XVe législature
Session ordinaire de 2020-2021

Deuxième séance du mardi 02 février 2021

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Deuxième séance du mardi 02 février 2021

Présidence de M. David Habib
vice-président

M. le président

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    La séance est ouverte.

    (La séance est ouverte à vingt et une heures.)

    1. Prorogation de l’état d’urgence sanitaire

    Nouvelle lecture (suite)

    M. le président

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    L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi prorogeant l’état d’urgence sanitaire (nos 3818, 3822).

    Discussion des articles (suite)

    M. le président

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    Cet après-midi, l’Assemblée a commencé d’entendre les orateurs inscrits sur l’article 2.

    Article 2 (suite)

    M. le président

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    La parole est à M. Pascal Brindeau.

    M. Pascal Brindeau

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    Je souhaitais en effet m’inscrire sur cet article qui vise notamment à fixer la durée de la prorogation de l’état d’urgence mais aussi des mesures qui en découlent, notamment celles qui sont relatives aux systèmes d’information.
    La commission mixte paritaire – CMP – ayant malheureusement échoué, je voudrais revenir sur l’argumentaire développé par Mme la présidente de la commission des lois lors de l’examen du précédent article. Selon elle, les députés de la majorité ont tout fait pour que la commission mixte paritaire aboutisse, et ce ne serait pas de leur faute si les méchants sénateurs, finalement, n’ont pas suivi leurs préconisations.

    Mme Yaël Braun-Pivet, présidente de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

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    Je n’ai pas dit cela !

    M. Pascal Brindeau

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    Je ferai simplement remarquer que, depuis le début de l’examen des textes relatifs à l’état d’urgence, toutes les commissions mixtes paritaires ont échoué.

    Mme Yaël Braun-Pivet, présidente de la commission des lois

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    Ce n’est pas vrai !

    M. Pascal Brindeau

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    Cependant, de mon point de vue, l’échec d’une commission mixte paritaire n’est pas une raison suffisante pour permettre à la majorité, une fois la négociation avec le Sénat terminée, de – passez-moi l’expression – reprendre ses billes et de revenir ainsi au texte initial en faisant fi des avancées votées par la chambre haute. Celle-ci avait en effet proposé des mesures de bon sens sur lesquelles vous tirez un trait de plume. Je proposerai d’ailleurs, lors de l’examen d’un prochain article, un amendement visant à rétablir une disposition votée par le Sénat et qui prévoit de proroger les délais pour que les collectivités locales ayant la compétence d’autorité organisatrice de la mobilité puissent l’exercer dans de bonnes conditions.
    Concernant cet article qui vise, je le répète, à fixer des bornes, nous redisons que le Parlement doit pouvoir se réunir, à intervalles réguliers, pour débattre à nouveau de ces grandes questions liées à l’état d’urgence.

    M. le président

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    La parole est à M. Arnaud Viala.

    M. Arnaud Viala

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    Cet article représente la pomme de discorde entre, d’un côté, le Gouvernement et, de l’autre, les sénateurs et nous-mêmes puisqu’il porte sur la durée de prorogation de l’état d’urgence sanitaire. Vous avez décidé qu’elle serait de six mois sans que le Parlement soit consulté une nouvelle fois.
    Le point de vue des sénateurs, qui est aussi le nôtre, est que ce délai est infiniment trop long car – la démonstration en a été faite la semaine dernière –, la situation évolue à une très grande vitesse. J’observe d’ailleurs que, pour cette raison, la semaine dernière, le Président de la République et le Premier ministre avaient eux-mêmes envisagé de reconsulter le Parlement puisqu’un débat autour d’un éventuel reconfinement était prévu alors même que nous étions encore sous le régime de l’état d’urgence sanitaire.
    Nous demandons – et c’est pour moi une condition sine qua non à un éventuel vote de ce texte – que ce délai soit fortement réduit pour que le Parlement – et, à travers lui, tous les Français, dont l’humeur est très fluctuante – soit à nouveau consulté. Actuellement, un sentiment de ras-le-bol submerge la France entière. On ne peut imaginer infliger maintenant aux Français l’idée que, pendant six mois encore, auxquels s’ajouteraient six mois supplémentaires, plus personne ne pourra rien dire à propos des décisions prises, et que l’état d’urgence sanitaire permettra à l’exécutif de faire absolument ce qu’il veut en matière de contraintes sur la vie quotidienne, sans en référer au Parlement, c’est-à-dire aux représentants du peuple.

    M. le président

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    Je suis saisi de trois amendements, nos 5, 27 et 40, tendant à supprimer l’article 2.
    La parole est à Mme Martine Wonner, pour soutenir l’amendement no 5.

    Mme Martine Wonner

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    Je me suis exprimée tout à l’heure sur cet article. J’aimerais à présent vous dire pourquoi je souhaite, à travers cet amendement, qu’il soit supprimé.
    Je ne cesse de répéter qu’il existe d’autres solutions dont vous ne voulez pas entendre parler. Je conçois que, selon vous, il faille conserver la même stratégie pour protéger les plus vulnérables, les anciens. Mais il existe d’autres moyens de procéder.
    J’aimerais faire part ce soir des alertes émises par la Société française de pédiatrie qui voit arriver aux urgences pédiatriques psychiatriques des gamins de 9 ou 10 ans qui font des tentatives de suicide. C’est du jamais vu ! Cette population est aujourd’hui stigmatisée. Alors que l’on sait que ces personnes ne sont pas contaminantes, vous continuez à dire qu’elles doivent porter des masques à longueur de journée. Il est urgent de sortir de cette stratégie, et bien avant le 1er juin. Il existe d’autres moyens d’accompagner les quelques patients qui seraient contaminés. Il y a réellement urgence.
    D’autre part, le professeur John Ioannidis de l’université de Stanford a publié une étude très récente qui démontre, en comparant la situation de dix pays qui ont tous adopté des stratégies différentes, que le confinement et le couvre-feu n’ont servi absolument à rien, qu’ils n’ont pas permis d’épargner des vies.

    M. le président

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    La parole est à M. François Ruffin, pour soutenir l’amendement no 27.

    M. François Ruffin

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    « Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle »… Depuis un an, un couvercle pèse sur la France, celui du covid-19, mais un autre couvercle pèse sur la démocratie. Après un an d’état d’urgence sanitaire, il est regrettable que vous n’ouvriez aucun horizon. Vous nous proposez d’en reprendre pour un an. Vous ne posez dans le débat aucun jalon. Vous pourriez nous laisser espérer par exemple que, dans trois mois, la situation aura évolué, que les personnes fragiles seront à l’abri et que dans certains secteurs, comme la restauration ou la culture, on pourra rouvrir les établissements. Or aucun horizon n’est donné, madame la ministre déléguée.
    Allez-vous profiter du débat de ce soir pour nous proposer des perspectives de sortie du confinement, non seulement celui de notre assemblée – puisque nous sommes confinés d’un point de vue démocratique –, mais aussi celui de plusieurs secteurs dans notre pays ?
    J’entends les remarques de Martine Wonner. Je ne détiens pas la solution et personne, ici, ne prétend la détenir. Mais nous ne disposons pas d’un espace de discussion nous permettant d’envisager les solutions proposées par Martine Wonner, d’évaluer les effets de la situation actuelle sur la santé mentale par rapport aux conséquences de l’épidémie sur la santé physique, et plus généralement de partager nos connaissances.
    Madame la ministre déléguée, je vous le demande une nouvelle fois : quels horizons pouvez-vous dessiner ? N’avez-vous rien d’autre à nous proposer que les ténèbres pendant six mois, pendant douze mois, avant une nouvelle prorogation ? (Mmes Danièle Obono et Mathilde Panot applaudissent.)

    M. le président

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    La parole est à M. Pierre Dharréville, pour soutenir l’amendement no 40.

    M. Pierre Dharréville

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    Cet article prévoit de proroger l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 1er juin prochain. Nous réitérons notre opposition à la banalisation du recours au régime dérogatoire au droit commun que constitue l’état d’urgence sanitaire.
    Compte tenu de la nature et de l’intensité des mesures de restrictions susceptibles d’être prises aussi bien que de l’évolution rapide de la situation sanitaire, nous estimons indispensable l’intervention beaucoup plus régulière du législateur, du Parlement, afin de s’assurer de la nécessité et de la proportionnalité des mesures prises et des prérogatives confiées à l’exécutif.
    À cet égard, nous souhaitons limiter plus strictement dans la loi la prorogation de l’état d’urgence. Nous ne pouvons accepter plus longtemps que le Parlement ne soit plus sollicité que de loin en loin, au fil des prorogations successives. Nous ne pouvons plus accepter cette atrophie de la démocratie qui pèse sur nos travaux, sur nos délibérations, sur la qualité des décisions prises et sur l’ensemble de la société, sur sa capacité à affronter les défis qui se posent à elle.
    Nous avons besoin de davantage de délibération et de construction collectives. Il faut en finir avec la méthode qui consiste à nous demander d’écouter les sentences vespérales du Président de la République et du Premier ministre pour prendre connaissance des mesures qui vont nous tomber dessus. Il est nécessaire de restaurer une part de démocratie dans la gestion du pays. (Mme Danièle Obono ainsi que MM. François Ruffin et Philippe Gosselin applaudissent.)

    M. le président

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    La parole est à M. Jean-Pierre Pont, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, pour donner l’avis de la commission sur ces amendements de suppression.

    M. Jean-Pierre Pont, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

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    Nous prenons des mesures en fonction de ce que nous savons mais surtout de ce que nous ignorons encore. On parle actuellement des variants de Grande-Bretagne, d’Afrique du sud, du Brésil ou encore de Californie. Mais d’autres variants apparaîtront. On compterait actuellement un peu plus de cinquante mutations plus ou moins agressives du virus. Mais nous ne connaissons pas la dangerosité des variants à venir, leur contagiosité comme leur réaction au vaccin. Pour toutes ces raisons, il est hors de question de mettre fin à l’état d’urgence le 16 février. On nous reproche de prendre une mesure liberticide mais la décision contraire serait très dangereuse.

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’autonomie, pour donner l’avis du Gouvernement.

    Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l’autonomie

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    J’émettrai un avis défavorable sur ces amendements qui, loin d’exprimer le refus d’une durée en particulier, visent à supprimer purement et simplement la prorogation de l’état d’urgence sanitaire.

    M. le président

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    La parole est à M. Fabien Di Filippo.

    M. Fabien Di Filippo

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    On ne peut accepter totalement les arguments du rapporteur, qui donne une justification d’ordre pseudo-scientifique à la prorogation de l’état d’urgence sanitaire. Or nous ne disons pas que cette mesure ne doit pas être prise en fonction de la dangerosité ou de la contagiosité du virus. La question est de savoir si, oui ou non, nous souhaitons que le Gouvernement vienne plus souvent faire valider devant la représentation nationale les mesures qu’il prend dans le cadre de la pandémie.
    Force est de constater que, jusqu’à présent, de nombreuses mesures ont été fortement remises en question, a fortiori et a posteriori, comme le couvre-feu et bien d’autres décisions prises d’un claquement de doigts. Aujourd’hui, ce n’est pas satisfaisant, pas plus que ne le sont de nombreuses incohérences que nous lèverons tout au long de la soirée et qui deviennent réellement pesantes pour nos concitoyens.
    Nous ne disons pas que le virus circule moins ou qu’il ne poursuivra pas sa progression à un moment ou à un autre. Nous disons que les mesures prises par le Gouvernement ne suscitent pas suffisamment de confiance pour qu’il se dispense, pendant encore six mois ou tout au long de l’année 2021, de venir en rendre compte plus régulièrement et de les faire valider devant la représentation nationale.

    Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée

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    Nous parlons d’amendements de suppression !

    M. le président

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    La parole est à M. François Ruffin.

    M. François Ruffin

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    On nous dit qu’il existe cinquante variants, un Sud-africain, un Anglais, un Brésilien et ainsi de suite. Cela signifie-t-il que nous ne pourrons retrouver une démocratie normale que lorsque nous aurons vaincu, au terme d’une guerre totale, l’ensemble de ces variants ?

    M. Jean-Pierre Pont, rapporteur

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    Je n’en sais rien !

    M. François Ruffin

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    Cela étant, nous ne sommes pas en train de discuter de ces mesures elles-mêmes – confinement, déconfinement, reconfinement ou couvre-feu à dix-huit heures –, mais du fait qu’elles échappent au contrôle du Parlement et des Français, voire du Premier ministre, car le Président de la République en décide tout seul. Vous haussez les épaules, monsieur le rapporteur, ce qui tend à dire que vous acquiescez à ce que je dis. En somme, un variant pourra toujours survenir d’on ne sait où pour nous empêcher de reprendre une vie démocratique normale.
    Et je constate que, pendant ce temps, vous mettez de côté toute l’intelligence collective du pays – pas seulement la nôtre, qui est considérable. Quand consultez-vous les étudiants pour prendre des décisions qui concernent l’université ? Jamais ! Quand consultez-vous la restauration sur les mesures que vous lui appliquez ? Jamais ! Il n’y a pas de lieu de débats, pas d’institution qui permette à des segments entiers de la société française de se faire entendre. Il est pourtant évident que, si l’on avait pu entendre dans un cadre institutionnel les soignants, les étudiants, les commerçants et le monde de la culture, on ne serait pas dans l’impasse actuelle.
    Je vous demandais d’ouvrir des perspectives, madame la ministre déléguée, parce qu’il n’y en a aucune aujourd’hui ! Le couvercle n’est même pas entrouvert alors que vous pourriez, par exemple, dire que l’état d’urgence sanitaire prendra fin et que l’on retrouvera une vie plus ou moins normale quand 1 million de personnes seront totalement vaccinées, c’est-à-dire après avoir reçu les deux doses, ou quand toutes les personnes fragiles le seront, ou encore quand le nombre de personnes en réanimation aura baissé en dessous d’un certain seuil… Mais non, vous n’ouvrez ce soir aucune perspective ! (Applaudissements sur les bancs du groupe FI. – Mme Martine Wonner applaudit également.)

    (Les amendements identiques nos 5, 27 et 40 ne sont pas adoptés.)

    M. le président

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    Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 12, 35, 29, 20, 44 et 9, pouvant être soumis à une discussion commune.
    Les amendements nos 12 et 35 sont identiques, de même que les amendements nos 20 et 44.
    La parole est à M. Philippe Gosselin, pour soutenir l’amendement no 12.

    M. Philippe Gosselin

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    Ce débat est évidemment de même nature que celui qui a trait à la prorogation de l’état d’urgence sanitaire lui-même ; car, si nos concitoyens subissent un confinement partiel en raison du couvre-feu, il faut bien avoir en tête que la démocratie est, elle aussi, pour une part confinée, qu’elle vit au rythme du couvre-feu. C’est assez incroyable de devoir se bagarrer, semaine après semaine, état d’urgence après état d’urgence, pour que les droits du Parlement soient respectés, voire amplifiés dans cette période exorbitante du droit commun – puisque l’état d’urgence est un état d’exception.
    Il est compliqué de nous réunir plus souvent en raison des contraintes de l’ordre du jour, nous dit-on ; mais la démocratie est exigeante, et il est même d’autant plus nécessaire qu’elle le soit en pareille situation. Plutôt que de rester dans une tour d’ivoire d’où il envoie des réponses à nos concitoyens en proie à cette crise sanitaire, le Gouvernement pourrait agir en tendant la main, agir en permettant que se tienne régulièrement un vrai débat sur l’état d’urgence sanitaire. Pour en débattre, nous nous retrouvons à intervalles réguliers dans cet hémicycle, je ne le nie pas, mais toujours sous la contrainte que j’ai évoquée.
    J’ajoute que la parole publique n’est pas toujours si fiable : la semaine dernière, le porte-parole du Gouvernement annonce un confinement « plus plus », et puis, le soir même, le Premier ministre tient un autre discours pour remettre les choses en ordre. De même, on nous annonçait un débat sur le confinement pour aujourd’hui, et nous ne l’avons toujours pas : nous en sommes réduits à attendre que le Gouvernement tire une option de son chapeau pour savoir ce qu’il en est… Le Gouvernement avait déjà prorogé l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 1er avril, afin de prendre des mesures exorbitantes du droit commun. Nous souhaitons nous en tenir à cette date qui constitue une clause de revoyure.

    M. le président

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    La parole est à M. Pascal Brindeau, pour soutenir l’amendement no 35.

    M. Pascal Brindeau

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    J’entends M. le rapporteur nous dire que l’évolution de la situation sanitaire – avec l’apparition des variants anglais, sud-africain ou brésilien – impose une prorogation de cet état d’urgence jusqu’à une date la plus lointaine possible, donc non bornée à celle du 1er avril. Dans le même temps, le Président de la République déclare que l’on pourra peut-être s’en sortir sans reconfinement : ce faisant il essaie de tracer des perspectives, de donner aux Français ce qu’ils attendent, c’est-à-dire l’espoir que la vaccination massive finira, à un moment donné, par leur permettre de retrouver peu à peu une vie plus normale.
    Mais où est la cohérence entre ces deux discours ? Si la situation commence à s’améliorer, l’état d’urgence, régime dérogatoire qui impose au Parlement de se dessaisir de ses prérogatives au profit de l’exécutif pour l’ensemble des décisions prises dans la gestion de cette crise sanitaire – et pas seulement sur les mesures visant à protéger la santé de nos concitoyens, mais aussi sur de nombreux pans de la vie économique, sociale et culturelle –, l’état d’urgence, disais-je, n’a plus de sens et le Parlement doit à nouveau remplir son rôle : celui de légiférer et de contrôler l’action du Gouvernement. Or, madame la ministre déléguée, votre stratégie est de nous interdire de légiférer normalement. Ce n’est pas acceptable.

    M. le président

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    La parole est à M. Paul Molac, pour soutenir l’amendement no 29.

    M. Paul Molac

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    Cet amendement vise à ne pas confier les pleins pouvoirs au Gouvernement jusqu’au 1er juin mais jusqu’au 16 avril. En effet, comme l’ont souligné plusieurs collègues, il y a tout de même des incertitudes sur l’évolution de la situation sanitaire, qu’il s’agisse des variants ou de la vaccination. Le Gouvernement dit qu’il aura fini de faire vacciner les Français fin juin… Espérons-le. J’en doute un peu personnellement, mais, si c’est le cas, cela suppose que plus de la moitié de la population aura été vaccinée le 16 avril, autrement dit que nous en aurons alors fini avec le virus et que chacun pourra reprendre une vie normale. Sur la foi de cette anticipation du Gouvernement, il ne m’apparaît pas nécessaire de lui donner les pleins pouvoirs jusqu’au 1er juin. C’est pourquoi je propose la date du 16 avril. (M. François Ruffin et Mme Martine Wonner applaudissent.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement no 20.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Je comprends votre lassitude, madame la ministre déléguée, monsieur le rapporteur, chers collègues de la majorité. Il est certes très agaçant d’avoir des députés de l’opposition qui demandent de la démocratie… On est dans un régime d’exception qui n’en finit plus et qui, il faut bien le dire, n’a plus d’exception que le nom puisque, depuis mars 2020, les libertés fondamentales sont suspendues à coup d’annonces télévisées et de petites déclarations.
    En l’état actuel du droit, ce régime d’exception devrait prendre le 16 février. Cela ne veut évidemment pas dire que, dans quinze jours, la crise sanitaire sera considérée comme de l’histoire ancienne, mais simplement qu’il serait mis fin à cette gouvernance confinée qui prend des décisions en vase clos, sans le Parlement – celui-ci étant de surcroît réduit, plus que jamais, à n’être qu’une chambre d’enregistrement. Cette situation ne peut et ne doit plus durer, parce que concentrer les pouvoirs entre les seules mains du Gouvernement, c’est confiner la démocratie.
    À quelques heures de la reprise de nos débats sur un texte de loi censé promouvoir les valeurs de la République, avouez que cela fait désordre, d’autant plus que le Parlement n’a eu de cesse de démontrer sa capacité de travailler jour et nuit pour faire face à la crise, y compris pendant les différents confinements. La question de sa réactivité aux prises de décision n’est donc pas le sujet, c’est même un faux débat qui vise à légitimer une véritable privation des pouvoirs du Parlement, pouvoirs qui, faut-il le rappeler, sont ceux du peuple français ! De plus, préférer, comme je le propose, la date du 3 mai, plus raisonnable que celle du 1er juin, c’est revenir à la date votée par le Sénat, et c’est aussi avoir à l’esprit que la crise sanitaire ne doit pas servir de prétexte à l’affaiblissement de nos institutions, a fortiori quand il s’agit de prendre des mesures privatives de nos libertés fondamentales.

