exclusion. Seules la métropole de Rennes, les villes de Saint-Malo, dont je suis élu, et de Dinard, ainsi qu’une partie des îles bretonnes pourront bénéficier du dispositif.

Quelques chiffres pour rappeler combien il est plus que jamais nécessaire d’accompagner l’effort de construction. Toujours en Bretagne, les ventes de logements neufs en zone B2 sont passées de 2 025 en 2010 à 519 au premier semestre 2012. L’exclusion de ces zones du dispositif d’aide à l’investissement locatif risque d’aggraver cette situation. Si l’objectif du Gouvernement est que le nouveau dispositif conduise dès 2013 à une production de 40 000 logements commercialisés, il est alors primordial que la zone B2 y soit pleinement associée.

Monsieur le ministre, j’ai déposé un amendement qui a été déclaré irrecevable par la commission des finances : je peux le comprendre, encore que je n’en pense pas moins. J’ai également saisi l’ensemble des parlementaires bretons de ce sujet. Un amendement semblable au mien sera présenté par la majorité ; si c’est le seul moyen de parvenir à l’objectif visé, je le voterai.

M. le président. La parole est à M. Marcel Rogemont.

M. Marcel Rogemont. L’article 57 instaure un nouveau dispositif de défiscalisation, avec une vocation sociale, ce qui n’était pas forcément le cas du Scellier. C’est donc une bonne chose.

Sur le zonage, dont j’ai discuté avec la ministre du logement, nous avons une vraie question. Nous devons reprendre l’ensemble des zones pour les adapter. Le comité régional de l’habitat et le préfet de Bretagne ont d’ailleurs proposé au ministère un nouveau zonage de façon à tenir compte de la réalité objective des territoires.

Le comité régional de l’habitat pouvait être saisi pour une extension du zonage, en vue d’une éligibilité au Scellier, et il donnait en général son approbation. Aujourd’hui, il faut au moins six ou sept mois pour obtenir une décision du CRH. C’est pourquoi, en attendant une réflexion plus large sur un nouveau zonage, notamment pour les zones B2 et C, il conviendrait que le Gouvernement soit attentif à ce que la zone B2 puisse, sans accord préalable du CRH, être éligible au Duflot. D’autant plus que, quelle que soit la zone, l’article 57 prévoit un autre taquet, le prix au mètre carré construit, qui empêchera les investisseurs de construire n’importe comment, n’importe où. Ainsi, l’amendement de nos collègues Christophe Caresche et Jean-Jacques Urvoas devrait pouvoir retenir l’attention du ministre.

M. le président. La parole est à M. Marc Dolez.

M. Marc Dolez. Notre groupe s’interroge, non sur l’opportunité d’un nouveau dispositif pour contribuer à la réalisation de l’objectif de construction de 500 000 logements nouveaux par an, mais sur l’efficacité de la nouvelle incitation fiscale qui nous est proposée en remplacement du Scellier.

Certes, cette nouvelle incitation sera plus sociale, mieux ciblée géographiquement, un peu moins dispendieuse pour les finances de l’État, même si son coût, estimé à 1,3 milliard d’euros, demeure très important. Toutefois, le dispositif souffre, selon nous, de certaines insuffisances. On nous annonce que les prix des loyers seront inférieurs de 20 % à ceux du marché : c’est beaucoup trop peu, si l’on veut bien considérer que les loyers dans les zones tendues sont très surévalués du fait de la rareté de l’offre. Ce dispositif est en outre très favorable aux promoteurs, qui ne devront imposer un loyer intermédiaire que pour une durée de neuf ans et auront droit au bénéfice de la réduction d’impôt sur les quatre cinquièmes des logements acquis au sein d’un même immeuble.

Si nous comprenons la nécessité de relancer la mise en chantier de logements, nous ne sommes pas sûrs que cette incitation fiscale puisse être efficace pour tenir l’objectif fixé. La priorité doit être selon nous d’augmenter de manière significative les aides à la pierre et de doter les bailleurs sociaux de moyens d’accroître et de diversifier leur offre. Or les quelques mesures prises dans ce domaine nous semblent à l’heure actuelle trop timides et parfois contradictoires. Je pense en particulier aux incidences prévisibles de la hausse de la TVA, qui représentera un surcroît de charges évalué à 450 millions d’euros.

M. le président. La parole est à M. Éric Alauzet.

M. Éric Alauzet. Il est vrai que les acteurs économiques du logement ressentent une certaine inquiétude quant à l’activité dans le BTP ; ils craignent une concentration de l’activité, un détournement de l’investissement en direction des territoires tendus. Il faut bien voir que, si les problématiques sont un peu différentes dans les territoires non tendus, elles existent néanmoins. Souvent, l’offre de logements coexiste avec des listes d’attente. Ce paradoxe est lié au fait qu’en province beaucoup de logements ne correspondent plus aux besoins des gens et nécessitent des interventions importantes : ils restent donc vides, bien que les listes d’attente soient longues.

La démarche vise à mieux protéger les futurs locataires mais aussi les futurs propriétaires. Le fait d’avoir construit un peu partout de façon anarchique a déçu les attentes de nombreux propriétaires vis-à-vis de ces placements, dans la mesure où ils ont dû baisser leurs loyers : on leur avait promis des loyers bien au-delà de ce que la réalité a ensuite révélé. Il faut assainir la situation pour maîtriser le prix des logements.

Enfin, je rappelle que la loi prévoit, en cas de besoin avéré, des dérogations qui ouvrent droit, avec l’aide du préfet, au bénéfice du dispositif.

M. le président. Nous en venons aux amendements sur l’article.

Je suis saisi d’un amendement rédactionnel n° 686 de M. le rapporteur.

(L’amendement n° 686, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Marc Dolez, pour soutenir l’amendement n° 567.

M. Marc Dolez. Parmi les réserves que nous avons formulées quant à ce dispositif figure la limitation à neuf ans de la durée de l’engagement pris par l’acquéreur de louer sous les plafonds qui seront fixés par décret. Dans les zones tendues, le déséquilibre entre l’offre et la demande persistera probablement bien au-delà de la période de neuf ans retenue par le projet de loi. Pourquoi, alors, ne pas prévoir d’étendre l’obligation faite à l’acquéreur, pour autant qu’il continue, bien sûr, de proposer le bien à la location ? C’est l’objet de cet amendement. Nous pensons en effet qu’il est souhaitable de pérenniser l’offre de loyers réglementés dans les zones tendues, dans le double souci de garantir la mixité sociale de l’habitat et d’éviter que le marché se tende de nouveau à l’échéance du dispositif.

On objectera sans doute à cette mesure qui nous semble de bon sens qu’une telle obligation rendra le dispositif moins attractif. Nous pensons au contraire que le fait de consentir un crédit d’impôt pour une durée de neuf ans justifie ce type de contrepartie.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. La commission a repoussé cet amendement. Le plafonnement du loyer est assorti d’une contrepartie : la réduction d’impôt. Dès lors que la réduction d’impôt cesse, il n’y a pas lieu que le plafonnement se prolonge. D’autant moins que cela aurait probablement un effet incitatif sur la vente. Ce serait bon, certes, en termes d’encaissement de droits de mutation, mais cela aurait un effet désastreux sur la stabilité du parc et sur le marché.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Défavorable. L’avantage fiscal, c’est du donnant-donnant ; il vient en contrepartie d’un effort de la part de celui qui s’apprête à investir, un effort au regard à la fois du loyer demandé et des ressources du futur locataire. S’il ne demeure que la contrainte, il est hautement probable que l’investissement n’aura pas lieu. Le Gouvernement vous propose d’accepter ce compromis de neuf ans, qui paraît être une période suffisante pour permettre la mise en chantier de logements et susciter les investissements dont cette production a besoin. Si vous ne retiriez pas l’amendement, monsieur le député, le Gouvernement serait obligé d’appeler à voter contre, au nom du respect de ce contrat donnant-donnant entre l’investisseur et l’État.

(L’amendement n° 567 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 667.

M. Marc Le Fur. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, je voudrais vous convaincre qu’il y a, en B2, en C, des zones rurales qui connaissent une tension sur le logement et qui, pour cette raison, doivent être aidées. Nos collègues Isabelle Le Callennec, Gilles Lurton, Marcel Rogemont se sont exprimés en ayant à l’esprit des cas précis.

Quand certaines zones sont privilégiées à l’excès, quand les trois quarts, voire, dans une région comme la Bretagne, 95 % du territoire sont oubliés, cela produit une stigmatisation. Je reprends un exemple que le président Méhaignerie aimait à citer. Un épargnant résidant à la campagne se rend chez son conseiller financier pour lui indiquer qu’il envisage de construire chez lui afin de louer. Le conseiller financier ne peut que lui répondre : « Que nenni ! Allez plutôt dans les grandes villes, où vous bénéficierez d’avantages fiscaux que vous n’aurez pas sur votre lieu de résidence. » De fait, le logement locatif privé est en train de déserter nos zones B2 et C.

Vous me direz qu’il est plus facile d’accéder à la propriété dans ces zones. C’est vrai, mais on constate un arrêt de la construction pour l’accession à la propriété depuis quelques mois. Vous me direz aussi qu’il existe des initiatives publiques pour le logement social ; or ces initiatives se concentrent de plus en plus sur les quartiers urbains les plus défavorisés.

Il faut que nous ayons une vision fine des choses, que nous soyons capables de construire dans les zones rurales, qui doivent donc pouvoir bénéficier du dispositif Duflot. Le Scellier avait évolué dans ce sens à partir de 2010. C’est l’objet de nos amendements qui sont, me semble-t-il, raisonnables.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Très bien !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Défavorable. Plusieurs amendements portant sur le même sujet, je m’expliquerai pour l’ensemble. Tout d’abord, le zonage est indispensable,…

M. Marcel Rogemont. C’est vrai.

M. Christian Eckert, rapporteur général. …parce que le marché du logement n’est pas uniforme et que la dépense est lourde.

À terme, le dispositif coûtera en année pleine, au bout des neuf ans de la montée en charge, un milliard d’euros. Il est donc indispensable de zoner pour des raisons financières et aussi parce qu’il y a des zones beaucoup plus tendues que d’autres – là où l’accès au logement est plus cher, le nombre de demandes plus important.

Ensuite, je n’ai pas d’injonction à donner au Gouvernement, mais l’actualisation du zonage doit être faite plus souvent pour tenir compte des évolutions du marché.

M. Christophe Caresche et M. Marcel Rogemont. Exactement !

M. Christian Eckert, rapporteur général. Je vais citer un exemple qui devrait intéresser notre collègue Blanc : ma circonscription est frontalière du Luxembourg, et il y a une tension importante sur le marché parce que le foncier est inaccessible chez nos voisins, ce qui crée un appel d’air chez nous. Des zones peuvent, en quelques années, devenir tendues. J’invite donc à réviser régulièrement le zonage.

Enfin, je vous rappelle, monsieur Le Fur, que les préfets pourront, après avis du comité régional de l’habitat, inclure dans le dispositif des zones éligibles au Duflot des communes situées en zone B2. Je vous accorde que cela pourra faire perdre un peu de temps, c’est pourquoi j’émettrai un avis favorable à l’amendement de nos collègues Caresche et Urvoas qui propose que, pendant les six premiers mois, les communes situées en zone B2 continuent à être éligibles dans leur ensemble de façon à permettre la montée en charge du dispositif dérogatoire qui sera sous pouvoir des préfets. Votre amendement a une portée trop générale, mais j’ai rappelé des principes qui peuvent nous rassembler.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement. J’ai bien entendu vos arguments, monsieur Le Fur, ainsi que ceux des orateurs inscrits sur l’article, mais vous allez voir que l’amendement suivant prévoit une période de transition jusqu’en juin 2013 pour permettre au nouveau système de se caler et que le passage de l’un à l’autre se fasse sans solution de continuité. Je pense que vous serez sensible à cette préoccupation.

