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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Session ordinaire de 2012-2013

Compte rendu
intégral

Première séance du jeudi 14 février 2013

SOMMAIRE ÉLECTRONIQUE

SOMMAIRE


Présidence de Mme Sandrine Mazetier

1. Création du contrat de génération

Commission mixte paritaire

Présentation

M. Christophe Sirugue, rapporteur de la commission mixte paritaire

M. Michel Sapin, ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social

M. Thierry Repentin, ministre délégué chargé de la formation professionnelle et de l’apprentissage

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission mixte paritaire

Discussion générale

M. Christophe Cavard

Mme Jacqueline Fraysse

Mme Kheira Bouziane

M. Gérard Cherpion

M. Arnaud Richard

M. Denys Robiliard

Texte de la commission mixte paritaire

Suspension et reprise de la séance

Présidence de M. Christophe Sirugue

2. Séparation et régulation des activités bancaires

Suite de la discussion d'un projet de loi

Discussion des articles (suite)

Après l’article 4 bis

Amendement no 113

Mme Karine Berger, rapporteure de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

M. Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances

Amendements nos 313, 360 (sous-amendement), 314, 315, 359 (sous-amendement)

Article 4 ter

Après l’article 4 ter

Amendements nos 61, 66

Avant l’article 5

Amendements nos 246, 245

Article 5

Amendement no 311 rectifié

M. Philippe Kemel, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques

Amendements nos 118, 80, 172, 119

Article 6

Amendements nos 84 rectifié, 120, 287, 89, 288, 90, 121

Article 7

Mme Corinne Narassiguin

M. Jean-Luc Laurent

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

M. Pascal Cherki

Mme Valérie Rabault

M. Jean-François Lamour

M. André Chassaigne

Mme Karine Berger, rapporteure

M. Pierre-Alain Muet

Amendements nos 146, 147, 85, 300, 87, 141

Mme Axelle Lemaire, rapporteure pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

Amendements nos 203, 83, 104

Après l’article 7

Amendement no 244

Article 8

Amendements nos 88, 170, 103

Article 9

Article 10

M. Pierre-Alain Muet

Article 11

Amendements nos 132 rectifié, 33, 86, 162, 164, 165, 67 rectifié, 133

Article 11 bis

Après l’article 11 bis

Amendements nos 238 rectifié, 134, 320 rectifié

Article 12

Amendement no 341

Article 13

Article 14

Amendement no 301

Mme Karine Berger, rapporteure

Après l’article 14

Amendement no 322 rectifié

Article 14 bis

Amendement no 102

Avant l’article 15

Amendement no 319

Article 15

Après l’article 15

Amendements nos 326, 325 rectifié, 324 rectifié

Article 15 bis

Après l’article 15 bis

Amendement no 321

Article 16

Amendement no 16

Avant l’article 17

Amendement no 77

Article 17

Amendements nos 182, 72, 219

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques

Amendements nos 176, 228, 98

3. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de Mme Sandrine Mazetier
vice-présidente

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

Création du contrat de génération

Commission mixte paritaire

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la discussion, sur le rapport de la commission mixte paritaire, du projet de loi portant création du contrat de génération (n° 713).

Présentation

Mme la présidente. La parole est à M. Christophe Sirugue, rapporteur de la commission mixte paritaire.

M. Christophe Sirugue, rapporteur de la commission mixte paritaire. Madame la présidente, monsieur le ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, monsieur le ministre délégué chargé de la formation professionnelle et de l’apprentissage, madame la présidente de la commission mixte paritaire, mes chers collègues, nous voici parvenus au terme de la discussion du projet de loi portant création du contrat de génération.

Les parlementaires ont débattu de ce texte dans des délais limités, afin de permettre une entrée en vigueur rapide du dispositif, qui doit jouer un rôle important en faveur de l’emploi des jeunes et des salariés âgés ; nous savons à quel point la situation appelle aujourd’hui des réponses rapides.

Ce texte s’inscrit dans une politique d’ensemble. Grâce au déploiement des emplois d’avenir – principalement dans le secteur non marchand –, au déploiement à venir des contrats de génération dans le secteur marchand ainsi qu’à la réforme de la sécurisation de l’emploi, dont nous débattrons prochainement, et grâce aux efforts consentis en faveur du soutien à la croissance, le Gouvernement s’est pleinement saisi du problème et il faut s’en réjouir.

Je rappelle à cet égard, que notre assemblée avait souhaité pouvoir anticiper l’entrée en vigueur du contrat de génération, afin que l’aide afférente puisse bénéficier aux petites entreprises – celles de moins de 50 salariés – pour des embauches réalisées dès le 1er janvier de cette année. Cela prouve une nouvelle fois, s’il en était besoin, que le Gouvernement et le Parlement ont pleinement conscience de l’urgence de la situation et qu’ils travaillent main dans la main pour mener une politique active de lutte contre le chômage dans notre pays et favoriser l’emploi de nos compatriotes, en particulier des plus jeunes et des plus âgés, qui sont aussi les plus vulnérables sur le marché du travail.

Les débats parlementaires ont permis, je le crois, d’enrichir ce texte, de le consolider, sans remettre en cause l’équilibre global de la réforme telle qu’elle avait d’ailleurs été voulue et soutenue par les partenaires sociaux dans leur accord national interprofessionnel signé à l’unanimité le 19 octobre 2012.

Nous avons, dans un esprit qui a été, je dois le dire, tout à fait constructif, cherché autant que faire se peut, à l’Assemblée comme au Sénat, à améliorer le dispositif proposé.

Les députés ont avant tout voulu affermir l’ambition de lutte contre la précarité de l’emploi qui anime le contrat de génération, en limitant le recours au temps partiel pour les jeunes embauchés à ce titre. Cet élément constitue un acquis considérable. En effet, non seulement le contrat de génération sera obligatoirement conclu avec un jeune pour une durée indéterminée, mais il ne pourra y avoir de recours au temps partiel que lorsque la situation du jeune lui-même le justifie, ce temps partiel ne pouvant au demeurant être inférieur à 80 % d’un temps complet. L’Assemblée a également renforcé les conditions exigées des entreprises pour bénéficier de l’aide, en l’espèce la condition de non-licenciement dans les six mois précédant l’embauche du jeune sur les postes relevant de la catégorie professionnelle dans laquelle est prévue cette embauche, et la condition de non-licenciement ou d’absence de rupture conventionnelle avec le senior constitutif du contrat.

Les parlementaires ont également tenu à renforcer la portée de la négociation collective qui encadre la mise en place des contrats de génération. Les députés ont souhaité apporter toutes les garanties pour que le procès-verbal de désaccord – qui conditionne la possibilité pour l’employeur de recourir à un plan d’action unilatéral et à se soustraire, ce faisant, au dialogue social – garantisse bien la loyauté de la négociation menée. Les sénateurs ont ensuite relayé cette volonté en élargissant aux négociations menées avec les représentants du personnel l’obligation d’établir un procès-verbal de désaccord en cas d’échec de cette négociation.

Le Sénat a également souhaité introduire une clause de revoyure. Un bilan de la mise en œuvre du contrat de génération devra ainsi être réalisé, qui doit conduire à revoir, le cas échéant, les conditions d’accès à l’aide ainsi que le dispositif de pénalité applicable aux entreprises si celles-ci ne jouent pas le jeu. Il me semble en effet de bon aloi qu’un dispositif assorti d’une aide de l’État puisse faire l’objet d’un réexamen régulier. Nous aurons ainsi l’occasion de mesurer, d’ici trois ans, la portée du projet de loi que nous nous apprêtons aujourd’hui à voter définitivement.

La commission mixte paritaire qui s’est réunie mardi dernier pour examiner les dispositions restant en discussion sur ce texte n’a pu, en somme, que constater que, sur de très nombreux points, nos vues étaient largement partagées.

Seules quelques dispositions ont fait l’objet d’ultimes modifications.

Il s’agit en particulier du diagnostic préalable à la négociation, pour lequel la commission mixte paritaire a souhaité qu’il puisse s’appuyer sur un bilan des mesures d’ores et déjà éventuellement mises en œuvre en matière d’emploi des seniors comme en matière d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. S’agissant de la date ouvrant droit à l’aide au titre du contrat de génération, la commission mixte paritaire a également souhaité que celle-ci corresponde aux recrutements effectués à compter de la date de transmission de l’accord ou du plan d’action à l’administration, celle-ci nous étant apparue plus sûre et objective que la date de conclusion de l’accord ou d’établissement du plan d’action qui avait été votée au Sénat. Enfin, la commission mixte paritaire a voulu réintroduire la condition relative à l’absence de rupture conventionnelle dans les six mois précédant l’embauche du jeune pour le poste sur lequel est prévue l’embauche, qui avait été supprimée par les sénateurs.

En dehors de ces trois points, nous n’avons procédé qu’à quelques ajustements, d’ordre technique ou rédactionnel.

À l’Assemblée nationale comme au Sénat, les débats ont permis de préciser une nouvelle fois que le contrat de génération était avant tout un dispositif de droit commun et qu’il n’avait pas, dès lors, à être considéré comme un contrat aidé ni à présenter des particularités qui distinguent les jeunes relevant de ce contrat. Les discussions qui se sont déroulées dans le cadre de la commission mixte paritaire ont permis de souligner combien il est important que l’on sache que cette différenciation, que d’aucuns ont voulu faire, est contraire non seulement à l’esprit dans lequel a été négocié l’accord national interprofessionnel, mais aussi à l’esprit du contrat de génération. Celui-ci concerne des emplois de droit commun, ouverts à tous les jeunes, sans aucune distinction. Chaque amendement visant notamment à qualifier les jeunes s’éloignait de l’esprit du texte voulu par le Gouvernement et le législateur. De ce point de vue, le projet tel qu’il est soumis à votre vote est clair et redonne du sens au droit commun, qui doit s’appliquer au contrat de génération.

Au terme de la discussion, je tiens à saluer la qualité des débats qui ont eu lieu non seulement en commission et sur ces bancs, mais également avec le Gouvernement. De nombreuses modifications ont été apportées au texte initial grâce à nos collègues, de la majorité mais aussi de l’opposition. Je tiens en effet à souligner l’esprit constructif qui a animé nos collègues de l’opposition, lesquels, loin de rejeter en bloc le dispositif proposé, ont pris le temps de l’examiner avec attention et ont souvent cherché à lui apporter des améliorations, même si nous n’avons pas toujours – et c’est bien normal – le même point de vue à ce sujet. Cet état d’esprit mérite d’être souligné, et j’en remercie ceux de nos collègues qui sont présents ce matin.

Je souhaite que nous puissions clore ce débat parlementaire en adoptant ce projet de loi ambitieux dans sa rédaction issue de notre CMP. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Sapin, ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

M. Michel Sapin, ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Monsieur le rapporteur, je vous remercie d’avoir rappelé le travail minutieux et constructif du Parlement sur ce texte. Un consensus a pu être trouvé entre les deux chambres lors de la CMP, et c’est une bonne chose. Je pense que l’équilibre atteint est le bon.

Ainsi que cela a été souligné au cours des débats, nous devons – et c’était également l’intention des signataires de l’accord national interprofessionnel – nous prémunir contre tout risque de détournement du dispositif, c’est-à-dire contre ce que l’on appelle les effets d’aubaine. De ce point de vue, il est pleinement légitime qu’une entreprise ne puisse bénéficier du contrat de génération si elle a procédé à un licenciement ou conclu une rupture conventionnelle pour le poste sur lequel est prévue l’embauche. Toutefois, je crois qu’il aurait été un peu disproportionné de l’interdire aux entreprises ayant eu recours à un licenciement dans tout autre domaine d’activité que celui du poste l’embauche d’un jeune en contrat de génération.

Il me paraît également difficile d’avoir une lecture univoque de la rupture conventionnelle, qu’on ne peut pas assimiler purement et simplement à un licenciement. La DARES achève actuellement une enquête quantitative précise sur les ruptures conventionnelles pour préparer le bilan de l’ANI de 2008, qui a créé ce nouveau mode de rupture. Ce bilan doit être réalisé par les partenaires sociaux au printemps. Nous pourrons alors discuter ensemble des évolutions éventuelles à apporter au dispositif des ruptures conventionnelles.

À l’issue du vote de ce matin, le contrat de génération pourra voir le jour rapidement.

Nous comptons sur vous pour le faire vivre. À cette fin, il vous faut tout d’abord le faire connaître, car voter ne suffit pas, en expliquant aux chefs d’entreprises de plus de 300 salariés qu’ils vont devoir engager une négociation – je crois que beaucoup d’entre eux l’ont déjà compris – et à ceux de moins de 300 salariés – c’est de ce côté-là que l’effort doit porter – qu’ils pourront bénéficier d’une aide substantielle.

Le contrat de génération – vous avez eu raison de le rappeler, monsieur le rapporteur – n’est pas un contrat aidé, un sas circonscrit dans le temps : c’est un vrai contrat de droit commun et c’est un coup de pouce pour des embauches durables. Il créera ou consolidera un million d’emplois pérennes en cinq ans.

Je vous encourage également à faire vivre l’esprit du contrat de génération, car, derrière le dispositif, il y a des valeurs auxquelles beaucoup, sur vos bancs, peuvent adhérer.

Premièrement, la confiance dans la jeunesse. L’objet du contrat de génération est de donner une chance aux jeunes, en CDI, sans leur faire subir des périodes d’essai à rallonge, et de leur donner ainsi accès à l’autonomie en leur permettant de trouver leur place dans l’entreprise et dans la société, car cette place s’acquiert très largement par le travail.

Deuxièmement, l’inclusion des anciens et la préservation de leur expérience. C’est la richesse de notre société et de nos entreprises. J’insiste sur l’importance de la transmission et des liens intergénérationnels. L’harmonie entre les générations est un enjeu important dans la gestion des ressources humaines, et le contrat de génération y contribuera.

Troisièmement, la compétitivité des entreprises, qui, à travers la promotion des hommes et des femmes qui y travaillent, est au moins aussi importante que le capital financier. La préservation des compétences clés de nos entreprises dans tous les secteurs, aussi bien dans l’industrie que dans l’artisanat ou l’agriculture, sera un élément déterminant pour le maintien de notre compétitivité et nos capacités d’innovation futures.

Je crois que nous pouvons tous nous retrouver autour de ces valeurs, qui ont réuni l’ensemble des partenaires sociaux.

Pour finir, je remercie une nouvelle fois la présidente de la commission des affaires sociales, Mme Lemorton, et le rapporteur, Christophe Sirugue, pour leur engagement sur ce texte. Je veux à mon tour vous remercier tous, ici, pour votre travail et pour la façon dont vous avez su faire vivre le débat et dont vous avez notablement enrichi le texte, tout en respectant l’équilibre de l’accord conclu entre les partenaires sociaux.

Le contrat de génération sera créateur d’opportunités, pour les jeunes comme pour les salariés âgés. Il sera, je le crois profondément, un instrument important de lutte contre la précarité sur le marché du travail. Au-delà, il contribuera à redonner du sens au travail en reconnaissant autant la valeur de l’expérience que celle des compétences fraîchement acquises. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé de la formation professionnelle et de l’apprentissage.

M. Thierry Repentin, ministre délégué chargé de la formation professionnelle et de l’apprentissage. Madame la présidente, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les députés, nombreux ce matin (Sourires),nous arrivons au terme de la discussion du projet de loi portant création des contrats de génération puisque nous examinons les conclusions de la commission mixte paritaire, parvenue mardi matin à un consensus, ce dont nous ne pouvons que nous féliciter.

Je tiens à mon tour à saluer le travail fait par les deux assemblées, tant en commission qu’en séance publique. Ce travail fructueux a permis d’aboutir à un texte équilibré et très largement enrichi par vos travaux, puisqu’il a doublé de volume, comme l’a fait très justement remarquer Mme la présidente de la commission lors de la CMP. En effet, alors que le projet de loi gouvernemental comportait initialement cinq articles, au terme des débats, cinq articles additionnels ont été introduits par l’une ou l’autre des assemblées. Quel bel exemple de coproduction législative !

M. Arnaud Richard et M. Gérard Cherpion. Un copéiste ! (Sourires.)

M. Thierry Repentin, ministre délégué. La qualité de la loi ne se mesurant cependant pas à sa longueur, je souhaite surtout insister sur ce formidable outil que votre assemblée pourra offrir à nos jeunes et nos seniors en votant ce texte.

J’entends encore les membres de l’opposition – ils étaient alors plus nombreux qu’aujourd’hui –, lors de l’examen du projet de loi qui a permis la mise en place des emplois d’avenir, nous apostropher quant au fait que le dispositif n’était pas ouvert aux diplômés et pas assez ouvert au secteur marchand. Michel Sapin et moi-même n’avions alors de cesse de vous répondre que les contrats de génération arrivaient et de vous demander un peu de patience. Aujourd’hui, messieurs les députés de l’opposition, vous voyez donc votre patience – si l’on peut dire – récompensée.

Ce texte prévoit un vrai CDI, avec une vraie intégration dans l’entreprise, concernant notamment le plan de formation, un vrai transfert de compétences sortant de la logique d’opposition des générations entre elles : bien au contraire, il les rapproche et les rassemble. Le travail mené par vos assemblées a d’ailleurs conservé la philosophie et l’équilibre du texte. Il a aussi permis de maintenir la souplesse du dispositif, permettant son adaptation à la situation de chaque entreprise. Lors de nos débats de janvier dernier, quelques inquiétudes s’étaient traduites sous la forme d’amendements : certains d’entre vous s’étaient interrogés sur une éventuelle concurrence entre le nouveau dispositif et les contrats en alternance. Je le dis et le répète donc : il n’y aura aucune concurrence, bien au contraire.

Le contrat de génération contribuera au développement de l’alternance et permettra d’atteindre l’objectif de 500 000 apprentis en 2017, contre 435 000 aujourd’hui. En effet, seront comptabilisés dans les contrats de génération les embauches de jeunes en contrat de professionnalisation à durée indéterminée, mais aussi les contrats de professionnalisation et d’apprentissage en cours, sous réserve notamment de leur transformation en CDI.

Vous le voyez, loin de créer une concurrence, le contrat de génération offre de nouvelles ouvertures aux jeunes en alternance. Les travaux de la commission mixte paritaire se sont concentrés sur les articles 1er, 6 et 7, autour d’une quinzaine d’amendements, afin de renforcer la prise en compte de l’égalité hommes-femmes ; d’insister sur l’accès des jeunes les moins qualifiés au plan de formation dans l’entreprise, qui avait occupé les débats dans chacune des deux chambres ; de renforcer le contenu des accords sur la question de la transmission des savoirs et des compétences.

Enfin, ils ont permis d’apporter une réponse à une question faisant débat entre les deux assemblées, celle du non-licenciement durant les six mois précédant l’embauche en contrat de génération. Sur ce point, vous avez su trouver l’équilibre en adoptant le compromis du Sénat disposant que l’aide n’est pas accordée en cas de rupture conventionnelle, dans les six mois précédents, sur le poste pour lequel le jeune est embauché en contrat de génération. La CMP n’a donc pas modifié l’esprit du texte et de l’accord conclu par les partenaires sociaux, ce dont je me félicite.

En conclusion, je veux remercier à nouveau Mme la présidente de la commission mixte paritaire, ainsi que M. le rapporteur, pour leur investissement sur ce beau texte attendu par les entreprises de France. Le contrat de génération sera l’un des nombreux outils permettant la lutte pour l’emploi qu’entend mener le Gouvernement, avec la spécificité de rapprocher les générations dans l’entreprise et de faciliter ainsi la transmission des compétences et des savoir-faire. Je m’en tiendrai là et ne peux que vous inviter à adopter, après les emplois d’avenir et avant le projet de loi de sécurisation de l’emploi, dont vous serez saisis en mars prochain, les conclusions de cette commission mixte paritaire sur les contrats de génération. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission mixte paritaire.

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission mixte paritaire. Madame la présidente, messieurs les ministres, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je commencerai mon propos par une remarque générale.

Nous venons de passer deux semaines, plus de 110 heures, sur le projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe. Au cours de ces longues heures de séance, nous avons entendu de nombreux arguments qui n’avaient strictement rien à voir avec le contenu du projet de loi. Parmi ces arguments, il en est un qui est revenu en boucle : l’opposition a reproché au Gouvernement et à sa majorité de faire diversion, de proposer des réformes sociétales pour faire oublier à nos concitoyens la gravité de la crise, de se préoccuper de la revendication d’une petite minorité en négligeant les préoccupations d’une écrasante majorité.

Tout cela est faux, comme l’ordre du jour de cette semaine le démontre ! Notre assemblée débat du projet de loi sur la régulation des activités bancaires et, aujourd’hui, nous sommes réunis pour mettre le point final à la discussion du projet de loi portant création du contrat de génération. C’est bien la preuve que l’on peut s’occuper de problèmes sociétaux tout en traitant des problèmes sociaux, notamment ceux relatifs à l’emploi.

La création des emplois d’avenir il y a quelques semaines, le contrat de génération aujourd’hui, la sécurisation de l’emploi demain, sont autant de preuves que le Gouvernement travaille sur tous les fronts simultanément.

M. Thierry Repentin, ministre délégué. C’est vrai !

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission mixte paritaire. Il démontre qu’il peut à la fois faire progresser les droits de tous et l’égalité et mettre en place les outils de la politique de l’emploi et de lutte contre le chômage dont notre pays a besoin. Il me semblait nécessaire de mettre un terme aux faux procès qui nous ont été trop souvent faits durant deux semaines.

Mais revenons au contrat de génération. Le rapporteur a présenté les travaux de la commission mixte paritaire, qui est facilement parvenue à un accord dont il convient de se féliciter. Loin de diviser nos concitoyens, nous réconcilions les générations, jeunes et moins jeunes. Pour ma part, je suis particulièrement satisfaite du compromis trouvé pour la référence à la rupture conventionnelle dans la condition de non-licenciement pendant les six mois précédant l’embauche du jeune.

Il ne s’agit pas, comme certains membres de la CMP l’ont laissé entendre, de témoigner une hostilité de principe à la rupture conventionnelle. Celle-ci a été souhaitée par les partenaires sociaux et constitue un outil qui présente des avantages. Cependant, nous devons rester vigilants. Le nombre de ruptures conventionnelles augmente aujourd’hui dans des proportions inquiétantes, compte tenu de l’importance de la crise économique. Je rappelle les chiffres : entre janvier et octobre 2012, 279 000 demandes de rupture conventionnelle ont été reçues par l’administration. Cela représente 11,5 % de plus que l’année précédente, et 30 % de plus qu’en 2010, avec une crise toujours présente. Enfin, c’est au sein des entreprises de moins de 50 salariés, où le dialogue social est moins actif, que les ruptures conventionnelles ont le vent en poupe.