    M. le président

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    La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l’amendement no 44.

    Mme Marietta Karamanli

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    En première lecture déjà, notre groupe avait proposé la date du 3 mai comme fin de la prorogation. Au-delà de la stratégie vaccinale, qui soulève un certain nombre de questions sur l’ensemble du territoire, il nous semble essentiel que le Parlement soit régulièrement réuni pour prendre position sur l’évolution du droit en la matière. La date du 3 mai, d’ailleurs retenue par le Sénat, est la bonne échéance à cet égard.

    M. le président

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    La parole est à M. Sacha Houlié, pour soutenir l’amendement no 9.

    M. Sacha Houlié

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    Sur un tel sujet, il est moins question de dates que de principes. Dans cet amendement, mon collègue Gosselin et moi proposons de fixer l’échéance au 16 mai : non qu’elle constitue un jalon, mais parce qu’elle est située trois mois après le 17 février, date à laquelle serait reconduit l’état d’urgence sanitaire. Celui-ci a été décrété le 16 octobre et prorogé par la loi pour trois mois à compter du 16 novembre et, dans la mission d’information sur le régime juridique de l’état d’urgence sanitaire que nous avons conduite, mon collègue et moi avons considéré par principe que le Parlement doit pouvoir se prononcer tous les trois mois sur l’état d’urgence sanitaire. C’est donc à la fois par cohérence et par principe que nous proposons l’échéance du 16 mai, date à laquelle notre assemblée devra avoir adopté un nouveau texte si elle souhaite reconduire l’état d’urgence sanitaire.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?

    M. Jean-Pierre Pont, rapporteur

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    Je rappelle qu’en supprimant en première lecture l’article 3, relatif au régime transitoire de sortie de l’état d’urgence sanitaire, nous avons fixé l’échéance au 1er juin. Nous allons donc nous retrouver début mai, soit dans deux mois et demi, pour prendre de nouvelles décisions s’il y a lieu. Je pense que ce délai est suffisant, notamment pour bien connaître les effets des vaccinations. Le Parlement pourra alors délibérer en toute connaissance de cause. Et puis, je le répète, état d’urgence sanitaire ne veut pas forcément dire confinement : il me semble que certains mélangent les deux notions.

    M. François Ruffin

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    Non, non !

    M. Jean-Pierre Pont, rapporteur

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    Je suis certain que, si la situation s’améliorait bien au-delà de ce que laisse espérer la situation actuelle, le Gouvernement serait très heureux de renoncer à un éventuel confinement. Avis défavorable sur tous ces amendements, donc.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée

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    Vos amendements, mesdames, messieurs les députés, tendent à fixer l’échéance soit au 1er avril, soit au 16 avril, soit au 3 mai, soit au 16 mai, quand le texte la fixe au 1er juin. Je tiens tout de même à rappeler que la mise en œuvre de mesures de police sanitaire visant à maîtriser l’épidémie sera nécessaire pendant plusieurs mois encore, vous le savez bien. J’aimerais vous indiquer la sortie du tunnel, monsieur Ruffin, mais je ne suis pas plus scientifique que vous. Qui, ici, n’attend pas la sortie du tunnel ? Nous l’espérons tous, y compris, bien sûr, le Gouvernement. Nous avons bien dit que si la situation sanitaire s’améliorait avant le 1er juin, si les mesures prévues ici ne se justifiaient plus, nous reviendrions évidemment sur leur application et y mettrions un terme, de façon anticipée. Personne n’a intérêt à leur prolongation.

    M. Fabien Di Filippo

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    Hors sujet ! La question, c’est la validation des décisions du Gouvernement !

    Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée

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    Par conséquent, je peux tout entendre, mais pas rester sans réagir quand j’entends certains propos : non, la démocratie n’est pas mise sous cloche. Elle est en train de s’exprimer en ce moment même dans votre hémicycle. Et le Gouvernement rend compte en permanence de ses actes.

    Mme Mathilde Panot

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    Oh là là !

    Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée

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    Je conclurai en rappelant que la démocratie continue également à s’exprimer dans les territoires, car elle y existe aussi.

    M. Maxime Minot

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    Et le report des législatives partielles ?

    M. Philippe Gosselin

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    Et celui des régionales et des départementales au mois de juin ?

    Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée

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    Pendant que nous débattons, vous savez bien que se tiennent des conseils municipaux, des conseils départementaux, des conseils régionaux ! Il y a de la démocratie locale ! Arrêtez donc de penser que la vie s’arrête ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

    M. le président

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    La parole est à M. Pierre Dharréville.

    M. Pierre Dharréville

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    Convenez, madame la ministre déléguée, que nos institutions ne fonctionnent pas en ce moment comme elles le devraient – par-delà les défauts inhérents au fonctionnement des institutions de la Ve République même en temps ordinaire, mais c’est un débat que je n’ouvrirai pas aujourd’hui.
    J’illustrerai mon propos en rappelant les épisodes de la semaine dernière. On nous a annoncé que différentes hypothèses étaient sur la table, sans nous en saisir et même sans nous en dire plus, et que le Parlement sera appelé à voter sur une déclaration à l’issue du conseil de défense… Et que s’est-il passé ? Non seulement les députés n’ont pas eu connaissance des différentes hypothèses en discussion, mais il y a eu visiblement un recul par rapport à ce qui avait été envisagé, et nous n’avons finalement pas été réunis pour débattre de ces questions. Au passage, je rappelle que cette déclaration du Gouvernement devait faire l’objet d’un vote bloqué, c’est-à-dire d’un vote formel qui ne nous donnait d’autre pouvoir que de nous exprimer à la tribune, sans décider du contenu des mesures elles-mêmes. Vous voyez bien que cet état des choses n’est pas satisfaisant au regard du fonctionnement de nos institutions.
    L’autre épisode de la semaine dernière, c’est la décision de mettre fin à la mission d’information sur la gestion de la crise sanitaire, instance pourtant créée au tout début de la crise sanitaire pour en suivre la gestion par le Gouvernement. Je le regrette et je dis au Gouvernement : consultez-nous pour de vrai. Et à vous, chers collègues, je dis que c’est à nous de nous imposer dans le débat !

    M. le président

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    La parole est à M. Paul Molac.

    M. Paul Molac

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    Je vais retirer mon amendement au profit de celui de M. Houlié : issu de la mission d’information qu’il a menée, il me semble pouvoir rassembler davantage que le mien. C’est un moyen terme qui me semble intéressant.
    Je voulais dire à Mme la ministre, avec tout le respect que j’ai pour elle, que bien souvent les collectivités ne font qu’attendre les décisions du préfet.

    Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée

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    C’est faux, et vous le savez très bien !

    M. Paul Molac

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    Cela se passe ainsi dans les départements, je vous assure. Les consultations sont vraiment faibles : le préfet explique ce qu’il a décidé et comment les mesures vont devoir être mises en place. C’est une conception de la démocratie que je trouve un peu curieuse. (Mme Martine Wonner applaudit.)

    (L’amendement no 29 est retiré.)

    (Les amendements identiques nos 12 et 35 ne sont pas adoptés.)

    (Les amendements identiques nos 20 et 44 ne sont pas adoptés.)

    (L’amendement no 9 n’est pas adopté.)
    (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

    M. Sébastien Jumel

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    Ça se compte !

    M. Sylvain Maillard

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    On ne conteste pas la présidence !

    M. le président

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    Je suis saisi de cinq amendements, nos 13, 22, 24, 31 et 21, pouvant être soumis à une discussion commune.
    Les amendements nos 22 et 24 sont identiques.
    Sur l’amendement no 13 ainsi que sur les amendements identiques nos 22 et 24, je suis saisi par le groupe Les Républicains de demandes de scrutin public.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Philippe Gosselin, pour soutenir l’amendement no 13.

    M. Philippe Gosselin

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    Il s’agit de réintroduire une disposition votée judicieusement par le Sénat et qui a été, moins judicieusement, supprimée en commission à l’Assemblée par la majorité. En cas de confinement supérieur à un mois – ce qui n’est pas rien : on parle d’une privation de liberté plus de douze heures par jour pendant un mois –, il s’agit de ne permettre sa prorogation que par la loi. Cela supposerait donc un vote de l’Assemblée nationale et du Sénat, ce qui permettrait un large débat. Des privations de liberté aussi importantes pendant un mois, et à plus forte raison si elles sont prorogées, doivent relever du contrôle de la représentation nationale. C’est du bon sens et je pense que tous les démocrates – et je ne doute pas que vous le soyez – devraient pouvoir se retrouver sur une telle proposition.
    Cet amendement donne également aux préfets la possibilité de déroger à certaines règles de fermeture. Il ne s’agit pas de décider à la tête du client, c’est évident, mais simplement de reconnaître la diversité des territoires et que si l’épidémie peut flamber dans telle ou telle partie du territoire métropolitain ou des outre-mer, il peut en être autrement dans d’autres départements ou d’autres régions. Plutôt que d’avoir, par exemple, un couvre-feu ou un confinement uniforme dans l’ensemble du pays, des distinctions territoriales pourraient être faites. Depuis plusieurs mois, les territoires, les élus locaux ont du mal à se faire entendre. On parle du duo maire-préfet mais ce duo se limite régulièrement à une consultation du maire, point barre : c’est l’État qui décide. L’amendement propose autre chose.

    M. Jean-Marie Sermier

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    Bravo !

    M. le président

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    La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement no 22.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    En sept mois, la France a connu deux confinements de 45 jours chacun, un couvre-feu qui dure depuis 107 jours, et l’instauration de mesures sanitaires sans précédent. Si ces mesures visent à protéger les Français de la covid-19, les dommages collatéraux ne peuvent pas tous être énumérés tant ils sont nombreux : un retard estimé à six mois d’apprentissage pour les élèves ; 66 % des jeunes de 11 à 17 ans qui présentent un risque sanitaire préoccupant avec plus de deux heures d’écran par jour et moins de soixante minutes d’activité physique ; 40 % des 18-24 ans qui montrent des signes de trouble anxieux généralisé ; plus grave encore, trois jeunes sur dix ont eu des pensées suicidaires et la moitié des salariés français sont en détresse psychologique.
    Bref, tous ces signaux montrent à quel point la France est à bout, mais cela montre aussi à quel point il est temps de changer votre façon de gouverner. Jusqu’à présent, on a eu l’impression que la France était gouvernée par un conseil scientifique et des médecins spécialistes de ceci ou de cela. Il est temps de passer à un autre mode de gouvernement car il n’y a pas que la covid-19, il y a aussi la détresse psychologique des Français et les difficultés économiques.
    Ces signaux ne peuvent pas tous être appréciés par des médecins, c’est aux politiques de trancher. Le Parlement ne peut plus être évincé sous prétexte que seul le Gouvernement pourrait gérer la crise. Ma demande est donc simple : s’il doit y avoir un prochain confinement de plus d’un mois, c’est le Parlement qui doit l’autoriser, sans se contenter d’organiser un simple vote consultatif qui revient à se moquer de la démocratie. (M. Philippe Gosselin applaudit.)

    M. le président

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    La parole est à M. Guillaume Larrivé, pour soutenir l’amendement no 24.

    M. Guillaume Larrivé

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    Pour ma part, je suis favorable au principe de l’état d’urgence sanitaire, de même qu’à sa prorogation, même si nous pouvons débattre de la durée. Je suis favorable aussi, naturellement, à ce que dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, nous donnions au pouvoir exécutif la faculté de décider d’un confinement de la population,…

    M. Philippe Gosselin

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    Mais…

    M. Guillaume Larrivé

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    …mais à condition que le Parlement puisse décider par un vote, qui ne serait pas seulement consultatif, de la poursuite ou non du confinement : loin d’affaiblir notre riposte face à l’épidémie, cela la renforcerait.
    On a besoin de construire de l’adhésion, de démontrer, aux yeux de l’opinion publique, que ces mesures ne sont pas prises par un homme seul ou par le seul pouvoir exécutif, mais qu’elles sont bien l’expression d’une délibération et d’une décision nationale : tel est l’objet de l’amendement.
    Il ne s’agit pas de dire, de manière paranoïaque, que l’exécutif voudrait mal faire, qu’il aurait tous les pouvoirs, sans aucun contrôle. Ce que nous prônons, c’est un équilibre des pouvoirs : nous sommes dans un régime parlementaire, avec un pouvoir exécutif fort, mais qui agit sous le contrôle de l’Assemblée nationale. La mesure de confinement de la population est une mesure exceptionnelle, et je ne doute pas que le Président de la République, lorsqu’il la décide, le fait avec gravité et en ayant réfléchi. Ce que je demande, c’est que nous ayons la possibilité, au bout d’un mois, de décider si nous prolongeons le confinement ou si, au contraire, nous décidons de ne pas le prolonger. Soyons démocrates, nous en serons plus forts.

    M. Philippe Gosselin

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    Osez, osez !

    M. Maxime Minot

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    « Osez Joséphine »…

    M. le président

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    La parole est à M. Paul Molac, pour soutenir l’amendement no 31.

    M. Paul Molac

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    Donnons un peu de souplesse à la loi générale en permettant au préfet, en accord avec les maires, de déroger au couvre-feu dans un certain nombre de cas et à l’ouverture de commerces dans d’autres, à partir du moment où par exemple les taux d’incidence sont très bas. Je pense à la communauté de communes du Kreiz-Breizh où on trouve des taux d’incidence de 20 : faire comprendre aux habitants qu’à partir de dix-huit heures tout le monde doit être à la maison, c’est tout de même un peu compliqué. Je pense aussi à ce qui a relativement bien fonctionné pour les marchés : ce sont les préfets, en fonction d’un protocole qui leur a été donné par les maires, qui ont pu rouvrir les marchés pendant le confinement. Cela a été une réussite dans mon département. Je propose donc, dans cet esprit, d’apporter un peu de souplesse dans la loi.

    M. le président

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    Sur l’article 2, je suis saisi par le groupe Les Républicains d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement no 21.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Je voudrais revenir sur la situation absolument catastrophique dans laquelle se sont trouvés les commerces de proximité non essentiels, comme le Gouvernement les a appelés, lors du second confinement. Les commerçants ont été extrêmement nombreux à manifester leur indignation, pour ne pas dire leur colère, s’estimant sacrifiés alors que les grandes surfaces pouvaient rester ouvertes.
    Les mêmes commerces de proximité sont désormais pénalisés avec le couvre-feu à dix-huit heures étendu à tout le territoire, alors que le virus ne circule pas de façon homogène dans l’ensemble du pays. Ils ne sont d’ailleurs pas les seuls à être étranglés par les fermetures administratives. Quelques chiffres permettent de poser clairement les choses : après dix-huit heures, c’est 26 % du chiffre d’affaires qui est réalisé en temps normal ; or, avec le couvre-feu, les clients potentiels désertent les commerces par peur d’être sanctionnés. Les commerçants réalisent, d’après ce qu’ils nous disent, 42 % de leur chiffre d’affaires après dix-sept heures. Enfin, si de nouvelles restrictions devaient être prises dans les prochains jours, comme un confinement le samedi, 60 % du chiffre d’affaires serait perdu. Bref, les commerçants ont la boule au ventre à chaque annonce du Gouvernement.

    M. Pierre Cordier

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    C’est vrai !

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Parce que la capacité de résilience des commerçants est mise à rude épreuve, il est urgent de donner plus de marge de manœuvre aux territoires, par l’intermédiaire des préfets et avec les maires, parce que le couple maire-préfet, comme cela vient d’être dit, c’est vraiment de la poudre aux yeux…

    M. Pierre Cordier

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    Très bien, madame Ménard !

    Mme Emmanuelle Ménard

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    …ou de la poudre de perlimpinpin, pour reprendre une expression qui est chère au Président de la République. Le couple maire-préfet, c’est le préfet qui décide et le maire qui exécute : c’est bien ainsi que les choses sont perçues sur le terrain.

    M. Maxime Minot

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    C’est vrai !

    M. Rémy Rebeyrotte

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    À Béziers, pourtant, le maire a du caractère !

    Mme Emmanuelle Ménard

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    C’est l’objet de cet amendement, qui permettrait au préfet, malgré une décision de fermeture provisoire appliquée sur l’ensemble du pays, d’autoriser l’ouverture des commerces de proximité, lorsque la mise en œuvre des mesures de nature à prévenir les risques de propagation du virus est garantie.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?

    M. Jean-Pierre Pont, rapporteur

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    Pour prendre une sage décision, il faut en connaître tous les tenants et les aboutissants. Lorsque vous dites qu’on prendrait la décision de proroger le confinement au bout d’un mois, c’est faux : suivant les arcanes parlementaires, la procédure commencerait au bout de quinze jours. Par exemple, si nous étions confinés durant le mois de février, c’est dans quinze jours que nous devrions prendre une décision de prorogation, c’est-à-dire sans connaître véritablement tout ce qu’il peut se passer. Quand on ne sait pas, on ne peut pas prendre de décision au bout de quinze jours, c’est beaucoup trop court.
    Par ailleurs, en commission mixte paritaire, nous avons mis sur la table, en concertation avec le Gouvernement, une proposition inédite et ambitieuse : un débat suivi d’un vote après six semaines.

    M. Pierre Cordier

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    Avant, M. Pont était à l’UMP !

    M. Jean-Pierre Pont, rapporteur

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    Je regrette qu’elle n’ait pas emporté la conviction des sénateurs. Enfin, nous avons déjà eu le débat sur les commerces de détail à de nombreuses reprises. Mon avis reste défavorable compte tenu de la situation sanitaire et du fait que le Gouvernement continue d’aborder cette question avec le discernement qu’elle mérite : la procédure proposée à travers ces différents amendements ne me semble ni nécessaire, ni opportune.

    M. Philippe Gosselin

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    Puisque le Parlement ne sait pas, il n’a pas de pouvoir, donc il n’y a pas de contrôle !

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée

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    Défavorable également.

    M. le président

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    La parole est à M. Sébastien Chenu.

    M. Sébastien Chenu

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    Vous pardonnerez mon esprit taquin, mais j’entendais la ministre Bourguignon nous dire que la démocratie vit dans le pays. Permettez-moi, madame la ministre déléguée, de vous dire que vous êtes vraiment prise le doigt dans le pot de confiture : vous avez été nommée ministre en juillet dernier, votre suppléant refuse de siéger à l’Assemblée,…

    Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée

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    Rien à voir !

    M. Sébastien Chenu

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    …une élection partielle doit être organisée depuis des mois (Exclamations sur les bancs du groupe LR),

    M. Pierre Cordier

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    Je n’aurais jamais cru ça !

    M. Fabien Di Filippo

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    Je suis estomaqué !

    M. Sébastien Chenu

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    …elle est reportée de mois en mois au prétexte de la crise sanitaire…

    M. Thibault Bazin

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    La dictature en marche !

    M. Sébastien Chenu

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    …et vous venez nous dire que la démocratie vit dans le pays, alors que vous êtes la première à avoir tout fait, en empêchant ou en soutenant la décision de votre suppléant de refuser de siéger, pour limiter la vie démocratique. La réalité, madame, c’est que le Gouvernement cherche, partout où il le peut, à verrouiller le pays.

    M. Jean-Pierre Pont, rapporteur

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    J’ai parlé de mutation, mais pas à ce point-là !

    M. le président

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    La parole est à M. François Ruffin.

    M. François Ruffin

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    Madame la ministre déléguée, vous me répondiez tout à l’heure que je n’étais pas scientifique et que vous ne l’étiez pas non plus. Mais le Président de la République n’est pas scientifique lui non plus, et c’est pourtant lui qui arbitre en permanence, parce que les décisions qui sont à prendre – la fin de l’état d’urgence, le couvre-feu, le confinement, ce qu’on fait des commerces – ne sont pas scientifiques : ce sont des décisions politiques…

    M. Thibault Bazin

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    Politiciennes !

    M. Philippe Gosselin

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    Voire technos !

    M. François Ruffin

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    …qui nécessitent un arbitrage entre la vie biologique et la vie sociale, entre la santé mentale et la santé physique.

    M. Philippe Gosselin

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    Mais oui, évidemment, ça s’appelle concilier !

