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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Session ordinaire de 2015-2016

Compte rendu
intégral

Première séance du vendredi 13 novembre 2015

Présidence de Mme Sandrine Mazetier

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

Projet de loi de finances pour 2016

Seconde partie (suite)

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2016 (nos 3096, 3110).

Articles non rattachés (suite)

Mme la présidente. Hier soir, l’Assemblée a poursuivi l’examen des articles non rattachés, s’arrêtant à l’amendement n8 portant article additionnel après l’article 43.

Après l’article 43

Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Lefebvre, pour soutenir l’amendement n8.

M. Frédéric Lefebvre. Malgré la clémence due au dérèglement climatique, il ne fait pas de doute que les conditions météorologiques seront plus rigoureuses dans quelque temps. J’ai eu l’occasion de défendre hier avec force un amendement visant à lutter contre la pauvreté, puisqu’il prévoyait d’instaurer un revenu universel de base – une question essentielle sur laquelle je souhaiterais que gauche comme droite se mettent au travail. Ce dispositif, de fait, permettrait de ne plus avoir à discuter le présent amendement.

Celui-ci, que j’ai déjà soutenu dans cet hémicycle, vise à élargir le champ du dispositif « Coluche ». Notre pays compte une centaine de banques alimentaires – il y en a plus de 250 en Europe – ; 4 à 5 millions de personnes vivent dans des conditions difficiles, tandis que neuf Français sur dix n’excluent pas d’être touchés eux-mêmes par la pauvreté. La question des réfugiés ne fait qu’ajouter à ces difficultés dont les raisons sont aussi structurelles, et le resteront tant que nous ne nous attaquerons pas à la question de la redistribution. En attendant, nous devons légiférer dans l’urgence pour aider l’ensemble des acteurs de ce secteur à répondre à une demande en forte croissance.

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Rabault, rapporteure générale de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n8.

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé du budget, pour donner l’avis du Gouvernement.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget. Je ne saisis pas bien le sens de la première partie de votre amendement, monsieur Lefebvre, puisque vous proposez d’exclure de l’assiette des produits imposables les dons, alors qu’ils ne constituent pas un produit pour les professionnels ayant une activité agricole. Par ailleurs, les dons en nature sont déjà éligibles au régime fiscal du mécénat des entreprises. La doctrine est constante sur ce point et a d’ailleurs été précisée, conformément à l’engagement du Premier ministre du 24 novembre 2014. Ainsi, les dons en nature, notamment les œufs, peuvent être éligibles à la réduction d’impôt mécénat.

M. Frédéric Lefebvre. Il faut aller plus loin !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. La deuxième partie de l’amendement vise à relever le taux et le plafond des dons aux associations caritatives alimentaires dans ce que vous avez appelé le dispositif « Coluche ». L’État prend en charge les trois quarts du don, ce qui est déjà beaucoup.

M. Frédéric Lefebvre. Mon amendement concerne le plafond, pas le taux !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Je vous ai bien entendu. La limite est de 526 euros en 2015. Au-delà, la prise en charge est de 66 %, ce qui représente déjà une dépense fiscale importante. Avis défavorable.

M. Frédéric Lefebvre. Ce sont des arguties, quand ce problème touche malheureusement nombre de nos compatriotes !

(L’amendement n8 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l’amendement n894.

M. Charles de Courson. Cet amendement concerne les opérations de fusion et d’apport partiel d’actifs entre associations. Suite à une décision de justice intervenue en 2010, l’administration fiscale a publié, le 26 avril 2011, une décision de rescrit qui met fin à l’assimilation entre les fusions et les apports partiels d’actifs entre sociétés. Mon amendement vise à restaurer la neutralité de ce type d’opérations, comme c’était le cas avant la décision de rescrit du 26 avril 2011, sous l’empire de la doctrine administrative du 1er novembre 1995.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. La commission a examiné cet amendement au cours de la réunion prévue par l’article 88 du règlement, donc assez rapidement, mais la doctrine du 13 juin 2014 doit permettre de mettre un terme au dysfonctionnement dont vous faites état, monsieur de Courson et M. le secrétaire d’État devrait le confirmer. Je vous suggère donc de retirer cet amendement, qui est satisfait.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Soit les associations ne sont pas soumises à l’impôt sur les sociétés, auquel cas il n’y a pas de sujet ; soit elles le sont, et je confirme que la doctrine du 13 juin 2014 règle le problème. Il serait donc plus sage de retirer cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Monsieur le secrétaire d’État, je suppose que ce que vous venez d’indiquer figure dans une instruction à tous les services ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Oui, cela a été publié au Bulletin officiel des finances publiques, le BOFIP.

M. Charles de Courson. Dans ce cas, je retire mon amendement.

(L’amendement n894 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir l’amendement n866.

Mme Christine Pires Beaune. Cet amendement, qui a adopté par la commission des finances à l’initiative de M. Fauré, vise à priver de certains avantages fiscaux les entreprises peu scrupuleuses. Certaines entreprises dont la transmission a été mal préparée sont en effet rachetées par de grands groupes qui s’empressent parfois de récupérer les brevets avant de procéder à des licenciements importants et de revendre ensuite l’entreprise en réalisant de fortes plus-values exonérées d’impôts. Nous souhaitons donc que ces grands groupes soient privés de l’exonération d’impôt sur les plus-values de cession de long terme de titres de participation – niche Copé –, du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi – CICE – et du crédit d’impôt pour dépenses de recherche – CIR.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Pour m’en être entretenu avec M. Fauré, madame la députée, je pense qu’un problème d’optimisation de ce dispositif pourrait en effet se poser, notamment s’agissant de la « niche Copé », mais je suis moins affirmatif s’agissant du CICE et du CIR. Il est difficile de proposer par amendement une solution qui règle l’intégralité du problème.

En raison de la complexité des enjeux et du fait que l’amendement, tel qu’il est rédigé, ne nous semble pas de nature à empêcher les abus – en particulier par la création d’une holding qui serait localisée dans un pays à fiscalité favorable – j’avais convenu, avec M. Fauré, de lancer sur ce thème une mission ou un groupe de travail que lui-même, ou un autre député, pourrait prendre en charge. M. Fauré m’avait alors indiqué que, sous réserve de cet engagement, il pourrait retirer son amendement. Si tel n’était pas le cas j’y serai défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Le groupe UDI est très défavorable à cet amendement qui ne cerne pas correctement le problème. Considérer que des entreprises qui licencient après reprise, sans proposer de plan social, ont un comportement prédateur, est un peu rapide, de même que vos remarques sur le transfert des brevets. Je me permets d’ailleurs de poser la question : vous êtes vous amusés à regarder ce qu’aurait donné l’application d’un tel amendement sur les deux ou trois dernières années ? Et êtes-vous sûrs qu’une telle disposition serait conforme à la Constitution ?

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. On ne peut jamais le savoir avant que la décision ne soit rendue !

M. Charles de Courson. Certes, mais cela n’empêche pas de se poser la question avant. Je suis en tout cas très défavorable à ce type d’amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. M. Fauré soulève une vraie question. En effet, certains cas posent problème, notamment s’agissant des brevets. Nous devons donc nous pencher sur ce sujet. Je considère que nous sommes là face à un amendement d’appel qui mériterait des précisions techniques et juridiques. Mettons donc en place une mission parlementaire sur ce thème puisque les abus sont avérés.

Mme la présidente. La parole est à Mme Christine Pires Beaune.

Mme Christine Pires Beaune. Parce que le Gouvernement s’engage à travailler sur ce sujet et que l’auteur est favorable au retrait de son amendement qui, de surcroît, ne réglerait pas complètement le problème, je soutiens, à titre personnel, un tel retrait.

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure générale.

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Je rejoins Mme Pires Beaune et M. le secrétaire d’État. Nous pouvons établir des statistiques, en nous fondant notamment sur les déclarations d’un certain nombre de représentants du personnel en vertu de leur droit d’alerte. Ces personnes sont en première ligne pour constater les dysfonctionnements, mais je comprends les arguments du secrétaire d’État et je retire l’amendement.

(L’amendement n866 est retiré.)

Mme la présidente. Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 854, 631 et 915, pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements nos 854 et 631 sont identiques.

La parole est à Mme la rapporteure générale, pour soutenir l’amendement n854.

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Krabal, pour soutenir l’amendement n631.

M. Jacques Krabal. Cet amendement qui vise, dans un souci de transparence, à apporter des garanties aux donateurs et à l’État, a fait l’objet d’un consensus au sein de la commission des finances. Il tend à ce que soit publiée chaque année, au Journal officiel de la République française, la liste des organismes ayant demandé s’ils relèvent de l’une des catégories mentionnées aux articles 200 et 238 bis du code général des impôts et dont la demande a reçu, de manière tacite ou expresse, une réponse positive de l’administration au cours de l’année antérieure.

Mme la présidente. Je vous propose, monsieur Krabal, de garder la parole pour soutenir l’amendement n915.

M. Jacques Krabal. C’est un amendement de repli pour qu’en cas de rejet du précédent, une telle liste soit publiée « dans des conditions précisées par décret », par exemple par arrêté.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Je propose que nous adoptions l’amendement de la commission et j’invite M. Krabal à retirer l’amendement n915.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. La question soulevée est importante, mais très complexe. Je doute que la publication des rescrits satisfasse les auteurs de l’amendement, car la demande de rescrit n’est pas obligatoire. De nombreuses associations bénéficient du dispositif sans même l’avoir demandé. C’est plus à ce niveau qu’à celui de la publication des rescrits que nous devrions nous interroger. Les contrôles de l’administration s’exercent sur l’utilisation de ces dispositifs, mais les notions sont très complexes. Nous avons engagé un travail, en particulier avec votre collègue Yves Blein qui nous a souvent alertés et proposé des solutions pour traiter cette question délicate qui concerne de très nombreuses associations et soulève le problème du cercle restreint.

D’ailleurs, un certain nombre d’associations bien connues ont fait l’objet de rapports, de contrôles, de contestations. Je ne voudrais pas les nommer ici, même si certaines, au cœur d’affaires judiciaires en cours, ont été citées à l’appui d’amendements. Le sujet est complexe et la proposition difficile à mettre en œuvre. Elle nous contraindrait à rechercher dans le temps une liste qui, par définition, serait incomplète car elle ne concernerait que les associations les plus vertueuses, celles qui auraient demandé le rescrit et obtenu l’assurance de pouvoir recevoir des dons ouvrant droit à avantage fiscal.

La question dépasse celle de la publication des rescrits, que ce soit au Journal officiel ou par arrêté. Je m’engage, comme je l’ai déjà fait auprès de vos collègues, à continuer à travailler sur ce sujet complexe. L’administration devrait faire face à une difficulté technique considérable si elle devait rechercher l’ensemble des rescrits donnés. Il n’y a pas de problème pour les associations reconnues d’utilité publique, car la situation est claire et elles font déjà l’objet de publications. En revanche, il faudrait lancer des investigations sur des milliers d’autres associations. Nous devons clarifier la situation avant d’adopter ce type d’amendement que je vous invite à retirer. Sinon l’avis du Gouvernement sera défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Monsieur le secrétaire d’État, parmi les associations qui bénéficient de la déductibilité, quelle est la proportion de celles qui ont demandé un rescrit ? Par ailleurs, vos services font-ils état de nombreux contrôles exercés sur les associations ? J’ajoute que, suite au nouveau dispositif de dépôt, qui date de plusieurs années, il n’est plus obligatoire d’adresser les reçus, que l’on peut conserver à son domicile pour le cas où il y aurait un contrôle.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. La proportion d’associations qui demandent le rescrit est très faible. C’est d’ailleurs l’un des aspects du problème car la proposition qui nous est faite pourrait, certes, sécuriser cette très petite proportion, mais ne nous renseignerait pas sur le nombre.

Pour ce qui est des contrôles exercés sur les associations, soyez bien assuré qu’il y en a, évidemment. D’ailleurs, certaines associations sont soumises au contrôle de la Cour des comptes – j’ai évoqué une affaire où celle-ci avait rendu un rapport. Vous pouvez vous y référer.

Certains contrôles sont aussi exercés par notre administration, mais les règles qui entourent les régimes d’imposition, qu’il s’agisse du don, du régime de TVA, ou de la fameuse règle des « quatre P », les rendent difficiles. La matière donne lieu à de nombreux contentieux et les parlementaires ne manquent pas de nous alerter lorsque, à l’occasion d’un contrôle, l’administration est amenée à remettre en cause les pratiques d’une association. Je ne peux pas citer d’exemple, mais en raison des notions d’absence de but lucratif, de cercle restreint, d’absence de concurrence, de bon niveau des prix, la question est difficile à traiter. Ce n’est pour autant qu’il ne faut pas la traiter, mais nous devons le faire dans un cadre global et approfondi.

J’avais proposé à Yves Blein de travailler sur cette question, en lien avec d’autres ministères, et de lui confier une mission sur ce thème. Un autre député pourrait parfaitement s’en charger, mais je cite Yves Blein parce que je l’ai souvent rencontré au ministère pour en discuter. Nous avons eu quelques difficultés à fixer le périmètre de la mission. Quand on commence à tirer les ficelles, on peut en effet très vite aller très loin et soulever des questions fort complexes.

En tout cas, nous réfléchissons en ce moment avec Yves Blein et quelques autres parlementaires au lancement d’une mission parlementaire sur ce sujet plutôt inflammable.

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Lefebvre.

M. Dominique Lefebvre. C’est en effet un sujet sensible puisqu’il concerne le contribuable susceptible de bénéficier d’un allégement d’impôt lorsqu’il finance une association d’intérêt général, et les associations pour lesquelles ce dispositif représente un moyen important de trouver des financements.

Monsieur le secrétaire d’État, vous avez évoqué les cercles restreints. Yves Blein avait déposé un amendement d’appel, que j’avais co-signé, sur ce sujet. Me confirmez-vous qu’une instruction fiscale réglera les problèmes d’interprétation que posent les conditions d’éligibilité aux réductions d’impôt ?

S’agissant de l’autre point, permettez-moi de prolonger votre remarque : il convient de soumettre à contrôle tant la légitimité de la réduction que l’usage des fonds. Il y a vingt-cinq ans, après le scandale de l’ARC – Association pour la recherche sur le cancer –, nous avions dû avec Michel Rocard organiser un système de contrôle des associations faisant appel à la générosité publique. Tel est d’ailleurs le champ strict des contrôles de la Cour des comptes : toute association qui fait appel à la générosité publique et, par voie de conséquence, à des réductions d’impôt pour les dons qu’elle récolte, fait l’objet d’un contrôle, en particulier sur l’usage de fonds dont une partie est considérée de facto, à un moment donné, comme étant de l’argent public accordé à l’association.

Le système de contrôle est donc en place, mais les difficultés de l’administration, notamment pour établir une liste exhaustive, sont parfaitement compréhensibles.

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure générale.

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Au vu des explications de M. le secrétaire d’État, je retire l’amendement de la commission.

(L’amendement n854 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Krabal.

M. Jacques Krabal. J’aurais bien aimé retirer aussi les amendements nos 631 et 915, mais je ne suis pas entièrement satisfait par les explications qui ont été données. Après avoir suscité des commentaires à peu près identiques, nos propositions avaient fait l’objet d’un vote favorable l’an dernier, puis avait été rejetées en deuxième lecture. Or mon collègue Joël Giraud aurait bien voulu participer à la réflexion que vous avez engagée, monsieur le secrétaire d’État. Le sujet l’intéresse !

Je maintiens donc les amendements, en demandant que mon collègue ou le groupe RRDP soit partie prenante de la mission parlementaire.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. J’ai rencontré M. Giraud la semaine dernière pour évoquer la question avec lui, monsieur le député. Si, comme je le souhaite, une mission parlementaire est mise en place, je prends l’engagement d’associer aux travaux du Gouvernement tous ceux qui ont manifesté un légitime intérêt pour ce sujet. Cela étant, l’Assemblée est souveraine.

Mme la présidente. Dans ces conditions, que décidez-vous, monsieur Krabal ?

M. Jacques Krabal. Je suis partagé… Comme Joël Giraud tient à ces amendements, je suis contraint de les maintenir, mais je retiens que mon collègue sera associé à la mission parlementaire.

(Les amendements nos 631 et 915, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

Article 44

Mme la présidente. Nous commençons par l’amendement n954, qui tend à supprimer l’article 44.

La parole est à M. Charles de Courson, pour le soutenir.

M. Charles de Courson. L’article 44 est intéressant en ce qu’il montre l’incapacité des gouvernements et des majorités successifs à réduire les dépenses fiscales. Il y a quatre ans, il était promis dans le programme du parti socialiste de réduire de 50 milliards d’euros ces dépenses, qui s’élevaient à l’époque à un peu moins de 70 milliards. Le programme du candidat Hollande, plus modéré, comportait l’engagement d’une réduction de 20 milliards.

Or s’il est un secteur qui bénéficie de dépenses fiscales considérables, c’est bien celui du cinéma. Permettez-moi de rappeler tous les dispositifs dont il profite : réduction d’impôt au titre des souscriptions en numéraire réalisées entre le 1er janvier 2006 et le 31 décembre 2017, qui coûte 21 millions d’euros ; crédit d’impôt pour dépenses de production d’œuvres cinématographiques, dont nous reparlerons en examinant le détail de cet article 44 ; crédit d’impôt pour dépenses de production d’œuvres audiovisuelles, qui coûte 60 millions et qui a été encore élargi ; crédit d’impôt pour dépenses de production d’œuvres cinématographiques et audiovisuelles engagées par des entreprises de production exécutive, pour un coût de 25 millions ; sans compter un amendement venant ultérieurement en discussion, qui propose d’étendre encore ces dépenses fiscales.

