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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Session ordinaire de 2012-2013

Compte rendu
intégral

Première séance du vendredi 7 décembre 2012

SOMMAIRE ÉLECTRONIQUE

SOMMAIRE


Présidence de Mme. Catherine Vautrin

1. Projet de loi de finances rectificative pour 2012 (suite)

Seconde partie (suite)

Après l’article 14 (amendements précédemment réservés)

Amendement no 406

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué chargé du budget

M. Christian Eckert, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Amendements nos 226, 390 rectifié, 389, 388, 225

Article 15 (précédemment réservé)

Amendements nos 194, 168

Après l’article 15 (amendements précédemment réservés)

Amendements nos 381, 431 (sous-amendement), 433 (sous-amendement), 434 (sous-amendement), 432 (sous-amendement), 435 (sous-amendement), 448 (sous-amendement), 109, 122, 1, 8

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Amendement no 468 (sous-amendement)

Suspension et reprise de la séance

Article 16 (précédemment réservé)

Amendements nos 157, 158, 160, 161

Après l’article 16 (amendements précédemment réservés)

Amendements nos 452, 453, 97, 296, 411 (sous-amendement), 429 (sous-amendement), 430 (sous-amendement) deuxième rectification, 295, 412 (sous-amendement), 413 (sous-amendement), 414 (sous-amendement), 428 (sous-amendement) deuxième rectification, 23, 87, 284, 283, 400

Article 17 (précédemment réservé)

M. Dino Cinieri

M. Jean-Yves Le Bouillonnec

M. Jean-Christophe Lagarde

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances

Amendements nos 224, 386 (sous-amendement), 457 (sous-amendement), 73, 459 rectifié, 124, 125, 131, 126, 127, 128, 32, 129, 130, 403, 132 rectifié, 133, 407, 134, 408, 180, 181 rectifié, 182, 183, 184, 185, 186

Après l’article 17 (amendements précédemment réservé)

Amendements nos 136, 393, 222 rectifié

2. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de Mme. Catherine Vautrin,
vice-présidente

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

Projet de loi de finances rectificative pour 2012
(suite)

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2012 (nos 403, 465).

Seconde partie (suite)

Après l’article 14
(amendements précédemment réservés)

Mme la présidente. Mercredi, l’Assemblée a poursuivi l’examen des articles de la seconde partie, s’arrêtant à l’amendement n° 406 portant article additionnel après l’article 14.

La parole est à M. le ministre délégué chargé du budget, pour soutenir l’amendement n° 406.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué chargé du budget. Cet amendement a pour objet d’adapter le code général des impôts afin de tenir compte d’une modification du code monétaire et financier relative aux organismes de placement collectif en valeurs mobilières, plus classiquement appelés OPCVM. Il organise le régime fiscal de ces plus-values pour les entreprises détentrices de parts d’OPCVM et prévoit leur imposition à la distribution par l’OPCVM au taux normal de l’imposition des bénéfices. Le régime de quasi-exonération des plus-values de long terme ne leur serait donc pas applicable.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire pour donner l’avis de la commission sur cet amendement.

M. Christian Eckert, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Il s’agit là de tenir compte de la transposition d’une directive européenne du 13 juillet, réalisée par ordonnance. Avis favorable.

(L’amendement n° 406 est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l’amendement n° 226.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Un amendement similaire avait été adopté par la commission des finances en première partie du PLF et retiré en séance en vue d’un travail de précision technique avec les services. Ce travail a été réalisé.

L’article 5 du PLF pour 2013 unifie les prélèvements applicables aux produits de placement à revenu fixe. Cet amendement propose d’intégrer à la retenue à la source sur intérêts de placement antérieurs à 1987 les prélèvements applicables aux intérêts de placement postérieurs à 1987. C’est une mesure de simplification sur laquelle j’espère que l’Assemblée se prononcera positivement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Favorable.

(L’amendement n° 226 est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir l’amendement n° 390 rectifié.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Ce long amendement est un amendement de coordination visant à adapter le dispositif d’exit tax afin de tenir compte de votes intervenus dans le cadre du projet de loi de finances pour 2013. Il est proposé d’appliquer l’imposition au barème avec abattement pour durée de détention et, le cas échéant, le taux de 19 % réservé aux entrepreneurs lorsque certaines conditions tenant à la durée ou au pourcentage de détention des titres ainsi qu’à l’exercice d’une activité salariée ou dirigeante dans la société sont remplies.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Aussi bien présenté, cet amendement de coordination et de bon sens, qui a été examiné en commission, ne peut que recevoir un avis favorable.

(L’amendement n° 390 rectifié est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir l’amendement n° 389.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Cet amendement est présenté par le Gouvernement, mais reprend en réalité une disposition qui procède d’une initiative parlementaire due à M. Nicolas Sansu au nom de son groupe, adoptée ensuite au Sénat au cours de la discussion. L’Assemblée ne peut cependant pas examiner ladite disposition puisque, comme chacun sait, la première partie de la loi de finances n’a pas été adoptée par la Haute assemblée. Je veux associer à cet amendement le rapporteur général, Christian Eckert, qui a joué un rôle clé pour que le Gouvernement accepte l’initiative de M. Sansu et présente donc cet amendement à l’Assemblée, les textes régissant ses travaux ne permettant pas à un parlementaire de le reprendre à son compte.

Pour en venir au fond, il s’agit de remplacer la réduction d’impôt au titre des cotisations versées aux organisations syndicales représentatives de salariés en un crédit d’impôt aux paramètres identiques. Cet amendement constitue une avancée significative favorisant l’adhésion à une organisation syndicale représentative. Comme chacun sait, il faut que les organisations syndicales soient aussi représentatives que possible pour que le dialogue social puisse avoir toute sa puissance.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Je remercie M. le ministre de ses propos à mon égard, et le Gouvernement de la présentation de cet amendement qui correspond à une volonté du législateur, tant à l’Assemblée qu’au Sénat, le ministre ayant rappelé les raisons pour lesquelles il n’était plus possible à un parlementaire de faire cette démarche. Le crédit d’impôt est décidément d’actualité, sur ce point comme sur un autre plus majeur !

Vous avez rappelé, monsieur le ministre, la nécessité de renforcer – c’est le pari du Gouvernement – la négociation syndicale, y compris dans le cadre du CICE dont nous avons longuement parlé. Cet amendement y contribue. Le taux de syndicalisation dans notre pays est en effet très faible par comparaison avec d’autres.

Je suis donc bien entendu favorable à cet amendement du Gouvernement.

(L’amendement n° 389 est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir l’amendement n° 388.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Cet amendement proroge de deux ans le crédit d’impôt en faveur de l’agriculture biologique, qui arrive à échéance fin 2012. Cela concerne 9 000 entreprises pour un coût de 23 millions d’euros. Cet amendement s’inscrit dans la feuille de route pour la transition écologique issue de la conférence environnementale.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. La commission est favorable à cet amendement dont elle se réjouit. Il va en effet dans le sens de la feuille de route fixée lors de la conférence environnementale. Ce crédit d’impôt existait certes – ce n’est pas une nouveauté –, mais il devait prendre fin. Nous le prolongeons pour deux ans.

(L’amendement n° 388 est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Eckert, pour soutenir l’amendement n° 225.

M. Christian Eckert, rapporteur général. C’est un amendement de coordination avec le PLF. Il concerne l’ISF PME et prévoit deux mesures. Il augmente de 16 à 24 mois le délai d’investissement des FCPI pour le bénéfice de l’ISF PME et applique dès 2013 la durée de détention réduite pour les entreprises solidaires au titre de l’ISF PME. Tout cela va dans le bon sens et je suggère à l’Assemblée d’accepter cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement est favorable à l’amendement, et il lève le gage.

(L’amendement n° 225, modifié par la suppression du gage, est adopté.)

Article 15
(précédemment réservé)

Mme la présidente. L’amendement n° 194 de M. Eckert est rédactionnel.

(L’amendement n° 194, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Eckert, pour soutenir l’amendement n° 168.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Il est également rédactionnel, madame la présidente.

(L’amendement n° 168, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 15 est adopté.)

Après l’article 15
(amendements précédemment réservés)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir l’amendement n° 381.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Il s’agit d’un amendement relatif à la DPI et à la DPA, sujets familiers de nos débats budgétaires.

La DPI sous sa forme actuelle a encouragé les comportements abusifs en incitant à des renouvellements d’immobilisations excessifs et parfois non indispensables. La DPA, quant à elle, a été régulièrement jugée comme non adaptée aux réalités économiques et, surtout, trop rigide. Elle impose en effet l’immobilisation de sommes sur un compte bancaire dédié, ce qui naturellement constitue un frein à son succès et explique que le nombre de ses bénéficiaires soit à peine supérieur à 1 000 en 2009. En outre, la condition de souscription d’une assurance s’est avérée trop contraignante et parfois même difficile voire impossible à satisfaire.

Ce constat a conduit le Président de la République à reconnaître en septembre dernier que le mécanisme actuel ne répond plus à son objectif initial et qu’il fallait en 2013 un nouveau dispositif fiscal. Cet amendement a pour objet de mettre en œuvre ce nouveau dispositif.

D’une manière générale, le présent amendement maintient le principe de deux déductions distinctes, mais propose de les placer sous un plafond annuel commun qui serait fixé à 25 000 euros si la représentation nationale en décidait ainsi. C’est donc une mesure de simplification. En outre, les nouvelles dotations seront par ailleurs soumises à un plafond pluriannuel et global de 150 000 euros.

Plus spécifiquement, les dispositions concernant la DPI portent sur l’impossibilité nouvelle de l’utiliser pour l’acquisition d’immobilisations amortissables, les acquisitions de stocks à rotation lentes ou de parts sociales de sociétés coopératives demeurant quant à elles évidemment éligibles au dispositif. Les évolutions de la DPA portent essentiellement sur la suppression de la condition d’assurance et sur le blocage d’une somme équivalente à 50 % et non plus à 100 % du montant de la déduction sur un compte bancaire dédié. En contrepartie de ces assouplissements, le délai d’utilisation de la DPA est raccourci et ramené de dix à sept ans.

Cet amendement paraît un peu compliqué, mais en réalité il ne l’est pas si l’on veut bien se souvenir des débats que nous avons souvent eus sur ce sujet dans cette enceinte.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. La commission a estimé lors de sa réunion de mercredi soir dernier que cet amendement allait globalement dans le bon sens. Il donne satisfaction à une demande récurrente de notre collègue M. Charles de Courson, et permet de supprimer un « marronnier » de nos séances budgétaires qui donnaient chaque année lieu à un débat sur l’obligation d’assurance dont la difficulté de mise en œuvre a été soulignée.

La commission s’est toutefois interrogée sur le plafond annuel commun de 25 000 euros, mais un certain nombre de sous-amendements portent sur ce sujet. Elle est en tout cas globalement favorable à l’amendement.

Mme la présidente. Nous en venons aux sous-amendements.

La parole est à Mme Isabelle Le Callennec, pour soutenir le sous-amendement n° 431 ainsi que, si elle le veut bien, les sous-amendements nos 433, 434, 432, et 435.

Mme Isabelle Le Callennec. Volontiers, madame la présidente.

Solidarité bretonne oblige, mon collègue M. Marc Le Fur, dont chacun reconnaît ici l’implication personnelle dès qu’il s’agit d’agriculture, m’a demandé de défendre ces sous-amendements dont je suis cosignataire. Les agriculteurs, tant ils rencontrent de difficultés durables – je pense singulièrement aux éleveurs, et encore davantage aux éleveurs bretons des filières laitières, porcines ou de la volaille –, méritent l’attention particulière de la représentation nationale.

Pour rester compétitifs, les agriculteurs sont tenus d’investir en permanence. La DPI leur permet un amortissement anticipé de leurs investissements. Le Gouvernement a choisi de supprimer cette possibilité pour l’achat de matériels agricoles. Dont acte. Mais, de grâce, qu’il épargne les bâtiments d’élevage !

À l’heure où il est demandé aux agriculteurs de gros efforts de mises aux normes – efforts certes nécessaires, mais coûteux –, il ne faudrait pas les en décourager. Le sous-amendement n° 431 vise donc à soutenir la mise aux normes des bâtiments d’élevage, les dispositifs économes en produits phytosanitaires ou les installations destinées à économiser l’énergie, par le maintien de l’utilisation de la DPI.

S’agissant du sous-amendement n° 433, le texte du Gouvernement propose d’affecter la DPA simplement en cas d’acquisition de fourrages, dans les six mois qui précèdent ou suivent la reconnaissance du caractère de calamité agricole. La proposition n’a alors qu’une vocation curative et en aucun cas préventive.

Une telle mesure, cumulée aux aléas climatiques, comme les sécheresses de 2003 ou 2011, sera de nature inflationniste sur le prix des fourrages, car elle incitera à concentrer les achats sur les périodes de crises. Il est donc proposé d’utiliser la DPI pour financer les stocks de fourrages.

Toutefois, pour éviter tout abus, car il peut s’en produire, le montant de ces stocks ne devra pas excéder un plafond proportionnel au cheptel détenu et fixé par décret, et il ne pourra faire l’objet d’une reconstitution qu’en cas de calamités déclarées.

Tel est l’objet de ce sous-amendement de M. Marc Le Fur que j’ai cosigné avec nos collègues attentifs à la cause agricole.

Quant aux sous-amendements nos 432 et 435, ils sont défendus.

Mme la présidente. Le sous-amendement n° 435 fait l’objet d’une discussion commune avec le sous-amendement n° 448.

La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter ce sous-amendement et pour donner l’avis de la commission sur les précédents.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Le sous-amendement n° 448 vise à augmenter le plafond annuel de 25 000 à 27 000 euros : cela permettra de donner un peu d’oxygène eu égard aux plafonds cumulés actuels de la DPI et de la DPA.

Un travail effectué avec les personnes concernées nous incite à soutenir la majoration de ce plafond.

La commission est défavorable à tous les autres sous-amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse de l’Assemblée pour ce qui concerne le sous-amendement n° 448.

L’intention est bonne, et l’augmentation du plafond de 25 000 à 27 000 euros paraît acceptable, sous réserve de la question de son coût qui, à l’instant où je m’exprime, reste incertain. S’il devait être excessif, le Gouvernement se réserve la possibilité de demander au Sénat de revenir au plafond prévu par l’amendement que nous examinons. J’apporte cette précision à l’Assemblée nationale afin que nos travaux soient toujours emprunts de la loyauté requise lors des échanges entre les parlementaires et le Gouvernement.

Le Gouvernement est défavorable à tous les autres sous-amendements.

Mme la présidente. Monsieur le ministre, le Gouvernement lève-t-il le gage sur le sous-amendement n° 448 ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement lève le gage.

(Les sous-amendements nos 431, 433, 434, 432 et 435, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

(Le sous-amendement n° 448, modifié par la suppression du gage, est adopté.)

(L’amendement n° 381, ainsi sous-amendé, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement n° 109, portant article additionnel après l’article 15.

M. Dino Cinieri. Cet amendement vise à rétablir la défiscalisation des heures supplémentaires, supprimée en juillet dernier.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Ce débat ancien et connu se poursuivra sans doute encore. (Sourires.) La commission est défavorable à l’amendement.

(L’amendement n° 109, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement n° 122.

M. Dino Cinieri. Afin d’encourager l’emploi de personnes au titre de l’aide à domicile par toutes les catégories de personnes, quels que soient leurs revenus, le code général des impôts met en œuvre deux dispositifs distincts.

En effet, l’article 199 sexdecies de ce code dispose que les sommes versées par un particulier à un salarié ou à une association agréée dans le cadre des services à la personne donnent droit, d’une part, et dans certaines limites, à un abattement fiscal pour les contribuables redevables de l’imposition sur le revenu des personnes physiques, d’autre part, à un crédit d’impôt pour ceux qui ne sont pas redevables de l’IR.

Or, au titre de l’alinéa 4 de cet article, le dispositif de crédit d’impôt s’applique à tous, sauf aux personnes retraitées qui, pourtant, ont un grand besoin de ces services à la personne. Je pense, entre autres services, à la télésurveillance, à l’aide à la mobilité, à l’aide aux tâches ménagères, au petit bricolage, à l’assistance informatique.

De plus, au titre de ce même alinéa 4, le dispositif de crédit d’impôt s’applique à aux couples mariés dont les deux membres exercent une activité professionnelle ou ont été inscrits sur la liste des demandeurs d’emplois prévue à l’article L 522-1 du code du travail durant trois mois au moins au cours de l’année du paiement des dépenses, excluant ainsi les couples dont un seul des membres exerce une activité professionnelle ou est inscrit sur la liste précitée, qui ont également besoin de ces services à la personne

Ce dispositif instaure en outre une inégalité entre, d’une part, les retraités qui payant des impôts bénéficient d’un abattement fiscal et voient donc le coût du service à la personne à domicile réduit et, d’autre part, les retraités qui ne payent pas d’impôts sur lesquels pèse entièrement le coût du service à la personne à domicile.

Par ailleurs, dans les familles nombreuses, il est fréquent, qu’un seul des membres du couple réponde aux conditions fixées par l’article 199 sexdecies du code général des impôts, l’autre se consacrant à l’éducation des enfants. Les familles nombreuses sont ainsi injustement pénalisées

Il apparaît donc nécessaire, dans un souci d’équité et de justice, de permettre aux retraités et aux couples mariés ou pacsés de bénéficier de ce dispositif de crédit d’impôt. Cette extension de l’article 199 sexdecies du code général des impôts serait financée par une baisse de la limite retenue pour la prise en compte des dépenses engagées par le contribuable pour l’emploi d’un salarié à domicile ou le recours à une association agréée dans le cadre des services à la personne.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. La commission est défavorable à cet amendement bien connu.

Les bénéficiaires de l’article 199 sexdecies du code général des impôts, dont vous avez rappelé les caractéristiques, cher collègue, pèsent déjà à hauteur de plus de 2 milliards sur le budget et ceux qui bénéficient de la réduction d’impôts économisent l’équivalent d’1,6 milliard d’euros. Au total, les mesures de réduction ou de crédit d’impôt coûtent 3,7 milliards d’euros.

