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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Session ordinaire de 2014-2015

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du mardi 09 juin 2015

SOMMAIRE

Présidence de Mme Catherine Vautrin

1. Statut, accueil et habitat des gens du voyage

Discussion des articles (suite)

Article 2 (suite)

Amendement no 9

Suspension et reprise de la séance

M. Dominique Raimbourg, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité

Amendements nos 78 , 45 , 10 , 79 rectifié , 102 (sous-amendement) , 99 (sous-amendement) , 100 (sous-amendement) , 101 (sous-amendement) , 44 , 80 , 55 , 42 , 61 , 98 , 5 , 15 , 54 , 81 , 13 , 11 , 6 , 14 , 53 , 65 , 82 , 83

Après l’article 2

Amendements nos 43 , 64 , 38 , 41 rectifié

Article 3

Après l’article 3

Amendements nos 17 , 59 rectifié , 89 rectifié , 97 rectifié , 69 rectifié , 30 rectifié

Article 3 bis

M. Lionel Tardy

Mme Annie Genevard

M. Jean Lassalle

Amendements nos 70 , 31 , 7 , 50 , 58 , 48 , 57 , 95 , 40 , 91 , 33 , 51 , 60 , 92 , 52 , 62 , 93 , 8 , 25 , 56 , 36 , 16 , 24 , 49 , 90 , 39 , 84 , 94

Après l’article 3 bis

Amendement no 19

Articles 4 à 7

Avant l’article 8

Amendement no 20

Article 8

Amendements nos 34 , 86 , 37 , 85 , 96 , 21 , 32

Après l’article 8

Amendements nos 87 rectifié , 35 rectifié , 26 rectifié

Article 9

Amendement no 18

Après l’article 9

Amendement no 88

Explications de vote

M. Olivier Dussopt

Mme Jeanine Dubié

Mme Annie Genevard

Vote sur l’ensemble

2. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de Mme Catherine Vautrin

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

1

Statut, accueil et habitat des gens du voyage

Suite de la discussion d’une proposition de loi

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de loi relative au statut, à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage (n2812, 1610).

Discussion des articles (suite)

Mme la présidente. Cet après-midi, l’Assemblée a commencé la discussion des articles de la proposition de loi, s’arrêtant à l’amendement n9 à l’article 2.

Article 2 (suite)

Mme la présidente. La parole est à M. Sergio Coronado, pour soutenir l’amendement n9.

M. Sergio Coronado. Il s’agit d’un amendement lexical, que j’ai déjà présenté en commission, mais qui n’avait pas convaincu M. le rapporteur.

L’article 1er de la loi Besson utilise, pour qualifier l’habitat des gens du voyage, l’adjectif « traditionnel ».

M. Gérald Darmanin. Vous n’aimez pas la tradition ?

M. Sergio Coronado. Je l’avais dit lors des travaux de la commission : cet adjectif est à la fois inopérant et inadéquat. En effet, les gens du voyage ne constituent pas une population homogène, et leur habitat n’est pas forcément traditionnel, puisqu’ils résident habituellement en habitat mobile terrestre. Cet adjectif est donc inapproprié. Je propose qu’on lui substitue l’adjectif «  permanent  », qui figure à l’article L. 444-1 du code de l’urbanisme.

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Dussopt.

M. Olivier Dussopt. Je demande une suspension de séance au nom du groupe socialiste, républicain et citoyen. (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)

Mme Annie Genevard. Ça commence bien.

Mme la présidente. Elle sera d’une durée de deux minutes.

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt et une heures trente-deux, est reprise à vingt et une heures trente-cinq.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

La parole est à M. Dominique Raimbourg, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n9.

M. Dominique Raimbourg, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République. Il est défavorable : le qualificatif « traditionnel » ne me paraît pas péjoratif. En conséquence, je souhaite le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité, pour donner l’avis du Gouvernement. La majorité étant majoritaire, vous voilà revenue, madame la ministre !

Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à M. Gérald Darmanin.

M. Gérald Darmanin. Nous n’allons pas demander une suspension de séance. (Sourires.)

En me félicitant de l’avis du rapporteur et de la ministre, je voudrais dire à mon collègue Coronado que nous n’allons pas pouvoir passer toute la nuit sur des amendements lexicaux.

Ceci dit, il est intéressant de voir que la police de la pensée vienne de nouveau, par votre voix, cher collègue, attaquer ce qui est traditionnel. Cela nous rappelle certains débats qui ont eu lieu dans cet hémicycle. Vous semblez avoir un petit problème avec la tradition. Nous l’avons dit tout à l’heure, mais vous n’étiez pas là.

M. Patrick Mennucci et M. Sébastien Denaja. Si, nous étions là ! La retransmission de la séance le prouve.

M. Gérald Darmanin. Nous avons dû vous réveiller. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)

Pour notre part nous respectons la spécificité des gens du voyage, tout en considérant qu’ils faisaient partie de la communauté nationale. Nous n’avons pas à porter de jugement sur leur façon de vivre, et la République doit bien sûr édicter des lois et des règlements visant à les accueillir le mieux possible, partout où ils se trouvent sur le territoire français. Nous respectons leurs traditions ainsi que leur culture.

Mme la présidente. La parole est à M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Mon collègue Darmanin vient – et c’est de bonne guerre – de faire gonfler ses statistiques de deux minutes.

Je vais retirer mon amendement, monsieur le rapporteur, mais je n’ai pas développé la même argumentation qu’en commission, où nous avions parlé du caractère stigmatisant de l’adjectif : j’ai simplement dit qu’il était inapproprié.

(L’amendement n9 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Raimbourg, rapporteur, pour soutenir l’amendement n78.

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Il est rédactionnel.

(L’amendement n78, accepté par le Gouvernement, est adopté et l’amendement no 29 tombe.)

Mme la présidente. La parole est à M. Sergio Coronado, pour soutenir l’amendement n45.

M. Sergio Coronado. L’amendement vise à élargir les possibilités de domiciliation des personnes. L’élection de domicile est une procédure très contraignante. En outre, la domiciliation ne peut être accordée que par une association agréée ou un centre social. Ces domiciliations ne peuvent être que temporaires, en contradiction avec la situation réelle de certaines personnes qui disposent d’une installation permanente, et non pas traditionnelle, comme le voudrait mon collègue Darmanin.

Afin de simplifier la vie de ces personnes ainsi que celle des communes, des associations et des centres sociaux, l’amendement propose que les personnes qui jouissent d’une autorisation d’installation de leur résidence mobile de plus de trois mois puissent se domicilier sur ce terrain. Cette possibilité a été accordée aux usagers de résidences démontables par la loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, la loi ALUR, mais elle est refusée aux habitants des résidences mobiles. Je propose donc de réparer cet oubli.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Défavorable en raison des conditions générales de la domiciliation telles que prévues par l’article 102 du Code civil.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvia Pinel, ministre. Il est également défavorable. Si la loi ALUR a apporté une clarification quant à l’établissement de la résidence principale uniquement pour les utilisateurs d’une résidence démontable constituant leur habitat permanent, c’est que celle-ci est une résidence fixe : dans ce cas, le domicile se confond avec la résidence. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard.

Mme Annie Genevard. L’exposé sommaire de l’amendement mentionne le fait qu’une domiciliation délivrée par un centre communal d’action sociale, un CCAS, ne peut être que temporaire. J’aimerais avoir des précisions sur ce point : cette domiciliation n’a-t-elle qu’un caractère temporaire ? J’avais cru comprendre que ce texte permettait une demande de domiciliation auprès d’un CCAS ou d’une association agréée, dans la commune de son choix. Est-elle réellement temporaire, du fait de la nature du rattachement ?

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Raimbourg, rapporteur.

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. La domiciliation est temporaire et doit être renouvelée chaque année.

(L’amendement n45 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Sergio Coronado, pour soutenir l’amendement n10.

M. Sergio Coronado. Cet amendement propose de supprimer les mots « et de la demande de sédentarisation » à la fin de l’alinéa 6, parce qu’on peut s’interroger sur la réalité de cette demande, ainsi que sur le fait que l’habitat dans une caravane immobilisée soit le meilleur moyen d’y répondre. En outre, cette précision est redondante avec l’évocation de « l’évolution des modes de vie » au même alinéa. Enfin, il est à craindre que cette mention d’une éventuelle sédentarisation ne constitue une justification pour diminuer le nombre d’aires d’accueil prévues.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Défavorable.

(L’amendement n10, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n79 rectifié qui fait l’objet de quatre sous-amendements, no102, 99, 100 et 101.

La parole est à M. Dominique Raimbourg, rapporteur, pour soutenir l’amendement.

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Cet amendement important vise à permettre une réflexion autour du schéma départemental afin de choisir les éléments qui paraissent les plus adaptés aux besoins ainsi qu’à la demande. Il satisfait le souhait de M. Darmanin qu’on tienne compte des difficultés spécifiques des communes comptant des quartiers relevant de la politique de la ville ou qui ont des difficultés foncières. Cela permet, au sein des établissements publics de coopération intercommunale, de trouver des solutions alternatives. Le schéma départemental constitue une réponse adaptée aux réalités du terrain.

Mme la présidente. Je suis saisie de quatre sous-amendements, nos 102, 99, 100 et 101, à l’amendement no 79 rectifié.

La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir le sous-amendement n102.

M. Lionel Tardy. Nous sommes confrontés toutes les semaines aux problèmes posés par l’accueil des gens du voyage. La meilleure solution pour améliorer la loi Besson est encore de tenir compte des situations vécues sur le terrain, à Cusy, par exemple, commune de ma circonscription dont les habitants se sont constitués en collectif pour manifester leur inquiétude quant à l’installation d’une aire d’accueil.

Ce cas est loin d’être isolé : les aires d’accueil suscitent souvent des protestations. Les intercommunalités doivent respecter les obligations du schéma départemental et y sont poussées par les préfets. Cela n’a rien d’étonnant, mais on oublie bien souvent d’informer la population de ce tissu d’obligations, ce qui n’est pas sans susciter des inquiétudes légitimes, mais aussi des rejets qu’il faudrait éviter.

L’information des riverains – via, par exemple, des réunions publiques – pourrait être effectuée de façon conjointe par les services de l’État et les élus. Ce sous-amendement vise à systématiser l’information des populations. Si elle n’est pas érigée au rang d’obligation légale, elle risque d’être inexistante en cas de blocage entre la préfecture et les collectivités, situation que le texte semble viser quelques alinéas plus loin.

Le schéma départemental doit donc prévoir des modalités d’information particulières à destination des habitants des communes sur le territoire desquelles des aires doivent être aménagées.

Mme la présidente. La parole est à Mme Virginie Duby-Muller, pour soutenir le sous-amendement n99.

Mme Virginie Duby-Muller. Puisque l’objectif est d’améliorer la loi du 5 juillet 2000, nous vous proposons des solutions pour améliorer le schéma départemental d’accueil et d’habitat des gens du voyage.

En effet la loi Besson II ne prévoit pas explicitement que ce schéma est élaboré de concert entre les services de l’État et les collectivités concernées, à savoir les intercommunalités. Il faut pourtant éviter à tout prix les situations de blocage dans lesquelles les communes ont l’impression qu’elles ne font que subir des obligations qui leur sont imposées par le préfet.

M. Michel Vergnier. Ce n’est pas comme ça que ça marche !

Mme Virginie Duby-Muller. Mieux vaut prévenir que guérir et tout faire pour que le dispositif de sanction financière prévu à l’article 2 ne soit jamais mis en œuvre. C’est pourquoi ce sous-amendement, déposé avec mes collègues Lionel Tardy et Martial Saddier, vise à inscrire dans la loi l’obligation de concertation avec les élus communautaires. Je ne doute pas que cette concertation existe d’ores et déjà, mais le but est que le schéma départemental soit réalisé dans un esprit de concertation et de coopération qui sera bénéfique à tous.

Mme la présidente. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir le sous-amendement n100.

M. Lionel Tardy. Je défendrai en même temps le sous-amendement no 101, madame la présidente.

Mme la présidente. Je vous remercie.

M. Lionel Tardy. Toujours dans le souci de mieux faire accepter le schéma départemental, mes sous-amendements nos 100 et 101 sont deux versions possibles d’une même proposition. Le but est dans les deux cas d’associer les agriculteurs à la construction du schéma puisque, même quand les terrains retenus ou réquisitionnés en dernier lieu ne sont pas des terrains agricoles, ils se situent souvent à proximité de terrains agricoles. En outre ces derniers sont souvent victimes du stationnement illégal – on en revient toujours au même problème. Ce stationnement est très gênant pour les agriculteurs : non seulement il porte atteinte à leur droit de propriété, mais il nuit à leur activité économique.

C’est pourquoi nous proposons d’associer les agriculteurs à l’élaboration du schéma départemental dont ils seraient saisis pour avis : ils ont leur mot à dire.

Deux structures pourraient donner leur avis sur le schéma départemental : soit la chambre d’agriculture du département, c’est l’objet de mon sous-amendement n100 ; soit la commission départementale de la préservation des espaces naturels agricoles et forestiers, anciennement commission départementale de la consommation des espaces agricoles – c’est le sens de mon sous-amendement n101. Je rappelle que cette commission est composée de représentants de l’État, des collectivités territoriales et de leurs groupements, des professions agricoles et forestières, des chambres d’agriculture et des organismes nationaux à vocation agricole et rurale, des propriétaires fonciers, des notaires, des associations agréées de protection de l’environnement et des fédérations départementales ou interdépartementales des chasseurs. Sa composition est donc plus large et sa consultation est habituelle sur les sujets d’urbanisme.

Je ne doute pas que vous saurez apprécier ces deux options et renforcer l’association des acteurs agricoles à l’élaboration du schéma départemental d’accueil des gens du voyage.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces sous-amendements ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. C’est un avis défavorable sur l’ensemble de ces sous-amendements.

J’ai entendu avec intérêt les orateurs de l’opposition déplorer eux aussi la difficulté d’aménager des aires d’accueil, des terrains familiaux et des aires de grand passage. Or plus on multiplie les réglementations encadrant l’élaboration du schéma départemental, plus on impose de concertations par la loi, plus on alourdit le système et moins on a de chances d’aboutir à quelque chose de positif.

Un préfet normalement constitué,…

M. Gérald Darmanin. Qu’est-ce que c’est un préfet normalement constitué ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. …un président de conseil départemental tout aussi normalement constitué sait parfaitement que ce qui s’élabore sans concertation a très peu de chance de réussir…

M. Gérald Darmanin. Parlez-vous des rythmes scolaires ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. …et de trouver une application satisfaisante.

Il n’est pas raisonnable d’alourdir les schémas d’obligations de concertation au point de les rendre inapplicables.

M. Lionel Tardy. Pour complexifier, vous êtes pourtant les champions !

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. J’ajoute que, plus on alourdit la procédure légale d’élaboration, au-delà de la volonté légitime de concertation, plus on ouvre la porte à des recours. Il y aurait un risque de recours si la chambre d’agriculture n’était pas consultée ; autre risque de recours si l’organisme qui s’occupe des espaces naturels ne l’était pas.

Il ne faut pas alourdir le dispositif mais laisser les acteurs mettre en place eux-mêmes une concertation. Les élus locaux que j’ai reçus, notamment les représentants de l’association des maires des grandes villes de France, l’AMF, m’ont tous fait part de leur souhait que ces schémas soient élaborés de la façon la plus démocratique possible, mais faire de toutes ces consultations des obligations légales serait fournir autant de munitions à tous les procéduriers qui voudraient faire exploser le schéma départemental. Je ne pense pas du tout ce disant aux élus locaux, mais à tous ces collectifs de riverains qui n’ont pas d’autre but que de repousser les aires d’accueil chez le voisin.

Pour toutes ces raisons, je suis défavorable à l’ensemble de ces sous-amendements. J’en comprends le principe, j’en approuve l’idée, mais leurs dispositions constituent un terrain miné.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement et les sous-amendements ?

Mme Sylvia Pinel, ministre. Favorable à l’amendement et défavorable aux sous-amendements.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Vergnier.

M. Michel Vergnier. Je veux bien qu’on complique les choses à l’extrême mais je ne voudrais pas qu’on oublie l’essentiel.

M. Lionel Tardy. Vous êtes pourtant des spécialistes en la matière ! (Protestations sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)

M. Michel Vergnier. Il y a des critères d’implantation à regarder de très près, notamment en ce qui concerne les personnes en cause. Quand il y a des enfants, il faut qu’ils soient à proximité de commerces, d’écoles. Ces gens de passage doivent bénéficier de conditions d’accueil normales ; nous devons enfin les accueillir de façon convenable.

Mme la présidente. La parole est à M. Gérald Darmanin.

M. Gérald Darmanin. Vos explications sont un peu étonnantes, monsieur le rapporteur. Comment peut-on refuser la concertation sur un sujet aussi sensible ? Je crois savoir que votre famille politique préfère  parler avant – le fameux « dialogue » – plutôt que de régler les problèmes après.

Je ne doute pas un seul instant que les préfets soient normalement constitués, surtout lorsqu’ils ont la chance et l’honneur de servir la République dans l’une des plus grandes régions de France. Pourtant le préfet du département du Nord n’a organisé aucune concertation avec les élus locaux avant d’élaborer le schéma départemental des aires d’accueil des gens du voyage, provoquant le désarroi et le désappointement des élus locaux, notamment ceux des communes et des intercommunalités.

Le conseil général a délibéré sur le schéma départemental et l’a même découpé par territoires sans en parler aux élus locaux, sans leur demander leur avis, sans les en saisir, sans une délibération, sans même un courrier. Désormais, du fait d’une décision tout à fait unilatérale, mon territoire doit aménager cinquante-cinq places pour accueillir les gens du voyage sans qu’il ait été imaginé un seul instant de prévoir une répartition des places d’accueil à l’échelle de la métropole. Encore plus fort, on n’a même pas demandé à la métropole et aux intercommunalités si elles étaient d’accord sur la répartition à l’intérieur même de l’EPCI. Et ensuite on leur demande de financer et de faire ce qu’on leur dit !

La concertation proposée par M. Tardy devrait donc être acceptée, loin de tout esprit partisan.

M. Luc Belot. Jamais partisan ! L’esprit républicain !

Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Moreau.

M. Yannick Moreau. Je voudrais souhaiter la bienvenue à nos collègues socialistes qui nous ont rejoints et leur expliquer le sujet de notre séance. Mes chers collègues, nous parlons des gens du voyage. Votre collègue a dû demander une suspension de séance au début de la séance car vous n’étiez pas assez nombreux.

M. Christophe Borgel. Il a bien fait ! Maintenant nous sommes les plus nombreux !

M. Yannick Moreau. Nous avons eu droit ensuite à des interventions dilatoires qui vous ont laissé le temps d’arriver. Soyez les bienvenus, le débat n’en sera que plus riche.

M. Hugues Fourage. Quel provocateur !

M. Yannick Moreau. S’agissant de l’élaboration du schéma départemental des aires d’accueil des gens du voyage, je ne vois pas bien les raisons qui justifieraient de ne pas y associer les organismes cités par notre brillant collègue Tardy et de ne pas organiser une concertation avec leurs représentants.

Par ailleurs, monsieur le rapporteur, comment peut-on dans la pratique encourager la création de terrains familiaux locatifs, alors que c’est extraordinairement complexe ? J’ai cru comprendre à la lecture de diverses publications que c’était l’un des objectifs de la loi mais une fois qu’on l’a affirmé dans le schéma, comment fait-on concrètement ?

(Les sous-amendements nos 102, 99, 100 et 101, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

(L’amendement n79 rectifié est adopté et les amendements nos 1, 2, 3, 22 et 4 tombent.)

Mme la présidente. La parole est à M. Gérald Darmanin, pour soutenir l’amendement n44.

M. Gérald Darmanin. Je ne vous apprends rien, monsieur le rapporteur, en vous disant que toutes les communes de France ne sont pas égales en termes de population, de difficultés sociales ou de disponibilités foncières. Certaines communes notamment comptent sur leur territoire des quartiers prioritaires au titre de la politique de la ville et la législation relative aux gens du voyage doit tenir compte de cet état de fait.

Comme je l’ai dit à un moment où vous n’étiez pas aussi nombreux dans l’hémicycle, mes chers collègues, sur ce point, les socialistes sont souvent croyants mais pas pratiquants. Celui qui a été le député-maire de Tourcoing pendant vingt-cinq ans et a voté les deux lois Besson a simplement omis de créer des aires d’accueil des gens du voyage dans sa ville de 100 000 habitants. Comme quoi, il suffit parfois d’un trajet en TGV pour oublier des choses en chemin.

Souvent les difficultés sociales se cumulent. C’est pourquoi nous proposons, monsieur le rapporteur que les communes souffrant de difficultés sociales reconnues par l’État à travers la dotation de solidarité urbaine, la DSU et la politique de la ville, voire au titre du nouveau programme national de renouvellement urbain, le NPNRU, puissent être exemptées de l’obligation de créer des aires d’accueil des gens du voyage. Nous sommes même prêts à accepter des sous-amendements assortissant une telle exemption de délais, le but de la politique de la ville, notamment des programmes de rénovation urbaine, étant que les quartiers cessent d’en dépendre. Si les communes qui ont plus de facilités doivent accueillir les gens du voyage, et la République leur imposer cet effort, elle doit aussi tenir compte des difficultés spécifiques de certaines communes de France, comme la ville de Tourcoing, que je dirige.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. J’entends parfaitement cet argument mais je pense que la proposition de loi satisfait votre préoccupation. En effet, en lien avec la nouvelle organisation territoriale de la République, elle donne aux EPCI la compétence en matière d’accueil des gens du voyage, ce qui signifie que l’EPCI peut s’organiser pour qu’une commune qui connaît des difficultés particulières ne supporte pas directement des charges supplémentaires.