S’ajoute à cela le financement du Centre national du cinéma – CNC – qui prélève de l’impôt, certes, mais sous la forme, une fois de plus, d’une recette fiscale affectée – cette recette étant d’ailleurs écrêtée après avoir beaucoup progressé. Bref, l’industrie du cinéma est un système massivement subventionné.

Faut-il continuer dans cette voie ? Ce que nous faisons pour le cinéma, qui nous dit que nous ne devrons pas le faire dans d’autres domaines ?

Mme Marie-Christine Dalloz. C’est la vraie question !

M. Charles de Courson. On invoquera les mêmes bonnes raisons : soutenir l’emploi, la création, l’innovation, que sais-je encore…

Gilles Carrez et moi-même avons déposé des amendements de suppression de l’article pour faire réfléchir. Il n’y a pas de terme à ces subventions : il faut toujours plus ! Et c’est bien pour cela que nous n’arrivons pas à redresser les finances publiques !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Nous avons déjà longuement parlé de ce sujet, monsieur de Courson. Il faut envisager les soutiens au cinéma, qu’ils relèvent du crédit d’impôt ou de la taxe reversée au CNC, dans leur globalité. Le tableau qui figure dans mon rapport et que je vous ai montré la semaine dernière met en évidence que la taxe a baissé de 50 millions d’euros durant les quatre dernières années. C’est la conséquence de la diminution des recettes publicitaires des chaînes de télévision, qui constituent une part importante de son assiette. Le renforcement du crédit d’impôt vient donc compenser, en partie seulement, la baisse avérée – vous l’avez vous-même reconnue – de la taxe.

Pour cette raison, la commission a émis un avis défavorable à l’amendement de suppression de l’article 44.

Mme la présidente. J’imagine que l’avis du Gouvernement est également défavorable, monsieur le secrétaire d’État…

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Oui, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Le Roux.

M. Bruno Le Roux. J’interviens pour engager dès à présent le débat. Dans le rapport de M. Louis Gallois, l’industrie du cinéma figurait parmi les secteurs français d’excellence qu’il fallait soutenir. Or elle est soumise à une concurrence européenne et internationale particulièrement forte.

Mme Marie-Christine Dalloz. Ce n’est pas propre au cinéma !

M. Bruno Le Roux. Nous devons nous doter de règles communes et stables, que nous pouvons du reste améliorer aujourd’hui compte tenu des résultats bénéficiaires consécutifs aux mesures que nous avons prises dans les dernières lois de finances. Je remarque qu’il n’en va pas de même dans d’autres pays. En Belgique, par exemple, un producteur peut sortir du bureau d’un ministre avec l’engagement qu’il se verra offrir des conditions de tournage de toute façon plus favorables que dans les studios français. Je le répète, il nous faut des règles pour résister à ce dumping, des règles d’autant plus nécessaires qu’elles sont « tout bénéfice » pour notre économie. C’est pourquoi je remercie le Gouvernement d’avoir intégré dans son projet de loi de finances les mesures de soutien au cinéma.

Mais parlons plutôt des films. Si ces mesures avaient été adoptées auparavant, le film La French aurait été intégralement tourné en région Provence-Alpes-Côte d’Azur, La Belle et la Bête et Astérix : le Domaine des dieux auraient été tournés dans notre pays. Il en aurait été de même pour des films réalisés en langue étrangère du fait du choix de leurs producteurs ou de leurs réalisateurs : The Search, Personal Shopper, Sils Maria… On pourrait multiplier les exemples concrets !

Mme Marie-Christine Dalloz. Avec des « si », il est facile de refaire le monde !

M. Bruno Le Roux. Je reviendrai plus tard sur l’étude du CNC, que je veux saluer ici. Elle montre qu’il n’y a pas le moindre effet d’aubaine, puisque les mesures sont conditionnées à des contributions fiscales et sociales et à des dépenses en matière de personnel et d’investissement qui sont consenties avant le remboursement du crédit d’impôt. Il s’agit donc d’une opération « gagnant-gagnant » pour notre économie et pour l’influence de la France dans le monde à travers son industrie cinématographique.

M. Jean-Louis Dumont et M. Guy-Michel Chauveau. Bravo !

M. Charles de Courson. Quel talent d’acteur !

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Bloche.

M. Patrick Bloche. Le débat est comparable à celui que nous avons eu l’année dernière,…

Mme Marie-Christine Dalloz. Oui, c’est la même chose tous les ans !

M. Patrick Bloche. …quand nous avons été amenés à faire évoluer et les taux et les plafonds du crédit d’impôt cinéma, notamment pour le secteur de l’animation et pour les « films du milieu ».

J’aimerais toutefois que l’on ne se trompe pas de débat. Grâce à un système vertueux et ancien de redistribution, le CNC ne dépend pas du budget de l’État en tant que tel puisque ses recettes proviennent de taxes. Nul n’ignore qu’une partie du prix du billet de cinéma est reversée au CNC pour alimenter le fonds de soutien.

J’ai déjà entendu vos arguments à plusieurs reprises, monsieur de Courson. Je regrette d’ailleurs l’absence du président Carrez : cela ôte de son charme parlementaire à notre échange de ce matin ! Je comprends que vous employiez l’expression de « dépense fiscale », mais n’oubliez pas que ces crédits d’impôt, notamment celui qui est consacré au cinéma, visent à soutenir des industries culturelles qui, à l’arrivée, représentent pour le budget de l’État un gain en termes de recettes fiscales et sociales. Il s’agit donc de fausses dépenses fiscales, qui se traduisent au bout du compte par des recettes.

Mme Marie-Christine Dalloz. Ce sont malgré tout de vraies dépenses !

M. Patrick Bloche. Le solde est incontestablement positif. Nous y reviendrons à l’occasion de l’examen de l’amendement que j’ai cosigné avec le président Le Roux pour renforcer le crédit d’impôt au bénéfice des fictions audiovisuelles.

M. Jean-Marc Germain. Bravo !

Mme la présidente. La parole est à Mme Karine Berger.

Mme Karine Berger. Je suis totalement opposée à l’amendement de suppression de M. de Courson. La création culturelle, notamment française, nécessite une politique particulière qui a d’ailleurs été reconnue par l’Union européenne. À cet égard, je voudrais poser deux questions à la rapporteure générale et au secrétaire d’État.

La Commission européenne a émis, le 11 novembre 2013, une recommandation sur les limites dans lesquelles les aides spécifiques à la création audiovisuelle en Europe pouvaient ne pas être requalifiées en aides d’État. Il est très bien de soutenir un secteur, mon cher collègue Bruno Le Roux, mais, depuis le traité de Rome, l’Europe interdit les aides sectorielles spécifiques. C’est ce qui a amené la Commission européenne à préciser l’exception spécifique à la culture. Dans sa recommandation, la Commission indique qu’il est impossible que les aides au secteur cinématographique dépassent 50 % de la production. Or l’article 44 porte le plafonnement des aides à une même œuvre cinématographique à 30 millions d’euros. Sachant que le budget moyen d’une production cinématographique est en France de 6 millions d’euros, comment nous assurer, avec un plafond aussi élevé, du respect de la recommandation de la Commission ?

M. Patrick Bloche. Certaines productions dépassent 60 millions, heureusement !

Mme Karine Berger. Il ne faudrait pas que l’on en arrive à une remise en question de l’intégralité des aides culturelles accordées en France.

J’en viens à ma deuxième question. Un film aussi extraordinaire que Mustang, produit en France mais tourné en Turquie avec des acteurs turcs et ayant bénéficié du soutien du CNC au titre de l’aide aux cinémas du monde, aurait-il pu être aidé après l’adoption de cet article 44 qui ne lève que de façon très restrictive la condition de réalisation en langue française, notamment lorsque « l’emploi d’une langue étrangère est justifié pour des raisons artistiques tenant au scénario » ? Ce film, qui représentera la France dans la compétition pour l’Oscar du meilleur film étranger dans quelques mois, bénéficierait-il encore d’un soutien ? Je crains que non. Mais si vous me démentez, on comprendra mieux la teneur de cet article 44.

Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Lefebvre.

M. Frédéric Lefebvre. Je veux dire combien je suis favorable à l’article 44 et à l’amendement de M. Le Roux. La France montre depuis longtemps sa capacité à rayonner dans le monde entier à travers sa culture et son cinéma. Nous tirons tous gloire, à juste titre, d’avoir le cinéma et les fictions audiovisuelles les plus dynamiques à côté de ceux de nos amis américains.

Ce n’est pas le moment de fragiliser une politique qui a été construite à petits pas par les différentes majorités – et sur laquelle nous proposons aujourd’hui d’aller plus loin – alors que nous commençons à en voir les résultats. Notre pays accuse un retard important par rapport à d’autres pays d’Europe – je pense à l’Allemagne et à l’Angleterre – en matière de productions, mais nous sommes en train de rattraper ce retard et nous constatons la relocalisation en France d’un certain nombre de tournages.

J’ai en son temps proposé de développer à Hollywood un bureau du cinéma français, mis en place avec la région Île-de-France. Je souhaite que le Gouvernement remette cette question à l’ordre du jour.

Sur un tel sujet, nous devrions les uns et les autres, comme l’a dit Bruno Le Roux, avoir en tête les retombées économiques directes que représente pour notre pays un secteur traditionnellement puissant, en termes d’image de la France, et qui de surcroît revêt une importance absolument stratégique à un moment où nos industries du cinéma et de la fiction ainsi que notre secteur audiovisuel doivent s’adapter à la mondialisation.

L’une des fragilités du système français, on le voit avec nos grandes chaînes de télévision, vient de la déconnexion entre la diffusion, via les grands médias audiovisuels classiques, toute la problématique de la production, sujet sur lequel j’ai déposé des propositions de loi, et l’essor dans le monde entier du support dématérialisé et d’internet.

Nous devons investir massivement sur le contenu et sur la fiction. C’est un devoir national. C’est la raison pour laquelle je soutiens l’article 44. Je m’exprimerai à nouveau tout à l’heure, lorsque nous examinerons l’amendement de M. Le Roux.

Mme la présidente. Plus brièvement, je l’espère.

La parole est à Mme Michèle Delaunay.

Mme Michèle Delaunay. Sans aller jusqu’à adopter la position extrême de M. de Courson, qui voudrait supprimer les crédits d’impôt et les aides publiques à l’industrie cinématographique, je proposerais volontiers que l’on conditionne ces aides au respect de la loi Évin, qui d’ailleurs est très libérale. Il s’agirait de permettre les scènes de tabagisme dès lors qu’elles présentent un intérêt biographique ou artistique démontré.

M. Charles de Courson. Cela vaut également pour l’alcool !

Mme Michèle Delaunay. Or, malheureusement, ces scènes augmentent d’année en année en nombre et en durée, ce qui va à l’encontre de l’intérêt artistique, qui doit être constant. Aujourd’hui, 80 % des films français bénéficiant d’un sponsoring, cela devrait permettre de réaliser des économies sur les aides publiques.

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure générale.

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Madame Berger, aux termes du VII de l’article 220 sexies du code général des impôts : « Les crédits d’impôt obtenus pour la production d’une même œuvre cinématographique ou audiovisuelle ne peuvent avoir pour effet de porter à plus de 50 % du budget de production le montant total des aides publiques accordées. »

M. Charles de Courson. Ah, tout de même !

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Se pose en effet la question de savoir si les 30 millions pourront être atteints, car cela représente un montant significatif.

Quant à votre deuxième question concernant le film Mustang, n’étant pas en mesure de vous répondre, je vais laisser à M. le secrétaire d’État le privilège de le faire.

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Lefebvre.

M. Dominique Lefebvre. Je suis toujours étonné que nous ayons chaque année le même débat sur les aides au cinéma, tant en commission des finances que dans l’hémicycle. Il y a des partis pris ancrés mais, comme je l’ai dit en commission, compte tenu de mon antériorité dans ce ministère, je pourrais moi aussi être considéré comme ayant un parti pris.

Monsieur de Courson, quand on veut être cohérent, il faut l’être jusqu’au bout ! De votre côté de l’hémicycle, vous avez soutenu tellement de dépenses fiscales que vous ne pouvez pas utiliser cet argument.

M. Charles de Courson. Cela vaut aussi pour vous !

M. Dominique Lefebvre. Le débat tel qu’il a été conduit en commission des finances portait sur deux points.

Tout d’abord, compte tenu de la façon dont fonctionne le marché international, au niveau tant de la production que de la distribution, y-a-t-il un enjeu de relocalisation ?

Par ailleurs, nous sommes tous ici, depuis de nombreuses années, défenseurs de l’exception culturelle, au titre de laquelle nous avons fait beaucoup de très bonnes choses, même si d’autres le sont un peu moins. Mais défend-t-on mieux l’exception culturelle lorsque l’on peut produire des œuvres culturelles sur notre territoire ?

Une autre question s’est posée à l’occasion de l’examen d’amendements de suppression visant à refuser les aides publiques, au motif que ce serait porter atteinte à l’exception culturelle, à tout tournage qui n’aurait pas été réalisé en langue française. Nous avons été un certain nombre à expliquer que l’exception culturelle ne se limitait pas à la langue et que si nous voulions que des œuvres françaises soient diffusées à l’étranger, il fallait nous adapter à la demande du marché. Et vous pourrez décider tout ce que vous voudrez dans cet hémicycle, à partir du moment où, pour pénétrer certains marchés, il faut produire dans une langue étrangère, vous devrez en tenir compte si vous ne voulez pas abandonner l’exception culturelle.

Contrairement à ce que l’on entend parfois, cet amendement vise à conforter l’exception culturelle, et non l’inverse.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Je voudrais à mon tour répondre très précisément à une question posée par Mme Berger. Le régime des aides a été notifié à la Commission et n’a, pour l’instant, pas fait l’objet d’un retour négatif, pas plus d’ailleurs que d’un retour positif.

S’agissant du plafonnement, Mme la rapporteure générale a donné la réponse : c’est le total des aides publiques qui ne doit pas être supérieur à 50 % du budget de production.

Mme la présidente. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Mes chers collègues, nous lisons dans l’étude d’impact que l’article 44 ne pourra être mis en œuvre, s’il est voté, qu’après autorisation préalable de la Commission européenne. Or, M. le secrétaire d’État a dit qu’il n’avait pour le moment reçu aucune réponse.

Mme Marie-Christine Dalloz. Eh oui !

M. Charles de Courson. Nous délibérons donc ce matin comme si l’Europe n’existait pas.

Monsieur Le Roux, ce dont nous avons besoin, c’est d’une coordination européenne pour éviter les surenchères, notamment de la part de la Belgique. Mon cher collègue, vous pourriez utiliser les mêmes arguments pour l’industrie automobile, l’industrie chimique ou le raffinage !

Mme Marie-Christine Dalloz. Bien sûr !

M. Charles de Courson. Au nom de quoi l’emploi dans le secteur du cinéma devrait-il être privilégié par rapport à l’emploi dans l’industrie automobile, l’industrie chimique, et j’en passe ? Il faut que cela cesse ! Si nous faisions pour toute l’industrie française ce que nous faisons pour le cinéma, cela ferait exploser les crédits d’impôt ! Pourquoi le cinéma ?

M. Bruno Le Roux. Il n’y a pas, dans les autres secteurs, les mêmes possibilités de délocalisation !

M. Charles de Courson. Pourquoi n’avez-vous pas déposé des amendements proposant des crédits d’impôt pour la sculpture ou la peinture ? Au nom de quoi ?

Mme Karine Berger. Ils vont arriver ! (Sourires.)

M. Charles de Courson. Oui, pour enrichir les riches… Je me souviens de ce petit crédit d’impôt, à l’initiative de notre collègue ici présent, qui permet aux gens très aisés d’acheter des œuvres d’art en bénéficiant d’un avantage fiscal. Il faut le faire !

Par ailleurs, monsieur le secrétaire d’État, l’engagement pris par le Gouvernement dans la loi de programmation des finances publiques de stabiliser les dépenses fiscales n’est pas respecté.

Bien sûr, nous avons ce même débat chaque année parce que le domaine de la culture illustre une dérive – mais je reconnais que lorsque nous étions dans la majorité certains demandaient aussi toujours plus. On ne peut pas redresser les finances publiques si l’on n’a pas un peu de courage.

(L’amendement n954 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Karine Berger, pour soutenir l’amendement n1028.

Mme Karine Berger. Les aides au cinéma français sont naturellement toujours soumises aux critères de la Commission européenne en matière d’autorisation des aides publiques. Cela signifie qu’elles doivent avoir des liens directs avec la culture française, le premier de ces liens restant la langue.

L’article 44 ne prévoit que trois cas où les films pourraient ne pas être en langue française : les films d’animation ; les œuvres cinématographiques pour lesquelles l’emploi d’une langue étrangère est justifié pour des raisons artistiques tenant au scénario – je pense à Mustang – et les films qui comportent plus de 15 % d’effets spéciaux. Je crains, mes chers collègues, que cette dernière catégorie ne passera pas la barre des autorisations de l’Union européenne en matière d’aides de l’État. En effet, ce n’est pas parce qu’un film comporte 15 % d’effets spéciaux qu’il permet d’assurer la promotion de la culture française.