    M. François Ruffin

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    Je ne vois pas pourquoi ces décisions-là devraient être mises entre les mains d’un seul homme et ne pourraient pas être discutées collectivement dans cette assemblée et ailleurs.
    Pendant des décennies, le politique s’est caché derrière les experts économiques et, aujourd’hui, il vient se cacher derrière les experts scientifiques. (M. le rapporteur fait des signes de dénégation de la tête.) Mais, dans tous les cas, ce sont des décisions politiques qui doivent être prises : j’aimerais qu’on me dise quels critères vont être utilisés pour lever le couvre-feu, pour déconfiner, pour sortir de l’état d’urgence afin que le confinement ne soit pas banalisé, même si le rapporteur semblait en parler tout à l’heure comme d’un robinet qu’on ouvrirait ou qu’on fermerait.

    M. Jean-Pierre Pont, rapporteur

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    Oui !

    M. François Ruffin

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    Je ne vois pas ce que vous perdriez à ouvrir le débat dans cette assemblée, à l’ouvrir régulièrement, à poser les questions au sujet de ce que l’on fait des commerces ou de la culture. Je le vois d’autant moins que le Gouvernement dispose ici d’une véritable chambre d’enregistrement. Cela aurait au moins le mérite d’apporter un peu de transparence pour les citoyens : ils verraient ainsi les différentes options qui s’ouvrent devant eux et vers quel chemin on choisit d’aller ensemble. (Mmes Danièle Obono et Mathilde Panot applaudissent.)

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée.

    Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée

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    Monsieur le député Chenu, vous m’avez mise en cause personnellement – bien sûr, il n’écoute pas quand on lui répond…

    M. Sébastien Chenu

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    C’était une mise en cause personnelle, c’est vrai !

    Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée

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    Je tiens à vous dire que le combat militant de ma vie, c’est de lutter contre des gens comme vous. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)

    M. Jean-Marie Sermier

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    On ne combat pas des gens mais des idées !

    Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée

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    C’est votre famille politique que j’ai toujours combattue. Alors croyez-moi, jamais je n’ai eu peur d’un scrutin et je n’attends qu’une chose, c’est d’aller au combat. J’aurais pu « très courageusement », lorsque mon suppléant n’a pas voulu siéger – et ce n’était pas de mon fait, croyez-moi –, ne pas me représenter. Or ce n’est pas ce que je fais : j’y vais et je n’ai pas peur d’y aller. Je n’attends qu’une chose : le feu vert pour en découdre avec vous. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Agir ens. – M. Paul Molac applaudit également.)

    M. Pierre Cordier

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    Il faut donner la parole à M. Chenu, c’est une attaque personnelle !

    M. le président

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    Je mets aux voix l’amendement no 13.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        205
            Nombre de suffrages exprimés                203
            Majorité absolue                        102
                    Pour l’adoption                72
                    Contre                131

    (L’amendement no 13 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 22 et 24.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        180
            Nombre de suffrages exprimés                178
            Majorité absolue                        90
                    Pour l’adoption                50
                    Contre                128

    (Les amendements identiques nos 22 et 24 ne sont pas adoptés.)

    (Les amendements nos 31 et 21, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    M. le président

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    Je mets aux voix l’article 2.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        200
            Nombre de suffrages exprimés                194
            Majorité absolue                        98
                    Pour l’adoption                125
                    Contre                69

    (L’article 2 est adopté.)

    Mme Yaël Braun-Pivet, présidente de la commission des lois

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    Très bien !

    Article 4

    M. le président

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    La parole est à M. François Ruffin.

    M. François Ruffin

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    Quand on demande au Gouvernement de mettre de la démocratie dans cette crise, de ne pas laisser l’Assemblée de côté, on nous réplique que nous sommes en guerre, qu’il y a une cinquantaine de variants du covid-19, brésilien, sud-africain ou anglais. « Nous avons tout cela à affronter », dites-vous, « et donc nous n’avons pas le temps, pas le temps de discuter, ici, du couvre-feu, pas le temps de discuter du confinement : nous avons une guerre à mener. »
    Mais, quand on se rappelle ce qui s’est passé pendant la Première Guerre mondiale, la Grosse Bertha dans la Somme, c’était autre chose que le covid-19 !

    Mme Émilie Chalas

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    Arrêtez de gueuler !

    M. François Ruffin

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    Que s’est-il alors passé ? Au cours des premiers mois du conflit, parce qu’ils pariaient sur une guerre courte, les parlementaires ont accepté la dictature de l’état-major – or c’est cette dictature de l’état-major que nous subissons aujourd’hui. Mais, dès janvier 1915, les parlementaires reviennent aux affaires et ils refusent cette dictature et, nous expliquent les historiens, ils jouent alors incontestablement un rôle de premier plan dans la victoire. Ils y ont contribué par le contrôle exercé sur les services administratifs, notamment sur l’administration militaire, par leur œuvre législative, par la chasse aux embusqués, par le maintien d’un débat public qui a permis l’évolution des orientations politiques – ainsi ont-ils défini des buts de guerre modérés.
    Eh bien, de la même manière, aujourd’hui, nous devrions avoir pour mission de nous demander quels sont nos buts de guerre : à partir de quel moment lever le couvre-feu, lever le confinement ? Il devrait y avoir une discussion sur les différentes options, les différentes orientations qui se présentent à nous. Or le fait de nous répéter que nous sommes en guerre et qu’il y a cinquante-deux variants ne devrait pas être un motif suffisant pour mettre la démocratie de côté. Clemenceau et compagnie ne l’ont pas mise de côté, à ce moment-là… (Mmes Danièle Obono et Mathilde Panot applaudissent.)

    M. le président

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    La parole est à M. Philippe Gosselin.

    M. Philippe Gosselin

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    Avant d’aborder l’article 4, je reviendrai sur l’incohérence de la démonstration du rapporteur. À chacune de nos demandes de contrôle parlementaire, par le biais de la création d’une commission d’enquête ou autre, on nous répond systématiquement : « Nous ne savons pas ce que l’on sait, ce que l’on ne sait pas ; il y a cinquante variants ; demain il y en aura peut-être soixante, etc. » Mais dites-vous, monsieur le rapporteur, que, dans un an, nous y serons peut-être encore, et peut-être même dans deux, dans trois ans. Personne ne le souhaite mais on ne le sait pas. Allez-vous donc tous les mois ou tous les quinze jours, en tout cas régulièrement, nous dire : « On ne peut pas respecter les droits du Parlement parce qu’on ne sait pas » ?
    C’est une question d’organisation ! Personne ne conteste au Gouvernement la possibilité d’agir. Bien évidemment que le Gouvernement doit agir. J’ai voté, comme nombre de nos collègues, l’état d’urgence parce qu’il fallait d’emblée prendre des mesures fortes. Mais on ne peut pas rester impunément et indéfiniment dans un long tunnel ! Devrions-nous tous les matins nous entendre dire : « Ah ! On ne connaît pas l’état sanitaire, vous êtes donc priés, mesdames et messieurs les parlementaires, de rester sagement dans votre coin » ? Non ! Le Parlement veut être associé et consulté régulièrement. Pourquoi attendre d’être contraints et forcés pour que ce débat démocratique, faisant peut-être apparaître des divergences, ait lieu ? Pourquoi les députés de la majorité craignent-ils à ce point le jugement de leurs collègues, l’approche démocratique, la main tendue ?
    C’était une façon de gouverner qui n’était déjà pas acceptable il y a quelques années et qui l’est encore moins aujourd’hui. Il faut sans cesse rappeler, marteler, alors que la société est très inquiète, que la sécurité sanitaire doit être conciliée avec les libertés individuelles et publiques. C’est cette conciliation qui est attendue. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – M. François Ruffin applaudit également.)

    M. le président

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    La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.

    M. Jean-Christophe Lagarde

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    Je regrette, à l’occasion de l’examen de l’article 2, que nous ayons rejeté la possibilité de consulter régulièrement le Parlement. En fin de compte, ce qui nous dérange, dans cette nouvelle prolongation, nécessaire évidemment, c’est que nous avons bricolé un dispositif juridique, en mars dernier, dans des conditions où la plupart d’entre nous, chers collègues, ne pouvions pas siéger. Nous étions, je crois, une vingtaine de députés, puis une vingtaine de sénateurs, à essayer de trouver un mécanisme dont l’équilibre, la légalité n’était pas notre priorité ; notre priorité, c’était de donner au Gouvernement le moyen d’agir.
    Nous voilà dix mois plus tard…

    M. Fabrice Brun et M. Philippe Gosselin

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    Presque un an !

    M. Jean-Christophe Lagarde

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    …à prolonger une situation exceptionnelle. Je ne parle pas de la situation sanitaire mais de l’encadrement légal de ce que nous pouvons faire – il s’agit par exemple, avec cet article, de prolonger la possibilité de collecter des données à caractère personnel. Nous ne comprenons pas comment il est possible, au bout de presque un an, qu’un dispositif stable, équilibré, qui ne soit plus d’exception et qui donc doit relever du droit commun, un dispositif qui permette un meilleur contrôle parlementaire, n’ait pas encore été présenté par le Gouvernement.
    Évidemment, si de nouveaux variants du covid-19 apparaissent au cours de l’année, l’utilisation du fichier qu’on veut prolonger jusqu’au 31 décembre 2021, le sera dès lors jusqu’au 31 décembre 2022. Mais il va bien falloir qu’à un moment donné le Gouvernement et la majorité acceptent de respecter le contrat passé en mars dernier selon lequel nous donnions au Gouvernement les pouvoirs nécessaires à son action tout en instaurant un état d’urgence sanitaire équilibré, stable, respectant le droit de la République.
    C’est cette gêne que, d’une façon générale, nous éprouvons vis-à-vis du projet de loi en général et de cet article en particulier. Il n’y a pas lieu de vous refuser les moyens de combattre l’épidémie, il y a lieu de vous demander un État de droit normal pour la combattre dans des conditions normales et équilibrées. Il y a lieu, enfin, d’obtenir que le Parlement ait son mot à dire.

    M. le président

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    Je suis saisi de deux amendements, nos 6 et 41, visant à supprimer l’article 4.
    La parole est à Mme Martine Wonner, pour soutenir l’amendement no 6.

    Mme Martine Wonner

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    L’article 4 vise à prolonger l’utilisation de fichiers de données personnelles. Je reviens sur le propos de Mme la ministre déléguée, selon lequel elle n’est pas une scientifique. Il est vrai que bon nombre d’entre nous ne le sommes pas, ce qui ne doit pas empêcher la tenue d’un véritable débat. Surtout, cela n’empêche pas qu’il y ait un lieu où nous pourrions écouter les scientifiques et échanger à partir des données qu’ils nous fourniraient et qui, aujourd’hui, sont disponibles, ce qui n’était pas le cas il y a un an. Et nombreux sont les scientifiques qui nous expliquent que d’autres possibilités que celles que vous envisagez existent, d’autres solutions qui nous permettraient de sortir enfin la France de ce marasme.
    La volonté de proroger l’utilisation des fichiers dont il est ici question laisse penser que nous nous acheminons tout doucement vers l’établissement d’un passeport sanitaire que les Français ne souhaitent pas. Je suis encore très étonnée que, pour l’instant, la majorité ne se soit pas offusquée que certains magasins, certaines sociétés proposent déjà des réductions, des soldes aux seuls clients vaccinés, ce qui est scandaleux. Quand donc allez-vous réagir ?

    M. le président

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    La parole est à M. Hubert Wulfranc, pour soutenir l’amendement no 41.

    M. Hubert Wulfranc

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    Il est ici question de l’application TousAntiCovid, et du respect de la vie privée et de la protection des données. D’après les éléments dont nous disposons, 12 millions de Français ont téléchargé cette application, c’est-à-dire un chiffre encore bien éloigné du seuil d’efficacité estimé initialement de 20 millions d’utilisateurs. Nous déplorons une lacune majeure : l’absence totale d’évaluation d’un dispositif qui continue de fonctionner en totale opacité par rapport aux résultats attendus. Nous n’avons en effet obtenu aucun élément d’information sur les résultats du dépistage et de la lutte contre le covid-19. Eh bien, nous considérons, en cohérence avec nos propos liminaires sur la prorogation de l’état d’urgence jusqu’au 31 décembre, que ce dispositif doit être abrogé au 1er avril prochain. C’est pourquoi nous demandons la suppression de l’article. (M. Pierre Dharréville, Mme Danièle Obono et Mme Mathilde Panot applaudissent.)

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission sur ces amendements de suppression ?

    M. Jean-Pierre Pont, rapporteur

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    Ces systèmes d’information sont indispensables pour la lutte contre l’épidémie. S’en priver à compter du 1er avril prochain serait catastrophique sur le plan sanitaire. Avis défavorable.

    Mme Mathilde Panot

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    Donnez-nous des éléments, monsieur le rapporteur !

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée

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    Défavorable.

    M. le président

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    La parole est à M. Philippe Latombe.

    M. Philippe Latombe

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    Vous connaissez mon attachement à la protection des données. En revanche, nous avons besoin de fichiers pour suivre l’évolution de la maladie, pour suivre les personnes infectées. Et les deux fichiers ici en question sont donc absolument nécessaires.
    Je me réjouis de la discussion que nous avons eue avec le Gouvernement avant le dépôt du texte pour éviter que l’article 4 ne permette d’élargir, par un simple décret pris en Conseil d’État, la liste des fichiers concernés par cette prorogation. C’est bien nous qui fixons cette liste et, en l’occurrence, nous limitons cette extension de la durée d’utilisation à deux fichiers, ce qui est le strict nécessaire.
    Je ne suis pas d’accord avec notre collègue Wonner qui, si je résume l’exposé sommaire de son amendement, estime que cette prorogation est une façon de « fliquer » la population. C’est au contraire le moyen de s’assurer que l’ensemble des personnes dépistées sont bien suivies et ont bien fait l’objet d’un traçage permettant d’éviter les contaminations futures.
    Je ne tiens qu’à une chose, madame la ministre déléguée : c’est que, dès lors que les deux fichiers, constitués de façon rapide, seront prolongés dans le temps, vous preniez l’engagement qu’ils soient robustes et qu’il ne soit pas possible d’y accéder par une petite porte. Pourriez-vous donc vous engager à les faire expertiser par l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information – ANSSI – et à tirer les conséquences de ce qu’elle dira, pour les mettre à jour et les rendre le plus inviolable possible ?

    M. le président

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    La parole est à Mme Martine Wonner.

    Mme Martine Wonner

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    Je suis étonnée de la réponse de M. le rapporteur. Il nous dit très clairement que ces fichiers sont utiles pour soigner la covid. J’ai fait médecine au siècle dernier, et, au siècle dernier, pour lutter contre une épidémie, on demandait simplement aux patients d’aller voir leurs médecins et aux médecins de les traiter après une discussion et un examen clinique. La réponse que vous avez faite est absolument incroyable dans son genre. Que l’on ait des fichiers pouvant être utilisés pour suivre les cas contacts, je trouve déjà cela scandaleux car les médecins l’ont toujours fait, avec l’obligation de déclarer les maladies infectieuses, et ils savent conduire leurs propres enquêtes dans le milieu familial. Nous n’avons pas besoin de fichiers, nous avons besoin de médecins, de molécules et de possibilités de traitement.

    (Les amendements identiques nos 6 et 41 ne sont pas adoptés.)

    M. le président

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    Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 32, 14, 36, 23 et 48, pouvant être soumis à une discussion commune.
    Les amendements nos 14 et 36 sont identiques.
    L’amendement no 32 de M. Paul Molac est défendu.
    La parole est à M. Philippe Gosselin, pour soutenir l’amendement no 14.

    M. Philippe Gosselin

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    M. le ministre de l’intérieur est déjà là pour le texte confortant le respect des principes républicains, mais nous avons un peu de retard. C’est surtout que nous avons de l’avance pour défendre les libertés malmenées avec l’état d’urgence sanitaire. Voilà pourquoi le Parlement prend un peu son temps ce soir.
    Contrairement à certains, nous ne contestons pas la nécessité de fichiers alimentés par des données personnelles de santé. Nous sommes au XXIe siècle, et la technologie est au service de la santé de nos concitoyens. Pour autant, s’agissant de données de santé personnelles, on ne peut pas faire n’importe quoi : il ne s’agit pas de prolonger indûment des systèmes d’information. Or il est proposé par cet article de le faire jusqu’à la fin de l’année. Nous contestons, vous l’avez compris, la date du 31 décembre. Puisque vous avez retenu celle du 1er juin pour la prorogation de l’état d’urgence sanitaire, eh bien qu’au moins on n’aille pas au-delà du 1er juin pour les systèmes d’information visés ici. Cela nous paraît un juste équilibre. Si vous avez besoin de plus de temps, vous pouvez revenir devant le Parlement.

    M. Fabrice Brun

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    Bien sûr !

    M. Philippe Gosselin

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    C’est la clause de revoyure que nous appelons de nos vœux une énième fois, et que nous finirons peut-être par faire accepter car les choses vont finir par s’imposer à vous, si bien que vous serez obligés de vous y résoudre. Autant le faire dès aujourd’hui, dans une approche collective, plutôt que contraints et forcés.

    M. Fabrice Brun

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    Laissez le Parlement exercer son contrôle plein et entier, au nom du peuple !

    M. le président

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    La parole est à Mme Agnès Thill, pour soutenir l’amendement no 36.

    Mme Agnès Thill

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    Il s’agit par cet amendement de substituer à la date du 31 décembre 2021 celle du 1er juin 2021. Nous souhaitons en effet limiter la conservation des fichiers comportant des données de santé. Nous sommes en état d’urgence sanitaire, ce doit être exceptionnel, et les fichiers comportant des données de santé doivent être conservés de manière elle-même exceptionnelle, limitée et éphémère.

    M. le président

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    La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement no 23.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Avec l’article 4, vous souhaitez reporter jusqu’au 31 décembre 2021 le recours aux systèmes d’information institués pour suivre l’évolution de l’épidémie. Le reporter, on peut tout à fait le comprendre, mais jusqu’au 31 décembre, êtes-vous bien sérieux ?

    Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas

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    Oui, nous sommes sérieux !

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Ah oui, apparemment.
    Je propose plutôt de proroger ces mesures jusqu’au 1er août, quitte à changer cette date dans quelques mois, parce qu’il faut arrêter, me semble-t-il, de demander en permanence toujours plus de mesures exceptionnelles, d’autant plus que, comme l’a rappelé notre collègue Charles de Courson avant la pause, le ministre de la santé lui-même a annoncé 70 millions de Français vaccinés à la fin de l’été et que M. Macron, Président de la République, a promis ce soir un vaccin pour tous les Français qui le souhaitaient d’ici à la fin de l’été également. On voit donc bien que cette date du 31 décembre est beaucoup trop éloignée.
    Du 23 mars au 10 juillet 2020, la France a connu un premier état d’urgence sanitaire. Le 11 juillet, nous sommes passés à un état transitoire qui devait s’achever à la fin de cette année, et pourtant l’état d’urgence a de nouveau été enclenché le 17 octobre 2020 et pourrait durer jusqu’en juin 2021. Nous vivons certes une époque à part, une époque exceptionnelle – au sens où elle sort de l’ordinaire –, mais est-il pour autant légitime de dire que nous sommes toujours dans un état d’urgence ? C’est une urgence qui dure depuis plus de onze mois.

    M. Fabrice Brun

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    Nous sommes dans un État de droit, la restriction des libertés doit rester une exception !

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Concentration exceptionnelle des pouvoirs entre les mains du Gouvernement et du chef de l’État, possibilité de diriger le pays par ordonnances ou décrets, Parlement évincé de la plupart des questions, tel est aujourd’hui le visage de la France, du pays des droits de l’homme, et ce visage m’attriste autant, je vous l’avoue, qu’il m’inquiète. (M. Jacques Cattin applaudit.)

    M. le président

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    L’amendement no 48 de Mme Marietta Karamanli est défendu.
    Quel est l’avis de la commission sur ces amendements ?

    M. Jean-Pierre Pont, rapporteur

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    Je pense que, le 1er juin, le virus ne sera pas éradiqué, et que nous aurons donc besoin des systèmes d’information au moins jusqu’à la fin de l’année. En votant l’article 4, Le Parlement votera leur prorogation jusqu’au 31 décembre, et ce faisant il est bien dans son rôle. Avis défavorable, donc.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée

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    Même avis.

    M. le président

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    La parole est à M. Nicolas Dupont-Aignan.

    M. Nicolas Dupont-Aignan

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    Déclaré à partir du 23 mars 2020, puis prolongé à partir du 17 octobre de la même année, l’état d’urgence est parti, tel que vous le proposez, pour durer jusqu’au 31 décembre 2021 : presque deux ans sous ce régime, et chaque fois M. le rapporteur ou Mme la ministre déléguée nous parlent du virus. Si je comprends bien, dans notre République française, chaque fois qu’il y a un virus on va suspendre les droits du Parlement, autrement dit vous allez vous auto-dissoudre, mes chers collègues,…

    M. Pacôme Rupin

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    Mais oui, bien sûr !

