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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Session ordinaire de 2014-2015

Compte rendu
intégral

Troisième séance du vendredi 06 février 2015

SOMMAIRE

Présidence de M. Marc Le Fur

1. Croissance, activité et égalité des chances économiques

Discussion des articles (suite)

Suspension et reprise de la séance

Après l’article 27 (suite)

Amendement no 1266

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique de la commission spéciale

M. Emmanuel Macron, ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique

Amendement no 1267

M. Richard Ferrand, rapporteur général de la commission spéciale

Amendement no 1268

Article 27 bis

Amendements nos 2459 , 1821 , 1822 rectifié

Article 28

M. Daniel Fasquelle

Amendements nos 1269 , 2115 , 2361 , 2468

M. François Brottes, président de la commission spéciale

Amendements nos 1720 , 1270 , 2696, 2697 , 1734 , 1271 , 1823 , 2698 , 2699 , 1276 , 1275 , 3279 (sous-amendement) , 2668 , 1735 rectifié , 1315 , 1272 , 2700 , 1278 , 2701 , 1277 , 1302 , 1273 , 2469 rectifié , 2702 , 1279 , 2703 , 1304 rectifié , 1285 , 1284 , 1280 , 2704 , 2705 , 1286 , 1288 , 1287 , 1281 , 2674 , 2688 , 2706 , 1305 , 461 , 1274 , 1282 , 3280 rectifié (sous-amendement) , 1289 , 1283 , 2707 , 2708 , 1942 , 1722 , 1102 rectifié

Après l’article 28

Amendements nos 3146 , 2305 rectifié , 2787 rectifié , 2306 , 2799 rectifié , 756 , 2687 , 1448 rectifié , 1300

Article 29

M. Nicolas Sansu

M. Jean Lassalle

Amendements nos 1306 , 1382 , 1907 , 2473

Amendements nos 1824, 1825, 1827 , 1892

Après l’article 29

Amendements nos 495 , 3053 rectifié , 3030 , 118

Article 30

M. Jean Lassalle

Amendements nos 821 , 825 , 496 rectifié , 3040

Après l’article 30

Amendements nos 497 , 3044

Article 31

M. Jean Lassalle

Amendement no 1563

Article 32

M. Philippe Folliot

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique

M. Jean Lassalle

Amendements nos 581 , 2116

Article 33

Amendement no 582 rectifié

Article 33 bis

Amendements nos 1564 , 1755 , 1670

Article 33 ter

Amendement no 1664

Article 33 quater

Amendements nos 1672 , 365 , 3108 , 3123 , 3155 , 3124, 3125 , 2304 , 3126 rectifié, 3127, 3128 , 2904 , 2903 , 3156 , 3129

Suspension et reprise de la séance

Après l’article 33 quater

Amendements nos 1565 , 2906

Article 33 quinquies

Amendement no 1669

Article 33 sexies

Amendements nos 1566 , 1671 , 1567

Après l’article 33 sexies

Amendements nos 1569 , 1568 , 1724

Article 33 septies

Article 33 octies

Amendement no 2552

Article 33 nonies

Avant l’article 34

Amendement no 21

Article 34

Mme Karine Berger

M. Jean-Frédéric Poisson

M. Nicolas Sansu

M. Luc Belot

M. Pascal Cherki

M. Philippe Vigier

Mme Valérie Boyer

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique

M. Nicolas Sansu

Amendements nos 2788 , 241, 257 , 584 , 258, 259 rectifié, 260, 261 , 585 , 2811

Après l’article 34

Amendements nos 75 rectifié , 586 , 204 , 81 , 298 , 23 , 1466 rectifié , 1467 rectifié , 22 , 2119 , 24

Article 35

Amendements nos 262 , 1482 , 264 rectifié , 263

Après l’article 35

Amendements nos 52 , 1644 , 25 , 31 , 27 , 80 , 26 rectifié , 120 , 1464 , 2013 , 1687 , 1465 , 2779 , 28

2. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de M. Marc Le Fur

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

1

Croissance, activité et égalité des chances économiques

Suite de la discussion d’un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques (nos 2447, 2498).

Le temps de parole restant pour la discussion de ce texte est de huit heures et dix-huit minutes pour le groupe SRC dont 361 amendements sont en discussion ; trois heures et deux minutes pour le groupe UMP dont 439 amendements sont en discussion ; trois heures et sept minutes pour le groupe UDI dont 89 amendements sont en discussion ; deux heures et dix minutes pour le groupe RRDP dont 56 amendements sont en discussion ; une heure et quarante-sept minutes pour le groupe écologiste dont 121 amendements sont en discussion ; une heure et vingt-cinq minutes pour le groupe GDR dont 59 amendements sont en discussion et dix-huit minutes pour les députés non inscrits.

Discussion des articles (suite)

M. le président. Cet après-midi, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s’arrêtant à l’amendement n1266, portant article additionnel après l’article 27.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt et une heures trente-deux, est reprise à vingt et une heures trente-quatre.)

M. le président. La séance est reprise.

Après l’article 27 (suite)

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n1266, portant article additionnel après l’article 27.

M. Denis Baupin. Après avoir présenté tout à l’heure avant que nous ne suspendions nos travaux le premier des quatre amendements consacrés aux énergies renouvelables que j’ai déposés, j’en viens maintenant aux deux suivants, relatifs à l’énergie non plus éolienne, mais hydro-électrique, dont M. Brottes, président de la commission spéciale, rappelle régulièrement qu’elle est la première énergie renouvelable de notre pays. Il s’agit donc d’apporter des éléments de simplification pour soutenir le développement de la micro-hydraulique.

L’amendement n1266 tend à exonérer de la taxe foncière les équipements réalisés pour la protection de l’environnement dans le développement des centrales micro-hydrauliques. Il paraît en effet difficile de demander, lors de l’installation de ces centrales, l’implantation d’équipements de protection de l’environnement sur des terrains contigus tout en les soumettant à la taxe foncière.

M. le président. La parole est à M. Christophe Castaner, rapporteur thématique de la commission spéciale, pour donner l’avis de la commission.

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique de la commission spéciale. Bien que l’idée d’une telle exonération soit parfaitement fondée, l’incidence financière de cette perte de recettes pour les collectivités concernées ou pour l’État qui serait amené à la compenser n’est pas évalué. La commission n’est donc pas en mesure de donner un avis favorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique, pour donner l’avis du Gouvernement.

M. Emmanuel Macron, ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique. Même avis, car il existe déjà dans ce domaine des mécanismes de rachat. La taxe foncière, sur laquelle l’amendement propose d’agir, n’est pas le levier le plus adapté. Priver les collectivités concernées des recettes de ces taxes liées aux installations hydro-électriques ne serait pas totalement neutre et n’est donc pas le meilleur moyen d’aider ce que vous cherchez à encourager – je vous reconnais toutefois le mérite de constance et vous renverrais volontiers à l’article 28. Pour l’heure, compte tenu de leur coût potentiel et de leur incidence pour les collectivités locales, les dispositions fiscales que vous proposez, ne recevront pas l’avis favorable du Gouvernement.

(L’amendement n1266 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n1267.

M. Denis Baupin. L’amendement n1267, qui n’aura pas d’impact budgétaire, devrait recueillir un avis favorable. Il vise en effet à simplifier les procédures pour la micro-hydraulique en créant une autorisation unique. Certaines propositions en ce sens sont déjà sur la table pour l’éolien et les méthaniseurs : l’objet est ici, pour la micro-hydraulique, de réunir les procédures dans une seule autorisation. Il s’agit exclusivement d’une simplification des procédures, sans modification des règles : il n’est pas question de s’exonérer de la protection de l’environnement ni de dégrader le paysage. J’ai bien compris en effet que les membres de cette assemblée étaient soudainement très déterminés à préserver les paysages lorsqu’il s’agissait de l’éolien – alors que, pour le reste, on peut faire tout et n’importe quoi. J’espère donc, je le répète, que cet amendement recueillera un vote favorable.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Cet amendement part lui aussi d’une bonne volonté : développer l’hydro-électricité – mais celle-ci peut aussi provenir de barrages. Or, la simplification proposée aurait pour conséquence de priver certaines autorités, comme les maires – le député cumulard que je suis y est sensible –, de la possibilité de délivrer les autorisation). On sait en effet que l’autorité unique serait plutôt celle de l’État. Cela introduirait du coup une fragilité.

Mieux vaudrait donc travailler cette idée, comme la précédente, dont les conséquences financières, sans être spectaculaires, sont réelles. Nous ne sommes cependant pas encore prêts à introduire, dans un souci de simplification, le permis de construire dans l’autorisation unique expérimentée dans des domaines qui, comme l’hydro-électricité, peuvent être très larges – voire très « volumineux » si l’on pense à la taille de certains barrages.

M. André Chassaigne. Il est pas mal, ce rapporteur !

M. François Brottes, président de la commission spéciale. Un peu d’audace, monsieur le rapporteur !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Monsieur le député, je pense que cet amendement est déjà satisfait. En effet, l’alinéa 9 de l’article 26, que vous avez voté, fait explicitement entrer dans le champ de l’habilitation à procéder par ordonnance l’autorisation unique pour les installations, ouvrages, travaux et activités – IOTA– soumis à autorisation au titre de l’article L. 214-3 du code de l’environnement, que vous cherchez à couvrir par cet amendement. Je vous invite donc à retirer celui-ci.

Peut-être aviez-vous l’ambition d’aller plus loin, mais on tomberait alors sous les fourches caudines que vient de décrire le rapporteur. Ainsi, même si vous n’étiez que partiellement satisfait, je vous inviterais à retirer cet amendement. Au demeurant, et compte tenu de ce que j’ai entendu de l’exposé sommaire de votre amendement, vous devez être pleinement satisfait, je le répète, par l’alinéa 9 de l’article 26.

M. le président. La parole est à M. Daniel Fasquelle.

M. Daniel Fasquelle. Monsieur Baupin, je vous invite à franchir le périphérique. Vos propos sont insupportables ! Non, nous ne défendons pas les paysages uniquement lorsqu’il est question d’éoliennes : que ce soit dans les schémas de cohérence territoriale ou les plans locaux d’urbanisme, qui deviennent maintenant intercommunaux, ainsi que dans les chartes paysagères, je peux vous assurer que, partout en France, les maires des communes rurales et tous ceux des territoires touristiques sont attachés à la préservation des paysages. Je suis, pour ma part, maire d’une commune littorale où nous nous attachons à « renaturer » les paysages et le front de mer et sommes très attentifs à la question des paysages, et pas seulement pour l’éolien. Je suis donc très cohérent.

Parlant de cohérence, j’observe que vous êtes toujours prompt, lorsqu’il est question d’éoliennes, à accélérer les procédures pour en installer partout, tandis que, sur le terrain, vos amis multiplient les procédures pour empêcher tous les projets, y compris les zones d’activité économique – je suis bien placé pour le savoir. L’incohérence est donc plutôt de votre côté que du nôtre.

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin.

M. Denis Baupin. Je note donc, monsieur Fasquelle, que vous n’êtes plus favorable à l’installation de derricks et que vous avez, si je comprends bien, abandonné votre projet en faveur du gaz de schiste. Lorsque vous le défendiez en commission des affaires économiques, il ne semblait pas aussi évident que vous étiez attachés au paysage, mais il semble que vous soyez subitement devenu amnésique sur ce sujet.

Je tiens à préciser que simplifier les procédures n’est pas les supprimer. Ainsi, n’en déplaise à M. Chassaigne, qui déclarait tout à l’heure que, dès lors que nous aurions modifié la procédure relative aux installations classées pour la protection de l’environnement – ou ICPE –, tout serait permis et l’on pourrait installer des éoliennes partout, ce ne sera pas le cas, car de nombreuses lois continuent de s’appliquer.

Pour ce qui est de l’amendement, ce que j’ai entendu n’est pas clair. De fait, le rapporteur explique que ce serait modifier les compétences des uns et des autres que d’instaurer une autorisation unique : voilà que, subitement, cette procédure que nous avons défendue pour l’éolien et les méthaniseurs ne devrait plus s’appliquer à l’hydraulique ? Le ministre, quant à lui, déclare que cet amendement est satisfait, ce qui est du reste assez contradictoire avec le fait qu’il ne faudrait pas le voter. Pourquoi donc, monsieur le rapporteur, ne vous êtes-vous pas insurgé lors du vote de l’article 26 si, comme le déclare le ministre, cet article comporte déjà une disposition que vous dites désapprouver ?

Alors que l’article 26 vise une ordonnance, je propose, pour ma part, d’inscrire le dispositif dans la loi : l’amendement n’est donc pas satisfait, car l’ordonnance ne sera prise que dans un certain temps. Nous sommes parlementaires, et qui peut le plus peut le moins : faisons donc en sorte de voter une mesure qui permette d’avancer sans délai. Je maintiens donc cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Richard Ferrand, rapporteur général de la commission spéciale.

M. Richard Ferrand, rapporteur général de la commission spéciale. Monsieur Baupin, je m’interroge. J’ai en effet la chance – M. Le Fur me comprendra – d’être riverain du canal de Nantes à Brest, site superbe dont l’hydro-électricité a permis à la commune de Châteaulin d’être la première de France à bénéficier de l’électricité publique. Depuis des années, nous nous employons à réhabiliter des installations hydro-électriques qui seraient de nature à fournir abondance d’électricité, en substitution aux modes de production actuels dans une région de France dont l’approvisionnement en électricité est parfois insuffisant.

Or, chaque fois que nous essayons de le faire, que ce soit à l’échelle locale ou régionale, on nous oppose systématiquement l’argument que la production d’énergie hydro-électrique contribue au réchauffement de l’eau. (Interruptions sur les bancs du groupe écologiste.) Je tiens à votre disposition des dossiers complets.

M. Jean-Yves Caullet. Et +qu’elle provoque des ruptures de continuité pour le passage des saumons !

M. Richard Ferrand, rapporteur général. Ce réchauffement de l’eau fait que les saumons sont moins vigoureux qu’ils ne l’ont été et qu’ils n’arrivent pas à franchir les obstacles que constituent les écluses.

M. Jean-Yves Caullet. Les truites d’aujourd’hui n’ont plus le coup de rein de leurs grands-mères ! (Sourires)

M. Richard Ferrand, rapporteur général. On en déduit qu’il faudrait nous garder de toute capacité nouvelle d’hydro-électricité et que, de surcroît, il faudrait d’ailleurs abattre les écluses, qui présentent le défaut de faire obstacle aux saumons et d’incarner ce vieil ouvrage napoléonien et jacobin que représente le canal de Nantes à Brest.

Dans ce contexte, mon cher collègue, je voudrais vous dire combien je suis attaché à ce que l’on puisse développer l’hydro-électricité, y compris sur le canal dont je viens de vous parler. Je vous invite même à venir avec moi convaincre toutes celles et tous ceux qui se disent plus proches de vous que de moi et qui estiment que relancer l’hydro-électricité sur cette voie d’eau, d’importance, serait un attentat contre la biodiversité, contre la capacité des saumons à remonter le cours d’eau et donc à se reproduire là où il convient – j’en passe et des meilleures !

M. Daniel Fasquelle. J’ai les mêmes chez moi !

M. Richard Ferrand, rapporteur général. Notre collègue rapporteur thématique a bien expliqué qu’il n’y avait pas d’obstacle à ce développement de l’hydro-électricité. En Bretagne, je puis vous dire que le conseil régional milite ardemment pour l’éolien, l’hydrolien, notamment les hydroliennes marines au large d’Ouessant ou ailleurs et également pour l’hydro-électricité : c’est tout l’esprit du pacte électrique breton.

M. Daniel Fasquelle. Le conseil régional aura bientôt un nouveau président !

M. Richard Ferrand, rapporteur général. Ceux qui y font obstacle sont souvent celles et ceux qui nous indiquent que choisir ces énergies serait attentatoire à la préservation de l’environnement. Je vous le dis parce que j’en suis marri !

M. Denis Baupin. Donc vous êtes favorable à mon amendement ?

M. Richard Ferrand, rapporteur général. In petto, absolument : j’y suis extrêmement favorable !

M. Denis Baupin. Ah !

M. Richard Ferrand, rapporteur général. In petto seulement… Pour ce qui est de la décision de la commission, je m’en remets à mon collègue !

Tout cela pour vous convier à venir avec moi en Bretagne et, de Bretagne, à ramener les moyens de développer l’hydroélectricité.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Tous à Pontivy !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Emmanuel Macron, ministre. Je veux juste rappeler qu’il n’est pas incohérent de préciser qu’on a inclus l’esprit d’une disposition dans une habilitation à procéder par ordonnance, qui se justifie par la complexité technique, mais qu’on reste contre l’inscription « en dur » dans la loi, précisément parce que lesdites complexités techniques ne sont pas prises en compte dans l’amendement que vous proposez.

Ce n’est donc pas du tout incohérent, c’est simplement que si la rédaction était suffisamment précise et couvrait tous les cas nécessaires, comme les exemples qui viennent d’être cités le montrent, nous pourrions être favorables. Mais c’est précisément parce que c’est plus compliqué qu’il n’y paraît que nous n’avons pas pu nous-mêmes l’inscrire dans la loi ; je vous renvoie donc à l’alinéa 9 de l’article 26.

Il y a beaucoup de cohérence à organiser les choses de cette façon : soit on refait une loi ad hoc dans six mois ou un an,…

M. Daniel Fasquelle. Haddock ou saumon ? (Sourires.)

M. Emmanuel Macron, ministre. …soit on procède de la façon évoquée. Mais on ne peut pas procéder avec l’article 26 parce que c’est beaucoup trop monolithique ou brutal ; en tout cas, cela ne permet pas de couvrir la pluralité des situations que l’on veut ici traiter. Je maintiens donc mon avis défavorable, mais je voulais ici rappeler qu’il n’y avait rien d’incohérent à inclure une disposition dans une habilitation à procéder par ordonnance mais à ne pas vouloir le faire « en dur » dans un texte de loi.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Comme je suis le seul ici, avec le ministre Macron, à avoir une cohérence idéologique – bien que ce ne soit pas tout à fait la même… (Sourires.) – je voudrais regretter que mes collègues écologistes n’aient pas voté l’amendement de suppression de l’article 26 que j’avais présenté, ce qui aurait précisément permis de ne pas renvoyer à des ordonnances.

Habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnance, c’est en effet, pour reprendre une expression qu’on n’utilise sans doute qu’en Auvergne, « acheter un âne dans un sac », c’est-à-dire sans savoir ce qu’il y a derrière. (Sourires.)

D’ailleurs, dans sa cohérence idéologique, le ministre vous a renvoyé à cela en disant que vous trouveriez la réponse dans le cadre de l’habilitation. J’avais essayé de chercher ce qu’il pouvait y avoir derrière ces ordonnances : j’avais trouvé une liste, plus ou moins communiquée par le Conseil supérieur de la prévention des risques technologiques, mentionnant la distribution de carburants, l’élevage de chiens, la laiterie, l’extraction et le traitement des huiles, le broyage de produits végétaux, l’imprimerie, les centrales d’enrobage au bitume de matériaux routiers – j’en passe, parce que cela me prendrait trop de temps !

Mais dans toute cette liste, qui n’est sans doute pas exhaustive, je n’ai rien trouvé concernant les centrales hydrauliques ! Pour ma part, je préfère encore que cela soit inscrit dans la loi : aussi, cela va peut-être vous surprendre, mais je voterai cet amendement !

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin.

M. Denis Baupin. Je serai sans doute moins imagé que le camarade Chassaigne pour défendre la loi plutôt que l’ordonnance, mais nous aurons l’occasion d’y revenir à l’article 28, dont nous proposons la suppression parce que nous ne sommes pas d’accord pour qu’il soit procédé par ordonnances. Nous pensons qu’il vaut mieux passer par la loi que par l’ordonnance.

C’est la raison pour laquelle, monsieur le ministre, vous ne pouvez pas nous opposer systématiquement que les choses seraient trop compliquées pour les inscrire dans la loi. Autant supprimer le Parlement s’il ne fait plus que voter des habilitations à légiférer par ordonnances et ratifier des ordonnances – au seul motif que les points traités sont trop compliqués ! L’argument me paraît pour le moins limité !

Par ailleurs, je voudrais dire au rapporteur général que je suis un peu surpris par son argumentaire : nous ne proposons pas, par la simplification des procédures, de ne plus protéger l’environnement !

M. Richard Ferrand, rapporteur général. Moi non plus !

Mme Barbara Pompili. On ne peut pas nous soupçonner, nous, de cela !

M. Denis Baupin. Vous nous dites que des gens se battent contre je ne sais quelle installation que je ne connais pas dans le détail, parce que cela aurait des conséquences négatives sur l’environnement : ils ont sans doute de bonnes raisons ! Je ne vous propose pas que l’on passe outre leurs objections ! Il faut essayer de concilier les avancées que l’on peut obtenir par la micro-hydraulique et la protection de l’environnement, et cela peut se faire en simplifiant les procédures. J’avais compris que c’était l’état d’esprit de ce texte ; peut-être me suis-je trompé ? Peut-être nous proposez-vous de choisir entre la micro-hydraulique et la protection de l’environnement ? Si c’est cela, en effet, nous ne sommes pas d’accord !

Nous, nous voulons les deux : nous le voulons pour l’éolien, nous le voulons pour l’ensemble des projets, nous voulons réussir à concilier le développement économique et la protection de l’environnement, et non pas choisir entre les deux. C’est la raison pour laquelle nous essayons de trouver des procédures qui garantissent la protection de l’environnement et qui, en même temps, simplifient pour que cela soit le plus facile possible et que ce ne soient pas pour des raisons bureaucratiques et administratives que l’on n’arrive pas à concrétiser les projets. Voilà la raison pour laquelle nous maintenons cet amendement.

M. André Chassaigne. Je le voterai.

(L’amendement n1267 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n1268.

M. Denis Baupin. Je poursuis avec la simplification des procédures juridiques en ce qui concerne les éoliennes. Je remercie le ministre d’avoir permis, en commission spéciale, de simplifier les délais de procédure. En l’occurrence, il s’agit de diminuer le nombre de juridictions devant lesquelles sont exercés les recours, de façon à accélérer le processus. L’amendement tend à habiliter en quelque sorte le Gouvernement à prendre un décret pour qu’il n’y ait plus qu’une seule instance.

Afin de répondre aux inquiétudes du ministère de la justice – que je peux comprendre, d’ailleurs – si l’on déroge trop aux procédures habituelles, on pourrait envisager que ce décret prévoie que cette simplification des procédures ne vaille que pour un temps limité, pour quelques années – le temps qu’on rattrape le retard pris sur les objectifs votés lors du Grenelle de l’environnement, par exemple.

Le président Brottes a rappelé de façon excellente cet après-midi que le principal obstacle auquel nous nous heurtons aujourd’hui pour développer les énergies renouvelables, ce sont les procédures ! La question essentielle est vraiment celle des procédures, et notamment des recours qui se multiplient ; certains sont de bonne foi, d’autres – on a pu entendre leurs argumentaires ici – beaucoup moins !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur. Une nouvelle fois, je partage l’objectif de désengorgement, notamment quand on sait que 80 % des recours déposés contre ces projets sont rejetés.

M. Denis Baupin. Mais ?

M. Christophe Castaner, rapporteur. Il n’empêche que cela pose à la fois un problème juridique et un problème d’institutions juridiques.

Le problème juridique, c’est que je ne suis pas sûr qu’un décret en Conseil d’État puisse modifier ce qu’une loi a mis en place, en l’espèce la loi de 1987 ayant institué les cours administratives d’appel.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Bien sûr ! Cela relève de la compétence législative !

M. Christophe Castaner, rapporteur. Cela poserait bien un problème juridique, comme le dit notre collègue Le Bouillonnec.

Par ailleurs, cela créerait une difficulté dans la mesure où notre droit administratif repose sur ce double niveau de juridictions, sachant que le Conseil d’État, chambre suprême de décision, ne doit pas être considéré comme une instance d’appel. Ainsi, dans un domaine majeur, nous priverions le requérant, quel qu’il soit, d’une instance d’appel en portant directement les recours au niveau de la cour administrative d’appel.

Alors que les tribunaux administratifs ont été créés en 1953, puis les cours administratives d’appel en 1987, nous en viendrions, sur un sujet important, pour lequel en effet de nombreuses procédures, souvent abusives, sont engagées, à déroger au principe du droit d’appel garanti à nos concitoyens.

Je pense que la réponse, sur ce sujet, se trouve dans la loi relative à la transition énergétique, mais aussi dans les mesures que le Gouvernement envisage de prendre pour simplifier les procédures et, une fois qu’elles seront simplifiées, pour les sécuriser. Cela permettra d’éviter que des recours abusifs puissent, pour des motifs de pure forme, comme cela arrive souvent, aboutir à casser des opérations auxquelles les territoires tiennent mais aussi tous ceux qui portent une ambition environnementale et énergétique pour la France.

La commission a donc repoussé cet amendement, faisant preuve non pas d’une cohérence idéologique, mais d’une cohérence à repousser les amendements de M. Baupin ! (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Avis défavorable pour les mêmes raisons, qui sont d’ordre juridique, tenant tant à la hiérarchie des normes que, plus largement, à la philosophie de ce qui est proposé. J’insiste sur le fait que l’aménagement qui a été obtenu grâce à vous en commission spéciale, concernant la limitation du délai de recours, constitue déjà une avancée substantielle ; mais aller dans le sens que vous proposez dans le présent amendement ne semble pas réalisable. J’émets donc un avis défavorable, tout en rappelant l’avancée faite à l’article 27 bis, dont nous parlerons un peu plus tard.

M. André Chassaigne. Oui, nous en reparlerons, en effet !

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin.

M. Denis Baupin. N’étant pas un grand expert juridique, je vous renverrai simplement à la décision du Conseil d’État concernant l’éolien off shore : il a accepté d’être l’instance de premier et dernier recours. Alors que la ministre de l’écologie voulait inscrire cette disposition dans la loi, le Conseil d’État lui a répondu que ce n’était pas nécessaire et qu’un décret suffisait pour mettre cela en place.

Cela prouve bien que c’est possible. Ce qui est possible pour l’éolien off shore ne devrait donc pas se heurter à des obstacles juridiques insurmontables pour l’éolien terrestre ! On peut toujours débattre de ce sujet, faire valoir que c’est moins prioritaire ou moins compliqué mais, d’un point de vue juridique, je ne vois pas la différence !

(L’amendement n1268 n’est pas adopté.)

Article 27 bis

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n2459.

M. André Chassaigne. Je voudrais tenter de rectifier une erreur faite en commission spéciale ; cela ne devrait pas poser de problème.

Le présent amendement vise à supprimer l’article 27 bis introduit en commission sur proposition de nos collègues du groupe écologiste – ils se sont sans doute trompés ! En effet, au prétexte d’harmoniser les différents délais de recours concernant les installations d’énergies renouvelables, le texte vise à réduire à deux mois les délais de recours contre les permis de construire concernant en particulier les éoliennes et à supprimer l’affichage du permis de construire sur le terrain comme point de départ de ce délai.

Nous avons là un exemple de mesure qui, au nom de la simplification, vise rien moins qu’à faire reculer les droits de nos concitoyens ! Comme je sais nos collègues écologistes très attachés – extrêmement attachés, toujours attachés ! – aux droits et aux voies de contestation des projets affectant l’environnement, très attachés également à ce que l’on ne s’attaque pas à la démocratie, je demande que l’on prenne aujourd’hui en compte les conséquences de ce malencontreux amendement adopté en commission spéciale.

Nul ne peut en effet nier les nuisances potentielles du développement anarchique du parc éolien : nuisances pour les riverains, atteintes graves à l’intégrité des paysages, impact environnemental – certains parcs éoliens particulièrement denses et mal placés engendrent, comme l’ont souligné nos amis communs de la Ligue pour la protection des oiseaux, une mortalité importante de certaines populations d’oiseaux menacés et sensibles.

Il nous paraît dans ce contexte tout à fait essentiel de préserver les voies de recours des citoyens, voire des associations de protection de l’environnement. C’est tout le sens de notre amendement.

J’aime à citer cette phrase de Blaise Pascal : « Vérité en deçà des Pyrénées, erreur au-delà ». Cela pour dire qu’il faut se garder de géométrie variable quand il s’agit de donner aux citoyens la possibilité de s’exprimer sur les questions environnementales.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. C’est non sans émotion que je vais donner un avis défavorable à l’amendement de M. Chassaigne et défendre l’amendement adopté – à l’unanimité ! – en commission spéciale après la plaidoirie de M. Baupin, qui nous avait tous convaincus.

Il ne s’agit pas d’amputer des droits mais de mettre de la cohérence dans des délais qui étaient pluriels et, du coup, relativement complexes ; les délais pour les recours des tiers, notamment, étaient différents. Nous avons donc retenu le délai de deux mois, qui est le délai classique, traditionnel, de recours contre un permis de construire.

La situation antérieure était source d’insécurité juridique,  créait de l’incertitude et donc une difficulté supplémentaire au développement de ces projets qui sont nécessaires pour atteindre nos objectifs en faveur de la transition énergétique. Il s’agissait là d’une proposition de bon sens, qui s’inscrit pleinement dans la démarche de simplification et de modernisation portée par le Gouvernement, et que nous retrouverons tout à l’heure à l’article 28.

La commission est donc défavorable à l’amendement de M. Chassaigne.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Même avis.

(L’amendement n2459 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Christophe Castaner, rapporteur thématique, pour soutenir l’amendement n1821.

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. C’est un amendement de précision.

(L’amendement n1821, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Christophe Castaner, rapporteur thématique, pour soutenir l’amendement n1822 rectifié.

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. C’est un amendement de précision.

(L’amendement n1822 rectifié, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 27 bis, amendé, est adopté.)

Article 28

M. le président. M. Daniel Fasquelle est inscrit sur l’article. Vous avez la parole, monsieur Fasquelle.

M. Daniel Fasquelle. Nous ne soutenons certes pas toutes les dispositions de votre projet de loi – je maintiens ainsi que c’est le cheval de Troie des cabinets anglo-saxons en France et que vous allez profondément déstabiliser le réseau, aujourd’hui bien installé, des professionnels du droit, notamment des avocats et des notaires.

Il n’empêche qu’il est d’autres points de votre projet de loi que je peux soutenir car, contrairement à ce que vous avez laissé entendre mercredi soir, avec des mots que je préfère oublier, nous ne sommes ni dans des postures ni dans une opposition systématique, mon collègue Sébastien Huyghe et moi-même moins que tout autre.

Il en est ainsi de cet article 28, car nous souffrons beaucoup – je parle là en tant qu’élu local – de la multiplication des recours contre nos projets. Certains peuvent être parfaitement légitimes, et il est tout à fait normal que nos concitoyens puissent manifester leur désaccord, devant les tribunaux s’il le faut. Mais aujourd’hui nous sommes malheureusement victimes d’un certain nombre de recours abusifs.

Ceux-ci peuvent être le fait de particuliers, certains se livrant à un véritable chantage au recours, qu’ils retirent contre des compensations financières, bref contre un chèque ! Je veux dénoncer avec la plus grande force cette pratique malheureusement devenue courante dans notre pays. Il faut lutter de façon plus efficace contre ce phénomène.

Ces recours abusifs peuvent être également le fait d’associations constituées pour l’occasion et qui comptent très peu de membres. Lorsqu’elle était ministre du gouvernement Ayrault, Mme Duflot avait proposé des dispositions visant à lutter contre les recours abusifs des particuliers, et je les avais soutenues parce qu’elles allaient dans le bon sens. Les associations n’étaient cependant pas concernées par ces dispositions – et je comprends pourquoi.

Vous qui avez affiché votre volonté de lutter contre les recours abusifs, monsieur le ministre, comptez-vous mettre fin aux recours abusifs d’un certain nombre d’associations, parfois créées pour l’occasion, qui se prétendent citoyennes alors qu’elles regroupent très peu de nos concitoyens ? S’il est possible de discuter en amont de nos projets avec certaines associations de protection de l’environnement afin de les faire évoluer, d’autres refusent de discuter, préférant attendre le dernier moment pour exercer des recours, bloquant ainsi tous nos projets, alors que ceux-ci doivent permettre d’offrir du logement et de l’emploi à nos concitoyens.

Va-t-on enfin lutter efficacement contre les recours abusifs de ces associations ? Si tel est vraiment l’objectif de cet article, vous pouvez compter sur mon soutien total sur ce point de votre loi.

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements de suppression, nos 1269, 2115, 2361 et 2468.

La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n1269.

M. Denis Baupin. Votre volonté de modifier le droit de l’environnement à coups d’ordonnances nous inquiète beaucoup. Non pas que nous soyons opposés à la simplification, au contraire : nous pensons que les procédures actuelles, notamment en matière d’enquêtes publiques, ne sont pas adaptées au XXIe siècle. Tant qu’elles ne seront pas ouvertes aux nouvelles technologies de communication, qui sont désormais d’usage courant pour nos concitoyens, ceux qui pourront y participer resteront relativement peu nombreux et leur légitimité sera faible.

On constate par ailleurs que de mauvais projets, comme le barrage de Sivens ou celui de Center Parcs à Roybon ont pu franchir avec succès toutes les étapes procédurales en dépit de multiples avis défavorables, au mépris des exigences démocratiques.

Nous sommes donc d’accord pour dire qu’il y a des choses à changer.

En revanche, recourir aux ordonnances pour ce faire ne laisse pas de nous inquiéter. Pour reprendre l’expression de Jean-Jacques Urvoas, président de notre commission des lois, c’est de la législation de chef de bureau, puisque le Parlement est dessaisi de ses compétences au profit d’une administration. Il y a certes in fine une validation parlementaire, mais on sait bien qu’elle n’a rien à voir avec le véritable travail parlementaire, travail de précision qui demande des mois.

En outre, cette proposition est à notre avis inconstitutionnelle. Trois des dix articles de la Charte de l’environnement, qui fait partie de notre bloc de constitutionnalité, prévoient que les modifications du droit de l’environnement doivent se faire par la loi, et non par l’ordonnance ni par le décret.

M. Daniel Fasquelle. Vous n’avez qu’à saisir le Conseil constitutionnel !

M. Denis Baupin. Si d’aventure le Conseil constitutionnel juge que cette procédure n’est pas conforme à la Constitution, ces ordonnances en sortiront fragilisées ainsi que toutes les décisions qui seront prises sur cette base, à l’inverse de votre volonté de donner plus de robustesse aux projets.

J’ai noté qu’en commission spéciale, le ministre n’a pas répondu à mes nombreuses questions sur ce sujet de la conformité de l’article 28 à la Constitution et à la Charte de l’environnement, ce qui me laisse à penser qu’il y a bien un problème. Ce serait quand même dommage de s’écharper sur ce sujet pour se retrouver finalement dans une situation de blocage.

Par ailleurs, le Président de la République s’est engagé à ouvrir un grand chantier sur la démocratisation des procédures environnementales. Le but est quand même qu’il y ait un grand débat qui permette aux gens de s’exprimer, et que cela ne se limite pas à quelques bureaux ou, au mieux, à quelques commissions – si tant est que des commissions soient mises en place, mais il semble que des engagements aient été pris à cet égard.

Je rappelle aussi que la ministre de l’écologie a mis en place des groupes de travail qui, sous l’égide du sénateur Richard, ont commencé à travailler sur le sujet de la simplification du droit de l’environnement. Ces travaux, qui nous ont été présentés lors de l’avant-dernière réunion du Conseil national de la transition écologique, sont bien avancés, et devraient, selon la ministre, trouver leur aboutissement, soit dans le cadre du projet de loi relatif à la biodiversité, soit dans un projet de loi ad hoc : elle n’a jamais parlé d’ordonnance.

Nous avons quand même le sentiment qu’il y a là pour le moins des contradictions.

Enfin, lorsqu’en commission spéciale nous avons proposé un encadrement minimal de ces ordonnances, susceptible de rassurer les défenseurs de l’environnement, en demandant par exemple que ces ordonnances ne puissent pas faire régresser le droit de l’environnement, nous n’avons pas obtenu gain de cause.

C’est pourquoi nous avons déposé des amendements à cet article, notamment cet amendement de suppression d’un article que nous jugeons très inquiétant. Non pas que nous mettions en doute ses motivations, même si le fait qu’on prétende réformer le droit de l’environnement par une loi visant à favoriser la croissance n’est certes pas de nature à nous rassurer : l’histoire a montré que c’est souvent en piétinant l’environnement qu’on cherchait à faire avancer plus vite les projets.

Nous préférerions que cette assemblée adopte des dispositions qui permettent d’encadrer au maximum cette réforme. Le plus simple serait cependant de supprimer cet article et de réformer les procédures en matière de protection de l’environnement par un projet de loi qui nous permettrait de travailler collectivement.

Mme Barbara Pompili. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Pascal Cherki, pour soutenir l’amendement n2115.

M. Pascal Cherki. Sans prétendre épuiser la matière, je voudrais faire remarquer que le recours aux ordonnances de l’article 38, combiné à la procédure accélérée et au temps législatif programmé, cela commence à faire beaucoup !

Ce texte, qui est un texte intéressant, compte, après son examen en commission, 209 articles. En vertu du temps programmé, le groupe GDR, par exemple, dispose de trois heures et cinq minutes, soit moins d’une minute par article. Quand, alors qu’il n’y a qu’une seule lecture, un groupe – j’ai pris l’exemple du groupe GDR mais d’autres sont dans le même cas – dispose de moins d’une minute par article, défense d’amendements comprise, cela pose la question de la qualité du travail parlementaire et du respect des parlementaires que nous sommes.

Et voilà qu’en outre, une partie substantielle des dispositions envisagées seront prises par voie d’ordonnances.

C’est ce que je veux vous dire, mes chers collègues, depuis le début de nos débats, avec une ardeur peut-être excessive parfois, et je m’en excuse : c’est peut-être parce qu’il s’agit de mon premier mandat mais je suis choqué par ces mauvaises manières procédurales envers les représentants de la nation et par la façon dont on nous traite lors de l’examen de ce projet de loi.

M. le président. La parole est à Mme Fanélie Carrey-Conte, pour soutenir l’amendement n2361.

Mme Fanélie Carrey-Conte. Si avec d’autres collègues, notamment Philippe Noguès, nous présentons cet amendement de suppression, c’est pour les raisons qui viennent d’être développées.

Je voudrais souligner à mon tour que le champ d’habilitation tel qu’il est décrit par cet article apparaît excessivement large. En outre, les garanties apportées en commission, notamment l’association du CNTE à l’élaboration des ordonnances, ne me paraissent pas de nature à compenser les problèmes démocratiques posés par ce recours aux ordonnances.

Je voudrais surtout dire qu’à mon sens les questions de droit de l’environnement ne sont pas des questions techniques, mais traduisent des choix de société. Notre responsabilité est de garantir le respect des exigences démocratiques et de ce point de vue le recours aux ordonnances ne me semble pas du tout approprié.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n2468.

M. André Chassaigne. Top chrono !

Comme d’autres de nos collègues, nous proposons par cet amendement de supprimer cet article, qui soulève deux difficultés majeures.