L’amendement n1028 vise à exclure de tels films du champ d’application du dispositif proposé par le ministère des finances et le ministère de la culture pour éviter que l’article 44 soit intégralement remis par la Commission européenne lorsqu’elle donnera son avis. Qu’on le veuille ou non, 15 % d’effets spéciaux, cela n’a aucun rapport avec la culture française.

M. Frédéric Lefebvre. Sauf que les Français sont parmi les meilleurs du monde dans le domaine des effets spéciaux et qu’il est important de promouvoir la qualité de notre industrie et notre savoir-faire !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. La communication de la Commission européenne du 15 novembre 2013 dresse en effet la liste des critères culturels et des circonstances dans lesquelles peuvent être acceptés les soutiens et les crédits d’impôt. Cela dit, comme l’ont rappelé M. le secrétaire d’État et M. de Courson, tant que nous n’avons pas reçu l’autorisation officielle de la Commission européenne, nous ne sommes pas certains que le régime sera accepté.

Différents critères, dont celui de la langue officielle d’un État membre, figurent dans la liste de la Commission européenne. J’ai examiné le cas des films comprenant des effets spéciaux : en l’absence du critère de la langue qui, lui, est reconnu, nous prenons le risque de voir l’ensemble du dispositif balayé par la Commission, au motif que l’aide d’État n’entre pas dans les critères qu’elle a définis.

M. Charles de Courson. On aura tout gagné !

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Les dispositions que nous adopterons devront donc tenir compte de ces critères. En effet, les avis de la Commission européenne produisent parfois des effets secondaires et les acteurs privés sont obligés de rembourser – la Commission est très vigilante sur ce point –, de même que les acteurs publics.

La commission a donc accepté cet amendement, qui a été examiné dans le cadre de la réunion prévue au titre de l’article 88 du règlement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Tout d’abord, monsieur de Courson, au cours d’une des séances précédentes j’ai imaginé un compteur prenant en compte toutes les dépenses budgétaires que vous proposiez : j’aurais dû mettre en place le même compteur pour les dépenses fiscales ! Vous mettez aujourd’hui l’accent sur quelques centaines de millions d’euros de dépenses fiscales alors que vous en avez proposé bien plus hier – je pense à l’exonération de cotisations pour les employeurs particuliers.

M. Charles de Courson. Oui, pour soutenir les emplois à domicile !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Vous avez également proposé de relever les plafonds d’un certain nombre de niches fiscales. Vous n’avez donc pas de leçon à nous donner !

Je vous rejoins cependant sur la nécessité d’une concertation au niveau européen. Il n’est pas normal que certains producteurs comparent les subventions d’un pays à l’autre, ce qui est le cas pour le cinéma comme pour d’autres secteurs : nous l’avons vu hier lors du débat sur les rescrits fiscaux ou rulings.

Cette aide sera-t-elle contestée ? La Commission européenne a validé des dispositifs, en Allemagne notamment, qui ne font pas référence à la langue allemande et qui présentent des taux comparables à ceux prévu par cet article. Le crédit d’impôt allemand fonctionne sans aucun problème. Il en va de même pour toutes les décisions que nous prenons, concernant le cinéma ou les outre-mer, pour lesquelles un règlement d’exemption par catégorie s’applique. Parfois, la Commission européenne demande que les dispositifs que nous mettons en place soient notifiés ou prénotifiés.

Pour ces raisons, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Le Roux.

M. Bruno Le Roux. Je partage votre analyse, monsieur le secrétaire d’État, au vu des expériences d’autres pays européens. Précisons, car la question pourrait se poser, que l’article 44 ne fait peser aucune menace sur les tournages en langue française, qui sont toujours aidés par un crédit d’impôt à hauteur de 30 %.

Définir la culture dans notre pays suppose de distinguer deux cas de figure. Tout d’abord, je le répète, certains producteurs ou réalisateurs font le choix – artistique – de tourner dans une autre langue que le français. Ainsi, Michel Hazanavicius a décidé de tourner The Search en tchétchène ; Personal Shopper a été tourné en anglais ; de même, pour Timbuktu dAbderrahmane Sissako. Respecter ces choix et aider les réalisateurs, c’est aussi faire en sorte que ces films soient tournés dans notre pays. Tel est l’objectif de la disposition que nous examinons aujourd’hui pour permettre le rapatriement de ces tournages.

Mais une seconde partie de la production française à très gros budget, qui regroupe des films d’animation ou incluant de très nombreux effets visuels numériques, se fabrique quasi intégralement en dehors du territoire français. On peut citer à titre d’exemple Le Petit Prince, Mune, Ballerina, des blockbusters aux budgets souvent supérieurs à 100 millions d’euros, dont la dépense échappe aujourd’hui totalement à la France. Ces films utilisent la langue anglaise, car ils sont tournés vers le marché international et l’export.

Je félicite le Gouvernement de permettre, par cette mesure, que de tels films soient tournés dans notre pays. Sans revenir sur les effets en matière de dépenses sociales, fiscales ou d’investissement, signalons que, selon la Fédération des industries du cinéma, de l’audiovisuel et du multimédia, l’article 44 permettra de donner 1 million d’heures de travail aux personnels des industries techniques du cinéma et aux intermittents du spectacle que nous devons non seulement protéger, mais aussi alimenter en heures de travail car telle est bien leur raison d’être et leur métier.

Aussi, je félicite une nouvelle fois le Gouvernement d’avoir pris toute la mesure de ce qu’il faut faire pour soutenir ce secteur et d’avoir inclus de telles dispositions dans le projet de loi de finances initial.

Mme la présidente. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Je suis un peu étonné que l’on vote un article sans même avoir l’accord de la Commission européenne.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Je vous retournerai cet argument !

M. Charles de Courson. Notre collègue Karine Berger a raison de soulever ce point. Pourquoi n’attendons-nous pas l’accord de la Commission européenne avant de voter l’article 44 ? C’est un peu de la provocation envers la Commission ? Sommes-nous si pressés ?

Quant aux films tournés dans une langue étrangère, selon l’étude d’impact ils représentent 3 millions d’euros, à comparer aux 50 millions d’euros que coûtera l’article 44. Monsieur Le Roux, cela fait combien d’emplois en équivalents temps plein : 600, 700 ? Et si l’on divise le coût total par ces emplois, à combien arrivons-nous ?

M. Bruno Le Roux. Ce ne sont pas seulement des emplois ! Il y a des dépenses sociales, de l’investissement !

M. Charles de Courson. Pourquoi l’industrie cinématographique devrait-elle être privilégiée au détriment des autres industries ?

M. Bruno Le Roux. Parce qu’elle est délocalisable !

M. Charles de Courson. Et le secteur automobile n’est pas délocalisable ? Et la chimie ?

M. Bruno Le Roux. Non, ils ne sont pas délocalisables dans les mêmes conditions !

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Bloche.

M. Patrick Bloche. Je comprends le sens de l’amendement de Karine Berger et je partage l’attention qu’elle porte à la langue française.

La diversité culturelle, du moins telle qu’elle est vécue dans notre pays, a conduit à tisser un lien étroit entre culture et langue. L’article 44 du projet de loi de finances, tel quel le Gouvernement le propose, vise avant tout à créer une dynamique – bien plus forte que celle dont nous discutions l’année dernière –, avec un enjeu d’abord industriel, de relocalisation des tournages, comme cela vient d’être rappelé, et un enjeu linguistique, qui conduit à faire de l’industrie du cinéma une industrie pleinement exportatrice. Mais on ne pourra relocaliser des tournages en France qu’à partir du moment où ils pourront avoir lieu dans certaines langues, souvent l’anglais, afin de pouvoir exporter ensuite les films à l’étranger.

La relocalisation dans nos territoires peut présenter un autre avantage, qui est lié à la diversité culturelle, celui de valoriser notre patrimoine – monuments, paysages – et de dynamiser ainsi l’industrie touristique. Je pense que chacun partage ce point de vue.

Je comprends donc la démarche de Karine Berger qui peut, avec sérénité, envisager de retirer son amendement pour en rester à la rédaction originale de l’article du Gouvernement.

J’ai vécu, comme membre de l’opposition, les conséquences de la suppression soudaine et irresponsable des recettes publicitaires de France Télévisions en soirée et de l’instauration, en compensation, de ce que l’on a appelé la taxe Copé, source d’un tel contentieux avec l’Union européenne que ce gouvernement s’est trouvé confronté à une vraie bombe à retardement budgétaire de 1,3 milliard d’euros. La majorité d’hier – aujourd’hui devenue l’opposition – pourrait donc être un peu plus discrète sur la validité ou non des aides d’État. Dans de nombreux domaines, je peux en témoigner, nous avons été conduits à légiférer sans avoir la réponse de la Commission européenne, de façon volontariste, pour démontrer la pertinence des mesures que nous proposions.

Mme la présidente. La parole est à Mme Karine Berger.

Mme Karine Berger. Monsieur le secrétaire d’État, je vous repose ma question : pourquoi rattacher 15 % d’effets spéciaux à la culture française ? Dans sa longue liste, Bruno Le Roux n’a pas cité de tels films : il n’a évoqué que des œuvres où se posait la question du choix artistique de la langue du scénario et des films d’animation, qui ne sont pas concernés par cet amendement.

La question de la Commission européenne sera en effet simple : comment rattachez-vous les 15 % d’effets spéciaux à la culture française ? Patrick Bloche a parfaitement raison : pour la Commission, la culture ne se réduit pas à la langue. Et pourquoi 15 % ? Pourquoi pas 10, 20, 5 ou 30 % ?

M. Bruno Le Roux. J’ai oublié les Lapins crétins !

Mme Karine Berger. Excellente question : comment rattacher les Lapins crétins à la culture française ? (Sourires.)

Mme la présidente. Madame Berger, maintenez-vous l’amendement ?

Mme Karine Berger. Oui, mais j’aimerais avoir une réponse.

Mme la présidente. La parole est à M. Guy Bailliart.

M. Guy Bailliart. Cet amendement ne soulève pas non plus mon enthousiasme. En réalité, nous défendons le cinéma, non la langue française. Le cinéma partage avec d’autres formes artistiques comme l’opéra la caractéristique de dépasser les seuls mots. Ainsi, Mozart n’est pas un compositeur italien, pourtant on chante en italien dans ses opéras. Ce qui compte, dans les films, ce ne sont pas seulement les dialogues ; c’est le fait que l’on fasse du cinéma en France. C’est aussi le fait que des auteurs étrangers puissent venir en France, comme lors de la période de bouillonnement culturel du début du XXsiècle : le fait que le cinéma français dépasse largement les frontières de notre pays devrait tous nous rassembler et nous faire plaisir. Chipoter sur le fait que les dialogues doivent, ou non, être en français – bien entendu, lorsqu’ils le sont, c’est encore plus délicieux – n’est pas la bonne manière d’aider ce qui se fait ici, qui concerne une technicité utilisée et inventée en France. Aussi, je ne vois pas pourquoi nous négligerions la chance qui est nous est offerte, y compris par des auteurs étrangers.

Mme la présidente. Chers collègues, sur les amendements à l’article 44, nous avons écouté de nombreux orateurs, ce qui s’est apparenté à une forme de discussion générale. Or je vous rappelle que, selon le règlement, ne peuvent intervenir après l’orateur ayant présenté l’amendement, et après l’avis de la commission et du Gouvernement, qu’un orateur pour et un orateur contre. Je vous appelle donc à ne pas multiplier les demandes de parole.

La parole est à M. Frédéric Lefebvre.

M. Frédéric Lefebvre. S’agissant des effets spéciaux, je ne vois pas pourquoi l’on voudrait balayer d’un revers de main la puissance créatrice de notre industrie.

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Ce n’est pas le sujet !

M. Frédéric Lefebvre. Dans ma circonscription, qui rassemble de nombreux lieux de production et de création audiovisuelle et de fiction, les Français montrent sans cesse leurs qualités. De la même façon, de nombreux acteurs mondiaux de la production ou la réalisation de films de fiction ou d’animation à succès s’appuient sur le dynamisme de l’industrie française en matière d’effets spéciaux, qu’il s’agisse de logiciels ou de techniques de montage.

Balayer d’un revers de main toute cette industrie, en considérant par avance que l’on n’est pas capable de la défendre devant la Commission européenne, c’est passer totalement à côté de la richesse de nos ingénieurs et créateurs dans ce domaine. Cet amendement me paraît donc décalé par rapport à la réalité.

Penser que le seul critère de la langue incitera la France à soutenir la création sur son sol et la relocalisation de certains dispositifs, c’est oublier que des sociétés comme Mac Duff figurent aujourd’hui parmi les plus dynamiques du monde. Notre industrie en la matière est reconnue partout. Dans le 15ème arrondissement de Paris, sans que vous le sachiez, mesdames, messieurs les députés, 700 ou 800 personnes travaillent chaque jour pour une production mondiale. Il faut ouvrir les yeux sur cette réalité.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Le critère de 15 % d’effets spéciaux figure déjà dans les dispositions relatives au crédit d’impôt international. C’est pourquoi nous l’avons repris, madame Berger.

(L’amendement n1028 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Le Roux, pour soutenir l’amendement n523.

M. Bruno Le Roux. Dans la continuité du débat que nous venons d’avoir sur le cinéma, cet amendement s’intéresse cette fois aux séries audiovisuelles. Bien que le secteur soit en pleine expansion, le nombre de jours de tournage a diminué dans notre pays l’année dernière, en raison notamment d’une féroce compétition européenne.

Cet amendement vise donc à renforcer l’attractivité du crédit d’impôt au bénéfice de la fiction française, filière importante pour notre économie et créatrice d’emplois. Le taux réel de crédit d’impôt dont bénéficient aujourd’hui les œuvres de fiction françaises est très nettement inférieur à 10 %, en raison d’un plafond uniforme à 1 250 euros par minute.

Permettez-moi de donner un exemple très court et très précis : celui de la série Versailles, lieu important pour nous tant nous y allons peu pour réviser la Constitution – heureusement, nous pouvons le voir depuis quelques semaines dans cette série télévisée ! Pour un budget d’environ 30 millions d’euros, la production bénéficierait de 6 à 7 millions d’euros d’aides en Belgique, contre 2,5 millions d’euros – sous forme de crédit d’impôt – en France. Le chiffre donné tout à l’heure par M. de Courson est faux, car le simple tournage de la série permet de faire travailler 600 personnes et il est à l’origine de 5,5 millions de charges patronales et sociales. Il serait donc incompréhensible de laisser tourner ce genre de productions ailleurs que dans notre pays !

C’est pourquoi nous proposons de relever le taux du crédit d’impôt à 25 %, soit le même taux que pour l’animation audiovisuelle, et de réévaluer son plafond pour mieux tenir compte des coûts de production en constante augmentation de ces œuvres. Face à la demande des diffuseurs, la France ne peut refuser de prendre des mesures, sauf à laisser délocaliser les productions – à la différence d’autres secteurs, il suffit ici d’une simple décision pour aller tourner en Belgique ou en Hongrie.

M. Frédéric Lefebvre. C’est un très bon amendement !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Cet amendement avait été retiré en commission. Je le regrette, car son examen nous aurait permis d’avoir une discussion sur le coût de la mesure. Or nous nous imposons une discipline qui consiste à ne pas nous prononcer favorablement lorsque nous ne disposons pas d’une évaluation en termes de coût.

M. Frédéric Lefebvre. C’est un peu compliqué de dire cela après l’amendement d’hier sur la CSG !

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Nous en avons discuté, monsieur Lefebvre. Peut-être n’étiez-vous pas présent à ce moment-là…

M. Frédéric Lefebvre. Si, j’étais présent tout le temps !

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Toujours est-il qu’en ce qui concerne cet amendement, la question reste posée. M. Le Roux a évoqué la série Versailles et le risque de délocalisation en Belgique du tournage de la saison 2 – alors même que Versailles, nul ne le conteste, appartient à notre patrimoine.

M. Bruno Le Roux. C’est à dessein que j’ai choisi cet exemple !

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Cet amendement ayant été retiré, la commission ne l’avait pas examiné. Il a été rapidement examiné lors de la réunion qui s’est tenue au titre de l’article 88 – vous savez comment cela se passe – et a été repoussé en raison de l’absence d’éléments financiers.

M. Frédéric Lefebvre. Il n’y a pas eu d’étude d’impact alors que l’amendement portait sur quelques millions. Mais hier, c’était sur quelques milliards !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Quelqu’un parlait tout à l’heure de course à l’échalote. J’ai rencontré comme vous – ils ont dû faire le tour de la France – les producteurs de la série Versailles. On m’a expliqué que celle-ci pouvait être tournée n’importe où – je croyais pourtant qu’il n’y avait qu’un château de Versailles ! J’avais pensé à celui de Lunéville, dont l’architecture est semblable et qui n’est pas loin de chez nous. (Sourires.) Peut-être, m’étais-je dit, l’est de la France pourrait-il aussi participer à l’aventure. Las, on m’a expliqué qu’avec les moyens audiovisuels d’aujourd’hui, on pouvait tourner Versailles au fin fond de la Tchéquie, que tout le monde n’y verrait que du feu. Voilà pour détendre un peu l’atmosphère…

Quant à l’étude d’impact, il est évident que quel que soit le secteur concerné, le crédit d’impôt fait gagner de l’argent. Faites des crédits d’impôt sur le logement, nous dit-on : plus vous donnerez d’argent et plus vous en gagnerez ! Faites des crédits d’impôt sur le cinéma : vous serez gagnants ! Autant mettre tous les taux à zéro ! Mais là, nous sommes sûrs de ne plus gagner d’argent !