    M. Nicolas Dupont-Aignan

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    …comme vous l’avez fait avec la commission d’enquête.

    M. François Ruffin

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    Exactement !

    M. Nicolas Dupont-Aignan

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    Cela revient à donner les pleins pouvoirs à un homme, qui s’est d’ailleurs invité ce soir au journal télévisé comme représentant en chef des vaccins (Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas s’exclame) et nous a expliqué que tous les volontaires seront vaccinés avant l’été, comme le ministre de la santé qui, l’après-midi, dit « 15 millions de vaccinés » et deux heures après, au journal de TF1, nous parle de 70 millions.
    Voilà où mène la disparition de notre assemblée : à un pouvoir solitaire, incompétent, qui se contredit de jour en jour. Si vous voulez rétablir la confiance – et on ne vaincra l’épidémie que par la confiance –, pourquoi abandonnez-vous votre pouvoir ? N’avez-vous pas confiance en vous, majorité, pour contrôler le Gouvernement ? Vous laissez un homme seul, avec un conseil de défense et un Conseil scientifique sans comptes rendus, décider de la vie quotidienne de nos concitoyens (Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas s’exclame), de l’heure à laquelle ils ont le droit de rentrer ! Résultat : à partir de dix-huit heures les honnêtes gens qui ont cinq minutes de retard sont verbalisés, pendant que les trafiquants de drogue continuent à sévir dans nos quartiers. (Vives exclamations sur les bancs du groupe LaREM.)

    M. Rémy Rebeyrotte

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    Démagogie !

    M. Nicolas Dupont-Aignan

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    Voilà la réalité : d’un côté, des mesures liberticides pour les honnêtes gens, et, de l’autre, le laisser-aller. Croyez-vous que nos concitoyens vont accepter éternellement ce régime des pleins pouvoirs à un homme seul qui, de surcroît, ne commet que des erreurs ?

    (L’amendement no 32 n’est pas adopté.)

    (Les amendements identiques nos 14 et 36 ne sont pas adoptés.)

    (Les amendements nos 23 et 48, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    M. Jacques Cattin

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    Godillots !

    M. Pierre Cordier

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    Playmobils !

    (L’article 4 est adopté.)

    Article 4 bis

    (L’article 4 bis est adopté.)

    M. Pierre Cordier

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    Playmobils !

    M. Rémy Rebeyrotte

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    Lego ! L’ego vous perdra !

    Article 4 ter

    M. le président

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    Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 15, 25 et 34, tendant à rétablir l’article 4 ter.
    La parole est à M. Philippe Gosselin, pour soutenir l’amendement no 15.

    M. Philippe Gosselin

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    Cet article, introduit par le Sénat et supprimé en commission, donnait un peu plus de latitude aux collectivités locales dans cette période compliquée où il nous paraît préférable de faciliter la vie de leurs élus. Les conditions de l’élection ont été compliquées en mars et en juin, et les conseils n’ont pas toujours pu se réunir dans les premiers mois. Il semblait donc logique, et même évident, d’être aux côtés des collectivités locales, et le Sénat, qui est leur garant, avait eu ce soin.
    Mais c’était sans doute trop simple : le rapporteur nous a informés que, la CMP ayant échoué malgré les efforts consentis par la majorité à l’Assemblée, tous les cadeaux mis sur la table étaient repris. Il faut donc le savoir : lorsque le rapporteur et certains membres de la majorité offrent un cadeau, s’ils ne sont pas satisfaits par ailleurs, ils reprennent leur cadeau. Or ce dont nous parlons était un beau cadeau pour les collectivités ; c’était une facilité que, en dehors de toute polémique, on aurait pu leur laisser. Mais, encore une fois, c’était trop simple : tout cela a été enlevé en commission, où la majorité a voté comme un seul homme.
    Pour être utiles aux collectivités, à la territorialité, à celles et ceux qui font vivre les territoires, nous souhaitons réinstaurer ces dispositions. J’espère que nous serons suivis mais ne me fais guère d’illusion. J’entends déjà la réponse négative du rapporteur mais j’aimerais, à tout le moins, qu’il l’explicite.

    M. le président

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    L’amendement no 25 de M. Guillaume Larrivé est défendu.
    La parole est à M. Pascal Brindeau, pour soutenir l’amendement no 34.

    M. Pascal Brindeau

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    Le Sénat avait introduit une disposition de bon sens qui permettait aux collectivités, et en particulier aux communautés de communes, de pouvoir débattre plus sereinement dans cette période d’état d’urgence et de faire des choix touchant au transfert de compétences en matière de mobilités. Rejeter cet article, c’est méconnaître la réalité de ce que vivent les collectivités territoriales depuis le début de la crise sanitaire, leurs difficultés sur des sujets techniques mais aussi éminemment politiques. Déterminer une stratégie de transport – urbain, rural, à la demande ou scolaire – demande beaucoup de discussions entre élus, entre communes parfois, et les équilibres se trouvent dans la durée. Cet article était une pure mesure de bon sens : vous semblez totalement le méconnaître. (M. Bertrand Pancher applaudit.)

    M. Jean-Christophe Lagarde

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    Exactement !

    M. Pierre Cordier

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    Mme Bourguignon et M. Darmanin côte à côte au banc des ministres, qui aurait imaginé cela il y a cinq ans ?

    Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée

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    C’est cela, l’intelligence !

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Jean-Pierre Pont, rapporteur

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    Contrairement à ce que vous affirmez, la majorité des associations d’élus ne demandent pas ce nouveau report puisque, je vous le rappelle, l’ordonnance du 1er avril avait déjà prévu un report de trois mois. Le Gouvernement est par ailleurs saisi de cette question et la suit avec attention. Dans tous les cas, conformément à la position précédemment exprimée par l’Assemblée nationale, je reste défavorable à vos amendements. (M. Pascal Brindeau s’exclame.)

    M. le président

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    Cher collègue, laissez M. le rapporteur s’exprimer.

    M. Jean-Pierre Pont, rapporteur

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    Monsieur le président, j’ai siégé pendant trente ans dans un conseil municipal avec une opposition bien plus sévère que celle que j’entends ici…  Ah ! » sur les bancs des groupes LR et FI.)

    M. Pierre Cordier

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    C’est un ancien de l’UMP qui parle !

    M. Jean-Pierre Pont, rapporteur

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    J’ai proposé en commission des lois de reprendre deux des trois articles additionnels adoptés par le Sénat ; nous ne balayons donc pas tout d’un revers de main, nous sommes capables d’adopter certaines choses. Avis défavorable.

    (Les amendements identiques nos 15, 25 et 34, repoussés par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

    M. le président

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    Sur l’ensemble du projet de loi, je suis saisi par les groupes La République en marche et La France insoumise d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

    Article 4 quater

    M. le président

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    La parole est à M. François Ruffin.

    M. Bruno Millienne

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    J’arrive au bon moment !

    M. François Ruffin

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    Madame la ministre déléguée, vous avez tenu à répondre avec beaucoup d’animation à l’interpellation très personnelle de M. Chenu. Nous aimerions que vous répondiez avec autant d’animation à nos interpellations concernant les perspectives de sortie de l’état d’urgence sanitaire et votre stratégie en la matière.

    M. Fabien Di Filippo

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    Il faut savoir faire vibrer la corde sensible !

    M. François Ruffin

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    J’observe pour ma part un paradoxe et j’aimerais que vous nous aidiez à l’élucider : le rapporteur nous dit que nous pourrons en sortir quand le virus sera éradiqué, ce qui pourrait mettre un certain temps. Mais, ce soir, le Président de la République a annoncé qu’il y aura un vaccin pour tous les Français d’ici à la fin de l’été.

    M. Fabien Di Filippo

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    Il ne faut pas le croire !

    M. François Ruffin

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    Le vaccin est-il pour vous, dans le cadre de votre stratégie, l’arme fatale contre le virus ? Considérez-vous vraiment que tous les Français auront été vaccinés d’ici à l’été ? Et si tel est le cas, pourquoi prolongez-vous l’état d’urgence sanitaire possiblement au-delà de cette période, jusqu’à la fin de l’année ?

    M. Pierre Cordier

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    Là, M. Ruffin a marqué un point !

    M. François Ruffin

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    Cette histoire devrait être close à l’entrée de l’été. Expliquez-nous ce paradoxe ! (Mme Mathilde Panot applaudit.)

    M. le président

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    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 16.

    M. Jean-Pierre Pont, rapporteur

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    Ayant moi-même déposé cet amendement de clarification, j’émets bien entendu un avis favorable. Il s’agit de préciser que le délai pour s’opposer au transfert de compétence court du 1er octobre 2020 au 30 juin 2021.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée

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    Favorable. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)
    C’est un simple amendement de clarification !

    M. Philippe Gosselin

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    Cela montre bien que ce n’était pas très clair !

    (L’amendement no 16est adopté.)

    (L’article 4 quater, amendé, est adopté.)

    M. le président

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    Nous en venons donc à l’article 5.

    Article 5

    M. François Ruffin

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    S’il vous plaît, monsieur le président, je m’inscris sur l’article ! (Exclamations sur divers bancs.)

    M. le président

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    Attendez, monsieur Ruffin, ça ne marche pas comme ça…

    M. François Ruffin

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    Vous n’avez pas annoncé l’article !

    M. le président

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    Si, et j’allais appeler les amendements.
    Je suis donc saisi, sur cet article, de deux amendements, nos 17 de Mme Martine Wonner et 42 de M. Stéphane Peu, tendant à supprimer l’article 5, qui sont défendus.
    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Jean-Pierre Pont, rapporteur

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    Défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée

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    Même avis.

    M. le président

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    La parole est à M. François Ruffin.

    M. François Ruffin

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    Le paradoxe que je viens de pointer mérite, me semble-t-il, une réponse de Mme la ministre déléguée.
    Premièrement, le vaccin est-il pour vous l’arme fatale contre le virus ? Deuxièmement, tous les Français auront-ils été vaccinés d’ici l’été ? Troisièmement, si vous pensez que le vaccin aura permis d’éradiquer le virus à l’arrivée de l’été, pourquoi l’état d’urgence serait-il prolongé au-delà de cette période ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe FI.)

    (Les amendements identiques nos 17 et 42ne sont pas adoptés.)

    (L’article 5 est adopté.)

    Explications de vote

    M. le président

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    Dans les explications de vote sur l’ensemble du projet de loi, la parole est à M. Philippe Gosselin, pour le groupe Les Républicains.

    M. Bruno Millienne

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    Pour !

    M. Philippe Gosselin

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    Non ! Nous ne sommes pas pour la prorogation de l’état d’urgence sanitaire. En revanche, si vous voulez que nous en parlions, nous sommes pour la maîtrise de l’état d’urgence, pour des mesures sanitaires en direction de nos concitoyens, pour – évidemment – la défense de notre pays, pour – tout aussi évidemment – la défense des entreprises et de la vie économique, pour la défense des associations et de la vie culturelle, pour le bien-être de nos concitoyens, qui ne se résume pas uniquement à une logique « on/off » – être en vie ou être mort –, puisqu’ils sont de plus en plus nombreux, ces derniers temps, à exprimer leur mal-être.
    Alors oui, en résumé, les républicains que nous sommes souhaitent que le Gouvernement ait les moyens d’agir. Nous souhaitons évidemment lui donner des pouvoirs, mais pas tous les pouvoirs ! Nous devons concilier l’exigence de sécurité sanitaire avec les incertitudes de la situation, à condition, monsieur le rapporteur, madame la ministre déléguée, monsieur le ministre de l’intérieur, que ces incertitudes ne justifient pas le blanc-seing que vous vous donnez à chaque fois en disant : « On ne sait pas, donc il est prudent d’attendre et de ne pas vous consulter. » Non ! Cela, nous ne pouvons pas l’accepter.
    Alors oui, nous sommes pour des débats démocratiques, pour un contrôle du Parlement, pour des clauses de revoyure, pour l’expression démocratique de la représentation nationale !
    L’état d’urgence, ce n’est pas un droit banal.

    M. Frédéric Reiss

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    Ce n’est pas un chèque en blanc !

    M. Philippe Gosselin

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    Nous le disons et nous le répétons semaine après semaine : c’est un droit d’exception, un droit exorbitant du droit commun. Je le répète avec une forme de solennité, en ayant malheureusement l’impression de rabâcher et de ne pas être suffisamment entendu,…

    M. Pierre Cordier

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    C’est cela, la pédagogie !

    M. Philippe Gosselin

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    …sauf sur certains bancs, ceux d’autres oppositions, et je me réjouis d’ailleurs que par-delà les sensibilités politiques, des passerelles démocratiques…

    Mme Mathilde Panot

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    …républicaines !

    M. Philippe Gosselin

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    …se dessinent pour exiger le respect de nos concitoyens et de la vie de nos institutions. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.)
    Alors oui, nous sommes pour que le Gouvernement ait des pouvoirs et la possibilité d’agir, mais nous sommes contre l’octroi d’un blanc-seing à son profit, contre ce tunnel qui grandit jour après jour depuis bientôt un an, depuis le 23 mars 2020. Depuis cette date, l’état d’urgence n’a cessé d’être prolongé, jusqu’au 16 février, puis au 1er avril, au 1er juin, et enfin au 31 décembre 2021. Faudra-t-il attendre que nous soyons « au 31 du mois d’août », comme dans la chanson, pour qu’il se passe autre chose ? Mais dans la chanson, à ce moment-là, c’est le mot de Cambronne que reçoit le roi d’Angleterre…
    Eh bien je crains, mes chers collègues, qu’avant le 31 août, un certain nombre de nos compatriotes en aient ras-le-bol. En effet, telle qu’elle est appliquée, la vaccination ne semble pas être en mesure de les sécuriser complètement, et les stratégies que vous choisissez ne sont pas de celles qui permettraient sinon de les rassurer, au moins d’élaborer et de leur exposer un plan précis qui ne donne pas l’impression de jouer au yo-yo avec leurs nerfs.
    Pour toutes ces raisons, le groupe Les Républicains, tout en vous reconnaissant la possibilité et le devoir d’agir, ne pourra une fois encore pas vous suivre pour proroger l’état d’urgence sanitaire sous la forme que vous proposez. Nous voterons évidemment contre, mais dans l’espoir – tout de même – d’être entendus, car j’observe que progressivement, quelques éclaircies semblent poindre. Sur certains points, la majorité commence à se fracturer,…

    Plusieurs députés du groupe LaREM

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    Non !

    M. Philippe Gosselin

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    Je rappelle tout de même que si le texte présenté en conseil des ministres le 21 décembre 2020 a été retiré dès le 22, c’est bien parce que la majorité risquait de se fracturer  Eh oui ! » sur les bancs du groupe LR), alors ne me racontez pas d’histoires ! (Protestations sur les bancs du groupe LaREM.) Si l’article 3 du projet de loi a été supprimé et si la prorogation…

    M. Pierre Cordier

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    Il a raison !

    M. le président

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    Monsieur Cordier, laissez M. Gosselin s’exprimer !

    M. Philippe Gosselin

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    Si l’article 3 a été supprimé, disais-je, alors qu’il prévoyait une sortie de l’état d’urgence sanitaire, c’est bien parce que des lignes de fracture étaient en train de se dessiner au sein de la majorité, je le maintiens.

    M. Jacques Cattin et M. Vincent Descoeur

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    Eh oui !

    M. Philippe Gosselin

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    Peut-être arriverons-nous à nous rejoindre ; quoi qu’il en soit, ce ne sera pas ce soir et c’est une nouvelle fois un rendez-vous manqué, avec nous mais aussi avec les Françaises et les Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

    M. François Cormier-Bouligeon

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    Vous n’avez pas le monopole des Français !

    M. le président

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    La parole est à M. Sébastien Jumel, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine. (Brouhaha.)
    Nous écoutons les orateurs, mes chers collègues. Seul M. Jumel a la parole. Il n’a jamais interrompu personne, chacun le sait dans cette assemblée. Nous allons donc tous respecter son propos et l’écouter religieusement.

    M. Sébastien Jumel

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    Merci, monsieur le président.
    Quand j’observe la suffisance du groupe majoritaire, j’ai en tête le fait que, depuis un an, l’exécutif s’assoit sur le Parlement en décidant de tout, tout seul, et qu’il s’assoit même sur le conseil des ministres en réunissant le conseil de défense tous les quatre matins. Mais après tout, si cette méthode avait fait la démonstration de son efficacité, je me dirais qu’elle n’est ni vraiment juste ni conforme à nos principes fondamentaux, mais qu’au moins elle fonctionne.
    Force est cependant de constater que, sur l’ensemble des sujets dont les Français attendent qu’ils soient traités depuis le début de la crise, cet exercice solitaire du pouvoir ne fonctionne pas.

    M. Vincent Descoeur

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    Ça ne marche pas !

    M. Sébastien Jumel

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    Il n’a pas fonctionné s’agissant des masques, pas davantage s’agissant des tests ; quant à la vaccination, elle bute sur le principe de réalité,…

    Un député du groupe LaREM

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    Que proposez-vous ?

    M. Bruno Millienne

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    Oui, nous attendons vos propositions !

    M. Sébastien Jumel

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    …avec des libéraux qui refusent de reprendre la main pour prendre soin de la population.
    Lorsque je vois s’exprimer dans nos territoires la suffisance des parlementaires de la majorité (Exclamations sur les bancs du groupe LaREM), je me dis que lorsqu’ils rencontrent le préfet une fois par semaine – c’est pour eux un plaisir –, puis lorsqu’ils échangent avec le directeur de l’ARS – Agence régionale de santé –, également une fois par semaine et, j’imagine, avec autant de plaisir, et lorsqu’ils prennent connaissance de la carte scolaire auprès du DASEN – directeur académique des services de l’éducation nationale –, une fois par an, toujours avec beaucoup de plaisir, ils sont les collaborateurs zélés et les porte-parole de ceux que l’exécutif a désignés dans les territoires pour appliquer sa mauvaise politique.
    Nous ne sommes pas des collaborateurs de l’exécutif,…

    M. Pierre Cordier

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    Très bien !

    M. Sébastien Jumel

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    …nous sommes le Parlement ! Nous sommes là pour faire la loi, pour contrôler l’exécutif (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, LR et FI ainsi que parmi les députés non inscrits) et aussi pour apporter des contributions alternatives lorsque ça ne marche pas.

    Un député du groupe LaREM

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    Nous sommes majoritaires, monsieur !

    M. Sébastien Jumel

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    Force est de constater que de tout cela, vous ne voulez pas entendre parler ! Force est de constater que le fait majoritaire vous envoie dans le mur ! J’ai tendance à penser qu’il s’agit peut-être là…

    Un député du groupe LaREM

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    Jaloux !

    M. Sébastien Jumel

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    Pardon ? Ce qui extraordinaire avec les gens qui n’ont pas le droit de parler dans leur groupe, c’est qu’ils essaient d’interrompre les autres. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, LR et FI ainsi que parmi les députés non inscrits. – Mme Michèle Victory applaudit également.) Ils font vœu d’obéissance, d’allégeance et de soumission, mais lorsque l’opposition exprime à voix haute ce qu’ils n’ont pas le droit de penser, ils essaient de lui couper la parole. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, LR, SOC et FI ainsi que parmi les députés non inscrits.)
    Eh bien figurez-vous que la République n’étant pas au rendez-vous pour prendre soin des territoires et des Français,…

    M. Bertrand Sorre

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    Ridicule !

    M. Sébastien Jumel

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    …comme elle n’est pas au rendez-vous pour être efficace dans la lutte contre le virus,…

    M. Bertrand Sorre

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    Ridicule, Jumel !

    M. Sébastien Jumel

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    …les parlementaires que nous sommes, dans la grande diversité de l’opposition – et cela devrait vous inquiéter – ne sont pas là pour vous signer un chèque en blanc, et nous refuserons donc la prorogation de cet état d’exception auquel vous vous habituez malheureusement depuis le début de la législature. Les ordonnances, les délais raccourcis, les commissions soliveaux :…

    M. Bertrand Sorre

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    Ridicule !

    M. Sébastien Jumel

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    …c’est votre manière de gouverner, nous n’en voulons pas et nous voterons contre la prorogation de l’état d’urgence sanitaire. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et FI.)

    M. le président

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    La parole est à M. Guillaume Gouffier-Cha, pour le groupe La République en marche.

    Un député du groupe LaREM

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    Une parole libre !

