XVe législature
Session ordinaire de 2020-2021

Troisième séance du jeudi 03 décembre 2020

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Troisième séance du jeudi 03 décembre 2020

Présidence de Mme Laetitia Saint-Paul
vice-présidente

Mme la présidente

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    La séance est ouverte.

    (La séance est ouverte à vingt et une heures.)

    1. Carte Vitale biométrique

    Suite de la discussion d’une proposition de loi

    Mme la présidente

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    L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de loi tendant à instituer une carte Vitale biométrique (nos 2425, 3595).

    Discussion générale (suite)

    Mme la présidente

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    Cet après-midi, l’Assemblée a entendu les orateurs inscrits dans la discussion générale.
    La parole est à M. Patrick Hetzel, rapporteur de la commission des affaires sociales.

    M. Patrick Hetzel, rapporteur de la commission des affaires sociales

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    Je tiens en effet à répondre aux orateurs de la discussion générale car ils ont posé nombre de questions.
    Mme de Vaucouleurs a suggéré que le recours à la carte Vitale biométrique se fasse sur la base du volontariat. Si nous procédons de la sorte, nous sommes sûrs de ne pas réussir à lutter contre les fraudeurs, car je les imagine mal adhérer à ce dispositif de leur plein gré.
    De manière générale, j’ai eu l’impression, à entendre certains orateurs, que la prise de conscience de la réalité recouverte par la fraude était insuffisante, ce qui est assez inquiétant. J’aurai l’occasion d’y revenir.
    Sur ces questions, il y a tout d’abord l’excellent rapport de notre collègue Carole Grandjean et de la sénatrice Nathalie Goulet. Il constitue une première base de travail, même si certains chiffres n’ont pas été obtenus. Je recommande à toutes celles et tous ceux qui évoquent des données de s’y reporter. De surcroît, comme notre collègue est membre de la majorité, on ne peut pas dire que ce sujet serait une obsession du groupe LR.
    Un autre rapport a fait date ces derniers mois : celui de la commission d’enquête relative à la lutte contre les fraudes aux prestations sociales de notre collègue Pascal Brindeau.

    M. Raphaël Schellenberger

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    Excellent rapport !

    M. Patrick Hetzel, rapporteur

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    Il établit un certain nombre de faits. J’invite ceux qui doutent de la nécessité de se préoccuper de cet enjeu à le lire.
    En outre, dans les jours qui ont suivi sa diffusion, la Cour des comptes a rendu public un rapport consacré au même sujet. Il contient des chiffres extrêmement précis sur les cartes Vitale en surnombre et montre ce que cela peut signifier en ce qui concerne les fraudes aux prestations sociales.
    On ne peut donc pas balayer ce sujet d’un revers de main. Certes, il existe des débats, des écarts de chiffres – nous le voyons bien, car ceux qui sont cités diffèrent d’un orateur à l’autre – mais une chose est certaine : ils se rapportent bien à une réalité.
    Je voudrais insister sur une autre réalité que d’aucuns semblent négliger. Il existerait une dialectique entre la fraude du riche, la fraude fiscale, et la fraude du pauvre, la fraude sociale. Or des rapports récents ont mis en évidence que cette dernière est de plus en plus une fraude en bande organisée. Elle n’est plus simplement pratiquée sur un coin de table mais devient systémique voire systématique, en lien avec la criminalité. C’est une raison supplémentaire pour ne pas balayer ce sujet d’un revers de main ; ce ne serait pas de bonne politique.
    Dans la même logique, Mme Biémouret a reproché au groupe LR de pointer une nouvelle fois les fraudes. Que les choses soient claires, une fraude est une fraude, et M. Brindeau a été extrêmement clair : il faut lutter contre toute forme de fraude. Ce que nous cherchons à cibler, ce ne sont pas des populations en particulier mais les divers fraudeurs et les bandes organisées. Nous ne voulons pas stigmatiser qui que ce soit ; ce qui est en jeu, c’est la défense de notre pacte social, qui passe par la nécessité d’assurer un contrôle réel de la dépense des deniers publics.
    Mme Chapelier a parlé de 2,6 millions de cartes Vitale en surnombre et a souligné que l’on ne pouvait établir un parallèle avec le passeport. C’est vrai, car le passeport ne génère pas des dépenses moyennes de 3 000 euros au moins par an et par personne. Le recours à des procédures sécurisées se justifie donc d’autant plus pour les cartes Vitale.

    M. Maxime Minot

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    Eh oui !

    M. Patrick Hetzel, rapporteur

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    Je veux être clair. Le coût unitaire de la carte Vitale en circulation est de 5 euros. Celui d’une carte biométrique, si l’on optait pour ce dispositif, serait d’environ 10 euros, mais, je le répète, avec des modalités de sécurisation infiniment supérieures. Le retour sur investissement s’effectuerait assez rapidement : 2,4 milliards d’euros de deniers publics seraient économisés en moyenne, alors que le coût du déploiement de la carte Vitale biométrique à l’échelon national serait de l’ordre de 400 millions, selon votre propre chiffrage, monsieur le secrétaire d’État chargé de l’enfance et des familles – d’autres estimations vont jusqu’à 500 millions.
    Monsieur Brindeau, j’abonde dans votre sens. Cette expérimentation viendrait en complément de celle lancée par le Gouvernement, ce qui lui donne encore plus de sens, d’autant que le dispositif que nous proposons est davantage sécurisé.
    Monsieur Clément, vous avez souligné que les données dont nous disposons, sur lesquelles tout le monde se fonde, sont partielles. Je le répète, je vous invite à lire le rapport Grandjean-Goulet, le rapport Brindeau et le rapport de la Cour des comptes. Vous verrez que cette question n’est pas une lubie du groupe LR et qu’elle vaut la peine que l’on se penche dessus.
    Mme Autain a déclaré que nous cherchions à stigmatiser les plus fragiles. Non, non et encore non ! Ce n’est pas notre but ; il suffit, pour s’en convaincre, de rappeler qu’il s’agit d’une fraude en bande organisée. Si elle considère que le rôle de la collectivité nationale est de financer des réseaux étrangers qui commercialisent des médicaments en principe destinés aux Français, je lui dis bravo, la félicite !

    Un député LR

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    Elle est à table, en train de dîner avec ses amis !

    M. Patrick Hetzel, rapporteur

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    Pour notre part, ce n’est pas ainsi que nous voyons les choses. Dans sa conclusion, Mme Autain s’est livrée à une critique en règle de notre groupe. Une chose est sûre, ce n’est pas l’objectivité qui l’étouffe…

    M. Bruno Millienne

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    On est bien d’accord !

    M. Patrick Hetzel, rapporteur

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    L’orientation de son intervention, on le voit, est tout à fait discutable.
    Monsieur Dharréville, d’après vous, nous aurions des visées antisociales. Je tiens vraiment à insister, ce qui est en jeu, c’est le pacte républicain. Les travaux récents montrent que nous faisons face à une fraude en bande organisée ; dès lors, il s’agit de lutter contre la criminalité.
    Madame Grandjean, au nom du groupe majoritaire, vous avez affirmé qu’il n’y avait pas lieu de mettre en place une telle expérimentation. Nous ne cherchons pas à multiplier les expérimentations. Nous proposons simplement d’ajouter une expérimentation à celle déjà lancée par le Gouvernement, ce qui permettrait de comparer les avantages et les inconvénients de l’une et de l’autre. Quels que soient les résultats, nous sommes persuadés que cela contribuerait à rendre plus robuste la méthodologie du dispositif mis en place. Par conséquent, cela aurait de toute façon du sens. Du reste, le Sénat a lui-même amendé sa proposition initiale en se limitant dans un premier temps à une expérimentation, pour être certain qu’un maximum de précautions soient prises avant un déploiement généralisé.
    Vous l’aurez compris, il y a là plusieurs enjeux majeurs. Notre groupe tient à insister sur le fait qu’il s’agit d’une réalité et non pas d’une lubie. Ce n’est pas avec une politique de l’autruche que les problèmes seront réglés, bien au contraire. À un moment donné, il faut savoir nommer les choses. Ne pas les nommer est, à mon avis, une faute politique majeure. Et rejeter cette proposition de loi en sera une autre : cela enverra à nouveau le signal que le Gouvernement ne veut pas véritablement lutter contre la fraude.
    Monsieur le secrétaire d’État, permettez-moi d’appeler votre attention sur une chose qui a interpellé Pascal Brindeau et les membres de la commission d’enquête relative à la lutte contre la fraude aux prestations sociales : nous avons constaté que, dans la lettre de mission du ministre des solidarités et de la santé au nouveau directeur général de la Caisse nationale d’assurance maladie, qui comporte pourtant plusieurs pages, nulle part il n’est fait référence à la lutte contre la fraude,…

    M. Raphaël Schellenberger

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    C’est scandaleux !

    M. Patrick Hetzel, rapporteur

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    …alors que plusieurs rapports, dont un issu de la majorité, ont insisté sur la nécessité d’en faire une mission de l’ensemble des organismes. Voilà qui montre les limites du « en même temps ». (Applaudissements sur les bancs des groupes LR et UDI-I.)

    Discussion des articles

    Mme la présidente

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    J’appelle maintenant les articles de la proposition de loi dans le texte dont l’Assemblée a été saisie initialement, puisque la commission n’a pas adopté de texte.

    Article 1er

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Maxime Minot.

    M. Maxime Minot

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    Contrairement à ce que certains voudraient croire, l’argent public, ce n’est pas de l’argent gratuit. La solidarité nationale, à laquelle se rattache notre système de soins, est le fruit du travail des Français, de sacrifices et d’efforts consentis au nom d’un idéal d’égalité. Ainsi, la fraude, qu’elle soit sociale ou fiscale d’ailleurs, est-elle un vol commis à l’égard de l’ensemble de la nation et qui remet en cause les fondements de notre vivre-ensemble. La minimiser ou ne pas se donner les moyens de la combattre constitue une lâcheté morale et un affaiblissement de notre pacte social et républicain. Dès lors, cette proposition de loi, reprenant une mesure voulue par Nicolas Sarkozy en 2012 et votée par le Sénat, propose un outil efficace.
    Certains diront que la fraude sociale est résiduelle ou qu’elle n’est pas une priorité, en comparaison à d’autres enjeux. Je leur répondrai qu’il est vain d’opposer les fraudes entre elles et que la République des droits doit être aussi celle des devoirs.
    Certains autres diront que la lutte contre la fraude atteint des niveaux record. Je leur répondrai que les 1,2 milliard d’euros détectés ne sont rien en comparaison des 7 milliards d’euros fraudés.
    Certains enfin diront encore que cette disposition se heurte à des difficultés techniques et financières. Je leur répondrai que les sénateurs en ont tenu compte en assouplissant le dispositif proposé.
     
    Ce titre de presse, certes racoleur, ne doit pas manquer de nous interroger : « 67 millions de Français, 84 millions de cartes Vitale ». Nous n’avons pas à nous excuser auprès de ceux qui ne respectent pas les règles les plus élémentaires. Alors que notre pays est le champion du monde de la dépense sociale, il ne s’agit pas de stigmatiser qui que ce soit ou de remettre en cause la générosité qui fait la fierté de la France. Cette générosité, nous voulons au contraire la préserver afin qu’elle soit utile et efficace pour le plus grand nombre.
    Sans surprise, vous avez rejeté cette proposition de loi en commission, en arguant qu’une expérimentation était en cours, mais elle vient tout simplement en complément.
    Souvenez-vous : 67 millions de Français, 84 millions de cartes Vitale ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Pascal Brindeau.

    M. Pascal Brindeau

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    Sans allonger les débats, je tiens à rassurer les collègues qui siègent à gauche de l’hémicycle : faire de la lutte contre la fraude sociale une priorité, ce n’est pas cibler les populations fragiles et précaires. Nombre des auditions menées par la commission d’enquête ont montré que les organismes des trois branches, maladie, vieillesse et famille, dans leur stratégie de lutte, qui se renforce – ils ne partent pas d’une feuille blanche –, ciblent évidemment les fraudes massives et organisées, les plus contraires, dirais-je, à l’esprit du pacte républicain, pouvant du reste entraîner une qualification pénale et induisant le préjudice financier le plus important ; j’imagine que Carole Grandjean et la sénatrice Nathalie Goulet, qui ont aussi conduit des auditions, ont la même appréciation. Les organismes ne perdent pas leur temps avec une personne qui aurait sciemment omis de déclarer quelques heures de travail pour continuer à percevoir le RSA – revenu de solidarité active –, alors que ses droits auraient été revus, voire supprimés, si sa déclaration avait été totalement transparente. Ils visent un objectif politique : traquer, je le répète, les organisations et les professionnels – qui sont parfois d’ailleurs des professionnels de la santé – qui exploitent sciemment les failles du système. À aucun moment il ne s’agit de débusquer des pauvres gens qui profitent, pendant un temps, de ce système.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Carole Grandjean.

    Mme Carole Grandjean

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    Je voudrais réaffirmer la position du groupe La République en marche : nous travaillons depuis maintenant deux ans à la lutte contre les fraudes, et jamais nous n’avons infléchi nos efforts. Nous souhaitons lutter contre toutes les fraudes, mais nous voulons aussi simplifier l’accès de nos concitoyens aux droits et aux services. Forts de cette volonté, nous entendons engager des évolutions qui contribuent tout à la fois à l’accès aux droits et à une meilleure lutte contre tous types de fraudes. Nous ne faisons de la lutte contre les fraudes ni une obsession ni un repoussoir : notre objectif est de poursuivre le principe de justice sociale.
    Depuis le début de la législature, nous avons adopté quarante amendements en la matière, proposés par des députés de tous les bancs, tendant à améliorer le partage des données, le contrôle et le pilotage de la lutte contre les fraudes. Nous pouvons l’affirmer, nous avons ainsi fait progresser ce sujet. Il reste un enjeu majeur auquel nous devons être attentifs collectivement : l’application de cette législation.
    Je le répète, vous ne pouvez pas dire que nous n’avons pas pris l’ensemble des dispositions que nous souhaitions dans ce domaine. À l’issue des travaux effectués par de nombreux parlementaires ici présents, nous avons adopté, je le répète, plus de quarante amendements qui ont largement fait progresser la lutte contre les fraudes. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)

    M. Sylvain Maillard

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    Excellent !

    M. Raphaël Schellenberger

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    Laxiste !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Emmanuelle Ménard.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Je suis d’autant plus satisfaite de prendre la parole à ce stade de la discussion qu’il y a fort à parier que je ne pourrai défendre aucun des quinze amendements que j’ai déposés, car douze d’entre eux ont été retoqués, considérés comme des cavaliers législatifs,…

    M. Sylvain Maillard

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    C’est possible !

    Mme Emmanuelle Ménard

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    …et les trois malheureux restant tomberont probablement, si l’amendement de suppression du Gouvernement est adopté.
    La fraude sociale est un vieux serpent de mer et, malgré les milliards détournés, les gouvernements successifs ne se sont pas donné les moyens de lutter contre ce phénomène. Il est temps de s’y mettre. C’est d’autant plus nécessaire et urgent que, sur ce sujet, pas moins de quatre rapports parlementaires ont été publiés en à peine plus d’un an. Notre collègue Pascal Brindeau a ainsi présenté une nouvelle enquête très fouillée sur la fraude sociale le 15 septembre, quelques jours après que la Cour des comptes a remis son étude au Sénat. Pourtant, aucun de ces rapports ne parvient à chiffrer avec précision l’ampleur du phénomène, faute d’évaluation fiable par la sécurité sociale.
    Selon Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales du Sénat, la fraude à la carte Vitale est « l’une de celles dont l’occurrence est la plus fréquente et celle qui porte le plus visiblement atteinte au pacte républicain qui fonde la solidarité nationale ». C’est donc à un dommage avant tout symbolique que le texte s’attelle, mais le symbole est important.
    Comment expliquer, par exemple, que la direction de la sécurité sociale ne soit toujours pas capable de fournir des explications sur 2,4 millions de bénéficiaires potentiels de prestations inexistantes ? On estime la fraude moyenne à 800 euros par mois et par dossier. Autre point alarmant, il y aurait 200 000 usurpations d’identité par an en France. De plus, selon l’ONU – l’Organisation des Nations unies –, la fraude aux prestations sociales contribue au financement de 6 % du terrorisme !

    Mme la présidente

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    Il faut conclure.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Je termine, madame la présidente. L’instauration d’une carte Vitale biométrique permettrait de vérifier immédiatement l’identité du bénéficiaire lors du paiement d’un acte médical ; le dispositif aurait donc pour effet de supprimer toute fraude à la carte Vitale. Ce n’est qu’un début, il faudrait aller plus loin, mais cela aurait au moins le mérite d’exister. Par conséquent, je ne comprendrais pas que le texte ne soit pas adopté ce soir.

    Mme la présidente

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    Sur l’amendement no 17, je suis saisie par le groupe Les Républicains d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. le secrétaire d’État chargé de l’enfance et des familles, pour soutenir cet amendement, qui tend à supprimer l’article 1er.

    M. Adrien Taquet, secrétaire d’État chargé de l’enfance et des familles

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    Sans surprise, dans la lignée des débats en commission et de mon intervention dans la discussion générale, le Gouvernement vous propose, par cet amendement, de supprimer la disposition prévoyant l’expérimentation d’une carte Vitale biométrique, telle qu’elle est prévue par la proposition de loi. Ce n’est pas parce que nous ne nommerions pas les choses, monsieur Brindeau ; au contraire, nous les nommons, et nous luttons contre la fraude sociale et contre la fraude fiscale, de la même façon.

    M. Pierre-Henri Dumont

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    Courage, fuyons !

    M. Adrien Taquet, secrétaire d’État

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    J’en ai donné quelques exemples dans la discussion générale, et Carole Grandjean a évoqué les quarante amendements, issus de tous les groupes, qui ont été adoptés depuis le début de la législature pour lutter contre la fraude. Les opérateurs mènent cette lutte. M. le rapporteur, cet après-midi, a notamment cité la CNAF – Caisse nationale des allocations familiales–, qui, par le biais du data mining, traque la fraude et les fraudeurs.
    Toutefois, l’expérimentation que vous proposez paraît inapplicable en l’état. Si le Gouvernement, je le répète, partage la volonté de renforcer les mesures de lutte contre la fraude et de s’appuyer sur les technologies, un recours massif et systématique à la biométrie paraît complexe à mettre en œuvre, et il convient d’en tenir compte. Cela nécessiterait d’équiper les 400 000 professionnels de santé en lecteurs et de remplacer les 65 millions de cartes Vitale en circulation. Le ratio coût/bénéfice serait donc incertain.
    Nous proposons plutôt que l’on s’appuie sur une expérimentation en cours, l’application carte Vitale, qui vient d’être déployée dans le Rhône et dans les Alpes-Maritimes, et le sera très prochainement dans dix autres départements, comme je vous l’ai indiqué tout à l’heure. Cet outil, qui recourt à une identification à l’aide d’un téléphone mobile, paraît plus adapté pour envisager un déploiement de la biométrie progressif et réaliste, contrairement à votre proposition. Des premiers échanges ont eu lieu avec la CNIL – Commission nationale de l’informatique et des libertés – à cette fin.
    Je vous propose donc, non pas d’écarter les possibilités futures de recourir à la biométrie pour la carte Vitale, mais de les inscrire dans un cadre plus adapté, plus réaliste et plus efficace. C’est pourquoi je vous invite à supprimer l’article 1er.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Patrick Hetzel, rapporteur

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    Je commencerai par une question de méthode. Notre proposition de loi comporte trois articles. Or le Gouvernement a déposé trois amendements, visant à supprimer chacun des articles. Il vide donc notre proposition de sa substance ; je constate qu’il s’agit d’une nouvelle méthode gouvernementale pour écarter les sujets.

    M. Raphaël Schellenberger

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    Scandaleux ! Quel mépris !