La première tient au champ beaucoup trop large de l’habilitation qui nous est demandée, qui nous prive du débat parlementaire sur des matières appelant à l’évidence un véhicule législatif spécifique. De nombreux juristes, mais aussi des élus, qui s’intéressent de longue date à la modernisation du droit de l’environnement, ont émis des réserves sur le recours aux ordonnances. La sagesse voudrait qu’on laisse du temps pour le débat parlementaire s’agissant de questions aussi décisives que les modalités de consultation du public, le règlement des litiges, les compétences respectives des maires et des préfets.

Le champ de l’habilitation englobe des mesures qui tendent à une simplification au stade du projet et de sa contestation en justice, là où peuvent prospérer les carences démocratiques.

Alors que les premiers résultats des travaux annoncés par le chef de l’État dans le but de « conjuguer un approfondissement de l’étude des impacts environnementaux, tout en simplifiant les procédures administratives » ne seront connus que dans six mois, les dispositions de l’article 28 nous semblent prématurées.

La ministre de l’écologie avait évoqué l’hypothèse de donner une traduction législative à ces travaux dans le cadre du projet de loi relatif à la biodiversité ou par la voie d’un véhicule ad hoc. Cela nous semble essentiel.

La seconde difficulté tient au risque que la simplification se traduise par un recul du droit de l’environnement. Comme l’ont souligné là aussi certains juristes ainsi que les intervenants précédents, la modernisation du droit de l’environnement n’a de sens que si elle préserve les objectifs de ce droit, à savoir une protection efficace de notre environnement.

Nous sommes, pour notre part, hostiles à une simplification qui serait synonyme de recul des obligations de chacun et de la protection de l’environnement. Or votre texte n’offre pas suffisamment de garanties sur ce point. Le recours à la procédure des ordonnances, ajouté à d’autres dispositions du projet de loi, comme la modification des règles applicables en matière d’urbanisme commercial, nous font craindre que la précipitation associée à la pression du présent et de certains intérêts économiques ne fassent reculer notre droit de l’environnement.

Cela nous conforte dans le sentiment qu’il faut en la matière que le Parlement débatte d’un texte spécifique.

Deux minutes pile ! Merci. (Rires.)

M. le président. Sur les amendements identiques nos 1269, 2115, 2361 et 2468, je suis saisi par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

Quel est l’avis de la commission sur ces amendements de suppression ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Sans prétendre être aussi bon pédagogue que l’a été mon collègue Savary au début de l’examen de ce texte, je vais tenter d’exposer un peu plus longuement l’enjeu de l’article 28.

Il s’agit effectivement d’un article important et qui fait débat, non seulement au sein de cet hémicycle, mais également à l’extérieur, si j’en crois un certain nombre de tribunes, de contributions ou d’articles que la presse lui a consacrés.

C’est pourquoi je souhaite, avant d’en venir au fond du débat, rappeler quelques points fondamentaux.

Le premier est un constat que nous partageons tous : à l’heure actuelle, il existe des projets d’aménagement, de constructions, d’infrastructures, notamment de production d’énergies renouvelables, qui respectent parfaitement les dispositions de la loi ALUR ou du projet de loi de transition énergétique, et qui sont porteurs d’activités et d’emplois pour nos territoires.

M. Christophe Castaner, rapporteur. Mais ces projets, au stade de leur mise en œuvre, se heurtent à un droit de l’environnement excessivement complexe et dont les pathologies sont bien connues – à savoir, des normes imbriquées les unes dans les autres, des autorisations qui s’empilent et qui quelquefois se superposent, des dossiers à constituer qui sont chaque fois différents pour les porteurs de projet, des règles de procédure et des délais variables qui sont autant de niches à contentieux – qui font certes la joie des avocats, dont nous avons longuement parlé ces jours derniers –, des dispositions parfois obscures qu’il revient aux juridictions de démêler.

Bref, au nom d’objectifs légitimes et consensuels de protection de l’environnement, les vagues de législation successives ont fini par donner à notre droit de l’environnement les traits d’un jardin à l’anglaise – dont j’admets certes qu’il puisse faire les délices des juristes spécialisés mais qui ne satisfait pas complètement notre esprit historiquement cartésien.

Il faut donc simplifier ce droit et je crois que sur ce sujet également – M. Baupin l’a dit tout à l’heure – un consensus existe, y compris au sein des organisations non gouvernementales les plus engagées sur ce sujet.

Un travail important a été fait parce que nous savons que la simplification et la modernisation de notre droit est fondamentale.

L’objectif, il faut le dire, n’est pas de transformer inversement notre code de l’environnement en jardin à la française au prix d’un débroussaillage à la tronçonneuse.

Le problème est de lui donner plus de simplicité, plus de clarté et donc plus d’efficacité car je suis convaincu qu’elles vont de pair et qu’un droit efficace, parce qu’appliqué et sanctionné, est un droit simple et compréhensible par tous.

M. Daniel Fasquelle. Ne mettez pas trop d’eau dans votre jardin !

M. Christophe Castaner, rapporteur. Le Gouvernement nous demande donc aujourd’hui de lui donner les moyens d’engager rapidement ce travail de modernisation et de simplification.

Je rappelle que la législation par voie d’ordonnance a été prévue par le constituant en 1958 et n’a jamais été remise en cause – c’est ainsi que l’on a procédé récemment, par exemple, en faveur du développement de la construction et du logement. Elle est donc légitime.

Néanmoins, comme l’ont dit M. Cherki mais aussi d’autres collègues, elle aboutit à dessaisir le Parlement de son pouvoir pour une durée et des domaines limités.

Cela m’enthousiasme-t-il ? Non. Mais j’y vois tout de même un moyen de gagner du temps et de l’efficacité si nous voulons que cette modernisation du droit intervienne rapidement et si nous voulons adresser un signal fort aux porteurs de projet.

Nous pouvons toujours rêver d’attendre un nouveau texte ou une niche parlementaire pour agir en ce sens mais nous savons tous que c’est peu probable.

Il n’empêche que nous devons disposer de garde-fous – et, en tant que rapporteur, j’ai beaucoup travaillé sur cette question.

Il convient d’abord de réaffirmer notre volonté d’un niveau élevé d’exigence environnementale et notre refus, monsieur le ministre, de porter atteinte aux principes fondamentaux et aux objectifs généraux du code de l’environnement. Cette exigence est absolument fondamentale.

Il convient ensuite que nous puissions avoir la garantie que les futures ordonnances ne seront pas décidées dans le huis clos des bureaux et des réunions interministérielles.

C’est pourquoi la commission spéciale, sur proposition du rapporteur général et des rapporteurs thématiques, a souhaité que le CNTE soit étroitement associé à l’élaboration des ordonnances de manière à assurer une parfaite transparence des travaux préparatoires et du contenu des dispositions envisagées.

Par ailleurs, dans la lettre que les ministres chargés de l’écologie, de l’économie et du logement m’ont adressée conjointement le 13 janvier dernier, il est indiqué que le travail de concertation préalable, je cite, « pourra être complété par des échanges avec la représentation nationale ».

J’aimerais que sur ce point, monsieur le ministre, vous puissiez préciser votre pensée et votre ambition mais aussi, le cas échéant, prendre un certain nombre d’engagements sur les modalités d’association des organes compétents du Parlement à l’élaboration des ordonnances.

J’observe enfin que la ministre chargée de l’écologie, lors de la dixième réunion du CNTE, a mis sur les rails le chantier de la démocratie participative en matière d’environnement – je me souviens que le Président de la République lui-même en a souligné l’importance à l’occasion de son discours d’ouverture de la conférence environnementale le 27 novembre 2014. Il l’a encore répété hier lors de sa conférence de presse.

Des groupes de travail ont été mis en place qui œuvrent sur un ensemble de sujets que nous connaissons et sur lesquels je ne reviens pas.

Je souhaiterais que le Gouvernement nous indique la manière dont il conçoit l’articulation entre ce chantier de la démocratie participative – qui vient d’être lancé, – et l’habilitation à légiférer par ordonnance qu’il sollicite du Parlement.

En particulier, monsieur le ministre, le Gouvernement peut-il prendre l’engagement que les réflexions collectives aujourd’hui en cours, dans le cadre de ce chantier, sont bien appelées à être reprises et intégrées dans le cadre des futures ordonnances et nous confirmer que, dans son esprit, il s’agit bien de deux démarches complémentaires appelées à se rejoindre dans les prochains mois ?

J’en termine avec ces quelques réflexions destinées à alimenter notre débat et, peut-être – j’en suis convaincu – à répondre par avance à un certain nombre de doutes et d’interrogations tout à fait légitimes, que j’ai entendus exprimer à l’instant et que nous avons abordés en commission spéciale.

Compte tenu de l’importance du sujet pour notre économie mais, aussi, pour la transition énergétique, je suis convaincu qu’ensemble, en accompagnant le Gouvernement et en étant vigilants, nous trouverons des solutions permettant de garantir à la fois les droits du Parlement et l’exigence environnementale qui doit guider ce principe de simplification.

M. Richard Ferrand, rapporteur général. Excellent !

M. François Brottes, président de la commission spéciale. Très bien !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur ces amendements de suppression ?

M. Emmanuel Macron, ministre. L’article 28 suscite en effet beaucoup d’inquiétudes légitimes que nous avons déjà largement évoquées en commission spéciale. Nombre d’améliorations et de précisions y ont été apportées et je tiens à vous en remercier.

De quoi s’agit-il ? Habiliter le Gouvernement à procéder par voie d’ordonnances sur un sujet complexe et d’actualité puisqu’un travail est en cours. Vous avez tout à fait raison, un rapport sera remis tandis qu’un processus délibératif complexe se poursuit par ailleurs.

Je réponds tout d’abord aux points soulevés par votre rapporteur thématique.

Oui, les deux exercices s’articuleront d’une manière tout à fait particulière. L’objectif est de disposer des conclusions de ce rapport – qui sera remis au Premier ministre au début de l’année prochaine – et de continuer le travail qui a été engagé, en faisant converger les deux.

Je tiens également à revenir sur la méthodologie employée.

Il s’agit à la fois de réformer l’évaluation environnementale, d’accélérer la réalisation de projets grâce à la simplification du droit – en particulier de l’urbanisme – et de poursuivre la réforme de la participation du public.

Ce sont ces trois objectifs que nous voulons tenir ensemble afin, donc, de favoriser l’aboutissement de projets de constructions, de réduire les délais des procédures applicables et de renforcer la participation effective des citoyens. Je crois vraiment que nous pouvons tous et toutes nous retrouver derrière ces objectifs.

Il est en effet possible de bénéficier des mêmes garanties, des mêmes protections, et même de meilleures protections, si les temps sont mieux articulés.

Aujourd’hui, nous connaissons trop souvent des situations dans lesquelles il y a des recours abusifs, où la procrastination est collective, où la démocratie participative intervient trop tard autour de projets où de l’argent, qu’il soit privé ou public, a déjà été engagé – nos discussions sur certains articles précédents l’ont d’ailleurs montré – et où tout, dès lors, dysfonctionne.

Sans réduire quelque versant que ce soit de notre droit de l’environnement actuel et tout en étant fidèle à l’ambition portée par le Président de la République – les travaux se poursuivront dans les prochains mois – je suis persuadé qu’en assurant un meilleur fonctionnement de notre démocratie participative, il est possible de mieux conduire les projets, notamment certains grands projets, de façon plus lisible et plus transparente pour toutes et tous, en encadrant mieux les choses dans le temps.

Je crois que, sur bien des thèmes dont nous traitons, aller plus vite n’empêche pas de faire mieux.

En réponse à l’une des préoccupations que vous exprimiez, je rappelle que le travail en commission a permis d’une part que soit expressément prévue l’association étroite du CNTE, d’autre part, que soit réécrite la partie relative à la poursuite de la réforme de la participation du public, afin de la simplifier et l’intégrer dans la lignée des annonces du Président de la République après les événements de Sivens.

Je peux le dire d’ores et déjà : notre discussion permettra de clarifier plusieurs points.

Mme Véronique Louwagie. Sauf si l’article est supprimé !

M. Emmanuel Macron, ministre. Je donnerai un avis favorable à l’adoption de plusieurs amendements pour là encore apporter toutes les clarifications nécessaires mais il est important de conserver la teneur de cet article et l’ambition initiale du texte.

L’objectif sera aussi – je renvoie à l’alinéa 18 de l’article 28 – de traiter des recours abusifs dans le cadre de l’approche plus générale concernant les litiges. Je vous donne une totale garantie sur ce point.

Je sais que des amendements spécifiques seront défendus mais je ne donnerai pas un avis favorable à leur adoption parce que, précisément, ils sont trop spécifiques et extrêmement ciblés. Néanmoins, je veux le dire officiellement et clairement : l’objectif est bien de pouvoir encadrer certains recours abusifs qui bloquent les projets sans concourir pourtant à l’amélioration du débat démocratique ou à la bonne représentation de toutes et tous.

Je souhaite aussi clarifier quelques points soulevés par M. le député Baupin.

Je vous rappelle, si besoin était, qu’une ordonnance peut tout à fait contenir des dispositions relevant du domaine de la loi. L’ordonnance du 5 août 2013 relative à la mise en œuvre du principe de participation du public défini à l’article 7 de la Charte de l’environnement a été validée par le Conseil d’État, qui a reconnu que l’on pouvait traiter par ordonnances de dispositions relevant de la loi – qui, en l’espèce, étaient tout à fait conformes à notre Charte de l’environnement.

J’ai constamment rappelé que celle-ci, en raison de la hiérarchie des normes même, s’applique à la démarche qui est ici inaugurée.

J’ajoute que la consultation électronique sera évidemment adoptée dans le cadre de cette procédure, comme elle l’est d’ailleurs pour toutes les procédures de ce type et comme j’ai eu, là encore, l’occasion de le rappeler en commission spéciale.

Dans le cadre de ce travail, le Gouvernement veut promouvoir un processus transparent et fédérateur. Tel est l’objet de la lettre qu’avec Ségolène Royal et Sylvia Pinel, nous avons adressée le 13 janvier dernier à votre rapporteur, M. Castaner, qui vient de s’en faire l’écho.

Je cite : « Le Parlement sera naturellement régulièrement informé de l’avancée de ces travaux », avec un débat sur l’habilitation – ce que nous sommes en train de faire. Nous rappelions également dans ce courrier que le CNTE serait associé et terminions en indiquant qu’il y aurait des « échanges réguliers avec la représentation nationale sous une forme dont nous vous proposons de convenir prochainement ».

J’ai rappelé en commission spéciale – je le fais également en séance publique – que Ségolène Royal et moi-même, je m’y engage, viendrons rendre compte de notre action régulièrement auprès de l’ensemble des commissions concernées par ces sujets.

On peut même tout à fait envisager que la commission spéciale soit réactivée afin d’avoir un droit de suite spécifique quant aux avancées de ce texte. Cela me semblerait être de bonne politique pour que l’association du Parlement se fasse dans la continuité des travaux que nous avons menés depuis le début. Les engagements doivent aller à leur terme.

Pour toutes ces raisons, en réitérant les engagements qui ont été pris en commission spéciale et ici même mais, aussi, avant de procéder aux améliorations de cet article à travers sa discussion, j’émets un avis défavorable à l’adoption des amendements de suppression.

M. André Chassaigne. Dommage !

M. le président. La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Cet article qui habilite le Gouvernement à utiliser la voie de l’ordonnance pour régler des situations extrêmement importantes chagrine le groupe UDI.

La France a un ardent besoin de réformes, un ardent besoin d’investissements, un ardent besoin de logements, un ardent besoin d’aménagements et d’entreprises…

M. Denis Baupin. Un ardent besoin d’éoliennes !

M. Francis Vercamer. … et d’éoliennes, monsieur Baupin, d’éoliennes ! Mais les procédures sont longues.

J’ai eu l’occasion de dire avant le dîner, évoquant notamment une voie de desserte d’une entreprise, qu’il fallait essayer de les réduire et je l’ai dit également tout à l’heure à propos de l’éolienne de M. Baupin (Sourires).

Si l’on met de côté la question des ordonnances, on peut reconnaître que cet article formule un certain nombre de propositions pour essayer d’améliorer la situation et réduire un certain nombre de procédures dans le domaine de l’environnement ou de l’urbanisme qui, dans notre pays, tendent à s’éterniser.

Monsieur le ministre, pour être un opposant constructif, je vous dirais que les articles 26 et 28 sont, à mon sens, les principaux qui permettront de libérer la croissance et l’activité. Tous les autres en revanche, je me demande bien ce qu’ils viennent faire dans ce texte.

M. Richard Ferrand, rapporteur général. C’est agréable !

M. Francis Vercamer. S’il y a bien deux articles qui doperont la croissance et l’activité, ce sont bien ceux-là ! À l’UDI, nous ne ferons donc pas la fine bouche. Nous ne voterons pas les amendements de suppression…

M. Richard Ferrand, rapporteur général. Très bien ! Voilà qui est cohérent !

M. Francis Vercamer. … parce que nous sommes une opposition constructive et que nous estimons que ces articles-là vont dans le bon sens pour essayer d’améliorer la situation des entreprises, de la France, et pour promouvoir les réformes dont nous avons besoin.

Malheureusement, on se demande ce que tous les autres articles – ou la plupart – viennent faire dans un texte censé renforcer la croissance et l’activité.

Monsieur le ministre, monsieur le président, le groupe UDI votera contre ces amendements de suppression.

M. Philippe Vigier. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Daniel Fasquelle.

M. Daniel Fasquelle. Je souhaite parler du fond et de la méthode. Sur le fond, le groupe UMP partage les objectifs de l’article 28, que nous avons d’ailleurs voté en commission. J’ajoute toutefois qu’il faut aller plus loin dans la concertation en amont. Dans le cadre d’une procédure de zone d’aménagement concerté de ma commune, j’ai tenu à ce que la concertation ait lieu très en amont : à la suite de l’appel à projet, neuf projets ont été présentés, sur lesquels la population s’est prononcée. Nous en avons retenu trois, sur lesquels la population s’est de nouveau prononcée. Je peux vous assurer que cela a surpris les porteurs de projets, qui étaient plutôt mécontents de cette procédure au départ mais ont fini par en reconnaître l’intérêt, car elle a permis un vrai dialogue avec les habitants du quartier sur le choix du projet et de celui qui le portera. Plus on se concerte en amont, moins il y a de conflits, de contentieux et de problèmes en aval.

Je tiens par ailleurs à insister sur le caractère abusif de nombreux recours des associations, car votre réponse sur ce point n’a pas été aussi précise que je l’espérais.

S’agissant de la méthode, nous souscrivons aux propos des orateurs précédents. Ce projet de loi renvoie trop systématiquement aux ordonnances, ce qui dépossède le Parlement de sa fonction législative, et ce sur des questions d’importance majeure.

M. Jean-Luc Laurent. C’est la Constitution de la VRépublique !

M. Daniel Fasquelle. Mais le recours à l’article 38 de la Constitution n’est pas le seul problème. À cet égard, je me permets de vous lire un extrait d’une déclaration faite aujourd’hui par un éminent personnage de la République : « Trop de textes n’ont pas été suffisamment pensés et préparés en amont. Confondant urgence et précipitation, l’exécutif est souvent contraint de réintroduire pendant le débat parlementaire des amendements afin de modifier son propre projet de loi ! Un triste record est là pour l’illustrer : entre juin 2012 et septembre 2014, le Gouvernement a fait adopter 1 767 amendements, un nombre jamais atteint depuis plus de dix ans. »

Le constat est sévère ! Cela ne concerne certes pas l’article 38, mais cela peut valoir pour nos débats sur le présent projet de loi. L’auteur de cette déclaration poursuit ainsi : « Est-il normal que pendant l’examen du projet de loi Macron, le ministre lui-même découvre au banc des amendements transmis par les administrations et le Gouvernement ? » Cette critique très sévère provient, non pas des rangs de l’opposition, mais du président de l’Assemblée nationale lui-même, Claude Bartolone ! (« Ah ! » sur plusieurs bancs.) Avec lui, je dénonce la façon dont nous travaillons, dont ces débats sont menés, dont ce texte a été préparé et examiné, sans parler du temps de parole qui viendra à manquer à la fin de l’examen du texte, sur des sujets pourtant majeurs. Tout en portant, comme Claude Bartolone, un regard sévère sur la méthode, nous approuvons malgré tout l’esprit de l’article 28 et renvoyons donc la majorité à ses débats internes. Nous ne prendrons pas part au vote sur ces amendements de suppression. (Exclamations sur les bancs du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission spéciale.

M. François Brottes, président de la commission spéciale. S’agissant de la méthode, vous savez que nous avons désormais l’obligation de veiller au bon suivi de l’application des textes de loi. Pour toutes les lois entrant dans son champ de compétence, chaque commission permanente désigne deux corapporteurs, l’un de la majorité, l’autre de l’opposition, pour suivre les textes d’application – circulaires, décrets, voire ordonnances. C’est plus compliqué dans le cas d’une commission spéciale, car celle-ci a une durée de vie éphémère, qui ne dépasse pas le temps de l’élaboration du texte de loi. Je tiens à le dire officiellement, c’est la commission du développement durable qui sera chargée du suivi des textes d’application de cet article – je regarde tout spécialement Mme Buis, qui est membre de cette commission. J’indique au ministre, qui a invité le Parlement à la vigilance, que la commission spéciale ne pourra pas exercer cette vigilance, car elle n’aura plus d’existence une fois le texte adopté. En revanche, les commissions permanentes se réapproprieront les différents sujets, en fonction des thématiques.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1269, 2115, 2361 et 2468.

(Il est procédé au scrutin.)

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants35
Nombre de suffrages exprimés35
Majorité absolue18
Pour l’adoption9
contre26

(Les amendements identiques nos 1269, 2115, 2361 et 2468 ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à Mme Sabine Buis, pour soutenir l’amendement n1720.

Mme Sabine Buis. Cet amendement fait suite à celui que j’avais déposé avec mon collègue Arnaud Leroy en commission spéciale, et qui, comme les quatre que nous venons d’examiner, tendait à la suppression de l’article, et pour les mêmes raisons. J’y tenais d’autant plus qu’en tant que rapporteure du projet de loi du 27 décembre 2012 relative à la mise en œuvre du principe de participation du public, je connaissais bien les limites de ce texte, examiné également dans l’urgence, et pensais nécessaire de pouvoir le prolonger dans le cadre de l’examen d’un autre texte. Le contexte a encore évolué depuis, puisque nous cherchons tous, par tous les moyens, à recréer le lien entre le politique et le citoyen. Il me semble donc particulièrement regrettable de se priver d’un débat parlementaire sur une question qui relève de la démocratie participative.

Cela dit, en déposant cet amendement n° 1720, j’anticipais – à regret – le résultat du vote sur les amendements de suppression. J’entends le discours du rapporteur et je crois le ministre sincère, quand il nous assure de garanties quant au contenu des ordonnances, notamment qu’elles ne reviendront pas sur les acquis en matière de droit de l’environnement. Cette garantie n’est rien d’autre que le principe de non-régression, reconnu dès 2011 par le Parlement européen au travers d’une résolution, avant qu’en 2012 le Sénat n’adopte lui aussi une résolution en ce sens. Un an plus tard, la feuille de route issue des états généraux de la modernisation du droit de l’environnement préconisait également la reconnaissance de ce principe de non-régression. Celui-ci me semble un bon moyen de parvenir à un consensus de nature à faire avancer le débat. Tel est l’objet de mon amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur. Les objectifs de Mme Buis sont tout à fait légitimes et vont dans le sens de nos exigences. Toutefois, même si le Parlement européen s’est prononcé sur cette question, le principe de non-régression ne dispose pas, à la différence du principe de précaution, d’une assise indiscutable dans notre droit, notamment dans la Charte de l’environnement. Il s’agit donc d’un principe en devenir et l’intégrer dans le présent texte risquerait de fragiliser les procédures prévues.

Plus largement, un tel mécanisme de cliquet, interdisant la plus minime régression, y compris quand tous la considèrent comme justifiée, pourrait bloquer toute forme d’évolution du droit. Inscrire ce principe dans la loi créerait donc une incertitude juridique et irait au-delà de ce à quoi nous tenons tous, à savoir la non-régression de notre droit de l’environnement et, de façon plus globale, la précaution. Cela risquerait de conduire à une multiplication des procédures et des recours abusifs. La commission a donc repoussé cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Je ne paraphraserai pas les propos du rapporteur mais je réaffirme l’engagement du Gouvernement à aller dans le sens que j’évoquais tout à l’heure. Je crois que vous m’avez entendu et je vous en remercie. Nous avons longuement débattu en commission spécial de ce principe de non-régression. N’étant pas qualifié de manière stable en droit français, ce principe ferait peser des risques juridiques sur l’ordonnance, y compris après sa ratification. Notre volonté est bien, en substance, de satisfaire votre objectif. Je vous donc à retirer votre amendement, d’une part au bénéfice de l’engagement pris et réitéré par le Gouvernement, d’autre part parce que je donnerai un avis favorable à l’amendement n1734 de Mme Bonneton, qui viendra ultérieurement en discussion. Celui-ci va dans le même sens que votre amendement mais est rédigé dans des termes plus précis et plus sûrs sur le plan juridique.

M. le président. La parole est à Mme Sabine Buis.

Mme Sabine Buis. Je me doutais bien que vous nous renverriez à cet amendement n1734. Mais sa formulation ne correspond pas à nos attentes sur le principe de non-régression. De plus, rien ne nous empêche de définir le principe de non-régression à l’occasion de la rédaction de ces ordonnances. J’ai bien entendu vos propos mais je maintiens mon amendement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Si nous faisons référence à un principe de non-régression du droit de l’environnement, il faut que celui-ci soit défini. À défaut, comment pourrait-on le respecter ? Aussi estimable soit-il, ce principe, même s’il a fait l’objet d’une résolution du Parlement européen et constitue sans nul doute un progrès nouveau, n’existe toujours pas en droit. Il n’est donc pas possible d’exiger au Gouvernement qu’il s’y conforme lors de l’élaboration d’une ordonnance. Qui pourrait dire si le Gouvernement a ou non respecté ce principe, pour l’heure sans consistance précise ? De plus, je ne suis pas certain que cette inscription dans la loi d’un principe encore ignoré du droit soit conforme à la Constitution. Sur de tels sujets, il faut d’abord être inattaquable sur le plan juridique. À défaut, les objectifs les plus respectables, et celui-ci en est un, non seulement ne seront pas atteints, mais risquent d’être renvoyés aux calendes grecques.

(L’amendement n1720 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements, nos 1270, 2696, 2697 et1734, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n1270.

M. Denis Baupin. Je présenterai simultanément les amendements nos 1270, 2696 et 2697. Nous avons cherché à aider le Gouvernement, car ce principe de non-régression du droit de l’environnement lui pose visiblement des problèmes. Nous avons donc essayé de trouver des formulations différentes et, très ouverts, sommes prêts à adopter celle que vous souhaitez, monsieur le ministre. Il s’agit d’une question très importante pour nous. Mme Buis l’a dit, nous souhaitons avoir la garantie que les mesures de simplification engagées ne se traduiront pas par une régression de la protection de l’environnement.

M. le président. Les amendements nos 2696 et 2697 ont donc été défendus.

La parole est à Mme Michèle Bonneton, pour soutenir l’amendement n1734.

Mme Michèle Bonneton. Comme l’a excellemment dit M. Baupin, nous ne sommes pas du tout opposés à la simplification des procédures. Ce que nous dénonçons, c’est le recours aux ordonnances. Chacun aura d’ailleurs remarqué que le mot est employé au pluriel, il y en aura donc plusieurs, sans que l’on sache précisément combien. En nous élisant députés, les citoyens nous ont donné mandat pour discuter et voter la loi. Nous ne pouvons donc pas du tout approuver ce recours aux ordonnances.

Bien évidemment, nous pensons nous aussi qu’il faut éviter les recours abusifs. C’est d’ailleurs l’objet de l’ordonnance du 18 juillet 2013 prise par Mme Duflot, qui s’est appuyée sur le rapport de M. Daniel Labetoulle, dont elle a repris cinq des six propositions. Les effets de cette ordonnance n’ont pas été évalués à ce jour, ce que l’on ne peut que regretter. Mieux vaudrait peut-être attendre cette évaluation. Par ailleurs, la commission spéciale a introduit un nouvel alinéa, l’alinéa 6, qui est très intéressant et doit permettre de limiter les recours abusifs.

Enfin, il y a une demande très forte de la société pour participer davantage aux projets et même les co-élaborer, ce qui est relativement nouveau.

En effet, la société a compris toute l’importance d’être prudent avec l’environnement. Les gens savent que les bronchiolites des bébés sont, en ville, essentiellement dues à la pollution de l’air. Ils savent qu’en France, dans certains territoires, on ne peut même plus boire l’eau du robinet tant elle est polluée. Ils savent que le changement climatique est engagé, et que, si nous n’y prenons pas garde, il va complètement modifier la vie à la surface de notre planète.

Il est donc très important que ces ordonnances soient prises à droit de l’environnement constant. J’ai d’ailleurs interrogé madame la ministre Ségolène Royal à ce propos il y a dix jours, et elle m’a affirmé qu’elles le seraient sans régression du droit de l’environnement. Aujourd’hui, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur thématique, nous demandons des preuves de cette volonté. Nous demandons donc qu’à la troisième ligne de l’alinéa 1 soient insérés, après le mot : « loi », les mots : « sans porter atteinte aux principes fondamentaux et objectifs généraux du code de l’environnement, ». Le rapporteur en a parlé tout à l’heure, ce que j’ai apprécié.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces quatre amendements en discussion commune ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Nous retrouvons des éléments des discussions que nous avons eues précédemment. Tout d’abord, madame Bonneton, je voudrais vous redire que le Parlement n’est pas privé de son pouvoir en cas de recours à une ordonnance. Il habilite le Gouvernement à prendre une ordonnance puis il ratifie cette ordonnance.

M. François Brottes, président de la commission spéciale. Il vote deux fois.

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. En plus, nous disposons d’un certain nombre d’engagements quant à l’association du Parlement au processus. On pourrait même parler d’un « double effet Kiss Cool » puisque, comme nous le faisons à l’instant présent, nous pouvons nous montrer vigilants et exigeants et l’affirmer bien fort, puis ultérieurement conditionner notre vote lorsqu’il nous sera demandé de ratifier l’ordonnance.

Plus globalement, je voudrais revenir sur le risque d’un dispositif de cliquet. Je pense que notre droit de l’environnement a aussi besoin de faire passer aux acteurs un message de souplesse tout en demeurant extrêmement ferme, sur le fond, quant aux exigences. Il me semble donc que les amendements n° s 1270, 2696 et 2697 pourraient être retirés au profit de l’amendement n1734, auquel le Gouvernement a indiqué être favorable, et qui pose le principe de ces exigences que vous portez et que, bien évidemment, nous portons aussi, tout en n’excluant pas des évolutions possibles de notre droit de l’environnement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. J’ai déjà eu l’occasion de le dire, le Gouvernement est défavorable aux trois premiers amendements et favorable à l’amendement n1734, dont la rédaction me semble pleinement satisfaisante. Je réitère ici les déclarations que ma collègue Ségolène Royal vous a faites en réponse, madame Bonneton, à une question d’actualité. Ne pas écrire dans la loi ce qui a été dit oralement ne signifie pas que nous manquions de cohérence : cela traduit simplement un souci de sécurité juridique. Comme je le disais à Mme Buis, c’est bien l’objectif affiché et clairement exprimé par Ségolène Royal que nous voulons ici réaffirmer, mais dans une formulation plus sûre pour tous. Pour cette raison le Gouvernement est favorable à l’amendement n1734 et demande le retrait des autres. À défaut, il y donnerait un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Pascal Cherki.

M. Pascal Cherki. Je n’ai pas demandé la parole, monsieur le président. Mais puisque vous me la donnez, permettez-moi de vous exprimer toute ma sympathie. (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. Alain Tourret.

M. Alain Tourret. Je souhaitais juste faire une observation que pourrait faire l’Académie française : dans l’amendement n1734, il faut, avant les mots : « objectifs généraux », insérer le mot : « aux ». À défaut, l’amendement ne veut plus rien dire.

M. le président. Je vous remercie. Madame Bonneton, acceptez-vous cette rectification ?

Mme Michèle Bonneton. Sans problème.

(Les amendements nos 1270, 2696 et 2697 sont retirés.)

(L’amendement n1734, tel qu’il vient d’être rectifié, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n1271.

M. Denis Baupin. Il s’agit d’un amendement de cohérence.

(L’amendement n1271, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n1823 des rapporteurs est rédactionnel.

(L’amendement n1823, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n2698.

M. Denis Baupin. Il est rédactionnel.

M. le président. Est-ce bien sûr, monsieur Baupin ? (Sourires.)

(L’amendement n2698, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n2699.

M. Denis Baupin. Il est retiré.

(L’amendement n2699 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n1276.

M. Denis Baupin. Il est retiré.

(L’amendement n1276 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n1275 qui fait l’objet d’un sous-amendement n3279 du Gouvernement.

La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement.

M. Denis Baupin. Il s’agit là de bien préciser les choses : nous souhaitons, puisque ordonnances il y aura, qu’il soit précisé que les projets qui seront portés dans ce cadre seront des projets qui favorisent la transition écologique.

M. le président. La parole est à M. le ministre, pour soutenir le sous-amendement n3279.

M. Emmanuel Macron, ministre. Je suis sensible à l’objectif poursuivi par l’amendement n1275, mais je propose de le sous-amender. Avant le mot : « favorisant », je propose que soient insérés les mots : « notamment ceux ». Pourquoi ? Parce que si on opte pour votre formulation, on devient très restrictif et on ne prend en compte que les projets de constructions et d’aménagements qui favorisent la transition écologique. On veut néanmoins les couvrir, et je crois que sur ce point il n’y a pas de malice. Je l’ai dit et constamment redit, et c’est cohérent avec les engagements que j’ai pris tout à l’heure lorsque vous exprimiez votre préoccupation, tout aussi constante, relative aux éoliennes. Néanmoins, si nous voulons, dans l’article 28, répondre, comme je m’y étais engagé, à votre préoccupation, nous ne voudrions pas tomber non plus dans l’obsession de l’éolienne, et ne couvrir que les projets favorisant la transition écologique. Voilà pourquoi je propose ce sous-amendement. Sous réserve de son adoption, l’avis du Gouvernement est favorable à l’amendement n1275.

(Le sous-amendement n3279, accepté par la commission, est adopté.)

(L’amendement n1275, sous-amendé, accepté par la commission, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Christophe Castaner, rapporteur thématique, pour soutenir l’amendement n2668.

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Il s’agit de supprimer les alinéas 5 à 7. Cet amendement forme en fait un diptyque avec l’amendement n2787 rectifié, portant article additionnel après l’article 28. Il permettra d’atténuer, voire de supprimer, la capacité d’un maire à opposer des refus dilatoires. Le Gouvernement a proposé, à l’article 28, de contraindre l’autorité compétente à délivrer une autorisation d’urbanisme manifestement conforme aux prescriptions législatives et réglementaires, soit par l’injonction du juge, soit par la saisine du préfet, en tant que représentant de l’État. Si cet objectif est parfaitement louable, il nous semblait nécessaire de le restreindre.

Il me semble que cette modification directe du code de l’urbanisme, si elle était votée, rendrait sans objet le renvoi à une ordonnance prévu aux alinéas 5 et 7. C’est pour cette raison que je propose de supprimer ces alinéas.

(L’amendement n2668, accepté par le Gouvernement, est adopté et les amendements n2129, 1826 et 1301 tombent.)

M. le président. La parole est à Mme Michèle Bonneton, pour soutenir l’amendement n1735 rectifié.

Mme Michèle Bonneton. Cet amendement vise à supprimer l’alinéa 8 et à insérer un nouvel alinéa après l’alinéa 18. Il concerne la procédure d’autorisation des unités touristiques nouvelles, qui constitue un outil important de régulation de l’urbanisme touristique. Cette procédure permet, en effet, l’information et la large participation du public. C’est très souvent à l’occasion de cette procédure que le public découvre la nature du projet. Celui-ci doit être très précisément présenté, qu’il s’agisse de ses modalités ou de son coût. Ainsi, le public est associé aux études et délibérations concernant les projets d’unités touristiques nouvelles, tant au niveau départemental qu’au niveau des massifs.

M. André Chassaigne. Sauf pour les éoliennes !

Mme Michèle Bonneton. Cette procédure est donc très appréciée par les habitants.

Si l’on peut comprendre que, lorsque qu’il existe un schéma de cohérence territoriale ou une charte de parc, la procédure d’autorisation des unités touristiques nouvelles puisse éventuellement apparaître comme redondante, en revanche, si ces documents n’existent pas, ou lorsque qu’ils ne contiennent pas d’études environnementales suffisantes, ce qui est le cas dans un certain nombre de territoires, cette procédure se justifie pleinement. Ainsi, il apparaît que cette suppression, telle que la prévoit l’alinéa 8 du projet de loi, est prématurée.

(L’amendement n1735 rectifié, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Michèle Bonneton, pour soutenir l’amendement n1315.

Mme Michèle Bonneton. Cet amendement ne vise, lui, qu’à supprimer l’alinéa 8, je viens d’expliquer pourquoi.

(L’amendement n1315, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n1272.

M. Denis Baupin. Il est défendu.

(L’amendement n1272, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n2700.

M. Denis Baupin. Il est défendu.

(L’amendement n2700, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n1278.

M. Denis Baupin. Il est retiré.

(L’amendement n1278 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n2701.

M. Denis Baupin. Il est retiré.

(L’amendement n2701 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n1277.

M. Denis Baupin. Il s’agit, là encore, de préciser que seuls les projets favorisant la transition écologique seront concernés par la simplification du droit de l’environnement.

(L’amendement n1277, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Michèle Bonneton, pour soutenir l’amendement n1302.

Mme Michèle Bonneton. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Le droit positif permet d’ores et déjà de garantir l’indépendance des autorités environnementales. Il n’est pas nécessaire de le réaffirmer, afin de ne pas laisser penser qu’aujourd’hui cette indépendance n’existe pas. L’avis de la commission est donc défavorable.

(L’amendement n1302, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n1273.

M. Denis Baupin. Il est défendu.

(L’amendement n1273, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n2469 rectifié.

M. André Chassaigne. Défendu de le défendre par le temps programmé. (Sourires.)

(L’amendement n2469 rectifié, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n2702.

M. Denis Baupin. Il est défendu.

(L’amendement n2702, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n1279.

M. Denis Baupin. Il est retiré.

(L’amendement n1279 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n2703.

M. Denis Baupin. Il est retiré.

(L’amendement n2703 est retiré.)

M. le président. La parole est à Mme Michèle Bonneton, pour soutenir l’amendement n1304 rectifié.

Mme Michèle Bonneton. Il est défendu.

(L’amendement n1304 rectifié, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n1285.