    M. Guillaume Gouffier-Cha

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    J’avais exprimé un souhait au début de cette soirée – à ce propos, ma parole sera libre : que nos débats, nos travaux de ce soir se déroulent dans le même climat de sérénité que celui qui s’était finalement dégagé de la commission mixte paritaire. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe LR.)
    Je vous entends rire, mais cette commission mixte paritaire a quasiment abouti. Nous n’étions pas loin d’y parvenir, contrairement à ce que notre cher collègue Schellenberger disait tout à l’heure – je ne sais pas s’il est encore présent. Nous n’étions pas loin de trouver un accord. Cette CMP a montré que, sur des bancs divers de l’Assemblée nationale comme du Sénat, nous étions d’accord quant au constat de la dureté de la crise sanitaire et des mesures que nous avons à prendre, en faisant preuve de responsabilité. C’est ce qui a amené l’Assemblée nationale comme le Sénat à reconnaître que oui, nous devons proroger le régime de l’état d’urgence sanitaire.

    M. Philippe Gosselin

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    On ne dit pas le contraire, mais pas sous cette forme !

    M. Pierre Cordier

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    Suiveur !

    M. Guillaume Gouffier-Cha

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    Peut-être sommes-nous des suiveurs, mais la position du Sénat était identique à la nôtre, à quelques divergences près, et nous avions quasiment trouvé un accord qui n’a achoppé que sur un point :…

    M. Philippe Gosselin

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    Alors pourquoi avoir tout rayé ?

    M. Guillaume Gouffier-Cha

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    …le confinement, son contrôle et sa mise en place. Sur ce point de désaccord, le Gouvernement avait d’ailleurs formulé une proposition et pris un engagement, mais la majorité du Sénat l’a envoyé valdinguer, refusant de facto une certaine unité nationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.) Voilà la réalité !

    Un député du groupe LR

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    Cette proposition, vous pouviez la reprendre !

    M. Guillaume Gouffier-Cha

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    Si le Sénat ne l’avait pas fait, le débat aurait bien entendu été d’une tout autre nature…

    Un député du groupe LR

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    Socialiste !

    M. Guillaume Gouffier-Cha

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    …que le théâtre, le cirque auquel nous avons assisté tout au long de cette soirée…

    M. Sébastien Jumel

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    Ça ne va pas, non ?

    M. Guillaume Gouffier-Cha

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    …de la part de collègues que nous avions jusqu’à présent peu vus intervenir au cours de ces débats ou dans le cadre des missions de contrôle parlementaire qui se sont réunies ces derniers jours.
    Quoi qu’il en soit, ce n’est pas de suffisance que font preuve les députés de la majorité.

    M. Pierre Dharréville

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    D’insuffisance, alors !

    M. Guillaume Gouffier-Cha

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    Ce n’est pas non plus d’insuffisance.

    Mme Marie-Christine Dalloz

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    Si, d’insuffisance !

    Un député du groupe LR

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    D’amateurisme !

    M. Guillaume Gouffier-Cha

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    Je vous laisse ces mots excessifs et blessants. Mais quand j’observe l’ensemble de mes collègues de la majorité et aussi d’autres groupes, je vois qu’ils interviennent sur le terrain, qu’ils échangent avec leurs concitoyens et qu’ils continuent d’essayer, y compris dans cette période, d’organiser des réunions publiques. Cela, vous le faites trop peu sur certains bancs, à gauche. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM. – Exclamations sur les bancs des groupes GDR, FI, UDI-I et LR.) Essayez de faire de la politique autrement pour associer nos concitoyennes et nos concitoyens, pour apporter des solutions, pour ne pas toujours voter comme des godillots, comme vous le faites ! Parce que c’est le cas ! Voilà la réalité. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – Exclamations prolongées sur les bancs des groupes GDR, FI et LR.)
    Au sein de cette majorité, il y a parfois des voix dissonantes et nous parvenons à améliorer les textes en défendant nos convictions. Nous ne pouvons pas accepter les mots blessants que vous avez utilisés, cher collègue Jumel, considérant le travail effectué par les parlementaires des différents groupes. (Vives exclamations.)

    M. le président

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    Chers collègues…

    M. Guillaume Gouffier-Cha

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    Quoi qu’il en soit, nous ferons preuve de responsabilité en votant pour ce texte, sachant que nos concitoyennes et concitoyens vivent cette épreuve avec difficulté mais aussi compréhension. Ils attendent de nous, non pas le cirque auquel nous avons assisté ce soir, mais une capacité à prendre des décisions certes lourdes et difficiles, mais qui permettent de sauver des vies, d’aider nos soignants à faire leur métier et nos hôpitaux à tenir et à traverser cette crise. C’est ensemble que nous la traverserons. Nous voterons ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)

    M. le président

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    Avant de donner la parole à M. Philippe Latombe, pour le groupe Mouvement démocrate (MODEM) et démocrates apparentés,…

    M. Sébastien Jumel

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    Il va rester muet !

    M. le président

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    …je vous rappelle que la moindre des choses est de l’écouter. La remarque vaudra pour les députés de la majorité lorsque des orateurs de groupes de l’opposition prendront la parole.
    Dans une assemblée et une démocratie comme les nôtres, nous devrions au moins pouvoir nous écouter les uns les autres. Quitte à sortir un peu de mon rôle, j’avoue qu’au regard de ce qui se passe dans certains pays, je suis heureux de pouvoir entendre, dans cette assemblée, des femmes et des hommes qui ne partagent pas mes convictions. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, LaREM et Dem.)
    Nous avons eu mille fois l’occasion d’exprimer des arguments, et nous pouvons maintenant entendre les explications des orateurs des différents groupes avant de voter.
    Vous avez la parole, monsieur Latombe, et vous seul.

    M. Philippe Latombe

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    Dans mon groupe, nous étions opposés à l’idée d’examiner, en plein milieu de la crise du covid-19, un projet de loi visant à introduire les mesures de l’état d’urgence dans le droit commun. C’est donc par sens des responsabilités que nous sommes pour la prorogation de l’état d’urgence.
    Nous pensons en effet qu’il faut laisser au Gouvernement les marges de manœuvre nécessaires pour qu’il puisse prendre les mesures imposées par une situation épidémique qui ne cesse d’évoluer en raison de la fourniture assez erratique des vaccins depuis quelques semaines et de l’arrivée sur notre territoire de variants du virus aux effets méconnus.
    Comme nous l’avons déjà dit en première lecture, nous sommes très satisfaits de la suppression de l’article 3, ce qui implique une clause de revoyure et donc un nouveau un débat dans cet hémicycle, entre fin avril et début mai, pour que le texte soit adopté au plus tard le 1er juin.
    Le Parlement n’est donc pas mis sous cloche,…

    M. Sébastien Jumel

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    Il est mis sous serre, alors !

    M. Philippe Latombe

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    …mais il est interrogé et écouté, comme le montre aussi l’engagement du Gouvernement à avoir un débat en cinquante points, suivi d’un vote, au cas où il y aurait un confinement.
    Nous avons cependant posé deux conditions à notre vote en faveur de ce texte.
    Premièrement, nous demandons une transparence complète concernant les données dont dispose l’exécutif, afin que nous puissions prendre nos responsabilités en conscience lorsque nous votons sur un texte ou que nous posons une question dans le cadre du contrôle.
    Deuxièmement, nous demandons que toutes les ordonnances que vous prendrez au titre de la crise soient déposées immédiatement après leur publication au Journal officiel sur le bureau de l’Assemblée, afin que nous puissions les ratifier et que l’Assemblée puisse avoir son mot à dire. Si tel n’était pas le cas, nous en tirerions les conséquences.

    M. Thibault Bazin

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    Très bien !

    M. Philippe Latombe

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    Si les ordonnances permettent d’aller vite, elles doivent aussi être ratifiées.
    Nous voterons pour le texte, mais à ces conditions. (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et LR)

    M. le président

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    La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour le groupe Socialistes et apparentés.

    Mme Marietta Karamanli

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    Après plusieurs allers-retours de ce texte, nous constatons que l’état d’urgence est reconduit et toujours prolongé sans que nous ayons davantage de garanties quant à des dispositions qui permettraient le débat parlementaire sur les scénarios possibles et les mesures à prendre, ni quant à un débat public qui ne se fasse pas seulement dans l’urgence – c’est l’une des raisons d’être du Parlement. (M. François Ruffin applaudit.)
    Ce projet est déconnecté de l’appréciation des mesures prises, sans lien avec les stratégies mises en œuvre. Il nous éloigne des mesures susceptibles d’améliorer son contrôle, et donc son efficacité.
    Nous avons plusieurs points de désaccord avec la majorité : l’exercice de l’équilibre des pouvoirs ; l’interprétation stricte de la limitation des libertés ; la manière dont toutes nos propositions ont été écartées.
    Le débat contradictoire, n’est pas un cirque mais l’expression de la démocratie : il permet de rendre acceptable la décision. L’acceptabilité de la décision passe par le débat parlementaire et par le vote du Parlement, chaque fois que nécessaire. Nous voterons donc contre ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et plusieurs bancs du groupe GDR.)

    M. André Chassaigne

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    Très bien !

    M. le président

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    La parole est à M. Pierre-Yves Bournazel, pour le groupe Agir ensemble.

    M. Pierre-Yves Bournazel

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    Notre débat a besoin de modération, de pondération et de sens de l’équilibre. Je respecte profondément les oppositions et l’expression de points de vue différents, qui font partie du débat démocratique. Cependant, nous traversons une crise sanitaire, économique et sociale d’une ampleur exceptionnelle et inédite. En ces circonstances, nos concitoyens attendent de nous que nous manifestions un sens de l’intérêt général, de la justice et de l’équilibre dans la conduite des affaires de l’État.
    Personne au monde n’ayant de solution ou de remède miracle, il faut faire preuve d’humilité et de modestie. Le Gouvernement prend ses responsabilités : il protège les Français, notamment les plus vulnérables ; il accorde des aides exceptionnelles aux entreprises, plus qu’aucun autre pays au monde ; il agit aussi en faveur des soignants. Nous avons d’ailleurs des motifs d’espérance puisqu’un vaccin a été trouvé contre ce virus apparu il y a à peine plus d’un an et dont il existe désormais plusieurs variants. Ce n’est pas rien !
    Notre groupe travaille depuis de longs mois sur le sujet, notamment sur la démarche qui consiste à tester, tracer, isoler et accompagner. Certaines de nos propositions et demandes ont été entendues par le Gouvernement, ce dont nous ne pouvons que nous réjouir.
    La prorogation de l’état d’urgence sanitaire est une mesure dérogatoire, exceptionnelle comme le sont les circonstances qui la rendent nécessaire. Il faut avoir le courage de la prendre et de l’assumer devant les Français. Nombre de nos concitoyens critiquent telle ou telle mesure, racontent leurs soucis et leurs angoisses, tout en nous disant qu’ils comprennent la difficulté de gouverner en pleine controverse scientifique. Le Gouvernement et la majorité parlementaire et présidentielle veulent se battre pour défendre les principes fondamentaux qui demandent d’assurer la protection des Français face à ce virus.
    Notre groupe votera majoritairement pour le texte, mais il laisse la liberté de vote à tous ses membres, puisque nous sommes un groupe libre et indépendant.  Ah ! » sur les bancs du groupe LR.) Nous avons cependant la conviction que l’on ne gouverne pas à coup de « y’a qu’à, faut qu’on ». Au cours des derniers mois, nous avons relevé beaucoup de contradictions dans les prises de positions des uns et des autres : ils sont tantôt pour, tantôt contre ; ils peuvent dire tout et son contraire. Ce n’est pas une boussole pour la République et pour les Français, qui ont besoin d’être rassurés.
    Aux oppositions, que je respecte profondément dans leur diversité, je dis que les Français attendent le sens de l’unité et du rassemblement. En cas de crise, on défend son pays et on veut la réussite de son gouvernement, même si l’on n’est pas d’accord avec ses idées et sa philosophie. Ce qui doit primer, c’est la santé des Français, le sens de l’intérêt général et non pas des intérêts partisans et politiciens. (Applaudissements sur les bancs des groupes Agir ens et LaREM.  Protestations sur les bancs du groupe LR.)

    M. le président

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    La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, pour le groupe UDI et indépendants.

    M. Jean-Christophe Lagarde

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    Tout d’abord, je dirai que j’ai été très surpris, pour ne pas dire consterné, d’entendre l’intervention du porte-parole du parti de la majorité, M. Gouffier-Cha.  Oh ! » sur les bancs du groupe LaREM.)
    Vous nous avez expliqué, cher collègue, que vous organisiez tous des réunions publiques, au moment où le Gouvernement nous demande d’éviter les rencontres et les rassemblements. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.  Protestations sur les bancs du groupe LaREM.) Disiez-vous la vérité ? Je ne le sais pas et je préfère même croire que vous vous êtes égaré et vous avez proféré un mensonge.
    J’ai été consterné de vous entendre dire qu’à vos yeux, le débat à l’Assemblée nationale était un cirque. Il est vrai que le débat devient de plus en plus difficile dans un pays où, finalement, quand on n’est pas d’accord avec le Gouvernement, quand on ose émettre une critique, on est quasiment traité de traître à la nation.
    J’ai été consterné de vous entendre expliquer qu’un accord avait quasiment été trouvé avec le Sénat, que la commission mixte paritaire avait failli atteindre un point d’équilibre qui eût été nécessaire pour que les Français comprennent qu’il y avait un accord général, à un moment où l’on parle beaucoup d’acceptabilité des mesures. Or, après cela, vous revenez au texte initial dans cet hémicycle, en rejetant les mêmes amendements : là où il n’y avait qu’un seul désaccord, vous avez créé tous ceux que vous souhaitiez pour passer en force face au Sénat, aux oppositions, à tout le monde. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.) Si c’est là l’esprit d’union nationale qui nous a été vanté, je ne m’y retrouve pas.

    M. Hervé Berville

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    C’est nouveau !

    M. Jean-Christophe Lagarde

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    En effet. Figurez-vous, cher collègue, que nous avons fait confiance à un gouvernement qui était censé entendre le Parlement, ce qui n’est plus le cas depuis plusieurs mois. (Approbations sur plusieurs bancs du groupe LR.)
    Venons-en au fond. La crise est-elle finie ? Non. Le Gouvernement a-t-il encore besoin de moyens exceptionnels pour prendre parfois des mesures qui restreignent les libertés publiques ? Oui. Pourquoi devons-nous reprendre ce texte ? Ce n’est pas seulement parce que la crise sanitaire perdure, mais aussi parce que les mesures relatives à l’état d’urgence sanitaire que nous avons bricolées en mars 2020 n’ont jamais été inscrites dans le droit normal de la République. Nous en restons à ce régime bancal qui, manifestement, vous convient : il réduit les contrôles du Parlement à quasiment rien et il empêche que nous débattions régulièrement des dispositions nécessaires.
    En agissant de la sorte, vous faites une erreur : nos débats ici, en commission spéciale ou lors d’une mission d’information sur le covid-19 sont très regardés par les Français qui aiment comprendre et s’informer. En décidant qu’il y aura un débat quand le Gouvernement le souhaitera, s’il y a un reconfinement et qu’ensuite, il n’y en aura plus jusqu’à la fin du confinement, vous diminuez la capacité d’acceptation des mesures par les Français.
    Les propos des uns ou des autres peuvent ne pas plaire, mais c’est une erreur de refuser de débattre. La semaine dernière, lors d’une conférence avec le Premier ministre, on nous disait que les Français finiraient par ne pas accepter les décisions. Je ne partage pas ces craintes : les Français les accepteront si elles leur sont expliquées, si elles sont légitimes, claires et cohérentes. Ils l’ont fait à Noël et au jour de l’An : c’est grâce à leur sens des responsabilités que nous ne sommes pas encore confinés comme nos voisins.
    Pour ma part, je souhaiterais que le Parlement soit vu comme un moyen de détendre le débat et d’informer les Français. Malheureusement, ce n’est pas possible. Vous venez de refuser qu’un débat ait lieu au Parlement au bout d’un mois de confinement. Vous rendez-vous compte de ce que cela veut dire ?
    Si la mesure est nécessaire, le Gouvernement doit évidemment pouvoir la prendre. Il y a un an, notre assemblée a voté à l’unanimité pour cela. Mais nous devons pouvoir débatte en cas de reconfinement. Souvenez-vous qu’à l’époque, nous avions interdit tous les marchés alimentaires avant, finalement, d’autoriser leur réouverture. Lors du deuxième confinement, nous avons estimé qu’il n’y avait pas besoin de les fermer.
    N’est-il pas nécessaire de discuter de ce genre de modalités dans cet hémicycle ? Allez-vous prétendre que ce n’est pas la peine, à votre retour dans vos circonscriptions ? Pour ma part, je ne le crois pas. Nous avons besoin de débats réguliers.
    Jusqu’à présent, nous avons toujours voté pour les textes de prorogation de l’état d’urgence sanitaire, mais celui-ci pêche sur deux points. Tout d’abord, nous ne pouvons pas continuer à adopter des lois d’exception pendant encore un an, un an et demi ou deux ans, et il faut trouver un équilibre stabilisé dans le droit commun. Ensuite, le Gouvernement doit d’autant plus accepter ce genre de débats, prévus à l’article 50-1 de la Constitution, qu’ils ne sont pas contraignants pour lui et qu’ils nous permettraient de savoir s’il n’y a pas d’erreur.
    L’exécutif et la majorité, c’est formidable, ne serait-ce que parce qu’ils changent. Mais quels qu’ils soient – et j’en ai vu passer dans cet hémicycle –, ils ont deux vertus. La première, pour l’exécutif, est de savoir résister à son administration ; ce n’est pas facile et le Parlement peut l’aider dans cette tâche. La deuxième, pour la majorité, est de savoir se montrer souple quand la situation la met la difficulté. Quand elle se rigidifie, elle s’approche de sa fin. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI-I et LR.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Mathilde Panot, pour le groupe La France insoumise.
    (Mme Mathilde Panot monte à la tribune.  Exclamations diverses et vif brouhaha sur de nombreux bancs.  Les mots « La folle » et « La poissonnière » sont audibles dans une partie de l’hémicycle.)
    Mes chers collègues, veuillez écouter Mme Panot !

    M. Alexis Corbière

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    J’ai entendu une insulte !

    Mme Danièle Obono

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    Une insulte sexiste !

    M. Alexis Corbière

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    C’est inacceptable !

    M. le président

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    Je n’ai rien entendu, monsieur Corbière.

    Mme Danièle Obono

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    Nous, on a entendu ! (Brouhaha.)

    M. le président

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    Mme Panot a la parole, et elle seule.

    Mme Mathilde Panot

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    Onze mois après le premier confinement, retour à la case départ : nous voilà encore une fois à parler de prolonger l’état d’urgence sanitaire. Que s’est-il passé pendant onze mois pour que ce soit nécessaire ? Disons que vous étiez occupés, très occupés. Faisons ensemble l’historique de votre emploi du temps.
    Le 14 février 2020, les soignants demandent plus de moyens pour l’hôpital public, comme ils le font depuis un an, et même depuis longtemps. À cette période, le coronavirus faisait déjà parler de lui, mais à l’époque, il n’y avait pas d’argent magique. Le 16 février 2020, en pleine crise des hôpitaux, vous débauchez la ministre de la santé pour briguer la mairie de Paris. Bien sûr, vous direz que vous ne saviez pas ; pourtant, le coronavirus faisait déjà l’objet de rapports de l’OMS, l’Organisation mondiale de la santé, rapports que vous ne pouviez ignorer puisque Mme Agnès Buzyn est partie ensuite y pantoufler. Dès le 25 février 2020, la revue Science annonce que le scénario le plus probable est celui d’une pandémie. Le 29 février 2020, soit quatre jours après, vous détournez le conseil des ministres dédié au coronavirus pour mettre fin à la discussion sur la réforme des retraites. Pour vous, entre covid-19 et 49.3, il n’y avait pas photo : plutôt bloquer la démocratie que la pandémie !
    Je passe sur les fiascos qui ont suivi : celui des masques, celui des tests, celui des équipements des soignants et des premiers de corvée. Après un déconfinement raté où, chose remarquable, l’homme responsable de cet échec a été promu Premier ministre, on en arrive, en septembre dernier, à la rentrée des vacances d’été. La deuxième vague approche, les hôpitaux sont en tension et le virus est déjà répandu,…

    M. Bruno Millienne

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    C’est quand, la chute ?