Bref, il s’agit de trouver le bon équilibre. J’estime qu’à un moment donné, il faut une concertation et quelques règles, ne serait-ce qu’à l’échelle de l’Union européenne. Il est tout de même insupportable d’entendre dire que l’on peut tourner Versailles en Belgique pour avoir 3 ou 4 millions d’euros d’aides de plus. Cela devient fou… L’avis du Gouvernement sur cet amendement sera donc un avis de sagesse.

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Bloche.

M. Patrick Bloche. Je remercie M. le secrétaire d’État de son intervention : il a bien cerné l’enjeu. Aujourd’hui, on peut tourner la saison 2 de la série Versailles en n’importe quel lieu de la planète, et c’est bien là le problème. Compte tenu de l’extrême vivacité de la concurrence internationale et du dynamisme de la production audiovisuelle dans notre pays, comment relocaliser ces tournages ?

Selon une étude du Centre national du cinéma et de l’image animée – CNC – 2 000 heures de fiction ont été tournées l’an dernier en Allemagne et 1 350 heures au Royaume-Uni, contre seulement 780 heures en France. Le relèvement du taux du crédit d’impôt à 25 %, soit le même taux que pour l’animation audiovisuelle, et la réévaluation de son plafond visent donc à localiser ces tournages en France. L’avantage pour nos territoires est évident en termes de créations d’emplois comme de retombées économiques. Rappelons aussi que pour 1 euro de crédit d’impôt versé, 13 euros de dépenses sont réalisées dans la filière audiovisuelle et 3,6 euros de recettes fiscales et sociales sont perçues par l’État.

Je conclurai par un dernier argument, en rappelant quel plaisir politique et culturel ce fut pour moi de cosigner cet amendement avec le président Le Roux et Jean-Marie Beffara. L’enjeu de l’exportation est déterminant. Compte tenu de leur qualité, les séries françaises doivent s’exporter. L’enjeu est ici triple : un enjeu de volume, car les grandes chaînes internationales achètent des programmes par blocs de dizaines d’heures ; un enjeu de qualité, car la compétition internationale est vive ; et enfin un enjeu de réactivité, pour raccourcir les temps d’écriture et de production entre deux saisons.

Bref, nous avons là un amendement extrêmement vertueux, qui ne produira que des effets bénéfiques.

Mme la présidente. J’ai rappelé tout à l’heure quelle était la règle : présentation de l’amendement, avis de la commission et du Gouvernement, puis – éventuellement – intervention d’un orateur pour l’amendement et d’un orateur contre. M. Bloche est manifestement favorable à cet amendement dont il est cosignataire. Compte tenu de ses interventions précédentes, je présume que M. de Courson y est défavorable. Je lui donne donc la parole, mais ce sera le dernier.

M. Charles de Courson. Je m’excuse de l’extrême vulgarité de la question, mais combien coûtera cet amendement ?

Mme Marie-Christine Dalloz. On ne sait pas, mais ça va rapporter !

M. Charles de Courson. Si on pouvait le savoir…

Mme la présidente. Je m’excuse auprès de M. Beffara, qui est signataire de l’amendement, mais j’ai rappelé la règle : je ne puis accepter d’autres interventions.

Levez-vous le gage, monsieur le secrétaire d’État ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Open bar ! (Sourires)

(L’amendement n523, modifié par la suppression du gage, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure générale, pour soutenir l’amendement n802.

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Il est rédactionnel, madame la présidente.

(L’amendement n802, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 44, amendé, est adopté.)

Après l’article 44

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Ollier, pour soutenir l’amendement n763.

M. Patrick Ollier. Nous reprenons là un débat que nous avons eu cette nuit, qui concerne la défiscalisation outre-mer.

J’ai eu l’occasion de procéder à un contrôle sur pièces et sur place au bureau des agréments et rescrits à Bercy. J’avais en effet été interpellé par des problèmes de fonctionnement de la procédure et de délai d’instruction des dossiers de défiscalisation. J’ai pu constater que seulement huit personnes – qui ne sont pas toutes à temps plein – avaient à faire face à plus de 200 dossiers, ce qui est considérable. Ces agents sont sérieux et compétents. Ils font très bien leur travail, mais on ne peut leur demander d’aller plus vite qu’ils ne le peuvent. Il faut donc améliorer la procédure, la simplifier et faire en sorte qu’elle puisse être comprise sur place. Les investisseurs ne comprennent pas que les délais soient aussi longs, surtout lorsque les questionnaires sont renvoyés par le bureau des agréments et rescrits uniquement pour bénéficier d’un peu plus de temps pour étudier les dossiers.

Cet amendement prévoit donc de clarifier le délai de trois mois imposé au bureau des agréments et rescrits en en faisant un délai de première demande d’information, et non un délai d’instruction. Il est en effet impossible d’instruire ces dossiers, souvent très lourds, en trois mois. En Nouvelle-Calédonie, où je me suis rendu récemment, le délai moyen est de neuf à onze mois en matière de logement ; il est supérieur à vingt mois en matière d’hôtellerie. Cela crée évidemment des difficultés.

En outre, le ministère des outre-mer doit donner un avis. Or en moyenne, celui-ci intervient au bout d’un an. Dès lors, comment le bureau des agréments et rescrits pourrait-il instruire les dossiers en trois mois ? Aussi l’amendement vise-t-il également à imposer au ministère des outre-mer d’émettre un avis sur les dossiers de défiscalisation dans un délai de six mois, faute de quoi l’absence de réponse vaudrait avis favorable.

C’est pour aider vos services que je propose ces modifications, monsieur le secrétaire d’État ! Elles permettront aux investisseurs de mieux comprendre ce qui se passe et au bureau des agréments et rescrits de travailler dans de meilleures conditions.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. La commission a accepté cet amendement hier, en considération notamment des discussions que nous avons eues hier soir.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Je suis tout à fait opposé à cet amendement. Vous avez eu la gentillesse de tenir des propos équilibrés sur le fonctionnement du bureau des agréments, monsieur Ollier : vous avez relevé que les agents n’étaient que huit et que leur tâche prenait du temps, mais vous avez reconnu qu’ils étaient très sérieux. Vous avez aussi constaté que si les délais étaient longs, c’était parce que l’avis du ministère des outre-mer intervenait souvent tardivement.

Je ne souhaite pas opposer les ministères les uns aux autres, mais je me suis tout de même fait tenir au courant. Pour parler clair, j’ai demandé au ministère des outre-mer, qui ne cesse de nous dire que les agréments prennent trop de temps, de me donner la liste pour que nous puissions comprendre, pour chaque dossier, pourquoi l’instruction avait pris autant de temps. Et j’ai fait le constat que sur un nombre non négligeable de dossiers, c’était parce que le ministère des outre-mer n’avait pas donné son avis.

Néanmoins, il s’agit de dossiers très délicats. Trop de risques sont pris ; on en fait d’ailleurs prendre, parfois, à des particuliers qui investissent. Nous avons fait évoluer, nous avons sécurisé, moralisé les dispositifs de défiscalisation, qui ont tout de même défrayé la chronique il y a quelques années – c’est encore le cas de certains d’entre eux, même si cela ne fait pas toujours la une de l’actualité en métropole. Je peux vous citer quelques dossiers sulfureux, représentant chacun plusieurs dizaines, voire plusieurs centaines de millions d’euros, que nos fonctionnaires ont été amenés, sur le fondement de l’article 40 du code de procédure pénale, à transmettre au parquet financier.

L’examen attentif de ces dossiers est dans l’intérêt de tout le monde, y compris de ces dispositifs eux-mêmes qui, autrement, seront remis en cause. De fait, on ne compte plus les rapports qui montrent que ces mécanismes sont assez souvent l’objet de dysfonctionnements, pour employer un euphémisme. Je souhaite donc que l’on examine ces dossiers avec la plus grande attention. Comme nous le disions la nuit dernière, nous privilégions des systèmes de crédits d’impôts, qui, à tout le moins, éliminent un certain nombre d’intermédiaires, sources, parfois, de coûts, pour ne pas dire plus. Nous ne voulons pas que l’on vienne récupérer auprès de gens de bonne foi l’argent qu’ils ont investi à des fins de défiscalisation dans des dispositifs, parce que la société responsable de la collecte ou de la construction n’a pas fait son travail. Il s’agit souvent de particuliers exerçant en métropole, notamment dans le secteur des professions libérales, ou d’entreprises qui investissent de bonne foi dans des systèmes de défiscalisation. Ils utilisent une possibilité qui leur est offerte ; il n’y a là rien d’anormal. Mais il arrive que, si l’opération se passe mal, on aille ensuite récupérer auprès des intéressés des crédits ou des réductions d’impôts qui ont parfois été accordés deux, trois ou quatre ans auparavant, parce que l’agrément n’a pas été suffisamment sécurisé.

Je pense, pour ma part, qu’il faut continuer à travailler sur ce sujet. La solution réside dans un travail commun, que nous avons entamé, notamment, mais pas exclusivement – car, vous l’avez évoqué, se posent souvent des problèmes liés au logement – avec le ministère des outre-mer, pour que l’on puisse déterminer quels types de documents on demande, à quel moment. À titre d’exemple, on peut difficilement imaginer d’agréer une opération de défiscalisation si aucun permis de construire n’a été délivré…

M. Patrick Ollier. Je suis d’accord !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. …ou si l’on n’a pas reçu l’assurance que les travaux seront faits après une mise en concurrence adéquate. Ce sont des éléments importants qui posent souvent problème. On nous dit parfois que, pour viabiliser un terrain, il faut engager une somme très importante, de l’ordre de plusieurs millions d’euros ; or, on peut difficilement valider un tel dossier si, au bout de six mois, on n’a toujours pas reçu le devis, le plan demandé pour justifier cet investissement. Ce sont là des cas concrets, monsieur Ollier. Vous êtes allé sur place, en outre-mer ; c’est aussi mon cas, je me suis notamment rendu en Guyane. On a regardé ces dossiers. À chaque fois, on nous dit qu’ils doivent être adoptés en urgence pour des raisons liées à l’emploi, au logement ou au climat : à défaut de recevoir l’agrément dans les trois jours, nous dit-on, on va perdre six mois du fait de l’arrivée de la saison des pluies. Mais lorsque l’on demande la preuve qu’une mise en concurrence des entreprises a bien été effectuée, un grand silence se fait. Il faut examiner cette question de façon rigoureuse. Je suis défavorable à cet amendement, même si nous sommes prêts à travailler pour bien identifier les documents nécessaires et les délais à respecter.

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Ollier.

M. Patrick Ollier. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de ce que vous venez de dire : vous venez de plaider exactement pour mon amendement et de démontrer que j’ai raison. Que dit, en effet, cet amendement ? Il part du constat que le délai de trois mois pour l’instruction du dossier est trop court.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Vous parlez du délai global !

M. Patrick Ollier. Non, c’est inexact : lisez l’amendement, vous verrez. L’amendement vise à ce que l’administration fiscale dispose d’un délai de trois mois pour notifier au contribuable sa première demande relative aux compléments d’information nécessaires à l’instruction. À l’issue de ce délai de trois mois, l’administration pourrait adresser autant de demandes complémentaires qu’elle le souhaite. Cela va précisément dans votre sens, monsieur le secrétaire d’État ; je souscris d’ailleurs pleinement à ce que vous avez dit. De fait, à l’heure actuelle, le bureau des agréments ne peut instruire un dossier en trois mois ; il adresse donc fréquemment, huit jours avant le terme de ce délai – qui est un délai d’instruction – une demande de renseignements complémentaires, ce qui alimente les suspicions des investisseurs à son endroit ; ces derniers, en effet, ne comprennent pas cette procédure. L’adoption de cet amendement permettrait de répondre exactement à vos demandes ; je n’ai pas un mot à ajouter à ce que vous avez dit.

Par ailleurs, l’amendement vise à ce que, si le ministre des outre-mer n’a pas répondu au terme d’un délai de six mois, son avis soit réputé favorable. Cela vous faciliterait les choses et permettrait de déléguer la décision. Je ne comprends pas pourquoi vous êtes défavorable à cet amendement alors que vous venez de plaider en sa faveur.

(L’amendement n763 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement n1161.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Cet amendement a pour objet d’harmoniser les procédures de délivrance des agréments provisoires dans le cadre des différents crédits d’impôt gérés par le CNC.

(L’amendement n1161, accepté par la commission, est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 855 et 983.

La parole est à Mme la rapporteure générale, pour soutenir l’amendement n855.

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Bloche, pour soutenir l’amendement identique n983.

M. Patrick Bloche. Je suis cosignataire de cet amendement avec Pierre-Alain Muet et nombre de collègues de la commission des finances et de la commission des affaires culturelles et de l’éducation. Je suis d’ailleurs très heureux que la commission des finances ait adopté un amendement identique, et j’en remercie tout particulièrement la rapporteure générale, dont je connais la sensibilité culturelle.

Cet amendement vise à créer un nouveau crédit d’impôt au bénéfice du spectacle vivant et a notamment pour objet de soutenir la production des spectacles vivants, musicaux et de variétés. C’est un secteur extrêmement fragile, caractérisé par la présence non seulement de quelques grosses entreprises, mais aussi de nombreuses TPE et petites et moyennes entreprises qui présentent l’intérêt de promouvoir les artistes émergents – ou « en développement », selon l’expression consacrée – et de contribuer au renouvellement de ce domaine. De surcroît, ces petites structures indépendantes sont implantées sur tous les territoires – je suis persuadé, chers collègues, qu’elles sont présentes dans vos circonscriptions. Ce sont des employeurs artistiques importants qui totalisent, annuellement, 19 millions d’heures de travail salarié. En l’occurrence, aucun problème de délocalisation ne se pose, ces entreprises travaillant sur notre territoire.

Il s’agit, par ce crédit d’impôt, d’accroître le nombre et la qualité des projets de tournées d’artistes en développement, ce qui sera source d’effets induits en termes d’emploi et contribuera à rééquilibrer le secteur au bénéfice des très petites, petites et moyennes entreprises. Au-delà de la stimulation de l’emploi et de l’accélération de la structuration de la profession, ce crédit d’impôt aura des effets latéraux attendus : l’allongement du cycle des tournées, la pérennisation de certains emplois artistiques, ainsi qu’une amélioration des plateaux artistiques en tournée.

Ces dépenses seront plafonnées à 500 000 euros par spectacle, dans la limite d’un maximum par entreprise et par an de 750 000 euros. Le crédit d’impôt sera égal à 15 % du montant total des dépenses, ce taux étant porté à 30 % pour les très petites, petites et moyennes entreprises.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. On discute là de choses connues : on commence par des crédits d’impôt pour les petits, puis on les élargit à de plus grands, avant de les étendre à tout le monde et, finalement, de supprimer les plafonds. Un certain nombre de demandes de crédits d’impôt ont été formulées dans le secteur artistique et culturel. On a eu, tout à l’heure, un long et intéressant débat sur les crédits d’impôt en faveur du cinéma : certains ont trouvé que cela coûterait trop cher tandis que d’autres estimaient que les gains à attendre excéderaient les dépenses.

Pour ma part, je ne suis pas favorable à cet amendement qui crée un nouveau crédit d’impôt en faveur des entreprises qui se trouvent majoritairement, mais pas exclusivement, en France, en fixant une condition liée au nombre d’entrées, exception étant faite pour les festivals ; de fait, l’amendement, long de trois pages, pose des conditions extrêmement complexes. De mois en mois, de loi de finances en loi de finances, on va faire sauter tous les plafonds, à chaque fois pour d’excellentes raisons : on a connu cela, je le répète, et on continue à le connaître à propos de tous les crédits d’impôt. Compte tenu des arguments qui ont été développés, et que j’ai soutenus, le choix a été fait de concentrer les efforts, cette année, sur le crédit d’impôt en faveur du cinéma. Il n’a pas été question, me semble-t-il, de créer un crédit d’impôt sur les spectacles vivants. Le secrétaire d’État au budget est donc défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Bloche.

M. Patrick Bloche. J’avoue ma surprise ! Christian Eckert exprime l’avis officiel du Gouvernement, que je respecte, cela va de soi. Mais je voulais que notre assemblée sache que l’initiative que nous avons prise n’est pas celle du président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation ou celle de nos collègues députés socialistes de cette commission. Je suis, je le répète, assez surpris, car j’attendais, je l’avoue très sincèrement, au minimum un avis de sagesse, voire un avis favorable du Gouvernement. C’est du moins ce que m’avaient laissé entendre d’autres voix gouvernementales que celle du secrétariat d’État au budget ; je ne cite pas, volontairement, la rue de Valois, qui y est évidemment favorable. C’est donc fort de ces encouragements que j’ai déposé cet amendement ; et je me suis senti d’autant plus fondé à le faire que la commission des finances en a ensuite adopté un identique. Ma confiance s’en était trouvée confortée.