Par ailleurs, il ne paraît pas raisonnable d’adopter le système que vous proposez : on en connaît les excès. Ce n’est pas parce qu’on veut les corriger que l’on méconnaît les situations délicates de telle ou telle commune située en zone B2 ou en zone C. En revenir au préfet qui, selon les cas particuliers et au regard des difficultés communales, pourra décider d’agréer, est un bon système, une disposition qui s’apparente davantage à du sur-mesure qu’à du prêt-à-porter, qu’à de la production de masse. Le sur-mesure est adapté à la politique que nous voulons mener tant il est vrai que nous devons rompre avec deux échecs : le constat de l’insuffisance de logements dans les zones tendues, fussent-elles globalement en B2 ; la production de logements qui restent vides, ne répondant donc pas au besoin de ceux qui n’arrivent pas à se loger, et décourageant de surcroît les investisseurs qui, sur la foi de promotions souvent habilement menées, se sont endettés pour financer la construction de logements et se trouvent contraints de rembourser alors même qu’ils ne touchent pas de loyer. Il faut éviter ces deux écueils. Il me semble que le sur-mesure que nous proposons est de nature à corriger au moins en très grande partie ces deux défauts.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Tout d’abord, l’expérience montre qu’on a le plus grand mal à établir un zonage incontestable. Du fait de cette difficulté, sa mise en place prend des années et des années. S’agissant du Scellier, je me souviens qu’il a fallu très longtemps pour l’établir. Par ailleurs, la limite du zonage, c’est qu’une fois qu’il a été établi, la vie continue et il peut devenir obsolète à tel ou tel endroit du territoire – vous avez cité, monsieur le rapporteur général, l’exemple d’une zone frontalière. En dehors du zonage général, il faut donc prévoir des procédures dérogatoires, ainsi que des procédures transitoires quand on change de système.

Deuxième réflexion : on a progressé sur cette question parce qu’un accord général s’est dessiné ces dernières années pour centrer les aides fiscales sur des zones où il y a vraiment des besoins de logements. Certes, il y a eu des excès, c’est-à-dire des investissements locatifs inutiles faute de locataires, mais il faut reconnaître que c’était avant tout les séquelles du Robien, voire du Borloo, et qu’ils ont été limités avec le Scellier. Je ne dis pas qu’il n’y a pas eu des erreurs de localisation, mais elles ont été d’une ampleur limitée. On a été conduit, après beaucoup de discussion, à accepter des dérogations pour la zone C, choisissant finalement l’agrément déconcentré au niveau des préfets car l’agrément du ministre lui-même aurait été une procédure très lourde. Pour ma part, j’approuve complètement, dans la poursuite de cette politique, l’idée d’un recentrage sur le Duflot, mais il faut absolument prévoir une transition pour la zone B2. Je soutiendrai donc l’amendement qui la propose pour six mois parce qu’il faut vraiment être prudent en passant d’un système à l’autre.

Dans la logique de cette transition, je soutiens la demande de Marc Le Fur pour la zone C. C’est complètement cohérent : il faut pouvoir conserver un pouvoir dérogatoire au niveau préfectoral, même s’il sera exercé de façon très limitée. Exclure complètement la zone C du dispositif présentera deux inconvénients. Le premier, c’est qu’il peut y avoir en zone rurale de vrais besoins de logements ici où là. Le second est économique : derrière le fait d’agréer tel ou tel territoire, il y a des entreprises du bâtiment qui auront du travail ou qui n’en auront pas. Il faut donc faire très attention et on a intérêt, même si cela ne jouera qu’à la marge, à garder une procédure dérogatoire maîtrisée par les préfets.

M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, je ne nie pas la réalité du zonage. Il doit exister car il offre des avantages relatifs importants dans certaines zones très tendues. Mais n’excluons pas totalement la zone C. Il y a des territoires ruraux à expansion démographique. Certes, ce que disait M. Alauzet est vrai : il y a eu des excès dans certains endroits, avec des bâtiments vides. Mais ce n’est pas le cas dans les territoires que je connais bien, où la population a continué d’augmenter et où la pression foncière existe toujours. L’Ouest, tous les géographes le savent, connaît un développement démographique important alors qu’il est essentiellement en zone B2 et en zone C. Exclure la zone C du nouveau dispositif signifierait que pas un seul épargnant n’ira investir dans ces territoires puisque l’avantage relatif sera bien plus favorable s’ils investissent dans les zones urbaines.

L’amendement de nos collègues Caresche et Urvoas va dans le bon sens, mais à mon avis pas assez loin : pourquoi limiter la période transitoire à six mois ?

M. Christophe Caresche. Je vous répondrai quand je défendrai mon amendement.

M. Marc Le Fur. On a l’impression que les épargnants auront six mois de répit, mais que se passera-t-il après ? Cela dit, l’adoption cet amendement serait un moindre mal. Il faut un système de dérogations aisées pour le B2 et possibles, même si elles seront exceptionnelles, j’en conviens, pour le C. D’où le maintien de mon amendement.

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. On a cette discussion sur les zonages depuis des années. Monsieur le ministre, quel risque prenez-vous en étendant du B2 au C le régime dérogatoire ? Epsilon. Il y a des situations tendues en zone C. Je peux vous citer le département de la Marne : il y a toutes les situations possibles et imaginables, et tout le monde est en B2 ou en C. Vous indiquez vous-même dans votre rapport, monsieur Eckert, que l’agglomération rémoise bénéficiera de la dérogation, sans parler de la zone châlonnaise. Mais le paradoxe, c’est que le logement se développe à l’extérieur des communes situées en zone B2. Les gens ne veulent plus habiter dans les villes parce qu’ils recherchent l’accession à la propriété d’une maison individuelle avec jardin. Ils viennent donc à la campagne construire,…

M. Marc Le Fur. Et ils ont raison !

M. Charles de Courson. …libérant ainsi des logements, notamment pour des personnes âgées. Je vous parle des réalités marnaises mais c’est vrai aussi dans beaucoup d’autres départements. Regardons les dernières études de l’INSEE sur l’évolution de la population : la population des grandes zones rurbaines augmente tandis que celle de beaucoup de villes baisse. On voit, monsieur Caresche, que vous êtes parisien. Vous seriez d’un territoire rural, vous comprendriez mieux ce mouvement. L’approche zonale prévue à l’article 57 n’est pas bien adaptée. On ferait mieux de voter l’amendement Le Fur, ce qui permettrait après de calibrer secteur par secteur.

M. le président. Je considère que l’Assemblée et suffisamment éclairée. Nous passons au vote.

(L’amendement n° 667 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Christophe Caresche – il est parisien, mais ce n’est pas forcément un défaut, monsieur de Courson. (Sourires.) –, pour soutenir l’amendement n° 427, qui fait l’objet d’un sous-amendement n° 751.

M. Christophe Caresche. Je vous remercie, monsieur le président, pour cette solidarité parisienne.

Le Gouvernement a voulu à juste titre recentrer le Duflot sur les zones qui en ont le plus besoin. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de problèmes ailleurs – le Scellier avait d’ailleurs été petit à petit territorialisé. Le Gouvernement propose qu’en zone B2, les préfets puissent agréer des programmes immobiliers, au cas par cas et en fonction des besoins. Mon amendement propose de maintenir l’éligibilité de l’ensemble des communes en zone B2 pendant six mois parce que la procédure d’agrément va prendre du temps. Il faut donc un dispositif transitoire.

Monsieur Le Fur, outre le dispositif qui va reposer sur les préfets, il y a aussi l’engagement de la ministre de revoir le zonage, notamment en zone B2. Je souhaiterais que ce soit fait dans les six mois, s’agissant notamment des zones tendues afin qu’elles puissent passer en zone B1. On aurait ainsi une double réponse : une réponse préfectorale pour l’ensemble de la zone B2, et une recomposition. Tel est l’objectif. Cela permettrait de respecter le souci du Gouvernement de territorialiser le dispositif car nous savons qu’il y a eu un certain nombre d’abus avec le Scellier. Même si ce dispositif a incontestablement eu un effet très positif sur la construction, celle-ci n’a pas toujours répondu à de véritables besoins de logements. La période transitoire améliorerait très significativement ce qui nous est proposé.

(M. Marc Le Fur remplace M. Denis Baupin au fauteuil de la présidence.)

Présidence de M. Marc Le Fur,
vice-président

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué, pour présenter le sous-amendement n° 751.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le présent sous-amendement a pour objet d’expliciter l’amendement n° 427 – auquel le Gouvernement est favorable par principe, comme je l’ai indiqué en réponse notamment à M. le Fur – qui rend éligibles les communes de la zone B2 au dispositif Duflot, sans agrément pendant une période transitoire de six mois, soit jusqu’au 30 juin 2013. J’ai indiqué ce qu’était cette période de transition.

La date du 30 juin sera appréciée au regard soit de la signature de l’acte authentique d’acquisition soit du dépôt de la demande de permis de construire.

L’expérience nous a appris qu’il fallait caler les choses pour qu’il n’y ait pas de contestation possible. C’est l’un des objets de ce sous-amendement. S’il était adopté, le Gouvernement donnerait alors un avis favorable à l’amendement n° 427 et il lèverait le gage.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Après ce long débat, j’émets un avis favorable à l’amendement de nos collègues Urvoas et Caresche et au sous-amendement du Gouvernement qui permet de préciser les choses.

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Urvoas.

M. Jean-Jacques Urvoas. Je remercie le ministre et le rapporteur général de donner un avis favorable à l’amendement que j’ai déposé avec Christophe Caresche car, effectivement, dans une région comme la mienne où seulement 14 % du territoire sera concerné par les nouvelles dispositions, nous avons besoin de ce temps pour essayer de convaincre que les propositions qui ont pu être faites par le comité régional de l’habitat sont aussi fondées que les premières assises qui visent à ne mettre dans la zone dérogatoire que les agglomérations de Rennes et de Saint-Malo. Dans nos régions, bien des territoires tendus bénéficiaient du dispositif existant et méritaient une dérogation.

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Simple observation de méthode sur l’amendement et le sous-amendement – que nous voterons – concernant la date du 30 juin. Depuis un an ou un an et demi, tout le monde demande une révision de la carte. Pouvez-vous, monsieur le ministre, prendre l’engagement que la carte sera révisée au 30 juin ?

M. Marcel Rogemont. Il a dit oui !

M. Charles de Courson. Non, il n’a pas dit oui, il est prudent. Il faudrait un engagement solennel de la ministre du logement dont c’est le travail.

Je trouve le délai un peu court. Les préfets auront-ils le temps de sortir les décrets d’application en six mois ? Moi, je n’y crois pas. Si le délai était fixé à septembre ou octobre, cela ne serait déjà pas mal. Je suggère donc au Gouvernement de remplacer le 30 juin par début septembre parce que je ne vois pas comment cela peut être fait en six mois.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Charles de Courson vient de soulever la première question que je voulais poser.

Ma seconde question porte sur les deux critères que vous évoquez, monsieur le ministre – permis de construire et acte authentique – et sur la manière dont ils se combinent. Si un permis de construire est attribué en mai, par exemple, l’acte authentique sera postérieur puisque l’acquéreur n’a pas signé de promesse de vente. Le permis ayant été accordé, est-ce qu’il va bénéficier du régime Duflot ? Deuxième cas : le permis de construire n’a pas été accordé mais l’acquéreur a signé son acte authentique avant le 30 juin, que se passe-t-il ? Comment cela se combine-t-il ?

Nous risquons d’avoir beaucoup de questions de nos concitoyens. Il faut donc expliciter la manière dont les critères s’appliquent.

M. le président. La parole est à M. Benoist Apparu.

M. Benoist Apparu. Le zonage nous occupe depuis bon nombre d’années.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Cinquante ans !

M. Benoist Apparu. Comment ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Des années !

M. Benoist Apparu. Il nous occupe depuis des années et cela continuera, bien évidemment. Il s’agit de savoir si le zonage est bien ou mal fait et s’il peut être revu avant le 30 juin.

Il me semble qu’il peut être revu dans ce délai puisque nous avons des études relativement dynamiques et l’obligation légale de revoir le zonage tous les trois ans. Il me semble même que dans un passé pas si lointain, il avait été proposé de remonter des communes de C à B2, ce qui a été fait. En revanche, quand il s’agissait de faire le mouvement inverse et de redescendre des communes de B1 à B2, tout le monde refusait. Il est évidemment très facile d’accorder des avantages fiscaux mais les collectivités refusent le nouveau zonage quand il conduit à les supprimer. Je crois donc que nous pouvons sans difficulté aucune adapter le zonage existant avant le 30 juin et le délai me paraît donc suffisant.

En ce qui concerne la zone C, notre éminent collègue Charles de Courson, député de la Marne, nous a dit qu’il y avait des tensions très fortes en zone C dans son département. Marnais moi-même, et non pas parisien, je n’ai pas le sentiment qu’il y ait des tensions particulières en zone C dans la Marne, ou alors elles m’ont échappé. De grâce, arrêtons, avec nos dispositifs d’investissements locatifs, de construire là où cela n’est pas nécessaire !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Très bien ! Merci !