L’adoption de cet amendement rendrait ces dispositions encore plus coûteuses.

Il existe déjà plusieurs mesures fiscales favorables aux personnes âgées, qui sont la cible principale – mais pas exclusive, je vous l’accorde – de votre amendement. Je pense par exemple à l’abattement pour les plus de 65 ans, et à la déduction des pensions alimentaires versées par les enfants. Bien entendu, les aides fiscales s’appliquent en cas de dépendance pour la majoration du quotient familial ou de l’APA. Un certain nombre d’autres dispositions sont en vigueur, dont je vous épargnerai l’énumération.

En bref, mon cher collègue, les conditions budgétaires actuelles ne permettent pas l’élargissement que vous suggérez.

(L’amendement n° 122, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Lefebvre, pour soutenir l’amendement n° 1.

M. Dominique Lefebvre. J’avais retiré cet amendement en commission afin de laisser du temps aux collègues qui s’interrogeaient. Il vise à élargir le champ de l’accès aux données fiscales pour les chercheurs, à en sécuriser la procédure et à la clarifier.

En l’état du droit, l’INSEE et les services ministériels de statistique peuvent accéder aux données fiscales des entreprises. En 2009, cette possibilité avait été ouverte aux chercheurs s’agissant des données fiscales relatives aux entreprises, grâce à un amendement du sénateur Bernard Angels,

Cependant plusieurs problèmes se posent aujourd’hui.

La rédaction de la loi a été suffisamment ambiguë pour que depuis quelques mois ces données ne soient plus transmises. Nous rencontrons également des problèmes à la fois en termes de clarté et de transparence de la procédure, et de sécurisation des données transmises.

Deux procédures existent. L’une, instruite par la direction générale des finances publiques, donne lieu à une convention entre le chercheur et cette direction générale ; l’autre, nécessite un passage par le comité du secret statistique, qui se prononce sur l’opportunité des recherches. Ce système opaque n’est pas transparent.

Nous avons en fait un double sujet à traiter.

Voulons-nous, oui ou non, que la France puisse disposer, à l’instar de ce qui se fait dans les autres pays, d’une évaluation des politiques publiques et, en l’espèce, des politiques fiscales ? Aujourd’hui, cela n’est pas possible en raison des obstacles que rencontrent les chercheurs pour accéder aux données.

Voulons-nous par ailleurs assurer la sécurisation de la transmission de ces données, qui n’est pas aujourd’hui assurée ?

Le dispositif proposé par l’amendement repose sur une procédure claire qui comprend un avis systématique du comité du secret statistique sur toute demande de chercheur, qui examine l’objet et la portée de la recherche, un avis ministériel, et un passage par le centre d’accès sécurisé aux données, qui permet de retrouver à tout moment ce qui a été transmis.

Qu’elles concernent la fiscalité des entreprises ou celle des ménages, je rappelle que les données transmises ne seront jamais nominatives.

J’ajoute que la protection est assurée in fine par la possibilité de mettre en cause sur le plan pénal la responsabilité des chercheurs si le secret fiscal n’était pas garanti.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. La commission a longuement débattu de cet amendement qui avait d’abord été présenté en commission, avant d’être retiré. Les explications que vient de nous fournir Dominique Lefebvre sur ce sujet technique et complexe permettent à présent d’envisager l’adoption de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. C’est un excellent amendement. Le Gouvernement remercie Dominique Lefebvre d’en avoir pris, d’une certaine manière, l’initiative, et le rapporteur général pour l’avis qu’il vient de donner. Il s’agit bien de préciser dans quelles conditions les chercheurs peuvent accéder à ces données qui leur permettront de mesurer les évolutions économiques et fiscales dont notre pays a besoin et dont les travaux scientifiques bénéficieront pleinement. Par ailleurs, chacun le comprendra, il faut protéger le secret fiscal qui est un élément de la liberté individuelle, élément avec lequel, je me permets de le dire avec insistance, il ne faut pas transiger.

Les dispositions que propose Dominique Lefebvre me paraissent équilibrées car sans transiger avec ce principe constitutif de la liberté individuelle, il permettra aux chercheurs de mener leurs travaux dans de bien meilleures conditions, travaux dont la puissance publique pourra d’ailleurs profiter.

Mme la présidente. La parole est à Mme Karine Berger.

Mme Karine Berger. Comme j’ai été la principale opposante à cet amendement en commission des finances, je voudrais compléter les propos de Dominique Lefebvre. Après avoir longuement discuté des aspects techniques de cette mesure, je me suis finalement rangée à son avis, à celui du rapporteur et à celui du Gouvernement.

Une difficulté technique très particulière est liée à la question des données individuelles. Il est fondamental que le secret statistique soit maintenu pour tout le monde, en particulier sur les données fiscales, mais ce n’est pas évident à réaliser car ces données, même si elles ne sont pas nominatives, peuvent être recoupées à partir d’autres informations et permettre de reconnaître la personne concernée.

Or, le groupe des écoles nationales d’économie et de statistique a créé un logiciel – une sorte de cloud – pour que les données ne soient pas accessibles sur l’ordinateur personnel des chercheurs qui feront la recherche, mais sur une base de données externe. Cela permettra non seulement de ne jamais transférer les données individuelles, mais également de vérifier que le secret statistique est assuré par les échantillons qui sont testés par les différents chercheurs.

Dès lors que ce logiciel est disponible et mis en place par l’Insee, je pense que cet amendement peut être adopté.

(L’amendement n° 1 est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour soutenir l’amendement n° 8.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Le ministre a donné droit à la demande de Dominique Lefebvre de permettre aux chercheurs d’accéder à certaines données. Mon amendement s’inscrit dans le même ordre d’idée. Le président de la commission des finances souhaite en effet qu’un rapport apporte des informations, non plus aux chercheurs, mais aux parlementaires que nous sommes.

Je suis donc certain que je ne me heurterai pas à un refus, d’autant plus que ces informations nous permettront de mesurer les départs de nos concitoyens vers l’étranger, en particulier – même si c’est difficile à mettre en évidence – pour des raisons fiscales. L’opacité la plus complète entoure aujourd’hui cette question. Des bruits courent, les journaux regorgent d’informations selon lesquelles beaucoup de nos concitoyens, notamment, ce qui est plus préoccupant, de jeunes entrepreneurs d’une quarantaine d’années, considéreraient qu’en raison de la confiscation fiscale, leur avenir n’est plus dans notre pays.

Sur un sujet d’une telle importance, on ne peut pas rester dans une sorte d’omerta, de déni, de non-information. C’est pourquoi j’ai écrit au ministre, en accord d’ailleurs avec lui, pour que nous mettions en place un ensemble de suivi statistique à partir, notamment, des données sur l’ISF – dont il faudrait raccourcir les délais d’obtention, près de trois ans aujourd’hui – et d’une nouvelle procédure relative à l’exit tax qui oblige les contribuables ; lorsqu’ils quittent le territoire, à déclarer les plus-values latentes qu’ils peuvent détenir.

Dans le même courrier, j’ai demandé à obtenir des informations sur l’inscription de nos compatriotes dans les consulats d’un certain nombre de pays tels, madame Schmid, la Suisse, et également sur les inscriptions dans les écoles françaises.

Je n’ai pas encore reçu de réponse, mais je sais que le ministère est d’accord pour que nous engagions ce travail, qui ne s’inscrit pas du tout dans une démarche partisane ou polémique mais répond à un souci de transparence sur un sujet dont les médias parlent beaucoup. En tant que président de la commission des finances, je reçois tous les jours des demandes d’information de l’ensemble des médias, y compris de chaînes de télévision grand public. C’est dire à quel point le sujet est sensible.

Je n’ai pas encore reçu de réponse du ministère, ce qui est normal. En revanche, j’ai en reçu une, détournée, via le JDD, d’une ministre, Mme Conway, laquelle moque « la candeur du député Carrez » qui demande des informations dont elle estime qu’elles existent déjà – mais qui se garde bien de me les envoyer.

Je me contenterai de vous lire le message indigné que je viens de recevoir du président des expatriés français à New York après cette déclaration de la ministre des Français de l’étranger : « Je suis absolument scandalisé par la façon dont un ministre ose s’adresser à un élu de la République. Ce genre de réponse, aux États-Unis, de la part d’un exécutif fédéral ou local auprès d’un élu, serait accueilli ici non seulement par la fureur de celui-ci…

M. Jean-Christophe Lagarde. C’est vrai !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. …mais serait probablement sujet à une procédure dite d’outrage au Congrès » – contempt of congress en anglais.

Mme Karine Berger. Bravo. (Sourires)

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. C’était tout spécialement pour vous.

M. Dominique Baert. Délicate attention.

M. Thomas Thévenoud. Thank you, sir !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Il est inadmissible, mais ce n’est, hélas, pas une surprise de la part de Mme Conway, de répondre à une demande parfaitement légitime de la part d’un élu, s’agissant en particulier du président de la commission des finances de l’Assemblée nationale.

Monsieur le ministre, nous nous bornons à demander un rapport annuel. Il en existe des dizaines, sur le changement climatique ou encore sur toutes sortes de données. Mais j’estime qu’un rapport de ce type, annexé chaque année à la loi de finances, est absolument indispensable.

Par ailleurs, je souhaite que vous m’indiquiez sous quel délai le président de la commission des finances obtiendra des réponses à son courrier car, je le dis très solennellement, si nous ne recevons rien dans des délais proches, je serais conduit à user des moyens dont je dispose tout particulièrement en cette qualité.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur cet amendement ?

M. Christian Eckert, rapporteur. Monsieur le président de la commission, le sujet que vous venez d’aborder interpelle l’ensemble des élus.

Votre amendement, tel qu’il est rédigé, ne peut cependant être accepté en l’état. Vous demandez au Gouvernement d’adresser au Parlement un rapport pour permettre, notamment, « d’avoir des éléments d’appréciation de l’attractivité fiscale de la France ». Il est un peu curieux de charger le Gouvernement de réunir de tels simples éléments.

Vous avez par ailleurs évoqué un certain nombre de critères qui peuvent être des éléments d’information mais qui ne sont pas les plus déterminants. Ainsi, le nombre d’inscriptions dans les écoles des Français de l’étranger pourrait tout autant témoigner de la capacité de nos entreprises à s’installer à l’étranger. C’est un élément, mais ce n’est pas le meilleur pour évaluer l’exil fiscal.

Sur le reste, j’ai cru comprendre que vos questions s’adressaient davantage au ministre, qui s’efforcera de vous répondre. Vous l’avez dit vous-même, il existe déjà des quantités de rapport. Un de plus est-il bien nécessaire ? je n’ai pas à parler à sa place, mais il suffirait peut-être que le ministre s’engage à communiquer rapidement et régulièrement les informations que vous lui demandez.

M. Dino Cinieri. Ce serait une bonne chose.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Je pense qu’il l’a toujours fait comme ses prédécesseurs d’ailleurs, lorsque nous leur demandions le nombre d’entrées et de sorties. Vous l’avez rappelé, l’exit tax est un élément budgétaire dont vous pouvez avoir connaissance du produit, comme tout parlementaire, ce qui vous permettra d’en estimer le nombre de contribuables. Je ne suis pas sûr qu’un rapport supplémentaire soit nécessaire pour ce type d’information.

La commission, en tout cas, a refusé cet amendement. Je pense que vous voulez des informations plus qu’un rapport, et le ministre aura sûrement à cœur de vous les fournir.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. J’ai compris en vous écoutant, monsieur le président de la commission, que vous attendiez trois réponses du Gouvernement.

La première est liée à l’attitude du Gouvernement par voie de presse. Je vous connais, je sais votre honnêteté intellectuelle, votre attachement aux droits du Parlement, et je connais l’attachement bien sincère que vous portez au succès des politiques que ce pays peut mener autant qu’à l’attractivité de la France. Je vous ai deviné sinon blessé, en tout cas choqué. Je sais que ces sentiments sont sincères et dès lors, au nom du Gouvernement, je vous présente mes excuses. Je souhaite que, désormais, vous considériez cet incident comme clos.

Sur le fond, vous évoquez les pouvoirs dont dispose le président de la commission des finances. Je les connais, j’en ai moi-même usé, mais il ne me semble pas que ces pouvoirs doivent être brandis comme une menace car c’est un droit qui est le vôtre. Vous êtes seul juge des conditions dans lesquelles vous pouvez en user et personne, je dis bien personne, n’aura à s’indigner de ce que vous feriez dans ce cadre. Cela fait partie de vos prérogatives, cela fait partie des droits du Parlement que vous symbolisez via ces possibilités de saisie, de consultation, d’audition. Vous comprendrez bien qu’au ministère de l’économie et des finances, ce n’est certainement pas moi qui vous empêcherai de faire valoir ces droits et de les exercer dans toute leur plénitude.

Je souhaiterais donc, dans un souci d’apaisement, que vous ne considériez pas ce pouvoir comme une menace potentielle, mais comme le droit élémentaire du Parlement à bien faire son travail. Autrement dit, vous exercerez ce droit dans les conditions que vous jugerez les plus utiles pour l’information du Parlement et certainement pas en rétorsion à je ne sais quelle attitude ou propos que le Gouvernement pourrait avoir.

Enfin, toujours sur le fond de la demande que vous formulez, je souscris en partie aux objections du rapporteur. Le Gouvernement doit déjà transmettre un grand nombre de rapports au Parlement et je sais, pour l’avoir fait quand j’exerçais les fonctions qui sont aujourd’hui les vôtres, qu’il est extrêmement simple pour le président de la commission des finances d’obtenir des éléments d’information.

Si je ne vous ai pas encore répondu, c’est que vous m’avez demandé des éléments complémentaires, beaucoup plus difficiles à rassembler puisqu’ils nécessitent de consulter à la fois les consulats et les registres de scolarisation, ce qui prend bien plus de temps que de consulter simplement la liste des quitus fiscaux. N’imaginez pas un seul instant que le temps mis à vous répondre corresponde à une quelconque tentative d’obstruction ou même à de la mauvaise volonté de ma part. Je vous le dis très solennellement, ce serait une totale erreur d’interprétation de mon attitude, et j’espère que vous n’avez aucun doute à cet égard.

Je comprends votre demande – même si, pour ma part, je n’estime pas nécessaire de faire un rapport de plus –, mais je comprends également la position du rapporteur général. Avant d’en appeler à la sagesse de l’Assemblée, je veux vous faire part d’un engagement, celui de faire figurer les éléments que vous réclamez dans le rapport, déjà prévu par la loi, que le Gouvernement doit remettre au Parlement sur les conventions fiscales. Dès lors, il me semble que vous avez les assurances que vous espériez obtenir pour la bonne information du Parlement, sans avoir à user de vos pouvoirs spéciaux. Je comprends que le rapporteur général ne souhaite pas multiplier les rapports, chacun sachant qu’ils sont déjà en nombre excessif et finalement très peu lus, ce qui constitue une dénaturation des relations de travail normales entre le Gouvernement et le Parlement.

Au bénéfice des indications que je viens de vous donner, j’en appelle à la sagesse de l’Assemblée et j’attends très sereinement ce que sera son vote.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.

M. Jean-Christophe Lagarde. Le sujet dont nous débattons ne concerne pas que le président de la commission des finances. Depuis plus de trente ans, dans tous les débats politiques, à chaque échéance électorale, on a droit à des affirmations des uns et des autres sur le fait qu’un certain nombre de contribuables français quitteraient notre pays, ou y reviendraient, sous tel ou tel prétexte. Cette discussion, qui a lieu sous toutes les majorités, est parfaitement infantilisante pour la démocratie dans notre pays, puisque personne ne se base sur des chiffres établis.

Je pense, monsieur le ministre, que le fait d’inscrire dans la loi le principe de la transmission d’un rapport – étant précisé que la rédaction de cette mesure pourrait toujours être améliorée ultérieurement par le Sénat – serait utile pour que nous parlions sur la base de vrais chiffres, pas de fantasmes qui peuvent exister à droite, au centre ou à gauche. Cela rendrait service à tout le monde.

J’ai pris note de votre engagement, monsieur le ministre, mais s’il ne figure pas dans la loi, il prendra fin le jour où vous ne serez plus ministre des finances – n’y voyez aucune espèce d’allusion –, car l’un de vos successeurs pourrait très bien ne pas souscrire à cet engagement. Ce n’est pas un très gros rapport, et je suis sûr que, contrairement à d’autres, celui-ci serait très lu, par l’ensemble des parlementaires et pas seulement par le président de la commission des finances, par la presse et par nos concitoyens. Pour une fois, ce ne serait pas un rapport prétexte, mais un rapport utile qui permettrait une meilleure maturité du débat politique dans notre pays.

Mme la présidente. La parole est à Mme Claudine Schmid.

Mme Claudine Schmid. Je comprends très bien la demande du président de la commission des finances et si vous deviez y faire droit, monsieur le ministre, je souhaiterais que vous vous adressiez également au rapporteur de la commission des finances de l’Assemblée des Français de l’étranger où nous sommes très demandeurs de données sur nos compatriotes expatriés.

Les Français de l’étranger étant toujours accusés de ne pas payer leurs impôts en France, nous aimerions que le centre des impôts des non-résidents de Noisy-le-Grand nous permette de connaître le chiffre des impôts payés par les Français établis hors de France. C’est une demande récurrente, que le rapport pourrait sans doute satisfaire.

Pour ce qui est des écoles françaises à l’étranger, un pays comme la Suisse, comprenant une zone francophone, compte un grand nombre d’écoles se référant au système français et préparant au baccalauréat. Or, ces écoles ne seront probablement pas comptabilisées, dans la mesure où il s’agit d’établissements privés ne faisant pas partie du réseau de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger. Nous demandons depuis longtemps que leur lien avec le système scolaire français soit reconnu par l’État français, afin que les inscriptions dans ces écoles fassent partie des données prises en compte.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. La réponse du ministre me convient pour l’essentiel. J’avais, pour ma part, pris soin de préciser que la relation avec le ministre des finances ne posait aucun problème. Ce qui m’a choqué – à juste titre, et je tiens à votre disposition les éléments en ma possession –, ce sont les déclarations d’un autre ministre. Vous vous êtes excusé, monsieur le ministre, et j’en prends acte.