Mme Anne Grommerch. Sans concertation !

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. À votre argument sur les communes en situation difficile, nous répondons par la création d’une compétence communautaire. Il y aura alors forcément une répartition, que nous souhaitons la plus intelligente possible.

Comme nous le verrons dans un amendement ultérieur, une révision du schéma départemental sera possible. Si un maire hérite d’une situation difficile parce que son prédécesseur n’aura pas créé d’aires d’accueil des gens du voyage, il sera possible alors de provoquer une révision du schéma départemental à l’initiative du préfet ou du président du conseil départemental, de façon à remettre les choses à plat.

Il me semble donc que le texte répond parfaitement au souci tout à fait légitime que vous exposez.

(L’amendement n44, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Raimbourg, pour soutenir l’amendement n80.

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Je viens de défendre cet amendement relatif à la possibilité d’engager une procédure de révision.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvia Pinel, ministre. Favorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Gérald Darmanin.

M. Gérald Darmanin. J’aimerais, monsieur le rapporteur, que vous précisiez ce que vous venez de dire parce que c’est extrêmement important, d’autant que des élections viennent d’avoir lieu au niveau départemental et municipal. Des schémas départementaux ont été votés par d’anciens conseillers généraux au mépris de la loi Besson, et de nouveaux présidents de conseil départemental, de nouveaux maires se retrouvent dans la situation que vous évoquiez quand des élus de droite ou de gauche n’ont pas appliqué la loi de la République.

Si je comprends bien votre amendement, une commune – et pas simplement une commune bénéficiant de la politique de la ville puisque le champ de votre amendement est plus large que le mien – ayant des difficultés particulières est soumise à un schéma départemental trop rigide ou impossible à mettre en place, le président du conseil départemental ou le préfet du département pourra remettre en cause le schéma départemental, même si les délibérations sont déjà prises, mais non encore effectives. Nous sommes bien d’accord ?

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. En effet, dans le cadre d’une procédure de révision. Il ne me semble pas que cela pose des difficultés particulières.

(L’amendement n80 est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Sergio Coronado, pour soutenir l’amendement n55.

M. Sergio Coronado. Cet amendement vise à donner au préfet de région un rôle de coordonnateur de l’action de l’État et des collectivités concernant les grands passages. Je pense que cet amendement peut répondre à la demande de clarification des rôles respectifs des élus et du préfet que le débat a fait apparaître.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Avis défavorable pour des raisons techniques, le ministère de l’intérieur souhaitant que cette compétence reste au préfet du département. Le préfet de région n’a pas vocation à  assumer cette charge.

(L’amendement n55, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Gérald Darmanin, pour soutenir l’amendement n42.

M. Gérald Darmanin. Cet amendement est un peu différent de celui que nous venons de voter avec vous, monsieur le rapporteur. Comme je l’ai dit à la tribune, certaines communes rencontrent des difficultés pour s’acquitter de l’obligation de disposer de 25 % de logements sociaux imposée par la loi ALUR – au lieu de 20 % auparavant – et de construire une aire d’accueil pour les gens du voyage, en raison d’un manque de foncier – c’est le cas de la commune de Neuville-en-Ferrain, dans ma circonscription, et de bien d’autres en France. Si, comme vous le dites, le schéma départemental peut désormais être révisé par le préfet ou par le président de département, sans doute l’accepteront-ils assez facilement s’il s’agit d’une ou de deux communes dans une intercommunalité. Or, il se trouve que Neuville-en-Ferrain, comme Roncq ou Mouvaux – et je pourrais ainsi décliner toutes les communes du territoire tourquennois –, sont côte à côte…

Mme Marie-Anne Chapdelaine. C’est quand même bizarre !

M. Gérald Darmanin. Cela s’appelle une métropole ! Manifestement, madame, vous ne connaissez pas le territoire dont je parle. Je vous demande par conséquent de faire preuve d’un peu d’esprit républicain et de m’écouter. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et du groupe écologiste.)

Mme la présidente. Un peu de calme, s’il vous plaît ! Seul M. Darmanin a la parole.

M. Gérald Darmanin. Sur ce territoire, des communes relevant de la politique de la ville connaissent des difficultés et des spécificités sociales très fortes, comme Roubaix, Wattrelos ou Tourcoing et d’autres qui n’ont plus du tout de foncier. Monsieur le rapporteur, je vous demande un avis de sagesse, car cet amendement est porté par beaucoup d’élus de droite comme de gauche.

M. Luc Belot. Pas dans mon jardin ! Comme d’habitude !

M. Gérald Darmanin. L’idée n’est pas de refuser de construire le nombre de logements sociaux prévus par la loi ALUR, ni de refuser l’aménagement d’une aire d’accueil pour les gens du voyage, mais de permettre, en corrélation avec votre amendement que nous venons de voter, d’intégrer l’aire d’accueil des gens du voyage dans le pourcentage des logements sociaux prévus par la loi, ou inversement d’exempter de l’obligation de créer une aire d’accueil en tenant compte du nombre de logements sociaux – ce que je proposerai dans un amendement ultérieur.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Je ne peux que renvoyer à l’intelligence collective des élus de terrain,…

M. Gérald Darmanin. Il s’agit du préfet !

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. …à charge pour eux de trouver la solution. C’est vous-même qui vous nous avez invité tout à l’heure à faire confiance aux élus de terrain pour trouver des solutions. Encadrer leurs initiatives de dispositions réglementaires, ce n’est plus leur faire confiance, et ce n’est pas ainsi que nous ne trouverons des solutions. Je ne connais pas le cas précis de la commune de Neuville-en Ferrain.

M. Gérald Darmanin. Vous y êtes invité !

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. J’irai volontiers ! Vous avez dit qu’elle était condamnée à payer l’indemnité pour l’absence des 25 % ou des 20 % de logements sociaux, ainsi que l’amende pour l’absence d’aire d’accueil. Or aucune amende ne sanctionne pour l’instant l’absence d’aire d’accueil.

M. Gérald Darmanin. Elle arrive !

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Il ne s’agira que d’une procédure de consignation des fonds. Il reviendra à l’établissement public de régler cette question. Si jamais il n’est pas possible de satisfaire l’obligation de créer une aire d’accueil sur le territoire de la commune de Neuville-en-Ferrain, peut-être que, dans cette agglomération si dense, vous trouverez un petit espace. Je ne connais pas suffisamment Tourcoing pour vous dire s’il y a de la place au coin des rues Paul Fort et du Général Margueritte, mais je pense qu’un élu local aussi avisé que vous, monsieur Darmanin,…

M. Charles de La Verpillière. Ah ! On progresse !

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. …qui avez été élu brillamment, trouvera un petit coin de rue où caler quelques caravanes. (Sourires.)

Mme Marie-Anne Chapdelaine. Excellent, monsieur le rapporteur !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvia Pinel, ministre. Je partage l’avis du rapporteur.

M. Bernard Accoyer. Et son jugement sur M. Darmanin aussi ?

Mme Sylvia Pinel, ministre. Cet amendement est très flou, puisqu’il ne précise pas les critères qui seraient pris en compte pour qualifier une commune où le foncier est insuffisant.

M. Gérald Darmanin. C’est pourtant facile à comprendre !

Mme Sylvia Pinel, ministre. Cela est susceptible de reporter au-delà de 2025 la mise en œuvre des obligations de création d’aires d’accueil. Par ailleurs, les deux dispositifs de développement de l’offre de logement social et de production d’aires d’accueil, qui ne répondent pas aux mêmes finalités, ne sont pas incompatibles, et ce même quand le foncier disponible est rare. La mise en œuvre des objectifs de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, ou loi SRU, et le développement de l’offre de logements sociaux ne passent pas nécessairement par la construction : elle peut par exemple, passer par l’acquisition et l’amélioration de logement par les bailleurs ou par la mobilisation du parc privé conventionné avec l’ANAH.

C’est la raison pour laquelle le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard.

Mme Annie Genevard. Notre collègue pose une question des plus pertinentes sur le lien entre l’habitat des gens du voyage et les logements sociaux. Nous l’avions soulevée au moment de la discussion de la loi ALUR. La ministre en charge de ce texte à l’époque, Cécile Duflot, avait repoussé notre demande…

M. Bernard Accoyer. Brutalement !

Mme Annie Genevard. …de pouvoir comptabiliser les places dans les aires d’accueil des gens du voyage comme des logements sociaux.

Les terrains familiaux locatifs, qui, aux termes de votre amendement n79 rectifié, monsieur le rapporteur, pourront être intégrés dans le schéma départemental, ne sont pas de l’habitat temporaire, mais durable. Pourquoi ne pourraient-ils pas être comptabilisés dans le quota des logements sociaux, puisque vous les définissez comme pouvant être intégrés au plan départemental d’action pour le logement et l’hébergement des personnes défavorisées ? Nous devons reprendre cette définition s’agissant des terrains familiaux locatifs destinés à des populations en voie de sédentarisation, car ce sont des personnes défavorisées dont le logement peut pour cette raison relever de l’habitat social.

M. Bernard Accoyer. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Gérald Darmanin.

M. Gérald Darmanin. Je vous remercie, monsieur le rapporteur, pour l’esprit constructif dont vos propos témoignent. Les élus pourront faire fond sur ces propos de bon sens auprès du préfet. Souvent, en effet, ce ne sont pas eux qui posent problème, mais le préfet, « normalement constitué » pour reprendre vos mots, ou tout au moins ses services à qui il arrive de s’opposer au bon sens des élus de terrain.

Je vous renouvelle mon invitation à Neuville-en-Ferrain, qui est très sympathique, et à Tourcoing. Cependant, monsieur le rapporteur, nous ne vous avons pas attendu ! À peine élu, puisque mon prédécesseur n’avait pas cru bon en vingt-cinq ans de construire ces aires d’accueil,…

M. Luc Belot. Vous nous l’avez déjà dit quatre fois !

M. Gérald Darmanin. Il est bon de le répéter, cher collègue !

M. Luc Belot. C’est en effet la clé de la pédagogie !

M. Gérald Darmanin. …nous avons, avec les villes de Roncq, de Neuville-en-Ferrain et d’Halluin, décidé de créer une aire d’accueil intercommunale sur le territoire de la commune de Roncq. Je l’ai annoncé à la population, qui trouve d’ailleurs courageuse cette initiative commune. Cependant, le problème reste entier. Pourquoi ne pas comptabiliser ces cinquante-cinq places comme des logements sociaux au titre de la loi ALUR, comme le demande Mme Genevard – la réponse de Mme la ministre ne m’a d’ailleurs pas du tout satisfait – , puisque nous faisons un effort intercommunal, nous trouvons un terrain, alors que trois de ces communes n’ont plus du tout de foncier disponible, et nous sommes d’accord pour appliquer la loi SRU, y compris en recourant au parc privé conventionné avec l’ANAH ?

De 12 % à 25 % de logements sociaux, la marge est importante. Qui plus est, les élus encourent des amendes. Nous avons trouvé une solution intelligente au niveau intercommunal et nous demandons à la volonté générale de faire un petit effort pour faire entrer par la loi ces cinquante-cinq places dans le quota des logements sociaux. Nous trouvons des solutions, nous appliquons votre loi et nous faisons preuve de bon sens : vous pourriez faire un petit pas vers nous !

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Vergnier.

M. Michel Vergnier. Je comprends votre souci, monsieur Darmanin. Ce qui me gêne c’est votre façon d’établir une hiérarchie entre les uns et les autres.

M. Gérald Darmanin. Nous proposons les deux solutions dans deux amendements différents !

M. Michel Vergnier. Je parle de celui-ci et je vous le dis très tranquillement : les choses y sont dites d’une manière qui me blesse et qui me choque. Vous demandez que l’on prenne en compte les places d’accueil de gens du voyage dans le nombre des logements sociaux et, dans un deuxième temps, vous demandez que l’on établisse des priorités. Vous n’avez pas le droit de dire cela, car il y a là quelque chose d’incompréhensible. Je suis maire comme vous et soumis aux mêmes obligations. Or, je ne peux pas croire que, sur une commune ou une communauté de communes, on n’arrive pas à trouver un moyen de satisfaire à ces deux obligations.

M. Gérald Darmanin. Mon prédécesseur n’avait pas trouvé !

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Boyer.

Mme Valérie Boyer. Les propositions qui viennent d’être formulées par Mme Genevard et M. Darmanin sont frappées au coin du bon sens. Les adopter permettrait de faire avancer les choses, car ceux d’entre nous qui sont maires rencontrent fréquemment ces situations. Cette solution me paraît positive.

M. Michel Vergnier. Ce n’est pas une solution !

Mme Valérie Boyer. Vous devriez faire en sorte que cette proposition qui n’est ni de droite ni de gauche, mais seulement pratique et pragmatique, soit votée.

(L’amendement n42 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Chevrollier, pour soutenir l’amendement n61.

M. Guillaume Chevrollier. L’article prévoit qu’un décret en Conseil d’État détermine les dispositifs de substitution à mettre en œuvre par les communes en cas de fermeture temporaire d’une aire d’accueil permanente. Il crée ainsi une obligation nouvelle, inutile et dangereuse pour les communes : trouver un accueil de substitution, en cas de fermeture temporaire d’une aire d’accueil permanente pendant la période ordinaire d’entretien annuel. Cela revient dans les faits à imposer aux communes de créer deux aires, l’une permanente et l’autre provisoire qui serait utilisée lorsque l’aire officielle serait fermée. Cela constitue une charge supplémentaire pour les collectivités. C’est pourquoi nous proposons de supprimer cette disposition.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. En commission des lois, j’ai été convaincu par cette objection, faite par l’opposition et la majorité car il n’était pas du tout dans l’intention de la proposition de loi de prévoir une aire de substitution. C’est pourquoi nous vous proposerons via un amendement n81 de réécrire le texte de l’alinéa 22, de façon à prévoir qu’un décret en Conseil d’État déterminera « les modalités de coordination locale des périodes de fermeture temporaire des aires permanentes d’accueil ». Cette coordination n’implique pas la nécessité d’une deuxième aire. Je souhaite en conséquence que cet amendement et la série des autres amendements sur le même sujet soient retirés.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvia Pinel, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Retirez-vous votre amendement, monsieur Chevrollier ?

M. Guillaume Chevrollier. Je le maintiens.

(L’amendement n61 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Moreau, pour soutenir l’amendement n98.

M. Yannick Moreau. Cet amendement vise à éviter le dumping des tarifs des aires d’accueil des gens du voyage. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.) Il y a la théorie dans l’hémicycle et puis il y a la réalité du terrain. La réalité, c’est que les tarifs sont très variables dans un même département, sans parler de l’échelle régionale ou nationale. Quand on ne veut pas accueillir les gens du voyage, on pratique des tarifs prohibitifs. Cet amendement a pour but d’harmoniser et de réglementer les tarifications des aires d’accueil pour mettre fin à la concurrence déloyale et autres pratiques contrevenant à l’esprit de la loi, qui est de satisfaire à nos obligations. Nous renvoyons la fixation de cette tarification à un décret en Conseil d’État.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Il y à la en effet une vraie difficulté, dans un sens comme dans l’autre. Sous la réserve que j’aurais plutôt qualifié d’inflation ce que vous appelez dumping, je suis d’accord avec vous.

Mais ce que vous proposez est très difficile à réaliser, et ce pour deux raisons : la première, c’est que la fixation des tarifs relèvent pour l’heure de la libre administration des collectivités locales ; la seconde, c’est qu’il serait extrêmement délicat d’élaborer des critères d’appréciation de la qualité des aires d’accueil. On se retrouverait dans la situation de l’hôtellerie ou des terrains de camping, ce qui est impossible à envisager.

M. Charles de La Verpillière. Avec des étoiles !

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. C’est pourquoi on renvoie très prudemment ce soin à un décret. Je comprends et partage l’objectif de cet amendement, mais parce que je doute de la possibilité de sa réalisation, l’avis est défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvia Pinel, ministre. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à M. Gérald Darmanin.

M. Gérald Darmanin. L’amendement de mon collègue Yannick Moreau soulève en effet la question très importante de la libre administration des collectivités locales. Vous étiez beaucoup cependant moins ferme sur le respect de ce principe, consacré par l’article 72 de la Constitution, lorsque votre majorité leur a imposé par décret une réforme des rythmes scolaires.

Mme Valérie Boyer. Exactement !

M. Gérald Darmanin. On n’en a même pas discuté dans l’hémicycle. Il y a en l’espèce deux poids, deux mesures : votre argument a du poids juridique, monsieur le rapporteur, mais vous l’utilisez seulement quand cela vous arrange : on ne vous a pas beaucoup entendu en d’autres circonstances, où les collectivités locales auraient pourtant eu besoin de votre aide pour faire respecter le principe constitutionnel de leur libre administration.

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. L’argumentation est moyenne.

(L’amendement n98 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques, nos 5, 15 et 54.

La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n5.

M. Lionel Tardy. Un amendement assez étonnant du rapporteur a été adopté en commission, aux termes duquel il reviendrait à un décret en Conseil d’État de déterminer les normes techniques applicables aux aires et les modalités de leur contrôle, les dispositifs de substitution en cas de fermeture d’une aire permanente d’accueil et les modalités de calcul du droit d’usage desdites aires. Autant le premier et le troisième point semblent bien relever du décret, autant ce n’est pas le cas du deuxième. En effet, en cas de fermeture d’une aire, ce serait plutôt au schéma départemental de prévoir éventuellement des dispositifs temporaires de substitution. Si le soin de déterminer ces dispositifs est remis à un décret, je crains que cette faculté ne devienne une nouvelle obligation pour les communes.

M. Yannick Moreau. Bien sûr !

M. Lionel Tardy. Vous conviendrez, monsieur le rapporteur, qu’il n’est sans doute pas utile de doubler leur obligation en la matière. Vous qui venez de nous dire que vous êtes pour la simplification, cet amendement devrait vous agréer.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n15.

Mme Annie Genevard. Nous souhaitons par cet amendement revenir sur le dispositif de substitution proposé à l’alinéa 22. Nous avons certes bien compris que le rapporteur allait présenter un amendement qui vise à remplacer ce dispositif par des modalités de coordination locale mais, d’ores et déjà, nous notons que celles-ci seraient déterminées par décret, la loi restant donc relativement imprécise à cet égard. Cela nous amène à nous interroger sur le sens du mot « coordination » : s’agirait-il d’établir un calendrier de fermeture des aires pour qu’il n’y ait pas concomitance entre toutes les fermetures ou serait-ce une obligation pour les communes de trouver des dispositifs de substitution au bénéfice des gens du voyage qui auraient souhaité s’installer sur une aire d’accueil qui s’avérerait fermée ? Ce point doit être précisé parce qu’il ne faudrait pas que derrière le terme neutre de « coordination » se cache une obligation de substitution.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement n54.

M. Bernard Accoyer. Il convient de supprimer l’alinéa 22 qui double les contraintes en matière d’accueil de gens du voyage pesant sur les intercommunalités ou les communes en prévoyant que celles-ci doivent proposer une solution de substitution en cas d’indisponibilité de l’aire permanente d’accueil.

Dois-je rappeler les incidents récemment survenus dans une commune du sud de la France, tout comme en Haute-Savoie ? L’installation sauvage de gens du voyage est un problème grave pour ce département. C’est ce qui explique la présence de quatre députés de Haute-Savoie ce soir dans l’hémicycle pour témoigner de la gravité de la situation : Mme Duby-Muller, M. Saddier, M. Tardy et moi-même.

Mme Annie Genevard. Nous sommes tous des Savoyards ! (Sourires.)

M. Bernard Accoyer. En effet, nous sommes tous des Savoyards ! (Sourires et applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)

Cette commune du sud satisfaisait aux obligations légales par l’aménagement de longue date d’un terrain pour accueillir les gens du voyage, mais elle a dû y faire des travaux parce que ces aires sont très souvent, pour ne pas dire presque constamment, dégradées, avec brutalité parfois. Des gens du voyage se sont alors installés de façon sauvage dans la commune. Saisi, le préfet a refusé de mobiliser la force publique parce que l’aire n’était pas disponible.

M. Martial Saddier et Mme Annie Genevard. Très bien !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Avis défavorable. Puis-je défendre dès maintenant l’amendement n81 puisqu’il me semble répondre aux préoccupations qui viennent d’être exprimées, madame la présidente ?

Mme la présidente. Je vous en prie, monsieur le rapporteur, ne boudez pas votre plaisir. (Sourires.)

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Mon amendement propose qu’un décret en Conseil d’État détermine les modalités de coordination locale des périodes de fermeture temporaires des aires permanentes d’accueil. Il s’agirait donc d’un dispositif de coordination calendaire. Cette rédaction me paraît absolument parfaite.

M. Charles de La Verpillière. Normal, c’est vous qui en êtes l’auteur ! (Sourires.)

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. J’allais dire que c’est beau comme du Prévert, mais je vais m’en abstenir puisque j’en suis en effet l’auteur.

Mme la présidente. C’est beau comme du Raimbourg. (Sourires.)

Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements identiques ?

Mme Sylvia Pinel, ministre. Avis défavorable. J’annonce par avance que le Gouvernement est favorable à l’amendement n81 puisqu’il répond aux inquiétudes qui ont été exprimées.

Il importe en effet d’éviter que plusieurs aires voisines ferment en même temps, restreignant alors considérablement les capacités d’accueil sur un même territoire, tout en utilisant au mieux les périodes de moindre occupation. Cette nouvelle rédaction, en mettant en avant la nécessité d’une coordination locale plutôt qu’un dispositif de substitution, a le mérite d’éviter toute ambiguïté.