M. Marcel Rogemont. Il parle d’or !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Il faut poursuivre la politique du ministre précédent ! (Sourires)

M. le président. La parole est à M. Jacques Krabal.

M. Jacques Krabal. Je connais bien le département de la Marne et mieux encore le département de l’Aisne. Nous avons déjà sollicité la révision du zonage pour la partie sud de l’Aisne et nous n’avons jamais obtenu gain de cause alors qu’il y a une véritable tension sur notre territoire placé entre Paris et Reims. Nous n’avons bénéficié d’aucun dispositif. Je souscris à la nécessité – des demandes ont été adressées en ce sens au préfet et au ministre précédent – d’une révision du zonage afin que nous puissions bénéficier de ce dispositif, non pour des raisons politiques mais pour répondre aux attentes des habitants.

Est-il possible ou non de mettre en place, dans les six mois à venir, ce zonage que nous attendons depuis de nombreuses années pour le sud de l’Aisne ? Il y a des zonages qui sont complètement dénués de fondement. Cela n’a que trop duré !

M. le président. La parole est à M. Marcel Rogemont.

M. Marcel Rogemont. S’agissant du zonage, nous avons un problème. Dans certains cas, il existe des tensions objectives ; dans d’autres, on souhaiterait qu’il y en ait pour pouvoir construire, ce que je comprends. Cela étant, le dispositif vise à répondre à des situations particulières de tension réelles.

J’adhère tout à fait aux propos de Benoist Apparu. Élu de Bretagne, je siège au comité régional de l’habitat et je vous le dis net et clair : dans une grande partie de la Bretagne, il n’y a pas de tension ; en revanche, il y en a dans certains endroits.

C’est pourquoi je suis tout à fait favorable à l’amendement des collègues Caresche et Urvoas qui va être modifié parce que c’est aussi la réalité en ce qui concerne la zone B2. Je suis d’accord sur ce point.

Mais n’allons pas dire que le secteur C est très largement sous tension, ce n’est pas vrai. Si tension il y a, c’est celle éprouvée par les élus qui se disent : « Si on pouvait construire quelque chose, ce serait bien. » On n’en a que faire d’ailleurs, de connaître le résultat pour les investisseurs. Ne confondons pas la vraie tension avec l’espoir qu’il y ait une tension…

(Le sous-amendement n° 751 est adopté.)

(L’amendement n° 427, sous-amendé, modifié par la suppression du gage, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir l’amendement n° 752, qui fait l’objet d’un sous-amendement n° 759.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. La réduction d’impôt au titre du dispositif Scellier était possible pour un seul logement et dans la limite d’un plafond global de 300 000 euros.

Cette limite conduisait les contribuables voulant atteindre le plafond à acheter des logements chers, c’est-à-dire situés dans zones chères, ou des logements de grande taille. Or les besoins sont également réels pour des logements de taille moyenne dans des zones où les prix sont moins élevés.

Le Gouvernement propose donc de supprimer cette condition dans le nouveau dispositif, tout en conservant le plafond de 300 000 euros. On peut espérer qu’il y ait ainsi davantage de logements construits que sous l’empire du dispositif Scellier.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir le sous-amendement n° 759 et donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 752.

M. Christian Eckert, rapporteur général. La commission n’a malheureusement pas pu examiner votre amendement, monsieur le ministre. Néanmoins, votre rapporteur a eu le temps de s’échauffer depuis ce matin et a proposé, de façon assez rapide, un sous-amendement.

Au lieu d’autoriser la décomposition en plusieurs opérations, comme vous le proposez, je suggère que nous nous en tenions à deux. Si trois opérations sont réalisées dans la limite du plafond de 300 000 euros, on aura trois logements à 100 000 euros, c’est-à-dire de taille très réduite, autour de vingt mètres carrés, si l’on se réfère aux coûts de construction dans les zones concernées. Cet objectif ne me semble pas toujours intéressant.

Le sous-amendement propose donc de remplacer « des » opérations par « au plus deux » opérations.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Pour optimiser le plafond.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse de l’Assemblée nationale.

M. le président. La parole est à M. Christophe Caresche.

M. Christophe Caresche. S’agissant du sous-amendement du rapporteur général, à ma connaissance, ce dispositif permet aussi de financer des logements pour étudiants ou de même type. Mais je me trompe peut-être.

M. le président. La parole est à M. Benoist Apparu.

M. Benoist Apparu. Je comprends l’amendement du Gouvernement et je partage son objectif. Il y aurait une réflexion à mener : devrait-on avoir un même plafond de 300 000 euros pour toutes les zones ? Pour 300 000 euros on peut au mieux acheter un deux-pièces en zone A mais un quatre-pièces en zone B2. Les typologies ne correspondent pas forcément au plafond. Monsieur le ministre, le vrai débat est celui-ci : faut-il un plafond à 250 000 euros en zone B2 et à 350 000 euros en zone A + ? Ce serait beaucoup plus efficace.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Ce n’est pas faux !

(Le sous-amendement n° 759 est adopté.)

(L’amendement n° 752, sous-amendé, est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 688 de M. le rapporteur général est rédactionnel.

(L’amendement n° 688, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Benoist Apparu, pour soutenir l’amendement n° 483.

M. Benoist Apparu. Cet amendement vise à prolonger le dispositif fiscal proposé. Dans sa rédaction actuelle, le dispositif risque ne pas répondre aux objectifs de production fixés, monsieur le ministre. Au vu des évolutions actuelles, la production devrait baisser de 100 000 logements en 2012 par rapport à 2011, ce qui représente 150 000 emplois en moins pour les entreprises du BTP, selon les chiffres publiés par le ministère.

Les promoteurs annoncent une production encore inférieure en 2013, sous la barre des 300 000 logements. Le dispositif Duflot, le post Scellier, tel qu’il nous est présenté aujourd’hui ne me semble absolument pas calibré pour répondre aux objectifs de production que vous avez donnés dans l’étude d’impact et qui sont très loin de ceux qu’a fixés le Gouvernement, à savoir 500 000 logements.

C’est la raison pour laquelle je propose un dispositif plus incitatif : ajouter 1 % de défiscalisation supplémentaire par an au-delà des neuf ans prévus. Cela va coûter de l’argent, me direz-vous. C’est vrai, mais dans dix ans puisque le dispositif est générationnel : dès lors que l’on rajoute de la fiscalité supplémentaire au bout de neuf ans, le coût est reporté dans dix ans, et ne s’impute pas tout de suite.

Deuxième chose : sur le plan fiscal, le dispositif prévu ne me semble pas répondre à l’intérêt actuel du marché. L’autre solution dont nous discutions à l’instant avec Éric Woerth est de se poser la question du modèle économique des constructions de logements en France. Cela fait trente ans que nous inventons dispositif après dispositif : le Duflot après le Scellier qui avait lui-même succédé aux Robien, Méhaignerie et autres.

Il faudra un jour ou l’autre que nous sortions de ces dispositifs où la construction de logements est impérativement liée à de l’investissement fiscal. Pour l’heure, le principal, c’est de fournir un véritable effort de relance pour faire repartir le marché, avec une durée limitée. C’est pourquoi je propose cet amendement, qui vise à booster le dispositif. Mais il nous faut, parallèlement à cela, inventer non pas un nouveau dispositif fiscal, mais un nouveau modèle économique pour produire les logements dont notre pays a besoin.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Le ministre Apparu nous fait la leçon sur la sortie d’un dispositif fiscal tout en défendant un amendement qui propose de le rallonger et de le renforcer.

M. Benoist Apparu. Je viens d’expliquer pourquoi ! Nous avons besoin d’une relance immédiate !

M. Christian Eckert, rapporteur général. C’est néanmoins la triste réalité : vous défendez l’idée d’en finir avec les incitations fiscales au moment même où vous défendez un amendement qui propose de prolonger le dispositif de six années en appliquant un taux croissant. Cela peut apparaître contradictoire, même si le débat est intéressant.

Nous sommes en train d’examiner un projet de loi de finances. Je suis rapporteur de la commission des finances. Le dispositif coûte déjà en année pleine 1 milliard. Vouloir le prolonger de six ans avec un taux supérieur n’est tout simplement pas envisageable financièrement. Pour le reste, on peut toujours poursuivre les réflexions d’ensemble que vous évoquez. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Il est défavorable, pour deux raisons. La première est que, vraisemblablement par malfaçon technique, votre proposition n’est pas conditionnée par des critères de niveau de loyer ou de ressources. Mais un sous-amendement pourrait y remédier.

Mais le fond du problème est que, comme vous l’avez vous-même souligné en disant que cet amendement n’aurait un coût pour l’État que dans dix ans, vous suggérez en fait de majorer les engagements hors bilan de l’État. Ils sont déjà, je le crains, suffisamment élevés. Ne serait-ce qu’au regard de ce principe de précaution qui commande de tenter de limiter ces engagements hors bilan, cessons de repousser à dix ou quinze ans des engagements de l’État que d’autres assumeront en nos lieu et place.

M. Benoist Apparu. Vous les repoussez déjà à neuf ans !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Au nom de ce principe général de précaution, j’appelle à rejeter cet amendement.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Je comprends parfaitement la réponse du ministre. Mais il faut bien être conscient aussi, et c’est vraiment la raison d’intérêt général qu’évoque Benoist Apparu, que nous risquons de connaître un effondrement de la construction neuve. Chacun sait que si l’on veut garder la construction à un certain niveau, le logement étant une chaîne dont chaque maillon est indispensable, il faut également jouer sur l’investissement locatif. Si l’on veut permettre au dispositif Duflot d’assurer un relais dans cette perspective de construction globale, la proposition de Benoist Apparu est d’un grand intérêt, même si – et sur ce point, je pense comme vous, monsieur le ministre – il se traduit par un engagement financier reporté, avec l’espoir que dans dix ans nos finances publiques se porteront mieux.

Lorsque nous avons eu à mettre en place le dispositif Scellier, très rapidement, et vous vous souvenez que cela a été une initiative de la commission des finances qui a soulevé quelques réticences à l’époque du côté du ministère du logement, l’objectif était vraiment, face à la crise – les bureaux de vente s’étaient vidés subitement – de maintenir l’activité en construction neuve. Nous étions les premiers à reconnaître que le dispositif était très avantageux, mais il a marché. Nous avons réussi, pendant toute l’année 2009, à garder à flot la construction de logements neufs. C’est dans un esprit vraiment constructif, c’est le cas de le dire, que Benoist Apparu a présenté cet amendement.

(L’amendement n° 483 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Benoist Apparu, pour soutenir l’amendement n° 484.

M. Benoist Apparu. Il est dans le même esprit que le précédent. Je ne le défendrai donc pas.

Juste un mot, monsieur Eckert, sur la prétendue contradiction dans mes propos. Nous connaissons actuellement un effondrement de la construction. Nous avons fini l’année 2011 à 430 000 logements. Nous finirons 2012 à moins de 330 000, et 2013 à moins de 300 000 ! Vous en verrez les conséquences en termes de TVA pour le budget de l’État, vous en verrez les conséquences sur les droits de mutation, puisque le secteur de l’immobilier ancien s’effondre aussi. Et le neuf conditionne évidemment l’ancien.

L’idée de cet amendement, c’est que nous avons besoin, dans cette période de chute massive de la construction de logements, d’un effet booster. Or il me semble que le dispositif Duflot tel qu’il est aujourd’hui ne booste pas suffisamment la construction pour nous permettre de passer le trou d’air.

Nous avons déjà connu une chute similaire en 2008. Nous avons mis en place le dispositif Scellier, effectivement très puissant, qui nous a permis entre 2009 et 2011 de récupérer les 100 000 logements non produits en 2008. Le risque, aujourd’hui, est de flinguer l’appareil de production. Lors de la crise du logement de 1991, nous avons mis sept années à reconstituer l’appareil de production et à retrouver des chiffres de construction acceptables.

Le risque majeur, aujourd’hui, est celui-là. Raison pour laquelle je préconise de booster aujourd’hui le dispositif Duflot tout en préparant parallèlement la fin de l’ensemble de ces dispositifs avec lesquels on survit depuis trente ans. Il faut inventer un nouveau modèle économique. Mais il faut bien passer le trou d’air.

M. le président. L’amendement est-il retiré, mon cher collègue ?

M. Benoist Apparu. Oui, monsieur le président.

(L’amendement n° 484 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 704 de M. Christian Eckert. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

(L’amendement n° 704, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements de M. Christian Eckert, nos 678, 679, 680 et 681. Ils sont également rédactionnels.