    Mme Mathilde Panot

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    …notamment dans les EHPAD : c’est, pour vous, le moment idéal pour lancer les enchères sur la 5G. Oui, vous êtes comme ça en « Macronie » : vous avez vos urgences. Il y a aussi des choses que vous ne manquez jamais de faire, sous aucun prétexte : comme on dit chez vous, pour la répression, on a toujours le temps ! Une loi sécurité globale pour faire plaisir aux syndicats factieux de police ; un décret de fichage généralisé de la population promulgué en catimini ; et maintenant une loi séparatisme inutile, dangereuse et liberticide.

    M. Bruno Millienne

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    C’est quoi le rapport ?

    M. Sylvain Maillard

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    Ça, c’est pour la vidéo !

    Mme Mathilde Panot

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    Ce n’est pas comme si 715 000 emplois avaient été détruits depuis mars, ou comme si 1 million de personnes avaient basculé dans la pauvreté cette année ; pas comme si des files hallucinantes d’étudiants précaires s’allongeaient devant l’aide alimentaire dans la sixième puissance économique mondiale ; pas comme si la Fondation Abbé-Pierre nous alertait, ce jour, sur les 4,1 millions de mal-logés en France, les 300 000 personnes sans domicile fixe ou les 2 millions de Français n’ayant pas accès à l’eau courante ou au chauffage ; pas comme si le dérèglement climatique avait commencé. Mais tout cela attendra, car tout à l’heure, vous préférez parler des tenues vestimentaires des femmes et du foulard. N’avez-vous donc rien de mieux à faire ?
    Onze mois après le premier confinement, toujours pas de masques gratuits, toujours pas de nationalisation de Luxfer et de Famar, pas de pôle public du médicament, pas de moratoire sur les licenciements, pas de RSA pour les jeunes, pas de taxe sur les profiteurs de crise, pas d’investissements massifs dans les hôpitaux publics ; au contraire, vous leur avez imposé 800 millions d’euros d’économies en 2021 et vous supprimez toujours plus de lits. Votre amateurisme ne trompe plus personne. Vous réussissez l’exploit de nous placer soixante-treizièmes sur quatre-vingt-dix-huit dans le classement des pays ayant le mieux géré la crise sanitaire.
    Madame la ministre, vous ne pourrez pas garder la France en cage indéfiniment ! La nature humaine n’est pas celle que vous croyez : nous ne sommes pas des homo œconomicus tout juste bons à engraisser le capital avant de s’endormir, nous sommes des êtres sociaux. Regardez autour de vous : les Français crèvent de solitude.
    Nous vous avons fait des propositions : réorganiser la société par roulement, pour que la vie sociale soit à nouveau possible ; rouvrir les lieux de socialisation – commerces, bars, lieux de culture – en appliquant des jauges et le respect des gestes barrières ; faire du vaccin un bien public mondial, pour qu’il soit accessible à toutes et à tous ; réindustrialiser notre pays pour notre souveraineté sanitaire.

    M. Rémy Rebeyrotte

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    Et adhérer à la Quatrième Internationale !

    Mme Mathilde Panot

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    Oui, tout cela exige une chose : rompre avec le temps court et tirer enfin les leçons de la crise majeure que nous traversons. Mais comme à chaque fois, vous vous drapez dans le secret d’un conseil de défense, sourds à nos propositions et aveugles quant à la réalité du pays.
    Ce projet de loi est votre aveu d’échec : vous payez votre incompétence et l’incurie de vos décisions, alors que des alternatives ont été mises sur la table. Si vous en êtes à devoir prolonger l’état d’urgence sanitaire, c’est parce que depuis onze mois, vous n’avez rien planifié.

    M. Bruno Millienne

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    Il reste dix secondes…

    Mme Mathilde Panot

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    Cessez donc de jouer avec les nerfs des Français ! Quant à nous, nous continuerons à refuser de vous donner les pleins pouvoirs, alors qu’en ces temps de pandémie, nous aurions tant besoin de démocratie. (Applaudissements sur les bancs du groupe FI.)

    M. Bruno Millienne

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    Merci, madame Panot !

    M. le président

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    La parole est à M. Paul Molac, pour le groupe Libertés et territoires.

    M. Paul Molac

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    Ce soir, nous avons raté une occasion, manqué un rendez-vous : celui de l’unité dans la lutte contre la pandémie. Le problème, c’est que l’unité ne se décrète pas, elle se prépare et se négocie, elle exige souplesse et compromis – tout ce que vous n’avez pas voulu faire.
    Vous auriez dû associer le Parlement aux prises de décision. Cela aurait permis de tenir compte du suffrage universel – nous représentons les Français –, de respecter nos institutions, de faire démocratie et d’éviter la confusion des pouvoirs qui a été dénoncée par les philosophes des Lumières, de Locke, Hobbes et Montesquieu jusqu’à Rousseau. Vous nous faites au contraire voter une loi de dessaisissement du Parlement, qui entérine cette confusion. (M. François Ruffin applaudit.)
    Comment voulez-vous que les Français se sentent concernés si vous n’en faites pas les acteurs de leur propre sécurité ? Comment voulez-vous qu’ils acceptent des mesures si elles ne sont pas votées ici et qu’elles n’apparaissent pas claires, justes, cohérentes, expliquées et motivées ? Au lieu de faire des Français les acteurs de leur propre sécurité, vous en faites des exécutants d’ordres donnés d’en haut. Jusqu’à maintenant, ils ont été très patients et ont exécuté vos ordres, mais je crains qu’à l’avenir, ils ne les trouvent démesurés et qu’ils n’en viennent à les combattre. Pour amener nos concitoyens à se montrer favorables aux mesures proposées, il aurait évidemment fallu que celles-ci soient votées ici, dans un bel élan de solidarité. Votre démarche manque donc de méthode.
    Donner les pleins pouvoirs à un gouvernement, c’est signer l’échec de la démocratie. Cela se produit, dans notre pays, dans des situations difficiles. Chaque fois qu’on l’a fait, c’était pour des questions bien plus graves que celles qui nous occupent aujourd’hui.
    Je ne peux pas donc pas voter cette loi de dessaisissement du Parlement, que presque tous les membres de mon groupe et moi-même jugeons exorbitante en matière d’entorses au droit et aux libertés. Nous limitons la liberté de déplacement et de réunion, et même la liberté de travailler – car contrairement à ce qu’on entend, l’immense majorité des Français ne demandent qu’une chose : pouvoir travailler. Vous nous demandez un blanc-seing, que nous ne pouvons pas vous donner. Notre groupe votera contre la prolongation de l’état d’urgence sanitaire. (M. Nicolas Dupont-Aignan applaudit.)

    Vote sur l’ensemble

    M. le président

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    Comme vous le savez, sur l’ensemble du projet de loi, j’ai été saisi, par les groupes La République en marche et La France insoumise, d’une demande de scrutin public.

    M. Maxime Minot

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    Les Républicains aussi ont demandé un scrutin public !

    M. le président

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    On ne me l’a pas dit, mais merci, monsieur Minot, d’exprimer votre désir de connaître le détail du vote.
    Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        266
            Nombre de suffrages exprimés                258
            Majorité absolue                        130
                    Pour l’adoption                164
                    Contre                94

    (Le projet de loi est adopté.)

    2. Respect des principes de la République

    Suite de la discussion d’un projet de loi

    M. le président

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    L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi confortant le respect des principes de la République (nos 3649 rectifié, 3797).

    Discussion générale (suite)

    M. le président

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    Hier soir, l’Assemblée a continué d’entendre les orateurs inscrits dans la discussion générale.
    La parole est à M. André Chassaigne.

    M. André Chassaigne

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    Il est peu de dire que ce projet de loi était attendu par la représentation nationale. Après le discours prononcé aux Mureaux par le Président de la République et l’odieux attentat commis contre Samuel Paty, lâchement assassiné parce qu’il apprenait à ses élèves à être des citoyens épris de liberté, chacun était en droit d’attendre un texte qui nous permettrait de nous hisser à la hauteur des enjeux de notre époque. C’est ce qu’avaient su faire nos augustes prédécesseurs au début du XXe siècle en votant une loi dont Jean Jaurès disait avec raison qu’elle fut le plus grand achèvement depuis la Révolution française. Le décret du 3 ventôse An III avait en effet ouvert la voie, puis celui du 2 avril 1871, voté à l’unanimité par la Commune de Paris, qui mettait en œuvre la laïcisation de l’État, stipulant dans son article 1er : « L’Église est séparée de l’État », et dans son article 2 : « Le budget des cultes est supprimé. »
    La loi du 9 décembre 1905 a été construite par les parlementaires ; c’est toujours bon à rappeler alors que certains ici se font les chantres d’un présidentialisme débridé. Cette loi a consacré le principe de laïcité, garantissant ainsi la liberté de conscience et l’égalité entre tous les citoyens. Contre l’intransigeance de Pie X et de son secrétaire d’État, le cardinal Rafael Merry del Val, le législateur de 1905 a acté la séparation des Églises et de l’État et la neutralité de ce dernier en matière religieuse. Ce sont les Briand, Jaurès, Allard, Buisson qui étaient en ce temps les séparatistes soucieux de mettre fin aux conflits qui opposaient depuis des siècles pouvoir temporel et pouvoir spirituel, donnant lieu à des guerres de religion et à de violents affrontements entre républicains et Églises.
    Nous sommes éternellement redevables à ces parlementaires qui ont érigé la laïcité au rang de valeur fondamentale de notre République et qui ont donné à notre pays cette singularité regardée avec beaucoup d’attention dans le monde entier. Nous ne cesserons jamais de nous réjouir que la France soit passée à cette occasion du statut de petite fille de l’Église à celui de digne héritière de la philosophie des Lumières.
    Chacun en conviendra : le projet de loi en discussion n’est pas de la même épaisseur historique, d’abord parce qu’il a peu à voir avec la laïcité, à l’exception notable de l’extension de la neutralité pour les délégataires des missions de service public, à l’exception aussi des articles ayant trait à l’organisation des associations cultuelles. Sur ces points, nous considérons que le Gouvernement va dans le bon sens. En revanche, nous n’approuvons pas l’article 28 du projet de loi, qui leur permet de bénéficier d’immeubles de rapport, et de se transformer ainsi en gestionnaires de patrimoine immobilier, ce qui est contraire à la loi de 1905, laquelle ne leur permet rien d’autre que la gestion du culte. Censée favoriser l’autonomie financière du culte musulman, cette mesure est en outre contre-productive, puisqu’elle profitera avant tout aux cultes les plus anciens en France, dont les fidèles seront plus à même de transmettre des biens.

    M. Alexis Corbière

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    Il a raison !

    M. André Chassaigne

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    Je comprends qu’en restreignant la possibilité de recevoir des flux de l’étranger, le Gouvernement cherche un moyen de compenser d’une main ce qu’il empêche de l’autre, mais en aucun cas nous ne devons dévier de la ligne fixée par la loi de 1905 et céder à des logiques concordataires qui ne diraient pas leur nom.

    M. Alexis Corbière

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    Il a raison !

    M. André Chassaigne

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    C’est aux cultes, aux cultes eux-mêmes, qu’il revient de s’organiser et de se financer. Quant à la puissance publique, elle peut, le cas échéant, faciliter les garanties d’emprunt pour les associations cultuelles qui en feront la demande, comme le prévoit l’organisation actuelle.
    Parce qu’il est différent par nature, ce texte ne se hissera pas à la hauteur de celui de 1905 – mais aussi parce que vous ne saisissez pas l’opportunité de combattre les maux qui perdurent dans notre République. Quelques petites semaines : voilà le temps que nous aurons consacré à la délibération parlementaire sur des sujets ô combien essentiels. En 1905, dans le sillage d’Aristide Briand, rapporteur du projet de loi, les parlementaires ont rédigé et discuté leur texte pendant dix mois, après une discussion de deux ans au sein d’une commission spéciale sur la séparation des Églises et de l’État présidée par Ferdinand Buisson, et dont le rapporteur était déjà Aristide Briand. Cette commission avait pour objectif d’étudier les huit propositions de loi déposées sur le sujet et de trouver, dans la mesure du possible, un compromis satisfaisant pour toutes les forces politiques en présence.
    La version finale de la loi est d’ailleurs très proche de celle adoptée par cette commission spéciale. J’insiste sur ce point, car je pense, comme Victor Hugo, que « la forme, c’est le fond qui remonte à la surface. » En agissant dans la précipitation et parfois, hélas, sous l’influence d’impératifs purement politiciens, nous nous privons d’un débat de fond et de la richesse des opinions citoyennes et parlementaires. Je suis convaincu qu’avec du temps supplémentaire, nous aurions pu écrire une bien meilleure loi et que nous aurions été nombreux à converger pour nous attaquer à ce qui constitue pour nous la plus grande injustice de ce monde : le séparatisme social, qui s’exerce en premier lieu dans l’institution scolaire.
    L’école française est celle dans laquelle l’origine sociale des enfants pèse le plus lourd sur la réussite et le parcours scolaires. Ce n’est pas nouveau. Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron l’avaient déjà magistralement démontré il y a plus de soixante ans. Force est d’admettre que la situation n’a que peu changé en dépit de la promesse républicaine à laquelle nous sommes nombreux ici à adhérer, viscéralement attachés que nous sommes aux valeurs de la République. Aujourd’hui, une proportion significative de nos meilleurs élèves vit très tôt dans un entre-soi à la fois scolaire et social, parfois dès le primaire et presque toujours à partir du collège. Les sociologues de la jeunesse nous disent que les enfants des classes populaires et ceux des classes les plus privilégiées ne se rencontrent plus, ou très peu, leurs loisirs étant socialement très différenciés.

    M. Jean Lassalle

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    C’est vrai !

    M. André Chassaigne

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    Au constat de ce séparatisme, il est fort probable que les élèves qui intégreront les filières les plus sélectives de notre enseignement supérieur n’aient eu que très rarement l’occasion de rencontrer, au cours de leur enfance et de leur adolescence, les 20 % ou 30 % les plus faibles. Dans ces conditions, comment prétendre faire société et garantir l’égalité des chances républicaines ?

    M. Alexis Corbière

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    Il a raison !

    M. André Chassaigne

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    Comment soutenir que l’ascenseur social fonctionne quand le rapport de l’Observatoire de l’égalité des chances de 2017 nous dit que 30 % des jeunes âgés de 18 à 23 ans ont des parents ouvriers, mais qu’ils ne constituent que 11 % des étudiants de l’enseignement supérieur et 6 % des effectifs des classes préparatoires ? Comment affirmer que le rouage méritocratique agit lorsque l’ENA, grande fabrique des élites, compte, dans sa promotion 2019-2020, un seul enfant d’ouvriers ? Comment défendre l’égalité des sexes lorsque de grands établissements privés parisiens, hauts lieux de reproduction sociale, institutionnalisent la non-mixité et en font même un artifice promotionnel ?

    M. Alexis Corbière

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    Il a raison !

    M. André Chassaigne

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    Comment admettre que l’on distribue de l’argent public aux établissements privés contractualisés sans qu’on exige en contrepartie une mixité sociale et le respect des missions confiées à l’éducation nationale, alors que, dans le même temps, nos écoles publiques et nos universités se meurent d’une paupérisation grandissante, victimes de tant de carences qu’elles sont dévalorisées au profit du privé ?
    Comment se résoudre à accepter une ségrégation territoriale qui fait que des populations sont renvoyées dans des quartiers ou dans la ruralité que les services publics ont désertés, tandis que des personnes font le choix de vivre dans des ghettos de riches, loin des malheurs qui frappent les plus fragiles ?

    M. Sébastien Jumel

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    Il a raison !

    M. André Chassaigne

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    Comment ne pas s’élever contre les coups portés à l’école de la République, comme les mesures de carte scolaire annoncées la semaine dernière, qui accentuent encore la discrimination territoriale en supprimant massivement des classes – et même dans une proportion inédite –, notamment en milieu rural ? Dans mon département, pour justifier une saignée sans précédent, le directeur académique des services de l’éducation nationale déclare sans vergogne à la presse qu’il doit effectuer « un rattrapage », les fermetures de classe n’ayant pas été possibles l’an dernier, en raison du contexte épidémique, dans les communes de moins de 5 000 habitants. Merci, monsieur Blanquer, de nous faire savoir avec tant d’élégance que nous sommes enfin sortis de la crise sanitaire !
    Comment accepter, en tant qu’universalistes, que des êtres humains soient discriminés sur la base de leur nom de famille, de leur visage ou de leur lieu d’habitation ? J’affirme que celui ou celle qui voudrait conforter les principes de la République devrait commencer par prendre en compte ces questions majeures, faute de quoi la laïcité, en tant que valeur émancipatrice, aura toutes les peines du monde à rayonner.

    M. Alexis Corbière

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    C’est juste !

    M. André Chassaigne

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    Jean Jaurès, dans sa sublime intelligence, l’a résumé en une phrase passée à la postérité que beaucoup d’entre nous reprennent, sans toujours d’ailleurs en mesurer le sens : « La République doit être laïque et sociale mais restera laïque parce qu’elle aura su être sociale. » En d’autres termes, si la laïcité garantit la liberté de conscience et l’égalité en droit, elle ne pourra pas être un vecteur d’émancipation tant qu’elle ne sera pas accompagnée par des politiques sociales capables de briser les chaînes du déterminisme.
    Je le dis avec force : n’amputons jamais la laïcité. Elle est pleine et entière, et elle doit toujours faire cause commune avec la cause sociale, faute de quoi elle restera un doux rêve, aux mains des tenants d’un néolibéralisme par nature contraire à la réalisation de la fraternité, pilier essentiel de notre projet politique. Voilà sans doute, chers collègues, ce qui nous distingue profondément – chacun l’aura compris. N’ayant pas retrouvé dans le projet de loi les mesures indispensables pour nous permettre de nous attaquer aux nombreux problèmes que nous connaissons, je le dis franchement et tranquillement : mon vote n’est pas encore déterminé. Mais quelle soit la position que j’adopterai, je voterai sans enthousiasme, avec un sentiment d’inachevé que m’inspirent ces mesures inappropriées, comme celle qui diabolise, en les versant dans un pot commun, toutes les formes d’instruction en famille.
    Certes, on pourrait imaginer que le choix final de beaucoup d’entre nous soit guidé par les vers si beaux tirés de « La rose et le réséda » d’Aragon : « Celui qui croyait au ciel / Celui qui n’y croyait pas / Quand les blés sont sous la grêle / Fou qui fait le délicat ». Fou qui fait le délicat, en effet ! Pourtant, je ne suis pas certain qu’à l’issue des débats, cette fulgurance suffise à convaincre les députés communistes et l’ensemble du groupe GDR d’émettre un vote favorable au projet de loi. (Applaudissementssur les bancs des groupes GDR, SOC et FI.)

    M. le président

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    La parole est à M. Éric Ciotti.

    M. Maxime Minot

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    On va enfin parler de séparatisme !

    M. Éric Ciotti

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    Avant de prononcer cette allocution, je voudrais la dédier à deux femmes libres, qui sont aujourd’hui menacées de mort par l’islamisme. Leur parcours, leur vie, incarnent le meilleur des valeurs qui, au fil des siècles, ont forgé, sculpté, façonné la France. Elles défendent au péril de leur vie la laïcité républicaine. Leur calvaire inacceptable dessine le mal qui gangrène notre pays et, d’une certaine manière aussi, exprime notre lâcheté collective pour le combattre.
    Je voudrais d’abord dédier ces propos à Mila, lycéenne de 17 ans, dont une fatwa menace la vie chaque jour. Elle vient d’être exclue d’un lycée de la République, parce que celle-ci ne sait pas la protéger.

    M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur

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    Ce n’est pas vrai !

    M. Florent Boudié, rapporteur général de la commission spéciale et rapporteur pour le chapitre Ier du titre II

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    En effet !

