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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Session ordinaire de 2012-2013

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du jeudi 15 novembre 2012

SOMMAIRE ÉLECTRONIQUE

SOMMAIRE


Présidence de Mme Sandrine Mazetier

1. Projet de loi de finances pour 2013 Seconde partie (suite)

Articles non rattachés (suite)

Après l’article 59 (suite)

Amendement no 640

M. Christian Eckert, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué chargé du budget

Amendement no 163

M. Olivier Dussopt, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

Amendements nos 568 rectifié, 569, 306, 340, 25, 305, 57, 41, 682

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Amendements nos 335, 336 rectifié, 618, 486, 370 rectifié, 313, 339, 167, 338, 337, 89, 683, 660, 661, 465, 387 rectifié, 652, 341, 389, 268, 655, 342 rectifié, 753 (sous-amendement)

Suspension et reprise de la séance

Après l’article 59 (suite)

Amendements nos 372, 563

Articles de récapitulation

Article 46 et état B

Article 47 et état C

Article 48 et état D

Article 49 et état E

Article 50

Amendement no 724

Article 51

Amendement no 725

Articles 52 et 53

Article 54

Amendement no 726

Seconde délibération

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué

M. Christian Eckert, rapporteur général

Mme la présidente

Article 46 et état B

Amendements nos 1, à , 28

Article 48 et état D

Amendement no 29

Article 55 bis

Amendement no 33

Article 59 octies

Amendement no 34

Article 45 et état A (pour coordination)

Amendement no 30

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué

2. Régulation économique outre-mer

Présentation

Mme Ericka Bareigts, rapporteure de la commission mixte paritaire

M. Victorin Lurel, ministre des outre-mer

Discussion générale

M. Boinali Said

M. Daniel Gibbes

M. Philippe Gomes

M. Ary Chalus

M. Gabriel Serville

M. Serge Letchimy

M. Jean-Philippe Nilor

M. Éric Jalton

Texte de la commission mixte paritaire

Amendements nos 1, 2 rectifié, 3, 4 rectifié

Explications de vote

M. Serge Letchimy, M. Jean-Paul Tuaiva, M. Daniel Gibbes, M. Ary Chalus, M. Jean-Philippe Nilor

Vote sur l’ensemble

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques

M. Victorin Lurel, ministre

3. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de Mme Sandrine Mazetier,
vice-présidente

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

Projet de loi de finances pour 2013
Seconde partie (suite)

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2013 (n°s 235,251).

Articles non rattachés (suite)

Mme la présidente. Ce matin, l’Assemblée a poursuivi l’examen des articles non rattachés à des missions, s’arrêtant à l’amendement n° 640 portant article additionnel après l’article 59.

Après l’article 59 (suite)

Mme la présidente. La parole est à M. Serge Letchimy, pour soutenir l’amendement n° 640.

M. Serge Letchimy. Notre amendement concerne l’application de la contribution aux charges de service public de l’électricité, la CSPE. Dans les zones non interconnectées, les îles notamment, une compensation globale est prévue car le prix de revient de l’électricité est sensiblement plus élevé qu’en métropole. Ces surcoûts bénéficient d’une péréquation entre le prix de production et le prix de commercialisation de l’électricité.

La commission de régulation de l’énergie – la CRE – indique qu’ à partir du 1er janvier 2013 les textes seront appliqués très strictement. Tout ce qui concerne l’efficacité énergétique est important eu égard à l’évolution de la demande. Pour certaines régions, la demande peut évoluer entre 5 % et 7 %. C’est dire que la question de l’efficacité et de la sobriété énergétiques est fondamentale. Pourtant, la compensation peut ne pas être couverte par la CSPE. Il en va de même pour le stockage de l’énergie par EDF ou des structures privées. Pis, concernant les politiques d’énergies renouvelables, liées à des stratégies d’interconnexion entre îles, par exemple la production d’électricité à partir de la géothermie en Dominique, l’importation n’est pas prise en compte.

La production de l’énergie thermique en mer, spécificité de l’énergie renouvelable, risque de ne pas être prise en compte non plus, alors que cela va dans le sens de la sobriété et de l’efficacité énergétiques et des énergies renouvelables. La non-prise en compte de la compensation risque de déstabiliser l’application de la CSPE, notamment dans les régions d’outre-mer et de mettre en difficulté non seulement EDF, mais également la filière de la production d’énergies renouvelables ainsi que la politique de réduction de la demande.

Il serait souhaitable que l’on retienne cet amendement, qui a fait l’objet de discussions au sein du Gouvernement, pour éviter toutes ces difficultés.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.

M. Christian Eckert, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. La commission n’a pas retenu cet amendement.Dans sa compensation entre les charges et les produits, la CSPE est déficitaire. Il faudra donc, un jour ou l’autre, envisager de procéder à un ajustement. En outre, la péréquation avec l’outre-mer représente 28 % de la CSPE.

Par ailleurs, tel qu’il est rédigé, cet amendement pose un certain nombre de problèmes techniques. Dans ces conditions, je vous suggère de le retirer, monsieur Letchimy. À défaut, j’émettrai un avis défavorable. Cela étant, avec une rédaction différente, un tel amendement pourrait trouver sa place dans le collectif budgétaire ou la proposition de loi François Brottes sur la tarification de l’énergie.

Dernier point : l’amendement pose également un problème de coût eu égard au différentiel important entre ce qu’encaissent les distributeurs et le coût des missions de service public exercées au titre de la CSPE. Je crains que votre amendement n’aggrave les choses.

M. Serge Letchimy. Au contraire !

M. Christian Eckert, rapporteur général. Je ne sais pas ce qu’en pense le Gouvernement, mais tel que l’amendement est rédigé, j’émets un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé du budget.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué chargé du budget. Je comprends votre intention, monsieur le député, qui consiste à faire assumer via la CSPE un surcoût de façon à inciter, si j’ai bien compris, à modifier les modalités de consommation énergétique, notamment dans les territoires dont vous êtes l’élu.

Permettez-moi de vous faire part d’une difficulté. EDF assume ce coût, qui est en consolidé de l’ordre de 4 à 5 milliards d’euros. C’est un sujet sensible qu’EDF et l’État ont à traiter. Tant qu’une solution n’aura pas été trouvée entre eux, il est délicat de majorer encore la charge assumée pour l’instant par EDF, mais qu’un jour ou l’autre l’État devra supporter.

Je suis bien conscient qu’en vous donnant cette explication, je vous invite à retirer votre amendement ou à accepter son rejet au motif que deux entités, l’État et EDF, ne parviennent pas, pour l’instant, à trouver une solution dans un dialogue où vous n’avez aucune part à prendre. Je pourrais comprendre que vous refusiez de faire cet effort, dès lors que vous estimeriez que c’est à l’État et à EDF de trouver une solution, et non à vous, et en tout cas pas à cet instant. J’admets cette éventuelle objection, mais le problème que j’ai à résoudre demeure néanmoins. Tant que cette question n’est pas réglée, il est très difficile de majorer la charge au titre de la CSPE assumée transitoirement par EDF.

C’est la raison pour laquelle, en espérant votre compréhension, je vous demande de retirer votre amendement ou d’accepter que le Gouvernement demande à la représentation nationale de le rejeter.

Mme la présidente. La parole est à M. Serge Letchimy.

M. Serge Letchimy. L’argument du rapporteur général me semble recevable, à savoir que la rédaction technique de l’amendement peut être revue dans le cadre de la proposition de loi Brottes, par exemple.

S’agissant du fond de l’amendement, je me suis sans doute mal expliqué. Il ne s’agit pas d’obtenir 10 % de plus, monsieur le ministre. La CSPE est une contribution publique, et je souhaite qu’il y ait une solidarité vis-à-vis des politiques énergétiques.

Il ne s’agit pas de mon département, mais de l’ensemble des zones non interconnectées, je suppose même qu’il y en a pas loin de la métropole.

Lorsque vous produisez de l’électricité au-dessus du prix de référence, avec une économie de 50 euros par exemple, vous ne pouvez pas complètement répercuter ce supplément dans le remboursement. Dans le cadre d’une politique d’efficacité énergétique, si vous diminuez le surcoût, celui-ci ne pourra pas être remboursé, simplement parce que cela ne fait pas partie de la production de base classique et traditionnelle.

Je préfère, monsieur le ministre, retirer cet amendement et, au bénéfice de vos engagements, le retravailler pour le présenter dans le cadre de la proposition de loi Brottes. Mais je refuse que l’on parle de surcoût, car il n’y en a pas. Ce qu’il faut, c’est faire des économies dans le cadre de politiques d’énergies renouvelables, d’énergie thermique en mer, de géothermie. Toutes les politiques alternatives de production d’électricité pourraient permettre de faire des économies. C’est dans ce sens que les systèmes de récupération de l’énergie cinétique – les SREC – nous invitent à nous engager afin que nous puissions économiser et investir l’argent de la CSPE autrement que sous forme d’une compensation. La réduction des coûts et de la consommation est un objectif économique en matière de politique énergétique. C’est exactement le contraire de ce que vous avez dit.

Monsieur le ministre, j’accède à votre demande de retrait de l’amendement et, avec votre soutien, nous proposerons cet amendement dans le cadre de la proposition de loi Brottes.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Dont acte, monsieur le député : pardonnez-moi de ne pas avoir compris qu’il s’agissait d’une disposition de portée générale. Je m’engage également à voir si l’on peut traiter la question dans le cadre du collectif budgétaire. Si votre amendement permet de faire faire des économies à la puissance publique, votre contribution est plus que bienvenue. Elle est tout à fait souhaitable et chaleureusement accueillie. J’espère que nous parviendrons, dans le cadre du collectif, à une conclusion heureuse que la représentation nationale pourrait accepter.

Je vous remercie en tout cas d’avoir retiré votre amendement.

(L’amendement n° 640 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Dussopt, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, pour soutenir l’amendement n° 163.

M. Olivier Dussopt, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République. Cet amendement a été adopté par la commission des lois et prévoit que les communes qui, jusqu’à présent, bénéficient du versement d’une taxe du fait de la présence d’un casino sur leur territoire, voient le produit de cette taxe transféré à l’établissement de coopération intercommunale dès lors que celui-ci dispose de la compétence tourisme.

La commission des lois a adopté cet amendement qui lui avait été proposé par son président, Jean-Jacques Urvoas, sans méconnaître les difficultés d’application qu’il pouvait entraîner, sans méconnaître non plus les différences selon les communes d’implantation de ces établissements de jeu, avec le souci d’ouvrir le débat sur la solidarité nécessaire des territoires concernés par la présence d’un casino.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Avant de donner l’avis de la commission, je souhaite revenir à l’amendement de M. Letchimy, dont je n’avais pas perçu le sens. Il y a donc vraiment un problème de rédaction. Nous nous sommes sans doute mal compris et nous retravaillerons cet amendement.

S’agissant de l’amendement n° 163, quel est l’état du droit ? Sur le produit brut des jeux de casino, un prélèvement au profit de l’État est perçu sur la base d’un barème progressif défini par décret dont une fraction de 10 % du produit est rétrocédée aux communes d’implantation des casinos.

La deuxième part est un prélèvement local dans la limite de 15 % du produit brut des jeux après des abattements. Ce second prélèvement est perçu par la commune siège du casino, son institution est alors prescrite dans le cahier des charges conclu entre la commune et l’exploitant du casino et par un EPCI à fiscalité propre exerçant la compétence tourisme ou percevant la taxe de séjour ou la taxe de séjour forfaitaire, sauf s’il y a opposition de la commune siège du casino, auquel cas on revient au premièrement.

Par convention, les EPCI peuvent reverser tout ou partie du produit à la commune siège. De même, les communes peuvent par convention en reverser tout ou partie au groupement de communes ou au syndicat mixte dont elles sont membres lorsqu’elles réalisent des actions de promotion en faveur du tourisme.

Votre amendement, adopté par la commission de lois, entend inverser la logique et faire des EPCI les bénéficiaires de droit commun des prélèvements. À l’heure où l’on promeut une péréquation horizontale, il n’est pas illégitime d’envisager ce type de solution.

Toutefois, cette substitution des EPCI aux communes dès 2013 pour la fraction rétrocédée par l’État et le prélèvement local que prévoit l’amendement paraît beaucoup trop brutale pour être acceptée.

Je vous invite donc, mon cher collègue, à retirer cet amendement pour éventuellement retravailler sur la question de savoir quels versements seraient concernés et dans quelles conditions une mutualisation pourrait être opérée. Nous redoutons que le dispositif proposé n’ait un effet extrêmement massif, puisqu’il y aurait une concentration dans des établissements publics dotés ou non de la compétence du tourisme, qui mutualisent déjà ou pas le produit de ces taxes.

La commission des finances demandera sinon à l’Assemblée de repousser cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Je comprends l’inspiration de cet amendement. Vous aimeriez que les subsides publics dont sont fortement pourvoyeurs les casinos soient partagés à une échelle plus vaste que les communes sur le territoire desquelles ces établissements sont implantés.

La question est délicate : vous demandez au législateur d’intervenir dans les relations entre la commune d’implantation et les communes membres d’un même établissement public de coopération intercommunale, relations qui devraient normalement bien se passer entre élus locaux.

J’ignore à quel cas particulier vous faites référence (Sourires sur les bancs du groupe SRC) mais, aussi douloureux soit-il, il me paraît délicat de légiférer par une mesure de portée nationale pour régler un différend qui pourrait n’être que de nature locale.

M. Julien Aubert. Bravo !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Je crois recueillir une forme d’assentiment sur ces bancs et je l’apprécie à sa juste valeur, tant ce genre de manifestation est rare.

Légiférer ne consiste pas à prendre des dispositions de portée générale pour régler des cas particuliers. Et je souhaite que tous les efforts soient faits, le cas échéant avec le concours des autorités préfectorales, pour qu’un accord local soit trouvé. Il est possible au sein d’un EPCI, et par voie conventionnelle, de partager entre différentes communes, de façon intelligente, amiable, compréhensive, les versements effectués par un casino à sa commune d’implantation.

Il m’est difficile d’être favorable à votre amendement pour les raisons que je viens d’indiquer. Je ne suis pas sûr que l’État ait à se mêler de ces relations-là. Il m’est difficile aussi de refuser formellement cet amendement car je saisis bien le souci de justice et de répartition qui vous anime. Mais faire œuvre législative intelligente, ce n’est pas prendre une disposition générale pour régler des cas particuliers.

Dans ces conditions, monsieur le député, j’apprécierais beaucoup que vous retiriez votre amendement. Pour le cas particulier que vous souhaitez régler, vous pouvez solliciter les services du ministère de l’intérieur et – pourquoi pas ? – ceux du ministère de l’économie et des finances. Les miens sont à votre disposition pour servir de médiateur, le cas échéant. Ainsi, vous pourriez résoudre les difficultés que vous semblez éprouver sans que d’autres problèmes n’apparaissent, que le Gouvernement aurait du mal à régler tant les solutions à trouver seraient contradictoires les unes avec les autres. Ainsi, les problèmes locaux, pour importants qu’ils soient, ne viendraient pas perturber un débat qui doit rester de portée générale dans cet hémicycle.

Mme la présidente. La parole est à M. Étienne Blanc.

M. Étienne Blanc. Cet amendement pose un véritable problème.

Je rappelle que c’est sous Napoléon III qu’a été prise la décision d’autoriser les jeux dans certaines communes touristiques afin de financer des établissements thermaux, des activités culturelles ou des investissements nécessaires aux touristes et aux curistes.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. J’admire votre sang-froid : comment parvenez-vous à ne pas rire en disant cela ? C’est très fort !

M. Étienne Blanc. Monsieur le ministre, ne souriez pas, Napoléon III a fait des choses utiles, surtout dans votre région, vous le savez bien.

Cet amendement pose deux problèmes.

Le premier problème est juridique. Le ministre de l’intérieur autorise les jeux à l’échelle d’une commune et non pas d’une intercommunalité. C’est alors la commune qui arrête une délégation de service public et se lance dans la discussion du cahier des charges avec l’exploitant d’un casino. Décider ensuite que l’intercommunalité peut opérer un prélèvement sur le produit des jeux alors que, juridiquement, monsieur le président de la commission des lois, ce sont les relations entre la commune et l’exploitant de l’établissement de jeu qui prévalent, peut poser problème.

Le deuxième problème est économique et financier. Certaines communes investissent beaucoup car elles supportent des charges particulières. C’est le cas des communes touristiques. Je m’exprime ici à la demande de mon collègue Marc Francina, maire d’Evian, qui préside l’association des stations classées et le sait mieux que d’autres. C’est bien beau de transférer les ressources, mais il faut aussi parler des charges : les établissements thermaux, les hippodromes, les services particuliers liés aux activités touristiques sont financés par le jeu.

Ce système est très équilibré et je ne souhaite pas que cet équilibre soit remis en cause. C’est la raison pour laquelle le groupe UMP se joint à la demande de retrait de l’amendement formulée par le ministre et le rapporteur général. Si cet amendement était maintenu, nous voterions contre, bien évidemment.

Mme la présidente. La parole est à Mme Danielle Auroi.

Mme Danielle Auroi. Je serai brève : cet amendement illustre parfaitement le proverbe qui veut que l’enfer soit pavé de bonnes intentions. À partir d’une bonne intention – la volonté de mieux répartir des ressources à l’échelle de l’intercommunalité –, il s’expose au risque de prendre à la gorge du jour au lendemain certaines communes, en particulier les communes thermales qui sont loin d’être toutes riches – dans ma circonscription, elles sont petites. Une telle disposition, si elle était adoptée, serait très mal vécue, car le produit des versements des casinos sert à financer bien d’autres projets que les projets touristiques.

Je demande donc, à la suite du rapporteur général et du ministre que cet amendement soit retiré pour donner du temps à la concertation. Après tout, l’intercommunalité renvoie à un choix : il faut le temps que ce choix soit partagé par tous ses membres.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.

M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République. Madame la présidente, notre pays est le deuxième au monde pour le nombre de casinos : il en existe 200 sur notre territoire, ce qui nous place juste après les États-Unis et avant la Russie. C’est une activité qui génère énormément de ressources pour les communes : plus de 200 millions d’euros.

Madame Auroi, c’est la troisième année que je dépose cet amendement, en mettant en avant exactement les mêmes arguments, ceux tout simples de la solidarité. Je ne parviens pas à trouver de raisons pour lesquelles une commune où serait implanté un casino depuis des temps immémoriaux continuerait à recevoir sans faire d’efforts particuliers des subsides conséquents ne faisant que croître avec les années, et ce au détriment d’une intercommunalité qui n’en tire aucun profit pour l’intérêt général.

Depuis que j’ai déposé cet amendement au nom de la solidarité locale, j’ai pu constater deux types de réactions. Depuis une quinzaine de jours, je crois avoir une cartographie assez précise des circonscriptions où sont implantés des casinos : chacun de mes collègues concernés m’a fait part des difficultés éminemment compréhensibles qu’il peut y avoir pour certains maires à se voir potentiellement priver d’une recette du jour au lendemain. Je ne veux pas la mort des maires qui ont investi et qui comptaient sur ces ressources, bien évidemment. Je dois dire qu’au moment où nous évoquions la péréquation, j’ai quand même entendu des arguments qui se situent assez à rebours de ce qui se dit régulièrement. J’ai aussi beaucoup entendu : « ce n’est pas le bon moment », « on va réfléchir », « on va en reparler », « on n’est pas contre mais pas comme ça », « pas maintenant, autrement ».

M. Julien Aubert. Pourtant, le changement, c’est maintenant !

M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. Le législateur est patient, il est constant. J’ai déposé cet amendement trois fois, je peux le déposer une quatrième, d’autant qu’il semblerait que le Gouvernement ait l’intention de débattre des questions de décentralisation et des pouvoirs qui vont être donnés aux communes ou aux EPCI.

Mme la présidente. Veuillez conclure, cher collègue.

M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. Je termine – merci de votre tolérance, madame la présidente – en disant que 65 % des EPCI sont déjà dotés de la compétence tourisme. Dans ces conditions, il ne me paraissait pas anormal que ces établissements puissent profiter, puisque c’est en ces termes que les communes évoquent cette éventualité, des recettes tirées des casinos.

Toutefois, pour faire plaisir au ministre du budget qui est confronté à des difficultés (Exclamations sur certains bancs du groupe SRC) qui ne sont pas locales – je peux néanmoins le rassurer : de nombreux présidents d’intercommunalité ont apporté leur soutien à notre proposition – et pour le remercier de son écoute, en espérant qu’il fera en sorte l’année prochaine que cet amendement soit adopté, je vais le retirer cette année.

M. Julien Aubert. Rose, impair et passe !

(L’amendement n° 163 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Dolez, pour soutenir l’amendement n° 568 rectifié.

M. Marc Dolez. Cet amendement vise à proposer dès l’année prochaine de créer une part de versement transport au profit des régions de province, de manière à leur assurer une ressource propre, pérenne et dynamique, comme c’est le cas aujourd’hui pour les autorités organisatrices de transports urbains et le STIF en Île-de-France.

Il s’agirait de fixer un taux régional sur les zones hors périmètre de transport urbain plafonné à 0,3 % et un taux additionnel au versement transport existant dans un périmètre de transport urbain plafonné à 0,2 %.

Le produit de ce versement serait affecté au financement des dépenses d’investissement et de fonctionnement des transports de voyageurs régionaux. Il abonderait également les opérations visant à améliorer l’intermodalité avec les transports publics mis en œuvre par d’autres collectivités locales et EPCI ainsi que l’intermodalité entre les transports régionaux et le vélo.

Les estimations dont nous disposons – mais sans doute M. le ministre a-t-il des chiffres plus précis encore – montrent que, pour les régions hors Île-de-France, sur la base d’une taxation basse – 0,1 % pour les zones comprises dans le PTU et 0,2 % hors PTU –, le versement apporterait une ressource d’un peu plus de 500 millions d’euros, et que, sur la base d’une taxation haute – 0,2 % pour les zones comprises dans le PTU et 0,3 % hors PTU –, la ressource potentielle serait d’un peu plus de 850 millions d’euros.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. La commission n’a pas retenu cet amendement.

En dehors de l’Île-de-France, les communes et établissements administratifs reconnus comme autorités organisatrices des transports peuvent percevoir un versement transport. Votre amendement propose, si j’ose dire, d’en rajouter une couche – avec un taux allant de 0,2 à 0,3 % du montant de la masse salariale, sans pour autant réduire les taux pratiqués au niveau communal ou intercommunal, ce qui nous semble inopportun. Vous avez vous-même, monsieur le député, cité des montants qui sont loin d’être négligeables.

De surcroît, si votre disposition était adoptée, l’addition de cette tranche supplémentaire aux taux déjà en place aboutirait dans nos belles provinces à des taux supérieurs à ceux qui sont en vigueur dans la région Île-de-France, ce qui serait un peu contradictoire, les problèmes n’étant pas les mêmes.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Naturellement, le Gouvernement reprend à son compte les arguments du rapporteur général.

J’ajouterai un autre argument dont je ne suis pas sûr qu’il ait été développé. Une réforme de la décentralisation va être proposée par le Gouvernement au Parlement dans les mois qui viennent. Il me semble que c’est dans ce cadre que de telles questions doivent pouvoir se régler. Le Président de la République a d’ailleurs pris des engagements assez forts en la matière, comprenant que l’absence d’autonomie fiscale des régions posait un problème considérable. On sait que ce fut une volonté délibérée de la majorité précédente de supprimer toute autonomie fiscale aux régions ; on sait aussi qu’il n’est pas raisonnable d’avoir procédé de la sorte, et qu’à tout le moins un tel choix est peu respectueux du principe de libre administration des collectivités territoriales.

Je ne crois que ce soit le moment de légiférer en la matière, même si des circonstances exceptionnelles ou des problèmes particuliers peuvent nécessiter un traitement intervenant avant la discussion de cette réforme, je pense notamment à l’Île-de-France, qui connaît des difficultés tout à fait particulières. Mais, dans le cas général, je ne crois pas que ce soit l’heure d’anticiper sur l’acte III de la décentralisation.

Le Gouvernement demande donc le rejet de cet amendement.

(L’amendement n° 568 rectifié n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 569 et 306, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Marc Dolez, pour soutenir l’amendement n° 569.

M. Marc Dolez. Cet amendement vise à mettre en place un tarif unique dans les transports, au prix des zones 1 et 2, qui est défendu de longue date par les élus du Front de gauche, à la région Île-de-France comme au Parlement.

Je précise d’ailleurs qu’il s’agit d’un engagement de la majorité au conseil régional d’Île-de-France depuis le protocole de décembre 2011.

Cet amendement a un triple objectif, le premier étant de réduire les inégalités territoriales, car les Franciliens habitant loin du centre de Paris subissent en quelque sorte une triple peine : ils payent plus cher leurs trajets, passent plus de temps dans les transports, la flambée de l’immobilier les ayant contraints à habiter en grande banlieue.

Le deuxième objectif consiste à garantir le droit à la mobilité, notamment pour les plus modestes.

Enfin, troisième objectif, cet amendement vise à assurer un meilleur accès au réseau et donc à réduire l’usage de la voiture, permettant ainsi de diminuer les émissions de gaz à effet de serre.

Cet amendement propose une harmonisation du taux du versement transport à 2,6 % sur l’ensemble de l’unité urbaine de Paris, le cœur de l’agglomération francilienne bénéficiant d’un réseau de transports dense. Les quelque 800 millions d’euros de recettes supplémentaires permettront ainsi de financer la mise en place du tarif unique dans les transports.

J’ajoute que de nouvelles ressources sont nécessaires au Syndicat des transports d’Île-de-France, le réseau Grand Paris réclamant 500 millions d’euros supplémentaires, et le plan de mobilisation de la région 150 millions d’euros de plus dès 2014.

La hausse du versement transport est donc une mesure justifiée, comme le reconnaissait d’ailleurs le rapport Carrez sur le financement des transports franciliens, car depuis plusieurs années sa part dans le financement des transports publics a continuellement baissé. Il est donc temps de revenir à un partage plus juste de l’effort, afin de garantir le droit à la mobilité des Franciliens.