Monsieur le secrétaire d’État, dans le cadre de l’échange que nous avions eu, vous vous étiez déclaré opposé à la mise en place du crédit d’impôt en faveur de la musique, que j’avais proposé en première partie du projet de loi de finances. Vous aviez affirmé – je vous cite – que cela visait des artistes « sur le retour ». En l’occurrence, l’amendement dont nous discutons vise les artistes émergents. Je voudrais vous persuader que la structuration du secteur de la production de spectacles vivants musicaux et de variétés n’amènera pas à faire exploser plafonds et taux, tout simplement parce que ce secteur est constitué de très petites, petites et moyennes entreprises. Ce crédit d’impôt est extraordinairement important pour lui.

Mme la présidente. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Monsieur Bloche, vous ne serez pas étonné que nous votions contre votre amendement. Êtes-vous conscient de la situation du pays ?

Tous les ans, vous arrivez avec trois, quatre, cinq amendements ; il vous en faut toujours plus. Vous n’êtes d’ailleurs pas le seul. Aujourd’hui, vous jouez même la division gouvernementale. Pour ma part, je suis dans l’opposition, je ne suis pas là pour défendre le Gouvernement, mais j’aurais aimé que le secrétaire d’État soit encore plus dur, et qu’il l’ait été également tout à l’heure. On ne peut pas continuer comme cela ! J’ai présenté, ce matin, un amendement de suppression de l’article 44 – Gilles Carrez en avait déposé un identique – pour soulever la question de la pertinence des dépenses fiscales, mais il a été rejeté. Quand vous ouvrez des brèches à la demande de collègues comme M. Bloche, vous êtes sûr du résultat : toujours plus, il n’y en a jamais assez ! Mais, monsieur Bloche, connaissez-vous des ouvriers de l’industrie ? Savez-vous ce que c’est que la métallurgie, l’automobile ? Il n’y a pas que le domaine culturel, il faut un équilibre en toutes choses. Vous ne vous occupez toujours que d’un seul secteur. Où sont les autres Français ? N’y a-t-il que la culture pour vous ? Vous êtes député de la nation et, en faisant cela, vous dressez les Français les uns contre les autres. Voilà pourquoi il faut tenir bon !

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Je demande une suspension de séance, madame la présidente.

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à onze heures quinze, est reprise à onze heures vingt-cinq.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Je mets aux voix les amendements identiques nos 855 et 983.

(Les amendements identiques nos 855 et 983 sont adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 935 et 385, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Olivier Faure, pour soutenir l’amendement n935.

M. Olivier Faure. Alors que beaucoup d’amendements visent à engager de nouvelles dépenses, celui-ci a pour objet de générer une nouvelle recette, plus exactement de différer l’extinction de la contribution exceptionnelle à l’impôt sur les sociétés versée par celles dont le chiffre d’affaires est supérieur à 250 millions d’euros par an.

Le Gouvernement a prévu que cette contribution soit applicable jusqu’au 30 décembre 2016. Nous proposons de prolonger ce dispositif d’un an, jusqu’au 30 décembre 2017, tout en tenant compte de l’évolution voulue par le Gouvernement, c’est-à-dire en abaissant dès cette année le taux de 10,7 % à 5 %.

Cet amendement aurait pour vertu de rapporter 1,2 milliard d’euros à l’État et de financer un certain nombre de mesures dont nous débattons depuis plusieurs jours. Il aurait cependant été préférable qu’il soit placé en première partie du projet de loi de finances, car son examen en deuxième partie interdit le paiement par anticipation, qui est normalement la règle pour cette contribution. Il s’agit donc davantage d’un amendement d’appel, visant à approfondir la discussion avec vous, monsieur le secrétaire d’État, afin que la proposition soit déposée de nouveau dans de meilleures conditions en première partie du projet de loi de finances rectificative.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Germain, pour soutenir l’amendement n385.

M. Jean-Marc Germain. Notre débat budgétaire permettra, je l’espère, au-delà des mesures fiscales adoptées au bénéfice de telle ou telle catégorie, de contribuer à muscler la reprise économique, dont les chiffres au troisième trimestre – 0,3 % – dépassent les prévisions.

À cette fin, des décisions importantes ont été prises par le Gouvernement dans son projet de loi initial : une baisse d’impôt pour les classes moyennes, la création d’un fonds d’investissement pour les collectivités locales. Nous avons en outre adopté hier, pour 2017, une baisse d’impôt dont les catégories populaires devraient bénéficier.

Pour que ces mesures de principe puissent s’appliquer pleinement, elles doivent être financées. C’est la raison pour laquelle, dans le même esprit que mon collègue Olivier Faure, je propose par cet amendement, qui avait été déposé en première partie et cosigné par une centaine de collègues, mais écarté pour des raisons de forme, de prolonger de deux ans la surtaxe sur l’impôt sur les sociétés. Cette disposition rapporterait 2,5 milliards d’euros et permettrait de financer intégralement les mesures que j’ai mentionnées. Les entreprises qui réinvestiraient l’intégralité de leurs bénéfices seraient exemptées de la taxe durant cette période ; l’impôt sur les sociétés serait ainsi modulé en fonction des bénéfices réinvestis, un objectif que nombre d’entre nous, sur ces bancs mais également sur d’autres, poursuivent depuis longtemps.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements en discussion commune ?

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. L’avis est défavorable sur ces deux amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Monsieur Germain, je vous remercie de vos propos au sujet des mesures prises par le Gouvernement. Vous avez cependant affirmé que le Parlement avait adopté hier une mesure de baisse d’impôt prenant effet au 1er janvier 2017. J’ai cru comprendre plutôt qu’il avait été décidé de mettre en place au 1er janvier 2017 un acompte sur la prime d’activité versée tous les mois. Il y a donc là une ambiguïté qu’il nous appartiendra de lever dans les semaines à venir.

M. Olivier Faure. C’est vous qui avez parlé d’un surcoût ! S’il y a surcoût, c’est qu’il y a une baisse !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Plusieurs orateurs, en particulier Mme la rapporteure générale, ont évoqué une substitution à la réduction d’impôt. C’est bien ce qu’a dit M. Germain, j’étais présent hier. Je n’ai d’ailleurs pas fait allusion au coût de l’amendement, pas plus que le ministre des finances au cours de son intervention, me semble-t-il, puisque j’ai suivi très attentivement les débats.

M. Olivier Faure. Moi aussi !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Il me paraissait utile d’apporter cette précision car les propos tenus dans cet hémicycle ont leur importance à tout moment pour ceux qui nous observent et qui nous écoutent.

Par ailleurs, le Gouvernement est défavorable à ces amendements car il ne souhaite pas revenir sur les engagements qui ont été pris dans le cadre du pacte de responsabilité et de solidarité. Nous avons déjà eu ce débat à de nombreuses reprises, quel que soit l’emplacement des amendements dans le texte.

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Lefebvre.

M. Dominique Lefebvre. Le propre des débats dans l’hémicycle en loi de finances est que l’on revient régulièrement sur les mêmes sujets. Quitte à faire preuve de constance, je répondrai à ceux qui ont déposé ces deux amendements, qui demandent un changement de politique économique, que le groupe socialiste est toujours décidé à mettre en œuvre intégralement le pacte de responsabilité et de solidarité qui a été présenté le 14 janvier 2014 par le Président de la République. C’est d’ailleurs ce qu’il a fait au cours de l’examen de la première partie du projet de loi de finances.

Voter ces deux amendements serait d’abord une erreur de politique économique. Cela remettrait en cause les engagements pris vis-à-vis des entreprises à hauteur de 41 milliards d’euros. Or cette politique porte aujourd’hui ses fruits ; Jean-Marc Germain vient de rappeler notre taux de croissance : je pense qu’il ne tombe pas du ciel ! Quand nous sommes arrivés au pouvoir en 2012, les chiffres nets montraient que l’économie détruisait des emplois. À présent, l’emploi repart – nous créons des emplois – et la croissance redémarre : c’est aussi lié au message de confiance que nous avons envoyé. Nous avons veillé, jusqu’ici, à tenir nos engagements ; vis-à-vis des chefs d’entreprise, c’est très important.

Ce serait ensuite une erreur politique, y compris compte tenu de ce qu’attendent les électeurs de gauche. Je n’ai pas cité hier, dans le débat, les résultats des enquêtes d’opinion réalisées après l’annonce, par Jean-Marc Ayrault, de la remise à plat de la fiscalité. Ces enquêtes montraient que le prélèvement à la source était compris et demandé par les sondés ; les autres mesures fiscales ne bénéficiaient pas de la même approbation. Ce que demandent nos concitoyens, c’est une véritable baisse des impôts, pas une baisse factice, et c’est la maîtrise des dépenses publiques. Enfin, les enquêtes les plus récentes montrent qu’ils demandent, pour créer des emplois, que les impôts et charges sur les entreprises diminuent, afin de permettre à celles-ci d’être plus compétitives.

Je le répète : voter ces deux amendements, ce serait une erreur de politique économique, et une erreur politique tout court.

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Faure.

M. Olivier Faure. Je regrette vraiment le ton que prend ce débat. J’ai dit, à l’instant, que cet amendement est un amendement d’appel que je retirerai, et qu’il sert simplement à poursuivre une discussion avec le Gouvernement. M. le secrétaire d’État m’a répondu en employant des éléments de langage, pas en tenant un discours de vérité. Dans les couloirs de notre assemblée, on nous explique à tout bout de champ que l’amendement adopté hier à l’initiative de MM. Ayrault et Muet engendrera un surcoût de plusieurs milliards d’euros. Il faudrait savoir : soit cet amendement entraînera un surcoût, et dans ce cas il s’agit bien d’une baisse d’impôts, soit il n’entraînera pas de surcoût, et dans ce cas il ne faut pas en faire un drame encore et encore !

Deuxièmement, je veux répondre à Dominique Lefebvre – en l’occurrence, j’aurais préféré que ce fût à Frédéric Lefebvre ! Je ne comprends pas pourquoi vous refusez systématiquement de reprendre le débat avec cette majorité à laquelle il appartient. Ce débat est légitime, et normal : ne nous lions pas les pattes nous-mêmes, ne refusons pas par principe toute discussion !

Nous ne proposons certainement pas de revenir sur le pacte de responsabilité et de solidarité. J’ai cosigné l’amendement n935 avec Guillaume Bachelay : ni lui ni moi n’avons jamais fait partie de ceux que vous considérez comme des frondeurs. Nous sommes des soutiens constants de ce Gouvernement : il est donc excessif de vouloir nous faire porter un chapeau trop grand pour nous ! En réalité, nous demandons simplement de réfléchir à la possibilité de maintenir cette contribution exceptionnelle un an de plus, en divisant son taux par plus de deux. Ce n’est pas une demande extravagante !

Vous nous dites qu’il faut tenir nos engagements vis-à-vis des entreprises : j’en suis tout à fait conscient. Je souhaite, moi aussi, que nous les tenions. Mais je voudrais que, dans le même temps, nous nous préoccupions des engagements que nous avons pris vis-à-vis des salariés. Ce n’est quand même pas rien : nous sommes la gauche ! Nous ne sommes pas n’importe qui, et nous ne sommes pas arrivés n’importe comment ici, dans cette assemblée !

M. Patrice Martin-Lalande. Qu’est-ce que cela veut dire ? Quand on n’est pas de gauche, on est n’importe qui, alors ?

M. Olivier Faure. Nous devons réfléchir au-delà de ces mouvements d’humeur. Je souhaite donc que nous conservions, dans ce débat, le ton de camarades qui partagent les mêmes combats mais peuvent avoir, parfois, des divergences. Ne tombons pas dans les mouvements d’humeur permanents !

Mme Marie-Christine Dalloz. Les débats à l’intérieur de la majorité sont passionnés, à défaut d’être passionnants !

Mme la présidente. Monsieur Faure, dois-je considérer que votre amendement est retiré ?

M. Olivier Faure. Tout à fait, madame la présidente.

(L’amendement n935 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Germain.

M. Charles de Courson. Qui persiste et signe !

M. Jean-Marc Germain. Je voudrais, moi aussi, que nous puissions débattre calmement dans cet hémicycle. Cet amendement traduit une vraie proposition économique, pas une divergence politique, car je suis d’accord avec M. le secrétaire d’État et l’ensemble de mes collègues du groupe socialiste sur l’essentiel. Je propose donc un vrai choix économique.

Tout le monde l’a dit, sur tous les bancs : l’amendement que nous avons adopté hier aura un coût compris entre 1 et 2 milliards d’euros, puisque la moitié des bénéficiaires potentiels de la prime d’activité, qui ne la demandaient pas, gagneront une somme de l’ordre de 100 euros par mois sur leur feuille de paie.

Nous avons un an pour travailler aux modalités d’application de l’amendement adopté hier. Vous avez raison de dire, monsieur Lefebvre, que dans ce cadre, on peut choisir de neutraliser le dispositif en baissant les réductions de CSG prévues via la prime pour l’activité. Pour ma part, je souhaite éviter cette hypothèse : c’est pourquoi je propose, par cet amendement, une nouvelle manière de financer le dispositif.

Certes, nous devons respecter notre parole vis-à-vis des entreprises : c’est très important. Ce souci est tout à l’honneur du Président de la République et du Premier ministre. Mais je rappelle que le pacte de responsabilité et de solidarité était composé de deux éléments : des aides aux entreprises, et des contreparties qui devaient être négociées dans les branches. Sur ce dernier point, le verre n’est qu’à moitié plein, puisque cela a été fait par certains et pas par d’autres.

Ce que nous proposons, M. Faure et moi-même, c’est d’attendre avant d’examiner si ces engagements sont complètement respectés, et donc de différer de deux ans la sortie de vigueur de la contribution exceptionnelle à l’impôt sur les sociétés des grandes entreprises. Cette contribution ne serait maintenue qu’en partie : il s’agit de 2,5 milliards d’euros de recettes, à rapporter aux 41 milliards d’euros de baisses d’impôts consenties aux entreprises. De plus, elle serait efficace économiquement, puisque son produit serait utilisé pour aider les collectivités locales à investir et pour soutenir le pouvoir d’achat des catégories populaires – deux objectifs que nous soutenons tous.

Cette demande est essentielle pour notre économie : il faut que les efforts que nous avons réalisés afin d’améliorer la compétitivité des entreprises aboutissent à des créations d’emplois et à des investissements. C’est un vrai débat, un beau débat ; il ne porte pas sur nos valeurs, non plus que sur nos grands choix stratégiques, mais sur la manière d’être plus efficaces du point de vue économique et social au cours des mois à venir.

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Alauzet.

M. Éric Alauzet. Nous arrivons quasiment à la fin de ce projet de loi de finances : d’une certaine façon, pour 2016, la messe est dite. Bien sûr, une décision importante a été prise hier au sujet de la CSG ; elle aura un impact financier, mais uniquement en 2017. Avec ces deux amendements qui portent sur la surtaxe à l’impôt sur les sociétés, nos collègues Olivier Faure et Jean-Marc Germain tentent d’anticiper sur les difficultés de financement de cette mesure.

Pour ma part, je voudrais, dès maintenant, faire deux remarques pour anticiper sur les difficultés que nous rencontrerons en 2017. Si nous voulons respecter le pacte de responsabilité et de solidarité, si nous voulons respecter le message envoyé aux entreprises, nous n’échapperons pas à quelques ajustements. Il faudra en effet trouver 1 ou 2 milliards d’euros pour financer les réductions de CSG. Il faudra peut-être aussi, qu’on le veuille ou non, trouver 1 ou 2 milliards pour financer des dotations aux collectivités locales. Je pense donc qu’en 2017, nous serons confrontés à un besoin de financement de 4 à 5 milliards d’euros.

Dans le pacte de responsabilité, figure notamment la dernière phase de la suppression de la C3S, la contribution sociale de solidarité des sociétés. D’autres dispositions antérieures sont concernées : je pense notamment à la « niche Copé ». La dernière phase de la suppression de la C3S ne concerne qu’une petite partie des entreprises ; pour l’essentiel des entreprises, le pacte de responsabilité aura été respecté.

Une vraie question se pose, qui représente de 4 à 5 milliards d’euros, et qui touche à l’aide aux ménages modestes et à l’aide aux collectivités locales. Tout cela concerne aussi les entreprises, car les dépenses d’investissement des collectivités locales les concernent. Certes, le taux de croissance pour ce trimestre est bon : 0,3 %. Mais ce chiffre cache des différences très inquiétantes : je pense notamment au recul de 0,8 % du secteur du bâtiment et des travaux publics. Toutes ces questions sont étroitement liées.

Ces deux amendements ont donc le mérite de poser dès à présent des questions auxquelles nous devrons répondre l’an prochain pour préparer 2017.

Mme la présidente. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Je trouve que ces deux amendements sont intéressants en ce qu’ils traduisent l’état d’esprit d’une partie des membres de la majorité. Mes chers collègues, pensez-vous que si ces amendements étaient adoptés – en tout cas, celui des deux qui n’a pas été retiré –, l’investissement privé dans les entreprises serait encouragé ? À cette question, M. Germain répond : oui. Mais, monsieur Germain, vous savez bien que nous avons le taux facial de l’impôt sur les sociétés – contribution exceptionnelle incluse – le plus élevé d’Europe. Êtes-vous bien conscient que nous vivons dans un monde économique ouvert ?