Sur le fond, comme toujours, Jean-Christophe Lagarde a parfaitement exposé le problème. Le thème des exilés fiscaux donne aujourd’hui lieu à des rumeurs incessantes. Je suis assailli d’informations de la part de journalistes, de cabinets fiscaux, de notaires, selon lesquelles des dizaines, des centaines, des milliers de Français partent. Il nous est insupportable, à nous qui représentons notre pays et croyons en notre patrie – ne voyez pas une vaine grandiloquence dans mes propos, je suis fermement convaincu de ce que je dis – de nous trouver placés dans une situation de grande vulnérabilité par rapport à toutes ces affirmations. En effet, nous ne disposons d’aucun élément étayé pour y répondre.

Je souhaite que nous disposions des renseignements qui nous font défaut, et je sais qu’il est tout à fait possible que nous les obtenions. J’ai compris que le rapporteur général était gêné par le fait que cette demande d’informations englobe les critères d’attractivité de notre pays, et je suis disposé à écarter cette demande. Les éléments contenus dans le rapport seraient donc limités aux chiffres, comme l’a suggéré Jean-Christophe Lagarde : en résumé, qui part et qui revient. Certes, ce n’est pas aussi simple que ça en a l’air, il y a beaucoup de départs pour des motifs purement professionnels, par exemple. Mais le croisement des données de l’ISF, de l’exil fiscal, des inscriptions auprès des consulats, des écoles et des lycées français dans un certain nombre de pays – je ne vais pas dire lesquels, mais chacun a en tête la dizaine d’États concernés – permettrait de fournir des éléments.

Ma seule préoccupation est de faire mon travail de parlementaire et de pouvoir répondre de façon fiable à des affirmations qui ne reposent sur aucun élément concret. Je n’affirme pas ici qu’il y a une véritable hémorragie. En revanche, je veux pouvoir répondre en toute connaissance de cause à ceux qui affirment, à longueur de journée, qu’une hémorragie très inquiétante est en train de se produire.

Connaître chaque année le nombre de départs et de retours, c’est tout ce que je demande. Je ne tiens pas absolument à disposer d’un rapport sur ce point dans le cadre de la loi de finances, mais il faut, en tout état de cause, disposer de données fiables. C’est l’intérêt commun, c’est l’intérêt général que de pouvoir disposer de ces données, et ma démarche ne s’inscrit absolument pas dans un esprit de polémique.

Mme la présidente. Sur le vote de l’amendement n° 8, je suis saisie par le groupe Union des démocrates et indépendants d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

Je précise également que le groupe UDI a déposé un sous-amendement à l’amendement n° 8, qui sera défendu par M. Lagarde.

Dans l’immédiat, la parole est à M. le ministre délégué.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. J’ai pris l’engagement de faire figurer, dans un rapport sur les conventions fiscales, les éléments que le président de la commission des finances souhaite obtenir – comme je l’ai souhaité moi-même quand j’occupais ses fonctions et que je désirais mesurer l’impact du bouclier fiscal en termes de retour de nos compatriotes. À l’époque, nous avions pu objectivement constater que le bouclier fiscal, censé favoriser le retour de nos compatriotes, n’avait en rien modifié les flux des impatriés et expatriés qu’il était censé inverser, et que la principale motivation des Français quittant ou retrouvant leur pays était de nature professionnelle – même s’il existait aussi, effectivement, quelques cas d’expatriation fiscale que chacun s’accordait à considérer comme marginaux.

Je comprends que, de la même manière, vous souhaitiez aujourd’hui, monsieur le président de la commission des finances, être en mesure de juger si la nouvelle politique du Gouvernement a modifié les flux dans un sens ou dans l’autre. Vous m’avez adressé une demande écrite en ce sens, et vous aurez les éléments que vous souhaitez obtenir. Si j’ai tardé à vous répondre, c’est que vous demandez des éléments n’ayant pas fait l’objet d’une communication jusqu’alors, ce qui nécessite la mobilisation d’autres administrations que celle du ministère de l’économie et des finances. Si vous le souhaitez, je peux vous faire une réponse par anticipation en vous communiquant les éléments dont je dispose déjà, sans attendre ceux que mon collègue des affaires étrangères doit me transmettre. Quoi qu’il en soit, je réitère l’engagement du Gouvernement de faire figurer ces éléments dans le rapport sur la convention fiscale.

Il me semble que, dans le climat de confiance et de respect réciproques qui préside aux rapports entre le Gouvernement, le président de la commission des finances et, je l’espère, l’ensemble de la représentation nationale, l’établissement d’un rapport supplémentaire est inutile. La proposition que je vous ai faite constitue un engagement du Gouvernement et, dans l’hypothèse où les éléments que j’ai promis de vous communiquer vous sembleraient insuffisants, vous auriez toujours la possibilité d’user de vos pouvoirs spéciaux pour en demander d’autres – le fait que le Parlement souhaite s’informer, en l’occurrence par votre intermédiaire, me paraît tout à fait normal.

Je le répète, je comprends à la fois votre demande, monsieur le président, et les inquiétudes du rapporteur général. Pour ma part, je suis tout à fait disposé à vous fournir les renseignements que vous souhaitez obtenir, et je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée pour déterminer les modalités de transmission des éléments demandés.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, pour soutenir le sous-amendement n° 468.

M. Jean-Christophe Lagarde. Tenant compte à la fois de la demande du président de la commission des finances et de la position du rapporteur général, le sous-amendement n° 468 a pour objet de supprimer de l’amendement n° 8 les mots « et d’avoir des éléments d’appréciation de l’attractivité fiscale de la France ».

Il est difficile à un gouvernement, quel qu’il soit, de juger sa propre action et, si tel était l’objet du rapport demandé, il serait à craindre qu’il ne se résume à un exercice d’autosatisfaction. Au-delà de toutes les déclarations du ministre, je pense qu’il a la volonté sincère de satisfaire à la demande du président de la commission des finances. De par les responsabilités qu’il a exercées avant d’entrer au Gouvernement, il sait le besoin que nous avons d’être informés, mes chers collègues. Puisque le Gouvernement s’en remet à la sagesse de notre assemblée, sachons dépasser les barrières entre la majorité et l’opposition pour reconnaître ensemble que nous avons tous intérêt à obtenir les informations dont il est question.

La transmission des éléments demandés permettrait de mettre fin aux fantasmes et aux polémiques stériles qui polluent le débat depuis si longtemps : si l’on pouvait enfin savoir de quoi on parle !

Par ailleurs, les droits du Parlement forment un tout qui n’a pas vocation à être cloisonné entre les différents groupes, et ne se confondent pas avec les droits du président de la commission des finances : une fois que le président aura obtenu les éléments qu’il a demandés, nous n’en disposerons pas automatiquement. Enfin, un autre gouvernement remplacera un jour celui qui est en place, et pourrait changer de position par rapport à l’engagement de M. le ministre. L’inscription dans la loi du principe de l’établissement d’un rapport constituerait un renforcement des droits du Parlement et permettrait de faire mûrir le débat politique dans notre pays.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 468 ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Si je peux vous suivre sur un certain nombre de points, monsieur Lagarde, il en est un qui ne me convainc pas vraiment : lorsque le président de la commission des finances a connaissance d’informations, il prend toujours soin de les communiquer aux membres de la commission. Ainsi, lorsqu’il a obtenu des informations sur les niches outre-mer, il a adressé un courrier sur ce point à l’ensemble des membres de la commission. Les commissaires aux finances apprécient cette attitude – surtout les membres du groupe SRC (Sourires) – et l’en remercient.

Il ressort de l’intervention de M. le ministre que nous avons le choix entre la communication d’un rapport spécifique et l’intégration des éléments demandés dans le rapport sur les conventions internationales – mais en tout état de cause, la demande de M. le président sera satisfaite.

M. Jean-Christophe Lagarde. La loi vaut mieux qu’un simple engagement !

M. Christian Eckert, rapporteur général. Pour ma part, je resterais défavorable à l’amendement n° 8 s’il était maintenu. Il me semble qu’au bénéfice de l’engagement de M. le ministre de faire figurer les informations demandées dans le rapport sur les conventions internationales, M. le président de la commission des finances pourrait retirer son amendement – mais il reste évidemment seul juge de l’opportunité de le faire ou non.

En résumé, je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée sur le sous-amendement n° 468, et suis défavorable à l’amendement n° 8.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° 468 ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Je me suis exprimé longuement sur le sujet. J’ai indiqué que, dès lors qu’il s’agissait de l’information du Parlement, je laisse la représentation nationale décider en sa sagesse de l’amendement, du sous-amendement et de la proposition du Gouvernement d’introduire l’ensemble des éléments souhaités dans un rapport déjà existant.

Mme la présidente. La parole est à Mme Karine Berger.

Mme Karine Berger. Les statistiques et la politique entretiennent parfois des liaisons dangereuses, monsieur Carrez. En l’espèce, ce qui me gêne le plus, c’est que vous mentionniez dans votre amendement l’exil fiscal comme s’il était la seule raison qui explique le départ, et le retour, de nos concitoyens. Ma génération, qui certes n’est pas la vôtre, (Protestations sur les bancs du groupe UMP) a plus tendance à bouger pour des raisons professionnelles, pour la découverte du monde ou tout simplement à cause de la mondialisation que pour des raisons fiscales. Si vos demandes de statistiques étaient plus neutres, mon regard sur votre amendement serait sans doute plus positif.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Je ne demande pas la parole pour relever les amabilités de notre très très jeune collègue Karine (Sourires), mais pour proposer à l’Assemblée de rectifier ainsi l’amendement n° 8 : « Le Gouvernement adresse chaque année au Parlement un rapport lui permettant de suivre l’évolution des départs et retours de contribuables français ainsi que l’évolution du nombre de résidents fiscaux ».

Le rapporteur général était gêné par le fait que le rapport soit joint à la loi de finances. L’amendement rectifié se borne à évoquer un rapport qui pourra être joint soit à un rapport existant soit à la loi de finances. Par ailleurs, il reprend le sous-amendement n° 468. En outre, cette proposition est statistiquement presque parfaite. Enfin, suivant l’aimable recommandation de notre collègue Karine Berger, nous supprimons la notion d’exil fiscal, ce qui permet de couvrir les départs de jeunes actifs pour raisons professionnelles. Je ne vois pas la moindre aspérité qui pourrait gêner telle ou tel, et je suis certain que chacun pourra adopter cet amendement consensuel.

Mme la présidente. Il s’agit donc de l’amendement n° 8 rectifié, sur lequel le scrutin public aura lieu.

La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.

M. Jean-Christophe Lagarde. Je me rallie totalement à la rédaction du président car elle est consensuelle. Nous sommes en train de progresser ensemble sur les éléments d’information. Qu’ils figurent dans le budget ou ailleurs n’est pas notre sujet ; ce que nous voulons, c’est que cela soit inscrit dans la loi.

Monsieur le ministre, cela dépasse votre personne – j’aurais totalement confiance en vous sur ce point – : la loi est préférable aux engagements car elle demeure quand les acteurs changent. L’information du Parlement sera ainsi garantie.

(Le sous-amendement n° 468 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à M. Razzy Hammadi.

M. Razzy Hammadi. Puisque le Gouvernement fait appel à notre sagesse, je précise qu’en ce qui me concerne l’amendement ainsi rédigé va dans le bon sens. Je tiens cependant à rappeler que cet amendement, à l’origine, était motivé par la volonté de pouvoir évaluer l’impact des dispositions fiscales sur l’exil ou le retour de nos concitoyens. Il ne faudrait pas que cette nouvelle rédaction en annihile l’effet.

Par ailleurs, il faudrait, dans notre réflexion, prendre en compte certains éléments que par précaution je souhaite voir figurer au compte rendu des débats.

En 2012, pour la première fois dans notre histoire, les personnes de plus de soixante ans sont plus nombreuses que les moins de dix-huit ans. Cela a un effet immense sur la mobilité de nos concitoyens, qui n’est pas seulement liée à des raisons fiscales.

Par ailleurs, beaucoup de jeunes partent à l’étranger alors qu’ils ne sont pas imposables, puis reviennent en France en situation d’imposition, parce qu’ils se sont formés ou qu’ils ont été embauchés par de grands groupes.

Alors oui à l’esprit et au principe de cet amendement, même si j’étais plutôt favorable à ce que le rapport soit établi dans le cadre des conventions fiscales puisque cela permettait de présenter des éléments normés, objectifs et préétablis. Simplement, il faudra prendre garde à préserver l’ensemble des critères, car il y a des éléments à la fois politiques et démographiques à prendre en compte dans la discussion.

M. Jean-Christophe Lagarde. Il a raison !

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Alain Muet.

M. Pierre-Alain Muet. La nouvelle rédaction peut faire parfaitement consensus sur nos bancs. Pour notre part, nous la voterons.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Bien entendu et compte tenu de ce qui vient d’être dit, le rapporteur général s’en remet également à la sagesse de l’Assemblée sur cet amendement n° 8 rectifié.

Mme la présidente. Je rappelle que je suis saisie d’un scrutin public sur l’amendement n° 8 rectifié. Je vais maintenant le mettre aux voix.

(Il est procédé au scrutin.)

Mme la présidente. Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 51

Nombre de suffrages exprimés 49

Majorité absolue 25

(L’amendement n° 8 rectifié est adopté.)

(Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et Rassemblement-UMP.)

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente. À la demande de la commission, la séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix heures quarante, est reprise à dix heures cinquante-cinq.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Article 16
(précédemment réservé)

Mme la présidente. Sur l’article 16, je suis saisie par M. Christian Eckert d’une série d’amendements de précision rédactionnelle, nos 157, 158, 160 et 161, auxquels le Gouvernement donne un avis favorable.

(Les amendements nos 157, 158, 160 et 161 sont successivement adoptés.)

(L’article 16, amendé, est adopté.)

Après l’article 16
(amendements précédemment réservés)

Mme la présidente. Nous en venons à une série d’amendements portant articles additionnels après l’article 16.

La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement n° 452.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Il s’agit d’un amendement, assez technique, destiné à permettre la déductibilité des aides à caractère financier consenties à une entreprise en application d’un accord constaté par le TGI.

Un article précédant a posé des exceptions pour les entreprises en difficulté, mais la rédaction limitait ces exceptions aux procédures de sauvegarde ou de liquidation ou aux aides consenties en application d’un accord de conciliation homologué par le président du tribunal. En d’autres termes, l’exception ne s’appliquait pas lorsque l’accord était simplement constaté par le président du TGI.

Or, ayant eu connaissance de plusieurs cas critiques, il nous a paru souhaitable d’étendre cette exception aux abandons de créance consentis en application d’un accord de conciliation, simplement constaté, mais non homologué, par le président du TGI.

Cet amendement est présenté au nom de la commission, mais celle-ci n’a pas été formellement réunie pour en débattre, car la question avait déjà été soulevée lors de réunions précédentes. J’y tiens car il permettrait de résoudre les problèmes rencontrés par des entreprises en difficulté.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Avis favorable, et le Gouvernement lève le gage.

(L’amendement n° 452, modifié par la suppression du gage, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement n° 453.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Par exception au droit commun, certaines entreprises peuvent bénéficier d’un remboursement anticipé de la créance qu’elles détiennent au titre du crédit d’impôt recherche et du crédit d’impôt pour investissement en Corse. C’est notamment le cas de certaines entreprises en difficulté ou définies comme telles.

Cet amendement a pour objet de rajouter à la liste de ces entreprises, celles qui sont engagées dans une procédure de conciliation. Dans le même esprit que précédemment, il s’agit de venir en aide à ces entreprises, avant que le tribunal de commerce ait à se prononcer sur la liquidation. Cette disposition est particulièrement indispensable en tant de crise.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Avis favorable, et le Gouvernement lève également le gage.

(L’amendement n° 453, modifié par la suppression du gage, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement n° 97.

M. Dino Cinieri. Il s’agit d’introduire dans la loi une mesure d’exonération pour les entreprises commercialisant des produits nécessitant une période de stockage avant la mise en vente.

En effet, le projet de loi de finances pour 2013 prévoit une augmentation des charges pour les entreprises, augmentation qui ne contribuera pas à renforcer la compétitivité de nos entreprises et ne prend pas en compte les spécificités de certaines entreprises. Nous visons par cet amendement celles qui commercialisent des produits nécessitant pour leur fabrication une période de transformation plus ou moins longue, de fermentation, affinage ou séchage – je parle notamment au nom des Champenois, des viticulteurs et autres fabricants de produits alimentaires. Pour ces entreprises, l’augmentation des charges équivaut à une double peine, car leurs frais de fonctionnement sont déjà très élevés.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. La commission n’a pas examiné cet amendement, dont j’ai bien observé, madame la présidente, que vous étiez la première signataire, ce qui s’explique aisément…

Vous prévoyez d’exclure de la diminution de la déductibilité des charges financières les entreprises qui commercialiseraient des produits nécessitant une longue transformation préalable à la consommation, donc le champagne, qui vous est cher comme à plusieurs d’entre nous.

M. Dino Cinieri et Mme Claudine Schmid. Entre autres !

M. Christian Eckert, rapporteur général. Mais l’exclusion de ces entreprises ne se justifie par aucun motif d’intérêt général, et je crains que la rédaction de cet amendement ne rencontre des objections juridiques.

Par ailleurs, cet amendement aurait davantage sa place dans le projet de loi de finances pour 2013, que nous allons réexaminer en nouvelle lecture puisque la CMP, qui s’est réunie hier, a échoué. Vous pourriez donc reformuler votre dispositif dans des termes juridiquement plus satisfaisants dans ce cadre, d’autant que cette question fera, je crois, l’objet d’un certain nombre d’autres aménagements.