Mme la présidente. La parole est à Mme Danielle Auroi, pour soutenir l’amendement n° 306.

Mme Danielle Auroi. Je remplace M. Denis Baupin, momentanément absent ; cela explique que je défende l’Île-de-France, bien qu’étant provinciale.

À l’heure où nous nous accordons sur la nécessité de renforcer les transports collectifs, afin notamment de répondre aux besoins cruciaux de l’Île-de-France dont le réseau est au bord de la saturation, cet amendement pose la question de la refonte et de l’harmonisation du versement transport sur l’ensemble du territoire de la région Île-de-France.

Ce versement constitue en effet la principale source de financement des transports urbains en Île-de-France, son produit représentant plus de 60 % des ressources du Syndicat des transports d’Île-de-France.

Aujourd’hui, dans le prolongement des mesures engagées par une précédente loi de finances, nous proposons de lisser sur le territoire d’Île-de-France cette contribution des entreprises dans le sens d’une plus grande équité entre les départements et la région, afin de répondre aux besoins de financement des transports en commun.

Ce lissage sera compensé par une moindre contribution des employeurs au remboursement des titres de transport de leurs salariés, celui-ci diminuant du fait de la nouvelle tarification régionale qui réduit le nombre des zones au bénéfice des usagers des départements de la grande couronne. Il prépare en outre une tarification unique, qui bénéficiera principalement à ces personnes.

Le financement des transports collectifs en Île-de-France constitue une urgence qui ne peut reposer sur les seules contributions des usagers et des collectivités ; les entreprises de la région sont également directement concernées. La refonte du versement transport est de nature à dégager des marges de manœuvre financières qui manquent cruellement aujourd’hui et qui, rappelons-le, risquent d’être à nouveau grevées par le projet de relèvement de la TVA annoncé récemment par le Gouvernement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. En Île-de-France, le versement transport est actuellement organisé avec trois niveaux de taux plafonds : 2,6 % à Paris et dans les Hauts-de-Seine ; 1,6 % dans les communes autres que Paris et les Hauts-de-Seine, dont la liste est arrêtée par décret en tenant compte notamment du périmètre de l’unité urbaine de Paris ; et enfin, 1,4 % dans les autres communes.

Ce zonage différencié a été mis en place par la dernière loi de finances rectificative en 2010. Une période de transition a d’ailleurs été mise en place pour que les collectivités dont le taux passait de 1,4 % à 1,7 % connaissent une montée en puissance progressive. Cela avait fait l’objet, me semble-t-il, d’un consensus relativement large.

En fait, vous proposez non pas une harmonisation, mais une suppression de la zone intermédiaire, en portant le taux qui la concerne à 2,6 %, ce qui représente une marche très importante, d’autant plus que certaines de ces communes avaient déjà connu le passage du taux de 1,4 % à 1,7 %.

Cet amendement me paraît donc excessif et brutal, même si la question du financement des transports mérite d’être posée. La commission a donc repoussé ces deux amendements, mais a en revanche accepté un amendement qui sera examiné prochainement et qui, je le précise dès maintenant, répondra de façon claire à votre souci, que nous partageons.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, qui majorerait la charge pesant sur les entreprises de 500 millions d’euros.

Au moment où nous nous efforçons d’améliorer la compétitivité des entreprises – et après tout, pourquoi ne pas améliorer aussi celle des entreprises d’Île-de-France –, cette augmentation paraît assez déraisonnable.

J’ai cru comprendre que certains de vos collègues, monsieur Dolez, souhaitaient légiférer dans le même sens que vous, mais avec peut-être une plus juste appréciation de ce que les entreprises peuvent supporter. Je leur fais d’ailleurs confiance pour proposer un amendement qui sera très raisonnable à cet égard ; c’est du moins le vœu que je forme.

En attendant cette épreuve, car les entreprises devront le cas échéant payer davantage,…

M. Jean-Pierre Blazy. Pour améliorer les transports, monsieur le ministre !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. …j’appelle l’Assemblée à rejeter ces amendements.

Mme la présidente. La parole est à Mme Danielle Auroi.

Mme Danielle Auroi. Monsieur le ministre, je suis prête à retirer l’amendement n° 306 à condition qu’il soit clairement expliqué que l’amendement suivant, présenté par M. Guedj, est bien intégré dans les propositions que vous ferez par la suite, ainsi que M. le rapporteur général l’a annoncé.

(L'amendement n° 306 est retiré.)

(L'amendement n° 569 n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques, nos 340, 25 et 305.

La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement n° 340.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Cet amendement a été adopté par la commission. Je souhaite, par courtoisie pour son auteur, M. Olivier Faure, lui laisser le soin de le soutenir.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. S’il ose le faire !

M. Christian Eckert, rapporteur général. Puisque nous avons la chance de compter M. Faure parmi nous, nous allons le laisser défendre cet amendement.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. C’est un hasard s’il est là ! (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est donc à M. Olivier Faure.

M. Olivier Faure. Je répondrai à M. le ministre, qui en appelait à la raison. Mais avant de parler de raison, je parlerai de cœur, car cet amendement concerne les Franciliens qui, chaque matin, pour plusieurs millions d’entre eux, prennent les transports collectifs dans des conditions anormalement compliquées. Chacun connaît ces situations difficiles, il n’est donc pas nécessaire d’y revenir. Je tenais cependant à évoquer ce point en préalable.

Monsieur le ministre, je souhaite vous parler d’un sujet qui vous tient particulièrement à cœur : la compétitivité de nos entreprises. Il peut sembler curieux d’aborder ce sujet par le biais d’un tel amendement ; je tiens cependant à rappeler que l'économie de la région Île-de-France est extrêmement diversifiée et riche, mais très éclatée entre les différents pôles de la région – Saclay, Marne-la-Vallée, Sénart, Saint-Denis, La Défense, tous ces lieux structurant la vie économique de l’Île-de-France. La question de la mobilité est donc essentielle, particulièrement pour les entreprises.

De plus, bien que les entreprises ne participent qu’à hauteur de 41 % au financement des transports publics, l’essentiel des déplacements réalisés en Île-de-France concerne le trajet quotidien entre le domicile et le travail. Il est donc logique que les entreprises participent un peu plus : 0,1 point supplémentaire leur serait ainsi demandé, représentant un total de 175 millions d’euros. Ces nouvelles recettes seraient consacrées aux schémas directeurs des différents RER, dont le financement n’est aujourd’hui pas assuré. Cet amendement propose de remédier à cette situation, sujet majeur de préoccupation.

J’ajoute que 20 % seulement des entreprises d’Île-de-France seront concernées par cette mesure, puisque le versement transport ne concerne que les entreprises de plus de neuf salariés : 80 % des entreprises seront ainsi exonérées de l’effort demandé.

Pour celles qui viendraient à dépasser le seuil de neuf salariés, la loi instaure un mécanisme très progressif : le versement transport ne serait tout d’abord pas dû les trois premières années, puis son taux pendant les trois années suivantes augmenterait progressivement. Les entreprises concernées ne seraient ainsi pas brutalement impactées, puisqu’elles ne paieraient le taux plein qu’au bout de six années. Cette mesure est donc extrêmement souple.

Mme la présidente. Il faut conclure, cher collègue.

M. Olivier Faure. Je termine, madame la présidente.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Pour 175 millions, on peut le laisser parler !

Mme la présidente. Monsieur Faure, vous en êtes à trois minutes de présentation au lieu de deux. Je rappelle à l’ensemble de nos collègues, que la règle veut qu’un orateur dispose de deux minutes pour présenter son amendement, et qu’il peut s’exprimer à nouveau après les avis du rapporteur et du Gouvernement. Je vous remercie donc de bien vouloir accélérer, monsieur le député.

M. Olivier Faure. Veuillez accepter mes excuses, madame la présidente : j’avais prévu d’intervenir moins longuement, mais j’ai souhaité répondre à M. le ministre, qui m’avait en quelque sorte provoqué dans son intervention.

M. Marc Dolez. C’est un provocateur !

M. Olivier Faure. Cela a donc allongé mon temps de parole.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le compte rendu en témoignera : je n’ai rien dit de provocant !

M. Olivier Faure. Pour conclure, à ceux qui redoutent que certaines entreprises décident de s’implanter ailleurs en raison d’un versement transport trop élevé, je répondrai ceci : depuis trente ans, les lieux où le versement de transport est le plus élevé correspondent exactement à ceux où les entreprises se sont le plus implantées, c’est-à-dire dans les Hauts-de-Seine et à Paris.

Pour toutes ces raisons, j’invite l’Assemblée à voter en faveur de cet amendement adopté par la commission des finances.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement comprend parfaitement les raisons pour lesquelles cet amendement a été déposé. Il est vrai que les transports en commun, notamment en Île-de-France, souffrent d’imperfections dont les premières victimes sont évidemment les usagers, et d’abord ceux qui tous les matins et tous les soirs doivent se rendre à leur travail et en revenir.

Mais ces salariés ont besoin d’entreprises viables, dont les charges ne soient pas d’un niveau tel qu’elles ne pourraient poursuivre leur activité. Pour aller travailler, fût-ce dans des conditions désagréables, encore faut-il qu’un travail soit offert à ces salariés.

Ainsi que vous l’avez indiqué, monsieur Faure, un compromis subtil doit être trouvé pour dégager des moyens dans ces entreprises, permettant à leurs salariés de bénéficier de transports en commun dignes d’eux et de l’époque où nous vivons. Il existe en effet de très graves insuffisances, en particulier sur certaines lignes du RER ; vous m’en avez d’ailleurs souvent parlé, vous qui êtes très sensible à cette question.

Le Gouvernement est donc partagé entre son souci de respecter l’esprit du pacte de compétitivité, consistant à alléger les charges des entreprises, et la volonté de répondre à des demandes d’élus qui ne font que relayer les difficultés quotidiennement rencontrées par les usagers dans leur utilisation des transports en commun, celle-ci étant le plus souvent motivée par des raisons professionnelles.

Lorsque le Gouvernement est ainsi partagé entre deux impératifs d’égale importance, il s’en remet, sans jamais être déçu, à la sagesse de l’Assemblée nationale ; telle est donc mon intention.

Mme la présidente. La parole est à M. Jérôme Guedj, pour soutenir l’amendement n° 25.

M. Jérôme Guedj. Je souhaite tout d’abord remercier le Gouvernement pour l’expression de sa confiance, parce que cet amendement, que j’ai eu l’honneur de proposer à Christian Eckert et Olivier Faure, et que la commission des finances a repris – ce dont je la remercie – vise l’ensemble des Franciliens, comme l’a rappelé à juste titre Olivier Faure.

Le Syndicat des transports d’Île-de-France, dont je suis administrateur, considère aujourd’hui qu’il n’est plus en mesure de satisfaire la demande principale de nos concitoyens. Ceux-ci sont en effet confrontés à des situations de quasi-jacqueries lors de l’utilisation des RER, ou de frustration pour tous ceux qui, en zone périurbaine, ne peuvent pas ou plus bénéficier de services de bus pour rejoindre les gares SNCF ou RATP.

Vous allez nous donner les moyens de mettre en œuvre immédiatement, en Île-de-France, des mesures permettant de renforcer notamment l’offre de bus et d’accélérer la réalisation des schémas directeurs de l’ensemble des RER. N’oublions pas que, chaque jour, il y a plus de monde qui emprunte les différents RER de la région parisienne que l’ensemble des TGV. Les trains du quotidien doivent être la priorité de l’action de la puissance publique.

En autorisant le relèvement des plafonds du taux du versement transport applicables en Île-de-France dans une proportion raisonnable, nous œuvrons pour la qualité de vie de l’ensemble de nos concitoyens. Cela permettra aux salariés d’atténuer cette forme de souffrance que constituent les trajets quotidiens qu’ils doivent effectuer pour se rendre sur leur lieu de travail. Quand on habite dans le département de l’Essonne et que l’on passe deux heures quarante-trois en moyenne par jour dans les transports, on constate une forme d’atténuation ou d’altération de la compétitivité au travail.

Je veux remercier toutes celles et ceux qui, au sein de la commission des finances, ont soutenu cette disposition qui, je le rappelle, avait été proposée par Gilles Carrez dans son très stimulant rapport de 2009. Cette mesure nous permettra de répondre rapidement aux besoins en transports de l’ensemble de nos concitoyens.

La priorité est d’accélérer la réalisation des schémas directeurs des RER et de renforcer l’offre de bus. Pour le reste, on verra après.

Mme la présidente. L’amendement n° 305 est-il défendu ?

Mme Danielle Auroi. Oui, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Lefebvre.

M. Dominique Lefebvre. Je voudrais à la fois rassurer le ministre et le convaincre.

Dans la grande couronne, les chefs d’entreprise ne nous interpellent pas sur le coût du versement transport pas plus que sur celui de la cotisation logement, mais sur les conditions de transport et de logement de leurs salariés. S’ils le font, c’est parce que, comme l’a dit Olivier Faure, derrière cela il y a un vrai enjeu de compétitivité et d’emploi. Je rappelle que dans la grande couronne on perd son emploi parce que l’on n’arrive pas à l’heure au travail en raison d’un dysfonctionnement important des RER. Pour les entreprises, c’est un problème d’organiser la production à cause des aléas liés aux transports.

En Île-de-France, nos concitoyens passent entre une et trois heures par jour dans les transports en commun. Si aucune décision n’est prise sur le réseau Grand Paris express, si un effort considérable n’est pas entrepris pour rattraper les vingt-cinq années de sous-investissement dans le réseau des transports en Île-de-France, non seulement la vie se dégradera mais aussi la compétitivité et l’emploi en Île-de-France.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annick Lepetit.

Mme Annick Lepetit. M. Guedj a indiqué que la présente mesure avait pour origine le rapport Carrez, qui a été rendu il y a déjà quelques années. Cela fait plusieurs années qu’à chaque PLF nous présentons cette disposition. Mais elle a toujours été refusée par la précédente majorité.

Monsieur le ministre, je vous remercie pour votre sagesse. Nous aurons certainement l’occasion de revenir à ces questions qui sont importantes pour l’Île-de-France mais aussi pour d’autres régions. Les nombreux députés concernés, auxquels je vous associe, madame la présidente, sont heureux ce soir.

Mme la présidente. La parole est à M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Dans ce beau concert de louanges collectif, n’oublions pas qu’il n’est pas possible d’attendre deux ans avant que le STIF donne son accord pour dévier de quelques mètres une ligne de bus. Certes, il faut rénover les RER, mais il faut aussi que les services concernés fassent preuve de réactivité.

M. Michel Pouzol. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances Bien évidemment, j’ai défendu cet amendement en commission.

Nous pouvions traiter le versement transport de deux manières : en fonction du zonage et du taux.

La loi de finances rectificative de 2010 a prévu un mécanisme de lissage. Je rappelle à quel point ce zonage, qui datait de plusieurs décennies, était devenu obsolète.

Je prendrai un exemple, celui de la station de Noisy-Champs située sur la ligne A du RER. À un bout du quai, on est en Seine-Saint-Denis et le versement transport est de 1,7 %, tandis qu’à l’autre bout on est en Seine-et-Marne, où le versement transport est de 1,4 %.

Dans le rapport dont vous parlez, qui était issu d’un travail collégial avec Mme Lepetit et M. Goldberg, nous avions mis en évidence qu’il faudrait, en début de période, dans le cadre du plan de mobilisation de la région et du Grand Paris, augmenter de 0,1 point l’ensemble des tarifs, car le zonage ne suffirait pas. C’est dire à quel point je me réjouis de cet amendement et de la position du ministre.

Le défaut du versement transport, c’est qu’il est assis sur la masse salariale. C’est là la vulnérabilité de cette taxe, qui ne va pas exactement dans le sens de l’emploi et de la compétitivité des entreprises. Mais, comme l’a fort bien dit Dominique Lefebvre, les entreprises ne nous parlent jamais du versement transport. Elles demandent plutôt que les salariés arrivent à peu près à l’heure au travail et pas trop fatigués.

Vous avez parlé des lignes B et C. Pour ma part, je citerai le cas de la ligne A, qui est vraiment dans un état épouvantable. Chacun porte sa croix !

M. François Pupponi. Chacun porte sa ligne plutôt ! (Sourires.)

Mme la présidente. Pour clore la discussion sur cette question, je vais donner la parole à M. Daniel Goldberg. Ainsi, l’ensemble des députés de Paris, de la petite et de la grande couronne, des différentes sensibilités politiques, auront pu s’exprimer. En tout cas, il semble que se dégage une forme d’unanimité.

M. Daniel Goldberg. Madame la présidente, je suis député de Seine-Saint-Denis mais surtout député de la France, et c’est à ce titre que j’interviendrai dans ce débat.

Certes, la question du fonctionnement des transports du quotidien se pose aux Franciliens, qui sont près de 4 millions à les utiliser chaque jour. Mais, comme c’est la région capitale, beaucoup d’investisseurs l’utilisent également. La difficulté, aujourd’hui, ce sont les phénomènes de stress.

J’ajouterai un argument, même si, je le sais, il ne convaincra pas complètement le ministre, que je connais bien, à savoir que le Medef Île-de-France estime qu’il est nécessaire d’améliorer les transports du quotidien. Cela passe par des moyens renforcés pour l’autorité organisatrice des transports francilienne qu’est le STIF, mais aussi par une meilleure organisation des trois opérateurs qui s’occupent des transports en Île-de-France, la RATP, la SNCF et RFF. En la matière, le Gouvernement devra prendre des dispositions pour que ces trois opérateurs travaillent mieux ensemble car il y a des lignes de RER qui sont co-exploitées par la RATP et la SNCF et il y en a pour lesquelles la SNCF et RFF sont responsables, l’une de l’exploitation, l’autre de l’entretien du réseau. Il faut avancer sur ces questions.

Comme le Gouvernement, par la voix de Jérôme Cahuzac, s’en remet à la sagesse de l’Assemblée, j’ai peu de doute que l’Assemblée soit très sage puisque nous avons adopté à l’unanimité, au mois de mars dernier, un rapport sur la qualité des transports en Île-de-France dans le cadre d’une commission pluraliste que j’avais le plaisir de présider. J’espère que le vote sur ces amendements sera conforme à l’unanimité qui s’est dégagée sur ce rapport.

(Les amendements identiques nos 340, 25 et 305 sont adoptés.)

Mme la présidente. Je constate que le vote est acquis à l’unanimité. (Applaudissements sur tous les bancs.)

La parole est à M. Marc Dolez, pour soutenir l’amendement n° 570.

M. Marc Dolez. Cet amendement vise à pallier une lacune et à procéder à un ajustement sensible de la base de la contribution économique territoriale en y ajoutant, en tant que base imposable, les actifs financiers figurant au bilan des entreprises assujetties.

En effet, aujourd’hui, la contribution économique territoriale ne prend par exemple pas en compte ni la réalité de l’activité économique, ni la réalité des choix et des constructions capitalistiques des entreprises. L’accumulation du capital financier, y compris à visée spéculative fondée sur une préemption constante et permanente des richesses créées par l’activité réelle n’est toujours pas découragée ni prise en compte dans l’assiette fiscale de la contribution économique territoriale. Notre amendement vise donc à répondre à cette question.

J’ajoute que la prise en compte des actifs financiers pourrait contribuer à modifier les choix de gestion des entreprises en faveur de l’emploi et de l’investissement productif.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. La commission a repoussé cet amendement parce qu’il nous paraît assez difficile d’asseoir une contribution sur les actifs financiers des entreprises, y compris les PME. Cela veut dire que, d’une certaine façon, vous taxez la trésorerie des entreprises, ce qui est contre-productif en termes de compétitivité, et presque en ce qui concerne leur survie. Cette mesure n’a pas beaucoup de sens pour l’activité économique.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. L’Assemblée a eu déjà souvent à examiner cette disposition. Le Gouvernement y a été régulièrement défavorable et il le demeure. Aussi, je demande à la représentation nationale de rejeter cet amendement.

(L’amendement n° 570 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg, pour soutenir l’amendement n° 41.

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Cet amendement a été déposé par Gérard Charasse, député de l’Allier, aujourd’hui retenu dans sa circonscription, ce dont il vous prie de l’excuser. Je précise que cet amendement a été cosigné par l’ensemble des membres du groupe RRDP.

L’adoption de cet amendement aurait un double avantage : d’une part, et cet argument n’est sans doute pas négligeable aux yeux du ministre, la mesure ne coûterait rien à l’État ; d’autre part, elle permettrait davantage d’équité et de justice. Il s’agit en effet de mieux répartir le produit d’un prélèvement entre les communes concernées.

Comme vous le savez, il existe un prélèvement opéré par l’État sur les sommes engagées par les parieurs qui misent dans les courses organisées sur les hippodromes. 15 % de ces prélèvements sont affectés aux communes ayant un hippodrome. Or, pour des raisons de disponibilité foncière, ces communes ont souvent implanté ces hippodromes sur le territoire de communes voisines, car ils nécessitent un espace très important. D’où une situation très paradoxale : les communes sur le territoire desquelles se trouve réellement cet équipement se voient privées d’une recette tirée de son exploitation.

Il convient d’établir un mécanisme plus équitable. Plutôt que d’inventer un mécanisme complexe de recherche en paternité si je puis dire, pour savoir quelles communes, et dans quelles proportions, doivent être destinataires de la taxe, cet amendement propose de l’affecter à l’EPCI sur le territoire duquel se trouve l’équipement. Au demeurant, dans la majorité des cas, ces équipements ont d’ores et déjà été transférés aux EPCI concernés. Quand tel n’est pas le cas, ce dispositif permettrait d’obtenir davantage de transparence et de faire que là les communes effectivement concernées soient, au moins indirectement, destinataires de ces fonds. Il s’agit donc d’un amendement de bon sens, d’équité et naturellement de coût nul.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. C’est là un débat proche de celui que nous avons eu sur les casinos. La loi du 12 mai 2010 sur les jeux en ligne a affecté une fraction de 15 % du produit du nouveau prélèvement d’État sur les paris aux communes sur lesquelles est situé un hippodrome, dans la limite de 10 millions d’euros et de 700 000 euros par commune.

Ce critère d’implantation territoriale aboutit, c’est vrai, à concentrer les versements, en particulier sur des petites communes. Mais votre amendement de substitution pure et simple paraît brutal. Sous la précédente législature, dans un rapport sur l’application de la loi du 12 mai 2010, nos collègues Lamour et Filippetti avaient proposé que ces substitutions s’accompagnent d’une obligation de reversement qui ne puisse être inférieure à 50 % des sommes perçues. Cela me paraît un objectif à terme, avec une montée en puissance envisageable.

En l’état, la disposition que vous proposez nous paraît, dans le même esprit que ce qui a été dit tout à l’heure à propos des casinos, trop brutale et prématurée. Elle mériterait une rédaction permettant une évolution progressive de la mutualisation de la part reversée. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. C’est exactement la même proposition, pour les hippodromes, que celle que nous avons déjà examinée pour les casinos. Ma réponse sera donc la même. Il me paraît délicat de légiférer pour régler un ou deux cas particuliers quand une entente entre élus locaux pourrait peut-être suffire.

Quoi qu’il en soit, le Gouvernement peut difficilement donner un avis favorable à cet amendement après avoir demandé tout à l’heure à certains de vos collègues de retirer leur amendement sur les casinos qui avait le même objet : partager entre un certain nombre de communes.

Si je fais erreur dans mon analyse, merci de me le dire, et j’essaierai de vous répondre aussi précisément que possible.

Mme la présidente. La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg.

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Il n’y a pas identité entre cet amendement et l’amendement relatif aux casinos, qui est également légitime. Nous ne sommes pas dans le même cas. D’abord, aucune délégation de service public touchant des casinos n’a été transférée à des EPCI, la loi ne le prévoit d’ailleurs pas, je pense. Ensuite, s’il s’agit d’une délégation de service public, aucun casino titulaire d’une délégation de service public signée par une commune ne met en œuvre son activité déléguée dans le ressort d’une autre commune. Je pense d’ailleurs que ce serait juridiquement impossible. Donc je maintiens cet amendement. Connaissant le souci constant, permanent, répétitif qu’a le Gouvernement d’être favorable aux amendements du groupe RRDP, je ne doute pas qu’il y aura peut-être une évolution.

En réalité, j’en doute, mais comme les doutes sont parfois l’objet de confirmations contraires, je m’en remets à la puissante sagesse du rapporteur et du ministre.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Monsieur le député, si je comprends bien, la différence entre le cas que nous avons examiné tout à l’heure et celui que vous exposez est qu’il ne s’agit pas de répartir une éventuelle manne entre communes appartenant à un même établissement public, mais de veiller à ce que les communes sur le territoire desquelles cet hippodrome est implanté puissent partager cette manne, non pas que ces communes aient décidé de s’associer, mais tout simplement parce que les hasards de l’histoire ont fait que cet hippodrome est installé sur le territoire de plusieurs communes ; dans les cas que vous souhaitez corriger, seule l’une d’entre elles bénéficie des recettes de l’hippodrome.

Je fais remarquer à la représentation nationale que cet amendement, s’il était adopté, serait totalement neutre pour les finances publiques : il n’a aucun coût, et il n’y a donc aucun gage à lever.

Il ne s’agit pas d’interférer dans les relations entre élus de différentes communes, par ailleurs regroupées au sein d’un EPCI, mais simplement de rétablir par la loi une forme de justice qui n’a pas été respectée au cours de l’histoire, les hasards ayant attribué cet hippodrome à une commune alors même que son terrain d’assiette se partage entre plusieurs d’entre elles.

J’avais cru comprendre, monsieur le député, que le cas que vous exposiez était rigoureusement identique à celui qui fut exposé lorsqu’il s’agissait de partager les contributions des casinos entre plusieurs communes, et c’est la raison pour laquelle il m’était difficile de donner un avis favorable, dès lors que je n’en avais pas donné un à certains de vos collègues. La différence de traitement aurait été choquante et aurait laissé penser que le Gouvernement souhaitait privilégier outrageusement le groupe que vous présidez, alors qu’il s’attache évidemment, dans les avis qu’il donne, à faire preuve de la plus parfaite impartialité.