Les marges des entreprises françaises, qui sont les plus basses d’Europe, commencent à se relever. Il faudrait encore des années pour les rétablir tout à fait. Or vous voulez pomper encore les revenus des entreprises privées pour soutenir le fonds d’aide à l’investissement local, prévu à l’article 59 de ce projet de loi de finances, lequel alimentera les collectivités territoriales. Mais comment voulez-vous que celles-ci investissent, puisque leur taux d’autofinancement chute constamment ?

C’est la même chose pour le renforcement du CITE, le crédit d’impôt pour la transition énergétique : cela ne permettra pas de soutenir les entreprises.

M. Olivier Faure. Bien sûr que si !

M. Charles de Courson. La priorité des priorités, dites-vous, c’est de soutenir les entreprises ; le Gouvernement a donc, enfin, supprimé cette majoration de 10,7 % : c’est très bien. Il l’a fait trop tard, bien entendu, mais il l’a fait : ne revenons pas sur cette décision !

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Je n’ai pas eu de mouvement d’humeur, j’ai simplement fait une réflexion sur les propos tenus par M. Germain. Je ne me suis pas exprimé hier, au cours du débat. Plus encore, je n’ai fait aucune intervention publique : vous l’aurez probablement remarqué. J’ai décliné plusieurs invitations à m’exprimer sur ce sujet, y compris aujourd’hui. Je n’ai jamais dit que l’amendement adopté hier coûterait de l’argent ; j’ai simplement répété ce que j’ai compris du débat qui a eu lieu hier.

Monsieur Faure, revenir sur la fin de la contribution exceptionnelle à l’impôt sur les sociétés, afin de prélever 2,5 milliards d’euros, est-ce remettre en cause le pacte de responsabilité ? Je considère que oui ! Vous me demandez de m’engager à reprendre ce débat dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances rectificative : non, je n’ai pas mandat pour cela. Nous en avons déjà discuté de façon approfondie et répétée : le Gouvernement n’a cessé de dire qu’il ne souhaite pas revenir sur les éléments du pacte. Ce pacte est composé de différents éléments – M. Alauzet en a cité plusieurs. Vous pouvez en débattre, mais la position du Gouvernement est claire : nous voulons mettre fin à la contribution exceptionnelle à l’impôt sur les sociétés. C’est déjà prévu par les textes : si nous ne les modifions pas à cet égard, cette contribution s’éteindra d’elle-même.

La suppression de la deuxième tranche de la C3S, à hauteur d’1 milliard d’euros, a été votée, de même que la réduction des cotisations sociales ; le Gouvernement n’entend pas revenir sur ces éléments du pacte. Vous me demandez de m’engager à ouvrir à nouveau ce débat dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances rectificative : je ne peux pas le faire ! Vous me dites : « Mais non, cela ne remettrait pas en cause le pacte. » Excusez-moi de vous dire que si, cela le remettrait en cause !

Certes, vous pouvez avoir votre point de vue : c’est respectable et légitime. Pour ma part, je tiens à vous rappeler la position du Gouvernement. Si je vous disais : « Retirez votre amendement, nous en discuterons dans le cadre du PLFR », je vous mentirais.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Germain.

M. Jean-Marc Germain. Je tiens à répondre à M. de Courson, qui a dit beaucoup d’âneries en quelques mots. Ce n’est pas son habitude : il est plutôt connu pour son sérieux, comme M. Lefebvre – je ne préciserai pas le prénom pour cette fois. (Sourires.)

Vous dites que les marges des entreprises françaises sont les plus basses d’Europe : c’est faux. Vous oubliez de dire que ces marges ont été rétablies : pour l’ensemble de l’économie, elles ont été ramenées au niveau d’avant la crise de 2008 ; pour l’industrie, elles ont même été ramenées à leur niveau de 2001,…

M. Charles de Courson. Ce n’est pas vrai !

M. Jean-Marc Germain. …entre autres grâce au crédit d’impôt compétitivité emploi, grâce aussi, il est vrai, à la baisse du prix du pétrole, qui représente une sorte de CICE gratuit. Ne racontez donc pas ce genre d’histoire !

Deuxièmement, on sait très bien que le mécanisme proposé par l’amendement n385 que j’ai présenté est très efficace pour stimuler les investissements. Il s’agit en effet de baisser l’impôt uniquement pour les entreprises qui réinvestissent la totalité de leurs bénéfices pendant les deux années à venir, où nous aurons un besoin crucial d’investissement. Au fond, c’est un mécanisme assez semblable à celui du dégrèvement d’investissement que nous avons adopté, et dont tout le monde convient – même vous, monsieur de Courson : je vous ai entendu vous exprimer sur ce sujet – qu’il s’est montré efficace. Les constatations et prévisions faites par l’INSEE ce matin montrent en effet une amélioration des chiffres de l’investissement.

Soyons sérieux : nous discutons d’un réglage très important de la politique économique. C’est très important, car dans une phase de reprise, lorsqu’il y a une étincelle, il faut remettre de l’essence dans le moteur en appuyant sur le champignon. Voilà ce que je propose par cet amendement !

Dernier point – j’en finirai par là, madame la présidente – : le pacte de responsabilité – cela a été dit très clairement dans cet hémicycle – représente en effet 41 milliards d’euros, mais nécessitait un vote du Parlement chaque année. Les étapes devaient être approuvées par le Parlement les unes après les autres en fonction des résultats constatés, des négociations engagées, et des engagements pris par l’autre partie.

Vous avez donné la position du Gouvernement : en tant que parlementaires, nous n’avons pas à la discuter car elle est totalement respectable, mais nous pouvons décider si l’on déclenche ou pas cette étape et à quelle hauteur. Au fond, cet amendement prévoit qu’on la déclenche pour ce qui est considéré – je recevais un responsable du MEDEF récemment…

Mme la présidente. Il faut conclure, maintenant !

M. Jean-Marc Germain. Madame la présidente, je suis intervenu trois fois dans ce débat budgétaire.

M. Dominique Baert. C’est trop !

M. Jean-Marc Germain. C’est sans doute trop pour M. Baert…

M. Dominique Baert. Je confirme !

M. Jean-Marc Germain. …mais au total, par rapport aux autres,…

Mme la présidente. On ne calcule pas ainsi, monsieur Germain !

M. Jean-Marc Germain. Très bien : j’interviendrai donc sur les autres amendements !

Mme la présidente. Il y a des règles, que j’ai rappelées tout à l’heure : je peux les rappeler pour la énième fois !

M. Jean-Marc Germain. On peut quand même finir un raisonnement qui dure plus de deux minutes quand on intervient dix minutes dans un débat budgétaire !

Mme la présidente. Vous en êtes déjà à trois minutes, monsieur Germain : c’est pour cela que je vous le signale !

M. Jean-Marc Germain. J’en termine donc. Cette proposition, que nous pouvons et devons porter comme parlementaires, s’inscrit totalement dans la démarche qui a été fixée.

(L’amendement n385 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Krabal, pour soutenir l’amendement n916.

M. Jacques Krabal. Il ne s’agit pas, pour le groupe RRDP, de remettre en cause le pacte de responsabilité : nous l’avons soutenu et nous y sommes très favorables. Nous commençons à enregistrer des résultats et nous devons maintenir le cap. Cela étant, je souscris totalement aux propos d’Éric Alauzet : nous ne pouvons pas nous dispenser d’examiner la situation et de faire des ajustements dans un souci d’efficacité.

Il en va de même pour le CICE – je me suis déjà exprimé sur ce sujet – et pour le crédit d’impôt recherche, ou CIR, dont nous débattons au travers de cet amendement. Chacun sait en effet que les grands groupes cherchent à tirer profit de tout : ils ont la possibilité légale de faire entrer ou sortir des entreprises du périmètre de leur intégration pour bénéficier plus largement du crédit d’impôt recherche.

Nous pensons donc que le soutien n’exclut pas l’analyse ; la Cour des comptes nous y invite d’ailleurs dans son rapport. En effet, le régime actuel du crédit d’impôt recherche apparaît très largement optimisé par ces groupes. Leurs stratégies d’optimisation visent à maximiser l’avantage fiscal au titre du CIR alors que si son montant était calculé au niveau de chaque intégration et non au niveau des filiales, la Cour des comptes estime qu’il en résulterait une économie de 530 millions d’euros, sans pénaliser aucunement les groupes.

Ne nous privons pas d’examiner ces dispositifs pour les rendre encore plus efficaces, que ce soit au niveau du CICE ou au niveau du crédit d’impôt recherche.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. La commission a émis un avis défavorable ; à titre personnel, j’y suis favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Le Gouvernement émet un avis défavorable et, à titre personnel, j’y suis défavorable. (Sourires.) C’est un sujet que nous examinons depuis longtemps, de façon répétée – ce n’est pas une raison, me direz-vous. Le sujet est connu : le Gouvernement ne souhaite pas donner des signes de modification sur un crédit d’impôt dont il estime qu’il est le principal facteur d’attractivité pour nos entreprises. Le Gouvernement ne souhaite donc pas l’adoption de cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Lefebvre.

M. Dominique Lefebvre. Cet amendement est proposé chaque année dans notre hémicycle depuis 2012 ; il a encore été déposé et rejeté en première partie. Le groupe socialiste est défavorable à cet amendement, et j’y suis aussi, à titre personnel, défavorable.

Pour revenir au débat précédent, on dit chez ma belle-mère, dans la campagne, en Mayenne, que « C’est à la fin de la foire qu’on compte les bouses ». Nous verrons bien ce qui se passera en 2017 et quelle sera la responsabilité de ceux qui ont mené des politiques avec constance, clarté, dans le rassemblement, comme de ceux qui n’ont cessé de les remettre en cause, au risque de brouiller le message adressé aux Français. Je donne rendez-vous sur l’efficacité des résultats en 2017.

M. Dominique Baert. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Je croyais qu’il y avait un pacte entre les différents courants politiques qui composent cette assemblée : celui de ne plus toucher au crédit d’impôt recherche. C’est la première raison en opportunité, alors que nous discutons de ce problème depuis des années ; mais n’y touchons pas.

Il existe un deuxième inconvénient : sur qui porteront ces 530 millions d’économies ? Tout le monde le sait puisque des simulations ont été faites : l’aéronautique et l’industrie automobile. Pensez-vous que notre compétitivité soit telle que l’on puisse plomber de quelques centaines millions ces deux secteurs, dont le premier se tient encore bien, voire très bien ? Non ! La logique, c’est d’essayer d’encourager ceux qui se portent bien, parce que ce sont eux qui compensent les pertes d’emplois dans les secteurs qui ne se portent pas bien.

M. Patrice Martin-Lalande. Tout à fait !

Mme la présidente. La parole est à Mme Karine Berger.

Mme Karine Berger. J’utilise l’amendement de notre collègue pour poser à nouveau une question à messieurs les ministres, qui sont tous les deux au banc. L’année dernière, lors de l’examen d’un amendement de la présidente Mazetier, nous avions tous acté dans cet hémicycle que le crédit d’impôt recherche bénéficiait aussi aux entreprises qui font de la recherche en dehors des frontières françaises, dans le territoire de l’Union européenne, compte tenu de la liberté de circulation des capitaux.

Nous avions demandé, il y a un peu plus d’un an, quelle part des dépenses de crédit d’impôt recherche était consacrée à des dépenses de recherche qui ne sont pas faites en France. La réponse ne nous est pas, à ce stade, parvenue ; je crois que Mme la rapporteure générale vous avait d’ailleurs posé une question officielle sur ce sujet. Sur les 5 milliards du crédit d’impôt recherche, s’agit-il de 500 millions hors de France, de 1 milliard hors de France, de 1,5 milliard hors de France ? Pouvez-vous nous donner un ordre de grandeur à l’occasion de l’examen de cet amendement, messieurs les ministres ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure générale.

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. J’ai reçu les chiffres dont je vous avais parlé sous format papier. Je les ai scannés et intégrés dans des fichiers Excel, ce qui permet de faire des additions. J’ai reçu, sous le sceau du secret fiscal, les informations concernant les cinquante premiers bénéficiaires du crédit d’impôt recherche. J’ai fait moi-même un tri dans un fichier Excel pour voir quelle était la part des dépenses affectée à des groupes non français – cela ne veut pas dire que la recherche ne se fait pas en France : n’ayant pas reçu d’information sur cette distinction, je ne peux donc pas vous en parler.

Sur les quelque 5,3 milliards du crédit d’impôt recherche, les cinquante plus gros bénéficiaires perçoivent 2 milliards, dont 10 % à 12 % vont à des entreprises non françaises – j’entends par là que ces entreprises n’ont pas leur siège social en France : cela ne veut pas dire que la recherche n’est pas faite en France.

Parmi les questions que j’ai posées, je souhaitais avoir la décomposition des 5,3 milliards entre les entreprises françaises qui font de la recherche en France, les entreprises françaises qui font de la recherche à l’étranger, les entreprises étrangères qui font de la recherche en France et les entreprises étrangères qui font de la recherche à l’étranger. Je n’ai pas eu cette réponse mais, sur les cinquante premiers bénéficiaires, qui représentent 2 milliards sur 5,3 milliards, 10 % vont à des entreprises non françaises, c’est-à-dire qui ont leur siège social en dehors de la France et qui sont régies par des règles fiscales autres que celles appliquées en France, hormis pour les filiales présentes en France. Ce chiffre est déjà conséquent.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. À titre de complément d’information, nous nous sommes également livrés à un exercice de ce style, même si ce n’est pas le même. Nous avons regardé quelle part de la recherche était sous-traitée à l’étranger : le pourcentage de recherche effectué à l’étranger est de 1,32 % du crédit d’impôt recherche. On peut donc dire que c’est relativement marginal.

Pour le reste, ainsi que Mme la rapporteure générale vient de le dire, il est très difficile de savoir si la recherche est effectuée en France ou à l’étranger, que l’entreprise soit française ou étrangère, d’ailleurs. Ce travail est toujours possible mais nécessiterait un épluchage quasiment au cas par cas, en fonction de la structure capitalistique et de la localisation des filiales dans tel ou tel pays.

Nous savons que ce phénomène existe car l’éligibilité des dépenses de recherche ne dépend pas des lieux où la recherche est faite. Cela étant, la sous-traitance faite à l’étranger représente une part assez marginale de la dépense – dépense fiscale et dépense réelle – des entreprises recensées éligibles au crédit d’impôt recherche.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Krabal.

M. Jacques Krabal. J’ai le sentiment de ne pas avoir été bien compris : il ne s’agit pas de remettre en cause, comme cela, la politique arrêtée par le Gouvernement en matière de soutien aux entreprises, qu’il s’agisse du CICE ou du crédit d’impôt recherche. Mais, au-delà des totems existant ici ou là, le fait d’identifier des possibilités d’amélioration ne vient pas brouiller le message.

Je rappelle ce qu’a dit Éric Alauzet : cet argent provient des collectivités territoriales, que l’on est train de ponctionner ; cet argent a été gagné à la sueur du front des contribuables. Nous avons le droit et le devoir d’essayer de rendre ces dispositifs encore plus efficaces, mais pas de les remettre en cause : le groupe RRDP est un farouche défenseur du soutien aux entreprises. Cela étant, les efforts demandés justifient que l’on puisse regarder les choses sans bouleverser l’axe dans lequel nous sommes engagés.

Je retire donc cet amendement mais je suis convaincu, compte tenu de la pugnacité de Joël Giraud, que celui-ci et le groupe RRDP reviendront sur ce dossier. On ne peut pas dire : « On a pris une décision et on n’y revient plus : c’est comme cela ! », surtout quand des améliorations peuvent être apportées au CICE et à d’autres dispositifs sans les remettre en cause.

(L’amendement n916 est retiré.)

Mme la présidente. Avant d’en arriver à la série d’amendements que M. de Courson présentera, je vous informe qu’à la demande de la commission, nous lèverons la séance à douze heures quarante-cinq : la commission des finances doit en effet procéder à l’audition des ministres sur le projet de loi de finances rectificative pour 2015 à treize heures trente. Cela permettra aux membres de la commission des finances de ne pas être totalement en hypoglycémie pour cette audition…

M. Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics. Et aux ministres également !

Mme la présidente. …et au Parlement d’être totalement éclairé.

La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l’amendement n952.

M. Charles de Courson. Il s’agit d’une série d’amendements traditionnels, destinés à tester le Gouvernement sur l’avenir du CICE. Le premier de ces amendements, le n952, pose deux questions : l’exclusion des entreprises imposées au forfait – je n’ai jamais bien compris pourquoi elles avaient été exclues – et le problème particulier d’une exclusion partielle des sociétés fiscalement translucides.

Le CICE n’est en effet pas conçu pour aider les détenteurs de parts mais pour aider l’entreprise. Or, dans les sociétés fiscalement translucides, on fait une proratisation selon que les détenteurs de parts sont exploitants agricoles ou non, alors que c’est l’entreprise que l’on aide, et non tel ou tel détenteur de parts sociales. J’aimerais donc connaître la position du Gouvernement sur ces deux questions.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre des finances et des comptes publics, pour donner l’avis du Gouvernement.

M. Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics. Monsieur de Courson a lui-même indiqué qu’il s’agissait d’amendements habituels, qu’il présentait depuis que nous avons mis en place le CICE. La réponse du Gouvernement sera donc, comme d’habitude, défavorable à cet amendement.

(L’amendement n952 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 949 et 950, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

La parole est à M. Charles de Courson, pour les soutenir.