M. Denis Baupin. Il s’agit de préciser les choses, comme l’a indiqué le Président de la République lors de la conférence environnementale, en rappelant, à juste titre, que, lorsqu’on présente un projet à la concertation, il est important que le public ait connaissance des solutions alternatives. Cela a été dit également par la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, dans le cadre, par exemple, du projet de Sivens. Si tous les projets alternatifs sont présentés au public, non seulement celui-ci peut prendre connaissance des différentes possibilités, mais cela donne, aussi, plus de légitimité, ensuite, à la décision qui est prise. Qu’on soit pour ou contre, une décision plus légitime permet, au moins, de faire progresser le débat et la réalisation du projet. L’idée de cet amendement est bien de préciser que, dans ces processus, il convient de présenter les choix alternatifs.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Si je comprends les objectifs, l’adoption de cet amendement créerait très clairement une menace permanente sur tous les projets, y compris éoliens, monsieur Baupin. Pourquoi ? Tout simplement parce qu’il serait toujours possible d’alléguer que l’ensemble des solutions alternatives n’a pas été envisagé, y compris par le porteur de projet.

Outre le problème du coût et la question des délais, il y a un gros risque juridique parce que l’on pourra toujours évoquer une solution alternative qui n’aurait pas été présentée. Ce serait instaurer de l’instabilité dans la totalité des dossiers présentés au public, qui ont besoin de sécurité juridique.

La commission est donc défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin.

M. Denis Baupin. Si vous avez peur qu’on ne puisse pas présenter toutes les alternatives, ce qui est assez légitime, je rectifie mon amendement qui deviendrait ainsi rédigé : « Compléter l’alinéa 16 par les mots : « en présentant au public les projets et des alternatives. » ».

(L’amendement n1285, tel qu’il vient d’être rectifié, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n1284.

M. Denis Baupin. Je l’expliquais tout à l’heure, nous ne sommes pas contre la simplification des procédures, nous sommes même pour, comme nous sommes pour leur modernisation. Nous proposons donc que l’on prenne en compte les nouvelles technologies pour mieux associer une plus grande partie de la population.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Nous partageons l’objectif. La commission est favorable à cet amendement.

(L’amendement n1284, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n1280.

M. Denis Baupin. Il est retiré.

(L’amendement n1280 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n2704.

M. Denis Baupin. Retiré.

(L’amendement n2704 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n2705.

M. Denis Baupin. Retiré.

(L’amendement n2705 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n1286.

M. Denis Baupin. Notre objectif, c’est de moderniser, et pas seulement de simplifier. Cela va plus loin.

(L’amendement n1286, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n1288.

M. Denis Baupin. Retiré.

(L’amendement n1288 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n1287.

M. Denis Baupin. Il s’agit encore de préciser que l’on a recours aux nouvelles technologies.

(L’amendement n1287, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n1281.

M. Denis Baupin. Retiré.

(L’amendement n1281 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n2674.

M. Denis Baupin. Retiré.

(L’amendement n2674 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n2688.

M. Denis Baupin. Retiré.

(L’amendement n2688 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n2706.

M. Denis Baupin. Retiré.

(L’amendement n2706 est retiré.)

M. le président. La parole est à Mme Michèle Bonneton, pour soutenir l’amendement n1305.

Mme Michèle Bonneton. Nous proposons que les personnes qui effectuent les évaluations environnementales imposées par la loi possèdent des compétences spécifiques pour permettre aux porteurs de projet de choisir de manière éclairée la personne à qui ils confient cette évaluation.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Cet amendement a été repoussé par la commission mais la question est importante.

Des réflexions ont été conduites. Le commissariat général à l’environnement et au développement durable notamment avait rédigé un rapport sur le sujet dont voici la conclusion : « la qualité dans l’évaluation des impacts n’est donc pas au rendez-vous. » « Les mesures d’évitement, de réduction ou de compensation des impacts sur l’environnement, en particulier sur la biodiversité, sont mal comprises et mal appliquées et renvoient autant à la qualité des expertises mobilisées qu’à la perception de leur intérêt par les maîtres d’ouvrage. »

Les questions posées sont légitimes, et vous pourriez peut-être, monsieur le ministre, nous indiquer quelle est la volonté du Gouvernement sur cette question car nous avons besoin d’être éclairés.

Toutefois, la commission, n’ayant pas ces éléments, a émis un avis défavorable à l’amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. C’est un vrai sujet, effectivement, et nous avons eu l’occasion d’en discuter en commission. La question de la qualité des études d’impact environnementales et d’un éventuel agrément des bureaux d’études a fait l’objet d’un rapport du CGEDD, dont l’auteur est M. Lavoux, et les travaux conduits dans le cadre de la modernisation du droit de l’environnement ont également abordé cette thématique.

Le président du groupe de travail concerné lors de la séance du Conseil national de la transition écologique du 6 janvier 2014 a conclu dans son compte rendu qu’un agrément n’était pas à ce stade opportun et qu’instaurer une charte de bonnes pratiques, non contraignante, permettrait de garantir les qualités et l’objectivité des études environnementales et serait plus approprié.

C’est déjà une avancée, et nous avons dans le corpus juridique des règles permettant d’éviter les conflits d’intérêts. Aller jusqu’au dispositif que vous proposez, c’est-à-dire un agrément des personnes, me semble être une contrainte administrative un peu excessive par rapport à l’objectif recherché.

Je vous confirme l’engagement du Gouvernement à aller dans le sens de ce que le CNTE a proposé le 6 janvier 2014 et à travailler plutôt à une telle charte, ce qui serait déjà une avancée et je vous suggère donc, dans ces conditions, de retirer votre amendement. Sinon, j’y serai défavorable.

En outre, à l’alinéa 3 de son article 5, la directive sur les études d’impact impose désormais aux maîtres d’ouvrage de s’assurer que « le rapport d’évaluation des incidences sur l’environnement est préparé par des experts compétents ». Le critère n’est pas aussi dur que dans votre texte mais il y a déjà une avancée.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Caullet.

M. Jean-Yves Caullet. J’avais eu l’occasion d’aborder ce point en commission. Je souhaiterais que ce soit également l’occasion de travailler sur la déontologie de l’expertise. Quand il y a un projet, il y a parfois contestation et la question de l’expertise va se retrouver aussi dans le contentieux. Il est donc important de s’assurer que ceux qui procèdent à l’expertise n’en seront pas chargés à un autre moment, et cela vaut dans toutes les configurations.

(L’amendement n1305 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 461 et 1274.

La parole est à M. Philippe Vitel, pour soutenir l’amendement n461.

M. Philippe Vitel. L’alinéa 18 peut apparaître comme une atteinte au pouvoir du juge administratif. C’est la raison pour laquelle nous en demandons la suppression.

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n1274.

M. Denis Baupin. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Je crois que personne ne peut raisonnablement s’opposer à une accélération du règlement des litiges, dans l’intérêt de la préservation de l’environnement et de la sécurité juridique des porteurs de projet.

Il est plus question des moyens, c’est-à-dire des ordonnances, et je ne peux que vous répéter qu’il y a des garde-fous sur lesquels la Constitution nous apporte des garanties et le Gouvernement nous a donné des engagements.

La commission est donc défavorable à ces amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Je confirme ici les engagements pris en commission. C’est une habilitation à procéder par ordonnances. L’idée est que le groupe de travail présidé par Delphine Hédary, conseillère d’État, propose des mesures qui, dans le respect de l’accès au juge et tout en assurant un haut niveau de protection à l’environnement, renforcent la lisibilité et la cohérence des règles et accélèrent les procédures contentieuses.

Cette clarification devrait vous rassurer et je vous suggère donc de retirer vos amendements. Sinon, j’y serai défavorable.

(Les amendements identiques nos 461 et 1274 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n1282 qui fait l’objet d’un sous-amendement n3280 rectifié.

La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement.

M. Denis Baupin. Seuls les projets favorisant la transition écologique doivent être concernés par les améliorations en matière de procédure, notamment pour ce qui est des recours.

M. le président. La parole est à M. le ministre, pour soutenir le sous-amendement n3280 rectifié et donner l’avis du Gouvernement sur l’amendement n1282.

M. Emmanuel Macron, ministre. C’est la même philosophie que tout à l’heure. Sous réserve de l’adoption de ce sous-amendement, le Gouvernement est favorable à l’amendement.

(Le sous-amendement n3280 rectifié, accepté par la commission, est adopté.)

(L’amendement n1282, sous-amendé, accepté par la commission, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n1289.

M. Denis Baupin. Le texte tel qu’il nous est proposé vise à assurer la sécurité juridique des bénéficiaires mais jamais des victimes. Nous voulons que les victimes soient prises en considération de la même façon que les bénéficiaires.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Nous avons eu cette discussion en commission. Très clairement, il n’est pas question de nous opposer à l’idée de prendre en compte les victimes, mais leurs droits sont déjà garantis par d’autres dispositions, et il est totalement superfétatoire de les mentionner ici.

L’alinéa 18 cherche à combler le besoin de sécurité juridique. La commission est défavorable à cet amendement.

(L’amendement n1289, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n1283.

M. Denis Baupin. Il est défendu.

(L’amendement n1283, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n2707.

M. Denis Baupin. Il est retiré.

(L’amendement n2707 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n2708.

M. Denis Baupin. Retiré.

(L’amendement n2708 est retiré.)

M. le président. La parole est à Mme Sabine Buis, pour soutenir l’amendement n1942.

Mme Sabine Buis. Cet amendement tend simplement à soumettre les dispositions du droit minier aux droits et objectifs de la Charge de l’environnement adossée à notre Constitution. Dit autrement, il nous propose tout simplement d’engager la réforme du code minier qui est attendue par de nombreux acteurs depuis longtemps et qui est annoncée depuis 2012 lorsque nous avons été élus.

Durant l’année 2013, j’ai eu l’occasion de procéder, avec de nombreux collègues, à de multiples auditions sur le sujet, notamment dans le cadre de la commission du développement durable. Et je souhaiterais revenir un instant sur le sujet car j’ai rédigé cet amendement peut-être un peu trop vite en l’axant principalement sur les permis exclusifs de recherche.

L’objectif est de demander une réforme du code minier et en nul cas de stopper des projets.

Lorsque nous avons procédé aux auditions, la demande a été unanime, chez les industriels comme chez les ONG : il faut absolument réformer le code minier, car des projets sont en attente dans les tiroirs, parce que les industriels ne savent pas ce que va devenir le code minier dont la réforme est annoncée depuis si longtemps, et d’autres sont stoppés sur le terrain pour la simple et bonne raison qu’ils n’ont pas été soumis à la Charte constitutionnelle de l’environnement.

Ainsi, dans ma circonscription, un permis exclusif de recherche est en cours de renouvellement et expire le 31 mars 2015. Ce permis fait partie des permis dits blancs, sur lesquels certains n’ont jamais voulu faire émerger la vérité.

C’est pour cela, entre autres, que j’ai formulé mon amendement de la sorte. Il ne s’agit pas, je le répète, de prendre position dans un sens ou un autre par rapport au gaz de schiste, mais de proposer une vraie réforme du code minier qui permettrait d’un côté de faire avancer certains projets des industriels, et de l’autre de libérer des projets sur le terrain du côté des ONG.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. La commission a émis un avis défavorable à cet amendement. Toutefois, à titre personnel, il me semble que les arguments exposés par Sabine Buis sont intéressants et que, eu égard, d’une part, aux doutes persistants quant au recours, dans certains cas, à la fracturation hydraulique pour extraire des hydrocarbures non conventionnels et, d’autre part, aux sollicitations régulières dont la ministre chargée de l’écologie est l’objet, l’idée de procéder à un recensement définitif des titres et des autorisations suspects et d’en assurer le retrait complet de notre ordonnancement juridique va dans le bon sens. Mais c’est là mon avis, pas celui de la commission.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Vous avez raison de rappeler cet engagement important, qui a été pris dès 2012, de réformer le code minier. M. Tuot, qui a mené un important travail d’expertise et de consultation, a remis, à l’été 2014, une proposition de texte à mon prédécesseur, qui a été étudiée par les services compétents. Un texte, préparé par mon ministère à l’issue de ces travaux, est désormais prêt. Je vous propose de commencer, à partir de la fin du mois de février, des concertations sur la base du texte élaboré d’après les travaux de M. Tuot. Ce sujet va bien au-delà de la question des gaz de schiste, puisqu’il s’agit de rénover les conditions dans lesquelles on accorde ou on renouvelle les permis miniers dans notre pays.

Pour avoir eu à gérer beaucoup de cas de renouvellement ces dernières semaines, je perçois la difficulté que chacun pose, qu’il s’agisse de sensibilité, de transparence économique ou d’attentes de certains acteurs économiques. Il faut concilier ces différents principes. La concertation commencerait à la fin du mois de février afin de pouvoir soumettre un texte au conseil des ministres à l’automne. Un tel calendrier me semble raisonnable. Les parlementaires seraient évidemment étroitement associés au processus de concertation, je m’y engage, car je sais que vous y tenez tout particulièrement. Je sais que Ségolène Royal est également sensible à ce sujet et qu’elle partage mon objectif.

M. le président. La parole est à Mme Sabine Buis.

Mme Sabine Buis. Je m’étais promis de ne rien lâcher sur cet amendement tant il me tient à cœur, mais les propos du ministre sont très rassurants et je veux les croire. Je vais donc retirer mon amendement, sans me dire que je commets une erreur. Nous sommes dans la seconde moitié du mandat et il était temps de prendre des engagements. Je vous en remercie, monsieur le ministre, et soyez certain que je suis à votre disposition, comme de nombreux autres parlementaires, pour traiter de ce sujet au plus vite.

(L’amendement n1942 est retiré.)

M. le président. Vous gardez la parole, madame Buis, pour soutenir l’amendement n1722.

Mme Sabine Buis. Cet amendement me permet de revenir sur des échanges qui ont souvent lieu concernant la complexité du droit de l’environnement. Il est bon d’en identifier les causes. Comme je l’ai écrit dans l’exposé sommaire, la qualité du remède dépend de celle du diagnostic. On peut arriver à faire dire parfois tout et n’importe quoi à certaines situations. Cet amendement vise à compléter la première phrase de l’alinéa 20 par les mots « sur le fondement d’une étude d’impact préalable rendue publique par le Gouvernement » de façon que nous soyons en mesure d’y voir clair sur ce que l’on peut considérer comme des causes de complexité du droit de l’environnement et, à partir de cet examen, de mener un vrai travail.

À titre d’exemple, nous avons eu l’occasion d’étudier très récemment, à l’Assemblée nationale, une proposition de loi visant à exclure le principe de précaution du champ constitutionnel. Or, lorsque l’on se penche de très près sur la question, on constate qu’il n’existe pas de réelle jurisprudence en la matière. On faisait donc dire au principe de précaution des choses qui étaient fausses.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. La commission a émis un avis défavorable. Toutefois, je souhaite dire que ces études d’impact préalables à des ordonnances ou à l’avis du CNTE ne pourraient que contribuer à la transparence et à la clarté du débat, voire lever certaines ambiguïtés ou rassurer quant à la volonté de l’actuelle majorité de moderniser et de simplifier ce droit, tout en maintenant un haut niveau d’exigence environnementale.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. C’est le même. Il me semble que, dans son esprit, votre demande est satisfaite, madame Buis, parce que les projets d’ordonnance prévoient bien qu’il y ait des études d’impact qui seront rendues publiques. C’est peut-être moins lourd que le processus que vous envisagez et qui me conduit à avoir les mêmes réserves que le rapporteur, mais pour l’essentiel votre amendement est satisfait par le texte.

M. le président. Retirez-vous votre amendement, madame Buis ?

Mme Sabine Buis. Je le retire.

(L’amendement n1722 est retiré.)

M. le président. Vous gardez la parole, madame Buis, pour soutenir l’amendement n1102 rectifié.

Mme Sabine Buis. Si j’ai bien compris les propos du ministre tout à l’heure, il me semble que c’est sur cet amendement que nous pourrons nous retrouver. Lors des débats en commission, il était ressorti qu’un comité de liaison serait créé, permettant d’associer des parlementaires à la rédaction des ordonnances. C’était la garantie qui avait été donnée. Je propose au travers de cet amendement d’inscrire cette garantie dans le texte.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Les engagements répétés du ministre, y compris ceux qui avaient été formalisés par écrit relativement à l’article 28, mais aussi les propos du président Brottes, quand nous avons évoqué notre volonté que les commissions permanentes, en particulier celle du développement durable, assurent le suivi de ces travaux répondent à votre préoccupation. Vous pourriez peut-être retirer votre amendement, puisqu’une réponse lui a déjà été apportée. Toutefois, la commission y a donné un avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Ce qui est apparu à l’issue des réunions interministérielles sur ce sujet, c’est qu’il y avait un risque constitutionnel à l’inscrire dans la loi, à cause d’une fragilité juridique au regard de l’article 38 de la Constitution. Cela n’enlève rien à l’engagement que j’ai pris, mais le formaliser de cette façon fait courir un risque, me semble-t-il. Je serais plutôt tenté par une demande de retrait, pour rester cohérent avec mes propres engagements relatifs à la transparence, que ma loyauté à l’égard des arbitrages rendus m’a fait vous confirmer, mais ce sera une suggestion de retrait… molle (Rires.)

M. Jean-Yves Caullet. C’est la fatigue !

M. Emmanuel Macron, ministre. …puisque je vous ai habitués aux qualificatifs.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission spéciale.

M. François Brottes, président de la commission spéciale. On peut toujours créer des comités de liaison, mais la force qu’a une commission permanente lorsqu’elle désigne des corapporteurs des deux sensibilités principales du Parlement, c’est une force d’expertise, d’investigation ou encore d’exigence dans la communication de documents qui est bien supérieure à celle que l’on peut avoir dans un comité de liaison qui ne réunit qu’un grand nombre de gens de bonne volonté. C’est d’expérience, madame Buis, que je peux vous assurer que l’on a beaucoup plus de force avec des corapporteurs au sein d’une commission permanente qui définissent leurs exigences au titre du contrôle de l’exécution de la loi. Certes, l’un n’empêche pas l’autre, mais je voulais appeler votre attention sur ce point. Il ne faudrait pas que, au prétexte que ce comité de liaison existe, on se dise qu’il ne serait pas utile que la commission permanente concernée établisse un rapport sur la mise en application de la loi. Je soumets cela à votre réflexion.

M. le président. La parole est à Mme Sabine Buis.

Mme Sabine Buis. Réflexion faite, je maintiens mon amendement.

(L’amendement n1102 rectifié est adopté.)

M. le président. Je vais mettre aux voix l’article 28.

(L’article 28, amendé, est adopté.)

Après l’article 28

M. le président. La parole est à M. Philippe Vitel, pour soutenir l’amendement n3146.

M. Philippe Vitel. Cet amendement devrait vous plaire, monsieur le ministre, car il s’inscrit pleinement dans la logique économique et de simplification du droit que vous avez l’ambition de défendre. Nous proposons de réduire le délai de séquestre durant lequel le prix de cession d’un fonds de commerce est indisponible pour le vendeur. Aujourd’hui, ce délai est en moyenne de cinq mois et demi. Un tel délai n’est plus acceptable, ni économiquement, ni humainement, dans le monde difficile dans lequel nous vivons.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. La commission a repoussé cet amendement. Sur le fond, nous sommes d’accord avec votre proposition de simplification du régime de vente des fonds de commerce qui est ancien et, même sur certains points, archaïque. Conscients de la nécessité de simplifier ce régime, les pouvoirs publics l’ont déjà modifié en 2012. La principale réserve de la commission est liée au fait que si le problème soulevé a été analysé, les conséquences de l’amendement, elles, ne l’ont pas été. On pourrait craindre que les futurs créanciers bloquent l’accès aux financements, compte tenu d’une certaine fragilité et d’une réduction de leurs droits sur la vente du fonds de commerce. Il me semble qu’il serait plus opportun de retirer cet amendement. La question est bien posée, mais peut-être faudrait-il demander au Gouvernement de réaliser une analyse et de nous apporter quelques éléments de réflexion sur cet enjeu particulier, notamment sur l’évaluation de la procédure allégée mise en place en 2012.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Comme le rapporteur, je suis sensible à l’objectif poursuivi par votre amendement, monsieur Vitel. C’est parce que nous avons conscience de la nécessité de simplifier ce régime qu’en 2012 nous avons déjà allégé les contraintes pesant sur ce type de ventes. Il me semble que votre amendement propose de supprimer, à fin de simplification, plusieurs alinéas du code du commerce. Étant donné que cela n’a pas fait l’objet de la moindre étude de notre part, mon avis est donc réservé. Je peux m’engager à travailler sur ce sujet avec vous, dans la perspective de l’examen du texte au Sénat. Je suis en effet sensible au problème que vous posez, mais la réponse que vous apportez nous a semblé relativement disproportionnée. J’émettrai donc un avis défavorable. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Il n’y a eu aucune concertation. Techniquement, vous modifiez plusieurs articles du code, sans que j’en connaisse suffisamment les effets pour vous donner un avis favorable. Comme vous l’avez vu dans le laps de temps entre l’examen en commission spéciale et ici, je suis toujours prêt à travailler sur ce genre de sujet. Il faut parvenir à améliorer cet amendement, qui relève du bon sens. Je n’y suis pas opposé sur le principe. Je vous suggère donc de le retirer, tout en m’engageant à travailler sur ce sujet pour proposer une nouvelle disposition au Sénat.

M. le président. La parole est à M. Jean-Frédéric Poisson.

M. Jean-Frédéric Poisson. Je tiens à préciser, monsieur le président, que le groupe UMP était favorable à l’article 28 qui vient d’être voté. Je le dis pour que cela apparaisse au compte rendu.

M. le président. Cela y apparaîtra.

M. Jean-Frédéric Poisson. Monsieur le ministre, j’entends bien votre argument. Tout d’abord, et je vous le dis avec le sourire, parce qu’il nous reste encore quelques heures à passer ensemble dans l’hémicycle, si le motif selon lequel vous n’avez pas eu le temps d’évaluer l’impact des dispositions qui vous sont présentées justifie que vous n’y soyez pas favorable, à ce compte, monsieur le ministre, nous aurions fini l’examen de ce texte depuis fort longtemps ! Les indigences et les lacunes de l’étude d’impact dans son ensemble, sans parler même de tous les articles ajoutés en commission sans avoir fait eux non plus l’objet d’une étude précise…

M. Emmanuel Macron, ministre. Que nenni !

M. Jean-Frédéric Poisson. …auraient dû nous conduire à davantage de contention, si je peux m’exprimer ainsi.

Et puis je demande l’application de la jurisprudence Brottes, monsieur le ministre.

M. Richard Ferrand, rapporteur général. Mauvaise source !(Sourires.)

M. Jean-Frédéric Poisson. Il est beaucoup plus aisé de travailler à un amendement dans le cadre de la navette avec le Sénat quand il est déjà inscrit dans la loi. Puisque cela relève du bon sens, que vous êtes sensible au sujet et que vous réclamez des délais pour travailler, vous aurez tout le temps de le faire de manière cohérente et parfaite d’ici l’examen de votre projet au Sénat. J’enjoins l’Assemblée à voter cet amendement, que j’invite mon collègue à ne pas retirer.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Emmanuel Macron, ministre. Deux remarques, monsieur Poisson. La première, c’est qu’on peut ne pas partager la même appréciation concernant les études d’impact, mais qu’elles existent.

M. Jean-Frédéric Poisson. Pas pour tous les articles et donc pas sur toutes les mesures !

M. Emmanuel Macron, ministre. Certains professionnels les contestent, d’autres non, mais je ne peux pas vous laisser comparer l’approche qu’a eue le Gouvernement, avec des études d’impact et une concertation, avec l’approche d’un simple amendement. Je ne souscris donc pas à votre argument. Mais je sais qu’il était pour partie facétieux…

M. Jean-Frédéric Poisson. Pour partie seulement !

M. Emmanuel Macron, ministre. En revanche, monsieur le député, vous avez fait à raison référence à la jurisprudence Brottes, alors que pour ma part, vous l’avez compris, j’ânonnais ma fiche de banc avec un certain malaise.

M. Philippe Vitel. Ne vous autoflagellez pas ! (Sourires.)

M. Emmanuel Macron, ministre. Parfois, vos services vous font dire des choses dont vous n’êtes pas convaincu… En l’espèce, il n’y a pas de raison que vous ne soyez pas éligible à la jurisprudence Brottes (Sourires). Je vais donc donner un avis favorable à l’amendement n3146. J’ai d’autant plus de facilité à le faire que, pour le coup, cela ne dépend que de mes services et que je n’ai besoin d’un arbitrage interministériel pour prendre cette responsabilité. Nous le modifierons par la suite en vue du Sénat.

M. Jean-Frédéric Poisson. Je vous remercie !

M. Philippe Vitel. Monsieur le ministre, nous y sommes sensibles !

(L’amendement n3146 est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 2305 rectifié et 2787 rectifié.

M. Jean-Frédéric Poisson. C’est une affaire bretonne !

M. le président. La parole est à Mme Corinne Erhel, pour soutenir l’amendement n2305 rectifié.

Mme Corinne Erhel. Cet amendement vise à adjoindre aux études d’impact environnemental prévues à l’article L. 122-1 du code de l’environnement des études d’impact économique, notamment sur les conflits d’usage potentiellement induits par certaines activités. En effet, au regard de certains exemples récents, il me paraît important d’évaluer à la fois les conséquences d’une nouvelle activité sur un territoire et sur ses équilibres économiques, d’une part, et les conflits potentiels d’usage avec les activités économiques existantes et la mise en danger de l’emploi local d’autre part. Je pense en particulier à certains projets d’extraction en cours qui pourraient avoir un impact direct sur des activités économiques, impact dont il faut tenir compte.

Une telle disposition n’alourdirait en rien la procédure et permettrait au contraire d’anticiper les problématiques le plus en amont possible et d’éviter de se trouver en fin de procédure devant des difficultés.

Cet amendement soulève aussi la question de la mesure par l’État de l’impact micro-économique territorial des projets, qui est peu maîtrisée à l’heure actuelle.

M. Jean-Frédéric Poisson. Ça dépend des secteurs !

Mme Corinne Erhel. Il faut impérativement encourager l’État à développer ses compétences en la matière. Cela peut passer par cet amendement, mais aussi par la refonte du code minier. Il peut y avoir, dans les territoires, des activités économiques tout aussi importantes les unes que les autres mais qui se trouvent de fait en concurrence. Il faut pouvoir établir tout cela au préalable.

M. le président. La parole est à M. Richard Ferrand, pour soutenir l’amendement n2787 rectifié.

M. Richard Ferrand, rapporteur général. L’amendement de Mme Erhel a suscité le dépôt d’un amendement identique de la part de tous les rapporteurs, qui a été accepté par la commission spéciale. Nous le trouvons donc pertinent, tout en sachant qu’il place sans doute le Gouvernement dans une position inconfortable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur ces deux amendements identiques ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Par souci de cohérence, l’article 28 a plutôt pour objet de simplifier les études d’impact et je manquerais de constance si je vous disais que je suis ravi à l’idée d’en rajouter encore une. Je comprends très bien la préoccupation exprimée à travers ces amendements, qui correspond pour leurs auteurs à une réalité quotidienne. Néanmoins, une étude d’impact de plus alourdit ce projet, ce qui n’est pas la philosophie de l’article 28 que vous venez de voter.

En outre, je rappelle que l’étude d’impact prévue à l’article 28 comporte une description du projet qui permet de préciser son objectif et une esquisse des principales solutions de substitution justifiant son choix. Les conflits d’usage font partie des effets négatifs abordés par l’étude d’impact environnemental. Il faut se concentrer sur les études qui sont incomplètes ou déficientes, pas modifier le droit et alourdir les contraintes pour tous les acteurs concernés. Il faut être intraitable sur le respect de la procédure des études d’impact mais sûrement pas ajouter aux lourdeurs existantes.

Par ailleurs, les projets qui font l’objet d’une déclaration d’utilité publique donnent lieu à une évaluation socio-économique qui permet de la mettre en regard avec les impacts environnementaux. Enfin, l’instruction des demandes d’autorisation se fait aussi dans un objectif de développement durable.

Il me semble donc que le dispositif existant remplit l’objectif qui est le vôtre, madame la députée, messieurs les rapporteurs. Je le redis : c’est plutôt en étant plus intransigeant dans la pratique quant aux études d’impact existantes qu’on parviendra à répondre à vos préoccupations. Je demande le retrait de ces amendements, car leur adoption irait à rebours de l’objectif poursuivi à l’article 28.

M. le président. Madame Erhel, retirez-vous votre amendement ?

Mme Corinne Erhel. Je vais le retirer, mais j’insiste particulièrement sur la nécessité de clairement étayer la notion de conflit d’usage parce que pour le moment, comme le disait Jean-Yves Caullet, la question de la qualité des études d’impact en la matière se pose avec acuité. Je pense que ce point devrait susciter une particulière attention dans le cadre de la refonte du code minier.

(L’amendement n2305 rectifié est retiré.)

M. le président. Monsieur le rapporteur général ?

M. Richard Ferrand, rapporteur général. Je le retire, monsieur le président.

(L’amendement n2787 rectifié est retiré.)

M. le président. Je suis saisi de deux autres amendements identiques, nos 2306 et 2799 rectifié.

La parole est à Mme Corinne Erhel, pour soutenir l’amendement n2306.

Mme Corinne Erhel. Il faut que l’avis des élus locaux soit vraiment pris en compte, qu’il ne reste pas seulement un avis consultatif.

M. Jean Lassalle. Très bien !

Mme Corinne Erhel. Ils ont à l’évidence des remarques pertinentes à formuler sur les projets qui concernent directement leur territoire et, faisant ainsi la boucle avec mon amendement précédent, je souligne leur connaissance de l’éco-système et des équilibres économiques locaux, y compris en matière d’emploi. Cet amendement permettrait d’avancer sur ce point.

M. Jean Lassalle. Bravo !

M. le président. La parole est à M. Richard Ferrand, rapporteur général, pour soutenir l’amendement no 2799 rectifié.

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur ces amendements identiques ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Comme pour les amendements précédents, ajouter une procédure de plus irait à rebours de ce que nous venons d’alléger. Je rappelle que certaines procédures prévoient déjà la consultation des collectivités – pas forcément des élus locaux – et que leur avis est bien sûr pris en compte. La simplification que nous recherchons impose de ne viser que les avis obligatoires en application des textes en vigueur. Pour le reste, les préfets et autres autorités compétentes disposent d’une grande latitude pour consulter les collectivités, des organismes représentatifs ou des commissions spécialisées en fonction des enjeux des projets, et ils s’en servent. Pourquoi systématiser la demande d’avis alors que cet outil existe déjà et est dans la main du préfet ? Tout cela se gère au cas par cas, en veillant à la participation des élus, plutôt qu’en inscrivant dans la loi un principe qui alourdirait le processus sur tous les projets.

Je sais que certains préfets ou autorités compétentes ne demandent pas suffisamment l’avis de certains élus ou n’en tiennent pas assez compte. Je vois donc bien quel est votre objectif, madame Erhel, monsieur le rapporteur, mais je formule tout de même une demande de retrait, en m’engageant à transmettre votre préoccupation au ministre de l’intérieur afin que les élus soient bien pris en compte par les services compétents de nos ministères. Le Premier ministre est préoccupé en permanence par le sujet, il l’a évoqué encore récemment lors d’une récente réunion ministérielle sur les grands projets.

M. le président. La parole est à M. Yves Jégo.

M. Yves Jégo. Si ces amendements sont maintenus, je les voterai. Je comprends que le ministre veuille simplifier et ne pas rajouter de procédures mais, sur de tels sujets, les élus sont trop souvent laissés de côté. Quelles que soient les instructions du Premier ministre ou du ministre de l’intérieur aux préfets, tant qu’il ne s’agit pas d’une obligation inscrite dans la loi, on sait bien que les pratiques sont à géométrie variable. Il est très important de pouvoir ancrer dans la réalité des territoires les perspectives ouvertes par ces amendements.

M. le président. L’amendement n2799 rectifié est-il maintenu ?

M. Richard Ferrand, rapporteur général. Non, monsieur le président.

(L’amendement n2799 rectifié est retiré.)

M. le président. Et le vôtre, madame Erhel ?

Mme Corinne Erhel. Je le retire.

(L’amendement n2306 est retiré.)

M. Jean Lassalle. C’est dommage !

M. le président. La parole est à M. Philippe Vitel, pour soutenir l’amendement n756.

M. Philippe Vitel. C’est un amendement de cohérence avec l’amendement n3146 que nous avons adopté il y a quelques minutes avec votre soutien, monsieur le ministre, ce dont je vous remercie à nouveau. Le premier concernait le code de commerce, celui-ci est son pendant pour le code des impôts.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. À la différence de l’amendement précédent, celui-ci porte directement sur un point de fiscalité et devrait donc trouver sa place dans un projet de loi de finances ou dans un collectif budgétaire. C’est pourquoi l’avis est défavorable.

M. Nicolas Sansu. Et l’article 34 de la Constitution, monsieur Castaner ?

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Autant j’ai pu prendre mes responsabilités sur le précédent amendement, qui ressort de la compétence de mes services, autant celui-ci fait appel à d’autres compétences. Je ne respecterais pas un arbitrage interministériel si je l’acceptais. Je me suis engagé à travailler d’ici au Sénat sur le dispositif que vous avez proposé tout à l’heure. En attendant, je vous invite à retirer le présent amendement, car je ne peux pas vous donner un avis favorable.

M. le président. Monsieur Vitel ?

M. Philippe Vitel. Retiré.

(L’amendement n756 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Christophe Castaner, pour soutenir l’amendement n2687.

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. L’article 28 vise à contraindre l’autorité compétente à délivrer une autorisation d’urbanisme manifestement conforme aux prescriptions législatives et réglementaires, soit par injonction du juge, soit par substitution du représentant de l’État. Cet amendement complète le dispositif. J’en ai parlé plus en détail tout à l’heure à propos des alinéas que nous avons supprimés.

(L’amendement n2687, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Christophe Castaner, pour soutenir l’amendement n1448 rectifié.

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Il est défendu.

(L’amendement n1448 rectifié, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Michèle Bonneton, pour soutenir l’amendement n1300.

Mme Michèle Bonneton. Cet amendement vise à demander qu’un rapport soit remis au Parlement avant le 31 décembre 2015 sur l’évaluation des effets de l’ordonnance du 18 juillet 2013 relative aux recours abusifs et au contentieux de l’urbanisme, que j’évoquais tout à l’heure.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Sagesse.

(L’amendement n1300 est adopté.)

Article 29

M. le président. La parole est à M. Nicolas Sansu, inscrit sur l’article.

M. Nicolas Sansu. Cet article, dont nous proposerons la suppression avec l’amendement n2473, est issu du rapport du groupe de travail présidé par M. Daniel Labetoulle. Il vise à limiter le droit de demander la démolition de constructions édifiées en violation de servitudes d’urbanisme ou d’utilité publique et dont le permis de construire a été annulé, à l’exception des constructions implantées dans des zones protégées limitativement énumérées.

Cet article a provoqué la colère de plusieurs associations de protection de l’environnement. Le responsable du réseau juridique de France Nature Environnement indiquait par exemple : « Le message adressé est catastrophique : pour construire en violant les règles d’urbanisme, privilégiez le passage en force, une fois la construction réalisée, plus personne ne pourra s’y opposer ! »

Nous partageons ce point de vue. Il est indéniable que l’article 29 favorise la stratégie du fait accompli. Comme l’ont souligné plusieurs de nos collègues, il va inciter les maîtres d’ouvrage à achever rapidement le travail avant que le juge administratif ait pu suspendre le permis de construire. Le principe fondamental du caractère exécutoire des décisions de justice revêtues de l’autorité de la chose jugée est ainsi piétiné. Nous estimons que cela n’est pas acceptable et nous proposerons la suppression de l’article.

M. le président. La parole est à M. Jean Lassalle.

M. Jean Lassalle. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, tout en étant attentif au temps de parole qui me reste, je ne peux m’empêcher de m’exprimer : cet article, ainsi que les suivants, me renvoient à des épisodes de ma vie qui m’ont fait trop souffrir.

Mes collègues du groupe écologiste ne seront peut-être pas d’accord avec moi, mais je voudrais dire que j’ai parfois eu le sentiment que le milieu associatif de protection de la nature était impitoyable avec les faibles, ceux qui n’avaient guère d’incidence sur les atteintes à la nature, et obséquieux avec les puissants, ceux qui étaient capables de porter de très graves coups à l’environnement. En lisant cet article, je ne peux m’empêcher de penser qu’il y a trente ans, j’avais obtenu, au col du Somport, un permis de construire en bonne et due forme à l’intérieur du parc national des Pyrénées que je présidais à l’époque. Tout le monde avait donné son avis et l’on avait conçu un centre de jour pour la pratique du ski de fond, ce qui avait généré une petite activité économique à la frontière franco-espagnole, à un kilomètre des deux grandes stations espagnoles de Candanchú et d’Astún, célèbres pour avoir accueilli des années durant le roi d’Espagne et pour avoir failli accueillir les Jeux olympiques – si la communauté francophone avait voté pour les Espagnols ils les auraient eus, mais nous ne l’avons pas fait.

Au bout de deux ou trois ans, une association de protection de la nature, dûment encouragée par le WWF – dont je dirai un mot tout à l’heure – a porté une requête devant le tribunal administratif. L’affaire est montée jusqu’au Conseil d’État, et la construction a été déclarée illégale. Depuis, des milliers de skieurs, dont bon nombre sont de véritables défenseurs de la nature, se demandent quand les pelles monteront pour « déconstruire », puisque tel est le terme en usage, le centre du Somport.

Voilà pour cet article. Je me permettrai d’intervenir aussi sur les deux suivants

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements, nos 1306, 1382, 1907 et 2473, tendant à supprimer l’article.

La parole est à Mme Michèle Bonneton, pour soutenir l’amendement n1306.

Mme Michèle Bonneton. J’ai déposé cet amendement par précaution, au cas où la rédaction de l’article serait appelée à évoluer en cours de discussion. Si le ministre et le rapporteur me confirment que le texte tel qu’il a été adopté par la commission perdurera, je suis prête à le retirer. Nous avions en effet trouvé en commission spéciale un compromis intéressant.

M. le président. La parole est à M. Jean-Frédéric Poisson, pour soutenir l’amendement n1382.

M. Jean-Frédéric Poisson. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier, pour soutenir l’amendement n1907.

M. Philippe Vigier. Il est lui aussi défendu, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Nicolas Sansu, pour soutenir l’amendement n2473.

M. Nicolas Sansu. Ne voyant plus ni dans la liasse ni sur la feuille jaune l’amendement n2282, qui tendait à revenir à la rédaction initiale du projet de loi, je le retire, monsieur le président.

(L’amendement n2473 est retiré.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements de suppression ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Monsieur Sansu, votre sagacité vous a conduit à constater que votre propos liminaire n’était plus d’actualité, puisqu’il visait l’article 29 dans sa version initiale. Or celui-ci a été considérablement modifié à l’issue d’une longue discussion en commission spéciale, et il vous est proposé de maintenir en l’état cette dernière version du texte. L’amendement n2282 ne sera finalement pas présenté, ce qui devrait permettre, monsieur le rapporteur général, un triple effet Kiss Cool (Sourires) avec le retrait des amendements de suppression.