C’est au nom de cette impartialité, que, je le sais, vous saurez apprécier, que le Gouvernement, fort de vos explications, monsieur Schwartzenberg, s’en remet à la sagesse de l’Assemblée.

(L’amendement n° 41 est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l’amendement n°682.

M. François Pupponi. Monsieur le ministre, je vais vous proposer un amendement qui non seulement ne va pas coûter de l’argent à l’État, mais va lui permettre de faire des économies. C’est le fameux amendement Icade. Vous connaissez le sujet : l’État a autorisé la société Icade à vendre trente-trois mille logements en Île-de-France et a fait en sorte que les acquéreurs puissent bénéficier de vingt-cinq ans d’exonération de taxe foncière non compensée totalement pour les communes. L’opération de vente par Icade, qui s’est d’ailleurs déroulée dans des conditions particulières, entraîne des pertes de recettes pour les communes concernées, alors qu’elles ne sont en rien responsables de ces ventes. Pour éviter que ces communes soient pénalisées par les ventes des logements Icade, je propose de réduire le délai d’exonération des impôts locaux dont bénéficient les acquéreurs, de sorte que l’État ait moins d’années à compenser partiellement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. C’est un bon amendement. Il a été travaillé, car nous en avons vu plusieurs en commission des finances. Il y avait un premier amendement un peu radical de François Pupponi , puis cet amendement de repli qui permet de réduire de vingt-cinq à quinze ans la durée de l’exonération. Il ne coûte rien à l’État, il est d’effet nul sur le plan budgétaire. Nous avions demandé à notre collègue de le réécrire pour en améliorer la rédaction.

À titre personnel, compte tenu de la discussion qui a eu lieu en commission et dans la mesure où on ne réduit pas la durée d’exonération à zéro, mais à quinze ans au lieu de vingt-cinq ans, j’aurais tendance à m’en remettre à la sagesse de l’Assemblée.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. J’ignore si dans l’exposé des motifs vous indiquez la finalité de cet amendement, mais, pour que la représentation nationale en soit informée, je me permets de l’indiquer : c’est un amendement qu’on pourrait qualifier d’amendement Icade. Il est assumé et c’est très bien comme cela.

Je ne suis pas sûr que légiférer de façon aussi ciblée soit une bonne chose. Et lorsqu’il est indiqué que le coût pour l’État est nul, je me permets d’émettre quelques réserves : ce n’est pas parce que le coût n’est pas chiffrable qu’il est nul. Il y a nécessairement un coût pour l’État.

Pour ces deux raisons, le Gouvernement est très réservé sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. François Pupponi.

M. François Pupponi. Monsieur le ministre, non seulement l’État ne perdra pas d’argent, mais il va en économiser, puisqu’il n’aura pas à compenser dix ans d’exonération. Il aurait dû compenser partiellement pendant vingt-cinq ans ; on lui demande de compenser partiellement pendant quinze ans : donc il économise dix ans de compensation. Je fais faire des économies au budget de l’État, c’est mathématique.

En revanche, j’entends bien la remarque sur « l’amendement Icade », mais si le Gouvernement ne souhaite pas qu’il y ait un article de loi spécifique, il faudrait qu’il rapporte le décret Icade, puisque le précédent Gouvernement a pris un décret, dit décret Icade, de mai 2007, qui a été fait exclusivement pour permettre à cette société de vendre ses appartements.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Luc Laurent.

M. Jean-Luc Laurent. Je précise ce que vient de dire François Pupponi : ce sera bien dans les faits une économie pour l’État, puisqu’il s’agit de réduire la compensation de dix ans.

Quant au fait qu’il s’agirait d’une mesure ciblée, un décret avait classifié au titre du prêt locatif social la société Icade pour réaliser ces opérations. Dans ces conditions, il n’y a aucun obstacle à ce que l’amendement présenté par François Pupponi et retravaillé pour tenir compte des nombreux débats qui sont intervenus, puisse bénéficier de la sagesse de l’Assemblée et être adopté.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. J’entends vos arguments, messieurs les parlementaires. Je suis convaincu que, contrairement à la première analyse que j’ai pu faire, cette mesure n’aurait pas de coût pour l’État.

Je suis également sensible au problème de la spécificité et vous avez bien fait de me rappeler qu’elle ne daterait pas de cette mesure si elle était adoptée, mais qu’elle remontait à un décret pris en 2007. Le rapporteur général a donc eu raison de s’en remettre à la sagesse de l’Assemblée et je fais de même.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Pour vous rassurer complètement, ces logements Icade étaient des logements privés : il n’y avait donc pas d’exonération. Le fait qu’ils aient été cédés par Icade et repris par des bailleurs sociaux – soit par des prêts locatifs sociaux, soit par des prêts locatifs à usage social – a déclenché des exonérations, et ainsi les communes qui bénéficiaient totalement de la taxe foncière se sont retrouvées avec un manque à gagner.

Sous la précédente législature, nous avons essayé de compenser ce manque à gagner et Bercy s’est montré très généreux : c’est le budget de l’État qui a payé. Sauf que Bercy, généreux d’une main mais beaucoup moins de l’autre, a commencé au titre des variables d’ajustement à rogner cette compensation. Les communes, au bout de trois ans, se retrouvent avec une compensation qui, de cent au début, est tombée à soixante.

Comme nous sommes lucides, avec cet amendement il n’est pas demandé à Bercy de faire un effort : l’effort va être fait par certains bailleurs sociaux dont la durée d’exonération de taxe foncière, au lieu de vingt-cinq ans, sera ramenée à quinze. Je crois qu’on peut rassurer le ministre : Bercy n’est pas mis à contribution.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Goldberg.

M. Daniel Goldberg. La sagesse me paraît vraiment requise pour cet amendement, d’autant que c’est la première fois que M. Pupponi soulève ce problème. Nous nous trouvons face à une difficulté : un certain nombre d’organismes ont accepté de reprendre ce patrimoine ; la société Icade a accepté de le vendre dans des conditions particulières et je ne vois pas du tout pourquoi le président Carrez semble insinuer que le ministère des finances manque de générosité depuis deux ans.

Les trente-six communes touchées par ce changement de propriétaires des quelque 35 000 logements locatifs en question, en particulier en Île-de-France, perdent des ressources. On n’a pas demandé leur avis à ces communes sur le transfert de propriété, notamment à celles concentrant un grand nombre de ces logements, comme Sarcelles, certes, mais qui n’est pas la seule commune dans ce cas. L’absence de compensation du défaut de recettes crée une difficulté.

On a beaucoup parlé, ces derniers jours, d’inégalités territoriales, des moyens restreints dont souffrent un certain nombre de communes,…

M. Jean-Luc Laurent. Parfois en de mauvais termes !

M. Daniel Goldberg. …parfois, en effet, dans de mauvais termes. Certaines communes se trouvent donc dans une situation difficile à cause du choix d’un opérateur institutionnel de se retirer du logement social et à cause, il faut l’admettre, de la légèreté de certains bailleurs de ne pas penser collectivement aux communes où ils sont propriétaires.

(L’amendement n° 682 est adopté à l’unanimité.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement n° 335.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Cet amendement vise à revaloriser forfaitairement les bases des valeurs locatives pour l’ensemble des assiettes des impôts locaux. Traditionnellement, le Gouvernement ne prévoit pas d’augmentation dans le projet de loi de finances. Après réflexion, la commission a adopté à l’unanimité un taux de revalorisation des valeurs locatives de 1,8 %. Pour votre information, il était de 1,5 % en 2009, 1,2 % en 2010, 2 % en 2011, 1,8 % en 2012, et donc, si vous en décidez ainsi, de 1,8 % également pour 2013.

Ce chiffre, correspondant grosso modo au taux de l’inflation, est le même que celui de l’année dernière. Il s’agit, aux yeux de la commission, de la bonne mesure pour donner à la fois aux collectivités les moyens d’intégrer l’augmentation liée à l’inflation et pour ne pas alourdir plus que de raison la charge de nos concitoyens.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Favorable.

(L’amendement n° 335 est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement n° 336 rectifié.

M. Christian Eckert, rapporteur général. La commission a adopté cet amendement. Il concerne l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux, les IFER, dues notamment par les exploitants d’installations gazières. M. Muet, cosignataire de l’amendement, souhaitera peut-être le présenter.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Alain Muet.

M. Pierre-Alain Muet. Il s’agit d’élargir le champ des IFER qui s’applique essentiellement, pour l’instant, en ce qui concerne les canalisations, aux hydrocarbures à l’exclusion, de fait, des produits chimiques alors que ceux-ci présentent les mêmes risques pour la commune qui les supporte. Aussi, il paraît assez logique que les moyens de transport du gaz, des hydrocarbures ou des produits chimiques soient traités de la même façon.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Christian Eckert, rapporteur général. La commission, je l’ai dit, a adopté cet amendement. J’ai néanmoins quelques inquiétudes sur la volonté d’instaurer de nouvelles IFER. Certains affirment qu’on doit taxer les canalisations transportant des produits chimiques. Et pourquoi pas, un jour, ne pas taxer les canalisations transportant l’eau potable ? La question nous a déjà été posée. Il convient de veiller aux réflexions suscitées par l’IFER, qui est un dispositif assez particulier. Il s’agissait au départ de remplacer la taxe professionnelle, ce qui avait été décidé au cours d’une « nuit des longs couteaux ».

Il est certes intéressant de mettre à contribution les grandes entreprises de voyageurs. On en vient ici aux produits chimiques. Où va-t-on s’arrêter ?

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement. Cette imposition n’a pas été conçue pour assumer le type de charge proposé mais pour compenser la réforme de la taxe professionnelle, et non le manque de recettes lié à cette réforme. Le Gouvernement demande donc à l’Assemblée de ne pas adopter cet amendement car il faut garder aux outils créés par voie législative leur mission initiale sans l’élargir, à moins de courir le risque de voir d’autres taxes ou impôts utilisés à d’autres fins et d’aller ainsi de majoration en majoration, entraînant une préjudiciable augmentation des prélèvements obligatoires.

Le Gouvernement, j’y insiste, demande à l’Assemblée de rejeter cet amendement, nonobstant son adoption par la commission.

(L’amendement n° 336 rectifié n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg.

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Quoique n’étant pas cosignataire de l’amendement identique, non soutenu, présenté par plusieurs collègues de mon groupe, je souhaite m’exprimer sur cette question. En effet, je ne suis pas totalement convaincu par l’argument du rapporteur général à propos de l’eau potable. Le fait d’assujettir les exploitants de réseaux de transport de gaz naturel et d’hydrocarbures à l’indemnité forfaitaire sur les entreprises de réseaux serait tout à fait légitime. Les réseaux de transport de gaz naturel et d’hydrocarbures présentent des analogies assez fortes avec les réseaux de transport actuellement soumis à ce type de taxe.

Aussi pourrait-on déplorer une sorte de disparité de traitement à maintenir deux situations différentes pour deux problèmes quasiment identiques.

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Goasdoue, pour soutenir l’amendement n° 618.

M. Yves Goasdoue. Cet amendement vise à assurer une plus juste répartition territoriale de la CVAE – sujet bien connu par la commission des finances et par M. le ministre – entre activités de siège et unités de production. Il s’inscrit dans le prolongement des efforts du Parlement pour améliorer le rendement de la CVAE au profit des territoires industriels.

En 2010, l’Assemblée a adopté des dispositions telles que le doublement des effectifs et des valeurs locatives des établissements industriels. Cela ne concernait alors que la répartition de la CVAE au sein d’une même entreprise multi-établissements mais constituée sous la forme d’une seule entité juridique. Or, selon l’INSEE, plus de 70 % de la valeur ajoutée du secteur marchand reposent désormais sur des groupes.

Au sein d’un même groupe, chaque filiale acquitte sa propre cotisation à la valeur ajoutée. Pourtant, la valeur ajoutée déclarée au sein des différentes entités juridiques est très souvent déformée par rapport à la réalité, à travers les prix de cession pratiqués entre filiales ou entre une holding et ses filiales.

C’est donc pour neutraliser les incidences de ces réorganisations juridiques sur la répartition territoriale de la CVAE que le présent amendement propose de consolider les cotisations des entités d’un même groupe avant de procéder à la répartition du produit global entre l’ensemble des entités de ce groupe.

Il convient de souligner que cet amendement n’a pas d’incidence sur la pression fiscale supportée par les entreprises, et que le rapport du sénateur Charles Guené, remis en juillet dernier, conclut à la nécessité d’introduire une mesure de consolidation des cotisations à l’échelle des groupes. Ce sont les territoires industriels qu’il faut protéger.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général, Nos collègues posent là un vrai problème. Encore une fois, la réforme de la taxe professionnelle, réalisée une nuit, sur un coin de table, pose un grand nombre de problèmes, indépendamment même des questions budgétaires. On peut relever par exemple une concentration de la valeur ajoutée au sein d’un groupe, notamment au sein d’une filiale financière, alors que les charges, les unités industrielles, sont réparties sur d’autres territoires.

Votre réponse, monsieur le député, n’est pas très satisfaisante sur le plan intellectuel puisque vous souhaitez répartir la CVAE, assise sur la valeur ajoutée, proportionnellement à une valeur locative foncière. Vous en revenez par conséquent, en quelques sorte, à l’assiette de l’ancienne taxe professionnelle. Il ne s’agit donc pas forcément de la bonne réponse. On peut en discuter.

Vous avez ensuite fait allusion au rapport sénatorial. Nous venons juste de recevoir les chiffres de la CVAE de 2011 – je pourrai vous les transmettre, monsieur Goasdoue, au cas où vous n’en auriez pas été destinataire –, chiffres qui doivent être analysés. L’organisme adéquat pour mener cette réflexion me semble être le comité des finances locales.

Je vous suggère de retirer votre amendement afin de laisser aux CFL et aux associations d’élus concernées le temps de faire des propositions qui pourraient être reprises dans un texte ultérieur. À défaut, l’avis de la commission est défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Monsieur Goasdoue, plusieurs difficultés empêchent le Gouvernement de donner un avis favorable. D’abord, c’est l’article 1586 ter, au lieu de l’article 1586 octies, que vous visez. On pourrait certes sous-amender votre amendement pour le rendre opérant. Mais d’autres objections me paraissent plus sérieuses : le rapport sur la réforme de la taxe professionnelle conclut, à l’inverse de ce que vous semblez penser, que la répartition de la valeur ajoutée n’introduit pas d’injustice ou d’iniquité entre les territoires. Certains élus locaux peuvent être convaincus du contraire mais, dans l’ensemble, le rapport conclut au respect de l’équité qui, après les nombreuses corrections apportées ici, ne me paraît pas contestable.

De surcroît, j’ignore le but que vous poursuivez avec cet amendement, mais, s’il s’agit par exemple de corriger les iniquités qui peuvent exister au sein d’un groupe intégré, il semble bien que la plupart et même la totalité des opérations intragroupes soient sans conséquence sur la répartition de la valeur ajoutée : cela signifie que la structure économique du groupe est sans conséquences.

Ensuite, la mise à disposition des personnels et les effectifs en cause employés pendant plus de trois mois restent bien déclarés par l’employeur juridique, à l’adresse où ils sont effectivement employés : là non plus, il n’y a aucun facteur d’iniquité entre les territoires. C’est en tout cas ce qui semble ressortir du rapport auquel j’ai déjà fait référence.

Il en est de même de la distribution des bénéfices d’une entreprise ou d’une holding : cette distribution ne modifie pas la répartition de la valeur ajoutée, puisque les dividendes n’entrent pas dans le calcul de celle-ci. Cette remarque vaut également pour les facturations intragroupes. Lorsque celles-ci sont anormales, elles peuvent être corrigées par l’administration ; lorsqu’en revanche elles sont légitimes, elles sont admises, mais ne modifient pas davantage la répartition de la valeur ajoutée.

S’agissant, enfin, de la location des locaux, il n’y a pas non plus de quoi s’inquiéter, puisque la valeur ajoutée de la structure qui exploite n’est pas minorée du montant de la location payée à une société du même groupe.

Bref, vous voyez que, quels que soient les éléments constitutifs de la valeur ajoutée que l’on prend en considération, ceux-ci ne conduisent pas à des répartitions inéquitables, au sein du territoire, de la valeur ajoutée produite par cette entreprise, quelles que soient la forme juridique et les modalités de gestion de la société.

Au-delà de son imperfection technique – qui m’a été signalée par mes services et que je n’aurais pas décelée spontanément, je vous rassure –, je ne crois pas que votre amendement soit pleinement justifié. Il serait donc sage de le retirer, en tenant compte des explications que je viens de vous apporter. À défaut, je serai amené, comme le rapporteur général, à émettre un avis défavorable à son adoption.

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Je suis assez sensible à l’amendement de M. Goasdoue.

Nous avons fait une très bonne réforme de la taxe professionnelle (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.). Il s’agissait d’épargner l’industrie. (Même mouvements). C’était une très bonne réforme. Cependant…

Mme Catherine Coutelle. Cependant ?

M. Marc Le Fur. J’ai l’impression que je réveille les personnes présentes !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. C’est une erreur ! (Sourires)

Mme la présidente. Merci, monsieur Le Fur, de poursuivre votre intervention : vous ne disposez que de deux minutes.

M. Marc Le Fur. Il fallait épargner l’industrie, et cela a été fait. Cependant, il ne faut pas décourager les communes qui ont le mérite d’accueillir des établissements industriels et des cheminées d’usines. Ces communes rencontrent des difficultés, du fait de la présence de ces usines ; elles doivent prendre des engagements financiers et faire un certain nombre d’investissements.

Mme Catherine Coutelle. On l’a dit !

M. Marc Le Fur. À mon avis, l’essentiel de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises doit donc leur revenir.

Un argument me convainc particulièrement dans l’amendement de notre collègue Goasdoue : il explique que la région Île-de-France, qui représente 29 % du PIB, concentre 33 % des produits de la CVAE. Cela veut bien dire que la région Île-de-France, où sont concentrés les sièges des entreprises, est davantage bénéficiaire de la CVAE que les régions qui accueillent les usines.

Ce raisonnement, un peu intuitif, n’entend pas remettre en cause ce que vient d’expliquer le ministre de manière très savante – je ne suis pas certain, d’ailleurs, que tout le monde ait bien compris ce qu’il a dit. (Sourires). L’essentiel, me semble-t-il, c’est que l’on affecte la recette, non pas aux régions qui accueillent les sièges des entreprises, mais à celles qui accueillent les usines elles-mêmes.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Alain Muet.

M. Pierre-Alain Muet. Je partage l’avis du Gouvernement sur la nécessité d’étudier le problème plus en détail, mais je profite de la discussion de cet amendement pour dire à quel point les réformes de la taxe professionnelle ont été absurdes : elles l’ont été au moins autant que les défauts de l’impôt qu’elles entendaient améliorer.

Lorsque la taxe professionnelle a été créée, la volonté du législateur était de taxer la valeur ajoutée. Comme on ne savait pas comment la mesurer dans les établissements, on a pris ses deux composantes, c’est-à-dire l’investissement, ou le capital, et le travail. Par la suite, on s’est dit que ce n’était pas bien de taxer l’investissement, et on a cessé de le faire ; puis on s’est dit que taxer le travail…

M. Marc Goua. Ce n’était pas bien !

M. Pierre-Alain Muet. …ce n’était pas bien non plus, et on est arrivé à la conclusion qu’il fallait taxer la valeur ajoutée. Autrement dit, nous sommes revenus, au bout de vingt ans, à l’idée d’origine, mais on s’est aperçu qu’on ne savait toujours pas comment faire. On a donc remplacé la valeur ajoutée des établissements par une mesure, un peu différente, du capital, et par celle des effectifs. Bref, on tourne en rond sur cette question.

Cet amendement montre donc aussi à quel point la dernière réforme de la taxe professionnelle a été mal faite.

Mme Catherine Coutelle. Merci, monsieur Muet ! Enfin un peu de vérité !

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Dussopt, rapporteur pour avis.

M. Olivier Dussopt, rapporteur pour avis. Je veux d’abord compléter ce que vient de dire M. Pierre-Alain Muet et abonder dans son sens : la réforme et la suppression de la taxe professionnelle ont été de mauvaises mesures, dont nous n’avons pas fini de payer le prix. Je n’ajouterai qu’un élément, qui est tiré de l’actualité : en 2011, après avoir constaté les premières conséquences négatives de la réforme de la taxe professionnelle, la précédente majorité a proposé aux intercommunalités de fixer une base de cotisation minimale, ce qui se traduit aujourd’hui, pour des entreprises qui avaient vu leurs cotisations baisser énormément, par une nouvelle augmentation, et donc par de l’instabilité.

J’entends ce que disent M. le ministre et M. le rapporteur général, mais je veux tout de même rappeler l’esprit dans lequel cet amendement a été proposé : il s’agissait de faire en sorte que la fiscalité économique soit la plus juste possible pour les territoires, et qu’au-delà des efforts de péréquation du Gouvernement il y ait une juste répartition du produit de la fiscalité économique.

J’entends vos arguments. Je compte aussi beaucoup sur les futurs textes de décentralisation pour introduire encore plus de justice dans la répartition du produit de la CVAE.

Mme la présidente. Monsieur Goasdoue, l’amendement est-il retiré ?

M. Yves Goasdoue. Madame la présidente, j’ai entendu ce qu’ont dit le rapporteur général et le ministre, et je retire cet amendement. Je ne suis pas intimement persuadé que le jeu entre filiales soit totalement neutre. Il l’est d’une manière globale, c’est certain, mais je ne suis pas persuadé que ce soit le cas d’un point de vue territorial.

Il faut que ces questions soient examinées à l’avenir. C’est un fait que la réforme de la taxe professionnelle a eu un fort impact sur nos territoires industriels, et nous devons désormais porter une extrême attention aux anciennes composantes de la taxe professionnelle.

(L’amendement n° 618 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à M. Alexis Bachelay, pour soutenir l'amendement n° 486.

M. Alexis Bachelay. Les droits de mutation à titre onéreux sont perçus par les départements à hauteur de 3,8 % pour le régime de droit commun et de 0,7 % pour les ventes assujetties au régime dérogatoire.

Comme vous le savez, les finances des départements se sont considérablement détériorées du fait des réformes qui se sont succédé depuis 2004. L’État a confié aux départements des missions nouvelles, notamment le pilotage des politiques sociales et de solidarité dans les territoires, sans fournir parallèlement aux conseils généraux les moyens nécessaires pour faire face à ces dépenses en forte augmentation.

La crise économique a encore aggravé les difficultés des départements : puisqu’ils ont la charge des politiques de solidarité et que la crise a malheureusement frappé un nombre croissant de nos concitoyens, les tensions financières se sont accrues, ainsi que les difficultés pour équilibrer les budgets. Il est devenu chaque année plus difficile de construire un budget en équilibre. Nous proposons donc une modification du plafond du taux applicable aux droits de mutation à titre onéreux, qui permettrait aux départements de bénéficier de ressources supplémentaires aujourd’hui nécessaires pour voter des budgets en équilibre.

Il est ainsi proposé d’augmenter de 30 % le taux maximal autorisé du régime de droit commun des droits de mutation à titre onéreux pour pallier les difficultés financières des départements. Les conseils généraux pourront donc relever le taux applicable aux droits de mutation à titre onéreux du régime général jusqu’à 4,94 %.

Une telle augmentation produirait une recette supplémentaire de l’ordre de 2,25 milliards d’euros, sur la base du montant des droits perçus en 2011 dans l’ensemble des départements.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. La commission a repoussé cet amendement pour de nombreuses raisons. Je n’en citerai que quelques-unes.

D’abord, vous l’avez dit, cet amendement pèse 2,25 milliards d’euros, ce qui est considérable. Vous proposez d’augmenter de 30 % le plafond des droits de mutation à titre onéreux, au moment où nous prenons des dispositions pour « fluidifier » – j’utilise à dessein un terme pudique – le marché immobilier, qui est pour le moins en panne. Il suffit pour s’en convaincre de regarder l’évolution du nombre d’opérations immobilières ou de prendre des informations auprès des études notariales. À cela il y a plusieurs raisons : la crise, bien sûr, mais aussi, disons-le clairement, le problème des plus-values des valeurs immobilières, qui ont bloqué et continuent de bloquer un certain nombre de transactions.

Le Gouvernement a donc proposé un abattement supplémentaire de 20 % sur ces plus-values, que la commission a adopté, pour provoquer un choc de transactions immobilières et pour redonner un peu d’air au marché. Mais avec une augmentation brutale de 30 % du plafond des DMTO et une baisse de 50 % du nombre de transactions, je crains, mes chers collègues, que nous ne tuions l’assiette.

Je comprends, naturellement, l’inquiétude des départements, et j’ai conscience des difficultés auxquelles ils sont confrontés, en particulier pour l’année 2013. J’ai entendu les arguments de notre collègue, qui sont excellents, mais je crains, je le répète, qu’on ne tue l’assiette qui, il faut le dire, est déjà bien malade.

Tous les retours que nous avons sur le nombre de transactions et sur les rentrées des DMTO montrent qu’il y a actuellement un effondrement du marché immobilier : le ministre dispose certainement, sur ce sujet, d’informations plus précises que les nôtres et il nous les donnera peut-être. Cela ne veut cependant pas dire que les prix s’effondrent ; mais le nombre de transactions, lui, diminue fortement, ce qui, d’ailleurs, peut contribuer à faire monter les prix. En tous les cas, l’assiette des DMTO est en diminution, voire en très forte diminution ; l’idée d’augmenter leur taux me paraît donc contre-productive et elle va à l’encontre de l’objectif que nous poursuivons légitimement.

Vous ciblez un certain nombre de départements d’Île-de-France, mais je crois que beaucoup de nos départements rencontrent le même type de problèmes, et cela à cause d’un certain nombre de réformes qui n’ont par porté leurs fruits, c’est le moins qu’on puisse dire.

L’avis de la commission est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. L’Assemblée a adopté en première lecture, avec les voix de la majorité gouvernementale, un amendement instituant un abattement de 20 % sur le prix des transactions.

La logique, pour 2013, est donc de créer un mini-choc d’offre, en diminuant le prix de ces transactions, de sorte que le marché – je reprends à mon compte l’expression du rapporteur général – soit fluidifié.

