XVe législature
Session ordinaire de 2020-2021

Troisième séance du jeudi 10 décembre 2020

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Troisième séance du jeudi 10 décembre 2020

Présidence de M. Sylvain Waserman
vice-président

1. Justice pénale des mineurs (suite)

Suite de la discussion d’un projet de loi

M. le président

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    L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi ratifiant l’ordonnance no 2019-950 du 11 septembre 2019 portant partie législative du code de la justice pénale des mineurs (nos 2367, 3637).

    Discussion des articles (suite)

    M. le président

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    Cet après-midi, l’Assemblée a…

    Mme Perrine Goulet

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    …examiné 89 amendements !

    M. le président

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    …commencé la discussion des articles du projet de loi, s’arrêtant à l’amendement no 272 portant article additionnel après l’article 3.

    Après l’article 3 (suite)

    M. le président

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    Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 272 et 307.
    La parole est à M. Ugo Bernalicis, pour soutenir l’amendement no 272.

    M. Ugo Bernalicis

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    Nous souhaitons modifier le dernier alinéa du texte proposé pour l’article L. 112-3 du code de la justice pénale des mineurs afin que les interdictions et les obligations 5o à 9o prévues à l’article L. 112-2 ne puissent être prononcées pour des mineurs de moins de 13 ans, contre 10 dans le texte de l’ordonnance. Mme Ménard estimait à l’inverse, tout à l’heure, qu’il faudrait pouvoir appliquer ces mesures à des enfants de moins de 10 ans, arguant du fait qu’il revenait au magistrat d’apprécier leur capacité de discernement – on en viendrait ainsi à proposer des sanctions somme toute assez lourdes à des enfants en très bas âge !
    Cet âge de 13 ans que nous proposons est le même, par souci de cohérence, que celui à partir duquel on peut encourir une peine. Je sais bien qu’avec ces mesures éducatives judiciaires nous n’en sommes pas encore aux peines mais ces interdictions et obligations sont suffisamment lourdes pour les juger non pertinentes s’agissant d’enfants de 10 à 13 ans.

    M. le président

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    La parole est à Mme Perrine Goulet, pour soutenir l’amendement no 307.

    Mme Perrine Goulet

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    Je suis désolée, monsieur le ministre de la justice, mais je n’ai pas pu participer aux travaux de la commission des lois puisque je n’en suis pas membre. J’ai donc plusieurs questions à vous poser…
    Les enfants de moins de 13 ans sont présumés ne pas être capables de discernement. Pourtant, selon l’article L. 112-3 du futur code de la justice pénale des mineurs, ils pourraient encourir dès 10 ans une des mesures éducatives judiciaires d’interdiction ou d’obligation mentionnées à l’article L. 112-2. Aussi, par souci de coordination, je propose simplement de porter, dans cet article, l’âge des mineurs concernés à 13 ans puisque si, par ailleurs, ils ne sont pas jugés, en deçà, capables de discernement, ils ne le seront pas non plus en ce qui concerne les mesures éducatives judiciaires.

    M. le président

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    La parole est à M. Jean Terlier, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, pour donner l’avis de la commission.

    M. Jean Terlier, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

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    Je tiens à préciser, madame Goulet, que vous êtes la bienvenue au sein de la commission des lois aux travaux de laquelle vous pouvez tout à fait participer pour défendre vos amendements, quand bien même vous n’en êtes pas membre.

    Mme Perrine Goulet

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    On ne peut plus ! On se fait virer à cause du covid-19 !

    M. Raphaël Schellenberger

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    Mais non ! Venez : c’est l’auberge espagnole !

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Ces amendements identiques vont à l’encontre du souhait de leurs auteurs. L’article L. 112-3 du code de la justice pénale des mineurs fixe un cas limite : celui où une mesure éducative est prononcée à l’encontre d’un mineur de moins de 10 ans. Il dispose que, en même temps, il ne peut faire l’objet d’une mesure de couvre-feu ou d’interdiction de paraître. Si vous remplacez l’âge limite de 10 ans par celui de 13 ans, vous allez autoriser l’application du couvre-feu ou de l’interdiction de paraître pour les mineurs de 10 à 13 ans.

    Mme Perrine Goulet

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    Non, c’est l’inverse !

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    La rédaction des amendements n’est donc pas pertinente. J’émets un avis défavorable.

    M. le président

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    La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice, pour donner l’avis du Gouvernement.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

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    Je partage l’avis du rapporteur. La mise en cohérence que vous préconisez n’est pas justifiée…

    M. Raphaël Schellenberger

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    Mais si, ils ont raison !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    …pour les raisons qui viennent d’être exposées très clairement. Je vous propose donc de retirer vos amendements, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.

    M. le président

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    La parole est à M. Ugo Bernalicis.

    M. Ugo Bernalicis

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    Il n’est pas encore suffisamment tard pour que je n’arrive plus à lire. Le texte proposé pour l’article L. 112-3, que nous souhaitons modifier, dispose : « Toutefois, seuls les mineurs de plus de dix ans encourent une mesure éducative judiciaire comportant l’une ou plusieurs des interdictions et obligations mentionnées aux 5° à 9° de l’article L. 112-2. » Ces mesures prévoient l’interdiction de paraître, d’entrer en contact avec la victime ou les coauteurs ou complices, d’aller et venir sur la voie publique entre vingt-trois heures et six heures, l’obligation de remettre un objet détenu ou appartenant au mineur et ayant servi à la commission de l’infraction, enfin de suivre un stage de formation civique.
    Nous souhaitons que seuls les mineurs de plus de 13 ans encourent de telles mesures éducatives judiciaires. Ainsi, elles ne pourraient être prononcées pour un mineur de moins de 13 ans. Or, à moins que je ne sache plus lire, cela me semble relativement clair.

    Mme Perrine Goulet

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    Je fais la même lecture.

    M. Ugo Bernalicis

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    J’ai mis du temps, certes, à tout comprendre, non que les dispositions soient complexes, mais il faut distinguer entre les sanctions et les peines. Ainsi, au début du texte, si l’on interdit la prononciation de peines pour les moins de 13 ans – qui bénéficient d’une présomption simple de non-discernement –, cela ne concerne pas les mesures éducatives judiciaires, qui pourraient donc être appliquées aux moins de 13 ans, ce que nous ne souhaitons pas, car nous voulons conserver une certaine proportionnalité dans l’échelle des peines. Admettons que l’on applique une présomption de non-discernement irréfragable aux mineurs de moins de 13 ans, il faudra dès lors qu’entre 13 et 15 ans, certaines mesures ne soient plus prononçables.
    Quoi qu’il en soit, en l’état actuel du texte, il serait possible d’imposer ces mesures éducatives judiciaires dès 10 ans…

    M. le président

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    Merci, monsieur Bernalicis.
    La parole est à Mme Perrine Goulet.

    Mme Perrine Goulet

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    Je suis prête à retirer mon amendement mais j’ai tout de même un doute. En effet, à la lecture de l’article L. 112-3, je comprends qu’on pourrait appliquer aux enfants de plus de 10 ans une mesure d’accompagnement telle que l’obligation de suivre un stage de formation civique.

    M. Ugo Bernalicis

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    Eh oui !

    Mme Perrine Goulet

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    Il s’agit donc bien des enfants de plus de 10 ans ?

    M. Michel Zumkeller

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    Oui !

    Mme Perrine Goulet

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    Or les mineurs de moins de 13 ans ne peuvent être condamnés à une peine car ils bénéficient d’une présomption de non-discernement. Dès lors, comment peut-on appliquer aux mineurs des mesures éducatives à partir de 10 ans ?

    Mme Alexandra Louis

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    Parce qu’il s’agit d’une présomption simple !

    M. le président

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    La parole est à M. le garde des sceaux.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Je vous rappelle qu’il est ici question de présomption simple de non-discernement. Ce n’est pas une présomption irréfragable. Aussi, pour qu’un mineur de moins de 13 ans se voie imposer une de ces mesures, il faut qu’il soit considéré comme étant capable de discernement. C’est en ce sens que je considère que ces amendements identiques n’apportent rien.

    M. Ugo Bernalicis

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    Mais si !

    M. le président

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    La parole est à M. Raphaël Schellenberger.

    M. Raphaël Schellenberger

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    Nous pouvons continuer longtemps de débattre sur le discernement du mineur, mais permettez-moi de rappeler de quoi il est question dans les mesures 5o à 9o mentionnées dans l’article L. 112-2.
    « Une interdiction de paraître […] dans […] les lieux dans lesquels [on a commis les faits]. » Même pour des mineurs âgés de 10 à 13 ans, on a connu plus sévère, comme punition.
    « Une interdiction d’entrer en contact avec la victime ou les coauteurs ou complices […]. » Même pour des enfants entre 10 et 13 ans, ce n’est pas choquant.
    « Une interdiction d’aller et venir sur la voie publique [après] vingt-trois heures […]. » Mais enfin ! Entre 10 et 13 ans, après vingt-trois heures, et même si on n’a pas commis de délit, cela fait longtemps que l’on a plus sa place sur la voie publique !

    Mme Perrine Goulet

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    C’est un autre débat !

    M. Raphaël Schellenberger

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    « L’obligation de remettre un objet détenu ou appartenant au mineur et ayant servi à la commission de l’infraction […]. » Bref, une confiscation ! Comme sanction, on a étalement connu pire…
    Enfin, il n’est pas choquant non plus de contraindre des mineurs de 10 à 13 ans à suivre un stage de formation civique.
    Donc, au-delà de 10 ans, ces mesures me paraissent tout à fait appropriées. C’est même un minimum.

    M. Erwan Balanant

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    Je suis d’accord avec vous !

    M. Raphaël Schellenberger

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    Je vais changer d’avis alors ! (Sourires.)

    (L’amendement no 307 est retiré.)

    (L’amendement no 272 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    Je suis saisi de deux amendements, nos 178 et 8, pouvant être soumis à une discussion commune.
    La parole est à M. Ugo Bernalicis, pour soutenir l’amendement no 178.

    M. Ugo Bernalicis

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    Pour en revenir aux amendements identiques précédents, je suis désolé mais, discernement ou pas, ils signifiaient simplement qu’il faudrait avoir 13 ans pour encourir les mesures éducatives judiciaires en question. Vous les relirez à tête reposée et nous y reviendrons le moment venu.
    Le présent amendement vise à modifier l’article L. 112-4 du code de la justice pénale des mineurs, afin que le point de départ du délai de mise en œuvre de la mesure éducative judiciaire soit fixé à la date de la prise en charge effective de l’enfant. Nous en avons déjà discuté en commission : si le juge décide que la mesure doit durer trois mois, il vaut mieux que ce soit à compter de la date de la prise en charge effective du mineur.
    Nous souhaitons également intégrer au même article les dispositions de l’article 16 bis de l’ordonnance de 1945 – cela n’a donc rien de révolutionnaire –, qui prévoient la mise sous protection judiciaire. Appréciée des professionnels de la justice des enfants, cette mesure de protection des adolescents utilisée pour consolider le travail d’insertion déjà engagé et éviter la récidive.
    L’amendement vise ensuite à ce que le juge des enfants puisse, à tout moment, jusqu’à l’expiration du délai de la mesure éducative judiciaire – laquelle, je le rappelle, consiste en un « accompagnement individualisé du mineur » –, modifier les modules prononcés.
    Il vise enfin à ce que le juge des enfants, dans les mêmes conditions, puisse soit supprimer une ou plusieurs mesures d’accompagnement et modules auxquels le mineur aura été soumis, soit mettre fin à la mesure éducative judiciaire.
    En résumé, le juge pourrait appliquer ces dispositions, les adapter et y mettre un terme à tout moment.

    M. le président

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    La parole est à Mme Cécile Untermaier, pour soutenir l’amendement no 8.

    Mme Cécile Untermaier

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    Comme nos collègues du groupe FI, nous souhaitons fixer le point de départ du délai d’application de la mesure éducative au moment de la prise en charge effective du mineur. C’est une mesure de bon sens…

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Non !

    Mme Cécile Untermaier

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    …pour éviter des contentieux et garantir le caractère effectif de la mesure éducative. C’est presque un amendement de précision.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Non !

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ?

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Nous en avons déjà discuté en commission et j’y ai répondu en précisant que la mesure éducative était exécutoire et que sa durée commençait dès le prononcé du jugement, ce qui paraît plus pertinent. Que sa durée coure à partir de la prise en charge effective du mineur n’aurait pas vraiment de caractère incitatif.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    En effet !

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Au contraire, même : on pourrait avoir la tentation de se laisser le temps d’appliquer la mesure et de mettre ainsi à mal toute la procédure de mise à l’épreuve éducative.

    M. Ugo Bernalicis

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    Mais non !

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Tout est encadré par un délai de six mois auxquels on en ajoute trois, soit neuf mois, au plus, entre l’audience de culpabilité et l’audience consacrée au prononcé de la sanction. Aussi, si on réduit la durée de la mesure parce qu’elle n’est pas appliquée immédiatement, mettons de un ou deux mois, eh bien, ces un ou deux mois seraient perdus. Vous n’incitez donc pas à une application rapide de la mesure, à savoir dès le prononcé de la décision. Avis défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Vos amendements auraient pour effet un manque de prévisibilité pour le mineur et sa famille, manque qui n’est absolument pas compatible avec les délais fixés dans le cadre du suivi post-sententiel ordonné par une juridiction. Je rappelle que les dispositions de l’article 12-3 de l’ordonnance du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante, qui prévoient la comparution du mineur et de ses représentants légaux devant le service de la protection judiciaire de la jeunesse dans un délai maximal de cinq jours ouvrables, sont reprises dans la partie réglementaire. Avis défavorable.

    M. le président

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    La parole est à M. Ugo Bernalicis.

    M. Ugo Bernalicis

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    Si l’on excepte celle qui est commune à notre amendement et à celui de Mme Untermaier, nous ne faisons pourtant que reprendre des dispositions figurant déjà dans l’ordonnance du 2 février 1945.
    S’agissant de la durée de la mesure éducative judiciaire, c’est bien à partir de la prise en charge effective du mineur que devrait courir le délai. Ainsi, si cette prise en charge n’a lieu que deux semaines après le jugement, sa durée n’en serait pas affectée. Dans le cas contraire, on perdrait deux semaines… C’est l’effectivité de la mesure elle-même qui importe.
    Faites donc confiance au magistrat ! C’est d’ailleurs le sens des autres propositions contenues dans notre amendement, qui lui permettraient à tout moment de modifier les modules, d’en rajouter, d’en supprimer, en fonction des réactions de l’enfant à ce qui lui est imposé. Cela me semble de bon sens. Comme Alexandra Louis l’a dit, le magistrat connaît le jeune.

    M. le président

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    La parole est à Mme Cécile Untermaier.

    Mme Cécile Untermaier

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    Il y a deux partis pris possibles : le caractère exécutoire ou le caractère effectif de la durée de la mesure, ce dernier me paraissant plus cohérent avec l’exigence constitutionnelle consistant à privilégier l’éducatif.

    (Les amendements nos 178 et 8, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    M. le président

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    Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 9 et 416.
    La parole est à Mme Cécile Untermaier, pour soutenir l’amendement no 9.

    Mme Cécile Untermaier

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    Il est défendu.

    M. le président

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    La parole est à M. Michel Zumkeller, pour soutenir l’amendement no 416.

    M. Michel Zumkeller

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    Il est de repli. Nous ne comprenons pas non plus pourquoi vous ne voulez pas prendre en compte la date de la prise en charge effective de l’enfant. Cela serait bien plus logique et cohérent : la mesure pourrait s’appliquer pleinement.

    (Les amendements identiques nos 9 et 416, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

    M. le président

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    La parole est à M. Antoine Savignat, pour soutenir l’amendement no 56.

    M. Antoine Savignat

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    Il précise que la médiation entre le mineur et la victime ne peut intervenir qu’en présence des représentants légaux.
    Le texte proposé pour l’article L. 112-9 du code de la justice pénale des mineurs dispose que « la juridiction recueille les observations du mineur et, dans la mesure du possible, de ses représentants légaux avant de prononcer un module de réparation ». Aux termes de l’article L. 112-8, le module de réparation peut consister en une médiation entre le mineur et la victime, ce qui implique pour le premier de prendre des engagements réparateurs à l’égard de la seconde. Or un mineur n’est pas apte à contracter seul ce type d’engagement, qui pourrait être disproportionné au regard de ses capacités. Par conséquent, dès lors que l’audition des représentants légaux n’intervient que « dans la mesure du possible », il faut préciser que, dans le cadre de la médiation, le mineur est accompagné de ses représentants légaux – ses parents, un administrateur ad hoc ou toute personne ayant capacité à le représenter. Cela permettrait de rendre la médiation effective et serait donc de l’intérêt de la victime comme du mineur.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    J’ai mis un peu de temps à le comprendre, mais vous tenez à ajouter cette précision dans le cas où la victime est mineure,…

    M. Antoine Savignat

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    Non, c’est l’auteur qui devrait être accompagné de ses représentants légaux !

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    …parce que si la victime est majeure, elle n’a pas besoin de représentants légaux.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    En effet, aux termes de l’amendement, ce sont les représentants légaux de la victime qui devraient être présents lors de la médiation.

    M. Antoine Savignat

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    Non ! Référez-vous à l’article L. 112-9 !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Avis défavorable, donc.

    M. le président

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    La parole est à M. Antoine Savignat.

    M. Antoine Savignat

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    L’article L. 112-9 précise que, avant de prononcer un module de réparation, « la juridiction recueille les observations du mineur et, dans la mesure du possible, de ses représentants légaux », ce qui signifie que la présence des représentants légaux n’est pas systématique. Si nous voulons qu’une médiation entre un mineur et sa victime réussisse, il faudrait, dans l’intérêt même de la victime, que soient présents les représentants légaux du mineur.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Ce n’est pas le bon article !

    M. Antoine Savignat

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    Il me semble qu’il y a un problème d’ordonnancement dans le code. La disposition selon laquelle la juridiction recueille les observations du mineur et de ses représentants légaux avant de prononcer un module de réparation devrait venir avant celle qui précise en quoi consiste le module de réparation. Comme l’article L. 112-9 n’impose pas en toute hypothèse la présence des représentants légaux du mineur, il convient de prévoir cette présence en cas de médiation.

    M. Ugo Bernalicis

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    Il n’a pas tort !

    M. le président

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    La parole est à M. Raphaël Schellenberger.

    M. Raphaël Schellenberger

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    Je comprends votre raisonnement, monsieur le garde des sceaux : vous estimez que dans l’article modifié par notre amendement, les mots « représentants légaux » se rapporteraient plutôt à la victime qu’au mineur. Mais en réalité, ils pourraient concerner les deux. Au pire, la victime est majeure, auquel cas elle n’a pas de représentants légaux, mais si elle est mineure, il serait de bon ton que ses représentants légaux soient présents aussi.

    Mme Alexandra Louis

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    Ce n’est pas ce que dit l’amendement !

    M. Raphaël Schellenberger

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    Les mots que nous souhaitons ajouter concerneraient donc à la fois l’auteur et la victime. Ce n’est en rien gênant.

    M. le président

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    La parole est à M. le garde des sceaux.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Au-delà des petites difficultés légistiques, je pense qu’il n’est pas toujours utile que les représentants légaux soient présents.

    M. Antoine Savignat

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    Nous sommes d’accord !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    On l’a évoqué en commission : la parole de l’enfant est parfois plus libre quand les représentants légaux ne sont pas là.

    M. le président

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    Je vous donne à nouveau la parole, monsieur Savignat, à titre exceptionnel.

    M. Antoine Savignat

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    Je suis entièrement d’accord avec vous, monsieur la garde des sceaux : la présence des représentants légaux n’est pas toujours indispensable, et c’est pourquoi nous ne la prévoyons qu’en cas de médiation. Celle-ci est un engagement contractuel que le mineur n’est pas forcément en mesure de prendre seul.

    (L’amendement no 56 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Perrine Goulet, pour soutenir l’amendement no 311.

    Mme Perrine Goulet

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    Pour les adultes, il existe un type de réparation consistant à organiser une médiation entre l’auteur d’une infraction pénale et une victime autre que la sienne mais ayant subi le même genre de sévices. La même solution pourrait être proposée aux mineurs.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    La médiation prévue à l’article L. 112-8 ne peut concerner qu’un mineur et sa victime. Ce que vous proposez existe déjà, mais pas dans ce cadre. Ce n’est pas le bon endroit où insérer une telle mesure.

    Mme Perrine Goulet

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    Il ne s’agit que de proposer un module de réparation supplémentaire !

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Avis défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Je demande le retrait de l’amendement. Vous entendez prévoir une médiation entre le mineur et une victime concernée par une autre procédure. Or chaque affaire présente ses particularités. Je ne vois donc pas trop comment pourrait être mis en place un tel mécanisme, que je trouve possiblement utile mais aussi dangereux.