(Les amendements nos 678, 679, 680 et 681, acceptés par la commission et le Gouvernement, sont successivement adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements, nos 463, 696 rectifié, 644 et 654, pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements nos 463 et 696 rectifié sont identiques.

L’amendement n° 644 fait l’objet de deux sous-amendements.

L’amendement n° 654 fait l’objet d’un sous-amendement.

La parole est à M. Philippe Gomes, pour soutenir l’amendement n° 463.

M. Philippe Gomes. Le texte qui nous est présenté prévoit un avantage fiscal de 18 % pour l’outre-mer, équivalent à celui de l’hexagone. Dans le dispositif Scellier, cet avantage était de 24 %, contre 13 % pour l’hexagone. En outre, le Pacifique disposait d’un avantage supplémentaire, dans le cadre de ce qu’on appelait le Scellier Pacifique : la durée d’amortissement n’était que de cinq ans au lieu de neuf.

Bien évidemment, ce dispositif avait sa pertinence : il est plus sécurisant d’investir dans du logement intermédiaire à Bordeaux qu’à Fort-de-France, ce qui paraît encore plus sécurisant que de le faire à Nouméa ou à Papeete. D’autant qu’entre 2014 et 2019, dans le cadre de l’accord de Nouméa, la Nouvelle-Calédonie tiendra un référendum sur son indépendance, ce qui ne favorise pas forcément les investissements de cette nature.

L’amendement que je propose vise à maintenir l’écart qui existait entre l’hexagone et l’outre-mer. Il faut pour cela prévoir un delta de 11 points pour ce qui est de la réduction d’impôt, et donc passer de 18 à 29 % pour l’ensemble de l’outre-mer. Il faut en outre que la durée d’amortissement, qui est de neuf ans dans l’hexagone et dans les départements d’outre-mer, soit réduite pour ce qui est du Pacifique, comme c’était le cas dans le dispositif Scellier, à cinq ans. Ce qui confère un petit avantage supplémentaire lorsqu’on investit à Papeete ou à Nouméa.

J’insiste sur la nécessité de cette durée d’amortissement différenciée pour le Pacifique, faute de quoi je ne vois pas pourquoi un investisseur métropolitain irait prendre le risque de financer du logement intermédiaire à Papeete ou à Nouméa plutôt que dans les départements d’outre-mer. Autrement dit, on aurait mis sur pied un dispositif qui n’aurait aucune capacité à s’appliquer, faute d’attractivité.

M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Tuaiva, pour soutenir l’amendement n° 696 rectifié.

M. Jean-Paul Tuaiva. Je souscris totalement à ce que mon collègue de Nouvelle-Calédonie vient d’exposer. Je trouve qu’il y a une injustice, et je pense que nos collègues des départements d’outre-mer le comprendront. Il est important qu’il y ait un différentiel de durée d’amortissement entre les DOM et les TOM, compte tenu des difficultés qu’il y a dans nos collectivités et, surtout, pour que l’incitation soit meilleure vers les TOM que vers les DOM.

Nous sommes tout de même un petit peu surpris, et nous avons d’ailleurs soulevé la question dans la délégation de l’outre-mer, qu’à chaque fois les TOM soient plus ou moins exclus des dispositifs et projets de loi qui viennent en discussion dans l’hémicycle. J’appelle donc le ministre et le rapporteur général à faire un effort en faveur de cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Serge Letchimy, pour soutenir l’amendement n° 644.

M. Serge Letchimy. Il se trouve que le dernier amendement de cette discussion commune, qui est présenté par le Gouvernement, crée dans l’article 57 un dispositif Duflot DOM – même si je n’aime pas cette expression – qui comporte un différentiel de 11 points par rapport à l’hexagone. On rétablit donc ce qui existait dans le Scellier. C’est très important.

Je maintiens pour l’instant mon amendement, en attendant que le Gouvernement défende le sien. Je veux en effet insister sur le fait que nous connaissons actuellement un effondrement impressionnant de la construction de logements intermédiaires. Pour prendre l’exemple de la Réunion, nous sommes passés de 6 000 à 1 500 logements intermédiaires. Aujourd’hui, en Martinique, en Guadeloupe, en Guyane, à la Réunion et certainement dans les autres territoires, quand on n’a pas les moyens, on a deux possibilités : soit le logement social, soit pas de logement du tout. D’autant que le dispositif Girardin en faveur des primo accédants a été supprimé, et qu’il est en cours de suppression pour ce qui est du logement intermédiaire.

Nous sommes donc en pleine crise. M. Apparu a parlé de la diminution du volume. Ce dispositif marque notre volonté d’inverser la tendance. Il faut absolument reprendre des politiques de construction. C’est fondamental. Les conséquences de la situation sur le BTP sont graves. Cela représente beaucoup plus de licenciements dans les entreprises, notamment dans le BTP.

Par ailleurs, je soutiens nos collègues Gomes et Tuaiva qui demandent un dispositif plus attractif. Je considère qu’ils ont besoin de cette durée de cinq ans au lieu de neuf. C’est ce qui existait auparavant. En toute objectivité, je défends donc leur position, même si je souhaiterais que les départements d’outre-mer se rapprochent de cet avantage car il est difficile pour nous d’avoir la même durée d’amortissement que dans l’hexagone, soit neuf ans. Cela m’embarrasse donc un petit peu, mais par amitié et surtout par honnêteté intellectuelle, je soutiens leur demande.

M. le président. Sur l’amendement n° 644, je suis saisi de deux sous-amendements, nos 748 deuxième rectification et 746 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Philippe Gomes, pour soutenir le sous-amendement n° 748 deuxième rectification. À moins de considérer que vous l’avez déjà défendu, monsieur Gomes ?

M. Philippe Gomes. Si vous le souhaitez, monsieur le président, je souhaite dire ce que je n’ai pas pu dire lorsque j’ai défendu l’amendement n° 463. Vous savez, pour nous, ces questions sont capitales. Ce sont quelques minutes à l’Assemblée, mais c’est fondamental pour l’année qui vient.

M. le président. Nous vous écoutons.

M. Philippe Gomes. Le logement intermédiaire en Nouvelle-Calédonie constitue bien évidemment, probablement comme dans l’ensemble de l’hexagone et de l’outre-mer, la seule possibilité de logement pour les classes moyennes.

En effet, elles n’ont pas accès au marché libre dont elles ne peuvent pas acquitter les loyers, et les logements sociaux, comme le rapport le souligne, sont d’ores et déjà occupés à 96 %, taux qui ne laisse que des marges de manœuvre extrêmement réduites.

À défaut d’avoir accès au logement intermédiaire les classes moyennes font donc comme elles peuvent. Heureusement, les solidarités communautaires de nos pays permettent parfois à plusieurs familles de partager un logement, mais un tel système a ses limites.

Le dispositif Duflot prévoit des prix de loyers inférieurs de 20 % en moyenne à ceux du marché libre. Ce dispositif peut être, le cas échéant, adopté dans nos pays, ce qui n’est pas inutile quand on sait que dans les outre-mer les revenus sont en moyenne de 30 % inférieurs à ceux de la métropole. Il faut aussi prendre cet élément en considération lorsque l’on parle de la cherté de la vie puisque le loyer représente le premier poste de dépense des ménages.

La construction de logements intermédiaires est également une activité économique soutenue, qui crée de l’emploi dans nos pays. À ce titre-là aussi, ce que nous proposons ici est essentiel.

M. le président. La parole est à M. Boinali Said, pour soutenir le sous-amendement n° 746 rectifié.

M. Boinali Said. Ce sous-amendement vise à compléter les dispositions de l’amendement n° 644 en réduisant la durée de location de neuf à six ans.

Dans les départements et collectivités d’outre-mer, la construction de logements se heurte à des difficultés propres à ces territoires du fait d’un isolement relatif expliquant un prix élevé des matières premières, le manque de ressources des collectivités locales et la rareté du foncier.

Il s’agit donc de renforcer les mécanismes visant à accroître l’attractivité du logement locatif intermédiaire neuf, dont les surcoûts de la construction et l’appréciation des risques peuvent dissuader certains investissements.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir l’amendement n° 654.

Vous pourrez, par la même occasion, monsieur le ministre, donner l’avis du Gouvernement sur les trois autres amendements et sur les sous-amendements.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement présente un amendement qui revient à créer un Duflot pour les DOM, avec un avantage fiscal majoré de 18 à 29 %.

Cela nous paraît être une particularité suffisante et significative pour inciter à l’investissement. Toute réduction de la durée de l’engagement de location de neuf ans à cinq ans ou, comme le souhaite M. Said, à six ans, me semble exclue.

Monsieur Philippe Gomes, je suis désolé de ne pas avoir été convaincu par vos arguments. J’ai le souvenir que dans cette enceinte, lors du débat sur le dispositif Scellier, le député de Nouvelle-Calédonie avait probablement dû se montrer plus convaincant puisqu’il avait obtenu du gouvernement précédent la réduction de la durée d’engagement de neuf à cinq ans. Mais aujourd’hui, vos arguments n’ont pas convaincu le Gouvernement.

Le Gouvernement est défavorable aux trois autres amendements, ainsi qu’au sous-amendement n° 747.

M. le président. Sur l’amendement n° 654, je suis saisi d’un sous-amendement n° 747.

La parole est à M. Philippe Gomes, pour le soutenir.

M. Philippe Gomes. Je veux remercier M. le ministre : l’amendement du Gouvernement règle 80 % du problème pour l’outre-mer.

Cependant, s’il n’y a plus de différence entre un investissement dans le logement intermédiaire à Papeete ou à Nouméa, bénéficiant d’un amortissement sur neuf ans et d’un avantage fiscal de 29 %, et un investissement de même nature dans les départements d’outre-mer, le logement intermédiaire va mécaniquement disparaître en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française. Voulons-nous en arriver à un tel résultat ?

Une durée d’amortissement de cinq ans constitue-t-elle une dérogation nouvelle par rapport à la situation actuelle ? Non ! Le dispositif en vigueur aujourd’hui prévoit de différencier les départements d’outre-mer et le Pacifique puisque l’amortissement se fait sur neuf ans dans le premier cas, et sur cinq ans dans le second.

Je demande à la représentation nationale de bien vouloir prendre en compte cet élément qui conditionne l’accès des classes moyennes du Pacifique à un logement au loyer accessible.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’ensemble des amendements et sous-amendements ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. La commission est favorable à l’amendement du Gouvernement, en se félicitant qu’un dispositif particulier soit instauré pour les départements et collectivités d’outre-mer.

Ce dispositif prévoit un avantage fiscal de 29 % sur neuf ans. Son application est conditionnée au respect d’un certain nombre de critères en matière de performance énergétique pour les départements d’outre-mer – ce n’est pas le cas pour Mayotte et seulement sous certaines conditions pour les collectivités d’outre-mer. Les conditions prévues concernant le montant des loyers et les ressources des locataires seront adaptées par décret à chacun des territoires, puisque ceux-ci connaissent des situations très différentes.

La commission est favorable à l’amendement n° 654 du Gouvernement, et défavorable au sous-amendement n° 747.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Fruteau.

M. Jean-Claude Fruteau. Je suis cosignataire avec M. Serge Letchimy de l’amendement n° 644.

Il s’agit aujourd’hui de combler un vide, le logement intermédiaire dans les outre-mer étant quasiment en voie de disparition.

Mon collègue Letchimy a rappelé que la Réunion avait enregistré en la matière un recul de 75 % en quelques années sous les effets conjugués de la réorientation de la défiscalisation vers le logement social, opérée en 2009 par la LODEOM, et de la disparition programmée du dispositif Girardin locatif.

Nous pouvons donc nous féliciter de la mesure proposée par le Gouvernement, pour toutes sortes de raisons qui tiennent au logement, mais également au fait que le secteur des bâtiments et travaux publics constitue une part très importante de l’emploi outre-mer. Or nous savons que lorsque le logement intermédiaire est à la peine, l’emploi recule dans le secteur du BTP. Depuis deux ans, à la Réunion, ce secteur a perdu plus du tiers de ses empois.

La dimension économique de la mesure, son impact sur l’emploi, n’est donc pas à négliger, et je me félicite que le Gouvernement reprenne ces idées à son compte et propose d’instaurer un « Duflot DOM » pour relancer le secteur du logement intermédiaire.