Or vous voulez, dans la deuxième partie du PLF, augmenter les droits de mutation à titre onéreux, avec un surcoût, pour les acteurs de transactions, de l’ordre de 2 milliards d’euros : prenons tout de même conscience de ce que cela représente ! Il me semble que si l’Assemblée vote cet amendement, elle prendra une décision incohérente, contraire à ce qu’elle a décidé dans la première partie du PLF.

J’appelle donc à un souci de cohérence entre la première et la deuxième partie : il faut veiller à ce que la partie relative aux recettes ne soit pas trop fortement remise en cause par des dispositions votées en deuxième partie.

Je vous appelle donc, mesdames et messieurs les députés, à rejeter cet amendement, d’abord parce qu’il est incompatible avec la politique menée par le Gouvernement en matière immobilière, et ensuite parce qu’il est incohérent avec les dispositions votées dans la première partie du PLF, que le Gouvernement vous avait d’ailleurs remerciés d’avoir bien voulu voter.

Avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Alain Muet.

M. Pierre-Alain Muet. Je veux aller dans le même sens que le Gouvernement. S’il y a une assiette qui n’est pas efficace du point de vue économique, c’est bien celle qui correspond à des transactions réelles. Il est bon d’appliquer une taxe sur les transactions financières, car cela empêche la spéculation ; mais, s’agissant des transactions réelles, cela aura pour principal effet de nuire à la fluidité du marché. Ce n’est donc pas, a priori, la meilleure manière d’obtenir des recettes.

Mme Marietta Karamanli. Madame la présidente, l’amendement est retiré.

(L'amendement n° 486 est retiré.)

M. Alexis Bachelay. Puis-je, madame la présidente, revenir à cet amendement ?

Mme la présidente. Non, monsieur Bachelay, il a été retiré.

Mme la présidente. La parole est à M. Paul Molac, pour soutenir l'amendement n° 370 rectifié.

M. Paul Molac. Cet amendement vise à instaurer une part de progressivité dans la taxe sur les certificats d’immatriculation, à partir du sixième cheval-vapeur. Une telle mesure permettrait d’augmenter les marges de manœuvre fiscales des régions et de la collectivité territoriale de Corse, alors que la réforme de la fiscalité locale sous la précédente législature s’est traduite par une quasi-extinction de l’autonomie fiscale des régions.

Plus encore qu’une faveur au budget des régions, il s’agit d’une mesure de justice sociale, puisque les voitures les plus puissantes sont évidemment celles des ménages les plus aisés. Ce sont aussi les voitures qui consomment et polluent le plus. Il y a donc un double effet, qui permettra aux régions de mettre cet aspect en lumière.

Cette mesure n’aura aucun effet sur le budget de Bercy, puisqu’elle concerne les régions. Elle aura un caractère facultatif : les régions ne seront pas obligées de l’appliquer. La région Bretagne avait souhaité la mettre en place à un moment, mais on avait rétorqué aux conseillers régionaux que la loi l’interdisait.

Cette mesure est bordée, et j’en profite pour signaler une erreur dans l’exposé sommaire : le tarif progressif est en effet limité à 2 euros par cheval-vapeur, et non pas 100. Cela permettra d’éviter les phénomènes d’opportunité.

L’exposé sommaire comprend un tableau sur la progressivité pour expliquer comment cela pourrait fonctionner. Voilà donc une mesure sans incidence sur le budget de l’État et qui est un petit clin d’œil pour rappeler que les voitures moins polluantes sont préférables.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. La délivrance des certificats d’immatriculation donne lieu à une taxe au profit des régions ou de la collectivité territoriale de Corse. Le montant, dont le taux unitaire par cheval-vapeur est arrêté chaque année par la collectivité, est proportionnel à la puissance du véhicule.

Certaines catégories bénéficient déjà de taux réduits : les véhicules utilitaires ou les véhicules de plus de dix ans. La région peut également voter des exonérations ou des abattements sur certaines catégories de véhicules, par exemple les véhicules électriques ou GPL.

Vous voulez en plus, monsieur Molac, introduire une progressivité du taux afin de pénaliser les véhicules les plus puissants et les plus polluants. C’est doublement problématique. D’une part, votre proposition ne comprend pas de dispositif de plafonnement, ce qui pourrait conduire, nous avons déjà assisté à ce genre de phénomène, à un dumping entre régions pour attirer les flottes de véhicules : ce n’est certainement pas votre intention. D’autre part, il nous semble que cette progressivité ferait doublon avec le bonus-malus existant qui est lui-même déjà destiné à pénaliser les véhicules polluants.

La commission invite donc l’Assemblée à repousser cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Monsieur le député, vous le savez, un bonus-malus a été adopté afin de sanctionner les véhicules auxquels vous faites allusion. Je ne crois pas qu’il faille en rajouter, comme votre amendement nous y invite.

Certes, ce n’est pas ce segment du marché automobile que le Gouvernement souhaite privilégier ; néanmoins il en fait partie. Vous n’ignorez pas qu’un plan de relance est en cours et vous savez dans quelles difficultés se trouvent certains de nos constructeurs. Je ne crois donc pas que votre amendement soit opportun, même si j’en comprends les raisons et si je sais l’utilité que les collectivités pourraient trouver à ces recettes supplémentaires.

Mais si l’on prend le recul suffisant, il apparaît que les dispositions déjà votées ont alourdi la fiscalité pesant sur ces modèles et que la politique industrielle globale du Gouvernement supporterait difficilement une mesure supplémentaire telle que celle que vous proposez.

Je vous engage donc à retirer votre amendement ; à défaut, je serais obligé d’appeler à le repousser.

Mme la présidente. La parole est à M. Paul Molac.

M. Paul Molac. Les arguments du ministre m’ont convaincu ; je retire l’amendement.

(L'amendement n° 370 rectifié est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l'amendement n° 313.

M. Denis Baupin. Cet amendement vise à clarifier la fiscalité sur l’implantation des éoliennes.

M. Lionel Tardy. Ça faisait longtemps !

M. Denis Baupin. Il n’est pas question de la réduire, mais de faire en sorte que les communes qui sont membres d’un EPCI et accueillent des éoliennes perçoivent bien le produit fiscal afférent, de façon à créer un dynamisme local et un effet incitatif pour les communes.

Il s’agit de s’assurer que la part rétrocédée à la commune est identique, qu’elles fassent partie d’un EPCI ou non.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Nous sommes dans une configuration inverse à celle des casinos et des hippodromes, puisque l’amendement nous propose de dessaisir l’EPCI pour concentrer les revenus sur la commune où est implantée l’éolienne.

Il me semble que cela va à l’encontre de l’idée que des EPCI puissent se doter de la compétence concernant la fiscalité sur les éoliennes. La commission n’a donc pas souhaité retenir cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à M. Denis Baupin.

M. Denis Baupin. Notre idée est de trouver un bon équilibre. Aujourd’hui, le niveau de rétrocession fixé à 20 % pour la commune est très peu incitatif. Peut-être pourrait-on trouver un moyen terme, mais je ne sens pas le Gouvernement prêt à discuter.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Je rappelle que, sur ce point comme sur les autres points que nous avons évoqués, il est toujours possible de s’en remettre à des dispositions conventionnelles pour obtenir des répartitions plus justes. Mais ce qui est juste vu d’ici n’est pas toujours perçu du même œil sur le territoire.

On peut aussi recourir à des fonds de concours, afin d’aboutir à des répartitions qui correspondent mieux aux contraintes ressenties dans les communes où sont implantées ces machines.

(L'amendement n° 313 n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 339 et 167.

La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l’amendement n° 339.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Depuis que la commission a adopté cet amendement, nous avons reçu le texte du collectif budgétaire, qui sera examiné dans les prochains jours, et il semblerait qu’il contienne des dispositions qui traitent du même sujet.

En l’absence des députés qui étaient à l’origine de cet amendement, ainsi que du président de la commission, je suis d’avis de le retirer afin de nous permettre de retravailler cette question dans la loi de finances rectificative, qui contient des dispositions de cette nature. Il serait curieux d’adopter des dispositions aujourd’hui pour y revenir dans une dizaine de jours.

(L'amendement n° 339 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Dussopt, rapporteur pour avis, pour défendre l’amendement n° 167.

M. Olivier Dussopt, rapporteur pour avis Cet amendement, identique à celui de la commission des finances, a été adopté par la commission des lois. Il vise à clarifier l’interprétation de la loi dans les cas d’entrée ou de retrait des intercommunalités.

Nous avons la volonté de stabiliser le dispositif et de travailler à plus de justice. Mais les objections du rapporteur général semblent fondées, et nous comprenons qu’il souhaite traiter la question dans le collectif. Au nom de la commission des lois, je retire donc l’amendement n° 167.

(L'amendement n° 167 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement n° 338.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Mon analyse est la même que pour l’amendement précédent. Il s’agit plutôt d’un sujet à traiter dans le collectif budgétaire.

En l’absence de nos collègues cosignataires, et au nom de la commission, je retire cet amendement.

(L'amendement n° 338 est retiré.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 337 et 89, l’un de la commission, l’autre de M. Lefebvre et plusieurs de ses collègues.

Monsieur Lefebvre, vous avez la parole pour soutenir ces amendements.

M. Dominique Lefebvre. Ils ont pour objet de mettre en œuvre une proposition de la mission commune d’information, présidée par Anne-Marie Escoffier, sur les conséquences pour les collectivités territoriales, l’État et les entreprises de la suppression de la taxe professionnelle.

Il s’agit d’indexer les tarifs de l’ensemble des IFER sur le taux de revalorisation des valeurs locatives. Cette proposition ne va pas à l’encontre de l’esprit de la réponse du ministre à propos de l’extension des IFER à d’autres réseaux. L’objectif est simplement de maintenir le pouvoir d’achat de ces ressources accordées aux collectivités en compensation de la suppression de la taxe professionnelle.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Les IFER sont de création relativement récente, il faut donc que ce dispositif se stabilise et s’organise. J’ai en mémoire certaines corrections déjà faites l’année dernière. Tout cela est complexe, et bien que la commission ait adopté cet amendement, il serait peut-être préférable, là encore, d’attendre le collectif budgétaire pour se prononcer. Le Gouvernement nous donnera son point de vue, mais il n’y a pas d’urgence, et nous pourrions admettre que le règlement de cette question soit repoussée de quelques jours.

Néanmoins, il ne m’est pas possible de donner un avis défavorable, puisque la commission a fait sien cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le rapporteur général a raison, cet outil est relativement récent. Faut-il le revaloriser globalement dès maintenant ? Le Gouvernement en doute, mais il est prêt à étudier dans le cadre du collectif budgétaire dans quelle mesure une revalorisation sélective de telle ou telle indemnité forfaitaire serait possible.

Au bénéfice de cet engagement à examiner une telle revalorisation de manière sélective, et non pas globale comme le propose l’amendement, je souhaiterais qu’il soit retiré.

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Lefebvre.

M. Dominique Lefebvre. Je vais donc retirer cet amendement, monsieur le ministre, ayant noté votre engagement d’étudier cette revalorisation de manière sélective.

Pour les collectivités, l’évolution des ressources obéit à une double dynamique : l’évolution de l’assiette et l’évolution du taux. En l’espèce, nous pouvons également étudier l’évolution des assiettes, puisque les réseaux ne sont pas figés. Dès lors que certaines assiettes connaîtraient une progression dynamique, la revalorisation forfaitaire serait moins justifiée et entraînerait une progression trop importante des impositions. En revanche, lorsque les assiettes sont figées, l’absence de coefficient de revalorisation conduirait à une érosion des ressources des collectivités.

(L’amendement n° 89 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Goasdoue, pour soutenir l’amendement n° 683.

M. Yves Goasdoue. Cet amendement vise à favoriser la mise en œuvre au 1er janvier 2013 de la loi de réforme des collectivités territoriales, qui a animé nos commissions départementales de coopération intercommunale, de manière d’ailleurs très différenciée selon les territoires. Dans ce cadre, nous avons souvent bien travaillé et sommes arrivés à un certain nombre d’accords qui étaient pourtant considérés comme quasiment impossibles. Le travail a porté ses fruits !

Dans de nombreux départements, nous constatons que les procédures de fusion présentent de vraies difficultés, en particulier lorsqu’il s’agit de rattacher une commune issue d’un EPCI à fiscalité additionnelle à un EPCI à fiscalité intégrée, notamment lorsque l’écart de taux est initialement très important.

Monsieur le ministre, je suis bien conscient que l’amendement que je propose est sans doute très imparfait techniquement. J’ai essayé de partir, comme cela se fait quelquefois, d’une disposition du code général des impôts pour vous proposer une solution plus souple, consistant à dispenser pour une année la taxe d’habitation du respect des règles habituelles de lien entre les taux. Cette solution nous éviterait de subir et d’appliquer en même temps les règles de convergence des taxes et le régime de convergence des taux, qui peuvent créer une inflation de la fiscalité locale importante. Il s’agirait d’étendre à la taxe d’habitation un dispositif déjà prévu pour la taxe foncière sur les propriétés non bâties, dès lors que le taux initial de la taxe est évidemment très inférieur au taux national constaté pour les collectivités du même ordre.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Dans un premier temps, la commission des finances n’avait pas retenu cet amendement. Cependant, nous avons débattu de questions relativement proches, y compris tout à l’heure à propos d’un autre amendement.

Vous évoquez le cas très particulier de l’absorption d’un EPCI à fiscalité additionnelle par un EPCI à fiscalité professionnelle unique. Vous souhaitez déroger, la première année suivant la fusion, aux règles de convergence des taux en cas d’écart important de ces taux par rapport à la moyenne nationale. Cette question est certes un peu technique – vous l’avez dit vous-même –, mais eu égard au caractère très limité de la dérogation que vous introduisez, je suis prêt à me laisser convaincre, bien que la commission n’ait pas retenu cet amendement. À titre personnel, j’y suis donc plutôt favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Cet amendement est assez technique, mais il répond à une véritable difficulté, que vous tentez de régler tout en limitant la dérogation dans le temps. Je suis sensible à cet effort.

Le rapporteur général ayant indiqué qu’il y était favorable à titre personnel, le Gouvernement donne son accord à l’adoption de cet amendement qui facilitera la vie d’un nombre non négligeable de communes. Monsieur Goasdoue, je vous remercie d’avoir pris cette initiative.

(L’amendement n° 683 est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Joaquim Pueyo, pour soutenir l’amendement n° 660.

M. Joaquim Pueyo. Je soutiendrai en même temps mes deux amendements nos 660 et 661 car ils poursuivent le même objectif.

Mme la présidente. Je vous en prie.

M. Joaquim Pueyo. Je commencerai par l’amendement n° 661, qui concerne l’intégration des communes dans un établissement public intercommunal. Afin de faciliter la mise en œuvre de la réforme de l’intercommunalité, l’article 99 de la loi du 28 décembre 2011 prévoit, dans le cas du rattachement d’une commune à un EPCI, une application progressive, par fractions égales, des taux d’imposition intercommunaux à cette commune. Cependant, la réalisation des schémas départementaux mise en œuvre par les préfets nécessite souvent le rattachement à un EPCI d’une, voire de plusieurs communes qui appartenaient déjà à un autre EPCI, et qui étaient déjà soumises de fait à des taux intercommunaux. Dans ce cas, la possibilité d’application progressive des taux de l’EPCI de rattachement ne devrait concerner que les écarts de taux entre l’établissement d’origine et l’établissement de rattachement : tel est mon avis, ainsi que celui du groupe SRC et des nombreux parlementaires qui ont signé cet amendement. C’est pourquoi, afin de mieux répartir les efforts des collectivités territoriales, il est proposé de compléter le III bis de l’article 1638 quater du code général des impôts par la phrase indiquée dans mon amendement n° 661.

Par exemple, lorsqu’une commune déjà assujettie par la communauté de communes d’origine à une taxe d’habitation de 6 % intègre une autre communauté de communes où le taux de la taxe d’habitation s’élève à 14 %, il existe un différentiel de taux de 8 points qu’il convient de lisser. Les directions locales des finances publiques préconisent de commencer à zéro l’application progressive du nouveau taux. Quant à nous, nous proposons de donner aux collectivités la possibilité, si elles en conviennent, de commencer l’application progressive du nouveau taux à 5 % voire 6 %.

L’amendement n° 660 a le même objet. Si l’on conserve l’obligation de réduction des écarts de taux par fractions égales et que la communauté de communes de rattachement souhaite commencer à 6 %, cela implique de réaliser l’effort en deux exercices : 6 % puis 12 %, ou 7 % puis 14 %. C’est pourquoi il est proposé de supprimer les mots « fractions égales » à la première phrase du III bis de l’article 1638 quater du code général des impôts.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Pour des raisons de calendrier, ils n’ont pas été examinés par la commission.

Monsieur Pueyo, quelques modifications rédactionnelles pourraient permettre l’aboutissement d’au moins un de vos amendements. Je ne veux pas m’exprimer à la place du Gouvernement mais, après discussion, je pense que nous pourrions peut-être réécrire vos amendements pour leur permettre une issue plus favorable. Écoutez les explications du Gouvernement : vous obtiendrez probablement satisfaction. Je ne reviens pas sur le fond : le principe de vos amendements, très techniques, est bon, seules quelques dispositions nécessitent peut-être d’être réécrites. Je sais qu’il y a urgence, mais le collectif arrivera très rapidement !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Vous l’avez vous-même signalé, monsieur Pueyo : l’amendement n° 660 présente des difficultés techniques que sa rédaction ne permet pas de lever complètement. Pour cette raison, je vous suggère de retirer au moins cet amendement.

Pour ce qui est de l’amendement n° 661, nous avons examiné la situation : il répond en effet à un vide juridique qu’il convient de combler. Mais je ne crois pas que la rédaction que vous avez retenue permette de répondre de manière satisfaisante à cet objectif. Je vous propose de régler cette question lors du collectif budgétaire qui sera discuté très prochainement, après que nous aurons pu travailler sur ce sujet ensemble de manière plus complète. Dès lors, il serait peut-être opportun de retirer également cet amendement pour envisager une issue favorable au cours des prochaines semaines. Il est essentiel que ce vide juridique soit comblé avant la fin de l’année : je m’y engage.

Mme la présidente. La parole est à M. Joaquim Pueyo.

M. Joaquim Pueyo. Monsieur le ministre, si la commission n’a pas pu examiner ces amendements, c’est parce qu’il y avait urgence. Je me suis rendu compte que l’intégration des communes dans des nouvelles communautés de communes causait beaucoup de difficultés. Il y a même eu un tollé général de nombreux maires pour qui il n’est pas question d’intégrer de nouveaux EPCI s’il n’est pas possible de lisser convenablement les taux. C’est en effet un effort considérable que l’on demande soit à la communauté de communes de rattachement, soit aux communes qui vont y être intégrées. C’est la raison pour laquelle j’ai déposé ces deux amendements, qui ont effectivement le même objet.

J’ai bien sûr confiance en votre promesse. Mais il y a urgence : les intégrations ou les fusions auront lieu au 1er janvier 2013, et nous avons effectivement intérêt à ce que cette loi s’applique le plus vite possible. Nous disposons donc d’un mois et demi à peine. Il faut absolument donner des garanties aux communes confrontées à des écarts de taux parfois considérables. Dans certains cas, les taux d’imposition peuvent passer de 5 à 15 %, soit un écart de dix points. Il n’est pas possible de réduire un tel écart en deux ans : il faut prévoir un lissage convenable. Tel est l’objet de mes amendements. Il y a urgence ! Si nous ne parvenons pas à trouver la bonne solution, nous risquons d’être confrontés à des blocages et à l’insatisfaction de nombreuses communes.

Mme la présidente. Mon cher collègue, maintenez-vous ou retirez-vous ces deux amendements ?

M. Joaquim Pueyo. J’étais prêt à maintenir le deuxième. Mais je prends acte de l’engagement de M. le ministre. Je demande donc à être associé à la rédaction d’un nouvel amendement, qui pourra être préparé par les services de Bercy.

(Les amendements nos 660 et 661 sont retirés.)

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Lefebvre, pour soutenir l’amendement n° 465.

M. Dominique Lefebvre. Cet amendement vise à simplifier les conditions de contrôle des comptes des établissements locaux d’enseignement. La loi n° 2011-1862 avait fixé au 1er janvier 2013 la date d’application du seuil de 3 millions d’euros pour l’apurement administratif des comptes de ces établissements. Cependant, du fait de la réforme des chambres régionales des comptes, des centres d’apurement ont été mis en place dans les DGFiP, avec un transfert des personnels précédemment affectés dans les chambres régionales des comptes avant leur réorganisation. Il semble donc que les services de la DGFiP puissent exercer ces missions dès aujourd’hui, ce qui va dans le sens d’un allègement dont le principe est inscrit dans la loi de 2011.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Monsieur Lefebvre, la commission n’a pas examiné votre amendement.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Oh si ! Je vous confirme que nous l’avons examiné !

M. Christian Eckert, rapporteur général. Pardonnez-moi : nous l’avons examiné. Il est temps que cette discussion se termine ! (Sourires.)

M. Dominique Lefebvre. Nous l’avons même adopté !

M. Christian Eckert, rapporteur général. Il s’agit d’avancer légèrement la date de mise en œuvre d’une disposition connue. Cet amendement ne pose pas de problème : il fait l’objet d’un consensus. La commission a donc émis un avis favorable.

(L’amendement n° 465, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Goldberg, pour soutenir l’amendement n° 387 rectifié.

M. Daniel Goldberg. Auparavant, madame la présidente, , permettez-moi de revenir quelques secondes à l’amendement n° 486, dont le rejet a provoqué quelque émoi tout à l’heure. Je me tourne vers M. le ministre. Si l’instrument recherché dans les DMTO pour trouver des solutions aux problèmes financiers et budgétaires des départements n’était pas le bon, et si l’amendement posait – comme l’a expliqué M. le rapporteur général – un certain nombre de questions, je pense qu’un geste du ministre avant la fin de cette discussion serait le bienvenu, pour confirmer que le Gouvernement prêtera attention à la situation particulière des départements en difficulté financière, peut-être dans le cadre du prochain collectif budgétaire. Sinon, nous serons un certain nombre à nous acheter des tentes dans certains commerces de proximité pour nous installer devant l’Assemblée nationale. Il serait bon que l’on puisse trouver des solutions concrètes.

L’amendement n° 387 rectifié vise à permettre aux communes d’exonérer, par délibération du conseil municipal, tout ou partie des logements sociaux financés en prêt locatif à usage social ou en prêt locatif aidé d'intégration de la participation pour le financement de l’assainissement collectif.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. La commission a rejeté votre amendement, mon cher collègue, parce qu’il introduit la possibilité d’exonérer, en partie seulement, certains logements sociaux seulement. C’est évidemment neutre pour l’État, je vous rassure, monsieur le ministre.

Il me semble que, là, on ferait vraiment dans la dentelle ! La participation pour l’assainissement est importante, mais ce n’est pas non plus essentiel. Distinguer les logements selon qu’ils sont financés en prêt locatif social ou non, c’est aller un peu loin dans le raffinement. Ou on exonère tous les logements sociaux, ou on ne les exonère pas. Pourquoi ceux-là plutôt que d’autres ? Cela me semble une distinction un peu excessive.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. L’avis du Gouvernement est également défavorable. La participation pour l’assainissement collectif étant affectée à un service public industriel et commercial, chaque usager paie à proportion du service rendu, sans possibilité d’exonération fondée sur la qualité de l’usager. Favoriser un propriétaire constituerait donc une inégalité devant les charges publiques.

Pour ces raisons de principe, il n’est pas possible d’accepter votre amendement, monsieur le député.

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Goua.

M. Marc Goua. J’ai entendu M. le rapporteur général affirmer que l’on ferait vraiment dans la dentelle. Or, aujourd’hui, nos concitoyens connaissent de graves difficultés, notamment ceux qui vivent dans des logements sociaux. Je rappelle que les aides à la construction de logements sociaux ont considérablement baissé et toute charge supplémentaire se retrouve dans le loyer. Par ailleurs, pourquoi l’exonération ne s’étendrait-elle pas aux PLS ? Parce qu’il s’agit pratiquement d’un financement de logements normaux du secteur marchand. En revanche, les PLAI et les PLUS s’adressent à nos citoyens les plus en difficulté.

(L’amendement n° 387 rectifié est adopté.)

Mme la présidente. Levez-vous le gage, monsieur le ministre délégué ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Je suis désolé, monsieur Goldberg, mais le Gouvernement demandera une seconde délibération sur cet amendement.

Mme la présidente. Le gage n’est donc pas levé.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy, pour soutenir l’amendement n° 652.

M. Jean-Pierre Blazy. Cet amendement est cosigné par Dominique Lefebvre. De même que le suivant – l’amendement n° 341 de la commission des finances, que M. Lefebvre a également cosigné –, il a pour objet d’améliorer le pouvoir de sanction dont dispose l’Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires, l’ACNUSA, à l’encontre des compagnies aériennes qui, la nuit, contreviennent à des dispositions réglementaires de limitation de trafic.

L’amendement n° 652 tend à faire en sorte que l’infraction commise par les transporteurs ayant leur siège hors de France soit sanctionnée réellement. Il s’agit donc de permettre que l’amende soit, de plein droit, mise à la charge conjointe et solidaire du fréteur, c’est-à-dire le propriétaire exploitant technique, et de l’affréteur, qui est l’exploitant commercial. Cette disposition améliorera le taux de recouvrement. Il n’est pas normal, en effet, que des compagnies ayant leur siège social à l’étranger échappent aux sanctions, alors que les exploitants commerciaux ont souvent une représentation en France.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Il s’agit effectivement d’organiser la poursuite solidaire de l’auteur de l’infraction et de l’affréteur. Or, selon nous, elle est déjà juridiquement possible, quoiqu’il n’y soit pas recouru en pratique. Telle est l’analyse des juristes qui ont examiné la question. La commission – j’en suis navré, mon cher collègue – n’a donc pas retenu l’amendement n° 652.

Ce n’est pas facile, certes, il faut notamment identifier l’affréteur, mais c’est déjà faisable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Cet amendement présente, à mon avis, deux défauts.