    M. Patrick Hetzel, rapporteur

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    On aurait pu s’attendre à ce que la majorité, à l’instar de Mme Grandjean en commission, aille dans le sens de notre proposition. Vos amendements ont le mérite de la clarté, mais vous ne pouvez pas, d’un côté, affirmer votre volonté de lutter contre la fraude, et de l’autre, en réalité, assécher le contenu de notre proposition.
    J’en viens au fond de l’amendement présenté par le Gouvernement.
    Je constate d’abord qu’il vise le même objectif qu’un amendement que le groupe La France insoumise avait déposé – j’ignore s’il sera défendu. Je vous laisse juges de cette convergence entre le Gouvernement et La France insoumise…

    Mme Clémentine Autain

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    Historique !

    Mme Constance Le Grip

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    Ce n’est pas la première fois !

    M. Patrick Hetzel, rapporteur

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    Quoi qu’il en soit, dans son argumentaire, le Gouvernement invoque l’expérimentation de la carte Vitale dématérialisée menée depuis un an pour justifier le rejet d’une expérimentation de la carte Vitale biométrique. Comme je viens de l’expliquer – d’autres l’ont également dit –, il serait au contraire particulièrement avantageux de mener ces deux expérimentations conjointement ! Le modèle dématérialisé et le modèle biométrique de la carte Vitale sont extrêmement différents. En outre, l’expérimentation du Gouvernement ne cible pas suffisamment la fraude sociale – ce n’est d’ailleurs pas son objectif, vous en visez manifestement d’autres. Le fait d’intégrer la carte Vitale dans un téléphone mobile n’empêche en rien le prêt, la perte, le vol voire le piratage de ce nouveau support. Au reste, tous les assurés ne disposant pas d’un téléphone mobile, un grand nombre d’entre eux se trouvent, de fait, écartés du dispositif. Telles sont les failles de l’expérimentation gouvernementale, auxquelles la proposition de loi du Sénat, que nous avons reprise, remédie.
    Nous avons la possibilité d’expérimenter et d’évaluer deux dispositifs différents simultanément : rien de mieux pour juger du modèle le plus efficace et le plus souhaitable afin de sécuriser l’usage de la carte Vitale, une fois les conclusions tirées des deux expérimentations. Vous le noterez en outre, notre proposition prévoit que le déploiement soit assuré par le Gouvernement : vous ne pouvez donc pas la vouer aux gémonies. Au contraire, le groupe Les Républicains joue pleinement le jeu.
    Par ailleurs, le Gouvernement estime que notre expérimentation serait de trop grande ampleur. Non : seul un nombre restreint de territoires seront concernés, comme dans l’expérimentation gouvernementale. En outre, elle pourra facilement être déployée car des fleurons industriels produisent sur notre sol des documents biométriques.

    M. Jean-Marie Sermier

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    Exactement !

    M. Patrick Hetzel, rapporteur

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    D’autres l’ont dit tout à l’heure : alors que des entreprises françaises exportent un tel savoir-faire dans le monde entier, notre pays accuse au moins dix ans de retard dans l’utilisation de ces technologies. Est-il normal que la France ne recoure pas à ses industriels, alors qu’ils sont à la pointe ?
    Enfin, puisque les professionnels de santé et les pharmaciens utilisent des dispositifs similaires au quotidien, ils ne devraient rencontrer aucune difficulté dans le déploiement de celui-ci. Rappelons que le Sénat a retenu le modèle de l’expérimentation biométrique justement parce qu’il paraissait proportionné à l’objectif poursuivi.
    Pour toutes ces raisons, vous l’aurez compris, j’émets un avis très défavorable sur l’amendement gouvernemental.  Très bien ! » sur les bancs du groupe LR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Michèle de Vaucouleurs.

    Mme Michèle de Vaucouleurs

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    Monsieur Hetzel, vous m’avez attribué des propos que je n’ai pas tenus : jamais je n’ai dit que les personnes devaient être volontaires, je vous invite à vérifier dans le compte rendu.
    Je soutiens pleinement l’amendement du Gouvernement. Je reconnais que la biométrie doit être développée, mais l’expérimentation menée actuellement peut être l’occasion d’introduire des outils de ce type.
    Et il existe d’autres pistes à explorer que le tout-biométrique. Certaines actions très simples pourraient améliorer sensiblement la situation : la durée des cartes pourrait être actualisée au vu de la durée des droits ; l’identité des porteurs de cartes Vitale pourrait être vérifiée plus régulièrement – correspondance entre la photo et la personne, demande de présentation d’une pièce d’identité – ; et pourquoi pas, la déclaration de perte ou de vol de la carte pourrait devenir obligatoire.
    L’expérimentation en cours mérite d’être approfondie. Mon groupe est favorable à la suppression de l’article 1er.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Pascal Brindeau.

    M. Pascal Brindeau

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    Monsieur le secrétaire d’État, je n’ai pas dit que vous ne nommiez pas les choses ; je crois que c’est le rapporteur qui a parlé de la nécessité de nommer les choses. En revanche, j’assume avoir déclaré que votre ministre de tutelle était resté dans le déni de la réalité de la fraude sociale et de la nécessité absolue d’intensifier la lutte. Avec le président de la commission d’enquête, nous attendons toujours qu’il réponde à notre sollicitation de rendez-vous pour pouvoir lui présenter le rapport et ses conclusions. Je note que, quand des questions au Gouvernement lui ont été posées à ce sujet, sa seule réponse a été : circulez, il n’y a absolument rien à voir.
    Le pompon, c’est que le Gouvernement présente maintenant des amendements visant à supprimer les articles 1er, 1er bis et 3. Par respect, au moins, vous auriez pu laisser le débat parlementaire s’instaurer. D’autres groupes auraient pu proposer des amendements de suppression pour laisser la majorité faire son travail en votant contre. Il y a vraiment là un monde entre les déclarations et les actes.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Frédéric Reiss.

    M. Frédéric Reiss

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    Chers collègues de la majorité, cet après-midi, vous avez eu besoin des insoumis et des socialistes pour voter des amendements de suppression de l’article unique de la proposition de loi visant à permettre l’exclusion des étrangers en situation irrégulière du bénéfice de la tarification sociale dans les transports. Ce soir, vous vous abritez derrière le Gouvernement et la France insoumise pour supprimer l’article 1er. Quel courage politique ! Peut-être est-ce aussi pour masquer les divergences qu’il y a dans vos rangs – en tout cas, ça y ressemble…
    Sur le fond, si nous sommes tous d’accord pour dire que la fraude à la carte Vitale n’est pas la plus significative financièrement, au regard de l’ensemble des fraudes aux prestations sociales, elle est hautement symbolique car elle porte atteinte à la solidarité nationale, fondement même de notre pacte républicain.
    Monsieur le secrétaire d’État, votre expérimentation de carte d’assurance maladie électronique sur la base du volontariat dans deux départements n’est pas suffisante. Elle pourrait très bien être complémentaire à ce que nous vous proposons
    Pour nos concitoyens, notamment les plus précaires d’entre eux, il est insupportable de savoir qu’une même carte peut être utilisée par plusieurs personnes et qu’il y a beaucoup plus de cartes Vitale que de bénéficiaires couverts par les caisses de sécurité sociale. L’expérimentation d’abord, l’institution ensuite d’une carte Vitale biométrique seraient, pour toutes les raisons excellemment exposées par notre rapporteur Patrick Hetzel, par Josiane Corneloup et Maxime Minot, la meilleure solution pour lutter contre ces fraudes intolérables. Voilà pourquoi nous voterons évidemment contre l’amendement de suppression.

    M. Pierre Vatin

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    Très bien !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Carole Grandjean.

    Mme Carole Grandjean

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    Je ne sais pas de quel côté est le déni, je ne sais pas de quel côté est le courage… En l’occurrence, nous ne vous avons pas attendus puisque l’expérimentation de la e-carte vitale est engagée depuis déjà plus d’un an, que ses fonctionnalités biométriques sont en cours de développement, afin que la vérification d’identité soit automatique, et que nous avons déjà saisi la CNIL. Par conséquent, nous n’avons pas de leçon à recevoir du groupe LR, dont la proposition de loi est déjà satisfaite ! Qui a du courage ? Pardon, mais ce n’est pas vous ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)

    M. Sylvain Maillard

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    Exactement !

    Mme Émilie Bonnivard

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    Comme c’est intelligent !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Pierre Dharréville.

    M. Pierre Dharréville

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    Je voudrais rassurer l’ensemble des collègues à ma droite dans l’hémicycle. Il y a peut-être quelques divergences d’appréciation entre vous mais, au fond, je ne suis pas certain qu’il y ait tant d’écart que cela. Il convient d’en finir avec les faux débats. Effectivement, il faut lutter contre la fraude, nous le pensons et nous le disons. Mais la discussion porte sur la philosophie des moyens utilisés et sur leur éventuelle disproportion. Je me demande s’il n’y a pas quelque part, dans la proposition que vous nous faites, un rêve de magie. Ce que nous devons faire pour nous attaquer efficacement à ce sujet est sans doute d’une autre nature.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Josiane Corneloup.

    Mme Josiane Corneloup

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    Même si nous disposons de chiffres extrêmement flous quant aux coûts générés par la fraude à la carte Vitale,…

    M. David Corceiro

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    C’est faux !

    Mme Josiane Corneloup

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    …celle-ci est indéniable. Elle constitue une atteinte à l’équilibre de notre pacte républicain, cela a été dit, et elle mine la confiance de nos concitoyens quant à l’équité de notre système de santé. Il est inconcevable que des Français repoussent leurs consultations quand d’autres bénéficient indûment de soins.
    Cela a aussi été évoqué, ce ne sont pas forcément les plus précaires qui fraudent ; on constate plutôt des fraudes organisées qui utilisent les failles de notre système pour alimenter les trafics divers et variés. C’est une déperdition importante de fonds grandement nécessaires. Face aux usages multiples d’une même carte par plusieurs bénéficiaires, face à 1 million de cartes surnuméraires, nous devons agir.
    J’ai bien entendu qu’une carte Vitale dématérialisée est expérimentée mais je réfute que ce soit la solution, l’unique solution. Nous connaissons ses limites puisqu’elle est fondée sur le volontariat et limitée aux seuls bénéficiaires équipés d’un support mobile. Je crois qu’il ne faut négliger aucun outil : la carte Vitale biométrique serait complémentaire à la carte Vitale dématérialisée.
    J’estime qu’il est indispensable d’identifier strictement le bénéficiaire pour tout usage de sa carte afin que soient bel et bien anéantis les risques de fraude. Je dirais même que cette expérimentation présente d’autant plus d’intérêt que la lutte contre les fraudes se concentre sur la recherche a posteriori des irrégularités, alors que celles-ci pourraient souvent être empêchées a priori, dès la gestion courante des prestations. Un changement d’échelle apparaît donc indispensable pour tarir les possibilités de fraude. Nous serons bien évidemment opposés à l’amendement de suppression. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

    M. Raphaël Schellenberger

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    Bravo ! Excellent !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le rapporteur.

    M. Patrick Hetzel, rapporteur

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    Si nous insistons sur la pertinence d’une telle expérimentation, c’est d’abord parce que celle du Gouvernement n’a pas pour objectif de lutter contre la fraude ; il suffit de relire ce que le Gouvernement a annoncé l’année dernière à ce propos pour le vérifier.
    On nous dit qu’on va ajouter à cette expérimentation une dimension biométrique. Or ce n’est pas ainsi que vous résoudrez le problème. C’est grâce au déploiement d’une carte Vitale biométrique physique que nos concitoyens n’utilisant pas de support dématérialisé pourront y avoir recours. Je voudrais surtout insister sur le fait que nous proposons la possibilité de rendre les choses globalement plus robustes grâce à deux dispositifs conjoints d’expérimentation, afin de voir quels sont les avantages et les inconvénients de chacun.
    Le fait que vous balayiez d’un revers de main notre proposition particulièrement pertinente est une faiblesse a minima méthodologique et surtout politique, je pense. Le Gouvernement nous affirme qu’il veut lutter contre les fraudes mais, en réalité, vous savez pertinemment qu’il ne met pas tout en œuvre pour que cette lutte soit effective. Les différents rapports, notamment celui de la Cour des comptes et celui de la commission d’enquête, montrent très clairement que tous les organismes ne déploient pas les mêmes efforts en la matière, et que celui qui lutte sans doute le moins, c’est la Caisse nationale d’assurance maladie. Plus que jamais, nous devons lui indiquer qu’il ne peut pas s’exempter de cet objectif, tout simplement parce qu’il s’agit de deniers publics et que le pacte social républicain est en jeu. Vous dites que ce n’est pas très important ; pour notre part, nous considérons que c’est fondamental si l’on veut que notre République demeure, dans le futur, une et indivisible, autour du modèle social français. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

    M. Raphaël Schellenberger

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    Excellent rapporteur !

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 17.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        112
            Nombre de suffrages exprimés                112
            Majorité absolue                        57
                    Pour l’adoption                69
                    Contre                43

    (L’amendement no 17 est adopté ; en conséquence, l’article 1er est supprimé et les amendementsnos 13, 14 et 15 n’ont plus d’objet.)

    Rappel au règlement

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Pierre-Henri Dumont, pour un rappel au règlement.

    M. Pierre-Henri Dumont

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    Mon rappel au règlement, fondé sur l’article 48, alinéa 2, porte sur l’ordre du jour de nos séances. En 2018, il avait été décidé, à la suite d’une proposition de loi du groupe LR sur l’inclusion des élèves en situation de handicap à l’école, défendue par mon collègue Aurélien Pradié, que la majorité ne soutiendrait plus de motions de rejet préalable. Or c’est la deuxième fois aujourd’hui, sur deux propositions de loi examinées consécutivement, que vous instaurez une nouvelle forme de motion de rejet préalable en supprimant des articles,…

    Mme Constance Le Grip

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    Tout à fait !

    M. Pierre-Henri Dumont

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    …parce que vous n’avez pas le courage d’assumer votre acte, parce que vous n’avez pas le courage d’aller jusqu’au vote solennel sur ces textes,…

    M. Raphaël Schellenberger

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    Lamentable ! Trouillards !

    Mme Michèle Peyron

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    Ça vous va bien de dire cela !

    M. Pierre-Henri Dumont

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    …parce que nos concitoyens, partout en France, pourraient savoir concrètement ce que vous pensez de la lutte contre la fraude sociale ou de la lutte contre l’immigration irrégulière favorisée dans certaines sociétés de transport.

    M. Frédéric Reiss

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    Le Gouvernement se cache derrière sa majorité !

    M. Raphaël Schellenberger

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    Il a les chocottes !

    Mme la présidente

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    S’il vous plaît !

    M. Pierre-Henri Dumont

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    Ce procédé est profondément détestable. En masquant la réalité de vos choix, vous éloignez plus encore les Françaises et les Français du cœur battant de notre République. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

    Mme la présidente

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    Je vous remercie pour ce rappel au règlement qui n’avait rien à voir avec l’article 48, alinéa 2…

    Article 1er bis

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Julien Ravier.

    M. Julien Ravier

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    Pour illustrer votre opposition à l’instauration de la carte Vitale biométrique que nous proposons pour lutter contre les fraudes sociales, cette citation bien connue de Sénèque m’est venue à l’esprit : « Ce n’est pas parce que les choses sont difficiles que nous n’osons pas, c’est parce que nous n’osons pas qu’elles sont difficiles. »
    Oui, c’est parce que c’est difficile que vous n’osez pas, donc que vous n’avancerez pas. Franchement, il n’existe pas de moyen plus sûr et sécurisé que la biométrie pour contrôler l’identité d’un assuré social. C’est d’ailleurs pour cela que cette technique a été retenue dans le monde entier pour sécuriser les documents d’identité. Dès lors, il apparaît plus que logique que la carte Vitale évolue et que nous renforcions sa sécurisation en lui intégrant la biométrie, seule technique capable d’empêcher la falsification. Pourquoi donc aurions-nous recours à un système de puces électroniques pour la carte Vitale et à la biométrie pour les documents d’identité ? L’enjeu est le même : sécuriser l’identité du détenteur et lutter contre la fraude.
    L’argument financier n’est pas recevable car, en stoppant les fraudes, nous récupérerons autant si ce n’est davantage d’argent que ce que nous aura coûté la mise en place de la biométrie.
    Quant à l’argument de la protection des données, il n’est pas plus recevable puisque la CNIL pourra être consultée et donner ses exigences éventuelles, comme pour l’utilisation des drones dans la PPL relative à la sécurité globale, que vous avez présentée et adoptée.
    Enfin utiliser la même technologie pour les documents d’identité et la carte Vitale ou d’autres documents sécurisés permettra de faciliter le croisement des fichiers et de mieux lutter encore contre toutes les fraudes.
    En conclusion, je rappellerai la devise de la sécurité sociale, imaginée par le général de Gaulle : cotiser autant que de moyens, bénéficier autant que de besoin. Pour conserver ce système solidaire, il est grand temps de le sécuriser correctement et d’y mettre les moyens, avec les meilleures technologies, sans quoi cette devise risque de se transformer en : cotisez autant que de moyens, fraudez autant que vous voulez ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Carole Grandjean.

    Mme Carole Grandjean

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    À la suite des travaux parlementaires conduits par notre collègue Pascal Brindeau, la sénatrice Nathalie Goulet et moi-même, nous avons fait de la lutte contre les fraudes un chantier…

    M. Raphaël Schellenberger

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    Un chantier discursif !

    Mme Carole Grandjean

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    …à l’Assemblée nationale et au Sénat, qui a fait largement avancer la question. Je rappelle en effet que quarante amendements ont été adoptés et demandent maintenant à être mis en œuvre. Nous nous attacherons tous, je le crois, à le faire.
    Le support de la carte Vitale n’est peut-être pas la véritable question. Nous avons du reste pu voir que les évolutions successives de cette carte, notamment l’insertion de la photographie du titulaire, n’ont pas fait beaucoup progresser la lutte contre les fraudes. Chez nos voisins, d’ailleurs, le support de la carte n’est pas essentiel – la Belgique, par exemple, n’utilise pas de tel support et a largement dépassé le problème.
    Par ailleurs, nous n’avons pas rejeté la biométrie, bien au contraire. Dans le PLFSS pour 2021, nous l’avons adoptée pour les preuves d’existence des retraités vivant à l’étranger.

    Mme Émilie Bonnivard

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    Cela ne concerne pas des millions de personnes !

    Mme Carole Grandjean

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    C’est bien la preuve que la donnée biométrique ne nous gêne pas. Il faut cependant bien dire – et vous devriez pouvoir le reconnaître et l’assumer – que vous avez un train de retard,…

    Mme Émilie Bonnivard

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    Un peu comme vous avec les tests et les masques !

    Mme Carole Grandjean

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    …car votre proposition de loi est déjà satisfaite. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 16, tendant à supprimer l’article 1er bis.

    M. Adrien Taquet, secrétaire d’État

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    Cet article, qui vise à préciser que la carte Vitale n’est valable que « durant la validité des droits », avait été adopté au Sénat voilà près d’un an. Or l’article 91 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021, que vous venez de voter, intègre cette même disposition. L’article 1er bis est donc devenu redondant, raison pour laquelle le Gouvernement propose de le supprimer.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Bruno Millienne

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    Mesure satisfaite !

    M. Patrick Hetzel, rapporteur

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    Madame Grandjean, j’adore votre formule selon laquelle nous aurions un train de retard ! En réalité, c’est exactement l’inverse car ce texte a été adopté au Sénat en 2019 : avec l’article 1er bis, nous avions donc bien un train d’avance, et c’est la majorité qui a pris le train en retard en décidant voilà huit jours d’adopter cette disposition ! N’inversez donc pas les rôles ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – Mme Carole Grandjean proteste.)

    M. Vincent Descoeur

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    Excellent !

    M. Patrick Hetzel, rapporteur

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    Cependant, vous avez bien fait de souligner que cette question était essentielle et qu’il fallait limiter la durée de validité de la carte Vitale à celle des droits des assurés, alors qu’elle est actuellement prévue pour fonctionner tout au long de la vie.
    Cette disposition, qui était bien prévue dans la proposition de loi, a donc été reprise voilà huit jours dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021, et l’on peut ainsi considérer que la rédaction de l’article est satisfaite. Je n’émettrai donc pas d’avis défavorable sur l’amendement du Gouvernement. Il n’en demeure pas moins que la manière dont le Gouvernement traite notre proposition de loi manque d’élégance. Vous voulez éteindre le débat parlementaire et écarter les contributions des oppositions.