En conséquence, madame la présidente, et sans préjuger la position de la commission sur un amendement similaire qui serait examiné, si vous en décidiez ainsi, en projet de loi de finances, je propose que l’amendement n° 97 soit retiré. À défaut, j’émettrai, pour des raisons juridiques fortes, un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Même avis que la commission.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Monsieur le ministre, cet amendement soulève un problème qui devra absolument faire l’objet d’une évaluation. En effet, les frais financiers déductibles sont plafonnés à 85 %. Toutefois, le montant de ces frais, liés à l’emprunt, est très variable selon le type d’activité. Ainsi, certaines entreprises peuvent être structurellement très endettées en raison de leur cycle d’exploitation. Lorsqu’on a des stocks à rotation lente, par exemple, il est évident qu’il faut financer leur portage avant qu’ils soient vendus.

J’avais également appelé votre attention sur les difficultés que nous risquons de rencontrer en raison de la structure des montages en délégation de service public ou en concession, notamment pour le financement d’infrastructures telles qu’Eurotunnel ou les lignes à grande vitesse. Vous aviez d’ailleurs promis – car vous aviez reconnu qu’il pouvait y avoir un problème – de nous apporter des précisions sur le cas des entreprises très endettées qui réalisent des infrastructures, notamment dans le cadre de concessions.

Je m’excuse de quitter le domaine viticole, qui est passionnant et d’une importance extrême pour l’emploi, le commerce extérieur ainsi que pour ses qualités gustatives, mais je souhaitais également évoquer le financement des infrastructures.

Mme la présidente. La parole est à Mme Claudine Schmid.

Mme Claudine Schmid. Je m’étonne que l’on puisse s’opposer à un tel amendement au motif qu’il ne relève pas de l’intérêt général, puisqu’il vise notamment l’ensemble du secteur agricole, que l’on aide par ailleurs. Je rappelle que certains produits, comme les fromages ou les jambons, doivent absolument être stockés un certain nombre d’années.

Mme la présidente. La parole est à M. Dino Cinieri.

M. Dino Cinieri. Monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, on parle de concurrence et de compétitivité. Mais, que ce soit pour les produits alimentaires ou viticoles, notamment le champagne, il s’agit également de procéder à une régulation des charges au niveau européen notamment. Nos viticulteurs se trouvent en difficulté. J’insiste donc pour que vous reveniez à la sagesse.

(L’amendement n° 97 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Monsieur le rapporteur général, je vous remercie de l’intérêt que vous avez bien voulu porter à l’amendement n° 97. Vous comprendrez qu’assurant la présidence de la séance, je ne peux évoquer le fond, mais je ne doute pas que nous aurons l’occasion de le faire prochainement, comme vous avez bien voulu m’y inviter.

La parole est à M. Pierre-Alain Muet, pour soutenir l’amendement n° 296, qui fait l’objet de plusieurs sous-amendements.

M. Pierre-Alain Muet. Cet amendement no 296 ainsi que le suivant n° 295 ont trait aux crédits d’impôt en faveur de la production cinématographique et audiovisuelle. Ces crédits d’impôt ont été instaurés au milieu des années 2000 dans presque tous les pays européens, ceux-ci se livrant une concurrence féroce pour localiser les tournages sur leur territoire. En France, un crédit d’impôt cinéma a ainsi été créé en 2004 et élargi à l’audiovisuel en 2005 ; en outre, un crédit d’impôt dit international a été mis en œuvre en 2009, pour tenter d’attirer en France une partie des tournages réalisés par des productions internationales.

Toutefois, une récente étude a montré que nous perdions de nombreuses productions et journées de tournage. En effet, notre dispositif, qui a été bien calibré à l’origine, se révèle insuffisamment concurrentiel face à ceux, plus favorables, qu’ont créés nos voisins en 2007, 2008 et 2009. Lorsqu’on compare notre crédit d’impôt avec ceux de nos partenaires européens, on s’aperçoit que l’assiette du nôtre est plus étroite, que son taux est plus faible – 20 %, contre 40 % en Belgique, par exemple – et qu’il est plafonné alors que la plupart de nos partenaires n’ont pas plafonné le leur. Il est donc proposé, par ces deux amendements, de réajuster notre crédit d’impôt en élargissant son assiette, par exemple aux dépenses d’hébergement ou de figuration, et en portant son plafond de 1 à 4 millions pour les œuvres produites essentiellement en France.

Lorsque nous avons rédigé ces amendements avec mon collègue Patrick Bloche, nous n’avions pas tous les éléments dont dispose le Gouvernement. Je comprends donc parfaitement que celui-ci ait déposé des sous-amendements afin de préciser certains points. Néanmoins, je veux rappeler qu’il ressort d’une étude comparative que la France ne subventionne les œuvres cinématographiques qu’à hauteur de 6 % à 8 %, quand l’Allemagne les subventionne à hauteur de 13 % et la Belgique à hauteur de 18 %. Bref, nous avons véritablement besoin de remettre ces crédits d’impôt à niveau en les ajustant à une dynamique subtile.

Enfin, je rappelle que les deux derniers films dont les productions sont françaises ont été entièrement tournés à l’étranger. Le dernier Astérix, par exemple, a été intégralement tourné dans trois pays étrangers, principalement à Malte, alors même que le Centre national de la cinématographie a subventionné sa production. Si nous ne mettons pas à jour nos crédits d’impôt, nous allons donc aboutir à cette situation aberrante dans laquelle le CNC subventionne des productions françaises qui ne comptent pas un seul jour de tournage en France.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir le sous-amendement n° 411.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le présent sous-amendement a pour objet de ne pas prendre en compte dans l’assiette de calcul du crédit d’impôt des dépenses de captation ou de recréation de spectacles vivants. Sous réserve de l’adoption de ce sous-amendement, le Gouvernement pourrait donner un avis favorable – avec enthousiasme – à l’amendement n° 296, tant il est vrai qu’il faut encourager la production cinématographique dans notre pays. Celui-ci en a besoin : le climat y est rude, nous ne disposons pas de cités médiévales et les gens ne sont pas accueillants. Des incitations fiscales sont donc nécessaires. C’est tout à fait majeur (Sourires)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général pour présenter les sous-amendements nos 429 et 430, deuxième rectification, et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 296 et le sous-amendement n° 411 ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Actuellement, le crédit d’impôt pour le cinéma national coûte à notre budget 60 millions d’euros. Dans l’exposé sommaire de son amendement, M. Muet indique que la mesure qu’il propose coûterait 70 millions d’euros, ce qui porterait le coût total du dispositif à 130 millions d’euros. Le sous-amendement n° 411 du Gouvernement réduira ce surcoût ; le rapporteur général y est donc bien entendu favorable.

Par ailleurs, la commission a accepté un autre sous-amendement, n° 429, qui a pour objet de plafonner les frais d’hébergement pris en compte dans le calcul du crédit d’impôt. Il nous semblerait en effet un peu fort que ces frais, qui pourraient être – je ne dis pas que c’est la règle générale – un peu lourds, soient éligibles sans plafond au dispositif. Je propose donc de leur appliquer le même plafonnement que celui qui est applicable au crédit d’impôt cinéma international, à savoir 270 euros par nuit à Paris et 200 euros en région, ce qui permet de se loger tout à fait correctement.

Quant au sous-amendement n° 430, deuxième rectification, il tend à ramener le plafond des dépenses éligibles prévu par l’amendement n° 296 de 4 millions à 2 millions d’euros. À la limite, je suis moins attaché à ce sous-amendement qu’à celui qui plafonne les frais d’hébergement, puisqu’on nous a expliqué qu’il s’agit de concurrencer le cinéma allemand, dont nous connaissons la grande productivité… (Sourires.)

J’émets donc un avis favorable au sous-amendement n° 411 du Gouvernement et au sous-amendement n° 429 et je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée sur le sous-amendement n° 430, deuxième rectification. Sous réserve de l’adoption de ces sous-amendements, je ne peux être que favorable à l’amendement n° 296.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur les sous-amendements nos 429 et 430, deuxième rectification ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement est officiellement favorable à ces sous-amendements.

M. Jean-Christophe Lagarde. Avec enthousiasme !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Je vous remercie de l’avoir noté ! (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Bloche.

M. Patrick Bloche. S’agissant de la position officielle du Gouvernement, je veux retenir la manière dont elle a été exprimée pas plus tard que mardi soir, lorsque nous avons examiné un amendement que j’avais déposé concernant la TVA à taux réduit sur la billetterie de cinéma, c’est-à-dire le bout de la chaîne de production cinématographique. J’ai en effet en mémoire les propos enthousiastes du ministre du budget, qui promouvait lui-même le crédit d’impôt cinéma pour me demander de retirer mon amendement, ce que j’ai finalement fait. Je souhaiterais donc que, ce vendredi matin, le même enthousiasme s’exprime et que nous ayons une image réaliste de ce qu’est le cinéma.

On peut en sourire, dire que le cinéma, c’est la culture, le strass, les paillettes, le tapis rouge de Cannes et les revues people.

M. Jean-Christophe Lagarde. Les palaces !

M. Patrick Bloche. Mais on peut aussi voir le cinéma comme une industrie culturelle extrêmement puissante, qui nous permet d’avoir un cinéma national, de créer de l’emploi, de la richesse, de la croissance. Au reste, les régions ont pris conscience de l’apport de l’industrie cinématographique, puisqu’elles s’engagent pleinement, par des politiques extraordinairement actives, en faveur de la localisation des tournages de cinéma sur leur territoire.

Quel est donc notre rôle ce matin ? Créer à travers ce crédit d’impôt un cadre fiscal qui permette à la France d’être tout simplement compétitive et attractive. Je dis bien « compétitive », car c’est le mot-clé, et c’est bien de compétitivité dont nous parlons dans ce projet de loi de finances rectificative pour 2012.

Nous avons perdu des points. Pierre-Alain Muet, avec lequel j’ai cosigné cet amendement – je n’oublie pas Guillaume Bachelay, également cosignataire –, a très bien argumenté sur la nécessité de rattraper le retard que nous accumulons depuis déjà plusieurs années et qui conduit à ce que des tournages, y compris de films français, se délocalisent dans des pays très voisins – même pas dans les pays de l’ex-Europe de l’est, mais en Allemagne, à nos frontières. Ce n’est pas le problème du cinéma français et du cinéma allemand : il s’agit simplement de faire revenir sur notre territoire national des tournages que nous accueillions dans le temps, et dont on sait tout l’intérêt qu’ils présentent : un tournage sur un territoire, c’est de la création d’emplois indirects, c’est un élément fondamental d’attractivité économique.

Je voudrais vraiment que nous puissions adopter l’amendement que j’ai eu le plaisir de présenter avec Pierre-Alain Muet. J’accepte avec enthousiasme le sous-amendement du Gouvernement, parce que nous parlons attractivité des territoires, industrie et compétitivité.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Alain Muet.

M. Pierre-Alain Muet. Je souhaite que nous en restions à la position du Gouvernement et à son sous-amendement.

Je rappelle quelques chiffres : 70 % des films français dont les budgets dépassent 10 millions d’euros sont tournés chez nos voisins, mais sont subventionnés par le CNC. Nous en sommes arrivés à une situation aberrante : nous subventionnons des films français qui sont tournés en Allemagne ou en Grande-Bretagne qui le pays offrant les plus grandes facilités financières et fiscales. C’est pour cette raison que je vous demande d’être très attentifs aux paramètres de ce crédit d’impôt. Le plafonnement en Allemagne est de 4 millions d’euros ; c’est pour cela que le Gouvernement propose de passer de 1 à 4 millions d’euros. Il faut en rester à ce plafonnement de 4 millions d’euros. On croit y gagner en fixant le plafond à 2 millions d’euros ; en réalité, cela va nous faire perdre des tas de films. Nous avons des studios performants en France. Nous en avons en Rhône-Alpes, dans l’agglomération lyonnaise…

M. Razzy Hammadi. À Montreuil !

M. Pierre-Alain Muet. … et à Montreuil, bien sûr. Nous en avons y en a un peu partout. Et ces studios de grande qualité voient souvent des tournages leur échapper, tout simplement parce nous n’avons pas de crédit d’impôt adapté. Restons-en donc à la position bien équilibrée du Gouvernement.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Mes chers collègues, nous sommes en train d’examiner une loi de finances, un collectif qui plus est, qui va entériner à la fin de cette année un déficit de 90 milliards d’euros.

Vous avez raison, monsieur Bloche, le cinéma est une industrie. Le cinéma français crée des emplois, le cinéma français a une excellente réputation. Mais il y a des limites à tout. Je suis effrayé par le coût : 70 millions d’euros ! Vous rendez-vous compte de ce que cela représente ?

Tout à l’heure, nous avons discuté d’un amendement sur la compétitivité de notre industrie viticole, avec un plafonnement à 85 % des frais financiers. Cela a été balayé d’un revers de main, et j’ai trouvé que la position du Gouvernement était raisonnable. Ce n’est pas, monsieur Bloche, parce que l’on brandit les mots d’« attractivité » et de « compétitivité » qu’il doit en découler une dépense fiscale portée à 70 millions d’euros. C’est colossal !

Il est possible qu’au Royaume-Uni et en Allemagne, on ait récemment amélioré le crédit compétitivité. Mais je vous pose une question : existe-t-il dans ces deux pays les SOFICA, pour 30 millions d’euros par an ?

M. Razzy Hammadi. Ce n’est pas la même chose !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Existe-t-il un centre national du cinéma, dont le financement est passé en quelques années de 300 à 700 millions d’euros ?

M. Dino Cinieri. Tout de même !

M. Pierre-Alain Muet. Vous préférez subventionner les œuvres qui sont tournées à l’étranger ?

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Il faut raison garder. On ne peut pas multiplier les dépenses tous azimuts, monsieur Muet. À plus forte raison avec un amendement de ce genre : quand bien même nous avons pu l’examiner en commission des finances, nous travaillons à l’aveugle.

Prenez les dépenses d’hébergement. Instaurer un crédit d’impôt par tournage sur les simples dépenses d’hébergement, cela revient à dire que l’équipe de tournage hébergée à Paris, par exemple, ouvrirait droit à une réduction d’impôt, voire à un crédit d’impôt. Autrement dit, on lui ferait un chèque qui pourrait atteindre 2 millions d’euros ! Est-ce bien raisonnable ? Il faut tout de même parler chiffres ! Évidemment, si nous avions un budget en excédent, nous pourrions envisager une telle mesure ; mais un amendement de ce genre doit être précédé d’une étude d’impact rigoureuse. Et cela peut se faire, monsieur Bloche : pour ma part, j’ai été convaincu par votre argumentaire. Le problème, c’est que cette étude d’impact que vous évoquez, cette incidence sur l’emploi en France et sur notre compétitivité, nous ne l’avons pas à notre disposition. Donc, nous travaillons à l’aveugle : c’est ce que j’ai expliqué à M. Muet avant-hier.

Je n’aime pas beaucoup rappeler cette période, mais j’ai dû résister constamment, pendant dix ans, à la multiplication des dépenses fiscales, des crédits d’impôt, des niches tous azimuts dans ces domaines ; chaque fois, inlassablement, je demandais que l’on me prouve que cet effort sur l’argent public se transformerait en emplois, en investissements et en tournages supplémentaires dans notre pays.

Mme la présidente. La parole est à Mme Karine Berger.

Mme Karine Berger. Je suis étonnée de voir ce débat de fond s’ouvrir à nouveau sur le crédit d’impôt.

Il y a quelques jours, et même quelques heures, je vous ai vu autrement moins virulent, monsieur Carrez, à propos d’un autre crédit d’impôt, sur la nécessité de disposer d’évaluations en amont.

L’amendement de M. Muet s’inscrit dans la même logique économique que le crédit d’impôt que nous avons voté il y a quelques jours : si j’ai bien compris les explications de mon collègue, nous sommes dans la partie concave de la courbe de l’affaire et, par conséquent, moins d’impôt permettrait de faire rentrer plus d’impôt.

Ayant eu dans le passé quelque activité dans le secteur du cinéma, je pense que cette affirmation est plausible, mais qu’elle mériterait peut-être de faire l’objet d’évaluations dans le futur. Comme nous avons prévu pour le crédit d’impôt compétitivité emploi la possibilité de revenir sur les évaluations dans les années à venir, je propose à notre collègue d’admettre d’ores et déjà qu’il faudra une évaluation a posteriori.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.

M. Jean-Christophe Lagarde. Il y a quelques années, lorsque nous avons modifié le règlement de l’Assemblée nationale et même quelques lois organiques, nous avons souhaité disposer, à chaque fois que nous votions une mesure, notamment dans le cadre des lois de finances, d’une étude d’impact, comme vient de le rappeler le président de la commission, mais pas a posteriori. La disposition proposée, qui suscite l’enthousiasme du Gouvernement, fait plus que doubler le coût actuel. Quand on double un coût, ce n’est pas après coup que l’on doit évaluer l’impact, mais avant.

J’ai été assez convaincu par l’argumentation de M. Bloche, mais j’aimerais en l’occurrence que l’on puisse réellement évaluer le dispositif proposé. Et puisque vous êtes si enthousiaste, monsieur le ministre délégué,…

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Et charitable !

M. Jean-Christophe Lagarde. …sans doute pourriez-vous, comme vous l’avez fait tout à l’heure, prendre l’engagement de fournir une évaluation pour l’an prochain et de rendre compte de l’impact de cette mesure. Cela me semble indispensable. Faute de quoi, ce sera à vous, monsieur le président de la commission des finances, d’agir dans le cadre des fonctions qui sont les vôtres pour que nous puissions être informés.

Manifestement, les lobbies ont eu largement de quoi faire pour convaincre nombre de nos collègues, voire le Gouvernement. Dont acte : après tout, le mot « lobbies » n’est pas une insulte et ils ont parfois raison ! Les lobbies culturels bénéficient, chacun le voit, d’une audience particulièrement sensible dans la majorité,…

M. Razzy Hammadi. La culture, tout simplement !

M. Jean-Christophe Lagarde. …et jusqu’au sein du Gouvernement. Cela étant, il vous sera bien plus difficile, monsieur le ministre, de nous refuser un amendement bien moins coûteux au motif que la situation budgétaire ne le permet pas. Si nos collègues nous avaient démontré que ce crédit d’impôt fera rentrer plus d’argent, nous aurions peut-être pu le voter. Mais pour cela, il fallait une étude d’impact. Dès lors que ce n’est pas le cas, la prochaine fois qu’il y aura 70 millions d’euros à dépenser, on ne pourra plus entendre le Gouvernement expliquer qu’il n’y a pas d’argent dans les caisses.