In fine, il vous est suggéré de ne pas supprimer l’article 29, dont je précise qu’il a comme seul effet de modifier le droit à la démolition dans le délai de recours une fois que l’annulation a été prononcée par le juge. Il était jusqu’à présent prévu que le recours soit possible dans les deux ans. Le projet de loi maintient le délai de deux ans pour les zones protégées ; pour les autres, il réduit à six mois – cinq ans donc après la délivrance du permis de construire – la possibilité de demander l’exécution, donc la démolition. Nous n’aurons donc pas à nous prononcer sur l’amendement n2282. J’espère avoir été clair !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Vous avez rendu hommage tout à l’heure au groupe de travail de M. Labetoulle et salué la transcription de quatre de ses propositions. Il s’agissait, dans la version initiale de l’article 29, de la cinquième. Rendons à César ce qui est à César !

L’intention n’était donc pas spécialement mauvaise, mais nous avons eu des échanges nourris sur ce sujet en commission spéciale, au cours desquels certaines inquiétudes ont été manifestées, que j’ai essayé de lever. Je redis aujourd’hui que l’article 29, dans sa rédaction initiale, ne remettait nullement en cause les autres instruments de démolition ou de suspension des travaux de construction, qui restent possibles sur divers fondements – nous en avons longuement débattu en commission spéciale – et n’affectait aucunement la possibilité de démolir des constructions illégales en zone rouge de plan de prévention des risques. S’agissant du droit civil, une construction réalisée en méconnaissance d’une autorisation de construire peut tout à fait donner lieu à une action en démolition en application des règles habituelles de la responsabilité civile, par exemple de l’article 1382 du code civil, dès lors que sont établis une faute, un préjudice et un lien de causalité entre les deux.

Quoi qu’il en soit, cela avait donné lieu à une discussion abondante. Je veux remercier tout particulièrement M. Le Bouillonnec, qui avait repéré des failles juridiques possibles dans le raisonnement initialement exposé. Un compromis avait été trouvé, qui a conduit à une nouvelle rédaction de l’article.

Celle-ci, reconnaissons-le, est beaucoup moins ambitieuse que la précédente, puisque, comme vient de l’indiquer votre rapporteur thématique, elle s’attache à réduire les délais, mais en aucun cas à revenir sur la démolition. Mais celle-ci fait toujours courir un risque à certains projets : voilà la question à laquelle le groupe de travail de M. Labetoulle essayait de répondre. Je comprends vos inquiétudes, mais il serait sans doute bon de laisser mûrir encore le sujet.

J’émettrai par conséquent un avis défavorable aux amendements de suppression, considérant que nous avons trouvé en commission spéciale un bon équilibre, sans remplir toutefois l’ambition initiale de la mesure, puisque les projets bloqués par le risque de démolition, qui peut perdurer très longtemps, n’auront toujours pas de solution. Mais dont acte.

J’aurai donc la volonté, dans mes prises de position ultérieures, de préserver cet équilibre, car celui-ci me semble améliorer l’existant, même si c’est de manière plus marginale que dans le texte initial.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je voudrais remplir l’espace entre les pointillés.

Depuis l’examen du texte en commission spéciale, nous avons continué à travailler. Au vu de ce que nous avions dit alors, je crois nécessaire de rectifier l’idée selon laquelle il serait quasi-impossible d’obtenir une démolition indépendamment du dispositif présenté. Il existe en effet d’autres modalités de démolition prévues par le code civil. Cela impose toutefois de prouver le lien de causalité, ce qui peut être un peu compliqué : le seul fait qu’il existe une décision juridictionnelle annulant le permis de construire ne crée pas automatiquement pour le voisin un droit à obtenir la démolition, encore faut-il qu’il existe un lien entre la construction et ledit voisin. Mais il existe bien une multitude de possibilités, certaines figurant dans le code de l’environnement. Je voulais le préciser car il se peut qu’il y ait eu une certaine confusion sur ce point lors du débat en commission spéciale.

Il est un deuxième élément que je voudrais porter à la connaissance du ministre, car je crois qu’effectivement, il faut poursuivre le travail. J’en profite pour remercier les services du ministère du logement qui m’ont permis d’avoir une meilleure compréhension de cet aspect du dispositif. La mission Labetoulle, dont l’article dans sa version initiale reprenait une proposition, suggérait de supprimer la règle actuelle s’agissant des constructions dans les zones de droit commun parce qu’elle considérait que cela créait un aléa pour toutes les opérations, quelles qu’elles soient, à partir du moment où un recours était déposé. Elle estimait que, pour éviter cela, il fallait favoriser les référés suspension.

Cela me semble très important, et vous aviez d’ailleurs évoqué ce point au cours de l’examen du texte en commission spéciale, monsieur le ministre. Le dispositif de référé suspension, qui peut accompagner le recours en contestation de l’autorisation administrative, est de nature à éviter que l’on se trouve au bout de six ou sept ans avec une construction d’une part et une annulation de l’autorisation administrative d’autre part. Je le dis non pas pour relancer le débat, mais pour inciter le ministre à continuer à travailler sur ce point. Il reste en effet des choses en pointillé et nous ne sommes pas allés au bout de nos réflexions sur la pertinence de cette proposition, peut-être en raison d’une volonté de trop bien faire.

Pour ma part, je ne ferai pas amende honorable, parce que cela ne se fait pas quand on est un Breton expatrié (Sourires) mais sur le fond, je reconnais que l’hypothèse de développer la procédure de référé suspension est peut-être le meilleur instrument pour éviter de se retrouver à la fin du compte avec une construction et un permis annulé. Il serait donc bon de travailler encore un peu au dispositif, avec toujours l’idée de ne pas nous montrer pousse-au-crime en donnant un blanc-seing à ceux qui construisent sans autorisation et espèrent voir leurs constructions perdurer même après des décisions juridictionnelles.

M. le président. La parole est à Mme Michèle Bonneton.

Mme Michèle Bonneton. Je retire mon amendement, monsieur le président.

(L’amendement n1306 est retiré.)

(Les amendements identiques nos 1382 et 1907 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de plusieurs amendements rédactionnels, nos 1824, 1825 et 1827, de M. Richard Ferrand.

(Les amendements nos 1824, 1825 et 1827, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier, pour soutenir l’amendement n1892.

M. Philippe Vigier. Il est défendu, monsieur le président.

(L’amendement n1892, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

(L’article 29, amendé, est adopté.)

Après l’article 29

M. le président. Je suis saisi de plusieurs amendements portant article additionnel après l’article 29.

La parole est à M. Gilles Lurton, pour soutenir l’amendement n1341.

M. Gilles Lurton. La loi littoral a permis, de mon point de vue, de protéger l’ensemble de notre littoral. Je suis donc de ceux qui estiment qu’elle a eu des effets extrêmement bénéfiques pour les côtes de notre beau pays. Néanmoins, sont aussi soumis à la loi littoral d’autres espaces que ceux à proximité des rivages. Dans ces zones, il y a des hameaux avec ce que l’on appelle des dents creuses : par exemple, entre deux maisons d’habitation en pierre, il y a un trou, un endroit où rien n’est construit. Cela se voit très bien dans ma circonscription.

Cet amendement est issu des conclusions du rapport des sénateurs Jean Bizet et Odette Herviaux. Il avait été accepté par le Sénat dans le cadre de la loi d’avenir sur l’agriculture. Malheureusement, à une voix près, la commission mixte paritaire l’a rejeté, ce que j’ai profondément regretté car il permettrait de résoudre un certain nombre de situations qui peuvent donner matière à conflits et de construire des habitations, sous certaines conditions et sans nuire à l’environnement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Je ne m’exprimerai qu’une fois sur l’ensemble des amendements touchant à la loi littoral. Si je comprends la problématique évoquée par M. Lurton, le sujet est extrêmement sensible et nous ne pouvons vraiment pas sans étude d’impact précise remettre en cause les fondements de cette loi. C’est pourquoi, sur l’ensemble des amendements en question, notamment celui-ci, la commission a émis un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Gilles Lurton.

M. Gilles Lurton. Je crois que l’étude d’impact a été faite, et les sénateurs Bizet et Herviaux se sont précisément fondés sur elle pour rédiger leur rapport. Avec Philippe Le Ray et Marc Le Fur, nous avons donc décidé de relancer cet amendement à l’occasion de l’examen de ce texte.

J’habite une zone littorale où l’on trouve le Mont-Saint-Michel, classé au patrimoine mondial de l’humanité par l’UNESCO, un périmètre protégé, trente-trois communes presque complètement gelées par ce périmètre protégé, un site classé – tout le long de la baie du Mont-Saint-Michel – et pour finir un plan de prévention du risque de submersion marine. Ainsi, vous avez plusieurs communes qui ne pourront plus rien faire sur leur territoire si on ne leur offre pas quelques ouvertures de nature à leur permettre de construire quelques logements.

(L’amendement n1341 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 495 et 3053 rectifié.

La parole est à M. Philippe Vitel, pour soutenir l’amendement n495.

M. Philippe Vitel. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Gilles Lurton, pour soutenir l’amendement n3053 rectifié.

M. Gilles Lurton. Cet amendement vise à permettre aux élevages existants qui se trouvent trop près du rivage de pérenniser leur outil de travail dans un monde économique en perpétuelle évolution.

(Les amendements identiques nos 495 et 3053 rectifié, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Gilles Lurton, pour soutenir l’amendement n3030.

M. Gilles Lurton. Il est défendu.

(L’amendement n3030, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Vitel, pour soutenir l’amendement n118.

M. Philippe Vitel. Il est défendu.

(L’amendement n118, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Article 30

M. le président. La parole est à M. Jean Lassalle, inscrit sur l’article.

M. Jean Lassalle. Nous touchons là à un des éléments – je ne parle pas uniquement des parcs nationaux, ni de la loi littoral dont notre collègue a d’ailleurs remarquablement dit qu’elle ne concernait pas que le seul rivage mais qu’elle concernait aussi des terres très, très en profondeur – qui ont énormément contribué à paralyser notre pays depuis une trentaine d’années. Je crois que nous n’avons pas su appréhender cette réalité, et cela a d’ailleurs nui à tout le monde, y compris certainement aux Verts ici présents. Ils seraient certainement parvenus au pouvoir s’ils ne s’étaient fourvoyés dans la défense de certaines causes où ils n’avaient rien à faire, des causes promues par des groupes qui étaient aussi attachés à la protection de la nature que moi je suis proche de la NASA, si vous voyez ce que je veux dire.

Bref, cela s’est passé ainsi et beaucoup d’erreurs ont été commises. Pour ma part, je peux vous dire que je n’éprouve pas grande satisfaction à habiter à l’intérieur du parc national des Pyrénées. Mon père, qui est maintenant parti loin de nous depuis longtemps, mon père qui était pétri de liberté, qui aimait passionnément son pays, qui l’a servi, mais qui aimait aussi le territoire dont il estimait avoir la charge, qui l’aimait au point d’avoir choisi d’y vivre – ce territoire qui, pour lui, était aussi la France, et aussi l’humanité – mon père faisait tout pour nous apprendre à respecter ce territoire, à l’aimer de toutes nos forces, parce qu’il pensait qu’il devait être géré en bien commun, parce qu’il pensait que c’était un bien commun de notre pays.

Mais malheureusement, on s’est cru obligé de copier une fois de plus nos chers amis et cousins, parfois frères, américains. Eux peuvent se permettre de faire des parcs nationaux : leur pays est tellement vaste qu’ils peuvent constituer d’immenses parcs nationaux – je les ai presque tous visités – avec, à deux kilomètres, les activités les plus sordides pour la nature et la planète. D’ailleurs, s’il advient qu’on trouve une mine de nickel à l’intérieur d’un parc national, on se montre beaucoup moins regardant que chez nous : on l’exploite, après avoir licencié les deux pauvres hères qu’on avait habillés l’un en trappeur, l’autre en hôtesse d’accueil plus charmante que verte.

Je ne pense pas que ce que nous avons fait soit vraiment de la protection de la nature. Je pense que nous nous sommes fourvoyés. Et, l’Europe naissant et cherchant à exister malgré notre manque de courage pour lui donner une ossature, un sens, nous avons laissé éclore toute une série de directives qui ont quasiment réduit notre pays à l’état d’immobilisme dans lequel nous le connaissons aujourd’hui.

Dans ma prochaine petite déclaration, je dirai un mot du WWF, à qui je voue une reconnaissance éternelle et que je trouve tout simplement admirable, je dirai pourquoi.

M. le président. La parole est à M. Patrick Bloche, pour soutenir l’amendement de suppression n821.

M. Patrick Bloche. Pourquoi avoir déposé cet amendement de suppression ? Il ne s’agit pas de remettre en cause fondamentalement la logique qui a conduit à ce que cet article 30 figure dans ce projet de loi, une logique de simplification et d’harmonisation. Mais hélas, elle amènera à étendre un peu plus le champ de la dispense de recours à l’architecte dans notre pays.

Vous le savez, notre pays, contrairement à beaucoup d’autres pourtant si proches, connaît cette tendance générale : deux tiers des constructions s’y font sans architecte, avec les conséquences que l’on sait. Ce sera donc aussi vrai, en vertu de cet article, pour tous les travaux de construction de bâtiments agricoles dont l’emprise au sol est inférieure à 800 mètres carrés. De ce fait, et sans étude d’impact, même s’il en est annoncé une, on se retrouve avec un article qui contrevient non seulement à l’esprit de l’article 4 de la loi du 30 janvier 1977 mais aussi et surtout avec son article 1er, article fondateur de cette loi sur l’architecture, qui dispose : « La création architecturale, la qualité des constructions, leur insertion harmonieuse dans le milieu environnant, le respect des paysages naturels ou urbains ainsi que du patrimoine sont d’intérêt public. » Cet intérêt public, nous voulons le préserver avec cet amendement.

On dit trop souvent, hélas, que la France s’est enlaidie au fil du temps. Le non-recours à l’architecte, tel qu’il s’est généralisé dans notre pays, y a contribué. Et puis, comment admettre cette idée reçue selon laquelle le recours à l’architecte aurait avant tout pour conséquences un surcroît de coût ? Cela pourrait se justifier pour les petits exploitants, d’où l’exception qui les vise, mais gardons à l’esprit que le recours à l’architecte, contrairement aux idées reçues, est un facteur d’économie. C’est ce que nous avons voulu démontrer dans un rapport qui a été publié au mois de juillet 2014 et qui s’intitule Pour une création architecturale désirée et libérée. Il est le fruit de six mois de travaux d’une mission d’information et a été adopté à l’unanimité de la commission des affaires culturelles et de l’éducation. Lorsqu’un architecte porte le projet de sa conception à sa réalisation, c’est un investissement, notamment dans la durée, un investissement qui évite les mauvaises surprises habituelles.

Voilà pourquoi Brigitte Bourguignon et moi-même avons déposé cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. De quoi parle-t-on ? Il ne s’agit bien évidemment pas de mettre en cause la qualité et la nécessité de l’engagement des architectes dans la construction, dans notre pays. Nous parlons en fait d’une situation un peu anachronique. La loi du 3 janvier 1977 a exempté les agriculteurs – à ce moment-là, l’ensemble des agriculteurs – de recourir à un architecte. La taille moyenne des hangars construits par les agriculteurs était alors de 800 mètres carrés. C’est ainsi que ce chiffre avait été retenu. Mais depuis lors, la forme juridique de l’exploitation agricole a changé. L’agriculteur indépendant a été remplacé par des GAEC, groupements agricoles d’exploitation en commun, ou des exploitations agricoles à responsabilité limitée. Aujourd’hui, la France compte 36 000 GAEC. Les pouvoirs publics, le ministère de l’agriculture encouragent cette forme juridique-là, qui permet de bénéficier d’un certain nombre d’accompagnements et qui est aujourd’hui prédominante.

Nous nous retrouvons donc dans la situation suivante : nous avons des agriculteurs indépendants qui peuvent ne pas recourir à l’architecte, parce que la loi du 3 janvier 1977 les en avait exemptés, alors que d’autres agriculteurs ont l’obligation d’y recourir. Je crois que c’est donc une mesure de simplification mais surtout d’équité que celle qui garantit les mêmes droits aux agriculteurs quelle que soit la forme juridique de leur exploitation, parce que ça ne change rien à la qualité de la construction des hangars. Il s’agit vraiment d’une harmonisation qui doit permettre à un nombre plus important d’agriculteurs de réduire les coûts d’investissement pour les extensions de bâtiment nécessaires à l’exploitation agricole, y compris – c’est un clin d’œil – à l’activité d’élevage, dont nous avons vu l’importance aujourd’hui et dont nous avons vu aussi à quel point des mesures de simplification lui seraient utiles.

La commission a donc émis un avis défavorable, mais tout en ayant bien en tête l’importance et la qualité, dans notre pays, de l’action des architectes dans la construction, que le président Bloche a raison de rappeler.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. L’article 30 a pour objet une simplification qui ne concerne que les exploitants agricoles et qui vient corriger, en effet, une forme d’aberration héritée de l’histoire : cette discrimination entre les agriculteurs indépendants et les agriculteurs exerçant leur activité dans le cadre d’un type de société, qui, eux, doivent recourir à un architecte pour toute construction d’une superficie supérieure à 21 mètres carrés.

C’est donc une véritable mesure de simplification, qui a été préparée avec mon collègue Thierry Mandon. J’émets donc également un avis défavorable. Sinon, on entérinerait une situation qui conduit à traiter différemment deux types d’exploitation.

J’annonce par anticipation que j’émettrai le même avis défavorable pour les amendements visant à déplafonner le dispositif ou proposant que le recours à un architecte fasse l’objet d’une dispense pour toute exploitation agricole ou tout type de bâtiment, sans aucun seuil et au-delà du raisonnable. Le périmètre de l’article est dicté par la volonté de simplification. Il s’agit de toiletter la distinction entre deux catégories de professionnels en fonction de leur statut juridique, qui n’a pas beaucoup de sens. L’unité se fait au bénéfice de la simplification. Il faut éviter de conserver des seuils n’ayant plus beaucoup de sens et d’en créer de nouveaux ou d’élargir le dispositif. Avis donc défavorable.

M. le président. La parole est à M. Gilles Lurton.

M. Gilles Lurton. Je renonce à mon intervention, car je partage tout à fait l’avis de M. le ministre.

M. le président. La parole est à M. Patrick Bloche.

M. Patrick Bloche. Je ne suis pas surpris des réponses du rapporteur et du ministre. Je m’y attendais même un peu. Je répète avec insistance que je ne conteste pas la nécessité de mettre fin à cette aberration due à l’évolution du type d’exploitations agricoles dans notre pays. La logique de simplification et d’harmonisation est limpide et je n’argumente pas contre. En revanche, j’en mesure le résultat : un nombre croissant de bâtiments agricoles seront construits, modifiés ou feront l’objet de travaux d’extension et d’entretien sans recours à un architecte. C’est la raison pour laquelle je me suis permis de déposer cet amendement. Il y a là une contradiction avec la stratégie nationale pour l’architecture que Mme la ministre de la culture et de la communication vient de présenter au nom du Gouvernement en mettant en place trois groupes de travail coordonnés par M. Nordemann. L’année 2015 verra le vote d’une grande loi sur la liberté de création, l’architecture et le patrimoine témoignant de l’intérêt du Gouvernement et de la majorité pour une profession qui vit très difficilement les réalités économiques actuelles, comme chacun sait. Tout cela se trouve contredit par le vote de l’article 30 ressenti par les 30 000 architectes de France comme le signal que l’on recourra moins à eux, soit tout le contraire de ce que le Gouvernement s’apprête à leur dire.

Mme Barbara Pompili. C’est vrai.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Emmanuel Macron, ministre. Sans prolonger les débats, je tiens à rassurer M. le député Bloche. Tout d’abord, j’ose espérer que les 30 000 architectes de France ne vivent pas grâce aux bâtiments agricoles d’une superficie comprise entre 12 et 800 m!

M. Philippe Vigier. Évidemment !

M. Jean-Frédéric Poisson. Cela vaut mieux pour eux !

M. Emmanuel Macron, ministre. Ne perdons pas de vue l’objectif de simplification, ni le fait que les exploitants agricoles qui construisent des bâtiments ont souvent de grandes difficultés à s’offrir les services d’un architecte. L’article 30 n’entame en rien l’engagement du Gouvernement, et vous avez raison, monsieur le député, de rappeler la stratégie présentée par Mme la ministre de la culture et de la communication. Notre objectif est plutôt de consolider la profession. Nous avons évoqué au cours de nos débats l’interprofession et plusieurs de vos collègues de toutes sensibilités ont proposé de moderniser la profession d’architecte et d’aider les jeunes à entrer plus facilement au capital. Il existe donc une vraie cohérence entre la stratégie de Mme la ministre de la culture et de la communication et ce que prévoit le présent texte. Mais nous parlons là d’une petite niche qui ne représente pas beaucoup d’activité. Je tiens à dire qu’il ne s’agit pas d’un signal hostile à l’encontre des architectes mais d’un signal de simplification et peut-être de soulagement pour certains exploitants agricoles. Soyez donc rassuré, monsieur le député.

M. Gilles Lurton. Ça, c’est la vie de tous les jours !

M. le président. La parole est à M. Patrick Bloche.

M. Patrick Bloche. Je retire cet amendement et laisse le soin à Brigitte Bourguignon de présenter un amendement de repli qui présente le double avantage de participer de la démarche de simplification et d’harmonisation promue par le Gouvernement et d’assurer les architectes que l’on continuera à recourir à leurs talents dans les exploitations agricoles, ne serait-ce que pour la qualité architecturale des bâtiments et la beauté de nos paysages.

(L’amendement n821 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements, nos 825, 496 rectifié et 3040, pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements nos 496 rectifié et 3040 sont identiques.

La parole est à Mme Brigitte Bourguignon, pour soutenir l’amendement n825.

Mme Brigitte Bourguignon. Je serai brève, car mon ami Patrick Bloche a déjà tout dit. Il s’agit d’un amendement de repli. Nous prenons acte du désir de simplification et d’harmonisation que vous manifestez, monsieur le ministre, et le partageons. Toutefois, nous proposons de modifier la législation en matière de bâtiments agricoles et de recours à l’architecte en tenant compte de la surface moyenne habituelle des bâtiments agricoles, qui est aujourd’hui de 470 mètres carrés. Abaisser à 500 mètres carrés le seuil de recours à un architecte garantirait la qualité des constructions. Mais j’aurai sans doute sur ce point autant de succès que mon collègue…

M. Jean-Frédéric Poisson. Cela n’a rien d’impossible ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Vitel, pour soutenir l’amendement n496 rectifié.

M. Philippe Vitel. Nous considérons pour notre part que les bureaux d’études spécialisés en agriculture sont seuls compétents pour assurer dans le cadre du projet architectural la prise en compte du bien-être des animaux et des risques de contamination sanitaire ainsi que le respect des règles environnementales. C’est pourquoi notre amendement propose de confier aux bureaux d’études spécialisés en agriculture les projets architecturaux des exploitations agricoles.

M. le président. La parole est à M. Gilles Lurton, pour soutenir l’amendement n3040.

M. Gilles Lurton. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. À propos de l’abaissement du seuil de recours à un architecte de 800 à 500 mètres carrés, j’évoquerai plusieurs arguments. Premièrement, la définition du seuil de recours à un architecte pour les bâtiments agricoles relève actuellement du domaine réglementaire et il n’est pas forcément utile d’en faire une disposition législative. Deuxièmement, abaisser le seuil à 500 mètres carrés créerait une inégalité entre les différents types d’exploitation agricole. Par exemple, la taille moyenne des bâtiments d’élevage de volailles est de 645 mètres carrés, mais de 325 mètres carrés s’il s’agit de porcs. La modification du seuil créerait une discrimination. Elle serait en outre cause d’un phénomène de perte de droit. J’ai dit tout à l’heure que le nombre de GAEC et d’exploitations agricoles à responsabilité limitée a augmenté, mais les agriculteurs indépendants constituent toujours une partie importante du monde de l’agriculture. L’abaissement du seuil les priverait du droit de ne pas faire appel à un architecte pour une surface comprise entre 500 et 800 mètres carrés ! Tel n’est pas le sens de la loi dont nous discutons.

Les amendements nos 496 rectifié et 3040 visent à substituer des bureaux d’études spécialisés en agriculture à l’architecte, dont Patrick Bloche a bien fait de rappeler toutes les qualités, si la surface excède 800 mètres carrés. Le risque que nous prendrions ici serait de priver les architectes d’un droit. Il me semble que la proposition prévue dans le texte est équilibrée car elle accorde des droits à tous les agriculteurs sans en retirer aux architectes, contrairement aux deux derniers amendements. Je suggère donc le retrait du premier et émets au nom de la commission un avis défavorable sur les deux derniers.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Bourguignon.

Mme Brigitte Bourguignon. Je retire l’amendement.

M. le président. La parole est à M. Philippe Vitel.

M. Philippe Vitel. Nous retirons également les nôtres.

(Les amendements nos 825, 496 rectifié et 3040 sont retirés.)

(L’article 30 est adopté.)

Après l’article 30

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques portant article additionnel après l’article 30, nos 497 et 3044.

La parole est à M. Philippe Vitel, pour soutenir l’amendement n497.

M. Philippe Vitel. Défendu.

M. le président. La parole est à M. Gilles Lurton, pour soutenir l’amendement n3044.

M. Gilles Lurton. Défendu.

(Les amendements identiques nos 497 et 3044, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

Article 31

M. le président. La parole est à M. Jean Lassalle, inscrit sur l’article.

M. Jean Lassalle. L’un des intérêts du texte à mes yeux est de mettre à plat les enjeux de notre pays afin de les comparer, les situer les uns par rapport aux autres et les sortir des boîtes dans lesquelles nous les avions soigneusement classés et séparés : l’activité d’un côté, l’écologie d’un autre, la culture d’un autre encore. Nous nous rendons compte ici, et c’est une bonne chose, qu’il faut bien une agriculture et des paysans, des ouvriers et de l’activité, sinon on plonge de plus en plus. De même, il faut protéger la nature. Les enjeux ainsi mis en perspective, on raisonne beaucoup plus sainement, tout en faisant avancer notre pays et en inspirant ceux qui nous regardent et tenteront peut-être demain de s’inscrire dans la démarche que vous avez entreprise, monsieur le ministre.

Cela étant, je ne peux m’empêcher de dire un mot de WWF, l’une des plus grandes associations de protection de la nature du monde, bien connue à ce titre, très différente d’ailleurs de Greenpeace, dont je ne dis rien mais que je connais un peu aussi. WWF, qui a fêté récemment son cinquantième anniversaire, a l’immense mérite d’avoir été créé par l’un des plus grands cigarettiers du monde, qui était d’origine néerlandaise et membre éminent du parti de l’apartheid en Afrique du Sud. Car, comme vous le savez, mes chers collègues, quelques Hollandais ont trouvé en Afrique du Sud leur paradis qui n’a malheureusement pas été celui de tous. Cet homme a découvert un adjuvant favorisant l’intégration de la nicotine au fond des poumons et donc l’accoutumance aux cigarettes très modernes que nous avons fumées dans notre jeunesse et que nos chers enfants fument encore. Tout cela n’est pas très joli, me direz-vous, et pour donner le change il a fondé la plus puissante des organisations de protection de la nature du monde, WWF.

Je suggère dès ce soir l’ouverture d’une commission d’enquête parlementaire afin de connaître les véritables sources de financement de cette organisation. J’ai eu le privilège de m’entretenir un jour avec ses représentants, grâce au président de la commission des affaires économiques, notre ami François Brottes. Je me suis aussi entretenu avec l’ancien PDG de Total – je ne choisis pas entre les uns et les autres, je dis simplement ce que je ressens. Bref, j’ai un jour découvert que WWF sponsorisait même des associations attribuant des notes aux députés – j’espère que ce n’est plus le cas. Nos électeurs peuvent en effet se renseigner auprès d’organismes scrutant la présence et l’attitude des députés à l’Assemblée nationale, étudiant s’ils se tiennent bien et s’ils sont sérieux ou non. Quelle joie et quel plaisir de découvrir qu’ils sont financés par WWF ! Être sponsorisé par des hommes d’une telle grandeur d’âme, diffuser dans notre pays une information financée par des hommes ayant donné un tel exemple de moralité, voyez-vous, cela m’émeut profondément.

M. le président. La parole est à M. Christophe Castaner, pour soutenir l’amendement n1563.

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Il m’oblige à parler avec moins d’émotion que notre collègue Lassalle, puisqu’il s’agit du déploiement des antennes relais. Voilà qui nous ramène sur Terre… Et pourtant, on prend de la hauteur, avec les antennes ! (Sourires.)

Pour faire simple, le dispositif de la loi Alur visant à améliorer le fonctionnement des copropriétés et les discussions entre les copropriétaires a eu un dommage collatéral concernant les dispositifs d’installation des antennes relais. Or vous savez tous que le déploiement du très haut débit mobile constitue, au même titre que celui de la fibre optique, un enjeu majeur pour notre pays. Cet amendement introduit donc une petite modification, en permettant de se prononcer à la majorité des présents, et non pas à la majorité des copropriétaires, ce qui constitue une procédure beaucoup plus lourde, pour décider de la mise en place de ces antennes collectives.

La profession est plutôt favorable à cette modification – le dispositif actuel bloque un certain nombre d’installations – d’autant plus qu’elle a des obligations d’organisation du réseau. Cet amendement tend donc à introduire une mesure de simplification du fonctionnement des copropriétés pour la seule question de la mise en place des antennes collectives. Nous avons déjà un dispositif simplifié pour l’installation de réseaux internes de communications électroniques, comme la fibre optique ou le câble, qui sont pourtant des procédures plus lourdes. Je vous propose donc d’adopter cet amendement, auquel la commission est favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Cet amendement va dans le bon sens et répond à un souci que beaucoup d’entre vous rencontrent. Complétant les dispositions du présent article, il favorisera un déploiement plus ample et plus rapide des antennes. Plus loin dans le texte, nous présenterons d’autres dispositions qui, en renforçant les contrôles sur les contrats d’itinérance, nous permettront de mieux couvrir le territoire en téléphonie mobile, ce qui est notre objectif à toutes et à tous. Je tenais à souligner la cohérence entre cet amendement et ce qui viendra plus tard. Avis favorable.

(L’amendement n1563 est adopté.)

(L’article 31, amendé, est adopté.)

Article 32

M. le président. La parole est à M. Philippe Folliot, inscrit sur l’article.

M. Philippe Folliot. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en ce qui concerne le déploiement et l’installation d’antennes dans notre pays, la situation varie fortement d’une région à l’autre, voire au sein d’un même département. Je voudrais vous interroger, monsieur le ministre, sur les moyens qui seront mis en œuvre pour atteindre l’objectif qui a été fixé. Que comptez-vous faire pour que les opérateurs soient contraints de couvrir les zones dites blanches ?

Dans mon département, dans ma circonscription, un certain nombre de communes ne sont pas tout à fait couvertes. La seule obligation est de pouvoir capter une communication juste devant la mairie : mais la mairie, ce n’est pas toute la commune, surtout en zone de montagne ! Le fait de ne pouvoir accéder au téléphone mobile peut poser des problèmes en termes de sécurité des personnes, mais c’est aussi une contrainte dans la vie quotidienne des habitants.

Le problème, du reste, dépasse celui de la téléphonie puisqu’on déplore plus globalement un faible déploiement des moyens de communication modernes, et notamment du haut débit. Dans la commune dont je suis maire, le réseau n’atteint pas 2 mégabits par seconde. Aujourd’hui, les entreprises ne peuvent plus fonctionner avec un débit aussi faible. Il me paraît donc important, monsieur le ministre, que vous nous donniez des précisions, au-delà du contenu de cet article, sur la manière dont les choses vont se passer.

Si on en est arrivé là, c’est qu’on a attribué des fréquences aux opérateurs de téléphonie mobile pour qu’ils couvrent le territoire national sans leur imposer aucune contrainte. Or les choses se passent toujours de la même façon : les opérateurs affluent dans les zones à forte densité de population, ils sont presque les uns sur les autres, alors que les zones rurales à faible densité de population en revanche ne sont jamais desservies, ou alors beaucoup plus tard. Si la loi donne des facilités aux opérateurs, il faut que chacun d’entre eux s’engage en contrepartie à couvrir une partie du territoire nationale à 100 %. Cette notion de contrepartie me semble essentielle.

La puissance publique a déjà pris, dans de précédents textes, des initiatives pour obliger les opérateurs à financer en commun un certain nombre de relais. Cela a permis de résoudre une partie des problèmes, mais certainement pas la totalité. Nous devons faire en sorte que toute la population française soit desservie de la même façon.

Dans leurs publicités, les opérateurs se vantent de couvrir 90 %, 95 %, voire 98 % du territoire national. Mais on ne parle jamais des 2 % qui ne sont jamais desservis ! On en arrive à des contradictions avec les politiques publiques. Un seul exemple : le ministère de l’agriculture demande aux agriculteurs de transmettre leur déclaration PAC non plus par courrier postal, mais par courriel. Si vous n’avez pas internet sur votre exploitation, ce n’est pas possible ! Il y a donc une contradiction entre les politiques de l’État et les possibilités offertes aux usagers sur le terrain. Nous espérons, monsieur le ministre, que vous interviendrez pour que, en contrepartie de ce que prévoit le présent texte, tous les opérateurs se montrent plus soucieux de résoudre les problèmes concrets auxquels nos concitoyens doivent faire face.

M. le président. La parole est à M. Christophe Castaner, rapporteur thématique.

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Je voudrais compléter ce qui vient d’être dit, et rappeler l’engagement, sur ces sujets, du Gouvernement, de l’Assemblée nationale et particulièrement de sa commission des affaires économiques. Celle-ci a reçu il y a quelques jours le nouveau président de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes – ARCEP, M. Sébastien Soriano, et l’a interpellé sur ce thème. Il s’est d’ailleurs engagé à revenir prochainement devant la commission pour aborder cette question de la couverture.

Je tiens également à préciser que l’ARCEP réalise chaque année, à l’automne, une enquête sur la qualité des services mobiles en France métropolitaine. L’article 33 quinquies que nous adopterons tout à l’heure, du moins je l’espère, nous fournira des outils qui nous permettront de renforcer les obligations qui incombent aux opérateurs de téléphonie. Pour vous donner un seul exemple, Free devra, au 1er janvier 2016, garantir qu’elle a atteint les objectifs qui lui ont été fixés dans le cadre de la licence d’exploitation qui lui a été accordée. J’ai noté que l’ARCEP avait estimé que Free avait atteint ses objectifs à mi-parcours.

Nous avons aujourd’hui les moyens d’être vigilants sur ces questions. Il faut encore compléter l’équipement, et nous verrons tout à l’heure, à l’article 33 quinquies, que les moyens, dans ce domaine, devront encore être renforcés pour atteindre les objectifs que vous évoquez.

M. le président. La parole est à M. Jean Lassalle. Je vous signale, monsieur Lassalle, qu’il ne reste plus aux députés non inscrits que sept minutes.

M. Jean Lassalle. Cela me suffira largement ! J’aurai fait ma petite moisson… Merci beaucoup, monsieur le président, de m’avoir supporté avec ce sourire qui ne vous a jamais quitté et merci également à vous, monsieur le ministre, qui m’avez subi avec un flegmatisme auquel je suis sensible.

Mon excellent collègue et ami Philippe Folliot a mis l’accent…

M. Jean-Frédéric Poisson. Philippe Folliot a l’accent, c’est sûr ! (Sourires )

M. Jean Lassalle. …sur le défaut d’équipement d’une partie de notre territoire. Il n’est pas besoin de faire le tour de la France à pied pour s’en rendre compte. Mais je peux vous dire, monsieur le président, vous que je suis venu visiter et qui avez bien voulu m’accueillir à votre domicile, comme Dédé le Rouge, Philippe Folliot et quelques autres, qu’il y a plusieurs France à cet égard. Tout le monde sait qu’à trente kilomètres d’une grande ville, tout fonctionne. À partir du trente-deuxième, cela dépend. Et à partir du quarantième, c’est beaucoup plus aléatoire. Et il n’est pas besoin de se trouver dans la France la plus profonde, ni dans les montagnes les plus vertigineuses pour être confronté à ce genre de situation : cela se trouve un peu partout.

Ces défauts du réseau de téléphonie, tous nos compatriotes les connaissent, parce qu’ils vont en vacances – et aujourd’hui, si nous ratons nos vacances, nous ratons notre vie : c’est le moment où, dans nos vies trépidantes, que l’on travaille ou pas, il faut à tout prix se reconstruire et se reconstituer en un temps record. Mais malgré tout, il faut un téléphone ! Or il y a des zones où il ne passe pas. Il y a même des zones où il faut faire cinq ou six kilomètres pour passer un coup de fil. Tout le monde sait cela, je n’y reviens pas.

S’agissant du numérique, les choses sont moins évidentes. Comme le disait Philippe Folliot, d’après les grands opérateurs, seuls 2 à 5 % de la population restent à l’écart. Mais combien cela représente-t-il de centaines de milliers d’hectares de territoires français ? Et qui sont-ils, ces 5 % ? Ce sont des hommes et des femmes qui entretiennent l’espace, qui contribuent considérablement à l’entretien de notre merveilleux pays, qui le gardent tel qu’il est, si beau, si varié, si exceptionnel ! Ces pauvres hères ont un débit internet qui rappelle les démonstrations que l’on nous faisait il y a quelques années à la télévision pour souligner la différence entre le haut et le bas débit.

Je ne vais pas me lancer à nouveau, à cette heure-ci, dans de grandes démonstrations : tout le monde a compris ce que je voulais dire. Mais il serait bon, monsieur le ministre, que vous nous disiez quelles orientations vous pensez prendre, au niveau de l’État, et quelles indications vous pensez pouvoir donner aux opérateurs. Car si l’État parle à ces groupes qui sont devenus très puissants, il aura peut-être les moyens de se faire entendre d’eux et de faire en sorte que 60 %, et peut-être davantage, de notre territoire cessent d’être une zone d’ombre. Moi, j’aime la lumière !

J’en ai fini, monsieur le président. Je laisse les trois minutes qui restent à mes autres collègues non inscrits ! (Sourires et applaudissements.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements de suppression de l’article 32, nos 581 et 2116.

La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement n581.

M. Dominique Tian. Je propose tout simplement de supprimer cet article…

M. Richard Ferrand, rapporteur général. Tout simplement !

M. Dominique Tian. …qui prévoit d’habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance des mesures qui relèvent de la loi. Une telle habilitation, comme chacun sait, dessaisit le Parlement et évite un débat de fond sur des mesures qui seront décidées unilatéralement par le Gouvernement. L’article 38 de la Constitution autorise cette procédure, mais chacun sait les problèmes qu’elle pose. Si M. Cherki est là, il interviendra dans le même sens dans quelques minutes.

Monsieur le ministre, vous avez affirmé devant la commission spéciale que la plupart des ordonnances étaient déjà écrites, ou sur le point de l’être, et que vous pourriez les présenter au Parlement lors de la discussion. Pourquoi, dès lors, ne pas les intégrer immédiatement dans le texte, afin de pouvoir en débattre ? Cela permettrait aussi bien à l’administration qu’aux acteurs concernés de gagner du temps.

Cet amendement demande donc la suppression de l’habilitation et une intégration directe dans la législation. J’ajoute que l’article 32, qui porte sur les télécommunications, transcrit une directive européenne. Il aborde notamment les servitudes radioélectriques bénéficiant aux opérateurs de communications électroniques, ce qui n’est pas rien. M. le rapporteur a fourni des indications techniques tout à l’heure qui nous ont fait penser, à l’UMP, qu’il serait préférable que ces questions ne soient pas traitées par ordonnance mais fassent l’objet d’un débat parlementaire, que nous appelons de nos vœux.