    M. Raphaël Schellenberger

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    Et ce n’est pas la première fois !

    M. Patrick Hetzel, rapporteur

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    Eh bien non ! Nous disons haut et fort que cette majorité a fini par se ranger à une proposition formulée par Les Républicains depuis plus d’un an. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Carole Grandjean.

    Mme Carole Grandjean

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    Permettez-moi de souligner le travail effectué sur l’ensemble des bancs de notre assemblée. En effet, l’alignement de la durée de validité de la carte Vitale sur celle des droits du porteur procède bien d’un amendement signé par l’opposition. Je tiens tout de même à rappeler que tous les amendements adoptés sur le PLFSS pour 2020 émanaient de la majorité : nous ne vous avons pas attendus pour avancer sur la question de la fraude dans le dernier projet de budget. Vous nous avez rejoints cette année, et c’est très bien, mais nous l’avions déjà fait avant vous. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)
    Par ailleurs, si l’expérimentation démarre en mai 2019, c’est bien parce qu’elle a été programmée en amont, car une expérimentation se prépare et les objectifs poursuivis ont nécessité des travaux préparatoires. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)

    M. Bruno Millienne

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    Ils ont un train de retard !

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Quelle mauvaise foi !

    M. Pascal Brindeau

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    Vous rejetez nos amendements ou vous vous débrouillez pour qu’ils soient irrecevables ! Bravo pour la méthode !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Michèle de Vaucouleurs.

    Mme Michèle de Vaucouleurs

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    La Cour des comptes, chargée notamment de relever les fraudes sociales, émet des préconisations qui ne sont pas toujours les vôtres. Le premier chantier qu’elle propose d’ouvrir en vue de tarir les possibilités de fraude consiste à mieux circonscrire les usurpations d’identité – ce que vous souhaitez également faire –,…

    M. Patrick Hetzel, rapporteur

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    Tout à fait !

    M. Vincent Descoeur

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    Effectivement !

    Mme Michèle de Vaucouleurs

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    …mais au moyen : d’un rapprochement des informations dont disposent les différents organismes sociaux et une sécurisation de la carte Vitale, future e-carte dont il est ici question ; de la fiabilisation des informations concernant les salaires, les ressources et les situations professionnelles ; d’une gestion plus rigoureuse des droits. Il faut également renforcer les sanctions et récupérer les trop-versés. Des solutions existent donc déjà, qui ne sont pas forcément celle que vous proposez. Nous sommes donc favorables à l’amendement de suppression de l’article 1er bis.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Pascal Brindeau.

    M. Pascal Brindeau

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    Il est sympathique de dire que nous sommes tous mobilisés ensemble pour lutter contre la fraude,…
    …alors que la majorité vote ses amendements et rejette ceux de l’opposition ou s’arrange pour les faire déclarer irrecevables.

    M. Sylvain Maillard

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    On ne s’arrange pas : vous savez bien que nous sommes tous logés à la même enseigne !

    M. Pascal Brindeau

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    C’est là une méthode particulièrement inappropriée.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le rapporteur.

    M. Patrick Hetzel, rapporteur

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    Pour faire écho à M. Brindeau, la majorité nous dit de manière tonitruante, à propos du PLFSS pour 2020, que les amendements relatifs à la fraude qui ont été adoptés étaient ceux de la majorité. Mais vous avez rejeté ceux que nous avions déposés : CQFD ! Vous rejetez nos amendements puis vous vantez d’être les seuls à faire quelque chose !

    M. Vincent Descoeur

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    Ce n’est pas sérieux !

    M. Patrick Hetzel, rapporteur

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    Il n’est pas très sérieux de procéder de la sorte ! Il faut parfois savoir reconnaître le travail des uns et des autres !

    M. Vincent Descoeur

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    Voilà !

    M. Sylvain Maillard

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    Cela a été dit !

    M. Patrick Hetzel, rapporteur

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    Nous avons apporté une vraie contribution, et la manière dont elle est balayée par la majorité et le Gouvernement montre une fois de plus que vos actes ne suivent pas du tout vos discours !

    M. Sébastien Huyghe

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    C’est comme pour le fameux article 24 !

    (L’amendement no 16 est adopté ; en conséquence, l’article 1er bis est supprimé.)

    Article 3

    Mme la présidente

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    Sur l’amendement no 18, je suis saisie par le groupe Les Républicains d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir cet amendement.

    M. Adrien Taquet, secrétaire d’État

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    Il vise à supprimer l’article 3. En effet, les deux précédents articles ayant été supprimés, celui-ci n’a plus de raison d’être.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Patrick Hetzel, rapporteur

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    Monsieur le secrétaire d’État, vous avez raison, dès lors que vous avez supprimé l’article 1er, l’article 3, qui ne comporte que le gage permettant de financer cette disposition, perd son objet.
    Je reviendrai cependant sur ce qui vient d’être dit. Cette majorité nous dit qu’elle ne présentera plus de motions de rejet préalable des propositions de loi défendues dans le cadre d’une niche parlementaire,…

    M. Raphaël Schellenberger

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    Ce qu’elle fait maintenant revient au même !

    M. Patrick Hetzel, rapporteur

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    …mais nous constatons que cette procédure est contournée d’une manière qui incarne parfaitement le « en même temps » macronien. Vous trouvez un artifice de procédure qui a exactement le même effet que la motion de rejet : interdire le véritable débat en débranchant le dispositif au moyen d’amendements gouvernementaux. Je tiens donc à m’insurger, au nom de mon groupe parlementaire, contre cet incroyable détournement de procédure ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.)

    M. Pierre-Henri Dumont

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    Bravo !

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 18.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        108
            Nombre de suffrages exprimés                108
            Majorité absolue                        55
                    Pour l’adoption                67
                    Contre                41

    (L’amendement no 18 n’est pas adopté ; en conséquence, l’article 3 est supprimé.)
    (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

    Mme la présidente

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    L’ensemble des articles ayant été supprimés, la proposition de loi est rejetée.

    2. Développement raisonnable de l’éolien

    Discussion d’une proposition de loi

    Mme la présidente

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    L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de M. Julien Aubert et plusieurs de ses collègues visant à raisonner le développement de l’éolien (nos 2781, 3594).

    Présentation

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Julien Aubert, rapporteur de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire.

    M. Julien Aubert, rapporteur de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

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    « Le paysage français est l’un des plus beaux paysages au monde. Quand j’étais président, j’ai essayé de le protéger. À l’époque, d’ailleurs, les écologistes le demandaient. Depuis, ils se sont complètement retournés. »

    M. Raphaël Schellenberger

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    Valéry Giscard d’Estaing !

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    Ces propos furent prononcés par le président Valéry Giscard d’Estaing, qui s’est éteint hier. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.) Mes pensées les plus émues vont à sa veuve et à ses proches. Si cette citation m’est revenue lorsque j’écrivais mon discours, c’est parce que, voilà quelques mois, il m’avait contacté, car il considérait que notre combat contre les éoliennes était juste et il souhaitait me rencontrer. Le confinement puis la maladie l’en ont empêché. Il est symbolique que ce texte soit examiné en ce jour si particulier.
    Cette proposition de loi, que j’ai déposée avec mes collègues Vincent Descoeur, Marc Le Fur, Véronique Louwagie, Emmanuel Maquet et Didier Quentin, cosignée par quarante-quatre de mes collègues, vise à raisonner le développement de l’éolien. Elle ne sort pas de nulle part, mais d’une commission d’enquête qui nous a occupés pendant six mois et au cours de laquelle nous avons procédé à une centaine d’auditions. Mes collègues et moi-même en avons retiré une observation simple : s’il arrive qu’il y ait des résistances sur tous les sujets relatifs à la transition énergétique, celui de l’éolien en suscite de particulières. Des maires, des conseillers départementaux, des conseillers régionaux, des parlementaires, des agriculteurs, des pêcheurs, des acteurs du patrimoine et des citoyens sont tous venus faire la queue devant la commission d’enquête en demandant : « S’il vous plaît, écoutez-nous ! » Le débat à venir sera l’occasion de voir si la majorité sera capable ou non d’écouter et de sortir de l’idéologie.
    Commençons par un diagnostic : le développement de l’éolien a connu un essor formidable : en vingt ans, la puissance installée a été multipliée par 36. L’évolution a donc été très importante et le constat d’un développement anarchique est largement partagé. Je me permettrai à cet égard de citer le Président de la République, qui a appelé à être lucide en expliquant que le consensus sur l’éolien s’effritait. Mme Borne elle-même, qui vous a précédée dans vos fonctions, madame la ministre de la transition écologique, reconnaissait au Sénat, en février dernier, qu’il y a eu un développement anarchique de l’éolien terrestre, que l’État a laissé s’implanter certains projets de parcs éoliens en covisibilité avec des monuments historiques ou dispersés, et qu’il y a une saturation visuelle et un sentiment d’encerclement parfois insupportables autour de certains bourgs.
    Pourtant, de manière inexplicable, alors que nous savons qu’il y a un petit, ou plutôt un gros problème d’acceptabilité, la PPE – programmation pluriannuelle de l’énergie – a décidé d’aller plus loin en ambitionnant de porter à 15 % la production d’électricité française d’origine éolienne en 2028, ce qui suppose de doubler le nombre de mats pour atteindre un total de 14 000 à 16 000 d’ici à cette date et d’accroître le nombre de parcs éoliens en mer.

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    Cette marche forcée du déploiement de l’éolien est décidée d’en haut, depuis Paris, où la campagne est considérée comme un réservoir. En effet, il est plus facile d’implanter des éoliennes dans l’Orne si l’on habite place du Panthéon et qu’on les voit donc de loin ! Cette politique est appliquée par les préfets, tandis que les élus locaux n’ont pas leur mot à dire. Il s’agit d’une fausse politique d’aménagement du territoire. En réalité c’est au petit bonheur la chance : si les objectifs sont nationaux, ce sont des opérateurs privés qui vont ensuite démarcher des propriétaires. Il en résulte que les éoliennes sont inégalement réparties sur le territoire, avec parfois un effet de saturation important : sur les près de 2 000 parcs éoliens implantés en France métropolitaine, un quart sont situés dans Les Hauts-de-France et 20 % dans le Grand Est. La justice administrative reconnaît d’ailleurs cette saturation : pas plus tard que cette semaine, le tribunal administratif d’Amiens a retoqué un projet de construction d’éoliennes dans la Somme, motivant sa décision notamment par l’effet d’encerclement de villages proches.
    L’implantation de parcs éoliens nuit à la qualité de vie des riverains à cause des nuisances acoustiques et visuelles, au détriment de leur santé, et, d’après l’OMS – l’Organisation mondiale de la santé –, pas seulement leur santé physique, mais aussi leur santé mentale, psychologique. Selon un sondage de l’institut de sondages CSA, près de 31 % des personnes qui vivent à proximité des éoliennes s’estiment gênés par le bruit. Tous les partis admettent le problème des infrasons. Quant au paysage, l’éolien vertical, venant briser la ligne d’horizon, est susceptible de capter le regard au détriment de tel ou tel monument exceptionnel situé sur la même ligne d’horizon.
    L’autre problème est évidemment le coût. En 2019, la CRE – Commission de régulation de l’énergie –, que j’avais interrogée, l’a estimé entre 73 milliards et 90 milliards d’euros, pour produire, je vous le rappelle, 15 % de l’électricité, à comparer aux 80 milliards d’euros qu’a coûté la construction du parc nucléaire, à la source de 75 % de notre électricité pendant quarante ans. Cette préférence financière tacite pour l’éolien a évidemment pour conséquence de priver de financements les autres énergies, comme l’hydrogène, qui bénéficie d’un soutien public 10 fois moins important, ou les SMR, les petits réacteurs nucléaires modulaires de nouvelle génération, qui se disputent quant à eux 50 millions d’euros, soit 150 fois moins que l’éolien.
    Rappelons enfin que le développement de cette énergie introduit une forme d’instabilité dans le réseau électrique. Ce n’est pas moi qui le dis, mais le directeur exécutif de l’AIE – Agence internationale de l’énergie –, Fatih Birol. Celui-ci a appelé l’attention sur le risque accru de black-out en période de faible consommation, comme celle entraînée par les mesures de confinement. Il considère que l’intermittence de cette production, dépendante des conditions météorologiques, ruine le modèle des énergies pilotables – le nucléaire, le fossile ou encore l’hydroélectrique –, indispensables pour satisfaire la consommation en l’absence de vent. Il ne faut pas plaisanter avec ce risque : je vous rappelle que le black-out qui a frappé New York en 1977 pendant 36 heures a coûté 150 millions de dollars. Mon avant-propos au rapport de la commission d’enquête sur les politiques de transition énergétique alertait les pouvoirs publics sur ce risque.

    M. Vincent Descoeur

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    Exact !

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    Cette instabilité du réseau, nous en voyons déjà les prémices en 2021, et ce n’est pas l’éolien qui viendra pallier ces indisponibilités. La part d’électricité produite par l’éolien peut effectivement dans la même journée chuter de 30 à 7 voire 1 %, et cette instabilité ne fera que s’amplifier au fur et à mesure de l’augmentation de la part de l’éolien dans le mix énergétique français, mais aussi européen, puisque nous sommes interconnectés.
    Je vous rappelle enfin que le développement de l’éolien ne contribue en rien à la lutte contre le réchauffement climatique.

    M. Jean-Marie Sermier

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    Eh non !

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    C’est la conclusion d’un rapport, adopté par votre majorité et par l’opposition, sur la base de ce que le président de la CRE a déclaré devant la commission d’enquête.
    Pour toutes ces raisons, il convient de rendre raisonnable le développement de l’éolien. Il ne s’agit pas de l’interdire, à l’inverse de ce que prétendent certaines caricatures, mais de trouver un équilibre, notamment en ce qui concerne la localisation des éoliennes par rapport aux habitations. Dans des pays comme la Pologne, la Suisse ou encore l’Autriche, les distances minimales sont supérieures. Alors qu’elle est limitée à 500 mètres chez nous, elle est de 1 200 mètres en Autriche et de 10 fois la hauteur totale de l’éolienne en Pologne. (Commentaires sur les bancs du groupe LaREM.)

    M. Vincent Descoeur

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    Implacable.

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    Essayons d’en débattre ! L’OMS constate qu’il y a un risque et recommande de les éloigner davantage des habitations ; l’Académie de médecine nous dit qu’il faut qu’elles soient installées à 1 500 mètres au moins. À titre de comparaison, je vous rappelle que la flèche de Notre-Dame de Paris culmine à 100 mètres, la tour Montparnasse à 210 mètres. Et l’on s’étonne que des gens osent se plaindre quand on installe à 500 mètres de chez eux sept ou huit tours Montparnasse ! Comme c’est curieux !
    À partir du moment où des Français témoignent de leurs souffrances, n’essayons pas d’en faire une polémique politique. Essayons plutôt de trouver un équilibre entre la nécessaire recherche de lieux d’implantation et le respect du droit des gens qui vivent sur place à la tranquillité et au calme. Décidons d’implanter les éoliennes suffisamment loin des habitations pour éviter les problèmes d’acceptabilité. Précisons les règles d’éloignement par rapport aux radars, pour que la défense nationale ne soit pas gênée. Telle est la philosophie de ce texte.
    Vous dites toujours que c’est une énergie décentralisée ; il faut aussi en tirer les conséquences. C’est pourquoi l’article 2 prévoit que les communes seront consultées sur les projets d’implantation, voire auront un droit de veto.
    Enfin, l’article 3 prévoit un volet sanitaire d’étude d’impact. Un éleveur bovin du Nord indique qu’à la suite d’implantation d’éoliennes à proximité de son exploitation, sa production de lait a baissé de 50 000 litres entre avril et août dernier, et il a enregistré une surmortalité de ses veaux. Pourquoi l’humain est-il le seul mammifère qu’on ne protège pas dans ce pays ?
    Bossuet disait que « Dieu se rit des hommes qui déplorent les effets dont ils chérissent les causes. » Ne transformez pas ce débat en bataille de tranchées en faisant supprimer les amendements et les articles comme s’il n’y avait pas de problème, car il y a un problème.

    M. Jean-Marie Sermier

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    Un vrai problème !

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    Je citerai pour finir le président Giscard d’Estaing, qui évoquait, à propos de l’éolien, « un gaspillage inacceptable de fonds publics, un discours officiel trompeur, un business souvent douteux. Il s’agit de préserver les paysages de France, nos campagnes et, bientôt, notre littoral menacé aussi ». Il le disait en 2009 ; c’est encore plus vrai en 2020. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

    M. Guillaume Larrivé

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    Bravo !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre de la transition écologique.

    Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

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    L’éolien est une énergie d’avenir. Dans notre pays, le secteur représente déjà 20 000 emplois directs et indirects. Le vent fournit près de 7 % de notre consommation électrique et, avec le solaire, l’éolien a permis l’année dernière d’éviter l’émission de 22 millions de tonnes de CO2. Forte de ce bilan et forte des 82 % de Français qui en ont une opinion favorable, je le redis devant la représentation nationale, oui, cette technologie décarbonée fait partie intégrante de la solution.
    Oui, il nous en faut davantage. Il nous en faut davantage pour notre planète, pour mener la lutte contre le réchauffement climatique. Il nous en faut davantage pour notre pays, afin de créer de l’emploi durable local. Il nous en faut davantage afin de diversifier notre mix électrique, de ne plus dépendre à 70 % d’une seule technologie et de construire la résilience, l’indépendance dont nous avons besoin face aux défis immenses de ce siècle.

    M. Raphaël Schellenberger

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    C’est bien beau mais, pendant ce temps, les fournisseurs d’énergie préviennent les citoyens qu’il y aura des petites coupures d’électricité cet hiver !

    Mme Barbara Pompili, ministre

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    C’est l’ambition de ce gouvernement, qui a fixé un cap clair à notre pays au travers de la programmation pluriannuelle de l’énergie : atteindre 40 % d’électricité d’origine renouvelable d’ici à 2030. Et l’éolien est une des filières au plus gros potentiel de développement massif et rapide. La filière est compétitive, le résultat des derniers appels d’offres le montre, avec un prix moyen inférieur à 60 euros le mégawattheure.

    M. Raphaël Schellenberger

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    Après subventions !

    Mme Barbara Pompili, ministre

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    Elle est mature, et il nous en faut plus : à terme, nous prévoyons de disposer de 34 gigawatts de capacités de production en 2028. Oui, nous créons de nouveaux parcs d’éoliennes en mer pour que notre pays tire profit de son formidable potentiel marin. Et oui, la loi de finances que cette assemblée vient de voter prévoit un budget historique de près de 6 milliards d’euros pour les énergies renouvelables électriques, soit une hausse de 25 %.

    M. Jean-Marie Sermier

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    Une gabegie !

    Mme Barbara Pompili, ministre

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    Cette trajectoire, c’est celle de la France, c’est celle qui est portée par la majorité et c’est celle que je défendrai pour que les Français puissent compter demain sur une énergie décarbonée et résiliente.
    Il s’agit de voir loin,…

    M. Raphaël Schellenberger

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    Il n’y a même plus de technos au ministère de la transition écologique : il n’y a plus que des idéologues !

    Mme Barbara Pompili, ministre

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    …d’anticiper – oui, d’anticiper –, de se préparer sérieusement, avec des scénarios crédibles, et de construire un système de production adaptée au temps futur, un temps de lutte contre le réchauffement climatique, qui nous impose de produire sans émettre de CO2, mais aussi un temps de crise, imprévisible, à l’image de celle que nous traversons, qui nous impose de disposer de plusieurs sources d’énergie pour parer à toutes les éventualités. Ce choix, c’est celui de la raison et de la prévoyance, celui qui nous protégera demain.
    C’est pourquoi, monsieur le rapporteur, je ne peux que regretter les termes excessifs et volontairement polémiques que vous choisissez pour parler d’un sujet aussi sérieux et aussi stratégique pour la nation. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LR.) Non, le développement des éoliennes ne se fait pas à marche forcée. Non, il n’est pas imposé aux citoyens. (Vives exclamations sur les bancs du groupe LR.)

    Mme Sandra Marsaud

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    Ah ! Très bien !

    M. Raphaël Schellenberger

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    Qui est excessif là ? C’est insupportable !