Cela dit, je me félicite de la logique de la compétitivité, car celle-là, je peux parfaitement la comprendre.

Enfin, monsieur le rapporteur général, j’ai beaucoup apprécié vos propos sur les frais d’hébergement. Nous sommes bien d’accord : les crédits d’impôt ne sont pas là pour subventionner les palaces ou les suites royales, où que ce soit. Malheureusement, mais peut-être n’ai-je pas bien lu, je n’ai pas retrouvés de plafonnement dans votre sous-amendement. J’aimerais savoir où il figure, pour pouvoir le soutenir.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Je répondrai d’abord à M. Lagarde qui m’a posé une question précise.

Le sous-amendement n° 429 renvoie à la limite d’un plafond fixé par un décret, lui-même calé sur le décret que le Gouvernement propose dans le sous-amendement n° 412 relatif au cinéma international. Nous allons l’examiner dans quelques instants.

Dans le souci d’arriver à un consensus, comme je l’avais laissé entendre dans mon propos initial, je suis prêt à retirer le sous-amendement n° 430, deuxième rectification, qui propose de ramener le plafond de 4 à 2 millions. En revanche, je maintiens le sous-amendement n° 429 qui plafonne les frais d’hébergement, par parallélisme des formes avec le sous-amendement n° 412, relatif au cinéma international.

M. Jean-Christophe Lagarde. Très bien !

M. Christian Eckert, rapporteur général. Pour loger des acteurs nationaux sur un lieu de tournage national, on peut s’en tenir au tarif que j’ai évoqué et qui me semble tout à fait décent. Je rappelle que les frais de restauration, eux, ne sont pas plafonnés…

M. Jean-Christophe Lagarde. Ce qui déjà est discutable !

M. Christian Eckert, rapporteur général. Cela peut en effet interpeller. Mais pour les frais d’hébergement, je propose d’appliquer la même règle que celle proposée par le Gouvernement dans le sous-amendement n° 412 relatif au crédit d’impôt applicable au cinéma international.

(L’amendement n° 430, deuxième rectification, est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.

M. Gilles Carrez, président de la commission. Je soutiens totalement le rapporteur général.

Je disais tout à l’heure qu’il fallait raison garder. Je vous en donne un seul exemple.

Dans ce crédit d’impôt s’applique à un certain nombre de dépenses engagées dans le cadre d’un tournage : d’une part, les dépenses de restauration, dont on vient de voir qu’elles n’étaient pas plafonnées, d’autre part, les dépenses d’hébergement. Le rapporteur général nous dit, si j’ai bien compris, propose par son sous-amendement d’introduire un plafond de 270 euros par nuitée à Paris.

M. Jean-Christophe Lagarde. C’est une bonne chose !

M. Gilles Carrez, président de la commission. Les députés que nous sommes, surtout ceux venant de province, savent que leur plafond à eux de 122 euros… Une subvention publique sur une nuitée plafonnée à 270 euros, cela donne à réfléchir, et nous sommes là pour cela. Je le dis également à Patrick Bloche : imposer ce plafond, c’est le moins que l’on puisse faire si l’on se soucie de l’utilisation de l’argent public. Et pour vous livrer le fond du fond de ma pensée, 270 euros la nuitée, cela me paraît même un peu élevé !

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Nous discutons de tournages dits domestiques, non internationaux. Les parlementaires, le Gouvernement en est d’accord, souhaitent porter le plafond du crédit d’impôt de 1 à 4 millions d’euros, ce qui, sachant que le taux est de 20 %, correspond à 20 millions d’euros de dépense. Il me semble que l’appréciation faite par le Gouvernement n’est pas en arrière de la main et que, ce faisant, et d’un commun accord, nous manifestons notre souhait de maintenir, voire d’accroître l’attractivité de notre pays pour ces tournages.

Le rapporteur général a retiré son sous-amendement qui limitait le plafond à 2 millions d’euros, ce qui aurait ramené la dépense de 20 à 10 millions. Cela n’aurait peut-être pas compromis de manière très significative l’attractivité de la France ; mais le choix est fait, restons-en là.

Le rapporteur général souhaite que les nuitées soient plafonnées – à un niveau qui ne condamne pas ceux qui tourneraient ces films à s’abriter dans les lieux les plus inhospitaliers. (Sourires.) Précisons, le rapporteur général ainsi que le président de la commission des finances l’ont très justement rappelé, que les frais de restauration, eux, ne sont absolument pas plafonnés.

Sur ce sujet, j’entends donc la position du rapporteur général. Le Gouvernement n’a pas de position officielle sur ce sujet ; il me semble qu’en cohérence avec sa décision de relever le plafond de 1 à 4 millions d’euros, il ne peut qu’être favorable au sous-amendement du rapporteur général concernant les nuitées. Si la représentation nationale décidait d’en venir là, peu auraient à protester.

(Les sous-amendements nos 411 et 429, successivement mis aux voix, sont adoptés.)

(L’amendement n° 296, sous-amendé, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Bloche, pour soutenir l’amendement n° 295.

M. Patrick Bloche. Je le défendrai d’autant plus rapidement que le débat a largement eu lieu, et je suis heureux que nous ayons pu parvenir à un accord, et surtout à reconnaître que le cinéma n’est pas une dépense futile, secondaire ou inutile : je remercie le rapporteur général, le président de la commission des finances et le ministre d’avoir pris en compte sa dimension industrielle de l’industrie cinématographique.

Nous avons parlé du crédit d’impôt national : l’amendement n° 495 que nous avons déposé, Pierre-Alain Muet, Guillaume Bachelay et moi-même, vise à modifier le plafond du crédit d’impôt international. Dans la même logique, nous souhaitons attirer sur le territoire national des tournages internationaux.

J’ai entendu ce que disait le président de la commission des finances que j’écoute toujours avec une grande attention : nous sommes amenés à voter des dispositions fiscales sans étude d’impact et sans évaluation. Certes, mais nous avons été amenés, avec Pierre-Alain Muet, et le Gouvernement a apporté sa contribution par un sous-amendement, à prendre en compte des comparaisons internationales. Nous sommes dans le domaine de la compétitivité, de l’attractivité : si nous voulons que des films internationaux se tournent à nouveau en France et non plus dans des pays très voisins du nôtre, il faut bien un dispositif incitatif qui rende la France de nouveau attractive. Je n’ai pas besoin de rappeler quelle majorité a voté, il y a quelques années, les bases de ce crédit d’impôt cinéma.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué, pour donner l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 295 et soutenir les sous-amendements nos 412, 413 et 414.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le sous-amendement n° 412 vise à maintenir à 1 million d’euros le montant minimal de dépenses devant être réalisées en France, afin de garantir le caractère substantiel des opérations de tournage.

Le sous-amendement n° 413 vise à encadrer davantage les dépenses d’hébergement, désormais prises en compte. Il me semble que ce que la représentation nationale vient de décider devrait favoriser son adoption, par cohérence : il faut un minimum de cohérence dans les dispositifs fiscaux d’incitation, dès lors qu’il s’agit de la même activité, en l’occurrence la production cinématographique.

Enfin, le sous-amendement n° 414 vise à augmenter le plafond du crédit d’impôt pour le porter à 20 millions d’euros par œuvre, au lieu de le supprimer totalement comme le propose l’amendement.

Sous réserve de l’adoption de ces sous-amendements, le Gouvernement pourrait donner un avis favorable à l’amendement de M. Muet.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir le sous-amendement n° 428, deuxième rectification, et donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 295 et les sous-amendements du Gouvernement.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Le dispositif actuel a coûté 4 millions d’euros, pour sept bénéficiaires. L’exposé sommaire ne précise pas le coût de l’amendement tel qu’il est rédigé, mais selon des informations fournies par le ministère du budget, les deux amendements, c’est-à-dire celui que nous venons d’adopter et celui-ci, coûteraient autour de 150 millions d’euros. Par soustraction, j’imagine que l’amendement n° 295 coûterait autour de 70 millions d’euros.

M. Pierre-Alain Muet. On ne peut pas évaluer ce coût !

M. Christian Eckert, rapporteur général. Je suis désolé, je suis bien obligé de me référer aux chiffres qui me sont fournis !

Je suis favorable aux sous-amendements du Gouvernement – le débat a déjà eu lieu. En revanche, l’amendement de notre collègue présente l’inconvénient de supprimer tout plafond. Le Gouvernement avait proposé un plafond de 20 millions d’euros, la commission a souhaité le ramener à 10 millions d’euros. Comme l’a rappelé à l’instant le ministre délégué, le taux du crédit d’impôt est de 20 % ; autrement dit, il faut multiplier par cinq pour avoir le plafond de dépenses éligibles au crédit d’impôt. Ainsi, un plafond de 20 millions, comme le propose le Gouvernement, conduirait à une dépense d’assiette de 100 millions, ce qui pour un film, fût-ce une grande production, est déjà élevé.

J’avais proposé un plafond de 10 millions d’euros, parce qu’il me semble inimaginable de ne pas plafonner ce type de crédit d’impôt. Ce plafond a été retenu par la commission, ce qui a fait tomber l’amendement du Gouvernement qui le fixait à 20 millions.

Je ne suis pas figé sur le plafond. Si le Gouvernement insistait pour revenir à son plafond de 20 millions, je ne me considérerais pas comme honteusement battu, sous réserve bien entendu les sous-amendements que soient adoptés.

Pour résumer : avis favorable au seuil d’entrée proposé par le Gouvernement, avis favorable au plafonnement de l’assiette proposé par le Gouvernement, avis favorable à un plafonnement – qu’il soit de 20 millions comme le proposait le Gouvernement ou de 10 millions comme l’a voté la commission. Sous ces trois réserves, je serai favorable à l’adoption de l’amendement n° 295.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Alain Muet.

M. Pierre-Alain Muet. Comme je l’ai dit en présentant ce crédit d’impôt, nous n’avions pas fixé de plafond, non parce que nous pensons qu’il ne devait pas être plafonné, mais parce que nous avions besoin d’une étude un tant soit peu robuste : c’est ce qu’a fait le Gouvernement, c’est son rôle de faire des travaux interministériels en s’appuyant aussi bien sur les services de Bercy que sur les autres.

Ayons toutefois conscience d’une chose : Sur les 2 milliards de chiffre d’affaires générés par les tournages localisés en Europe, nous n’en captons que 3 %, c’est-à-dire 60 millions. La plupart des films – y compris ceux que nous subventionnons par le CNC – sont tournés ailleurs qu’en France. L’objectif est de calibrer ces crédits d’impôt de telle sorte que, sur un marché concurrentiel que se disputent sept ou huit nations, on rapatrie au moins pour partie les tournages que nous finançons : j’ai déjà cité l’exemple du dernier Astérix.

Le calibrage de 20 millions d’euros proposé par le Gouvernement me parait le bon, parce qu’il nous met légèrement au-dessus de la situation allemande. Je suis désolé de le dire : nous sommes sur ce qu’on appelle une concurrence oligopolistique entre quelques pays et des paramètres bien choisis peuvent changer complètement la donne.

M. Lagarde, à raison, demande une évaluation. Mais il faut avoir conscience qu’une telle évaluation ne peut être faite qu’ex post, sur tous les dispositifs incitatifs. J’en ai suffisamment fait dans une autre vie pour savoir qu’on ne peut y parvenir qu’en s’appuyant sur les données observées.

C’est la même chose pour le coût. Un dispositif incitatif, s’il marche, a un coût ; s’il ne marche pas, c’est-à-dire si les dispositifs que nous adoptons ne changent rien à la situation actuelle, je rassure mes collègues, il ne coûtera rien. Mais si nous votons des dispositifs incitatifs, c’est bien pour qu’ils aient un effet.

M. Jean-Christophe Lagarde. C’est le retour économique qui est intéressant.

M. Pierre-Alain Muet. En effet. Certaines études sur ce point mettent en évidence des effets de levier ou des effets multiplicateurs : à les croire, chaque euro dépensé, dans un dispositif bien calibré, peut engendrer six à sept euros de tournage en France. Si c’est le cas, avec les taux de pression fiscale que nous avons, la mesure serait entièrement autofinancée. Je ne suis pas certain que ce soit parfaitement garanti, mais les études que j’ai lues, et qu’il faudra approfondir, montrent que cela peut être extrêmement efficace.

J’appelle donc l’attention de mes collègues sur le calibrage : ce n’est pas la peine de changer la loi si le dispositif ne change rien et si les tournages – y compris ceux de productions françaises – continuent de se faire à l’étranger.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Monsieur Muet, quand Alfred Hitchcock a tourné La Main au collet en 1955, sur la Côte d’Azur, il n’y avait pas de crédit d’impôt et l’équipe de tournage – dont une certaine actrice qui a eu ensuite un avenir à Monaco – était hébergée au Carlton. Il n’y avait pas d’aide fiscale pour payer le séjour au Carlton ; pourtant, cet excellent film a été tourné en France.

Je soutiens complètement notre rapporteur général. Soyons cohérents les uns et les autres : nous avons passé des journées et des nuits entières à plafonner toutes les niches, toutes, l’une après l’autre, et voilà que notre collègue nous propose de déplafonner totalement ce crédit d’impôt !

Regardons les chiffres ensemble. Le Gouvernement nous propose de réintroduire un plafond, mais avec une générosité qui me surprend de la part du ministre délégué au budget…

M. Dominique Baert. Même lui n’en revient pas ! (Sourires.)

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Il propose de le porter à 20 millions d’euros : avec un crédit d’impôt à 20 %, cela veut dire que l’on subventionne des tournages de 100 millions d’euros ! C’est colossal.

M. Jean-Christophe Lagarde. Il n’y en a pas beaucoup dans l’année !

M. Dominique Baert. C’est pour Luc Besson !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Je vous demande de soutenir votre rapporteur général : sa proposition à 10 millions d’euros permet d’aller jusqu’à des tournages de 50 millions. Cela me paraît raisonnable. On passerait de 4 à 10 millions : c’est plus qu’un doublement et je pense que ce sera opérationnel.

M. Jean-Christophe Lagarde. Cela laisse de la place pour pas mal de films.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. C’est vrai, ces crédits d’impôt sont nécessaires. J’ai cité un exemple des années 50, j’aurais pu en citer d’autres plus récents, mais une compétition internationale s’est instaurée, je le reconnais. Nous avons une industrie encore florissante. Nous avons tous à l’esprit le naufrage du cinéma italien, la fermeture de Cinecittà, alors que le nôtre a bien tenu le coup. Il faut faire un effort, je suis d’accord ; mais nous devons être partagés entre l’intérêt extrême que nous portons au cinéma sous son aspect culturel, mais également en tant qu’industrie de main-d’œuvre et de technologie avancée, et notre souci du bon usage des deniers publics. Veillons à ne pas voter des mesures excessives au regard de notre doctrine en matière d’aide publique. Je vous demande instamment de vous rallier à l’amendement voté en commission des finances et fixant le plafond à 10 millions d’euros : il me paraît très raisonnable.

Mme la présidente. La parole est à M. Razzy Hammadi.

M. Razzy Hammadi. Monsieur le président de la commission des finances, vous faisiez référence à ce film d’Hitchcock qu’est La Main au collet ; puisque nous devons mettre la main à la poche (Sourires), je trouve nécessaire de manifester une certaine perplexité et suis en faveur du plafonnement à 10 millions, pour deux raisons.

La première tient au doute que je ressens face aux critères du plafonnement. J’ai bien entendu l’argumentation : nous financerions en fait des films réalisés à l’étranger.

Premièrement, sur un plan très technique et pratique, l’important – et c’était d’ailleurs l’esprit du crédit d’impôt –, ce n’est pas tant l’endroit où est réalisé le film que celui où sont payés les salaires. Si des salariés français, pour des besoins de tournage, ont besoin d’une banquise, on ne va pas se lancer dans la reproduction de cette banquise… Il ne faudrait pas que, pour des raisons fiscales, on en vienne à limiter les exigences d’un scénario.

Deuxièmement, et je m’adresse à mon collègue Jean-Christophe Lagarde, la problématique en question ici est celle du lieu de tournage. En plafonnant à 10 millions d’euros, nous gardons une certaine latitude, y compris pour discuter dans le futur d’une problématique plus particulière liée à l’industrie du cinéma : je veux parler des studios de cinéma qui appellent de notre part une réflexion particulière et une fiscalité adaptée. Il n’y a pas d’industrie sans infrastructure industrielle : c’est là que se jouent la concurrence internationale et le dumping. Élu de Montreuil et de Seine-Saint-Denis, je peux ici en témoigner.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.

M. Jean-Christophe Lagarde. Je rejoins les propos de mon collègue, élu comme moi de Seine-Saint-Denis, sur les studios. La compétitivité, monsieur le président de la commission des affaires culturelles, c’est un vrai sujet. Ou bien nos studios sont attractifs, ou bien ils ne le sont pas ; soit on les favorise, soit on ne les favorise pas. De gros efforts sont actuellement réalisés dans le nord-est parisien ; il y aurait réellement là matière à débat.

Je tenais à soutenir à mon tour le rapporteur général et le président de la commission des finances, en reprenant même l’argumentation avancée par MM. Bloche et Muet. Objectivement, des productions cinématographiques à plus de 100 millions d’euros par an, il n’y en a pas tant que ça. J’ignore le chiffre exact, mais je pense que si l’on parlait de moins d’une dizaine dans le monde, on ne serait pas loin de la vérité. Qui plus est, la plupart de ces productions n’auront pas vocation être créées en France ; et quand bien même certains tournages peuvent venir occasionnellement à Carcassonne, parce qu’il nous reste des cités médiévales, cela ne concernera pas la totalité des productions.