D’abord, il est inutile, car la poursuite solidaire est déjà possible, quoiqu’elle ne soit guère pratiquée.

Ensuite, c’est un cavalier. Si cet amendement était adopté, il serait immanquablement censuré car il n’affecte pas les finances publiques. Or, vous le savez, c’est là une condition obligatoire en loi de finances.

Pour ces deux raisons, monsieur le député, je ne vous cache pas que le Gouvernement vous serait reconnaissant de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, je serais obligé d’appeler à son rejet.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.

M. Jean-Pierre Blazy. J’argumenterai rapidement, mais il faudra quand même approfondir la question avec l’ACNUSA, qui demande au Gouvernement de renforcer son pouvoir de sanction.

Ce sont les agents de la direction générale de l’aviation civile qui sont chargés d’identifier les manquements et de dresser les procès-verbaux. Ceux-ci sont alors transmis à l’ACNUSA, dotée d’un pouvoir d’instruction et, le cas échéant, de sanction.

On ne peut pas dire, aujourd’hui, que le dispositif fonctionne bien. S’il existe une volonté de travailler sur le sujet au-delà de la présente discussion, je veux bien retirer cet amendement, mais le problème est réel et je voudrais qu’il soit sérieusement examiné. Je ne vois d’ailleurs pas en quoi il s’agit d’un cavalier. Il y a surtout un problème technique de mauvais fonctionnement de la direction générale de l’aviation civile. Finalement, des décisions prises par le pouvoir politique, par le ministère des transports ne sont pas mises en œuvre.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. J’entends ce que vous dites, monsieur Blazy, et vous avez évidemment raison de vouloir régler ce problème. On ne peut pas le faire avec l’amendement que vous avez déposé. Je vous ai suggéré de le retirer dès lors que cette réflexion serait engagée ; c’est ce que je vous promets. Je donne instruction à mes collaborateurs pour que ce que travail se fasse avec vous et qu’une solution puisse être présentée à l’Assemblée dans un véhicule législatif approprié.

Si, sur la foi de cet engagement, vous acceptiez de retirer votre amendement, je vous en serais très reconnaissant.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.

M. Jean-Pierre Blazy. Sur la foi de cet engagement, j’accepte de retirer cet amendement. Nous travaillerons donc à la question.

(L’amendement n° 652 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement n°341.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Je ne suis pas à l’origine de cet amendement mais, comme il a été retenu par la commission des finances, j’en suis l’un des signataires, et je vous le présente à ce titre.

Les plafonds des amendes infligées par l’ACNUSA sont de 1 500 euros pour une personne physique et de 20 000 euros pour une personne morale. L’amendement n° 341 a pour objet de relever sensiblement le plafond applicable aux personnes morales en cas de manquement aux restrictions permanentes ou temporaires d’usage de certains types d’avions en fonction de leurs émissions atmosphériques polluantes ou de leur classification acoustique ou d’inobservation des mesures de restriction des vols de nuits. Dans ces deux cas, le plafond de ces amendes, pour qu’elles soient très dissuasives, serait porté à 40 000 euros.

D’après la DGAC, la dissuasion a déjà porté ses fruits, et le montant des amendes est déjà relativement élevé, mais on pourrait attendre de meilleurs résultats avec des amendes encore majorées.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Je ne suis pas le meilleur spécialiste qui soit en cette matière, mais il m’est expliqué qu’avec une amende de 20 000 euros le vol voit son bénéfice réduit à néant. Si c’est vrai, doubler l’amende ne changera rien. Si c’est faux, cela sera immanquablement dissuasif.

Comme toujours lorsqu’il est impossible au Gouvernement de faire une proposition claire à l’Assemblée, il s’en remet à la sagesse de celle-ci, dont il ne doute pas qu’elle s’exercera pleinement.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.

M. Jean-Pierre Blazy. Je remercie M. le rapporteur général de soutenir cet amendement.

Monsieur le ministre, l’ACNUSA a été créée il y a treize ans. On sait bien, aujourd’hui, que les règles fixées ne sont pas toujours respectées. Comme je l’ai indiqué, il faut tout d’abord que les manquements soient constatés par les fonctionnaires de la DGAC. Or le nombre de manquements constatés et transmis à l’ACNUSA est d’environ 400 par an. Ce n’est pas dissuasif, car les compagnies arbitrent systématiquement, contrairement à ce que vous croyez ou à ce qu’on vous dit, monsieur le ministre, en faveur du paiement de l’amende plutôt que pour le respect des règles.

Cet amendement n’a pas pour objet de remplir les caisses de Bercy. Il vise plutôt à ce que les compagnies se comportent de manière vertueuse, afin que le droit au sommeil partiel des riverains de nos grands aéroports soit quand même respecté.

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Lefebvre.

M. Dominique Lefebvre. Je soutiens M. Blazy, qui vient de dire quels problèmes posaient ces amendes insuffisamment dissuasives. En grande couronne, notamment dans le Val-d’Oise, on a des problèmes de transport, mais aussi de nuisances aériennes.

Le ministre chargé des transports, M. Cuvillier, s’est exprimé récemment à ce sujet dans l’hémicycle et le débat va se poursuivre. Actuellement, il y a des règles et des amendes sont infligées lorsqu’elles ne sont pas respectées. Le constat que l’on fait sur le terrain, c’est que certaines compagnies ignorent systématiquement ces règles et préfèrent payer une amende. Cela nuit considérablement à la qualité de vie de nos concitoyens.

C’est pourquoi nous proposons le doublement des amendes ; ce sera plus dissuasif. Peut-être les compagnies aériennes continueront-elles à les payer mais l’adoption de cet amendement témoignera de notre volonté de régler ce problème de nuisances aériennes, en particulier pour les vols de nuit.

(L’amendement n° 341 est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Goua, pour soutenir l’amendement n° 389.

M. Marc Goua. La taxe d’aménagement du territoire est en vigueur depuis le 1er mars 2012. Les collectivités territoriales peuvent en exonérer les logements sociaux.

Dans le même esprit que précédemment, nous souhaitons donner une certaine souplesse à la fiscalité de l’urbanisme en offrant aux collectivités la possibilité d’exonérer de manière différenciée les différents types de logements sociaux. Il serait en effet utile de traiter différemment ceux financés par des prêts locatifs sociaux et ceux financés par des prêts locatifs à usage social ou des prêts locatifs aidés d’intégration. Les PLAI sont destinés à la population la plus en difficulté alors que les PLS sont quasiment dans le secteur marchand. Cela irait plutôt dans le bon sens pour les finances publiques.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. L’amendement n° 389 a un double objet.

Premièrement, il étend à la taxe d’aménagement la possibilité dont nous avons discuté tout à l’heure concernant la participation pour l’assainissement en différenciant l’exonération de taxe d’aménagement selon le type de logements sociaux considéré : PLS, PLUS ou PLAI. J’ai dit tout à l’heure mon opposition à une telle différenciation, qui ne me semble pas intéressante.

Deuxièmement, l’amendement propose d’exonérer les parkings de taxe d’aménagement, et plus particulièrement, si j’ai bien compris, les parkings souterrains.

La commission des finances a émis un avis défavorable sur le premier point. M. le président Carrez présentera dans un instant un autre amendement au sujet des parkings souterrains, qu’il affectionne particulièrement. (Sourires.)

Si cet amendement n’était pas retiré, j’émettrais un avis défavorable.

Mme la présidente. Le maintenez-vous, monsieur Goua ?

M. Marc Goua. Au vu des explications de M. le rapporteur, nous retirons cet amendement.

(L’amendement n° 389 est retiré.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 268 de M. Carrez, qui a la parole pour le soutenir.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Monsieur le ministre, l’amendement n° 268 ne coûte rien au budget de l’État puisqu’il concerne uniquement les collectivités territoriales. Lorsque la taxe d’aménagement a remplacé la taxe locale d’équipement, l’assiette a été modifiée. La taxe locale d’équipement n’était assise que sur la surface hors œuvre nette, c’est-à-dire grosso modo la surface constructible, alors que la taxe d’aménagement englobe également les aires de stationnement souterraines. Autrement dit, quand on construit un immeuble, la taxe d’aménagement frappe aussi le parking souterrain attenant.

Or ces places de stationnement représentent une surface de plus en plus importante, du fait de l’apparition de nouvelles contraintes. Les communes incluent notamment dans leurs plans d’occupation des sols, à juste titre, une exigence importante de construction de places de parking souterraines afin de dégager les voies publiques en surface. L’assujettissement à la taxe a pour conséquence un renchérissement vraiment trop important du coût de construction.

Le Président de la République s’est fixé pour objectif de construire 500 000 logements par an. Si l’on veut atteindre cet objectif, il faut s’efforcer par tous les moyens d’alléger les coûts de construction. De là vient cet amendement, qui consiste à exclure de l’assiette de la taxe d’aménagement les parkings souterrains.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. La commission a été sensible aux arguments de son président et a approuvé l’amendement de notre collègue Gilles Carrez. (Sourires.)

Au vrai, on peut s’interroger sur la différence de traitement par la taxe d’aménagement des parkings aériens et des parkings souterrains. Certes, comme vous l’avez dit, mon cher collègue, cela concerne plus la fiscalité locale que le budget de l’État. Pour ma part, je rends compte des travaux de la commission des finances, qui a accepté votre amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. J’ai bien entendu les arguments de Gilles Carrez ainsi que ceux de M. le rapporteur général. Le coût de la mesure est incontestable : j’en veux pour preuve que votre amendement est gagé par un relèvement des droits sur le tabac. Je vous propose donc, monsieur le président de la commission des finances, de laisser le Gouvernement étudier quel serait le coût réel de cette disposition pour les collectivités locales. Nous examinerons les résultats de cette expertise ensemble, et si ce coût est raisonnable, nous reprendrons votre proposition dans un collectif budgétaire : elle sera alors adoptée de manière consensuelle.

Au bénéfice de cet engagement, acceptez donc, si vous le voulez bien, de retirer cet amendement.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Je le retire.

(L’amendement n° 268 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir l’amendement n° 655.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Merci, madame la présidente. Il s’agit de proroger jusqu’en 2023 la durée de perception du droit de timbre de 150 euros dû par les parties à l’instance d’appel. Le Gouvernement s’engage, devant la représentation nationale, à lui rendre compte en 2023 du bilan de cette disposition. Nous nous en souviendrons tous, et je suis certain que vous saurez me rappeler cet engagement. (Sourires.)

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Je serai vigilant et ne manquerai pas de rappeler à ses devoirs et à ses engagements le ministre du budget. (Sourires.) L’avis de la commission est favorable.

(L’amendement n° 655 est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 342 rectifié de la commission, qui fait l’objet d’un sous-amendement n° 753 du Gouvernement.

C’est à vous de défendre l’amendement, monsieur le rapporteur général…

M. Christian Eckert, rapporteur général. Je suis comme un vieux tracteur, vous savez : c’est dur le matin, et c’est dur aussi le soir. (Sourires.)

Cet amendement est cosigné par notre collègue François Cornut-Gentille et moi-même. M. Cornut-Gentille m’a demandé de le présenter en notre nom commun. Pourquoi cela ? Nous avons réalisé l’an dernier, pour le comité d’évaluation et de contrôle, un rapport sur la RGPP. Un rapport de suivi sur cette question devrait sortir dans les prochains jours : il est quasiment prêt. Ces derniers mois, dans le cadre de nos travaux sur ce rapport de suivi, nous avons procédé à de nombreuses auditions. Je dois avoir l’honnêteté de dire que François Cornut-Gentille s’en est occupé beaucoup plus que moi-même.

Le Gouvernement s’est engagé dans ce qu’il appelle la MAP, c’est-à-dire la modernisation de l’action publique, qui rompt avec la conception de la RGPP qui prévalait antérieurement. Il nous a semblé qu’associer le Parlement à la modernisation de l’action publique et aux réformes conséquentes est plus qu’utile : nécessaire. L’ignorance du Parlement a été un des travers de la RGPP. Si la RGPP a été un échec marqué, si ses ambitions n’ont pas été partagées, c’est parce que cette politique a été menée dans l’ignorance complète du Parlement. C’est en tout cas un point sur lequel nous nous sommes accordés, car vous aurez remarqué que François Cornut-Gentille et moi-même ne sommes pas du même bord politique.

Associer le Parlement à la modernisation de l’action publique est un facteur de réussite. Ce n’est pas le seul : il convient également d’associer les usagers et les personnels. Il faut de plus que le Gouvernement s’organise : c’est le rôle du comité interministériel de modernisation de l’action publique, ou CIMAP, et du secrétariat général pour la modernisation de l’action publique, le SGMAP. Nous avons évoqué cette question hier au cours de la discussion des crédits budgétaires : la direction générale de la modernisation de l’État est désormais rattachée aux crédits du Premier Ministre.

Cet amendement vise donc à formaliser la nécessaire information réciproque entre le Gouvernement et le Parlement, afin de mener des échanges constructifs pour un travail conjoint. Le Gouvernement conduira bien sûr les actions comme il l’entend. Toutefois, y associer plus étroitement le Parlement permettra à ces réformes complexes et difficiles de bénéficier d’une plus large assise politique. Nos prédécesseurs ont éprouvé la difficulté de la réforme de l’action publique : s’ils y avaient associé le Parlement, peut-être y aurait-il eu moins de problèmes.

Tel est l’objet de cet amendement, monsieur le ministre. Nous en avons d’ailleurs parlé avec Mme la ministre de la réforme de l’État, Marylise Lebranchu, qui est aussi chargée de ces questions. Je crois que l’adoption de cet amendement serait un signe assez fort de revalorisation de la relation entre le Gouvernement et le Parlement sur les questions relatives à la modernisation de l’action publique.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre, pour défendre le sous-amendement n° 753.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Ce sous-amendement vise à préciser les modalités d’information du Parlement par le comité interministériel pour la modernisation de l’action publique. Après la MAP, le CIMAP ! Chaque trimestre, le Gouvernement transmettra au Parlement les éléments utiles concernant la modernisation de l’action publique : évaluations réalisées, décisions prises, état d’avancement des réformes décidées, etc. Sous réserve de l’adoption de ce sous-amendement, monsieur le rapporteur général, le Gouvernement est favorable à l’adoption de l’amendement n° 342 rectifié.

Madame la présidente, le Gouvernement demande une suspension de séance de quinze minutes après le vote sur cet amendement, afin de préparer la deuxième délibération. Je vous remercie de votre compréhension.

(Le sous-amendement n° 753 est adopté.)

(L’amendement n° 342 rectifié, sous-amendé, est adopté.)

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures quarante-cinq, est reprise à dix-huit heures cinq.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Après l’article 59 (suite)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Lamour, pour soutenir l’amendement n° 372.

M. Jean-François Lamour. Cet amendement a trait à un problème qui reste douloureux pour nombre de nos concitoyens, je veux parler des rapatriés d’Afrique du Nord. Comme vous le savez, la loi du 23 février 2005 avait fort justement permis d’ouvrir un droit à réparation aux rapatriés spoliés de leurs biens. Tout s’est d’ailleurs passé plutôt correctement, puisqu’il avait été prévu que les rapatriés spoliés pouvaient déposer leur dossier jusqu’au 28 mai 2007, délai qui fut repoussé au 31 décembre 2008 pour ceux qui n’avaient pas eu l’information à temps.

Il se trouve, monsieur le ministre, qu’un certain nombre de rapatriés qui se trouvent dans des situations extrêmement difficiles dues à des problèmes de santé ou même à l’amertume n’ont pas été informés très précisément de ce droit à réparation. Ils n’ont, en conséquence, pas pu déposer à temps leur demande d’indemnisation. J’ai d’ailleurs à votre disposition, si vous le souhaitez, plusieurs de ces dossiers.

Il est hors de question d’ouvrir, aujourd’hui, une nouvelle ligne. Je propose donc que le Gouvernement remette avant le 31 décembre 2012 un rapport au Parlement. Toutefois, comme vous m’avez fait remarquer, il y a peu de temps, que le délai prévu n’était pas suffisant, n’hésitez pas à sous-amender et je serai tout à fait d’accord pour que ce rapport soit rendu le 30 juin 2013 ! Vos services pourraient ainsi dresser la liste de celles et ceux qui ont fait la demande après le 31 décembre 2008. Il n’y a pas ici matière à polémiquer, mais cela permettrait, vous en conviendrez, de satisfaire tous ceux dont les biens ont été spoliés ou leurs ayants droit, qui pourraient ainsi être indemnisés au titre de l’article 12 de la loi de 2005.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Vous proposez, monsieur Lamour, d’ouvrir un nouveau délai alors que ce droit à indemnisation n’existe plus depuis quatre ans. Vous avez vous-même précisé dans l’exposé des motifs de votre amendement qu’un premier délai fixé à la date du 28 mai 2007 avait été repoussé à la fin de l’année 2008. Je pense donc franchement qu’il n’y a pas lieu de rouvrir ce dossier. On peut certes imaginer qu’il existe encore quelques cas difficiles, mais on risque de ne plus s’en sortir.

Je ne peux donc qu’émettre un avis défavorable à votre amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Vous avez raison, monsieur le député, on ne peut prévoir un rapport dicté par une loi dont la date de promulgation est postérieure à celle de la remise supposée dudit rapport.

Sur le fond, les droits sont forclos depuis le 31 décembre 2008 : cela fait maintenant quatre ans. À cette date, 50 millions d’euros ont été versés. On peut penser que la nation s’est désormais acquittée d’une forme de dette, même si c’est avec un grand retard et beaucoup d’hésitations. Elle a vraisemblablement été très coupable, de par son attitude, à l’égard de nos compatriotes rapatriés d’Afrique du Nord. S’est-elle acquittée totalement de sa dette ? Je crains que non. Les indemnisations pécuniaires suffiront-elles, le cas échéant, à s’acquitter de cette dette ? Je crains également que non. Mais, avec tout le respect que l’on doit à nos compatriotes rapatriés ou à leurs descendants, il faut savoir clore un chapitre, même si cela s’est fait dans les conditions extraordinairement douloureuses que l’on connaît. Cela n’enlève rien à la compassion que l’on peut avoir à leur égard et, naturellement, au respect qu’on leur doit.

Donc, le Gouvernement est défavorable à votre amendement.

M. Jean-François Lamour. Je le retire.

(L’amendement n° 372 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Dolez, pour soutenir l’amendement n° 563.

M. Marc Dolez. Comme je l’ai indiqué lors de la discussion de l’article 56, si le plafonnement des réductions fiscales est la manière la plus simple de dégager des ressources, cela ne nous exonère pas du travail de toilettage de l’impôt sur le revenu. Il conviendrait, en effet, de réduire le nombre de niches en évaluant, au préalable, la pertinence économique et sociale des dispositifs mis en place au fil des ans, et en particulier dans la dernière période.

C’est à ce travail qu’invite l’amendement n° 563. Nous proposons que le Gouvernement remette au Parlement un plan de révision des niches fiscales, éventuellement sur la durée du quinquennat, visant à simplifier l’impôt sur le revenu et à en améliorer la lisibilité.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Ce sujet est bien sûr important, mon cher collègue. Je vous rappelle néanmoins qu’un rapport de plusieurs milliers de pages a été réalisé par le comité d’évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales en octobre 2011. Il est prévu qu’il soit mis à jour tous les six mois. Je pense qu’il n’est pas nécessaire de recommencer ce long travail à si courte échéance. À la lumière des débats de ces dernières heures, on ne peut que constater que la réforme des niches fiscales s’appréhende parfois niche par niche. J’évoquerai les niches dites « outre-mer » dont nous avons longuement parlé durant cette discussion budgétaire qui touche à sa fin. D’autres réflexions sont en cours sur l’épargne longue. Dominique Lefebvre et Karine Berger sont chargés d’une mission à ce titre. Nous disposons là de quoi informer le Parlement pour qu’il puisse prendre à bon escient des décisions. Un rapport de plus me semble inutile.

Je suis donc défavorable à votre amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement émet également un avis défavorable, non qu’il ne souhaite pas que tous soient informés de la réalité de la dépense fiscale, bien au contraire, mais les rapports existent déjà qui permettent cette information. Je citerai d’abord le rapport prévu par l’article 12 de la loi de programmation des finances publiques du 9 février 2009. Toutes les dépenses fiscales et les niches fiscales existantes ont ainsi fait l’objet d’une évaluation de leur efficacité et de leur efficience, évaluation qui est portée, bien évidemment, à la connaissance de l’ensemble des parlementaires. L’article 17 du projet de loi de programmation pour 2012-2017 prévoit aussi un dispositif d’évaluation permanente des dépenses fiscales et des niches sociales dont les résultats seront transmis au Parlement. Il me semble, par conséquent, que la transparence existe en la matière. Un rapport de plus, je le crains, n’apporterait pas grand-chose.

Le Gouvernement a, au demeurant, la volonté de réviser l’ensemble des niches fiscales, soit pour les maintenir en les assumant, soit pour les réformer si cela s’avère nécessaire, soit, enfin, pour les supprimer s’il estime que leur coût excède, et de très loin, le bénéfice que l’on est en droit d’en attendre.

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Dolez.

M. Marc Dolez. Vous avez bien compris, monsieur le ministre, que nous ne demandions pas un rapport d’évaluation de plus, puisqu’il en existe effectivement déjà un certain nombre. Cet amendement a surtout pour objet de demander au Gouvernement de mettre en œuvre un plan de révision des niches sur la durée du quinquennat. C’est la raison pour laquelle je le maintiens.

(L’amendement n° 563 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Nous avons terminé l’examen des articles non rattachés à des missions.

Articles de récapitulation

Mme la présidente. Nous abordons maintenant l’examen des articles de récapitulation, tels qu’ils résultent des votes intervenus en seconde partie du projet de loi de finances pour 2013.

Les articles 46 à 49 ne faisant l’objet d’aucun amendement, je vais les mettre aux voix successivement.

Article 46 et état B

(L’article 46 et l’état B sont adoptés.)

Article 47 et état C

(L’article 47 et l’état C sont adoptés.)

Article 48 et état D

(L’article 48 et l’état D sont adoptés.)

Article 49 et état E

(L’article 49 et l’état E sont adoptés.)

Article 50

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement n° 724.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Cet amendement a pour objet de tirer les conséquences sur le plafond des autorisations d’emplois de l’État, d’une part, du transfert des emplois de la direction générale de la modernisation de l’État du ministère de l’économie et des finances vers les services du Premier ministre et, d’autre part, de l’ajustement du transfert des services de navigation de l’État à l’établissement public Voies navigables de France.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Favorable. L’exposé sommaire est très clair.

(L’amendement n° 724 est adopté.)

(L’article 50, amendé, est adopté.)

Article 51

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir l’amendement n° 725.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Cet amendement tire les conséquences, sur le plafond d’emplois des opérateurs, de l’ajustement du transfert des services de navigation de l’État à l’établissement public VNF. Le montant du transfert a été ajusté par l’amendement qui vient d’être adopté. Par coordination avec ce mouvement de crédits, le présent amendement propose de majorer le plafond d’emplois de VNF.

(L’amendement n° 725, accepté par la commission, est adopté.)

(L’article 51, amendé, est adopté.)

Articles 52 et 53

(L’article 52 est adopté.)

(L’article 53 est adopté.)

Article 54

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement n° 726.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. L’article 15 de la loi organique relative aux lois de finances prévoit que les crédits de paiement disponibles sur les différents programmes budgétaires peuvent être reportés d’une année sur l’autre dans la limite de 3 % des crédits initiaux. Pour s’écarter de ce plafond, une disposition de loi de finances est nécessaire.

L’article 54 du projet de loi de finances pour 2013 établit une liste de huit programmes ainsi déplafonnés. Le présent amendement propose, au regard des dernières données de l’exécution du budget 2012 de l’État, d’ajouter neuf programmes à cette liste, qui concernent par exemple la presse, l’entretien des bâtiments de l’État, le patrimoine, le logement ou la jeunesse et la vie associative.

(L’amendement n° 726, accepté par la commission, est adopté.)

(L’article 54, amendé, est adopté.)

Mme la présidente. Nous avons achevé l’examen des articles de récapitulation.

Seconde délibération

Mme la présidente. En application de l’article 119, alinéa 6, du règlement, le Gouvernement demande qu’il soit procédé à une seconde délibération de l’article 46 et de l’état B, de l’article 48 et de l’état D, de l’article 55 bis et de l’article 59 octies de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2013 et, pour coordination, de l’article 45 et de l’état A.

La seconde délibération est de droit.

Je rappelle que le rejet des amendements vaut confirmation de la décision prise en première délibération.

La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Mesdames, messieurs les députés, je souhaite vous présenter les amendements de seconde délibération dans leur intégralité et je vous précise que le Gouvernement ne souhaite pas recourir à un vote bloqué.

Cette seconde délibération a plusieurs objets.

En premier lieu, le Gouvernement souhaite abonder de 90 millions d’euros deux des missions relevant du ministère de l’intérieur afin de ne pas affecter les investissements en matière de systèmes d’information et de communication des services de police et de gendarmerie. En effet, un audit vient de conclure que la valorisation des fréquences hertziennes du ministère de l’intérieur ne générera des recettes sur le compte d’affectation spéciale existant à cet effet qu’au-delà de l’année 2013.

Le Gouvernement souhaite par ailleurs revenir sur quatre amendements, ce qui est très peu par rapport à ces cinq dernières années.

Premièrement, l’amendement n° 447, qui, bien qu’ayant reçu un avis favorable de la commission des finances, n’a pas été adopté. En effet, le transfert des moyens de la direction générale de la modernisation de l’État vers les services du Premier ministre n’a été réalisée que partiellement en première délibération, avec la majoration des crédits de la mission « Direction de l’action du gouvernement ». Il convient désormais, en toute logique, de réduire à due concurrence les crédits de la mission « Gestion des finances publiques », car la DGME n’y sera plus rattachée.

Deuxièmement, l’amendement n° 379, qui ne comportait pas de crédits de paiement. Cet amendement majorait seulement les autorisations d’engagement de la mission « Travail et emploi », au titre d’une compensation de prime d’apprentissage à Mayotte.