Un salarié souhaite-t-il vraiment, dans ce contexte, rompre de gré à gré son contrat de travail ? On peut en douter, d’autant que la rupture conventionnelle concerne surtout des salariés de plus de 57 ans.

M. Christophe Cavard. C’est un problème !

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission mixte paritaire. Pour ma part, sans vouloir faire un procès d’intention à la rupture conventionnelle, je m’interroge. La question de la rupture conventionnelle est sensible, et je crois que nous devrons nous pencher à nouveau sur ce dossier dans les mois à venir.

Pour conclure, je voudrais revenir sur le fait que ce projet de loi est la transcription fidèle d’un accord national interprofessionnel signé par l’ensemble des partenaires sociaux, aussi bien les cinq organisations syndicales de salariés que les trois organisations d’employeurs. Comme je le disais lors de l’examen en première lecture : « C’est une configuration suffisamment rare pour être soulignée ici et pour que, sur tous ces bancs, nous nous en félicitions. »

Or je dois avouer qu’à ma grande surprise et à mon grand regret ce n’est pas toujours le cas. En première lecture, ici même, le groupe UMP s’est massivement prononcé contre ce texte, alors que le groupe UDI choisissait la voie de l’abstention. Avant-hier, au Sénat, l’UMP s’est également opposée au texte issu des travaux de la CMP, alors que le groupe UDI-Union centriste votait pour. Je ne comprends pas l’attitude de défiance d’une partie de l’opposition à l’égard des partenaires sociaux, attitude qui, me semble-t-il, constitue un mauvais signal adressé au dialogue social dans notre pays, que le Président de la République et son gouvernement ont réussi à remettre en place. J’espère que vous saisirez l’occasion de ce dernier vote pour revenir à une position constituant un signal positif pour nos concitoyens, qui souhaitent promouvoir le dialogue social.

Je vais conclure en remerciant tous nos collègues, de la majorité comme de l’opposition, ayant travaillé à l’élaboration de ce texte. Je vous remercie également, messieurs les ministres, ainsi que vos collaborateurs au sein des cabinets ministériels, ces hommes et ces femmes de l’ombre toujours à l’écoute des parlementaires, toujours disposés à nous fournir les informations dont nous avons besoin, bref des personnes avec lesquelles il est agréable de travailler. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Michel Sapin, ministre. Ils sont aujourd’hui en pleine lumière ! (Sourires.)

Discussion générale

Mme la présidente. Dans la discussion générale, la parole est à M. Christophe Cavard.

M. Christophe Cavard. Madame la présidente, messieurs les ministres, madame la présidente de la commission mixte paritaire, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous abordons aujourd’hui la dernière étape pour l’adoption de la loi instaurant le contrat de génération, à la suite des travaux de la commission mixte paritaire. Comme cela a été dit, ce texte est issu d’un dialogue entre les partenaires sociaux que je tiens à saluer en préambule de mon intervention et sur lequel je reviendrai ultérieurement.

Bien sûr, notre travail parlementaire ne s’est pas limité à une stricte retranscription de ce dialogue et des accords qui en découlent, car ce serait une approche naïve des rapports de force qui traversent la société. Je crois que les améliorations sensibles que nous avons su apporter à la loi marquent notre volonté de soutenir la condition des employés dans les entreprises. Toutefois, nous avons su préserver l’équilibre de l’accord qui engage les partenaires sociaux sur la voie de la responsabilité dans leurs négociations ultérieures. Nous pouvons, messieurs les ministres, y voir un ballon d’essai pour le texte suivant.

La loi sur le contrat de génération instaure une obligation pour les entreprises de prendre leur part de responsabilité dans la résorption du déséquilibre structurel du chômage des jeunes et des salariés âgés. Essentiellement incitative, cette mesure contient une pénalité pour les entreprises les plus riches qui ne se mettraient pas en conformité avec les dispositions prévues.

Pour nous, écologistes, l’un des intérêts essentiels de ce texte réside dans l’esprit de coopération qu’il promeut au sein de l’entreprise. Car si le chômage est aussi déséquilibré entre les tranches d’âges, c’est parce qu’il règne trop souvent un climat concurrentiel entre générations. Favorisée par un haut niveau de chômage, cette concurrence renforce les inégalités salariales, accentue la pression à la baisse des salaires et entretient souvent le déséquilibre hommes-femmes. Plus encore, il conduit l’entreprise à se dessaisir de son caractère social et structurant, notamment en matière de formation tout au long de la vie ou d’évolution dans les parcours professionnels.

En renforçant la coopération entre les salariés, cette loi permet à des jeunes de bénéficier d’un emploi plus tôt et de maintenir les salariés âgés dans l’emploi à un moment où l’allongement des durées de cotisations conduit les retraités à une diminution de leurs indemnités de retraite. Du point de vue de la formation et de la transmission des savoirs, elle incite les entreprises à développer des plans de formation au bénéfice des personnes les moins qualifiées et valorise la transmission des compétences des salariés âgés disposant d’une expérience et d’un savoir-faire précieux.

Comme je le disais, notre travail législatif ne s’est pas limité à une simple retranscription de l’accord. Par des amendements successifs à l’Assemblée nationale et au Sénat, nous sommes, me semble-t-il, parvenus à un texte qui, tout en respectant l’équilibre initial, comporte de réelles améliorations pour les salariés. Tout d’abord, les contrats de génération doivent être un moyen d’améliorer la situation de personnes au chômage en raison de leur âge, de leur manque d’expérience ou de leur coût pour l’entreprise : en instaurant une quotité horaire minimale pour ces contrats, nous avons voulu renforcer la lutte contre la précarité salariale et contre l’augmentation continue d’une classe de travailleurs pauvres cumulant les petits boulots pour faire face à leurs besoins élémentaires.

Pour limiter les effets d’aubaine de la loi, nous avons aussi interdit le remplacement d’un salarié licencié au cours des six derniers mois pour des motifs autres qu’économiques ou de faute grave ou lourde. La loi portant dans son esprit une coopération entre salariés qui se traduit par une formation accrue, nous avons amélioré le texte en obligeant les accords à préciser les dispositions de formation spécifique. En effet, nous savons que le maintien dans l’emploi des jeunes sans qualifications suffisantes ainsi que la progression dans leur parcours professionnel passent par un investissement conséquent dans leur formation.

Il s’agit là d’une mesure de justice sociale importante pour compenser l’inégalité que subissent ceux qui, par la condition sociale des familles dont ils sont issus, n’ont pas pu suivre un parcours scolaire qualifiant ou diplômant. Par la loi, nous renforçons le rôle fondamental que peut jouer l’entreprise dans la lutte contre les inégalités sociales.

Comme vous avez pu le dire lors des précédentes étapes de l’examen du texte, monsieur le ministre, cette loi s’inscrit dans un projet plus global du Gouvernement pour lutter contre le chômage. Précédée par les emplois d’avenir, elle sera suivie d’un moment important pour notre majorité, la loi relative à la sécurisation de l’emploi. Dans cette série de lois, le Gouvernement a décidé de lever les obstacles à l’embauche, en particulier des salariés les plus précaires.

Cependant, nous, les écologistes, savons que le chômage ne résulte pas de ces seuls dysfonctionnements.

Notre économie est en pleine mutation. La raréfaction des ressources et le réchauffement climatique appellent notre secteur industriel à revoir en profondeur son mixte énergétique et à développer de nouvelles filières industrielles. Comme nous le savons, l’anticipation de ces mutations est fondamentale pour accompagner les salariés dans leur parcours professionnel, mais aussi dans les plans de formation pour adapter l’emploi aux nouvelles technologies.

Nous savons que tous les secteurs seront touchés par ces mutations dans les prochaines années. D’ores et déjà à l’œuvre dans le secteur de la sidérurgie ou de l’automobile, demain dans les transports, l’agriculture, le bâtiment et sa rénovation mais aussi dans les services, la transformation écologique ne doit pas être subie mais au contraire appréhendée comme une opportunité importante pour diminuer massivement le chômage.

Nous attendons donc que les lois actuelles soient rapidement complétées par des lois structurantes pour notre économie afin de favoriser le développement des nouvelles filières tout en garantissant l’accompagnement des salariés issus des secteurs en mutation.

Cet accompagnement de la transition écologique doit suivre une méthode elle aussi nouvelle. Au face à face entre le marché et l’État, qui a montré son incapacité à affronter ces crises d’un genre nouveau, il nous faut substituer le fédéralisme et le dialogue social.

Le fédéralisme, qui consiste dans un premier temps à mieux négocier les décisions de l’État avec l’Europe et les territoires locaux de projets et à utiliser de nouveaux moyens, notamment en matière de fiscalité, doit se retrouver dans chacune des lois économiques de notre majorité.

Cela passe par une association resserrée des collectivités territoriales en général et des régions en particulier dans la définition et la mise en œuvre concrète des lois, notamment de celle-ci.

Comme vous le souligniez, monsieur le ministre, la mise en œuvre des emplois d’avenir démarre lentement. En appelant les associations et les collectivités à un effort, vous insistez sur le rôle incontournable que doivent jouer les collectivités dans la réussite des politiques publiques. Pensées en lien direct avec le territoire et mises en œuvre par les citoyens de ces territoires, elles ont une chance beaucoup plus grande d’aboutir à leurs objectifs.

Le parallèle avec le monde de l’entreprise est évident ; c’est pour cela que, au même titre que nous sommes fédéralistes, nous souhaitons promouvoir le dialogue social et la négociation.

Seul un modèle d’entreprise associant davantage les salariés aux choix stratégiques peut permettre de renforcer le droit des salariés dans un contexte d’économie mondialisée où des actionnaires parfois désincarnés dictent leurs lois iniques. Ce modèle d’organisation existe déjà mais doit être développé avec force. Il s’agit, vous l’aurez compris, de l’économie sociale, qui nous est chère, et qui allie la responsabilité sociale et la participation, ou encore l’innovation dans les modes d’organisation du travail et la répartition des produits de l’entreprise.

Comme lors des précédents votes sur ce projet de loi, le groupe écologiste votera avec plaisir ce texte, qui constitue pour nous une étape sur le chemin de la résorption du chômage. S’agissant de la transformation écologique de notre économie, nous attendons – avec impatience parfois, mais cela doit être fait avec sérieux – les mesures d’ampleur qui permettront de concilier dans un même élan la réponse aux urgences sociales et environnementales. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Madame la présidente, messieurs les ministres, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, chers collègues, le groupe GDR votera en faveur de ce texte comme il l’a fait en première lecture.

En premier lieu, celui-ci transcrit assez fidèlement un accord national interprofessionnel signé à l’unanimité. Puisqu’il est assez rare que la démocratie politique recoupe pleinement la démocratie sociale unanime, cela mérite d’être souligné. Je tiens à préciser toutefois qu’il n’en sera pas de même, hélas, avec l’accord si mal nommé de sécurisation de l’emploi que nous étudierons dans quelques semaines et auquel le groupe GDR est farouchement opposé.

M. Arnaud Richard. Nous n’en avons pas encore débattu !

Mme Jacqueline Fraysse. Nous en parlerons le moment venu.

En second lieu, alors que plus de 10 % de la population active se trouve au chômage, nous ne pouvons qu’approuver un texte qui, s’il ne constitue pas la panacée en matière d’emploi, a néanmoins le mérite de s’attaquer à un fléau insupportable que les gouvernements précédents et l’attitude d’un trop grand nombre d’entreprises ont contribué à aggraver durablement.

Pour les salariés âgés, une telle situation résulte de l’allongement de la durée de cotisation contenue dans la loi de réforme des retraites combiné aux réticences des entreprises à garder ces salariés considérés comme insuffisamment productifs et souvent coûteux.

Quant aux jeunes, ils sont considérés comme insuffisamment formés et les employeurs rechignent à leur confier des responsabilités, ce qui les contraint à enchaîner pendant des années les stages, les contrats précaires et les périodes de chômage. Pour la grande majorité d’entre eux, les débuts dans la vie professionnelle sont marqués par une précarité difficilement soutenable.

Dès lors, nous ne pouvons que souscrire aux objectifs de ce texte : favoriser l’emploi des jeunes, maintenir les salariés âgés en activité et développer la transmission des savoirs.

Nous les approuvons d’autant plus que nos débats et la discussion au Sénat ont permis des avancées qui doivent être saluées. Je n’en citerai qu’une, tant elle revêt à nos yeux un caractère symbolique : c’est le premier texte sur l’emploi depuis des années qui lie une aide publique au recrutement d’un salarié en CDI !

La seule ombre à cette avancée est la possibilité d’embaucher à temps partiel, même si celle-ci est encadrée – la durée hebdomadaire du travail ne peut être inférieure à quatre cinquièmes de la durée hebdomadaire de travail à temps plein, et cette décision nécessite l’accord du salarié.

Dans la mesure où vous n’avez pas accepté notre amendement proposant un salaire correspondant à 1,6 SMIC, les salariés concernés émargeront encore dans la catégorie des travailleurs pauvres, même s’ils seront heureusement en CDI. Par ailleurs, il est heureux que ce recours au temps partiel soit conditionné par l’accord du ou de la salariée, mais nous doutons de la liberté de choix des jeunes et des seniors qui cherchent un travail dans la conjoncture actuelle : entre le RSA et un CDI, même à temps partiel, le choix sera certainement biaisé. C’est encore l’employeur qui, in fine, décidera.

Nous espérons que ce point négatif sera atténué par les changements de mentalité que ce texte pourrait induire dans les entreprises.

Notre vote va dans ce sens : il n’exprime pas une adhésion pleine et entière, mais plutôt un espoir.

Nous espérons également que ce texte permettra aux partenaires sociaux d’avancer sur la question de l’adaptation des postes, de la réduction de la pénibilité, notamment pour les salariés âgés, car, en l’absence d’avancées dans ce domaine, nombre de dispositions en faveur de l’emploi des seniors risquent de rester inopérantes.

Si nous apprécions que l’aide accordée ne concerne pas aveuglément toutes les entreprises mais soit réservée aux entreprises de moins de 300 salariés, nous n’en sommes pas moins critiques – pour ne pas dire opposés – quant à la démarche de fond, car de toute évidence la politique de l’emploi ne peut se réduire à la distribution de fonds publics au secteur privé ou aux exonérations en tous genres, d’autant que, pour beaucoup des entreprises concernées, aucune contrepartie en matière d’emploi n’est demandée.

Nous regrettons ainsi que le Gouvernement reste sur une ligne politique consistant à favoriser ce qu’il est convenu d’appeler la réduction du coût du travail, plutôt que celle du capital et des dividendes au détriment des investissements et des créations d’emplois. Je l’ai déjà dit et je le répéterai, car ce point me semble essentiel pour sortir notre pays de la crise.

Enfin, si ce texte fait l’objet d’un large consensus, il ne faut pas perdre de vue qu’il ne saurait à lui seul résoudre le problème du chômage, fût-ce celui des jeunes et des seniors.

M. Gérard Cherpion. C’est vrai !

Mme Jacqueline Fraysse. Il est donc indispensable que le Gouvernement propose des mesures structurelles permettant d’endiguer la saignée d’emplois à laquelle se livrent de nombreuses entreprises sous prétexte de préserver la compétitivité. Il est temps désormais de s’attaquer à la finance pour la remettre au service de l’économie réelle, de l’industrie, d’un modèle de production plus soutenable, d’un épanouissement plutôt que d’un asservissement des salariés et finalement des peuples.

Nous sommes donc conscients des limites de ce texte, mais nous avons la volonté d’être constructifs et nous voulons croire en son potentiel de progrès, un potentiel que nous apprécierons à l’occasion de l’évaluation du dispositif annoncée par le Gouvernement. Dans ces conditions, nous le voterons.

Mme la présidente. La parole est à Mme Kheira Bouziane.

Mme Kheira Bouziane. Madame la présidente, messieurs les ministres, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, chers collègues, vous me pardonnerez de commencer mon intervention par un propos grave : je ne peux m’empêcher d’avoir une pensée pour cet homme que le désespoir social a conduit à commettre un geste dramatique et irréparable en s’immolant. J’ai également une pensée pour sa famille, qui devra survivre à cette épreuve.

Cette triste actualité nous amène à constater, à dire et à reconnaître que le chômage exclut, désocialise, fragilise et, hélas, aujourd’hui, peut tuer.

Pour lutter contre ce fléau, monsieur le ministre, depuis votre prise de fonction, vous ne ménagez pas vos efforts pour mettre en place toute une série de mesures destinées à favoriser l’emploi de ceux qui sont exclus du marché du travail. Nous devons également nous interroger sur l’accompagnement de ces derniers.

Après les emplois d’avenir et la mise en place du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, vous nous avez présenté un projet de loi portant création du contrat de génération et visant à mettre en œuvre un engagement majeur du Président de la République.

Le contrat de génération, outil innovant, est une pièce maîtresse de l’arsenal pour la lutte contre le chômage qui vient s’ajouter à d’autres dispositifs de création d’emplois et de vitalisation de l’économie.

Issu d’un accord national interprofessionnel unanime, témoignant ainsi de la victoire du dialogue social, le contrat de génération enrichit la mobilisation de tous les acteurs contre le chômage.

Je me réjouis aujourd’hui du parcours sans faute de ce texte.

Nous voici parvenus au terme de la procédure d’examen de ce projet de loi, au moment où la situation de l’emploi en France est particulièrement alarmante.

Sur les quelques points qui restaient en discussion, les deux chambres sont arrivées à un accord qui nous satisfait pleinement. Le texte adopté mardi dernier en commission mixte paritaire n’a pas modifié l’esprit du texte retenu par la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale et enrichi au cours de nos débats en séance publique. Il respecte l’esprit de l’accord national interprofessionnel qui en constituait le fondement.

J’en profite pour saluer le travail réalisé par les deux rapporteurs de la commission mixte paritaire : Christiane Demontès pour le Sénat et Christophe Sirugue pour l’Assemblée nationale.

Dans le contexte actuel, caractérisé par un taux de chômage élevé, le contrat de génération redonnera de l’espoir à la fois aux jeunes et aux salariés âgés. Il répond pleinement aux objectifs liés aux réalités subies aujourd’hui par ces publics.

L’intégration durable des jeunes dans l’entreprise s’impose à nous de manière criante. Ils sont souvent confrontés à la précarité, aux stages répétitifs, aux contrats temporaires ou partiels ou à l’intérim.

Le contrat de génération – vous l’avez dit, monsieur le ministre – leur rendra la confiance en leur offrant l’occasion d’accéder à un vrai emploi en contrat à durée indéterminée, lequel leur permettra d’être autonomes et leur fera une place dans l’entreprise, mais aussi dans la société.

Il permettra parallèlement de maintenir les anciens dans l’emploi et de préserver leurs expériences professionnelles, facteur de compétitivité. C’est là la richesse de nos entreprises et de notre société.

Je ne reviendrai ni sur l’intégralité des mesures contenues dans ce texte, ni sur les dispositions phares que nous avons déjà débattues, ni sur les modifications que notre rapporteur a si bien présentées.

Le contrat de génération sera bientôt opérationnel et nous nous en réjouissons. Nous avons conscience qu’il ne réglera pas toutes les difficultés que rencontrent nos concitoyens sur le marché de l’emploi. Cependant, il constituera un outil dans la lutte pour l’emploi que mène le Gouvernement, à laquelle nous devons tous participer et dont la mise en œuvre reste notre objectif commun.

Ce dispositif quitte le champ du Parlement pour entrer dans celui de l’action ; nous allons faire d’une mesure phare du candidat François Hollande une réalité. À nous tous, chacun à son niveau, de le faire vivre, de le faire connaître et de le promouvoir. Le Gouvernement est mobilisé pour inverser la courbe du chômage d’ici à la fin de l’année. Cette bataille doit être l’affaire de tous.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, le contrat de génération est ambitieux ; il fera l’objet d’un contrôle par le Parlement ; il répondra aux aspirations des seniors comme à celles des jeunes. Il s’agit d’un contrat de droit commun garantissant aux jeunes la concrétisation de leur projet professionnel et leur insertion dans une vie sociale digne. Puissent ces contrats profiter à tous, sans discrimination de quelque nature que ce soit.

Le dispositif des contrats de génération a été validé par l’ensemble des partenaires sociaux. Nous espérerons qu’il recueillera, de la même façon, l’adhésion de l’ensemble des parlementaires. Nos concitoyens ne comprendraient pas que l’on puisse refuser de nouvelles solutions pour l’emploi.

Ces quinze derniers jours, nos collègues de l’opposition nous ont fait le plaisir de citer bon nombre de personnalités de la majorité. Je voudrais aujourd’hui leur faire un clin d’œil en leur rappelant une expression que l’on prête à Jacques Chirac,…

M. Gérard Cherpion. Bonne référence !

Mme Kheira Bouziane. …lequel l’empruntait en fait à Richelieu : avec ce contrat, le Gouvernement rend possible ce qui est nécessaire ; c’est bien le rôle de la politique.

Aujourd’hui, 14 février, faites un geste d’amour en direction de nos jeunes et de nos anciens ! (Sourires.)

M. Yves Fromion. Vous le méritez bien, mais nous n’irons pas jusque-là. Cela dit, nous vous enverrons des roses…

Mme Kheira Bouziane. En conclusion, nous voterons bien sûr ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Cherpion.

M. Gérard Cherpion. Madame la présidente, messieurs les ministres, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, 58 % : telle est, selon un sondage paru hier, la proportion des jeunes de moins de trente ans qui pensent que le dispositif que le Gouvernement propose ne permettra pas de lutter efficacement contre le chômage des jeunes ; je ne m’en réjouis pas.

M. Michel Sapin, ministre. C’est qu’ils ne le connaissent pas !

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. Les sondeurs ont dû interroger les maternités !

M. Gérard Cherpion. Pour les plus de trente ans, le pourcentage atteint même 70 %.

Ce sondage démontre que les Français ne sont pas dupes et qu’ils sont persuadés que ce projet n’atteindra pas les objectifs attendus. Tout au long de la discussion, le groupe UMP s’est employé à vous mettre en garde. De plus, les modifications apportées à ce texte par la majorité, sur lesquelles je vais revenir, lui font perdre le peu d’attrait qu’il avait en le complexifiant et en le rigidifiant encore davantage.

Mon introduction peut sembler sombre. Oui, elle l’est, parce que la situation s’assombrit et que les solutions apportées par le Gouvernement et la majorité n’apportent aucune lumière, alors que l’angoisse des salariés et des demandeurs d’emploi comme les difficultés des employeurs vont croissant.