Par conséquent, l’essentiel de l’industrie cinématographique, qui a besoin sans doute d’être soutenue et qui doit entrer dans la démarche compétitivité, ne serait pas touché par le plafond de 20 millions d’euros, qui concerne en réalité des productions à 100 millions d’euros. À 50 millions, il me semble que la proposition du rapporteur général est raisonnable : cela concernera 90 à 95 % de la production française et nous évitera d’aller subventionner les plus grosses productions qui, de toute façon, n’ont pas besoin de nous pour sortir, et encore moins de raisons pour choisir la France.

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Bloche.

M. Patrick Bloche. Je ne voudrais pas prolonger inutilement ce débat, car tous les arguments ont été mis sur la table. Rappelons tout de même que c’est le Gouvernement, et non Pierre-Alain Muet ou moi-même, qui a proposé ce plafond de 20 millions d’euros dans son sous-amendement : c’est la contribution du Gouvernement à notre débat sur le crédit d’impôt international.

Ces 20 millions constituent un plafond d’éligibilité des dépenses. Parler dès maintenant d’étude d’impact ou d’évaluation est prématuré : c’est seulement a posteriori que nous pourrons évaluer les effets, et au besoin réévaluer ce dispositif si nous jugeons l’effet d’aubaine trop important. Pour l’heure, parce que nous parlons compétitivité et attractivité des territoires, parce que le cinéma est une industrie créatrice d’emplois directs et d’encore plus d’emplois indirects, parce que les régions font des efforts considérables en ce domaine, l’enjeu est de relocaliser les tournages. Seulement 3 % des tournages internationaux sont aujourd’hui réalisés en France. Avec un plafond d’éligibilité des dépenses de 10 millions, la France ne sera pas attractive et nous resterons à 3 %. À 20 millions d’euros, comme nous le propose le Gouvernement, nous serons attractifs. Tout l’enjeu est là. Je suggère donc que, par cohérence, ne soient votés que les sous-amendements du Gouvernement à notre amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. J’insiste naturellement sur l’importance que le Gouvernement attache aux sous-amendements qu’il a déposés.

Toutefois, monsieur le président de la commission des affaires culturelles, je ne voudrais pas qu’il y ait de malentendu ou de confusion, quand vous parlez d’éligibilité : dès lors que l’on retient un taux de 20 % et un plafond de 20 millions d’euros, ce sont bien 100 millions d’euros qui sont éligibles, et non pas 20.

M. Jean-Christophe Lagarde. Eh oui !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. J’ai cru sentir une confusion à cet égard dans vos propos. Des tournages jusqu’à 100 millions bénéficient du taux de 20 %, soit 20 millions d’euros. Au-delà de 100 millions d’euros, le crédit d’impôt restera plafonné à 20 millions d’euros, mais le dispositif va néanmoins jusqu’à ces montants-là.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Je voudrais vous rappeler un chiffre, afin d’avoir les ordres de grandeur en tête : la dépense éligible au crédit d’impôt recherche est plafonnée à 100 millions d’euros. Au-delà de ce chiffre, le taux n’est plus de 30 %, mais de 5 %…

Mme la présidente. Je précise à chacun que l’adoption du sous-amendement n° 414 ferait de facto tomber le sous-amendement n° 428 deuxième rectification ; que chacun en soit bien prévenu avant de voter.

(Les sous-amendements nos 412 et 413 sont successivement adoptés.)

Mme la présidente. Je vais maintenant mettre aux voix le sous-amendement n° 414.

(Après une première épreuve déclarée douteuse, l’Assemblée est consultée par assis et levé. – Le sous-amendement n° 414 n’est pas adopté.)

(Le sous-amendement n° 428, deuxième rectification, est adopté.)

(L’amendement n° 295, sous-amendé, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des finances, pour soutenir l’amendement n° 23.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Cet amendement met en évidence l’évolution extrêmement rapide des dépenses de mécénat d’entreprise.

La loi relative au mécénat, que nous avons votée en 2003, a instauré une réduction d’impôt – autrement dit une niche fiscale – sur l’impôt sur les sociétés au titre des dépenses de mécénat. Le pourcentage adopté de 60 % est très élevé. Ainsi, une dépense de mécénat de 1 000 euros ouvre droit à une déduction à hauteur de 600 euros.

Ce qui devait se produire s’est produit : l’évolution de la dépense a été explosive : nous arrivons aux alentours de 700 millions d’euros. C’est vraiment considérable, sachant que l’on partait de pratiquement rien, puisque ce dispositif n’existait pas.

Mon amendement n° 23 vise donc, sans pour autant remettre en cause le mécénat d’entreprise, vraiment très utile, à adopter un taux plus raisonnable, soit 50 % au lieu de 60 %, pour essayer de freiner un peu la dérive de la dépense fiscale.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. La commission des finances a rejeté votre amendement, monsieur le président – vous le savez, puisque vous étiez là… (Sourires.)

La mesure bénéficie à environ 25 000 entreprises : ce dispositif est assez concentré, c’est vrai. Le comité d’évaluation des dépenses fiscales lui a attribué la note 2 sur une échelle allant de 0 à 3.

Il a été prévu, depuis assez longtemps – c’est un engagement du Président de la République – de ne pas modifier ces dispositions concernant le mécénat d’entreprise. D’où un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Même avis.

(L’amendement n° 23 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, pour soutenir l’amendement n° 87.

M. Jean-Christophe Lagarde. Après le débat que nous venons d’avoir, je ne doute pas que l’Assemblée et le Gouvernement accueilleront avec intérêt cet amendement présenté par le groupe UDI.

Son objet est d’ouvrir droit à la réduction d’impôts aux dons en matières premières alimentaires, transformées ou non, au profit d’organismes d’intérêt général concourant à l’aide alimentaire.

Ces dons alimentaires en nature aident aujourd’hui des centaines de milliers, voire des millions de nos compatriotes vivant sous le seuil de pauvreté : cela concerne en France plus de 8,5 millions de personnes, soit 14 % de la population. La consommation alimentaire représente aujourd’hui pour ces familles un véritable problème.

De plus, le calendrier se précipite, parce que les dons de lait se trouvent dès maintenant menacés : la récente décision du Gouvernement de supprimer la pénalité en cas de dépassement des quotas laitiers risque de remettre en cause ces dons. Au moins pourrait-on en contrepartie les faire bénéficier d’une réduction fiscale.

J’appelle aussi votre attention, et cela fera l’objet d’autres interventions du groupe UDI dans cet hémicycle, sur le fait qu’en ce moment même, l’Union européenne cherche à son tour à réduire les aides aux organismes caritatifs ; on se dirige ainsi vers une véritable pénurie de dons alimentaires.

L’amendement n° 87 vise donc à tenir compte de l’effort que représente le don de matières alimentaires aux associations caritatives, qui ensuite les redistribuent aux personnes les plus pauvres dans notre pays. Cela se fait d’ailleurs pour les dons monétaires : il n’y a pas de raison que les dons matériels ne bénéficient pas également d’une réduction d’impôt.

J’insiste auprès de vous, chers collègues : les associations – banque alimentaire, etc. – indiquent aujourd’hui qu’elles ont de plus en plus de difficultés à simplement recueillir des matières premières.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. La commission n’a pas examiné cet amendement.

Celui-ci propose de rendre éligible à la réduction d’impôt sur les sociétés dite « mécénat d’entreprise » les dons aux œuvres de matières premières agricoles destinées à l’alimentation humaine. Il semblerait, selon les informations qui me sont parvenues, que cet amendement soit satisfait. Je laisse éventuellement à M. le ministre le soin de s’exprimer sur le sujet. En attendant, dans la mesure où je crois votre amendement satisfait, j’émets un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Monsieur Lagarde, vous proposez d’introduire une disposition spécifique relative aux dons en nature issus de la réalisation conjointe de dons de matières premières agricoles et de prestations à titre gratuit de conditionnement et/ou de transformation de ces matières premières.

Le Gouvernement n’est pas favorable à votre proposition, car les donc en nature sont d’ores et déjà éligibles. En outre, il appartient aux donateurs de convenir ensemble des modalités de transmission à l’organisme des informations. Ainsi, inscrire une telle mesure dans la loi serait, me semble-t-il, inutile. Le Gouvernement appelle donc au rejet de cet amendement, si par hypothèse il n’était pas retiré.

(L’amendement n° 87 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 284 et 283, qui peuvent faire l’objet d’une présentation commune.

La parole est à M. Thomas Thévenoud.

M. Thomas Thévenoud. Je défendrai ces deux amendements en y associant mes collègues Carole Delga et Patrick Bloche. Ce sont des amendements tout à la fois « cité médiévale » et « faubourg Saint-Antoine »… Le but est de réconcilier l’une et l’autre à travers l’aménagement du régime du crédit d’impôt en faveur des métiers d’art.

Nous avions déjà, lors de l’examen du projet de loi de finances, débattu de la prorogation du crédit d’impôt « métiers d’art », appelé à s’éteindre à la fin de cette année. Nous avons travaillé avec vous, monsieur le ministre, et avec vos services, afin de préciser les modalités de mise en œuvre de cette prorogation, qui fait d’ailleurs partie des engagements du Président de la République, ainsi que les conditions d’application du CIMA, qui ont donné lieu à un certain nombre de contentieux ces derniers mois.

Nous proposons de proroger ce dispositif jusqu’en 2016, de le simplifier, notamment en ce qui concerne la conception de nouveaux produits, et de le plafonner la dépense fiscale à 30 000 euros par an et par entreprise.

Rappelons que 60 % des entreprises de ce secteur n’emploient pas de personnel salarié. L’amendement n° 283 vise donc à tenir compte de la contribution des entrepreneurs individuels et des dirigeants de société de personnes relevant de l’impôt sur le revenu pour leur permettre de bénéficier du crédit d’impôt en faveur des métiers d’art.

Je ne reviendrai pas sur l’intérêt de ce crédit d’impôt : c’est un soutien à la création, au savoir-faire français, mais aussi à l’activité économique de nombreux territoires, ruraux ou urbains, où de nombreux artisans d’art continuent à travailler, à produire et à faire valoir l’excellence française.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. La commission n’a pas examiné ces amendements. Toutefois, le rapporteur général a bien entendu les motivations de notre collègue. Il est favorable à la prorogation de ce dispositif qui arrive en fin de vie.

Je propose de retenir plutôt l’amendement n° 284.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement a le même avis que le rapporteur général sur l’amendement n° 283 et partage sa préférence pour l’amendement de repli n° 284, qui précise mieux les choses en demandant la prorogation pour quatre années du crédit d’impôt et en le réservant aux entreprises créant des ouvrages en un seul exemplaire ou en petite série.

La disposition relative à la révision des règles de prescription dans le cadre du droit de reprise du crédit d’impôt était, bien évidemment, nécessaire : on sait les difficultés juridiques qu’a pu poser le CIMA. Outre le fait, vous l’avez rappelé, qu’il répond à une volonté du Gouvernement et de la majorité à laquelle vous appartenez en la matière et qu’il correspond à un engagement électoral, cet amendement permet de régler des difficultés juridiques qui pouvaient compromettre le plein succès de ces dispositions fiscales. C’est pourquoi je vous remercie d’avoir déposé l’amendement n° 284 auquel le Gouvernement est favorable, tout en vous demandant de retirer l’amendement n° 283.

Mme la présidente. Levez-vous le gage sur l’amendement n° 284, monsieur le ministre ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Effectivement, madame la présidente, dans l’hypothèse où l’amendement n° 284 serait adopté, le Gouvernement lèverait le gage.

Mme la présidente. Monsieur Thévenoud, retirez-vous l’amendement n° 283 ?

M. Thomas Thévenoud. Oui, madame la présidente.

(L’amendement n° 283 est retiré.)

(L’amendement n° 284, modifié par la suppression du gage, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir l’amendement n° 400 du Gouvernement.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le présent amendement propose de ne pas soumettre à la contribution de 3 % sur les dividendes les sommes que les sociétés d’investissement immobilier cotées doivent distribuer obligatoirement en application de la loi.

Chacun se souvient que, dans le cadre de la loi de finances rectificative, le Gouvernement a décidé de taxer à 3 % la distribution des dividendes pour deux raisons. D’abord, parce qu’il a besoin de recettes supplémentaires. Ensuite, parce qu’il nous semblait qu’en taxant les dividendes, on incitait davantage au réemploi des bénéfices, c’est-à-dire à l’investissement des profits réalisés plutôt qu’à leur distribution. Telle est la politique voulue par le Gouvernement.

Cette affaire est un peu délicate du fait que, par nature, les SIIC sont obligées de distribuer leurs dividendes. Il a donc été décidé, en loi de finances rectificative, de ne pas taxer à 3 % les distributions intermédiaires, car ces entreprises sont souvent constituées d’emboîtages d’entreprises ayant le même statut. Le Gouvernement propose à la représentation nationale de ne pas taxer les dividendes distribués en sortie de ces entreprises pendant un an. C’est le délai qu’il nous a paru nécessaire d’adopter pour discuter avec ces sociétés des modalités qui les verraient privilégier davantage qu’elles ne le font actuellement la construction de logements, et notamment de logements sociaux. Nous aurons donc, avec les dirigeants et les actionnaires de ces sociétés, un rendez-vous à la fin de l’année prochaine, afin de voir quels programmes ils ont lancé et les actions supplémentaires qu’ils proposent, le cas échéant, pour aider les pouvoirs publics à satisfaire à la création de logements, et notamment de logements sociaux.

Il va de soi que si rien n’était fait ou proposé, le Gouvernement se garderait la possibilité de revenir sur cette suppression temporaire de la taxation de 3 % en sortie des dividendes des SIIC.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Il faut effectivement tenir compte de la situation particulière des SIIC qui ont des obligations légales de distribution de dividendes. L’amendement du Gouvernement reprend d’ailleurs une suggestion que j’avais moi-même faite dès le mois de juillet dernier lors de l’examen du précédent collectif. Il est donc heureux que le Gouvernement se rallie à cette proposition et je ne peux qu’émettre un avis favorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.

M. Gilles Carrez, président de la commission. C’est un amendement extrêmement important.

Nous avons mis en place le régime des SIIC en 2003-2004 pour redonner de l’attractivité à l’investissement immobilier dans notre pays. Ces sociétés sont fiscalement transparentes ; en contrepartie, elles doivent distribuer au moins 85 % de leur résultat sous forme de dividendes. Comme l’a rappelé le rapporteur général, au mois de juillet dernier nous avons été plusieurs à indiquer au Gouvernement, qui en était conscient, que la taxe de 3 % sur les dividendes devait faire l’objet d’un traitement particulier : il convenait d’exonérer les SIIC de cette taxe, sachant que la quasi-totalité du résultat est redistribuée.

Je partage d’autant plus l’objectif poursuivi par le Gouvernement à travers cet amendement que nous assistons, depuis quelques années, à un désengagement des investisseurs institutionnels en matière de logement locatif – au sens large –, ce qui pose problème. M. Le Bouillonnec le sait bien, lui qui est un grand spécialiste du logement : nous avons besoin de chacun des segments pour que la politique du logement, surtout en zone tendue comme c’est le cas dans l’agglomération parisienne, soit efficace.

Je suis d’accord pour la reconduction, pendant un an, du système actuel. Toutefois, il faut en profiter pour engager une négociation avec l’ensemble des investisseurs institutionnels afin de les inciter à réinvestir dans le domaine du logement. Ce sera très utile pour desserrer les contraintes qui sont les nôtres en matière d’offre de logements.

(L’amendement n° 400 est adopté.)

Article 17
(précédemment réservé)

Mme la présidente. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article 17.

La parole est à M. Dino Cinieri.

M. Dino Cinieri. Artisans, commerçants, PME, PMI s’élèvent contre la flambée de la CFE. Dans le département de La Loire dont je suis élu, des centaines d’entre eux ont manifesté leur mécontentement.

Le dispositif de la CFE repose sur le chiffre d’affaires. Certains chefs d’entreprise peuvent réaliser un chiffre d’affaires important tout en ayant des marges très faibles.

Des quatre coins de l’hexagone, des chefs d’entreprise signalent des hausses invraisemblables de la CFE avec des montants à acquitter souvent multipliés par trois ou quatre en deux ans. Un commerçant de ma circonscription m’a informé ce week-end qu’il a vu sa cotisation passer de 750 euros en 2010 à 1 100 euros et 2 194 euros en 2012. Cette hausse est brutale et profondément injuste. Certaines intercommunalités à l’origine de ces fortes hausses n’avaient pas réalisé de simulation pour en mesurer l’impact sur les entreprises. J’ai été saisi de ce problème notamment par les communautés d’agglomération ou les communautés de communes comme Loire Forez, Saint-Étienne métropole, le Pilat rhodanien, les Monts du Pilat et le Pays de Saint-Bonnet-le-Château. Il me paraît donc indispensable de leur permettre de délibérer à nouveau sur ce sujet, sinon de nombreux chefs d’entreprise pourraient se retrouver dans une situation dramatique.

Mon collègue de la Loire, Jean-Louis Gagnaire, a déposé, à l’article 17, un amendement visant à permettre aux EPCI de délibérer à nouveau avant le 31 décembre 2012. C’est une bonne proposition, mais cela laisse très peu de temps pour réunir les conseils. C’est pourquoi je me range derrière le très sage avis de Charles de Courson qui propose de pouvoir délibérer à nouveau jusqu’au 21 janvier 2013. J’espère que le Gouvernement soutiendra cet amendement car je rappelle que certaines petites entreprises, notamment dans le secteur du bâtiment, devront subir également une hausse de la TVA.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je voudrais exprimer ma satisfaction, que je partage avec nombre de membres de la représentation nationale, face à la décision prise par le Gouvernement de revoir la situation dans laquelle se trouvent certains territoires, en particulier ceux où les décisions des communautés d’agglomération ou de communes à fiscalité propre ont des effets catastrophiques.

À cette occasion, je veux souligner la culpabilité – je ne parle pas de responsabilité, mais bel et bien de culpabilité – de la précédente majorité et du précédent gouvernement, qui ont mis en œuvre une réforme de la taxe professionnelle dans des conditions incroyablement scandaleuses.