Troisièmement, l’amendement n° 440 relatif aux conditions d’octroi de taux majorés pour le crédit d’impôt « développement durable ». Le Gouvernement est convaincu, Fleur Pellerin l’a expliqué et je l’en remercie, que l’incitation fiscale ne pourra fonctionner, en opportunité comme techniquement, que si les travaux d’amélioration de la performance énergétique se font dans un délai rapide, soit un an au lieu de deux.

Enfin l’amendement n° 387 rectifié, qui n’a pas reçu le soutien du Gouvernement. En effet, la participation pour assainissement collectif étant affectée à un service public industriel et commercial, chaque usager paie à proportion des services rendus sans possibilité d’exonération fondée sur la qualité de l’usager. Favoriser certains propriétaires, alors même qu’ils bénéficient des services d’assainissement, constituerait donc une inégalité devant les charges publiques.

Il est également nécessaire de tirer les conséquences de vos votes : sur le compte d’affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », car l’amendement n° 778 a modifié la part des amendes de radars automatiques reversée aux collectivités territoriales et au désendettement de l’État et il convient, par coordination, d’ajuster les crédits de ce compte d’affectation ; sur le plafond des emplois de l’État, dans le cadre de transferts affectant le ministère de l’écologie, car, par coordination avec l’amendement n° 724, il est nécessaire d’ajuster ce plafond légèrement à la baisse.

Cette seconde délibération propose enfin d’abonder à hauteur de 89,5 millions d’euros les crédits de diverses missions, afin de répondre favorablement aux propositions de la commission des finances.

Le Gouvernement entend assurer le respect de la norme de dépense dite « zéro valeur », qui consiste à stabiliser nominalement le champ de dépenses correspondant au budget général et aux prélèvements sur recettes hors dette et pensions. Il propose donc à la représentation nationale de gager les ouvertures nouvelles de crédits votées en seconde partie du projet de loi de finances, ainsi que la hausse des prélèvements sur recettes découlant des discussions de la première partie, de deux manières.

Il est prévu, d’une part, de mobiliser environ 97 millions d’euros de crédits de la mission « Provisions ». Je vous précise que ce gage couvre, à titre transitoire, la hausse de 25 millions d’euros de la dotation de développement urbain en faveur des communes les plus défavorisées issue de l’amendement n° 721. Ce gage sera modifié ultérieurement au cours du débat, afin de le faire porter, au sein des concours de l’État aux collectivités territoriales, sur le chapitre précisément concerné par ce type d’opérations. La stabilisation de ces concours sera ainsi assurée en 2013, comme le Gouvernement s’y est engagé.

Il est prévu, d’autre part, de procéder à un prélèvement différencié sur les principales missions du budget général, pour environ 144 millions d’euros, les missions « Culture », « Travail et emploi » et « Régimes sociaux et de retraite » étant exemptées de ce prélèvement.

À l’issue de l’ensemble de ces mouvements de crédits, le déficit budgétaire prévisionnel de l’État demeurerait inchangé. Il avait été amélioré de 398 millions d’euros au terme de l’examen de la première partie du projet de loi de finances.

Je tiens à cet égard à saluer le travail accompli au sein de votre assemblée au cours de l’examen du projet de loi de finances. Ce travail commun a permis de contribuer à la fois à remettre la justice au cœur de notre système fiscal, à lancer la mise en œuvre des priorités du quinquennat et à réaffirmer notre objectif de maîtrise de la dépense publique, puisque la norme « zéro valeur » est respectée.

Permettez-moi enfin de remercier l’ensemble des parlementaires qui ont participé à la discussion de cette seconde partie. Je remercie plus particulièrement, on le comprendra, les parlementaires de la majorité, qui ont soutenu les politiques défendues par le Gouvernement. Je vous remercie, madame la présidente, ainsi que vos collègues qui ont présidé ces débats, et je remercie, c’est la tradition mais c’est bien sincère, le service de la séance, sans lequel personne ne pourrait travailler, notamment pas le Gouvernement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur l’ensemble de ces amendements ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Je suis évidemment favorable à l’adoption de ces amendements.

Permettez-moi à mon tour de remercier tous ceux qui ont contribué au bon déroulement de cette longue discussion, qui n’est d’ailleurs qu’une étape puisqu’il y en aura d’autres d’ici à la fin de l’année.

Je remercie moi aussi l’ensemble des services, particulièrement ceux du rapporteur général, dont le personnel a été réactif et assidu, dans des délais parfois contraints. L’équipe du ministre avait également des délais contraints. Nous avons tenté de nourrir des échanges réguliers, et cela s’est bien passé.

Je remercie tous les parlementaires. Il n’y a pas eu de moments de très forte tension dans l’hémicycle, même si les débats ont été francs et parfois passionnés, ce qui est normal. Après la CMP qui ne manquera pas d’avoir lieu, j’imagine, s’annonce le projet de loi de finances rectificative. Il a été présenté hier et nos travaux en commission démarrent la semaine prochaine. Nous pourrons peut-être souffler un peu à Noël !

Je remercie bien sûr le ministre pour sa présence et son écoute. Nous devons avoir conscience qu’il en fait beaucoup plus que nous puisqu’il va au Sénat…

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. C’est vrai !

M. Christian Eckert, rapporteur général. …et qu’il intervient très souvent sur la loi de financement de la sécurité sociale. Nous sommes quelques-uns à avoir suivi les travaux depuis le début, il en fait à peu près trois fois plus que nous, ce qui est tout de même une belle performance, sans s’énerver et en étant toujours attentif aux suggestions. Après, chacun joue sa partie, c’est le propre de la démocratie.

Mme la présidente. Monsieur le ministre, avant de mettre aux voix ces amendements un par un puisque vous n’avez pas souhaité de vote bloqué, ce qui est tout à votre honneur, je me permets de vous remercier au nom de mes collègues vice-présidents et, je crois pouvoir le faire, des services de la séance, d’avoir eu la gentillesse de reconnaître notre travail.

Article 46 et état B

(Les amendements nos 1 à 28 sont successivement adoptés.)

(L’article 46 et l’état B, amendés, sont adoptés.)

Article 48 et état D

(L’amendement n° 29 est adopté.)

(L’article 48 et l’état D, amendé, sont adoptés.)

Article 55 bis

Mme la présidente. L’amendement n° 33 tend à supprimer l’article 55 bis.

(L’amendement n° 33 est adopté et l’article 55 bis est supprimé.)

Article 59 octies

Mme la présidente. L’amendement n° 34 tend à supprimer l’article 59 octies.

(L’amendement n° 34 est adopté et l’article 59 octies est supprimé.)

Article 45 et état A
(pour coordination)

(L’amendement n° 30 est adopté.)

(L’article 45, amendé, et l’état A sont adoptés.)

Mme la présidente. Nous avons achevé l’examen du projet de loi de finances pour 2013.

Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que les explications de vote et le vote, par scrutin public, sur l’ensemble du projet de loi de finances pour 2013, auraient lieu le mardi 20 novembre après les questions au gouvernement.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Madame la présidente, un dernier mot. Je regrette que nous ne soyons pas parvenus à régler la très délicate question du financement de l’action sociale par les départements. L’amendement que le Gouvernement a dû refuser était excessif par les recettes qu’il générait – plus de 2 milliards d’euros –, et il aurait été déraisonnable de l’accepter. Je comprends les motivations de ses auteurs, qui souhaitent permettre aux départements de mener des politiques dont nous savons qu’elles sont obligatoires. Il faudra trouver une solution, car certaines collectivités souffrent terriblement de l’effet de ciseaux dû aux dépenses obligatoires nouvelles des départements et à la diminution concomitante des recettes. La solution devra être trouvée dans le cadre du projet de loi de décentralisation. Il n’était pas possible pour le Gouvernement d’anticiper cette réforme, surtout avec un financement de l’ampleur proposée. À défaut d’avoir gagné votre entière adhésion à cette vision des choses, j’espère au moins pouvoir compter sur votre compréhension.

Enfin, on l’aura remarqué, tout le monde a été remercié sauf le rapporteur général. Je me permets donc de le faire, au nom du Gouvernement. Je pense que les députés s’associeront à ces remerciements. (Applaudissements.)

Je remercie également le président de la commission des finances (Nouveaux applaudissements), dont le précieux concours m’a parfois permis de convaincre les parlementaires de l’opposition de la pertinence des politiques que nous proposons. Après dix années de soutien au Gouvernement, il lui faut peut-être un peu de temps pour réaliser que les choses ont changé au sein de cet hémicycle… (Sourires.) Toute ironie mise à part, je retrouve dans cette attitude celle qui, sous la précédente législature, nous a conduits, Gilles Carrez et moi-même, à soutenir ensemble certaines positions pour faire prévaloir l’intérêt général sur des considérations partisanes ne permettant pas de trouver des solutions adaptées. Monsieur le président, je vous remercie sincèrement et sans ironie, croyez-le bien, des propos que vous avez pu tenir pour éclairer les choix du Gouvernement.

Madame la présidente, je m’en serais voulu de ne pas répondre sur la question des départements et, surtout, de donner l’impression que le rapporteur général, dont on connaît le rôle essentiel, aurait été oublié dans nos remerciements collectifs.

Mme la présidente. Merci, monsieur le ministre. À mon tour, je salue l’efficacité et l’endurance du rapporteur général.

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Régulation économique outre-mer

Commission mixte paritaire

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la discussion, sur le rapport de la commission mixte paritaire, du projet de loi relatif à la régulation économique outre-mer et portant diverses dispositions relatives à l’outre-mer (n° 334).

Présentation

Mme la présidente. La parole est à Mme Ericka Bareigts, rapporteure de la commission mixte paritaire.

Mme Ericka Bareigts, rapporteure de la commission mixte paritaire. Madame la présidente, monsieur le ministre des outre-mer, monsieur le président de la commission des affaires économiques, chers collègues, j’ai l’honneur de vous présenter le texte du projet de loi relatif à la régulation économique outre-mer issu des travaux de la commission mixte paritaire.

Nous avons, je dois le dire, travaillé en bonne intelligence avec le Sénat, et respecté les initiatives de chaque assemblée. Le projet de loi qui vous est présenté aujourd’hui est un texte équilibré, nécessaire à l’essor économique de nos outre-mer et à l’amélioration de la qualité de vie de nos concitoyens ultramarins, trop longtemps oubliés des grandes politiques nationales.

Dois-je rappeler qu’outre-mer, la moitié de notre population vit avec des ressources inférieures au seuil de pauvreté national, alors que seuls – et c’est évidemment toujours trop – 24 % de la population hexagonale souffre de cette situation ? Comment comprendre que, parallèlement, le niveau moyen des prix dans les outre-mer est supérieur de 6 à 13 %, et de 34 à 49 % pour les seuls produits alimentaires ? Concrètement, cela signifie qu’avec des revenus inférieurs, nos familles doivent payer plus cher pour se nourrir et nourrir leurs enfants. C’est une grande inégalité que la République, par cette loi, a décidé de combattre.

Nos concitoyens ont poussé un cri d’alarme en 2009, afin de dénoncer une situation devenue insupportable, et ressentie comme inéluctable. Au-delà des événements médiatisés qui ont frappé les Antilles, mais aussi la Guyane, Mayotte et La Réunion, c’est l’ensemble de nos territoires qui sont secoués par des revendications sociales fortes depuis 2009. Ce projet de loi arrive donc à point nommé et va courageusement faire évoluer des situations figées depuis trop longtemps.

Les « trente engagements pour les outre-mer » du candidat François Hollande ont témoigné de sa ferme volonté d’inscrire durablement les collectivités ultramarines dans la République, loin des stigmatisations et des préjugés dont celles-ci souffrent trop souvent. Il y a deux jours, le chef de l’État a d’ailleurs clairement réaffirmé sa considération, son intérêt et sa compréhension pour les outre-mer. Comme beaucoup de nos concitoyens, monsieur le ministre, je m’en réjouis.

Ainsi, ce projet de loi est animé d’une volonté de changement. Il ne s’agit pas, une énième fois, d’en rester aux soins palliatifs, comme le faisait la LODEOM, loi pour le développement économique des outre-mer. Porteuse d’espoir à l’époque, cette loi présentait des solutions bricolées dans l’urgence, qui n’ont pas eu les effets escomptés. Aujourd’hui, nos concitoyens ultramarins attendent des solutions efficaces et pérennes.

Nos territoires sont caractérisés par des handicaps structurels bien connus, qui ont été rappelés tout au long des débats : éloignement, insularité, étroitesse des marchés. Tous ces facteurs ont servi à justifier aux yeux de certains la nécessité de concentrer les activités économiques, rendant inéluctable le phénomène de la vie chère et grevant par là même l’essor de nos territoires.

Le diagnostic est connu, nous l’avons tous rappelé : les outre-mer souffrent d’un déficit de concurrence. La représentation nationale doit les accompagner dans le cadre de réformes structurelles plutôt qu’en apportant des remèdes complexes et ponctuels. Ce projet de loi opère donc un changement profond. Il abandonne les ressorts habituels de l’action publique, centrés sur l’encadrement systématique des prix, au profit d’outils novateurs permettant de modifier les processus de formation des prix. En somme, on privilégie désormais l’amont par rapport à l’aval.

Il ne s’agit pas de détailler à nouveau l’ensemble des dispositions du projet, qui ont fait l’objet de débats nourris, tant en commission qu’en séance. Ce projet de loi agit sur l’environnement concurrentiel qui conduit à la formation des prix et sur le fonctionnement des marchés. La régulation des marchés de gros, l’accroissement des compétences de l’Autorité de la concurrence dans le cadre d’une procédure d’injonction structurelle et le bouclier qualité-prix sont des dispositifs essentiels dont notre assemblée a déjà longuement débattu. Je n’évoquerai donc que trois évolutions apportées par le Parlement, notamment en CMP.

Premièrement, l’Assemblée nationale a décidé de renforcer le rôle des observatoires des prix et des revenus, dorénavant appelés observatoires des prix, des marges et des revenus. Ces structures, placées sous la présidence d’un magistrat de la chambre régionale des comptes, associent toutes les parties, notamment des représentants de l’État, des collectivités, du monde économique et social, et, à l’initiative de l’Assemblée, des associations de consommateurs. Les observatoires des prix, des marges et des revenus constituent le lieu pertinent pour échanger et réguler l’activité économique de manière informelle. Par ailleurs, dans le cadre du dispositif du bouclier qualité-prix, ils devront émettre un avis préalable à la négociation menée par le préfet.

Je me félicite du renforcement de ces observatoires, mais je ne peux qu’attirer votre attention, monsieur le ministre, sur la nécessité de conforter les moyens financiers et humains à leur disposition. Au cours de mes auditions, j’ai pu me rendre compte de la diversité des situations selon les territoires et des inquiétudes de certains présidents d’observatoire face à l’absence de moyens.

Deuxièmement, la commission mixte paritaire a souhaité encadrer les tarifs bancaires outre-mer, souvent en décalage complet avec les pratiques constatées dans l’hexagone. Ainsi, les établissements de crédit ne pourront pratiquer des tarifs supérieurs à la moyenne de ceux que les établissements ou les caisses régionales du groupe auquel ils appartiennent pratiquent dans l’hexagone. Par ailleurs, le nouvel article 6 ter A prévoit l’organisation d’une réunion de concertation annuelle sous l’égide du préfet et de l’Institut d’émission des départements d’outre-mer.

Troisièmement, la CMP a tenu à doter les administrations fiscales et douanières, ainsi que le juge, de nouveaux pouvoirs leur permettant d’obtenir des opérateurs économiques assujettis à l’octroi de mer tous éléments utiles permettant d’établir la répercussion effective d’une baisse de cet octroi sur les prix. Trop souvent, les collectivités abaissent les niveaux de taxation sans constater d’effet sur les prix. Le Gouvernement a souhaité aller plus loin au Sénat, et je ne peux que soutenir cette initiative.

Finalement, le Gouvernement déploie une démarche cohérente à destination des outre-mer, qui ne se limite pas à ce projet de loi. La semaine dernière, vous avez ainsi signé à La Réunion, monsieur le ministre, les premiers contrats des emplois d’avenir outre-mer, et je m’en réjouis.

En guise de conclusion, je tiens à remercier l’ensemble de nos collègues, ultramarins et hexagonaux, qui ont participé à l’élaboration de ce projet de loi tant attendu par nos concitoyens. Il s’agit d’une initiative courageuse, que vous portez, monsieur le ministre, avec force et détermination. Vous avez su organiser une large concertation avec tous les acteurs. C’est un gage de réussite, et je vous en remercie vivement.

Le changement est particulièrement attendu par la jeunesse de nos territoires, qui a repris espoir depuis nos derniers rendez-vous électoraux. Nous ne devons pas la décevoir. À l’égard des oppositions, car il y en a toujours, sachez que nous ferons face collectivement, de manière courageuse et responsable, car les attentes sont grandes et légitimes. (Applaudissements.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre des outre-mer.

M. Victorin Lurel, ministre des outre-mer. Madame la présidente, monsieur le président de la commission des affaires économiques, madame la rapporteure, mesdames et messieurs les députés, ce n’est pas sans une certaine émotion que je prends la parole devant vous aujourd’hui. Nous sommes ici pour achever un travail entamé en juillet dernier, lorsque nous avons lancé l’élaboration du projet de loi de régulation économique dans les outre-mer. Vous allez discuter les conclusions issues des travaux de la commission mixte paritaire, mettant ainsi un terme à ce qui fut tout à la fois une course de fond et un sprint.

Une course de fond car, de l’avant-projet au texte final, il y en aura eu des réunions, des audiences, des discussions, puis des débats parlementaires et des amendements qui ont, reconnaissons-le, profondément modifié le texte, toujours en l’améliorant. Oui, ce fut, pour ainsi dire, une longue marche, mais c’est en définitive une belle œuvre collective.

Ce fut aussi, paradoxalement, un sprint. Car moins de six mois pour élaborer un texte, le discuter puis le voter, je le rappelle, sans opposition au Sénat, puis à l’Assemblée nationale, c’est tout de même très rapide. Je tiens à en remercier le Président de la République et le Premier ministre, qui ont inscrit ce projet de loi parmi les textes prioritaires de ce début de législature. Je tiens aussi à remercier l’ensemble des députés et sénateurs qui ont permis cette célérité.

Avoir fait vite n’a pas empêché de produire un travail de très grande qualité. Si les sénateurs ont considérablement contribué à sécuriser les articles qui figuraient au cœur du projet de loi initial, les députés ont, quant à eux, grandement et fort utilement enrichi le texte avec des dispositions importantes sur les frais bancaires, mais aussi sur la répétition de l’indu, le seuil d’urbanisme commercial, la lutte renforcée contre les marges arrières, ou encore la place de la production locale.

Le texte qui résulte de la CMP est, en définitive, mieux assuré dans sa sécurité juridique, mieux équilibré et plus respectueux des intérêts des uns et des autres.

En revanche, il me semble que sur quelques points, le projet de loi peut être encore davantage explicité, et c’est pourquoi le Gouvernement a déposé quatre amendements au texte adopté en CMP.

Trois d’entre eux sont purement rédactionnels : le premier, à l’article 5 bis A, vise à remplacer le mot : « elle », par le mot : « il ». Un second, à l’article 11 bis, tend à sécuriser juridiquement la conclusion éventuelle d’une convention avec la chambre consulaire interprofessionnelle de Saint-Martin ou avec la chambre économique multiprofessionnelle de Saint-Barthélemy car une telle convention ne viserait que le TGI de Basse-Terre, compétent pour la Guadeloupe, Saint-Barthélemy et Saint-Martin, produisant ainsi ses effets non seulement en Guadeloupe mais aussi dans les deux autres collectivités alors que les dispositions actuelles de l’article 11 bis ne mentionnent que les « départements d’outre-mer ». Un troisième amendement rédactionnel, à l’article 11 sexies, vient corriger deux erreurs de plume.

Le quatrième amendement vise, lui, à compléter les dispositions de l’article 6 quater adoptées en CMP. En effet, ces dispositions ne permettent pas d’appréhender complètement le problème posé en outre-mer dès lors que, d’une part, seul l’octroi de mer est visé alors qu’il pourrait être envisagé une action sur d’autres outils de la politique fiscale, et que, d’autre part, seuls quatre départements d’outre-mer sont visés alors que la thématique du niveau des prix de détail est tout aussi aiguë dans le département de Mayotte ou dans les trois collectivités d’outre-mer de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon. Cet amendement précise en outre sur quels opérateurs porterait l’obligation prévue à l’article 6 quater, en l’occurrence ceux bénéficiant directement de la baisse de la fiscalité, mais aussi les intermédiaires entre ces bénéficiaires directs et le consommateur final, qui bénéficient indirectement de la baisse de la fiscalité. Il est enfin proposé d’encadrer strictement les conditions dans lesquelles l’obligation prévue à l’article 6 quater pourrait être mise à la charge des opérateurs économiques, en l’occurrence une baisse de la fiscalité décidée aux fins de lutter contre la hausse ou le niveau des prix de détail. Je tiens à souligner que cet amendement n’a ni pour objet ni pour effet d’inverser la charge de la preuve au détriment des opérateurs économiques, mais qu’il se borne à prévoir l’obligation, pour ceux-ci, de fournir les pièces qui leur sont demandées.

Somme toute, comme je l’ai dit au Sénat, c’est un texte équilibré, fidèle en tout point aux intentions de départ du Gouvernement, enrichi par les travaux parlementaires, qui est soumis à votre approbation, que j’espère aussi unanime que celle qui a prévalu en première lecture. Plus que jamais, il s’agit d’un texte volontariste et innovant qui cherche à favoriser la concurrence dans des économies de petite taille, éloignées des grands pôles d’activités, où l’on constate des prix anormalement élevés pour de nombreux biens et services. Il donne à l’État, et plus largement aux pouvoirs publics, une véritable capacité d’intervention sur le fonctionnement et sur les structures même de l’économie. Cette loi est une traduction concrète de ce que peut être une politique de régulation économique au service de l’intérêt général.

Un important travail reste cependant devant nous. Car ce texte n’est pas un aboutissement, mais bien un point de départ à partir duquel nous aurons, tous, à nous mobiliser afin d’utiliser les outils qu’il met à notre disposition.

Première disposition qui aura à trouver sa traduction concrète : le bouclier qualité-prix. Le décret le mettant en œuvre est finalisé. Il sera très rapidement soumis pour avis aux collectivités. Dès lors les négociations pourront commencer dans chaque territoire sous l’égide des préfets dans le cadre des observatoires de prix, des revenus et des marges. Ainsi, le bouclier qualité-prix pourra entrer en vigueur début 2013.

Dans la foulée, nous ouvrirons les dossiers sectoriels afin de commencer le travail de régulation que permettra désormais la loi. Le secteur du carburant et celui du fret seront les premiers à être examinés.

Enfin, c’est l’occasion pour moi de mettre un terme à une polémique assez inutile qui a été engagée sur les tarifs bancaires au motif que cette loi provoquerait je ne sais quelle hausse. Je rappelle que l’harmonisation des tarifs sur la moyenne pratiquée dans l’Hexagone est un tarif plafond et que si, par bonheur, il devait y avoir des tarifs inférieurs dans les territoires, ils n’ont pas vocation à être portés au niveau de cette moyenne. Il s’agit bien d’un plafond à ne pas dépasser.

Au moment où j’achève mon propos, je veux remercier très chaleureusement le président de votre commission des affaires économiques, François Brottes, ici présent, ainsi que Bernard Lesterlin, présent lui aussi, rapporteur pour avis de la commission des lois, remercier tout particulièrement et très chaleureusement Ericka Bareigts, qui a excellemment joué son rôle de rapporteure au fond, avec sagesse et détermination, remercier enfin tous les députés concernés, qui ont fait un excellent ouvrage, sans oublier les administrateurs de la commission des lois et de la commission des affaires économiques pour leur travail, remarquable de bout en bout. Ensemble, nous avons tracé un cadre, nous avons créé des outils. À nous de nous en saisir pour traduire sans délai en actes les nécessaires changements bénéfiques pour le plus grand nombre et pour le développement de nos économies.

Les outre-mer ont repris espoir et nous avons à cœur de ne pas les décevoir. (Applaudissements.)

Discussion générale

Mme la présidente. Dans la discussion générale, la parole est à M. Boinali Said.

M. Boinali Said. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, c’est une première dans l’histoire des outre-mer qu’une loi s’en prenne aux monopoles et aux oligopoles en remédiant aux dysfonctionnements des marchés de gros, des biens et des services, mais aussi en interdisant toute forme d’accord exclusif d’importation. Je constate que de nouvelles mesures sont prises pour faire face aux coûts des frets, parfois excessifs. Cela aura probablement des répercussions sur le prix final de vente. Il est évident que pour les usagers, la régulation du marché de gros favorisera une baisse des prix des produits de première nécessité. Je remarque également que les consommateurs seront davantage informés sur les tarifs des produits grâce à un tableau d’affichage. Ils pourront ainsi mieux constater par eux-mêmes les abus éventuels de certaines entreprises dans la fixation des prix.

De telles dispositions tiennent donc compte de la protection et des intérêts des consommateurs, dans la transparence. Elles contribueront à lutter contre des mesures frauduleuses qui sont l’apanage de certains, et renforceront la vigilance de nos concitoyens contre tout système de « profitation », pour reprendre le terme célèbre utilisé aux Antilles françaises.

Il est important de souligner que le renforcement des compétences de l’observatoire des prix assurera une meilleure transparence des coûts, surtout grâce à la diffusion des comptes sociaux.

Je note que le texte permettra aux organisations professionnelles du secteur du commerce de négocier chaque année avec le représentant de l’État un accord sur les prix des produits. Je regrette toutefois que les syndicats, et de manière générale la société civile, ne puissent pas y participer. Cela aurait davantage légitimé les décisions qui seraient prises.