    Mme Barbara Pompili, ministre

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    Nous, politiques, devons certes nous faire l’écho des préoccupations citoyennes, mais faut-il, au passage, attiser les peurs ? Faut-il volontairement simplifier le débat pour mieux l’empêcher ?

    Mme Sandra Marsaud

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    Très bien !

    M. Raphaël Schellenberger

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    La peur est votre fonds de commerce électoral !

    Mme Barbara Pompili, ministre

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    Permettez-moi de ramener les choses à leur juste mesure. La France serait envahie d’éoliennes ? L’Allemagne dispose de 5 fois plus d’éoliennes au kilomètre carré que la France, le Danemark de 3 fois plus, le Royaume-Uni de 2 fois plus. Même en suivant le cap que la France s’est fixé, notre pays aura toujours, dans les années à venir, une densité 2 fois inférieure à celle de l’Allemagne à ce jour.

    M. Raphaël Schellenberger

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    Et le charbon ? Et le lignite ? Si on en parlait ?

    Mme Barbara Pompili, ministre

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    Cela dit, j’entends bien sûr ceux qui perçoivent ce changement nécessaire comme un bouleversement ; je les entends et je les écoute. Oui, nos champs d’éoliennes ont parfois été trop concentrés, donnant parfois localement un sentiment de saturation. Qui le nie ?

    Mme Émilie Bonnivard

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    Vous !

    Mme Barbara Pompili, ministre

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    Pas moi en tout cas. Je n’habite pas à côté du Panthéon, je suis une ancienne élue de la Somme, ma terre de cœur, où l’éolien est un sujet qui fait débat et divise parfois, et j’ai une conviction, acquise au long de mon parcours : on ne fera pas la transition écologique contre les Françaises et les Français, où qu’ils soient. C’est en les embarquant qu’on la réussira, en écoutant chacune et chacun, en créant les conditions du débat et du consensus : c’est mon engagement et ma responsabilité.
    Néanmoins je ne crois pas que cette proposition de loi nous donne les moyens de répondre à ces enjeux.

    M. Pascal Brindeau

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    Si !

    Mme Barbara Pompili, ministre

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    Augmenter encore la distance minimale entre les éoliennes et les habitations, comme il est proposé à l’article 1er, n’est pas justifié par des difficultés objectives nouvelles. Ce n’est pas la solution. La loi prévoit déjà au moins 500 mètres d’écart, et rien, j’insiste, n’interdit d’imposer au cas par cas des distances plus élevés, ce qui est d’ailleurs le cas, en conséquence de certaines études d’impact. De même, le code de l’environnement prévoit déjà trois avis de conformité, pas moins, pour nous assurer que les installations n’interfèrent pas avec les radars.
    Offrir à une collectivité un droit de veto, comme il est proposé à l’article 2, reviendrait à remettre en cause notre droit de l’environnement. Notre droit en vigueur porte déjà une grande attention à l’association des citoyens et des collectivités, préalablement à la prise de décision.
    Enfin pour ma part, je ne crois pas que les plaintes des riverains soient imputables à l’insuffisance des études d’impact. Le droit prévoit déjà un volet santé dans ces études. Avant de rallonger de complexifier les procédures, nous devrions plutôt rechercher si corrélation vaut causalité.
    Si j’estime que ce texte ne répond pas aux enjeux, c’est bien que je mesure l’importance d’apaiser les clivages locaux, les oppositions parfois fortes des riverains.

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    C’est mal parti…

    Mme Barbara Pompili, ministre

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    C’est que je crois au développement de l’éolien, oui, mais un éolien apaisé, un éolien harmonieux qui s’intègre dans la vie des territoires et des habitants.

    Mme Émilie Bonnivard

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    Ça n’existe pas !

    Une députée du groupe LaREM

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    Mais si !

    Mme Barbara Pompili, ministre

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    Depuis près d’un an, mon ministère travaille, avec l’ensemble des parties prenantes, pour définir cette nouvelle manière de faire que je préconise. Quatre axes d’action se sont dégagés pour répondre aux griefs adressés à l’éolien terrestre ; si je ne peux pas présenter dès aujourd’hui l’ensemble des mesures que nous allons prendre,…

    Mme Émilie Bonnivard

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    Dommage !

    Mme Barbara Pompili, ministre

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    …nous allons vous les annoncer très vite, vous pouvez compter sur moi.
    Je peux déjà vous dire que nous voulons agir concrètement : bruits, balisages, empreinte en fin de vie de l’installation, ce sont des réalités dans les territoires et nous devons en tenir compte pour les réduire ; c’est une question d’acceptabilité, d’efficacité et de justice.
     
     
     
     
    Enfin, je suis convaincue que les projets les mieux acceptés sont ceux qui favorisent l’implication des collectivités et des citoyens. Déjà, les élus locaux sont obligatoirement consultés lors de l’enquête publique. Déjà, la loi ASAP – d’accélération et de simplification de l’action publique – améliorera l’information de la commune d’implantation et des communes limitrophes. Cette démocratie environnementale dans les territoires et par les citoyens, j’y suis personnellement très attachée. Je pense qu’il nous faut aller plus loin et faire en sorte que les territoires puissent se saisir pleinement du sujet des implantations éoliennes et de leur planification énergétique, dans une vraie réflexion territoriale, car la confiance et la prévisibilité sont des enjeux clés, et je peux vous dire que c’est déjà possible.
    Quand j’entends certains élus en place hurler que rien n’est prévisible, qu’on ne peut pas savoir ce qui va se passer, en attisant la peur des citoyens, en criant à l’anarchie, alors qu’ils pourraient tout à fait organiser et planifier dans des schémas le développement de l’éolien pour que chaque citoyen puisse savoir où et comment les éoliennes vont s’implanter, je trouve cela complètement irresponsable. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM. – Exclamations sur plusieurs bancs des groupes LR, Agir ens et UDI-I.)
    Alors oui, à terre comme en mer, faire naître les consensus qui font date, sur le terrain, avec les collectivités, les élus, les riverains, les associations, c’est la condition indispensable aux grands projets.
    Lutter contre la saturation est tout autant indispensable. C’est le dernier axe sur lequel mon ministère travaille depuis près d’un an. Quelle est la situation ? Plus de 80 % du territoire est inaccessible à l’éolien terrestre : radars militaires ou météo, zones d’entraînement aérien, balises de radionavigation constituent autant d’obstacles. Il est indispensable de libérer de l’espace pour construire de l’acceptabilité. Nous devons veiller à la qualité de l’intégration paysagère des champs d’éoliennes. Là aussi, mon ministère sera au rendez-vous et je travaille évidemment avec mes collègues du Gouvernement pour parvenir aux meilleures solutions.
    L’éolien fait partie du monde de demain, un monde plus résiliant, plus écologique. Ce monde, nous le construirons avec ambition, nous le construirons bien avec tous et dans tous les territoires. C’est pour moi la seule manière de mener la transition écologique. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)

    Discussion générale

    Mme la présidente

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    Dans la discussion générale, la parole est à M. Emmanuel Maquet.

    M. Emmanuel Maquet

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    Alors que la Convention pour le climat a montré l’efficacité du recours à la consultation citoyenne, il est temps d’organiser un débat ouvert et dépassionné sur les choix de production d’électricité en France. Je suis donc très heureux, au nom du groupe Les Républicains, que notre niche parlementaire nous donne enfin l’occasion d’aborder aujourd’hui la problématique du développement de l’éolien en France.
    En fixant pour objectif de porter la part des énergies dites « renouvelables » à 40 % du mixte électrique d’ici à 2030 tout en ramenant de 70 à 50 % la production du nucléaire, la stratégie approuvée par le Gouvernement le 21 avril dernier dans le décret de programmation pluriannuelle de l’énergie constitue à mon sens une triple faute : faute pour le climat ; faute contre les consommateurs et les contribuables ; faute contre la sécurité de l’approvisionnement en électricité et l’intérêt général.

    M. Jean-Marie Sermier

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    Eh oui !

    M. Emmanuel Maquet

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    Depuis le début de la législature, à de nombreuses reprises, nous avons essayé de provoquer le débat sur l’éolien en France. Avec le dépôt de nombreux amendements et des interventions en commission et en séance, nos élus n’ont cessé de dénoncer les impacts sur l’environnement, les atteintes à la concertation publique ou encore l’aberration financière de ces machines à vent. Depuis vingt-cinq ans et les décisions d’Yves Cochet, alors ministre de l’environnement,…

    Mme Barbara Pompili, ministre

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    Merci pour lui !

    M. Emmanuel Maquet

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    …notre territoire est véritablement livré aux spéculateurs du vent. Ces investisseurs sont intéressés par la garantie de vingt ans offerte par l’État : avec l’éolien, ils sont à l’abri des retournements des marchés financiers et bénéficient d’une véritable rente. Ce n’est pas un hasard si 80 % des mâts terrestres sont la propriété de fonds de pension. Cette PPL est enfin l’occasion de dénoncer ce scandale de l’éolien tous azimuts dans notre pays.
    Le premier scandale est écologique. De leur conception à leur fin de vie en passant par leur mode de fonctionnement, les éoliennes ne répondent pas à la dimension écologique qu’elles prétendent incarner. Pour fabriquer une éolienne, il faut utiliser entre 200 kilos et 1 tonne de terre rares. Le plan pluriannuel de l’énergie précise d’ailleurs que les éoliennes sont le système de production d’électricité nécessitant le plus de terres rares.

    M. Raphaël Schellenberger

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    Ça aussi, c’est une réalité !

    M. Emmanuel Maquet

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    Il faut savoir que celles-ci sont extraites principalement en Asie, sans considération des conséquences environnementales. Dans ces centres d’extraction, on broie des quantités industrielles de pierre afin d’obtenir une fine poudre qui sera séparée des métaux rares en trempant dans des bains d’acide sulfurique et oxalique. Ces bains usés sont eux directement jetés dans des lacs toxiques qui polluent les nappes phréatiques.
    Pire encore, cette technique d’extraction…

    M. Raphaël Schellenberger

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    Délocalise la pollution !

    M. Emmanuel Maquet

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    …conduit à de la radioactivité. À Baotou, en Mongolie intérieure, où se trouve le principal site d’extraction, on a mesuré une radioactivité trois fois supérieure à celle de Tchernobyl. Vous imaginez bien que les conséquences sanitaires sont désastreuses pour les populations concernées.
    Une fois installées, le mode de fonctionnement de ces éoliennes est aussi loin de l’image verte que l’on veut nous vendre. Nous pouvons tous le voir très facilement dans nos campagnes. Les éoliennes ne fonctionnent pas tout le temps, soit parce qu’il y a trop de vent et qu’elles doivent alors être stoppées, soit parce qu’il n’y a tout simplement pas assez de vent. Pour compenser cette intermittence, on est obligé d’utiliser des énergies fossiles. L’industrie nucléaire étant peu pilotable, les usines à gaz, au pétrole, au charbon ou au lignite sont mobilisées pour venir en support à l’éolien. C’est la raison pour laquelle, en Allemagne, malgré les 500 milliards d’euros dépensés dans les énergies éoliennes et photovoltaïques, il n’y a pas eu de baisse des gaz à effet de serre, à cause des émissions produites par les usines au charbon et à lignite.

    Mme Valérie Beauvais

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    Très bien !

    M. Emmanuel Maquet

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    La fin de vie d’une éolienne participe aussi à ce scandale écologique. Il faut en effet avoir à l’esprit que la durée de vie d’une éolienne ne dépasse pas vingt ans et qu’elle n’est pas entièrement recyclable. Lors du démantèlement d’un parc éolien, seuls les mâts sont recyclables.

    Mme Barbara Pompili, ministre

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    Mais non !

    M. Emmanuel Maquet

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    Les socles, composés en moyenne de 50 tonnes de ferraille et de 1 500 tonnes de béton armé, restent sur place et viennent durablement polluer nos sols, dans la mesure où ils ne peuvent être réutilisés en cas de repowering, c’est-à-dire la réinstallation d’éoliennes plus puissantes encore. (Mme la ministre lève les bras au ciel en signe de désapprobation.) Les pales, quant à elle, ne pouvant être ni broyées ni brûlées, les risques de cancer étant aussi importants qu’avec l’amiante, la seule solution est de les enterrer, ce qui crée des décharges de pales d’éoliennes.

    M. Raphaël Schellenberger

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    Quel gâchis !

    M. Emmanuel Maquet

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    Au regard de ces faits, on identifie très clairement le problème de l’éolien. Les résultats obtenus à travers le développement de cette filière sont paradoxaux, l’inverse de ceux recherchés en matière de transition énergétique.
    Le second scandale est celui de l’impact des éoliennes sur la santé et la biodiversité. Les éoliennes conduisent à l’émission d’infrasons, basses fréquences aux conséquences désastreuses sur la santé. Dans Le Monde, on parle même de « syndrome éolien » : tachycardies, céphalées, troubles de l’équilibre, insomnies, les pathologies sont nombreuses. Les personnes qui vivent à côté des éoliennes expriment un mal-être très important, en partie dû à ces infrasons mais également aux effets stroboscopiques et à l’électricité diffusée dans le sol par les câbles de raccordement.
    Malgré tout, certains expliquent encore que ces problèmes de santé sont dus à l’effet nocebo : à l’inverse de l’effet placebo, les informations négatives véhiculées sur les éoliennes provoqueraient les maladies des personnes vivant à proximité de celles-ci. (Exclamations sur quelques bancs du groupe LR.) Pourtant, à Nozay, petit village de Loire-Atlantique, l’installation d’un parc éolien a totalement perturbé le cadre de vie des habitants et a causé la mort de nombreuses vaches. Comment expliquer le décès de ces vaches ? Certainement pas par l’effet nocebo ! Il est grand temps de prendre conscience de ces conséquences sanitaires, et cette PPL, je crois, est une première étape.
    En matière de biodiversité aussi le bilan est catastrophique. Les études internationales universitaires sur les conséquences des éoliennes dans le monde sont édifiantes. Au Nouveau-Mexique, en Inde, sur l’île de Man, en France, en Australie, partout dans le monde, les spécialistes de la biodiversité alertent à propos des conséquences désastreuses sur la nature : diminution des populations d’oiseaux marins, divisées par deux ou trois au large de l’île de Man ; pertes importantes des rapaces, en particulier du milan royal, relevées en Inde, en Suisse ou au Luxembourg ; échouage des baleines à proximité des centrales éoliennes au large de Rhode Island ou en mer du Nord ; mortalité inexpliquée des vaches dans différentes exploitations en France ; décès des visons au Danemark ; hécatombe mondiale des chauves-souris, essentielles à notre écosystème.
     
    Dans le cas précis de l’éolien offshore, les conséquences sont également graves pour l’écosystème marin. Les poissons disparaissent, tout simplement. Au large du Tréport et de Mers-les-Bains, les pêcheurs ont subi de plein fouet les essais d’installation des pieux du futur parc éolien, avec une baisse de 50 % du produit de leur pêche. Quel sera le résultat une fois les éoliennes installées ?
    Le troisième scandale, vous le savez, est financier.

    M. Jean-Marie Sermier

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    Eh oui !

    M. Emmanuel Maquet

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    Entamée il y a plus de vingt ans, l’aventure de l’éolien dans notre pays est celle d’une électricité subventionnée.

    M. Raphaël Schellenberger

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    Un gouffre !

    M. Emmanuel Maquet

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    Les différents soutiens directs à l’éolien représentent entre 72 milliards et 90 milliards d’euros, dont 54 milliards déjà dépensés ou engagés, et entre 18 milliards et 36 milliards à venir pour atteindre les objectifs de la PPE.

    M. Raphaël Schellenberger

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    Avec cela, nous aurions pu faire de la vraie transition écologique !

    M. Emmanuel Maquet

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    Ces sommes sont astronomiques, pour un résultat, vous l’aurez compris, plus que contestable.
    Cet argent, nous avons encore le moyen de l’économiser, en stoppant ces soutiens financiers qui ne servent qu’à générer des profits pour des fonds privés. C’est d’ailleurs ce qui se passe en Allemagne, qui supprime ses subventions à l’éolien. Lors de la COP 24, la Pologne a décidé d’arrêter la filière éolienne et de mettre en place un plan de désinstallation des éoliennes existantes d’ici à 2040. La Norvège vient quant à elle d’arrêter son plan national d’installations éoliennes. Au niveau européen, on observe une baisse de 30 % du nombre d’éoliennes installées ; en Allemagne, elle est même de 80 %. Dans le monde, on enregistre une baisse ces trois dernières années de 20 % du nombre d’éoliennes installées.

    M. Raphaël Schellenberger

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    Le Gouvernement est toujours à contre-courant !

    M. Jean-Marie Sermier

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    On n’est pas dans le vent ! (Sourires.)

    M. Emmanuel Maquet

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    Il y a donc une prise de conscience internationale. La France doit suivre ce mouvement. Nous ne pouvons accepter que notre pays soit la terre d’accueil des commerciaux de l’éolien, qui, voyant qu’ils n’ont plus de marché dans les autres pays, se précipitent chez nous avec des méthodes de lobbying contestables.
    Vous l’aurez compris, il est plus que jamais temps de raisonner le développement de l’éolien dans notre pays, car c’est aussi ce que nous demandent nos concitoyens. En effet, si le développement de cette énergie a pu susciter un certain enthousiasme, l’implantation des parcs éoliens provoque des oppositions de plus en plus fortes. Pour preuve, sept projets éoliens sur dix font actuellement l’objet d’un recours devant les juridictions administratives.
    Pourtant, l’ambition de porter à 15 % la production d’électricité française d’origine éolienne en 2028 supposerait de porter le nombre d’éoliennes terrestres de 8 000 en 2018 à un étiage compris entre 14 200 et 15 500 en 2028, tout en augmentant le nombre de parcs d’éoliennes en mer : toujours plus d’éoliennes alors que la contestation est toujours plus grande.
    Le sujet de l’éolien offshore résume à lui seul ce décalage. La France a voulu rattraper son retard dans le domaine et a donc lancé six projets via trois appels d’offres, attribués de 2012 à 2014, et un septième projet à Dunkerque. Mais à quel prix ? Les deux premiers appels d’offres ont été lancés dans la précipitation. À la différence de ce qui se pratique ailleurs en Europe, les sites choisis l’ont été sans étude préalable. Pire, ces projets qui détruisent de nombreux habitats et espèces ont été attribués contre l’avis des professionnels de la mer et contre l’avis des populations concernées. À ce sujet, Jean-Louis Bal, président du Syndicat des énergies renouvelables, a même déclaré, devant notre commission d’enquête parlementaire, à propos d’un dossier que je connais bien, au large de ma commune : « Ce projet montre ce qu’il ne faut pas faire. »
    Raisonner le développement de l’éolien en France, c’est donc commencer dès maintenant, avec pour première étape l’obligation d’installer des éoliennes à plus de 1 500 mètres des habitations pour les éoliennes terrestres d’une hauteur supérieure à 180 mètres, dans la perspective du renouvellement des parcs et de la procédure de repowering. Nous devons éloigner proportionnellement ces aérogénérateurs en fonction de la hauteur des mâts et surtout respecter l’avis des élus locaux concernés directement par l’implantation des projets.
    Il est temps de prendre conscience de la part sombre du développement de la filière éolienne dans notre pays depuis plus de vingt ans ! Au regard de la réalité des faits, cette marche forcée doit cesser. La filière doit être repensée en prenant notamment en compte le désenchantement de toutes celles et de tous ceux qui en subissent les conséquences. Je vous invite donc à adopter cette PPL, qui constituerait une première réponse apportée aux Français qui souffrent de ne plus être entendus par leurs élus ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Bruno Millienne.