M. le président. La parole est à M. Jean-Philippe Nilor.

M. Jean-Philippe Nilor. Je prends acte du fait que le Gouvernement entend concrètement préserver l’attractivité du logement intermédiaire dans nos territoires et dans nos pays. Il serait d’ailleurs plus juste de dire qu’il entend arrêter la dégradation de la situation.

Je soutiens les amendements défendus par M. Serge Letchimy et M. Boinali Said. Il faut savoir que dans nos pays, de plus en plus de personnes doivent payer un loyer qui dépasse leurs revenus. Vous avez bien entendu : un loyer qui dépasse le revenu ! On se demande comment cela peut exister.

Par honnêteté intellectuelle, je soutiens également le sous-amendement de M. Philippe Gomes, même si son adoption pourrait diminuer l’attractivité de l’investissement dans le logement intermédiaire en Martinique, à la Guadeloupe ou à la Réunion. J’en ai fait la promesse : s’il ne retire pas son sous-amendement, je le voterai.

(Les amendements identiques nos 463 et 696 rectifié ne sont pas adoptés.)

(Les sous-amendements nos 748 deuxième rectification et 746 rectifié, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

(L’amendement n° 644 n’est pas adopté.)

(Le sous-amendement n° 747 n’est pas adopté.)

(L’amendement n° 654 est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 691 de M. Christian Eckert. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

(L’amendement n° 691, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 57, amendé, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Monsieur le président, je vous demande une courte suspension de séance.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à onze heures quarante, est reprise à onze heures cinquante.)

M. le président. La séance est reprise.

Nous en venons aux amendements portant article additionnel après l’article 57.

Après l’article 57

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l’amendement n° 701.

M. Charles de Courson. Pour financer la mesure dite « Reynès-de Courson » instaurant une défiscalisation d’un euro sur les CDD dans le secteur agricole, il avait été prévu une taxe soda et une réduction du remboursement de TIPP dont bénéficiaient les agriculteurs. Or, le Gouvernement n’a pas maintenu l’exonération, mais il a gardé la recette. Il est donc proposé de revenir à la situation antérieure, en rétablissant la réduction dont bénéficiaient les agriculteurs.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Nous avons déjà eu ce débat à plusieurs reprises. Défavorable.

(L’amendement n° 701, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Éric Alauzet, pour soutenir l’amendement n° 298.

M. Éric Alauzet. Cet amendement vise à mettre en œuvre la taxe sur les produits générateurs de déchets prévue par la loi du Grenelle de l’environnement. Il s’agit de responsabiliser les metteurs sur le marché, c’est-à-dire les industriels, en les mettant à contribution, progressivement, par l’intermédiaire d’un dispositif de responsabilité élargie du producteur – REP – adapté à chaque type de déchets. Il se trouve qu’aujourd’hui, seule une partie des produits qui finissent dans nos poubelles sont concernés par le principe de responsabilité élargie du producteur, la moitié restante ne faisant l’objet d’aucune contribution. Cette situation est injuste et crée une inégalité entre les différents metteurs sur le marché. Nous proposons donc, en attendant qu’une éventuelle REP soit créée, d’instaurer une taxe sur ces produits. Cette taxe serait très faible – 0,01 euro par kilo –, mais elle aurait le mérite de définir un cap, d’envoyer un signal et d’inclure l’ensemble des acteurs économiques dans le même processus.

Nous voulons supprimer une anomalie : ce sont aujourd’hui les collectivités, et donc, au bout du compte, les ménages, qui supportent non seulement le coût de la collecte et du traitement de ces déchets, mais aussi la TGAP, puisque, ces déchets ne faisant pas l’objet d’une REP, ils sont le plus souvent traités par l’incinération ou l’enfouissement. En cas d’adoption de cet amendement, la logique voudrait que l’État redistribue le produit de cette taxe aux collectivités locales pour alléger la facture des ménages. Il s’agit finalement d’un transfert des ménages vers les producteurs, qui, à leur tour, pourront éventuellement répercuter cette charge supplémentaire sur le consommateur. Ainsi, cet amendement vise à modifier l’assiette, puisque la taxe serait acquittée, non plus par les ménages dans leur ensemble, mais par les consommateurs, lesquels seraient responsabilisés, de même que les producteurs. Cette taxe relève donc du même principe que l’impôt à la source.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Cet amendement a été rejeté par notre assemblée lors de l’examen de la première partie du projet de loi de finances. Certes, il est plus vertueux, en principe, de faire payer la gestion des déchets par les consommateurs plutôt que par les contribuables, mais une telle généralisation doit faire l’objet d’un groupe de travail et d’une concertation, comme le prévoit, du reste, la feuille de route environnementale définie par le Premier ministre.

En outre, la mesure serait techniquement très difficile à mettre en œuvre en l’état, pour au moins trois raisons. Premièrement, la définition des produits de grande consommation générateurs de déchets est renvoyée à un décret sans plus d’indications. L’amendement est donc encore plus large que l’amendement n° 63, que nous devrions examiner dans un instant et qui vise, quant à lui, les produits fortement générateurs de déchets : ici, tous les produits de grande consommation seraient visés. Deuxièmement, la TGAP, qui doit avoir un effet dissuasif, s’appliquerait dès 2014, ce qui laisse peu de temps pour la mise en place de nouveaux éco-organismes, qui ne sont d’ailleurs pas prévus par la loi. Enfin, votre taxe renchérirait le coût de ces produits, le surplus de recettes allant à l’État mais pas directement à la gestion des déchets.

Pour toutes ces raisons, mon cher collègue, je vous invite à retirer votre amendement, faute de quoi je demanderais à l’Assemblée de le rejeter.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement comprend votre intention, monsieur le député, mais ne croit pas possible de donner un avis favorable à votre amendement, car la mesure que vous proposez n’atteindrait pas l’objectif que vous lui assignez.

Tout d’abord, pour créer un impôt, encore faut-il en définir l’assiette de façon précise. Or, vous faites référence à des « produits de grande consommation fortement générateurs de déchets ». Cette notion, que l’on peut comprendre intuitivement, ne fait l’objet, à ce jour, d’aucune définition législative. Ce ne serait donc pas faire œuvre législative satisfaisante que d’asseoir une taxe sur un produit qui n’a pas été préalablement défini.

Par ailleurs, il est prévu que cette taxe serait acquittée par les seuls metteurs sur le marché qui ne participent pas à un dispositif de responsabilité élargie. Or, l’administration n’a pas connaissance de ces metteurs sur le marché. Ainsi, de même que l’on ne connaît pas l’assiette de la taxe, on ne sait pas davantage qui acquitterait cette taxe. Il faudrait que l’administration interroge tous les metteurs sur le marché et vérifie pour chacun d’entre eux s’ils participent ou non à un dispositif de prévention tel que celui que vous souhaitez. Ce serait – passez-moi l’expression – un travail de Romain.

Encore une fois, je comprends votre intention, mais il me semble qu’il serait prématuré d’adopter cette taxe, qui resterait vaine, faute d’une définition et de ceux qui l’acquittent et de son assiette. Le Gouvernement appelle donc au rejet de l’amendement.

M. le président. Retirez-vous votre amendement, monsieur Alauzet ?

M. Éric Alauzet. Je retiens au moins un élément positif de l’intervention du rapporteur général : il souhaite qu’un groupe de travail se penche sur cette question. Mais je ne m’en satisfais pas tout à fait. Je maintiens donc cet amendement, car je crois qu’il ne faut pas relâcher la pression ; nous devons atteindre les objectifs fixés dans le Grenelle. Nous ne pouvons pas nous effacer, en ce domaine.

(L’amendement n° 298 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Gomes, pour soutenir l’amendement n° 293.

M. Philippe Gomes. La responsabilité élargie du producteur, fondée sur le principe constitutionnel du « pollueur-payeur », a vocation à s’appliquer à l’ensemble des activités économiques. Le présent amendement propose donc une modification de l’article L.541-10-1 du code de l’environnement, afin d’intégrer les livres et la presse dans l’assiette de la contribution relative à la REP « papiers ». La presse et les livres sont en effet exonérés de toute contribution financière depuis l’origine du mécanisme, alors qu’ils représentent le quart du gisement papiers en France. Cette exonération représente un manque à gagner de plus de 50 millions d’euros pour les collectivités en charge de la gestion et du traitement de ces déchets, et exclut ces acteurs des politiques d’éco-conception. Leur participation à la REP papiers est, en outre, une condition indispensable pour atteindre les objectifs fixés par le Gouvernement, à savoir atteindre un taux de recyclage des papiers de 60 % en 2018, contre 47 % seulement aujourd’hui.

Toutefois, étant donné les difficultés financières de certains acteurs des secteurs concernés, l’amendement introduit une alternative leur permettant de contribuer en nature : pour la presse, cette contribution consisterait en une mise à disposition de l’éco-organisme des papiers agréé par l’État ; pour les livres, elle prendrait la forme de la mise en place de dispositifs de réemploi, de tri et de recyclage des déchets d’imprimés papiers, ménagers et assimilés.

Par ailleurs, l’amendement renvoie à des décrets le soin de déterminer le barème applicable à ces contributions en nature. Il prévoit une période transitoire – le dispositif serait applicable seulement à partir du 1er janvier 2014 – durant laquelle la presse et les livres demeureront en dehors du champ de la REP papiers et donc exonérés d’éco-contribution.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Cet amendement a été repoussé par la commission. Même si le montant de l’éco-contribution serait de moins d’un centime par livre de poche, par exemple, le livre ne peut pas être soumis au même régime que les imprimés gratuits, comme la publicité. Au demeurant, il ne représente que 7 % des imprimés. Quant à la presse, l’impact d’une telle mesure serait de plus de 9 millions d’euros pour la presse régionale, soit le tiers de l’aide au portage. Par souci de cohérence, il serait donc plus judicieux de rejeter cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Même avis que la commission.

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton.

M. Hervé Mariton. Je souhaiterais dire quelques mots des difficultés que soulève la fiscalité écologique. À la différence de la fiscalité classique, qui repose essentiellement sur des flux de richesse, la fiscalité écologique est une fiscalité comportementale, dont l’objectif est souvent de faire en sorte que la base sur laquelle elle est établie s’éteigne. De surcroît, elle suppose une analyse fine des comportements et risque ainsi de favoriser une approche normative, voire de poser des difficultés du point de vue des libertés. Il s’agit d’un vrai sujet de philosophie de l’impôt.

Par ailleurs, l’amendement de notre collègue part évidemment d’une bonne intention, mais force est de constater que le dispositif fiscal proposé s’accorde mal au soutien de la presse et du livre.

J’ai compris que le Gouvernement est assez prudent, assez hésitant, s’agissant de la fiscalité écologique. Mais, puisqu’un certain nombre de contraintes politiques vont le conduire à être plus allant et à agir plus rapidement en ce domaine, je l’alerte sur les difficultés considérables qu’il risque de rencontrer et sur le rendement extrêmement médiocre que peut produire ce type de fiscalité. En outre, il me semble que moraliser les comportements n’est pas tout à fait l’objectif de l’impôt. La morale, l’incitation à adopter un comportement vertueux est une chose, mais l’impôt est fondamentalement fait pour financer le budget de l’État et les missions que celui-ci a à assumer.

M. Michel Piron. C’est très bien dit. Nous l’avons d’ailleurs vu avec les amendements « vélo » !

(L’amendement n° 293 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Éric Alauzet, pour soutenir l’amendement n° 294.

M. Éric Alauzet. Alors que l’amendement n° 298 visait à instaurer une taxe sur les produits générateurs de déchets, l’amendement n° 294 vise à poser les bases d’une responsabilité élargie du producteur – une REP. Par conséquent, la philosophie est différente. Ce dispositif repose sur une assiette clairement identifiée et un transfert opéré des ménages vers les producteurs. Après la filière DEEE, les emballages, les imprimés non sollicités et différents matériaux, nous avons ici un dispositif constituant une nouvelle étape.

Je veux dire à M. Mariton que si nous ne faisons pas notre révolution culturelle, si nous ne tenons pas compte de l’épuisement des matières premières, de leur renchérissement, de la question écologique et des énormes coûts de réparation – en termes de santé et d’environnement – engendrés par notre système économique déviant, si nous ne savons pas intégrer ces facteurs dans la fiscalité, nous passons à côté de notre rôle, qui est d’anticiper l’économie du xxie siècle.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Je comprends bien l’intention de M. Alauzet, mais il n’y a pas actuellement de REP mise en place. Par ailleurs, dans la mesure où le dispositif fiscal qu’il est proposé d’instaurer pour taxer les produits concernés ne décrit pas leur champ – il est seulement question d’« éléments d’équipement » –, il est inopérant. La commission est donc défavorable à l’amendement n° 294.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. La politique du Gouvernement consiste à renforcer les filières existantes plutôt qu’à en créer de nouvelles. De plus, aucune étude d’impact n’est prévue, ce qui ne me paraît pas raisonnable. Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Éric Alauzet.