Alors que le chômage est en hausse constante, qu’il touche 3,2 millions de personnes, qu’il y a 1 000 chômeurs de plus par jour, que l’UNEDIC prévoit pour 2013 près de 90 000 chômeurs indemnisés de plus, le Gouvernement nous propose un dispositif onéreux et bien peu ambitieux.

Il est peu ambitieux car, selon l’Observatoire français des conjonctures économiques, il permettrait de créer 21 000 emplois par an. Au vu de la situation que je viens d’exposer, à laquelle nous pouvons ajouter, hélas ! les 20 000 emplois industriels qui sont actuellement gravement menacés, cet objectif est largement insuffisant.

Il est aussi onéreux. En effet, le Gouvernement va devoir abaisser sa prévision de croissance, puisque la Cour des comptes la met sérieusement en doute. Alors que votre prévision est de 0,8 % pour 2013, l’OCDE et le FMI tablent sur une croissance de 0,3 %. Le plus probable est d’ailleurs au mieux, selon le Premier président de la Cour des comptes, une stagnation.

Cette absence de croissance vous obligera à trouver plus de 8 milliards d’euros, sans lesquels l’objectif de réduction du déficit public à 3 % ne pourra pas être tenu. Alors que nous sommes dans l’obligation de tenir cet engagement vis-à-vis de nos partenaires européens et internationaux – en particulier les investisseurs –, le Gouvernement propose une dépense de 2,5 milliards d’euros.

Lors de la discussion en première lecture, monsieur le ministre, que ce soit devant l’Assemblée nationale ou devant le Sénat, vous n’avez pas précisé le financement. Ainsi, implicitement, vous confirmez l’amputation du crédit d’impôt compétitivité emploi et le recours à l’emprunt.

« Il ne sert à rien d’afficher des objectifs s’ils ne peuvent être atteints ». Cette phrase, prononcée avant-hier par le Président de la République, pourrait s’appliquer au contrat de génération, même si elle concerne la prévision de croissance. C’est d’ailleurs, en substance, ce que le groupe UMP vous répète inlassablement à propos de ce texte.

M. Yves Fromion. Très bien !

M. Gérard Cherpion. Ainsi, votre dispositif résume à lui seul le manque de réponses crédibles du Gouvernement sur les deux sujets majeurs de notre société : la montée inexorable du chômage et votre incapacité à tenir vos engagements financiers en matière de réduction du déficit.

Le texte issu de la commission mixte paritaire présente deux changements notables.

Le premier concerne l’impossibilité de souscrire ces contrats dans certaines entreprises. En effet, celles de moins de 300 salariés ayant procédé à une rupture conventionnelle sur le poste pour lequel est prévue l’embauche ne pourront pas bénéficier de cette mesure. Bien que la formulation du Sénat, choisie par la commission, soit plus souple que le dispositif inséré par la majorité de l’Assemblée nationale, elle reste inacceptable.

Non seulement elle limitera les embauches, mais surtout elle remet en cause la rupture conventionnelle, pourtant voulue par les partenaires sociaux. À l’heure où nous parlons de sécurisation de l’emploi et de compétitivité, vous rigidifiez le peu de marges de manœuvre que possèdent les employeurs et les salariés.

Monsieur le ministre, après avoir augmenté les taxes sur la rupture conventionnelle, vous acceptez sa remise en cause. Vous confortez ainsi la volonté de votre majorité de briser un dispositif mis en place avec – et par – les partenaires sociaux. Nous dénonçons cette démarche.

Le second changement est lié à la signature du procès-verbal de désaccord lorsque les négociations entre l’entreprise et les représentants des salariés n’aboutissent pas. Je m’étais déjà interrogé, lors de la première lecture dans notre assemblée, sur les conséquences du refus de signature de ce procès-verbal.

Bien que cette situation soit, je l’espère, peu fréquente, il faut réfléchir aux conséquences de la non-signature du procès-verbal de désaccord par l’une des parties. Or elles peuvent être graves pour l’entreprise, puisque cette situation entraînera de facto l’application des sanctions. Cela est d’autant plus plausible que le Sénat a modifié les dispositions en la matière. L’Assemblée nationale, en première lecture, avait prévu la signature de ce procès-verbal dans les seules entreprises pourvues de délégués syndicaux. Les autres entreprises – en très grande majorité de petite et moyenne taille –, pouvaient, à la suite de l’échec des négociations, mettre en place sans tarder un plan d’action.

Cette procédure permettait de fluidifier les prises de décision dans les entreprises ne disposant pas des moyens humains et logistiques des grandes entreprises ; elle s’inscrivait de plus dans la logique des signataires du texte.

Le Sénat a alourdi cette disposition en obligeant toutes les entreprises, y compris celles n’ayant pas de délégués syndicaux, à signer un procès-verbal de désaccord. Cela me semble, monsieur le ministre, la porte ouverte à de nombreux contentieux.

M. Philippe Armand Martin. Bien sûr !

M. Gérard Cherpion. Par ailleurs, je rappelle que l’entreprise embauche non pas pour recevoir une prime, mais pour recruter un salarié compétent lui permettant de répondre à son carnet de commandes et de favoriser son développement.

J’en viens à un point qui me satisfait. Lors de la navette, le Sénat est revenu sur l’alinéa concernant la perte de l’aide. Il a tenu à souligner qu’elle ne serait pas retirée en cas de licenciement pour faute grave ou lourde ou en cas d’inaptitude du salarié. J’avais d’ailleurs déposé un amendement allant dans ce sens, qui n’avait pu être discuté car il avait été jugé irrecevable financièrement. Bien que le dispositif soit encore trop contraignant pour les entreprises, je salue le Sénat, qui l’a amendé favorablement.

L’examen par le Parlement n’a pas permis d’intégrer la transmission des savoirs. Nous ne pouvons que le regretter. Le contrat de génération n’aura donc de générationnel que le nom, comme nous avons pu le souligner tout au long de la discussion du projet de loi. Ainsi, le lien intergénérationnel n’existe qu’à l’instant de la signature du contrat.

Votre majorité au Sénat n’a que peu corrigé les insuffisances de ce texte. Elle n’est pas non plus revenue sur le cavalier législatif que vous avez intégré grâce à un amendement gouvernemental, évitant d’ailleurs ainsi l’avis du Conseil d’État. Votre déclaration au Sénat, monsieur le ministre – je cite : « de nouvelles missions doivent être conduites par l’inspection du travail pour déjouer de nouvelles modalités de mise en cause des intérêts des salariés » –, prouve votre défiance vis-à-vis des employeurs.

Nos concitoyens attendent une véritable politique de l’emploi et non une succession de mesurettes législatives. Ainsi, les premiers résultats disponibles concernant les emplois d’avenir dénotent une absence de montée en charge, avec un nombre relativement important de ruptures de ces contrats.

Enfin, le sondage en date du 13 février que j’ai cité au début de mon intervention, réalisé pour l’Observatoire du travail, souligne que les salariés, quelle que soit leur catégorie d’âge, ne croient pas dans les contrats de génération. Ils veulent une politique de l’emploi globale. Pour toutes ces raisons, le groupe UMP votera contre ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Yves Fromion. Voilà de la clarté !

M. Michel Sapin, ministre. Vous ne l’avez même pas écouté ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Richard.

M. Arnaud Richard. Madame la présidente, messieurs les ministres, madame la présidente de la commission, mes chers collègues, la force d’une nation est dans sa ressource humaine ; un pays n’est puissant que par les hommes et les femmes qui le composent, par l’envie qu’ils ont de vivre et de construire ensemble, par le rayonnement de leur confiance dans l’avenir et par la cohésion sociale qui les unit. La prospérité économique est indissociable de la prospérité sociale.

À l’heure du chômage de masse et dans un monde en pleine mutation, Le traitement amiable et en toute humanité des chômeurs doit prévaloir, d’autant qu’il s’agit souvent de situations où le désespoir prend le pas sur l’espoir. Nous sommes en panne de croissance, c’est un fait ; ne soyons pas en panne de médiation ou d’humanité.

Le texte qui nous est présenté aujourd’hui est issu des travaux de la commission mixte paritaire ; il a été amélioré lors de la discussion dans les deux assemblées sur certains aspects qui nous semblaient importants, ce qui me donne l’occasion de féliciter nos collègues pour l’ensemble du travail que nous avons accompli ensemble. Je remercie également Mme la présidente de la commission, ainsi que les membres du Gouvernement ; ils ont su, dans les limites inhérentes à l’exercice, faire évoluer – même si c’est à la marge – le projet de loi.

Je vous remercie, monsieur le rapporteur, pour vos propos sur la qualité de nos travaux ; ils sont d’autant plus savoureux que vous avez eu tendance à rejeter nos amendements au prétexte qu’ils ne correspondaient pas aux termes de l’accord national interprofessionnel, comme si les décisions des partenaires sociaux devaient nécessairement déterminer celles du Parlement.

Je regrette que vous ayez refusé, alors même que le ministre y était favorable, un amendement relatif à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences territoriale. C’est pourtant, à notre sens, le meilleur moyen de décloisonner les relations, sur un territoire, entre l’ensemble des acteurs qui œuvrent pour l’emploi. Mais, comprenant l’état d’esprit qui nous animait, vous vous êtes, ici ou là, quelque peu assoupli. Vous avez compris que nous nous étions efforcés de travailler de façon constructive sur le sujet majeur qu’est l’emploi.

Notre seule préoccupation, qui s’est traduite par les amendements que nous avons défendus, a été de rendre le contrat de génération efficace et opérationnel, à défaut d’une politique plus ambitieuse, globale et mobilisatrice pour l’emploi, la formation et l’apprentissage, que nous souhaitons voir mise en œuvre.

Chemin faisant, vous avez admis, si ce n’est à la lettre, du moins dans l’esprit, quelques-unes de nos propositions relatives à l’amélioration des conditions de travail des seniors, au principe du temps plein, à la garantie de l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes et à la lutte contre les discriminations à l’embauche.

Malgré cela, l’économie générale du texte n’a pas substantiellement évolué. Admettez tout d’abord, messieurs les ministres, que l’expression « contrat de génération » demeure, à l’issue de nos discussions, un abus de langage…

M. Gérard Cherpion. Eh oui !

M. Yves Fromion. C’est un slogan !

M. Guy Geoffroy. Ce sont les rois du slogan !

M. Arnaud Richard. …et que le projet qui est aujourd’hui soumis à notre vote est sans grand rapport avec la proposition de campagne du candidat Hollande.

L’« alliance des âges » ne se traduira en réalité que très rarement par une transmission effective des savoirs et des compétences entre un senior et un jeune. Je rappelle à cet égard que notre collègue Arlette Grosskost, ici présente, avait, il y a bien longtemps, déposé une proposition de loi sur ce sujet.

Mme Arlette Grosskost. Eh oui !

M. Guy Geoffroy. C’est vrai !

M. Arnaud Richard. Il eût d’ailleurs été plus correct de conserver le dispositif qui existait jusque-là au bénéfice des seniors. Or vous l’assouplissez, au risque d’en affaiblir l’efficacité.

Quant aux jeunes, vous êtes à notre sens passés à côté de l’objectif fondamental, lequel devait vous conduire à lier systématiquement l’emploi à la formation et à l’apprentissage pour en faire un authentique et novateur CDI de professionnalisation.

Nous regrettons tout spécialement que vous vous soyez cantonnés à des « engagements en faveur de la formation et de l’insertion durable des jeunes », même si ces mentions constituent un progrès dans la mesure où elles ne figuraient pas dans le texte initial. Nous aurions souhaité que ces engagements mentionnent l’accès obligatoire à une « formation qualifiante et diplômante pour les jeunes non diplômés. »

La formation restera ainsi la grande absente du dispositif des contrats de génération, alors qu’elle est pour ces jeunes un enjeu clé. Je crains que les dispositions relatives à la formation que nous avons votées soient assez mal engagées, mais j’espère, messieurs les ministres, me tromper.

M. Régis Juanico. Quel optimisme !

M. Arnaud Richard. Les jeunes peu qualifiés n’étant pas les bénéficiaires prioritaires des contrats de génération adossés à une formation qualifiante, nous craignons que le dispositif ne fasse que déplacer de l’emploi sans en créer.

M. Guy Geoffroy. Exactement !

M. Arnaud Richard. Autrement dit, nous voyons mal comment l’effet d’aubaine ne jouerait pas à plein.

Finalement, en dégradant l’offre faite aux seniors et en ne répondant qu’insuffisamment au véritable enjeu de l’employabilité de la jeunesse, ce projet de loi semble passer à côté du grand espoir de campagne qu’il a soulevé.

Mme Marie-Christine Dalloz. Très bien !

M. Guy Geoffroy. Voilà un excellent résumé !

M. Arnaud Richard. Le texte aurait pu au moins prévoir de distinguer l’accueil du jeune en entreprise du travail de transmission des savoirs techniques afin de rendre le parrainage par un senior effectif.

Nous souhaitions ainsi donner à l’arrivée du jeune dans l’entreprise une sorte de solennité et exprimer la solidarité entre générations. C’eût été un symbole positif et une démarche simple à concrétiser.

Nous regrettons également que le contenu des diagnostics soit évoqué dans des termes génériques et renvoyé à un décret. Il nous semblait au contraire très important de le préciser afin qu’il puisse produire des effets vertueux basés sur une analyse précise.

Nous déplorons aussi que vous ayez maintenu, comme l’a rappelé mon collègue Cherpion, la mesure qui prive du dispositif des contrats de génération les entreprises qui ont procédé, dans les six mois précédant l’embauche du jeune, à un licenciement pour motif économique sur les postes relevant de la même catégorie professionnelle.

Cette disposition, comme d’autres dans ce texte, signe une méfiance inquiétante à l’égard de l’entreprise. Nos collègues du Sénat avaient proposé de l’amender en remplaçant la notion trop large de « catégorie professionnelle » par celle, plus restreinte, « d’emploi équivalent ». Mais vous ne les avez pas entendus.

M. Guy Geoffroy. Quel autisme !

M. Arnaud Richard. Vous avez opéré ainsi un choix lourd de conséquences, créant un frein à la mise en œuvre du dispositif dans des situations où, objectivement, l’entreprise ne mérite pas de se voir ainsi sanctionnée.

Dans le même esprit, l’introduction de la rupture conventionnelle homologuée comme motif d’interdiction du versement de l’aide est un mauvais signal donné aux entreprises et aux salariés. Vous en avez parlé dans votre propos liminaire, monsieur le ministre : au vu des décisions de justice récentes, nous aurons l’occasion d’évoquer à nouveau cette question au Parlement.

Je ferai une ultime remarque concernant le financement du dispositif. Nous ne voyons pas en quoi votre choix de lever une part des 20 milliards du CICE, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi qui avait pour vocation de financer la recherche, l’innovation et la formation, est cohérent.

Le chômage massif est devenu une donnée permanente, avec toutes ses conséquences négatives sur la compétitivité de notre pays. Nous devons le maîtriser dans le cadre d’une perspective d’avenir : l’allocation chômage est une indemnité, il faut en faire un investissement, un instrument de retour à l’activité.

Le chômage représente une période de difficultés durant laquelle le risque d’accidents de la vie est accru, et je ne reviendrai pas sur l’actualité récente, qui nous a tous meurtris ; il faut en faire une étape de reconstruction, au cours de laquelle le rôle éminent de la puissance publique est d’accompagner chacun de ceux qui en ont besoin, au nom de l’efficacité mais aussi de la fraternité.

Pour conclure, nous regrettons le manque de souplesse du dispositif proposé, l’absence d’une action volontariste pour une formation qualifiante des jeunes, mais aussi un certain état d’esprit peu favorable au retour de la confiance des entreprises.

M. Régis Juanico. Vous faites le grand écart !

M. Arnaud Richard. L’UDI ne s’opposera donc pas à un projet de loi qui cherche des solutions, en la matière toujours difficiles à trouver, et qui se propose d’apporter une aide à la jeunesse. Mais face au constat que nous faisons, et malgré la qualité de nos échanges, nous choisissons de nous abstenir.

Mme la présidente. La parole est à M. Denys Robiliard.

M. Denys Robiliard. Madame la présidente, messieurs les ministres, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je constate que le groupe UDI progresse puisqu’il avait soutenu une motion de procédure en première lecture. Il y avait donc bien lieu de délibérer, ce qui lui a permis de tenir des propos forts sur la nécessité d’employer le temps du chômage pour la reconstruction. Je ne suis pas certain qu’il en tire toutes les conséquences ; du moins ne s’opposera-t-il pas au texte issu de la CMP !

Cela ne sera pas le cas sur les bancs de l’UMP. Nous ne doutons pas, chers collègues, que vous assumerez devant les chômeurs le fait de leur refuser des moyens pour sortir de cette situation. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Guy Geoffroy. Si seulement ce dispositif était aussi efficace que vous le dites !

M. Denys Robiliard. Ce que l’on peut être bavard sur les bancs de l’opposition, surtout lorsqu’on n’a rien à dire !

Je constate que, dans un délai bref, ce qui montre que le Gouvernement et le Parlement ont pris la mesure de l’urgence de la situation, nous transposons un accord national interprofessionnel qui a recueilli l’unanimité. C’est l’une des marques du travail que nous menons pour la politique de l’emploi.

M. Gérard Cherpion. Laquelle ?

M. Denys Robiliard. Contrairement à l’ancienne majorité, nous avons une politique de l’emploi et nous ne pensons pas qu’une politique économique soit suffisante.

Chacun le reconnaîtra, ce dispositif ne représente pas à lui seul la politique de l’emploi ; il est l’un de ses éléments. Il s’ajoute aux emplois d’avenir, qui n’avaient pas davantage trouvé grâce à vos yeux, et aux mesures prises pour remuscler rapidement le service public de l’emploi, notamment avec la restauration des 2 000 postes que vous aviez supprimés : autant d’éléments d’une politique globale, qui sera poursuivie.

Le choix des cibles est pertinent et les partenaires sociaux ne se sont pas trompés en adoptant à l’unanimité cet accord national interprofessionnel. J’observe d’ailleurs que vous êtes extrêmement cohérents avec ce que vous souteniez lors de la campagne : selon vous, les partenaires sociaux ne servent pas à grand-chose, car même lorsqu’ils sont unanimes, vous votez contre la transposition de leur accord !

M. Yves Fromion. C’est faux.

M. Guy Geoffroy. Et si on passait au texte ?

M. Denys Robiliard. Vous ne nierez pas que le chômage des jeunes est anormalement élevé, et qu’il dépasse largement la moyenne nationale. Il était donc nécessaire qu’un dispositif cible cette population.

M. Guy Geoffroy. Que faites-vous pour leur embauche ?

Mme la présidente. Seul M. Robiliard a la parole !

M. Denys Robiliard. Je n’en avais pas l’impression, madame la présidente, mais chacun a le droit de s’exprimer. M. Cherpion n’a pas été interrompu : sans doute ce qu’il avait à dire était-il intéressant. Vous pouvez penser ce que vous voulez de mon intervention, chers collègues, mais ne caricaturez pas vous-mêmes l’opposition !

Tout le monde convient aussi qu’il est dommage que les entreprises abandonnent les salariés dans la force de l’âge, très expérimentés. De surcroît, ce n’est pas au moment où la durée de cotisation-retraite s’allonge qu’il faut diminuer leurs droits à retraite en les mettant sur la touche à l’âge de 55 ans. À quoi aboutit-on avec une telle politique ? Tout simplement à des retraites minables, parce que l’on ne permet pas aux salariés de cotiser le temps nécessaire.

Le dispositif est adapté, tout d’abord dans son mode d’établissement. Il est vertueux de transcrire rapidement un accord national interprofessionnel adopté à l’unanimité.

Conformément au souhait des partenaires sociaux, il est décliné en fonction de la taille des entreprises et ainsi ajusté à leurs possibilités.

Par ailleurs, le dispositif est souple. Vous disiez que la proposition du Président de la République – dont vous vous faites l’interprète dès qu’il s’agit de le contester – n’était pas respectée parce que le binôme entre le salarié âgé et le jeune embauché n’était pas nominatif ; c’est la souplesse qui a été privilégiée. La transmission se fera sans que l’on ait l’obligation d’identifier le salarié qui sera remplacé par le jeune. La transmission demeure : on la rend possible sans figer les choses.

De ce point de vue, les dispositions sur la formation et l’insertion professionnelle des jeunes que comprennent l’accord et le projet de loi sont importantes.

Enfin, le dispositif gère les effets d’aubaine. M. Richard a cru déceler un signal négatif tandis que M. Cherpion voyait une attaque en direction du dispositif des ruptures conventionnelles. Les modalités qui ont fait l’objet d’un accord en CMP ne s’attaquent pas à la rupture conventionnelle. Mme Lemorton l’a rappelé tout à l’heure : on constate une montée en charge rapide du dispositif. La dernière étude de la DARES – nous attendons des données plus récentes – montre que, dans 60 % des cas, c’est l’employeur qui est à l’initiative de la rupture. Ce dispositif est donc employé par les entreprises, à côté du licenciement classique, pour rompre un contrat, et le nombre de ruptures conventionnelles à l’initiative de l’employeur s’approche du nombre de licenciements. Si l’on veut être responsable, il faut nécessairement intégrer le dispositif des ruptures conventionnelles, au même titre que les licenciements, dans la gestion des effets d’aubaine.

Voilà pourquoi, en regardant l’ensemble des éléments, je n’ai pas trouvé dans les critiques adressées à la politique de l’emploi ou à ce dispositif une seule raison qui nous convaincrait de modifier notre vote en faveur de ce projet. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. La discussion générale est close.

Texte de la commission mixte paritaire

M. le président. Je vais maintenant mettre aux voix l’ensemble du projet de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire.

(Le projet de loi est adopté.)

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix heures quarante-cinq, est reprise à dix heures cinquante, sous la présidence de M. Christophe Sirugue.)

Présidence de M. Christophe Sirugue
vice-président

M. le président. La séance est reprise.

2

Séparation et régulation des activités bancaires

Suite de la discussion d’un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires (n°s 566, 707, 661, 666).

Discussion des articles (suite)

M. le président. Hier soir, l’Assemblée a poursuivi l’examen des articles, s’arrêtant à l’amendement n° 113 portant article additionnel après l’article 4 bis.

Après l’article 4 bis

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n° 113.

M. André Chassaigne. Nous relayons, avec cet amendement, une demande du collectif qui réunit des associations et des syndicats aussi divers qu’Attac, la fondation Copernic, la CGT finances, la FSU, Solidaires finances publiques, les Économistes atterrés. Ce collectif, craignant que ce projet de loi ne laisse le système bancaire français dans une situation aussi risquée qu’au début de la crise, formule des propositions, telle celle d’interdire aux établissements de crédit d’installer des filiales dans les paradis fiscaux dont la liste devrait être selon eux réactualisée avec plus d’ambition. Nous partageons d’ailleurs ce point de vue.

