dégâts des animaux
Question de :
M. Michel Bouvard
Savoie (3e circonscription) - Rassemblement pour la République
Question posée en séance, et publiée le 15 mars 2000
M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard.
M. Michel Bouvard. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre. Elle concerne les problèmes posés par la réapparition en 1992, dans les Alpes du Sud, et en 1997, dans les Alpes du Nord, du loup. («Hou ! Hou !» sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)...
C'est un sujet très sérieux, mes chers collègues: 4 000 animaux détruits depuis sa réintroduction, 11 millions de francs de dégâts ! («Hou ! Hou !» sur les mêmes bancs.)
M. le président. Non ! mes chers collègues. Aucun bruit, pas même en mettant votre main devant votre bouche ! (Rires.)
Poursuivez, monsieur Bouvard.
M. Michel Bouvard. Pour le seul département de la Savoie, on est passé de 60 animaux détruits en 1997 à 420 en 1999.
Le résultat, c'est la fragilisation de la filière ovine, dont les revenus, je le rappelle, sont les plus faibles parmi les agriculteurs de montagne, ces derniers ayant eux-mêmes des revenus inférieurs à la moyenne nationale; c'est la disparition progressive du pastoralisme; le retour de la friche; l'accroissement des risques naturels, notamment d'avalanche, sur des sites non entretenus. Déjà, en 1999, des alpages, dans les Alpes du Nord comme dans les Alpes du Sud, ont été abandonnés. Or, pour la seule Savoie, c'est 66 000 hectares qui sont pâturés par les ovins.
En 1997, le Gouvernement a commandé à M. Braque un rapport qui préconisait des mesures de protection. Ces mesures sont coûteuses et insuffisamment financées: 18,6 millions de francs pour le programme Life-loup pour l'ensemble des Alpes du Nord, alors que leur montant, pour la Savoie uniquement, est évalué par la direction départementale de l'agriculture à 61 millions de francs. Sur les 165 unités pastorales, qui regroupent plusieurs éleveurs, neuf seulement sont protégées.
Ces mesures sont par ailleurs inefficaces: elles n'empêchent ni les attaques de troupeaux; ni les menaces des chiens de protection sur les randonneurs, dont la réalité est reconnue par le ministère de l'agriculture; ni les infractions de l'Etat aux législations qu'il a lui-même fait adopter sur les chalets d'alpage ou sur les emplois-jeunes.
Monsieur le Premier ministre, avez-vous conscience du désespoir des éleveurs et de l'exaspération des élus ? Avec Patrick Ollier et Christian Estrosi, nous avions proposé une commission d'enquête; c'est finalement une mission d'information qui a été créée. Pilotée par nos collègues Honde et Chevallier, elle a bien fait son travail et il faut en tenir compte.
La période d'estive approche. Que comptez-vous faire ? Considérez-vous, comme la mission d'information parlementaire, que le pastoralisme est incompatible avec les prédateurs ? Ou bien considérez-vous, comme la ministre de l'environnement, qui l'écrit dans la revue de la DIREN-PACA, qu'il faut augmenter le nombre de meutes, et dépenser des millions de francs pour améliorer l'image du loup dans l'opinion publique ?
Monsieur le Premier ministre, les éleveurs attendent votre réponse pour des raisons de sécurité dans les zones de montagne. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - «Hou !» sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le député, oui, c'est un sujet sérieux !
M. Patrick Ollier et M. René André. Très bien !
M. le ministre de l'agriculture et de la pêche. Et je réponds à votre question comme aurait pu le faire Dominique Voynet, car c'est un sujet que nous traitons tous les deux en étroite concertation. Il nous faut en effet rendre compatibles les engagements de la France au plan international et européen, notamment vis-à-vis du programme Life, et notre volonté, non seulement de préserver le pastoralisme, mais même de le redévelopper, comme nous arrivons à le faire ça et là, en particulier dans les Pyrénées.
M. Jacques Myard. Double langage !
M. le ministre de l'agriculture et de la pêche. Nous avons donc confié un premier rapport à M. Pierre Braque. Puis il y a eu la mission d'information parlementaire, dont je salue le travail, et le rapport de Daniel Chevallier, qui a bien cerné les problèmes. Enfin, nous avons soumis des propositions au Comité national de concertation, avec un programme de travail qui retient un certain nombre de pistes, dont je tiens le détail à votre disposition, en particulier, conformément à une demande formulée par des élus de la montagne, l'idée d'un zonage comportant des zones d'expérimentation...
M. Christian Estrosi. On n'en veut pas !
M. le ministre de l'agriculture et de la pêche. ... et des zones de gestion d'où le loup serait préventivement exclu et où l'on pourrait développer le pastoralisme.
Ce programme sera soumis dans les prochaines semaines à la concertation des régions, des élus locaux et des associations. La volonté du Gouvernement est de le mettre en oeuvre pour le printemps prochain, avant la saison d'estive. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur divers bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Auteur : M. Michel Bouvard
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Animaux
Ministère interrogé : agriculture et pêche
Ministère répondant : agriculture et pêche
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 15 mars 2000