M. Dino Cinieri. C’est faux !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. C’est une contrevérité ! Polémique inutile !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Nous avions dénoncé l’absence d’études d’impact sur le dispositif. Le Gouvernement, à l’initiative du rapporteur général de l’époque à qui je veux rendre hommage, avait, dans les deux lois de finances successives, avait repris cette affaire en essayant d’amoindrir l’effet de la loi.

Nous nous sommes mis dans une situation extrêmement complexe. Je rappelle également que la plupart des instances délibérantes, notamment les communautés d’agglomération, ne détiennent plus aucun instrument d’évaluation de la réalité fiscale de leur territoire. Du fait du travail de sape dont a souffert l’organisation des services des finances publiques départementaux, les élus n’ont pas eu connaissance des données réelles, ce qui les a amenés à prendre des décisions en ignorant totalement leurs conséquences. Au-delà d’une polémique désormais dépassée, nous devons faire en sorte que les délibérations que sont amenés à prendre notamment les établissements de coopération intercommunale se fassent en connaissance de données dont pour l’instant nous ne disposons pas.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.

M. Jean-Christophe Lagarde. Monsieur Le Bouillonnec, nonobstant le caractère polémique de votre intervention, je veux corriger au moins un élément de votre intervention : si nous sommes amenés à revenir sur ce dispositif, ce n’est pas grâce au Gouvernement, mais bel et bien à l’initiative du groupe UDI – la numérotation le prouve.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Ce n’est pas vrai !

M. Jean-Christophe Lagarde. Monsieur le rapporteur général, vous dites que ce n’est pas vrai : mais vous allez présenter un amendement rigoureusement identique au nôtre, sur lequel vous avez déposé quelques sous-amendements, sans doute pour en contester la paternité !

M. Christian Eckert, rapporteur général. Je vous répondrai ultérieurement !

M. Jean-Christophe Lagarde. Quoi qu’il en soit, le problème est réel ; et je le dis d’autant plus volontiers, monsieur Le Bouillonnec, qu’à titre personnel je n’avais pas voté ce dispositif. Je n’avais même pas voté le budget qui l’instaurait puisque j’ai toujours considéré que la réforme de la CFE n’avait pas été conduite correctement.

Je vais simplement moduler vos propos sur un point, monsieur Le Bouillonnec : à l’époque, le Parlement a dû corriger une réforme précipitée du Gouvernement, réforme dont l’impact sinon eût été sans doute bien pire. Le Parlement n’a alors pas travaillé dans de bonnes conditions ; nous l’avons regretté nous-mêmes. Reste que je ne suis pas sûr que ceux qui ont participé à ce travail de correction mériteraient tant d’opprobre ; c’est bien le Gouvernement qui avait alors, je le répète, lancé sa réforme de façon vraiment précipitée.

Cela dit, monsieur le ministre, je requiers votre attention sur un point qui me choque profondément depuis ce vote. Cette réforme porte en effet atteinte à la fois au droit des élus locaux et au droit constitutionnel – chacun devant connaître les bases sur lesquelles la CFE est calculée. Je suis maire et, même si vous n’êtes pas concerné pour la totalité de la période, je demande aux services de votre ministère depuis maintenant presque trois ans qu’on nous donne les bases de calcul. C’est certes une bonne chose, comme le propose le groupe UDI, de reporter le vote au 21 janvier prochain, mais nous ne connaissons pas les bases sur lesquelles l’impôt est calculé. Il fut un temps, cher collègue Le Bouillonnec, vous qui êtes maire d’une ville aux caractéristiques assez semblables aux miennes, où l’on nous donnait au moins les dix principaux critères ; or on n’est plus en mesure de nous les donner.

D’où un doute : cet impôt est-il vraiment calculé et sur quelle base ? Puisqu’on est incapable de me la donner, je peux m’interroger sur le fait de savoir si elle existe. Ensuite, si nous devons à nouveau délibérer d’ici au 21 janvier, comment allons-nous calculer l’effort fiscal que nous demandons à nos concitoyens ? C’est le cœur du sujet. Il faut que nous puissions une nouvelle fois délibérer, et je pense qu’il y aura un consensus sur ce point, mais nous devons savoir de quel droit l’administration de l’État ne donne pas aux élus locaux la base fiscale sur laquelle est calculée la CFE.

M. Claude de Ganay. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Cet amendement dont je reconnais bien volontiers la paternité au groupe UDI…

M. Jean-Christophe Lagarde. C’est vrai !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. …est le bienvenu et je ne doute pas que nous allons tous l’adopter. Cela dit, monsieur Le Bouillonnec, je souhaite rétablir l’exactitude des faits : comme vous avez eu la gentillesse de le rappeler, j’avais été conduit à re-rédiger totalement cette réforme.

Du temps de la taxe professionnelle, il existait une cotisation minimum dont vous vous souvenez peut-être qu’elle était assise sur la valeur locative d’un local de référence choisi dans la commune, valeur locative à laquelle on appliquait non pas le taux de la taxe d’habitation, mais celui de la taxe professionnelle.

J’ai pris soin, dans le texte que j’ai été conduit à récrire, de conserver ce dispositif. La taxe professionnelle, lorsque nous l’avons réformée, reposait sur deux piliers : un pilier « immobilier » – à savoir la valeur locative des immeubles – et un pilier « équipements, biens mobiliers » – à savoir les outils, les machines de l’entreprise. La réforme a consisté à garder le pilier « immobilier », devenu la CFE, et à remplacer l’assiette « équipements, biens mobiliers » par la valeur ajoutée.

Par prudence, j’ai alors déclaré qu’il fallait garder la cotisation minimum. Aussi toutes les communes n’ayant pris aucune délibération ont-elles conservé l’ancien système.

M. Jean-Christophe Lagarde. Exactement !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. C’est le cas dans ma propre communauté d’agglomération. Comme nous appartenons au même département, monsieur Le Bouillonnec, pourquoi avons-nous, pour notre part, décidé de ne pas prendre de délibération et de garder l’ancien système ? C’est parce que l’administration des impôts, dans le Val-de-Marne, ne pouvait pas nous donner d’éléments de simulation.

M. Jean-Christophe Lagarde. C’est le cas partout !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Puisque nous n’y voyions pas clair, nous n’avons pas délibéré ; du coup, nous n’avons aucun problème. C’est aussi le cas pour la commune de Villeneuve-sur-Lot, comme pour la commune du rapporteur général.

En revanche, différentes associations de maires, l’AMF, l’AMGVF, ont souhaité que, parallèlement à l’ancien système, on introduise un nouveau dispositif qui, dans le cadre d’une base de 200 à 2 000 euros, portée ensuite à 6 000 euros, leur permettait de choisir cette nouvelle valeur locative qui remplaçait donc l’ancien local de référence. Et de nombreuses collectivités, escomptant que cela leur permettrait de reconstituer de la « matière fiscale », autrement dire d’élargir leur assiette fiscale – puisque la réforme de la taxe professionnelle a consisté, comme toutes les réformes précédentes, à injecter des dotations là où il y avait des impôts – se sont parfois précipitées, sans avoir de simulations, vers la valeur maximum de 6 000 euros avec des taux qui, de surcroît, avaient augmenté. On se rend compte aujourd’hui que, faute de simulations, il s’agissait d’une erreur.

Je ne souhaite pas qu’on incrimine la réforme : après tout, ceux qui n’ont rien fait ne rencontrent pas de problèmes. En revanche, nous devons voter ces amendements et mettre à profit l’année 2013 pour définir un système mieux adapté aux demandes de nos collectivités locales. Nous y reviendrons tout à l’heure.

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 224 et 73.

La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement n° 224 qui fait l’objet de deux sous-amendements nos 386 et 457.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Avant de défendre mon amendement, je reviendrai sur ce qui vient d’être dit. Cherchons ce qui nous rassemble plutôt que ce qui nous divise, mes chers collègues. Pour ce qui est de la paternité des amendements, il y aurait beaucoup à dire : pour être tout à fait honnête, cet amendement ne manque pas de pères putatifs. Nos collègues sénateurs avaient déjà écrit des choses là-dessus, mais comme ils ont finalement rejeté l’ensemble du texte, il a fallu tout refaire. Un amendement n° 223 a déposé, reprenant à peu près un amendement similaire déposé au Sénat, mais récrit en liaison entre la commission et le Gouvernement ; l’amendement n° 224, lui, a bel et bien été rédigé par mes services, j’en atteste. Le fait que quelques collègues jouent au coucou, comme c’est parfois l’usage, en en reprenant mot pour mot le texte, ne devrait heurter aucune conscience ; c’est plutôt le signe que nous pouvons être d’accord sur certains points.

Ce qui peut également nous rassembler, chers collègues, c’est que la réforme de la taxe professionnelle – et mon prédécesseur vient de le montrer – continue à avoir plus que des queues de comète… Le dispositif est absolument incompréhensible pour le commun des mortels,…

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Exactement !

M. Christian Eckert, rapporteur général. …et je m’inclus parmi ceux qui ont bien du mal à le déchiffrer.

M. Jean-Christophe Lagarde. Moi aussi !

M. Christian Eckert, rapporteur général. J’en veux pour preuve ces interminables discussions sur des péréquations, des coefficients, des critères, des pondérations, qui nous occuperont d’ailleurs encore probablement une partie de la journée, et cela pour des montants parfois ridiculement faibles : je pense au fonds de péréquation de la CVAE à propos duquel on péréquait sur 25 millions d’euros pour un total d’un milliard d’euros, et à propos duquel on « s’aspouillait » pour savoir s’il fallait prendre en compte les vieux, les malades, les personnes âgées,…

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Surtout s’ils font du cinéma ! (Sourires.)

Mme Claudine Schmid. Quelle est la différence entre les vieux et les personnes âgées ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. …les logements sociaux, avec des coefficients de pondération variables !

Rassemblons-nous au moins sur le constat : il y a des choses à faire.

Je vous propose, madame la présidente, de présenter simultanément l’amendement n° 224, dont il est question ici, mais aussi l’amendement n° 223, que je défendrai tout à l’heure, car ils traitent de sujets très proches. Nous souhaitons, et la commission en est d’accord, par le biais de l’amendement n° 223, laisser la possibilité aux collectivités, contrairement à l’usage, de délibérer jusqu’au 21 janvier pour fixer la base pour le calcul de la cotisation minimale de CFE pour l’année 2013. Elles pourront corriger et fixer leur taux plancher jusqu’à cette date, ce qui laisse du temps.

Pour l’heure, l’amendement n° 224, lui, permet aux collectivités, là encore jusqu’au 21 janvier 2013, de prononcer des dégrèvements sur ce qui aurait pu leur paraître excessif et qui aurait été appliqué dès 2012 par ignorance, par culpabilité ou toute autre raison : chacun y retrouvera ses petits, ce qui nous intéresse étant de préparer l’avenir, de pouvoir régler au mieux ce qui peut l’être. Chacun pourra ensuite donner son point de vue sur la responsabilité des uns et des autres.

J’indique par avance que je serai favorable à un amendement que nous examinerons un peu plus loin sur la modification des seuils pour les redevables de la CFE, le fameux « 10-100 000 ». Au-delà de 100 000 euros, je préférerais créer une tranche à 250 000 euros – tout le monde aura compris ce dont je parle, et qui correspond à une demande assez générale.

Je vous remercie, madame la présidente, de votre indulgence pour ma longueur… et ma lourdeur.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, pour soutenir l’amendement n° 73.

M. Jean-Christophe Lagarde. Dans la droite ligne de ce que vient de dire le rapporteur général, attachons-nous à chercher ce qui nous rassemble. Il faut permettre aux collectivités de voter à nouveau, sachant, monsieur le président de la commission, que celles qui, à l’instar de celle dont je suis élu, n’ont pas délibéré n’ont pas créé de problème. Je pense d’ailleurs que les élus qui ont refusé de délibérer n’étaient que prudents puisque, je le répète, en ne nous donnant pas les bases de calcul de la CFE, on ne nous a pas donné la capacité de calculer l’effort fiscal ainsi demandé.

J’ajouterai que cette réforme qui donne lieu encore et encore à force discussions parce que ses effets induits n’avaient pas pu être mesurés faute d’une préparation suffisamment longue et sérieuse, doit être totalement remise à plat par la nouvelle majorité et le nouveau gouvernement. Nous devons prendre le temps et consulter les organisations d’élus locaux pour aboutir à un consensus. Ainsi, nos entreprises et notre industrie pourront être compétitives et lutter contre certains surcoûts pouvant conduire à des délocalisations. Il s’agit donc de garantir aux collectivités lisibilité et équité – j’y reviendrai au besoin.

En tout état de cause, il faut voter cet amendement, c’est le souhait du groupe UDI. Nous souhaitons ensuite, monsieur le ministre, une réponse à propos des bases fiscales, faute de quoi reporter la possibilité de délibérer jusqu’au 21 janvier n’aura pas de sens : voter quelque chose sans avoir les bases, c’est sans précédent sous la Ve République.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 73 ?

M. Christian Eckert, rapporteur général, rapporteur. Il est identique au mien, puisé à bonne source, comme me le souffle le président de la commission. Donc avis favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements identiques nos 224 et 73 ainsi que sur les sous-amendements nos 386 et 457 ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement est favorable à l’amendement du rapporteur général et, par voie de conséquence, souhaiterait que les autres soient retirés.

La direction générale des finances publiques, monsieur Lagarde, communique les taxes aux collectivités dans des délais qui peuvent être évidemment améliorés. Avec Pierre Moscovici, nous avons fixé des objectifs de performance concernant, précisément, ces temps de réponse. Je souhaite que les choses s’améliorent car les données transmises pour fonder les délibérations des collectivités locales pour l’année 2013 sont désormais plus complètes – j’espère que vous le constaterez – après une année difficile, je le reconnais bien volontiers, une année qui a vu les données transmises parfois de façon un peu lacunaire. Dont acte pour ce qui a pu se passer.

Quoi qu’il en soit, une réflexion est en cours pour enrichir les informations transmises aux collectivités afin que les élus puissent délibérer dans de meilleures conditions, aussi satisfaisantes que possible. Il s’agit de faire en sorte, en leur permettant de revenir sur certaines délibérations, que les collectivités ne se retrouvent pas confrontées à des difficultés en devant assumer des décisions dont, en conscience, elles n’avaient pas totalement mesuré les conséquences, notamment sur certaines entreprises de commerce ou d’artisanat.

J’espère donc qu’à l’occasion de l’examen du prochain projet de loi de finances, vous me donnerez acte que, si les choses ne sont pas parfaites – le seront-elles un jour ? –, du moins elles se seront améliorées. Je puis vous assurer, monsieur Lagarde, monsieur Le Bouillonnec, que j’y travaille avec Pierre Moscovici.

En conséquence, le Gouvernement est, comme le rapporteur général, favorable aux sous-amendements nos 386 et 457 et favorable aux amendements identiques nos 224 et 73 ainsi sous-amendés.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Je suis bien sûr favorable à ces amendements, mais, comme l’a très bien dit Jean-Christophe Lagarde, il faut que nous profitions de l’année 2013 pour réfléchir aux moyens de rendre le système plus satisfaisant.

En effet, la catégorie qui va relever de cette approche forfaitaire et qui réalise un chiffre d’affaires inférieur à 100 000 euros, englobe des activités très différentes. Il y a, par exemple, beaucoup de professions libérales, ce que l’on appelle les bénéfices non commerciaux employant moins de cinq salariés. Le ministre se souvient parfaitement de la décision du Conseil constitutionnel, qui les a fait entrer dans le droit commun, pour un coût de 800 millions d’euros. Grâce à l’entrée dans le droit commun, les BNC employant moins de cinq salariés ont parfois bénéficié d’une réduction considérable – allant jusqu’à une division par cinq – du montant de leur taxe professionnelle. À l’inverse, parmi ceux qui ont un chiffre d’affaires inférieur à 100 000 euros, vous avez aussi des artisans et des commerçants. La valeur ajoutée est complètement différente ; or on prend un critère de chiffre d’affaires.

Une proposition que je voudrais faire à ce stade consisterait à généraliser le plafonnement à 3 % de la valeur ajoutée, qui existe aujourd’hui pour toutes les entreprises qui réalisent plus de 152 000 euros de chiffre d’affaires. La généralisation de ce plafonnement permettrait aux collectivités locales d’avoir un système mieux adapté : on reprendrait, de façon juste, un peu de matière fiscale à certaines professions et activités qui ont connu des baisses d’impôt très importantes, sans pénaliser les autres. Voilà, monsieur le ministre, une piste à explorer.

Quant à votre réponse concernant les fichiers, je confirme ce qu’a dit Jean-Christophe Lagarde : nous ne les avons pas. Il faudrait que, sous le sceau, évidemment, du secret fiscal, puissent au moins nous être communiqués les fichiers de base – je ne parle pas des montants d’impôt, mais des fichiers de base – sur la cotisation foncière des entreprises, pour celles qui ont plus de 152 000 ou 100 000 euros de chiffre d’affaires.

Il faudrait par ailleurs que l’on dispose des simulations de montants de cotisation, aussi bien pour la CVAE, qui a un taux national, que pour la CFE, pour les entreprises qui réalisent moins de 100 000 euros de chiffre d’affaires.

Sans ces données, on est contraint de prendre des délibérations complètement à l’aveugle, avec les conséquences que l’on sait. C’est précisément pour cette raison, je le répète, que dans notre propre communauté d’agglomération, nous avons préféré ne pas délibérer du tout, parce qu’on n’y voyait pas clair.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.

M. Jean-Christophe Lagarde. Monsieur le ministre, je vous prie de croire dans ma sincérité et dans la vérité de ce que je vais vous dire : vos services vous disent qu’ils nous donnent des informations lacunaires, mais la réalité, c’est qu’on ne nous donne aucune information.

Le produit global fiscal nous est bien évidemment transmis, puisque c’est une obligation. Je pense d’ailleurs que, à l’heure où je parle, pour une collectivité comme la nôtre, l’État n’est pas encore en mesure de me le donner : en général, l’information arrive au mois de février. Si je devais délibérer sur ce sujet, vous imaginez donc bien qu’au 21 janvier, je n’aurais pas les informations nécessaires pour faire ces calculs.