Nous avons à plusieurs reprises, lors de la discussion du projet de loi de finances, défendu cette proposition qui traduit le souci de clarifier les activités des établissements bancaires dans les États ne coopérant pas avec la France. Interdire aux établissements de crédit d’exercer des activités dans les États ou les territoires qui n’auraient pas conclu avec notre pays une convention d’assistance permettant l’échange automatique de tout renseignement nécessaire à l’application de la loi fiscale française nous paraît être une mesure de bon sens.

Au-delà des obligations de transparence et d’information, l’enjeu de la régulation est bien évidemment de mettre fin à l’existence des paradis fiscaux en rendant effective l’interdiction d’application.

Là encore, nous pensons que la France peut, doit, jouer un rôle pionnier.

M. le président. La parole est à Mme Karine Berger, rapporteure de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l’avis de la commission.

Mme Karine Berger, rapporteure de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Cet amendement va trop loin par rapport à l’objectif que nous partageons tous et dont nous avons beaucoup discuté hier soir : la lutte contre l’utilisation de notre système bancaire pour échapper à l’impôt. Rompre toute relation avec un bon nombre de pays ne donnerait pas le résultat attendu. Avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. le ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social pour donner l’avis du Gouvernement.

M. Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances. Même avis.

(L’amendement n° 113 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Pascal Cherki, pour soutenir l’amendement n° 313, qui fait l’objet d’un sous-amendement n° 360.

M. Pascal Cherki. Nous avons beaucoup discuté hier des avancées majeures que nous avons réalisées en matière de lutte contre les paradis fiscaux.

Nous en arrivons à présent à des amendements qui traitent du blanchiment. Sur ce sujet, les gouvernements successifs ont, depuis des années, patiemment bâti avec leur majorité à l’Assemblée un système que nos voisins étrangers observent de près, en particulier la cellule de renseignement financier, Tracfin, qui a servi de modèle dans de nombreux cas.

Nous avons déjà réalisé un travail considérable en commission puisque nous avons adopté une nouvelle rédaction de l’article 615-1 du code monétaire et financier afin de mettre en place, parallèlement au régime subjectif de la déclaration de soupçon, un nouveau régime objectif.

J’en profite pour remercier très chaleureusement les membres du cabinet du ministre qui nous ont permis, à l’issue d’un travail productif, de réaliser de nouvelles avancées à droit constant pour mettre en cohérence ce nouvel article 615-1 au regard d’autres articles du même code et apporter un certain nombre de précisions.

Tel est l’objet de trois amendements, sous-amendés à bon escient par Mme la rapporteure pour en améliorer la rédaction.

M. le président. La parole est Mme la rapporteure pour présenter le sous-amendement n° 360 et donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 313.

Mme Karine Berger, rapporteure. Le sous-amendement est rédactionnel. L’amendement de M. Cherki nous aidera à lutter contre les mécanismes de blanchiment, qui diffèrent encore de ceux dont nous avons discuté hier soir, en clarifiant la liste des pays à risque dont nous disposons.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Je suis également favorable à cette clarification qui sera bien utile.

(Le sous-amendement n° 360 est adopté.)

(L’amendement n° 313, sous-amendé, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Régis Juanico, pour soutenir l’amendement n° 314.

M. Régis Juanico. En vertu des articles L. 561-23 du code monétaire et financier et 40 du code de procédure pénale, seul le procureur de la République territorialement compétent peut être destinataire d’une note d’information de Tracfin lorsque les investigations du service ont mis en évidence des faits susceptibles de relever d’une infraction pénale, en particulier du blanchiment du produit d’une infraction punie d’une peine privative de liberté supérieure à un an ou du financement du terrorisme.

Cet amendement tend à permettre la transmission spontanée de renseignements aux autorités judiciaires, à l’instar de l’administration des douanes et des services de police judiciaire, et d’étendre le champ des informations pouvant être transmises aux autorités judiciaires, à l’administration des douanes et aux services de police judiciaire, aux faits susceptibles d’être en lien avec les missions de ces services.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Karine Berger, rapporteure. Avis favorable puisque cet amendement en prolonge un autre que nous avions adopté en commission des finances et qui tendait déjà à renforcer les pouvoirs de cet organisme et à améliorer les échanges d’information à ce sujet.

(L’amendement n° 314, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Pascal Cherki, pour soutenir l’amendement n° 315, qui fait l’objet d’un sous-amendement n° 359.

M. Pascal Cherki. Cet amendement, qui tient compte des remarques, pour une fois judicieuses, de la Cour des comptes, tend à ajouter les termes « sans délai »au premier alinéa du II de l’article L. 561-30 du code monétaire et financier.

Il convient de préciser dans la loi qu’il s’agit d’une obligation déclarative qui incombe aux autorités et non d’une simple faculté.

M. le président. La parole est Mme la rapporteure pour présenter le sous-amendement n° 359 et donner son avis sur l’amendement n° 315.

Mme Karine Berger, rapporteure. Le sous-amendement est rédactionnel.

Avis favorable sur l’amendement mais j’ajouterai que la Cour des comptes est toujours de bon conseil, sauf exception.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Avis favorable à l’amendement sous-amendé.

(Le sous-amendement n° 359 est adopté.)

(L’amendement n° 315, sous-amendé, est adopté.)

Article 4 ter

(L’article 4 ter est adopté.)

Après l’article 4 ter

M. le président. La parole est à M. Jean Launay, pour soutenir l’amendement n° 61.

M. Jean Launay. Cet amendement a déjà été discuté en commission des finances mais je le présente ici remanié pour tenir compte des remarques du ministre.

Il vise à réserver, parmi les sociétés relevant du code monétaire et financier, le nom de « banque » aux seuls établissements de crédit.

L’utilisation de ce terme n’est pas encadrée aujourd’hui, de sorte que rien n’empêcherait une filiale spéculant sur le cuivre de s’appeler banque si l’on se fie à la seule lecture de l’article L. 511-8 du code monétaire et financier. On en arrive à appeler banque d’affaires ou banque d’investissement des structures qui n’ont rien de bancaire.

M. le ministre avait indiqué en commission que l’article L. 511-8 du code monétaire et financier interdit à toute entité qui n’est pas agréée en tant qu’établissement de crédit, quelle que soit sa nature, d’adopter une raison sociale ou quelque expression publique que ce soit pouvant laisser croire qu’elle en est un.

Or cet article interdit à toute entreprise autre qu’un établissement de crédit d’utiliser une dénomination, une raison sociale, une publicité ou, d’une façon générale, des expressions faisant croire qu’elle est agréée en tant qu’établissement de crédit ou de créer une confusion en la matière.

Seuls les termes d’ « établissement de crédit » apparaissent dans le code, jamais celui de « banque ». L’article L. 511-8 interdit à une société d’investissement de s’appeler « établissement de crédit » mais non de s’appeler « banque ». Cet amendement de précision vise à combler ce vide.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Karine Berger, rapporteure. Avis défavorable car le terme de « banque » est déjà réservé, et, surtout, seuls les termes « établissement de crédit » sont juridiquement valables.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Même avis.

(L’amendement n° 61 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean Launay, pour soutenir l’amendement n° 66.

M. Jean Launay. L’étude d’impact a donné des informations lacunaires sur les effets de cette loi. Cet amendement vise à ce qu’un rapport soit remis sur ce sujet au Parlement d’ici au 30 juin 2014.

Nous avons déjà débattu de ce sujet hier et le ministre en a accepté le principe à la suite d’un amendement du président de la commission des finances.

Mme Arlette Grosskost. En effet.

M. Jean Launay. Je retire par conséquent cet amendement.

Mme Arlette Grosskost. C’est dommage.

(L’amendement n° 66 est retiré.)

Avant l’article 5

M. le président. La parole est à M. Jean Launay, pour soutenir l’amendement n° 246.

M. Jean Launay. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Karine Berger, rapporteure. Je l’ai déjà dit hier, il serait compliqué de rendre publics les noms des détenteurs de la dette française.

Avis défavorable.

(L’amendement n° 246, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean Launay, pour soutenir l’amendement n° 245.

M. Jean Launay. Cet amendement, qui porte sur le même sujet, tend à ce que l’État procède à une identification des détenteurs des titres financiers émis par l’État au moins une fois par an, et à ce qu’un rapport contenant des résultats agrégés de l’identification soit présenté au Parlement au moins une fois par an.

On nous oppose souvent l’argument du secret ou de la difficulté, mais je ne sollicite ici que des résultats agrégés.

Ce sujet a déjà fait l’objet de nombreuses questions écrites par différents collègues, dès 2009, auprès de l’agence France Trésor. Sur le fond, cet amendement vise simplement à étendre aux obligations publiques les règles valables pour les actions.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Karine Berger, rapporteure. Il serait en effet intéressant de connaître exactement les montants de la dette française détenus par telle ou telle structure. Mais cette information, outre qu’elle est extrêmement volatile, pourrait poser problème sous certains aspects si elle était rendue publique. Rappelez-vous ce qui s’est passé en 2010, lors du débouclage de la dette grecque.

Par ailleurs, je suis certaine que le ministère des finances aura à cœur de donner toutes les informations utiles et nécessaires qu’il peut rendre publiques chaque fois que nous lui poserons la question. C’est dans ce contexte que je rends un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Je confirme ma disponibilité pour donner toutes les informations nécessaires. Avis défavorable.

(L’amendement n° 245 n’est pas adopté.)

Article 5

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour soutenir l’amendement n° 311 rectifié.

M. Philippe Kemel, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Karine Berger, rapporteure. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Défavorable.

(L’amendement n° 311 rectifié n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n° 118.

M. André Chassaigne. Cet amendement devrait être consensuel puisqu’il porte sur la composition du collège de résolution.

Le projet de loi prévoit de faire supporter d’abord par ses actionnaires les pertes d’une banque aidée par les pouvoirs publics afin de diminuer les risques pris, de protéger les dépôts des clients et l’argent du contribuable. En cas de difficulté, ce sera aux actionnaires et, le cas échéant, à certains créanciers d’en supporter d’abord le coût.

Le projet de loi met également en place un fonds de garantie financé par les banques et le secteur financier, qui pourrait être appelé pour contribuer à payer le coût des sinistres.

Ces principes louables reçoivent des modalités d’application moins enthousiasmantes.

Le gouverneur de la Banque de France et le directeur du Trésor disposeront du pouvoir exorbitant de décider comment et par qui une banque défaillante sera renflouée. Il faut savoir que les actifs des quatre premières banques françaises représentent trois fois le PIB de notre pays. Quant à la Banque de France, elle est le principal créancier des banques privées.

La Banque de France, aujourd’hui, a une créance de 230 milliards d’euros sur les banques. Il y a peu de doute qu’entre sauver les banques au risque d’endetter considérablement les contribuables français et laisser la banque faire faillite, le gouverneur de la Banque de France choisira la première option.

Compte tenu des enjeux et de la nécessité d’un contrôle démocratique accru, nous proposons de modifier la composition du collège de résolution : nous proposons de prévoir, d’une part, la présence d’un conseiller de la Cour de cassation – ce qui semble pour le moins naturel, concernant une procédure de testament ou de liquidation bancaire –, d’autre part, la présence de parlementaires, laquelle nous paraît d’autant plus légitime qu’il pourra être fait appel à des concours publics.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Karine Berger, rapporteure. Je voudrais apporter un peu de clarté dans des propos qui peuvent semer la confusion.

La Banque de France ne possède pas les banques privées dans notre pays.

M. André Chassaigne. Je n’ai pas dit cela !

Mme Karine Berger, rapporteure. Vous l’avez dit « quasiment explicitement », cher collègue.

Il y a un lien via les mécanismes de liquidités et de création monétaire…

M. André Chassaigne. Il ne faut pas me faire dire n’importe quoi ! Il faut respecter mes propos !

Mme Karine Berger, rapporteure. Je les respecte, monsieur Chassaigne.

M. André Chassaigne. Vous n’avez pas le droit de les déformer !

Mme Karine Berger, rapporteure. Je peux dire, sans vous contredire, monsieur Chassaigne, que la Banque de France n’est pas, de près ou de loin, propriétaire des banques privées en France. Il n’y a donc pas de conflit d’intérêts potentiel entre la Banque de France et l’hypothèse d’une faillite de banque privée. Par conséquent, le problème que vous avez évoqué ne se pose pas.

Par ailleurs, le collège de résolution doit être assuré d’une très grande confidentialité dans ses décisions qui, la plupart du temps, sont prises en l’espace d’un week-end. Augmenter le nombre de membres du collège de résolution pourrait porter atteinte à cette nécessité de confidentialité sans régler pour autant le problème des conflits d’intérêts potentiels.

C’est pourquoi nous donnons un avis défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Également défavorable.

(L’amendement n° 118 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean Launay, pour soutenir l’amendement n° 80.

M. Jean Launay. Cet amendement procède de la même démarche que celui qui vient d’être présenté par André Chassaigne. Il n’en diffère que par la composition du collège de résolution. Notre collègue Chassaigne propose la présence du président de la Chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation. Dans mon amendement, je propose un conseiller à la Cour de cassation, proposé par le Premier président de cette institution. La démarche est au fond la même.

Je rejoins l’argumentaire d’André Chassaigne en évoquant le problème de la présence multipliée par deux de la Banque de France, avec un gouverneur et un sous-gouverneur. Cela fait beaucoup, me semble-t-il, quand on sait que la Banque de France est par nature – c’est sans doute l’idée qu’a voulu défendre André Chassaigne – au cœur d’un conflit d’intérêts puisqu’elle serait, en cas de problème, le principal créancier des structures à liquider, et disposant, au moment du vote de cette loi, d’une créance de 230 milliards d’euros sur le système bancaire français.

Pour établir un parallèle, peut-on aujourd’hui imaginer un banquier juge de son client au tribunal de commerce ? C’est l’idée de fond de cet amendement. Rien ne dit que, dans ce cas, il n’y aurait pas une polémique sur le rôle de la Banque de France.

Notre idée est de prévoir un juge pour une procédure qui s’apparente à une liquidation judiciaire. Cet amendement vise à remplacer le sous-gouverneur de la Banque de France par un juge qui préside le collège.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Karine Berger, rapporteure. Mes chers collègues, une banque centrale ne peut pas faire faillite. Elle peut encourir des pertes liées au fait que certaines prises de position en liquidités sont abandonnées par la faillite d’une banque commerciale, mais une banque centrale ne peut pas subir de pertes qui l’amèneraient elle-même à un problème de liquidités et à la faillite. Ce cas de figure n’existe pas.

J’avoue que je ne comprends pas l’argument des créances perdues. Ce qui est certain, c’est que, comme pour l’amendement de M. Chassaigne, j’insiste sur le fait que le collège de résolution doit avoir une capacité d’action rapide, très confidentielle, qui n’est pas une procédure s’inscrivant dans un processus juridique habituel, mais une véritable procédure de résolution au sens où le texte est en train de l’élaborer.

Par conséquent, la présence d’un magistrat supplémentaire ne paraît pas, à ce stade de la procédure de résolution, une solution nécessaire ni même utile.

Voilà pourquoi, monsieur Launay, je vous suggère de retirer votre amendement. Faute de quoi, nous émettons un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Dominique Lefebvre.

M. Dominique Lefebvre. Nous avons eu l’occasion de débattre de cette question en commission des finances.

Au-delà du contexte dans lequel le collège de résolution serait amené à intervenir, nous devons nous méfier de ce qui entraîne une confusion entre les responsabilités de l’exécutif et celles du législatif. Cet amendement, comme le précédent, pourrait, s’il était adopté et mis en œuvre, aller à l’encontre de l’objectif visé.

Notre système fonctionne sur la base d’autorités responsables du contrôle prudentiel qui doivent exercer ce contrôle jusqu’au bout. Y adjoindre des parlementaires affaiblirait selon moi le rôle du Parlement, parce qu’à ma connaissance ce collège ne peut à aucun moment engager directement ni une garantie de l’État ni des deniers publics, lesquels relèvent de décisions de notre assemblée.

Pour que les autorités de contrôle prudentiel et les autorités responsables de la surveillance et de la régulation des marchés financiers fassent bien leur travail, il faut qu’elles aient une pleine responsabilité, pour pouvoir prendre des décisions dans des situations urgentes. Il appartient ensuite d’en rendre compte devant le Parlement et il appartient à celui-ci, le moment venu, de voter des décisions.

Étant le rapporteur de la mission « Engagements financiers de l’État » et suivant l’ensemble des garanties, je dirai que nous en avons encore eu un exemple, à l’automne dernier : des garanties de l’État ne peuvent être mises en place que par un vote du Parlement. C’est à ce moment-là que nous devons intervenir. Mais la confusion pour le bon fonctionnement du système.

M. le président. La parole est à M. Jean Launay.

M. Jean Launay. Je n’avais pas prévu d’intervenir à nouveau sur le sujet, mais notre collègue Lefebvre a oublié un épisode.

Autant ce débat a eu lieu en commission, et nous avions émis l’idée de la présence de parlementaires dans le collège de résolution, autant, dans les amendements présentés par André Chassaigne et par moi-même, cette idée a été abandonnée. Les amendements ont été réécrits et nous ne les situions dans le cadre de notre discussion que pour la présence d’un juge dans le collège de résolution. Cet épisode n’était donc pas très utile.

(L’amendement n° 80 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean Launay, pour soutenir l’amendement n° 172.

M. Jean Launay. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Karine Berger, rapporteure. Défavorable.

La Banque de France est utile dans les mécanismes de résolution.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Elle est tout à fait utile.

Avis défavorable.

(L’amendement n° 172 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n° 119.

M. André Chassaigne. Il est prévu que le collège de résolution se compose des gouverneur et sous-gouverneur de la Banque de France, du directeur du Trésor, du président de l’AMF, du président du fonds de garantie des dépôts.

Ce collège dispose de pouvoirs exorbitants. Je rappelle par exemple le nouveau pouvoir défini à l’article 7. Le collège peut décider le transfert d’office de tout ou partie d’une ou plusieurs branches d’activité de la personne morale en cause, sans qu’il soit besoin d’aucune formalité. Il peut transférer au fonds de garantie des dépôts et de résolution ou à un établissement relais les actions et les parts sociales émises par la personne soumise à la procédure de résolution. Il peut imposer la réduction du capital, l’annulation des titres de capital ou des d’éléments de passif ou la conversion des éléments de passif afin d’absorber le montant des dépréciations.

Ces pouvoirs exorbitants du droit commun, confidentiels – vous l’avez dit tout à l’heure, madame la rapporteure –, s’exerceront sur des structures pouvant atteindre 2 000 milliards d’euros de bilan, sur un ensemble de près de 10 000 milliards d’euros de bilan.

Compte tenu de ces remarques, nous proposons, dans cet amendement, de soumettre à l’approbation du Parlement les décisions pouvant entraîner l’appel à des concours publics et de s’assurer qu’elles ne peuvent être mises en œuvre qu’avec la voix du directeur général du Trésor.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Karine Berger, rapporteure. L’amendement que nous avons adopté hier suite à celui déposé par M. Chartier répond en grande partie à la demande de notre collègue Chassaigne. Par ailleurs, toute autorisation préalable serait tout à fait exclue dans le mécanisme de résolution. Votre amendement, monsieur Chassaigne, est donc satisfait a priori.

La commission émet par conséquent un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Même avis que celui de la commission.

M. André Chassaigne. Satisfait en grande partie, madame la rapporteure, cela ne veut pas dire que l’ensemble de mon amendement est satisfait !

(L’amendement n° 119 n’est pas adopté.)

(L’article 5 est adopté.)

Article 6

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 84 rectifié et 120.

La parole est à M. Jean Launay, pour soutenir l’amendement n° 84 rectifié.

M. Jean Launay. Dans cet amendement, nous proposons de séparer les fonds affectés à la couverture des dépôts de ceux affectés à la résolution.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n° 120.

M. André Chassaigne. Le projet de loi prévoit de fusionner le fonds de garantie des dépôts avec un fonds de résolution prévu, lui, pour sauver les banques.

Il sera donc possible, si nous comprenons bien, que la Banque de France et le Trésor décident d’utiliser l’argent destiné à garantir les dépôts pour sauver les banques et même les institutions financières non bancaires, c’est-à-dire des fonds spéculatifs, des fonds de capital-investissement, voire des chambres de compensation.

Sommes-nous d’accord pour que l’argent destiné à sauver les déposants serve à sauver des banques et des hedge funds ?

C’est pour nous une question assez grave. C’est pourquoi nous proposons, avec cet amendement, de séparer ou de cantonner dans des structures juridiques distinctes l’un et l’autre de ces fonds.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Karine Berger, rapporteure. Défavorable.

Le débat européen sur la question de la mise en place d’un système de résolution donne la possibilité à chaque pays de choisir de séparer ou non le fonds de résolution et le fonds de garantie des dépôts.

Le projet de loi propose le rapprochement des deux fonds. La commission a donné un avis défavorable à cet amendement et favorable au rapprochement des deux fonds, simplement parce que cela permet d’avoir une taille suffisante pour être crédible quant aux mécanismes de résolution globaux, que ce soit au travers d’interventions sur des structures ou sur les dépôts des épargnants.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Défavorable.

(Les amendements identiques nos 84 rectifié et 120 ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour soutenir l’amendement n° 287.

M. Philippe Kemel, rapporteur pour avis. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Karine Berger, rapporteure. La commission donne un avis défavorable à cet amendement. Veiller à la préservation du système financier n’est pas la mission du seul fonds de garantie, mais aussi celle du CSF.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Également défavorable.

(L’amendement n° 287 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean Launay, pour soutenir l’amendement n° 89.

M. Jean Launay. L’alinéa 9 de l’article 6 prévoit une disposition importante. Le fonds de garantie des dépôts et de résolution est censé intervenir après que le maximum de pertes a été imputé aux actionnaires. Cette rédaction me semble perfectible dans la mesure où l’utilisation de cet alinéa n’est qu’une possibilité parmi d’autres offertes à l’autorité. J’aimerais obtenir de la rapporteure et du ministre des précisions. Je pense pour ma part, si vous me permettez de m’exprimer trivialement, qu’en cas de défaillance il faut « rincer » les actionnaires.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Karine Berger, rapporteure. La situation est complexe. En matière de résolution bancaire, tous les cas de figure peuvent se présenter. L’hypothèse envisagée par notre collègue Launay me semble trop restrictive. Tout peut arriver. L’autorité de résolution peut être amenée à prendre des décisions qui ne rentrent pas dans le schéma séquentiel que vous proposez. Je ne conteste pas cet amendement sur le fond, mais pour ses conséquences pratiques. Il arrive que les choses ne se passent pas ainsi. Ne nous lions pas les mains. Je vous propose de retirer cet amendement, faute de quoi la commission émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Je crois en effet que cet amendement tend à compliquer les choses.