    M. Éric Ciotti

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    La seconde, c’est Zineb El Rhazoui, ancienne journaliste de Charlie Hebdo, qui a tenu des propos libres et sans concession contre l’obscurantisme islamiste. Elle vient d’être proposée pour le prix Nobel de la paix. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR, LaREM et Dem.) Elle est française. Elle vit en France sous protection policière. Qu’elle puisse prétendre au prix Nobel de la paix signifie bien que, quelque part, la France est en guerre.
    Oui, l’islamisme a déclaré la guerre à notre pays, une guerre sans merci. Ces deux beaux visages de la France rejoignent ceux des 270 morts et 900 blessés martyrs de l’islamisme depuis 2012 dans notre pays (Mme Emmanuelle Anthoine applaudit) : les enfants juifs de l’école Ozar-Hatorah, les journalistes de Charlie, les amoureux de musique du Bataclan, le couple de policiers de Magnanville, les quatre-vingt-six anges de la promenade des Anglais, le père Hamel, le colonel Beltrame, le hussard noir Samuel Paty, Nadine, Simone et Vincent, les trois fidèles catholiques de la basilique Notre-Dame de Nice…
    C’est l’islamisme armé qui les a frappés, mais son expression la plus sournoise et la plus vile, mes chers collègues, avance, elle aussi. C’est l’islamisme du coin de rue, l’islamisme du parent d’élève, du voisin, de l’anonyme sur les réseaux sociaux, celui qui fait de l’islamisme une hydre sans fin, celui qui, par la terreur, veut nous imposer un autre mode de vie, différent de celui que nous avons reçu en héritage. Dans les familles, à l’école, à l’université, à l’hôpital, dans les associations et les services publics, dans les piscines, sur nos plages, les islamistes conquièrent des âmes et des territoires. Ils imposent le voile, ils pratiquent la polygamie, ils imposent l’excision, ils refusent de serrer la main ou de travailler avec une femme, ils refusent de se faire soigner par un médecin en raison de son sexe, ils refusent l’homosexualité, ils refusent que leurs enfants apprennent la Shoah et la théorie de l’évolution ou suivent certains cours de science ou d’histoire, ils refusent de parler de religions, de République, de laïcité, de caricatures ; bref, ils exigent que l’on se soumette. Ces islamistes gagnent chaque jour de plus en plus de terrain et font des adeptes chaque jour de plus en plus nombreux. Leur discours rencontre un écho de plus en plus fort : aujourd’hui, chiffre terrifiant, 57 % des jeunes musulmans considèrent que la charia est plus importante que la loi de la République. Quel échec pour notre République !
    C’est dans ce contexte que ce projet de loi est débattu : le contexte d’une rupture de plus en plus grande, de plus en plus forte, de certains musulmans – je dis bien : certains – avec la République, avec ce que nous sommes. Cette rupture est dramatique, elle est historique. Le diagnostic, je crois que nous le partageons, car j’ai lu des extraits de votre livre, monsieur le ministre, les bonnes feuilles dont vous avez assuré la promotion. Je vous rejoins pour dire qu’il est grave. La gravité du péril devrait justement nous conduire à des solutions fortes pour sauver ce qui peut encore l’être. Depuis 2015 et son explication hasardeuse et uniquement sociale des attentats – il était alors candidat –, le discours du Président de la République actuel a considérablement évolué jusqu’au discours des Mureaux. C’est un premier pas. Pourquoi ne pas le saluer ? En avril 2017, je le rappelle, le candidat Macron déclarait après l’attentat des Champs-Élysées dont un jeune policier, Xavier Jugelé, avait été la victime : « Je ne vais pas inventer un programme de lutte contre le terrorisme dans la nuit. » C’était il y a quatre ans. Que la nuit fut longue pendant ces quatre années !

    M. Maxime Minot

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    C’est bien vrai !

    M. Éric Ciotti

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    Ce texte pouvait et devait incarner le changement radical que nous attendions depuis toutes ces années. Il devait conforter, voire renouveler, refonder la loi de 1905. Il devait ériger de nouveaux garde-fous comparables à ceux qu’avaient dressés des présidents courageux : Jacques Chirac, en interdisant le voile à l’école en 2004 après le rapport rendu ici même par François Baroin, (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR) et Nicolas Sarkozy, en interdisant le voile intégral en 2010. Ce texte, oui, devait être fondateur, nous l’espérions ; en fin de compte, il ne sera qu’illusion. Il offrait un espoir, mais il ne sera qu’un rendez-vous manqué. Il aurait pu être le tournant décisif pour nous éviter de connaître le funeste scénario romancé et anticipé par Michel Houellebecq, un scénario peut-être visionnaire qui doit nous interroger : n’est-il pas déjà trop tard ? Votre projet de loi peut-il empêcher cette soumission ? En conscience, mes chers collègues, je ne le crois pas. Son intitulé même a signé sa vacuité : vous en avez banni le mot islamisme. Tout est dit !

    M. Nicolas Dupont-Aignan

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    Eh oui !

    M. Éric Ciotti

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    Ou plutôt, tout est non-dit : ne pas oser nommer le mal par peur de l’amalgame marque le renoncement à le combattre. Ce que le projet de loi contient concrètement, de façon générale, ne me pose pas de difficulté ; bien au contraire, je veux souligner des dispositions qui vont dans le bon sens, concernant les services publics, les associations, la lutte contre les discours de haine et les contenus illicites sur les réseaux sociaux, ou encore la préservation de l’ordre public. Mais beaucoup plus graves sont ses absences et ses lacunes. Le « en même temps » macronien, qu’il soit sanitaire – nous venons d’en parler –, sécuritaire ou identitaire, est malheureusement un naufrage. Rien, dans ce texte, sur l’école de la République ! Aujourd’hui, dans des villes, dans des quartiers, dans un département, des écoles publiques ne peuvent quasiment plus accueillir d’élèves juifs ; aujourd’hui, des écoles, des collèges ne peuvent pas se renommer en hommage à Samuel Paty sans provoquer menaces et peur, comme à Ollioules, dans le Var, où un collège devait porter le nom de Samuel Paty (Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – Mme Agnès Thill applaudit également) et où toute la communauté éducative, par peur, y a renoncé.
    La République suppose la création d’une instruction publique tournée vers l’émancipation des consciences. La laïcité, notamment, la garantit. Mais, dans ce texte, il n’y a quasiment rien, ou si peu, sur la laïcité. Le voile – parlons-en, monsieur le ministre, même si je sais que ce n’est pas la volonté ni l’objectif de la majorité –, le voile, notamment, est le symbole conquérant du refus de cette émancipation. Face à l’avancée islamiste, je le redis, Jacques Chirac avait eu le courage de poser cet interdit, d’ériger ce garde-fou, cette digue protectrice pour nos enfants. Ce courage, hélas, vous en manquez aujourd’hui pour interdire son port aux accompagnants scolaires ou aux mineurs, ce que certains députés de la majorité ont tenté de faire. Je défendrai personnellement un amendement en ce sens. Non, nos enfants n’ont pas à se faire imposer l’appartenance religieuse d’adultes ! Non, nos enfants n’ont pas à se faire imposer le voile islamique en sortie scolaire ! Le voile, monsieur le ministre, n’est pas un vêtement ordinaire, banal, anodin : c’est l’étendard de l’islamisme et de son idéologie, c’est le vêtement que la République islamique impose aux femmes pour les masquer, pour les dissimuler, pour qu’elles ne soient pas l’objet de tentations.
    Le garde des sceaux, Éric Dupond-Moretti, a eu le mot juste devant notre commission spéciale en indiquant que le voile pouvait être un choix, mais qu’il pouvait être aussi un asservissement. Le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, quant à lui, a souligné qu’il n’était pas le bienvenu dans la République. Alors, pourquoi ne pas agir ? Puisqu’il n’est pas le bienvenu, puisqu’il est un asservissement, pourquoi cette pudeur, pourquoi cette crainte, pourquoi cette hésitation, pourquoi avez-vous la main qui tremble ? Vous avez systématiquement refusé toute tentative de limiter l’avancée de ce prosélytisme. Circulez, il n’y a rien à voir : « irrecevable », dites-vous aux membres de la majorité. L’ordre règne ! Mais l’opposition, monsieur le ministre, fera son travail. Pour moi, le voile et son obscurantisme n’ont pas leur place à l’université, temple des savoirs, des Lumières et des sciences ; pour moi, le voile dans sa version aquatique, le burkini, n’a pas sa place dans nos piscines publiques ou sur nos plages.
    Rien non plus, dans votre projet, sur l’immigration, rien sur l’assimilation, rien sur l’intégration. L’islamisme s’est pourtant nourri de l’échec de l’assimilation et d’une immigration massive devenue impossible à intégrer ; l’immigration a gravement renforcé le communautarisme, lui-même terreau du terrorisme. Or votre Gouvernement a laissé prospérer une immigration massive plus qu’aucun autre : près de 500 000 étrangers par an depuis le début du quinquennat, l’équivalent chaque année de la ville de Lyon arrivé sur notre territoire ! Il n’y a pas de République là où il n’y a pas une nation maîtresse de son destin et de son avenir. Il est urgent de restreindre ces flux, de restreindre les conditions d’octroi de la nationalité au titre du droit du sol, de rendre indissociable de la connaissance et de l’adhésion aux valeurs de la République la délivrance d’un titre de séjour, d’instaurer des quotas par catégorie de motif de séjour – ce que nous avions défendu ensemble dans un programme –, et d’introduire un système de points en matière d’immigration, comme au Canada. Sans sortie de l’immigration de masse, il n’y aura pas d’intégration possible et encore moins d’assimilation, pourtant indispensable.
    Rien non plus sur la radicalisation dans les prisons, lesquelles, on le sait, sont une source d’inquiétude parmi les plus fortes – ces prisons où des étrangers dangereux restent sur le sol français alors qu’ils n’ont plus rien à y faire. Au 1er avril 2020, les prisons comptaient 23 % d’étrangers, soit très exactement 15 400 personnes. Qu’est-ce que ces personnes font encore sur le sol national ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.) Pour enrayer cette spirale infernale, des mesures fortes et immédiates s’imposent, que le groupe Les Républicains et son président Damien Abad ont présentées ce matin dans un programme pragmatique et courageux – courageux, c’est sans doute le mot qui manque à ce texte. Voilà des dispositions qui, elles, peuvent être utiles et sont indispensables.
    Mes chers collègues, au cours des siècles, les religions, quelquefois au prix de violents et douloureux combats qui ont marqué terriblement notre histoire, se sont soumises aux lois de la République. Ce fut le cas de la religion juive ; ce fut le cas de la religion catholique ; c’est aujourd’hui à l’islam de s’intégrer à la République, et non à la République de s’adapter à l’islam. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.) La charte qui a été signée marque un progrès que je salue, monsieur le ministre, et elle est peut-être plus importante que le texte que vous nous proposez. Mais quand je lis, dans Le Figaro de demain, la réaction des trois fédérations qui ont refusé de signer cette charte, quand je vois la violence de leur refus et celle de leur expression, quand je vois qu’ils refusent d’admettre que l’homosexualité puisse être légale dans un pays comme le nôtre, quand je vois que ces trois fédérations contestent la liberté d’expression, je mesure le chemin qu’il reste à accomplir car je vois qu’elles sont étroitement liées à la Turquie d’Erdogan ; je mesure que rien n’est encore gagné, que rien n’est encore acquis et que le combat est devant nous. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

    M. Dino Cinieri

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    Bravo !

    M. Éric Ciotti

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    Laisser l’islamisme prospérer et avancer dans notre société, c’est défaire l’unité française et fragiliser le pacte républicain. C’est aussi – et ce point est essentiel – porter atteinte à la dignité de tous les musulmans de France qui, dans leur immense majorité, respectent les lois de la République.
    Sans mesures fortes, nous nous condamnons à assister impuissants à la fin de notre socle commun et à subir la flambée du communautarisme, du racialisme et de l’indigénisme. Si la République recule, c’est le face-à-face qui s’installe, comme l’un de vos prédécesseurs, monsieur le ministre, l’avait annoncé de manière prémonitoire, dans la cour de l’hôtel de Beauvau ; c’est l’affrontement qui se rapproche, c’est la violence qui s’exacerbe, c’est la guerre civile qui s’annonce.
    « La seule chose qui permet au mal de triompher, c’est l’inaction des hommes de bien », écrivait Edmund Burke. Or on ne trouve rien dans ce texte d’une action courageuse et salutaire. Nous attendions l’action, vous nous livrez la communication habituelle.
    Monsieur le ministre, l’inaction fait ici le lit de la soumission. Nous le regrettons profondément. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

    M. Jean Lassalle

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    Les Républicains ont trouvé leur candidat !

    M. le président

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    La parole est à Mme Delphine Batho.

    Mme Delphine Batho

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    Des adolescents de 13, 14 et 15 ans sont mis en examen pour complicité d’assassinat en relation avec une entreprise terroriste, à la suite de l’attentat contre Samuel Paty. Certains ont donné des informations contre de l’argent ; d’autres ont fait longuement le guet avec celui qui déclarait vouloir venger le prophète. Ce ne sont que des enfants, des collégiens, et ils ont aidé un terroriste à identifier leur professeur. Ces faits obsédants devraient être au cœur des débats à l’Assemblée nationale.
    Jusqu’ici, la France a combattu le terrorisme – c’est le travail remarquable accompli par les magistrats spécialisés, par les services de renseignement, par la police, par la gendarmerie, par tous les fonctionnaires auxquels nous renouvelons notre soutien. Malgré ce combat, la France ne s’attaque pas à l’islamisme politique et à tout ce qui concourt à la radicalisation.
    Bien sûr, cette loi n’est pas mauvaise dans son intention – qui peut être contre le projet de conforter les principes républicains ? – mais elle repose sur une erreur de diagnostic. Ce que nous devons affronter n’est pas un séparatisme, mais une idéologie précise, l’islamo-fascisme. Le projet totalitaire de l’islamisme politique ne vise pas la séparation, à « faire bande à part », comme le disait le garde des sceaux. Il vise à instaurer une domination par la manipulation, la menace, la terreur, la force, à faire pression sur tous nos compatriotes de confession musulmane, à soumettre les femmes, à déstabiliser la République.
    Ce totalitarisme, nous devons l’affronter idéologiquement. Le combat contre l’islamisme est éminemment politique ; ce n’est pas qu’une affaire de mesures juridiques, aussi perfectibles soient-elle – nous pourrons discuter des dispositions de ce projet de loi, en les prenant une par une.
    Ma principale réserve vis-à-vis de ce texte, outre le choix de recourir au temps législatif programmé et d’esquiver les débats, est qu’il cherche un raccourci, un « truc » magique, là où il n’y a d’autre choix que le dur labeur d’une mobilisation générale, à engager avec détermination, constance et cohérence, pour faire de la République une réalité de tous les jours, pour toutes et tous.
    C’est l’enjeu déterminant du combat féministe, en premier lieu. C’est la révolte des filles et des femmes qui fera reculer l’islamisme. Où est la cohérence, quand un membre du Gouvernement indique aux lycéennes qu’elles doivent porter une tenue décente, autrement dit qu’elles doivent cacher leurs corps ? La liberté des femmes ne se négocie pas, le patriarcat ne se combat pas à moitié, son héritage doit être aboli en totalité.
    C’est l’enjeu de la République des territoires, ensuite, avec les mêmes droits, les mêmes devoirs, les mêmes normes partout. La Nation se résigne depuis des décennies à l’état de fait d’une ségrégation territoriale, abandonnant la population à des logiques identitaires. C’est encore l’enjeu du combat pour l’éducation, pour les sciences, pour la culture, pour l’histoire, contre le racisme. C’est comprendre que l’éducation contre l’antisémitisme est la clé de voûte de la lutte contre tous les complotismes. C’est comprendre enfin que notre jeunesse a besoin d’un autre horizon que celui d’une société vide de sens, menacée par le changement climatique, rongée par un consumérisme destructeur, qui laisse les cœurs vides, dans un monde en proie à des menaces existentielles.
    On ne combat pas la barbarie par des mesures techniques, mais par un destin commun, des perspectives collectives nouvelles. Voilà pourquoi, chers collègues, le Parlement s’honorerait à prendre le temps de se poser les bonnes questions et à ne pas se contenter de dispositions dont certaines sont utiles, mais d’autres superficielles ou parfaitement discutables. Pensons-nous vraiment qu’aggraver la maladie française du contrôle bureaucratique par une suspicion envers toutes les associations qui font honnêtement leur travail changera quoi que ce soit ? On se trompe de cible.
    Nous sommes nombreux ici, par-delà les différences de sensibilité, qui étions prêts à un acte fondateur. Le 11 janvier 2015, des millions de Françaises et de Français avaient manifesté pour dire « je suis Charlie ». C’était un soulèvement contre la haine, pour la laïcité, mais aussi l’exigence d’un sursaut, afin que les problèmes qui depuis trop longtemps minent la République soient enfin traités et que l’on ne remette pas à nouveau la poussière sous le tapis, en se rassurant à bon compte avec des lois vite faites.
    Nos principes républicains ne doivent pas seulement être réaffirmés et défendus contre ceux qui les attaquent par la référence au passé, et la célébration de celui-ci, mais par une vision du futur qui suscite l’enthousiasme. Les principes de laïcité, de fraternité, de sororité sont mieux adaptés encore au monde d’aujourd’hui qu’à celui qui les a vus naître.
    Chaque fois qu’elle est attaquée, la République doit faire bloc, mais cela ne suffit plus. Remettre le pays en mouvement autour d’une nouvelle espérance pour la jeunesse, pour l’émancipation des femmes, pour la démocratie, pour le métissage, pour un nouvel horizon de civilisation écologique permettant de se projeter dans l’avenir et d’aimer vivre ensemble parce que l’on regarde devant soi, voilà ce qui permettra à chacune et chacun d’agir, de ne plus rien laisser passer, et de…

    M. le président

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    Merci, madame la députée.

    Mme Delphine Batho

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    …se sentir investi d’une mission républicaine. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et GDR.)

    M. André Chassaigne

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    Excellent !

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Le temps imparti a été dépassé !

    M. le président

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    Madame Ménard, ne me dites pas qu’il ne m’est pas arrivé de vous accorder davantage de temps que ne le veut le règlement. Madame Batho a pris vingt-cinq secondes supplémentaires ; ce n’est pas dramatique.
    La parole est à M. Pierre Dharréville, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