    M. le président

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    La parole est à M. le rapporteur, qui souhaite compléter son propos.

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Votre amendement est en réalité satisfait par l’article L. 13-4 du futur code de la justice pénale des mineurs : « Il peut être proposé à la victime et à l’auteur de l’infraction de recourir à la justice restaurative, conformément à l’article 10-1 du code de procédure pénale, à l’occasion de toute procédure concernant un mineur et à tous les stades de celle-ci, y compris lors de l’exécution de la peine, sous réserve que les faits aient été reconnus. »

    M. le président

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    La parole est à M. le garde des sceaux, qui souhaite également compléter son propos.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    La justice restaurative – la victime et l’auteur rapprochés l’un de l’autre – est très utile. En aucun cas elle n’est obligatoire, il faut l’accord des deux personnes concernées. Mais vous proposez de mettre un auteur en présence d’une victime qui n’est pas la sienne. Je trouve que cela peut être utile mais aussi extrêmement dangereux. Je maintiens donc mon avis défavorable.

    M. le président

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    La parole est à Mme Perrine Goulet.

    Mme Perrine Goulet

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    De telles rencontres sont déjà organisées par les associations d’aide aux victimes : faire se rencontrer des auteurs d’infractions et des victimes afin que les premiers prennent conscience de la nature de leurs actes sans pour autant être confrontés à la personne qui les a subis. Il s’agit d’une pratique assez novatrice, je le reconnais. Par ailleurs, le mot « médiation »  n’est peut-être pas approprié. Mais ce serait une possibilité supplémentaire de réparation, sur le modèle de ce qui se fait déjà pour les adultes et qui fonctionne.

    M. le président

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    La parole est à Mme Alexandra Louis.

    Mme Alexandra Louis

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    Je comprends l’intention de Perrine Goulet, qui relève de la justice restaurative : protéger la victime, voire l’auteur lui-même, en évitant de faire se rencontrer l’auteur et sa propre victime. Mais l’amendement concernent les dispositions relatives à la médiation pénale, laquelle ne peut concerner que l’auteur et sa victime et est très différente de la justice restaurative. Les deux procédures – la médiation et la rencontre entre auteurs et victimes – ont l’intérêt de procéder à une réparation mais c’est leur seul point commun. Par ailleurs, l’amendement est satisfait par d’autres dispositions du code de la justice pénale des mineurs et du code de procédure pénale.

    M. le président

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    La parole est à Mme Cécile Untermaier.

    Mme Cécile Untermaier

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    Tout a été dit et bien dit. Le module de réparation doit nécessairement rapprocher l’auteur et la victime. Ce que propose l’amendement relève d’un tout autre registre.

    M. le président

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    La parole est à M. Raphaël Schellenberger.

    M. Raphaël Schellenberger

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    C’est même pire : l’amendement tend à élaborer une stratégie d’entretien de la victimisation, qui plus est vis-à-vis de mineurs. La réparation consiste à rapprocher les points de vue afin que tout le monde s’en sorte par le haut. Là, on entretiendrait une position victimaire en organisant une circulation quasi professionnelle des victimes. Il ne faut pas enfermer les gens dans leur état de victime : l’objectif est qu’ils en sortent.

    (L’amendement no 311 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement no 146.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Lors des débats en commission et de nouveau en séance, la place centrale de la victime a été rappelée. Je propose, avec cet amendement, que soient recueillies ses observations avant de prononcer le module de réparation. Le fait d’entendre la version du mineur, ainsi que celle de la victime, permettra de garantir la qualité et la pertinence du module de réparation.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Cet amendement implique l’immixtion de la victime dans l’office du juge, ce à quoi je suis tout à fait opposé. La victime n’a pas à se prononcer sur l’opportunité de la décision du juge. Avis défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Je partage la position du rapporteur.

    M. le président

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    La parole est à Mme Emmanuelle Ménard.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Je ne propose pas que la victime donne son avis ou formule des propositions de réparation ; je demande qu’elle soit entendue en tant que victime, ce qui ne me semble pas aberrant.

    (L’amendement no 146 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Perrine Goulet, pour soutenir l’amendement no 312.

    Mme Perrine Goulet

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    Le texte proposé pour l’article L. 112-11 du code de la justice pénale des mineurs permet le placement du mineur dans un établissement de santé, ce dont nous nous félicitons, mais « à l’exclusion des services de psychiatrie ». La France connaît certes une crise dans le secteur de la psychiatrie et plus encore dans celui de la psychiatrie infantile, mais il est nécessaire qu’un placement en établissement psychiatrique puisse être décidé lorsque cela s’impose. Je propose donc de supprimer cette exception, d’autant que c’est souvent à l’adolescence que se révèlent certaines affections psychiatriques. Laissons donc au juge la possibilité d’en décider.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Je ne suis pas certain que la solution que vous proposez soit la bonne, chère collègue. Il existe actuellement deux procédures distinctes. L’hospitalisation sous contrainte en matière psychiatrique obéit à des règles strictes. Il n’est pas opportun de la fondre dans la mesure éducative. Ce serait source de confusion. Je vous invite à retirer l’amendement ; à défaut, mon avis sera défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Le placement en établissement psychiatrique est du ressort du médecin et non du juge.

    M. Raphaël Schellenberger

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    J’allais le dire !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Avis défavorable.

    (L’amendement no 312 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Perrine Goulet, pour soutenir l’amendement no 313.

    Mme Perrine Goulet

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    Il est nécessaire et utile que les parlementaires puissent visiter les établissements publics ou privés accueillant des mineurs en application du code de la justice pénale des mineurs, et je remercie le Gouvernement pour cette disposition figurant à l’article L. 113-4. Mais, au nom de l’intérêt supérieur de l’enfant, il faudrait autoriser aux parlementaires la visite de tout établissement pouvant accueillir des enfants.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Sur le fond, nous sommes d’accord : il est souhaitable que les parlementaires puissent visiter des établissements chargés de la protection de l’enfance. Néanmoins, nous parlons ici du code de la justice pénale des mineurs, dont les règles s’appliquent aux établissements accueillant des mineurs pris en charge dans le cadre d’une procédure pénale. L’autorisation donnée par cet article vise à améliorer le contrôle du respect des droits des mineurs, en particulier des mineurs enfermés. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Même avis.

    M. le président

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    La parole est à M. Ugo Bernalicis.

    M. Ugo Bernalicis

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    Cet amendement, qui est intéressant, démontre l’intérêt qu’aurait un code de l’enfance…

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    On ne va pas remettre ça ! C’est toujours la même rengaine…

    M. Ugo Bernalicis

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    …liant la sphère civile et la sphère pénale. Avec un tel code, tous les établissements qui accueillent des enfants auraient été susceptibles d’être visités par les parlementaires. Il est dommage que cela ne puisse pas être le cas !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Ce qui est dommage, c’est que vous ayez pris la parole pour dire ça !

    M. le président

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    La parole est à M. Raphaël Schellenberger.

    M. Raphaël Schellenberger

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    Je fais partie des plus ardents défenseurs du Parlement et des parlementaires, mais un peu de cohérence ne fait pas de mal ! Les parlementaires ont des droits spécifiques en matière de visite des lieux de privation de liberté, et pour cause : ils sont les garants de la liberté et leur mission est de définir les règles de la privation de liberté. Ils ont donc la possibilité, à tout moment, sans prévenir, de visiter les lieux de privation de liberté, qu’ils soient médicaux, pénitentiaires ou chargés de la protection de l’enfance.
    Reste que la propriété privée ne saurait être remise en cause. Or si nous cessons de limiter les visites des parlementaires aux lieux de privation de liberté, alors demain, à tout moment, ils pourront entrer dans les domiciles des Français. Telle est bien la question qui nous est posée avec cet amendement ! Un foyer de l’enfance de l’ASE – Aide sociale à l’enfance – est un domicile pour l’enfant – même si son fonctionnement obéit à des règles particulières –, et non un lieu de privation de liberté. L’amendement induit une immixtion des parlementaires dans la sphère privée et va donc bien au-delà des compétences qui leur sont attribuées. Cet amendement n’est pas seulement inutile, il est dangereux.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Bravo !

    (L’amendement no 313 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    Je suis saisi de deux amendements, nos 417 et 179, pouvant être soumis à une discussion commune.
    La parole est à M. Michel Zumkeller, pour soutenir l’amendement no 417.

    M. Michel Zumkeller

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    L’article L. 113-4 du code de la justice pénale des mineurs permet aux parlementaires de visiter les lieux accueillant des mineurs. Cet amendement, déposé à l’initiative de notre collègue Agnès Thill, propose de compléter l’article avec la phrase suivante : « Les avocats bénéficient de la même autorisation. »

    M. le président

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    La parole est à Mme Danièle Obono, pour soutenir l’amendement no 179.

    Mme Danièle Obono

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    Il vise à étendre au bâtonnier ou à la bâtonnière l’autorisation de visiter des établissements publics ou privés accueillant des mineurs et à répondre ainsi à une demande ancienne des avocats et des avocates.
    Que ce soit dans les lieux de privation de liberté et plus encore dans les établissements chargés de la protection de l’enfance, les différents professionnels de la défense et de la protection de la jeunesse doivent être présents et accomplir un devoir de vigilance et d’alerte face à des agissements qui ont malheureusement donné lieu à de nombreux scandales au cours des dernières années. Plus leur présence sera forte, plus l’exigence et l’exemplarité seront assurées et plus les pouvoirs publics seront alertés sur d’éventuels dysfonctionnements. La mesure que nous proposons avec cet amendement serait donc bénéfique à la fois aux personnes concernées et à la protection judiciaire elle-même.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements en discussion commune ?

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Il ne faut pas tout mélanger. Un avocat a pour mission de défendre les intérêts de son client. Il peut l’assister dans le cadre d’un droit de visite et peut même l’accompagner dans son établissement de placement, mais, en dehors de ces deux cas, il n’a aucune raison de visiter un lieu de privation de liberté.
    Nous n’allons pas autoriser tous les avocats de France et de Navarre à se rendre dans tous les établissements publics ou privés accueillant des mineurs ! Que ce soit le bâtonnier, dans le second amendement, ou l’avocat, dans le premier, il n’y a aucune raison d’étendre le droit de visite de ces professionnels en dehors des cas où ils assistent leurs clients. Avis très défavorable.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Mais oui !

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Il n’est pas impossible que l’amendement de Mme Obono soit un amendement du Conseil national des barreaux – CNB : il s’exprime beaucoup par votre voix, mesdames et messieurs les députés du groupe La France insoumise !
    Reste que le rôle d’un avocat n’est pas de visiter les lieux de privation de liberté ; il est de défendre son client. La France comptait 69 900 avocats le 9 septembre 2019 – ils sont sans doute un peu plus nombreux aujourd’hui – et vous voulez leur permettre à tous de visiter les lieux accueillant des mineurs ? Ce n’est pas leur rôle, ils ne sont contrôleurs de rien. En revanche, c’est le rôle des parlementaires – j’espère que vous visitez souvent des lieux de privation de liberté, madame Obono –,…

    Mme Elsa Faucillon

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    Il faut vérifier quand on fait ce genre d’insinuation !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    …des magistrats, de la contrôleuse générale des lieux de privation de liberté et de la Défenseure des droits.
    Les avocats n’ont strictement rien à faire là ! Pardon, madame la députée, mais vous direz au CNB que le Gouvernement était défavorable à l’amendement. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Danièle Obono.

    Mme Danièle Obono

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    Vous avez mal lu, monsieur le garde des sceaux : cet amendement n’est pas un amendement du CNB, mais un amendement du groupe La France insoumise ! Il se trouve simplement que nous souscrivons à cette demande du CNB. Si vous voulez faire passer un message à cette organisation, vous avez certainement les contacts qu’il faut pour cela !
    Il semblerait, par ailleurs, que vous n’ayez pas revu vos argumentaires depuis les travaux en commission, car nous avons pris en considération vos remarques : à la différence de l’amendement de Mme Thill, le nôtre ne concerne pas tous les avocats de France et de Navarre, mais seulement les bâtonniers et les bâtonnières, qui jouent un rôle particulier au sein de la justice, notamment à l’égard des avocats. (Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.)
    Je suis certaine que vous portez en haute estime la profession d’avocat, monsieur le garde des sceaux…

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Je suis moi-même avocat !

    Mme Yaël Braun-Pivet, présidente de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

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    Vous avez ici trois avocats !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Et même davantage !

    Mme Danièle Obono

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    …– nombreux sur ces bancs ont d’ailleurs occupé cette fonction –, mais les avocats ne font pas que défendre leurs clients.

    M. Raphaël Schellenberger

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    Ils représentent un client, pas l’intérêt général !

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Cela n’a rien à voir !

    Mme Danièle Obono

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    Il y va de la conception que nous nous faisons de la justice. Au-delà des leurs clients, les bâtonniers et les bâtonnières défendent une certaine idée de la justice. Le droit de la défense ne porte pas simplement sur des intérêts particuliers et clientélistes,…

    M. Raphaël Schellenberger

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    Si !

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Mais si !

    Mme Danièle Obono

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    …mais sur la justice dans son ensemble. Or plus les liens seront étroits entre les lieux de privation ou de restriction de liberté et le reste de la société, mieux notre nation se portera. C’est la raison pour laquelle des vigies sont nécessaires et il est utile que les parlementaires soient désormais autorisés à visiter les lieux de privation de liberté. Nous sommes nombreux à effectuer de telles visites. Les députés du groupe La France insoumise souhaitent que ces visites soient étendues dans l’intérêt de l’institution.

    M. le président

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    Je vous remercie, madame Obono.

    Mme Danièle Obono

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    Notre amendement, qui a été rectifié pour tenir compte de vos critiques, est tout à fait justifié.

    M. Ugo Bernalicis

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    Il n’y avait pas ça sur les fadettes du CNB ? (Exclamations sur les bancs des groupes LaREM et Dem.)

    Mme Perrine Goulet

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    Ça, ce n’était pas nécessaire !

    M. Ugo Bernalicis

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    Vous ne pouvez pas me reprocher de faire ce que vous faites tout le temps !

    M. le président

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    Monsieur Bernalicis, je vous en prie !

    M. Ugo Bernalicis

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    Ils n’ont pas cessé d’interrompre Mme Obono pendant son intervention !

    M. le président

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    La parole est à M. Antoine Savignat.

    M. Antoine Savignat

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    Permettez-moi de ramener un peu de sérénité dans notre débat et de rassurer les auteurs de ces deux amendements.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Mais oui !

    M. Antoine Savignat

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    Tous les jeunes placés dans des établissements auront le droit de recevoir leur avocat. Autrement dit, les avocats entreront bel et bien dans ces établissements en allant voir les jeunes qu’ils assistent. Ces derniers auront donc la possibilité de dénoncer à leur avocat les éventuels dysfonctionnements que vous semblez craindre.
    J’ajoute que c’est faire insulte aux avocats de ces jeunes que de demander que d’autres avocats vérifient qu’ils ont été vigilants dans la défense de leurs clients. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LR et LaREM.)
    En ce sens, votre raisonnement n’est pas logique.
    Enfin, bien que je porte une affection particulière à cette profession (Sourires), je ne crois pas que ce soit le rôle d’un avocat que d’être enquêteur et dénonciateur. Il risquerait, en remplissant la nouvelle fonction que vous lui assignez, de perdre son indépendance et sa crédibilité,…

    M. Ugo Bernalicis

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    Mais non !

    M. Antoine Savignat

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    …ce qui serait catastrophique pour la mission qu’il mène au sein de la société. (M. Raphaël Schellenberger applaudit. – Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Alexandra Louis.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Elle aussi, elle est avocate !

    Mme Alexandra Louis

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    Dans un État de droit, il est très important que chacun reste dans son rôle. Les avocats assurent les droits de la défense, les magistrats sont les gardiens des libertés et les parlementaires défendent les libertés.
    En pratique, cela a été dit à plusieurs reprises, le rôle de l’avocat est de défendre son client. Si, lorsqu’il se rend dans un lieu de détention pour rencontrer son client, il constate des problèmes, il dispose de plusieurs recours possibles : il peut saisir le magistrat ou la contrôleuse des lieux de privation de liberté ; il peut aussi alerter les pouvoirs publics. En tout état de cause, le rôle du bâtonnier n’est pas de garantir des conditions de détention satisfaisantes dans les lieux de privation de liberté, mais de défendre les intérêts de la profession. Je le redis, chacun doit être dans son rôle. Tout se passe bien mieux quand c’est le cas.

    M. Rémy Rebeyrotte

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    Excellent !

    (Les amendements nos 417 et 179, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    M. le président

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    La parole est à M. Rémy Rebeyrotte, pour soutenir l’amendement no 441.

    M. Rémy Rebeyrotte

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    Je vais me faire l’avocat – bien que je n’en sois pas un (Sourires) – d’une cause que j’avais défendue avec Erwan Balanant lors de l’examen de la loi de programmation et de réforme pour la justice : changer le nom des centres éducatifs fermés – CEF.

    M. Erwan Balanant

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    Eh oui !

    M. Rémy Rebeyrotte

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    En fait, même si leur dénomination a un sens sur le plan judiciaire, ces centres ne sont pas fermés. Or pour avoir eu à en installer un dans ma ville, je peux vous dire que l’appellation présente un inconvénient : la grande majorité de nos concitoyens les perçoivent comme des prisons, tout en constatant qu’ils sont ouverts, notamment aux réseaux associatifs.
    L’objectif de ces centres est précisément d’ouvrir l’esprit de ces jeunes grâce à l’éducation et non pas de les maintenir enfermés. Il y a donc quelque chose qui ne va pas dans la juxtaposition des termes « éducatifs » et « fermés ».
    Comme nous l’avions fait à l’époque, je propose de les appeler « centres éducatifs sous contrôle judiciaire ». Ce n’est peut-être pas encore satisfaisant, mais en tout cas, il faut modifier leur nom actuel qui ne correspond pas à la fonction qu’ils exercent.

    M. Erwan Balanant

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    Il faut bien nommer les choses !

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    L’idée de renommer ces structures est très intéressante…

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Oui !

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    …mais l’appellation proposée laisserait penser qu’ils ne s’adressent qu’à des jeunes placés sous contrôle judiciaire, ce qui n’est pas le cas : les mineurs qui y sont hébergés peuvent l’être en application d’un sursis probatoire, d’un placement à l’extérieur ou à la suite d’une libération conditionnelle.
    L’idée est intéressante mais la terminologie proposée serait source de confusion. Je vais laisser le ministre se prononcer.

    Mme Elsa Faucillon

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    Belle réponse diplomatique !

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    J’ai été très sensible à l’un de vos arguments : les projets de création de CEF rencontrent parfois des réticences en raison de leur nom qui évoque la fermeture et donc la prison, ce qui fait peur aux futurs voisins. On a parfois du mal à trouver des lieux pour les créer, en particulier au sein des villes. Vous le savez bien : un CEF, comme une prison, on préfère qu’il soit dans la ville d’à côté.
    Votre idée me semble donc de bon sens. Cela étant, il faut que je consulte les services et les acteurs concernés. Je vous demande un peu de patience et, dans l’attente que nous lancions les premières pistes de réflexion, je vous propose de retirer votre amendement.

    M. Rémy Rebeyrotte

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    Je le retire, et je remercie M. le rapporteur et M. le ministre pour l’ouverture dont ils ont fait preuve.

    M. Ugo Bernalicis

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    Dites-nous si on vous gêne !

    Mme Elsa Faucillon

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    Un petit café ?

    (L’amendement no 441 est retiré.)

    M. le président

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    La parole est à M. Michel Zumkeller, pour soutenir l’amendement no 173.

    M. Michel Zumkeller

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    Il tend à compléter ainsi le texte proposé pour l’article L. 113-7 du code de la justice pénale des mineurs : « Les mineurs font également l’objet d’un suivi psychologique et psychiatrique. »
    Comme j’ai eu l’occasion de le rappeler dans la discussion générale, j’ai eu le plaisir, en 2009, de rédiger au nom de la commission des lois, présidée à l’époque par Jean-Luc Warsmann, un rapport d’information qui dressait un constat catastrophique de la prise en charge sanitaire, psychologique et psychiatrique des personnes mineures. Or rien n’a changé en ce domaine depuis 2009 – la situation a même empiré.
    Même si les moyens consacrés à la psychiatrie ne sont pas à la hauteur des enjeux, il serait peut-être temps d’agir sur ce sujet important. Les enfants dont nous parlons depuis le début de nos débats souffrent souvent d’un malaise qui doit être traité par la psychologie ou la psychiatrie.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Votre amendement est intéressant, et je partage votre analyse sur l’importance du suivi psychologique pour de nombreux mineurs. Toutefois, la rédaction que vous avez retenue tend à rendre ce suivi automatique et obligatoire, ce qui se heurte au nécessaire consentement aux soins. C’est pourquoi j’émettrai un avis défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Nous sommes tous d’accord sur l’intérêt de ces questions, mais les juridictions ont déjà la possibilité d’ordonner la prise en charge des besoins psychologiques ou psychiatriques des mineurs dans le cadre du module « santé », d’une mesure éducative, ou à titre d’obligation dans le cadre d’une mesure de sûreté ou d’un sursis probatoire.
    Ce qui me chagrine dans votre proposition et me conduit à y donner un avis défavorable, c’est le caractère automatique du suivi. N’importe quel juge qui pressent un malaise, fût-il existentiel – et vous avez raison d’en souligner la fréquence chez les gamins délinquants –, a recours au psychologue ou au psychiatre.