M. le président. Maintenez-vous votre amendement, monsieur Launay ?

M. Jean Launay. Oui, je le maintiens.

(L’amendement n° 89 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Kemel, pour soutenir l’amendement n° 288.

M. Philippe Kemel, rapporteur pour avis. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Karine Berger, rapporteure. Favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Défavorable.

(L’amendement n° 288 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 90 et 121.

La parole est à M. Jean Launay, pour soutenir l’amendement n° 90.

M. Jean Launay. Cet amendement propose simplement de remplacer « administrative » par « judiciaire » à la fin de l’alinéa 19. Celui-ci prévoit que les décisions du fonds de garantie relèvent de la juridiction administrative, ce qui n’est pas acceptable. Il ne s’agit pas d’une simple différence lexicale.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n° 121.

M. André Chassaigne. L’argumentation est la même. Le fonds de garantie des dépôts est une personne morale de droit privé, gérée par un directoire dont les actions sont contrôlées par un conseil de surveillance composé exclusivement de dirigeants d’établissements de crédit. Nous ne comprenons donc pas pourquoi les recours contre les décisions du fonds relèvent du juge administratif plutôt que du juge judiciaire. Sans doute la rapporteure et le Gouvernement vont-ils nous éclairer sur ce point et sur la pertinence du choix de compétence retenu. J’espère que mes propos ne seront pas déformés, mais c’est peu probable sur un amendement aussi simple.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Karine Berger, rapporteure. J’entends bien l’argument que vous développez, dès lors que le fonds de garantie est essentiellement abondé par des fonds privés. Toutefois, l’autorité de contrôle prudentiel et de résolution est une personne morale de droit public chargée de la responsabilité de gérer le fonds de garantie et de résolution. En raison de la personnalité morale publique de la CPR, ses décisions relèvent de la juridiction administrative et non judiciaire. Je vous invite donc à retirer ces amendements, faute de quoi nous donnerons un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Comme l’a dit M. Launay, la différence n’est pas uniquement lexicale. C’est déjà le juge administratif qui est compétent, il me semble donc qu’il faut, par souci de cohérence et comme le propose le projet de loi, s’en tenir à ce qui existe. Je milite donc moi aussi pour le retrait et à défaut le rejet de ces amendements.

M. le président. Maintenez-vous ces amendements, messieurs Launay et Chassaigne ?

M. Jean Launay. Oui.

M. André Chassaigne. De même !

(Les amendements identiques nos 90 et 121 ne sont pas adoptés.)

(L’article 6 est adopté.)

Article 7

M. le président. La parole est à Mme Corinne Narassiguin.

Mme Corinne Narassiguin. Ce projet de loi est la concrétisation de l’une des promesses de campagne les plus fondamentales du Président de la République. Loin de moi l’idée de les hiérarchiser, mais ce projet constitue l’une des bases sur lesquelles tout l’édifice du nouveau modèle français doit reposer.

En économie de marché, le financement de l’activité économique est primordial. L’irrigation du système tout entier en dépend. Que la source vienne à se tarir et c’est tout le champ qui s’assèche : l’activité est pénalisée. Que l’eau vienne à couler en flux trop abondants et les risques de déstabilisation du terrain s’accroissent, même si les plantes peuvent se développer. Que le jet d’eau vienne à être orienté non vers les cultures mais vers les mauvaises herbes, et la probabilité de propagation des pousses non souhaitées s’accroît. C’est donc à la fois sur le volume et la destination du flux qu’il nous faut agir.

C’est ce que fait ce projet de loi. J’ai vécu de l’intérieur la crise financière de 2008 et ai pu constater, dans la grande banque américaine pour laquelle je travaillais, le sentiment d’impunité qui régnait au cours des mois qui l’ont précédée. L’ambiance qui régnait parmi les acteurs du financement était celle du no limit. Le niveau de prise de risque montrait d’une part que l’aléa moral fonctionnait à plein et d’autre part que ceux qui s’adonnaient à des activités spéculatives périlleuses avaient oublié un enjeu pourtant essentiel : l’intérêt économique général.

L’inexorable chemin qui a conduit à la crise de 2008 aux États-Unis est jalonné de décisions dérégulant petit à petit le secteur bancaire. Il est temps pour l’État de reprendre ses responsabilités. Le renflouage des banques sans contrepartie en France après la crise de 2008 a au contraire renforcé l’aléa moral qui crée un sentiment d’irresponsabilité absolu. C’est pourquoi l’article 7, qui responsabilise les acteurs du secteur financier, me semble essentiel.

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Laurent.

M. Jean-Luc Laurent. L’article 7 nous amène à examiner les dispositifs de prévention. Le projet de loi prévoit une autorité non indépendante intégrée à l’autorité de contrôle prudentiel chargée du traitement des crises bancaires. Le rapport Liikanen a prévu de donner à l’autorité de résolution des crises bancaires le pouvoir d’étendre le périmètre des activités à filialiser au cas par cas. Il me semble donc qu’il faut préciser le projet de loi. C’est le sens des amendements que je présente et sur lesquels j’attire particulièrement l’attention de la rapporteure et du ministre, afin de rendre pleinement opérationnel le dispositif de prévention en renforçant ses capacités d’action.

M. le président. La parole est à M. Gilles Carrez, président de la commission des finances.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Je souhaite réagir à ce que vient de dire notre collègue Mme Narassiguin. Si je comprends bien, en 2008, elle était à New-York. Elle y travaillait pour une banque américaine où elle a constaté des agissements tout à fait critiquables. Mais nous légiférons ici, ma chère collègue, pour la France, et pour des banques françaises !

Mme Marie-Christine Dalloz. Eh oui !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Elles représentent 400 000 emplois et restent les seules à embaucher environ 30 000 personnes par an, dont la moitié sont des jeunes, alors même que notre industrie est en grave difficulté.

Mme Corinne Narassiguin. Il y a eu des suppressions d’emplois dans ma banque !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Je voudrais vous rappeler, puisqu’en 2008 vous étiez à New-York, ce que nous avons fait et constaté à l’automne 2008 dans les banques françaises. Je voudrais, madame, que ce débat soit d’abord mû par l’intérêt général et le souci de la protection de notre industrie bancaire. M. Cherki nous disait la nuit dernière qu’il nous faut porter des valeurs et être des précurseurs. Le ministre parlait d’avant-garde progressiste apportant la vérité au monde entier. Je suis pour ma part totalement opposé, madame, à ce que le législateur que vous êtes devenu aujourd’hui transpose à notre pays des solutions à des problèmes dont vous avez pu avoir connaissance à New-York !

Mme Corinne Narassiguin. Il s’agit de suppressions d’emplois à travers le monde !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Je vais donc prendre le temps de vous rappeler ce qui s’est passé à l’automne 2008. Le 15 septembre, une banque américaine, Lehman Brothers, fait faillite. Nous nous réunissons ici immédiatement et, en un mois, le 16 octobre 2008, le Parlement français voit la majorité remettre en place les financements interbancaires grâce à une garantie de l’État par le biais d’une structure ad hoc, la société de financement de l’économie française. L’opposition d’alors, si ma mémoire est bonne, s’est abstenue. Vous pourrez le confirmer, monsieur Muet, vous vous êtes abstenu après avoir hésité et vous avez bien fait.

M. Pierre-Alain Muet. Nous n’avons pas hésité !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Pour faire revenir la confiance partie, nous avons également réinjecté des quasi-fonds propres, toujours grâce à une garantie de l’État par le biais d’une autre structure, la société de prises de participations de l’État, sous forme de prêts subordonnés ou d’actions de préférence. Vous dites, madame, que le contribuable a été mis à contribution. C’est sans doute parce que vous étiez à New-York et je vous en excuse, mais c’est inexact !

M. Jean-François Lamour. Cela a même rapporté cinq milliards d’euros à l’État !

Mme Axelle Lemaire, rapporteure pour avis. Quelle condescendance !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. On n’a pas le droit de dire des inexactitudes dans cet hémicycle ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Vous lirez les rapports, en particulier ceux du rapporteur général Christian Eckert. La garantie de l’État portant sur les 60 milliards d’euros de liquidités a été rémunérée à hauteur de 1,4 milliard d’euros, inscrit dans les budgets que je tiens à votre disposition.

M. le président. Veuillez conclure.

M. Patrice Verchère. C’est la vérité !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Par ailleurs, seuls une vingtaine de milliards d’euros sur ces soixante milliards d’euros de garantie font encore aujourd’hui l’objet d’une contrepartie en termes de liquidités. Quant à la société de prises de participations de l’État…

M. le président. Vous êtes au-delà du double de votre temps de parole, monsieur le président de la commission. Je vous demande de conclure. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Patrice Verchère. Il rétablit la vérité !

M. Jean-François Lamour. Laissez-le terminer sa démonstration !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Nous assistons depuis 48 heures, monsieur le président, à un débat purement interne à la majorité. En termes de temps de parole, l’opposition est d’une très grande sagesse et vous laisse discuter entre vous.

M. Jean-Luc Laurent. Non pas de sagesse, mais de frilosité ! Vous êtes opposés à la régulation !

M. le président. Il me revient, monsieur le président de la commission, de répartir le temps de parole. Vous pourrez intervenir à nouveau ultérieurement, comme vous le savez.

Je vous demande donc de bien vouloir conclure votre propos.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Je termine donc, en évoquant la société de prises de participations de l’État. La rémunération a été de 1,7 milliard d’euros.

En fin de compte, le contribuable français, au titre de la garantie de l’État, est bénéficiaire, à la différence du contribuable aux États-Unis, en Angleterre, en Allemagne ou en Espagne. En France, le contribuable a bénéficié de 3 milliards d’euros dans le budget de l’État, et la totalité des quasi-fonds propres apportés par l’État via la SPPE a été remboursée.

M. André Schneider. Le contribuable a été bénéficiaire !

M. Patrice Verchère. Bravo ! Il a rétabli la vérité !

M. le président. La parole est à M. Pascal Cherki.

M. Pascal Cherki. Le président Carrez semble me vouer une affection particulière, car il me cite lors de chacune de ses interventions. Peut-être finirai-je par vous convaincre, monsieur le président de la commission, de vous rapprocher plus substantiellement de mes idées.

Votre raisonnement me semble présenter une difficulté. Selon vous, faire des pas en avant est une menace pour l’industrie bancaire. Lorsque Jacques Chirac, avec Lula, a lancé la taxe sur les billets d’avion, des voix se sont élevées pour dire qu’il fallait le faire simultanément partout dans le monde, faute de quoi Air France serait pénalisée par rapport aux compagnies aériennes américaines. Il n’en a rien été.

M. Jean-Luc Laurent. C’est exact !

M. Pascal Cherki. Je souhaite par ailleurs apporter un deuxième élément à votre réflexion, monsieur le président de la commission. L’un des problèmes de la crise de 2008, c’est que des comportements spéculatifs irresponsables ont failli provoquer une crise systémique. Et qui trinque, dans cette affaire ? Pas uniquement les traders ! Quand les banques sont en difficulté, elles font des plans sociaux, et des milliers de salariés des banques risquent de se retrouver sur le carreau lors de la prochaine crise systémique majeure du système bancaire et financier. Il faut donc plus de régulation, et non moins, pour protéger l’emploi dans les banques, et non pas prendre le risque de le fragiliser et mettre en danger l’emploi de centaines de milliers de salariés qui ne sont pas responsables des errements d’un certain nombre de décideurs.

M. Jean-Luc Laurent. Excellent !

M. le président. La parole est à Mme Valérie Rabault.

Mme Valérie Rabault. Je voudrais, à mon tour, répondre à M. le président de la commission des finances au sujet des banques françaises, et non des banques américaines.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Très bien.

Mme Valérie Rabault. Nous entamons la discussion de l’article 7, qui propose de mettre en place un mécanisme de résolution.

Quiconque a vécu le fameux week-end des 13 et 14 septembre 2008 sait qu’il est essentiel de pouvoir anticiper les décisions qui, le cas échéant, devront être prises dans un laps de temps extrêmement court, décisions qui ne concerneront pas un seul établissement, mais tous les établissements, et même l’équilibre économique dans son ensemble. Se contraindre à anticiper, et associer à cet effort le régulateur, qui est désormais l’autorité de contrôle prudentiel et de résolution, ou ACPR, voilà, à mes yeux, une avancée réelle.

Évidemment, les banques françaises n’ont pas connu la situation des banques américaines, telle que l’a décrite notre collègue Corinne Narassiguin – je pense que nous sommes tous d’accord sur ce point.

M. Jean-François Lamour. Très bien.

Mme Valérie Rabault. Nous savons aussi, pour en avoir connu d’autres par le passé, que le régulateur français a sans doute une longueur d’avance, par les contrôles qu’il effectue, sur pièces et sur place.

Mme Arlette Grosskost. Absolument.

Mme Valérie Rabault. La situation, je le répète, fut meilleure en France, et j’estime – je ne sais pas s’il est dans les usages de l’Assemblée nationale de formuler de tels jugements – que le régulateur français n’a pas à rougir de la comparaison avec d’autres régulateurs, bien au contraire. Pour autant, cela ne nous dispense pas de réfléchir aux moyens d’organiser une résolution et de faire en sorte que la survenue d’une crise coûte le moins cher possible aux contribuables.

Vous dites, monsieur le président de la commission, que cela n’a rien coûté aux contribuables français, mais si l’État français n’avait pas été là, il y aurait eu un enchaînement en cascade. La mobilisation d’une garantie a toujours un prix, même si j’admets qu’au final cela n’a pas coûté d’argent aux contribuables français. Dès qu’on mobilise une garantie, c’est une mobilisation publique qui se produit. L’ensemble des députés ici présents a dès lors une responsabilité : ils peuvent, soit donner leur accord, soit renforcer aujourd’hui la loi sur cette problématique essentielle de la résolution, ce qui serait un grand pas en avant.

M. le président. La parole est à M. Jean-François Lamour.

M. Jean-François Lamour. On revient finalement à notre discussion d’hier soir sur l’intérêt de ce dispositif et de cette loi. Le vrai problème, et je rebondis sur ce que vient de dire Gilles Carrez, ce n’est pas que le contribuable ait été mis à contribution à l’occasion de cette crise, puisqu’il ne l’a pas été ; je dirais même que l’État a gagné de l’argent, ou en tout cas qu’il s’en est plutôt bien sorti, et extrêmement rapidement.

On voit bien que la garantie a permis d’éviter que tout s’effondre, mais qu’elle a aussi redonné confiance et permis aux banques françaises de passer cet obstacle à très court terme. La chose a assez bien fonctionné. Pour autant, il est hors de question d’en rester là : nous sommes tous d’accord sur ce point, où que nous siégions dans cet hémicycle.

Nous vous répétons seulement ce que nous vous avons déjà dit au cours de la discussion générale et de la discussion sur l’article 1er : nous ne pensons pas qu’il soit judicieux de faire subir aujourd’hui au dispositif bancaire français des bouleversements profonds. Vous allez altérer la compétitivité de nos établissements bancaires, en leur demandant trop de précisions et en les mettant en difficulté par rapport à leurs concurrents – nous avons déjà évoqué ce problème hier, notamment quand nous avons abordé la question des filiales et de leur transparence.

Je le répète : aucun contribuable français n’a été lésé du fait de la crise de 2008 ou de la résolution de celle-ci par le Gouvernement français. Nous estimons donc, premièrement, que ce projet de loi, même s’il va dans le bon sens, n’est pas prêt : il suffit de regarder ce que font actuellement nos homologues, en Europe et dans le reste du monde. Deuxièmement, vous n’avez pas résolu certains problèmes cruciaux, comme la transparence et la fourniture de données, qui remettent en cause la compétitivité de notre réseau bancaire.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Je voudrais revenir sur les propos de notre collègue Carrez.

Je trouve, mon cher collègue, que les mots que vous employez révèlent vos objectifs : vous dites que les contribuables français ont « bénéficié » des intérêts versés par les banques. Vous considérez donc comme un bénéfice pour le contribuable français et pour la nation le fait que les banques, après que l’État leur a apporté sa garantie et les a protégées en période de crise, aient versé des intérêts.

Qu’en termes élégants ces choses-là sont dites ! Dans ce cas-là, il faut aussi prendre le mot « bénéfice » en sens inverse : quand nos petites et moyennes entreprises, ou quand des particuliers, versent des intérêts aux banques après avoir contracté un emprunt, ces intérêts bénéficient bien évidemment aux banques, et chacun sait que cela leur bénéficie énormément…

Mme Marie-Christine Dalloz. Il faut faire des prêts à taux zéro !

M. André Chassaigne. ...au point que certains économistes se demandent si on ne pourrait pas effacer une partie de la dette, étant donné les bénéfices pharamineux – j’emploie à dessein le mot « bénéfice » – qui ont pu être faits par les banques.

Vous voyez que, quelquefois, la richesse de notre vocabulaire permet d’avoir des développements à dimension économique.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Karine Berger, rapporteure. Le titre II de cette loi devrait, selon moi, faire l’objet du consensus le plus large dans cet hémicycle.

M. Jean-François Lamour. Bien sûr. Nous n’avons pas dit le contraire.

Mme Karine Berger, rapporteure. S’il y a un titre qui devrait faire l’objet d’un consensus, je crois que c’est celui-ci, monsieur le président Carrez.

Comme l’a très bien dit notre collègue Corinne Narassiguin, la différence qu’il y avait entre les États-Unis et nous en 2008, c’est que les États-Unis avaient une autorité de résolution. Je vais vous le dire franchement, monsieur le président Carrez : depuis le moment où j’ai été nommée rapporteure sur cette loi, je me suis battue pour qu’on cesse de dire que le titre II était l’alpha et l’oméga de la problématique que nous examinons aujourd’hui. Le titre II est indispensable, mais il n’est pas suffisant. Les États-Unis avaient, et ont toujours, une autorité de résolution extraordinairement efficace. Si l’autorité de résolution avait suffi pour faire face à la crise systémique et pour répondre à l’aléa moral de 2008, nous n’aurions pas eu de crise financière générale. Le titre I de ce projet de loi, qui répond à la problématique du risque systémique, est indispensable pour que le titre II, c’est-à-dire l’autorité de résolution, fonctionne.

Nous n’avons pas d’autorité de résolution, ce qui signifie que nous ne savons pas ce qui va se passer en cas de problème. Valérie Rabault a expliqué très justement que, le 15 septembre au soir, tout le monde, sur la planète, se demandait ce qui allait se passer le lendemain matin, parce qu’il n’y avait pas de mécanisme consécutif à une faillite bancaire. C’était un saut dans le vide.

Nous nous dotons, en Europe, d’une autorité de résolution qui pourra, le cas échéant, faire en sorte que nous trouvions des solutions au cas par cas. Les États-Unis ont une expérience extraordinaire de la chose, puisqu’ils mettent une banque en faillite tous les mois – et pendant l’année 2009, ce fut une par jour ! Les mécanismes de résolution fonctionnent, sauf quand l’organisme est trop gros – on dit qu’il est « too big to fail » – et dans ce cas, il ne faut pas le laisser faire faillite. C’est tout l’objet de ce projet de loi. Pour autant, ne pas avoir d’autorité de résolution, c’est courir le risque de ne pas pouvoir trouver de réponses pragmatiques, en cas de problème particulier d’un système bancaire.

Vous soulevez, enfin, le problème de l’aide que nous avons apportée à nos banques, et de l’utilité de celle-ci. Je salue le travail qui a été fait dans l’urgence à l’automne 2008 et je ne le tiens pas pour négligeable, mais la réalité est cruelle : les banques françaises, comme toutes les banques du monde, ont cessé, du jour au lendemain, de fournir du crédit à l’économie. Nos exportations se sont effondrées de 18 % en décembre 2008, puisqu’il n’y avait plus la moindre couverture de crédit à l’exportation. Le financement des entreprises, des PME et du crédit immobilier a cessé, lui aussi. À mes yeux, cette facture-là a eu des conséquences tout aussi importantes sur les finances publiques, et c’est le système bancaire qui en est responsable.

C’est une question délicate, mais je dis, et j’ai toujours pensé, que, si l’on veut évaluer la responsabilité des banques dans le coût de la crise de 2008, il ne faut pas prendre seulement en compte le coût de leur sauvetage, qui a été modeste et même positif, mais aussi celui des conséquences sur l’économie française, et notamment sur la récession française. Ce coût-là, nous savons tous qu’il est considérable, puisqu’on peut estimer aujourd’hui qu’il est de l’ordre de 50 à 60 milliards d’euros. C’est pour éviter d’avoir à débourser de nouveau une pareille somme que nous mettons en place un titre II, relatif à la résolution, après le titre I, relatif à la séparation des activités. Je crois véritablement, mes chers collègues, que sur cet emboîtement de solutions nous devons trouver un consensus.

M. Jean Launay. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Pierre-Alain Muet.

M. Pierre-Alain Muet. Je serai bref, car notre rapporteure a longuement développé ce que je voulais dire. Je voudrais seulement rappeler au président de la commission des finances qu’à l’époque, nous avons effectivement approuvé l’intervention du Gouvernement, car il fallait bien sûr intervenir partout et rapidement. Nous avons simplement dit que nous aurions préféré intervenir sous la forme d’une prise de participation. La Cour des comptes a montré par la suite que ce dispositif, qui consiste à détenir des actions et à les revendre une fois que la banque est rétablie, aurait permis de faire un gain bien supérieur à celui qui a été obtenu. Mais c’est le passé.

Je crois que l’article 7 est fondamental, car il introduit ce qui a complètement fait défaut au moment de la crise, particulièrement chez nous, à savoir des plans de résolution. C’est un peu comme si des armées s’engageaient dans une guerre sans avoir des scénarios tout prêts, selon les situations. Les grandes entreprises fonctionnent ainsi, mais cela manquait à notre système bancaire.

Notre collègue Corinne Narassiguin a eu raison de rappeler l’exemple américain : contrairement à nous, les États-Unis ont toujours eu des plans de résolution de ce type. L’apport de l’article 7 est extrêmement important : en cas de crise majeure touchant une banque, nous saurons désormais quoi faire, puisque nous disposerons d’un dispositif cohérent et prêt d’avance, avec des étapes prédéfinies. C’est l’un des grands apports de ce texte, à côté bien sûr de l’article 1er, qui porte sur la séparation des activités.