M. Charles de Courson. Il s’agit de la même question concernant les travailleurs indépendants. Le Gouvernement répondra qu’il en a tenu compte puisqu’il a pris une mesure particulière avec un décalage de deux ans. Mais ce serait tellement plus simple si tout le monde était traité de la même façon, monsieur le ministre ! C’est d’ailleurs la position du Président de la République, qui a reconnu que le plus simple serait de transformer le CICE en une réduction de cotisations sociales pour tout le monde. Avez-vous évolué sur la question des travailleurs indépendants ?

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ?

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Sapin, ministre. Également défavorable, madame la présidente. Je ne voudrais pas que nous privions les travailleurs indépendants du milliard qui leur a été accordé en aides diverses pour que tout le monde puisse bénéficier de ce pacte de stabilité.

La transformation en baisses de cotisations, qui est une question intéressante, viendra beaucoup plus tard. Le Gouvernement ne souhaite pas donner le moindre signe annonçant une modification des dispositifs, parce que cela susciterait des interrogations de la part des entreprises aujourd’hui bénéficiaires du CICE alors qu’elles inscrivent enfin leurs projets dans la durée, prenant ainsi des décisions d’investissement. Elles ont besoin de stabilité pour cela. Au moment où l’investissement des entreprises, au troisième trimestre, s’affiche à 0,7 %, il vaut mieux confirmer que déranger.

(Les amendements nos 949 et 950, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l’amendement n951.

M. Charles de Courson. Il soulève l’éternel problème, monsieur le ministre, des structures non assujetties à l’impôt sur les sociétés et qui, de ce fait, sont exclues du bénéfice du CICE : je pense en particulier aux coopératives, malgré l’amendement voté par le Parlement qui n’a pas été mis en œuvre au motif que la Commission européenne n’avait pas donné son accord. C’est du moins ce qu’a dit le Gouvernement ; je ne suis pas persuadé qu’on ne puisse négocier sur ce point.

Il y a aussi le domaine associatif parmi les champs exclus de l’impôt sur les sociétés et qui de ce fait ne bénéficient pas du CICE. Il s’agit de savoir si vous évoluez sur ce point.

Contrairement à ce que vous avez dit, monsieur le ministre, le Président de la République a été précis : il a dit que le CICE serait transformé en une réduction des cotisations sociales en 2017. Ce n’est donc pas moi qui le dis ! Je m’excuse d’être obligé de rappeler les annonces présidentielles.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Comme nous l’avons rappelé en commission, il y a déjà eu un triplement de l’abattement de la taxe sur les salaires, pour un montant de 315 millions d’euros.

M. Charles de Courson. Pour les associations, pas pour les coopératives !

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Je pourrais rappeler ce qui a été fait dans d’autres secteurs. En commission, nous avons évoqué l’équilibre financier de tous les régimes fiscaux et sociaux spéciaux. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Sapin, ministre. Même avis pour les mêmes raisons.

(L’amendement n951 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Patrice Martin-Lalande, pour soutenir l’amendement n783 rectifié.

M. Patrice Martin-Lalande. La différence, dans un rapport de 1 à 15, des coûts salariaux entre l’outre-mer et ses voisins immédiats fausse gravement la concurrence en matière de tourisme.

Deux symptômes de la gravité de cette situation : d’abord les lourdes dettes sociales et fiscales, qui s’élevaient à 17 millions à la Martinique à la fin 2014, et la suppression de l’aide à la rénovation hôtelière, devenue inutile. Nous tous avons reconnu qu’il était impossible d’investir dans un secteur structurellement déficitaire.

Il est clair que le taux de 9 % de CICE ne compensera pas suffisamment cette profonde différence de compétitivité. Le tourisme, dans nos départements d’outre-mer, a besoin d’un taux spécifique bien ciblé, à 18 %, pour continuer d’exister.

Les autres secteurs prioritaires, comme les services bancaires ou les services commerciaux, n’ont pas besoin d’être traités de la même manière puisqu’ils ne sont pas en concurrence frontale avec les pays voisins.

La hausse du taux de CICE à 18 % entraînerait une dépense de 30 millions d’euros qui serait largement couverte par des gains substantiels pour l’État. Le premier gain serait naturellement la fin des dettes sociales et fiscales qui doivent dépasser les 30 millions d’euros pour l’ensemble des départements d’outre-mer. Le deuxième gain serait les recettes fiscales supplémentaires fournies par l’activité nouvelle que générerait cette disposition. Et le troisième gain serait une contribution sans équivalent à la lutte contre le chômage, qui est le double de celui de la métropole.

Pour conclure sur le point le plus important, cette hausse du taux à 18 % est une aide eurocompatible, qui n’aura pas besoin d’être notifiée à la Commission européenne.

Mme Karine Berger. Tout à fait !

M. Patrice Martin-Lalande. Pour rassurer ceux qui craignent l’interdiction de cette aide par les règles européennes, argument qui m’a été opposé en commission élargie et en commission des finances, le règlement 651 de la Commission daté du 17 juin 2014 est formel sur ce point. Je vous lis son alinéa 32 qui précise que « les secteurs du tourisme et du haut débit jouent un rôle important dans les économies nationales et ont généralement un effet particulièrement favorable sur le développement régional. Il convient, par conséquent, d’exempter de l’obligation de notification les régimes d’aides à finalité régionale visant les activités touristiques et le haut débit. »

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Sapin, ministre. Défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Karine Berger.

Mme Karine Berger. Je pense que le raisonnement de M. Martin-Lalande doit être écouté, même si, pour des raisons financières, les positions ne changeront pas.

L’outre-mer est peut-être la seule région à subir une concurrence sur le coût des services. On peut débattre à l’infini dans cet hémicycle pour savoir si la France a besoin d’améliorer sa compétitivité sur les coûts en matière d’industrie : les avis sont partagés entre économistes. Mais sur les services, tout le monde est d’accord pour dire qu’il n’y a de compétition sur les coûts – sauf en outre-mer où les territoires les plus proches peuvent fournir un service équivalent pour un coût radicalement différent.

Même si je comprends très bien que le Gouvernement et la commission des finances ne soient pas forcément favorables au plan financier à la démarche proposée, le raisonnement de M. Martin-Lalande doit être pris au sérieux.

Mme la présidente. La parole est à M. Patrice Martin-Lalande.

M. Patrice Martin-Lalande. J’aurais aimé avoir une explication sur l’avis défavorable de la commission et du Gouvernement.

En commission, vous nous avez dit, madame la rapporteure générale, ainsi que le président, que se posait un problème de compatibilité européenne. J’ai clairement expliqué que ce problème n’existait pas : je viens de citer l’alinéa 32 d’un règlement qui date de l’an dernier.

Quelle autre raison pourrait-elle justifier un avis défavorable ? Il faut préciser avec une plus grande clarté ce qu’on veut faire outre-mer.

Je le répète, ces régions ultrapériphériques sont en concurrence de manière insupportable, comme l’a dit Karine Berger, s’agissant des salaires. Ne pas faire un effort pour compenser la différence signifie renoncer à une activité touristique créatrice d’emplois, qui pourrait être l’un des principaux moteurs de croissance. Est-ce ce que nous voulons, à l’Assemblée nationale ? Par quels coûts ce renoncement se traduira-t-il ? Je pense que nous prenons une décision très pénible et regrettable pour l’outre-mer.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Deux mots sur les débats que nous avons eus en commission à propos de cet amendement très intéressant de notre collègue Patrice Martin-Lalande.

Nous avons d’abord constaté qu’en matière de compétitivité sur les prix, on ne pouvait remédier à un écart salarial de 1 à 10 en relevant de 9 à 18 % le taux du CICE.

M. Patrice Martin-Lalande. Ne rien faire serait encore pire !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. La vraie question est de faire jouer la compétitivité hors prix. Nos départements antillais ont des atouts extraordinaires, dont la qualité des services publics. Si quelqu’un tombe malade, il sait qu’il sera correctement soigné. La vraie question est de savoir pourquoi les hôtels de quatre ou cinq étoiles ont tous fermé les uns après les autres. C’est ce type de problème qu’il faut traiter avant de chercher à résoudre les problèmes de compétitivité sur les prix. Cela passe par des efforts de formation, la mise en place d’un environnement beaucoup plus accueillant, beaucoup plus compétitif en termes de services offerts au touriste : c’est tout à fait possible compte tenu des atouts extraordinaires dont disposent ces deux départements d’outre-mer.

Mme Marie-Christine Dalloz. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Patrice Martin-Lalande.

M. Patrice Martin-Lalande. Je suis d’accord, il n’y a pas une seule solution au problème, mais ne pas rechercher celle que je propose signifie qu’on va rester dans une situation de compétitivité impossible, de sorte qu’il n’y aura pas d’investissement dans la formation, pas d’investissement dans l’immobilier. Nous avons d’ailleurs renoncé à l’aide à la rénovation hôtelière, faute de perspectives d’exploitation normale. Il y aura impossibilité d’agir sur ces facteurs dont vous venez de parler.

(L’amendement n783 rectifié n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Alauzet, pour soutenir l’amendement n872.

M. Éric Alauzet. Il porte sur la sous-traitance et plus précisément sur l’abus de sous-traitance. Pour éviter le malentendu qui a eu lieu en commission, il ne s’agit pas d’évoquer la sous-traitance d’Airbus ou des grandes sociétés quand elles ne disposent pas de certaines compétences en interne. Mon amendement fait plutôt référence à des activités comme le bâtiment ou les services de proximité, dans lesquelles de vrais professionnels de la sous-traitance captent des marchés avec un moins-disant social et un moins-disant tout court…

La surtaxe de 3 % de l’impôt sur les sociétés que prévoit mon amendement n’est pas forcément la mesure la plus pertinente et aurait plus sa place dans loi sur les nouvelles opportunités économiques, mais je tenais à appeler votre attention sur ce sujet. Si ma solution n’est pas idéale, le problème est, lui, réel. Il y a véritablement des abus de sous-traitance, des sous-traitances en cascade : il serait bon de les limiter à 30 % du total de l’activité de l’entreprise, ou bien à une ou deux opérations en cascade. Il faut assurer la qualité « Reconnu garant de l’environnement », ou RGE, des sous-traitants, favoriser les groupements d’entreprises…

Si la relance de la croissance, à 0,3 point sur le troisième trimestre, est une bonne nouvelle, elle cache un déficit énorme dans le secteur du bâtiment et des travaux publics. Nous avons pourtant pris beaucoup de mesures, mais le problème du bâtiment est sans doute multifactoriel : l’abaissement des prix du marché explique certainement pour une part la baisse de la part du bâtiment dans le PIB.

Je ne demande pas de réponse aujourd’hui, mais cette sous-traitance est sans doute un élément d’explication. Il faut empoigner cette question du bâtiment et des travaux publics.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. La rédaction de cet amendement a un peu évolué par rapport à l’examen en commission, suite à nos échanges.

La question de la sous-traitance, vous avez raison de la poser, parce que nous savons que des abus existent. Pour autant, il y a eu de nombreux rapports, y compris celui du médiateur du crédit qui analysait en 2008 les liens entre un grand donneur d’ordres et les PME sous-traitantes.

À ce stade, il faut néanmoins reconnaître que nous ne sommes jamais arrivés à trouver le cadre approprié pour lutter contre ce que vous dénoncez avec justesse.

La commission a estimé que votre amendement ne touchait pas sa cible et a émis un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Même avis. J’entends bien l’appel qui est lancé sur cette question, mais la fiscalité n’est pas le meilleur outil pour limiter les éventuels abus.

S’agissant du retour de la croissance, ce taux de 0,3 % est meilleur que ce qui était attendu et confirme la justesse de nos prévisions – ainsi que le caractère plus que raisonnable de nos prévisions pour l’année prochaine. Nous aurons probablement ce débat tout à l’heure en commission des finances.

Dans le secteur du bâtiment, j’observe que l’activité est encore en baisse mais légèrement moins que le trimestre précédent. Les mesures que vous venez d’adopter notamment l’élargissement du PTZ au secteur de l’ancien – mais pas seulement – peuvent contribuer à répondre à ce problème. Il n’en faut pas moins rester vigilant.

L’avis du Gouvernement demeure défavorable à l’adoption de cet amendement, s’il est maintenu.

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Alauzet.

M. Éric Alauzet. Je le retire.

(L’amendement n872 est retiré.)

Article 45

Mme la présidente. La parole est à M. Razzy Hammadi, pour soutenir l’amendement n650.

M. Razzy Hammadi. Il vise à augmenter l’imposition sur les plus-values de cession de titres d’une société autorisée pour l’édition d’un service de télévision – le Gouvernement l’avait lui-même portée à 19 % en loi de finances ; je propose quant à moi de la faire passer à 25 %, et ce pour deux raisons.

Dans l’économie « normale », une imposition des cessions de titres à 25 % existe déjà. Or, ici, que vise-t-on ? Des sociétés qui obtiennent une autorisation du CSA puis qui revendent ensuite les titres hors de tout contrôle de l’entreprise.

Depuis la cession de titres – qui a beaucoup choqué – concernant une chaîne de la TNT que je ne citerai pas, le Gouvernement et le Parlement ont pris un certain nombre de mesures dont l’une au sein de la loi relative au deuxième dividende numérique, qui a été sanctionnée cet été par le Conseil constitutionnel.

Je me félicite donc qu’il soit désormais possible d’imposer et le prix et la plus-value de cession mais sachant que la menace demeure compte tenu de la décision de ce dernier, je propose que l’on agisse efficacement et directement en une seule fois en portant l’imposition sur les plus-values de 19 % à 25 %.

Enfin – je serai bref madame la présidente et je ne reviendrai pas sur cette question : j’interpelle le Gouvernement afin qu’il soit possible de discuter sérieusement lors de la préparation du prochain budget de la question de la fiscalité et du financement de la télévision dans notre pays, qu’il s’agisse de la TNT ou du secteur audiovisuel public.

Il n’est pas possible de débattre partout du retour ou non de la publicité après 20 heures sur la télévision publique sauf au Parlement – en particulier lorsque l’on sait que les arbitrages ont eu lieu à la dernière minute et que, pour parler simplement, aucune majorité ne s’est clairement décidée pour l’une ou l’autre option.

La télévision concerne tout le monde. La question de la réforme de l’audiovisuel est également posée – même si ce n’est évidemment pas l’enjeu de cet amendement – de même que celle de la redevance.

Il est préférable d’anticiper et de prévenir plutôt que de guérir. Je crois que nous sommes nombreux, parmi les parlementaires, à vouloir aborder ce sujet. Travaillons largement en amont en interpellant le Gouvernement dès maintenant plutôt que de défendre l’année prochaine des amendements qui déstabiliseraient la situation et la rendraient encore plus illisible.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. M. Hammadi, par cet amendement, a le mérite de poser une excellente question : le Gouvernement souhaite-il la mise en place d’une double imposition ?

En effet, un premier dispositif a été voté dans la loi Macron – qui a été censuré par le Conseil constitutionnel – puis il a ensuite été adopté et validé en CMP voilà un mois dans la loi relative au deuxième dividende numérique.

Une taxation de la plus-value existe déjà lors de la cession et cet article 45 prévoit quant à lui une taxation supplémentaire de 19 %.

Si je comprends bien, l’amendement vise à porter cette dernière à 25 % en supprimant la première. La commission a émis un avis favorable à son adoption, monsieur le secrétaire d’État, afin que le Gouvernement puisse nous éclairer.

Soit l’on ajoute la taxation existante de 26 % à celle de 25 % proposée par M. Hammadi et elle sera in fine de 51 %, soit le Gouvernement refuse la double taxation et celle-ci est limitée à 25 %. En tout état de cause, hors l’amendement de M. Hammadi, la taxation serait de 25 % plus 19 % soit 44 %.

Nous nous permettons donc de vous interroger sur ce point-là, monsieur le secrétaire d’État.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Si j’ai bien compris, une proposition de loi tend à porter à 20 %…

M. Razzy Hammadi. Progressivement.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. …la taxe sur les ventes qui est aujourd’hui de 5 % – nous ne sommes d’ailleurs pas sûrs que cela soit possible.

Ni la proposition du Gouvernement ni celle de l’amendement n’ « écrase » quoi que ce soit.

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Absolument. Les taxes s’additionnent et c’est précisément la question de l’addition qui est posée.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. D’accord, c’est la question du cumul des deux taxes, mais celles-ci sont différentes : l’une porte sur la vente et l’autre sur la plus-value réalisée – à la limite, s’il n’y en a pas, que le taux soit de 19 % ou de 25 % ne changera rien du tout.

J’entends bien toutefois les intentions de l’auteur de l’amendement. À ce stade, le Gouvernement s’en remet à la sagesse de l’Assemblée et se ralliera à son avis.

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure générale.

(L’amendement n650 est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure générale, pour soutenir l’amendement n805.

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Amendement rédactionnel.

(L’amendement n805, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 45, amendé, est adopté.)

Après l’article 45

Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Lefebvre, pour soutenir l’amendement n20 portant article additionnel après l’article 45.

M. Frédéric Lefebvre. Nous avons évoqué la question du régime fiscal applicable aux contrats d’assurances-vie l’année dernière.

Les chiffres de la croissance peuvent nous rendre un peu optimistes. L’augmentation de 0,3 % est certes vécue comme une excellente nouvelle dans notre pays alors qu’en Allemagne, c’en est une mauvaise – ce qui témoigne de la différence entre les pays qui donnent de l’élan à la croissance et ceux qui sont entraînés dans son sillage.