M. Éric Alauzet. L’argument avancé par M. le rapporteur général, selon lequel il n’y a pas de REP en place, ne me paraît pas justifié. En effet, la mise en place de la contribution a toujours précédé l’installation des filières : c’est justement ce qui incite les metteurs sur le marché à installer ces filières.

(L’amendement n° 294 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Éric Alauzet, pour soutenir l’amendement n° 303 rectifié.

M. Éric Alauzet. Je ne sais pas pourquoi l’amendement n° 303 rectifié se retrouve à cet emplacement, monsieur le président, car il était lié à l’amendement n° 302 rectifié, que j’ai retiré. Bien sûr, je retire également l’amendement n° 303 rectifié.

(L’amendement n° 303 rectifié est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Goldberg, pour soutenir l’amendement n° 391 rectifié.

M. Daniel Goldberg. L’amendement n° 391 rectifié fait suite à une discussion que nous avons déjà eue au sujet de l’article 1407 bis du code général des impôts, qui prévoit la possibilité, pour les communes de moins de 50 000 habitants, non touchées par la taxe sur les logements vacants réformée dans le cadre de ce PLF, de mettre en place une taxe spécifique sur les logements vacants. Notre amendement prévoit que, dans les communes en état de carence au regard de l’article 55 de la loi SRU, c’est-à-dire n’atteignant pas les objectifs de construction de logement locatif social, la taxe soit instaurée de plein droit.

Pour être tout à fait honnête vis-à-vis de M. le ministre et M. le rapporteur, je dois dire qu’ayant réfléchi depuis la rédaction du rapport, je proposerais, si mon amendement recueillait un avis favorable, un sous-amendement supprimant les mots : « À défaut de délibération prise avant le 30 juin 2013 ». L’alinéa à insérer dans le code des impôts commencerait donc par les mots : « Dans les communes faisant l’objet », pour une meilleure compréhension.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement est du même avis que la commission, d’abord parce qu’il est peu probable que cet amendement ait une grande portée, le nombre de communes concernées étant très limité.

Par ailleurs, l’outil auquel vous souhaitez recourir, à savoir la taxe sur les logements vacants, pour sanctionner les communes n’appliquant pas parfaitement la loi SRU, ne paraît pas adapté. Si vous souhaitez renforcer – notamment par voie d’initiative parlementaire – les sanctions existant déjà, nous pourrons en débattre, mais il ne paraît pas approprié d’utiliser ici un outil créé pour une autre finalité.

En résumé, le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 391 rectifié, d’abord parce que son champ d’application serait extrêmement restreint, ensuite parce que l’outil qu’il est proposé d’utiliser semble inadapté à l’objectif poursuivi.

M. le président. La parole est à M. Daniel Goldberg.

M. Daniel Goldberg. Au vu des remarques de M. le ministre – auxquelles s’ajoute le problème de rédaction que j’ai moi-même évoqué –, je vais retirer mon amendement. Cependant, j’attire votre attention, monsieur le ministre, sur le fait qu’il vise, par l’instauration systématique de la taxe dans les communes carencées, à donner plus de moyens à ces communes pour construire du logement social. J’ai bien noté que nous aurions l’occasion de débattre à nouveau de cette question, et je retire mon amendement n° 391 rectifié.

(L’amendement n° 391 rectifié est retiré.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 334 et 386.

La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement n° 334.

M. Christian Eckert, rapporteur général. S’il n’est pas d’une portée considérable, l’amendement n° 334 est tout de même d’une certaine utilité. Actuellement, l’administration fiscale doit communiquer, pour une commune donnée, la liste des logements vacants située sur le territoire de celle-ci. Cet amendement propose de remplacer, à l’article L. 135 B du livre des procédures fiscales, les mots « à leur demande » par les mots « chaque année », ce qui conduira, pour l’ensemble des communes, à une transmission annuelle automatique de la liste des logements vacants par l’administration fiscale, pour le prix d’un timbre.

M. le président. La parole est à M. Daniel Goldberg, pour soutenir l’amendement n° 386.

M. Daniel Goldberg. Contrairement à M. le rapporteur général, je considère que cet amendement a une portée considérable : il peut aboutir à ce que des communes ne souhaitant pas construire ne puissent invoquer l’excuse de ne pas connaître la liste des logements vacants sur leur territoire.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Je comprends l’objectif de ces amendements et, dans la mesure où j’y suis assez sensible, je proposerai dans un moment une solution à ce sujet. Il faut toutefois prendre conscience du fait qu’à partir du moment où l’on demande aux administrations de l’État de faire des économies et des gains de productivité, il n’est pas logique de leur demander, dans le même temps, d’effectuer des tâches supplémentaires plutôt lourdes – établir et transmettre la liste des logements vacants n’est pas si simple.

Je suggère que l’on revienne sur ce sujet dans le cadre du prochain collectif budgétaire, en proposant par exemple un système de facturation que l’administration pourrait adresser aux communes et qui constituerait, pour celles-ci, un élément de responsabilisation : le fait pour les communes de demander communication de la liste ne se résumerait pas à la volonté de rassembler encore davantage de documentation sur les logements, sur le taux d’occupation ou sur tel ou tel élément d’information, mais impliquerait l’intention d’utiliser la liste.

M. Pierre-Alain Muet. Très bien !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Je vous invite par conséquent à retirer cet amendement. De mon côté, je m’engage à ce que l’on revienne sur la question dans le cadre du collectif. Nous pourrions rédiger conjointement une disposition que le Gouvernement approuverait par principe, dès lors qu’elle reprendrait les éléments que je viens d’indiquer.

En tout état de cause, je ne suis pas favorable à une demande qui ne serait pas suivie d’effet de la part des élus de la commune recevant les renseignements sollicités.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Chacun est dans son rôle, monsieur le ministre. Pour ma part, je voudrais attirer l’attention de chacun sur les difficultés de fonctionnement de services tels que le cadastre ou la commission communale des impôts. Il faudra vraiment, lorsque nous nous pencherons sur les questions de fiscalité locale, nous intéresser de près à la gestion de ces services, en regardant qui fait quoi. De plus en plus, on demande aux collectivités locales de donner un coup de main, par l’intermédiaire des commissions communales ou intercommunales des impôts. On a parlé tout à l’heure d’un travail de Romain, je dirai ici que c’est un travail de bénédictin que de déterminer maison par maison, rue par rue, le nombre d’occupants, en croisant les fichiers : c’est une tâche lourde et complexe pour l’administration.

Cela étant, au cours des dernières années, on a responsabilisé les élus locaux, qui s’investissent sur ces questions. La demande que nous faisons avec ces amendements ne me paraît donc pas excessive. J’ai bien entendu vos arguments, monsieur le ministre, et je veux bien retirer l’amendement n° 334 au bénéfice de votre engagement de revoir la question dans le cadre du prochain collectif. J’insiste tout de même sur un point : les réponses étant de plus en plus longues à obtenir et les intégrations dans les rôles, y compris dans le cadre des commissions communales, très complexes, on aboutit à une rupture du principe d’égalité devant l’impôt. Dans une commune de petite taille, comme la mienne, l’établissement de la liste des logements vacants ne représente pas une tâche insurmontable, pourvu que l’on s’y mette sérieusement. Mais il en va tout autrement dans les grandes villes, où la même opération est beaucoup plus lourde, ce qui fait que certaines personnes profitent des erreurs commises – des erreurs excusables, au regard de l’énormité de la tâche – pour échapper à l’impôt.

M. Michel Piron. Tout à fait !

M. Christian Eckert, rapporteur général. Cela étant, j’ai entendu les arguments et l’engagement de M. le ministre, et j’accepte de retirer l’amendement n° 334.

(L’amendement n° 334 est retiré.)

M. le président. Retirez-vous également votre amendement, monsieur Goldberg ?

M. Daniel Goldberg. Oui, je vais le retirer, monsieur le président.

J’ai bien entendu M. le ministre s’engager à ce que l’on retravaille sur cette question dans le cadre du projet de loi de finances rectificative. J’attire cependant son attention sur le fait que l’on ne peut s’en tenir à une liste transmise à la seule demande des collectivités. Le but de notre amendement est bien d’offrir la possibilité de pointer l’ensemble des logements vacants, notamment afin qu’en zone tendue, la mobilisation des logements et, plus largement, du foncier disponible, soit rendue publique. Si je retire l’amendement, je souhaite néanmoins que la rédaction conjointe à laquelle nous devrons aboutir permette non seulement la transmission de la liste à la demande des communes, mais aussi la possibilité de rendre cette liste publique.

(L’amendement n° 386 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Gilles Carrez, pour soutenir l’amendement n° 555.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. L’amendement n° 555 propose de rendre déductible le montant « théorique » de la contribution exceptionnelle sur la fortune du montant de la base imposable à l’ISF déclarée en 2012. En effet, lors de l’établissement d’une déclaration d’ISF, généralement effectuée au mois de juin, on fige au 1er janvier de l’année l’actif et le passif. L’actif comprend notamment les biens immobiliers, tandis que le passif regroupe l’ensemble des dettes, y compris les impôts à acquitter durant l’année – dont l’impôt sur le revenu, la taxe d’habitation et l’impôt foncier.

En l’état actuel, du fait d’une particularité que je ne m’explique pas, la contribution exceptionnelle de 2012 ne figure pas au passif. Il me semble logique de faire en sorte que la contribution exceptionnelle due dans le courant de l’année 2012 – non connue au 1er janvier, puisqu’elle n’a été votée que dans le cadre du PLFR de juillet – figure au passif au titre de la déclaration d’ISF pour 2012.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Comme vous le savez puisque nous en avons débattu en commission, mon cher collègue, le rapporteur général et la commission sont défavorables à votre amendement.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Nous verrons ce qu’en pensera le Conseil constitutionnel !

M. Christian Eckert, rapporteur général. Pour le calcul de l’ISF, l’assiette taxable nette est calculée en déduisant le montant de l’impôt lui-même, qui constitue une dette fiscale. Les règles de droit commun de l’ISF n’étant pas transposables, vous proposez d’instaurer une disposition spécifique similaire pour la contribution exceptionnelle, qui n’était d’ailleurs pas due au 1er janvier.

Il est impossible d’introduire une telle disposition, pour trois raisons. Premièrement, nous avons voté une contribution exceptionnelle de solidarité qui n’est pas plafonnée : il n’y a donc aucune raison de chercher à l’aligner sur l’ISF. Deuxièmement, pour les redevables qui ont déjà déclaré la contribution exceptionnelle, c’est-à-dire ceux dont le patrimoine est inférieur à trois millions d’euros, il faudrait procéder à des dégrèvements d’impôt pour de faibles montants…

M. Hervé Mariton. Et alors ? Si c’est justifié !

M. Christian Eckert, rapporteur général. …ce qui serait source de lourdeur administrative pour un gain faible pour les contribuables.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. La justice fiscale n’a pas de prix !

M. Christian Eckert, rapporteur général. Enfin, pour les gros patrimoines, qui doivent être déclarés au 15 novembre, il pourrait en résulter une baisse non négligeable de la contribution – de ce point de vue, vous avez raison –, ce qui aurait pour conséquence une perte de recettes de plusieurs millions d’euros. Cela n’est pas acceptable dans le contexte budgétaire actuel. Je confirme donc l’avis de la commission : défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. L’avis du Gouvernement est défavorable. La contribution exceptionnelle a été liquidée ; elle est acquittée. Tout cela me paraît donc bien tardif. J’imagine que vous envisagez un système de récupération ou d’à-valoir. Ce serait extrêmement compliqué.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Mais non !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Un effort exceptionnel est demandé cette année, dont on connaît les raisons ; nous nous en sommes expliqués en loi de finances rectificative pour 2012.

La disposition, menacée de censure par le Conseil constitutionnel par l’opposition, a été validée. Cette question est maintenant derrière nous. Je suis désolé de ne pouvoir donner suite à votre amendement ; le Gouvernement appelle à le rejeter.

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton.

M. Hervé Mariton. La contribution exceptionnelle est proche cousine de l’ISF. Le Gouvernement et la majorité l’ont d’ailleurs toujours assumé.