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Dussopt.

M. Olivier Dussopt. Le groupe SRC soutiendra évidemment votre amendement, monsieur le rapporteur, qui est de nature à apaiser les inquiétudes exprimées en commission des lois. il est vrai que le mot « substitution » a suscité quelque émoi chez certains élus locaux qui pensaient qu’une seconde aire deviendrait obligatoire, ce qui n’est évidemment pas l’objectif.

Le dispositif de coordination répondra au type de problème évoqué par M. Accoyer, qui résulte du dispositif légal et réglementaire actuellement en vigueur – un préfet refusant de mettre à disposition la force publique pour procéder à l’évacuation d’un campement illégal parce que l’aire d’accueil était fermée. En effet il va permettre, à l’échelle du bassin ou du département, sous l’égide du préfet, de déterminer selon quel rythme et quel calendrier les aires pourront être fermées pour y réaliser des travaux tout en garantissant le maintien d’une capacité d’accueil sur le territoire. Cela évitera à des élus locaux d’être confrontées à la situation évoquée par mon collègue.

Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Rohfritsch.

Mme Sophie Rohfritsch. Je crois, monsieur le rapporteur, que nous ne lisons pas le même texte. Votre rédaction ne peut absolument pas répondre au problème évoqué par notre collègue Bernard Accoyer. Celui-ci a évoqué le cas de dégradations qui, qu’elles soient volontaires ou non, étaient par définition imprévisibles. Aucun préfet ne pouvant anticiper ce type de situation, comment voulez-vous le prévoir dans un schéma départemental ? Ce n’est possible que dans le cas d’une réfection prévue de longue date, et votre amendement est alors tout à fait recevable, mais qu’en est-il dans le cas de telles dégradations ? La commune serait bel et bien punie deux fois dans ce cas. C’est la raison pour laquelle cet amendement ne peut absolument pas être adopté.

M. Bernard Accoyer. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Le sujet des aires d’accueil des gens du voyage est particulièrement sensible, notamment dans le Vaucluse, où nous avons connu toute une série de problèmes. Il me semble que la formulation que vous proposez, monsieur le rapporteur, ne répond pas au cas de dégradations volontaires susceptibles d’entraîner une fermeture et que vous envisagez uniquement l’hypothèse de la fermeture volontaire, par exemple pour des travaux. Comment conciliez-vous les arguments excellemment exposés par M. Accoyer – au nom des Savoyardes et des Savoyards – avec votre rédaction ? Comment allez-vous prendre en compte ce problème des dégradations volontaires ? Il faut avoir un vrai débat à ce sujet si on veut traiter la question dans le respect des gens du voyage, parfois victimes d’amalgame, tout en prenant en compte la réalité du terrain. Vous savez qu’il existe malheureusement une minorité de gens du voyage qui s’attaque aux aires que l’on met à leur disposition.

M. Michel Vergnier. N’importe quoi !

M. Julien Aubert. Vous pouvez pousser de hauts cris, cher collègue, mais je pourrais vous indiquer la liste de toutes les aires qui ont été victimes de dégradations l’année dernière dans le Vaucluse.

M. Hugues Fourage. Chiche !

M. Julien Aubert. Nous avons ici et maintenant l’occasion de débattre de cette situation.

M. Bernard Accoyer. C’est en effet un vrai problème !

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Monsieur Aubert, si les fermetures sont dues à des dégradations, nous sommes dans un cas de force majeure : la commune n’y est pour rien et c’est au préfet qu’il appartient d’en tirer les conséquences.

M. Luc Belot. Excellent argument !

Mme Valérie Boyer. Et s’il ne les tire pas, que fait-on ?

M. Bernard Accoyer. C’est le quotidien, monsieur le rapporteur !

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Je ne dis pas le contraire, mon cher collègue.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard.

Mme Annie Genevard. Monsieur le rapporteur, l’aire d’accueil de ma commune a été fermée pendant plusieurs mois tant les dégradations étaient importantes. À peine l’avions-nous parfaitement remise en état, et à grands frais, qu’elle a été à nouveau totalement dégradée dès le premier passage. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.) Les personnes sont alors évidemment parties puisque tout était devenu inutilisable. Alors même que nous allions la fermer pour la remettre encore une fois en état, puisque c’est une obligation, une autre vague de gens du voyage est arrivé et a achevé le travail ! En un mois, ma commune a connu trois occupations illégales. Voilà la situation concrète des maires aujourd’hui, monsieur le rapporteur !

M. Michel Vergnier. Que proposez-vous ?

Mme Annie Genevard. Ne nous parlez pas de pouvoir de substitution qui se transformerait en modalités de coordination. Il faut véritablement prendre en compte ce type de situations parce que c’est cela notre quotidien. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)

M. Charles de La Verpillière. Revenons sur terre !

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Nous n’avions pas quitté la terre, monsieur de La Verpillière.

Que souhaitez-vous me faire dire, madame Genevard ? Que je trouve formidable que les aires soient dégradées ?

Mme Annie Genevard. Bien sûr que non.

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Le dispositif de coordination s’appliquera aux fermetures régulières. S’il s’agit de vandalisme, le préfet n’en tirera aucune conséquence au détriment de la commune qui en est la victime. (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)

M. Michel Vergnier. C’est le bon sens !

M. Charles de La Verpillière. Je demande à voir !

(Les amendements identiques nos 5, 15 et 54 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. L’amendement n81 a été défendu.

(L’amendement n81 est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n13.

Mme Annie Genevard. Avec cet amendement, nous revenons sur la question de l’harmonisation des tarifs des terrains d’accueil que notre collègue Yannick Moreau évoquait tout à l’heure.

Lorsque nous avions débattu de ce sujet en commission, vous nous aviez suggéré, monsieur le rapporteur, de revoir la rédaction de notre amendement en vue, non pas de fixer des tarifs uniformes, mais de procéder à une harmonisation des tarifs. C’est sur la base de ce conseil que nous vous proposons cette réécriture de l’alinéa 23. Cette formulation est d’ailleurs conforme à ce que vous avez prévu dans la réécriture de l’article 2. Il s’agit de procéder à une harmonisation, et non pas à une uniformisation, des tarifs des terrains d’accueil – sur votre propre conseil, monsieur le rapporteur.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. L’amendement est satisfait par la nouvelle rédaction de l’article que je propose. Avis défavorable, donc.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvia Pinel, ministre. Le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement, le préfet ayant d’ores et déjà la possibilité de refuser de signer une convention de financement s’il estime que le niveau du droit d’usage est inadapté au vu des prestations offertes et des ressources des personnes accueillies.

M. Bernard Accoyer. Ce n’est pas de cela dont il s’agit !

Mme Sylvia Pinel, ministre. Cette solution peut permettre d’aller vers une harmonisation des tarifs au plan local, sans avoir à définir de plafond inflationniste. Il est en effet difficile de corréler la tarification pratiquée au prix de revient d’une aire – d’autant que rien ne garantit que les deux soient liés.

M. Bernard Accoyer. Votre avis ne porte pas sur le bon amendement !

Mme Sylvia Pinel, ministre. Si, mais laissez-moi finir, monsieur Accoyer !

Aussi la fixation d’un plafond par décret apparaît difficile : d’abord, ce plafond ne peut pas être déconnecté du coût réel des aires ; ensuite, la collectivité ne doit pas commettre d’erreur manifeste d’appréciation dans la fixation du droit d’usage, auquel cas l’usager ou le préfet serait fondé à le contester.

(L’amendement n13 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Sergio Coronado, pour soutenir l’amendement n11.

M. Sergio Coronado. Dans la continuité des modifications apportées par la commission, cet amendement propose que les règlements intérieurs soient harmonisés sur des bases communes, en fonction du type d’aire.

Actuellement, ces règlements peuvent être très différents, voire contradictoires. Dans son rapport, le rapporteur note ainsi qu’il existe en France « des aires d’accueil qui restent vides, notamment parce que les exigences d’accès – par exemple en matière d’assurances à produire – sont insurmontables pour les gens du voyage, ou parce que les emplacements proposés ne correspondent pas à des exigences minimales d’accessibilité des véhicules ou de respect des personnes. Il a été rapporté que certaines aires d’accueil interdisent tout accès ou sortie après une certaine heure, compromettant l’intervention des secours. »

Harmoniser les règlements serait une mesure de simplification et permettrait d’éviter d’éventuels abus. Certains règlements contiennent en effet des dispositions compliquant volontairement l’accès aux aires, par exemple en exigeant la présentation d’un certificat d’assurance avec des garanties très élevées.

Il est à noter qu’il existe un règlement intérieur type pour d’autres dispositifs, comme pour les campings aux termes du code du tourisme.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Avis favorable. (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvia Pinel, ministre. Avis favorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Rohfritsch.

Mme Sophie Rohfritsch. Franchement, on y perd son latin !

M. Hugues Fourage. Retournez donc au collège ! (Sourires.)

M. Gérald Darmanin. Au collège, il n’y a plus de latin !

Mme Sophie Rohfritsch. On vient de refuser une harmonisation nationale des tarifs, qui visait à ce que toutes les aires soient logées à la même enseigne de ce point de vue, mais on accepte l’harmonisation nationale du règlement intérieur. C’est pourtant reconnaître implicitement qu’une harmonisation serait bénéfique.

M. Hugues Fourage et Mme Martine Pinville. Ce n’est pas la même chose !

Mme Sophie Rohfritsch. J’ai vraiment le sentiment qu’aucun amendement qui émane de l’opposition n’est tout simplement le bienvenu !

M. Yannick Moreau. Eh oui ! C’est de la discrimination !

M. Julien Aubert. Négative, de surcroît !

Mme Valérie Boyer. Il y a deux poids, deux mesures !

(L’amendement n11 est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques, nos 6, 14 et 53.

La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n6.

M. Lionel Tardy. Comme je l’ai dit en commission, les dispositions prévues par les alinéas 24 à 33 sont inacceptables, ne serait-ce qu’en raison de leur philosophie, qui est clairement de menacer les communes et de les frapper au portefeuille en cas de non-respect de leurs obligations. Elles provoqueraient une dégradation regrettable – je pèse mes mots – des relations entre l’État, représenté par le préfet, et les collectivités territoriales. Le système de substitution du préfet au maire, avec réquisition, fonctionne – pas forcément dans la joie, je vous l’accorde, mais il fonctionne. Pourquoi mettre en place des sanctions financières qui permettraient au préfet de consigner des fonds communaux ou intercommunaux ?

Je le répète : forcer la main aux communes est contre-productif – le risque est notamment de susciter une forte opposition des habitants. En outre, c’est un message agressif et inutilement violent qui est ainsi adressé aux communes, sans compter qu’il est malvenu de vouloir frapper celles-ci au portefeuille au moment même où l’État réduit drastiquement leurs dotations.

Nous voulons donc supprimer ces alinéas, car la procédure actuelle est suffisante. Des obligations légales existent ; il ne s’agit pas d’encourager leur violation, mais d’accompagner les communes autant que possible.

Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Moreau, pour soutenir l’amendement n14.

M. Yannick Moreau. Monsieur le rapporteur, vous qui êtes un ardent défenseur de la libre administration des collectivités territoriales, vous allez certainement nous rejoindre pour la défendre dans ce cas et laisser aux collectivités le choix de leurs priorités budgétaires !

Mme Annie Genevard et M. Lionel Tardy. Eh oui !

M. Yannick Moreau. Vous concevrez en effet que si des communes n’ont pas aménagé une aire d’accueil pour les gens du voyage, cela peut être pour des raisons autres que budgétaires. C’est une réalité, mais vous feignez de ne pas la comprendre !

L’amendement que nous vous proposons tend à supprimer les alinéas 24 à 33 de l’article 2 et à libérer les communes du poids supplémentaire dont vous voulez les charger.

Vous introduisez en effet, comme je l’ai dit en défendant la motion de renvoi en commission, un déséquilibre entre les droits et les devoirs de chacun : vous imposez plus d’obligations, plus de charges financières, plus de dépenses aux communes, tout en leur accordant moins de moyens, mais, dans le même temps, vous n’imposez pas plus de devoirs aux gens du voyage ; bien au contraire, vous leur donnez plus de droits. Cette proposition de loi aurait pu rééquilibrer les droits et les devoirs, en donnant aux communes plus de moyens pour lutter contre les occupations illégales ; mais vous augmentez les dépenses, les obligations, les contraintes qui pèsent sur elles, alors qu’elles sont déjà asphyxiées par le poids des nouvelles dépenses obligatoires et par la baisse des dotations de l’État.

Au nom de la libre administration des collectivités territoriales, je vous demande donc, monsieur le rapporteur, madame la ministre, d’être favorables à cet amendement.

M. Charles de La Verpillière. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement n53.

M. Bernard Accoyer. Ces dispositions sont inacceptables, pour les communes, pour les EPCI, pour les élus et pour les citoyens contribuables. Dans des départements tels que les nôtres, comme dans la plupart des départements français, de nombreuses agglomérations doivent prévoir un budget annuel de plusieurs centaines de milliers d’euros pour remettre en état les terrains d’accueil des gens du voyage après des dégradations malheureusement habituelles. Or, alors que les dotations diminuent, voilà que vous proposez une procédure de consignation par les préfets de fonds communaux ou intercommunaux !

Madame la ministre, que cherche le Gouvernement ? Une révolte des citoyens, qui n’en peuvent plus des conséquences du passage des gens de voyage, lesquels s’installent sur les terrains d’accueil en causant des dégradations sur place et tout autour, lesquelles s’accompagnent bien souvent – ceci dit sans vouloir les stigmatiser – d’une hausse de la délinquance ?

M. Hugues Fourage. Vous proposez quoi ?

M. Bernard Accoyer. Et maintenant, il faudrait qu’en plus, ils payent avec leurs impôts les nouvelles dépenses engagées par le préfet ? Cela est inacceptable ! Nous vous demandons d’écouter les Français et leurs élus. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.)

M. Charles de La Verpillière. Bravo !

M. Hugues Fourage. C’est la politique de l’autruche !

Mme la présidente. Sur les amendements identiques nos 6, 14 et 53, je suis saisie par le groupe Les Républicains d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

M. Julien Aubert. La République monte au créneau !

M. Hugues Fourage. Cela ne nous pose aucun problème, surtout après ce que l’on vient d’entendre !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Les dispositions que vous souhaitez supprimer sont excellentes parce qu’elles ne constituent pas une charge nouvelle pour les communes.

Mme Valérie Boyer. Ah bon ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Cette charge pèse en effet sur elles depuis l’an 2000.

M. Hugues Fourage. Exactement !

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. En revanche, elle n’a pas été acquittée de la même façon par toutes les communes. Il s’agit donc de décerner un satisfecit à celles qui ont fait ce qui était nécessaire, et à ceux de nos collègues maires qui, jour après jour, se sont efforcés d’appliquer la loi, et d’inciter les retardataires s’y mettent à leur tour.

Ces retardataires ont eu tort de traîner, car l’aide financière de l’État a pris fin le 31 décembre 2012. En conséquence, ils ne peuvent plus en bénéficier aujourd’hui ; nous réfléchissons toutefois au moyen de la rétablir.

J’ajoute que, contrairement à ce que vous laissez entendre, nous ne sommes pas dans un régime incitatif. Je vous renvoie au jugement du tribunal administratif de Nice en date du 16 décembre 2014, qui rappelle que, sur l’ensemble des Alpes-Maritimes, il n’existe pas d’aires d’accueil des gens du voyage ailleurs qu’à Nice, Antibes, Mougins et Vallauris ; en conséquence, le tribunal administratif fait injonction au préfet d’engager la procédure de substitution et de mettre les communes en demeure de satisfaire à leurs obligations. Il ne s’agit donc nullement d’un régime de libre administration des communes…

M. Martial Saddier. Ah bon ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. …où, par la magie du verbe, les choses se feraient toutes seules. Il s’agit d’un régime déjà contraint. La libre administration des communes s’exerce dans le cadre des lois qui régissent la République ; si celles-ci ne sont pas appliquées – sans vouloir pour autant stigmatiser les retardataires et soutenir qu’ils sont tous de mauvaise volonté, car nous savons les difficultés que cela représente –, il convient de mettre en place un dispositif de coercition plus efficace que celui qui existe déjà et qui, comme le rappelle la Cour des comptes, n’a jamais été appliqué à ce jour, bien qu’environ 35 % des aires d’accueil prévues n’ont toujours pas été créées.

Voilà la réalité, et il est inutile d’essayer d’affoler les maires en prétendant que le Gouvernement cherche à mettre en place un dispositif très coercitif, alors que nous demandons simplement l’application d’une loi vieille de quinze ans.

D’autre part, le dispositif de consignation…

M. Yannick Moreau. D’expropriation, plutôt !

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. …est un dispositif très mesuré, assorti de délais. En outre, tout cela s’inscrira dans le cadre des schémas départementaux. Nous avons donc affaire à des dispositions qui sont de nature à pacifier les relations.

Puisque M. Accoyer prétend que tout le monde est savoyard et que M. Darmanin m’a invité à visiter la commune de Tourcoing, je prendrai l’exemple d’un département qui n’est pas le mien, l’Ille-et-Vilaine. Celui-ci a créé un groupement d’intérêt public qui gère l’accueil des gens du voyage, les aires de grand passage, et s’intéresse à des questions comme la scolarisation ou la sédentarisation ; il existe en outre une coordination au plan préfectoral entre les quatre départements de la Bretagne historique. Je ne dis pas que tout va bien, mais les choses s’améliorent. Voilà ce vers quoi nous souhaitons aller.

Je pense que le dispositif proposé devrait recueillir votre assentiment, puisqu’il va dans le sens d’une pacification – car vous avez raison : les dégradations sont inacceptables et il faut qu’elles cessent. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)

M. Sébastien Denaja. Magistral !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvia Pinel, ministre. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à M. Gérald Darmanin.

M. Gérald Darmanin. On peut considérer que tout texte contient un peu d’idéologie. Dans celui-ci, vous faites quatre erreurs, qui sont les mêmes que celles que commet votre majorité et le Gouvernement depuis plusieurs années.

La première est le centralisme. Nous vous parlons des élus locaux, des municipalités, de la coordination intercommunale, et vous nous répondez en invoquant le préfet. Monsieur le ministre…

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Pas encore ! (Sourires.)

M. Gérald Darmanin. Je l’espère pour la France – de toute façon, cela ne pourra pas être pire ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)

Mme la présidente. Monsieur Darmanin, pourriez-vous revenir au texte, s’il vous plaît ?

M. Gérald Darmanin. Monsieur le rapporteur, le centralisme ne plaît pas aux élus. Et voilà une bien étrange manière de concevoir la décentralisation !

Votre deuxième faute est de prévoir une sanction. Comme s’il fallait rééduquer – ou, en l’occurrence, éduquer – les élus locaux en les sanctionnant financièrement !

Troisième faute, l’incohérence. Comme l’a très bien dit mon collègue, alors que vous aggravez les charges des collectivités territoriales – n’en égrenons pas la longue litanie, ce serait terrible pour vous –, vous continuez aujourd’hui à vouloir leur faire porter des chapeaux qu’elles n’ont malheureusement plus les moyens de se payer.

La quatrième faute est le défaut du sens de la réalité. Tout à l’heure, nous avons parlé de la loi SRU, de la pénurie de foncier, un mien collègue a évoqué un certain nombre de problèmes très concrets, et Daniel Fasquelle a parlé de la loi littoral. Il ne s’agit pas d’un refus politique des aires d’accueil des gens du voyage, mais il y a des communes qui ne peuvent pas créer ces aires tout simplement parce que la loi Besson est totalement inapplicable. Certes, il y a des communes qui refusent de l’appliquer par militantisme, et la République doit les sanctionner dans la mesure où la loi de la République doit s’appliquer, mais elle ne peut s’appliquer que lorsque la rigidité s’accompagne de souplesse. Or vous refusez toute souplesse.

Mme la présidente. La parole est à M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Mes chers collègues qui maniez la matraque budgétaire, comme j’aimerais que vous vous montriez aussi fermes face à la délinquance et à la criminalité !

M. Hugues Fourage. Qui a réduit les effectifs ?

M. Julien Aubert. Malheureusement, votre fermeté ne vient sanctionner que ceux qui ne sont pas des délinquants – en l’occurrence des communes. Sanctionner financièrement des personnes morales n’est pas vraiment la solution, parce qu’en réalité vous sanctionnez des contribuables, des citoyens.

M. Bernard Accoyer. Très bien !

M. Julien Aubert. Vous êtes en train de réinventer ce qui a été inventé au niveau européen avec le Pacte de stabilité et ces fameuses amendes auxquelles s’exposent les pays au déficit excessif, qui n’ont strictement aucun impact sur la volonté politique !

M. Bernard Accoyer. Ne mélangez pas tout, cher collègue.

M. Julien Aubert. Mes chers collègues, on ne peut pas invoquer d’un côté la libre administration des collectivités territoriales et, de l’autre, nier que l’accumulation des règles d’urbanisme limite considérablement la disponibilité du foncier – par exemple, dans mon département, les plans de prévention des risques d’inondation, alors que le prix du foncier y est déjà très élevé. Des communes de bonne foi sont dans l’impossibilité de mettre en place ces schémas et ce n’est pas en les sanctionnant que vous les convaincrez du bien-fondé de cette politique.

Si seulement d’ailleurs ce n’était qu’une question de bonne foi ou de bonne volonté ! Nous avons essayé d’appeler votre attention sur le problème des dégradations, mais vous ne voulez pas le voir. Vous avez une vision asymétrique de la réalité, et c’est ce que je déplore. Nous n’arrivons pas à débattre des vrais problèmes des Français. Comme le disait tout à l’heure Gérald Darmanin, vous êtes dans une logique punitive de rééducation, mais les Français vous ont déjà montré qu’ils en avaient assez, de la gauche laogai !