M. Pascal Cherki. Il a raison ! Ne soyons pas les Gamelin du droit !

M. le président. Nous passons à l’examen des amendements à l’article 7.

La parole est à M. Jean-Luc Laurent, pour soutenir les amendements nos 146 et 147.

M. Jean-Luc Laurent. Les plans préventifs de rétablissement des établissements bancaires sont appelés à jouer un rôle crucial pour prévenir les crises et éviter les coûts financiers et sociaux liés à leur résolution – nous sommes instruits par l’expérience. Il convient donc, à mes yeux, d’écarter toute incertitude juridique et d’affirmer expressément les pouvoirs de l’Autorité de résolution en termes d’approbation de ces plans et de demande de modification de ces plans s’ils ne répondent pas à leur vocation, avec, conformément aux recommandations du rapport Liikanen, la capacité d’imposer une extension des activités à transférer dans les filiales dédiées.

Le sens de ces deux amendements est donc fort simple. L’amendement n° 146 vise à donner à l’autorité la capacité de demander un plan préventif de rétablissement. L’amendement n° 147 propose qu’en cas de gestion imprudente ou d’absence de satisfaction aux obligations de contrôle interne, l’autorité demande une extension des activités sur tout ou partie des instruments financiers à transférer au sein de la filiale dédiée.

Ces deux amendements, mes chers collègues, donnent des moyens d’action à l’autorité et placent les banques face à leurs responsabilités, en introduisant cette épée de Damoclès.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Karine Berger, rapporteure. J’ai évoqué le cas des États-Unis, où l’autorité de résolution, qui mène une action efficace depuis des années, comme l’a également rappelé Pierre-Alain Muet, n’impose pas à tous les établissements un plan de résolution en amont. L’autorité de résolution agit au cas par cas, en fonction de la taille et de la situation des établissements. C’est pour cette raison que, dans le projet de loi porté par le Gouvernement, l’obligation de déposer un plan préventif n’est prévue que pour les organismes systémiques, et non pour l’ensemble des établissements. Un tel plan n’est pas indispensable pour les petits établissements – si vous me permettez cette expression – et l’autorité de résolution sera capable de trouver des solutions au cas par cas. C’est pour cette raison que la commission n’a pas donné un avis favorable à votre premier amendement.

S’agissant du deuxième amendement, vouloir donner la possibilité à l’ACPR de rendre possible la filialisation unilatérale de certaines activités, c’est lui donner un pouvoir que je qualifierai d’absolument exorbitant, étant donné qu’elle a déjà la possibilité, grâce à plusieurs amendements adoptés en commission des finances, de juger les plans préventifs.

Je vous invite donc à retirer vos deux amendements ; à défaut, je leur donnerai un avis défavorable, au nom de la commission des finances.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. J’ai eu l’honneur d’entendre la réponse de six ou sept collègues à mon intervention précédente, je voudrais donc clarifier quelques points.

Nous sommes totalement en accord avec l’article 7 et le renforcement, au titre de la résolution, des pouvoirs de l’autorité de contrôle prudentiel.

M. Pierre-Alain Muet. C’est bien de le dire !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. C’est d’ailleurs nous qui avions créé cette autorité de contrôle prudentiel. La preuve de notre accord est qu’il n’y a pas un seul amendement de l’opposition sur cet article.

Mais je suis très mal à l’aise quand j’entends certains de nos collègues justifier cet article par le fait que les banques doivent être sanctionnées, ou que tel ou tel pan de notre législation est insuffisant.

Le paradoxe est que notre système bancaire est probablement celui qui a le mieux résisté à la crise. Monsieur le ministre, vous utilisez souvent le terme de fierté. Acceptez que l’ancienne majorité ait également ce sentiment de fierté, car nos autorités publiques ont bien réagi lors de la crise. Lorsque l’on connaît la difficulté de la procédure parlementaire, il est extraordinaire d’avoir réussi à mettre en place en moins d’un mois ce système qui a permis de poursuivre, en France, le financement de l’économie.

Madame la rapporteure, les chiffres que vous nous avez donnés pour décembre 2008 ne sont pas exacts pour notre pays, notamment s’agissant du financement des PME. Nos autorités ont pris les bonnes décisions. En France, il y a eu une sorte de résolution générale par l’intervention des pouvoirs publics.

Je ne suis pas pour autant en désaccord avec le fait que dans des cas particuliers, on ait besoin de mettre en place un système de résolution extrêmement rapide.

Je termine en rappelant à M. Muet que nous avons hésité à prendre des prises de participation parce que chacun avait encore en mémoire le désastre du Crédit Lyonnais.

M. Jean-François Lamour. Tout à fait !

M. Gilles Carrez. Les actions de l’État ne valaient plus rien. Depuis deux jours, vous expliquez cela, mais dès lors que l’on intervient en actions, en capitaux propres, on prend un risque. Nous avons estimé que la collectivité publique ne devait pas prendre ce risque, et c’est la raison pour laquelle elle est intervenue avant tout en garantie.

(L’amendement n° 146, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

(L’amendement n° 147, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean Launay, pour soutenir l’amendement n° 85.

M. Jean Launay. Cet amendement fait référence à la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil qui établit un cadre pour le redressement et la résolution des défaillances d’établissements de crédit.

Cette proposition de résolution du 6 juin 2012 a largement inspiré ce projet de loi qui en reprend de nombreux paragraphes. Mais il m’a semblé étrange que la disposition majeure, relative à l’intérêt public, n’ait pas été reprise.

Je propose donc d’insérer, après l’alinéa 17 de l’article 7, un alinéa permettant de réparer cet oubli. En commission, la rapporteure a répondu que le débat n’était pas stabilisé. Je ne suis pas intervenu sur l’article, mais à ce stade, même si la proposition de directive du Parlement n’est pas encore en vigueur, le fait que notre projet de loi s’en inspire largement mérite que l’on aille au bout.

Monsieur le président de la commission des finances, il ne faut pas faire croire à l’opinion que nous ne sommes pas sensibles aux conditions de financement de l’économie. Mais au fond, en posant cette question de l’intérêt public, nous mettons en lumière ce qui nous différencie dans nos soucis respectifs. Vous avez mis en avant le souci de la profession bancaire ; je préfère, comme je l’ai fait dans toutes mes interventions depuis le début de nos débats, mettre en avant le souci des salariés des banques, mais aussi de leurs clients, de leurs crédits et de leurs dépôts.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Karine Berger, rapporteure. Le point soulevé par notre collègue est important : à quel moment la résolution doit-elle être enclenchée, et pour quel motif d’intérêt public ?

Je l’ai dit en commission des finances, le débat n’est pas tranché au niveau européen pour la directive CRD IV sur la résolution ; soyons donc prudents.

Par ailleurs, j’attire l’attention de notre collègue Launay sur l’amendement no 141 présenté par la rapporteure pour avis de la commission des lois. Si l’hémicycle venait à l’adopter, ce serait à mes yeux une réponse suffisante au problème qu’il soulève.

J’invite donc M. Launay à retirer son amendement au bénéfice de l’amendement no 141. À défaut, l’avis de la commission est défavorable.

(L’amendement n° 85, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Kemel, pour soutenir l’amendement n° 300.

M. Philippe Kemel, rapporteur pour avis. Il est défendu.

(L’amendement n° 300, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean Launay, pour soutenir l’amendement n° 87.

M. Jean Launay. Il est défendu.

(L’amendement n° 87, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis de la commission des lois, pour soutenir l’amendement n° 141.

Mme Axelle Lemaire, rapporteure pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République. Notre collègue Jean Launay vient d’aborder ce sujet. Cet amendement à l’alinéa 23 de l’article 7 vise à l’expliciter en précisant que les finalités poursuivies par le collège de résolution de l’ACPR, qui prendrait des mesures dérogatoires du droit commun dans le cadre de la résolution en cas de défaillance d’une banque, doivent être d’intérêt public.

La formulation permet de rappeler que les banques ne sont pas des établissements commerciaux comme les autres. Dès lors qu’elles prennent les dépôts des épargnants, cela justifie l’intervention de l’autorité publique et la poursuite de l’intérêt général.

Cet amendement permet également d’apporter une précision rédactionnelle, qui est aussi une garantie procédurale conforme à l’esprit des ajouts que la commission des lois a apportés au texte : principe du contradictoire, principe de proportionnalité, valeur juste et équitable de l’indemnisation prononcée. De la même manière, il faut préciser que les finalités poursuivies sont d’intérêt public.

Cela correspond tout à fait à l’esprit de la proposition de directive européenne, et il me semble qu’il serait plus sûr juridiquement de s’y conformer dès à présent.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Karine Berger, rapporteure. Avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Avis favorable.

M. le président. La parole est à Mme Corinne Narassiguin.

Mme Corinne Narassiguin. Cet amendement, dont je suis cosignataire, est le fruit du remarquable travail de la rapporteure pour avis de la commission des lois, Axelle Lemaire, que je salue.

Il ne vise pas à ajouter une condition supplémentaire pour la mise en place de mesures de prévention et de résolution de crises bancaires, mais simplement à rappeler le principe de proportionnalité du droit, c’est-à-dire de l’adéquation des moyens aux buts recherchés.

Il est urgent que nous adoptions une loi bancaire : il faut donc que le projet que nous examinons aujourd’hui soit parfaitement solide et incontestable juridiquement. Ces mesures de prévention et de résolution de crises bancaires sont essentielles ; l’optique de leur mise en œuvre n’est en rien punitive, elle est constructive.

Oui, il nous faut protéger les banques contre elles-mêmes, contre la tentation des pratiques à hauts risques. L’appât du profit à court terme met en danger leur pérennité.

(L’amendement n° 141, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Éric Alauzet, pour soutenir l’amendement n° 203.

M. Éric Alauzet. Le ministre s’est déjà exprimé sur cette question : il s’agit de proposer la mobilisation des créanciers seniors en cas de résolution.

Le projet de loi prévoit que l’ensemble des actionnaires, le fonds de garantie et les créanciers juniors pourraient être mobilisés. Ce n’est qu’une faculté, pas une certitude absolue, ce qui pose donc une première question.

Puisque l’objectif est de mettre les contribuables à l’abri de toute mésaventure et de tout désagrément, je reviens sur cette question, même si j’ai compris que le ministre souhaitait attendre que les règlements européens viennent proposer cette disposition, et que si la France s’orientait seule dans cette voie, cela la fragiliserait dans la compétition internationale. J’aimerais toutefois entendre à nouveau les explications du Gouvernement sur ce point.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Karine Berger, rapporteure. Le débat s’est déjà tenu en commission des finances, mais l’occasion nous est ici offerte de repréciser un certain nombre d’éléments.

Dans le cas d’une résolution bancaire, les actionnaires seront mis à contribution par le mécanisme dit du « Bail-in », c’est-à-dire qu’ils seront responsables des risques portés par la banque, et donc responsables en cas de résolution et de pertes. C’est une énorme évolution qu’apporte ce texte du Gouvernement.

La question des créanciers, c’est-à-dire de la partie obligataire, est beaucoup plus complexe. À ce stade, si la France incluait unilatéralement la question de la responsabilité des créanciers dans les mécanismes de résolution, elle pourrait se retrouver dans une situation de très forte perte de confiance des personnes en mesure d’assurer le financement de la dette au travers des banques. Ce fut le cas, par exemple, de la panique sur la dette grecque en mai 2010 lorsqu’une décision d’abandon de créances a été prise nuitamment lors d’un sommet européen.

Une décision unilatérale de mise à contribution des créanciers sur la dette en cas de résolution bancaire serait contre-productive pour notre pays. Par ailleurs, un accord est actuellement recherché au niveau européen. La position de la France est connue : il s’agit de trouver l’accord le plus ambitieux possible pour que le champ de résolution bancaire inclue à terme la question des créanciers, mais, à ce stade, en introduire une version unilatérale dans notre projet de loi sur la séparation et la régulation bancaire ne serait pas raisonnable et déstabiliserait le système. Avis défavorable.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis de la commission des lois.

Mme Axelle Lemaire, rapporteure pour avis de la commission des lois. J’entends la position de la rapporteure, et je la partage. J’aimerais tout de même profiter de la présence du ministre pour obtenir quelques clarifications sur cette question de la dette senior.

L’article 7 du projet de loi définit les mesures qui peuvent être prises par le collège de résolution de l’autorité de régulation en cas de défaillance d’une banque. Une telle défaillance signifie que l’établissement ne peut plus respecter ses exigences de fonds propres, ou qu’il ne peut plus assurer ses paiements, ou qu’il requiert un soutien financier exceptionnel des pouvoirs publics.

Or tout l’esprit de la loi bancaire, et en tout cas de son titre II, est justement d’éviter le recours aux fonds publics pour répondre à une situation de défaillance bancaire.

Pour ce faire, la loi prévoit que l’ACPR peut demander à la banque de lui fournir des informations, nommer un administrateur provisoire, révoquer un dirigeant, transférer d’office une branche d’activité, recourir à un établissement relais, faire intervenir le fonds de garantie, et – c’est ce qui nous intéresse particulièrement en l’espèce – estimer les dépréciations et imposer une réduction du capital, l’annulation des titres de capital ou de la dette, ou la conversion des titres.

À qui ces mesures doivent-elles être imputées ? La loi détermine un ordre des créanciers : elles sont d’abord imputées sur les capitaux propres de la banque, puis sur les titres subordonnées, et enfin sur les autres obligations. Les créanciers seniors ne sont pas mentionnés : il n’existe pas de quatrième rang dans l’ordre de ces créanciers. Il me semble pourtant que c’est le nerf de la guerre ! Faire couvrir la totalité de l’imputation par les créanciers seniors permet véritablement de réduire l’aléa moral, puisque ces créanciers savent qu’en tout état de cause, l’État n’apporte pas une garantie tacite ou implicite qui justifierait une prise de risque sans lien avec la réalité de la valeur des créances.

M. le ministre a fait référence à Alistair Darling, qui a compris que le bail-in doit, à terme, remplacer le risque de bail-out. Il faut absolument améliorer les mécanismes de renflouement interne faisant appel aux créanciers, pour éviter que le bail-out – c’est-à-dire le recours à l’État et aux fonds publics – n’intervienne au dernier stade.

Cela dit, la rédaction de cet amendement pose problème. D’abord, il ne conditionne pas son application à l’entrée en vigueur de la directive européenne en cours d’élaboration. On aurait pu envisager une telle disposition : elle est mentionnée dans l’exposé sommaire mais ne figure pas dans l’amendement proposé.

Deuxième problème : on parle des créanciers seniors sans préciser qui ils sont. Toute la difficulté consiste précisément à définir ces créanciers. En l’occurrence, vous incluez par défaut les créanciers privilégiés : vous intégrez donc les salaires, la dette aux organismes fiscaux et aux organismes sociaux, ainsi que les frais de justice. Il me semble qu’il aurait fallu les limiter a minima aux créanciers chirographaires.

En outre, il faut comprendre que la mise en place de ce mécanisme, à ce stade, uniquement au niveau national est quasiment suicidaire. La valeur des titres inclut en effet l’aléa moral, ce qui représente un coût financier sonnant et trébuchant : si cet aléa moral n’était pas inclus dans la valeur des créances, il y aurait donc pour les créanciers un véritable manque à gagner, que la Commission européenne a d’ailleurs estimé de 5 à 15 points. À ce stade, nous ne pouvons pas faire payer ce risque à nos seuls établissements bancaires. En revanche, j’aimerais obtenir un engagement de M. le ministre concernant la position de la France dans les négociations européennes sur la future directive relative à la résolution.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Je m’inscris largement dans les propos de Mme la rapporteure pour avis. Le projet de loi prévoit la possibilité d’imputer des pertes sur les actionnaires et les créanciers se trouvant dans une situation proche – ceux que l’on appelle les créanciers juniors –, ce qui vise à impliquer le secteur privé dans le financement de la résolution. C’est l’un des points clés de la réforme.

Le projet de directive sur la résolution prévoit d’appliquer plus largement ce mécanisme aux créanciers seniors, c’est-à-dire aux créanciers obligataires ne bénéficiant d’aucune garantie particulière. J’ai déjà eu l’occasion de le dire publiquement, notamment en commission des finances, et je le redis ici : la France soutient l’implication des créanciers seniors dans le processus de résolution. Pour autant, il ne me semble pas souhaitable, il me paraîtrait même préjudiciable d’inclure dès à présent ces dispositions dans la loi, et ceci pour plusieurs raisons.

D’abord, je crois qu’il faut attendre l’émergence d’un consensus européen sur le périmètre des créanciers couverts, sans aller au-delà de ce qui figure dans le projet de loi. À ce stade, les débats européens sont loin d’être stabilisés : il est donc nécessaire d’attendre l’adoption de la directive.

Deuxièmement, le projet de directive lui-même prévoit des exceptions, qui s’appliquent par exemple aux dépôts couverts par la garantie des dépôts, afin de protéger les déposants et d’éviter les risques de run, c’est-à-dire de panique. Le moment venu, il faudra prendre en compte ces exceptions, qui sont nécessaires pour la stabilité financière et la protection des déposants. À ce stade, une loi trop générale présenterait des risques et pourrait entrer en contradiction avec certains intérêts que nous défendons.

Troisièmement, l’implication des créanciers seniors peut avoir un effet important sur l’accès des banques au financement, et sur le coût de celui-ci. Il faut prendre en compte l’impact d’une telle disposition sur le financement des banques, et donc sur le financement de l’économie. Avec une mesure de cette ampleur, il convient de ne pas pénaliser unilatéralement le financement de l’économie française – vous savez que c’est l’une de mes préoccupations majeures dans le cadre de ce débat –, alors qu’une disposition européenne allant dans le bon sens est dans l’antichambre et sera appuyée par les autorités françaises.

Quatrièmement, le projet de directive lui-même prévoit un report de l’entrée en vigueur du dispositif à 2018, afin de prendre en compte ses effets possibles sur le financement bancaire. On parle souvent ici de 2015, 2017, 2018 ou 2020 ; or il est imprudent d’anticiper sur ce point. Encore une fois, je crains des effets de fuite ou des effets préjudiciables.

Nous participons activement aux négociations en cours sur le projet de directive pour trouver rapidement un consensus sur ce sujet sensible. Je le dis à la fois à l’auteur de l’amendement, à la rapporteure et à la rapporteure pour avis : je souhaite que la directive retienne un périmètre de créanciers large, tout en reconnaissant des exceptions nécessaires à la stabilité financière, notamment en excluant les dépôts des particuliers. Voilà la raison pour laquelle un amendement qui serait trop général et pourrait paraître prématuré ne me semble pas devoir être retenu à ce stade.

Je profite de mon intervention pour réaffirmer mon engagement à ce que nous puissions, dans le cadre des négociations européennes, adopter un champ large de créanciers seniors. Cette préoccupation n’est absolument pas étrangère à notre démarche, notamment dans le cadre de la discussion européenne. Toutefois, je ne pense pas qu’il faille aujourd’hui retenir cet amendement. Si mes arguments vous convainquent, et si mes engagements sont acceptés et considérés comme sérieux – ils le sont en général ! –, je demanderai le retrait de cet amendement. Dans le cas contraire, je recommanderai un rejet, mais le retrait me paraît vraiment la solution la plus sage.

M. le président. La parole est à M. Éric Alauzet.

M. Éric Alauzet. Je ferai quelques observations avant de retirer cet amendement.

Sur la forme, nous avions inséré dans une première rédaction une référence à l’adoption d’une telle disposition à l’échelle européenne. Nous l’avons cependant retirée, parce qu’elle semblait poser des problèmes juridiques. Nous avons tenté de lui substituer un sous-amendement qui aurait mentionné une échéance – 2016 – allant au-delà de la date limite prévue pour l’adoption du texte européen. Il nous a été expliqué qu’il ne s’agissait pas d’un sous-amendement, mais d’un amendement, que nous n’avons pas pu déposer.

Sur le fond, je peux tout à fait entendre les arguments de M. le ministre et de Mme la rapporteure ; ce sont, d’ailleurs, les mêmes arguments que M. Vickers nous a avancés il y a quelques jours. Il serait effectivement cohérent que l’ampleur de cette disposition soit européenne. Cependant, si nous déposons ce type d’amendements, c’est que nous doutons de la capacité de cette loi à mettre le contribuable et les pouvoirs publics définitivement à l’abri de mésaventures. Face à un tel amendement, on aurait pu s’attendre à ce qu’on nous réponde, non pas qu’une disposition européenne viendrait conforter la garantie, mais que la loi suffirait en l’état. Or ce n’est pas le sens de la réponse que j’ai obtenue. J’aurais tellement aimé entendre que la loi suffit et que le contribuable est à l’abri ! Or nos échanges mettent en évidence la nécessité de dispositifs complémentaires.

Finalement, l’amendement que notre collègue Pascal Cherki a fait adopter hier, qui n’instaure pas un barbelé mais un mur de Berlin entre la contribution publique et la filiale en cas de difficulté, constitue peut-être une garantie d’une certaine force. C’est même, peut-être, la garantie plus forte que l’on ait incluse dans cette loi !

M. Jean Launay. Tout à fait !

(L’amendement n° 203 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Jean Launay, pour soutenir l’amendement n° 83.

M. Jean Launay. J’arrive bientôt au terme de l’ensemble des amendements que j’ai souhaité défendre au cours de notre débat.

M. Jean-François Lamour. Bon week-end ! (Sourires sur les bancs du groupe UMP.)

M. Jean Launay. Je ne désespère pas de convaincre Mme la rapporteure et M. le ministre au sujet de cet amendement, qui est finalement un amendement de précision. J’y verrais le fruit des efforts déployés pour durcir ce texte, comme je le souhaitais dès le début.

L’alinéa 39 de l’article 7 dispose qu’il est interdit à la société de distribuer des dividendes aux actionnaires et de rémunérer des parts sociales aux sociétaires de cet établissement. Il me semble utile de préciser que cette disposition doit également s’appliquer durant la période de résolution. En effet, il ne me paraît pas envisageable que ces distributions de dividendes ou de rémunérations de parts sociales puissent avoir lieu durant cette période. Il ne me semble pas non plus logique de laisser cette possibilité à l’appréciation de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution.

Je serais très heureux de voir l’un de mes amendements adoptés lors de cette séance !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Karine Berger, rapporteure. Je crains de décevoir mon collègue Jean Launay. Nous en avons débattu en commission des finances : la liberté de décision de l’ACPR en matière de suivi d’une résolution bancaire doit être relativement large. Le cadre est fixé par la loi, mais les moyens d’action de l’ACPR restent à l’appréciation de cette autorité, qui doit être la plus efficace et la plus utile possible pour trouver la solution que nous cherchons tous, et éviter qu’une faillite bancaire ne se répercute sur l’économie réelle et crée du chômage et de la désespérance dans notre société. Dans ce contexte, il ne me paraît pas spécifiquement indispensable de fixer plus précisément les devoirs de l’ACPR.