L’amendement du président de la commission des finances est affaire à la fois de cohérence et de justice. Le rapporteur général, dans sa réponse, a apporté trop d’arguments. Or, il y a un moment où trop d’arguments nuisent.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Voilà une proposition qui n’a aucune valeur intellectuellement !

M. le président. Mon cher collègue, écoutons M. Mariton !

M. Hervé Mariton. L’un d’entre eux est fondé sur une distinction entre la contribution exceptionnelle et l’ISF. Au bout du compte, vous vous reposez essentiellement sur l’argument selon lequel le mécanisme serait compliqué et coûteux. Or, je le répète, je crois que c’est une simple question de cohérence et de justice.

Compliqué, dites-vous ? Ce n’est tout de même pas insurmontable. D’ailleurs, comme vient de le rappeler M. le président de la commission des finances, cela peut assez aisément être pris en compte comme un à-valoir sur l’ISF de l’année suivante.

Cela a-t-il un coût pour l’État ? Oui, en effet, mais très inférieur au montant de la contribution exceptionnelle elle-même.

Le problème réside dans la cohérence même de la définition. Le danger, dont on ne s’était peut-être pas rendu compte au moment du collectif, est que, une fois que vous aurez créé cette exception, vous puissiez être tentés de recommencer avec d’autres impôts du même type. Rien, en effet, n’interdit de penser que vous ne chercherez pas là une mesure de recettes supplémentaires sur l’ISF.

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Les trois arguments du rapporteur général ne tiennent pas.

Vous parlez du coût, mais quel sera-t-il exactement ? Même en prenant un taux de 1,5 % sur les 210 millions – et en supposant que tous ceux qui paient soient éligibles à l’ISF, ce qui n’est pas certain –, cela fait 3 millions. Ce n’est donc pas un problème de coût.

Pour ce qui est de la complexité alléguée du dispositif, vous savez bien, si vous avez déjà regardé le mode de fonctionnement de l’ISF, que l’on fait déjà la même chose : l’ISF à payer est considéré comme un passif, ce qui fait que vous devez faire une itération. Je vous rassure, la convergence se fait en deux phases, heureusement. Chaque itération représente dix euros de moins, autant dire rien.

Ce que vous dites est donc totalement incohérent au regard de l’état du droit. Il s’agit là d’une contribution due sur le patrimoine ; c’est donc bien un passif. Dès lors, au nom de quoi refusez-vous d’ajouter une partie du passif, ce qui est la logique même de l’ISF ? Je vous le dis franchement : aucun des arguments n’est pertinent.

(L’amendement n° 555 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 428, qui fait l’objet d’un sous-amendement n° 758.

La parole est à M. Christophe Caresche, pour soutenir l’amendement n° 428.

M. Christophe Caresche. Cet amendement vise à assurer une bonne transition entre le dispositif Scellier et le dispositif Duflot, dans un contexte très difficile pour la construction de logements.

L’idée est simple : il s’agit de faire en sorte que l’avantage Scellier puisse être accordé pendant le premier trimestre 2013 pour les investissements immobiliers engagés de façon certaine avant le 31 décembre 2012. Comme vous le savez, le dispositif Scellier doit s’interrompre à la fin de cette année. L’objectif est que les opérations qui sont en cours et qui ne pourraient pas être signées fermement d’ici à la fin de l’année puissent aussi bénéficier, dans un contexte extrêmement difficile, je le répète, de ce dispositif.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué, pour donner l’avis du Gouvernement sur cet amendement et pour soutenir le sous-amendement n° 758.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Monsieur Caresche, le Gouvernement est favorable à votre amendement, sous réserve que vous acceptiez ce sous-amendement, qui vise à apporter une précision. Il s’agit de circonscrire le champ de la mesure transitoire aux seules opérations qui présentent un décalage temporaire entre l’engagement de réaliser l’investissement et sa réalisation effective.

Si vous en êtes d’accord, l’amendement ainsi sous-amendé rencontrerait l’accord du Gouvernement. Je vous remercie d’ailleurs d’avoir veillé à soigner l’articulation entre l’ancien dispositif et le nouveau. Vous avez eu parfaitement raison de le faire.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement et sur le sous-amendement ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. La commission et moi-même sommes favorables à l’amendement présenté par le couple Urvoas-Caresche (Sourires), qui rencontre d’ailleurs un certain succès, car c’est le second amendement qui pourrait être adopté par notre assemblée.

Il s’agit là encore d’opérer une jonction entre deux dispositifs, ce qui est utile et souhaité par beaucoup. Le Gouvernement présente un sous-amendement qui précise les choses. La commission est donc favorable au sous-amendement et à l’amendement.

M. le président. La parole est à M. Michel Piron.

M. Michel Piron. Je me réjouis de la réponse du Gouvernement. Il y avait, en effet, un véritable risque de rupture entre les deux dispositifs.

J’en profite pour rappeler que Mme Duflot est en ce moment en commission pour présenter de nouveau son texte. On connaît, en ce moment, un véritable effondrement de la construction : nous ne sommes pas du tout sûrs d’atteindre les 320 000 logements cette année, alors que nous étions à 435 000. On pourrait même tomber, l’an prochain, en dessous de 300 000. Il faut être conscient que cela représente l’équivalent de près de 200 000 emplois.

Je souscris donc complètement, moi aussi, à l’amendement de notre collègue, tel que le Gouvernement propose de le sous-amender. Ce n’est rien d’autre qu’une mesure d’une grande sagesse.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Je précise, avant la mise aux voix, que le Gouvernement lève le gage.

(Le sous-amendement n° 758 est adopté.)

(L’amendement n° 428, sous-amendé et modifié par la suppression du gage, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton, pour soutenir l’amendement n° 583.

M. Hervé Mariton. Nous souhaitons aider le Gouvernement dans la tâche qui est la sienne de faire des économies – en l’occurrence, des économies qui doivent être anticipées.

Il s’agit de nouveau du CNC. Vous le savez, les ressources fiscales affectées au CNC ont progressé de plus de 40 % entre 2007 et 2011 – 230 millions d’euros supplémentaires –, tandis que, dans le même temps, les dépenses de soutien ont augmenté seulement de 25 %. De tout cela, il est résulté une augmentation de la trésorerie du CNC.

Il nous paraît judicieux, vis-à-vis des opérateurs, d’afficher un certain nombre de choix budgétaires de moyen terme, et cela sans attendre 2015, monsieur le ministre, car ce ne serait pas raisonnable en seconde partie du budget. À cet égard, il serait bon d’opérer un nouveau prélèvement de 150 millions d’euros en 2014 sur le fonds de roulement du CNC.

Nous avons l’intuition que le ministre aurait voulu – en tout cas il aurait dû le vouloir –, dès cette année, aller au-delà du prélèvement prévu sur la trésorerie, mais qu’il ne l’a pas pu. Nous souhaitons donc simplement lui apporter quelques vitamines supplémentaires.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Nos collègues ont décidément une vision à long terme ! Ils proposaient précédemment de traiter de l’impôt sur les revenus de 2013, perçu en 2014, et aujourd’hui ils veulent effectuer un nouveau prélèvement sur le CNC pour l’exercice suivant.

M. Hervé Mariton. C’est un prélèvement modeste !

M. Christian Eckert, rapporteur général. Pour ma part, je ne sais pas prévoir l’avenir. Je ne sais pas quels seront le dynamisme des ressources du CNC et l’état de cet opérateur. Nous verrons le moment venu.

Le Gouvernement, ainsi que notre assemblée, qui l’a suivi, a pris ses responsabilités en décidant un prélèvement de 150 millions sur le CNC. Vous pouvez bien dire que ce n’est pas assez ; il n’en reste pas moins que, vous, vous ne l’avez jamais fait !

Saint-Exupéry disait : « Pour ce qui est de l’avenir, il ne s’agit pas de le prévoir, mais de le rendre possible. » C’était la pensée du jour. (Sourires.)

M. Dominique Baert. Très bien !

M. Michel Piron. Pour le rendre possible, il faut le prévoir !

M. Christian Eckert, rapporteur général. Pour ces raisons, la commission est défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Monsieur le député, le Gouvernement est défavorable à votre amendement, même s’il comprend les très bonnes intentions qui vous inspirent.

Le rapporteur général a raison de vous rappeler que vous n’avez jamais effectué de prélèvement sur le fonds de roulement du CNC, même si vous aviez plafonné la taxe affectée. En réalité, le prélèvement et le plafonnement reviennent au même. Il y a donc une continuité entre l’action que vous avez soutenue et celle que nous menons. Dès lors, votre amendement vitaminé n’est peut-être pas indispensable.

Cela dit, il est vrai que, pour cet opérateur de l’État, l’on peut constater une gestion qui amène légitimement les parlementaires à s’interroger sur le bon usage qui est fait des fonds publics. J’en veux pour preuve le fait que le CNC a acheté en empruntant un immeuble à Paris, lors même qu’il dispose, dans sa trésorerie, d’une ligne dédiée aux achats immobiliers. Si ma mémoire est bonne, cela représente 23 millions, qui sont placés à un taux inférieur à celui auquel le CNC a emprunté pour acheter l’immeuble en question. C’est à se demander si le président du CNC, qui est un inspecteur des finances, a regardé cela de près, tant on attend à tout le moins d’un inspecteur des finances qu’il compare le rendement des sommes placées et les taux d’intérêt qu’il acquitte, dès lors qu’il décide de ne pas utiliser des sommes placées.

Je considère donc qu’un effort doit être accompli s’agissant de la gestion du Centre national du cinéma. Je suis convaincu que le ministre de tutelle du CNC l’a fermement rappelé aux dirigeants de cet opérateur de l’État. En toute hypothèse, tout cela se fait sous le contrôle du Parlement, ce qui me paraît tout à fait normal. Vous exercez ce droit de contrôle et votre liberté d’amendement. Le Gouvernement, de son côté, vous répond. Pour en revenir à l’amendement, j’émets un avis défavorable, pour les raisons que j’ai indiquées au début de mon propos.

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton.

M. Hervé Mariton. La nature très engagée de la réponse du ministre va m’amener à retirer cet amendement. Nous le faisons rarement, mais votre propos, monsieur le ministre, était assez précis et assez fort.

Nous sommes au cœur d’un sujet important. Nous comprenons l’importance des missions du CNC et nous sommes très attachés à l’aide au cinéma et, plus largement, à la création dans notre pays.

M. Michel Piron. Très bien !

M. Hervé Mariton. Pour autant que les exceptions demeurent exceptionnelles, l’exception culturelle peut aussi avoir son sens. La France s’honore d’avoir une production cinématographique forte ; c’est l’honneur et la richesse de notre pays et c’est important pour nos concitoyens.

En même temps, cela ne dispense pas d’une gestion rigoureuse. Cela ne dispense pas, comme vient de le faire M. le ministre, d’émettre des observations sur les modalités de gestion du CNC, qui ne sont pas convenables. Ce à quoi nous voulons nous attaquer, ce n’est pas la création cinématographique ; ce n’est pas la culture ; ce n’est pas même la politique menée par le CNC, mais son intendance, qui est infiniment défaillante. Il y a là des marges d’économies considérables. L’État peut parfaitement y gagner. C’est le sens de ce que nous avons dit en première partie ; c’est aussi le sens de cet amendement. J’entends que le ministre a une position forte sur ce sujet. J’espère qu’il saura la rappeler dans l’exécution budgétaire de 2013 et à l’occasion de la préparation du budget pour 2014. Mais, compte tenu des propos assez précis qui ont été tenus, je retire l’amendement n° 583.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Je vous remercie, monsieur le député, de bien vouloir retirer cet amendement et de souscrire, au moins sur ce point, à la politique culturelle que mène le Gouvernement.

M. Hervé Mariton. Non, c’est vous qui souscrivez à la vision de l’opposition !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement est extrêmement attaché à la vitalité de l’industrie cinématographique en France. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle un amendement a été adopté afin de favoriser le tournage et la production de films à l’intérieur de nos frontières. C’est aussi la raison pour laquelle, comme vous l’avez vous-même souligné, l’exception culturelle cinématographique est une des priorités du Gouvernement, ce que j’ai grand plaisir à rappeler ici devant la représentation nationale.

Puisque vous souhaitez – du moins ai-je cru le comprendre dans vos propos – quelques précisions sur la politique du Gouvernement à l’égard du CNC, c’est bien volontiers que je vous donne quelques éléments d’appréciation.