    M. le président

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    La parole est à M. Michel Zumkeller.

    M. Michel Zumkeller

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    En pratique, il n’y a pas de psychiatres et de psychologues disponibles ; le juge ne peut donc pas, concrètement, recourir à leurs services. Votre critique relative au caractère automatique de la disposition est sûrement justifiée, mais l’idée était de rendre obligatoire la mise en œuvre d’un suivi psychologique. Peut-être pourriez-vous rectifier l’amendement en proposant une autre formule. Ce qui est sûr, c’est que nous ne pouvons pas nous satisfaire de la situation actuelle, qui est catastrophique. Je vous conseille vraiment la lecture de ce rapport, car rien n’a changé depuis 2009 : en réalité, les jugent ne peuvent pas ordonner de tels suivis.

    (L’amendement no 173 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Elsa Faucillon, pour soutenir l’amendement no 80.

    Mme Elsa Faucillon

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    Le changement proposé à l’instant par M. Rebeyrotte est cosmétique : le nouveau nom donné aux CEF permettrait de masquer qu’ils constituent plutôt un autre mode d’enfermement qu’une forme de substitution à l’incarcération.
    Notre amendement s’inspire d’une préconisation de l’UNICEF, le Fonds des Nations unies pour l’enfance. Il vise à renforcer la progressivité des sanctions applicables aux mineurs délinquants et à réaffirmer que l’enfermement doit être une solution de dernier recours.
    Rappelons que 882 adolescents vivaient derrière les barreaux au 1er juillet 2019. En comptant les jeunes en centres éducatifs fermés, ce sont plus de 1 350 mineurs qui sont enfermés, un nombre qui tend à augmenter. Or votre réforme de l’ordonnance de 1945 ne s’attaque pas réellement au problème et risque même de l’aggraver.
    Le CEF se situe actuellement à mi-chemin entre le foyer et la prison, mais il tend à s’imposer comme la principale mesure de prise en charge des adolescents en conflit avec la loi.
    Au départ, ils ont été présentés comme une alternative à l’incarcération, mais cela ne correspond pas à la réalité.

    Mme Alexandra Louis et M. Rémy Rebeyrotte

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    Si !

    Mme Elsa Faucillon

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    Non, ce qu’indiquent les chiffres, c’est qu’ils sont de plus en plus des antichambres de la prison.
    Monsieur Rebeyrotte, je vais vous le redire à chaque fois que nous examinons un texte dans l’hémicycle : prenez un micro si vous voulez vous exprimer, plutôt que de faire ces incessants petits apartés. Ils sont insupportables. (M. Ugo Bernalicis et Mme Danièle Obono applaudissent.)

    M. Rémy Rebeyrotte

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    Je pourrais vous en dire autant, madame !

    M. Bruno Questel

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    Qu’est-ce que c’est que cette façon de prendre les gens à partie ?

    Mme Elsa Faucillon

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    Non, mais ça suffit ! Je prends le micro très régulièrement, monsieur Rebeyrotte, certainement trop souvent à votre goût. Et quand vous le prendrez, j’en penserai sans doute autant, mais je vous engage tout de même à le faire.
    La disposition que nous souhaitons supprimer atteste parfaitement mes propos précédents : « La violation des obligations auxquelles le mineur est astreint en vertu des mesures qui ont entraîné son placement dans le centre, y compris en cas d’accueil temporaire dans un autre lieu, peut entraîner le placement en détention provisoire ou l’emprisonnement du mineur. »
    Afin que l’enfermement soit véritablement la solution de dernier recours, mise en œuvre seulement en cas d’échec des autres modalités de prise en charge, il convient d’apporter une réponse graduée.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Il sera évidemment défavorable. Certains collègues l’ont dit en aparté : le placement en CEF est bien une solution alternative à l’incarcération.

    Mme Elsa Faucillon

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    Non ! Il y a moins de délinquants, et pourtant on incarcère plus !

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Si, madame Faucillon. Lisez le rapport d’information que j’ai rédigé avec Cécile Untermaier. Nous avons visité des CEF. Aucun magistrat ne vous réclamera l’arrêt des créations de places dans ces structures qui offrent une véritable proposition éducative. Vouloir les supprimer ne me semble vraiment pas raisonnable.

    M. Ugo Bernalicis

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    Comment faisait-on quand ils n’existaient pas ?

    M. le président

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    La parole est à M. Rémy Rebeyrotte.

    M. Rémy Rebeyrotte

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    Contrairement à vous, madame Faucillon, je pense que tant qu’il y a l’espoir d’une solution éducative pour un jeune, il faut le saisir. Les centres éducatifs fermés représentent cela.
    Depuis le départ, vous êtes contre les CEF. Pour notre part, nous nous y sommes favorables parce que l’aspect éducatif – et c’est tout le sens du texte et celui de l’ordonnance de 1945 – doit l’emporter sur la répression à chaque fois que c’est possible. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)

    M. le président

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    La parole est à M. Ugo Bernalicis.

    M. Ugo Bernalicis

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    Je me demande comment on faisait avant la création des CEF, quand je n’étais pas encore né…
    Avant la création des CEF, il y avait moins de mineurs emprisonnés. Depuis leur création, en plus des enfants hébergés dans ces centres, il y a davantage de mineurs dans les établissements pénitentiaires pour mineurs ! Selon le principe des vases communicants, si les CEF constituaient vraiment une alternative à l’incarcération, les EPM devraient se vider. Or les statistiques montrent le contraire.
    Cher collègue Rebeyrotte, vous trouvez que la juxtaposition des termes « éducatifs » et « fermés » est bizarre. C’est justement le genre d’argument qui était opposé, à l’époque de la création des CEF, à cette trouvaille de Nicolas Sarkozy.

    M. Rémy Rebeyrotte

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    La proposition venait de Lionel Jospin !

    Mme Cécile Untermaier

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    Ce n’est pas un argument !

    M. Ugo Bernalicis

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    Mais il ne s’agissait pas, alors de changer le nom du dispositif, mais bien d’en empêcher la création.
    Avant, il existait des lieux de vie, par exemple, pour séparer un mineur de son environnement. Ils ont été fermés les uns après les autres. Étaient-ils plus coûteux ? Je ne le crois pas. En revanche, ils exigeaient une plus grande implication de la part des éducateurs de la protection judiciaire de la jeunesse – PJJ. C’est sûr qu’il aurait été compliqué de déléguer au privé la gestion de ces structures ! Or elles ont été peu à peu supprimées au profit de centres fermés. Voilà la réalité.

    M. le président

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    Veuillez conclure, monsieur Bernalicis.

    M. Ugo Bernalicis

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    Nous sommes opposés à cette logique. Notre collègue Faucillon l’a rappelé : le placement en centre éducatif fermé est une étape avant la détention provisoire. Quoi qu’il en soit, nous pouvons tous tomber d’accord sur un point : si un terme est adéquat dans leur nom, c’est « fermés ».

    M. le président

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    Dans mon empressement à donner la parole à M. Rebeyrotte, j’ai oublié de demander l’avis du garde des sceaux, que j’ai présupposé négatif. Veuillez m’en excuser, monsieur le ministre. Vous avez la parole.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Vous êtes pardonné, monsieur le président.
    Comment faisait-on avant les CEF ? Comment faisait-on avant l’ordonnance de 1945 ?

    M. Ugo Bernalicis

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    Attendez, ce n’est pas la même date !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Comment faisait-on avant la création de La France insoumise ? Comment faisait-on quand Jean-Luc Mélenchon était ministre socialiste ? (Exclamations sur les bancs du groupe FI.) Je n’en sais rien.
    À présent, les CEF existent et je suis allé en visiter. Ce que j’ai vu est absolument formidable : on y compte vingt-six éducateurs pour douze gamins. C’est formidable ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)

    Mme Perrine Goulet

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    Eh oui !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Ces centres font l’objet d’un consensus général qui va même jusqu’à l’extrême droite – je ne parle pas de vous, madame Ménard, mais de Mme Le Pen. Dès lors, je me demande si votre méthode ne consiste pas à vous opposer à tout.

    Mme Elsa Faucillon

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    Oh !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    C’est la conclusion à laquelle je parviens en vous écoutant. Vous voulez supprimer la possibilité de placer en détention un mineur en cas de violation de ses obligations. Pourquoi vouloir retirer au juge ces moyens ? Il y a des cas où cela se justifie, je suis désolé de le dire.
    Depuis le début, monsieur Bernalicis, nos échanges sur cette question sont surréalistes. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)

    M. Ugo Bernalicis

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    Là, je suis d’accord !

    M. le président

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    La parole est à M. Raphaël Schellenberger.

    M. Raphaël Schellenberger

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    Notre collègue Bernalicis donne dans la caricature. On ne peut pas lui en vouloir d’y recourir – nous le faisons aussi – jusqu’à même l’incarner.

    M. Ugo Bernalicis

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    Merci !

    M. Raphaël Schellenberger

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    Mais là, on compare des données brutes sans les contextualiser. Il y a cinquante ans, il y avait moins de mineurs. (Exclamations sur les bancs du groupe FI.)

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Eh oui !

    M. Ugo Bernalicis

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    Pas dans le Nord…

    M. Raphaël Schellenberger

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    Le nombre de mineurs délinquants n’était pas forcément moins élevé en pourcentage mais il l’était en données brutes. Il y avait donc besoin de moins de places.
    C’est une question de proportion et de répartition. En données brutes, les mineurs délinquants sont actuellement plus nombreux qu’il y a cinquante ans. Cela ne veut pas dire que le pourcentage de mineurs délinquants dans la population a explosé. Comme la population a largement augmenté, le nombre de mineurs délinquants à placer dans des centres éducatifs fermés a progressé.
    En raison d’une politique nataliste dont nous pouvons être fiers, la population va encore s’accroître et, avec elle, le besoin de places en prison et en centres éducatifs fermés.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Il est bien, lui !

    M. le président

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    La parole est à Mme Alexandra Louis.

    Mme Alexandra Louis

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    Il faut sortir du débat un peu stérile entre les partisans et les détracteurs des centres éducatifs fermés. En réalité, le placement en centre éducatif fermé permet très souvent d’éviter l’incarcération. Vous pouvez prétendre le contraire, mais cela n’en fait pas une vérité. Je pourrais lister de nombreux exemples si je n’étais pas tenue par le secret professionnel.

    M. Ugo Bernalicis

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    Oh là là !

    Mme Alexandra Louis

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    Cela étant, l’esprit de cette réforme est avant tout de donner au juge des enfants ou au tribunal pour enfants tous les outils nécessaires pour s’adapter à chaque mineur et lui donner la réponse la plus appropriée possible.
    Surtout, si l’option du placement en détention provisoire ou de l’emprisonnement n’est plus disponible, que faire si un mineur ne respecte pas ses obligations et quitte un CEF, ce qui arrive dans de nombreux cas ? La réponse éducative doit parfois être progressive avant de pouvoir ensuite être allégée. En tout cas, vous ne pouvez pas priver un magistrat de cette option : c’est un non-sens et ce n’est même pas dans l’intérêt du mineur.  Bravo ! » sur les bancs du groupe LaREM.)

    (L’amendement no 80 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à Mme la présidente de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, pour soutenir l’amendement no 345.

    Mme Yaël Braun-Pivet, présidente de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

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    Il est le résultat d’une visite de terrain. Certains se demandent parfois à quoi servent les parlementaires. Le présent amendement montre combien il est important de dialoguer avec les acteurs de terrain – en l’occurrence, en visitant des centres éducatifs fermés – pour pouvoir ensuite agir par la voie législative. Avec ma collègue Mireille Clapot, j’ai ainsi visité un centre éducatif fermé dans la Drôme. Nous nous sommes rendu compte, à cette occasion, que des places restent parfois vacantes pendant plusieurs semaines, parce que les magistrats les ont attribuées à des mineurs qui ne les occupent pas, pour de multiples raisons. Le centre se retrouve donc avec des places vacantes, alors que l’encadrement et les éducateurs sont présents et qu’ils pourraient exercer leur activité de réinsertion auprès des mineurs.
    L’amendement, soutenu par l’ensemble du groupe de La République en marche, vise à permettre à l’établissement de demander au magistrat, après une semaine, de prononcer la mainlevée de la place pour l’attribuer à un mineur qui en aurait besoin. Il me semble important car il permettra, d’une façon très pragmatique, de libérer des places en centres éducatifs fermés dès la promulgation du texte. Il s’inscrit dans la logique qui nous anime et qui consiste à prendre en charge toujours plus de mineurs dans de bonnes conditions.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Il est favorable à cet amendement de terrain.

    M. Raphaël Schellenberger

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    Quel succès, madame la présidente de la commission !

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    À quoi sert un député ? À aller sur le terrain, selon madame la présidente de la commission des lois. À quoi sert un ministre ? Parfois, à entendre ce que dit un député qui est allé sur le terrain.

    Mme Aurore Bergé

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    Très bien !

    M. Raphaël Schellenberger

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    Parfois !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    J’émets donc un avis favorable. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)

    M. Raphaël Schellenberger

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    Nous venons de vivre un grand moment de démocratie…

    M. le président

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    La parole est à Mme Danièle Obono.

    Mme Danièle Obono

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    Oui, les députés vont sur le terrain – tant mieux. D’autres le font aussi : ce sont, par exemple, la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté (Exclamations sur les bancs du groupe LaREM), les agents et agentes de la CNCDH – Commission nationale consultative des droits de l’homme – ou les membres de l’OIP, l’Observatoire international des prisons. Vous savez fort bien que c’est l’OIP, notamment, qui avait désigné les centres éducatifs fermés comme étant des « antichambres de la prison ».

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Et que proposez-vous ?

    M. Ugo Bernalicis

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    Calmez-vous, monsieur le garde des sceaux, tout va bien !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    C’est cela, oui !

    Mme Danièle Obono

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    Il s’agit certainement d’une formule provocatrice, mais qui se fonde aussi sur des réalités de terrain : ces personnes ne se contentent pas de pondre des rapports inspirés par leur seul idéalisme, mais s’appuient sur la collecte de données. Plusieurs rapports parlementaires parus depuis 2010 critiquent également certaines pratiques.
    Au-delà, les centres éducatifs fermés sont bien sûr une réalité, et je suis convaincue que la très grande majorité des personnes qui s’y investissent s’efforcent de faire au mieux. Ce que nous disons, c’est que leur existence résulte d’un choix politique et qu’il ne s’agit pas simplement de la constater. Pourquoi a-t-on recours à ces centres ? Parce qu’ils correspondent à une politique qui est promue comme telle. Il faut l’assumer : ce n’est pas neutre que de choisir une structure de ce type comme réponse éducative.

    M. Rémy Rebeyrotte

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    Choisir l’éducatif, ce n’est pas neutre, en effet !

    Mme Danièle Obono

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    Cela reflète une vision dont nous estimons qu’elle est en réalité contre-éducative au vu des contraintes qu’elle implique. Nous ne prétendons pas que tous les centres éducatifs fermés sont horribles, mais que c’est un choix politique que de les promouvoir.

    M. le président

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    Veuillez conclure, madame la députée.

    Mme Danièle Obono

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    C’est un choix politique que d’en construire toujours plus plutôt que de proposer des solutions alternatives, des lieux de vie et une autre pédagogie à l’égard de l’enfance en danger, laquelle est d’autant plus vulnérable qu’elle s’engage dans un parcours de délinquance.

    M. le président

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    Je vous remercie, madame Obono.

    Mme Danièle Obono

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    Ce n’est pas uniquement La France insoumise et ses lubies, c’est tout un ensemble d’acteurs de terrain…

    M. le président

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    Merci, madame la députée.

    (L’amendement no 345 est adopté.)

    Mme Yaël Braun-Pivet, présidente de la commission des lois

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    Merci !

    M. le président

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    La parole est à Mme Aurore Bergé, pour soutenir l’amendement no 294.

    Mme Aurore Bergé

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    En effet, c’est un vrai choix politique que de croire aux centres éducatifs fermés, et donc à leur visée éducative. Cet amendement vise précisément à renforcer leur mission au travers des activités culturelles et socioculturelles, qui doivent être dispensées dans tous ces centres. La culture est un bien essentiel, y compris pour permettre la réappropriation du corps et du langage et pour instaurer un dialogue entre les jeunes accueillis dans ces centres ainsi qu’entre les jeunes et celles et ceux qui les encadrent.
    Je n’ai pas eu l’occasion de visiter de centre éducatif fermé, mais la présidente de la commission des lois – qui a d’ailleurs cosigné cet amendement – et moi-même avons visité plusieurs prisons, notamment celle de Réau, qui proposent des activités culturelles. Nous avons vu combien l’atmosphère y avait changé et combien ces activités étaient propices à une réinsertion. Nous croyons à cette visée éducative, dont j’estime qu’elle est aussi l’objet du présent projet de loi. C’est en tout cas celui de cet amendement. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Il me semble que des activités culturelles sont déjà proposées dans les CEF. Les mentionner me semble néanmoins relever du bon sens. J’émets donc un avis plutôt favorable.

    Mme Cécile Untermaier

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    Cela existe déjà !

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    On ne peut évidemment pas être insensible à cette thématique : là où avance la culture, la violence recule. L’heure étant à la sagesse, je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée. (Sourires et applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)

    M. le président

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    La parole est à M. Ugo Bernalicis.

    M. Ugo Bernalicis

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    Au vu du sort réservé à la culture pendant l’épidémie de covid-19, je n’en ferais pas des caisses, à votre place. Vraiment !

    M. Rémy Rebeyrotte

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    C’est vraiment n’importe quoi !

    M. Erwan Balanant

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    Ils sont vraiment spécialistes de tout !

    M. Ugo Bernalicis

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    Vous donnez des avis favorables ou de sagesse aux demandes de la majorité parce que, même si elles sont déjà satisfaites, ce n’est pas plus mal de les inscrire dans le texte, mais quand de nombreux parlementaires, sur tous les autres bancs, proposent des dispositions qui existent certes déjà, mais mériteraient d’être réunies dans le code de justice pénale des mineurs, vous les envoyez balader ! Si vous aviez une position un tant soit peu équitable, cohérente et juste, nous pourrions nous dire que nous débattons en bonne intelligence. Malheureusement, monsieur le garde des sceaux, vous êtes systématiquement dans l’opposition avec les oppositions. C’est regrettable, notamment pour un texte comme celui qui nous occupe aujourd’hui, que les uns et les autres tentent d’améliorer et de préciser.

    Mme Aurore Bergé

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    Êtes-vous pour ou contre l’amendement ?

    Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas

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    Il est jaloux !

    M. Ugo Bernalicis

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    Qu’à cela ne tienne : nous tiendrons bon jusqu’au bout, jusqu’au dernier amendement, jusqu’à la dernière minute et jusqu’à la dernière explication de vote. Vous pouvez compter sur nous.

    Un député du groupe LaREM

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    On n’en doute pas !

    M. le président

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    La parole est à M. Raphaël Schellenberger.

    M. Raphaël Schellenberger

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    Je partage les objectifs qui sous-tendent cet amendement. Néanmoins, nous rédigeons le code de la justice pénale des mineurs, qui ne doit pas être bavard. Or nous examinons ici un amendement bavard.

    Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas

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    Il est jaloux, lui aussi !

    M. Raphaël Schellenberger

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    Il n’a pas été étudié en commission des lois. C’est d’ailleurs heureux, parce que, sur un texte comme celui-là, nous devons aller à l’essentiel et peser chaque mot.

    Mme Aurore Bergé

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    La culture, c’est essentiel !

    M. Raphaël Schellenberger

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    Je ne dis pas que la culture n’est pas essentielle, bien au contraire.

    Mme Aurore Bergé

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    Vous venez précisément de le dire !

    M. Raphaël Schellenberger

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    Ce n’est sûrement pas moi qui tiendrais de tels propos, parce que si je suis ici, c’est en grande partie grâce à mon engagement culturel dans mon territoire, notamment auprès de mineurs. J’estime toutefois qu’un texte modifiant le droit pénal doit être le plus clair et le plus simple possible. Il est évident que les missions d’un centre éducatif fermé, consubstantiellement, incluent une part d’éducation et de culture – c’est inscrit dans son nom ! En l’occurrence, il ne me semble pas forcément utile d’en rajouter pour vous faire plaisir et pour vous dire que vous avez fait adopter un amendement.

    M. le président

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    La parole est à M. Michel Zumkeller.