Monsieur Launay, je vous invite à retirer votre amendement. De manière générale, je vous remercie de nous avoir expliqué l’ensemble des éléments qui vous tenaient à cœur dans les titres I et II de ce projet de loi.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Je remercie moi aussi Jean Launay de sa participation au débat et de ses amendements. Il est vrai que tous n’ont pas été retenus,…

M. Jean Launay. Aucun, monsieur le ministre !

M. Pierre Moscovici, ministre. …et je parle de façon euphémistique ! Certains ont été acceptés en commission des finances.

M. Jean Launay. Oui, deux !

M. Pierre Moscovici, ministre. Par ailleurs, un certain nombre d’engagements ont été pris pour la suite. Cependant, je suivrai en l’occurrence l’avis de la rapporteure.

(L’amendement n° 83 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement rédactionnel, n° 104, présenté par Mme la rapporteure.

(L’amendement n° 104, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 7, amendé, est adopté.)

Après l’article 7

M. le président. La parole est à M. Jean Launay, pour soutenir l’amendement n° 244 portant article additionnel après l’article 7.

M. Jean Launay. Revoilà la Cour des comptes ! J’avais déposé cet amendement en commission, où il n’a pas été retenu. J’ai donc soigné sa réécriture pour qu’il puisse être examiné en séance publique.

La Cour contrôle déjà des organismes privés, par exemple les organismes qui font appel à la générosité publique. Dès 2008, pendant la crise bancaire, elle a également travaillé sur le plan d’aide. Au vu des risques générés par les banques systémiques pour les finances publiques, je propose donc de fournir aux ministres un outil de contrôle supplémentaire, qui n’a évidemment pas pour objet de remplacer l’Autorité de contrôle prudentiel mais de compléter la surveillance. C’est la raison pour laquelle je demande que l’État présente au Parlement un rapport étudiant l’opportunité de soumettre à un contrôle additionnel de la Cour des comptes les établissements financiers reconnus comme systémiques. Nous savons qu’il en existe quatre importants !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Karine Berger, rapporteure. Je ne sous-estime pas la puissance d’action de la Cour des comptes dont les membres, aux compétences reconnues et aux pouvoirs importants, nous démontrent tous les jours qu’elle produit ce qu’il y a de meilleur !

M. Dominique Lefebvre. Effectivement !

Mme Karine Berger, rapporteure. Toujours est-il que la Cour des comptes n’est pas l’institution la plus à même d’apprécier des questions de comptabilité privée, puisque les risques d’un établissement financier s’apprécient évidemment en comptabilité privée et financière. Bien que les magistrats soient très compétents sur de nombreux sujets – ils se sont d’ailleurs découvert très récemment une compétence en fait de prévision macroéconomique –, je crains qu’ils ne le soient pas en matière de comptabilité privée et financière. C’est pourquoi j’invite notre collègue Jean Launay à retirer son amendement et à ne pas solliciter l’avis de la Cour des comptes sur des établissements systémiques.

(L’amendement n° 244, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Article 8

M. le président. La parole est à M. Jean Launay, pour soutenir l’amendement n° 88.

M. Jean Launay. L’amendement est défendu.

(L’amendement n° 88, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean Launay, pour soutenir l’amendement n° 170.

M. Jean Launay. Défendu.

(L’amendement n° 170, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Karine Berger, pour soutenir l’amendement n° 103.

Mme Karine Berger, rapporteure. Amendement de coordination.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Avis très favorable. (Sourires.)

(L’amendement n° 103 est adopté.)

(L’article 8, amendé, est adopté.)

Article 9

(L’article 9 est adopté.)

Article 10

M. le président. La parole est à M. Pierre-Alain Muet.

M. Pierre-Alain Muet. L’article 10 redonne à la Banque de France, en sa qualité de banque centrale, le pouvoir de surveillance macrofinancière qu’elle a toujours eu dans notre histoire. La force de notre système bancaire reposait sur le fait d’avoir une banque centrale qui non seulement faisait la politique monétaire, ce qui est le rôle de toutes les banques centrales, mais assurait également la surveillance des banques.

J’ai toujours regretté que le traité de Maastricht ne prenne en considération que la politique monétaire en oubliant complètement le rôle de surveillance prudentielle de la banque centrale.

Cela va être corrigé, dans la mesure où la réforme bancaire en cours de discussion dans l’Union européenne va réaffecter la surveillance macroprudentielle aux banques. L’article 10, qui en tire les conséquences pour notre pays, nous ramène à la bonne situation, celle où la Banque de France joue ce double rôle.

(L’article 10 est adopté.)

Article 11

M. le président. La parole est à M. Joël Giraud, pour soutenir l’amendement n° 132 rectifié.

M. Joël Giraud. Cet amendement propose que le président du Conseil économique, social et environnemental soit membre de droit du Conseil de stabilité financière afin de sortir de l’entre soi financier et de permettre à l’économie réelle de pénétrer mieux cette institution

(L’amendement n° 132 rectifié, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Karine Berger, pour soutenir l’amendement n° 33.

Mme Karine Berger, rapporteure. Amendement rédactionnel.

(L’amendement n° 33, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean Launay, pour soutenir l’amendement n° 86.

M. Jean Launay. Faire référence à la croissance économique à l’article 11 me paraît curieux. Le but d’un conseil de stabilité financière est d’assurer la stabilité. Par cet amendement, je défends l’idée que les problèmes de croissance relèvent du pouvoir politique et qu’il n’y a pas lieu d’évoquer ici la croissance.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Karine Berger, rapporteure. C’est un élément important. J’ai du reste expliqué en commission des finances à quel point il était indispensable d’intégrer la régulation dite macroprudentielle dans le cadre des mécanismes de résolution et de séparation des activités bancaires que nous mettons en place par le biais de ce projet de loi.

Si nous ne suivons pas les indicateurs macroéconomiques – il ne s’agit ni de décroissance ni de croissance nulle, mais bien de croissance économique, de croissance de la valeur ajoutée –, nous manquerons notre objectif final : assurer le bon fonctionnement de l’économie. Retirer au conseil de stabilité financière la responsabilité du suivi de la croissance serait donc contreproductif.

Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Même avis que la rapporteure.

M. le président. La parole est à Mme Valérie Rabault.

Mme Valérie Rabault. Je me permets d’intervenir sur cet amendement sur lequel j’avais déjà été amenée à m’exprimer en commission des finances.

Une entité qui réfléchit de manière macroéconomique et, en même temps, prend en compte des données de marchés – les flux – permet d’avoir des indicateurs d’alerte à un moment de surchauffe. Pour prévenir des crises, c’est une grande force que de disposer d’une synthèse de ces deux indicateurs : des volumes qui peuvent être traités sur différents produits, et des éléments de macroéconomie. Vouloir dissocier les deux risque de favoriser l’apparition de bulles ou de les laisser gonfler sans que l’on s’en aperçoive avant qu’il soit trop tard. Pour ma part, je milite vigoureusement en faveur de l’aspect macroéconomique concernant les données financières

M. Pierre-Alain Muet. C’est très keynésien.

Mme Valérie Rabault. En effet, monsieur Muet et c’est pourquoi je ne partage pas l’avis de M. Launay.

(L’amendement n° 86 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Joël Giraud, pour soutenir l’amendement n° 162.

M. Joël Giraud. L’amendement est défendu.

(L’amendement n° 162, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Joël Giraud, pour soutenir l’amendement n° 164.

M. Joël Giraud. Défendu.

(L’amendement n° 164, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Joël Giraud, pour soutenir l’amendement n° 165.

M. Joël Giraud. Également défendu.

(L’amendement n° 165, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Laurent Baumel, pour soutenir l’amendement n° 67 rectifié.

M. Laurent Baumel. L’amendement est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Karine Berger, rapporteure. La commission a émis un avis favorable car il s’agit de la prévention des conflits d’intérêt au sein du Conseil de stabilité financière. Le projet de loi prévoyait déjà de lutter contre les conflits d’intérêt pour les membres du CSF. L’amendement de mon collègue Baumel vise à faire en sorte que ces conflits d’intérêt n’aient jamais l’opportunité de se matérialiser.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Sagesse.

(L’amendement n° 67 rectifié est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Joël Giraud, pour soutenir l’amendement n° 133.

M. Joël Giraud. Il s’agit de renforcer l’interdiction faite aux membres du Conseil de stabilité financière d’exercer, après leur retrait du conseil, une fonction dans un établissement dont ils ont été chargés d’assurer la surveillance. Le délai de cette interdiction est de trois ans, conformément au délai habituellement appliqué aux fonctionnaires et agents publics. Compte tenu de l’importance des responsabilités du Conseil de stabilité financière, nous proposons de porter ce délai à cinq ans.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Karine Berger, rapporteure. La proposition de notre collègue Giraud va peut-être un peu trop loin. Nous avons déjà considérablement renforcé, notamment en adoptant l’amendement précédent, tout risque de manifestation d’un conflit d’intérêt pour les membres du CSF. Une limitation de l’activité pouvant créer conflit d’intérêt a posteriori à trois ans me paraît largement suffisante.

Avis défavorable, monsieur Giraud, sauf si vous retirez votre amendement ! (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Même avis.

M. le président. L’amendement est-il maintenu ?

M. Joël Giraud. Je le maintiens.

(L’amendement n° 133 n’est pas adopté.)

(L’article 11, amendé, est adopté.)

Article 11 bis

(L’article 11 bis est adopté.)

Après l’article 11 bis

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 238 rectifié et 134, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à Mme Axelle Lemaire, rapporteure pour avis, pour soutenir l’amendement n° 238 rectifié.

Mme Axelle Lemaire, rapporteure pour avis. Le président de l’Assemblée nationale Claude Bartolone avait présidé la commission d’enquête sur les emprunts toxiques et vous avez sûrement lu son rapport. À ma connaissance, la loi ne prévoit rien pour éviter à l’avenir les pratiques abusives de la part des établissements de crédit concernant les collectivités territoriales.

L’amendement, cosigné par le rapporteur général Christian Eckert, vise à encadrer les conditions auxquelles les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent recourir à l’emprunt. En aucun cas, il ne s’agit de limiter les conditions d’accès au crédit des collectivités territoriales. Il s’agit, et la nuance est d’importance, d’encadrer plus précisément les conditions d’octroi de crédit par les banques. Il ne traite que de la question des prêts toxiques qui pourraient être souscrits à l’avenir – ce que l’on appelle le flux – et ne résout pas la question du stock pendant et actuel, que la commission d’enquête a évalué à 18 milliards d’euros. Je pense notamment au département de Seine-Saint-Denis, particulièrement affecté par le scandale des prêts toxiques.

J’invite Mme la rapporteure et M. le ministre à considérer avec beaucoup de bienveillance et de sérieux cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Joël Giraud, pour soutenir l’amendement n° 134.

M. Joël Giraud. Cet amendement s’inscrit dans la même logique de protection des collectivités territoriales par rapport à certains emprunts. Il vise à reprendre une disposition de la proposition de loi de M. Bartolone à la suite de la publication du rapport de la commission d’enquête, évoqué à l’instant par Mme Lemaire.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les deux amendements ?

Mme Karine Berger, rapporteure. Ce sujet important peut faire l’objet d’un consensus très large. Quel élu ne connaît pas la problématique des collectivités locales confrontées aux emprunts toxiques ? Joël Giraud et moi-même sommes députés d’un département frappé de plein fouet par les méthodes inacceptables utilisées par certains systèmes bancaires qui ont conduit des communes au surendettement. Elles n’ont du reste même pas compris ce qui se passait. J’ajoute, mais Joël Giraud le sait bien, que Briançon n’a même pas commencé à rembourser le capital levé en 1991.

Le sujet est crucial et je remercie la rapporteure pour avis de la commission des lois de porter cet amendement dont une première version avait été élaborée en commission des finances et méritait d’être adaptée. Je vous invite, cher collègue Giraud, à vous rallier à l’amendement de notre collègue Axelle Lemaire, qui a fait l’objet d’un travail entre la commission et l’hémicycle.

La commission des finances donne un avis favorable à l’amendement de Mme Lemaire et espère que le ministre suivra.

M. Christian Paul. Très bien.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Je vais en effet, madame la rapporteure pour avis, prendre votre amendement au sérieux et émettre un avis favorable. Ultérieurement, il faudra peut-être revenir sur quelques détails de rédaction. Dès lors que l’amendement de Mme Lemaire et de M. Eckert satisfait aux attentes de M. Giraud, je souhaite comme la rapporteure qu’il se rallie à l’amendement n° 238 rectifié.

M. le président. La parole est à M. Joël Giraud.

M. Joël Giraud. Je retire mon amendement au profit de celui de Mme Lemaire. Nous apportons ainsi une solution à un problème extrêmement grave dans un certain nombre de régions.

(L’amendement n° 134 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Éric Woerth.

M. Éric Woerth. Nous ne sommes pas favorables à cet amendement – même si nous en partageons évidemment l’objectif, qui est tout à fait honorable – car il restreint la liberté des collectivités locales. Il suffirait que les documents de prêt soient suffisamment clairs et qu’il y ait un échange entre les établissements prêteurs et les collectivités qui amène ces dernières à prendre leurs propres responsabilités.

M. Christian Paul. Il est urgent de ne rien faire !

M. Éric Woerth. Restreindre sous prétexte que les collectivités seraient, au fond, des irresponsables ne me paraît pas une bonne chose. On note du reste un mouvement un peu général pour rogner la liberté des collectivités locales sous prétexte que l’État serait plus responsable, ce qui reste encore à prouver.

Plusieurs députés du groupe UMP. Ça, c’est vrai !

M. le président. La parole est M. le rapporteur pour avis.

M. Philippe Kemel, rapporteur pour avis. Les emprunts toxiques mettent en jeu une relation entre un prêteur et un emprunteur. Que nous mettions en garde l’emprunteur, c’est bien sûr une nécessité. Nous avons pu voir comment les collectivités locales ont été emmenées, contre leur gré, vers de grandes difficultés.

L’amendement tel qu’il est rédigé met surtout l’accent sur l’emprunteur, c’est-à-dire les collectivités locales. Il faudrait qu’il prenne aussi en compte le comportement du prêteur, qui n’est pas toujours digne.

M. Jean-François Lamour. Effectivement !

M. Philippe Kemel, rapporteur pour avis. La façon dont certains prêteurs ont pu présenter leurs produits a souvent conduit à mettre les collectivités locales en grand danger.

La commission des affaires économiques avait donc demandé que les produits présentés aux collectivités puissent faire l’objet en amont d’un diagnostic de l’ACPR afin d’apporter davantage de sécurité.

Il ne faudrait pas que cet amendement conduise à mettre en cause de manière rétroactive la responsabilité des collectivités pour des décisions qu’elles ont prises antérieurement.

M. le président. La parole est à M. Jean-François Lamour.

M. Jean-François Lamour. Évidemment, toutes ces dispositions vont dans le bon sens. Cela dit, pour rebondir sur les propos de M. Kemel, il y a un certain paradoxe à laisser entendre que les produits toxiques continuent de circuler en France – c’est bien ce qu’implique l’amendement qui vise à en interdire l’accès aux collectivités locales.

M. Razzy Hammadi. Ce n’est pas ça !

M. Jean-François Lamour. Nous sommes confrontés effectivement à un double problème : ce n’est pas simplement celui qui reçoit qui est cause, mais aussi celui qui émet. À cet égard, l’ACPR pourrait utilement définir ce qu’est un produit toxique et en empêcher la commercialisation. Nous agirions ainsi d’un côté comme de l’autre.

Cela renforcerait la protection des collectivités. Compte tenu de leurs besoins de financement – ce n’est pas dans les années à venir que les aides de l’État augmenteront –, elles pourraient ainsi continuer à accéder à divers types de crédits, à condition que ceux-ci soient dûment référencés.

Vous avez employé l’expression de « coup de ciseau », madame la rapporteure. Mais plutôt qu’à protéger, il aurait tendance à castrer, si vous me permettez ce trait d’humour. (Rires sur divers bancs.)

M. Gérard Terrier. Bonne Saint-Valentin !

M. Jean-François Lamour. En contrepoint de cette proposition qui conduit à atténuer les possibilités d’action des collectivités, j’estime qu’il serait bon d’établir une liste des produits autorisés. Sinon, vous laissez entendre que les produits toxiques continuent à circuler en France, ce qui est bien dommage pour nos collectivités.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Karine Berger, rapporteure. Pour en revenir à l’amendement et m’éloigner des considérations biologiques…

M. Christian Paul. Psychanalytiques !

Mme Karine Berger, rapporteure. …et psychanalytiques, j’aimerais apporter des précisions sur la question de la définition des emprunts toxiques. C’est par facilité que nous utilisons ce terme. Il s’agit en réalité de produits dérivés relativement simples : la couverture d’une monnaie sur l’autre fait même partie des produits dérivés les plus basiques que l’on puisse imaginer.

Même si je comprends le souci de la commission des affaires économiques de voir ces produits classés, la problématique touche non pas au qualificatif de « toxique » mais à des structures de dettes publiques d’une ampleur qui n’a absolument rien à voir, en termes de masse et de conséquences sur la gestion quotidienne, avec les mécanismes de couverture que ces produits dérivés doivent normalement permettre.

J’entends votre remarque selon laquelle nos débats pourraient entretenir une confusion. En l’occurrence, nous assumons l’utilisation du terme « emprunt toxique » pour qualifier des produits qui, en eux-mêmes, sont autorisés mais qui, appliqués aux sommes considérables des dettes des communes, prennent une nature systémique.

(L’amendement n° 238 rectifié est adopté.)

M. le président. La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement n° 320 rectifié.

M. Pierre Moscovici, ministre. Depuis sa création, l’Autorité de contrôle prudentiel est dotée d’une mission de surveillance des pratiques commerciales. Elle a constitué pour ce faire un pôle commun avec l’Autorité des marchés financiers. Cette mission peut néanmoins recouper certaines prérogatives de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, en particulier pour ce qui est de ses compétences spéciales en matière financière, sur le démarchage ou la vente à distance de services financiers par exemple.

Comme le soulignait la Cour des comptes – dont nous vantions à l’instant l’efficacité et la qualité du travail – dans son rapport de 2011 sur les modalités de mise en place de l’ACP, les possibilités de coordination entre ce pôle commun ACP-AMF et la DGCCRF sont entravées par les exigences de secret professionnel auxquelles sont soumises ces autorités.

La levée du secret professionnel devrait donc de faciliter la coordination de leurs activités. Il s’agit surtout de rendre plus efficace la surveillance des pratiques commerciales des établissements financiers.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Karine Berger, rapporteure. Avis favorable. Les moyens de lutte contre toute forme de fraude doivent évoluer avec la technologie.

(L’amendement n° 320 rectifié est adopté.)

Article 12

M. le président. La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement n° 341.

M. Pierre Moscovici, ministre. Le Gouvernement présente six amendements – les amendements nos 341, 322 rectifié, 319, 326, 325 rectifié et 324 rectifié – visant à adapter complètement la législation fiscale aux dispositions du règlement européen EMIR.

Avancée majeure dans la sécurisation des marchés de dérivés, il pose le principe d’une obligation de compensation centrale de l’ensemble des contrats de dérivés ayant été déclarés comme suffisamment standardisés par l’Autorité européenne des marchés financiers et il impose le recours à des techniques d’atténuation des risques pour les contrats qui n’ont pu être compensés ainsi.

Il permet également d’établir un cadre juridique harmonisé au niveau européen pour la supervision des chambres de compensation.

En France, trois autorités sont concernées : la Banque de France, l’Autorité des marchés financiers, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution. Nous avons fait le choix de conserver le cadre de répartition des compétences qui préexistait en France entre les différentes autorités.

Ces amendements visent à créer de nouveaux pouvoirs de sanction attribués à l’AMF et à l’ACPR pour faire respecter ces règles. Ajoutés aux dispositions déjà présentes dans le texte, ils participent d’une avancée majeure de la régulation des marchés financiers en réponse à la crise financière. Je vous invite donc à les adopter.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Karine Berger, rapporteure. Avis favorable à l’amendement n° 341 ainsi qu’aux autres amendements du Gouvernement visant la transposition du règlement EMIR.

(L’amendement n° 341 est adopté.)

(L’article 12, amendé, est adopté.)

Article 13

(L’article 13 est adopté.)

Article 14

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour soutenir l’amendement n° 301.

M. Philippe Kemel, rapporteur pour avis. L’alinéa 5 indique que l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution peut s’opposer à la nomination ou au renouvellement du mandat des dirigeants des établissements de crédit s’ils ne remplissent pas certaines conditions d’honorabilité ou de compétence.

Le présent amendement vise à préciser que cette compétence incombe au collège de supervision de l’ACPR et non au collège de résolution.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Karine Berger, rapporteure. Il convient bien de confier le pouvoir de nomination et de contrôle au collège de supervision et non au collège de résolution de l’ACPR.

Je vous remercie, monsieur Kemel, d’avoir apporté cette précision par votre amendement auquel nous donnons un avis favorable.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Pierre Moscovici, ministre. Sagesse.

(L’amendement n° 301 est adopté.)

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Karine Berger, rapporteure. Juste une précision, monsieur le président, avant que nous passions au vote de l’article 14.

Depuis nos réunions en commission des finances, de nombreux échanges sont intervenus. L’équilibre que nous avons réussi à trouver, pour le monde mutualiste, sur un contrôle des nominations des organes centraux et des organes régionaux, au travers de l’avis de l’organe central, est un bon équilibre. Je suis persuadée que l’esprit mutualiste qui prévaut actuellement pourra ainsi perdurer.

(L’article 14, amendé, est adopté.)

Après l’article 14

M. le président. L’amendement n° 322 rectifié du Gouvernement a déjà été défendu et a recueilli un avis favorable de la commission.

(L’amendement n° 322 rectifié est adopté.)

Article 14 bis

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l’amendement n° 102.

Mme Karine Berger, rapporteure. Il s’agit d’un amendement de coordination.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Favorable.

(L’amendement n° 102 est adopté.)

(L’article 14 bis, amendé, est adopté.)

Avant l’article 15

M. le président. L’amendement n° 319 du Gouvernement a déjà été défendu et a recueilli un avis favorable de la commission.

(L’amendement n° 319 est adopté.)

Article 15

(L’article 15 est adopté.)