M. le président. La parole est à M. Pascal Cherki, pour soutenir l’amendement n2116.

M. Pascal Cherki. Sachant que 100 % des gagnants au loto ont tenté leur chance, je valide mon ticket « Suppression de la procédure des ordonnances » et j’attends le tirage. Monsieur le ministre, dites-moi si j’ai gagné !

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements de suppression ?

M. Richard Ferrand, rapporteur général. Je voudrais d’abord rappeler à ceux qui demandent la suppression de cet article que nous avons demandé, et obtenu, en commission spéciale qu’un grand nombre d’articles qui sollicitaient l’habilitation donnent lieu à des dispositions inscrites en dur dans le projet de loi. Cela explique d’ailleurs que le texte ait pris un peu de volume lors des débats en commission – certains s’en sont plaints. Cela a donc été le cas pour de nombreux sujets pour lesquels une demande d’habilitation était prévue.

M. Dominique Tian. C’était donc utile !

M. Richard Ferrand, rapporteur général. C’était utile, en effet. Comme l’ont rappelé avant moi Christophe Castaner et d’autres, nous aurons l’occasion de nous prononcer sur ces ordonnances à l’issue du travail de rédaction. On ne peut donc pas accepter que le respect de la Constitution soit en permanence analysé comme une violation des droits du Parlement, surtout lorsque la preuve inverse a été apportée au cours de nos travaux.

S’agissant dans notre cas de la transposition d’une directive éminemment technique, la réactivité nécessaire et le fait qu’il nous faille aller le plus rapidement possible dans l’intérêt général justifient cette demande d’habilitation que je vous suggère de soutenir. Retenons que sur l’ensemble de ces demandes, le Gouvernement a fait preuve de bonne volonté : il me paraît abusif de prétendre le contraire. C’est pourquoi la commission est défavorable à l’ensemble de ces amendements de suppression.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Même avis. Rappelons qu’il s’agit ici de transposer des directives extrêmement techniques et codées. C’est du reste souvent de cette façon que l’on procède lorsque la transposition est très contrainte.

Vous avez été plusieurs à soulever un point important, qui constitue une préoccupation plus que légitime : la couverture du territoire par les réseaux mobiles. Pour ce qui est du fixe, un plan très haut débit est en déploiement.

M. Philippe Folliot. Ça ne marche pas !

M. Emmanuel Macron, ministre. Nous en accélérons le déploiement, l’horizon est fixé à dix ans. Trois zones sont définies dans le plan de montée en charge et nous continuons à travailler avec les opérateurs. Des dispositifs avec les réseaux d’intérêt public sont mis en place pour essayer d’aller plus vite dans les territoires.

La mission très haut débit est chargée de gérer cela de façon très opérationnelle, et elle a vocation, au sein de mon ministère, à traiter chaque sujet. Un engagement est pris. De l’argent a été mis à disposition par la Caisse des dépôts, sous forme de prêts très longs pour financer la part dévolue aux collectivités locales dans les zones les moins rentables. Les dispositifs techniques et financiers sont donc en place. Si cela ne va pas assez vite, n’hésitez pas à solliciter la mission très haut débit, c’est son rôle et les dispositifs sont en place.

S’agissant du mobile, vous avez raison de dire que beaucoup de situations ne sont pas satisfaisantes. Nous en avons bien conscience et le Gouvernement est mobilisé. Nous voulons d’abord assurer la couverture des communes qui ne sont pas encore couvertes par la téléphonie mobile, ce que l’on appelle les zones blanches. Il y a environ 180 communes dans ce cas.

Il existe également beaucoup de zones grises : ce sont à celles-là que vous faisiez référence. Elles sont censées être couvertes, mais en fait on n’y capte que devant la mairie, pas à côté. Nous avons une très mauvaise cartographie de ces zones grises pour la téléphonie mobile. Il faut faire remonter plus facilement l’information et contraindre plus fortement les opérateurs privés à investir.

Cela rejoint les contraintes en matière d’itinérance qui figurent dans ce texte, en tout cas le contrôle accru que nous voulons mettre en œuvre. Il faut que les opérateurs investissent des capitaux dans des antennes, mais aussi dans le déploiement d’antennes existantes, beaucoup plus qu’ils ne le font maintenant. C’est un dispositif d’ensemble qu’il faut mettre en place. Cela ne se fera pas du jour au lendemain, il faut maintenant accélérer. Les dispositions du projet de loi portant sur l’itinérance et sur les antennes vont dans ce sens.

Au-delà, le Gouvernement veut aller plus loin pour couvrir les cas de zones blanches et de zones grises dès le premier semestre 2015, en se dotant du dispositif manquant. En ce moment, un amendement est en discussion dans le cadre du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République – NOTRe – sur ce sujet. Il mérite d’ailleurs d’être retravaillé et précisé, mais ce point manquant sera couvert par ce dispositif.

Il y a donc une vraie mobilisation du Gouvernement sur le sujet que vous avez évoqué, parce qu’il est particulièrement important. Nous devons aller plus loin sur la partie mobile. Entre le projet de loi NOTRe et la lecture du présent texte au Sénat, je veux que nous ayons trouvé une rédaction pour que la mobilisation pleine et entière soit effective.

M. le président. La parole est à M. Philippe Folliot.

M. Philippe Folliot. Monsieur le ministre, je prends acte de vos déclarations. Au-delà, les perspectives données par les opérateurs ne sont pas acceptables. Sur la communauté de communes que je préside, au cœur de la montagne tarnaise, l’opérateur historique, pour ne citer que lui, nous donne pour seule perspective d’avoir le haut débit – mais sans couvrir tout le monde – à l’horizon 2022. Il n’est pas possible, pour les usagers ou les entreprises, d’attendre 2022 ou 2024 pour espérer avoir un débit théorique de 20 mégabits par seconde, qui correspond souvent à un débit effectif de 8 ou 12 mégabits !

Au final, nous sommes condamnés à une forme de double peine, car ce sont les collectivités qui vont devoir investir pour pallier les manquements des opérateurs. Nous sommes une communauté de communes de 3 200 habitants, l’une des plus pauvres du département, et pour avoir accès au minimum, nous allons devoir débourser 200 000 euros l’année prochaine, pour amener le haut débit jusqu’au central d’Orange et que la population de quatre des huit communes de la communauté puisse bénéficier de ces 20 mégabits par seconde théoriques ! Ce n’est pas acceptable, et c’est profondément injuste pour nos territoires. Non seulement ils sont enclavés et doivent faire face à beaucoup plus de difficultés financières et de charges que d’autres territoires, mais en plus, pour avoir accès au minimum, ils n’ont aucune aide ! Quand on pense que pour d’autres territoires, on n’a que le très haut débit à la bouche… Si vous me permettez une métaphore, c’est comme si l’on voulait absolument une Ferrari pour ceux qui roulent en Vel Satis tandis que nous, qui sommes à vélo, on ne propose même pas de nous aider à acheter une mobylette !

La seule solution pour s’en sortir, monsieur le ministre, serait de dire à chacun des opérateurs qu’ils ont la liberté de s’installer où ils veulent, mais que chacun, s’ils sont quatre, doit s’engager à couvrir un quart du territoire national, avec des résultats concrets. Nous ne demandons pas à avoir tous les opérateurs, mais à en avoir au moins un qui fournisse du haut débit.

Pour la téléphonie mobile, le problème est exactement le même. Vous avez d’ailleurs bien résumé la situation, monsieur le ministre : quand il y a une antenne devant la mairie, elle ne couvre parfois que 5 à 10 % de la population de la commune ! Nos concitoyens ressentent une forme d’injustice dans ces situations, et il est important de mettre en place une réglementation assez contraignante à l’égard des opérateurs pour obtenir des résultats concrets et rapides. Donner une perspective de cinq ou dix ans, ce n’est plus acceptable.

M. le président. La parole est à Mme Michèle Bonneton.

Mme Michèle Bonneton. Dans les territoires plutôt ruraux que je connais, il y a des gens qui veulent venir habiter. C’est probablement pour la qualité de vie qu’ils y trouvent, ainsi que pour un certain nombre de services et la disponibilité des élus locaux, il faut bien le reconnaître. Ces personnes veulent travailler à domicile, soit à plein temps, soit quelques jours par semaine, ce qui a pour avantage de réduire considérablement les difficultés de transport – embouteillages, pollution et ainsi de suite.

Il y a là un fort potentiel de dynamisation des territoires et de croissance. Mais pour cela il faut que ce très haut débit soit offert rapidement partout dans les territoires. Il ne faut pas laisser ces territoires se désertifier, aller à vau-l’eau avec des services publics déclinants, à l’exemple de La Poste, problème que nous connaissons bien.

M. Dominique Tian. Avec le permis de conduire, ils auront du travail !

Mme Michèle Bonneton. Il faut donc vraiment aller vite pour éviter ce cercle infernal. Des délais de sept ou dix ans pour avoir le très haut débit partout me semblent beaucoup trop longs. Nous allons laisser ces territoires se désertifier et rater des opportunités d’activité.

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. Comme Philippe Folliot l’a très bien dit à l’instant, dans un tel texte sur la croissance et l’activité, le très haut débit est au cœur du problème. En Eure-et-Loir, nous faisons partie des trois premiers départements de France à avoir mis le paquet sur le très haut débit. Imaginez que pour ce seul département, nous y consacrons 140 millions d’euros sur cinq ans, dont 20 % sont payés par les collectivités locales ! Je regrette que dans un texte sur lequel nous avons d’aussi longs débats, aussi constructifs soient-ils, cette ambition-là ne soit pas plus marquée. Car derrière le très haut débit, il y a le télétravail, la télémédecine, les entreprises, qui ont besoin des 100 mégabits.

Monsieur le président Brottes, vous savez très bien ce que font les opérateurs. Lorsque je parle de 140 millions d’euros, ce n’est pas pour avoir la fibre à l’habitant sur tout le territoire, pas du tout ! Cela permet de desservir des zones d’activité et de disposer de la fibre à l’habitant dans les agglomérations. Dans mon département, cela concerne l’agglomération de Chartres : partout ailleurs, il n’y a jamais eu de fibre à l’habitant !

Le deuxième sujet, c’est le mobile. La situation ne s’est pas améliorée depuis dix ans. Philippe Folliot l’a très bien dit, il faut imposer des contraintes aux opérateurs. C’est la seule solution, si l’on veut y arriver.

M. Nicolas Sansu. C’est l’économie administrée !

M. Philippe Vigier. La seule chose que j’ai réussi à faire, c’est de mutualiser les opérateurs sur les antennes dans tout le sud du département. J’ai organisé un tour de table et ils ont payé les antennes ensemble. Cela m’a pris deux ans et demi. Alors, monsieur le ministre, je vous demande vraiment d’avoir de l’ambition sur ce sujet. On ne peut pas être ministre de l’économie et laisser passer cette chance pour notre pays : non seulement nous disposons des technologies et des savoir-faire, mais en plus cela implique des travaux publics ! Les travaux de passage de fibre sont considérables, et ils soutiendront l’ensemble du secteur.

Les opérateurs, à l’heure actuelle, et en particulier l’ancien monopole que vous connaissez bien, ne sont pas du tout enclins à déployer ces réseaux à la vitesse que l’on pourrait attendre. Pourtant, le développement économique est à la clé.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission spéciale.

M. François Brottes, président de la commission spéciale. Les propos de nos collègues m’inspirent quelques réflexions, en particulier ceux de Philippe Vigier. Je suis un rescapé de ce que l’on a appelé la mission câble en 1982, qui avait pour projet de câbler l’ensemble de la France. Lorsqu’il y a eu un changement de majorité, ce plan a été cassé. Je le regrette, parce que nous y serions arrivés et qu’aujourd’hui, cette question serait derrière nous.

Nous avons aussi échoué à intégrer les réseaux à haut débit dans le service universel de téléphonie. Du coup, ce n’est pas un service public parce que ce n’est pas dans le service universel. Là encore, c’est une bataille que nous avons perdue au niveau de l’Europe.

M. Dominique Tian. C’était la gauche !

M. François Brottes, président de la commission spéciale. Non, c’était après !

Ensuite, dans le modèle libéral qui est cher à beaucoup d’entre vous, nous sommes allé chercher une quatrième licence qui a complètement dénaturé les modèles économiques de déploiement des réseaux, qu’il s’agisse des réseaux mobiles ou des réseaux d’infrastructures fixes. Et l’on voit bien le résultat, tant pour nos équipementiers que pour ces modèles économiques, puisque plusieurs opérateurs sont aujourd’hui complètement fragilisés.

Si je fais ce petit feedback, pardonnez cet anglicisme, c’est parce que la situation dans laquelle nous nous retrouvons aujourd’hui est la conséquence des décisions prises. L’une d’entre elles a été de faire des enchères pour les licences, autre élément qui a largement contribué à fragiliser les modèles économiques. Bref, aujourd’hui, il nous reste nos yeux pour pleurer en regrettant d’avoir pris du retard.

Oui, nous avons pris du retard. Nous n’aurions pas dû casser le plan câble ni multiplier les opérateurs : de ce fait, les investissements sur les infrastructures sont aujourd’hui très en retard. Heureusement, les collectivités ont pris le relais – mais pas partout, ce qui crée une inégalité d’accès de l’ensemble des citoyens à un dispositif qui n’est pas un service public.

M. Philippe Vigier. Si !

M. François Brottes, président de la commission spéciale. Non ! L’annuaire ou le téléphone fixe sont une service public, mais pas les cabines téléphoniques ni les réseaux. C’est comme cela ! C’est l’état du droit dans ce domaine. On peut le déplorer tous ensemble, mais on a fait beaucoup de bêtises – je dis « on » pour généraliser, mais je pourrais donner des dates plus précises…

M. Richard Ferrand, rapporteur général. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Nicolas Sansu.

M. Nicolas Sansu. Mon intervention sera très brève car, contrairement au président Brottes et aux rapporteurs, je ne peux pas parler au nom de mon groupe sans que mon intervention soit décomptée de son temps de parole.

M. Dominique Tian. C’est aussi comme cela pour nous !

M. Nicolas Sansu. Oui, mais c’est très embêtant : nous ne pouvons pas rebondir sur les interventions de nos collègues autant que nous le souhaiterions.

Plusieurs de nos collègues, notamment du groupe UDI, sont très enclins à réclamer le développement du numérique, de la fibre et de la téléphonie mobile. Tout le monde ici va dans le même sens. Un certain nombre d’investissements très importants sont nécessaires sur nos territoires.

Cependant, comme l’a dit le président Brottes, la privatisation de l’opérateur historique n’a pas vraiment été une bonne chose pour le déploiement du très haut débit et de la téléphonie mobile. Si cette obligation avait incombé à l’opérateur historique quand il était un service public, nous n’en serions pas là.

Aujourd’hui, ce sont les collectivités territoriales qui prennent le relais, même si l’État affiche un certain nombre d’ambitions. Or, compte tenu de la baisse des dotations qu’elles reçoivent de l’État, et donc de la diminution de leurs investissements, nous connaîtrons bientôt de grosses difficultés pour déployer la fibre partout sur nos territoires.

(Les amendements identiques nos 581 et 2116 ne sont pas adoptés.)

(L’article 32 est adopté.)

Article 33

M. le président. La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement n582 rectifié.

M. Dominique Tian. Dans sa décision n2010-45 QPC, le Conseil constitutionnel a rendu inconstitutionnelles les dispositions législatives relatives aux noms de domaine sur internet, en raison de l’absence de précisions législatives suffisantes. Afin de maintenir un cadre législatif pour les nouveaux noms de domaine et éviter toute inconstitutionnalité, il est nécessaire de modifier le titre Ier de l’ordonnance n2014-329 du 12 mars 2014 relative à l’économie numérique, de manière à préserver l’applicabilité des articles L. 45-1 et L. 45-2 du code des postes et des communications électroniques à l’ensemble des noms de domaine de l’internet, ce que la rédaction de l’ordonnance empêche aujourd’hui.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. S’il existe une compétence nationale pour les noms de domaine en « .fr », tel n’est pas le cas pour les autres noms de domaine, en « .paris » ou « .bzh » par exemple. Nous ne sommes pas en mesure de les gérer. Le projet de loi ne peut donc pas régler cette difficulté. La commission a donc émis un avis défavorable, non sur la démarche, mais parce que nous ne sommes pas en mesure d’agir.

M. Dominique Tian. Cela règle tout, alors !

(L’amendement n582 rectifié, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

(L’article 33 est adopté.)

Article 33 bis

M. le président. La parole est à M. Christophe Castaner, pour soutenir l’amendement n1564.

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Amendement de cohérence rédactionnelle.

(L’amendement n1564, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Christophe Castaner, pour soutenir l’amendement n1755.

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Il est rédactionnel.

(L’amendement n1755, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Christophe Castaner, pour soutenir l’amendement n1670.

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Amendement de précision.

(L’amendement n1670, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 33 bis, amendé, est adopté.)

Article 33 ter

M. le président. La parole est à Mme Corinne Erhel, pour soutenir l’amendement n1664.

Mme Corinne Erhel. Je me réjouis que nous placions au cœur de nos débats la question des réseaux téléphoniques fixes et mobiles, qui soutiennent largement l’activité économique dans la mesure où ils sont facteurs d’importants investissements et d’emplois sur l’ensemble des territoires.

L’amendement n1664 vise à définir le « partage d’un réseau radioélectrique ouvert au public », qui comprend les prestations d’itinérance mais également de mutualisation des réseaux. L’objectif est d’étendre à ces sujets cruciaux le champ de compétences de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’ARCEP.

Le ministre l’a dit tout à l’heure : il est important de pouvoir poser un regard appuyé sur les contrats d’itinérance et les contrats de mutualisation, puisqu’ils sont au cœur de la stratégie d’investissement dans les réseaux télécoms.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Favorable. Il me semble que Mme Erhel a également déposé l’amendement n1669 à l’article 33 quinquies, auquel nous sommes aussi favorables.

M. François Brottes, président de la commission spéciale. Très bien !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Très favorable.

(L’amendement n1664 est adopté.)

(L’article 33 ter, amendé, est adopté.)

Article 33 quater

M. le président. La parole est à Mme Corinne Erhel, pour soutenir l’amendement n1672.

Mme Corinne Erhel. Si vous le permettez, monsieur le président, je défendrai en même temps mes amendements nos 3123 à 3129, qui résultent d’un travail de réécriture et de précision après l’adoption de l’amendement SPE702 en commission spéciale, lequel modifiait déjà l’article L. 32-1 du code des postes et des communications électroniques qui définit et répartit les compétences en matière de régulation entre le ministre chargé des communications et l’autorité de régulation.

Cette série d’amendements vient donc préciser le travail accompli en commission spéciale. Je le rappelle : la régulation a pour objectif d’atteindre le point d’équilibre entre l’investissement, l’emploi, l’innovation, l’aménagement du territoire et la protection du consommateur. Cette série d’amendements a pour objet de réintroduire la référence au ministre chargé de la consommation, mais également de préciser l’exercice du pouvoir réglementaire partagé entre le ministre en charge des communications électroniques et l’autorité de régulation des communications. Ils assignent également à la régulation deux objectifs supplémentaires : la promotion des numéros européens harmonisés pour les services à objet social et la levée des restrictions de technologies et de services pour maintenir une bonne transposition des dispositions.

L’ensemble de ces amendements s’inscrivent dans une démarche très cohérente avec le présent projet de loi : en effet, les investissements en matière de réseaux fixes et mobiles sont au cœur de la stratégie d’investissement et d’emploi et sont évidemment facteurs de croissance puisqu’ils sous-tendent toute l’activité et toute l’économie numériques sur l’ensemble de nos territoires.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Avis favorable sur l’ensemble de ces amendements, pas parce qu’ils ont été déposés par Mme Erhel, mais parce qu’ils sont de qualité ! (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Les amendements adoptés par la commission spéciale permettaient de clarifier très utilement le cadre des compétences partagées et de nous donner plus d’instruments pour appliquer une politique plus ambitieuse sur les sujets que nous avons évoqués précédemment. Avis très favorable à l’ensemble de ces amendements.

(L’amendement n1672 est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement n365.

M. Dominique Tian. Vous en êtes également signataire, monsieur le président : je le défendrai avec d’autant plus de vigueur !

À l’alinéa 8, la référence à la fourniture d’informations claires et à la transparence des tarifs et des conditions d’utilisation a disparu lors de la réécriture de l’article L. 32-1 du code des postes et des communications électroniques. On peut penser qu’il s’agit d’un oubli. C’est pourquoi Marc Le Fur et moi-même proposons de réintégrer ces notions très importantes.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Monsieur Tian, vous avez raison de dire que les préoccupations qui figuraient dans l’article L. 32-1 du code des postes et des communications électroniques sont importantes. C’est pourquoi elles ont été reprises à l’article 33 quater du présent projet de loi, qui réécrit ledit article du code et qui nous semble suffisamment clair sur ce point. La séparation de l’objectif prévu au 5° en deux objectifs distincts, comme vous le proposez, n’est pas en soi de nature à augmenter le niveau de protection des personnes visées. Pour autant, la transparence des offres commerciales comme la qualité du service fourni aux consommateurs par les opérateurs télécoms font évidemment bien partie des objectifs de l’action de l’État dans ce secteur. À défaut de retrait, j’émettrai donc un avis défavorable sur votre amendement, car l’objectif qu’il poursuit me semble satisfait par cette précision.

M. François Brottes, président de la commission spéciale. C’est clair !

(L’amendement n365 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Alain Tourret, pour soutenir l’amendement n3108.

M. Alain Tourret. Cet amendement vise à renforcer les dispositions clarifiant le rôle et les objectifs assignés au régulateur et au Gouvernement, concernant notamment les aspects relatifs aux utilisateurs consommateurs en matière de communications électroniques. La modification de l’alinéa 8 tend à réintégrer dans le corps du projet de loi l’objectif de « niveau élevé de protection des consommateurs ». En effet, dans le texte adopté par la commission spéciale, cet objectif est significativement rabaissé puisque seule la « protection des consommateurs » est évoquée.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Nous avons une incertitude quant à la définition d’un « niveau élevé ». L’objectif est plus simple encore : il est de faire en sorte que le Gouvernement et le régulateur assurent la protection des consommateurs. Nous sommes convaincus que l’un et l’autre tâcheront, comme ils le font déjà, monsieur le ministre, d’atteindre le meilleur niveau de protection possible. Quoi qu’il en soit, cette référence à un « niveau élevé » nous paraît poser un certain nombre de problèmes, à la fois juridiques et de cohérence rédactionnelle au sein du nouvel article L. 32-1 du code des postes et des communications électroniques. Avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission spéciale.

M. François Brottes, président de la commission spéciale. Dans un texte précédent, nous avons modifié la composition de la commission de régulation en prévoyant la présence de représentants des consommateurs, qui n’étaient plus membres du collège de l’ARCEP. Le niveau de protection est maintenant d’autant plus élevé que la voix des consommateurs a désormais droit de cité dans le processus de décision. Cette disposition est assez récente, puisqu’elle date d’un an, mais elle complète largement les objectifs figurant à l’article L. 32-1 du code des postes et des communications électroniques dans la version réécrite par Mme Erhel.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Monsieur Tourret, votre amendement est satisfait, dans sa philosophie, par l’amendement n3123 de Mme Erhel qui suit. Je vous invite donc à le retirer.

(L’amendement n3108 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 3123 et 3155, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à Mme Corinne Erhel, pour soutenir l’amendement n3123.

Mme Corinne Erhel. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Alain Tourret, pour soutenir l’amendement n3155.

M. Alain Tourret. Défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Favorable à l’amendement n3123 de Mme Erhel, comme je l’ai indiqué tout à l’heure. Je demande à M. Tourret de retirer son amendement n3155, puisqu’il est couvert par la proposition de Mme Erhel.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Emmanuel Macron, ministre. Même avis.

M. le président. Retirez-vous votre amendement, monsieur Tourret ?

M. Alain Tourret. Oui, monsieur le président.

(L’amendement n3155 est retiré.)

(L’amendement n3123 est adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Corinne Erhel, pour soutenir les amendements nos 3124 et 3125, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

Mme Corinne Erhel. Ils sont défendus.

(Les amendements nos 3124 et 3125, acceptés par la commission et le Gouvernement, sont successivement adoptés.)

M. le président. La parole est à Mme Barbara Pompili, pour soutenir l’amendement n2304.

Mme Barbara Pompili. Le présent amendement vise à mettre en cohérence les nouvelles dispositions du II de l’article L. 32-1 du code des postes et des communications électroniques, modifiées en commission spéciale, avec le troisième aliéna de l’article 1er de la proposition de loi relative à la sobriété, à la transparence, à l’information et à la concertation en matière d’exposition aux ondes électromagnétiques, adoptée, et nous nous réjouissons, lors de la journée d’initiative parlementaire du groupe écologiste le 29 janvier 2015. Il ne vise nullement à diminuer la couverture du territoire, mais à utiliser des moyens plus adaptés.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Avis favorable. L’ajout de cet objectif ayant été acté par l’Assemblée nationale le 29 janvier, il semble logique de l’intégrer après l’alinéa 12 de l’article 33 quater.

(L’amendement n2304, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements, nos 3126 rectifié, 3127 et 3128, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

La parole est à Mme Corinne Erhel, pour les soutenir.

Mme Corinne Erhel. Ils ont été défendus.

(Les amendements nos 3126 rectifié, 3127 et 3128, acceptés par la commission et le Gouvernement, sont successivement adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Alain Tourret, pour soutenir l’amendement n2904.

M. Alain Tourret. Nous proposons de compléter l’alinéa 14 par «, en veillant notamment à la préservation d’un espace économique viable pour les fournisseurs de services de communications électroniques entre leurs coûts de production et les revenus de détail », afin de veiller à la préservation d’un espace économique viable.

M. François Brottes, Président. Sobre.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Le présent amendement vise clairement la situation des opérateurs virtuels, dits MVNO. Si je comprends bien l’inquiétude qui entoure l’avenir de ces opérateurs, je ne crois pas pour autant que l’amendement soit justifié. Il aurait même pour effet de menacer les MVNO. Si ces derniers s’estiment lésés, ils doivent engager des procédures devant le régulateur sectoriel, gendarme de la concurrence. Il n’est ni nécessaire, ni opportun d’adopter cet amendement. Avis défavorable, donc.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Même avis.

M. Alain Tourret. Je retire l’amendement.

(L’amendement n2904 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Alain Tourret, pour soutenir l’amendement n2903.

M. Alain Tourret. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Défavorable.

M. Alain Tourret. Je le retire.

(L’amendement n2903 est retiré.)

M. le président. Vous gardez la parole, monsieur Tourret, pour soutenir l’amendement n3156.

M. Alain Tourret. Défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Défavorable.

M. Alain Tourret. Je retire l’amendement.

(L’amendement n3156 est retiré.)

M. le président. La parole est à Mme Corinne Erhel, pour soutenir l’amendement n3129.

Mme Corinne Erhel. Il est défendu.

(L’amendement n3129, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 33 quater, amendé, est adopté.)

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue le samedi 7 février 2015 à une heure quinze, est reprise à une heure vingt-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Après l’article 33 quater

M. le président. Je suis saisi de deux amendements portant articles additionnels après l’article 33 quater.

La parole est à M. Richard Ferrand, pour soutenir l’amendement n1565.

M. Richard Ferrand, rapporteur général. Il est défendu.

(L’amendement n1565, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Alain Tourret, pour soutenir l’amendement n2906.

M. Alain Tourret. Cet amendement vise à demander à l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes un rapport sur la situation des opérateurs des réseaux mobiles virtuels sur le marché français de la téléphonie mobile.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. La commission a émis un avis favorable, tout en soulignant qu’il existait déjà de nombreux rapports sur le sujet. Si vous retiriez l’amendement, cela éviterait d’avoir à assumer la charge d’un nouveau rapport.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Il peut être utile de faire analyser la situation des opérateurs mobiles virtuels, les MVNO. Ils représentent aujourd’hui un peu plus de 10 % du marché et contribuent à son animation. Ils peuvent aussi répondre à des besoins spécifiques des utilisateurs. Je comprends donc votre demande.

En même temps, l’ARCEP informe régulièrement sur ce sujet. Je vous inviterais donc plutôt à retirer cet amendement, si vous n’y voyez pas d’objection. En effet, objectivement, le sujet n’est pas substantiellement modifié par ces articles et, même s’il est important, il faut d’abord laisser l’ARCEP poursuivre sa surveillance du secteur, dont les MVNO, et donner suite aux nouvelles dispositions que vous aurez votées. À défaut de retrait, avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Alain Tourret.

M. Alain Tourret. Je retire l’amendement.

(L’amendement n2906 est retiré.)

Article 33 quinquies

M. le président. La parole est à M. François Brottes, pour soutenir l’amendement n1669.

M. François Brottes, président de la commission spéciale. Dans le prolongement de ce qu’a dit tout à l’heure Mme Erhel, je rappelle que la commission spéciale a adopté un amendement visant à donner à l’ARCEP une compétence qu’elle n’avait pas en matière d’intégration de l’itinérance, qui est un des moyens de conjuguer les pratiques en matière d’utilisation des fréquences mobiles, mais qui peut parfois perturber les investissements en matière d’infrastructures. La nouveauté de l’amendement n1669 par rapport à celui que nous avons déposé en commission est qu’il intègre également la mutualisation, qui est une autre méthode de partage, non des fréquences mais des pylônes. Cet amendement est plus complet : itinérance et mutualisation font désormais partie des compétences du régulateur en matière de régulation des télécommunications.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Avis bien évidemment favorable – comment aurait-il pu en être autrement devant un amendement de M. Brottes ? Les travaux de la commission avaient permis d’y voir plus clair à propos de l’itinérance. Nous les complétons maintenant avec la mutualisation, le présent amendement établissant les compétences de l’ARCEP en la matière.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Favorable.

(L’amendement n1669 est adopté et les amendements nos 703 et 2905 tombent.)

(L’article 33 quinquies est ainsi rédigé.)

Article 33 sexies

M. le président. La parole est à M. Christophe Castaner, rapporteur thématique, pour soutenir l’amendement n1566.

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

(L’amendement n1566, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. François Brottes, président de la commission spéciale, pour soutenir l’amendement n1671.

M. François Brottes, président de la commission spéciale. Il s’agit d’un amendement de coordination.

(L’amendement n1671, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Christophe Castaner, rapporteur thématique, pour soutenir l’amendement n1567.

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Il s’agit encore d’un amendement rédactionnel.

(L’amendement n1567, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 33 sexies, amendé, est adopté.)

Après l’article 33 sexies

M. le président. Je suis saisi de plusieurs amendements portant article additionnel_ après l’article 33 sexies.

La parole est à M. Christophe Castaner, rapporteur thématique, pour soutenir l’amendement n1569.

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Cet amendement tend à permettre aux collectivités locales, en cas de recours d’une décision de l’ARCEP, de se constituer partie civile devant la Cour d’appel de Paris ou la Cour de cassation en cas de contestation.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Favorable.

(L’amendement n1569 est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Christophe Castaner, rapporteur thématique, pour soutenir l’amendement n1568.

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Un problème juridique s’est posé dans le fonctionnement de l’ARCEP. Cet amendement tend à permettre au collège de l’ARCEP de déléguer une partie de ses fonctions au directeur général. Il a donc pour objet de faciliter la gestion interne de l’ARCEP et de se conformer aux bonnes règles du droit.

(L’amendement n1568, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Christophe Castaner, rapporteur thématique, pour soutenir l’amendement n1724.

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. L’amendement tend à confier à l’ARCEP la mission de publier, dans les six mois suivant la promulgation de la présente loi, des lignes directrices portant sur les conditions tarifaires d’accès aux infrastructures et réseaux de communications électroniques à très haut débit.

(L’amendement n1724, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Article 33 septies

(L’article 33 septies est adopté.)

Article 33 octies

M. le président. La parole est à M. Yves Blein, pour soutenir l’amendement n2552.

M. Yves Blein. Cet amendement tend à supprimer l’article. La question a déjà largement été débattue lors de l’examen de la loi-cadre sur l’économie sociale : nous nous étions interrogés sur l’opportunité de créer des agences régionales de l’économie sociale, ou plutôt de les inscrire dans la loi. En fait, ces agences existent déjà à l’initiative de certaines régions et n’ont donc pas forcément vocation à être dans la loi. En revanche, nous avions pris le parti d’inscrire dans la loi les chambres régionales de l’économie sociale, afin de rendre bien visible la nécessité et l’intérêt de faire intervenir les stratégies de l’économie sociale dans des logiques qui réunissent les acteurs.

Il ne m’a donc pas semblé utile d’inscrire à nouveau dans la loi, comme le fait l’article 33 octies, des agences régionales qui n’ont pas leur place dans un texte de cette nature.

M. Bruno Le Roux. Il a raison !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Il est tard pour engager une thérapie en tant que rapporteur, mais j’ai le souvenir douloureux d’avoir été mis en minorité en commission sur cette question par le président de la commission, voire par le rapporteur général. J’avais en effet le sentiment que l’amendement que nous avons accepté nous mettait quelque peu en contradiction avec l’accord politique que l’Assemblée avait trouvé avec le Sénat. Je m’étais donc opposé à cet amendement de nos collègues du groupe écologiste. Sur la pression cependant du président de la commission et compte tenu de ma jeune expérience, je n’avais pas osé m’arc-bouter sur ma position et j’ai été mis en minorité.

Si notre assemblée, du haut de sa sagesse, corrigeait cela, sur la base de l’amendement de M. Blein et avec la bonne volonté du président et du rapporteur général, peut-être cela nous permettrait-il à la fois d’assumer notre attachement aux enjeux de l’économie sociale et solidaire et de prendre acte du fait que cette disposition, qui partait d’une bonne intention, aurait des conséquences un peu contradictoires qui surchargeraient la mise en œuvre de nos politiques, au niveau notamment des exécutifs régionaux, auxquels nous sommes tous particulièrement attachés.

M. Jean-Frédéric Poisson. Quel curieux attachement à la région, monsieur Castaner !

M. le président. La parole est à M. le président de la commission spéciale.

M. François Brottes, président de la commission spéciale. Puisque le rapporteur me met en cause (Sourires), je rappelle que, lors de l’examen du texte en commission, l’avis d’expert de M. Blein, rapporteur de la loi sur l’économie sociale et solidaire, n’avait pas été exprimé avec la même fermeté et la même clarté que ce soir. S’il l’avait été, sans doute mon point de vue aurait-il été différent. Je me range donc aujourd’hui au vôtre, monsieur le rapporteur.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Sagesse.

M. le président. La parole est à Mme Michèle Bonneton.

Mme Michèle Bonneton. Lors de la discussion de la loi relative à l’économie sociale et solidaire, l’Assemblée nationale avait adopté cette disposition qui a pour objet de reconnaître les agences de développement qui existent déjà dans certaines régions. Il ne s’agit nullement d’une obligation : le texte de cet article 33 octies se contente d’offrir la possibilité aux régions d’avoir recours à des agences de développement, tout en reconnaissant et en encourageant celles qui fonctionnent bien.

M. le président. La parole est à M. Gilles Lurton.

M. Gilles Lurton. Pour ma part, je me rangerais volontiers à la position de M. Blein. Il n’est effectivement pas la peine d’ajouter encore de nouvelles structures à celles qu’a créées la loi sur l’économie sociale et solidaire – nous nous sommes suffisamment exprimés sur ce point lors de la discussion de cette loi. Je tiens simplement à noter que le problème de la loi sur l’économie sociale et solidaire n’est certainement pas celui-là, mais plutôt un problème de financement, lequel n’a pas été prévu dans le projet de loi de finances pour 2015, ce qui rend la loi très difficilement applicable.

M. Jean-Frédéric Poisson. Très bien !

(L’amendement n2552 est adopté et l’article est supprimé.)

Article 33 nonies

(L’article 33 nonies est adopté.)

Avant l’article 34

M. le président. La parole est à M. Frédéric Lefebvre, pour soutenir l’amendement n21, portant article additionnel avant l’article 34.

M. Frédéric Lefebvre. La France accuse un retard de 5 millions d’emplois marchands par rapport à l’Allemagne et à la Grande-Bretagne. Nous créons des entreprises, mais nous les créons trop souvent vides d’emplois marchands. Cette carence est imputable pour une bonne part à l’equity gap qui apparaît dès qu’une nouvelle entreprise démarre son activité. Pour la quasi-totalité des entreprises qui ont un potentiel de développement allant au-delà de l’emploi de leur créateur, et qui tôt ou tard auront besoin de fonds propres pour pouvoir employer d’autres personnes, ce besoin se situe entre 100 000 et 1 million d’euros. Elles ne parviendront à les réunir que si des « business angels » peuvent participer à leur développement.

L’objectif de l’amendement est donc que chaque individu puisse investir en direct jusqu’à 250 000 euros, et un couple jusqu’à 500 000 euros, déductibles à 30 %, avec l’exonération des plus-values au-delà de trois ans. C’est, vous le savez, la condition indispensable pour créer dans notre pays une vraie culture de l’investisseur providentiel, qui existe ailleurs, aux États-Unis notamment, mais qui manque cruellement en France.

M. Jean-Frédéric Poisson. Très juste !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Je comprends le problème posé par M. Lefebvre, mais cette augmentation serait disproportionnée par rapport au plafond de la réduction d’impôt sur le revenu Madelin. En gros, le présent amendement vise à quintupler les plafonds de versement Madelin. Son coût se situerait entre 100 et 200 millions d’euros. Dans le contexte budgétaire que nous connaissons, cela ne s’impose pas. J’ai du reste en tête que M. Lefebvre appartenait à une majorité qui a pratiqué plutôt le tour de vis que le tour d’échappement : de 2010 à 2012, le taux a ainsi été ramené de 22 % à 18 % et le plafonnement global est passé à 10 000 euros secs…

Cet amendement qui vise à quintupler les plafonds est donc très ambitieux. Nous ne sommes pas, au regard de l’intérêt de cette mesure, en situation d’accepter cet engagement financier de 200 millions d’euros – chiffre haut de la fourchette –même si ce dispositif a quelques qualités. La commission a donc émis un avis défavorable.

M. Frédéric Lefebvre. Vous oubliez ce que ces mesures génèrent en termes de développement des entreprises !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. Il faudrait faire passer un message aux créateurs, qui ont toutes les difficultés du monde à se financer, vous le savez mieux que moi. Lorsqu’on crée une entreprise, peut-on, oui ou non, mobiliser durant les trois premières années une société de capital-risque ? À quelle hauteur ? Dans les régions, notamment celle que je connais bien, quand une entreprise a pu recueillir 50 000 euros, elle est au bout du rouleau ! Alors si elle a besoin de 200 000, 300 000 ou 500 000 euros pour mettre au point un process et faire devenir ses produits opérationnels pour qu’ils puissent un jour embrasser un marché, comment faire ? Il n’y a pas de solutions, et les circuits bancaires sont absents.