    M. Michel Zumkeller

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    Je n’ai bien sûr rien à redire à une proposition en faveur de la culture, mais j’ai une question technique pour les services de l’Assemblée : il me semble que cet amendement a une incidence budgétaire.

    Mme Cécile Untermaier

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    Exactement !

    M. Michel Zumkeller

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    Comment a-t-il pu passer les fourches caudines de l’article 40 de la Constitution ? (Applaudissements sur les bancs des groupes FI et GDR.)

    Mme Elsa Faucillon

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    La culture, ce n’est pas gratuit !

    M. Michel Zumkeller

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    Nombre de nos amendements sont déclarés irrecevables, alors que celui-ci a une réelle incidence budgétaire. Pardonnez-moi d’être membre de la commission des finances, mais il me semble que cet amendement ne peut pas être examiné car il tombe sous le coup de l’article 40.

    M. Ugo Bernalicis

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    Bravo !

    Mme Elsa Faucillon

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    Il est vraiment étonnant qu’il ait pu venir en discussion !

    M. le président

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    La parole est à Mme Anne-Laure Cattelot.

    Mme Anne-Laure Cattelot

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    Pour répondre à nos collègues, qui semblent inquiets de l’examen de cet amendement, je souligne qu’il ne précise ni le nombre d’heures d’activités culturelles à organiser, ni le nombre d’équivalents temps plein à y consacrer.

    M. Raphaël Schellenberger

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    Ça ne sert à rien de l’adopter, alors !

    Mme Anne-Laure Cattelot

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    De grâce, ne vous inquiétez pas : ces éléments seront traités dans le cadre de l’examen à venir du PLF.

    M. Michel Zumkeller

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    C’est trop facile !

    Mme Anne-Laure Cattelot

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    Je vous invite donc, mes chers collègues, à vous mobiliser en ce sens la semaine prochaine. L’intention de Mme Bergé n’est pas de décider quelles livres et bandes dessinées doivent être mis dans les mains des enfants, ou quelle musique il faut diffuser, mais simplement d’inscrire ce principe fondamental dans le texte que nous examinons ce soir. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Cécile Untermaier.

    Mme Cécile Untermaier

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    Je me demande effectivement comment les membres de la majorité font pour passer outre l’article 40 de la Constitution : chaque fois que les élus du groupe Socialistes et apparentés proposent une mesure, ils en sont empêchés.

    Mme Aurore Bergé

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    Nombre de nos amendements sont retoqués également !

    M. Erwan Balanant

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    Ce n’est pas nous qui décidons, c’est le président Woerth !

    Mme Cécile Untermaier

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    C’est une question d’égalité.
    Tant mieux pour vous et pour la culture, à laquelle je suis tout à fait favorable. Je signale simplement que nous devrions mener une vraie réflexion sur l’éducation dans les prisons comme dans les centres éducatifs : actuellement, les enseignements chargés des centres éducatifs fermés et de l’instruction pédagogique dans les quartiers des mineurs ou dans les EPM rencontrent d’importantes difficultés de financement. J’aurais aimé, au nom du groupe Socialistes et apparentés, proposer un amendement visant à garantir une éducation de qualité et l’accès à certaines formations diplômantes. Je ne l’ai pas fait, précisément car l’article 40 de la Constitution me l’interdisait, d’où ma remarque.
    Encore une fois, tant mieux pour la culture et pour les centres éducatifs fermés, mais n’oublions pas l’éducation : si vous avez ce pouvoir – dont je ne dispose pas –, faites en sorte qu’elle soit prise en considération, car les enseignants qui nous écoutent sont très inquiets du devenir de l’éducation dans les centres éducatifs fermés, dans les EPM et dans les quartiers pour mineurs des centres pénitentiaires.

    Mme Aurore Bergé

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    Nos amendements sont aussi régulièrement retoqués en application de l’article 40 !

    M. le président

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    Je ne veux pas laisser croire que certains auraient plus d’influence que d’autres pour déposer des amendements.

    M. Ugo Bernalicis

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    Ah bon ?

    M. le président

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    Je rappelle que la recevabilité au titre de l’article 40 de la Constitution est validée par le président de la commission des finances, que l’on ne saurait soupçonner d’appartenir à la majorité.

    Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas

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    Exactement !

    Mme Danièle Obono

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    Mais la majorité est de droite, comme le président de la commission des finances !

    M. Ugo Bernalicis

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    D’ailleurs, Mme Bergé et lui appartenaient autrefois au même parti !

    M. le président

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    Nous pouvons débattre, mais n’essayons pas de faire croire que certains auraient bénéficié d’un passe-droit quelconque. (Mmes Marie-Christine Verdier-Jouclas et Anne-Laure Cattelot applaudissent.)
    La parole est à Mme Elsa Faucillon.

    Mme Elsa Faucillon

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    Loin de moi l’idée d’accuser le président de la commission des finances d’accorder des passe-droits. Je note simplement que nous avons assisté, le 10 décembre 2020, à vingt-deux heures treize, à la naissance d’une jolie jurisprudence, dont nous pourrons nous prévaloir.

    M. Michel Zumkeller

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    Exactement !

    Mme Elsa Faucillon

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    J’avais par exemple récemment déposé un amendement qui réclamait un rapport évaluant les conséquences de la création d’une prime pour les enseignants qui exercent en prison – nous ne sortons pas vraiment du sujet, comme vous le voyez.
    Or il m’a été signifié que cet amendement était irrecevable au titre de l’article 40. Je suis donc heureuse de constater aujourd’hui que nous pouvons continuer à faire des propositions. Nous pourrions même parler de « jurisprudence Bergé », cela ne me pose aucun problème. Sachez en tout cas que je m’y référerai souvent. (M. Ugo Bernalicis et M. Michel Zumkeller applaudissent.)

    M. le président

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    Nous allons clore cette discussion. Je vous rappelle qu’une telle décision relève de la compétence du président de la commission des finances et de lui seul, et qu’il la prend sur le seul fondement de l’article 40. Vous pouvez compter sur moi pour lui faire part de vos remarques, mais je suis désolé de vous annoncer, madame Bergé, qu’il n’est pas question de faire ici jurisprudence, fût-elle à votre nom. (Sourires.)

    (L’amendement no 294 est adopté.)

    Article 4

    M. le président

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    Je suis saisi de deux amendements, nos 118 rectifié et 304, pouvant être soumis à une discussion commune.
    La parole est à M. Raphaël Schellenberger, pour soutenir l’amendement no 118 rectifié.

    M. Raphaël Schellenberger

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    Cet amendement de mon collègue Éric Ciotti vise à ramener à 13 ans l’âge à partir duquel un juge peut prononcer une peine de travail d’intérêt général à l’encontre de mineurs ayant commis un délit. Je rappelle qu’à 13 ans, un mineur fréquente déjà un collège depuis un certain temps et que, justement, dans ces établissements, il arrive qu’un élève un peu turbulent soit invité à accomplir des travaux d’intérêt général en réparation des bêtises qu’il a commises. Il me semble donc cohérent et proportionné qu’un juge puisse prononcer à l’encontre d’un mineur de 13 ans une peine de travail d’intérêt général, qui devra bien sûr être adaptée à cet âge.

    M. le président

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    Madame Ménard, je suppose que vous souhaitez prendre la parole pour soutenir l’amendement no 304. C’est un peu osé car il s’agit d’un amendement déposé par Mme Le Pen.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Mais c’est la règle en cette période de crise sanitaire !

    M. le président

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    Non, un député peut défendre l’amendement d’un collègue de son groupe même s’il n’en est pas signataire. Mais cette règle ne s’applique pas aux non-inscrits. Il s’agirait bien cette fois d’une nouvelle jurisprudence !

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Si je puis me permettre, j’ai déjà eu l’occasion de le faire pour Mme Lorho et nous n’avions alors pas eu besoin de présenter une lettre de délégation officielle.

    M. Raphaël Schellenberger

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    On passe plus de temps à en discuter qu’à examiner l’amendement ! Vivement la fin de l’épidémie !

    M. le président

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    Je soumettrai cette question à la conférence des présidents puisqu’elle relève de sa compétence. Je vous autorise exceptionnellement à vous exprimer sur cet amendement mais je ne souhaite pas entériner cette pratique qui n’est guère orthodoxe.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Je vous remercie, monsieur le président. Je n’ai pas l’habitude de défendre les amendements du Rassemblement national mais celui-ci me semble très intéressant.
    Dans la mesure où vous avez refusé que les moins de 10 ans participent à des stages d’éducation civique, j’imagine que vous ne souhaiterez pas abaisser de 16 à 13 ans l’âge à partir duquel un mineur peut effectuer un travail d’intérêt général. C’est vraiment dommage car le travail d’intérêt général présente une réelle vertu éducative. En outre, il est tout à fait possible de l’adapter à l’âge du mineur délinquant. Il a été dit, au cours de la discussion sur les amendements précédents, que le placement en centre éducatif fermé figurait parmi les mesures éducatives. Il serait encore plus légitime que le travail d’intérêt général en fasse partie.
    J’ai également entendu que vous souhaitiez donner au juge un maximum d’outils afin qu’il puisse prendre sa décision avec le plus de finesse possible. Il me semblerait donc cohérent de lui laisser aussi cette possibilité car des mineurs de 13 ans ou plus qui ont plongé dans la délinquance sont parfaitement capables de réaliser des travaux d’intérêt général.
    En outre, le dernier alinéa de l’article 122-1 dispose que les travaux d’intérêt général « doivent être adaptés au mineur ». On peut donc considérer qu’ils peuvent également être adaptés à son âge.
    Je vous remercie encore, monsieur le président, de m’avoir laissé défendre cet amendement.

    M. le président

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    Ne me remerciez pas. Je vous demande surtout de ne pas en faire une habitude ! (Sourires.)
    Quel est l’avis de la commission sur ces amendements ?

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    L’avis est défavorable. Il n’est pas possible de demander à un mineur de 13 ans d’effectuer un travail d’intérêt général. Une mesure de réparation pénale peut en revanche être prononcée mais il s’agit alors d’une mesure éducative et surtout pas d’un TIG.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Monsieur Schellenberger, puis-je vous demander de suggérer à M. Éric Ciotti de lire la convention no 138 adoptée par l’assemblée générale de l’Organisation internationale du travail, dont l’article 2 stipule que l’âge légal minimum d’admission à l’emploi ne peut être inférieur à 15 ans ?
    Dans le même élan d’audace, puis-je également vous demander de lui suggérer de lire l’article L. 4153-1 du code du travail qui interdit d’employer des travailleurs de moins de 16 ans ? Si le code du travail admet des exceptions à ce principe, elles ne s’appliquent qu’aux mineurs âgés d’au moins 15 ans pour les contrats d’apprentissage et d’au moins 14 ans pour les jobs d’été.
    Puis-je enfin vous rappeler que, s’agissant des mineurs de 13 à 16 ans, des activités d’aide et d’intérêt collectif peuvent être prévues dans le cadre éducatif d’un module de réparation ? En aucun cas le travail d’intérêt général n’est permis selon les modalités que vous appelez de vos vœux.
    Madame Ménard, vous qui avez remplacé Mme Le Pen au pied levé, ces réponses s’adressent également à vous. L’avis est donc doublement défavorable.

    M. le président

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    La parole est à Mme Emmanuelle Ménard.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Monsieur le ministre, votre réponse est certes intéressante mais je vous rappelle qu’il est possible d’adapter le travail d’intérêt général à l’âge de la personne qui doit l’effectuer, et ce de façon plus satisfaisante que s’il s’agissait d’un travail au sens strict.
    D’autre part, je trouve incohérent d’autoriser le placement d’un mineur de 13 ans dans un centre éducatif fermé mais de lui interdire d’effectuer un travail d’intérêt général. Il me semble pourtant que le centre éducatif fermé représente une sanction un peu plus impressionnante qu’un travail d’intérêt général dès lors que celui-ci est adapté à l’âge de l’enfant.  

    (Les amendements nos 118 et 304, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    Rappel au règlement

    M. le président

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    La parole est à M. Ugo Bernalicis, pour un rappel au règlement.

    M. Ugo Bernalicis

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    À la suite de la discussion que nous avons eue tout à l’heure, j’ai relu l’article 89 du règlement de l’Assemblée nationale relatif à la recevabilité financière. Or il est prévu que, concernant les amendements en séance, le filtre n’est pas opéré par le président de la commission des finances mais par le président de l’Assemblée nationale. En cas de doute, celui-ci interroge le président de la commission des finances. L’alinéa 4 précise que « l’irrecevabilité est appréciée par le président ou le rapporteur général de la commission des finances et du contrôle budgétaire ou un membre de son bureau désigné à cet effet » et que les dispositions de l’article 40 peuvent être soulevées en séance « par le Gouvernement ou par tout député ».
    À travers ce rappel au règlement, je demande que la recevabilité de l’amendement de Mme Bergé fasse bien l’objet d’un examen attentif. Celui-ci aboutira peut-être à une jurisprudence Bergé, ce que je souhaite personnellement. J’attends en tout cas qu’une décision soit prise à ce sujet. Il est de votre responsabilité, monsieur le président de séance, de transmettre cette demande au président de l’Assemblée qui, lui-même, interrogera le président de la commission des finances.
    Nombre de nos amendements ont été déclarés irrecevables. Celui qui prévoyait la remise d’un récépissé dans le cadre d’un contrôle d’identité avait ainsi été déclaré irrecevable sous prétexte que les bouts de papier nécessaires coûteraient trop cher. Il n’a donc pas été possible de le défendre dans l’hémicycle. J’imagine que si l’on propose des activités culturelles dans les CEF, on rémunère au moins les intervenants – du moins je l’espère.
    Voilà pourquoi je souhaite que nous formalisions cette demande.

    M. le président

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    Nous n’allons rien formaliser, cher collègue. La discussion sur ce sujet est close. Au passage, les intervenants chargés des activités culturelles peuvent tout à fait être déjà rémunérés par les centres éducatifs fermés.

    Mme Danièle Obono

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    Là n’est pas le propos !

    M. le président

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    Nous n’allons pas trancher sur le fond du débat…

    M. Ugo Bernalicis

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    Je ne vous le demande pas !

    M. le président

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    …ni créer de jurisprudence ou modifier le règlement intérieur. Néanmoins je saisirai le président Woerth sur cette question, je ne doute pas qu’il aura à cœur de nous livrer son interprétation.

    Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas

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    Si vous voulez, je l’appelle !

    Article 4 (suite)

    M. le président

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    Je suis saisi de quatre amendements, nos 160, 195, 196 et 162, pouvant être soumis à une discussion commune.
    Les amendements nos 160 et 195 sont identiques.
    La parole est à M. Michel Zumkeller, pour soutenir l’amendement no 160.

    M. Michel Zumkeller

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    Nous avons déjà eu une longue discussion à ce sujet en commission. J’imagine que vous ne serez pas favorable à cet amendement. La peine de détention à domicile sous surveillance électronique nous semble totalement inappropriée pour un mineur. Une telle sanction ne me semble pas de nature à lui faire comprendre qu’il a commis un acte répréhensible.
    J’en profite pour défendre le no 162 qui est un amendement de repli. 

    M. le président

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    La parole est à M. Ugo Bernalicis, pour soutenir l’amendement no 195.

    M. Ugo Bernalicis

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    Il vise à supprimer la peine de détention à domicile avec surveillance électronique pour les mineurs. Il s’agit exactement du cas de figure que j’ai dénoncé dans mon intervention lors de la discussion générale et que la Défenseure des droits a évoqué dans son dernier avis : le droit pénal applicable aux personnes majeures tend à irriguer la justice pénale des mineurs.
    On se drape dans la vertu en disant qu’un bracelet électronique est préférable à un placement dans un CEF ou dans un établissement pénitentiaire pour mineurs. Si c’est ainsi que vous envisagez les choses, il y a vraiment un problème. Car aujourd’hui, il existe déjà toute une batterie de mesures, que vous avez d’ailleurs citées tout à l’heure, des modules de réparation à l’interdiction de paraître devant la victime. Elles sont suffisantes.
    Il n’est donc pas nécessaire de compléter la boîte à outils avec cette nouvelle mesure, d’autant plus que le placement sous surveillance électronique pose déjà problème aux personnes majeures : les études montrent qu’elles ont du mal à respecter leurs horaires de détention car elles doivent, dans ces moments-là, imaginer autour d’elles des murs qui n’existent pas. Cette situation crée toutes sortes de difficultés, pouvant même donner lieu à des faits divers lorsque des détenus en viennent à éteindre leur bracelet par peur de le perdre, ce qui pose un problème vis-à-vis du magistrat, sans même parler des cas où un dispositif défaillant conduit au déclenchement inopiné d’alertes.
    Il n’est pas anodin de devoir se représenter une interdiction virtuelle en portant à la cheville un objet comme celui-là. Pour les mineurs, on se passe très bien de ce dispositif actuellement et il est souhaitable qu’il en soit toujours ainsi.

    M. le président

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    Peut-on considérer que l’amendement no 196 est également défendu, monsieur Bernalicis ?

    M. Ugo Bernalicis

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    C’est un amendement de repli. Il prévoit que ce type de détention peut être appliqué aux mineurs de plus de 16 ans. Mais je le défends sans conviction.

    M. le président

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    L’amendement no 162 a déjà été défendu par son auteur.
    Quel est l’avis de la commission sur ces amendements ?

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    L’avis est défavorable – et je le dis avec conviction – car la peine de détention à domicile sous surveillance électronique, qui peut être utile dans certains cas, constitue une solution alternative à l’incarcération. Je précise qu’elle est encadrée par différentes conditions. Elle ne peut ainsi être prononcée sans l’accord des représentants légaux et doit systématiquement être assortie d’une mesure éducative confiée à la protection judiciaire de la jeunesse, la PJJ. Ce dispositif paraît donc pertinent.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Ce qui est compliqué, c’est que vous êtes contre tout – du CEF à l’assignation à domicile – mais que vous ne proposez rien.

    Mme Danièle Obono

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    Vous vous répétez, monsieur le ministre !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    La critique finit par avoir ses limites.
    La peine de détention à domicile sous surveillance électronique n’est pas mal du tout. Elle est adaptée au mineur à plus d’un égard : elle lui permet de demeurer auprès de ses proches – peut-être n’est-ce rien pour vous –, de poursuivre sa scolarité ou sa formation professionnelle, en un mot d’assurer son suivi éducatif. « Éducatif » : vous n’avez que ce mot-là à la bouche, vous en avez même compté les occurrences dans le texte !

    M. Ugo Bernalicis

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    Non, ça c’est vous ! J’ai compté les occurrences du mot « sanction » !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Vous avez commencé par compter les occurrences du mot « sanction », affirmant qu’il y en avait trente-neuf alors qu’il y en a trente-huit, et oubliant le mot « éducatif ».

    Mme Danièle Obono

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    Ça rame ! Ça rame !

    Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas

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    C’est chez vous que ça rame !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    La réalité, c’est que vous êtes contre tout et que vous ne proposez rien ; en cela, vous n’êtes plus crédibles ! (Exclamations sur les bancs du groupe FI.)

    Mme Danièle Obono

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    Calmez-vous, ministre !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Si vous vous intéressiez à la justice des mineurs comme vous le prétendez, vous nous proposeriez des mesures au lieu de ne faire que nous dire que rien n’est bon !

    M. Ugo Bernalicis

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    C’est ce que nous faisons !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Monsieur Bernalicis, on n’a pas attendu La France insoumise pour juger les mineurs : on les juge en tant que tels depuis l’ordonnance de 1945 ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)

    M. Ugo Bernalicis

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    Vous n’étiez pas né, en 1945 !

    M. Jean-Michel Fauvergue

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    Calmez-vous, Bernalicis !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Et cette disposition n’est plus lisible, elle est obsolète. On a tous travaillé pour permettre aux gamins de sortir de l’impasse dans laquelle il leur arrive de se trouver à tel ou tel moment de leur vie.

    M. Ugo Bernalicis

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    Vous jugiez les mineurs, en 1945 ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Alors ça suffit ! Vous ergotez sur la moindre virgule mais vous ne voulez rien et, surtout, vous ne proposez rien ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)

    M. Bruno Questel

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    Le ministre a raison !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Avis totalement défavorable. Je me demande même pourquoi je me lève encore pour vous répondre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)

    Mme Danièle Obono

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    Si c’est pour faire des réponses pareilles, mieux vaut rester assis en effet !

    M. le président

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    La parole est à M. Ugo Bernalicis.

    M. Ugo Bernalicis

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    Attendez, il faut que je…

    M. le président

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    Il faut que vous retrouviez vos esprits ?