    M. Bruno Millienne

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    La question du développement de l’éolien a été débattue de très nombreuses fois dans cet hémicycle dans le cadre de l’examen de textes aux objectifs très divers. Je pense notamment au projet de loi pour un État au service d’une société de confiance – ESSOC –, au projet de loi d’accélération et de simplification de l’action publique – ASAP – et au projet de loi relatif à l’énergie et au climat. Preuve, s’il en est, que l’accroissement de l’énergie éolienne sur le territoire suscite de fortes réactions, essentiellement liées à un manque d’acceptabilité sociale.
    Les opposants à l’éolien mettent en avant trois principaux arguments, auxquels je veux prendre le temps de répondre. Le premier est un coût supposé grandissant de l’énergie éolienne pour le contribuable. Au sein du groupe Mouvement démocrate (MoDem) et démocrates apparentés, nous considérons, sur la base des travaux de la Commission de régulation de l’énergie, que les nouveaux projets d’éoliennes ne conduiront en aucun cas à un doublement du prix de l’électricité. Le développement de l’éolien est même susceptible d’avoir un impact baissier sur le marché de gros de l’électricité.
    Le deuxième argument est la dimension supposée faiblement écologique de l’énergie éolienne. En 2017, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie – ADEME – avait réalisé une étude sur les différentes étapes du cycle de vie d’une installation éolienne : la fabrication des composants du système éolien, l’utilisation, la maintenance, la désinstallation et le traitement en fin de vie. Les résultats de cette étude…

    M. Raphaël Schellenberger

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    Mais qui la préside ?

    M. Bruno Millienne

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    …confirment que les éoliennes sont faiblement émettrices de CO2.

    M. Raphaël Schellenberger

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    C’est vrai !

    M. Bruno Millienne

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    Elle montre, en outre, que l’éolien est une énergie très performante puisque seuls le nucléaire et l’hydraulique seraient moins émetteurs de dioxyde de carbone. Bien entendu, les travaux de recherche doivent se poursuivre afin de continuer d’améliorer les performances environnementales des éoliennes. Félicitons-nous d’ores et déjà des avancées obtenues quant au recyclage des pales d’éoliennes lors de leur démantèlement.
    Enfin, le dernier argument avancé par les opposants aux éoliennes concerne les nuisances visuelles et sonores qu’elles engendrent. Nous pensons en effet qu’elles ne doivent pas être sous-estimées et que c’est sur ce point que nous devons concentrer tous nos efforts.
    Néanmoins, monsieur le rapporteur, plutôt que d’inscrire une distance minimale dans la loi et de prendre une fois encore, depuis Paris, une mesure déclinée dans les territoires – ces derniers sont très divers –,…

    Mme Barbara Pompili, ministre

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    C’est bien !

    M. Bruno Millienne

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    …pourquoi ne pas faire enfin confiance aux élus locaux ? À l’Assemblée nationale, de très nombreux rapports ont été écrits sur le sujet des éoliennes. Je vous en conjure, chers collègues, utilisons nos propres travaux, coconstruits avec les administrateurs, avant de nous lancer dans l’édiction de nouvelles normes !
    Notre collègue Bruno Duvergé a présenté un rapport d’une très grande qualité il y a deux ans au nom de la mission d’information relative aux freins à la transition énergétique. Le groupe des démocrates souhaite que ses conclusions, que nous partageons sans réserve, soient enfin prises en compte. Nous sommes en effet convaincus, comme Bruno Duvergé, que les phénomènes de saturation et de densification excessive des parcs éoliens pourraient être évités grâce à une meilleure planification territoriale.
    Il est indispensable d’intégrer leurs enjeux environnementaux, par exemple leur impact paysager, et d’anticiper les problématiques liées aux conflits d’usages – circulation aérienne, radars météorologiques et d’aviation – dans la planification territoriale des projets éoliens. Une meilleure planification permettra d’éviter le mitage du territoire ou, à l’inverse, la densification excessive des parcs éoliens. La réutilisation des sites éoliens en fin de vie, pour y réimplanter des machines plus performantes, plutôt que la mise en place de nouveaux parcs éoliens, est également encouragée.
    Afin de favoriser l’acceptabilité sociale des projets et leur appropriation territoriale, Bruno Duvergé proposait également de mettre en place un réseau de conseillers éoliens afin d’aider les collectivités à mieux intégrer les projets éoliens dans leur dynamique territoriale et de promouvoir des systèmes qui réduisent les effets sonores et visuels des éoliennes. France énergie éolienne – FEE – a ainsi suggéré l’utilisation d’un système de balisage circonstancié, qui existe déjà dans d’autres pays et qui permettrait de maintenir les éoliennes éteintes et de ne les allumer qu’en cas de détection d’un aéronef. Cette proposition mériterait d’être davantage étudiée.
    Dans son rapport, Bruno Duvergé proposait par ailleurs de réaliser des études afin de connaître l’impact de l’augmentation de la distance des éoliennes par rapport aux habitations sur la taille du gisement éolien.
    Encore une fois, monsieur le rapporteur, nous ne contestons pas les problèmes, mais nous n’y apportons pas les mêmes solutions que vous. La mise en œuvre des préconisations que je viens de citer doit passer non pas par la loi, mais par l’ingénierie locale. Il est de notre devoir d’insuffler une impulsion politique pour les planifications territoriales, pour les réseaux de conseillers éoliens et pour le soutien à la recherche. Selon nous, l’inscription d’une nouvelle distance, telle que vous la préconisez dans la proposition de loi, est non seulement à rebours des solutions à apporter, mais également contreproductive car dangereuse pour le développement de l’énergie éolienne dans le territoire.
    Vous ne nous invitez pas à débattre sérieusement de ce sujet compliqué,…

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    Ce serait dommage ! Jusqu’ici, c’était bien ! 

    M. Bruno Millienne

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    …mais vous profitez de cette tribune pour attaquer l’énergie éolienne. Pour ces différentes raisons, nous ne pourrons soutenir votre texte. (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et LaREM.)

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    In cauda venenum ! 

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Gérard Leseul.

    M. Gérard Leseul

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    Le groupe Les Républicains nous présente aujourd’hui une proposition de loi visant à « raisonner » le développement de l’éolien. En réalité, ce texte a pour principal objet de freiner le développement de l’éolien en France.

    M. Alain Perea

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    Exactement !

    M. Gérard Leseul

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    Les dispositions qu’il propose poursuivent cet objectif implicite. Malheureusement, elles sont très éloignées d’une position équilibrée qui permettrait de respecter les objectifs que la France s’est fixés. La stratégie nationale bas carbone, introduite en 2015 par la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, fixe pourtant un cap clair : la neutralité carbone d’ici à 2050. Plus vite cet objectif sera atteint, mieux cela sera pour les générations futures et la protection de l’environnement. Pour l’atteindre, il nous faut mobiliser plusieurs leviers, parmi lesquels la décarbonation de la production énergétique. L’éolien est une partie certes modeste de la solution, mais une partie tout de même.
    La part de l’éolien dans la production électrique française représente aujourd’hui un peu plus de 5 % et le projet de programmation pluriannuelle de l’énergie ambitionne de la porter à 15 % en 2028. La part des énergies renouvelables devrait ainsi atteindre 40 % de la production d’électricité en 2030.
    Nous en sommes tous conscients, l’énergie éolienne ne réglera pas tous les problèmes et ne permettra pas à elle seule – on peut le regretter – de relever le grand défi de la transition énergétique et plus largement le défi de la transition écologique. Elle n’en demeure pas moins essentielle pour enrichir le mix énergétique français, condition sine qua non à la souveraineté énergétique du pays et au respect de l’environnement.
    L’éolien permet aujourd’hui de développer des sources d’énergies renouvelables compétitives puisque les tarifs moyens constatés dans les différents appels d’offres approchent désormais 50 à 60 euros par mégawattheure pour le terrestre et l’offshore.
    Bien sûr, un développement harmonieux de l’éolien doit être assuré sur l’ensemble du territoire pour éviter que certaines régions et certaines zones portent à elles seules la politique de développement de l’éolien. Il serait sans doute judicieux de retravailler les contraintes militaires et aéronautiques, s’agissant des radars notamment, et surtout de mieux organiser la couverture territoriale de l’éolien.
    Aujourd’hui, vous l’avez souligné, la situation n’est pas satisfaisante. J’ai fait l’exercice de superposer deux cartes de l’hexagone : la première concerne les gisements éoliens présents dans le pays ; la seconde répertorie les projets éoliens sur l’ensemble du territoire. Le constat est sans appel : les régions Nord et Grand Est concentrent la grande majorité des installations éoliennes alors que d’autres régions pourraient également prendre leur part et contribuer au grand projet français de transition énergique. Ce constat soulève la question de la solidarité dans l’effort, car ce sont les efforts partagés et la solidarité qui nous permettront de faire face aux grands défis écologiques, à commencer par celui de la production énergétique, qui nous intéresse particulièrement dans ce texte.
    Nous préconisons de rechercher et de proposer des solutions dans un esprit de responsabilité. Le développement de l’éolien devrait être mieux encadré par la mise en œuvre d’une réelle planification territoriale définissant des zones d’implantation potentielle de l’éolien – des ZIPE –, dont l’élaboration serait menée par les élus locaux, et non par les services de l’État, et qui devrait recueillir la majorité qualifiée, favorisant ainsi les compromis et une adhésion large au schéma territorial. Le projet devrait avoir fait l’objet d’une évaluation environnementale et d’une enquête publique, ce qui permettrait d’entendre les associations et les habitants et de favoriser ainsi l’acceptabilité sociale des projets d’installation.
    Par ailleurs, monsieur le rapporteur, peut-être aurait-il fallu, dans votre proposition de loi, travailler sur une limitation proportionnée de la taille des pylônes terrestres, des pales ou des rotors dans certains territoires.

    M. Vincent Descoeur

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    Oh là là ! On a déjà essayé ! 

    M. Gérard Leseul

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    Enfin, nous regrettons que le texte laisse totalement de côté la question de l’éolien offshore. La France est pourtant un pays côtier et possède un potentiel de gisements éoliens maritimes de grande qualité.
    En résumé, cette proposition de loi, qui consiste à augmenter de manière excessive les distances entre les habitations et une installation, et à créer un droit de veto des communes sur les projets éoliens, s’apparente à un abandon de l’éolien lui-même. Les questions posées par M. le rapporteur sont pertinentes, mais les réponses apportées sont à rebours d’une position équilibrée. Les mesures qu’il propose contribueraient à entériner l’ajournement sine die de l’ambition éolienne française. Si la proposition de loi était adoptée, elle bloquerait tout développement des projets éoliens.

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    Ah bon ? Ça reste à prouver ! 

    M. Gérard Leseul

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    Pour toutes ces raisons, le groupe Socialistes et apparentés votera contre la proposition de loi. Il est de notre responsabilité de trouver les conditions d’une acceptabilité partagée pour concilier les légitimes préoccupations territoriales, l’intérêt général et l’autonomie énergétique de la France. C’est le grand défi de la transition écologique, auquel, malheureusement, ne répond pas la proposition de loi.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Laure de La Raudière.

    Mme Laure de La Raudière

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    Depuis des années, les éoliennes sont le symbole de la transition écologique et de la lutte contre le réchauffement climatique. Nous les voyons en photo ou en dessin sur tous les documents de communication des projets de développement durable des entreprises, des collectivités et de l’État. Le déploiement de cette énergie est-il réellement utile pour lutter contre les émissions de gaz à effet de serre et pour favoriser un mix électrique bas carbone ?

    M. Jean-Marie Sermier

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    Non !

    Mme Laure de La Raudière

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    La réponse est non. Ce n’est pas moi qui le dis, mais le président de la Commission de régulation de l’énergie, Jean-François Carenco,…

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    Eh oui !

    Mme Laure de La Raudière

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    …qui s’en est expliqué devant la commission d’enquête sur l’impact économique, industriel et environnemental des énergies renouvelables, sur la transparence des financements et sur l’acceptabilité sociale des politiques de transition énergétique, présidée par M. le rapporteur.
    Pourtant, le déploiement de l’énergie éolienne s’est accéléré depuis les années 2000.

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    Eh oui !

    Mme Laure de La Raudière

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    Au cours des vingt dernières années, la France a consacré plus de 9 milliards d’euros à des aides directes à la filière ; 70 milliards sont déjà engagés.

    M. Jean-Marie Sermier

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    Dix milliards seraient déjà trop ! 

    Mme Laure de La Raudière

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    Le projet de programmation pluriannuelle de l’énergie prévoit l’augmentation du nombre d’éoliennes terrestres, qui devraient passer de plus de 8 000 en 2019 à près de 15 000 en 2028. Cette énergie est-elle aussi vertueuse en matière de protection de l’environnement que l’image que l’on nous en donne ? La réponse est également non. Le bilan environnemental des éoliennes n’est pas aussi formidable que ses promoteurs veulent le faire croire. Transition écologique et éoliennes sont loin de rimer aujourd’hui.
    En effet, la construction de la nacelle d’une éolienne nécessite l’utilisation d’importantes quantités de terres rares. On sait, madame la ministre, que leur extraction participe à la destruction du tissu végétal et des terres agricoles en Chine, à la pollution de l’air et à la production de déchets radioactifs.

    Mme Barbara Pompili, ministre

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    Non ! Soyons sérieux ! 

    Mme Laure de La Raudière

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    En outre, les pales des éoliennes – mon collègue Emmanuel Maquet l’a dit – sont fabriquées à partir de matériaux composites non recyclables. Pour le moment, lorsqu’elles arrivent en fin de vie, elles sont donc enfouies. Enfin, mes collègues l’ont également rappelé, le socle des éoliennes est en béton armé. Difficile de dire, après tout cela, que les éoliennes contribuent au développement durable !
    J’ajoute que l’énergie éolienne terrestre a une faible productivité du fait de son intermittence. En moyenne, le fonctionnement d’une éolienne terrestre à pleine puissance est effectif environ 21 % du temps, de façon non prédictive et non pilotable.
    On pourrait se dire que le choix des éoliennes nous permet de diversifier nos sources d’énergie. Soit, l’argument est acceptable, mais à condition, madame la ministre, que leur déploiement se déroule sereinement dans les territoires. Or ce n’est pas le cas ou, plutôt, ce n’est plus le cas. Partout, des oppositions à l’implantation des parcs éoliens se manifestent. Elles sont maintenant fortes et locales. Le comportement de certains promoteurs n’est pas étranger à ces réactions. Ils arrivent parfois comme des chasseurs de primes, négociant en catimini avec les propriétaires de terres, parfois avec le maire, mais pas toujours. Depuis 2013, les outils juridiques permettant aux élus locaux et à l’État d’organiser harmonieusement le déploiement des éoliennes sur le territoire ont…

    M. Vincent Descoeur

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    Fondu au soleil !

    Mme Laure de La Raudière

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    …été supprimés, malgré le nombre important de schémas d’aménagement du territoire existants. Les schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires – SRADET – ne sont pas prescriptifs, les plans climat air énergie territoriaux – PCAET – ne sont pas prescriptifs, les schémas de cohérence territoriale – SCOT – ne sont pas prescriptifs. Quant aux plans locaux d’urbanisme intercommunal – PLUI –, ils ne permettent pas d’interdire l’implantation d’une éolienne sur le territoire d’une commune, quand bien même le maire souhaiterait protéger un monument historique dans un rayon de cinq kilomètres.
    Nous sommes donc démunis sur le terrain : nous nous trouvons dans l’impossibilité de planifier le développement des éoliennes là où elles sont souhaitées, aussi bien que leur interdiction là où elles ne le sont pas. L’État, d’ailleurs, est aussi démuni que les élus.

    M. Vincent Descoeur

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    Elle a tout à fait raison !

    Mme Barbara Pompili, ministre

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    Eh bien, travaillons ensemble !

    Mme Laure de La Raudière

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    C’est ainsi que nous voyons fleurir des projets réalisés sans se soucier des paysages et du patrimoine remarquables, donc de ce qui fait l’identité de certains territoires ou leur attrait touristique. Je suis certaine que nous le regretterons d’ici quelque temps.
    C’est pourquoi je veux remercier notre collègue Julien Aubert pour son investissement sur ce sujet,…

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    Je vous remercie.

    Mme Laure de La Raudière

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    …et le groupe LR de nous permettre d’en débattre aujourd’hui.

    Plusieurs députés du groupe LR

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    Merci !

    Mme Laure de La Raudière

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    Très honnêtement, je dois dire que le groupe Agir ensemble est partagé quant à l’approche juridique à adopter sur le sujet du développement éolien, mais nous sommes tous en phase pour souhaiter un apaisement des relations entre les projets éoliens et leurs territoires ; c’est indispensable pour que réussisse la politique énergétique du Gouvernement. À titre personnel, je soutiendrai la proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes LR et UDI-I.)

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    Un peu de bon sens, ça fait tellement de bien !

    M. Alain Perea

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    C’est votre bon sens !

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    C’est mieux que le bon sens « not in my backyard » !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Pascal Brindeau.

    M. Pascal Brindeau

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    Je tiens d’abord à féliciter le rapporteur Julien Aubert pour la qualité de son travail – engagé de longue date, sérieux, précis et sincère –, visant à raisonner le développement éolien. Au nom du groupe UDI et indépendants, je me réjouis que nous puissions débattre de ce sujet dans le cadre de l’ordre du jour proposé par le groupe Les Républicains.
    C’est un constat partagé : le développement de l’éolien se fait de manière plus ou moins anarchique et très inégal selon les territoires. Par exemple, la région des Hauts-de-France concentrera bientôt à elle seule 30 % de l’effort national en la matière.
    Nous ne sommes pas opposés aux énergies renouvelables. Bien au contraire, chacun a bien conscience qu’il est nécessaire de poursuivre leur développement dans notre pays, alors que nous comptons encore quatre centrales à charbon en activité – leur fermeture n’est prévue qu’en 2022, alors que la centrale nucléaire de Fessenheim a déjà été fermée et que l’EPR –– réacteur pressurisé européen – de Flamanville est encore en travaux. Ces incohérences révèlent d’ailleurs le décalage abyssal entre les discours et la réalité des actes s’agissant de la transition énergétique, laquelle ne doit pas se faire sans nos concitoyens : c’est bien là le cœur du débat.
    Actuellement, le développement de la quasi totalité des projets de parcs éoliens se fait à marche forcée. Tout est mis en œuvre pour essayer de forcer l’acceptation des populations locales, plutôt que de prendre en considération la parole des élus et les besoins des citoyens. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : dans les Hauts-de-France, 70 % des projets sont aujourd’hui contestés devant les tribunaux. Les retombées financières pour les communes, qui sont souvent la carotte avancée par les développeurs auprès des maires, ne peuvent pas tout justifier. Il faut mettre dans la balance la détérioration des paysages, qui pèse également sur le patrimoine culturel et architectural, ainsi que des avantages environnementaux qui sont parfois discutables et se trouvent remis en cause par certains experts.
    En effet, comme cela a été rappelé avant moi par plusieurs de nos collègues, la construction d’éoliennes est d’abord fortement consommatrice de terres rares ; je ne m’étendrai pas sur le sujet, développé notamment par notre collègue du groupe Les Républicains. Ensuite, le recyclage des pales est en amélioration, mais il n’est pour le moment qu’à hauteur de 50 % maximum. Enfin, une grande partie des socles en béton ne peuvent à ce jour être retirés des sols.

    M. Vincent Descoeur

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    Eh oui !

    Mme Barbara Pompili, ministre

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    Mais non !

    M. Pascal Brindeau

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    Mais si, madame. Je vous invite à le vérifier par exemple sur le territoire loir-et-chérien.

    Mme Barbara Pompili, ministre

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    Je connais très bien cette question !

    M. Pascal Brindeau

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    Nous défendrons d’ailleurs un amendement visant à retirer intégralement ces fondations lors du démantèlement des installations, ce qui n’est actuellement pas prévu dans les projets de développement éolien, alors que c’est la question, vous le savez très bien.
    La transition énergétique et écologique de notre pays ne se fera que de manière concertée, si elle est comprise et accompagnée par les populations. Balayer d’un revers de main, comme vous le faites, les inquiétudes et les oppositions de nombreux riverains est donc inutile et même méprisant. L’avenir des territoires concernés doit être pris en considération. La hausse de la fiscalité énergétique a, faut-il le rappeler, entraîné la création du mouvement des gilets jaunes, et cela doit nous servir de leçon à tous.
    Pour apaiser le climat social, nous soutenons donc le retour des zones de développement éolien – ZDE –, qui ont été supprimées en 2013. Cela permettrait d’engager une véritable planification et de donner de la visibilité et de la prévisibilité à la fois aux porteurs de projets, aux élus locaux et bien sûr aux populations concernées.