M. Nicolas Sansu. Parce que les banques ne jouent pas leur rôle !

M. Philippe Vigier. Il est vrai que ce dispositif représente un effort financier de 200 millions d’euros. C’est important. Si nous voulons cependant, au moment où tant de jeunes partent à l’étranger, redonner à la France la culture nécessaire pour qu’elle soit une terre d’accueil, de développement et d’investissement, faisons ce qu’ont fait les Anglais avec les « business angels ».

M. Jean-Frédéric Poisson. De l’audace !

M. Philippe Vigier. À l’heure actuelle, nous ne sommes pas, en France, à la hauteur des enjeux qui sont devant nous. Dans une loi pour la croissance de l’activité, un tel signal en direction de la jeunesse semble nécessaire. Puisqu’il y a une difficulté et que les circuits de financement classiques ne marchent pas, il faut offrir une opportunité.

Enfin, il faut parvenir à drainer une partie de l’argent de ceux qui en ont vers les investissements productifs et innovants. Je rappelle que tous les abattements opérés sur l’ISF ont déjà permis de drainer plus d’un milliard d’euros par an vers les entreprises. Si nous n’avions pas fait ces abattements, ce serait un milliard d’euros de cash en moins pour ces entreprises et un handicap supplémentaire pour la France.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Emmanuel Macron, ministre. Je comprends l’objectif, mais le rapporteur a parfaitement expliqué pourquoi nous sommes défavorables à cette mesure. En effet, pour favoriser le financement en fonds propres des entreprises, il n’existe pas que les dispositifs d’avantages fiscaux. Nous aurons du reste l’occasion, à partir de l’article 34, de discuter des dispositifs que propose le Gouvernement pour favoriser les salariés, dirigeants ou créateurs d’entreprises, d’ETI ou de grands groupes, car c’est une préoccupation que nous partageons.

Pour ce qui est du financement en fonds propres, il existe d’abord l’investissement de la BPI, qui reste important pour la phase d’amorçage, avec 1 milliard d’euros par an, ce qui n’est pas rien. Ensuite, il existe déjà des business angels. Nous avons amélioré le dispositif et des articles importants ont été votés en commission spéciale. Un fonds de cofinancement de BPI France sera mis sur pied pour exercer un effet de levier permettant de démultiplier l’action des « business angels ». Nous avons aussi mis en place la société libre partenariat, qui est très importante car elle nous permettra de disposer d’un vrai véhicule pour le capital-risque et le capital investisseur. Et nous avons développé plusieurs modalités par exemple de crowdfunding pour personnes privées ou personnes morales – nous y reviendrons un peu plus tard dans la discussion.

Le dispositif de financement de notre économie s’est donc aujourd’hui nettement amélioré. Cette amélioration s’est accélérée parce que nous partageons cette préoccupation et qu’elle a, me semble-t-il, été traitée au-delà d’un dispositif fiscal sur les personnes physiques. Je ne suis pas en train de dire que tout est parfait, mais cela a été nettement amélioré.

Le manque que nous avons aujourd’hui se situe au niveau de ce que l’on appelle en anglais le venture capital, c’est-à-dire le deuxième ou le troisième tour de table. Cela reste un problème. La société de libre partenariat a pour but d’y répondre, mais cela suppose qu’on ait des éléments de réussite, une mise sur le marché et des sorties par rachat de ces start-up qui progressent. Cela permettra d’aller plus vite, plus loin, pour que les investisseurs prennent des tickets plus importants au deuxième ou au troisième tour de table. C’est là que la France a une petite défaillance de marché, beaucoup plus que dans les phases amont.

En termes de financement en fonds propres de nos entreprises et en particulier des start-up, comme vous l’évoquiez, nous avons un dispositif qui a sa cohérence même s’il reste encore à améliorer.

M. Frédéric Lefebvre. Il faut regarder dans d’autres pays ce qui se fait et ce qui fonctionne !

(L’amendement n21 n’est pas adopté.)

Article 34

M. le président. La parole est à Mme Karine Berger, inscrite sur l’article.

Mme Karine Berger. Nous abordons là la question du financement général des entreprises. C’est un sujet évidemment important, cela a déjà été souligné, mais ne nous trompons pas de débat : le financement des entreprises et de l’économie, ce n’est pas la question de la rémunération personnelle de ceux qui sont dans l’entreprise – sujet par ailleurs passionnant, qu’il soit économique ou social.

Le financement de l’entreprise, c’est la question de savoir si on peut lever des fonds propres en France. Il serait malheureusement difficile de répondre que oui, puisque notre épargne est essentiellement consolidée sur de l’assurance vie en fonds en euros. Cela va malheureusement en s’accélérant, puisque au cours des douze derniers mois, la part de ces fonds en euros s’est encore accrue. Il est donc très difficile de trouver du financement en France venant de l’épargne française pour des fonds propres.

Concernant la dette, les banques sont très frileuses dès qu’il s’agit de prêter à des PME, voire à des ETI. En outre, sur les bas de bilan, l’ensemble des mesures visant à limiter les durées de crédits inter-entreprises font que même cette partie-là est en train de baisser. Nous avons donc un risque de contraction des bilans de toutes les entreprises en France, risque d’ailleurs totalement cohérent avec la déflation européenne.

C’est contre ce risque que nous devons nous élever, en mobilisant des fonds propres et en faisant en sorte que l’épargne française aille sur des PME risquées, ce qui passe par une réforme très profonde de l’assurance vie, en sorte que les banques fassent leur métier et enfin en sorte que nos PME ne soient pas contraintes de faire sur leurs bas de bilan ce que des grandes entreprises refusent de faire sur leurs hauts de bilan.

M. le président. La parole est à M. Jean-Frédéric Poisson.

M. Jean-Frédéric Poisson. Avec cet article 34, nous entrons dans la partie du texte qui traite plus particulièrement de l’épargne salariale et de l’actionnariat salarié. Je veux rappeler à la représentation nationale que nous sommes passés de sept articles dans le texte initial à vingt-cinq dans le texte issu de la commission : c’est dire si elle a fait preuve de largesse et de créativité !

Nous nous contenterons d’intervenir de manière générale sur l’ensemble des articles. Je souhaite donner ici la position d’ensemble du groupe UMP sur cette question.

Lors de la commission spéciale, il a été acté que les conclusions du Conseil d’orientation de la participation, de l’intéressement, de l’épargne salariale et de l’actionnariat salarié ont été reprises, dans beaucoup de cas sous forme d’amendements, pour lesquels nous avons d’ailleurs souvent voté.

M. Nicolas Sansu, rapporteur spécial. Ça ne nous rassure pas…

M. Jean-Frédéric Poisson. Je signale ainsi la création à l’article 35 quater d’une nouvelle structure pour le capital investissement, la société de libre partenariat, pour aider au développement des entreprises innovantes. Je signale également l’application d’un taux réduit de forfait social à 16 % sur les plans d’épargne pour la retraite collectifs, les PERCO, investis en titres de PME, PMI et ETI, qui est prévue à l’article 35 nonies. Enfin, l’article 40 ter prévoit un taux de forfait social de 8 % au lieu de 20 % pour le premier accord de participation ou d’intéressement conclu au sein des entreprises de moins de cinquante salariés.

Globalement, monsieur le ministre, nous soutenons votre volonté de développer les dispositifs qui peuvent rendre le travail plus attractif et donner davantage de pouvoir d’achat aux salariés, et donc, évidemment, tout ce qui peut passer par l’épargne salariale dans les PME et les TPE. Il faut en effet rappeler à ce stade que 83 % des salariés des entreprises de plus de cinquante salariés bénéficient d’un dispositif d’épargne salariale, contre 20 % dans les entreprises de dix à quarante-neuf salariés et 12 % dans les TPE de moins de dix salariés. Il y a donc effectivement des efforts à soutenir !

Mais, monsieur le ministre, je veux quand même vous dire que, si vous vous félicitez de vouloir rendre l’épargne salariale attractive, on peut considérer que c’est une posture relativement nouvelle de la part du Gouvernement. Cette nouveauté, si elle est bienvenue, ne m’empêchera pas de rappeler, sans en faire des tonnes, la suppression de la défiscalisation des heures supplémentaires au tout début de ce mandat, qui mériterait qu’on y revînt de manière beaucoup plus détaillée. Ce sera sans doute le cas lorsque nous examinerons le titre III, puisque nous présenterons des amendements sur ce sujet.

Je rappelle également que le collectif budgétaire de l’été 2012 a porté de 8 % à 20 % le forfait social payé par les entreprises sur les sommes versées au titre de l’intéressement et de la participation, ce qui ne peut pas raisonnablement être considéré comme une mesure incitative. Vous semblez revenir à résipiscence, monsieur le ministre, concernant ces erreurs passées, ce dont nous nous félicitons. Dont acte.

Même si nous maintenons notre opposition à l’ensemble de ce projet de loi tel qu’il se profile, le groupe UMP soutiendra l’ensemble de ces dispositifs sur l’épargne salariale, même si nous aurions préféré qu’il allât un peu plus loin.

M. le président. La parole est à M. Nicolas Sansu.

M. Nicolas Sansu. Ce que vient de dire M. Poisson nous conforte dans notre point de vue.

M. Dominique Tian. Tant mieux !

M. Nicolas Sansu. L’article 34 est sans doute l’un des symboles de ce projet de loi. Il y est question d’adapter le cadre fiscal applicable aux actions gratuites en proposant de simplifier et d’alléger les modalités d’acquisition des actions gratuites.

Quelle est aujourd’hui la fiscalité des actions gratuites en France ? Elles sont soumises à l’impôt sur le revenu selon les règles de droit commun applicable aux traitements et salaires, comme cela avait été décidé, je crois, dans un projet de loi de finances rectificative pour 2012 ou dans le projet de loi de finances pour 2013. Vous proposez à la représentation nationale de modifier le traitement fiscal des actions gratuites pour qu’elles soient désormais imposées selon les principales modalités applicables aux plus-values mobilières.

Quelles conséquences cela a-t-il pour les détenteurs d’actions gratuites ? Concrètement, cela se traduit par un nouvel abattement de 50 % pour celui qui les détient pendant une période supérieure à deux ans. Vous nous dites, monsieur le ministre, que cela bénéficiera en premier lieu aux start-up, ces jeunes entreprises à fort potentiel de croissance dans lesquelles on offre des actions gratuites à des salariés dont les salaires sont traditionnellement peu élevés. Ces actions gratuites sont censées leur assurer une rémunération confortable à l’avenir, lorsque les affaires de l’entreprise seront florissantes.

Nous n’évoquerons pas ici le piège que peut représenter l’actionnariat salarié car ce n’est pas le point essentiel de ce que vous nous proposez. Le cœur du sujet est de savoir qui utilise aujourd’hui très majoritairement ce dispositif des actions gratuites, qui tirera profit de cet article et quel sera l’impact de votre proposition sur nos finances publiques.

Les révélations d’un célèbre hebdomadaire satirique la semaine dernière sont venues confirmer ce que nous craignions, à savoir que derrière l’arbre se cachait la forêt. En effet, monsieur le ministre, le dispositif des actions gratuites ne profitera pas, comme vous le prétendez, aux salariés et aux cadres dirigeants des start-up, mais d’abord aux dirigeants des grandes entreprises du CAC 40, qui en seront les principaux bénéficiaires.

Ainsi, comme l’a révélé ce journal satirique et contrairement à ce qu’indique votre exposé des motifs, les actions gratuites sont aujourd’hui massivement utilisées dans les grandes entreprises du CAC 40 à destination de leurs hauts cadres dirigeants. Ces entreprises ont ainsi distribué la coquette somme de 6,4 milliards d’euros d’actions gratuites pour la seule année 2014. Selon la même source, près de 90 % des distributions d’actions gratuites sont aujourd’hui réalisées par les entreprises du CAC 40.

Rappelons, pour être précis, que les évolutions de la fiscalité ont conduit à rendre la distribution de stock-options moins attractives et que les actions gratuites sont devenues un instrument désormais très majoritairement utilisé dans ces entreprises pour récompenser grassement les hauts cadres dirigeants. La réforme que vous nous proposez apparaît donc clairement comme un cadeau fiscal adressé aux grandes entreprises cotées, ce qui, compte tenu des efforts que vous exigez aujourd’hui des Français, n’apparaît tout simplement pas acceptable.

On apprend par ailleurs que les traders pourraient être les autres grands bénéficiaires de votre proposition d’allégement puisqu’en vertu d’une réglementation européenne, ils doivent toucher en action la moitié de leur bonus. Soyons clairs, monsieur le ministre : vous nous proposez de défiscaliser une partie de la rémunération des hauts dirigeants du CAC 40 et des traders.

Nous devons également nous pencher sur l’impact de ces dispositions sur nos finances publiques. Votre étude d’impact, un peu faible, table sur une baisse des recettes de l’État du fait de l’application de ces dispositions de l’ordre d’un peu moins de 200 millions d’euros pour 2016. Or, d’après les estimations réalisées par des cabinets privés et publiées par Le Canard Enchaîné, l’adaptation du régime fiscal des actions gratuites ferait perdre à l’État 900 millions d’euros par an : ce n’est plus un trou dans nos finances publiques mais bien un gouffre, voire un abîme, que vous nous proposez aujourd’hui ! Monsieur le ministre, quel sera le réel manque à gagner pour l’État dans cette histoire ?

En outre, vous négligez à notre sens l’effet d’aubaine permis par les dispositions que vous nous proposez dans la gestion de la rémunération des grandes entreprises, lesquelles seront tentées de faire basculer vers ce système défiscalisé une partie des rémunérations ; un effet d’aubaine alimenté par la baisse de la contribution patronale que vous proposez ici dans votre projet.

Pour toutes ces raisons, vous comprendrez que vous n’aurez pas notre soutien sur cet article. Bien au contraire, nous voterons un amendement de suppression.

J’ajoute que cet article a une vertu : celle de rouvrir la possibilité de placer des dispositions fiscales en dehors des lois de finances. Cela ne se faisait plus. Nous saurons exploiter cette jurisprudence dans notre règlement !

M. André Chassaigne. Excellent !

M. le président. La parole est à M. Luc Belot.

M. Luc Belot. J’entends bien les propos de M. Sansu, et notamment toutes les inquiétudes qui peuvent se manifester concernant les grandes entreprises : on nous parle régulièrement du CAC 40 et de la manière dont ces grands groupes peuvent parfois utiliser quelques biais fiscaux. Pour ma part, j’aimerais parler d’une autre réalité : celle de nos entreprises innovantes et de nos start-up qui, toutes, feront la croissance de demain et seront le CAC 40 dans dix ou vingt ans.

Ainsi qu’on l’a vu en commission spéciale, l’objectif aujourd’hui est d’accompagner très concrètement le développement de ces entreprises par le biais d’avantages salariaux, avec des actions gratuites. Il y a une grande différence avec les stock-options qui ont été évoquées tout à l’heure : il n’y a pas de prix fixé préalablement, puisque ce sont des actions gratuites, et donc pas de risque de chute du cours du titre. Mais c’est aussi ce qui fait toute la force du dispositif pour attirer des employés qui, avec une forte compétence, peuvent espérer une forte rémunération : ils viendront dans toutes nos entreprises innovantes parce qu’ils auront accès à ces actions gratuites.

Parlons de choses concrètes : quand une entreprise met exactement 100 euros pour ses actions dans le dispositif actuel, si ces actions sont revendues avant deux ans, et avec une tranche marginale assez classique de 30 %, le salarié ne touchera que 37 euros, contre 44 euros avec le dispositif de l’article 34.

Dans son amendement de suppression, Karine Berger évoque le fait que ce dispositif n’incite pas à l’investissement à long terme.

M. Frédéric Lefebvre. C’est tout l’inverse !

M. Luc Belot. C’est exactement l’inverse ! Pour les mêmes 100 euros, mais lorsque la revente se fait dans une période de deux à huit ans, on passe très concrètement à 56 euros pour le salarié, dans la même tranche marginale.

M. Frédéric Lefebvre. Très juste !

M. Luc Belot. Notre économie, nos entreprises innovantes, nos start-up ont besoin de recruter des personnels avec de fortes compétences mais n’ont pas toujours les moyens de les rémunérer. Qu’on arrête de nous faire peur avec quelques entreprises du CAC 40 : il y a des réalités économiques dont on a bien besoin aujourd’hui !

Mme Valérie Boyer et M. Dominique Tian. Bravo !

M. Frédéric Lefebvre. Bien parlé !

M. le président. La parole est à M. Pascal Cherki.

M. Pascal Cherki. Avant de rentrer dans le détail avec les amendements, je voudrais remercier sincèrement le ministre, qui n’a pas utilisé la procédure des ordonnances. Il y va à visage découvert et il assume !

M. Dominique Lefebvre. Oh, ça va !

M. Pascal Cherki. Merci donc, monsieur le ministre : vous avez abondamment recouru aux ordonnances et vous auriez pu le faire à nouveau, mais vous avez décidé que non. C’est un sujet extrêmement politique et vous assumez.

Cela étant, et mon compliment s’arrêtera là, se pose le problème du contenu que l’on assume. Je voudrais dire, avant d’entamer l’examen des amendements, que je suis toujours un peu gêné quand on fait l’apologie de la distribution des actions plutôt que de la hausse des salaires. Je fais sûrement partie de la vieille gauche, qui pense que dans une économie capitaliste, il y a un rapport entre le travail et le capital et que les salariés doivent être rémunérés à un moment donné avec des hausses de salaires.

Je n’ai jamais cru à ce fantasme du capitalisme populaire qu’avait essayé de nous vendre Édouard Balladur, en même temps qu’il organisait la privatisation du secteur public en 1986 avec, d’un côté, la théorie des noyaux durs qui étaient la réalité du pouvoir dans la recomposition capitaliste alors que, de l’autre, on amusait la galerie avec le capitalisme populaire. J’en suis resté là, et j’en reste là.

Deuxièmement, il faudra bien répondre à la question posée par Mme Berger. Jusqu’à présent, la fiscalité des actions était alignée sur celle des traitements et des salaires ; avec ce dispositif elle est alignée sur celle applicable aux plus-values mobilières. Cela pose question. Est-on en train d’inverser une logique, poursuivant sur la voie empruntée à la suite du mouvement des Pigeons ? S’agit-il de recommencer la même opération ? J’attends des réponses sur ce point.

Troisièmement, quelle conception a-t-on du temps quand on considère que le court terme c’est moins de deux ans, et qu’on parle de long terme à propos d’un investissement de cinq à huit ans ? Si on avait considéré que huit ans c’était le long terme, pensez-vous que la France aurait une filière nucléaire de cette qualité, une filière ferroviaire, une filière aéronautique de cette qualité ? Vous pensez que nous aurions pu connaître un développement industriel de cette qualité en considérant que le long terme, c’est huit ans ? Réfléchissons à ce que cela signifie quant à la durée de l’investissement industriel aujourd’hui de considérer un investissement de huit ans comme un investissement de long terme.

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. Naturellement le groupe UDI votera cet article 34, parce que nous n’avons pas un double discours, et notre discours est celui qui sera tenu tout à l’heure par Jean-Christophe Fromantin, qui défendra avec énergie et enthousiasme les financements interbancaires, les bourses régionales, le crowdfunding, les investissements innovants.

Après avoir entendu le plaidoyer formidable de notre collègue du groupe socialiste, il m’a semblé que quelque chose de l’ordre de l’esprit de Noël était en train de souffler. Quelque chose se passe dans les esprits s’agissant des entreprises innovantes : c’est là qu’on doit mettre le paquet, et l’amendement de Frédéric Lefebvre allait dans ce sens – et je n’ai pas été totalement convaincu par la réponse que vous lui avez apportée, monsieur le ministre.

Désormais l’économie repose en grande partie sur ces start-up et la capacité qui sera la nôtre d’accompagner ces PME-PMI. On ne peut pas passer son temps à se comparer à l’Allemagne sans s’en donner les moyens – ce qui veut dire faire plus qu’elle car elle a plusieurs longueurs d’avance –, et sans mettre en place des dispositifs plus incitatifs.

Il y a quelque chose qui m’a surpris dans l’ argumentation de M. Sansu, d’autant qu’il fait preuve d’habitude d’une vraie cohérence : voilà qu’il se réfère à des analyses réalisées par des cabinets privés pour vérifier la validité des études d’impact publiques.

M. Nicolas Sansu. Ce n’est pas moi qui ai diligenté cette étude !

M. Philippe Vigier. Erreur en-deçà des Pyrénées, vérité au-delà, comme chacun le sait.

Les réalités de l’économie s’imposent à nous. Il y a ceux qui disent qu’on ne peut pas échapper à la mondialisation et qu’il faut la considérer comme une opportunité de gagner de nouveaux marchés, et puis il y a ceux qui imaginent qu’on peut s’en protéger en érigeant des frontières, des murs, ce que je ne crois absolument pas. Je crois au contraire qu’elle peut être une opportunité pourvu qu’on fasse le choix de l’innovation, des technologies de pointe, de l’intelligence économique et qu’on accompagne les entrepreneurs qui prennent des risques. C’est comme cela qu’on retrouvera des marges et qu’on assurera la cohésion sociale. C’est comme cela qu’on trouvera les moyens de distribuer des dividendes, monsieur Chassaigne.

Si Michelin à Clermont-Ferrand n’avait pas pu développer les technologies que vous connaissez, on en serait où ? Ce groupe n’occuperait certainement pas le rang mondial qui est le sien aujourd’hui. Son centre de recherche n’est pas à Paris, ni au Brésil, mais bien en Auvergne.

C’est comme cela, mes chers collègues, qu’on ira chercher l’innovation et les savoir-faire. C’est en accompagnant le développement des secteurs d’avenir comme celui des biotechnologies ou des nanotechnologies, où nous conservons encore une certaine avance et sommes presque au niveau des Américains – un article de votre projet de loi vise d’ailleurs à favoriser le financement des entreprises innovantes, notamment dans le domaine de la biologie.

Les dispositifs que vous proposez ne sont pas encore assez puissants, et nous sommes là pour vous pousser à aller plus loin. Comptez sur notre pack pour pousser, comme dirait mon ami joueur de rugby Philippe Folliot, parce que c’est comme ça que nous comblerons notre retard par rapport à nos voisins. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI.)

M. le président. La parole est à Mme Valérie Boyer.

Mme Valérie Boyer. Même si je n’approuve pas le texte dans son ensemble, je considère qu’il y a là un point d’accord. Après l’épargne salariale, les actions gratuites vont dans le bon sens.

On connaît le succès de la journée « J’aime ma boîte » : il est bon de soutenir de petites entreprises comme les start-up – nous étions en train de nous dire avec Dominique Tian qu’elles seront nombreuses à Marseille à bénéficier de ce dispositif.

C’est pourquoi je suis stupéfaite que certains de nos collègues puissent considérer que cela va dans le mauvais sens. Ce qui va dans le mauvais sens, c’est d’assommer les Français d’impôts et de taxes, et non de leur permettre de participer au dynamisme de leur entreprise…

M. Nicolas Sansu. Surtout quand c’est payé par d’autres !

Mme Valérie Boyer. …et surtout de faire en sorte qu’ils s’y soient encore plus attachés en leur permettant d’en être des actionnaires actifs, quels que soient les moyens d’y parvenir.

C’est pourquoi nous soutiendrons cette mesure.

M. le président. La parole est à M. Christophe Castaner, rapporteur thématique.

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Autant j’ai pu avoir le sentiment, monsieur Sansu, que vous vous référiez au texte de l’article 29 tel qu’il était avant l’examen en commission spéciale, autant j’ai le sentiment que votre seule référence à l’occasion de l’examen de cet article est Le Canard enchaîné, qui n’est pourtant pas à mon sens la seule référence valable.

Je vous en citerai une autre, qui infirme votre affirmation que les entreprises du CAC 40 seraient les seules ou presque à utiliser ce type de dispositif. En effet l’analyse des chiffres de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l’ACOSS, et des déclarations faites pour l’année 2013, démontre l’inverse. Ainsi 68 % des actions gratuites distribuées en 2013 l’ont été par des entreprises de moins de 500 salariés et 80 % par des entreprises de moins de 2 000 salariés.

Ces chiffres montrent très clairement que ce ne sont pas les entreprises du CAC 40 qui utilisent le dispositif d’attribution d’actions gratuites, pour une raison simple : elles n’en ont pas besoin pour attirer les talents, puisqu’elles peuvent leur proposer des niveaux de salaires qui sont hors de la portée des petites entreprises.

Vous avez évoqué la question du long terme, monsieur Cherki. Deux ans, c’est court pour des filières industrielles comme la filière automobile, mais c’est déjà une durée significative quand on investit dans une start-up. Pour des business angels, un placement à deux ans, c’est déjà assez long. Je crois que le modèle industriel, qui nous est cher, est un tout petit peu dépassé sur ce dont il est question aujourd’hui.

Comment peut-on parler de cadeau fiscal, quand, pour les salariés, le taux marginal d’imposition passera en moyenne de 64,5 % dans le dispositif actuel à 62 % ? Ce n’est là que fantasme. On pourrait même dire que le taux proposé n’est pas suffisamment attractif pour les salariés. La suppression de la cotisation salariale de 10 % est presque effacée par le passage de 8 % à 15,5 % du taux de CSG-CRDS.

Cessons d’avoir peur des entreprises, surtout lorsqu’on souhaite qu’elles viennent s’implanter sur notre territoire. La région Provence-Alpes-Côte d’Azur, dont j’ai longtemps été vice-président en charge de l’économie, n’a cessé de se battre pour favoriser l’implantation d’entreprises sur son territoire, et dans ce combat elle a subi et subit encore la concurrence de territoires étrangers. Or en France, la fiscalité sur l’acquisition est quasiment à 96 %, contre 45 % en Allemagne. La question fiscale ne peut pas être séparée de la question de l’attractivité et doit être posée au regard du contexte dans lequel nous évoluons.

Il est donc faux de dire que ce dispositif est fait pour les entreprise du CAC 40 : elles n’en ont pas besoin et elles ne le demandent pas. Au cours des auditions que j’ai conduites sur ce sujet, aucune entreprise du CAC 40 n’est venue défendre ce dispositif.

M. André Chassaigne. Elles l’utilisent pourtant !

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. En revanche, il est défendu par de nombreux représentants des petites entreprises.

Il est faux de dire que ce dispositif est hyper-favorable aux salariés car le niveau de fiscalité demeure élevé, nous pourrons y revenir.

Il est faux enfin de dire que le choix de tels délais est un choix d’opportunité : ces délais sont adaptés à l’économie réelle de ces entreprises qui ont besoin de business angels pour les aider à financer des investissements particulièrement importants sur le court terme.

Il faut sortir du mythe et ne pas se contenter des informations contenues dans certain hebdomadaire. Il faut surtout savoir que ce dispositif permettra à nos entreprises, aux plus petites, mais aussi, pourquoi pas, aux plus grandes, de conserver des cadres de haut niveau plutôt que de les voir partir à l’étranger.

Je vais vous donner une dernière information. Le journal que vous avez évoqué estime que ce dispositif coûtera 900 millions d’euros à l’État. Or selon les chiffres de l’ACOSS, le montant total des actions gratuites attribuées était en 2013 de 800 millions d’euros. J’ai du mal à comprendre comment 800 millions d’euros distribués pourraient générer une recette fiscale de 900 millions d’euros. Si tel était le cas, non seulement l’impôt serait confiscatoire, mais il faudrait même qu’on sollicite les bénéficiaires pour qu’ils sortent de leur poche des fonds supplémentaires.

M. André Chassaigne. Ce sont vos chiffres ! Nous en avons d’autres !Vous dites des mensonges.

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Non, c’est la réalité : 800 millions d’euros distribués en 2013, avec un niveau de fiscalité déjà très élevé, ne peuvent en aucun cas générer 900 millions d’euros de recettes fiscales.

M. André Chassaigne. C’est votre vérité !

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Ce sont les chiffres de l’ACOSS. Vous pouvez les contester…

M. André Chassaigne. Nous n’avons même pas le temps de vous répondre !

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. M. Sansu a parlé très longuement de ce sujet…

M. André Chassaigne. Non, pas longuement ! Il ne nous reste presque plus de temps.

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. … et c’est pour lui répondre que je lui indique les chiffres de l’ACOSS. On peut toujours les mettre en cause, mais c’est la réalité décrite par l’ACOSS.

M. André Chassaigne. C’est insupportable d’entendre cela.

M. le président. La parole est à M. Nicolas Sansu.

M. Nicolas Sansu. Je veux bien tout entendre, monsieur le rapporteur, à condition qu’on ne biaise pas les chiffres. Vous dites que ce sont à 80 % des entreprises de moins de 2 000 salariés qui distribuent des actions gratuites, mais quelle est leur valorisation boursière ? Si vous vouliez vraiment limiter le bénéfice de ce dispositif aux petites entreprises, vous n’aviez qu’à fixer un seuil de valorisation boursière au-delà duquel il n’aurait pas été possible de le mettre en place, et l’affaire était réglée.

M. Pascal Cherki. Il a raison !

M. Nicolas Sansu. Aujourd’hui je peux vous assurer que ce sont d’abord les grandes entreprises du CAC 40 qui vont bénéficier de ce nouveau dispositif.

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. C’est faux !

M. Nicolas Sansu. Mais non, monsieur Castaner, ce n’est pas faux ! Croyez-moi, elles sauront très bien profiter de l’aubaine.

M. le président. Nous en venons à l’examen des amendements.

La parole est à Mme Karine Berger, pour soutenir l’amendement n2788.

Mme Karine Berger. Je défends cet amendement avec mes collègues Valérie Rabault et Pierre-Alain Muet.

L’article 34 nous propose de réduire considérablement l’impôt sur le revenu des personnes qui reçoivent des actions gratuites, puisqu’il s’agit d’un abattement de moitié de l’impôt sur le revenu sur la première partie des gains, la partie plus-value étant elle imposée à l’identique.

Pour nuancer quelque peu l’analyse de mon collègue Belot, la modification porte sur le début de la durée de détention de l’action gratuite : aujourd’hui déjà plus on garde longtemps une action gratuite, plus la fiscalité est favorable. Cela va de soi : c’est la rémunération de la prise de risque dans le temps.

L’article 34 nous propose de réduire massivement l’impôt sur le revenu sur la première période de détention de l’action. La condition de durée de détention, qui était jusqu’à présent de quatre ou cinq ans, est réduite à deux ans, soit une perte de trois ans dans la définition du long terme, et pour une baisse d’impôt sur le revenu très importante pour les personnes dont le taux d’imposition est très élevé. Les exemples cités par le rapporteur Castaner partent de l’hypothèse de ménages imposés au taux marginal le plus élevé, signe d’ailleurs qu’il estime dès le départ que ce sont ces personnes qui seront concernées, ce qui ne manque pas d’intérêt.

Quelles sont les entreprises touchées ?

Bien évidemment, nous sommes tous d’accord ici pour considérer que les prises de risque des entreprises innovantes et des petites start-up, au départ, doivent être soutenues.

Mais, monsieur le rapporteur, vous venez justement de nous démontrer que le cœur de cet article vise les actions gratuites distribuées par les grandes entreprises. Pourquoi ?

Parce que, selon l’ACOSS, 68 % des entreprises de moins de 500 salariés ont distribué des actions gratuites en France. Or, vous le savez comme moi, 90 % des entreprises, dans notre pays, emploient moins de 500 salariés.

Cela signifie donc que, parmi celles qui distribuent des actions gratuites, la représentation des grandes entreprises est trois fois supérieure – cela concerne, et c’est bien naturel, les entreprises qui sont en mesure d’utiliser ce mode de rémunération. J’en ai moi-même bénéficié lorsque je travaillais dans le secteur privé en tant que cadre dirigeant.

M. Richard Ferrand, rapporteur général. Bravo !

Mme Karine Berger. Mais l’attribution d’actions gratuites, c’est mon troisième point, n’est pas toujours liée à des objectifs de performance.

Je ne sais, monsieur le ministre, si comme moi vous lisez chaque année le rapport de l’Autorité des marchés financiers, l’AMF. Elle a la gentillesse d’analyser le mode de rémunération des cadres dirigeants en France et elle a mis en évidence que, l’année dernière, seules trois entreprises n’avaient pas conditionné leur distribution d’actions gratuites à des critères de performance : deux entreprises du CAC 40, que je ne nommerai pas, et une entreprise qui a attiré mon attention, Eurazeo, le fonds d’investissement bien connu qui est effectivement classé PME ou ETI et qui, l’année dernière, a distribué un grand nombre d’actions gratuites sans aucune corrélation avec les performances attendues de ses salariés.

L’AMF l’a relevé de façon un tout petit peu négative eu égard aux dispositions du code AFEP-MEDEF.

Nous devons réfléchir aujourd’hui à la façon de faire évoluer cet article 34 afin que votre objectif, qui est de rémunérer ceux qui prennent des risques au sein des start-up et des petites entreprises, n’entraîne pas dès cette année la perte de150 millions sur 200 millions en raison de l’habitude prise, tout à fait naturelle et non critiquable, consistant à utiliser une partie des actions gratuites pour rémunérer des cadres dirigeants de grandes entreprises, de fonds d’investissement ou de banques.

M. le président. Sur l’amendement n2788, je suis saisi par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

Quel est l’avis de la commission sur cet amendement ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Plusieurs éléments pour compléter et peut-être éclairer les propos de Karine Berger.

Tout d’abord, non, je n’ai pas travaillé sur l’hypothèse du taux marginal d’imposition à 45 %. Je peux vous dire ce qu’il en est au taux de 30 % ce qui est cohérent pour un cadre de haut niveau…

M. Nicolas Sansu. Trente pour cent, c’est le taux moyen, mais le taux marginal est de 45 %.

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Je peux, monsieur Sansu, vous donner les chiffres au taux de 30 %, au taux de 41% et au taux de 45 %, qui est celui de la tranche supérieure.

Lorsqu’un employeur distribue pour 100 euros d’actions gratuites, en l’état, il reste au bénéficiaire, selon qu’il est imposé à 30 %, 41 % ou 45 %, respectivement, 37, 29 ou 26 euros. Inutile de vous dire que la mesure est assez peu attractive.

Dans le nouveau système – nous ne sommes pas en train de faire des cadeaux aux salariés – lorsque l’employeur y consacrera 100 euros, le bénéficiaire, gardera respectivement, selon son taux marginal d’imposition, 44, 35 ou 32 euros.

Vous le constatez, la fiscalité est encore relativement élevée. S’il reste 32 euros au salarié, cela signifie tout de même que le prélèvement fiscal global s’élève à 68 euros.

Je le répète : la tranche de 45 % n’est pas la seule concernée.

En outre, s’agissant des prélèvements sociaux sur les entreprises, toute différence de traitement entre les PME, les ETI et les grandes entreprises est juridiquement interprétée comme une aide publique de l’État et entrerait dans le cadre du régime de minimis que l’on connaît et dont le plafond se situe à 200 000 euros.

Nous ne sommes donc pas dans cette situation. En revanche, le Gouvernement a prévu d’aider les petites entreprises grâce à une fiscalité plus avantageuse. Voilà la réalité !

Je souhaiterais maintenant compléter les propos de Karine Berger.

J’ai dit que 80 % des actions gratuites étaient distribuées par des entreprises de moins de 2 000 salariés et 68 % par des entreprises de moins de 500 salariés.

Les plus grandes entreprises – les 10 % restantes – bénéficient en effet de 20 % du volume global du dispositif et sont donc un peu sur-représentées mais ce sont plutôt elles qui font beaucoup de recherche-développement et qui recrutent des cadres de haut niveau.

C’est donc cela, la réalité dont nous parlons. On peut continuer de prétendre que 15 ou 20 milliards sont distribués – alors que ce ne sont pas les chiffres de l’ACOSS –, on peut continuer à affirmer que seules les entreprises du CAC 40 bénéficient du dispositif. Ce n’est pas le cas.

M. André Chassaigne. Personne ne dit cela.

M. Jean-Frédéric Poisson. Les grandes entreprises en bénéficient aussi.

M. Dominique Tian. En effet ! Il faut l’assumer.

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Aujourd’hui, les bénéficiaires sont essentiellement des entreprises de taille moyenne qui n’ont pas les moyens de recruter les meilleurs cadres grâce aux seules rémunérations. Elles pourront demain bénéficier d’un dispositif amélioré – dont la fiscalité, entre nous, demeure tout de même assez lourde – qui sera un peu plus attractif que précédemment.

Si nous voulions une attractivité optimale, il faudrait aller beaucoup plus loin mais cela impliquerait une forte baisse des recettes fiscales et telle n’est pas la proposition du Gouvernement.

Voilà la réalité de ce dont nous parlons, le reste n’étant en partie que fantasmatique.

M. Dominique Lefebvre. Très bien !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur cet amendement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Je reviens sur nos discussions.

L’article 34 ne traite pas du sujet du financement de l’économie, problème relevant pour partie de dispositions que nous avons prises ou qui seront discutées et, pour partie, de règles prudentielles que des dispositions législatives françaises ne peuvent à elles seules faire évoluer. Elles sont d’ailleurs largement insatisfaisantes – vous avez évoqué le cas des assureurs, madame la députée Berger, et il est tout à fait exact que les règles prudentielles sont aujourd’hui très défavorables au financement de notre économie.

Si nous parvenions à les modifier là où elles doivent l’être, nous pourrions sans doute largement réorienter des flux financiers vers l’activité productive, en particulier, la première ressource de l’épargne financière française.

Je ne reviendrai pas sur ce que j’ai déjà dit quant aux dispositifs de financement de l’économie que nous avons mis en place et que nous allons continuer de développer. Nos échanges concernant l’épargne salariale iront dans le même sens : financement de l’économie sur le long terme grâce à l’implication des salariés.

Mais ici, nous évoquons des éléments de rémunération de salariés et de cadres dans une optique que nous assumons totalement et qui est la volonté d’attirer des talents. Il s’agit de favoriser l’implantation en France des entreprises les plus performantes.

Je serai parfaitement clair avec vous : l’objectif, ce sont les start-up, les ETI et les grands groupes.

M. Dominique Tian. C’est tout le monde.

M. Emmanuel Macron, ministre. Les grands groupes français contribuent à la compétitivité française. Telle est notre histoire industrielle ! Les entreprises du CAC 40 sont premières de cordée et tirent les autres. Telle est la réalité !

À juste titre, mon prédécesseur avait demandé un rapport à l’Inspection générale des finances sur les risques de délocalisation des grands groupes. Certains en effet ne manquent pas de nous reprocher qu’ils partent, ou que leur comité directeur se délocalise ou qu’ils soient rachetés à l’international parce que nous ne savons plus nous défendre.

Mais lorsque l’on regarde la réalité des choses, plus du quart de nos entreprises du CAC 40 est en train de se détricoter via leur comité directeur. C’est cela, la réalité de notre économie !

M. le rapporteur Castaner a rappelé les chiffres. Pour être très explicite, ceux que Le Canard enchaîné a publiés sont faux. (Exclamations sur les bancs du groupe GDR.) L’ACOSS est une source officielle, pas Le Canard enchaîné.

La mesure que nous prenons vise également les grands groupes français parce qu’eux aussi concourent à la compétitivité de notre pays, eux aussi doivent attirer les talents.

Les grands groupes français, oui, ce sont aussi Alstom, GDF, EDF ! Allez expliquer aux salariés de ces grands groupes qu’ils ne concourent pas à la compétitivité française ! Allez expliquer aux ETI et aux PME qu’elles n’ont pas le droit d’être tirées vers le haut parce que nous laissons filer ces grands groupes !