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard.

Mme Annie Genevard. Nous avons à maintes reprises évoqué la situation financière des communes. Je voudrais pour ma part faire état, madame la ministre, monsieur le rapporteur, d’une motion actuellement en discussion à l’AMF, qui n’est pas, vous en conviendrez, une association de dangereux révolutionnaires. Elle insiste dans ses premières lignes sur la gravité de la situation financière dans laquelle se trouvent les communes. Introduire des dispositions visant à la consignation des fonds publics pour réaliser des aires d’accueil des gens du voyage au moment où les collectivités locales connaissent de telles difficultés, il y a là quelque chose qui est de l’ordre de la provocation.

Pareille mesure aurait encore pu être justifiée si, dans le même temps, le texte comportait des avancées significatives en matière de lutte contre les occupations illicites. Dans ma commune, qui dispose d’une aire d’accueil de gens du voyage, cela n’a pas empêché les dégradations et les installations illicites. Les moyens à ma disposition pour y remédier sont trop peu nombreux et trop peu efficaces. C’est de cela que manque votre proposition de loi, monsieur le rapporteur : d’outils utiles pour combattre les occupations illicites, que subissent même des communes qui remplissent leurs obligations en matière d’aires d’accueil de gens du voyage.

Voilà pourquoi, monsieur le rapporteur, je pense que cette consignation des fonds publics est véritablement une erreur.

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Dussopt.

M. Olivier Dussopt. Je sais que Mme Genevard connaît très bien la situation financière des collectivités locales, et je mets à son crédit le fait qu’elle travaille depuis longtemps sur ce sujet, mais franchement, entendre des députés UMP nous dire que ce serait à cause des dotations qu’ils ne pourraient pas…

Un député du groupe Les Républicains. Des députés républicains, pas des députés UMP !

M. Olivier Dussopt. Prenez-le comme une contribution au débat sur la connaissance des origines. (Sourires.)

En tout cas, prétendre ne pas pouvoir travailler à cela, alors qu’il y a moins d’une semaine, Nathalie Kosciusko-Morizet, première vice-présidente de l’UMP, disait vouloir encore baisser les dépenses publiques de 100 milliards d’euros, c’est quand même un peu gros !

Je voudrais surtout insister sur un point évoqué par M. le rapporteur : le dispositif actuel de la loi Besson est déjà coercitif, et la justice peut d’ores et déjà enjoindre au préfet de mettre en œuvre la procédure de substitution comme le montre le jugement du tribunal administratif de Nice évoqué par le rapporteur.



Je rappelle que le dispositif de consignation proposé aujourd’hui prévoit deux mises en demeure, qui n’existent pas dans le cadre de la loi Besson. Il peut aussi prendre la forme d’un calendrier, ce qui n’est pas non plus prévu par loi Besson. Du point de vue de la coercition, cela représente quand même un progrès pour les élus locaux, en même temps que cela permet de souligner le fait que ces aires d’accueil doivent être réalisées et qu’il faut y travailler.

Le groupe socialiste votera donc évidemment contre les amendements présentés par l’UMP.

Mme la présidente. La parole est à M. Joaquim Pueyo.

M. Joaquim Pueyo. Député, je suis également à la tête d’une collectivité qui vient de créer deux aires de gens du voyage pour se mettre en conformité avec la loi. Cela signifie des efforts sur le plan financier. En outre, vous le savez, mes chers collègues, choisir un terrain n’est pas simple, parce que le voisinage n’y est pas forcément favorable et qu’il y a des recours. Nous l’avons fait pourtant !

Ce que vient d’évoquer le rapporteur, c’est une mesure d’équité. Il est trop facile pour les collectivités qui ne veulent pas respecter la loi de ne pas se plier à leurs obligations. Pendant ce temps-là nous, qui accueillons les gens du voyage, nous devons prendre des arrêtés d’expulsion parce que des terrains de nos communes sont illégalement occupés. Vous parlez, chers collègues de l’opposition, de punition, mais ce sont les contribuables des villes qui ont fait l’effort de respecter la loi qui sont punis, tandis que les autres ne bougent pas et restent bien au chaud.

Vous avez raison, monsieur le rapporteur : il s’agit d’une mesure d’équité, d’une mesure d’égalité, et quand on est républicain, on considère que la loi doit s’appliquer à tout le monde et à toutes les collectivités.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 6, 14 et 53.

(Il est procédé au scrutin.)

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants59
Nombre de suffrages exprimés59
Majorité absolue30
Pour l’adoption24
contre35

(Les amendements identiques nos 6, 14 et 53 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Reiss, pour soutenir l’amendement n65.

M. Frédéric Reiss. Cet amendement de repli vise le même objectif que la série d’amendements identiques qui viennent malheureusement d’être rejetés : s’opposer à la procédure de consignation des fonds communaux et intercommunaux en cas de non-respect des obligations en matière d’accueil des gens du voyage. Il s’agit là d’une véritable sanction financière à l’encontre des collectivités territoriales, dans un contexte de baisse des dotations de l’État. Le fait d’exiger l’aménagement de dispositifs de substitution en cas de fermeture temporaire d’une aire d’accueil, notamment à la suite de dégradations, n’incitera sûrement pas les élus locaux à se mettre en conformité avec la loi.

(L’amendement n65, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Raimbourg, rapporteur, pour soutenir l’amendement n82.

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. C’est un amendement rédactionnel, madame la présidente.

(L’amendement n82, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Raimbourg, rapporteur, pour soutenir l’amendement n83.

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. C’est un amendement de coordination, madame la présidente.

(L’amendement n83, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 2, amendé, est adopté.)

Après l’article 2

Mme la présidente. Je suis saisie de plusieurs amendements portant article additionnel après l’article 2.

La parole est à M. Gérald Darmanin, pour soutenir l’amendement n43.

M. Gérald Darmanin. Je ne vais pas prolonger davantage la discussion que nous avons eue tout à l’heure, monsieur le rapporteur, mais il s’agit effectivement de faire en sorte que les communes qui ne peuvent pas atteindre le quota de logements sociaux prévu par la loi SRU puissent intégrer dans le calcul du nombre de logements sociaux les places des aires d’accueil de gens du voyage, et inversement. C’est donc une sorte d’amendement de repli.

Vous me permettrez, monsieur le rapporteur, de vous dire que je visiterai volontiers avec lui, s’il le souhaite, tous les départements de France, puisqu’il est manifestement de bonne compagnie en dehors des débats d’amendements.

(L’amendement n43, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour soutenir l’amendement n64.

Mme Valérie Boyer. Je rappelle que la loi du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage impose aux communes de plus de 5 000 habitants de créer des aires d’accueil légales dans le cadre de schémas départementaux. Ces schémas prévoient la création de 41 561 places, réparties en 1 867 aires d’accueil, et la réalisation de 350 aires de grand passage sur le territoire national. C’est de ces aires de grand passage que je voudrais vous parler.

Force est de constater aujourd’hui que de trop nombreuses communes sont obligées d’engager des investissements importants, à la charge du contribuable. Rappelons que le coût des aires peut dépasser 100 000 euros par an en fonctionnement, et cela ne concerne pas seulement Marseille. Ce coût est, par exemple, de 120 000 euros pour l’aire de Toulenne.

Dans son rapport de 2012 consacré aux gens du voyage, la Cour des comptes conclut qu’il est « nécessaire que l’État s’implique dans ce secteur d’activité encore inorganisé et en fort développement, qui n’est pas exempt de risques pour les finances publiques et la qualité du service rendu aux usagers ».

Comme dans de trop nombreuses communes, des terrains privés et publics de Marseille font chaque année l’objet d’occupations illicites parfois violentes, et nous devons y mettre un terme. Je suis absolument choquée par les frais que la commune de Marseille est obligée d’engager après certains passages sur des terrains privés et publics, et nous devons mettre un terme à cette situation. Pour l’aire de Saint-Menet, ce sont, chaque fois, 80 000 euros de frais, des terrains qui ne sont plus utilisables, etc. Cela représente un préjudice extrêmement important pour les contribuables. Parfois, il faut dépolluer des terrains, les remettre en état, et ça recommence ! Je tiens à votre disposition des photos de ce qui se passe en ce moment : c’est absolument épouvantable ! Tout cela est à la charge de la commune. En plus, on voit parfois la préfecture se charger de la circulation quand les gens du voyage s’installent sur ces aires.

Cet amendement a pour objet de confier à l’État la responsabilité de l’ordre public lors des grands passages, notamment des grands rassemblements occasionnels ou traditionnels des gens du voyage. C’est à l’État de les prendre en charge : les communes ne doivent plus en être affectées ni y être impliquées.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Défavorable.

L’article L.2214-4 du code général des collectivités territoriales prévoit que c’est l’État qui a la responsabilité de la police d’État.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvia Pinel, ministre. Même avis.

(L’amendement n64 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n38.

Mme Annie Genevard. Par cet amendement, nous proposons que les communes dont la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale s’adosse pour 15 % sur le rapport entre la part des logements sociaux de la commune et son parc total de logements puissent intégrer les capacités des aires d’accueil des gens du voyage dans le quota des logements sociaux, dans le prolongement du débat que nous avons eu tout à l’heure. Ce serait assurer une juste reconnaissance de l’effort fait par ces communes plutôt défavorisées en faveur des gens du voyage.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Avis défavorable. En l’état, il est impossible d’assimiler le mode de résidence des gens du voyage à un logement, ne serait-ce que pour des raisons de compatibilité avec les règles de l’habitat décent.

Mme Annie Genevard. Même pour les terrains familiaux ?

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvia Pinel, ministre. Je ne suis pas favorable à votre amendement pour des raisons qui complètent ce que vient de dire votre rapporteur.

Tout d’abord, le Gouvernement a confié une mission sur la réforme des dotations de l’État à Christine Pires Beaune. Les conclusions de cette mission et les pistes de réforme proposées seront rendues publiques très prochainement et porteront en particulier sur la dotation globale de fonctionnement, dont la DSU est l’une des principales composantes de péréquation.

Par ailleurs, un groupe de travail du comité des finances locales mène actuellement une réflexion sur les critères de ressources et de charges pertinents pour le calcul et l’attribution des dotations de l’État sur la base de simulations. Votre amendement risque d’entrer en contradiction avec les travaux du comité des finances locales et de la mission parlementaire. Puisque vous êtes associée à ces travaux, madame la députée, je vous laisse le soin de soumettre à votre collègue la possibilité d’introduire une telle proposition.

Surtout, votre demande est déjà satisfaite puisque les communes disposant d’aires d’accueil des gens du voyage bénéficient dans la répartition de la DGF d’une majoration du nombre d’habitants qui leur est favorable. Ainsi, en 2015, 1 042 communes disposant d’une ou plusieurs aires d’accueil des gens du voyage ont perçu plus de 4,5 milliards d’euros au titre de la DGF, soit 222 euros par habitant en moyenne, c’est-à-dire un montant supérieur de 10 % à la moyenne nationale, qui est de 202 euros. En 2015, une commune disposant d’une aire d’accueil des gens du voyage bénéficie d’une DGF par habitant supérieure de vingt euros à la moyenne nationale.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est défavorable à votre amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Gérald Darmanin.

M. Gérald Darmanin. Vous avez raison, madame la ministre : les débats parlementaires qui ont précédé le vote des lois Besson I et II témoignent que la DGF est augmentée pour les communes qui en font la demande quand elles disposent d’une aire d’accueil fréquentée. Mais ces débats ont permis de discuter longuement de la question de savoir si cette augmentation couvre bien le surcoût que cela représente pour ces collectivités locales.

En effet, les gens du voyage, comme tous les citoyens français, s’adressent au CCAS en cas de difficultés sociales, inscrivent leurs enfants à l’école, utilisent les autres services publics : il est normal dans ces conditions que la DGF, dotation de l’État, aide les collectivités locales à remplir ces missions essentielles, parfois au nom de l’État.

Mais selon les élus et l’Association des maires de France, cette DGF est insuffisante puisqu’elle est calculée sur la base de deux personnes par caravane. Selon l’AMF– et pas simplement les élus de droite – la majoration de DGF devrait prendre en considération le nombre exact d’habitants résidant dans les caravanes des gens du voyage pour correspondre à la réalité des dépenses supportées par les collectivités en faveur de ces populations.

Ce sujet de la DGF constitue un motif de réflexion en vue de la prochaine loi de finances : vous devriez mettre à profit ce que vous venez de dire à Mme Genevard et prendre effectivement en compte le nombre d’habitants supplémentaires par aire d’accueil dans le calcul de la DGF attribuée aux collectivités locales, car celles-ci dépensent aujourd’hui plus qu’elles ne reçoivent de l’État.

(L’amendement n38 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Dussopt, pour soutenir l’amendement n41 rectifié.

M. Olivier Dussopt. Il s’agit là d’un amendement d’appel, que nous sommes plusieurs membres du groupe socialiste à avoir déposé pour proposer que la réalisation des aires d’accueil des gens du voyage soit éligible à la dotation d’équipement des territoires ruraux, la DETR. En effet cette dotation d’équipement a augmenté – elle est passée de 600 à 800 millions d’euros lors du dernier vote de la loi de finance –, et elle correspond à des investissements.

Nous n’ignorons pas cependant que la DETR est extrêmement sollicitée par les élus locaux, au point que d’ores et déjà, les préfets et les commissions d’attribution ne peuvent pas satisfaire toutes les demandes de financement au titre de la DETR, loin s’en faut. Cet amendement vise surtout à vous demander, madame la ministre, si vous pouvez vous engager à travailler avec nous, dans le cadre du projet de loi de finance pour l’année 2016, à réactiver les fonds de soutien prévus par la loi Besson au titre des aides à la politique de logement et de l’habitat en général, et qui sont en sommeil depuis 2008.

J’ajouterai cette réserve qu’il faut veiller à ce que l’accompagnement des élus passe par l’activation d’un fonds ad hoc, et non par une ponction sur la DGF : dans ce cas, nous serions nombreux à rappeler que, la DGF faisant l’objet de réductions importantes,…

M. Gérald Darmanin. De 13 % !

M. Olivier Dussopt. …il ne serait ni logique, ni convenable qu’elle soit à nouveau sollicitée pour des projets de ce type.

Mme Marie-Anne Chapdelaine. Très bien !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvia Pinel, ministre. Monsieur le député, l’amendement que vous proposez vise à permettre au représentant de l’État dans le département d’attribuer les crédits de la DETR aux communes ou aux établissements publics à fiscalité propre sous forme de subventions en vue de la réalisation du schéma départemental d’accueil des gens du voyage.

Les objectifs pour 2015 de la DETR, qui a fait l’objet d’une augmentation de 200 millions d’euros dans la dernière loi de finance, ont été annoncés par le Premier ministre. Ajouter de nouvelles priorités à la DETR reviendrait à diminuer les sommes affectées à des projets d’équipement et d’aménagement des communes rurales. C’est la raison pour laquelle cela ne nous semble pas pertinent, même si les élus ruraux demandent légitimement à l’État de prioriser cette enveloppe.

Il est déjà possible d’allouer au titre de la DETR des aides au financement de l’aménagement d’aires d’accueil : cette possibilité ne relève pas du niveau de la loi, mais de celui de l’instruction. Au-delà des autres points de discussion politiques et financiers, cette faculté n’est pas négligeable. En pratique, plusieurs collectivités y ont déjà eu recours pour aménager leurs aires. Le versement de ces subventions se décide directement avec les préfets de département en fonction des besoins identifiés sur les territoires. Des solutions adaptées peuvent toujours être trouvées, même dans les situations les plus délicates.

Je répète ce que j’ai répondu tout à l’heure à votre collègue : l’État reste aussi présent à travers la DGF,…

M. Gérald Darmanin. Laquelle baisse !

Mme Sylvia Pinel, ministre. …selon les modalités de calcul que j’ai rappelées. Enfin, outre la subvention de l’État, les collectivités peuvent être soutenues par des subventions des régions, des départements ou des caisses d’allocations familiales.

M. Bernard Accoyer. Tout cela est faux !

Mme Sylvia Pinel, ministre. Toutefois, eu égard aux nouvelles obligations des collectivités locales, comme l’aménagement des aires de grand passage prévu dans cette proposition de loi, et aux difficultés que vous avez justement soulevées, le Gouvernement vous propose de travailler dans la perspective du prochain projet de loi de finances à déterminer quelles solutions seraient possibles, étant entendu qu’elles ne pourront être du même niveau qu’entre 2000 et 2008.

Je rappelle que les grands rassemblements réunissant plusieurs milliers de caravanes continuent à être gérés par l’État. Les grands passages et les aires nécessaires pour les faciliter soulèvent des enjeux qui dépassent parfois le seul niveau local et je souhaite que les possibilités de soutien de l’État à leur réalisation soient étudiées. C’est sur la base de ces engagements que je vous propose, monsieur le député, de retirer votre amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Dussopt.

M. Olivier Dussopt. Me voilà satisfait, madame la ministre, puisque vous vous engagez devant nous à travailler sur des modalités de financement qui pourraient s’apparenter à une réactivation des fonds existant avant 2008.

M. Charles de La Verpillière. Nous voilà rassurés !

M. Olivier Dussopt. Vous avez raison de préciser que cela ne pourra pas se faire à la même hauteur puisque le nombre d’aires est moins important et qu’il faut accompagner celles et ceux qui en ont besoin et qui ne faisaient pas montre d’une mauvaise volonté délibérée à appliquer la loi. Je retire donc cet amendement.

(L’amendement n41 rectifié est retiré.)

Article 3

Mme la présidente. La commission a supprimé l’article 3.

Après l’article 3

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 17 et 59 rectifié.

La parole est à M. Yannick Moreau, pour soutenir l’amendement n17.

M. Yannick Moreau. Cet amendement vise à renforcer les moyens de lutte contre les occupations illégales. Le vrai problème des communes d’accueil est en effet celui de la gestion des occupations illégales. Cette situation absolument infernale exaspère nos compatriotes et les pousse dans les bras des populistes.

Je souhaite vous remercier, monsieur le rapporteur, d’avoir repris à votre compte une partie de la proposition de loi qu’Annie Genevard et moi-même avons déposée au nom du groupe Les Républicains pour lutter contre ces occupations illégales en proposant de raccourcir, certes dans des proportions encore modestes, le délai de recours contre les arrêtés d’expulsion.

Vous auriez été bien inspiré de suivre également nos propositions de renforcement de la répression de ces occupations illégales. C’est précisément l’objet de cet amendement, qui vise à doubler la peine de prison encourue pour, la faisant passer de six à douze mois, et à porter l’amende de 3 750 euros à 7 500 euros. Il s’agit d’assurer l’effet dissuasif de la sanction, de manière à prévenir le fléau que constituent ces occupations illégales pour l’ensemble du territoire national.

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour soutenir l’amendement identique n59 rectifié.

Mme Valérie Boyer. Si nous siégeons ici, c’est pour faire en sorte que la loi soit respectée par tout le monde. Or nous demandons aux communes de respecter la loi, mais nous nous trouvons confrontés à des gens du voyage qui ne la respectent pas – « deux poids, deux mesures », encore une fois ! Les occupations illicites créent des tensions très importantes et entraînent des frais épouvantables pour les communes auxquelles l’État enjoint d’accueillir ces personnes, au besoin de façon illicite. On assiste de ce fait à des situations qui, si elles n’étaient pas tragiques en raison de cette injustice, seraient cocasses : on doit négocier leur départ, et ce sont eux qui en fixent la date – c’est formidable !

À Marseille, nous subissons une occupation illicite à côté de l’aire dédiée de Saint-Menet. À chaque passage, c’est la préfecture et la police qui font la circulation. Une fois l’occupation illégale constatée, on négocie et ils nous disent qu’ils partent dans quinze jours, puis dans trois semaines, dans un mois – c’est n’importe quoi ! Quel citoyen français, quand il gare sa voiture là il ne faut pas, oserait répondre à la police qu’il revient dans deux heures, après ses courses et demander qu’on ne dresse pas de PV d’ici là ? Et quand on voit l’état dans lequel les locaux sont laissés, c’est absolument abominable !

M. Bernard Accoyer. C’est vrai !

Mme Valérie Boyer. Et tout cela aux frais de la commune ! Non seulement les activités prévues sur ce terrain ne peuvent plus avoir lieu, mais nous devons en plus tout remettre en état : c’est absolument incroyable que nous en soyons là ! Il y a toujours plus de droits pour les gens qui ne respectent pas la loi, et toujours moins de moyens pour les communes !

M. Lionel Tardy. Bien sûr !

Mme Valérie Boyer. Il faut absolument sortir de ce dilemme ! Comment pouvons-nous être crédibles auprès des Français que vous accablez d’impôts alors que, lorsque des gens ne respectent pas la propriété d’autrui, on ne leur dit rien et c’est à la collectivité de payer !

M. Lionel Tardy. On en a marre !

Mme Valérie Boyer. C’est absolument incroyable d’être dans une situation comme celle-là ! Vous rendez-vous compte de l’absurdité de ce dont nous sommes en train de parler ?

M. Bernard Accoyer. C’est parce qu’il s’agit d’un engagement de François Hollande !

Mme Valérie Boyer. Nous sommes en train de parler de personnes qui occupent des terrains de façon illicite et on demande à la collectivité de prendre en charge ces occupations illicites : c’est incroyable ! Nous sommes dans l’absurdité et l’injustice absolues !

M. Bernard Accoyer. François Hollande l’a dit, donc ils le font !

Mme Valérie Boyer. C’est la raison pour laquelle j’ai déposé avec mes collègues un amendement pour doubler les amendes.