    M. Ugo Bernalicis

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    Oui, parce qu’il n’était pas évident d’entendre tout cela… Vous présidiez déjà la séance lorsque j’ai proposé de rétablir la remise à parent, une mesure que le ministre a supprimée. Voilà une proposition que j’ai faite, et le ministre m’a répondu – je résume à gros traits, mais à peine – qu’elle ne servirait à rien, qu’elle n’est que symbolique et qu’une peine vaut mieux, et qu’en tout état de cause, elle sera fusionnée avec un autre truc, ce sera plus simple. Eh oui, il nous arrive des fois de proposer des choses, la preuve.
    Autre proposition : supprimer les erreurs de votre texte, en l’occurrence l’alinéa 17 de l’article 4. On se permet d’autant plus cette proposition que la mesure est déjà contestée pour les majeurs. Dans votre esprit, le bracelet électronique est une alternative à l’incarcération, mais ce ne sera pas le cas : vous allez simplement mettre un bracelet à des gens qui aujourd’hui, selon l’ordonnance de 1945, n’en ont pas ! Voilà ce qu’il va se passer ! On imposera le port du bracelet au cas où, en espérant que tout ira bien, et ce sera ceinture et bretelles pour le magistrat et pour la société… Mais non, je ne suis pas d’accord, pas plus que je ne le suis pour la visioconférence, non par principe – je l’utilise tout le temps –, mais parce qu’elle est inacceptable dans le cadre de la justice des mineurs et dans ces conditions. Et si vous me dites que ces dispositifs sont assortis de mesures éducatives, appliquez-les et elles seules ! Et ne les augmentez pas comme compléments à de nouvelles interdictions ! Oui, on dit stop ! Moi aussi, monsieur le ministre, je vous dis : ça suffit ! Ça suffit ! Ça suffit ! (Protestations sur les bancs du groupe LaREM.)

    M. Éric Girardin

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    L’éducation, ça existe, monsieur !

    Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas

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    Vous n’êtes pas dans la rue, ici !

    M. Ugo Bernalicis

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    C’est sûr qu’on ne vous y voit pas souvent, dans la rue !

    M. le président

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    Mes chers collègues, pas d’altercations dans l’hémicycle, retrouvons de la sérénité.

    M. Ugo Bernalicis

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    Dans ce cas, je vais demander une suspension de séance !

    M. le président

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    La parole est à M. Rémy Rebeyrotte.

    M. Ugo Bernalicis

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    Mais ça ne fera qu’aggraver la situation !

    M. Rémy Rebeyrotte

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    Je voudrais tout d’abord rappeler M. Bernalicis à nos devoirs de politesse réciproque.

    Mme Danièle Obono

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    Ha, ha !

    M. Rémy Rebeyrotte

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    Nous nous réjouissons, nous, de donner au juge un panel de solutions à la question de la justice des mineurs, y compris à travers les centres éducatifs fermés – vous êtes contre l’éducatif aussi, monsieur Bernalicis, on n’a pas bien compris pourquoi –,…

    Mme Danièle Obono

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    C’est trop subtil !

    M. Rémy Rebeyrotte

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    …afin de renforcer d’année en année les possibilités d’action et de choix du juge. Je trouve que c’est tout à fait favorable au traitement de la question que d’être au plus près de ce dont le mineur a besoin. (Mmes Laetitia Avia et Catherine Kamowski applaudissent.)

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Bien sûr !

    (Les amendements identiques nos 160et 195 ne sont pas adoptés.)

    (Les amendements nos 196 et 162, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    Suspension et reprise de la séance

    M. le président

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    La séance est suspendue.

    (La séance, suspendue à vingt-deux heures trente-cinq, est reprise à vingt-deux heures quarante-cinq.)

    M. le président

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    La séance est reprise.
    La parole est à Mme Danièle Obono, pour soutenir l’amendement no 197.

    Mme Danièle Obono

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    Nous sommes fondamentalement contre l’application aux mineurs d’une justice pour majeurs, et cet amendement le dénonce une fois encore en proposant de supprimer la possibilité du mandat de dépôt à l’encontre des mineurs. Rappelons que dans une décision du 9 décembre 2016, le Conseil constitutionnel a précisé que la mesure par laquelle le tribunal pour enfants ordonne « l’exécution provisoire d’une peine d’emprisonnement sans sursis prononcée à l’encontre d’un mineur, alors que celui-ci comparaît libre, [ce qui] entraîne son incarcération immédiate à l’issue de l’audience, y compris en cas d’appel, (…) le prive du caractère suspensif du recours et de la possibilité d’obtenir, avant le début d’exécution de sa condamnation, diverses mesures d’aménagement de sa peine » ; il en a déduit qu’« en permettant l’exécution provisoire de toute condamnation à une peine d’emprisonnement prononcée par un tribunal pour enfants, quel que soit son quantum et alors même que le mineur ne fait pas déjà l’objet au moment de sa condamnation d’une mesure de détention dans le cadre de l’affaire pour laquelle il est jugé ou pour une autre cause, les dispositions contestées méconnaissent les exigences constitutionnelles en matière de justice pénale des mineurs ».
    Nous travaillons donc pour vous, puisque cet article est inconstitutionnel à nos yeux, comme à ceux d’ailleurs des professionnels membres du Collectif des enfants, dont nous vous avons déjà parlé et qui propose d’autres manières d’aborder les choses. Nous aurions pu en discuter, si nos amendements n’avaient pas été retoqués. Nous reviendrons à la charge mais demandons pour l’instant la suppression du mandat de dépôt.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    L’amendement a déjà été examiné en commission. Avis défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Même avis.

    M. le président

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    La parole est à M. Ugo Bernalicis.

    M. Ugo Bernalicis

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    Nous arrivons au moment où vous ne répondez plus, monsieur le ministre, et je vois bien que vous en avez marre. Il est dommage que la séance ne se termine pas à vingt-trois heures, cela nous permettrait de recommencer demain matin à tête reposée.

    M. Jean-René Cazeneuve

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    Allez !

    M. Ugo Bernalicis

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    Nous allons néanmoins poursuivre notre argumentation…

    Mme Aurore Bergé

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    Nous nous en passerions !

    M. Raphaël Schellenberger

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    Vous n’allez pas la poursuivre, vous allez la réitérer ! (Sourires.)

    M. Ugo Bernalicis

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    …car nous estimons que les mesures que vous ajoutez dans ce texte sont systématiquement de nouvelles sanctions, peines ou mesures répressives. Qu’avez-vous ajouté en matière éducative ?

    Mme Danièle Obono

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    Rien.

    Mme Aurore Bergé

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    La culture !

    M. Ugo Bernalicis

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    En effet, il y a la culture, je vous l’accorde…

    Mme Danièle Obono

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    Ça ne coûte rien…

    M. Rémy Rebeyrotte

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    Vous avez voté contre !

    M. Ugo Bernalicis

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    Dont acte ; vous avez bien ajouté une mesure éducative, même si elle concerne les centres éducatifs fermés, ce qui pose d’autres problèmes.

    M. Jean-René Cazeneuve

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    Et le sport !

    M. Ugo Bernalicis

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    Revenons-en au mandat de dépôt à la barre : se peut-il, monsieur le ministre, de vous à moi, que vous y soyez favorable ? Y étiez-vous déjà favorable ou êtes-vous un récent converti ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    C’est n’importe quoi !

    M. Ugo Bernalicis

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    Franchement, ce n’est pas possible ! C’est même inacceptable ! Nous parlons des mineurs. Peut-être préférez-vous attendre la censure du Conseil constitutionnel ; vous ne serez ni le premier ni le dernier – mais nous aurions pu nous l’épargner.

    M. le président

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    La parole est à M. Bruno Questel.

    M. Bruno Questel

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    On peut comprendre, en théorie, les bonnes intentions de nos collègues de La France insoumise, mais il y a aussi la vraie vie.

    Mme Danièle Obono

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    Oh !

    M. Bruno Questel

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    Je ne connais pas un magistrat qui ordonne de gaieté de cœur une incarcération ou un mandat de dépôt à l’encontre d’un mineur. Ce sont des décisions très rares, prises parce que les faits commis sont suffisamment graves pour les justifier. On ne prend pas ce type de décision à la légère ou pour fanfaronner.
    Priver le juge de cette possibilité, c’est parfois mettre en danger le jeune concerné, sa famille ou ses proches, de même que les proches et collatéraux des victimes. Je suis défavorable à cet amendement. (M. Rémy Rebeyrotte applaudit.)

    (L’amendement no 197 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    L’amendement de coordination no 396 de M. le rapporteur est défendu.

    (L’amendement no 396, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

    (L’article 4, amendé, est adopté.)

    Après l’article 4

    M. le président

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    Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 115, 148 et 242, portant article additionnel après l’article 4.
    L’amendement no 115 de M. Éric Ciotti est défendu.
    La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement no 148.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Cet amendement vise à conserver la possibilité pour le juge, lorsque des circonstances d’une particulière gravité le justifient, d’interdire le territoire français à un mineur de nationalité étrangère.
    Le leitmotiv de ce soir, d’ailleurs parfaitement justifié, est qu’il faut faire confiance aux magistrats, qui sauront adopter cette sanction lorsqu’elle est strictement nécessaire et proportionnée et qu’elle ne porte pas atteinte à l’intégrité familiale ou à l’intérêt supérieur du mineur.

    Mme Cécile Untermaier

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    Mais justement, il s’agit tout de même de mineurs !

    Mme Elsa Faucillon

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    Oui, où iront-ils ?

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Faisons donc enfin confiance aux magistrats et laissons-les prendre des décisions au cas par cas, en fonction de la situation particulière de chaque mineur.

    M. le président

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    L’amendement no 242 de M. Fabien Di Filippo est défendu.
    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Avis très défavorable. Nous parlons de mineurs ! L’interdiction du territoire implique automatiquement la reconduite à la frontière. Peut-on imaginer un mineur reconduit à la frontière, séparé de ses parents, vers un pays dans lequel on ne sait même pas qui pourra l’accueillir ? Soyons raisonnables face aux dispositifs que vous proposez.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    La peine d’interdiction du territoire français, madame Ménard, est une peine inadaptée aux mineurs, ce qui ne vous convaincra sans doute pas ; mais surtout, elle n’est pas conforme au droit international.

    Mme Cécile Untermaier

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    Bien sûr !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Elle est prohibée par l’ordonnance de 1945 et par le CESEDA, le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, qui interdit l’expulsion d’un mineur. J’en suis navré pour vous mais il est impossible d’imposer à un mineur l’obligation de quitter le territoire, car, dans notre pays, la vulnérabilité liée à l’âge du mineur prime sur sa qualité d’étranger. Et moi, je trouve que c’est bien comme ça. Avis défavorable.

    M. le président

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    La parole est à Mme Cécile Untermaier.

    Mme Cécile Untermaier

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    Je suis très surprise qu’on puisse déposer un amendement comme celui-ci. On sait parfaitement que le CESEDA n’autorise pas ce dispositif, et mieux vaudrait que vous fassiez de la pédagogie de la complexité plutôt que de défendre ce genre d’amendement populiste, propice à éveiller les plus mauvais sentiments et faisant croire qu’une telle disposition est possible alors que ce n’est pas le cas. Nous légiférons dans un État de droit et il est extrêmement dangereux et préjudiciable, quand on est parlementaire, de se livrer à ce type d’exercice. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    C’est vrai !

    M. le président

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    La parole est à Mme Emmanuelle Ménard.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Nous, législateur, sommes là pour faire le droit. Si certaines règles ne sont plus adaptées à la situation d’aujourd’hui, c’est à nous de les réformer.
    En outre, j’ai évidemment pris soin de préciser que c’est au juge de décider, en fonction des circonstances et d’une multitude d’éléments. Il n’est évidemment pas question de renvoyer un mineur étranger dans son pays d’origine, sans garantie. Le retour dans le pays d’origine ne pourra se faire qu’à la condition qu’un organisme social adapté soit en mesure de prendre soin du mineur ou que sa famille, si elle est restée là-bas, soit en mesure de l’accueillir. Ce sont tous ces éléments que le juge prendra en considération. Nous n’entendons pas renvoyer ces mineurs dans la nature sans faire preuve de la moindre humanité. Faites-nous la grâce de considérer que nous ne sommes pas non plus le diable !

    (Les amendements identiques nos 115, 148 et 242 ne sont pas adoptés.)

    M. le président

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    La parole est à M. Ugo Bernalicis, pour soutenir l’amendement no 181.

    M. Ugo Bernalicis

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    Voici une proposition, monsieur le ministre – une proposition d’ajout aux interdictions, certes, mais une proposition tout de même ! L’article L. 121-1 établit la liste des peines applicables aux majeurs mais pas aux mineurs. Y sont mentionnées notamment, l’interdiction du territoire français, que nous venons d’évoquer, ou les jours-amende. Nous proposons d’y ajouter l’amende pour les mineurs de moins de seize ans – et encore s’agit-il presque d’une proposition de repli.
    En effet, dans le cas d’un mineur de moins de seize ans, soit la peine retombe sur les parents soit elle entraîne d’autres problèmes – par exemple si le mineur cherche à acquitter lui-même son amende par des moyens peu scrupuleux qui risquent de le ramener directement devant le juge des enfants, ce qui n’est pas l’objectif recherché. C’est pourquoi nous proposons d’exclure l’amende des peines pouvant s’appliquer aux mineurs.
    L’amendement précédent m’incite à conclure par un mot sur l’idée selon laquelle il faut faire confiance aux juges et à l’utilisation qu’ils font des outils à leur disposition : non, il y a des outils que nous ne voulons pas lui donner, et c’est nous qui en décidons. Faire confiance aux juges n’est pas un argument de fond.

    Mme Cécile Untermaier

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    Ou si nous leur donnons des outils, il faut les encadrer.

    M. Ugo Bernalicis

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    Quant à l’expulsion des mineurs, monsieur le ministre, vous venez de prendre, il y a trois jours, une décision de retour dans leur pays d’origine pour les mineurs non accompagnés marocains. Voilà ; ce genre de mesure facilite le débat que nous venons d’avoir à l’amendement précédent.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Avis défavorable. Une amende prononcée à l’encontre d’un mineur peut être efficace si elle est proportionnée.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Oui.

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Elle peut présenter un caractère désincitatif, notamment en matière d’infractions routières. Il revient aux magistrats de s’assurer qu’elle est raisonnable et, si vous voulez faire confiance aux magistrats, vous ne pouvez pas être favorable à votre propre amendement.

    Mme Danièle Obono et M. Ugo Bernalicis

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    Justement, ce n’est pas le sujet !

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    M. Bernalicis ou quand le nihilisme devient un programme… Vous êtes contre tout, même l’amende ! C’est faramineux.

    Mme Danièle Obono

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    Vous nous l’avez déjà faite, celle-là !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Et alors ? Pour ce qui est de répéter sans cesse la même chose, vous n’avez franchement pas de leçons à me donner ! (M. Bruno Questel applaudit.)

    Mme Danièle Obono

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    Le contenu n’est pas le même !

    M. Ugo Bernalicis

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    Nous, nous essayons de varier les plaisirs.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Je rappelle d’abord que le tribunal de police est compétent pour les contraventions, sauf les contraventions de cinquième classe. Laissez-moi ensuite vous donner un exemple précis d’amende utile : imaginons un mineur se livrant au trafic de stupéfiants.

    M. Ugo Bernalicis

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    Ah !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    N’est-il pas normal de le sanctionner par une amende ? On peut prendre d’autres infractions, parce que les stupéfiants ne sont pas forcément l’exemple le mieux adapté pour des mesures de police. Prenons le cas d’un mineur qui se serait enrichi : est-il anormal de lui infliger une amende à titre de peine ? Non ! Vous ne voulez pas l’entendre mais plus le juge a de moyens à sa disposition, plus la justice peut être rendue finement et proposer des réponses individualisées.
    À vous écouter, que proposez-vous de votre côté sinon le vide abyssal ?

    Mme Danièle Obono

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    Ah ! ah ! Mais bien sûr !

    M. Jean-René Cazeneuve

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    Un vide à la puissance deux !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Je ne sais pas comment vous entendez construire la justice des mineurs, puisque rien ne trouve grâce à vos yeux. (Mme Laetitia Avia et M. Rémy Rebeyrotte applaudissent.)

    M. le président

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    La parole est à M. Ugo Bernalicis.

    M. Ugo Bernalicis

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    Vu ce que vous construisez, nous aurons de quoi déconstruire ! En attendant, nous ne supprimons pas tout, et il reste encore pas mal de choses. Nous ne supprimons pas l’assistance éducative, par exemple, même s’il paraît que ce n’est pas l’objet de nos discussions. Nous vous avons aussi proposé de rétablir la remise à parent, mais vous n’en voulez pas…

    M. Rémy Rebeyrotte

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    La remise à parent n’est pas une peine !

    Mme Perrine Goulet

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    C’est quand les parents ne se souviennent plus qu’ils ont des enfants !

    M. Ugo Bernalicis

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    Nous persistons à ne pas être d’accord avec les amendes infligées au moins de seize ans, et le fait de vouloir que ce ne soit pas le tribunal de police mais le juge qui soit compétent sur le sujet est en quelque sorte une position de repli, car nous ne croyons absolument pas à la vertu pédagogique ou dissuasive de l’amende ; nous pensons qu’elle n’a aucune vertu.
    Quant aux stups, c’est un excellent exemple : il me semble qu’un magistrat peut user de cette astuce que l’on nomme « saisie et confiscation » et qui permet, en cas d’enrichissement lié au trafic, de saisir de l’argent, ou le produit de cet argent, s’il a été dépensé pour acheter une montre ou quoi que ce soit d’autre. Elle est là, la sanction !
    L’amende, elle, vient par surcroît et, autant je suis favorable à ce qu’on retire au jeune concerné les fruits de son larcin ou de son trafic de stupéfiants, autant il me paraît peu probable qu’il ait les ressources pour payer l’amende, et je fais l’hypothèse que cela l’incitera à la récidive. Or je suis sûr, monsieur le ministre, que ce n’est pas ce que vous souhaitez.

    M. le président

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    La parole est à Mme Alexandra Louis.

    Mme Alexandra Louis

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    Vous ne proposez que la remise à parent ou la détention et rien entre les deux. Vous privez donc le juge de toute une gamme de dispositions pour répondre à la situation du mineur.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Eh oui !

    Mme Alexandra Louis

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    Vous en restez aux généralités et votre vision est déconnectée.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Complètement !

    Mme Alexandra Louis

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    Prenons l’exemple simple d’un jeune en apprentissage, qui a commis une infraction et qui doit payer une amende de 135 euros : c’est très bien qu’il travaille pour payer sa dette à la société.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    En effet.

    Mme Alexandra Louis

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    C’est ça, une mesure éducative ; c’est ça, devenir un citoyen !
    La remise à parent existe à travers l’avertissement judiciaire, mais il ne faut pas priver le juge de faire du sur-mesure pour les mineurs car je vais vous dire quelque chose : le sur-mesure, ça marche ! (Mme Nicole Dubré-Chirat et M. Rémy Rebeyrotte applaudissent.)

    M. Erwan Balanant

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    Et c’est souvent plus joli.

    M. le président

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    La parole est à M. le garde des sceaux.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Vous ne voulez pas l’entendre alors que nous l’avons répété je ne sais combien de fois : la mesure est individualisée ! Si le juge pense que l’amende générera un nouveau trafic, il ne la prononcera pas ; ne prenez pas les magistrats pour des imbéciles !

    M. Bruno Questel

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    Exactement !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Cela ne servirait à rien. Encore une fois, les mesures sont in-di-vi-du-a-li-sables. C’est pour cela qu’il ne faut pas priver la justice des mineurs des moyens qui sont les siens. Rien n’est automatique, monsieur Bernalicis. L’exemple donné par Mme Alexandra Louis est clair : il y a des droits et des devoirs. C’est bien qu’un gamin aille bosser pour réparer et payer une amende !

    M. Ugo Bernalicis

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    C’est sûr qu’en ce moment, le boulot, ça court les rues !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Ce n’est pas plus compliqué que cela. Tous les moyens sont intéressants, mais vous n’en proposez aucun. C’est la quatrième fois ce soir que vous nous parlez de la remise à parent ! Ce que j’en ai dit, c’est qu’elle est une bien curieuse façon de nommer une sanction : on remet un gosse à ses parents, la belle affaire ! Ce n’est pas une sanction,…

    M. Erwan Balanant

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    Cela dépend des parents…

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    …c’est presque la moindre des choses. Une sanction qui s’intitule « remise à parent » est très désobligeante pour les parents et peu claire pour leur gamin.

    M. Ugo Bernalicis

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    Mais les parents sont présents lors de l’avertissement judiciaire !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Restez donc dans vos histoires ! Des gens passionnés suivent nos débats…

    M. Ugo Bernalicis

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    Ah ça, oui !

    Mme Danièle Obono

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    Et ils sont gâtés !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Ils savent que vous ne proposez rien, absolument rien. Votre programme, c’est le nihilisme ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)

    Mme Danièle Obono

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    Non, c’est le marxisme !

    (L’amendement no 181 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Danièle Obono, pour soutenir l’amendement no 182.