L’attractivité ne se divise pas : les talents ont le droit d’être rémunérés à la hauteur de ce qu’ils méritent, quelle que soit la taille de l’entreprise.

Je ne veux donc pas rentrer dans un débat sur la question des seuils parce qu’en l’occurrence, il n’est pas pertinent.

M. Dominique Tian. Tout à fait.

M. Emmanuel Macron, ministre. Cet article vise à revenir aux standards, à favoriser la compétitivité pour rémunérer le talent, quelle que soit la taille des entreprises.

Il importe en tout cas de corriger un chiffrage qui ne correspond pas à la situation réelle.

Cette modalité de l’actionnariat salarié permet aussi d’associer les salariés aux risques – nous le verrons lors de l’examen des dispositions sur les bons de souscription de parts de créateurs d’entreprise, les BSPCE, et sur l’épargne salariale.

Telle est la philosophie à laquelle nous croyons ! C’est d’ailleurs ce qui justifie que nous proposions de ne pas fiscaliser ces dispositifs au taux normal de l’impôt sur le revenu.

Les salariés ont en effet un complément de revenu en fonction de leurs performances qui leur est versé sous forme d’actions. Ils prennent donc un risque. En tout cas, les actions ne sont pas de même nature qu’un revenu liquide versé un jour J. C’est pourquoi nous proposons un basculement vers le régime des plus-values mobilières, ce qui, il faut le dire, remédiera à la complexité actuelle.

Je tiens à être très précis compte tenu de la discussion que nous avons eue et des arguments qui ont été invoqués.

Le premier objectif de ce texte est la simplification car, il faut bien le dire, notre système fiscal et social, aujourd’hui, est éminemment complexe.

M. Philippe Vigier. Ah bon ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Depuis 2008, les gains liés aux actions de performances sont soumis à deux prélèvements sociaux spécifiques qui s’ajoutent aux contributions sociales de droit commun. Deux taxations différentes sont par ailleurs prévues à l’impôt sur le revenu.

Ce texte engage quatre simplifications sur lesquelles je veux être précis.

La première consiste à revenir au droit commun de l’actionnariat salarié avec le forfait social à 20 % et la suppression de la contribution patronale spécifique de 30 %.

Un débat a eu lieu en commission spéciale sur le forfait social de 20 % lui-même, que vous avez évoqué en creux, monsieur le député Poisson.

M. Jean-Frédéric Poisson. Cela ne vous a pas échappé.

M. Emmanuel Macron, ministre. Nous ne proposons pas ici d’y revenir.

Observons la réalité des prélèvements sociaux sur l’actionnariat salarié et les AGA.

Lorsque ces dernières ont été mises en place, le taux du forfait social était de 2 %, ce qui avait justifié une taxation spécifique des actions de performance.

Comme vous le savez, à la suite des augmentations successives décidées d’ailleurs aussi bien avant qu’après 2012, le taux s’élève désormais à 20 %. Rien ne justifie donc plus la majoration complètement exorbitante du droit commun. Nous proposons, avec ce texte, de revenir au droit commun.

Afin de tenir compte de la situation particulière des PME et des entreprises qui, au vu de leurs besoins d’investissements, manquent de liquidités – et aussi pour vous rassurer pleinement, monsieur le député Sansu – certaines d’entre elles n’auront pas à s’acquitter du forfait social. Tel est l’aménagement prévu par ce texte.

Dans le cas présent, il s’agit des PME qui n’ont jamais distribué de dividendes depuis leur création, l’exonération s’appliquant dans la limite du plafond annuel de la Sécurité sociale, soit, 38 040 euros par période de quatre ans.

La deuxième simplification concerne l’impôt sur le revenu.

Actuellement, deux calculs sont effectués sur les gains de cession d’une action de performance : le premier, sur le gain dit d’attribution, qui est imposé comme un salaire, le second, sur la plus-value éventuellement réalisée ultérieurement, imposée comme une plus-value avec l’application des abattements pour durée de détention.

Nous proposons d’harmoniser ces modalités d’imposition et d’appliquer à l’ensemble du gain l’abattement pour durée de détention. Nous proposons donc de faire rentrer ces actions dans le droit du régime d’imposition des plus-values mobilières.

En outre, cette mesure renforcera l’incitation des bénéficiaires d’actions de performance à conserver ces titres, au bénéfice de la stabilité du capital des entreprises qui les allouent.

On revient en effet à un délai de détention de quatre ans au lieu de huit ans pour le régime des plus-values mobilières classiques.

Pardon de vous le dire, monsieur le député Cherki, mais il me semble que vous avez comparé deux choses qui, précisément, ont été distinguées par Mme la députée Berger : le financement des entreprises et la rémunération des salariés.

Quatre ans, lorsque vous êtes salarié d’une entreprise, ce n’est pas un profit immédiat ! Lorsque l’on regarde les autres dispositions en vigueur, cela suppose que le salarié ne fasse pas un « aller-retour », comme on dit.

Vous avez, quant à vous procédé à une comparaison avec des modalités de financement de filières. Or, nous ne parlons pas ici de financement des entreprises ou de celui de la filière énergie ou nucléaire.

Nous parlons de modalités de rémunération de salariés. Il n’y a aucun caractère spéculatif. Le salarié est fidélisé à travers une durée de rétention mais celle-ci n’a rien à voir avec les durées de financement de l’économie.

Troisième simplification : par coordination, nous proposons de soumettre l’ensemble du gain réalisé suite à la cession aux prélèvements sociaux sur les revenus du capital, soit, au taux cumulé de 15,5 % alors que la partie correspondant aux gains d’acquisition est actuellement soumise aux prélèvements sociaux sur les revenus d’activité au taux de 8 %.

Enfin, la quatrième mesure de simplification consiste à assouplir les modalités juridiques d’attribution des actions de performance pour mieux tenir compte de la diversité des situations des entreprises, en réduisant la période minimale à partie de laquelle leur attribution peut être définitive.

Le rapporteur M. Castaner l’a dit très clairement, les baisses subséquentes d’impôts tiennent compte du fait que les actions de performance ne peuvent être aujourd’hui utilisées que par des sociétés très financières, qui ont énormément de liquidités, mais non par les sociétés productives. Quand une entreprise veut accorder par une action de performance un complément de rémunération de 100 euros nets d’impôts et de charges à ses salariés, cela lui coûte 320 euros au total. Je tiens à votre disposition les comparaisons avec les autres pays d’Europe continentale, pour qu’il n’y ait aucune ambiguïté. Elles vous montreront à quel point nous sommes absolument hors compétition.

Nous sommes arrivés à un point où l’imposition sociale et fiscale de la plus-value d’acquisition à la charge de l’entreprise atteint plus de 110 % de la plus-value d’acquisition soumise à CSG pour le salarié. Si je reprends le même exemple, après la réforme, l’employeur déboursera 195 euros, ce qui n’est pas rien – c’est près du double du gain net que recevra le salarié. Pour le bénéficiaire – j’exclus ceux imposés au taux marginal le plus élevé –, le taux d’imposition effectif global s’établira au moins aux alentours de 40 %.

Il suffit pour le comprendre de décomposer ce que je viens de dire : la fiscalité sociale – CSG, CRDS – représente 15,5 % ; dans le meilleur des cas, si on applique le régime des plus-values mobilières voté en 2013, le taux d’impôt sur le revenu pourrait être abaissé à 22,5 % ; selon le niveau de revenus, peuvent encore s’ajouter les 4 % de contribution additionnelle, mais même sans ces 4 %, on arrive à un taux d’imposition de 38 %, sans parler du cas de ceux imposés au taux marginal le plus élevé. Il n’est pas question de baisser le taux d’imposition à 10 %, 15 % ou 20 %, comme j’ai pu le lire dans plusieurs articles, dont les auteurs ont, je le pense, omis de prendre en compte l’augmentation prévue de la fiscalité sociale.

Pardon d’être entré dans la technicité de ce texte, mais ces précisions me semblaient indispensables. J’assume totalement son ambition. S’agissant des chiffrages fiscaux – nous avons longuement discuté en commission spéciale des chiffrages sociaux –, les chiffres qui sont souvent cités n’ont aucun sens et ne correspondent pas à la réalité. En effet, compte tenu de la mécanique même de cette mesure, notamment des délais de détention, l’impact fiscal ne sera pas perceptible avant 2018 ou 2019. Ainsi, les chiffres avancés par plusieurs ne sont pas réalistes et en tout cas ne viennent pas grever les chiffres, qui étaient des majorants, dont nous avons discuté en commission. J’espère avoir répondu aux questions techniques et exposé la philosophie de l’article. Je donne bien sûr un avis défavorable à l’amendement de suppression.

M. le président. La parole est à M. Pascal Cherki.

M. Pascal Cherki. Je répète que l’une de vos grandes qualités est la franchise. Vous avez dit que vous assumiez complètement ce texte. Je vous en remercie, car cette franchise permet de mesurer nos points d’accord et de désaccord. Je conviens qu’il faille tenir compte de l’attractivité des jeunes entreprises innovantes pour les business angels, comme l’a dit Luc Belot. Je suis favorable à un dispositif ciblé sur ces entreprises. Ce sont des entreprises naissantes, qui n’ont pas nécessairement les moyens de rémunérer leurs collaborateurs sous forme de salaires : elles peuvent leur distribuer des actions et les associer au risque. Elles organisent un système qui soit crédible et répondent à une préoccupation qui revêt une dimension quasiment culturelle, dans un milieu où les entrepreneurs sont généralement assez jeunes, se lancent et peuvent avoir connu un premier échec professionnel. À cela, il n’y a rien que de normal.

Mais je vous remercie d’avoir dit avec franchise, et en assumant même la philosophie du dispositif, qu’il était normal que les grands groupes bénéficient aussi d’un tel dispositif. Sur ce point, je ne suis pas d’accord. On peut le comprendre pour les petites entreprise, mais dans un grand groupe, la rémunération doit être versée sous forme de salaires. En distribuant des actions gratuites, on ne verse pas seulement un complément de rémunération, mais on diffuse une culture de la distribution des actions et, à terme, la distribution des dividendes deviendra la priorité.

Je peux vous démontrer que cette disposition a un impact sur l’économie. Prenons l’exemple d’un grand groupe, Total, qui est l’un de vos interlocuteurs : ce groupe doit attirer les talents, réfléchir à sa stratégie d’investissement, de recherche et développement et à son rang mondial – je ne parle pas des impôts qu’il devrait ou non payer en France. À la suite de la chute des cours du pétrole, Total a indiqué qu’il allait réduire ses investissements, comme un certain nombre d’autres compagnies, mais que s’il y a bien quelque chose qu’il ne réduirait pas, ce sont les dividendes versés à ses actionnaires. Voilà où peut conduire, dans les grands groupes, une culture économique centrée sur l’actionnariat et le versement des dividendes. Que les grands groupes puissent bénéficier de ce dispositif posera à terme un problème.

M. le président. La parole est à Mme Michèle Bonneton.

Mme Michèle Bonneton. Si j’ai bien compris, l’un des objectifs de l’article 34 est de retenir nos cadres les plus talentueux. Mais ce dispositif s’inscrit dans la logique d’un dumping fiscal alors qu’il faudrait s’orienter vers une harmonisation fiscale, au moins au niveau européen. En outre, il existe d’autres dispositifs pour aider les start-up innovantes, comme le crédit d’impôt recherche, etc, et on peut en imaginer d’autres. Les risques de dérives d’un dispositif sans seuil et sans ciblage seraient trop grands. C’est pourquoi nous sommes favorables à sa suppression.

M. le président. La parole est à M. Dominique Tian.

M. Dominique Tian. M. Poisson a très bien exposé la position du groupe UMP tout à l’heure. Nous voterons contre la suppression de l’article 34. Monsieur le ministre, vous avez fait un chemin appréciable pour que nos entreprises soient plus concurrentielles, qu’elles attirent et gardent les talents. Il ne s’agit pas de dumping social. Il s’agit de prendre conscience que nous vivons dans un monde concurrentiel et qu’un effort est nécessaire pour attirer et maintenir les talents dans notre pays. Ce dispositif est adapté pour les petites entreprises, mais nous ne sommes pas choqués à l’UMP qu’il s’adresse également aux grandes entreprises, qu’elles soient françaises ou installées sur le territoire national. Ce dispositif va dans le bon sens, même si nous aurions aimé que vous reveniez, monsieur le ministre, sur la suppression de la défiscalisation des heures supplémentaires ou sur le forfait social – 20 % nous paraît un taux trop élevé.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Il ne nous reste plus que quelques minutes pour nous exprimer quand vous pouvez, vous, continuer de parler pendant des heures, monsieur le ministre. En quelques mots donc, je souhaite d’abord saluer, comme l’a fait M. Cherki, votre honnêteté intellectuelle quand vous dites que vous assumez cet article. Mais j’avoue que le regard que vous portez aujourd’hui sur la société est un peu effrayant : vous considérez, en définitive, que le développement industriel et la réussite économique tiennent aux salaires faramineux versés aux dirigeants. Ni vous ni le rapporteur n’avez eu un mot pour ces centaines de milliers, que dis-je ces millions de salariés, réduits à la portion congrue.

M. Philippe Vigier et M. Dominique Tian. Il s’agit d’épargne salariale !

M. André Chassaigne. Permettez-moi de le dire car c’est ainsi que je le ressens. Le développement économique tient aussi à l’augmentation du pouvoir d’achat de ceux qui sont le plus en difficulté. Il y a une forme de contradiction entre ce que vous assumez, avec beaucoup d’honnêteté intellectuelle, et les propos du rapporteur, qui m’ont rappelé ce que vous m’aviez dit, monsieur le ministre, lors de la discussion générale – c’était, en quelque sorte, la réponse du berger à la bergère, si je puis m’exprimer ainsi : « La logique du révolté est de s’efforcer au langage clair pour ne pas épaissir le mensonge universel ». Monsieur le rapporteur, évitons d’épaissir le mensonge universel en mettant en avant des chiffres et en affirmant que le dispositif ne concerne pas les entreprises du CAC 40 – ce que vous n’avez d’ailleurs pas dit. Car en définitive, les entreprises du CAC 40 seront concernées par cette mesure, au même titre que les start-up, ce que M. Cherki appelle le capitalisme populaire. Mais vous le savez, c’est comme les poissons volants, ce n’est pas la majorité de l’espèce !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Emmanuel Macron, ministre. Il n’y a pas de contradiction entre les propos de M. Castaner et les miens.

M. Nicolas Sansu. Un peu quand même !

M. Emmanuel Macron, ministre. Il a exposé des données statistiques correspondant à une réalité. Pour ma part, j’ai voulu éclairer une partie du dispositif, qui n’en constitue pas l’objet essentiel, mais qui existe et que j’assume, celle qui concerne les grands groupes.

M. André Chassaigne. En volume, elle est majoritaire !

M. Emmanuel Macron, ministre. Deuxièmement, M. Cherki a fait une confusion entre les dividendes et l’actionnariat salarié. Les dividendes ne sont pas l’objet du dispositif proposé. L’actuelle majorité a d’ailleurs en début de mandature augmenté la fiscalité qui leur est applicable.

Troisièmement, monsieur Chassaigne, il n’y a pas, d’un côté, les belles âmes et, de l’autre, ceux qui ne pensent qu’à l’argent ou qui veulent réduire la réussite industrielle à cet aspect. Vous avez cité Camus, je vous répondrai avec Hegel : « Le risque des belles âmes, c’est d’être vaporeuses ». Je n’ai jamais dit que notre économie se réduisait à l’argent, mais cette composante existe. Dans une économie où la compétition pour s’arracher les talents est devenue critique, les laisser partir est aussi un crime.

M. Philippe Vigier. Très bien !

M. Dominique Tian. Tout à fait.

M. Emmanuel Macron, ministre. Il n’y a pas là de contradiction. Je tiens les chiffres à votre disposition : un cadre supérieur d’un grands groupe, d’une ETI, d’une start-up ou d’une PME qui part emmène avec lui dix à quinze salariés. Avec ce dispositif, nous ne faisons pas de dumping, madame Bonneton, car s’aligner sur l’Allemagne ou la Grande-Bretagne ne correspond pas à l’idée que je me fais du dumping. Voilà les clarifications que je voulais apporter.

M. Philippe Folliot. Bravo ! Vous mériteriez d’être à l’UDI !

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Vous le savez, monsieur le ministre, les chiffres prouvent qu’une part toujours plus grande des profits des entreprises est distribuée sous forme de dividendes versés à quelques-uns.

M. Emmanuel Macron, ministre. Le dispositif ne concerne pas les dividendes !

M. André Chassaigne. De moins en moins d’argent sert à l’innovation, au développement industriel et à la formation continue. L’argent va essentiellement dans les poches de quelques-uns. Ce capitalisme financiarisé, qui en lui-même porte son propre échec, est l’une des causes de la situation que nous vivons aujourd’hui.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n2788.

(Il est procédé au scrutin.)

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants38
Nombre de suffrages exprimés37
Majorité absolue19
Pour l’adoption7
contre30

(L’amendement n2788 n’est pas adopté.)

M. le président. Les deux amendements, nos 241 et 257, de M. Castaner, rapporteur thématique, sont rédactionnels.

(Les amendements nos 241 et 257, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement n584.

M. Dominique Tian. Il est proposé que les entreprises de taille intermédiaire ou les grandes entreprises qui n’ont procédé à aucune distribution de dividendes depuis trois ans puissent également bénéficier de l’exonération de la contribution patronale dans la limite, pour chaque salarié, du plafond de la Sécurité sociale.

En effet, si la volonté des pouvoirs publics est de développer l’actionnariat salarié, il n’y a pas de raison objective de réserver ce dispositif incitatif aux seules PME. Le critère de non-distribution de dividendes depuis trois ans proposé dans cet amendement est pertinent car il permet de cibler les ETI et les grandes entreprises qui ont privilégié l’investissement et l’emploi pour préparer leur avenir et renforcer leur compétitivité, de préférence au versement de dividendes aux actionnaires, même si bien entendu celui-ci est tout à fait souhaitable. Or, les entreprises non financières distribuent désormais 85 % de leurs bénéfices en dividendes.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Il y a clairement une volonté de ciblage en faveur des PME, comme le Gouvernement l’a proposé. Mais, comme je l’ai rappelé tout à l’heure, il s’agit d’un dispositif global, d’un « zoom » et d’un effort particulier en faveur des PME.

Or, cet amendement permettrait que l’ensemble des entreprises, quelle que soit leur taille, bénéficient de l’effort consenti en faveur de ces PME. Du coup, il ne s’agirait plus d’opérer un ciblage renforcé, comme nous le faisons en faveur des PME. J’ai rappelé tout à l’heure l’ensemble de nos arguments, ainsi que notre volonté de faire un effort particulier en faveur des petites entreprises, sans négliger celui qui s’impose pour les grandes entreprises, y compris celles du CAC 40. Or il s’agit, là, d’élargir le dispositif et, en quelque sorte, de supprimer la bonification proposée pour les PME. L’avis de la commission est donc défavorable, afin de maintenir l’avantage fiscal consenti aux PME par rapport aux autres types d’entreprises.

(L’amendement n584, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements, nos 258, 259 rectifié, 260 et 261, pouvant faire l’objet d’une présentation groupée.

La parole est à M. Christophe Castaner, rapporteur thématique, pour les soutenir.

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Ils sont tous les quatre rédactionnels.

(Les amendements nos 258, 259 rectifié, 260 et 261, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement n585.

M. Dominique Tian. Il est proposé que le régime fiscal tendant à simplifier et alléger les modalités d’imposition du gain d’acquisition des actions gratuites, par rapport à leur valeur le jour d’acquisition, s’applique aux actions gratuites à la date de décision et d’annonce du plan d’octroi d’actions gratuites et non à celle de la décision de l’assemblée générale extraordinaire portant sur leur attribution.

En effet, l’assemblée générale extraordinaire ne prend pas en soi de décision, elle ne fait qu’autoriser le conseil d’administration ou le directoire à procéder, au profit des membres du personnel salarié de la société ou de certaines catégories d’entre eux, à une attribution gratuite d’actions existantes ou à émettre, dans les vingt-six mois qui suivent sa réunion.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Cet amendement pose à la fois un problème juridique et, peut-être, un problème quasi-démocratique au sein de l’entreprise. Si nous adoptions l’amendement tel qu’il rédigé, le problème juridique serait le suivant : qui déciderait de la mise en place du dispositif au sein de l’entreprise ? Nous rencontrerions une difficulté de ce côté-là. Mais je suis, en même temps, favorable au maintien de la décision en assemblée générale extraordinaire, car elle permet l’information complète des salariés. On sait que ce sujet peut prêter à emballement et à discussion vive, comme nous venons de le voir dans notre hémicycle. Mais il doit être traité dans la plus grande transparence, ce que permet une assemblée générale extraordinaire : tous les salariés de l’entreprise ont connaissance de ce qui est décidé en matière de distribution d’actions. Je pense donc qu’il faut garder à la fois cette publicité et cette sécurité juridique. L’adoption de cet amendement, tel qu’il est rédigé, ferait que l’on ne saurait plus qui, du patron, du directeur des ressources humaines ou qui sais-je encore, décide en la matière. Cela fragiliserait donc le dispositif : pour cette raison, la commission a émis un avis défavorable.

(L’amendement n585, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement n2811.

M. Emmanuel Macron, ministre. Cet amendement vise à revenir sur une disposition adoptée par la commission spéciale qui avait souhaité rendre le nouveau dispositif opérant plus rapidement, en l’espèce au 1er janvier 2015. Mais cela entraînerait une série d’insécurités juridiques. Je propose donc, à travers cet amendement, de revenir à la rédaction antérieure, c’est-à-dire à une entrée en vigueur à la date publication de la loi. Pourquoi ? D’abord parce que des assemblées générales se tiennent actuellement et sont en train d’attribuer des actions de performances. Elles les attribuent dans le cadre du régime fiscal actuel, en particulier pour ce qui est des contributions sociales. Il faudrait donc ensuite opérer des reversements, les actions gratuites ainsi attribuées étant éligibles ex post au nouveau régime. Cela créerait beaucoup d’insécurité juridique pour de nombreuses entreprises qui ne savent pas si elles peuvent d’ores et déjà compter sur le nouveau régime, vu qu’il n’est pas encore voté. Je vous propose donc tout simplement que le nouveau régime s’applique à compter de la date de promulgation de la loi, et non du 1er janvier 2015.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. La commission était défavorable à l’amendement parce qu’elle avait précisément réintroduit la possibilité de cette rétroactivité limitée, afin que le dispositif, auquel nous tenons, puisse entrer en vigueur dès 2015. Compte tenu des dates auxquelles elles se tiennent habituellement, les assemblées générales risquent en effet de prendre leurs décisions avant la promulgation de la présente loi et, du coup, elles perdraient pour 2015 le bénéfice de ce dispositif, que nous défendons sur ces bancs. Toutefois, les arguments du ministre relatifs aux risques juridiques que nous ferions courir à ceux qui attribuent ces actions se défendent. Par conséquent, même si la commission a émis un avis défavorable, nous entendons les arguments juridiques du ministre, et je ne nous imagine pas fragiliser l’article 34 en ne retenant pas l’amendement du Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. Pascal Cherki.

M. Pascal Cherki. Tout à l’heure, monsieur le ministre a, avec raison, fait appel à notre élévation d’esprit en citant un grand philosophe allemand, Hegel. Qu’il me permette de lui répondre par une citation d’un grand dramaturge anglais, Shakespeare : « C’est un malheur du temps que les fous guident les aveugles ». Ainsi aurons-nous cité un Allemand et un Anglais !

(L’amendement n2811 est adopté.)

(L’article 34, amendé, est adopté.)

Après l’article 34

M. le président. La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement n75 rectifié.

M. Dominique Tian. L’objet de cet amendement est de simplifier le financement des PME et des PMI, au travers de l’assurance vie. En effet, tout en maintenant le dispositif protecteur de l’assurance vie qui est en vigueur, et en prévoyant, bien sûr, des garde-fous liés au montant minimum du contrat, cet amendement ouvrirait une option au-delà d’un certain montant, à l’instar de ce qu’offrent les compagnies d’assurance-vie notamment luxembourgeoises. Il permettrait ainsi à un certain nombre de nos concitoyens d’alimenter de nouveaux contrats en France plutôt qu’à l’étranger.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Je comprends la logique de l’amendement mais je suis réservé. Il s’agit en effet d’outils comme les fonds communs de placement à risque ou les fonds professionnels spécialisés, qui sont des véhicules très spéculatifs. Il y a deux situations : soit les épargnants ne sont pas spécialement initiés, et on peut craindre que ces systèmes de valorisation complexes ne les amènent à prendre un risque et qu’ils puissent, en bout de course, se retrouver floués, soit on a affaire à des épargnants aguerris, et dans ce cas, cet amendement pourrait faire courir le risque d’une optimisation fiscale. Je pense qu’il ne faut ni faire courir de risques à des épargnants insuffisamment expérimentés, ni exposer nos finances publiques aux comportements d’épargnants qui le seraient, eux, un peu trop et qui utiliseraient le dispositif proposé par cet amendement en vue d’une optimisation fiscale. Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis défavorable.

(L’amendement n75 rectifié, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement n586.

M. Dominique Tian. Il est défendu.

(L’amendement n586, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Frédéric Lefebvre, pour soutenir l’amendement n° 204.

M. Frédéric Lefebvre. La solution obligataire est l’alternative incontournable au crédit bancaire classique pour le financement des PME et des ETI, y compris à l’international. C’est la raison pour laquelle cet amendement vise à favoriser l’auto-détention des titres en vue de concéder une garantie directe ou par constitution d’une fiducie-sûreté.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner. À trois heures moins dix du matin, nous abordons des sujets d’une grande complexité et d’une grande technicité. (Sourires.)

Je crois que si l’idée peut paraître séduisante, le sujet est extrêmement complexe. Les rachats de leurs propres actions par les sociétés sont très encadrés. Le principe est que ce type de procédé doit être très ponctuel et limité dans le temps. Or, j’ai l’impression que le dispositif que vous proposez élargit et simplifie sa mise en œuvre. Je crains vraiment que ce type de montage conduise, à long terme, à fausser la présentation comptable dans les sociétés, ce qui n’est pas le cas avec le dispositif actuel qui ne prévoit que des opérations ponctuelles. Compte tenu de ces réserves très techniques, j’ai proposé à la commission, qui m’a suivi, de donner un avis défavorable sur cet amendement.

(L’amendement n204, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 81 et 298, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Gilles Lurton, pour soutenir l’amendement n81.

M. Gilles Lurton. Il s’agit d’un amendement dont l’initiative revient à ma collègue Véronique Louwagie. Il a été défendu en commission spéciale et porte sur le plan d’épargne en actions destiné au financement des PME et des ETI, le PEA-PME. Créé il y un peu plus d’un an, celui-ci connaît, avec 80 000 plans ouverts, un véritable succès populaire, mais les sommes placées ne sont pas très importantes, ne dépassant pas 300 millions d’euros. C’est pourquoi, afin de booster un peu ces PEA-PME et de relancer l’investissement en faveur des PME et des ETI, cet amendement propose d’exonérer d’impôt sur les plus-values toutes les cessions de titres ou parts de FCP ou de SICAV pendant un temps limité, en l’espèce l’année 2015.

M. le président. La parole est à M. Philippe Vitel, pour soutenir l’amendement n298.

M. Philippe Vitel. Cet amendement est très important car son adoption permettrait d’augmenter considérablement la collecte du PEA-PME et de donner à ce support une nouvelle lisibilité. Enfin, il n’aggrave pas la situation budgétaire puisqu’en dehors de ce cadre les plus-values n’auraient de toute façon pas été réalisées.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Si je conviens de l’utilité de ce dispositif, je ne suis en revanche pas du tout convaincu de son opportunité. Effectivement, si nous le mettions en place, le PEA-PME deviendrait, certes, encore plus attractif, mais nous courrions le risque d’une optimisation fiscale avec des cessions de valeurs mobilières pour orienter des fonds vers le PEA-PME, avec une gestion de plus court terme, et l’intérêt du financement de l’investissement à long terme serait perdu. De surcroît, cela ferait courir un risque de perte de recettes fiscales. Donc, oui, si ce dispositif était adopté, il favoriserait et ferait très rapidement monter en puissance le PEA-PME, mais il occasionnerait dans le même temps des transferts vers des investissements qui ne seraient pas nécessairement de long terme. Cela ferait courir un risque.

M. Philippe Vitel. Il faut oser !

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. N’oublions pas que le PEA-PME est un dispositif nouveau, créé dans la loi de finances pour 2014, avec un plafond à 75 000 euros. Observons sa montée en puissance. Il a une efficacité : c’est pour cette raison que nous avions proposé de le mettre en place, en quoi d’ailleurs nous n’avions pas été soutenus. Je vois maintenant qu’il est adopté : observons son devenir, sans prendre le risque de mouvements spéculatifs et surtout d’optimisation fiscale qui amèneraient à faire des arbitrages dans la gestion de plus-values mobilières qui ne seraient pas forcément favorables et qui auraient des conséquences fiscales. Pour toutes ces raisons, nous avons émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. Dominique Tian. Vous manquez d’audace !

(Les amendements nos 81 et 298, repoussés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Frédéric Lefebvre, pour soutenir l’amendement n° 23.

M. Frédéric Lefebvre. Cet amendement porte sur la société de capitaux transparente fiscalement, qui avait été créée par la loi de modernisation de l’économie du 4 août 2008. Elle s’inspire de la société dite « Subchapter S », l’une des sources, vous le savez, monsieur le ministre, de l’expansion économique américaine. L’objectif est de remédier aux difficultés que rencontre cette incitation dont l’échec s’explique en grande partie du fait que l’article 156 du code général des impôts, encadre très strictement les revenus en ne permettant la déduction que de bénéfices de même nature.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Je suis quelque peu perturbé par la défense faite par M. Lefebvre de cet amendement n23. On en connaît bien le contenu, puisqu’il est présenté chaque automne dans la loi de finances. Il prévoit que quelqu’un qui placerait plus de 100 000 euros d’actifs dans une entreprise serait considéré comme son gestionnaire. Ce qui m’étonne, c’est que cela ne correspond pas à la culture des entreprises françaises qui, au contraire, préfèrent distinguer le statut d’investisseur du statut de gestionnaire. En effet, cette opération peut avoir des conséquences importantes, notamment sur le passif. Un investisseur pourrait se trouver responsable de la gestion du passif, alors même qu’il n’est qu’actionnaire.

Je pense que cela vient de la culture anglo-saxonne. Je n’ai jamais entendu en France les représentants du monde de l’entreprise le réclamer. Je pense qu’au contraire, cela exposerait l’investisseur, notamment s’il faut combler un passif ou procéder à d’autres mesures de ce type.

Pour toutes ces raisons, la commission est défavorable à cet amendement.

(L’amendement n23, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements, nos 1466 rectifié, 1467 rectifié et 22, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Philippe Vigier, pour soutenir l’amendement n1466 rectifié.

M. Philippe Vigier. Toujours pour améliorer le financement de nos PME, c’est un amendement que nous avons l’habitude de déposer lors les lois de finances, qui concerne la possibilité donnée depuis 2011 à ceux qui paient l’ISF de bénéficier d’un abattement, avec un plafond de 45 000 euros.

Nous proposons de doubler le plafond actuel, en le faisant passer de 45 000 à 90 000 euros, pour donner une impulsion.

Je vous le disais tout à l’heure, monsieur le ministre, plus d’un milliard d’euros ont été drainés de l’ISF vers le financement des PME depuis que l’on a mis en place ce dispositif, ce qui veut dire qu’il correspond à un besoin.

Le taux de marge des entreprises a baissé à la fin de 2014, les problèmes de trésorerie sont plus que récurrents et s’aggravent au fil du temps, il y a de plus en plus de faillites, un tel amendement est donc indispensable.

Si vous ne pouvez l’accepter, je vous en propose un second, plus modeste, l’amendement n1467 rectifié, qui porterait le plafond de 45 000 à 50 000 euros et qui serait tout de même un signal. Avec le réalisme dont vous avez fait preuve ce soir et l’évolution vers une social-démocratie totalement apaisée, comprise, chacun ayant bien en tête que le financement de l’économie, c’est la base du redressement de notre pays, je suis persuadé que cet amendement va trouver un écho favorable.

M. le président. L’amendement n1467 rectifié a donc été défendu.

La parole est à M. Frédéric Lefebvre, pour soutenir l’amendement n22.

M. Frédéric Lefebvre. Dans la droite ligne des amendements qui viennent d’être défendus par M. Vigier et qui soulignent à quel point il est temps dans notre pays de renforcer un dispositif qui fonctionne de façon efficace – on l’a vu d’ailleurs dans les moments les plus compliqués, notamment les moments de crise, parce que ce sont de tels dispositifs qui ont contribué à sauver une grande partie de notre tissu économique –, je propose de doubler le plafond de la réduction liée à l’ISF-PME.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Ce dispositif marche et il a fait ses preuves, vous l’avez souligné. C’était l’une des mesures de la loi TEPA et, en 2011, la majorité de l’époque a choisi d’abaisser le plafond de 50 000 à 45 000 euros, pour refroidir en quelque sorte le dispositif dont l’inconvénient est qu’il conforte de plus en plus cette pratique qui consiste non pas à investir dans l’économie réelle mais à investir en fonction de la défiscalisation que l’on pourrait obtenir. Je pense que cela ne va pas dans le bon sens, et cela rejoint un peu la discussion que nous avions tout à l’heure sur les investissements.

Si la majorité précédente, opposition aujourd’hui, a abaissé le plafond de 50 000 à 45 000 euros en 2011, c’est effectivement parce qu’il fallait une corrélation entre l’économie réelle et les enjeux de défiscalisation. Ce dispositif fait ses preuves, avec un plafond à 45 000 euros.

Au-delà du coût, 100 millions euros par exemple pour les contribuables si l’on passait à 90 000 euros, nous n’avons pas intérêt à multiplier les dispositifs qui suppriment toute corrélation entre les investissements dans l’économie réelle et la réalité de la gestion financière et, surtout, favorisent une gestion d’optimisation fiscale. C’est la raison pour laquelle nous avons émis un avis défavorable à ces amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. Le ministre a dit à plusieurs reprises depuis le début de la discussion de ce texte que l’on corrigeait un certain nombre d’erreurs du passé.

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Cela vaut pour toutes les erreurs.

M. Philippe Vigier. Nous aussi, nous avons fait des erreurs, mais à l’époque, nous nous étions opposés à l’abaissement de 50 000 à 45 000 euros dans la loi de finances en 2011. François Hollande, dans sa déclaration de mai 2012, avait annoncé qu’il faudrait bien veiller à sanctuariser un certain nombre de dispositifs qui permettent de drainer des financements vers les PME.

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. On sanctuarise !

M. Philippe Vigier. La situation des entreprises à la fin de 2014 n’est pas tout à fait celle de 2011, elle s’est considérablement dégradée. Si vous en doutez, le député qui est juste devant moi, qui connaît très bien le fonctionnement des tribunaux de commerce, vous fera un plaidoyer formidable en vous expliquant que les problèmes s’amoncellent, à cause de la diminution des taux de marge, des fonds propres et de l’aggravation des problèmes de trésorerie.

Face à une telle situation, mieux vaut peut-être permettre à ceux qui ont de l’argent d’aider ces entreprises plutôt que d’aller voir à la barre du tribunal si on peut sauver quelques emplois.

(Les amendements nos 1466 rectifié, 1467 rectifié et 22, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Christophe Castaner, rapporteur thématique, pour soutenir l’amendement n2119.

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. C’est une clarification technique, qui permet de modifier à la marge l’objet social des organismes de placement collectif immobilier, les OPCI, afin de leur permettre, à titre accessoire et si c’est bien lié à l’opération réalisée, d’acquérir des meubles et biens d’équipement affectés à des biens immobiliers placés en location. Aujourd’hui, ce n’est pas prévu.

Il nous semble nécessaire de clarifier les modalités d’action des OPCI qui, pour l’instant, doivent séparer les deux volets, l’immobilier et le mobilier, alors même que c’est dans l’opération de placement la même chose. Il est donc proposé de lier les deux.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Favorable. Il est en effet important de proposer une mesure pour ce secteur qui souffre particulièrement. Je sais que des dispositifs plus ambitieux avaient été proposés, qu’on ne peut retenir, mais c’est une première réponse.

(L’amendement n2119 est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Frédéric Lefebvre, pour soutenir l’amendement n24.

M. Frédéric Lefebvre. Cet amendement demande au Gouvernement de présenter au Parlement un rapport sur le crowdfunding.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Défavorable car il est un peu tôt pour évaluer le nouveau dispositif qui est entré en vigueur le 1eroctobre 2014, il y a seulement quelques semaines. Un rapport sera nécessaire à un moment donné mais c’est sans doute un peu prématuré aujourd’hui.

M. Frédéric Lefebvre. Ce n’est pas aujourd’hui, nous demandons qu’il soit remis avant le 31 décembre 2015.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse de l’Assemblée puisque le rapport doit être remis avant le 31 décembre 2015.

(L’amendement n24 n’est pas adopté.)

Article 35

M. le président. La parole est à M. Castaner pour soutenir l’amendement n262.

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. C’est un amendement rédactionnel.

(L’amendement n262, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Fromantin, pour soutenir l’amendement n1482.

M. Jean-Christophe Fromantin. Cet amendement a pour but de permettre d’émettre des bons de souscription de part de créateurs d’entreprise – BSPCE – dans des entreprises qui ont ou ont eu des partenaires industriels ou des fonds d’investissement à hauteur de plus 25 %, comme c’est le cas pour les stock-options ou les bons de souscription d’actions, afin de ne pas gêner des entreprises qui doivent renforcer leurs fonds propres au travers de fonds d’investissement ou avoir des acteurs industriels qui contribuent au projet de l’entreprise.

Le fait d’avoir eu de tels partenaires ne doit pas bloquer une émission de BSPCE.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Défavorable.

Le projet de loi qui favorise les attributions de BSPCE prévoit déjà la possibilité de les accorder pour des entreprises filiales détenues à 75 % alors que le droit fiscal prévoit que la filiale doit être détenue à 95 % par exemple dans le régime mère-fille.

À 33 %, on risque tout de même que ce soient des salariés ou des dirigeants n’ayant pas grand-chose à voir avec l’entreprise qui bénéficient du dispositif. Or c’est tout l’inverse de l’ambition portée par les BSPCE, qui est aussi de rendre plus attractifs le maintien et le recrutement de cadres dans les entreprises.

On risquerait d’avoir un pur effet d’aubaine et, du coup, à mon sens, cela ne mérite pas d’être soutenu fiscalement. C’est la raison pour laquelle nous avons émis un avis défavorable à cet amendement.

(L’amendement n1482, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n264 rectifié de M. Castaner est rédactionnel.

(L’amendement n264 rectifié, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. L’amendement n263 de M. Castaner est lui aussi rédactionnel.

(L’amendement n263, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 35, amendé, est adopté.)