    M. Vincent Descoeur

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    Très juste ! Les ZDE le permettraient !

    M. Pascal Brindeau

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    À défaut, les collectivités territoriales tentent de prendre le relais, et je souhaite ici rendre hommage à notre collègue des Ardennes Jean-Luc Warsmann qui, en concertation avec l’ensemble des élus locaux de sa circonscription, est sur le point de réussir à définir des zones communes d’implantation.
    Face à ces tensions qui pèsent sur l’éolien terrestre, nous considérons qu’il est vital d’accélérer en particulier le déploiement de l’éolien en mer, plus rentable et source de moins d’oppositions. Nos voisins européens sont en avance dans ce domaine, alors que la France ne dispose d’aucune installation en service au large de ses côtes.
    Les tensions extraordinaires que suscitent les projets d’éoliennes terrestres sont aussi en partie le résultat du dévoiement de la programmation pluriannuelle de l’énergie et de son examen par le Parlement. À aucun moment nous n’avons pu voter pour exprimer nos préférences en faveur d’une source d’énergie particulière plutôt qu’une autre. Nous n’avons eu qu’à valider un scénario qui est l’apanage du seul Gouvernement.
    Vous l’aurez compris, le groupe UDI et indépendants soutiendra cette proposition de loi qui entend donner un cadre précis à l’implantation d’éoliennes. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI-I et LR.)

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    Je vous remercie !

    M. Vincent Descoeur

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    Très bien !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Michel Clément.

    M. Jean-Michel Clément

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    La présente proposition de loi, qui s’attaque au développement de l’éolien, fait de vous un Don Quichotte des temps modernes. Charge à moi d’être un Sancho Pança et de tenter de vous raisonner dans votre quête.
    Il est vrai que l’éolien terrestre n’est pas exempt de tout reproche. Bien que les Français aient globalement une image positive de cette source d’énergie, sa croissance importante et souvent anarchique suscite aujourd’hui de vives résistances : 70 % des permis de construire finissent ainsi devant un tribunal administratif, et le délai moyen pour la mise en route d’un nouveau parc est de sept à neuf ans, contre trois ou quatre en Allemagne.
    Parmi les principales sources de résistance se trouvent les nuisances visuelles et sonores, sans parler de l’impact sur la faune. L’aménagement du territoire implique nécessairement certaines modifications du paysage ; il est évident que l’impact des champs d’éoliennes sur le paysage n’est pas suffisamment pris en compte, ce qui contribue au rejet de cette source d’énergie dans sa globalité.
    Dans ma circonscription, située au sud de la Vienne, on comptera bientôt plus de mâts que d’arbres centenaires. Un nombre important de projets compromet l’identité même des territoires ruraux.

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    Eh oui !

    M. Jean-Michel Clément

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    La preuve en est que des monuments classés se trouvent cernés par d’immenses machines toujours plus arrogantes. Si nous n’y prenons garde, nous risquons de tout perdre et de compromettre cet axe essentiel pour de nombreux territoires qu’est le tourisme, sans oublier que la période actuelle pourrait être pour demain propice à un retour dans nos provinces. Encore faut-il qu’elles soient toujours attractives !
    Il est vrai également que le coût de la transition énergétique est supporté majoritairement par quelques territoires, et certaines régions risquent de se retrouver totalement saturées. C’est le cas des Hauts-de-France et du Grand Est – vous l’avez dit, chers collègues –, qui représentent respectivement 28 % et 21,7 % de la puissance éolienne installée en France métropolitaine. Mais cela devient aussi le cas du nord de la Nouvelle-Aquitaine, où la quasi-totalité de la production est concentrée dans trois départements, et uniquement dans le sud ou dans le nord de certains d’entre eux, alors que de nouveaux projets sont annoncés. Leurs habitants ont l’impression que les services se concentrent dans les métropoles et que les territoires ruraux sont relégués à supporter cette énergie intermittente.
    Il faut en outre interroger le coût du soutien public à l’éolien. Ne perdons pas de vue que les charges liées au soutien des énergies renouvelables pèsent sur la facture des contribuables et des consommateurs, qui devient ainsi de plus en plus lourde.
    Cette situation, aussi critique soit-elle dans certains territoires, justifie-t-elle les mesures radicales que vous proposez ? Le seuil d’éloignement de 1 500 mètres que vous entendez fixer pour toutes les éoliennes dont la taille est égale ou supérieure à 180 mètres mettrait un coup d’arrêt au déploiement de l’éolien, a fortiori dans les régions où le bâti est dispersé – on nous le répète à l’envi.
    Rappelons à toutes fins utiles que, dans certains territoires, en particulier dans les zones non interconnectées telles que la Corse, le développement des énergies renouvelables permet d’assurer l’indépendance énergétique. Il serait dommage de se priver de ce levier-là, quand un choix collectif se dessine.
    De même, l’article 2 nous semble introduire trop de rigidité. Comme vous, nous sommes convaincus que les parcs éoliens revêtent avant tout des enjeux liés aux territoires, et que toutes les collectivités concernées doivent avoir voix au chapitre s’agissant de leur implantation. Je proposerai d’ailleurs un amendement visant à rétablir les ZDE à l’échelle intercommunale. Toutefois, le droit de veto que vous voulez accorder à chaque commune se traduirait souvent par des querelles de clocher menant à un arrêt quasi certain des projets. Pour ma part, je suis convaincu de la nécessité d’accroître leur acceptabilité par davantage de planification – cela a été demandé à maintes reprises, mais cela tarde – et par une meilleure appropriation par les riverains.
    Concernant l’article 3, qui demande un rapport au Gouvernement sur les moyens de renforcer le volet sanitaire des études d’impact pour les parcs éoliens, le groupe Libertés et territoires n’a pas de réticences particulières. Si des craintes existent quant à l’effet de l’éolien sur les riverains, il nous semble légitime d’y répondre par des recherches plus approfondies.
    Historiquement centralisée, la production d’électricité devient, avec le développement des énergies renouvelables et notamment celui de l’éolien, plus proche des territoires. Profondément girondin, je suis convaincu que cette décentralisation de la production énergétique est créatrice de valeur pour les territoires d’implantation, à condition bien sûr que les projets puissent être compris, acceptés et intégrés localement. Ce n’est pour le moment pas le cas, et je le regrette.
    Le groupe Libertés et territoires votera majoritairement contre cette proposition de loi, dont l’objet pourrait être de mettre un coup d’arrêt au développement de nouveaux parcs éoliens ; pour ma part, je voterai pour,…

    M. Vincent Descoeur

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    Très bien ! (MM. Julien Aubert, rapporteur, et Guillaume Larrivé applaudissent.)

    M. Jean-Michel Clément

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    …afin d’envoyer un signe à ceux qui ne respectent ni les territoires, ni les populations, ni leurs élus. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Clémentine Autain.

    Mme Clémentine Autain

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    Par cette proposition de loi, vous souhaitez raisonner le développement de l’éolien. Permettez-moi alors, à mon tour, de vous raisonner.
    Que dire, en 2020, d’un texte faisant la part belle au nucléaire ? Il faut d’abord rappeler une chose : le nucléaire est une énergie du passé et les réacteurs, construits pour durer trente ans, ne pourront être prolongés indéfiniment.

    M. Jean-Marie Sermier

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    C’est faux !

    Mme Clémentine Autain

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    Cette énergie n’est pas résiliente au changement climatique, elle entrave notre souveraineté nationale du fait de l’importation d’uranium et, contrairement à ce que vous dites, monsieur Aubert, elle n’est pas une énergie propre : il n’existe à ce jour aucune solution de traitement des déchets nucléaires, et leur enfouissement n’est qu’une manière de différer la résolution du problème.
    Le nucléaire est aussi un formidable gaspillage d’argent public. Faut-il vous rappeler, à vous qui êtes pourtant des adeptes de la réduction des dépenses publiques, combien nous a coûté l’EPR de Flamanville ?
    Surtout, le nucléaire est une énergie dangereuse. Elle fait peser sur la population un risque inconsidéré. La maintenance des centrales repose à 80 % sur des travailleurs sous-traitants qui reçoivent les plus fortes doses de radioactivité et sont les moins protégés. Ces femmes et ces hommes étaient en première ligne pendant le confinement, subissant à la fois le risque radioactif et celui du covid-19.
    L’obstination aveugle dans le nucléaire nous fait perdre du temps. Elle freine la transition énergétique vers le 100 % d’énergie renouvelable, objectif dont nous sommes très éloignés.
    En général, chers collègues, on raisonne ce qui est exagéré ou ce qui est excessif. Mais dans cette proposition de loi, c’est bien le développement de l’éolien que vous vous donnez pour objectif de « raisonner ». Pourtant, je le rappelle, il ne représentait que 5,1 % de la production électrique française en 2018, et son objectif annoncé n’est que d’atteindre 15 % en 2028. Et il s’agit d’une énergie renouvelable, à l’heure où la France est avant-dernière au niveau européen en ce qui concerne leur développement.
    Loin du cauchemar auquel voudraient nous faire croire nos collègues, le développement de l’éolien est, en réalité, plutôt timide et inoffensif, dès lors qu’il est dans les mains de ce gouvernement dont les velléités de réaliser la bifurcation énergétique sont inversement proportionnelles à celles de protéger les riches.

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    Holà !

    Mme Barbara Pompili, ministre

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    Franchement, madame Autain !

    Mme Clémentine Autain

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    Alors pourquoi, chers collègues, montrez-vous les dents quand il s’agit de l’éolien ? Qu’est-ce qui vous fait si peur ?
    Vous voulez permettre à chacune des communes consultées en phase d’enquête publique d’empêcher la délivrance d’une autorisation environnementale pour l’installation d’éoliennes. Cela m’étonne, car je ne crois pas vous avoir entendu manifester la même préoccupation de l’avis des communes concernant les centrales nucléaires, les lignes à haute tension ou les autoroutes. Vous ne vous êtes pas émus non plus des dispositions de la loi ASAP qui sape la démocratie environnementale, ou du traitement réservé aux maires qui avaient pris des arrêtés contre les pesticides.
    Votre indignation est donc à géométrie variable. L’écologie n’ayant jamais été votre tasse de thé, ce que vous souhaitez obtenir avec ce texte, c’est bien un moratoire sur l’éolien pour endiguer son développement. Voilà l’objectif véritable de cette proposition de loi. Si votre article 1er était adopté en l’état, il empêcherait l’installation de nouvelles éoliennes sur la quasi totalité du territoire.

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    Ah bon ?

    Mme Clémentine Autain

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    Mes chers collègues, il nous faut baisser rigoureusement notre consommation d’énergie – j’espère au moins que nous sommes d’accord sur ce point – et la bifurcation vers 100 % d’énergies renouvelables d’ici à 2050 permettrait de créer 600 000 emplois. Cette planification énergétique doit être démocratique, à l’inverse de ce qui a été fait pour le nucléaire.
    Qui a décidé qu’une cinquantaine de centrales nucléaires allaient fleurir sur notre territoire ?

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    Mitterrand, avec le soutien des communistes, qui étaient au gouvernement !

    Mme Clémentine Autain

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    En tout cas, il n’y a pas eu, à ma connaissance, de décision démocratique ni de débats éclairés et raisonnés dans notre pays sur le sujet. À présent, le Gouvernement décide seul de financer six nouveaux EPR, sans que le Parlement ait son mot à dire.

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    Il a été élu démocratiquement !

    Mme Clémentine Autain

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    Pire : il envisage de faire passer son insensé projet Hercule dans le texte inspiré par les propositions de la convention citoyenne pour le climat, laquelle ne lui a rien demandé. De toute façon, pour la considération accordée par le Gouvernement à cette convention, on repassera !
    La bifurcation énergétique doit se faire en concertation avec les citoyens, les riverains, les travailleurs et travailleuses du nucléaire et, évidemment, les élus. Nous réaffirmons notre opposition au nucléaire, une énergie folle, irresponsable et dangereuse. Nous voterons contre ce texte, en continuant à faire des propositions concrètes pour que nous puissions basculer vers une société à 100 % d’énergies renouvelables.

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    Dans le black out !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Hubert Wulfranc.

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    La gauche raisonnable ! Les communistes, eux, savent ce qu’est l’énergie !

    M. Hubert Wulfranc

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    Tout d’abord, je voudrais vous remercier, monsieur Maquet, pour un plaidoyer où je retrouve des accents sur la rente financière et la destruction des terres rares, auxquels nous serions très sensibles, comme nous le serions à la posture des élus des territoires qui rappellent les réalités du terrain.
    Cette proposition de loi, à l’ambition mesurée mais pragmatique, a le mérite de nous permettre de débattre de l’avenir de l’éolien. Le Gouvernement a fixé des objectifs à un horizon qui nous semble juste, mais sans tenir compte des critiques sur la pertinence économique du développement de cette filière, sans un regard sur les incidences sanitaires et environnementales potentielles et sans écouter ceux de nos concitoyens qui en subissent ou en redoutent les conséquences.
    Au nom de justes impératifs de lutte contre le réchauffement climatique, ces critiques ont été étouffées ou esquivées. Comme le disait Clémentine Autain, le Gouvernement n’a eu de cesse, au cours des dernières années, d’accélérer la réalisation de projets, en allégeant la réglementation, en limitant les délais de recours et, par le biais de la loi pour un État au service d’une société de confiance, en faisant en sorte que les lauréats d’appels d’offres puissent obtenir des autorisations à géométrie variable, leur permettant d’adapter leur projet après les avoir obtenues.
    Le Gouvernement continue aussi de faire un pont aux opérateurs, quitte à créer des situations de rente…

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    Tout à fait !

    M. Hubert Wulfranc

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    …aussi exorbitantes que celles qui ont prévalu lors de la privatisation des autoroutes, en leur garantissant des tarifs d’achat aussi juteux pour eux que ruineux pour les finances publiques.
    Pour l’éolien terrestre, le montant total des engagements pris par l’État représentera près de 34 milliards d’euros. Pour quel résultat ? Des incertitudes scientifiques, des fragilités économiques croissantes et un malaise accru pour les populations.
    La majorité nous l’a dit en commission : son mot d’ordre est de passer outre les critiques, au nom de la nécessité de faire évoluer notre mix énergétique, quoi qu’il en coûte – y compris le passage des oiseaux, monsieur Perea : réfléchissez-y !
    Cependant, nos concitoyens n’en peuvent plus d’être mis devant le fait accompli et d’être impuissants face à ces pouvoirs publics inaccessibles et indifférents à leur sort, quand ils sont dépossédés de leurs droits, de leur tranquillité et de leur environnement de proximité. Même si elles sont restreintes, nous ne pouvons donc qu’approuver les dispositions du texte concernant l’éloignement des édifications d’éoliennes par rapport aux habitations, le droit de veto d’une commune concernée et le rapport sur les effets sanitaires.
    Cela étant, nous sommes convaincus qu’en matière de développement des énergies renouvelables, la priorité est de renouveler le modèle économique de l’énergie. Le développement par trop anarchique des installations éoliennes résulte d’abord de la dérégulation du marché de l’énergie, du manque de planification nationale des énergies renouvelables et de l’absence d’un débat public unifié sur le sujet. Dans un contexte de précarité énergétique sans cesse accrue, il est essentiel de refaire de l’énergie un bien commun et un enjeu de souveraineté, de bâtir une politique industrielle cohérente, valorisant les complémentarités.
    En tant que jacobin, je préconise un modèle contraire à l’entreprise de démantèlement à laquelle se livrent le chef de l’État et le Gouvernement, notamment avec le projet Hercule. Comme le développement actuel des énergies renouvelables, ce projet répond à une logique économique et financière ruineuse et délétère, bien éloignée de la poursuite de l’intérêt général.

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    N’en jetez plus !

    M. Hubert Wulfranc

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    Nous y reviendrons. À ce stade, le groupe de la Gauche démocrate et républicaine votera donc pour cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes LR et UDI-I.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Alain Perea.

    M. Alain Perea

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    Le changement climatique, perceptible par tous, ainsi que nombre d’autres facteurs poussent les Françaises et les Français à s’intéresser de plus en plus aux questions environnementales, notamment à l’énergie – sous ses aspects de production et de consommation –, qui en est l’un des enjeux majeurs.
    Dans ce contexte, la majorité actuelle a fait le choix d’un mix énergétique ambitieux, traduit dans la programmation pluriannuelle de l’énergie par des engagements rappelés par Mme la ministre, qui courent jusqu’à la fin de 2028. Nous tablons sur une puissance installée de 24,6 gigawatts pour l’éolien terrestre et de 2,4 gigawatts pour l’éolien offshore à la fin de 2023.

    M. Jean-Marie Sermier

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    C’est la catastrophe !

    M. Alain Perea

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    La réalisation de ces ambitieux projets ne va pas sans rencontrer sur les territoires des difficultés, dont mes collègues Yves Daniel, François Cormier-Bouligeon et Hervé Berville – pour ne citer qu’eux – se sont fait l’écho. Si personne ne nie ces difficultés sur les bancs de la majorité, nous pensons en même temps qu’il est important de continuer à soutenir une politique dynamique de développement éolien. Nous avons pris des mesures dès le début de la législature et continué de le faire dans le cadre de la loi ASAP. Comme elle l’a rappelé, Mme la ministre continue de travailler dans ce sens avec ses services.
    Confrontés à ce dilemme – un développement nécessaire des énergies renouvelables qui se heurte à des problèmes sur le territoire –, nous adoptons une approche fondamentalement différente de la vôtre. Vous dites vouloir, dans le cadre de votre proposition de loi, « raisonner » l’éolien mais, en écoutant vos propos et en lisant vos amendements, il apparaît que vous voulez plutôt l’interdire. Pour notre part, membres de la majorité, nous voulons sécuriser le développement éolien.

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    C’est subtil !

    M. Alain Perea

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    Dans cette perspective, il nous semble important de creuser trois pistes.
    Première piste : inciter les territoires à bâtir encore davantage leurs projets autour des énergies renouvelables. Je ne parle pas des ZDE, sur lesquelles nous reviendrons sûrement lors de l’examen des amendements, mais d’aménagement du territoire au sens où nous l’entendons, ma collègue Sandra Marsaud et moi-même. Je parle de projets de territoire comportant des enjeux de filières – y compris de démantèlement – et d’emploi, répondant aux questions liées au paysage et à l’acceptation sociale des installations. Pour ce faire, nous devons lancer des expérimentations, afin de libérer de nouveaux espaces et d’arrêter la concentration que vous dénoncez.
    J’abonde dans le sens de Mme la ministre lorsqu’elle souligne que certains territoires ont subi des implantations alors qu’ils auraient dû être proactifs. On peut toujours se retourner contre les porteurs de projets privés, mais il faut aussi que les élus locaux – dont je faisais partie, il y a encore quelques années –, les élus régionaux et les élus départementaux en tirent les conséquences et assument leur part de responsabilités. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LaREM.)
    Deuxième piste : nous devons, comme le souligne régulièrement notre collègue Patrice Perrot, revoir le modèle de répartition sur le territoire des recettes liées aux énergies renouvelables.
    Troisième piste : effectuer un vrai travail avec les populations.

    M. Jean-Marie Sermier

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    N’importe quoi !

    M. Alain Perea

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    Nous ne pourrons pas continuer indéfiniment à défendre des mesures en faveur du climat tout en laissant une partie de la population se battre contre les outils utilisés.
    Les mesures prévues dans cette proposition de loi sont contraires à ce que nous pensons utile. À l’intelligence du projet à coconstruire, on nous oppose la rigueur bête et méchante du trait de crayon : déplacer l’installation à un, deux ou trois kilomètres, ou faire des boucles de ZDE. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LaREM.)
    Plutôt que de développer et de partager les richesses, on attise la jalousie entre les élus locaux. Plutôt que d’opter pour la pédagogie et l’évolution de la société, on laisse planer le doute en demandant rapport sur rapport sur des sujets cent fois étudiés.
    La position du groupe majoritaire est évidemment plus délicate à tenir sur les territoires, et je sais que certains de mes collègues ont pu être sensibles à certaines questions – nous en avons parlé. Mais nous sommes prêts à accepter cette difficulté et à relever le défi,…

    M. Jean-Marie Sermier

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    Celui des lobbies !