Je ne connais pas d’autre exemple où, en cas de violation de la propriété d’autrui, on dit : « Pas de souci, c’est la collectivité qui paye ». C’est incroyable !

M. Lionel Tardy. Un peu de courage !

Mme Valérie Boyer. Et ce sont les communes qui sont mises en cause ! Le « deux poids, deux mesures », ce n’est plus possible. Le travail du législateur n’est pas de faire des exceptions ni de consacrer l’injustice, et c’est pourtant ce que vous vous apprêtez à faire. J’aimerais que vous votiez nos amendements pour envoyer un signal, mais je crains malheureusement que vous ne préfériez prendre une décision totalement déraisonnable.

M. Lionel Tardy. Ils n’auront pas le courage !

Mme Valérie Boyer. Et quand la population se tourne vers les partis populistes vous jouez les vierges effarouchées, alors que c’est vous qui la poussez dans leur bras !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Cette disposition répressive est issue de la loi du 5 mars 2007 et a donc été prise par la droite.

M. Charles de La Verpillière. Elle a eu tort…

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Je ne la conteste pas et nous ne la remettons pas en cause.

M. Charles de La Verpillière. Elle n’est pas néanmoins de bon aloi.

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Je n’ai pas dit qu’elle est mauvaise : je dis qu’elle ne trouve pas application. Nous sommes confrontés à une difficulté centrale : les statistiques des condamnations montrent qu’il est impossible d’isoler l’une d’entre elles qui aurait été prononcée en application de ce texte-là.

Cela signifie que l’on peut toujours doubler ou quadrupler les peines mais que, en l’état, cela ne donnera pas lieu à poursuite.

Mme Valérie Boyer. Il n’est pas possible de consacrer notre impuissance !

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. La difficulté est là. Le doublement des peines est inutile.

M. Charles de La Verpillière. C’est peut-être maintenant qu’une circulaire de Mme Taubira le serait, elle !

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Monsieur de La Verpillière, vous avez la mémoire courte. Avant Mme Taubira, d’autres gardes des Sceaux ont réclamé des peines accrues, pour autant, le nombre de condamnations n’a pas augmenté.

Le problème, ce n’est pas de faire référence à Mme Taubira (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen) mais de remédier à l’inapplicabilité ou à la difficulté d’application de ce texte.

Si nous devions mettre en place un dispositif pénal, il faudrait y réfléchir autrement mais celui dont nous disposons n’est visiblement pas efficace.

La loi pénale doit prévoir des peines efficaces, justes, nécessaires et proportionnées mais cette peine-là, en l’occurrence, ne fonctionne pas. Je ne dis pas qu’elle est disproportionnée ni qu’elle ne serait pas bonne. Je dis qu’elle ne fonctionne pas.

Mme Valérie Boyer. Ce qui fonctionne, en revanche, c’est la pénalisation des communes !

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Il est donc inutile de vouloir la doubler, la quadrupler ou la décupler : cela ne fonctionne pas ! Regardez ce qu’il en est des peines !

Nous sommes confrontés à une difficulté. Je veux bien que l’on y réfléchisse mais ce n’est pas en se faisant plaisir que l’on fera avancer les choses.

Avis défavorable.

Mme Valérie Boyer. C’est incroyable !

Mme la présidente. La parole est à M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Je suis atterré.

Je me souviens de nos débats à propos des sanctions financières des communes : la fermeté était au rendez-vous. Je me rappelle du lyrisme de notre collègue M. Dussopt, de la SFIO (Rires sur les bancs du groupe Les Républicains) – voilà qui concerne aussi votre identité et votre histoire !

Je suis choqué lorsque l’on nous explique que nous avons une loi mais que nous sommes infoutus de l’appliquer.

Mme Annie Genevard. Eh oui !

M. Julien Aubert. Nous sommes prêts à siéger toute la nuit pour revisiter l’ensemble de notre système. Peut-être que, d’après vous, l’amendement défendu par ma collègue Boyer mériterait d’être révisé mais, dans ce cas-là, faites une proposition !

Mme Valérie Boyer. Oui, proposez quelque chose de cohérent !

M. Julien Aubert. C’est vous, le rapporteur ! Faites donc une proposition !

Je peux en faire, moi : saisissons les voitures de ceux qui se rendent coupables d’occupations illégales !

M. Bernard Accoyer. Les berlines !

M. Julien Aubert. Saisissons les caravanes si c’est la seule manière de faire reculer l’illégalité !

Ce n’est d’ailleurs pas le seul domaine, dans la République, où la propriété n’est pas respectée. Avec l’affaire Maryvonne, voilà quelques semaines, nous avons appris qu’une octogénaire avait été privée de sa propriété pendant deux ans. Où est la République ? Où est-elle ?

Mme Marie-Anne Chapdelaine. Cela n’a rien à voir !

M. Julien Aubert. J’ai l’impression que vous avez inversé la phrase de Proudhon pour qui « la propriété, c’est le vol » et que, pour vous, en République, le produit du vol devient la propriété ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Fasquelle.

M. Daniel Fasquelle. Madame la ministre, monsieur le rapporteur, si vous n’acceptez pas ces amendements, d’autres suivront qui permettront de renforcer utilement les sanctions.

Mme Valérie Boyer. En effet !

M. Daniel Fasquelle. Il faut évoquer cette question d’une façon équilibrée, à la fois avec humanité et fermeté.

Oui, il faut créer des aires d’accueil mais, lorsqu’elles existent, il faut être très ferme avec ceux qui refusent de les occuper ou qui s’installent illégalement sur les domaines public ou privé.

Cela provoque d’ailleurs de très vives réactions de la part de nos concitoyens. Ils ne comprennent pas, en effet, que l’on fasse preuve d’une extrême sévérité envers eux – on cite souvent l’application du code de la route mais d’autres exemples sont aussi possibles – alors que ce n’est pas le cas avec d’autres citoyens français. Ils ne le comprennent pas, ils ne l’acceptent pas, ils ne le supportent pas !

De surcroît, eux ou la collectivité doivent également supporter un certain nombre de dégâts qui ont pu être causés par ces occupations illégales.

Si l’on veut régler ce problème, qui est délicat, il faut éviter les amalgames, je suis tout à fait d’accord avec vous. J’accueille régulièrement de grands rassemblements dans ma commune où tout se déroule très bien mais, malheureusement et tout aussi régulièrement, de petits groupes viennent sans prévenir, s’installent n’importe où, font absolument n’importe quoi et créent les pires difficultés.

C’est contre eux qu’il convient de se montrer beaucoup plus sévères que nous ne le sommes aujourd’hui.

Si ces amendements ne conviennent pas, faites des contre-propositions, le Gouvernement le peut, mais puissions-nous enfin régler définitivement ce problème en France, avec humanité et fermeté, celle-là même dont vous semblez malheureusement manquer ce soir !

Acceptez cet amendement ou d’autres et réglons enfin ce problème !

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Boyer.

Mme Valérie Boyer. Je souscris totalement aux propos de mes deux collègues.

Je suis absolument atterrée que nous discutions aujourd’hui du problème qui est le vôtre avec le droit de propriété.

Des gens sont propriétaires, ils ne peuvent pas utiliser leurs biens comme ils le souhaitent et, de surcroît, ils sont sanctionnés doublement : et parce qu’ils ne sont pas aidés lorsque leur bien est illégalement occupé, et parce qu’ils sont tenus de le remettre en état à leurs propres frais !

J’ai envoyé un courrier au préfet lorsque cette situation s’est produite sur le territoire des arrondissements dont je suis élue.

On a fait la circulation pour faire entrer des caravanes, qui plus est dans un terrain qui se situe à proximité d’une aire de prescription, d’une zone relevant des plans de prévention des risques technologiques, les PPRT, alors que l’on empêche les gens de s’y installer en arguant que c’est dangereux. En revanche, 500 personnes dans des caravanes à proximité d’une usine classée Seveso, pas de problème !

La commune, en l’occurrence la ville de Marseille, a été obligée de remettre le terrain en état.

M. Bernard Accoyer. Cela a coûté cher ?

Mme Valérie Boyer. Nos concitoyens nous élisent pour rendre la loi un peu plus cohérente. Tel est notre travail et c’est pour cela qu’ils nous envoient siéger ici le jour et la nuit. Or, ce que nous faisons est totalement incohérent.

M. Lionel Tardy. Ce n’est pas la première fois…

Mme Valérie Boyer. En plus, monsieur le rapporteur, vous venez de dire que nous sommes impuissants ! Mais si je fais de la politique, moi, c’est parce que je ne peux me résoudre à l’impuissance ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.) Si nous sommes là, si nous voulons changer la loi, c’est précisément parce que nous ne pouvons pas nous résoudre à cette impuissance !

À quoi cela sert-il de discuter si c’est pour dire que la loi existe, que nous ne pouvons pas l’appliquer et que cela ne sert à rien ? Nous sommes là pour la changer ! Changeons-la donc !

Je souhaite également qu’ici nous traitions les Français avec équité et égalité. Pourquoi certains ont-ils le droit de violer la propriété d’autrui et les propriétaires n’auraient-ils que celui de payer pour eux ? Où est l’égalité ? Où est la justice ? Enfin, il n’est pas possible que nous puissions supporter ce genre de chose !

Les discriminations sont patentes entre des personnes qui violent la propriété d’autrui et d’autres qui s’endettent pour devenir propriétaires, qui remettent les lieux en état, qui ont seulement le droit de payer, qui plus est en présentant leurs excuses !

Ce n’est pas possible de tolérer une situation pareille ! Il faut être un peu cohérent !

M. Lionel Tardy. Le texte devrait revenir en commission !

Mme Valérie Boyer. Quelle est notre crédibilité, monsieur le rapporteur ? Faites-nous des propositions concrètes ! En cas d’occupations illicites et de dégradations, il faut que des sanctions soient prises !

Peut-être n’avons-nous pas été efficaces par le passé mais je ne doute pas de votre volonté de traiter les Français avec équité et égalité, en faisant des propositions efficaces. Croyez-moi, nous les voterions tous parce que nombre d’entre nous sont maires et que nous sommes comme tels confrontés à ces difficultés !

Franchement, je suis consternée lorsque je rends visite aux riverains, qu’ils constatent ces dégradations et qu’ils savent que leurs impôts serviront à les réparer ! C’est une histoire sans fin ! Après une remise en état, les dégradations, et de nouveaux paiements ! Il est ensuite impossible de faire d’autres choses et de réutiliser les terrains pour leur ancien usage !

Mme la présidente. Je vous remercie.

Mme Valérie Boyer. Cela suffit ! Les Français ne peuvent pas être sanctionnés sans arrêt !

(Les amendements identiques nos 17 et 59 rectifié ne sont pas adoptés.)

M. Charles de La Verpillière. C’est dommage !

Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Moreau, pour soutenir l’amendement n89 rectifié.

M. Yannick Moreau. Vous ne voulez pas augmenter les sanctions liées aux occupations illégales : nous, si !

Tel est à nouveau l’objet de cet amendement prévoyant une amende supplémentaire au-delà de 36 heures d’occupation, laquelle peut s’élever jusqu’à 1 000 euros par jour et par véhicule.

Je ne crois pas que la situation actuelle soit satisfaisante et je ne pense pas qu’il soit possible de lutter efficacement contre les occupations illégales qui désespèrent nos compatriotes sans renforcer l’arsenal juridique de sanctions.

Mme Valérie Boyer. Bien sûr !

(L’amendement n89 rectifié, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Moreau, pour soutenir l’amendement n97 rectifié.

M. Yannick Moreau. Il ne s’agit pas ici de renforcer les sanctions contre les occupations illégales mais d’écrire dans la loi que le préfet informe régulièrement les maires concernant l’évolution des occupations et des décisions prises.

En effet, il ne faut pas omettre le rôle du préfet dans la gestion des gens du voyage. Il s’agit d’une responsabilité de l’État, lequel ne peut pas toujours se reposer sur les élus locaux, ces bonnes à tout faire de la République qui doivent gérer tous les problèmes de la nation.

Mme Marie-Anne Chapdelaine. Oh ! la la !

Mme Valérie Boyer. Mais oui, il a raison !

M. Yannick Moreau. L’État doit donc prendre ses responsabilités. Cet amendement vise à rappeler le rôle éminent que celui-ci joue en la matière, donc, celui du préfet, qui est d’informer les collectivités et les bonnes à tout faire de la République.

M. Bernard Accoyer. Très bien !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Avis défavorable, le droit actuel satisfaisant cette demande.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvia Pinel, ministre. Même avis.

(L’amendement n97 rectifié n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n69 rectifié.

Mme Annie Genevard. Il est défendu.

(L’amendement n69 rectifié, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Virginie Duby-Muller, pour soutenir l’amendement n30 rectifié.

Mme Virginie Duby-Muller. Malgré les lois existantes, les élus sont confrontés à des difficultés en raison du non-respect de la réglementation en vigueur.

La Haute-Savoie et le territoire du Genevois en particulier en ont subi de nombreuses, pouvant nuire à l’image de ce département touristique et à son attractivité économique lorsque les installations se font sur une technopole, comme celle d’Archamps.

Ces occupations sur des terrains privés ou publics ont parfois lieu alors même que les aires dédiées sont disponibles, ce qui entraîne des situations très tendues au point parfois que des élus soient blessés, comme ce fut le cas à Frangy, ou que des menaces soient proférées – en l’occurrence et récemment à l’endroit de deux agriculteurs.

M. Bernard Accoyer. Il y en a même un qui a été agressé physiquement.

Mme Virginie Duby-Muller. Absolument.

Le maire de Neydens, qui est aussi ma suppléante au conseil départemental, a également fait l’objet de menaces.

Il faut donc davantage de moyens dissuasifs, à l’instar de ce qui se pratique dans d’autres pays.

Par cet amendement, je propose qu’il soit possible de saisir les véhicules, notamment les caravanes, en cas d’installations illicites afin de les transférer vers les aires d’accueil du département.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Avis défavorable, la saisie des véhicules automobiles étant déjà prévue par la loi.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvia Pinel, ministre. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Fasquelle.

M. Daniel Fasquelle. Je soutiens cette proposition car si certaines sanctions ne sont pas efficaces, celle-ci pourrait l’être terriblement.

Elle est de surcroît nécessaire pour toutes les raisons qui ont été données. En tant que maire d’une commune touristique, je souhaite simplement en ajouter une.

Ces occupations illégales peuvent perturber gravement le fonctionnement de ces économies touristiques.

Je ne parle bien évidemment pas des espaces publics qui sont parfois dévastés et que nos employés communaux, qui ont mis beaucoup de soin à les préparer, doivent restaurer – je peux vous assurer que c’est parfois vraiment compliqué pour eux.

En outre, il faut penser à l’économie touristique, à tous les emplois qui en dépendent et aux à-coups que cela peut provoquer.

Ma commune a été bloquée. Je me souviens que, pendant tout un week-end, nous n’avons pu ni entrer ni sortir de la station, le préjudice économique étant réel pour les restaurants, les commerçants voire les hôtels puisqu’il était tout simplement impossible de circuler sur son territoire.

C’est un aspect des choses dont on ne parle jamais mais l’économie touristique, ce sont aussi des emplois et les territoires touristiques méritent d’être respectés.

Prenons enfin des mesures ! Faisons en sorte que les gens du voyage puissent se rendre partout en France, y compris en vacances, qu’ils soient donc aussi accueillis dans les territoires touristiques et que l’on construise des aires d’accueil, j’en suis tout à fait d’accord – nous faisons d’ailleurs l’effort chez nous – mais, par ailleurs, c’est la contrepartie, que l’on puisse aussi développer ces activités économiques en toute tranquillité.

Si certains ne respectent pas la loi, que l’on se donne enfin les moyens de les sanctionner comme il se doit !

(L’amendement n30 rectifié n’est pas adopté.)

Article 3 bis

Mme la présidente. La parole est à M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. Nous abordons ici l’article concernant le stationnement illégal. Les mesures afin de s’y opposer étaient bien maigres initialement mais, heureusement, elles se sont un peu étoffées.

L’extension de la durée de validité de la mise en demeure sur un même territoire va dans le bon sens même s’il est sans doute possible d’aller plus loin, tout comme la réduction du délai pour statuer sur le recours contre une telle mise en demeure.

Au sein du groupe des Républicains, nous avons d’autres propositions.

Pour ma part, je pense qu’il faut aller plus loin et rendre le régime d’évacuation réellement efficace et rapide.

Je répète que même lorsque les capacités d’accueil sont suffisantes dans un département, cela n’empêche pas le stationnement illégal – je le constate dans ma circonscription. Ces stationnements illégaux peuvent donner lieu à des conflits, comme ceux auxquels j’ai assisté il y a deux ans. Face à cette situation, les élus et les propriétaires de terrains, des agriculteurs pour la plupart, sont désemparés, et on les comprend. Il importe donc d’envoyer un message de fermeté.

Si le département respecte ses obligations d’accueil, nous ne devons pas tolérer le stationnement illégal, et les camps installés de cette manière doivent être évacués. Il faut donc proposer d’autres solutions, dans cette optique de fermeté.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard.

Mme Annie Genevard. L’article dont nous entamons l’examen est important, et je pense que nous allons y passer un peu de temps. C’est en effet le seul article de cette proposition de loi qui apporte quelques améliorations. Même si elles ne compensent pas totalement les contraintes introduites par le texte, ces améliorations existent, il faut le reconnaître. La première amélioration concerne la durée d’application de la mise en demeure d’évacuation, qui est portée à sept jours. De notre point de vue, ce n’est pas suffisant, mais c’est tout de même mieux qu’avant. La deuxième amélioration consiste en la réduction de soixante-douze à quarante-huit heures du délai à statuer.

Au cours de l’examen de cet article, nous vous proposerons, au travers de deux amendements, d’apporter une amélioration supplémentaire, en clarifiant le périmètre d’application de la mise en demeure d’évacuation. L’amendement n25 de Mme Vautrin vise à élargir ce périmètre d’évacuation à la commune ; un amendement que je présenterai tend, quant à lui, à l’élargir à la commune et à la communauté de communes. Parce que ces amendements sont très attendus des élus locaux, je voulais appeler d’emblée votre attention sur eux, avant d’y revenir dans la discussion.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Lassalle.

M. Jean Lassalle. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le rapporteur, je suis de ceux qui considèrent que ce texte apporte des améliorations substantielles sur un sujet où aucun d’entre nous n’a réussi depuis longtemps – il faut dire qu’il s’agit d’un morceau difficile. J’y suis confronté, comme tout un chacun ici, surtout en bordure de l’Espagne.

La cohabitation a toujours été difficile entre les nomades et les sédentaires, et elle n’a fait que s’exacerber au fil du temps, à mesure que la modernité s’est imposée. Aujourd’hui, cette confrontation symbolise tout ce que nous ne sommes pas et ce que nous ne supportons pas.

J’ai eu l’occasion, durant ma marche à travers la France, et même l’Europe, de rencontrer un certain nombre de ces groupes, que j’avais jusque-là abondamment pourchassés. Je sais que je vais me faire des ennemis en disant cela, mais j’ai été surpris par la profondeur de leur réflexion, de leur raisonnement et de leur humanité. Et je me suis rendu compte que nous n’avions certainement pas les bonnes grilles de lecture pour communiquer avec eux, ni le bon argumentaire pour entrer en contact avec ces hommes et ces femmes qui, délibérément ou parce qu’ils ne pouvaient faire autrement, ont choisi un autre mode de vie que le nôtre. Ils font d’ailleurs tout ce qu’ils peuvent pour que le nôtre se détraque et se dérégule : ils le font volontiers, souvent par provocation, ce qui est d’ailleurs insupportable.

Si j’avais eu le droit de m’exprimer dans la discussion générale, comme les orateurs des différents groupes, j’aurais dit que c’est là un problème où l’Europe a failli. Au lieu de s’occuper d’un tas de choses, dont elle n’avait aucun besoin de s’occuper, elle aurait pu mettre en place, sur ce sujet, une forme d’accord, qui serait aujourd’hui respecté par tous les États et qui nous permettrait de suivre – car ce n’est pas si difficile – ces hommes et ces femmes qui effectuent tous les ans la même transhumance, ou qui se sédentarisent.

Il y a également une carence de l’État, un dysfonctionnement profond de notre État sur ce sujet depuis des décennies. Il est absolument incroyable que, sur cette question, et dans un pays comme le nôtre, on s’en remette au seul préfet, qui est obligé de dire tout et son contraire, alors que le maire n’a aucun moyen de faire appliquer les textes que nous votons.

Nous gagnerions donc à introduire un minimum de cohérence, parce que l’État ne doit pas faillir dans cette affaire : il faut qu’il donne aux collectivités les moyens de se doter des possibilités d’accueil. Il faut également tout mettre en œuvre, au niveau européen, pour renouer le dialogue perdu depuis des siècles avec ces populations. Mais, à partir du moment où ces personnes ne respectent pas ce que l’on a mis à leur disposition et se mettent délibérément hors la loi, il faut sévir, comme nous le faisons avec le commun des mortels.

Je sais que ce que j’ai dit ne fera pas beaucoup avancer les choses, mais j’avais envie de le dire, et je vous remercie, madame la présidente, de m’y avoir autorisé.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n70.

Mme Annie Genevard. Il est défendu.

(L’amendement n70, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Virginie Duby-Muller, pour soutenir l’amendement n31.