Ce projet de loi est très demandé par nos populations, dont les attentes sont nombreuses, surtout chez celles qui subissent de plein fouet la cherté de la vie. En effet, cette dernière est un cercle vicieux qui ne permet plus à certaines familles de vivre dignement et décemment, sans se soucier des lendemains. Elle porte atteinte à l’éducation de nos jeunes qui ne disposent pas toujours des équipements nécessaires pour réussir dans leurs études. Elle constitue une plaie pour nos sociétés ultramarines, minées par un chômage excessif bien supérieur à la moyenne nationale car les monopoles détruisent toute forme d’emploi qui résulte d’une concurrence. Enfin, la vie chère est aussi une des conséquences des échanges exclusifs des anciennes colonies, devenues des collectivités territoriales, avec l’Hexagone, qui ne leur a pas permis d’accroître leurs relations commerciales avec les pays de leur environnement géographique.

Malgré ces remarques, je relève des avancées dans ce texte.

Ainsi, les produits locaux pourront être vendus dans les grandes surfaces. J’espère que cela stimulera la production locale, notamment agricole.

J’observe aussi que le projet de loi garantira que les services bancaires ne pratiqueront des tarifs supérieurs à la moyenne des établissements auxquels ils appartiennent dans l’Hexagone.

Par ailleurs, les collectivités territoriales pourront saisir l’Autorité de la concurrence, et le Gouvernement pourra réglementer, après avis public de l’Autorité de la concurrence et par décret en Conseil d’État, le prix de vente des produits de première nécessité.

Il s’agit là encore de mesures nouvelles qui permettront à nos économies de mieux se développer et d’améliorer les conditions de vie de nos populations.

J’espère que d’autres dispositions législatives promouvront le développement local des collectivités ultramarines en modernisant leur agriculture, en accroissant leurs investissements dans des productions locales grâce aux financements d’une banque publique d’investissement, et en augmentant leurs logements sociaux, notamment pour le locatif intermédiaire. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, UDI et RRDP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Gibbes.

M. Daniel Gibbes. Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la rapporteure, monsieur le président de la commission des affaires économiques, mes chers collègues, nous arrivons au terme de l’examen du projet de loi relatif à la régulation économique outre-mer et portant diverses dispositions relatives à l’outre-mer. Après son adoption par le Sénat, puis par l’Assemblée nationale, une commission mixte paritaire s’est réunie le 25 octobre dernier pour s’accorder sur une rédaction consensuelle des dispositions restant en discussion. Le Sénat a validé le texte issu de la CMP la semaine dernière, le 7 novembre, et c’est donc aujourd’hui à notre assemblée de se prononcer. Je vous le dis d’emblée : comme lors des votes en commission, et en séance publique le 10 octobre dernier, les députés du groupe UMP s’abstiendront.

Le projet de loi a pour objectif de faire baisser les prix dans les territoires ultramarins par une régulation accrue de la concurrence. Je l’ai dit pendant nos débats : en tant qu’élu ultramarin, je veux voir dans ce texte une extension cohérente des dispositifs mis en place par la majorité précédente après la crise sociale qui a bouleversé nos territoires d’outre-mer en 2009. La lutte contre la vie chère est donc un objectif qui fait consensus. Le groupe UMP en général, l’élu de la circonscription de Saint-Barthélemy et Saint-Martin en particulier, sommes parfaitement conscients des difficultés et des multiples problématiques auxquelles sont confrontées nos populations et nos entreprises outre-mer. Reste que la majorité des solutions apportées par ce projet de loi ne nous paraissent ni très appropriées, ni très utiles.

En effet, et je l’ai souligné durant nos débats, un diagnostic aussi précis qu’exhaustif des problématiques spécifiques à chacun de nos territoires ultramarins a pu être établi sous la précédente législature, et de nombreuses mesures ont déjà été mises en place. II conviendrait tout d’abord, assez logiquement, de dresser un véritable bilan de ces mesures, ensuite, le cas échéant, d’envisager d’apporter des ajustements. Ce serait tout le rôle de la délégation aux outre-mer de l’Assemblée nationale, créée en septembre dernier. Permettez-moi d’ailleurs de m’interroger, monsieur le ministre, sur la place que vous souhaitez réellement réserver à cette délégation dès lors que vous ne lui laissez pas le temps de travailler les dossiers et que vous imposez un texte clés en main sans concertation préalable.

Je ferme cette petite parenthèse.

M. Éric Jalton. C’est l’UMP qui veut que l’on aille vite !

M. Daniel Gibbes. Il serait faux autant qu’injuste de prétendre que nous n’avons rien fait sous la mandature précédente pour nos territoires d’outre-mer.

M. Éric Jalton. Presque rien !

M. Daniel Gibbes. La loi du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer, la LODEOM, avait pour objectif de créer les conditions du développement économique outre-mer en privilégiant la compétitivité des entreprises, notamment dans leur environnement régional.

Entre mars et juillet 2009, après la crise sans précédent traversée par nos territoires, se sont tenus les États généraux de l’outre-mer, qui ont associé tous les acteurs ultramarins et ont permis d’élaborer une véritable feuille de route. Le Conseil interministériel de l’outre-mer du 6 novembre 2009 a ainsi arrêté 137 mesures concrètes et opérationnelles, dans tous les domaines.

La problématique de la baisse des prix et de la transparence des circuits de distribution a constitué un axe de réflexion majeur de ces États généraux et a donné lieu à des mesures concrètes dont je vous donnerai trois exemples. L’Autorité de la concurrence a été dotée de pouvoirs renforcés lors des opérations de rachat de supermarchés ou d’hypermarchés. Le seuil de notification des opérations de concentration pour le secteur du commerce de détail a été abaissé de 15 millions d’euros à 7,5 millions d’euros, en application de l’article 41 de la loi du 23 juillet 2010 relative aux réseaux consulaires, au commerce, à l’artisanat et aux services. Des groupes d’intervention régionaux « concurrence » ont été créés dès 2010 dans chaque territoire d’outre-mer pour veiller au respect des règles de concurrence.

Certes, les dispositifs créés hier et leur application sont sans doute loin d’être parfaits, mais ils sont perfectibles et ils existent. Ils méritaient sans aucun doute d’être complétés par une législation plus ambitieuse encore, j’en conviens, et ce ne sont pas mes collègues ultramarins ici présents qui me contrediront sur ce point.

M. Serge Letchimy. Bien sûr !

M. Daniel Gibbes. Pardonnez-moi, monsieur le ministre, mais le projet de loi que vous nous avez présenté manque quelque peu d’ambition. Même si, à titre personnel encore une fois, l’élu de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin que je suis (Exclamations sur les bancs du groupe UDI) ne peut que se réjouir de l’avancée que représente, par exemple, l’obtention par convention de la gestion matérielle du registre du commerce et des sociétés par les chambres de commerce et d’industrie locales.

M. Éric Jalton. Un autre exemple !

M. Daniel Gibbes. Force est de constater que l’examen de votre texte par le Parlement n’a pas permis de combler ses lacunes.

Au travers de ce texte, nous souhaitons aussi mettre en garde sur la mise en place d’une économie suradministrée. Certes, il faut faire des contrôles et réguler les marchés pour éviter les abus,…

M. Éric Jalton. C’est mieux que le laissez-faire !

M. Daniel Gibbes. …mais il faut également veiller à ne pas réduire à néant les principes de liberté du commerce et d’entreprendre.

Les articles 5 et 6 bis notamment donnent un important pouvoir à l’État et à l’Autorité de la concurrence pour sanctionner les entreprises et contrôler les prix. Dans les faits, c’est une nouvelle situation qui est prohibée : non plus celle de pratiquer des prix et des marges abusifs mais tout simplement élevés.

Améliorer la situation des territoires d’outre-mer ne se limite pas à la régulation économique et au contrôle des prix.

M. Éric Jalton. Il faut un début !

M. Daniel Gibbes. D’autres pans de l’économie méritent une action appropriée : aider les PME à exporter et à conquérir de nouveaux marchés ; mettre des moyens et plancher sur la question fondamentale de l’intégration économique régionale de nos territoires d’outre-mer ; valoriser les filières de production locale, notamment l’agriculture et l’aquaculture. Que fait le Gouvernement pour tenir compte des spécificités de l’outre-mer dans la réforme de la politique agricole commune ?

M. Éric Jalton. Qu’avez-vous fait naguère ?

M. Daniel Gibbes. Il s’agit aussi de valoriser les espaces naturels et la biodiversité, ce qui permettrait par exemple de répondre à une nouvelle demande en matière de tourisme, celle du tourisme environnemental, plus responsable. L’économie en outre-mer, c’est aussi le tourisme, monsieur Jalton.

M. Éric Jalton. Ah oui ?

M. Daniel Gibbes. Nous aurions donc pu avoir un texte plus global sur les outre-mer. Au lieu de cela, nous avons un projet de loi qui a été examiné en procédure accélérée – vous avez parlé de sprint, monsieur le ministre – et qui prive le Parlement d’une seconde lecture qui aurait pu apporter de nécessaires améliorations.

Nous le regrettons d’autant plus que le Gouvernement présente aujourd’hui quatre amendements pour corriger le texte avant qu’il ne soit trop tard.

M. Serge Letchimy. Ce sont des amendements rédactionnels pour trois d’entre eux !

M. Daniel Gibbes. Effectivement. Les députés du groupe UMP ne comprennent pas très bien la logique qui vous guide.

M. Éric Jalton. Cela nous rassure !

M. Daniel Gibbes. Néanmoins, nous considérons que tout ce qui peut être mis en œuvre pour améliorer la condition de nos outre-mer doit être reçu avec le plus attentif des accueils par notre assemblée, au regard de la situation exceptionnelle de nos territoires. Voilà pourquoi, je le répète, le groupe UMP s’abstiendra. Cette abstention, monsieur le ministre, se veut le symbole d’une opposition constructive sur les problématiques des outre-mer. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI.)

M. Éric Jalton. C’était bien vers la fin !

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Gomes.

M. Philippe Gomes. Monsieur le ministre, nous arrivons au terme d’un parcours qui a été quasiment un parcours du combattant durant lequel vous avez su avec célérité et dextérité franchir tous les obstacles. Nous vous félicitons donc pour le travail que vous avez accompli avec l’ensemble de vos collaborateurs et nous vous remercions pour la capacité d’écoute dont vous avez témoigné tout au long des débats.

Le texte que nous examinons prévoit de nouveaux moyens d’action : le pouvoir d’injonction structurel de l’Autorité de la concurrence, l’interdiction des accords d’exclusivité, la négociation annuelle dans les mains du représentant de l’État visant à modérer les prix.

Pour ma part, cher Daniel Gibbes, j’adore les contrôles et ce texte prévoit diverses mesures pour les renforcer : abaissement du seuil de concentration à 5 millions d’euros ; possibilité donnée aux collectivités locales de saisir l’Autorité de la concurrence pour lutter contre des pratiques anticoncurrentielles ; contrôle des autorisations d’exploitation commerciales dès lors qu’une entreprise ou un groupe dépasse le seuil de 50 % de surfaces de vente dans une zone de chalandise ; création d’un observatoire pour surveiller l’évolution des marges, des prix et des revenus.

Sur ce point, monsieur le ministre, je crains que les 50 000 malheureux euros prévus au budget de l’outre-mer ne permettent pas de contrôler grand-chose. Je souhaiterais donc que, derrière cet article formidable et cette ambition considérable, se trouvent les moyens financiers nécessaires pour que cet observatoire soit digne de ce nom et pour que, dans un an, nous ne constations pas que les études demandées n’ont pu être effectuées faute de moyens, comme il est arrivé dans le passé. Il serait vraiment dommage que n’ayons pas les moyens d’évaluer les résultats de cette loi sur le terrain.

Même si 80 % des articles de cette loi ne s’appliquent pas à la Nouvelle-Calédonie, elle y serait très pertinente. En octobre 2012, l’INSEE a publié une étude sur le niveau des prix en Nouvelle-Calédonie, comparé à ceux de métropole et de l’ensemble de l’outre-mer. Et nous ne sommes pas déçus du résultat !

Lors des dernières réunions j’avais cité l’indice Big Mac que j’étais, semble-t-il, seul à connaître, et j’espère avoir contribué à le populariser. Selon cet indice, la Nouvelle-Calédonie était le cinquième pays le plus cher de la planète, juste devant la Polynésie.

Pour sa part, l’INSEE a relevé les prix de divers produits et services : logement, produits alimentaires, transports, etc. Il en ressort qu’en Nouvelle-Calédonie les prix sont 48 % plus élevés qu’en métropole ; ce taux atteint 51 % en Polynésie, 20 % en Guyane et 13 % à La Réunion. Les écarts de prix sont significatifs outre-mer d’une façon générale, mais plus particulièrement dans le Pacifique où nous sommes véritablement les détenteurs du pompon.

En prenant les seuls produits alimentaires, nous avons encore la grande chance d’arriver devant tout le monde. Une ménagère – de moins de cinquante ans (Sourires) – qui irait faire ses courses en Nouvelle-Calédonie paierait le même panier 90 % plus cher qu’en métropole ! À titre indicatif, ce taux se situe à 75 % pour la Polynésie française, à 50 % pour la Guyane et à 35 % pour la Guadeloupe. Pour les produits alimentaires, on voit aussi à quel point les écarts sont significatifs et à quel point les mesures de votre projet de loi – qui vont, je l’espère, être adoptée par l’Assemblée nationale – étaient indispensables.

Pour la Nouvelle-Calédonie, il est aussi indispensable d’adopter le projet que porte le mouvement politique auquel j’appartiens : une loi antitrust qui reprenne le droit sur la concentration en métropole et qui l’enrichisse par les dispositions que vous nous avez proposées, monsieur le ministre, dans le cadre du texte que nous avons examiné.

Il faut qu’une telle loi soit adoptée par le Congrès de la Nouvelle-Calédonie et qu’une autorité locale de la concurrence, sans laquelle la loi risque de rester lettre morte, soit créée par le législateur national. En Nouvelle-Calédonie, cette autorité serait indépendante des pouvoirs politiques et économiques et disposerait d’un véritable pouvoir d’enquête et de sanction, de sorte que les textes soient respectés et appliqués et que les pratiques anticoncurrentielles – marges abusives et autres – puissent être normalement sanctionnées.

Monsieur le ministre, votre texte prévoit de lutter contre la vie chère en ciblant principalement les pratiques de la grande distribution, mais il s’agit aussi de faire en sorte que le logement soit plus accessible. Le budget d’un ménage comporte trois principaux postes qui représentent entre 15 % et 20 % chacun : les produits alimentaires, le logement et le transport. Voilà comment sont structurées les dépenses des ménages, en métropole comme outre-mer, malgré quelques différences.

Or nous avons examiné ce matin un levier fiscal qui peut permettre l’accès à des loyers moins élevés dans l’outre-mer : le dispositif Duflot, successeur du Scellier. Cet avantage fiscal vise à abaisser les coûts de construction des logements intermédiaires outre-mer et surtout à faire en sorte que les loyers pratiqués soient en moyenne 20 % moins élevés que ceux habituellement pratiqués dans le secteur.

Selon la même étude INSEE, le prix des loyers en Nouvelle-Calédonie est 62 % plus élevé qu’en métropole, sachant que l’indice regroupe le logement, l’énergie et l’eau. Comment voulez-vous que le consommateur calédonien – et ultramarin en général, même si la Nouvelle-Calédonie est en tête – puisse s’en sortir ? Il gagne 20 % à 30 % de moins qu’un métropolitain, paie son panier de la ménagère 90 % plus cher et son loyer 62 % plus cher. Je trouve que nos populations sont d’une patience infinie face aux difficultés qu’elles rencontrent dans la vie quotidienne de très longue date.

M. Éric Jalton. De bonnes gestionnaires !

M. Philippe Gomes. L’avantage fiscal du dispositif Duflot permet donc de minorer le prix des loyers des logements à destination principalement des classes moyennes, sachant que le logement intermédiaire est capital. La loi Duflot pose d’ailleurs le principe de répartition suivant : un tiers de libre, un tiers d’intermédiaire, un tiers de social.

Or l’outre-mer avait été oublié ! Certes, le dispositif a été réparé ce matin grâce à nos amendements repris par le Gouvernement qui a monté l’avantage fiscal de 18 % à 29 % en ce qui concerne les DOM. Le décalage de 11 % qui existait dans le Scellier – 13 % en métropole et 24 % dans les DOM – a ainsi été maintenu.

Le Pacifique avait été complètement oublié, passant dans le triangle des Bermudes du projet de loi de finances. Repris en considération, il bénéficie aussi du taux de 24 % d’avantage fiscal. En revanche, monsieur le ministre, j’appelle votre attention sur le fait que Pacifique a perdu un petit avantage : la période d’amortissement est passée de cinq ans à neuf ans, comme dans les DOM et en métropole. Si une bataille a été perdue dans cet hémicycle, la procédure parlementaire se poursuit et les choses peuvent être corrigées à un moment ou un autre.

Faire financer un logement intermédiaire par un contribuable métropolitain est plus ou moins compliqué. À Bordeaux, c’est hypersimple et sécurisé. À Fort-de-France, le contribuable commence à réfléchir et réclame un avantage digne de ce nom. Alors, à Nouméa ou à Papeete, c’est quasiment l’aventure !

Si nous ne disposons pas d’un petit avantage supplémentaire, comme, dans le dispositif Scellier, un amortissement sur cinq ans plutôt que neuf ans, il est à craindre que la production de logements intermédiaires, déjà insuffisante chez nous, continue à s’effondrer. Cela contribuera à paupériser encore plus les classes moyennes, qui ont des revenus trop élevés pour accéder au logement social mais pas assez pour le marché libre. Sans logements intermédiaires, je ne sais pas quelle réponse nous pourrons leur apporter.

Enfin, monsieur le ministre, je souhaite vous remercier pour les améliorations apportées au texte, que vous avez bien voulu accepter. Le plafonnement des frais bancaires par exemple, qui a été étendu à la Nouvelle-Calédonie et à la Polynésie française et repris sous une formule différente au profit des départements d’outre-mer. C’est une bonne chose pour le pouvoir d’achat des ménages.

Je pense également à l’ordonnance relative aux transferts de compétences qui permet l’actualisation du droit civil et du droit commercial. C’est un sujet important, vous le savez, dans le cadre de l’accord de Nouméa, qui prévoit une émancipation de la Nouvelle-Calédonie au sein de la République. Merci aussi au Gouvernement d’avoir accepté d’étendre la loi de 1989 qui protège les droits des locataires. Là encore, cela permettra à la Nouvelle-Calédonie de bénéficier d’un dispositif juridique plus protecteur.

Monsieur le ministre, vous devez venir prochainement en Nouvelle-Calédonie. Nous serons très heureux de vous accueillir. Vous devez préparer le prochain comité des signataires de l’accord de Nouméa, qui réunit chaque année les partis politiques et l’État. Nous allons faire en sorte qu’il se passe dans les meilleures conditions possibles, même si, comme vous le savez, les difficultés politiques ne manquent pas, comme dans chacun de nos territoires. (Applaudissements.)

Mme la présidente. La parole est à M. Ary Chalus.

M. Ary Chalus. Je n’entrerai pas dans le détail de tout ce que nous avons accompli dans ce projet de loi sur la régulation économique. En revanche, je tiens à saluer le travail qui a été fourni tout au long de la procédure parlementaire.

Ce texte représente un apport indéniable dans la manière d’aborder non seulement les problèmes de la vie chère en outre-mer, mais aussi ceux d’une structure économique inefficace léguée par le passé.

Ainsi, nous changeons de paradigme. Nous ne réglons plus les problèmes économiques des outre-mer par des mesures conjoncturelles prises dans l’urgence –mesures souvent nécessaires, mais souvent aussi, il faut le dire, insuffisantes, voire dans certains cas contreproductives.

Les problèmes que nos concitoyens ont soulevés dans des mouvements sociaux d’ampleur n’ont pas disparu. Et comment auraient-ils pu, alors que leurs causes n’étaient pas de simples politiques tarifaires inéquitables mais bien plutôt l’accumulation de pratiques, à tous les niveaux de la chaîne d’approvisionnement, par lesquelles les uns et les autres profitaient des difficultés structurelles de nos territoires ?

On l’aura dit et répété tout au long de la discussion : nous avons des territoires isolés géographiquement, des marchés aux tailles réduites, un nombre d’opérateurs insuffisant. Or, nous savons tous que le libre jeu de la concurrence ne peut s’exercer que dans des marchés au contraire ouverts et fluides.

Tout le droit de la concurrence que l’on a opposé à ce texte n’a été bâti, au niveau national et européen, que pour des marchés radicalement différents des marchés ultramarins. On ne le dira jamais avec assez de force, ce qui est envisageable dans l’hexagone ne trouve pas nécessairement de traduction dans l’économie de nos territoires insulaires.

Face à certaines injustices, nous ne pouvons rester impuissants. Il importe que le législateur prenne toute sa place dans ce combat, afin de faire obstacle aux pratiques prédatrices d’un petit nombre, pour le bénéfice du plus grand nombre.

Les mesures de ce texte – l’injonction structurelle, la réglementation des marchés de gros, la régulation des tarifs bancaires, le bouclier qualité-prix, la faculté pour les collectivités de saisir directement l’Autorité de la concurrence – trouveront toutes leur utilité. Ce texte est ce dont nos outre-mer avaient besoin.

Au-delà de la régulation économique qui inspire son auteur, il est aussi l’occasion pour nous de lutter contre les lieux communs qui entourent tout ce qui concerne l’outre-mer : la défiscalisation et ses bateaux de plaisance, la sur rémunération et ses fonctionnaires…

Monsieur le ministre, je vous invite à rester vigilants quant à l’application de ce texte. Les décrets nécessaires devront être pris, et vite ! Car il me semble que vous allez au-devant de certaines difficultés dans son application, qui émaneront de certains milieux économiques, voire, dans certains cas, d’une administration trop frileuse.

Et nous autres parlementaires devrons aussi rester vigilants. Les études que nous avons demandées devront être réalisées. Je pense plus particulièrement à celles sur l’octroi de mer et sur les tarifs aériens et bancaires.

Je tiens aussi à féliciter tous mes collègues parlementaires qui ont veillé toute la nuit pour défendre la défiscalisation outre-mer. Le dispositif demeure perfectible et doit, je le concède, souffrir désormais davantage d’évaluation. Ainsi que je le disais hier soir, dans nos régions, la défiscalisation permet le financement de l’économie et bien souvent remédie à la diminution des dotations publiques et au désengagement des banques privées.

Aucun investisseur ne s’engagera dans un projet s’il ne dispose d’une visibilité à moyen, voire à long terme. Aussi, je considère que l’amendement Eckert n’était pas de nature à ramener la sérénité dans une économie déjà moribonde. À ce jour, il n’existe pas de solution pour remplacer une disposition qui a déjà prouvé son efficacité notamment en matière de logement social. Plafonner la défiscalisation, changer les dispositifs, c’est mettre en difficulté les entreprises et créer une instabilité juridique.

Bref, je ne puis conclure qu’en réitérant tout mon soutien au présent texte, que le ministre et nous avons travaillé ensemble, et en appelant le Gouvernement à faire preuve de constance en faisant vivre les dispositions qu’il contient.

Je souhaite et j’espère que les élus ultramarins, quelle que soit leur appartenance politique, avec en outre le soutien des élus de l’hexagone et surtout de notre ministre, se montreront solidaires pour rattraper le retard qui existe entre nos régions et l’hexagone, et surtout pour redonner à notre jeunesse et à nos populations l’espoir en un avenir meilleur.

Ary Chalus et le groupe RRDP voteront ce texte. Et je finirai en félicitant notre rapporteure, qui a fait un travail considérable avec le président de la commission. (Applaudissements.)

Mme la présidente. La parole est à M. Gabriel Serville.

M. Gabriel Serville. Nous parachevons aujourd’hui l’étude d’un texte inédit pour nos territoires, de l’autre côté de l’Atlantique, du Pacifique et de tous les océans à travers le globe. Inédit car il ose s’attaquer aux structures et ambitionne de permettre à nos populations d’assumer autrement leur destin économique.

Dans ce texte, la baisse des prix est l’angle que le Gouvernement a choisi pour lutter contre la vie chère. Si cet axe majeur constitue bien évidemment un objectif, il faudra envisager le volet de la confection des revenus dans un avenir proche. Je sais pouvoir compter sur le volontarisme de M. le ministre pour faire avancer cette revendication.

Au-delà des très nombreuses dispositions positives que comporte ce projet, dont notamment les négociations annuelles qui seront rendues obligatoires, le Gouvernement a privilégié le droit de la concurrence. À travers ce choix, il confère un rôle central à l’Autorité de la concurrence.

Sur le fond, je rappelle que la sanction des pratiques qui seraient mises en cause nécessiterait l’existence avérée d’un effet anticoncurrentiel, ce qui implique une affectation de marché et la délimitation d’un marché de produits et d’un marché géographique concerné – ce qui suppose l’affectation d’une partie substantielle du marché national.

Sincèrement, je souhaiterais que ces filtres ne deviennent pas, à l’épreuve du temps, des barrières à l’application de la loi et à l’atteinte des nobles objectifs qu’elle se fixe. Si tel était le cas, ce que je n’espère pas, il ne serait pas inutile d’envisager une interdiction de principe des clauses d’exclusivité dans le champ contractuel. Cela permettrait de déconnecter les activités de transporteur de marchandises et d’acheteur-revendeur-grossiste, par l’intervention des centrales de référencement, et de proposer aux consommateurs l’ensemble des avantages tarifaires négociés avec les fournisseurs aux points de vente.

Pour ce qui est de mes prises de position lors des discussions antérieures, je tiens encore une fois à rappeler de façon très solennelle que mon seul objectif était de rechercher les voies et moyens susceptibles de consolider les fondamentaux de cette loi, dont on sait déjà qu’elle pourrait être malmenée par les PDG des grands groupes commerciaux qui n’y retrouveraient pas leurs intérêts. En conséquence, et malgré les quelques divergences de point de vue que j’ai pu manifester, le groupe GDR soutiendra cette loi dans sa déclinaison actuelle, car il en va de l’intérêt de nos concitoyens.

Cela étant dit, monsieur le ministre, je tiens à saluer la très large concertation que vous avez initiée pour ce projet. Je salue également les améliorations apportées à ce texte par le Gouvernement, l’ensemble des parlementaires et les commissions lors des débats en séance et bien sûr en commission mixte paritaire.