    M. Alain Perea

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    …car il faut arrêter de jouer avec l’avenir par manque de courage politique.
    Nous affirmons donc – tels sont nos trois points – que le développement de l’énergie éolienne est important pour l’avenir, qu’il provoque des difficultés sur le terrain – nous en sommes conscients –, mais qu’il ne s’agit pas de reculer devant l’obstacle, comme vous le proposez dans votre proposition de loi.
    En commission, la majorité a fait le choix de laisser le débat s’instaurer : nous avons discuté pendant plus de trois heures trente.

    M. Vincent Descoeur

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    Uniquement sur des amendements de suppression !

    M. Alain Perea

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    Nos différences étant trop profondes, nous avons déposé des amendements de suppression des articles. Mais nous ne devons pas en rester là. Je demande officiellement à Mme la ministre de continuer à travailler avec les parlementaires sur le sujet. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.  Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Emmanuelle Ménard.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Une nouvelle fois, je suis heureuse de prendre la parole à ce stade de la discussion, car les amendements de suppression déposés par la majorité vont probablement faire leur œuvre en limitant fortement les débats, ce qui, pour des questions d’une telle importance, me semble tout à fait regrettable. Permettez-moi donc d’exprimer ici mes craintes concernant l’énergie éolienne – des craintes classiques, qui rejoignent les préoccupations fréquemment exprimées par les Français au vu des modifications majeures de nos paysages et de notre patrimoine liées au développement de cette filière et à ses effets sur les habitats naturels, la faune et la flore.
    Je ne résiste pas, ici, à évoquer les conséquences de l’éolien sur les populations de chauves-souris. Cette question peut sembler accessoire ou marginale. Pourtant, le caractère essentiel des chauves-souris dans la lutte contre les ravageurs de la vigne est démontré depuis maintenant plusieurs années. Vous comprendrez donc pourquoi j’y suis sensible. Les chauves-souris sont, en effet, friandes de petits papillons, insectes et autres nuisibles, véritables bêtes noires du vigneron, qui étaient jusqu’alors exclusivement combattues à l’aide de produits chimiques. Il serait donc totalement paradoxal, en autorisant l’installation d’éoliennes sous prétexte de produire de l’énergie propre, de fragiliser, voire de détruire la population de chiroptères – qui sont d’ailleurs protégés – sur les sites retenus, obligeant ainsi les viticulteurs à utiliser davantage de pesticides pour leurs cultures.
    Ces inquiétudes concernent également le bras de fer qui s’engage presque systématiquement entre associations de riverains, élus locaux et promoteurs des projets autour des programmes d’installation de parcs éoliens. Lorsque ces derniers font l’unanimité contre eux, ils devraient être automatiquement retoqués pour respecter la volonté de la population locale, lorsque cette dernière estime que l’implantation d’éoliennes n’est pas souhaitable.
    Mon appréhension s’étend aussi à la fin de vie des éoliennes, qui constitue évidemment un enjeu très important. À l’heure actuelle, les textes réglementaires ne prévoient qu’une excavation partielle des fondations des éoliennes en fin d’exploitation. Ces fondations représentaient, à la fin 2018, environ 7 millions de tonnes de béton armé dans les sols français. Il est donc particulièrement nécessaire d’imposer leur démantèlement total en fin d’exploitation, en prévoyant une remise en état des terrains par des terres comparables à celles existant à proximité du site. Cette obligation correspond à une demande des associations de protection de l’environnement. Lors de son audition devant l’Assemblée nationale dans le cadre de la commission d’enquête sur l’impact économique, industriel et environnemental des énergies renouvelables, M. Lhermitte, vice-président de France énergie éolienne, avait reconnu que se conformer à cette obligation supplémentaire ne serait pas très coûteux.
    D’autre part, les textes réglementaires prévoient seulement la valorisation ou l’élimination des déchets de démolition et de démantèlement, au lieu d’inciter les exploitants à trouver une solution de recyclage des déchets, dont certains, comme les pâles, posent des difficultés en raison de leur nature composite.
    Il faut en outre, comme d’autres l’ont rappelé avant moi, s’inquiéter du coût exorbitant de cette filière. Je rappelle que la Commission de régulation de l’énergie a évalué à 9 milliards d’euros le montant des dépenses publiques effectuées depuis 2001 au titre du soutien à l’éolien terrestre, à 23 milliards celui des dépenses publiques engagées, mais non exécutées, au titre du soutien à cette même filière et à 12 milliards les dépenses à souscrire pour respecter les objectifs de développement de l’éolien terrestre inscrit dans le projet de programmation pluriannuelle de l’énergie. Ces dépenses de soutien ne se justifient pas : ces fonds devraient plutôt être alloués à la politique de rénovation énergétique des logements.
    En conclusion, je me contenterai de citer le Président de la République qui, en janvier dernier, à Pau, estimait que « le consensus sur l’éolien est en train de nettement s’affaiblir dans notre pays » et rappelait qu’« on ne peut pas imposer l’éolien d’en haut ». Tout est dit. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.)

    M. Vincent Descoeur

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    Très bien !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le rapporteur.

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    Merci, chers collègues, pour ces interventions, que j’ai regroupées en trois grandes catégories.
    Je remercie d’abord Laure de La Raudière, Pascal Brindeau, Emmanuel Maquet, notre cher collègue Wulfranc – j’ai enfin compris la différence entre le parti communiste et La France insoumise – et notre collègue Ménard pour leurs propos transpartisans, qui ont montré que ce texte avait sa raison d’être, loin des caricatures qu’en ont faites d’autres orateurs.
    Vient ensuite une deuxième série d’orateurs, qui se sont livrés à un examen critique de la proposition de loi.
    Je répondrai en premier lieu à M. Millienne, du groupe Mouvement démocrate (MoDem) et démocrates apparentés. D’abord, en évoquant le coût de l’éolien, vous avez confondu le prix de l’électricité éolienne et le coût budgétaire du soutien à la filière. Ce sont pourtant deux grandeurs différentes.

    M. Bruno Millienne

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    Je n’ai pas confondu !

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    S’il est vrai que le prix de l’électricité d’origine éolienne baisse, je vous confirme que le coût budgétaire est bien réel : nous avons déjà validé 9 milliards d’euros de dépenses et 70 à 80 milliards restent à payer.
    Pour ce qui est de l’incidence écologique de cette technologie, je vous renvoie au rapport de la commission d’enquête sur l’impact économique, industriel et environnemental des énergies renouvelables, dont les conclusions montrent que l’énergie éolienne ne contribue pas à lutter contre le réchauffement climatique, contrairement à ce que prétend le Gouvernement. Le Bureau de recherches géologiques et minières – BRGM – souligne par ailleurs que les filières photovoltaïque et éolienne pèsent très lourdement sur les ressources en métaux.
    S’agissant enfin des nuisances, vous expliquez qu’il faut privilégier l’ingénierie locale et ne fixer aucune norme dans la loi. Quand il s’est agi de supprimer l’avantage fiscal pour l’huile de palme, vous n’avez pourtant pas hésité à faire intervenir le Parlement. Nous n’avons pas seulement besoin d’ingénierie locale : nous devons évidemment jouer notre rôle et ne pas laisser chacun faire ce qu’il veut dans ce nouveau Far West.
    Au nom du parti socialiste, M. Leseul a évoqué l’objectif de neutralité carbone d’ici à 2050. Notons tout d’abord qu’atteindre la neutralité carbone supposerait de diviser par sept ou huit les émissions de CO2. Or, pour les diviser ne serait-ce que par cinq, il faudrait fixer des quotas qui seraient atteints avec un seul aller-retour Paris-New York par an. Comprenez bien que la neutralité carbone permet de chauffer au gaz un appartement de 80 mètres carrés pendant l’année : elle ne permet pas d’aller au-delà.
    Vous semblez par ailleurs considérer que la neutralité carbone ne peut être atteinte qu’en ayant recours à l’énergie éolienne. C’est faux ! Non seulement d’autres énergies sont disponibles, mais même si, comme vous le prétendez, l’adoption de la proposition de loi interdisait tout projet d’éolien terrestre, il serait toujours possible de développer l’éolien offshore – qui n’est pas concerné par le texte –, l’hydrogène, les biocarburants et une multitude d’autres solutions permettant d’atteindre notre objectif carbone. Ne mélangeons pas tout. Je vous souhaite enfin bonne chance pour faire rouler votre voiture à l’énergie éolienne : j’espère que vous choisirez un jour de grand vent ! L’enjeu est en effet essentiellement fossile, puisqu’il porte essentiellement sur les transports et sur l’habitat.
    Enfin, votre concept de ZIPE me semble très inspiré de la ZDE : autant aller à l’essentiel et voter les amendements relatifs aux ZDE ! Je vous rejoins sur la nécessité d’une réelle planification territoriale. En revanche, j’ai trouvé amusante l’idée selon laquelle il ne faudrait pas réglementer les distances, mais réduire la taille des éoliennes. Cette manière très jivaresque d’aborder le débat promet d’être intéressante ! (M. Guillaume Larrivé applaudit.)

    M. Hubert Wulfranc

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    Il est dur !

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    Venons-en maintenant à la troisième catégorie d’orateurs.
    À l’intervention du Gouvernement, véritable page de publicité pour le secteur éolien, je réponds : non, l’implantation d’éoliennes ne permet pas de lutter contre le réchauffement climatique ! C’est un rapport bipartisan, adopté par la majorité, qui le confirme. Vous pouvez répéter le contraire, madame le ministre, mais cela n’y changera rien. Je vous remercie, en revanche, d’avoir rappelé que vous dépensez autant pour l’éolien en un an que pour le plan hydrogène en dix ans : cela montre bien comment vous hiérarchisez les enjeux. Pour le reste, il me semble que vous n’avez à aucun moment prononcé le mot « citoyens » : ils sont pourtant concernés par les projets au plan local. Votre posture consiste donc à ne rien voir du problème.
    D’autres ont préféré ne rien dire : je songe à M. Perea qui, au nom du groupe La République en marche, s’est livré à une superbe intervention, toute en protestation, pour dire qu’il était parfaitement d’accord avec notre diagnostic, mais surtout fermement résolu à ne rien faire.

    Un député du groupe LaREM

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    Vous l’avez mal écouté !

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    Si je suis content d’avoir réuni la branche LPO – Ligue pour la protection des oiseaux – et la branche chasse de la majorité, j’ai néanmoins des difficultés à comprendre le raisonnement selon lequel, quand il y a un problème, on devrait accélérer : quand il y a un mur, personnellement, j’essaye plutôt de ralentir. Le dispositif que vous proposez, qui n’est pas une ZDE mais y ressemble beaucoup, sans en avoir le goût, est un peu compliqué à suivre. Vous avez déploré les règles imposées d’un trait de crayon : j’ai cru un instant que vous faisiez référence au confinement, mais pas du tout. (Riressur plusieurs bancs du groupe LR.) Vous avez en tout cas creusé des pistes – j’ai toutefois eu le sentiment, à la fin de votre intervention, que la station de ski restait fermée.
    Enfin, Mme Autain a joué le rôle de celle qui ne veut rien entendre : elle n’a pas dû écouter mon intervention, puisqu’elle m’a accusé de faire la part belle au nucléaire, que j’aurais présenté comme une énergie propre. Je suis désolé pour elle, mais Mme Autain s’est trompée de texte : nous débattons ici de l’éolien. Il y a là un réflexe pavlovien : dès que nous évoquons l’éolien, on nous répond sur le nucléaire, alors qu’on pourrait très bien favoriser un développement raisonné de l’éolien terrestre tout en soutenant d’autres d’énergies.
    J’ajoute que, si on nous critique sur le caractère déraisonnable de la proposition de loi, l’objectif consistant à alimenter le réseau électrique intégralement par des énergies intermittentes est de nature à faire rire n’importe quel distributeur d’énergie ou n’importe quel régulateur. La même remarque vaut pour ceux qui évoquent un moratoire sur l’éolien : je rappelle que le texte porte essentiellement sur l’éolien terrestre. Je crains donc que la fameuse bifurcation annoncée par Mme Autain ne donne sur une impasse, pour ne pas dire sur un ravin. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – Mme Agnès Thill applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre.

    Mme Barbara Pompili, ministre

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    Je répondrai sur le fond à certains points au cours de l’examen des amendements,…

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    Il nous faudrait une demi-heure de plus !

    Mme Barbara Pompili, ministre

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    …qui nous permettra de débattre plus avant, mais je veux éclaircir quelques points, afin que nous n’engagions pas la discussion sur des bases biaisées.
    Je n’entrerai pas dans les considérations sur le coût des différents types d’énergie – on pourrait y passer la nuit. Je dirai simplement que le coût de toute énergie pour la collectivité est très élevé et que si nous dressions des comparaisons, elles ne seraient pas nécessairement au désavantage de l’éolien.
    Certains ont évoqué le black-out auquel pourrait mener le développement de l’éolien. Par pitié, arrêtons avec cela ! Le bilan prévisionnel 2019 du Réseau de transport d’électricité – RTE – que l’on ne saurait soupçonner de manquer de sérieux – souligne la contribution des énergies renouvelables à la sécurité d’approvisionnement. De la même façon, en pratique, l’éolien se substitue majoritairement à des importations d’électricité carbonée et permet donc d’éviter le recours à des énergies fossiles. Il est important de le rappeler.
    Ensuite, ce n’est pas parce qu’on répète 150 fois une information complètement fausse qu’elle devient vraie. Je sais qu’il existe un fantasme quant à la quantité énorme de terres rares qui entreraient dans la composition des éoliennes. Cela a pu être vrai il y a très longtemps, mais, d’après les derniers chiffres de l’Agence de la transition écologique, dont je dispose, qui datent de 2019, moins de 3 % des éoliennes contiennent des terres rares. Tentons-nous de nous en tenir aux faits.
    De la même manière, sachez qu’à l’heure actuelle, toujours selon les chiffres de l’agence, 93 % du poids des éoliennes est recyclable. Les obligations réglementaires prévoient d’ailleurs le recyclage de 90 % de la masse totale d’ici au 1er janvier 2022, ce taux devant être porté à 95 % en 2024. Pour le reste, s’il est vrai que les pales sont pour l’heure en grande partie non recyclables, l’obligation de rendre recyclable 45 % de leur masse entrera en vigueur en 2023. Parmi les éléments non recyclables, une partie est stockée, tandis que l’autre est – comme on le dit pudiquement – valorisée sous forme de combustible, c’est-à-dire broyée, mélangée à d’autres matériaux et brûlée.
    Nous évoquerons les autres points au cours de l’examen des amendements.

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    Ah ?

    Mme Barbara Pompili, ministre

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    Je vous livre néanmoins, concernant l’excavation des fondations, une information dont beaucoup ne disposent manifestement pas et qui réjouira donc, j’en suis sûre, une partie de l’Assemblée : l’arrêté du 22 juin 2020 impose l’excavation totale des fondations. Cet engagement qu’avait pris le Gouvernement est tenu. C’est d’ailleurs ce même arrêté qui prévoit les obligations de recyclabilité des éoliennes. Vous voyez donc que, quand nous prenons des engagements, nous les tenons. De la même manière, nous annoncerons en début d’année prochaine des propositions structurées qui permettront d’améliorer l’acceptabilité des éoliennes, car nous regardons les problèmes en face et y apportons des solutions. (M. Damien Pichereau applaudit.)

    Discussion des articles

    Mme la présidente

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    J’appelle maintenant les articles de la proposition de loi dans le texte dont l’Assemblée a été saisie initialement, puisque la commission n’a pas adopté de texte.

    Article 1er

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Guillaume Larrivé.

    M. Guillaume Larrivé

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    Merci à Julien Aubert et à Emmanuel Maquet d’avoir, de manière très éloquente et convaincante, formulé des propositions très utiles pour dire « stop » à la prolifération anarchique des éoliennes.
    Massacre des paysages, bilan économique négatif, coût budgétaire déraisonnable : le moment est venu de reprendre le contrôle. Je le dis en tant qu’élu de la nation mais surtout en tant que député de l’Yonne, ce merveilleux petit coin de Bourgogne, aux portes de Paris, désormais saturé d’éoliennes qui sont laides, qui se développent de façon très peu harmonieuse et qui défigurent le paysage, suscitant la révolte légitime de nombreux concitoyens.
    Reprenons donc le contrôle en nous dotant, à travers une loi, d’instruments. Pourquoi ne pas donner aux communes et aux conseils départementaux un droit de veto démocratique ? Pourquoi ne pas donner aux élus la possibilité de définir des zones protégées où le développement de l’éolien serait maîtrisé, voire des zones « zéro éolienne » ? Pourquoi ne pas préciser dans la loi la distance qui permettra de préserver les habitations, les monuments et les installations remarquables de cette pollution visuelle que représentent les éoliennes ?
    Vous l’avez compris, je ne suis pas très enthousiasmé par un tel sabotage de nos beaux paysages de France ces dernières années. J’ai à l’esprit la fameuse phrase de Jean Guitton, citée parfois dans d’autres contextes mais qui me semble particulièrement adaptée ce soir : « Être dans le vent, c’est avoir le destin des feuilles mortes. » Il est peut-être temps d’envisager que ce vent des éoliennes cesse de souffler et que l’on puisse retrouver à la fois l’harmonie des paysages et des choix économiques et budgétaires raisonnables. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LR. M. Christophe Naegelen applaudit aussi.)

    Mme la présidente

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    Sur l’amendement no 45, je suis saisie par le groupe Les Républicains d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à Mme Sandra Marsaud, pour soutenir cet amendement, qui tend à supprimer l’article.

    Mme Sandra Marsaud

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    Il nous semble nécessaire de rappeler qu’il existe des garde-fous juridiques depuis 2011, donc d’assez longue date. Tout d’abord, l’implantation d’éoliennes terrestres est soumise au régime des installations classées pour la protection de l’environnement : c’est un critère très important dans les dossiers d’analyse.
    Ensuite, les éoliennes de grande hauteur, vous le savez très bien, doivent respecter un seuil d’éloignement de 500 mètres, distance minimale qui peut-être appréciée au cas par cas, selon les conclusions de l’étude d’impact et de l’étude de danger. Cela permet donc au préfet, après enquête publique, de fixer des prescriptions complémentaires. Le seuil de 1 500 mètres que vous proposez d’inscrire dans la loi amputerait les préfets de cette capacité d’appréciation. Ce n’est pas ainsi que nous envisageons les possibilités d’améliorer et de « raisonner » pour reprendre votre terme, le développement de l’éolien.
    Comme l’a rappelé mon collègue Alain Perea, nous souhaitons plutôt développer plus largement des projets territoriaux de mix énergétiques – qui ne se limiteraient donc pas à l’éolien –, mener une analyse paysagère, définir les atouts et les faiblesses des différents scénarios, étudier les solutions en lien avec les SRADDET, avec aussi les schémas de RTE, dont nous avons parlé en commission, voire muscler les PCAET, sans fixer un périmètre au plan national, lequel scléroserait complètement le développement du mix énergétique. Voilà pourquoi nous demandons la suppression de l’article 1er. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LaREM.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    Je souhaite que nous puissions débattre. Je sais bien qu’il y a des adeptes de la cancel culture, la culture de l’effacement, qui décident d’annuler tout ce qu’ils peuvent annuler pour éviter le débat. Je vous rappelle cependant que c’est le Parlement qui a fixé la limite de 500 mètres. Il est normal de fixer des limites. Si nous voulons le faire de nouveau aujourd’hui, c’est pour des raisons sanitaires et pour mettre fin à des problèmes de voisinage qu’au demeurant personne ne conteste. Nous pourrions débattre de la pertinence de cette mesure. Or en demandant la suppression de l’article, vous empêchez le débat.
    La commission a rendu un avis favorable sur cet amendement. Chacun prendra ses responsabilités mais cette manière de fabriquer une loi ne me semble pas une preuve de maturité ni, surtout, de respect à l’égard des gens qui nous écoutent et attendent des représentants de la nation qu’ils s’emparent d’un problème. Nous ne partageons peut-être pas le même point de vue mais donnons-nous au moins la possibilité d’exposer nos accords et nos désaccords. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Barbara Pompili, ministre

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    Le Gouvernement émet un avis favorable…

    M. Rémi Delatte

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    Scandaleux !