Mme Virginie Duby-Muller. Lorsque la loi n’est pas respectée, il faut donner aux forces de l’ordre les moyens d’agir rapidement. Je vais vous citer plusieurs exemples, à commencer par celui de la technopole que j’ai déjà évoquée. Lorsque des occupations illicites s’y produisent, vous imaginez bien que les investisseurs potentiels n’ont pas d’autre envie que de fuir. Lorsque vous êtes agriculteur, on porte atteinte à votre outil de travail. Les délais de mise en demeure suscitent également des crispations dans la population, et l’occupation illicite a un coût pour la collectivité, puisqu’il faut réparer les dégâts. Je rappelle qu’il est fait appel aux agents des services techniques pour nettoyer les immondices.

Compte tenu de tous les exemples que j’ai mentionnés, je pense qu’il est important d’agir rapidement pour que les forces de l’ordre puissent verbaliser les véhicules en attendant la mise en demeure éventuelle. Une telle verbalisation aurait un caractère dissuasif.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Avis défavorable, car cet amendement est déjà satisfait par le droit existant.

M. Daniel Fasquelle. L’amendement est déjà satisfait ? Tout va bien, alors !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvia Pinel, ministre. Même avis.

(L’amendement n31 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n7.

M. Lionel Tardy. Dans ma circonscription, la maire de Doussard a mis en place un système d’alerte lors des périodes de grand passage, pour prévenir les stationnements illégaux dans les champs et éviter qu’un agriculteur se réveille un matin en découvrant dans son champ des caravanes. Vous le voyez, les élus sont obligés de faire avec les moyens du bord, car, dans ces cas-là, il faut réagir vite. Les campements illégaux ne doivent pas s’installer et doivent être évacués au plus vite pour éviter les détériorations, les préjudices économiques et, tout simplement, les occupations qui durent.

C’est dans ce but que nous proposons de prévoir un délai, au terme duquel la mise en demeure d’évacuer les lieux doit être décidée. En cas de stationnement illégal, vous le savez, le maire, le propriétaire ou le titulaire du droit d’usage du terrain occupé peut demander au préfet de mettre en demeure les occupants de quitter les lieux. Cet amendement vise donc à améliorer la loi Besson, en prévoyant que la mise en demeure intervienne dans un délai de vingt-quatre heures maximum.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Si l’occupation intervient un vendredi soir et que la préfecture n’est pas en mesure de faire appliquer l’arrêté de mise en demeure, la situation sera inextricable, car l’arrêté cessera d’être valable pour n’avoir pas été appliqué dans les délais. Cet amendement me paraît donc contre-productif.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvia Pinel, ministre. Même avis.

(L’amendement n7 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 50 et 58.

La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement n50.

M. Bernard Accoyer. La plupart des communes ont fait l’effort de se mettre en règle vis-à-vis des dispositions de la loi de juillet 2000. Néanmoins, les occupations illégales de terrains publics ou privés sont monnaie courante, avec les conséquences que l’on sait. Cette situation est exaspérante, mais il est prévu que la mise en demeure ne puisse intervenir que si le stationnement est de nature à porter atteinte à la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques.

Lorsque les gens du voyage se branchent de façon sauvage sur les réseaux électriques, s’il n’y a pas de preuve qu’ils portent atteinte à la salubrité, à la sécurité ou à la tranquillité publiques, rien ne peut être fait contre eux. Le droit de propriété est méconnu et méprisé par ces dispositions. Il y a donc lieu de supprimer le deuxième paragraphe de l’article 9 de la loi du 5 juillet 2000.

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour soutenir l’amendement n58.

Mme Valérie Boyer. Cet amendement tend à supprimer le deuxième paragraphe de l’article 9 de la loi du 5 juillet 2000, qui dispose que : « La mise en demeure ne peut intervenir que si le stationnement est de nature à porter atteinte à la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques. » Je fais cette demande au nom du respect du droit de propriété. Une mise en demeure par le préfet doit pouvoir intervenir dès qu’un stationnement illicite est constaté par le propriétaire ou le titulaire du droit d’usage du terrain. Il y va de l’intérêt de nos administrés.

J’ai, sur ma tablette, des photographies que j’ai prises lundi d’une aire occupée de façon illicite. C’est indigne, à la fois pour les gens qui l’ont dégradée, et pour les riverains. On venait de la remettre en état, à grands frais, et à peine remise en état, elle a de nouveau été occupée. Je voudrais que l’on ait un peu d’humanité et une pensée pour nos agents municipaux…

Plusieurs députés du groupe Les Républicains. Eh oui !

Mme Valérie Boyer. … qui doivent remettre en état des terrains qui ont été dégradés de façon illicite. Il est absolument indigne de leur faire faire ce genre de choses : cela me choque. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.) Nous parlions tout à l’heure des conséquences de ces occupations sur le tourisme, et je voudrais, pour ma part, vous parler de celles qu’elles ont sur le développement économique.

L’aire qui est occupée se trouve à côté d’une aire de développement économique, Valentine Vallée Verte, dont le propriétaire a remis en état des bâtiments magnifiques de Fernand Pouillon, qui doivent accueillir des entreprises, qui créeront des emplois. Or, pour vous rendre sur ce site, vous devez traverser un paysage constellé d’immondices. C’est absolument insupportable, à la fois pour les gens qui viennent travailler, pour les gens qui ont envie d’investir et de venir créer des emplois à Marseille, mais aussi pour ceux qui nous ont fait confiance.

Je voudrais que l’on trouve des moyens efficaces pour faire respecter la propriété d’autrui, pour faire respecter nos communes, pour faire respecter nos agents municipaux. C’est cela l’égalité ; c’est cela l’humanité. Je le répète : nous ne pouvons pas consacrer, dans cet hémicycle, l’impuissance de la puissance publique, et c’est pourtant ce que nous sommes en train de faire. C’est la raison pour laquelle il faut absolument supprimer le deuxième paragraphe de l’article 9, parce que ces questions d’hygiène et de salubrité se posent à chaque occupation illicite, y compris lorsque les gens du voyage occupent des endroits où il y a des vestiaires et des salles de douche. Le tableau est toujours apocalyptique après leur passage.

Monsieur le rapporteur, madame la ministre, on ne peut tolérer cela, et les contribuables qui s’inscrivent dans la légalité ne doivent pas être les comptables et les payeurs de personnes qui ne respectent pas le bien d’autrui.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. L’avis de la commission est défavorable et je vais m’en expliquer un instant.

M. Julien Aubert. Merci !

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. J’ai essayé de faire ce que vous souhaitez, et j’ai d’abord proposé que le texte s’affranchisse de la notion de trouble à l’ordre public si, dans un rayon de 50 kilomètres, des aides d’accueil étaient installées. Or il est apparu que cette disposition présentait un grand risque d’inconstitutionnalité. J’ai donc retiré mon texte.

Depuis la loi du 5 mars 2007, il existe une procédure d’évacuation des stationnements irréguliers qui sort du droit commun : le préfet a le pouvoir de prendre un arrêté sans en demander l’autorisation au juge. Or il faut nécessairement, pour prendre cet arrêté, qu’il y ait une atteinte à l’ordre public.

La seule solution trouvée consiste à permettre de contester la validité de l’arrêté pendant sept jours. Dans la première version de ma rédaction, j’avais proposé de porter ce délai à quinze jours. Avant même que vous ne fassiez cette proposition, j’avais spontanément proposé un délai de quinze jours, mais il m’a aussitôt été indiqué que le risque d’inconstitutionnalité était trop important.

Cela veut dire que ce dispositif est extrêmement contraint. Si, pour permettre des évacuations, d’autres idées surgissaient, je suis prêt à les prendre en compte. Mais pour l’instant, en l’état actuel, compte tenu de cette procédure qui sort de l’ordinaire, sans autorisation préalable du juge, la situation est extrêmement contrainte.

M. Julien Aubert. Alors il faut changer la Constitution !

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. J’ajoute qu’il ne faut pas non plus se faire trop de souci quant à l’efficacité de la procédure. Si l’on se réfère au rapport que nous avons rédigé conjointement avec MM. de La Verpillière et Quentin, il y a eu, entre 2008 et 2009, 808 mises en demeure, qui ont fait l’objet de 75 recours – ce qui est extrêmement faible – qui ont abouti, en tout et pour tout, à quatorze annulations. Et tout ceci a donné lieu à 48 évacuations forcées.

C’est donc dire que dans la pratique, les évacuations se font – le mot n’est pas parfaitement approprié – de façon plus ou moins spontanée, avant l’intervention de la force publique. La vraie difficulté tient au délai qui s’écoule. Elle est liée d’une part à l’exigence d’un minimum de respect de la procédure, et d’autre part à la mobilisation des moyens.

En l’état actuel, je ne peux pas vous proposer mieux que le texte que je vous ai soumis. Si vous aviez des idées, ou s’il m’en venait au cours de la navette, je ne suis pas du tout opposé à l’amélioration du texte, car à l’évidence, il faut attendre le meilleur point d’équilibre possible pour que le respect des devoirs des gens du voyage soit assuré dans les meilleures conditions. Mais pour l’instant, je ne peux pas faire mieux. Ce n’est pas un constat d’impuissance, c’est un effort nécessaire qui doit être poursuivi, voilà l’état actuel de la réflexion.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvia Pinel, ministre. Je rejoins l’analyse du rapporteur, cette proposition se heurte au principe constitutionnel. Je voudrai préciser qu’à l’occasion de plusieurs questions prioritaires de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel a rappelé que les mesures de police administrative, dont la mise en demeure prévue par la loi de 2000, doivent être justifiées par la nécessité de sauvegarder l’ordre public.

D’autres procédures peuvent permettre d’obtenir l’évacuation d’occupants sans titre sur le fondement du respect du droit de propriété, sans qu’il soit besoin de justifier d’un trouble à l’ordre public, mais ce sont alors des procédures juridictionnelles de droit commun, et non des procédures administratives.

Pour cette raison, il est préférable de maintenir la justification liée à l’ordre public pour mettre en œuvre la procédure de mise en demeure. C’est la raison pour laquelle l’avis du Gouvernement est défavorable. Mais je partage l’avis du rapporteur, si une meilleure formulation était trouvée au cours de la navette, nous la soutiendrions évidemment.

Mme la présidente. La parole est à M. Charles de La Verpillière.

M. Charles de La Verpillière. Je ne suis pas convaincu par l’argumentation juridique qui vient de nous être présentée. Vraiment pas. Je crois que si l’on supprime cette condition d’atteinte à l’ordre public, et plus précisément d’atteinte à la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques, nécessaire pour la prise d’arrêtés de mise en demeure, on n’encourt pas pour autant un risque d’inconstitutionnalité.

Nous sommes face à une mesure de police administrative. Comme toute mesure de police administrative, elle doit respecter le principe de proportionnalité, sous le contrôle d’un juge. Or c’est bien le cas.

Mme Sylvia Pinel, ministre. Non, il n’y a pas de contrôle du juge !

M. Charles de La Verpillière. Il y aura une mesure de police administrative prise parce qu’une illégalité est commise. Et de mon point de vue, une illégalité est en soi un trouble à l’ordre public, mais peu importe. Si cette mise en demeure et cette évacuation forcée ne sont pas justifiées, si le préfet a méconnu le principe de proportionnalité, le recours qui sera porté devant le tribunal administratif aboutira à l’annulation de l’arrêté préfectoral. Donc je ne pense pas qu’il y ait d’atteinte à la Constitution.

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Boyer.

Mme Valérie Boyer. Je comprends et je remercie le rapporteur de la précision de ses propos, mais je suis tout de même extrêmement gênée par ce qui nous a été décrit. Je ne peux pas imaginer que l’on n’arrive pas à trouver de solution, puisque nous sommes là pour cela.

D’autre part, il est important d’envoyer un signal. Parfois, même s’il est nécessaire de faire évoluer les textes, il est aussi nécessaire, quand on fait la loi, que l’on est engagé dans la vie publique et que l’on fait de la politique, d’envoyer des signaux. Or les signaux que nous envoyons aujourd’hui aux propriétaires sont dévastateurs. On marche sur la tête, en leur disant : « On viole votre propriété, on dégrade votre bien, mais c’est comme ça. » Et si l’on ne fait rien, c’est le contribuable qui sera sanctionné. Ce n’est pas possible, quelque chose ne va pas dans nos textes.

Je voudrais donc que l’on examine la proposition que vient de faire notre collègue de La Verpillière, qui me semble frappée au coin du bon sens et qui permettrait d’avancer, et surtout d’envoyer des signaux corrects à nos concitoyens, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.

(Les amendements identiques nos 50 et 58 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. Charles de La Verpillière, pour soutenir l’amendement n48.

M. Charles de La Verpillière. L’essentiel du débat a eu lieu sur l’amendement précédent, celui que je vous présente maintenant est un amendement de repli. Il vous est proposé de supprimer la condition d’atteinte à la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques uniquement lorsque l’occupation illégale concerne un terrain appartenant à une personne publique, à une collectivité publique. Cela signifie que la condition demeure lorsque l’occupation illégale porte sur le terrain d’une personne privée.

L’expérience m’a montré, depuis l’institution de cette procédure administrative d’évacuation forcée dans les mains du préfet, que les préfets n’aiment pas appliquer cette procédure.

Mme Valérie Boyer. C’est vrai !

M. Charles de La Verpillière. C’est un constat, ce n’est pas une critique. La raison en est très simple : ils savent que si la mise en demeure n’est pas respectée, c’est-à-dire que si les gens du voyage occupant illégalement un terrain sont toujours là à l’expiration du délai fixé par la mise en demeure, il va falloir passer à l’évacuation forcée, et donc disposer de suffisamment de forces de police ou de gendarmerie. Et les préfets de l’Ain successifs m’ont toujours dit que pour évacuer 100 à 120 caravanes, il faut au moins un escadron de gendarmerie, ce que le préfet de région ne leur donnera jamais. C’est tout bête, mais c’est l’expérience de terrain.

Alors les préfets trouvent très souvent de bons prétextes pour ne pas prendre d’arrêtés de mise en demeure, ou pour les retarder ou fixer un délai très tardif. Et lorsqu’ils sont à court d’arguments, ils prétendent qu’il n’y a pas d’atteinte à la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques.

Encore une fois, j’estime – mais j’ai sûrement tort (protestations sur les bancs du groupe Les Républicains) – qu’il y a trouble à l’ordre public dès lors qu’il y a violation de la loi. J’estime aussi que si le préfet prend un arrêté de mise en demeure…

Mme la présidente. Veuillez conclure, monsieur le député.

M. Charles de La Verpillière. Madame la présidente, je n’ai pas beaucoup parlé, je pense que c’est un sujet intéressant, vous pourriez me laisser m’exprimer.

Mme la présidente. Monsieur de La Verpillière, vous en êtes à quatre minutes d’intervention au lieu de deux.

M. Charles de La Verpillière. Je pense que le principe de proportionnalité des mesures de police suffit à assurer la constitutionnalité de la mesure que je vous soumets. Je propose donc que la condition d’atteinte à la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques ne concerne plus les occupations illégales de terrains appartenant à une personne publique. C’est l’objet de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Avis défavorable.

Mme Valérie Boyer. C’est la solution appelée de vos vœux, monsieur le rapporteur !

(L’amendement n48, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 57 et 95.

La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n57.

Mme Annie Genevard. Il est question dans cet amendement d’entrave à l’activité économique. La présente proposition de loi permet aujourd’hui au propriétaire d’un terrain affecté à une activité économique de demander au préfet de mettre en demeure les occupants d’évacuer les lieux. En revanche, votre texte ne donne pas cette possibilité à un propriétaire public, par exemple une commune, qui dispose d’un terrain situé à côté d’une activité économique qui sera pénalisée par l’occupation illégale de ce lieu public.

C’est la raison pour laquelle je propose, par cet amendement, de compléter le deuxième alinéa du II par les mots : « ou à l’activité économique. »

Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Moreau, pour soutenir l’amendement n95.

M. Yannick Moreau. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. J’y suis défavorable en l’état, mais je pense que cela peut être retravaillé dans le cadre de la navette. Je crois qu’il y a quelque chose à faire, je ne sais pas exactement quoi, mais il me semble que l’on peut progresser sur ce sujet. Mais en l’état, avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvia Pinel, ministre. Même avis que le rapporteur, je suis défavorable à l’amendement dans sa rédaction actuelle, mais il me semble que le dispositif que vous proposez pourrait être retravaillé et expertisé plus précisément d’un point de vue juridique, et dans le cadre de la navette, nous pourrions faire un certain nombre de propositions pour améliorer votre proposition.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard.

Mme Annie Genevard. Je ne suis pas très convaincue par les arguments que vous venez d’énoncer, j’ai le sentiment que vous hésitez à donner satisfaction à un amendement déposé par l’opposition. Franchement, quel danger présente cet amendement sur le plan juridique ? Il est simplement question de protéger l’activité économique, et en plus vous êtes d’accord sur cet objectif. En quoi la rédaction est-elle problématique ?

Et de toute façon, quand bien même le serait-elle, la navette pourrait la rectifier le cas échéant !

M. Yannick Moreau. Elle a raison !

Mme Annie Genevard. Rien ne vous empêche de donner un signe positif en faveur de l’activité économique, que vous prétendez tant vouloir protéger. Si véritablement il y avait un problème juridique, la navette permettra de le rectifier. Mais au moins, vous aurez souscrit à l’objectif de protéger l’activité économique, ce n’est pas rien !

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Boyer.

Mme Valérie Boyer. Je voudrais vraiment appuyer les propos de Mme Genevard, parce qu’il n’y a aucun risque à voter cet amendement. Au pire, vous verrez comment il sera retravaillé au Sénat. Monsieur le rapporteur, madame la ministre, nos collègues de La Verpillière et Genevard ont proposé des amendements qui vont dans le bon sens, et qui ne devraient pas causer de clivage dans cet hémicycle.

Tout à l’heure, des solutions étaient proposées, et l’on ne prendrait pas de risque à les voter puisque l’on pourrait les examiner au cours de la navette. Au moins, nous aurions une base de discussion solide et étayée, puisque nous avons la chance d’avoir des élus qui sont des juristes, qui ont une réflexion autonome et qui parviennent à faire des amendements qui peuvent emporter le consensus. Pour l’activité économique, ce serait un signal intéressant en ce moment.

Permettez-moi d’insister encore une fois sur la justice et l’équité. Ces amendements nous permettraient vraiment d’avancer et de faire en sorte que le texte que nous adopterons soit présentable à nos concitoyens.

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. J’y reste défavorable.

Mme Valérie Boyer. Vous êtes sectaire !

Mme Annie Genevard. C’est incompréhensible !

(Les amendements identiques nos 57 et 95 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 40 et 91.

La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n40.

Mme Annie Genevard. Cet amendement prévoit que la décision du préfet de mettre ou non en demeure les occupants doit intervenir dans les vingt-quatre heures suivant la saisine. Cette rapidité à statuer est importante pour les élus, afin de ne pas laisser perdurer des situations préjudiciables.

Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Moreau, pour soutenir l’amendement n91.

M. Yannick Moreau. M. le rapporteur a convenu de la nécessité de réduire le délai d’intervention et de recours contre l’arrêté d’expulsion. Là encore, cet amendement vise à réduire les délais, concernant la décision de mise en demeure cette fois.

Cette proposition de bon sens vise à garantir le respect de la propriété en faisant cesser les occupations illégales dans les meilleurs délais. Il s’agit là d’une amélioration assez logique et naturelle du mode de règlement des conflits d’occupation illégale. Je ne vois rien qui soit compliqué à accepter, même de la part du Gouvernement. Je vous encourage à nous inciter à travailler ensemble, de manière constructive, et à faire droit à au moins une de nos demandes au cours de ce débat. Merci de votre compréhension.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements identiques ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Défavorable. Comme je l’ai déjà expliqué, ces amendements posent une difficulté majeure : si l’arrêté n’est pas pris dans les vingt-quatre heures, il est susceptible d’être attaqué pour illégalité par ceux contre qui il est dirigé. Ce serait totalement contre-productif ! Quand on peut réduire les délais, on les réduit – cette préoccupation nous est commune –, mais ces amendements vont à l’encontre du but recherché.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvia Pinel, ministre. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Monsieur le rapporteur, je n’ai pas compris ce qui empêche techniquement un préfet de prendre sa décision en vingt-quatre heures. Vous avez l’air de penser que l’administration est lente par essence. Expliquez-nous ! Vous dites que ce délai compliquerait les choses et susciterait un contentieux contre les décisions concernées. Pourtant, nonobstant l’existence d’un délai, une occupation est illégale ou elle ne l’est pas – c’est assez simple de le reconnaître objectivement. Qu’est-ce qui empêche d’accélérer la mise en œuvre de la décision de l’administration ?

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Cela peut poser problème si l’occupation intervient le vendredi soir ou le samedi matin (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains), dans une préfecture qui n’est pas équipée pour faire face à ce type de situation.

Mme Sophie Rohfritsch. Il y a toujours une permanence à la préfecture !

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Nous avons tous observé le temps que prenait un constat. Le délai de vingt-quatre heures est donc trop court : s’il n’est pas tenu, il fait courir à la décision de mise en demeure un risque trop important, que je refuse de prendre.

Mme la présidente. La parole est à M. Charles de La Verpillière.

M. Charles de La Verpillière. Cette argumentation n’est pas recevable. Il y a des permanences dans les préfectures, même le week-end, mon cher collègue.

Mme Valérie Boyer. Heureusement !

M. Charles de La Verpillière. Il y a toujours au moins un sous-préfet de permanence dans le département. En réalité, le corps préfectoral est averti dans l’heure qui suit l’occupation illégale. Le maire envoie un SMS ou un mail, et la gendarmerie se rend sur place. L’administration a tous les moyens d’instruire une demande de mise en demeure en moins de vingt-quatre heures, y compris le week-end. Nous ne sommes plus au temps de la diligence !

