PAT
Question de :
M. Jacques Barrot
Haute-Loire (1re circonscription) - Union pour la démocratie française-Alliance
Question posée en séance, et publiée le 27 mai 1999
M. le président. La parole est à M. Jacques Barrot.
M. Jacques Barrot. Madame la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, vous venez de proposer une nouvelle carte pour l'attribution des primes d'aménagement du territoire.
M. Charles Cova. Pour les chasseurs !
M. Jacques Barrot. Des secteurs et des pays vont cesser de bénéficier de cette prime, en raison de leur dynamisme. Certains d'entre eux, c'est vrai, ont marqué des points contre le chômage et la dénatalité.
M. Patrick Ollier. Surtout en montagne !
M. Jacques Barrot. Je veux espérer, madame la ministre, qu'il ne faut rien croire de ce qu'affirme un journal du soir,...
M. André Santini. «Le» journal du soir !
M. Jacques Barrot. ... à savoir qu'«au ministère de l'intérieur, on admet qu'il a fallu aussi adapter les critères à la carte».
M. André Santini. Non ?
M. Jacques Barrot. Je ne veux pas retenir une telle affirmation.
M. Jean-Michel Ferrand. Bidouillage politique !
M. Jacques Barrot. On peut comprendre la volonté de réserver les primes à des zones en difficulté. On peut concevoir une politique de secours, dans le cadre d'une stratégie défensive, axée sur les territoires les plus menacés. Pour autant, faut-il renoncer à mener une stratégie offensive, à s'appuyer sur ces secteurs qui ont surmonté le handicap de leur éloignement des grands centres urbains et sont devenus de vrais pôles de dynamisme, avec un réseau de petites et moyennes entreprises qui portent l'investissement français ? Va-t-on secourir des zones en grande difficulté en cassant le dynamisme de ces secteurs ruraux, de ces petites villes,...
M. André Santini. Bonne question !
M. Jacques Barrot. ... dont le développement exige précisément des équipements nouveaux ?
M. Léonce Deprez. Absolument !
M. Jacques Barrot. Madame la ministre, nous voulons savoir si ces secteurs aujourd'hui privés du bénéfice de la prime d'aménagement du territoire vont, en outre, être privés de tous les fonds structurels européens, indispensables à leur désenclavement.
M. Patrick Ollier. C'est un scandale !
M. Jacques Barrot. Ces territoires vont-ils perdre par la même occasion le bénéfice des allégements fiscaux qui s'attachaient à la prime d'aménagement du territoire ? Les collectivités de ces zones n'auront-elles plus la possibilité d'exonérer pendant cinq ans les entreprises de la taxe professionnelle ?
L'objection selon laquelle l'aménagement du territoire est complètement encadré par l'Union européenne ne tient pas. Il y a des choix qui sont nationaux. Comment, madame la ministre, allez-vous associer notre Parlement à ces choix cruciaux ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Faut-il, pour aider la France en difficulté, décourager la France qui, à force d'effort et d'initiative, est arrivée à soutenir la concurrence des territoires en Europe et a entraîné notre communauté nationale sur les chemins de l'investissement et de la création d'emplois ? (Applaudissements sur les mêmes bancs.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des affaires européennes.
M. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes. Monsieur le député, Mme Voynet, qui a dû nous quitter pour se rendre au Sénat, vient de présenter la proposition française pour le zonage de la PAT sur la période 2000-2006. Je précise d'emblée, pour répondre à votre question principale, que ce zonage concerne uniquement la PAT, et ne préjuge en rien des décisions qui seront prises ultérieurement sur la répartition des fonds structurels,...
M. Maurice Leroy. C'est faux.
M. Yves Nicolin. On en reparlera !
M. le ministre délégué chargé des affaires européennes. ... et notamment sur l'objectif 2, domaine où le Gouvernement conserve une marge de manoeuvre nationale, de 50 % par rapport aux critères communautaires.
M. Patrick Ollier. Cela vaut pour la PAT aussi !
M. le ministre délégué chargé des affaires européennes. Je vais préciser comment la carte de la PAT a été fixée. Le contexte était forcément plus compliqué que par le passé...
M. Patrick Devedjian. C'est encore une usine à gaz !
M. le ministre délégué chargé des affaires européennes. ... puisque nous devions réduire le volume de la population «couverte» par la PAT en France de 40 à 34 %, c'est-à-dire la faire passer de 23,5 à 20,4 millions d'habitants. Le Gouvernement a retenu les critères suivants: il convient, tout d'abord, de soutenir les territoires fragiles, c'est-à-dire les territoires qui ont connu en 1998 soit un taux de chômage supérieur à la moyenne nationale, soit un déclin démographique avéré. Ces deux critères conduisent à prendre en compte 15,2 millions d'habitants, soit 75 % de la population couverte par la PAT. C'est bien sûr, tout le monde le comprendra, la priorité.
Il s'agit ensuite d'accompagner les mutations industrielles. De ce point de vue, nous avons retenu des zones qui comportent des risques industriels ou qui ont un taux de chômage supérieur à 10 %. Ces deux critères ont permis de retenir 3,9 millions d'habitants, soit 19 % de la population éligible à la PAT.
Enfin, deux derniers critères, complémentaires, ont été pris en compte, ce que la représentation nationale comprendra aisément: d'une part, les zones qui vont perdre l'éligibilité à l'objectif 1 des fonds structurels européens, c'est-à-dire le Hainaut et la Corse - ces derniers font bien sûr l'objet de toute notre attention - et d'autre part, des espaces intérieurs aux bassins d'emplois qui rencontrent des difficultés spécifiques.
J'ajoute que, suite au CIADT du 15 décembre 1998, des arbitrages ont été rendus qui permettent d'abaisser le seuil d'éligibilité de la PAT de 20 à 15 millions de francs, et de financer ainsi des projets moins importants: le seuil des créations d'emplois est de ce fait abaissé et le bénéfice de la PAT tertiaire qui, je le rappelle, est non zonée, étendu.
Toutes ces précisions vous montrent que nous conservons en la matière une attitude offensive. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République. - Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
Auteur : M. Jacques Barrot
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Aménagement du territoire
Ministère interrogé : affaires européennes
Ministère répondant : affaires européennes
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 27 mai 1999