La possibilité accordée aux collectivités de saisir l’Autorité, notamment en cas d’atonie de l’État dans la lutte contre la vie chère, est tout à fait opportune et je vous sais gré de cette attention.

Je salue aussi le travail qui a été fourni sur les bancs de la majorité comme de l’opposition. En raison des enjeux liés à ce texte, nous avons, me semble-t-il, su transcender les clivages traditionnels. Je voudrais à ce propos saluer notre collègue Daniel Gibbes pour son choix que je qualifierais de positif. J’aimerais qu’il en soit ainsi dans la relation entre opposition et majorité lorsque nous aborderons d’autres grands dossiers relatifs à l’avenir de nos régions respectives – je pense en particulier à la loi de programmation sur 1’agriculture et surtout à la révision du code minier, dont on pressent déjà les conséquences sur une éventuelle exploitation du pétrole au large des côtes de la Guyane.

Monsieur le ministre, ce projet de loi est le premier étage d’une fusée qui en comporte plusieurs. La vie chère en Guyane sera encore plus facile à combattre le jour où le Gouvernement acceptera de valoriser ses richesses suivant une démarche intégrée, qui doit créer une véritable synergie entre tous les ministères. Vous avez là une lourde responsabilité, mais nous vous faisons confiance pour poursuivre le travail déjà entamé, et je tiens une nouvelle fois à vous en remercier. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, SRC et RRDP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Serge Letchimy.

M. Serge Letchimy. Nous arrivons au bout d’un processus, d’une dynamique extrêmement courageux et je voudrais saluer cette initiative du ministre, du Gouvernement et de cette assemblée, car ce n’est pas un sujet facile et vous n’avez pas choisi la voie la plus aisée, monsieur le ministre. Mettre ce projet de loi à l’ordre du jour en tout début de législature montre bien le respect que vous avez pour l’outre-mer et votre volonté de changer quelque chose au fond.

J’insiste sur ce point, car s’attaquer à la vie chère pourrait donner le sentiment qu’on ne fait que prendre quelques petites mesures. Or, de mon point de vue, on s’attaque ici à l’un des grands problèmes de l’outre-mer. Je tiens à dire à mon collègue Daniel Gibbes, qui est aussi mon ami, que je n’ai jamais entendu dire ici que cette loi allait tout régler. Nous avons été clairs, nous avons dit que c’était une étape et qu’il fallait absolument, dans la structure même de la confection du mal développement, trouver des solutions claires, nettes et propres.

Lutter contre la « profitation » – excellente expression créole – donne à mon avis le ton de toute la ligne politique : au fond, il s’agit de lutter contre l’ultralibéralisme financier du capitalisme. On se donne la possibilité de créer une démocratie économique beaucoup plus ouverte, plus solidaire, avec une croissance partagée par tous et qui se voit aussi dans le panier de la ménagère.

Et lorsque l’on entend notre collègue parler de la Nouvelle-Calédonie où les prix sont de 90 % plus élevés qu’en métropole, c’est extrêmement grave. Ce n’est plus de la « profitation », c’est un massacre économique !

Puisque je m’exprime également au nom de mon collègue Jean-Claude Fruteau, absent ce soir, je ne peux pas, cher Daniel Gibbes, vous laisser dire que la délégation aux outre-mer serait en désaccord avec le ministre. Cette délégation a un excellent président, qui organise de très nombreuses réunions. Et chaque fois que le ministre y est convié, il a à cœur de répondre à chacun en particulier.

Vous avez parlé, cher collègue, du passé : la LODEOM, c’est un milliard d’euros pour l’outre-mer. En conjuguant un milliard en dynamique d’investissement, on aboutit à la suppression d’une grande partie de la défiscalisation. La LODEOM, ce sont 137 mesures, des mesures intéressantes, notamment sur la coopération, mais insuffisantes de mon point de vue car s’apparentant à un saupoudrage qui n’a pas permis de s’attaquer au fond.

Le projet de loi relatif à la régulation économique outre-mer constituant une première étape, nous attendons avec impatience un projet de loi en faveur de l’outre-mer en matière d’agriculture. Nous attendons également une modification de l’article 349 du traité de Lisbonne ainsi qu’une politique beaucoup plus puissante en faveur de la jeunesse. Dès lors que 64 % des jeunes de moins de vingt-sept sont au chômage, nous nous devons d’apporter une solution plus massive que ponctuelle.

Il est important également de rappeler que ce projet de loi est le résultat de la concertation qui s’est déroulée dans l’ensemble des régions d’outre-mer, et qui ne s’appuie pas sur une stigmatisation. Le débat sur la défiscalisation montre un réel malaise. Le Gouvernement, le ministre et la majorité cherchent les voies d’une mutation économique capable de porter une croissance qui ne soit ni dépendante, ni soumise,…

Mme Catherine Coutelle. Très bien !

M. Serge Letchimy. …ni figée par une économie de comptoir et d’importation, mais qui soit capable de se remettre en cause.

Nous avons l’obligation, et je me tourne vers le président Brottes, de réussir et de proposer des solutions innovantes. Il faut tourner le dos à l’économie de comptoir et de guichet pour s’engager dans une économie de filières. C’est ainsi que nous pourrons réussir.

À cet effet, nous avons besoin, monsieur le ministre, de larges espaces de liberté et de coopération, comportant une forte dimension économique. Bref, d’une démocratie territorialisée et de coopération décentralisée et territorialisée.

Nous avons aussi besoin d’une grande liberté en matière de politique fiscale. Cela peut paraître étrange, mais il faut absolument s’engager en ce sens. En outre, nous avons également besoin d’une politique de développement économique qui s’appuie sur l’ensemble de nos potentialités.

Saluons enfin l’interdiction des clauses d’exclusivité commerciale, les injonctions structurelles, la répétition de l’indu qui permet de demander des informations à quelqu’un lorsque l’on a supprimé ou diminué une taxe, le bouclier qualité-prix, le registre du commerce et des sociétés, même si la CMP a été quelque peu douloureuse, et enfin, la dynamique qui a été lancée.

Je souhaite, monsieur le ministre, que les décrets d’application soient pris le plus rapidement possible. Permettez-moi de vous mettre en garde contre les groupes de pression et de vous souhaiter tout le courage nécessaire, mais je sais que vous n’en manquez pas ! (Applaudissements.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Philippe Nilor.

M. Jean-Philippe Nilor. Madame la présidente, madame la rapporteure, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi tout d’abord de saluer la réflexion, la posture ainsi que la méthode sur lesquelles nous nous sommes appuyés pour proposer ensemble une réponse législative à la « profitation ».

La large concertation que vous avez menée sur le terrain, monsieur le ministre, a contribué à l’enrichissement du texte. Les amendements adoptés laissent présager à terme, une amélioration des conditions de concurrence, dans l’intérêt des consommateurs.

C’est vrai que nos peuples attendent de cette loi des baisses de prix immédiates. Or, même si certaines mesures seront prises dès janvier 2013, la plupart des effets espérés ne seront observés qu’à moyen ou long terme. Il en va ainsi des résultats escomptés de la mise en place effective du bouclier qualité-prix sur 150 à 200 produits de grande consommation ; de l’alignement des tarifs bancaires ; de l’interdiction des contrats exclusifs d’importation ; du renforcement des compétences et des moyens des observatoires des prix, des revenus et des marges ; de la possibilité pour les collectivités territoriales de saisir directement l’Autorité de la concurrence ; enfin, des injonctions structurelles.

Cette loi, quels que soient ses mérites, a cependant ses limites. Elle ne peut décider unilatéralement la baisse des prix, et il faudra s’attendre à une lente montée en puissance de ses bienfaits.

Permettez-moi à ce stade d’insister sur deux dispositions majeures sur lesquelles j’ai tenu à porter un éclairage particulier.

La première réside dans la commande d’un rapport qui permettra désormais de faire la lumière sur la formation des prix plus qu’excessifs des liaisons aériennes reliant la France et les pays d’outre-mer, mais aussi entre les pays d’outre-mer entre eux. À titre d’exemple, le prix d’un billet d’avion Fort-de-France-Cayenne est parfois plus élevé que celui d’un billet pour Paris. C’est une réalité aussi banale qu’anormale ! Ces prix dissuasifs constituent un frein objectif à l’émergence de relations transversales qui permettraient de développer des échanges économiques, culturels, touristiques, éducatifs, sportifs entre nos peuples.

La seconde prévoit que les entreprises de grande distribution devront désormais réserver une surface de vente dédiée aux productions régionales. Ces dernières ne bénéficient à ce jour que d’un accès extrêmement limité à ces marchés laissant la part belle aux importations. La loi entend remédier à cette exclusion de fait.

Il s’agit là d’un signal fort lancé à l’attention de nos producteurs, qu’ils opèrent dans l’agriculture, dans l’agroalimentaire, mais aussi dans l’artisanat ou dans l’industrie ; une contribution à une baisse à terme des prix des productions régionales, un encouragement à sortir du cycle infernal et suicidaire de l’import consommation.

Mais la vie chère ne se caractérise pas seulement par l’existence de prix et de marges élevés. Elle s’appréhende tout autant par la survivance de revenus extrêmement faibles, conséquence du sous-emploi et du chômage endémique.

En réalité, la lutte contre la vie chère passe aussi par le combat pour l’emploi. Au-delà du RSA, des contrats aidés et des statuts précaires, quelles politiques économiques ont été menées outre-mer, par quels gouvernements pour proposer des perspectives durables en termes d’emplois et d’insertion sociale à nos 65 % de jeunes au chômage ?

Pour contenir le risque omniprésent d’éruption sociale, nous devons être porteurs de propositions concrètes pour combattre le fléau du chômage et du désœuvrement dans nos pays.

À ce propos, si nous devons nous assurer que les observatoires des prix, des revenus et des marges disposent des moyens, tant matériels qu’humains, d’accomplir pleinement et durablement l’ensemble de la mission qui leur est confiée en toute indépendance par rapport au pouvoir des préfets, si le besoin est de conforter leurs ressources humaines, nos compétences martiniquaises devraient avoir priorité quant aux recrutements.

Par ailleurs, la situation de nos seniors se caractérise par une très grande fragilité financière. Faute d’avoir été déclarés à la caisse générale de sécurité sociale, nombre de nos aînés qui ont pourtant travaillé dur toute leur vie se retrouvent aujourd’hui avec des retraites indécentes. La promesse de versement de leur retraite dès le premier jour du mois n’a toujours pas été tenue. Cette situation est particulièrement préjudiciable chez nous, compte tenu des tarifs bancaires usuraires qui viennent encore amaigrir le montant de leur pension versée trop tardivement. La lutte contre la vie chère passe donc aussi par le respect de cet engagement gouvernemental.

Enfin, je ne peux m’empêcher d’établir un parallèle ô combien pertinent entre cette vie chère et une vie institutionnelle qui nous coûte très cher aussi. Le statut de région monodépartementale, de par les nombreux dysfonctionnements qu’il impose en maintenant des doublons financiers et administratifs, ne favorise pas l’efficacité et la lisibilité de l’action publique. Il a donc un coût que la Martinique paie au prix fort.

Monsieur le ministre, cette collectivité unique votée par les Martiniquais depuis 2010 devant contribuer à une rationalisation et à une optimisation des ressources, pourquoi dès lors vouloir reporter ad vitam aeternam sa mise en œuvre ? (Applaudissements.)

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Jalton.

M. Éric Jalton. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite à mon tour saluer le rejet, le retrait de l’amendement scélérat qui remettait en cause les engagements présidentiels réaffirmés lors de la conférence de presse à l’Élysée.

La loi de régulation économique se veut une loi de rupture pour faire reculer ce que d’aucuns appellent la vie chère, d’autres la « profitation ». Elle a pour mérite de s’attaquer à des mécanismes d’import-distribution hérités de l’économie de plantation et de l’exclusif colonial.

Je ne peux donc que soutenir activement cet effort législatif. Je sais bien que la loi ne peut tout. Ce sont les comportements et les mentalités des acteurs en cause qu’il faut chaque jour faire évoluer, au moins par la régulation et par la concertation, qui vous est chère, monsieur le ministre.

En effet, la régulation n’est désormais efficace que si elle est précédée par une forte concertation et suivie par une réelle évaluation ! L’exemple de la législation sur les mécanismes de la défiscalisation outre-mer montre l’importance de l’évaluation pour faire taire les fantasmes sur un dispositif qui pourtant recueille l’assentiment quasi unanime de tous les acteurs politiques et économiques des outre-mer.

Aussi reste-t-il, après les travaux de la commission mixte paritaire, deux situations qui retiennent mon attention.

La première réside dans le fait que nous n’avons pas retenu, une extension de la possibilité de saisine de l’Autorité de la concurrence, allant au-delà de celles offertes aux régions, en direction des établissements publics de coopération intercommunale qui ont une connaissance assez fine des distorsions concurrentielles ou des abus de position pouvant exister sur leur territoire. Les communautés d’agglomération ont compétence en matière économique territoriale. Le temps viendra certainement où nous ferons évoluer la présente législation afin de permettre cette saisine de l’Autorité de la concurrence par les EPCI.

Le second fait qui retient mon attention, c’est l’abandon des sanctions prévues à l’alinéa 10 de l’article 2 du présent texte relatif aux sanctions prévues à l’article L. 420-2-1. Si je comprends qu’il faille une échelle de peine compatible avec le principe de proportionnalité des peines, je regrette que cet abandon des sanctions affaiblisse l’arsenal dissuasif contre les droits exclusifs d’importation.

En effet, les droits exclusifs d’importation, trop nombreux dans nos régions, sont une cause indéniable de non-lisibilité des mécanismes de fixation des prix et contribuent à la hausse des prix outre-mer. Il serait donc utile qu’entre la sanction excessive et le vide répressif nous trouvions un juste milieu.

Ces précisions apportées, je ne peux qu’approuver le projet de loi qui nous est soumis, en soulignant le volontarisme dont a fait preuve le ministre pour faire aboutir ce texte sans le dénaturer. J’en appelle au même volontarisme, et ce conformément aux trente engagements du Président de la République, pour une nouvelle et forte initiative gouvernementale ou parlementaire en faveur de la jeunesse des outre-mer, confrontée à des taux de chômage autrement plus importants que ceux auxquels sont soumis les jeunes de l’hexagone, nous ne le dirons jamais assez.

C’est ainsi que l’assouplissement des règles relatives à l’alternance et à l’apprentissage en faveur des entreprises et des collectivités devient une urgente priorité en outre-mer afin de faire diminuer le nombre de nos jeunes qui ne sont ni étudiants ni employés. Cette trappe à chômage doit se réduire, car les taux atteignent parfois 70 à 80 % dans certains quartiers de l’agglomération de Pointe-à-Pitre-Les Abymes en Guadeloupe.

Je conclurai en saluant le travail de tous les parlementaires épris de la cause ultramarine qui ont bien compris que s’attaquer enfin, par la régulation concertée, aux monopoles et oligopoles de l’import-distribution, c’est tout simplement préserver les fondements de la République. C’est aussi répondre aux objectifs d’équité territoriale et de justice sociale dans le redressement national, maintes fois réaffirmés par le Président de la République.

Monsieur le ministre, vous avez déclaré dans votre présentation que ce texte n’était pas un aboutissement mais un point de départ. Je suis tout à fait d’accord avec vous. Nous vous en donnons acte. L’essentiel est bien de commencer. Ensuite, comme disait Serge Letchimy reprenant Aimé Césaire, il nous faut avancer, avancer ensemble vers une vie moins chère pour nos compatriotes des outre-mer. (Applaudissements.)

Mme la présidente. La discussion générale est close.

Texte de la commission mixte paritaire

Mme la présidente. Nous en venons au texte de la commission mixte paritaire.

Conformément à l’article 113, alinéa 3, du règlement, je vais d’abord appeler l’Assemblée à statuer sur les amendements dont je suis saisie.

La parole est à M. le ministre, pour soutenir les quatre amendements, nos 1, 2 rectifié, 3 et 4 rectifié, du Gouvernement.

M. Victorin Lurel, ministre. Je les ai déjà présentés.

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Ericka Bareigts, rapporteure de la commission mixte paritaire. Ces amendements n’ayant pas été examinés par la commission, c’est à titre personnel que j’émets un avis favorable.

(Les amendements nos 1, 2, 3 et 4 rectifié sont successivement adoptés.)

Explications de vote

Mme la présidente. Au titre des explications de vote, la parole est à M. Serge Letchimy, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

M. Serge Letchimy. Avant d’expliquer mon vote, je voudrais revenir sur cette collectivité unique dont il est question ici à chaque fois que nous avons un débat sur l’outre-mer. Je voudrais faire une mise au point sans « esprit de cancan », comme on dit chez nous, avec le respect que je dois à chacun.

Lorsqu’en janvier 2010 le passage à la collectivité unique a été soumis à référendum, aucune date n’était mentionnée. La question était très simple : « Approuvez-vous la transformation en une collectivité unique ?». Le Président de la République d’alors, M. Sarkozy, imaginait que la transformation se ferait en 2012. Pourquoi ? Pour inscrire ce changement institutionnel comme une réussite de son mandat. Ensuite, à la demande du président du conseil régional de Guyane, il y a eu report à 2014, par alignement sur le calendrier national des élections régionales. La nouvelle majorité socialiste ayant décidé d’abroger le conseiller territorial, et les élections cantonales et régionales venant normalement s’ajouter en 2014 aux municipales, il a été décidé de les reporter plutôt à 2015. L’installation de la nouvelle collectivité unique est donc potentiellement reportée à la même date. Chacun donnera son avis à un moment donné, mais il faut rappeler que la loi de juillet 2011 prévoyait la date de 2014 en vertu de l’agenda électoral et que nous devons tenir compte du report des élections cantonales et régionales à 2015.

Cela dit, monsieur le ministre, nous voterons votre texte. Il s’agit d’un texte courageux, ambitieux et qui, surtout, ouvre une perspective. Je souhaite simplement que nous soyons suffisamment forts, que le Gouvernement nous soutienne dans ce défi qu’il nous faut absolument relever, sans quoi nous devrons nous contenter de rajouts à des rajouts. Nous allons vers une mutation profonde de notre économie et de nos sociétés, que nous assumons nous-mêmes à travers une nouvelle ingénierie du développement de nos pays. Je pense que nous pouvons réussir. C’est notre génération qui a cette responsabilité. Il nous faut partager cette ambition collective qu’ont configurée des grands aînés comme Aimé Césaire. Nous devons avancer, il faut y aller ! (Applaudissements sur tous les bancs.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Paul Tuaiva, pour le groupe Union des démocrates et indépendants.

M. Jean-Paul Tuaiva. Naturellement, les députés polynésiens de l’UDI voteront en faveur de cette loi, bien qu’elle ne s’applique pas entièrement à leur territoire. Je note certaines avancées, notamment l’extension du plafonnement des tarifs bancaires, qui avait provoqué toute une agitation chez nous, et le soutien technique à la mise en place de l’autorité administrative indépendante. Nous vous en remercions, monsieur le ministre.

Si nous votons ce texte, c’est aussi par solidarité avec les DOM. Les habitants des TOM et les DOM ont un point commun : ils vivent dans des îles. Nous sommes tous des « îliens », comme on dit chez nous en Polynésie.

Monsieur le ministre, je voudrais également vous remercier car nous ressentons, à travers vos efforts et votre volonté de défendre les intérêts de l’outre-mer, une écoute et une attention pour les TOM.

Je voudrais également vous inviter, monsieur le ministre, à avoir le réflexe, dans les futurs textes de loi concernant l’outre-mer, d’intégrer les collectivités du Pacifique – la Nouvelle-Calédonie, Wallis-et-Futuna, la Polynésie – mais aussi Saint-Martin, Saint-Barthélemy et Saint-Pierre-et-Miquelon. Bien que nous soyons dotés de statuts particuliers, nous sommes fiers d’être français. C’est la raison pour laquelle nous soutenons aussi votre action, monsieur le ministre. (Applaudissements.)

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Gibbes, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Daniel Gibbes. Madame la présidente, je ne serai pas très long. Je vais confirmer le vote du groupe UMP : nous avions parlé d’une abstention qui se voulait le symbole d’une opposition constructive, monsieur le ministre, et je réitère notre choix.

Je voudrais aussi corriger une petite inexactitude qui a laissé croire que j’estimais que la délégation aux outre-mer entretenait de mauvaises relations avec le ministre. Là n’était pas le fond de mon propos : j’ai au contraire voulu souligner le fait que nous aimerions être consultés plus en amont et que nous manquions de temps pour effectuer un travail d’une meilleure qualité pour que nos îles, les outre-mer en général, puissent être les grands vainqueurs d’un débat riche.

M. Éric Jalton. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Ary Chalus, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

M. Ary Chalus. Le Président de la République a réaffirmé à plusieurs reprises que les communes riches devraient accompagner les communes pauvres. Cette loi sur la vie chère, voulue par le ministre Victorin Lurel, permet aussi de donner un espoir à nos populations de la Guadeloupe qui n’ont pas bénéficié du même niveau de vie que les populations de l’hexagone. Nous n’allons pas rabâcher les différences.

La Martinique et la Guadeloupe sont confrontées aux échéances électorales et nous sommes ici pour soutenir l’action du ministre de l’outre-mer. La réussite de notre ministre, c’est la réussite de tous les parlementaires ultramarins. C’est pour cette raison que j’ai toujours appelé à la solidarité entre nous pour rattraper le temps que nous avons perdu auparavant du fait des appartenances politiques qui divisaient nos élus.

Je suis maire d’une commune qui doit être intégrée à une communauté d’agglomération. Nous avons le soutien de l’agglomération du Nord-Basse-Terre. Les élections législatives ont eu lieu et il y a eu un vote populaire. Nous sommes une commune dite riche : nous voulons aussi accompagner les communes pauvres. J’ai soutenu le mouvement de Stéphane Gatignon parce qu’il m’a paru légitime. Je souhaiterais aussi avoir le soutien de notre ministre pour apporter notre connaissance aux communes dites pauvres dans notre département.

Avec ce projet de loi, je pense que nous allons faire un grand pas vers l’avenir. Le groupe RRDP le votera. (Applaudissements.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Philippe Nilor, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

M. Jean-Philippe Nilor. Le groupe GDR votera bien évidemment en faveur de ce texte, mon ami et collègue Gabriel Serville l’a dit dans son intervention, parce que l’intention qui l’anime est courageuse et parce que la méthode qui le soutient est exemplaire. Assainir les conditions de concurrence au profit du consommateur est une démarche louable.

Nous allons voter en faveur ce texte parce que nous l’avons accompagné et que nous avons participé activement à son élaboration et à son enrichissement.

S’agissant de la collectivité unique, je ne répondrai pas maintenant, tout simplement parce que je ne m’adressais pas à Serge Letchimy et parce que nous aurons ce débat en d’autres lieux et en d’autres temps. Je suis, sur cette question, particulièrement serein.

M. Éric Jalton. Très bien !

Vote sur l’ensemble

Mme la présidente. Je mets maintenant aux voix l’ensemble du projet de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire modifié par les amendements qui viennent d’être adoptés.

(Le projet de loi est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Un texte d’une telle qualité voté dans un délai aussi rapide et adopté à l’unanimité moins une voix, monsieur Gibbes, cela peut vous laisser sans voix – à tous les sens du terme, comme le montre l’extinction de la mienne… (Sourires.)

Permettez-moi, monsieur le ministre, de vous féliciter pour votre engagement : votre enthousiasme a emporté l’enthousiasme de tous – et pas seulement des ultramarins, je tiens à le redire !

Je félicite aussi nos deux rapporteurs, Ericka Bareigts et Bernard Lesterlin, qui se sont impliqués à plein temps et avec beaucoup de passion : le sens de la précision dont ils ont fait montre dans l’examen de ce texte a permis d’apporter les réponses attendues.

Je veux remercier également tous nos collègues qui se sont investis dans ce travail, mais aussi l’ensemble des fonctionnaires de l’Assemblée, sans naturellement oublier la Présidence.

Cette loi constitue une réponse concrète pour améliorer la vie quotidienne en outre-mer, et c’est bien là le but recherché. (Applaudissements.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Victorin Lurel, ministre. Je tiens à remercier la représentation nationale, et en particulier Mme la présidente dont l’efficacité nous permet d’achever cet après-midi l’examen de ce texte.

Je remercie une fois de plus la commission des affaires économiques, son président, les rapporteurs et vous-mêmes, mesdames et messieurs les députés, qui avez très significativement amélioré ce texte.

Je serai bref : il faut répéter que ce texte est important, et j’ajouterai même, sans vouloir engager une ultime querelle avec M. Gibbes, que cela n’avait jamais été tenté.

Nous n’avons pas récusé les textes en vigueur – ce n’est pas la méthode de ce gouvernement –, à l’exception de ceux qui étaient franchement mauvais. Nous n’avons ainsi pas récusé la LODEOM : si ce texte n’a pas été appliqué, c’est parce que la volonté politique faisait défaut.

Vous constaterez par ailleurs, lorsque la loi sera mise en application, qu’elle nécessite peu de décrets, et que deux ou trois d’entre eux sont déjà prêts. Nous avons en effet souhaité que ce texte puisse continuer à vivre par la base, même si la volonté politique s’affaisse. Les élus, les citoyens, les observatoires des prix, les organisation de consommateurs pourront ainsi le faire vivre.

Par ailleurs, des initiatives sont encouragées. Cette loi sera suivie non seulement de décrets d’application, mais également de décrets s’attaquant à certains secteurs monopolistiques.

De plus, des plans d’actions seront engagés. De tels plans existent déjà dans certains territoires, comme par exemple à La Réunion, qui permettent la création de plateformes logistiques, de centrales d’achats ou de coopératives associant les salariés au sein des conseils d’administration. Ce texte précurseur peut donc d’une certaine façon préfigurer l’avenir.

Je vous remercie pour votre confiance ; et je remercie également le groupe UMP dont l’abstention se révèle constructive et positive. Merci à vous tous. (Applaudissements).

3

Ordre du jour de la prochaine séance

Mme la présidente. Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Proposition de loi relative à l’abrogation du conseiller territorial.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures cinq.)