M. Frédéric Reiss. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Moreau.

M. Yannick Moreau. Vous le savez bien, monsieur le rapporteur : dans la pratique, les services de l’État sont branchés sur l’actualité des occupations illégales dans leur département – le directeur de cabinet du préfet ou le sous-préfet de permanence, à tout le moins, week-ends et jours fériés compris. Quand il existe un coordinateur des gens du voyage, comme c’est le cas dans de nombreux départements, la circulation de l’information est évidemment encore plus rapide.

M. Charles de La Verpillière. Ils sont même informés de l’installation des gens du voyage avant qu’elle soit effective !

M. Yannick Moreau. Il n’existe vraiment aucun obstacle technique. Le délai de vingt-quatre heures commencerait à courir à partir du moment où les services de l’État sont saisis d’un dossier de mise en demeure constatant le trouble à l’ordre public. Or le préfet est mis au courant bien avant la remise du dossier à la préfecture ! Je ne vois donc vraiment aucun obstacle technique, de bonne foi, monsieur le rapporteur, qui empêcherait le préfet de prendre une décision en vingt-quatre heures.

Mme la présidente. La parole est à M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. C’est le moment de partager nos expériences. Figurez-vous que j’ai travaillé en sous-préfecture et que j’ai eu à gérer des dossiers d’expulsion de gens du voyage.

En premier lieu, un certain nombre de gens du voyage appellent la préfecture avant d’arriver dans un département.

Mme Sophie Rohfritsch. En effet !

Mme Valérie Boyer. Ils réservent le terrain qu’ils vont occuper illégalement !

M. Julien Aubert. Il faut le dire : un très grand nombre de gens du voyage respectent la réglementation. Avant d’arriver dans un département, parfois avec de longues caravanes, ils appellent la préfecture pour savoir quelle aire est disponible et annoncer qu’ils y seront quelques jours plus tard.

En deuxième lieu, pour avoir assuré ces permanences en préfecture, je peux attester que la continuité de l’État est garantie, Dieu merci !

Mme Valérie Boyer. C’est rassurant !

M. Julien Aubert. Les samedis et les dimanches, même si les guichets sont fermés, l’État veille. Pour avoir reçu des signalements, je peux vous assurer, monsieur le rapporteur, que vous avez connaissance de l’installation de gens du voyage dans l’heure. Lorsqu’un maire voit débarquer des personnes qu’il n’attendait pas sur un terrain non prévu à cet effet, la première chose qu’il fait est évidemment d’avertir la sous-préfecture ou la préfecture.

Si votre opposition au délai de vingt-quatre heures est idéologique, je peux le comprendre. Mais de grâce, ne vous retranchez pas derrière des arguments qui constituent en fait une critique un peu biaisée de notre administration. J’en profite d’ailleurs pour saluer le travail de nos sous-préfets et de nos préfets, qui sont confrontés ensuite à la difficulté d’appliquer la loi de la République, parfois mise en œuvre de manière un peu trop molle.

(Les amendements identiques nos 40 et 91 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. Sergio Coronado, pour soutenir l’amendement n33.

M. Sergio Coronado. Depuis un certain temps, je constate que la question de la prise de décision et des mises en demeure pour mettre fin aux occupations prend une grande place dans nos débats, notamment dans les interventions de nos collègues de l’opposition. Je veux simplement leur rappeler que la procédure créée par la loi du 5 mars 2007 est assez exceptionnelle. Elle est en effet dérogatoire, puisqu’une expulsion ne peut en principe être ordonnée qu’en vertu de la décision d’un juge, gardien des libertés individuelles et de l’équilibre entre le droit de propriété et le droit pour toute personne de disposer d’un logement décent – ces deux éléments doivent être considérés dans leur globalité. Par ailleurs, l’évacuation des installations illicites ne fait parfois que déplacer le problème d’un lieu à un autre, sans que l’on puisse régler les difficultés de séjour et de stationnement des gens du voyage.

Le présent amendement vise à permettre au préfet de prendre en compte la disponibilité des aires d’accueil pour apprécier l’opportunité de prononcer une mise en demeure. C’est d’ailleurs, comme l’a dit M. le rapporteur, l’une des logiques qui a présidé à la suppression de l’article 3 en commission.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Défavorable. À l’évidence, le préfet prend en considération l’ensemble des éléments en sa possession pour apprécier l’opportunité d’une mise en demeure. Ainsi, il peut choisir de ne pas prononcer de mise en demeure s’il n’a pas envie de disperser les caravanes vers un autre endroit et de créer des situations plus difficiles.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvia Pinel, ministre. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Accoyer.

M. Bernard Accoyer. Je suis opposé à cet amendement, qui vise à préciser que le préfet tient compte de la disponibilité des aires d’accueil et des terrains aménagés. Cela veut dire que, si l’aire aménagée est occupée, alors on peut mettre des gens du voyage partout. Cet amendement est absolument inacceptable : nous voterons contre.

(L’amendement n33 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques, nos 51, 60 et 92.

La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement n51.

M. Bernard Accoyer. Chacun sait que la loi du 5 juillet 2000 pose des problèmes et que les mesures relatives à l’évacuation des terrains occupés illégalement sont trop souvent perçues comme insuffisamment efficaces. Aussi cet amendement vise-t-il à ramener à vingt-quatre heures le délai maximal d’exécution de la mise en demeure.

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour soutenir l’amendement n60.

Mme Valérie Boyer. Il est identique à celui que vient de défendre M. Accoyer : je ne reviendrai donc pas sur son exposé sommaire.

Il me semble totalement absurde de penser que les préfets et les forces de police ne peuvent pas voir arriver des cohortes de parfois 50, 100 ou 200 caravanes. Non seulement les services de l’État les voient arriver, car un certain nombre de gens du voyage préviennent parfois la préfecture, comme le disait notre collègue Julien Aubert, mais encore, quand ils ne les voient pas arriver, les forces de l’ordre sont bien obligées de faire la circulation, compte tenu du nombre de caravanes concernées. Ce sont donc les services de l’État qui installent, en quelque sorte, les gens du voyage sur des terrains qui seront occupés illégalement, comme je l’ai vu à Saint-Menet : on ne peut donc pas dire qu’ils ne pouvaient pas les voir ! Nous sommes dans une situation absolument absurde : ce sont la préfecture et les forces de police qui consacrent l’illégalité.

Quant aux évacuations, elles sont à la carte. Comme on n’applique pas la loi, on va négocier : les gens du voyage annoncent qu’ils resteront quinze jours ou trois semaines, car ils doivent voir untel ou faire telle ou telle chose, et qu’ils s’en iront à la date qu’ils ont eux-mêmes choisie. Là encore, nous sommes dans une situation absolument absurde. Aujourd’hui, l’administration a les moyens de savoir ce que chacun fait, compte tenu notamment de toutes les caméras de vidéoprotection qui ont été installées et dont les aires d’autoroutes sont largement équipées : elle est donc parfaitement capable de voir arriver les gens du voyage.

De grâce, monsieur le rapporteur, madame la ministre, ne soyez pas sectaires et acceptez nos propositions, qui visent à éviter que l’illégalité soit consacrée par la loi, comme c’est le cas aujourd’hui. Acceptez les amendements qui nous permettent d’agir de façon concertée. Si vous votez ces amendements, je suis, comme mes collègues, tout à fait disposée à les retravailler dans le cadre de la navette.

M. Bernard Accoyer et M. Yannick Moreau. Tout à fait !

Mme Valérie Boyer. Nous ferons alors un pas les uns vers les autres, et nous essaierons surtout de mettre en place des solutions concrètes. Nous ne pouvons pas accepter des explications comme : « C’est comme cela ! On ne peut pas faire autrement ! »

M. Bernard Accoyer. C’est un peu court !

Mme Valérie Boyer. À quoi cela sert-il que nous nous réunissions cette nuit ?

M. Julien Aubert. Comme le petit prince et le renard, il faut faire un pas vers l’autre !

Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Moreau, pour soutenir l’amendement n92.

M. Yannick Moreau. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements identiques ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Défavorable : il n’y a pas de sanction en cas de non-respect du délai de vingt-quatre heures.

(Les amendements identiques nos 51, 60 et 92, repoussés par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques, nos 52, 62 et 93.

La parole est à M. Bernard Accoyer, pour soutenir l’amendement n52.

M. Bernard Accoyer. Défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour soutenir l’amendement n62.

Mme Valérie Boyer. Dans le même esprit que les précédents, cet amendement vise à ramener de vingt-quatre à six heures le délai maximal d’exécution de la mise en demeure, dans le cas où les occupants du terrain ont déjà procédé à une occupation illicite sur le territoire de la commune ou d’une autre commune du département. Cela empêchera les gens du voyage de s’installer sur des terrains dont les propriétaires n’ont pas envie d’accueillir des caravanes.

Non seulement les occupations illicites sont pratiquement organisées, parfois par les forces de police ou la préfecture, mais en plus, comme il n’y a aucune sanction et que le stationnement est quasiment à la carte, les gens du voyage reviennent chaque année ou plusieurs fois dans l’année.

Mme Sophie Rohfritsch. Bien sûr !

Mme Valérie Boyer. C’est donc une histoire sans fin ! À un moment donné, il faut faire en sorte d’empêcher les installations illicites sur ces pauvres terrains, qui sont régulièrement dévastés. En tant que maires, nous en sommes réduits à déployer des trésors d’imagination pour éviter des occupations illégales, en couvrant par exemple les terrains de terre ou de gros cailloux. Or il n’y a rien qui ne finisse par être démoli, aux frais du contribuable. Si nous pouvions empêcher une installation au moment où on la constate ou lorsqu’on sait qu’elle va avoir lieu, nous gagnerions peut-être en pédagogie et en équité.

Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Moreau, pour soutenir l’amendement n93.

M. Yannick Moreau. L’amendement est défendu.

(Les amendements identiques nos 52, 62 et 93, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. Julien Aubert, pour soutenir l’amendement n8.

M. Julien Aubert. Par le présent amendement, nous vous proposons un dispositif différent. Comment cela se passe-t-il sur le terrain, monsieur le rapporteur ? Un préfet n’a recours à la force publique qu’avec un ratio de 1 pour 1. Pour une personne appartenant à la communauté des gens du voyage, il y a un gendarme. Cela oblige le préfet du département à avoir recours à des compagnies mobiles qui se trouvent généralement au niveau régional.

Compte tenu des lourdeurs administratives, le temps que le préfet obtienne l’autorisation du préfet de région, on arrive à la veille du jour où il va être procédé à ladite expulsion. Et c’est là que les occupants indésirables libèrent les lieux, car ils connaissent très bien le fonctionnement de l’État. Ils changent de département, voire de région et reproduisent plus loin le même cycle. Tel est le système auquel nous avons affaire.

Dans le département du Vaucluse, les communes récemment concernées par ce type de problème sont nombreuses. À Vedène, le domaine public a été occupé à deux reprises en un mois. On a recensé trois occupations de propriétés privées en un mois, notamment le parking d’une entreprise, et actuellement le champ privé d’un agriculteur ainsi que les terrains d’une autre entreprise.

À Morières-lès-Avignon, le stade a été occupé et son arrosage détérioré. Saint-Saturnin-lès-Avignon, Châteauneuf-de-Gadagne, Le Pontet dont on a récemment parlé à propos des élections municipales ont également été concernés. À Avignon, le terrain du gymnase René-Char est actuellement occupé.

Nous proposons que préfet procède à l’opération d’expulsion dans les quarante-huit heures. Cela ne doit pas être une faculté, mais une obligation. Vous allez sans doute vous réfugier derrière la Constitution. Je vous réponds préventivement qu’il n’y a pas de problème d’ordre constitutionnel. Nous sommes dans une procédure dérogatoire. Néanmoins, il ne vous aura pas échappé qu’il existe un droit au recours devant le juge administratif qui n’est nullement modifié par la proposition que je vous soumets.

Qu’il s’agisse d’une faculté ou d’une obligation, cela ne change rien en droit dans la mesure où il s’agit d’un recours suspensif. En revanche, cela enverra le signal suivant : lorsque l’on viole la loi de la République, le préfet procède immédiatement à une mise en demeure et à une expulsion, protégeant ainsi le droit de propriété.

C’est ce signal-là qu’il faut envoyer. Vous avez refusé jusqu’ici toutes les propositions qui vous ont été soumises.

Mme Valérie Boyer et M. Charles de La Verpillière. Hélas !

M. Julien Aubert. Celle-ci est très simple. Elle consiste à faire savoir qu’en cas d’acte illégal, il y a une action et une réplique de la République. Certains d’entre vous nous ont reproché de nous appeler Les Républicains, il vous appartient aujourd’hui de prouver que vous aussi, vous pouvez l’être sur ce texte ! (Sourires et applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Avis défavorable. Premièrement, il n’y a pas de sanction en cas de non-respect du délai de quarante-huit heures. Deuxièmement, vous avez vous-même fait la démonstration de la difficulté d’application de votre proposition.

Ce n’est pas un problème juridique, mais un problème de moyens car il faut pouvoir mobiliser des forces suffisantes.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvia Pinel, ministre. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Vous êtes en train de nous expliquer, monsieur le rapporteur, que le Gouvernement est incapable – ou refuse – de revoir l’organisation de son système de police ou de gendarmerie pour faire respecter la loi !

Pour les gens du voyage qui nous écoutent et qui occupent illégalement des terrains, c’est une publicité incroyable !

Mme Valérie Boyer. En effet ! C’est donner le signal qu’ils peuvent y aller !

M. Julien Aubert. Vous venez de dire, monsieur le rapporteur, que la République est nue, qu’elle ne peut strictement rien faire. Quel aveu ! Vous dites que vous ne changerez pas le droit et que, de toute façon, vous êtes incapables de l’appliquer.

La différence entre nous, c’est que nous pensons, nous, avoir une véritable responsabilité à endosser. Les problèmes que nous évoquons ne sont pas des problèmes théoriques, mais des problèmes bien concrets. Nous sommes là pour nous occuper concrètement des problèmes des Français. Pour ma part, je trouve inadmissible que vous nous expliquiez que l’on ne peut rien faire !

Mme Valérie Boyer. À quoi ça sert de siéger ce soir ?

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Pendant cinq années, la situation n’a pas progressé d’un iota. Vous ne vous êtes pas attaqués à ces questions et aujourd’hui, vous voulez nous donner des leçons au motif que vous vous appelez Les Républicains ? C’est inacceptable. Vous n’avez pas été meilleurs et vous n’avez pas su réorganiser l’État. (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)

Nous nous attaquons sérieusement à cette question et ce n’est pas à minuit vingt qu’on va recevoir des leçons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen. – Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)

(L’amendement n8 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Reiss, pour soutenir l’amendement n25.

M. Frédéric Reiss. C’est un excellent amendement, madame la présidente, qui propose une rédaction plus précise de l’alinéa 3 à l’article 3 bis. Il permet aux particuliers d’être davantage informés de leurs obligations et aux communes d’agir plus rapidement et efficacement pour faire respecter le droit.

Il est ainsi rédigé : « La mise en demeure reste applicable pendant sept jours à compter de sa notification aux occupants, sur toutes les parties du territoire de la commune autres que l’aire d’accueil, si le stationnement est à nouveau effectué en violation de l’arrêté du maire prévu au I et est de nature à porter atteinte à la salubrité, à la sécurité ou à la tranquillité publique. »

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Avis défavorable. Je préfère la rédaction actuelle où la mise en demeure reste valable dans un délai de sept jours. Cela me paraît plus protecteur.

(L’amendement n25, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n56.

Mme Annie Genevard. Pour nous, cet amendement est très important car il permet de fixer dans la loi un élément qui figure dans l’exposé sommaire d’un amendement du rapporteur. Lorsque l’évacuation est prononcée, celle-ci s’opère sur l’ensemble du territoire de la collectivité compétente en matière d’accueil des gens du voyage.

Dès lors que le préfet prononce un arrêté d’expulsion, d’évacuation, celui-ci est valable sept jours sur l’ensemble du territoire de la commune si celle-ci est compétente en matière d’accueil – c’était l’amendement de Mme Vautrin – ou sur l’ensemble de la communauté de communes si celle-ci a reçu cette compétence.

C’est exactement ce que vous dites dans l’exposé des motifs d’un amendement que vous avez présenté en commission, monsieur le rapporteur. Mais en l’espèce, nous lui donnons force législative. Nous ne laissons pas au juge la latitude d’apprécier le périmètre, mais nous le fixons conformément à ce que vous avez dit dans l’exposé sommaire de l’amendement que vous avez présenté en commission des lois l’autre jour.

Mme Valérie Boyer. Il va le voter alors !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Avis défavorable. (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)

Mme Valérie Boyer. Ce n’est vraiment pas correct !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvia Pinel, ministre. Je vous suggère de retirer votre amendement, madame la députée, afin que nous puissions retravailler ce point au cours de la navette parlementaire, en raison d’un certain nombre d’imprécisions.

Vous proposez d’ajuster la rédaction du dispositif introduit par la commission des lois, permettant notamment la mise en demeure qui reste applicable pendant sept jours en cas de nouvelle installation illégale causant un trouble à l’ordre public.

Si cet amendement me semble sur le fond conforme à l’esprit de la proposition de loi et très proche des dispositions qu’elle prévoit, il mériterait d’être précisé. En particulier, il ne prévoit pas la possibilité que des caravanes en stationnement illicite quittent ce stationnement pour aller sur une aire de grand passage mise en place par l’intercommunalité.

Mme Valérie Boyer. Proposez un sous-amendement !

Mme Sylvia Pinel, ministre. Il ne prévoit pas non plus le cas où son président n’aurait interdit le stationnement que sur une partie du territoire de l’intercommunalité. Ces points me semblent importants pour aboutir au dispositif le plus opérationnel possible, cela dans l’intérêt des élus locaux. Vous n’avez cessé ce soir de rappeler la nécessité d’avoir des dispositifs opérationnels, concrets, efficaces. Or avec votre amendement, vous semez le trouble.

Je vous propose de retirer votre amendement afin qu’il soit revu dans le cadre de la navette parlementaire. À défaut, j’émettrais un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard.

Mme Annie Genevard. Vous êtes pris en flagrant délit de mauvaise foi !

Mme Sylvia Pinel, ministre. Non.

Mme Annie Genevard. Et je vais vous dire pourquoi. Dans l’amendement n37 du rapporteur présenté en commission des lois, voici ce qui figure dans l’exposé sommaire : « Le présent amendement améliore ce dispositif afin de faciliter l’usage de cette faculté en prévoyant que lorsqu’une caravane procède dans un délai de sept jours à un stationnement illicite, en violation du même arrêté d’interdiction de stationnement, c’est-à-dire sur le territoire de la commune ou sur le territoire de l’EPCI lorsque celui-ci est compétent en matière de voirie... »

En fait, vous l’admettez dans l’exposé sommaire, mais dès lors que l’on rend les choses explicites dans le texte de loi, vous refusez la mesure, alors qu’elle est très attendue par les élus locaux. Vous nous avez fait part de votre embarras de ne pas pouvoir apporter des réponses concrètes. On vous donne l’opportunité de le faire.

Mme Valérie Boyer. Ce n’est pas la première fois !

Mme Annie Genevard. Mme la ministre vient de convenir que sur le fond, notre proposition rejoint les préoccupations qui sont les siennes.

Mme Sylvia Pinel, ministre. Mais ce n’est pas rédigé comme cela le devrait.

Mme Annie Genevard. Rien ne peut être mis en avant pour contredire cet amendement si ce n’est le fait qu’il émane de notre groupe, et pas de vous !

Mme Valérie Boyer. Des Républicains.

M. Frédéric Reiss. Si ce n’est pas du sectarisme, cela y ressemble !

Mme Annie Genevard. Et lorsque vous dites qu’on y travaillera pendant la navette, cela signifie que vous présenterez un amendement du Gouvernement ou un amendement du rapporteur qu’on pourra recevoir parce qu’il ne sera pas marqué du sceau d’infamie de l’opposition. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)

M. Charles de La Verpillière. Très bien !

Mme Annie Genevard. Cela est inadmissible et nous en ferons largement état auprès des maires. Madame la ministre, monsieur le ministre, vous êtes pris en flagrant délit de mauvaise foi.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Si nous réécrivons l’amendement et puisque vous en avez la paternité ou la maternité, nous vous le renverrons et vous le signerez.

La difficulté posée par votre amendement et qui nécessite une réécriture, c’est que ce n’est pas un territoire qui est visé, mais un arrêté d’interdiction. Cet arrêté peut être partiel ou porter sur la totalité du territoire. Dans votre rédaction, c’est le territoire qui est visé et votre amendement peut ne pas s’appliquer à l’arrêté d’interdiction.

Nous sommes donc très proches l’un de l’autre. Il ne faut pas en faire un casus belli.

Mme Annie Genevard. Si ! Puisque nous sommes très proches, proposez un sous-amendement.

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. On le fera au cours de la navette. Quoi qu’il en soit, nous ne vous volerons pas votre amendement si telle est votre crainte. Cela n’a jamais fait partie de nos pratiques.

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Boyer.

Mme Valérie Boyer. Monsieur le rapporteur, je ne comprends pas votre attitude. Mme Genevard vient de lire votre exposé sommaire. Il est très simple de proposer un sous-amendement. Vous n’en êtes pas à votre premier mandat, et vous savez que l’on peut, y compris nuitamment, sous-amender un texte.

Moi qui siège à la commission des affaires sociales, je peux vous assurer que lors de l’examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, c’est monnaie courante. Je ne vois pas pourquoi nous ne sous-amendons pas dès à présent. Rien n’empêche d’améliorer le texte au cours de la navette parlementaire.