Après l’article 15

M. le président. Je suis saisi de trois amendements du Gouvernement, nos 326, 325 rectifié, 324 rectifié, qui peuvent faire l’objet d’une présentation commune.

Ces amendements ont déjà été défendus et ont fait l’objet d’un avis favorable de la commission.

(L’amendement n° 326 est adopté.)

(L’amendement n° 325 rectifié est adopté.)

(L’amendement n° 324 rectifié est adopté.)

Article 15 bis

(L’article 15 bis est adopté.)

Après l’article 15 bis

M. le président. La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement n° 321.

M. Pierre Moscovici, ministre. Défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Karine Berger, rapporteure. Favorable.

(L’amendement n° 321 est adopté.)

Article 16

M. le président. La parole est à Mme Karine Berger, pour soutenir l’amendement n° 16.

Mme Karine Berger, rapporteure. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Favorable.

(L’amendement n° 16 est adopté.)

(L’article 16, amendé, est adopté.)

Avant l’article 17

M. le président. La parole est à M. Philippe Armand Martin, pour soutenir l’amendement n° 77.

M. Philippe Armand Martin. Cet amendement vise à la fois à étendre le présent chapitre à l’ensemble des clients-consommateurs et à affirmer la nécessité d’améliorer la transparence des offres aujourd’hui proposées par les établissements bancaires.

Le manque de transparence des tarifs appliqués par les établissements bancaires est de plus en plus décrié. Il convient donc de renforcer la protection de l’ensemble des consommateurs.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Karine Berger, rapporteure. Le titre VI et l’article 17 portent sur la protection des consommateurs dans le cadre de leurs achats bancaires : cela inclut mécaniquement leur information.

La commission a adopté plusieurs amendements visant à améliorer cette information, qu’il s’agisse, par exemple, de l’assurance emprunteur pour les particuliers ou de l’obligation faite aux banques de transmettre aux PME leur notation.

La commission vous invite donc à retirer votre amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Défavorable.

(L’amendement n° 77 n’est pas adopté.)

Article 17

M. le président. Je suis saisi de trois amendements, nos 182, 72 et 219, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Laurent Baumel pour soutenir l’amendement n° 182.

M. Laurent Baumel. Il s’agit d’un amendement très important, qui a fait l’objet de nombreuses discussions et d’un investissement collectif important de l’ensemble du groupe SRC. M. Christian Paul étant son premier signataire, il pourra peut-être s’exprimer sur cet amendement s’il le souhaite.

Cet amendement vise à étendre le plafonnement des commissions d’intervention, actuellement prévu par la loi pour les publics les plus fragiles, à l’ensemble des publics potentiellement concernés, et surtout à introduire le principe d’un double plafond de ces opérations, par opération et par mois.

Cette disposition, si elle reçoit un avis favorable de la rapporteure et du Gouvernement, pourrait permettre de soulager nombre de nos concitoyens qui connaissent parfois des difficultés en fin de mois, subissent des découverts, autorisés ou non, et dont la situation générale se trouve encore aggravée par le prélèvement de commissions.

M. le président. La parole est à M. Philippe Armand Martin, pour soutenir l’amendement n° 72.

M. Philippe Armand Martin. Cet amendement a pour objet de substituer, à l’alinéa 2 de l’article 17, aux mots « ne peuvent excéder un plafond pour les clients en situation de fragilité eu égard, notamment,… » les mots « sont fixées à 5 euros, quel que soit le moyen de paiement, et ne peuvent excéder un plafond déterminé, pour les clients en situation de fragilité, eu égard… ».

Afin d’éviter la tarification abusive de frais bancaires contractés à l’occasion d’un incident de paiement ou d’un découvert, il convient de renforcer son encadrement.

Le phénomène de cascade de frais, qui peut, selon les cas, représenter des centaines d’euros pour quelques refus de paiement sur un compte à découvert, génère un cercle vicieux de l’endettement, dans un contexte de fragilité économique des ménages.

Cet amendement reprend une proposition de Christine Lagarde, lorsqu’elle était ministre de l’économie, de limiter à 5 euros ou de réduire de 50 % les commissions d’intervention des banques à l’occasion d’un incident de paiement.

De la même manière, il convient d’étendre la fixation d’un plafond de commission à l’ensemble des consommateurs clients, et non plus seulement aux clients en situation de fragilité.

M. le président. Dans la discussion commune, je suggère à M. Philippe Armand Martin de soutenir également l’amendement n° 219.

M. Philippe Armand Martin. Cet amendement vise à supprimer la fin de l’alinéa 2 de l’article 17 après le mot « clients », ainsi que l’alinéa 3.

Il a pour but d’assurer l’égalité entre les citoyens, de renforcer la relation de confiance et de transparence entre les banques et les clients, et de permettre un juste équilibre entre la protection du consommateur et l’efficacité économique du secteur bancaire.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements ?

Mme Karine Berger, rapporteure. Tout d’abord, mes chers collègues, je souhaite rappeler que le titre VI de ce projet de loi a été voulu par le Gouvernement pour protéger les consommateurs contre tous les abus éventuels auxquels ils pourraient être confrontés dans leur relation avec les banques.

L’esprit de la loi, en tant que tel, marque une évolution considérable. La volonté de plafonner les commissions d’intervention pour les populations les plus fragiles s’inscrit dans une approche très pratique du pouvoir d’achat, de la vie concrète et réelle de nos concitoyens, dont de nombreux ménages modestes.

Dans ce contexte, il faut rappeler ce qu’est une commission d’intervention : il s’agit de frais prélevés par une banque pour laisser passer un chèque ou un prélèvement qui, sinon, du fait du contrat liant la personne avec sa banque, serait rejeté et entraînerait l’interdit bancaire de la personne.

De ce point de vue, un plafonnement des commissions d’intervention protège, ainsi que le ministre l’a parfaitement démontré lors de sa présentation, les personnes soumises à un coup dur, lorsque tout s’emballe et que les commissions d’intervention deviennent tellement nombreuses que, même si leurs chèques passent, leur dette s’accumule.

Cela étant, ces commissions d’intervention sont aussi la garantie que la personne ne sera pas frappée d’interdit bancaire. Par conséquent, les amendements défendus par M. Martin me semblent aller trop loin : plafonner de manière très stricte, sans tenir compte de la situation exacte et de l’équilibre existant entre une banque et l’ensemble de ses clients, risque de nous faire dépasser la ligne de crête et de mettre des personnes en difficulté, voire de leur faire courir le risque d’un rejet des chèques ou des prélèvements, du fait du plafond de 5 euros que vous voulez instaurer.

La commission des finances ne vous suivra donc pas dans cette voie. Je vous suggère d’aller dans le sens proposé par MM. Paul et Baumel, à savoir un élargissement du plafonnement – tout en laissant au ministre la responsabilité de jauger finement selon quelles modalités ce plafond doit être adapté – pour d’une part protéger ceux de nos concitoyens qui, pendant deux ou trois mois, traversent une période difficile et ont besoin de ce bouclier, et d’autre part assurer que le système bancaire continue de fonctionner de la manière la plus efficace possible pour tout le monde, en limitant, je l’espère, les rejets, sauf quand ils sont vraiment indispensables.

La position de la commission est claire : elle donne un avis favorable à l’amendement n° 182 – ainsi que dans quelques instants à l’amendement n° 228, de coordination –, et invite nos collègues à retirer les autres amendements, qui seront par ailleurs largement satisfaits par l’amendement signé par M. Paul, s’il est adopté par l’Assemblée nationale.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur ces trois amendements ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Tout comme Mme la rapporteure, je rappelle que le Gouvernement a souhaité qu’un titre du projet de loi soit spécifiquement consacré à ces problèmes, parce que la question des consommateurs et des frais bancaires est de toute première importance.

Nous sommes allés vite et loin dans les titres précédents consacrés à la séparation et à la régulation des activités bancaires, qui sont essentiels il est vrai. Mais je tenais à ce que cette loi rapproche les consommateurs des banques et vice-versa, afin que les banques ne travaillent pas uniquement pour elles-mêmes, mais également pour l’ensemble des Françaises et des Français ainsi que de tous les ressortissants disposant d’un compte dans notre pays. Cela me semblait tout à la fois indispensable sur le fond et nécessaire sur la forme.

Il s’agit, c’est vrai, d’un marqueur politique important, parce que la régulation bancaire ne doit pas être traitée uniquement d’un point de vue systémique, mais aussi selon une approche humaine.

Ce que voient nos concitoyens des banques, ce sont leurs agences, leurs conseillers, leurs éventuels crédits, leurs frais bancaires : il s’agit en général d’une relation de confiance et de proximité, qui connaît cependant des difficultés. Nous devons en effet être conscients que beaucoup de nos concitoyens rencontrent des difficultés dans l’inclusion bancaire, quand ils ne souffrent pas d’exclusion.

La Conférence nationale de lutte contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale a concentré ses travaux sur ces questions. Nous y avons travaillé avec Benoît Hamon, et certains aspects seront repris ultérieurement dans un projet de loi sur la consommation qu’il défendra devant vous, avec mon concours.

Le projet de loi introduit déjà beaucoup d’avancées considérables et très concrètes sur les frais bancaires, sur l’assurance emprunteur, sur la gestion du surendettement et sur l’égalité homme-femme dans les pratiques des compagnies d’assurance. Je n’y reviens pas, parce que j’ai déjà eu l’occasion de détailler tout cela lors de la présentation du projet de loi.

La question des frais bancaires a concentré une grande partie des débats, et je pense que nous sommes parvenus à un accord – je me tourne vers les auteurs de ces amendements – sur des modalités de plafonnement qui ne se limitent pas, comme c’était l’intention du Gouvernement, aux seules populations en situation de fragilité financière, tout en se concentrant prioritairement sur elles, conformément aux souhaits du Gouvernement.

Les amendements nos 182 et 228 déposés par le groupe SRC, et dont M. Paul est le premier signataire, me semblent répondre parfaitement à l’esprit et aux conclusions de nos débats. Ils élargissent le champ des personnes bénéficiant du plafond à tous les particuliers n’agissant pas pour des besoins professionnels, et prévoient la mise en place d’un double système de plafonnement, par mois et par opération.

Les paramètres devront être fixés par décret, ce qui suppose évidemment un travail approfondi en concertation avec les banques et les associations de consommateurs car, je le répète, nous avons à l’esprit non seulement les besoins des consommateurs, mais également le souci de la présence territoriale. J’ai eu l’occasion en commission des finances d’expliquer qu’il s’agissait de privilégier ces réseaux, bancaires et mutualistes, auxquels nous sommes attachés. Ces points ayant été travaillés – et bien travaillés –, je suis favorable à l’adoption de ces deux amendements.

Encore une fois, nous traitons d’un sujet de grande importance : ne minimisez pas l’ambition de la mesure que vous examinez aujourd’hui, car elle est à l’égal de ce qui a été fait sur la tenue de marché, à l’égal de ce qui a été décidé sur les paradis fiscaux, à l’égal des progrès que nous réalisons en matière de résolution. Ce projet de loi comporte ainsi quatre piliers, qui sont autant d’avancées très importantes du débat – et je n’oublie pas ce que nous devons encore accomplir sur le trading à haute fréquence.

Au vu de ces cinq éléments, vous pouvez constater que le débat que nous avons eu, aussi bien en commission que dans cet hémicycle, aura été utile. Le Gouvernement s’est montré à l’écoute du Parlement, le Parlement a été force de proposition, et tout ceci a permis de rendre la loi plus forte et de rapprocher le système bancaire des citoyens.

Personne n’ignore que ces frais représentent une part importante du revenu des banques. L’État souhaite agir pour limiter le poids de ces frais pour nos concitoyens : rien n’est plus normal, car il n’est pas acceptable que le modèle économique de la banque repose sur la fragilité, la précarité et la vulnérabilité de certains de nos concitoyens.

Toutefois, nous devons prendre garde à ne pas affaiblir cette banque de détail, cette banque des agences, cette banque du service au client, cette banque de la proximité, qui est une des spécificités du modèle français de banque universelle. Le président de la commission des finances aime à nous rappeler, à juste titre d’ailleurs, que ce secteur emploie 400 000 personnes. Aujourd’hui, les banques qui présentent les frais les plus bas sont, et de loin, les banques sans agence, c’est-à-dire les banques en ligne. Il ne faut donc pas courir le risque de créer des effets pervers.

C’est en ayant en tête l’ensemble de ces contraintes que nous devions avancer sur ce sujet. L’amendement n° 182, auquel j’ai indiqué être favorable, nous permet de légiférer au mieux dans l’intérêt des consommateurs.

Je suggère donc que nous nous concentrions sur les amendements nos 182 et 228, qui apportent une avancée très consistante, dans le même esprit que ce que nous avons décidé sur les paradis fiscaux. Je propose dès lors que les autres amendements soient retirés car ils viendraient dépasser ou déborder, voire feraient reculer le dispositif prévu, afin que nous restions toujours sur cette logique d’équilibre à laquelle je suis attaché et que je défends depuis que ce projet de loi a été présenté au Conseil des ministres puis devant vous.

J’émets donc un avis favorable sur les amendements que j’ai évoqués, compte tenu du travail remarquable qui a été effectué – auquel nous avons un peu participé – et que je tiens à saluer.

M. le président. La parole est à M. Christian Paul.

M. Christian Paul. Je sais gré au ministre de permettre ce travail réformiste et vigoureux, qui produit en effet dans ce texte plusieurs avancées. J’ai bien entendu également l’avis favorable de la rapporteure.

Il était très important, au-delà de l’intention initiale de cibler les populations les plus fragiles en plafonnant les frais bancaires, qu’en cette période de crise économique, de difficultés sociales et de grande précarité du salariat, il existe une mesure d’ordre général complétant les plafonnements déjà existants en matière de frais bancaires.

Des plafonnements existent déjà pour les rejets de chèques ou de prélèvements, et il pourrait être intéressant, monsieur le ministre – mais cela relève strictement du pouvoir réglementaire –, que le plafonnement des frais de rejet soit également revu, car il est sans doute trop élevé aujourd’hui et continue à générer des frais considérables.

Encore une fois, nous avons collectivement ciblé, au sein du groupe SRC, le plafonnement des commissions d’intervention. Elles s’élèvent aujourd’hui entre 5 et 15 euros, avec une moyenne de 8,50 euros. Mais selon quelques informations officieuses, cela rapporte environ 1,8 milliards d’euros par an ; ces sommes sont donc considérables.

Je partage d’ailleurs l’idée du ministre que le modèle économique des banques, dont les banques de détail, ne doit pas reposer sur les commissions d’intervention ou sur les frais bancaires : il existe tout de même, dans le financement de l’économie ou des particuliers, d’autres façons pour les banques de consolider leur modèle économique.

L’amendement n° 182 propose un système de double plafond : plafond du niveau des commissions d’intervention, plafond mensuel de leur occurrence, ce qui permet de contenir ces frais.

Bien évidemment, il appartiendra au ministre de fixer ces plafonds. Sans m’immiscer dans son rôle, je me permettrai de lui suggérer que ces commissions d’intervention ne devraient pas être plafonnées au-delà de cinq euros par opération pour un montant qui pourrait être de l’ordre de 40 euros par mois.

Les acteurs bancaires devront également s’interroger sur la possibilité de développer la gamme de moyens de paiement alternatifs aux chèques, la GPA, que les banques n’utilisent pas assez.

M. Guy Geoffroy. Ne nous faites pas peur avec la GPA ! N’oubliez pas que cela veut dire aussi « gestation pour autrui » dont il a été beaucoup question récemment !

M. Christian Paul. Mon cher collègue, je suis au regret de vous dire que c’est le terme employé par le monde bancaire ! En tout cas, voilà une GPA sur laquelle nous serons facilement d’accord.

Je souhaite que l’ensemble des groupes de cette Assemblée puisse se retrouver autour de cet amendement qui marque, comme l’a dit le ministre, une avancée importante du texte.

M. le président. La parole est à M. Razzy Hammadi.

M. Razzy Hammadi. En effet, voilà une GPA à laquelle nous serons tous favorables à terme, moi y compris…

Une remarque de forme, tout d’abord. La commission des affaires économiques et son rapporteur pour avis ont, en partenariat avec la commission des affaires européennes, beaucoup travaillé sur la question des frais bancaires. Je fais ce rappel pour montrer à quel point l’ensemble des parlementaires a souhaité, dans un même élan, parvenir à cet objectif. C’est ce qu’a dit la vice-présidente de la commission des affaires économiques, Frédérique Massat, pendant la discussion générale. Deux amendements identiques sont parvenus à la commission des finances et ont constitué la base de travail pour parvenir à ce très bon résultat.

La commission des affaires économiques était très engagée sur le sujet, ce qui aurait valu une autre présentation écrite de l’amendement que celle qui nous est proposée ici, à la fois parce que c’est un travail collectif et parce que la commission des affaires économiques travaille quotidiennement sur ce sujet.

En second lieu, je suis d’accord avec l’idée des quatre piliers qu’a évoquée M. le ministre, et notamment avec celui relatif aux frais bancaires. Voilà une mesure forte et concrète qui permet à ce projet de loi de prendre toute sa dimension au-delà de la technicité à laquelle nous sommes confrontés à chaque article. Cette disposition a une dimension populaire parce qu’elle s’inscrit dans la vie quotidienne.

Pour autant, nous revenons de très loin. Les travaux de Mme Lagarde, ce que nous dit la CCASF sur le surendettement, ce à quoi nous assistons, notamment avec les banques en ligne, l’émergence de nouvelles procédures y compris relatives à la mobilité, les exigences sur les banques universelles vont nous conduire à capitaliser. En effet, comme l’indique M. Moscovici, il faut défendre les avancées que comporte ce texte, mais aussi avancer sur les points qui ne sont pas traités par ces deux amendements. Nous y travaillerons dans le cadre du projet de loi sur la consommation qui sera discuté prochainement au Parlement. Tous les parlementaires semblent mobilisés sur ce sujet, y compris l’opposition qui apparaît, avec ses amendements, très sensible à cette question.

En tout cas, je remercie la rapporteure et le ministre pour le résultat auquel nous sommes parvenus, ainsi que Philippe Kemel, le rapporteur pour avis, qui s’est beaucoup engagé sur ce thème.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Je me félicite à nouveau de ces dispositions.

Monsieur le ministre, la commission des affaires économiques sera très prochainement saisie au fond d’un projet de loi sur la consommation porté par votre ministre délégué, Benoît Hamon. Il serait souhaitable que vous puissiez nous faire parvenir les textes d’application de la mesure dont nous discutons, même si je sais que l’élaboration des décrets d’application demande toujours beaucoup de temps, avant que nous engagions ce nouveau débat. Je vois que vous acquiescez, et je vous en remercie.

(L’amendement n° 182 est adopté.)

M. le président. En conséquence les amendements nos 72 et 219 tombent, ainsi que l’amendement n° 292 de M. le rapporteur pour avis.

La parole est à M. Jean-Charles Taugourdeau, pour soutenir l’amendement n° 176.

M. Jean-Charles Taugourdeau. Comme je l’ai expliqué lors la discussion générale, la séparation des activités bancaires ne réglera pas le problème du financement des entreprises. Plutôt que d’obliger les banques à une telle scission, mieux vaut les contraindre à constituer un fonds qui serait réservé au financement des entreprises.

Je m’explique. Une entreprise qui a travaillé pendant un certain nombre d’années avec un établissement bancaire a rapporté à ce dernier de l’argent. Il ne serait donc pas anormal que cette entreprise puisse emprunter un pourcentage de ce qu’elle a fait gagner à la banque, même si elle n’a pas de garanties extraordinaires. Cela obligerait les banques à constituer un fonds à part, ce qui leur permettrait de prêter aux entreprises avec beaucoup plus de facilités qu’actuellement car on sait bien qu’à chaque fois se pose un problème de garanties. C’est bien pour cela que l’État a créé Oséo et aujourd’hui la BPI, qui devra sûrement travailler en relation avec la Médiation du crédit. Il ne me paraît pas anormal qu’une entreprise qui a pu faire gagner 50 000 euros à une banque puisse lui emprunter 10 000 ou 15 000 euros : il est hallucinant de voir que la Médiation du crédit doit traiter des dossiers de 4 000, 6 000 ou 10 000 euros !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Karine Berger, rapporteure. Le financement des PME et des TPE en France est une question cruciale. De ce point de vue, monsieur Taugourdeau, nous partageons vos objectifs, ainsi que le Gouvernement.

Mais cet amendement ne correspond pas à la façon dont un crédit est accordé en France à une PME ou une TPE. Il s’agit de prendre en compte le risque, l’investissement, la rentabilité, la réalité économique de chaque choix d’investissement et non pas la cagnotte que la banque aurait pu constituer au fil de ses relations avec les entreprises.

Ce n’est pas servir les entreprises que de tenter d’obliger les banques à leur prêter a minima. Il vaut mieux travailler la problématique de l’évaluation du risque, des capacités de financement. De ce point de vue, je ne peux que regretter que vous n’ayez pas voté le projet de loi créant la Banque publique d’investissement qui a apporté une réponse ô combien plus large à la problématique du financement des PME.

Avis défavorable donc.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Je suis tout à fait d’accord avec Mme la rapporteure.

(L’amendement n° 176 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Christian Paul, pour soutenir l’amendement n° 228.

M. Christian Paul. Il a été défendu : c’est un amendement de coordination avec le n° 182.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Karine Berger, rapporteure. Favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Favorable.

(L’amendement n° 228 est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Armand Martin, pour soutenir l’amendement n° 98.

M. Philippe Armand Martin. Cet amendement vise à insérer, après l’alinéa 3 de l’article 17, l’alinéa suivant : « Les établissements de crédit veillent à mettre en place un système d’alerte sur le solde du compte permettant de signaler au client qu’il est à l’approche d’un éventuel dépassement de découvert ».

Il s’agit d’anticiper les dépassements de découvert et les frais bancaires qui sont liés. Le présent amendement permet à la fois de limiter les frais bancaires et d’éviter la spirale vicieuse du découvert non autorisé.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Karine Berger, rapporteure. Cette mesure relève à mon sens beaucoup plus du domaine réglementaire que de la loi. Le mécanisme existe d’ores et déjà chez bon nombre de banques. Et surtout le mécanisme de plafonnement des commissions d’intervention qui est porté par ce projet de loi et voulu par le Gouvernement répond largement à la question des risques d’emballement.

La commission est donc défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Pierre Moscovici, ministre. Défavorable.

(L’amendement n° 98 n’est pas adopté.)

(L’article 17, amendé, est adopté.)

3

Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :

Suite de la discussion du projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires.

La séance est levée.

(La séance est levée à treize heures dix.)