    Mme Barbara Pompili, ministre

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    …sur cet amendement pour les raisons qui ont été brillamment exposées par Mme la députée Marsaud. La distance de 500 mètres est bien connue, elle a été votée par le Parlement à plusieurs reprises car des amendements visant à augmenter la distance minimale ont déjà fait l’objet de discussions.
    Il s’avère qu’il existe beaucoup de garde-fous et que, s’agissant des projets, des vérifications sont prévues pour définir des distances acceptables : il est possible de relever cette distance lorsque des raisons objectives locales le justifient. Les outils juridiques existant déjà, il n’est donc absolument pas pertinent d’augmenter ce seuil en imposant une distance minimale qui, elle, risquerait de réduire fortement les possibilités d’implantation d’éoliennes. Et nous voyons bien où cela peut nous mener.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Vincent Descoeur.

    M. Vincent Descoeur

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    Je crains de ne pas pouvoir défendre mes amendements. Je veux dénoncer la stratégie adoptée et assumée par la majorité qui consiste à proposer systématiquement des amendements de suppression des articles dans le seul but de nous priver de débat. Comme l’a dit notre collègue Julien Aubert, ce n’est pas respectueux du mal-être exprimé par les populations riveraines de ces champs d’éoliennes. Ne vous en déplaise, l’implantation anarchique d’éoliennes ne fait pas que des heureux.
    En empêchant l’examen de nos amendements et en refusant de débattre des distances minimales d’implantation des éoliennes par rapport aux habitations, vous faites le choix du statu quo, c’est-à-dire du développement anarchique de l’éolien qui est, de l’avis de tous, une source de discorde : 500 mètres, c’est très proche. Je vous invite à imaginer ce que représente une telle distance et l’effet que pourrait avoir une telle implantation sur l’environnement de votre pavillon. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Bruno Millienne.

    M. Bruno Millienne

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    Il ne faut pas que vous preniez mal cet amendement, même si je vous comprends. Au rythme où nous allons, il est clair que, de toute façon, nous n’irons pas au bout de l’examen de votre proposition de loi ce soir – et nous n’y sommes pas pour grand-chose.
    En effet nous avons des différends. Vous voulez fixer une distance minimale. Nous pensons, nous, qu’il existe peut-être d’autres moyens d’assurer un développement harmonieux de l’éolien, qui soit notamment accepté par les populations et par les élus locaux.
    Vous avez un peu caricaturé mon intervention dans la discussion générale, je ne vous en veux pas – vous aimez bien les effets de manche, et d’ailleurs cela vous va très bien. En toute humilité, je vous dirai simplement que nous voulons, nous aussi, travailler avec les territoires et avec les porteurs de projet. Nous voulons faire de l’éolien une énergie renouvelable acceptable par tous et qui soit enfin rentable.
    Travaillons ensemble, d’autant plus que, je le répète, nous n’achèverons pas l’examen de ce texte ce soir. Une simple mesure d’éloignement ne me paraît pas être la seule – et peut-être même pas la bonne – mesure envisageable. C’est pourquoi nous voterons en faveur de cet amendement de suppression.

    Un député du groupe Dem

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    Il suffit de l’expliquer à la population !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Alain Perea.

    M. Alain Perea

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    Peut-être l’ai-je dit un peu trop rapidement lors de la discussion générale : en commission, nous avons clairement signalé que la majorité était prête à ouvrir le débat autour de ce texte.

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    Mais seulement en commission, pas ici !

    M. Alain Perea

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    Nous avons alors débattu pendant trois heures trente des amendements présentés une nouvelle fois ce soir – je les ai vérifiés un à un. Tout citoyen désireux de connaître la position des différents groupes politiques – qui se sont tous exprimés – peut retrouver nos débats sur le site de l’Assemblée. Par conséquent, je ne peux laisser dire ici que nous ne voulons pas avoir de débat et que nous n’assumons pas nos positions sur l’énergie éolienne.

    M. Vincent Descoeur

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    Mais non ! La preuve : vous proposez un amendement de suppression par article !

    M. Alain Perea

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    Nous n’avons rien à cacher, nous assumons nos positions, nous défendons nos choix politiques et nous n’en avons pas honte.
    D’autre part, le fait de supprimer des articles sur lesquels nous avons déjà débattu nous permettra peut-être d’ouvrir le débat sur d’autres amendements qui n’avaient pas été discutés en commission, en l’occurrence les amendements portant article additionnel. Dès lors, vous ne pouvez pas prétendre que nous ne voulons pas débattre des éoliennes, bien au contraire. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LaREM.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Hubert Wulfranc.

    M. Hubert Wulfranc

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    J’entends bien que, selon M. Perea, la majorité parlementaire est ouverte au débat. Concrètement, celui-ci peut porter sur l’ordonnancement d’un schéma national de développement de l’éolien – qui n’existe pas aujourd’hui –,…

    M. Bruno Millienne

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    C’est ce que j’ai proposé !

    M. Hubert Wulfranc

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    …décliné à l’échelle territoriale et en concertation avec les élus locaux qui, quoi qu’on en dise, restent les interlocuteurs du pouvoir central, notamment en matière d’harmonisation des capacités électriques sur notre territoire. C’est ainsi que pourront être réunies les conditions permettant de déterminer les éléments de la réglementation en détail, comme l’a dit Julien Aubert tout à l’heure.

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    Ah ah !

    M. Hubert Wulfranc

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    Je ne vais pas non plus vous citer toutes les cinq minutes !

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    C’est bien, continuez ! (Sourires.)

    M. Hubert Wulfranc

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    Ce débat concernerait aussi bien la distance avec les habitations que la capacité d’intervention des collectivités territoriales, en particulier les communes, lorsque des terrains sur lesquels des éoliennes doivent être implantées présentent des particularités, ainsi que la capacité d’entamer, toujours sur le terrain. Le dialogue démocratique avec les populations.
    Êtes-vous prêt à entamer ce travail de réflexion sur un schéma territorial de développement de l’éolien ? Si oui, nous considérons que cette discussion aura présenté un intérêt majeur.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Gérard Leseul.

    M. Gérard Leseul

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    Je voudrais, si je puis dire, venir au secours de ce texte. Comme je l’ai dit lors de la discussion générale, il a, à l’évidence, le mérite de poser des questions d’acceptabilité. Il n’est pas raisonnable de vouloir supprimer directement l’article 1er eu égard à la discussion que nous devons avoir. Il est évident que des projets très importants de développement de l’éolien pourraient nécessiter de reposer la question. Vous avez dit, madame la ministre, que des discussions auraient lieu prochainement. Il se trouve que ce soir nous avons la possibilité d’en avoir une.

    M. Hubert Wulfranc

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    C’est la reconstitution de l’union de la gauche !

    M. Damien Pichereau

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    Vous en avez rêvé !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Emmanuelle Ménard.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Je ne comprends pas pourquoi nous ne pourrions pas débattre ici ce soir de la distance entre les éoliennes et les habitations. Tout d’abord, la réglementation n’est pas la même selon les pays d’Europe : dans certains il existe une distance minimale, dans d’autres non, dans d’autres encore on procède au cas par cas. Je ne comprends donc pas cette fin de non-recevoir.
    Ensuite, madame la ministre, vous dites que, si on augmentait le seuil minimum, il n’y aurait plus d’éolienne. Il y aurait surtout une meilleure acceptation de l’éolien de la part des citoyens français. (M. Julien Aubert, rapporteur, applaudit.) Car ce n’est pas pareil de se retrouver à 500 mètres ou à 1 000 mètres d’un mat. Si l’acceptation est plus forte, vous aurez plus de possibilités d’implanter des parcs éoliens. On peut donc voir les choses différemment.
    Enfin, madame la ministre, en 2017, je me souviens d’avoir interrogé votre prédécesseur, Nicolas Hulot, sur la distance des 500 mètres, lors d’une audition de la commission des affaires économiques. C’est simple, m’avait-il expliqué, si on avait retenu 1 000 mètres, le mitage du territoire national aurait laissé beaucoup moins de possibilités d’installer des mats. Autrement dit, contrairement à ce que vous affirmez, les 500 mètres n’ont pas été retenus pour prendre en considération la sécurité ou la santé des Français ; ils correspondent à la distance qui vous permet d’installer un nombre de parcs suffisant à vos yeux, et à rien d’autre – et cela n’est pas fait pour rassurer les Français.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Emmanuel Maquet.

    M. Emmanuel Maquet

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    Je rappelle à la majorité et à Mme la ministre que, depuis au moins trois ans, nous avons tenté à plusieurs reprises d’aborder la question de l’éolien. Ce fut le cas, en 2018, lors des débats sur le projet de loi pour un État au service d’une société de confiance puis, plus récemment, lors de l’examen du projet de loi d’accélération et de simplification de l’action publique. Vous nous avez systématiquement renvoyés dans nos cordes en nous demandant de déposer un texte spécifique. Eh bien, ce texte est aujourd’hui à l’ordre du jour !
    J’ai bien compris que nous ne serons pas d’accord sur tout, mais nous devrions discuter. Nous devrions aussi nourrir notre débat de la production scientifique. En 2017, un rapport de l’Académie nationale de médecine recommandait d’éloigner les éoliennes des habitations : il faut considérer cet avis et le décliner dans la loi.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Agnès Thill.

    Mme Agnès Thill

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    À chaque fois que nous essayons de parler des éoliennes, on nous répond que ce n’est pas le moment. Cette fois, vous soutenez un amendement de suppression qui vous permet d’éviter le débat : nous ne pourrons pas discuter du passage à 1 000 mètres ou plus, nous ne pourrons pas avancer sur le sujet ni changer les choses. Tout cela vous arrange.
    À vous entendre, tout va bien. Les bras m’en tombent car, je peux vous dire qu’en matière d’éoliennes, dans ma circonscription, tout va mal. Les Hauts-de-France sont saturés au plus haut point. Il faut vraiment faire quelque chose – introduisons par exemple un seuil de saturation.
    Vous parlez de la participation des élus, mais que faites-vous lorsque ni les élus ni les habitants ne veulent d’éoliennes ? Quel respect pour les terres agricoles, pour les élus et les habitants ? Lorsqu’on habite dans le 7e arrondissement de Paris, on est favorable aux éoliennes, mais il faut aussi accepter de regarder la réalité et d’en parler. (M. Guillaume Larrivé applaudit.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Laure de La Raudière.

    Mme Laure de La Raudière

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    Certes, la discussion en commission a eu lieu – nous vous en remercions –, mais ce n’est pas la même chose de débattre en séance publique, en présence de la ministre. Elle vient par exemple de nous parler de l’arrêté du 22 juin 2020 « portant modification des prescriptions relatives aux installations de production d’électricité utilisant l’énergie mécanique du vent » – j’avoue que je ne le connaissais pas –, lequel indique que « les opérations de démantèlement et de remise en état […] comprennent […] l’excavation de la totalité des fondations jusqu’à la base de leur semelle, à l’exception des éventuels pieux. Par dérogation, la partie inférieure des fondations peut être maintenue dans le sol sur la base d’une étude adressée au préfet démontrant que le bilan environnemental du décaissement total est défavorable ».

    Mme Barbara Pompili, ministre

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    Eh oui !

    Mme Laure de La Raudière

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    Cela signifie bien que le bilan environnemental de l’excavation peut être à ce point négatif qu’il est préférable de laisser dans le sol un socle de plusieurs centaines de tonnes de béton, autrement dit, les éoliennes posent bien un problème écologique et peut-être fallait-il commencer par ne pas les installer. En tout cas, je pose la question.
    Par ailleurs, l’arrêté du 22 juin 2020 s’applique-t-il aux 8 000 éoliennes déjà en service ? Je crains que non, car cela créerait a posteriori des obligations dont les promoteurs n’ont pas été informés au moment de la construction, et il faudrait sans doute les indemniser.
    En tout cas, vous voyez bien qu’il est intéressant de débattre dans l’hémicycle avec la ministre. Cela permet de poser des questions et d’obtenir des réponses que l’on n’obtient pas toujours en commission. Je voterai donc contre l’amendement de suppression de l’article 1er.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Marie Sermier.

    M. Jean-Marie Sermier

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    Madame la ministre, la majorité remet la censure à l’ordre du jour. (M. le rapporteur et M. Remi Delatte applaudissent.)

    M. Emmanuel Maquet

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    Tout à fait !

    M. Jean-Marie Sermier

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    Vous refusez le débat dans l’hémicycle parce que vous avez peur ; vous avez peur que nous disions la vérité. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.) Vous aviez raison : répéter 150 fois un mensonge n’en fait pas une vérité. Alors, de grâce, ne répétez pas 150 fois que vous installez des éoliennes au nom du climat ; c’est faux, et vous le savez parfaitement. L’énergie éolienne décarbonée remplace aujourd’hui de l’énergie nucléaire,…

    Mme Barbara Pompili, ministre

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    Non !

    M. Jean-Marie Sermier

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     …qui l’est également, mais comme elle n’est pas pilotable de la même manière, il faut adjoindre à l’éolien des centrales à charbon – on en a remis en route au mois de septembre pour que tous les Français puissent disposer d’électricité.
    Vous savez aussi très bien qu’un certain nombre d’inquiétudes se sont fait jour concernant la santé. S’il en fallait une preuve, je vous rappelle que la présidente de la commission du développement durable – je suis certain que vous restez sensible à l’action de votre ancienne commission – a récemment saisi l’Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques de la question des basses fréquences produites par les éoliennes et des risques en matière de santé publique.
    Dans ces conditions, madame la ministre, acceptez le débat. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Damien Pichereau.

    M. Damien Pichereau

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    Je ne peux pas laisser dire que ce texte n’a fait l’objet d’aucun débat ! (Protestations sur les bancs du groupe LR.)

    Plusieurs députés du groupe LR

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    Pas dans l’hémicycle !

    M. Damien Pichereau

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    Nous en avons discuté pendant trois heures trente en commission où la majorité n’a soutenu aucun amendement de suppression. Ceux que nous examinons aujourd’hui tirent en quelque sorte la conséquence de nos échanges en commission et des votes de cette dernière qui n’a adopté aucun article ; acceptez-le ! (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)
    Vous voudriez que nous débattions d’un sujet aussi important en trente minutes ! Les questions posées ce soir méritent plus que trente minutes de débat. Et ce n’est pas la majorité qui a choisi d’inscrire cette proposition de loi comme dernier point de l’ordre du jour de cette journée de niche parlementaire. Finalement, je crois que l’écologie n’est pas pour vous si importante que cela ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre.

    Mme Barbara Pompili, ministre

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    Je suis évidemment heureuse de répondre aux questions des parlementaires, et je suis à la disposition du Parlement – j’avais d’ailleurs libéré mon agenda tout cet après-midi pour pouvoir être présente. Finalement, l’examen de la proposition de loi n’a pu commencer que fort tard, ce que je regrette, d’autant que j’aurais pu vous expliquer pourquoi nous considérons que l’inscription dans la loi de la limite des 500 mètres est suffisante pour permettre de poursuivre l’implantation d’éoliennes. Paradoxalement, nous aurons peu parlé de la distance d’éloignement des éoliennes pour débattre de la légitimité d’un amendement de suppression : c’est dommage, nous avons perdu une demi-heure qui nous aurait permis de parler du sujet, mais nous en débattrons certainement une prochaine fois – je suis bien placée pour savoir que ce n’est pas la première fois qu’il est évoqué dans l’hémicycle, et je suis persuadée que ce n’est pas la dernière.
    Madame de La Raudière, l’arrêté du 22 juin 2020 s’applique à toutes les éoliennes, y compris celles qui sont déjà implantées. Lorsqu’elles seront démantelées, elles devront retirer leur socle de béton – quelques exceptions sont légitimement prévues pour préserver l’environnement d’éventuels impacts négatifs.
    S’agissant de la nuisance que représenteraient les infrasons et de la position de l’Académie nationale de médecine, je rappelle que cette dernière a considéré en 2017 qu’ils pouvaient « raisonnablement » être mis hors de cause.
    Je crois avoir répondu à vos questions et je reste évidemment à votre disposition. J’aurais aimé pouvoir vous en dire plus sur ce que nous vous proposerons, mais le groupe de travail sur l’acceptabilité de l’éolien qui, depuis un an et demi, a réuni, au cours de plusieurs sessions, tous les acteurs – élus, associations, producteurs d’éolien, administration –, a présenté de nombreuses propositions qui doivent encore faire l’objet d’un bilan et d’un plan d’action général. C’est essentiel, car, outre le fait que l’adoption de vos propositions entraînerait l’arrêt total de l’implantation d’éoliennes en France, ce qui ne correspond pas à ce que nous voulons, elles sont éparses et juxtaposées. Or je crois qu’il nous faut prendre des mesures qui fassent système. Si on s’engage à augmenter la part globale des énergies renouvelables sans décliner cette promesse dans les territoires en se donnant les moyens de la respecter, en concertation avec les élus et les populations, c’est comme si l’on comptait sur le hasard pour réussir. Nous devons être mieux organisés et plus ordonnés ; le groupe de travail a œuvré en ce sens depuis un an et demi. Vous verrez lorsque nous vous présenterons les résultats de ses réflexions qu’il a vraiment fait du bon boulot !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le rapporteur.

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    Je ne comptais pas reprendre la parole, mais comme minuit approche et que je sens que ce texte, tel le carrosse du conte, risque de se transformer en citrouille, j’en profite pour répondre à quelques arguments.
    Permettez que je m’adresse aux collègues de mon groupe pour leur dire que c’est ma faute. Je viens de comprendre qu’en commission les députés de la majorité ont passé un si mauvais moment, ils se sont retrouvés à ce point désemparés et cela a duré tellement longtemps qu’ils ont décidé de ne surtout pas remettre le couvert dans l’hémicycle. Tant pis pour les collègues qui ne participaient pas aux travaux de la commission et qui espéraient défendre des amendements ;…  Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe LR)

    M. Vincent Descoeur

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    Il a raison !

    M. Julien Aubert, rapporteur

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     …tant pis pour ceux qui, comme moi, s’étaient inspirés du travail de la commission pour présenter en séance des amendements réécrits. Monsieur Perea, ces nouveaux amendements sont ainsi emportés avec l’eau du bain !
    Madame le ministre, vous évoquez des études sur les nuisances sonores comme les infrasons : elles sont souvent très contradictoires. Il est dommage que, lorsqu’il est question du glyphosate, vous ne fassiez pas preuve de la même modération.

    Mme Barbara Pompili, ministre

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    Ce n’est pas bon !

    M. Julien Aubert, rapporteur

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    Chers collègues, je pense que vous manquez de bon sens, or, comme le disait Marie-Joseph Chénier, le frère d’André – je cite un homme de gauche, ce qui devrait vous être agréable : « C’est le bon sens, la raison qui fait tout : vertu, génie, esprit, talent, et goût. » Ce soir, l’opposition a fait preuve de bon sens, avec tout ce que cela signifie. Malheureusement, vous n’envoyez pas un bon signal en évitant le débat. Vous aviez Acquitator à la justice ; vous avez désormais Annulator à l’injustice. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.)

    Un député du groupe LaREM

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    On n’a pas compris !

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 45.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        94
            Nombre de suffrages exprimés                94
            Majorité absolue                        48
                    Pour l’adoption                56
                    Contre                38

    (L’amendement no 45 est adopté ; en conséquence, l’article 1er est supprimé.)

    M. Vincent Descoeur

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    Et le texte est enterré !

    Mme la présidente

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    En application du quatrième alinéa de l’article 50 du règlement, qui prévoit que la dernière séance de la journée s’achève à minuit, je vais lever la séance.

    3. Ordre du jour de la prochaine séance

    Mme la présidente

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    Prochaine séance, demain, à neuf heures :
    Discussion du projet de loi organique relatif aux délais d’organisation des élections législatives et sénatoriales ;
    Discussion du projet de loi relatif aux délais d’organisation des élections municipales partielles et des élections des membres des commissions syndicales ;
    Suite de la discussion de la proposition de loi visant à réformer l’adoption.
    La séance est levée.

    (La séance est levée à minuit.)

    Le Directeur du service du compte rendu de la séance
    de l’Assemblée nationale
    Serge Ezdra