Monsieur le ministre, je vous demande vraiment de nous entendre. Je suis sûr que je ne suis pas le seul dans ce cas : cela concerne l’ensemble du département de la Seine-Saint-Denis, et je pense que le problème se pose également dans le Val-de-Marne et dans toute la France, pour en avoir discuté avec des collègues de notre groupe. Les services départementaux répondent au maire, que je suis par ailleurs, qu’ils ne peuvent pas identifier les bases. Si j’ai à délibérer, je veux savoir qui, dans ma collectivité, va être pénalisé, et qui ne va pas l’être.

Lorsqu’un grand centre commercial installé dans ma commune me dit avoir vu – ou semble avoir vu – disparaître quasi totalement sa contribution, alors que des artisans, des commerçants ou des PME se retrouvent dans une situation inverse, je voudrais comprendre ce qui se passe avant de délibérer. Et pour comprendre, nous avons le droit de savoir.

Vous aussi, monsieur le ministre, vous avez le droit de savoir que si votre administration vous dit qu’elle nous donne les éléments d’information, elle ne dit pas vrai. Tout est perfectible, je l’entends. Vous vous engagez à perfectionner le dispositif, je l’entends. Mais sachez qu’aujourd’hui, aucun élu, en Seine-Saint-Denis en tout cas, n’est en capacité de savoir qui paie quoi au titre de la CFE dans sa collectivité.

(Les sous-amendements nos 386 et 457 sont successivement adoptés.)

(Les amendements identiques nos 224 et 73, sous-amendés, sont adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement n° 459 rectifié.

M. Christian Eckert, rapporteur général. C’est la suite de notre feuilleton sur la taxe professionnelle et la CFE. L’analyse des rôles d’imposition de la CFE en 2012 a mis en évidence le caractère inéquitable du seuil de 100 000 euros de chiffre d’affaires – le président de la commission vient d’en parler. La définition de ce seuil a, de fait, engendré des effets de seuil trop importants.

Pour cette raison, avec notre collègue Laurent Grandguillaume, que je cherche en vain des yeux…

M. Razzy Hammadi. Ce n’est pas bien, ça !

M. Christian Eckert, rapporteur général. …nous proposons de créer une tranche allant de 10 000 à 100 000 euros, et une autre de 100 000 à 250 000 euros, ce qui permettra de fixer trois bases distinctes de cotisation minimale de la CFE.

La base correspondant à cette nouvelle tranche sera comprise dans la même fourchette – de 206 à 2 065 euros – que celle de la première tranche, mais son montant pourra être supérieur, ce qui permettra aux collectivités, si elles le souhaitent, de retrouver de la « matière fiscale » – je n’aime pas trop cette expression, qu’a utilisée le président de la commission – et en tout cas un peu plus d’autonomie fiscale, ce qui leur fait cruellement défaut.

Je vous suggère donc vivement d’adopter cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement est favorable à l’amendement présenté par le rapporteur général qui, en créant une tranche intermédiaire, apporte, me semble-t-il, une réponse adaptée à la situation des petits commerçants et artisans, et ce dès l’année 2013 : tel était bien le problème que nous voulions régler.

En revanche, il n’est pas possible d’appliquer rétroactivement, au titre de 2012, une nouvelle tranche de cotisation, car mes services seraient dans l’incapacité technique de disposer des informations nécessaires à ce calcul. On règle donc le problème en deux temps : une délibération qui peut avoir un effet rétroactif pour 2012, et une architecture différente pour 2013, qui permettra aux collectivités de délibérer dans des conditions valables.

Mme la présidente. Monsieur le ministre, levez-vous le gage sur l’amendement n° 459 rectifié ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Oui, madame la présidente.

(L’amendement n° 459 rectifié, modifié par la suppression du gage, est adopté.)

Mme la présidente. Les six amendements nos 124, 125, 131, 126, 127 et 128 de M. le rapporteur général sont rédactionnels

(Les amendements nos 124, 125, 131, 126, 127 et 128, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. Gilles Carrez, pour soutenir l’amendement n° 32.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Cet amendement traite de la convergence des taux de CFE. Il est proposé de mettre en œuvre cette convergence dans un délai de dix ans.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. La commission a accepté cet amendement, qui met en place un mécanisme de convergence des bases minimales dans un délai plus compatible avec les évolutions en cours. Le rapporteur, comme la commission, est favorable à cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Cet amendement a un objectif auquel le Gouvernement adhère ; mais comme je ne suis pas certain que cela règle le problème posé, je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée.

(L’amendement n° 32 est adopté.)

Mme la présidente. les amendements nos 129 et 130 de M. le rapporteur général sont rédactionnels

(Les amendements nos 129 et 130, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir l’amendement n° 403.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. L’article 17 du présent projet de loi de finances rectificative prévoit que, durant la première année d’application du régime de la fiscalité professionnelle unique, les bases minimums de cotisation foncière des entreprises applicables sur le territoire de l’établissement public sont celles qui s’appliquaient l’année précédente. Or, certaines collectivités ont porté le montant de la base minimum au niveau le plus élevé permis par la loi.

Afin d’éviter de retenir des bases de CFE très élevées, le présent amendement propose de permettre aux EPCI qui appliquent pour la première fois le régime de la fiscalité professionnelle unique de ne pas appliquer les bases minimums fixées pour 2012 et de délibérer pour fixer de nouvelles bases minimums. Cette possibilité serait également ouverte, en cas de rattachement de communes à un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité professionnelle unique ou à fiscalité professionnelle de zone, en cas de création de communes nouvelles.

Cette disposition technique absolument nécessaire s’inscrit dans le droit fil de ce que le Parlement et le Gouvernement souhaitent faire pour éviter des impositions manifestement excessives dans le cadre de l’application de la réforme de la taxe professionnelle.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. C’est un excellent amendement, que le ministre a parfaitement exposé, et que le rapporteur général et la commission ont adopté. Il permet de corriger, là encore, toutes ces élucubrations complexes qui entourent la taxe professionnelle, les planchers, les plafonds, etc. Ce dispositif ne peut que susciter l’adhésion.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. C’est limpide, monsieur le rapporteur !

M. Christian Eckert, rapporteur général. C’est limpide pour vous, monsieur le président, parce que vous avez dix ans de pratique. Pardonnez-moi de ne pas avoir au bout de six mois la même compétence que la vôtre…

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Ce n’est pas ce que je voulais dire ! Même pour moi, c’est difficile à comprendre… (Sourires.)

(L’amendement n° 403 est adopté.)

Mme la présidente. Les amendements nos 132 rectifié et 133 de M. le rapporteur général sont de coordination.

(Les amendements nos 132 rectifié et 133, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir l’amendement n° 407.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Les montants de CVAE 2010 déclarée au 30 juin 2011, mais non payés partiellement ou totalement par les entreprises, n’ont pas été pris en compte dans les montants de CVAE territorialisés en 2011 au profit des collectivités territoriales, ni dans les calculs 2011 de mécanisme de garantie individuelle de ressources, prévus à l’article 78 de la loi de finances pour 2010, portant réforme de la taxe professionnelle.

Ainsi, l’article 40 de la loi de finances initiale pour 2012 avait prévu la prise en compte dans les calculs de garantie de ressources des régularisations de cette fraction de CVAE au moment où ces régularisations interviendraient, c’est-à-dire au plus tard le 31 décembre 2012. Le présent amendement reporte cette date limite au 30 juin 2013, en vertu, là encore, du principe que je me suis permis d’indiquer tout à l’heure et qui permettrait aux collectivités, s’il était accepté, de délibérer à nouveau pour corriger ce qui manifestement fut parfois voté de façon… insuffisamment informée.

M. Jean Launay. Comme c’est bien dit !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Cet amendement traite des montants de CVEA – tout le monde sait ce que ça veut dire – et de leur impact sur le FNGIR – tout le monde sait également ce que ça veut dire. (Sourires.) Il traite en outre de cas particuliers, dont tout le monde nous dit qu’il s’agit de mesures de régularisations, qui ne posent aucun problème et sur lesquelles tout le monde s’accorde.

J’ai bien sûr vérifié tout cela en détail et je recommande l’adoption de cet amendement.

(L’amendement n° 407 est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 134 de M. le rapporteur général est rédactionnel.

(L’amendement n° 134, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir l’amendement n° 408.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Cet amendement concerne la correction des abattements de taxe d’habitation.

Afin de neutraliser les effets sur les contribuables du transfert de la part départementale de taxe d’habitation, le IX de l’article 108 de la loi de finances pour 2011, codifié au II quater de l’article 1411 du code général des impôts, prévoit d’appliquer, à chaque abattement communal ou intercommunal de taxe d’habitation, une variable d’ajustement. Toutefois, le VIII de l’article 44 de la loi n° 2011-1978 de finances rectificative pour 2011 a offert la possibilité aux communes de supprimer cette correction, à partir des impositions établies au titre de l’année 2013.

Certains élus locaux ont éprouvé des difficultés à anticiper les effets de la suppression de la variable d’ajustement. Afin d’éviter aux contribuables de trop fortes hausses de cotisation, cet amendement offre la possibilité aux communes et aux EPCI à fiscalité propre de revenir exceptionnellement sur leurs délibérations jusqu’au 31 décembre 2012.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Il s’agit encore de la réforme de la taxe professionnelle, si limpide et si simple que les communes ont été incapables d’apprécier la portée exacte de leurs délibérations sur les abattements possibles pour la taxe d’habitation.

Afin d’éviter que les mêmes causes – celles que nous évoquions tout à l’heure sur la cotisation minimale de CFE – ne produisent les mêmes effets sur les abattements de la taxe d’habitation, il est proposé de permettre aux collectivités de rapporter leurs délibérations d’ici le 31 décembre. Compte tenu de la date choisie, cette disposition serait expressément rétroactive.

M. Jean Launay. Encore faudra-t-il que les services de l’État aient le temps de la notifier !

(L’amendement n° 408 est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 180 de M. le rapporteur général, est rédactionnel.

(L’amendement n° 180, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. Les amendements nos 181 rectifié, 182, 183, 184, 185, 186 de M. le rapporteur général, sont également rédactionnels.

La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Alors que nous nous apprêtons à quitter le sujet de la cotisation économique territoriale, je voudrais saluer le Gouvernement et la majorité qui, grâce à ces différents amendements d’ajustement, consolident cette réforme.

M. Dominique Baert. Et surtout réparent les âneries de nos prédécesseurs !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Il y avait quelques scories, elles sont bien corrigées. Si l’œuvre n’atteint pas encore la perfection, monsieur le rapporteur général, elle est désormais solide dans notre paysage fiscal. Après avoir été contestée, cette réforme est maintenant cristallisée.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Non !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Je félicite le Gouvernement et la majorité d’avoir apporté les quelques correctifs nécessaires.

M. Dominique Baert. Ah çà !

M. Michel Pouzol. Quelques correctifs !

(Les amendements nos 181 rectifié, 182, 183, 184, 185, 186, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.)

(L’article 17, amendé, est adopté.)

Après l’article 17
(amendements précédemment réservé)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement n° 136.

M. Christian Eckert, rapporteur général. La loi de décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales a remplacé l’ancien dispositif des fusions de communes par l’institution de communes nouvelles.

L’article 1638 du CGI organise l’intégration fiscale de ces communes nouvelles en prévoyant l’harmonisation progressive des taux d’imposition des communes préexistantes. Pour l’établissement du budget de la nouvelle commune, des taux d’imposition différents peuvent être appliqués pour chacune des quatre taxes locales sur le territoire de chacune des anciennes communes, pendant une période de douze ans au plus.

Cette harmonisation concerne également les abattements de taxe d’habitation. Elle peut donc se traduire par l’instauration d’un abattement nouveau sur le territoire d’une commune préexistante.

Dans ce dernier cas, il y a diminution de la base de taxe d’habitation qui est compensée mécaniquement par une hausse des taux. Ce mécanisme accroît cependant la fiscalité qui pèse sur les autres contribuables qui ne bénéficient pas dudit abattement, et notamment sur les plus modestes.

Afin que ces foyers modestes, qui bénéficient de dispositifs de dégrèvement sous condition de ressources, ne soient pas désavantagés, il est proposé de calculer le plafonnement de leur contribution par rapport à leur revenu sur une base plus favorable.

Le présent amendement retient le taux de taxe d’habitation de 2000 en le majorant proportionnellement à l’augmentation mécanique de taux induite par cette harmonisation des abattements.

Je veux enfin remercier Mme Grellier, qui est à l’initiative de cet amendement.

M. Jean Launay. Tout à fait.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement est favorable à ce très bon amendement qui neutralise les hausses de taxes d’habitation pour les contribuables les plus modestes.

(L’amendement n° 136 est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir l’amendement n° 393.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Pour les besoins de la répartition des bases imposables au titre de la taxe professionnelle, il existait un dispositif spécifique de localisation des véhicules de la SNCF en l’absence de lieu de stationnement habituel. La loi prévoyait ainsi une répartition de la valeur locative de ces véhicules entre toutes les communes où la SNCF exerçait son activité au prorata des valeurs locatives foncières des locaux et terrains affectés à cette activité.

La même problématique se pose en matière de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises pour les besoins de la répartition des effectifs. Dès lors, il est proposé de transposer le dispositif de la taxe professionnelle à la CVAE pour les entreprises de transport ferroviaire – ce qui signifie en pratique pour la seule SNCF.

En effet, compte tenu de la mobilité des effectifs dans ce secteur d’activité, leur localisation est particulièrement difficile. L’application des critères de répartition de droit commun aboutirait à une concentration des effectifs affectés au transport sur Paris.

Les dispositions proposées s’appliquent donc aux déclarations des effectifs établies à compter de 2013, et ne modifieront pas la répartition de la valeur ajoutée de cette entreprise retenue actuellement.

C’est afin de garantir stabilité et visibilité aux communes que le Gouvernement propose cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. C’est un très bon amendement, bien qu’il ait fait l’objet de débats nourris en commission : nos collègues craignaient que cet amendement ne concentre le produit de la CVAE versée par la SNCF dans les grandes villes. C’est en fait le contraire qui se produira.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. C’est le contraire, en effet.

M. Christian Eckert, rapporteur général. La difficulté posée est au fond assez drôle : une partie du personnel et du matériel de la SNCF sont, par définition, mobiles. (Sourires).

Or pour répartir la CVAE, il faut bien une localisation. Personne, jusqu’à présent, n’a trouvé mieux que de retenir la valeur locative foncière des établissements de la SNCF. Comme l’a indiqué le ministre un peu rapidement, faute d’avoir opéré cette répartition, et bien qu’elle se fasse sur un critère foncier, la CVAE serait extrêmement concentrée sur la capitale.

C’est donc une très bonne disposition qui répond à un souci d’équité. La commission l’a approuvée après avoir levé les craintes légitimes. Je souhaite évidemment que l’Assemblée l’adopte.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.

M. Jean-Christophe Lagarde. Je comprends parfaitement l’objet de cet amendement et la difficulté qu’il tend à régler.

Je saisis cette occasion pour interpeller M. le ministre sur une autre difficulté qui se pose aux communes qui n’accueillent pas d’installations SNCF destinées au transport des voyageurs, mais au transport des marchandises. Dans la ville dont je suis maire, 12,5 % du territoire est occupé par une gare de triage, mais la contribution de la SNCF sur le territoire de ma commune est parfaitement ridicule. En clair, nous subissons les nuisances sans qu’aucun apport direct ne profite à la population, une grande partie du foncier de la commune est indisponible, voire affecte négativement la valeur du foncier voisin, sans qu’aucun bénéfice n’en soit retiré.

Je comprends les arguments relatifs à la mobilité des engins, mais moins ceux qui portent sur la contribution que cette entreprise devrait à ces territoires. Et ce d’autant plus que la valeur locative des installations est estimée à un niveau ridicule. Je ne suis pas le seul en France dans ce cas.

Une difficulté demeure donc. Je comprends que l’on s’en débarrasse en maintenant l’état du droit antérieur, il n’en reste pas moins qu’il y a là une iniquité qui est source de pertes pour des collectivités qui, par ailleurs, peuvent être très pauvres.

(L’amendement n° 393 est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement n° 222 rectifié.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Cet amendement, que la commission a adopté, a été proposé par nos collègues Carole Delga, Laurent Baumel et Alain Fauré. Son but est de revenir sur un certain nombre de dispositions concernant les possibilités de révision des attributions de compensation. Il existe plusieurs méthodes aujourd’hui : la voie normale, et des modes alternatifs, dont l’un n’est quasiment jamais utilisé. L’objet de cet amendement est de mettre fin à cette méthode qui n’est pratiquement pas utilisée.

Il ne subsisterait donc que la voie normale, lorsqu’il n’y a pas de délibération, ou les deux voies alternatives.

Ceux de nos collègues qui sont d’affreux cumulards… (Exclamations). Je me mets au rang de ceux-là ! À cette heure, je n’ai pas intérêt à ouvrir un tel débat ! (Sourires). Je retire mes propos !

Bref, beaucoup de mes collègues savent, parfois pour de très bonnes raisons, que la procédure que nous proposons de supprimer n’est pas utilisée. C’est donc un amendement de simplification.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Cet amendement ne revient pas sur le principe qui autorise des mécanismes dérogatoires pour ajuster les attributions de compensation lorsque l’EPCI avait opté pour le régime de la taxe professionnelle unique avant le 1er janvier 2010.

Ce régime dérogatoire permet en effet d’introduire une certaine souplesse dans les relations entre les EPCI et les communes, et cette souplesse est de bon aloi. Le rapporteur général souhaite encadrer plus strictement l’un de ces mécanismes ; le Gouvernement s’en remet à la sagesse de l’Assemblée.

(L’amendement n° 222 rectifié est adopté.)

Mme la présidente. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

2

Ordre du jour de la prochaine séance

Mme la présidente. Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :

Suite du projet de loi de finances rectificatif pour 2012.

La séance est levée.

(La séance est levée à treize heures.)