    M. Pierre Dharréville

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    Par où commencer ? C’est la question que vous avez dû vous poser vous-même, monsieur le ministre, après la commande présidentielle – et cela se voit.
    Vous auriez dû commencer, tout simplement, par formuler la question à laquelle voulez répondre, et par établir clairement un diagnostic. Ce n’est pas pour rien que vous avez éprouvé tant de difficultés à trouver un titre à ce projet de loi, à nommer son objet. Pour faire bonne mesure, vous avez d’abord choisi l’euphémisme : c’était un projet de loi « confortant les principes républicains », mais c’est là l’objet que doit avoir tout projet de loi !
    Le Conseil d’État a d’ailleurs dû vous appeler à un peu plus d’humilité dans l’affichage. Le nouveau titre indique donc que vous n’agissez que pour le « respect » de ces principes par tout un chacun. En effet, si l’on voulait remédier aux manquements à la promesse de la République, il faudrait bien plus que la proposition que vous mettez sur la table. À faire l’état des lieux de la liberté, de l’égalité et de la fraternité, l’état des lieux des outils abîmés et délaissés, l’état des lieux du domaine des communs, mité par celui du marché et du profit, l’état des lieux de nos vies dans les quartiers populaires, les entreprises, les écoles et les universités, dans les zones pavillonnaires, à la périphérie des métropoles, dans les villages du monde rural, dans les villes moyennes et dans les outre-mer, on mesure l’écart.
    Les manquements de la République à ses propres principes sont des poisons puissants. Mais il n’est pas question de cela ici, d’autant que votre politique n’a pas amélioré la situation. Ce que vous ne dites pas, c’est de quelle République il s’agit dans ce texte.
    Votre texte affichait cependant sa vertu ; il était présenté comme un acte visant à nous ressouder autour du bien commun qu’est la République. Mais vous aurez remarqué qu’il se trouve bien peu d’acteurs de la vie sociale et institutionnelle qui lui rendent grâces. Il ne suscite aucun enthousiasme dans la société et vous reconnaissez vous-même à haute voix que vous vous trouvez bien seuls. Pourquoi un accueil si frais ? Seriez-vous les chevaliers Bayard de la laïcité ? C’est peu probable. Attention au syndrome de celui qui roule à contresens sur l’autoroute !
    J’ai entendu beaucoup de gargarismes : il s’agirait d’un grand texte historique, digne de l’œuvre de 1905, vous plaçant sur la voie médiane – et j’en passe. Si l’on a le droit de rêver, il s’agit là de vœux pieux. D’autant que, par certains aspects, vous vous tournez plus vers Émile Combes que vers Aristide Briand, avec quelques accents sarkozystes et concordataires qui relèvent d’une conception assez singulière.
    Quelle leçon tirons-nous de la façon dont a été menée la bataille ces vingt dernières années ? Il y aurait beaucoup à dire sur les présupposés que vous déclinez avec beaucoup d’aplomb et un peu de simplisme. Au cœur de votre argumentaire se trouve la question rhétorique de savoir si les lois de la République doivent avoir la prééminence sur les prescriptions religieuses, mais les deux ne sont pas de même nature, et c’est cette conscience qu’il faut faire grandir.
    Bien sûr que seule la loi de la République régit la vie en société, car elle procède de la souveraineté populaire. Pourtant, elle ne dit pas tout de l’existence de chacune et de chacun. Vous ne devriez pas reprendre les termes de cette question sans les discuter. C’est ajouter de la confusion, prendre le risque de se tromper sur la religion, sur la République, et donc sur la laïcité et sur la nature des problèmes à propos desquels elle est si souvent convoquée à tort et à travers.
    André Chassaigne citait ces vers d’Aragon : « Celui qui croyait au ciel / Celui qui n’y croyait pas / Tous deux adoraient la belle / Prisonnière des soldats. » La belle, c’est la République française, c’est une ode à l’alliance, à la défense de ce qui nous est commun. Ce projet n’y répond pas. Il appelle principalement trois critiques : il est inefficace quant à ses objectifs, irrecevable du point de vue du droit et soupçonnable d’être manœuvrier.
    Manœuvrier, tout d’abord : si certaines des questions évoquées sont graves et douloureuses, nous savons combien la laïcité est instrumentalisée depuis plus de vingt ans dans le débat public. Certains s’en servent pour diviser les milieux ouvriers et populaires, alors qu’elle est faite pour rassembler. Certains la réduisent à une liste d’interdits, alors qu’elle est une grammaire vivante. Certains l’utilisent même pour justifier une forme de racisme, auquel ils croient pouvoir donner une apparence républicaine. Vous avez ouvert la boîte de Pandore ; on sent un appel d’air : le concours Lépine de la proposition la plus détestable et la plus polémique a été lancé. N’était-ce pas le but ?
    Nous devrons donc, dans les jours qui viennent, figurer dans cette mauvaise pièce, dans laquelle nos compatriotes de confession musulmane se voient de fait, plus ou moins insidieusement, placés au banc des accusés. C’est ainsi que nombre d’entre eux le vivent, comme j’ai pu le constater dans ma circonscription ; la méthode du patchwork qui a présidé à l’écriture de votre projet de loi y contribue en amalgamant différentes pratiques et sujets pour les ramener tous au rang de danger intégriste. Il est à craindre, que vous le vouliez ou non, que tout cela vienne légitimer des discriminations et alimenter l’affrontement identitaire qui fait tant de dégâts dans les esprits, que tout cela vienne apporter du carburant à des ennemis de la République et de l’humanité.
    Nul ne méconnaît les dangers de l’« absolutisme religieux » – pour reprendre la formule d’Aristide Briand –, les entreprises intégristes, sectaires, terroristes, avec ces actes monstrueux, les tentatives d’emprise, les mécanismes de soumission, les atteintes à la dignité des femmes, les relents de fascisme contemporains, qui sont à l’œuvre dans le monde. Nul ne peut ignorer ce climat, cette ambiance propice à des pulsions de peur, de repli, de ressentiment, de violence des rapports sociaux, de quête de boucs émissaire, de racisme.
    Non, le national populisme qui instrumentalise la laïcité n’est pas l’antithèse de l’intégrisme qui instrumentalise la religion ; ce sont les deux faces d’une même médaille. Ces réalités, celle d’une société fracturée, fractionnée, divisée, appellent plus que jamais au respect de la dignité humaine et à un nouvel élan pour une République en proie à une crise, dont on ne trouvera pas le remède dans des actes d’autorité.
    Ce texte est irrecevable, ensuite, car il y est essentiellement question d’ordre public, ce à quoi la République ni la laïcité ne sauraient être résumées.
    Après la loi sur la sécurité globale, après le recours répété à l’état d’urgence, vous êtes encore enfermés dans votre matrice autoritaire, dans votre conception d’une société bien ordonnée, rangée, quadrillée, où l’on durcit en vain les peines, où l’on accroît les moyens de la surveillance, où l’on remplace la liberté par l’autorisation, où l’on pratique l’ingérence.
    Les problèmes que votre projet prétend affronter ne peuvent se résoudre uniquement avec des mesures d’ordre public, des mesures touchant à des droits fondamentaux comme la liberté d’association, tel ce pseudo-contrat qui procède d’un principe de soupçon préalable et généralisé – et encore n’en reste-t-il que la charpente, le Conseil d’État ayant réfréné vos ardeurs, vous forçant à rebrousser chemin sur un certain nombre de points, notamment quand le recours à l’interdit et à l’arbitraire devenait trop manifeste.
    Au fond, la question posée est la suivante : est-ce en reniant ou en rognant ce qui fait le socle de la République que nous parviendrons à réduire à néant les offensives des adversaires de la civilisation humaine ? Une telle attitude ne revient-elle pas à renforcer ces adversaires en leur concédant une forme de résultat, dont ils jouent comme d’un levier ?
    Le texte est inefficace, enfin, car on peut douter que vos mesures permettent de conforter le respect des principes républicains et de faire face aux intégrismes. Pour cela, il faudrait savoir par quels canaux passent ces derniers pour gagner du terrain, et votre diagnostic sur ce point apparaît souvent fragile.
    À l’aune des menaces que plusieurs de ces mesures font peser en termes de droits, quelle sera leur portée réelle dans la lutte nécessaire contre les intégristes, et ne s’agit-il pas, au bout du compte et pour l’essentiel, de mesure d’affichage ?
    En effet, par-delà les critiques sur l’esprit de la loi, certaines appellent d’autant moins d’opposition qu’elles semblent ne pas devoir changer grand-chose. D’autres en revanche, il faut le dire, constituent des garanties utiles à la mise en acte de la République et à sa protection – je pense notamment à celles qui renforcent la protection des agents de la fonction publique, à celles qui visent à mieux contrôler les écoles hors contrat ou encore à celles qui visent à assurer la transparence des flux financiers.
    Face à la gravité des menaces et des drames, nous avons besoin d’une société pleinement mobilisée contre les intégrismes et le terrorisme, sans naïveté ni renoncement, derrière une puissance publique agissante et réactive disposant des moyens nécessaires. Car, oui, il faut être farouche pour la République, il faut, bien sûr, utiliser tous les moyens juridiques, dans le respect des libertés communes, pour empêcher les ligues factieuses de s’organiser, mais il faut aussi, inlassablement, élever, partout, la voix contre elles. Il faut donc une réaction populaire, citoyenne, politique, sociale et culturelle ; il faut que partout où elles s’insinuent, elles trouvent à qui répondre, et que celles et ceux qui s’y emploient sachent qu’ils ne sont pas seuls.
    Cela se joue sur le terrain, là où la misère est instrumentalisée avec le mal-vivre, l’exploitation et le mépris, là où ces mouvements trouvent leur financement, là où ils essayent d’installer leur terreur et font ployer les esprits. Nous devons donc appeler à une grande réaction citoyenne. C’est par elle que pourra prendre force le principe de laïcité, principe moteur de la République en cela qu’il protège et promeut la liberté de conscience, l’égalité des droits et la volonté fraternelle.
    Oui, il faut défendre la République contre celles et ceux qui veulent l’asservissement des esprits, l’inégalité des personnes devant la loi et la violence des rapports humains. Oui, il faut combattre au quotidien ces intégrismes, ces mouvements politiques qui entendent asseoir leur domination et imposer leur vision du monde, en se gardant toutefois de ne pas les voir là où ils sont, comme de les voir là où ils ne sont pas. Oui, il faut démanteler les mécanismes du choc des civilisations. Oui, il faut une république en actes, et cela ne peut exister sans un combat déterminé et unitaire contre les discriminations et pour l’égalité. Cette exigence politique porte en elle la possibilité de la créolisation, de la rencontre, d’une émancipation partagée.
    L’enjeu est celui de la crise de sens de notre civilisation et de l’invention, pour y répondre, d’un nouveau projet républicain, de nouveaux horizons, de nouveaux rêves communs.
    Cela exige de nous un effort anthropologique – donc culturel et politique – pour sortir de l’ornière de l’affrontement identitaire, rassembler, rencontrer, partager, entrechoquer nos imaginaires et nos visions du monde dans un substrat commun, toutes choses difficiles dans un monde marqué par l’affrontement et par la domination du capitalisme, qui se fonde sur les inégalités.
    Il est possible de faire reculer les intégristes si nous sortons de l’enfermement et des crispations, si la République est là, si elle rend les services qu’on est en droit d’attendre d’elle, si elle accompagne celles et ceux qui sont fragilisés, si elle garantit et protège les libertés, si elle apaise les peurs au lieu d’en jouer, si elle nous offre un horizon.
    Il est possible de construire cette république, d’amorcer sa réappropriation là où s’est installée la désaffection, en s’appuyant sur le meilleur des aspirations pour en faire un puissant mouvement de femmes et d’hommes pour l’égale dignité autour de la promotion de biens communs.
    La laïcité établit que la souveraineté réside dans le peuple, en tant qu’association de femmes et d’hommes libres, égales, égaux. Démocratie et laïcité sont identiques, proclamait Jean Jaurès en 1904, et il y a danger lorsque la règle, au lieu de garantir l’égalité des droits par-delà les convictions religieuses ou philosophiques, se traduit par de l’inégalité et par une discrimination fondée sur les convictions des uns et des autres.
    Le fondateur de L’Humanité décrivait la loi de 1905 comme le fruit d’un patient travail de rassemblement et d’apaisement, comme une œuvre de liberté et de loyauté, une œuvre hardie mais sincère, qui ne cachait aucun piège, ne dissimulait aucune arrière-pensée. Puisse cet état d’esprit nous inspirer.
    Quant à Aristide Briand, il affirmait, en conclusion du débat, son souci que la réforme puisse « affronter sans péril pour la République les critiques de ses adversaires afin de ne pas s’affaiblir en leur prêtant le flanc ». Cela lui faisait dire : « Nous n’avons pas le droit de faire une réforme dont les conséquences puissent ébranler la République. » Que cet appel nous guide. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

    Rappel au règlement

    M. le président

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    La parole est à Mme Mathilde Panot, pour un rappel au règlement.

    Mme Mathilde Panot

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    Je souhaite faire un rappel au règlement sur la base de l’article 70, alinéa 2, pour fait personnel. Je le fais à cet instant, parce qu’il me tient à cœur de ne pas laisser passer ce qui s’est produit tout à l’heure. Alors que je m’apprêtais à prendre la parole, un député du groupe La République en marche s’est permis de lancer à mon endroit une insulte sexiste.
    Cette insulte a été entendue par de nombreux collègues de mon groupe, mais aussi du groupe La République en marche, qui, pour certains, s’en sont d’ailleurs dit choqués.
    Je veux faire ce rappel au règlement parce qu’il est important que notre assemblée ne laisse pas passer ce genre de manifestations sexistes. Nous, femmes parlementaires, ne sommes pas dans cet hémicycle pour nous faire insulter, comme je l’avais déjà dit lorsqu’une députée du groupe La République en marche avait vu ses propos salués par des bêlements. J’avais défendu cette collègue comme je défendrai chacune de nos collègues parlementaires qui sera victime de sexisme, parce que le sexisme n’a sa place ni à l’Assemblée ni ailleurs.

    M. le président

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    Merci, madame Batho, on a compris.

    Mme Mathilde Panot

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    Je m’appelle Panot, monsieur le président !

    M. le président

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    M. Corbière m’a fait un signe au moment où ce propos aurait été proféré, mais il se trouve que je ne l’ai moi-même pas entendu.

    M. Alexis Corbière

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    Vous êtes bien le seul !

    M. le président

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    J’ai immédiatement réagi – tous ceux qui étaient dans l’hémicycle s’en souviennent – et demandé à l’ensemble des députés de se taire, indiquant que vous seule aviez la parole.
    Bien que n’ayant pas entendu de quoi il retournait, je ne mets pas en cause la véracité de vos propos et je transmettrai vos remarques au président de l’Assemblée nationale. Si des propos sexistes ont en effet été tenus, susceptibles d’emporter notre désapprobation à tous, le président de l’Assemblée nationale prendra bien évidemment les dispositions et les décisions qui s’imposent.
    Je ne peux pas vous en dire plus, dans la mesure où je n’ai pas entendu les propos en questions – sans doute ai-je un gros problème de surdité (M. Alexis Corbière rit), et j’irai consulter.

    M. Alexis Corbière

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    Nous irons ensemble !

    Discussion générale (suite)

    M. le président

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    La parole est à M. Bruno Bilde.

    M. Bruno Bilde

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    Après l’assassinat abominable de Samuel Paty devant son collège, le 16 octobre dernier, après l’attentat islamiste en la basilique de Nice, le 29 octobre dernier, la République française était dans l’obligation de réagir et de répondre avec la plus grande fermeté.
    Ce projet de loi aurait pu être un acte fondateur et le grand tournant d’un quinquennat crépusculaire, terni par la succession des crises et entaché d’une impuissance chronique. Ce projet de loi aurait pu être un formidable sursaut national, l’union sacrée de tous les républicains, au-delà des clivages, autour de nos libertés, de nos valeurs, de notre mode de vie. Ce projet de loi devait être le bouclier et le glaive du peuple français pour combattre l’islamisme. De l’islamisme, pourtant, il n’est pas du tout question dans ce texte. Vous refusez purement et simplement de le nommer, comme si vous aviez peur que nos ennemis ne traînent l’État devant les tribunaux pour stigmatisation. Vous refusez d’interdire cette idéologie barbare qui nous mène une guerre implacable depuis janvier 2015 et l’attentat effroyable qui a décimé la rédaction de Charlie Hebdo. Vous refusez, encore et toujours, de mettre hors la loi toutes celles et tous ceux qui font l’apologie de l’islam politique et radical, vous refusez, encore et toujours, d’attaquer le mal à la racine et le laissez prospérer sur son terreau migratoire et ses cellules de recrutement.
    Le débat qui s’ouvre aujourd’hui est dramatiquement déconnecté d’une réalité terrifiante et d’un contexte sanglant. Il insulte le passé, fragilise le présent et condamne l’avenir. Pouvons-nous d’ailleurs réellement parler de débat : le choix du temps législatif programmé est un scandale démocratique majeur, qui ne trompe personne et dont l’objectif à peine dissimulé n’est autre que d’écarter le Rassemblement national et de le censurer.
    Votre projet de loi est gangrené par la lâcheté, rongé par la peur, paralysé par votre mantra du « vivre-ensemble ». L’exemple le plus éloquent en est, sans nul doute, la reculade sémantique pitoyable à laquelle s’est livré votre gouvernement ces derniers mois.
    Le 8 octobre 2019, après l’attentat islamiste à la préfecture de police de Paris, qui a causé la mort de quatre policiers, le Président de la République esquissait un semblant de prise de conscience en prononçant un discours inhabituellement offensif. Emmanuel Macron appelait alors, avec lucidité, à venir à bout de l’hydre islamiste et à lutter contre cet islamisme souterrain qui corrompt les enfants de France. C’était il y a un an et demi, et cela semble aussi lointain que la préhistoire.
    Le 2 octobre dernier, dans le discours contrasté des Mureaux, dans lequel le « en même temps » reprenait ses droits, Emmanuel Macron, demandait la mobilisation de tous dans la bataille républicaine contre le séparatisme islamiste. Puis le séparatisme islamiste s’est soudainement vu délesté de son fardeau stigmatisant, pour devenir « les séparatismes », formulation épargnant l’idéologie qui a tué 270 personnes sur notre sol.
    Mais, manifestement, cette nouvelle formule apparaissait encore trop dure aux oreilles sensibles du Gouvernement, qui a cheminé vers la défense de la laïcité pour s’échouer honteusement sur les rivages du respect des principes de la République.
    En refusant de nommer, de désigner, de définir, de caractériser, de cibler l’idéologie islamiste, vous ne confortez pas les principes de la République, vous les affaiblissez. Au bout du compte, ce projet de loi, monsieur le ministre, est celui de la politique de l’autruche et du statu quo. Il ne conforte qu’une seule chose : l’islam radical en France. (Applaudissements sur les bancs des députés non inscrits siégeant à droite.)

    M. le président

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    La parole est à M. Sébastien Chenu.

    M. Sébastien Chenu

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    Depuis des années maintenant, la France vit au rythme des attentats islamistes. Ils agressent, ils tuent, ils assassinent nos compatriotes ; ils attaquent, ils violent, ils souillent nos valeurs. Combien de temps aura-t-il fallu pour cette prise de conscience ? Combien de morts pour comprendre la guerre qui nous est menée ?
    Les yeux grands fermés, beaucoup de ceux qui aujourd’hui, ici, bombent le torse ont détourné, hier, le regard. Pire, ils ont souvent couvert d’injures ceux qui ont fait office de lanceurs d’alerte, les militants du Rassemblement national qui, pendant des années, ont sonné l’alarme – hommage leur soit rendu.
    En refusant de nommer l’idéologie islamiste, ce texte, d’une portée trop générale, se prend les pieds dans le tapis de l’urgence et manque son objectif, tout en faisant – drame du « en même temps » – reculer des libertés du quotidien pour nos compatriotes qui n’ont aucun lien avec la guerre qui nous est menée.
    Déjà encloîtrés dans un état d’urgence sanitaire liberticide, nous refusons de faire l’économie des libertés fondamentales. Aussi refusons-nous de supprimer la liberté d’une instruction en famille ; l’atteinte à cette liberté, l’abolition d’un droit à une pédagogie personnalisée, sonnerait comme un recul. En dépit d’un potentiel système de dérogation pour les enfants qui requerront un suivi particulier, comment pouvons-nous être assurés que les enfants qui rencontrent des difficultés socio-psychologiques à peine perceptibles pourront jouir d’une instruction suffisamment personnalisée sans l’instruction en famille ? Ce projet de loi vient donc bousculer une liberté fondamentale, sans être même capable de s’attaquer aux thérapies de conversion, à l’autre bout du spectre.
    Ce texte, par sa faiblesse, passe donc à côté de l’essentiel. Ce que requiert aujourd’hui la République, c’est évidemment de faire montre de fermeté et de sévérité lorsque ses principes ne sont pas respectés, lorsque des individus aux velléités abominables utilisent la violence pour imposer leur idéologie mortifère.
    Faible et bien souvent absurde, le texte interdit par exemple à un terroriste d’officier dans une association cultuelle pendant dix ans ; mais dans ce cas comme dans bien d’autres, c’est la prohibition totale des droits de cet individu qui est nécessaire. J’entendais François de Rugy indiquer que ce texte s’attaquait au séparatisme ; permettez-moi de vous dire, cher collègue, que nous n’en sommes plus là. En réalité, le défi qui est devant nous n’est pas de faire face à des gens qui veulent vivre séparés de la communauté nationale, mais à des gens qui veulent la faire plier, qui veulent s’y attaquer, qui veulent la dominer, qui finalement, veulent remplacer les lois de la République par la charia. Désormais, dans certains endroits, c’est le tribal qui fait la loi.
    Si la laïcité n’est pas un athéisme d’État, elle n’est pas non plus une simple tolérance des religions, ce qui ouvrirait la porte aux surenchères prosélytes. La laïcité ne peut pas se penser aujourd’hui sans regarder ce qui se passe autour de nous, notre histoire, l’histoire du monde, notre sociologie, notre démographie, sans tenir compte des menaces qui pèsent sur elle. Remettant en cause des libertés individuelles, incapable d’éradiquer l’islamisme – et même de le nommer –, lacunaire sur les moyens, répétitif sur bien des points, le projet de loi passe à côté de sa dimension historique, de sa dimension urgente et nécessaire.
    André Comte-Sponville disait : « nous faisons du droit parce que nous manquons de courage et de charité. » Nous sommes là, chers collègues, pour vous donner du courage ; nous sommes là pour nommer ce qui vous effraie – l’islamisme ; nous sommes là pour vous donner des outils, des armes, des idées ; nous sommes là pour relayer l’espoir d’une prise de conscience, si petite soit-elle. Mais parce que vous manquez cruellement de courage, vos petites mesures de droit ne nous convainquent pas. Nous leur préférerons toujours l’audacieuse et utile contre-proposition que Marine Le Pen défendra devant la France pour protéger les Français, leur sécurité et leur liberté. (Applaudissements parmi les députés non inscrits.)

    M. le président

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    La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

    3. Ordre du jour de la prochaine séance

    M. le président

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    Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
    Suite de la discussion du projet de loi confortant le respect des principes de la République.
    La séance est levée.

    (La séance est levéele mercredi 3 février 2021 à zéro heure cinq.)

    Le Directeur du service du compte rendu de la séance
    de l’Assemblée nationale
    Serge Ezdra