    Mme Danièle Obono

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    C’est une sorte d’amendement de repli par rapport au précédent.

    Mme Anne-Laure Cattelot

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    Une sorte d’amendement ?

    Mme Danièle Obono

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    Nous voudrions que seul le juge ou la juge des enfants soit compétent en audience de cabinet pour les contraventions de première à quatrième classe et les peines d’amende, au nom du principe de spécialisation de la justice des mineurs, sur lequel vous avez beaucoup insisté.
    Je sais que cela vous hérisse que l’on parle du Conseil national des barreaux, monsieur le ministre…

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Pas du tout !

    Mme Danièle Obono

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    …mais je vais quand même le citer. Notre collègue Alexandra Louis nous reproche d’être déconnectés ; peut-être que le CNB, qui n’a pas les faveurs de la majorité, l’est aussi à vos yeux, comme la conférence des bâtonniers, le barreau de Paris, le syndicat de la magistrature – eux, ce sont des gauchistes –, le syndicat des avocats de France, le SNES de la PJJ, protection judiciaire de la jeunesse, – eux ne sont pas déconnectés et savent de quoi ils et elles parlent –, la CGT – encore des gauchistes –, la FSU, la Ligue des droits de l’homme – également des gauchistes –, le Genepi, l’OIP, le SNUAS FP – syndicat national de tous les assistants sociaux de la fonction publique – FSU,…  

    Mme Anne-Laure Cattelot

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    Et la défense de l’amendement ?

    M. Bruno Questel

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    Oui, rien à voir avec l’amendement !

    Mme Danièle Obono

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    Si, complètement !

    M. Rémy Rebeyrotte

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    En dehors de lobbies, avez-vous une position personnelle ?

    Mme Danièle Obono

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    Nous assumons de relayer la parole et les propositions de ces organisations de professionnels.

    M. Rémy Rebeyrotte

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    Vous êtes des perroquets !

    Mme Perrine Goulet

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    Vous ne savez pas réfléchir par vous-mêmes !

    Mme Danièle Obono

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    Oui, nous sommes des perroquets. C’est un très bel animal, qui a un cerveau et de la matière grise, au contraire des Playmobil. (M. Ugo Bernalicis applaudit.)  

    Mme Perrine Goulet

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    Un Playmobil, c’est indéboulonnable, international et durable !

    M. Ugo Bernalicis

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    Oui c’est vrai, mon gamin en a plein !

    M. le président

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    S’il vous plaît !

    Mme Danièle Obono

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    Bref, nous relayons ces propositions, que nous soutenons. Vous pouvez considérer que nous sommes hors-sol mais je pense que ce serait injurier tous ces professionnels, qui sont très attentifs à nos débats. (Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.)

    M. le président

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    S’il vous plaît, restons dignes : « perroquet » et « Playmobil » n’ont pas leur place dans cet hémicycle. Une fois la boutade faite, retrouvons notre concentration et veillons à la dignité de nos débats.

    Mme Danièle Obono

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    Dites-le aux députés de la majorité !

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Encore un amendement sur la compétence du tribunal de police, encore un avis défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Même avis.

    M. le président

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    La parole est à M. Ugo Bernalicis.

    M. Ugo Bernalicis

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    Que reste-t-il si l’on supprime la compétence du tribunal de police ? Le juge des enfants en cabinet. Que reste-t-il s’il n’y a plus d’amende pour les mineurs de moins de 16 ans ? Il reste les réparations. Cela vous a peut-être échappé, mais nous n’avons pas déposé d’amendements visant à supprimer les modules de réparation. C’est peut-être parce que nous y sommes favorables.
    Avec votre accord, monsieur le président, nous déposerons la prochaine fois des amendements de soutien à certaines dispositions du texte,…

    M. Erwan Balanant

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    Cela augmentera encore les statistiques.

    M. Ugo Bernalicis

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    …afin de montrer que nous soutenons certaines mesures. Le ministre comprendra peut-être mieux notre positionnement, nos oppositions comme nos propositions. Il n’en reste pas moins que telle n’est pas la pratique actuelle.

    Mme Perrine Goulet

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    Il y a la discussion générale pour cela.

    M. Ugo Bernalicis

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    Imaginez nos débats si je vous expliquais mon soutien à telle ou telle disposition ; ce serait insupportable.

    M. Bruno Questel

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    Bla bla bla !

    M. Ugo Bernalicis

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    Je le redis et le redirai à chaque fois : à l’article liminaire, nous avons déclamé des principes, dont celui de spécialité, qui commande que les personnes qui jugent les mineurs connaissent ces derniers ainsi que le code de la justice pénale des mineurs. Cette exigence s’applique à tous les cas qui concernent des mineurs, y compris les contraventions de la première à la quatrième classe, qui relèvent du tribunal de police. Oui, nous sommes favorables à ce que ces contentieux soient traités par des personnes spécialisées.
    Sans doute que la plupart des affaires n’entraînent pas plus qu’une légère contravention ; soit, elles seront suivies par un magistrat. Lorsque d’autres problématiques éducatives sont en jeu, en revanche, le juge des enfants est beaucoup plus compétent que le tribunal de police pour traiter ces cas et déployer des mesures éducatives – afin d’éviter toute confusion, je précise que je pense à l’assistance éducative – qui pourraient compléter les contraventions.
    Nous n’avons pas la même vision de la justice des mineurs, monsieur le ministre, et, sachez-le, une justice des mineurs subsistera en 2022. Peut-être pas la vôtre.

    M. Bruno Questel

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    Ce ne sera pas la vôtre non plus !

    (L’amendement no 182 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    Je suis saisi de deux amendements, nos 418 et 183, pouvant être soumis à une discussion commune.
    La parole est à M. Michel Zumkeller, pour soutenir l’amendement no 418.

    M. Michel Zumkeller

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    Cet amendement de notre collègue Agnès Thill porte sur le même sujet ; il vise à supprimer la peine d’amende pour les enfants de moins de 16 ans – nous venons d’en parler assez longuement – et, surtout, à ouvrir la possibilité – c’est une proposition ! (Rires sur les bancs du groupe FI.) – de prononcer une mesure éducative judiciaire, afin que le mineur prenne conscience de la portée et du sens de l’acte qu’il a commis.

    M. le président

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    La parole est à M. Ugo Bernalicis, pour soutenir l’amendement no 183.

    M. Ugo Bernalicis

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    Nous proposons de supprimer la peine d’amende pour les enfants de moins de 16 ans, pour lesquels toute activité professionnelle est a priori interdite – sauf à dire aux mineurs de changer de formation et d’orientation et de partir en apprentissage à 15 ans, et encore cela dépend du mois de naissance, mais laissons cela de côté.
    L’amendement vise également à créer – c’est une proposition, chers collègues ! – la possibilité de prononcer une mesure éducative judiciaire allégée, afin que le mineur prenne conscience de la portée et du sens de l’acte qu’il a commis. Cela me paraît intéressant.

    Mme Perrine Goulet

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    Avec une remise aux parents ?

    M. Ugo Bernalicis

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    Cette mesure allégée prend la forme d’un stage de formation civique d’une durée qui ne peut excéder un mois. C’est une belle proposition, meilleure que l’amende, car elle a plus de sens. Vous en ferez ce que vous voulez et vous pouvez continuer de dire que nous ne proposons jamais rien. Le collectif avec lequel nous avons travaillé, qui nous a aidés…

    Mme Perrine Goulet

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    Qui vous a mâché le travail ! C’est différent ! Cela s’appelle du lobbying !

    M. Ugo Bernalicis

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    …et qui regarde la séance n’est pas déçu de nos débats – cette appréciation n’étant pas à prendre dans le bon sens du terme.
    Je souhaite que nous avancions sur ces sujets, sachant que je ne crois pas en la vertu pédagogique de l’amende. C’est comme pour la soi-disant vertu préventive de la peine, démentie pas une multitude d’études scientifiques qui démontrent le contraire en long, en large et en travers ! Vous préférez vous entêter ; c’est bien dommage. Le dogmatisme n’est pas de notre côté mais au banc du Gouvernement.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Avis défavorable. Vous proposez de supprimer des dispositions de l’article L. 121-4 du code de la justice pénale des mineurs laissant au juge des enfants en chambre du conseil la possibilité de prononcer certaines peines, comme la confiscation, le stage et le TIG. Ce dispositif est très utile.

    M. le président

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    Êtes-vous également défavorable, monsieur le ministre ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Bien sûr, monsieur le président.

    Mme Danièle Obono

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    Il n’écoute pas quand on lui fait des propositions.

    M. le président

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    La parole est à M. Ugo Bernalicis.

    M. Ugo Bernalicis

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    Monsieur le ministre, vous n’écoutez pas le seul moment où nous faisons une proposition – ce ne sera pas le seul, je vous rassure. (Rires sur les bancs du groupe LaREM.)

    M. le président

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    C’est vous qui l’avez dit, monsieur Bernalicis.

    Plusieurs députés du groupe LaREM

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    Vous l’avez dit !

    M. Ugo Bernalicis

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    Ma langue a fourché, monsieur le président.

    Mme Perrine Goulet

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    C’était un lapsus révélateur !

    M. Ugo Bernalicis

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    Vous êtes dur en affaires, monsieur le président ! Surtout que ma présentation de l’amendement n’était pas exhaustive, car je ne vous ai parlé que du stage, alors qu’il vise aussi à ajouter un nouvel alinéa 4 à l’article L. 121-4, qui prévoit que le juge des enfants peut condamner un mineur d’au moins 13 ans à effectuer une activité d’aide ou de réparation à l’égard de la victime ou dans l’intérêt de la collectivité.
    Vous avez avancé d’autres propositions dans d’autres blocs – la justice des mineurs est une histoire de seuils, de blocs et de modules, comme vous les nommez – mais nous refusons en effet d’instaurer des peines au stade de l’amende, monsieur le rapporteur. Nous privilégions des mesures éducatives, que nous souhaitons introduire dans le texte.
    Vous ne pouvez pas dire que nous ne proposons rien ; simplement, nous proposons une autre orientation que la vôtre, un peu moins sévère que le droit actuel et l’ordonnance de 1945. Cela nous paraît plus probant et plus sensé. Nous ne sommes pas d’accord, mais c’est dommage que nous ne puissions pas en discuter, car cela finit par valider mon propos initial, à savoir que tous les nouveaux outils que vous donnez aux magistrats montent la répression d’un cran.

    Mme Cécile Untermaier

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    Non !

    M. Ugo Bernalicis

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    Je ne suis pas contre la répression, il faut des outils répressifs, mais votre texte accroît la répression. Il est vrai que cette augmentation n’est pas forte, madame Untermaier, mais elle est incontestable. Et le délai de trois mois pose problème.

    M. le président

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    La parole est à M. Michel Zumkeller.

    M. Michel Zumkeller

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    Monsieur le garde des sceaux, vous reprochez souvent aux parlementaires de pécher par incohérence. Nous ne sommes peut-être pas assez intelligents, il est vrai que nous ne sommes que des parlementaires, mais un élément me semble également très incohérent. Vous avez reproché à Mme Ménard de vouloir faire travailler les enfants et vous aviez sûrement raison, mais vous nous dites que les mineurs doivent payer des amendes.
    Dans votre exemple du jeune qui a gagné de l’argent en vendant de la drogue et qui doit payer une amende, avec quel argent va-t-il l’acquitter ? Avec celui de ses trafics ?

    (Les amendements nos 418 et 183, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    M. Michel Zumkeller

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    J’ai posé une question à laquelle le ministre ne répond pas !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    J’ai déjà répondu !

    M. le président

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    Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 63 et 184.
    La parole est à Mme Elsa Faucillon, pour soutenir l’amendement no 63.

    Mme Elsa Faucillon

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    S’agissant des derniers échanges, nous pourrions au moins nous entendre sur le fait d’arrêter le petit jeu consistant à reprocher aux autres de ne faire aucune proposition.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Je ne parlais pas de vous et ce n’est pas un jeu !

    Mme Elsa Faucillon

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    Monsieur le ministre, nous faisons régulièrement des propositions, qui sont refusées. Elles visent souvent à éviter les situations que nous examinons aujourd’hui. Je pense, par exemple, à l’interdiction d’héberger les mineurs non accompagnés et les enfants bénéficiant de l’aide sociale à l’enfance dans des hôtels, car ils y sont la proie de trafics. La majorité et le Gouvernement ont repoussé cette proposition. (M. Ugo Bernalicis applaudit.)
    Nous avons avancé d’autres propositions de ce type, comme celle de la présomption irréfragable que vous avez écartée. Nous faisons des propositions dans le cadre du projet de loi de finances pour augmenter le nombre d’éducateurs, afin de développer les mesures éducatives alternatives : elles aussi sont rejetées.
    Il faudrait lever l’obstacle de l’article 40 de la Constitution, qui nous empêche de faire certaines propositions – à moins que vous ne vouliez lever ce verrou avec nous.

    M. Ugo Bernalicis

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    Très bien !

    M. Rémy Rebeyrotte

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    Parlez pour vous !

    Mme Elsa Faucillon

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    J’en viens à l’amendement. L’article L. 121-4 dispose que le juge pourra désormais prononcer des peines dans son cabinet, en seule présence d’un greffier à ses côtés. Il s’agit d’un recul important pour la justice des mineurs. L’absence de collégialité et celle, physique, du procureur à l’audience sont contre-productives sur le plan éducatif, car la lecture de réquisitions écrites n’est pas équivalente. Au reste, à l’exception d’une seule procédure spécifique en droit français, nul ne peut être condamné à une peine sans avoir pu entendre les réquisitions orales du procureur.
    Tous ceux qui ont assisté à une audience au tribunal pour enfants témoignent de l’importance des réquisitions du procureur, qui sont un temps éducatif fort et une présence qui permet au juge des enfants d’asseoir symboliquement son autorité.

    M. le président

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    La parole est à M. Ugo Bernalicis, pour soutenir l’amendement no 184.

    M. Raphaël Schellenberger

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    Défendu. (Sourires.)

    M. Ugo Bernalicis

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    L’article L. 121-4 est intéressant, car il est l’une des vraies nouveautés de cette codification. En effet, il était jusqu’à présent impossible de prononcer des peines – j’insiste bien sur ce terme, car les mots ont une portée juridique – en cabinet.
    Seul le tribunal pour enfants était habilité à prononcer ces peines, avec la collégialité que cela implique. Du point de vue des garanties, l’article 121-4 est un recul, à moins que jusqu’à présent, celles-ci n’aient été superfétatoires et inutiles ? Créer cet article serait une légère marque de défiance envers les magistrats qui exercent collégialement ; il serait dommage de leur faire grief de l’excellent travail qu’ils accomplissent.
    S’agissant de peines, il faut le décorum, l’ambiance et les apparences, ainsi que les garanties qui vont avec, notamment la collégialité. On doit pouvoir atteindre, en matière de peines à l’encontre de mineurs, l’idéal de justice. La collégialité n’est ni la panacée ni un génial miracle qui apporterait toutes les garanties, mais c’est mieux qu’un juge unique. Tous les professionnels du droit admettent ce point, le partagent et le souhaitent ; c’est tant mieux.
    L’amendement vise à supprimer la nouveauté que vous voulez créer, qui ressemble plutôt à un outil de gestion de flux. Réunir le tribunal pour enfants, ce n’est pas pareil que décider d’une sanction en cabinet ; l’audience est plus longue, notamment pour les magistrats. Je vois bien l’intérêt que vous pouvez trouver à cette mesure, mais ce n’est pas celui de l’enfant.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Il est toujours défavorable. Sincèrement, je crois que nous n’avons pas auditionné les mêmes personnes.

    Mme Alexandra Louis

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    Oui, c’est fort possible !

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Lors des auditions, aucun magistrat…

    M. Erwan Balanant

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    Oui, aucun !

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    …n’a indiqué qu’il ne serait pas pertinent, pour un juge des enfants en chambre du conseil, de prononcer certaines peines.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Voilà.

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Quelles sont-elles ? Une peine de confiscation d’un objet, une peine de stage et une peine de travail d’intérêt général. Soyons sérieux !

    M. Erwan Balanant

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    Oui, ces amendements sont une blague ! Il ne s’agit quand même pas de condamnations à dix ans de prison ou au goulag !

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Il est utile que ces peines puissent être prononcées rapidement, devant le juge pour enfants ; la collégialité n’est pas nécessaire. L’amendement n’est pas pertinent.

    Mme Elsa Faucillon

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    Argumentation très limite !

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Madame Elsa Faucillon, je ne m’en suis pas pris à vous, je n’ai pas évoqué votre nihilisme ni votre position systématique.

    Mme Danièle Obono

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    Il garde ça pour nous !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    J’ai pincé La France insoumise et c’est vous qui dites « aïe ! » ; c’est tout de même assez curieux !

    Mme Danièle Obono

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    Parce que nous sommes très proches !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Encore une fois, je ne m’en suis pas pris à vous, madame.

    Mme Elsa Faucillon

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    Je suis députée.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Si nous nous étions rencontré en commission, vous auriez eu connaissance des discussions très constructives que nous avons eues avec Marie-Georges Buffet – beaucoup de vos collègues peuvent en témoigner.

    M. Erwan Balanant

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    C’est vrai.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    J’ai cédé à plusieurs de ses demandes, avec lesquelles je n’étais pas d’accord a priori, et cela ne s’est pas produit qu’une seule fois.
    Je m’adresse à La France insoumise ; vous avez choisi de les défendre. Pourquoi pas, je le comprends, c’est toujours beau et noble de défendre. Mais je ne m’en suis pas pris à vous et je ne sais pas quelle mouche vous pique. C’est la deuxième fois que je vous fais la remarque ce soir ; mais peu importe.

    Mme Danièle Obono

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    Ne faites pas la leçon à une députée !

    M. le président

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    Je vous en prie, madame Obono.

    Mme Danièle Obono

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    Mais il est méprisant à notre égard !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Venons-en au fond. Il ne s’agit pas de goulag mais de confiscation, de stage et de travail d’intérêt général ! Je vais vous dire une dernière chose, parce qu’il y en a marre du monopole des consultations : vous avez peut-être auditionné la terre entière, la CGT,…

    M. Ugo Bernalicis

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    Oui !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    …le syndicat de la magistrature,…

    M. Ugo Bernalicis

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    Oui !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    …le CNB…

    M. Ugo Bernalicis

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    Aussi !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    …et je ne sais qui d’autre, mais certains magistrats qui ont été entendus sont favorables à cette mesure. Ils ne sont peut-être pas affiliés à la CGT ou au syndicat de la magistrature, et certainement pas au CNB, mais ce sont tout de même des magistrats ! J’affirme qu’une très grande majorité des professionnels se prononce en faveur de ces mesures. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – Mme Florence Lasserre applaudit également.)

    M. Ugo Bernalicis

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    Était-ce donc ça, la réponse au questionnaire ?

    M. le président

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    La parole est à Mme Alexandra Louis.

    Mme Alexandra Louis

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    Il s’agit, pour un mineur, de se trouver dans le bureau du juge ; c’est parfois dans son intérêt. Chacun tient ici au respect de l’intérêt supérieur de l’enfant. Lorsqu’il se trouve dans le bureau d’un juge, un mineur sait qu’il ne risque qu’un stage, une confiscation ou un travail d’intérêt général. Ce n’est pas du tout la même chose lorsqu’il se trouve devant un tribunal pour enfants : il peut en ressortir avec une peine. Se trouver dans le bureau du juge me semble donc beaucoup plus sécurisant pour les mineurs, qui sauront qu’ils ne risquent pas de peines lourdes ; cela va dans votre sens, monsieur Bernalicis.
    Rappelons qu’un mineur sera assisté d’un avocat, que le cadre juridique de cette mesure est très précis et que les peines sont légères ; aucune peine privative de liberté ne sera prononcée dans ce cas. À vous écouter, on pourrait croire que le juge serait amené à prononcer des peines très graves dans son bureau ; ce n’est pas du tout le cas. Un TIG est prononcé dans l’intérêt du mineur ; s’il est effectué dans un délai raisonnable, c’est encore mieux.

    Mme Laetitia Avia

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    C’est très clair !

    M. le président

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    La parole est à Mme Elsa Faucillon.

    Mme Elsa Faucillon

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    Je vous demande, monsieur le ministre, de bien vouloir éviter de parler à la place d’une députée, comme vous l’avez fait deux fois aujourd’hui. Mme Marie-George Buffet est absente ce soir ; elle était présente en commission. Il serait mieux de parler d’elle en sa présence ; il serait encore mieux que ce soit elle qui s’exprime, c’est important.

    M. Rémy Rebeyrotte

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    Vous n’êtes pas obligée de parler pour La France insoumise !

    Mme Elsa Faucillon

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    Il m’est arrivé, il m’arrive et il m’arrivera de nouveau, de défendre le travail parlementaire de députés de droite, dont je ne partage pas l’avis sur un amendement.

    Mme Alexandra Louis

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    Et alors ?