Les services du ministère du budget – via France Domaine – et du ministère de la culture travaillent ensemble afin que la relocalisation du CNC se fasse dans des conditions plus conformes aux directives que l’État a pu donner aussi bien à ses agents qu’aux opérateurs.

Vous le savez, le ratio de mètres carrés par agent pour le CNC est aujourd’hui assez largement dérogatoire aux règles que l’État a pu édicter. Nous tentons de convaincre le CNC qu’il faut revenir à une pratique plus normale en la matière, de la même manière qu’il faut revenir à un coût du mètre carré plus conforme aux directives de l’État – d’où le projet de relocalisation.

Tout cela, naturellement, est sans conséquence sur la politique culturelle cinématographique, car il ne faut pas confondre les conditions de travail du CNC avec la politique en matière d’industrie cinématographique. Nous soutenons de façon vigoureuse la politique et l’industrie cinématographiques. En revanche, nous demandons à cet opérateur d’abandonner des pratiques non conformes au droit commun, que l’exception culturelle ne saurait justifier.

M. Hervé Mariton. Je vous remercie de rejoindre la vision du groupe UMP !

(L’amendement n° 583 est retiré.)

Article 58

M. le président. Nous en venons à l’article 58.

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 346 et 663.

La parole est à M. Michel Piron, pour soutenir l’amendement n° 346.

M. Michel Piron. Mon engagement en faveur de la majoration forfaitaire sur le foncier non bâti ne date pas d’aujourd’hui. Nous avons pu, encore cette année, porter la surtaxe de 5 à 10 euros.

Toutefois, je présente un amendement qui vise à rétablir, pour les communes et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, la possibilité de moduler à la baisse – entre 0 et 5 euros – la majoration forfaitaire concernant leur part de taxe sur le foncier non bâti.

La loi de finances rectificative de mars 2012 avait instauré, par dérogation au régime général, une majoration fixée à 5 euros par mètre carré à partir de 2016 pour les terrains situés dans une zone stratégique en matière d’aménagement et de développement urbain définie par arrêté ministériel. La capacité des collectivités du bloc communal à exonérer ou à moduler cette majoration avait été préservée.

Si le projet de loi de finances pour 2013 renforce la majoration, ce dont je me réjouis, il modifie son application sur le territoire. D’une part, il propose de fixer, sans possibilité d’y déroger – et c’est là qu’est tout le problème –, une majoration de 25 % sur la valeur locative cadastrale et de 5 euros d’office à partir de 2014, 10 euros à partir de 2016, pour les communes appartenant à des zones d’urbanisation continue de plus de 200 000 habitants où existe un déséquilibre marqué entre l’offre et la demande de logements – on ne pourrait en effet imaginer une telle majoration sans raison sérieuse ! D’autre part, il prévoit de conserver aux communes ou aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre la possibilité de majorer la valeur locative de 0 à 3 euros par mètre carré dans les autres secteurs urbains.

Cet amendement propose – et on pourrait presque dire que c’est là un point de doctrine, qui est important – de redonner à ces mêmes communes et établissements publics intercommunaux la possibilité d’exonérer tout ou partie des terrains situés sur leur territoire ou de fixer une majoration comprise entre 0 et 5 euros par mètre carré, autrement dit de leur donner un droit de modulation.

À titre d’exemple, certains terrains classés « urbanisables », n’ont pas fait l’objet d’un déclassement et n’ont pas pour autant vocation à être urbanisés dans des délais courts. C’est la raison pour laquelle la disposition initiale introduite dans la LFR de mars 2012 prévoyait la possibilité de moduler. Cet amendement propose de rétablir cette possibilité de modulation plutôt que de rester dans un régime de standardisation pour le moins contraignant.

M. le président. La parole est à M. Yves Goasdoue, pour soutenir l’amendement n° 663.

M. Yves Goasdoue. Je veux attirer l’attention de nos collègues sur le fait qu’il n’y a pas d’homogénéité dans les zones d’urbanisation continue de plus de 200 000 habitants soumises à tension. Il peut arriver que des terrains soient proprement invendables. Sans possibilité de dérogation, nous ferions peser sur nos concitoyens une charge qui ne correspondrait pas à la finalité de la loi. Ces propriétaires dans l’impossibilité de vendre en raison de la configuration des lieux, de leur pollution, ou de la proximité de certains établissements. Il n’y a que l’échelon local, communal ou intercommunal – si l’EPCI a la compétence –, qui puisse gérer de telles situations avec responsabilité. Tel est le sens de l’amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. La commission a émis un avis défavorable. L’esprit de l’article 58 est de systématiser la majoration de la valeur locative des terrains constructibles dans certaines zones. C’est pourquoi il supprime la possibilité d’exonération qu’avait laissé subsister la première loi de finances rectificative de 2012 lors du remaniement du dispositif. Rétablir cette exonération facultative irait à rebours de la logique du choc d’offre recherché par le Gouvernement. Avec de tels amendements, la majoration ne serait plus automatique dans ces zones où le marché est tendu, ce qui n’inciterait pas les propriétaires à remettre les terrains constructibles en vente.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement ne souhaite pas maintenir cette modulation et il la supprime. Je ne peux donc être favorable à ces amendements. C’est la politique inverse que nous souhaitons mener.

M. le président. La parole est à M. Michel Piron.

M. Michel Piron. Nous nous trompons sans doute sur les termes du débat. La majoration sera automatique, standardisée, sur des terrains proprement invendables. Cela n’a pas de sens. Quel est l’esprit de la majoration ? Je peux d’autant plus en parler que j’ai été moi-même à l’initiative de cette mesure en commission des finances en 2012. L’esprit est de dissuader les propriétaires de pratiquer la rétention foncière dans les zones tendues et de les inciter à vendre leurs terrains afin d’y construire des logements. Mais en voulant appliquer la loi partout, urbi et orbi, y compris dans les endroits où il est impossible de construire, vous défendez la lettre et non l’esprit de la majoration. Je regrette qu’on ne soit pas capable de faire ce distinguo.

(Les amendements identiques nos 346 et 663 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 552 de M. Christian Eckert.

La parole est à M. le rapporteur général, pour le soutenir.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Amendement rédactionnel.

(L’amendement n° 552, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 345 et 662.

La parole est à M. Michel Piron, pour soutenir l’amendement n° 345.

M. Michel Piron. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Yves Goasdoue, pour soutenir l’amendement n° 662.

M. Yves Goasdoue. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Contrairement à ce qui est dit dans l’exposé sommaire, on ne peut pas considérer cet amendement comme rédactionnel.

La majoration de la valeur locative des terrains constructibles ne concerne pas les EPCI qui perçoivent une fiscalité propre. Le niveau communal, en effet, a été jugé plus adapté pour lutter contre la rétention foncière. C’est pourquoi l’alinéa 5 ne vise que le conseil municipal et non pas l’organe délibérant de l’EPCI, pour décider, en dehors des zones tendues, de la mise en place de cette possible majoration. La mention des EPCI sans fiscalité propre fait simplement écho à la fiscalité additionnelle sur la taxe foncière sur les propriétés non bâties, que peuvent percevoir certains syndicats sans pour autant voter de taux. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Yves Goasdoue.

M. Yves Goasdoue. Faut-il comprendre que les EPCI ayant la compétence peuvent instituer la majoration, mais que la quote-part de cette majoration ne leur est pas distribuée ?

(Les amendements identiques nos 345 et 662 ne sont pas adoptés.)

M. Michel Piron. La question de M. Goasdoue était intéressante. Pourquoi n’a-t-on pas de réponse ?

M. le président. Je suis saisi de trois amendements, nos 550, 549 et 548, de M. Christian Eckert. Il s’agit d’amendements rédactionnels.

(Les amendements nos 550, 549 et 548, acceptés par la commission et par le Gouvernement, sont successivement adoptés.)

(L’article 58, amendé, est adopté.)

Article 59

M. le président. Nous en venons à l’article 59.

La parole est à M. Jacques Krabal, pour soutenir l’amendement n° 38.

M. Jacques Krabal. Cet amendement concerne la taxe sur les friches commerciales, qui relève du même esprit que la taxe sur les logements vacants. Je propose de réduire de deux ans à dix-huit mois la durée d’inoccupation du local au terme de laquelle la taxe peut s’appliquer, et ce dès 2013.

Nous connaissons tous parfaitement les nuisances liées à ces friches commerciales, qu’elles se situent en périphérie ou à l’intérieur de nos villes. Il faut absolument inciter leurs propriétaires, comme nous l’avons fait pour les logements vacants, à mettre sur le marché ces biens immobiliers.

Ce sont les communes et les établissements publics, qui ont compétence pour cela, qui seront amenés à lever cette taxe, selon les processus habituels.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. La commission n’a pas retenu cet amendement. L’article 59 réduit déjà de cinq à deux ans le délai de vacance au terme duquel la taxation sur les friches commerciales pourra s’appliquer. Vous proposez d’aller plus loin. Il nous semble pourtant qu’il faut laisser un certain temps au propriétaire pour qu’il puisse éventuellement trouver une nouvelle affectation ou un acheteur : un délai de deux ans semble adapté. C’est la bonne taille.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement ne peut accepter votre amendement, monsieur le député. La durée de vacance est déjà réduite, de cinq à deux ans, ce qui représente une évolution assez rude et très significative. Vous proposez de réduire encore ce délai en le faisant passer à dix-huit mois. Peut-être vaut-il mieux, ne serait-ce que pour la simplicité de la gestion, rester en année pleine ? Le Gouvernement apprécierait que vous retiriez votre amendement, faute de quoi son avis serait défavorable.

M. le président. La parole est à M. Jacques Krabal.

M. Jacques Krabal. Je retire l’amendement.

(L’amendement n° 38 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Goldberg, pour soutenir l’amendement n° 393, deuxième rectification.

M. Daniel Goldberg. Nous reprenons un débat que nous avons eu sur la taxe s’appliquant aux logements vacants, lors duquel nous avions retiré un certain nombre d’amendements à la demande du ministre, dans l’attente de l’article 59.

Celui-ci réduit le délai de vacance de cinq à deux ans et renforce les taux. Néanmoins, l’instauration de cette taxe n’est pas obligatoire – il est précisé dans l’exposé des motifs que les communes « peuvent »instituer une taxe annuelle sur les friches commerciales.

Dans le droit fil de ma proposition concernant la taxe d’habitation sur les logements vacants, je propose que la taxe sur les friches commerciales soit instaurée de plein droit dans les communes carencées, c’est-à-dire assujetties à l’article 55 de la loi SRU.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Cet amendement repose sur une confusion, puisqu’il rend obligatoire l’instauration de la taxe sur les friches commerciales et la création de logements dans les communes qui ne respectent pas les obligations de la loi SRU.

La taxe sur les friches commerciales n’est pas de même nature que la taxe sur les locaux vacants ou la majoration des valeurs locatives des terrains constructibles, qui portent sur des biens mobilisables afin de créer des logements. Elle consiste plutôt à inciter les propriétaires de boutiques ou d’ateliers à l’abandon, notamment dans les centres villes, à les remettre en exploitation. Même si les bureaux peuvent entrer éventuellement dans l’assiette de cette taxe, celle-ci n’est pas, me semble-t-il, un outil de mobilisation du foncier, mais une incitation à la réutilisation. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Daniel Goldberg.

M. Daniel Goldberg. Je ne voudrais pas mettre le Gouvernement et le rapporteur général en difficulté en provoquant un vote qui ne suivrait pas leur avis. Néanmoins, la mauvaise gestion des friches commerciales et le fait que les opérateurs ne soient pas assez dissuadés de construire des bureaux voués à rester longtemps vacants constituent actuellement un frein au développement du logement social, dans la mesure où, dans certaines communes, la construction de logements n’est plus une solution avantageuse. Je retire donc mon amendement, mais je pense que nous y reviendrons.

(L’amendement n° 393, deuxième rectification, est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Krabal, pour soutenir l’amendement n° 39.

M. Jacques Krabal. Il est défendu.

(L’amendement n° 39, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

(L’article 59 est adopté.)

M. le président. La suite de la discussion budgétaire est renvoyée à la prochaine séance.

2

Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :

Suite de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2013 : suite de l’examen des articles non rattachés ;

Discussion, sur le rapport de la commission mixte paritaire, du projet de loi relatif à la régulation économique outre-mer ;

Proposition de loi relative à l’abrogation du conseiller territorial.

La séance est levée.

(La séance est levée à douze heures quarante-cinq.)