Après l’article 35

M. le président. La parole est à M. Frédéric Lefebvre, pour soutenir l’amendement n52.

M. Frédéric Lefebvre. Cet amendement vise à modifier l’article L. 132-23 du code des assurances, relatif aux conditions de sortie anticipée des plans d’épargne retraite populaire, pour ajouter l’expatriation de longue durée à la liste des situations permettant de récupérer de façon anticipée son épargne, après cinq ans d’expatriation.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Un dispositif de rachat de contrat existe, notamment dans un certain nombre de cas, qui sont plutôt des coups durs de la vie. Je n’ai pas l’expérience de M. Lefebvre sur la situation de nos expatriés, notamment aux États-Unis, mais je ne qualifie pas cela de coup dur de la vie.

Je ne vois pas en quoi la qualité d’expatrié depuis plus de cinq ans pourrait justifier que nous dérogions à cette règle, ce qui aurait notamment un coût fiscal. C’est la raison pour laquelle nous avons émis un avis défavorable à cet amendement.

(L’amendement n52, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 1644 et 25, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Philippe Vitel, pour soutenir l’amendement n1644.

M. Philippe Vitel. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Frédéric Lefebvre, pour soutenir l’amendement n25.

M. Frédéric Lefebvre. Il est défendu.

(Les amendements nos 1644 et 25, repoussés par la commission et le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Frédéric Lefebvre, pour soutenir l’amendement n31.

M. Frédéric Lefebvre. Il est défendu.

(L’amendement n31, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Frédéric Lefebvre, pour soutenir l’amendement n27.

M. Frédéric Lefebvre. C’est un dispositif important que nous avions voté il y a quelques années pour favoriser l’investissement et le développement grâce à l’épargne d’un certain nombre d’étrangers qui vivent dans notre pays. Nous avions développé cette stratégie avec les caisses d’épargne à l’époque.

Je crois en effet qu’il serait sain, et j’aimerais que le Gouvernement réfléchisse à cette question, de remplacer une partie de l’aide au développement d’État à État par des dispositifs incitant les étrangers qui travaillent dans notre pays à investir dans leur pays d’origine.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Je trouve l’idée totalement pertinente, mais tel qu’il est rédigé, l’amendement risque d’avoir des conséquences très négatives.

En gros, il s’agit d’un dispositif de type Madelin pour les sociétés en développement dans les pays en développement, mais on peut parfaitement imaginer qu’une entreprise organisant de la sous-traitance et délocalisant dans des pays en voie de développement bénéficie d’un avantage fiscal massif sur cet investissement.

L’idée mérite d’être creusée, y compris dans la politique de co-développement que la France doit mener, mais pas nécessairement dans ce cadre ni sur cette base car on risquerait de financer ainsi par l’impôt la délocalisation d’un certain nombre d’entreprises. Le ministre pourrait prendre le relais car c’est un sujet intéressant, mais on ne peut l’aborder sous cette forme.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Frédéric Lefebvre.

M. Frédéric Lefebvre. Je vous remercie, monsieur le rapporteur. J’aimerais, monsieur le ministre, que, comme le rapporteur lui-même vous y invite, le Gouvernement engage une réflexion sur ce sujet. L’argent public que notre pays consacre au développement serait utilisé de façon beaucoup plus efficace et beaucoup plus pertinente qu’il ne l’est aujourd’hui.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Emmanuel Macron, ministre. C’est pour ne pas prendre trop de temps que j’ai laissé le rapporteur vous répondre. Le dispositif que vous proposez n’a pas rencontré un franc succès quand il a été utilisé. Cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas revenir dessus et y réfléchir. Avec Michel Sapin, nous avons déjà commencé les travaux. Je m’engage à les continuer et à vous y associer. Le montant de l’ensemble des aides au développement s’élève à environ 10 milliards d’euros en France. On voit bien la magnitude de l’effort et ce que ce genre de dispositif pourrait aider à faire. Les Sofidev n’avaient pas permis d’aller suffisamment loin. Elles avaient juste vivoté. Nous partageons votre souci, et un forum économique qui rappelait ces mêmes nécessités se tenait d’ailleurs ce matin. Vous serez associé à ces réflexions, monsieur Lefebvre, car vous y êtes attaché.

M. le président. Retirez-vous votre amendement, monsieur Lefebvre ?

M. Frédéric Lefebvre. Je le retire.

(L’amendement n27 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Vitel, pour soutenir l’amendement n80.

M. Philippe Vitel. Pour relancer la croissance et l’activité, il convient avant tout de refonder la confiance des ménages. C’est ce à quoi est destiné cet amendement, qui leur permet de déduire de leur impôt sur le revenu une partie des sommes versées sur des contrats d’assurance vie, à l’instar de ce qui se fait pour les PERP.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. S’il s’agissait, pour relancer la croissance et l’activité et pour démontrer la confiance des ménages, de mesurer le volume de placement des Français dans l’assurance vie, tout irait bien ! Nous avons en effet dépassé le mois dernier les 1 500 milliards d’euros. Les Français, malgré le contexte difficile que nous connaissons, privilégient fortement ce placement. Or, il a un coût fiscal annuel de 1,3 milliard d’euros, parce qu’il fonctionne bien et qu’il est bien aidé.

Vous proposez de rajouter un régime fiscal très favorable, en donnant la possibilité que les sommes versées en assurance vie soient déductibles de l’impôt sur le revenu. Je ne doute pas que nous dépasserions alors très vite les 1 600 milliards d’euros, mais cela représenterait un coût fiscal hors de proportion. Surtout, aujourd’hui, le problème serait surtout de mieux orienter ces sommes placées en assurance vie. Je vous renvoie à ce sujet au rapport Berger-Lefebvre, qui a commencé d’être traduit dans la loi de finances de l’année dernière : le but est de sortir cet argent du volume de l’assurance vie ; or, là, nous amplifierions le phénomène. Mais si cela était un marqueur de la croissance, de l’activité et de la confiance des ménages, je serais prêt à soutenir cet amendement !

(L’amendement n80, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 26 rectifié et 120, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Frédéric Lefebvre, pour soutenir l’amendement n26 rectifié.

M. Frédéric Lefebvre. Je tiens beaucoup à cet amendement. J’ai évoqué la question de la faim dans notre pays et nous avons travaillé sur celle du gaspillage. Je veux remercier à nouveau le ministre de l’engagement qu’il a pris de créer dans les deux mois un dispositif pour lutter contre le gaspillage alimentaire. Je propose ici de doubler quasiment l’avantage dit « Coluche », en le faisant passer de 521 à 1 000 euros, et de faire passer le plafond pour le don en nature de 0,5 % à 1 % du chiffre d’affaires. Il serait logique que le Gouvernement adopte de tels amendements, surtout après le discours tenu par M. le ministre devant les Restos du cœur. Cette évolution viendrait répondre à la volonté de générosité de nos compatriotes et de nos entreprises.

M. le président. La parole est à M. Philippe Vitel, pour soutenir l’amendement n120.

M. Philippe Vitel. Monsieur le président Le Fur, étant à l’origine de cet amendement, vous ne pouvez qu’être en phase avec les explications que vient de donner Frédéric Lefebvre. Je le suis également et je soutiens avec force et vigueur cette proposition.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Cela semble une vraie bonne idée, présenté ainsi, mais elle pose des problèmes techniques et sans doute opérationnels. Ainsi, les agriculteurs sont généralement imposés au titre de l’IS sur leur activité. Or, leur versement, qui aurait eu un effet sur l’IS, générerait de l’IR. Cela poserait un problème de confusion entre les deux volumes. D’autre part, j’ai interrogé des responsables des Restos du cœur et ils me disent qu’ils ont beaucoup plus besoin de dons d’argent pour faire fonctionner leurs structures, compléter ce qui leur manque et acheter parfois des repas conditionnés, que de dons de matière brute qu’ils ont quelquefois du mal à gérer quand ils en bénéficient. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Philippe Vitel.

M. Philippe Vitel. Monsieur le rapporteur, êtes-vous certain de ce que vous avancez sur l’IS ? Ce n’est apparemment pas la situation que j’ai rencontrée.

M. le président. La parole est à M. Frédéric Lefebvre.

M. Frédéric Lefebvre. Il y a effectivement une petite confusion sur la question de l’IS. Mais la logique est d’autant plus évidente qu’elle est portée par le Premier ministre lui-même. Le Gouvernement a avancé sur la question du lait et sur celle des céréales, il nous faut faire désormais des progrès sur la question de la volaille et d’autres produits. Je souhaite que nous puissions nous joindre à l’élan donné par le Gouvernement en cette matière.

M. le président. La parole est à M. Christophe Castaner, rapporteur thématique.

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Les professionnels sont naturellement soumis à l’IS, mais ils peuvent opter pour l’IR. Effectivement, il peut y avoir une différence de cas. Ensuite, s’agissant du lait par exemple, étant donné qu’il s’agit d’un produit transformé, c’est l’industrie agroalimentaire qui est concernée, tandis qu’une volaille non transformée et non préparée que pourrait donner un producteur n’aurait pas toutes les conditions de traçabilité requise. C’est sur cela que les Restos du cœur émettent des réserves, et non sur votre philosophie, que je soutiens.

(Les amendements nos 26 rectifié et 120, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier, pour soutenir l’amendement n1464.

M. Philippe Vigier. Monsieur le ministre, puisque nous parlons beaucoup de compétitivité, il est un sujet sur lequel nous n’avons cessé d’alerter le Gouvernement : c’est celui du niveau de l’impôt sur les sociétés. Comme vous le savez, la hausse impulsée par le gouvernement précédent a malheureusement été confirmée. La France a le triste privilège d’avoir le taux d’IS le plus élevé avec la Belgique. L’Italie a ramené son taux d’IS de 33 à 27,5 %. Au Portugal, il est passé de 25 à 23 % le 1erjanvier. Le gouvernement portugais s’est même engagé à aller plus loin, pour atteindre des taux de 17, puis de 15 %. Je ne parle même pas de pays comme l’Irlande, où le taux est à 12,5 %.

Cette question de la convergence de l’impôt sur les sociétés est un élément fondamental de la gouvernance économique européenne. La moyenne de l’IS dans les pays de l’OCDE est à 25 points. Cela veut dire que cette question est un handicap considérable pour la compétitivité de notre pays.

Nous vous proposons de nouveau de baisser dès maintenant cet impôt. Vous allez nous répondre que le Gouvernement prévoit un IS à 28 % à l’horizon 2020, mais ce sera trop tard. Si vous n’accélérez pas dès maintenant, le différentiel sera en défaveur de notre pays.

Nous avons même fait des propositions alternatives. Le Gouvernement avait fait le choix de baisser la C3S, alors que ce n’était pas la priorité. Il fallait baisser l’IS et diminuer le plancher d’imposition, qui est à 15 %. C’est seulement ainsi que vous auriez apporté un véritable soutien à la compétitivité des toutes petites entreprises, mais également des PME. Vous allez me répondre « CICE » et « baisse des charges », mais c’est insuffisant. Ce taux d’IS est un anachronisme français. Il est urgent de s’y attaquer.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Je vais vous répondre « CICE » et « baisse des charges » ! (Sourires.) Un effort significatif de 42 milliards d’euros a été fait dans le cadre du pacte de responsabilité en faveur des entreprises. Il n’empêche que l’IS reste à un taux élevé. Mais, pour le clin d’œil, en prenant en compte le fait que l’IS représente 55 milliards d’euros, l’abaissement du taux de 33 à 28 % devrait coûter 15 % du rendement. Votre amendement coûterait donc 8 milliards d’euros.

M. Philippe Vigier. Mais oui !

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Il ferait donc passer le paquet de cigarettes à une centaine d’euros, à condition d’imaginer que cela ne fasse pas varier la consommation de tabac et encore moins les entrées clandestines en France. Il soulève donc un petit problème de gage et un petit problème de recettes fiscales…

M. Jean-Frédéric Poisson. Il n’est pas exclu qu’une telle baisse génère des recettes !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. L’argument de la contrainte budgétaire est un argument dirimant dans notre contexte économique. Nous savons nous affranchir de certaines contraintes, mais je pense que le gage qui permet de passer les fourches caudines de l’article 40 ne résisterait pas longtemps.

J’entends votre argument, monsieur Vigier, sur les arbitrages ayant conduit à préférer la C3S à l’IS, qui sont aussi le fruit de réflexions et de discussions avec les différentes entreprises. Nous avons choisi la C3S car l’un des problèmes de nos entreprises, ce sont les marges basses. Pour relever les marges, qui commandent, par la suite, la capacité à emprunter, mieux vaut traiter les coûts salariaux, via le CICE et les allégements de charges sur les bas salaires,…

M. Nicolas Sansu. Les cotisations !

M. Emmanuel Macron, ministre. …et les impôts dits de production, qui se situent au-dessus de la marge, en particulier la C3S qui a cette caractéristique d’être un impôt plus aveugle que l’IS. Nous avons dû arbitrer entre deux contraintes : la lisibilité – en termes d’attractivité et de lisibilité, il est plus pertinent de baisser l’IS – et la sophistication de l’impôt – baisser la C3S, c’est économiquement plus urgent que de baisser l’IS, parce que c’est un impôt aveugle qui taxe le chiffre d’affaires. C’est pourquoi nous avons retenu cette disposition. Le Président de la République s’est engagé, à moyen terme il est vrai, à baisser l’IS au niveau de la moyenne européenne, pour des raisons de compétitivité et d’attractivité, mais cela ne sera pas possible dans les deux ans à venir.

M. le président. La parole est à M. Nicolas Sansu.

M. André Chassaigne. Je sors mon chronomètre !

M. Nicolas Sansu. Je ne le savais pas, mais je suis heureux de voir que l’on peut proposer des dispositions fiscales dans tous les textes présentés en séance. Cela n’était pas le cas depuis quelques mois. Quant à l’impôt sur les sociétés, Philippe Vigier le sait bien mais il fait semblant de l’ignorer, il ne représente plus rien : 1,5 point du PIB maintenant, après les divers allégements consentis avec le CICE.

Mme Karine Berger. Moins qu’en Allemagne !

M. Nicolas Sansu. Nous sommes passés de 52 milliards d’euros en 2013 à quelque 32 milliards en 2015. Autant dire que cela ne représente plus rien ! Le taux facial est extrêmement élevé, mais le taux réel est très bas, parce que l’assiette est de plus en plus réduite. Je voulais le relever, car tout le monde se focalise sur l’IS alors que ce n’est plus un impôt défavorable, parce qu’il ne s’applique plus sur une assiette très large.

M. André Chassaigne. Cinquante-neuf secondes ! (Sourires.) C’est ça, la démocratie parlementaire…

(L’amendement n1464 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Pascal Cherki, pour soutenir l’amendement n2013.

M. Pascal Cherki. Pour prolonger le débat que nous avions eu sur la manière d’aider les petites entreprises de la nouvelle économie sans se préoccuper des cadeaux à faire aux dirigeants des grands groupes, je présente cet amendement avec mes collègues Dagoma, Mazetier, Lepetit et Carrey-Conte. La recomposition fiscale décidée dans la dernière loi de finances rectificative pour 2010 a fait participer, et c’est heureux, l’immobilier d’entreprise, dès 2011, à l’effort de financement du Grand Paris à travers la refonte de la taxe annuelle sur les bureaux et de la redevance pour création de bureaux.

Cette réforme s’est traduite par une augmentation très significative des montants unitaires et une refonte de la carte des territoires d’Île-de-France, avec notamment une augmentation de 492 % pour les communes et les arrondissements de Paris situés en zone 3, et désormais classés en unité urbaine 1.

Cette réforme a été lourde de conséquences pour des locaux du type pépinières, incubateurs, hôtels d’entreprise ou fab lab, c’est-à-dire de nouvelles catégories d’immobilier innovant, des locaux soutenus par les villes car ils participent à une politique locale de soutien à l’entrepreneuriat et à l’emploi, ce que vous ne pouvez qu’approuver, monsieur le ministre. Ils ont pour spécificité de proposer aux occupants des loyers à des tarifs préférentiels, avec des services d’animation et de formation, et sont un véritable outil de redynamisation des quartiers et de soutien à l’emploi pour les collectivités locales en hébergeant des entreprises au stade de la création et des premières années de développement.

Or, alors même que leur mission de service public est avérée, ces lieux ne sont pas par nature des activités de service public et ne peuvent donc pas être exclus du champ d’application de la redevance pour création de bureaux. En effet, l’article L. 520-7 du code de l’urbanisme prévoit la non-application de la redevance pour les locaux « affectés au service public » et « appartenant ou destinés à appartenir » aux collectivités locales.

C’est pourquoi je compte sur votre appui, monsieur le ministre. Il faut exclure ces locaux du champ d’application de cette redevance pour création de bureaux ainsi que de la taxe annuelle sur les bureaux prévue à l’article 231 ter du code général des impôts. Cela permettrait d’encourager la création de ces lieux, dans un contexte de pression foncière forte, et d’assurer leur pérennité alors que leurs recettes locatives sont par nature très inférieures aux bureaux classiques. La nouvelle dynamique ainsi donnée à la création de ces locaux sur l’ensemble du territoire de l’Île-de-France contribuerait au développement économique à l’échelle métropolitaine, notamment autour des futurs grands projets universitaires et projets de recherche que par ailleurs le Gouvernement encourage.

L’impact financier restera limité, beaucoup plus que la distribution d’actions aux quatre dirigeants des grandes multinationales, puisque ces surfaces représentent une partie minoritaire de la catégorie immobilier d’entreprise. À l’inverse, cela créera des externalités positives majeures sur l’urbanité des sites ou sur la redynamisation de quartiers à l’échelle de la future métropole du Grand Paris.

J’espère vous avoir convaincu, monsieur le ministre, vous sachant sensible à ce sujet, puisqu’il s’agit d’aider les collectivités locales qui s’investissent dans ces activités.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Je me sens parfaitement à l’aise s’agissant de la philosophie de cet amendement.

M. Jean-Frédéric Poisson. Ça commence très mal ! (Sourires.)

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. La notion de coworking, par exemple, qui se développe aujourd’hui, ne me pose aucun problème. Mais j’ai une angoisse, monsieur Cherki : que des grandes entreprises, celles du CAC 40 par exemple, puissent profiter du défaut de définition que présente votre amendement. Par exemple, j’ai du mal à savoir ce qu’est un commerce flexible ou encore un espace ouvert à une multiplicité d’utilisateurs ou favorisant le travail collaboratif.

M. Dominique Tian. C’est l’économie moderne, monsieur Castaner !

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. J’imagine que la direction juridique de Total pourrait organiser un open space et revendiquer le régime fiscal que vous proposez ! J’y vois un léger risque…

J’aurais volontiers émis un avis favorable, parce que la philosophie de cet amendement ne me pose aucun problème, mais sa rédaction me semble prêter à une interprétation très large. Peut-être la jurisprudence Brottes s’applique-t-elle : on pourrait le voter maintenant pour avoir le temps de le modifier plus tard ! Quoi qu’il en soit, la commission a émis un avis défavorable. Je donnerai donc, à titre personnel, un avis de sagesse, mais à condition qu’il soit retravaillé plus tard pour éviter que de grandes entreprises en profitent. Je suis sûr que j’aurai tout le soutien de M. Pascal Cherki pour cela.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Dans la rédaction actuelle, il est défavorable.

M. Pascal Cherki. Ah !

M. Emmanuel Macron, ministre. Si l’amendement est retravaillé pour aboutir à une rédaction qui permette de cibler les incubateurs et les accélérateurs que vous avez évoqués, monsieur Cherki, je pourrais accéder à votre demande. Je vous invite donc à le retirer pour le réécrire en vue du Sénat.

M. le président. La parole est à M. Pascal Cherki.

M. Pascal Cherki. Je suis très peiné. (« Oh ! » sur les bancs du groupe SRC.) Je vais vous dire pourquoi. La part qui reste dévolue au travail parlementaire, une fois qu’ont été décidés le recours aux ordonnances et le temps programmé, est assez congrue. Les amendements qui arrivent en séance sont connus des rapporteurs thématiques et du Gouvernement. En l’espèce, M. Castaner a montré qu’il était bien informé, puisqu’il a bâti une argumentation très solide le conduisant à émettre un avis de sagesse. Me demander donc de retirer le mien sans rien proposer d’autre, ni sous-amendement, ni amendement alternatif, ce n’est pas bien. Me demander de renvoyer aux calendes grecques une initiative que vous auriez pu prendre, monsieur le ministre, vous qui êtes un esprit si souple, si flexible, me pose problème.

Mme Clotilde Valter, rapporteure thématique de la commission spéciale. Oh, allez…

M. Pascal Cherki. Comme c’est votre première loi, je vais le maintenir pour que la prochaine fois que vous serez confronté au même problème, vous prévoyiez un amendement alternatif. Sinon, monsieur le ministre, il est tout à fait possible d’adresser une circulaire à l’administration fiscale pour borner le champ d’application de l’amendement afin d’éviter le risque évoqué à l’instant par le rapporteur thématique – et que je partage, car s’il y a bien une personne dans cet hémicycle qui ne souhaite pas favoriser outre mesure les entreprises du CAC 40, c’est bien moi, monsieur Castaner. Bref, vous avez tous les outils juridiques à votre disposition…

M. Dominique Tian. Et les compétences ?

M. Pascal Cherki. …pour lever toute ambiguïté.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur thématique.

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Il est difficile pour le rapporteur – pas pour les services du ministre – de réécrire chacun des amendements sur lesquels il doit se prononcer, surtout quand il a trait à un principe général du droit fiscal. Je rappelle qu’il faut, en ce cas, définir précisément l’assiette, les modalités de recouvrement et le taux, variable ou non. Il aurait donc fallu une réécriture en profondeur, un sous-amendement n’y aurait pas suffi.

Je pense, monsieur Cherki, qu’au-delà de votre position de principe, vous avez entendu nos avis favorables à votre démarche. Faisons-le, mais avec un texte qui passe la rampe ! Car je crois que celui-ci, si nous le votions tel quel, serait censuré par le Conseil constitutionnel si celui-ci venait à en être saisi.

M. Dominique Tian. Ce ne serait pas le seul !

M. le président. La parole est à M. Pascal Cherki.

M. Pascal Cherki. Je vais le maintenir, sauf si, monsieur le ministre, vous prenez l’engagement formel que le Gouvernement déposera au Sénat un amendement sécurisé juridiquement et qui aille dans la même direction, puisque vous la partagez. (Exclamations sur de nombreux bancs du groupe SRC.)

M. Dominique Tian. Il ne faut pas les croire !

M. Pascal Cherki. Ne me reprochez pas d’essayer d’avancer ! On ne peut pas me demander de fixer une assiette, des taux et des modalités de recouvrement, c’est le boulot de Bercy !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Richard Ferrand, rapporteur général. Nous n’allons tout de même pas passer la nuit sur le seul amendement non réécrit de M. Cherki. Je propose donc de l’adopter et de s’en remettre à la sagesse des sénateurs pour le réécrire. (Exclamations sur de nombreux bancs du groupe SRC.)

M. Philippe Vigier. S’ils font ça comme pour la loi NOTRe…

M. le président. M. le ministre, levez-vous le gage ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Oui.

(L’amendement n2013, modifié par la suppression du gage, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 1687 et 1465.

La parole est à M. Philippe Vitel, pour soutenir l’amendement n1687.

M. Philippe Vitel. Vous voulez de la croissance et de l’activité, monsieur le ministre. Par ce remarquable amendement de mon éminent collègue Éric Woerth, que nous avons été très nombreux à cosigner, nous pouvons y arriver en mettant en place une véritable réforme et non pas un emplâtre sur une jambe de bois comme le CICE.

Notre ambition est de remplacer ledit CICE par une baisse de cotisations salariales et patronales de 15 % sur les 500 premiers euros de salaire, compensée par la mise en place d’une taxe sur la valeur ajoutée sociale.

Mme Karine Berger. En toute simplicité !

M. Philippe Vitel. Cette idée n’est pas limitée aux députés UMP : certains députés socialistes jugent qu’une telle transformation permettrait de clarifier l’objectif de politique publique, de créer un facteur de simplicité pour les entreprises et de produire des effets sans décalage dans le temps – alors que c’est un vrai problème pour votre CICE.

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier, pour soutenir l’amendement n1465.

M. Philippe Vigier. Il s’agit encore d’un amendement qui s’inscrit dans la logique du choc de compétitivité. M. Castaner s’est quelque peu ému tout à l’heure d’un de nos amendements à quelques milliards. Pourtant, nous n’avons pas traduit d’émotion lorsqu’un amendement gouvernemental à 5 milliards a tout à coup fait apparaître un canal Seine-Nord parfaitement justifié au demeurant, ni quand nous avons appris l’existence d’un amendement sur une société de projets pour soutenir notre armée de l’ordre de plusieurs milliards. Ne soyez donc pas inquiet, monsieur le rapporteur thématique : tous, vous le savez très bien, ont franchi l’article 40.

Nous abordons avec cet amendement un sujet majeur : la TVA compétitivité. Je ne résiste pas, malgré l’heure avancée, à l’envie de partager avec vous deux phrases formidables prononcées en 2012 et qui montrent la conversion exceptionnelle à laquelle s’est livré le parti socialiste. Tout d’abord, Pierre-Alain Muet, une voix que nous aimons entendre ici, déclarait le 13 février 2012 dans cette enceinte :« Le problème de la compétitivité française n’est pas un problème de coût du travail. » Et que dire de l’irrésistible petite phrase de Pierre Moscovici, l’ancien ministre de l’économie devenu un commissaire européen qui surveille la copie de la France avec beaucoup d’assiduité : « Le coût du travail, ce n’est pas le principal problème » ?

Cet amendement vise à anticiper les désirs du Président de la République, qui avait annoncé dans sa conférence de presse de novembre 2014 que vous alliez faire le CICE pendant trois ans, que ça allait monter en régime et qu’après, en 2017, tout ce qui avait été mis sur l’allégement du coût du travail serait transféré sur des baisses de cotisations sociales pérennes.

Je m’aperçois donc qu’au fil du temps, il y a eu une conversion. Lorsque nous avions mis en place la TVA compétitivité en 2012, les socialistes la critiquaient matin, midi et soir, nous expliquant qu’augmenter la TVA, c’était affecter le pouvoir d’achat et que jamais ils ne toucheraient au taux de 19,6 %. Depuis, mes chers collègues, vous l’avez porté à 20 % et vous avez même augmenté le taux de TVA intermédiaire !

Passez à l’acte, mettez en œuvre, avec notre amendement, la quatrième proposition de Louis Gallois dans son rapport : c’est maintenant qu’il faut baisser les charges sociales patronales, à hauteur de 30 milliards, le tout gagé bien sûr sur la TVA ! En effet, la TVA à taux plein est celle qui ampute le moins le pouvoir d’achat, tout le monde le sait maintenant. Un point de TVA à taux plein en plus, cela représente seulement 0,3 % de pouvoir d’achat en moins, tout le monde le confirme !

Il faut aller dans ce sens, et vigoureusement. Votre conversion à nos thèses s’est accélérée depuis deux ans. C’est très bien, mais maintenant, monsieur le ministre, il faut passer des paroles aux actes. Il s’agit de savoir si, oui ou non, ce texte que vous soutenez avec une immense assiduité depuis le début va se traduire par une amélioration de la compétitivité de l’entreprise France, ce qui passe obligatoirement par la baisse des charges sociales patronales. Allez-y franco, dès ce soir : l’amendement est là, il est gagé. C’est le moment de le faire ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Je reprends vos excellentes références, mon cher collègue, en citant Pierre Gallois, le 13 novembre 2013 : « L’effet du CICE est plus fort sur l’emploi que la baisse des charges que j’avais préconisée. »

M. Philippe Vigier. Ah, non !

M. Jean-Frédéric Poisson. Il n’y a qu’à regarder la courbe du chômage !

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Il faut écouter, monsieur Poisson, celui qui a fait dans son rapport sur la compétitivité plus que des préconisations : un réquisitoire contre la politique que vous avez accompagnée pendant dix ans.

M. Richard Ferrand, rapporteur général. Désastreuse !

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Il avait aussi préconisé un certain nombre de dispositifs, et il a eu depuis l’occasion d’expliquer en quoi, selon lui, le CICE était plus fort pour l’emploi que la baisse des charges. Il me semble qu’à cette heure tardive de la nuit, cela devrait suffire à clore la discussion.

M. Philippe Vitel. Les électeurs jugeront en 2017 !

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Peut-être même dès dimanche prochain, monsieur Vitel !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. Monsieur le ministre, je ne vous trouve guère loquace ! (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) Qu’y a-t-il, chez collègues ? Moi, je veux bien tenir jusqu’à 8 heures du matin, aucun problème.

Il y a pourtant là un vrai sujet de débat. Vous avez commis des fautes économiques majeures au début de ce quinquennat, après nous avoir critiqués avec force. Mais je vois que le ministre n’écoute pas… Faut-il revenir dans quelques minutes ?

M. le président. Monsieur Vigier, tout le monde vous écoute.

M. Philippe Vigier. C’est un sujet économique majeur. Monsieur Castaner, combien représente le CICE en 2014 ? Un peu plus de 8 milliards d’euros, pour un an donc. Et la proposition n4 de M. Gallois, à combien s’élevait-elle par an ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Monsieur Vigier, nous ne sommes pas à l’école !

M. Philippe Vigier. À 30 milliards ! Je me permets d’insister sur cette nuance !

Je ne vous en veux pas d’être revenus sur vos erreurs quant à cette TVA compétitivité chère au Premier ministre Manuel Valls – qui, en 2011, n’avait pas de mots assez élogieux pour elle… Je salue même votre conversion. Mais il faut maintenant accélérer ; et puisque le Président de la République a annoncé dans sa conférence de presse de novembre 2014 que le CICE serait terminé trois ans plus tard, il me semble que c’est le moment de réduire massivement les charges sociales. Nous vous aidons à avancer : saisissez la perche que l’on vous tend !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Emmanuel Macron, ministre. Tout d’abord, monsieur Vigier, si j’étais facétieux, je vous répondrais qu’il faut une étude d’impact. (Rires et exclamations.)

M. Philippe Vigier. Elle est bien bonne, celle-là !

M. Jean-Frédéric Poisson. Cela en ferait au moins une !

M. Emmanuel Macron, ministre. Plus sérieusement, l’engagement a été pris par le Président de la République de procéder à cette conversion à terme.

Puisque vous le voulez, revenons sur le sujet du CICE : il n’a rien à voir avec ce qui avait été voté par la majorité précédente ! D’abord, si ces sujets étaient si urgents, pourquoi avez-vous attendu la fin du quinquennat pour prendre une mesure qui n’entrait en vigueur qu’après l’élection ? Nous, nous avons traité l’urgence, nous avons pris nos responsabilités. Le CICE et le pacte de responsabilité et de solidarité ne sont pas seulement des engagements, mais la réalisation d’une politique qui n’avait jamais été menée. Découvrir de manière soudaine, en février 2012, l’urgence de la situation et prendre une mesure qui ne s’appliquait qu’à l’automne, franchement, c’était ridicule !

Mme Clotilde Valter, rapporteure thématique. Tout à fait !

M. Frédéric Lefebvre. Il ne faut pas vous énerver comme ça, monsieur le ministre, pas à cette heure !

M. Emmanuel Macron, ministre. Ensuite, la vraie différence, c’est que le CICE n’a pas été financé par la TVA dite « sociale » : il a été gagé pour bonne partie par les économies. C’est une différence que j’assume et qu’il convient de rappeler.

M. Philippe Vigier. Ce n’est pas vrai !

M. Emmanuel Macron, ministre. Si, c’est la vérité, monsieur Vigier : la moitié a été financée par des économies, le reste pour partie par la contribution énergie-climat et pour partie par les modulations de la TVA. En effet, ce qui a été décidé par le Gouvernement, ce n’est pas une hausse de 1,3 point de la TVA !

M. Philippe Vigier. De 1,6 point.

M. Emmanuel Macron, ministre. Non, la hausse a été de…

M. Nicolas Sansu. 0,4 point !

M. Emmanuel Macron, ministre. Tout à fait. Vous conviendrez que ce n’est pas la même chose.

M. André Chassaigne. Heureusement que les communistes sont là pour préciser les choses ! (Rires.)

M. Emmanuel Macron, ministre. Je vous remercie, monsieur le président Chassaigne, de ce soutien inattendu !

Plus sérieusement, la question, qui est critique pour nos entreprises, des marges et des charges sociales, surtout sur les bas salaires, a bel et bien été prise en compte dans le CICE et le pacte de responsabilité et de solidarité. Il faut encore procéder à des aménagements techniques – je ne fais là que répéter un engagement du Président de la République.

Enfin, on ne peut parler de ces sujets sans évoquer les contraintes de finances publiques qui sont les nôtres. Nous n’aurions pas élaboré le CICE si le déficit public et les contraintes européennes n’avaient pas pesé à ce point sur la France en novembre 2012. Là encore, les choses s’expliquent par l’état des finances publiques dont nous avons hérité. Si nous avions pu procéder immédiatement à des allégements de charges, nous l’aurions fait. Mais cela n’était pas possible, car c’eût été enfreindre nos engagements européens.

Il m’importait de rappeler ces éléments, vu la façon dont vous avez revisité deux ans et demi de politique économique. Il me semble que oui, nous avons traité la question des marges des entreprises, et que oui, nous avons répondu aux problèmes que vous avez soulevés. Mais cela ne va jamais assez vite, d’abord parce que cela prend du temps, ensuite parce qu’il fallait rattraper une décennie perdue, celle dont parle M. Gallois, ce que vous avez omis de rappeler. C’est cette décennie qui fait qu’alors qu’en 2002 la France avait un coût salarial horaire inférieur à celui de l’Allemagne, dix ans plus tard, elle s’est réveillée dans une situation exactement inverse. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. Monsieur le ministre, je vous ai écouté avec attention. Je voudrais commencer par une correction : quand vous dites que la précédente majorité n’a mis en place la TVA compétitivité qu’en 2012, avec application au 1er octobre, vous avez raison. Mais nous, centristes, et en particulier Charles de Courson, avons déposé des amendement continûment, depuis 2007, pour l’instaurer ! Sans interruption ! Vous ne pouvez donc pas lancer cette accusation. Nous étions les Pascal Cherki de l’époque, nous essayions de contrer le Gouvernement ! (Rires.)

Ensuite, porter la TVA de 19,6 % à 20 %, jamais nous ne l’aurions fait. Vous l’avez fait, parce que les choix de 2012 ne sont pas les nôtres. Là où je vous rejoins, c’est sur la question de la dette : il est vrai que sur ce point, il y a une responsabilité partagée de toutes les anciennes majorités. J’ai déjà eu l’occasion de le dire à la tribune, et je le redis ce soir.

En revanche, quand vous affirmez que le CICE est financé uniquement par les économies, ce n’est pas vrai. Vous savez aussi pertinemment que pour ce qui est du programme de stabilité, les 50 milliards d’euros d’économies ne seront pas au rendez-vous. Bruxelles se montre dubitative, la Cour des comptes n’y croit pas. Pour ma part, je vous ai dit à la tribune que vous ne ferez pas mieux que 21 milliards d’euros. Nous ferons les comptes en janvier 2016 et vous verrez que malheureusement j’aurai eu raison.

(Les amendements nos 1687 et 1465, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à Mme Karine Berger, pour soutenir l’amendement n2779.

Mme Karine Berger. Je suis navrée de revenir à près de quatre heures du matin à des choses aussi terre à terre, après cette discussion sur la macroéconomie générale, la TVA et le CICE… Ce que souhaite cet amendement, cosigné par plusieurs de mes collègues, dont Christophe Premat, c’est faciliter les activités à l’exportation des PME françaises – et d’elles seules : le dispositif est à destination des PME. Notre proposition coûte un peu d’argent, j’en conviens, mais vraiment très peu en regard des sommes que nos collègues viennent de vous soumettre, monsieur le ministre… Il s’agit de doubler le crédit d’impôt attaché à l’assurance prospection.

Je rappelle que les PME ont la possibilité de voir financer, grâce à un amortissement très favorable de l’investissement, leur installation dans des pays étrangers, pour ce qui est des bureaux d’exportation, ou tout simplement la présentation de leurs produits dans des foires commerciales. Cette assurance prospection fonctionne très bien et toutes les PME qui cherchent à exporter, qu’elles soient innovantes ou pas, y ont recours.

Nous proposons donc de doubler cette assurance prospection, son montant étant plafonné à 40 000 euros par PME : il ne s’agit donc pas de sommes considérables. Je crois savoir qu’il y a une petite erreur rédactionnelle dans l’amendement, mais il devrait être possible de la corriger en séance. Il convient de mobiliser tout ce qui peut aider les PME à trouver des marchés à l’étranger.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Cet amendement, dont je comprends l’objectif, présente effectivement des incertitudes de nature juridique. Que veut dire « renouvelable au moins une fois » ? Comment vérifier que le crédit d’impôt ait permis « le recrutement d’un salarié affecté aux exportations » ? Et je ne parle même pas de son coût : en 2013, le dispositif a coûté 22 millions d’euros. S’il n’était renouvelable qu’une fois, cela ferait 44 millions.

Quoi qu’il en soit, la rédaction fait problème et j’ignore si nous réussirions à la modifier en séance, sans compter que rien ne garantit que le Gouvernement acceptera de lever le gage. Il vaudrait mieux s’accorder un peu de temps et demander à un collègue sénateur de présenter un amendement plus précis.

Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Même avis.

(L’amendement n2779 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Frédéric Lefebvre, pour soutenir l’amendement n28.

M. Frédéric Lefebvre. Cet amendement vise à supprimer la TVA inter-entreprises. La Cour des comptes estime en effet que la fraude réalisée dans le cadre de ce dispositif s’élève à 10 milliards d’euros par an.

M. Nicolas Sansu. Au moins !

M. Frédéric Lefebvre. Le droit communautaire permet aujourd’hui la suppression de la TVA inter-entreprises. Cela ne modifierait en rien le montant de la taxe due au stade de la consommation finale, tout en facilitant la vie des entreprises et la lutte contre la fraude. Il s’agit vraiment d’un bon dispositif, et j’espère que nous allons nous retrouver pour l’adopter.

M. Nicolas Sansu. C’est un dispositif très intelligent !

M. André Chassaigne. Il a raison !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe Castaner, rapporteur thématique. Tout à l’heure on remettait en cause le CICE. Là, on en est à un bouleversement profond de la TVA !

La lecture que nous faisons de la directive « TVA » du 28 novembre 2006 ne nous amène à la même conclusion que vous, monsieur Lefebvre. Elle précise en effet qu’« à chaque opération, la TVA, calculée sur le prix du bien ou du service au taux applicable à ce bien ou à ce service, est exigible déduction faite du montant de la taxe qui a grevé directement le coût des divers éléments constitutifs du prix. » C’est le principe même de cet article premier que votre amendement remet en cause !

À l’issue de cette rapide analyse, il me semble que votre amendement bouleverserait totalement l’équilibre du système de la TVA et ne serait de surcroît pas conforme avec la directive européenne du 28 novembre 2006.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Même avis.

(L’amendement n28 n’est pas adopté.)

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

2

Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Prochaine séance, lundi 9 février, à seize heures :

Suite de la discussion du projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.

La séance est levée.

(La séance est levée, le samedi 7 février 2015, à quatre heures.)

La Directrice du service du compte rendu de la séance

de l’Assemblée nationale

Catherine Joly