    Mme Elsa Faucillon

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    Depuis quelques heures, à certains moments, je trouve…

    Mme Alexandra Louis

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    Leçon de morale no 2 !

    Mme Elsa Faucillon

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    Oui, nous recevons des leçons de morales mais il m’arrive d’en faire également, donc je vous en excuse, monsieur le ministre. En revanche, il me semble avoir le droit d’exprimer mon avis sur le mauvais traitement du travail parlementaire et la manière dont vous vous comportez depuis ce matin ; peu importe qu’il s’agisse de mon groupe ou d’un autre, avec lequel je suis d’accord ou non. Ce rappel me semble important et me permet aussi de vous dire très directement – je pense que c’est mieux de le faire ainsi – que je déplore un manque de respect du travail parlementaire.

    Mme Alexandra Louis

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    Et sinon, l’amendement ?

    M. le président

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    La parole est à M. le garde des sceaux.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Je n’ai pas quatre ans, nous ne sommes pas sous le préau de la cour de récréation et vous n’êtes pas mon institutrice.

    M. Ugo Bernalicis

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    Et pourtant !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Je suis intervenu à deux reprises pour vous dire, la première fois, que je n’avais pas été incorrect avec vous, et la seconde, que je m’adressais aux députés de La France insoumise et pas à vous.

    Mme Danièle Obono

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    Ce n’est pas un règlement de comptes !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    S’agissant des consultations, puisqu’elles ont été évoquées, les députés de La France insoumise présentent les choses comme s’ils en avaient le monopole.

    Mme Danièle Obono

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    Mais arrêtez !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Mes services échangent quotidiennement avec les agents de la PJJ.

    Mme Danièle Obono

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    Avec qui parlez-vous donc ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Pardon ? Il y a 9 000 agents de la PJJ ; croyez-moi, mes services les consultent et ne font pas n’importe quoi au mépris de leurs positions.

    Mme Perrine Goulet

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    Oui, il n’y a pas que les syndiqués ! Le taux de syndicalisation est très bas en France ; les syndicats ne sont pas représentatifs.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Je peux vous dire que beaucoup de gens attendent cette réforme : les Français, qui se sont exprimés dans un sondage récent, et ceux qui travaillent pour les enfants et qui ne se contentent pas de la critique.
    Vous me reprochez d’avoir évoqué mon entente avec Mme Marie-George Buffet, pour laquelle j’ai le plus profond respect – ce n’est pas formidable. Vous ne voulez pas entendre ce que je veux vous dire, mais peu m’importe ; je vais me rasseoir. Simplement, je ne suis pas dogmatique, contrairement à beaucoup et en tous les cas, à certains.

    (Les amendements identiques nos 63 et 184 ne sont pas adoptés.)

    M. le président

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    Je suis saisi de deux amendements, nos 241 et 57, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L’amendement no 241 de M. Fabien Di Filippo est défendu.
    La parole est à M. Raphaël Schellenberger, pour soutenir l’amendement no 57.

    M. Raphaël Schellenberger

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    Il vise, dans la même logique que depuis le début de l’examen du texte, à ce que la justice des mineurs se construise par étapes successives, selon une forme de gradation, comme se construit la compréhension de la responsabilité de l’enfant, du jeune, de l’adolescent, du jeune adulte et de l’adulte. Lorsque deux magistrats défendant des points de vue différents s’entendent, l’amendement vise à leur permettre de lever l’excuse de minorité et de renvoyer le mineur de plus de 16 ans devant une juridiction de droit commun. Cela nous semble nécessaire parce qu’à 16 ans, à 17 ans, à quelques jours de son 18e anniversaire, on ne peut pas être considéré de la même façon qu’à 10 ou 11 ans.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Avis défavorable pour deux raisons. Il s’agit de l’article 121-4 concernant les prérogatives du juge des enfants de statuer seul en cabinet ; vous voudriez lui accorder la possibilité de lever l’excuse de minorité, ce qui est réservé à une formation collégiale. En outre, cette possibilité ne concerne que des infractions exceptionnelles, commises par des mineurs âgés de plus de 16 ans.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Monsieur Schellenberger, un jeune homme de votre circonscription qui brûlerait de voter pour vous, mais dont le 18e anniversaire tomberait le lendemain du scrutin, ne pourrait pas le faire. En effet, à 18 ans moins un jour, on est mineur. C’est vrai en matière électorale et aussi dans la situation qui nous occupe.
    L’amendement vise à permettre au juge des enfants d’exclure l’excuse de minorité et de renvoyer le mineur devant une juridiction pour majeurs : cela a quelque chose d’hérétique ! Le mineur est jugé par la juridiction des mineurs. Je suis totalement défavorable à l’amendement.
    Je sais ce que cela sous-tend, au fond : dans l’esprit de certains, la gravité du crime devrait permettre de ne plus considérer le mineur comme un mineur.

    M. Ugo Bernalicis

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    C’est déjà le cas !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Or quelle que soit la gravité du crime commis, s’il est commis par un mineur, il demeure un crime commis par un mineur. On ne peut pas transiger sur cette règle, fixée depuis 1945.

    M. Ugo Bernalicis

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    Mais le code prévoit déjà qu’il est possible d’y déroger !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    En dépit de ce que j’entends dire derrière moi, et qui n’est pas bien grave, ce sont nos règles. Un mineur reste un mineur et doit être jugé par une juridiction pour mineurs ; ce n’est pas plus compliqué que cela. Je suis totalement, obstinément et absolument défavorable à l’amendement, que vous avez pourtant défendu avec beaucoup de talent, monsieur le député.

    M. le président

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    La parole est à M. Raphaël Schellenberger.

    M. Raphaël Schellenberger

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    Sur un amendement aussi sérieux, nous pouvons avoir un débat de fond. Évitez, monsieur le ministre, les effets de manche sur les électeurs de ma circonscription. L’exemple est mauvais : la citoyenneté s’acquiert aussi de façon progressive, comme la responsabilité pénale dont il est question. Du jour au lendemain, à 18 ans, on ne devient pas un électeur plein et entier ; on ne peut pas être candidat aux élections sénatoriales ; on ne peut pas accéder à certaines fonctions démocratiques.

    M. Rémy Rebeyrotte

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    Mais on peut voter.

    M. Raphaël Schellenberger

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    La citoyenneté se construit au fur et à mesure ; par analogie, on peut appliquer le même raisonnement à la question de la responsabilité pénale.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Non !

    M. le président

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    La parole est à M. le garde des sceaux.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Je reprends la parole une seconde pour vous répondre, monsieur Schellenberger. Vous ne pouvez pas me faire grief de la légèreté : c’est vous qui avez abordé dans le débat le critère du mineur arrivé à quelques jours de ses 18 ans. Je vous ai répondu ce qui m’apparaissait nécessaire : un jeune homme qui voudrait voter la veille de ses 18 ans ne peut pas le faire. C’est tout à fait sérieux, même si je l’ai dit avec empathie et un sourire qui vous était adressé. J’ai la faiblesse de penser que ma réponse n’était pas stupide : un mineur sur le point de devenir majeur ne l’est pas encore, et reste un mineur. Ce n’est pas plus compliqué que cela : il y a un avant et un après.

    (Les amendements nos 241 et 57, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Danièle Obono, pour soutenir l’amendement no 185.

    Mme Danièle Obono

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    Cet amendement de repli vise à modifier l’article 121-4 – vous voyez, c’est une proposition ! – afin de réserver le prononcé des travaux d’intérêt général au tribunal pour enfants, pour préserver la collégialité. La notion de travail d’intérêt général serait remplacée par une mesure de travail éducatif, dont la durée correspondrait à la moitié de celle du TIG, soit soixante heures au maximum.
    L’amendement est le fruit du travail engagé depuis un an avec le Collectif des enfants.
    Nous le disons explicitement, car il ne s’agit pas d’une forme de lobbying dont nous pourrions avoir honte. Nous ne prétendons pas par ailleurs que la représentativité de cette association soit absolue, mais nous estimons que son intervention garantit l’expertise de professionnels engagés. Nous sommes fiers d’avoir accompli ce travail avec les acteurs et actrices du terrain. Je ne sais pas, monsieur le ministre, pourquoi vous prenez la mouche chaque fois que nous évoquons les échanges de cette nature. Ils visent à verser des éléments au débat et à montrer que nos propositions ne sont pas le fruit du nihilisme insoumis, mais d’une réflexion menée avec des acteurs impliqués, pour examiner sérieusement le texte.
    Encore une fois, il s’agit d’un amendement de repli. Nous n’en déposons pas toujours, parce que nous assumons le plus souvent de demander la suppression de l’article. Ici, nous pensons pouvoir faire œuvre utile en visant à améliorer le projet de loi. Cet amendement se justifie parce qu’il contient d’autres propositions que celles que vous défendez. Nous voudrions un système différent, néanmoins nous estimons que l’adoption de cet aménagement contribuerait à améliorer la protection des enfants.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Avis défavorable à la création d’une mesure de travail éducatif, qui n’est pas pertinente. L’article L121-4 prévoit déjà le recours au TIG. Il est parfaitement défini dans notre droit et me paraît suffisant.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    C’est une proposition, en effet, mais elle est bien démagogique !

    Mme Danièle Obono

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    Vous êtes toujours contre, monsieur le ministre ! Vous êtes nihiliste ! Vous êtes dogmatique !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Malgré le changement de terminologie, il s’agit de condamner un mineur à effectuer des heures de travail non rémunéré, c’est-à-dire à une peine de travail d’intérêt général – assez bien nommé, d’ailleurs. Défavorable.

    Mme Danièle Obono

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    Vous êtes contre tout ! Arrêtez d’être aussi dogmatique !

    M. le président

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    La parole est à M. Ugo Bernalicis.

    M. Ugo Bernalicis

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    Je crois, monsieur le ministre, que vous fûtes un éminent spécialiste du droit pénal : peut-être l’article L434-42 du code pénal vous évoque-t-il quelque chose – peut-être pas de mémoire, moi-même je confonds tant il y a d’articles.

    M. Erwan Balanant

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    M. Bernalicis va donner des cours de droit pénal au garde des sceaux !

    M. Ugo Bernalicis

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    Il prévoit, en cas de non-respect du TIG, une peine de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende. Voilà comment un travail non rémunéré se distingue d’un travail d’intérêt général : par les conséquences éventuelles du non-respect de la peine.

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Mais ce n’est pas possible pour des mineurs !

    M. Ugo Bernalicis

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    Je sais que la peine que je viens de citer concerne les majeurs, mais un mineur encourt aussi un emprisonnement s’il n’accomplit pas le TIG prévu. Ne me dites pas le contraire !

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Cela ne dépendra pas d’un juge des enfants, mais d’un tribunal pour enfants !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Mais oui !

    M. Jean-Michel Fauvergue

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    Hors sujet !

    M. Ugo Bernalicis

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    La peine ne sera pas prononcée en cabinet, d’accord, une audience sera organisée au tribunal pour enfants. Il n’en reste pas moins que cela établit une différence avec le travail non rémunéré. Ne venez pas me dire que notre amendement ne vise qu’une amélioration cosmétique : la mesure emporte des conséquences juridiques pour l’enfant. Respectez au moins la technique du droit et ne nous accusez pas de démagogie ! Nihiliste, si ça vous fait plaisir, mais pas démago !

    (L’amendement no 185 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Elsa Faucillon, pour soutenir l’amendement no 64.

    Mme Elsa Faucillon

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    Il s’inscrit dans la continuité des précédents, en opposition au recul de la collégialité que le texte induit. En commission, monsieur le ministre, vous avez justifié la rédaction de l’article L121-4 en expliquant qu’il faut désengorger les tribunaux pour enfants, qui sont confrontés à des stocks importants et connaissent des délais sensiblement plus longs que ceux des jugements prononcés en chambre du conseil. Selon nous, la perte de la collégialité et l’argument qui la justifie sont tous deux inacceptables. On ne peut pas ainsi modifier le code pour assurer la gestion des flux – qu’il faut plutôt aborder lors de l’examen du budget de la justice. Les réformes, elles, doivent améliorer le fonctionnement de la justice des mineurs et garantir l’intérêt supérieur de l’enfant.
    Vous avez refusé de rétablir la collégialité, nous proposons donc un amendement de repli, qui vise à supprimer la possibilité de prononcer en chambre une peine de stage ou de travaux d’intérêt général. Comme mes collègues, je souligne que la non-exécution d’un stage ou d’un travail d’intérêt général constitue un nouveau délit et peut donc aboutir à une peine d’emprisonnement.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Défavorable.

    M. le président

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    La parole est à M. Ugo Bernalicis.

    M. Ugo Bernalicis

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    Je ne comprends pas que vous ne compreniez pas.

    Mme Alexandra Louis

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    Nous non plus !

    M. Ugo Bernalicis

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    Le stage et le TIG sont des peines. Si le mineur ne les exécute pas, il encourt une peine de prison. Certes, au moment où la peine est prononcée, il n’est pas question de prison, et on peut penser qu’il s’agit de peines légères. Néanmoins, il faut garantir la solennité qui entoure la décision, avec la collégialité du tribunal. Ceux qui ont défini la procédure du tribunal pour enfants, y compris concernant des peines de cette nature, étaient-ils des êtres lunaires ? Bien sûr que non ! La procédure fonctionne ainsi et offre davantage de garanties que celle que vous proposez. Je le répète : nous avons déclamé des principes à l’article 1er, nous voulons les suivre jusqu’au bout.

    (L’amendement no 64 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    L’amendement no 65 de M. Stéphane Peu est défendu.

    (L’amendement no 65, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

    M. le président

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    L’amendement no 113 de M. Éric Ciotti est défendu.

    (L’amendement no 113, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à M. Raphaël Schellenberger, pour soutenir l’amendement no 112.

    M. Raphaël Schellenberger

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    Il devrait plaire à M. le garde des sceaux, puisqu’il vise à introduire un nouveau cliquet. Il y a avant 18 ans et après 18 ans ; je propose de lever l’excuse de minorité à 16 ans. Cet âge est un seuil ; la proposition me paraît donc équilibrée, puisque la décision relève toujours du juge des enfants. En revanche, cela implique une gradation de la sanction, les peines encourues étant les mêmes que pour un justiciable majeur. Cette mesure introduirait une étape de transition, propice à la construction progressive de la pleine et entière responsabilité du futur majeur.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Il reste défavorable quant à la levée de l’excuse de minorité. Je vous renvoie à l’article L121-7, qui en définit déjà les conditions : votre amendement est satisfait.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Oui.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Avis défavorable. M. le député avait tout à fait raison de pressentir que cet amendement ne plairait pas au garde des sceaux.

    M. le président

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    La parole est à Mme Emmanuelle Ménard.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Il est vrai que nous avons déjà eu ce débat en commission mais je veux souligner l’intérêt de cet amendement. Il vise à protéger plus spécifiquement nos forces de l’ordre. En ce sens, il aurait mérité davantage de considération, en ces temps d’attaques systématiques à leur encontre, qu’il s’agisse des policiers, des gendarmes et même des pompiers. Peut-être faut-il remettre les principes à plat, notamment à l’attention des mineurs, en réaffirmant qu’on ne s’attaque pas aux forces de l’ordre.

    Mme Cécile Untermaier

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    C’est dramatique !

    M. le président

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    La parole est à Mme Alexandra Louis.

    Mme Alexandra Louis

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    Je veux clarifier nos débats, car certaines interventions pourraient induire le public en erreur. Le principe est clair : un mineur est jugé comme tel, par une juridiction spécialisée, selon une procédure adaptée, qui prévoit des peines et sanctions appropriées. Il existe déjà une exception pour les mineurs de seize ans et plus : le tribunal pour enfants peut écarter l’excuse de minorité, s’il l’estime nécessaire, en fonction des circonstances, de la gravité des faits, et surtout de la personnalité du mineur. Inverser les principes n’aidera personne. Je ne crois pas à l’idée que la justice des majeurs serait plus répressive et donc plus efficace. Restons fidèles à nos principes et respectons l’équilibre du texte, qui prévoit des exceptions quand c’est nécessaire. (M. Rémy Rebeyrotte applaudit.)

    Mme Laetitia Avia

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    Excellent !

    M. le président

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    La parole est à M. le garde des sceaux.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Voyez, madame Ménard, la présentation que vous faites des choses :…

    Mme Cécile Untermaier

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    Oui !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    …elle revient à dire qu’en repoussant cet amendement, nous ne respectons pas les forces de l’ordre.

    Mme Cécile Untermaier

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    Il a raison !

    M. Ugo Bernalicis

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    Mais n’est-ce pas ce qui s’est produit il y a deux semaines ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    C’est insupportable de démagogie, et je vous le dis très calmement ! Si le juge considère que l’infraction commise est grave – s’attaquer aux forces de l’ordre est en effet une infraction grave –, il peut parfaitement ne pas appliquer l’excuse de minorité, et vous le savez : c’est prévu deux articles plus loin. Ne présentez pas les choses en faisant comme si notre position consistait à nous désintéresser des forces de l’ordre et de la gravité des infractions qui les concernent.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Ce n’est pas ce que j’ai dit !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Vous avez tous les droits, mais cette présentation des choses est fallacieuse. Nous sommes aussi sensibles que vous à la nécessité de protéger les forces de l’ordre. L’article L121-7 qui suit autorise déjà à ne pas faire application des règles d’atténuation des peines spécifiques aux mineurs. Ne faites pas comme si vous aviez le monopole de la protection des forces de l’ordre : ça n’est pas vrai ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – Mme Emmanuelle Ménard proteste.)

    (L’amendement no 112 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à M. Ugo Bernalicis, pour soutenir l’amendement no 186.

    M. Ugo Bernalicis

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    L’article L121-6 prévoit qu’un mineur peut être condamné à une peine d’amende allant jusqu’à 7 500 euros – 7 500 euros d’amende !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Oui, et alors ?

    M. Ugo Bernalicis

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    On ne parle pas de quelqu’un qui aurait mis 15 000 euros de côté en trafiquant des stupéfiants : dans ce cas, la somme est saisie et confisquée. L’amende vient en plus. Il ne s’agit pas de dire que vous vous êtes mis 15 000 euros dans la poche, qu’on vous en prélève donc 7 500 : ce ne serait pas logique car cela reviendrait à laisser un bénéfice à celui qui se débrouille bien, or tel n’est pas le but de la justice, comme chacun sait. Je ne comprends donc pas ce qui autorise à envisager des peines de 7 500 euros d’amende. Ce montant est tellement disproportionné que je ne saisis pas comment il peut figurer à cet endroit du texte. Je défendrai ensuite un amendement de repli visant à définir le montant de l’amende selon plusieurs critères. Vous allez évidemment me répondre que le magistrat sait ce qu’il fait, qu’il décide en son âme et conscience, et qu’il prend en considération la situation du mineur. Cependant, quand des peines sont prévues, il ne faut pas s’étonner qu’un jour ou l’autre, elles soient prononcées. La meilleure garantie qu’aucune amende de 7 500 euros ne sera prononcée consiste à ne pas en prévoir la possibilité.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Il est défavorable à la suppression de l’article L121-6.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    M. Bernalicis semble ignorer que des mineurs riches aussi commettent des infractions, quand bien même ils ne sont sans doute pas la majorité. Ensuite, le montant fixé est un maximum. Pardonnez-moi de le répéter : vous n’avez toujours pas compris qu’il s’agit d’un instrument. Au regard de la situation de fortune du mineur concerné, de sa situation contributive, des économies qu’il a pu faire, par exemple en commettant des infractions – je ne parle pas que des stupéfiants –, le juge modulera sa décision. Une fois encore, ce n’est pas plus compliqué que cela. Pour bien analyser les choses, vous manquez d’une expérience de la réalité quotidienne de cette délinquance et de la manière dont elle est jugée.

    M. Bruno Questel

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    De la vraie vie !

    Mme Danièle Obono

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    Oh, bien sûr !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Je sais qui vous avez consulté, mais je sais aussi comment on juge les gens : j’ai fait ça pendant plus de trente ans.

    M. Ugo Bernalicis

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    Vous avez aussi fait de la justice des mineurs ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    On n’inflige pas une peine d’amende de 7 500 euros à un gamin qui n’a pas un centime. Ce n’est pas vrai ! Ça n’arrive que dans votre tête ! Il s’agit de la peine maximum. Le juge a besoin d’une large palette : c’est la quarantième fois qu’on vous le dit ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)

    M. le président

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    La parole est à M. Ugo Bernalicis.

    M. Ugo Bernalicis

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    Je regrette que la droite ou l’extrême droite n’aient pas déposé un amendement visant à hausser le plafond de l’amende à 20 000 euros. C’est dommage.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Non, c’est 7 500 !