Quoi qu’il en soit, je me réjouis qu’un certain nombre de dispositifs – que j’ai eu pour ma part l’occasion de voter – aient permis d’obtenir quelques résultats. J’aurais néanmoins souhaité que nous allions beaucoup plus loin.

Je présente donc un amendement que j’avais déjà défendu l’année dernière.

Chacun sait – tous les économistes le regrettent – que l’épargne de précaution est trop importante dans notre pays. Certes, c’est d’abord la confiance dans l’avenir qui détermine l’investissement et la consommation mais la réduction de huit à six ans de la durée minimale ouvrant droit au régime fiscal le plus avantageux en matière d’assurances-vie favoriserait dans le meilleur des cas le soutien à la consommation.

En outre, dans un pays où les citoyens et les acteurs économiques – parfois les plus modestes – étouffent sous le poids de la fiscalité, ces derniers pourraient faire face à leurs obligations, notamment fiscales.

Nombre de nos compatriotes, nous le savons, sont en effet aujourd’hui obligés de faire appel à la générosité familiale ou de toucher à leur épargne pour ce faire – d’ailleurs, quelle que soit la catégorie sociale à laquelle ils appartiennent, qu’ils soient modestes ou qu’ils aient une situation que d’aucuns jugent enviable.

Voilà de multiples raisons de défendre cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. La réforme de la fiscalité de l’assurance-vie, qui n’est pas si ancienne que cela, a beaucoup occupé le Parlement et le Gouvernement en posant plusieurs principes dont la mise en œuvre de certains nécessite d’ailleurs des délais – je pense notamment à l’allocation d’un certain nombre de fonds en direction de l’économie dite réelle. Mais enfin, heureusement, cela commence à se développer.

Je ne crois pas non plus que ce secteur de l’assurance-vie soit en crise – il suffit de se reporter aux chiffres mensuels du taux de collecte.

Le Gouvernement n’est donc pas favorable à l’adoption de cet amendement.

(L’amendement n20 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Lefebvre, pour soutenir l’amendement n9.

M. Frédéric Lefebvre. Nous avons évoqué plusieurs fois dans cet hémicycle la question des sociétés de financement du développement. Or, M. Macron et vous-même avez répondu à mes questions de façon diamétralement opposée. Je souhaite donc y revenir avec vous.

Vous m’avez dit en effet ex abrupto que le Gouvernement n’a engagé aucune réflexion en la matière. M. Macron m’a quant à lui assuré de l’inverse en disant que le Gouvernement partageait mon souci, qu’un forum économique dont les membres sont conscients des enjeux qui se posent se tenait à Bercy et que je serai associé à ses réflexions.

Où en sommes-nous donc ?

Une forme de coordination s’impose, en effet, entre le ministre de l’économie et le secrétaire d’État au budget chargé, conséquemment, de la fiscalité.

Je ne rentre pas dans le détail de l’amendement, monsieur le secrétaire d’État. Depuis bien longtemps, ce n’est pas l’avantage fiscal qui est en cause mais la question de principe.

Où en sont donc les travaux gouvernementaux évoqués très précisément par M. Macron dans cet hémicycle – il a fait référence à une réunion qui s’était déroulée le matin du 20 janvier ? Où en sommes-nous ? Comment le Gouvernement travaille-t-il sur cette question qui me paraît extrêmement importante ?

Il en va en effet de la confiance que nous pouvons accorder à des acteurs individuels afin qu’ils participent au développement de l’activité dans leurs pays puisque ces sociétés concernent des étrangers vivant en France. C’est l’intérêt de tous !

Pour vous rassurer sur le plan financier…

Mme la présidente. Je vous remercie, monsieur Lefebvre.

M. Frédéric Lefebvre. …je précise que la logique de cet amendement tend à financer l’avantage fiscal proposé par la baisse à due concurrence de l’aide accordée aux pays en question. Il s’agit donc de faire confiance à l’initiative et à l’entrepreunariat individuels.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Nous avons vu passer cet amendement à deux reprises au moins.

L’investissement des sociétés françaises dans une société du tiers-monde peut être de différente nature – un investissement capitalistique est parfaitement possible.

Tel qu’il est rédigé, cet amendement…

M. Frédéric Lefebvre. En l’occurrence, ce n’est pas la rédaction qui importe, mais le principe.

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure générale pour donner l’avis de la commission. Nous devons avancer.

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. J’entends bien, monsieur Lefebvre. Je dis simplement que cet amendement ouvre la porte à ce qui pourrait être considéré comme de l’optimisation fiscale – appelez cela comme vous le souhaitez. La commission est donc défavorable à son adoption.

J’entends bien, toutefois, la question que vous posez…

M. Frédéric Lefebvre. Voilà ! Merci !

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. …au secrétaire d’État et je ne répondrai bien évidemment pas à sa place.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. J’ai l’impression que vous me soumettez à la question pour savoir exactement où en est la réflexion du Gouvernement. Le rôle du Parlement, c’est de faire la loi, d’être une force de proposition…

M. Frédéric Lefebvre. De contrôle, aussi !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. …et de contrôle, bien sûr. Mais vous permettrez au Gouvernement de mener ses réflexions sans être soumis, à ce stade, à votre contrôle. Un ministre a tenu des propos devant vous : c’est son problème. Mais moi, je n’ai pas à vous exposer l’état des réflexions que je peux mener à titre personnel ou avec mes équipes. Vous serez informé, le moment venu, si le Gouvernement décide d’avancer sur cette question.

Mon rôle, c’est de donner mon avis sur votre amendement. Or cet amendement propose de remettre en route un dispositif qui n’a pas fonctionné, et qui a été abandonné, précisément, parce qu’il ne fonctionnait pas.

M. Frédéric Lefebvre. C’est un amendement d’appel pour poursuivre la réflexion !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Vous avez fait votre appel, mais vous permettrez au Gouvernement de mener ses réflexions comme il l’entend. Le moment venu, s’il souhaite avancer, il le fera sous la forme qu’il vous proposera. Le Gouvernement, pour conclure, est défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. Monsieur Lefebvre, maintenez-vous votre amendement ?

M. Frédéric Lefebvre. Je vais évidemment le retirer. Je note simplement que, depuis que nous avons abordé cette question dans cet hémicycle il y a quelques mois, vous n’avez pas échangé avec le ministre de l’économie. Or il me semblerait important que vous le fassiez, sur un tel sujet – d’autant que le Gouvernement s’est engagé sur ce point. Vous dites que c’est son problème, mais lorsqu’un ministre est au banc, quelle que soit sa fonction, et qu’il s’engage, au nom du Gouvernement, à associer le Parlement à une réflexion, ce n’est pas son problème à lui : c’est celui du Gouvernement.

La seule demande que je réitère, en retirant cet amendement, c’est que l’engagement qui a été pris par M. Macron au nom du Gouvernement d’associer la représentation nationale à cette réflexion soit tenu. J’aurai l’occasion de revenir sur ce sujet au moment de l’examen du prochain texte qu’il nous présentera. Mais il aurait été opportun que vous montriez, sur cette question, la capacité du Gouvernement à tenir ses engagements.

(L’amendement n9 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l’amendement n904.

M. Charles de Courson. Cet amendement d’appel tend à faciliter les échanges d’immeubles ruraux. Nous en avons discuté en commission : actuellement, il existe un régime spécifique sur les droits de mutation, quand les échanges ont lieu à l’intérieur d’un canton et des communes périphériques. L’idée serait de l’étendre au département et aux cantons périphériques.

Pour une raison technique, que j’ai indiquée dans l’exposé sommaire, je n’ai pas pu corriger la rédaction de cet amendement. Je me contenterai donc de demander au Gouvernement s’il accepterait d’examiner cette proposition dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances rectificative. Puisque votre compteur tourne, monsieur le secrétaire d’État, je vous informe que le coût de cette mesure représenterait une toute petite somme, de l’ordre de quelques centaines de milliers d’euros.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Dans sa rédaction actuelle, monsieur de Courson, votre amendement rend possible le remembrement d’un terrain situé au Perreux avec un terrain situé à Montauban, alors qu’ils sont très éloignés géographiquement.

M. Charles de Courson. J’ai expliqué dans l’exposé sommaire pourquoi je n’ai pas pu modifier cette rédaction !

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Et moi je vous explique pourquoi on ne peut pas donner un avis favorable à votre amendement. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Même avis.

Mme la présidente. Monsieur de Courson, maintenez-vous votre amendement ?

M. Charles de Courson. Je le retire.

(L’amendement n904 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Lefebvre, pour soutenir l’amendement n11.

M. Frédéric Lefebvre. Le dispositif de l’exit tax, qui a été créé par la précédente majorité avec l’accord quasi général de cet hémicycle et le soutien du Gouvernement auquel j’appartenais – mais que j’avais moi-même critiqué – fait son œuvre, sa mauvaise œuvre. Il dissuade en effet d’investir en France un certain nombre de nos compatriotes, qui préfèrent investir à l’étranger. Je réitère mon opposition à cet exit tax et je ne doute pas que, de la même façon, la rapporteure générale et le secrétaire d’État réitéreront leur opposition à mon amendement.

(L’amendement n11, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 856 et 639.

La parole est à Mme la rapporteure générale, pour soutenir l’amendement n856.

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Krabal, pour soutenir l’amendement n639.

M. Jacques Krabal. Cet amendement concerne les fonds d’investissement de proximité – FIP – qui existent en Corse et en outre-mer.

Afin de ne pas créer de distorsion entre le régime fiscal du FIP-Corse et celui des FIP-DOM, il est proposé de créer un régime fiscal unifié de capital-risque insulaire, et donc d’appliquer au FIP-DOM et au FIP-Corse le même taux de réduction d’impôt, soit 38 % de l’investissement jusqu’à 12 000 euros pour un célibataire ou 24 000 euros pour un couple, dans le cadre de l’impôt sur le revenu.

Créé en 2011, le FIP-DOM a été bridé par une souscription restreinte aux seuls domiciliés fiscaux outre-mer, ce qui en limite évidemment la portée et freine son développement. Ouvrir la souscription au FIP-DOM à l’ensemble des contribuables, comme c’est le cas du FIP-Corse, permettrait de lui donner un réel essor. Ce serait aussi un acte de justice et un moyen d’assurer une réelle égalité entre les DOM et la Corse. Je sais que plusieurs d’entre nous partagent cet objectif.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement, qui a un coût non négligeable, et qui s’éloigne de l’objectif qui a conduit à la création du dispositif FIP-DOM, lequel, par définition, a vocation à favoriser l’investissement de proximité. Or votre amendement effacerait cette notion de proximité. Par ailleurs, vous proposez un taux majoré à 38 %, soit une augmentation de plus de 10 % de la dépense fiscale. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Je voudrais soutenir cet amendement, dont je suis d’ailleurs cosignataire. Ce que je voudrais savoir, monsieur le secrétaire d’État, c’est la raison pour laquelle les conditions d’éligibilité au FIP-Corse et au FIP-DOM ne sont pas les mêmes. Qu’est ce qui justifie cette différence ? On a tué le FIP-DOM en disant que seuls les domiciliés fiscaux outre-mer ont le droit d’y investir. Mais ce n’est pas le cas ! Moi qui suis Champardennais, il m’arrive parfois d’investir dans des FIP – entre nous, cela relève plutôt du bénévolat, car chacun sait que les FIP ont perdu, en moyenne, 20 à 30 % de leur valeur. Je suis Champardennais, mais je peux investir dans un FIP qui n’est pas champardennais – un FIP, du reste, doit concerner au moins deux régions, et bientôt nous aurons les grandes régions…

Pourquoi avoir à ce point limité les conditions de souscription au FIP-DOM, que les investissements se sont effondrés ? Ces investissements s’élevaient à 5 millions il y a trois ans et ils atteindront à peine 2 millions à la fin de cette année. Si vous pensez que c’est anormal, alors appliquons au FIP-DOM les mêmes règles qu’au FIP-Corse. Pourquoi le FIP-Corse n’a-t-il pas les mêmes conditions d’éligibilité que les FIP-DOM ?

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. La réponse est très simple, monsieur de Courson, et vous la connaissez : c’est parce que dans les territoires et départements d’outre-mer, il existe des dispositifs de crédit d’impôt, qui n’existent pas en Corse. Nous en avons longuement parlé cette nuit.

M. Charles de Courson. Ils sont plus favorables en Corse !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Non, il n’y a pas de dispositif de crédit d’impôt pour les investissements en Corse, ni sur le logement social, ni sur les investissements productifs. Il existe en Corse un dispositif de fonds d’investissement de proximité, qui existe également en outre-mer, mais qui n’est pas calibré de la même façon, parce que nous privilégions en outre-mer les crédits d’impôt, qui sont des systèmes beaucoup plus sécurisés pour tout le monde, y compris pour les investisseurs. Nous ne souhaitons pas revenir sur ce point.

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Lefebvre.

M. Dominique Lefebvre. Je comprends parfaitement les arguments du secrétaire d’État. Quand on considère l’aide apportée à un territoire, il faut prendre en compte l’ensemble des données : je suis d’accord avec lui pour dire que la comparaison entre le FIP-Corse et le FIP-DOM n’est pas pertinente.

Je voulais simplement rappeler ici, puisque Victorin Lurel ne peut être présent, que c’est à son initiative, par un amendement au projet de loi de finances pour 2011, que le FIP-DOM a été créé, avec les objectifs que l’on sait. Or je crois qu’il y a consensus dans cet hémicycle pour dire que cette disposition ne fonctionne pas.

J’entends ce que vous dites, monsieur le secrétaire d’État, et je comprends les problèmes de principe qui se posent. Mais, si je pense comme vous que cet amendement ne doit pas être adopté, j’estime qu’il faudra tout de même réexaminer cette question avec nos collègues d’outre-mer.

(Les amendements identiques nos 856 et 639 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir l’amendement de la commission, n857.

Mme Christine Pires Beaune. Cet amendement, dont l’initiative revient à notre collègue Alain Fauré, concerne, comme l’amendement n866 que nous avons examiné tout à l’heure, la niche dite Copé. Pour rappel, cette niche permet d’abaisser le taux de taxation des plus-values lors de la cession de titres de participation à 4 %, dès lors que ces titres sont détenus depuis deux ans.

Vous le savez, les niches fiscales coûtent au budget de l’État quelque 85 milliards. Si l’on a du mal à évaluer le coût de celle-ci, elle représenterait, selon quelques experts, quelques milliards par an. Cet amendement ne vise pas à mettre fin à la niche Copé, mais seulement à restreindre les modalités d’application, en allongeant le délai de détention de deux à cinq ans.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Nous avons déjà débattu de cette niche tout à l’heure, et envisagé un autre moyen de l’encadrer. Je propose que cet amendement soit traité comme le précédent : pour les mêmes raisons que j’ai exposées tout à l’heure, je vous suggère le retrait de cet amendement. À défaut, le Gouvernement y serait défavorable.

Mme la présidente. Mme la rapporteure générale, l’amendement est-il maintenu ?

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Je le retire.

(L’amendement n857 est retiré.)

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Goldberg, pour soutenir l’amendement n1000.

M. Daniel Goldberg. Cet amendement vise à clarifier le déroulement des transactions immobilières, et notamment le paiement des droits de mutation à titre onéreux – DMTO. Aujourd’hui, comme le montre un exemple développé dans l’exposé sommaire, suivant que les honoraires de l’agence sont à la charge de l’acquéreur ou du vendeur, le montant des DMTO est variable. Une inégalité de traitement existe donc entre les acheteurs.

Afin de simplifier le dispositif et de permettre à l’acquéreur de savoir précisément, au moment où il calcule sa capacité de financement, quel montant de DMTO il devra régler, cet amendement propose que, lors d’une vente, les droits de mutation soient systématiquement calculés sur la valeur du bien, honoraires de l’agence compris. Cela apportera de la transparence et, accessoirement, quelques ressources supplémentaires. Je dois avouer que les professionnels que j’ai consultés sont largement favorables à cette disposition.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. La commission a émis un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Il nous semble que l’amendement est déjà satisfait puisque les frais entrent dans le champ des DMTO lorsqu’ils sont à la charge de l’acquéreur. C’est pourquoi je vous suggère, monsieur Goldberg, de retirer l’amendement.

Si, toutefois, vous souhaitiez le maintenir, je ferais alors la remarque qu’il est mal rédigé puisqu’il ne vise que les agences immobilières alors que d’autres professionnels peuvent être commissionnés lors des transactions, notamment les notaires et les avocats. En ne couvrant pas totalement le champ concerné, l’amendement créerait des ruptures d’égalité.

De toute façon, je le répète, le Gouvernement estime qu’il est satisfait puisque les frais entrent dans l’assiette des DMTO.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Goldberg.

M. Daniel Goldberg. J’entends votre argument sur la rupture d’égalité : c’est pourquoi je retire l’amendement.

Je suis moins convaincu par votre premier argument, reposant sur le caractère systématique de l’entrée des frais dans le champ des DMTO. Je propose de retravailler cette question avec vos services.

(L’amendement n1000 est retiré.)

Mme la présidente. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

2

Ordre du jour de la prochaine séance

Mme la présidente. Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :

Suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2016 : suite de l’examen des articles non rattachés.

La séance est levée.

(La séance est levée à douze heures quarante-cinq.)

La Directrice du service du compte rendu de la séance

de l’Assemblée nationale

Catherine Joly