En tout état de cause, je ne vois pas au nom de quoi on repousse des idées que vous trouvez bonnes et concrètes. Et ce n’est pas la première fois ce soir.

Si ces idées sont correctes et si elles permettent d’avancer plutôt que d’en rester au constat d’impuissance auquel vous nous condamnez, il serait de bon ton de rédiger un sous-amendement, quitte à ce qu’il soit amélioré ou adopté, puisque nous partageons les mêmes idées. Puisque nous sommes d’accord sur ce point.

M. Sergio Coronado. Ah non !

Mme Valérie Boyer. Ce texte vise à avancer, il est simple de sous-amender, cela prend trois minutes. De plus, Mme la ministre vient de dire dans quel sens elle veut sous-amender. Mme la ministre vient de lire le commentaire préparé par ses services, autant dire que les sous-amendements sont prêts. Alors, faisons-le sur le champ. Il est minuit et demi, on peut attendre jusqu’à une heure du matin pour sous-amender, nous sommes là pour ça !

(L’amendement n56 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n36.

Mme Annie Genevard. L’amendement est défendu.

(L’amendement n36, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n16.

Mme Annie Genevard. Également défendu.

(L’amendement n16, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Sergio Coronado, pour soutenir l’amendement n24.

M. Sergio Coronado. Je retire l’amendement.

(L’amendement n24 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à M. Charles de La Verpillière, pour soutenir l’amendement n49.

M. Charles de La Verpillière. Cet amendement vise à faciliter la procédure d’évacuation forcée des gens du voyage, inefficace aujourd’hui, comme nous l’avons répété. Nous proposons donc que le maire puisse, à la place du préfet, procéder à la mise en fourrière immédiate des véhicules et caravanes qui stationnent illégalement sur un terrain non prévu à cet effet.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Avis défavorable, car c’est impossible pour les caravanes, qui sont assimilées à des domiciles.

(L’amendement n49, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Moreau, pour soutenir l’amendement n90.

M. Yannick Moreau. Cet amendement, issu de la proposition de loi déposée par Mme Genevard et moi-même, insère la saisie automatique des véhicules en stationnement illégal depuis plus de soixante-douze heures. En cas de non-respect de la réglementation en vigueur, cet amendement permet donc la confiscation des véhicules.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Le délit, dans le code pénal, entraîne déjà la confiscation des véhicules. L’amendement est donc inutile. Avis défavorable.

Mme Annie Genevard. Cette disposition est-elle appliquée ?

(L’amendement n90, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n39.

Mme Annie Genevard. Il est défendu.

(L’amendement n39, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Raimbourg, rapporteur, pour soutenir l’amendement n84.

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination.

(L’amendement n84, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Moreau, pour soutenir l’amendement n94.

M. Yannick Moreau. Afin que les arrêtés d’expulsion soient effectifs, cet amendement, issu lui aussi de la proposition de loi Genevard-Moreau, tend à imposer au préfet de mobiliser les moyens de police nécessaires dans les vingt-quatre heures à compter de la notification de l’arrêté d’expulsion qui ordonne une évacuation immédiate et l’assistance de la force publique. Nous retrouvons ici le débat lancé tout à l’heure par M. Julien Aubert sur la question de savoir si le législateur doit donner le ton ou se résoudre à subir les effets de l’état de nos forces de l’ordre.

(L’amendement n94, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

(L’article 3 bis, amendé, est adopté.)

Après l’article 3 bis

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n19, portant article additionnel après l’article 3 bis.

Mme Annie Genevard. Cet amendement tend à organiser une meilleure prévision des grands passages. Inspiré de notre proposition de loi, il vise à permettre d’organiser l’information et une concertation obligatoire entre les services de l’État, les maires et les présidents d’EPCI concernés en cas de grands passages.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvia Pinel, ministre. Défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Charles de La Verpillière.

M. Charles de La Verpillière. Pourquoi n’est-il pas possible de demander aux organisateurs des grands rassemblements et des grands passages de déposer leur itinéraire à l’avance ? Existe-t-il vraiment une raison constitutionnelle qui s’y opposerait ? Ne serait-ce tout de même pas une bonne chose, sachant que cela se fait déjà dans certains cas de façon informelle ? Si on l’écrit dans la loi, où est le scandale ? Il me semble au contraire qu’il y a un intérêt général à le faire.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Premièrement, cela se fait déjà. Deuxièmement, aucune sanction n’est prévue s’il n’y a pas de concertation. Le régime créé pour les rave parties prévoyait une sanction possible, consistant en la saisie du matériel. Ce n’est pas le cas ici. En l’état, donc, avis défavorable.

(L’amendement n19 n’est pas adopté.)

Articles 4 à 7

Mme la présidente. Les articles 4, 5, 6 et 7 ont été supprimés par la commission.

Avant l’article 8

Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Moreau, pour soutenir l’amendement n20, portant article additionnel avant l’article 8.

M. Yannick Moreau. Il vise à rappeler la responsabilité de l’État dans l’organisation des grands passages. Nous avons assisté à une querelle d’experts en commission sur l’emploi de l’adverbe « notamment ». Cette rédaction nouvelle qui vous est proposée respecte les souhaits de la commission et recueillera donc, je n’en doute pas, un avis favorable du rapporteur, pour la première fois de la séance.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Malheureusement, non : avis défavorable. La responsabilité des grands passages est une responsabilité partagée.

(L’amendement n20, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Article 8

Mme la présidente. La parole est à M. Sergio Coronado, pour soutenir l’amendement n34.

M. Sergio Coronado. Cet amendement vise à revenir, à propos de l’élection de domicile, à la rédaction envisagée par la proposition de loi initiale, qui me semblait plus claire. L’élection de domicile a été modifiée par la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové – ALUR. Toutefois, cette rédaction de l’article 102 du code civil est moins complète que celle initialement proposée dans cette proposition de loi. En effet, la notion d’effets liés au domicile est remplacée par les simples droits civils pour l’élection de domicile. La rédaction initiale permettrait donc de clarifier les obligations fiscales ou relatives au service national, qui ne font pas partie des droits civils et ne figurent pas dans l’actuel article 102 du code civil.

(L’amendement n34, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Raimbourg, rapporteur, pour soutenir l’amendement n86.

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Il est défendu.

(L’amendement n86, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 37 et 85, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n37.

Mme Annie Genevard. Cet amendement tend à permettre à une famille ayant des enfants de les inscrire dans plusieurs établissements scolaires, publics ou privés, du territoire national et de cumuler cette scolarisation avec l’inscription auprès du Centre national d’enseignement à distance – le CNED.

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Raimbourg, rapporteur, pour soutenir l’amendement n85.

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. L’amendement n85 tend à permettre une co-inscription au CNED et dans une école. Sur ce point, nous sommes d’accord avec Mme Genevard. En revanche, je ne suis pas favorable à son amendement n37, qui ajoute la possibilité de s’inscrire dans plusieurs écoles à la fois, ce qui rendrait impossibles les prévisions scolaires d’ouverture et de fermeture de classes.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvia Pinel, ministre. Même avis que le rapporteur. La deuxième partie de votre amendement, madame Genevard, portait sur le même thème et j’y étais favorable. Sur la première partie, en revanche, nous ne pouvons être d’accord. Le dispositif proposé comporte en effet plusieurs risques. Le premier est celui d’une rupture d’égalité dans le droit commun. Il présente aussi un risque en matière de protection de l’enfance. Enfin, pédagogiquement, l’inscription dans plusieurs établissements compromet le suivi de l’élève lorsque celui-ci change de lieu de vie. Je suis donc défavorable à votre amendement n37, mais favorable à l’amendement n85 du rapporteur.

(L’amendement n37 n’est pas adopté.)

(L’amendement n85 est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 96 et 21, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Yannick Moreau, pour soutenir l’amendement n96.

M. Yannick Moreau. Cet amendement ressemble étrangement à celui dont nous venons de parler. Il prévoit cependant la possibilité d’une polyscolarisation. Si vous voulez garantir la libre circulation des gens du voyage, il faut leur permettre d’être scolarisés dans plusieurs établissements de leur itinéraire habituel. Je ne vois là aucun obstacle – c’est une évidence, une lapalissade. Vous dites que cela entrave les capacités prévisionnelles de l’éducation nationale. C’est une blague ? Où avez-vous vu que l’éducation nationale pouvait prévoir la scolarisation des gens du voyage, avec ou sans multiscolarisation ? Cet argument n’a pas de sens. Si vous voulez vraiment que les gens du voyage voyagent, acceptez la multiscolarisation.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n21.

Mme Annie Genevard. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Avis défavorable s’il s’agit d’inscrire les enfants en même temps dans plusieurs écoles. S’il s’agit, en revanche, de les y inscrire successivement, avis évidemment favorable, mais c’est déjà le cas et je ne vois donc pas l’utilité de cet amendement.

(Les amendements nos 96 et 21, repoussés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. Sergio Coronado, pour soutenir l’amendement n32.

M. Sergio Coronado. Cet amendement vise à modifier une autre disposition dérogatoire au droit commun pour les gens du voyage : le récépissé de consignation avec dépôt de garantie, obligatoire pour les personnes exerçant une activité lucrative sur la voie publique ou dans un lieu public. Avant 1982, ce récépissé avec dépôt était obligatoire pour toute personne exerçant une activité ambulante et permettait de consigner de l’argent trimestriellement en prévision du paiement de la TVA. Il pouvait également faire office d’inscription au registre du commerce. Depuis lors, ce document ne s’applique qu’aux personnes ne disposant pas de domicile ou de résidence fixe depuis plus de six mois, ce qui est discriminatoire et stigmatisant. Il est, de fait, systématique pour les gens du voyage.

La plupart des personnes qui se procurent ce récépissé payant ne sont pas inscrites au registre du commerce, mais pensent que ce récépissé, qu’ils paient 226 euros, leur permet d’exercer une activité commerciale dans les mêmes conditions, un peu comme une patente. Les services des impôts ne vérifient souvent pas leur situation professionnelle mais, si ces personnes font l’objet d’un contrôle lors de l’exercice de leur activité avec ce récépissé, elles sont renvoyées devant un tribunal et condamnées pour travail clandestin.

Il est donc proposé de réserver ce dépôt de consignation, qui n’est jamais rendu et mal utilisé, aux personnes ne pouvant justifier d’un domicile en France. Je réponds ainsi à la critique formulée en commission par le rapporteur, qui reprochait que l’on supprime un dispositif utile pour les forains en zone frontalière.

(L’amendement n32, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

(L’article 8, amendé, est adopté.)

Après l’article 8

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 87 rectifié et 35 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Dominique Raimbourg, rapporteur, pour soutenir l’amendement n87 rectifié.

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Cet amendement tend à inscrire la politique d’accueil des gens du voyage dans le programme local de l’habitat et dans le plan local d’action pour le logement et l’hébergement des personnes défavorisées.

Mme la présidente. La parole est à M. Sergio Coronado, pour soutenir l’amendement n35 rectifié.

M. Sergio Coronado. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Je demande le retrait de cet amendement, qui me paraît satisfait par l’amendement précédent.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvia Pinel, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Monsieur Coronado, retirez-vous votre amendement ?

M. Sergio Coronado. Oui, madame la présidente.

(L’amendement n35 rectifié est retiré.)

(L’amendement n87 rectifié est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Sergio Coronado, pour soutenir l’amendement n26 rectifié.

M. Sergio Coronado. Dans la continuité de l’article 2, cet amendement vise à permettre à l’autorité administrative de qualifier les aires d’accueil des gens du voyage comme projets d’intérêt général.

Dans les schémas départementaux, les obligations en matière d’accueil ne sont pas toujours très précises. Dans certains cas, lors de la mise en œuvre des schémas, cette imprécision a empêché une localisation précise de l’équipement, les différentes communes se renvoyant la responsabilité sans faire de choix ou découpant leurs obligations, rendant impossible leur réalisation.

En cas d’obstruction de la commune ou de l’EPCI, visant à ne pas satisfaire aux obligations prévues dans le schéma départemental, il semble donc nécessaire que le préfet puisse adapter les documents d’urbanisme.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvia Pinel, ministre. Sagesse.

(L’amendement n26 rectifié est adopté.)

Article 9

Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Moreau, pour soutenir l’amendement n18, qui est un amendement de suppression.

M. Yannick Moreau. Puisque nous arrivons au terme de notre débat, je tiens à remercier mes collègues de la majorité pour l’expérience de co-construction parlementaire qu’ils m’ont fait vivre : vous avez refusé systématiquement toutes les propositions qui venaient de l’opposition ! Nous avons bien compris le message : seule la majorité détient la lumière et la vérité, tandis que l’opposition, elle, vit dans la nuit et l’erreur. Quel triste constat ! Pour ce pauvre travail parlementaire, je ne vous remercie pas.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Entrez dans la lumière ! (Rires sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvia Pinel, ministre. Défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard.

Mme Annie Genevard. Nous avons travaillé honnêtement sur cette proposition de loi, parce qu’elle touche à des situations, des problèmes que nous connaissons personnellement grâce à nos responsabilités d’élus locaux. Nous tenions, en tant que représentants de la Nation, à rendre compte dans cette enceinte des difficultés rencontrées, et surtout à dégager des pistes pour les résoudre.

Monsieur le rapporteur, c’est mon premier mandat à l’Assemblée nationale : nous ne nous connaissons pas beaucoup. J’ai pourtant toujours eu le sentiment, à vous écouter, que vos positions étaient assez équilibrées. Mais cela, c’était avant !

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Ça va mal finir !

Mme Annie Genevard. Eh oui, cela va mal finir ! C’est ce que l’on appelle, en rhétorique, une captatio benevolentiae – mais je crains de ne pas réussir à capter votre bienveillance. Vous avez en effet refusé absolument tous nos amendements. Nous avons pourtant travaillé pour vous proposer une rédaction équilibrée ; nous avons pourtant essayé d’apporter des solutions aux problèmes ; mais vous n’avez pas accepté un seul de nos amendements. Cela, monsieur le rapporteur, madame la ministre, c’est une faute : ce n’est pas ainsi que se conçoit le travail parlementaire. Ce n’est pas là un travail parlementaire équilibré, ni même républicain (Exclamations sur quelques bancs du groupe SRC) – j’entends que cet adjectif déclenche, dans vos rangs, la bronca habituelle.

Ce n’est pas ainsi que notre assemblée devrait travailler. C’est peu dire que l’examen de ce texte nous a déçus : nous ressentons une grande amertume de ce que vous n’ayez même pas pris le temps de considérer tout le travail que nous avons accompli.

Mme la présidente. La parole est à M. Charles de La Verpillière.

M. Charles de La Verpillière. Je suis tout à fait d’accord avec ce que vient de dire notre collègue Annie Genevard. J’ajoute un argument important : la question des gens du voyage est très sensible, car les élus, les gens du voyage eux-mêmes et les populations sédentaires ne sont pas satisfaites du système actuel. Vous aviez l’occasion d’essayer, avec nous, de trouver des solutions, quitte – nous vous l’avons proposé à plusieurs reprises – à sous-amender vos amendements ; vous ne l’avez pas fait. Ainsi, nous n’allons pas au bout de notre mission de législateurs, alors que la situation sur le terrain n’est pas satisfaisante, et que nous sommes en permanence à la merci d’un dérapage – quel qu’il soit, d’où qu’il vienne. Vraiment, ce n’est pas du bon travail.

Mme la présidente. La parole est à M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Je n’ai pas la même image de M. le rapporteur que Mme Genevard. Je vous rassure, chère collègue : on peut avoir l’impression, parfois, qu’il n’est pas ouvert au dialogue, mais je peux témoigner que certains amendements refusés en commission ont par la suite été acceptés en séance.

Mme Annie Genevard. Les faits parlent d’eux-mêmes : pas un seul de nos amendements n’a été adopté !

M. Sergio Coronado. M. le rapporteur vous a proposé de retravailler certains de vos amendements pour les examiner à nouveau au cours de la navette : peut-être les débats ultérieurs de ce texte vous réserveront-ils quelques surprises !

Quoi qu’il en soit, le débat n’a pas été aussi caricatural que vous le dites. Sincèrement, comme M. le rapporteur l’a dit lui-même au cours de la discussion générale, c’est un texte modeste, qui comprend cependant une très grande avancée, avec l’abrogation de la loi du 3 janvier 1969. Cette mesure était souhaitée par les associations, mais j’ai cru comprendre qu’elle ne faisait pas débat dans cet hémicycle, que vous n’étiez pas attachés à son maintien.

Je remercie M. le rapporteur pour les avancées qui ont été réalisées concernant la domiciliation, l’harmonisation des règlements-type, la possibilité donnée à l’autorité administrative de qualifier les aires d’accueil comme des projets d’intérêt général. Tous ces éléments sont autant de progrès ; pourtant, tous ces amendements n’avaient pas été acceptés en commission. Nous avons dû revenir à la charge : je vous conseille d’en faire de même, chers collègues du groupe Les Républicains, et vous verrez que Dominique Raimbourg est souvent plus ouvert au dialogue qu’on le croit.

(L’amendement n18 n’est pas adopté.)

(L’article 9 est adopté.)

Après l’article 9

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Raimbourg, pour soutenir l’amendement n88.

M. Dominique Raimbourg. Je souhaite que le Gouvernement remette un rapport au Parlement dans les six mois suivant la promulgation de cette proposition de loi, sur la question de la caravane comme domicile.

M. Charles de La Verpillière. Comme logement !

M. Dominique Raimbourg. C’est vrai, il s’agit de la question de la caravane comme logement. Je sais que les dispositions demandant un rapport au Gouvernement ne sont pas de bonne technique légistique, mais je pense que ce rapport serait politiquement très utile pour éclaircir un certain nombre de questions – y compris certaines questions soulevées par les députés de l’opposition, et sur lesquelles je ne suis pas aussi fermé qu’ils le prétendent !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Sylvia Pinel, ministre. Je vous demande, monsieur le rapporteur, de retirer cet amendement, parce qu’il me semble que la Commission nationale consultative des gens du voyage – que nous allons réactiver – devrait travailler sur cette question importante. J’aurai prochainement l’occasion d’installer cette commission, dont vous serez le président : je vous propose de lui réserver cette question.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Je retire cet amendement.

(L’amendement n88 est retiré.)

Explications de vote

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Dussopt, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

M. Olivier Dussopt. Je serai bref. Tout d’abord, le groupe socialiste a d’emblée considéré ce texte comme un texte d’avancée et d’équilibre. D’avancée, car il met fin aux discriminations induites par la loi de 1969 en abrogeant définitivement ce texte. D’équilibre, car si les préfets auront de nouvelles prérogatives pour achever la création d’aires d’accueil, les maires et les élus pourront se voir faciliter les opérations d’évacuation.

Nos débats ont permis d’avancer sur quatre points. Tout d’abord, les questions relatives à la durée de validité de l’arrêté de mise en demeure : sur ce point, l’article 3 a largement évolué. Deuxièmement, les dispositions relatives aux terrains de substitution ont été remplacées par un dispositif de concertation beaucoup plus rassurant pour les élus locaux. Troisièmement, nous avons avancé sur les questions de scolarité, en écho aux débats qui ont eu lieu en commission. Quatrièmement, Mme la ministre s’est engagée à prendre, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2016, des mesures pour le financement des collectivités qui s’engageront dans une démarche volontaire. Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste votera pour cette proposition de loi.

Mme la présidente. La parole est à Mme Jeanine Dubié, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

Mme Jeanine Dubié. Comme cela vient d’être dit, ce texte est équilibré. Il a été d’abord amélioré en commission, puis à nouveau aujourd’hui, dans cet hémicycle. Le groupe RRDP votera donc pour ce texte.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard, pour le groupe Les Républicains.

Mme Annie Genevard. Je ne suis pas de l’avis de M. Dussopt : pour nous, ce texte ne représente pas une avancée, et n’est pas équilibré !

M. Sergio Coronado. Vous avez pourtant reconnu tout à l’heure qu’il y avait des avancées !

Mme Annie Genevard. Il n’est pas équilibré car les contraintes infligées aux communes sont largement supérieures aux devoirs imposés aux gens du voyage. Il ne représente pas une avancée, parce que vous avez refusé de prendre en compte des situations qui compromettent dès à présent la tranquillité publique dans de nombreux cas. Certains, parmi les gens du voyage, se comportent mal – certains, pas tous : je me refuse à toute généralisation, ce qui serait stigmatisant. Votre proposition de loi ne changera pas significativement la situation à cet égard ; vous l’avez vous-même reconnu, monsieur le rapporteur. Les occupations illégales continueront, tout comme les dégradations d’aires d’accueil, les intrusions illégales sur terrains privés et les perturbations de l’activité économique.

M. Yannick Moreau. Elle a raison !

Mme Annie Genevard. Même sur ce dernier point, alors que l’intérêt général est en jeu, vous n’avez pas voulu avancer d’un iota. Aux communes, vous laissez la consignation des fonds publics, une situation quasi inchangée, pour tout dire : une galère pour la plupart des maires. Ils seront heureux d’apprendre qu’à chacune de nos propositions, qui visaient à résoudre concrètement les problèmes des élus locaux et des populations des communes concernées, vous avez opposé un refus buté. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)

Vote sur l’ensemble

Mme la présidente. Je mets aux voix l’ensemble de la proposition de loi.

(La proposition de loi est adoptée.)

2

Ordre du jour de la prochaine séance

Mme la présidente. Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :

Questions au Gouvernement ;

Proposition de loi instaurant une action de groupe en matière de discrimination et de lutte contre les inégalités.

La séance est levée.

(La séance est levée, le mercredi 10 juin 2015, à zéro heure cinquante-cinq.)

La Directrice du service du compte rendu de la séance

de l’Assemblée nationale

Catherine Joly