    M. Ugo Bernalicis

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    Je le dis à mes collègues de droite : allez-y, voyez avec les sénateurs pour passer à 15 000 ! Après tout, ce n’est qu’un outil, laissons le magistrat adapter, regarder, ajuster au plus près… Et puis certains mineurs – certes, pas la majorité de l’espèce – ont des parents très riches, pour qui 15 000 euros, ce n’est pas grand-chose !
    Mais qu’est-ce que c’est que cet argument, monsieur le ministre ? Vous me parlez de réalité, mais à quelle réalité faites-vous référence ? La réalité, elle sera plutôt dans l’amendement de repli suivant.
    Pour un enfant de famille riche, une peine d’amende, ça peut n’être pas grand-chose, il s’en fiche. Cela revient au débat que nous avons eu tout à l’heure sur la supposée vertu pédagogique de l’amende. Eh bien il n’y en a pas ! La mesure éducative, oui, elle en a une. Mais l’amende ? Non. Et 7 500 euros, c’est un autre monde : les gens que je croise dans ma circonscription voient à peu près ce que ça représente, mais ce n’est pas ce qu’ils touchent par mois !

    M. Bruno Questel

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    Ça n’a rien à voir !

    M. le président

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    La parole est à M. le garde des sceaux.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Vous vous levez, monsieur, et vous proclamez que la peine d’amende n’a strictement aucun intérêt, aucune vertu pédagogique. Mais qui vous permet de dire un truc pareil ? D’où sortez-vous cela, de votre tête ? Il y a des amendes de 35 euros qui dissuadent ; il y a des gens qui ne stationnent pas à certains endroits parce que cela coûte quelques dizaines d’euros. Cela aurait un impact sur les majeurs, mais pas sur les mineurs ? Vous avez décidé, péremptoirement, que la peine d’amende n’avait aucune vertu, et il faudrait que nous nous inclinions tous, et que nous suivions votre pensée comme un seul homme.

    M. Ugo Bernalicis

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    Ce serait bien, mais je ne veux pas vous en demander tant !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    C’est très curieux, comme mode de raisonnement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – Exclamations sur les bancs du groupe FI.)

    M. Ugo Bernalicis

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    Si vous voulez vous incliner, allez-y !

    (L’amendement no 186 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Danièle Obono, pour soutenir l’amendement no 187.

    Mme Danièle Obono

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    C’est un amendement de repli.

    M. Jean-Michel Fauvergue

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    Eh bien repliez-le !

    Mme Danièle Obono

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    Vous n’étiez nullement obligés de voter pour l’amendement précédent comme un seul homme, mais vous pouvez peut-être entendre nos propositions de clarification… Comme nous ne sommes pas complètement sectaires,…  Oh que si ! » sur les bancs du groupe LaREM.)

    M. Jean-Michel Fauvergue

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    Si, complètement !

    M. Bruno Questel

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    Ne vous sous-estimez pas !

    Mme Danièle Obono

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    …nous espérons vous convaincre d’établir des critères. Ainsi, pour les seuls mineurs de plus de seize ans ayant une activité professionnelle ou effectuant un stage rémunéré, qui ne sont pas insolvables, l’amendement prévoit des niveaux d’amende inférieurs à ceux figurant actuellement à l’article L. 121-6. La rédaction que nous en proposons permet d’établir certains critères de distinction, afin justement de prêter attention à la réalité et à la gradation des situations qui arrivent devant la justice.
    On peut aussi, par principe, penser que la sanction financière n’a aucune valeur éducative pour ceux qui ont les moyens de payer ; pour ceux qui ne les ont pas, elle peut même avoir une valeur négative, en enfonçant un peu plus encore ceux qui rencontrent déjà des difficultés. Considérer que la sanction financière éduque, ce n’est pas notre logique, car ce qu’elle enseigne, c’est que plus on a de l’argent, mieux on s’en sortira. Ce n’est pas le genre d’éducation que nous souhaitons pour les enfants en danger.

    M. le président

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    Merci.

    Mme Danièle Obono

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    Notre vision de l’éducation ne repose pas sur les sanctions financières. Nous assumons pleinement l’amendement précédent, mais nous vous proposons néanmoins cet amendement de repli.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Avis défavorable. Il y a dans votre amendement un effet de bord qui n’est pas pertinent. Vous proposez de sanctionner plus durement les mineurs de plus de seize ans qui auraient une activité professionnelle. Cela ne me paraît pas judicieux : s’ils travaillent, c’est peut-être parce qu’ils en ont besoin, et il ne serait pas juste de les sanctionner plus durement que des mineurs suffisamment aisés pour que leurs parents les aident à poursuivre des études, par exemple.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Je n’ai jamais dit que l’amende, c’était la panacée… J’ai dit que, de temps en temps, cela peut marcher. Je n’ai pas l’arrogance de ceux qui pensent savoir. Pardonnez-moi, mais nous parlons de matière humaine ! Ce n’est pas de l’administratif pur et dur ! Savez-vous que, dans le cas des mineurs, les amendes, c’est 5 % des condamnations ?
    Tout à l’heure, les amendes ne servaient à rien, il fallait avaler cela surtout sans discuter ; maintenant, vous vous mettez à proposer des amendes pour les mineurs de plus de seize ans. Je sais bien qu’en technique parlementaire, cela s’appelle un amendement de repli ; mais enfin, si l’on voulait rester logique, cela ne s’appellerait rien du tout. C’est tout de même curieux : vous ne vouliez pas d’amende il y a vingt secondes, et maintenant vous en voulez ; elle ne servait à rien, et voilà qu’elle est susceptible de servir à quelque chose.
    Si l’on cherchait la nuance, on pourrait dire qu’il n’y a pas de certitude absolue ; l’amende, c’est une possibilité. Trouver la juste peine, c’est compliqué, c’est même la chose la plus compliquée en matière de justice – mais il arrive que ça marche ! L’idée, à ce stade, c’est de ne pas se priver de cet outil, voilà tout. Plus le juge dispose d’outils, plus il pourra affiner sa décision : est-ce compliqué à entendre ? Cette idée simple ne devrait-elle pas faire consensus chez les gens raisonnables ? Je crois que oui, et je suis donc défavorable à cet amendement, qui n’est à mes yeux qu’un…

    Mme Danièle Obono

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    Une hérésie ?

    Mme Perrine Goulet

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    Un déchet ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    …moyen de gagner du temps. C’est dilatoire, et cela devient franchement gênant ; on parle de la justice des mineurs ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)

    Mme Danièle Obono

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    Eh bien non, justement !

    M. le président

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    La parole est à M. Antoine Savignat.

    M. Antoine Savignat

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    Tout à l’heure, notre collègue Bernalicis nous invitait à proposer des amendements pour fixer le montant maximum d’amende à 15 000 euros. Nous ne l’avons pas fait, mais en proposant de fixer ce montant en fonction de la faculté contributive du mineur, et de supprimer le plafond de 7 500 euros, vous allez bien au-delà et vous faites mieux que nous ! C’est aberrant.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Oui, c’est aberrant…

    M. Antoine Savignat

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    Les amendes et les peines doivent s’appliquer à tous de la même manière ; sinon, à fait équivalent, on rétablit la peine de mort pour moi parce que je suis de droite, et on vous proposera à vous un séjour au soleil ! (Rires.)

    Mme Danièle Obono

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    Mais non !

    M. Antoine Savignat

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    Le montant des sanctions doit être le même pour tous ; le juge apprécie, en fonction des revenus de chacun, de sa faculté contributive. Le but du magistrat, c’est finalement que l’amende soit payée.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Voilà !

    M. le président

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    La parole est à Mme Danièle Obono.

    Mme Danièle Obono

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    Il faudrait savoir ce que vous nous reprochez, monsieur le ministre ! Ici, nous essayons de nous adapter à ce cadre contraint que nous contestons, en posant des garde-fous. Vous en appelez à la mesure : eh bien, 7 500 euros, c’est trop. L’un des critères que nous proposons, c’est que la peine d’amende ne doit pas excéder « le montant mensuel du salaire minimum de croissance pour les mineurs » – ce n’est pas 7 500 euros ! Nous proposons aussi un calcul en fonction des facultés contributives.

    M. Éric Girardin

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    C’est ce que le ministre vient de dire !

    M. Ugo Bernalicis

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    Vous l’avez lu, l’amendement ? Vous l’avez lu ? (Vives protestations sur les bancs du groupe LaREM.)

    M. le président

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    Du calme, mes chers collègues. Monsieur Bernalicis, écoutez Mme Obono, elle a la parole.

    M. Ugo Bernalicis

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    Dites-le à ceux qui nous hurlent dans les oreilles !

    Mme Perrine Goulet

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    Il est bien énervé, le petit !

    Mme Danièle Obono

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    Nous essayons donc, je le disais, de nous adapter à votre cadre ; tout à l’heure vous nous disiez dogmatiques, et maintenant nous serions trop souples. Non ! Nous pensons que le montant de 7 500 euros est démesuré, et nous essayons de proposer des garde-fous.
    Nous ne sommes pas d’accord sur la sanction financière, c’est vrai. Nous lui préférons les mesures éducatives, qui ont un tout autre impact. Nous pourrons nous échanger des références de recherches menées sur ces sujets, notamment sur le caractère prétendument dissuasif des amendes. (M. Bruno Questel fait claquer son pupitre.)

    M. le président

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    Je vous remercie, madame Obono.

    Mme Danièle Obono

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    Le repli que nous proposons nous semble raisonnable…

    M. le président

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    Merci.

    Mme Danièle Obono

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    Plus vous faites du bruit, plus on va parler ! Ils sont devenus masochistes, ce soir !

    (L’amendement no 187 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 4, 41 et 188.
    La parole est à Mme Cécile Untermaier, pour soutenir l’amendement no 4.

    Mme Cécile Untermaier

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    En cohérence avec la présomption irréfragable d’irresponsabilité pénale à 13 ans que nous avons défendue tout à l’heure, nous proposons, par souci de clarté et parce qu’avant 13 ans le discernement sur les conséquences pénales d’un fait nous paraît difficile à apprécier, de supprimer l’article L. 121-7, qui permet d’écarter l’excuse de minorité et la diminution de moitié, pour les mineurs, des peines encourues.
    Vous n’aggravez pas le dispositif actuel ; nous sommes ici à droit constant et la dérogation en vigueur ne change pas. Le texte retient d’ailleurs les dispositions que nous avions adoptées en 2016 interdisant la condamnation à perpétuité, même dans le cadre de cette dérogation. Il demeure exceptionnel d’écarter l’excuse de minorité, et il faut pour cela une décision spécialement motivée. Mais les conséquences d’une telle décision sont graves, puisque le quantum des peines est alors celui des adultes. Entre 16 et 18 ans, on est encore un adolescent, et pourtant on peut être condamné à aller en prison ; cette disposition abîme inutilement le code de la justice pénale des mineurs.
    Nous souhaitons donc revenir sur ce principe et atténuer le caractère répressif des règles ajoutées à l’ordonnance de 1945 depuis une vingtaine d’années.

    M. le président

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    La parole est à Mme Elsa Faucillon, pour soutenir l’amendement no 41.

    Mme Elsa Faucillon

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    C’est le même amendement. J’ajouterais aux propos de ma collègue, qui disait que l’on était à droit constant, que ce n’est pas tout à fait exact puisque l’exception à l’excuse de minorité est ici étendue au tribunal de police. Ce nouveau code va donc au-delà du régime actuel. Nous l’avons dit plusieurs fois déjà : 16 ans, ce n’est pas 18 ans, de nombreux textes nous le rappellent, et la réalité aussi.
    Dans un amendement que nous examinerons sans doute demain, nous vous proposerons de limiter cette exception à l’excuse de minorité – oui, l’amendement de repli est pratiqué par les parlementaires ; il vise à limiter les effets d’une mesure que nous n’approuvons pas.

    M. le président

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    La parole est à M. Ugo Bernalicis, pour soutenir l’amendement no 188.

    M. Ugo Bernalicis

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    Il est ici question de l’une des trois exceptions qu’évoquait le rapporteur au début de l’examen du texte. Nous avions défendu un amendement interdisant toute exception, et celle-ci est à notre sens la plus problématique, puisqu’elle permet de condamner les mineurs de 16 à 18 ans aux mêmes peines que les majeurs. Bien sûr, les magistrats sont toujours spécialisés – encore heureux, c’est la moindre des choses. Mais je ne comprends pas pourquoi on prend le soin, qui est tout à notre honneur, de rappeler les grands principes dans le titre liminaire – principe de l’excuse de minorité, principe de spécialité, principe de primauté de l’éducatif sur le répressif – pour, tout à coup, prévoir que l’on peut déroger à ces principes, au cas où – au cas où je ne sais quoi, d’ailleurs.
    Mais si l’on peut y déroger, alors ce ne sont plus des principes ! Ce sont des faire-valoir, des belles paroles, des idées intéressantes avec lesquelles on peut être d’accord ; mais ce ne sont plus des principes. Cette exception à l’excuse de minorité est vraiment problématique, puisque l’article autorise à condamner des mineurs aux peines prévues pour les majeurs.
    Je crois que ce n’est pas l’esprit de l’ordonnance de 1945, ni celui que nous souhaiterions – et vous non plus, je présume – insuffler. Si vous voulez donner des gages et pouvoir affirmer que vous améliorez l’ordonnance de 1945, en allant dans le sens du progrès et de plus d’humanité, il convient de supprimer l’exception au principe d’atténuation des peines.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements identiques ?

    M. Jean Terlier, rapporteur

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    Le principe de l’atténuation de la responsabilité pénale du mineur est bien préservé et, nous l’avons reconfirmé, nous ne souhaitons pas y déroger. Cependant, aux termes de l’article L. 121-7 du code de la justice pénale des mineurs, « si le mineur est âgé de plus de 16 ans, le tribunal de police, le tribunal pour enfants et la cour d’assises des mineurs peuvent, à titre exceptionnel et compte tenu des circonstances de l’espèce et de la personnalité du mineur » – ce qui fait beaucoup de conditions cumulatives –, revenir sur l’excuse de minorité. Cette possibilité est très rarement utilisée. Le principe reste celui de l’atténuation de la peine. Et les motifs d’exception sont clairement encadrés.
    J’estime qu’il est de bonne justice que de conserver ce dispositif car, dans certains cas, le juge peut avoir intérêt à écarter cette atténuation. Avis défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Nous avons eu ce débat tout à l’heure lorsque nous avons évoqué le caractère irréfragable, ou non, de la présomption de discernement. Rien n’est assuré en la matière. Certains gamins de 12 ans ont du discernement, d’autres de 14 ans n’en ont pas. De la même manière, certains gamins de 17 ans font preuve de beaucoup de maturité, quand des jeunes gens majeurs de 21 ans en sont dépourvus. On ne peut tenir deux discours sur cette question ; c’est une façon d’être cohérent.
    Cela vient d’être rappelé à l’instant, les mineurs de plus de 16 ans sont jugés devant et par des juridictions spécialisées.

    Mme Cécile Untermaier

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    Sauf le tribunal de police !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Certes, mais ce n’est pas la levée de l’excuse de minorité par le tribunal de police pour une contravention de première classe qui fonde l’amendement. Ce qui le fonde, ce sont les situations criminelles dans lesquelles on envisage cette levée pour accroître les peines encourues.
    Sachez que cette exception est rarement utilisée : elle ne concerne que moins de 1 % des mineurs incriminés. Et je rappelle que la cour d’assises qui fait le choix de l’exclusion de l’atténuation de responsabilité pénale est composée spécialement d’un président et de deux juges des enfants. Je le répète, cet usage est extrêmement rare.

    Mme Elsa Faucillon

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    Pourquoi prévoir l’exception, dans ce cas ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Que peut motiver cette exclusion ? La personnalité de l’accusé ou la gravité des faits. Cette exception n’est pas devenue la règle ; elle demeure l’exception. Le Gouvernement est donc défavorable à ces amendements. Il en comprend bien sûr le sens, mais il lui paraît nécessaire, dans certaines hypothèses particulières et graves, que l’on dispose de cette possibilité. Je vous l’assure, cette exception au principe est entourée de toutes les garanties procédurales suffisantes.

    M. Ugo Bernalicis

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    Pourquoi prévoir une peine de police, dans ce cas ? Cela n’a pas de sens !

    M. le président

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    La parole est à Mme Cécile Untermaier.

    Mme Cécile Untermaier

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    Je vous remercie, monsieur le ministre, de ces explications. Elles sont très claires et je partage votre analyse. Vous avez raison de dire que l’exclusion de l’atténuation de la responsabilité pénale est très exceptionnelle et qu’elle est utilisée dans les cas où la société estimerait insuffisant que l’accusé mineur au moment des faits n’encoure qu’une demi-peine. Vous avez raison, ce dispositif existait déjà et l’exception n’est pas devenue la règle ; il faut que nous soyons clairs pour ceux qui liront les débats.
    En revanche, un élément dont je ne m’étais pas aperçue m’interroge : que vient faire le tribunal de police dans cette disposition ? Pour la clarté de nos débats et notre sérénité vis-à-vis de cette mesure, il serait souhaitable de donner un avis favorable à l’amendement de repli no 42 que nous examinerons demain matin et visant à supprimer, pour le tribunal de police, la possibilité de prononcer la levée de l’excuse de minorité. Vraiment, je ne vois pas pourquoi cette juridiction vient faire ici !

    M. le président

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    La parole est à Mme Elsa Faucillon.

    Mme Elsa Faucillon

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    Il s’agit d’une vraie question, posée sans arrière-pensées. L’amendement no 42 vise en effet à revenir aux dispositions actuellement en vigueur et à ne pas étendre au tribunal de police la possibilité de lever l’atténuation de responsabilité pénale. Nous souhaiterions d’ailleurs connaître les motifs de cet ajout, sachant que vous venez de nous dire que les possibilités de déroger à ce principe sont actuellement suffisantes.

    (Les amendements identiques nos 4, 41 et 188 ne sont pas adoptés.)

    M. le président

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    La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

    2. Communication de M. le président

    M. le président

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    Avant de lever la séance et pour que cela figure au compte rendu, je souhaite, chers collègues, vous apporter des éléments sur deux points que nous avons évoqués ce soir.
    Le premier concerne les députés non-inscrits. J’ai demandé, et le président Ferrand l’a accepté, que ce sujet soit inscrit à l’ordre du jour de la prochaine conférence des présidents de mardi prochain et nous aurons, en toute hypothèse, une réponse claire à cette occasion.
    Le second a trait à l’amendement no 294 de Mme Bergé.  Ah ! » sur les bancs du groupe FI.) Je remercie le service de la séance d’avoir eu la diligence de contacter celui des finances publiques. L’appréciation de la recevabilité financière d’un amendement parlementaire, nous rappelle-t-il, s’examine au regard soit du droit proposé, soit du droit existant, le président de la commission des finances retenant systématiquement l’option la plus favorable au député. (Mme Elsa Faucillon rit.)

    M. Ugo Bernalicis

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    C’est bien le comble !

    Mme Cécile Untermaier

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    Nous ne nous en sommes pas aperçus !

    M. le président

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    En l’espèce, il a pris en considération un arrêté du garde des sceaux du 31 mars 2015 relatif au fonctionnement des centres éducatifs fermés, ainsi que sa circulaire d’application du 10 mars 2016, qui prévoyait que « le centre éducatif fermé met en place des activités d’insertion scolaire et professionnelle, dont trois ateliers techniques minimum, ainsi que des activités d’éducation à la santé, culturelles, sportives ou de détente ».

    M. Raphaël Schellenberger

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    C’est bien la preuve que cet amendement était inutile !

    M. Antoine Savignat

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    Car satisfait !

    M. le président

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    Dans une interprétation favorable à Mme la députée, le président de la commission des finances a donc considéré que l’amendement no 294 n’allait pas plus loin que le droit existant,…

    M. Raphaël Schellenberger

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    Il a pourtant donné lieu à beaucoup de bavardages !

    M. Antoine Savignat

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    Tout ça pour ça !

    M. le président

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    …dès lors qu’il se borne à préciser les objectifs de ces activités sans les assortir d’obligations de moyens humains supplémentaires. Nous disposons donc de toutes les explications.
    Je remercie à nouveau les services pour la qualité de leur analyse et de leur travail, ainsi que le président de la commission des finances et nous aurons toute la nuit pour méditer ce sujet. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)

    3. Ordre du jour de la prochaine séance

    M. le président

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    Prochaine séance à neuf heures :
    Discussion sur le rapport de la commission mixte paritaire du projet de loi organique relatif aux délais d’organisation des élections législatives et sénatoriales ;
    Discussion sur le rapport de la commission mixte paritaire du projet de loi relatif aux délais d’organisation des élections municipales partielles et des élections des membres des commissions syndicales ;
    Suite de la discussion du projet de loi ratifiant l’ordonnance du 11 septembre 2019 portant partie législative du code de la justice pénale des mineurs.
    La séance est levée.

    (La séance est levéele vendredi 11 décembre à zéro heure dix.)

    Le Directeur du service du compte rendu de la séance
    de l’Assemblée nationale
    Serge Ezdra